Digitized by the Internet Archive in 2016 https://archive.org/details/oeuvrescompletes01buff_0 — : : .. ^J,..;w, ..'- V OEUVRES COMPLÈTES DE BTJFFON. TOME 1. MATIÈRES GÉNÉRALES. TYPOGRAPHIE DE FIRMIN DIDCT FRÈRES IMPRIMEURS DE u’iNSTITUT I5E FRANCE, RUE JACOB , N° 24. ; OEUVRES COMPLÈTES DE BUFFON AVEC LES SUPPLÉMENS, AUGMENTÉES de la classification DE G. CUVIER, ET ACCOMPAGNEES DE 700 VIGNETTES GRAVEES SUR ACIER , REPRESENTANT AU MOINS 900 ANIMAUX. Sentie fermier. PARIS, P. DUMÉNIL, ÉDITEUR, RUE DES BEAUX-ARTS, 10. MDCCCXXXV. ÉLOGE DE BUFFON, PAR CONDORCET. — — - George-Louis Leclerc, comte de Buffon, trésorier de l’Académie des Sciences , de l’Académie Françoise, de la Société royale de Londres , des Académies d’Édimbourg , Pé- tersbourg , Berlin , de l’Institut de Bologne, naquit à Montbard, le 7 septembre 1707, de Benjamin Leclerc de Buffon, conseiller au parlement de Bourgogne, et de mademoiselle Marlin. Animé dès sa jennesse du désir d’appren- dre, éprouvant à la fois et le besoin de mé- diter et celui d’acquérir de la gloire, M. de Buffon n’en avoit pas moins les goûts de son âge; et sa passion pour l’étude, en l’empê- chant d’être maîtrisé par son ardeur pour le plaisir, contribuoit plus à la conserver qu’à l’éteindre. Le hasard lui offrit la connois- sance du jeune lord Kingston , dont le gou- verneur aimoit et cultivoit les sciences : cette société réunissoit pour M. de Buffon l’in- struction et l’amusement ; il vécut avec eux à Paris et à Saumur, les suivit en Angleterre, les accompagna en Italie. Ni les chefs-d’œuvre antiques, ni ceux des modernes qui , en les imitant , les ont souvent surpassés, ni ces souvenirs d’un peuple-roi sans cesse rappelés par des monu- mens dignes de sa puissance, ne frappèrent M. de Buffon; il ne vit que la nature, à la fois riante, majestueuse et terrible, offrant des asiles voluptueux et de paisibles retraites entre des torrens de laves et sur les débris des volcans, prodiguant ses richesses à des campagnes qu’elle menace d’engloutir sous des monceaux de cendres ou de fleuves en- flammés, et montrant à chaque pas les ves- tiges et les preuves des antiques révolutions du globe. La perfection des ouvrages des hommes, tout ce que leur foiblesse a pu y imprimer de grandeur, tout ce que le temps a pu donner d’intérêt ou de majesté, dis- parut à ses yeux devant les œuvres de cette main crédîrice dont la puissance s’étend sur tous les mondes, et pour qui, dans son éter- nelle activité, les générations humaines sont à peine un instant. Dès lors il apprit à voir Buffon. I. la nature avec transport comme avec ré- flexion; il réunit le goût de l’observation à celui des sciences contemplatives; et les em- brassant toutes dans l’universalité de ses connoissances , il forma la résolution de leur dévouer exclusivement sa vie. Une constitution qui le rendoit capable d’un travail long et soutenu; une ardeur qui lui faisoit dévorer sans dégoût et presque sans ennui les détails les plus fastidieux; un caractère où il ne se rencontroit aucune de ces qualités qui repoussent la fortune , le sentiment qu’il avoit déjà de ses propres forces, le besoin de la considération, tout sembloit devoir l’appeler à la magistrature, où sa naissance lui marquoit sa place, où il pouvoit espérer des succès brillans et se livrer à de grandes espérances : elles furent sacrifiées aux sciences , et ce n’est point le seul exemple que l’histoire de l’Académie puisse présenter de ce noble dévouement. Ce qui rend plus singulier celui de M. de Buffon, c’est qu’alors il n’étoit entraîné vers aucune science en particulier par cet attrait puissant qui force l’esprit à s’occuper d’un objet , et ne laisse pas à la volonté le pouvoir de l’en distraire. Mais tout ce qui élevoit ses idées ou agrandissoit son intelligence avoit un charme pour lui : il savoit que , si la gloire littéraire est, après la gloire des armes, la plus durable et la plus brillante, elle est de toutes celle qui peut le moins être contestée ; il savoit enfin que tout homme qui attire les regards du public par ses ouvrages ou par ses actions , n’a plus besoin de place pour pré- tendre à la considération , et peut l’attendre de son caractère et de sa conduite. Les premiers travaux de M. de Buffon furent des traductions; anecdote singulière que n’a encore présentée la vie d’aucun homme destiné à une grande renommée. Il désiroit se perfectionner dans la langue an- gloise, s’exercer à écrire dans la sienne, étudier dans Newton le calcul de l’infini , dans Haies les essais d’une physique nou- velle, dans Tull les premières applications z ELOGE DE BUFFON des 'sciences à l'agriculture ; il ne vouloit pas en même temps qu’un travail nécessaire à son instruction retardât l’instant où il com- menceroit à fixer sur lui les regards du pu- blic, et il traduisit les livres qu’il étudioit. Chacune de ces traductions est précédée d’une préface. M. de Buffon a obtenu de- puis , comme écrivain , une célébrité si grande et si méritée, que les essais de sa jeunesse doivent exciter la curiosité. Il est naturel d’y chercher les -premiers traits de son talent , de voir ce que les observations et l’exercice ont pu y ajouter ou y corriger, de distinguer, en quelque sorte , les dons de la nature et l’ouvrage de la réflexion. Mais on ne trouve dans ces préfaces qu’un des caractères du style de M. de Buffon, cette gravité noble et soutenue qui ne l’aban- donne presque jamais. Son goût étoit déjà trop formé pour lui permettre de chercher des ornemens que le sujet eût rejetés , et son nom trop connu pour le risquer. La timidité et la hardiesse peuvent être égale- ment le caractère du premier ouvrage d’un homme de génie; mais la timidité, qui sup- pose un goût inspiré par la nature et une sagesse prématurée, a été le partage des écri- vains qui ont montré le talent le plus pur et le plus vrai. Rarement ceux dont une crainte salutaire n’a point arrêté les pas au commen- cement de la carrière, ont pu en atteindre le terme et ne pas s’y égarer. M. de Buffon parut d’abord vouloir se livrer uniquement aux mathématiques : re- gardées , surtout depuis Newton , comme le fondement et la clef des connoissances na- turelles, elles éloient, en quelque sorte, de- venues parmi nous une science à la mode ; avantage qu’elles dévoient en partie à ce que M. de Maupertuis, le savant alors le plus connu des gens du monde, étoit un géomètre. Mais, si M. de Buffon s’occupa quelque temps de recherches mathématiques, c’étoit surtout pour s’étudier lui-même, es- sayer ses forces, et connoître la trempe de son génie. Bientôt il sentit que la nature l’appeloit à d’autres travaux , et il essaya une nouvelle route que le goût du public lui indiquoit encore. A l’exemple de M. Duhamel, il voulait appliquer les connoissances physiques à des objets d’une utilité immédiate ; il étudia en physicien les bois dont il étoft obligé de s’occuper comme propriétaire, et publia sur cette partie de l’agriculture plusieurs mé- moires remarquables surtout par la sagesse avec laquelle, écartant tout système, toute vue générale, mais incertaine, il se borne à raconter des faits, à détailler des expériences* Il n’ose s’écarter de l’esprit qui commençoit alors à dominer parmi les savans , de cette fidélité sévère et scrupuleuse à ne prendre pour guides que l’observation et le calcul , à s’arrêter dès l’instant où ces fils secoura- bles se brisent ou s’échappent de leurs mains. Mais s’il fut depuis moins timide , il faut lui rendre cette justice, qu’en s’abandonnant trop facilement peut-être à des systèmes spéculatifs, dont l’adoption peut tout au plus égarer quelques savans et ralentir leur course, jamais il n’étendit cet esprit systéma- tique sur des objets immédiatement applica- bles à l’usage commun , où il pourroit con- duire à des erreurs vraiment nuisibles. Parmi les observations que renferment ces mémoires, la plus importante est celle où il propose un moyen de donner à l’aubier une dureté au moins égale à celle du cœur du bois, qui est elle-même augmentée par ce procédé; il consiste à écorcer les arbres sur pied dans le temps de la sève , et à les y laisser dessécher et mourir. Les ordonnances défendoient cette opération; car elles ont trop souvent traité les hommes comme si , condamnés à une enfance éternelle ou à une incurable démence, on ne pouvoit leur laisser sans danger la disposition de leurs propriétés et l’exercice de leurs droits. Peu de temps après , M. de Buffon prouva par îe fait la possibilité des miroirs brûlans d’Archimède et de Proclus. Tzetzès en a laissé une description qui montre qu’ils avoient employé un système de miroirs plans. Les essais tentés par Kircher avec un petit nombre de miroirs , ne laissoient aucun doute sur le succès; M. Dufay a voit répété cette expérience; Hartsoeker avoit même commencé une machine construite sur ce principe ; mais il restoit à M. de Buffon l’honneur d’avoir montré , le premier parmi les modernes , l’expérience extraordinaire d’un incendie allumé à deux cents pieds de distance ; expérience qui n’avoit été vue avant lui qu’à Syracuse et à Constantinople. Bientôt après, il proposa l’idée d’une loupe à échelons , n’exigeant plus ces masses énor- mes de verres si difficiles à fondre et à tra- vailler, absorbant une moindre quantité de lumière, parce quelle peut n’avoir jamais qu’une petite épaisseur, offrant enfin l’avan- tage de corriger une grande partie de l’aber- ration de sphéricité. Cette loupe, proposée en 1748 par M. de Buffon, n’a été exécutee que par M. l’abbé Rochon, plus de trente ans après , avec assez de succès pour montrer quelle mérite la préférence sur les lentilles 3 PAR CONDORCET. ordinaires. On pourvoit même composer de plusieurs pièces ces loupes à échelons ; on y gagnerait plus de facilité dans la construc- tion, une grande diminution de dépense, l’avantage de pouvoir leur donner plus d’é- tendue, et celui d’employer, suivant le be- soin , un nombre de cercles plus ou moins grand , et d’obtenir ainsi d’un même instru- ment différens degrés de force. En 1739, M. de JBuffon fut nommé in- tendant du Jardin du Roi. Les devoirs de cette place fixèrent pour jamais son goût jusqu’alors partagé entre différentes scien- ces ; et sans renoncer à aucune , ce ne fut plus que dans leui’s rapports avec l'histoire naturelle qu’il se permit de les envisager. Obligé d’étudier les détails de cette science si vaste , de parcourir les compilations im- menses où l’on avoit recueilli les observa- tions de tous les pays et de tous les siècles, bientôt son imagination éprouva le besoin de peindre ce que les autres avoient décrit; sa tête , exercée à former des combinaisons , sentit celui de saisir des ensembles où les observateurs ne lui offroient que des faits épars et sans liaison. Il osa donc concevoir le projet de ras- sembler tous ces faits, d’en tirer des résultats généraux qui devinssent la théorie de la na- ture, dont les observations ne sont que l’histoire ; de donner de l’intérêt et de la vie à celle des animaux, en mêlant un tableau philosophique de leurs mœurs et de leurs habitudes à des descriptions embellies de toutes les couleurs dont l’art d’écrire pouvoit les orner ; de créer enfin pour les philoso- phes , pour tous les hommes qui ont exercé leur esprit ou leur âme , une science qui n’existoit encore que pour les naturalistes. L’immensité de ce plan ne le rebuta point; il prévoyoit sans doute qu’avec un travail assidu de tous les jours, continué pendant une longue vie, il n’en pourrait en- core exécuter qu’une partie : mais il s’agis- soit surtout de donner l’exemple et d’impri- mer le mouvement aux esprits. La difficulté de répandre de l’intérêt sur tant d’objets inanimés ou insipides ne l’arrêta point; il avoit déjà celte conscience de talent qui , comme la conscience morale , ne trompe ja- mais quand on l’interroge de bonne foi , et qu’on la laisse dicter seule la réponse. Dix années furent employées à préparer des matériaux, à former des combinaisons, à s’instruire dans la science des faits, à s’exercer dans l’art d’écrire , et au bout de ce terme le premier volume de Y Histoire na- turelle vint étonner l’Europe. En parlant de cet ouvrage, que tous les hommes ont lu , que presque tous ont admiré, qui a rempli, soit par le travail de la composition, soit par des études préliminaires , la vie entière de M. de Buffon , nous ne prendrons pour guide que la vérité ; (car pourquoi cherche- rions-nous vainement à flatter par des éloges qui ne dureraient qu’un jour, un nom qui doit vivre à jamais?) et en évitant, s’il est possible, l’influence de toutes les causes qui peuvent agir sur l’opinion souvent passagère des contemporains, nous tâcherons de pré- voir l’opinion durable de la postérité. La théorie générale du globe que nous habitons, la disposition, la nature et l’ori- gine des substances qu’il offre à nos regards, les grands phénomènes qui s’opèrent à sa surface ou dans son sein ; l’histoire de l’homme et les lois qui président à sa forma- tion, à son développement, à sa vie, à sa destruction; la nomenclature et la descrip- tion des quadrupèdes ou des oiseaux , l’exa- men de leurs facultés, la peinture de leurs mœurs, tels sont les objets que M. de Buffon a traités. Nous ne connoissons, par des observations exactes, qu’une très-petite partie de la sur- face du globe; nous n’avons pénétré dans ses entrailles que conduits par l’espérance, plus souvent avide qu’observatrice, d’en tirer ce qu’elles renferment d’utile à nos be- soins, de précieux à l’avarice ou au luxe; et, lorsque M. de Buffon donna sa Théorie de la Terre, nos connnoissanees n’étoient même qu’une foible partie de celles que nous avons acquises, et qui sont si imparfaites encore. On pouvoit donc regarder comme téméraire l’idée de former dès lors une théo- rie générale du globe , puisque celte entre- prise le serait encore aujourd’hui. Mais M. de Buffon connoissoit trop les hommes pour ne pas sentir qu’une science qui n’of- friroit que des faits particuliers , ou ne pré- senterait des résultats généraux que sous la forme de simples conjectures, frapperait peu les esprits vulgaires , trop foibles pour supporter le poids du doute. Il savoit que Descartes n’avoit attiré les hommes à la philosophie que par la hardiesse de ses sys- tèmes; qu’il ne les avoit arrachés au joug de l’autorité, à leur indifférence pour la vérité, qu’en s’emparant de leur imagination, en ménageant leur paresse ; et qu’ensuite , libres de leurs fers , livrés à l’avidité de con- noîire, eux-mêmes avoient su choisir la véritable roule. Il avoit vu enfin, dans l’his- toire des sciences , que 1 époque^ de leurs grands progrès avoit presque toujours été ELOGE DE BUFFON celle des systèmes célèbres, parce que ces sys- tèmes exaltant à la fois l’activité de leurs ad- versaires et celle de leurs défenseurs , tous les objets sont alors soumis à une discussion dans laquelle l’esprit de parti, si difficile sur les preuves du parti contraire, oblige à les multiplier. C’est alors que chaque combattant, s’appuyant sur toqs les faits reçus, ils sont tous soumis à un examen rigoureux ; c’est alors qu’ayant épuisé ces premières armes, on cherche de nouveaux faits pour s’en procurer de plus sûres et d’une trempe plus forte. Ainsi la plus austère philosophie peut pardonner à un physicien de s’être livré à son imagination, pourvu que ses erreurs aient contribué aux progrès des sciences, ne fût-ce qu’en imposant la nécessité de le combattre; et si les hypothèses de M. de Buffon, sur la formation des planètes, sont contraires à ces même lois du système du monde, dont il avoit été en France un des premiers, un des plus zélés défenseurs, la vérité sévère, en condamnant ces hypo- thèses , peut encore applaudir à l’art avec lequel l’auteur a su les présenter. Les objections de quelques critiques , des observations nouvelles, des faits ancienne- ment connus, mais qui lui avoient échappé, forcèrent M. de Buffon d’abandonner quel- ques points de sa Théorie de la Terre. Mais, dans ses Époques de la Nature , ouvrage destiné à rendre compte de ses vues nouvelles, à modifier ou à défendre ses principes , il semble redoubler de hardiesse à proportion des pertes que son système a essuyées, le défendre avec plus de force, lorsqu’on l’auroit cru réduit à l’abandonner, et balancer par la grandeur de ses idées , par la magnificence de son style, par le poids de son nom, l’autorité des savans réunis , et même celle des faits et des calculs. La Théorie de la Terre fut suivie de V His- toire de l’Homme , qui en a reçu ou usurpé l’empire. La nature a couvert d’un voile impéné- trable les lois qui président à la reproduc- tion des êtres ; M. de Buffon essaya de le lever , ou plutôt de deviner ce qu’il cachoit. Dans les liqueurs où les autres naturalistes avoient vu des animaux , il n’aperçut que des molécules organiques, élémens communs de tous les êtres animés. Les infusions de diverses matières animales et celles des graines présentoient les mêmes molécules avec plus ou moins d’abondance : elles ser- vent donc également à la reproduction des êtres, à leur accroissement, à leur con- servation; elles existent dans les alimens dont ils se nourrissent, circulent dans leui liqueurs, s’unissent à chacun de leurs or ganes pour réparer les pertes qu’il a pi faire. Quand ces organes ont encore la flexi bilité de l’enfance , les molécules organiques se combinant de manière à en conserver O' modifier les formes , en déterminent le dé veloppement et les progrès; mais, aprè l’époque de la jeunesse, lorsqu’elles son rassemblées dans des organes particuliers où échappant à la force qu’exerce sur elle le corps auquel elles ont appartenu, elle peuvent former de nouveaux composés ; elle conservent, suivant les différentes parties Oi elles ont existé, une disposition à se réuni de manière à présenter les mêmes formes et reproduisent par conséquent des indivi dus semblables à ceux de qui elles son émanées. Ce système brillant eut peu d partisans ; il étoit trop difficile de se fair une idée de cette force , en vertu de laquell les molécules enlevées à toutes les partie d’un corps conservoient une tendance à s replacer dans un ordre semblable. D’ailleuri! les recherches de Haller sur la formatio: du poulet contredisoient cette opinion avei trop de force ; l’identité des membranes di l’animal naissant, et de celles de l’œuf, s refusoit trop à l’hypothèse d’un animal formi postérieurement , et ne s’y étant attaché qui pour y trouver sa nourriture. Les observa tions de Spallanzani sur les mêmes liqueur et sur les mêmes infusions sembloient éga lement détruire , jusque dans son principe le système des molécules organiques. Ma lorsque, dégagé des liens de ce système M. de Buffon n’est plus que peintre, histc rien et philosophe, avec quel intérêt, pai courant l’univers sur ses traces, on vo l’homme, dont le fond est partout le même j modifié lentement par l’action continue d climat , du sol , des habitudes , des préjugé, j changer de couleur et de physionomie comm j de goût et d’opinion, acquérir ou perdre d ! la force, de l’adresse, de la beauté, comm; de l’intelligence , de la sensibilité et de; vertus! Avec quel plaisir on suit dans so ouvrage l’histoire des progrès de l’homme et même celle de sa décadence ! On étudi 1 les lois de cette correspondance constant! entre les changemens physiques des seri ou des organes , et ceux qui s’opèrent dar | l’entendement ou dans les passions ; on ap ;; prend à connoître le mécanisme de nos sen:| ses rapports avec nos sensations ou ne J idées, les erreurs auxquelles ils nous expef sent, la manière dont nous apprenons voir, à toucher, à entendre, et commet PAR CONDORCET. l’enfant, de qui les yeux foibles et incer- tains apercevoient à peine un amas confus | de couleurs, parvient, par l’habitude et la réflexion, à saisir d’un coup d’œil le ta- bleau d’un vaste horizon, et s’élève jusqu’au pouvoir de créer et de combiner des images. Avec quelle curiosité enfin on observe ces détails qui intéressent le plus vif de nos plaisirs et le plus doux de nos sentimens , ces secrets de la nature et de la pudeur aux- quels la majesté du style et la sévérité des réflexions donnent de la décence et une sorte de dignité philosophique qui permet- tent aux sages mêmes d’y arrêter leurs re- gards et de les contempler sans rougir ! Les observations dispersées dans les livres des anatomistes , des médecins et des voya- geurs , forment le fond de ce tableau , offert pour la première fois aux regards des hommes I avides de se connoître et surpris de tout ce : qu’ils apprenoient sur eux-mêmes , et de retrouver ce qu’ils avoient éprouvé , ce j cpi’ils avoient vu sans en avoir eu la con- I science ou conservé la mémoire. Avant d’écrire l’histoire de chaque espèce d’animaux , M. de Buffon crut devoir porter j ses recherches sur les qualités communes à toutes , qui les distinguent des êtres des autres classes. Semblables à l’homme dans presque tout ce qui appartient au corps; I n’ayant avec lui dans leurs sens , dans leurs j organes, que ces différences qui peuvent j exister entre des êtres d’une même nature, et qui indiquent seulement une infériorité ,dans les qualités semblables; les animaux sont-ils absolument séparés de nous par leurs facultés intellectuelles ? M. de Buffon essaya de résoudre ce problème, et nous n’oserions dire qu’il l’ait résolu avec succès. Craignant d’effaroucher des regards faciles à blesser en présentant ses opinions autre- ment que sous un voile , celui dont il les (lcouvre a paru trop difficile à percer. On ( peut aussi lui reprocher , avec quelque jus- (jtice, de n’avoir pas observé les animaux ,,^vec assez de scrupule; de n’avoir point j porté ses regards sur des détails petits en , eux-mêmes , mais nécessaires pour saisir les ( nuances très-fines de leurs opérations. Il t(pemble n’avoir aperçu dans chaque espèce t du’une uniformité de procédés et d’habi- j, odes , qui donne l’idée d’êtres obéissans à j, -ne force aveugle et mécanique, tandis qu’en 5 observant de plus près , il auroit pu aperce- voir des différences très-sensibles entre les D individus , et des actions qui semblent appar- tenir au raisonnement , qui indiquent même B ies idées abstraites et générales. 5 La première classe d’animaux décrite par M. de Buffon est celle des quadrupèdes ; la seconde celle des oiseaux; et c’est à ceâ deux classes que s’est borné son travail. Une si longue suite de descriptions sembloit de- voir être monotone et ne pouvoit intéresser que les savans : mais le talent a su triom* pher de cet obstacle. Esclaves ou ennemis de l’homme, destinés à sa nourriture, ou n’étant pour lui qu’un spectacle, tous ces êtres, sous le pinceau de M. de Buffon , ex- citent alternativement la terreur, l’intérêt, la pitié ou la curiosité. Le peintre philosophe n’en appelle aucun sur cette scène toujours attachante, toujours animée, sans marquer la place qu’il occupe dans l’univers, sans montrer ses rapports avec nous. Mais s’agit- il des animaux qui sont connus seulement par les relations des voyageurs, qui ont reçu d’eux des noms différens , dont il faut chercher l’histoire et quelquefois discutef la réalité au milieu de récits vagues et sou- vent défigurés par le merveilleux , le savant naturaliste impose silence à son imagination ; il a tout lu , tout extrait , tout analysé , tout discuté : on est étonné de trouver un no- mencîateur infatigable dans celui de qui on n’attendoit que des tableaux imposans ou agréables ; on lui sait gré d’avoir plié son génie à des recherches si pénibles; et ceux qui lui auroient reproché peut-être d’avoir sacrifié l’exactitude à l’effet , lui pardonnent et sentent ranimer leur confiance. Des réflexions philosophiques mêlées aux descriptions , à l’exposition des faits et à la peinture des mœurs, ajoutent à l’intérêt, aux charmes de cette lecture et à son utilité. Ces réflexions ne sont pas celles d’un phi- losophe qui soumet toutes ses pensées à une analyse rigoureuse, qui suit sur les divers ob- jets les principes d’une philosophie toujours une ; mais ce ne sont pas non plus ces ré- flexions isolées que chaque sujet offre à l’esprit , qui se présentent d’elles-mêmes , et n’ont qu’une vérité passagère et locale. Celles de M. de Buffon s’attachent toujours à quelque loi générale de la nature , ou du moins à quelque grande idée. Dans ses discours sur les animaux domes- tiques, sur les animaux carnassiers , sur la dégénération des espèces , on le voit tantôt esquisser l’histoire du règne animal consi- déré dans son ensemble, tantôt parler en homme libre de la dégradation où la servi- tude réduit les animaux; en homme sensible, de la destruction à laquelle l’espèce humaine les a soumis ; et en philosophe, de la néces- sité de cette destruction , des effets lents et ÉLOGE DE BUFFON 6 sûrs de cette servitude, de son influence sur la forme, sur les facultés, sur les habi- tudes morales des différentes espèces. Des traits qui semblent lui échapper caractérisent la sensibilité et la fierté de son âme; mais elle paroît toujours dominée par une raison supérieure : on croit, pour ainsi dire, con- verser avec une pure intelligence , qui n’au- roit de la sensibilité humaine que ce qu’il en faut pour se faire entendre de nous et intéresser notre foiblesse. Dans son discours sur les perroquets , il fait sentir la différence de la perfectibilité de l’espèce entière, apanage qu’il croit ré- servé à l’homme , et de cette perfectibilité individuelle que l’animal sauvage doit à la nécessité, à l’exemple de son espèce , et l’a- nimal domestique aux leçons de son maître. Il montre comment l’homme par la durée de son enfance, par celle du besoin phy- sique des secours maternels, contracte l’ha- bitude d’une communication intime qui le dispose à la société, qui dirige vers ses rapports avec ses semblables le développe- ment de ses facultés , susceptibles d acquérir une perfection plus grande dans un être plus heureusement organisé et né avec de plus grands besoins. Peut-être cette nuance entre nous et les animaux est-elle moins tranchée que M. de Buffon n’a paru le croire ; peut-être, comme l’exemple des castors semble le prouver, existe-t-il des espèces d’animaux susceptibles d’une sorte de perfectibilité non moins réelle, mais plus lente et plus bornée : qui pourvoit même assurer qu’elle ne s’élendroil pas bien au delà des limites que nous osons lui fixer, si les espèces qui nous paroissent les plus ingénieuses , affranchies de la crainte dont les frappe la présence de l’homme , et soumises par des circonstances locales à des besoins assez grands pour exciter l’activité , mais trop foiblcs pour la détruire, éprou- voient la nécessité et avoient en même temps la liberté de déployer toute l’énergie dont la nature a pu les douer ? Des observa- tions long-temps continuées pourroient seules donner le droit de prononcer sur cette question; il suffit, pour la sentir, de jeter un regard sur notre espèce même. Supposons que les nations européennes n’aient pas existé, que les hommes soient sur toute la terre ce qu’ils sont en Asie et en Afrique, qu’ils soient restés partout à ce même degré de civilisation et de connois- sances auquel ils étoient déjà dans le temps où commence pour nous l’histoire : ne seroit- onpas alors fondé à croire qu’il est un terme que dans chaque climat l’homme ne peul passer? ne regarderoit-on pas comme un visionnaire le philosophe qui oseroit pro- mettre à l’espèce humaine les progrès qu’elk a faits et qu’elle fait journellement en Eu- rope ? La connoissance anatomique des animaux est une portion importante de leur histoire. M. de Buffon eut , pour cette partie de son ouvrage , le bonheur de trouver des secours dans l’amitié généreuse d’un célèbre natu- raliste, qui, lui laissant la gloire attachée à ces descriptions brillantes, à ces peintures, de mœurs, à ces réflexions philosophiques qui frappent tous les esprits, se contentoil du mérite plus modeste d’obtenir l’estime des savans par des détails exacts et précis, par des observations faites avec une rigueur scrupuleuse, par des vues nouvelles qu’eux seuls pou voient apprécier. Ils ont regrette que M. de Buffon n’ait pas, dans l’histoire des oiseaux , conservé cet exact et sage coopérateur : mais ils l’ont regretté seuls, nous l’avouons sans peine et sans croire di marner par là le juste tribut d’honneui qu’ont mérité les travaux de M. Daubenton. I A l’histoire des quadrupèdes et des oi-j seaux succéda celle des substances miné- rales. Dans cette partie de son ouvrage , peut- , être M. de Buffon n’a-t-il pas attaché assez ! d’importance aux travaux des chimistes! modernes , à cette foule de faits précis et| bien prouvés dont ils ont enrichi la science j| de la nature, à cette méthode analytique1 qui conduit si sûrement à la vérité, oblige de l’attendre lorsqu’elle n’est pas encore i | notre portée , et ne permet jamais d’y sub- stituer des erreurs. En effet, l’analyse chi-i mique des substances minérales peut seule j donner à leur nomenclature une base solide f répandre la lumière sur leur histoire , sur j leur origine , sur les antiques événemen; qui ont déterminé leur formation. Malgré ce juste reproche , on retrouve dans l’histoire des minéraux le talent et h philosophie de M. de Buffon, ses aperçu; ingénieux, ses vues générales et grandes. j ce talent de saisir dans la suite des fait; tout ce qui peut appuyer ces vues, de s’em- parer des esprits, de les entraîner où i: veut les conduire, et de faire admirer l’au- teur lors même que la raison ne peul adop- ; ter ses principes. V Histoire naturelle renferme un ouvrage, d’un genre différent , sous le titre d 'Jrith- 1 métique morale. Une application de calcul s la probabilité de la durée de la vie humaine PAR CONDORCET. 1 à- la ine entrait dans le plan de l’ Histoire naturelle ; M. de Buffon ne pouvoit guère traiter ce sujet sans porter un regard philosophique sur les principes mêmes de ce calcul , et sur la nature des différentes vérités. Il y établit cette opinion, que les vérités ma- thématiques ne sont jpoint des vérités réelles, mais de pures vérités de définition : obser- vation juste, si on veut la prendre dans la rigueur métaphysique, mais qui s’applique également alors aux vérités de tous les ordres , dès qu’elles sont précises et qu’elles n’ont pas des individus pour objet. Si en- suite on veut appliquer ces vérités à la pra- tique et les rendre dès lors individuelles, semblables encore à cet égard aux vérités mathématiques, elles ne sont plus que des vé- rités approchées.Il n’existeréellementqu’une seule différence : c’est que les idées dont l’identité forme les vérités mathématiques ou physiques sont plus abstraites dans les premières ; d’où il résulte que , pour les vé- rités physiques, nous avons un souvenir distinct des individus dont elles expriment les qualités communes , et que nous ne l’a- vons plus pour les autres. Mais la véritable réalité, l’utilité d’une proposition quelcon- que est indépendante de cette différence; car on doit regarder une vérité comme réelle, toutes les fois que, si on l’applique à un objet réellement existant, elle reste une vérité absolue, ou devient une vérité indéfiniment approchée. M. de Buffon proposoit d’assigner une valeur précise à la probabilité très-grande que l’on peut regarder comme une certitude morale , et de n’avoir , au delà de ce terme , aucun égard à la petite possibilité d’un événement contraire. Ce principe est vrai , lorsque l’on veut seulement appliquer à l’usage commun le résultat d’un calcul ; et dans ce sens tous les hommes l’ont adopté dans la pratique, tous les philosophes l’ont suivi dans leurs raisonnemens ; mais il cesse d’être juste si on l’introduit dans le calcul même, et surtout si on veut l’employer à établir des théories, à expliquer des para- doxes, à prouver ou à combattre des règles générales. D’ailleurs, cette probabilité, qui peut s’appeler certitude morale , doit être plus ou moins grande suivant la nature des objets que l’on considère, et les principes qui doivent diriger notre conduite; et il au- roit fallu marquer, pour chaque genre de vérités et d’actions, le degré de probabilité où il commence à être raisonnable de croire et permis d’agir. C’est par respect pour les talens de notre illustre confrère que nous nous permettons de faire ici ces observations. Lorsque des opinions qui paraissent erronées se trouvent dans un livre fait pour séduire l’esprit comme pour l’éclairer, c’est presque un devoir d’avertir de les soumettre à un examen ri- goureux. L’admiration dispose si facilement à la croyance, que les lecteurs, entraînés à la fois par le nom de l’auteur et par le charme du style, cèdent sans résistance, et semblent craindre que le doute , en affoi- blissant un enthousiasme qui leur est cher, ne diminue leur plaisir. Mais on doit encore ici à M. de Buffon , sinon d’avoir répandu une lumière nouvelle sur cette partie des mathématiques et de la philosophie, du moins d’en avoir fait sentir l’utilité, peut- être même d’en avoir appris l’existence à une classe nombreuse qui n’auroit pas été en chercher les principes dans les ouvrages des géomètres , enfin d’en avoir montré la liaison avec l’histoire naturelle de l’homme. C’est avoir contribué aux progrès d’une science qui, soumettant au calcul les événe- mens dirigés par des lois que nous nommons irrégulières, parce qu’elles nous sont incon- nues, semble étendre l’empire de l’esprit humain au delà de ses bornes naturelles , et lui offrir un instrument à l’aide duquel ses regards peuvent s’étendre sur des espaces immenses , que peut-être il ne lui sera ja- mais permis de parcourir. On a reproché à la philosophie de M. de Buffon non seulement ces systèmes généraux dont nous avons parlé, et qui reparaissent trop souvent dans le cours de ses ouvrages, mais on lui a reproché un esprit trop sys- tématique, ou plutôt un esprit trop prompt à former des résultats généraux d’apres les premiers rapports qui l’ont frappé, et de négliger trop ensuite les autres rapports qui auraient pu ou jeter des doutes sur ces ré- sultats, ou en diminuer la généralité, ou leur ôter cet air de grandeur, ce caractère imposant, si propre à entraîner les imagi- nations ardentes et mobiles. Les savans qui cherchent la vérité étoient fâchés d’être obligés sans cesse de se défendre contre la séduction, et de ne trouver souvent, au lieu de résultats et de faits propres à servir de base à leurs recherches et à leurs obser- vations , que des opinions à examiner et des doutes à résoudre. Mais si Y Histoire naturelle a eu parmi les savans des censeurs sévères, le style de cet ouvrage n’a trouvé que des admirateurs. M. de Buffon est poète dans ses descrip- tions ; mais , eomme les grands poètes , il « ÉLOGE DE BUFFON sait rendre intcr'éssânte h peinture dés ob- jets physiques, en y mêlant avec art des idées morales qui intéressent l’âme, en même 'temps que l’imagination est amusée ou éton- taée. Son style est harmonieux, non de cette harmonie qui appartient à tous les écrivains corrects à qui le sens de l’oreille n’a pas été refusé, et qui consiste presque unique- ment à éviter les sons durs ou pénibles , mais de cette harmonie qui est une partie du talent, ajoute aux beautés par une sorte d’analogie entre les idées et les sons, et fait que la phrase est douce et sonore, majestueuse ou légère, suivant les objets qw’elle doit peindre et les sentimens qu’elle doit réveiller. Si M. de Buffon est plus abondant que précis, cette abondance est plutôt dans les choses que dans les mots : il ne s’arrête pas à une idée simple, il en multiplie les nuan- ces; mais chacune d’elles est exprimée avec précision. Son style a de la majesté, de la pompe ; mais c’est parce qu’il présente dés idées vastes et de grandes images. La force et l’énergie lui paraissent naturelles ; il semble qu’il lui ait été impossible de parler, ou plutôt de penser autrement. On a loué la variété de ses tons, on s’est plaint de sa monotonie; mais ce qui petit être fondé dans cette censure est encore un sujet d’éloge. En peignant la nature sublime ou terrible , douce ou riante; en décrivant la fureur du tigre, la majesté du cheval, la fierté et la rapidité de l’aigle, les couleurs brillantes du colibri, la légèreté de l’oiseau-mouche, son style prend le caractère des objets; mais il conserve sa dignité imposante : c’est tou- jours la nature qu’il peint, et il sait que meme dans les petits objets elle a manifesté toute sa puissance. Frappé d’une sorte de respect religieux pour les grands phéno- mènes de 1 univers , pour les lois générales auxquelles obéissent les diverses jiarties du vaste ensemble qu’il a entrepris de tracer, ce sentiment se montre partout, et forme ni quelque sorte le fond sur lequel il répand de Ja variété, sans que cependant on cesse jamais de l’apercevoir. Cet art de peindre en ne paraissant que raconter, ce grand talent du style porté aux objets qu’on avoit traités avec clarté , avec elegance, et même embellis par des ré- llexions ingénieuses , mais auxquels jusqu’à- lors I éloquence avoit paru étrangère, frap- pèrent bientôt tous les esprits : la langue Ira i^oise était déjà devenue la langue de Lui ope, et M. de Buffon eut partout des le^teyrs et des disciples. Mais ce qui est plus glorieux parce qu’il s’y joint une uti- lité réelle, lé succès de ce grand ouvrage fut l’épôqne d’une révolution dans les es- prits; on ne put le lire sans avoir envie de jeter au moins un coup d’œil sur la nature, et l’histoire naturelle devint une connois- sance presque vulgaire; elle fut pour toutes les classes de la société , ou un amusement, ou une occupation; on voulut à voie une bi- bliothèque. Mais le résultat n’eh est pas le même; car dans les bibliothèques on ne fait que répéter les exemplaires des mêmes livres : ce sont au contraire des individus différeiis qu’on rassemble dans les cabinets; ils s’y multiplient pour les naturalistes, à qui dès lors les objets dignes d’être observés échappent plus difficilement. La botanique , la métallurgie , les parties de l’histoire naturelle immédiatement utiles à la médecine, au commerce, aux manufac- tures , avoient été encouragées : mais c’est à la science même, à cette science commë ayant pour objet la conuoissanfce de la na- ture , que M. de Buffon a su le premier in- téresser les souverains , les grands , les hommes publics de toutes les nations. Plus sûrs d’obtenir des récompenses, pouvant aspirer enfin à cette gloire populaire que les vrais savans savent apprécier mieux que les autres hommes , mais qu’ils ne méprisent point, les naturalistes se sont livrés à leurs travaux avec une ardeur nouvelle ; on les a vus se multiplier à la voix de M. de Buf- fon dans les provinces comme dans les ca- pitales, dans les autres parties du moude j comme dans l’Europe. Sans doute on avoit I cherché avant lui à faire sentir la nécessité i de l’étude de la nature; la science n’étoit ; pas négligée; la curiosité humaine s’étoit j portée dans les pays éloignés, avoit voulu connoître la surface de la terre , et pénétrer : dans son sein; mais on peut appliquer à M. de Buffon ce que lui -même a dit d’un autre philosophe également célèbre , son ri- val dans l’art d’écrire, comme lui plus utile S peut-être par l’effet de ses ouvrages que par ; les vérités qu’ils renferment : D’autres ! avoient dit les mêmes choses ; mais il les a commandées au nom de la nature i et on lui a obéi. Peut-être le talent d’inspirer aux autres son enthousiasme, de les forcer de concou- rir aux mêmes vues , n’est pas moins néces- saire que celui des découvertes au perfçe* tionnement de l’espèce humaine; peut-êtra n’est-il pas moins rare, n’exige-t-il pas moins ces grandes qualités de l’esprit qui nous forcent à l’admiration, Noug l’accordons à ! s I n P P i di li El

vains, les défauts tiennent souvent aux beau- tés, ont la même origine, sont plus difficiles à distinguer ; et ce sont ces défauts que l’imi- tateur ne manque jamais de transporter dans ses copies. Veut-on les prendre pour mo- dèles, il ne faut point chercher à saisir leur manière , il ne faut point vouloir leur res- sembler, mais se pénétrer de leurs beautés, aspirer à produire des beautés égales , s’ap=. pliquer comme eux à donner un caractère; 10 ÉLOGE DE BUFFON original à ses productions , sans copier celui qui frappe ou qui séduit dans les leurs. Il seroit donc injuste d’imputer à ces grands écrivains les fautes de leurs enthou- siastes, de les accuser d’avoir corrompu le goût , parce que des gens qui en manquoient les ont parodiés en croyant les imiter. Ainsi, on auroit tort de reprocher à M. de Buffon ces idées vagues, cachées sous des expres- sions ampoulées, ces images incohérentes, cette pompe ambitieuse du style, qui dé- figure tant de productions modernes, comme on auroit tort de vouloir rendre Rousseau responsable de cette fausse sensibilité, de cette habitude de se passionner de sang- froid, d’exagérer toutes les opinions, enfin de cette manie de parler de soi sans néces- sité , qui sont devenues une espèce de mode , et presque un mérite. Ces erreurs passagères dans le goût d’une nation cèdent facilement à l’empire de la raison et à celui de l’exem- ple: l’enthousiasme exagéré, qui fait admirer jusqu’aux défauts des hommes illustres , donne à ces maladroites imitations une vo- gue momentanée; mais à la longue il ne reste que ce qui est vraiment beau ; et comme Corneille et Bossuet ont contribué à donner à notre langue, l’un plus de force, l’autre plus d’élévation et de hardiesse , M. de Buffon lui aur% fait acquérir plus de magnificence et de grandeur, comme Rous- seau l’aura instruite à former des accens plus fiers et plus passionnés. Le style de M. de Buffon n’offre pas tou- jours le même degré de perfection ; mais , dans tous les morceaux destinés à l’effet, il a cette correction, cette pureté, sans les- quelles , lorsqu’une langue est une fois for- mée, on ne peut atteindre à une célébrité durable. S’il est permis quelquefois d’être négligé, c’est uniquement dans les discus- sions purement scientifiques , où les taches qu’il a pu laisser ne nuisent point à des beautés , et servent peut-être à faire mieux goûter les peintures brillantes qui les sui- vent. C’étoit par un long travail qu’il parvenoit à donner à son style ce degré de perfection, et il conlinuoit de le corriger jusqu’à ce qu’il eût effacé toutes les traces du travail, et qu’à force de peine il lui eût donné de la facilité; car cette qualité si précieuse n’est, dans un écrivain, que l’art de cacher ses efforts , de présenter ses pensées, comme s’il les avoit conçues d’un seul jet, dans l’ordre le plus naturel ou le plus frappant , revê- tues des expressions les plus propres ou les plus heureuses ; et cet art , auquel le plus grand charme du style est attaché, n'est cependant que le résultat d’une longue suite d’observations fugitives et d’attentions mi- nutieuses. M. de Buffon aimoit à lire ses ouvrages , non par vanité , mais pour s’assurer, par l’expérience, de leur clarté et de leur effet; les deux qualités peut-être sur lesquelles on peut le moins se juger soi-même. Avec une telle intention, il ne choisissoit pas ses au- diteurs ; ceux que le hasard lui offroit sem- bloient devoir mieux représenter le public , dont il vouloit essayer sur eux la manière 1 de sentir : il ne se bornoit pas à recevoir leurs avis ou plutôt leurs éloges ; souvent il i leur demandoit quel sens ils attachoient à ! une phrase, quelle impression ils avoient j éprouvée ; et s’ils n’avoient pas saisi son idée, ! s’il avoit manqué l’effet qu’il vouloit pro- j duire, il en concluoit que cette partie de son ouvrage manquoil de netteté, de mesure j ou de force, et il l’écrivoit de nouveau, j Cette méthode est excellente pour les ou- j vrages de philosophie qu’on destine à deve- j nir populaires ; mais peu d’auteurs auront le ! courage de l’employer. Il ne faut pas cepen- ! dant s’attendre à trouver un égal degré de clarté dans toute Y Histoire naturelle; M. de Buffon a écrit pour les savans, pour les phi- i losophes et pour le public , et il a su pro- i portionner la clarté de chaque partie au désir qu’il avoit d’être entendu d’un nombre plus ; ou moins grand de lecteurs. Peu d’hommes ont été aussi laborieux que j lui, el l’ont été d’une manière si continue et ; si régulière. Il paroissoit commander à ses j idées plutôt qu’être entraîné par elles. Né ! avec une constitution à la fois très-saine et ; très-robuste, fidèle au principe d’employer ! toutes ses facultés jusqu’à ce que la fatigue j l’avertit qu’il commençoit à en abuser, son esprit étoit toujours également prêt à rem- plir la tâche qu’il lui imposoit. C’étoit à la j campagne qu’il aimoit le plus à travailler: il avoit placé son cabinet à l’extrémité d’un : vaste jardin sur la cime d’une montagne ; ; c’est là qu’il passoit les matinées entières , ; tantôt écrivant dans ce réduit solitaire, tan- tôt méditant dans les allées de ce jardin , dont l’entrée étoit alors rigoureusement in- terdite; seul, et dans les momens de distrac- tion nécessaires au milieu d’un travail long- temps continué, n’ayant autour de lui que la nature, dont le spectacle, en délassant ses organes, le ramenoit doucement à ses idées que la fatigue avoit interrompues. Ces ; longs séjours à Montbard étoient peu com- patibles avec ses fonctions de trésorier de XI PAR CONDORCET. l’Académie; mais il s’étoit choisi pour ad- joint M. Tillet, dont il connoissoit trop le zèle actif et sage, l’attachement scrupuleux à tous ses devoirs , pour avoir à craindre que ses confrères pussent jamais se plaindre d’une absence si utilement employée. On doit mettre au nombre des services qu’il a rendus aux sciences, les progrès que toutes les parties du Jardin du Roi ont faits sous son administration. Les grands dépôts ne dispensent point d’étudier la nature. La connoissance de la disposition des objets et de la place qu’ils occupent à la surface ou dans le sein de la terre , n’est pas moins im- portante que celle des objets eux-mêmes ; c’est par là seulement qu’on peut connoître leurs rapports, et s’élever à la recherche de leur origine et des lois de leur formation : mais c’est dans les cabinets qu’on apprend à se rendre capable d’observer immédiate- ment la nature; c’est là encore qu’après l’avoir étudiée, on apprend à juger ses pro- pres observations , à les comparer, à en tirer des résultats, à se rappeler ce qui a pu échapper au premier coup d’œil. C’est dans les cabinets que commence l’éducation du naturaliste , et c’est là aussi qu’il peut mettre la dernière perfection à ses pensées. Le Ca- binet du roi est devenu entre les mains de M. de Buffon, non un simple monument d’ostentation, mais un dépôt utile et pour l’instruction publique et pour le progrès des sciences. Il avoit su intéresser toutes les classes d’hommes à l’histoire naturelle ; et pour le récompenser du plaisir qu’il leur avoit procuré, tous s’empressoient d’appor- ter à ses pieds les objets curieux qu’il leur avoit appris à chercher et à connoître. Les savans y ajoutoienl aussi leur tribut; car ceux mêmes qui combattoient ses opinions , qui désapprouvoient sa méthode de traiter les sciences, reconnoissoient cependant qu’ils dévoient une partie de leurs lumières aux vérités qu’il avoit recueillies, et une partie de leur gloire à cet enthousiasme pour l’his- toire naturelle, qui étoit son ouvrage. Les souverains lui envoyoient les productions rares et curieuses dont la nature avoit en- richi leurs états : c’est à lui que ces présens étoient adressés; mais il les remettoit dans le Cabinet du roi , comme dans le lieu où , exposés aux regards d’un grand nombre d’hommes éclairés, ils pouvoient être plus utiles. Dans les commencemens de son adminis- tration , il avait consacré à l’embellissement du Cabinet une gratification qui lui étoit of- ferte, mais qu’il ne vouloit pas accepter pour lui-même : procédé noble et double- ment utile à ses vues, puisqu’il lui donnoit le droit de solliciter des secours avec plus de hardiesse et d’opiniâtreté. lia botanique étoit celle des parties de l’histoire naturelle dont il s’étoit le moins occupé; mais son goût particulier n’influa point sur les fonctions de l’intendant du Jardin du Roi. Agrandi par ses soins, dis- tribué de la manière la plus avantageuse pour l’enseignement et pour la culture, d’a- près les vues des botanistes habiles qui y président , ce jardin est devenu un établisse- ment digne d’une nation éclairée et puis- sante. Parvenu à ce degré de splendeur, le Jardin du Roi n’aura plus à craindre sans doute ces vicissitudes de décadence et de renouvellement dont notre histoire nous a transmis le souvenir, et le zèle éclairé du successeur de M. de Buffon suffiroit seul pour en répondre à l’Académie et aux sciences. Ce n’est pas seulement à sa célébrité que M. de Buffon dut le bonheur de lever les obstacles qui s’opposèrent long-temps à l’en- tier succès de ses vues; il le dut aussi à sa conduite. Des louanges insérées dans YHis- toire naturelle étoient la récompense de l’intérêt que l’on prenoit aux progrès de la science , et l’on regardoit comme une sorte d’assurance d’immortalité l’honneur d’y voir inscrire son nom. D’ailleurs, M. de Buffon avoit eu le soin constant d’acquérir et de conserver du crédit auprès des ministres et de ceux qui , chargés par eux des détails , ont sur la décision et l’expédition des af- faires une influence inévitable. Il se conci- lioit les uns en ne së permettant jamais d’a- vancer des opinions qui pussent blesser, en ne paroissanl point prétendre à les juger; il s’assuroit des autres en employant avec eux un ton d’égalité qui les flattoit, et en se dé- pouillant de la supériorité que sa gloire et ses talens pouvoient lui donner. Ainsi , au- cun des moyens de contribuer aux progrès de la science à laquelle il s’étoit dévoué , n’ avoit été négligé. Ce fut l’unique objet de son ambition: sa considération, sa gloire y étoient liées sans doute; mais tant d’hommes séparent leurs intérêts de l’intérêt général , qu’il seroit injuste de montrer de la sévérité pour ceux qui savent les réunir. Ce qui prouve à quel point M. de Buffon étoit éloi- gné de toute ambition vulgaire, c’est qu’ap- pelé à Fontainebleau par le feu roi , qui vouloit le consulter sur quelques points re- latifs à la culture des forêts, et ce prince lui ayant proposé de se charger en chef dç l’ad- ELOGE DE BUFFON *2 ministration de toutes celles qui composent les domaines , ni l’imjportance de cette place, ni l’honneur si désire d’avoir un travail par- ticulier avec le roi, ne purent l’éblouir : il sentoit qu’en interrompant ses travaux , il alloit perdre une partie de sa gloire; il sen- toit en même temps la difficulté de faire le bien : surtout il voyoit d’avance la foule des courtisans et des administrateurs se réunir contre une supériorité si effrayante , et con- tre les conséquences d’un exemple si dan- gereux. Placé dans un siècle où l’esprit humain s’agitant dans ses chaînes, les a relâchées toutes et en a brisé quelques-unes, où toutes les opinions ont été examinées, toutes les erreurs combattues , tous les anciens usages soumis à la discussion , où tous les esprits ont pris vers la liberté un essor inattendu , M. de Buffon parut n’avoir aucune part à ce mouvement général. Ce silence peut paroître singulier dans un philosophe dont les ou- vrages prouvent qu’il avoit considéré l’hom- me sous tous les rapports , et annoncent en même temps une manière de penser mâle et ferme, bien éloignée de ce penchant au doute , à l’incertitude, qui conduit à l’indif- férence. Mais peut-être a-t-il cru que le meilleur moyen de détruire les erreurs en métaphy- sique et en morale, étoit de multiplier les vérités d’observations dans les sciences na- turelles; qu’au lieu de combattre l’homme ignorant et opiniâtre, il falloit lui inspirer le désir de s’instruire : il étoit plus utile , selon lui , de prémunir les générations sui- vantes contre l’erreur, en accoutumant les esprits à se nourrir de vérités même indiffé- rentes, que d’attaquer de front les préjugés enracinés et liés avec l’amour-propre, l’in- térêt ou les passions de ceux qui les ont adoptés. La nature a donné à chaque homme son talent, et la sagesse consiste à y plier sa conduite: l’un est fait pour combattre, l’autre pour instruire ; l’un pour corriger et redresser les esprits , l’autre pour les subju- guer et les entraîner après lui. D’ailleurs, M. de Buffon vouloit élever le monument de V Histoire naturelle , il vouloit donner une nouvelle forme au Cabinet du roi , il avoit besoin et de repos et du con- cours général des suffrages; or, quiconque attaque des erreurs, ou laisse seulement en- trevoir son mépris pour elles , doit s’attendre à voir ses jours troublés, et chacun de ses pas embarrassé par des obstacles. Un vrai philosophe doit combaUre les ennemis qu’il rencontre sur la route qui le conduit à la vérité, mais il seroit maladroit d’en appeler de nouveaux par des attaques imprudentes. Peu de savans, peu d’écrivains, ont ob- tenu une gloire aussi populaire que M. de Buffon , et il eut le bonheur de la voir con- tinuellement s’accroître à mesure que les autres jouissances diminuant pour lui , celles de l’amour-propre lui devenoient plus néces- saires. U n’essuya que peu de critiques , parce qu’il avoit soin de n’offenser aucun parti, parce que la nature de ses ouvrages ne permetloit guère à la littérature ignorante j d’atteindre à sa hauteur. Les savans avoient presque tous gardé le silence, sachant qu'il y a peu d’honneur et peu d’utilité pour les sciences à combattre un système qui devient nécessairement une vérité générale si les faits le confirment, ou tombe de lui-même s’ils le contrarient. I D’ailleurs, M. de Buffon employa le moyen le plus sûr d’empêcher les critiques de se multiplier; il ne répondit pas à celles qui parurent contre ses premiers volumes. Ce n’est point qu’elles fussent toutes méprisa- bles; celles de M. Haller, de M. Bonnet, de M. l’abbé de Condillac, celles même que plusieurs savans avoient fournies à l’auteur i des Lettres américaines , pou voient mériter des réponses qui n’eussent pas toujours été faciles. Mais en répondant, il auroit inté- ressé l’amour-propre de ses adversaires à continuer leurs critiques, et perpétué une guerre où la victoire, qui ne pouvoit jamais être absolument complète, ne l’auroit pas dédommagé d’un temps qu’il étoit sûr d’em- ployer plus utilement pour sa gloire. Les souverains , les princes étrangers qui visitoient la France , s’empressoient de ren- dre hommage à M. de Buffon, et de le cher- cher au milieu de ces richesses de la nature rassemblées par ses soins. L’impératrice de Russie , dont le nom est lié à celui de nos plus célèbres philosophes , qui avoit proposé j inutilement à M. d’Alembert de se charger de l’éducation de son fils , et appelé auprès d’elle M. Diderot, après avoir répandu sur lui des bienfaits dont la délicatesse avec la- quelle ils étoient offerts augmentoit le prix ; qui avoit rendu M. de Yoltaire le confident de tout ce qu’elle entreprenoit pour répan- dre les lumières, établir la tolérance et adoucir les lois ; l’impératrice de Russie pro- diguoit à M. de Buffon les marques de son admiration les plus capables de le toucher, en lui envoyant tout ce qui , dans ses vastes états , devoit le plus exciter sa curiosité , et en choisissant par une recherche ingénieuse les productions singulières qui pouvoien^ PAR CONDORCET. servir de preuves à ses opinions. Enfin il eut l’honneur de recevoir dans sa retraite de Montbard ce héros en qui l’Europe admire le génie de Frédéric et chérit l’humanité d’un sage , et qui vient aujourd’hui mêler ses regrets aux nôtres , et embellir par l’éclat de sa gloire la modeste simplicité des honneurs académiques. M. de Buffon n’étoit occupé que d’un seul objet , n’avoit qu’un seul goût ; il s’étoit créé un style, et s’étoit fait une philosophie par ses réflexions plus encore que par l’étude : on ne doit donc pas s’étonner de ne trouver ni dans ses lettres , ni dans quelques mor- ceaux échappés à sa plume, cette légèreté, cette simplicité qui doivent en être le carac- tère; mais presque toujours quelques traits font i’econnoitre le peintre de la nature et dédommagent d’un défaut de flexibilité in- compatible peut-être avec la trempe mâle et vigoureuse de son esprit. C’est à la même cause que l’on doit attribuer la sévérité de ses jugemens, et celle sorte d’orgueil qu’on a cru observer en lui. L’indulgence suppose quelque facilité à se prêter aux idées et à la manière d’autrui , et il est difficile d’être sans orgueil , quand , occupé sans cesse d’un grand objet qu’on a dignement rempli , on est forcé en quelque sorte de porter toujours avec soi le sentiment de sa supériorité. Dans la société, M. de Buffon souffroit sans peine la médiocrité; ou plutôt, occupé de ses propres idées , il ne l’apercevoit pas, et préféroit en général les gens qui pouvoient le distraire sans le contredire et sans l’assu- jettir au soin fatigant de prévenir leurs ob- jections ou d’y répondre. Simple dans la vie privée, y prenant sans effort le ton de la bonhomie, quoique aimant par goût la ma- gnificence et tout ce qui avoit quelque ap- pareil de grandeur, il avoit conservé cette politesse noble, ces déférences extérieures pour le rang et les places , qui étoient dans sa jeunesse le ton général des gens du monde, et dont plus d’amour pour la liberté et l’é- galité , au moins dans les manières , nous a peut-être trop corrigés; car sauvent les formes polies dispensent de la fausseté, et le respect extérieur est une barrière que l’on oppose avec su< cès à une familiarité dange- reuse. On auroil pu tirer de ces déférences qui paroissoient exagérées, quelques induc- tions défavorables au caractère de M. de Buffon, si dans des circonstances plus im- portantes il n’avoit montré une hauteur d’âme et une noblesse supérieures à l’intérêt comme au ressentiment. Il avoit épousé en 1752 mademoiselle de i3 Saint-Belin, dont la naissance, les agréniens extérieurs et les vertus réparèrent à ses yeux le défaut de fortune. L’âge avoit fait perdre à M. de Buffon une partie des agrémens de la jeunesse; mais il lui restoit une taille avantageuse, un air noble, une figure impo- sante, une physionomie à la fois douce et majestueuse. L’enthousiasme pour le talent fit disparoître aux yeux de madame de Buf- fon l’inégalité d’âge; et dans cette époque de la vie où la félicité semble se borner à rem- placer par l’amitié et les souvenirs mêlés de regrets un bonheur plus doux qui nous échappe , il eut celui d’inspirer une passion tendre , constante, sans distraction comme sans nuage : jamais une admiration plus pro- fonde ne s’unit à use tendresse plus vraie. Ces sentimens se montroient dans les re- gards , dans les manières , dans les discours de madame de Buffon, et remplissoient son cœur et sa vie. Chaque nouvel ouvrage de son mari, chaque nouvelle palme ajoutée à sa gloire , étoient pour elle une source de jouissances d’autant plus douces, qu’elles étoient sans retour sur elle-même , sans au- cun mélange de l’orgueil que pouvoit lui inspirer l’honneur de partager la considéra- tion et le nom de M. de Buffon; heureuse du seul plaisir d’aimer et d’admirer ce qu’elle aimoit, son âme étoit fermée à toute vanité personnelle , comme à tout sentiment étran- ger. M. de Buffon n’a conservé d’elle qu’un fils, M. le comte de Buffon, major en se- cond du régiment d’Angoumois, qui porte avec honneur dans une autre carrière un nom à jamais célèbre dans les sciences, dans les lettres et dans la philosophie. M. de Buffon fut long-temps exempt des pertes qu’amène la vieillesse : il conserva également et toute la vigueur des sens et toute celle de l’âme; toujours plein d’ardeur pour le travail, toujours constant dans sa ma- nière de vivre , dans ses délassemens comme dans ses études , il sembloit que l’âge de la force se fût prolongé pour lui au delà des bornes ordinaires. Une maladie douloureuse vint troubler et. accélérer la fin d’une si belle carrière : il lui opposa la patience , eut le courage de s’en distraire par une étude opi- niâtre; mais il ne consentit jamais à s’en délivrer par une opération dangereuse. Le travail, les jouissances de la gloire, le plai- sir de suivre ses projets pour l’agrandisse- ment du Jardin et du Cabinet du Roi, suf- fisoient pour l’attacher à la vie; il ne voulut pas la risquer contre l’espérance d’un soula- gement souvent passager et suivi quelquefois d’infirmités pénibles, qui, lui ôtant une ÉLOGE DE BUFFON î4 partie de ses forces, auroient été pour une âme active plus insupportables que la dou- leur. Il conserva presque jusqu’à ses derniers momens le pouvoir de s’occuper avec intérêt de ses ouvrages et des fonctions de sa place, la liberté entière de son esprit , toute la force de sa raison, et pendant quelques jours seu- lement il cessa d’être l’homme illustre dont le génie et les travaux occupoient l’Europe depuis quarante ans. Les sciences le perdirent le 16 avril 1788. Lorsque de tels hommes disparoissent de la terre , aux premiers éclats d’un enthou- siasme augmenté par les regrets, et aux der- niers cris de l’envie expirante , succède bien- tôt un silence redoutable , pendant lequel se prépare avec lenteur le jugement de la pos- térité. On relit paisiblement, pour l’exami- ner, ce qu’on avoit lu pour l’admirer, le critiquer, ou seulement pour le vain plaisir d’en parler. Des opinions conçues avec plus de réflexion, motivées avec plus de liberté, se répandent peu à peu , se modifient , se corrigent les unes les autres ; et à la fin une voix presque unanime s’élève, et prononce un arrêt que rarement les siècles futurs doi- vent révoquer. Ce jugement sera favorable à M. de Buf- fon; il restera toujours dans la classe si peu nombreuse des philosophes dont une posté- rité reculée lit encore les ouvrages. En gé- néral , elle se rappelle leurs noms; elle s’oc- cupe de leurs découvertes, de leurs opinions : mais c’est dans des ouvrages étrangers qu’elle va les rechercher , parce qu’elles s’y présen- tent débarrassées de tout ce que les idées particulières au siècle, au pays où ils ont vécu, peuvent y avoir mêlé d’obscur, de vague ou d’inutile; rarement le charme du style peut-il compenser ces effets inévita- bles du temps et du progrès des esprits : mais M. de Buffon doit échapper à cette règle commune, et la postérité placera ses ouvrages à côté des dialogues du disciple de Socrate , et des entretiens du philosophe de Tusculum. L’histoire des sciences ne présente que deux hommes qui par la nature de leurs ou- vrages paroissent se rapprocher de M. de Buflon , Aristote et Pline. Tous deux infati- gables comme lui dans le travail, étonnans par l’immensité de leurs connoissances et par celle des plans qu’ils ont conçus et exécutés, tous deux respectés pendant leur vie et ho- norés après leur mort par leurs concitoyens, ont vu leur gloire survivre aux révolutions des opinions et des empires , aux nations qui les ont produits , et même aux langues qu’ils ont employées, et ils semblent par leur exemple promettre à M. de Buffon une gloire non moins durable. Aristote porta sur le mécanisme des opé- rations de l’esprit humain , sur les principes de l’éloquence et de la poésie, le coup d’œil juste et perçant d’un philosophe , dicta au goût et à la raison des lois aux- quelles ils obéissent encore , donna le pre- mier exemple, trop tôt oublié, d’étudier la nature dans la seule vue de la connoitre et de l’observer avec précision comme avec méthode. • Placé dans une nation moins savante, Pline fut plutôt un compilateur de relations qu’un philosophe observateur; mais, comme il avoit embrassé dans son plan tous les travaux des arts et tous les phénomènes de la nature, son ouvrage renferme les mé- moires les plus précieux et les plus étendus que l’antiquité nous ait laissés pour l’his- toire des progrès de l’espèce humaine. Dans un siècle plus éclairé , M. de Buffon a réuni ses propres observations à celles que ses immenses lectures lui ont fournies; son plan, moins étendu que celui de Pline, est exécuté d’une manière plus complète; il pré- sente et discute les résultats qu’ Aristote n’a- voit osé qu’indiquei\ Le philosophe grec n’a mis dans son style qu’une précision méthodique et sévère, et n’a parlé qu’à la raison. Pline , dans un style noble , énergique et grave, laisse échapper des traits d’une ima- gination forte , mais sombre , et d’une phi- losophie souvent profonde, mais presque toujours austère et mélancolique. M. de Buffon, plus varié, plus prodigue d’images, joint la facilité à l’énergie, les grâces à la majesté ; sa philosophie , avec un caractère moins prononcé , est plus vraie et moins affligeante. Aristote semble n’avoir écrit que pour les savans, Pline pour les philosophes, M. de Buffon pour tous les hommes éclairés. Aristote a été souvent égaré par cette vaine métaphysique des mots, vice de la philosophie grecque, dont la supériorité de son esprit ne put entièrement le garantir. La crédulité de Pline a rempli son ou- vrage de fables qui jettent de l’incertitude sur les faits qu’il rapporte , lors même qu’on n’est pas en droit de les reléguer dans la classe des prodiges. On n’a reproché à M. de Buffon que ses hypothèses : ce sont aussi des espèces de fables, mais des fables produites par une imagination active qui a besoin de créer, •: PAR CONDORCET. | et non par une imagination passive qui cède à des impressions étrangères. On admirera toujours dans Aristote le génie de la philosophie ; on étudiera dans I Pline les arts et l’esprit des anciens, on y cherchera ces traits qui frappent l’âme d’un j sentiment triste et profond : mais on lira l M. de Buffon pour s’intéresser comme pour s’instruire; il continuera d’exciter pour les iÔ sciences naturelles un enthousiasme utile, et les hommes lui devront long-temps et les doux plaisirs que procurent à une âme jeune encore les premiers regards jetés sur la nature, et ces consolations qu’éprouve une âme fatiguée des orages de la vie, en reposant sa vue sur l’immensité des êtres paisiblement soumis à des lois éternelles et nécessaires. ÉLOGE DE BUFFON PAR VICQ D’AZYR. M. Yicq d’Azyr ayant été élu par Mes- sieurs de l’Académie Françoise, à la place de M. le comte de Buffon , y vint prendre séance le jeudi ix décembre 1788 , et pro- nonça le discours qui suit ; Messieurs; Dans le nombre de ceux auxquels vous accordez vos suffrages, il en est qui, déjà célèbres par d’immortels écrits , viennent associer leur gloire avec la vôtre; mais il en est aussi qui , à la faveur de l’heureux ac- j cord qui doit régner entre les sciences et les arts , viennent vous demander , au nom des sociétés savantes, dont ils ont l’honneur 1 d’être membres , à se perfectionner près de vous dans le grand art de penser et d’écrire , le premier des beaux-arts, et celui dont ivous êtes les arbitres et les modèles. C’est ainsi, messieurs, c’est sous les aus- pices des corps savans auxquels j’ai l’hon- neur d’appartenir, que je me présente au- jourd’hui parmi vous. L’un de ces corps 1 vous est attaché depuis long-temps par des liens qui sont chers aux lettres ; dépositaire des secrets de la nature , interprète de ses jois , il offre à l’éloquence de grands sujets çt de riches tableaux. Quelque éloignées que paroissent être de vos occupations les autres compagnies 2 qui m’ont reçu dans leur sein, elles s’en rapprochent, en plu- sieurs points , par leurs études. Teut-ètre x. L’Académie royale des Sciences. 2. La Faculté et la Société royale de Médecine de Paris. que les grands écrivains qui se sont illustrés dans l’art que je professe, qui ont contribué, par leurs veilles , à conserver dans toute leur pureté ces langues éloquentes de la Grèce et de l’Italie , dont vos productions ont fait revivre les trésors , qui ont le mieux imité Pline et Celse dans l’élégance de leur lan- gage, peut-être que ces hommes avoient quelques droits à vos récompenses. Animé par leurs exemples, j’ai marché de loin sur leurs traces; j’ai fait de grands efforts, et vous avez couronné mes travaux. Et ce n’est pas moi seul dont les vœux sont aujourd’hui comblés ; que ne puis-je vous exprimer, messieurs, combien la fa- veur que vous m’avez accordée a répandu d’encouragement et de joie parmi les mem- bres et les correspondans nombreux de la compagnie savante dont je suis l’organe ! J’ai vu que, dans les lieux les plus éloignés, que partout où l’on cultive son esprit et sa raison , on connoît le prix de vos suffrages ; et si quelque chose pouvoit ajouter au bon- heur de les avoir réunis , ce seroit celui de voir tant de savans estimables partager votre bienfait et ma reconnoissance ; ce seroit ce concours de tant de félicitations qu’ils m’ont adressées de toutes parts , lorsque vous m’a- vez permis de succéder parmi vous à l’homme illustre que le monde littéraire a perdu. Malheureusement il en est de ceux qui succèdent aux grands hommes, comme de ceux qui en descendent. On voudroit qu’hé- ritiers de leurs privilèges, ils le fussent aussi de leurs talens ; et 011 les rend , pour ainsi dire, responsables de ces pertes que ÉLOGE DE BUFFON iG Ja nature est toujours si lente à réparer. Mais ces reproches qui échappent au senti- ment aigri par la douleur , le silence qui règne dans l’empire des lettres , lorsque la voix des hommes éloquens a cessé de s’y faire entendre, ce vide qu’on ne sauroit combler, sont autant d’hommages offerts au génie. Ajoutons-y les nôtres ; et méritons , par nos respects , que l’on nous pardonne d’être assis à la place du philosophe qui fut une des lumières de son siècle, et l’un des ornemens de sa patrie. La France n’avoit produit aucun ouvrage qu’elle pût opposer aux grandes vues des anciens sur la nature. Buffon naquit , et la France n’eut plus, à cet égard, des regrets à former. On touchoit au milieu du siècle; l’auteur de la Henriade et de Zaïre continuoit de charmer le monde par l’inépuisable fécon- dité de son génie; Montesquieu démèloit les causes physiques et morales qui influent sur les institutions des hommes; le citoyen de Genève commençoit à les étonner par la hardiesse et l’éloquence de sa philosophie; d’Alembert écrivoit cet immortel discours qui sert de frontispice au plus vaste de tous les monumens de la littérature ; il expliquoit la précession des équinoxes, et il créoit un nouveau calcul: Buffon préparoit ses pin- ceaux, et tous ces grands esprits donnoient des espérances qui n’ont point été trompées. Quel grand , quel étonnant spectacle que celui de la nature ! Des astres étincelans et fixes qui répandent au loin la chaleur et la lumière ; des astres errans qui brillent d’un éclat emprunté , et dont les routes sont tracées dans l’espace; des forces opposées d’où naît l’équilibre des mondes; l’élément léger qui se balance autour de la terre; les eaux courantes qui la dégradent et la sil- lonnent; les eaux tranquilles, dont le limon qui la féconde forme les plaines; tout ce qui vit sur sa surface, et tout ce qu’elle caché en son sein; l’homme lui-même dont l’au- dace a tout entrepris, dont l’intelligence a tout embrassé , dont l’industrie a mesuré le temps et l’espace; la chaîne éternelle des causes ; la série mobile des effets : tout est compris dans ce merveilleux ensemble. Ce sont ces grands objets que M. de Buffon a traités dans ses écrits. Historien , orateur, peintre et poète , il a pris tous les tons et mérité toutes les palmes de l’éloquence. Ses vues sont hardies , ses plans sont bien con- çus, ses tableaux sont magnifiques. Tl instruit souvent, il intéresse toujours; quelquefois il enchante, il ravit; il force l’admiration, lors même que la raison lui résiste. On re trouve dans ses erreurs l’empreinte de so génie; et leur tableau prouveroit seul qu celui qui les commit fut un grand homme. Lorsqu’on jette un coup d’œil général su les ouvrages de M. de Buffon , on ne sait c I qu’on doit le plus admirer dans une entre j prise si étendue, ou de la vigueur de so esprit, qui ne se fatigua jamais, ou de 1 perfection soutenue de son travail, qui n s’est point démentie , ou de la variété d son savoir, que chaque jour il augmentai > par l’étude. Il excella surtout dans l’art d généraliser ses idées et d’enchaîner les ob servations. Souvent , après avoir recueilli de faits jusqu’alors isolés et stériles , il s’élève e il arrive aux résultats les plus inattendus. E le suivant , les rapports naissent de toute j parts; jamais on ne sut donner à des conjec tures plus de vraisemblance, et à des doute l’apparence d’une impartialité plus parfaite Voyez avec quel art, lorsqu’il établit un opinion , les probabilités les plus foibles som placées les premières; à mesure qu’il avance il en augmente si rapidement le nombre et la force, que le lecteur subjugué se refuse toute réflexion qui porteroit atteinte à son plaisir. Pour éclairer les objets, M. de But fon emploie, suivant le besoin, deux ma; nières : dans l’une, un jour doux, égal, s: répand sur toute la surface; dans l'autre une lumière vive, éblouissante, n’en frapp qu’un seul point. Personne ne voila mieu;i ces vérités délicates, qui ne veulent qu’êtr indiquées aux hommes. Et, dans son style quel accord entre l’expression et la pensée i Dans l’exposition des faits, sa phrase n’es qu’élégante ; dans les préfaces de ses traduc l tions, il ne montre qu’un écrivain correct et sage. Lorsqu’il applique le calcul à la mo raie , il se contente de se rendre intelligibl à tous. S’il décrit une expérience, il est préci i et clair; on voit l’objet dont il parle; et pour des yeux exercés , c’est le trait d’ui ! grand artiste : mais on s’aperçoit sans pein j que ce sont les sujets élevés qu’il cherche el qu’il préfère. C’est en les traitant qu’il dé ! ploie toutes ses forces , et que son styl montre toute la richesse de son talent. Dan ces tableaux , où l’imagination se repose su ; un merveilleux réel , comme Manilius e Pope, il peint pour s’instruire; comme eux il décrit ces grands phénomènes, qui son plus imposans que les mensonges de la fable comme eux, il attend le moment de l’inspi ration pour produire; et comme eux il es poète. En lui, la clarté, cette qualité pre mière des écrivains, n’est point altérée pa: PAR TIC Q D’Azm l’abondance. Les idées principales, distri- & buées avec goût, forment les appuis du dis- )i cours ; il a soin que chaque mot convienne il à l’harmonie autant qu’à la pensée ; il ne se sert, pour désigner les choses communes, il que de ces termes généraux, qui ont , avec ce ci qui les entoure , des liaisons étendues. A la e beauté du coloris il joint la vigueur du des- )i sin; à la force s’allie la noblesse; l’élégance li de son laugage est continue; son style est if toujours élevé, souvent sublime, imposant lf et majestueux; il charme l’oreille, il séduit l’imagination, il occupe toutes les facultés lt de l’esprit; et, pour produire ces effets, il i) n’a besoin ni de la sensibilité qui émeut et « qui touche, ni de la véhémence qui entraîne Pi et qui laisse dans l’étonnement celui quelle fol a frappé. Que l’on étudie ce grand art dans c| le discours où M. de Buffon en a tracé les c| règles ; on y verra partout l’auteur se ren- jf daut un compte exact de ses efforts, réflé- ejj chissant profondément sur ses moyens , et icj dictant des lois auxquelles il n’a jamais man- nl qué d’obéir. Lorsqu’il vous disoit, messieurs, e, que les beautés du style sont les droits les elj plus sûrs que l’on puisse avoir à l’admiration à de la postérité ; lorsqu’il vous exposoit com- ® ment un écrivain , en s’élevant par la con- f | templation à des vérités sublimes , peutéta- î- biir sur des fondemens inébranlables des «| monumens immortels, il portoit en lui le sen- 8ij timent de sa destinée; et c’étoit alors une ?i| prédiction qui fut bientôt accomplie. u| Je n’aurois jamais osé, messieurs, parler ï<| ici de l’élocution et du style, si, en essayant îi d’apprécier M. de Buffon sous ce rapport, il je n’avois été conduit par M. de Buffon lui- st même. C’est en lisant ses ouvrages que l’on I éprouve toute la puissance du talent qui les et a produits et de l’art qui les a formés. Je 0 sens mieux que personne combien il est dif- 1 ficiie de célébrer dignement tant de dons us rassemblés ; et lors même que cet éloge me i,l ramène aux objets les plus familiers de mes m travaux, j’ai lieu de douter encore que j’aie ne rempli votre attente. Mais les ouvrages de cl M. de Buffon sont si répandus , et l’on s’est é- tant occupé de la nature en l’ étudiant dans |£ ses écrits, que pour donner de ce grand Mj homme l’idée que j’en ai conçue, je n’ai pas ur! craint, messieurs, de vous entre tenir, aussi et des plus profonds objets de ses méditations h et de ses travaux. utj Avant de parler de l’homme et des ani- Ifi maux, M. de Buffon devoit décrire la terre ®'. qu’ils habitent, et qui est leur domaine st| commun; mais la théorie de ce globe lui e-| parut tenir au système entier de l’univers ; Buffoh. T. 11 et différens phénomènes , tels que l’augmen- tation successive des glaces vers les pôles , et la découverte des ossemens des grands animaux dans le Nord, annonçant qu’il avoit existé sur cette partie de notre planète une autre température , M. de Buffon chercha , sans la trouver, la solution de cette grande énigme dans la suite des faits connus. Libre 4 alors, son imagination féconde osa suppléer à ce que les travaux des hommes n’avoient pu découvrir. Il dit avec Hésiode : Yous con- noîtrez quand la terre commença d’être , et comment elle enfanta les hautes montagnes. Il dit avec Lucrèce : J’enseignerai avec quels élémens la nature produit, accroît et nourrit les animaux; et, se plaçant à l’origine des choses : un astre, ajouta-t-il, a frappé le so- leil ; il en a fait jaillir un torrent de matière embrasée , dont les parties , condensées in- sensiblement par le froid, ont formé les planètes. Sur le globe que nous habitons , les molécules vivantes sê sont composées de l’union de la matière inerte avec l’élément du feu; les régions des pôles, où le refroi- dissement a commencé, ont été, dans le principe , la patrie des plus grands animaux. Mais déjà la flamme de la vie s’y est éteinte; et la terre se dépouillant par degrés de sa verdure, finira par n’être plus qu’un vaste tombeau. On trouve dans ces fictions brillantes la source de tous les systèmes que M. de Buf- fon a formés. Mais, pour savoir jusqu’à quel point il tenoit à ces illusions de l’esprit, qu’on le suive dans les routes où il s’engage. Ici , plein de confiance dans ses explications, il rappelle tout à des lois que son imagina- tion a dictées. Là, plus î-éservé, il juge les systèmes de Winston et de Leibnitz, comme il convient au traducteur de Newton; et la sévérité de ses principes étonne ceux qui - savent combien est grande ailleurs la har- diesse de ses suppositions. Est-il blessé par la satire? il reprend ces théories qu’il avoit presque abandonnées ; il les accommode aux découvertes qui ont changé la face de la physique; et , perfectionnées , elles excitent de nouveau les applaudissemens et l’admira- tion que des critiques maladroits avoient projeté de lui ravir. Plus calme ailleurs , il convient que ses hypothèses sont dénuées de preuves; et il semble se justifier plutôt que s’applaudir de les avoir imaginées. Mainte- nant son art est connu, et sop secret est dé- voilé. Ce grand homme n’a rien négligé de ce qui pouvoit attirer sur lui l’attention gé- nérale, qui éloit l’objet de tous ses travaux. Il a vou lu lier? par une chaîne commune i8 ÉLOGE DE BUFFON toutes les parties du système de la nature ; il n’a point pensé que , dans une si longue carrière , le seul langage de la raison pût se faire entendre à tous ; et , cherchant à plaire pour instruire, il a mêlé quelquefois les vé- rités aux fables , et plus souvent quelques fictions aux vérités. Dans les discours dont je dois rassembler ici les principales idées, les problèmes les plus intéressans sont proposés et résolus. On y cherche, parmi les lieux les plus élevés du globe, quel fut le berceau du genre hu- main; on y peint les premiers peuples s’en- tourant d’animaux esclaves ; des colonies nombreuses suivant la direction et les pentes des montagnes, qui leur servent d’échelons pour descendre au loin dans les plaines , et la terre se couvrant, avec le temps, de leur postérité. On y demande s’il y a des hommes de plusieurs espèces; l’on y fait voir que, de- puis les zones froides, que le Lapon et î’Eskimau partagent avec les phoques et les ours blancs , jusqu’aux climats que disputent à l’Africain le lion et la panthère , la grande cause qui modifie les êtres est la chaleur. L’on y démontre que ce sont ses variétés qui produisent les nuances de la couleur et les différences de la stature des divers habiîans du globe , et que nul caractère constant n’é- tablit entre eux des différences déterminées. D’un pôle à l’autre , les hommes ne forment donc qu’une seule espèce, ils ne composent qu’une même famille. Ainsi, c’est aux natu- ralistes qu’on doit les preuves physiques de cette vérité morale, que l’ignorance et la tyrannie ont si souvent méconnue, et que, depuis si long-temps, les Européens outra- gent, lorsqu’ils achètent leurs frères, pour les soumettre, sans relâche, à un travail sans salaire, pour les. mêler à leurs troupeaux, et s’eu former une propriété, dans laquelle il n’y a de légitime que la haine vouée par les esclaves à leurs oppresseurs, et les impré- cations adressées , par ces malheureux , au ciel , contre tant de barbarie et d’impunité. On avait tant écrit sur les sens, que la matière paroissoit épuisée; mais on n’avoit point indiqué l’ordre de leur prééminence dans les diverses classes d’animaux. C’est ce que M. de Buffon a fait; et considérant que les rapports des sensations dominantes doi- vent être les mêmes que ceux des organes qui en sont le foyer, il en a conclu que l’homme, instruit surtout par le toucher, qui est uu sens profond, doit être attentif, sé- rieux et réfléchi ; que le quadrupède, auquel l’odorat et le goût commandent, doit avoir des appétits véhémens et grossiers; tandis qu l’oiseau , que l’œil et l’oreille conduisent aura des sensations vives, légères, précipi tées comme son vol , et étendues comme 1, sphère où il se meut en parcourant les airs. En parlant de l’éducation , M. de Buffoi prouve que, dans toutes les classes d’ani maux, c’est par les soins assidus des mère que s’étendent les facultés des êtres sensi blés; que c’est par le séjour que les petit font près d’elles, que se perfectionne leu jugement et que se développe leur industrie de sorte que les plus imparfaits de tous son.'! ceux par qui ne fut jamais pressé le sein qu les porta , et que le premier est l’homm qui, si long-temps foible, doit à celle don il a reçu le jour tant de caresses , tant d’in nocens plaisirs, tant de douces paroles, tan d’idées et de raisonnemens , tant d’expé riences et de savoir ; que , sans cette pre mière instruction qui forme l’esprit , ; demeureroit peut-être muet et stupide parm les animaux auxquels il devoit commander. Les idées morales sont toutes appuyées su 2lt ph des vérités physiques; et, comme celles -c résultent de l’observation et de l’ expérience les premières naissent de la réflexion et d la philosophie. M. de Buffon , en les mêlan avec art les unes aux autres , a su tout ani mer et tout embellir. Il en a fait surtout 1 plus ingénieux usage pour combattre le maux que répand parmi les hommes la peu de mourir. Tantôt , s’adressant aux personne les plus timides, il leur dit que le corp énervé ne peut éprouver de vives souffrance au moment de sa dissolution. Tantôt , voit lant convaincre les lecteurs les plus éclairés il leur montre dans le désordre apparent d la destruction un des effets de la cause qi conserve et qui régénère; il leur fait re marquer que le sentiment de l’existence n forme point en nous une trame continue que ce fil se rompt chaque jour par 1 sommeil , et que ces lacunes , dont personn: ne s’effraie, appartiennent toutes à la mort Tantôt, parlant aux vieillards, il leur an nonce que le plus âgé d’entre eux, s’il joui d’une bonne sauté , conserve l’espérance lé gitime de trois années de vie; que la mor se ralentit dans sa marche , à mesure qu’ell s’avance, et que c’est encore une raiso; pour vivre, que d’avoir long-temps vécu. Les calculs que M. de Buffon a publié IRd sur ce sujet important, ne se bornent poiu à répandre des consolations; on en tire eri eore des conséquences utiles à l’administra tien des peuples. Il prouve que les grande villes sont des abîmes où l’espèce humain Condül; Éldéi Sdét I «ii Slltlcs s Ira pii, ■Un «ne COüQoijf 14 ! P j «Uom, K i5 PAR YICQ s’engloutit. On y Voit que les années les moins fertiles en subsistance sont aussi les moins fécondes en hommes. De nombreux résultats y montrent que le corps politique languit lorsqu’on l’opprime, qu’il se fatigue et s’épuise lorsqu’on l’irrite; qu’il dépérit faute de chaleur ou d’aliment, et qu’il ne jouit de toutes ses forces qu’au sein de l’a- bondance et de la liberté. M. de Buffon est donc le premier qui ait uni la géographie à l’histoire naturelle, et qui ait appliqué l’histoire naturelle à la philosophie ; le premier qui ait distribué les quadrupèdes par zones , qui les ait com- parés entre eux dans les deux mondes, et qui leur ait assigné le rang qu’ils doivent tenir à raison de leur industrie. Il est le premier qui ait dévoilé les causes de la dé- génération des animaux , savoir : le change- ment de climats, d’alimens et de mœurs,' c’est-à-dire l’éloignement de la patrie et la perte de la liberté. Il est le premier qui ait expliqué comment les peuples des deux continens se sont confondus , qui ait réuni dans un tableau toutes les variétés de notre espèce, et qui, dans l’histoire de l’homme, ait fait connoître, comme un caractère que l’homme seul possède, cette flexibilité d’or- ganes qui se prête à toutes les températures, et qui donne le pouvoir de vivre et de vieillir dans tous les climats. Parmi tant d’idées exactes et de vues neuves, comment ne reconnoîtroit- qn pas une raison forte que l’imagination n’aban- donne jamais , et qui, soit qu’elle s’occupe s Sa discuter, à diviser ou à conclure, mêlant |f jdes images aux abstractions et des emblèmes U aux vérités, ne laisse rien sans liaisons, sans I couleur ou sans vie, peint ce que les autres jj ont décrit, substitue des tableaux ornés à e des détails arides, des théories brillantes à |de vaines suppositions, crée une science E( nouvelle, et force tous les esprits à méditer rtpur les objets de son étude, et à partager n ses travaux et ses plaisirs? ujl Dans le nombre des critiques qui s'élevè- rent contre la première partie de l’Histoire (jr paîurelle de M. de Buffon, M. l’abbé' de dondiilac, le plus redoutable de ses adver- bes , fixa tous les regards. Son esprit jouis- it de toute sa force dans la dispute. Celui M. de Buffon, au contraire, y étoit en elque sorte étranger. Veut-on les bien gut-onnoître? que l’on jette les yeux sur ce trafiu ils ont dit des sensations. Ici les deux hilosophes partent du même point; c’est tint*11 ^omme que chacun d’eux veut animer, ’un, toujours méthodique, commence par D’ÀZYR. ig ne donner à sa statue qu’un seul sens à la fois, Toujours abondant , l’autre ne refuse à la sienne aucun des dons qu’elle auroit pu tenir de la nature. C’est l'odorat, le plus obtus de tous les organes , que le premier met d’abord en usage. Déjà le second a ou- vert les yeux de sa statue à la lumière, et ce qu’il y a de plus brillant a frappé ses re- gards. M. l’abbé de Condillac fait une ana- lyse complète des impressions qu’il commu- nique. M. de Buffon, au contraire, a dis- paru; ce n’est plus lui, c’est l’homme qu’il a créé, qui voit, qui entend et qui parle. La statue de M. l’abbé de Condillac, calme, tranquille, ne s’étonne de rien, parce que tout est prévu, tout est expliqué par son auteur. Il n’en est pas de même de celle de M. de Buffon; tout l’inquiète, parce qu’a- Jjandonnée à elle-même, elle est seule dans l’univers; elle se meut, elle se fatigue, elle s’endort, son réveil est une seconde naissance; et, comme le trouble de ses esprits fait une partie de son charme, il doit excuser une partie de ses erreurs. Plus l’homme de M. l'abbé de Condillac avance dans la car- rière de son éducation, plus il s’éclaire ; il parvient enfin à généraliser ses idées , et à découvrir en lui-même les causes de sa dé- pendance et les sources de sa liberté. Dans la statue de M. de Buffon, ce n’est pas la raison qui se perfectionne, c’est le sentiment qui s’exalte; elle s’empresse de jouir; c’est Gaîatée qui s’anime sous le ciseau de Pyg- malion , et l’amour achève son existence. Dans ces productions de deux de nos grands hommes, je ne vois rien, de semblable. Dans l’une, on admire une poésie sublime; dans l’autre, une philosophie profonde. Pourquoi se traiîoient-ils en rivaux, puisqu’ils al- laient par des chemins différens à la gloire , et que tous les deux étoient également sûrs d’y arriver ? Aux discours sur la nature des animaux succéda leur description. Aucune production semblable n’avoit encore attiré les regards des hommes. Swammerdam avoit écrit sur les insectes. Occupé des mêmes travaux , Réaumur avoit donné à l’histoire naturelle le premier asile qu’elle ait eu parmi nous , et ses ouvrages, quoique diffus, étoient re- cherchés. Ce fut alors que M. de Buffon se montra. Fort de la conscience de son talent , il commanda l’attention. I! s’attacha d’abord à détruire le merveilleux de la prévoyance attribuée aux insectes; il rappela les hommes à l’étude de leurs propres organes; et, dé- daignant toute méthode, ce fut à grands traits qu’il dessina ses tableaux. Autour de y % O ÉLOGE DE BUFFON l’homme , à des distances que le savoir et le goût ont mesurées, il plaça les animaux dont l’homme a fait la conquête; ceux qui le servent près de ses foyers , ou dans les travaux champêtres; ceux qu’il a subjugués et qui refusent de le servir; ceux qui le suivent , le caressent , et l’aiment ; ceux qui le suivent et le caressent sans l’aimer ; ceux qu’il repousse par la ruse ou qu’il at- taque à force ouverte; et les tribus nom- breuses d’animaux qui , bondissant dans les taillis, sous les futaies, sur la cime des montagnes, ou au sommet des rochers, se nourrissent de feuilles et d’herbes ; et les tribus redoutables de ceux qui ne vivent que de meurtre et de carnage. A ces grou- pes de quadrupèdes il opposa des groupes d’oiseaux. Chacun de ces êtres lui offrit une physionomie , et reçut de lui un caractère, il avoit peint le ciel, la terre, l’homme, et ses âges, et ses jeux, et ses malheurs, et ses plaisirs ; il avoit assigné aux divers animaux toutes les nuances des passions. Il avoit parlé de tout, et tout parloit de lui. Ainsi quarante années de vie littéraire furent pour M. de Buffon quarante années de gloire ; ainsi le bruit de tant d’applaudissemens étouffa les cris aigus de l’envie, qui s’effor- çoit d’arrêter son triomphe; ainsi le dix- huitième siècle rendit à Buffon vivant les honneurs de l’immortalité. M. de Buffon a décrit plus de quatre cents espèces d’animaux ; et , dans un si long tra- vail, sa plume ne s’est point fatiguée. L’ex- position de la structure et rémunération des propriétés , par les places qu’elles occu- pent, servent à reposer la vue , et font res- sortir les autres parties de la composition. Les différences des habitudes, des appétits, des mœurs et du climat, offrent des con- trastes, dont le jeu produit des effets bril- Jans. Des épisodes heureux y répandent de la variété , et diverses moralités y mêlent , comme dans des apologues, des leçons utiles. S'il falloit prouver ce que j’avance, qu’au- rois-je, messieurs, à faire de plus que de retracer des lectures qui ont été la source de vos plaisirs ? Vous n’avez point oublié avec quelle noblesse, rival de Virgile, M. de Buf- fon a peint le coursier fougueux, s’animant au bruit des armes, et partageant avec l’hom- me les fatigues de la guerre et la gloire des combats; avec quelle vigueur il a dessiné le tigre , qui , rassasié de chair , est encore altéré de sang. Comme on est frappé de l’opposition de ce caractère féroce avec la douceur de la brebis , avec la docilité du chameau , de la vigogne et du renne , aux- quels la nature a tout donné pour leurs maî- tres; avec la patience du bœuf, qui est le ture ! Qui n’a pas remarqué , parmi les oi- seaux dont M. de Buffon a décrit les mœurs, le courage franc du faucon , la cruauté lâche du vautour, la sensibilité du serin, la pétu- lance du moineau, la familiarité du troglo- dyte, dont le ramage et la gaieté bravent la rigueur de nos hivers, et les douces habi- tudes de la colombe, qui sait aimer sanr.l partage , et les combats innocens des fau-ij vettes, qui sont l’emblème de l’amour léger ij Quelle variété, quelle richesse dans les cou leurs avec lesquelles M. de Buffon a pein la robe du zèbre , la fourrure du léopard la blancheur du cygne, et l’éclatant plumag de i’oiseau-mouche ! Comme on s’intéress à la vue des procédés industrieux de l’élé I pliant et du castor ! Que de majesté dans le épisodes où M. de Buffon compare les terre! an (Oit» nu oc ot hmilooc ri ne docoph- r î’ A rom/J Ie: > anciennes et brûlées des déserts de l’Arabie; où tout a cessé de vivre , avec les plaint fangeuses du nouveau continent, qui foui; millent d’insectes, où se traînent d’énorme reptiles , qui sont couvertes d’oiseaux ravi seurs , et où la vie semble naître du sein dé eaux ? Quoi de plus moral enfin que h! réflexions que ces beaux sujets ont dictées C’est, dit-ii (à l’ article de l’éléphant), paru les êtres les plus intelligens et les plus doi ; que la nature a choisi le roi des animau Mais je m’arrête. En vain j’aecumulerois les exemples ; entouré des richesses que génie de M. de Buffon a rassemblées, il seroit également impossible de les faire coi noître, et de les rappeler toutes dans ce d cours. J’ai voulu seulement, pour paroît meilleur, emprunter un instant son langai J’ai voulu graver sur sa tombe, en ce jo .de deuil, quelques-unes de ses pensées ;j voulu , messieurs , consacrer ici ma vénér tion pour sa mémoire, et vous montrer qu moins j’ai médité long-temps sur ses écrits j gfaude Lorsque M. de Buffon avoit conçu le pi jet de son ouvrage , il s’étoit flatté qi fui seroit possible de l’achever dans s entier. Mais le temps lui manqua; il vit q trouvé la chaîne de ses travaux alloit être rompt il voulut au moins en former le dern anneau, l’attacher et le joindre au premi Les minéraux , à l’étude desquels il a vc la fin de sa carrièrre, vus sous tous rapports, sont en opposition avec les êî animés , qui ont été les sujets de ses p miers tableaux. De toutes parts, dans premier règne, l’existence se renouvelle se propage; tout y est vie, mouvement V k tc"ïl FAR YiCQ D’AZYR. a* sensibilité. ‘ Ici, c’est au contraire l’empire de la destruction : la terre, observée dans .l’épaisseur des couches qui la composent, est jonchée dossemens; les générations passées y sont confondues; les générations a venir s’y engloutiront encore. Nous-mêmes en ferons partie. Les marbres des palais, les murs des maisons, le soi qui nous soutient, le vêtement qui nous couvre, l’aliment qui nous nourrit , tout ce qui sert à l’homme est le produit et l’image de la mort. Ce son! ces grands contrastes que M. de Ruffon aimoiî. à saisir; et, lorsque abandon- nant à l’un de ses amis, qui s’est montré digne de cette association honorable, mais qui déjà n’est plus, le soin de finir son traité des oiseaux, il se îivroit à l’examen des corps que la terre cache en son sein , il y cherchoit, on n’en peu! douter, de nou- veaux sujets à peindre ; il voulait considé- rer et suivre les continuelles métamorphoses de la matière qui vit dans les organes, et ui meurt hors des limites de leur énergie ; vouloit dessiner ces grands laboratoires ou se pif jtrent la chaux , la craie, la soude et la magnésie au fond du vaste océan; il vouloit parler de la nature active, j’ai pres- ue dit des sympathies, de ce métal ami e l’homme , sans lequel nos vaisseaux vo- gueroieut au hasard sur les mers; il vouloit décrire l’éclat et la limpidité des pierres précieuses, échappées à ses pinceaux; il vouloit montrer i’or suspendu dans les fleuves, dispersé dans les sables, ou caché dans les mines, et se dérobant partout à la cupidité qui le poursuit; il vouloit adresser un discours éloquent aux nations sur la nécessité de chercher les richesses , pon dans des cavernes profondes , mais sur tant de plaines incultes , qui , livrées an aboureur, produiroient à jamais l’abon- ' lance et la santé. K Quelquefois M. de Buffon montre dans | on talent une confiance qui est l’âme des j fraudes entreprises. Voilà , dit-il , ce que ]! 'apercevais par la duc de l’esprit ; et il ne u rompe point , car cette vue seule lui a dé- couvert des rapports que d’autres n’ont (jijrouvés qu’à force de veilies et de travaux, ut il «voit jugé que le diamant étoit inflam- nitiable, parce qu’il y avoit reconnu, comme ii( ans les huiles, une réfraction puissante, i le qu’il a conclu de ses remarques sur l’é- ; fendue des glaces australes, Cook l’a con- 3tr rmé. Lorsqu’il comparoit la respiration à prhetion d’un feu toujours agissant; lorsqu’il is listinguoit deux espèces de chaleur , l’une Ile marneuse, et l’autre obscure; lorsque, mé- at content du phlogistique de Stalil, il en for- mait un à sa manière ; lorsqu’il créoit un soufre; lorsque, pour expliquer la calcina- tion et la réduction des métaux, il avoit recours à un agent composé de feu , d’air et de lumière; dans ces différentes théories, il faisoit tout ce qu’on peut attendre de l’es- prit ; ildevançoit l observa lion ; il arrivoit an but sans avoir passé par les sentiers pénibles de l’expérience ; c’est qu’il l’avoit vu d’en haut, et qu’il étoit descendu pour l’atteindre, tandis que d’autres ont à gravir long-temps pour y arriver. Celui qui a terminé un long ouvrage sa repose en y songeant. Ce fut en réfléchis- sant ainsi sur le grand édifice qui étoit sorts de ses mains, que M. de Buffon projeta d’en resserrer l’étendue dans des sommaires, où ses observations, rapprochées de ses principes, et mises eu action, offriroient toute sa théorie dans un mouvant, tableau. A cette vue il en joignit une autre, L’his- toire de la nature lui parut devoir com- prendre, non seulement tous les corps, mais aussi toutes les durées et tous les es- paces. Far ce qui reste, il espéra qifil join- droit le présent au passé , et que de ces deux points il se porteroit sûrement vers l’a- venir. Il réduisit à cinq grands faits tous les phénomènes du mouvement et de la chaleur du globe; de toutes les substances miné- rales, il forma cinq monumens principaux; et, présent à tout, marchant d’une de ces bases vers l’autre, calculant leur ancien- neté, mesurant leurs intervalles, il assigna aux révolutions leurs périodes, au monde ses âges , à la nature ses époques. Qu’il est grand et vas le ce projet de mon- trer les traces des siècles empreintes depuis le sommet des plus hautes élévations du globe jusqu’au fond des abîmes , soit dans ces massifs que le temps a respectés, soit dans ces couches immenses, formées par les débris des animaux muets et voraces , qui pullulent si abondamment dans les mers, soit dans ces productions dont les eaux ont couvert les montagnes, soit dans ces dé- pouilles antiques de 1 éléphant et de l’hip- popotame que l’on trouve aujourd’hui sous des terres glacées, soit dans ces excavations profondes, où, parmi tant de métamor- phoses, tant décompositions ébauchées, et tant de formes régulières , on prend l’idée de ce que peuvent le temps et le mouvement, et de ce que sont l’éternité et la toute-puis- sance ! Mille objections ont été faites contre cette composition hardie. Mais que leurs ÉLOGE DE BUFFON auteurs disent si, lorsqu’ils affectent, par une critique aisée , d’en blâmer les détails , ils ne sont pas forcés à en admirer l’ensem- ble; si jamais des sujets plus grands ont fixé leur attention ; si quelque part le génie a plus d’audace et d’abondance. J’oserai pour- tant faire un reproche à M. de Buffon. Lorsqu’il peint la lune déjà refroidie , lors- qu’il menace la terre de la perte de sa cha- leur et de la destruction de ses liabitans; je demande si cette image lugubre et som- bre, si cette fin de tout souvenir, de toute pensée , si cet éternel silence n’offrent pas quelque chose d’effrayant à l’esprit ? Je de- mande si le désir des succès et des triom- phes, si le dévouement à l’étude, si le zèle du patriotisme, si la vertu même, qui s’ap- puie si souvent sur l’amour de la gloire, si toutes ces passions, dont les vœux sont sans limites, n’ont pas besoin d’un avenir sans bornes? Croyons plutôt que les grands noms ne périront jamais; et quels que soient nos plans, ne touchons point aux illusions de l’espérance, sans lesquelles que resteroit- il , hélas ! à la triste humanité ? Pendant que M. de Buffon voyoit chaque jour à Paris sa réputation s’accroître , un savant méditoit à Upsal le projet d’une ré- volution dans l’étude de la nature. Ce savant avoit toutes les qualités nécessaires au succès des grands travaux. ïl dévoua tous ses mo- mens à l’observation; l’examen de vingt mille individus suffit à peine à son activité. Il se servit, pour les classer, de méthodes qu’il avoit inventées; pour les décrire, d’une langue qui étoit son ouvrage; pour les nommer, de mots qu’il avoit fait revivre, ou que lui-même avoit formés. Ses termes furent jugés bizarres; on trouva que son idiome étoit rude; mais il étonna parla précision de ses phrases; il rangea tous les êtres sous une loi nouvelle. Plein d’enthou- siasme , il sembïôit qu’il eût un culte à éta- blir, et qu’il en fût le prophète. La pre- mière de ses formules fut à Dieu, qu’il salua comme le père de la nature. Les sui- vantes sont aux élémens , à l’homme , aux autres êtres ; et chacune d’elles est une énigme d’un grand sens, pour qui veut l’approfon- dir. Avec tant de savoir et de caractère, Linné s’empara de l’enseignement dans les écoles ; il eut les suÜcès d’un grand profes- seur; M. de Buffou a eu ceux d’un 'grand philosophe. Plus généreux, Linné auroit trouvé, dans les ouvrages de M. de Buffon, des passages dignes d’être substitués à ceux de Sénèque, dont il a décoré les frontispices de ses divisions. Plus juste , M. de Buffon fs, le for Plia plus m j as ws éc ® du rien y soit approfondi ; aussi l’on en ti souvent des citations, et jamais des pri cipes. Les erreurs que l’on y trouve ne sol point à lui; il ne les adopte point, il raconte ; mais les véritables beautés , cj sont celles du style, lui appartiennent, sont au reste moins les mœurs des anima | que celles des Romains qu’il expose. Y» j ^ tueux ami de Titus , mais effrayé par auroit profité des recherches de ce savant laborieux./Us vécurent ennemis, parce que chacun d’eux regarda l’autre comme pouvant porter quelque atteinte à sa gloire. Aujour- d’hui que l’on voit combien ces craintes étoient vaines , qu’il me soit permis , à moi, leur admirateur et leur panégyriste, de rapprocher, de réconcilier ici leurs noms, sûr qu’ils ne me désavoueroient pas eux-mê- mes, s’ils pouvoient être rendus au siècle qui les regrette et qu’ils ont tant illustré. Pour trouver des modèles auxquels M. de Buffon ressemble, c’est parmi les anciens qu’il faut les chercher. Piaton, Aristote, et Pline , voilà les hommes • auxquels il faut qu’on le compare. Lorsqu’il traite des facul- tés de l’aine, de la vie, de ses élémens, ef des moules qui les forment, brillant, élevé. ? mais subtil , c’est Platon dissertant à l’Aca- | ,,1! démie; lorsqu’il recherche quels sont le phénomènes des animaux, fécond, mai exact , c’est Aristote enseignant au Lycée lorsqu’on lit ses discours , c’est Pline écri vaut ses éloquens préambules. Aristote parlé des animaux avec l’élégante simplicité que les Grecs ont portée dans toutes le productions de l’esprit. Sa vue ne se born point à la surface, elle pénétra dans l’inté rieur, où il examina les organes. Aussi ne sont point les individus, mais les pro priétés générales des êtres qu’il considère Ses nombreuses observations ne se montrer point comme des détails; elles lui serv toujours de preuve ou d’exemple. Ses carat tères sont évidens , ses divisions sont nati relies, son style est serré , son discours e: plein; avant lui, nulle règle n’étoit tracée après lui , nulle méthode n’a surpassé sienne ; on a fait plus , mais on n’a pas fa mieux; et le précepteur d’Alexandre sei long-temps encore celui de la postérité. Plu suivit un autre plan, et mérita d’autr louanges; comme tous les orateurs et 1 poètes latins, il rechercha les ornemens la pompe dans le discours. Ses écrits col tiennent , non l’examen , mais le récit de que l’on savoit de son temps. Il traite toutes les substances, il révèle tous les s crets des arts ; tout y est indiqué , sans q elres, raide rantniaii «le 'pb, tas 3% '■S 11 'N PAR VICQ DAZYR, a3 règnes de Tibère et de Néron, une teinte de mélancolie se mêle à ses tableaux; chacun de ses livres reproche à la nature le malheur de l’homme, et partout il respire, comme Tacite, la crainte et l’horreur des tyrans. M. de Buffon, qui a vécu dans des temps calmes , regarde au contraire la vie comme un bienfait; il applique aussi les vérités physiques à la morale, mais c’est toujours pour consoler; il est orné comme Pline; mais, comme Aristote, il recherche, il in- tente; souvent il va de l’effet à la cause, ce fui est la marche de la science , et il place 'homme au centre de ses descriptions. Il aarle d’Aristote avec, respect, de Platon ivec étonnement, de Pline avec éloge ; les noindres passages d’Aristote lui paroissent lignes de son attention ; il en examine le sens, 1 les discute, il s’honore d’en être i’inter- irète et le commentateur. Il traite Pline ivec moins de ménagement; il le critique tvec moins d’égards. Platon, Aristote, et Suffon , n’ont point , comme Pline , recueilli bs opinions des autres; ils ont répandu les leurs. Platon et Ajistote ont imaginé, ! tomme le philosophe françois, sur les mou- ;mens des cieux et sur la reproduction des res, des systèmes qui ont dominé long- mps. Ceux de M. de Buffon ont fait moins e fortune, parce qu’ils ont paru dans un ècle plus éclairé. Si l’on comparp Aristote Pline , on voit combien la Grèce étoit lus savante que l’Italie : en lisant M. de juffon, l’on apprend tout ce que les con- pissanees physiques ont fait de progrès Ami nous; ils ont tous excellé dans l’art p penser et dans l’art d’écrire. Les Athé- ens écoutoient Platon avec délices; Aris- 1 le dicta des lois à tout l’empire des lettres ; val de Quintilien, Pline écrivit sur la “ammaire et sur les talens de l’orateur. fj. de Buffon vous offrit, messieurs, à la f s le précepte et l’exemple. On cherchera ( ns ses écrits les richesses de notre Lan- 10 *e , comme nous étudions dans Pline celles 1 la langue des Romains. Les savans, les mfesseurs étudient Aristote; les philo - Sf|>hes, les théologiens lisent Platon ; les l1 iteurs les historiens, les curieux, les fis du monde préfèrent Pline. La lecture 111 ! écrits de M. de Buffon convient à tous; 501 11, il vaut mieux que Pline; avec M. Dau- "iiton, son illustre compétiteur , il a été *1 s loin qu’ Aristote. Heureux accord de dix âmes dont l'union a fait la force, et “alit les trésors étoient communs ; rare as- ^ iblage de toutes les qualités requises pour observer, décrire, et peindre la nature; phénomène honorable aux lettres , dont les siècles passés n’offrent point d’exemple, et dont il faut que les hommes gardent long- temps le souvenir. S’il m’éloit permis de suivre ici M. de Buffon dans la carrière des sciences phy- siques, nous l’y retrouverions avec cet amour du grand qui le distingue. Pour estimer la force et la durée du bois, il a soumis des forêts entières à ses recherches. Pour obte- nir des résultats nouveaux sur les progrès de la chaleur, il a placé d’énormes globes de métal dans des fourneaux immenses. Pour résoudre quelques problèmes sur l’action du feu, il a opéré sur des torrens de flamme et de fumée. Il s’est appliqué à la solution des questions les plus importantes à la fonte des grandes pièces d’artillerie; disons aussi qu’il s’est efforcé de donner plus de perfec- tion aux fers de charrue, travail vraiment digne que la philosophie le consacre à l’hu- manité. Enfin, en réunissant les foyers de plusieurs miroirs en un seul, il a inventé l’art qu’employèrent Procul et Archimède pour embraser au loin des vaisseaux. On doit surtout le louer de n’avoir pas, comme Descartes, refusé d’y croire. Tout ce qui étoit grand et beau lui paroissoit devoir être tenté , et il n’y avoit d’impossible pour lui que les petites entreprises et les travaux obscurs, qui sont sans gloire comme sans obstacles. M. de Buffon fut grand dans l’aveu de ses fautes; il les a relevées dans ses supplémens avec autant de modestie que de franchise, et il a montré par là tout ce que pouvoit sur lui la force de la vérité. Il s’étoit permis de plaisanter sur une let- tre dont il ignoroiî alors que M. de Voltaire fût l’auteur. Aussitôt qu’il l’eut appris, il déclara qu’il regrettoit d’avoir traité légère- ment une des productions de ce grand hom- me; et il joignit à cette conduite généreuse un procédé délicat , en répondant avec beau- coup d’étendue aux faibles objections de M. de Voltaire, que les naturalistes n’ont pas mêmes jugées dignes de trouver place dans leurs écrits. Pour savoir tout ce que vaut M. de Buf- fon, il faut, messieurs, l’avoir lu tout entier. Pourrois-je ne pas vous le rappeler encore lorsque dans sa réponse à M. de la Conda- mine, il le peignit voyageant sur ces monts sourcilleux que couvrent des glaces éter- nelles, dans ces vastes solitudes , où la na- ture , accoutumée au plus profond silence , *4 ÉLOGE DE BUFFON dut être étôiinée de s'entendre interroger pour la première fois ! L’auditoire fut frappé de celte grande image, et demeura pendant quelques instans dans le recueillement avant que d’applaudir. Si, après avoir admiré M. de Buffon dans toutes les parties de ses ouvrages, nous com- parions les grands écrivains dont notre siècle s’honore , avec ceux par qui les siècles pré- cédons furent illustrés, nous verrions com- ment la culture des sciences a influé sur l’art oratoire, en lui fournissant des objets et des moyens nouveaux. Ce qui distingue les écri- vains philosophes, parmi lesquels celui que nous regrettons s’ést acquis tant de gloire, c’est qu’ils ont trouvé, dans la nature même, des sujets dont les beautés seront éternelles ; c’est qu’ils n’ont montré les progrès de l’es- prit que par ceux de la raison , qu’ils ne se sont servis de l’imagination qu’autant qu’il fallait pour donner des charmes à l’étude ; c’est qu’avançant toujours' et se perfection- nant sans cesse , on ne sait ni à quelle hau- teur s’élèveront leurs pensées , ni quels es- paces embrassera leur vue, ni quels effets produiront un jour la découverte de tant de vérités et l’abjuration de tant d’erreurs. Pour suffire à d’aussi grands travaux, il a fallu de grands taîens, de longues années, et beaucoup de repos. A Montbard, au milieu d’un jardin orné, s’élève une tour antique: c’est là que M. de Buffon a écrit l’histoire de la nature; c’est de là que sa renommée s est répandue dans l’univers. Il y venoit au lever du soleil, et nul importun n’avoit le droit de l’y troubler. Le calme du matin, les premiers chants des oiseaux , l’aspect varié des campagnes, tout ce qui frappoit ses sens, le rappeloit à son modèle. Libre, indépen- dant, il erroit dans les allées; il précipitoit, il modéroit, il suspendoit sa marché, tantôt la tète vers le ciel, dans le mouvement de 1 inspiration et satisfait de sa pensée; tantôt recueilli, cherchant, ne trouvant pas, ou prêt à produire; il écrivoit, ileffaçoit, il ecrivoit de nouveau pour effacer encore; rassemblant, accordant avec le même soin, le même goût, le même art, toutes les par- ties du discours Kil le prononçoit à diverses reprises, se corrigeant à chaque fois; et content enfin de ses efforts, il le déclamoit de nouveau pour lui-même, pour son plaisir, et comme pour se dédommager de ses peines. Tant de fois répétée, sa belle prose, comme de beaux vers, se gravoit dans sa mémoire; il la récit oit à ses amis; il les engageoit à la lire eux-memes à haute Yoix en sa présence; alors il l’écoutoit en juge sévère, et il 1 travailloit sans relâche , voulant s’élever à 1 perfection que l’écrivain impatient ne pourr jamais atteindre. Ce que je peins foiblement, plusieurs e ont été témoins. Une belle physionomie, d( cheveux blancs, des attitudes nobles rer doient ce spectacle imposant et magnifique car s’il y a quelque chose au dessus des pr ductions du génie, ce ne peut être que génie lui-même, lorsqu’il compose , lorsqu i crée, et que dans ses mouvemens subliml il se rapproche, autant qu’il se peut, de < Divinité. Voilà bien des litres de gloire. Quand : seroient tous anéantis , M. de Buffon ne d ! meureroit pas sans éloge. Parmi les mon mens dont la capitale s’honore , il en est i que la munificence des rois consacre à la e ture, où les productions de tous les rège sont réunies, où les minéraux de la Suè et ceux du Potose , où le renne et l’éléphai le pingoin et le kamichi sont étonnés de trouver ensemble; c’est M. de Buffon qu fait ces miracles; c’est lui qui, riche c tributs offerts à sa renommée par les souv rains, par les savans, par tous les nalun listes du monde, porta ces offrandes les cabinets confiés à ses soins. Il y av trouvé les plantes que Tournefort et Vaill avoient recueillies et conservées ; mais jourd’hui ce que les fouilles les plus p fondes et les voyages les plus étendus découvert de plus curieux et de plus s’y montre rangé dans un petit espace. L y remarque surtout ces peuples de quad pèdes et d’oiseaux qu’il a si bien peints se rappelant comment il en a parlé, chac les considère avec un plaisir mêlé de rec noissance. Tout est plein de lui dans temple, où il assista, pour ainsi dire , à apothéose; à l’entrée, sa statue, que lui fut étonné d’y voir, atteste la vénération sa patrie, qui, tant de fois injuste envers grands hommes, ne laissa pour la gloire M. de Buffon rien à faire à la postérité. La même magnificence se déploie dans jardins. L’école, l’amphithéâtre, les sel- les végétaux, l’enceinte elle-même, tou est renouvelé, tout s’y est étendu, loi porte l’empreinte de ce grand caractère, repoussant les limites , ne se plut jamais dans les grands espaces et au milieu grandes conceptions. Des collines, des val artificielles, des terrains de diverse nati des chaleurs de tous les degrés y serve! la culture des plantes de tous les pays. 1 PAR TIC* de richesse et de variété rappellent l’idée de ces monts fameux de l’Asie , dont la cime est glacée, tandis que les vallons situés à leur base sont brûlans, et sur lesquels les tem- pératures et les productions de tous les cli- mats sont rassemblées. Une mort douloureuse eplente a terminé cette belle vie. A de grandes souffrances M. de Buffon opposa un grand courage. Pen- dant de longues insomnies, il se féliciioit d’avoir conservé cette force de tète, qui, après avoir été la source de ses inspirations, 1 entretenoit encore des grands objets de la nature. Il vécut tout entier jusqu’au moment où nous le perdîmes. Tous vous souvenez , messieurs, de la pompe de ses funérailles; vous y avez assisté avec les députés des au- tres académies , avec tous les amis des lettres et des arts, avec ce cortège innombrable de personnes de tous les l’angs, de tous les états, qui suivoient en deuil, au milieu d’une foule immense et consternée. Un murmure de louanges et de regrets rompoit quelquefois le silence de l’assemblée. Le temple vers le- quel on marchoit ne put contenir cette nom- breuse famille d’un grand homme. Les por- tiques, les avenues demeurèrent remplis; et tandis que l’on cbantoit l’hymne funèbre , ces discours , ces regrets , ces épanchemens de tous les cœurs 11e furent point interrom- pus. Enfin, en se séparant, tristes de voir le siècle s’appauvrir, chacun formoit des vœux pour que tant de respects rendus au génie fissent germer de nouveaux talens , et prépa- rassent une génération digne de succéder à celle dont on trouve parmi vous , messieurs , les titres et les exemples. J’ai parlé des beautés du style et de l’éten- due du savoir de M. de Buffon. Que ne peut s’élever ici, messieurs, pour peindre digne- ment ses qualités et ses vertus, et pour ajou- ter beaucoup à vos regrets, la voix des per- sonnes respectables dont il s’étoit environné! que ne peut surtout se faire entendre la voix éloquente d’une vertueuse amie, dont les tendres consolations, dont les soins affec- tueux, elle me permettra de dire, dont les hommages ont suivi cet homme illustre jus- qu’au tombeau ! elle peiudroit l’heureuse alliance de la bonté du cœur et de la simpli- cité du caractère avec toutes les puissances de l’esprit ! elle peiudroit la résignation d’un philosophe souffrant et mourant sans plainte et sans murmure ! Cette excellente amie a été témoin de ses derniers efforts ; elle a reçu ses derniers adieux ; elle a recueilli ses der- nières pensées. Qui mérita mieux qu’elle ,) D’AZYR. a.5 d’ê.lre dépositaire des dernières méditations du génie ? Que ne peut encore s’élever ici la voix imposante d’un illustre ami de ce grand homme, de cet administrateur qui tantôt, dans la retraite, éclaire les peuples par ses ouvrages, et tantôt, dans l’activité du mi- nistère, les rassure par sa présence et les conduit par sa sagesse ! Des sentimens com- muns d’admiration , d’estime et d’amitié , rapprochoient ces trois âmes sublimes. Que de douceurs , que de charmes dans leur union ! Étudier la nature et les hommes , les gouverner et les instruire, leur faire du bien et se cacher, exciter leur enthousiasme et leur amour; ce sont presque les mêmes soins, les mêmes pensées ; ce sont des travaux et des vertus qui se ressemblent. Avec quelle joie M. de Buffon auroit vu cet ami, ce grand ministre, rendu par le meilleur des rois aux vœux de tous, au mo- ment où les représentans du plus généreux des peuples vont traiter la grande affaire du salut de l’état; à la veille de ces grands jours où doit s’opérer la régénération solennelle du corps politique; où de l’union, naîtront l’amour et la force; où le père de la patrie recueillera ces fruits si doux de sa bienfai- sance, de sa modération et de sa justice; où son auguste compagne, mère sensible et tendre, si profondément occupée des soins qu’elle ne cesse de prodiguer à ses enfans , verra se préparer pour eux , avec la prospé- rité commune, la gloire et le bonheur ! Dans cette époque, la plus intéressante de notre histoire, qui peindra Louis XVI protégeant la liberté près de son trône, comme il l’a défendue au delà des mers; se plaisant à s’entourer de ses sujets; chef d’une nation éclairée, et régnant sur un peuple de ci-» toyens; roi par la naissance, mais de plus, par la bonté de son cœur et par sa sagesse, le bienfaiteur de ses peuples et le restaurateur de ses états P Qu’il m’est doux, messieurs, de pouvoir réunir tant de justes hommages à celui de la reconnoissance que je vous dois ! L’Académie Françoise fondée par un roi qui fut lui- même un grand homme, forme une répu- blique riche de tant de moissons de gloire, fameuse par tant de conquêtes ,- et si célèbre par vos propres travaux, que peu de per- sonnes sont dignes d’èire admises à partager avec vous un héritage transmis par tant d’aïeux illustres; mais voulant embrasser, dans toute son étendue, le champ de la pensée, vous appelez à vous des colonies composées d’hommes laborieux dont vous 2Ô ÉL0G3Î DE BUFFON éclairez le zèle, dont vous dirigez les tra- vaux, et parmi lesquels j’ai osé former le vœu d’ctre placé. Ils vous apportent ce que le langage des sciences et des arts contient d’utile aux progrès des lettres ; et ce concert PAR VICQ D’ÀZYR. de tant de voix , dont chacune révèle quel- ques-uns des secrets du grand art qui préside à la culture de l’esprit, est un des plus beaux monumens que notre siècle puisse offrir à l’admiration de la postérité. DISCOURS ACADÉMIQUES. ■» ■■....— ^,.1. DISCOURS PRONONCÉ A d’aCADEMIE FRANÇOISE PAR M., DE EUFFON DE JOUR. DE SA RÉCEPTION, M. de. Buffon ayant été élu par MM. de l’Académie Françoise, à la place de feu M. l’archevêque de Sens, y vint prendre séance le samedi 2 5 août 1753 , et prononça le discours qui suit ; Messieurs , Tous m’avez comblé d’honneur en m’ap- pelant à vous; mais la gloire n’est un bien qu’autant qu’on en est digne, et je ne me per- suade pas que quelques essais écrits sans art et sans autre ornement que celui de la na- ture soient des titres suffisans pour oser prendre place parmi les maîtres de l’art , parmi les hommes éminens qui représentent ici la splendeur littéraire de la France , et dont les noms célébrés aujourd’hui par la voix des nations retentiront encore avec éclat dans la bouche de nos derniers neveux. Yous avez eu, messieurs, d’autres motifs en jetant les yeux sur moi; vous avez voulu donner à l’illustre compagnie 1 à laquelle j’ai l’honneur d’appartenir depuis long-temps , une nouvelle marque de considération : ma reconnoissance , quoique partagée, n’en sera pas moins vive. Mais comment satisfaire au devoir qu’elle m’impose en ce jour? Je n’ai, messieurs, à vous offrir que votre propre bien : ce sont quelques idées sur le style que j’ai puisées dans vos ouvrages ; c’est en vous lisant, c’est en vous admirant qu’elles ont été conçues; c’est en les soumettant à vos lumières qu’elles se produiront avec quelque succès. ïl s’est trouvé dans tous les temps des hommes qui ont su commander aux autres par la puissance de la parole. Ce n’est néan- x. L’Académie royale des Sciences. M. de Buffon y avoit été reçu en 1733 , dans la elasse de méca- nique. moins que dans les siècles éclairés que l’on a bien écrit et bien parlé. La véritable élo- quence suppose l’exercice du génie et la cul- ture de l’esprit. Elle est bien différente de cette facilité naturelle de parler qui n’est qu’un talent, une qualité accordée à tous ceux dont les passions sont fortes, les or- ganes souples et l’imagination prompte. Ces hommes sentent vivement, s’affectent de même, le marquent fortement au dehors; et, par une impression purement mécanique, ils transmettent aux autres leur enthousiasme et leurs affections. C’est le corps qui parle au corps ; tous les mouvemens , tous ies signes, concourent et servent également. Que faut-il pour émouvoir la multitude et l'en- traîner ? que faut-il pour ébranler la plupart même des autres hommes et les persuader ? Un ton véhément et pathétique, des gestes expressifs et fréquens, des paroles rapides et sonnantes. Mais pour le petit nombre de ceux dont la tête est ferme, le goût délicat, et le sens exquis i et qui, comme vous, mes- sieurs , comptent pour peu le ton , les gestes et le vain son des mots, il faut des choses, des pensées, des raisons; il faut savoir les présenter, les nuancer, les ordonner : il ne suffit pas de frapper l’oreille et d’occuper les yeux; il faut agir sur l’âme, et toucher le cœur en parlant à l’esprit. Le style n’est que l’ordre et le mouvement qu’on met dans ses pensées. Si 011 les en- chaîne étroitement, si 011 les serre, le style devient ferme, nerveux et concis; si on les laisse se succéder lentement, et ne se join- dre qu’à la faveur des mots, quelque élé- gans qu’ils soient, le style sera diffus, lâche et traînant. Mais, avant de chercher l’ordre dans le- quel on présentera ses pensées, il faut s’en être fait un autre plus général et plus fixe , 28 DISCOURS ACADEMIQUES. où ne doivent entrer que les premières vues et les principales idées : c’est en marquant leur place sur ce premier plan qu’un sujet sera circonscrit, et que l’on en connoîtra l’étendue; c’est en se rappelant sans cesse ces premiers linéamens qu’on déterminera les justes intervalles qui séparent les idées principales, et qu’il naîtra des idées acces- soires et moyennes , qui serviront à les rem- plir. Par la force du génie, on se représen- tera toutes les idées générales et particulières sous leur véritable point de vue; par une grande finesse de discernement, on distin- guera les pensées stériles des idées fécondes; par la sagacité que donne la grande habitude d’écrire, on sentira d’avance quel sera le produit de toutes ces opérations de l’esprit. Pour peu que le sujet soit vaste ou compli- qué, il est bien rare qu’on puisse l’embrasser d’un coup d’œil, ou le pénétrer en entier d’un seul et premier effort de génie; et il est rare encore qu après bien des réflexions on en saisisse tous les rapports. Ou ne peut donc trop s’en occuper ; c’est même le seul moyen d’affermir, d’étèndre et d’élever ses pensées : plus on leur donnera de substance et de force par la méditation, plus il sera facile ènsuite de les réaliser par l’expression. Ce plan n’est pas encore le style , mais il en est la base; il le soutient, il le dirige, il règle son mouvement et le soumet à des lois : sans cela, le meilleur écrivain s’égare; sa plume marche sans guide , et jette à l’aven- ture des traits irréguliers et des figures dis- cordantes. Quelque brillantes que soient les couleurs qu’il emploie , quelques beautés qu’il sème dans les détails, comme l’ensem- bie choquera, ou ne se fera pas assez sentir, l'ouvrage ne sera point construit; et, en admirant l’esprit de fauteur, on pourra soupçonner qu’il manque de génie. C’est par cette raison que ceux qui écrivent comme ils parlent, quoiqu’ils parlent très-bien, écri- vent mal; que ceux qui s’abandonnent au premier feu de leur imaginai ion prennent un ton qu’ils ne peuvent soutenir; que ceux qui craignent de perdre des pensées isolées, fugitives, et qui écrivent en différens temps des morceaux détachés , ne les réunissent jamais sans transitions forcées ; qu’en un mot il y a tant d’ouvrages faits de pièces de rapport, et si peu qui soient fondus d’un seul jet. Cependant tout sujet est un; et, quelque vaste qu’il soit, il peut être renfermé dans un seul discours. Les interruptions, les re- pos, les sections, ne devroient être d’usage que quand on traite des sujets différens, ou lorsqu' 'ayant à parler de choses grandes, épineuses et disparates , la marche du génie se trouve interrompue par la multiplicité des obstacles, et contrainte par la nécessité des circonstances 1 : autrement le grand nombre de divisions, loin de rendre un ouvrage plus solide, en détruit l’assemblage; le livre pa- roît plus clair aux yeux , mais le dessein de l’auteur demeure obscur; il ne peut faire impression sur l’esprit du lecteur; il ne peut même se faire sentir que par la continuité du fil, par la dépendance harmonique des idées, par un développement successif, une gradation soutenue, un mouvement uni- forme que toute interruption détruit ou fait languir. Pourquoi les ouvrages de la nature sont-ils si parfaits ? c’est que chaque ouvrage est un tout, et qu’elle travaille sur un plan étemel dont elle ne s’écarte jamais ; elle prépare en silence les germes de ses productions ; elle ébauche, par un acte unique, la forme pri- mitive de tout être vivant; elle la développe, elle la perfectionne par un mouvement continu et dans un temps prescrit. L’ouvrage étonne ; mais c’est l’empreinte divine dont il porte les traits qui doit nous frapper. L’esprit humain ne peut rien créer; il ne produira qu’après avoir été fécondé par f expérience et la méditation; ses connois- sances sont les germes de ses productions : mais s’il imite la nature dans sa marche et dans son travail, s’il s’élève par la contem- plation aux vérités les plus sublimes, s’il les réunit, s’il les enchaîne, s’il en forme un tout, un système par la réflexion, il établira sur des fondemens inébranlables des monu- mens immortels. C’est faute de plan, c’est pour n’avoir pas assez réfléchi sur son objet, qu’un homme d’esprit se trouve embarrassé, et ne sait par où commencer à écrire. Il aperçoit à la fois un grand nombre d’idées; et comme il ne les a ni comparées ni subordonnées, rien ne le détermine à préférer les unes aux au- tres; il demeure donc dans la perplexité : mais lorsqu’il se sera fait un plan, lorsqu’une fois il aura rassemblé et mis en ordre tontes les pensées essentielles à son sujet , il s’aper- cevra aisément de l’instant auquel il doit prendre la plume; il sentira le point de maturité de la production de l’esprit, il sera pressé de la faire éclore, il n’aura même que du plaisir à écrire : les idées se succéderont i. Dans ce que j’ai dit ici , j’avois en vue le livre de C Esprit des Lois; ouvrage excellent pour le fond, et auquel on n’a pu faire d’autre reproche que celui des sections trop fréquentes. DISCOURS ACADÉMIQUES. àg aisémént, et le style sera naturel et facile; la chaleur naîtra de ce plaisir, se répandra partout et donnera la vie à chaque expres- sion; tout s’animera de plus en plus, le ton s’élèvera, les objets prendront de la couleur; et le sentiment , se joignant à la lumière , l’augmentera, la portera plus loin, la fera passer de ce que l’on a dit à ce que l’on va dire, et le style deviendra intéressant et lu- mineux. Rien ne s’oppose plus à la chaleur que le désir de mettre partout des traits saillans ; rien n’est plus contraire à la lumière, qui doit faire un corps et se répandre unifor- mément dans un écrit, que ces étincelles qu’on ne tire que par force en choquant les mots les uns conli’e les autres, et qui ne nous éblouissent pendant quelques instans que pour nous laisser ensuite dans les té- nèbres. Ce sont des pensées qui ne brillent que par l’opposition; l’on ne présente qu’un côté de l’objet; on met dans l’ombre toutes les autres faces; et ordinairement ce côté qu’on choisit est une pointe, un angle sur lequel on fait jouer l’esprit avec d’autant plus de facilité qu’on l’éloigne davantage des grandes faces sous lesquelles le bon sens a coutume de considérer les choses. Rien n’est encore plus opposé à la véri- table éloquence que l’emploi de ces pensées fines, et la recherche de ces idées légères, déliées, sans consistance, et qui, comme la feuille du métal battu, ne prennent de l’éclat qu’en perdant de la solidité. Ainsi plus on mettra de cet esprit mince et bril- lant dans un écrit, moins il aura de nerf, de lumière, de chaleur et de style; à moins que cet esprit ne soit lui-mème le fond du sujet, et que l’écrivain n’ait pas eu d’autre objet que la plaisanterie ; alors l’art de dire de petites choses devient peut-être plus dif- ficile que l’art d’en dire de grandes. Rien n’est plus opposé au beau naturel que la peine qu’on se donne pour exprimer des choses ordinaires ou communes d’une manière singulière ou pompeuse ; rien ne dégrade plus l’écrivain. Loin de l’admirer, on le plaint d’avoir passé tant de temps à faire de nouvelles combinaisons de syllabes , pour ne dire que ce que tout le monde dit. Ce défaut est celui des esprits cultivés , mais stériles : ils ont des mots en abondance, point d’idées; ils travaillent donc sur les mots, et s’imaginent avoir combiné des idées parce qu’ils ont arrangé des phrases , et avoir épuré le langage quand ils font cor- rompu en détournant les acceptions. Ces écrivains n’ont point de style , ou, si l’on veut, ils n’en ont <|ue l’ombre. Le style doit graver des pensees ; ils ne savent que tracer des paroles. Pour bien écrire , il faut donc posséder pleinement son sujet , il faut y réfléchir as- sez pour voir clairement l’ordre de ses pen- sées , et en former une suite, une chaîne continue, dont chaque point représente une idée; et lorsqu’on aura pris la plume, il faudra la conduire successivement sur ce premier trait, sans lui permettre de s’en écarter, sans l’appuyer trop inégalement, sans lui donner d’autre mouvement que ce- lui qui sera déterminé par l’espace qu’elle doit parcourir. C’est en cela que consiste la sévérité du style; c’est aussi ce qui en fera l’imité et ce qui en réglera la rapidité ; et cela seul aussi suffira pour le rendre précis et simple, égal et clair, vif et suivi. A cette première règle dictée par le génie si l’on joint de la délicatesse et du goût , du scru- pule sur le choix des expressions, de l’at- tention à ne nommer les choses que par les termes les plus généraux, le style aura de la noblesse. Si l’on y joint encore de la dé- fiance' pour son premier mouvement, du mépris pour tout ce qui n’est que brillant , et une répugnance constante pour l’équi- voque et la plaisanterie, le style aura de la gravité, il aura même de la majesté. Enfin, si l’on écrit comme l’on pense, si l’on est convaincu de ce que l’on veut persuader, cette bonne foi avec soi-même, qui fait la bienséance pour les autres, et la vérité du style, lui fera produire tout son effet, pourvu que cette persuasion intérieure ne se marque pas par un enthousiasme trop fort, et qu’il y ait partout plus de candeur que de con- fiance, plus de raison que de chaleur. C’est ainsi , messieurs, qu’il me sembloit, en vous lisant, que vous me parliez, que vous m’instruisiez. Mon âme, qui recueil- loit avec avidité ces oracles de fa sagesse , vouloit prendre l’essor et s’élever jusqu’à vous : vains efforts ! Les règles , disiez-xous encore, ne peuvent suppléer au génie; s’il manque, elles seront inutiles. Bien écrire, c’est tout à la fois bien penser, bien sentir et bien rendre; c’est avoir en même temps de l’esprit, de l’âme et du goût. Le style suppose la réunion et l’exercice de toutes les facultés intellectuelles : les idées seules forment le fond du style, l’harmonie des paroles n’en est que l’accessoire , et ne dé- pend que de la sensibilité des organes. Il suffit d’avoir un peu d’oreille pour éviter les dissonances; de l’avoir exercée, perfec- tionnée .par la lecture des poêles et des 3 o DISCOURS ACADEMIQUES. orateurs , pour que mécaniquement on soit porté à l’imitation de la cadence poétique et des tours oratoires. Or jamais l’imitation n’a rien créé : aussi cette harmonie des mots ne fait ni le fond ni le ton du style, et se trouve souvent dans des écrits vides d’idées. Le ton n’est que la convenance du style à la nature du sujet; il 11e doit jamais être forcé; il naîtra naturellement du fond même de la chose, et dépendra beaucoup du point de généralité auquel on aura porté ses pen- sées. Si l’on s’est élevé aux idées les plus générales, et si l’objet en lui-même est grand, le ton paraîtra s’élever à la même hauteur ; et si , en le soutenant à cette élévation , le génie fournit assez pour donner à chaque objet une forte lumière, si l’on peut ajouter la beauté du coloris à l’énergie du dessin , si l’on peut, en un mot, représenter chaque idée par une image vive et bien terminée , et former de chaque suite d’idées un tableau harmonieux et mouvant, le ton sera non seulement élevé , mais sublime. Ici, messieurs, l’application ferait plus que la règle ; les exemples instruiraient mieux que les préceptes-: mais il ne m’est pas permis de citer les morceaux sublimes qui m’ont si souvent transporté en lisant vos ouvrages , je suis contraint de me borner à des réflexions. Les ouvrages bien écrits se- ront les seuls qui passeront à la postérité. La quantité des connoissances , la singula- rité des faits , la nouveauté même des dé- couvertes, ne sont pas de sûrs garans de l’immortalité; si les ouvrages qui les con- tiennent ne roulent que sur de petits objets, s’ils sont écrits sans goût, sans noblesse et sans génie, ils périront, parce que les con- noissances, les faits et , les découvertes s’en- lèvent aisément , se transportent, et gagnent même à être mis en œuvre par des mains plus habiles. Ces choses sont hors de l’homme; le style est de l’homme même. Le style ne peut donc ni s’enlever, ni se transporter, ni s’altérer : s’il est élevé, noble, sublime, l'auteur sera également admiré dans tous les temps; car il n’y a que la vérité qui soit durable et même éternelle. Or un beau style n’est tel en effet que par le nombre infini des vérités qu’il présente. Toutes les beautés intellectuelles qui s’y trouvent, tous les rapports dont il est composé, sont autant de vérités aussi utiles et peut-être- plus précieuses pour l’esprit humain que celles qui peuvent faire le fond du sujet. Le sublime ne peut se trouver que dans les grands sujets. La poésie, l’histoire et la philosophie , ont toutes le meme objet , et un très-grand objet , l’homme et la nature. La philosophie décrit et dépeint la nature ; la poésie la peint et l’embellit; elle peint aussi les hommes, elle les agrandit; elle les exagère; elle crée les héros et les dieux : l’histoire ne peint que l’homme, et le peint tel qu’il est; ainsi le ton de i’bistorien ne deviendra sublime que quand il fera le por- trait des plus grands hommes, quand il ex- posera les plus grandes actions, les plus grands mou vemens , les plus grandes révo- lutions, et partout ailleurs il suffira qu’il soit majestueux et grave. Le ton du philo- sophe pourra devenir sublime toutes les fois qu’il parlera des lois de la nature, des êtres en général, de l’espace, de la matière, du mouvement et du temps, de l’âme, de l’esprit humain, des sentimens, des pas- sions : dans le reste , il suffira qu’il soit noble et élevé. Mais le ton de l’orateur et du poète, dès que le sujet est grand, doit toujours être sublime, parce qu’ils sont les maîtres de joindre à la grandeur de leur sujet autant de couleur, autant de mouve- ment, autant d’illusion qu’il leur plaît, et que, devant toujours peindre et toujours agrandir les objets, ils doivent aussi par- tout employer toute la force et déployer toute l’étendue de leur génie. ADRESSE A MESSIEURS DE l’aCADÉMIE FRANÇOISE. Que de grands objets, messieurs, frappent ici mes yeux ! et quel style et quel ton fau- drait-il employer pour les peindre et les représenter dignement ! L’élite des hommes est assemblée; la Sagesse est à leur tête. La Gloire, assise au milieu d’eux , répand ses rayons sur chacun, et les couvre tous d’un éclat toujours le même et toujours re- naissant. Des traits d’une lumière plus vive encore partent de sa couronne immortelle, et vont se réunir sur le front auguste du plus puissant et du meilleur des rois1. Je le vois, ce héros, ce prince adorable, ce maître si cher. Quelle noblesse dans tous ses traits! que de majesté dans toute sa personne ! que d’âme et de douceur natu- relle dans ses regards ! il les tourne vers vous , messieurs , et vous brillez d’un nou- veau feu; une ardeur plus vive vous em- brase; j’entends déjà vos divins accents et les accords de vos voix; vous les réunissez 1. Louis XV, le Bien-Aimé. DISCOURS ACADEMIQUES. 3® pour célébrer ses Vertus , pour chanter ses victoires, pour applaudir à notre bonheur; vous les réunissez pour faire éclater voire zèle, exprimer voire amour, et ü'ansmellre à la postérité des sentimens dignes de ce grand prince et de ses descendans. Quels concerts! ils pénètrent mon cœur; ils seront immortels comme le nom de Louis. Dans le lointain, quelle autre scène de grands objets ! le génie de la France qui parle à Richelieu , el lui dicte à la fois l’art d’éclairer les hommes et de faire régner les rois; la Justice el la Science qui conduisent Seguier , et l’élèvent de concert à la première place de leurs tribunaux; la Yictoire qui s’avance à grands pas , et précède le char triomphal de nos rois, où Louis-!e-Grand , assis sur des trophées, d’une main donne la paix aux nations vaincues, et de l’autre rassemble dans ce palais les muses disper- sées. Et près de moi , messieurs, quel autre objet intéressant! la Religion en pleurs, qui vient emprunter l’organe de l’éloquence pour exprimer sa douleur, et semble m’ac- cuser de suspendre trop long-temps vos re- grets sur une perte que nous devons tous ressentir avec elle *. i. Celle de M. Languet de Cergy , archevêquede Sens, auquel j’ai succédé à l’Académie Françoise. PROJET D’UNE RÉPONSE A M. COETLOSQÜET, ANCIEN ÉVÊQUE DE LIMOGES , Lors de sa réception à l’Académie Françoise r. Monsieur , En vous témoignant la satisfaction que nous avons à vous recevoir, je ne ferai pas i rémunération de tous les droits que vous laviez à nos vœux. Il est un petit nombre j d’hommes que les éloges font rougir, que la louange déconcerte , que la vérité même jhlesse, lorsqu’elle est trop flatteuse. Cette poble délicatesse, qui fait la bienséance |du caractère, suppose la perfection de toutes les qualités intérieures. Une âme belle et sans tache, qui veut se conserver dans toute pa pureté , cherche moins à paraître qu’à se couvrir du voile de la modestie; jalouse de ses beautés qu’elle compte par le nombre de jses vertus, elle ne permet pas que le souffle jmpur des passions étrangères en ternisse 2e lustre; imbue de très-bonne heure des principes de la religion, elle en conserve avec le même soin les impressions sacrées : jnais comme ces caractères divins sont gra- ves en traits de flamme, leur éclat perce et polore de son feu le voile qui nous les dé- e i. Cette réponse devoit être jour de la réception de M. 1’ l’Académie Frairoise; mais prononcée 'évêque de comme ce en 1760, Limoges prélat se roboit; alors il brille à tous les yeux et sans les offenser. Bien différent de l’éclat de la gloire, qui toujours nous frappe par éclairs, et souvent nous aveugle, celui de la vertu n’est qu’une lumière bienfaisante qui nous guide, qui nous éclaire, et dont les rayons nous vivifient. Accoutumée à jouir en silence du bon- heur attaché à l’exercice de la sagesse , occu- pée sans relâche à recueillir la rosée céleste de la grâce divine, qui seule nourrit la piété, cette âme vertueuse et modeste se suffit à elle-même : contente de son intérieur, elle a peine à se répandre au dehors; elle ne s’épanche que vers Dieu. La douceur et la paix , l’amour de ses devoirs , la remplissent, l’occupent tout entière ; la charité seule a droit de l’émouvoir ; mais alors son zèle , quoique ardent, est encore modeste; il ne s’annonce que par l’exemple; il porte l’em- preinte du sentiment tendre qui le fit naître; c’est la vertu, seulement devenue plus ac- tive. Tendre piété ! vertu sublime ! vous rnéri- retira pour laisser passer deux hommes de lettres qui aspiroient en même temps à l’Académie , cette ^réponse n’a été si prononcée ni imprimée. 32 tez tous nos respects; vous élevez l’homme au dessus de sou être , vous l’approchez du Créateur , vous en faites sur la terre un ha- bitant des cieux. Divine modestie ! vous méritez tout notre amour; vous faites seule la gloire du sage, vous faites aussi la décence du saint état des ministres de l’autel : vous n’êtes point un sentiment acquis par le commerce des hommes; vous êtes un don du ciel, une grâce qu’il accorde en secret à quelques âmes privilégiées, pour rendre la vertu plus aimable; vous rendriez même, s’il étoit possible, le vice moins choquant. Mais jamais vous n’avez habité dans un cœur corrompu; la honte y a pris votre place : elle prend aussi vos traits lorsqu’elle veut sortir de ces replis obscurs où le crime l’a fait naître; elle couvre de votre voile sa confusion, sa bassesse. Sous ce lâche dégui- sement elle ose donc paroître : mais elle soutient mal la lumière du jour , elle a l’œil trouble et le regard louche; elle marche à pas obliques dans des routes souterraines où le soupçon la suit; et lorsqu’elle croit échap- per à tous les yeux, un rayon de la vérité luit , il perce le nuage , l’illusion se dissipe, le prestige s’évanouit, le scandale seul reste, et l’on voit à nu toutes les difformités du vice grimaçant la vertu. Mais détournons les yeux, n’achevons pas le portrait hideux de la noire hypocri- sie; ne disons pas que, quand elle a perdu le masque de la honte , elle arbore le pa- nache de l’orgueil, etqu’alors elle s’appelle impudence. Ces monstres odieux sont in- dignes de faire ici contraste dans le tableau des vertus; ils souilleraient nos pinceaux. Que la modestie, la piété, la modération, la sagesse, soient mes seuls objets et mes seuls modèles. Je les vois , ces nobles filles dir ciel, sourire à ma prière; je les vois, chargées de tous leurs dons, s’avancer à ma voix, pour les réunir ici sur la même per- sonne : et c’est de vous , monsieur DISCOURS ACADÉMIQUES. pour eux, les marques publiques qu’ils que je vais emprunter encore des traits vivans qui les caractérisent. Au peu d’empressement que vous avez marqué pour les dignités, à la contrainte qu’il a fallu vous faire pour vous amener à la cour , à l’espèce de retraite dans laquelle vous continuez d’y vivre, au refus absolu que vous fîtes de l’archevêché de Tours, qui vous étoit offert, aux délais mêmes que vous avez mis à satisfaire les vœux de l’A- cadémie , qui pourrait méconnaître cette modestie pure (pie j’ai tâché de peindre ? L’amour des peuples de votre diocèse, la tendresse paternelle qu’on vous connoît donnèrent de leur joie lorsque vous refusâtes de les quitter, et parûtes plus flatté de leur attachement que de l’éclat d’un siège plus élevé, les regrets universels qu’ils ne cessent de faire encore entendre , ne sont-ils pas les effets les plus évidens de la sagesse, de la modération, du zèle charitable, et ne supposent-ils pas le talent rare de concilier les hommes en les conduisant ? talent qui ne peut s’acquérir que par une connoissance parfaite du cœur humain, et qui cependant parait vous être naturel, puisqu’il s’est annoncé dès les premiers temps, lorsque, formé sous les yeux de M. le cardinal de La Rochefoucauld, vous eûtes sa confiance et celle de tout son diocèse ; talent peut- être le plus néces-saire de tous pour le succès de l’éducation des princes ; car ce n’est en effet qu’en se conciliant leur cœur que l’on peut le former. Tous êtes maintenant à portée, monsieur, de le faire valoir, ce talent précieux; il peut devenir entre vos mains l’inslrumenl du bonheur des hommes; nos jeunes princes sont destinés à être quelque jour leurs maî-i très ou leurs modèles ; ils font déjà l’amour de la nation; leuraugûste père vous honorei de toute sa confiance; sa tendresse, d’au- tant plus éclairée , qu’elle est plus vive et plus vraie , ne s’est point méprise : que faut- il de plus pour faire applaudir à sou discer- nement, et pour justifier son choix? U vous a préposé, monsieur, à cette éducation si chère , certain que ses augustes enfans vous aimeraient, puisque vous êtes universelle- ment aimé.... Universellement aimé : à ce seul mot , que je ne crains point de répéter, vous sentez , monsieur, combien je pourrai; étendre , élever mes éloges ; mais je vous ai promis d’avance toute la discrétion que peu! exiger la délicatesse de votre modestie. J( ne puis néanmoins vous quitter encore, ni passer sous silence un fait qui seul prouve voit tous les autres, et dont le simple réci a pénétré mon cœur ; c’est ce triste et der nier devoir que, malgré la douleur qui dé chirait votre âme , vous rendîtes avec tan d’empressement et de courage à la méinoii de M. le cardinal de La Rochefoucauld. I vous avoit donné les premières leçons de 1; sagesse; il avoit vu germer et croître vo vertus par l’exemple des siennes; il étoit si j’ose m’exprimer ainsi, le père de votr -'os Irav; ï, celle tàs ton lettre v nieuu cetii ame : et vous, monsieur, vous aviez pou lui plus que l’amour d’un fils, une constanc d’attachement qui ne fut jamais altérée une reconnoissanee si profonde , qu’au lie Ueü NflUll; h'. DISCOURS ACADÉMIQUES. 33 de diminuer avec le temps , elle a paru tou- l jours s’augmenter pendant la vie de votre j illustre ami, et que, plus vive encore après son décès , ne pouvant plus la contenir, vous I la fîtes éclater en allant mêler vos larmes à celles de tout son diocèse , et prononcer son éloge funèbre, pour arracher au moins quelque chose à la mort en ressuscitant ses vertus. Vous venez aussi, monsieur, de jeter des fleurs immortelles sur le tombeau du prélat auquel vous succédez. Quand on aime autant la vertu, on sait la reconnoitre partout, et la louer sous toutes les faces qu’elle peut présenter. Unissons nos regrets à vos éloges. Le reste de ce discours manque, les cir- constances ayant changé. M. l’ancien évêque de Limoges auroit même voulu qu’il fût supprimé en entier. J’ai fait ce que j’ai pu pour le satisfaire, mais l’ouvrage étant trop avancé, et les feuilles tirées jusqu’à la p. 16, je n’ai pu supprimer celte partie du discours, et je la laisse comme un hommage rendu à la piété, à la vertu, et à la vérité. REPONSE A M. WATELET, LE JOUR DE SA RECEPTION A l’aCADEMIE FRANÇOISE, DE SAMEDI 19 JANVIER 1761. | Monsieur , Si jamais il y eut dans une compagnie un (deuil de cœur, général et sincère , c’est celui de ce jour. M. de Mirabaud, auquel vous uccédez , monsieur, n’avoit ici que des amis, quelque digne qu’il fût d’y avoir des rivaux. Souffrez donc que le sentiment qui nous af- jlige paroisse le premier, et que les motifs de 10s regrets précèdent les raisons qui peuvent ions consoler. M. de Mirabaud, votre con- fère et votre ami, messieurs, a tenu, pen- lant près de vingt ans, la plume sous vos (eux. Il était plus qu’un membre de notre orps, il en était le principal organe : occupé put entier du service et de la gloire de l’A- 'adémie, il lui avoit consacré et ses jours et ps veilles; il étoit , dans votre cercle, le cen- re auquel se réunissoient vos lumières, qui e perdoient rien de leur éclat en passant par % plume. Connaissant par un si long usage pute l’utilité de sa place pour les progrès de ps travaux académiques, il n’a voulu la quit- cette place qu’il remplissoit si bien, qu’a- ,rès vous avoir désigné, messieurs, celui ‘ lenlre vous que vous avez jugé convenir le ieux C et qui joint à tous les talens de l’es- TÎt. cette droiture délicate qui va jusqu’au [rupule dès qu’il s’agit de remplir ses devoirs, jjb de Mirabaud a joui lui-même de ce bien p’il nous a fait ; il a eu la satisfaction , pen- î ii. M. Duclos a succédé à M. de Mirabaud dans jtl place de secrétaire de l’Académie Françoise. Buffon. I. dant ses dernières années, de voiries premiers fruits de cet heureux choix. Le grand âge n’avoit point affaissé l’esprit; il n’avoit altéré ni ses sens, ni ses facultés intérieures : les tristes impressions du temps ne s’étoient mar- quées que par le dessèchement du corps. A quatre-vingt-six ans, M. de Mirabaud avoit encore le feu de la jeunesse et la sève de l’âge mûr, une gaieté vive et douce, une sérénité d’âme, une aménité de mœurs qui faisoient disparoîtrela vieillesse, ou ne la laissoient voir qu’avec celte espèce d’attendrissement qui suppose bien plus que du respect. Libre de passions , et sans autres liens que ceux de l’amitié, il étoit plus à ses amis qu’à lui- même : il a passé sa vie dans une société dont il faisoit les délices; société douce, quoique intime, que la mort seule a pu dis- soudre. Ses ouvrages portent l’empreinte de son caractère : plus un homme est honnête, el plus ses écrits lui ressemblent. M. de Mirabaud joignoit toujours le sentiment à l’esprit, et nous aimons à le lire comme nous aimions à l’entendre ; mais il avoit si peu d’attache- ment pour ses productions, il craignoit si fort et le bruit et l’éclat , qu’il a sacrifié cel- les qui pou voient le plus contribuer à sa gloire. Nulle prétention, malgré son mérite éminent ; nul empressement à se faire va- loir, nul penchant à parler de soi ; nul désir, ni apparent ni caché, de se mettre au dessus des autres : ses propres talens n’éloient à 3 34 DISCOURS ACADÉMIQUES. ses yeux que des droits qu’il a voit acquis pour être plus modeste , et il paroissoit n’a- voir cultivé son esprit que pour élever son âme et perfectionner ses vertus. Vous, monsieur, qui jugez si bien de la vérité 'des peintures , auriez-vous saisi tous les traits qui vous sont communs avec votre prédécesseur dans l’esquisse que je viens de tracer ? Si l’art que vous avez chanté pou- voit s’étendre jusqu’à peindre les âmes, nous verrions d’un coup d’œil ces ressemblances heureuses que je ne puis qu’indiquer; elles consistent également et dans ces qualités du cœur si précieuses à la société, et dans ces talens de l’esprit qui vous ont mérité nos suf- frages. Toute grande qu’est notre perte, vous pouvez donc, monsieur, plus que la réparer; vous venez d’enrichir les arts et notre langue d’un ouvrage qui suppose, avec la perfection du goût, tant de connoissances différentes, que vous seul peut-être en possédez les rap- ports et l’ensemble ; vous seul , et le premier, avez osé tenter de représenter par des sons harmonieux les effets des couleurs; vous avez essayé de faire pour la peinture ce qu’Horace fit pour la poésie, un monument plus durable que le bronze. Rien ne garantira des outra- ges du temps ces tableaux précieux des Ra- phaël , des Titien , des Corrége ; nos arrière- neveux regretteront ces chefs-d’œuvre comme nous regrettons nous-mêmes ceux des Zeuxis et des Apelles. Si vos leçons savantes son! d’un si grand prix pour nos jeunes artistes, que ne vous devront pas dans les siècles fu-, turs l’art lui-même et ceux qui le cultive- ront ? Au feu de vos lumières ils pourroni réchauffer leur génie; ils retrouveront an moins, dans la fécondité de vos principes el dans la sagesse de vos préceptes , une partit des secours qu’ils auroient tirés de ces mo- dèles sublimes qui ue subsisteront plus qut par la renommée. fc V» -V* X'A. -VA. •V%V>'V%. 'A'*'»/*. l’abrégé le plus savant qui ait jamais été Ire J fait, si la science est en effet l’histoire des | faits; et quand même on supposeroit qu’A- ristote auroit tiré de tous les livres de son rit j temps ce qu’il a mis dans le sien , le plan 'e | de l’ouvrage, sa distribution, le choix des us j exemples, la justesse des comparaisons , une 115 certaine tournure dans les idées , que j’ap- ^ ! pellerois volontiers le caractère philoso- *eS phique, ne laissent pas douter un instant fl' j qu’il ne fût lui-même bien plus riche que ^ j ceux dont il auroit emprunté. ® ! Pline a travaillé sur un plan bien plus ® i grand , et peut-être trop vaste : il a voulu I- tout embrasser, et il semble avoir mesuré rit j la nature et l’avoir trouvée trop petite en- lé- core pour l’étendue de son esprit. Son His- on toire naturelle comprend , indépendamment - de l’histoire des animaux, des plantes, et les ides minéraux, l’histoire du ciel et de la ueï terre, la médecine, le commerce, la navi- re gation, l’histoire des arts libéraux et méca- it, niques, l’origine des usages, enfin toutes ire | les sciences naturelles et tous les arts hu- a- mains; et ce qu’il y a d’étonnant c’est que les idans chaque partie Pline est également ou grand. L’élévation des idées , la noblesse du nt J style, relèvent encore sa profonde érudi- ii- tion : non seulement il savait tout ce qu’on en pouvoit savoir de son temps, mais il avoit les cette facilité de penser en grand qui mul- a. tiphe la science; il avoit cette finesse de SUR- NATURELLE. Sq flexion , de laquelle dépendent l’élégance et le goût, et il communique à ses lecteurs une certaine liberté d’esprit , une hardiesse de penser , qui est le germe de la philoso- phie. Son ouvrage, tout aussi varié que la nature, la peint toujours en beau : c’est, si l’on veut, une compilation de tout ce qui avoit été écrit avant lui, une copie de tout ce qui avoit été fait d’excellent et d’utile à savoir ; mais cette copie a de si grands traits., cette compilation contient des choses ras- semblées d’une manière si neuve, qu’elle est préférable à la plupart des ouvrages ori- ginaux qui traitent des mêmes matières. Nous avons dit que l’histoire fidèle et la description exacte de chaque chose étoient les deux seuls objets que l’on devoit se proposer d’abord dans l’étude de l’histoire naturelle. Les anciens ont bien rempli le premier, et sont peut-être autant au des- sus des modernes par cette première partie, que ceux-ci sont au dessus d’eux par la se- conde; car les anciens ont très-bien traité l’historique de la vie et des mœurs des ani- maux, de la culture et des usages des plan- tes, des propriétés et de l’emploi des miné- raux , et en même temps ils semblent avoir négligé à dessein la description de chaque chose. Ce n’est pas qu’ils ne fussent très-ca- pables de la bien faire : mais ils dédaignoient apparemment d’écrire des choses qu’ils re- gardoient comme inutiles, et cette façon de penser tenoit à quelque chose de général, et n’étoit pas aussi déraisonnable qu’on pour- roit le croire; et même ils ne pouvoient guère penser autrement. Premièrement , ils cherchoient à être courts, et à ne mettre dans leurs ouvrages que les faits essentiels et utiles, parce qu’ils n’avoient pas, comme nous, la facilité de multiplier les livres et de les grossir impunément. En second lieu , ils tournoient toutes les sciences du côté de l’utilité, et donnaient beaucoup moins que nous à la vaine curiosité; tout ce qui n’é- toit pas intéressant pour la société, pour la santé, pour les arts, étoil négligé; ils rap- portaient tout à l’homme moral, et ils ne croyoient pas que les choses qui n’avoient point d’usage fussent dignes de l’occuper ; un insecte inutile dont nos observateurs ad- mirent les manœuvres , une herbe sans vertu dont nos botanistes observent les étamines, n’étoient pour eux qu’un insecte ou une herbe. On peut citer pour exemple le vingt- septième livre de Pline, reliqua herbarum généra , où il met ensemble toutes les her- bes dont il ne fait pas grand cas, qu’il se contente de nommer par lettres alphabé- 58 MANIÈRE tiques, en indiquant seulement quelqu’un de leurs caractères généraux et de leurs usa- ges pour la médecine. Tout cela venoit du peu de goût que les anciens avoient pour la physique; ou pour parler plus exactement, comme ils n’avoient aucune idée de ce que nous appelons physique parliculière et ex- périmentale, ils ne pensoient pas que l’on pût tirer aucun avantage de l’examen scru- puleux et de la description exacte de toutes les parties d’une plante ou d’un petit ani- mal ; et ils ne voyoient pas les rapports que cela pouvoit avoir avec l’explication des phénomènes de la nature. Cependant cet objet est le plus important, et il ne faut pas s’imaginer, même aujour- d’hui, que dans l’étude de l’histoire natu- relle , on doive se borner uniquement à faire des descriptions exactes, et à s’assurer seu- lement des faits particuliers. C’est, à la vé- rité, et comme nous l’avons dit, le but es- sentiel cju’on doit se proposer d’abord ; mais il faut tâcher de s’élever à quelque chose de plus grand et de plus digne encore de nous occuper, c’est de combiner les observations , de généraliser les faits, de les lier ensemble par la force des analogies, et de tâcher d’ar- river à ce haut degré de connoissances où nous pouvons juger que les effets particu- liers dépendent d’effets plus généraux, où nous pouvons comparer la nature avec elle- même dans ses grandes opérations, et d’où nous pouvons enfin nous ouvrir des routes pour perfectionner les différentes parties de la physique. Une grande mémoire, de l’as- siduité, et de l’attention, suffisent pour ar- river au premier but : mais il faut ici quel- que chose de plus , il faut des vues générales , un coup d’œil ferme, et un raisonnement formé plus encore par la réflexion que par l’étude; il faut enfin cette qualité d’esprit qui nous fait saisir les rapports éloignés, les rassembler et en former un corps d’idées raisonnées, après en avoir apprécié au juste les vraisemblances et en avoir pesé les pro- babilités. C’est ici où l’on a besoin de méthode pour conduire son esprit , non pas de celle dont nous avons parlé, qui ne sert qu’à ar- ranger arbitrairement des mots, mais de cette méthode qui soutient l’ordre même des choses, qui guide notre raisonnement, qui éclaire nos vues, les étend , et nous em- pêche de nous égarer. Les plus grands phi- losophes ont senti la nécessité de cette mé- thode, et même ils ont voulu nous en don- ner des principes et des essais : mais les uns ne nous ont laissé que l’histoire de D’ÉTUDIER leurs pensées , et les autres la fable de leur imagination; et quelques-uns se sont élevés à ce haut point de métaphysique d’où l’on peut voir les principes , les rapports , et l’ensemble des sciences : aucun ne nous a sur cela communiqué ses idées, aucun ne nous a donné des conseils, et la méthode de bien conduire son esprit dans les sciences est encore à trouver : au défaut de précep- tes , ou a substitué des exemples ; au lieu de principes, on a employé des définitions; au lieu de faits avérés, des suppositions ha- sardées. Dans ce siècle même , où les sciences pa- roissent être cultivées avec soin, je crois j qu’il est aisé de s’apercevoir que la philoso- j phie est négligée, et peut-être plus que dans aucun autre siècle; les arts qu’on veut ap- peler scientifiques ont pris sa place ; les j méthodes de calcul et de géométrie, celles de botanique et d histoire naturelle, les for- mules, en un mot, et les dictionnaires, oc- cupent presque tout le monde : on s’imagine savoir davantage, parce qu’on a augmenté le nombre des expressions symboliques et des phrases savantes, et on ne fait point attention que tous ces arts ne sont que des j échafaudages pour arriver à la science, etj non pas la science elle-même; qu’il ne faut s’en servir que lorsqu’on ne peut s’en pas-N ser, et qu’on doit toujours se défier qu’ils; ne viennent à nous manquer, lorsque nous! voudrons les appliquer à l’édifice. i La vérité, cet être métaphysique dont; tout le monde croit avoir une idée claire J ( me paroît confondue dans un si grand nom- ! p bre d’objets étrangers auxquels on donne p son nom , que je ne suis pas surpris qu’ori i ait de la peine à la reconnoitre. Les préjugée] pi et les fausses applications se sont multiplié.' | œ à mesure que nos hypothèses ont été plu;j pu savantes , plus abstraites et plus perfection al nées; il est donc plus difficile que jamais d< n reconnoitre ce que nous pouvons savoir, e! lio de le distinguer nettement de ce que noua fer devons ignorer. Les réflexions suivantes ser i sot viront au moins d’avis sur ce sujet im | dé portant. j (e| Le mot de vérité ne fait naître qu’un ion idée vague, il n’a jamais eu de défini tioi jirj précise; et la définition elle-même, pris : \ dans un sens général et absolu, n’est qu’uni jonl abstraction qui n’existe qu’en vertu de quelj poit que supposition. Au lieu de chercher a fairjj JB une définition de la vérité, cherchons don] is à faire une énumération; voyons de près c Je! q^gn appelle communément vérités, et tfj tfpé cHons de nous en former des idées nettes. a, | fest L’HISTOIRE NATURELLE. 59 Il y a plusieurs espèces de vérités, et on 1 coutume de mettre dans le premier ordre les vérités mathématiques : ce ne sont ce- pendant que des vérités de définitions; ces définitions portent sur des suppositions sim- îles, niais abstraites, et toutes les vérités jn ce genre ne sont que des conséquences composées, mais toujours abstraites de ces léfinitions. Nous avons fait les suppositions, ions les avons combinées de toutes les fa- çons, ce corps de combinaisons est la science nathématique; il n’y a donc rien dans cette cience que ce que nous y avons mis , et les Mérités qu’on en tire ne peuvent être que des expressions différentes, sous lesquelles se îrésentent les suppositions que nous avons employées : ainsi les vérités mathématiques ie sont que les répétitions exactes des défi- îitions ou suppositions. La dernière consé- quence n’est vraie que parce qu’elle est dentique avec celle qui la précède, et que belle-ci l’est avec la précédente, et ainsi de [uite, en remontant jusqu’à la première upposition; et comme les définitions sont es seuls principes sur lesquels tout est éta- bli, et qu’elles sont arbitraires et relatives, toutes les conséquences qu’on en peut tirer kmt également arbitraires et relatives. Ce qu’on appelle vérités mathématiques se ré- duit donc à des identités d’idées, et n’a au- cune réalité : nous supposons , nous raison- nons sur nos suppositions, nous en tirons jles conséquences , nous concluons : la con- clusion ou dernière conséquence est une proposition vraie, relativement à notre sup- position; mais cette vérité n’est pas plus réelle que la supposition elle-même. Ce n’est point ici le lieu de nous étendre sur les usages des sciences mathématiques, non plus Jus bue sur l’abus qu’on en peut faire ; il nous suffit d’avoir prouvé que les vérités mathé- dematiques ne sont que des vérités de défiui- ettions, ou, si l’on veut, des expressions dif- férentes de la même chose, et qu’elles ne sont vérités que relativement à ces mêmes définitions que nous avons faites : c’est par jcette raison qu’elles ont l’avantage d’être nejtoujours exactes et démonstratives, mais ab- ionjstraites , intellectuelles et arbitraires. Les vérités physiques, au contraire, ne sont nullement arbitraires, et ne dépendent point de nous; au lieu d’être fondées sur lirf'des suppositions que nous ayons faites, elles il ne sont appuyées que sur des faits. Une suite cjde faits semblables, ou, si l’on veut, une répétition fréquente et une succession non interrompue des mêmes événemens, fait l’essence de la vérité physique ; ce qu’on appelle vérité physique n’est donc qu’une probabilité, mais une probabilité si grande, qu’elle équivaut à une certitude. En mathé* malique on suppose ; en physique on pose et on établit. Là ce sont des définitions; ici ce sont des faits. On va de définitions en définitions dans es sciences abstraites; on marche d’observations en observations dans les sciences réelles. Dans les premières on arrive à l’évidence, dans les dernières à la certitude. Le mot de vérité comprend l’une et l’autre, et répond par conséquent à deux idées différentes ; sa signification est vague et composée, il n’éloit donc pas possible de la définir généralement; il falloil, comme nous venons de le faire , en distinguer les genres afin de s’en former une idée nette. Je ne parlerai pas des autres ordres de vérités: celles de la morale, par exemple, qui sont en partie réelles et en partie ar- bitraires, demanderoient une longue dis- cussion qui nous éloigneroit de notre but, et cela d’autant plus qu’elles n’ont pour objet et pour fin que des convenances et des pro- babilités. L’évidence mathématique et la certitude physique sont donc les deux seuls points sous lesquels nous devons considérer la vé- rité; dès qu’elle s’éloignera de l’une ou de l’autre, ce n’est plus que vraisemblance et probabilité. Examinons donc ce que nous pouvons savoir de science évidente ou cer- taine; après quoi nous verrons ce que nous ne pouvons connoître que par conjecture, et enfin ce que nous devons ignorer. Nous savons ou nous pouvons savoir de science évidente toutes les propriétés, ou plutôt tous les rapports des nombres , des lignes, des surfaces et de toutes les autres quantités abstraites; nous pourrons les sa- voir d’une manière plus complète à mesure que nous nous exercerons à résoudre de nouvelles questions, et d’une manière plus sûre à mesure que nous rechercherons les causes des difficultés. Comme nous sommes les créateurs de celte science , et qu’elle ne comprend absolument rien que ce que nous avons nous-mêmes imaginé, il ne peut y avoir ni obscurités ni paradoxes qui soient réels ou impossibles, et on en trouvera toujours la solution en examinant avec soin les prin- cipes supposés , et en suivant toutes les dé- marches qu’on a faites pour y arriver ; comme les combinaisons de ces principes et des façons de les employer sont innombra- bles, il y a dans les mathématiques un champ d’une immense étendue de connois- sances acquises et à acquérir, que nous se* 6o MANIERE rons toujours les maîtres de cultiver quand nous voudrons, et dans lequel nous re- cueillerons toujours la même abondance de vérités. Mais ces vérités auroient été perpétuelle- ment de pure spéculation , de simple curio- sité et d’eniière inutilité, si on n’avoit pas trouvé les moyens de les associer aux vérités physiques. Avant que de considérer les avan- tages de cette union, voy ons ce que nous pou» vons espérer de savoir en ce genre. Les phénomènes qui s’offrent tous les jours à nos yeux, qui se succèdent et se ré- pètent sans interruption et dans tous les cas, sont le fondement de nos connoissances phy- siques. Il suffit qu’une chose arrive toujours de la même façon , pour qu’elle fasse une certitude ou une vérité pour nous; tous les faits de la nature que nous avons observés , ou que nous pourrons observer, sont autant de vérités : ainsi nous pouvons en augmenter le nombre autant qu’il nous plaira, en mul- tipliant nos observations; notre science n’est ici bornée que par les limites de l’univers. Mais lorsqu’après avoir bien constaté les faits par des observations réitérées, lorsqu’a- près avoir établi de nouvelles vérités par des expériences exactes , nous voulons chercher les raisons de ces mêmes faits , les causes de Ces effets, nous nous trouvons arrêtés tout à coup , réduits à lâcher de déduire les ef- fets d’effets plus généraux, et obligés d’a- vouer que les causes nous sont et nous seront perpétuellement inconnues; parce que nos sens étant eux-mêmes les effets de causes que nous ne connoissons point , ils ne peu- vent nous donner des idées que des effets , et jamais des causes; il faudra donc nous ré- duire à appeler cause un effet général, et renoncer à savoir au delà. Ces effets généraux sont pour nous les vraies lois de la nature: tous les phénomènes que nous reconnoî Irons tenir à ces lois et en dépendre, seront autant de faits expliqués, autant de vérités comprises ; ceux que nous ne pourrons y rapporter, seront de simples faits qu’il faut mettre en réserve, en atten- dant qu’un plus grand nombre d’observa lions et une plus longue expérience nous-appren- nent d’autres faits, et nous découvrent la cause physique, c’est-à-dire l’effet général dont ces effets particuliers dérivent. C’est ici où l’union des deux sciences mathématique et physique peut donner de grands avan- tages : l’une donne le combien, et l’autre le comment des choses; et comme il s’agit ici de combiner et d’estimer des probabilités pour juger si un effet dépend plutôt d’une D’ÉTUDIER cause que d’une autre, lorsque vous av( imaginé par la physique le comment , c’esl à-dire lorsque vous avez vu qu’un tel eff< pourroit bien dépendre de telle cause , voi appliquez ensuite le calcul pour vous assure du combien de cet effet combiné avec s cause; et si vous trouvez que le résultat s’a< corde avec les observations, la probabilil que vous avez deviné juste augmente si for' ^ qu’elle devient une certitude , au lieu qu sans ce secours elle seroit demeurée simpl probabilité. | J Il est vrai que cette union des mathéma tiques et de la physique ne peut se faire qu pour un très-petit nombre de sujets : il fau pour cela que les phénomènes que nou cherchons à expliquer soient susceptible d’être considérés d’une manière abstraite et que de leur nature ils soient dénués d< ^ presque toutes qualités physiques; car poui peu qu’ils soient composés , le calcul ne peu plus s’y appliquer. La plus belle et la plut heureuse application qu’on en ait jamais! faite est au système du monde ; et il faut avouer que si Newton ne nous eût donne que les idées physiques de son système, sansi les avoir appuyées sur des évaluations pré- cises et mathématiques, elles n’auroient pas eu , à beaucoup près , la même force : maisi on doit sentir en même temps qu’il y a très- peu de sujets aussi simples , c’est-à-dire aussi dénués de qualités physiques que l’est ce- lui-ci; car la distance des planètes est si grande, qu’on peut les considérer les unes ^ à l’égard des autres comme n’étant que des points. On peut en même temps, sans se t tromper, faire abstraction de toutes les qua- jj^ lités physiques des planètes , et ne considérer que leur force d’attraction : leurs mouve- mens sont d’ailleurs les plus réguliers que nous commissions , et n’éprouvent aucun re- tardement par la résistance. Tout cela con- court à rendre l’explication du système du monde un problème de mathématique , au- quel il ne falloit qu’une idée physique heu- reusement conçue pour la réaliser; et celte idée est d’avoir pensé que la force qui fait tomber les graves à la surface de la terre , pourroit bien être la même que celle qui re- tient la lune dans son orbite. Mais, je le répète, il y a, bien peu de sujets en physique où l’on puisse appliquer aussi avantageusement les sciences abstraites, et je ne vois guère que l’astronomie et l’op- tique auxquelles elles puissent être d’une grande utilité : l’astronomie par les raisons que nous venons d’exposer, et l’optique parce que la lumière étant un corps presque inh- L’HISTOIRE NATURELLE. 61 ment petit, dont les effets s’opèrent en jne droite avec une vitesse presque infinie, propriétés sont presque mathématiques ; qui fait qu’on peut y appliquer avec elque succès le calcul et les mesures géo- êtriques. Je ne parlerai pas des mécani- es , parce que la mécanique rationnelle est e-mème une science mathématique et ab- aite , de laquelle la mécanique pratique , l’art de faire et de composer les machines, mprunte qu’un seul principe par lequel peut juger tous les effets en faisant ab- action des frottemens et des autres qualités ysiques. Aussi m’a-t-il toujours paru qu’il avoit une espèce d’abus dans la manière nt on professe la physique expérimentale, bjet de cette science n’étant point du tout ui qu’on lui prête. La démonstration des èts mécaniques, comme de la puissance leviers, des poulies, de l’équilibre des ides et des fluides , de l’effet des plans in- lés, de celui des forces centrifuges, etc., parlenant entièrement aux mathématiques, pouvant être saisie par les yeux de l’esprit pc la dernière évidence, il me paroît su- rflu de la représenter à ceux du corps : le û but est, au contraire, de faire des ex- iences sur toutes les choses que nous ne avons pas mesurer par le calcul , sur tous effets dont nous ne connoissons pas en- •e les causes, et sur toutes les propriétés it nous ignorons les circonstances ; cela 1 peut nous conduire à de nouvelles dé- livertes , au lieu que la démonstration des ts mathématiques ne nous apprendra ja- is que ce que nous savons déjà. JMais cet abus n’est rien en comparaison | inconvéniens où l’on tombe lorsqu’on I“| it appliquer la géométrie et le calcul à des ets dont nous ne connoissons pas assez les priétés pour pouvoir les mesurer : on est igé dans tous ces cas de faire des suppo- ons toujours contraires à la nature, de ouiller le sujet de la plupart de ses qua- s, d’en faire un être abstrait qui ne res- ible plus à l’être réel; et lorsqu’on a ucoup raisonné et calculé sur les rap- re' ts et les propriétés de cet être abstrait , Jpi’on est arrivé à une conclusion tout ® jsi abstraite, on croit avoir trouvé quel- chose de réel , et on transporte ce ré- at idéal dans le sujet réel; ce qui pro- une infinité de fausses conséquences et reurs. est ici le point le plus délicat et le plus ortant de l’étude des sciences : savoir 1 distinguer ce qu’il y a de réel dans un sujet de ce que nous y mettons d’arbitraire en le considérant, reconnoître clairement les propriétés qui lui appartiennent et celles que nous lui prêtons, me^ paroît être le fon- dement de la vraie méthode de conduire son esprit dans les sciences ; et si on ne perdoit jamais de vue ce principe, on ne feroit pas une fausse démarche , on éviteroit de tomber dans ces erreurs savantes qu’on reçoit sou- vent comme des vérités : on verroit dispa- roître les paradoxes, les questions insolubles des sciences abstraites; on reconnoîtroit les préjugés et les incertitudes que nous portons nous-mêmes dans les sciences réelles; on viendrait alors à s’entendre sur la métaphy- sique des sciences ; on cesserait de disputer, et on se réunirait pour marcher dans la même route à la suite de l’expérience , et arriver enfin à la connoissance de toutes les vérités qui sont du ressort de l’esprit hu- main. Lorsque les sujets sont trop compliques pour qu’on puisse y appliquer avec avantage le calcul et les mesures , comme le sont pres- que tous ceux de l’histoire naturelle et de la physique particulière, il me paroît que la vraie méthode de conduire son esprit dans ces recherches, c’est d’avoir recours aux observations , de les rassembler, d’en faire de nouvelles, et en assez grand nombre pour nous assurer de la vérité des faits princi- paux , et de n’employer la méthode mathé- matique que pour estimer les probabilités des conséquences qu’on peut tirer de ces faits; surtout il faut tâcher de les généraliser et de bien distinguer ceux qui sont essentiels de ceux qui ne sont qu’accessoires au sujet que nous considérons; il faut ensuite les lier ensemble par les analogies, confirmer ou détruire certains points équivoques par le moyen des expériences , former son plan d’explication sur la combinaison de tous ces rapports, et les présenter dans l’ordre le plus naturel. Cet ordre peut se prendre de deux façons : la première est de remonter des effets particuliers à des effets plus géné- raux, et l’autre de descendre du général au particuliei : toutes deux sont bonnes, et le choix de l’une ou de l’autre dépend plutôt du génie de l’auteur que de la nature des choses, qui toutes peuvent être également bien traitées par l’une ou par l’autre de ces manières. Nous allons donner des essais de cette méthode dans les discours suivans, de la Théorie de la Terre, de la Formation des Planètes et de la Génération des Animaux. SECOND DISCOURS. HISTOIRE ET THÉORIE DE LA TERRE. Vidi ego , quod fuerat quondam solidissima tell [ Esse fretum; vidi factas ex æquore terras; Et procul à pelago eonchæ jacuêre marinæ , Et vêtus inventa est in montibus anchora summisiî Quodque fuit campus, vallem decursus aquarur Fecit, et eluvie mous est deductus in æquor. , (O vin. , Metarn,, lib. xv, r. Il n’est ici question ni de la figure 1 de la terre , ni de son mouvement , ni des rap- ports qu’elle peut avoir à l’extérieur avec les autres parliesde l’univers; c’est sa constitu- tion intérieure , sa forme et sa matière, que nous nous proposons d’examiner. L’histoire générale de la terre doit précéder l’histoire particulière de ses productions, et les dé- tails des faits singuliers de la vie et des mœurs des animaux , ou de la culture et de la vé- gétation des plantes , appartiennent peut-être moins à l’histoire naturelle que les résultats généraux des observations qu’on a faites sur les différentes matières qui composent le globe terrestre, sur les éminences, les pro- fondeurs et les inégalités de sa forme , sur le mouvement des mers , sur la direction des montagnes, sur la position des carrières, sur la rapidité et les effets des courans de la mer , etc. Ceci est la nature en grand , et ce sont là ses principales opérations; elles influent sur «outes les autres, et la théorie de ces effets est une première science de la- quelle dépend l’intelligence des phénomènes particuliers , aussi bien que la connoissance exacte des substances terrestres; et quand même on voudroit donner à cette partie des sciences naturelles le nom de physique , toute physique où l’on n’admet point de sys- tèmes n’est-elle pas l’histoire de la nature ? Dans des sujets d’une vaste étendue dont les rapports sont difficiles à rapprocher , où les faits sont inconnus en partie, et pour le reste incertains , il est plus aisé d’imaginer un système que de donner une théorie : aussi la théorie de la terre n’a-t-elle jamais été traitée que d’une manière vague et hy- i. Voyez ci-après les Preuves de la Théorie de la terre , art. I. pothétique. Je ne parlerai donc que légè méat des idées singulières de quelques i teurs qui ont écrit sur cette matière. L’una, plus ingénieux que raisonnab astronome convaincu du système de Newti j; envisageant tous les événemens possibles cours de la direction des astres, expliqq à l’aide d’un calcul mathématique, par: queue d’une comète, tous les changera qui sont arrivés au globe terrestre. Un autre3, théologien hétérodoxe,!; tête échauffée de visions poétiques, ci avoir vu créer l’univers. Osant prendre i style prophétique, après nous avoir dit; qu’étoit la terre au sortir du néant, ce < ; le déluge y a changé, ce qu’elle a été, et ( qu’elle est, il nous prédit ce qu’elle se< , même après la destruction du genre hum;: ( Un troisième 4, à la vérité meilleur 1 > servateur que les deux premiers , mais t a aussi peu réglé dans ses idées, expliq j par un abîme immense d’un liquide cont 1 T dans les entrailles du globe, les principe [{ phénomènes de la terre, laquelle, selon j ^ n’est qu’une croûte superficielle et fort mir i j qui sert d’enveloppe au fluide qu’elle i B ferme. ^ Toutes ces hypothèses , faites au hasa ; (j et qui ne portent que sur des fondea ; ^ ruineux , n’ont point éclairci les idées , et j( confondu les faits. On a mêlé la fable j ^ physique : aussi ces systèmes n’ont été r< 1 que de ceux qui reçoivent tout aveuglém ^ incapables qu’ils sont de distinguer les m 1 2. Whiston. Voyez les Preuves de la Théori ;j la terre , art. II. ! ® 3. Burnet. Voyez les Preuves de la Théorie < ! fi terre, art. III. 4. Woodward. Voyez les Preuves, art. IV. THÉORIE DE LA TERRE. ces du vraisemblable, et plus flattés du mer- veilleux que frappés du vrai. Ce que nous avons à dire au sujet de la terre sera sans doute moins extraordinaire , et pourra paroître commun en comparaison des grands systèmes dont nous venons de parler : mais on doit se souvenir qu’un bis- . torien est fait pour décrire et non pour in- venter , qu’il ne doit se permeltre aucune supposition , et qu’il ne peut faire usage de son imagination que pour combiner les ob- servations, généraliser les faits, et en for- mer un ensemble qui présente à l’esprit un ordre méthodique d’idées claires et de rap- ports suivis et vraisemblables : je dis vraisem- blables , car il ne faut pas espérer qu’on puisse donner- des démonstrations exactes sur cette matière, elles n’ont lieu que dans les sciences mathématiques; et nos connois- sances en physique et en histoire naturelle dépendent de l’expérience et se bornent à des inductions. Commençons donc par nous représenter ce que l’expérience de tous les temps et ce que nos propres observations nous appren- nent au sujet de la terre. Ce globe immense nous offre, à la surface, des hauteurs , des profondeurs, des plaines, des mers, des marais , des fleuves , des cavernes , des gouf- fres, des volcans; et à la première inspection nous ne découvrons en tout cela aucune ré- gularité , aucun ordre. Si nous pénétrons dans son intérieur, nous y trouverons des métaux, des minéraux, des pierres, des bi- tumes , des sables , des terres , des eaux et des matières de toute espèce, placées comme au hasard et sans aucune règle apparente. En examinant avec plus d’attention , nous voyons des montagnes 1 * affaissées, des rochers fendus et ' brisés , des contrées englouties , des îles nouvelles, des terrains submergés, des cavernes comblées ; nous trouvons des matières pesantes souvent posées sur des matières légères ; des corps durs environnés de substances molles ; des choses sèches , hu- mides, chaudes, froides, solides, friables, toutes mêlées et dans une espèce de confu- sion qui ne nous présente d’autre image que celle d’un amas de débris et d’un monde en ruine. Cependant nous habitons ces ruines avec une entière sécurité ; les générations d’hom- mes, d’animaux, de plantes, se succèdent sans interruption : la terre fournit abondam- i. Vide Senec. Quœst. , lib. vi , cap. 21; Strab. Geograph., lib. i ; Oros., lib. n, cap. 18; Plin., lib. ii, cap. 19; Histoire de V Academie des Sciences , année 1708, page 2 3» 63 ment à leur subsistance ; la mer a des limites et des lois , ses mouvemens y sont assujettis; l’air a ses courans réglés a , les saisons ont leurs retours périodiques et certains, la ver- dure n’a jamais manqué de succéder aux frimas; tout nous paroît être dans l’ordre : la terre, qui tout à l’heure n’étoit qu’un chaos , est un séjour délicieux , où régnent le calme et l’harmonie, où tout est animé et conduit avec une puissance et une intelli- gence qui nous remplissent d’admiration et nous élèvent jusqu’au Créateur. Ne nous pressons donc pas de prononcer sur l’irrégularité que nous voyons à la sur- face de la terre , et sur le désordre apparent qui se trouve dans son intérieur : car nous en reconnoîtrons bientôt l’utilité, et même la nécessité ; et en y faisant plus d’attention, nous y trouverons peut-être un ordre que nous ne soupçonnions pas, et des rapports généraux que nous n’apercevions pas au pre- mier coup d’œil. A la vérité, nos connois- sancesà cet égard seront toujours bornées: nous ne connoissons point encore la surface entière3 * du globe : nous ignorons en partie ce qui se trouve au fond des mers ; il y en a dont nous n’avons pu sonder les profondeurs; nous 11e pouvons pénétrer que dans l’écorce de la terre, et les 4 plus grandes cavités, les mines 5 les plus profondes , ne descendent pas à la huit millième partie de son diamè- tre. Nous ne pouvons donc juger que de la couche extérieure et presque superficielle ; l’intérieur de la masse nous est entièrement inconnu. On sait que , volume pour volume, la terre pèse quatre fois plus que le soleil. On a aussi le rapport de sa pesanteur avec les autres planètes : mais ce n’est qu’une es- timation relative; l’unité de mesure nous manque , le poids réel de la matière nous étant inconnu : en sorte que l’intérieur de ta terre pourroit être ou vide ou rempli d’une matière mille fois plus pesante que l’or, et nous n’avons aucun moyen de le reconnoî- tre ; à peine pouvons-nous former sur cela quelques6 conjectures raisonnables?. 2. "Voyez les Preuves, art. XI V. 3. Voyez les Preuves, art. VI. 4. Voyez Trans. phil. abrig., vol. II, page 323. 5. Voyez Bojrle’s JVorks , vol. III , page 232. 6. Voyez les Preuves, art. 1. 7. Lorsque j’ai écrit ce Traité de la Théorie de la terre, en 1744» je n'étois pas instruit de tous les faits par lesquels on peut reconnoître que la den- sité du globe terrestre , prise généralement , est moyenne entre les densités du fer, des marbres , des grès, de la pierre et du verre, telle que je l’ai déterminée dans mon premier Mémoire ; je n’avois pas fait alors toutes les expériences qui. m’ont con- duit à ce résultat; il me manquoit aussi beaucoup 64 THEORIE DE LA TERRE. Il faut donc nous borner à examiner et à décrire la surface de la terre , et la petite épaisseur intérieure dans laquelle nous avons d’observations que j’ai recueillies dans ce long es • Î>ace de temps : ces expériences toutes faites dans a même vue , et ces observations , nouvelles pour la plupart , ont étendu mes premières idées , et m’en ont fait naître d’autres accessoires et même plus élevées ; en sorte que ces conjectures raisonnables que je soupçonnois dès lors qu’on pouvoit former, me paroissent être devenues des inductions très- plausibles , desquelles il résulte que le globe de la terre est principalement composé, depuis la surface jusqu’au centre , d’une matière vitreuse un peu plus dense que le verre pur; la lune, d’une matière aussi dense que la pierre calcaire; Mars, d’une matière à peu près aussi dense que celle du mar- bre ; Vénus , d’une matière un peu plus dense que l’émeril; Mercure, d’une matière un peu plus dense que l’étain ; Jupiter, d’une matière moins dense que la craie ; et Saturne , d’une matière presque aussi légère que la pierre ponce ; et enfin que les satellites de ces deux grosses planètes sont composés d’une matière encore plus légère que leur planète prin- cipale. Il est certain que le centre de gravité du globe , eu plutôt du sphéroïde terrestre, coïncide avec son centre de grandeur, et que l'axe sur lequel il tourne passe par ces mêmes centres , c’est-à-dire par le milieu du sphéroïde, et que par conséquent il est de même densité dans toutes ses parties correspon- dantes : s’il en étoit autrement, et que le centre de grandeur ne coïncidât pas avec le centre de gra- vité, l’axe de rotation se trouveroit alors plus d’un côté que de l’autre; et, dans les différens hémi- sphères delà terre, la durée de la révolution pa- roitroit inégale. Or, cette révolution est parfaite- ment la même pour tous les climats : ainsi toutes les parties correspondantes du globe sont de la même densité relative. Et comme il est démontré par son renflement à l’équateur et par sa chaleur propre , encore actuel- lement existante, que , dans son origine, le globe terrestre étoit composé d’une matière liquéfiée par le feu, qui s’est rassemblée par sa force d’attrac- tion mutuelle, la réunion de cette matière en fu- sion n’a pu former qu’une sphère pleine depuis le centre à la circonférence , laquelle sphère pleine ne diffère d’un globe parfait que par ce renflement sous l’équateur et cet abaissement sous les pôles , produits par la force centrifuge dès les premiers momens que cette masse encore liquide a commencé à tourner sur elle-même. Nous avons démontré que le résultat de toutes les matières qui éprouvent la violente action du feu, est l’élat de vitrification; et comme toutes se réduisent en verre plus ou moins pesant, il est né- cessaire que l’intérieur du globe soit en effet une matière vitrée, de la même nature que la roche vitreuse, qui fait partout le fond de sa surface au dessous des argiles, des- sables vitrescibles , des pierres calcaires, et de toutes les autres matières qui ont été remuées , travaillées et transportées par les eaux. ’ Ainsi l’intérieur du globe est une masse de ma- tière vitrescible , peut-être spécifiquement un peu plus pesante que la roche vitreuse , dans les fentes de laquelle nous cherchons les métaux ; mais elle est de même nature , et n’en diffère qu’en ce qu’elle est plus massive et plus pleine : il n’y a de vides pénétré. La première chose qui se présente, c’est l’immense quantité d’eau qui couvre la j plus grande partie du globe. Ces eaux occu- et de cavernes que dans les couches extérieures ; l’intérieur doit être plein ; car ces cavernes n’ont pu se former qu’à la surface , dans le temps de la consolidation et du premier refroidissement : les fentes perpendiculaires qui se trouvent dans les montagnes , ont été formées presque en même temps, c’est-à-dire lorsque les matières se sont resserrées par le refroidissement : toutes ces cavités ne pouvoient se faire qu’à la surface , comme l’on voit dans une masse de verre ou de minéral fondu les éminences et les trous se présenter à la super- ficie , tandis que l’intérieur du bloc est solide et plein. Indépendamment de cette cause générale de la formation des cavernes et des fentes à la surface de la terre, la force centrifuge étoit une autre cause qui , se combinant avec celle du refroidissement, a produit dans le commencement de plus grandes cavernes et dt plus grandes inégalités dans les cli- mats où elle agissoit le plus puissamment. C’est . par cette raison que les plus hautes montagnes et 1 les plus grandes profondeurs se sont trouvées voi- sines des tropiques et de l’équateur; c’est par la même raison qu’il s’est fait dans ces contrées mé- ■ ridionaies plus de bouleversemens que nulle part ailleurs. Nous ne pouvons déterminer le point de ï profondeur auquel les couches de la terre ont été boursoufflées par le feu et soulevées en cavernes ; mais il est certain que cette profondeur doit être : bien plus grande à l’équateur que dans les autres climats, puisque le globe, avant sa consolidation, s’y est élevé de six lieues un quart de plus que sous les pôles. Cette espèce de croûte ou de calotte va toujours en diminuant d’épaisseur depuis l’équa- teur, et se termine à rien sous les pôles. La ma- tière qui compose cette croûte est la seule qui ait été déplacée dans le temps de la liquéfaction, et refoulée par l’action de la force centrifuge; le reste : de la matière qui compose l’intérieur du globe , , est demeuré fixe dans son assiette, et n’a subi ni i changement , ni soulèvement , ni transport : les vides et les cavernes n’ont donc pu se former que dans cette croûte extérieure; elles se sont trouvées s d’autant plus grandes el plus fréquentes que cette ; croûte étoit plus épaisse , c’est-à-dire plus voisine de l’équateur. Aussi les plus grands affaissemens se ; sont faits et se feront encore dans les parties méri- 1 dionales , où se trouvent de même les plus grandes inégaliiés de la surface du globe, et, par la même raison , le plus grand nombre de cavernes , de j ; fentes et de mines métalliques qui ont rempli ces ? 11 fentes dans le temps de leur fusion ou de leur sublî- 1 mation. L’or et l’argent , qui ne font qu’une quantité , t pour ainsi dire , infiniment petite en comparaison f de celle des autres matières du globe, ont été su- | blimés en vapeurs , et se sont séparés de la ma- : tière vitrescible commune par l’action de la cha- ■ leur, de la même manière que l’on voit sortir d’une i plaque d’or ou d’argent exposée au foyer d’un mi- f roir ardent, des particules qui s’en séparent par la f sublimation , et qui dorent ou argentent les corps j que l’on expose à cette vapeur métallique : ainsi ; l’on ne peut pas croire que ces métaux , suscepti- ] blés de sublimation , même à une chaleur médiocre, > puissent être entrés en grande partie dans la com- position du globe, ni qu’ils soient placés à de THEORIE DE LA TERRE. >ent toujours les parties les plus basses; illes sont aussi toujours de niveau, et elles endent perpétuellement à l’équilibre et au epos. Cependant nous les voyons 1 agitées >ar une forte puissance , qui , s’opposant à i tranquillité de cet élément , lui imprime in mouvement périodique et réglé, soulève t abaisse alternativement les flots, et fait n balancement de la masse totale des mers, n les remuant jusqu’à la plus grande profon- eur. Nous savons que ce mouvement est e tous les temps, et qu’il durera autant que i lune et le soleil , qui en sont les causes. Considérant ensuite le fond de la mer , pus y remarquons autant d’inégalités 2 que [ir la surface de la terre ; nous y trouvons es hauteurs3, des vallées, des plaines, des rofondeurs, des rochers, des terrains de pute espèce : nous voyons que toutes les fîs ne sont que les sommets 4 de vastes mon- gnes, dont le pied et les racines sont cou- prts.de l’élément liquide ; nous y trouvons 'autres sommets de montagnes qui sont resque à fleur d’eau. Nous y remarquons es courans5 rapides qui semblent se sous- jaire au mouvement général : on les voit 6 •ancles profondeurs dans son intérieur. Il en est i même de tous les autres métaux et minéraux , Û sont encore plus susceptibles de se sublimer àï l’action de la chaleur; et à l’égard des sables ptrescibles et des argiles, qui ne sont que des dé- jimens de scories vitrées dont la surface du globe pit couverte immédiatement après le premier re- pidissement, il est certain qu’elles n’ont pu se ter dans l’intérieur, et qu’elles pénètrent tout au lus aussi bas que les fiions métalliques dans les ntes et dans les autres cavités de cette ancienne jrface de la terre, maintenant recouverte par- toutes 5 matières que les eaux ont déposées. jNous sommes donc bien fondés à conclure que le pbe de la terre n’est, dans son intérieur, qu'une asse solide de matière vitrescible , sans vides, |ns cavités , et qu’il ne s’en trouve que dans les uches qui soutiennent celles de sa surface; que us l’équateur, et dans les climats méridionaux , , b cavités ont été et sont encore plus grandes que ins les climats tempérés ou septentrionaux , parce , l’il y a eu deux causes qui les ont produites sous , jquateur, savoir, la force centrifuge et le refroi- , bsement ; au lieu que , sous les pôles , il n’y a eu , e la seule cause du refroidissement : en sorte le , dans les parties méridionales , les affaisse- bns ont été bien plus considérables, les inégalités ps grandes, les fentes perpendiculaires plus fré- j tentés, et les mines des métaux précieux plus , Sondantes. ( Adcl . Buff.) i. Voyez les Preuves, art. XII. 2. Voyez les Preuves, art. XIII. ie [3. Voyez la Carte dressée en 1737 par M. Buache, j/ s profondeurs de l’Océan entre l’Afrique et l’A- la brique. j 4- Voyez Varen. Gcogr. gcn. , page 218. si 5. Voyez les Preuves , art XIII. t[. 6. Voyez Varen., p. 140. Voyez aussi les Voyages ■e, j Pjrrard, p. i37. Buffon. T, 65 se porter quelquefois consomment dans la même direction , quelquefois rétrograder , et ne jamais excéder leurs îimiies, qui pa- roissent aussi invariables que celles qui bor- nent les efforts des fleuves de la terre. Là sont ces contrées orageuses où les vents en fureur précipitent la tempête, où la mer et le ciel , également agités , se choquent et se confondent : ici sont des mouvemens in- testins, des bouillonnemens7, des trombes 8 et des agitations extraordinaires causées par des volcans dont la bouche submergée vomit le feu du sein des ondes, et pousse jusqu’aux nues une épaisse vapeur mêlée d’eau, de sou- fre et de bitume. Plus loin, je vois ces gouf- fres 9 dont on n’ose approcher, qui semblent attirer les vaisseaux pour les engloutir : au delà j’aperçois ces vastes plaines , toujours calmes et tranquilles10, mais tout aussi dan- gereuses, où les vents n’ont jamais exercé leur empire , où l’art du nautonier devient inutile, où il faut rester et périr : enfin, portant les yeux jusqu’aux extrémités du globe, je vois ces glaces 11 énormes qui se détachent des continens des pôles, et vien- nent , comme des montagnes flottantes, voya- ger et se fondre jusque dans les régions tempérées 1 2. Yoiîà les principaux objets que nous offre le vaste empire de la mer : des milliers d’ha- bitans de différentes espèces en peuplent toute l’étendue; les uns, couverts d’écailles légères, en traversent avec rapidité les dif- férens pays; d’autres, chargés d’une épaisse coquille, se traînent pesamment, et mar- quent avec lenteur leur route sur le sable; d’autres, à qui la nature a donné des na- geoires en forme d’ailes, s’en servent pour s’élever et se soutenir dans les airs; d’autres enfin, à qui tout mouvement a été refusé, croissent et vivent attachés aux rochers : tous trouvent dans cet élément leur pâture. Le fond de la mer produit abondamment des plantes, des mousses, et des végétations encore plus singulières. Le terrain de la mer est de sable, de gravier, souvent de vase, quelquefois de terre ferme, de coquillages, de rochers , et partout il ressemble à la terre que nous habitons. Yoyageons maintenant sur la partie sèche 7. Voyez les Voyages de S haut, tome II, page 56. 8. Voyez les Preuves, art. XVI. 9. Le Malestroom dans la mer de Noîwége. xo. Les calmes #t les tornaclos de la mer Éthio- pique. 11. Voyez les Preuves , art. VI et X. 12. Voyez la Carte de l’expédition de M. Bouvet; dressée parM. Buache, en 1739. 66 THÉORIE DE LÀ TERRE. du globe : quelle différence prodigieuse entre les climals ! quelle variété de terrains ! quelle inégalité de niveau ! Mais observons exacte- ment^ et nous reconnoîtrons que les grandes 1 chaînes de montagnes se trouvent plus voi- sines de l’équateur que des pôles; que dans l’ancien continent elles s’étendent d’orient en occident beaucoup plus que du nord au sud, et que dans le Nouveau-Monde elles s’étendent au contraire du nord au sud beaucoup plus que d’orient en occident : mais ce qu’il y a de très-remarquable , c’est que la forme de ces montagnes et leurs con- tours, qui paroissent absolument irréguliers 2, ont cependant des directions suivies et cor- respondantes 3 entre elles ; en sorte que les angles saillans d’une montagne se trouvent toujours opposés aux angles rentrans de la montagne voisine, qui en est séparée par un vallon ou par une profondeur. J’observe aussi que les collines opposées ont toujours à très-peu près la même hauteur, et qu’en général les montagnes occupent le milieu des eontinens, et partagent, dans la plus grande longueur, les îles, les promontoires, et les autres 4 terres avancées. Je suis de même la direction des plus grands fleuves, et je vois quelle est toujours presque perpendiculaire à la côte de la mer dans laquelle ils ont leur embouchure, et que, dans la plus grande partie de leur cours, ils vont à peu près 5 comme les chaînes de montagnes dont ils prennent leur source et leur direction. Exa- minant ensuite les rivages de la mer, je trouve qu’elle est ordinairement bornée par des rochers , des marbres , et d’autres pierres dures, ou bien par des terres et des sables qu elle a elle-même accumulés ou que les fleuves ont amenés, et je remarque que les côtes voisines , et qui ne sont séparées que par un bras ou par un petit trajet de mer, sont composées des mêmes matières, et que les lits de terre sont les mêmes de l’un et de l’autre côté6. Je vois que les volcans se 7 trouvent tous dans les hautes montagnes, qu’il y en a un grand nombre dont les feux sont entièrement éteints, que quelques-uns de ces volcans ont des correspondances 8 sou- terraines, et que leurs explosions se font quelquefois en même temps. J’aperçois une correspondance semblable entre certains lacs i. Voyez les Preuves, art. IX. а. Voyez les Preuves, art. IX et XII. 3. Voyez Lettres pli il. de Bourguet , page 181. 4. Vide V are ni i Geogr., p. 69. 5. Voyez les Preuves, art. X. б. Voyez les Preuves, art. VII. 7. Ibid. , art. XVI. è. Vide Kircher, Mund, fulter. in præf. et les mers voisines. Ici sont des fleuves e des torrens 9 qui se perdent tout à coup , e paroissent se précipiter dans les entrailles d la terre; là est une mer intérieure où s rendent cent rivières , qui y portent de toute parts une énorme quantité d’eau, sans jamai augmenter ce lac immense , qui semble rendr par des voies souterraines tout ce qu’il reço par ses bords; et, chemin faisant, je recon nois aisément les pays anciennement liai) tés, je les distingue de ces contrées noi velles , où le terrain paroît encore tout brut où les fleuves sont remplis de cataractes, Oi les terres sont en partie submergées , mar( cageuses, ou trop arides, où la distribuée des eaux est irrégulière , où des bois incuit couvrent toute la surface des terrains q peuvent produire. Entrant dans un plus grand détail , je vc que la première couche10, qui enveloppe globe, est partout d’une même substanc que cette substance, qui sert à faire croit et à nourrir les végétaux et les animau n’est elle-même qu’un composé de pari animales et végétales détruites ou plutôt 1 duites en petites parties, dans lesquel l’ancienne organisation n’est pas sensibi Pénétrant plus avant, je trouve la vrti terre; je vois des couches de sable, pierres à chaux, d’argile, de coquillages, marbre, de gravier, de craie, de plâtre, et et je remarque que ces 11 couches sont te jours posées parallèlement les unes 12 sur \ autres, et que chaque couche a la mê épaisseur dans toute son étendue. Je v' l que dans les collines voisines les mêr matières se trouvent au même nivet quoique les collines soient séparées par intervalles profonds et considérables. J’< serve que dans tous les lits de terre, et même dans les couches plus solides, corn dans les rochers , dans les carrières de mi bres et de pierres, il y a des fentes, et < ces fentes sont perpendiculaires à l’horiz et que, dans les plus grandes comme d les plus petites profondeurs, c’est une esp de règle que la nature suit constamment vois de plus que dans l’intérieur de la tei sur la cime des monts *4 et dans les lieux plus éloignés de la mer, on trouve des quilles , des squelettes de poissons de n des plantes marines , etc. , qui sont enti 9. Voyez Varen. Geogr., page 43. 10. Voyez les Preuves , art. VII. xx. Voyez les Preuves , art. VII. 12. Voyez Woodward , page 4x> etc. 13. Voyez les Preuves, art. VIII. x4- Ibid. THÉORIE DE LA TERRE. Ineut semblables aux coquilles , aux poissons , aux plantes actuellement vivantes dans la mer, et qui en effet sc-nt absolument les mêmes. Je remarque que ces coquilles pétri- fiées sont en prodigieuse quantité, qu’on en trouve dans une infinité d’endroits , qu’elles sont renfermées dans l’intérieur des rochers et des autres- masses de marbre et de pierre dure, aussi bien que dans les craies et dans les terres; et que non-seulement elles sont renfermées dans toutes ces matières, mais qu’elles y sont incorporées, pétrifiées, et remplies de la substance même qui les en- vironne. Enfin, je me trouve convaincu , par des observations réitérées, que les marbres, les pierres , les craies , les marnes , les argiles , les sables , et presque toutes les matières ter- restres, sont remplies de f. coquilles et d’au- tres débris de l'a mer, et cela par toute la terre , et dans tous les lieux où l’on a pu faire des observations exactes. Tout cela posé, raisonnons. Les changeroens qui sont arrivés au globe terrestre , depuis deux et même irpis mille ans, sont fort peu considérables en compa- raison des révolutions qui ont du se faire dans les premiers temps après la création ; car il est aisé de démontrer que comme toutes les matières terrestres n’ont acquis de la solidité que par l’action continuée de la gravité et des autres forces qui rappro- chent et réunissent les particules de la matière , la surface de la terre devoit être au commencement beaucoup moins solide qu’elle ne l’est devenue dans la suite, et que par conséquent les mêmes causes qui ne produisent aujourd’hui que des chaugemens presque insensibles dans î’espaee de plusieurs siècles , dévoient causer alors de très-grandes révolutions dans un petit nombre d’années. En effet, il paroît certain que la terre, ac- tuellement sèche et habitée , a été autrefois sous les eaux de la mer, et que ces eaux éloient supérieures aux sommets des plus hautes montagnes , puisqu’on trouve sur ces montagnes et jusque sur leurs semmets des productions marines et des coquilles 2 qui , 1. Voyez Sténon , Woodward , Bay, Bourguet, Scheuchzer, tes Trans. philos ., les Mémoires de l’A- cadémie', etc. 2. Ceei exige une explication, et demande même quelques restrictions. Il est certain et reconnu par mille et mille observations , qu’il se trouve des co- quilles et d’autres productions de la mer sur toute la surface de la terre actuellement habitée , et même sur les montagnes , à une très-grande hau- teur. J’ai avancé, d’après l’autorité de Woodward, qui , le premier, a recueilli ces observations , qu’on trouvoit aussi des coquilles jusque sur les sommets des plus hautes montagnes j d’autant que j’étois 67 comparées avec les coquillages vivans, sont les mêmes, et qu’on ne peut douter de leur assuré par moi-même et par d’autres observations assez récentes , qu’il y en a dans les Pyrénées et les Alpes, à 900, 1000, 1200 et i5oo toises de hau- teur au dessus du niveau de la mer; qu’il s’en trouve de même dans les montagnes de l’Asie, et qu’enfin dans les Cordillères, en Amérique, on en. a nouvellement découvert un banc à plus de 2000 toises au dessus du niveau de la mer. On ne peut donc pas douter que, dans toutes les différentes parties du monde, et jusqu’à la hau- etùr de i5oo ou 2000 toises au dessus du niveau des mers actuelles, la surface du globe 11’ait été couverte des eaux, et pendant un temps assez long , pour y produire ces coquillages et les laisser mul- tiplier; car leur quantité est si considérable, que leurs débris forment des bancs de plusieurs lieues d’étendue , souvent de plusieurs toises d’épaisseur sur une largeur indéfinie; en sorte qu’ils compo- sent une partie assez considérable des couches ex- térieures de la surface du globe , c’est-à-dire, toute la matière calcaire, qui, comme l’on sait, est très- commune et très-abondante en plusieurs contrées. Mais au dessus des plus hauts points d’élévation , c’est-à-dire, au dessus de i5oo on 2000 toises de hauteur, et souvent plus bas , on a remarqué que les sommets de plusieurs montagnes sont composés de roc vif, de granité et d’autres matières vitresci- bles produiies par le feu primitif, lesquelles ne contiennent en effet ni coquilles, ni madrépores, ni rien qui ait rapport aux matières calcaires. On peut donc en inférer que la mer ri’a pas atteint, oa du moins n’a surmonté que pendant un petit temps, èes parties les plus élevées et ces pointes les plus avancées de la surface de la terre. Comme l’observation de don Ulloa , que nous venons de citer au sujet des coquilles trouvées sur les Cordillères, pourroit paraître encore douteuse, ou du moins comme isolée et 11e faisant qu’un seul exemple , nous devons rapporter à l’appui de son témoignage celui d’Alphonse Barba, qui dit qu’au milieu de la partie la plus montagneuse du Pérou , on trouve des coquilles dè toutes grandeurs, les unes concaves et les autres convexes . et très-bien imprimées. Ainsi l’Amérique , comme toutes les autres parties du monde, à également été couverte par les eaux de la mer ; et si les premiers observa- teurs ont cru qu’on ne trouvoit point de coquilles sur les montagnes des Cordillères, c’est que ces montagnes, les plus élevées de la terre, sont pour la plupart des volcans actuellement agissans , ou des volcans éteints, lesquels, par leurs éruptions, ont recouvert de matières brûlées toutes les terres adjacentes; ce qui a non seulement enfoui, mais détruit toutes les coquilles qui pouvoient s’y trou- ver. Il ne seroii donc pas étonnant qu’on ne ren- contrât point de productions marines autour de ces montagnes, qui sont aujourd’hui ou qui ont été autrefois embrasées ; car le terrain qui les enveloppe ne doit être qu’un composé de cendres , de scories, de verre, de lave et d’autres matières brûlées ou ■vitrifiées; ainsi il n’y a d’autre fondement à l’opi- nion de cens qui prétendent que la mer n’a pas couvert les montagnes, si ce n’est qu’il y a plu- sieurs de leurs sommets où l’on ne voit aucune coquille ni autres productions marines. Mais comme on trouve en une infini lé d’endroits, et jas- qu’à i5oo et 2000 toises de hauteur, des coquille? et d’autres productions de la mer, il est évident qu’il y a eu peu de pointes ou crêtes de montagsgp 5c THÉORIE DE LA TERRE. 6 S parfaite ressemblance, ni de l’identité de leurs espèces. Il paroît aussi que les eaux de la mer ont séjourné quelque temps sur cette terre, puisqu’on trouve en plusieurs endroits des bancs de coquilles si prodigieux et si étendus, qu’il n’est pas possible qu’une aussi grande 1 multitude d’animaux ait été tout à la fois vivante en môme temps. Cela semble prouver aussi que, quoique les matières qui composent la surface de la terre fussent alors dans un état de mollesse qui les rendoit sus- ceptibles d’ètre aisément divisées , remuées et transportées par les eaux , ces mouvemens ne se sont pas faits toitf à coup, mais suc- cessivement et par degrés; et comme on trouve quelquefois des productions de la mer à mille et douze cents pieds de profon- deur, il paroît que celte épaisseur de terre ou de pierre étant si considérable, il a fallu des années pour la produire; car, quand on voudrait supposer que dans le déluge uni- versel tous les coquillages eussent été enlevés du fond des mers et transportés sur toutes les parties de la terre, outre que cette sup- position serait difficile à établir 2, il est clair que comme on trouve ces coquilles incor- porées et pétrifiées dans les marbres et dans les rochers des plus hautes montagnes, il faudroit donc supposer que ces marbres et ces rochers eussent été tous formés en même temps et précisément dans l’instant du dé- luge, et qu’avant cette grande révolution il n’y avoit sur le globe terrestre ni montagnes, ni marbres, ni rochers, ni craies, ni aucune autre matière semblable à celles que nous connoissons, qui presque toutes contiennent des coquilles et d’autres débris des produc- tions de la mer. D’ailleurs, la surface de la terre devoit avoir acquis au temps du déluge un degré considérable de solidité, puisque la gravité avoit agi sur les matières qui la composent pendant plus de seize siècles ; et par conséquent il ne paroît pas possible que les eaux du déluge aient pu bouleverser les terres à la surface du globe jusqu’à d’aussi grandes profondeurs, dans le peu de temps que dura l’inondation universelle. Mais, sans insister plus long-temps sur ce point, qui sera discuté dans la suite, je m’en tiendrai maintenant aux observations qui n’aient été surmontées par les eaux , et que les endroits où on ne trouve point de coquilles , indi- quent seulement que les animaux qui les ont pro- duites ne s’y sont pas habitués, et que les mouve- mens de la iner n’y ont point amené les débris de ses productions , comme elle en a amené sur tout le reste de la surface du globe. (Add. Buff.) 1. Voyez les Preuves, art. VIII. 2. Voyez les Preuves , art. V qui sont constantes, et aux faits qui sont certains. On ne peut douter que les eaux de j la mer n’aient séjourné sur la surface de la terre que nous habitons , et que par consé- quent cette même surface de noire continent, n’ait été pendant quelque temps le fond d’une mer, dans laquelle tout se passoit comme tout se passe actuellement dans la mer d’aujourd’hui. D’ailleurs, les couches ; des différentes matières qui composent la < terre étant, comme nous l’avons remarqué 3, j posées parallèlement et de niveau , il est clair ( que celte position est l’ouvrage des eaux, ( qui ont amassé et accumulé peu à peu ces , matières, et leur ont donné la même situa- ) tion que l’eau prend toujours elle-même, j c’est-à-dire cette situation horizontale que ] nous observons presque partout; car dans , les plaines les couches sont exactement ho- 1 ] rizontales, et il n’y a que dans les montagnes , où: elles soient inclinées , comme ayant été formées par des sédimens déposés sur une base inclinée , c’est-à-dire sur un terrain f penchant 4. Or, je dis que ces couches ont , 3. Voyez les Preuves, art. VII. 4- Non seulement les couches de matières cal- caires sont horizontales dans les plaines, mais elles I le sont aussi dans toutes les montagnes où il n’y a I point eu de bouleversement par les tremblemens de : j terre ou par d’autres causes accidentelles; et lors- ■ j que ces couches sont inclinées , c’est que la mon- tagne elle-même s’est inclinée tout en bloc , et t J qu’elle a été contrainte de pencher d’un côté par I la force d’une explosion souterraine, ou par l’af- • , faissement d’une partie du terrain qui lui servoit de base. L’on peut donc dire qu’en général toutes les couches formées par je dépôt et le sédiment des ; Jl eaux sont horizontales, comme l’eau l’est toujours s elle-même, à l’exception de celles qui ont été for- - lu mées sur une base inclinée, c’est-à-dire sur un ter- - d«, rain penchant, comme se trouvent la plupart des > « mines de charbon de terre. &!( La couche la plus extérieure et superficielle de la terre, soit en plaine, soit en montagne, n’est i «le composée que de terre végétale, dont l’origine est t reu due aux sédimens de l’air, au dépôt des vapeurs et 1 if)i des rosées, et aux détrimens successifs des herbes, e fussent ensuite précipitées au fond de cet élément , parce qu’alors elles eussent pro- iuit une tout autre composition que celle pii existe ; les matières les plus pesantes se- ’oient descendues les premières et au plus 3as ; et chacune se seroit arrangée suivant sa jravité spécifique , dans un ordre relatif à eur pesanteur particulière, et nous ne trou- verions pas des rochers massifs sur des arènes égères, non plus que des charbons de terre ous des argiles, des glaises sous des mar- ges, et des métaux sur des sables. Une chose à laquelle nous devons encore aire ittention, et qui confirme ce que nous 'enons de dire sur la formation des couches >ar le mouvement et par le sédiment des aux, c’est que toutes les autres causes de évolution ou de changement sur le globe ie peuvent produire les mêmes effets. Les iontagnes les plus élevées sont composées e couches parallèles, tout de même que les laines les plus basses, et par conséquent on e peut attribuer l’origine et la formation es montagnes à des secousses , à des trem- fbstances calcaires , la craie est celle dont les ancs conservent le plus exactement la position orizontale : comme la craie n’est qu’une poussière es déirimens calcaires, elle a été déposée par les iux dont le mouvement étoit tranquille et, les .dilations réglées, tandis que les matières qui étoient que brisées et en plus gros volume, ont é transportées par les courans et déposées par le anous des eaux; en sorte que leurs bancs ne sont is parfaitement horizontaux comme ceux de la aie. Les falaises de la mer en Normandie sont imposées de couches horizontales de craie si ré- .dièrement coupées à plomb, qu’on les prendroit : loin pour des murs de fortifications. L’on voit itre les couches de craie de petits lits de pierre à sil noire, qui tranchent sur le blanc de la craie: est là l’origine des veines noires dans les marbres ancs. Indépendamment de^ collines calcaires dont les mes sont légèrement inclinés et dont la position a point varié , il y en a grand nombre d’autres li ont penché par différens aecidens , et dont utes les couches sont fort inclinées. On en a de ands exemples dans plusieurs endroits des Pyré- ies , où l’on en voit qui sont inclinées de 45, So même 60 degrés au dessous dè la ligne horizontale; qui semble prouver qu’il s'est fait de grands angemens dans ces 'montagnes par l’affaissement s cavernes souterraines sur lesquelles leur masse oit autrefois appuyée. ( Add . Buff.) ' i. Voyez les Preuves , art. IV. blemens de terre , non plus qu’à des volcans; et nous avons des preuves que s’il se forme quelquefois de petites éminences par ces mouvemens convulsifs de la terre 2, ces émi- nences ne sont pas composées de couches parallèles; que les matières de ces éminences n’ont intérieurement aucune liaison, aucune position régulière, et qu’enfin ces petites collines formées par les volcans ne présentent aux yeux que le désordre d’un tas de ma- tière rejetée confusément. Mais cette espèce d’organisation de la terre que nous décou- vrons partout, cette situation horizontale et parallèle des couches, ne peuvent venir que d’une cause constante et d’un mouvement réglé et toujours dirigé de la même façon. Nous sommes donc assurés, par des ob- servations exactes, réitérées, et fondées sur des faits incontestables, que la partie sèche du globe que nous habitons a été long-temps sous les eaux de la merj par conséquent cette même terre a éprouvé pendant tout ce temps les mêmes mouvemens, les mêmes changemens qu’éprouvent actuellement les terres couvertes par la mer. Il paroît que notre terre a été un fond de mer : pour trouver donc ca qui s’est passé autrefois sur cette terre, voyons ce qui se passe aujour- d’hui sur le fond de la mer, et de là nous tirerons des inductions raisonnables sur la forme extérieure et la composition intérieure des terres que nous habitons. Souvenons-nous donc que la mer a de tout temps, et depuis la création, un mou- vement de flux et de reflux causé principa- lement par la lune; que ce mouvement, qui dans vingt-quatre heures fait deux fois élever et baisser les eaux, s’exerce avec plus de force sous l’équateur que dans les autres climats. Souvenons-nous aussi que la terre a un mouvement rapide sur son axe, et par conséquent une force centrifuge plus grande à l’équateur que dans toutes les autres par- ties du globe ; que cela seul , indépendam- ment des observations actuelles et. des mesures , nous prouve qu’elle n’est pas parfai- tement sphérique , mais qu’elle est plus élevée sous l’équateur que sous les pôles; et concluons de ces premières observations, que quand même on supposeroit que la terre est sortie des mains du Créateur par- faitement ronde en tout sens (supposition gratuite, et qui marqueroit bien le cercle étroit de nos idées) , son mouvement diurne et celui du flux et du reflux auroient élevé peu à peu les parties de l’équateur, en y 2. Voyez les Preuves , art, XVII, 70 THEORIE DE LA TERRE. amenant successivement les limons , les ter- res, les coquillages, etc. Ainsi les plus gran- des inégalités du globe doivent se trouver et se trouvent en effet voisines de l’équateur; et comme ce mouvement de flux et de re- flux 1 se fait par des alternatives journa- lières et répétées sans interruption, il est fort naturel d’imaginer qu’à chaque fois les eaux emportent d’un endroit à l’autre une petite quantité de matière, laquelle tombe ensuite comme un sédiment au fond de l’eau , et forme ces couches parallèles et horizon- tales qu’on trouve partout ; caria totalité du mouvement des eaux dans le flux et le re- flux étant horizontale, les matières entraî- nées ont nécessairement suivi la même di- rection, et se sont toutes arrangées paral- lèlement et de niveau. Mais, dira-t-on, comme le mouvement du flux et reflux est un balancement égal des eaux , une espèce d’oscillation régulière, on ne voit pas pourquoi tout ne seroit pas compensé , et pourquoi les matières appor- tées par le flux ne seroient pas remportées par le reflux ; et dès lors la cause de la for- mation des couches disparoît, et le fond de la mer doit toujours rester le même, le flux détruisant les effets du reflux, et l’un et l’autre ne pouvant causer aucun mouve- ment, aucune altération sensible dans le fond de la mer, et encore moins en chan- ger la forme primitive en y produisant des hauteurs et des inégalités. A cela je réponds que le balancement des eaux n’est point égal , puisqu’il produit un mouvémefît continuel de la mer de l’orient vers l’occident; que de plus, l’agitation cau- sée par les vents s’oppose à l’égalité du flux et du reflux , et que de tous les mouve- mehs dont la mer est susceptible, il résul- tera toujours des transports de terre et des dépôts de matières dans de certains endroits; que ces amas de matières seront composés de couches parallèles et horizontales, les combinaisons quelconques des mouvemens de la mer tendant toujours à remuer les ter- res et à les mettre de niveau les unes sur les autres dans des lieux où elles tombent en forme de sédiment. Mais de plus il est aisé de répondre à cette objection par un fait : c’est que dans toutes les extrémités de la mer où l’on observe le flux et le reflux , dans toutes les côtes qui la bornent, on voit que le flux amène une infinité de choses que le reflux ne remporte pas; qu’il y a des terrains que la mer couvre insensiblement x. Voyez les Preuves, art. Xlt. 2. Voyez les Preuves, art. XIX. et d’autres qu’elle laisse à découvert, après y avoir apporté de terres, dessables, des coquilles, etc. , qu’elle dépose, et qui pren- nent naturellement une situation horizon-j taie; et que ces matières, accumuloer par la suite des temps, et élevées jusqu’à un certain point, se trouvent peu à per hors d’atteinte des eaux, restent ensuite pour toujours dans l’état de terre sèche, '-.('font partie des continens terrestres. Mais, pour ne laisser aucun dout? sur ce point important, examinons de près la pos- sibilité ou l’impossibilité de la formation d’une montagne dans le fond de la mer par le mouvement et par le sédiment des eaux. Personne ne peut nier que sur une côte contre laquelle la mer agit avec violence dans le temps qu’elle est agitée par le flux, ces efforts réitérés ne produisent quelque changement, et que les eaux n’emportent à chaque fois une petite portion de la terre de la côte; et quand même elle seroit bor- née de rochers, on sait que l’eau use peu à peu ces rochers3, et que par conséquent! elle en emporte de petites parties à chaque fois que la vague se retire après s’être bri- sée. Ces particules de pierre ou de terre se ront nécessairement transportées par le;; eaux jusqu’à une certaine distance et dan, de certains endroits ou le mouvement ddj l’eau, se trouvant ralenti, abandonnera ce; particules à leur propre pesanteur, et alor elles se précipiteront au fond de l’eau ei forme de sédiment, et là elles formeront un If première couche horizontale ou inclinée suivant la position de la surface du terrai: sur laquelle tombe cette première couche laquelle sera bientôt couverte et surmonté d’une autre couche semblable et produit par la même cause, et insensiblement il s formera dans cet endroit un dépôt consi dé rable de matière, dont les couches seroi posées parallèlement les unes sur les autre. Cet amas augmentera toujours par les noi veaux sédimens que les eaux y transport; ront , et peu à peu par succession de temj il se formera une élévation, une montagi dans le fond de la mer, qui sera entier ment semblable aux éminences et aux mo tagnes que nous connoissons sur la ter tant pour la composition intérieure que po la forme extérieure. S’il se trouve des c quilles dans cet endroit du fond de la m où nous supposons que se fait notre dépt les sédimens couvriront ces coquilles et 1 rempliront; elles seront incorporées da 3. Voyez les p'ojage* de Shaw , tome II, page THÉORIE DE IA TERRE. les couches de celle matière déposée, et elles feront partie des masses formées par ces dépôts ; on les y trouvera dans la situa- tion qu’elles auront acquise en y tombant , ou dans l’état où elles auront éié saisies; car, dans celte opération, celles qui se se- ront trouvées au fond de la mer , lorsque les premières couches se seront déposées , se trouveront dans la couche la plus basse, et celles qui seront tombées depuis dans ce même endroit, se trouveront dans les couches plus élevées. Tout de même, lorsque le fond de la mer sera remué par l’agitation des eaux, il se fera nécessairement des transports de terre, de vase, de coquilles, et d’autres matières, dans de certains endroits où elles se dépo- seront en forme de sédimens. Or, nous sommes assurés par les plongeurs 1 qu’aux plus grandes profondeurs où ils puissent descendre, qui sont de vingt brasses, le fond de la mer est remué au point que l’eau se mêle avec la terre , qu’elle devient trouble, et que la vase et les coquillages sont emportés par le mouvement des eaux à des distances considérables; par consé- quent, dans tous les endroits de la mer où Fou a pu descendre, il se fait des transports de terre et de coquilles qui vont tomber quelque part, et former, en se déposant, des couches parallèles et des éminences qui sont, composées comme nos montagnes le sont. Ainsi le flux et le reflux, les vents, les courans, et tous les. mouvemens des eaux, produiront des inégalités dans le fond de la mer, parce que toutes ces causes dé- tachent du fond et des côtes de la mer des matières qui se précipitent ensuite en forme de sédimens. Au reste, il ne faut pas croire que ces transports de matières ne puissent pas se faire à des distances considérables, puisque nous voyons tous les jours des graines et d’autres productions des Indes orientales et occidentales arriver 2 sur nos côtes : à la vérité, elles sont spécifiquement plus légères que l’eau, au lieu que les matières dont nous parlons sont plus pesantes ; mais comme elles sont réduites en poudre impalpable, elles se soutiendront assez long-temps dans l’eau pour être transportées à de grandes distances. Ceux qui prétendent que la mer n’est pas remuée à de grandes profondeurs, ne font pas attention que le flux et le reflux 1. Voyez Boyle’s Works, vol. III, page 23a. 2. Particulièrement sur les cotes d’Ecosse et d’Ir* lande. Voyez Raj’s Discourses. ébranlent et agitent à la fois toute la masse des mers, et que dans un globe qui seroit entièrement liquide il y auroit de l’agitation et du mouvement jusqu’au centre; que la force qui produit celui du flux et du reflux , est une force pénétrante qui agit sur toutes les parties proportionnellement à leurs mas- ses ; qu’on pourrait même mesurer et déter- miner par le calcul la quantité de cette ac- tion sur un liquide à différentes profon- deurs, et qu’enfin ce point ne peut être contesté qu’en se refusant à l’évidence du raisonnement et à la certitude des obser- vations. Je puis donc supposer légitimement que le flux et le reflux, les vents, et toutes les autres causes qui peuvent agiter la mer, doivent produire par le mouvement des eaux des éminences et des inégalités dans le fond de la mer, qui seront toujours com- posées de couches horizontales ou également inclinées : ces éminences pourront , avec le temps, augmenter considérablement, et de- venir des collines qui, dans une longue étendue de terrain, se trouveront, commue les ondes qui les auront produites, dirigées du même sens, et formeront peu à peu une chaîne de montagnes. Ges hauteurs une fois formées feront obstacle a l’uniformité du mouvement des eaux , et il en résultera des mouvemens particuliers dans le mouvement général de la mer : entre deux hauteurs voi- sines il se formera nécessairement un cou- rant 3 qui suivra leur direction commune , et coulera, comme coulent les fleuves de la terre , en formant un canal dont les an- gles seront alternativement opposés dans toute l’étendue de son cours. Ges hauteurs formées au dessus de la surface du fond pourront augmenter encore de plus en plus; car les eaux qui n’auront que le mouvement du flux déposeront sur la cime le sédiment ordinaire, et celles qui obéiront au courant entraîneront an loin les parties qui se se- raient déposées entre deux, et en même temps elles creuseront un vallon au pied de ces montagnes , dont tous les angles se trouveront correspondons , et , par l’effet de ces deux mouvemens et de ces dépôts, le fond de la mer aura bientôt été sillonné, traversé de collines et de chaînes de mon- tagnes , et semé d’inégalités telles que nous les y trouvons aujourd’hui. Peu à peu les matières molles dont les éminences éloient d’abord composées, se seront durcies par leur propre poids : les unes , formées de par- is 3. Voyez les Preuves, art. XIII. THEORIE DE LA TERRE, ties purement argileuses, auront produit ces collines de glaise qu’on trouve en tant d’endroits; d’autres, composées de parties sablonneuses et cristallines, ont fait ces énor- mes amas de rochers et de cailloux d’où l’on tire le cristal et les pierres précieuses ; d’au- tres, faites de parties pierreuses mêlées de coquilles , ont formé ces lits de pierres et de marbres où nous retrouvons ces coquilles aujourd’hui ; d’autres enfin , composées d’une matière encore plus coquilleuse et plus ter- restre, ont produit les marnes, les craies, et les terres. Toutes sont posées par lits , toutes contiennent des substances hétéro- gènes; les débris des productions marines s’y trouvent en abondance, et à peu près suivant le rapport de leur pesanteur; les co- quilles les plus légères sont dans les craies, les plus pesantes dans les argiles et dans les pierres , et elles sont remplies de la ma- tière même des pierres et des terres où elles sont renfermées; preuve incontestable qu’elles ont été transportées avec la matière qui les environne et qui les remplit, et que cette matière étoit réduite en particules im- palpables. Enfin toutes ces matières, dont la situation s’est établie par le niveau des eaux de la mer, conservent encore aujour- d’hui leur première position. On pourra nous dire que la plupart des collines et des montagnes dont le sommet est de rocher, de pierre, ou de marbre, ont pour base des matières plus légères; que ce sont ordinairement ou des monti- cules de glaise ferme et solide, ou des cou- ches de sable qu’on retrouve dans les plai- nes voisines jusqu’à une dislance assez grande; et on nous demandera comment il est arrivé que ces marbres et ces rochers se soient trouvés au dessus de ces sables et de ces glaises. Il me paroît que cela peut s’expli- quer assez naturellement : l’eau aura d’a- bord transporté la glaise ou le sable qui faisoit la première couche des côtes ou du fond de la mer; ce qui aura produit au bas une éminence composée de tout ce sable ou de toute cette glaise rassemblée ; après cela les matières plus fermes et plus pesantes qui se seront trouvées au dessous, auront été attaquées et transportées par les eaux en poussière impalpable au dessus de cette émi- nence de glaise ou de sable, et celte pous- sière de pierre aura formé les rochers et les carrières que nous trouvons au dessus des collines. On peut croire qu’étant les plus pesantes, ces matières étoient autrefois au dessous des autres, et qu’elles sont aujour- d’hui au dessus , parce qu'elles ont été en- levées et transportées les dernières par le ® mouvement des eaux. gu Pour confirmer ce que nous avons dit ; né examinons encore plus en détail la situa- te tion des matières qui composent celte pre- et mière épaisseur du globe terrestre, la seule ei que nous connoissions. Les carrières sont ils composées de différens lits ou couches près- et que toutes horizontales ou inclinées suivant de; la même pente; celles qui posent sur des po glaises ou sur des bases d’autres matières gre solides sont sensiblement de niveau , surtout i f dans les plaines. Les carrières où l’on trouve obi les cailloux et les grès dispersés ont, à la vé- 1 col rité, une position moins régulière: cepen- bit dant l’uniformité de la nature ne laisse pas qu de s’y reconnoître; car la position horizon- gli taie ou toujours également penchante des lat couches se trouve dans les carrières de roc y: vif et dans celles de grès en grande masse’: . su elle n’est altérée et interrompue que dans et les carrières de cailloux et de grès en petite ni masse, dont nous ferons voir que la forma- ne tion est postérieure à celle de toutes les au- sei très matières; car le roc vif, le sable vitri-- leu fiable , les argiles , les marbres , les pierres par calcinables, les craies, les marnes sont tou- - àli tes disposées par couches parallèles toujours r lai horizontales, ou également inclinées. Omet! reconnoît aisément dans ces dernières ma- et a tières la première formation ; car les cou- les ches sont exactement horizontales et fort ! ris minces, et elles sont arrangées les unes suri mi les autres comme les feuillets d’un livre. Les rei couches de sable, d’argile molle, de glaise < etc dure, de craie, de coquilles, sont aussi tou- - » tes ou horizontales ou inclinées suivant la à pi même pente. Les épaisseurs des couches sont con toujours les mêmes dans toute leur étendue, que qui souvent occupe un espace de plusieurs ffi lieues, et que l’on pourroit suivre bien plus w loin, si l’on observoit exactement. Enfin ous toutes îes matières qui composent la pre- Égal mière épaisseur du globe sont disposées de » celte façon; et quelque part qu’on fouille, (en on trouvera des couches, et on se couvain- es cra par ses yeux de la vérité de ce qui vient roi d’être dit. Il faut excepter , à certains égards , les t roi couches de sable ou de gravier entraîné du ; laa sommet des montagnes par la pente dos * eaux : ces veines de sable se trouvent quel- iojn quefois dans les plaines, où elles s’étendent •*, même assez considérablement; elles sont or- m dinai remeut posées sous la première couche «n de la terre labourable, et, dans les lieux n£n plats , elles sont de niveau, comme les cou- ^ ches plus anciennes et plus intérieures : ^ THÉORIE DE LA TERRE. 73 biais , au pied et sur la croupe des monta- gnes, ces couches de sable sont fort incli- nées , et elles suivent le penchant de la hau- teur sur laquelle elles ont coulé. Les rivières üt les ruisseaux ont formé ces couches; et, în changeant souvent de lit dans les plaines, 1s ont entraîné et déposé partout ces sables ït ces graviers. Un petit ruisseau coulant les hauteurs voisines suffit , avec le temps , lour étendre une couche de sable ou de gravier sur toute la superficie d’u-n vallon , juelque spacieux qu’il soit ; et j’ai souvent ibservé dans une campagne environnée de :ollines , dont la base est de glaise aussi )ien que la première couche de la plaine, ju’au dessus d’un ruisseau qui y coule, la ;iaise se trouve immédiatement sous la terre abourable, et qu’au dessous du ruisseau il r a une épaisseur d’environ un pied de sable ur la glaise, qui s’étend à une distance :onsidérable. Ces couches, produites par les ivières et par les autres eaux courantes, 1e sont pas de l’ancienne formation; elles le reconnoissent aisément à la différence de èur épaisseur, qui varie et n’est pas la même >artout comme celle des couches anciennes, leurs interruptions fréquentes, et enfin à i matière même , qu’il est aisé de juger , t qu’on reconnoît avoir été lavée, roulée lt arrondie. On peut dire la même chose es couches de tourbes et de végétaux pour- is qui se trouvent au dessous de la pre- îière couche de terre dans les terrains ma- écageux : ces couches ne sont pas anciennes, t elles ont été produites par l’entassement accessif des arbres et des plantes qui peu peu ont comblé ces marais. Il en est en- pre de même de ces couches limoneuses ue l’inondation des fleuves a produites dans ifférens pays : tous ces terrains ont été ouvellement formés par les eaux courantes u stagnantes, et ils ne suivent pas la pente gale ou le niveau aussi exactement que les louches anciennement produites par le mou- ement régulier des ondes de la mer. Dans îs couches que les rivières ont formées , on pouve des coquilles fluviatiles : mais il y n a peu de marines, et le peu qu’on y en rouve est brisé, déplacé, isolé, au lieu que ans les couches anciennes les coquilles ma- in es se trouvent en quantité; il n’y en a oint de fluviatiles , et ces coquilles de mer sont bien conservées, et toutes placées de même manière , comme ayant été trans- ortées et posées en même temps par la tême cause. Et en effet, pourquoi ne trouve- on pas les matières entassées irrégulière- tent, au lieu de les trouver par couches ? Pourquoi les marbres, les pierres dures, les craies, les argiles, les plâtres, les marnes, etc., ne sont-ils pas dispersés ou joints par cou- ches irrégulières ou verticales ? Pourquoi les choses pesantes ne sont-elles pas toujours au dessous des plus légères P II est aisé d’a- percevoir que cette uniformité de la nature, cette espèce d’organisation de la terre , cette jonction des différentes matières par couches parallèles et par lits, sans égard à leur pe- santeur , n’ont pu être produites que par une cause aussi puissante et aussi constante que celle de l’agitation des eaux de la mer, soit par le mouvement réglé des vents, soit par celui du flux et reflux , etc. Ces causes agissent avec plus de force sous l’équateur que dans les autres climats , car les vents y sont plus constans et les marées plus violentes que partout ailleurs : aussi les plus grandes chaînes de montagnes sont voisines de l’équateur. Les montagnes de l’Afrique et du Pérou sont les plus hautes qu’on connoisse ; et, après avoir traversé des continens entiers , elles s’étendent encore à des distances très-considérables sous les eaux de la mer Océane. Les montagnes de l’Europe et de l’Asie , qui s’étendent depuis l’Espagne jusqu’à la Chine , ne sont pas aussi élevées que celles de l’Amérique méridionale et de l’Afrique. Les montagnes du Nord ne sont, au rapport des voyageurs, que des col- lines , en comparaison de celles des pays méridionaux I. D’ailleurs le nombre des 1. Lorsque j’ai composé, en 1744 > ce Traité de la Théorie de la terre , je n’étois pas aussi instruit que je le suis actuellement, et l’on n’avoit pas fait les observations par lesquelles on a reconnu que Iss sommets des plus hautes montagnes sont com- posés de granité et de rocs vitrescibles , et qu’on ne trouve point de coquilles sur plusieurs de ces sommets; cela prouve que ces montagnes n’ont pas été composées par les eaux, mais produites par le feu primitif, et qu’elles sont aussi anciennes que le temps de la consolidation du globe. Toutes les pointes et les noyaux de ces montagnes étant com- posés de matières vitrescibles , semblables à la roche intérieure du globe, elles sont également l’ouvrage du feu primitif, lequel a le premier établi ces masses de montagneà , et formé les grandes inégalités de la surface de la terre. L’eau n’a tra- vaillé qu’en second , postérieurement au feu , et n’a pu agir qu’à la hauteur où elle s’est trouvée après la chute ^entière des eaux de l’atmosphère et l’éta- blissement de la mer universelle , laquelle a dé- posé successivement les coquillages qu’elle nourris- soit et les autres matières qu’elle délayoit; ce qui a formé les cduches d’argile et de matières calcaires qui composent nos collines, et qui enveloppent les montagnes vitrescibles jusqu’à une grande hauteur. Au reste, lorsque j’ai dit que les montagnes du Nord ne sont que des collines en comparaison des montagnes du Midi , cela n’est vrai que pris géné- ralement ; car il y a dans le nord de l’Asie de 74 THÉORIE DE îles est fort peu considérable dans les mers septentrionales, tandis qu’il y en a une quan- tité prodigieuse dans la zone torride; et comme une île u’est qu’un sommet de mon- tagne , il est clair que la surface de la terre a beaucoup plus d’inégalités vers l’équateur que vers le nord. Le mouvement général du flux et du re- flux a donc produit les plus grandes monta- gnes, qui se trouvent dirigées d’occident en orient dans l’ancien continent, et du nord au sud dans le nouveau , dont les chaînes sont d’une étendue très-considérable; mais il faut attribuer aux mouvemens particuliers des courans , des vents, et des autres agita- tions irrégulières de la mer , l’origine de toutes les autres montagnes. Elles ont vrai- semblablement été produites par la combi- naison de tous ces mouvemens, dont on voit bien que les effets doivent être variés à l’infini , puisque les vents, la position dif- férente des îles et des côtes , ont altéré de tous les temps et dans tous les sens possibles grandes portions de terre qui paroissent être fort élevées au dessus du niveau de la mer ; et en Eu- rope les Pyrénées, les Alpes, le mont Carpate, les montagnes de Norwége , les monts Riphées et Rymniques, sont de hautes montagnes; et toute la partie méridionale de la Sibérie, quoique composée de vastes plaines et de montagnes médiocres, paroît être encore plus élevée que le sommet des monts Riphées; mais ce sont peut-être les seules excep- tions qu’il y ait à faire ici ; car non seulement les plus hautes montagnes se trouvent dans les climats plus. voisins de l’équateur que des pôles, mais il paroit que c’est dans ces climats méridionaux où se sont faits les plus grands bouleversemens inté- rieurs et extérieurs, tant par l’effet de la force centrifuge dans te premier temps de la consolida- tion , que par l’action plus fréquente des feux sou- terrains et le mouvement plus violent du flux et du reflux dans les temps subséquens. Les tremble- mens de terre sont si fréqnens dans l’Inde méri- dionale, que les naturels du pays ne donnent pas d’autre épithète à l’Etre tout-puissant que celui de remueur de terre. Tout l'archipel indien ne semble être qu’une mer de volcans agissons ou éteints : on ne peut donc pas douter que les inégalités du globe ne soient beaucoup plus grandes vers l’équa- teur que vers les pôles; on pourroit même assurer que cette surface de lu zone torride a été entière- ment bouleversée depuis la côte orientale de l’A- frique jusqu’aux Philippines, et encore bien au delà de la mer du Sud. Toute cette plage ne paroit être que les restes en débris d’un vaste continent, dont toutes les terres basses ont été submergées. L’action de tous les éléntens s’est réunie pour la destruction de la plupart de ces terres équinoxiales; car, indépendamment des marées, qui y sont plus ■violentes que sur le reste du globe , il paroit aussi qu’il y a eu plus de volcans , puisqu’il en Subsiste - encore dans la plupart de ces îles , dont quelques- unes, commé les îles de France et de Bourbon, se sont trouvées ruinées par le feu, et absolument dé- sertes , lorsqu’on en a fait la découverte. ( Add. Bu/f) LÀ TERRE, % la direction du flux et du reflux des eâuj Ainsi il n’est point étonnant qu’on trouv et sur le globe des éminences considérabh le dont le cours est dirigé vers différentes pk st ges : il suffit pour noire objet d’avoir dt :i montré que les montagnes n’ont point él a placées au hasard, et qu’elles n’ont poir d été produites par des tremblemens de terr pt ou par d’autres causes accidentelles, mai je qu’elles sont un effet résultant de l’ordr l'a général de la nature, aussi bien que l’espèc : I d’organisation qui leur est propre, et la pn 511 sition des matières qui les composent. gei Mais comment est-il arrivé que cette terr Bai que nous habitons , que nos ancêtres on fie» habitée comme nous, qui, de temps imm« liai morial, est un continent sec , ferme et éloi iju gné des mers , ayant été autrefois un fon no de mer, soit actuellement supérieure à tout€ Il les eaux , et en soit si distinctement séparée di Pourquoi les eaux de la mer n’ont- elles pa ; ni resté sur celte terre, puisqu’elles y ont sé ce journé si long-temps ? Quel accident, quell j en cause a pu produire ce changement dans ! de globe? Est-il même possible d’en concevoi 101 une assez puissante pour opérer un tel effet ! Il: Ces questions sont difficiles à résoudre lai mais les faits étant certains , la manière donj coi ils sont arrivés peut demeurer inconnue sar; de préjudicier au jugement que nous devons e; fai porter : cependant , si nous voulons y réflé i chir, nous trouverons par induction de co raisons très- plausibles de ces cbaagemens 1 ïi Nous voyons tous les jours la mer gagne p du terrain dans de certaines côtes, et eifen perdre dans d’autres; nous savons que F G JL/ céan a un mouvement général et continue f cet d’orient en occident ; nous entendons de loii j en les efforts terribles que la mer fait contr Loi les basses terres et contre les rochers quif |con bornent; nous connoissons des province Las entières où on est obligé de lui oppose ] Jep des dignes que l’industrie humaine a bien d je[( la peine à soutenir contre la fureur de j au flots; nous avons des exemples de pays ré II SU1 cemmenl submergés et de débordemens ré nei guliers; 1 histoire nous parle d’inondation j pj encore plus grandes et de déluges : tout ce{.-.l p|u, ne doit-il pas nous porter à croire qu’il es iijfj en effet arrivé de grandes révolutions suri Jjjf,| surface de la terre , et que la mer a pu quii j j ter et laisser à découvert la plus grand fi mil partie des terres qu’elle occupoit autrefois Par exemple , si nous nous prêtons un instan | lyi; à supposer que l’Ancien et le Nouveau-Mond j ^ 11e faisoient autrefois qu’un seul continent ]a „ I x. Voyez les Preuves, art. XIX. eau m t que, par un violent tremblement de terre, “î)l( 3 terrain de l’ancienne A tlantide de Platon 'laie soit affaissé , la mer aura nécessairement dé oulé de tous côtés pour former l’Océan lél üamique, et par conséquent aura laissé à poii écouvert de vastes continens , qui sont le» ieul-être ceux que nous habitons. Ce chan- œt ement a donc pu se faire tout à coup par fdl affaissement de quelque vaste caverne dans et intérieur du globe , et produire par consé- ip tient un déluge universel; ou bien cechan- ement ne s’est pas fait tout à coup , et il en fallu peut-être beaucoup de temps : mais oi nfm il s’est fait , et je crois même qu’il s’est œ ait naturellement; car, pour juger de ce !o [ui est arrivé , et même de ce qui arrivera, m tous n’avons qu’à examiner ce qui arrive. Ht 1 est certain , par les observations réitérées ée le tous les voyageurs r, que l’Océan a un pi nouvement constant d’orient en occident : :e mouvement se fait sentir non seulement pntre les tropiques , comme celui du vent l’est , mais encore dans toute l’étendue des :ones tempérées et froides où l’on a navigué. 1 suit de cette observation , qui est cons- ante, que la mer Pacifique fait un effort continuel contre les côtes de la Tartarie , ïe la Chine et de l’Inde ; que l’Océan indien fait effort contre la côte orientale de l’Afri- que , et que l’Océan atlantique agit de même contre toutes les côtes orientales de l’Amé- ’ique : ainsi la mer a dû et doit toujours ga- gner du terrain sur les côtes orientales , et îii perdre sur les côtes occidentales. Cela ;eul suffiroit pour prouver la possibilité de 3e changement de terre en mer et de mer 3n terre; et si en effet il s’est opéré par ce mouvement des eaux d’orient en occident , comme il y a grande apparence, ne peut-on pas conjecturer très-vraisemblablement que e pays le plus ancien du monde est l’Asie et tout le continent oriental; que l’Europe, au contraire, et une partie de l’Afrique, et surtout les côtes occidentales de ces conti- nens, comme l’Angleterre, la France, l’Es- pagne, la Mauritanie, etc., sont des terres plus nouvelles ? L’histoire paroît s’accorder ici avec la physique , et confirmer cette con- jecture, qui n’est as sans fondement. Mais il y a bien d’autres causes qui con- courent, avec le mouvement continuel de la mer d’orient en occident , pour produire l’effet dont nous parlons. Combien n’y a-t-il pas de terres plus basses que le niveau de la mer, et qui ne sont défendues que par un isthme, un banc de rochers, ou par des digues encore plus foibles ! L’effort des eaux x. Voyez Karen. Geogr. gen., page ng. 1$ détruira peu à peu ces barrières , et dès lors ces pays seront submergés. De plus, ne sait- cm pas que les monlagnes s’abaissent 2 con- tinuellement par les pluies, qui en détachent les terres et les entraînent dans les vallées ? ne sait-on pas que les ruisseaux roulent les terres des plaines et des montagnes dans les fleuves , qui portent à leur tour cette terre superflue dans la mer ? Ainsi peu à peu le fond des mers se remplit , la surface des continens s’abaisse et se met de niveau , et il ne faut que du temps pour que la mer prenne successivement la place de la terre. Je ne parle point de ces causes éloignées qu’on prévoit moins qu’on ne les devine , de ces secousses de la nature dont le moin- dre effet seroit la catastrophe du monde : le choc ou l’approche d’une comète, l’absence de la lune, la présence d’une nouvelle pla- nète, etc., sont des suppositions sur les- quelles il est aisé de donner carrière à son imagination ; de pareilles causes produisent tout ce qu’on veut, et d’une seule de ces hypothèses on va tirer milie romans physi- ques , que leurs auteurs appelleront Théorie ae la terre. Comme historien , nous nous refusons à ces vaines spéculations ; elles rou- lent sur des possibilités qui, pour se réduire à l’acte , supposent un bouleversement de l’univers , dans lequel notre globe , comme un point de matière abandonnée, échappe à nos yeux, et n’est plus un objet digne de nos regards : pour les fixer , il faut le pren- dre tel qu’il est, en bien observer toutes les parties , et , par des inductions, conclure du présentai! passé. D’ailleurs, des causes dont l’effet est rare, violent et subit, ne doi- vent pas nous toucher; elles ne se trouvent pas dans la marche ordinaire de la nature ; mais des effets qui arrivent tous les jours , des mouvemens qui se succèdent et se re- nouvellent sans interruption, des opérations constantes et toujours réitérées , ce sont là nos causes et nos raisons. Ajoutons-y des exemples, combinons la cause générale avec les causes particulières, et donnons des faits dont le détail rendra sensibles les différens changemens qui sont arrivés sur le globe, soit par l’irruption de l’Océan dans les terres, soit par l’abandon de ces mêmes terres , lorsqu’elles se sont trou- vées trop élevées. La plus grande irruption de l’Océan dans les terres est celle 3 qui a produit la mer 4 2. Voyez Raj’s Discourscs , page 226; Plot, Hist. nat., etc. 3. Voyez les Preuves , art. XI et XIX. 4. Voyez Raj’s Discourses , page 209. THÉORIE DE LA TERRE, 7 6 THEORIE DE LA TERRE. Méditerranée. Entre deux promontoires avancés , l’Océan 1 coule avec une très-grande rapidité par un passage étroit , et forme en- suite une vaste mer qui couvre un espace, lequel, sans y comprendre la mer Noire, est environ sept fois grand comme la France. Ce mouvement de l’Océan par le détroit de Gibi'altar a été contraire à tous les autres mouvemens de la mer dans tous les détroits qui joignent l’Océan à l’Océan; car le mou- vement général de la mer est d’orient en occident, et celui-ci seul est d’occident en orient; ce qui prouve que la mer Méditer- ranée n’est point' un golfe ancien de l’Océan, mais qu’elle est formée par une irruption des eaux, produite par quelques causes ac- cidentelles, comme seroit un tremblement de terre , lequel auroit affaissé les terres à l’endroit du détroit, ou un violent effort de l’Océan causé par les vents, qui auroit rompu la digue entre les promontoires de Gibraltar et de Ceuta. Cette opinion est appuyée du témoignage des anciens 1 , qui ont écrit que la mer Méditerranée n’exisloit point autrefois ; et elle est, comme on voit, confirmée par l’histoire naturelle, et par les observations qu’on a faites sur la nature des terres à la côte d’Afrique et à celle d’Espagne, où l’on trouve les mêmes lits de pierre, les mêmes couches de terre en deçà et au delà du détroit, à peu près comme dans de certaines vallées où les deux collines qui les surmontent se trouvent être composées des mêmes matières et au même niveau. L’Océan , s’étant donc ouvert cette porte . a d’abord coulé par le détroit avec une ra- pidité beaucoup plus grande qu’il ne coule aujourd’hui, et il a inondé le continent qui joignoit l’Europe à l’Afrique; les eaux ont couvert toutes les basses terres dont nous n’apercevons aujourd’hui que les éminences et les sommets dans l’Italie et dans les îles de Sicile, de Malte, de Corse, de Sardai- gne, de Chypre, de Rhodes, et de l’Archi- pel. Je n’ai pas compris la mer Noire dans cette irruption de l’Océan , parce qu’il pa- roît que la quantité d’eau qu’elle reçoit du Danube, du Niéper, du Don, et de plu- sieurs autres fleuves qui y entrent , est plus que suffisante pour la former, et que d’ailleurs elle 3 coule avec une très-grande rapidité par le Bosphore dans la mer Méditerranée. On pourroit même présumer que la mer 1. Voyez Tram. phil. abrig’d , vol. II, page 289. 2. Diodore de Sicile , Strabon. 3. Veye? Trans.phil. abrig'd , vol. II, page 289. Noire et la mer Caspienne ne faisoient au 1 (î trefois que deux grands lacs qui peut-êtri 1 g étoient joints par un détroit de communi j cation , ou bien par un marais ou un peti (S| lac qui réunissoit les eaux du Don et dili |a Volga auprès de Tria , où ces deux fleuve; j sont fort voisins l’un de l’autre, et l’on peu croire que ces deux mers ou ces deux lac, m étoient autrefois d’une bien plus grandi f étendue qu’ils ne sont aujourd’hui : peu i ]f peu ces grands fleuves, qui ont leur embou jcl chure dans la mer Noire et dans la mei p0l Caspienne , auront amené une assez grandi 1 ^ quantité de terre pour fermer la communi- ^ cation, remplir le détroit et séparer ce* deux lacs; car on sait qu’avec le temps let grands fleuves remplissent les mers et for- m ment des continens nouveaux, comme h |e„ province de l’embouchure du fleuve Jaune m à la Chine , la Louisiane à l'embouchure ^ du Mississipi, et la partie septentrionale dejl’Égyple, qui doit son origine 4 et soin M existence aux inondations 5 du Nil. La ra- j ]ffi pidité de ce fleuve entraîne les terres dé fo, l’intérieur de l’Afrique, et il les dépose en-i m suite dans ses débordemens en si grandéi J, quantité, qu’on peut fouiller jusqu’à cin-i ,jfl quante pieds dans l’épaisseur de ce limon ^ déposé par les inondations du Nil ; de même (ei les terrains de la province de la rivière K Jaune et de la Louisiane ne se sont formés 0ll que par le limon des fleuves. M Au reste, la mer Caspienne est actuel-! ja lement un vrai lac qui n’a aucune commun m nication avec les autres mers, pas même* |ua avec le lac Aral, qui paroît en avoir fait par-r ten( tie, et qui n’en est séparé que par un vaste pi pays de sable, dans lequel on ne trouve ni. ^ fleuves ni rivières, ni aucun canal par le- n quel la mer Caspienne puisse verser ses y eaux. Cette mer n’a donc aucune commu- ^ nication extérieure avec les autres mers, ]| et je ne sais si l’on est bien fondé à soup- ÿ, çonner qu’elle en a d’intérieure avec la mer C()ll, Noire ou avec le golfe Persique. Il est vrai sje que la mer Caspienne reçoit le Volga et ^ plusieurs autres fleuves qui semblent lui sjje fournir plus d’eau que l’évaporation n’en; y peut enlever : mais, indépendamment de la ^ difficulté de cette estimation, i! paroît que j|re si elle avoit communication avec l’une ou te|tc l’autre de ces mers, on y auroit reconnu un y courant rapide et constant qui entraîneroit jy tout vers cette ouverture qui serviroit de ]31ltl décharge à ses eaux , et je ne sache pas qu’on j ^ 4- Voyez les Voyages de Shaw, vol. II, page ij3 i, jusqu’à la page 188. wl, [ 5. Voyez les Preuves, art. XJX. THÉORIE DE LA TERRE. 77, ait jamais rien observé de semblable sur cette mer; des voyageurs exacts, sur le té- moignage desquels on peut compter, nous assurent le contraire, et par conséquent il (est nécessaire que l’évaporation enlève de la mer Caspienne une quantité d’eau égale à celle qu’elle reçoit. On pourvoit encore conjecturer avec quel- que vraisemblance, que la mer Noire sera un jour séparée de la Méditerranée, et que le Bosphore se remplira lorsque les grands fleuves qui ont leurs embouchures dans le Pont-Euxin, auront amené une assez grande mtité de terre pour fermer le détroit; ce qui peut arriver avec le temps, et par la diminution successive des fleuves, dont la [quantité des eaux diminue à mesure que les montagnes et les pays élevés dont ils tirent leurs sources, s’abaissent par le dépouille- ment des terres que les pluies entraînent et que les vents enlèvent. La mer Caspienne et la mer Noire doi- vent donc être regardées plutôt comme des lacs que comme des mers ou des golfes de l’Océan ; car elles ressemblent à d’autres lacs qui reçoivent un grand nombre de fleuves et qui ne rendent rien par les voies exté- rieures, comme la mer Morte, plusieurs lacs en Afrique, etc. D’ailleurs les eaux de ces deux mers ne sont pas à beaucoup près aussi salées que celles de la Méditerranée (ou de l’Océan, et tous les voyageurs assu- rent que la navigation est très-difficile sur la mer Noire et sur la mer Caspienne , à cause de leur peu de profondeur et de la quantité d’écueils et de bas-fonds qui s’y rencontrent, en sorte qu’elles ne peuvent ; porter que de petits vaisseaux 1 ; ce qui prouve encore qu’elles ne doivent pas être Regardées comme des golfes de l’Océan, mais comme des amas d’eau formés par les grands fleuves dans l’intérieur des terres. Il arriverait peut-être une irruption con- [érable de l’Océan dans les terres, si on coupait l’isthme qui sépare l’Afrique et l’A- sie, comme les rois d’Egypte, et depuis les califes , en ont eu le projet : et je ne sais si le canal de communication qu’on a pré- tendu reconnoître entre ces deux mers, est àssez bien constaté; car la mer Rouge doit être plus élevée que la mer Méditerranée : êelte mer étroite est un bras de l’Océan, qui dans toute son étendue ne reçoit aucun fleuve du côté de l’Égypte , et fort peu de “autre côté : elle ne sera donc pas sujette à diminuer comme les mers ou les lacs qui reçoivent en même temps les terres et les eaux que les fleuves y amènent , et qui se remplissent peu à peu. L’Océan fournit à la mer Rouge toutes ses eaux, et le mouve- ment du flux et reflux y est extrêmement sensible : ainsi elle participe immédiate- ment aux grands mouvemens de l’Océan. Mais la mer Méditerranée est plus basse que l’Océan, puisque les eaux y coulent avec une très-grande rapidité par le détroit de Gibraltar ; d’ailleurs elle reçoit le Nil qui coule parallèlement à la côte occidentale de la mer Rouge, et qui traverse l’Égypte dans toute sa longueur, dont le terrain est par lui-même extrêmement bas : ainsi il est très- vraisemblable que la mer Rouge est plus élevée que la Méditerranée, et que si on ôtoit la barrière en coupant l’isthme de Suez , il s’ensuivrait une grande inondation et une augmentation considérable de la mer Méditerranée, à moins qu’on ne retînt les eaux par des digues et des écluses de dis- tance en distance, comme il est à présumer qu’on l’a fait autrefois, si l’ancien canal de communication a existé. Mais, sans nous arrêter plus long-temps à des conjectures qui, quoique fondées, pourraient paraître trop hasardées , surtout à ceux qui ne jugent des possibilités que par les événemens actuels , nous pouvons don- ner des exemples récens et des faits certains sur le changement de mer en terre 2 et de terre en mer. A Venise, le fond de la mer Adriatique s’élève tous les jours, et il y a déjà long-temps que les lagunes et la ville fe- raient partie du continent, si on n’a voit pas un très-grand soin de nettoyer et vider les canaux ; il en est de même de la plu- part des ports, des petites baies, et des embouchures de toutes les rivières. En Hol- lande, le fond de la mer s’élève aussi en plusieurs endroits, car le petit golfe de Zuyderzée et le détroit du Texel ne peu- vent plus recevoir de vaisseaux aussi grands qu’autrefois. On trouve à l’embouchure de presque tous les fleuves, des îles, des sables, des terres amoncelées et amenées par les eaux; et il n’est pas douteux que la mer ne se remplisse dans tous les endroits où elle recoit.de grandes rivières. Le Rhin se perd dans les sables qu’il a lui-même accumulés. Le Danube, le Nil, et tous les grands fleu- ves ayant entraîné beaucoup de terrain, n’arrivent plus à la mer par un seul canal; mais ils ont plusieurs bouches dont les in- tervalles ne sont remplis que des sables ou - Voyez les Voyants dt Pietro dclla Valle vol. III, page a36. 2. Voyez les Preuves, art. XIX, 7§ THÉORIE DE LA TERRE. du limon qu’ils ont charriés. Tous les jours on dessèche des marais, on cultive des ter- res abandonnées par la mer, on navigue sur des pays submergés ; enfin nous voyons sous nos yeux d’assez grands changemens de terres en eau et d’eau en terres, pour être assurés que ces changemens se sont faits , se font et se feront, en sorte qu’avec le temps les golfes deviendront des continens, les isthmes seront un jour des détroits , les ma- rais deviendront des terres arides, et les sommets de nos montagnes les écueils de la mer. Les eaux ont donc couvert et peuvent encore couvrir successivement toutes les parties des continens terrestres, et dès lors on doit cesser d’être étonné de trouver par- tout des productions marines , et une com- position daqs F intérieur qui ne peut être que l’ouvrage des eaux. Nous avons vu com- ment se sont formées les couches horizon- tales de la terre ; mais nous n’avons encore rien dit des fentes perpendiculaires qu’on remarque dans les rochers, dans les car- rières, dans les argiles, etc., et qui se trouvent aussi généralement 1 que les cou- ches horizontales dans toutes les matières qui composent le globe. Ces fentes perpen- diculaires sont, à la vérité, beaucoup plus éloignées les unes des autres que les cou- ches horizontales; et plus les matières sont molles, plus ces fentes paroissent être éloi- gnées les unes des autres. Il est fort ordi- naire, dans les carrières de marbre ou de pierre dure, de trouver des fentes perpen- diculaires , éloignées seulement de quelques pieds : si la masse des rochers est fort grande, on les trouve éloignées de quelques toises, quelquefois elles descendent depuis le som- met des rochers jusqu’à leur base, souvent elles se terminent à un lit inferieur du ro- cher ; mais elles sont toujours perpendicu- laires aux couches horizontales dans toutes les matières calcinables, comme les craies, les marnes , les pierres , les marbres , etc., au lieu qu’elles sont plus obliques et plus irrégulièrement posées dans les matières vi- trifiables , dans les carrières de grès et les rochers de caillou, où elles sont intérieure- ment garnies de pointes de cristal et de mi- néraux de toute espèce ; et dans les carriè- res de marbre ou de pierre calcinable, elles sont remplies de spar , de gypse , de gravier, et d’un sable terreux, qui est bon pour bâtir , et qui contient beaucoup de chaux ; dans les argiles, dans les craies, dans les i. Voyez les Preuves , art. XYIÏ. marnes , et dans toutes les autres espèces terre, à l’exception des tufs, on trouve c< fentes perpendiculaires, ou vides, ou reir plies de quelques matières que l’eau y conduites. Il me semble qu’on ne doit pas aller che cher loin la cause et l’origine de ces fent< perpendiculaires : comme toutes les matièr ont été amenées et déposées par les eau il est naturel de penser qu’elles étoient d( trempées et qu’elles ccnleuoient d’abord ur grande quantité d’eau; peu à peu elles sont durcies et ressuyées , et en se desséchai elles ont diminué de volume, ce qui les fait fendre de distance en distance : ell ont dû se fendre perpendiculairement, par que l’action de la pesanteur des parties I unes sur les autres est nulle dans cette d reetion , et qu’au contraire elle est tout-, fait opposée à cette disruption dans la s tuation horizontale; ce qui a fait que diminution de volume n’a pu avoir d’eff sensible que dans la direction verticale. , dis que c’est la diminution du volume p le dessèchement qui seule a produit *ces ft tes perpendiculaires , et que ce n’est p l’eau contenue dans l’intérieur de ces ni tières qui a cherché des issues et qui a fora i ces fentes ; car j’ai souvent observé que 1 deux parois de ces fentes se répondent da toute leur hauteur aussi exactement que dei morceaux de bois qu’on viendroil de fendr leur intérieur est rude , et ne paroît p; avoir essuyé le frottement des eaux, qui a roient à la longue poli et usé les surface ainsi ces fentes se sont faites ou tout à cov» ou peu à peu par le dessèchement , comi nous voyons les gerçures se faire dans bois, et la plus grande partie de l’eau s’( évaporée par les pores. Mais nous fera voir dans noire discours sur les minéral qu’il reste encore de cette eau primitil dans les pierres et dans plusieurs autres ir tières, et qu’elle sert à la production i cristaux , des minéraux , et de plusieurs i très substances terrestres. L’ouverture de ces fentes perpendiculai varie beaucoup pour la grandeur : quelqu unes n’ont qu’un demi-pouce , un pouc d’autres ont un pied, deux pieds; il y ei qui ont quelquefois plusieurs toises , et ■ dernières forment entre les deux parties rocher ces précipices qu’on rem ontre si sd vent dans les Alpes et dans toutes les h au montagnes. On voit bien que celles di l’ouverture est petite ont été produites ] le seul dessèchement : mais celles qui p sentent une ouverture de quelques pieds I fn 1 ÏHEORIË DE largeur ne se sont pas augmentées à ce point par cette seule cause ; c’est aussi parce que la base qui porte le rocher ou les terres supérieures , s’est affaissée un peu plus d’un côté que de l’autre, et un petit affaissement dans la base, par exemple, une ligne ou deux, suffit pour produire dans une hau- teur considérable des ouvertures de plusieurs pieds, et môme de plusieurs toises : quel- quefois aussi les rochers coulent un peu sur leur base de glaise ou de sable , et les fen- tes perpendiculaires deviennent plus gran- des par ce mouvement. Je ne parle pas encore de ces larges ouvertures , de ces énormes coupures qu’on trouve dans les ro- chers et dans les montagnes; elles ont été produites par de grands affaissemens, comme seroit celui d’une caverne intérieure qui, ne pouvant plus soutenir le poids dont elle est chargée, s’affaisse et laisse un intervalle considérable entre les terres supérieures. Ces intervalles sont différens des fentes perpendiculaires; ils paroissent être des portes ouvertes par les mains de la nature pour la communication des nations. C’est de cette façon que se présentent les portes qu’on trouve dans les chaînes de montagnes et les ouvertures de détroits de la mer, comme les Thermopyîés , les portes du Cau- case , les Cordillères , etc., la porte du dé- troit de Gibraltar entre les monts Calpe et Abyla , la porte de l’HeîIespont, etc. Ces ouvertures n’ont point été formées par la simple séparation des matières, comme les fentes dont nous venons de parler 1 , mais par l’affaissement et la destruction d’une partie même de terres , qui a été engloutie on renversée. Ces grands affaissemens, quoique pro- duits par des causes accidentelles 2 et se- condaires , ne laissent pas de tenir une des premières places entre les principaux faits de l’histoire de la terre , et ils n’ont pas peu contribué à changer la face du globe. La plupart sont causés par des feux intérieurs, dont l’explosion fait les tremblemens de terre et les volcans : rien n’est comparable à la force 3 de ces matières enflammées et resserrées dans le sein de la terre ; on a vu des villes entières englouties, des provinces bouleversées , des montagnes renversées par leur effort. Mais, quelque grande que soit cette violence, et quelque prodigieux que j. Voyez les Preuves , art. XVII. 2. Voyez les Preuves , art. XVII. 3. Voyez Agricola, De rebus quce efjliiunt e Terra ; Trans. phii. ab., yol. H , page 39; Discourses t page 272 , etc. LA TERRÉ. 7 g nous en paroissent les effets , il ne faut pas croire que ces feux viennent d’un feu cen- tral, comme quelques auteurs l’ont écrit,' ni même qu’ils viennent d’une grande pro- fondeur, comme c’est l’opinion commune, car l’air est absolument nécessaire à leur embrasement , au moins pour l’entretenir. On peut s’assurer, en examinant les matiè- res qui sortent des volcans dans les plus violentes éruptions , que le foyer de la ma- tière enflammée n’est pas à une grande pro- fondeur, et que ce sont des matières sem- blables à celles qu’on trouve sur la croupe de la monlagne, qui ne sont défigurées que par la calcination et la fonte des parties métalliques qui y sont mêlées ; et pour se convaincre que ces matières jetées par les volcans ne viennent pas d’une grande pro- fondeur, il n’y a qu’à faire attention à la hauteur de la montagne , et juger de la force immense qui seroit nécessaire pour pousser des pierres et des minéraux à une demi-lieue de hauteur ; car l’Etna , l’Hécla, et plusieurs autres volcans , ont au moins cette élévation au dessus des plaines. Or, on sait que l’action du feu se fait en tous sens : elle ne pourroit donc pas s’exercer en haut avec une force capable de lancer de grosses pierres à une demi-lieue en hau- teur , sans réagir avec la même force en bas et vers les côtés ; cette réaction auroit bien- tôt détruit et percé la montagne de tous côtés, parce que les matières qui la compo- sent ne sont pas plus dures que celles qui sont lancées : et comment imaginer que la cavité qui sert de tuyau ou de canon pour conduire ces matières jusqu’à l’embouchure du volcan , puisse résister à une si grande violence ? D’ailleurs si cette cavité descen- doit fort bas, comme l’orifice extérieur n’est pas fort grand, il seroit comme impossible qu’il en sortît à la fois une aussi grande quantité de matières enflammées et liquides, parce qu’elles se choqueroient entre elles et contre les parois du tuyau , et qu’en par- courant un espace aussi long, elles s’étein- droient et se durciraient. On voit souvent couler du sommet du volcan dans les plai- nes des ruisseaux de bitume et de soufre fondu qui viennent de l’intérieur, et qui sont jetés au dehors avec les pierres et les minéraux. Est-il naturel d’imaginer que des matières si peu solides , et dont la masse donne si peu de prise à une violente action, puissent être lancées d’une grande profon- deur ? Toutes les observations qu’on fera sur ce sujet prouveront que le feu des vol- cans n’est pas éloigné du sommet de la mon- 8o THÉORIE DE LA TERRE. tagne , et qu’îl s’en faut bien qu’il ne des- cende 1 au niveau des plaines. Cela n’empêche pas cependant que son action ne se fasse sentir dans ces plaines par des secousses et des tremblemens de terre qui s’étendent quelquefois à une très-grande distance , qu’il ne puisse y avoir des voies souterraines par où la flamme et la fumée peuvent se 2 communiquer d’un volcan à un autre , et que dans ce cas ils ne puissent agir et s’enflammer presque en même temps. Mais c’est du foyer de l’embrasement que nous parlons : il ne peut être qu’à une pe- tite distance de la bouche du volcan, et il n’est pas nécessaire, pour produire un trem- blement de terre dans la plaine, que ce foyer soit au dessous du niveau de la plaine, ni qu’il y ait des cavités intérieures remplies du même feu; car une violente explosion, telle qu’est celle du volcan, peut, comme celle d’un magasin à poudre , donner une secousse assez violente pour quelle produise par sa réaction un tremblement de terre. Je ne prétends pas dire pour cela qu’il n’y ait des tremblemens de terre produits immédiatement par des feux souterrains ; mais3 il y en a qui viennent de la seule explosion des volcans. Ce qui confirme tout ce que je viens d’avancer à ce sujet, c’est qu’il est très-rare de trouver des volcans dans les plaines ; ils sont au contraire tous dans les plus hautes montagnes, et ont tous leur bouche au sommet : si le feu intérieur qui les consume s’étendoit jusque dessous les plaines, ne le verroit-on pas dans le temps de ces violentes éruptions s’échapper et s’ouvrir un passage au travers du terrain des plaines ? et dans le temps de la première éruption, ces feux n’auroient-ils pas plutôt percé dans les plaines, et au pied des mon- tagnes où ils n’auroient trouvé qu’une foible résistance, en comparaison de celle qu’ils ont dû éprouver, s’il est vrai qu’ils aient ouvert et fendu une montagne d’une demi- lieue de hauteur pour trouver une issue ? Ce qui fait que les volcans sont toujours dans les montagnes , c’est que les minéraux, les pyrites et soufres, se trouvent en plus grande quantité et plus à découvert dans les montagnes que dans les plaines , et que ces lieux élevés recevant plus aisément et en plus grande abondance les pluies et les au- tres impressions de l’air , ces matières miné- rales qui y sont exposées, se mettent en i. Voyez Borelli , de Incendîis'Æ tnœ, etc. 3. Voyez Trans. phil. cibrig’d, vol. II, page 3g2. 3. Voyez les Preuves, art. XVI. fermentation et s’échauffent jusqu’au point de s’enflammer. Enfin on a souvent observé qu’après de violentes éruptions pendant lesquelles le volcan rejette une très-grande quantité de matières, le sommet de la montagne s’affaisse et diminue à peu près de la même quantité qu’il seroit nécessaire qu’il diminuât pour fournir les matières rejetées ; autre preuve quelles^ ne viennent pas de la profondeur intérieure du pied de la montagne, mais de la partie voisine du sommet, et du sommet même. Les tremblemens de terre ont donc pro- duit dans plusieurs endroits des affabsemens considérables, et ont fait quelques-unes des grandes séparations qu’on trouve dans les chaînes des montagnes : toutes les autres ont été produites en même temps que les montagnes mêmes par le mouvement des courans de la mer; et partout où il n’y a pas eu de bouleversement , on trouve les pondans des montagnes 4. Les volcans ont aussi formé des cavernes et des excavations souterraines qu’il est aisé de distinguer de celles qui ont été formées par les eaux, qui, ayant entraîné de l’intérieur des montagnes les sables et les autres matières divisées, n’ont laissé que les pierres et les rochers qui contenoient ces sables , et ont ainsi formé les cavernes que l’on remarque dans les lieux élevés, car celles qu’on trouve dans les plaines ne sont ordinairement que des carrières anciennes ou des mines de sel et d’autres minéraux, comme la carrière de Maestricht et les mines de Pologne, etc., qui sont dans des plaines. Mais les caver- nes naturelles appartiennent aux montagnes, et elles reçoivent les eaux du sommet et des environs , qui y tombent comme dans des réservoirs , d’où elles coulent ensuite sur la surface de la terre lorsqu’elles trouvent une issue. C’est à ces cavités que l’on doit attri- buer l’origine des fontaines abondantes et des grosses sources; et lorsqu’une caverne s’affaisse et se comble , il s’ensuit ordinaire- ment 5 une inondation. On voit par tout ce que nous venons de dire, combien les feux souterrains contri- buent à changer la surface et l’intérieur du globe. Cette cause est assez puissante pour produire d’aussi grands effets : mais on ne croiroit pas que les vents pussent 6 causer des altérations sensibles sur la terre ; la mer abi «llei 4. Voyez les Preuves, art. XVII. 5. Voyez Trans. phil. ab., vol. II, page 3aa. 6. Voyez les Preuves, art. XV. THEORIE DE LA TERRE. 81 >aroit être leur empire, et après le flux et e reflux, rien n’agit avec plus de puissance ur cet élément ; même le flux et le reflux aarchent d’un pas uniforme , et leurs effets opèrent d’une manière égale et qu’on pré- oit : mais les vents impétueux agissent, our ainsi dire, par caprice; ils se préci- itent avec fureur et agitent la mer avec une die violence, qu’en un instant cette plaine aime et tranquille devient hérissée de vagues- autes comme des montagnes, qui viennent 3 briser contre les rochers et contre les ôtes. Les vents changent donc à tout mo- lent la face mobile de la mer : mais la face la terre, qui nous paroît si solide, ne evroit-elle pas être à l’abri d’un pareil fet ? On sait cependant que les vents évent des montagnes de sables dans l’A- ibie et dans l’Afrique, qu’ils en couvrent s plaines ; et que souvent ils transportent îs sables à de grandes 1 distances et jusqu’à lusieurs lieues dans la mer, où il les amon- llent en si grande quantité, qu’ils y ont »rmé des bancs, des dunes, et des îles. On lit que les ouragans sont le fléau des Antilles , e Madagascar, et de beaucoup d’autres pays , i ils agissent avec tant de fureur, qu’ils en- vent quelquefois les arbres, les plantes, les îimaux, avec toute la terre cultivée; ils mt remonter et tarir les rivières, ils ep roduisent de nouvelles, ils renversent les ontagnes et les rochers, ils font des trous des gouffres dans la terre, et changent itièrement la surface des malheureuses con- ées où ils se forment. Heureusement il n’y que peu de climats exposés à la fureur ipétueuse de ces terribles agitations de pr. Mais ce qui produit les changemens les us grands et les plus généraux sur la sur- ce de la terre, ce sont les eaux du ciel, s fleuves, les rivières et les torrens. Leur emière origine vient des vapeurs que le leil élève au dessus de la surface des mers , que les vents transportent dans tous les imats de la terre : ces vapeurs , soutenues ms les airs, et poussées au gré du vent, attachent aux sommets des montagnes li’elles rencontrent, et s’y accumulent en grande quantité , qu’elles y forment con- nuellement des nuages, et retombent in- ssamment en forme de pluie, de rosée, de Mouillard, ou de neige. Toutes ces eaux sont abord descendues dans les plaines a sans 1. Voyez Bellarmin , de Aseen. mentis in Deum ; aren. Geogr. gen., page 282; Voyages de Pyrard , me I , page 47°- 2. Voyez les Preuves, art. X et XVIII. Büffoiî. I. tenir de route fixe ; mais peu à peu elles ont creusé leur lit , et , cherchant par leur pente naturelle les endroits les plus bas de la mon- tagne et les terrains les plus faciles à diviser ou à pénétrer, elles ont entraîné les terres et les sables; elles ont formé des ravines profondes en coulant avec rapidité dans les jplaines; elles se sont ouvert des chemins jusqu’à la mer, qui reçoit autant d’eau par ses bords qu’elle en perd par l’évaporation : et de même que les canaux et les ravines que les fleuves ont creusés ont des sinuosités et des contours dont les angles sont correspon- dans entre eux, en sorte que l’un des bords formant un angle saillant dans les terres, le bord opposé fait toujours un angle rentrant, les montagnes et les collines, qu’on doit re- garder comme les bords des vallées qui les séparent, ont aussi des sinuosités correspon- dantes de la même façon; ce qui semble démontrer que les vallées ont été les canaux des courans de la mer, qui les ont creusés peu à peu et de la même manière que les fleuves ont creusé leur lit dans les terres. Les eaux qui roulent sur la surface de la terre, et qui y entretiennent la verdure et la fertilité, ne sont peut-être que la plus pe- tite partie de celles que les vapeurs pro- duisent; car il y a des veines d’eau qui coulent et de l’humidité qui se filtre à de grandes profondeurs dans l’intérieur de la terre. Dans de certains lieux, en quelque endroit qu’on fouille, on est sûr de faire un puits et de trouver de l’eau; dans d’autres, on n’en trouve point du tout : dans presque tous les vallons et les plaines basses , on ne manque guère de trouver de l’eau à une profondeur médiocre ; au contraire , dans tous les lieux élevés et dans toutes les plaines en montagne, on ne peut en tirer du sein de la terre, et il faut ramasser les eaux du ciel. Il y a des pays d’une vaste étendue où l’on n’a jamais pu faire un puits, et où toutes les eaux qui servent à abreuver les habitans et les animaux sont contenues dans des mares et des citernes. En Orient , surtout dans l’Arabie, dans l’Égypte, dans la Perse, etc., les puits sont extrêmement rares, aussi bien que les sources d’eau douce ; et ces peuples ont été obligés de faire de grands réservoirs pour recueillir les eaux des pluies et des neiges ; ces ouvrages, faits pour la nécessité publique, sont peut-être les plus beaux et les plus magnifiques monumeus des Orien- taux; il y a des réservoirs qui ont jusqu’à deux lieues de surface, et qui servent à arroser et à abreuver une province entière, au moyen des saignées et des petits ruisseaux 6 8a THÉORIE DE LA TERRÉ. qu’on en dérive de tous côtés. Dans d’autres pays, au contraire, comme dans les plaines où coulent les grands fleuves de la terre, on ne peut pas fouiller un peu profondément sans trouver de l’eau; et dans un camp situé aux environs d’une rivière , souvent chaque tente a son puits au moyen de quelques coups de pioche. Celte quantité d’eau qu’on trouve partout dans les lieux bas , vient des terres supérieu- res et des collines voisines, au moins pour la plus grande partie; car, dans le temps des pluies et de la fonte des neiges , une partie des eaux coule sur la surface de la terre, et le reste pénètre dans l'intérieur à travers les petites fentes des terres et des ro- chers; et cette eau sourcille en différens endroits lorsqu’elle trouve des issues, ou bien elle se filtre dans les sables; et lors- qu’elle vient à trouver un fond de glaise ou de terre ferme et solide , elle forme des lacs, des ruisseaux , et peut-être des fleuves sou- terrains dont le cours et l’embouchure nous sont inconnus, mais dont cependant, par les lois de la nature, le mouvement ne peut se faire qu’en allant d’un lieu plus élevé dans un lieu plus bas; et par conséquent ces eaux souterraines doivent tomber dans la mer , ou se rassembler dans quelque lieu bas de la terre , soit à la surface , soit dans l’in- térieur du globe ; car nous connaissons sur la terre quelques lacs dans lesquels il n’en- tre et desquels il ne sort aucune rivière, et il y en a un nombre beaucoup plus grand qui, ne recevant aucune rivière considé- rable, sont les sources des plus grands fleu- ves de la terre, comme les lacs du fleuve Saint-Laurent, le lac Chiamé, d’où sortent deux grandes rivières qui arrosent les royau- mes d’Asem et de Pégu, les lacs d’Assini- boïls en Amérique , ceux d’Ozera en Mos- covie, celui qui donne naisance au fleuve Bog, «celui dont sort la grande rivière Irtis, etc. , et une infinité d’autres qui semblent être les réservoirs 1 d’où la nature verse de tous côtés les eaux qu’elle distribue sur la surface de la terre. On voit bien que ces lacs ne peuvent être produits que par les eaux des terres supérieures, qui coulent par de petits canaux souterrains en se fdtrant à travers les graviers et les sables, et vien- nent toutes se rassembler dans les lieux les plus bas où se trouvent ces grands amas d’eau. Au reste, il ne faut pas croire, comme quelques gens l’ont avancé , qu’il se trouve des lacs au sommet des plus hautes montagnes ; car ceux qu’on trouve dans les Alpes et dans les autres lieux hauts, sont .tous surmontés par des terres beaucoup plut hautes, et sont au pied d’autres montagne! peut-être plus élevées que les premières : ils tirent leur origine des eaux qui coulent à l’extérieur ou se filtrent dans l’intérieur df ces montagnes , tout de même que les eaus des vallons et des plaines tirent leur source des collines voisines et des terres plus éloi- gnées qui les surmontent. Il doit donc se trouver, et il se trouve en effet dans l’intérieur de la terre des1 lacs et des eaux répandues; surtout ai dessous des plaines 2 et des grandes val- lées ; car les montagnes, les collines, el toutes les hauteurs qui surmontent les terre! basses , son! découvertes tout autour , et pré sentent dans leur penchant une coupe on perpendiculaire ou inclinée, dans l’étendm de laquelle les eaux qui tombent sur le som- met de la montagne et sur les plaines éle- vées , après avoir pénétré dans les terres, ne peuvent manquer de trouver issue et de sor-i tir de plusieurs endroits en forme de sour i ces et de fontaines; et par conséquent il n’j aura que peu ou point d’eau sous les monta- gnes. Dans les plaines, au contraire, commt l’eau qui se filtre dans les terres ne peut trou- ver d’issue, il y aura des amas d’eau souter- rains dans les cavités de la terre, et un< grande quantité d’eau qui suintera à traveriii les fentes des glaises et des terres fermes, j|p ou qui se trouvera dispersée et divisée dan! les graviers et dans les sables. C’est cette ear qu’on trouve partout dans les lieux bas. Poui l’ordinaire, le fond d’un puits n’est autre chose qu'un petit bassin dans lequel les eauj <| u1 qui suintent des terres voisines serassemblen en tombant d’abord goutte à goutte, et en- suite à filets d’eau continus, lorsque les route sèc sont ouvertes aux eaux les plus éloignées; er fait sorte qu’il est vrai de dire que quoique dam cm les plaines basses on trouve de l’eau partout au on ne pourroit cependant y faire qu’un cer loi tain nombre de puits, proportionné à fefoi quantité d’eau dispersée, ou plutôt à l’é-ie tendue des terres plus élevées d’où ces eaus la tirent leur source. p Dans la plupart des plaines, il n’est pa! nécessaire de creuser jusqu’au niveau de k rivière pour avoir de l’eau ; on la trouve ordinairement à une moindre profondeur , fini et il n’y a pas d’apparence que l’eau deip fleuves et des rivières s’étende loin en st filtrant à travers les terres. On ne doit pas 1 T.. Voyez les Preuves, art. XI. a. Voyez les Preuves, art. XVIII. THEORIE DI LÀ TERRE. 83 non plus leur attribuer l’origine de toutes les eaux qu’on trouve au dessous de leur niveau dans l’interieur de la terre ; car dans les torrens , dans les rivières qui tarissent, dans celles dont on détourne le cours, on ne trouve pas, en fouillant dans leur lit , plus d’eau qu’on n’en trouve dans les terres voisines. Il ne faut qu’une langue de terre de cinq ou six pieds d’épaisseur pour conte- nir l’eau et l’empècher de s’échapper ; et j’ai souvent observé que les bords des ruis- seaux et des mares ne sont pas sensiblement humides à six pouces de distance. Il est vrai que l’étendue de la filtration est plus ou moins grande, selon que le terrain est plus ou moins pénétrable : mais si 1 on examine les ravines qui se forment dans les terres et même dans les sables, on reconnoîtra que l’eau passe toute dans le £etit espace qu’elle se creuse elle-même , et qu’à peine les bords sont mouillés à quelques pouces de distance dans ces sables. Dans les terres végétales même, où la filtration doit être beaucoup plus grande que dans les sables et dans les autres terres , puisqu’elle est aidée de la force du tuyau capillaire , on ne s’aperçoit pas Quelle s’étende fort loin. Dans un jardin m an arrose abondamment, et on inonde, pour :oi ainsi dire, une planche, sans que les plan- te ihes voisines s’en ressentent considérable- ui nent. J’ai remarqué, en examinant de gros ive non^eaux de terre de jardin de huit ou dix me lieds d’épaisseur , qui n’avoient pas été re- M nués depuis quelques années, et dont le ea ommet étoit à peu près de niveau , que l’eau Pot Les pluies n’a jamais pénétré à plus de trois aut u quatre pieds de profondeur; en sorte eau u’en remuant cette terre au printemps il)|j près un hiver fort humide, j’ai trouvé la ;t et Brre de l’intérieur de ces monceaux ai.ssi roui eche que quand on l’avoit amoncelée. J’ai ; f lit la même observation sur des terres ac- ed’ai umulées depuis près de deux cents ans: ulon u dessous de trois ou quatre pieds de pro- mue mdeur, la terre étoit aussi sèche que la j j | oussière. Ainsi l’eau ne se communique ni j fi e s’étend pas aussi loin qu’on le croit par ;seal l seule filtration; cette voie n’en fournit Jans l’intérieur de la terre que la plus pe- estjii jte partie; mais depuis la surface jusqu’à u(je! g grandes profondeurs, l’eau descend par iroUj lin propre poids ; elle pénètre par des con- D(|flir uits naturels ou par de petites routes ,i( u’elle s’est ouvertes elle-même; elle suit les peines des arbres, les fentes des rochers, s interstices des terres , et se divise et s’é- nd de tous côtés en une infinité de petits imeaux et de filets , toujours en descendant jusqu’à ce qu’elle trouve une issue après avoir rencontré la glaise ou un autre terrain solide sur lequel elle s’est rassemblée. Il seroit fort difficile de faire une évalua- tion un peu juste de la quantité des eaux souterraines qui n’ont point d’issue appa- rente1. Rien des gens ont prétendu qu’elle surpassoit de beaucoup celle de toutes les eaux qui sont à la surface de la terre ; et sans parler de ceux qui ont avancé que l’intérieur du globe étoit absolument rempli d’eau , il y en a qui croient qu’il y a une infinité de fleuves, de ruisseaux, de lacs, dans la pro- fondeur de la terre : mais cette opinion , quoique commune, ne me paroît pas fon- dée, et je crois que la quantité des eaux souterraines qui n’ont point d’issue à la sur- face du globe n’est pas considérable; car s’il y avoit un si grand nombre de rivières sou- terraines, pourquoi ne verrions-nous pas à la surface de la terre des embouchures de quelques-unes de ces rivières, et par con- séquent des sources grosses comme des fleu- ves ? D’ailleurs les rivières et toutes les eaux courantes produisent des changemens très- considérables à la surface de la terre ; elles entraînent les terres , creusent les rochers , déplacent tout ce qui s’oppose à leur passage. Il en seroit de même des fleuves souterrains; ils produiraient des altérations sensibles dans l’intérieur du globe. Mais on n’y a point observé de ces changemens produits par le mouvement des eaux; rien n’est déplacé : les couches parallèles et horizontales sub- sistent partout; les différentes matières gar- dent partout leur position primitive, et ce n’est qu’en fort peu d’endroits qu’on a ob- servé quelques veines d’eau souterraines un peu considérables. Ainsi l’eau ne travaille point en grand dans l’intérieur de la terre; mais elle y fait bien de l’ouvrage en petit : comme elle est divisée en une infinité de filets, qu elle est retenue par autant d’obsta- cles, et enfin qu’elle est dispersée presque partout , elle concourt immédiatement à la formation de plusieurs substances terrestres qu’il faut distinguer avec soin des matières anciennes, et qui en effet en different tota- lement par leur forme et par leur organi- sation. Ce sont donc les eaux rassemblées dans la vaste étendue des mers qui, par le mouve- ment continuel du flux et du reflux, ont produit les montagnes, les vallées et les au- tres inégalités de la terre; ce sont les cou- rans de la mer qui ont creusé les vallons et t. Voyez les Preuves, art. X , XI et XVIII. 6. 84 THÉORIE DE LA TERRE. élevé les collines en leur donnant des direc- tions correspondantes; ce sont ces mêmes eaux de la mer qui, en transportant les terres , les ont disposées les unes sur les au- tres par lits horizontaux; et ce sont les eaux du ciel qui peu à peu détruisent l’ouvrage de la mer, qui rabaissent continuellement la hauteur des montagnes, qui comblent les vallées , les bouches des fleuves et les golfes, et qui, ramenant tout au niveau, rendront un jour cette terre à la mer qui s’en empa- rera successivement, en laissant à découvert de nouveaux continens entrecoupés de val- lons et de montagnes, et tout semblables à ceux que nous habitons aujourd’hui. % A Montbard, le 3 octobre 1744. PREUVES DE LA THÉORIE DE LA TERRE. ARTICLE I. De la formation des planètes. Fecitque cadendo Undique ne caderet. Ma. nil. Notre objet étant l’histoire naturelle , nous nous dispenserions volontiers de parler d’astronomie : mais la physique de la terre tient à la physique céleste ; et d’ailleurs , nous croyons que pour une plus grande in- telligence de ce qui a été dit , il est nécessaire de donner quelques idées générales sur la formation, le mouvement et la figure de la terre et des planètes. La terre est un globe d’environ trois mille lieues de diamètre : elle est située à trente millions de lieues du soleil , autour duquel elle fait sa révolution en trois cent soixante- cinq jours. Ce mouvement de révolution est Le résultat de deux forces : l’une qu’on peut se représenter comme une impulsion de droite à gauche , ou de gauche à droite ; et l’autre comme une attraction de haut en bas, ou du bas en haut, vers un centre. La direc- tion de ces deux forces et leurs quantités sont combinées et proportionnées de façon qu’il en résulte un mouvement presque uniforme dans une ellipse for» approchante d’un cer- cle *. Semblable aux autres planètes , la terre 1. J’ai dit que la terre est située à trente million» de lieues du soleil ; et c’étoit en effet l’opinion com- mune des astronomes en 1745 , lorsque j’ai écrit ce traité de la formation des planètes : mais de nou- velles observations , et surtout la dernière faite en 1769, du passage de Vénus sur le disque du soleil, nous ont démontré que cette distance de trente millions doit être augmentée de trois ou quatre est opaque, elle fait ombre, elle reçoit et réfléchit la lumière du soleil , et elle tourne autour de cet astre suivant les lois qui con- viennent à sa distance et à sa densité rela- tive : elle tourne aussi sur elle-même en vingt quatre heures, et l’axe autour duquel se fait ce mouvement de rotation est incliné de soixante-six degrés et demi sur le plan de l’orbite de sa révolution. Sa figure est celle d’un sphéroïde dont les deux axes diffèrent d’environ une cent soixante et quinzième partie, et le plus petit axe est celui autour duquel se fait la rotation. Ce sont là les principaux phénomènes de la terre; ce sont là les résultats des grandes découvertes que l’on a faites par le moyen de la géométrie, de l’astronomie, et de la navigation. Nous n’entrerons point ici dans le détail qu’elles exigent pour être démon- trées, et nous n’examinerons pas comment on est venu au point de s’assurer de la vé- cu re au dé soi millions de lieues ; et c’est par cette raison que dans I tel les deux mémoires de la partie hypothétique de ! cet ouvrage, j’ai toujours compté trente-trois mil- lions de lieues, et non pas trente, pour la distance j ® moyenne de la terre au soleil. Je suis obligé de Ici faire cette remarque , afin qu’on ne me mette pas | toi en opposition avec moi-même. || Je dois encore remarquer que non seulement on j , a reconnu par les nouvelles observations que le so- J (l"' leil étoit à quatre millions de lieues de plus de dis- J (]U6 tance de la terre, mais aussi qu’il étoit plus volu- I ijoj mineux d’un sixième, et que par conséquent le L». volume entier des planètes n’est guère que la huit 1 centième partie de celui du soleil , et non pas la ij 8 'E six cent cinquantième partie, comme je l’ai avancé J Sont d’après les connoissances que nous avions , eu | tous 1745 , sur ce sujet. Cette différence en moins rend || . d’autant plus plausible la possibilité de cette pro- jj jection de la matière des planètes hors du soleil, j *™C! (Add. Buff.\ - j Celte 1 nm ART. L FORMATION DES PLANÈTES. J rité de tous ces faits; ce seroit répéter ce qui a été dit : nous ferons seulement quel- ques remarques qui pourront servir à éclair- cir ce qui est encore douteux ou contesté,^ t et en même temps nous donnerons nos idées ; au sujet de la formation des planètes, et des ' ,r différens états par où il est possible qu’elles aient passé avant que d’être parvenues à l’état où. nous les voyons aujourd’hui. On trouvera dans la suite de cet ouvrage des extraits de tant de systèmes et de tant d’hy- pothèses sur la formation du globe terres- tre, sur les différens états par où il a passé, et sur les changemens qu’il a subis, qu’on ne peut pas trouver mauvais que nous joi- gnions ici nos conjectures à celles des phi- losophes qui ont écrit sur ces matières , et surtout lorsqu’on verra que nous ne les don- nons en effet que pour de simples conjec- ît tures, auxquelles nous prétendons seule- e ment assigner un plus grand degré de pro- habilité qu’à toutes celles qu’on a faites I sur le même sujet. Nous nous refusons d’au- i tant moins à publier ce que nous avons jt pensé sur cette matière, que nous espérons |e par là mettre le lecteur plus en étal de pro- ie noncer sur la grande différence qu’il y a le entre une hypothèse où il n’entre que des et possibilités , et une théorie fondée sur des lie faits; entre un système tel que nous allons ûr en donner un dans cet article sur la forma- i tion et le premier état de la terre , et une de histoire physique.de son état actuel, telle [fS que nous venons de la donner dans le dis- ffl cours précédent. la Galilée ayant trouvé la loi de la chute des ms corps , et Kepler ayant observé que les ai- in. res que les planètes principales décrivent ÎUt autour du soleil, et celles que les satellites [j. décrivent autour de leur planète principale, sont proportionnelles aux temps , et que les mu temps des révolutions des planètes et des Je satellites sont proportionnels aux racines ul1' carrées des cubes de leurs distances au so- leil ou à leurs planètes principales, New- pas ton trouva que la force qui fait tomber les i graves sur la surface de la terre s’étend jus- qu’à la lune et la relient dans son orbite; ” que cette force diminue en même propor- ,0jij tion que le carré de la distance augmente; jtli j que par conséquent la lune est attirée par tul la terre; que la terre et toutes les planètes “J sont attirées par le soleil , et qu’en général ei jj tous les corps qui décrivent autour d’un centre ou d’un foyer des aires proportion» P1! nelles au temps, sont attirés vers ce point. 1,1(1 Cette force, que nous connoissons sous le nom de pesanteur, est donc généralement 851 répandue dans toute la matière; les planè- tes, les comètes, le soleil, la terre, tout est sujet à ses lois, et elle sert de fondement à l’harmonie de l’univers : nous n’avons rien de mieux prouvé en physique que l’exis- tence actuelle et individuelle de cette force dans les planètes, dans le soleil, dans la terre , et dans toute la matière que nous touchons ou que nous apercevons. Toutes les observations ont confirmé l’effet actuel de cette force , et le calcul en a déterminé la quantité et les rapports. L’exactitude des géomètres et la vigilance des astronomes at- teignent à peine à la précision de celte mé- canique céleste et à la régularité de ses effets. Cette cause générale étant connue , on en déduiroit aisément les phénomènes , si l’ac- tion des forces qui les produisent n’étoit pas trop combinée. Mais qu’on se représente un moment le système du monde sous ce point de vue, et on "senftra. quel chaos or a eu à débrouiller. Les planètes principales sont attirées par le soleil; le soleil est attiré par les planètes; les satellites sont aussi at- tirés par leur planète principale ; chaque pla- nète est attirée par toutes les autres, et elle les attire aussi. Toutes ces actions et réac- tions varient suivant les masses et les dis- tances : elles produisent des inégalités, des irrégularités : comment combiner et évaluer une si grande quantité de rapports ? Paroit- il possible, au milieu de tant d’objets, de suivre un objet particulier? Cependant on a surmonté ces difficultés; le calcul a con- firmé ce que la raison avoit soupçonné ; chaque observation est devenue une nou- velle démonstration , et l’ordre systématique de l’univers est à découvert aux yeux de tous ceux qui savent reconnoître la vérité. Une seule chose arrête, et est en effet indépendante de cette théorie ; c’est la force d’impulsion : l’on voit évidemment que celle d’attraction tirant toujours les planètes vers le soleil, elles tomberoient en ligne perpen- diculaire sur cet astre si elles n’en étoient éloignées par une autre force, qui ne peut être qu’une impulsion en ligne droite, dont l’effet s’exerceroit dans la tangente de l’or- bite, si la forçe d’attraction cessoit un ins- tant. Cette force d’impulsion a certainement été communiquée aux astres en général par la main de Dieu, lorsqu’il donna le branle à l’univers; mais comme on doit, autant qu’on peut, en physique, s’abstenir d’avoir recours aux causes qui sont hors de la na- ture, il me paroît que dans le système so- laire on peut rendre miser? de celte force THÉORIE DE LA TERRE. 86 d’impulsion d’une manière assez vraisem- blable, et qu’on peut en trouver une cause dont l’effet s’accorde avec les règles de la mécanique, et qui d ailleurs ne s’éloigne pas des idées qu’on doit avoir au sujet des chan- gemens et des révolutions qui peuvent et doivent arriver dans l’univers. La vaste étendue du système solaire, ou, ce qui revient au même, la sphère de l’at- traction du soleil , ne se borne pas à l’orbe des planètes, même les plus éloignées; mais elle s’étend à une distance indéfinie, tou- jours en décroissant dans la même raison que le carré de la distance augmente. Il est démontré que les comètes qui se perdent à nos yeux dans la profondeur du ciel, obéis- sent à cette force, et que leur mouvement, comme celui des planètes , dépend de l’at- traction du soleil. Tous ces astres , dont les routes sont si différentes, décrivent autour du soleil des aires proportionnelles au temps, les planètes dans des ellipses plus ou moins approchantes d’un cercle, et les comètes dans des ellipses fort allongées. Les comètes et les planètes se meuvent donc en vertu de deux forces , l’une d’attraction , et l’autre d’impulsion, qui, agissant à la fois et à tout instant, les obligent à décrire ces courbes : mais i! faut remarquer que les comètes par- courent le système solaire dans toutes sortes de directions, et que les inclinaisons des plans de leurs orbites sont fort différentes entre elles; en sorte que, quoique sujettes, comme les planètes, à la même force d’at- traction, les comètes n’ont rien de commun dans leur mouvement d’impulsion : elles pa- raissent à cet égard absolument indépen- dantes les unes des autres. Les planètes, au contraire, tournent toutes dans le même sens autour du soleil, et presque dans le même plan, n’y ayant que sept degrés et demi d’inclinaison entre les plans les plus éloignés de leurs orbites. Cette conformité de position et de direction dans le mouve- ment des planètes suppose nécessairement quelque chose de commun dans leur mou- vement d’impulsion, et doit faire soupçon- ner qu’il leur a été communiqué par une seule et même cause. Ne peut-on pas imaginer, avec quelque sorte de vraisemblance, qu’une comète, tombant sur la surface du soleil , aura dé- placé cet astre, et qu’elle en aura séparé quelques petites parties auxquelles elle aura communiqué un mouvement d’impulsion dans le même sens et par un même choc, en sorte que les planètes auraient autrefois appartenu au corps du soleil, et quelles en auraient été détachées par une force impul- sive commune à toutes, qu’elles conservent encore aujourd’hui ? Cela me paraît au moins aussi probable que l’opinion de M. Leibnitz, qui prétend que les planètes et la terre ont été des so- leils; et je crois que son système, dont on trouvera le précis à l’article cinquième, au- rait acquis un grand degré de généralité et un peu plus de probabilité s’il se fût élevé à cette idée. C’est ici le cas de croire avec lui que la chose arriva dans le temps que Moïse dit que Dieu sépara la lumière des téuèbres; car, selon Leibnitz, la lumière fut séparée des ténèbres lorsque les planètes s’éteignirent. Mais ici la séparation est phy- sique et réelle, puisque la matière opaque qui compose les corps des planètes fut réel- lement séparée de la matière lumineuse qui compose le soleil 1 . Cette idée sur la cause du mouvement d’impulsion des planètes paraîtra moins ha- sardée lorsqu’on rassemblera toutes les ana- logies qui y ont rapport, et qu’on voudra se donner la peine d’en estimer les proba- bilités. La première est celte direction com- mune de leur mouvement d’impulsion qui fait que les six planètes vont toutes d’occi- dent en orient. Il y a déjà 64 à parier contre un qu’elles n’auroient pas eu ce mouvement dans le même sens si la même cause ne l’a- voit pas produit; ce qu’il est aisé de prou- ver par la doctrine des hasards. Cette probabilité augmentera prodigieu- sement par la seconde analogie, qui est que l’inclinaison des orbites n’excède pas 7 de- 1. J’ai dit que la matière opaque qui compose le corps des planètes fut réellement séparée de la matière lumineuse qui compose le soleil. Cela pourroit induire en erreur; car la matière des planètes au sortir du soleil étoit aussi lumi- neuse que la matière même de cet astre, et les planètes ne sont devenues opaques , ou pour mieux dire obscures , que quand leur état d’incandescence a cessé. J’ai déterminé la durée de cet état d’in- candescence dans plusieurs matières que j’ai sou- mises à l’expérience, et j’en ai conclu, par ana- logie, la durée de l’incandescence de chaque pla- nète dans le premier mémoire de la partie hypo- thétique. Au reste, comme le torrent de la matière pro- jetée par la comète hors du corps du soleil a tra- versé l’immense atmosphère de cet astre, il en a entraîné les parties volatiles aériennes et aqueuses qui forment aujourd’hui les atmosphères et les mers des planètes. Ainsi l’on peut dire qu’à tous égards la matière dont sont composées les planètes est la même que celle du soleil , et qu’il n’y a d’autre différence que par le degré de chaleur, ex- trême dans le soleil, et plus ou moins attiédie dans les planètes, suivant le rapport composé de leur épaisseur et de leur densité. ( Add . Buff.) ART. I. FORMATION DES PLANETES. 87 grés et demi : car en comparent les espa- ces , on trouve qu’il y a 24 contre un pour que deux planètes se trouvent dans des plans plus éloignés , et par conséquent 24 ou 7962624 à parier contre un que ce n’est pas par hasard qu’elles se trouvent toutes six ainsi placées et renfermées dans l’espace de 7 degrés et demi ; ou , ce qui revient au même, il y a cette probabilité qu’elles ont quelque chose de commun dans le mouve- ment qui leur a donné cette position. Mais que peut-il y avoir de commun dans l’im- pression d’un mouvement d’impulsion, si ce n’est la force et la direction des corps qui le communiquent ? On peut donc con- clure avec une très-grande vraisemblance que les planètes ont reçu leur mouvement d’impulsion par un seul coup. Cette proba- bilité qui équivaut presque à une certitude, étant acquise , je cherche quel corps en mouvement a pu faire ce choc et produire cet effet, et je ne vois que les comètes ca- pables de communiquer un aussi grand mou- vement à d’aussi vastes corps. Pour peu qu’on examine le cours des co- mètes, on se persuadera aisément qu’il est presque nécessaire qu’il en tombe quelque- fois dans le soleil. Celle de 1680 en appro- cha de si près, qu’à son périhélie elle n’en étojt pas éloignée de la sixième partie du diamètre solaire; et si elle revient, comme il y a apparence, en l’année 22 55, elle pour- voit bien tomber cette fois dans le soleil : cela dépend des rencontres qu’elle aura fai- tes sur sa route, et du retardement qu’elle a souffert en passant dans l’atmosphère du soleil l. Nous pouvons donc présumer, avec le philosophe que nous venons de citer, qu’il tombe quelquefois des cometes sur le soleil; mais celte chute peut se faire de différentes façons : si elles y tombent à plomb, ou même dans une direction qui ne soit pas fort oblique, elles demeureront dans le so- leil et serviront d’aliment au feu qui con- sume cet astre, et le mouvement d’impul- sion quelles auront perdu et communiqué au soleil , ne produira d’autre effet que celui de le déplacer plus ou moins, selon que la masse de la comète sera plus ou moins con- sidérable. Mais si la chute de la comète se fait dans une direction fort oblique , ce qui doit arriver plus souvent de cette façon que de l’autre, alors la comète ne fera que raser la surface du soleil ou la sillonner à une petité profondeur ; et dans ce cas elle pourra ï. Voyez Newton, troisième édition , page 525. en sortir et en chasser quelques parties de matière auxquelles elle communiquera un mouvement commun d’impulsion, et ces parties poussées hors du corps du soleil , et la comète elle-même , pourront devenir alors des planètes qui tourneront autour de cet astre dans le même sens et dans le même plan. On pourroit peut-être calculer quelle masse, quelle vitesse et quelle direction devroit avoir une comète pour faire sortir du soleil une quantité de matière égale à celle que contiennent les six planètes et leurs satellites : mais cette recherche seroit ici hors de sa place ; il suffira d’observer que toutes les planètes avec les satellites ne font pas la 65oe partie de la masse du so- leil 2 , parce que la densité des grosses pla- nètes, Saturne et Jupiter , est moindre que celle du soleil, et que quoique la terre soit quatre fois, et la lune près de cinq fois plus dense que le soleil, elles ne sont cependant que comme des atomes en comparaison de la masse de cet astre. J’avoue que quelque peu considérable que soit une six cent cinquantième partie d'un tout , il pai oit au premier coup d’œil qu’il faudroit, pour séparer cette partie du corps du soleil, une tres-puissante comète : mais si on fait réflexion à la vitesse prodigieuse des comètes dans leur périhélie, vitesse d’autant plus grande que leur route est plus droite, et qu’elles approchent du soleil de ilus près; si d’ailleurs on fait attention à a densité, à la fixité et à la solidité de la matière dont elles doivent être composées pour souffrir, sans être détruites, la cha- leur inconcevable qu’elles éprouvent auprès du soleil, et si on se souvient en même temps qu’elies présentent aux yeux des observa- teurs un noyau vif et solide qui réfléchit fortement la lumière du soleil à travers l’at- mosphère immense de la comète qui enve- loppe et doit obscurcir ce noyau , on ne pourra guère douter que les comètes ne soient composées d’une matière très-solide et très-dense3, et qu’elles ne contiennent 2. "Voyez Newton , page 4o5. 3. J’ai dit que les cometes sont composées d'une matière très- solide et tres-dense. Ceci ne doit pas être pris comme une assertion positive et générale; car il doit y avoir de grandes différences entre la den- sité de telle ou telle comète, comme il y en a entre la densité des différentes planètes i mais on ne pourra déterminer cette différence de densité rela- tive entre chacune des comètes que quand on en connoîtra les périodes de révolution aussi parfaite- ment que l’on connoît les périodes des planètes. Une comète dont la densité seroit seulement comme la densité de la planète de Mercure, double de celle de la terre , et qui auroit à sou périhélie a®- THÉORIE DE LA TERRE. 88 sous un petit volume une grande quantité de matière ; que par conséquent une comète ne puisse avoir assez de masse et de vitesse pour déplacer le soleil , et donner un mou- vement de projectilité à une quantité de matière aussi considérable que l’est la 65oe partie de la masse de cet astre. Ceci s’ac- corde parfaitement avec ce que l’on sait au sujet de la densité des planètes : on croit qu’elle est d’autant moindre que les planè- tes sont plus éloignées du soleil , et qu’elles ont moins de chaleur à supporter; en sorte que Saturne est moins dense que Jupiter, et Jupiter beaucoup moins dense que la terre. En effet, si la densité des planètes étoit, comme le prétend Newton, propor- tionnée à la quantité de chaleur qu’elles ont à supporter, Mercure seroit sept fois plus dense que la terre , et vingt-huit fois plus dense que le soleil ; la comète de 1680 se- roit 28,000 fois plus dense que la terre, ou 112,000 fois plus dense que le soleil; et en la supposant grosse comme la terre , elle contiendroit sous un même volume une quantité de matière égale à peu près à la neuvième partie de la masse du soleil , ou, en ne lui donnant que la centième partie de la grosseur de la terre , sa masse seroit en- core égale à la 900e partie du soleil : d’où il est aisé de conclure qu’une telle masse qui ne fait qu’une petite comète , pourroit séparer et pousser hors du soleil une 900e ou une 65oe partie de sa masse, surtout si l’on fait attention à l’immense vitesse acauise avec laquelle les comètes se meuvent lors- qu’elles passent dans le voisinage de cet astre. Une autre analogie , et qui mérite quel- que attention , c’est la conformité entre la densité de la matière des planètes et la densité de la matière du soleil. Nous con- noissons sur la surface de la terre des ma- tières 14 ou 1 5,ooo fois plus denses les unes que les autres; les densités de l’or et de l’air sont à peu près dans ce rapport : mais l’intérieur de la terre et le corps des planètes sont composées de parties plus si- milaires , et dont la densité comparée varie beaucoup moins ; et la conformité de la den- tant de vitesse que la comète de 1680, seroit peut- être suffisante pour chasser hors du soleil toute la quantité de matière qui compose les planètes , parce que la matière de la comète étant dans ce cas huit fois plus dense que la matière solaire, elle communiqueroit huit fois autant de mouvement, et chasseroit une 800e partie de la masse du soleil aussi aisément qu’un corps dont la densité seroit égale à celle de la matière solaire, pourroit en chasser une centième partie. {Adcl, Bujf. ) sité de la matière des planètes et de la den- sité de la matière du soleil est telle, que sur 65o parties qui composent la totalité de la matière des planètes, il y en a plus de ; 640 qui sont presque de la même densité que la matière du soleil , et qu’il n’y a pas dix parties sur ces 65o qui soient d’une plus grande densité ; car Saturne et Jupiter sont à peu près de la même densité que le soleil, et la quantité de matière que ces deux planètes contiennent est au moins 64 fois plus grande que la quantité de matière des quatre planètes inférieures , Mars , la Terre, Vénus , et Mercure. On doit donc dire que la matière dont sont composées les planètes en général est à peu près la même que celle du soleil, et que par conséquent cette ma- tière peut en avoir été séparée. Mais, dira-t-on, si la comète, en tom- bant obliquement sur le soleil , en a sillonné la surface et en a fait sortir la matière qui compose les planètes, il paroît que toutes les planètes, au lieu de décrire des cercles 1 j dont le soleil est le centre, auroient au 1 contraire à chaque révolu lion rasé la sur- 5 face du soleil , et seroient revenues au même | 1 point d’où elles étoient parties , comme fe- ^ roit tout projectile qu’on lanceroit avec as- I1 sez de force d’un point de la surface de la terre pour l’obliger à tourner perpétuelle- ment : car il est aisé de démontrer que ce d corps reviendrait à chaque révolution au d point d’où il aurait été lancé ; et dès lors on J 1 ne peut pas attribuer à l’impulsion d’une f f comète la projection des planètes hors du ^ soleil , puisque leur mouvement autour de Cl cet astre est différent de ce qu’il seroit dans « cette hypothèse. se A cela je réponds que la matière qui com- i| pose les planètes n’est pas sortie de cet astre s" en globes tout formés , auxquels la comète fr auroit communiqué son mouvement d’im- pulsion , mais que cette matière est sortie { ^ sous la forme d’un torrent dont le mouve- U ment des parties antérieures a dû être accé- 1 ct léré par celui des parties postérieures ; que 1 P d’ailleurs l’attraction des parties antérieures f P< a dû aussi accélérer le mouvement des par- ties postérieures , et que cette accélération I ot de mouvement , produite par l’une ou l’au- ;! b tre de ces causes, et peut-être par toutes les p deux, a pu être telle, qu’elle aura changé p la première direction du mouvement d’im- P pulsion, et qu’il a pu en résulter un mou- p vement tel que nous l’observons aujourd’hui p dans les planètes, surtout en supposant que Me le choc de la comète a déplacé le soleil ; > f car , pour donner un exemple qui rendra ; ^ ART. I. FORMATION DES PLANETES. ceci plus sensible , supposons qu’on tirât du haut d’une montagne une bade de mous- I quet , et que la force de la poudre fût assez grande pour la pousser au delà du demi- | diamètre de la terre; il est certain que cette balle tourneroit autour du globe, et revien- droit à chaque révolution passer au point d’où elle auroit été tirée : mais si au lieu d’une balle de mousquet nous supposons qu’on ait tiré une fusée volante où l’action du feu seroit durable et accéléreroit beau- coup le mouvement d’impulsion , cette fusée, ou plutôt la cartouche qui la contient, ne reviendrait pas au même point , comme la balle de mousquet , mais décriroit un orbe dont le périgée seroit d’autant plus éloigné i de la terre , que la force d’acçélération au- roit été plus grande et aurait changé da- vantage la première direction , toutes choses étant supposées égales d’ailleurs. Ainsi, pourvu qu’il y ait eu de l’accélération dans le mouvement d’impulsion communiqué au torrent de matière par la chute de la comète, lil est très-possible que les planètes qui se Isont formées dans ce torrent aient acquis le mouvement que nous leur connoissons dans ■, des cercles et des ellipses dont le soleil est le centre ou le foyer. La manière dont se font les grandes érup- tions de volcans peut nous donner une idée de cette accélération de mouvement dans le torrent dont nous parlons. On a observé que quand le Vésuve commence à mugir et à rejeter les matières dont il est embrasé, le premier tourbillon qu’il vomit n’a qu’un certain degré de vitesse ; mais cette vitesse est bientôt accélérée par l’impulsion d’un second tourbillon qui succède au premier, puis par l’action d’un troisième , et ainsi de suite : les ondes pesantes de bitume, de sou- fre, de cendre, de métal fondu, paraissent des nuages massifs; et, quoiqu’ils se succè- dent toujours à peu près dans la même di- rection , ils ne laissent pas de changer beau- coup celle du premier tourbillon , et de le [pousser ailleurs et plus loin qu’il ne seroit parvenu tout seul. [I D’ailleurs ne peut-on pas répondre à cette :< objection , que le soleil ayant été frappé par Ija comète , et ayant reçu une partie de son jmouvement d’impulsion , il aura lui-même E 'prouvé un mouvement qui l’aura déplacé ; t que quoique ce mouvement du soleil soit aaintenant trop peu sensible pour que dans jde petits intervalles de temps les astronomes [aient pu l’apercevoir, il se peut cependant que ce mouvement existe encore , et que 1g kjsoleil se meuve lentement vers différentes parties de l’univers , en décrivant une courbe autour du centre de gravité de tout le sys- tème ? et si cela est , comme je le présume, on voit bien que les planètes , au lieu de revenir auprès du soleil à chaque révolution, auront au contraire décrit des orbites dont les points des périhélies sont d’autant plus éloignés de cet astre, qu’il s’est plus éloigné lui-même du lieu qu’il occupoit ancienne- ment. Je sens bien qu’on pourra me dire que si l’accélération du mouvement se fait dans la même direction, cela ne change pas le point du périhélie, qui sera toujours à la surface du soleil ; mais doit-on croire que dans un torrent dont les parties se sont suc- cédé, il n’y a eu aucun changement de direction ? Il est au contraire très-probable qu’il y a eu un assez grand changement de direction pour donner aux planètes le mou- vement qu’elles ont. On pourra me dire aussi que si le soleil a été déplacé par le choc de la comète, il a dû se mouvoir uniformément , et que dès lors ce mouvement étant commun à tout le système , il n’a dû rien changer ; mais le so- leil ne pouvoit-il pas avoir avant le choc un mouvement autour du centre de gravité du système cométaire, auquel mouvement pri- mitif le choc de la comète aura ajouté une augmentation ou une diminution ? et cela suffirait encore pour rendre raison du mou- vement actuel des planètes. Enfin, si l’on ne veut admettre aucune de ces suppositions, ne peut-on pas présu- mer , sans choquer la vraisemblance , que dans le choc de la comète contre le soleil il y a eu une force élastique qui aura élevé le torrent au dessus de la surface du soleil, au lieu de le pousser directement ? ce qui seul peut suffire pour écarter le point du périhélie et donner aux planètes le mouve- ment qu’elles ont conservé : et cette suppo- sition n’est pas dénuée de vraisemblance ; car la matière du soleil peut bien être fort élastique, puisque la seule partie de cette matière que nous connoissons, qui est la lumière , semble par ses effets être parlai tement élastique. J’avoue que je ne puis pas dire si c’est par l’une ou par l’autre des rai- sons que je viens de rapporter, que la di- rection du premier mouvement d’impulsion des planètes a changé ; mais ce3 raisons suf- fisent au moins pour faire voir que ce chan- gement est possible , et même probable ; et cela suffit aussi à mon objet. Mais sans insister davantage sur les oh*; j actions qu’on pourrait faire \ non plus que 9° THEORIE DE LA TERRE. sur les preuves que pourraient fournir les analogies en faveur de mon hypothèse , suivons-en l’objet et tirons des inductions; voyons donc ce qui a pu arriver lorsque les planètes, et surtout la terre, ont reçu ce mouvement d’impulsion , et dans quel état elles se sont trouvées après avoir été sépa- rées de la masse du soleil. La comète ayant, par un seul coup , communiqué un mouve- ment de projectile à une quantité de ma- tière égale à la six cent cinquantième partie de la masse du soleil , les particules les moins denses se seront séparées des plus denses, et auront formé par leur attraction mutuelle des globes de différente densité: Saturne, composé des parties les plus gros- ses et les plus légères , se sera le plus éloigné du soleil ; ensuite Jupiter , qui est plus dense que Saturne, se sera moins éloigné; et ainsi de suite. Les planètes les plus gros- ses et les moins denses sont les plus éloignées, parce qu’elles ont reçu un mouvement d’im- pulsion plus fort que les plus petites et les plus denses; car la force d’impulsion se com- muniquant par les surfaces, le même coup aura fait mouvoir les parties les plus grosses et les plus légères de la matière du soleil avec plus de vitesse que les parties les plus petites et les plus massives : il se sera donc liait une séparation des parties denses de différens degrés , en sorte que la densité de la matière du soleil étant égale à ioo, celle de Saturne est égale à 67 , celle de Jupiter = 94 1/2 , celle de Mars = 200, celle de la terre = 400, celle de Vénus= 800 , et celle de Mercure= 2800. Mais la force d’attraction ne se communiquant pas, comme celle d'impulsion , par la surface, et agissant au contraire sur toutes les parties delà masse, elle aura tenu les portions de matière les plus denses ; et c’est pour cette raison que les planètes les plus denses sont les plus voisines du soleil, et qu’elles tour- nent autour de cet astre avec plus de rapi- dité que les planètes les moins denses , qui sont aussi les plus éloignées. Les deux grosses planètes, Jupiter et Sa- turne, qui sont, comme l’on sait, les par- ties principales du système solaire, ont con- servé ce rapport entre leur densité et leur mouvement d’impulsion, dans une propor- tion si juste, qu’on doit en être frappé : la densité de Saturne est à celle de Jupiter comme 67 à 94 1/2 , et leurs vitesses sont à peu près comme 88 1/2 à 120 1/72, ou comme 67 à 90 n/16. Il est rare que de pures conjectures on puisse tirer des rap- ports aussi exacts. Il est vrai qu’en suivant ce rapport entre la vitesse et la densité des planètes, la densité de la terre ne devrait être que comme 206 7/18, au lieu qu’elle est comme 400 1 : de là on peut conjecturer que notre globe étoit d’abord une fois moins dense qu’il ne l’est aujourd’hui. A l’égard des autres planètes, Mars, Vénus, et Mer- cure, comme leur densité n’est connue que par conjecture, nous ne pouvons savoir si cela détruirait ou confirmerait notre opi- nion sur le rapport de la viiesse et de la densité des planètes en général. Le senti- ment de Newton est que la densité est d’au- tant plus grande, que la chaleur à laquelle la planète est exposée est plus grande; et c’est sur cette idée que nous venons de dire 1. J’ai dit qu’en suivant la proportion de ces rap- ports , la densité du globe de la terre ne devrait être que comme 206 7/18 , au lieu d’être 4oo. Cette densité' de la terre, qui se trouve trop grande relativement à la vitesse de son mouvement autour du soleil, doit être un peu diminuée par une raison qui m’avoit échappé: c’est que la lune, qu’on doit regarder ici comme faisant corps avec ta terre, est moins dense dans la raison de 702 à 1000, et que le globe lunaire faisant 1/49 du vo- lume du globe terrestre , il faut par conséquent diminuer la densité 4oo de la terre , d’abord dans la raison de 1000 à 70 1 ; ce qui nous donneroit 281, c’est-à-dire 119 de diminution sur la densité 400, si la lune étoit aussi grosse que la terre : mais comme elle n’en fait ici que la 49e partie, cela ne produit qu’une diminution de 119/49 ou 2 3/7, et |]j par conséquent la densité de notre globe relative- ment à sa vitesse, au lieu de 2067/18, doit être estimée 206 7/18 —J— 2 3/7, c’est-à-dire à peu près 209. D’ailleurs l’on doit présumer que notre globe étoit moins dense au commencement qu’il ne l’est au- jourd’hui , et qu’il l’est devenu beaucoup plus , d’abord par le refroidissement , et ensuite par l’af- faissement des vastes cavernes dont son intérieur jh étoit rempli. Cette opinion s’accorde avec la con- noissance que nous avons des bouleversemens qui sont arrivés et qui arrivent encore tous les jours à la surface du globe , et jusqu’à d’assez grandes profondeurs : ce fait aide même à expliquer com- ment il est possible que les eaux de la mer aient; autrefois été supérieures de deux mille toises aux parties de la terre actuellement habitées ; car ces eaux la couvriroient encore , si , par de grands af- faissemens, la surface de la terre ne s’étoit abaissée en différens endroits pour former les bassins de la mer et les autres réceptacles des eaux tels qu’ils sont aujourd’hui. Si nous supposons le diamètre du globe terrestre de 2863 lieues , il en avoit deux de plus lorsque les3 eaux le couvroient à 2000 toises de hauteur. Cette différence du volume de la terre donne 1/477 d’aug mentation pour sa densité par le seul abaissement des eaux : on peut même doubler, et peut-être tripler cette augmentation de densité ou cette dirni nution de volume du globe par l’affaissement et les éboulemens des montagnes et par les remblais des vallées , en sorte que depuis la chute des eaux sur la terre, on peut raisonnablement présumer qu’elle a augmenté de plus d’un centième de densité. {Add, Buff.) ART. I. FORMATION DES PLANÈTES. 91 que Mars est une fois moins dense que la terre, Vénus une fois plus dense. Mercure sepl fois plus dense, et la comète de 1680 vingt-huit mille fois plus dense que la terre. Mais cette proportion entre la densité des planètes et la chaleur quelles ont à suppor- ter, ne peut pas subsister lorsqu’on fait at- tention à Saturne et à Jupiter, qui sont les principaux objets que nous ne devons jamais perdre de vue dans le système solaire ; car, ^elon ce rapport entre la densité et la cha- leur , il se trouve que la densité de Saturne peroit environ comme 4 7/18 , et celle de Jupiter comme 14 17/22 au lieu de 67 et de 94 1/2 , différence trop grande pour que le rapport entre la densité et la chaleur | que les planètes ont à supporter , puisse être admis: ainsi, malgré la confiance que mé- ritent les conjectures de Newton , je crois }ue la densité des planètes a plus de rap- port avec leur vitesse qu’avec le degré de chaleur qu’elles ont à supporter *. Ceci J’ai dit que malgré la confiance que méritent 'es conjectures de Newton, la densité des planètes a plus de rapport avec leur vitesse qu’avec le degré de en! chaleur qu’elles ont à supporter. ; Par l’estimation que nous avons faite dans les mémoires précédens , de l’action de la chaleur so- dlre sur chaque planète , on a dù remarquer que pette chaleur solaire est en général si peu considé- rable , qu’elle n’a jamais pu produire qu’une très- 'égère différence sur la densité de chaque planète; ;ar l’action de cette chaleur solaire , qui est fiable pn elle-même, n’influe sur la densité des matières flanétaires qu’à la surface même des planètes , et :11e ne petit agir sur la matière qui est dans l’inté- rieur des globes planétaires , puisque cette chaleur solaire ne peut pénétrer qu’à une très-pelite pro- fondeur. Ainsi la densité totale de la masse entière le la planète n’a aucun rapport avec cette chaleur jui lui est envoyée du soleil. ' Dès lors il me paroît certain que la densité des tdanètes ne dépend en aucune façon du degré de :haleur qui leur est envoyée du soleil , et qu’au :ontraire cette densité des planètes doit avoir un apport nécessaire à leur vitesse, laquelle dépend l’un autre rapport qui me paroit immédiat: c’est felui de leur distance au soleil. Nous avons vu que es parties les plus denses se sont moins éloignées [Ue les parties les moins denses dans le temps de ja projection générale. Mercure, qui est composé les parties les plus denses de la matière projetée lors du soleil , est resté dans le voisinage de cet istre , tandis que Saturne , qui est composé des parties les plus légères de cette même matière pro- jetée , s’en est le plus éloigné. Et comme les pla- îètes les pins distantes du soleil circulent autour le cet astre avec plus de vitesse que les planètes les plus voisines , il s’ensuit que leur densité a un rap- port médiat avec leur vitesse, et plus immédiat avec eur distance au soleil. Les distances des six pla- lètes au soleil sont ; comme 4, 7» 10 » *5, 52, 95. Leurs densités comme 2o4o, 1270, 1000, 780, 292, 184. Et ci l’on suppose les densités en raison inverse n’est qu’une cause finale , et l’autre est un rapport physique dont l’exactitude est sin- gulière dans les deux grosses planètes : il est cependant vrai que la densité de la terre, au lieu d’être 206 7/8, se trouve être 400, et que par conséquent il faut que le globe ter- restre se soit condensé dans cette raison de 206 7/8 à 400. Mais la condensation ou la coction des planètes n’a-t-elle pas quelque rapport a\ec la quantité de la chaleur du soleil dans cha- que planète? et dès lors Saturne, qui est fort éloigné de cet astre, n’aura souffert que peu ou point de condensation, Jupiter sera condensé de 1 1/16 à 94 1/12 : or, la chaleur du soleil dans Jupiter étant à celle du soleil sur la terre comme 14 17/22 sont à 400, les condensations ont dû se faire dans la même proportion ; de sorte que Ju- piter s’étant condensé de 90 11/16 à 64 1/2, la terre auroit dû se condenser en même proportion de 206 7/8 à 2i5 990/1451, si elle eût été placée dans l’orbite de Jupiter, où elle n’auroit dû recevoir du soleil qu’une chaleur égale à celle que reçoit cette pla- nète. Mais la terre se trouvant beaucoup plus près, de cet astre , et recevant une cha- leur dont le rapport à celle que reçoit Ju- piter est de 400 à 14 17/22, il faut multi- plier la quantité de condensation qu’elle auroit eue dans l’orbite de Jupiter par le rap- port de 400 à 14 17/22; ce qui donne à peu près 234 1/2 pour la quantité dont la terre a dû se condenser. Sa densité étoit 207 7/8 : en y ajoutant la quantité de con- densation, l’on trouve pour sa densité ac- tuelle 440 7/8 ; ce qui approche assez de la densité 400 , déterminée par la parallaxe de la lune. Au reste, je ne prétends pas donner ici de rapports exacts, mais seulement des approximations, pour faire voir que les densités des planètes ont beaucoup de rap- port avec leur vitesse dans leurs orbites. La comète ayant donc par sa chute oblique sillonné la surface du soleil, aura poussé hors du corps de cet astre une partie de ma- tière égale à la six cent cinquantième partie de sa masse totale : cette matière, qu’on doit considérer dans un état de fluidité, ou plutôt de liquéfaction, aura d’abord formé un torrent; les parties les plus gros- ses et les moins denses auront été poussées des distances, elles seront 2040, 1x60, 889 1/2, 660, 210, i5g. Ce dernier rapport entre leurs den sites respectives est peut être plus réel que le pre mier, parce qu’il me paroît fondé sur la cause phy- sique qui a dù produire la différence de densité dans chaque planète. (Add. Buff.) 9* THÉORIE DE LÀ TERRE. au plus loin ; et les parties les plus petites et les plus denses n’ayant reçu que la même impulsion, ne se seront pas si fort éloignées, la force d’attraction du soleil les aura rete- nues; toutes les parties détachées par la co- mète et poussées les unes par les autres, auront été contraintes de circuler autour de cet astre, et en même temps l’attraction mutuelle des parties de la matière en aura formé des globes à différentes distances, dont les plus voisins du soleil auront néces- sairement conservé plus de rapidité pour tourner ensuite perpétuellement autour de cet astre. Mais, dira-t-on une seconde fois, si la matière qui compose les planètes a été sé- parée du corps du soleil, les planètes de- vroient être, comme le soleil, brûlantes et lumineuses, et non pas froides et opaques comme elles le sont : rien ne ressemble moins à ce globe de feu qu’un globe de terre et d’eau; et, à en juger par comparaison, la matière de la terre et des planètes est tout à fait différente de celle du soleil. A cela on peut répondre que dans la sé- paration qui s’est faite des particules plus ou moins denses , la matière a changé de forme , et que la lumière ou le feu s’est éteint par cette séparation causée par le mouvement d’impulsion. D’ailleurs ne peut-on pas soup- çonner que si le soleil ou une étoile brûlante et lumineuse par elle-même se mouvoil avec autant de vitesse que se meuvent les planè- tes, le feu s’éteindroit peut-être, et que c’est par cette raison, que toutes les étoiles lumineuses sont fixes et ne changent pas de lieu , et que ces étoiles que l’on appelle nou- velles, qui ont probablement changé de lieu, se sont éteintes aux yeux mêmes des obser- vateur ? Ceci se confirme par ce qu’on a observé sur les comètes ; elles doivent brûler jusqu’au centre lorsqu’elles passent à leur périhélie : cependant elles ne deviennent pas lumineuses par elles-mêmes ; on voit seulement qu’elles exhalent des vapeurs brû- lantes, dont elles laissent en chemin une partie considérable. J’avoue que si le feu peut exister dans un milieu où il n’y a point ou très-peu de résistance , il pourroit aussi souffrir un très- grand mouvement sans s’éteindre; j’avoue aussi que ce que je viens de dire ne doit s’entendre que des étoiles qui disparoissent pour toujours, et que celles qui ont des re- tours périodiques et qui se montrent et dis- paroissent alternativement sans changer de lieu , sont fort différentes de celles dont je pari* ; les phénomènes de ces astres singu- liers ont été expliqués d’une manière très satisfaisante par M. de Mauperluis dans soi Discours sur la figure des astres , et je sui convaincu qu’en partant des faits qui nou sont connus , il n’est pas possible de mieu: deviner qu’il l’a fait. Mais les étoiles qu ont paru et ensuite disparu pour toujours se sont vraisemblablement éteintes , soit pa la vitesse de leur mouvement , soit par quel que autre cause, et nous n’avons poin d’exemple dans la nature qu’un astre lumi neux tourne autour d’un autre astre : d vingt-huit ou trente comètes et de treiz planètes qui composent notre système et qu se meuvent autour du soleil avec plus o moins de rapidité, il n’y en a pas une d lumineuse par elle-même. On pourroit répondre encore que le fei ne peut pas subsister aussi long-temps dan les petites que dans les grandes masses , e qu’au sortir du soleil les planètes ont d brûler pendant quelque temps, mais qu’elle se sont éteintes faute de matières combustit blés, comme le soleil s’éteindra probable ment par la même raison, mais dans déi âges futurs et aussi éloignés des temps aux' quels les planètes se sont éteintes, que s grosseur l’est de celle des planètes. Quo qu’il en soit, la séparation des parties plui ou moins denses, qui s’est faite nécessaire ment dans le temps que la comète a pouss hors du soleil la matière des planètes, mi paroît suffisante pour rendre raison de cett! extinction de leurs feux. La terre et les planètes au sortir du sole: étoient donc brûlantes et dans un état d liquéfaction totale. Cet état de liquéfactio n’a duré qu’autant que la violence de 1 chaleur qui l’avoit produit ; peu à peu lé planètes se sont refroidies , et c’est dans 1 temps de cet état de fluidité causée par 1 feu qu’elles auront pris leur figure, et qui!*1 leur mouvement de rotation aura faitéleve les parties de l’équateur en abaissant lé pôles. Cette figure , qui s’accorde si bien ave les lois de l’hydrostatique, suppose uécessa rement que la terre et les planètes aient ét dans un état de fluidité ; et je suis ici d l’avis de M. Leibnitz : celte fluidité éto une liquéfaction causée par la violence d la chaleur ; l’intérieur de la terre doit êtr une matière vitrifiée dont les sables, le grès, le roc vif, les granités et peut-être le argiles , sont des fragmens et des scories. On peut do te croire, avec quelque vrai semblance , que les planètes ont apparten au soleil, qu’elles en ont été séparées pa un seul coup (jui leur a donné un mouvç ART. I. FORMATION DES PLANÈTES. 9$ : |rjs ment d’impulsion dans le même sens et dans k S0I Je même plan , et que leur position à diffé- h Sllj rentes distances du soleil ne vient que de ri J, leurs différentes densités. Il reste mainte- nu^ nant à expliquer par la même théorie le qn paouvement de rotation des planètes et la j01)rs formation des satellites : mais ceci , loin d’a- il pa jouter des difficultés ou des impossibilités à quel aotre hypothèse, semble au contraire la poig confirmer. y Car le mouvement de rotation dépend jpniquement de l’obliquité du coup, et il est trejZ( nécessaire qu’une impulsion, dès qu’elle est «ijnblique à la surface d’un corps, donne à ce iIS01:orps un mouvement de rotation : ce mou- ae Jvement de rotation sera égal et toujours le même, si le corps qui le reçoit est homo- efeigène ; et il sera inégal, si le corps est com- y posé de parties hétérogènes ou de différentes s ef densités : et de là on doit conclure que dans lt| chaque planète la matière est homogène, 'e|e nuisque leur mouvement de rotation est |||stj égal : autre preuve de la séparation des par- y ities denses et moins denses lorsqu’elles se jd^ont formées. Mais l’obliquité du coup a pu être telle ie sa qu’il se sera séparé du corps de la planète )ll0j principale de petites parties de matière, qui ^ auront conservé la même direction de mou- 3ire vement que la planète même; ces parties se m seront réunies, suivant leurs densités, à dif- m( Férentes distances de la planète par la force cet(f jle leur attraction mutuelle, et en même temps elles auront suivi nécessairement la 0|ej planète dans son cours autour du soleil, en ; (j, tournant elles-mêmes autour de la planète , ltj0Ia peu près dans le plan de son orbite. On e ], voit bien que ces petites parties que la j|e grande obliquité du coup aura séparées, sont s |f les satellites : ainsi la formation , la position r ](pt la direction des mouvemens des satellites .^s’accordent parfaitement avec la théorie; car | ils ont tous la même direction de mouvement ]f; flans des cercles concentriques autour de M eur planète principale ; leur mouvement est —dans le même plan, et ce plan est celui de '|( l’orbite de la planète. Tous ces effets qui l^leur sont communs, et qui dépendent de (0jleur mouvement d’impulsion, ne peuvent ^ venir que d’une cause commune, c’est-à- -dire d’une impulsion commune de mouve- ]f ment, qui leur a été’ communiquée par un |ejseul et même coup donné sous une certaine ^obliquité. ; Ce que nous venons de dire sur la cause du mouvement de rotation et de la forma- tion des satellites , acquerra plus de vrai- " semblance , si nous faisons attention à tou- tes les circonstances des phénomènes. Les planètes qui tournent le plus vite sur leur axe, sont celles qui ont des satellites. La terre tourne plus vile que Mars dans le rapport d’environ 24 à 1 5; la terre a un satellite, et Mars n’en a point. Jupiter sur- tout , dont la rapidité autour de son axe est 5 ou 600 fois plus grande que celle de la terre , a quatre satellites ; et il y a grande apparence que Saturne , qui en a cinq et un anneau , tourne encore beaucoup plus vite que Jupiter. On peut même conjecturer avee quelque fondement que l’anneau de Saturne est pa- rallèle à l’équateur de cette planète, en sorte que le plan de l’équateur de l’anneau et celui de l’équateur de Saturne sont à peu près les mêmes ; car en supposant , suivant la théorie précédente , que l’obliquité du coup par lequel Saturne a été mis en mou- vement ait été fort grande , la vitesse autour de l’axe, qui aura résulté de ce coup obli- que, aura pu d’abord être telle, que la force centrifuge excédoit celle de la gravité ; et il se sera détaché de l’équateur et des par- ties voisines de l’équateur de la planète une quantité considérable de matière, qui aura nécessairement pris la figure d’un anneau, dont le plan doit être à peu près le même que celui de l’équateur de la planète ; et cette partie de matière qui forme l’anneau ayant été détachée de la planète dans le voisinage de l’équateur, Saturne en a été abaissé d’autant sous l’équateur ; ce qui fait que, malgré la grande rapidité que nous lui supposons autour de son axe, les dia- mètres de cette planète peuvent n’être pas aussi inégaux que ceux de Jupiter, qui dif- fèrent de plus d’une onzième partie. Quelque grande que soit à mes yeux la vraisemblance de ce que j*ai dit jusqu’ici sur la formation des planètes et de leurs satel- lites, comme chacun a sa mesure, surtout pour estimer des probabilités de cette na- ture, et que cette mesure dépend de la puissance qu’a l’esprit pour combiner des rapports plus ou moins éloignés, je ne pré- tends pas contraindre ceux qui n’en vou- dront rien croire. J’ai cru seulement devoir semer ces idées , parce qu’elles m’ont paru raisonnables , et propres à éclaircir une ma- tière sur laquelle on n’a jamais rien écrit, quelque important qu’en soit le sujet, puis- que le mouvement d’impulsion des planètes entre au moins pour moitié dans la compo- sition du système de l’univers , que l’attrac- tion seule ne peut expliquer. J’ajouterai seulement, pour ceux qui voudroient nier I 94 THÉORIE DE LA TERRE. la possibilité de mon système , les questions suivantes : i° N’est-il pas naturel d’imaginer qu’un corps qui est en mouvement, ait reçu ce mouvemenl par le choc d’un corps ? 20 N’est-il pas très-probable que plu- sieurs corps qui ont la même direction dans leur mouvement, ont reçu cette direction par un seul ou par plusieurs coups dirigés dans le même sens ? 3° N’est-il pas tout-à-fait vraisemblable que plusieurs corps ayant la même direction dans leur mouvement et leur position dans un même plan, n’ont pas reçu cette direc- tion dans le même sens et cette position dans le même plan par plusieurs coups, mais par un seul et même coup ? 4° N’est-il pas très-probable qu’en même temps qu’uu corps reçoit un mouvement d’impulsion , il le reçoive obliquement , et que par conséquent il soit obligé de tourner sur lui-même d’autant plus vite que l’obli- quité du coup aura été plus grande ? Si ces questions ne paroissent pas dérai- sonnables, le système dont nous venons de donner une ébauche cessera de paroître une absurdité. Passons maintenant à quelque chose qui nous touche de plus près, et examinons la figure de la terre, sur laquelle on a fait tant de recherches et de si grandes observations. La terre étant , comme il paroît par l’égalité de son mouvement diurne et la constance de l’inclinaison de son axe, composée de parties homogènes, et toutes ses parties s’attirant en raison de leurs masses, elle auroit pris nécessairement la figure d’un globe parfai- tement sphérique, si le mouvement d’im- pulsion eût été donné dans une direction perpendiculaire à la surface ; mais ce coup ayant été donné obliquement , la terre a tourné sur son axe dans le même temps qu’elle a pris sa forme, et de la combinaison de ce mouvement de rotation et de celui de l’attraction des parties, il a résulté une figure sphéroïde , plus élevée sous le grand cercle de rotation, et plus abaissée aux deux ex- trémités de l’axe, et cela parce que faction de la force centrifuge provenant du mouve- ment de rotation, diminue l’action de la gravité : ainsi la terre étant homogène , et ayant pris sa consistance en même temps qu’elle a reçu son mouvement de rotation , elle a dû prendre une figure sphéroïde, dont les deux axes diffèrent d une 23oe partie. Ceci peut se démontrer à la rigueur , et ne dépend point des hypothèses qu’on voudroit faire sur la direction de la pesanteur ; car il n’est pas permis de faire des hypothèses contraires à des vérités établies ou qu’on peut établir. Or , les lois de la pesanteur nous sont con- nues ; nous ne pouvons douter que les corps ne pèsent les uns sur les autres en raison directe de leurs masses , et inverse du carré de leurs distances : de même nous ne pou- vons pas douter que l’action générale d’une masse quelconque ne soit composée de toutes les actions particulières des parties de cette masse. Ainsi il n’y a point d’hypothèse à faire sur la direction de la pesanteur : cha- que partie de matière s’attire mutuellement' en raison directe de sa masse et inverse du carré de la distance ; et de toutes ces attrac- tions il résulte une sphère lorsqu’il n’y a point de rotation, et il en résulte un sphé- roïde lorsqu’il y a rotation. Ce sphéroïde est plus ou moins accourci aux deux extré- mités de l’axe de rotation, à proportion de la vitesse de ce mouvement, et la terre a pris, en vertu de sa vitesse de rotation et de l’attraction mutuelle de toutes ses parties, la figure d’un sphéroïde, dont les deux axes sont entre eux comme 229 à 2 3o. Ainsi, par sa constitution originaire, par son homogénéité, et indépendamment de toute hypothèse sur la direction de la pesan- teur, la terre a pris cette figure dans le temps de sa formation , et elle est , en vertm des lois de la mécanique , élevée nécessaire- ment d’environ six lieues et demie à chaque extrémité du diamètre de l’équateur de plus que sous les pôles. Je vais insister sur cet article, parce qu’il y a encore des géomètres qui croient que la' figure de la terre dépend, dans la théorie, du système de philosophie qu’011 embrasse, et de la direction qu’on suppose à la pesan- teur. La première chose que nous ayons à démontrer c’est l’attraction mutuelle de tou- tes les parties de la matière; et la seconde, l’homogénéité du globe terrestre. Si nous fai- sons voir clairement que ces deux faits nt peuvent pas être révoqués en doute , il n’y aura plus aucune hypothèse à faire sur ls direction de la pesanteur : la terre aura et nécessairement la figure déterminée pai Newton ; et toutes les autres figures qu’or voudroit lui donner en vertu des tourbillon! ou des autres hypothèses , ne pourront sub sister. On ne peut pas douter , à moins qu’on ni doute de tout, que ce ne soit la force de la gravité qui retient les planètes dans leurs orbites. Les satellites de Saturne gravitenl vers Saturne, ceux de Jupiter vers Jupiter, la lune vers la terre, et Saturne, Jupiter, ART. I. FORMATION DES PLANETES. g5 Mars, la terre, Vénus et Mercure, gravi- tent vers le soleil; de même Saiurne et Jupi- ter gravitent vers leurs satellites, la terre gravite vers la lune, et le soleil gravite vers les planètes. La gravité est donc géné- rale et mutuelle dans toutes les planètes ; car l’action d’une force ne peut pas s’exercer sans qu’il y ait réaction : toutes les planètes agissent donc mutuellement les unes sur les autres. Cette attraction mutuelle sert de fon- dement aux lois de leur mouvement , et elle est démontrée par les phénomènes. Lorsque Satyrne et Jupiter sont en conjonction, ils agissent l’un sur l’autre, et celte attraction produit une irrégularité dans leur mouve- ment autour du soleil. Il en est de même de la terre et de la lune; elles agissent mu- tuellement l’une sur l’autre ; mais les irré- gularités du mouvement de la lune viennent de l’attraction du soleil, en sorte que le so- leil, la terre et la lune, agissent mutuelle- ment les uns sur les autres. Or, cette attrac- tion mutuelle que les planètes exercent les unes sur les autres, est proportionnelle à leur quantité de matière lorsque les distances sont égales; et la même force de gravité qui f«Lt tomber les graves sur la surface de la terre, et qui s’étend jusqu’à la lune, est aussi proportionnelle à la quantité de matière : donc la gravité totale d’une planète est com- posée de la gravité de chacune des parties qui la composent ; donc toutes les parties de la matière, soit dans la terre, soit dans les pla- nètes , gravitent les unes sur les autres; donc toutes les parties de la matière s’attirent mu- tuellement : et cela étant une fois prouvé, la terre, par son mouvement de rotation, a dû nécessairement prendre la figure d’un sphéroïde dont les axes sont entre eux comme 229 à 23o,et la direction de la pesanteur est nécessairement perpendiculaire à la sur- face de ce sphéroïde ; par conséquent il n’y a point d’hypothèse à faire sur la direction de la pesanteur, à moins qu’on ne nie l’at- traction mutuelle et générale des parties de la matière : mais on vient de voir que l’at- traction mutuelle est démontrée par les ob- servations; et les expériences des pendules prouvent qu’elle est générale dans toutes les parties de la matière : donc on ne peut pas faire de nouvelles hypothèses sur la direction de la pesanteur, sans aller contre l’expérience et la raison. Venons maintenant à l’homogénéité du globe terrestre. J’avoue que si l’on suppose que le globe soit plus dense dans certaines parties que dans d’autres, la direction de la pesanteur doit être différente de celle que nous venons d’assigner; qu’elle sera différente suivant les différentes suppositions qu’on fera , et que la figure de la terre deviendra différente aussi en vertu des mêmes suppo- sitions. Mais quelle raison a-t-on pour croire que cela soit ainsi ? Pourquoi veut-on , par exemple , que les parties voisines du centre soient plus denses que celles qui en sont plus éloignées ? toutes les particules qui composent le globe ne sont-elles pas rassem- blées par leur attraction mutuelle ? dès lors chaque particule est un centre , et il n’y a pas de raison pour croire que les parties qui sont autour du centre de grandeur du globe , soient plus denses que celles qui sont autour d’un autre point : mais d’ailleurs, si une partie considérable du globe étoit plus dense qu’une autre partie, l’axe de rotation se trouveroit plus près des parties denses , et il en résulteroit une inégalité dans la ré- volution diurne, en sorte qu’à la surface de la terre nous remarquerions de l’inégalité dans le mouvement apparent des fixes ; elles nous paroitroient se mouvoir beaucoup plus vite ou beaucoup plus lentement au zénith qu’à l’horizon , selon que nous serions posés sur les parties denses ou légères du globe. Cet axe de la terre ne passant plus par le centre de grandeur du globe, changeroit aussi très-sensiblement de position. Mais tout cela n’arrive pas : on sait , au contraire , que le mouvement diurne de la terre est égal et uniforme ; on sait qu’à toutes les parties de la surface de la terre les étoiles paroissent se mouvoir avec la même vitesse à toutes les hauteurs; et s’il y a une nutation dans l’axe, elle est assez insensible pour avoir échappé aux observateurs. On doit donc conclure que le globe est homogène ou presque homogène dans toutes ses parties. Si la terre étoit un globe creux et vide , dont la croûte n’auroit, par exemple, que deux ou trois lieues d’épaisseur, il en résul- teroit, i° que les montagnes seroient dans ce cas des parties si considérables de l’épais- seur totale de la croûte, qu'il y auroit une grande irrégularité dans les mouvemens de la terre par l’attraction de la lune et du so- leil ; car quand les parties les plus élevées du globe, comme les Cordilières, auroient la lune au méridien, l’attraction seroit beau- coup plus forte sur le globe entier que quand les parties les plus basses auroient de même cet astre au méridien ; 20 l’attraction des montagnes seroit beaucoup plus considéra- ble qu’elle ne l’est en comparaison de l’at- traction totale du globe , et les expériences faites à la montagne de Chimboraço au Pé^ 90 THÉORIE DE LA TERRE. rou donneraient dans ce cas plus de degrés qu’elles n’ont donné de secondes pour la déviation du fil à plomb; 3° la pesanteur des corps seroit plus grande au dessus d’une haute montagne, comme le pic de Ténérilfe, qu’au niveau de la mer, en sorte qu’on se sentiroit considérablement plus pesant et qu’on marcheroit plus difficilement dans les lieux élevés que dans les lieux bas. Ces corn sidérations , et quelques autres qu’on pour- roit y ajouter, doivent nous faire croire que l’intérieur du globe n’est pas vide, et qu’il est rempli d’une matière assez dense. D’autre côté, si au dessous de deux ou trois lieues la terre étoil remplie d’une ma- tière beaucoup plus dense qu’aucune des matières que nous connoissons, il arriverait nécessairement que toutes les fois qu’on des- cendrait à des profondeurs même médiocres, on pèseroit sensiblement beaucoup plus , les pendules s’accéléreraient beaucoup plus qu’ils ne s’accélèrent en effet lorsqu’on les trans- porte d’un lieu élevé dans un lieu plus bas. Ainsi nous pouvons présumer que l’intérieur de la terre est rempli d’une matière à peu près semblable à celle qui compose sa sur- face. Ce qui peut achever de nous déterminer en faveur Ve ce sentiment, c’est que dans le temps de la première formation du globe, lorsqu’il a pris la forme d’un sphéroïde aplati sous les pôles , la matière qui le compose étoit en fusion , et par conséquent homogène et à peu près également dense dans toutes ses parties, aussi bien à la surface qu’à l’in- térieur. Depuis ce temps la matière de la surface , quoique la même , a été remuée et travaillée par les causes extérieures ; ce qui a produit des matières de différentes densités. Mais on doit remarquer que les matières qui , comme l’or et les métaux , sont les plus denses , sont aussi celles qu’on trouve le plus rarement , et qu’en conséquence de l’action des causes extérieures , la plus grande partie de la matière qui compose le globe à la surface , n’a pas subi de très -grands chan- gemens par rapport à sa densité , et les ma- tières les plus communes, comme le sable et la glaise , ne diffèrent pas beaucoup en den- sité, en sorte qu’il y a tout lieu de conjectu- rer , avec grande vraisemblance , que l’in- térieur de la terre est rempli d’une matière vitrifiée dont la densité est à peu près la même que celle du sable, et que par consé- quent le globe terrestre en général peut être regardé comme homogène. Il reste une ressource à ceux qui veulent absolument faire des suppositions ; c’est de dire que le globe est composé de couches concentriques de différentes densités: car, dans ce cas, le mouvement diurne sera égal, et l’inclinaison de l’axe constante, comme dans le cas de l’homogénéité. Je l’avoue ; mais je demande en même temps s’il y a au- cune raison de croire que ces couches de différentes densités existent, si ce n’est pas vouloir que les ouvrages de la nature s’a- justent à nos idées abstraites , et si l’on doit admettre en physique une supposition qui n’est fondée sur aucune observation, aucune analogie , et qui ne s’accorde avec aucune des inductions que nous pouvons tirer d’ail- leurs. Il paraît donc que la terre a pris, en vertu de l’attraction mutuelle de ses parties et de son mouvement de rotation , la figure d’un sphéroïde dont les deux axes diffèrent d’une 23 oe partie : il paraît que c’est là sa figure primitive , qu’elle l’a prise nécessaire- ment dans le temps de son état de fluidité ou de liquéfaction ; il paraît qu’en vertu des lois de la gravité et de la force centrifuge, elle ne peut avoir d’autre figure que du moment même de sa formation. If y a eu cette différence entre les deux diamètres , de six lieues et demie d’élévation de plus sous l’équateur que sous les pôles, et que par conséquent toutes les hypothèses par les- quelles on peut trouver plus ou moins de différence , sont des fictions auxquelles il ne faut faire aucune attention. Mais , dira-t-on , si la théorie est vraie , si le rapport de 229 à 23o est le vrai rapport des axes , pourquoi les mathématiciens en- voyés en Laponie et au Pérou s’accordent-ils à donner le rapport de 174 à 175 ? d’où peut venir cette différence de la pratique à la théo- rie ? et , sans faire tort au raisonnement qu’on vient de faire pour démontrer la théo- rie , n’est-il pas plus raisonnable de donner la préférence à la pratique et aux mesures , surtout quand on ne peut pas douter qu’elles aient été prises par les plus habiles mathé- maticiens de l’Europe 1 , et avec toutes les précautions nécessaires pour en constater le résultat ? A cela je réponds que je n’ai garde de donner atteinte aux observations faites sous l’équateur et au cercle polaire , que je n’ai aucun doute sur leur exactitude, et que la terre peut bien être réellement élevée d’une 175e partie de plus sous l’équateur que sous les pôles : mais en même temps je main- tiens la théorie, et je vois clairement que ces deux résultats peuvent se concilier. Cette lia 1 . M. de Maupertui# , Figure de la terre. . ART. I. FORMATION DES PLANÈTES. différence des deux résultats de la théorie et des mesures est d’environ quatre lieues ^lans les deux axes , en sorte que les parties sous l’équateur sont élevées de deux lieues ae plus qu’elles ne doivent l’être suivant la théorie. Cette hauteur de deux lieues ré- pond assez juste aux plus grandes inégalités le la surface du globe : elles proviennent lu mouvement de la mer, et de l’action les fluides à la surface de la terre. Je m’ex- >lique : il me paroît que dans le temps que a terre s’est formée, elle a nécessairement lu prendre, en vertu de l’attraction mu» uelle de ses parties et de l’action de la orce centrifuge, la figure d’un sphéroïde ont les axes diffèrent d’une a3oe partie, a terre ancienne et originaire a eu néces- airement cette figure qu’elle a prise lors- [u’elle éloit fluide ou plutôt liquéfiée par le êu : mais lorsqu’après sa formation et son efroidissement , les vapeurs , qui étoiçnt tendues et raréfiées , comme nous voyons atmosphère et les feux d’une comète, se tirent condensées, elles tombèrent sur la |urface de la terre, et formèrent l’air et eau ; et lorsque ces eaux qui éloient à la ùrface furent agitées par le mouvement du ux et du reflux , les matières furent en- tamées peu à peu des pôles vers l’équateur, n sorte qu’il est possible que les parties es pôles se soient abaissées d’environ une eue, et que les parties de l’équateur se bient élevées de la môme quantité. Cela ne est pas fait tout à coup, mais peu à peu t dans la succession des temps : la terre tant à l’extérieur exposée aux vents, à bac- on de l’air et du soleil, toutes ces causes 'régulières ont concouru avec le flux et le bflux pour sillonner sa surface, y creuser es profondeurs, y élever des montagnes; s qui a produit des inégalités, des irrégu- rités , dans cette couche de terre remuée , ont cependant la plus grande épaisseur ne lié- jeut être que d’une lieue sous l’équateur, etle inégalité de deux lieues est peut-être plus grande qui puisse être à la surface de terre; car les plus hautes montagnes n’ont 1ère qu’une lieue de hauteur, et les plus ’andes profondeurs de la mer n’ont peut- re pas une lieue. La théorie est donc vraie, . la pratique peut l’être aussi : la terre a jî d’abord n’être élevée sous l’équateur que environ six lieues et demie de plus qu’aux blés, et ensuite, par les changemens qui |nt arrivés à sa surface , elle a pu s’élever avantage. L’histoire naturelle confirme mer- iilleusement cette opinion, et nous avons ouvé, dans le discours précédent, que c’est le flux et reflux , et les autres mouve-' mens des eaux, qui ont produit les mon- tagnes et toutes les inégalités de la surface du globe; que cette même surface a subi des changemens très-considérables, et qu’à de grandes profondeurs, comme sur les plus grandes hauteurs, on trouve des os, des coquilles, et d’autres dépouilles d’ani- maux habitans des mers ou de la surface de la terre. On peut conjecturer, par ce qui vient d’être dit, que pour trouver la terre an- cienne et les matières qui n’ont jamais été remuées, il faudroit creuser dans les cli7 mats voisins des pôles , où la couche de terré remuée doit être plus mince que dans les climats méridionaux. Au reste , si l’on examine de près les me- sures par lesquelles on a déterminé la figure de la terre, on verra bien qu’il entre de l’hypothétique dans cette détermination , car elle suppose que la terre a une figure courbe régulière ; au lieu qu’on peut penser que la surface du globe ayant été altérée par une grande quantité de causes combi- nées à l’infini, elle n’a peut-être aucune figure régulière, et dès lors la terre pour- roit bien n’être en effet aplatie que d’une a3oe partie, comme le dit Newton, et comme la théorie le demande. D’ailleurs, on sait bien que, quoiqu’on ait exactement la longueur du degré au cercle polaire et à l’équateur, on a aussi exactement la lon- gueur du degré en France , et que l’on n’a pas vérifié la mesure de M. Picard. Ajoutez à cela que la diminution et l’augmentation du pendule ne peuvent pas s’accorder avec le résultat des mesures, et qu’au contraire elles s’accordent à très-peu près avec la théorie de Newton. En voilà plus qu’il n’eù faut pour qu’on puisse croire que la terré n’est réellement aplatie que d’une a3o^ partie, et que, s’il y a quelque différence, elle ne peut venir que des inégalités que les eaux et les autres causes extérieures ont produites à la surface ; et ces inégalités étant 9 selon toutes les apparences, plus irrégulières que régulières, on ne doit pas faire d’hypo- thèses sur cela , ni supposer , comme on l’a fait, que les méridiens sont des ellipses ou d’autres courbes régulières : d’où l’on voit que quand on mesureroit successivement plusieurs degrés de la terre dans tous les sens, on ne seroit pas encore assuré par là de la quantité d’aplatissement qu’elle peut avoir de moins ou de plus que la 2 3o® partie. Ne doit-on pas conjecturer aussi que si BüFForr. I. THÉORIE DE LA TERRE, l’ inclinaison de î’âxe de la terre a changé , ce ne peut être qu’en vertu des changeinens arrivés à la surface , puisque tout le reste du globe est homogène; que par conséquent celte variation est trop peu sensible pour être aperçue par les astronomes, et qu’à moins que la terre ne soit rencontrée par quelque comète, ou dérangée par quelque autre cause extérieui’e , son axe demeurera perpétuellement incliné comme il l’est au- jourd’hui, et comme il l’a toujours été? Et atin de n’omettre aucune des conjec- tures qui me paroissent raisonnables, ne peut-on pas dire que comme les montagnes et les inégalités qui sont à la surface de la terre ont été formées par l’action du flux et reflux , les montagnes et les inégalités que nous remarquons à la surface de la lune ont été produites par une cause semblable ? qu’elles sont beaucoup plus élevées que celles de la terre, parce que le flux et reflux y est beaucoup plus fort, puisqu’ici c’est la lune, et là c’est la terre, qui le cause, dont la masse étant beaucoup plus considérable que celle de la lune, devrait produire des effets beaucoup plus grands, si la lune avoit, comme la terre , un mouvement de rotation rapide par lequel elle nous présenterait suc- cessivement toutes les parties de sa surface ? mais comme la lune présente toujours la même face à la terre, le flux et le reflux ne peuvent s’exercer dans cette planète qu’en vertu de son mouvement de libration, par lequel elle nous découvre alternativement un segment de la surface; ce qui doit pro- duire une espèce de flux et de reflux fort différent de celui de nos mers, et dont les effets doivent être beaucoup moins consi- dérables qu’ils ne le seraient , si ce mouve- ment avoit pour cause une révolution de cette planète autour de son axe, aussi prompte que l’est la rotation du globe ter- restre. J’aurais pu faire un livre gros comme celui de Burnet ou de Whislon, si j’eusse voulu délayer les idées qui composent le système qu’on vient de voir ; et , en leur don- nant l’air géométrique, comme l’a fait ce dernier auteur , je leur eusse en même temps donné du poids; mais je pense que des hy- pothèses, quelque vraisemblables qu’elles soient, ne doivent point être traitées avec cet appareil qui tient un peu de la charla- tanerie. A Buffon, le 20 septembre 1745. ARTICLE îî. Du système de M. Whistoit Cet auteur commence son traité de la Théorie de la terre par une dissertation sur la création du monde. Il prétend qu’on a toujours mal entendu le texte de la Genèse , qu’on s’est trop attaché à la lettre et au sens qui se présente à la première vue , sans faire attention à ce que la nature, la raison, la philosophie, et même la décence, exigeoient de l’écrivain pour traiter dignement cette matière. Il dit que les notions que l’on a communément de l’ouvrage des six jours sont absolument fausses, et que la descrip- tion de Moïse n’est pas une narration exacte et philosophique de la création de l’univers entier et de l’origine de toutes choses, mais une représentation historique de la forma- tion du seul globe terrestre. La terre, selor lui, existoit auparavant dans le chaos, ei elle a reçu dans le temps mentionné par Moïse la forme, la situation, et la consis tance nécessaires pour pouvoir être habité» par le genre humain. Nous n’entrerons poin dans le détail de ses preuves à cet égard et nous n’entreprendrons pas d’en faire It réfutation : l’exposition que nous venons di faire suffit pour démontrer la contrariété di son opinion avec la foi , et par conséquen a } l’insuffisance de ses preuves. Au reste, il h traite cette matière en théologien contra i s versiste plutôt qu’en philosophe éclairé. f t Partant de ces faux principes, il pass à des suppositions ingénieuses, et quii quoique extraordinaires, ne laissent pas d’s voir un degré de vraisemblance lorsqu’oi veut se livrer avec lui à l’enthousiasme d système. Il dit que l’ancien chaos, l’originj de notre terre , a été l’atmosphère d’une cc mète; que le mouvement annuel de la terr a commencé dans le temps qu’elle a pri |çt une nouvelle forme; mais que son motive ment diurne n’a commencé qu’au temps d la chute du premier homme ; que le cercl de l’écliptique coupoit alors le tropique du cai cer au point du paradis terrestre à la irontièi j qu d’Assyrie, du côté du nord-ouest ; qu’avant déluge l’année commençoil à l’équinoxeji’ai tomne ; que les orbites originaires des plam tes, et surtout l’orbite delà terre, étoien avant le déluge, des cercles parfaits ; que le d luge a commencé le 18e jour de novembi de l’année 2365 de la période julienn» c’est-à-dire 234Q ans avant i’ère chrétien» î. À new Tbeory of the eartb, by Will. Wbisto London, 1708. ART. ÏI. SYSTÈME DE M. WHISTON, 99 que l’année solaire et l’année lunaire étoient les mêmes avant le déluge, et qu’elles con- tenoient juste 36o jours; qu’une comète descendant dans le plan de l’écliptiqué vers son périhélie, a passé tout auprès du globe ur jde la terre le jour même que le déluge a commencé; qu’il y a une grande chaleur dans l’intérieur du globe terrestre, qui se ni répand constamment du centre à la circon- cire iférence; que la constitution intérieure et lo- 1) taie de la terre est comme celle d’un œuf, ni ancien emblème du globe ; que les mon- tagnes sont les parties les plus légères de la terre, etc. Ensuite il attribue au déluge uni- versel toutes les altérations et tous les chan- ïipfgemens arrivés à la surface et à l’intérieur acte du globe; il adopte aveuglément les hypo- thèses de Woodward , et se sert indislinc- lœuftement de toutes les observations de cet au- teur au sujet de l’état présent du globe ; mais il y ajoute beaucoup lorsqu’il vient à ,e traiter de l’état futur de la terre : selon lui, elle périra par le feu , et sa destruction sera iis (précédée de tremblemens épouvantables, de tonnerres, et de météores effroyables; iin le soleil et la lune auront l’aspect hideux, les cieux paraîtront s’écrouler , l’incendie sera général sur la terre : mais lorsque le è feu aura dévoré tout ce qu’elle contient d d’impur, lorsqu’elle sera vitrifiée et trans- parente comme le cristal , les saints et les , i | bienheureux viendront en prendre posses- Ision pour l’habiter jusqu’au temps du juge- ment dernier. assi Toutes ces hypothèses semblent, au pre- jiii mier coup d’œil , être autant d’assertions té- d’a méraires, pour ne pas dire extravagantes. i’üi Cependant l’auteur les a maniées avec tant à j d’adresse , et les a réunies avec tant de force, j- J qu’elles cessent de paroitre absolument chi- co Stériques. Il met dans son sujet autant d’es- ecp prit et de science qu’il peut en comporter, pt et on sera toujours étonné que d’un mélange ivtj d’idées aussi bizarres et aussi peu faites d jpour aller ensemble, on ait pu tirer un sys- rfiütème éblouissant: ce n’est pas même aux I esprits vulgaires, c’est aux yeux des savans ièi I qu’il paraîtra tel, parce que les savans sont il î déconcertés plus aisément que le vulgaire 'ai; i par l’étalage de l’érudition et par la force inè 1 et la nouveauté des idées. Notre auteur étoit en j un astronome célèbre, accoutumé à voir le di ciel en raccourci, à mesurer les mouvemens i| des astres , à eompasser les espaces des mi cieux : il n’a jamais pu se persuader que ce ij petit grain de sable, cette terre que nous habitons, ait attiré l’attention du Créateur au point de l’occuper plus long-temps que le ciel et l’univers entier , dont la vaste éten- due contient des millions de millions de so- leils et de terres. Il prétend donc que Moïse ne nous a pas donné l’histoire de la pre- mière création, mais seulement le détail de la nouvelle forme que la terre a prise lorsque la main du Tout-Puissant l’a tirée du nombre des comètes pour la faire pla- nète, ou, ce qui revient au même, lorsque d’un monde en désordre et d’un chaos in- forme il en a fait une habitation tranquille et un séjour agréable. Les comètes sont en effet sujettes à des vicissitudes terribles à cause de l’excentricité de leurs orbites : tan- tôt, comme dans celle de 1680, il y fait mille fois plus chaud qu’au milieu d’un bra- sier ardent; tantôt il y fait mille fois plus froid que dans la glace, et elles ne peuvent guère être habitées que par d’étranges créa- tures, ou, pour trancher court, elles sont inhabitées. Les planètes, au contraire, sont des lieux de repos où la distance au soleil ne variant pas beaucoup , la température reste à peu près la même, et permet aux espèces de plantes et d’animaux de croître, de durer et de multiplier. Au commencement, Dieu créa donc l’uni- vers; mais, selon notre auteur, la terre, confondue avec les autres astres écrans , n’étoit alors qu’une comète inhabitable , souffrant alternativement l’excès du froid et du chaud, dans laquelle les matières se liquéfiant, se vitrifiant, se glaçant tour à tour, formoient un chaos, un abîme enve- loppé d’épaisses ténèbres : et tenebræ erant super faciem abyssi. Ce chaos étoit l’atmo- sphère de la comète qu’il faut se représenter comme un corps composé de matières hété- rogènes, dont le centre étoit occupé par un noyau sphérique, solide et chaud, d’environ deux mille lieues de diamètre, autour du- quel s’étendoil une très-grande circonférence d’un fluide épais, mêlé d’une matière in- forme, confuse, telle qu’étoit l’ancien chaos: rudis indigestaque moles. Cette vaste atmo- sphère ne conlenoit que fort peu de parties sèches, solides ou terrestres, encore moins de particules aqueuses ou aériennes, mais une grande quantité de matières fluides , denses et pesantes, mêlées, agitées et con- fondues ensemble. Telle étoit la terre la veille des six jours; mais dès le lendemain, c’est-à-dire dès le premier jour de la créa- tion , lorsque l’orbite excentrique de la co- mète eût été changée en ellipse presque circulaire , chaque chose prit sa place , et les corps s’arrangèrent suivant la loi de leur îoo THEORIE DE LA TERRE. gravité spécifique : les fluides pesans des- cendirent au plus bas, et abandonnèrent aux parties terrestres, aqueuses et aériennes la région supérieure ; celles-ci descendirent aussi dans leur ordre de pesanteur, d’abord la terre , ensuite l’eau , et enfin l’air ; et cette sphère d’un chaos immense se réduisit à un globe d’un volume médiocre, au centre du- quel est le noyau solide qui conserve en- core aujourd’hui la chaleur que le soleil lui a autrefois communiquée lorsqu’il étoit hoyau de comète. Cette chaleur peut bien durer depuis six mille ans , puisqu’il en fau- drait cinquante mille à la comète de 1680 pour se refroidir, et qu’elle a éprouvé en passant à son périhélie une chaleur deux mille fois plus grande que celle d’un fer rouge. Autour de ce noyau solide et brûlant qui occupe le centre de la terre, se trouve le fluide dense et pesant qui descendit le premier, et c’est ce fluide qui forme le grand abîme sur lequel la terre porteroit comme !e liège sur le vif-argent; mais comme les parties terrestres éloient mêlées de beaucoup d’eau, elles ont, en descendant, entraîné une partie de cette eau , qui n’a pu remonter lorsque la terre a été consolidée, et cette eau forme une couche concentrique au fluide pesant qui enveloppe le noyau : de sorte que le grand abîme est composé de deux orbes concentriques, dont le plus intérieur est un fluide pesant, et le supérieur est de l’eau; c’est proprement cette couche d’eau qui sert de fondement à la terre , et c’est de cet ar- rangement admirable de l’atmosphère de la comète que dépendent la théorie de la terre et l’explication des phénomènes. Car on sent bien que quand l’atmosphère de la comète fut une fois débarrassée de toutes ces matières solides et terrestres, il ne resta plus que la matière légère de l’air, à travers laquelle les rayons du soleil pas- sèrent librement; ce qui tout d’un coup produisit la lumière : fiat lux. On voit bien que les colonnes qui composent l’orbe de la terre s’étant formées avec tant de précipi- tation, elles se sont trouvées de différentes densités , et que par conséquent les plus pe- santes ont enfoncé davantage dans ce fluide souterrain , tandis que les plus légères ne se sont enfoncées qu’à une moindre profon- deur ; et c’est ce qui a produit sur la sur- face de la terre des vallées et des montagnes. Ces inégalités étoient , avant le déluge , dis- persées et situées autrement qu’elles ne le sont aujourd’hui : au lieu de la vaste vallée qui contient l’océan , il y avoit sur toute la surface du globe plusieurs petites cavités séparées qui contenoient chacune une partie de cette eau, et faisoient autant de petites ! mers particulières; les montagnes étoient I aussi plus divisées et ne formoient pas des : chaînes comme elles en forment aujour- j d’hui. Cependant la terre étoit mille fois J plus peuplée, et par conséquent mille fois : plus fertile qu’elle ne l’est ; la vie des hom- j; mes et des animaux étoit dix fois plus Ion- ! gue, et tout cela parce que la chaleur inté- j; rieure de la terre , qui provient du noyau 1 central , étoit alors dans toute sa force , et ! 1 que ce plus grand degré de chaleur faisoit j < éclore et germer un plus grand nombre 11 d’animaux et de plantes , et leur donnoit le H degré de vigueur nécessaire pour durer plus | long-temps et se multiplier plus abondam- j < ment ; mais cette même chaleur, en aug- ; 1 mentant les forces du corps, porta malheu- |t reusement à la tête des hommes et des jj< animaux; elle augmenta les passions, elle b ôta la sagesse aux animaux et l’innocence à fi l’homme; tout, à l’exception des poissons P qui habitent un élément froid, se ressentit 'P des effets de cette chaleur du noyau; enfin, N tout devint criminel et mérita la mort. Elle N arriva, cette mort universelle, un mercredi pi 28 novembre, par un déluge affreux de Jft uarante jours et de quarante nuits; et ce |l'i éluge fut causé par la queue d’une autre P comète qui rencontra la terre en revenant de son périhélie. là La queue d’une comète est la partie la si Elus légère de son atmosphère ; c’est un e rouillard transparent, une vapeur subtile, fî« que l’ardeur du soleil fait sortir du corps et tjjde de l’atmosphère de la comète; cette vapeur, .de composée de particules aqueuses et aériennes sfloi extrêmement raréfiées, suit la comète lors- javi qu’elle descend à son périhélie, et la pré— i en cède lorsqu’elle remonte , en sorte qu’elle j toi est toujours située du côté opposé au soleil, w comme si elle cherchoit à se mettre à l’om- -lieu bre et à éviter la trop grande ardeur de cet lima astre. La colonne que forme celte vapeur ficoi est souvent d’une longueur immense; et plus ftei une comçte approche du soleil , plus la h queue est longue et étendue, de sorte qu’elle Isaii occupe souvent des espaces très-grands, et ijCe comme plusieurs comètes descendent au des- liai sous de l’orbe annuel de la terre, il n’est jjdei pas surprenant que la terre se trouve quel- ceo quefois enveloppée de la vapeur de cette jlipie queue; c’est précisément ce qui est arrivé pue dans le temps du déluge : il n’a fallu que I cou: deux heures de séjour dans cette queue de Ipré comète pour faire tomber autant d’eau qu’il j asir y en a dans la mer; enfin cette queue étoit f jtom ART. II. SYSTÈME U( les es cataractes du ciel : et cataractes cœli eut r ipertœ surit. En effet, le globe terrestre ayant une fois rencontré la queue de la co- r-imète, il doit, en y faisant sa roule, s’ap- ois aroprier une partie de la matière qu’elle ois Contient : tout ce qui se trouvera dans la m. .phère de l’attraction du globe doit tomber ®. mr la terre , et tomber en forme de pluie , tés puisque cette queue est en partie composée 5« le vapeurs aqueuses. Voilà donc une pluie et lu ciel qu’on peut faire aussi abondante oit ju’on voudra, et un déluge universel dont ne es eaux surpasseront aisément les plus le ;iautes montagnes. Cependant notre auteur, lus jui, dans cet endroit, ne peut pas s’éloigner ij. de la lettre du livre sacré, ne donne pas i’. pour cause unique du déluge cette pluie J ;irée de si loin ; il prend de l’eau partout les où il y en a : le grand abîme , comme nous Ile ivonsvu, en contient une bonne quantité, ij La terre, à l’approche de la comète, aura es sans doute éprouvé la force de son attrac- tit ion : les liquides contenus dans le grand iQ) abîme auront été agités par un mouvement lie ie flux et de reflux si violent , que la croûte di superficielle n’aura pu résister; elle se sera de ’endue en divers endroits, et les eaux de ce l’intérieur se seront répandues sur la surface: re et rupti surit, fontes abyssi. de Mais que faire de ces eaux que la queue de la comète et le grand abîme ont fournies la si libéralement ? Notre auteur n’en est point ja embarrassé. Dès que la terre, en continuant et sa route , se fut éloignée de la comète , l’effet et 'de son attraction, le mouvement de flux et irr de reflux, cessa dans le grand abîme, et dès ej lors les eaux supérieures s’y précipitèrent J avec violence par les mêmes voies qu’elles é- en étoient sorties : le grand abîme absorba Ile toutes les eaux superflues, et se trouva d’une il( .capacité assez grande pour recevoir non tt. seulement les eaux qu’il avoit déjà contenues, et mais encore toutes celles que la queue de la llt comète avoit laissées, parce que, dans le m temps de son agitation et de la rupture de la la croûte, il avoit agrandi l’espace en pous- |)e saut de tous côtés la terre qui l’environnoit. et Ce fut aussi dans ce temps que la figure de ;s. la terre, qui jusque-là avoit été sphérique, ,st devint elliptique , lant par l’effet de la force centrifuge causée par son mouvement diurne te que par l’action de la comète , et cela parce sé que la terre, en parcourant la queue de la ne comète, se trouva posée de façon qu’elle Je présentoit les parties de l’équateur à cet ,’é astre, et que la force de l’attraction de la )j 'comète , concourant avec la force centrifuge de la terre, fit élever les parties de l’équa- DE M. WHÎSTON. tôt teur avec d’autant plus de facilité que la croûte étoit rompue et divisée en une infi- nité d’endroits, et nue l’action du flux et du reflux de l’abîme poussoit plus violemment que partout ailleurs les parties sous l’équa- teur. Voilà donc l’histoire de la création, les causes du déluge universel , celles de la lon- gueur de la vie des premiers hommes , et celles de la figure de la terre. Tout cela semble n’avoir rien coûté à notre auteur; mais l’arche de Noé paroît l’inquiéter beau- coup. Comment imaginer en effet qu’au milieu d’un désordre aussi affreux, au milieu de la confusion de la queue d’une comète avec le grand abîme, au milieu des ruines de l’orbe terrestre , et dans ces terribles momens où non seulement les élémens de la terre étoient confondus, mais où il arrivoil encore du ciel et du tartare de nouveaux élémens pour augmenter le chaos ; comment imaginer que l’arche voguât tranquillement avec sa nombreuse cargaison sur la cime des flots ? Ici, notre auteur rame et fait de grands efforts pour arriver et pour donner une rai- son physique de la conservation de l’arche : mais comme il m’a paru qu’elle étoit insuffi- sante, mal imaginée, et peu orthodoxe, je ne la rapporterai point ; il me suffira de faire sentir combien il est dur pour un homme qui a -expliqué de si grandes . choses sans avoir recours à une puissance surnaturelle ou au miracle, d’être arrêté par une cir- constance particulière : aussi notre auteur aime mieux risquer de se noyer avec l’arche que d’attribuer, comme il le devoit, à la bonté immédiate du Tout-Puissant, la con- servation de ce précieux vaisseau. Je ne ferai qu’une remarque sur ce sys- tème , dont je viens de faire une exposition fidèle, c’est que toutes les fois qu’on sera assez téméraire pour vouloir expliquer par des raisons physiques les vérités théologi- ques, qu’on se permettra d’interpréter, dans des vues purement humaines, le texte divin des livres sacrés, et que l’on voudra rai- sonner sur les volontés du Très-Haut et sur l’exécution de ses décrets, on tombera né- cessairement dans les ténèbres et dans le chaos où est tombé l’auteur de ce système , qui cependant a été reçu avec grand applau- dissement. Il ne doutoit ni de la vérité du déluge, ni de l’authenticité des livres sacrés: mais comme il s’en étoit beaucoup moins occupé que de physique et d’astronomie, il a pris les passages de l’Écriture-Sainte pour des faits de physique et pour des résultats d’observations astronomiques ; et il a si THÉORIE DE LA TERRE. étrangement mêlé la science divine avec nos sciences humaines, qu’il en est résulté la chose du monde la plus extraordinaire, qui est ïe système que nous venons d’exposer. ARTICLE III. Du système de M. Burnet 1. Cet auteur est le premier qui ait traité cette matière généralement et d’une manière systématique. Il avoit beaucoup d’esprit et étoit homme de belles-lettres. Son ouvrage a eu une grande réputation, et il a été cri- tiqué par quelques savans, entre autres par M. Keill, qui, épluchant cette matière en géomètre , a démontré les erreurs de Burnet dans un traité qui a pour titre : Examina- tion of the Theory of the eart ; London , 1734, 2e édit. Ce même M. Keill a aussi ré- futé le système de Whiston : mais il traite ce dernier auteur bien différemment du premier; il semble même qu’il est de son avis dans plusieurs cas , et il regarde comme une chose fort probable le déluge causé par la queue d’une comète. Mais pour revenir à Burnet, son livre est élégamment écrit; il sait peindre et présenter avec force de gran- des images, et mettre sous les yeux des scènes magnifiques. Son plan est vaste; mais l’exécution manque faute de moyens : son raisonnement est petit, ses preuves sont foibles, et sa confiance est si grande, qu’il la fait perdre à son lecteur. Il commence par nous dire qu’avant le déluge la terre avoit une forme très-diffé- rente de celle que nous lui voyons aujour- d’hui. C’étoit d’abord une masse fluide , un chaos composé de matières de toute espèce et de toute sorte de figures : les plus pesan- tes descendirent vers le centre , et formè- rent au milieu du globe un corps dur et solide , autour duquel les eaux , plus légères, se rassemblèrent et enveloppèrent de tous côtés le globe intérieur ; l’air , et toutes les liqueurs plus légères que l’eau , la surmon- tèrent et l’enveloppèrent aussi dans toute la circonférence : ainsi entre l’orbe de l’air et celui de l’eau il se forma un orbe d'huile et de liqueur grasse.plus légères que l’eau. Mais comme l’air étoit encore fort impur, et qu’il conienoit une très-grande quantité de petites particules de matière terrestre, peu à peu ces particules descendirent , tom- 1. Thomas Burnet: Telluris Theoria sacra , orbis nostri originem et mutadones generales , quas aut jam subiit , aut olim subilurus est, complectens. Loudini j68i bèrent sur la couche d’huile , et formèrent un orbe terrestre mêlé de limon et d’huile ; et ce fut là la première terre habitable et le premier séjour de l’homme. C’étoit un j excellent terrain, une terre légère, grasse, et faite exprès pour se prêter à la faiblesse des premiers germes. La surface du globe : terrestre étoit donc, dans ces premiers temps, j égale, uniforme, continue, sans montagnes, sans mers, et sans inégalités. Mais la terre! ne demeura qu’environ seize siècles dans cet état; caria chaleur du soleil, desséchant peu à peu cette croûte limoneuse , la fit ; fendre d’abord à la surface; bientôt ces fentes pénétrèrent plus avant, et s’augmen- tèrent si considérablement avec le temps, qu’enfin elles s’ouvrirent en entier; dans’ un instant toute la terre s’écroula et tomba | par morceaux dans l’abîme d’eau qu’elle* contenoit ; voilà comme se fit le déluge uni- j verse 1. Mais toutes ces masses de terre, en tom-j bant dans l’abîme , entraînèrent une grande 1 quantité d’air ; et elles se heurtèrent , se j ( choquèrent , se divisèrent , s’accumulèrent I ( si irrégulièrement, qu’elles laissèrent entre! ( elles de grandes cavités remplies d’air. Les| ( eaux s’ouvrirent peu à peu les chemins de ( ces cavités ; et à mesure qu’elles les remplis- ( soient, la surface de la terre se découvrait j J dans les parties les plus élevées. Enfin il ne j resta de l’eau que dans les parties les plus! basses, c’est-à-dire dans les vastes vallées I qui contiennent la mer ; ainsi notre océan 1 est une partie de l’ancien abîme; le reste ' est entré dans les cavités intérieures avec J lesquelles communique l’océan. Les îles el j || les écueils sont les petits fragmens , lest continens sont les grandes masses de l’an- j j| cienne croûte; et comme la rupture et là ^ chute de cette eroûte se sont faites avec , confusion, il n’est pas étonnant de trouver j, sur la terre des éminences, des profondeurs ^ des plaines, et des inégalités de toute es-J j, pèce. ^ Cet échantillon du système de Burnet suffit pour en donner uue idée ; c’est ur ! roman bien écrit , et un livre qu’on peu lire pour s’amuser, mais qu’on ne doit pad ^ consulter pour s’instruire. L’auteur ignorai ■ j les principaux phénomènes de la terre , e j , n’étoit nullement informé des observations j il a tout tiré de son imagination, qui, comme* , l’on sait , sert volontiers aux dépens de h ! e vérité. lit nile; le et ! un f*, l,j-se lobe M lies, erre scet Mût Ifij Cé| iril' lans É ellj J à ade se 1 eut j lire | Les! dej & j 4 ne ! lus ! ées J 'an sij rei elj Kj é la ;« ! et | ES1 iet un iül ta i : IS I1 ART. IV. SYSTÈME DE M. WOODWARD. ARTICLE 1Y. Du système de M. Woodward *. On peut dire de cet auteur qu’il a voulu élever un monument immense sur une base moins solide que le sable mouvant, et bâtir l’édifice du monde avec de la poussière ; car il prétend que dans le temps du déluge il s’est fait une dissolution totale de la terre. La première idée qui se présente après avoir lu son livre, c’est que cette dissolution s’est faite par les eaux du grand abîme, qui se sont répandues sur la surface de la terre , et qui ont délayé et réduit en pâte les pierres , les rochers , les marbres, les métaux, etc. Il prétend que l’abîme où cette eau étoit renfermée s’ouvrit tout d’un coup à la voix de Dieu , et répandit sur la surface de la terre la quantité énorme d’eau qui étoit nécessaire pour la couvrir et sur- monter de beaucoup les pins hautes mon- tagnes , et que Dieu suspendit la cause de la cohésion des corps, ce qui réduisit tout en poussière, etc. Il ne fait pas attention que par ces suppositions il ajoute au miracle du déluge universel d’autres miracles , ou tout au moins des impossibilités physiques qui ne s’accordent ni avec la lettre de la sainte Écriture , ni avec les principes ma- thématiques de la philosophie naturelle. Mais comme cet auteur a le mérite d’avoir rassemblé plusieurs observations importan- tes , et qu’il connoissoit mieux que ceux qui ont écrit avant lui les matières dont le globe est composé, son système, quoique mal conçu et mal digéré, n’a pas laissé d’é- blouir les gens séduits par la vérité de quel- ques faits particuliers et peu difficiles sur la vraisemblance des conséquences générales. Nous avons donc cru devoir présenter un extrait de cet ouvrage, dans lequel, en ren- dant justice au mérite de l’auteur et à l’exac- titude de ses observations, nous mettrons le lecteur en état de juger de l’insuffisance de son système et de la fausseté de quelques- unes de ses remarques. M. Woodward dit avoir reconnu par ses yeux que toutes les matières qui composent la terre en Angle- terre, depuis sa surface jusqu’aux endroits les plus profonds où il est descendu , étoient disposées par couches , et que dans un grand nombre de ces couches il y a des coquilles et d’autres productions marines ; ensuite il ajoute que par ses correspondans et par ses amis il s’est assuré que dans tous les x. Jean Woodward : An Essay towards the natural History of the earth , etc. ïo3 autres pays la terre est composée de même, et qu’on y trouve des coquilles non seule- ment dans les plaines et en quelques en- droits , mais encore sur les plus hautes mon- tagnes , dans les carrières les plus profon- des, et en une infinité d’endroits : il a vu que ces couches étoient horizontales et po- sées les unes sur les autres , comme le se- roient des matières transportées par les eaux et déposées en forme de sédiment. Ces re- marques générales, qui sont très-vraies, sont suivies d’observations particulières, par les- quelles il fait voir évidemment que les fos- siles qu’on trouve incorporés dans les couches sont de vraies coquilles et de vraies pro- ductions marines , et non pas des minéraux, des corps singuliers, des jeux de la na- ture, etc. A ces observations, quoique en partie faites avant lui , qu’il a rassemblées et prouvées , il en ajoute d’autres qui sont moins exactes ; il assure que toutes les ma- tières des différentes couches sont posées les unes sur les autres dans l’ordre de leur pesanteur spécifique , en sorte que les plus pesantes sont au dessous, et les plus légères au dessus. Ce fait général n’est point vrai : on doit. arrêter ici l’auteur, et lui montrer les rochers que nous voyons tous les jours au dessus des glaises , des sables , des char- bons de terre , des bitumes , et qui certai- nement sont plus pesans spécifiquement que toutes ces matières ; car en effet , si par toute la terre on trouvoit d’abord les cou- ches de bitume , ensuite celles de craie , puis celles de marne, ensuite celles de glaise, celles de sable, celles de pierre, celles de marbre , et enfin les métaux , en sorte que la composition de la terre suivît exactement et partout la loi de la pesanteur , et que les matières fussent toutes placées dans l’ordre de leur gravité spécifique, il y auroit ap- parence qu’elles se seroient toutes précipi- tées en même temps ; et voilà ce que notre auteur assure avec confiance , malgré l’évi- dence du contraire : car , sans être obser- vateur, il ne faut qu’avoir des yeux pour être assuré que l’on trouve des matières pe- santes très-souvent posées sur des matières légères , et que par conséquent ces sédimens ne se sont pas précipités tous en même temps, mais qu’au contraire ils ont été amenés et déposés successivement par les eaux. Comme c’est là le fondement de son système , et qu’il porte manifestement à faux , nous ne le suivrons plus loin que pour faire voir combien un principe erroné peut produire de fausses combinaisons et de mauvaises conséquences. Toutes les ma- ïo4 THÉORIE DE LA TERRE. tières , dit notre auteur , qui composent la terre , depuis les sommets des plus hautes montagnes jusqu’aux plus grandes profon- deurs des mines et des carrières , sont dis- posées par couches , suivant leur pesanteur spécifique: donc, conclut-il, toute la ma- iière qui compose le globe a été dissoute et S’est précipitée en même temps. Mais dans quelle matière et en quel temps a-t-elle été dissoute P Dans l’eau et dans le temps dû déluge. Mais il n’y a pas assez d’eau Êür le globe pour que cela se puisse, puis- qu’il y a plus de terre que d’eau, et que le fond de la mer est de terre. Eh bien ! nous dit-il , il y a de l’eau plus qu’il n’en faut au centre de la terre : il ne s’agit que de la faire monter; de lui donner tout ensemble la vertu d’un dissolvant uni- versel et la qualité d’un remède préservatif pour les coquilles, qui seules n’ont pas été dissoutes, tandis que les marbres et les rochers l’ont été; de trouver ensuite le moyen de faire rentrer cette eau dans l’abîme, et de faire cadrer tout cela avec l’histoire du déluge. Voilà le système de la vérité duquel l’auteur ne trouve pas le moyen de pouvoir douter; car quand on lui oppose que l’eau ne peut point dissoudre les marbres, les pierres, les métaux, sur- tout en quarante jours qu’a duré le déluge, il répond simplement que cependant cela est arrivé. Quand on lui demande quelle étoit donc la vertu de cette eau de l’abîme pour dissoudre toute la terre et conserver en même temps les coquilles, il dit qu’il n’a jamais prétendu que cette eau fût un dis- solvant ; mais qu’il est clair , par les faits, que la terre a été dissoute , et que les co- quilles ont été préservées. Enfin , lorsqu’on le presse et qu’on lui fait voir évidemment que s’il n’a aucune raison à donner de ces phénomènes, son système n’explique rien, il dit qu’il n’y a qu’à imaginer que dans le temps du déluge la force de la gravité et de la cohérence de la matière a cessé tout à coup , et qu’au moyen de cette supposition , dont l’effet est fort aisé à concevoir, on explique d’une manière satisfaisante la dissolution de l’ancien monde. Mais , lui dit-on , si la force qui tient unies les parties de la matière a cessé , pourquoi les coquilles n’ont-elles pas été dissoutes comme tout le reste ? Ici il fait un discours sur l’organisation des coquilles et des os des animaux, par lequel il prétend prouver qne leur texture étant fibreuse et diffé- rente de celle des minéraux, leur force de cohésion est aussi d’un autre genre. Après tout , il n’y a , dit-il , qu’à sup- poser que la force de la gravité et de la ta cohérence n’a pas cessé entièrement , mais d' seulement qu’elle a été diminuée assez pour tli désunir toutes les parties des minéraux, le mais pas assez pour désunir celles des ani- é maux. A tout ceci on ne peut pas s’empê- d cher de reconnoîlre que notre auteur n’étoit p pas aussi bon physicien qu’il étoit bon ob- si servateur ; et je ne crois pas qu’il soit n1 nécessaire que nous réfutions sérieusement y, des opinions sans fondement, surtout lors- a qu’elles ont été imaginées contre les règles pi de la vraisemblance , et qu’on n’en a tiré 1 n que des conséquences contraires aux lois de q la mécanique. \ ARTICLE V. J Exposition de quelques autres systèmes. j On voit bien que les trois hypothèses dont f nous venons de parler ont beaucoup de j choses communes; elles s’accordent toutes p en ce point , que dans le temps du déluge a, la terre a changé de forme, tant à l’extérieur p qu’à l’intérieur : ainsi tous ces spéculatifs „ n’ont pas fait attention que la terre , avant d le déluge, étant habitée par les mêmes es- p pèces d’hommes et d’animaux, devoit être p nécessairement telle , à très-peu près , qu’elle e est aujourd’hui , et qu’en effet les livres saints p nous apprennent qu’avant le déluge il y avoit p sur la terre des fleuves , des mers , des mon- ^ tagnes, des forêts et des plantes; que ces ( fleuves et ces montagnes étoient pour la plu- s part les mêmes, puisque le Tigre et l’Eu- Sl phrate étoient les fleuves du paradis terres- p tre ; que la montagne d’Arménie sur laquelle l’arche s’arrêta, étoit une des plus hautes p montagnes du monde au temps du déluge , p comme elle l’est encore aujourd’hui ; que les ^ mêmes plantes et les mêmes animaux qui i [p existent existoient alors, puisqu’il y est parlé y du serpent, du corbeau, et que la colombe j rapporta une branche d’olivier: car quoique p M. de Tournefort prétende qu’il n’y a point „ d’oliviers à plus de 400 lieues du mont A.ra- .. rath , et qu’il fasse sur cela d’assez mauvaises plaisanteries 1 , il est cependant certain qu’il jj y en avoit en ce lieu dans le temps du dé- luge, puisque le livre sacré nous en assure; et il n’est pas étonnant que dans un espace j de 4000 ans les oliviers aient été détruits dans ] ces cantons et se soient multipliés dans d’au- tres. C’est donc à tort et contre là lettre de la sainte Écriture que ces auteurs ont sup- 1. Voyage du Levantt vol. 11, page 336. ART. y. QUELQUES AUTRES SYSTÈMES. xo5 posé que la terre étoit, avant le déluge, to- talement différente de ce qu’elle est aujour- d’hui ; et cette contradiction de leurs hypo- thèses avec le texte sacré, aussi bien que leur opposition avec les vérités physiques , doit faire rejeter leurs systèmes, quand même ils seroient d’accord avec quelques phénomènes : mais il s’en faut bien que cela soit ainsi. Burnet, qui a écrit le premier, ïi’avoit, pour fonder son système, ni obser- vations , ni faits. Woodward n’a donné qu’un essai , où il promet beaucoup plus qu’il ne peut tenir ; son livre est un projet dont on pas vu l’exécution : on voit seulement qu’il emploie deux observations générales ; la première , que la terre est partout com- posée de matières qui autrefois ont été dans un état de mollesse et de fluidité, qui ont été transportées par les eaux, et qui se sont déposées par couches horizon tales ; la seconde, qu’il y a des productions marines dans l’in- térieur de la terre en une infinité d’endroits. Pour rendre raison de ces faits, il a recours au déluge universel , ou plutôt il paroît ne les donner que comme preuves du déluge : mais il tombe , aussi bien que Burnet , dans des contradictions évidentes ; car il n’est pas permis de supposer avec eux qu’avant le dé- tre luge il n’y avoit point de montagnes, puisqu’il est dit précisément et très- clairement que les eaux surpassèrent de quinze coudées les plus hautes montagnes. D’autre côté , il n’est pas dit que ces eaux aient détruit et dissous ces montagnes: au contraire, ces montagnes- so^t restées en place, et l’arche s’est arrêtée sur celle que les eaux ont laissée la première ï découvert. D’ailleurs, comment peut-on l’imaginer que pendant le peu de temps qu’a iuré le déluge, les eaux aient pu dissoudre es montagnes et toute la terre? Y’est-ce pas |ine absurdité de dire qu’en quarante jours eau a dissous tous les marbres , tous les ro- chers , toutes les pierres, tous les minéraux ? ’est-ce pas une contradiction manifeste que l’admettre cette dissolution totale, et en nême temps de dire que les coquilles et les iroductions marines ont été préservées , et tes jue tout ayant été détruit et dissous , elles eules ont été conservées , de sorte qu’on les etrouve aujourd’hui entières , et les mêmes ire> [u’elles étoient avant le déluge ? Je ne crain- Irai donc pas de dire qu’avec d’excellentes ibservations , Woodward n’a fait qu’un fort tiauvais système. Whiston, qui est venu le lernier, a beaucoup enchéri sur les deux utres; mais en donnant une vaste carrière i son imagination, au ombé en contradiction moins n’est-il pas : il dit des choses fort peu croyables ; mais du moins elles ne sont ni absolument ni évidemment impossi- bles. Comme on ignore ce qu’il y a au centre et dans l’intérieur de la terre, il a cru pouvoir supposer que cet intérieur étoit occupé par un noyau solide , environné d’un fluide pesant et ensuite d’eau sur laquelle la croûte exté- rieure du globe étoit soutenue, et dans la- quelle les différentes parties de celte croûte se sont enfoncées plus ou moins, à propor- tion de leur pesanteur ou de leur légèreté rélalive; ce qui a produit les montagnes et les inégalités de la surface de la terre. Il faut avouer que cet astronome a fait ici une faute de mécanique : il n’a pas songé que la terre, dans cette hypothèse, doit faire voûte de tous côtés ; que par conséquent elle ne peut être portée sur l’eau qu’elle contient , et en- core moins y enfoncer. A cela près je ne sache pas qu’il y ait d’autres erreurs de phy- sique dans ce système. Il y en a un grand nombre quant à la métaphysique et à la théologie ; mais enfin on ne peut pas nier absolument que la terre, rencontrant la queue d’une comète , lorsque celle-ci s’ap- proche de son périhélie , ne puisse être inon- dée, surtout lorsqu’on aura accordé à l’au- teur que la queue d’une comète peut contenir des vapeurs aqueuses. On ne peut nier non plus , comme une impossibilité absolue , que la queue d’une comète , en revenant du pé- rihélie , ne puisse brûler le terre, si on sup- pose avec l’auteur que la comète ait passé fort près du soleil, et qu’elle ait été prodi- gieusement échauffée pendant son passage. Il en est de même du reste de ce système ; mais quoiqu’il n’y ait pas d’impossibilité ab- solue , il y a si peu de probabilité à chaque chose prise séparément, qu’il en résulte une impossibilité pour le tout pris ensemble. Les trois systèmes dont nous venons de parler ne sont pas les seuls ouvrages qui aient été faits sur la théorie de la terre. U a paru, en 1729, un mémoire de M. Bour- guet, imprimé à Amsterdam avec ses Let- tres philosophiques sur la formation des sels , etc., dans lequel il donne un échantil- lon du système qu’il méditoit, mais qu’il n’a pas proposé , ayant été prévenu par la mort. Il faut rendre justice à cet auteur ; personne n’a mieux rassemblé les phéno- mènes et les faits : on lui doit même cette belle et grande observation , qui est une des clefs delà théorie de la terre; je veux parler de la correspondance des angles des monta- gnes. Il présente tout ce qui a rapport à ces matières dans un grand ordre : mais , avec tous ces avantages, il paroît qu’il n’auvoit ! io6 THEORIE DE {>as mieux réussi que les autres à faire une listoire physique et raisonnée des change- mens arrivés au globe, et qu’il étoil bien éloigné d’avoir trouvé les vraies causes des ef- fets qu’il rapporte; pour s’en convaincre, ilne faut que jeter les yeux sur les propositions qu’il déduit des phénomènes, et qui doivent servir de fondement à sa théorie1. Il dit que le globe a pris sa forme dans un même temps, et non pas successivement ; que la forme et la disposition du globe supposent nécessai- rement qu’il a été dans un état de fluidité; que l’état présent de la terre est très-diffé- rent de celui dans lequel elle a été pendant plusieurs siècles après sa première formation ; que la matière du globe étoit dès le com- mencement moins dense qu’elle ne l’a été depuis qu’il a changé de face; que la con- densation des parties solides du globe dimi- nua sensiblement avec la vélocité du globe même, de sorte qu’après avoir fait un cer- tain nombre de révolutions sur son axe et autour du soleil, il se trouva tout à coup dans un état de dissolution qui détruisit sa première structure; que cela arriva vers l’é- quinoxe du printemps; que dans le temps de cette dissolution les coquilles s’introdui- sirent dans les matières dissoutes; qu’après cette dissolution la terre a pris la forme que nous lui voyons, et qu’aussitôl le feu s’y est mis, la consume peu à peu , et va toujours en augmentant, de sorte qu’elle sera dé- truite un jour par une explosion terrible , accompagnée d’un incendie général, qui aug- mentera l’atmosphère du globe et en dimi- nuera le diamètre, et qu’alors la terre, au lieu de couches de sable ou de terre, n’aura que des couches de métal et de minéral cal- ciné, et des montagnes composées d’amal- games de différens métaux. En voilà assez pour faire voir quel étoit le système que l’auteur méditoit. Deviner de cette façon le passé, vouloir prédire l’avenir, et encore deviner et prédire à peu près comme les au- tres ont prédit et deviné, ne me paroît pas être un effort : aussi cet auteur avoit beau- coup plus de connoissances et d’érudition que de vues saines et générales , et il m’a paru manquer de cette partie si nécessaire aux physiciens, de cette métaphysique qui rassemble les idées particulières, qui les rend plus générales, et qui élève l’esprit au point où il doit être pour voir l’enchaînement des causes et des effets. Le fameux Leibnitz donna en i683, dans les Actes de Leipzick 2 , un projet de sys- 1. Voyez page ai 2. Page 4<>, LA TERRE. tème bien différent, sous le titre de Pro togœa. La terre , selon Bourguet et tous les autres, doit finir par le feu; selon Leibnitz, elle a commencé par là, et a souffert beaucoup plus de changemens et de révolutions qu’on ne l’imagine. La plus grande partie de la matière terrestre a été embrasée par un feu violent dans le temps que Moïse dit que la lumière fut séparée des ténèbres. Les planètes, aussi bien que h terre , étoient autrefois des étoiles fixes et lumineuses par elles-mêmes. Après avoir brûlé long-temps, il prétend qu’elles se soin éteintes faute de matière combustible, e qu’elles sont devenues des corps opaques Le feu a produit par la fonte des matière: une croûte vitrifiée, et la base de toute 1 matière qui compose le globe terrestre es du verre, dont les sables ne sont que de. fragmens : les autres espèces de terre se son formées du mélange de ces sables avec de sels fixes et de l’eau; et quand la croûte fu refroidie, les parties humides, qui s’étoien élevées en forme de vapeurs, retombèren et formèrent les mers. Elles envelopperai d’abord toute la surface du globe, et surmon tèrent même les endroits les plus élevés, qu forment aujourd’hui les conlinens et les îles Selon cet auteur , les coquilles et autres dé bris de la mer qu’on trouve partout, proi vent que la mer a couvert toute Ta terre et la grande quantité de sels fixes, de sa blés , et de matières fondues et calcinées qui sont renfermées dans les entrailles de 1 terre, prouve que l’incendie a été générai et qu’il a précédé l’existence des mers. Quo: que ces pensées soient dénuées de preuves elles sont élevées, et on sent bien qu’elle sont le produit des méditations d’un grau génie. Les idées ont de la liaison, les hy pothèses ne sont pas absolument impossible et les conséquences qu’on en peut tirer n sont pas contradictoires : mais le grand dé faut de celte théorie c’est qu’elle ne s’appli que point à l’état présent de la terre; c’e; le passé qu’elle explique ; et ce passé est , ancien , et nous a laissé si peu de vestiges qu’on peut en dire tout ce qu’on voudra et qu’à proportion qu’un homme aura pli d’esprit , il en pourra dire des choses qi auront l’air plus vraisemblable. Assurer comme l’assure Whiston , que la terre a él comète, ou prétendre avec Leibnitz qu’el: a été soleil, c’est dire des choses égalemei possibles ou impossibles, et auxquelles seroit superflu d’appliquer les règles d< probabilités. Dire que la mer a autrefo couvert toute la terre , qu’elle a envelopj ÂRT. V. QUELQUES ni, le globe tout entier, et que c’est par cette ou raison qu’on trouve des coquilles partout , a n’est-ce pas faire attention à une chose très- essentielle, qui est l’unité du temps de la création? car si cela étoit, il faudroit néces- sairement dire que les coquillages et les au- tres animaux habitaus des mers, dont on trouve les dépouilles dans l'intérieur de la jj terre, ont existé les premiers, et long-temps avant l’homme et les animaux terrestres : or, indépendamment du témoignage des givres sacrés, n’a-t-on pas raison de croire , e[que toutes les espèces d’animaux et de végé- taux sont à peu près aussi anciennes les unes que les autres ? M. Scheuchzer , dans une dissertation esj qu’il a adressée à l’Académie des Sciences Wen 1708, attribue., comme Woodward, le ( changement, ou plutôt la seconde forma- , 1. Lion de la surface du globe, au déluge uni- e|jjversel; et pour expliquer celle des monta- r|i[gnes , il dit qu’qprès le déluge Dieu, voulant Paire rentrer les eaux dans les réservoirs sou- terrains, avoit brisé et déplacé de sa main toute-puissante un grand nombre de lits au- paravant horizontaux, et les avoit élevés iiir la surface du globe. Toute la disserta- tion a été faite pour appuyer celte opinion, pomme il falloit que ces hauteurs ou émi- pences fussent d’une consistance fort solide, \1. Scheuchzer remarque que Dieu 11e les lira que des lieux où il y avoit beaucoup I |ile pierres : de là vient , dit-il , que les pays, f| pomme- la Suisse, où il y en a une grande '..quantité, sont montagneux, et qu’au con- ü traire ceux qui , comme la Flandre , l’Alle- ,m jnjtagne, la Hongrie, la Pologne, n’ont que du sable ou de l’argile, même à une assez 'f grande profondeur, sont presque entière- , paient sans montagnes T. 1 I Cet auteur a eu plus qu’aucun autre le '""défaut de vouloir mêler la physique avec la j, théologie; et quoiqu’il nous ait donné quel- If ques bonnes observations, la partie systé- ceSfnalique de ses ouvrages est encore plus mauvaise que celle de tous ceux qui l’ont précédé : il a fait même sur ce sujet des dé- damai ions et des plaisanteries ridicules. P11 Voyez la plainte des poissons, Piscium rjfyè'relœ, etc., sans parler de son gros livre sn plusieurs volumes in-folio , intitulé Phy- >ica sacra, ouvrage puéril, et qui paroît 1 “fait moins pour occuper les hommes que 1101 pour amuser les enfans par les gravures et 111 [es images qu’on y a entassées à dessein et ans nécessite. ï. VojezYHistoirs de l’Académie , 1708.., p. 3a. AUTRES SYSTÈMES, 10? Stenon, et quelques autres après lui, ont attribué la cause des inégalités de la surface de la terre à des inondations particulières , à des tremblemens de terre, à des secousses, des éboulemens , etc. : mais les effets de ces causes secondaires n’ont pu produire que quelques légers changemens. Nous admet- tons ces mêmes causes après la cause pre» mière, qui est le mouvement du flux et re- flux, et le mouvement de la mer d’orient en occident. Au reste, Stenon ni les autres n’ont pas donné de théorie , ni même des faits généraux sur cette matière 3. Ray prétend que toutes les montagnes ont été produites par des tremblemens de terre, et il a fait un traité pour le prouver. Nous ferons voir, à l’article des volcans, combien peu cette opinion est fondée. Nous ne pouvons nous dispenser d’obser- ver que la plupart des auteurs dont nous venons de parler, comme Burnet, Whiston, et Woodward, ont fait une faute qui nous parqît mériter d’êire relevée, c’est d’avoir regardé le déluge comme possible par l’ac- tion des causes naturelles, au lieu que l’É- criture-Sainte nous le présente comme pro- duit par la volonté immédiate de Dieu. Il n’y a aucune cause naturelle qui puisse pro- duire sur la surface entière de la terre la quantité d’eau qu’il a fallu pour couvrir les plus hautes montagnes; et quand même on pourrait imaginer une cause proportionnée à cet effet , il seroit encore impossible de trouver quelque autre cause capable de faire disparaître les eaux : car en accordant à Whiston que ces eaux sont venues de la queue d’une comète, on doit lui nier qu’il en soit venu du grand abîme, et qu’elles y soient toutes rentrées, puisque le grand abîme étant, selon lui, environné et pressé de tous côtés par la croûte ou l’orbe ter- restre, il est impossible que l’attraction de la comète ait pu causer aux fluides conte- nus dans l’intérieur de cet orbe le moindre mouvement; par conséquent le grand abîme n’aura pas éprouvé, comme il le dit, un flux et reflux violent ; dès lors il n’en sera pas sorii et il n’y sera pas entré une seule goutte d’eau; et à moins de supposer que l’eau tombée de la comète a été détruite par miracle, elle seroit encore aujourd’hui sur la surface de la terre, couvrant les sommets des plus hautes montagnes. Rien ne carac- térise mieux un miracle que l’impossibilité d’en expliquer l’effet par les causes natu- relles. Nos auteurs ont fait de vains efforts s. Voyez la Dissertation de sçlido intra soli • dum , etc. io8 THÉORIE DE LA TERRE. pour rendre raison du déluge : leurs erreurs de physique au sujet des causes secondes qu’ils emploient, prouvent la vérité du fait tel qu’il est rapporté dans PÉcriture-Sainte , et démontrent qu’il n’a pu être opéré que par la cause première, par la volonté de Dieu. D’ailleurs il est aisé de se convaincre que ce n’est ni dans un seul et même temps , ni par l’effet du déluge , que la mer a laissé à découvert les continens que nous habitons : car il est certain par le témoignage des li- vres sacrés, que le paradis terrestre était en Asie, et que l’Asie étoit un continent ha- bité avant le déluge; par conséquent ce n’est pas dans ce temps que les mers ont couvert cette partie considérable du globe. La terre étoit donc avant le déluge telle à peu près qu’elle est aujourd’hui; et cette énorme quantité d’eau que la justice divine fit tomber sur la terre pour punir l’homme coupable, donna en effet la mort à toutes les créatures : mais elle ne produisit aucun changement à la surface de la terre ; elle ne détruisit pas même les plantes, puisque la colombe rapporta une branche d’olivier. Pourquoi donc imaginer, comme Pont fait la plupart de nos naturalistes, que cette eau changea totalement la surface du globe jusqu’à mille et deux mille pieds de pro- fondeur ? pourquoi veulent-ils que ce soit le déluge qui ait apporté sur la terre les coquilles qu’on trouve à sept ou huit cents pieds dans les rochers et dans les marbres ? pourquoi dire que c’est dans ce temps que se sont formées les montagnes et les col- lines ? et comment peut-on se figurer qu’il soit possible que ces eaux aient amené des masses et des bancs de coquilles de cent lieues de longueur ? Je ne crois pas qu’on puisse persister dans celle opinion, à moins qu’on n’admette dans le déluge un double miracle, le premier pour l’augmentation des eaux , et le second pour le transport des co- quilles; mais comme il n’y a que le premier qui soit rapporté dans PEcriture-Sainte, je ne vois pas qu’il soit nécessaire de faire un article de foi du second. D’autre côté, si les eaux du déluge, après avoir séjourné au dessus des plus hautes montagnes, se fussent ensuite retirées tout à coup, elles auroient amené une si grande quantité de limon et d’immondices, que les terres n’auroient point été labourables ni propres à recevoir des arbres et des vignes que plusieurs siècles après cette inondation, comme l’on sait que , dans le déluge qui ar- riva en Grèce, le pays submergé fut totale- ment abandonné, et ne put recevoir aucune culture que trois siècles après cette inonda- i lion I. Aussi doit-on regarder le déluge uni- versel comme un moyen surnaturel dont s’est servie la toute-puissance divine pour le châtiment des hommes , et non comme un effet naturel dans lequel tout se seroitj passé selon les lois de la physique. Le dé- luge universel est donc un miracle dans sa I cause et dans ses effets; on voit clairement | par le texte de PÉcriture-Sainte qu’il a servi ! uniquement pour détruire l’homme et les | animaux, et qu’il n’a changé en aucune fa-ij çon la terre, puisqu’après la retraite deî eaux les montagnes, et même les arbres | étoient à leur place, et que la surface de U: terre étoit propre à recevoir la culture et i produire des vignes et des fruits. Commenl ; toute la race des poissons, qui n’entra pa: dans l’arche, auroit-elle pu être conservé* j si la terre eût été dissoute dans Peau ou seu-; lement si les eaux eussent été assez agitée.1! pour transporter les coquilles des Indes er Europe , etc. ? Cependant cette supposition, que c’est h déluge universel qui a transporté les CO' quilles de la mer dans tous les climats dé la terre, est devenue l’opinion ou plutôt lu superstition du commun des naturalistes! Woodward, Scheuchzer, et quelques au très appellent ces coquilles pétrifiées les resj tes du déluge; ils les regardent comme le médailles et les monumens que Dieu nou a laissés de ce terrible événement , afin qu’i I ne s’effaçât jamais de la mémoire du genr humain ; enfin ils ont adopté cette hypothès avec tant de respect, pour ne pas dire d’aver glemenl , qu’ils ne paroissent s’être occupé ' qu’à chercher les moyens de concilier l’Écr ture- Sainte avec leur opinion, et qu’au lieu d se servir de leurs observations et d’en tirer d< lumières, ils se sont enveloppés dans les nuagi d’une théologie physique, dont l’obscurité et petitesse dérogent à la clarté et à la digniij de la religion, et ne laissent apercevoir au| incrédules qu’un mélange ridicule d’idéu humaines et de faits divins. Prétendre c effet expliquer le , déluge universel et s< causes physiques, vouloir nous apprend]) le détail de ce qui s’est passé dans le temj de cette grande révolution, deviner que) en ont été les effets , ajouter des faits à ceij du livre sacré, tirer des conséquences < ces faits, n’est-ce pas vouloir mesurer , puissance du Très-Haut? Les merveilles qi sa main bienfaisante opère dans la natu i i. Voyez Acta érudit Lips., anno 1691, p. xoci de l’Ecjualeitr ART V. QUELQUES d’une manière uniforme et régulière , sont i incompréhensibles; et à plus forte raison, Ses coups d’éclat , les miracles doivent nous tenir dans le saisissement et dans le silence. Mais , diront-ils , le déluge universel étant un fait certain , n’est-il pas permis de rai- sonner sur les conséquences de ce fait ? A la bonne heure : mais il faut que vous com- menciez par convenir que le déluge universel h’a pu s’opérer par les puissances physiques ; fl faut que vous le reconnoissiez comme un iffet immédiat de la volonté du Tout-Puis- sant; il faut que vous vous borniez à en savoir seulement ce que les livres sacrés tous en apprennent , avouer en même temps qu’il ne vous est pas permis d’en savoir da- vantage, et surtout ne pas mêler une mau- vaise physique avec la pureté du livre saint, lies précautions , qu’exige le respect que lions devons aux décrets de Dieu, étant | prises, que reste-t-il à examiner au sujet du jéluge? Est -il dit dans l’Écriture-Sainte jue le déluge ait formé les montagnes ? U est dit le contraire. Est-il dit que les eaux fussent dans une agitation assez grande pour Enlever du fond des mers les coquilles et les Iransporter par toute la terre ? Non ; l’arche foguoit tranquillement sur les flots. Est-il dit jue la terre souffrit une dissolution totale ? Point du tout. Le récit de l’historien sacré est impie et vrai ; celui de ces naturalistes est oniposé et fabuleux. ARTICLE VI. Géographie. La surface de la terre n’est pas, comme ielle de Jupiter, divisée par bandes alterna- ives et parallèles à l’équateur : au contraire, lie est divisée d’un pôle à l’autre par deux tandes de terre et deux bandes dé mer. La Première et principale bande est l’ancien ontinent, dont la plus grande longueur se t’ouve être en diagonale avec l’équateur, et tu’on doit mesurer en commençant au nord e la Tartarie la plus orientale, de là à la erre qui avoisine le golfe Linchidolin, où J&s Moscovites vont pêcher des baleines, de \ à à Tobolsk, de Tobolsk à la mer Caspienne, ?je la mer Caspienne à la Mecque, de la Mecque à la partie occidentale du pays ha- bité par le peuple de Galles en Afrique, Ensuite au Monoemugi, au Monomoîapa, et nün au cap de Bonne - Espérance. Cette jlgue, qui est la plus grande longueur de l’an- ' ien continent , est d’environ 36oo lieues T : x. J’ai dit que la ligne que l'on peut tirer dans la AUTRES SYSTÈMES. 109 elle n’est interrompue que par la mer Cas- pienne et par la mer Rouge, dont les lar- geurs ne sont pas considérables ; et on ne plus grande longueur de l’ancien continent , est d’en- viron 36oo lieues. J’ai entendu des lieues comme on les compte aux environs de Paris , de 2000 ou aooo toises, et qui sont d’environ 27 au degré. Au reste, dans cet article de géographie géné- rale , j’ai tâché d’apporter l’exactitude que deman- dent des sujets de cette espèce; néanmoins il s’y est glissé quelques petites erreurs et quelques né- gligences. Par exemple, i° je n’ai pas donné les noms adoptés ou imposés par les François à plu- sieurs contrées de l’Amérique; j’ai suivi en tout les globes anglois faits par Senex , de deux pieds de diamètre , sur lesquels les cartes que j’ai données ont été copiées exactement. Lee Anglois sont plus justes que nous à l’égard des nations qui leur sont indifférentes; ils conservent à chaque pays le nom originaire, ou celui que leur a donné le premier qui les a découverts. Au contraire, nous donnons souvent nos noms françois à tous les pays où nous abordons , et c’est de là que vient l’obscurité de la nomenclature géographique dans notre langue. Mais , comme les lignes qui traversent les deux continens dans leur plus grande longueur sont bien indiquées dans mes cartes par les deux points ex- trêmes , et par plusieurs autres points intermé- diaires, dont les noms sont généralement adoptés, il ne peut y avoir sur cela aucune équivoque es- sentielle. • 20 J’ai aussi négligé de donner le détail du cal- cul de la superficie des deux continens, parce qu’il est aisé de le vérifier sur un grand globe. Il en résulte que dans la partie qui est à gauche de la ligne de partage, il y a 2,471,092 3/4 lieues car- rées, et 2,469,687 lieues carrées dans la partie qui est à droite de la même ligne, et que par consé- quent l’ancien continent contient en tout environ 4,940,980 lieues carrées, ce qui ne fait pas une cinquième partie de la surface entière du globe. Et de même la partie à gauche de la ligne de partage dans le nouveau continent contient 1,069,286 5^6 lieues carrées, et celle qui est à droite de la même ligne, en contient 1,070,926 1/12, en tout 2,i4o,2i3 lieues environ; ce qui ne fait pas la moitié de la surface de l’ancien continent. Et les deux continens ensemble ne contenant que 7,080,993 lieues carrées , leur superficie ne fait pas, à beaucoup près, le tiers de la surface totale du globe , qui est environ de 26 millions de lieues carrées. 3° J’aurois dû donner la petite différence d'in- clinaison qui se trouve entre les deux lignes qui partagent les deux continens; je me suis contenté de dire qu’elles étoient l’une et l’autre inclinées à l’équateur d’environ 3o degrés , et en sens opposés. Ceci n’est en effet qu’un environ , celle de l’ancien continent l’étant d’un peu plus de 3o degrés , et celle du nouveau l'étant un peu moins. Si je me fusse expliqué comme je viens de le faire , j’aurois évité l’imputation qu’on m’a faite d’avoir tiré deux lignes d’inégale longueur sous le même angle entre deux parallèles : ce qui prouveroit , comme l’a dit un critique anonyme, que je ne sais pas les élémens de la géométrie. 4° J’ai négligé de distinguer la haute et la basse Égypte : en sorte que, dans les pages 283 et 285 , il y a une apparence de contradiction ; il semble que , dans le premier de ces endroits , l’Égypte soit Î10 THÉORIE DE LÀ TERRE, doit pas avoir égard aux petites interruptions lorsque l’on considère, comme nous le fai- sons, la surface du globe divisée seulement en quatre parties. Cette plus grande longueur se trouve en mesurant le continent en diagonale : car si on le mesure au contraire suivant les méri- diens, on verra qu’il n’y a que i5oo lieues depuis le cap nord de Laponie jusqu’au cap de Bonne -Espérance, et qu’on traverse la mer Baltique dans sa longueur, et la mer Méditerranée dans toute sa largeur; ce qui fait une bien moindre longueur et de plus grandes interruptions que par la première route. A l’égard de toutes les autres distances qu’on pourroit mesurer dans l’ancien con- tinent sous les mêmes méridiens, on les trouvera encore beaucoup plus petites que celles-ci, n’y ayant, par exemple, que 1800 lieues depuis la pointe méridionale de l’ile de Ceylan jusqu’à la côte septentrionale de la Nouvelle-Zemble. De même, si on mesure le continent parallèlement à l’équateur, 011 trouvera que la plus grande longueur sans interruption se trouve depuis la côte occi- dentale de l’Afrique, à Trefana jusqu’à Ning- po sur la côte orientale de la Chine, et qu’elle est environ de 2800 lieues; qu’une autre longueur sans interruption peut sc mesurer depuis la pointe de la Bretagne à Brest jusqu’à la côte de la Tartarie chinoise, et qu’elle est environ de 2800 lieues; qu’en mesurant depuis Bergen en Norwège jusqu’à la côte de Kamtschatka, il n’y a plus que 1800 lieues. Toutes ces lignes ont, comme l’on voit, beaucoup moins de longueur que la première; ainsi la plus grande étendue de l’ancien continent est en effet depuis le cap oriental de la Tartarie la plus septentrionale jusqu’au cap de Bonne-Espérance , c’est-à-dire de trois mille six cents lieues. Cette ligne peut être regardée comme le milieu de la bande de terre qui compose l’ancien continent : car en mesurant l’éten- due de la surface du terrain des deux côtés de cette ligne, je trouve qu’il y a dans la partie qui est à gauche 2,471,092 3/4 lieues carrées , et que , dans la partie qui est à droite de cette ligne, il a 2,469,687 lieues carrées; ce qui est une égalité singulière, et qui doit faire présumer, avec une très-grande vrai- mise au rang des terres les plus anciennes ; tandis que, dans le second, je la mets au rang des plus nouvelles. J’ai eu tort de n’avoir pas , dans ce passage, distingué, comme je., l’ai fait ailleurs , la Laute Égypte , qui est en effet une terre très-an- cienne, de la basse Égypte, qui est au contraire une terre très-nouvelle, (Acid. Buff.) semblance , que cette ligne est le vrai miliei de l’ancien continent , en même temps qu’ell en est la plus grande longueur. L’ancien continent a donc en tout enviroi 1 4,940,780 lieues carrées, ce qui ne fait pa j une cinquième partie de la surface totale d globe ; et on peut regarder ce conrinen comme une large bande de terre inclinée | l’équateur d’environ trente degrés *. A l’égard du nouveau continent, on per le regarder aussi comme une bande de terr dont la plus grande longueur doit être pris depuis l’embouchure du fleuve de la Plat jusqu’à cette contrée marécageuse qui s’éten l au-delà du lac des Assiniboïls. Cette routr va de l’embouchure du fleuve de la Plat a a | lac Caracares ; de là elle passe chez les Ma f 1. Voici ce que dit sur la figure des contmen* l’ingénieux auteur de l 'Histoire philosophique et pi litique des deux Indes. « On croit être sur aujourd’hui que le riouvea I continent n’a pas la moitié de la surface du nôtre P leur figure d’ailleurs offre des ressemblances sii gulières.... Ils paroissent former comme deux band- 1 de terre qui partent du pôle arctique, et vont terminer au midi, séparées à l’est et à l’ouest pi- I l’océan qui les environne. Quels que soient et |j structure de ces deux bandes , et le balancement < j la symétrie qui règne dans leur figure , on vc j bien que leur équilibre ne dépend pas de leur pli sition : c’est l’inconstance de la mer qui fait *j solidité de la terre. Pour fixer le globe sur sa bas || il falloit, ce me semble, un élément qui , flotta ij sans cesse autour de notre planète , put contr fl balancer par sa pesanteur toutes les autres suit stances , et par sa fluidité ramener cet équilib H que le combat et le eboe des autres élémens a j roient pu renverser. L’eau , par la mobilité de [ nature et par sa gravité tout ensemble, est infir- ment propre à entretenir cette harmonie et ce b j lancement des parties du globe autour de s I centre.... tf Si les eaux qui baignent encore les entrail | du nouvel hémisphère n’en avoient pas inondé | surface , l’homme y auroit de bonne heure cou j les bois , desséché les marais , consolidé un j pâteux,... ouvert une issue aux vents, et doi i| des digues aux fleuves; le climat y eût déjà chair Mais un hémisphère en friche et dépeuplé ne p- j annoncer qu’un monde récent, lorsque la mer v | sine de ces côtes serpente encore sourdement d; |j ses veines. » Nous observerons , à ce sujet, que quoiqu’il ait plus d’eau sur la surface de l’Amérique que : celle des autres parlies du monde, on ne doit ] 1 en conclure qu’une mer intérieure soit contei flans les entrailles de cette nouvelle terre ; on d jj se borner à inférer de cette grande quantité lacs , de marais, de larges fleuves , que l’ Amérif I n’a été peuplée qu’après l’Asie, l’Afrique et 1 1 rope, où les eaux stagnantes sont en bien moin '| quantité; d’ailleurs il y a mille autres indices j démontrent qu’en général on doit regarder le c j tinent de l’Amérique comme une terre nouvel 1 dans laquelle la nature n’a pas eu le temps d’ quérir toutes ses forces , ni celui de les manife: par une très-nombreuse population. ( Add . Buff. Buffon Classique Tome i"r. Paçe m . c l I B JfOI7VEAlT fOPITI."(f.>T '/ . '// ////A • t/S/S/Z/d’ /fV/ Ruifon Classique Tome i'T Paq-e ru ÀRT. VI. GÉOGRAPHIE» m iguaîs , chez les Chîriguanes , ensuite à Po- ona , à Zongo , de Zongo chez les Zamas , îs Marinas, les Moruas, de là à Santa-Fé t à Carthagène, puis, par le golfe du Mexi- ue , à la Jamaïque , à Cuba , tout le long de i péninsule de la Floride, chez les Apalaches, ;s Chicachas, de là au fort Saint-Louis ou Irève-Cœur , au fort le Sueur , et enfin chez ;s peuples qui habitent au-delà du lac des .ssiniboïls , où l’étendue des terres n’a pas ncore été reconnue I. Cette ligne, qui n’est interrompue que jar le golfe du Mexique, qu’on doit regarder omme une mer Méditerranée, peut avoir nviron 2 5oo lieues de longueur, et elle Sftage le nouveau continent en deux par- ies égales, dont celle qui est à gauche a ,069,286 5/6 lieues carrées de surface, et elle qui est à droite en a 1,070,926 1/12. lette ligne , qui fait le milieu de la bande u nouveau continent, est aussi inclinée à équateur d’environ 3o degrés, mais en sens pposé ; en sorte que celle de l’ancien con- fient s’étendant du nord-est au sud-ouest , eile du nouveau s’étend du nord-ouest au ud-est; et toutes ces terres ensemble, tant e l’ancien que du nouveau continent, font nviron 7,080,993 lièues carrées, ce qui ’est pas , à beaucoup près , le tiers de la urface totale du globe, qui en contient ingt-cinq millions. On doit remarquer que ces deux lignes , ui traversent" les continens dans leurs plus randes longueurs, et qui les partagent cha- un en deux parties égales , aboutissent ouïes les deux au même degré de latitude eptentrionale et australe. On peut aussi ch- er ver que les deux continens font des vances opposées et qui se regardent , savoir, es côtes de l’Afrique, depuis les îles Cana- ries jusqu’aux côtes de la Guinée, et celles le l’Amérique, depuis la Guiane jusqu’à embouchure de Rio-Janéiro. Il paroît donc que les terres les plus an- tennes du globe sont les pays qui sont aux eux côtés de ces lignes à une distance mé- liocre, par exemple , à 200 ou 25o lieues e chaque côté ; et en suivant cette idée, jui est fondée sur les observations que nous ’enons de rapporter, nous trouverons dans /ancien continent, que les terres les plus incienïies de l’Afrique sont celles qui s’éten- lent depuis le cap de Bonne-Espérance jus- ju’à la mer Rouge et l’Égypte, sur une argeur d’environ 5oo lieues, et que par conséquent toutes les côtes occidentales de 1. Vo^ez la carte de géographie. l’Afrique, depuis la Guinée jusqu’au détroit de Gibraltar, sont des terres plus nouvelles. De même nous reconnoîtrons qu’en Asie t si on suit la ligne sur la même largeur, les terres plus anciennes sont l’Arabie heureuse et déserte, la Perse et la Géorgie, la Tur- comanie et une partie de la Tartarie indé- pendante, la Circassie, et une partie de la Moscovie, etc.; que par conséquent l’Eu- rope est plus nouvelle, et peut-être aussi la Chine et la partie orientale de la Tartarie. Dans le nouveau continent , nous trouverons que la terre Magellanique , la partie orien- tale du Brésil, du pays des Amazones, delà Guiane et du Canada, sont des pays nou- veaux en comparaison du Tucuman , du Pérou , de la terre-ferme et des îles du golfe du Mexique, de la Floride, du Mississipi et du Mexique. On peut encore ajouter à ces observations deux faits qui sont assez remarquables : le vieux et le nouveau con- tinent sont presque opposés l’un à l’autre; l’ancien est plus étendu au nord de l’équa- teur qu’au sud ; au contraire , le nouveau l’est plus au sud qu’au nord de l’équateur; le centre de l’ancien continent est à 16 ou 18 degrés de latitude nord, et le centre du nou- veau est à 16 ou 18 degrés de latitude sud; en sorte qu’ils semblent faits pour se contre- balancer. Il y a encore un rapport singulier entre les deux continens, quoiqu’il me pa- roisse plus essentiel que ceux dont je vien3 de parler : c’est que les deux continens se- roient chacun partagés en deux parties, qui seroient toutes quatre environnées de la mer de tous côtés , sans deux petits isthmes, cela de Suez et celui de Panama, Voilà ce que l’inspeotion attentive du globe peut nous fournir de plus général sur la division de la terre. Nous nous abstien- drons de faire sur cela des hypothèses et de hasarder des raisonnemens qui pourroien nous conduire à de fausses conséquences : mais comme personne n’avoit considéré sous ce point de vue la division du globe , j’ai cru devoir communiquer ces remarques. 11 est assez singulier que la ligne qui fait la plus grande longueur des continens terres- tres, les partage en deux parties égales; il ne l’est pas moins que ces deux lignes com- mencent et finissent aux mêmes degrés de latitude, et qu’elles soient toutes deux in- clinées de même à l’équateur. Ces rapports peuvent tenir à quelque chose de général , que l’on découvrira peut-être et que iiqus ignorons. Nous verrons dans la suite à exa- miner plus en détail les inégalités de la fi- gure des continens ; il nous suffit d’observer ii 2 Théorie de la terre. ici que les pays les plus anciens doivent être les plus voisins de ces lignes , et en même temps les plus élevés, et que les terres plus nouvelles en doivent être les plus éloignées et en même temps les plus basses. Ainsi en Amérique la terre des Amazones , la Guiane et le Canada, seront les parties les plus nouvelles : en jetant les yeux sur la carte de ces pays, on voit que les eaux y sont répandues de tous côtés , qu’il y a un grand nombre de lacs et de très-grands fleuves ; ce qui indique encore que ces terres sont nou- velles : au contraire , le Tucuman , le Pérou et le Mexique, sont des pays très-élevés, fort montueux et voisins de la ligne qui par- tage le continent; ce qui semble prouver qu’ils sont plus anciens que ceux dont nous venons de parler. De même toute l’Afrique est très-montueuse , et cette partie du monde est fort ancienne ; il n’y a guère que l’É- gypte , la Barbarie et les côtes occidentales de l’Afrique jusqu’au Sénégal, qu’on puisse regarder comme de nouvelles terres. L’Asie est aussi une terre ancienne et peut-être la plus ancienne de toutes, surtout l’Arabie, la Perse et la Tartarie ; mais les inégalités de celte vaste partie du monde demandent, aussi bien que celles de l’Europe, un détail que nous renvoyons à un autre article. On pourroit dire en général que l’Europe est un pays nouveau ; la tradition sur la migra- tion des peuples et sur l’origine des arts et des sciences paroît l’indiquer : il n’y a pas long- temps qu’elle éloit encore remplie de marais et couverte de forêts, au lieu que dans les pays très-anciennement habités il y a peu de bois, peu d’eau, point de marais, beaucoup de landes et de bruyères, une grande quantité de montagnes dont les som- mets sont secs et stériles; car les hommes détruisent les bois, contraignent les eaux, resserrent les fleuves , dessèchent les marais, et avec le temps ils donnent à la terre une face toute différente de celle des pays inha- bités ou nouvellement peuplés. Les anciens ne connoissoient qu’une très- petite partie du globe; l’Amérique entière, les terres arctiques , la terre australe et Ma- gel lanique , une grande partie de l’intérieur de l’Afrique, leur étoient entièrement in- connues; ils ne savoient pas que la zone tor- ride étoit habitée , quoiqu’ils eussent navigué autour de l’Afrique; car il y a 2200 ans que Néco, roi d’Égypte, donna des vaisseaux à des Phéniciens qui partirent de la mer Rouge, côtoyèrent l’Afrique, doublèrent le cap de Bonne-Espérance, et ayant employé deux ans à faire ce voyage , ils entrèrent la troisième année dans le détroit de Gib tar *. Cependant les anciens ne connoissoi pas la propriété qu’a l’aimant de se diri vers les pôles du monde , quoiqu’ils conr sent celle qu’il a d’attirer le fer; ils ig roient la cause générale du flux et du ref de la mer ; ils n’étoient pas sûrs que l’Oci environnât le globe sans interruption ; qi ques-uns, à la vérité, l’ont soupçonné, ir avec si peu de fondement, qu’aucun n’a dire , ni même conjecturer, qu’il étoit p sible de faire le tour du monde. Magella été le premier qui l’ait fait en l’année i5 dans l’espace de 1124 jours. François Dn a été le second en 1577, et il l’a fait io56 jours. Ensuite Thomas Cavendischi fait ce grand voyage en 777 jours, d; l’année i586. Ces fameux voyageurs ont 1 les premiers qui aient démontré physiqi ment la sphéricité et l’étendue de la circc férence de la terre ; car les anciens étoit aussi fort éloignés d’avoir une juste mesi de celte circonférence dn globe, quoiqu’ y eussent beaucoup travaillé. Les vents g néraux et réglés, et l’usage qu’on en pt faire pour les voyages de long cours, le étoient absolument inconnus : ainsi on doit pas être surpris du peu de prog1 qu’ils ont fait dans la géographie , puisq ] :!a aujourd’hui , malgré toutes les connoissanei que l’on a acquises par le secours des scie ! ces mathématiques et par les découvert des navigateurs, il reste encore bien d| choses à trouver et de vastes contrées à d couvrir. Presque toutes les terres qui soi du côté du pôle antarctique nous sont itij connues ; on sait seulement qu’il y en a qu’elles sont séparées de tous les autres co tinens par l’Océan. Il reste aussi beaucou de pays à découvrir du côté du pôle arct que , et l’on est obligé d’avouer, avec quei que espèce de regret, que depuis plus d’i i siècle l’ardeur pour découvrir de nouvel! terres s’est extrêmement ralentie ; on a pr- ière , et peut - être avec raison , l’utili qu’on a trouvée à faire valoir celles qu’c connoissoit, à la gloire d’en conquérir c nouvelles. Cependant la découverte de ces tem australes seroit un grand objet de curiosit et pourroit être utile ; on n’a reconnu de < côté-là que quelques côtes, et il est fâcheu que les navigateurs qui ont voulu tente cette découverte en différens temps aier presque toujours été arrêtés par des glace qui les ont empêchés de prendre terre. L|it Voyez Hérodote, liv. tv. : ART. VI. GÉOGRAPHIE. ii3 brume, qui est fort considérable dans ces parages, est encore un obstacle. Cependant, malgré ces inconvéniens , il est à croire qu’en parlant du cap de Bonne-Espérance en dif- férentes saisons, on pourroit enfin recon- noître une partie de ces terres, lesquelles jusqu’ici font un monde à part. Il y auroit encore un autre moyen, qui peut-être réussiroil mieux : comme les glaces et les brumes paroissent avoir arrêté lous les navigateurs qui ont entrepris la décou- verte des terres australes par l’océan Atlan- tique, et que les glaces se sont présentées dans l’été de ces climats aussi bien que dans les autres saisons , ne pourroil-on pas se promettre un meilleur succès en changeant de route ? Il me semble qu’on pourroit ten- ter d’arriver à ces terres par la mer Pacifi- que , en partant de Baldivia ou d’un autre port de la côte du Chili et traversant cette mer sous le 5 oe degré de latitude sud *. Il , .. J’ajouterai à ce que j’ai dit des terres au- strales , que depuis quelques années on a fait de nouvelles tentatives pour y aborder, qu’on eft a même découvert quelques points après être parti , jsoit du cap de Bonne-Espérance, soit de l’Ile-de- France , mais que ces nouveaux voyageurs ont également trouvé des brumes , de la neige et des ' laces dès le 46 ou le 47e degré. Après avoir con- féré avec quelques-uns d’entre eux , et ayant pris d’ailleurs toutes les observations que j’ai pu re- cueillir, j’ai vu qu’ils s’accordent sur ce fait, et que ous ont également trouvé des glaces à des latitudes beaucoup moins élevé- ' qu’on n’en trouve dans 'hémisphère boréal; ils ont aussi tous également trouvé des brumes à ces mêmes latitudes où ils ont encontré des glaces, et cela dans la saison même Jtle l’été de ees climats : il est donc très- probable (Ju’au delà du 5oe degré on chercheroit en vain les terres tempérées dans cet hémisphère austral , »ù le refroidissement glacial s’est étendu beaucoup idus loin que dans l’hémisphère boréal. La brume tfst un effet produit par la présence ou par le voisi- nage des glaces; c’est un brouillard épais, une ispèce de neige très-fine , suspendue dans l’air et “ jui le rend obscur : elle accompagne souvent les Vendes glaces flottantes , et elle est perpétuelle sur es plages glacées. Au reste , les Anglois ont fait tout nouvellement tour de la Nouvelle-Hollande et de la Nouvelie- élande. Ces terres australes sont d’une étendue jlus grande que l’ Europe entière. Celles de la Zé- ^inde sont divisées e plusieurs îles : mais celles [fjje la Nouvelle-Hollanci ■ doivent plutôt être regar- dées comme une partie du continent de l’Asie que omme une île du continent austral ; car la Nou- elle-Hollande n’est séparée que par un petit dé- lûîtoit de la terre des Papous ou Nouvelle-Guinée, et tj put l’archipel qui s’étend depuis les Philippines ers le sud , jusqu’à la terre d’Arnheim dans la Nouvelle-Hollande, et jusqu’à Sumatra et Java, [ers l’occident et le midi , paroît autant appartenir Lil ce continent de la Nouvelle-Hollande qu’au conti- ent de l’Asie méridionale. M. le capitaine Cook , qu’on doit regarder comme e plus grand navigateur de ce siècle, et auquel or. Buffon. I. n’y a aucune apparence que cette navigation, qui n’a jamais été faite , fût périlleuse : et il est probable qu’on trouveroit dans cette tra- versée de nouvelles terres ; car ce qui nous reste à connoître du côté du pôle austral est si considérable, qu’on peut sans se tromper l’évaluer à plus d’un quart de la superficie du globe; en sorte qu’il peut y avoir dans ces climats un continent terrestre aussi grand que l’Europe, T Asie et l’Afrique, prises tou- tes trois ensemble. Comme nous ne connoissons point du tout cette partie du globe, nous ne pouvons pas savoir au juste la proportion qui est en- tre la surface de la terre et celle de la mer; seulement, autant qu’on en peut juger par l’inspection de ce qui est connu, il paroît qu’il y a plus de mer que de terre. Si l’on veut avoir une idée de la quantité énorme d’eau que contiennent les mers, on peut supposer une profondeur commune et générale à l’Océan ; et en ne la faisant que de deux cents toises ou de la dixième partie d’une lieue, on verra qu’il y a assez d’eau pour couvrir le globe entier d’une hauteur de six cents pieds d’eau; et si on veut ré- duire cette eau dans une seule masse , on trouvera qu’elle fait un globe de plus de soixante lieues de diamètre. Les navigateurs prétendent que le conti- nent des terres australes est beaucoup plus froid que celui du pôle arctique : mais il n’y a aucune apparence que cette opinion soit fondée , et probablement elle n’a été adoptée des voyageurs que parce qu’ils ont trouvé -des glaces à une latitude où l’on n’en trouve presque jamais dans nos mers septentrio- nales ; mais cela peut venir de quelques l’on est redevable d’un nombre infini de nouvelles découvertes, a non seulement donné la carte des côtes de la Zélande et de la Nouvelle-Hollande, mais il a encore reconnu une très-grande étendue de mer dans la partie australe voisine de l’Amé- rique ; il est parti de la pointe même de l’Amérique, le 3o janvier 1769, et il a parcouru un grand es- pace sous le 60e degré, sans avoir trouvé des terres. On peut voir, dans la carte qu’il en a donnée, l’étendue de mer qu’il a reconnue , et sa route dé- montre que s’il existe des terres dans cette partie du globe, elles sont fort éloignées du continent de l’Amérique, puisque la Nouvelle-Zélande, située entre le 35e et le 45e degré de latitude, en est elle- même très-éloignée : mais il faut espérer que quel- ques autres navigateurs, marchant sur les traces du capitaine Cook , chercheront à parcourir ces mers australes sous le 5oe degré, et qu’on ne tar- dera pas à savoir si ces parages immenses, qui ont plus de deux mille lieues d’étendue , sont des terres ou des mers; néanmoins je ne présume pas qu’au delà du 5oe degré dans les régions australes ces terres soient assez tempérées pour que leur décou- verte pût nous être utile. (Add. Buff.) 8 THÉORIE DE LA TERRE. causes particulières. On ne trouve plus de glaces dès le mois d’avril en deçà des 67 et 68e degrés de latitude septentrionale , et les sauvages de l’Acadie et du Canada disent que quand elles ne sont pas toutes fondues dans ce mois-là, c’est une marque que le reste de l’année sera froid et pluvieux. En 1725 il n’y eut, pour ainsi dire , point d’été, et il plut presque continuellement ; aussi non seulement les glaces des mers septen- trionales n’étoient pas fondues au mois d’a- vril au 67e degré, mais même on en trouva au i5 juin vers le 41 ou. 42e degré I. On trouve une grande quantité de ces glaces flottantes dans la mer du Nord , sur- tout à quelque distance des terres; elles vien- nent de la mer de Tartarie dans celle de la Nouvelle-Zemble et dans les autres endroits de la mer Glaciale. J’ai été assuré par des gens dignes de foi qu’un capitaine anglois , nommé Monson, au lieu de chercher un passage entre les terres du Nord pour aller à la Chine, avoit dirigé sa route droit au pôle et en avoit approché jusqu’à deux de- grés ; que dans cette route il avoit trouvé une haute mer sans aucune glace : ce qui prouve que les glaces se forment auprès des terres et jamais en pleine mer; car quand même on voudroil supposer, contre toute appa- rence, qu’il pourroit faire assez froid au pôle pour que la superficie de la mer fût gelée, on ne concevroit pas comment ces énormes glaces qui flottent pourroient se former, si elles ne trouvoient pas un point d’appui contre les terres, d’où ensuite elles se détachent par la chaleur du soleil. Les deux vaisseaux que la compagnie des ludes envoya en 1739 à la découverte des terres australes, trouvèrent des glaces à une lati- tude de 47 ou 48 degrés; mais ces glaces n’éloient pas fc éloignées des terres , puis- qu’ils les reconnurent sans cependant pou- voir y aborder 2. Ces glaces doivent venir des terres intérieures et voisines du pôle austral, et on peut conjecturer qu’elles sui- vent le cours de plusieurs grands fleuves dont ces terres inconnues sont arrosées, de même que le fleuve Oby, le Jénisca, et les autres grandes rivières qui tombent dans les mers du Nord, entraînent les glaces qui bouchent , pendant la plus grande partie de l’année, le détroit de Waigats et rendent inabordable la mer de Tartarie par cette route, tandis qu’au delà de la Nouvelle- Zemble et plus près des pôles , où il y a peu de fleuves et de terres, les glaces sont moins a. Voyez l’ Histoire de U Académie, annéa 1725. 3, Voyez sur cela la carte de M. Euache, 173g. communes et la mer est plus navigable ; en sorte que si 011 vouloil encore tenter le voyage de la Chine et du Japon par les mers du Nord, il faudroit peut-être, pour s’éloi- gner le plus des terres et des glaces , diriger sa roule droit au pôle et chercher les plus hautes mers , où certainement il n’y a que peu ou point de glaces; car on sait que l’eau salée peut , sans se geler, devenir beaucoup plus froide que l’eau douce glacée, et par conséquent le froid excessif du pôle peut bien rendre l’eau de la mer plus froide que la glace, sans que pour cela la surface de la mer se gèle, d’autant plus qu’à 80 ou 82 degrés la surface de la mer, quoique mê- | îée de beaucoup de neige et d’eau douce, i n’est glacée qu’auprès des côtes. En recueil- lant les témoignages des voyageurs sur le passage de l’Europe à la Chine par la mer j du Nord, il paroit qu’il existe, et que s’il a été si souvent tenté inutilement , c’est parce qu’on a toujours craint de s’éloigner des terres et de s’approcher du pôle : les voya- geurs l’ont peut-être regardé comme un écueil. Cependant Guillaume Barents , qui avoit échoué, comme bien d’autres, dans son:) voyage du Nord, ne doutoit pas qu’il n’yj eût un passage, et que s’il se fût plus éloi- gné des terres, il n’eût trouvé une mer libre et sans glaces. Des voyageurs mosco- vites , envoyés par le czar pour reconnoître les mers du Nord , rapportèrent que la Nou- velle-Zemble n'est point une île , mais une terre ferme du continent de la Tartarie, et qu’au nord de la Nouvelle-Zemble c’est une mer libre et ouverte. Un voyageur hollan- dois nous assure que la mer jette de temps en temps , sur la côte de Corée et du Japon, des baleines qui ont sur le dos des harpons anglois et hollandois. Un autre Ilollandoisi a prétendu avoir été jusque sous le pôle, et assuroit qu’il y faisoit aussi chaud qu’il fait à Amsterdam en été. Un Anglois nom- mé Goulden , qui avoit fait plus de trente voyages en Groenland , rapporta au roj Charles II que deux vaisseaux hollandois avec lesquels il faisoit voile, n’ayant poinl trouvé de baleines à la côte de l’île d’Edges, résolurent d’aller plus au nord, et qu’étant de retour au bout de quinze jours, ces Hol landois lui dirent qu’ils avoient été jusqu’au 89e degré de latitude, c’est-à-dire à un de gré du pôle, et que là ils n’avoient poinl trouvé de glaces , mais une mer libre e ouverte , fort profonde , et semblable à cellt de la baie de Biscaye , et qu’ils lui montré rent quatre journaux de deux vaisseaux qu ART. VI. GÉOGRAPHIE. n3 Restaient la même chose , et s’accordoient fort peu de chose près. Enfin il est rap- >orté dans les Transactions philosophiques , [ue deux, navigateurs qui avoienl entrepris le découvrir ce passage firent une route de rois cents lieues à l’orient de la Nouvelle- Zemble; mais qu’étant de retour, la com- >agnie des Indes, qui avoit intérêt que ce jassage ne fût pas découvert , empêcha ces Navigateurs de retourner *. Mais la com- jagnie des Indes de Hollande crut au con- raire qu’il étoit de son intérêt de trouver :e passage : l’ayant tenté inutilement du :ôlé de l’Europe, elle le fit chercher du îôté du Japon; et elle auroit apparemment ’éussi , si l’empereur du Japon n’eut pas nterdit aux étrangers toute navigation du :ôté des terres de Jesso. Ce passage ne peut lonc se trouver qu’en allant droit au pôle au delà de Spitzberg , ou bien en suivant e milieu de la haute mer, entre la Nou- velle-Zemble et Spitzberg, sous le 79e de- jré de latitude. Si cette mer a une largeur considérable, on ne doit pas craindre de la prouver glacée à cette latitude, et pas même îfeous le pôle, par les raisons que nous avons (alléguées. E11 effet, il n’y a pas d’exemple jqu’on ait trouvé la surface de la mer glacée jàu large et à une distance considérable des côtes : le seul exemple d’une mer totale- ment glacée est celui de la mer Noire ; elle est étroite et peu salée, et elle reçoit une très-grande quantité de fleuves qui vien- nent des terres septentrionales, et qui y apportent des glaces : aussi elle gèle quel- quefois au point que sa surface est entière- ment glacée , même à une profondeur con- sidérable ; et , si l’on en croit les historiens, elle gela, du temps de l’empereur Copro- nyme , de trente coudées d’épaisseur , sans compter vingt coudées de neige qu’il y avoit par dessus la glace. Ce fait me paroît exa- géré ; mais il est sûr qu’elle gèle presque tous les hivers , tandis que les hautes mers, qui sont de mille lieues plus près du pôle, ne gèlent pas ; ce qui ne peut venir que de la différence de la salure et du peu de gla- ces qu elles reçoivent par les fleuves en com- paraison de la quantité énorme de glaçons jqu’ils transportent dans la mer Nome, j Ces glaces , que l’on regarde comme des barrières qui s’opposent à la navigation vers les pôles et à la découverte des terres au- strales , prouvent seulement qu’il y a de très-grands fleuves dans le voisinage des ] climats où on les a rencontrées : par consé- j- S, Voyez le Recueil des Topazes du, Nord, p. 200. quent elles nous indiquent aussi qu’il y a de vastes continents d’où ces fleuves tirent leur origine, et on ne doit pas se découra- ger à la vue de ces obstacles ; car , si l’on y fait attention , l’on reconnoîtra aisément que ces glaces ne doivent être que dans cer- tains endroits particuliers; qu’il est presque impossible que dans le cercle entier que nous pouvons imaginer terminer les terres australes du côté de l’équateur, il y ait partout de grands fleuves qui charrient des glaces, et que par conséquent il y a grande apparence qu’on réussiroit en dirigeant sa route vers quelque autre point de ce cercle. D’ailleurs la description que nous ont don- née Dampier et quelques autres voyageurs du terrain de la Nouvelle-Hollande, nous peut faire soupçonner que cette partie du globe qui avoisine les terres australes , et qui peut-être en fait partie, est un pays moins ancien que le reste de ce continent inconnu. La Nouvelle-Hollande est une terre basse , sans eaux , sans montagnes, peu habitée, dont les naturels sont sauvages et sans industrie ; tout cela concourt à nous faire penser qu’ils pourraient être dans ce continent à peu près ce que les sauvages des Amazones ou du Paraguay sont en Amé- rique. On a trouvé des hommes policés, des empires et des rois, au Pérou, au Mexique, c’est-à-dire dans les contrées de l’Amérique les plus élevées, et par consé- quent les plus anciennes ; les sauvages , au contraire, se sont trouvés dans les contrées les plus basses et les plus nouvelles. Ainsi on peut présumer que dans l’intérieur des terres australes on trouverait aussi des hom- mes réunis en société dans les contrées éle- vées d’où ces grands fleuves qui amènent à la mer ces glaces prodigieuses tirent leur source. L’intérieur de l’Afrique nous est inconnu presque autant qu’il l’étoit aux anciens : ils avoienl , comme nous , fait le tour de cette presqu’île par mer ; mais à la vérité ils ne nous avoient laissé ni cartes ni descriptions de ces côtes. Pline nous dit qu’on avoit, dès le temps d’Alexandre , fait le tour de l’Afri- que ; qu’on avoit reconnu dans la mer d’Ara- bie des débris de vaisseaux espagnols , et qu’Harmon, général carthaginois, avoit fait le voyage depuis Gades jusqu’à la mer d’A- rabie ; qu’il avoit même donné par écrit la relation de ce voyage. Outre cela , dit-il, Cornélius Népos nous apprend que de son temps un certain Eudoxe, persécuté par le roi Laîhurus, fut obligé de s’enfuir; qu’é- tant parti du golfe Arabique, il étoit arrivé 8. tI6 THÉORIE DE à Gades , et qu’avant ce temps on commer- çoit d’Espagne en Éthiopie par la mer *. Cependant, malgré ces témoignages des an- ciens , on s’étoit persuadé qu’ils n’avoient jamais doublé le cap de Bonne-Espérance, et l’on a regardé comme une découverte nouvelle cette route que les Portugais ont prise les premiers pour aller aux grandes Indes. On ne sera peut-être pas fâché de voir ce qu’on en croyoit dans le neuvième siècle. « On a découvert de notre temps une chose toute nouvelle , et qui étoit incon- nue autrefois à ceux qui ont vécu avant nous. Personne ne croyoit que la mer qui s’étend depuis les Indes jusqu’à la Chine, eût communication avec la mer de Syrie, et on ne pouvoit se mettre cela dans l’esprit. Yoici ce qui est arrivé de notre temps, selon ce que nous en avons appris. On a trouvé dans la mer de Roum ou Médi- terranée les débris d’un vaisseau arabe que la tempête avoit brisé, et tous ceux qui le montoient étant péris, les flots l’ayant mis en pièces , elles furent portées par le vent et par la vague jusque dans la mer des Cozars, et de là au canal de la mer Méditerranée, d’où elles furent enfin jetées sur la côte de Syrie. Cela fait voir que la mer environne tout le pays de la Chine et de Cila , l’extrémité du Turquestan et le pays des Cozars; qu’ensuite elle coule par le détroit jusqu’à ce quelle baigne la côte de Syrie. La preuve est tirée de la construction du vaisseau dont nous venons de parler ; car il n’y a que les vaisseaux de Siraf dont la fabrique est telle , que les bordages ne sont point cloués , mais joints ensemble d’une matière particulière, de même que s’ils étoient cousus; au lieu que ceux de t s les vaisseaux de la mer Méditerranée et de la côte de Syrie sont cloués , et ne sont pas joints de cette ma- nière a. » Yoici ce qu’ajoute le traducteur de celle ancienne relation : « Abuziel remarque comme une chose nouvelle et fort extraordinaire , qu’un vaisseau fût porté de la mer des Indes sur les côtes de Syrie. Pour trouver le pas- sage dans la mer Méditerranée , il suppose qu’il y a une grande étendue de mer au dessus de la Chine , qui a communication avec la mer des Cozars, c’est-à-dire de Moscovie. La mer qui est au delà du cap 1. Voyez Plin. , Hist. nal., tom. I, lib. n. 2. Voyez les anciennes relations des Vo/ages faits par terre « la Chine, pages 53 et 54. LA TERRE. J!( des Courants étoit entièrement inconnu ® aux Arabes , à cause du péril extrême d esi la navigation ; et le continent étoit habit te par des peuples si barbares , qu’il n’étoi | j pas facile de les soumettre , ni même d les civiliser par le commerce. Les Portu p I, gais ne trouvèrent depuis le cap de Bonne : Espérance jusqu’à Soffala aucuns Maure trii établis , comme ils en trouvèrent depui ta dans toutes les villes maritimes jusqu’à 11! Mo Chine. Cette ville étoit la dernière qu les connoissoient les géographes; mais ils no 3p pouvoient dire si la mer avoit communii ri cation par l’extrémité de l’Afrique avec là ils mer de Barbarie, et ils se contentaient di cii la décrire jusqu’à la côte de Zinge, qu: so est celle de la Cafrerié : c’est pourquoi nou coi ne pouvons douter que la première dé 4 couverte du passage de cette mer par 1< tei cap de Bonne-Espérance n’ait été faite par j au les Européens , sous la conduite de Yasct U de Gama, ou au moins quelques année:, m avant qu’il doublât le cap , s’il est vra; k qu’il se soit trouvé des cartes marines plun jtm anciennes que cette navigation, où le caji; pré étoit marqué sous le nom de Fronteirc da Afriqua. Antoine Galvan témoigne, sun tt( le rapport de Francisco de Sousa Tavaresi mit qu’en ï5t.8 l’infant don Fernand lui fiti ta voir une semblable carte qui se trouvoiii tiei dans le monastère d’Acoboca, et qui étoili le: faite il y avoit cent vingt ans, peut-être | tio sur celle qu’on dit être à Yenise dans] le les trésors de Saint-Marc , et qu’on croitif ri avoir été copiée sur celle de Marc Paolojj par qui marque aussi la pointe de l’Afrique^ ri selon le témoignage de Ramusio, etc. » 1 ou L’ignorance de ces siècles au sujet de lai; ri navigation autour de l’Afrique paraîtrai »pa peut-être moins singulière que le silence j ri de l’éditeur de cette ancienne relation au l sujet des passages d’Hérodote, de Pline, etc.,, port que nous avons cités, et qui prouvent: ipi'o que les anciens avoient fait le tour de!' ri l’Afrique. fao Quoi qu’il en soit, les côtes de l’Afrique' Soi nous sont actuellement bien connues; maiSl fie quelques tentatives qu’on ait faites pour pé- sel nétrer dans l’intérieur du pays, on n’a pu biei parvenir à le connoître assez pour en donner j Ara des relations exactes. Il seroit cependant { «toi fort à souhaiter que , par le Sénégal ou par ri quelque autre fleuve, on pût remonter bien!j«j avant dans les terres et s’y établir : on y trouverait -, selon toutes les apparences, un J', pays aussi riche eu mines précieuses que , l’est le Pérou ou le Brésil; car on sait que \ les fleuves de l’Afrique charrient beaucoup ART. VI. GÉOGRAPHIE. l’or; et comme ce continent est un pays de 1 hontagnes très-élevées , et que d’ailleurs il (Hst situé sous l’équateur, il n’est pas dou- teux qu’il ne contienne, aussi bien que l’A- : jnêrique , les mines des métaux les plus pe- ^ Sans, et les pierres les plus compactes et les ^ ilus dures. oti La vaste étendue de la Tartarie septen- rionale et orientale n’a été reconnue que Pui lans ces derniers temps. Si les cartes des I iloscovites sont justes, on connoît à présent ;s côtes de toute cette partie de l’Asie, et paroît que depuis la pointe de la Tartarie H rientale jusqu’à l’Amérique septentrionale, C1 . n’y a guère qu’un espace de quatre ou tdi inq cents lieues : on a même prétendu tout <1» ouvellement que ce irajet étoit bien plus ou ourt; car dans la gazette d’Amsterdam, du dé 4 février 1747, il est dit, à l’article de Pé- lf ersbourg, que M. Sloller avoit découvert, pa u delà de Kamtschatka, une des îles de ci Amérique septentrionale, et qu’il avoit dé- ée bontré qu’on pouvoit y aller des terres de ra fempire de Russie par un petit trajet. Des lu jésuites et d’autres missionnaires ont aussi a| prétendu avoir reconnu en Tartarie des sau- iri fages qu’ils avoient catéchisés en Amérique; ut je qui supposeroit en effet que le trajet se- es oit encore bien plus court *. Cet auteur pré- fi end même cpie les deux continens de l’An- |ien et du Nouveau-Monde se joignent par b nord, et il dit que les dernières naviga- ions des Japonnois donnent lieu de juger que p trajet dont nous avons parlé n’est qu’une |aie, au dessus de laquelle on peut passer zontale). Si , dans la maçonnerie , les pier- 11 res étoient posées sur un autre sens , elles * se fendroient et ne résisteroient pas aussi 3'j long-temps au poids dont elles sont char- '» gées. On voit bien que ceci confirme que 0 les pierres se sont formées par couches pa- rallèles et horizontales , qui se sont succes- sivement accumulées les unes sur les autres, 0I! et que ces couches ont composé des masses 01 1 dont la résistance est plus grande dans ce * sens que dans tout autre. ie Au reste , chaque couche , soit qu’elle d ! soit horizontale ou inclinée , a , dans toute le ! son étendue , une épaisseur égale ; c’est-à- j dire , chaque lit d’une matière quelconque, * pris à part, a une épaisseur égale dans ’f toute son étendue : par exemple , lorsque, le dans une carrière , le lit de pierre dure a ail trois pieds d’épaisseur en un endroit, il a »ejces 3 pieds d'épaisseur partout; s’il a 6 le ! pieds d’épaisseur en un endroit, il en a 6 >"| partout. Dans les carrières autour de Paris, à le lit de bonne pierre n’est pas épais, et il mi n’a guère que 18 à 20 pouces d’épaisseur jpartout; dans d’autres carrières, comme fflien Bourgogne , la pierre a beaucoup plus d d’épaisseur. Il en est de même des mar- jiilbres : ceux dont le lit est le plus épais sont isiles marbres blancs et noirs ; ceux de cou- pleur sont ordinairement plus minces; et je îiijconnois des lits d’une pierre fort dure , et d;dont les paysans se servent en Bourgogne 01 pour couvrir leurs maisons , qui n’ont qu’un )u pouce d’épaisseur. Les épaisseurs des diffè- re ! rens lits sont donc différentes ; mais chaque laijlit conserve la même épaisseur dans toute ièlson étendue. En général , on peut dire que s il’épaisseur des couches horizontales est telle- iniiment variée , qu’elle va depuis une ligne le jet moins encore , jusqu’à 1, 10, 20, 3o J jet 100 pieds d’épaisseur. Les carrières an- d ciennes et nouvelles qui sont creusées ho- i’a rizontalement , les boyaux des mines , et ot les coupes à-plomb , en long et en travers, d de plusieurs montagnes, prouvent qu’il y a «ides couches qui ont beaucoup d’étendue en :oujtous sens. « U est bien prouvé , dit l’histo- le rien de l’Académie, que toutes les pierres d ont été une pâte molle ; et comme il y a des carrières presque partout , la surface de la terre a donc été dans tous ces lieux, du moins jusqu’à une certaine profondeur, une vase et une bourbe. Les coquillages qui se trouvent dans presque toutes les carrières , prouvent que cette vase étoit une terre détrempée par de l’eau de la mer ; et par conséquent la mer a couvert tous ces lieux-là, et elle 11’a pu les couvrir sans couvrir aussi tout ce qui étoit de niveau ou plus bas , et elle n’a pu couvrir tous les lieux où il y a des carrières , et tous ceux qui sont de niveau ou plus bas , sans couvrir toute la surface du globe terrestre. Ici l’on ne considère point encore les montagnes, que la mer auroit dû couvrir aussi , puis- qu’il s’y trouve toujours des carrières, et souvent des coquillages. Si on les supposoit formées , le raisonnement que nous fai- sons en deviendroit beaucoup plus fort. « La mer, continue-t-il, couvroit donc toute la terre; et de là vient que tous les bancs ou lits de pierre qui sont dans les plaines sont horizontaux et parallèles entre eux : les poissons auront été les plus anciens habitans du globe, qui ne pouvoit encore avoir ni animaux terrestres, ni oiseaux. Mais comment la mer s’est-elle retirée dans les creux , dans les vastes bassins qu’elle occupe présentement ? Ce qui se présente le plus na- turellement à l’esprit, c’est que le globe de la terre, du moins jusqu’à une certaine profondeur, n’étoit pas solide partout, mais entremêlé de quelques grands creux dont les voûtes se sont soutenues pendant un temps, mais enfin sont venues à fondre subitement ; alors les eaux seront tombées dans ces creux , les auront remplis et auront laissé à découvert une partie de la surface de la terre, qui sera devenue une habita- tion convenable aux animaux terrestres et aux oiseaux. Les coquillages des carrières s’accordent fort avec celte idée ; car outre qu’il n’a pu se conserver jusqu’à présent dans les terres que des parties pierreuses des poissons, on sait qu’ordinairement les coquillages s’amassent en grand nombre dans certains endroits de la mer, où ils sont comme immobiles et forment des espèces de rochers, et ils n’auront pu suivre les eaux qui les auront subitement abandon- nés : c’est par cette dernière raison que l’on trouve infiniment plus de coquillages que d’arêtes ou d’empreintes d’autres poissons ; et cela même prouve une chute soudaine de la mer dans ses bassins. Dans le même temps que les voûtes que nous supposons ont fondu , il est fort possible que d’autres parties de la surface du globe se soient éle- THÉORIE DE LA TERRE. îa6 vées ; et , par la même cause , ce seront là les montagnes qui se seront placées sur cette surface avec des carrières déjà toutes for- mées. Mais les lits de ces carrières n’ont pas pu conserver la direction horizontale qu’ils avoient auparavant, à moins que les masses des montagnes ne se fussent élevées précisément selon un axe perpendiculaire à la surface de la terre ; ce qui n’a pu être que très-rare : aussi , comme nous l’avons déjà observé en 1708, les lits des carrières des montagnes sont toujours inclinés à l'ho- rizon , mais parallèles entre eux ; car ils n’ont pas changé de position les uns à l’é- gard des autres, mais seulement à l'égard de la surface de la terre *. » Ces couches parallèles, ces lits de terre ou de pierre qui ont été formés par les sé- dimens des eaux de la mer, s’étendent sou- vent à des distances très-considérables, et même on trouve dans les collines séparées par un vallon les mêmes lits , les mêmes matières , au même niveau. Cette observa- tion que j’ai faite s’accorde parfaitement avec celle de l’égalité de la hauteur des col- lines opposées, dont je parlerai tout à l’heure. On pourra s’assurer aisément de la vérité de ces faits ; car dans tous les vallons étroits où l’on découvre des rochers, 011 verra que les mêmes lits de pierre ou de marbre se trouvent des deux côtés à la même hauteur. Dans une campagne que j’habite souvent et où j’ai beaucoup exa- miné les rochers et les carrières , j’ai trouvé une carrière de marbre qui s’étend à plus de 12 lieues en longueur, et dont la largeur est fort considérable , quoique je n’aie pas pu m’assurer précisément de cette étendue en largeur. J’ai souvent observé que ce lit de marbre a la même épaisseur partout ; et dans des collines séparées de cette carrière par un vallon de 100 pieds de profondeur et d’un quart de lieue de largeur, j’ai trouvé le même lit de marbre à la même hauteur. Je suis persuadé qu’il en est de même de toutes les carrières de pierre ou de marbre où l’on trouve des coquilles , car cette ob- servation n’a pas lieu dans les carrières de grès. Nous donnerons dans la suite les rai- sons de cette différence, et nous dirons pourquoi le grès a’est pas disposé , comme les autres matières , par lits horizontaux , et qu’il est en blocs irréguliers pour la forme et pour la position. On a de même observé que les lits de terre sont les mêmes des deux côtés des 1. Voyez les Mémoires de l’Académie, année 1716, pages 14 et suiv. de 1 ’ Histoire. détroits de la mer : et cette observatioi ! qui est importante, peut nous conduire! reconnoître les terres et les îles qui ont ( j séparées du continent; elle prouve, j[ exemple , que l’Angleterre a été séparée la France, l’Espagne de l’Afrique, la Sic de l’Italie : et il seroit à souhaiter qu’ { eût fait la même observation dans tous détroits , je suis persuadé qu’on la trom roit vraie presque partout ; et pour co: j mencer par le plus long détroit que ne connoissions , qui est celui de Magelîaj nous ne savons pas si les mêmes lits j: pierre se trouvent à la même hauteur ensemble, ont près de 200 lieues de li - gueur, ne formoient autrefois qu’une me î terre ; elles sont divisées en treize provf 1 ces, que l’on appelle atollons. Chaque ai- lon contient un grand nombre de pet js îles, dont la plupart sont tantôt submerg b et tantôt à découvert ; mais ce qu’il y a i remarquable, c’est que ces treize atoll s ! sont chacun environnés d’une chaîne de j- ; chers de même nature de pierre , et q fl 3 n’y a que trois ou quatre ouvertures d j- jj gereuses par où on peut entrer dans chai b ï atollon : ils sont tous posés de suite et h G à bout : et il paroît évidemment que ÉN îles étoient autrefois une longue monta; S » couronnée de rochers 2. Plusieurs auteurs, comme Yersteg;.|lf Twine , Sommer, et surtout Campbell di fri sa Description de V Angleterre , au chapilüii de la province de Kent, donnent des ilài sons très-fortes pour prouver que l’An^pJ terre étoit autrefois jointe à la France J & qu’elle en a été séparée par un coup de 1 ir i qui , s’étant ouvert cette porte , a laiss I ir 2. Voyez les Voyages de François Pyrard, vo «j Paris, 1719, page X07, etc. I te ion Art. vil production irefecouyert une grande quantité de terres t eusses et marécageuses tout le long des >tes méridionales de l’AngleteiTe. Le doc- ■ei ui' Wallis fait valoir comme une preuve ici b ce fait la conformité de l’ancien langage jn’i îs Gallois et des Bretons ; et il ajoute plu- is 1 eurs observations que nous rapporterons ijunns les articles suiyans. cou Si l’on considère en voyageant la forme jobs terrains, la position des montagnes et lai s sinuosités des rivières , on s’apercevra is du’ ordinairement les collines opposées sont rdlon seulement composées des mêmes ma- ipc eres, au même niveau, mais même qu’elles roi ont à peu près également élevées. J’ai ob- mebrvé cette égalité dé hauteur dans les en- agn jroits où j’ai voyagé , et je l’ai toujours s, pouvée la même, à très-peu près, des deux a ôtés, surtout dans les valions serrés, et ed ui n’ont tout au plus qu’un quart ou un Mers de lieue de largeur ; car dans les gran- e les vallées qui ont beaucoup plus de lar- îèijeur, il est assez difficile de juger exacte- an peut de la hauteur des collines et de leur îtijgalité , parce qu’il y a erreur d’optique et jrréur de jugement. En regardant une plaine s |u tout autre terrain de niveau qui s’étend [s brt au loin , il paroît s’élever ; et , au con- traire, en voyant de loin des collines, elles le tapissent s’abaisser. Ce n’est pas ici le lieu irii (e donner la raison mathématique de cette le lifférence. D’autre côté, il est fort difficile îêi e juger, par le simple coup d’œil , où se prouve le milieu d’une grande vallée, à atpoins qu’il n’y ait une rivière ; au lieu que, >ti lans les vallons serrés , le rapport des yeux fjjist moins équivoque et le jugement plus a jertain. Cette partie de la Bourgogne qui llojst comprise entre Auxerre, Dijon, Autun e : ft Bar-sur-Seine , et dont une étendue con- I Erable s’appelle le bailliage de la Mon- 1; ^figne , est un des endroits les plus élevés aq le la France : d’un côté de la plupart de |ï es montagnes , qui ne sont que du second ! i rdre et qu’on ne doit regarder que comme ades collines élevées , les eaux coulent vers Océan et de l’autre vers la Méditerranée. jj 1 y a des points de partage , comme à Som- d; >ernon, Bouilli en Auxois, etc., où on peut ,i ourner les eaux indifféremment vers l’O- r ‘éan ou vers la Méditerranée. Ce pays élevé ]jdst entrecoupé de plusieurs petits vallons ( issez serrés et presque tous arrosés de gros n ruisseaux ou de petites rivières. J’ai mille W mille fois observé la correspondance des c) tngles de ces collines et leur égalité de hau- teur ; et je puis assurer que j’ai trouvé par- tout les angles saillans opposés aux angles DES LITS DE TERRE. 127 rentrans et les hauteurs à peu près égales des deux côtés. Plus on avance dans le pays élevé où sont les points de partage dont nous venons de parler, plus les montagnes ont de hauteur ; mais cette hauteur est tou- jours la même des deux côtés des vallons , et les collines s’élèvent ou s’abaissent éga- lement. En se plaçant à l’extrémité des val- lons dans le milieu de la largeur, j’ai tou- jours vu que le bassin du vallon étoit en- vironné et surmonté de collines dont la hauteur étoit égale. J’ai fait la même observation dans plusieurs autres provinces de France. C’est cette égalité de hauteur dans les collines qui fait les plaines en montagnes ; ces plaines forment , pour ainsi dire, des pays élevés au dessus d’autres pays : mais les hautes montagnes ne parois- sent pas être si égales en hauteur ; elles se terminent la plupart en pointes et en pics irréguliers ; et j’ai vu en traversant plu- sieurs fois les Alpes et l’Apennin , que les angles sont en effet correspondans , mais qu’il est presque impossible de juger à l’œil de l’égalité ou de l’inégalité de hauteur des montagnes opposées , parce que leur som- met se perd dans les brouillards et dans les nues. Les différentes couches dont la terre est composée ne sont pas disposées suivant l’ordre de leur pesanteur spécifique; sou- vent on trouve des couches de matières pa* santés posées sur des couches de matières plus légères : pour s’en assurer, il ne faut qu’examiner la nature des terres sur les- quelles portent les rochers , et on verra que c’est ordinairement sur des glaises ou sur des sables qui sont spécifiquement moins pesants que la matière du rocher1. Dans 1. J’ai dit que, dans les collines et dans les autres élévations , on reconnaît facilement la base sur laquelle portent les rochers ; mais qu’il n’en est, pas de même des grandes montagnes ; que non seulement leur sommet est de roc vif, de granité, etc. J’avoue que cette conjecture , tire'e de l’analogie, n’étoit pas assez fondée ; depuis trente-quatre ans que cela est écrit, j'ai acquis des connoissances et recueilli des faits qui m’ont démontré que les grandes montagnes, composées de matières vitres- cibles et produites par l’action du feu primitif, tiennent immédiatement à la roclie intérieure du globe , laquelle est elle-même un roc vitreux de la même nature : ces grandes montagnes en font par* tie , et ne sont que les prolongerons ou éminences qui se sont formées à la surface du globe dans le temps de sa consolidation; on doit donc les regar- der comme des parties constitutives de la première masse de la terre , au lieu que les collines et les petites montagnes qui portent sur des argiles, ou sur des sables vitrescibles , ont été formées par un autre élément, c’est-à-dire par le mouvement et le sédiment des eaux dans un temps bien postérieur I5tg ÏHÉORIE DÊ les collines et dans les autres petites élé- vations, on reconnoît facilement la base sur laquelle portent les rochers ; mais il n’en est pas de même des grandes mon- tagnes ; non seulement le sommet est de rocher, mais ces rochers portent sur d’au- tres rochers ; il y a montagnes sur mon- tagnes et rochers sur rochers , à des hau- teurs si considérables, et dans une si grande étendue de terrain , qu’on ne peut guère s’assurer s’il y a de la terre dessous , et de quelle nature est cette terre. On voit des rochers coupés à pic qui ont plusieurs centaines de pieds de hauteur ; ces rochers portent sur d’autres qui peut-ê'tre n’en ont pas moins. Cependant ne peut-on pas con- clure du petit au grand? et puisque les rochers des petites montagnes dont on voit la base portent sur des terres moins pe- santes et moins solides que la pierre , ne peut-on pas croire que la base des hautes montagnes est aussi de terre? Au reste, tout ce que j’ai à prouver ici, c’est qu’il a pu arriver naturellement, par le mouve- ment des eaux, qu’il se soit accumulé des matières plus pesantes au dessus des plus légères, et que si cela se trouve en effet dans la plupart des collines , il est probable que cela est arrivé comme je l’explique dans le texte. Mais quand même on voudroit se refuser à mes raisons , en m’objectant que je ne suis pas bien fondé à supposer qu’avant la formation des montagnes , les matières les plus pesantes étoient au des- sous des moins pesantes , je répondrai que je n’assure rien de général à cet égard, parce qu’il y a plusieurs manières dont cet effet a pu se produire , soit que les matières pesantes fussent au dessous ou au dessus , ou placées i différemment comme nous les voyons aujourd’hui : car pour concevoir comment la mer ayant d’abord formé une montagne de glaise, l’a ensuite couronnée de rochers, il suffit de faire attention que les sédimens peuvent venir successivement de différens endroits , et qu’ils peuvent être de matières différentes ; en sorte que , dans à celui de la formation des grandes montagnes produites par le feu primitif. C’est dans ces pointes ou parties saillantes qui forment le noyau des montagnes , que se trouvent les filons des métaux : et ces montagnes ne sont pas les plus hantes de toutes, quoiqu’il y en ait de fort élevées qui con- tiennent des mines ; mais la plupart de celles où on les trouve sont d’une hauteur moyenne, et toutes sont arrangées uniformément, c’est-à-dire par des élévations insensibles qui tiennent à une chaîne de montagnes considérable, e*t qui sont coupées de temps eu temps par des vallées. (. Add . BuJJ.) LA TERRE* un endroit de la mer où les eaux aur déposé d’abord plusieurs sédimens de glai il peut très-bien arriver que tout d’un coi au lieu de glaise , les eaux apportent sédimens pierreux; et cela, parce qu’e auront enlevé du fond ou détaché des cc< toute la glaise , et qu’ensuite elles aur» attaqué les rochers , ou bien parce que premiers sédimens venoient d’un endro et les seconds d’un autre. Au reste , c s’accorde parfaitement avec les observatic par lesquelles on reconnoît que les lits terre , de pierre , de gravier, de sable , et ne suivent aucune règle dans leur arranj ment, ou du moins se trouvent placés différemment et comme au hasard les i au dessus des autres. Cependant ce hasard même doit av< des règles , qu’on ne peut connoître qu’ estimant la valeur des probabilités et la vr semblance des conjectures. Nous avons qu’en suivant notre hypothèse sur la fora tion du globe, l’intérieur de la terre d être d’une matière vitrifiée, semblable nos sables vitrifiables , qui ne sont que d fragmens de verre , et dont les glaises so peut-être les scories ou les parties décor posées. Dans cette supposition, la terre dé être composée dans le centre, et presq jusqu’à la cmconférence extérieure, de ver ou d’une manière vitrifiée qui en occu presque tout l’intérieur; et au dessus cette matière on doit trouver les sables , 1 glaises, et les autres scories de cette m tière vitrifiée. Ainsi, en considérant la ter dans son premier état, c’étoit d’abord i noyau de verre ou de matière vitrifiée , q est ou massive comme le verre , ou divisa comme le sable , parce que cela dépend < degré de l’activité du feu qu’elle au éprouvé ; au dessus de cette matière étoie les sables , et enfin les glaises : le limon d eaux et de l’air a produit l’enveloppe ext rieure, qui est plus ou moins épaisse su vaut la situation du terrain , plus ou moii colorée suivant les différens mélanges d limon , des sables , et des parties d’animai ou de végétaux détruits , et plus ou mon féconde suivant l’abondance ou la diset de cès mêmes parties. Pour faire voir qi cette supposition , au sujet de la formatio des sables et des glaises, n’est pas aus gratuite qu’on pourrait l’imaginer, noi avons cru devoir ajouter à ce que noi venons de dire, quelques remarques part culières. Je conçois donc que la terre, dans premier état , étoit un globe , ou plutôt u ART. VII. PRODUCTION DES LITS DE TERRE. I29 nhéroïde de matière vitrifiée , de verre , si on veut, très-compacte, couvert d’une rf mute légère et friable, formée par les ; tories de la matière en fusion, d’une véri- ible pierre ponce : le mouvement et l’agi- ! ition des eaux et de l’air brisèrent bientôt , ; réduisirent en poussière cette croûte de 0 ;rre spongieuse , cette pierre ponce qui oit à la surface ; de là les sables qui , en 6 unissant, produisirent ensuite les grès et roc vif, ou, ce qui est la même chose, 6 s cailloux en grande masse , qui doivent , M issi bien que les cailloux en petite masse , ’ ur dureté , leur couleur ou leur transpa- j! :nce , et la variété de leurs accidens , aux !î fférens degrés de pureté et à la finesse : i grain des sables qui sont entrés dans 11 ur composition. Ces mêmes sables dont les parties consti- J antes s’unissent par le moyen du feu, 11 issimilent et deviennent un corps dur très- E mse, et d’autant plus transparent que le j ble est plus homogène, exposés, au con- aire , long-temps à l’air, se décomposent ar la désunion et l’exfoliation des petites : Mmes dont ils sont formés ; ils commencent devenir terre , et c’est ainsi qu’ils ont pu nrmer les glaises et les argiles. Cette pous- j’ère, tantôt d’un jaune brillant, tantôt I mblable à des paillettes d’argent, dont on II f sert pour sécher l’écriture , n’est autre c liose qu’un sable très-pur, en quelque fa- Üm pourri, presque réduit en ses principes, ( l qui tend à une décomposition parfaite ; ■ rec le temps ces paillettes se seroient at- ^lnuées et divisées au point qu’elles n’au- riî!)ient point eu assez d’épaisseur et de sur- “ilce pour réfléchir la lumière , et elles Pjiroient acquis toutes les propriétés des if aises. Qu’on regarde au grand jour un “ lorceau d’argile , on y apercevra une [[’ande quantité de ces paillettes talqueuses, 1 ni n’ont pas encore entièrement perdu leur " irme. Le sable peut donc, avec le temps, I roduire l’argile, et celle-ci, en se divisant, II tquiert de même les propriétés d’un véri- l! ible limon , matière vitrifiable comme Çar- ^ île et qui est du même genre. il Cette théorie est conforme à ce qui se “jasse tous les jours sous nos yeux. Qu’on five du sable sortant de sa minière , l’eau » chargera d’une assez grande quantité de lerre noire , ductile , grasse , de véritable urgiie. Dans les villes où les rues sont pa- yées de grès , les boues sont toujours noires Ht très-grasses , et desséchées elles forment Ine terre de la même nature que l’argile. | )u’on détrempe et qu’on lave de même de . Tome I. l’argile prise dans un terrain où il n’y a ni grès ni cailloux, il se précipitera toujours au fond de l’eau une assez grande quantité de sable vitrifiable. Mais ce qui prouve parfaitement que le sable, et même le caillou et le verre, existent dans l’argile et n’y sont que dégui- sés , c’est que le feu , en réunissant les par- ties de celle-ci que l’action de l’air et des autres élémens avoit peut-être divisées , lui rend sa première forme. Qu’on mette de l’argile dans un fourneau de réverbère échauffé au degré de la calcination , elle se couvrira au dehors d’un émail très-dur : si à l’intérieur elle n’est pas encore vitrifiée , elle aura cependant acquis une très grande dureté, elle résistera à la lime et au burin, elle étincellera sous le marteau , elle aura enfin toutes les propriétés du caillou; un degré de chaleur de plus la fera couler et la convertira en un véritable verre. L’argile et le sable sont donc des ma- tières parfaitement analogues et du même genre ; si l’argile se condensant peut deve- nir du caillou , du verre , pourquoi le sable en se divisant ne pourroit-il pas devenir de l’argile? Le verre paroît être la véritable terre élémentaire , et tous les mixtes un verre déguisé ; les métaux , les minéraux , les sels , etc. , ne sont qu’une terre vitres- cible ; la pierre ordinaire , les autres ma- tières qui lui sont analogues, et les coquilles des testacés , des crustacés , etc. , sont les seules substances qu’aucun agent connu n’a pu jusqu’à présent vitrifier, et les seules qui semblent faire une classe à part1. Le feu, i. J’ai dit que les matières calcaires sont les seules qu’aucun feu connu n’a pu jusqu’à présent vitrifier, et les seules qui semblent, à cet égard , faire classe à part, toutes les autres matières du globe pouvant être réduites en verre. Je n’avois pas fait alors les expériences par les- quelles je me suis assuré, depuis, que les matières calcaires peuvent, comme toutes les autres, être réduites en verre; il ne faut en effet pour cela qu’un feu plus violent que celui de nos fourneaux ordinaires. On réduit la pierre calcaire en verre au foyer d’un bon miroir ardent : d’ailleurs M. d’Arcet, savant chimiste , a fondu du spath calcaire , sans addition d’aucune autre matière , aux fourneaux à faire de la porcelaine de M. le comte de Laura- guais : mais ces opérations n’ont été faites que plu- sieurs années après la publication de ma Théorie de la terre. On savoit seulement que dans les hauts fourneaux qui servent à fondre la mine de fer, 1® laitier spumeux , blanc et léger, semblable à de la pierre ponce , qui sort de ces fourneaux lorsqu’ils sont trop échauffés , n’est qu’une matière vitrée qui provient de la castine ou matière calcaire qu’on jette au fourneau pour aider à la fusion de la mine de fer : la seule différence qu’il y ait à l’égard de la vitrification entre les matières cal- caires et les matières vitrescibles, c’est que celles-ci 9 t3o THÉORIE DE en réunissant les parties divisées des pre- mières , en fait une matière homogène, dure et transparente à un certain degré , sans aucune diminution de pesanteur, et à la- quelle il n’est plus capable de causer aucune altération ; celles-ci , au contraire , dans les- quelles il entre une plus grande quantité de principes actifs et volatils , et qui se cal- cinent, perdent au feu plus du tiers de leur poids , et reprennent simplement la forme de terre , sans autre altération que la désunion de leurs principes : ces matières exceptées, qui ne sont pas en grand nom- bre , et dont les combinaisons ne produisent pas de grandes variétés dans la nature , toutes les autres substances , et particuliè- rement l’argile , peuvent être converties en verre , et ne sont essentiellement par con- séquent qu’un verre décomposé. Si le feu fait changer promptement de forme à ces substances en les vitrifiant , le verre lui- même , soit qu’il ait sa nature de verre, ou bien celle de sable ou de caillou , se change naturellement en argile , mais par un pro- grès lent et insensible. Dans les terrains où le caillou ordinaire est la pierre dominante , les campagnes en sont ordinairement jonchées ; et si le lieu est inculte , et que ces cailloux aient été long-temps exposés à l’air sans avoir été remués , leur superficie supérieure est tou- jours très-blanche , tandis que le côté op- posé qui touche immédiatement à la terre, est très-brun et conserve sa couleur natu- relle. Si on casse plusieurs de ces cailloux , on reconnoîtra que la blancheur n’est pas seulement au dehors, mais qu’elle pénètre dans l’intérieur plus ou moins profondé- ment , et y forme une espèce de bande , qui n’a dans de certains cailloux que très-peu d’épaisseur, mais qui , dans d’autres , oc- cupe presque toute celle du caillou ; cette partie blanche est un peu grenue , entière- ment opaque , aussi tendre que la pierre , et elle s’attache à la langue comme les bols, tandis que le reste du caillou est lisse et sont immédiatement vitrifiées par la violente ac- tion du feu , au lieu que les matières calcaires passent par l’état de calcination et forment de la chaux avant de se vitrifier ; mais elles se vitri- fient comme les autres, même au feu de nos four- neaux , dès qu’on les mêle avec des matières vitres- cibles , surtout avec celles qui, comme l’aubuë, ou terre limoneuse, coulent le plus aisément au feu. On peut donc assurer, sans crainte de se tromper, que généralement toutes les matières du globe peu- vent retourner à leur première origine en se ré- duisant ultérieurement en verre, pourvu qu’on leur administre le degré de feu nécessaire à leur vitrifi- cation. [Add. Buff) LA TERRE. poli , qu’il n’a ni fil ni graiil , et qu’i | conservé sa couleur naturelle , sa trans] ; rence , et sa même dureté. Si on met d; un fourneau ce même taillou à moitié t j composé , sa partie blanche deviendra d’ | rouge couleur de tuile , et sa partie bri j d’un très-beau blanc. Qu’on ne dise poil j avec un de nos plus célèbres naturalisé î que ces pierres sont des cailloux imparfi de différens âges , qui n’ont pas encore | quis leur perfection ; car pourquoi seroie: ils tous imparfaits ? pourquoi le seroient tous du même côté , et du côté qui est < ! posé à l’air ? Il me semble qu’il est aisé j se convaincre que ce sont au contraire ( j cailloux altérés , décomposés , qui tendf j à reprendre la forme et les propriétés ! l’argile et du bol dont ils ont été formé Si c’est conjecturer que de raisonner ain j qu’on expose en plein air le caillou le pl j caillou (comme parle ce fameux naturalisé le plus dur et le plus noir, en moins d’u j année il changera de couleur à la surfac f et si on a la patience de suivre cette exjJ rience , on lui verra perdre insensiblemcl et par degrés sa dureté , sa transparence ! ses autres caractères spécifiques , et apprj! cher de plus en plus chaque jour de la i ture de l’argile. Ce qui arrive au caillou arrive au sabl \ chaque grain de sable peut être corisidél comme un petit caillou , et chaque caillo l comme un amas de grains de sable extrên: ;] ment fins et exactement engrenés. L’exer pie du premier degré de décomposition i |i sable se trouve dans cette poudre brillant mais opaque , mica , dont nous venons ; parler, et dont l’argile et l’ardoise sont toi joui's parsemées ; les cailloux entièreme j transparens , les quarz, produisent en il décomposant des talcs gras et doux au to i cher, aussi pétrissables et ductiles que glaise , et vitrifiables comme elle , tels q l ceux de Venise et de Moscovie ; et il 1 1! paroît que le talc est un terme moyen enl J le verre ou le caillou transparent et l’argi I, au lieu que le caillou grossier et impur, en l décomposant, passe à l’argile sans intermèc \ Notre verre factice éprouve aussi la mêi ; altération : il se décompose à l’air, il J pourrit en quelque façon en séjournant de f les terres : d’abord sa superficie s 'iris j s’écaille , s’exfolie , et eh le maniant , ! s’aperçoit qu’il s’en détache des paillet i brillantes ; mais lorsque sa décompositi est plus avancée , il s’écrase entre les doi et se réduit en poudre talqueuse très-blanc J et très-fine ; l’art a même imité la nati ART. VII. COUCHES ET LITS DE TERRE. tooür la décomposition du verre et du cail- lou. « Est etiam certa methodus solius aquæ « communis ope silices et arenam in liquo- « rem viscosum , eumdemque in sal viride « convertendi , et hoc in oleum rubicun- « dum , etc. Solius ignis et aquæ ope, spe- « ciali experimento durissimos quosque la- « pides in mucorem resolvo , qui distilîatus « subtilem spiritum exbibet et oleum nullis «c laudibus prædicabile. » Nous traiterons ces matières encore plus à fond dans notre discours sur les minéraux, et nous nous contenterons d’ajouter ici que les différentes couches qui couvrent le globe terrestre, étant encore actuellement ou de matières que nous pouvons considérer pomme vitrifiées , ou de matières analogues au verre , qui en ont les propriétés les plus essentielles , et qui toutes sont vitrescibles, et que d’ailleurs , comme il est évident que de la décomposition du caillou et du verre qui se fait chaque jour sous nos yeux , il résulte une véritable terre argileuse, ce n’est donc pas une supposition précaire ou gratuite , que d’avancer , comme je l’ai fait, que les glaises , les argiles et les sables , ont été formés par les scories et les écumes vi- trifiées du globe terrestre, surtout lorsqu’on y joint les preuves à priori que nous avons données pour faire voir qu’il a été dans un état de liquéfaction causée par le feu. Sur les couches et lits de terre en différens endroits. * Nous avons quelques exemples des fouilles et des puits , dans lesquels on a ob- servé les différentes natures des couches ou lits de terre jusqulà de certaines profon- deurs ; celle du puits d’Amsterdam , qui descendoit jusqu’à 282 pieds; celle du puits de Marly-la-Tille , jusqu’à 100 pieds; et nous pourrions en citer plusieurs autres exemples, si les observateurs étoient d’ac- cord dans leur nomenclature : mais les uns appellent marne ce qui n’est en effet que de l’argile blanche ; les autres nomment cailloux des pierres calcaires arrondies ; ils donnent le nom de sable à du gravier cal- coire : au moyen de quoi l’on ne peut tirer aucun fruit de leurs recherches ni de leurs longs mémoires sur ces matières , parce qu’il y a partout incertitude sur la nature des substances dont ils parlent ; nous nous bornerons donc aux exemples suivants. Un bon observateur a écrit à un de mes amis , dans les termes suivans , sur les cou- ches de terre dans le voisinage de Toulon ; i3i « U existe ici , dit-il , un immense dépôt pierreux qui occupe toute la pente de la chaîne de montagnes que nous avons au nord de la ville de Toulon , qui s’étend dans la vallée au levant et au couchant , dont une partie forme le sol de la vallée et va se perdre dans la mer ; cette matière la- pidifique est appelée vulgairement sa/re , et c’est proprement ce tuf que les natura- listes appellent marga tofacea fistulosa. M. Guettard m’a demandé des éclaircisse- mens sur ce safre pour en faire usage dans ses mémoires, et quelques morceaux de cette matière pour la connoître. Je lui ai envoyé les uns et les autres , et je crois qu’il en a été content , car il m’en a remercié ; il vient même de me marquer qu’il reviendra en Provence et à Toulon au commencement de mai Quoiqu’il en soit , M. Guettard n’a rien de nouveau à dire sur ce dépôt ; car M. de Buffon a tout dit à ce sujet dans son premier volume de Y Histoire naturelle , à l’article des Preuves de la Théorie de la terre; et il semble qu’en faisant cet article , il avoit sous les yeux les montagnes de Tou- lon et leur croupe. « A la naissance de cette croupe * qui est d’un tuf plus ou moins dur, on trouve dans de petites cavités du noyau de la montagne, quelques mines de très-beau sable , qui sont probablement ces pelotes dont parle M. de Buffon. En cassant en d’autres endroits la superficie du noyau , nous trouvons en abondance des coquilles de mer incorporées avec la pierre J’ai plusieurs de ces co- quilles, dont l’émail est assez bien conservé : je les enverrai quelque jour à M. de Buf- fon T . » M. Guettard , qui a fait par lui - même plus d’observations en ce genre qu’aucun autre naturaliste , s’exprime dans les termes suivans en parlant des montagnes qui avoi- sinent Paris : « Après la terre labourable , qui n’est tout au plus que de deux ou trois pieds , est placé un banc de sable qui a depuis quatre et six pieds jusqu’à vingt pieds, et souvent même jusqu’à trente de hauteur : ce banc est communément rempli de pierres de la nature de la pierre meulière Il y a des cantons où l’on rencontre, dans ce banc sableux , des masses de grès isolées. « Au dessous de ce sable , on trouve un tuf qui peut avoir depuis dix ou douze jus- qu’à trente , quarante et même cinquante pieds. Ce tuf n’est cependant pas coramu- 1. Lettre de M. de Boissy à M. Guenaud de Mont béliard. Toulon, 16 avril 1775. 9* THÉORIE DE LA TERRE. i3a nément d’une seule épaisseur ; il est assez souvent coupé par différens lits de fausse marne , de marne glaiseuse , de cos , que les ouvriers appellent tripoli, ou de bonne marne , et même de petits bancs de pierres assez dures Sous ce banc de tuf com- mencent ceux qui donnent la pierre à bâtir. Ces bancs varient par la hauteur ; ils n’ont guère d’abord qu’un pied. Il s’en trouve dans des cantons trois ou quatre au dessus l’un de l’autre : ils en précèdent un qui peut être d’environ dix pieds , et dont les surfaces et l’intérieur sont parsemés de noyaux ou d’empreintes de coquilles ; il est suivi d’un autre qui peut avoir quatre pieds ; il porte sur un ae sept à huit , ou plutôt sur deux de trois ou quatre. Après ces bancs , il y en a plusieurs autres qui sont petits , et qui peuvent former en tout un massif de trois toises au moins ; ce massif est suivi des glaises , avant lesquelles cepen- dant on perce un lit de sable. « Ce sable est rougeâtre et terreux : il a d’épaisseur deux , deux et demi , et trois pieds ; il est noyé d’eau ; il a après lui un banc de fausse glaise bleuâtre , c’est-à-dire d’une terre glaiseuse mêlée de sable : l’é- paisseur de ce banc peut avoir deux pieds ; celui qui le suit est au moins de cinq, et d’une glaise noire, lisse, dont les cassures sont brillantes presque comme du jayet ; et enfin cette glaise noire est suivie de la glaise bleue , qui forme un banc de cinq à six pieds d’épaisseur. Dans ces différentes glai- ses, on trouve des pyrites blanchâtres d’un jaune pâle et de différentes figures L’eau qui se trouve au dessous de toutes ces glaises empêche de pénétrer plus avant « Le terrain des carrières du canton de Moxouris , au haut du faubourg Saint-Mar- ceau, est disposé delà manière suivante: pi. po. i° La terre labourable, d’un pied d’épais- seur t o 2° Le tuf, deux toises 12 3° Le sable, deux à trois toises 18 4° Les terres jaunâtres, deux toises ia 5° Le tripoli, c’est-à-dire des terres blan- ches, grasses, fermes, qui se durcis- sent au soleil, et qui marquent comme la craie, de quatre à cinq toises 3o 6° Du cailloutage ou mélange de sable gras, de deux toises ia 70 De la roche ou lichette, depuis un pied jusqu’à deux a 8° Une espèce de bas appareil ou qui a peu de hauteur, d’un pied jusqu’à deux. . a 90 Deux moies de banc blanc , de chacune six , sept à huit pouces 1 io° Le souchet, de dix-huit pouces jusqu’à pi. po. De Vautre part, t , » 90 o vingt, en y comprenant son bousin. . 1 6 ix° Le banc franc, depuis quinze, dix-huit, jusqu’à trente pouces 1 6 12° Le liais-ferault , de dix à douze pouces. 1 i3° Le banc vert, d’un pied jusqu’à vingt pouces 1 6 i4° Les lambourdes , qui forment deux bancs , un de dix-huit pouces , et l’autre de deux pieds 3 6 i5° Plusieurs petits bancs de lambourdss bâtardes, ou moins bonnes que les lambourdes ci-dessus; ils précèdent la nappe d’eau ordinaire des puits: cette nappe est celle que ceux qui fouillent la terre à pots sont obligés de passer pour tirer cette terre ou glaise à poterie, laquelle est entre deux eaux, c’est-à-dire entre cetto nappe dont je viens de parler...., et une autre beaucoup plus considéra- ble, qui est au dessous. En tout 99 pi. » Au reste, je ne rapporte cet exemple que faute d’autres ; car on voit combien il laisse d’incertitudes sur la nature des dif- férentes terres. On ne peut donc trop exhorter les observateurs à désigner plus exactement la nature des matières dont ils parlent, et de distinguer au moins celles qui sont vitrescibles ou calcaires comme dans l’exemple suivant. Le sol de la Lorraine est partagé en deux grandes zones toutes différentes et bien distinctes : l’orientale , que couvre la chaîne des Vosges, montagnes 'primitives , toutes composées de matières vitrifiables et cris- tallisées, granités, porphyres, jaspes, et quarz , jetés par blocs et par groupes , et non par lits et par couches. Dans toute cette chaîne , on ne trouve pas le moindre vestige de productions marines , et les collines qui en dérivent sont de sable vitrifiable. Quand elles finissent , et sur une lisière suivie dans toute la ligne de leur chute, commence l’autre zone toute calcaire , toute en couches horizontales , toute remplie ou plutôt for- mée de corps marins *. Les bancs et les lits de terre du Pérou sont parfaitement horizontaux, et se ré- pondent quelquefois de fort loin dans les différentes montagnes : la plupart de ces montagnes ont deux ou trois cents toises de hauteur, et elles sont presque toujours inaccessibles ; elles sont souvent escarpées comme des murailles, et c’est ce qui per- met de voir leurs lits horizontaux , dont ces escarpemens présentent l’extrémité. Lorsque le hasard a voulu que quelqu’une fût ronde , 1. Note communiquée à M. de Buffon par M. l’ab- bé Bexon, le i5 mars 1777. 90 o ART. VII. COUCHES ET LITS DE TERRE. et qu’elle se trouve absolument détachée des autres , chacun de ces lits est devenu comme un cylindre très-plat, et comme un cône tronqué, qui n’a que très-peu de hauteur; et ces différens lits placés les uns au-dessous des autres, et distingués par leur couleur et par les divers talus de leur contour, ont souvent donné au tout la forme d'un ou- vrage artificiel et fait avec la plus grande régularité. On voit dans ces pays-là les mon- tagnes y prendre continuellement l’aspect d’anciens et somptueux édifices, de cha- pelles, de châteaux, de dômes. Ce sont quelquefois des fortifications, formées de longues courtines munies de boulevarts. Il est difficile, en distinguant tous ces objets : et la manière dont leurs couches se ré- pondent, de douter que le terrain ne soit ! abaissé tout autour ; il paroît que ces mon- ! tagnes , dont la hase étoit plus solidement appuyée, sont restées comme des espèces de æmoins et des monumens qui indiquent la hauteur qu’avoit anciennement le sol de ces contrées. | La montagne des Oiseaux, appelée en i arabe Gebelteiv, est si égale du haut en bas l’espace d’une demi-lieue, qu’elle semble plutôt un mur régulier bâti par la main des | hommes que non pas un rocher fait ainsi ; par la nature. Le Nil la touche par un très- long espace , et elle est éloignée de quatre journées et demie du Caire, dans l’Égypte supérieure. Je puis ajouter à ces observations une | remarque faite par la plupart des voyageurs : c’est que dans les Arables le terrain est d’une nature très-différente ; la partie la plus voi- i sine du mont Liban n’offre que des rochers tranchés et culbutés , et c’est ce qu’on ap- pelle F Arabie pétvée. C’est de cette contrée , dont les sables ont été enlevés par le mou- j vement des eaux, que s’est formé le ter- 1 rain stérile de l’Arabie déserte ; tandis que 5 les limons plus légers et toutes les bonnes terres ont été portés plus loin dans la partie que l’on appelle X Arabie heureuse. Au reste , les revers dans l’Arabie heureuse sont, comme partout ailleurs , plus escarpés vers la mer d’Afrique , c’est-à-dire vers l’occi- dent , que vers la mer Rouge qui est à l’orient, ( Add . Buff. ) ARTICLE VIII. ! Sur les coquilles et autres productions de la mer qu’on trouve dans l’intérieur de la terre. J’ai souvent examiné des carrières du haut en bas , dont les bancs étoient remplis de i33 coquilles; j’ai vu des collines entières qui en sont composées, des chaînes de rochers qui en contiennent une grande quantité dans toute leur étendue. Le volume de ces pro- ductions de la mer est étonnant, et le nom- bre de ces dépouilles d’animaux marins est si prodigieux, qu’il n’est guère possible d’imaginer qu’il puisse y en avoir davantage dans la mer. C’est en considérant celte mul- titude innombrable de coquilles et d’autres productions marines qu’on ne peut pas dou- ter que notre terre n’ait été, pendant un très-long temps , un fond de mer peuplé d’autant de coquillages que l’est actuelle- ment l’Océan : la quantité en est immense , et naturellement on n’imagineroit pas qu’il y eût dans la mer une multitude aussi grande de ces animaux ; ce n’est que par celle des coquilles fossiles et pétrifiées qu’on trouve sur la terre que nous pouvons en avoir une idée. En effet , il ne faut pas croire, comme se l’imaginent tous les gens qui veulent rai- sonner sur cela sans avoir rien vu , .qu’on ne trouve ces coquilles que par hasard , qu’elles sont dispersées çà et là , ou tout au plus par petits tas, comme des coquilles d’huîtres jetées à la porte : c’est par mon- tagnes qu’on les trouve , c’est par bancs de ioo et 200 lieues de longueur; c’est par collines et par provinces qu’il faut les toi- ser, souvent dans une épaisseur de 5o ou 6o pieds , et c’est d’après ces faits qu’il faut raisonner. Nous ne pouvons donner sur ce sujet un exemple plus frappant que celui des co- quilles de Touraine : voici ce qu’en dit l’historien de l’Académie 1 : « Dans tous les siècles assez peu éclairés et assez dé- pourvus du génie d’observation et de re- cherche , pour croire que tout ce qu’on ap- pelle aujourd’hui pierres figurées, et les coquillages même trouvés dans la terre , étoient des jeux de la nature, ou quelques petits accidens particuliers , le hasard a dû mettre au jour une infinité de ces sortes de curiosités , que les philosophes mêmes , si c’étoient des philosophes, ne regardoient qu’avec une surprise ignorante ou une lé- gère attention : et tout cela périssoit sans aucun fruit pour les progrès des connois- sances. Un potier de terre , qui ne savoit ni latin ni grec, fut le premier, vers la fin du seizième siècle , qui osa dire dans Paris , et à la face de tous les docteurs, que les co- quilles fossiles étoient de véritables coquilles (déposées autrefois par la mer dans les lieux x. Année 1720, pages 5 etsuiv? ï34 THÉORIE DE où elles se trouvoient alors ; que des ani- maux, et surtout des poissons, avoient donné aux pierres figurées toutes leurs dif- férentes figui'es , etc. ; et il défia hardiment toute l’école d’Aristote d’attaquer ses preu- ves : c’est Bernard Palissy , Saintongeois , aussi grand physicien que la nature seule puisse en former un : cependant son sys- tème a dormi plus de cent ans , et le nom même de l’auteur est presque mort. Enfin les idées de Palissy se sont réveillées dans l’esprit de plusieurs savans ; elles ont fait la fortune qu’elles méritoient; on a profité de toutes les coquilles , de toutes les pierres figurées que la terre a fournies : peut-être seulement sont-elles devenues aujourd’hui trop communes ; et les conséquences qu’on en tire sont en danger d’être bientôt trop incontestables. « Malgré cela , ce doit être encore une chose étonnante que le sujet des observa- tions présentes de M. de Réaumur, une masse de i3o, 680,000 toises cubiques, en- fouie sous terre, qui n’est qu’un amas de coquilles , ou de fragmens de coquilles , sans nul mélange de matière étrangère , ni pierre, ni terre, ni sable : jamais, jusqu’à présent, les coquilles fossiles n’ont paru en cette énorme quantité , et jamais , quoi- qu’on une quantité beaucoup moindre, elles n’ont paru sans mélange. C’est en l'ouraine que se trouve ce prodigieux amas, à plus de 36 lieues de la mer : on l’y connoît, parce que les paysans de ce canton se servent de ces coquilles qu’ils tirent de la terre, comme de marne, pour fertiliser leurs campagnes, qui sans cela seroient absolument stériles. Nous laissons expliquer à M. de Réaumur comment ce moyen assez bizarre leur réus- sit ; nous nous renfermons dans la singula- rité de ce grand tas de coquilles. « Ce qu’on tire de terre, et qui ordinai- rement 11’y est pas à plus de 8 ou 9 pieds de profondeur, ce ne sont que de petits fragmens de coquilles très-reconnoissables pour en être des fragmens ; car ils ont les cannelures très-bien marquées : seulement ils ont perdu leur luisant et leur vernis , comme presque tous les coquillages qu’on trouve en terre, qui doivent y avoir été long-temps enfouis Les plus petits frag- mens qui ne sont que de la poussière, sont encore reconnoissables pour être des fragmens de coquilles , parce qu’ils sont larfaitement de la même matière que es autres ; quelquefois il se trouve des co- quilles entières. On reconnoît les espèces tant des coquilles entières que des fragmens LA TERRE. un peu gros : quelques-unes de ces espèces | sont connues sur les côtes de Poitou , d’au- | très appartiennent à des côtes éloignées. Il j y a jusqu’à des fragmens de plantes marines pierreuses , telles que des madrépores , des 8 champignons de mer, etc. Toute cette ma- tière s’appelle dans les pays du falun. « Le canton qui, en quelque endroit qu’on le fouille, fournit du falun, a bien neuf lieues carrées de surface. On ne perce ja- mais la minière de falun ou falunière au delà de 20 pieds : M. de Réaumur en rap- porte les raisons , qui ne sont prises que de la commodité des laboureurs et de l’épargne des frais. Ainsi les falunières peu- vent avoir une profondeur beaucoup plus grande que celle qu’on leur connoît ; ce- pendant nous n’avons fait le calcul de i3o, 680, 000 toises cubiques que sur le pied de 18 pieds de profondeur, et non pas de 20, et nous n’avons mis la lieue qu’à 2,200 toises : tout a donc été évalué fort bas , et peut-être l’amas de coquilles est-il de beau- coup plus grand que nous 11e l’avons posé : qu’il soit seulement double , combien la merveille augmente-t-elle ! « Dans les faits de physique , de petites circonstances que la plupart des gens ne s’aviseroient pas de remarquer, tirent quel- quefois à conséquence et donnent des lu- mières. M. de Réaumur a observé que tous les fragmens de coquilles sont, dans leur tas , posés sur le plat et horizontalement : de là il a conclu que cette infinité de frag- i mens ne sont pas venus de ce que , dans le tas formé d’abord de coquilles entières , les I supérieures auroient , par leur poids , brisé i les inférieures ; car de cette manière il se j seroit fait des écroulemens qui auroient donné aux fragmens une infinité de posi- lions différentes. Il faut que la mer ait ap- ! èi porté dans ce lieu-là toutes ccs coquilles , j soit entières, soit quelques-unes déjà bri- j il sées ; et comme elle les apportoit flottantes , j elles étoient posées sur le plat et horizonta- j lement ; après qu’elles ont été toutes dépo- ■ no sées au rendez-vous commun , l’extrême ; te longueur du temps en aura brisé et presque 1 Je calciné la plus grande partie sans déranger ■ t« leur position. « Il paroît assez par là qu’elles n’ont pu i lal être apportées que successivement ; et en i [« effet , comment la mer voitureroit-elle tout ift à la fois une si prodigieuse quantité de co- j ta quilles, et toutes dans une position horizon- j tel taie? elles ont dû s’assembler dans un même I lt lieu , et par conséquent ce lieu a été le fond j ffl d’un golfe ou une espèce de bassin. j b ART. YIIL PRODUCTIONS DE LÀ MER. « Toutes ces réflexions prouvent que , [uoiqu’il ait dû rester, et qu’il reste effecti- ement sur la terre beaucoup de vestiges du léluge universel rapporté par l’Écriture- ainte , ce n’est point ce déluge qui a pro- uit l’amas des coquilles de Touraine ; eut-ètre n’y en a-t-il d’aussi grands amas ans aucun endroit du fond de la mer : mais nfin le déluge ne les en auroit pas arra- îiées ; et s’il l’avoit fait , ç’auroit été avec ne impétuosité et une violence qui n’au- oient pas permis à toutes ces coquilles 'avoir une même position : elles ont dû tre apportées et déposées doucement , len- ement , et par conséquent en un temps seaucoup plus long qu’une année. « Il faut donc , ou qu’avant ou qu’après b déluge la surface de la terre ait été , du ûoins en quelques endroits, bien différem- uent disposée de ce qu’elle est aujourd’hui, |ue les mers et les continens y aient eu tn autre arrangement , et qu enfin il y ait :u un golfe au milieu de la Touraine. Les fliangemens qui nous sont connus depuis le emps des histoires ou des fables qui ont [uelque chose d’historique, sont, à la vé- rité , peu considérables ; mais ils nous tonnent lieu d’imaginer aisément ceux que les temps plus longs pourroient amener. Æ. de Réaumur imagine comment le golfe le Touraine tenoit à l’Océan , et quel étoit je courant qui y charrioit des coquilles ; nais ce n’est qu’une simple conjecture dou- tée pour tenir lieu du véritable fait incon- m , qui sera toujours quelque chose d’ap- brochant. Pour parler plus sûrement de “,ette matière , il faudrait avoir des espèces le cartes géographiques dressées selon Joutes les manières de coquillages enfouis m terre : quelle quantité d’observations ne laudroit-i! pas , et quel temps pour les rvoir ! Qui sait cependant si les sciences [t’iront pas un jour jusque là , du moins en aartie ?» r Cette quantité si considérable de coquilles tous étonnera moins , si nous faisons atten- ion à quelques circonstances qu’il est bon le ne pas omettre. La première est que les îoquillages se multiplient prodigieusement, ît qu’ils croissent en fort peu de temps ; ’abondance d’individus dans chaque espèce prouve leur fécondité. On a un exemple de ïette grande multiplication dans les huîtres : tn enlève quelquefois dans un seul jour un volume de ces coquillages de plusieurs toises le grosseur ; on diminue considérablement ni assez peu de temps les rochers dont on [es sépare , et il semble qu’on épuise les i3 S autres endroits où on les pêche : cependant l’année suivante on en retrouve autant qu’il y en avoit auparavant ; on ne s’aperçoit pas que la quantité d huîtres soit diminuée , et je ne sache pas qu’on ait jamais épuisé les endroits où elles viennent naturellement. Une seconde attention qu’il faut faire, c’est que les coquilles sont d’une substance ana- logue à la pierre , qu’elles se conservent très long-temps dans les matières molles , qu’elles se pétrifient aisément dans les ma- tières dures , et que ces productions ma- rines et ces coquilles que nous trouvons sur la terre , étant les dépouilles de plusieurs siècles , elles ont dû former un volume fort considérable. Il y a , comme on voit , une prodigieuse quantité de coquilles bien conservées dans les marbres , dans les pierres à chaux , dans les craies , dans les marnes , etc.. On les trouve , comme je viens de le dire , par collines et par montagnes ; elles font sou- vent plus de la moitié du volume des ma- tières où elles sont contenues : elles parais- sent la plupart bien conservées ; d’autres sont en fragmens , mais assez gros pour qu’on puisse reconnoître à l’œil l’espèce de coquilles à laquelle ces fragmens appar- tiennent , et c’est là où se bornent les ob- servations et les connaissances que l’inspec- tion peut nous donner. Mais je vais plus loin : je prétends que les craies, les marnes et les pierres à chaux ne sont composées que de poussière et de détrimens de co- quilles ; que par conséquent la quantité des coquilles détruites est infiniment plus con- sidérable que celle des coquilles conservées. On verra dans le discours sur les minéraux les preuves que j’en donnerai ; je me con- tenterai d’indiquer ici le point de vue sous lequel il faut considérer les couches dont le globe est composé. La première couche ex- térieure est formée du limon de l’air, du sédiment des pluies , des rosées , et des parties végétales ou animales , réduites en particules dans lesquelles l'ancienne organi- sation n’est pas sensible ; les couches inté- rieures de craie , de marne , de pierre à chaux , de marbre , sont composées de dé- trimens de coquilles et d’autres productions marines , mêlées avec des fragmens de co- quilles ou avec des coquilles entières ; mais les sablés vitrifiables et l’argile sont les ma- tières dont l’intérieur du globe est composé ; elles ont été vitrifiées dans le temps que le globe a pris sa forme , laquelle suppose né- cessairement que la matière a été toute en fusion. Le granité, le roc vif, les cailloux, i36 THÉORIE DE LA TERRE. et les grès en grande masse , les .ardoises , doivent leur origine au sable et à l’argile , et ils sont aussi disposés par couches : mais les tufs , les grès , et les cailloux qui ne sont pas en grande masse , les cristaux , les mé- taux , les pyrites , la plupart des minéraux , les soufres , etc. , sont des matières dont la formation est nouvelle en comparaison des marbres, des pierres calcinables, des craies, des marnes , et de toutes les autres matières qui sont disposées par couches horizontales, et qui contiennent des coquilles et d’autres débris des productions de la mer. Comme les dénominations dont je viens de me servir pourroient paroître obscures ou équivoques , je crois qu’il est nécessaire de les expliquer. J’entends par le mot d’ar- gile non seulement les argiles blanches, jaunes , mais aussi les glaises bleues , mol- les , dures , feuilletées , etc. , que je regarde comme des scories de verre , ou comme du verre décomposé. Par le mot de sable, j’entends toujours le sable vitrifiable; et non seulement je comprends sous cette dé- nomination le sable fin qui produit les grès, et que je regarde comme de la poussière de verre , ou plutôt de pierre ponce , mais aussi le sable qui provient du grès usé et détruit par le frottement, et encore le sable gros comme du menu gravier , qui provient du granité et du roc vif, qui est aigre , an- guleux, rougeâtre, et qu’on trouve assez communément dans le lit des ruisseaux et des rivières qui tirent immédiatement leurs eaux des hautes montagnes, ou de collines qui sont composées de roc vif ou de gra- nité. La rivière d’Armanson, qui passe à Se- mur en Auxois , où toutes les pierres sont du roc vif, charrie une grande quantité de ce sable , qui est gros et fort aigre ; il est de la même nature que le roc vif, et il n’en est en effet que le débris , comme le gra- vier calcinable n’est que le débris de la pierre de taille ou du moellon. Au reste , le roc vif et le granité sont une seule et meme substance ; mais j’ai cru devoir em- ployer les deux dénominations , parce qu’il y a bien des gens qui en font deux ma- tières différentes. Il en est de même des cailloux et des grès en grande masse : je les regarde comme des espèces de rocs vifs ou de granités, et je les appelle cailloux en grande masse, parce qu’ils sont disposés, comme la pierre calcinable , par couches , et pour les distinguer des cailloux et des grès que j’appelle en petite masse , qui sont les cailloux ronds et les grès que l’on trouve à la chasse , comme disent les ouvriers, c’est-à-dire les grès dont les bancs n’o: pas de suite et ne forment pas des ca rières continues et qui aient une certaii étendue. Ces grès et ces cailloux sont d’ui formation plus nouvelle, et n’ont pas même origine que les cailloux et les gr en grande masse , qui sont disposés par coi ches. J’entends par la dénomination d’a doise, non seulement l’ardoise bleue qi tout le monde connoît, mais les ardoisi blanches, grises, rougeâtres, et tous L schistes. Ces matières se trouvent ordina rement au dessous de l’argile feuilletée , i semblent n’être en effet que de l'argile dont les différentes petites couches ont pr corps en se desséchant, ce qui a produ les délits qui s’y trouvent. Le charbon d terre , la houille , le jais , sont des matièn qui appartiennent aussi à l’argile , et qu’o trouve sous l’argile feuilletée ou sous. l’ai doise. Par le mot de tuf, j’entends non sei lement le tuf ordinaire qui paroît troué et, pour ainsi dire, organisé, mais encor toutes les couches de pierre qui se sont fa tes par le dépôt des eaux courantes, toi le tes les stalactites , toutes les incrustations! toutes les espèces de pierres fondantes il n’est pas douteux que ces matières n soient nouvelles, et qu’elles ne premier tous les jours de l’accroissement. Le ti n’est qu’un amas de matières lapidifiques dans lesquelles on n’aperçoit aucune coucli distincte : cette matière est disposée ordl nairement en petits cylindres creux, irrî gulièrement groupés et formés par des eaui gouttières au pied des montagnes ou sur 1 pente des collines , qui contiennent des lit de marne ou de pierre tendre et calcinable la masse totale de ces cylindres, qui for un des caractères spécifiques de cette e;. pèce de tuf, est toujours ou oblique ou vei ticale , selon la direction des filets d’eau qi les forment. Ces sortes de carrières pari sites n’ont aucune suite : leur étendue es très-bornée en comparaison des carrière ordinaires , et elle est proportionnée à 1 hauteur des montagnes qui leur fournisse! la matière de leur accroissement. Le ti recevant chaque jour de nouveaux sucs h pidifiques , ces petites colonnes cylindrique qui laissoient entre elles beaucoup d’intei valle , se confondent à la fin , et avec 1 temps le tout devient compacte : mais cett matière n’acquiert jamais la dureté de 1 pierre; c’est alors ce qu’Agricola nomm marga tofacea fistulosa. On trouve ordi nairement dans ce tuf quantité d’impre; sions de feuilles d’arbres et de plantes d si ART. VIII. PRODUCTIONS DE LA MER. i37 l’espèce de celles que le terrain des envi- rons produit ; on y trouve aussi assez sou- vent des coquilles terrestres très-bien con- servées , mais jamais-de coquilles de mer. Le tuf est donc certainement une matière nouvelle , qui doit être mise dans la classe des stalactites, des pierres fondantes, des incrustations , etc. Toutes ces matières nou- velles sont des espèces de pierres parasites il qui se forment aux dépens des autres , mais qui n’arrivent jamais à la vraie pétrifi- cation. Le cristal , toutes les pierres précieuses , toutes celles qui ont une figure régulière , même les cailloux en petite masse qui sont formés par couches concentriques , soit que ces sortes de pierres se trouvent dans les fentes perpendiculaires des rochers ou par- tout ailleurs, ne sont que des exsudations des cailloux en grande masse , des sucs con- crets de ces mêmes matières, des pierres i parasites nouvelles , de vraies stalactites de ij caillou ou de roc vif. 1 On ne trouve jamais de coquilles ni dans ;! le roc vif ou granité , ni dans le grès ; au j moins je n’y en ai jamais vu , quoiqu’on en ( trouve, et même assez souvent, dans le j sable vitrifiable , duquel ces matières tirent leur origine : ce qui semble prouver que le | sable ne peut s’unir pour former du grès ou , du roc vif que quand il est pur ; et que s’il est mêlé de substances d’un autre genre, comme sont les coquilles , ce mélange de I1 parties qui lui sont hétérogènes en empêche la réunion. J’ai observé, dans le dessein de m’en assurer , ces petites pelotes qui se forment souvent dans les couches de sable mêlé de coquilles , et je n’y ai jamais trouvé aucune coquille ; ces pelotes sont un véri- !i table grès ; ce sont des concrétions qui se ! forment dans le sable aux endroits où il j n’est pas mêlé de matières hétérogènes , qui ('s’opposent à la formation des bancs ou ;! d’autres masses plus grandes que ces pe- lotes. Nous avons dit qu’on a trouvé à Amster- dam , qui est un pays dont le terrain est i fort bas , des coquilles de mer à ioo pieds de profondeur sous terre, et à Marly-la- i Ville , à six lieues de Paris , à 7 5 pieds : on en trouve de même au fond des mines et dans les bancs des rochers au dessous d’une hauteur de pierre de 5o, 100, 200 et jus- qu’à 1000 pieds d’épaisseur, comme il est aisé de le remarquer dans les Alpes et dans îles Pyrénées ; il n’y a qu’à examiner de ( près les rochers coupés à plomb , et on voit ((que dans les lits inférieurs il y a des co- quilles et d’autres productions marines : mais , pour aller par ordre , on en trouve sur les montagnes d’Espagne , sur les Pyré- nées , sur les montagnes de France , sur celles d’Angleterre , dans toutes les carriè- res de marbre en Flandre , dans les monta- gnes de Gueldre , dans toutes les collines autour de Paris , dans toutes celles de Bour- gogne et de Champagne , en un mot , dans tous les endroits où le fond du terrain n’est pas de grès ou de tuf ; et dans la plupart des lieux dont nous venons de parler , il y a presque dans toutes les pierres plus de coquilles que d’autres matières. J’entends ici par coquilles non seulement les dépouil- les de coquillages , mais celles des crustacés, comme tests et pointes d’oursin , et aussi toutes les productions des insectes de mer, comme les madrépores , les coraux , les as- troïtes , etc. Je puis assurer , et on s’en convaincra par ses yeux quand on le voudra, que dans la olupart des pierres calcinables et des marbres , il y a une si grande quan- tité de ces productions marines , qu’elles paroissent surpasser en volume la matière qui les réunit. Mais suivons. On trouve ces productions marines dans les Alpes , même au dessus des plus hautes montagnes , par exemple, au dessus du mont Cenis; on en trouve dans les montagnes de Gênes , dans les Apen- nins et dans la plupart des carrières de pierre ou de marbre en Italie ; on en voit dans les pierres dont sont bâtis les plus anciens édifices des Romains ; il y en a dans les montagnes du Tyrol et dans le centre de l’Italie, au sommet du mont Paterne, près de Bologne, dans les mêmes endroits qui produisent cette pierre lumineuse qu’on appelle la pierre de Bologne ; on en trouve dans des collines de la Pouille , dans celles de la Calabre , en plusieurs endroits de l’Allemagne et de la Hongrie , et généra- lement dans tous les lieux élevés de l’Eu- rope *. En Asie et en Afrique, les voyageurs en ont remarqué en plusieurs endroits : par exemple , sur la montagne de Castravan au dessus de Barut , il y a un lit de pierre blanche , mince comme de l’ardoise , dont chaque feuille contient un grand nombre et une grande diversité de poissons ; ils sont la plupart fort plats et fort comprimés, comme est la fougère fossile ; et ils sont ce- pendant si bien conservés , qu’on y remar- que parfaitement jusqu’aux moindres traits 1, Voyez sur cela Stenon, Ray, Wootlward, etc. i38 THÉORIÎ des nageoires i des écailles , et de toutes les parties qui distinguent chaque espèce de poisson. On trouve de même beaucoup d’oursins de mer et de coquilles pétrifiées entre Suez et le Caire , et sur toutes les collines et les hauteurs de la Barbarie ; la plupart sont exactement conformes aux es- pèces qu’on prend actuellement dans la mer Rouge l. Dans notre Europe on trouve des poissons pétrifiés en Suisse , en Allemagne, dans la carrière d’Oningen , etc. La longue chaîne de montagnes, dit M. Bourguet, qui s’étend d’occident en orient, depuis le fond du Portugal jusqu’aux parties les plus orientales de la Chine , cel- les qui s’étendent collatéralement du côté du nord et du midi , les montagnes d’Afri- que et d’Amérique qui nous sont connués, les vallées et les .plaines de l’Europe, ren- ferment toutes des couches de terres et de pierres qui sont remplies de coquillages, et de là on peut conclure pour les autres parties du monde qui nous sont inconnues. Les îles de l’Europe , celles de l’Asie et de l’Amérique où les Européens ont eu oc- casion de creuser , soit dans les montagnes, soit dans les plaines , fournissent aussi des coquilles , ce qui fait voir qu’elles ont cela de commun avec les continens qui les avoi- sinent 2. En voilà assez pour prouver qu’en effet on trouve des coquilles de mer, des pois- sons pétrifiés et d’autres productions mari- nes, presque dans tous les lieux où on a voulu les chercher , et qu’elles y sont en pro- digieuse quantité. «Il est vrai, dit un auteur anglois3, qu’il y a eu quelques coquilles de mer dis- persées çà et là sur la terre par les ar- mées , par les liabitans des villes et des villages, et que ’a Loubère rapporte dans son Voyage de Siam , que les singes au cap de Bonne-Espérance s’amusent conti- nuellement à transporter des coquilles du rivage de la mer au dessus des montagnes ; mais cela ne peut pas résoudre la question pourquoi ces coquilles sont dispersées dans tous les climats de la terre , et jusque dans l’intérieur des plus hautes montagnes, où elles sont posées par lit , comme elles le sont dans le fond de la mer. » En lisant une lettre italienne sur les chan- gemens arrivés au globe terrestre , imprimée DE LA TERRE. à Paris cette année (1746), je m’attendois à y trouver ce fait rapporté par la Loubère ; il s’accorde parfaitement avec les idées de l’auteur : les poissons pétrifiés ne sont , à son avis , que des poissons rares , rejetés de la table des Romains parce qu’ils n’étoient pas frais ; et à l’égard des coquilles , ce sont, dit-il , les pèlerins de Syrie qui ont rap- porté , dans le temps des croisades , celles des mers du Levant qu’on trouve actuelle- ment pétrifiées en France , en Italie , et dans les autres états de la chrétienté. Pour- quoi n’a-t-il pas ajouté que ce sont les sin- ges qui ont transporté les coquilles au som- met des hautes moutagnes et dans tous les lieux où les hommes ne peuvent habiter? cela 11’eût rien gâté et eût rendu son ex- plication encore plus vraisemblabe. Com- ment se peut-il que des personnes éclairées et qui se piquent même de philosophie, , aient encore des idées fausses sur ce sujet 4? et 84 j. Voyez les V oyages de S/iaw , vol. II, pages 70 a. Voyez Lettres philosophiques sur la formation des sels, page 2o5. 3. Tancred. Robinson, 4- Sur ce que j’ai écrit, au sujet de la lettre ita- lienne, dans laquelle il est dit que ce sont les pèlerins et autres qui , dans le temps des croisades, ont rap- porté de Syrie les coquilles que nous trouvons dans le sein de la terre en France, etc., on a pu trouver, comme je le trouve moi-même , que je 11’ai pas traité M. de Voltaire assez sérieusement ; j’avoue que j’aurois mieux fait de laisser tomber cette opi- nion que de la relever par une plaisanterie , d’au- tant que ce 11’ est pas mon ton, et que c’est peut- être la seule qui soit dans mes écrits. M. de Voltaire est un homme qui , par la supériorité de ses talens, mérite les plus grands égards. On m’apporta cette lettre italienne dans le temps même que je corri- geois la feuille de mon livre où il en est question ; je ne lus cette lettre qu’en partie, imaginant que c’étoit l’ouvrage de quelque érudit d’Italie, qui, d’après ses connoissances historiques , n’avoit suivi que son préjugé , sans consulter la nature ; et ce ne’ fut qu’après l’impression de mon volume sur la Théorie de la terre, qu’on m’assura que la lettre étoit de M. de Voltaire : j’eus regret alors à mes expressions. Voilà la vérité : je la déclare autant pour M. de Voltaire que pour moi-même et pour la postérité, à laquelle je ne voudrois pas laisser douter de la haute estime que j’ai toujours eue pour un homme aussi rare , et qui fait tant d’honneur à son siècle. L’autorité de M. de Voltaire ayant fait impres- sion sur quelques personnes , il s’en est trouvé qui ont voulu vérifier par eux-mêmes si les objections j contre les coquilles avoient quelque fondement , et je crois devoir donner ici l’extrait d’un mémoire qui J«s m’a été envoyé , et qui me paroit n’avoir été fait que dans cette vue : « En parcourant différentes provinces du royau- me et même d’Italie, j’ai vu, dit le P. Chabenat, des pierres figurées de toutes parts , et dans cer- tains endroits en si grande quantité et arrangées de façon qu’on ne peut s’empêcher de croire que I ®oi ces parties de la terre n’aient été autrefois le lit de la mer. J’ai vu des coquillages de toute espèce , et qui sont parfaitement semblables à leurs analogues j fitill vivans. J’en ai vu de la même figure et de la même f m, grandeur : celte observation m’a paru suffisante l pi dimens qui se sont amoncelés peu à peu , e J qui ont enfin produit des hauteurs consf i; déràbles par la succession des temps ; ca;;i re il est évident , pour tous les gens qui se ts donneront la peine d’observer, que l’arran: » gement de toutes les matières qui composen; tt le globe est l’ouvrage des eaux. Il n’e^t don p question que de savoir si cet arrangement ; fil été fait dans le même temps : or nous avon )» prouvé qu’il n’a pu se faire dans le mêm temps , puisque les matières ne gardent palpa l’ordre de la pesanteur spécifique , et qu’il n’y a pas eu de dissolution générale d i toutes les matières; donc cet arrangemen! a été produit par les eaux, ou plutôt pai ïi les sédimens qu’elles ont déposés dans 1 succession des temps ; toute autre révolu} tion, tout autre mouvement, toute autrl cause, auroit produit un arrangement très > différent. D’ailleurs, un accident partiel] lier, une révolution, ou un bouleversement n'auroit pas produit un pareil effet dans 1 j i. Voyez Ray ‘s Discourses, pages 178 et soiv. ART. VIII. PRODUCTIONS DE LÀ MER. 147 »îobe tout entier *, et si l’arrangement des terres et des couches avoit pour cause des révolutions particulières et accidentelles, an trouveroit les pierres et les terres dis- posées différemment en différens pays , au lieu qu’on les trouve partout disposées de même par couches parallèles , horizontales , au également inclinées. Voici ce que dit à ce sujet l’historien de l’Académie 1 : « Des vestiges très-anciens et en très- »rand nombre d’inondations qui ont dû être très-étendues, et la maniéré dont on est abligé de concevoir que les montagnes se sont formées, prouvent assez qu’il est arrivé autrefois à la surface de la terre de grandes révolutions. Autant qu’on en a pu creuser, an n’a presque vu que des ruines , des dé- bris , de vastes décombres entassés pêl - mêle , et qui , par une longue suite de siècles , se sont incorporés ensemble , et unis en une seule masse le plus qu'il a été possible : s’il y a dans le globe de la terre quelque espèce d’organisation régulière , aile est plus profonde, et par conséquent nous sera toujours inconnue, et toutes nos Recherches se termineront à fouiller dans les ruines de la croûte extérieure; elles [tonneront encore assez d’occupations aux philosophes. I« M. de Jussieu a trouvé aux environs de iaint-Chaumont , dans le Lyonnois , une prande quantité de pierres écailleuses ou euilletées, dont presque tous les feuillets >ortoient sur leur superficie l’empreinte ou l’un bout de tige, ou d’une feuille , ou d’un ragment de feuille de quelque plante : les «présentations de feuilles étoient toujours ixactement étendues, comme si on avoit :ollé les feuilles sur les pierres avec la main ; e qui prouve qu’elles avoient été apportées bar de l’eau qui les avoit tenues en cet état ; lies étoient en différentes situations, et uélquefois deux ou trois se croisoient. « On imagine bien qu’une feuille déposée ar l’eau sur une vase molle, et couverte nsuite d’une autre vase pareille, imprime pr l’une l’image de l’une de ses deux sur- ices , et sur l’autre l’image de l’autre sur- ice ; de sorte que ces deux lames de vase jtant durcies et pétrifiées, elles porteront hacune l’empreinte d’une face différente, liais ce qu’on auroit cru devoir être, n’est ias : les deux lames ont l’empreinte de la îème face de la feuille, l’une en relief, et üautre en creux. M. de Jussieu a observé, 1. Année 1718, pages 3 el suiv. dans toutes ces pierres figurées de Saint- Chaumont, ce phénomène, qui est assez bizarre ; nous lui en laissons l’explication , pour passer à ce que ces sortes d’observa- tions ont de plus général et de plus inté- ressant. « Toutes les plantes gravées dans les pierres de Saint-Chaumont sont des plantes étrangères ; non seulement elles ne se trou- vent ni dans le Lyonnois , ni dans le reste de la France, mais elles ne sont que dans les Indes orientales et dans les climats chauds de l’Amérique ; ce sont la plupart des plantes capillaires , et souvent en particulier des fougères-. Leur tissu dur et erré les a rendues plus propres à se graver et à se conserver dans les moules autant de temps qu’il a fallu. Quelques feuilles de plantes des Indes , imprimées dans les pierres d’Al- lemagne, ont paru étonnantes à M. Leib- nitz : voici la même merveille infiniment multipliée ; il semble même qu’il y ait à cela une certaine affectation de la nature; dans toutes les pierres de Saint-Chaumont on ne trouve pas une seule plante du pays. « Il est certain, par les coquillages des carrières et des montagnes, que ce pays, ainsi que beaucoup d’autres , à dû autrefois être couvert par l’eau de la mer; mais com- ment la mer d’Amérique ou celle des Indes orientales y est-elle venue? «On peut, pour satisfaire à plusieurs phénomènes, supposer avec assez de vrai' semblance , que la mer a couvert tout le globe de la terre : mais alors il n’y avoit point de plantes terrestres; et ce n’est qu’après ce temps-là , et lorsqu’une partie du globe a été découverte, qu’il s’est pu faire les grandes inondations qui ont trans- Îiorté des plantes d’un pays dans d’autres ort éloignés. « M. de Jussieu croit que comme le lit de la mer hausse toujours par les terres, le limon , les sables que les rivières y char- rient incessamment , des mers renfermées d’abord entre certaines digues naturelles sont venues à les surmonter, et se sont ré- pandues au loin. Que les digues aient elles- mêmes été minées par les eaux, t s’y soient renversées, ce sera encore le même effet, pourvu qu’on les suppose d’une grandeur énorme. Dans les premiers temps de la for- mation de la terre , rien n’avoit encore pris une forme réglée et arrêtée ; il a pu se faire alors des révolutions prodigieuses et subites dont nous ne voyons plus d’exemple , parce que tout est venu à peu près à un état de. consistance, qui n’est pointant pas tel, que 10. ï48 - THÉORIE DE LA TERRE. les changemens lents et peu considérables qui arrivent, ne nous donnent heu cl en imaginer comme possibles d’autres de meme espèce, mais plus grands et prompts. « Par quelqu’une de ces grandes révolu- tions , la mer des Indes , soit orientales , soit occidentales , aura été poussée jusqu’en Europe, et y aura apporté des plantes étran- gères flottantes sur ses eaux ; elle les avoit arrachées en chemin , et les alloit déposer doucement dans les lieux où l’eau n’étoit qu’en petite quantité, et pouvoit s’évapo- rer. » Il me seroit facile d’ajouter à 1 énumé- ration des amas de coquilles qui se trouvent dans toutes les parties du monde , un très- grand nombre d’observations particulières qui m’ont été communiquées depuis trente- quatre ans. J’ai reçu des lettres des îles de l’Amérique , par lesquelles on m’assure que presque dans toutes on trouve des coquijles dans leur état de nature ou pétrifiées dans l’intérieur de la terre, et souvent sous la première couche de la terre végétale ; M. de Bougainville a trouvé aux îles Malouines des pierres qui se divisent par feuillets , sur lesquelles on remarquoit des empreintes de coquilles fossiles d’une espèce inconnue dans ces mers. J’ai reçu des lettres de plusieurs endroits des Grandes- Indes et de l’Afrique , où l’on me marque les mêmes choses. Don Ulloa nous apprend (t. III, p. 3i4 de son Voyagé) , qu’au Chili , dans le terrain qui s’étend depuis Talcaguano jusqu’à la Con- ception , l’on trouve des coquilles de diffé- rentes espèces en très-grande quantité et sans aucun mélange de terre , et que c’est avec ces coquilles que l’on fait de la chaux. Il ajoute que cette particularité ne seroit pas si remarquable , si l’on ne trouvoit ces co- quilles que dans les lieux bas et dans d’au- tres parages sur lesquels la mer auroit pu les couvrir; mais que ce qu’il y a de singulier, dit-il, c’est que les mêmes las de coquilles se trouvent dans les collines à 5o toises de hauteur au dessus du niveau de la mer. Je ne rapporte pas ce fait comme singulier, mais seulement comme s’accordant avec tous les autres , et comme étant le seul qui me soit connu sur les coquilles fossiles de cette partie du monde, où je suis très persuadé qu’on trouveroit, comme partout ailleurs, des pétrifications marines , à des hauteurs bien plus grandes que 5o toises au dessus du niveau de la mer : car le même don Ul- loa a trouvé depuis des coquilles pétrifiées dans les montagnes du Pérou a plus de a,ooo toises de hauteur; et, selon M. Kalm, on voit des coquillages dans l’ Amérique sep- tentrionale , sur les sommets de plusieurs montagnes ; il dit en avoir vu lui-même sur le sommet de la montagne Bleue. On en trouve aussi dans les craies des environs de Montréal , dans quelques pierres qui se tirent près du lac (Jhamplain en Canada , et encore dans les parties les plus septentrio- nales de ce nouveau continent , puisque les Groenlandois croient que le monde a été noyé par un déluge , et qu’ils citent pour garant de cet événement les coquilles et les os de baleine qui couvrent les mon- tagnes les plus élevées de leur pays. Si de là on passe en Sibérie , on trouvera également des preuves de l’ancien séjour des eaux de la mer sur tous nos continens. Près de la montagne de Jéniséik , on voit d’autres montagnes moins élevées, sur le sommet desquelles on trouve des amas de coquilles bien conservées dans leur forme et leur couleur naturelles : ces coquilles sont toutes vides, et quelques-unes tombent en poudre dès qu’on les touche; la mer de cette contrée n’en Journit plus de semblables ; les plus grandes ont un pouce de large, d’au- tres sont très-petites. Mais je puis encore citer des faits qu’on sera bien plus à portée de vérifier ; chacun dans sa province n’a qu’à ouvrir les yeux , il verra des coquilles dans tous les terrains d’où l’on tire de la pierre pour faire de la chaux ; il en trouvera aussi dans la plupart des glaises , quoique en général ces produc- tions marines y soient en bien plus petite ' quantité que dans les matières calcaires. Dans le territoire de Dunkerque , au haut delà montagne des Récollets , près de celle: de Cassel , à 400 pieds du niveau de la basse: mer, on trouve un lit de coquillages hori- zontalement placés et si fortement entassés, que la plus grande partie en sont brisés , et par dessus ce lit, une couche de 7 ou 8 pieds! de terre et plus; c’est à six lieues de dis- tance de la mer, et ces coquilles sont de là même espèce que celles qu’on trouve ac- tuellement dans la mer. Au mont Gannelon près d’Anet , à quel que distance de Compiègne , il y a plusieurs carrières de très-belles pierres calcaires, entre les différons lits desquelles il se trouv< du gravier mêlé d’une infinité de coquille; ou de portions de coquilles marines très-lé gères et fort friables : on y trouve aussi de: lits d’huîtres ordinaires de la plus belle con servation, dont l’étendue est de plus de cin< J1® quarts de lieue en longueur. Dans l’une d» ces carrières , il se trouve trois lits de co Irai raji ART. YIH. PRODUCTIONS DE LA MER. quilles dans difFérens états : dans deux de ces lits elles sont réduites en parcelles, et on ne peut en reconnoître les espèces , tan- dis que dans le troisième lit, ce sont des huîtres qui n’ont souffert d’autre altération qu’une sécheresse excessive : la nature de la coquille, l’émail, et la figure sont les mêmes que dans l’analogue vivant ; mais ces coquilles ont acquis de la légèreté et se dé- tachent par feuillets. Ces carrières sont au pied de la montagne et un peu en pente. En descendant dans la plaine on trouve beaucoup d’huîtres, qui ne sont ni chan- gées , ni dénaturées , ni desséchées comme les premières; elles ont le même poids et le même émail que celles que l’on tire tous les jours de la mer *. Aux environs de Paris , les coquilles ma- rines ne sont pas moins communes que dans les endroits qu’on vient de nommer. Les carrières de Bougival, où l’on tire de la marne , fournissent une espèce d’huîtres d’une moyenne grandeur : on pourroit les appeler huîtres tronquées , ailées , et lisses , {parce qu’elles ont le talon aplati , et qu’elles sont comme tronquées en devant. Près de Belleville, où l’on tire du grès, on trouve qne masse de sable dans la terre , qui con- tient des corps branchus, qui pourroient bien être du corail ou des madrépores de- venus grès ; ces corps marins ne sont pas ians le sable même, mais dans les pierres, |ui contiennent aussi des coquilles de dif- ërens genres, telles que des vis, des uni- salves, et des bilvalves. La Suisse n’est pas moins abondante en :orps marins fossiles que la France et les utres contrées dont on vient de parler; n trouve au mont Pilate , dans le canton Se Lucerne, des coquillages de mer pétri- Sés , des arêtes et des carcasses de poissons. C’est au dessous de la corne du Dôme où l’on en rencontre le plus; on y a aussi rouvé du corail , des pierres d’ardoises qui je lèvent aisément par feuillets, dans les- quelles on trouve presque toujours un pois- jon. Depuis quelques années on a même rouvé des mâchoires et des crânes entiers Ile poissons, garnis de leurs dents, j M. Altman observe que dans une des parties les plus élevées des Alpes aux en- trons de Grindelvald , où se forment les jameux Gletchers , il y a de très-belles arrières de marbre , qu’il a fait graver sur ne des planches qui représentent ces mon- jagne* : ces carrières de marbre ne sont !i t. Extrait d’une lettre de M. Leschevin à M. de îuffon, Compiègne, le 8 octobre 1772. i49 qu’à quelques pas de distance du Gletcher. Ces marbres sont de différentes couleurs ; il y en a du jaspé, du blanc, du jaune , du rouge, du vert : on transporte l’hiver ces marbres sur des traîneaux par dessus les neiges jusqu’à Underseen , où on les em- barque pour les mener à Berne par le lac de Thorne, et ensuite par la riviere d’Are. Ainsi les marbres et les pierres calcaires se trouvent , comme l’on voit , à une très- grande hauteur dans cette partie des Alpes. M. Cappeler, en faisant des recherches sur le mon! Grimsel (dans les Alpes) , a observé que les collines et les monts peu élevés qui confinent aux vallées, sont en bonne partie composés de pierre de taille ou pierre mollasse, d’un grain plus ou moins fin et plus ou moins serré. Lessom- miiés des monts sont composées, pour la plupart, de pierre à chaux de différentes couleurs et dureté : les montagnes plus éle- vées que ces rochers calcaires sont compo- sées de granités et d’autres pierres qui pa- roissent tenir de la nature du granité et de celle de l’émeri ; c’est dans ces pierres graniteuses que se fait la première généra- tion du cristal de roche, au lieu que dans les bancs de pierre à chaux qui sont au dessous , l’on ne trouve que des concrétions calcaires et des spaths. En général , on a remarqué sur toutes les coquilles, soit fos- siles , soit pétrifiées , qu’il y a de certaines espèces qui se rencontrent constamment ensemble, tandis que d’autres ne se trouvent jamais dans ces mêmes endroits. Il en est de même dans la mer, où certaines espèces de ces animaux testacés se tiennent cons- tamment ensemble , de même que certaines plantes croissent toujours ensemble, à la surface de la terre2. On a prétendu trop généralement qu’il n’y avoit point de coquilles ni d’autres pro- ductions de la mer sur les plus hautes mon- tagnes. Il est vrai qu’il y a plusieurs som- mets et un grand nombre de pics qui ne sont composés que de granités et de rochers vi- trescibles, dans lesquels on n’aperçoit au- cun mélange, aucune empreinte de coquilles ni d’aucun autre débris des productions ma- rines ; mais il y a un bien plus grand nom- bre de montagnes , et même quelques-unes fort élevées, où l’on trouve de ces débris marins. M. Costa, professeur d’anatomie et de botanique en l’université de Perpi- gnan, a trouvé, en 1774, sur la montagne de Nas , située au midi de la Cerdagne es- 2. Lettres philosophiques de M. Boiirguet Biblio- thèque raisonnée , mois d'avril, mai et juin 1730. ïSo THÉORIE DE LA TERRE. pagnole , ï’une des plus hautes parties des Pyrénées, à quelcpies toises au dessous du sommet de cette montagne, une très-grande quantité de pierres lenticulées , c’est-à-dire des blocs composés de pierres lenticulaires, et ces blocs étoient de différentes formes et de différens volumes; les plus gros pou- voient peser quarante ou cinquante livres. Il a observé que la partie de la montagne où ces pierres lenliculaires se trouvent sembloit s’ètre affaissée ; il vit en effet dans cet endroit une dépression irrégulière , obli- que, très-inelinée à l’horizon, dont une des extrémités regarde le haut de la mon- tagne , et l’autre le bas. Il ne put apercevoir distinctement les dimensions de cet affais- sement à cause de la neige qui le recouvroit presque partout, quoique ce fût au mois d’août. Les bancs de pierres qui environ- nent ces pierres lenticulées , ainsi que ceux qui sont immédiatement au dessous, sont calcaires jusqu’à plus de cent toises toujours en descendant. Cette montagne de Nas, à en juger par le coup d’œil, semble aussi élevée que le Canigou ; elle ne présente nulle part aucune trace de volcan. Je pourrois citer cent et cent autres exemples de coquilles marines trouvées dans une infinité d’endroits, tant en France que dans les différentes provinces de l’Europe; mais ce seroit grossir inutilement cet ou- vrage de faits particuliers déjà trop multi- pliés , et dont on ne peut s’empêcher de tirer la conséquence très-évidente que nos terres actuellement habitées ont autrefois été, et pendant fort long-temps, couvertes par les mers. Je dois seulement observer, et on vient de le voir, qu’on trouve ces coquilles ma- rines dans des états différens ; les unes pé- trifiées, c’est- dire moulées sur une ma- tière pierreuse ; et les autres dans leur état naturel , c’est-à-dire telles qu’elles existent dans la mer. La quantité de coquilles pé- trifiées, qui ne sont proprement que des pierres figurées par les coquilles, est infi- niment plus grande que celle des coquilles fossiles , et ordinairement on ne trouve pas les unes et les autres ensemble, ni même dans les lieux contigus. Ce n’est guère que dans le voisinage , et à quelques lieues de distance de la mer, que l’on trouve des lits de coquilles dans leur état de nature , et ces coquilles sont communément les mêmes que dans les mers voisines : c’est au contraire dans les terres plus éloignées de la mer et sur les plus hautes collines que l’on trouve presque partout des co- quilles pétrifiées dont un grand nombre d’espèces n’appartiennent point à nos mers, et dont plusieurs même n’ont aucun ana- logue vivant; ce sont ces espèces anciennes dont nous avons parlé , qui n’ont existé que dans les temps de la grande chaleur du globe. De plus de cent espèces de cornes d’ammon que l’on pourroit compter, dit un de nos savans académiciens , et qui se trouvent en France aux environs de Paris, de Rouen, de Dive, de Langres et de Lyon, dans les Cévennes , en Provence et en Poi- tou, en Angleterre, en Allemagne et dans d’autres contrées de l’Europe, il n’y en a qu’une seule espèce nommée n'autilus papy- raceus, qui se trouve dans nos mers, et cinq à six espèces qui naissent dans les mers étrangères. ( Add . Buff.) ARTICLE IX. Sur les inégalités de la surface de la terre. Les inégalités qui sont à la surface de la terre, qu'on pourroit regarder comme une imperfection à la figure du globe , sont en même temps une disposition favorable et qui étoit nécessaire pour conserver la vé- gétation et la vie sur le globe terrestre : il ne faut , pour s’en assurer , que se prètci un instant à concevoir ce que seroit la terre, si elle étoit égale et régulière à sa surface; on verra qu’au lieu de ces collines agréables d’où coulent des eaux pures qui entretiennent la verdure de la terre , au lieu de ces campagnes riches et fleuries où les plantes et les animaux trouvent aisément leur subsistance , uue triste mer couvrirent 1 le globe entier , et qu’il ne resteroit à hi terre de tous ses attributs, que celui d’être une planète obscure, abandonnée et destinée tout au plus à l’habitation des poissons. Mais indépendamment de la nécessiteijl morale , laquelle ne doit que rarement faire preuve en philosophie , il y a une nécessite physique pour que la terre soit irrégulière; à sa surface; et cela, parce qu’en la sup posant même parfaitement régulière dan son origine , le mouvement des eaux , le feux souterrains, les vents et les autre causes extérieures auroient nécessairemen produit à la longue des irrégularités sem niables à celles que nous.. voyons. Les plus grandes inégalités sont les pro fondeurs de l’Océan, comparées à l’élévatioi ; des montagnes ; cette profondeur de l’Océai | est fort différente, même à de grandes dis | tances des terres ; on prétend qu’il y a de ART. IX. INÉGALITÉS DE LA TERRE. 1 St j endroits qui ont jusqu’à une lieue de pro- , fondeur : mais cela est rare , et les profon- i deurs les plus ordinaires sont depuis 60 jus- ] qu’à i5o brasses. Les golfes et les parages ii voisins des côtes sont bien moins profonds, 1 et les détroits sont ordinairement les en- droits de la mer où l’eau a le moins de pro- fondeur. Pour sonder les profondeurs de la mer, on se sert ordinairement d’un morceau de plomb de 3o ou 40 livres, qu’on attache à une petite corde. Cette manière est fort bonne pour les profondeurs ordinaires : mais lorsqu’on veut sonder de grandes pro- fondeurs , on peut tomber dans l’erreur , et ne pas trouver de fond où cependant il y en a , parce que la corde étant spécifique- ment moins pesante que l’eau , il arrive , après qu’on en a beaucoup dévidé, que le volume de la sonde et celui de la corde ne pèsent plus qu’auîant ou moins qu’un pa- reil volume d’eau : dès lors la sonde ne des- cend plus, elle s’éloigne en ligne oblique , en se tenant toujours à la meme hauteur : 'ainsi , pour sonder de grandes profondeurs, il faudroit une chaîne de fer ou d’autre ma- tière plus pesante que l’eau. Il est assez pro- bable que c’est faute d’avoir fait cette atten- tion , que les navigateurs nous disent que la mer n’a pas de fond dans une si grande ! quantité d’endroits. En général , les profondeurs dans les hautes mers augmentent ou diminuent d’une manière assez uniforme ; et ordinairement plus on s’éloigne des côtes , plus la profon- deur est grande : cependant cela n’est pas sans exception , et il y a des endroits au milieu de la mer où l’on trouve des écueils, comme aux Abrolhos dans la mer Atlanti- que ; d autres où il y a des bancs d’une étendue très-considérable , comme le grand banc , le banc appelé le Borneur dans no- tre Océan , les bancs et les bas-fonds de l’Océan indien , etc. I De même le long des côtes les profon- deurs sont fort inégales : cependant on peut donner comme une règle certaine , que la profondeur de la mer à la côte est toujours proportionnée à la hauteur de cette même côte , en sorte que si la côte est fort élevée, ; la profondeur sera fort grande ; et , au con- i traire , si la plage est basse et le terrain plat , la profondeur est fort petite , comme dans les fleuves où les rivages élevés annon- cent toujours beaucoup de profondeur , et où les grèves et les bords de niveau mon- trent ordinairement un gué , ou du moins une profondeur médiocre. Il est encore plus aisé de mesurer la hau- teur des montagnes que de sonder les pro- fondeurs des mers , soit au moyen de la géométrie pratique, soit par le baromètre : cet instrument peut donner la hauteur d’une montagne fort exactement, surtout dans les pays où sa variation n’est pas considé- rable , comme au Pérou et sous les autres climats de l’équateur. On a mesuré par l’un ou l’autre de ces deux moyens la hau- teur de la plupart des éminences qui sont à la surface du globe; par exemple, on a trouvé que les plus hautes montagnes de la Suisse sont élevées d’environ seize cents toises au dessus du niveau de la mer plus que le Canigou , qui est une des plus hau- tes de Pyrénées1. Il paraît que ce sont les plus hautes de toute l’Europe ,' puisqu’il en sort une grande quantité de fleuves, qui portent leurs eaux dans différentes mers fort éloignées , comme le Pô , qui se rend dans la mer Adriatique; le Rhin, qui se perd dans les sables en Hollande; le Rhône, qui tombe dans la Méditerranée ; et le Danube, ii va jusqu’à la mer Noire. Ces quatre mves, dont les embouchures sont si éloi- gnées les unes des autres , tirent tous une partie de leurs eaux du mont Saint-Gothard et des montagnes voisines; ce qui prouve que ce point est le plus élevé de l’Europe. Les plus hautes montagne de l’Asie sont le mont Taurus , le mont Xmaüs , le Cau- case , et les montagnes du Japon. Toutes ces montagnes sont plus élevées que celles de l'Europe; celles d’Afrique, le grand Atlas, et les monts de la Lune sont au moins aussi hautes que celles de l’Asie ; et les plus élevées de toutes sont celles de l’Amérique méridionale, surtout celles du Pérou , qui ont jusqu’à 3ooo toises de hau- teur au dessus du niveau de la mer. En gé- néral , les montagnes entre les tropiques sont plus élevées que celles des zones tem- pérées , et celles-ci plus que celles des zo- nes froides ; de sorte que plus on approche de l’équateur , et plus les inégalités de la surface de la terre sont grandes. Ces inéga- lités , quoique fort considérables par rap- port à nous , ne sont rien quand on les con- sidère par rapport au globe terrestre. Trois mille toises de différence sur trois mille lieues de diamètre , c’est une toise sur une lieue , ou un pied sur deux mille deux cents pieds ; ce qui, sur un globe de deux pieds et demi de diamètre , ne fait pas la sixième partie d’une ligne : ainsi la terre, dont la 1. Voyez Y Histoire de V Académie, 1708, p. s4* THÉORIE DE LA TERRE. surface nous paroit traversée et coupée par !a hauteur énorme des montagnes et par la rofondeur affreuse des mers , n’est cepen- ant , relativement à son volume , que très- légèrement sillonnée d’inégalités si peu sen- sibles , quelles ne peuvent causer aucune différence à la figure du globe. Dans les continens , les montagnes sont continues et forment des chaînes ; dans les îles , elles paraissent ê tre ni us interrompues et plus isolées , et elles s’élèvent ordinaire- ment au dessus de la mer en forme de cône ou de pyramide , et on les appelle des pics. Le pic de Ténériffe , dans l’île de Fer , est une des plus hautes montagnes de la terre ; elle a près d’une lieue et demie de hauteur perpendiculaire au dessus du niveau de la mer. Le pic de Saint-George dans l’une des Açores , le pic d’Adam dans l’île de Ceylan , sont aussi fort élevés. Tous ces pics sont composés de rochers entassés les uns sur les autres, et ils vomissent à leur sommet du feu, des cendres, du bi- tume , des minéraux et des pierres. Il y a même des îles qui ne sont précisément que des pointes de montagnes , comme l’ile Sainte-Hélène , File de l’Ascension , la plu- part des Canaries et des Açores; et il faut remarquer que dans la plupart des îles , des promontoires et des autres terres avancées dans la mer , la partie du milieu est tou- jours la plus élevée , et qu’elles sont ordi- nairement séparées en deux par des chaînes de montagnes qui les partagent dans leur plus grande longueur , comme en Écosse le mont Gransbain, qui s’étend d’orient en occident , et partage l’île de la Grande-Bre- tagne en deux parties : il en est de même des îles de Sumatra , de Luçon , de Bornéo, des Célèbes , de Cuba , et de Saint-Domin- gue , et aussi de l'Italie , qui est traversée dans toute sa longueur par l’Apennin , de la presqu’île de Corée , de celle de Ma- laye, etc. Les montagnes , comme l’on voit , diffè- rent beaucoup en hauteur; les collines sont les plus basses de toutes ; ensuite viennent ïes montagnes médiocrement éle- vées , qui sont suivies d’un troisième rang de montagnes encore plus hautes, lesquel- les , comme les précédentes , sont ordinaire- ment chargées d’arbres et de plantes , mais qui , ni les unes ni les autres , ne fournis- sent aucune source , excepté au bas ; enfin les plus hautes de toutes les montagnes sont celles sur lesquelles on ne trouve (pie du sable , des pierres , des cailloux , et des ro- chers dont les pointes s’élèvent souvent jusqu’au dessus des nues : c’est précisément au pied de ces rochers qu’il y a de petits espaces, de petites plaines, des enfonce- mens , des espèces de vallons où l’eau de la pluie , la neige et la glace s’arrêtent , et où elles forment des étangs , des marais, des fontaines , d’où les fleuves tirent leur origine r. La forme des montagnes est aussi fort diffthente : les unes forment des chaînes dont la hauteur est assez égale dans une très-longue étendue de terrain , d’autres sont coupées par des vallons très -profonds; les unes ont des contours assez réguliers, d’autres paroissent au premier coup d’œil irrégulières , autant qu’il est possible de l’être ; quelquefois on trouve au milieu d’un vallon ou d’une plaine un monticule isolé : et de même qu’il y a des montagnes de différentes especes , il y a aussi de deux sortes de plaines , les unes en pays bas, les autres en montagnes : les premières ' sont ordinairement partagées par le cours de quelque grosse rivière ; les autres , quoique d’une étendue considérable , sont èches, et n’ont tout au plus que quelque petit ruisseau. Ces plaines en montagnes sont souvent fort élevées , et toujours de diffi- cile accès : elles forment des pays au dessus des autres pays, comme en Auvergne, en Savoie , et dans plusieurs autres pays éle- vés ; le terrain ep est ferme et produit beaucoup d’herbes et de plantes odoriféran- tes, ce qui rend ces dessus de montagnes les meilleurs pâturages du monde. Le sommet des hautes montagnes est com- posé de rochers plus ou moins élevés , qui ressemblent , surtout vus de loin , aux on- des de la mer 2. Ce n’est pas sur cette ob- servation seule que l’on pourrait assurer, comme nous l’avons fait, que les montagnes ont été formées par les ondes de la mer, et je ne la rapporte que parce qu’elle s’accorde avec toutes les autres. Ce qui prouve évi- demment que la mer a couvert et formé les montagnes , ce sont les coquilles et les autres productions marines qu'on trouve partout en si grande quantité , qu’il n’est pas possible qu’elles aient été transportées de la mer actuelle dans des continens aussi éloignés et à des profondeurs aussi considé- rables. Ce qui le prouve , ce sont les cou- ches horizontales et parallèles qu’on trouve partout , et qui ne peuvent avoir été for- 1. Voyez Lettres philosophiques sur la formation des sels , page 198. 2. Voyez Lettres philosophiques sur la formation des sels, page 196. ART. IX. INÉGALITÉS DE LA TERRE. mées que par les eaux ; c’est la composition j des matières , même les plus dures , comme ! de la pierre et du marbre , à laquelle ou recouuoît clairement que les matières étoient réduites en poussière avant la formation de ces pierres et de ces marbres , et qu’elles se sont précipitées au fond de l'eau en forme de sédiment ; c’est encore l’exactitude avec laquelle les coquilles sont moulées dans ces matières ; c’est l’intérieur de ces mêmes co- jquilles , qui est absolument rempli des ma- nières dans lesquelles elles sont renfermées : et enfin ce qui le démontre incontestable- ment , ce sont les angles correspondans des moniagnes et des collines , qu’aucune autre cause que les courans de la mer n’auroit pu former ; c’est l’égalité de la hauteur des jcoilines opposées et les lits des différentes matières qu’on y trouve à la même hauleur ; c’est la direction des montagnes, dont les chaînes s’étendent en longueur dans ' le même sens , comme l’on voit s’étendre les ondes de la mer. A l’égard des profondeurs qui sont à la jisurface de la terre , les plus grandes sont [sans contredit les profondeurs de la mer : mais comme elles ne se présentent point jà l’oeil , et qu’on n’en peut juger que par la sonde , nous n’entendons parler que des profondeurs de terre ferme, tei- lles que les profondes vallées que l’on voit entre les montagnes , les précipices qu’on trouve entre les rochers , les abîmes qu’on aperçoit du haut des montagnes , comme l’abîme du mont Ararath , les précipices [les Alpes , les vallées des Pyrénées. Ces profondeurs sont une suite naturelle de jj’élévation des montagnes ; elles reçoivent des eaux et les terres qui coulent de la [montagne ; le terrain en est ordinaire- ment très-fertile et fort habité. Pour les précipices qui sont entre les rochers , ils ie forment par l’affaissement des rochers, pont la base cède quelquefois plus d’un “ôté que de l’autre , par l’action de l’air t de la gelée qui les fait fendre et qui les sépare, et par la chute impétueuse (les torrens qui s’ouvrent des routes et Entraînent tout ce qui s’oppose à leur vio- lence : mais ces abîmes , c’est-à-dire ces pionnes et vastes précipices qu’on trouve ui sommet des montagnes , et au fond des- quels il n’est quelquefois pas possible de descendre , quoiqu’ils aient une demi-lieue pu une lieue de tour , ont été formés par le feu ; ces abîmes éloient autrefois les loyers des volcans, et toute la matière qui y manque en a été rejetée par faction et i53 l’explosion de ces feux , qui depuis se sont éteints faute de matière combustible. L’abîme du mont Ararath, dont M. de Tournefort donne la description dans son Voyage du Levant , est environné de rochers noirs et brûlés , comme seront quelque jour les abî- mes de l’Etna , du Vésuve , et de tous les autres volcans , lorsqu’ils auront consumé toutes les matières combustibles qu’ils ren- ferment. Dans V Histoire naturelle de la province de Stafford en Angleterre , par Plot , il est parlé d’une espèce de gouffre qu’on a sondé jusqu’à la profondeur de 2600 pieds perpendiculaire, sans qu’on y ait trouvé d’eau : on n’a pu même en trouver le fond, parce que la corde n’étoit pas assez longue r. Les grandes cavités et les mines profon- des sont ordinairement dans les montagnes, et elles ne descendent jamais , à beaucoup près , au niveau des plaines : ainsi nous ne connoissons par ces cavités que l’intérieur de la montagne , et point du tout celui du globe. D’ailleurs ces profondeurs ne sont pas en effet fort considérables. Ray assure que les plus profondes n’ont pas un demi-mille de profondeur. La mine de Cotteberg, qui, du temps d’Agricola, passoit, pour la plus pro- fonde de toutes les mines connues , n’avoit que 9.500 pieds de profondeur perpendicu- laire. U est vrai qu’il y a des trous dans certains endroits, comme celui dont nous venons de parler dans la province de Staf- ford , ou le Poolshole dans la province de Darby en Angleterre, dont la profondeur est peut-être plus grande : mais tout cela n’est rien en comparaison de l’épaisseur du globe. Si les rois d’Égypte , au lieu d’avoir fait des pyramides et élevé d’aussi fastueux mo- numens de leurs richesses et de leur vanité, eussent fait la même dépense pour sonder la terre et y faire une profonde excavation, comme d’une lieue de profondeur , on au - roit peut-être trouvé des matières qui au- roient dédommagé de la peine et de la dé- pense , ou tout au moins on auroit des con- noissances qu’on n’a pas sur les matières dont le globe est composé à l’intérieur ; ce qui seroit peut-être fort utile. Mais revenons aux montagnes. Les plui élevées sont dans les pays méridionaux ; et plus on approche de l’équateur , plus on trouve d’inégalités sur la surface du globe. Ceci est aisé à prouver par une courte énu- mération des montagnes des îles. 1. Voyez le Journal des Savons, année 1680, p. ia. X54 THÉORIE DE LA TERRE. En Amérique , la chaîne des Cordillères, les plus hautes montagnes de la terre , est précisément sous l’équateur , et elle s’étend des deux côtés bien loin au delà des cer- cles qui renferment la zone torride. En Afrique, les hautes montagnes de la Lune et du Monomotapa , le grand et le pe- tit Atlas, sont sous l’équateur, ou n’en sont pas éloignés. En Asie, le morit Caucase, dont la chaîne s’étend sous différens noms jusqu’aux mon- tagnes de la Chine, est, dans toute cette étendue, plus voisin de l’équateur que des pôles. En Europe, les Pyrénées, les Alpes, et les montagnes de la Grèce , qui ne sont que la même chaîne, sont encore moins éloi- gnées de l’équateur que des pôles. Or ces montagnes dont nous venons de faire l’énumération sont toutes plus élevées, plus considérables et plus étendues en lon- geur et en largeur que les montagnes des pays septentrionaux. A l’égard de la direction de ces chaînes de montagnes , on verra que les Alpes prises dans toute leur étendue forment une chaîne qui traverse le continent entier depuis l’Es- pagne jusqu’à la Chine : ces montagnes com- mencent au bord de la mer en Galice , ar- rivent aux Pyrénées, traversent la France par le Vivarais et l’Auvergne, séparent l’Ita- lie, s’étendent en Allemagne et au-dessus de la Daîmatie jusqu’en Macédoine , et de là se joignent avec les montagnes d’Arménie, le Caucase, leTaurus, l’Imaüs, et s’étendent jusqu’à la mer de Tartarie. De même le mont Atlas traverse le continent entier de l’Afrique d’occident en orient, depuis le royaume de Fez jusqu’au détroit de la mer Rouge. Les monts de la Lune ont aussi la même direction. Mais en Amérique la direction est toute contraire , et les chaînes des Cordilières et des autres montagnes s’étendent du nord au sud plus que d’orient en occident *. i. Cette dernière assertion doit être modifiée : car quoiqu’il paroisse au premier coup d’œil qu’on puisse suivre les montagnes de l’Espagne jusqu’à la Chine, en passant des Pyrénées, en Auvergne, aux Alpes, en Allemagne, en Macédoine, au Cau- case, et autres montagnes de l’Asie jusqu’à la mer de Tartarie, et quoiqu’il semble de même que le mont Atlas partage d’occident en orient le continent de l’Afrique, cela n’empêche pas que le milieu de cette grande presqu’île ne soit une chaîne continue de hautes montagnes qui s’étend depuis le mont Atlas aux monts de la Lune, et des monts de la Lune jusqu’aux terres du cap de Bonne-Espérance; en sorte que l’Afrique doit être considérée comme composée de montagnes qui en occupent le milieu Ce que nous observons ici sur les plus grandes éminences du globe peut s’observer dans toute sa longueur, et qui sont disposées du nord au sud et dans la même direction que celles de l’Amérique. Les parties de l’Atlas qui s’étendent depuis le milieu et des deux côtés vers l’occident et vers l’orient, ne doivent être considérées que comme des branches de la chaîne principale. Il en sera de même de la partie des monts de la Lune qui s'étend vers l’occident et vers l’orient : ce sont des montagnes collatérales de la branche principale qui occupe l’intérieur, c’est-à-dire le milieu de l’A- frique; et s’il n’y a point de volcans dans cett* prodigieuse étendue de montagnes , c’esi parce que la mer est des deux côtés fort éloignée du milieu de cette vaste presqu’île; tandis qu’en Amérique lg mer est très-voisine du pied des hautes montagnes, et qu’au lieu de former le milieu de la presqu’île de l’Amérique méridionale, elles sont au contraire toutes situées à l’occident , et que l’étendue des basses terres est en entier du côté de l’orient. La grande chaîne des Cordilières n’est pas la seule, dans le nouveau continent, qui soit dirigée du nord au sud ; car dans le terrain de la Guiane, à environ cent cinquante lieues de Cayenne, il y s aussi une chaîne d’assez hautes montagnes qui courl également du nord au sud : cette montagne est si escarpée du côté qui regarde Cayenne, qu’elle est, pour ainsi dire, inaccessible. Ce revers à-plomb dt la chaîne de montagnes semble indiquer qu’il y a d< l’autre côté une pente douce et une bonne terre) aussi la tradition du pays, ou plutôt le témoignagi des Espagnols, est qu’il y a au delà de cette montagne des nations de sauvages réunis en assez grand nomi. bre. On a dit aussi qu’il y avoit une mine d’or danj, ces montagnes, et un lac où l’on trouvoit des pail lettes d’or; mais ce fait ne s’est pas confirmé. En Europe, la chaîne de montagnes qui comi mence en Espagne, passe en France, en Allemagne et en Hongrie , se partage en deux grandes brani clics, dont l’une s’éiend en Asie par les montagne ; de la Macédoine, du Caucase, etc. , et l’autre bran ! che passe de la Hongrie dans la Pologne, la Rus j sie, et s’étend jusqu'aux sources du Wolga et di j Borysthène; et se prolongeant encore plus loin i elle gagne une autre chaîne de montagnes en SiM bérie qui aboutit enfin à la mer du Nord à l’occl ! dent du fleuve Oby. Ces chaînes de montagne j doivent être regardées comme un sommet presquj 1 continu , dans lequel plusieurs grands fleuves prêt j lient leurs sources : les uns , comme le Tage , j I Doure en Espagne, la Garonne, la Loire en FranO'j le Rhin en Allemagne, se jettent dans l’Océan; h '1 autres, comme l’Oder, la Vistule, le Niémen,! | jettent dans la mer Baltique; enfin d’autres fleuve. ; comme la Doine, tombent dans la mer Blanche, ! j le fleuve Petzora dans la mer Glaciale. Du côté < | l’orient, cette même chaîne de montagnes donufl naissance à l’Yeucar et l’Èbre en Espagne, an Rhôi ; en France, au Pô en Italie, qui tombent dans 3 mer Méditerranée; au Danube et au Don, qui ; | perdent dans la mer Noire; et enfin au Wolga , q tombe dans la mer Caspienne. Le sol de la Norwége est plein de rochers et < ?ji groupes de montagnes 11 y a cependant des plain i fort unies de six, huit et dix milles d’étendue. 1 !|i direction des montagnes n’est point à l’ouest < l’est, comme celles des autres montagnes de l’E; j i rope ; elles vont au contraire, comme les Cordilièrt q i du sud au nord. Dans l’Asie méridionale , depuis l’île de Ceyl ART. IX. INÉGALITÉS DE LA TERRE. iussi sur les plus grandes profondeurs de a mer. Les plus vastes et les plus hautes uers sont plus voisines de l’équateur que des >ôles, et il résulte de celte observation que es plus grandes inégalités du globe se trou- ent dans les climats méridionaux. Ces irré- ularités qui se trouvent à la surface du lobe , sont la cause d’une infinité d’effets rdinaires et extraordinaires; par exemple, ntre les rivières de l’Inde et du Gange il y t le cap Comorin , il s’étend une chaîne de mon- tgnes qui sépare le Malabar -de Coromandel , tra- erse le Mogol , regagne le mont Caucase , se pro- mge dans le pays des Calmouks , et s’étend jus- u’à la mer du Nord à l’occident du fleuve I r lis : n en trouve une autre qui s’étend de même du ord au sud jusqu’au cap Razalgat en Arabie, et u’on peut suivre à quelque distance de la mer ouge jusqu’à Jérusalem ; elle environne l’extrémité e la mer Méditerranée et la pointe de la mer Noire, t de là s’étend par la Russie jusqu’au même point e la mer du Nord On peut aussi observer que les montagnes de Indostan et celles de Siam courent du sud au nord, t vont également se réunir aux rochers du Thibel t de la Tartarie. Ces montagnes offrent, de cha- ue coté, des saisons différentes : à l’ouest on a six ois de pluie , tandis qu'on jouit à l’est du plus ;au soleil. Toutes les montagnes de Suisse , c’est-à-dire celles e la Vallésie et des Grisons , celles de la Savoie , u Piémont et du Tyrol , forment une chaîne qui étend du nord au sud jusqu’à la mer Méditer- anée. Le mont Pilate, situé dans le canton de Lu- erne, à peu près dans le centre de la Suisse, forme ne chaîne d’environ quatorze lieues qui s’étend du ord au sud jusque dans le canton de Berne. On peut donc dire qu’en général les plus grandes minences du globe sou: disposées du nord au sud, que celles qui courent dans d’autres directions ne oivent être regardées que comme des branches llatérales de ces premières montagnes ; et c’est partie par cette disposition de montagnes pri- nitives , que toutes les pointes des continens se résentent dans la direction du nord au sud, comme i le voit à la pointe de l’Afrique, à celle de l’A- érique, à celle de Californie, à celle de Groen- nd , au cap Comorin , à Sumatra , à la Nouvelle- ollande, etc.; ce qui paroît indiquer, comme ous l’avons déjà dit , que toutes les eaux sont enues en plus grande quantité du pôle austral que u pôle boréal. Si l’on consulte une nouvelle mappemonde, dans quelle on a représenté autour du pôle arctique outes les terres des quatre parties du monde , à exception d’une pointe de l’Amérique , et autour lu pôle antarctique, toutes les mers et le peu de erres qui composent l’hémisphère pris dans ce ens , on reconnoîtra é idemment qu’il y a eu beau- oup plus de boulever-emens dans ce second hémi- phère que dans le premier, et que la quantité des aux y a toujours été et y est encore bien plus onsidérable que dans notre hémisphère. Tout con- ourt donc à prouver que les plus grandes inégalités Ju globe se trouvent dans les parties méridionales, Iît que la direction la plus générale des montagnes jriiniiives est du nord au sud plutôt que d’orient ;n occident dans toute l’étendue de la surface du ;lobe. (Add. Buff.) i55 a une large chersonèse qui est divisée dans son milieu par une chaîne de hautes mon- tagnes que l’on appelle le Gâte, qui s’étend du nord au sud depuis les extrémités du mont Caucase jusqu’au cap de Comorin : de l’un des côtés est Malabar, et de l’autre Coromandel; du côté de Malabar, entre cette chaîne de montagnes et la mer, la sai son de l’été est depuis le mois de septembre jusqu’au mois d’avril, et pendant tout ce temps le ciel esl serein et sans aucune pluie; de l’autre côté de la montagne , sur la côte de Coromandel , celte même saison est leur hiver, et il y pleut tous les jours en abon- dance; et du mois d’avril au mois de sep- tembre c’est la saison de l’été , tandis que c’est celle de l’hiver en Malabar; en sorte qu’en plusieurs endroits qui ne sont guère éloignés que de 20 lieues de chemin , on peut , en croisant la montagne , changer de saison. On dit que la même chose se trouve au cap Razalgat en Arabie, et de même à la Jamaïque, qui est séparée dans son mi- lieu pas une chaîne de montagnes dont la direction esl de l’est à l’ouest, et que les plantations qui sont au midi de ces mon- tagnes éprouvent la chaleur de l’été, tandis que celles qui sont au nord souffrenl la ri- gueur de l’iiiver dans ce même temps. Le Pérou , qui esl situé sous la ligne et qui s’étend à environ mille lieues vers le midi , est divisé en trois parties , longues, étroites, que les habitans da Pérou appellent lanos , sierras, et andes. Les lanos, qui sont les plaines, s’étendent tout le long de la côte de la mer du Sud ; les sierras sont des col- lines avec quelques vallées, et les andes sont ces fameuses Cordilières, les plus hautes montagnes que l’on commisse. Les lanos ont 10 lieues plus ou moins de largeur; dans plusieurs endroits les sierras ont 20 lieues de largeur, et les andes autant, quelquefois plus, quelquefois moins : la largeur est de ï’esl à l’ouest , et la longueur est du nord au sud. Cette partie du monde a ceci de remar- quable : i° dans les lanos, le long de toute cette côte , le vent de sud-ouest souffle constamment , ce qui est contraire à ce qui arrive ordinairement dans la zone torride ; 20 il ne pleut ni ne tonne jamais dans les lanos, quoiqu’il y tombe quelquefois un peu de rosée ; 3° il pleut presque continuelle- ment sur les andes; 40 dans les sierras , qui sont entre les lanos et les andes , il pleut depuis le mois de septembre jusqu’au mois d’avril. On s’est aperçu depuis long-temps que les chaînes des plus hautes montagnes alloient THÉORIE DE LÀ TERRE. d’occident en orient; ensuite, après la dé- couverte du Nouveau -Monde, on a vu qu’il y en avoit de fort considérables qui tour- noient du nord au sud : mais personne n’â voit découvert avant M. Rôurguet la sur- prenante régularité de la structure de ces grandes masses; il a trouvé, après avoir passé trente fois les Alpes en quatorze en- droits différens, deux fois l’Apennin, et fait plusieurs tours dans les environs de ces montagnes et dans le mont Jura, que toutes les montagnes sont formées dans leurs con- tours à peu près comme les ouvrages de fortification. Lorsque le corps d’une mon- tagne va d’occident en orient , elle forme des avances qui regardent, autant qu’il est possible, le nord et le midi : cette régularité admirable est si sensible dans les vallons, qu’il semble qu’on y marche dans un che- min couvert fort régulier; car si, par exemple , on voyage dans un vallon du nord au sud, on remarque que la montagne qui est à droite forme des avances ou des angles qui regardent l’orient , et ceux de la mon- tagne du côté gauche regardent l’occident; de sorte que néanmoins les angles saillans de chaque côté répondent réciproquement aux angles rentrais qui leur sont toujours alternativement opposés. Les angles que les montagnes forment dans les grandes vallées sont moins aigus, parce que la pente est moins roide, et qu’ils sont plus éloignés les uns des autres; et dans les plaines ils ne sont sensibles que dans le cours des rivières, qui en occupent ordinairement le milieu : leurs coudes naturels répondent aux avances les plus marquées ou aux angles les plus avancés des montagnes auxquelles le terrain, où les rivières coulent , va aboutir. Il est étonnant qu’on n’ait pas aperçu une chose si visible; et lorsque dans une vallée la pente de l’une des montagnes qui la borde est moins rapide que celle de l’autre, la ri- vière prend son cours beaucoup plus près de la montagne la plus rapide, et elle ne coule jias dans le milieu *. On peut joindre à ces observations d’au- tres observations particulières qui les con- firment : par exemple , les montagnes de Suisse sont bien plus rapides , et leur pente est bien plus grande du côté du midi que du côté du no; d , et plus grande du côté du couchant que du côté du levant ; on peut le voir dans la montagne Gemmi , dans le mont Brisé, et dans presque toutes les autres montagnes. Les plus hautes de ce pays sont i. Voyez Lettres philosophiques sur la formation des sels, pages 181 et 200. celles qui séparent la Vallès ie et les Grisoi de la Savoie , du Piémout , et du Tyrol ; c [ pays sont eux-mêmes une continuation c ces montagnes , dont la chaîne s’étend ju qu’à la Méditerranée , et continue mèn assez loin sous les eaux de celte mer : l montagnes des Pyrénées ne sont aussi qu’ur continuation de cette vaste montagne qi commence dans la Vallésie supérieure, < dont les branches s’étendent fort loin a couchant et au midi , en se soutenant toi jours à une grande hauteur, tandis qu’a contraire du côté du nord et de l’est c< montagnes s’abaissent par degrés jusqu’à di venir des plaines ; comme on le voit par h vastes pays que le Rhin, par exemple , et 1 Danube arrosent avant que d’arriver à leur embouchures , au lieu que le Rhône des cend avec rapidité vers le midi dans la me Méditerranée. La même observation sur 1 penchant plus rapide des montagnes du eôt du midi et du couchant que du côté d ! nord ou du levant, se trouve vraie dans lé montagnes d’Angleterre et dans celles dd Norwége : mais la partie du monde où cel I se voit le plus évidemment c’est au Pérou et au Chili ; la longue chaîne des Cordilièret est coupée très-rapidement du côté dit couchant, le long de la mer Pacifique; au lieu que du côté du levant elle s’abaiss»; par degrés dans de vastes plaines arrosé» par les plus grandes rivières du monde. M. Bourguet, à qui on doit cette belbl observation de la correspondance des angled des montagnes , l’appelle avec raison , Itl clef de la théorie de la terre ; cependant , i me paroît que s’il en eût senti toute l’imt portahce , il l’auroit employée plus heureuu sement en la liant avec des faits plus com venables, et qu’il auroil donné une théorie de la terre plus vraisemblable , au lieu que dans son mémoire, dont on a vu l’exposé I il ne présente que le projet d’un systèmn hypothétique dont le plupart des consé i quences sont fausses ou précaires. La théorie que nous avons donnée roule sur quatrtî faits principaux, desquels on ne peut pa, ' douter après avoir examiné les preuves qu ‘ les constatent : le premier est, que la tern i est partout, et jusqu’à des profondeurs con sidérables , composée de couches parallèle: ; et de matières qui ont été autrefois dan: un état de mollesse ; le second , que la mei a couvert pendant quelque temps la terr» que nous habitons; le troisième, que le: marées et les autres mouvemens des eauj produisent des inégalités dans le fond de h ; mer ; et le quatrième , que ce sont les cou ART. IX. INÉGALITÉS DE LA TERRE. i5y rans de la mer qui ont donné aux mon- tagnes la forme de leurs contours , et la di- (ç action correspondante dont il est question, d On jugera, après avoir lu les preuves que 8 soutiennent les articles suivans, si j’ai eu B fort d’assurer que ces faits solidement établis, |{ dablissent aussi la vraie théorie de la terre. U ]e que j’ai dit dans le texte au sujet de la » formation des montagnes , n’a pas besoin l’une plus ample explication; mais comme m >n pourroit m’objecter que je ne rends pas )ü aison de la formation des pics ou pointes Je montagnes, non plus que de quelques ef utres faits particuliers, j’ai cru devoir ajou- ter ici les observations et les réflexions que le ’ai faites sur ce sujet. I J’ai tâché de me faire une idée nette et u| jénérale de la manière dont sont arrangées jj es différentes matières dont se compose le lt ;lobe, et il m’a paru qu’on pouvoit les con- Jlidérer d’une manière différente de celles font on les a vues jusqu’ici ; j’en fais deux dj lasses générales, auxquelles je les réduis je outes : la première est celle des matières d( ue nous trouvons posées par couches, par its, par bancs horizontaux ou régulièrement ncliaés; et la seconde comprend toutes les aatières qu’on trouve par amas, par filons, r veines perpendiculaires et irrégulière- nent inclinées. Dans la première classe, ont compris les sables, les argiles, les gra- ites ou le roc vif, les cailloux, et les grès n grande masse , les charbons de terre , les |lrdoises, les schistes, etc., et aussi les j||narnes, les craies, les pierres calcinables, ltes marbres, etc. Dans la seconde, je mets j es métaux , les minéraux , les cristaux , les lierres fines, et les cailloux en petites passes. Ces deux classes comprennent gé- néralement toutes les matières que nous con- loissous : les premières doivent leur origine ux sédimens transportés et déposés par les jaux de la mer, et on doit distinguer celles ui, étant mises à l’épreuve du feu, se câl- inent et se réduisent en chaux, de celles [ui se fondent et se réduisent en verre ; pour îs secondes , elles se réduisent toutes en erre, à l’exception de celles que le feu onsume entièrement par l’inflammation. Dans la première classe , nous distingue- rons d’abord deux espèces de sable : l’une jue je regarde comme la matière la plus abondante du globe , qui est vitrifiable, ou plutôt qui n’est qu’un composé de fragmens le verre ; l’autre , dont la quantité est beau- jjoup moindre , qui est calcinable , et qu’on ioit regarder comme du débris et de la pous- sière de pierre , et qui ne diffère du gravier que par la grosseur des grains. Le sable vi- trifiable est , en général , posé par couches comme toutes les autres matières : mais ces couches sont souvent interrompues par des masses de rochers de grès , de roc vif , de caillou , et quelquefois ces matières sont aussi des bancs et des lits d’une grande étendue. En examinant ce sable et ces matières vitrifiables , on n’y trouve que peu de co- quilles de mer ; et celles qu’on y trouve ne sont pas placées par lits , elles n'y sont que parsemées et comme jetées au hasard : par exemple , je n’en ai jamais vu dans les grès ; cette pierre, qui est fort abondante en cer- tains endroits, n’est qu’un composé de par- ties sablonneuses qui se sont réunies : on ne la trouve que dans les pays où le sable vitrifiable domine, et ordinairement les car- rières de grès sont des collines pointues , dans des terres sablonneuses , et dans des éminences entrecoupées. On peut attaquer ces carrières dans tous les sens ; et s’il y a des lits, ils sont beaucoup plus éloignés les uns des autres que dans les carrières de pierres calcinables, ou de marbres : on coupe dans le massif de la carrière de grès des blocs de toutes sortes de dimensions et dans tous les sens , selon le besoin et la plus grande commodité ; et quoique le grès soit difficile à travailler, il n’a cependant qu’un genre de dureté c’est de résister à des coups violens sans s’éclater; car le frot- tement l’use peu à peu et le réduit aisé- ment en sable, à l’exception de certains clous noirâtres qu’on y trouve , et qui sont d’une matière si dure , que les meilleures limes ne peuvent y mordre. Le roc vif est vitrifiable comme le grès, et il est de la même nature ; seulement il est plus dur , et les parties en sont mieux liées : il y a aussi plusieurs clous semblables à ceux dont nous venons de parler, comme on peut le remarquer aisément sur le sommet des hau- tes montagnes, qui sont pour la plupart de cette espèce de rocher, et sur lesquels on ne peut pas marcher un peu de temps sans s’apercevoir que ces clous coupent et déchi- rent le cuir des souliers. Ce roc vif qu’on trouve au dessus des hautes montagnes , et que je regarde comme une espèce de gra- nité , contient une grande quantité de paillettes talqueuses , et il a tous les genres de dureté au point de ne pouvoir être tra- vaillé qu’avec une peine infinie. J’ai examiné de près la nature de ces clous 1 qu’on trouve dans le grès et dans le i. J’ai dit qu’on trouve dans les grès des espèces de * ! ï58 THÉORIE DÉ LA TERRE, roc vif, et j’ai reconnu que c’est une ma tièi'e métallique fondue et calcmee a un feu clous, etc. Cela semble indiquer que les grandes masses de grès doivent leur origine à l’action du feu primitif. J’avois d’abord pensé que cette ma tière ne devoit sa dureté et la réunion de ses par lies qu’à l’intermède de l’eau; mais je me suis as suré , depuis , que l’action du feu produit le même effet , et je puis citer sur cela des expériences qui d’abord m’ont surpris , et que j’ai répétées assez souvent pour n’en pouvoir douter. BXPÉRIÏNCB3. J’ai fait broyer des grès de différens degrés de dureté , et je les ai fait tamiser en poudre plus ou moins fine pour m’en servir à couvrir les cémenta- tions dont je me sers pour convertir le fer en acier: cette poudre de grès répandue sur le cément, et amoncelée en forme de dôme de trois ou quatre pouces d’épaisseur, sur une caisse de trois pieds de longueur et deux pieds de largeur, ayant subi l’action d’un feu violent dans mes fourneaux d’aspi- ration pendant plusieurs jours et nuits de suite sans interruption , n’étoit plus de la poussière de grès, mais une masse solide, q e l’on étoit obligé de casser pour découvrir la caisse qui contenoit le fer converti en acier boursouflé ; en sorte que l’ac- tion du feu sur cette poudre de grès en a fait des masses aussi solides que le grès de médiocre qua- lité qui ne sonne point sous le marteau. Cela m’a démontré que le feu peut , tout aussi bien que l’eau , avoir agglutiné les sables vitrescibles , et avoir par conséquent formé les grandes masses de grès qui composent le noyau de quelques-unes de nos montagnes. Je suis donc très-persuadé que toute la matière vitrescible dont est composée la roche intérieure du globe, et les noyaux de ses grandes éminences extérieures , ont été produits par l’action du feu primitif, et que les eaux n’ont formé que les cou- ches inférieures et accessoires qui enveloppent ces noyaux, qui sont toutes posées par couches paral- lèles, horizontales ou également inclinées, et dans lesquelles on trouve des débris de coquilles et d’au- tres productions de la mer. Ce n’est pas que je prétende exclure l’intermède de l'eau pour la formation des grès et de plusieurs autres matières vitrescibles ; je suis, au contraire , porté à croire que le sable vitrescible peut acquérir de la consistance, et se réunir en masses plus ou moins dures par le moyen de l’eau, peut-être en- core plus aisément que par l’action du feu; et c’est seulement pour prévenir les objections qu’on ne manqueroit pas de faire, si l’on imaginoit que j’at- tribue uniquement à l’intermède de l’eau la solidité et la consistance du grès et des autres matières composées de sable vitrescible- Je dois même ob- server que les grès qui se trouvent à la superficie ou à peu de profondeur dans la terre, ont tous été formés par l’intermède de l’eau ; car l’on remarque des ondulations et des tournoiemens à la surface supérieure des masses de ces grès , et l’on y voit quelquefois des impressions de plantes et de co- quilles. Mais on peut distinguer les grès formés par le sédiment des eaux , de ceux qui ont été produits par le feu : ceux-ci sont d’un plus gros grain , et s’égrènent plus facilement que les grès dont l’agré- gation des parties est due à l’intermède de Peau. Ils sont plus serrés , plus compactes ; les grains qui les composent ont des angles plus vifs , et en gé- très-violent , et qui ressemble parfaiteme à de certaines matières rejetées par les vi cans , dont j’ai vu une très-grande quanti étant en Italie , où l’on me dit que les ge du pays les appeloient schiarri. Ce sont d masses noirâtres fort pesantes, sur lesquell le feu, l’eau, ni la lime, ne peuvent fai aucune impression , dont la matière est d. férente de celle de la lave , car celle-ci t une espèce de verre, au lieu que l’autre p roît plus métallique que vitrée. Les elo du grès et du roc vif ressemblent beaucoi à celte première matière; ce qui semJj prouver encore que toutes ces matières o:J été autrefois liquéfiées par le feu. On voit quelquefois en certains endroit au plus haut des montagnes , une prod néral ils sont plus solides et plus durs que les gr coagulés par le feu. Les matières ferrugineuses prennent un tri grand degré de dureté par le feu , puisque rii n’est si dur que la fonte de fer ; mais elles peuvei aussi acquérir une dureté considérable par l’inte mède de l’eau : je m’en suis assuré en mettant u; bonne quantité de limaille de fer dans des va. exposés à la pluie; cette limaille a formé d< masses si dures , qu’on ne pouvoit les casser qu’i marteau. La roche vitreuse qui compose la masse de l’i: térieur du globe est plus dure que le verre orcr] naire; mais elle ne l’est pas plus que certain laves de volcans, et beaucoup moins que la fom de fer, qui n’est cependant que du verre mêlé parties ferrugineuses. Cette grande dureté de roche du globe indique assez que ce sont les pa ties les plus fixes de toute la matière qui se so réunies, et que, dès le temps de leur consolid tion , elles ont pris la consistance et la dure« qu’elles ont encore aujourd’hui. L’on ne peut do; : pas argumenter contre mon hypothèse de la viti fication générale , en disant que les matières r duites en verre par le feu de nos fourneaux so j moins dures que la roche du globe , puisque fonte de fer, quelques laves ou basaltes, et raéifi certaines porcelaines , sont plus dures que cet roche, et néanmoins ne doivent comme elle leu dureté qu’à l’action du feu. D’ailleurs les élémen du fer et des autres minéraux qui donnent de dureté aux matières liquéfiées par le feu ou ait | nuées par l’eau , existoient ainsi que les terres fix ! dès le temps de la consolidation du globe; et j’ déjà dit qu’on ne devoit pas regarder la roche son intérieur comme du verre pur, semblable j celui que nous faisons avec du sab!e et dt* salin mais comme un produit vitreux mêlé des matièr les plus fixes et les plus capables de soutenir grande et longue action du feu primitif, dont no ne pouvons comparer les grands effets que de loi I avec le petit effet de nos feux de fourneaux ; néanmoins cette comparaison , quoique désavant j geuse , nous laisse apercevoir clairement ce qu : peut y avoir de commun dans les effets du feu pi j rnitif et dans les produits de nos feux , et nous c j montre en même temps que le degré de durt j dépend moins de celui du feu que de la combinj son des matières soumises à son action. (Ac \ À#) ma vî gieuse quantité de blocs d’une grandeur ^ considérable de ce roc vif, mêlé de paillettes ■8» talqueuses : leur position est si irrégulière, qu’ils paroissent avoir été lancés et jetés au l™ hasard; et on croiroit qu’ils sont tombés de quelque hauteur voisine, si les lieux où on les trouve n’étoient pas élevés au dessus 1 f de tous les autres lieux : mais leur substance P' vitrifiable et leur figure anguleuse et car- rée comme celle des rochers de grès, nous découvrent une origine commune entre ces matières. Ainsi dans les grandes couches de sable vitrifiable il se forme des bancs de grès cl de roc vif, dont la figure et la si- _ tuation ne suivent pas exactement la posi- ro^l tion horizontale de ces couches : peu à peu les pluies ont entraîné du sommet des col- lines et des montagnes le sable qui les cou- J vroit d’abord , et elles ont commencé par rit sillonner et découper ces collines dans les intervalles qui se sont trouvés entre les noyaux de grès, comme on voit que sont découpées les collines de Fontainebleau; chaque pointe de colline répond à un noyau qui. fait une carrière de grès , et chaque in- tervalle a été creusé et abaissé par les eaux , J qui ont fait couler le sable dans la plaine. De même les plus hautes montagnes , dont les sommets sont composés de roc vif et ter- minés par ces blocs anguleux dont nous ve- nons de parler, auront autrefois été recou- vertes de plusieurs couches de sable vitri- fiable dans lequel ces blocs se seront formés; et les pluies ayant entraîné tout le sable qui les couvroit et qui les environnoit, ils seront demeurés au sommet des montagnes dans la position où ils auront été formés. Ces blocs présentent ordinairement des poin- tes au dessus et à l’extérieur : ils vont en augmentant de grosseur à mesure qu’on descend et qu’on fouille plus profondément ; souvent même un bloc en rejoint un autre par la base, ce second un troisième , et ainsi de suite en laissant entre eux des intervalles irréguliers ; et comme par la succession des temps les pluies ont enlevé et entraîné tout le sable qui couvroit ces différens noyaux, il ne reste au dessus des hautes montagnes que les noyaux mêmes qui forment des poin- tes plus ou moins élevées , et c’est là l’ori- gine des pics ou des cornes de montagnes, qu’ | Car supposons, comme il est facile de P" le prouver par les productions marines j qu’on y trouve, que la chaîne des mon- "',1, tagnes des Alpes ait été autrefois couverte g: des eaux de la mer, et qu’au dessus de cette il chaîne de montagnes il y eût une grande épaisseur de sable vitrifiable que l’eau de la ART. IX. INÉGALITÉS DE LA TERRE. mer y avoit transporté et déposé, de la même façon et par les mêmes causes qu’elle a déposé et transporté dans les lieux un peu plus bas de ces montagnes une grande quan- tité de coquillages, et considérons cette couche extérieure de sable vitrifiable comme posée d’abord de niveau et formant un pays plat de sable au dessus des montagnes des Alpes , lorsqu’elles étoient encore couvertes des eaux de la mer : il se sera formé dans cette épaisseur de sable des noyaux de roc, de grès , de caillou , et de toutes les ma- tières qui prennent leur origine et leur fi- gure dans les sables par une mécanique à peu près semblable à celle de la cristalli- sation des sels ; ces noyaux une fois formés auront souienu les parties où ils se sont trouvés , et les pluies auront détaché peu à peu tout le sable intermédiaire aussi bien que celui qui les environnoit immédiate- ment ; les torrens, les ruisseaux , en se pré- cipitant du haut de ces montagnes , auront entraîné ces sables dans les vallons,- dans les plaines , et en auront conduit une partie jusqu’à la mer ; de cette façon le sommet des montagnes se sera trouvé à découvert , et les noyaux déchaussés auront paru dans toute leur hauteur l. C’est ce que nous ap- i. J’ai tâché d’expliquer comment les pics des montagnes ont été dépouillés des sables vitrescibles qui les environnoient au commencement, et mon explication ne pèche qu'en ce que j’ai attribué la première formation des rochers qui forment le noyau de ces pics à l’intermède de l’eau , au lieu qu’on doit l’attribuer à l’action du feu; ces pics ou cornes de montagnes ne sont que des prolongemens et des pointes de la roche intérieure du globe, les- quelles étoient environnées d’une grande quantité de scories et de poussière de verre ; ces matières divisées auront été entraînées dans les lieux infé- rieurs par les mouvemens de la mer dans le temps qu’elle a fait retraite, et ensuite les pluies et les torrens des eaux courantes auront encore sillonné du haut en bas les montagnes, et auront par con- séquent achevé de dépouiller les masses de roc vif qui formoient les éminences du globe , et qui , par ce dépouillement, sont demeurées nues et telles que nous les voyons encore aujourd’hui. Je puis dire en général qu’il n’y a aucun autre changement à faire dans toute ma Théorie de la terre , que celui de la composition des premières montagnes qui doivent leur origine au feu primitif, et non pas à l’intermède de l’eau , comme je l’avois conjecturé , parce que j'étois alors persuadé , par l’autorité de Woodward et de quelques autres naturalistes, que l’on avoit trouvé des coquilles au dessus des som- mets de toutes les montagnes; au lieu que, par des observations plus récentes, il paroît qu’il n’y a pas de coquilles sur les plus hauts sommets, mais seu- lement jusqu’à la hauteur de deux mille toises an dessus du niveau des mers , d’où il résulte qu’ellç n’a peut-être pas surmonté ces hauts sommets, ou du moins qu’elle ne les a baignés que pendant un petit temps , en sorte qu’elle n’a formé que les t6o théorie de la terre. elons aujourd’hui des pics ou des cornes e montagnes , el ce qui a formé toutes ces éminences pointues qu’on voit en tant d’en- droits ; c’est aussi là l’origine de ces roches élevées et isolées qu’on trouve à la Chine et dans d’autres endroits, comme en Irlande, où on leur a donné le nom de devil’s stones, ou pierres du diable , et dont la formation , aussi bien que celle des pics des montagnes, avoit toujours paru une chose difficile à ex- pliquer : cependant l’explication que j’en donne est si naturelle , qu’elle s’est présen- tée d’abord à l’esprit de ceux qui ont vu ces roches , et je dois citer ici ce qu’en dit le P. Du Tertre dans les Lettres édifiantes : « De Yan-chuin-yen nous vînmes à Ho- îcheou : nous rencontrâmes en chemin une chose assez particulière ; ce sont des roches d’une hauteur extraordinaire et de la figure d’une grosse tour carrée , qu’on voit plan- tées au milieu des plus vastes plaines. On ne sait comment elles se trouvent là , si ce n’est que ce furent autrefois des montagnes , et que les eaux du ciel ayant peu à peu fait ébouler la terre qui environnoit ces masses de pierre , les aient ainsi à la longue escar- pées de toutes parts : ce qui fortifie la con- jecture, c’est que nous en vîmes quelques- unes qui vers le bas sont encore environ- nées de terre jusqu’à une certaine hauteur 1 . » Le sommet des plus hautes montagnes est donc ordinairement composé de rochers < t de plusieurs espèces de granité , de roc vif, de grès, et d’autres matières dures et vitrifiabîes, et cela souvent jusqu’à deux ou trois cents toises en descendant ; ensuite on y trouve souvent des carrières de marbre ou de pierre dure qui sont remplies de co- quilles, et dont la matière est calcinable, comme on peut le remarquer à la grande Chartreuse en Dauphiné et sur le mont Cenis, où les pierres et les marbres qui contiennent des coquilles, sont à quelques centaines de toises au dessous des sommets , des pointes, et des pics des plus hautes montagnes , quoique ces pierres remplies de coquilles soient elles-mêmes à plus de mille toises au dessus du niveau de la mer. Ainsi les montagnes où l’on voit des pointes ou des pics, sont ordinairement de roc vitri- fiable, et celles dont les sommets sont plats contiennent pour la plupart des marbres et des pierres dures remplies de produc- tions marines. Il eu est de même des col- collines et tes montagnes calcaires, qui sont toutes au dessous de cette hauteur de deux mille toises. (Add. Buff.) i. Voyez Lettres èdif., rec. II, t. II , p. t35, etc. lines lorsqu’elles sont de grès ou de roi vif, elles sont pour la plupart entrecoupée: de pointes, d’éminences, de tertres et d< cavités , de profondeurs et de petits vallon: intermédiaires; au contraire, celles qui son | composées de pierres calcinables sont à pei près égales dans toute leur hauteur, et elle: ne sont interrompues que par des gorges e' des vallons plus grands, plus réguliers, e dont les angles sont correspondans ; enfir elles sont couronnées de rochers dont h position est régulière et de niveau. Quelque différence qui nous paroisse d’a bord entre ces deux formes de montagnes . elles viennent cependant toutes deux de le même cause, comme nous venons de le faire voir ; seulement on doit observer que ces pierres calcinables n’ont éprouvé au- cune altération, aucun changement, depuis la formation des couches horizontales, au lieu que celles de sable vitrifiable ont pu être altérées et interrompues par la produc- tion postérieure des rochers et des blocs anguleux qui se sont formés dans l’intérieun de ce sable. Ces deux espèces de montagner ont des fentes qui sont presque toujours perpendiculaires dans celles de pierres cal-! cinables , et qui paroissent être un peu plus irrégulières dans celles de roc vif et de grès ; c’est dans ces fentes qu’on trouve les métaux, les minéraux, les cristaux, les sou-: fres, et toutes les matières de la seconde classe, et c’est au dessous de ces fentes quel les eaux se rassemblent pour pénétrer en-i suite plus avant et former les veines d’eau qu’on trouve au-dessous de la surface de là: terre. * Nous avons dit que les plus hautes montagnes du globe sont les Cordillères en Amérique , surtout dans la partie de ces' montagnes qui est située sous l’équateur eé entre les tropiques. Nos mathématiciens en- voyés au Pérou, et quelques autres ob-! servateurs, en ont mesuré les hauteurs ai; j dessus du niveau de la mer du Sud , les uns géométriquement, les autres par h moyen du baromètre , qui , n’étant pa: ‘ sujet à de grandes variations dans ce cli- ! mat, donne une mesure presque aussi exacte que celle de la trigonométrie. Yoici le ré- sultat de leurs observations : Hauteur des montagnes les plus élevées de ; la province de Quito au Pérou. toisas. ] Cota-catché , au nord de Quito 2$7C Cayambé-orcou , sous l’équateur 3o3< Pitchincba , volcan en i53g, iSyy et 1660.. . . z43i Antisana, volcan en i5go 3oa< ART. IX. INÉGALITÉS DE LA TERRE. toises. îinchoulogea , volcan en 1660 2670 Ilinica , présumé volcan. .... ; 27 17 lt ]oto paxi, volcan en 1 533, en 1742 et 1744* ... 2960 ,q|| ihimboraço , volcan : on ignore l’époque de son éruption 3a 20 argavi-raso, volcan écroulé en 1698 245o ’ongouragoa, volcan en 1641 2620 eljïl-altan , l’une des montagnes appelées Coil - lanes 2780 anguai , volcan actuellement enflammé de- puis 1728 2680 En comparant ces mesures des montagnes e l’Amérique méridionale avec celles de lOtre continent, on verra qu’elles sont en la [énéral élevées d’un quart de plus que celles e l’Europe , et que presque toutes ont été u sont encore des volcans embrasés ; tan- is que celles de l’intérieur de l’Europe , de Asie et de l’Afrique, même celles qui sont ^s plus élevées , sont tranquilles depuis un mps immémorial. Il est vrai que , dans lusieurs de ces dernières montagnes, on Jeconnoît assez évidemment l’ancienne exis- înce des volcans, tant par les précipices ont les parois sont noires et brûlées , que iar la nature des matières qui environnent es précipices, et qui s’étendent sur la pupe de ces montagnes : mais comme elles ant situées dans l’intérieur des continens , t maintenant très-éloignées des mers , l’ac- ion de ces feux souterrains, qui ne peut roduire de grands effets que par le choc de eau , a cessé lorsque les mers se sont éloi- nées ; et c’est par cette raison que , dans ^s Cordilières , dont les racines bordent , our ainsi dire , la mer du Sud , la plupart es pics sont des volcans actuellement agis- ans , tandis que depuis très-long-temps les Jolcans d’Auvergne , du Yivarais, du Lan- bedoc , et ceux d’Allemagne , de la Suisse, Jtc., en Europe; ceux du mont Ararath en [sie, et ceux du mont Atlas en Afrique, sont j,. bsolument éteints. La hauteur à laquelle les vapeurs se gla- [esj jent est d’environ 2400 toises sous la zone ]e arride ; et en France, de i5oo toises de auteur : les cimes des hautes montagnes arpassent quelquefois cette ligne de 8 à 00 toises , et toute cette hauteur est cou- èrte de neiges qui ne fondent jamais ; les uages (qui s’élèvent le plus haut) ne les urpassent ensuite que de 3 à 400 toises , et t’excèdent par conséquent le niveau des ners que d’environ 36oo toises : ainsi , s’il r avoit des montagnes plus hautes encore , in leur verroit sous la zone torride une peinture de neige à 2400 toises au dessus ^ te la mer, qui finiroit à 35oo ou 36oo toises, ° ion par la cessation du froid , qui devient Buffoîï. I. 161 toujours plus vif à mesure qu’on s’élève , mais parce que les vapeurs n’iroient pas plus haut. M. de Keralio , savant physicien , a re- cueilli toutes les mesures prises par diffé- rentes personnes sur la hauteur des monta- gnes dans plusieurs contrées. En Grèce , M. Bernouilli a déterminé la hauteur de l’Olympe à 1017 toises ; ainsi la neige n’y est pas constante , non plus que sur le Pélion en Thessalie , le Cathaly- lium et le Cyllenou ; la hauteur de ces monts n’atteint pas le degré de la glace. M. Bou- guer donne 25oo toises de hauteur au pic de Ténériffe , dont le sommet est toujours couvert de neige. L’Etna, les monts Nor- wégiens, l’Hémus, l’Athos, l’Atlas, le Cau- case et plusieurs autres, tels que le mont Ararath , le Taurus , le Libanon , sont en tout temps couverts de neige à leurs som- mets. toises. Selon Pontoppidam , les plus hauts monts de Norwége ont 3ooo Nota. Cette mesure, ainsi que la suivante , me paraissent exagérées. Selon M. Brovallius, les plus hauts monts de Suède ont 2333 Selon les Mémoires de V Académie royale des Sciences (année 1718), les plus hautes montagnes de France sont les suivantes : toises. Le Cantal 984 Le mont Ventoux io36 Le Canigou des Pyrénées i44t Le Moussec 12 53 Le Saint Barthélemi 1184 Le Mont d’Or en Auvergne , volcan éteint. . . . 1048 Selon M. Needham, Savoie ont en hauteur : les montagnes de Le couvent du grand Saint-Bernard. 124 1 Le Roc au sud-ouest de ce monl. 1274 Le mont Serène 1282 L’allée Blanche 1249 Le mont Tourné; i683 Selon M. Facio de Duiller, le mont Blanc, ou la montagne Maudite , a 22i3 Il est certain que les principales monta- gnes de Suisse sont plus hautes que celles de France, d’Espagne, d’Italie et d’Alle- magne; plusieurs savans ont déterminé , comme il suit, la hauteur de ces montagnes. Suivant M. Mikhéli, la plupart de ces montagnes, comme le Grimselberg, le Wet- terhorn, le Schrekhorn , l’Eighess-schnée- berg , le Ficherhorn , le Stroubel , le Fourke, le Louk-manier, le Crispait, le Mougle , la cime du Baduts et du Gothard , ont de 2400 à 2750 toises de hauteur au dessus du niveau de la mer ; mais je soupçonne que ces i6a THÉORIE DE LA TERRE. mesures données par M. Mikhéli sont trop fortes, d’autant qu’elles excèdent de moitié celles qu’ont données MM. Cassini, Scheueh- zer et Mariotte, qui pourroient bien être trop foibles , mais non pas à cet excès ; et ce qui fonde mon doute, c’est que, dans les régions froides et tempérées où l’air est toujours orageux , le baromètre est sujet à trop de variations , même inconnues des physiciens , pour qu’ils puissent compter sur les résultats qu’il présente. Sur la formation des montagnes. * Toutes les vallées et tous les vallons de la surface de la terre, ainsi que toutes les montagnes et les collines , ont eu deux causes primitives : la première est le feu, et la seconde l’eau. Lorsque la terre a pris sa consistance, il s’est élevé à sa surface un grand nombre d’aspérités , il s’est fait des boursOufflures comme dans un bloc de verre ou de métal fondu. Cette première cause a donc produit les premières et les plus hautes montagnes qui tiennent par leur base à la roche intérieure du globe, et sous lesquelles, comme partout ailleurs, il a dû se trouver des cavernes qui se sont affaissées en diffé- rons temps : mais, sans considérer ce second événement de l’affaissement des cavernes , il est certain que , dans le premier temps où la surface delà terre s’est consolidée, elle étoit sillonnée partout de profondeurs et d’é- minences uniquement produites par l’action du premier refroidissement. Ensuite, lorsque les eaux se sont dégagées de l’atmosphère , ce qui est arrivé dès que la terre a cessé d’être brûlant* au point de les rejeter en vapeurs, ces memes eaux ont couvert toute la surface de là terre actuellement habitée jusqu’à la hauteur de 2000 toises; et, pendant leur long séjour sur nos continens, le mou- vement du flux et du reflux et celui des cou- rans ont changé la disposition et la forme des montagnes et des vallées primitives. Ces mouvemens auront formé des collines dans les vallées, ils auront recouvert et environné de nouvelles couches de terre le pied et les croupes des montagnes ; et les courans au- ront creusé des sillons, des vallons, dont tous les angles se correspondent. C’est à ces deux causes , dont 1 une est bien plus an- cienne que l’autre, qu’il faut rapporter la forme extérieure que nous présente ia surface de la terre. Ensuite, lorsque les mers se sont abaissees , elles ont produit des escarpernens du côté de l’occident où elles s’écouloieut le plus rapidement , et ont laissé des pente douces du côté de l’orient. Les éminences qui ont été formées par 1» sédiment elles dépôts de la mer , ont un» structure bien différente de celles qui doi j vent leur origine au feu primitif : les pre j mières sont toutes disposées par couches ho j rizontales et contiennent une infinité de pro| ductions marines; les autres, au contraire ont une structure moins régulière et ne ren ferment aucun indice de productions de li mer. Ces montagnes de première et de second»/ formation n’ont rien de commun que les fen tes perpendiculaires qui se trouvent dans lé; | unes comme dans les autres; mais ces fente:! sont un effet commun de deux causes hier différentes. Les matières vilrescibles , en s» refroidissant, ont diminué de volume, etst sont par conséquent fendues de distance ei distance : celles qui sont composées de ma tières calcaires amenées par les eaux, se son fendues par le dessèchement. J’ai observé plusieurs fois sur les colline isolées, que le premier effet des pluies es de dépouiller peu à peu leur sommet et d’ei entraîner les terres, qui forment au pie» de la colline une zone uniforme et tres-épaiss» de bonne terre, tandis que le sommet est de venu (diauve et dépouillé dans son contour voilà l’effet que produisent et doivent pro duire les pluies ; mais une preuve qu’il y eu une autre cause qui avoil préeédemmen :i disposé les matières autour de la colline | c’est que, dan> toutes et même ctens celle | qui sont isolées, il y a toujours un côu| ou le terrain est meilleur; elles sont escar| pées d’une part, et en pente douce d»| l’autre; ce qui prouve l’action et la direclioij du mouvement des eaux d’un côté plus q de l’autre. ARTICLE X. Des Fleuves. Nous avons dit que, généralement parlant les plus grandes montagnes occupent le mi lieu des continens, que les autres oecupen le milieu des îles, des presqu’îles, et de terres avancées dans la mer; que dans l’an cien continent les plus grandes chaînes d montagnes sont dirigées d’occident en orient et que celles qui tournent vers le nord e vers le sud ne sont que des branches de ce chaînes principales : on verra de même qu les plus grands fleuves sont dirigés comme le plus giandes montagnes, et qu i! y en a pet qui suivent la direction des branches de ce montagnes Pour s’en assurer et le voir etj détail, il n’y a qu’à jeter les yeux sur ut ART. X. FLEUVES. ïlobe, et parcourir l’ancien continent depuis ’Espagne jusqua la Chine; on trouvera qu’à lommencer par l’Espagne, le Vigo, le Douro, e Tage et la Guadiana vont d’orient en occi- lent, et l’Èbre d’occident en orient, et qu’il i’y a pas une rivière remarquable dont le ours soit dirigé du sud au nord , ou du nord u sud, quoique l'Espagne soit environnée e la mer en entier du côté du midi , et pres- ue en entier du côté du nord. Cette opér- ation sur la direction des fleuves en Espagne rouve non seulement que les montagnes de e pays sont dirigées d occident en orient , îais encore que le terrain méridional et qui voisine le détroit , et celui du détroit même, st une terre plus élevée que les côtes du ortugal ; et de même du côté du nord, rjue ;s montagnes de Galice, des Asturies, etc., e sont qu’une continuation des Pyrénées ; t que c’est cette élévation des terres, tant u nord qu’au sud, qui ne permet pas aux euves d’arriver par là jusqu’à la mer. On verra aussi , en jetant les yeux sur la ;arte de France, qu’il n’y a que le Rhône |ui soit dirigé du nord au midi, et encore ans près de la moitié de son cours, de- uis les montagnes jusqu’à Lyon, est-il irigé de l’orient vers l’occident ; mais qu’au [mtraire tous, les autres grands fleuves, )mme la Loire, la Charente, la Garonne ; même la Seine, ont leur direction d’o- ent en occident. On verra de même qu’en Allemagne il ’y a que le Rhin qui , comme le Rhône , la plus grande partie de son cours du idi au nord ; mais que les autres grands euves, comme le Danube, la Grave et lûtes les grandes rivières qui tombent dans îs fleuves, vont d’occident en orient se indre dans la mer Noire. On reconnoîtra que cette mer Noire, que (du doit plutôt considérer comme un grand c que comme une mer, a presque trois is plus d’étendue d’orient en occident je du midi au nord , et que par consé- jent sa position est semblable à la direc- on des fleuves en général ; qu’il en est de lême de la mer Méditerranée, dont la (ligueur d’orient en occident est environ {x fois plus grande que sa largeur moyenne, pise du nord au midi. A la vérité, la mer Caspienne, suivant carte qui en a été levée par ordre du iar Pierre Ier, a plus d’étendue du midi a nord que d’orient en occident ; au lieu ue dans les anciennes cartes elle étoit pres- ae ronde, ou plus large d’orient en occi- bnt que du midi au nord : mais si l’on i63 fait attention que le lac Aral peut être re- gardé comme ayant fait partie de la mer Caspienne , dont il n’est séparé que par des piaiaes de sable, on trouvera encore jue la longueur depuis le bord occidental de la mer Caspienne jusqu’au bord oriental du lac Aral , est plus grande que la longueur depuis le bord méridional jusqu’au bord septentrional de la même mer. On trouvera de même que l’Euphrate et le golfe Persique sont dirigés d’occident en orient , et que presque tous les fleuves de la 'Chine vont d’occident en orient. Il en est de même de tous les fleuves de l’inté- rieur de l’Afrique au delà de la Barbarie ; ils coulent tous d’orient en occident et d’oc- cident en orient : il n’y a que les rivières de Barbarie et le Nil qui coulent du midi au nord. A la vérité, il y a de grandes ri- vières en Asie qui coulent en partie du nord au midi, comme le Don, le Wolga, etc. : mais en prenant la longueur entière de leur cours, on verra qu’ils ne se tournent du côté du midi que pour se rendre dans la mer Noire et dans la mer Caspienne , qui sont des lacs dans l’intérieur des terres. On peut donc dire en général que dans l’Europe, l’Asie et l’ Afrique, les fleuves et les autres eaux méditerranées s’étendent plus d’orient en occident que du nord au sud ; ce qui vient de ce que les chaîne^ de montagnes sont dirigées pour la plupart dans ce sens , et que d’ailleurs le continent entier de l’Europe et de l’Asie est plus large dans ce sens que l’autre ; car il y a deux manières de concevoir cette direction des fleuves. Dans un continent long et étroit, comme est celui de l’Amérique méridionale, et dans lequel il n’y a qu’une chaîne prin- cipale de montagnes , qui s’étend du nord au sud , les fleuves n’étant retenus par au- cune autre chaîne de montagnes, doivent couler dans le sens perpendiculaire à celui de la direction des montagnes, c’est-à-dire d’orient en occident ou d’occident en orient : c’est On effet dans ce sens que cou- lent toutes les rivières de l’Amérique, parce qu’à l’exception des Cordilières, il n’y a pas de chaînes de montagnes fort étendues et qu’il n’y en a point dont les directions soient parallèles aux Cordilières. Dans l’an- cien continent, comme dans le nouveau, la plus grande partie des eaux ont leur plus grande étendue d’occident en orient , et le plus grand nombre des fleuves coulent dans cette direction , mais c’est par une autre raison ; c’est qu’il y a plusieurs longues chaînes de montagnes parallèles les unes aux ir. théorie de la terre. 164 autres, dont la direction est d’occident en orient, et que les fleuves et les autres eaux sont obligés de suivre les intervalles qui séparent ces chaînes de montagnes : par conséquent uue seule chaîne de montagnes, dirigée du nord au sud, produira des fleu- ves dont la direction sera la même que celle des fleuves qui sortiroient de plusieurs chaî- nes de montagnes dont la direction com- mune seroit d’orient en occident ; et c’est par cette raison particulière que les fleuves d’Amérique ont cette direction, comme ceux de l’Europe , de l’ Afrique et de l’Asie. Pour l’ordinaire , les rivières occupent le milieu des vallées ou plutôt la partie la plus basse du terrain compris entre les deux collines ou montagnes opposées. Si les deux collines qui sont de chaque côté de la ri- vière ont chacune une pente à peu près égale , la rivière occupe à peu près le mi- lieu du vallon ou de la vallée intermédiaire. Que cette vallée soit large ou étroite, si la pente des collines ou des terres élevées qui sont de chaque côté de la rivière, est égale, la rivière occupera le milieu de la vallée. Au contraire, si l’une des collines a une pente plus rapide que n’est la pente de la cdli'ie opposée, la rivière ne sera plus dans le milieu de la vallée ; mais elle sera d’au- tant plus voisine de la colline la plus rapide, que cette rapidité de pente sera plus grande que celle de la pente de l’autre colline : l’endroit le plus bas du terrain , dans ce cas, n’est plus le milieu de la vallée : il est beaucoup plus près de la colline dont la pente est la plus grande , et c’est par cette raison que la rivière en est aussi plus près. Dans tous les endroits où il y a d’un côté de la riviere des montagnes ou des collines fort rapides, et de 1 autre côté des terres élevées en pente douce, on trouvera tou- jours que la rivière coule au pied de ces collines rapides et qu’elle les suit dans toutes leurs directions, sans s’écarter de ces colli- nes, jusqu’à ce que de l’autre côté il se trouve d’autres collines dont la pente soit assez considérable pour que le point le plus bas du terrain se trouve plus éloigné qu’il ne l’étoit de la colline rapide. Il arrive or- dinairement que par la succession de temps la pente de la colline la plus rapide diminue et vient à s’adoucir, parce que les pluies en- traînent les terres en plus grande quantité et les enlèvent avec plus de violence sur une pente rapide que sur une pente douce : la rivière est alors contrainte de changer de lit {jour retrouver l’endroit le plus bas du val- on. Ajoutez à cela que comme toutes les rivières grossissent et débordent de temps en temps, elles transportent et déposent des limons en différens endroits, et que souvent il s’accumule des sables dans leur lit ; ce qui fait refluer les eaux et en change la direc- ! tion. Il est assez ordinaire de trouver dans les plaines un grand nombre d’anciens lits j de la rivière , surtout si elle est impétueuse et sujette à de fréquentes inondations , et si elle entraîne beaucoup de sable et de limon. Dans les plaines et dans les larges vallées où coulent les grands fleuves , le fond du lit , du fleuve est ordinairement l’endroit le plus , bas de la vallée : mais souvent la surface de ! l’eau du fleuve est plus élevée que les terres ! qui sont adjacentes à celles des bords du ! fleuve. Supposons, par exemple, qu’uni fleuve soit à plein bord, c’est-à-dire que les | bords et l’eau du fleuve soient de niveau, et que l’eau peu après commence à déborder j des deux côtés : la plaine sera bientôt inon-i dée jusqu’à une largeur considérable; et l’on observera que des deux côtés du fleuve les bords seront inondés les derniers ; ce qu. prouve qu’ils sont plus élevés que le reste du terrain ; en sorte que de chaque côté du fleuve , depuis les bords jusqu’à un certain point de la plaine, il y a une pente insen-i sible, une espèce de talus qui fait que la surface de l’eau du fleuve est plus élevée que le terrain de la plaine, surtout lorsque le fleuve est à plein bord. Cette élévation du terrain aux bords des fleuves provient du dépôt du limon dans les inondations : l’eau est communément très- bourbeuse dans les grandes crues des rivières ; lorsqu’elle com- mence à déborder, elle coule très-lentement 1 par dessus les bords ; elle dépose le limon qu’elle contient et s’épure, pour ainsi dire, à mesure qu’elle s’éloigne davantage au large dans la plaine : de même toutes les parties de limon que le courant de la rivière 11’en- traîne pas sont déposées sur les bords; ce qui ; les élève peu à peu au dessus du reste de la plaine. Les fleuves sont , comme l’on sait , tou- jours plus larges à leur embouchure ; à me- sure qu’on avance dans les terres et qu’on s’éloigne de la mer, ils diminuent de largeur: mais ce qui est plus remarquable et peut-être moins connu , c’est que dans l’intérieur des terres, à une distance considérable de lai mer, ils vont droit et suivent la même direc* j tion dans de grandes longueurs ; et à mesure j qu’ils approchent de leur embouchure, les sinuosités de leur cours se multiplient. J’ai ouï dire à un voyageur, homme d’esprit el j ART. X. FLEUVES. *65 bon observateur T, qui a fait plusieurs grands voyages par terre dans la partie de l’ouest de l’ Amérique septentrionale, que les voyageurs et même les sauvages ne se trompoient guère sur la distance où ils se trouvoient de la jmer; que pour reconnoître s’ils éloient bien kvant dans l’intérieur des terres ou s’ils étaient dans un pays voisin de la mer, ils suivoient le bord d’une grande rivière ; et que quand la direction de la rivière étoit droite dans une longueur de quinze ou vingt ieues, ils jugeoient qu’ils éloient fort loin lie la mer; qu’au contraire, si la rivière avoit des sinuosités et changeoit souvent de direction dans son cours, ils éloient assurés [le n’être pas fort éloignés de la mer. M. Fa- bry a vérifié lui-même cette remarque , qui ui a été fort utile dans ses voyages , lors- qu’il parcouroit des pays inconnus et presque [inhabités. U y a encore une remarque qui beut être utile en pareil cas ; c’est que dans les grands fleuves il y a , le long des bords , E1 n remous considérable , et d’autant plus onsidérable qu’on est moins éloigné de la aer et que le lit du fleuve est plus large ; ce qui peut encore servir d’indice pour juger bi l’on est à de grandes ou à de petites dis- tances de l’embouchure : et comme les sinuo- sités des fleuves se multiplient à mesure qu’ils approchent de la mer, il n’est pas étonnant que quelques-unes de ces sinuosités venant à s’ouvrir, forment des bouches par où une partie des eaux du fleuve arrive à la mer ; et c’est une des raisons pourquoi les grands fleuves se divisent ordinairement en plusieurs pras pour arriver à la mer. | Le mouvement des eaux dans le cours des fleuves se fait d’une manière fort diffé- rente de celle qu’ont supposée les auteurs qui ont voulu donner des théories mathé- matiques sur cette matière : non seulement la surface d’une rivière en mouvement n’est ipas de niveau en la prenant d'un bord à l’autre , mais même , selon les circonstances , le courant qui est dans le milieu est consi- dérablement plus élevé ou plus bas que l’eau qui est près des bords. Lorsqu’une rivière grossit subitement par la fonte des neiges , pu lorsque , par quelque autre cause , sa rapidité augmente, si la direction de la Rivière est droite , le milieu de l’eau , où est Je courant , s’élève , et la rivière forme une espèce de courbe convexe ou d’élévation ijtrès-sensible , dont le plus haut point est idans le milieu du courant. Cette élévation jest quelquefois fort considérable ; et M. Hu- 1 z. M. Fabry. peau, habile ingénieur des ponts-et-chaus- sées, m’a dit avoir un jour mesuré cette différence de niveau de l’eau du bord de l’Aveyronj et de celle du courant, ou du milieu de ce fleuve, et avoir trouvé trois pieds de différence ; en sorte que le milieu de l’Aveyron étoit de trois pieds plus élevé que l’eau du bord. Cela doit en effet arriver toutes les fois que l’eau aura une très- grande rapidité : la vitesse avec laquelle elle est emportée diminuant l’action de sa pesanteur, l’eau qui forme le courant ne se met pas en équilibre par tout son poids avec l’eau qui est près des bords ; et c’est ce qui fait qu’elle demeure plus élevée que celle-ci. D’autre côté , lorsque les fleuves approchent de leur embouchure, il arrive assez ordi- nairement que l’eau qui est près des bords est plus élevée que celle du milieu, quoique le courant soit rapide ; la rivière paroit alors former une courbe concave dont le point le plus bas est dans le plus fort du courant : ceci arrive toutes les fois que l’action des marées se fait sentir dans un fleuve. On sait que dans les grandes rivières le mouvement des eaux occasioné par les marées est sen- sible à cent ou deux cents lieues de la mer ; on sait aussi que le courant du fleuve con- serve son mouvement au milieu des eaux de la mer jusqu’à des distances considé- rables : il y a donc, dans ce cas, deux moirvemens contraires dans l’eau du fleuve ; le milieu , qui forme le courant , se préci- pite vers la mer, et l’action de la marée forme un contre-courant, un remous, qui fait remonter l’eau qui est voisine des bords, tandis que celle du milieu descend ; et comme alors toute l’eau du fleuve doit passer par le courant qui est au milieu, celle des bords descend continuellement vers le milieu , et descend d’autant plus qu’elle est plus élevée et refoulée avec plus de force par l’action des marées. Il y a deux espèces de remous dans les fleuves. Le premier, qui est celui dont nous venons de parler , est produit par une force vive, telle qu’est celle de l’eau de la mer dans les marées , qui non-seulement s’op- pose comme obstacle au mouvement de l’état du fleuve , mais comme corps en mouvement, et en mouvement contraire et opposé à celui du courant de l’eau de ce fleuve; ce remous fâit un contre-courant d’autant plus sensible que la marée est plus forte. L’autre espèce de remous n’a pour cause qu’une force morte , comme celle d’un obstacle , d’une avance de terre , d’une île dans la rivière, etc. Quoique ce remous i66 THÉORIE DE LA TERRE. n’occasionne pas ordinairement un contre- courant bien sensible, il l’est cependant assez pour être reconnu , et même pour fatiguer les conducteurs de bateaux sur les rivières. Si cette espèce de remous ne fait pas toujours un contre-courant , il produit nécessairement ce que les gens de riviere appellent une morte , c’est-à-dire des eaux mortes, qui ne coulent pas comme le reste de la riviere , mais qui tournoient de façon que quand les bateaux y sont entraînés , il faut employer beaucoup de force pour les en faire sortir. Ces eaux mortes sont fort sensibles dans toutes les rivières rapides au passage des ponts. La vitesse de l’eau aug- menle, comme l’on sait, à proportion que le diamètre des canaux par où elle passe diminue , la force qui la pousse étant sup- posée la même ; la vitesse d’une riviere augmente donc au passage d’un pont, dans la raison inverse de la somme de la largeur des arches à la largeur totale de la riviere ; et encore faut-il augmenter cette raison de celle de la longueur des arches, ou , ce qui est le même, de la largeur du pont : l’aug- mentation de la vitesse de l’eau étant donc tres-considérable en sortant de l’arche d’un pont , celle qui est à côté du courant est poussée latéralement et de côté contre les bords de la riviere ; et par cette réaction , il se forme un mouvement de tournoiement quelquefois très-fort. Lorsqu’on passe sous le pont Saint-Esprit , les conducteurs sont forcés d’avoir une grande attention à ne pas perdre le fil du courant de l’eau , même apres avoir passé le pont; car s’ils laissoient écarter le bateau à droite ou à gauche , on seroit porté contre le rivage avec danger de périr, ou tout au moins on seroit entraîné dans le tournoiement des eaux mortes, d’où I on ne pourroit sortir qu’avec beaucoup de peine. Lorsque ce tournoiement , causé par le mouvement du courant et par le mouvement opposé du remous , est fort considérable , cela forme une espèce de petit gouffre ; et l’on voit souvent dans les rivières rapides, à la chute de l’eau , au- delà des arrière-becs des piles d’un pont , qu’il se forme de ces petits gouffres ou tournoiemens d’eau , dont le milieu paroît être vide , et former une espèce de cavité cylindrique autour de laquelle l’eau tour- noie avec rapidité. Cette apparence de ca- vité cylindrique est produite par l’action de la force centrifuge , qui fait que l’eau tâche de s’éloigner et s’éloigne en effet du centre du tourbillon causé par le tournoie- ment. Lorsqu’il doit arriver une grande cru j d’eau , les gens de rivière s’en aperçoiven ! par un mouvement particulier qu’ils re | marquent dans l’eau ; ils disent que la rivièr mouve de fond, c’est-à-dire que l’eau du font | de la riviere coule plus vite quelle ne coul ordinairement. Cette augmentation de vil tesse dans l’eau du fond de la rivière an nonce toujours, selon eux, un prompt e subit accroissement des eaux. Le mouvemen et le poids des eaux supérieures, qui ni sont point encore arrivées , ne laissent pa j d’agir sur les eaux de la partie inférieure d la rivière, et leur communiquent ce mou vement ; car il faut , à certains égards ,-coni sidérer une fleuve qui est contenu et qui coule dans son lit, comme une colonne d’eai f contenue dans un Ui)au, et le fleuve entie u comme un très-long canal où tous les mou | f vemens doivent se communiquer d’un bou I mi à l’autre. Or, indépendamment du mouve ft ment des eaux supérieures , leur poids seu f pourroit faire augmenter la vitesse de la ri du viere, et peut-être la faire mouvoir de fond l)( car on sait qu’en mettant à l'eau plusieurs te bateaux à la fois, on augmente dans ce mo tu ment la vitesse de la partie inférieure dé k la rivière , en même temps qu’on retardé b la vitesse de la partie supérieure. p La vitesse des eaux courantes ne suit pas ■ exactement, ni même à beaucoup près, U « proportion de la pente. Un fleuve dont kl b pente seroit uniforme, et double de la pente il d’un autre fleuve, ne devroit, à ce qu’il lia paroît, couler qu’une fois plus rapidement; il que celui-ci ; mais il coule en effet beau ; sa coup plus vite encore; sa vitesse, au lieu- on d’être double, est ou triple, ou quadruple, dai etc. Cette vitesse dépend beaucoup plus dé la quantité d’eau et du poids des eaux su- les périeures que de la pente; et lorsqu’on t veut creuser le lit d’un fleuve, ou celui d’un: la égout , etc. , il ne faut pas distribuer la t pente également sur toute la longueur; il; rei est nécessaire, pour donner plus de vitesse ta à l’eau, de faire la pente beaucoup plus agi forte au commencement qu’à l’embouchure, itit où elle doit être presque insensible, comme nous le voyons dans les fleuves : lorsqu’ils , approchent de leur embouchure, la pente II, est presque nulle, et cependant ils ne laissent pas de conserver une rapidité d’autant plus ™ grande que le fleuve a plus d’eau; en sorte que dans les grandes rivières, quand même fc le terrain seroit de niveau , l’eau ne laisse- * roit pas de couler, et même de couler ra- tlf pidement , non seulement par la vitesse ac- r1 ART. X. FLEUVES. 167 rjuise r, mais encore par l’action et le poids les eaux supérieures. Pour mieux faire sen- ir la vérité de ce que je viens de dire, sup- posons que la partie de la Seine qui est entre le Pont-Neuf et le Pont-Royal, fût parfaitement de niveau, et que partout elle eût dix pieds de profondeur; imaginons oour un instant que tout d’un coup on pût mettre à sec le lit de la rivière au dessous au Pont-Royal et au-dessus du Pont-Neuf; dors l’eau qui seroit entre ces deux ponts, (juoique nous l’ayons supposée parfaitement le niveau , coulera des deux côtés en haut pi en bas, et continuera de couler jusqu’à ce ju’elle se soit épuisée; car, quoiqu’elle soit le niveau, comme elle est chargée d’un poids de dix pieds d’épaisseur d’eau , elle coulera des deux côtés avec une vitesse pro- t portionnelle à ce poids; et celle vitesse di- minuant toujours à mesure que la quantité ll’eau diminuera, elle ne cessera de couler que quand elle aura baissé jusqu’au niveau lu fond. Le poids de l’eau contribue donc .id beaucoup à la vitesse de l’eau; et cest pour ni bette raison que la plus grande vitesse du courant n est ni à la surface de l’eau ni au ddcond , mais à peu près dans le milieu de la ndi hauteur de 1 eau, parce qu’elle est produite par l’action du poids de l’eau qui est à la pas surface, et par réaction du fond. U y a la même quelque chose de plus; c’est que si un lia fleuve avoit acquis une tres-grande vitesse, i!e|l poiirroil non seulement la conserver en raversant un terrain de niveau, mais même ni I seroit en état de surmonter une éminence ans se répandre beaucoup des deux côtés, pu du moins sans causer une grande inon- iatiou. On seroit porté à croire que les ponts, es levées et les autres obstacles qu’on établit n sur les riv ieres , diminuent considérablement a vitesse totale du cours de l’eau; cepen- |a iant cela n’y fait qu’une très-petite diffé- rence. L’eau s’élève à la rencontre de l’avant- >ec d’un pont : cette élévation fait qu’elle igit da\antage par son poids, ce qui aug- mente la vitesse du courant entre les piles, ’ijfj nie l|j rtê ne i tr ■a* ic- 1. C’est faute d’avoir fait ces réflexions que ü. Kuhn dit que ta source du Danube est au moins Je deux milles d’Allemagne plus élevée que son jmbouchure ; que la mer Méditerranée est de 5 3/4 milles d’Allemagne plus basse que les sources lu Nil; que la mer Atlantique est plus basse d’un lemi-mille que la Méditerranée, etc., ce qui est (bsolument contraire à la vérité. Au reste, le prin- cipe'faux dont M. Kuhn tire toutes ces consé- quences , n’est pas la seule erreur qui se trouve dans :ette pièce sur l’origine des fontaines, qui a rem- porté le prix de l'académie de Bordeaux en 174t. d’autant plus que les piles sont plus larges et les arches plus étroites; en sorte que le retardement que ces obstacles causent à la vitesse totale du cours de l’eau est presque insensible. Les coudes, les sinuosités, les terres avancées, les îles, ne diminuent aussi que très-peu la vitesse totale du cours de l’eau. Ce qui produit une diminution très- considérable dans cette vitesse, c’est l’abais- sement des eaux, comme au contraire l’aug- mentation du volume d’eau augmente cette vitesse plus qu’aucune autre cause. Si les fleuves étoient toujours à peu près également pleins , le meilleur moyen de di- minuer la vitesse de l’eau et de les contenir, seroit d’en élargir le canal : mais comme presque tous les fleuves sont sujets à grossir et à diminuer beaucoup , il faut, au con- traire, pour les contenir, rétrécir leur canal, parce que dans les basses eaux, si le canal est fort large , l’eau qui passe dans le mi- lieu, y creuse un lit particulier, y forme des sinuosités; et lorsqu'elle vient à grossir, elle suit cette direction qu’elle a prise dans ce lit particulier, elle vient frapper avec force contre les bords du canal, ce qui détruit les levées et cause de grands dommages. On pourroit .prévenir en partie ces effets de la fureur de l’eau , en faisant , de distance en distance, de petits golfes dans les terres, c’est-à-dire en enlevant le terrain de l’un des bords jusqu’à une certaine distance dans les terres ; et pour que ces petits golfes soient avantageusement placés, il faut les faire dans l’angle obtus des sinuosités du fleuve; car alors le courant de 1 eau se détourne et tour- noie dans ces petits golfes, ce qui en dimi- nue la vitesse. Le moyen seroit peut-être fort bon pour prévenir la chute des ponts dans les endroits où il n’est pas possible de faire des barres auprès du pont : ces barres soutiennent faction du poids de l’eau ; les golfes dont nous venons de parler en dimi- nuent le courant : ainsi tous deux produi- raient à peu près le même effet , c’est-à-dire la diminution de la vitesse. La manière dont se font les inondations mérite une attention particulière. Lorsqu’une rivière grossit, la vitesse de l’eau augmente toujours de plus en plus jusqu’à ce que ce fleuve commence à déborder: dans cet instant la vitesse de l’eau diminue; ce qui fait que le débordement une fois commencé, il s’ensuit toujours une inondation qui dure plusieurs jours : car quand même il arriverait une moindre quantité d’eau après le déborde- ment qu’il n’en arrivoit auparavant, l’inon- dation ne laisserait pas de se faire , parce THÉORIE DE LA TERRE. 168 qu’elle dépend beaucoup plus de la diminu- tion de la vitesse de l’eau que de la quantité de l’eau qui arrive. Si cela n’étoit pas ainsi , on verroit souvent des fleuves déborder pour une heure ou deux , et rentrer ensuite dans leur lit, ce qui n’arrive jamais : l’inondation dure au contraire toujours pendant quelques jours, soit que la pluie cesse, ou qu’il arrive une moindre quantité d’eau, parce que le débordement a diminué la vitesse, et que par conséquent la même quantité d’eau n’é- tant plus emportée dans le même temps qu’elle l’étoit auparavant, c’est comme s’il en arrivoit une plus grande quantité. L’on peut remarquer, à l’occasion de cette dimi- nution, que s’il arrive qu’un vent constant souffle contre le courant de la rivière, l’inon- dation sera beaucoup plus grande qu’elle n’auroit été sans cette cause accidentelle , qui diminue la vitesse de l’eau; comme au contraire , si le vent souffle dans la même direction que suit le courant de la rivière, l’inondation sera bien moindre, et diminuera plus promptement. Voici ce que ditM. Oran- ger du débordement du Nil : « La crue du Nil et son inondation a long- temps occupé les savans ; la plupart n’ont trouvé que du merveilleux dans la chose du monde la plus naturelle , et qu’on voit dans tous les pays du monde. Ce sont les pluies qui tombent dans l’Abyssinie et dans l’Ethio- pie qui font la croissance et l’inondation de ce fleuve : mais on doit regarder le vent du nord comme cause primitive, i° parce qu’il chasse les nuages qui portent cette pluie du côté de l’Abyssinie; 20 parce qu’étant le traversier des deux embouchures du Nil , il en fait refouler les eaux à contremont, et empêche par là qu’elles ne se jettent en trop grande quantité dans la mer : on s’assure tous les ans de ce fait lorsque le vent étant au nord et changeant tout à coup au sud, le Nil perd dans un jour ce dont il étoil crû dans quatre l. » Les inondations sont ordinairement plus grandes dans les parties supérieures des fleuves que dans les parties inférieures et voisines de leur embouchure, parce que, toutes choses étant égales d’ailleurs, la vi- tesse d’un fleuve va toujours en augmentant jusqu’à la mer ; et quoique ordinairement la pente diminue d’autant plus qu’il est plus près de son embouchure, la vitesse cepen- dant est souvent plus grande par les raisons que nous avons rapportées. Le P. Castelli , qui a écrit fort sensément sur cette matière , x. V ojrage de Granger; Paris, 1745, p. i3 et 14. remarque très-bien que la hauteur des levées qu’on a faites pour contenir le Pô , va tou- jours en diminuant jusqu’à la mer, en sorte j qu’a Ferrare , qui est à 5o ou 60 milles de : distance de la mer, les levées ont près de j 20 pieds de üauteur au-dessus de la surface j ordinaire du Pô ; au lieu que plus bas, à 10 ou 1 2 milles de distance de la mer, les le- vées n’ont pas 12 pieds , quoique le canal1 du fleuve y soit aussi étroit qu’à Ferrare. Au reste , la théorie du mouvement des eaux courantes est encore sujette à beaucoup j de difficultés et d’obscurités , et il est très- difficile de donner des règles générales qui puissent s’appliquer à tous les cas particu-'j liers : l’expérience est ici plus nécessaire; que la spéculation ; il faut non seulement connoître par expérience les effets ordinai- res des fleuves en général, mais il faut en-; core connoître en particulier la rivière à ; laquelle on a affaire , si l’on veut en raison- j ner juste et y faire des travaux utiles el durables. Les remarques que j’ai données* ci-dessus , sont nouvelles pour la plupart : [ il seroit à désirer qu’on rassemblât beau- ; coup d’observations semblables; on par-j viendroit peut-être à éclaircir cette matière, j et à donner des règles certaines pour con- ! tenir et diriger les fleuves, et prévenir la! ruine des ponts, des levées, et les autres! dommages que cause la violente impétuo- sité des eaux a. i. Au sujet de la théorie des eaux courantes, je vais ajouter une observation nouvelle, que j’ai faite'; depuis que j’ai établi des usines , où la différente' vitesse de l’eau peut se reconnoître assez exacte-j ment. Sur neuf roues qui composent le mouvement; de ces usines, dont les unes reçoivent leur impul- ; sion par une colonne d’eau de deux ou trois' pieds j et les autres de cinq à six pieds de hauteur, j’a: été assez surpris d’abord de voir que toutes cesl p roues tournoient plus vite la nuit que le jour, et « que la différence étoit d’autant plus grande que lîl ft colonne d’eau étoit plus haute et plus large. Pa> ! m exemple, si l’eau a six pieds de chute, c’est-à-dirtij lie si le biez près de la vanne a six pieds de hauteui i li d’eau , et que l’ouverture de la vanne ait deuj j tfl pieds de hauteur, la roue tournera, pendant la nuit J i]i d’un dixième et quelquefois d’un neuvième plue I id vite que pendant le jour; et s’il y a moins de hau-j t® teur d’eau , la différence entre la vitesse pendant la j toi nuit et pendant le jour sera moindre, mais tou- j |i jours assez sensible pour être reconnue. Je me suis ; tu assuré de ce fait , en mettant des marques blanches t lt sur les roues , et en comptant avec une montre à I ni secondes le nombre de leurs révolutions dans un igj même temps , soit la nuit , soit le jour, et j’ai con- iy stamment trouvé, par un très-grand nombre d’ob- ) servations , que le temps de la plus grande vitesse ! lit des roues étoit l’heure la plus froide de la nuit , el 1 [lu qu’au contraire celui de la moindre vitesse étoit le ; m moment de la plus grande chaleur du jour : ensuite j ® j’ai de même reconnu que la vitesse de toutes les lt ART. X. FLEUVES. Les plus grands fleuves de l’Europe sont le Wolga, qui a environ 65o lieues de cours depuis Reschow jusqu’à Astracan sur la mer Caspienne; le Danube, dont le cours est d’environ 45o lieues depuis les mon- tagnes de Suisse jusqu’à la mer Noire; le Don, qui a 400 lieues de cours depuis la source du Sosna, qu’il reçoit, jusqu’à son embouchure dans la mer Noire; le Niéper, dont le cours est d’environ S5o lieues , qui se jette aussi dans la mer Noire ; la Duine, qui a environ 3oo lieues de cours , et qui va se jeter dans la mer Blanche , etc. Les plus grands fleuves de l’Asie sont le Hoanho de la Chine, qui a 85o lieues ! ïoues est généralement plus grande en hiver qu’en été. Ces faits, qui n’ont été remarqués par aucun physicien , sont importans dans la pratique. La théorie en est bien simple : cette augmentation de vitesse dépend uniquement de la densité de l’eau , ! laquelle augmente par le froid et diminue par le chaud; et, comme il ne peut passer que le même volume par la vanne, il se trouve que ce volume d’eau , plus dense pendant la nuit et en hiver qu’il ne l’est pendant le jour ou en été, agit avec plus de masse sur la roue , et lui communique par con- séquent une plus grande quantité de mouvement. Ainsi, toutes choses étant égales d’ailleurs, on S aura moins de perte à faire chômer ses usines à l’eau pendant la chaleur du jour, et à les faire tra- vailler pendant la nuit : j’ai vu dans mes forges que Icela ne laissoit pas d’influer d’un douzième sur le (produit de la fabrication du fer. Une seconde observation , c'est que de deux ! roues, l’une plus voisine que l’autre du Liez, mais |du reste parfaitement égales, et toutes deux mues ipar une égale quantité d’eau qui passe par des ivannes égales, celle des roues qui est la plus voi- sine du biez tourne toujours plus vite que l’autre Iqui en est plus éloignée, et à laquelle l’eau ne peut larriver qu’après avoir parcouru un certain espace dans le courant particulier qui aboutit à cette roue. jOn sent bien que le frottement de l’eau contre les jparois de ce canal doit en diminuer la vitesse; mais i'cela seul ne suffit pas pour rendre raison de la dif- férence considérable qui se trouve entre le mouve- 'ment de ces deux roues : elle provient en premier |lieu,dece que l’eau contenue dans ce canal cesse d’ tre pressée latéralement, comme elle l’est en (effet lorsqu’elle entre par la vanne du biez et qu’elle frappe immédiatement les aubes de la roue ; secondement , cette inégalité de vitesse , qui se me- sure sur la distance du biez à ces roues, vient en* tore de ce que l’eau qui sort d’une vanne n’est (pas une colonne qui ait les dimensions de la vanne ; ;car l’eau forme dans son passage un cône irrégu- lier, d’autant plus déprimé sur les côtés , que la pnasse d’eau dans le biez a plus de largeur. Si les aubes de la roue sont très-près de la vanne , l’eau s’y applique presque à la hauteur de l’ouverture de la vanne : mais si la roue est plus éloignée du s'biez , l’eau s’abaisse dans le coursier, et ne frappe 'plus les aubes de la roue à la même hauteur ni avec autant de vitesse que dans le premier cas ; et jces deux causes réunies produisent cette diminution de vitesse dans les roues qui sont éloignées du biez. \{Add Buff.) l6$ de cours en prenant sa source à Raja-Ri- hron , et qui tombe dans la mer de la Chine, au midi du golfe de Changi; le Jénisca de la Tartarie, qui a 800 lieues environ d’éten- due, depuis le lac Selingua jusqu’à la mer septentrionale de la Tartarie ; le fleuve Oby, qui en a environ 600, depuis le lac Kila jusque dans la mer du Nord, au delà du détroit de Waigats ; le fleuve Amour de la Tartarie orientale, qui a environ 5^5 lieues de cours, en comptant depuis la source du fleuve Kerlon, qui s’y jette, jusqu’à la mer de Kamtschatka , où il a son embouchure ; le fleuve Menamcon, qui a son embouchure à Poulo-Condor, et qu’on peut mesurer de- puis la source du Longmu , qui s’y jette ; le fleuve Kian , dont le cours est environ de 55o lieues en le mesurant depuis la source de la rivière Kinxa, qu’il reçoit, jusqu’à sou embouchure dans la mer de la Chine ; le Gange, qui a aussi environ 55o lieues de cours; l’Euphrate, qui en a 5oo, en le prenant depuis la source de la rivière Irma, qu’il reçoit ; l’Indus, qui a environ 400 lieues de cours, et qui tombe dans la mer d’A- rabie à la partie occidentale de Guzarate; le fleuve Sirderoias , qui a une étendue de 400 lieues environ, et qui se jette dans le lac Aral. Les plus grands fleuves de l’Afrique sont le Sénégal, qui a 1125 lieues environ de cours , en y comprenant le Niger, qui n’en est en effet qu’une continuation, et en re- montant le Niger jusqu’à la source du Gom- barou , qui se jette dans le Niger ; le Nil , dont la longueur est de 970 lieues, et qui prend sa source dans la haute Éthiopie , où il fait plusieurs contours : il y a aussi le Zaïr et le Coanza , desquels on connoît en- viron 400 lieues, mais qui s’étendent bien plus au loin dans les terres de Monoémugi; le Couama, dont on ne connoît aussi qu’en- viron 400 lieues, et qui vient de plus loin, des terres de la Cafrerie; le Quilmanci, dont le cours entier est de 400 lieues, et qui prend sa source dans le royaume de Gengiro. Enfin les plus grands fleuves d’Amérique, qui sont aussi les plus larges fleuves du monde, sont la rivière des Amazones, dont le cours est de plus de 1200 lieues, si l’on remonte jusqu’au lac qui est près de Gua- nuco, à 3o lieues de Lima, où le Maragnon prend sa source; et si l’on remonte jusqu’à la source de la rivière Napo , à quelque dis- tance de Quito, le cours de la rivière des Amazones est de plus de mille lieues. On pourroit dire que le cours du fleuve THÉORTE DE LA TERRE. 170 Saint-Laurent en Canada est de plus de 900 lieues, depuis son embouchure en remon- tant le lac Oniario et le lac Érié, de là au lac Huron, ensuite au lac Supérieur, de là au lac Alemipigo , au lac Cristinaux, et enfin au lac des Assiniboïls, les eaux de tous ces lacs tombant des uns dans les au- tres , et enfin dans le fleuve Saint-Laurent. Le fleuve Mississipi a plus de 700 lieues d’étendue depuis son embouchure jusqu’à quelques-unes de ses sources, qui ne sont p-as éloignées du lac des Assiniboïls dont nous venons de parler. Le fleuve de la Plata a plus de 800 lieues de cours, en le remontant depuis son em- bouchure jusqu’à la source de la rivière Pa- rana, qu’il reçoit. Le fleuve Orénoque a plus de 575 lieues de cours, en comptant depuis la source de la rivière Caketa près de Pasto, qui se jette en partie dans l’Orénoque, et coule aussi en partie vers la rivière des Amazones. La rivière Madera, qui se jette dans celle des Amazones, a plus de 660 ou 670 lieues. Pour savoir à peu près la quantité d’eau que la mer reçoit par tous les fleuves qui y arrivent, supposons que la moitié du globe soit couverte par la mer, et que l’autre moitié soit terre sèche, ce qui est assez juste; supposons aussi que la moyenne pro- fondeur de la mer, en la prenant dans toute son étendue, soit d’un quart de mille d’I- talie, c’est-à-dire d’environ 23 o toises : la surface de tou te la terre étant de 170,981,012 milles , la surfaeedela mer « stde 85,490,506 milles carrés, qui étant multipliés par r/4 , profondeur de la mer, donnent 21,372,6^6 milles cubiques pour la quantité d’eau con- tenue dans l’Océan tout entier. Maintenant, pour calculer la quantité d’eau que l’Océan reçoit des rivières, prenons quelque grand fleuve dont la vitesse et la quantité d’eau nous soient connues; le Pô, par exemple, qui passe en Lombardie, et qui arrose un pays de 38o milles de longueur, suivant Riccioli : sa largeur, avant qu’il se divise en plusieurs bçmches pour tomber dans la mer, est de cent perches de Bologne, ou de mille pieds, et sa profondeur de dix pieds; sa vitesse est telle, qu’il parcourt 4 milles dans une heure : ainsi le Pô four- nit à la mer 200,000 perches cubiques d’eau en une heure, ou 4,800,000 dans un jour. Mais un miilecubique contient 125,000,000 perches cubiques : ainsi il faut vingt-six jours pour qu’il porte à la mer un mille cu- bique d’eau. Reste maintenant à détermi- ner la proportion qu’il y a entre la rivière du Pô et toutes les rivières de la terre prises ensemble, ce qu’il est impossible de faire ' exactement ; mais pour le savoir à peu près, | supposons que la quantité d’eau que la mer reçoit par les grandes rivières dans tous les pays, soit proportionnelle à l’étendue et à la surface de ces pays, et que par consé- quent le pays arrosé par le Pô et par les rivières qui y tombent , soit à la surface de toute la terre sèche en même proportion que le Pô est à toutes les rivières de la terre. Or, par les cartes les plus exactes, le Pô, depuis sa source jusqu’à son embouchure, traverse un pays de 38o milles de longueur, et les rivières qui y tombent de chaque côté,, viennent de sources et de rivières qui sont ; à environ 60 milles de distance du Pô : ainsi ce fleuve et les rivières qu’il reçoit,! arrosent un pays de 38o milles de long et de 120 milles de large; ce qui fait 45,600 È milles carrés. Mais la surface de toute la terre I sèche est de 85,490,506 milles carrés; par conséquent la quantité d’eau que toutes les p rivières portent à la mer sera 1874 fois plus grande que la quantité que le Pô lui; fournit : mais comme vingt-six rivières comme le Pô fournissent un mille cubique' d’eau à la mer par jour , il s’ensuit que dansi l’espace d’un an, 1874 rivières comme k' Pô fourniront à la mer 26,308 milles cu-i biques d’eau, et que dans l’espace de 813 [ ans toutes ces rivières fourniroient à la mer;L 21,372,626 milles cubiques d’eau, c’est-à-i dire autant qu’il y en a dans l’Océan, et que par conséquent il ne faudrait que 8i2jco ans pour le remplir. je Il résulte de ce calcul, que la quantité p d’eau que l’évaporation enlève de la surface |)B de la mer, que les vents transportent sur là îf terre, et qui produit tous les ruisseaux et p tous les fleuves, est d’environ 245 lignes. jt ou de 20 à 21 pouces par an, ou d’environ (i les deux tiers d’une ligne par jour; ceci est roj une très-petite évaporation, quand même # on la doubleroit ou tripleroit, afin de tenir jj, compte de l’eau qui retombe sur la mer, et (1 qui n’est pas transportée sur la terre. Voyea lu sur ce sujet 1 écrit de Halley dans les Tran-, (ll sactions philosophiques , n° 192, où il failj |e„ voir évidemment et par le calcul, que les j r ( vapeurs qui s’élèvent au dessus de la mer,j et que les vents transportent sur la terre, 4 sont suffisantes pour former toutes les ri- * vieres et entretenir toutes les eaux qui sonl ,< à la surface de la terre. g| Après le Nil, le Jourdain est le fleuve le j i, plus considérable qui soit dans le Levant. j «j, et même dans la Barbarie: il fournit à h! ART. X. FLEUVES. 171 mer Morte environ six millions de tonnes îd’eau par jour : toute cette eau, et au delà, 'est enlevée par l’évaporation ; car en comp- tait , suivant le calcul de Halley, 691 '+ ton- nes d’eau qui se réduit en vapeurs sur cha- que mille superficiel , on trouve que la mer «Morte, qui a 72 milles de long sur 18 milles de large, doit perdre tous les jours jpar l’évaporation piès de neuf millions de tonnes d’eau, c’est-à-dire non seulement 'toute l’eau qu’elle reçoit du Jourdain, mais encore celle des petites rivières qui y arri- vent des montagnes de Moab et d’ailleurs : ’ par conséquent elle ne communique avec 1 àucune autre mer par des canaux souter- ILes fleuves les plus rapides de tous son'; e Tigre, l’Indus, le Danube, l’Yrtis en Si- érie, le Malmistra en Cilicie, etc. Mais, tomme nous l’avons dit au commencement e cet article, la mesure de la vitesse des aux d’un fleuve dépend de deux causes : a première est la pente, et la seconde le àoids ei la quantité d’eau. En examinant ur le globe quels sont les fleuves qui ont e plus de pente, on trouvera que le Da- nube en a beaucoup moins que le Pô, le Lhin, et le Rhône, puisque, tirant quel- nies-unes de ses sources des mêmes mon- agnes, le Danube a un cours beaucoup dus long qu’aucun de ces trois autres fleu- es, et qu’il tombe dans la mer Noire, qui fist plus élevée que la Méditerranée, et kut-ètre plus que l’Océan. Tous les grands fleuves reçoivent beau- oup d’autres rivières dans toute l’étendue le leur cours; on a compté, par exemple, ue le Danube reçoit plus de deux cents ant ruisseaux que rivières. Mais en ne pmptant que les rivières assez considérables el (ue les fleuves reçoivent, on trouvera que p Danube en reçoit trente ou trente-une, 00 k Wolga en reçoit trente-deux ou trente- rois , le Don cinq ou six , le Niéper dix-neuf u vingt, la Duine onze ou douze; et de jême en Asie le Hoanlio reçoit trente-quatre et u trente-cinq rivières; le Jénisca en reçoit lus de soixante, l’Oby tout autant, le êuve Amour environ quarante; le Kian ou euve de Nanquin en reçoit environ trente, Gange plus de vingt , l’Euphrale dix ou üze , etc. En Afrique, le Sénégal reçoit lus de vingt rivières ; le Nil ne reçoit au- une rivière qu’à plus de cinq cents lieues son embouchure; la dernière qui y tombe ;t le Moraba, et de cet endroit jusqu’à sa mrce il reçoit environ douze ou treize vières. En Amérique , le fleuve des Ama- sonte zones en reçoit plus de soixante , et toutes fort considérables; le fleuve Saint-Laurent environ quarante, en comptant celles qui tombent dans les lacs; le fleuve Mississipi plus de quarante, le fleuve de la Plata plus de cinquante , etc. U y a sur la surface de la ferre des con- trées élevées qui paroissent être des points de partage marqués par la nature pour la distribution des eaux. Les environs du mont Saint-Golhard sont un de ces points en Eu- rope. Un autre point est le pays situé entre les provinces de Belozera et de Vologda en Moscovie, d’où descendent des rivières dont les unes vont à la mer Blanche, d’au- tres à la mer Noire, et d’autres à la mer Caspienne en Asie; le pays des Tariares Mogols d’où il coule des rivières dont les unes vont se rendre dans la mer Tranquille ou mer de la Nouvelle-Zemble, d’autres au golfe Linchidolin , d’autres à la mer de Corée , d’autres à celle de la Chine; et de même le petit Tliibet , dont les eaux cou- lent vers la mer de la Chine, vers le golfe de Bengale, vers le golfe de Cambaïe et vers le lac Aral ; en Amérique la province de Quito, qui fournit des eaux à la mer du Sud , à la mer du Nord , et au golfe du Mexique. Il y a dans l’ancien continent environ quatre cent trente fleuves qui tombent im- médiatement dans l’Océan ou dans la Mé- diterranée et la mer Noire , et dans le nouveau continent on ne connoît guère que cent quatre-vingts fleuves qui tombent immédiatement dans la mer; au reste, je n’ai compris dans ce nombre que des ri» vières grandes au moins comme l’est la Somme en Picardie. Toutes ces rivières transportent à la mer avec leurs eaux une grande quantité de parties minérales et salines qu’elles ont enlevées des diflérens terrains par où elles ont passé. Les particules de sels, qui , comme l’on sait , se dissolvent aisé- ment , arrivent à la mer avec les eaux des fleuves. Quelques physiciens , et entre autres Halley , ont prétendu que la salure de la mer ne provenait que des sels de la terre que les fleuves y transportent ; d’autres ont dit que la salure de la mer éloit aussi ancienne que la mer même, et que ce sel n’avoit été créé que pour l’empêcher de se corrompre ; mais on peut croire que l’eau de la mer est préservée de la corruption par l’agitation des vents et par celle du flux et reflux , autant que par le sel qu’elle contient ; car quand on THÉORIE DE LA TERRE. la garde dans un tonneau , elle se cor- rompt au bout de quelques jours, et Boyle rapporte qu’un navigateur pris par un calme qui dura treize jours, trouva la mer si infectée au bout de ce temps que si le calme n’eût cessé, la plus grande partie de son équipage auroit péri. L’eau de la mer est aussi mêlée d’une huile bi- tumineuse, qui lui donne un goût désa- gréable , et qui la rend très-malsaine. La quantité de sel que l’eau de la mer con- tient est d’environ une quarantième par- tie , et la mer est à jpeu près également salée partout, au dessus comme au fond, également sous la ligne et au cap de Bonne-Espérance , quoiqu’il y ait quelques endroits , comme à la côte de Mozam- bique, où elle est plus salée qu’ailleurs. On prétend aussi qu’elle est moins salée dans la zone arctique : cela peut venir de la grande quantité de neige et des grands fleuves qui tombent dans ces mers, et de ce que la chaleur du soleil n’y produit que peu d’évaporation , en comparaison de l’évaporation qui se fait dans les climats chauds. Quoi qu’ii en soit, je crois que les vraies causes de la salure de la mer sont non seu- lement les bancs de sel qui ont pu se trouver au fond de la mer et le long des côtes , mais encore les sels mêmes de la terre que les fleuves y transportent continuellement; et que Halley a eu quelque raison de présumer qu’au commencement du monde la mer n’étoit que peu ou point salée, qu’elle l’est devenue par degrés et à mesure que les fleuves y ont amené des sels; que cette sa- lure augmente peut-être tous les jours et augmentera toujours de plus en plus , et que par conséquent il a pu conclure qu’en fai- sant des expériences pour reconnoitre la quantité de sel dont l’eau d’un fleuve est chargée lorsq; lie arrive à la. mer, et qu’en supputant la quantité d’eau que tous les fleuves y portent, on viendroit à connoître l’ancienneté du monde par le degré de la salure de la mer. Les plongeurs et les pêcheurs de perles assurent, au rapport de Boyle , que plus on descend dans la mer, plus l’eau est froide ; que le froid est même si grand à une profondeur considérable , qu’ils ne peuvent le souffrir, et que c’est par cette raison qu’ils ne de- meurent pas long -temps sous l’eau , lorsqu’ils descendent à une profondeur un peu plus grande , que quand ils ne descendent qu’à une petite profondeur. Il me paroît que le poids de l’eau pourroît en être la cause aussi bien que le froid, si on descendoit à un grande profondeur, comme trois ou quati cents brasses; mais, à la vérité, les ploi geurs ne descendent jamais à plus de cei pieds ou environ. Le même auteur rappori |, que dans un voyage aux Indes orientale} au delà de la ligne , à environ 35 degrés d j latitude sud, on laissa tomber une sonde ! quatre cents brasses de profondeur , < qu’ayant retiré cette sonde qui étoit d plomb et qui pesoit environ trente à trenh cinq livres , elle étoit devenue si froide qu’il sembloit toucher un morceau de glace On sait aussi que les voyageurs, pour re fraîchir leur vin , descendent les bouteille, à plusieurs brasses de profondeur dans ] mer ; et plus on les descend , plus le vin e frais. Tous ces faits pourroient faire présume que l’eau de la mer est plus salée au fon qu’à la surface; cependant on a des t< moignages contraires , fondés sur des exp< riences qu’on a faites pour tirer dans d< vases , qu’on ne débouchoit qu’à une cei taine profondeur, de l’eau de la mer, Id quelle ne s’est pas trouvée plus salée qc celle de la surface : il y a même des en droits où l’eau de la surface étant salée; l’eau du fond se trouve douce ; et cela do; arriver dans tous les lieux où il y a des fou taines et des sources qui sourdent du fom de la mer, comme auprès de Goa , à Ormusi et même dans la mer de Naples, où il y des sources chaudes dans le fond *. i. Au sujet delà salure de la mer, il y a der opinions, qui toutes deux sont fondées et en part vraies. Halley attribue la salure de la mer uniqui ment aux sels de la terre que les fleuves y trana portent, et pense même qu’on peut reconnoîtj l’ancienneté du monde par le degré de cette salu» des eaux de la mer. Leibnitz croit au contraire qi] le globe de la terre ayant été liquéfié par le feu les sels et les autres parties empyreumatiques or: produit avec les vapeurs aqueuses une eau lixiviel et salée, et que par conséquent la mer avoit ses degré de salure dès le commencement. Les opinioi: de ces deux grands physiciens , quoique opposées; doivent être réunies , et peuvent même s’accorde avec la mienne : il est en effet très-probable qt[ l’action du feu combinée avec celle de l’eau a fa j la dissolution de toutes les matières salines qui i sont trouvées à la surface de la terre dès le cou mencement , et que par conséquent le premier d< j gré de salure de la mer provient de la cause iri diquée par Leibnitz; mais cela n’empêche pas qt j la seconde cause désignée par Halley n’ait aus très-considérablement influé sur le degré de la sa lure aetuelle de la mer, qui ne peut manquer d’aile toujours en augmentant, parce qu’en effet les flet ves ne cessent de transporter à la mer une grand] quantité de sels fixes, que l’évaporation ne pei j enlever; ils restent donc mêlés avec la masse dtj eaux, qui, dans la mer, se trouvent généralemerl ART. X. |™ Il y a d’autres endroits où l’on a remarqué les sources bitumineuses et des couclies de )itume au fond de la mer, et sur la terie il ‘ a une grande quantité de ces sources qui Sortent le bitume mêlé avec l’eau dans la j lier. A la Barbade , il y a une source de Jpitume pur qui coule des rochers jusqai’à la 'ner; le sel et le bitume sont donc les ma- niérés dominantes dans l’eau de la mer : mais Ile est encore mêlée de beaucoup d’autres natieres; car le goût de l’eau n’est pas le ,f aême dans toutes les parties de l’Océan, d’ailleurs l’agitation, et la chaleur du soleil, Itèrent le goût naturel que devroit avoir I [eau de la mer; et les couleurs différentes es différentes mers , et des mêmes mers en ifférens temps , prouvent que l’eau de la lier contient des matières de bien des es- jj èces, soit qu’elle les détache de son propre • pnd , soit qu’elles y soient amenées par les ^ leuves. f i Presque tous les pays arrosés par de grands r euves sont sujets à des inondations pério- a iques , surtout les pays bas et voisins de ?ur embouchure; et les fleuves qui tirent ?urs sources de fort loin, sont ceux qui , ebordent le plus régulièrement. Tout le • îonde a entendu parler des inondations du j [il ; il conserve dans un grand espace, et f rt loin dans la mer, la douceur et la blan- îeur de ses eaux. Strabon et les autres an- ,iens auteurs ont écrit qu’il y avoit sept 'jnbouchures, mais aujourd’hui il n’en reste ne deux qui soient navigables ; il y a un foisième canal qui descend à Alexandrie our remplir les citernes, et un quatrième anal qui est encore plus petit. Comme on négligé depuis fort long-temps de nettoyer ^s canaux , ils se sont comblés. Les anciens tnployoient à ce travail un grand nombre ^ouvriers et de soldats , et tous les ans , près l’inondation , l’on enlevoit le limon et j sable qui étoient dans les canaux ; ce euve en charrie une très-grande quantité, ja cause du débordement du Nil vient des luies qui tombent en Éthiopie : elles com- lencent au mois d’avril, et ne finissent îautant plus salées qu’elles sont plus éloignées de îmbouchure des fleuves , et que la chaleur du inaat y produit une plus grande évaporation. La reuve que cette seconde cause y fait peut-être jitant et plus que la première , c’est que tous les jes dont il sort des fleuves , ne sont point salés ; [ndis que presque tous ceux qui reçoivent des ^uves sans qu’ils en sortent, sont imprégnés de ul. La mer Caspienne, le lac Aral, la mer Morte, |c. , ne doivent leur salure qu’aux sels que les üeuves y transportent et que l’évaporation ne peut Jilever. {Add. Buff.) FLEUVES. 17S qu’au mois de septembre. Pendant les trois premiers mois les jours sont sereins et beaux: mais des que le soleil se couche, il pleut jusqu’à ce qu’il se lève; ce qui est accom- pagné ordinairement des tonnerres et d’é- clairs. L’inondation ne commence en Égypte que vers le 17 de juin; elle augmente ordi- nairement pendant environ quarante jours, et diminue pendant tout autant de temps : tout le plat pays de l’Égypte est inondé. Mais ce débornement est bien moins consi- dérable aujourd’hui qu’il ne l’étoii autrefois; car Hérodote nous dit que le Nil étoit cent jours à croître et autant à décroître. Si le fait est vrai , on ne peut guère en attribuer la cause qu’à l’élévation du terrain que le limon des eaux a haussé peu à peu , et à la diminution de la hauteur des montagnes de l’intérieur de l’Afrique dont il tire sa source ; il est assez naturel d’imaginer que ces mon- tagnes ont diminué , parce que les pluies abondantes qui tombent dans ces climas pendant la moitié de l’année , entraînent les sables et les terres du dessus des montagnes dans les vallons, d’où les torrens les char- rient dans le canal du Nil, qui en emporte uue bonne partie en Égypte , où il les dé- pose dans1 ses débordemens. Le Nil n’est pas le seul fleuve dont les inondations soient périodiques et annuelles : on a appelé la rivière de Pégu le Nil indien , parce que ses débordemens se font tous les ans régulièrement; il inonde ce pays à plus de trente lieues de ses bords, et il laisse, comme le Nil, un limon qui fertilise si fort la terre, que les pâturages y deviennent ex- cellens pour le bétail, et que le riz y vient en si grande abondance, qu’on en charge tous les ans un grand nombre de vaisseaux sans que le pays en manque. Le Niger, ou , ce qui revient au même, la partie supérieure du Sénégal, déborde aussi comme le Nil, et l’inondation, qui couvre tout le plat pays de la Nigritie , commence à peu près dans le même temps que celle du Nil, vers le 1 5 juin ; elle augmente aussi pendant qua- rante jours. Le fleuve de la Plata, au Bré- sil, déborde aussi tous les ans, et dans le même temps que le Nil ; le Gange, l’Indus , l’Euphrate, et quelques autres, débordent aussi tous les ans ; mais tous les autres fleuves n’ont pas des débordemens périodiques ; et quand il arrive des inondations, c’est un ef- fet de plusieurs causes qui se combinent pour fournir une plus grande quantité d’eau qu’à l’ordinaire, et pour retarder en même temps la vitesse du fleuve. Nous avons dit que dans presque tous les THÉORIE DE LA TERRE. 174 fleuves la pente de leur lit va toujours en diminuant jusqu’à leur embouchure d une manière assez insensible : mais il y en a dont la pente est tres-brusque dans certains endroits; ce qui forme ce qu’on appelle une cataracte , qui n’est autre chose qu’une chute d’eau plus vive que le courant ordi- naire du fleuve. Le Rhin, par exemple, a deux cataractes; l’une à Bilefeld, et l’autre auprès de Schafihouse. Le Nil en a plu- sieurs , et entre autres deux qui sont tres- violentes et qui tombent de fort haut entre deux montagnes. La rivière Vologda, en Moscovie , a aussi deux cataractes auprès de Ladoga. Le Zaïr, fleuve de Congo, com- mence par une forte cataracte qui tombe du haut d’une montagne. Mais la plus fameuse cataracte est celle de la riviere Niagara au Canada ' ; elle tombe de i5b pieds de hau- teur perpendiculaire; comme un torrent pro- digieux, et elle a plus d’un quart de lieue de largeur : la brume ou le brouillard que l’eau fait en tombant se voit de cinq lieues, et séleve jusqu’aux nues; il s’y forme un très-bel arc-en-ciel lorsque le soleil donne dessus. Au dessous de cette cataracte il y a des tournoiemens d’eau si terribles, qu’on ne peut y naviguer jusqu’à six milles de distance; et au dessus de la cataracte, la ri- vière est beaucoup plus étroite qu’elle ne l’est dans les terres supérieures. Voici la description qu’en donne le P. Charlevoix: « Mon premier soin fut de visiter la plus belle cascade qui soit peut-être dans la na- ture; mais je reconnus d’abord que le ba- ron de La Hontan s’étoit trompé sur sa i. J’ai dit que la cataracte de la rivière de Nia- gara au Canada é t'oit la plus fameuse, et qu’elle tomboit de rofi . ieds de hauteur perpendiculaire. J’ai depuis été informé qu’i! se trouve en Europe une cataracte qui tombe de 3oo pieds de hauteur; c’est celle de Terni , petite ville sur la route de Rome à Bologne. Elle est formée par la rivière de Velino, qui prend a source dans les montagnes de l’Abruzze. Après avoir passé par Riète , ville frontière du royaume de Naples, elle se jette dans le lac de Luco, qui paroîl entretenu par des sources abondantes; car elle en sort plus forte qu’elle n’y est entrée, et va jusqu’au pied de la montagne del Marmore , d’où elle se précipite par un saut per- pendiculaire de 3oo pieds; elle tombe comme dans un abîme, d’où elle s'échappe avec une espèce de fureur La rapidité de sa chute brise ses eaux avec tant d’effort contre les rochers et sur le fond de cet abîme, qu’il s’en élève une vapeur humide, sur laquelle les rayons du soleil forment des arcs-en- ciel, qui sont très-variés; et lorsque le vent du midi souffle et rassemble ce brouillard contre la mon- tagne, au lieu de plusieurs petits arcs-en-ciel, ou n’en voit plus qu’un seul qui couronne toute la cas- cade. {Add. Buff.) hauteur et sur sa figure , de manière à fait juger qu’il ne l’avoit point vue. « Il est certain que si on mesure sa hau i teur par les trois montagnes qu’il faut frai | chir d’abord, il n’y a pas beaucoup à rai battre des boo pieds que lui donne la cari de M. Delisle, qui sans doute n’a avancé c paradoxe que sur la foi du baron de L Hanlon et du P. Hennepin : mais après qu je fus arrivé au sommet de la troisiem montagne , j’observai que dans l’espace d' trois lieues que je fis ensuite jusqu’à cett chute d’eau , quoiqu’il faille quelquefoi, monter, il faut encore plus descendre ; t c’est à quoi ces voyageurs paroissent n’avoi pas fait assez d’aiteniion. Comme on ne pei approcher la cascade que de côté, ni la voij que de profil , il n’est pas aisé d’en mesure j la hauteur avec les instrumens : on a voull le faire avec une longe corde attachée 1 une longue perche ; et après avoir sou ver réitéré cette maniéré , on n’a trouvé qu x 10 ou f2o pieds de profondeur: mais i n’esl pas possible de s’assurer si la percl i n’a pas été arrêtée par quelque rocher qi avançoit; car quoiqu’on l’eût toujours retit rée mouillée aussi bien qu’un bout de J corde à quoi elle étoit attachée, cela ni prouve rien, puisque l’eau qui se précipita de la montagne rejaillit fort haut en écu mani. Pour moi , apres l’avoir considérée d tous les endroits d où l’on peut f examiné à son aise , j’estime qu’on ne sauroit h donner moins de 140 ou i5o pieds. « Quant à sa figure, elle est en fer-à-clie Val , et elle a environ 400 pas de circonft renee : mais, précisément dans son milieu; elle est partagée en deux par une île foi étroite et d’un demi-quart de lieue de longj qui y abouti). Il est vrai que ces deux par ties ne tardent pas à se rejoindre : celle qi étoil de mon côté, et qu’on 11e voyoit qui de profil, a plusieurs pointes qui avancent; mais celle que je découvrois en face me pi rut fort unie. Le baron de La Hontan ajoute un torrent qui vient de l’ouest : faut que dans la fonte des neiges les eau, sauvages viennent se décharger là parque! que ravine , etc.i. 2 ». Il y a une autre cataracte à trois lieue; d’Albanie, dans la province de la Nouvelle York, qui a environ 5o pieds de hautec perpendiculaire, et de cette chute d’eau s’élève aussi un brouillard dans lequel o( aperçoit un léger arc-en-ciel, qui chang de place à mesure qu’on s’en éloigne 0 qu’on s’en approche. 2. Tome lit , pages 33a et suivantes. ART. X. FLEUVES. En général, dans tous les pays où le nom- jre d’hommes n’est pas assez considérable jour former des sociélés policées, les ter- ains sont plus irréguliers et le lit des fleu- res plus étendu, moins égal, et rempli de fataractes. Il a fallu des siècles pour rendre e Rhône et la Loire navigables. C’est en iOn tenant les eaux, en les dirigeant, et en lettoyant le fond des fleuves , qu’on leur lonne un cours assuré ; dans toutes les erres où il y a peu d’habitans, la nature st brute, et quelquefois difforme. Il y a des fleuves qui se perdent dans les ïbles , d autres qui semblent se précipiter ans les entrailles de la terre : le Guadal- uivir en Espagne, la rivière de Gottemburg h Suède, et le Rhin même, se perdent ans la terre. On assure que dans la partie icidentale de l’ile Saint-Domingue il y a ne montagne d’une hauteur considérable , !i pied de laquelle sont plusieurs cavernes i les rivières et les ruisseaux se précipitent rec tant de bruit, qu’on l’entend de sept ï huit lieues. I Au reste, le nombre de ces fleuves qui t perdent dans le sein de la terre est fort etit , et il n’y a pas d’apparence que ces lux descendent bien bas dans l’intérieur li globe ; il est plus vraisemblable qu’elles j perdent, comme celles du Rhin, en se visant dans les sables : ce qui est fort or- uaire aux petites rivières qui arrosent les Tains secs et sablonneux; on en a plu- jurs exemples en Afrique, en Perse, en ’abie, etc. Les fleuves du Nord transportent dans les srs une prodigieuse quantité de glaçons i, venant à s’accumuler, forment ces masses ormes de glace si funestes aux voyageurs. |] des endroits de la mer Glaciale où ehés ht le plus abondantes , est le détroit de aigats, (pii est gelé en entier pendant la is grande partie de l’année ; ces glaces it formées des glaçons que le fleuve Oby nsporte près pie continuellement ; elles fâchent le long des côtes, et s’élèvent à !e hauteur considérable des deux côtés du roit ; le milieu du détroit est l’endroit | gèle le dernier, et où la glace est le lins élevée ; lorsque le vent cesse de venir ! nord et qu’il souffle dans la direction du cl jroit , la glace commence à fondre et à se J npre dans le milieu ; ensuite il s’en dé- ® lie des côtes de grandes masses qui "i lagent dans la haute mer. Le vent, qui 1 lidanl tout l’hiver vient du nord et passe j les terres gelées de la Nouvelle-Zemble, id le pays arrosé par l’Oby et toute la i75 Sibérie si froids , qu’à Tobolsk même , qui est au 57e degré, il n’y a point d’arbres frui- tiers , tandis qu’en Suède, à Stockholm, et même à de plus hautes latitudes, on a des arbres fruitiers et desdégumes. Cette diffé- rence ne vient pas , comme on l’a cru , de ce que la mer de Laponie est moins froide que celle du détroit, ou de ce que la terre de la Nouvelle-Zemble l’est plus que celle de la Laponie, mais uniquement de ce que la mer Baltique et le golfe de Bothnie adou- cissent un peu la rigueur des vents du nord, au lieu qu’en Sibérie il 11’y a rien qui puisse tempérer l’activité du froid. Ce que je dis ici est fondé sur de bonnes observations ; il ne fait jamais aussi froid sur les côtes de la mer que dans l’intérieur des terres : il y a des plantes qui passent l’hiver en plein air à Londres , et qu’on ne peut con- server à Paris; et la Sibérie, qui fait un vaste continent où la mer n’entre pas, est par celte raison plus froide que la Suède, qui est environnée de la mer presque de loua côtés. Le pays du monde le plus froid est le Spitzberg*: c’est une terre au 78e degVé de latitude, toute formée de petites montagnes aiguës; ces montagnes sont composées de gravier et de certaines pierres plates sem- blables à de petites pierres d’ardoise grise, entassées les unes sur les autres. Ces colli- nes se forment , disent les voyageurs , de ces petites pierres et de ces graviers que les vents amoncelent ; elles croissent à vue d’œil, et les matelots en découvrent tous les ans de nouvelles ; on ne trouve dans ce pays que des rennes , qui paissent une petite herbe fort courte et de la mousse. Au des- sus de ces petites montagnes , et à plus d’une lieue de la mer, 011 a trouvé un mât qui avoit une poulie attachée à un de ses bouts ; ce qui a fait penser que la mer passoit au- trefois sur ces montagnes , et que ce pays est formé nouvellement : il est inhabité et inhabitable ; le terrain qui forme ces peti- tes montagnes n’a aucune liaison, et il en sort une vapeur si froide et si pénétrante, qu’on est gelé pour peu qu’on y demeure. Les vaisseaux qui vont au Spitzberg pour la pêche de la baleine, y arrivent au mois de juillet, et en partent vers le i5 d’août; les glaces empêcheroient d’entrer dans cette mer avant ce temps , et d’en sortir apres ; on y trouve des morceaux prodigieux de glaces épaisses de 60, 70, et 80 brasses. Il y a des endroits où il semble que la mer soit glacée jusqu’au fond : ces glaces qui sont si élevées au dessus du niveau de la 176 THÉORIE DE LA TERRE. mer, sont claires et luisantes comme du verre. Il y a aussi beaucoup de glaces dans les mers du nord de f Amérique , comme dans la baie de P Ascension , dans les détroits de Hudson, de Cumberland, de Davis, de Forbisher, etc. Robert Lade nous assure que les montagnes de Frisland sont entière- ment couvertes de neige , et toutes les côtes de glace, comme d’un boulevart qui ne permet pas d’en approcher : « Il est, dit-il, fort remarquable que dans cette mer on trouve des îles de glace de plus d’une demi- lieue de tour, extrêmement élevées , et qui ont 70 ou 80 brasses de profondeur dans la mer : cette glace, qui est douce, est peut- être formée dans les détroits des terres voi- sines , etc. Ces îles ou montagnes de glace sont si mobiles , que dans des temps orageux elles suivent la course d'un vaisseau , comme si elles étoient entraînées dans un même sillon : il y en a de si grosses , que leur superfice au dessus de l’eau surpasse l’ex- trémité des mâts des plus gros navires, etc. 1 » On trouve dans le recueil des voyages qui ont servi à l’établissement de la compagnie des Indes de Hollande , un petit journal his- torique au sujet des glaces de la Nouvelle- Zemble , dont voici l’extrait : « Au cap de Troost le temps fut si embrumé, qu’il fallut amarrer le vaisseau à un banc de glace qui avoit 36 brasses de profondeur dans l’eau, et environ 16 brasses au dessus , si bien qu’il avoit 52 brasses d’épaisseur... « Le 10 d’août , les glaces s’étant séparées, les glaçons commencèrent à flotter, et alors on remarqua que le gros banc de glace au- quel le vaisseau avoit été amarré, touchoit au fond , parce que tous les autres passoient au long et le heurtoient sans l’ébranler ; on craignit donc de demeurer pris dans les gla- ces, et on tâcha de sortir de ce parage , quoi- que en passant on trouvât déjà l’eau prise , le vaisseau faisant craquer la glace bien loin autour de lui : enfin on aborda un autre banc, où l’on porta vite l’ancre de touée, et l’on s’y amarra jusqu’au soir. « Après le repas , pendant le premier quart , les glaces commencèrent à se rompre avec un bruit si terrible, qu’il n’est pas possible de l’exprimer. Le vaisseau avoit le cap au courant qui charrioit les glaçons , si bien qu’il fallut filer du câble pour se reti- rer ; on compta plus de 400 gros bancs de glace , qui enfonçoient de xo brasses dans 1. Voyez la traduction des Voyages de Lade, par M. l’abbé Prévost, tome II, pages 3o5 et suivantes. l’eau, et paroissoient de la hauteur de 2 br ses au dessus. « Ensuite on amarra le vaisseau à un ; Ire banc qui enfonçoit de 6 grandes bras> et l’on y mouilla en croupiere. Dès qu y fut établi , on vit encore un autre bi peu éloigné de cet endroit-là , dont le h, s’élevoit en pointe, tout de même que pointe d’un clocher , et il touchoit le fc de la mer ; on s’avança vers ce banc , et 1 trouva qu’il avoit 20 brasses de haut di l’eau , et à peu près 12 brasses au dessu « Le 11 août on nagea encore vers autre banc qui avoit 18 brasses de profc deur , et 10 brasses au dessus de l’eau... « Le 21 , les Hollandois entrèrent as avant dans le port des glaces , et y demi rèrent à l’ancre pendant la nuit : le lem main matin ils se retirèrent et allèrent am rer leur bâtiment à un banc de glace ; lequel ils montèrent et dont ils adïnirèrt là figure comme une chose très-singulièi ce banc étoit couvert de terre sur le ha et on y trouva près de quarante œufs ; couleur n’en étoit pas non plus comme ce de la glace , elle étoit d’un bleu céleste. Ct qui étoient là raisonnèrent beaucoup sur objet; les uns disoient que c’étoit un et de la glace, et les autres soulenoient q ■ #- nrvrt Iavwia nrnlAn m,’!! *■ lOllS iel c etoit une terre gelée. Quoi qu’il en fût banc étoit extrêmement haut , il avoit en ron 18 brasses sous l’eau et 10 brasses dessus ». » Wafer rapporte que près de la Terre-( Feu il a rencontré plusieurs glaces floltam très-élevées, qu’il prit d’abord pour < îles. Qnelques-unes , dit-il , paroissent av’ une lieue ou deux de long, et la plus gro de toutes lui parut avoir 4 ou 5oo pieds haut. Toutes ces glaces , comme je l’ai dit d1 'oute du nord pour aller à la Chine, il vaut jcaucoup mieux passer au nord de la Nou- ^ ^elle-Zemble à 77 ou 78 degrés, où d’ailleurs (|1| }a mer est plus libre et moins glacée, que de Jlljl tenter encore le chemin du détroit glacé de le1 jVVaigals, avec l’incertitude de ne pouvoir F%ortir de cette mer médit erranée. ml En suivant donc l’Océan tout le long des môles de la Nouvelle-Zemble et du Jelmor- II «and, on a reconnu ces terres jusqu’à l’em- 1:4 m>ouchure du Chotanga, qui est environ au lll* 1 3e degré ; après quoi l’on trouve un espace i l’environ 200 lieues, dont les côtes ne sont seul bas encore connues : on a su seulement par it;j b rapport des Moscovites qui ont voyagé tyj par terre dans ces climats , que les terres ne wf ont point interrompues, et leurs cartes y i b marquent des fleuves et des peuples qu’ils ' fjnt appelés Populi Patati. Cet intervalle de t bûljples encore inconnues est depuis i’embou- nèwhure du Chotanga jusqu’à celle du Kau- elcfoina au 66e degré de latitude : là , l’Océan ïiil ait un golfe dont le point le plus avancé l’ei lans les terres est à l’embouchure du Len, nte| fui est un fleuve très considérable ; ce golfe id,:j st formé par les eaux de l’Océan; il est fort mW luvert et il appartient à la mer de Tartarie ; lue In l’appelle le golfe Linchidolin , et les Mos- lorilovites y pêchent la baleine. ; terri De l’embouchure du fleuve Len, on peut )lef|uivre les côtes septentrionales de la Tarta- ie dans un espace de plus de 5oo lieues |ers l’orient, jusqu’à une grande péninsule lu terre avancée où habitent les peuples Ichelates; cette pointe est l’extrémité la ijlus septentrionale de la Tartarie la plus Éjrientale, et elle est située sous le 72e de- iré environ de latitude nord. Dans cette longueur de plus de ôoo lieues , l’Océan ne fait aucune irruption dans les terres , aucun golfe , aucun bras ; il forme seulement un coude considérable à l’endroit de la nais- sance de celte péninsule des peuples Sche- lates, à l’embouchure du fleuve Korvinea: cette pointe de terre fait aussi l’exirémité orientale de la côte septentrionale du con- tinent de l’ancien monde, dont l’extrémité occidentale est au cap Nord en Laponie , en sorte que l’ancien continent a environ 1700 lieues de côtes septentrionales, en y comprenant les sinuosités des golfes , en comptant depuis le cap Nord de Laponie jusqu’à la pointe de la terre des Schelales , et il y a environ 1100 lieues en naviguant sous le même parallèle. Suivons maintenant les côtes orientales de l’ancien continent , en commençant à cette pointe de la terre des peuples Schelates , et en descendant vers l’équateur : l’Océan fait d’abord un coude entre la terre des peuples Schelates et celle des peuples Tschurtschi, qui avance considérablement dans la mer ; au midi de cette terre, il forme un petit golfe fort ouvert, qu’on appelle le golfe Suctoikret , et ensuite un autre plus petit golfe, qui avance même comme un bras à 40 ou 5o lieues dans la terre de Kamtschatka ; après quoi l’Océan entre dans les terres par un large détroit rempli de plusieurs petites îles, entre la pointe méridionale de la terre de Kamtschatka et la pointe septentrionale de la terre d’Yeço , et il forme une grande mer méditerranée dont il est bon que nous sui- vions toules les parties. La première est la mer de Kamtschatka , dans laquelle se trouve une île très-considérable qu’on appelle Vile Amuor ; cette mer d'e Kamtschatka pousse un bras dans les terres au nord-est : mais ce petit bras et la mer de Kamtschatka elle-même pourroient bien être, au moins en partie , formés par l’eau des fleuves qui y arrivent , tant des terres de K amtschatka , que de celles de la Tartarie. Quoi qu’il en soit , cette mer de Kamtschatka communique par un très-large détroit avec la mer de Co- rée , qui fait la seconde partie de cette mer méditerranée, et toute cette mer , qui a plus de 600 lieues de longueur, est bornée à l’oc- cident et au nord par les terres de Corée et de Tartarie, à l’orient et au midi par celles de Kamtschatka , d’Yeço et du Japon , sans qu’il y ait d’autre communication avec l’O- céan que celle du détroit dont nous avons parlé , entre Kamtschatka et Yeço ; car on n’est pas assuré si celui que quelques cartes ont marqué entre le Japon et la terre 12, i8d THÉORIE DE LA TERRE. d’Yeço, existe réellement; et quand même ce détroit existeroit , la mer de Kamtschatka et celle de Corée ne laisseroient pas d’être toujours regardées comme formant ensemble une grande mer méditerranée , séparée de l’Océan de tous côtés, et qui ne doit pas être prise pour un golfe , car elle ne communique pas directement avec le grand Océan par son détroit méridional qui est entre le Japon et la Corée; la mer de la Chine, à laquelle elle communique par ce détroit , est plutôt en- core une mer méditerranée qu’un golfe de l’Océan. Nous avons dit dans le discours précédent, que la mer avoit un mouvement constant d’orient en occident, et que par conséquent la grande mer Pacifique fait des efforts con- tinuels contre les terres orientales. L’inspec- tion attentive du globe confirmera les con- séquences que nous avons tirées de cette observation; car si l’on examine le gisement des terres, à commencer de Kamtschatka jusqu’à la Nouvelle-Bretagne, découverte en 1700 par Dampier, et qui est à 4 ou 5 de- grés de l’équateur, latitude sud , on sera très- porté à croire que l’Océan a rongé toutes les terres de ces climats dans une profondeur de 4 ou 5oo lieues ; que par conséquent les bornes orientales de l’ancien continent ont été reculées, et qu’il s’étendoit autrefois beaucoup plus vers l’orient : car on remar- quera que la Nouvelle-Bretagne et Kam- tschatka , qui sont les terres les plus avancées vers l’orient, sont sous le même méridien ; on observera que toutes ces terres sont diri- gées du nord au midi. Kamtschatka fait une pointe d’environ 160 lieues du nord au midi ; et cette pointe , qui du côté de l’orient est baignée par la mer Pacifique , et de l’autre par la mer méditerranée dont nous venons de parler , est partagée dans cette direction du nord au miù, par une chaîne de monta- gnes. Ensuite Yeço et le Japon forment une terre dont la direction est aussi du nord au midi dans une étendue de plus de 400 lieues entre la grande mer et celle de Corée, et les chaînes des montagnes d’Yeço et de cette partie du Japon ne peuvent pas manquer d’être dirigées du nord au midi , puisque ces terres, qui ont 400 lieues de longueur dans cette direction , n’en ont pas plus de 5o, 60 ou roo de largeur dans l’autre direction de l’est à l’ouest : ainsi Kamtschatka , Yeço et la partie orientale du Japon sont des terres qu’on doit regarder comme contiguës et di- rigées du nord au sud; et suivant toujours la même direction, l’on trouve, après la pointe du cap Ava au Japon, l’île de Barne- veldt et trois autres îles qui sont posées les unes au dessus des autres, exactement dans la direction du nord au sud , et qui occupent en tout un espace d’environ 100 lieues : or trouve ensuite dans la même direction trois autres îles appelées les îles des Callanos, qui sont encore toutes trois posées les unes au dessus des autres dans la même direction du nord au sud ; après quoi on trouve les îles des Larrons , au nombre de quatorze 01 quinze, qui sont toutes posées les unes an dessus des autres, dans la même directior du nord au sud, et qui occupent toutes en semble, y compris les îles des Callanos, ur espace de plus de 3oo lieues de longueui dans cette direction du nord au sud, sui une largeur si petite , que dans l’endroit oi elle est la plus grande , ces îles n’ont pas 7 ï 8 lieues: il me paroît donc que Kamtschatka Yeço , le Japon oriental , les îles Barneveldt du Prince , des Callanos et des Larrons , n< sont que la même chaîne de montagnes e les restes de l’ancien pays que l’Océan a rongi et couvert peu à peu. Toutes ces contrées ne sont en effet que des montagnes, et ces île des pointes de montagnes : les terrains main; élevés ont été submergés par l’Océan ; et s ce qui est rapporté dans les Lettres édifiante. est vrai, et qu’en effet on ait découvert uno quantité d’îles qu’on a appelées les Nouvelles Philippines , et que leur position soit réellé ment telle qu’elle est donnée par le P. Gohiem! on ne pourra guère douter que ces îles le plus orientales de ces Nouvelles-Philippine ne soient une continuation de la chaîne d montagnes qui forme les îles des Larrons i car ces îles orientales , au nombre de onze sont toutes placées les unes au dessus de'i autres dans la même direction du nord a f sud ; elles occupent en longueur un espac de plus de 200 lieues, et la plus large n’ij pas 7 ou 8 lieues de largeur dans la directio de l’est à l’ouest. Mais si l’on trouve ces conjectures tro hasardées, et qu’on m’oppose les grands in tervalles qui sont entre les îles voisines d; cap Ava, du Japon, et celles des Callanos et entre ces îles et celles des Larrons, et en core entre celles des Larrons et des Nouvelle.5 Philippines, dont en effet le premier est d’en viron 160 lieues, le second de 5o ou 60, e le troisième de près de 120, je répondra que les chaînes des montagnes s’étenden souvent beaucoup plus loin sous les eaux d la mer , et que ces intervalles sont petits e: comparaison de l’étendue de terre que pré sentent ces montagnes d« de l’un et de l’autre côté de ce passage les «e côtes suivent une direction droite et sur la même ligne , la côte d’Arabie depuis le cap Razalgat jusqu’au cap Fartaque étant dans la même direction que la côte d’Afrique de- puis le cap de Guardafui jusqu’au cap de Sands. A l’extrémité de la mer Rouge est cette fameuse langue de terre qu’on appelle l’isthme de Suez , qui fait une barrière aux eaux de la mer Rouge et empêche la com- munication des mers. On a vu dans le dis- cours précédent les raisons qui peuvent faire croire que la mer Rouge est plus élevée que la Méditerranée , et que si l’on coupoit l’isthme de Suez , il pourroit s’ensuivre une j inondation et une augmentation de la Médi-i mut terranée ; nous ajouterons à ce que nous avons dit , que quand même on ne voudroit pas convenir que la mer Ronge fût plus élevée que la Méditerranée, on ne pourra pas nier qu’il n’y ait aucun flux et reflux.) juge dans cette partie de la Méditerranée voisine ' des bouches du Nil, et qu’au contraire il y a dans la mer Rouge un flux et reflux très- considérable et qui élève les eaux de plu- sieurs pieds , ce qui seul suffirait pour faireloa passer une grande quantité d’eau dans la j dit, Méditerranée, si l’isthme étoit rompu. D’ail- leurs nous avons un exemple cité à ce sujet par Varenius, qui prouve que les mers 11e sont pas également élevées dans toutes leurs parties; voici ce qu’il en dit, page 100 de sa Géographie : « Oceanus Germanicus , qui « est Allanci pars, inter Frisiam et Hollau-i jtsll « diam se effundens, efficit sinum qui, etsi « parvus sit respectu celebrium sinuum « maris, tamen et ipse dicitur mare, aluit- « que Hoîlandiæ emporium celeberrimum, i ^ « Amstelodanum. Non procul inde abest « lacus Harlemensis, qui etiam mare Har- « lemense dicitur. Hujus altitudo non est « minor aititudine sinus illius Belgici quern « diximus, et mittit rarum ad urbem Lei- « dam, ubi in varias fossas divaricatur. « Quoniam itaque nec lacus hic neque sinus « ille Hollandici maris inondant adjacentes « agros (de naturali constitutione loquor, « non ubi lempestatibus urgentur , propter « quas aggeres facti sunt), patet inde quôd « non sint altiores quàm agri Hoîlandiæ. ART. XI. MERS ET LACS. i83 ÉÀt verô Oceanum Germanicum esse altio- t rem quàm terras hasce experli sunt Lei- i denses , cùm suscepissent fossam seu al- : veum ex urbe sua ad Oceani Germanici c littora prope Cattorum vicum perducere jt (dislantia est duorum milliarium), ut, :[= recepto per alveum hune mari , possent \ navigationem instituere in Oceanum Ger- t manicum , et hinc in varias terræ regiones. I Verùm enimverô , cùm magnam jam alvei |c partem perfecissent , desistere coacti sunt , I quoniam tum demum per observationem | cognitum est Oceani Germanici acjuain [ esse altiorem quàm agrum inter Leidam | et littus Oceani illius ; unde locus ille , f ubi fodere desierunt, dicitur Het malle [ Gat. Oceanus itaque Germanicus est ali- [ quantum allior quàm sinus ille Hollan- f dicus, etc. » Ainsi on peut croire que la per Rouge est plus haute que la Méditer- ranée , comme la mer d’Allemagne est plus iaute que la mer de Hollande. Quelques Inciens auteurs, comme Hérodote et Dio- lore de Sicile, parlent d’un canal de com- nunication du Nil et de la Méditerranée ivcc la mer Rouge, et en dernier lieu VL Delisle a donné une carte en 1704 , dans aquelle il a marqué un bout de canal qui ort du bras le plus oriental du Nil, et qu’il uge devoir être une partie de celui qui àisoit aulrefois cette communication du Nil avec la mer Rouge T. Dans la troisième )artie du livre qui a pour titre : Connois - ance de l'ancien monde , imprimé en 1707, in trouve le même sentiment, et il y est lit, d’après Diodore de Sicile, que ce fut 'ïéco , roi d’Égypte , qui commença ce ca- tal , que Darius , roi de Perse , le continua , t que Ptolémée II l’acheva et le conduisit usqu’à la ville d’Arsinoé; qu’il le faisoit uvrir et fermer selon qu’il en avoit besoin, ans que je prétende vouloir nier ces faits , 3 suis obligé d’avouer qu’ils me paroissent outeux, et je ne sais pas si la violence et 1 hauteur des marées dans la mer Rouge" ne e seroient pas nécessairement communi- uées aux eaux de ce canal ; il me semble u’au moins il auroit fallu de grandes pré- au lions pour contenir les eaux , éviter les aondations , et beaucoup de soin pour en- ['etenir ce canal en bon état : aussi les his- Driens qui nous disent que ce canal a été ntrepris et achevé , ne nous disent pas s’il duré ; et les vestiges qu’on prétend en sconnoître aujourd’hui, sont peut-être tout e qui en a jamais été fait. On a donné à 1. Voyez les Mémoires de l'Académie des Sciences, laée 1704. ce bras de l’Océan le nom de mer Rouge , parce qu’elle a en effet cette couleur dan3 tous les endroits où il se trouve des madré- pores sur son fond ; voici ce qui est rap- porté dans X Histoire générale des Voyages , tome I, pages 198 et 199 : « Avant que de quitter la mer Rouge , D. Jean examina quelles peuvent avoir été les raisons qui ont fait donner ce nom au golfe Arabique par les anciens , et si cette mer est en effet dif- férente des autres par la couleur. Il observa que Pline rapporte plusieurs sentimens sur l’origine de ce nom : les uns le font venir d’un roi nommé Érythros , qui régna dans ces cantons , et dont le nom en grec signifie rouge ; d’autres se sont imaginé que la ré- flexion du soleil produit une couleur rou- geâtre sur la surface de l’eau ; et d’autres , que l’eau du golfe a naturellement cette couleur. Les Portugais , qui avoient déjà fait plusieurs voyages à l’entrée des détroits, assuroient que toute la côte d’Arabie étant fort rouge , le sable et la poussière qui s’en détachoient, et que le vent poussoit dans la mer, teignoient les eaux de la même couleur. « D. Jean, qui, pour vérifier ces opinions, ne cessa point jour et nuit , depuis son dé- part de Socotora , d’observer la nature de l’eau et les qualités des côtes jusqu’à Suez , assure que , loin d’être naturellement rouge, l’eau est de la couleur des autres mers, et que le sable ou la poussière n’ayant rien de rouge non plus , ne donnent point cette teinte à l’eau du golfe. La terre sur les deux côtés est généralement brune, et noire même en quelques endroits; dans d’autres lieux elle est blanche ; ce n’est qu’au delà de Sua- quen , c’est-à-dire sur des côtes où les Por- tugais n’avoient point encore pénétré , qu’il vit en effet trois montagnes rayées de rouge ; encore étoient-elles d’un roc fort dur, et le pays voisin étoit de la couleur ordinaire. « La vérité donc est que cette mer, de- puis l’entrée jusqu’au fond du golfe, est partout de la même couleur ; ce qu’il est fa- cile de se démontrer à soi-même en puisant de l’eau à chaque lieu ; mais il faut avouer aussi que dans quelques endroits elle paroît rouge par accident, et dans d'autres verte et blanche. Yoici l’explication de ce phéno- mène : depuis Suaquen jusqu’à Kossir, c’est- à-dire pendant l’espace de i36 lieues, la mer est remplie de bancs et de rochers de co- rail ; on leur donne ce nom , parce que leur forme et leur couleur les rendent si sembla- bles au corail, qu’il faut une certaine habi- leté pour ne pas s’y tromper; ils croissent THÉORIE DE LA TERRE. comme des arbres , et leurs branches pren- nent la forme de celles du corail; on en distingue deux sortes, l’une blanche et l’au- tre fort rouge ; ils sont couverts en plusieurs endroits d’une espèce de gomme ou de glu verte , et dans d’autres lieux , orange foncé. Or, l’eau de cette mer étant plus claire et plus transparente qu’aucune autre eau du inonde , de sorte qu’à 20 brasses de profon- deur l’œil pénètre jusqu’au fond , surtout depuis Suaquen jusqu’à l’extrémité du golfe, il arrive qu’elle paroît prendre la couleur des choses qu’elle couvre; par exemple, lorsque les rocs sont comme enduits de glu verte , l’eau qui passe par-dessus paroît d’un vert plus foncé que les rocs mêmes ; et lors- que le fond est uniquement de sable, l’eau paroît blanche : de même, lorsque les rocs sont de corail , dans le sens que j’ai donné à ce terme , et que la glu qui les environne est rouge ou rougeâtre , l’eau se teint , ou plutôt semble se teindre en rouge. Ainsi , comme les rocs de cette couleur sont plus fréquens que les blancs et les verts , D. Jean conclut qu’on a dû donner au golfe Ara- bique le nom de mer Rouge plutôt que celui de mer Verte ou Blanche; il s’applaudit de cette découverte avec d’autant plus de rai- son, que la méthode par laquelle il s’en étoit assuré ne pouvoit lui laisser aucun doute. Il faisoit amarrer une flûte contre les yocs dans les lieux qui n’avoient point assez de profondeur pour permettre aux vaisseaux d’approcher, et souvent les matelots pou- voient exécuter ses ordres à leur aise , sans avoir la mer plus haut que l’estomac à plus d’une demi-lieue des rocs; la plus grande partie des pierres ou des cailloux qu’ils en tiroient dans les lieux où l’eau paroissoit rouge , avoient aussi cette couleur ; dans l’eau qui paroissoit verte, les pierres étoient vertes ; et si l’eau paroissoit blanche, le fond étoit d’un sable blanc , où l’on n’apercevoit point d’autre n Jauge. « Depuis l’entrée de la mer Rouge au cap Guardafui jusqu’à la pointe de l’Afrique au cap de Bonne-Espérance, l’Océan a une di- rection assez égale , et il ne forme aucun golfe considérable dans l’intérieur des terres ; il y a seulement une espèce d’enfoncement à la côte de Mélinde, qu’on pourroit regarder comme faisant partie d’un grand golfe, si l’île de Madagascar étoit réunie à la terre ferme. Il est vrai que cette île, quoique sé- parée par le large détroit de Mozambique , paroît avoir appartenu autrefois au conti- nent : car il y a des sables fort hauts et d’une vaste étendue dans ce détroit, surtout deM du côté de Madagascar ; ce qui reste de pa sage absolument libre dans ce détroit n’e pas fort considérable. En remontant la côte occidentale de l’J frique depuis le cap de Bonne-Espéram jusqu’au cap Négro , les terres sont droit» et dans la même direction , et il semble qi toute cette longue côte ne soit qu’une suit de montagnes; c’est au moins un pays élev qui ne produit, dans une étendue de pli de 5 00 lieues, aucune rivière considérable à l’exception d’une ou de deux dont on n reconnu que l’embouchure : mais au del du cap Négro la côte fait une courbe dan les terres, qui, dans toute l’étendue^ d cette courbe , paroissent être un pays plu bas que le reste de l'Afrique, et qui est ar rosé de plusieurs fleuves dont les plus grand sont le Coanza et le Zaïr ; on compte depui le cap Négro jusqu’au cap Gonsalvez vingt quatre embouchures de rivières toutes con sidérables , et l’espace contenu entre ce deux caps est d’environ 420 lieues en sui vant les côtes. On peut croire que l’Océai a un peu gagné sur ces terres basses de l’A frique, non pas par son mouvement nature d’orient en occident, qui est dans une di rection contraire à celle qu’exigeroit l’eft’e dont il est question , mais seulement parc« que ces terres étant plus basses que toute les autres, il les aura surmontées et minée presque sans effort. Du cap Gonsalvez ai cap des Trois-Pointes , l’Océan forme un golfe fort ouvert qui n’a rien de remarqua ble , sinon un cap fort avancé et situé à petiy près dans le milieu de l’étendue des côteA, qui forme ce golfe : on l’appelle le cap For- L mosa , Il y a aussi trois îles dans la partie là 6[ plus méridionale de ce golfe, qui sont les n îles de Fernandpo , du Prince , et de Saint ! ^ Thomas ; ces îles paroissent être la continua- ( lion d’une chaîne de montagnes située entre Rio del Rey et le fleuve Jamoer. Du cap des Trois-Pointes au cap Palmas , l’Océan rentre un peu dans les terres, et du cap Palmas au cap Tagrin, il n’y a rien de remarquable dansij le gisement des terres; mais auprès du cap Tagrin , l’Océan fait un très-petit golfe dans les terres de Sierra-Leona , et plus haut un autre encore plus petit où sont les îles Bi sagas. Ensuite on trouve le cap Vert, qui est] fort avancé dans la mer, et dont il paroît que les îles du même nom ne sont que la continuation , ou, si l’on veut, celle du cap Blanc , qui est une terre élevée , encore plus considérable et plus avancée que celle du cap Vert. On trouve ensuite la côte mon- tagneuse et sèche qui commence au cap b v ART. XI. MERS ET LACS. i85 Blanc et finit au cap Bajador ; les îles Cana- ries paroissent être une continuation de ces montagnes. Enfin entre les terres de Portu- gal et de l’Afrique, l’Océan fait un golfe fort ouvert, au milieu duquel est le fameux étroit de Gibraltar, par lequel l’Océan coule ans la Méditerranée avec une grande rapi- dité. Cette mer s’étend à près de 900 lieues dans l’intérieur des terres , et elle a plu- sieurs choses remarquables : premièrement slle ne participe pas d’une manière sensible ki mouvement de flux et de reflux , et il p’y a que dans le golfe de Venise , où elle e rétrécit beaucoup , que ce mouvement se [ait sentir; on prétend aussi s'être aperçu le quelque petit mouvement à Marseille et la côte de Tripoli ; en second lieu , elle contient de grandes îles, celles de Sicile, celles de Sardaigne , de Corse , de Chypre , le Majorque, etc., et l’une des plus grandes Presqu’îles du monde , qui est l’Italie : elle 1 aussi un archipel , ou plutôt c’est de cet rchipel de notre mer Méditerranée que les pitres amas d’iies ont emprunté ce nom ; bais cet archipel de la Méditerranée me pa- oît appartenir plutôt à la mer Noire, et il èmble que ce pays de la Grèce ait été en Partie noyé par ies eaux surabondantes de a mer Noire, qui coulent dans le mer de jlarmara, et de là dans la mer Méditerra- tée. Je sais bien que quelques gens ont pré- endu qu’il y avoit dans le détroit de Gi- braltar un double courant; l’un supérieur, ui portoit l’eau de l’Océan dans la Médi- erranée ; et l’autre inférieur, dont l’effet , isent-ils, est contraire; mais cette opinion St évidemment fausse et contraire aux lois le l’hydrostatique. On a dit de même que ans plusieurs autres endroits il y avoit de es courans inférieurs , dont la direction toit opposée à celle du courant supérieur, omme dans le Bosphore, dans le détroit du und , etc. ; et Marsigli rapporte même des kpériencés qui ont été faites dans le Bos- hore et qui prouvent ce fait ; mais il y a rande apparence que les expériences ont té mal faites , puisque la chose est impos- ble et qu’elle répugne à toutes les notions ùe l’on a sur le mouvement des eaux, •'ailleurs Greaves , dans sa Pyramidogra- hie, pages 10 1 et 102, prouve, par des itpériences bien faites, qu’il n’y a dans le losphore aucun courant inférieur dont la irection soit opposée au courant supérieur, e qui a pu tromper Marsigli et les autres, jest que dans le Bosphore , comme dans le étroit de Gibraltar et dans tous les fleuves qui coulent avec quelque rapidité, il y a un remous considérable le long des rivages, dont la direction est ordinairement diffé- rente , et quelquefois coutraire à celle du courant principal des eaux. * J’ai dit trop généralement et assuré trop positivement , qu’iV ne se trouvait pas dans La mer des endroits ou les eaux eussent un courant inférieur opposé et dans une direc- tion contraire au mouvement du courant su- périeur : j’ai reçu depuis des informations qui semblent prouver que cet effet existe et peut même se démontrer dans certaines plages de la mer; les plus précises sont celles que M. Deslandes, habile navigateur, a eu la bonté de me communiquer par ses lettres des 6 décembre 1770 et 5 novembre 1773, dont voici l’extrait : « Dans votre Théorie de la terre , art. xr , Des mers et des lacs , vous dites que quel- ques personnes ont prétendu qu’il y avoit, dans le détroit de Gibraltar, un double cou- rant , supérieur et inférieur, dont l’effet est contraire; mais que ceux qui ont eu de pa- reilles opinions auront sans doute pris des remous qui se forment au rivage par la rapidité de l’eau , pour un courant véri- table, et que c’est une hypothèse mal fon- dée. C’est d’après la lecture de ce passage que je me détermine à vous envoyer mes observations à ce sujet. « Deux mois après mon départ de France, je pris connoissance de terre entre les caps Gonsalvez et de Sainte-Catherine ; la force des courants, dont la direction est au nord- nord-ouest, suivant exactement le gisement des terres qui sont ainsi situées, m’obligea de mouiller. Les vents généraux, dans cette partie, sont du sud-sud-est, sud-sud-ouest, et sud-ouest : je fus deux mois et demi dans l’cfttente inutile de quelque changement, faisant presque tous les jours de vains ef- forts pour gagner du côté deLoango, où j’avois affaire. Pendant ce temps, j’ai ob- servé que la mer descendoit dans la direc- tion ci-dessus avec sa force , depuis une demie jusqu’à une lieue à l’heure , et qu’à de certaines profondeurs les courans re- montoient en dessous avec au moins autant de vitesse qu’ils descendoient en dessus. « Voici comme je me suis assuré de la hauteur de ces différens courans. Étant mouillé par huit brasses d’eau , la mer ex- trêmement claire , j’ai attaché un plomb de trente livres au bout d’une ligne ; à environ deux brasses de ce plomb, j’ai mis une serviette liée à la ligne par un de ses coins, laissant tomber le plomb dans l’eau ; aussi- x86 THÉORIE DE LÀ TERRE. tôt que la serviette y entroit, elle prenoit la direction du premier courant : continuant à l’observer, je la faisois descendre ; d’abord que je m’apercevois que le courant n’agissoit plus , j’arrêtois ; pour lors elle flottoit in- différemment autour de la ligne. Il y avoit donc dans cet endroit interruption de cours. Ensuite, baissant ma serviette à un pied plus bas , elle prenoit une direction contraire à celle qu’elle avoit auparavant. Marquant la ligne à la surface de l’eau , il y avoit trois brasses de distance à la serviette , d’où j’ai conclu, après différens examens, que, sur les huit brasses d’eau, il y en avoit trois qui couroient sur le nord-nord-ouest, et cinq en sens contraire sur le sud-sud-est. « Réitérant l’expérience le même jour, jusqu’à cinquante brasses, étant à la distance de six à sept lieues de terre , j’ai été surpris de trouver la colonne d’eau courant sur la mer, plus profonde à raison de la hauteur du fond ; sur cinquante brasses , j’en ai es- timé de douze à quinze dans la première direction : ce phénomène n’a pas eu lieu pendant deux mois et demi que j’ai été sur cette côte , mais bien à peu près un mois en différens temps. Dans les interruptions, la marée descendoit en total dans le golfe de Guinée. « Cette division des courans me fit naître l’idée d’une machine qui, coulée jusqu’au courant inférieur, présentant une grande surface , auroit entraîné mon navire contre les courans supérieurs; j’en fis l’épreuve en petit sur un canot , et je parvins à faire équilibre entre l’effet de la marée supérieure, joint à l’effet du vent sur lé canot, et l’effet de la marée inferieure sur la machine. Les moyens me manquèrent pour faire de plus grandes tentatives. Yoilà , monsieur, un fait évidemment vrai, et que tous les naviga- teurs qui ont été dans ces climats peuvent vous confirmer. « Je pense que les vents sont pour beau- coup dans les causes générales de ces effets , ainsi que les fleuves qui se déchargent dans la mer le long de cette côte, charroyant une grande quantité de terre dans le golfe de Guinée. Enfin le fond de cette partie, qui oblige par sa pente la marée de rétro- grader lorsque l’eau, étant parvenue à un certain niveau, se trouve pressée par la quantité nouvelle qui la charge sans cesse , pendant que les vents agissent en sens con- traire sur la surface, la contraint en partie de conserver son cours ordinaire. Cela me paroît d’autant plus probable, que la mer entre de tous côtés dans ce golfe , et n’en sort que par des révolutions qui sont fort rares. La lune n’a aucune part apparent* dans ceci, cela arrivant indifféremment dan! tous ses quartiers. « J’ai eu occasion 1 jet “P: de me convaincre dt plus en plus que la seule pression de l’eai parvenue à son niveau , jointe à l’inclinaisoi nécessaire du fond , sont les seules e uniques causes qui produisent ce phéno- mène. J’ai éprouvé que ces courans n’on lieu qu’à raison de la pente plus ou moin: rapide du rivage, et j’ai tout lieu de croir* qu’ils ne se font sentir qu’à douze ou quinzi lieues au large , qui est l’éloignement le plu; grand le long de la côte d’Angole , où l’or puisse se promettre avoir fond... Quoiqu< sans moyen certain de pouvoir m’assurer q.u< les courans du large n’éprouvent pas ur pareil changement , voici la raison qui m< semble l’assurer. Je prends pour exempli une de mes expériences faite par une hau teur de fond moyenne , telle que trente-cinc brasses d’eau : j’éprouvois jusqu’à la hauteu: de cinq à six brasses le cours dirigé dan le nord-nord-ouest ; en faisant couler davar tage comme de deux à trois brasses , mi ligne tendoit au ouest-noi’d-ouest ; ensuite trois ou quatre brasses de profondeur de plui me l’amenoient au ouest- sud-ouest, puis au sud-ouest, et au sud; enfin, à vingt-cinq e vingt-six brasses, au sud-sud-est, et jus qu’au fond, au sud-est et à est-sud-est; d’où j’ai tiré les conséquences suivantes , que j pouvois comparer l’Océan entre l’Afrique e l’Amérique à un grand fleuve dont le cour est presque continuellement dirigé dans 1 nord-ouest ; que , dans son cours , il transi^ porte un sable ou limon qu’il dépose sur se bords , lesquels se trouvant rehaussés , aug mentent le volume d’eau , ou , ce qui est 1; même chose, élèvent son niveau, et l’oblilj gent de rétrogader selon la pente du ri vage. Mais il y a un premier effort qui l dirigeoit d’abord : il ne retourne donc pa directement ; mais , obéissant encore au pre ^ mier mouvement , ou cédant avec peine i ce dernier obstacle, il doit nécessairemeni décrire une courbe plus ou moins allongée jusqu’à ce qu’il rencontre ce courant du mi lieu avec lequel il peut se réunir en partie ou qui lui sert de point d’appui pour suivrij la direction contraire que lui impose le fond r comme il faut considérer la masse d’eau ei mouvement continuel, le fond subira tou jours les premiers changemens comme étanj |!7 plus près de la cause et plus pressé , et il iri s en sens contraire du courant supérieur; pen dant qu’à des hauteurs différentes il n’y sert ila ii.il pie* farco lïtoiiv ART. XI. MERS ET LACS. 187 is encore parvenu. Voilà, monsieur, quelles dnt mes idées. Au reste , j’ai tiré parti plu- èurs fois de ces courans inférieurs ; et oyennant une machine que j’ai coulée à dif- lirentes profondeurs , selon la hauteur du nd où je me trouvois, j’ai remonté contre courant supérieur. J’ai éprouvé que , dans 1 temps calme , avec une surface trois fois ;!us grande que la proue noyée du vais- au , on peut faire d’un tiers à une démi- né par heure. Je me suis assuré de cela usieurs fois, tant par ma hauteur en lati- 'de que par les bateaux que je mouillois , mt je me trouvois fort éloigné dans une ure , et enfin par la distance des pointes long de la terre.» Ces observations de M. Deslandes me pa- issent décisives, et j’y souscris avec plai- ; je ne puis même assez le remercier de us avoir démontré que mes idées sur ce jet n’étoient justes que pour le général, iis que, dans quelques circonstances , elles îffroient des exceptions. Cependant il n’en ; pas moins certain que l’Océan s’est ou- pt la porte du détroit de Gibraltar, et le par conséquent l’on ne peut douter que jjmer Méditerranée n’ait en même temps is une grande augmentation par l’irrup- n de l’Océan. J’ai appuyé celte opinion, 'n seulement sur le courant des eaux de >céan dans la Méditerranée , mais encore ’ la nature du terrain et la correspondance js mêmes couches de terre des deux côtés détroit , ce qui a été remarqué par plu- urs navigateurs instruits. « L’irruption i a formé la Méditerranée est visible et dente, ainsi que celle de la mer Noire t* le détroit des Dardanelles, où le cou- pi est toujours très-violent, et les angles Hans et rentrans des deux bords , très- Lrqués , ainsi que la ressemblance des cou- 2s de matières qui sont les mêmes des jx côtés l. » Au reste, l’idée de M. Deslandes, qui asidère la mer entre l’Afrique et l’Amé- ue comme un grand fleuve dont le cours dirigé vers le nord-ouest , s’accorde par- lement avec ce que j’ai établi sur le mou- inent des eaux venant du pôle austral en is grande quantité que du pôle boréal. Iîl,ff ) Parcourons maintenant toutes les côtes nouveau continent, et commençons par point du cap Hold-with-hope, situé au e degré latitude nord ; c’est la terre la is septentrionale que l’on connoisse dans • Fragment d’une lettre écrite à M. de Buffon 1772. le Nouveau- Groenland; elle n’est éloignée du cap Nord de Laponie que d’environ 160 ou 180 lieues. De ce cap on peut suivre la côte du Groenland jusqu’au cercle polaire; là l’Océan forme un large détroit entre l’Is- lande et les terres du Groenland. On pré- tend que ce pays voisin de l’Islande n’est pas l’ancien Groenland que les Danois pos- sédoient autrefois comme province dépen- dante de leur royaume; il y avoit dans cet ancien Groenland des peuples policés et chrétiens , des évêques , des églises , des vil- les considérables par leur commerce ; les Da- nois y aboient aussi souvent et aussi aisé- ment que les Espagnols pourraient aller aux Canaries ; il existe encore , à ce qu’on assure, des titres et des ordonnances pour les affai- res de ce pays , et tout cela n’est pas bien ancien : cependant, sans qu’on puisse devi- ner comment ni pourquoi , ce pays est abso- lument perdu, et l’on n’a trouvé dans le nouveau Groenland aucun indice de tout ce que nous venons de rapporter ; les peuples y sont sauvages ; il n’y a aucun vestige d’é- difice , pas un mot de leur langue qui res- semble à la langue danoise , enfin rien qui puisse faire juger que c’est le même pays; il est même presque désert et bordé de gla- ces pendant la plus grande partie de l’année. Mais comme ces terres sont d’une très-vaste étendue, et que les côtes ont été très-peu fréquentées par les navigateurs modernes, ces navigateurs ont pu manquer le lieu où habitent les descendons de ces peuples po- licés; ou bien il se peut que les glaces étant devenues plus abondantes dans cette mer, elles empêchent aujourd’hui d’aborder en cet endroit: tout ce pays cependant, à en juger par les cartes , a été côtoyé et reconnu en entier ; il forme une grande presqu’île à l’extrémité de laquelle sont les deux détroits de Forbisher et l’île de Frisland, où il fait un froid extrême, quoiqu’ils ne soient qu’à la hauteur des Orcades , c’est-à-dire à 6a degrés. Entre la côte occidentale du Groenland et celle de la terre de Labrador , l’Océan fait un golfe et ensuite une grande mer méditer- ranée , la plus froide de toutes les mers , et dont les côtes ne sont pas encore bien re- connues. En suivant ce golfe droit au nord, on trouve le large détroit de Davis, qui con- duit à la mer Christiane, terminée par la baie de Baffin, qui fait un cul-de-sac dont il paroît qu’on ne peut sortir que pour tom- ber dans un autre cul-de-sac, qui est la baie d’Hudson. Le détroit de Cumberland , qui peut , aussi bien que celui de Davis , x88 THÉORIE DE LA TERRE. conduire à la mer Christiane, est plus étroit et plus sujet à être glacé ; celui d’Hudson , quoique beaucoup plus méridional , est aussi glacé pendant une partie de l’année ; et on a remarqué dans ces détroits et dans ces mers médilerranées un mouvement de flux et re- flux très-fort, tout au contraire de ce qui arrive dans les mers méditerranées de l’Eu- rope, soit dans la Méditerranée, soit dans la mer Baltique , où il n’y a point de flux et de reflux; ce qui ne peut venir que de la différence du mouvement de la mer, qui, se faisant toujours d’orient en occident , occa- sionne de grandes marées dans les détroits qui sont opposés à cette direction de mouvement, c’est-à-dire dans les détroits dont les ouver- tures sont tournées vers l’orient, au lieu que dans ceux de l’Europe qui présentent leur ouverture à l’occident , il n’y a aucun mouvement : l’Océan , par son mouvement général , entre dans les premiers et fuit les derniers , et c’est par cette même raison qu’il y a de violentes marées dans les mers de la Chine, de Corée, et de Kamtschatka. En descendant, du détroit d’Hudson vers la terre de Labrador, on voit une ouverture étroite, dans laquelle Davis, en i586, re- monta jusqu’à 3o lieues, et fit quelque petit commerce avec les habitans ; mais personne, que je sache, n’a depuis tenté la découverte de ce bras de mer, et on ne eonnoît de la terre voisine que le pays des Eskimaux : le fort Pontcharlrain est la seule habitation et la plus septentrionale de tout ce pays , qui n’est séparé de l’île de Terre-Neuve que par le petit détroit de Belle-Ile, qui n’est pas trop fréquenté; et comme la côte orien- tale de Terre-Neuve est dans la même di- rection que la côte de Labrador, on doit regarder l’île de Terre-Neuve comme une partie du continent, de même que l’île Royale paroîî être une partie du continent de l’Acadie : le grand banc et les autres bancs sur lesquels on pêche la morue ne sont pas des hauts fonds , comme on pour- roit le croire; ils sont à une profondeur con- sidérable sous l’eau , et produisent dans cet endroit des courans très-violens. Entre le cap Breton et Terre-Neuve est un détroit assez large par lequel on entre dans une pe- tite mer méditerranée qu’on appelle le golfe de Saint-Laurent : celte petite mer a un bras qui s’étend assez considérablement dans les terres , et qui semble n’être que l’embouchure du fleuve Saint-Laurent : le mouvement du flux et reflux est extrême- ment sensible dans ce bras de mer ; et à Québec même , qui est plus avancé dans les terres , les eaux s’élèvent de plusieurs pie< j Au sortir du golfe de Canada, et en si 0 vant la côte de l’Acadie, on trouve un pe , e golfe qu’on appelle la baie de Boston, t ut fait un petit enfoncement carré dans idi terres. Mais avant que de suivre cette et i» plus loin , il est bon d’observer que depi 1 lie l’île de Terre-Neuve jusqu’aux îles Antil ' lu les plus avancées, comme la Barbade et A fi tigoa, et même jusqu’à celle de la Guian hui l’Océan fait un très-grand golfe qui a pillent de 5oo lieues d’enfoncement jusqu’à la Fl se: ride. Ce golfe du nouveau continent < mit semblable à celui de l’ancien continent de «sib nous avons parlé ; et tout de même que da j» le continent oriental, l’Océan, après av< jo fait un golfe entre les terres de Kamtschat » et de la Nouvelle-Bretagne, forme ensuijaau une vaste mer méditerranée qui compreijade la mer de Kamtschatka, celle de Coré ible celle de la Chine, etc. : dans le nouvel im continent l’Océan , après avoir fait un grai L’; golfe entre les terres de Terre-Neuve et c ent les de la Guiane , forme une très-gram Océ mer méditerranée qui s’étend depuis 1 rofoi Antilles jusqu’au Mexique : ce qui coi usuil firme ce que nous avons dit au sujet d< rand effets du mouvement de l’Océan d’oriei peu en occident; car il semble que l’Océan i rem gagné tout autant de terrain sur les côt mp orientales de l’Amérique qu’il en a gag (ipai sur les côtes orientales de l’Asie, et c ne i deux grands golfes ou enfoncémens que l’< eut céan a formés dans ces deux continen eut sont sous le même degré de latitude , et iré peu près de la même étendue; ce qui fjlisia des rapports ou des convenances singulière! des i et qui paroissent venir de la même causnrèsi Si l’on examine la position des îles A! «es: tilles à commencer par celle de la Trinit erres qui est la plus méridionale, on ne pounieue guère douter que les îles de la Trinité, < iouv Tabago, de la Grenade, les îles des Gran le dilles, celles de Saint-Vincent, delà Ma ’emb tinique, de Marie-Galande , de la Désirad fia dAntigoa , de la Barbade, avec toutes lien autres îles qui les accompagnent , ne fasse irge une chaîne de montagnes dont la directic wsii est du sud au nord, comme celle de Pîl ’arri de Terre-Neuve et de la terre dès Eskimau : entei Ensuite la direction de ces îles Antilles e oncl de l’est à l’ouest en commençant à l’île < liau la Barbade, passant par Saint-Barthélem : bit Porto-Rico, Saint-Domingue, et l’île c rca Cuba, à peu près comme les terres du ca ni; Breton de l’Acadie, de la Nouvelle- Anglt bas- terre. Toutes ces îles sont si voisines L isoi unes des autres, qu’on peut les regard» tanc ! rit ART. XL MERS ET LACS. x8$ jnme une bande de terre non interrom- pe et comme les parties les plus élevées in terrain submergé : la plupart de ces 5 ne sont en effet que des pointes de mon- des, et la mer qui est au-delà est une aie mer méditerranée , où le mouvement flux et reflux n’est guère plus sensible e dans notre mer Méditerranée, quoique ouvertures qu’elles présentent à l’Océan lent directement opposées au mouvement p eaux d’orient en occident; ce qui de- nt contribuer à rendre ce mouvement isible dans le golfe du Mexique : mais mine cette mer méditerranée est fort large, mouvement du flux et reflux qui lui est mmuniqué par l’Océan, se répandant sur aussi grand espace, perd une grande par- | de sa vitesse et devient presque insen- )le à la côte de la Louisiane et dans plu- :urs autres endroits. L’ancien et le nouveau continent parois- ut donc tous les deux avoir été rongés par )céan à la même hauteur et à la même ofondeur dans les terres; tous deux ont suite une vaste mer méditerranée et une ande quantité d’îles qui sont encore situées peu près à la meme hauteur : la seule dif- ■ence est que l’ancien continent étant beau- up plus large que le nouveau , il y a dans partie occidentale de cet ancien continent :e mer méditerranée occidentale qui ne ut pas se trouver dans le nouveau conti- nt; mais il paraît que tout ce qui est ar- -é aux terres orientales de l’ancien monde : aussi arrivé de même aux terres orien- es du nouveau monde , et que c’est à peu ès dans leur milieu et à la même hauteur e s’est faite la plus grande destruction des •res, parce qu’en effet c’est dans ce mi- u et près de l’équateur qu’est le plus grand juvement de l’Océan. Les côtes de la Guiane, comprises entre mbouchure du fleuve Orenoque et celle la rivière des Amazones n’offrent rien remarquable ; mais cette rivière , la plus ge de l’univers, forme une étendue d’eau isidérable auprès de Coropa, avant que irriver à la mer par deux bouches diffé- ites qui forment l’île de Caviana. De l’em- uchure de la rivière des Amazones jus- ’au cap Saint-Roch, la côte va presque )it de l’ouest à l’est; du cap Saint-Roch cap Saint-Augustin, elle va du nord au 1 ; et du cap Saint- Augustin à la baie de us-les-Saints , elle retourne vers l’ouest ; sorte que cette partie du Brésil fait une mce considérable dans la mer, qui re- de directement une pareille avance de terre que fait l’Afrique en sens opposé. La baie de Tous-les-Sainls est un petit bras de l’Océan qui a environ 5o lieues de profon- deur dans les terres, et qui est fort fré- quenté des navigateurs. De cette baie jus- qu’au cap de Saint-Thomas, la côte va droit du nord au midi , et ensuite dans une direc- tion sud-ouest jusqu’à l’embouchure du fleuve de la Plata, où la mer fait un petit bras qui remonte à près de ioo lieues dans les terres. De là à l’extrémité de l’Amérique, l’Océan paroît faire un grand golfe terminé par les terres voisines de la Terre-de-Feu , comme l’île Falkland, les terres du cap de l’Assomption, l’île Beauchène, et les terres qui forment le détroit de La Roche, décou- vert en 1671 ; on trouve au fond de ce golfe le détroit de Magellan, qui est le plus long de tous les détroits, et où le flux et reflux, est extrêmement sensible; au delà est celui de Le Maire, qui est plus court et plus com- mode , et enfin le cap Horn , qui est la pointe du continent de l’Amérique méri- dionale. On doit remarquer au sujet de ces poin- tes formées par les continens qu’elles sont toutes posées de la même façon ; elles re- gardent toutes le midi , et la plupart sont coupées par des détroits qui vont de l’orient à l’occident ; la première est celle de l’Amé- rique méridionale, qui regarde le midi ou le pôle austral , et qui est coupée par le dé- troit de Magellan; la seconde est celle du Groenland, qui regarde aussi directement le midi , et qui est coupée de même de l’est à l’ouest par les détroits de Forbisher; la troisième est celle de l’Afrique , qui regarde aussi le midi, et qui a au delà du cap de Bonne-Espérance des bancs et des hauts fonds qui paroissent en avoir été séparés; la quatrième est la pointe de la presqu’île de l’Inde, qui est coupée par un détroit qui forme l’île de Ceylan , et qui regarde le midi, comme toutes les autres. Jusqu’ici nous ne voyons pas qu’on puisse donner la raison de cette singularité, et dire pour- quoi les pointes de toutes les grandes pres- qu’îles sont toutes tournées vers le midi , et presque toutes coupées à leurs extrémités par des détroits. En remontant de la Terre-de-Feu tout le long des côtes occidentales de l’Amérique méridionale, l’Océan rentre assez considé- rablement dans les terres, et cette côte sem- ble suivre exactement la direction des hautes montagnes qui traversent du midi au nord toute l’Amérique méridionale depuis l’équa- teur jusqu’à la Terre-de-Feu. Près de l’équa- *9° THÉORIE DE LÀ TERRE. leur, l’Océan fait un golfe assez considérable, qui commence au cap Saint-François, et s’étend jusqu’à Panama, où est le fameux isthme qui, comme celui de Suez, empêche la communication des deux mers, et sans lesquels il y aurc t une séparation entière de l’ancien et du nouveau continent en deux parties; de là il n’y a rien de remarquable jusqu’à la Californie, qui est une presqu’île fort longue , entre les terres de laquelle et celles du Nouveau-Mexique l’Océan fait un bras qu’on appelle la mer Vermeille , qui a plus de 200 lieues d’étendue en longueur. Enfin on a suivi les côtes occidentales de la Californie jusqu’au 43e degré ; et à cette la- titude, Drake , qui le premier a fait la dé- couverte de la terre qui est au nord de la Californie, et qui l’a appelée Nouvelle-Al- bion , fut obligé, à cause de la rigueur du froid , de changer sa route , et de s’arrêter dans une petite baie qui porte son nom; de sorte qu’au delà du 43e ou du 44e degré, les mers de ces climats n’ont pas été recon- nues, non plus que les terres de l’Amérique septentrionale , dont les derniers peuples qui sont connus , sont les Moozemlekis sous le 48e degré , et les Assiniboïls sous le 5ie, et les premiers sont beaucoup plus reculés vers l’ouest que les seconds. Tout ce qui est au delà, soit terre, soit mer, dans une étendue de plus de mille lieues en longueur et d’au- tant en largeur, est inconnu, à moins que les Moscovites dans leurs dernières naviga- tions n’aient , comme ils l’ont annoncé , re- connu une partie de ces climats en partant de Kamtschatka, qui est la terre la plus voisine du côté de l’Orient. L’Océan environne donc toute la terre sans interruption de continuité, et on peut faire le tour du globe en passant à la pointe de l’Amérique méridionale ; mais on ne sait pas encore si l’Océan environne de même la partie septentrionale du globe, et tous les navigateurs qui ont tenté d’aller d’Europe à la Chine par le nord-est ou par le nord- ouest , ont également échoué dans leurs en- treprises. Les lacs diffèrent des mers méditerranées en ce qu’ils ne tirent aucune eau de l’Océan, et qu’au contraire s’ils ont communication avec les mers , ils leur fournissent des eaux : ainsi la mer Noire, que quelques géographes ont regardée comme une suite de la mer Méditerranée, et par conséquent comme une appendice de l’Océan, n’est qu’un lac, parce qu’au lieu de tirer les eaux de la Mé- diterranée elle lui en fournit, et coule avec rapidité par ie Bosphore dans le lac appelé »! mer de Marmara , et de là par le détroit j Dardanelles dans la mer de la Grèce, mer Noire a environ deux cent cinqua lieues de longueur sur cent de largeur, elle x-eçoit un grand nombre de fleuves, d les plus considérables sont le Danube , Niépei-, le Don, le Bog, le Donjec, etc. ! Don, qui se réunit avec le Donjec, foi’r avant que d’arriver à la mer Noire, un ou un marais fort considérable , qu’on pelle le Palus Mèotide , dont l’étendue est plus de cent lieues de longueur, sur vi ou vingt-cinq de largeur. La mer de M mara , qui est au dessous de la mer Noi ,j îf est un lac plus petit que le Palus Méoti<"iS et il n’a qu 'environ cinquante lieues de li gueur sur huit ou neuf de largeur. Quelq anciens , et entre autres Diodore de Sici ont écrit que le Pont-Euxin , ou la n Noire , n’étoit autrefois que comme 1 grande rivière ou un grand lac qui n’av aucune communication avec la mer de Grè mais que ce grand lac s’étant augmenté cc sidérablement avec le temps par les eaux 1 fleuves qui y arrivent, il s’étoit enfin vert un passage , d’abord du côté des i Cyanées , et ensuite du côté de l’IIellespo Cette opinion me paroît assez vraisemblal et même il est facile d’expliquer le fait; <| ^ en supposant que le fond de la mer No fût autrefois plus bas qu’il ne l’est aujoi d’hui, on voit bien que les fleuves quii arrivent auront élevé le fond de cette m par le limon et les sables qu’ils entraîner et que par conséquent il a pu arriver que» surface de cette mer se soit élevée assez pc que l’eau ait pu se faire une issue ; et comi 11 1 les fleuves continuent toujours à amener sable et des terres , et qu’en même temps» quantité d’eau diminue dans les fleuves , proportion que les montagnes dont ils tire leurs sources s’abaissent , il peut arriver j une longue suite de siècles que le Bosphc se remplisse : mais comme ces effets dépe dent de plusieurs causes , il n’est guère pi sible de donner sur cela quelque chose plus que de simples conjectures. C’est sur témoignage des anciens que M. de Tournefd dit, dans son Voyage du Levant , que la m Noire recevant les eaux d’une grande par de l’Europe et de l’Asie , après avoir au menté considérablement , s’ouvrit un et min par le Bosphore, et ensuite forma MédileiTanée, ou l’augmenta si considéi blement, que d’un lac quelle étoit autrefo ^ elle devint une grande mer, qui s’ouv ensuite elle-même un chemin par le détrt de Gibraltar, et que c’est probablement da ART. XI. MERS ET LACS. :e temps que File Atlantide dont parle Pla- ;on a été submergée. Cette opinion ne peut je soutenir, dès qu’on est assuré que c’est ’Océan qui coule dans la Méditerranée , et ion pas la Méditerranée dans l’Océan. D’ail- eurs M. de l’ournefort n’a pas combiné deux 'aits essentiels, et qu’il rapporte cependant nus deux : le premier, c’est que la mer ^oire reçoit neuf ou dix fleuves, dont il l’y en a pas un qui ne lui fournisse plus l’eau que le Bosphore n’en laisse sortir ; le iecond , c’est que la mer Méditerranée ne ■eçoit pas plus d’eau par les fleuves que la ner Noire; cependant elle est sept ou huit ois plus grande, et ce que le Bosphore lui mirait ne fait pas la dixième partie de ce jui tombe dans la mer Noire : comment ^eut-il que celte dixième partie de ce qui ombe dans une petite mer, ait formé non eulement une grande mer, mais encoi e ait i fort augmenté la quantité des eaux,qu elles lient renversé les terres à l’endroit du dé- çoit , pour aller ensuite submerger uni île dus grande que l’Europe ? Il est aisé de voir [ue cet endroit de M. de Tournefort n’est >as assez réfléchi. La mer Méditerranée tire m contraire au moins dix fois plus d’eau de 'Océan qu’elle n’en tire de la mer Noire, »arce que le Bosphore n’a que huit cents >as de largeur dans l’endroit le plus étroit, u lieu que le détroit de Gibraltar en a plus le cinq mille dans l’endroit le plus serré, |t qu’en supposant les vitesses égales dans jun et dans l’autre détroit, celui de Gibral- ar a bien plus de profondeur. M. de Tournefort , qui plaisante sur Po- rbe au sujet de l’opinion que le Bosphore a remplira , et qui la traite de fausse pré- iction , n’a pas fait assez d’attention aux irconstances , pour prononcer comme il le lit sur l’impossibilité de cet événement, .ette mer, qui reçoit huit ou dix grands pives , dont la plupart entraînent beaucoup b terre , de sable , et de limon , ne se rem- jit-elle pas peu à peu ? les vents et le cou- pnt naturel des eaux vers le Bosphore ne oivent-ils pas y transporter une partie de îs terres amenées par ces fleuves? Il est onc, au contraire, très-probable que par succession des temps le Bosphore se trou- era rempli , lorsque les fleuves qui arrivent ans la mer Noire auront beaucoup dimi- îé : or, tous les fleuves diminuent de jour I jour, parce que tous les jours les mon- jgnes s’abaissent ; les vapeurs qui s’arrêtent itour des montagnes étant les premières ■urces des rivières , leur grosseur et leur tanlité d’eau dépend de la quantité de ces vapeurs , qui ne peut manquer de diminuer à mesure que les montagnes diminuent de hauteur. Cette mer reçoit, à la vérité, plus dJ’eau par les fleuves que la Méditerranée , et voici ce qu’en dit le même auteur : « Tout le monde sait que les plus grandes eaux de l’Europe tombent dans la mer Noire par le moyen du Danube , dans lequel se dégorgent les rivières de Suabe , de Franconie , de Ba- vière, d’Autriche, de Hongrie, de Moravie, de Carinthie, de Croatie, de Bothnie, de Servie , de Transylvanie , de Yalachie ; celles de la Russie Noire et de la Podolie se ren- dent dans la même mer par le moyen du Niester; celles des parties méridionales et orientales de la Pologne , de la Moscovie sep- tentrionale , et du pays des Cosaques , y en- trent par le Niéper ou Borysthène ; le Tanaïs et le Copa arrivent aussi dans la mer Noire par le Bosphore Cimmérien; les rivières de îa Mingrélie, dont le Phase est la principale, se vident aussi dans la mer Noire, de même que le Casalmac, le Sangaris et les autres fleuves de l’Asie mineure qui ont leur cours vers le nord; néanmoins le Bosphore de Thrace n’est comparable à aucune de ces grandes rivières l. » Tout cela prouve que l’évaporation suffit pour enlever une quantité d’eau très-consi- dérable, et c’est à cause de cette grande évaporation qui se fait sur la Méditerranée, que l’eau de l’Océan coule continuellement pour y arriver par le détroit de Gibraltar. H est assez difficile de juger de la quantité d’eau que reçoit une mer; il faudrait connoître la largeur, la profondeur, et la vitesse de tous les fleuves qui y arrivent , savoir de combien ils augmentent et diminuent dans les diffé- rentes saisons de l’année : et quand même tous ces faits seroient acquis , le plus impor^ tant et le plus difficile reste encore, c’est de savoir combien cette mer perd par l’évapa- ration ; car en la supposant même propor- tionnée aux surfaces , on voit bien que dans un climat chaud elle doit être plus considé- rable que dans un pays froid. D’ailleurs l’eau mêlée de sel et de bitume s’évapore plus len- tement que l’eau douce ; une mer agitée , plus promptement qu’une mer tranquille : la différence de profondeur y fait aussi quelque chose ; en sorte qu’il entre tant d’élémens dans cette théorie de l’évaporation, qu’il n’est guère possible de faire sur cela des estimations qui soient exactes. L’eau de la mer Noire paraît être moins i. Voyez le Voyage du Levant de Tournefort^ Vol. II , page 123, 192 THÉORIE DE claire, et elle est beaucoup moins salée que celle de l’Océan. On ne trouve aucune île dans toute l’étendue de cette mer : les tem- pêtes y sont très-violentes et plus dangereuses que sur l’Océan , parce que toutes les eaux étant contenues dans un bassin qui n’a, pour ainsi dire , aucune issue , elles ont une es- pèce de mouvement de tourbillon , lors- qu’elles sont agitées, qui bat les vaisseaux de tous les côtés avec une violence insup- portable *. Après la mer Noire , le plus grand lac de l’univers est la mer Caspienne , qui s’étend du midi au nord sur une longueur d’environ trois cents lieues , et qui n’a guère que cin- quante lieues de largeur en prenant une me- sure moyenne. Ce lac reçoit l’un des plus grands fleuves du monde, qui est le Wolga, et quelques autres rivières considérables , comme celles de Kur, de Faie , de Gempo ; mais ce qu’il y a de singulier, c’est qu’elle n’en reçoit aucune dans toute cette longueur de trois cents lieues du côté de l’orient. Le pays qui l’avoisine de ce côté, est un désert de sable que personne n’avoit reconnu jus- qu’à ces derniers temps ; le czar Pierre I‘ r y ayant envoyé des ingénieurs pour lever la carte de la mer Caspienne, il s’est trouvé que cette mer avoit une figure tout à-fait différente que celle qu’on lui donnoit dans les cartes géographiques; on la représentoit ronde, elle est fort longue et assez étroite : on ne connoissoit donc point du tout les côtes orientales de cette mer, non plus que le pays voisin; on ignoroit jusqu’à l’existence du lac Aral, qui en est éloigné vers l’orient d’en- viron cent lieues ; ou si on connoissoit quel- ques unes des côtes de ce lac Aral, on croyoit que c’étoit une partie de la mer Caspienne : en sorte qu’avant les découvertes du czar, il y avoit dans ce climat un terrain de plus de trois cents lieues de longueur sur cent et cent cinquante de largeur, qui n’étoit pas encore connu. Le lac Aral est à peu près de figure oblongue , et peut avoir quatre-vingt-dix ou cent lieues dans sa plus grande longueur, sur cinquante on soixante de largeur ; il reçoit deux fleuves très-considérables, qui sont le Sirderoias et l’üxus, et les eaux de ce lac n’ont aucune issue , non plus que celles de la mer Caspienne : et de même que la mer Caspienne ne reçoit aucun fleuve du côté de l’orient, le lac Aral n’en reçoit aucun du côté de l’occident; ce qui doit faire pré- sumer qu’autrefois ces deux lacs n’en for- moient qu’un seul , et que les fleuves ayant x, Voyez les p'o/ages de Chardin, page 142, LA TERRE. diminué peu à peu et ayant amené une très grande quantité de sable et de limon , tou le pays qui les sépare aura été formé de ce 1 sables. Il y a quelques petites îles dans li mer Caspienne , et ses eaux sont beaucouj moins salées que celles de l’Océan. Les tem pètes y sont aussi fort dangereuses , et le , grands bâtimens n’y sont pas d’usage pou la navigation , parce qu’elle est peu profond m et semée de bancs et d’écueils au dessou | de la surface de l’eau. Yoici ce qu’en di ;j Pietro délia Valle : « Les plus grands vais seaux que l’on voit sur la mer Caspienne lt le long des côtes de la province de Mazand en Perse , où est bâtie la ville de Ferhabad quoiqu’ils les appellent navires , me parois sent plus petits que nos tartanes ; ils sont foi hauts de bord, enfoncent peu dans l’eau , < ont le fond plat : ils donnent aussi cet forme à leurs vaisseaux, non seulement cause que la mer Caspienne n’est pas profonc à la rade et sur les côtes, mais encore par qu’elle est remplie de bancs de sable , et qi : les eaux sont basses en plusieurs endroit.'! 01 tellement que si les vaisseaux n’étoient fabi st qués de cette façon, on ne pourrait pas s’e i® servir sur cette mer. Certainement je m’éto: j® nois , et avec quelque fondement, ce me ser ble, pourquoi ils ne pèchoient à Ferhabe '' que des saumons qui se trouvent à l’en , bouchure du fleuve, et de certains estu s geons très-mal conditionnés, de même qi 1 de plusieurs autres sortes de poissons qui ’ rendent à l’eau douce, et qui ne valent riet j( et comme j’en attribuois la cause à l’insuf :u sance qu’ils ont en l’art de naviguer et 1 ’ pêcher, ou à la crainte qu’ils avoient de ; 1 perdre s’ils pèchoient en haute mer, par t que je sais d’ailleurs que les Persans ne sc dm pas d’habiles gens sur cet élément, et qu « 11’entendent presque pas la navigation, j“ kan d’Esterabad , qui fait sa résidence s ^ le port de mer, et à qui par conséquent ! ; 4 raisons n’en sont pas inconnues par l’exj ?s' rience qu’il en a, m’en débita une , savo ® que les eaux sont si basses à vingt et trer [( milles dans la mer, qu’il est impossible < 1 ® jeter des filets qui aillent au fond , et c » faire aucune pêche qui soit de la conséquer J de celles de nos tartanes ; de sorte que c’< ^ par cette raison qu’ils donnent à leurs va seaux la forme que je vous ai marquée ' ® dessus, et qu’ils ne les montent d’aucu '■ piece de canon, parce quil se trouve tij^ peu de corsaires et de pirates qui couvn y cette mer. ». ' vi ! Struys , le P. Avril, et d’autres voyage! ont prétendu qu’il y avoit dans le voisine , 4 ART. XI. Kilan deux gouffres où les eaux de la mer spienne étoient englouties, pour se rendre suite par des canaux souterrains dans le lfe Persique. De Fer et d'autres géographes t même marqué ces gouffres sur leurs rtes : cependant ces gouffres n’existent s , les gens envoyés par le czar s’en sont Burés. Le fait des feuilles de saule qu’on it en quantité sur le golfe Persique , et ’on prétendoit venir de la mer Caspienne, rce qu’il n’y a pas de saules sur le golfe rsique , étant avancé par les mêmes au- trs , est apparemment aussi peu vrai que lui des prétendus gouffres ; et Gemelli rreri , aussi bien que les Moscovites , as- re que ces gouffres sont absolument ima- laires. En effet , si l’on compare l’étendue la mer Caspienne avec celle de la mer )ire, on trouvera que la première est de ès d’un tiers plus petite que la seconde; e la mer Noire reçoit beaucoup plus d’eau e la mer Caspienne ; que par conséquent vaporation suffit dans l’une et dans l’autre ur enlever toute l’eau qui arrive dans ces ux lacs, et qu’il n’est pas nécessaire d’ima- îer des gouffres dans la mer Caspienne itôt que dans la mer Noire1. t. A tout ce que j’ai dit pour prouver que la r Caspienne n’est qu’un lac qui n’a point de nraunication avec l’Océan, et qui n’en a jamais I; partie, je puis ajouter une réponse que j’ai ue de l’académie de Pétersbourg , à quelques îstions que j’avois faites au sujet de cette mer. < Augusto 1748 , octobr. 5 , etc. Cancellaria acca- emiæ scientiarurn mandavit ut Astrachanensis jubernii cancellaria responderet ad sequentia : r Sunt-ne vortices in mare Caspico necne ? P Quæ généra piscium illud inhabitant ? quomodo apellantur? et an marini tantum aut et fluvia- les ibidem reperiantur? 3° Qualia généra con- îarurn , quæ species ostrearum et cancrorum :currunt? 4° Quæ généra marinarum avium in iso mari aut circa illud versantur ? Ad quæ strachanensis cancellaria die i3 Mart. 1749» se- îentibus respondit : Ad 1, in mari Caspico vortices occurrunt nus- am : hinc est , quod nec in mappis marinis stant, nec ab ullo officialium rei navalis visi se perhibentur. Ad 2, pisces Caspiura mare inhabitant; aci- nseres, sturioli Gmelin, siluri, cyprini clavati, amæ, percæ, cyprini ventre acuto , ( ignoti bi pisces ) , tincæ , salinones , qui , ut è mari ^vios intrare, ita et in mare è fluviis remeare lent. Ad 3, conchæ in littoribus maris obviæ qui- m sunt , sed parvæ , candidæ , aut ex una parte bræ. Cancri ad littora observantur magnitu- ne fluviatilibus similes ; ostreæ aulem et capita edusæ visa sunt nusquam. Ad 4. aves marinæ quæ circa Caspium ver- ptur, sunt anseres vulgares et rubri , pelicani , cni , anates rubræ et nigricantes aquilæ , corvi ualici, grues, plateæ, ardeæ albæ cinereæ et gricautes , ciconiæ albæ gruibus similes , ka- Buffon. I. MERS ET LACS* i93 Il y a des lacs qui sont comme des mares qui ne reçoivent aucune rivière , et desquels il n’en sort aucune ; il y en a d’autres qui reçoivent des fleuves et desquels il sort d’autres fleuves , et enfin d’autres qui seu- lement reçoivent des fleuves. La mer Cas- pienne et le lac Aral sont de cette dernière espèce ; ils reçoivent les eaux de plusieurs fleuves , et les contiennent : la mer Morte reçoit de même le Jourdain , et il n’en sort aucun fleuve. Dans l’Asie mineure il y a un petit lac de la même espèce qui reçoit les eaux d’une rivière dont la source est auprès de Cogni , et qui n’a , comme les précé- dons , d’autre voie que l’évaporation pour rendre les eaux qu’il reçoit. Il y en a un beaucoup plus grand en Perse, sur lequel est située la ville de Marago ; il est de figure ovale , et il a environ dix ou douze lieues de longueur sur six ou sept de largeur : il reçoit la riviere de Tauris , qui n’est pas considérable. Il y a aussi un pareil petit lac en Grèce, à douze ou quinze lieues de Lé- pante. Ce sont là les seuls lacs de cette es- pèce qu’on connoisse en Asie ; en Europe il n’y en a pas un qui soit un peu considé- rable. Eu Afrique il y en a plusieurs , mais qui sont tous assez petits , comme le lac qui reçoit le fleuve Ghir, celui dans lequel tombe le fleuve Zez , celui qui reçoit la ri- vière de Touguedout , et celui auquel abou- tit le fleuve Tafiîet. Ces quatre lacs sont assez près les uns des autres , et ils sont situés vers les frontières de Barbarie , près des déserts de Zara. Il y en a un autre si- tué dans la contrée de Kovar, qui reçoit la rivière du pays de Berdoa. Dans l’Amé- rique septentrionale , où il y a plus de lacs qu’en aucun pays du monde , on n’en con- noît pas un de cette espèce , à moins qu’on ne veuille regarder comme tels deux petits amas d’eaux formés par des ruisseaux , l’un auprès de Guatimapo , et l’autre à quelques «rawaiki (ignotum avis nomen) , larorum variæ « species , sturni nigri et lateribus albis instar pica- « mm , phasiani , anseres parvi nigricantes , tudaki « (ignotum avis nomen) albo colore præditi. » Ces faits, qui sont précis et authentiques, con- firment pleinement ce que j’ai avancé , savoir, que la mer Caspienne n’a aucune communication sou- terraine avec l’Océan ; et ils prouvent de plus qu’elle n’cn a jamais fait partie, puisqu’on n’y trouve point d’huîtres ni d’autres coquillages de la mer, mais seulement les espèces de ceux qui sont dans les rivières. On ne doit donc regarder cette mer que comme un grand lac formé dans le milieu des terres par les eaux des fleuves , puisqu'on n’y trouve que les mêmes poissons et les mêmes coquil- lages qui habitent les fleuves, et point du tout ceux qui peuplent l’Océan ou la Méditerranée. ( Add . Buff.), i3 194 THÉORIE DE LÀ TERRE. lieues de Réal-Nuevo , tous deux dans le Mexique : mais dans l’Amérique méridio- nale , au Pérou , il y a deux lacs consécutifs, dont l’un , qui est le lac Titicaca , est fort grand , qui reçoivent une rivière dont la source n’est pas éloignée de Gusco , et des- quels il ne sort aucune autre rivière : il y en a un plus petit dans le Tucuman , qui reçoit la rivière Salta , et un autre un peu plus grand dans le même pays , qui reçoit la l'ivière de Sant-Iago , et encore trois ou quatre autres entre le Tucuman et le Chili. Les lacs dont il ne sort aucun fleuve et qui n’en reçoivent aucun, sont en plus grand nombre que ceux dont je viens de parler : ces lacs ne sont que des espèces de mares où se rassemblent les eaux pluviales , ou bien ce sont des eaux souterraines qui sor- tent en forme de fontaines dans les lieux bas , où elles ne peuvent ensuite trouver d’écoulement. Les fleuves qui débordent , peuvent aussi laisser dans les terres des eaux stagnantes , qui se conservent aussi pendant long-temps , et qui ne se renouvellent que dans le temps des inondations. La mer, par de violentes agitations , a pu inonder quel- quefois de certaines terres , et y former des lacs salés , comme celui de Harlem et plu- sieurs autres de la Hollande , auxquels il ne paroit pas qu’on puisse attribuer une autre origine ; ou bien la mer en abandonnant par son mouvement naturel certaines terres, y aura laissé des eaux dans les lieux les plus bas > qui ont formé des lacs que l’eau des pluies entretient. Il y a en Europe plusieurs petits lacs de cette espèce , comme en Ir- lande , en Jutland , en Italie , dans le pays des Grisons , en Pologne , en Moscovie , en Finlande , en Grèce ; mais tous ces lacs sont très-peu considérables. En Asie il y en a un près de l’Euphrate , dans le désert d’Irac , qui a plus de quinze lieues de longueur ; un autre aussi en Perse , qui est à peu près de Ja même étendue que le premier, et sur le- quel sont situées les villes de Kélat , de Tétuan , de Yastan et de Yan ; un autre petit dans le Korasan auprès de Ferrior ; un autre petit dans la Tartarie indépendante, qu’on appelle le lac Lévi ; deux autres dans la Tartarie moscovite ; un autre à la Co- chinchine , et enfin un à la Chine , qui est assez grand , et qui n’est pas fort éloigné de Nankin ; ce lac cependant communique à la mer voisine par un canal de quelques lieues. En Afrique il y a un petit lac de cette espèce dans le royaume de Maroc ; un autre près d’Alexandrie , qui paroît avoir été laissé par la mer ; un autre assez consi- dérable , formé par les eaux pluviales dan le désert d’Azarad , environ sous le 3oe de gré de latitude , ce lac a huit ou dix lieu* de longueur ; un autre encore plus grand sur lequel est située la ville de Gaoga , soi le 27e degré ; un autre , mais beaucoup pli petit , près de la ville de Kanum , sous 3oe degré ; un près de l’embouchure de rivière de Gambia; plusieurs autres dai le Congo à 2 ou 3 degrés de latitude suc deux autres dans le pays des Cafres, l’i, appelé le lac Rufumbo, qui est médiocr* et l’autre dans la province d’Arhuta , qui c peut-être le plus grand lac de cette espèc j ayant vingt-cinq lieues environ de longue j sur sept ou huit de largeur. Il y a aussi 1 j de ces lacs à Madagascar près de la cc orientale , environ sous le 29e degré de la j tude sud. En Amérique , dans le milieu de la j | ninsule de la Floride , il y a un de ces la< au milieu duquel est une île appelée S., rope. Le lac de la ville de Mexico est aui de cette espèce; et ce lac, qui est à p près rond, a environ dix lieues de diamèt Il y en a un autre encore plus grand dd la Nouvelle-Espagne , à vingt-cinq lieues distance ou environ de la côte de la b de Campêche , et un autre plus petit di la même contrée près des côtes de la ni du Sud. Quelques voyageurs ont prêter qu’il y avoit dans l’intérieur des terres la Guiane un très-grand lac de cette espèt ils l’ont appelé le lac d’Or, ou le lac J rime ; ils ont raconté des merveilles de richesse des pays voisins , et de l’abonda! des paillettes d’or qu’on trouvoit dans 1’ de ce lac : ils donnent à ce lac une étenr de plus de quatre cents lieues de longue et «le plus de cent vingt-cinq de largeur -»> ’ai-. oatiI île* OHOlin il n’en sort , disent-ils , aucun fleuve , et il en entre aucun. Quoique plusieurs géo| plies aient marqué ce grand lac sur le cartes , il n’est pas certain qu’il existe , < l’est encore bien moins qu’il existe tel qi nous le représentent. Mais les lacs les plus ordinaires et les ] , “ communément grands , sont ceux qui, aj avoir reçu un autre fleuve, ou plusieurs tites rivières , donnent naissance à d’au grands fleuves. Comme le nombre de lacs est fort grand , je ne parlerai que plus considérables , ou de ceux qui aui quelque singularité. En commençant 1 l’Europe , nous avons en Suisse le lac Genève , celui de Constance , etc. : en E grie celui de Balaton : en Livonie un lac est assez grand, et qui sépare les terre ou SC Ssoii lac tsii] àl’o % ARi. XI. MERS ET LACS. ;ette province de celles de la Moscovie : en Finlande le lac Lapwert , qui est fort long, ;t qui se divise en plusieurs bras ; le lac 3ula , qui est de figure ronde : en Moscovie e lac Ladoga, qui a plus de vingt-cinq lieues le longueur sur plus de douze de largeur ; e lac Onega , qui est aussi long , mais moins arge ; le lac Ilmen ; celui de Bélosero , d’où iort l’une des sources du Wolga; l’Iwan- 3séro , duquel sort l’une des sources du )on ; deux autres lacs dont le Yitzogda tire on origine : en Laponie le lac dont sort le leuve de Kimi ; un autre beaucoup plus rand , qui n’est pas éloigné de la côte de Yardhus; plusieurs autres, desquels sortent es fleuves de Lula , de Pitha , d’Uma , qui lous ne sont pas fort considérables : en Ÿorwége deux autres à peu près de même randeur que ceux de Laponie : en Suède lac Yéner, qui est grand , aussi bien que lac Mêler, sur lequel est situé Stockholm ; eux autres lacs moins considérables , dont un est près d’Elvédal , et l’autre de Lin- ]opin. Dans la Sibérie et dans la Tartarie mos- ovite et indépendante , il y a un grand ombre de ces lacs , dont les principaux ônt le grand lac Baraba , qui a plus de cent eues de longueur, et dont les eaux tom- ent dans l’Irtis ; le grand lac Estraguel , à source du même fleuve Irtis ; plusieurs îtres moins grands, à la source du Jérxisca ; grand lac K.ita , à la source de l’Oby ; un itre grand lac , à la source de l’Angara ; lac Baïcal , qui a plus de soixante-dix ues de longueur, et qui est formé par le ême fleuve Angara ; le lac Péhu , d’où sort fleuve Urack , etc. : à la Chine et dans la artarie chinoise , le lac Dalai , d’où sort la osse rivière d’ Argus , qui tombe dans le ;uve Amour ; le lac des Trois-Montagnes, où sort la rivière Hélum , qui tombe dans même fleuve Amour ; les lacs de Cinhal, Cokmor et de Sorama , desquels sortent sources du fleuve Hoanho ; deux autres ânds lacs voisins du fleuve deNankin, etc. : ïis le Tunquin le lac ue Guadag, qui est es nsidérable : dans l’Inde le lac Chiamat , j)ù sort le fleuve Laquia , et qui est voisin sources du fleuve Ava, duLongenu, etc.; lac a plus de quarante lieues de lar- ar sur cinquante de longueur : un autre à l’origine du Gange ; un autre près de a1 chemire , à l’une des sources .du fleuve lus , etc. 'af jEn Afrique on a le lac Cayar et deux ou is autres qui sont voisins de l’embou- ire du Sénégal ; le lac de Guarde et celui de Sigisme , qui tous deux ne font qu’un même lac de forme presque triangulaire , qui a plus de cent lieues de longueur sur soixante-quinze de largeur, et qui contient une île considérable : c’est dans ce lac que le Niger perd son nom ; et au sortir de ce lac qu’il traverse, on l’appelle Sénégal. Dans le cours du même fleuve , en remontant vers la source , on trouve un autre lac considé- rable qu’on appelle le lac Bournou, où le Niger quitte encore son nom, car la rivière qui y arrive s’appelle Gambaru ou Gom- barow. En Éthiopie , aux sources du Nil , est le grand lac Gambia , qui a plus de cin- quante lieues de longueur. Il y a aussi plu- sieurs lacs sur la côte de Guinée , qui pa- roissent avoir été formés par la mer ; et il n’y a que peu d’autres lacs d’une grandeur un peu considérable dans le reste de l’A- frique. L’Amérique septentrionale est le pays des lacs : les plus grands sont le lac Supérieur, qui a plus de cent vingt-cinq lieues de lon- gueur sur. cinquante de largeur ; le lac Hu- ron , qui a près de cent lieues de longueur sur environ quarante de largeur ; le lac des Illinois , qui , en y comprenant la baie des Puants , est tout aussi étendu que le lac Huron ; le lac Érié et le lac Ontario , qui ont tous deux plus de quatre-vingts lieues de longueur sur vingt ou vingt-cinq de lar- geur ; le lac Mistasin , au nord de Québec , qui a environ cinquante lieues de longueur ; le lac Champlain , au midi de Québec , qui est à peu près de la même étendue que le lac Mistasin ; le lac Alemipigon et le lac des Cristinaux , tous deux au nord du lac Supérieur, et qui sont aussi fort considé- rables ; le lac des Assiniboïls , qui contient plusieurs îles, et dont l’étendue en longueur est de plus de soixante-quinze lieues. Il y en a aussi deux de médiocre grandeur dans le Mexique, indépendamment de celui de Mexico : un autre beaucoup plus grand , ap- pelé le lac Nicaragua, dans la province du même nom ; ce lac a plus de soixante ou soixante-dix lieues d’étendue en longueur. Enfin dans l’Amérique méridionale il y en a un petit à la source du Maragnon; un autre plus grand à la source de la rivière du Paraguay ; le lac Titicaca , dont les eaux tombent dans le fleuve de la Plata ; deux autres plus petits dont les eaux coulent aussi vers ce même fleuve , et quelques autres qui ne sont pas considérables dans l’intérieur des terres du Chili. Tous les lacs dont les fleuves tirent leur origine , tous ceux qui se trouvent dans le i3. IQÔ THÉORIE DE LA TERRE. cours des fleuves ou qui en sont voisins et qui y versent leurs eaux, ne sont point salés : presque tous ceux , au contraire , qui reçoi- vent des fleuves, sans qu’il en sorte d’autres fleuves, sont salés; ce qui semble favoriser l’opinion que nous avons exposée au sujet de la salure de la mer, qui pourroit bien avoir pour cause les sels que les fleuves détachent des terres , et qu’ils transportent continuel- lement à la mer : car l’évaporation ne peut pas enlever les sels fixes, et par conséquent ceux que les fleuves portent dans la mer y restent; et quoique l’eau des fleuves paroisse douce, on sait que cette eau douce ne laisse pas de contenir une petite quantité de sel, et, par la succession des temps, la mer a du acquérir un degré de salure considérable , qui doit toujours aller en augmentant. C’est ainsi, à ce que j’imagine, que la mer Noire, la mer Caspienne, le lac Aral, la mer Morte, etc., sont devenus salés; les fleuves qui se jettent dans ces lacs y ont amené successivement tous les sels qu’ils ont dé- tachés des terres, et l’évaporation n’a pu les enlever. A l’égard des lacs qui sont comme des mares , qui ne reçoivent aucun fleuve , et desquels il n’en sort aucun, ils sont ou doux ou salés, suivant leur différente ori- gine; ceux qui sont voisins de la mer sont ordinairement salés, et ceux qui eu sont éloignés sont doux, et cela parce que les uns ont été formés par des inondations de la mer, et que les autres ne sont que des fontaines d’eau douce, qui , n’ayant pas d’é- coulement, forment une grande étendue d’eau. On voit aux Indes plusieurs étangs et réservoirs faits par l’industrie des habituas, qui ont jusqu’à deux ou trois lieues de su- perficie, dont les bords sont revêtus d’une muraille de pierre; ces réservoirs se remplis- sent pendant la saison des pluies, et servent aux habitans pendant l’été, lorsque l’eau leur manque absolument , à cause du grand éloignement où ils sont des fleuves et des fontaines. Les lacs qui ont quelque chose de parti- culier sont la mer Morte, dont les eaux contiennent beaucoup plus de bitume que de sel; ce bitume, qu’on appelle bitume de Judée, n’est autre chose que de l’asphalte, et aussi quelques auteurs ont appelé la mer Morte lac Âsphaltite. Les terres aux environs du lac contiennent une grande quantité de ce bitume. Bien des gens se sont persuadé , au. sujet de ce lac, des choses semblables à celles que les poètes ont écrites du lac d’A- verne, que le poisson ne pouvoit y vivre; que les oiseaux qui passoient par-dessus étoient suffoqués : mais ni l’un ni l’autre de ces lacs ne produit ces funestes effets, ils nourrissent tous deux du poisson, les oiseaux volent par-dessus, les hommes s’y baignent sans aucun danger. Il y a , dit-on , en Bohême , dans la cam- pagne de Boleslaw, un lac où il y a des trous d’une profondeur si grande, qu’on n’a pu le souder , et il s’élève de ces trous des vents impétueux qui parcourent toute la Bohême, et qui pendant l’hiver élèvent souvent en l’air des morceaux de glace de plus de cent, livres de pesanteur. On parle d’un lac en Islande qui pétrifie; le lac Néagh en Irlande! a aussi la même propriété : mais ces pélrifi- j cations produites par l’eau de ces lacs m > sont sans doute autre chose que des incrus- tations comme celles que fait l’eau d’Arcueil. Sur les parties septentrionales, de la mer Atlantique. * A la vue des îles et des golfes qui S'f multiplient ou s’agrandissent autour dil Groenland, il est difficile, disent les navi gateurs, de ne pas soupçonner que la me 11e refoule , pour ainsi dire , des pôles ver l’équateur : ce qui peut autoriser celte cou jecture, c’est que le flux qui monte jusqu’il dix-huit pieds au cap des États, ne s’élcv que de huit pieds à la baie de Disko , c’es à dix degrés plus haut de latitud à-dire nord. Celte observation des navigateurs , joint) à celle de l’article précédent, semble confit mer encore ce mouvement des mers depu les régions australes aux septentrionales, elfe elles sont contraintes, par l’obstacle d fi là terres, de refouler ou refluer vers les plag lccii du midi. Ifroi Dans la baie de Hudson, les vaisseai T dan ont à se préserver des montagnes de glacl auxquelles des navigateurs ont donné quia à dix-huit cents pieds d'épaisseur, et q< étant formées par un hiver permanent cinq à six ans dans de petits golfes éterni lement remplis de neige, en ont été dél chées par les vents de nord-ouest ou [ quelque cause extraordinaire. Le vent du nord-ouest, qui règne presq, continuellement durant l'hiver ,. et très-sc vent en été, excite dans la baie même (j tempêtes effroyables. Elles sont d’autant p à craindre, que les bas-fonds y sont tr communs. Dans les contrées qui bord< celle baie, le soleil ne se lève, ne se c< che jamais sans un grand cône de lumièr lorsque ce phénomène a- disparu, l’aun disp finit ■pan tuait voit 1 c’est I boréale en prend la place. Le ciel y est ra- rement serein ; et, dans ie printemps el dans l'automne, l’air est habituellement rempli de brouillards très-épais, el durant l’hiver, d’une infinité de petites flèches glaciales sen- sibles à l’œil. Quoique les chaleurs de l’été soient assez vives durant deux mois ou six semaines , le tonnerre et les éclairs sont rares. La mer, le long des côtes de Norwége qui sont bordées par des rochers, a ordinai- rement depuis cent jusqu’à quatre cents brasses de profondeur, et les eaux sont moins isalces que dans les climats plus chauds. La Iquantité de poissons huileux dont cette mer est remplie la rend grasse au point d’en être presque inflammable : le flux n’est point considérable, et la plus haute marée n’y est que de huit pieds. On a fait, dans ces dernières années, quelques observations sur la température ides terres et des eaux dans les climats les plus voisins du pôle boréal. « Le froid commence dans le Groenland là la nouvelle année, et devient si perçant an unois de février et de mars , que les pierres jse fendent en deux , et que la mer fume comme un four , surtout dans les baies. Ce- pendant le froid n’est pas aussi sensible au îmilieu de ce brouillard épais que sous un ciel sans nuages : car , dès qu’on passe des ! terres à cette atmosphère de fumée qui couvre r da surface et le bord des eaux , on sent un li air plus doux et le froid moins vif, quoique j les habits et les cheveux y soient bientôt I hérissés de bruine et de glaçons. Mais aussi Icette fumée cause plutôt des engelures qu’un [froid sec ; et , dès qu’elle passe de la mer dans une atmosphère plus froide, elle se change en une espèce de verglas, que le vent disperse dans l’horizon, et qui cause un froid si piquant, qu’on ne peut sortir an grand air sans risquer d’avoir les pieds et les mains gelés. C’est dans cette saison que l’on [voit glacer l’eau sur le feu avant de bouillir : c’est alors que l’hiver pave un chemin de j glace sur la mer, entre les îles voisines, et jdans les baies et les détroits... « La plus belle saison du Groenland est l’automne ; mais sa durée est courte , et sou- vent interrompue par des nuits de gelées jtrès-froides. C’est à peu près dans ces temps- la que , sous une atmosphère noircie de va- peurs , on voit les brouillards qui se gèlent [quelquefois jusqu’au verglas, former sur la mer comme un tissu glacé de toiles d’arai- gnées, et dans les campagnes charger l’air d’atomes luisans, ou ie hérisser de glaçons 197 pointus , semblables à de fines aiguilles. « On a remarqué plus d’une fois que le temps et la saison prennent dans le Groenland une température opposée à celle qui règne dans toute l’Europe ; en sorte que si l’hiver est très-rigoureux dans les climats tempérés, il est doux au Groenland; et très-vif en cette partie do nord , quand il est le plus modéré dans nos contrées. A la fin de 1739, l’hiver fut si doux à la baie de Disko, que les oies passèrent, au mois de janvier suivant, delà zone tempérée dans la glaciale , pour y cher- cher un air plus chaud, et qu’en 1740 on ne vit point de glace à Disko jusqu’au mois de mars , tandis qu’en Europe , elle régna constamment depuis octobre jusqu’au mois de mai... « De même l’hiver de 1763, qui fut ex- trêmement froid dans toute l’Europe, se fit si peu Sentir au Groenland, qu’on y a vu quelquefois des étés moins doux. » Les voyageurs nous assurent que , dan? ces mers voisines du Groenland , il y a des montagnes de glaces flottantes très-hautes, et d’autres glaces flottantes comme des radeaux, qui ont plus de deux cents toises de longueur sur soixante ou quatre-vingts de largeur : mais ces glaces, qui forment des plaines im- menses sur la mer, n’ont communément que neuf à douze pieds d’épaisseur : il pareil qu’elles se forment immédiatement sur la surface de la mer dans la saison la plus froide, au lieu que les autres glaces flot tantes et très- élevées viennent de la terre , c’est-à-dire des environs des montagnes et des côtes, d’où elles ont été détachées et roulées dans la mer par les fleuves. Ces dernières glaces entraînent beaucoup de bois, qui sont ensuite jetés par la mer sur les côtes orientales du Groenland: il paroît que ces bois ne peuvent venir que de la terre de Labrador , et non pas de la Norwége , parce que les vents dit nord-est, qui sont très -violens dans ces con- trées, repousseroient ces bois, comme les courans, qui portent du sud au détroit de Davis et à la baie de Hudson, arrêterôient tout ce qui peut venir de l’Amérique aux côtes du Groenland. La mer commence à charroyer des glaces au Spitzberg dans les mois d’avril et de mai; elles viennent au détroit de Davis en très- grande quantité , partie de la Nouvelle-Zem- ble, et la plupart le long de la côte orien- tale du Groenland, portées de l’est à l’ouest, suivant le mouvement général de la mer. L’on trouve, dans le Voyage du capitaine Phipps, les indices et les faits suivans : «Dès xÔ27 , Robert Tfiorne, marchand ART. XL MERS ET LACS. ïgS théorie de de Bristol, fit naître l’idée d’aller aux Indes orientales par le pôle boréal Cependant on ne voit pas qu’on ait formé aucune expé- dition pour les mers du cercle polaire avant 1607 , lorsque Henri Hudson fui envoyé par plusieurs marchands de Londres à la dé- couverte du passage à la Chine et au Japon par le pôle boréal Il pénétra jusqu’au 8o° 23', et il ne put aller plus loin... « En 1609 , sir Thomas Smith fut sur la côte méridionale du Spitzberg , et il ap- prit , par des gens qu’il avoit envoyés à terre , que les lacs et les mares d’eau n’é- toient pas tous gelés (c’étoit le 26 mai) , et que l’eau en étoit douce : il dit aussi qu’on arriverait aussitôt au pôle de ce côté que par tout autre chemin qu’on pourrait trou- ver, parce que le soleil produit une grande chaleur dans ce climat , et parce que les glaces ne sont pas d’une grosseur aussi énorme que celles qn’il avoit vues vers le 73e degré. Plusieurs autres voyageurs ont tenté des voyages au pôle pour y découvrir ce passage, mais aucun n’a réussi... » Le 5 juillet, M. Pliipps vit des glaces en quantité vers le 790 34" de latitude; le temps étoit brumeux; et, le 6 juillet, il continua sa route jusqu’au 790 59' 39", en- tre la terre du Spitzberg et les glaces : le 7, il continua de naviguer entre les glaces flot- tantes , en cherchant une ouverture au nord par où il aurait pu entrer dans une mer libre : mais la glace ne formoit qu’une seule masse au nord-nord-ouest, et au 8o° 36' la mer étoit entièrement glacée; en sorte que toutes les tentatives de M. Phipps pour trouver un passage ont été infructueuses. « Pendant que nous essuyions , dit ce na- vigateur, une violente rafale le 12 septem- bre, le docteur Irving mesura la tempéra- ture de la mer dans cet état d’agitation , et il trouva qu’elle étoit beaucoup plus chaude que celle de l’atmosphère. Cette observation est d’autant plus intéressante , qu’elle est conforme à un passage des Questions natu- relles de Plutarque , où il dit que la mer devient chaude lorsqu’elle est agitée par les flots... « Ces rafales sont aussi ordinaires au Erintemps qu’en automne ; il est donc pro- able que si nous avions mis à la voile plus tôt , nous aurions eu en allant le temps aussi mauvais qu’il l’a été à notre retour. » Et comme M. Phipps est parti d’Angleterre à la fin de mai , il croit qu’il a profité de la saison la plus favorable pour soù expé- dition. « Enfin , continue-t-il, si la navigation au LA TERRE. pôle étoit praticable , il y avoit la plus grande probabilité de trouver , après le solstice , la mer ouverte au nord , parce qu’alors la chaleur des rayons du soleil a produit tout son effet , et qu’il reste d’ail- leurs une assez grande portion d’été pour visiter les mers qui sont au nord et à l’ouest du Spitzberg. » Je suis entièrement du même avis que cet habile navigateur, et je ne crois pas que l’expédilion au pôle puisse se renouveler avec succès, ni qu’on arrive jamais au-delà du 82 ou 83e degré. On assure qu’un vais- seau du port de Whilby , vers la fin du mois d’avril 1774, a pénétré jusqu’au 80e degré sans trouver de glaces assez fortes pour gêner la navigation ; on cite aussi un capitaine Robinson , dont le journal fait foi qu’en 1773 il a atteint le 8x° 3o'; et enfin on cite un vaisseau de guerre hollandois qui protégeoit les pêcheurs de cette nation, et qui s’est avancé, dit-on, il y a cinquante ans , jusqu’au 88e degré. Le docteur Camp- bell, ajoute-t-on, tenoit ce fait d’un cer- tain docteur Daillie , qui étoit à bord du vaisseau , et qui professoit la médecine à Londres en 1745. C’est probablement le même navigateur que j’ai cité moi-même sous le nom de capitaine Mouton ; mais je doute beaucoup de la réalité de ce fait , et je suis maintenant très-persuadé qu’on ten- terait vainement d’aller au-delà du 82 ou 83e degré, et que si le passage par le nord est possible, ce ne peut être qu’en prenant la route de la baie de Hudson. Yoici ce que dit à ce sujet le savant et |ii( des : « La baie de Hudson a été long-temps regardée et on la regarde encore comme la route la plus courte de l’Europe aux Indes orientales et aux contrées les plus riches de l’Asje. « Ce fut Cabot qui le premier eut l’idée d’un passage par le nord-ouest à la mer du Sud. Ses succès se terminèrent à la décou- verte de file de Terre-Neuve. On vit en- trer dans la carrière après lui un grand nom- bre de navigateurs anglois... Ces mémorables et hardies expéditions eurent plus d’éclat que d’utilité. La plus heureuse ne donna pas la moindre conjecture sur le but qu’on se proposoit... On croyoit enfin que c’étoit conrir après des chimères, lorsque la dé- couverte de la baie de Hudson ranima les espérances prêtes à s’éteindre. « A cette époque une ardeur nouvelle fait recommencer les travaux , et enfin arrive la fameuse expédition de 1746 > d’où l’on voit ART. XL MERS ET LACS. *99 * rtir quelques clartés après des ténèbres ’ûfondes qui duroient depuis deux siècles, tir quoi les derniers navigateurs fondent- de meilleures espérances ? D’après quel- s expériences osent-ils former leurs con- ctures? C’est ce qui mérite une discussion. « Trois vérités dans l’histoire de la nalure )ivent passer désormais pour démontrées, la première est que les marées viennent de ■ Dcéan, et qu’elles entrent plus ou moins 1 ant dans les autres mers, à proportion le ces divers canaux communiquent avec grand réservoir par des ouvertures plus moins considérables : d’où il s’ensuit le ce mouvement périodique n’existe point i ne se fait presque pas sentir dans la Mé- terranée , dans la Baltique , et dans les Ures golfes qui leur ressemblent. La se- mde vérité de fait est que les marées ar- vent plus tard et plus foibles dans les :ux éloignés de l’Océan , que dans les en- oits qui le sont moins. La troisième est le les vents violens qui soufflent avec la arée la font remonter au-delà de ses bor- îs ordinaires , et qu’ils la retardent en la minuant , lorsqu’ils soufflent dans un sens mtraire. « D’après ces principes , il est constant le si la baie de Hudson étoit un golfe en- avé dans des terres , et qu’il ne fût ouvert ’à la mer Atlantique , la marée y devroit re peu marquée, qu’elle devroit s’affoiblir s’éloignant de sa source, et qu’elle devroit rdre de sa force lorsqu’elle auroit à lutter intre les vents. Or, il est prouvé, par s observations faites avec la plus grande telligence , avec la plus grande précision, le la marée s’élève à une grande hauteur ms toute l’étendue de la baie ; il est prouvé 'elle s’élève à une plus grande hauteur fond de la baie que dans le détroit même au voisinage ; il est prouvé que cette uteur augmente encore, lorsque les vents posés au détroit se font sentir : il doit ne être prouvé que la baie de Hudson a nitres communications avec l’Océan que lie qu’on a déjà trouvée. « Ceux qui ont cherché à expliquer des ts si frappans en supposant une commu- cation de la baie de Hudson avec celle de iïin , avec le détroit de Davis , se sont anifestement égarés. Ils ne balanceroient s à abandonner leur conjecture , qui n’a ùlleurs aucun fondement , s’ils vouloient re attention que la marée est beaucoup as basse dans le détroit de Davis, dans baie de Baffin , que dans celle de idson. « Si les marées qui se font sentir dans le golfe dont il s’agit ne peuvent venir ni de l’océan Atlantique, ni d’aucune autre mer septentrionale, où elles sont toujours beau- coup plus foibles, on ne pourra s’empêcher de penser qu’elles doivent avoir leur source dans la mer du Sud. Ce système doit tirer un grand appui d’une vérité incontestable, c’est que les plus hautes marées qui se fas- seut remarquer sur ces côtes sont toujours causées par les vents du nord-ouest qui soufflent directement contre ce détroit. « Après avoir constaté , autant que la na- ture le permet , l’existence d’un passage si long-temps et si inutilement désiré , il reste à déterminer dans quelle partie de la baie il doit se trouver. Tout invite à croire que le welcome à la côte occidentale doit fixer les efforts dirigés jusqu’ici de toutes parts sans choix et sans méthode. On y voit le fond de la mer à la profondeur de onze brasses : c’est un indice que l’eau y vient de quelque océan, parce qu’une semblable transparence est incompatible avec des dé- charges de rivières , de neiges fondues et de pluies. Des courans, dont on ne sau- roit expliquer la violence qu’en les faisant partir de quelque mer occidentale , tien- nent ce lieu débarrassé de glaces , tandis que le reste du golfe en est entièrement couvert. Enfin les baleines, qui cherchent constamment dans l’arrière-saison à se reti- rer dans des climats plus chauds, s’y trou- vent en fort grand nombre à la fin de l’été ; ce qui paroît indiquer un chemin pour se rendre , non à l’ouest septentrio- nal , mais à la mer du Sud. « Il est raisonnable de conjecturer que le passage est court. Toutes les rivières qui se perdent dans la côte occidentale de la baie de Hudson sont foibles et pe- tites ; ce qui paroît prouver qu’elles ne viennent pas de loin , et que par consé- quent les terres qui séparent les deux mers ont peu d’étendue : cet argument est fortifié par la force et la régularité des marées. Partout où le flux et le reflux observent des temps à peu près égaux, avec la seule différence qui est occasionée par le retardement de la lune dans son retour au méridien , on est assuré de la proximité de l’Océan, d’où viennent ces marées. Si le passage est court , et qu’il ne soit pas avancé dans le nord , comme tout l’indique , on doit présumer qu’il n’est pas difficile ; la rapidité des courans qu’on observe dans ces parages, et qui ne permettent pas aux glaces de s’y ar- THÉORIE DE LA TERRE. 200 rêter, ne peut que donner du poids à celte conjecture. » Je crois , avec cet excellent écrivain , que s’il existe en effet un passage prati- cable , ce ne peut être que dans le fond de la baie de Hudson , et qu’on le ten- terait vainement par la baie de Baffin, dont le climat est trop froid, et dont les côtes sont glacées , surtout vers le nord : mais ce qui doit faire douter en- core beaucoup de l’existence de ce pas- sage par le fond de la baie de Hudson, ce sont les terres que Behring et Tschi- rikow ont découvertes, en 174.1, sous la meme latitude que la baie de Hudson ; car ces terres semblent faire partie du grand continent de l’Amérique , qui pa- roi t continu sous cette même latitude jus- qu’au cercle polaire : ainsi ce ne seroit qu’au dessous du 55e degré que ce pas- sage pourrait aboutir à la mer du Sud. {Add. Buffon.') Sur les lacs sales de l’Asie , * Dans la contrée des Tartares Ufiens, ainsi appelés parce qu’ils habitent les bords de la rivière Uf , il se trouve , dit M. Palias, des lacs dont l’eau est aujourd’hui salée, et qui ne l’étoit pas autrefois. Il dit la même chose d’un lac près de Miacs, dont l’eau étoit ci-devant douce , et qui est ac- tuellement salée. L’un des lacs les plus fameux par la quantité de sel qu’on en tire , est celui qui se trouve vers les bords de la rivière Isel , et que l’on nomme Soratschya. Le sel en est en général amer : la médecine l’emploie comme un bon purgatif ; deux onces de ce sel forment une dose très- forte. Yers Kurtenegsch , les bas-fonds se couvrent d’un sel amer , qui s’élève comme un lapis de neige à deux pouces de hau- teur ; le lac salé de Korjackof. fournit annuellement trois cent mille pieds cubi- ques de sel 1 ; le lac de Jennu en donne aussi en abondance. Dans les voyages de MM. de l’Académie de Pétersbourg , il est fait mention du lac salé de Jamuscha en Sibérie ; ce lac, qui est à peu près rond , n'a qu’environ neuf lieues de circonférence. Ses bords sont couverts de sel, et le fond est re- vêtu de cristaux de sel. L’eau est salée nu suprême degré ; et quand le soleil y donne , le lac paraît rouge comme une 1. Le pied cubique pèse trente-cinq livres, de seize onces chacune. belle aurore. Le sel est blanc comme neig et se forme en cristaux cubiques. Il y e ; a une quantité si prodigieuse , qu’en pe de temps on pourrait en charger un grac \ nombre de vaisseaux ; et dans les endroi où l’on en prend, on en retrouve d’auti cinq à six jours après. Il suffit de dii que les provinces de Tobolsk et Jéniséi ; en sont approvisionnées , et que ce 1< suffirait pour fournir cinquante provino semblables. La couronne s’en est résert!1 le commerce , de même que celui de toi tes les autres salines. Ce sel est d’ui bonté parfaite ; il surpasse tous les autr en blancheur, et on n’en trouve nulle pa ! d’aussi propre pour saler la viande. Dai le midi de l’Asie , on trouve aussi d * lacs salés ; un près de l’Euphrate , 1 1 autre près de Barra. Il y en a encore , | ce qu’on dit , près d’Haleb et dans 1 î | de Chypre à Larnaca ; ce dernier est vcl sin de la mer. La vallée de sel de Barri! n’étant pas loin de l’Euphrate , pourra^ être labourée, si l’on en faisoit coul m les eaux dans ce fleuve, et que le terra:! fût bon ; mais à présent cette terre rer| un bon sel pour la cuisine , et même ( | si grande quantité , que les vaisseaux < | Bengale le chargent en retour pour les |t (. ddet . Buff.) |i ARTICLE XII. Du flux et reflux. if L’eau n’a qu’un mouvement naturel qt! lui vient de sa fluidité ; elle descend toujoul des lieux les plus élevés dans les lieux 1 plus bas, lorsqu’il n’y a point de digues < d’obstacles qui la retiennent ou qui s’oppi sent à son mouvement; et lorsqu’elle est a rivée au lieu le plus bas , elle y reste trar quille et sans mouvement , à moins que qu( que cause étrangère et violente ne l’agite ne l’en fasse sortir. Toutes les eaux de l’( j céan sont rassemblées dans les lieux les pl bas de la superficie de la terre ; ainsi 1 mouvemens de la mer viennent de caus j extérieures. Le principal mouvement c celui du flux et du reflux, qui se fait alte j nativement en sens contraire, et duquel résulte un mouvement continuel et génér de toutes les mers d’orient en occident ; c deux mouvemens ont un rapport consta: et régulier avec les mouvemens de la lun ; Dans les pleiues et dans les nouvelles lune ce mouvement des eaux d’orient en oct : dent est plus sensible, aussi bien que cel du flux et du reflux ; celui-ci se fait senl 201 ART. XII. FLUX ET REFLUX. ns l’intervalle de six heures et demie sur plupart des rivages, en sorte que le flux ive toutes les fois que la lune est au des- > ou au dessous du méridien , et le reflux reède toutes les fois que la lune est dans 1 plus grand éloignement du méridien, st-à-dire toutes les fois qu’elle est à l’ho- on, soit à son coucher, soit à son lever, mouvement de la mer d’orient en occi- ît est continuel et constant, parce que it l’Océan dans le flux se meut d’orient en. :idcnt, et pousse vers l’occident une très- mde quantité d’eau, et que le reflux ne oit se faire en sens contraire qu’à cause la moindre quantité d’eau qui est alors ussée vers l’occident ; car le flux doit plu- être regardé comme une intumescence, le reflux comme une *détumescence des ix, laquelle, au lieu de troubler le mou- nent d'orient en occident, le produit et rend continuel , quoique à la vérité il soit is fort pendant l’intumescence, et plus bîe pendant la détumescence , par la rai- i que nous venons d’exposer. Les principales circonstances de ce mou- nent sont, i° qu’il est plus sensible dans nouvelles et pleines lunes que dans les adrat ures : dans le printemps et bau- me il est aussi plus violent que dans les 1res temps de l’année , et il est le plus ble dans le temps des solstices; ce qui ïplique fort naturellement par la combi- son des forces de l’attraction de la lune du soleil. 2° Les vents changent souvent lirection et la quantité de ce mouvement, tout les vents qui soufflent constamment même côté ; il en est de même des grands îves qui portent leurs eaux dans la mer, qui y produisent un mouvement de cou- lt qui s’étend souvent à plusieurs lieues; orsque la direction du vent s’accorde avec mouvement général , comme est celui rient en occident , il en devient plus sen- le : on en a un exemple dans la mer Pâ- que, où le mouvement d’orient en occi- it est constant et très-sensible. 3° On doit marquer que lorsqu’une partie d’un fluide meut , toute la masse du fluide se meut si : or, dans le mouvement des marées, r a une très-grande partie de l’Océan qui meut sensiblement; toute la masse des rs se meut donc en même temps , et les rs sont agitées par ce mouvement dans te leur étendue et dans toute leur pro- deur. tour bien entendre ceci, il faut faire at- tion à la nature de la force qui produit lux et le reflux , et réfléchir sur son ac- tion et sur ses effets. Nous avons dit que la lune agit sur la terre par une force que les uns appellent attraction, et les autres pesan- teur : cette force d’attraction ou de pesan- teur pénètre le globe de la terre dans toutes les parties de sa masse ; elle est exactement proportionnelle à la quantité de matière, et en même temps elle décroît comme le carré de la distance augmente. Cela posé , exami- nons ce qui doit arriver en supposant la lune au méridien d’une plage de la mer. La sur- face des eaux étant immédiatement sous la lune, est alors plus près de cet astre que de toutes les autres parties du globe, soit de la terre, soit de la mer; dès lors celte partie de la mer doit s’élever vers la lune , en for- mant une éminence dont le sommet corres- pond au centre de cet astre : pour que cette éminence puisse se former , il est nécessaire que les eaux, tant de la surface environ- nante que du fond de cette partie de la mer, y contribuent: ce qu’elles font en effet à pro- portion de la proximité où elles sont de l’astre qui exerce cette action dans la raison inverse du carré de la distance. Ainsi la sur- face de cette partie de la mer s’élevant la première , les eaux de la surface des parties voisines s’élèveront aussi , mais à une moin- dre hauteur, et les eaux du fond de toutes ces parties éprouveront le même effet et s’é- lèveront par la même cause, en sorte que, toute cette partie de la mer devenant plus haute et formant une éminence, il est né- cessaire que les eaux de la surface et du fond des parties éloignées et sur lesquelles cette force d’attraction n’agit pas, viennent avec précipitation pour remplacer les eaux qui se sont élevées : c’est là ce qui produit le flux, qui est plus ou moins sensible sur les différentes côtes, et qui, comme l’on voit, agile la mer non seulement à sa surface , mais jusqu’aux plus grandes profondeurs. Le reflux arrive ensuite par la pente naturelle des eaux ; lorsque l’aslre a passé et qu’il n’exerce plus sa force, l’eau, qui s’étoil élevée par l’action de cette puissance étran- gère, reprend son niveau et regagne les ri- vages et les lieux qu’elle avoit été forcée d’abandonner : ensuite, lorsque la lune passe au méridien de l’antipode du lieu où nous avons supposé qu’elle a d’abord élevé les eaux , le même effet arrive ; les eaux , dans cet instant où la lune est absente et la plus éloignée , s’ élèvent sensiblement, autant que dans le temps où elle est présente et la plus voisine de celte partie de la mer. Dans le premier cas, les eaux s’élèvent, parce qu’elles sont plus près de l’astre que toutes ! THÉORIE DE LA TERRE. les autres parties du globe ; et dans le se- cond cas , c’est par la raison contraire , elles ne s’élèvent que parce qu’elles en sont plus éloignées que toutes les autres parties du globe : et l’on voit bien que cela doit pro- duire le même effet; car alors les eaux de cette partie étant moins attirées que tout le reste du globe , elles s’éloigneront nécessai- rement du reste du globe, et formeront une éminence dont le sommet répondra au point de la moindre action , c’est-à-dire au point du ciel directement opposé à celui où se trouve la lune, ou, ce qui revient au même, au point où elle étoit trois heures aupara- vant lorsqu’elle avoit élevé les eaux la pre- mière fois : car lorsqu’elle est parvenue à l’horizon , le reflux étant arrivé , la mer est alors dans son état naturel, et les eaux sont en équilibre et de niveau; mais quand la lune est au méridien opposé, cet équilibre ne peut plus subsister, puisque les eaux de la partie opposée à la lune étant à la plus grande distance où elles puissent être de cet astre, elles sont moins attirées que le reste du globe, qui, étant intermédiaire, se trouve être plus voisin de la lune, et dès lors leur pesanteur relative , qui les tient toujours en équilibre et de niveau, les pousse vers le point opposé à la lune, pour que cet équi- libre se conserve. Ainsi dans les deux cas, lorsque la lune est au méridien d’un lieu ou au méridien opposé, les eaux doivent s’élever à très-peu près de la même quan- tité , et par conséquent s’abaisser et refluer de la même quantité lorsque la lune est à l’horizon , à son coucher ou à son lever. On voit bien qu’un mouvement dont la cause et l’effet sont tels que nous venons de l’ex- pliquer , ébranle nécessairement la masse en- tière des mers , et la remue dans toute son étendue et dans toute sa profondeur; et si ce mouvement paroît insensible dans les hautes mers, et lorsqu’on est éloigné des ter- res , il n’en est pas moins réel : le fond et la surface sont remués à peu près égale- ment; et même les eaux du fond, que les vents ne peuvent agiter comme celles de la surface , éprouvent bien plus régulièrement cette action que celles de la surface, et elles ont un mouvement plus réglé et qui est tou- jours alternativement dirigé de la même façon. De ce mouvement alternatif de flux et de reflux , il résulte , comme nous l’avons dit , un mouvement continuel de la mer de l’o- rient vers l’occident, parce que l’astre qui produit l’intumescence des eaux va lui-mêine d’orient en occident, et qu’agissant succes- sivement dans cette direction , les eaux su vent le mouvement de l’astre dans la mêa direction. Ce mouvement de la mer d’oriei [ en occident est très-sensible dans tous 1 détroits ; par exemple, au détroit de Mi gellan , le flux élève les eaux à près de vin pieds de hauteur , et cette intumescem dure six heures , au lieu que le reflux ou détumescence ne dure que deux heures et l’eau coule vers l’occident ; ce qui prou évidemment que le reflux n’est pas égal ; flux, et que de tous deux il résulte un mo vement vers l’occident , mais beaucoi plus fort dans le temps du flux que da celui du reflux , et c’est pour cette raist que, dans les hautes mers éloignées de tou terre , les marées ne sont sensibles que p le mouvement général qui en résulte, c’esl à-dire par ce mouvement d’orient en oc< | dent. i Les marées sont plus fortes, et elles fo hausser et baisser les eaux bien plus conn dérablement dans la zone torride entre 1 tropiques , que dans le reste de l’Océan ; el): sont aussi beaucoup plus sensibles dans lieux qui s’étendent d’orient en oceideo sj dans les golfes qui sont longs et étroits, sur les côtes où il y a des îles et des pt montoires : le plus grand flux qu’on co noisse, est, comme nous l’avons dit da l’article précédent, à l’une des embouchui « du fleuve Indus , où les eaux s’élèvent trente pieds; il est aussi fort remarquai auprès de Malaye, dans le détroit de Sonde, dans la mer Rouge, dans la baie Nelson, à 55 degrés de latitude septentrip nale , où il s’élève à quinze pieds , à l’embc chure du fleuve Saint-Laurent, sur les cô de la Chine, sur celles du Japon , à Panap j^ dans le golfe de Bengale , etc. Le mouvement de la mer d’orient en oc dent est très-sensible dans de certains < p droits ; les navigateurs l’ont souvent obseï ® en allant de l’Inde à Madagascar et en Af jfai que ; il se fait sentir aussi avec beaucoup force dans la mer Pacifique, et entre les JV luques et le Brésil : mais les endroits où mouvement est le plus violent sont les c troits qui joignent l’Océan à l’Océan ; j exemple, les eaux de la mer sont port< avec une si grande force d’orient en oc dent par le détroit de Magellan , que mouvement est sensible même à une gran distance dans l’océan Atlantique ; et prétend que c’est ce qui a fait conjecture] Magellan qu’il y avoit un détroit par leqi x. "Voyez le Voyage de Narbrough, il ART. XII. FU leux mers avoient unë communication, s le détroit des Manilles et dans tous :anaux qui séparent les îles Maldives , er coule d’orient en occident , comme dans le golfe du Mexique entre Cuba acatan ; dans le golfe de Paria , ce mou- mt est si violent, qu’on appelle le dé- la gueule du Dragon; dans la mer de ida, ce mouvement est aussi très-vio- aussi bien que dans la mer de Tartarie, ins le détroit de Waigats, par lequel :an, en coulant avec rapidité d’orient ccident , charrie des masses énormes de : de la mer de Tartarie dans la mer du l de l’Europe. La mer Pacifique coule ême d’orient en occident par les détroits apon ; la mer du Japon coule vers la e ; l’océan Indien coule vers l’occident le détroit de Java et par les détroits lutres îles de l’Inde. On ne peut donc louter que la mer n’ait un mouvement j;ant et général d’orient en occident , et :st assuré que l'océan Atlantique coule l’Amérique, et que la mer Pacifique Joigne , comme on le voit évidemment p des Courans , entre Lima et Panama, i reste, les alternatives du flux et du t sont régulières et se font de six heures mie en six heures et demie sur la plu- ies côtes delà mer, quoique à différentes ;s, suivant le climat et la position des : ainsi les côtes de la mer sont battues nuellement des vagues, qui enlèvent à îe fois de petites parties de matières es transportent au loin et qui se dé- Lt au fond ; et de même, les vagues por- ur les plages basses des coquilles , des > qui restent sur les bords, et qui, s’ac- lant peu à peu par couches horizon- forment à la fin des dunes et des hau- aussi élevées que des collines, et qui ;n effet des collines tout-à-fait sembla- iux autres collines , tant par leur forme >ar leur composition intérieure ; ainsi r apporte beaucoup de productions ma- sur les plages basses, et elle emporte n toutes les matières qu’elle peut en- des côtes élevées contre lesquelles elle soit dans le temps du flux, soit dans ips des orages et des grands vents, îr donner une idée de l’effort que fait r agitée contre les hautes côtes , je crois ’ rapporter un fait qui m’a été assuré ne personne très-digne de foi , et que iU d’autant plus facilement, que j’ai vu lême quelque chose d’approchant. Dans icipale des îles Orcades il y a des côtes )sées de rochers coupés à plomb et £ ET REFLUX.3 ao3 perpendiculaires à la surface de la mer , en sorte qu’en se plaçant au dessus de ces ro- chers, on peut laisser tomber un plomb jus- qu’à la surface de l’eau , en mettant la corde au bout d’une perche de neuf pieds. Cette opération , que l’on peut faire dans le temps que la mer est tranquille , a donné la mesure de la hauteur de la côte, qui est de deux cents pieds. La marée , dans cet endroit, est fort considérable , comme elle l’est ordinai- rement dans tous les endroits où il y a des terres avancées et des îles : mais , lorsque le vent est fort, ce qui est très-ordinaire en Ecosse, et qu’en môme temps la marée monte, le mouvement est si grand , et l’agi- tation si violente, que l’eau s’élève jusqu’au sommet des rochers qui bordent la côte , c’est-à-dire à deux ceuts pieds de hauteur , et qu’elle y tombe en forme de pluie ; elle jette même à cette hauteur des graviers et des pierres qu’elle détache du pied des ro- chers , et quelques-unes de ces pierres , au rapport du témoin oculaire que je cite ici , sont plus largès que la main. J’ai vu moi-même dans le port de Li- vourne , où la mer est beaucoup plus tran- quille , et où il n’y a point de marée , une tempête au mois de décembre 173 r , où l’on fut obligé de couper les mâts de quelques vaisseaux qui étoient à la rade , dont les ancres avoient quitté ; j’ai vu , dis-je , l’eau de la mer s’élever au dessus des fortifica- tions , qui me parurent avoir une élévation très-considérable au dessus des eaux ; et comme j’étois sur celles qui sont les plus avancées , je ne pus regagner la ville sans être mouillé de l’eau de la mer beaucoup plus qu’on ne peut l’être par la pluie la plus abondante. Ces exemples suffisent pour faire enten- dre avec quelle violence la mer agit contre les côtes ; cette violente agitation détruit , use , ronge et diminue peu à peu le terrain des côtes ; la mer emporte toutes ces ma- tières , et les laisse tomber dès que le calme a succédé à l’agitation. Dans ces temps d’o- rage , l’eau de la mer, qui est ordinairement la plus claire de toutes les eaux , est trouble et mêlée des différentes matières que le mouvement des eaux détache des côtes et du fond ; et la mer rejette alors sur les ri- vages une infinité de choses qu’elle apporte de loin , et qu’on ne trouve jamais qu’après les grandes tempêtes , comme de l’ambre gris sur les côtes occidentales de l’Irlande , de l’ambre jaune sur celles de Poméranie , des cocos sur les côtes des Indes , etc. , et quelquefois des pierres ponces et d’autres 204 THÉORIE DE LA TERRE. pierres singulières. Nous pouvons citer, à cette occasion , un fait rapporté dans les nouveaux Voyages aux îles de l’Amérique: « Étant à Saint-Domingue , dit l’auteur, on me donna entre autres choses quelques pierres très-légères que la mer amène à la côte quand il a fait de grands vents du sud : il y en avoit une de deux pieds et demi de long sur dix-huit pouces de large et environ un pied d’épaisseur, qui ne pesoit pas tout- à-fait cinq livres ; elle étoit blanche comme la neige , bien plus dure que les pierres ponces , d’un grain fin , ne paroissant point du tout poreuse ; et cependant , quand on la jetoit dans l’eau , elle bondissoit comme un ballon qu’on jette contre terre ; à peine enfonçoit-elle un demi-travers de doigt. J’y fis faire quatre trous de tarière pour y planter quatre bâtons , et soutenir deux pe- tites planches légères qui renfermoient les pierres dont je la chargeois: j’ai eu le plaisir de lui en faire porter une fois cent soixante livres , et une autre fois trois poids de fer de cinquante livres pièce. Elle servoit de chaloupe à mon nègre , qui se mettoit des- sus et alloit se promener autour de la caye.» Gette pierre devoit être une pierre ponce d’un grain très-fin et serré , qui venoit de quelque volcan , et que la mer avoit trans- Ïiortée , comme elle transporte l’ambre gris, es cocos , la pierre ponce ordinaire , les graines de plantes , les roseaux , etc. On peut voir sur cela les discours de Ray : c’est principalement sur les côtes d’Irlande et d’Écosse qu’on a fait des observations de cette espèce. La mer, par son mouvement général d’orient en occident , doit porter sur les côtes de l’Amérique les productions de nos côtes ; et ce n’est peut-être que par des mouvemens irréguliers et que nous ne connoissons pas , qu’elle apporte sur nos rivages les productions des Indes orientales et occidentales ; elle apporte aussi des pro- ductions du Nord. Il y a grande apparence que les vents entrent pour beaucoup dans les causes de ces effets. On a vu souvent , dans les hautes mers , et dans un très-grand éloignement des côtes , des plages entières couvertes de pierres ponces : on ne peut guère soupçonner qu’elles puissent venir d’ailleurs que des volcans des îles ou de la terre ferme , et ce sont apparemment les courans qui les transportent au milieu des mers. Avant qu’on connût la partie méri- dionale de l’Afrique, et dans le temps où ûn croyoit que la mer des Indes n’avoit au- cune communication avec notre Océan , on commença à la soupçonner par un indice de cette nature. Le mouvement àlten du flux et du reflux , et le mouvement i ! stant de la mer d’orient en occident, off différens phénomènes dans les différem mats ; ces mouvemens se modifient d j remment suivant le gisement des terres hauteur des côtes : il y a des endroits < mouvement général d’orient en occi n’est pas sensible ; il y en a d’autres c mer a même un mouvement contra comme sur la côte de Guinée : mais1 mouvemens contraires au mouvemen néral sont occasionés par les vents , p position des terres , par les eaux des gr fleuves , et par la disposition du fond jl1 mer ; toutes ces causes produisent des I rans qui altèrent et changent souvent à-fait la direction du mouvement géi dans plusieurs endroits de la mer. comme ce mouvement des mers d’orier ; occident est le plus grand , le plus gé et le plus constant, il doit aussi proi 1 les plus grands effets , et tout pris cm " ble , la mer doit , avec le temps , gagm ^ terrain vers l’occident , et en laisser l’orient , quoiqu’il puisse arriver que si 13 côtes où le vent d’ouest souffle pends ® plus grande partie de l’année , comm ^ France , en Angleterre , la mer gage 10 terrain vers l’orient : mais , encore une w ces exceptions particulières ne détrr { pas l’effet de la cause générale. I1'' |! e ARTICLE XIII \ d Des inégalités du fond de la mer c d’ courans. ^ < Ci irpc On peut distinguer les côtes de la en trois espèces : i° les côtes élevées sont de rochers et de pierres dures , co ordinairement à plomb à une hauteur j dérabîe , et qui s’élèvent quelquefois i ou huit cents pieds : s>° les basses ( dont les unes sont unies et presque c veau avec la surface de la mer, et do autres ont une élévation médiocre elfleü vent bordée de rochers à fleur d’eau forment des brisans et rendent l’app des terres fort difficile : 3° les dunes sont des côtes formées par les sables c mer accumule, ou que les fleuves dépo ces dunes forment des collines plus ou i élevées. Les côtes d’Italie sont bordées de mt et de pierres de plusieurs espèces , do1 A distingue de loin les différentes carri 1er y les rochers qui forment la côte parois AB.T. XIII. INÉGALITÉS DU FOND DE LA MER. :ès-grande distance comme autant de ; de marbres qui sont coupés à plomb, ôtes de France depuis Brest jusqu’à sàux sont presque partout environnées jcliers à fleur d’eau qui forment des îs ; il en est de même de celles d’An- •re, d’Espagne et de plusieurs autres de l’Océan et de la Méditerranée , qui bordées de rochers et de pierres dures, ception de quelques endroits dont on fite pour faire les baies , les ports et vres. profondeur de l’eau le long des côtes ’dinairement d’autant plus grande que )tes sont plus élevées, et d’autant moin- u’elles sont plus basses ; l’inégalité du de la mer le long des côtes correspond ordinairement à l’inégalité de la sur- iu terrain des côtes. Je dois citer ici ce i dit un célèbre navigateur : l’ai toujours remarqué que dans les en- s où la côte est défendue par des ro- i escarpés , la mer y est très-profonde, l’ü est rare d’y pouvoir ancrer ; et , au •aire , dans les lieux où la terre penche )té de la mer, quelque élevée qu’elle soit avant dans le pays , le fond y est bon , r conséquent l’ancrage. A proportion a côte penche ou est escarpée près de er, à proportion trouvons-nous aussi nunément que le fond pour ancrer est ou moins profond ou escarpé : aussi lions-nous plus près ou plus loin de la , comme nous jugeons à propos ; car i a point , que je sache , de côte au Je , ou dont j’aie entendu parler, qui d’une hauteur égale et qui n’ait des > et des bas. Ce sont ces hauts et ces ces montagnes et ces vallées , qui font légalités des côtes et des bras de mer, jetites baies et des havres , etc. , où l’on ancrer sûrement , parce que telle est rface de la terre , tel est ordinairement nd qui est couvert d’eau. Ainsi l’on vre plusieurs bons havres sur les côtes i terre borne la mer par des rochers ’pés , et cela parce qu’il y a des pentes ieuses entre ces rochers : mais dans les ; où la pente d’une montagne ou d’un er n’est pas à quelque distance en terre e montagne à l’autre , et que , comme a côte de Chili et du Pérou , le pen- t va du côté de la mer, ou est dedans, a côte est perpendiculaire ou fort escar- Jepuis les montagnes voisines , comme est en ces pays-là depuis les montagnes ides qui y régnent le long de la côte , er y est profonde , et pour des havres 20 5 ou bras de mer il n’y en a que peu ou point; toute cette côte est trop escarpée pour y ancrer, et je ne connois point de côtes où il y ait si peu de rades commodes aux vais- seaux. Les côtes de Galice , de Portugal , de Norwége, de Terre-Neuve, etc., sont comme la côte du Pérou et des hautes îles de l’Ar- chipélague, mais moins dépourvues de bons havres. Là où il y a de petits espaces de terre , il y a de bonnes baies aux extrémités de ces espaces dans les lieux où ils s’avan- cent dans la mer comme sur la côte de Ca- racas , etc. Les îles de Jean Fernando , de Sainte-Hélène, etc., sont des terres hautes dont la côte est profonde. Généralement parlant , tel est le fond qui paroît au dessus de l’eau , tel est celui que l’eau couvre : et pour mouiller sûrement il faut ou cpie le fond soit de niveau , ou que sa pente soit bien peu sensible ; car s’il est escarpé, l’an- cre glisse et le vaisseau est emporté. De là vient que nous ne nous mettons jamais en devoir de mouiller dans les lieux où nous voyons les terres hautes et des montagnes escarpées qui- bornent la mer : aussi, étant à vue des îles des États , proche la terre del Fuego , avant que d’entrer dans les mers du Sud , nous ne songeâmes seulement pas à mouiller après que nous eûmes vu la côîe , parce qu’il nous parut près de la mer des rochers escarpés : cependant il peut y avoir de petits havres où des barques ou autres petits bàtimens peuvent mouiller ; mais nous ne nous mîmes pas en peine de lès chercher. « Comme les côtes hautes et escarpées ont ceci d’incommode qu’on n’y mouille que ra- rement , elles ont aussi ceci de commode , qu’on les découvre de loin , et qu’on en peut approcher sans danger ; aussi est-ce pour cela que nous les appelons côtes ar- dues, ou, pour parler plus naturellement, côtes exhaussées : mais pour les terres basses on ne les voit que de fort près , et il y a plusieurs lieux dont on n’ose approcher, de peur d’échouer avant que de les apercevoir; d’ailleurs il y a en plusieurs endroits des bancs qui sé forment par le concours des grosses rivières , qui des terres basses se jettent dans la mer. « Ce que je viens de dire , qu’on mouille d’ordinaire sûrement près des terres basses, peut se confirmer par plusieurs exemples. Au midi de la baie de Campêche les terres sont basses pour la plupart : aussi peut-on ancrer tout le long de la côte , et il y a des endroits à l’orient de la ville de Campêche, où vous avez autant de brasses d’eau que 206 THÉORIE DE vous êtes éloignés de la terre , c’est-à-dire depuis neuf à dix lieues de distance , jusqu’à ce que vous en soyez à quatre lieues ; et de là jusqu’à la côte la profondeur va toujours en diminuant. La baie de Honduras est en- core un pays bas , et continue de même tout le long de là aux côtes de Porto-Bello et de Carthagène , jusqu’à ce qu’on soit à la hau- teur de Sainte-Marthe ; de là le pays est encore bas jusque vers la côte de Caracas , qui est haute. Les terres des environs de Surinam sur la même côte sont basses , et l’ancrage y est bon ; il en est de même de là à la côte de Guinée. Telle est aussi la baie de Panama , et les livres de pilotage or- donnent aux pilotes d’avoir toujours la sonde à la main et de ne pas approcher d’une telle profondeur, soit de nuit , soit de jour. Sur les mêmes mers , depuis les hauteurs de Guatimala en Mexique jusqu’à Californie , la plus grande partie de la côte est basse : aussi peut-on y mouiller sûre- ment. En Asie la côte de la Chine, les baies de Siam et de Bengale , toute la côte de Coromandel et la côte des environs de Ma- laca , et près de l’ile de Sumatra du même côté, la plupart de ces côtes sont basses et bonnes pour ancrer : mais à côté de l’occi- dent de Sumatra les côtes sont escarpées et hardies ; telles sont aussi la plupart des îles situées à l’orient de Sumatra , comme les îles de Bornéo , des Célèbres, de Gilolo, et quantité d’autres îles de moindre considé- ration qui sont dispersées par-ci par-là sur ces mers , et qui ont de bonnes rades avec plusieurs fonds bas : mais les îles de l’Océan de l’Inde orientale, surtout à l’ouest de ces îles, sont des terres hautes et escarpées; principalement les parties occidentales , non seulement de Sumatra , mais aussi de Java, de Timor, etc. On n’auroit jamais fait si l’on vouioit produire tous les exemples qu’on pourroit trouver ; on dira seulement, en général, qu’il est rare que les côtes hautes soient sans eaux profondes , et au contraire les terres basses et les mers peu creuses se trouvent presque toujours ensemble r. » On est donc assuré qu’il y a des inégalités dans le fond de la mer, et des montagnes très-considérables , par les observations que les navigateurs ont faites avec la sonde. Les plongeurs assurent aussi qu’il y a d’autres petites inégalités formées par des rochers , et qu’il fait fort froid dans les vallées de la mer. En général , dans les grandes mers les profondeurs augmentent , comme nous l’a- i . Voyage de Dampier autour du monde , tome II , pages 476 et suiv. LA TERRE. vons dit , d’une manière assez uniforme |b! s’éloignant ou en s’approchant des c fl Par la carte queM. Buache a dressée 1 » partie de l’Océan comprise entre les 1 ; ® d'Afrique et d’Amérique, et par les co Jr qu’il donne de la mer depuis le cap T; j ie jusqu’à la côte de Rio-Grande, il p cr qu’il y a des inégalités dans tout l’Oc Si comme sur la terre ; que les abrolhos P y a des vigies et où l’on trouve quelque i il* chers à fleur d’eau, ne sont que des som «s de très-grosses et de très-grandes montai dont l’île Dauphine est une des plus h; 1 s pointes ; que les îles du cap Vert ne ulr de même que des sommets de montag ® qu’il y a un grand nombre d’écueils i cette mer, où l’on est obligé de mettre air vigies ; qu’ensuite le terrain tout auton m ces abrolhos descend jusqu’à des pre pi deurs inconnues , et aussi autour de ces ; if A l’égard de la qualité des différens jff rains qui forment le fond de la mer 2, co 1 it is 2. M. l’abbé Dicquemare, savant physiciei jj. fait sur ce sujet des réflexions et quelques obs j tions particulières , qui me paroissent s’ac&i ,U parfaitement avec ce que j’en ai dit dans ma 77 ® de la terre. d « Les entretiens avec des pilotes de toutes ^ gués ; la discussion des cartes et des sondes éc anciennes et récentes ; l’examen des corps qui b tachent à la sonde; l’inspection des rivages bancs; celle des couches qui forment l’intérie la terre , jusqu’à une profondeur à peu près Ip blable à la longueur des lignes des sondes les le ordinaires ; quelques réflexions sur ce que la il s sique, la cosmographie et l’histoire naturelle te de plus analogue avec cet objet, nous ont fait . ir çonner, nous ont même persuadé, dit M. I Inc Dicquemare, qu’il doit exister, dans bien des pai ion deux fonds différens , dont l’un recouvre souvent l do par intervalles : le fond ancien ou permanent , ir peut nommer fond général , et le fond accident tu particulier. Le premier, qui doit faire la hase la tableau général , est le sol même du bassin Le mer. Il est composé des mêmes couches que ed trouvons partout dans le sein de la terre, i que la marne, la pierre, la glaise, le sable!] ifa coquillages , que nous voyons disposés horizor foi ment , d’une épaisseur égale , sur une fort gj i ite étendue... Ici ce sera un fond de marne; là 1 le ••glaise , de sable , dérochés. Enfin le nombri lé fonds généraux qu’on peut discerner par la sens ne va guère qu’à six ou sept espèces. Les plus ?r, dues et les plus épaisses de ces couches, se s, vant découvertes ou coupées en biseau , foi ^ dans la mer de grands espaces , où l’on do; # connoître le fond général , indépendamment « « que les courans et autres circonstances peuv (( déposer d’étranger à sa nature. Il est encor fonds permanens dont nous n’avons point p ce sont ces étendues immenses de madrépore coraux, qui recouvrent souvent un fond de roc et ces banc? d’une énorme étendue de coquilb que la prompte multiplication ou d’autres eau ont accumulés ; ils y sont comme par peupl - Une espèce paroît occuper une certaine éten ART. XIII. INÉGALITÉS t impossible de l’examiner de près , et 1 faut s’en rapporter aux plongeurs et à mde , nous ne pouvons rien dire de bien fis : nous savons seulement qu’il y a des roi; s couverts de bourbe et de vase à grande épaisseur, et sur lesquels les 'es n’ont point de tenue ; c’est probable- Lt dans ces endroits que se dépose le >n des fleuves : dans d’autres endroits ce ; des sables semblables aux sables que s connoissons, et qui se trouvent de le de différente couleur et de différente seur, comme nos sables terrestres : dans très ce sont des coquillages amoncelés , madrépores , des coraux et d’autres pro- lions animales, lesquelles commencent à ir, à prendre corps et à former des res : dans d’autres ce sont des fragmens pierre , des graviers et même souvent pierres toutes formées , et des marbres; exemple , dans les îles Maldives on ne t qu’avec de la pierre dure que l’on tire } les eaux à quelques brasses de profon- r ; à Marseille on tire de très-beau mar- du fond de la mer : j’en ai vu plusieurs mtillons : et loin que la mer altère et les pierres et les marbres , nous prou- ms , dans notre discours sur les miné- t , que c’est dans la mer qu’ils se for- t et qu’ils se conservent , au lieu que le ace suivant est occupé par une autre , comme e remarque à l’égard des coquilles fossiles , une grande partie de l’Europe, et peut-être tut. Ce sont même ces remarques sur l’inté- ' de la terre, et des lieux où la mer découvre coup, où l’on voit toujours une espèce dominer xe par cantons, qui nous ont mis à portée-de lure sur la prodigieuse quantité des individus, r l'épaisseur des bancs du fond de la mer, nous ne pouvons guère connoître par la sonde la superficie. [je fond accidentel ou particulier.... est com- i d’une quantité prodigieuse de pointes d’our- f de toute espèce , que les marins nomment es d’alènes ; de fragmens de coquilles , quel- )is pourries; de crustacés, de madrépores, de tes marines , de pyrites , de granités arrondis e frottement, de particules de nacre, de mica, être même de talc, auxquels ils donnent des s conformes à l’apparence ; quelques coquilles res , mais en petite quantité, et comme semées | des étendues médiocres; de petits cailloux , bues cristaux , des sables colorés , un léger n, etc. Tous ces corps, disséminés par les ans , l’agitation de la mer, etc. , provenant en e des fleuves , des éboulemens de falaises , et :s causes accidentelles, ne recouvrent souvent tparfaitement le fond général, qui se repré- ï à chaque instant , quand on sonde fréquem- : dans les mêmes parages.... J’ai remarqué que s près d’un siècle une grande partie des fonds aux du golfe de Gascogne et de la Manche n’ont uc pas changé; ce qui fonde encore mon opi- sur les deux fonds. » (Add. Buff) DU FOND DE LÀ MER. 207 soleil , la terre , l’air et l’eau des pluies les corrompent et les détruisent. Nous ne pouvons donc pas douter que le fond de la mer ne soit composé comme la terre que nous habitons , puisqu’ en effet on y trouve les mêmes matières , et qu’on tire de la surface du fond de la mer les mêmes choses que nous tirons de la surface de la terre ; et de même qu’on trouve au fond de la mer de vastes endroits couverts de co- quillages , de madrépores et d’autres ou- vrages des insectes de la mer, on trouve aussi sur la terre une infinité de carrières et de bancs de craie et d’autres matières remplies de ces mêmes coquillages , de ces madrépores , etc. , en sorte qu’à tous égards les parties découvertes du globe ressemblent à celles qui sont couvertes par les eaux , soit pour la composition et pour le mélange des matières , soit par les inégalités de la superficie. C’est à ces inégalités du fond de la mer qu’on doit atlribuer l’origine des courans; car on sent bien que si le fond de l’Océan étoit égal et de niveau , il n’y auroit dans la mer d’autre courant que le mouvement gé- néral d’orient en occident et quelques autres mouvemens qui auroient pour cause l’action des venîs et qui en suivroienl la direction : mais une preuve certaine que la plupart des courans sont produits par le flux et le re- flux et dirigés par les inégalités du fond de la mer, c’est qu’ils suivent régulièrement les marées et qu’ils changent de direction à chaque flux et à chaque reflux. Voyez sur cet article ce que dit Pietro délia Valle, au sujet des courans du golfe de Carnbaie , et le rapport de tous les navigateurs , qui as- surent unanimement que dans les endroits où le flux et le reflux de la mer est le plus violent et le plus impétueux, les courans y sont aussi plus rapides. Ainsi on ne peut pas douter que le flux et le reflux ne produisent des courans dont la direction suit toujours celle des collines ou des montagnes opposées entre lesquelles ils coulent. Les courans qui sont produits par les vents suivent aussi la direction de ces mêmes collines qui sont cachées sous l’eau ; car ils ne sont presque jamais oppo- sés directement au vent qui les produit , non plus que ceux qui ont le flux et le re- flux pour cause, ne suivent pas pour cela la même direction. Pour donner une idée nette de la pro- duction des courans , nous observerons d’a- bord qu’il y en a dans toutes les mers ; que les uns sont plus rapides et les autres plus aoS THEORIE DE lents; qu’il y en a de fort étendus tant en longueur qu’en largeur, et d’autres qui sont plus courts et plus étroits; que la même cause , soit le vent , soit le flux et le reflux, qui produit ces courans, leur donne à cha- cun une vitesse et une direction souvent très-différentes; qu’un vent de nord, par exemple , qui devroit donner aux eaux un mouvement général vers le sud , dans tonte l’étendue de la mer où il exerce son action, produit, au contraire, un grand nombre de courans séparés les uns des autres et bien différens en étendue et en direction : quel- ques-uns vont droit au sud, d’autres au sud-est, d’autres au sud-ouest; il y en a de plus et moins forts, de plus et moins larges, de plus et moins étendus , et cela dans une variété de combinaisons si grande , qu’on ne peut leur trouver rien de commun que la cause qui les produit ; et lorsqu’un vent con- traire succède, comme cela arrive souvent dans toutes les mers et régulièrement dans l’Océan Indien, tous ces courans prennent une direction opposée à la première et sui- vent en sens contraire les mêmes routes et le même cours , en sorte que ceux qui al- loient au sud vont au nord , ceux qui cou- loient vers le sud-est vont au nord-ouest, etc. ; et ils ont la même étendue en longueur et en largeur, la même vitesse , etc. ; et leur cours au milieu des autres eaux de la mer se fait précisément de la même façon qu’il se feroit sur la terre entre deux rivages opposés et voisins , comme on le voit aux Maldives et entre toutes les îles de la mer des Indes, où les courans vont, comme les vents, pendant six mois dans une direction et pendant six autres mois dans la direction opposée. On a fait la même remarque sur les courans qui sont entre les bancs de sable et entre les hauts-fonds ; et en général tous les courans, soit qu’ils aient pour cause le mouvement du flux et du reflux, ou l’action des vents, ont chacun constamment la même étendue, la même largeur et la même direction dans tout leur cours, et ils sont très-différens les uns des autres en longueur, en largeur, en rapidité et en direction ; ce qui ne peut ve- nir que des inégalités des collines, des mon- tagnes et des vallées , qui sont au fond de la mer, comme l’on voit qu’entre deux îles le courant suit la direction des côtes aussi bien qu’entre les bancs de sable, les écueils et les hauts-fonds. On doit donc regarder les col- lines et les montagnes du fond de la mer comme Jes bords qui contiennent et qui di- rigent les courans, et dès lors un courant est un fleuve, dont la largeur est déterminée LA TERRE. par celle de la vallée dans laquelle il cou] j dont la rapidité dépend de la force qui jù produit , combinée avec le plus ou le moi § de largeur de l’intervalle par où il doit p; ser, et enfin dont la direction est trac foi par la position des collines et des inég ] lr lités entre lesquelles il doit prendre s j «o cours. « Ceci étant entendu, nous allons dont ( une raison palpable de ce fait singulier de ni nous avons parlé, de cette correspondar. ■ ,« des angles des montagnes et des colline a, qui se trouve partout, et qu’on peut c » server dans tous les pays du monde. I é voit, en jetant les yeux sur les ruisseat * les rivières et toutes les eaux courantt aro que les bords qui les contiennent fornu « toujours des angles alternativement opj on sés; de sorte que quand un fleuve fait m coude, l’un des bords du fleuve forme d’ rrc côté une avance ou un angle rentrant d; h, les terres, et l’autre bord forme au cf int traire une pointe ou un angle saillant lii en des terres, et que dans toutes les sinuosi t J de leur cours cette correspondance des 4 icoi gles alternativement opposés se trouve te qui jours : elle est, en effet, fondée sur les j spe du mouvement des eaux et l’égalité de 1’ h tion des fluides , et il nous seroit très-fa* mm de démontrer la cause de cet effet ; mai; s 21 nous suffit ici qu’il soit général et uni! imj sellement reconnu, et que tout le mor fo puisse s’assurer par ses yeux que toutes de fois que le bord d’une rivière fait une aval i je dans les terres, que je suppose à main g; le che , l’autre bord fait , au contraire , ii oit avance hors des terres à main droite. ! use Dès lors les courans de la mer, qu tse doit regarder comme de grands fleuves ose des eaux courantes , sujettes aux mêmes 1 le que les fleuves de la terre, formeront. 01 même, dans l’étendue de leur cours, u ef sieurs sinuosités, dont les avances et ; ea| angles seront rentrans d’un côté et sailli ir 1 de l’autre côté ; et comme les bords de j si courans sont les collines et les montagi -r. qui se trouvent au dessous ou au dessus* lira la surface des eaux, ils auront donné à risse éminences cette même forme qu’on rem; n; que aux bords des fleuves. Ainsi on ne dj 1er pas s’étonner que nos collines et nos mi il! tagnes, qui ont été autrefois couvertes < 011 eaux de la mer et qui ont été formées | p le sédiment des eaux , aient pris par le mû a veulent des courans cette figure régulièj ts et que tou§ les angles en soient alternat^ il ment opposés ; elles ont été les bords « r courans ou des fleuves de la mer, elles û lu ART XIII. INÉGALITÉS DU FOND DE LA MER. 209 ne nécessairement pris une figure et des rections semblables à celles des bords des uves de la terre ; et par conséquent toutes 1 fois que le bord à main gauche aura rmé un angle rentrant, le bord à main oite aura formé un angle saillant , comme |us l’observons dans toutes les collines op- sées. Cela seul, indépendamment des autres euves que nous avons données, suffiroit ur faire voir que la terre de nos conti- ns a été autrefois sous les eaux de la et l’usage que je fais de cette obser- tion de la correspondance des angles des Intagnes, et la cause que j’en assigne, me oissent être des sources de lumière et de nonstration dans le sujet dont il est ques- n : car ce n’étoit point assez d’avoir mvé que les couches extérieures de la re ont été formées par les sédimens de la r, que les montagnes se sont élevées par itassement successif de ces mêmes sédi- 11s, qu’elles sont composées de coquilles d’autres productions marines; il ialloit :ore rendre raison de cette régularité de ire des collines dont les angles sont cor- ondans et en trouver la vraie cause que sonne jusqu’à présent n’avoil même soup- née , et qui cependant, étant réunie avec autres, forme un corps de preuves aussi iplet qu’011 puisse en avoir en physique, ’ournit une théorie appuyée sur des faits épendans de toute hypothèse, sur un et qu’on n’avoit jamais tenté par cette et sur lequel il paroissoit avoué qu’il it permis et même nécessaire de s’aider ne infinité de suppositions et d’hypo- ses gratuites, pour pouvoir dire quelque se de conséquent et de systématique, bes principaux courans de l’Océan sont x qu’on a observés dans la mer Atlanti- > près de la Guinée; ils s’étendent depuis :ap Vert jusqu’à la baie de Fernandopo : ■ mouvement est d’occident en orient, et it contraire au mouvement général de la •, qui se fait d’orient en occident. Ces rans sont fort violens , en sorte que les iseaux peuvent venir en deux jours de ura à Rio de Bénin, c’est-à-dire faire route de plus de cent cinquante lieues ; 1 leur faut six ou sept semaines pour y iiirner; ils ne peuvent même sortir de parages qu’en profitant des vents ora- >£ qui s’élèvent tout à coup dans ces cli- : mais il y a des saisons entières pen- It lesquelles ils sont obligés de rester, la |s If étant continuellement calme , à l’ ex- ci lion du mouvement des courans , qui est | Büffon. I toujours dirigé vers les côtes dans cet en- droit ; ces courans ne s’étendent guère qu’à vingt lieues de distance des côtes. Auprès de Sumatra il y a des courans rapides qui cou- lent du midi vers le nord , et qui probable- ment ont formé le golfe qui est entre Malaye et l’Inde. On trouve des courans semblables entre l’île de Java et la terre de Magellan. U y a aussi de très-grands cou- rans entre le cap de Bonne-Espérance et l’île de Madagascar, et surtout sur la côte d’Afrique, entre la terie de Natal et le cap. Dans la mer Pacifique, sur les côtes du Pérou et du reste de l’Amérique, la mer se meut du midi au nord , et il y règne constamment un vent de midi qui semble être la cause de ces courans; on observe le même mou- vement du midi au nord sur les côtes du Brésil, depuis le cap Saint-Augustin jus- qu’aux îles Antilles, à l’embouchure du dé- troit des Manilles, aux Philippines, et au Ja- pon dans le port de Kibuxia. U y a des courans très-violens dans la mer voisine des. îles Maldives; et entre ces îles les courans coulent, comme je l’ai dit, con- stamment pendant six mois d’orient en occi- dent , et rétrogradent pendant les six autres mois d’occident en orient ; ils suivent la direction des vents moussons, et il est pro- bable qu’ils sont produits par ces vents , qui , comme l’on sait, soufflent dans cette mer six mois de l’est à l’ouest, et six mois en sens contraire. Au reste, nous ne faisons ici mention que des courans dont l’étendue et la rapidité sont fort considérables : car il y a dans toutes les mers une infinité de courans que les navigateurs ne reeonnoissent qu’en com- parant la route qu’ils ont faite avec celle qu’ils auroient dû faire, et ils sont souvent obligés d’attribuer à l’action de ces courans la dérive de leur vaisseau *. Le flux et le 1. O11 doit ajouter à l’énurnération des courans de la mer le fameux courant de Moschœ , 3füsc/ie ou Male, sur les côtes de Norwège, dont un savant suédois nous a donné la description dans les termes suivans : « Ce courant , qui a pris son nom du rocher de Moschensicle , situé entre les deux îles de Lofœde et de Woerœn, s’étend à quatre milles vers le sud et vers le .‘.ord. « Il est extrêmement rapide , surtout entre le rocher de Mosche et la pointe de Lofoede ; mais plus il s’approche des deux îles de Woerosu et de Roest , moins il a de rapidité. Il achève son cours du nord au sud en six heures, puis du sud au nord en autant de temps. « Ce courant est si rapide , qu’il fait un grand nombre de petits tournans, que les habitans du pays ou les Norwégiens appellent gargamer. « Son cours ne suit point celui des eaux de la 14 210 THEORIE DE LA TERRE. reflux , les vents et toutes les autres causes qui peuvent donner de l’agitation aux eaux de la mer, doivent produire des courans lesquels seront plus ou moins sensibles dan j ,, mer dans leur flux et dans leur reflux : il y est plutôt tout contraire. Lorsque les eaux de l'Océan montent , elles vont du sud au nord , et alors le courant va du nord au sud : lorsque la, mer se re- tire, elle va du nord au sud, et pour lors le courant va du sud au nord. « Ce qu’il y a de plus remarquable , c’est que tant en allant qu’en revenant, il ne décrit pas une ligne droite , ainsi que les autres courans qu’on trouve dans quelques détroits, où les eaux de la mer montent et descendent , mais il va en ligne circulaire. « Quand les eaux de la mer ont monté à moitié, celles du courant vont au sud-est. Plus la mer s’élève , plus il se tourne vers le sud ; de là il se tourne vers Je sud-ouest , et du sud-ouest vers l’ouest. ce Lorsque les eaux de la mer ont entièrement monté, le courant va vers le nord-ouest, et ensuite vers le nord: vers le milieu du reflux, il recom- mence son cours, après l’avoir suspendu pendant quelques momens.... «Le principal phénomène qu’on y observe, est son retour par l’ouest du sud-sud est vers le nord, ainsi que du nord vers le sud-est. S’il ne revenoit pas par le même chemin, il seroit fort difficile et presque impossible de passer de la pointe de Lo- fœde aux deux grandes îles de Woerœn et de Roest. Il y a cependant aujourd’hui deux paroisses qui seroient nécessairement sans habitans , si le cou- rant ne prenoit pas le chemin que je viens de dire; mais , comme il le prend en effet, ceux qui veulent passer de la pointe de Lofœde à ces deux îles , attendent que la mer ait monté à moitié, parce qu’alors le courant se dirige vers l’ouest : lors- qu’ils veulent revenir de ces îles vers la pointe de Lofœde , ils attendent le mi-reflux , parce qu’aîors le courant est dirigé vers le continent; ce qui fait qu’on passe avec beaucoup de facilité... Or, il n’y a point de courant sans pente; et ici l’eau monte d’un côté et descend de l’autre. « Pour se convaincre de cette vérité , il suffit de considérer qu’il y a une petite langue de terre qui s’étend à seize milles de Norwège dans la mer, de- puis la pointe de Lofœde, qui est le plus à l’ouest, jusqu’à celle de Lodtlinge, qui est la plus orien- tale. Cette petite langue de terre est environnée par la mer ; et soit pendant le flux , soit pendant le reflux, lés eaux y sont toujours arrêtées, parce qu’elles ne peuvent avoir d’issue que par six petits détroits ou passages qui divisent cette langue de terre en autant de parties. Quelques-uns de ces dé- troits ne sont larges que d’un demi-quart de mille, et quelquefois moitié moins; ils ne peuvent donc contenir qu’une petite quantité d’eau. Ainsi , lors- que la mer monte , les eaux qui vont vers le nord s’arrêtent en grande partie au sud de cette langue de terre : elles sont donc bien plus élevées vers le sud que vers le nord. Lorsque la mer se retire et va vers le sud, il arrive pareillement que les eaux s’arrêtent en grande partie au nord de cette langue de terre , et sont par conséquent bien plus hautes vers le nord que vers le sud. « Les eaux arrêtées de cette manière, tantôt au nord , tantôt au sud , ne peuvent trouver d’issue qu’entre la pointe de Lofœde et de l’île de Woerœn, et qu’entre cette île et celle de Roest. « La pente qu’elles ont lorsqu’elles descendent , çause la rapidité du courant; et par la même raison cette rapidité est plus grande vers la pointe d Lofœde que partout ailleurs. Comme cette poinl est plus près de l’endroit où les eaux s’arrêtent, j pente y est aussi plus forte; et plus les eaux d courant s’étendent vers les îles de Woerœn et d Roest, plus il perd de sa vitesse « Après cela , il est aisé de concevoir pourqoi ce courant est toujours diamétralement opposé’ celui des eaux de la mer. Rien ne s’oppose à celle! ci, soit qu’elles montent, soit qu’elles descendenj au lieu que celles qui sont arrêtées au dessus do I pointe de Lofœde ne peuvent se mouvoir ni en ligj droite, ni au dessus de cette même pointe , tai que la mer n’est point descendue au. plus bas, j n’a pas , en se retirant, emmené les eaux que celli qui sont arrêtées au dessus de Lofœde doivent reij placer.,.. « Au commencement du flux et du reflux , li eaux de la mer ne peuvent pas détourner celles q courant; mais lorsqu’elles ont monté ou descend à moitié, elles ont assez de force pour changer ! direction. Comme il ne peut alors retourner va l’est , parce que l’eau est toujours stable près de 1 pointe de Lofœde, ainsi que je l’ai déjà dit, il fa: nécessairement qu’il aille vers l’ouest , où l’eau d plus basse. » Cette explication me paroît bonne! conforme aux vrais principes de la théorie des eau courantes. Nous devons encore ajouter ici la description « hj0 fameux courant de Charybde et Scylla , près dej i Sicile , sur lequel M. Brydone a fait nouvelleme» des observations qui semblent prouver que sa ra» dite et la violence de tous ses mouvemens est foi diminuée. « Le fameux rocher de Scylla est sur la côte I cile, et J la Calabre, le cap Pelore sur celle de Sic célèbre détroit du Phare court entre les deux. L’ti entend, à quelques milles de distance de l’entffl du détroit , le mugissement du courant ; il aug mente à mesure qu’on s’approche, et, en plusieui endroits , l’eau forme de grands tournans , loi même que tout le reste de la mer est uni coma une glace. Les vaisseaux sont attirés par ces toJilüc nans d’eaux ; cependant on court peu de dangi uni quand le temps est calme : mais si les vagues re# contrent ces tournans violens, elles forment un mer terrible. Le courant porte directement vers! rocher de Scylla : il est à environ un mille de l’e|. cc trée du Phare. Il faut convenir que réellement)! fameux Scylla n’approche pas de la descriptif formidable qu’Homère en a faite; le passage nr pas aussi prodigieusement étroit ni aussi diffii qu’il le représente : il est probable que depuis temps il s’est fort élargi, et que la violence courant a diminué en même proportion. Le roà a près de deux cents pieds d’élévation ; on y troi plusieurs cavernes et une espèce de fort bat sommet. Le fanal est à présent sur le cap Peloi I,’entrée du détroit entre ce cap et la Coda di Volj en Calabre, paroît avoir à peine un mille de laf geur ; son canal s’élargit , et il a quatre milles d r près de Messine, qui est éloignée de douze mifl de l’entree du détroit. Le célèbre gouffre ou tour liant de Charybde est près de l’entrée du havre| #r Messine : il occasionne souvent dans l’eau un mon [°’il vement si irrégulier, que les vaisseaux ont beau | ! coup de peine à y entrer. Aristote fait une longtt §/' mère, Lucrèce, Virgile et plusieurs autres pot»»' rART. XIII. INÉGALITÉS différens endroits. Nous avons vu que le îd de la mer est, comme la surface de la re , hérissé de montagnes , semé d’inéga- 3S , et coupé par des bancs de sable : dans is ces endroits monlueux et entrecoupés, courans seront violens ; dans les lieux ts où le fond de la mer se trouvera de eau, ils seront presque insensibles : la lidité du courant augmentera à propor- i des obstacles que les eaux trouveront , plutôt du rétrécissement des espaces par piels elles tendent à passer. Entre deux înes de montagnes qui seront dans la r, il se formera nécessairement un cou- t qui sera d’autant plus violent que ces ix montagnes seront plus voisines ; il en i de même entre deux bancs de sable ou re deux îles voisines : aussi remarque-t- on s l’océan Indien, qui est entrecoupé 1e infinité d’îles et de bancs , qu’il y a tout des courans très-rapides qui rendent îavigation de cette mer fort périlleuse ; courans ont en général des directions blables à celles des vents , ou du flux et reflux qui les produisent. Ion seulement toutes les inégalités du 1 de la mer doivent former des courans, s les côtes mêmes doivent faire un effet larlie semblable. Toutes les côtes font uler les eaux à des distances plus ou ns considérables : ce refoulement des t est une espèce de courant que les instances peuvent rendre continuel et ;nt ; la position oblique d’une côte , le inage d’un golfe ou de quelque grand re , un promontoire , en un mot , tout acle particulier qui s’oppose au mouvé- t général, produira toujours un cou- : or , comme rien n’est plus irrégulier le fond et les bords de la mer, on doit : cesser d’être surpris du grand nombre décrit comme un objet qui inspiroit la plus le terreur. Il n’est certainement pas si formi- aujourd’hui , et il est très-probable que le ement des eaux depuis ce temps a émoussé ointes escarpées des rochers , et détruit les clés qui resserroient les flots. Le détroit s’est . considérablement dans cet endroit. Les vais- sont néanmoins obligés de ranger la côte de re de très-près , afin d’éviter l’attraction vio- occasionée par le tournoiement des eaux ; et l’ils sont arrivés à la partie la plus étroite et as rapide du détroit , entre le cap Pelore et i , ils sont en grand danger d’être jetés directe- contre ce rocher. De là vient le proverbe , cidit in Scyllam cupiens vitare Churybdin, placé un autre fanal pour avertir les marins approchent de Charybde, comme le fanal p Pelore les avertit qu’ils approchent de ij. » {Add. DÛ FOND DE LA MER. an de courans qu’on y trouve presque partout. Au reste, tous ces courans ont une lar- geur déterminée et qui ne varie point : cette largeur du courant dépend de celle de l’in- tervalle qui est entre les deux éminences qui lui servent de lit. Les courans coulent dans la mer comme les fleuves coulent sur la lerre , et ils y produisent des effets sem- blables ; ils forment leur lit ; ils donnent aux éminences entre lesquelles ils coulent une figure régulière , et dont les angles sont correspondais : ce sont , en un mot , ces courans qui ont creusé nos vallées , figuré nos montagnes , et donné à la surface de notre terre, lorsqu’elle étoit sous l’eau de la mer , la forme qu’elle conserve encore aujourd’hui. Si quelqu’un douloit de cette correspon- dance des angles de montagnes, j’oserois en appeler aux yeux de tous les hommes , surtout lorsqu’ils auront lu ce qui vient d’être dit : je demande seulement qu’on examine, en voyageant, la position des collines oppbsées, et les avances qu’elles font dans les vallons ; on se convaincra par ses yeux que le vallon étoit le lit, et les collines les bords des courans ; car les côtés opposés des collines se correspondent exac- tement , comme les deux bords d’un fleuve. Dès que les collines à droite du vallon font une avance , les collines à gauche du vallon font une gorge. Ces collines ont aussi , à très-peu près , la même élévation ; et il est très-rare de voir une très-grande inégalité de hauteur dans deux collines opposées , et séparées par un vallon : je puis assurer que plus j’ai regardé les contours et les hauteurs des collines , plus j’ai été convaincu de la correspondance des angles, et de cette res- semblance qu’elles ont avec les lits et les bords des rivières ; et c’est par des obser- vations réitérées sur cette régularité surpre- nante et sur cette ressemblance frappante, que mes premières idées sur la théorie de la terre me sont venues. Qu’on ajoute à cette observation celle des couches parallèles et horizontales , et celle des coquillages ré- pandus dans toute la terre et incorporés dans toutes les différentes matières , et on verra s’il peut y avoir plus de probabilité dans un sujet de cette espèce. ARTICLE XXV. Des vents réglés. Rien ne paroît plus irrégulier et plus variable que la force et la direction des vents dans nos climats ; mais il y a des pays i4. 212 THÉORIE DE LA TERB.E. où cette irrégularité n’est pas si grande, et d’autres où le vent souffle constamment dans la même direction , et presque avec la même force. Quoique les mouvemens de l’air dépen- dent d’un grand nombre de causes , il y en a cependant de principales dont on peut estimer les effets ; mais il est difficile de juger des modifications que d’autres causes secondaires peuvent y apporter. La plus puissante de toutes ces causes est la chaleur du soleil, laquelle produit successivement une raréfaction considérable dans les diffé- rentes parties de l’atmosphère , ce qui fait le vent d’est , qui souffle constamment en- tre les tropiques, où la raréfaction est la plus grande. La force d’attraction du soleil , et même celle de la lune , sur l’atmosphère , sont des causes dont l’effet est insensible en com- paraison de celles dont nous venons de parler. Il est vrai que cette force produit dans l’air un mouvement semblable à celui du flux et du reflux dans la mer : mais ce mouvement n’est rien en comparaison des agitations de l’air qui sont produites par la raréfaction ; car il ne faut pas croire cpie d’air, parce qu’il a du ressort et qu’il est huit cents fois plus léger que l’eau , doive recevoir par l’action de la lune un mouve- ment de flux fort considérable. Pour peu qu’on y réfléchisse , on verra que ce mou- vement n’est guère plus considérable que celui du flux et du reflux des eaux de la mer ; car la distance à la lune étant suppo- sée la même , une mer d’eau ou d’air , ou de telle autre matière fluide qu’on voudroit imaginer, aura à peu près le même mou- vement , parce que la force qui produit ce mouvement pénètre la matière, et est pro- portionnelle à sa quantité. Ainsi une mer d’eau, d’air ou de vif-argent, s’élèveroit à peu près à la même hauteur par l’action du soleil et de la lune ; et dès lors on voit que le mouvement que l’attraction des as- tres peut causer dans l’atmosphère , n’est pas assez considérable pour produire une grande agitation 1 ; et quoiqu’elle doive causer un léger mouvement de l’air d’orient en occident , ce mouvement est tout-à-fait insensible en comparaison de celui que la chaleur du soleil doit produire en raréfiant l’air ; et comme la raréfaction sera toujours plus grande dans les endroits où le soleil i. L’effet de cette cause a été déterminé géomé- triquement dans différentes hypothèses , et calculé par M. d’Alembert. Voyez Réflexions sur la cause generale des vents. est au zénith , il est clair que le court \ d’air doit suivre le soleil et former un vt constant et général d’orient en occidei Ce vent souffle continuellement sur la n dans la zone torride , et dans la plup. | des endroits de la terre entre les tropiqut c’est le même vent que nous sentons lever du soleil ; et en général les ve; j d’est sont bien plus fréquens et bien p j impétueux que les vents d’ouest ce v< général d’orient en occident s’étend mêi, au delà des tropiques', et il souffle si c( stamment dans la mer Pacifique , que navires qui vont d’Acapulco aux Philip ; nés font cette route , qui est de plus deux mille sept cents lieues , sans auc risque, et, pour ainsi dire, sans avoir 1 j’j soin d’être dirigés. Il en est de même M la mer Atlantique entre l’Afrique et le B sil ; ce vent général y souffle constamme t re Il se fait sentir aussi entre les Philippiri «j et l’Afrique , mais d’une manière me constante , à cause des îles et des diffère a obstacles qu’on rencontre dans cette me pu car il souffle pendant les mois de janvier février , mars , et avril , entre la côte w Mozambique et l’Inde ; mais pendant )K autres mois il cède à d’auires vents ; ; je quoique ce vent d’est soit moins sensii a sur les côtes qu’en pleine mer, et enc( j moins dans le milieu des continens que s L les côtes de la mer , cependant il y a t L lieux où il souffle presque continuellemei L comme sur les côtes orientales du Brévia sur les côtes de Loango en Afrique , etc [j] Ce vent d’est, qui souffle continuelleme jj sous la ligne , fait que lorsqu’on part d’I $ rope pour aller en Amérique , on dirige f i cours du vaisseau du nord au sud dans i0j direction des côtes d’Espagne et d’Afriq n jusqu’à 20 degrés en deçà de la ligne , |î(] l’on trouve ce vent d’est qui vous porte t ||| rectement sur les côtes d’Amérique ; et ei même dans la mer Pacifique l’on fait « deux mois le voyage de Callao ou d’A< ié( pulco aux Philippines à la faveur de ce ve L d’est , qui est continuel ; mais le retour d ; 81 Philippines à Acapulco est plus long et p! difficile. A 28 ou 3o degrés de ce côté , . delà ligne, on trouve des vents d’ou< j |;i assez constans ; et c’est pour cela que ]:j f] vaisseaux qui reviennent des Indes occide j | taies en Europe ne prennent pas la mêjj j f, route pour aller et pour revenir : ceux c| j jt viennent de la Nouvelle-Espagne font vo; ;; le long des côtes et vers le nord jusqu’à tf qu’ils arrivent à la Havane dans l’île 1 j J Cuba • et de là ils gagnent du côté du no ART. XIV. VENTS RÈGLES. ai3 ur trouver les vents d’ouest , qui les amè- nt aux Açores et ensuite en Espagne. ; même dans la mer du Sud ceux qui re- muent des Philippines ou de la Chine Pérou ou au Mexique , gagnent le nord ;qu’à la hauteur du Japon, et naviguent us ce parallèle jusqu’à une certaine dis- ace de Californie, d’où, en suivant la te de la Nouvelle-Espagne , ils arrivent à ;apulco. Au reste, ces vents d’est ne Lifllent pas toujours du même point ; mais général ils sont au sud-est depuis le ais d’avril jusqu’au mois de novembre , et sont au nord-est depuis novembre jus- ’en avril. Le vent d’est contribue par son action à gmenter le mouvement général de la mer □rient en occident : il produit aussi des urans qui sont cons tans et qui ont leur Irection , les uns de l’est à l’ouest , les au- îs de l’est au sud-ouest ou au nord-ouest, ivant la direction des éminences et des laines de montagnes qui sont au fond de mer, dont les vallées ou des intervalles ii les séparent servent de canaux à ces urans. De même les vents alternatifs qui ufflent tantôt de l’est, et tantôt de l’ouest, oduisent aussi des courans qui changent i direction en même temps que ces vents i changent aussi. Les vents qui soufflent constamment pen- int quelques mois sont ordinairement sui- s de vents contraires , et les navigateurs nt obligés d’attendre celui qui leur est vorable ; lorsque ces vents viennent à langer, il y a plusieurs jours et quelque- is un mois ou deux de calme ou de tern- îtes dangereuses. Ces vents généraux causés par la raréfac- dii de l’atmosphère se combinent diffé- mment par différentes causes dans diffé- ns climats. Dans la partie de la mer tlantique qui est sous la zone tempérée, vent du nord souffle presque constamment rndant les mois d’octobre , novembre , Dcembre et janvier : c’est pour cela que ïs mois sont les plus favorables pour s’em- arquer lorsqu’on veut aller de l’Europe aux ides , afin de passer la ligne à la faveur de îs vents ; et l’on sait par expérience que s vaisseaux qui partent au mois de mars Europe n’arrivent quelquefois pas plus »t au Brésil que ceux qui partent au mois octobre suivant. Le vent du nord règne jresque continuellement pendant l’hiver jans la Nouvelle-Zemble et dans les autres Dtes septentrionales. Le vent du midi souf- e pendant le mois de juillet au cap Vert : c’est alors le temps des pluies, ou î’hiver de ces climats. Au cap de Bonne-Espérance le vent de nord-ouest souffle pendant le mois de septembre. A Patna dans l’Inde, ce même vent de nord-ouest souffle pendant les mois de novembre , décembre et jan- vier , et il produit de grandes pluies ; mais les vents d’est soufflent pendant les neuf autres mois. Dans l’océan Indien , entre l’Afrique et l’Inde, et jusqu’aux îles Mo- luques , les vents moussons régnent d’orient en occident depuis janvier jusqu’au com- mencement de juin , et les vents d’occident commencent aux mois d’août et de septem- bre , et pendant l’intervalle de juin et de juillet il y a de très-grandes tempêtes, or- dinairement par des vents du nord : mais sur les côtes ces vents varient davantage qu’en pleine mer. Dans le royaume de Guzarate et sur les côtes de la mer voisine , les vents de nord soufflent depuis le mois de mars jusqu’au mois de septembre , et pendant les autres mois de l’année il règne presque toujours desvents.de midi. Les Hollandois, pour revenir de Java, partent ordinairement aux mois de janvier et de février par un vent d’est qui se fait sentir jusqu’à 18 degrés de latitude ausirale, et ensuite ils trouvent des vents de midi qui les portent jusqu’à Sainte- Hélène. Il y a des vents réglés qui sont produits par la fonte des neiges ; les anciens Grecs les ont observés. Pendant l’été les vents de nord-ouest , et pendant l’hiver ceux de sud-est , se font sentir en Grèce , dans la Thrace , dans la Macédoine , dans la mer Égée, et jusqu’en Égypte et en Afrique; en remarque des vents de môme espèce dans le Congo , à Guzarate , à l’extrémité de l’Afrique, qui sont tous produits par la fonte des neiges. Le flux et le reflux de la mer produisent aussi des vents réglés qui ne durent que quelques heures, et dans plusieurs endroits on remarque des vents qui viennent de terre pendant la nuit, et de la mer pendant le jour, comme sur les côtes de la nouvelle-Espagne , sur celles de Congo , à la Havane, etc. Les vents de nord sont assez réglés dans les climats des cercles polaires : mais plus on appi’oche de l’équateur , plus ces vents de nord sont foibles ; ce qui est commun aux deux pôles. Dans l’océan Atlantique et l’Éthiopique il y a un vent d’est général entre les tropi- ques , qui dure toute l’année sans aucune variation considérable, à l’exception de THÉORIE DE LA TERRE. 214 quelques petits endroits où il change sui- Vact les circonstances et la position des cô- tes. i° Auprès de la côte d’Afrique , aussi- tôt que vous avez passé les îles Canaries, vous êtes sûr de trouver un vent frais de nord-est à environ 28 degrés de latitude nord : ce vent passe rarement de nord-est ou de nord-nord-est , et il vous accompagne jusqu’à 10 degrés latitude nord , à environ cent lieues de la côte de Guinée , où l’on trouve au 4e degré latitude nord les calmes et tornados ; 20 ceux qui vont aux îles Ca- ribes trouvent , en approchant de l’Améri- que , que ce même vent de nord-est tourne de plus en plus à l’est, à mesure qu’on approche davantage; 3° les limites de ces vents variables dans cet océan sont plus grandes sur les côtes d’Amérique que sur celles d’Afrique. Il y a dans cet océan un endroit où les vents de sud et de sud-ouest sont continuels , savoir , tout le long de la côte de Guinée dans un espace d’environ cinq cents lieues , depuis Sierra-Leona jus- qu’à l’île de Saint-Thomas. L’endroit le plus étroit de celte mer est depuis la Guinée jusqu’au Brésil, où il n’y a qu’ environ cinq cents lieues : cependant les vaisseaux qui partent de la Guinée ne dirigent pas leur cours droit au Brésil ; mais ils descendent du côté du sud, suriout lorsqu’ils partent aux mois de juillet et d’août , à cause des venls de sud-est qui régnent dans ce temps. Dans la mer Méditerranée le vent souffle de la terre vers la mer , au coucher du so- leil; et au conlraire de la mer vers la terre au lever; en sorte que le matin c’est un vent du levant , et le soir un vent du cou- chant. Le vent du midi , qui est pluvieux, et qui souffle ordinairement à Paris , en Bourgogne et en Champagne , au com- mencement de novembre , et qui cède à une bise douce et tempérée , produit le beau temps qu’on appelle vulgairement l’été de la Saint-Martin. Le docteur Lister , d’ailleurs bon ob- servateur , prétend que le vent d’est gé- néral qui se fait sentir entre les tropi- ques pendant toute l’année , n’est produit que par la respiration de la plante appe- lée lentille de mer , qui est extrêmement abondante dans ces climats, et que la différence des vents sur la terre ne vient que de la différente disposition des arbres et des forêts ; et il donne très-sérieuse- ment cette ridicule imaginaiion pour cause des vents, en disant qu’à 1 heure de midi le vent est plus fort parce que les plan- tes ont plus chaud et respirent l’air plus souvent, et qu’il souffle d’orient en occi- [ dent , parce que toutes les plantes font i un peu le tournesol, et respirent toujours du côté du soleil. D’aulres auteurs, dont les vues étaient plus saines, ont donné pour cause de ce vent constant le mouvement de la terre ! sur sou axe : mais cette opinion n’est qui ] spécieuse, et il est facile de faire com- prendre aux gens même les moins initiés en mécanique , que tout fluide qui en- vironneroit la terre ne pourrait avoir ata 1 cun mouvement particulier en vertu de la rotation du globe , que l’atmosphère ne peut avoir d’autre mouvement qui celui de cette même rotation , et que tout tournant ensemble et à la fois , ce mou- vement de rotation est aussi insensible dans l’atmosphère qu’il l’est à la surface de la terre. La principale /cause de ce mouvement constant est, comme nous l’avons dit, la chaleur du soleil ; on peut voir sur cela la traité de Halley dans les Transactiojmi philosophiques ; et en général toutes les causes qui produiront dans l’air une raré-j faction ou une condensation considérable! produiront des vents dont les directions se-! ront toujours directes ou opposées aux lieux où sera la plus grande raréfaction ou la plus grande condensation. La pression des nuages, les exhalaisons de la terre, l’inflammation des météores , la résolution des vapeurs en pluie, etc. 3 , sont aussi des causes qui toutes produisent des agitations considérables dans l’atmo- sphère ; chacune de ces causes se combinant de différentes façons, produit des effets dif- férent : il me paroît donc qu’on tenteroit vainement de donner une théorie des vents, et qu’il faut se borner à travailler à en faire l’histoire : c’est dans cette vue que j’ai ras- semblé des faits qui pourront y servir. Si nous avions une suite d’observations sur la direction , la force et la variation des vents, dans les différens climats; si cette suite d’observations étoit exacte et assez étendue pour qu’011 put voir d’un coup d’œil le résultat de ces vicissitudes de l’air dans chaque pays , je ne doute pas qu’on n’arrivât à ce degré de connoissance dont nous sommes encore si fort éloignés, à une méthode par laquelle nous pourrions prévoir et prédire les différens états du ciel et la différence des saisons : mais il n’y a pas assez long-temps qu’on fait des observations mé- téorologiques , il y en a beaucoup moins qu’on les fait avec soin , et il s’en écoulera ART. XIV, VENTS REGLES. ai 5 eut-être beaucoup avant qu’on sache en nployer les résultals, qui sont cependant les :uls moyens que nous ayons pour arriver quelque connoissance positive sur ce sujet. Sur la mer les venis sont plus réguliers îe sur la terre, parce que la mer est un pace libre , et dans lequel rien ne s’oppose la direction du vent ; sur la terre , au con- aire, les montagnes, les forêts, les villes, c., forment des obstacles qui font changer direction des vents, et qui souvent pro- lisent des vents contraires aux premiers. >s vents réfléchis par les montagnes se font uvent sentir dans toutes les provinces qui sont voisines , avec une impétuosité sou- nt aussi grande que celle du vent direct i les produit ; ils sont aussi très-irréguliers, rce que leur direction dépend du contour, la hauteur et de la situation des monta- es qui les réfléchissent. Les vents de mer ufflent avec plus de force et plus de con- mité que les vents de terre; ils sont aussi aucoup moins variables et durent plus îg-temps. Dans les vents de terre , quelque ilèns qu’ils soient, il y a des momens de nission et quelquefois desinstans de repos; ns ceux de mer , le courant d’air est cons- ît et continuel sans aucune interruption : différence de ces effets dépend de la cause e nous venons d’indiquer. En général , sur la mer, les vents d’est et ix qui viennent des pôles sont plus forts e les vents d’ouest et que ceux qui vien- nt de l’équateur ; dans les terres , au con- ir e , les vents d’ouest et de sud sont plus moins violens que les vents d’est et de rd, suivant la situation des climats. Au intemps et en automne les vents sont îs violens qu’en été ou en hiver , tant sur :r que sur terre; on peut en donner plu- urs raisons : i° le printemps et l’automne ît les saisons des plus grandes marées, et i* conséquent les vents que ces marées >duisent, sont plus violens dans ces deux sons; 2° le mouvement que l’action du eil et de la lune produit dans l’air , c’esl- lire le flux et le reflux de l’atmosphère , aussi plus grand dans la saison des équi- pes ; 3° la fonte des neiges au printemps , la résolution des vapeurs que le soleil a vées pendant l’été, qui retombent en iies abondantes pendant l’automne, pro- isent ou du moins augmentent les vents; le passage du chaud au froid, ou du froid i chaud, ne peut se faire sans augmenter diminuer considérablement le volume de r, ce qui seul doit produire de très-grands îts. On remarque souvent dans l’air des cou- rans contraires : on voit des nuages qui se meuvent dans une direction, et d’autres nuages plus élevés ou plus bas que les pre- miers qui se meuvent dans une direction contraire ; mais cette contrariété de mouve- ment ne dure pas long-temps, et n’est ordi- nairement produite que par la résistance de quelque nuage à l’action du vent, et par la répulsion du vent direct qui règne seul dès que l’obstacle est dissipé. Les vents sont plus violens dans les lieux élevés que dans les plaines ; et plus on monte dans les hautes montagnes, plus la force du vent augmente jusqu’à ce qu’on soit arrivé à la hauteur ordinaire des nuages, c’est-à-dire à environ un quart ou un tiers de lieue de hauteur perpendiculaire : au delà de cette hauteur le ciel est ordinairement serein, au moins pendant l’été, et le vent dimintie; on prétend même qu’il est tout-à-fait insensible au sommet des plus hautes montagnes : ce* pendant la plupart de ces sommets , et même les plus élevés , étant couverts de glace et de neige, il est naturel de penser que cette ré- gion de l’air est agitée par les vents dans le temps de la chute de ces neigesg ainsi ce ne peut être que pendant l’été que les vents ne s’y font pas sentir. Ne pourroit-on pas dire qu’en été les vapeurs légères qui s’élèvent au sommet de ces montagnes retombent en rosée, au lieu qu’en hiver elles se condensent, se gèlent et retombent en neige ou en glace, ce qui peut produire en hiver des vents au dessus de ces montagnes, quoiqu’il n’y en ait point en été? Un courant d’air augmente de vitesse comme un courant d’eau , lorsque l’espace de son passage se rétrécit : le même vent qui ne se fait sentir que médiocrement dans une plaine large et découverte, devient vio- lent en passant par une gorge de montagne, ou seulement entre deux bàtimens élevés , et le point de la plus violente action du vent est au dessus de ces mêmes bàtimens , ou de la gorge de la montagne; l’air étant comprimé par la résistance de ces obstacles, a plus de masse, plus de densité; et la même vitesse subsistant, l’effort ou le coup du vent, le momentum, en devient beaucoup plus fort. C'est ce qui fait qu’au près d’une église ou d’une tour les vents semblent être beaucoup plus violens qu’ils ne le sont à une certaine distance de ces édifices. J’ai souvent remarqué que le vent réfléchi par un bâtiment isolé ne laissoit pas d’être bien plus violent que le vent direct qui produisoit ce vent réfléchi ; et lorsque j’en ai cherché la raison , je n’en THEORIE DE LA TERRE. 216 ai pas trouvé d’autre que celle que je viens de rapporter : l’air chassé se comprime con- tre le bâtiment et se réfléchit non seulement avec la vitesse qu’il avoit auparavant, mais encore avec plus de masse : ce qui rend en effet son action beaucoup plus violente T. A ne considérer que la densité de l’air, qui est plus grande à la surface de la terre que dans tout autre point de l’atmosphère , on seroit porté à croire que la plus grande action du vent devroit être aussi à la surface de la terre, et je crois que cela est en effet ainsi toutes les fois que le ciel est serein : mais lorsqu’il est chargé de nuages, la plus violente action du vent est à la hauteur de ces nuages, qui sont plus denses que l’air, puisqu’ils tombent en forme de pluie ou de grêle. O11 doit donc dire que la force du vent doit s’estimer non seulement par sa vi- tesse, mais aussi par la densité de l’air, de quelque cause que puisse provenir cette den- sité, et qu’il doit arriver souvent qu’un vent qui n’aura pas plus de vitesse qu’un autre vent, ne laissera pas de renverser des arbres et des édifices , uniquement parce que l’air poussé par ce vent sera plus dense. Ceci fait voir l’imperfection des machines qu’on a imaginées pour mesurer la vitesse du vent. Les vents particuliers , soit qu’ils soient directs ou réfléchis, sont plus violens que 1. Je dois rapporter ici une observation qui me paroît avoir échappé à l’attention des physiciens , quoique tout te monde soit en état de la vérifier; c’est que le vent réfléchi est plus violent que le vent direct, et d’autant plus qu’on est plus près de l’obstacle qui le renvoie. J’en ai fait nombre de fois l’expérience , en approchant d’une tour qui a près de cent pieds de hauteur, et qui se trouve située au nord, à l’extrémité de mon jardin, à Montbard : lorsqu’il souffle un grand vent du midi, on se sent fortement poussé jusqu’à trente pas de la tour; après quoi il y a un intervalle de cinq ou six pas où l’on cesse d’être poussé , et où le vent , qui est réfléchi parla tour, fait, pour ainsi dire, équilibre avec le vent direct: après cela, plus on approche de la tour, et plus le vent qui en est ré- fléchi est violent; il vous repousse en arrière avec beaucoup plus de force que le vent direct 11e vous poussoit en avant. La cause de cet effet, qui est général , et dont on peut faire l’épreuve contre tous les grands bàtimens , contre les collines cou- pées à plomb , etc. , n’est pas difficile à trouver. L’air dans le vent direct n’agit que par sa vitesse et sa masse ordinaire; dans le vent réfléchi, la vi- tesse est un peu diminuée, mais la masse est consi- dérablement augmentée par la compression que l’air souffre contre l’obstacle qui le réfléchit ; et comme la quantité de tout mouvement est com- posée de la vitesse multipliée par la masse, cette quantité est bien plus grande après la compression qu’auparavant. C’est une masse d’air ordinaire qui vous pousse dans le premier cas , et c’est une masse d’air une ou deux fois plus dense qui vous repousse dans le second cas. (Add. Bu//.') les vents généraux. L’action interrompue de< vents de terre dépend de cette compressior de l’air , qui rend chaque bouffée beaucouf plus violente qu’elle ne le seroit si le ven! souffloit uniformément; quelque fort qut soit un vent continu, il ne causera jamais les désastres que produit la fureur de ce; vents qui soufflent, pour ainsi dire, par ac cès : nous en donnerons des exemples dam l’ariicle qui suit. On pourrait considérer les vents et leur,' différentes directions sous des points de vui généraux , dont on tirerait peut -être des in ductions utiles : par exemple , il me paroi qu’on pourrait diviser les vents par zones que le vent d’est qui s’étend à environ 25 0$ 3o degrés de chaque côté de l’équateur doit être regardé comme exerçant son actioi tout autour du globe dans la zone torride le vent de nord souffle presque aussi com slamment dans la zone froide, que le veqj d’est dans la zone torride; et on a reconni qu’à la Terre-de-Feu et dans les endroits le! moins éloignés du pôle austral où l’on es parvenu, le vent vient aussi du pôle. Ainsi l’on peut dire que le vent d’est occupant U zone torride , les vents du nord occupent le zones froides; et à l’égard des zones tempe rées , les vents qui y régnent 11e sont, pou: ainsi dire, que des courans d’air, dont il mouvement est composé de ceux de ces deuf vents principaux qui doivent produire tou les vents dont la direction tend à l’occident 1 et à l’égard des vents d’ouest, dont la direc tion tend à l’orient, et qui régnent souven dans la zone tempérée, soit dans la me Pacifique, soit dans l’océan Atlantique! on peut les regarder comme des vents réfié j chis par les terres de l’Asie et de l’Amé j rique , mais dont la première origine est du: aux vents d’est et de nord. Quoique nous ayons dit que, générale! ment parlant, le vent d’est règne tout autou j du globe à environ 2 5 ou 3o degrés de eha que côté de l’équateur, il est cependant vra | que dans quelques endroits il s’étend à un i bien moindre distance, et que sa directioil n’est pas partout de l’est à l’ouest; car e: I deçà de 1 équateur il est un peu est-nord-esl | et au delà de l’équateur il est est-sud -est j et plus on s’éloigne de l’équateur, soit a l nord , soit au sud, plus la direction du ven ] est oblique : l’équateur est la ligne sous la f quelle la direction du vent de l’est à l’ouâl est la plus exacte. Par exemple, dans l’cjj céan Indien le vent général d’orient en oc 1 cident ne s’étend guère au delà de 1 t degrés : en allant de Goa au cap de Bonne >1 ART. XIV. VENTS REGLES. spérance , on ne trouve ce vent d’est qu’au elà de l’équateur, environ au 12e degré de titude sud, et il ne se fait pas senlir en îçà de l’équateur : mais lorsqu’on est ar- vé à ce 12e degré de latitude sud, on a ! vent jusqu’au 28e degré de latitude sud. ans la mer qui sépare l’Afrique de l’Amé- cjue , il y a un intervalle, qui est depuis 4e degré de latitude nord jusqu’au 10e I 11e degré de latitude nord, où ce vent :néral n’est pas sensible, mais au delà de 10e ou ixe degré ce vent règne et s’é- nd jusqu’au 3oe degré. II y a aussi beaucoup d’exceptions à faire sujet des vents moussons , dont le mou- illent est alternatif : les uns durent plus 1 moins long-temps , les autres s’étendent de plus grandes ou à de moindres dis- îces ; les autres sont plus ou moins régu- ts , plus ou moins violens. Nous rappor- ’ons ici , d’après Varenius , les principaux lénomènes de ces vents. « Dans l’océan (lien, entre l’Afrique et l’Inde jusqu’aux oluques, les vents d’est commencent à ré- er au mois de janvier, et durent jusqu’au mmencement de juin; au mois d’août ou septembre commence le mouvement con- jure, et les vents d’ouest régnent pendant >is ou quatre mois ; dans l’intervalle de ces mssons, c’est-à-dire à la fin de juin, au fis de juillet, et au commencement d’août, l’y a sur cette mer aucun vent fait , et on rouve de violentes tempêtes qui viennent septentrion. « Ces vents sont sujets à de plus grandes nations en approchant des terres ; car vaisseaux- ne peuvent partir de la côte Malabar, non plus que des autres ports la côte occidentale de la presqu’île de ide, pour aller en Afrique, en Arabie, Perse , etc. , que depuis le mois de jan- r jusqu’au mois d’avril ou de mai : car > la fin de mai et pendant les mois de n, de juillet et d’août, il se fait de si lentes tempêtes par les vents de nord ou nord-est, que les vaisseaux ne peuvent lir à la mer; au contraire, de l’autre côté cette presqu’île, c’est-à-dire sur la mer i baigne la côte de Coromandel , 011 ne Iioît point ces tempêtes. On part de Java, de Ceylan, et de pîu- rs endroits, au mois de septembre pour ’ aux îles Moluques , parce que le vent :cident commence alors à souffler dans parages ; cependant , lorsqu’on s’éloigne ’équateur de i5 degrés de latitude aus- e, on perd ce vent d’ouest et on retrouve ent général , qui est dans cet endroit un vent de sud -est. On part de même de Co- chin, pour aller à Malaca, au mois de mars, parce que les vents d’ouest commencent à souffler dans ce temps. Ainsi ces vents d’oc- cident se font sentir en différens temps dans la mer des Indes : on part, comme l’on voit, dans un temps pour aller de Java aux Moluques, dans un autre temps pour aller de Cochin à Malaca , dans un autre pour aller de Malaca à la Chine, et encore dans un autre pour aller de la Chine au Japon. « A Banda les vents d’occident finissent à la fin de mars ; il règne des vents variables et des calmes pendant le mois d’avril; au mois de mai, les vents d’orient recommen- cent avec une grande violence. A Ceylau les vents d’occident commencent vers le mi- lieu du mois de mars, et durent jusqu’au commencement d’octobre que reviennent les vents d’est , ou plutôt d’est-nord-est. A Ma- dagascar, depuis le milieu d’avril jusqu’à la fin de mai , on a des vents de nord et de nord-ouest ; mais aux mois de février et de mars, ce sont des vents d’orient et de midi. De Madagascar au cap de Bonne-Espérance le vent du nord et les vents collatéraux souf- flent pendant les mois de mars et d’avril. Dans le golfe de Bengale , le vent de midi se fait sentir avec violence après le 20 d’avril ; auparavant il règne dans cette mer des vents de sud-ouest ou de nord-ouest. Les vents d’ouest sont aussi très-violens dans la mer de la Chine pendant les mois de juin et de juillet ; c’est aussi la saison la plus conve- nable pour aller de la Chine au Japon : mais pour revenir du Japon à là Chine , ce sont les mois de février et de mars qu’on préfère, parce que les vents d’est ou de nord-est ré- gnent alors dans celte mer. « Il y a des vents qu’on peut regarder comme particuliers à de certaines côtes : par exemple , le vent de sud est presque con- tinuel sur les côtes du Chili et du Pérou ; il commence au 46e degré ou environ de la- titude sud , et il s’étend jusqu’au delà de Panama ; ce qui rend le voyage de Lima à Panama beaucoup plus aisé à faire et plus court que le retour. Les vents d’occident soufflent presque continuellement, ou du moins très-fréquemment, sur les côtes de la terre Magellanique , aux environs du dé- troit de Le Maire ; sur la côte de Malabar les vents de nord et de nord ouest régnent presque continuellement ; sur la côte de Gui- née le vent de nord-ouest est aussi fort fré- quent, et à une ceitaine distance de cette côte , en pleine mer , on retrouve le vent de nord-est ; les vents d’occident régnent sur THÉORIE DE LA TERRE. 218 les côtes du Japon aux mois de novembre et de décembre. » Les vents alternatifs ou périodiques dont nous venons de parler sont des vents de mer; mais il y a aussi des vents de terre qui sont périodiques, et qui reviennent ou dans une certaine saison , ou à de certains jours, ou même à de certaines heures: par exemple , sur la côte de Malabar , de- puis le mois de septembre jusqu’au mois d’avril souffle un vent de terre qui vient du côté de l’orient; ce vent commence or- dinairement à minuit et finit à midi , et il n’est plus sensible dès qu’on s’éloigne à douze ou quinze lieues de la côte ; et depuis midi jusqu’à minuit il règne un vent de mer qui est fort faible, etqui vient de l’occident : sur la côte de la Nouvelle-Espagne en Amé- rique , et sur celle de Congo en Afrique , il règne des vents de terre pendant la nuit , et des vents de mer pendant le jour : à la Jamaïque les vents soufflent de tous côtés à la fois pendant la nuit, et les vaisseaux ne peuvent alors y arriver sûrement , ni en sortir avant le jour. En hiver le port de Cochin est inabor- dable , et il ne peut en sortir aucun vais- seau, parce que les vents y soufflent avec une telle impétuosité , que les bàtimens ne peu- vent pas tenir à la mer , et que d’ailleurs le vent d’ouest qui y souffle avec fureur , amène à l’embouchure du fleuve de Cochin une si grande quantité de sable, qu’il est im- possible aux navires, et même aux barques, d’y entrer pendant six mois de l’année; mais les vents d’est qui soufflent pendant les six autres mois repoussent ces sables dans la mer, et rendent libre l’entrée de la ri- vière. Au détroit de Babel-Mandel , il y a des vents de sud-est qui y régnent tous les ans dans la même saison, et qui sont tou- jours suivis de vents de nord-ouest. A Saint- Domingue il y a deux vents différens qui s’élèvent régulièrement presque chaque jour : l’un, qui est un vent de mer, vient du côté de l’orient , et il commence à dix heures du matin ; l’autre , qui est un vent de terre , etqui vient de l’occident, s’élève à six ou sept heures du soir et dure toute la nuit. Il y auroit plusieurs autres faits de cette espèce à tirer des voyageurs , dont la connoissance pourroit peut-être nous conduire à donner une histoire des vents qui seroit un ouvrage très-utile pour la navigation et pour la phy- sique. Sur l’état de l’air au dessus des hautes montagnes. * Il est prouvé par des observations con- stantes et mille fois réitérées, que plus on s’élève au dessus du niveau de la mer ou des plaines, plus la colonne de mercure des baromètres descend , et que par conséquent le poids de la colonne d’air diminue d’autant plus qu’on s’élève plus haut ; et comme l’aii est un fluide élastique et compressible , tous les physiciens ont conclu de ces expériences du baromètre, que l’air est beaucoup plus comprimé et plus dense dans les plaines qu’il ne l’est au dessus des montagnes. Pai exemple, si le baromètre, étant à vingt-sept pouces dans la plaine, tombe à dix-huit pouces au haut de la “montagne, ce qui fait un tiers de différence dans le poids de la co- lonne d’air, on a dit que la compression de cet élément étant toujours proportionnelle au poids incombant, l’air duhaut de la mon-; tagne est en conséquence d’un tiers moins dense que celui de la plaine, puisqu’il est comprimé par un poids moindre d’un tiers*. Mais de fortes raisons me font douter de la vérité de cette conséquence, qu’on a regar- dée comme légitime et même naturelle. Faisons pour un moment abstraction dti cette compressibilité de l’air que plusieurs! causes peuvent augmenter, diminuer, dé| truire ou compenser; supposons que l’at- mosphère soit également dense partout : si son épaisseur n’étoit que de trois lieues , il est sûr qu’en s’élevant à une lieue , c’est-à- dire de la plaine au haut de la montagne! le baromètre étant chargé d’un tiers demoins( descendroit de vingt-sept pouces à dix-h ni ?| Or , l’air, quoique compressible, me paroii être également dense à toutes les hauteurs , et voici les faits et les réflexions sur les- quels je fonde cette opinion. i° Les vents sont aussi puissans , aussj violens au dessus des plus hautes rnontagnd que dans les plaines les plus basses ; tout les observateurs sont d’accord sur ce fait! Or, si l’air y étoit d’un tiers moins dense! leur action seroit d’un tiers plus foible, ej tous les vents ne seroient que des zéphyrs I une lieue de hauteur , ce qui est absolumenl contraire à l’expérience. 20 Les aigles et plusieurs autres oiseaux, non seulement volent au sommet des plus hautes montagnes, mais même ils s’élèvent encore au dessus à de grandes hauteurs. Or, je demande s’ils poui'roient exécuter leur vo ni même se soutenir dans un fluide qui se roit une fois moins dense , et si le poids d< ART. XIV. VENTS RÉGLÉS. 219 corps , malgré tous leurs efforts , ne les nèneroit pas en bas. 0 Tous les observateurs qui ont grimpé sommet des plus hautes montagnes con- nnent qu’on y respire aussi facilement partout ailleurs , et que la seule incom- dité qu’on y ressent est celle du froid, augmente à mesure qu’on s’élève plus R. Or, si l’air étoit d’un tiers moins se au sommet des montagnes, la respi- ion de l’homme, et des oiseaux qui s’é- * nt encore plus haut , seroit non seule- nt gênée, mais arrêtée, comme nous le ons dans la machine pneumatique dès en a pompé le quart ou le tiers de la se de l’air contenu dans le récipient. 0 Comme le froid condense l’air autant la chaleur le raréfie, et qu’à mesure j'a" on s’élève sur les hautes montagnes le d augmente d’une manière très-sensible, t-il pas nécessaire que les degrés de la densation de l’air suivent le rapport du é du froid ? et cette condensation peut er et même surpasser celle de l’air des nés , où la chaleur qui émane de l’inté- jç1 ir de la terre est bien plus grande qu’au miet des montagnes , qui sont les poin- les plus avancées et les plus refroidies de nasse du globe. Cette condensation de par le froid, dans les hautes régions atmosphère , doit donc compenser la di- ution de densité produite par la dirni- ion de la charge ou poids incombant , et conséquent l’air doit être aussi dense les sommets froids des montagnes que s les plaines. Je serois même porté à e que l’air y est plus dense, puisqu’il ble que les vents y soient plus violens , îe les oiseaux qui volent au dessus de ces mets de montagnes semblent se soute- dans les airs d’autant plus aisément s s’élèvent plus haut. ' là je pense qu’on peut conclure que libre est à peu près également dense à es les hauteurs, et que l’atmosphère une ne s’étend pas à beaucoup près haut qu’on l’a déterminée , en ne con- ant l’air que comme une masse élasti- , comprimée par le poids incombant : f: i l’épaisseur totale de notre atmosphère 1111 Toit bien n’ètre que de trois lieues, au de quinze ou vingt comme l’ont dit les iciens r. hll Albazen , par la durée des crépuscules , a pdu ue la hauteur de l’atmosphère est de 1 toises. Kepler, par cette même durée, lui 4i,iio toises. de La Hire, en parlant de la réfraction ho- Nous concevons à l’entour de la terre une première couche de l’atmosphère, qui est remplie de vapeurs qu’exhale ce globe, tant par sa chaleur propre que par celle du so- leil. Dans cette couche , qui s’étend à la hauteur des nuages, la chaleur que répan- dent les exhalaisons du globe , produit et soutient une raréfaction qui fait équilibre à la pression de la masse d’air supérieur, de manière que la couche basse de l’atmosphère n’est point aussi dense qu’elle le devroit être à proportion de la pression qu’elle éprouve: mais à la hauteur où cette raréfaction cesse, l’air subit toute la condensation que lui donne le froid de cette région où la chaleur émanée du globe est fort atténuée , et celte condensation paroît même être plus grande que celle que peut imprimer sur les régions inférieures , soutenues par la raréfaction , le poids des couches supérieures ; c’est du moins ce que semble prouver un autre phé- nomène, qui est la condensation et la sus- pension des nuages dans la couche élevée où nous les voyons se tenir. Au dessous de celte moyenne région , dans laquelle le froid et la condensation commencent , les vapeurs s’élèvent sans être visibles , si ce n’est dans quelques circonstances où une partie de cette couche froide paroît se rabattre jusqu’à la surface de la terre , et où la chaleur émanée de la terre , éteinte pendant quelques mo- mens par des pluies , se ranimant avec plus de force, les vapeurs s’épaississent à l’entour de nous en brumes et en brouillards : sans cela elles ne deviennent visibles que lors- qu’elles arrivent à cette région où le froid les condense en flocons, en nuages, et par là même arrête leur ascension ; leur gravité, augmentée à proportion qu’elles sont deve- nues plus denses, les établissant dans un équilibre qu’elles ne peuvent plus franchir. O11 voit que les nuages sont généralement plus élevés en été , et constamment encore plus élevés dans les climats chauds ; c’est que, dans cette saison et dans ces climats, la couche de l’évaporation de la terre a plus de hauteur : au contraire , dans les plages rizontale de 32 minutes, établit le terme moyen de la hauteur de l’atmosphère à 34,585 toises. M. Mariotle , par ses expériences sur la com- pressibilité de l’air, donne à l’atmosphère plus de 3o,ooo toises. Cependant , en ne prenant pour l’atmosphère que la partie de l’air où s’opère la réfraction , ou du moins presque la totalité de la réfraction, M. Bou- guer ne trouve que 5i58 toises, c’est-à-dire deux lieues et demie ou trois lieues ; et je crois ce ré- sultat plus certain et mieux fondé que tous les autres. 220 THÉORIE DE LA TERRE. glaciales des pôles , où cette évaporation de la chaleur du globe est beaucoup moindre, la couche dense de l’air paroît toucher à la surface de la terre et y retenir les nuages qui ne s’élèvent plus, et enveloppent ces parages d’une brume perpétuelle. ( Add . Buff-) Sur quelques 'vents qui 'varient régulièrement. * Il y a de certains climats et de certaines contrées particulières où les vents varient , mais constamment et régulièrement; les uns au bout de six mois , les autres après quel- ques semaines , et enfin d’autres du jour à la nuit ou du soir au matin. J’ai dit, page 218 de ce volume , « qu’à Saint-Domingue il y a « deux vents différens , qui s’élèvent régu- lièrement presque chaque jour; que l’un « est un vent de mer qui vient de l’orient , « et que l’autre est un vent de terre qui « vient de l’occident. » M. Fresnaye m’a écrit que je n’avois pas été exactement informé. « Les deux vents réguliers , dit-il , qui souf- flent à Saint-Domingue , sont tous deux des vents de mer, et soufflent l’un de l’est le matin , et l’autre de l’ouest le soir, qui n’est que le même vent renvoyé ; comme il est évident que c’est le soleil qui le cause , il y a un moment de bourrasque que tout le monde remarque entre une heure et deux de l’après-midi. Lorsque le soleil a décliné, raréfiant l’air de l’ouest , il chasse dans l’est les nuages que le vent du matin avoit con- finés dans la partie opposée. Ce sont ces nuages renvoyés , qui , depuis avril et mai jusque vers l’automne , donnent dans la par- tie du Port-au-Prince les pluies réglées qui viennent constamment de l’est. Il 11’y a pas d’habitant qui 11e prédise la pluie du soir entre six et neuf heures , lorsque , suivant leur expression , la brise a été t'envoyée. Le vent d’ouest ne dure pas toute la nuit , il tombe régulièrement vers le soir ; et c’est lorsqu’il a cessé, que les nuages poussés à l’orient ont la liberté de tomber, dès que leur poids excède un pareil volume d’air : le vent que l’on sent la nuit est exactement un vent de terre qui n’est ni de l’est ni de l’ouest, mais dépend de la projection de la côte. Au Port-au-Prince , ce vent du midi est d’un froid intolérable dans les mois de janvier et de février : comme il traverse la ravine de la rivière froide, il y est mo- difié r. » t. Note communiquée à M. de Buffon par M. Fresnaye , conseiller au conseil supérieur de .Saint-Domingue , en date du 10 mars 1777- {Add. Buff.) Sur les lavanges. * Dans les hautes montagnes , il y a t vents accidentels qui sont produits par c causes particulières , et notamment par lavanges. Dans les Alpes, aux environs d glacières , on distingue plusieurs espèces lavanges. Les unes sont appelées lavait £ venteuses, parce qu’elles produisent grand vent ; elles se forment lorsqu’u neige nouvellement tombée vient à être ni en mouvement , soit par l’agitation de l’a soit en fondant par dessous au moyen de chaleur intérieure de la terre : alors la nei se pelotonne , s’accumule , et tombe en co lant en grosses masses vers le vallon ; ce q cause une grande agitation dans l’air, par qu’elle coule avec rapidité et en très-grai volume , et les vents que ces masses pi duisent sont si impétueux , qu’ils renverse tout ce qui s’oppose à leur passage , jusqi rompre de gros sapins. Ces lavanges co vrent d’une neige très-fine tout le terra auquel elles peuvent atteindre, et celte po dre de neige voltige dans l’air au caprice d vents, c’est-à-dire sans direction fixe;! qui rend ces neiges dangereuses pour 1 gens qui se trouvent alors en campagn parce qu’on 11e sait pas trop de quel co tourner pour les éviter, car en peu de ni mens on se trouve enveloppé et même e fièrement enfoui dans la neige. Une autre espèce de lavanges, encore pl dangereuse que la première , sont celles q les gens du pays appellent schlaglaïuvci c’est-à-dire lavanges frappantes ; elles surviennent pas aussi rapidement que ! premières , et néanmoins elles renversé tout ce qui se trouve sur leur passage, pa; qu’elles entraînent avec elles une grau quantité de terres, de pierres, de caillou et même des arbres tout entiers , en so qu’en passant et en arrivant dans le valw'j elles tracent un chemin de destruction ! écrasant tout ce qui s’oppose à leur passa Comme elles marchent moins rapidemi ! que les lavanges qui 11e sont que de nei | on les évite plus aisément : elles s’annonçi de loin; car elles ébranlent, pour ainsi di les montagnes et les vallons par leur poidi leur mouvement , qui causent un bruit é ■ à celui du tonnerre. Au reste , il ne faut qu’une très-pe ! cause pour produire ces terribles effets suffit de quelques flocons de neige tom jj d’un arbre ou d’un rocher, ou même du 3 des cloches, du bruit d'une arme à feu, p ,f què quelques portions de neige se détacb [| 221 ART. XIV. L AV ANGES. i sommet , se pelotonnent et grossissent en scendant jusqu’à devenir une masse aussi osse qu’une montagne. Les habitans des contrées sujettes aux vanges ont imaginé des précautions pour garantir de leurs effets ; ils placent leurs timens contre quelques petites éminences i puissent rompre la force de la lavange : plantent aussi des bois derrière leurs ha- lations; on peut voir au mont Saint-Go- ird une forêt de forme triangulaire , dont rjgle aigu est tourné vers le mont, et qui nble plantée exprès pour détourner les •anges et les éloigner du village d’Urseren des bâtimens situés au pied de la mon- ;ne ; et il est défendu , sous de grosses ines , de toucher à cette forêt , qui est , ur ainsi dire , la sauvegarde du village. 1 voit de même , dans plusieurs autres droits , des murs de précaution dont l’an- ; aigu est opposé à la montagne , afin de npre et détourner les lavanges ; il y a une iraille de cette espèce à Davis , au pays 3 Grisons, au dessus de l’église du milieu, nme aussi vers les bains de Leuk ou uèche en Valais. On voit dans ce même ys des Grisons et dans quelques autres droits , dans les gorges de montagne, des ùtes de distance en distance, placées à é du chemin et taillées dans le roc, qui vent aux passagers de refuge contre les anges. { Add . Buff.) ARTICLE XV. s 'vents irréguliers , des ouragans , des trombes, et de quelques autres phénomènes causés par V agitation de la mer et de l’air. Les vents sont plus irréguliers sur terre e sur mer, et plus irréguliers dans les ys élevés que dans les pays de plaines, s montagnes non seulement changent la ■ection des vents , mais même elles en pro- isent qui sont ou constans ou variables vaut les différentes causes : la fonte des iges qui sont au dessus des montagnes jduit ordinairement des vents constans i durent quelquefois assez long-temps ; vapeurs qui s’arrêtent contre les mon- des et qui s’y accumulent , produisent s vents variables , qui sont très-fréquens iis tous les climats , et il y a autant de riations dans ces mouvemens de l’air qu’il !a d’inégalités sur la surface de la terre, ms ne pouvons donc donner sur cela que s exemples , et rapporter les faits qui sont avérés; et comme nous manquons d’obser- vations suivies sur la variation des vents, et même sur celle des saisons dans les différens pays , nous ne prétendons pas expliquer toutes les causes de ces différences , et nous nous bornerons à indiquer celles qui nous paroîtront les plus naturelles et les plus pro- bables. Dans les détroits , sur toutes les côtes avancées , à l’extrémité et aux environs de tous les promontoires , des presqu’îles et des caps , et dans tous les golfes étroits , les orages sont plus fréquens ; mais il y a outre cela des mers beaucoup plus orageuses que d’autres. L’océan Indien , la mer du Japon , la mer Magellanique , celle de la côte d’A- frique au delà des Canaries , et de l’autre côté vers la terre de Natal , la mer Rouge , la mer Vermeille , sont toutes fort sujettes aux tempêtes. L’océan Atlantique est aussi plus orageux que le grand Océan , qu’on a appelé , à cause de sa tranquillité , mer Pa- cifique : cependant cette mer Pacifique n’est absolument tranquille qu’entre les tropiques, et jusqu’au quart environ des zones tempé- rées ; et plus on approche des pôles , plus elle est sujette à des vents variables dont le changement subit cause souvent des tem- pêtes. Tous les continens terrestres sont sujets à des vents variables qui produisent souvent des effets singuliers : dans le royaume de Cachemire , qui est environné des monta- gnes du Caucase, on éprouve à la montagne Pire-Penjale des changemens soudains ; on passe, pour ainsi dire, de l’été à l’hiver en moins d’une heure : il y règne deux vents directement opposés , l’un de nord et l’autre de midi , que , selon Bernier, on sent suc- cessivement en moins de deux cents pas de distance. La position de cette montagne doit être singulière et mériteroit d’être observée. Dans la presqu’île de l’Inde, qui est tra- versée du nord au sud par les montagnes de Gâte, on a l’hiver d’un côté de ces monta- gnes, et l’été de l’autre côté dans le même temps , en sorte que sur la côte de Coro- mandel l’air est serein et tranquille , et fort chaud, tandis qu’à celle de Malabar, quoi- que sous la même latitude , les pluies , les orages , les tempêtes , rendent l’air aussi froid qu’il peut l’être dans ce climat ; et au contraire , lorsqu’on a l’été à Malabar, on a l’hiver à Coromandel. Cette même différence se trouve des deux côtés du cap de Rasal- gate en Arabie : dans la pai’tie de la mer qui est au nord du cap , il règne une grande tranquillité , tandis que dans la partie qui THÉORIE DE LÀ TERRÉ. 222 est au sud on éprouve de violentes tempêtes. Il en est encore de même dans l’île de Cey- lan : l’hiver et les grands vents se font sentir dans la partie septentrionale de l’île , tandis que dans les parties méridionales il fait un très-beau temps d’été ; et au contraire quand la partie septentrionale jouit de la douceur de l’été, la partie méridionale à son tour est plongée dans un air sombre , orageux et pluvieux. Cela arrive non seulement dans plusieurs endroits du continent des Indes , mais aussi dans plusieurs îles : par exemple, à Céram , qui est une longue île dans le voi- sinage d’Amboine, on a l’hiver dans la partie septentrionale de l’île , et l'été en même temps dans la partie méridionale, et l’inter- valle qui sépare les deux saisons n’est pas de trois ou quatre lieues. En Égypte il règne souvent pendant l’été des vents du midi qui sont si chauds , qu’ils empêchent la respiration ; ils élèvent une si grande quantité de sable , qu’il semble que le ciel est couvert de nuages épais ; ce sable est si fin et il est chassé avec tant de vio- lence , qu’il pénètre partout , et même dans les coffres les mieux fermés : lorsque ces vents durent plusieurs jours, ils causent des maladies épidémiques, et souvent elles sont suivies d’une grande mortalité. Il pleut très- rarement en Égypte ; cependant tous les ans il y a quelques jours de pluie pendant les mois de décembre , janvier et février. Il s’y forme aussi des brouillards épais qui sont plus fréquens que les pluies , surtout aux environs du Caire : ces brouillards commencent au mois de novembre , et con- tinuent pendant l’hiver ; ils s’élèvent avant le lever du soleil ; pendant toute l’année il tombe une rosée si abondante, lorsque le ciel est serein, qu’on pourrait la prendre pour une petite pluie. Dans la Perse l’hiver commence en no- vembre et dure jusqu’en mars : le froid y est assez fort pour y former de la glace , et il tombe beaucoup de neige dans les mon- tagnes , et souvent un peu dans les plaines ; depuis le mois de mars jusqu’au mois de mai il s’élève des vents qui soufflent avec force et qui ramènent la chaleur ; du mois de mai au mois de septembre le ciel est se- rein , et la chaleur de la saison est modérée pendant la nuit par des vents frais qui s’é- lèvent tous les soirs , et qui durent jusqu’au lendemain malin ; et en automne il se fait des vents qui , comme ceux du printemps , soufflent avec force ; cependant , quoique ces vents soient assez violens, il est rare qu’ils produisent des ouragans et des tem- pêtes : mais il s’élève souvent pendant l’éh le long du golfe Persique, un vent trè dangereux que les habitans appellent S, myel, et qui est encore plus chaud et pf terrible que celui de l’Égypte dont noi venons de parler ; ce vent est suffocant mortel ; son action est presque semblable celle d’un tourbillon de vapeur enflammét et on ne peut en éviter les effets lorsqu’® s’y trouve malheureusement enveloppé, s’élève aussi sur la mer Rouge , en été , i sur les terres de l’Arabie , un vent de mên espèce qui suffoque les hommes et les an maux, et qui transporte une si gram quantité de sable , que bien des gens pr< tendent que celte mer se trouvera comble avec le temps par l’entassement success des sables qui y tombent : il y a souvent d ces nuées de sable en Arabie, qui obscui cissent l’air et qui forment des tourbilloi dangereux. A la Yéra-Cruz, lorsque le vei de nord souffle, les maisons de la ville sol presque enterrées sous le sable qu’un vei pareil amène : il s’élève aussi des veni chauds en été à Négapatan dans la presqu’îl de l’Inde, aussi bien qu’à Pélapouli et Masulipatan. Ces vents brûlans, qui for périr les hommes, ne sont heureusemei pas de longue durée , mais ils sont violens et plus ils ont de vitesse et plus ils soi brûlans; au lieu que tous les autres venl rafraîchissent d’autant plus qu’ils ont d vitesse. Cette différence ne vient pas d degré de chaleur de l’air : tant que la cha leur de l’air est moindre que celle du corj des animaux, le mouvement de l’air e; rafraîchissant ; mais si la chaleur de l’ai est plus grande que celle du corps , alors 1 mouvement de l’air ne peut qu’échauffer ( brûler. A Goa, l’hiver, ou plutôt le temp des pluies et des tempêtes , est aux mois d mai, de juin et de juillet; sans cela le chaleurs y seroient insupportables. Le cap de Bonne-Espérance est fameu par ses tempêtes et par le nuage singulie qui les produit : ce nuage ne paroît d’abor que comme une petite tache ronde dans 1 ciel, et les matelots l’ont appelé œ il a bçeiif; j’imagine que c’est parce qu’il s soutient à une très-grande hauteur qu’ paroît si petit. De tous les voyageurs qi ont parlé de ce nuage, Kolbe me paro être celui qui l’a examiné avec le plus d’aï tention : voici ce qu’il en dit, tom. I pag. 224 et suivantes : « Le nuage qu’o voit sur les montagnes de la Table, ou d Diable, ou du Vent , est composé, si je n me trompe , d’une infinité de petites pat ART. XV. VENTS IRRÉGULIERS, OURAGANS, ETC. 223 iules poussées premièrement contre les ntagnes du Cap , qui sont à l’est , par les îts d’est qui régnent pendant presque [te l’année dans la zone torride ; ces par- îles ain^i poussées sont arrêtées dans r cours par ces hautes montagnes , et se aassent sur leur côté oriental; alors elles iennent visibles , et y forment de petits nceaux ou assemblages de nuages , qui , ut incessamment poussés par le vent ,t , s’élèvent au sommet de ces mou- les. Ils n’y restent pas long-temps tran- lles et arrêtés ; contraints d’avancer , ils igouffrent entre les collines qui sont ant eux, où ils sont serrés et pressés îme dans une manière de canal : le vent presse au dessous, et les côtés opposés deux montagnes les retiennent à droite gauche. Lorsqu’en avançant toujours ils viennent au pied de quelque montagne la campagne est un peu plus ouverte, s’étendent, se déploient, et deviennent îouveau invisibles ; mais bientôt ils sont ssés sur les montagnes par les nouveaux ges qui sont poussés derrière eux, et viennent ainsi , avec beaucoup d’impé- sité, sur les montagnes les plus hautes Cap , qui sont celles du Vent et de la ble, où règne alors un vent tout con- re : là il se fait un conflit affreux , ils t poussés par derrière et repoussés par ant ; ce qui produit des tourbillons bor- es, soit sur les hautes montagnes dont jarle , soit dans la vallée de la Table, ces nuages voudroient se précipiter, sque le vent de nord ouest a cédé le mp de bataille , celui de sud-est aug- îte et continue de souffler avec plus ou 1ns de violence pendant son semestre ; il •enforce pendant que le nuage de l’œil îoeuf est épais , parce que les particules viennent s’y amasser par derrière , s’ef- ent d’avancer ; il diminue lorsqu’il est ns épais , parce qu’alors moins de par- îles pressent par derrière ; il baisse en- ui ement lorsque ce nuage ne paroît plus, lit ce qu’il n’y vient plus de l’est de nou- ai es particules, ou qu’il n’en arrive pas :l !Z ; le nuage enfin ne se dissipe point , il plutôt paroît toujours à peu près de t[i aie grosseur, parce que de nouvelles ; i tières remplacent par derrière celles qui g dissipent par devant. I Toutes ces circonstances du phénomène i jjduisent à une hypothèse qui en explique |n pien toutes les parties : i° Derrière la ni itagne de la Table on remarque une I èce de sentier ou une traînée de légers brouillards blancs , qui , commençant sur la descente orientale de cette montagne, abou- tit à la mer, et occupe dans son étendue les montagnes de Pierre. Je me suis très- souvent occupé à contempler cette traînée , qui , suivant moi , étoit causée par le pas- sage rapide des particules dont je parle, depuis les montagnes de Pierre jusqu’à celle de la Table. « Ces particules, que je suppose, doivent être extrêmement embarrassées dans leur marche par les fréquens chocs et conlre- chocs causés non seulement par les monta- gnes, mais encore par les vents de sud et d’est qui régnent aux lieux circon voisins du Cap ; c’est ici ma seconde observation. J’ai déjà parlé des deux montagnes qui sont situées sur les pointes de la baie Falzo ou fausse baie : l’une s’appelle la Lèvre pen- dante, et l’autre Norwège. Lorsque les particules que je conçois sont poussées sur ces montagnes par les vents d’est, elles en sont repoussées par les vents de sud , ce qui les porte sur les montagnes voisines ; elles y sont arrêtées pendant quelque temps et y paroissent en nuages, comme elles le fai- soient sur les deux montagnes de la baie Falzo , et même un peu davantage. Ces nuages sont souvent fort épais sur la Bol- lande Hottenfote, sur les montagnes de Stellenbosch , de Drakenstein , et de Pierre, mais surtout sur la montagne de la Table et sur celle du Diable. « Enfin ce qui confirme mon opinion est que constamment deux ou trois jours avant que les vents de sud-est soufflent , on aper- çoit sur la Tête du lion de petits nuages noirs qui la couvrent ; ces nuages sont, sui- vant moi , composés des particules dont j’ai parlé : si le vent de nord-ouest règne encore lorsqu’elles arrivent, elles sont arrêtées dans leur course ; mais elles ne sont jamais chas- sées fort loin jusqu’à ce que le vent du sud- est commence. » Les premiers navigaleurs qui ont appro- ché du cap de Bonne -Espérance ignoroient les effets de ces nuages funestes, qui sem- blent se former lentement, tranquillement, et sans aucun mouvement sensible dans l’air, et qui tout d’un coup lancent la tempête , et causent un orage qui précipite les vais - seaux dans le fond de la mer, surtout lors- que les voiles sont déployées. Dans la terre de Natal il se forme aussi un petit nuage semblable à l’œil de bœuf du cap de Bonne- Espérance , et de ce nuage il sort un vent terrible et qui produit les mêmes effets. Dans la mer qui est entre l’Afrique et l’A- THÉORIE DE LÀ TERRE. 224 mérique , surtout sous l’équateur et dans les parties voisines de l’équateur, il s’élève très- souvent de ces espèces de tempêtes. Près de la côte de Guinée il se fait quelquefois trois ou quatre orages en un jour : ils sont causés et annoncés , comme ceux du cap de Bonne - Espérance , par de petits nuages noirs ; le reste du ciel est ordinairement fort serein, et la mer tranquille. Le premier coup de vent qui sort de ces nuages est fu- rieux , et feroit périr les vaisseaux en pleine mer, si l’on ne prenoit pas auparavant la précaution de caler les voiles. C’est princi- palement aux mois d’avril, de mai et de juin qu’on éprouve ces tempêtes sur la mer de Guinée , parce qu’ilTi’y règne aucun vent réglé dans cette saison , et plus bas , en des- cendant de Loango , la saison de ces orages sur la mer voisine des côtes de Loango est celle des mois de janvier, février, mars et avril. De l’autre côté de l’Afrique, au cap de Guardafui , il s’élève de ces espèces de tempêtes au mois de mai , et les nuages qui les produisent sont ordinairement au nord, comme ceux du cap de Bonne-Espérance. Toutes ces tempêtes sont donc produites par des vents qui sortent d’un nuage, et qui ont une direction, soit du nord au sud, soit du nord-est au sud-ouest, etc. : mais il y a d’au tres espèces de tempêtes que l’on ap- pelle des ouragans, qui sont encore plus violentes que celles-ci , et dans lesquelles les vents semblent venir de tous les côtés; ils ont un mouvement de tourbillon et de tour- noiement auquel rien ne peut résister. Le calme précède ordinairement ces horribles tempêtes, et la mer paroît alors aussi unie qu’une glace ; mais dans un instant la fureur des vents élève les vagues jusqu’aux nues. Il y a des endroits dans la mer où l’on ne peut pas aborder, parce que alternativement il y a ou des calmes ou des ouragans de cette espèce : les Espagnols ont appelé ces en- droits ca/mes et tornados . Les plus considé- rables sont auprès de la Guinée, à deux ou trois degrés latitude nord : ils ont environ trois cents ou trois cent cinquante lieues de longueur sur autant de largeur, ce qui fait un espace de plus de trois cent mille lieues carrées. Le calme ou les orages sont presque continuels sur cette côte de Guinée, et il y a des vaisseaux qui y ont été retenus trois mois sans pouvoir en sortir. Lorsque les vents contraires arrivent à la fois dans le même endroit, comme à un centre, ils produisent ces tourbillons et ces tournoiemens d’air par la contrariété de leur mouvement, comme les courans contraires produisent dans l’eau des gouffres ou di [ ! tournoiemens : mais lorsque ees vents tro vent en opposition d’autres vents gui coi tre-balancent de loin leur action ; alors ij tournent autour d’un grand espace dans li j quel il règne un calme perpétuel ; et c’e ce qui forme les calmes dont nous parlon et desquels il est souvent impossible de so j tir. Ces endroits de la mer sont marqu [ sur les globes de Senex, aussi bien que 1 directions des différens vents qui règne a ordinairement dans toutes les mers. A la v ' ,» ri té , je serois porté à croire que la conti: j riété seule des vents ne pourrait pas produi j m cet effet, si la direction des côtes et la forn L particulière du fond de la mer dans ces è L droits n’y contribuoient pas; j’imagine do! w que les courans causés en effet par les*venji H mais dirigés par la forme des côtes et J 1 § inégalités du fond de la mer, viennent ^ aboutir dans ces endroits, et que leurs d ^ réel ions opposées et contraires forment I |el tornados en question dans une plaine em ,| ronnée de tous côtés d’une chaîne de mdii |e[ tagnes. ' j üt Les gouffres neparoissent être autre cho sor que des tournoiemens d’eau causés par ï’f ^ tion de deux ou de plusieurs courans oppL sés. L’Euripe , si fameux par la mort d’Ar L tote, absorbe et rejette alternativement 1 S|, eaux sept fois en vingt-quatre heures fj:, j(s gouffre est près des côtes de la Grèce. ' J nt Charybde, qui est près du détroit de Sici rejette et absorbe les eaux trois fois en vin |IS quatre heures. Au reste, on n’est pas tr L sûr du nombre de ces alternatives de mciE. vement dans ces gouffres. Le docteur ffiL! centia, dans son traité qui a pour titre redivivo , dit que l’Euripe a des mouvemeL, irréguliers pendant dix-huit ou dix-peL jours de chaque mois, et des mouveme |eri réguliers pendant onze jours; qu’ordinai . L ment il ne grossit que d’un pied, et rareirn py' de deux pieds; il dit aussi que les autëj -j ne s’accordent pas sur le flux et le reflux jm l’Euripe;que les uns disent qu’il se fait défi ltl fois, d’autres sept, d’autres onze, d’aut rt( douze, d’autres quatorze fois, en vim „| quatre heures ; mais que Loirius l’ayant e l)i( miné de suite pendant un jour entier, ^ l’avoit observé ci chaque six heures d’i ^ manière évidente et avec un mouvement ,jas violent, qu’à chaque fois il pouvoit faire to ]|f 11er alternativement les roues d’un moulin ^ Le plus grand gouffre que l’on connoi ^ est celui de la mer de Nonvège; on assi j qu’il a plus de vingt lieues de circuit; il | u sorbe pendant six heures tout ce qui est d< j ART. XV. VENTS IRRÉGULIERS, OURAGANS. voisinage , l’eau , les baleines , les vais- ix, et rend ensuite pendant autant de ps tout ce qu’il a absorbé. I n’est pas nécessaire de supposer dans bnd de la mer des trous et des abîmes engloutissent continuellement les eaux, ir rendre raison de ces gouffres ; on sait quand l’eau a deux directions contraires, omposilion de ces mouvemens produit tournoiement circulaire, et semble for- ■ un vide dans le centre de ce mouvement, une on peut l’observer dans plusieurs en- its auprès des piles qui soutiennent les jes des ponts , surtout dans les rivières ides : il en est de même des gouffres de ner, ils sont produits par le mouvement Jeux ou plusieurs courans contraires ; et une le flux ou le reflux sont la principale se des courans , en sorte que pendant lux ils sont dirigés d’un côté, et que dant le reflux ils vont en sens contraire, est pas étonnant que les gouffres qui ré- élit de ces courans attirent et engloulis- t pendant quelques heures tout ce qui environne, et qu’ils rejettent ensuite pen- t tout autant de temps tout ce qu’ils ont arbé. ,es gouffres ne sont donc que des tour- emens d’eau qui sont produits par des rans opposés, et les ouragans ne sont que tourbillons ou tournoiemens d’air pro- ts par des vents contraires : ces ouragans t communs dans la mer de la Chine et du on, dans celle des îles Antilles, et en sieurs autres endroits de la mer, surtout rès des terres avancées et des côtes éle- s ; mai ils sont encore plus fréquens sur erre, et les effets en sont quelquefois digieux, « J’ai vu, dit Bellarmin , je ne ■roirois pas si je ne l’eusse pas vu , une ie énorme creusée par le vent, et toute erre de cette fosse emportée sur un vil- i , en sorte que l’endroit d’où la terre it été enlevée paroissoil un trou épou- itable , et que le village fut entièrement erré par cette terre transportée 1 . » On lit voir dans X Histoire de l'Académie des I ences et dans les Transactions philosophé •s le détail des effets de plusieurs o lira- is qui paroissent inconcevables, et qu’on oit de la peine à croire , si les faits ri’é- ;nt attestés par un grand nombre de té- ins oculaires , véridiques et intelligens. II en est de même des trombes , que les ûgateurs ne voient jamais sans crainte et is admiration. Ces trombes sont fort fré- . Bellanninus , de ascensu mentis in Deum. ji Buffon. I. 225 quentes auprès de certaines côtes de la Mé- diterranée , surtout lorsque le ciel est fort couvert , et que le vent souffle en même temps de plusieurs côtés ; elles sont plus communes près des caps de Laodicée, de Crecgo et de Carmel , que dans les autres parties de la Méditerranée. La plupart de ces trombes sont autant de cylindres d»eau qui tombent des nues, quoiqu’il semble quelquefois, surtout quand on est à quelque distance, que l’eau de la mer s’élève en haut. Mais il faut distinguer deux espèces de trombes. La première, qui est la trombe dont nous venons de parler , n’est autre chose qu’une nuée épaisse, comprimée, res- serrée et réduite en un petit espace par des vents opposés et contraires , lesquels , souk fiant en même temps de plusieurs côtés , donnent à la nuée la forme d’un tourbillon cylindrique , et font que l'eau tombe tout à la fois sous celte forme cylindrique ; la quan- tité d’eau est si grande et la chute en est si précipitée que si malheureusement une de ces trombes tomboit sur un vaisseau, elle le briseroit et le submergeroit dans un instant. On prétend, et cela pourroit être fondé, qu’en tirant sur la trombe plusieurs coups de canon chargés à boulets, on la rompt, et que cette commotion de l’air la fait cesser assez promptement : cela revient à l’effet des cloches qu’on sonne pour écarter les nuages qui portent le tonnerre et la grêle. L’autre espèce de trombe s’appelle ly phon ; et plusieurs auteurs ont confondu le typhon avec l’ouragan , surtout en parlani des tem- pêtes de la mer de la Chine , qui est en effet sujette à tous deux : cependant ils ont. des causes bien différentes. Le typhon ne des- cend pas des nuages comme la première es- pèce de trombe; il n’est pas uniquement produit par le tournoiement des vents comme l’ouragan : il s’élève de la mer vers le ciel avec une grande violence; et quoique ces typhons ressemblent aux tourbillons qui s’é- lèvent sur la terre en tournoyant , ils ont une autre origine. On voit souvent, lorsque les vents sont violens et. contraires, les oura gans élever des tourbillons de sable , de terre, et souvent ils enlèvent et transportent dans ce tourbillon les maisons, les arbres , les animaux. Les typhons de mer, au con- traire, restent dans la même place, et ils n’ont pas d’autre cause que celle des feux souterrains; car la mer est alors dans une grande ébullition, et l’air est si fort rempli d’exhalaisons sulfureuses, que le ciel paroîl caché d’une croûte couleur de cuivre , quoi- qu’il n’y ait aucun nuage et qu’on puisse i5 THÉORIE DE LA TERRE. 226 voir à travers ces vapeurs le soleil et les étoi- les : c’est a ces feux souterrains qu’on peut attribuer la tiédeur de la mer de la Chine en hi ver, où ces typhons sont très-fréquens r. Nous allons donner quelques exemples de la manière dont ils se produisent. Yoici ce que dit Thévenot dans son Voyage du Le- vant : « Nous vîmes des trombes dans le golfe Persique entre les îles Quésomo , La- réea et Orinus. Je crois que peu de per- sonnes ont considéré les trombes avec tonte l’attention que j’ai faite dans la rencontre dont je viens de parler, et peut-être qu’on n’a jamais fait les remarques que le hasard m’a donné lieu de faire; je les exposerai avec toute la simplicité dont je fais profes- sion dans tout le récit de mon voyage, aün de rendre les choses plus sensibles et plus aisées à comprendre. « La première qui parut à nos yeux étoit du côté du nord ou tramontane, entre nous et l’île Quésomo , à la portée d’un fusil du vaisseau ; nous avions alors la proue à grec levant ou nord-est. Nous aperçûmes d’abord en cet endroit l’eau qui bouillounoit et étoit élevée de la surface de la mer d’environ un pied; elle étoit blanchâtre, et au dessus pa- roissoit co rme une fumée noire un peu énaisse, de manière que cela ressembloit proprement à un tas de paille où l’on auroit mis le feu, mais qui ne feroit encore que fumer : cela faisoit un bruit sourd, sembla- ble à celui d’un torrent qui court avec beau- coup de violence dans un profond vallon ; mais ce bruit étoit mêlé d’un autre un peu plus clair, semblable à un fort sifflement de serpens ou dbies. Un peu après nous vîmes comme un canal obscur qui avoit assez de ressemblance à une fumée qui va montant aux nues en tournant avec beaucoup de vi- tesse, et ce canal paraissait gros comme le doigt , et le même bruit Continuoit toujours. Ensuite la lumière nous en ôta la vue, et nous connûmes que cette trombe étoit finie, parce que nous vîmes que cette trombe ne s’élevait plus, et ainsi la durée n’avoit pas été de plus d’un demi-quart d’heure. Celle-là finie, nous en vîmes une autre du côté du midi , qui commença de la même manière qu’avoit fait la précédente ; presque aussitôt il s’en fit une semblable à côté de celle-ci vers le couchant , et incontinent après une troisième à côté de cette seconde ; la plus éloignée des trois pouvoit être à portée du mousquet loin de nous; elles paroissoient toutes trois comme trois tas de paille hauts 1. Voyez Acta crud. Lips. supp. , t. I , p. 4o5. d’un pied et demi ou de deux , qui fumoi beaucoup, et faisoient même bruit qu première. Ensuite nous vîmes tout aul j de canaux qui venoient depuis les nues i ces endroits où l’eau étoit élevée , et cha de ces canaux étoit large par le bout tenoit à la nue, comme le large bout d’ trompette, et fais .it la même figure (p } l’expliquer intelligiblement) que peut f I la mamelle ou la tette d'un animal tirée pendiculairement par quelque poids, i canaux paroissoient blancs d’une blanch i blafarde , et je crois que c'était l’eau étoit dans ces canaux tronsparens qui I faisoit paroi tre blancs ; car apparemmen étoient déjà formés avant que de tirer l’i selon qu’on peut juger par ce qui suit lorsqu ils étoient vides, ils ne paroisse pas, de même qu’un canal de verre fort c exposé au jour devant nos yeux à que la distance, ne paroît pas, s’il n’est rempli i in liqueur teinte. Ces canaux netoient P droits, mais courbés en quelques endrvjt même ils n’étoient pas perpendiculaires sic contraire, depuis les nues où ils paroisse la entés jusqu’aux endroits où ils tiraient f! ire ils étoient fort inclinés; et ce qui est »e plus particulier, c’est que la nue où étoi é: tachée la seconde de ces trois ayant ftti chassée du vent, ce canal la suivit sanilne rompre et sans quitter le lieu où il 1 |« l’eau, et passant derrière le canal de la «r mière, ils furent quelque temps cr< Ile: comme en sautoir, ou en croix de S; «te André. Au commencement ils étoient fis trois gros comme le doigt, si ce n’est amp de la nue qu’ils étoient plus gros, corllil j’ai déj ! remarqué; mais dans la suite 1 le) de la première de ces trois se grossit ce* dérabiemeut ; pour ce qui est des deu: Ici très, je n’en ai autre chose à dire, ca ;»qi dernière formée ne dura guère davarjU qu’avoit duré celle que nous avions vu b côté du nord. La seconde du côté du i |t dura environ un quart d’heure ; ma 1 îrdi première de ce même côté dura un pér i te vantage, ci ce fut celle qui nous doin 1 îes plus de crainte; et ce t de celle-là qu i j Je reste encore quelque chose à dire. D’a U| son canal étoit gros comme le doigt ; en i » il se fit gros comme le bras , et après coi j irai la jambe, et enfin comme un gros j : in d’arbre, autant qu’un homme pourrait U, brasser. Nous voyions distinctement ai 1 m| vers de ce corps transparent l’eau qui 1 i toit en serpentant un peu, et queïquefi fc( diminuoit un peu de grosseur, tantôt! s f haut et tantôt par bas : pour lors U res > ART. XV. VENTS IRREGULIERS* OURAGANS. 227 oit justement à un boyau rempli de quei- e matière Suide que l’on presserait avec J doigts, ou par haut pour faire descendre te liqueur, ou par bas pour la faire mon- ; et je me persuadai que c’étoit la vio- ce du veut qui faisoit ces ehangeinens , saut monter l’eau fort vite lorsqu’il pres- t le canal par le bas , et la faisant des- idre lorsqu’il le pressoit par le haut, res cela il diminua tellement de grosseur, il étoil plus menu que le bras , comme boyau qu’on allonge en le tirant perpen- ulairement ; ensuite il retourna gros lime la cuisse ; après il redevint fort ïu : enfin je vis que l’eau élevée sur la serfïcie de la mer commençoit à s’abais- et le bout du canal qui lui touchait , a sépara et s’étrécit, comme si on l’eût et alors la lumière qui nous parut par noyen d’un nuage qui se détourna , m’en la vue. Je ne laissai pas de regarder éli- te quelque temps si je ne le reverrais nt, parce que j’avois remarqué que par is ou quatre fois le canal de la seconde ce même côté du midi nous avoit paru rompre par le milieu , et incontinent •ôs nous te revoyions entier, et ce n é toit es 3 la lumière qui nous en cachait la moi- : mais j’eus beau regarder avec toute i’at- ition possible ; je 11e revis plus celui-ci , et an ie se lit plus de trombe , etc. Ges trombes sont fort dangereuses sur r ; car si elles viennent sur un vaisseau , s se mêlent dans les voiles , en sorte que Sj eîquefois elles l'enlèvent , et , le laissant mite retomber, elles le coulent à fond , et ni la arrive particulièrement quand c’est un it vaisseau ou une barque : tout au moins, elles n’enlèvent pas un vaisseau , elles upent toutes les voiles, ou bien laissent m nber dedans toute l’eau qu’elles tiennent; qui le fait souvent couler à fond. Je ne îte point que ce ne soit par de sembla- s accidens que plusieurs des vaisseaux it on n’a jamais eu de nouvelles , ont été mai -dus, puisqu’il n’y a que rop d’exemples ceux que l’on a su de certitude avoir péri cette manière. » Je soupçonne qu’il y a plusieurs illusions l ’ilptique dans les phénomènes que ce voya- iir nous raconte ; mais j’ai été bien aise rapporter les faits tels qu’il a cru les voir, ,ii U qu’on puisse ou les vérifier, ou du lit tins les comparer avec ceux que rappor- I au It les autres voyageurs. Voici la descrip- it 11 qu’en donne Le Gentil dans son Voyage niefl tour du monde : « A onze heures du ma- nil , l’air étant chargé de nuages, nous vîmes autour de notre vaisseau , à un quart de lieue environ de distance, six trombes de mer qui se formèrent avec un bruit sourd, semblable à celui que fait l’eau en coulant dans des canaux souterrains ; ce bruit s’ac- crut peu à peu, et ressentbloit au sifflement que font les cordages d’un vaisseau lors- qu’un vent impétueux s’y mêle. Nous re- marquâmes d’abord l'eau qui houiilonnoit et qui s’élevoit au dessus de la surface de la mer d’environ un pied et demi; il paraissait au dessus de (e bouillonnement un brouil- lard, ou plutôt une fumée épaisse, d'une couleur pâle , et celte fumée formait une espèce de canal qui montait à la nue. « Les canaux ou manches de ces trombes se pliaient selon que le vent emportait les nues auxquelles ils étoient attachés; et mal- gré l’impulsion du vent , non seulement ils ne se détachoient pas , mais encore il sem- bloit qu’ils s’allongeassent pour les suivre, en s’étrécissant et se grossissant à mesure que le nuage s’élevoit ou se baissoit. « Ces phénomènes nous causèrent beau- coup de frayeur, et nos matelots , au lieu de s’enhardir, . fomentaient leur peur parles contes qu’ils débitoient. Si ces trombes * disoient ils, viennent à tomber sur notre vaisseau, elle l’enlèveront, et, le laissant ensuite retomber, elles le submergeront. D’autres (et ceux-ci étoient les officiers) ré- pondoient d’un ton décisif qu’elles n’enlè- veroient pas le vaisseau, mais que venant à le rencontrer sur leur route, cet obstacle romproit la communication qu’elles avoienÇ avec l’eau de la mer, et qu’étant pleines d’eau , toute l’eau qu’elles renfermeroienî tomberoit perpendiculairement sur le tillac du vaisseau et lé briserait. « Pour prévenir ce malheur, on amena les voiles et on chargea le canon , les gens de mer prétendant que le bruit du canon, agi- tant 1 air, fait crever les trombes et les dis- sipe : mais nous n’eûmes pas besoin de recourir à ce remède; quand elles eurent couru pendant dix minutes autour du vais- seau , les unes à un quart de lieue , les au- tres à une moindre distance, nous vîmes que les canaux s’étrécissoient peu à peu, qu’ils se détachèrent de la superficie de la mer, et qu’enfm ils se dissipèrent f. » ) Il paroît par la description que ces deux voyageurs donnent des trombes, qu’êllés sont produites , au moins en partie , par l’ action d’un feu ou d’une fumée qui s’élève du fond de la mer avec qne grande violence, 1. Tome I , page 191. ire! i5. 228 THEORIE DE LA TERRE. et qu’elles sont fort différentes de l’autre espece de tiombe qui est produite par l’ac- tion des vents contraires, et par la compres- sion forcée et la résolution subite d’un ou de plusieurs nuages , comme le décrit M. Shaw : « Les trombes , dit-il 1 , que j’ai eu occasion de voir, m’ont paru autant de cylindres d’eau qui tomboient des nuées , quoique par la réflexion des colonnes qui descendent , ou par les gouttes qui se déta- chent de l’eau qu’elles contiennent et qui tombent, il semble quelquefois , surtout quand on en est à quelque distance, que l’eau s’élève de la mer en haut. Pour rendre raison de ce phénomène, on peut supposer que les nuées étant assemblées dans un même endroit par des vents opposés, ils les obligent , en les pressant avec violence, de se condenser et de descendre en tour- billons. » Il reste beaucoup de faits à acquérir avant qu’onpuisse donner une explication c omplète de ces phénomènes; il me paroît seulement que s’il y a sous les eaux de la mer des ter- rains mêlés de soufre , de bitume et de mi- néraux, comme l’on n’en peut guère douter, on peut concevoir que ces matières venant à -s'enflammer produisent une grande quan- tité d'air 2 comme en produit la poudre à canon; que cette quantité d’air nouvellement généré et prodigieusement raréfié s’échappe et monte avec rapidité, ce qui doit élever l’eau et peut produire ces trombes qui s’élè- vent de la mer vers le ciel : et de même si, par, l’inflammation des matières sulfureuses que contient un nuage, il se forme un cou- rant d’air qui descende perpendiculairement du nuage vers la mer, toutes les parties aqueuses que contient le nuage peuvent sui- vre le courant d’air et former une trombe qui tombe du ciel sur la mer. Mais il faut avouer que l’explication de cette espece de trombe, non plus que celle que nous avons donnée par le tournoiement des eaux et la compression des nuages, ne satisfait pas en- core a tout ; car on aura raison de nous de- mander pourquoi l’on ne voii pas plus sou- vent sur la terre, comme sur la mer, de ces especes de trombes qui tombent perpendi- culairement des nuages. U Histoire de L’ Académie , année 1727, fait men.ion d’une trombe déterré qui pa- rut à Capestan près de Béziers ; c’étoit une colonne assez noire qui descendoit d’une nue jusqu à terre, et diminuoit toujours de 1. Tome II , page 56. 2. Voyez f Analyse de l’air de M. Haies, et le Traité de Taitillerie de M. Robins. largeur en approchant de la terre , où ell ? se lerminoit en pointe ; elle obéissoitau ven ! qui soufüoit de l’est au sud-ouest ; elle étoi j accompagnée d’une espèce de fumée fo ! épaisse et d’un bruit pareil à celui d’uni mer fort agitée, arrachant quantité de rejti tons d olivier, déracinant des arbres et ju qu’à un gros noyer qu’elle transporta jusqu I quarante ou cinquante pas, et marquant sel chemin par une large trace bien battue, ci trois carrosses de front auroient passé. 1 parut une autre colonne de la même figurjj mais qui se joignit bientôt à la première; fl apres que le tout eut disparu, il tomba uij grande quantité de grêle. Cette espece de trombe paroît être enco 1 différente des deux autres : il n’est pas ci quelle contint de l’eau, et il semble, ta I par ce que je viens d’en rapporter, que p j j l’explication qu’en a donnée M. Andoqu l lorsqu'il a fait part de l’observation de ( phénomène à l’Académie, que cette Iromil n’étoit qu’un tourbillon de vent épaissi jj rendu visible par la poussière et les vaper jj condensées qu’il conlenoit. Dans la mêi SI histoire, année 17.41, il est parlé d’u j I trombe vue sur le lac de Genève : c’ét | une colonne dont la partie supérieure aboi tissoit à un nuage assez noir, et dont la p;j lie inférieure, qui étoit plus étroite, se tu minoit un peu au dessus de l’eau. Ce ml téore ne dura que quelques minutes ; et de j : le moment qu il se dissipa, on aperçut un j vapeur épaisse qui montoit de l’endroit 1 j il avoit paru, et là même les eaux du , ! bouillonnoient etsembloient faire effort pc s’élever. L’air étoit fort calme pendant j temps que parut cette trombe; et lorsqu’f i se dissipa, il ne s’ensuivit ni vent ni plu j 1 «Avec tout ce que nous savons déjà, j; l’historien de l’Académie, sur les tromilj I marines , ne seroit-ce pas une preuve b 1 plus quelles 11e se forment point pari seul conflit des vents, et qu’elles sont pi !• que toujours produites par quelque érupt 1 de vapeurs souterraines , ou même de Vj- cans , dont on sait d’ailleurs que le fond î la mer n’est pas exempt? Les tourbillîl d’air et les ouragans qu’on croit connnu jr ment être la cause de ces sortes de plié - menes, pourroient donc bien n’en être «Je l’effet ou une suite accidentelle. » 9 Sur la violence des vents du midi dai j quelques contrées septentrionales, j * Les voyageurs russes ont observé c jà l’entrée du territoire de Milim , il y a su je ART. XV. VENTS DU MIDI. <229 bord de la Lena , à gauche , une grande [daine entièrement couverte d’arbres ren- | versés, et que tous ces arbres sont couchés u sud au nord en ligne droite , sur une tendue de plusieurs lieues; en sorte que jout ce district, autrefois couvert d’une paisse forêt, est aujourd’hui jonché d’arbres [ans cette même direction du sud au nord, i'et effet des vents méridionaux dans le nord 1 S aussi été remarqué ailleurs. Dans le Groen- 1 and, principalement en automne, il règne 111 les vents si impétueux, que les maisons s’eu branlent et se fendent ; les tentes et les ba- eaux en sont emportés dans les airs. Les Jroenlandois assurent même que quand ils eulent sortir pour mettre leurs canots à I* 'abri , ils sont obligés de ramper sur le ven- in , de peur d’être le jouet des vents. E11 ilé, on voit s’élever de semblables tourbil- lons, qui bouleversent les flots de la mer, ;t font pirouetter les bateaux. Les pins fières empêtes viennent du sud , tournent au nord f s’y calment : c’est alors que la glace des "kaies est enlevée de son lit, et se disperse :ll?ur la mer en monceaux. ( Add . Buff) Sur les trombes. 01 J * M. de La Nux , que j’ai déjà eu occasion ^ le citer plusieurs fois dans mon ouvrage, 111 ;t qui a demeuré plus de quarante ans dans lÊf’îîe de Eourbon, s’est trouvé à portée de voir un grand nombre de trombes, sur les- quelles il a bien voulu me communiquer ses Observations, que je crois devoir donner ici ‘par extrait. üi! Les trombes que cet observateur a vues , I se sont formées, i° dans des jours calmes et des intervalles de passage du vent de la par- ! fie du nord à celle du sud, quoiqu’il en ait ’ pu une qui s’est formée avant ce passage du II vent à l’autre, et dans le courant même d’un " peut d e nord , c’est-à-dire assez long-temps '‘avant que ce vent eût cessé ; le nuage duquel ^ cette trombe dépendoit, et auquel elle te- Oioil, étoit encore violemment poussé; le so- 11 leil se montrait eu même temps derrière lui, :[ eu égard à la direction du vent : c’éloit le 1(6 janvier, vers les onze heures du matin. | 20 Ces trombes se sont formées pendant le jour, dans des nuées détachées , fort 11 épaisses en apparence, bien plus étendues que profondes, et bien terminées par d s- sous parallèlement à l’horizon, le dessous \\ de ces nuées paroissant toujours fort noir. “j 3° Toutes ces trombes se sont montrées d’abord sous la forme de cônes renversés, dont les bases étoient plus ou moins larges. 4° De ces différentes trombes qui s’an- nonçoient par ces cônes renversés, et qui quelquefois lenoient au même nuage, quel- ques-unes n’ont pas eu leur entier effet ; les unes se sont dissipées à une petite distance de nuage; les autres sont descendues vers la surface de la mer, et en apparence fort près, sous la forme d’un long cône aplati , très- étroit et pointu par le bas. Dans le centre de ce cône, et sur toute sa longueur, régnoit un canal blanchâtre, transparent et d’un tiers environ du diamètre du cône, dont les deux côtés étoient fort noirs, surtout dans le commencement de leur apparence. Elles ont été observées d’un point de l’île de Jfourbon élevé de cent cinquante toises au dessus du niveau de la mer, et elles étoient, pour la plupart, à trois, quatre, ou cinq lieues de distance de l’endroit de l’observation, qui étoit la maison même de l’observateur. Voici la description détaillée de ces trombes. Quand le bout de la manche, qui pour lors est fort pointu, est descendu environ au quart de la distance du nuage à la mer, on commence à voir sur l’eau, qui d’ordi- naire est calme et d’un blanc transparent , une petite noirceur circulaire, effet du fré- missement (ou tournoiement) de l’eau : à mesure que la pointe de celte manche des- cend, l’eau bouillonne, et d’autant plus que cette pointe approche de plus près la sur- face de la mer, et l’eau de la mer s’élève successivement en tourbillon , à plus ou moins de hauteur, et d’environ vingt pieds dans les plus grosses trombes. Le bout de la manche est toujours au dessus du tourbillon, dont la grosseur est proportionnée à celle de la trombe qui le fait mouvoir. Il ne pa- roxt pas que le bout de la manche atteigne jusqu’à la surface de la mer, autrement qu’en se joignant au tourbillon qui s’élève. On voit quelquefois sortir du même nuage de gros et de petits cônes de trombes; il y en a qui ne paroisseut que comme des filets, d’autres un peu plus forts. Du même nuage on voit sortir assez souvent dix ou douze pe- tites trombes toutes complètes, dont la plu- part se dissipent très-près de leur sortie , et remontent visiblement à leur nuage : dans ce dernier cas, la manche s’élargit tout à coup jusqu’à l’extrémité inférieure, et ne paroît plus qu’un cylindre suspendu au nuage, déchiré par en bas, et de peu de longueur. Les trombes à large base , c’est-à-dire les grosses trombes , s’élargissent insensiblement a 3o THÉORIE DE LA TERRE. dans toute ïeur longueur et par le bas qui paroit s’éloigner de la mer et se rapprocher de la nue. Le tourbillon qu’elles excitent sur l’eau diminue peu à peu , et bientôt la man- che de cette trombe s’élargit dans sa partie inférieure et prend une forme presque cy- lindrique : c’est dans cet étal que des deux côtés élargis du canal on voit comme de l’eau entrer en tournoyant vivement et abondam- ment dans le nuage; et c’eT enfin par le rac- courcissement successif de cette espèce de cylindre que finit l’apparence de la trombe. Les plus grosses trombes se dissipent lê moins vite, quelques-unes clés plus grosses durent plus d’une d; mi-heure. On voit assez ordinairement tomber de fortes ondées , qui sortent du même endroit du nuage d’où sont sorties et auxquelles tien- nent encore quelquefois les trombes : ces ondées cachent souvent aux yeux celles qui ne sont pas encore dissipées. J’en ai vu, dit IV!. de La Nux, deux le 26 octobre 1775 , très-distinctement, au milieu d’une ondée qui devint si forte , qu’elle m’en déroba la vue. Le vent , ou l'agitation de l’air inférieur sous la nuée , ne rompt ni les grosses ni les petites trombes; seulement cette impul- sion les détourne de la perpendiculaire : les plus petites forment des courbes très-remar- quables , et quelquefois des sinuosités ; en sorte que leur extrémité qui aboutissoit à l’eau de la mer, étoit fort éloignée de l’a- plomb de l’autre extrémité qui étoit dans le nuage. On 11e voit plus de nouvelles trombes se former lorsqu’il est tombé de la pluie des nuages d’où elles partent. « Lé 14 juin de l’année 1756, sur les quatre heures après midi , j’étois , dit M. de La Nux, au bord de la mer , élevé de vingt à vingt-cinq pieds au dessus de son niveau. Je vis sortir d’un même nuage douze à qua- torze trombes complètes, dont trois seule- ment considérables , et surtout la dernière. Le canal du milieu de la manche étoit si transparent, qu’à travers je voyais les nuages que derrière elle, à mon égard, le soleil éclairoit. Le nuage , magasin de tant de trombes , s’étendoit à peu près du sud-est au nord-ouest , et cette grosse trombe , dont il s’agit uniquement ici, me restoit vers le sud-sud-ouest : le soleil étoit déjà fort bas, puisque nous étions dans les jours les plus courts. Je ne vis point d’ondées tomber du nuage : son élévation pouvoit être de cinq ou six cents toises au plus. » Plus le ciel est chargé de nuages, et plus il est aisé d’observer les trombes et toutes les apparences qui les accompagnent. , M. de La Nux pense, peut-être avec rai- 1 son , que ces trombes ne sont que des por- tions visqueuses du nuage, qui sont entraî- nées par différent tourbillons, c’est-à-dire j par des tournoiemens de l’air supérieur en gouffré dans les masses des nuées dont h nuage total est composé. Ce qui paroit prouver que ces trombe; ! sont composées de parties visqueuses , c’es i leur ténacité, et , pour ainsi dire, leur collé ronce; car elles font des inflexions et de : courbures, même en sens contraire, sans s< rompre: si cette matière des trombes n’étoi pas visqueuse, pourroit-on concevoir com : ment elles se courbent et obéissent au: vents , sans se rompre? Si toutes les partie n’étoient pas fortement adhérentes entr elles, le vent les dissiperoit, ou tout a i moins les feroit changer de forme ; mai I comme celte forme est constante dans le trombes grandes et petites, c’est un indicj presque certain dè la ténacité visqueuse d i la matière qui les compose. » Ainsi le fond de la matière des trombe •f1 est une substance visqueuse contenue daii| ^ les nuages , et chaque trombe est formée pa| ^ un tourbillon d’air qui s’engouffre entre ît!| 1(11 nuages, et boursouflant le nuage inférieur! le perce et descend avec son enveloppe dj matière visqueuse; et comme les trombïS qui sont complètes descendent depuis nuage jusque sur la surface de la mer, real frémira, bouillonnera, tourbillonnera à Loi droit vers lequel le bout de la trombe seij dirigé par l’effet de l’air qui sort deî'extrcij 1 mité de la trombe comme du tuyau d’u J « soufflet : les effets de ce soufflet sur la nul f! augmenteront à mesure qu’il s’en apprdj i chera, et que l’orifice de cette espèce ci1» tuyau , s’il vieil! à s’élargir, laissera sort ? 1 a plus d’air. O11 a cru mal à propos que les tromb< i I > enlevoient l’eau de la mer, et qu’elles ( j ! ■ l'enfermoient une grande quantité: ce cp a fortifié ce préjugé, ce sont les pluies, cil» plutôt les averses qui tombent souvent ai ; environs des trombes. Le canal du milic M de toutes les trombes est toujours transp; I refit, de quelque côté qu’on les regarde : ' I l’eau de la mer paroit monter, ce n’est p i ) • dans ce canal , mais seulement dans si > côtés; presque toutes les trombes souffre | des inflexions , et ces inflexions se font so ; vent en sens contraire, en forme d'S, do ! la tête est au nuage et la queue à la me ! Les espèces de trombes dont nous A'eno ART. XV. le parler ne peuvent donc contenir de l’eau, jii pour la verser à la mer, ni pour la mon- Jér au nuage : ainsi ces trombes ne sont à ijjraindre que par l’impétuosité de Pair qui Sort de leur orifice inférieur; car il paroîtra Certain à tous ceux qui auront occasion l'observer ces trombes , qu’elles ne sont lomposées que d’un air engouffré dans un jiuage visqueux, et déterminé par son toui’- toiemenl vers la surface de la mer. M. de La Nux a vu des trombes autour e Pile de Bourbon dans les mois de janvier, mai, juin, octobre, c’est-à-dire en toutes taisons; il en a vu dans des temps calmes pt pendant de grands vents : mais néanmoins bn peut dire que ces phénomènes ne se [montrent que rarement, et ne se montrent guère que sur la mer, parce que la viscosité les nuages ne peut provenir que des parties Sitümineüses et grasses que la chaleur du loleil et les vents enlèvent à la surface des iaux de la mer, et qui se trouvent rassem- blées dans des nuages assez voisins de sa audace; c’est par cette raison qu’on ne voit îas de pareilles trombes sur la terre, où il l’y a pas, comme sur la surface de la mer, une fbbndamfe quantité de parties bitumineuses ît huileuses que faction de la chaleur pour- ’oil én détacher. On en voit cependant quel- piefois sur la terre , et même à de grandes listalicës de la mer; ce qui peut arriver orsque les nuages visqueux sont poussés apidemenl par un vent violent de la mer ters les terres. M. de Grignon a vu au mois le juin 1768, en Lorraine, près de Vau- ùiiier, dans les coteaux qui sont une suite le l’empiètement des Vosges, une trombe rès-bien formée; elle avoit environ cin- (ùante toises de hauteur; sa forme éloit :el!e d’une colonne, et elle communiquoit 1 un gros nuage fort épais, et poussé par in ou plusieurs vents violens, qui faisoient minier rapidement la trombe, et produi- oient des éclairs et des coups de tonnerre, [bette trombe ne dura que sept ou huit minutes , et vint se briser sur la base du îoteau , qui est élevé de cinq ou six cents lieds '. Plusieurs voyageurs ont parlé des trombes le nier, mais personne 11e les a si bien ob- iërvées que M. de La Nux. Par exemple , îes voyageurs disent qu’il s’élève au dessus le la mer une fumée noire, lorsqu’il se orme quelques trombes ; nous pouvons as- >ùrer que cette apparence est trompeuse, ît ne dépend que de la situation de l’obser- 1. Note communiquée par M. de Grignon à M. de îuffoh, le 6 août 1777. TROMBES. a3i vateur : s’il est placé dans un lieu assez élevé pour que le tourbillon qu’une trombe excite sur l’eau ne surpasse pas à ses yeux 1 horizon sensible, il ne verra que de l’eau s’élever et retomber en pluie, sans aucun méiange de fumée, et on le reconnoîtra avec la der- nière évidence $ si le soleil éclaire le lieu du phénomène. Les trombes dont nous venons de parler n’ont rien de commun avec les bouillonne-, meiïs et les fumées que les feux sous-marins excitent quelquefois , et dont nous avons fait mention ailleurs ; ces trombes ne ren- ferment ni n’excitent aucune fumée. Elles sont assez rares partout : seulement les lieux de la mer où l’on en voit le plus souvent sont les plages des climats chauds, et en même temps celles où les calmes sont ordi- naires et où les vents sont le plus iucon- stans; elles sont peut-être aussi plus fré- quentes près les îles et vers les côtes que dans la pleine mer. [Acid. Bu/f.) ARTICLE XVI. Des r, volcans et des tremblemens de terre. Les montagnes ardentes qu’on appelle ' volcans renferment dans leur sein le soufre, le bitume et les matières qui servent d’aSi- ment à un feu souterrain, dont l’effet, plus violent que celui de la poudre ou du ton- nerre, a de tout temps étonné, effrayé les hommes et désolé la terre. Un volcan est un canon d’un volume immense, dont l’ou- verture a souvent plus d’une demi-lieue : cètie large bouche à feu vomit des torrens de fumée et de flammes, des fleuv s de bi- tume, de soufre et de métal fondu, des nuées de cendres et de pierres, et quelque- fois elle lance à plusieurs lieues de distance des masses de rochers énormes, et que toutes les forces humaines., réunies ne pôur- rôient pas mettre en mouvement. L’embra- sement est si terrible, et la quantité des matières ardentes , fondues , calcinées , vitri- fiées,- que la montagne rejette , est si abon- dante, qu’elles enterrent les villes, les fo- rets, couvrent les campagnes de cent et de deux cents pieds d’épaisseur, et forment quelquefois des collines et des montagnes qui ne sont fjue des monceaux de Ces ma- tières entassées. L’action de ce feu est si grande, la force de l’explosion est si vio- lente, qu’elle produit pàV sa réaction des secousses assez fortes pour ébranler et faire trembler la terre, agiter la mer, renverser les montagnes, détruire les villes etlesédi- 23a THEORIE DE LA TERRE. fices les plus solides, à des distances même très-considérables. Ces effets, quoique naturels, ont été re- gardés comme des prodiges; et quoiqu’on \oie en petit des effets du feu assez sem- blables à ceux des volcans, le grand, de quelque nature qu’il soit, a si fort le droit de nous étonner, que je ne suis pas surpris que quelques auteurs aient pris ces mon- tagnes pour les soupiraux d’un feu central, et le peuple pour les bouches de l’enfer. L’étonnement produit la crainte et la crainte fait naître la superstition : les habitans de l’île d’Islande croient que les mugissemens de leur volcan sont les cris des damnés, et que leurs éruptions sont les effets de la fureur et du désespoir de ces malheu- reux. Tout cela n’est cependant que du bruit , du feu et de la fumée : il se trouve dans une montagne des veines de soufre , de bi- tume et d’autres matières inflammables; il s’y trouve en même temps des minéraux , des pyrites, qui peuvent fermenter et qui fermentent en effet toutes les fois qu’elles sont exposées à l’air ou «à l’humidité; il s’en trouve ensemble une très-grande quan- tité ; le feu s’y met et cause une explosion proportionnée à la quantité des matières enflammées, et dont les effets sont aussi plus ou moins grands dans la même proportion; voila ce que c’est qu’un volcan pour un phy- sicien, et il lui est facile d’imiter l’action de ces feux souterrains , en mêlant ensem- ble une certaine quantité de soufre et de limaille de fer qu’on enterre à une certaine profondeur, et de faire ainsi un petit volcan dont les effets sont les mêmes , proportion gardée, que ceux des grands; car il s’en- flamme par la seule fermentation, il jette la terre et les pierres dont il est couvert, et il fait de la fumée, de la flamme et des ex- plosions. Il y a en Europe trois fameux volcans , le mont Etna en Sicile, le mont Hécla en Is- lande et le mont Yésuve en Italie près de Naples. Le mont Etna brûle depuis un temps immémorial ; ses éruptions sont très- violentes, et les matières qu’il rejette si abondantes, qu’on peut y creuser jusqu’à soixante-huit pieds de profondeur, où l’on a trouvé des pavés de marbre et des vestiges d’une ancienne ville qui a été couverte et enterrée sous cette épaisseur de terre reje- tée, de la même façon que la ville d’Héra- clée a été couverte par les matières rejetées du Vésuve. Il s’est formé de nouvelles bou- ches de feu dans l’Etna en i65o, 1669 et en d’autres temps. O11 voit les flammes et les fumées de ce volcan depuis Malte, qui ; en est à soixante lieues : il s’en éleve con- tinuellement de la fumée , et il y a des j temps où cette montagne ardente vomit avec I impétuosité des flammes et des matières de toute espèce. En i537, il y eut une érup- tion de ce volcan qui causa un tremblement de terre dans toute la Sicile pendant douze jours, et qui renversa un très-grand nombre de maisons et d’édifices; il ne cessa que par l’ouverture d’une nouvelle bouche à feu, qui brûla tout à cinq lieues aux en\ irons de laj montagne; les cendres rejetées par le volcan i étoient si abondantes et lancées avec tant de i force , qu’elles furent portées jusqu’en Ita-i lie , et des vaisseaux qui étoient éloignés de la Sicile en furent incommodés. Fazelli dé- crit fort au long les embrasemens de cette montagne, dont il dit que le pied a cent lieues de circuit. Ce volcan a maintenant deux bouches principales ; l’une est plus étroite que l’au tre. Ces deux ouvertures fument toujours . mais on n’y voit jamais de feu que dans hl temps des éruptions : on prétend qu’on f trouvé des pierres qu’il a lancées jusqu’il soixante mille pas. En x683, il arriva un terrible tremble-, j ment en Sicile , causé par une violente i éruption de ce volcan; il détruisit entière- j u ment la ville de Catane et fil périr plus dt j ïn soixante mille personnes dans cette ville j seule, sans compter ceux qui périrent dan; j les autres villes et villages voisins. j L’Hécla lance ses feux à travers les glace; et les neiges d’une terre gelée ; ses éruption; sont cependant aussi violentes que celles de l’Etna et des autres volcans des pays méri dionaux. Il jette beaucoup de cendres , de ; pierres ponces et quelquefois, dit-on, de l’eau bouillante; on ne peut pas habiter il six lieues de distance de ce volcan, e toute l’ile d’Islande est fort abondante ei, soufre. On peut voir l’histoire des vio: lentes éruptions de l’Hécla dans Dithmal Bleffken. ( Le mont Vésuve, à ce que disent le j historiens, n’a pas toujours brûlé et il n’j commencé que du temps du septième con| sulat de Tite Vespasien et de Flavius Domil tien : le sommet s’étant ouvert, ce volcaiï rejeta d’abord des pierres et des rochers e S ensuite du feu et des flammes en si grand abondance, qu’elles brûlèrent deux ville; voisines, et des fumées si épaisses qu’elle | obscurcissoient la lumière du soleil. Pline voulant examiner cet incendie de trop près ART. XVI. VOLCANS ET TREMBLEMENS DE TERRE. 233 jit étouffé par la fumée r. Dion Cassius pporte cpie cette éruption du Vésuve fut violente , qu’il jeta des cendres et des mées sulfureuses en si grande quantité et ' |rec tant de force, qu’elles furent portées squ’à Rome, et même au delà de la mer éditerranée en Afrique et en Egypte. ! une des deux villes qui fut couverte des atières rejetées par ce premier incendie Vésuve, est celle d’Héraclée, qu’on a trouvée dans ces derniers temps a plus de ixante pieds de profondeur sous ces ma- ! îres , dont la surface étoit devenue , par succession du temps , une terre labou- M ble et cultivée. La relation de la décou- rte d’iïéraclée est entre les mains de tout inonde : il seroit seulement à désirer que lelqu'un versé dans l’histoire naturelle et physique, prît la peine d’examiner les fférentes matières qui composent cette ijiaisseur de terrain de soixante pieds ; lie a il fit en même temps attention à la dis- bj bsition et à la situation de ces mêmes ma- int ères , aux altérations qu’elles ont pi\>dui- is I (s ou souffertes elles-mêmes, à la direction mi Telles ont suivie, à la dureté qu’elles ont (|iij tquise , etc. jj II y a apparence que Naples est situé sur illt li terrain creux et rempli de minéraux enj plans , puisque le Vésuve et la Solfatare 1er? ?m b lent avoir des communications inié- sili leures ; car quand le Vésuve brûle , la Sol- vl tare jette des flammes ; et lorsqu’il cesse, N I Solfatare cesse aussi. La ville de Naples ;t à peu près à égale distance entre les ace îux. io» i Une des dernières et des plus violentes Tpptions du Vésuve a été celle de l’année )én 737 ; la montagne vomissoit par plusieurs jouches de gros torrens de matières métal- liques fondues et ardentes , qui se répan- er jpient dans la campagne et s’alloient jeter , i àns la mer. M. de Montealègre, qui com- mniqua cette relation à l’Académie des 'H ciences , observa avec horreur un de ces ni! jieuves de feu , et vit que son cours étoit é six ou sept milles depuis sa source jus- fli u’à la mer, sa largeur de cinquante ou » bixante pas, sa profondeur de vingt-cinq * u trente palmes et , dans certains fonds ou allées, de cent vingt; la matière qu'il rou- is kit oit semblable à l'écume qui sort du rs jpumeau d’une forge , etc. 2. m En Asie , surtout dans les îles de l’océan il adieu , il y a un grand nombre de vol- f 1. Voyez l’Épître de Pline le jeune à Tacite. 2. Voyez Y Histoire de i’ Académie , année 1737, il âges 7 et 8. cans ; l’un des plus fameux est le mont Al- bours auprès du mont Taurus , à huit lieues de Hérat : son sommet fume continuelle- ment et il jetie fréquemment des flammes et d’autres matières en si grande abondance, que toute la campagne aux environs est couverte de cendres. Dans File de Ternate il y a un volcan qui rejette beaucoup de matière semblable à la pierre ponce. Quel- ques voyageurs prétendent que ce volcan est plus enflammé et plus furieux dans le temps des équinoxes que dans les autres saisons de l’année, parce qu’il règne alors de certains vents qui contribuent à embra- ser la matière qui nourrit ce feu depuis tant d’années. L’île de Ternate n’a que sept lieues de tour et n’est qu’un sommet de montagne ; on monte toujours depuis le rivage jusqu’au milieu de l’île, où le volcan s’élève à une hauteur très-considérable et à laquelle il est très-difficile de parvenir. Il coule plusieurs ruisseaux d’eau douce qui descendent sur la croupe de cette même montagne ; et lorsque l’air est calme et que la saison est douce, ce gouffre embrasé est dans une moindre agitation que quand il fait de grands vents et des orages. Ceci con- firme ce que j’ai dit dans le discours précé- dent, et semble prouver évidemment que le feu qui consume les volcans ne vient pas de la profondeur de la montagne, mais du sommet ou du moins d’une profondeur assez petite , et que le foyer de l’embrasement n’est pas éloigné du sommet du volcan ; car si cela n’étoit pas ainsi, les grands vents ne pourroient pas contribuer à leur embrase- ment. Il y a quelques autres volcans dans les Moluques. Dans l’une des îles Mauriees, à soixante-dix lieues des Moluques, il y a un volcan dont les effets sont aussi violens que ceux de la montagne de Ternate. L’île de Sorca, l’une des Moluques, étoit autre- fois habitée ; il y avoit au milieu de cette île un volcan, qui étoit une montagne très- élevée. En 1693 , ce volcan vomit du bitume et des matières enflammées en si grande quantité , qu’il se forma un lac ardent qui s’étendit peu à peu , et toute l’île fut abîmée et disparut. Au Japon , il y a aussi plusieurs volcans, et dans les îles voisines du Japon les navigateurs ont remarqué plusieurs mon- tagnes dont les sommets jettent des flammes pendant la nuit et de la fumée pendant le jour. Aux îles Philippines il y a aussi plu- sieurs montagnes ardentes. Un des plus fa- meux volcans des îles de l’océan Indien , et en même temps un des plus nouveaux , est celui qui est près de la ville de Panaru- 234 THÉORIE DE LA TERRE. can dans l’île de Java : il s’est ouvert en i586; on n’avoit pas mémoire qu’il eût brûlé auparavant; et à la première éruption il poussa une énorme quantité de soufre , de bitume et de pierres. La même année, le mont Gounapi dans File de Bànda, qui brûloit seulement depuis dix-sepl ans, s’ou- vrit et vomit avec un bruit affreux des ro- chers et des matières de toute espèce. 11 y à encore quelques autres volcans dans ies Indes, comme à Sumatra et dans le nord de l’Asie , au delà du fleuve Jénisca et de la rivière de Pésida : mais ces deux derniers volcans ne sont pas bien reconnus. En Afrique il y à une monlagü'é, ou plu- tôt une caverne appelée Reniguazcval, au- près de Fez , qui jette toujours de la fumée , el quelquefois des flammes. L’une des îles du cap Vert, appelée File de Fuogue , n’est qu’une grosse montagne qui brûle conti- nuellement : ce volcan rejette, comme les autres , beaucoup de cendres et de pierres; et les Portugais, qui ont plusieurs fois tenté de' faire des habitations dans cette île, ont été contraints d’abandonner' leur projet par la crainte des effets du volcan. Aux Cana- ries, le pic de Ténériffe , autrement appelé la montagne de Teide, qui passe pour ètré l’une des plus hautes montagnes de la terre, jette du feti , des cendres et de grosses pier- res : du sommet coulent des ruisseaux de soufre fondu du côté du sud à travers les neiges ; ce soufre se coagule bientôt , et forme des veines dans la neige, qu’on peut distinguer de fort loin. En Amérique il y a un très-grand nom- bre de volcans, et surtout dans les mon- tagnes du Pérou et du Mexique : celui d’Aréquipa est un des plus fameux; il cause souvent des tremblemens de terre plus com- muns dans le Pérou que dans aucun autre pays du monde. Le volcan de Carrapa et celui deMalabalio sont, au rapport des voya- geurs les plus considérables après celui d’A- réquipa ; mais il y en a beaucoup d’autres dont on n’a pas une connoissance exacte. M. Bouguer, dans la relation qu’il a don- née de son voyage au Pérou, dans le vo- lume des Mémoires de l' Académie de Fan- née 1744, fait mention de deux volcans, l’un appelé Cotopaxi, et l’autre Pichincha ; le premier est cà quelque distance el l’autre est très-voisin de la ville de Quito : il a même été témoin d’un incendie de Coto- paxi en 1742, et de l’ouverture qui se fit dans cette montagne d’une nouvelle bouche à feu; celte éruption ne fît cependant d’au- tre mal que celui de fondre lès neiges de la montagne, et de produire ainsi des lorrei d’eau si abondans , qu’en moins de trois he res ils inondèrent Un pays de dix-huit lieu d’étendue , et renversèrent tout ce qui trouva sur leur passage. Au Mexique il y a plusieurs volcans do les plus considérables sont Popocbampècl et i opoeàtepec : ce fut auprès de ce demi volcan que Cortez passa pour aller au Mes que, et il y eût des Espagnols qui mont rent jusqu’au sommet, où ils virent la bo die dû volcan qui â environ une demi-lie de tour. On trouve aussi de ceS montagn de soufré à la Guadeloupe, à Tercère dans les autres îles dés Açores ; et si 011 vo îoit mettre au nombre des volcans toutes 1 montâgheé qui fument ou desquelles il s levé même des flammes , on pourrait 1 compter plus de oixanie : mais nous n’ vous parlé que de ces volcans redouta bl auprès desquels 011 n’Ose habiter, et qui 1 jettent des pierres et des matières minée les à une grande distante. Ces volcans , qui sont en si grand nom! dans les Cordilières , causent, comme je 1 dit, des tremblemens de terre presque ce- tinuels, ce qui empêche qu’on y bâtisse av ® de la pierre au dessus du premier étag et pour ne pas risquer d’être écrasés , habitans de ces parties du Pérou 11e co struisent les étages supérieurs de leurs m ] :in sons qu’avec des roseaux et du bois lég Il y a aussi dans ces montagnes plusiet précipices et de larges ouvertures dont parois sont noires et brûlées, comme dé le précipice du mont Ararath en Armé u qu’on appelle L’Abîme ; ces abîmes sont bouches des anciens volcans qui se sc éteints. Il y a eu dernièrement un tremblemt de terre à Lima dont les effets ont été t< ribles ; la ville de Lima et le por de Cal ont été presque entièrement abîmés, m le mal a encore été plus considérable au C lào. La mer a couvert de ses eaux tous édifices, el par conséquent noyé tous habitans; il 11’est resté qu’une tour. De vin cinq vaisseaux qu’il y avoit dans ce port, y en a eu quatre qui ont été portés à tu lieue dans les terres, et le reste a été n premier livre, rapporte qu’il y avoit une i;i[Jj ille en Phénicie, située auprès de Sidon , ujr Jui lut engloutie par un tremblement de ^ prre , et avec elle le territoire voisin et les eux tiers mêmes de la ville de Sidon , et ni ne cet effet ne se fit pas subitement , de I )rte qu’il donna le temps à la plupart des (( àbitaus de fuir; que ce tremblement s’é- ,a) mdit presque par toute la Syrie et jusqu’aux (af, es Cyclades, et en Eubée , où les fontaines n’Arélhuse tarirent tout à coup et ne re- ârurent que plusieurs jours après par de iouvelles sources éloignées des anciennes; J tee tremblement ne cessa pas d’agiter l’île, jel jmtôt dans un endroit , tantôt dans un au- J -e , jusqu’à ce que la terre se fût ouverte jj ans la campagne de Lépante et qu’elle eût Rejeté une grande quantité de terre et xie I îafières enflammées. Pline, dans son pre- mier livre, chap. 84, rapporte que sous le lègne de Tibère il arriva un tremblement f terre qui renversa douze villes d’Asie; t dans son second livre, chapitre 83, il lit mention dans les termes süivans d’un rodige causé par un tremblement de terre : Factum estsemel (quodequidem inEtruscæ disciplinæ voluminibus inveni) ingens ler- ràrum portentum, Lucio Marcio, Sex. Julio coss. in agro Mutinensi. Namque montes duo inter se concurrerunt , cre- pitu maximo adsultantes, recedentesque, inter eos flammâ fumoque in cœlurn éxeunte interdiù , speclante è via Æmiiiâ magnà equitum Romanorum , familiarum- que et viatorum multitudîne. Eo concursu villæomnes elisæ; animalia permulta, quæ intra fuerant , exanimata sunt , etc. » iaint Augustin (de Miraculis , lib. ix , Kap. 3) dit que par un très-grand tremble- ment de terre, il y eut cent villes renver- ées dans là Libye. Du temps de Trajan, la ville d’Antioche et une grande partie du pays adjacent furent abîmés par un trem- blement de terre; et du temps de Justi- nien, en 028, cette ville fut une seconde fois détruite par la même cause avec plus de quarante mille de ses habitans ; et soixante ans après, du temps de saint Grégoire, elle essuya un troisième tremblement avec perle de soixante mille de ses habitans. Du temps de Saladin, en 1x82 , la plupart des villes de Syrie et du royaume de Jérusalem furent détruites par la même cause. Dans la Pouille et dans la Calabre il est arrivé plus de trem- blemens de terre qu’en aucune autre partie de l’Europe : du temps du pape Pie II, toutes les églises et les palais de Naples fu- rent renversés; il y eut près de trente mille personnes de tuées, et tous les habitans qui restèrent furent obligés de demeurer sous des tentes jusqu’à ce qu’ils eussent ré- tabli leurs maisons. En 1629, il y eut des tremblemens de terre dans la Pouille , qui firent périr sept mille personnes ; et en i638, la ville de Sainîe-Euphémie fut en- gloutie, et il n’est resté en sa place qu’un lac de fort mauvaise odeur; Raguse et Smyrne furent aussi presque entièrement détruites. Il y eut en 1692 un tremblement de terre qui s’étendit en Angleterre, en Hollande, en Flandre, en Allemagne, en France, et qui se fil sentir principalement sur les côtes de la mer et auprès des gran- des rivières ; il ébranla au moins deux mille six cents lieues carrées; il ne dura que deux minutes : le mouvement étoit plus considérable dans les montagnes que dans les vallées. En 1688, le 10 de juillet , il y eut un tremblement de terre à Smyrne qui commença par un mouve- ment d’occident en orient. Le château fut renversé d’abord, ses quatre murs s’étant entr’ouverts et enfoncés de six pieds dans la mer. Ce château, qui étoit un isthme, est à présent une véritable île éloignée de la terre d’environ cent pas , dans l’endroit où la langue de terre a manqué : les murs qui étoient du couchant au levant sont tombés; ceux qui alloient du nord au sud sont restés sur pied. La ville, qui est à dix milles du château, fut renversée presque aussitôt; on vit en plusieurs endroits des ouvertures à la terre, on entendit divers bruits souter- rains : il y eut de cette manière cinq ou six secousses jusqu’à la nuit ; la première dura environ une demi-minute : les vaisseaux qui étoient à la rade furent agites, le terrain de la ville a baissé de deux pieds; il n’est resté qu’environ le quart de la ville, et prin- a36 THÉORIE DE LA TERRE. cipalement les maisons qui étoient sur des rochers : on a compté quinze ou vingt mille personnes accablées par ce tremblement de terre. En 1695, dans un tremblement de terre qui se fit sentir à Bologne en Italie, on remarqua , comme une chose particu- lière, que les eaux devinrent troubles un jour auparavant. « Il se fit un si grand tremblement de terre à Tercère, le 4 mai 1614, qu’il ren- versa en la ville d’Angra onze églises et neuf chapelles, sans les maisons particulières, et en la ville de Praya il fut si effroyable, qu’il n’y demeura presque pas une maison debout; et le 16 juin 1628, il y eut un si horrible tremblement dans l’île de Saint- Michel, que proche de là la mer s’ouvrit et fit Sortir de son sein, en un lieu où il y avoit plus de cent cinquante toises d’eau , une île qui avoit plus d’une lieue et demie de long et plus de soixante toises de haut T. Il s’en étoil fait un autre en i5gi, qui com- mença le vingt-six de juillet, et dura, dans l’île de Saint-Michel, jusqu’au 21 du mois suivant ; Tercère et Fayal furent agitées le lendemain avec tant de violence, qu’elles paroissoient tourner ; mais ces affreuses se- cousses n’y recommencèrent que quatre fois, au lieu qu’à Saint-Michel elles ne cessèrent point un moment pendant plus de quinze jours; les insulaires, ayant abandonné leurs maisons qui tomboient d’elles mêmes à leurs yeux , passèrent tout ce temps exposés aux injures de l’air. Une ville entière, nommée Yilla-Franca , fut renversée jusqu’aux fon- dements , et la plupart de ses habitans écra- sés sous les ruines. Dans plusieurs endroits les plaines s’élevèrent en collines , et dans d’autres quelques montagnes s’aplanirent ou changèrent de situation; il sortit de la terre une source d’eau vive qui coula pendant quaire jours, et qui parut ensuite sécher tout d’un coup ; l’air et la mer , encore plus agités, retentissoient d’un bruit qu’on auroit pris pour le mugissement de quantité de bêtes féroces; plusieurs personnes mouroient d’effroi ; il n’y eut point de vaisseaux dans les ports mêmes qui ne souffrissent des at- teintes dangereuses, et ceux qui étoient à l’ancre ou à la voile à vingt lieues aux en- virons des îles , furent encore plus maltrai- tés. Les tremblemens de terre sont fréquens aux Açores ; vingt ans auparavant il en etoit arrivé un dans l’île de Saint-Michel, qui avoit renversé une montagne fort haute. Il s’en fit un à Manille , au mois de sep- i. Voyez les Voyages de Mande Islo. tembre 1627, qui aplanit une des deux montagnes qu’on appelle Carvalîos , dans la ! province de Cagayan. En 1645 , la troisième partie de la ville fut ruinée par un pareil accident , et trois cents personnes y périrent ; l’année suivante elle en souffrit encore un autre. Les vieux Indiens disent qu’ils étoient autrefois plus terribles , et qu’à cause de cela on ne bâtissoit les maisons que de bois ce que font aussi les Espagnols, depuis le premier étage. « La quantité des volcans qui se trouvent dans l’île confirme ce qu’on a dit jusqu’à présent , parce qu’en certains temps ils vo missent des flammes, ébranlent la terre, et font tous ces effets que Pline attribue à ceux d’Italie, c’est-à-dire de faire change! de lit aux rivières et retirer les mers voi- sines, de remplir de cendres tous les envi- rons, et d’envoyer des pierres fort loin avec un bruit semblable à celui du canon 2 » « L’an 1646, la montagne de 1 île de Ma- chian se feudit avec des bruits et un fracat épouvantables , par un terrible tremblemén de terre, accident qui est fort ordinaire ei; ces pays-là : il sortit tant de feux par cettt] fente, qu’ils consumèrent plusieurs nègre ries avec les habitans et tout ce qui y étoil O11 voyoit encore, l’an i685, cette prodi gieuse fente, et apparemment elle subsisl toujours; on la nominoit l’ornière de Ma;j - chian , parce qu’elle descendoit du haut e bas de la montagne, comme un chemin qi y auroit été creusé, mais qui de loin ne pi roissoit être qu’une ornière. « L 'Histoire de l’Jcadémie fait mention dans les termes suivants, des tremblemeï de terre qui se sont faits en Italie en 170 et 1703 : « Les tremblemens commencèrei en Italie au mois d’octobre 1702, et cor tinuèrent jusqu’au mois de juillet 1703 les pays qui en ont le plus souffert , et qi sont aussi ceux par où ils commencèrent sont la ville de Norcia avec ses dépendai ces dans l’Etat ecclésiastique, et la proviir de l’Abruzze. Ces pays sont contigus et 5 tués au pied de l’Apennin , du côté du ùïic « Souvent les tremblemens ont été aecoi pagnés de bruits épouvantables dans l’ai 1 et souvent aussi 011 a entendu ces bruits sa qu’il y ait eu de tremblemens, le ciel éta même fort serein. Le tremblement du 2 il vrier 1703 , qui fut le plus violent de ton j fut accompagné, du moins à Rome, d’irl grande sérénité du ciel et d’un grand cah dans l’air : il dura à Rome une demi-minu :l!t( t|)ll 2. Voyez le Voyage de Gemelli Caireri , p. 1 2 h ART. XVI. VOLCANS ET TREMBLEMENS DE TERRE. 237 t à Aquila, capitale de l’Abruzze, trois leures. Il ruina toute la ville d’Aquila, en- [*»velit cinq mille personnes sous les ruines , fit un grand ravage dans les environs. « Communément les balaneemens de la rre ont été du nord au sud , ou à peu près; ; qui a été remarqué par le mouvement des mpes des églises. « Il s’est fait dans un champ deux ouver- tes, d’où il est sorti avec violence une ■ande quantité de pierres qui l’ont entière- ent couvert et rendu stérile ; après les pier- s il s’élança de ces ouvertures deux jets eau qui surpassoient beaucoup en hauteur s arbres de cette campagne, qui durèrent un îarl d’heure , et inondèrent jusqu’aux cam- ignes voisines. Cette eau est blanchâtre, se ni- able à de l’eau de savon, et n’a aucun goût. k Une montagne qui est près de Sigillo, uirg éloigné d’Aquila de vingt-deux milles, oit sur son sommet une plaine assez grande, vironnée de rochers qui lui servoient jmme de murailles. Depuis le tremblement i 2 février, il s’est fait, à la place de cette aine, un gouffre de largeur inégale, dont plus grand diamètre est de vingt -cinq toi- s, et le moindre de vingt : on n’a pu en mver le fond, quoiqu’on ait été jusqu’à >is cents toises. Dans le temps que se fit tte ouverture , on en vit sortir des flammes , ensuite une très-grosse fumée, qui dura lis jours avec quelques interruptions. « A Gènes, le ier et le 2 juillet i7o3, il eut deux petits tremblemens; le dernier fut senti que par des gens qui travaiiloient r le môle : en même temps la mer dans le rt s’abaissa de six pieds , en sorte que les lères louchèrent le fond , et cette basse Jer dura près d’un quart d’heure. « L’eau soufrée qui est dans le chemin de ime à Tivoli s’est diminuée de deux pieds demi de hauteur , tant dans le bassin que ns le fossé. En plusieurs endroits de la line appelée le Testine , il y avait dessour- s et des ruisseaux d’eaux qui form oient des irais impraticables ; tout sVst séché. L’eau lac appelé l’ Enfer a diminué aussi de pis pieds en hauteur : à la place des an- ilines sources qui ont tari, il en est sorti : nouvelles en . n on à une lieue des premiè- s ; en sorte qu’il y a apparence que ce nt les mêmes eaux qui ont changé de ute1. » Le même tremblement de terre qui , en >38 , forma le Monte ill Cenere auprès de luzzol, remplit en même temps le lac Lu- 1. Page 10, année 1704. :i crin de pierres, de terres, et de cendres; de sorte qu’acluellement ce lac est un terrain marécageux. U y a des tremblemens de terre qui se font sentir au loin dans la mer. M. Shaw rapporte qu’en 1724, étant à bord de la Ga- zelle , vaisseau algérien de cinquante canons , on sentit trois violentes secousses l’une après l’autre, comme si, à chaque fois, on avoit jeté d’un endroit fort élevé un poids de vi gt ou trente tonneaux sur le lest : cela arriva dans un endroit de la Méditerranée où il y avoit plus de deux cents brasses d’eau. Il rapporte aussi que d’autres avoient senti des tremblemens de terre bien plus considéra- bles en d’autres endroits , et un entre autres à quarante lieues ouest de Lisbonne. Schouten, en parlant d’un tremblement de terre qui se fit aux îles Moluques, dit que les montagnes furent ébranlées, et que les vaisseaux qui étoienl à l’ancre sur trente et quarante brasses, se tourmentèrent comme s’ils se fussent donné des culéès sur le rivage, sur des rochers , ou sur des bancs. « L’expé- rience, continue-t-il, nous apprend tous les jours que la même chose arrive en pleine mer où l’on ne trouve point de fond, et que quand la terre tremble, les vaisseaux viennent tout d’un coup à se tourmenter jusque dans les endroits où la mer étoit tranquille2 . » Le Gentil, dans son Voyage autour du Monde , parle des tremblemens de terre dont il a été témoin, dans les termes suivans : «,1'ai, dit- il, fait quelques remarques sur ces tremble- mens de terre. La première est qu’une demi- heure avant que la terre s’agite, tous les ani- maux paroissent saisis de frayeur; les che- vaux hennissent , rompent leurs licous , et fuient de l’écurie ; les chiens aboient ; les oiseaux , épouvantés et presque étourdis , entrent dans les maisons ; les rats et les son.is sortent de leurs trous, etc. La se- conde est que les vaisseaux qui sont à l’ancre sont agités si violemment, qu’il semble que toutes les parties dont ils sont composés vont se désunir ; les canons sau- tent sur leurs affûts , et les mâts, par celte agitation , rompent leurs haubans : c’est ce que j’aurois eu de la peine à croire , si plu- sieurs témoignages unanimes ne m’en avoient convaincu. Je conçois bien que le fond de la mer est une continuation de la terre; que si cette terre est agitée, elle communique son agitation aux eaux qu’elle porte : mais ce que je ne conçois pas , c’est ce mouvement irrégulier du vaisseau , dont tous les mem- 2. Voyez tome VI, page io3, 238 THÉORIE DE LA. TERRE. bres et les parties prises séparément partici- pant à cette agitation , comme si tout le vaisseau faisait partie de la terre, et qu’il ne nageât pas dans une matière fluide; son mou- vement devroit être tout au plus semblable à celui qu’il éprouveroil dans une tempête. D’ailleurs, dans l’occasion où je parle, la surface de la mer étoit unie , et ses flots n’é- toient point élevés; toute l’agitation étoit intérieure , parce que le vent ne se mêla point au tremblement de terre. La troisième remarque est que si la caverne de la terre où le feu souterrain est renfermé va du septen- trion au midi, et si la ville est pareillement située dans sa longueur du septentrion au midi, toutes les maisons sont renversées , au lieu que si cette veine ou caverne fait son effet en prenant la ville par sa largeur , le tremble- ment de terre fait moins de ravage, etc. l. » Il arrive que, dans les pays sujets aux tremblemeus de terre, lorsqu’il se fait un nouveau volcan, les tremblemeus de terre fi- nissent et ne se font sentir que dans les érup- tions violentes du volcan , comme on l’a ob- servé dans l’île Saint-Christophe. Ces énormes ravages produits par les tremblemeus de terre ont fait croire à quel- ques naturalistes que les montagnes et les inégalités de la surlace du globe n’élolent que le résultat des effets de l’action des feux souterrains, et que toutes les irrégularités que nous remarquons sur la terre dévoient être attribuées à ces secousses violentes et aux bouleversemens qu’elles ont produits. : C’est , par exemple, le sentiment de Ray ; il croit que toutes les montagnes ont été for- mées par des tremblemeus de terre ou par l’explosion des volcans , comme le mont di Centre , file nouvelle près de Santprin, etc. : mais il n’a pas pris garde que ces petites élé- vations formées par l’éruption d’un volcan , ou par l’action d'un tremblement de terre, ne sont pas intérieurement composées de couches horizontales , comme le sont toutes les autres montagnes ; car en fouillant dans le mont di Caere , on trouve les pierres cal- cinées , les cendres, les terres brûlées, le mâchefer , les pierres ponces , tous mêlés et confondus comme clans un monceau de dé- combres. D’ailleurs , si les tremblemeus de terre et les feux souterrains eussent produit les grandes montagnes de la terre , comme les Cordillères , le mon! Taurus, les Alpes , etc. , la force prodigieuse qui auroii élevé ces masses énormes auroit en même temps dé- truit une grande partie de la surface du glo- i. Voyez le Nouveau Noyage autour du monde de Le Gentil, Ionie I, pages ija et soir. be, et l’effet du tremblement auroit été d’ j ne violence inconcevable , puisque les pl fameux tremblemeus de terre dont l’bisto fasse mention n’ont pas eu assez de foi i pour élever des montagnes : par exempl il y eut, du temps de Valentinien Ier, ! tremblement de terre qui se fit sentir ch tout le monde connu, comme le rappo ! Ammien Marcellin2, et cependant il n’y < j aucune montagne élevée par ce grand Ire : blement. Il est cependant vrai qu’en calculant î pourvoit trouver qu’un tremblement de te ! assez violent pour élever les plus hautes m< tagnes, ne le seroit pas assez pour dépla |] le reste du globe. Car, supposons pour un instant que | chaîne des hautes montagnes qui trave j| l’Amérique méridionale, depuis la poi | des terres Mageilaniques jusqu’aux mon | gnes de la Nouvelle-Grenade et au golfe Darien , ait été élevée tout à la fois et p (luit, e par un tremblement de terre, etvoy par le calcul l’effet de cette explosion. C< chaîne de montagnes a environ dix-s 11 cents lieues de longueur , et corn numéro f quarante lieues de largeur, y compris 1 Sierras , qui sont des montagnes moins > f vées que les Andes ; la surface de ce len 1 est donc de soixante-huit mille lieues ; j] rées. Je suppose que l’épaisseur de la } [“ tière déplacée par le tremblement est d’ ! lieue , c’est-à-dire que la hauteur raoye [ de ces montagnes , prise du sommet qu’au pied, ou plutôt jusqu’aux cavgj: qui, dans cette hypothèse , doivent les s | porter, n’est que d’une lieue; ce qjjJ m’accordera facilement : alors je dis qu J force de l’exploûon pu du tremblement ; terre aura élevé à une lieue de hauteur 1 1 quantité de terre égale à soixante-huit n 1 lieues cubiques; or, l’action étant éga | la réaction, cette explosion aura connni g qué au reste du globe la même quantité 1 mouvement : mais le globe entier est j î?., 3(0,523, So t lieues cubiques , dont à j 68,ooo, il reste 12, 3 io, 455, 801 lieues c l ques, dont la quantité de mouvement aun égale à celle de 68,uoo lieues cubiques H vées à une lieue ; d’où l’on voit que la f i qui aura été assez grande pour dépi /I 68,000 lieues cubiques et les pousser à } lieue n’aura pas déplacé d’un pouce le r j du globe. Il n’y auroit donc pas d’impossibilité • solue à supposer que les montagnes ont j: ; ■i si n 2. Lib. XXVI, cap. xiv. J- - ^ ^ y- a. . • • « Ifs sL S B . ART. XYL YOLCANS ET îlevées par des trembh mens de terre , si leur composition intérieure, aussi bien que leur forme extérieure, n’étoient pas évi- lemment l’ouvrage des eaux de la mer. L’intérieur est composé de couches régu- ières et parallèles remplies de coquilles ; j’extérieur a une figure dont les angles sont partout correspondons : est-il croyable que Jette composition uniforme et celle forme légulière aient été produites par des secousses ^'régulières et des explosions subites? Blais comme cette opinion a prévalu chez uelques physiciens , eî qu’il nous paroît |ue la nature et les effets des tremblemens e terre ne sont pas bien entendus, nous rayons qu’il est nécessaire de donner sur fêla quelques idées qui pourront servir à claircir cette matière. La terre ayant subi de grands cliangemens sa surface, on trouve, même à des pro- , nideurs considérables , des trous, des ca- ernes, des ruisseaux souterrains, et des ncirqits vides qui se communiquent quel- uefois par des fentes et des boyaux. Il y a a deux espèces de cavernes. Les premières Dut celles qui sont produites par l’action es feux somerrains et des volcans ; l’action u feu soulève, ébranle, et jette au loin les patières supérieures, et en même temps e divise, fend, et dérange celles qui sont | côté , et produit ainsi des cavernes , des ilroftes, des trous, et des anfractuosités : rais cela ne se trouve ordinairement qu’aux jnvirons des hautes montagnes où sont les olcaos , et ces espèces de cavernes pro- uves par l’action du feu sont plus rares ue les cavernes de la seconde espèce, qui ont produites par les eaux. Nous avons vu ue les différentes couches qui composent î globe terrestre à sa surface, sont toutes Rerrompues par desfentes perpendiculaires a iont nous expliquerons l’origine dans la i< iii’e ; les eaux des pluies et des vapeurs, n descendant par ces fentes perpendicu- aires, se rassemblent sur la glaise, et for- aient des sources et des ruisseaux ; elles herehent pai leur mouvement naturel toutes jes petites cavités et les petits vides, et elles eudent toujours à couler et à s’ouvrir des outes, jusqu’à ce qu’elles trouvent une ssue ; elles entraînent en même temps les ables, les terres, les graviers, et les autres patieres qu’elles peuvent diviser, et peu à jeu elles se font des chemins ; elles foraient Jans l’intérieur de la terre des espèces de jetites tranchées ou de canaux qui leur ervent de lit ; elles sortent enfin , soit à la urface de la terre, soit dans la mer, en TREMBLEMENS DE TERRE. 289 forme de fontaines : les matières qu’elles entraînent laissent des vides dont l’étendue peut être fort considérable, et ces vides forment des grottes et des cavernes dont l’origine est, comme l’on voit, bien diffé- rente de celle des cavernes produites par des tremblemens de terre. Il y a deux espèces de tremblemens de terre : les uns causés par l’action des feux souterrains et par l’explosion des volcans , qui ne se font sentir qu’à de petites di- stance et dans les temps que les volcans agissent, ou avant qu’ils s’ouvrent : lorsque les matières qui forment les feux souterrains viennent à fermenter, à s'échauffer, et à s’enflammer, le feu fait effort de tous côtés ; et s’il ne trouve pas naturellement des issues, il soulevé la terre et se fait un pas- sage en la rejetant, ce qui produit un vol- can dont les effets se répètent e! durent à proportion de la quantité des matières in- flammables. Si la quantité des matières qui s’enflamment est peu considérable, il peut arriver un soulèvement et une commotion , un tremblement de terre, sans que pour cela il se forme un volcan : l’air produit et raréfié par le feu souterrain peut aussi trouver de petites issues par où il s’échap- pera , et dans ce cas il n’y aura encore qu’un tremblement sans éruption et sans volcan ; mais lorsque la matière enflammée est en grande quantité, et qu’elle est resserrée par des matières solides et compactes, alors il y a commotion et volcan : mais toutes ces commotions 11e font que la première espèce des tremblemens de terre , et elles ne peu- vent ébranler qu’un petit espace. Une érup- tion Irès-violente de l'Etna -causera, par exemple, un tremblement de terre dans toute î’île de Sicile; mais il 11e s’étendra jamais à des distances de trois ou quatre cents lieues. Lorsque dans le mont Yésuve il s’est formé quelques nouvelles bouches à feu, il s’est fait en même temps des trem- blemens de terré à Naples et dans le voi- sinage du volcan : mais ces tremblemens n’ont jamais ébranlé les Alpes , et ne se sont pas communiqués en France ou aux autres pays éloignés du Vésuve. Ainsi les tremblemens de terre produits par l’action des volcans sont bornés à un petit espace, c’est proprement l’effet de la réaction du feu ; et ils ébranlent la terre , comme l’explo- sion d’un magasin à poudre produit une secousse et un tremblement sensible à plu- sieurs lieues de distance. Mais il y a une autre espèce de tremble- ment de terre bien différente pour les effets 240 THÉORIE DE LA TERRE. et peut-être pour les causes : ce sont les tremblemens qui se font sentir à de grandes distances, et qui ébranlent une longue suite de terrain sans qu’il paroisse aucun nou- veau volcan ni aucune éruption. On a des exemples de tremblemens qui se sont fait sentir en même temps en Angleterre, en France, en Allemagne, et jusqu’en Hon- grie : ces tremblemens s’étendent toujours beaucoup plus en longueur qu’en largeur ; ils ébranlent une bande ou une zone de ter- rain avec plus ou moins de violence en dif- férens endroits, et ils sont presque toujours accompagnés d’un bruit sourd, semblable à celui d’une grosse voiture qui rouleroit avec rapidité. Pour bien entendre quelles peuvent être les causes de cette espèce de tremblement , il faut se souvenir que toutes les matières inflammables et capables d’explosion pro- duisent, comme la poudre, par l’inflamma- tion, une grande quantité d’air; que cet air produit par le feu est dans l’état d’une très-grande raréfaction , et que par l’état de compression où il se trouve dans le sein de la terre, il doit produire des effets très- violens. Supposons donc qu’à une profon- deur très-considérable, comme à cent ou deux cents toises, il se trouve des pyrites et d’autres matières sulfureuses , et que par la fermentation produite par la filtration des eaux ou par d’autres causes elles viennent à s’enflammer , et voyons ce qui doit arriver : d’abord ces matières ne sont pas disposées régulièrement par couches horizontales , comme le sont les matières anciennes qui ont été formées par le sédiment des eaux; elles sont au contraire dans les fentes per- pendiculaires, dans les cavernes au pied de ces fentes, et dans les autres endroits où les eaux peuvent agir et pénétrer. Ces ma- tières, venant à s’enflammer, produiront une grande quantité d’air, dont le ressort , comprimé dans un petit espace comme celui d’une caverne , non seulement ébranlera le terrain supérieur, mais cherchera des routes pour s’échapper et se mettre en liberté. Les routes qui se présentent sont les cavernes et les tranchées formées par les eaux et par les ruisseaux souterrains ; l’air raréfié se précipitera avec violence dans tous ces pas- sages qui lui sont ouverts, et il formera un vent furieux dans ces routes souterraines , dont le bruit se fera entendre à la surface de la terre , et en accompagnera l’ébranle- ment et les secousses; ce vent souterrain produit par le feu s’étendra tout aussi loin que les cavités ou tranchées souterraines , et causera un tremblement plus ou moins granc à mesure qu’il s’éloignera du foyer, et qu’i trouvera des passages plus ou moins étroits ce mouvement se faisant en longueur , l’é- branlement se fera de même; et le trem blement se fera sentir dans une longue zom de terrain; cet air ne produira aucuni éruption, aucun volcan, parce qu’il auri trouvé assez d’espace pour s’étendre, 01 bien parce qu’il aura trouvé des issues , e qu’il sera sorti en forme de vent et de va peur ; et quand même on ne voudroit pa convenir qu’il existe en effet des route souterraines par lesquelles cet air et ce vapeurs souterraines peuvent passer, o; conçoit bien que, clans le lieu même où s fait la première explosion , le terrain étan soulevé à une hauteur considérable , il e? nécessaire que celui qui avoisine ce lieu s divise et se fende horizontalement pou suivre le mouvement du premier, ce qv suffit pour faire des routes qui de proch en proche peuvent communiquer le mouvc plication s’accorde avec tous les phénomène Ce n’est pas dans le même instant ni à 1 même heure qu’un tremblement de terre ; fait sentir en deux endroits distans, p: exemple, de cent ou deux cents lieues ; n’y a point de feu ni d’éruption au deho j par ces tremblemens qui s’étendent an loir et le bruit qui les accompagne presque loi jours marque le mouvement progressif < ce vent souterrain. On peut encore cot fumer ce que nous venons de dire, en liant avec d’autres faits : on sait que 1 mines exhalent des vapeurs ; indépendant ment des vents produits par le courant d eaux , on y remarque souvent des coura d’un air malsain et de vapeurs suffocante; on sait aussi qu’il y a sur la terre des trou des abîmes, des lacs profonds qui produise des vents, comme le lac de Boleslavv Bohème, dont nous avons parlé. Tout ceci bien entendu, je ne vois [ trop comment on peut croire que les trei blemens de terre ont pu produire des me tagnes , puisque la cause même de ces tre blemens sont des matières minérales et sij foreuses qui ue se trouvent ordinairenu j que dans les fentes perpendiculaires ci montagnes et dans les autres cavités de j terre, dont le plus grand nombre a i] produit par les eaux; que ces matières j s’enflammant ne produisent qu’une exp sion momentanée et des vents violeiis <| suivent les routes souterraines des eaux ; (j| la durée des tremblemens n’est en effet c j ART. XVL VOLCANS ET TREMBLEMENS DE TERRE. homentanée à la surface de la terre, et que ar conséquent leur cause n’est qu’une ex- losion et non pas un incendie durable ; qu’enfin ces tremblemens qui ébranlent n grand espace, et qui s'étendent à des dis- nces très-considérables, bien loin d'élever ;s chaînes de montagnes, ne soulèvent pas lerre d’une quantité sensible, et ne pro- lisent pas la plus petite colline dans toute longueur de leur cours. Les tremblemens de terre sont, à la vé* té, bien plus fréquens dans les endroits i sont les volcans qn’ailleurs, comme en cile et à Naples: ou sait, parles observa- ms faites en différens temps, que les plus olens tremblemens de terre arrivent dans temps des grandes éruptions des volcans; ais ces trenfblemens ne sont pas ceux qui Rendent le plus loin, et ils ne pourroient mais produire une chaîne de montagnes. I On a quelquefois observé que les maliè- s rejetées de l’Etna, après avoir été re- ndies pendant plusieurs années, et ensuite imectées par l’eau des pluies, se sont ral- mées , et ont jeté des flammes avec une -plosion assez violente qui produisoit même ie espece de petit tremblement. En 1669, dans une furieuse éruption de Itna , qui commença le 11 mars, le som- îtde la montagne baissa considérablement, ni me tous ceux qui avoieut vu cette mon- ;ne avant cette éruption s’en aperçurent ; qui prouve que le feu du volcan \ient plu- du sommet que de la profondeur iuté- ure de la montagne. BorelLi est du même îtiment, et dit précisément «que le feu 3 volcans ne vient pas du centre ni du ;d de la montagne , mais qu'au contraire tort du sommet et 11e s’allume qu a une s-petite profondeur *. » ILe ont Vésuve a souvent rejeté, dams i éruptions, une grande quantité d’eau aillante: M. Ray, dont le sentiment est j le feu des volcans vient d’une tres-^grande ^fondeur, dit que c’est de l’eau de la mer \ communique aux cavernes intérieures pied de cette montagne ; il en donne pour puve la sécheresse et l’aridité du sommet Vésuve, et le mouvement de la mer, , dans le temps de ces violentes éruptions, oigne des côtes , et diminue au point d’a- r laissé quelquefois à sec le port de Na- s. Mais quand ces faits seroient bien écr- is, ils ne prouveroienl pas d’une maniéré de que le feu des volcans vient dune nde profondeur; car l’eau qu’ils rejettent - IL Voyez Borelli , de Incendiis montis Etna;. Büffon. I, I ’ 241 est certainement l’eau des pluies qui pénètre par les fentes, et qui se ramasse dans les ca- vités de la montagne : on voit* découler des eaux vives et des ruisseaux du sommet des volcans, comme il en découle des autres montagnes élevées ; et comme elles sont creu- ses et qu’elles ont été plus ébranlées que les autres montagnes, il n’est pas étonnant que les eaux se ramassent dans les cavernes qu’el- les contiennent dans leur intérieur, et que ces eaux soient rejetées dans le temps des éruptions avec les autres matières : à l’égard du mouvement de la mer, il provient uni- quement de la secousse communiquée aux eaux par l’explosion ; ce qui doit les faire affluer ou refluer , suivant les différentes cir- constances. Les matières que rejettent les volcans sor- tent le plus souvent sous la forme d’un tor- rent de minéraux fondus, qui inonde tous les environs de ces montagnes : ces fleuves de matières liquéfiées s’étendent même à des distances considérables; et en se refroi- dissant, ces matières, qui sont en fusion, forment des couches horizontales ou incli- nées , qui, pour la position, sont sembla- bles aux coucnes formées par les sédimens des eaux. Mais il est fort aisé de distinguer ces couches produites par l’expansion des matières rejetées des volcans, de celles qui ont pour origine les sédimens de la mer: x° parce que ces couches ne sont pas d’é- gale épaisseur partout; 20 parce qu elles ne contiennent que des matières quon recon- noit évidemment avoir été calcinées, vitri- fiées, ou fondues; 3° parce quelles ne s’é- tendent pas à une grande distance. Comme il y a au Pérou un grand nombre de vol- cans, et que le pied de la plupart des mon- tagnes des Cordilieres es; recouvert de ces matières rejetées par ces volcans , il 11’est pas étonnant qu’on ne trouve pas de co- quilles marines dans ces couches de lerre, elles ont été calcinées et détruites par l’ac- tion du feu : mais je suis persuadé que si l’on creusoit dans la terre argileuse qui , selon M. Bouguer, est la terre ordinaire de la vallée de Quito, on y trouveroit des co- quilles, comme l'on en trouve partout ailleurs; en supposant que cette terre soit vraiment de i’argile, et quelle 11e soit pas, comme celle qui est au pied des montagnes , un ter- rain formé par les matières rejetées des vol- cans. On a souvent demandé pourquoi les vol- cans se trouvent tous dans les hautes mon- tagnes. Je crois avoir sa isfait en partie à cette question dans le discours précédent ; 16 242 THÉORIE DE LA TERRE. mais comme je ne suis pas entré dans un assez grand détail, j’ai cru que je ne de- vôis pas finir cet article sans développer ddvatitàge ce que j’ai dit Sur ce sujet. Lës pics ou les pointes des montagnes étoleut autrefois recouvertes et environnées de sables et de terres que les eaux pluviales ont entraînés dans les vallées; il n’est resté que les rochers et les pierres qui formoient le noyau de la montagne. Ce noyau, se trou- vant à découvert et déchaussé jusqu’au pied, aura encore été dégradé par les injures dé l’air ; la gelée en aura détaché de grosses et de petites parties qui auront roulé au bas; en même temps elle aura fait fendre plu- sieurs rochers au sommet de la montagne; ceux qui foraient la base de ce sommet se trouvant découverts, et n’étant plus appuyés par les terres qui les environnoient , ahront un peu cédé; et en s’écartant les uns des autres ils auront formé de petits intervalles : cet ébranlement de rochers inférieurs n’aura pii se faire sans communiquer aux rochers supérieurs Un mouvement plus grand; ils se seront fendus ou écartés les uns des au- tres. Il se sera donc formé dans ce noyau de montagne une infinité de petites et dé grandes fentes perpendiculaires, depuis le sommet jusqu’à la base des rochers inférieurs; les pluies auront pénétré dans toutes ces fentes, et elles auront détaché, dans l’inté- rieur de la montagne, toutes les parties mi- nérales et toutes les autres matières qu’elles auront pu enlever ou dissoudre; elles au- ront formé des pyrites, des soufres et d’au- tres matières combustibles; et lorsque, par succession des temps, ces matières se seront accumulées en grande quantité, elles auront fermenté, et en s’enflammant elles auront produit les explosions et les autres effets des volcans. Peut-être aussi y a voit-il , dans l’in- térieur de la montagne, des amas de ces malièréé minérales déjà formées, avant que les pluies pussent y pénétrer; dès qu’il se Sera fait des ouverture, ou des fentes qui auront donné passage à l’eau et à l’air, ces matières se seront enflammées et auront formé un volcan. Aucun de ces mouvemens ne pouvant se faire dans les plaines , puis- que tout est en repos, et que rien ne peut se déplacer , il n’est pas surprenant qu’il n’y ait aucun volcan dans les plaines, et qu’ils se trouvent tous en effet dans les hau- tes montagnes. Lorsqu’on a ouvert des minières de char- bon de terre , que l’on trouve ordinairement dans l’argile à une profondeur considérable, il est arrivé quelquefois que le feu s est mis à ces matières ; il y à même des mines d charbon en Écosse , en Flandre * etc. , qi brûlent continuellement depuis plusieu années : la communication de l’air suffit pou produire Cet effet. Mais ces feux qui se soi allumés daûs ces minés ne produisent qi de légères exp.losions i et ils ne forment p des volcans, parce que tout étant solide plein dans ces endroits, le feu ne peut p être excité comme celui des volcans, da ' lesquêls il y a des câvilés et des vides l’air pénètre ; ce qui doit nécessaireme étendre l’embrasement, et peut augmeni l’action du feu au point où nous la voyo lorsqu’elle produit les terribles effets do nous avons parlé. Sur les tremblemens de terre. ti b! Mû tes, tsm * Il y a deux causes qui produisent tremblemens de terre : la première est 1’ faissement subit des cavités de la terre; la seconde, encore plus fréquente et pj s™ violente que la première, est l’action feux souterrains. Lorsqu’une caverne s’affaisse dans le i lieu des continens, elle produit par sa ch une commotion qui s’étend à une plus moins grande dislance, selon la quantité' 1 mouvement donné par la chute de et j‘[ masse à la terre; et à moins que le volui but n’en soit fort grand et ne tombe de t haut , sa chute ne produira pas une secoi assez violente pour qu’elle se fasse resse : |0üj à de grandes distances : l’effet en est bo aux environs de la caverne affaissée; le mouvement se propage plus loin , ce r que par de petits trémoussemens et dé|tréi gères trépidations. Comme la plupart des montagnes pr tives reposent sur des cavernes , parce ( dans le moment de la consolidation , éminences ne se sofit formées que par boursouflures, il s’est fait, et il se fait n|e|| core de nos jours , des affaissemens dan: " montagnes toutes les fois que les voûte; cavernes minées par les eaux ou ébrai jai par quelque tremblement, viennent à crouler : une portion de la montagne faisse en bloc, tantôt perpendiculairen mais plus souvent en s’inclinant beauc et quelquefois même en culbutant. On des exemples frappans dans plusieurs ties des Pyrénées, où les couches de la , jadis horizontales , sont souvent incl de plus de 45 degrés ; ce qui démontr J la masse entière de chaque portion de j tagne dont les bancs sont parallèles J Sires fort Ils îeffo. ART. XVI. VOLCANS ET leux, a penché tou! en bloc, et s’est assise, dans le moment de l’affaissement, sur une Ibase inclinée de 4 S degrés : c’est la cause a plus générale de l'inclinaison des couches Ans les montagnes. C’est par la même rai- 011 que l’on trouve souvent entre deux éminences voisines, des couches qui des- ■eudent de la première et remontent à la econde , après avoir traversé le vallon. Ces louches sont horizontales, et gisent à la même hauteur dans les deux collines oppo- ses , entre lesquelles la caverne s’étant icroulée, la terre s’est affaissée, et le val- on s’est formé sans autre dérangement dans es couches de la terre que le plus ou moins l’inclinaison, suivant la profondeur du val- lon et la pente des deux coteaux correspon- ians. C’estTlà le seul effet sensible de Faffais- èmenl des cavernes dans les montagnes et ! lans les autres parties des continens ter- l’ jestres : mais toutes les fois que cet effet irrive dans le sein de la mer, où les affais- p emens doivent être plus frequens que sur ( a terre , puisque l’eau mine continuellement ps voûtes dans tous les endroits où elles Soutiennent le fond de la mer, alors ces :l)i ffaissemens non seulement dérangent et us ont pencher les couches de la terre , mais té 1s produisent encore un autre effet sensible ctjn faisant baisser le niveau des mers; sa alu auteur s’est déjà déprimée de deux mille tr bises par ces affaissemens successifs depuis cou b. première occupation des eaux; et comme set ouïes les cavernes sous-marines ne son! pas bol ucore à beaucoup près entièrement écrou- ; e :es , il est plus que probable que l’espace eu es mers s’approfondissant de plus en plus, èp rétrécira par la surface, et que par con- équent l’étendue de tous les continens ter- pripsüvs continuera toujours d’augmenter par ret|| retraite et l’abaissement des eaux. 1)11,1 Une seconde cause, plus puissante que pat preiqiere, concourt avec elle pour pro- létaire le même effet; c’est la rupture et dans affaissement des cavernes par l’effort des lûtes jux sous-marins. U est certain qu’il ne se iliràt lit aucun mouvement , aucun affaissement ut à ans le fond de la mer, que sa surface igftE p baisse ; et si nous considérons en gé- infi» ferai les effets des feux souterrains, nous eaiiit kconnoîtrons que, dès qu’il y a du feu, , t)n commotion de la terre ne se borne eurs, oint à de simples trépidations , mais e la-fue l’effort du feu soulève , entr’ouvre la iiicljler et la terre par des secousses violentes lontlf réitérées, qui non seulement renversent in de 1 détruisent les terres voisines , mais encore lelesl TR EM BLEME NS DE TERRE. 243 çbyanlent celles qui sont éloignées , et ra- vagent et bouleversent tout ce qui se trouve sur la route de leur direction. Ces tremblemens de terre , causés par les feux souterrains , précèdent ordinairement les éi\ options des volcans et cessent avec el- les, et quelquefois même au moment où ce feu renfermé s’ouvre un passage dans les flancs de la terre, et porte sa flamme dans les airs. Souvent aussi ces tremble mens épou- vantables continuent tant que les éruptions durent : ces deux effets sont intimement liés ensemble ; et jamais iî ne se fait une grande éruption dans un volcan , sans qw’elle ait été précédée ou du moins accompagnée d’un tremblepient de terre, au lieu que très-sou- vent on ressent des secousses même assez violentes sans éruption de feu. Ces mouve- mens où le feu n’a point de part , provien- nent non seulement de la première cause que nous avons indiquée, c’est-à-dire de l’écroulement des cavernes , mais aussi de Faction des vents et des orages souterrains. On a nombre d’exemples de terres soulevées ou affaissées par la force de ces vents inté- rieui’Si M. le chevalier Hamilton , homme aussi respectable par son caractère, qu’ad- mirable par l’étendue de ses connoissances et de ses recherches en ce genre, ma dit avoir vu entre Trente et Vérone , près du vidage de Roveredo, plusieurs monticules composés de grosses masses de pierres cal- caires , qui ont été évidemment soulevées par diverses explosions causées par des vents souterrains. U n’y a pas le moindre indice de Faction du feu sur ces rochers ni sur leurs fragmens : tout le pays des deux côtés du grand chemin, dans une longueur de près d’une lieue , a été bouleversé de place en place par ces prodigieux efforts des vents souterrains. Les habitons disent que cela est arrivé tout à coup par l’effet d’un trem- blement de terre. Mais la force du vent, quelque violent qu’on puisse le supposer , qe me paroît pas une cause suffisante pour produire d’aussi grands effets; et quoiqu’il n’y ait aucune apparence de feu dans ces monticules sou- levés par la commotion de la terre , je suis persuadé que ces soulèvemens se sont faits par des explosions électriques de la foudre souterraine, et que les vents intérieurs n’y ont contribué qu’en produisant ces orages électriques dans les cavités de la terre. Nous réduirons donc à trois causes tous les mou- vemeus convulsifs de la terre : la première et la plus simple est l’affaissement subit des cavernes- la seconde, les orages et tes coups 16. 244 THÉORIE DE LA TERRÉ. de foudre souterraine : et la troisième , l’ac- tion el les efforts des feux allumés dans l’in- térieur du globe. Il me-paroîi qu’il est aisé de rapporter à l’une de ces trois causes tous les phénomènes qui accompagnent ou sui- vent les Iremblemcns de terre. Si les mouvemens de la terre produisent quelquefois des éminences, ils forment en- core plus souvent des gouffres. Le i5 octo- bre *1773 , il s’est ouvert un gouffre sur le territoire du bourg Induno, dans les états de Modène, dont la cavité a plus de quatre cents brasses de largeur, sur deux cents de profondeur. En 1726, dans la partie sep- tentrionale de l’ Islande , une montagne d’une hauteur considérable- s’enfonça en une nuit par un tremblement de terre , et un lac très- profond prit sa place : dans la même nuit , à une lieue et demie de distance, un ancien lac , dont on ignorait la profondeur , fut en- tièrement desséché et sou fond s’éleva de ma- niéré à former un monticule assez haut, que l’on voit encore aujourd’hui. Dans les mers voisines de la Nouvelle-Bretagne, les tremble- mens de terre, dit M. de Bougainville, ont de terribles conséquences pour la navigation. Les 7 juin, 12 et 27 juillet 1766, il y en a eu trois à Bocro , et le 22 de ce même' mois un à la Nouvelle-Bretagne. Quelquefois ces tremblemens!, anéantissent des îles et des bancs de saille connus; quelquefois aussi ils en créent où il n’y en avoit pas. Il y a des tremblemens de terre qui s’é- tendent très-loin, et toujours plus en lon- gueur qu’en largeur : l’un des plus consi- dérables est celui qui se fit ressentir au Canada en 166 »; il s’étendit sur plus de deux cents, lieues de longueur et cent lieues de largeur, c’est-à-dire sur plus de vingt mille lieues superficielles. Les effets du der- nier tremblement de terre du Portugal se se sont fait de nos jours ressentir encore plus loin : M. le chevalier de Saint-Sauveur, com- mandant pour le roi à Merueis, a dit à 3VI. de Gensanne qu’en se promenant à la rive gauche de la Jouante, en Languedoc, le ciel devint tout à coup fort noir, et qu’un moment apres il aperçut au bas du coteau qui est à la rive droite de celle riviere , un globe de feu qui éclata d’une maniéré terri- ble. Il sortit de Tint rieur de la terre un tas de rochers considérables, el toute cette chaîne de montagnes se fendit depuis Me- rueis jusqu’à Elorac, sur près de six lieues de longueur : '-etle fente a, dans certains en- droits, plus de deux pieds de largeur, et elle est en partie comblée. Il y a d’autres trem- blemens de terre qui semblent se faire saus l. secousseâ et sans grande émotion. Kolb rapporte que, le 24 septembre 1707, de puis huit heures du malin jusqu’à dix heu res, la mer monta sur la contrée du cap Bonne-Espérance, et en descendit sept lo de suite, et avec une telle vitesse, que d’u moment à l’autre la plage étoit alternat vement couverte et découverte par eaux. Je puis ajouter , au sujet des effets dé tremblemens de terre et de l’éboulementd* montagnes par 1 affaissement des cavernes quelques faits assez lécens et qui sont bie constatés. En Norwege, un promontoire appelé Hammers-Jie/ds , tomba tout à cou en entier. Une montagne fori élevée , et pre que adjacente à celle de Cliimboraço , 1 ur des plus hautes des Cordilieres , dans la pr» vince de Quito, s’écroula tout à coup. I fait avec ses circonstances est rapporté dai les Mémoires de MM. de la Conîlamiiie Bouguer. Il arrive souvent de pareils éboul mens et de grands affaissemeus dans les il des Indes méridionales. A Gamma-canon où les Hollandois ont un établissement, un haute montagne s’écroula tout à coup » 167.1, par un temps calme et fort beau qui fut suivi d’uu tremblement de terre q renversa les villages d’alentour, où plusieu milliers de personnes périrent : le 1 1 ao 1772, dans File d Java, province de Cfi ri/jou, l’une des plus riches possessions d Hollandois, une montagne d’environ tri lieues de circonférence s’abîma tout à eou: s’enfonçant et se relevant allernativeme comme les flots de la mer agitée : en mèr temps elle laissoit échapper une quanti prodigieuse de globes de feu qu’on apertr voil de très-loin , et qui jetoient une lurnië aussi vive que celle du jour ; toutes les ph tâtions el trente-neuf negreries ont été e glouties, avec deux mille cent quarante 1 bitans, sans compter les étrangers. Ne pourrions recueillir plusieurs autres exe pies de l’affaissement des terres et de 1 croulement des montagnes par la rupti des cavernes , par les secousses des tremb mens de terre , et par l’action des volcan mais noua en avons dit assez pour qu’on puisse contester les inductions el les con quences générales que nous avons tirées j ces faits particuliers. ( Add. Bujf. ) t Des volcans. * Les anciens nous ont laissé quelqi! notices des volcans qui leur étoient connu et particulièrement de i Euia et du Vésu irjr ART. XVI. VOLCANS ET TREMÜLEMENS DE TERRE. 240 Plusieurs observateurs savans et curieux ont, de nos jours, examiné de plus près la forme et les effets de ces volcans : mais la première chose qui frappe en comparant ces descriptions, c’est qu’on doit renoncer à transmettre à la poslérité la topographie exacte et constante de ces montagnes arden- tes ; leur f irme s’altère et change , pour ainsi dire , chaque jour ; leur surface s’élève ou s’abaisse en différens endroits; chaque éruption produit de nouveaux gouffres ou des éminences nouvelles : s’attacher à, décrire tous ces ehangeiuens , c’est vouloir suivre et représenter les ruines d’un bâtiment incen- dié. Le Vésuve de l’line et l’Etna d’Empé- docle présentoient une face et des aspects différens de ceux qui nous son! aujourd’hui si bien représentés par MM. Hamilton et Brydone; et, dans quelques siècles, ces descriptions récentes ne ressembleront plus à leur objet. Après la surface des mers , rien sur le globe n’est plus mobile et inconstant que la surface des volcans : mais de cette in- constance même et de cette variation de mouvemens et de formes on peut tirer quel- ques conséquences générales en réunissant les observations particulières. ( Add. Bujf ) Exemples des changent en s arrivés dans les 'volcans. * La base de l’Etna peut avoir, soixante lieues de circonférence , et sa hauteur per- pendiculaire est d’environ deux mille toises au dessus du niveau de la mer Méditerra- née. On peut peut donc regarder cette énor- me montagne comme un cône obtus, dont la superficie n'a guere moins de trois cents lieues carrées : cette superficie qonique est partagée en quatre zones placées concentri- quement les unes au dessus des autres. La première et la plus large s’étend à plus de six lieues, toujours en montant doucement, depuis le point le plus éloigné de la base de la montagne ; et cette zone de six lieues de largeur est peuplée et cultivée presque partout. La ville de Catane et plusieurs villa- ges se trouvent dans celte première enceinle , dont la superficie est de plus de deux cent vingt lieues carrées. Tout le fond de ce vaste terrain n’est que de la lave ancienne et mo- derne, qui a coulé des différens endroits de la montagne où se sont faites les explo- sions des feux souterrains ; et la surface de cette lave, mêlée avec les cendres rejetées par ces différentes bouches à feu , s’est con- vertie en une bonne terrre actuellement se- mée de grains et plantée de vignobles, à l’exception de quelques endroits où la lave, encore trop récente , ne fait que commencer à changer de nature, et présente quelques espaces dénués de terre. Vers le haut de cette zone, on voit déjà plusieurs cratères ou coupes plus ou moins larges et profon- des, d’où sont sorties les matières qui ont formé les terrains au dessous La seconde zone commence au dessus de six lieues ( depuis le point le plus éloigné dans la circonférence de la montagne). Cette seconde zone a environ deux lieues de lar- geur en montant : la pente en est plus ra- pide partout que celle de la première zone; et celte rapidité augmente à mesure qu’on s’élève et qu’on s'approche du sommet. Cette seconde zone, de deux lieues de largeur, peut avoir en superficie quarante ou qua- rante-cinq lieues carrées : de magnifiques forêts couvrent toute cette éteùdue, et sem- blent former un beau collier de verdure à la tête blanche et chenue de ce respectable mont. Le fond du terrain de ces belles forêts n’est néanmoins que de la lave et des cen- dres converties par le temps en terres ex- cellentes; et ce qui est encore plus remar- quable, c’est l’inégalité de la surface de cette zone : elle ne présente partout que des collines, ou plutôt des montagnes, tou- tes produites par les différentes éruptions du sommet de l’Etna et des autres bouches à feu qui sont au dessous de ce sommet, et dont plusieurs ont autrefois agi dans cette zone , actuellement couverte de forêts. Avant d arriver au sommet, et après avoir passé les belles forêts qui recouvrent la croupe de cette montagne, on traverse une troisième zone, où il ne croît que de petits végétaux. Cette région est couverte de neige en hiver, qui fond pendant l’été; mais ensuite on trouve la ligne de neige perma- nente qui marque te commencement de la quatrième zone, et s’étend jusqu’au sommet de l’Etna. Ces neiges et ces glaces occupent environ deux lieues en hauteur , depuis la région des petits végétaux jusqu’au sommet , lequel est également couvert de neige et de glace : il est exactement d'une figure coni- que , et l’on voit dans son intérieur le grand cratère du volcan, duquel il sort conti- nuellement des tourbillons de fumée. L’in- térieur de ce cralere est en forme de cône renversé , s’élevant également de tous côtés : ii n’est composé que de cendres et d’autres matières brûlées , sorties de la bou- che du volcan, qui est au centre du cra- tère. L’extérieur de ce sommet est fort es- carpé ; la neige y est couverte de cendres ; 246 et il y fait un très-grand froid. Sur le côté septentrional de cette région de neige, il y a plusieurs petits lacs qui ne dégèlent ja- mais. En général, le terrain de celte der- nière zone est assez égal et d’une même pente, excepté dans quelques endroits; et ce n’est qu’au dessous de cette région de neige qu’il se trouve un grand nombre d’in- égalités , d’éminences, et de profondeurs produites par les éruptions, et que l’on voit les collines et les montagnes plus ou moins nouvellement formées, et composées de ma- tières rejetées par ces différentes bouches à feu. Le cratère du sommet de l’Etna , en 1770, avoit, selon M. Brydôiie, plus d’une lieue de circonférence , et les auteurs anciens et modernes lui ont donné des dimensions très- différentes : néanmoins tous ces auteurs ont raison , parce que toutes les dimensions de celte bouche à feu ont changé; et tout ce que l’on doit inférer de la comparaison des différentes descriptions qu’on en a faites, c’est que le cratere , avec ses bords, s’est éboulé quatre fois depuis six ou sept cents ans. Les matériaux dont il est formé re- tombent dans les entrailles de la montagne , d’où ils sont ensuite rejetés par de nouvelles éruptions qui forment un autre cratère, le- quel s’augmente et s’élève par degrés , jus- qu’à ce qu’il retombe de nouveau dan^le même gouffre du volcan. Ce haut sommet de la moniagne n’est pas le seul endroit où le feu souterrain ait fait éruption; on voit, dans tout le terrain qui forme la croupe de l’Etna, et jusqu’à de irès- grandes distances du sommet, plusieurs au- tres cratères qui ont donné passage au feu , et qui sont environnés de morceaux de ro- chers qui en sont sortis dans différentes éruptions. On peut même compter plusieurs collines, toutes formeps par l’érüplion de ces petits volcans qui environnent le grand ; chacune de ces collines offre à son sommet une coupe ou cratère, au milieu duquel on voit la bouche ou plutôt le gouffre profond de ces volcans particuliers. Chaque éruption de l’Etna a produit une nouvelle montagne ; et peut-être, dit M. Brydone , que leur nombre serviroit mieux que toute autre méthode à déterminer celui des éruptions de ce fameux volcan. La ville de Catane, qui est au bas de la montagne, a souvent été ruinée par le tor- rent des laves qui sont sorties du pied de ces nouvelles moniagnes, lorsqu’elles se sont formées. En montant de Calane à Nicolosi, on oarcourt douze milles de chemin dans THÉORTE DE M TERRE. uii terrain formé d’anciennes laves, et dans lequel on voit des bouches de volcans éteints , qui sont à présent des terres couverles de blé, de vignobles et de vergers. Les laves qui forment cette région proviennent de l’éruption de ces petites moniagnes qui sont répandues partout sur les flancs de l’Elna : elles put toutes sans exception d’une figure régulière, soit hémisphérique, soit conique : chaqüb éruption crée ordinairement une de ces montagnes. Ainsi l’aclion des feux sou- terrains ne s'élève pas toujours jusqu’au sommet de l’Etna ; souvent iis ont éclaté sur la croupe, et, pour ainsi dire, jusqu’au pied de eetle montagne ardente. Ordinaire- ment chacune de ces éruptions du flanc de l’Etna produit une montagne nouvelle, com- posée des rochers, des pierres, et des cen- dres lancées par la force du feu ; et le volume de Ces montagnes nouvelles est plus ou moins énorme, à proportion du temps qu’à duré l’éruption : si elle se fait en peu de jours , elle ne produit qu’une eollinei d’environ une lieue de circonférem e à la base, sur Irois ou quatre ceuts pieds de bailleur perpendiculaire ; mais si l’éruption a duré quelques mois, comme celle de 1669, elle produit alors une montagne considérable de deux ou trois lieues de circonférence sur neuf cents ou mille pieds d élévation; et toutes ces collines enfantées par l’Etna, qui ! a douze' mille pieds de hauleur, ne parois- senl être que de petites éminences faites pour accompagner la majesté de la mère- montagne. Dans le Vésuve, qui n’est qu’un très-petili volcan en comparaison de l’Etna, les érup- tions des flancs de la montagne sont rares, et les laves sortent ordinairement du cra- tère qui est au sommet ; au lieu que dans l’Etna les éruptions se sont faites bien plus souvent par les flancs de la montagne qui par son sommet, et les laves sont sorties d< chacune de ces montagnes formées par de; éruptions sur les côtés de l’Etna. M. Bry- done dit, d’après M. Recupero , que le; masses de pierres lancées par l’Etna s’é- lèvent si haut , qu’elles emploient vingi-unf ; secondes de temps à descendre et retombei j à terre , tandis que celles du Vésuve toffibenl ! en neuf secondes ; ce qui donne douze cen! ï quinze pieds pour ta hauteur à laquelle s’é- ■ lèveni les pierres lancées par le Vésuve, et] six mille six cent quinze pieds pour la liau- ; teur à laquelle montent celles qui sont lan- cées par l'Etna ; d'où l’on pourrait conclura, \ si les observations sont justes, que la foret ; de l’Etna est à celle du Vésuve comme 441 i ART. XVI. VOLCANS ET TREMBLEMENS DE TERRE. ïinai Cgnij M me il| ont à 8 1 , c’est-à-dire cinq à six fois pins ;ra»de. Et ce qui prouve d’une pian i ère Ipémonstralive que le Vésuve n’est qu’un Jrès-foible volcan en comparaison de l’Etna , it J r’est que celui-ci paroît avoir enfanté d’autres ni soni rçïlcahs plus grands que le Vésuve. « Assez jrès de la caverne des Chèvres, dit M. Bry- lone, on voit deux des plus belles monta- gnes qu’ait enfantées l’Etna ; chacun des ratéres de ces deux montagnes est beau- oup plus large que celui du Vésuvje : ils qu'au \°nt à présent remplis par des forêts de dûmes, et revêtus jusqu’à un,e grande pro- ’oiideur d’un sol très-fertile ; le fond du sel îst composé de lavesdans cette région comme d{ lans toutes les autres, depuis le pied de la pontagne jusqu’au sommet. La montagne ionique qui forme le sommet de l’Etna et contient son cratère a plus de trois lieues de irconfcrence ; elle est extrêmement rapide , èt couverte de neige et de glace en tout pç„ temps. Ce grand cratère a plus d’une lieue de circonférence en dedans, et il forme une excavation qui ressemble à un vaste amphi- théâtre ; il en sort des nuages de fumée qui ne s’élèvent point en l’air, mais roulent jvers le bas de la montagne : le cratère est si chaud , qu’il est très-dangereux d’y des- cendre. La grande bouche du volcan est el près du centre du cratère ; quelques-uns des rochers lancés par le volcan hors de son cratère sont d’une grandeur incroyable : le l” jplus gros qu’ait vomi le Vésuve est de forme ronde et a environ douze pieds de diamètre; ceux de l’Etna sont bien plus considérables, et proportionnés à la différence qui se trouve entre les deux volcans. » Comme toute la partie qui environne le sommet de l’Etna présente un terrain égal, sans collines ni vallées jusqu’à plus de deux lieues de distance en descendant , et qu’on y voit encore aujourd’hui les ruines de la tour du philosophe Empédocle, qui vivoit l” quatre ceuts avant l’ère chrétienne, il y a toute apparence que depuis ce temps le grand cratere du sommet de l’Etna n’a fait ' que peu ou point d’ éruptions ; la force du feu a donc diminué, puisqu’il n’agit plus avec violence au sommet et que toutes les éruptions modernes se sont faites dans les régions plus basses de la montagne. Cepen- dant , depuis quelques siècles , les dimensions de ce grand cratere du sommet de l’Etna ont souvent changé : on le voit par les me- sures qu’en ont données les auteurs siciliens en différens temps. Quelquefois il s’est écroulé, ensuite il s’est reformé en s’éle- vant peu à peu jusqu’à ce qu’il s’écroulât de nouveau. Le premier de ces écroulemens , bien constaté, est arrivé en r 1 57 , un se- cond en i32Ç), up troisième en 14.74 , elle dernier en 1669. 35dsii$ je pe crpis pas qu’on doive en conclure avec M. Riydone, que dans peu le cratère s’écroulera de nouveau; l’opinion que cet effet doit arriver tous les cent ans rie me paroît pas assez fondée , et je semis au contraire l res-porté à présumer que le feu n’agissant plus avec la même vio- lence au sommet de ce yolcan , ses forces ont diminué et continueront à s’atfoiblir à mesure jqjue la mer s’éloignera davantage : il l'a déjà fait reculer de plusieurs milles par ses propres forces, il en a construit les digues et les .côtes par ses t orrons de laves ; et d’ailleurs, on sait, par la diminution de la rapidité du Charybde et du Scylla, et par plusieurs autres indices, que la mer de Sicile a considérablement baissé depuis deux mille cinq cents ans : ainsi l’on ne peut guère douter qu’elle ne continue à s’abaisser, et que par conséquent Faction des volcans voisins ne se ralentisse, en sorte que le cra- tère de l’Etna pourra rester t:ès-long-!emps dans son état actuel, et que, s’il vient à retomber dans ce gouffre, ce sera peut-être pour la dernière fois. Je crois encore pou- voir présumer que quoique l'Etna doive être regardé comme une des montagnes primitives du globe, à cause de sa hauteur et de sou immense volume, et que très- anciennement il ait commencé d’agir dans le temps de la retraite générale des eaux, son action a néanmoins cessé après cette retraite, et qu’elle ne s’est renouvelée que dans des temps assez modernes, e’est-a-dire lorsque la mer Méditerranée, s’étant élevée par la rupture du Bosphore et de Gibraltar, a inondé les terres enire la Sicile el l’Italie, et s’est approchée de la base de l’Etna. Peut-être la première des éruptions nou- velles de ce fameux volcan est-elle encore postérieure à cette époque de la nature. « Il me paroît évident, dit M. Brydone, que l’Etna ne brûloit pas au siècle d’Ho- mère, ni même long-temps auparavant; autrement il seroit impossible que ce poele eût tant parlé de la Sicile sans faire men- tion d’un objet si remarquable. » Cette ré- flexion de M. Brydone est très-juste ; ainsi ce n’est qu’après le siècle d’Homere qu’on doit dater les nouvelles éruptions de l’Etna : mais on peut voir, par les tableaux poétiques de Pindare, de Virgile, et par les descrip- tions des auteurs anciens et modernes , combien en dix-huit ou dix-neuf cents ans la face entière de cette montagne et des 1 248 THEORIE DE LA TERRE. contrées adjacentes a subi de changemens et d’altérations par les tremblemeris de terre, par les éruptions, par les torrens de laves, et enfin par la formation de la plu- part des collines et des gouffres produits par tous ces mouvemens. Au reste, j’ai tiré les laits que je viens de rapporter de l’excellent ouvrage de M. Brydone, et j’es- time assez l’auteur pour croire qu’il ne trouvera pas mauvais que je ne sois pas de son avis sur la puissance de l'aspiration des volcans et sur quelques autres conséquences qu'il a cru devoir tirer des faits; personne, avant M. Brydone, ne les a voit si bien observés et si clairement présentés, et tous les savans doivent se réunir pour donner à son ouvrage tous les éloges qu’il mérite. Les torrens de verre en fusion, auxquels on a donné le nom de laves , ne sont pas, comme on pourrait le craire, le premier produit de leruption d’un volcan : ces éruptions s’annoncent ordinairement par un tremblement de terre plus ou moins violent, premier effet de l’effort du feu qui cherche à sortir et à s’échapper au dehors ; bientôt il s échappe en effet , et s’ouvre une route dont il élargit l’issue, en projetant au de- hors les rochers et toutes les terres qui s’opposoient à son passage ; ces matériaux , lancés à une grande distance, retombent les uns sur les autres, et forment une émi- nence plus ou moins considérable, à pro- portion de la durée et de la violence de l’éruption. Comme toutes les terres rejetées sont pénétrées de feu , et la plupart conver- ties en cendres ardentes, l’éminence qui en est composée est une montagne de feu so- lide , dans laquelle s achève la vitrification d’une grande partie de la matière par le fondant des cendres ; dès lors cette matière fondue fait effort pour s’écouler, et la lave éclate et jaillit ordinairement au pied de la nouvelle montagne qui vient de la produire : mais dans les petits volcans, qui n’ont pas assez de force pour lancer au loin les ma- tières qu ils rejettent , la lave sort du haut de la montagne. On voit cet effet dans les éruptions du Vésuve : la lave semble s’élever jusque dans le cratère ; le volcan vomit auparavant des pierres et des cendres qui, retombant à-plomb sur l’ancien cratère , ne font que l’augmenter ; et c’est à travers cette matière additionnelle nouvellement tombée que la lave s’ouvre une issu . Ces deux effets, quoique différens en apparence, sont néanmoins les mêmes : car, dans un petit volcan qui , comme le Vésuve, n’a pas assez de puissance pour enfanter de nouvelles montagnes en projetant au loin les matière j qu’il rejette, toutes tombent sur le sommet I elles en augmentent la hauteur , et c’est at pied de cette nouvelle couronne de matièr que la lave s’ouvre un passage pour s'écouler j Ce dernier effort est ordinairement suivi de calme du volcan ; les secousses de la terr j au dedans, les projections au dehors, cesseni dès que la lave coule : mais 1rs torrens djdl ce verre en fusion produisent des effets en j core plus étendus, plus désastreux, qu ceux du mouvement de la montagne dan son éruption ; ces fleuves de feu ravagent! détruisent, et même dénaturent la surfac j de la terre. Il est comme impossible de leu opposer une digue ; les malheureux liabé tans de Catane en ont fait la triste expé» rience : comme leur ville avoil souvent étl détruite en total ou en partie par les ton rens de lave , ils ont construit de trè-vs fortes murailles de cinquante-cinq pieds di hauteur; environnés de ces remparts, if se croyoient en sûreté : les murailles résisi; tèrenl en effet au feu et au poids du torrenti mais cette résistance ne servit qu’à le gom fier; il s’éleva jusqu’au dessus de ces remi parts, retomba sur la ville, et détruisit toui ce qui se trouva sur son passage. Ces torrens de lave ont souvent une demiij lieue et quelquefois jusqu’à deux lieues d j largeur. « La derni< re lave que nous avoni traversée, dit M. Brydone, avant d’arrivet à Catane, est d une si vaste étendue, que j j croyois qu’elle ne finirait jamais; elle n’i ; certainement pas moins de six ou sept mil!; de large, et elle paraît être en plusieurs em droits d’une profondeur énorme : elle chassé en arriéré les eaux de la mer à plui d’un mille, et a formé un large promontoir j élevé et noir, devant lequel il y a beaucou p d’eau. Cette lave est stérile et n’est couvert I que de très-peu de terreau : cependant ellil est ancienne; car au rapport de Diodore dfl Sicile, cette même lave a été vomie pa.fi l’Etna au temps de la seconde guerre pun fl que : lorsque Syracuse étoit assiégée par ldi Romains, les habitans de Taurominum end voyèrent un détachement pour secourir lelfl assiégés; les soldats furent arrêtés dans leuifl marche par ce torrent de lave qui avoit déj iirç gagné la mer avant leur arrivée au pied d \M la montagne; il leur coupa entièrement Ir passage. Ce fait , confirmé par d’autres au N leurs et même par des inscriptions et de j monumens, s’est passé il y a deux mille ans jH et cependant cette lave n’est encore couvert 1 que de quelques végétaux parsemés , et ell j est absolument incapable de produire di ART. XVI. VOLCANS ET TREMBLEMENS DE TERRE. 249 olé et des vins ; il y a seulement quelques ;ros arbres dans les crevasses qui sont rem- )lies d’un bon terreau. La surface des laves [evient avec le temps un sol très-fertile. «En allant en Piémont, continue M. Bry- 011e, nous passâmes sur un large pont con- truit entièrement de lave. Près de là, la ri- ière se plonge à travers une autre lave, qui st très-remarquable et probablement une es plus anciennes qui soient sorties de Etna ; le courant , qui est extrêmement ra- ide, l’a rongée en plusieurs endroits jusqu’à l profondeur de cinquante ou soixante ieds ; et elon M. Recupero , son cours ccupe une longueur d’environ quarante plies : elle est sortie d’une éminence très- pnsidérable sur la côte septentrionale de Etna; et comme elle a trouvé quelques liées qui sont à l’est, elle a pris son cours ce côté : elle interrompt la rivière d’Al- intara à diverses reprises , et enfin elle ar- jve à la mer près de l’embouchure de cette vière. La ville de Jaci et toutes celles de tte côte sont fondées sur des rochers im- enses de laves, entassés les uns sur les •tires, et qui sont en quelques endroits il une hauteur surprenante ; car il pareil que js torrens enflammés se durcissent en ro- i iers dès qu’ils sont arrivés à la mer De 1( ici à Catane on ne marche que sur la lave; îi e a formé toute cette côte, et, en beaucoup eipndroits, les torrens de lave ont repoussé j( mer à plusieurs milles en arrière de ses alciennes limites... ,A Catane , près d’une lli ûie qui est à présent à (rente pieds de" nofondeur, on voit un endroit escarpé où ib distingue plusieurs couches délavé, avec Ui e de terre très-épaisse sur la surface de lacune : s’il faut deux mille ans pour for- ujfer sur la lave une légère couche de (erre, rlf ji dû s’écouler un temps plus considérable §fre chacune des éruptions qui ont donné abssance à ces couches. On a percé à tra- laùssept laves séparées , placées les unes sur mi autres, et dont la plupart sont couvertes le in lit épais de bon terreau; ainsi la plus en ?se de ces couches paroît s’être formée il leija quatorze mille ans... En 1669, la lave émana un promontoire à Catane, dans un léji droit où il y avoit plus de cinquante pieds ^profondeur d’eau , et ce promontoire est l levé de cinquante autres pieds au dessus du au eau actuel de la mer. Ce torrent de lave des jtit au dessous de Monlpelieri, vint frap- îiis;|* contre cette montagne, se partagea en- ertefcte en deux branches, et ravagea tout le elle /s qui est entre Montpelieri et Catane , iOt elle escalada les murailles, avant de se verser dans la mer; elle forma plusieurs col- lines où il y avoit autrefois des vallées, et combla un lac étendu et profond dont on n’aperçoit pas aujourd’hui le moindre ves- tige.... La côte de Catane à Syracuse est par- tout éloignée de trente milles au moins du sommet de l’Etna ; et néanmoins cette côte, dans une longueur de près de dix lieues , est formée des laves de ce volcan : la niera été repoussée fort loin, en laissant des ro- chers élevés et des promontoires de laves qui défient la fureur des flots et leur présentent des limites qu’ils ne peuvent franchir. Il y avoit, dans le siècle de Virgile, un beau port au pied de l’Etna; il n’en reste aucun vestige aujourd’hui : c’est probablement celui qu’on a appelé mal à propos le port d’Ulysse. On montre aujourd’hui le lieu de ce port à trois ou quatre milles dans l’intérieur du pays : ainsi la lave a gagné toute cette éten- due sur la mer, et a formé tous ces nou- veaux terrains... L’étendue de cette contrée couverte de laves et d’autres matières brûlées est, selon M. Recupero, de cent quatre-vingt- trois milles en circonférence, et ce cercle augmente encore à chaque grande érup- tion. » Voilà donc une terre d’environ trois cents lieues superficielles toute couverte ou formée par les projections des volcans, dans laquelle, indépendamment du pic de l’Etna , l’on trouve d’autres montagnes en grand nombre qui toutes ont leurs cratères propres et nous démontrent autant de volcans particuliers : il ne faut donc pas regarder l’Etna comme un seul volcan, mais comme un assemblage, une gerbe de volcans , dont la plupart sont éteints ou brûlent d’un feu tranquille, et quelques autres, en petit nombre, agissent encore avec violence. Le haut sommet de l’Etna ne jette maintenant que des fumées , et, depuis très-long-temps, il n’a fait aucune projection au ioin , puisqu’il est partout en- vironné d’un terrain sans inégalités à plus de deux lieues de distance, et qu’au dessous de cette haute région couverte de neige 011 voit une large zone de grandes forêts , dont le sol est une bonne-terre de plusieurs pieds d’épaisseur. Cette zone inférieure est, à la vérité, semée d’inégalités, et présente des éminences, des vallons, des collines, et même d’assez grosses montagnes : mais, comme presque toutes ces inégalités sont couvertes d’une grande épaisseur de terre, et qu’il faut une longue succession de temps pour que les matières volcanisées se convertissent en terre végétale , il me paroît qu’011 peut re- garder le sommet de l’Etna et les autres bon- a5o THÉORIE DE LA TERRE. ches à feu qui l’environnoien! jusqu’à quatre ou cinq lieues au( dessous comme des vol- cans presque éteints, ou du moins assoupis depuis nombre de siècles ; car les éruptions dont on peut citer les dates depuis deux mille cinq cents ans se sont faites dans la région plus basse, c’est-à dire à cinq , six et sept lieues de distance du sommet. Il me paroît donc qu’il y a eu deux âges différens pour les volcans de la Sicile : le premier très- ancien, où le sommet de l'Etna a commencé d’agir, lorsque la mer universelle a laissé ce sommet à découvert et s’esî abaissée à quel- ques centaines de toises au dessous ; c’est dès lors que se sont faites les premières érup- tions qui ont produit les laves du sommet et formé les collines qui se trouvent au des- sous dans la région des forêts : mais ensuite les eaux, ayant continué de baisser, ont to- talement abandonné cette montagne, ainsi que toutes les terres de la Sicile et des con- tinens adjaeens ; et , après cette entière re- traite des eaux, la Méditerranée n’étoit qu’un lac d’assez médiocre étendue , et ses eaux étoient très-éloignées de la Sicile et de toutes les contrées dont elle baigne aujour- d’hui les côtes. Pendant tout ce temps, qui a duré plusieurs milliers d’années, la Sicile a été tranquille, l’Etna et les autres anciens Volcans qui environnent son sommet ont cessé d’agir; et ce n’est qu’après l’augmentation de la Méditerranée par les eaux de l’Océan et de la mer Noire, c’est-à-dire après la rupture de Gibraltar et du Bosphore, que les eaux sont venues attaquer de nouveau les mon- tagnes de l’Etna par leur base, et qu’elles ont produit les éruptions modernes et récente^, depuis le sie.cle de Pindare jusqu’à ce jour; car ce poète est le premier qui ait parlé des éruptions des volcans de la Sicile. Il en est de même du Vésuve ; il a fait long-temps partie des volcans éteints de l’Italie , qui sont en très-grand nombre; et ce n’est qu’a- près l’augmentation de la mer Méditerranée que, les eaux s’en étant rapprochées, ses éruptions se sent renouvelées. La mémoire des premières, et même de toutes celles qui avoient précédé le siecle de Pline , éloit en- tièrement oblitérée ; et l’on ne doit pas en être surpris, puisqu'il s’est passé peut-être plus de dix mille ans depuis la retraite en- tière des mers jusqu’à l’augmentation de la Méditerranée , et qu’il y a ce même inter- valle de temps entre la première action du Vésuve et son renouvellement. Toutes ces considérations semblent prouver que les feux souterrains ne peuvent agir avec vio- lence que quand ils sont assez voisins des mers pour éprouver un cjioc cnnfre u grand volume d’eau : quelques autres phi nomènes particuliers paroissent encore d< montrer cette vérité. On a vu quelquefp les volcans rejeter une grande quantit d’eau , et aussi des torrens de bitume. I P. de La Torre , très -habile pfrysjrjjBij rapporte que, le 10 mars j?55, il sortit c pied de la montagpe de l’Etna un large to rent d’eau qui inonda les campagnes d’ale tour. Ce torrent rouloit une quantité de s ble si considérable, qu’elle remplit u plaine très-étendue. Ces eaux étoient foi chaudes. Les pierres et les sables laissés da la campagne ne différoient en rien d ids pierres et du sable qu’on trouve dans mer. Ce torrent d’eau fut immédiatemc suivi d’un torrent de matière enflammé qui sortit de la même ouverture. Cette même éruption de 17 55 s’annom dit M. d’Arthenay , par un si grand brasement, qu’il éelairoit plus de vinn quatre milles de pays du côté de Catar les explosions furent bientôt si fréqu les, que, des Je 3 mars, on apercevoit nouvelle montagne au dessus du sommet l’ancienne, de la même- manière que n l’avons vu au Vésuve dans ces dernii temps. Enfin les jurais de Mascali mandé le 12, que le 9 du même mois explosions devinrent terribles; que la fui augmenta à tel point que le ciel en fut scurci ; qu’à l’entrée de la nuit il comme à pleuvoir un déluge de petites piem pesant jusqu’à trois onces, dont tou pays et les cantons circonvoisins fu inondés ; qu’à cette pluie affreuse , qui c plus de cinq quarts d’heure , en succéda autre de cendres noires , qui continua t la nuit ; que le lendemain, sur les huit 1 res du matin, le sommet de l’Etna v< un fleuve d’eau comparable au Nil; qu anciennes laves les plus impraticables leurs montuosités, leurs coupures, et 1 pointes , furent en un clin d’œil couve I par ce torrent en une vaste plaine de sa que l’eau, qui heureusement n’avoit cl que pendant un demi-quart d’heure, très-chaude; que les pierres et les s: qu’elle avoit charriés avec elle ne differ en rien des pierres et du sable de la 1 qu’après l’inondation il étoit sorti de h me bouche un petit ruisseau de fei coula pendant vingi-quatre heures ; q «f :!i qui s’y sont faites en différais temps, » par lesquelles sortent les laves, ces torra de matières , qui sortent quelquefois di ; it flancs , et qui tantôt courent sur la croup de la montagne, se répandent dans les can pagnes, et quelquefois jusqu’à la mer, < s’endurcissent comme une pierre lorsque I matière vient à se refroidir.... « A la cime du Vésuve on ne voit qu’un espèce d’ourlet ou de rebord de quatre cinq palmes de large , qui , prolongé autoii de la Cime, décrit une circonférence de cin mille six cent vingt-quatre pieds de Pari} On peut marcher commodément sur ce ri bord. Il est mut couvert d’un sable brûlé qui est rouge eu quelques endroits , et sot lequel on trouve des pierrres partie nati relies, partie calcinées.... On remarque, dar deux élévations de ce rebord, des lits d pierres naturelles, arrangées comme dan toutes les montagnes; ce qui détruit le ser. ART. XVI. VOLCANS ET TREMBLEMENS DE TERRE fiment de ceux qui regardent le Vésuve [ comme une montagne qui s’est élevée peu à peu au dessus du plau du vallon.... r « La profondeur du goiiffrë où la matière iniboiiillorlue est de cinq cent quarante-trois 11 pieds : pour la hauteur de la montagne de- pt puis sa cime jusqu’au niveau de la mer, elle K lest de seize cent soixante-dix-sept pieds, qui (font le tiers d’un mille d’Italie. Ü « Cette hauteur a vraisemblablement été lophis considérable. Les éruptions qui ont 1 changé la forme extérieure de la montagne Fi en ont aussi diminué l’élévation par les par- ilijties qu’elles ont détachées du sommet , et a qui ont roulé dans le gouffre. » 1 ' D’après tous ces exemples, si nous consi- dérons la forme extérieure que nous présen- tent la Sicile et les aùlrès terres ravagées par il !ë feu , nous i’ëconnoîtrons évidemment qu’il [ n’existe àùcùii volcan simple et purement ijjisolé. La surface de ces contrées offre par- tout une suite et quelquefois une gerbe de f (volcans. On vient de le voir au sujet de \ l’Etna , et nous pouvons en donner un së- ajcond exemple dans l’Hécla. L’Islande, comme s |â Sicile, n’est en grande partie qu’un groupe rde volcans, et nous allons le prouver par îles observations. L’Islande entière ne doit être regardée que Comme une vaste montagne parsemée de ca- vités profondes, cachant dans son sein des Ùmas de minéraux , de matières vitrifiées et bitumineüsës, et s’élevant de tous côtés du milieu de la mer qui la baigne, en forme d’un cône court et écrasé. Sa surface ne pré- sente à l’œil que des sommets de montagnes jplanchis par des neiges et des glaces , et plus «bas l’image de la confusion et du boulever- sement. C’est un énorme monceau de pierres èt de rochers brisés , quelquefois poreux et à demi calcinés , effrayans par la noirceur jet les traces de Feu qui y sont empreintes. Les fentes et les creux de ces rochers ne sont remplis que d’un sable rouge, et quelquefois noir ou blanc; mais dans les vallées que les piontngnes forment entre elles , on trouve des plaines agréables. I La plupart des johuts, qui sont des mon- tagnes de médiocre hauteur , quoique cou- vertes de glaces, et qui sont dominées par d’autres montagnes plus élevées , sont des volcans qui, de temps à autre, jettent des (flammes et causent des tremblemens de terre; ion en compte une vingtaine dans toute l’île. «Leshabitans des environs de ces montagnes ont appris, par leurs observations, que lors- que les glaces et la neige s’élèvent à une hau- teur considérable , et qu’elles oui bouché les 2 55 cavités par lesquelles il est anciennement sorti des flammes, on doit s’attendre à des tremblemens de terre, qui sont suivis im- manquablement d’éruptions de feu. C’est par cette raison qu’à présent les Hollandois craignent que les jokuts qui jetèrent des flammes, en 1728, dans le canton de Skat- field, ne s’enflamment bientôt, la glace et la neige s’étant accumulées sur leur sommet, et paraissant fermer les soupiraux qui favo- risent les exhalaisons de ces feux souterrains. En 1721 , le jokut appelé Koetlegan , à cinq ou six lieues à l’ouest de la mer , au- près de la baie de Portland, s’enflamma après plusieurs secousses de tremblement de terre. Cet incendie fondit des morceaux de glace d’une grosseur énorme, d’où se for- mèrent des torrens impétueux qui portèrent fort loin l’inondation avec la terreur, et en- traînèrent jusqu'à la mer des quantités pro- digieuses de terre, de sable et de pierres. Les masses solides de glace et l’immense quan- tité de terre, de pierres et de sable qu’em- porta cette inondation, comblèrent tellement la mer , qu’à un demi-mille des côtes il s’en forma une petite montagne qui paroissoit en- core au dessus de l’eau en 1750. On peut juger combien cette inondation amena de matières à la mer, puisqu’elle la fit remonter ou plutôt reculer à douze milles au delà de ses anciennes côtes. La durée entière de cette inondation fut de trois jours, et ce ne fut qu’après ce temps qu’on put passer au pied des montagnes comme auparavant.... L’Hécla, que l’on a toujours regardé comme un des pus fameux volcans de l’univers à cause de ses éruptions terribles, est aujour- d’hui un des moins dangereux de l’Islande. Les monts de Koetlegan dont on vient de parler, et le mont K rafle , ont fait récem- ment autant de ravages que l’Hécla en fai- soit autrefois. On remarque que ce dernier volcan n’a jeté des flammes que dix fois dans l’espace de huit cents ans; savoir, dans les années 1104, nÔ7, 1222, i3oo, i34i, x3f)2, 1389, i558, i636, et pour la der- nière fois en 1693. Celte éruption com- mença le i3 février, et continua jusqu’au mois d’août suivant. Tous les autres incen- dies 11’ont de même duré que quelques mois. Il faut donc observer que l’Hécla ayant fait les plus grands ravages au quatorzième siècle , à quatre reprises différentes , a été toul-à-fait tranquille pendant le quinzième, et a cessé de jeter du feu pendant cent soixante ans. Depuis cette époque il n’a lait qu’une seule éruption au seizième siecle , et üS6 TËÉORlE DE deux au dix-septième. Actuellement on n’a- perçoit sur ce volcan ni feu , ni fumée , ni exhalaisons ; on y trouve seulement dans quelques petits creux, ainsi que dans beau- coup d’autres endroits de l’iie, de l’eau bouillante, des pierres, du sable et des cen- dres. En 1726, après quelques secousses de tremblemens de terre , qui ne furent sensi- bles que dans les cantons du nord, le mont Krafle commença à vomir, avec un fracas épouvantable, de la fumée, du feu, des cendres et des pierres. Cette éruption conti- nua pendant deux ou trois ans, sans faire aucun dommage . parce que tout retomboit sur ce volcan ou autour de sa base. En 1728, le feu s’étant communiqué à quelques montagnes situées près du Erafle , elles brûlèrent pendant plusieurs semaines. Lorsque les matières minérales qu’elles ren- fermoient furent fondues , il s’en forma un ruisseau de feu qui coula fort doucement vers le sud , dans les terrains qui sont au dessous de ces montagnes. Ce ruisseau brû- lant s’alla jeter dans un lac, à trois lieues du mont Krafle, avec un grand bruit, et en formant un bouillonnement et un tourbillon d’écume horrible. La lave ne cessa de couler qu’en 1729, parce qu’alors vraisemblable- ment la matière qui la fonnoit étoit épuisée. Ce lac fut rempli d’une grande quantité de pierres calcinées, qui firent considérable- ment élever ses easx : il a environ vingt lieues de circuit , et il est situé à une pa- reille distance de la mer. On ne parlera pas des autres volcans d’Islande ; il suffît d’avoir fait remarquer les plus considérables. On voit , par cette description , que rien ne ressemble plus aux volcans secondaires de l’Etna que les jokuts de i’Hécla; que dans tous deux le haut sommet est tranquille ; que celui du Vésuve s’est prodigieusement abaissé , et que probablement ceux de l’Etna et de l’Hécia étoient autrefois beaucoup plus élevés qu’ils ne le sont aujourd’hui. Quoique la topographie des volcans, dans les autres parties du monde, ne nous soit pas aussi bien connue que celle des volcans d’Europe , nous pouvons néanmoins juger , par analogie et par la conformité de leurs effets , qu’ils se ressemblent à tous égards : tous sont situés dans les lies ou sur le bord des continens; presque tous sont environnés de volcans secondaires; les uns sont agis- sans, les autres éteints ou assoupis ; et ceux-ci sont en bien plus grand nombre , même dans les Cordilieres, qui paroissent être le domaine le plus ancien des volcans. Dans LA TERRE. l’Asie méridionale, les îles de la Sonde, 1 Moluques et les Philippines, 11e retrace que destruction par le feu , et sont euco pleines de volcans. Les îles du Japon < contiennent de même un assez grand nor bre : c’est le pays de l’univers qui est ans le plus sujet aux tremblemens de terre ; y a des fontaines chaudes en beaucoup d’ei droits. La plupart des îles de l’océan Indic et de toutes les mers de ces régions oriei taies ne nous présentent que des pics et d: sommets isolés qui vomissent le feu, que d côtes et des rivages tranchés , restes d’a. ciens continens qui ne sont plus : il arri même encore souvent aux navigateurs d 4 rencontrer des parties qui s’affaissent jou | nellement;et l’on y a vu des îles entier | disparoître ou s’engloutir avec leurs volcat , sous les eaux. Les mers de la Chine soi ffll chaudes; preuve de la forte effervescern | des bassins maritimes en cette partie : 1 œ ouragans y sont alfreux ; on y remarq- jjr souvent des trombes; les tempêtes sont to L jours annoncées par un bouillonnement gç j néral et sensible des eaux , et par divers nu fei téores et autres exhalaisons dont l’almospheit ^ se charge et se remplit. n Le volcan de Ténériffe a été observé p; | le docteur Thomas Heberden , qui a résici j(; plusieurs années au bourg d’Oratava, sitii ^ au pied du pic; il trouva eu y allant que w ques grosses pierres dispersées de tous côM tW; à plusieurs lieues du sommet de cette moi llle tagne : les unes paroissent entières, d’an |e, très semblent avoir été brûlées et jetées: j,, celte distance par le volcan. En montant montagne, il vit encore des rochers bn 1 lés qui étoient dispersés en assez grossi masses. I «En avançant, dit-il, nous arrivâmes t la fameuse grotte de Zegds, qui est enviroi |; née de tous côtés par des masses énormes c ^ rochers brûlés... «A un quart de lieue plus haut, noi ü’ouvâmes une plaine sablonneuse, du m, ^ lieu de laquelle s’élève une pyramide de si: ^ ble ou de cendres jaunâtres, que l’on ap ^ pelle le pain de sucre. Autour de sa base ^ on voit sans cesse transpirer des vapeui ^ fuligineuses : de là jusqu’au sommet, il pei ^ y avoir un demi-quart de lieue; mais | montée en est très-difficile par sa hautei ^ escarpée et le peu d’assiette qu’on trouv, j. dans tout ce terrain — >< Cependant nous parvînmes à ce que l’o | appelle la Chaudière. Cette ouverture douze ou quinze pieds de profondeur; sc ^ côtés , se rétrécissant toujours jusqu’au fonc; ^ ART. XVI. VOLCANS ET TREMBLEMENS DE TERRE. 2J7 forment une concavité qui ressemble à un cône tronqué dont la base seroit renversée... La tei're en est fort chaude; et d’environ vingt soupiraux , comme d’autant de che- minées, s’exhale une fumée ou vapeur épais- se, dont l'odeur est très^sulfureuse. Il semble que tout le sol soit mêlé ou poudré de sou- fre; ce qui lui donne une surface brillante et colorée... « On aperçoit une couleur verdâtre , mê- lée d’un jaune brillant comme de l’or, pres- jque sur toutes les pierres qu’on trouve aux environs ; une autre partie peu étendue de ce pain de sucre est blanche comme la chaux; et une autre, plus basse, ressem- ble à de l’argile rouge qui seroit couverte ide sel. « Au milieu d’un autre rocher nous dé- couvrîmes un trou qui n’avoit pas plus de deux pouces de diamètre , d’où procédoit un bruit pareil à celui d’un volume consi- dérable d’eau qui bouillir oit sur un grand feu. » 1 Les Açores, les Canaries, les îles du cap Vert, l’île de l’Ascension, les Antilles, qui paraissent être les restes des anciens cont- iens qui réunissoient nos contrées à l’Amé- rique, ne nous offrent presque toutes que Ues pays brûlés ou qui brûlent encore. Les Volcans anciennement submergés avec les Montrées qui les portoienl , excitent sous les e:aux des tempêtes si terribles, que, dans %ie de ces tourmentes arrivées aux Açores, suif des sondes se fondoit par la chaleur 1 lu fond de la mer. {Acid. Buff.) Des volcans éteints. Le nombre des volcans éteints est sans iomparaison beaucoup plus grand que celui es volcans actuellement agissans; on peut nême assurer qu’il s’en trouve en très-grande uantité dans presque toutes les parties de 1 terre. Je pourrois citer ceux que M. de a Condamine a remarqué dans les Cordi- tères, ceux que M. Fresnaye a observés à aint-Domingue , dans le voisinage du Port- u-Prince , ceux du Japon et des autres îles rientales et méridionales de l’Asie, dont 18 Iresquo toutes les contrées habitées ont au- c refois été ravagées par le feu; mais je me ornerai à donner pour exemple ceux de ®flle-de-France et de l’île de Bourbon, que uelques voyageurs instruits ont reconnus l’une manière évidente. « Le terrain de l’Ile-de-France est recou- ;9 ert, dit M. l’abbé de La Caille, d’une quan- 0“ té prodigieuse de pierres de toutes sortes de grosseurs, dont la couleur est cendrée noire ; une grande partie est criblée de trous : elles contiennent la plupart beau- coup de fer, et la surface de la terre est couverte de mines de ce métal ; on y trouve aussi beaucoup de pierres ponces , surtout sur la côte nord de l’île , des laves ou espè- ces de laitier de fer, des grottes profondes et d’autres vestiges manifestes de volcans éteints... «L’île de Bourbon, continue M. l’abbé de La Caille, quoique plus grande que l’Ile- de-France, n’est cependant qu’une grosse montagne , qui est comme fendue dans toute sa hauteur en trois endroits différens. Son sommet est couvert de bois et inhabité, et sa pente, qui s’étend jusqu’à la mer, est défrichée et cultivée dans les deux tiers de son contour ; le reste est recouvert de laves d’un volcan qui brûle lentement et sans bruit : il ne paroît même un peu ardent que dans la saison des pluies... « L’ile de l’Ascension est visiblement for- mée et brûlée par un volcan ; elle est cou- verte d’une terre rouge semblable à de la brique pilée ou à dé la glaise brûlée... L’île est composée de plusieurs montagnes d’élé- vation moyenne , comme de cent à cent cin- quante toises ; il y en a une plus grosse qui est au sud-est de l’île , haule d’environ qua- tre cents toises... Son sommet est double et allongé ; mais toutes les autres sont termi- nées en cône assez parfait et couvertes de terre rouge : la terre et une partie des montagnes sont jonchées d’une quantité prodigieuse de roches criblées d’une infinité de trous , de pierres calcaires et fort légères, dont un grand nombre ressemble à du lai- tier; quelques-unes sont recouvertes d’un vernis blanc sale , tirant sur le vert ; il y a aussi beaucoup de pierres ponces. » Le célèbre Cook dit que, dans une ex- cursion que l’on fit dans l’intérieur de l’ile d’Otaïti , on trouva que les rochers avoient été brûlés comme ceux de Madère , et que toutes les pierres portoient des marques in- contestables du feu; qu’on aperçoit aussi des traces de feu dans l’argile qui est sur les col- lines , et que l’on peut supposer qu’Otaïti et nombre d’îles voisines sont les débris d’un continent qui a élé englouti par l’explosion d’un feu souterrain. Philippe Carteret dit qu’une des îles de la Reine-Charlotte , située vers le n° 10' de latitude sud, est d’une hauteur prodigieuse et d’une figure conique, et que son sommet a la forme d’un enton- noir, dont on voit sortir de la fumée, mais point de flammes ; que sur le côté le plus Buffon. I. 17 a58 HÉORIÈ DE LA TËRRE. méridional de la terre de la Nouvelle-Bre- tagne se trouvent trois montagnes, de l’une desquelles il sort une grosse colonne da fumée. L’on trouve des basaltes à l’île de Bour- bon, où le volcan , quoique affoibli, est en- core agissant ; à l’lle-de- France, où tous les feux sont éteints; à Madagascar, où il y a des volcans agissans et d’autres éteints : mais pour ne parler que des basaltes qui se trou- vent en Europe, on sait, à n’en pouvoir douter, qu’il y en a des masses considéra- bles en Irlande, en Angleterre, en Auver- gne, en Saxe sur les bords de l’Elbe, en Misnie sur la montagne de Cottener, à Ma- rienbourg, à Weilbourg dans le comté de Nassau, à Lauterbaeh, à Bilstein, dans plu- sieurs endroits de la Hesse , dans la Lusace , dans la Bohême', etc. Ces basaltes sont les plus belles laves qu'aient produites les vol- cans qui sont actuellement éleints dans toutes ces contrées : mais nous nous contenterons de donner ici l’extrait des descriptions dé- taillées des volcans éteints qui se trouvent en France. « Les montagnes d’Auvergne , dit M. Guet- tard, qui ont été, à ce que je crois, autre- fois des volcans sont celles de Volvic à deux lieues de Riom, du Puy-de-Dôme pro- che Clermont et du mont d’Or. Le volcan de Volvic a formé par ses laves différens lits posés les uns sur les autres , qui composent ainsi des masses énormes, dans lesquelles on a pratiqué des carrières qui fournissent de la pierre à plusieurs endroits assez éloi- gnés de Volvic.... Ce fut à Moulins que je vis les laves pour la première fois... et étant à Volvic, je reconnus que la montagne n’é- toit presque qu’un composé de différentes; matières qui sont jetées dans les éruptions des volcans... « La figure de cette montagne est conique ; sa base est formée par des rochers de gra- nité gris blanc, ou d’une couleur de rose pâle.... le reste de la montagne n’est qu’un amas de pierres ponces, noirâtres ou rou- geâtres, entassées les unes sur les autres sans ordre ni liaison.... Aux deux tiers de la montagne , on rencontre des espèces de ro- chers irréguliers, hérissés de pointes infor- mes contournées en tous sens, de couleur rouge obscur, ou d’un noir sale et mat, et d’une substance dure et solide, sans avoir de trous comme les pierres ponces... Avant d’arriver au sommet, on trouve un trou large de quelques toises, d’une forme conique , et qui approche d’un entonnoir... La partie de la montagne qui est au nord et à l’est m’a paru n’être que de pierres ponces... Les bancs de pierre de Volvic suivent l’inclinai- son de la montagne, et semblent se conti- nuer sur cette montagne, et avoir commu- nication avec ceux que les ravins mettent à découvert un peu au dessous du sommet... Ces pierres sont d’un gris de fer qui semble se charger d’une fleur blanche qu’on diroit en sortir comme une efflorescence : elles sont dures , quoique spongieuses et remplies de petits trous irréguliers. « La montagne du Puy-de-Dôme n’est qu’une masse de matière qui n’annonce que les effets les plus terribles du feu le plus violent... Dans les endroits qui ne sont point couverts de plantes et d’arbres , on ne marche que parmi des pierres ponces, sur des quartiers de laves et dans une espèce de gravier ou de sable formé par une sorte de .mâchefer et par de très-petites pierres pon- ces mêlées de cendres... « Ces montagnes présentent plusieurs pics, qui ont tous une cavité moins large au fond qu’à l’ouverture... Un de ces pics, le che- min qui y conduit , et tout l’espace qui se trouve de là jusqu’au Puy-de-Dôme , ne sont qu’un amas de pierres ponces ; et il en est de même pour ce qui est des autres pics , qui sont au nombre de quinze ou seize , placés sur la même ligne , du sud au nord , et qui ont tous des entonnoirs. « Le sommet du pic du mont d’Or est un rocher d’une pierre d’un blanc cendré ten- dre , semblable à celle du sommet des mon- tagnes de cette terre volcanisée ; elle est seu- lement un peu moins légère que celle du Puy-de-Dôme. Si je n’ai pas trouvé sur cette montagne des vestiges de volcan en aussi grande quantité qu’aux deux autres, cela vient en grande partie de ce que le mont d’Or est plus couvert, dans toute son éten- due, de plantes et de bois que la montagne de Volvic et le Puy-de-Dôme... Cependant la partie sud-ouest est entièrement décou- verte et n’est remplie que de pierres et de rochers qui me paroissent avoir été exempts des effets du feu... « Mais la pointe du mont d’Or est un cône pareil à ceux de Volvic et du Puy-de- Dôme : à l’est de cette pointe est le pic du Capucin, qui affecte également la figure co- nique; mais la sienne n’est pas aussi régu-| lière que celle des précedens : il semble même que ce pic ait plus souffert dans sa composiiion; tout y paroît plus irrégulier, plus rompu, plus brisé... Il y a encore plu- sieurs pics dont la base est appuyée sur le dos de la montagne; ils sont tous dominés ART. XVI. VOLCANS ET TREMËLEMENS DE TERRE. a59 par le mont d’Or, dont la hauteur est de cinq cent neuf toises... Le pic du mont d’Or est très-roide; il finit en une pointe de quinze ou vingt pieds de large en tous sens... « Plusieurs montagnes entre Thiers et Saint-Chaumont ont une figure conique ; ce qui me fait penser, dit M. Guettard, qu’elles pouvoient avoir brûlé... Quoique je n’aie pas été à Pontgibault, j’ai des preuves que les montagnes de ce canton sont des volcans éteints; j’en ai reçu des morceaux de laves qu’il étoit facile de reconnoître pour tels par les points jaunes et noirâtres d’une matière vitrifiée , qui est le caractèrë le plus certain d’une pierre de volcan. » Le même M. Guettard et M. Faujas ont trouvé sur la rive gauche du Rhône , et assez avant dans le pays, de très-gros frag- mens de basaltes en colonnes... En remon- tant dans le Vivarais, ils ont trouvé dans un torrent un amas prodigieux de matières de volcan, qu’ils ont suivi jusqu’à sa source: il ne leur a pas été difficile de reconnoître le volcan : c’est une montagne fort élevée , sur le sommet de laquelle ils ont trouvé la bouche d’environ quatre-vingts pieds de dia- mètre : la lave est partie visiblement du dessous de celte bouche ; elle a coulé en grandes masses par les ravins l’espace de sept ou huit mille toises ; la matière s’est amon- celée toute brûlante en certains endroits; venant ensuite à s’y figer, elle s’est gercée et fendue dans toute sa hauteur, et a laissé toute la plaine couverte d’une quantité in- , nombrable de colonnes, depuis quinze jus- 1 qu’à trente pieds de hauteur, sur environ sept pouces de diamètre. « Ayant été me promener à Montferrier, dit M. Montet, village éloigné de Mont- pellier d’une lieue... je trouvai quantité de pierres noires détachées les unes des autres, de différentes figures et grosseurs... et les ayant comparées avec d’autres qui sont cer- tainement l’ouvrage des volcans... je les trouvai de même nature que ces dernières : ainsi je ne doutai point que ces pierres de Montferrier ne fussent elles-mêmes une lave ftrès-dure ou une matière fondue par un vol- can éteint depuis un temps immémorial. Toute la montagne de Montferrier est par- semée de ces pierres ou laves ; le village en est bâti en partie, et les rues en sont pa- vées... Ces pierres présentent, pour la plu- part, à leurs surfaces, de petits trous ou de petites porosités qui annoncent bien qu’elles sont formées d’une matière fondue par un volcan ; on trouve cette lave répandue dans toutes les terres qui avoisinent Montfer- rier... « Du côté de Pézenas, les volcans éteints y sont en grand nombre... toute la contrée en est remplie , principalement depuis le cap d’Agde, qui est lui-même un volcan éteint, jusqu’au pied de la masse des montagnes qui commencent à cinq lieues au nord de cette côte , et sur le penchant ou à peu de dis- tance desquelles sont situés les villages de Livran , Peret , Fontès, Néfiez, Gabian, Faugères. On trouve, en allant du midi au nord, une espèce de cordon ou de chapelet fort remarquable, qui commence au cap d’Agde, et qui comprend les monts Saint- Thibery et le Causse (montagnes situées au milieu des plaines de Bressan) ; le pic de la tour de Yalros, dans le territoire de ce vil- lage ; le pic de Montredon au territoire de Tourbes, et celui de Sainte -Marthe auprès du prieuré royal de Cassan , dans le terri- toire de Gabian. Il part encore du pied de la montagne , à la hauteur du village de Fontès , une longue et large masse qui finit au midi auprès de la grange des Prés.... et qui est terminée, dans la direction du levant au couchant, entre le village de Cans et celui de Nizas... Ce canton a cela de remarqua- ble, qu’il n’est presque qu’une masse de lave, et qu’oa observe au milieu une bouche ronde d’environ deux cents toises de diamè- tre , aussi reconnoissable qu’il soit possible, qui a formé un étang qu’on a depuis dessé- ché, au moyen d’une profonde saignée faite entièrement dans une lave dure et formée par couches, ou plutôt par ondes immédia- tement contiguës... «On trouve, dans ces endroits, de la lave et des pierres ponces ; presque toute la ville de Pézenas est pavée de lave; le ro- cher d’Agde n’est que de la lave très-dure , et toute cette ville est bâtie et pavée de cette lave, qui est très-noire... Presque tout le territoire de Gabian , où l’on voit la fa- meuse fontaine de pétrole, est parsemé de laves et de pierres ponces. « On trouve aussi au Causse de Basan et de Saint-Thibery une quantité considérable de basaltes..... qui sont ordinairement des prismes à six faces , de dix à quatorze pieds de long... Ces basaltes se trouvent dans un endroit où les vestiges d’un ancien volcan sont on ne peut pas plus reconnoissables. « Les bains' de Balaruc nous offrent partout les débris d’un volcan éteint; les pierres qu’on y rencontre ne sont que des pierres ponces de différentes grosseurs... « Dans tous les volcans que j’ai exami- I7* THÉORIE DE LA TERRE. 260 nés, j’ai remarqué que la matière ou les pierres qu’ils ont vomie sont sous diffé- rentes formes : les unes sont en masse con- tiguë, très-dures et pesantes, comme le rocher d’Agde : d’autres, comme celles de Montferrier et la lave de Tourbes ," ne sont point en masses ; ce sont des pierres déta- chées, d’une pesanteur et d’une dureté con- sidérables. » M. Yillet, de l’Académie de Marseille, m’a envoyé, pour le Cabinet du roi, quel- ques échantillons de laves et d’autres ma- tières trouvées dans les volcans éteints de Provence, et il m’écrit qu’à une lieue de Toulon on voit évidemment les vestiges d’un ancien volcan , et qu’étant descendu dans une ravine au pied de cet ancien volcan de la montagne d’( )lli ouïes , il fut frappé , à l’as- pect d’un rocher détaché du haut , de voir qu’il étoit calciné ; qu’après en avoir brisé quelques morceaux, il trouva, dans l’inté- rieur, des parties sulfureuses si bien carac- térisées, qu’il ne douta plus de l’ancienne existence de ces volcans éteints aujour- d’hui. M. Valmont de Bomare a observé, dans le territoire de Cologne, les vestiges de plu- sieurs volcans éteints. Je pourrois citer un très-grand nombre d’autres exemples qui tous concourent à prouver que le nombre des volcans éteints est peut-être cent fois plus grand que celui des volcans actuellement agissans, et l’on doit observer qu’entre ces deux états il y a, comme dans tous les autres effets de la na- ture , des états mitoyens , des degrés et des nuances dont on ne peut saisir que les prin- cipaux points. Par exemple, les solfatares ne sont ni des volcans agissans, ni des vol- cans éteints, et semblent participer des deux. Personne ne les a mieux décrites qu’un de nos savans académiciens, M. Fougeroux de Bondaroy, et je vais rapporter ici ses prin- cipales observations. « La solfatare située à quatre milles de Naples à l’ouest , et à deux milles de la mer, est fermée par des montagnes qui l’en- tourent de tous côtés. Il faut monter pen- dant environ une demi-heure avant que d’y arriver. L’espace compris entre les mon- tagnes forme un bassin d’environ douze cents pieds de longueur sur huit cents pieds de largeur. Il est dans un fond par rapport à ces montagnes , sans cependant être aussi bas que le terrain qu’011 a été obligé de tra- verser pour y arriver. La terre qui forme le fond de ce bassin est un sable très-fin , uni et battu ; le terrain est sec et aride , les plantes n’y croissent point; la couleur du sable est jaunâtre... Le soufre qui s’y trouve en grande quantité, réuni avec ce sable, sert sans doute à le colorer. « Les montagnes qui terminent la plus grande partie du bassin 11’offrent que des rochers dépouillés de terre et de plantes ; les uns fendus , dont les parties sont bridées et calcinées, et qui tous n’offrent aucun arran- gement et n’ont aucun ordre dans leur posi- j tion Ils sont recouverts d’une plus ou moins grande quantité de soufre qui se su- j blime dans cette partie de la montagne , et | dans celle du bassin qui en est proche. « Le côté opposé... offre un meilleur ter- ! rain aussi n’y voit-on pas de fourneaux pai'eils à ceux dont nous allons parler, et qui se trouvent communément dans la partie que l’on vient de décrire. « Dans plusieurs endroits du fond du bas- : sin on voit des ouvertures, des fenêtres, ou ; des bouches d’où il sort de la fumée accom- pagnée d’une chaleur qui bruleroit vivement ; les mains, mais qui n’est pas assez grande ; pour allumer du papier.... « Les endroits voisins donnent une cha- leur qui se fait sentir à travers les souliers; ! et il s’en exhale une odeur de soufre dés- 1 agréable... Si l’on fait entrer dans le terrain un morceau de bois pointu, il sort aussitôt une vapeur, une fumée pareille à celle qu’ex- halent les fentes naturelles «Il se sublime, par les ouvertures, du soufre en petite quantité, et un sel connu sous le nom de sel ammoniac , et qui en a les caractères « On trouve sur plusieurs des pierres qui environnent la solfatare, des filets d’alun qui y a fleuri naturellement Enfin ou retire encore du soufre de la solfaFare Cette substance est contenue dans des pierres de couleur grisâtre, parsemées de parties bril- j lantes, qui dénotent celles du soufre cris- tallisé entre celles de la pierre ; et ces : pierres sont aussi quelquefois chargées d’a- lun « En frappant du pied dans le milieu du bassin , on reconnoît aisément que le terrain en est creux en dessous. « Si l’on traverse le côté de la montagne le plus garni de fourneaux, et qu’on la des- cende , on trouve des laves , des pierres ponces , des écumes de volcans , etc. , enfin tout ce qui, par comparaison avec les ma- ; tières que donne aujourd’hui le Vésuve, peut ! démontrer que la solfatare a formé la bouche d’un volcan « Le bassin de la solfatare a souvent changé f 1 9 P /te « 2( l’a va d ei ta 1 à 1 d I de l'ea Dft qne irai tapi fom élit k dp sin jtns ko Irai il ART. XVI. VOLCANS ET TREMBLEMENS DE TERRE. de forme; on peut conjecturer qu’il en prendra encore d’autres , différentes de celle qu’il offre aujourd’hui : ce terrain se mine et se creuse tous les jours ; il forme main- tenant une voûte qui couvre un abîme... Si cette voûte venoit à s’affaisser, il est proba- ble que , se remplissant d’eau , elle produi- |j roit un lac. » M. Fougeroux de Bondaroy a aussi fait plusieurs observations sur les solfatares de j quelques autres endroits de l’Italie. «J’ai été, dit-il, jusqu’à la source d’un ruisseau que l’on passe entre Rome et Ti- voli, et dont l’eau a une forte odeur de 1 soufre... elle forme deux petits lacs d’envi- ron quarante toises dans leur plus grande ! étendue « L’un de ces lacs, suivant la corde que j! nous avons été obligés de filer , a en certains | endroits jusqu’à soixante, soixante-dix, ou , quatre-vingts brasses.... On voit sur ces eaux j plusieurs petites îles flottantes, qui changent ! quelquefois de place.... elles sont produites j par des plantes réduites en une espèce de j, tourbe, sur lesquelles les eaux, quoique j corrosives , n’ont plus de prise « J’ai trouvé la chaleur de ces eaux de 20 degrés, tandis que le thermomètre à l’air libre étoit à 18 degrés; ainsi les obser- vations que nous avons faites n’indiquent I qu’une très-foible chaleur dans ces eaux.... elles exhalent une odeur fort désagréable... et cette vapeur change la couleur des végé- « taux et celle du cuivre. « La solfatare de Viterbe, dit M. l’abbé Mazéas, n’a une embouchure que de trois ! à quatre pieds ; ses eaux bouillonnent et exhalent une odeur de foie de soufre , et | pétrifient aussi leurs canaux, comme celles j de Tivoli Leur chaleur est au degré de l’eau bouillante, quelquefois au dessous... Des tourbillons de fumée qui s’en élevent quelquefois, annoncent une chaleur plus grande ; et néanmoins le fond du bassin est )| tapissé des mêmes plantes qui croissent au j fond des lacs et des marais : ces eaux pro- duisent du vitriol dans les terrains ferrugi- neux , etc. « Dans plusieurs montagnes de l’Apennin, et principalement celles qui sont sur le che- min de Bologne à Florence , on trouve des feux ou simplement des vapeurs qui n’ont besoin que de l’approche d’une flamme pour brûler elles-mêmes « Les feux de la monlagne Cenida , proche Pietramala, sont placés à différentes hau- teurs de la montagne , sur laquelle on compte quatre bouches à feu qui jettent des flam- 26 £ mes.... Un de ces feux est dans un espace circulaire entouré de buttes La terre y paroît brûlée, et les pierrçs sont plus noires que celles des environs ; il en sort çà et là une flamme bleue, vive, ardente, claire, qui s’élève à trois ou quatre pieds de hau- teur Mais au delà de l’espace circulaire orf ne voit aucun feu , quoique à plus de soixante pieds du centre des flammes , on s’aperçoive encore de la chaleur que con- serve le terrain « Le long d’une fente ou crevasse voisine du feu , on entend un bruit sourd comme seroit celui d’un vent qui traverseroit un souterrain Près de ce lieu on trouve deux sources d’eau chaude Ce terrain , dans lequel le feu existe depuis du temps, n’est ni enfoncé ni relevé On ne voit près du foyer aucune pierre de volcan, ni rien qui puisse annoncer que ce feu ait jeté ; cependant des monticules près de cet en- droit rassemblent tout ce qui peut prouver qu’elles ont été anciennement formées ou au moins changées par les volcans Ert 1767, on ressentit même des secousses de tremblemens de terre dans les environs , sans que le feu changeât, ni qu’il donnât plus ou moins de fumée. « Environ à dix lieues de Modène, dans un endroit appelé Barlgazzo , il y a encore cinq ou six bouches où paroissent des flammes dans certains temps, qui s’étei- gnent par un vent violent : il y a aussi des vapeurs qui demandent l’approche d’un corps enflammé pour prendre feu... Mais, maigre les restes non équivoques d’anciens volcans éteints, qui subsistent dans la plu- part de ces montagnes, les feux qui s’y voient aujourd’hui ne sont point de nou- veaux volcans qui s’y forment , puisque ces feux ne jettent aucune substance de vol- cans. >» Les eaux thermales, ainsi que les fon- taines de pétrole, et des autres bitumes e8 huiles terrestres , doivent être regardées comme une autre nuance entre les volcans éteints et les volcans en action : lorsque les feux souterrains se trouvent voisins d’une mine de charbon, ils la mettent en distilla- tion , et c’est là l’origine de la plupart des sources de bitume; ils causent de même la chaleur des eaux thermales cpii coulent dans leur voisinage. Mais ces feux souterrains brûlent tranquillement aujourd’hui; on ne reconnoît leurs anciennes explosions que par les matières qu’ils ont autrefois reje- tées : ils ont cessé d’agir lorsque les mers s’en sont éloignées ; et je ne crois pas , Ira ig| j THÉORIE DE LÀ TERRE. 262 comme je l’ai dit , qu’on ait jamais à craindre le retour de ces funestes explo- sions , puisqu’il y a toute raison de penser que la mer se retirera de plus en plus. ( Add . Buff.) Des laves et basaltes. * A tout ce que nous venons d’exposer au sujet des volcans , nous ajouterons quelques considérations sur le mouvement des laves , sur le temps nécessaire à leur refroidisse- ment , et sur celui qu’exige leur conversion en terre végétale. La lave qui s’écoule ou jaillit du pied des éminences formées par les matières que le volcan vient de rejeter, est un verre impur en liquéfaction , et dont la matière tenace et visqueuse n’a qu’une demi-flui- diié ; ainsi les torrens de cette matière vi- trifiée coulent lentement en comparaison des torrens d’eau , et néanmoins ils arrivent souvent à d’assez grandes distances : mais il y a dans ces torrens de feu un mouvement de plus que dans les torrens d’eau ; ce mou- vement tend à soulever toute la masse qui coule, et il est produit par la force expan- sive de la chaleur dans l’intérieur du torrent embrasé ; la surface extérieure se refroidis- sant la première, le feu liquide continue à couler au dessous ; et comme l’action de la chaleur se fait en tous sens , ce feu , qui cherche à s’échapper, soulève les parties supérieures déjà consolidées, et souvent les force à s’élever perpendiculairement : c’est de là que proviennent ces grosses masses de laves en forme de rochers qui se trouvent dans le cours de presque tous les torrens où la pente n’est pas rapide. Par l’effort de cette chaleur intérieure , la lave fait souvent des explosions , sa surface s’entr’ouvre , et la matière liquide jaillit de l’intérieur et forme ces masses élevées au dessus du niveau du torrent. Le P. de La Torre est, je crois , le premier qui ait remarqué ce mouvement intérieur dans les laves ardentes ; et ce mouvement est d'autant plus violent qu’elles ont plus d’épaisseur et que la pente est plus douce : c’est un effet général et commun dans toutes les matières liquéfiées par le feu , et dont on peut donner des exemples que tout le monde est à portée de vérifier dans les forges *. Si l’on observe les gros lingots 1. La lave des fourneaux à fondre le fer subit les mêmes effets. Lorsque cette matière vitreuse coule lentement sur la dame, et qu’elle s’accumule à sa base, on voit se former des éminences, qui sont des bulles de verre concaves, sous une forme hémisphérique. Ces bulles crèvent, lorsque la force de fonte de fer qu’on appelle gueuses , qui coulent dans un moule ou canal dont la pente est presque horizontale, on s’aper- cevra aisément qu’elles tendent à se courber en effet d’aulant plus qu’elles ont plus d’é- paisseur 2. Nous avons démontré , par les expériences rapportées dans les mémoires | précédens , que les temps de la consolidation ! sont à très-peu près proportionnels aux épaisseurs, et que la surface de ces lingots | étant déjà consolidée, l’intérieur en est en- 1 core liquide : c’est cette chaleur intérieure [ qui soulève et fait bomber le lingot ; et si son épaisseur étoit plus grande, il y auroit, j comme dans les torrens de lave, des explo- sions, des ruptures à la surface, et des j jets perpendiculaires de matière métallique I poussée au dehors par l’action du feu ren- fermé dans l’intérieur du lingot. Cette ex- j plication, tirée de la nature même de la chose , ne laisse aucun doute sur l’origine de ces éminences qu’on trouve fréquemment dans les vallées et les plaines que les laves ' ont parcourues et couvertes. Mais , lorsqu’après avoir co-ulé de la mon- tagne et traversé les campagnes , la lave toujours ardente' arrive aux rivages de la mer, son cours se trouve tout à coup arrêté : le torrent de feu se jette comme un ennemi puissant , et fait d’abord reculer les flots ; j mais l’eau , par son immensité , par sa froide résistance et par la puissance de saisir et d’éteindre le feu , consolide en peu d’instans j la matière du torrent, qui dès lors ne peut aller plus loin, mais s’élève, se charge de nouvelles couches , et forme un mur à-plomb, expansive est très-active , et que la matière a moins j de fluidité ; alors il en sort avec bruit un jet ra- j pide de flamme : lorsque cette matière vitreuse est t assez adhérente pour souffrir une grande dilata- : tion , ces bulles, qui se forment à sa surface, 1 prennent un volume de huit à dix pouces de dia- mètre sans se crever, lorsque la vitrification en est moins achevée , et qu’elle a une consistance vis- j queuse et tenace ; ces bulles occupent peu de vo- ; lume, et la matière, en s’affaissant sur elle-même, i forme des éminences concaves, que l’on nomme j yeux de crapaud. Ce qui se passe ici en petit dans I le laitier des fourneaux de forge , arrive en grand : dans les laves des volcans. ?.. Je 11e parle pas ici des autres causes parti- culières , qui souvent occasionnent la courbure des t lingots de fonte. Par exemple, lorsque la fonte n’est pas bien fluide , lorsque le moule est trop humide, ils se courbent beaucoup plus, parce que j ces causes concourent à augmenter l’effet de la première : ainsi l’humidité de la terre sur laquelle jj coulent les torrens de la lave aide encore à la cha- leur intérieure à en soulever la masse , et à la faire éclater en plusieurs endroits par des expie- || sions suivies de ces jets de matière dont nous avons H parlé. ART. XYI. VOLCANS ET TREMBLEMENS DE TERRE. de la hauteur duquel le torrent de lave tombe alors perpendiculairement et s’ap- plique contre le mur à-plomb qu’il vient de former : c’est par cette chute et par le sai- sissement de la matière ardente que se for- ment les prismes de basalte 1 , et leurs colonnes articulées. Ces prismes sont ordi- nairement à cinq, six, ou sept faces, et quelquefois à quatre ou à trois, comme aussi à huit ou neuf faces : leurs colonnes sont formées par la chute perpendiculaire de la lave dans les flots de la mer , soit qu’elle tombe du haut des rochers de la côte, soit qu’elle forme elle-même le mur à-plomb qui produit sa chute perpendiculaire : dans tous les cas , le froid et l’humidité de l’eau qui saisissent celte matière toute pénétrée de feu, en consolidant les surfaces au moment même de sa chute, les faisceaux qui tombent du torrent de lave dans la mer, s’appliquent les uns contre les autres ; et comme'la cha- leur intérieure des faisceaux tend à les di- later , ils se font une résistance réciproque , et il arrive le même effet que dans le ren- flement des pois , ou plutôt des graines cylindriques , qui seraient pressées dans un vaisseau clos rempli d’eau qu’on feroit bouil- lir ; chacune de ces graines deviendrait hexagone par la compression réciproque ; et de même chaque faisceau de lave devient à plusieurs faces par la dilatation et la rési- stance réciproques ; et lorsque la résistance * des faisceaux environnans est plus forte que la dilatai ion du faisceau environné, au lieu de devenir hexagone , il n’est que de trois , quatre , ou cinq faces ; au contraire , si la dilatation du faisceau environné est plus forte que la résistance de la matière envi- ronnante , il prend sept , huit , ou neuf faces, toujours sur sa longueur, ou plutôt sur sa hauteur perpendiculaire. Les articulations transversales de ces co- lonnes prismatiques sont produites par une cause encore plus simple : les faisceaux de lave ne tombent pas comme une gouttière régulière et continue, ni par masses égales: ! pour peu doue qu’il y ait d’intervalle dans la chute de la matière, la colonne à demi consoli- dée à sa face supérieure s’affaisse en creux par le poids de la masse qui survient , et qui dès lors se moule en convexe dans la concavité de la première ; et c’est ce qui forme les espèces i. Je n’examinerai point ici l’origine de ce nom basalte, que M. Desmarest , savant naturaliste de l’Académie des Sciences, croit avoir été donné par les anciens à deux pierres de nature différente : et je ne parle ici que du basalte lave , qui est en forme de colonnes prismatiques. 203 d’articulations qui se trouvent dans la plu- part de ces colonnes prismatiques : mais lorsque la lave tombe dans l’eau par une chute égale et continue, alors la colonne de basalte est aussi continue dans toute sa hau- teur, et l’on n’y voit point d’articulations. De même, lorsque, par une explosion, il s’élance du torrent de lave quelque masse isolée , cette masse prend alors une figure globuleuse ou elliptique , ou même tortillée en forme de câble ; et l’on peut rappeler à cette explication simple toutes les formes sous lesquelles se présentent les basaltes et les laves figurées. C’est à la rencontre du torrent de lave avec les flots et à sa prompte consolidation „ qu’on doit attribuer l’origine de ces côtes hardies qu’on voit dans toutes les mers qui sont au pied des volcans. Les anciens rem- paris de basalte , qu’on trouve aussi dans l’intérieur des continens, démontrent la présence de la mer et son voisinage des vol- cans dans le temps que leurs laves ont coulé : nouvelle preuve qu’on peut ajouter à toutes celles que nous avons données de l’ancien séjour des eaux sur toutes les terres actuel- lement habitées. Les torrens de lave ont depuis cent jus- qu’à deux et trois mille toises de largeur , et quelquefois cent cinquante et même deux cents pieds d’épaisseur; et comme nous avons trouvé par nos expériences que le temps du refroidissement du verre est à celui du refroidissement du fer comme i32 sont à 236 2, et que les temps respectifs de leur consolidation sont à peu près dans ce même rapport3, il est aisé d’en conclure que, pour consolider une épaisseur de dix pieds de verre ou de lave, il faut 201 21/59 minu- tes , puisqu’il faut 36o minutes pour la con- solidation de dix pieds d’épaisseur de fer; par conséquent il faut 4028 minutes, ou 67 heures 8 minutes, pour la consolidation de deux cents pieds d’épaisseur de lave : et, par la même règle, on trouvera qu’il faut environ onze fois plus de temps , c’est-à-dire 3o jours 17/24, ou un mois, pour que la surface de cette lave de deux cents pieds d’épaisseur soit assez froide pour qu’on puisse la toucher : d’où il résulte qu’il faut un an pour refroidir une lave de deux cents pieds d’épaisseur assez pour qu’on puisse la toucher sans se brûler à un pied de profon- deur, et qu’à dix pieds de profondeur elle sera encore assez chaude au bout de dix ans 2. Voyez le Mémoire sur le refroidissement de la terre et des planètes. 3. Voyez ibid. THÉORIE DE LA TERRE. 264 pour qu’on ne puisse la toucher , et cent ans pour être refroidie au même point jusqu’au milieu de son épaisseur. M. Bry- done rapporte qu’après plus de quatre ans la lave qui avoit coulé en 1766 au pied de l’Etna n’éloit pas encore refroidie. Il dit aussi « avoir vu une couche de lave de quel- ques pieds, produite par l’éruption du Vé- suve , qui resta rouge de chaleur au centre , long-temps après que la surface fut refroidie, et qu’en plongeant un bâton dans ses crevas- ses il prenoit feu à l’instant , quoiqu’il n’y eût au dehors aucune apparence de chaleur.» Massa, auteur sicilien, digne de foi, dit « qu’étant à Catane, huit ans après la grande éruption de 1669, il trouva qu’en plusieurs endroits la lave n’étoit pas encore froide. » M. le chevalier Hamilton laissa tomber des morceaux de bois sec dans une fente de lave du Vésuve, vers la fin d’avril 1771 ; ils furent enflammés dans l’instant : quoique cette lave fût sortie du volcan le 19 octo- bre 1767, elle n’avoit point de communica- tion avec le foyer du volcan ; et l’endroit où il fit cette expérience étoit éloigné au moins de quatre milles de la bouche d’où cette lave avoit jailli. Il est très-persuadé qu’il faut bien des années avant qu’une lave de l’épaisseur de celle-ci ( d’environ deux cents pieds ) se refroidisse. Je n’ai pu faire des expériences sur la consolidation et le refroidissement qu’avec des boulets de quelques pouces de diamè- tre ; le seul moyen de faire ces expériences plus en grand seroit d’observer les laves , et de comparer les temps employés à leur con- solidation et refroidissement selon leurs dif- férentes épaisseurs : je suis persuadé que ces observations confirmeroient la loi que j’ai établie pour le refroidissement depuis l’état’de fusion jusqu’à la température ac- tuelle; et quoiqu’à la rigueur ces nou- velles observations ne soient pas néces- saires pour confirmer ma théorie, elles serviroient à remplir le grand intervalle qui se trouve entre un boulet de canon et une planète. Il nous reste à examiner la nature des laves et à démontrer qu’elles se convertis- sent, avec le temps, en une terre fertile; ce qui nous rappelle l’idée de la première conversion des scories du verre primitif qui couvroienl la surface entière du globe après sa consolidation. « On ne comprend pas sous le nom de laves, dit M. de La Condamine, toutes les matières sorties de la bouche d’un volcan , telles que les cendres , les pierres ponces , le gravier, le sable; mais seulement celles qui, réduites par l’action du feu dans un état de liquidité , forment en se refroidissant des masses solides dont la dureté surpasse celle du marbre. Malgré cette restriction, on conçoit qu’il y aura encore bien des es- pèces de laves , selon le différent degré de fusion du mélange, selon qu’il participera plus ou moins du métal, et qu’il sera plus ou moins intimement uni avec diverses ma- tières. J’en distingue surtout trois espèces , et il y en a bien d’intermédiaires. La lave la plus pure ressemble , quand elle est polie , à une pierre d’un gris sale et obscur ; elle est lisse, dure, pesante, parsemée de petits fragmens semblables à du marbre noir, et de pointes blanchâtres ; elle paroît contenir des parties métalliques ; elle ressemble , au premier coup d’œil , à la serpentine, lorsque la couleur de la lave ne lire point sur le vert ; elle reçoit un assez beau poli, plus ou moins vif dans ses différentes parties ; on en fait des tables , des chambranles de che- minée , etc. « La lave la plus grossière est inégale et raboteuse ; elle ressemble fort à des sco- ries de forges ou écumes de fer. La lave la plus ordinaire tient un milieu entre ces deux extrêmes ; c’est celle que l’on voit répandue en grosses masses sur les flancs du Vésuve et dans les campagnes voisines. Elle y a coulé par torrens : elle a formé en se re- froidissant des masses semblables à des ro- chers ferrugineux et rouillés, et souvent épais de plusieurs pieds. Ces masses sont interrompues et souvent recouvertes par des amas de cendres et de matières calcinées.... C’est sous plusieurs lits alternatifs de laves, de cendres, et de terre , dont le total fait une croûte de soixante à quatre-vingts pieds d’é- paisseur, qu’011 a trouvé des temples, des portiques, des statues, un théâtre, une ville entière , etc » « Presque toujours, dit M. Fougeroux de Bondaroy , immédiatement après l’érup- tion d’une terre brûlée ou d’une espèce de cendre le Vésuve jette la lave elle coule par les fentes qui sont faites à la mon- tagne... « La matière minérale enflammée, fon- due, et coulante, ou la lave proprement dite, sort par les fentes ou crevasses avec plus ou moins d’impétuosité, et en plus ou moindre quantité, suivant la force de l’é- ruption; elle se répand à une distance plus ou moins grande , suivant son degré de flui- dité , et suivant la pente de la montagne ART. XVI. VOLCANS ET TREMBLEMENS DE TERRE. lu’elle suit, qui retarde plus ou moins son fefroidissement. . . i| « Celle qui garnit maintenant une partie i terrain dans le bas de la montagne , et |ii descend quelquefois jusqu’au pied de |>rtici forme de grandes masses, dures, Isantes, et hérissées de pointes sur leur ilrface supérieure ; la surface qui porte sur terrain est plus plate : comme ces mor- aux sont les uns sur les autres, ils res- nblent un peu aux flots de la mer ; quand morceaux sont plus grands et plus amon- és, ils prennent la figure des rochers... « En se refroidissant , la lave affecte dif- entes formes... La plus commune est en des plus ou moins grandes ; quelques mor- aux ont jusqu’à six , sept , ou huit pieds de aension : elle s’est ainsi cassée et rompue cessant d’êire liquide et en se refroidis- ilt ; c’est cette espèce de lave dont la su- fficie est hérissée de pointes. !< La seconde espèce ressemble à da gros dages; elle se trouve toujours proche verture , paroît s’être figée prompte- nt et avoir roulé avant de s’ètre durcie : I est moins pesante que celle de la pre- ire espèce; elle est aussi plus fragile, ins dure et plus bitumineuse; en la cas- L on voit que sa substance est moins fée que dans la première I: On trouve au haut de la montagne une i iième espèce de lave, qui est brillante, osée en filets qui quelquefois se croisent; est lourde et d’un rouge violet.... Il y a i jmorceaux qui sont sonores et qui ont t gure de stalactites Enfin on trouve à s fines parties de la montagne , des laves ïffectoient une forme sphérique, et qui , lissoient avoir roulé. On conçoit aisément e tuent la forme de ces laves peut varier !înt une infinité de circonstances , etc. » is ! entre des matières de toute espèce dans le imposition des laves; on a tiré du fer et eu de cuivre de celles du sommet du « (ve ; il y en a même quelques - unes l> ez métalliques pour conserver la flexi- ie b du métal : j’ai vu de grandes tables le pve de deux pouces d’épaisseur , tra- in- ïes et polies comme des tables de mar- se courber par leur propre poids; j’en m- i d’autres qui plioient sous une forte ;nt I ;e, mais qui reprenoient le plan hori- tec >1 par leur élasticité, ou tûtes les laves, étant réduites en poudre, |’é- comme le verre, susceptibles d'être Jus prties , par l’intermède de l’eau , d’a- lui- en argile, et peuvent devenir ensuite, gne W!p mélange des poussières et des détri- a65 mens de végétaux, d’excellens terrains. Ces faits sont démontrés par les belles et grandes forêts qui environnent l’Etna, qui toutes sont sur un fond de lave recouvert d’une bonne terre de plusieurs pieds d’épaisseur; les cen- dres se convertissent encore plus vite en terre que les poudres de verre et de lave : on voit dans la cavité des cratères des an- ciens volcans actuellement éteints , des ter- rains fertiles ; on en trouve de même sur le cours de tous les anciens torrens de lave. Les dévastations causées par les volcans sont donc limitées par le temps ; et comme la na- ture tend toujours plus à produire qu’à dé- truire , elle répare , dans l’espace de quel- ques siècles , les dévastations du feu sur la terre , et lui rend sa fécondité en se servant même des matériaux lancés pour la destruc- tion. (Add. Buff.) ARTICLE XVII. Des îles nouvelles , des cavernes, des fentes perpendiculaires , etc. Les îles nouvelles se forment de deux fa- çons , ou subitement par l’action des feux souterrains , ou lentement par le dépôt du limon des eaux. Nous parlerons d’abord de celles qui doivent leur origine à la première de ces deux causes. Les anciens historiens et les voyageurs modernes rapportent à ce sujet des faits , de la vérité desquels on ne peut guère douter. Sénèque assure que de son temps l’ile de Thérasie T parut tout d’un coup à la vue des mariniers. Pline rapporte qu’autrefois il y eut treize îles dans la mer Méditerranée qui sortirent en même temps du fond des eaux, et que Rhodes et Délos sont les principales de ces treize îles nou- velles ; mais il paroît par ce qu’il en dit , et par ce qu’en disent aussi Ammien Marcellin, Philon , etc. , que ces treize îles n’ont pas été produites par un tremblement de terre , ni par une explosion souterraine : elles étoient auparavant cachées sous les eaux ; et la mer en s’abaissant a laissé , disent-ils , ces îles à découvert ; Délos avoit même le nom de Pelagia , comme ayant autrefois ap- partenu à la mer. Nous ne savons donc pas si l’on doit attribuer l’origine de ces treize îles nouvelles à l’action des feux souterrains, ou à quelque autre cause qui auroil produit un abaissement et une diminution des eaux dans la mer Méditerranée; mais Pline rap- porte que l’îîe d ‘Hiera près de Thérasie a i. Aujourd’hui Santorin, a66 THÉORIE DE LA TERRE. élé formée de masses ferrugineuses et de terres lancées du fond de la mer ; et dans le chapitre 89 , il parle de plusieurs autres îles formées de la même façon. Nous avons sur tout cela des faits plus certains et plus nou- veaux. . Le 23 mai 1707, au lever du soleil, on vit de cette* même île de Thérasie ou de Santorin , à deux ou trois milles en mer, comme un rocher flottant : quelques gens curieux y allèrent , et trouvèrent que cet écueil , qui étoit sorti du fond de la mer, augmentoit sous leurs pieds ; et ils en rap- portèrent de la pierre ponce et des huîtres que le rocher qui s’étoit élevé du fond de la mer tenoit encore attachées à sa surface. Il y avoit eu un petit tremblement de terre à Santorin deux jours avant la naissance de cet écueil. Celte nouvelle île augmenta con- sidérablement jusqu’au 14 juin, sans acci- dent, et elle avoit alors un demi-mille de tour, et vingt à trente pieds de hauteur; la terre étoit blanche , et tenoit un peu de l’ar- gile : mais après cela la mer se troubla de plus en plus, il s’en éleva des vapeurs qui infectoient l’île de Santorin; et le 16 juillet on vit dix-sept ou dix-huit rochers sortir à la fois du fond de la mer; ils se réunirent. Tout cela se fit avec un bruit affreux qui con- tinua plus de deux mois, et des flammes qui s'élevaient de la nouvelle île ; elle augmen- toit toujours en circuit et en hauteur, et les explosions lançoieut toujours des rochers et des pierres à plus de sept milles de distance. L’île de Santorin elle-même a passé chez les anciens pour une production nouvelle; et, en 726, 1427 et 1573 elle a reçu des ac- croissemens , et il s’est formé de petites îles auprès de Santorin1. Le même volcan qui du temps de Sénèque a formé l’île de San- torin, a produit, du temps de Pline, celle d’Hiera ou de Volcanelle , et de nos jours a formé l’écueil dont nous venons de parler. Le 10 octobre 1720 , on vit auprès de l’île de Tercère un feu considérable s’élever de la mer ; des navigateurs s’en étant appro- chés par ordre du gouverneur , ils aperçu- rent, le 19 du même mois, une île qui n’é- toit que feu et fumée , avec une prodigieuse quantité de cendres jetées au loin , comme parla force d’un volcan, avec un bruit pa- reil à celui du tonnerre. Il se fit en même temps un tremblement de terre qui se fit sentir dans les lieux circonvoisins , et on re- marqua sur la mer une grande quantité de x. Voyez Y Histoire de l’Académie , année 1708 , pages 23 et suiv. pierres ponces , surtout autour de la no velle île ; ces pierres ponces voyagent, et 1 en a quelquefois trouvé une grande quanti dans le milieu même des grandes mers JJ Histoire de l’Académie , année 172 dit , à l’occasion de cet événement , qu’api un tremblement de terre dans l’île de Saii Michel , l’une des Açores , il a paru à vin! huit lieues au large, entre cette île et Tercère, un torrent de feu qui a don naissance à deux nouveaux écueils3. D; le volume de l’année suivante 1722 trouve le détail qui suit : « M. Delisle a fait savoir à l’Acadér plusieurs particularités de la nouvelle entre les Açores , dont nous n’avions qu’un mot en 1721 4 ; il les avoit tirées d’ lettre de M. de Montagnac , consul à I bonne. « Un vaisseau ou il étoit mouilla, le septembre 1721, devant la forteresse dd ville de Saint-Michel, qui est dans l’île même nom , et voici ce qu’on apprit d pilote du port : « La nuit du 7 au 8 décembre 1720 , eut un grand tremblement de terre dan Tercère et dans Saint-Michel, distantes 1’ de l’autre de vingt-huit lieues, et l’île ne sortit ; an remarqua en même temps qu pointe de l’île de Pic, qui en étoit à tr< lieues, et qui auparavant jetoit du feu, toit affaissée et n’en jetoit plus : mais neuve jetoit continuellement une grosse mée; et effectivement elle fut vue du seau où étoit M. de Montagnac, tant en fut à portée. Le pilote assura qu’il 0 fait dans une chaloupe le tour de l’île l’approchant le plus qu’il avoit pu. Du du sud il jeta la sonde, et fila soix brasses sans trouver fond : du côté de l’c il trouva les eaux fort changées ; elles ét< d’un blanc bleu et vert , qui sembloi bas-fond , et qui s’étendoit à deux tiei lieue; elles paroissoient vouloir boui au nord-ouest, qui étoit l’endroit d’où toit la fumée, il trouva quinze brasses d fond de gros sable; il jeta une pierre mer, et il vit, à l’endroit où elle étoit ton l’eau bouillir et sauter en l’air avec i tuosité; le fond étoit si chaud, qu’il f deux fois de suite le suif qui étoit au du plomb. Le pilote observa encore t côté-là , que la fumée sortoit d’un pet borné d’une dune de sable. L’île est tavi 2. Voyez Trans.phil. abrig’d , vol. VI, pa page i54- 3. Page 26. 4. Page 26. lest l*son ®ari i, et Suh per i. Pli ÀRT. XVII. ILES NOUVELLES, CAVERNES. 267 s ronde, et assez haute pour être aper- de sept à huit lieues dans un temps clair, c On a appris depuis par une lettre de Adrien , consul de la nation françoise s l’île de Saint-Michel, en date du mois mars 1722, que l’île neuve avoit consi- ablement diminué , et qu’elle étoit pres- : à fleur d’eau , de sorte qu’il n’y avoit d’apparence qu’elle subsistât encore long- Ps- ” )n est donc assuré par ces faits et par un id nombre d’autres semblables à ceux-ci, tu dessous même des eaux de la mer les ières inflammables renfermées dans le de la terre agissent et font des explo- is violentes. Les lieux où cela arrive sont espèces de volcans qu’on pourroit ap- ir sous-marins , lesquels ne diffèrent des :ans ordinaires que parle peu de durée eur action et le peu de fréquence de s effets ; car on conçoit bien que le feu ^nt une fois ouvert un passage, l’eau doit métrer et l’éteindre. L’île nouvelle laisse sssairement un vide que l’eau doit rem- ; et cette nouvelle terre qui n’est corn- ée que des matières rejetées par le volcan in , doit x’essembler en tout au Monte di ere , et aux autres éminences que les :ans terrestres ont formées en plusieurs ii’oits ; or, dans le temps du déplacement >é par la violence de l’explosion , et pen- t ce mouvement, l’eau aura pénétré s la plupart des endroits vides, elle aura jnt pour un temps ce feu souterrain. C’est aremmenl par cette raison que ces vol- » sous-marins agissent plus rarement que volcans ordinaires , quoique les causes nus les deux soient les mêmes , et que matières qui produisent et nourrissent feux souterrains , puissent se trouver ; les terres couvertes par la mer, en aussi ide quantité que sous les terres qui sont icouvert. e sont ces mêmes feux souterrains ou i-marins qui sont la cause de toutes ces 'Aidons des eaux de la mer, que les tgeurs ont remarquées en plusieurs en- ts, et des trombes dont nous avons é : iis produisent aussi des orages et des ablemens qui ne sont pas moins sensibles la mer que sur la terre. Ces îles qui ont formées par ces volcans sous-marins , t ordinairement composées de pierres ces et de rochers calcinés ; et ces vol- > produisent , comme ceux de la terre , tremblemens et des commotions très- I entes. >n a aussi vu souvent des feux s’élever de la surface des eaux. Pline nous dit que le lac de Trasimène a paru enflammé sur toute sa surface. Agricola rapporte que lors- qu’on jette une pierre dans le lac de Den- stad en Thuringe, il semble, lorsqu’elle descend dans l’eau, que ce soit un trait de feu. Enfin la quantité de pierres ponces que les voyageurs nous assurent avoir rencon- trées dans plusieurs endroits de l’Océan et de la Méditerranée, prouve qu’il y a au fond de la mer des volcans semblables à eeux que nous connoissons, et qui ne dif- fèrent , ni par les matières qu’ils rejettent , ni par la violence des explosions, mais seu- lement par la rareté et par le peu de con- tinuité de leurs effets : tout, jusqu’aux vol- cans , se trouve au fond des mers , comme à la surface de la terre. Si même on y fait attention, on trouvera plusieurs rapports entre les volcans de terre et les volcans de mer; les uns et les autres ne se trouvent que dans les sommets des montagnes. Les îles des Açores et celles de l’Archipel ne sont que des pointes de mon- tagnes, dont les unes s’élèvent au dessus de l’eau, et les autres sont au dessous. On voit par la relation de la nouvelle île des Açores, que l’endroit d’où sortoit la fumée n’étoit qu’à quinze brasses de profondeur sous l’eau ; ce qui , étant comparé avec les pro- fondeurs ordinaires de l’Océan , prouve que cet endroit même est un sommet de mon- tagne. On en peut dire tout autant du ter- rain de la nouvelle île auprès de Santorin: il n’étoit pas à une grande profondeur sous les eaux , puisqu’il y avoit des huîtres atta- chées aux rochers qui s’élevèrent. U paroît aussi que ces volcans de mer ont quelque- fois, comme ceux de terre, des communi- cations souterraines, puisque le sommet du volcan du pic de Saint-George , dans l’île de Pic, s’abaissa lorsque la nouvelle île des ■4çores s’éleva. On doit encore observer que ces nouvelles îles ne paroissent jamais qu’au- près des anciennes , et qu’on n’a point d’exemple qu’il s’en soit élevé de nouvelles dans les hautes mers : on doit donc regarder le terrain où elles sont comme une conti- nuation de celui des îles voisines; et lorsque ces îles ont des volcans, il 11’est pas éton- nant que le terrain qui en est voisin con- tienne des matières propres à en former, et que ces matières viennent à s’enflammer, soit par la seule fermentation, soit par l’ac- tion des vents souterrains. Au reste, les îles produites par l’action du feu et des tremblemens de terre sont en a68 THÉORIE DE IA TERRE. petit nombre, et ces événemens sont rares ; mais il y a un nombre infini d’îles nouvelles produites par les limons, les sables et les terres que les eaux des fleuves ou de la mer entraînent et transportent en différens en- droits. A l’embouchure de toutes les rivières, il se forme des amas de terre et des bancs de sable, dont l’étendue devient souvent assez considérable pour former des îles d’une grandeur médiocre. La mer, en se re- tirant et en s’éloignant de certaines côtes, laisse à découvert les parties les plus élevées du fond, ce qui forme autant d’îles nou- velles ; et de même en s’étendant sur de certaines plages, elle en couvre les parties les plus basses , et laisse paroître les parties les plus élevées qu’elle n’a pu surmonter, ce qui fait encore autant d’îles ; et on remarque en conséquence qu’il y a fort peu d’îles dans le milieu des mers , et qu’elles sont presque toutes dans le voisinage des continens, où la mer les a formées , soit en s’éloignant , soit en s’approchant de ces différentes con- trées. L’eau et le feu , dont la nature est si dif- férente et même si contraire, produisent donc des effets semblables, ou du moins qui nous paroissent être tels , indépendamment des productions particulières de ces deux élémens, dont quelques-unes se ressemblent au point de s’y méprendre, comme le cristal et le verre, l’antimoine naturel et l’antimoine fondu, les pépites naturelles des mines et celles qu’on fait artificiellement par la fu- sion , etc. Il y a dans la nature une infinité de grands effets que l’eau et le feu produi- sent, qui sont assez semblables pour qu’on ait de la peine à les distinguer. L’eau, comme on l’a vu, a produit les montagnes et formé la plupart des îles; le feu a élevé quelques collines et quelques îles : il en est de même des cavernes , des fentes, des ouvertures, des gouffres, etc.; les unes ont pour origine les feux souterrains, et les autres les eaux tant souterraines que superficielles. Les cavernes se trouvent dans les monta- gnes, et peu on point du tout dans les plaines ; il y en a beaucoup dans les îles de l’Archipel et dans plusieurs autres îles , et cela parce que les îles ne sont en général que des dessus de montagnes. Les cavernes se forment, comme les précipices, par l’af- faissement des l'ochers, ou, comme les abî- mes, par l’action du feu : car pour faire d’un précipice ou d’un abîme une caverne, il ne faut qu’imaginer des rochers contre- buttés et faisant voûte par dessus; ce qui doit arriver très-souvent , lorsqu’ils viennent à être ébranlés et déracinés. Les cavefi peuvent être produites par les mêmes eau qui produisent les ouvertures , les ébran mens et les affaissemens des terres ; et causes sont les explosions des volcans , 1’ tion des vapeurs souterraines et les treml mens de terre ; car ils font des boulevei mens et des éboulemens qui doivent née sairement former des cavernes, des trot des ouvertures et des anfractuosités de to espece. La caverne de Saint-Patrice en Irlai n’est pas aussi considérable qu’elle est meuse; il en est de même de la grotte Chien en Italie, et de celle qui jette du dans la montagne de Beniguazeval au roy me de Fez. Dans la province de Derby Angleterre , il y a une grande caverne 1 considérable, et beaucoup plus grande < la fameuse caverne de Bauman auprès d«l forêt Noire dans le pays de Brunswick. . appris par une personne aussi respecta par son mérite que par son nom (mil»! K1 comte de Morton) que cette grande cave:' appelée DevÏÏshole présente d’abord \ ouverture fort considérable, comme c»i d’une très-grande porte d’église; que ] cette ouverture il coule un gros misses? qu’en avançant, la voûte de la caverne j rabaisse si fort, qu’en un certain endroit ! ltlJt est obligé, pour continuer sa route, de mettre sur l’eau du ruisseau dans des quets fort plats, où on se couche pour p ser sous la voûte de la caverne, qui abaissée dans cet endroit au point que l’i!|Jec touche presque à la voûte : mais api'ès av passé cet endroit, la voûte se relève, et voyage encore sur la rivière, jusqu’à ce ( la voûte se rabaisse de nouveau et toucli la superficie de l’eau , et c’est là le fond ® la caverne et la source du ruisseau qui sort; il grossit considérablement dans certains temps , et il amène et amonci beaucoup de sable dans un endroit de la verne qui forme comme un cul-de-sac, d la direction est différente de celle de la verne principale. Dans la Carniole, il y a une caverne « près de Potpéchio, qui est fort spacieu.1 et dans laquelle on trouve un grand lac s< terrain. Près d’Adelsperg, il y a une cave] dans laquelle on peut faire deux mil d’Allemagne de chemin, et où l’on trot des précipices très-profonds. Il y a aussi grandes cavernes et de belles grottes s( les montagnes de Meudipp en Galles; ? % trouve des mines de plomb auprès de < cavernes , et des chênes enterrés à quir ART. XVII. ILES NOUVELLES, CAVERNES. 269 lasses de profondeur. Dans la province de jocester, il y a une très-grande caverne , l’on appelle Penpark hole , au fond de la- |elle on trouve de l’eau à trente-deux lisses de profondeur; on y trouve aussi | filons de mine de plomb. On voit bien que la caverne de Devil’s- le et les autres, dont il sort de grosses taines ou des ruisseaux , ont été creusées formées par les eaux , qui ont apporté les les et les matières divisées qu’on trouve re les rochers et les pierres; et on auroit t de rapporter l’origine de ces cavernes aux mlemens et aux tremblemens de terre. Jne des plus singulières et des plus gran- cavernes que l’on connoisse , est celle nliparos, dont M. de Tourneforl nous a nié une ample description. On trouve aord une caverne rustique d’environ îte pas de largeur, partagée par quelques ers naturels : entre les deux piliers qui t sur la droite, il y a un terrain en pente pce, et ensuite, jusqu’au fond de la même erne , une pente plus rude d’environ gt pas de longueur ; c’est le passage pour r à la grotte ou caverne intérieure , et passage n’est qu’un trou fort obscur, par |uel on ne sauroit entrer qu’en se baissant pu secours des flambeaux. On descend aord dans un précipice horrible à l’aide a câble que l’on prend la précaution :tacher tout à l’entrée ; on se coule dans autre bien plus effroyable, dont les bords t fort glissans, et qui répondent sur la che à des abîmes profonds. On place sur bords de ces gouffres une échelle , au fen de laquelle on franchit, en tremblant, rocher tout-à-fait coupé à plomb ; on tinue à glisser par des endroits un peu ns dangereux. Mais dans le temps qu’on ;roit en pays praticable , le pas le plus eux vous arrête tout court , et on s’y seroit la tête , si on n’étoit averti ou ar- ji par ses guides : pour le franchir, il £ se couler sur le dos le long d’un gros aer, et descendre une échelle qu’il faut orter exprès; quand on est arrivé au bas l’échelle , on se roule quelque temps en- 3 sur des rochers, et enfin on arrive s la grotte. On compte trois cents brasses profondeur depuis la surface de la terre : ;rotte paroît avoir quarante brasses de teur sur cinquante de large ; elle est rem- de belles et grandes stalactites de diffé- tes formes, tant au dessus de la voûte i sur le terrain d’en bas ». Voyez le Voyage du Levant , pages 188 el antes. Dans la partie de la Grèce appelée Liva- die ( Ac/iaia des anciens) il y a une grande caverne dans une montagne, qui étoit au- trefois fort fameuse par les oracles de Tro- phonius, entre le lac de Livadia el la mer voisine, qui, dans l’endroit le plus près, en est à quatre milles : il y a quarante passages souterrains à travers le rocher, sous une haute montagne, par où les eaux du lac s’écoulent 2. Dans tous les volcans , dans tous les pays qui produisent du soufre, dans toutes les contrées qui sont sujeltes aux tremblemens de terre , il y a des cavernes : le terrain de la plupart des îles de l’Archipel est caver- neux presque partout ; celui des îles de l’océan Indien, principalement celui des îles Moluques, 11e paroît être soutenu que sur des voûtes et des concavités; celui des îles Açores, celui des îles Canaries, celui des îles du cap Vert, et en général le terrain de presque toutes les petites îles , est , à l’intérieur, creux et caverneux en plusieurs endroits , parce que ces îles ne sont , comme nous l’avons dit , que des pointes de monta- gnes , où il s’est fait des éboulemens consi- dérables, soit par l’action des volcans, soit par celle des eaux , des gelées , et des autres injures de l’air. Dans les Cordilières, où il a plusieurs volcans, et où les tremblemens de terre sont fréquens , il y a aussi un grand nombre de cavernes , de même que dans le volcan de l’ile de Banda , dans le mont Ara- rath , qui est un ancien volcan , etc. Le fameux labyrinthe de l’île de Candie n’est pas l’ouvrage de la nature toute seule; M. de Tournefort assure que les hommes y ont beaucoup travaillé : et on doit croire que cette caverne n’est pas la seule que les hommes aient augmentée; ils en forment même tous les jours de nouvelles en fouil- lant les mines et les carrières ; et lorsqu’elles sont abandonnées pendant un très-long es- pace de temps , il n’est pas fort aisé de re- connoître si ces excavations ont été produi- tes parla nature, ou faites de la main des hommes. On connoît des carrières qui sont d’une étendue très-considérable, celle de Maestricht , par exemple , où l’on dit que cinquante mille personnnes peuvent se ré- fugier, et qui est soutenue par plus de mille piliers , qui ont vingt ou vingt-quatre pieds de hauteur ; l’épaisseur de terre et de rocher qui est au dessus est de plus de vingt-cinq brasses. Il y a, dans plusieurs endroits de cette carrière , de l’eau et de petits étangs 2. Voyez Géographie de Gordon , édition de Lon- dres, 1733, page 179. THÉORIE DE LÀ TERRE. 270 où l’on peut abreuver du bétail , etc. Les mines de sel de Pologne forment des exca- vations encore plus grandes que celle-ci. Il y a ordinairement de vastes carrières auprès de toutes les grandes villes ; mais nous n’en parlerons pas ici en détail : d’ailleurs les ouvrages des hommes , quelque grands qu’ils puissent être , ne iiendront jamais qu’une bien petite place dans l’histoire de la nature. Les volcans et les eaux , qui produisent les cavernes à l’intérieur, forment aussi à l’extérieur des fentes , des précipices et des abîmes. A Cajeta en Italie , il y a une mon- tagne qui autrefois a été séparée par un tremblement de terre, de façon qu’il semble 3ue la division en a été faite par la main es hommes. Nous avons déjà parlé de l’or- nière de l’île de Machian, de l’abîme du mont Ararath, de la porte des Cordilières et de celle des Thermopylès, etc.; nous pouvons y ajouter la porte de la montagne des Troglodytes en Arabie, celle des Echelles en Savoie, que la nature n’avoit fait qu’é- baucher, et que Yictor Amédée a fait ache- ver. Les eaux produisent, aussi bien que les feux souterrains, des affaissemens de terre considérables, des éboulemens, des chutes de rochers , des renversemens de montagnes, dont nous pouvons donner plu- sieurs exemples. « Au mois de juin 1714, une partie de la montagne de Diableret en Yalais tomba subitement et tout à la fois entre deux et trois heures après midi, le ciel étant fort Serein. Elle éloit de figure conique. Elle ren- versa cinquante-cinq cabanes de paysans , écrasa quinze personnes, et plus de cent bœufs et vaches , et beaucoup plus de menu bétail, et couvrit de ses débris une bonne lieue carrée ; il y eut une profonde obscurité causée par la poussière : les tas de pierres amassés en bas sont hauts de plus de trente perches , qui sont apparemment des perches du Rhin de dix pieds ; ces amas ont arrêté des eaux qui forment de nouveaux lacs fort profonds. Il n’y a dans tout cela nul vestige de matière bitumineuse , ni de soufre , ni de chaux cuite , ni par conséquent de feu souterrain; apparemment la base de ce grand rocher s’étoit pourrie d’elle-même et réduite en poussière. » On a un exemple remarquable de ces af- faissemens dans la province de Kent , auprès de Folkstone : les collines des environs ont baissé de distance en distance par un mouvement insensible et sans aucun tremble- ment de terre ; ces collines sont à l’intérieur des rochers de pierre et de craie. Par cet affaissement, elles ont jeté dans la mer 5, rochers et des terres qui en étoient vc ^ nés. On peut voir la relation de ce fait 1 1 attesté dans les Transactions philoso :;s abrig’d, vol. IV, page 200. - ^ En 1618, la ville de Pleur, s en Val te ifl fut enterrée sous les rochers au pied i «I quels elle étoit située. En 1678 il y eut jj® grande inondation en Gascogne , causée i l’affaissement de quelques morceaux (1 montagnes dans les Pyrénées, qui fii pi sortir les eaux qui étoient contenues d, juer les cavernes souterraines de ces monfagi a En 1680, il en arriva une plus gra «n en Irlande, qui avoil aussi pour cause ] jg faissement d’une montagne dans des cai Sjui nés remplies d’eau. On peut concevoir a * ment la cause de tous ces effets ; on sait q iijon y a des eaux souterraines en une infi: d’endroits : ces eaux entraînent peu à: [fo les sables et les terres à travers lesqj fjj elles passent, et par conséquent elles 1 ^ vent détruire peu à peu la couche de té roc sur laquelle porte une montagne ; et ci [’jj couche de terre qui lui sert de base ver a(f à manquer plutôt d’un côté que de l’aul g il faut que la montagne se renverse; 011 w cette base manque également partout ^ montagne s’affaisse sans se renverser. ue Après avoir parlé des affaissemens , , ^ éboulemens et de tout ce qui n’arrive, p s ( ainsi dire , que par accident dans la nati ÿ , nous ne devons pas passer sous silence jj,ce chose qui est plus générale, plus ordin; ^ et plus ancienne ; ce sont les fentes perp ii)t diculaires que l’on trouve dans toutes ^ couches de terre. Ces fentes sont sensil 1 (C0[ et aisées à reconnoitre , non seulement d, ^ les rochers, dans les carrières de marbrt m, de pierre, mais encore dans les argiles p dans les terres de toute espèce qui n’out ,e | été remuées ; et on peut les observer d ^ toutes les coupes un peu profondes des ^ rains et dans toutes les cavernes et les it- cavations. Je les appelle fentes perpendi jç laires, parce que ce n’est jamais que jt{ accident lorsqu’elles sont obliques, corai -J les couches horizontales 11e sont inclin ! [|)(1| que par accident. Woodward et Ray pari, J de ces fentes , mais d’une manière confu j ÿ et ils ne les appellent pas fentes perpen p culaires, parce qu’ils croient qu’elles gj| ,(j vent être indifféremment obliques ou p: 5î pendiculaires; et aucun auteur n’en a exj: ^ qué l’origine : cependant il est visible < ^ ces fentes ont été produites , comme ra j ; | l’avons dit dans le discours précédent , ; j ^ le dessèchement des matières qui compos ART. XVII. ILES NOUVELLES , CAVERNES. couches horizontales. De quelque ma- re que ce dessèchement soit arrivé, il a produire des fentes perpendiculaires ; matières qui composent les couches n’ont pu diminuer de volume sans se fendre de tance en distance dans une direction per- îdiculaire à ces mêmes couches. Je com- nds cependant sous ce nom de fentes ■pendiculaires toutes les séparations na- elles des rochers, soit qu’ils se trouvent ts leur position originaire, soit qu’ils aient peu glissé sur leur hase , et que par con- uent ils se soient un peu éloignés les uns autres. Lorsqu’il est arrivé quelque mou- lent considérable à des masses de rochers, fentes se trouvent quelquefois posées quement, mais c’est parce que la masse elle -même oblique; et avec un peu d’at- ion , il est toujours fort aisé de recou- re que ces fentes sont en général per- dicülai'res aux couches horizontales , sur- . dans les carrières de marbre, de pierre aaux et dans toutes les grandes chaînes ’ocher. l’intérieur des montagnes est principale- t composé de pierres et de rochers, dont lifférens lits sont parallèles. On trouve rent entre les lits horizontaux de petites ches d’une matière moins dure que la re , et les fentes perpendiculaires sont plies de sable , de cristaux , de miné- l, de métaux, etc. Ces dernières ma- ïs sont d’une formation plus nouvelle celle des lits horizontaux dans lesquels ;rouve des coquilles marines. Les pluies neu à peu détaché les sables et les terres îessus des montagnes , et elles ont laissé couvert les pierres et les autres matières les , dans lesquelles on distingue aisé- t les couches horizontales et les fentes endiculaires ; dans les plaines , au con- e , les eaux des pluies et les fleuves ayant aé une quantité considérable de terre , >able, de gravier et d’autres matières ;ées, il s’en est formé des couches de ' de pierre molle et fondante , de sable e gravier arrondi , de terre mêlée de taux. Ces couches ne contiennent point coquilles marines , ou du moins n’en iennent que des fragmens qui ont été chés des montagnes avec les graviers et erres. Il faut distinguer avec soin ces ■elles couches des anciennes , où l’on re presque toujours un grand nombre oquilles entières et posées dans leur si- on naturelle. I l’on veut observer l’ordre et la distri- J)n intérieure des matières dans une montagne composée , par exemple , de pierres ordinaires ou de matières lapidi- fiques calcinables, on trouve ordinaire- ment sous la terre végétale une couche de gravier ; ce gravier est de la nature et de la couleur de la pierre qui domine dans ce terrain; et soua le gravier on trouve de la pierre. Lorsque la montagne est coupée par quelque tranchée ou par quelque ravine profonde, on distingue aisément tous les bancs , toutes les couches dont elle est com- posée ; chaque couche horizontale est sépa- rée par une espèce de joint qui est aussi horizontal ; et l’épaisseur de ces bancs ou de ces couches horizontales augmente ordi- nairement à proportion qu’elles sont plus basses, c’est-à-dire plus éloignées du som- met de la montagne ; on reconnoît aussi que des fentes à peu près perpendiculaires divi- sent toutes ces couches et les coupent verti- calement. Pour l’ordinaire, la première cou- che, le premier lit qui se trouve sous le gravier, et même le second , sont non seule- ment plus minces que les lits qui forment la base de la montagne, mais ils sont aussi divisés par des fentes perpendiculaires si fréquentes, qu’ils ne peuvent fournir aucun morceau de longueur, mais seulement du moellon. Ces fentes perpendiculaires , qui sont en si grand nombre à la superficie, et qui ressemblent parfaitement aux gerçures d’une terre qui se seroit desséchée , ne par- viennent pas toutes , à beaucoup près , jus- qu’au pied de la montagne : la plupart dis- paroissent insensiblement à mesure qu’elles descendent; et au bas il ne reste qu’un certain nombre de ces fentes perpendicu- laires, qui coupent encore plus à plomb qu’à la superficie les bancs inférieurs , qui ont aussi plus d’épaisseur que les bancs su- périeurs. Ces lits de pierre ont souvent , comme je l’ai dit, plusieurs lieues d’étendue sans in- terruption : on retrouve aussi presque tou- jours la même nature de pierre dans la mon- tagne opposée, quoiqu’elle en soit séparée par une gorge ou par un vallon; et les lits de pierre ne disparoissent entièrement que dans les lieux où la montagne s’abaisse et se met au niveau de quelque grande plaine. Quelquefois entre la première couche de terre végétale et celle de gravier, on en trouve une de marne qui communique sa couleur et ses autres caractères aux deux autres : alors les fentes perpendiculaires des carrières qui sont au dessous sont remplies de cette marne, qui y acquiert une dureté presque égale en apparence à celle de la 272 THÉORIE DE LA TERRE. pierre; mais en l’exposant à l’air, elle se gerce, elle s’amollit et elle devient grasse et ductile. Dans la plupart des carrières, les lits qui forment le dessous ou le sommet de la mon- tagne sont de pierre tendre , et ceux qui forment la base de la montagne sont de pierre dure; la première est ordinairement blan- che, d’un grain si fin, qu’à peine il peut être aperçu : la pierre devient plus grenue et plus dure à mesure qu’on descend ; et la pierre des bancs les plus bas est non seule- ment plus dure que celle des lits supérieurs, mais elle est aussi plus serrée, plus com- pacte et plus pesante; son grain est fin et brillant , et souvent elle est aigre , et se casse presque aussi net que le caillou. Le noyau d’une montagne est donc com- posé de différens lits de pierre, dont les supérieurs, sont de pierre tendre et les in- férieurs de pierre dure. Le noyau pierreux est toujours plus large à la base et plus pointu ou plus étroit au sommet : on peut en attribuer la cause à ces différens degrés de dureté que l’on trouve dans les lits de pierre; car comme ils deviennent d’autant plus durs qu’ils s’éloignent davantage du sommet de la montagne , on peut croire que les courans et les autres mouvemens des eaux qui ont creusé les vallées et donné la figure aux contours des montagnes, auront usé latéralement les matières dont la mon- tagne est composée, et les auront dégradées d’autant plus qu’elles auront été plus molles: en sorte que les couches supérieures , étant les plus tendres, auront souffert la plus grande diminution sur leur largeur, et au- ront été usées latéralement plus que les au- tres ; les couches suivantes auront résisté un peu davantage ; et celles de la base , étant plus anciennes, plus solides et formées d’une matière plus compacte et plus dure , auront été plus en état que toutes les autres de se défendre contre l’action des causes exté- rieures, et elles n’auront souffert que peu ou point de diminution latérale par le frot- tement des eaux. C’est là l’une des causes auxquelles on peut attribuer l’origine de la pente des montagnes ; cette pente sera de- venue encore plus douce à mesure que les terres du sommet et les graviers auront coulé et auront été entraînés par les eaux des pluies : et c’est par ces deux raisons que toutes les collines et les montagnes qui ne sont composées que de pierres calcinables ou d’autres matières lapidifiques calcinables , ont une pente qui n’est jamais aussi rapide que celle des montagnes composées de roc vif et de caillou en grande masse, qui soi; ordinairement coupées à plomb à des haï | teurs très-considérables , parce que dans 0 masses de matières vitrifiables les lits sup< rieurs, aussi bien que les lits inférieurs, son d’une très-grande dureté, et qu’ils ont toi | également résisté à l’action des eaux, qij n’a pu les user qu’également de haut en ba | et leur donner par conséquent une pen perpendiculaire ou presque perpendiculaire Lorsque au dessus de certaines collines j dont le sommet est plat et d’une assez granc; étendue, on trouve d’abord de la pien dure sous la couche de terre végétale, c remarquera, si l’on observe les environs c ces collines, que ce qui paroît en être j sommet ne l’est pas en effet, et que ce de sus de collines n’est que la continuation c ! la pente insensible de quelque colline pli ' élevée ; car après avoir traversé cet espai j de terrain, on trouve d’autres éminenol qui s’élèvent plus haut, et dont les couch| supérieures sont de pierre tendre et les ii . férieures de pierre dure : c’est le prolong ! ment de ces dernières couches qu’on retrou' au dessus de la première colline. Lorsque au contraire on trouve une ca j rière à peu près au sommet d’une montagm j et dans un terrain qui n’est surmonté d’?J | eu ne hauteur considérable, on n’en tireo! dinairement que delà pierre tendre, et il fa j fouiller très-profondément pour trouver J pierre dure. Ce n’est jamais qu’entre ces lilj ! de pierre dure que l’on trouve des bancs c j marbres : ces marbres sont diversement c< lorés par les terres métalliques que les eanl • pluviales introduisent dans les couches p; infiltration , après les avoir détachées d autres couches supérieures ; et on peut croi 1 que dans tous les pays où il y a de la pierr j i on trouveroit des marbres si l’on fouille assez profondément pour arriver aux ban ; de pierre dure : quoto enim loco non situ j marmor invenitur ? dit Pline. C’est en effj une pierre bien plus commune qu’on ne j croit, et qui ne diffère des autres pierr I que par la finesse du grain , qui la rend pl compacte et susceptible d’un poli brillan qualité qui lui est essentielle, et de laque! 1 elle a tiré sa dénomination chez les ancien 1 Les fentes perpendiculaires des carrièrj et les joints des lits de pierre sont souve remplis ou incrustés de certaines concrétion qui sont tantôt transparentes comme le cri ; lai , et d’une figure régulière, et tantôt op; ques et terreuses ; l’eau coule par les fenlj perpendiculaires, et elle pénètre même I tissu serré de la pierre ; les pierres qui so ART. XVII. ILES NOUVELLES, CAVERNES. 2?3 poreuses s’imbibent d’une si grande quantité d’eau , que la gelée les fait fendre et éclater. Les eaux pluviales , en criblant à travers les lits d’une carrière, et pendant le séjour qu’elles font dans les couches de marne , de pierre , de marbre , en détachent les molé- cules les moins adhérentes et les plus fines , et se chargent de toutes les matières qu’elles peuvent enlever ou dissoudre. Ces eaux cou- lent d’abord le long des fentes perpendicu- 1 laires; elles pénètrent ensuite entre les lits de pierre ; elles déposent entre les joints ho- rizoniaux , aussi bien que dans les fentes per- pendiculaires, les matières qu’elles ont en- I traînées, et elles y forment des congélations differentes, suivant les différentes matières qu’elles déposent : par exemple , lorsque ces eaux gouttières criblent à travers la marne, Ja craie, ou la pierre tendre, la matière I qu’elles déposent n’est aussi qu’une marne ‘I très-pure et très-fine , qui se pelotonne or- dinairement dans les fentes perpendiculaires : des rochers sous la forme d’une substance ‘j poreuse , molle , ordinairement fort blanche || et très-légère, que les naturalistes ont ap- j pelée lac lunœ ou medulla saxi. I Lorsque ces filets d’eau chargés de ma- tière lapidifique s’écoulent par les joints ho- rizontaux des lits de pierre tendre ou de craie , cette matière s’attache à la superficie des blocs de pierre, et elle y forme une croûte écailleuse, blanche, légère et spon- gieuse. C’est cette espèce de matière que quelques auteurs ont nommée agaric miné- ral, par sa ressemblance avec l’agaric végé- tal. Mais si la matière des couches a un cer- tain degré de dureté', c’est-à-dire si les lits de la carrière sont de pierre dure ordinaire, de pierre propre à faire de la bonne chaux, le filtre étant alors plus serré, l’eau en sor- tira chargée d’une matière lapidifique plus pure , plus homogène , et dont les molécules pourront s’engrener plus exactement ,, s’u- nir plus intimement ; et alors il s’en formera des congélations qui auront à peu près la dureté de la pierre et un peu de transparence, ! et l’on trouvera dans ces carrières , sur la | superficie des blocs , des incrustations pier- <| reuses disposées en ondes , qui remplissent i entièrement les joints horizontaux. Dans les grottes et dans les cavités des rochers , qu’on doit regarder comme les bas- sins et les égouts des fentes perpendiculai- res , la direction diverse des filets d’eau qui || charrient la matière lapidifique donne aux I concrétions qui en résultent des formes dif- jl férentes; ce sont ordinairement des culs-de- | lampe et des cônes renversés qui sont alta- Buffon. I. chés à la voûte , ou bien ce sont des cylindres creux et très-blancs formés par des couches presque concentriques à l’axe du cylindre; et ces congélations descendent quelquefois jusqu’à terre, et forment dans ces lieux sou- terrains des colonnes et mille autres figurés aussi bizarres que les noms qu’il a plu aux naturalistes de leur donner : tels sont ceux de stalactites, stalagmites, ostéocolles , etc. Enfin, lorsque ces sucs concrets sortent immédiatement d’une matière très-dure , comme des marbres et des pierres dures , la matière lapidifique que l’eau charrie étant aussi homogène qu’elle peut l’étre, et l’eau en ayant , pour ainsi dire , plutôt dissous que détaché les parties constituantes, elle prend , en s’unissant , une figure constante et régulière ; elle forme des colonnes à pans, terminées par une pointe triangulaire , qui sont transparentes , et composées de couches obliques : c’est ce qu’on appelle sparr ou spalt. Ordinairement cette matière est trans- parente et sans couleur ; mais quelquefois aussi elle est colorée lorsque la pierre dure, ou le marbre dont elle sort , contient des parties métalliques. Ce sparr a le degré de dureté de la pierre; il se dissout, comme la pierre , par les esprits acides ; il se calcine au même degré de chaleur : on ne peut pas douter que ce ne soit de la vraie pierre, mais qui est devenue parfaitement homo- gène ; on pourroit même dire que c’est de la pierre pure et élémentaire , de la pierre qui est sous sa forme propre et spécifique. Cependant la plupart des naturalistes re- gardent celte matière comme une substance distincte et existante indépendamment de la pierre ; c’est leur suc lapidifique ou cris- tallin, qui, selon eux, lie non seulement les parties de la pierre ordinaire, mais même celles du caillou. Ce suc, disent-ils, aug- mente la densité des pierres par des infil- trations réitérées; il les rend chaque jour plus pierres qu’elles n’étoient , et il les con- vertit en véritable caillou ; et lorsque ce suc s’est fixé en sparr, il reçoit, par des infil- trations réitérées de semblables sucs encore plus épurés, qui en augmentent la densité et la dureté , en sorte que cette matière ayant été successivement sparr, verre, en- suite cristal , elle devient diamant. Ainsi toutes les pierres , selon eux , tendent à de- venir caillou , et toutes les matières transpa- rentes à devenir diamant. Mais, si cela est, pourquoi voyons-nous que dans de très-grands cantons , dans des provinces entières , ce suc cristallin ne forme que de la pierre , et que dans d’autres pro- 18 274 THÉORIE DE LA TERRE. vinces il ne forme que du caillou ? Dira-t-on que ces deux terrains ne sont pas aussi an- ciens l’un que l’autre ; que ce suc n’a pas eu le temps de circuler et d’agir aussi long- temps dans l’un que dans l’autre ? cela n’est pas probable. D’ailleurs , d’où ce suc peut- il venir? s’il produit les pierres et les cailloux , qu’est-ce qui peut le produire lui-même ? Il est aisé de voir qu’il n’existe pas indépen- damment de ces matières, qui seules peu- vent donner à l’eau qui les pénètre cette qua- lité pétrifiante toujours relativement à leur nature et à leur caractère spécifique , en sorte que dans les pierres elles forment du sparr, et dans les cailloux du cristal ; et il y a au- tant de différentes espèces de ce suc qu’il y a de matières différentes qui peuvent le produire et desquelles il peut sortir. L’ex- périence est parfaitement d’accord avec ce que nous disons ; on trouvera que les eaux gouttières des carrières de pierres ordinai- res forment des concrétions tendres et calci- nables comme ces pierres le sont ; qu’au con- traire celles qui sortent du roc vif et du caillou forment des congélations dures et vitrifiables, et qui ont toutes les autres propriétés du caillou, comme les premières ont toutes celles de la pierre; et les eaux qui ont pénétré des lits de matières minérales et métalliques, donnent lieu à la production des pyrites, des marcassites , et des grains métalliques. Nous avons dit qu’on pouvoit diviser tou- tes les matières en deux grandes classes et par deux caractères généraux ; les unes sont vitrifiables , les autres sont calcinables : l’argile et le caillou , la marne et la pierre , peuvent être regardés comme les deux ex- trêmes de chacune de ces classes , dont les intervalles sont remplis par la variété pres- que infinie des mixtes, qui ont toujours pour base l’une ou l’autre de ces matières. Les matières de la première classe ne peu- vent jamais acquérir la nature et les pro- priétés de celles de l’autre : la pierre, quel- que ancienne qu’on la suppose , sera toujours aussi éloignée de la nature du caillou que l’argile l’est de la marne ; aucun agent connu ne sera jamais capable de les faire sortir du cercle de combinaisons propre à leur na- ture. Les pays où il n’y a que des marbres et de la pierre n’auront jamais que des mar- bres et de la pierre , aussi certainement que ceux où il n’y a que du grès , du caillou , et du roc vif, n’auront jamais de la pieri’e ou du marbre. Si l’on veut observer l’ordre et la distri- bution des matières dans une colline compo- sée de matières vitrifiables , comme nous l’a- vons fait tout à l’heure dans une colline com posée de matières calcinables , on trouvera ordinairement sous la première couche de terre végétale un lit de glaise ou d’argile, matière vitrifiable et analogue au caillou , et qui n’est, comme je l’ai dit, que du sable vitrifiable décomposé; ou bien on trouve sous la terre végétale une couche de sablé vitrifiable. Ce lit d’argile ou de sable répond au lit de gravier qu’on trouve dans les col- lines composées de matières calcinables, Après cette couche d’argile ou de sable , on trouve quelques lits de grès, qui le plus sou- vent n’ont pas plus d’un demi-pied d’épais- seur, et qui sont divisés en petits morceaux par une infinité de fentes perpendiculaires, comme le moellon du troisième lit de la col- line composée de matières calcinables. Sous ce lit de grès, on en trouve plusieurs autres de la même matière , et aussi des couches de sable vitrifiable ; et le grès devient plus dur et se trouve en plus gros blocs à mesurf que l’on descend. Au dessous de ces lits deijj grès , on trouve une matière très-dure , que j’ai appelée du roc vif ou du caillou en grande masse : c’est une matière très-dure, très-dense, qui résiste à la lime, au burin. J à tous les esprits acides , beaucoup plus que n’y résiste le sable vitrifiable , et même le verre en poudre , sur lesquels l’eau-forte pa- ? roît avoir quelque prise. Cette matière, frap- P pée avec un autre corps dur, jette des élin- f! celles , et elle exhale une odeur de sùufwrffj très-pénétrante. J’ai cru devoir appeler cettflp matière du caillou en grande masse : il esl jj51 ordinairement stratifié sur d’autres lits d’ar- 1® gile , d’ardoise , de charbon de terre , et dt W sable vitrifiable, d’une très-grande épaisseur; et ces lits de cailloux en grande masse ré- pondent encore^, aux couches de matière* dures et aux marbres qui servent de base aux collines composées de matières calci- nables. L’eau , en coulant par les fentes perpen- if» diculaires , et, en pénétrant les couches dé ces sables vitrifiables, de ces grès, de ces argiles , de ces ardoises , se charge des par- ties les plus fines et les plus homogènes de i!! ces matières , et elle en forme plusieurs con- I crétions différentes, telles que les talcs, les amiantes et plusieurs autres matières qui * ' ne sont que des productions de ces stilla-M tions de matières vitrifiables , comme nous 3 l’expliquerons dans notre discours sur les minéraux. Le caillou , malgré son extrême dureté et sa grande densité , a aussi , comme le marbre ordinaire et comme la pierre dure îiî ART. XVII. ILES NOUVELLES, CAVERNES. 2?5 ses exsudations ; d’où résultent des stalacti- tes de différentes espèces , dont les variétés dans la transparence, les couleurs, et la configuration, sont relatives à la différente nature du caillou qui les produit , et parti- cipent aussi des différentes matières métalli- ques ou hétérogènes qu’il contient : le cris- tal de roche, toutes les pierres précieuses, blanches ou colorées , et même le diamant, [peuvent être regardés comme des stalactites jde celte espèce. Les cailloux en petites masses, Mont les couches sont ordinairement concen- triques , sont aussi des stalactites et des pier- res parasites du caillou en grande masse , et lia plupart des pierres fines opaques ne sont Lue des espèces de caillou. Les matières du genre vitrifiable produisent, comme l’on voit, ine aussi grande variété de concrétions que Lelles du genre calcinable; et ces concré- ions produites par les cailloux sont presque outes des pierres précieuses , au lieu que elles de la matière calcinable ne sont que [es matières tendres et qui n’ont aucune va- eur. On trouve les fentes perpendiculaires ans le roc et dans les lits de cailloux en rande masse, aussi bien que dans les lits e marbre et de pierre dure : souvent mê- le elles y sont plus larges, ce qui prouve ue celte matière, en prenant corps, s’est ncore plus desséchée que la pierre. L’une t l’autre de ces collines dont nous avons servé les couches , celles de matières cal- nables et celles de matières vitrifiables , mt soutenues tout au dessous sur l’argile u sur le sable vitrifiable , qui sont les ma- ères communes et générales dont le globe ;t composé , et que je regarde comme les irties les plus légères , comme les scories î la matière vitrifiée dont il est rempli à ntérieur : ainsi toutes les montagnes et utes les plaines ont pour base commune Irgile ou le sable. On voit par l’exemple Ji puits d’Amsterdam , par celui de Marly- [•Viile , qu’on trouve toujours au plus pro- Ind du sable vitrifiable : j’en rapporterai !]aulres exemples dans mon discours sur les néraux. On peut observer , dans la plupart des chers découverts , que les parois des fen- perpendiculaires se correspondent aussi actement que celles d’un morceau de bois du ; et cette correspondance se trouve ssi bien dans les fentes étroites que dans plus larges. Dans les grandes carrières l’Arabie, qui sont presque toutes de nite, ces fentes ou séparations perpen- Ibulaires sont très-sensibles et très-fréquen- tes ; et quoiqu’il yen ait qui aient jusqu’à vingt et trente aunes de large, cependant les côtés se rapportent exactement, et lais- sent une profonde cavité entre les deux. Il est assez ordinaire de trouver dans les fentes perpendiculaires des coquilles rompues en deux, de manière que chaque morceau, de- meure attaché à la pierre de chaque côlé de la fente ; ce qui fait voir que ces coquilles étoient placées dans le solide de la couche horizontale lorsqu’elle étoil continue , et avant que la fenle s’y fût faite. Il y a de certaines matières dans lesquelles les fentes perpendiculaires sont fort larges , comme dans les carrières que cite M. Shaw ; c’est peut-être ce qui fait qu’elles y sont moins fréquentes. Dans les carrières de roc vif et de granité , les pierres peuvent se tirer en très-grandes masses : nous en connois- sons des morceaux , comme les grands obé- lisques et les colonnes qu’on voit à Rome en tant d’endroits , qui ont plus de soixante, quatre-vingts, cent, et cent cinquante pieds de longueur sans aucune interruption ; ces énormes blocs “sont tous d’une seule pierre continue. Il paroît que ces masses de granité ont été travaillées dans la carrière même , et qu’on leur donnoit telle épaisseur que l’on vouloit , à peu près comme nous voyons que, dans les carrières de grès qui sont un peu profondes, on tire des blocs de telle épaisseur que l’on veut. Il y a d’autres matiè- res où ces fentes perpendiculaires sont fort étroites : par exemple, elles sont fort étroi- tes dans l’argile, dans la marne, dans la craie; elles sont, au contraire, plus larges dans les marbres et dans la plupart des pier- res dures. Il y en a qui sont imperceptibles et qui sont remplies d’une matière à peu près semblable à celle de la masse où elles se trouvent , et qui cependant interrompent la continuité des pierres; c’est ce que les ouvriers appellent des poils : lorsqu’ils débi- tent un grand morceau de pierre , qu’ils le réduisent à une petite épaisseur, comme à un demi-pied , la pierre se casse dans la direction de ce poil. J’ai souvent remarqué , dans le marbre et dans la pierre, que ces poils traversent le bloc tout entier : ainsi ils ne diffèrent des fentes perpendiculaires que parce qu’il n’y a pas solution totale de continuité. Ces espèces de fentes sont rem- plies d’une matière transparente , et qui est du vrai sparr. fl y a un grand nombre de fentes considérables entre les différens ro- chers qui composent les carrières de grès ; cela vient souvent de ce que ces rochers por- tent souvent sur des bases moins solides que 18. ! 27 6 THEORIE DE LA TERRE. celles des marbres ou des pierres calcina- hles, qui portent ordinairement sur des glaises , au lieu que les grès ne sont le plus souvent appuyés que sur du sable extrême- ment fin : aussi y a-t-il beaucoup d’endroits où l’on ne trouve pas les grès en grande masse; et, dans la plupart des carrières où Ton tire le bon grès, on peut remarquer qu’il est en cubes et en parallélipipèdes po- sés les uns sur les autres d’une manière assez irrégulière, comme dans les collines de Fontainebleau , qui de loin paroissent être des ruines de bâtimens. Cette disposi- tion irrégulière vient de ce que la base de ces collines est de sable, et que les masses de grès se sont éboulées, renversées, et af- faissées les unes sur les autres , surtout dans les endroits où on a travaillé autrefois pour tirer du grès , ce qui a formé un grand nom- bre de fentes et d'intervalles entre les blocs; et si on y veut faire attention , on remar- quera dans tous les pays de sable et de grès , qu’il y a des morceaux de rochers et de grosses pierres dans le milieu des vallons et des plaines en très-grande quantité , au lieu que , dans les pays de marbre et "de pierre dure, ces morceaux dispersés et qui ont roulé du dessus des collines et du haut des montagnes , sont fort rares ; ce qui ne vient que de la différente solidité de la base sur laquelle portent ces pierres, et de l’éten- due des bancs de marbre et de pierres cal- cinables , qui est plus considérable que celle des grès. Sur les cavernes formées par le feu primitif. * Je n’ai parlé, dans ma Théorie de la terre, que de deux sortes de cavernes, les unes produites par le feu des volcans , et les autres par -le mouvement des eaux souter- raines : ces deux espèces de cavernes ne sont pas situées à de grandes profondeurs ; elles sont même nouvelles , en comparaison des autres cavernes bien plus vastes et bien plus anciennes , qui ont dù se former dans le temps de la consolidation du globe ; car c’est dès lors que se sont faites les éminen- ces et les profondeurs de sa superficie, et toutes les boursouflures et cavités de son in- térieur , surtout dans les parties voisines de la surface. Plusieurs de ces cavernes produi- tes par le feu primitif, après s’être soute- tenues pendant quelque temps se sont en- suite fendues par le refroidissement successif, qui diminue le volume de toute matière; bientôt elles se seront écroulées , et par leur affaissement elles ont formé les bassins ac- tuels de la mer, où les eaux, qui étoient autrefois très-élevées au dessus de ce niveau, se sont écoulées et ont abandonné les terres qu’elles couvroient dans le commencement : il est plus que probable qu’il subsiste encore aujourd’hui dans l’intérieur du globe un cer- tain nombre de ces anciennes cavernes, dont l’affaissement pourra produire de sem- blabes effets, en abaissant quelques espaces du globe , qui deviendront dès lors de nou- veaux réceptacles pour les eaux; et dans ce cas , elles abandonneront en partie le bassin 1 qu’elles occupent aujourd’hui , pour couler par leur pente naturelle dans ces endroits plus bas. Par exemple , on trouve des bancs de coquilles marines sur les Pyrénées jus- qu’à quinze cents toises de hauteur au des- sus du niveau de la mer actuel. Il est donc bien certain que les eaux, dans le temps de la formation de ces coquilles , étoient de quinze cents toises plus élevées qu’elles ne le ! sont aujourd’hui ; mais lorsqu’au bout d’un temps les cavernes qui soutenoient les terres J de l’espace où gît actuellement Tocéaiii Atlantique se sont affaissées , les eaux , quiij couvroient les Pyrénées et l’Europe entière,- auront coulé avec rapidité pour remplir ces j bassins, et auront par conséquent laissé à| découvert toutes les terres de cette partie l:! du monde. La même chose doit s’entendre t de tous les autres pays ; il paroît qu’il n’y a 4 que les sommets des plus hautes montagnes i|] auxquels les eaux de la mer n’aient jamais j atteint, parce qu’ils ne présentent aucuns li débris des productions marines, et ne don- ]j nent pas des indices aussi évidens du séjoui | des mers : néanmoins comme quelques-unes des matières dont ils sont composés, quoi- que toutes du genre vitrescible, semblent n’avoir pris leur solidité , leur consistance, et leur dureté que par l’intermède et le glu- ten de l’eau, et qu’elles paroissent s’être formées, comme nous l’avons dit, dans les masses de sable ou de poussière de verre qui étoient autrefois aussi élevées que ces iie pics de montagnes , et que les eaux des pluies :i[ ont , par succession de temps , entraînées à j „ leur pied, ou ne doit pas prononcer affirs i; mativement que les eaux de la mer ne soient jamais trouvées qu’au niveau où l’oc trouve des coquilles; elles ont pu être en- >,f core plus élevées, même avant le temps où . leur température a permis aux coquilles , d’exister. La plus grande hauteur à laquelle |,t s’est trouvée la mer universelle, ne nous est j L pas connue; mais c’est en savoir assez que , de pouvoir assurer que les eaux étoient éle i ,, vées de quinze cents ou deux mille toises an ART. XVI I. ILES NOUVELLES, CAVERNES. dessus de leur niveau actuel, puisque les coquilles se trouvent à quinze cents toises dans les Pyrénées et à deux mille toises dans les Cordilières. Si tous les pics des montagnes éloient formés de verre solide ou d’autres matières produites immédiatement par le feu , il ne seroit pas nécessaire de recourir à l’autre cause, c’est-à-dire au séjour des eaux , pour concevoir comment elles ont pris leur con- sistance; mais la plupart de ces pics ou pointes de montagnes paroissent être compo- sés de matières qui, quoique vitrescibles , ont pris leur solidité et acquis leur nature par l’intermède de l’eau. On ne peut donc guère décider, si le feu primitif seul a pro- duit leur consistance actuelle , ou si l’inter- nède et le gluten de l’eau de la mer n’ont aas été nécessaires pour achever l’ouvrage lu feu , et donner à ces masses vitrescibles la nature qu’elles nous présentent aujour- l’hui. Au reste , cela n’empêche pas que le eu primitif, qui d’abord a produit les plus grandes inégalités sur la surface du globe , t’ait eu la plus grande part à l’établisse- nent des chaînes de montagnes qui en tra- ersent la surface , et que les noyaux de ces randes montagnes ne soient tous des pro- uits de l’action du feu, tandis que les con- aurs de ces mêmes montagnes n’ont été isposés et travaillés par les eaux que dans Ies temps subséquens; en sorte que c’est ir ces mêmes contours et à de certaines auteurs que l’on trouve des dépôts de co- uilles et d’autres productions de la mer. Si l’on veut se former une idée nette des liis anciennes cavernes , c’est-à-dire de ;lles qui ont été formées par le feu primi- f , il faut se représenter le globe terrestre îpouillé de toutes ses eaux, et de toutes s matières qui en recouvrent la surface jus- i’à la profondeur de mille ou douze cents eds. En séparant par la pensée cette coû- te extérieure de terre et d’eau, le globe ms présentera la forme qu’il avoit à peu ès dans tes premiers temps de sa consoli- tion. Laroche vitrescible, ou, si l’on ut, le verre fondu, en compose la masse tière ; et cette matière , en se consolidant sè refroidissant, a formé, comme toutes ; autres matières fondues , des éminences , s profondeurs , des cavités , des boursou- Ires dans toute l’étendue de la surface du ibe. Ces cavités intérieures formées par feu sont les cavernes primitives, et se mvent en bien plus grand nombre vers contrées du Midi que dans celles du Nord, |'ce que le mouvement de rotation qui a 277 élevé ces parties de l’équateur avant la con- solidation y a produit un plus grand dépla- cement de la matière , et , en retardant cette même consolidation , aura concouru avec l’action du feu pour produire un plus grand nombre de boursouflures et d’inégalités dans cette partie du globe que dans toute autre. Les eaux venant des pôles n’ont pu gagner ces contrées méridionales, encore brûlantes, que quand elles ont été refroi- dies; les cavernes qui les soutenoient s’é- tant successivement écroulées, la surface s’est abaissée et rompue en mille et mille endroits. Les plus grandes inégalités du globe se trouvent, par cette raison, dans les cli- mats méridionaux : les cavernes primitives y sont encore en plus grand nombre que partout ailleurs; eues y sont aussi situées plus profondément, c’est-à-dire peut-être jusqu’à cinq et six lieues de profondeur, parce que la matière du globe a été remuée jusqu’à cette profondeur par le mouvement de rotation , dans le temps de sa liquéfac- tion. Mais les cavernes qui se trouvent dans les hautes montagnes ne doivent pas toutes leur origine à cette même cause du feu pri- mitif : celles qui gisent le plus profondé- ment au dessous de ces montagnes , sont les seules qu’on puisse attribuer à l’action de ce premier feu ; les autres, plus extérieures et plus élevées dans la montagne, ont été formées par des causes secondaires, comme nous l’avons exposé. Le globe , dépouillé des eaux et des ^matières qu’elles ont trans- portées, offre donc à sa surface un sphéroïde bien plus irrégulier qu’il ne nous paroît l’être avec cette enveloppe. Les grandes chaînes de montagnes, leurs pics, leurs cornes , ne nous présentent peut-être pas au- jourd’hui la moitié de leur hauteur réelle ; toutes sont attachées par leur base à la roche vitrescible qui fait le fond du globe , et sont de la même nature. Ainsi l’on doit compter trois espèces de cavernes, prod uites par la na- ture ; les premières, en vertu de la puissance du feu primitif ; les secondes, par l’action des eaux; et les troisièmes, par la force des feux souterrains : et chacune de ces cavernes diffé- rentes par leur origine , peuvent être dis- tinguées et reconnues à l’inspection- des matières qu’elles contiennent ou qui les en- vironnent. ( Acid. Buff.y 278 THÉORIE DE LA TERRE. ARTICLE XVIII. De V effet des pluies , des marécages , des bois souterrains , des eaux souterraines. Nous avons dit que les pluies et les eaux courantes qu’elles produisent détachent con- tinuellement du sommet et de la croupe des montagnes les sables, les terres, les gra- viers, etc., et qu’elles les entraînent dans les plaines , d’où les rivières et les fleuves en charrient une partie dans les plaines plus basses, et souvent jusqu’à la mer : les plaines se remplissent donc successivement et s’élèvent peu à peu, et les montagnes dimi- nuent tous les jours et s’abaissent continuel- lement; et dans plusieurs endroits on s’est aperçu de cet abaissement. Joseph Blan- canus rapporte sur cela des faits qui étoient de notoriété publique dans son temps , et qui prouvent que les montagnes s’étoient abaissées au point que l’on voyoit des villages et des châteaux de plusieurs en- droits d’où on ne pouvoit pas les voir autre- fois. Dans la province de Derby en Angle- terre , le clocher du village Craih n’étoit pas visible en 1572 depuis une certaine mon- tagne , à cause de la hauteur d’une autre montagne interposée , laquelle s’étend en Hoplon et Wirsworth , et quatre-vingts ou cent ans après on voyoit ce clocher, et même une partie de l’église. Le docteur Plot donne un exemple pareil d’une montagne entre Sibbertoft et Ashby, dans la province de Northampton. Les eaux entraînent non seu- lement les parties les plus légères des monta- gnes , comme la terre , le sable , le gravier et les petites pierres, mais elles roulent même de très-gros rochers , ce qui en diminue consi- dérablement la hauteur. En général, plus les montagnes sont hautes, et plus leur pente est roide , plus les rochers sont coupés à pic. Les plus hautes montagnes du pays de Galles ont des rochers extrêmement droits et fort nus ; on voit les copeaux de ces rochers (si on peut se servir de ce nom) en gros mon- ceaux à leur pied : ce sont les gelées et les eaux qui les séparent et les entraînent. Ainsi ce ne sont pas seulement les montagnes de sable et de terre que les pluies rabaissent , mais, comme l’on voit, elles attaquent les rochers les plus durs , et en entraînent les fragmens jusque dans les vallées. Il arriva dans la vallée de Nantphrancon , en i685 , qu’une partie d’un gros rocher qui ne por- toit que sur une base étroite , ayant été mi- née par les eaux , tomba et se rompit en plusieurs morceaux avec plus d’un millier d’autres pierres , dont la plus grosse fit en descendant une tranchée considérable jusque dans la plaine, où elle continua à cheminer dans une petite prairie, et traversa une pe- tite rivière, de l’autre côté de laquelle elle s’arrêta. C’est à de pareils accidens qu’on doit attribuer l’origine de toutes les grosses pierres que l’on trouve ordinairement çà et là dans les vallées voisines des montagnes. On doit se souvenir, à l’occasion de cette ob- servation , de ce que nous avons dit dahs l’article précédent, savoir, que ces rochers et ces grosses pierres dispersées sont bien plus communes dans les pays dont les montagnes sont de sable et de grès, que dans ceux où elles sont de marbre et de glaise , parce que le sable qui sert de base au rocher est un fondement moins solide que la glaise. Pour donner une idée de la quantité de terres que les pluies détachent des monta- gnes, et qu’elles entraînent dans les vallées, nous pouvons citer un fait rapporté par fi docteur Plot: il dit, dans son Histoire natu- relle de Stafford, qu’on a trouvé dans la terre, à dix-huit pieds de profondeur, un grandi nombre de pièces de monnoie frappées di temps d’Édouard IY, c’est-à-dire deux cenb ans auparavant , en sorte que ce terrain, qu est marécageux, s’est augmenté d’enviroi un pied en onze ans , ou d’un pouce et ut douzième par an. On peut encore faire uni observation semblable sur des arbres enterré à dix-sep t pieds de profondeur , au dessou desquels on a trouvé des médailles de Jule César. Ainsi les terres amenées du dessu des montagnes dans les plaines par les eau courantes, ne laissent pas d’augmenter très considérablement l’élévation du terrain plaines. Ces graviers , ces sables et ces terres qu les eaux détachent des montagnes, et qu’elle entraînent dans les plaines, y forment de '11 couches qu’il ne faut pas confondre avec le couches anciennes et originaires de la terre On doit mettre dans la classe de ces nouvelle couches celles de tuf, de pierre molle, d gravier et de sable , dont les grains sont lave et arrondis; on doit y rapporter aussi li couches de pierres qui se sont faites par un espèce de dépôt et d’incrustation ; toutes ce couches ne doivent pas leur origine au moi vement et aux sédimens des eaux de la me O11 trouve dans ces tufs et dans ces piern molles et imparfaites une infinité de vég 'au: f rès f de f fl taux , de feuilles d’arbres , de coquilles te restres, ou fluviatiles, de petits osd’animau terrestres et jamais des coquilles ni d’aulrii 1^, productions marines : ce qui prouve évidec y . ART. XVIII. EFFET DES PLUIES. ment , aussi bien que leur peu de solidité , . que ces couches se sont formées sur la sur- face de la terre sèche, et qu’elles sont bien plus nouvelles que les marbres et les autres aierres qui contiennent des coquilles , et qui ie sont formées autrefois dans la mer. Les ;ufs et toutes ces pierres nouvelles paroissent ivoir de la dureté et de la solidité lorsqu’on es tire : mais si on veut les employer, on rouve que l’air et les pluies les dissolvent )ientôi ; leur substance est même si diffé- ente de la vraie pierre, que lorsqu’on les éduit en petites parties, et qu’on en veut aire du sable, elles se convertissent bientôt n une espèce de terre et de boue. Les sta- lactites et les autres concrétions pierreuses [ue M. de Tourriefort prenoit pour des mar- iées qui avoient végété, ne sont pas de vraies ierres, non plus que celles qui sont for- cées par des incrustations. Nous avons déjà ait voir que les tufs ne sont pas de Fan- ienne formation, et qu’on ne doit pas les ^nger dans la classe des pierres. Le tuf est ne matière imparfaite , différente de la ierre et de la terre , et qui tire son origine e toutes deux par le moyen de l’eau des luies , comme les incrustations pierreuses rent la leur du dépôt des eaux de certaines mtaines : ainsi les couches de ces matières jp sont pas anciennes , et n’ont pas été for- Iées, comme les autres, par le sédiment is eaux de la mer. Les couches de tourbes ûvent être aussi regardées comme des coû- tes nouvelles qui ont été produites par l’en- ssement successif des arbres et des autres jjjgétaux à demi pourris, et qui ne se sont ||nservés que parce qu’ils se sont trouvés |ns des terres bitumineuses , qui les ont jibpêchés de se corrompre en entier1. On t . On peut ajouter à ce que j’ai dit sur les tour- , les faits suivans : ■pans les châtellenies et subdélégations de Ber- ■es-Saint-Winox , Fûmes et Bourbourg , on trouve tjla tourbe à trois ou^quatre pieds sous terre; ■ninairement ces lits de tourbe ont deux pieds ■|paisseur, et sont composés de bois pourris , d’ar- ■ ps même entiers, avec leurs branches et leurs Mlles dont on connoît l’espèce , et particulière- i;nt des coudriers , qu’on reconnoît à leurs noi- ■jjtes encore existantes , entremêlées de différentes I flièces de roseaux faisant corps ensemble. ■ D’où viennent ces lits de tourbes qui s’étendent ■ puis Bruges par tout le plat pays de la Flandre ■ qu’à la rivière d’Aa , entre les dunes et les terres ■Jvées des environs de Bergues , etc. ? Il faut que, ■bs les siècles reculés , lorsque la Flandre n’étoit Hune vaste forêt, une inondation subite de la llr ait submergé tout le pays, et en se retirant ait ■posé tous les arbres, bois et roseaux qu’elle ■ »it déracinés et détruits dans cet espace de ter- fi i, qui est le plus bas de la Flandre, et que cet H bernent soit arrivé vers le mois d’août ou $«>■»• ne trouve dans toutes ces nouvelles couches de tuf, ou de pierre molle, ou de pierre formée par des dépôts, ou de tourbe, aucune tembre, puisqu’on trouve encore les feuilles aux arbres , ainsi que les noisettes aux coudriers. Cette inondation doit avoir été bien long-temps avant la conquête que fit Jules César de cette province , puis- que les écrits des Romains , depuis cette époque , n’en ont pas fait mention. Quelquefois on trouve des végétaux dans le sein de la terre, qui sont dans un état différent de celui de la tourbe ordinaire : par exemple , au mont Ganelon, près de Compïègne, on voit, d’un côté de la montagne , les carrières de belles pierres et les huîtres fossiles dont nous avons parlé , et , de l’autre côté de la montagne, on trouve à mi-côte un lit de feuilles de toutes sortes d’arbres , et aussi des roseaux , des goémons , le tout mêlé ensemble et renfermé dans la vase; lorsqu’on remue ces feuilles , on retrouve la même odeur de marécage qu’on respire sur le bord de la mer, et ces feuilles conservent cette odeur pendant plusieurs années. Au reste, elles ne sout point détruites, on peut en reconnoître aisément les espèces : elles n’ont que de la sécheresse, et sont liées foiblement les unes aux autres par la rase. « On reconnoît, dit M. Guettard, de deux espèces de tourbes : les unes sont composées de plantes marines , les autres de plantes terrestres ou qui viennent dans les prairies. On suppose que les pre- mières ont été formées dans le temps que la mer recouvroit la partie de la terre qui est maintenant habitée : on veut que les secondes se soient accu- mulées sur celle-ci. On imagine, suivant ce sys- tème , que les courans portoient dans des bas-fonds formés par les montagnes qui étoient élevées dans la mer, les plantes marines qui se détacboient des rochers , et qui , ayant été ballottées par les flots , se déposoient dans les lieux profonds. « Cette production de tourbes n’est certainement pas impossible ; la grande quantité de plantes qui croissent dans la îner, paroît bien suffisante pour former ainsi des tourbes : les Hollandois mêmes prétendent que la bonté des leurs ne vient que de ce qu’elles sont ainsi produites , et qu’elles sont pénétrées du bitume dont les eaux de la mer sont chargées « Les tourbières de Villeroy sont placées dans la vallée où coule la rivière d’Essone ; la partie de cette vallée peut s’étendre depuis Roissy jusqu’à Escliarcon.... C’est même vers Roissy qu’on a com- mencé à tirer des tourbes Mais celles que l’on fouille auprès d’Escbarcon sont les meilleures.... « Les prairies où les tourbières sont ouvertes sont assez mauvaises , elles sont remplies de joncs, de roseaux , de prêles et autres plantes qui crois- sent dans les mauvais prés : on fouille ces prés jus- qu’à la profondeur de huit à dix pieds.... Après la couche qui forme actuellement le sol de la prairie , est placé un lit de tourbe d’environ un pied : il est rempli de plusieurs espèces de coquilles fluviatiles et terrestres.... « Ce banc de tourbe , qui renferme les coquilles , est communément terreux : ceux qui le suivent sont à peu près de la même épaisseur, et d’autant meil- leurs qu’ils sont plus profonds ; les tourbes qu’ils fournissent sont d’un brun noir, lardées de roseaux, de joncs , de cypéroïdes et autres plantes qui vien- nent dans les prés; on ne voit point de coquilles dans ces bancs.... « On a quelquefois rencontré dans la masse des s8o THÉORIE DE LA TERRE. production marine; mais on y trouve au contraire beaucoup de végétaux, d’os d’ani- maux terrestres , de coquilles fluviatiles et terrestres , comme on peut le voir dans les prairies de la province de Northampton au- près d’Ashby, où l’on a trouvé un grand nombre de coquilles d’escargots, avec des plantes, des herbes, et plusieurs coquilles fluviatiles, bien conservées à quelques pieds de profondeur sous terre , sans aucune co- quille marine. Les eaux qui coulent sur la surface de la terre ont formé toutes ces nouvelles couches en changeant souvent de lit et en se répandant de tous côtés : une partie de ces eaux pénètre à l’intérieur et coule à travers les fentes des rochers et des pierres ; et ce qui fait qu’on ne trouve point d’eau dans les pays élevés , non plus qu’au dessus des collines, c’est parce que toutes les hauteurs de la terre sont ordinairement composées de pierres et de rochers , surtout vers le sommet. Il faut, pour trouver de l’eau, creuser dans la pierre et dans le ro- tourbes , des souches de saules et de peupliers , et quelques racines de ces arbres on de quelques au- tres semblables. On a découvert du côté d’Escharcon un chêne enseveli à neuf pieds de profondeur : il étoit noir et presque pourri ; il s’est consommé à l’air : un autre a été rencontré du côté de Roissy à la profondeur de deux pieds entre la terre et la tourbe. On a encore vu près d’Escharcon des bois de cerf; ils étoient enfouis jusqu’à trois ou quatre pieds.... «II y a aussi des tourbes dans les environs d’E- tampes , et peut-être aussi abondamment qu’auprès de Villeroy : ces tourbes ne sont point mousseuses, ou le sont très-peu ; leur couleur est d’un beau noir, elles ont de la pesanteur, elles brûlent bien au féu ordinaire, et il n’y a guère lieu de douter qu’on n’en pût faire de très-bon charbon.... « Les tourbières des environs d’Etampes ne sont, pour ainsi dire , qu'une continuité de celles de Villeroy ; en un mot, toutes les prairies qui sont renfermées entre les gorges où la rivière d’Etampes coule sont probablement remplies de tourbe. On en doit, à ce que je crois, dire autant de celles qui sont arrosées par la rivière d’Essone ; celles de ces prairies que j’ai parcourues m’ont fait voir les mêmes plantes que celles d’Etampes et de Vil- leroy. » Au reste , selon l’auteur, il y a en France encore nombre d’endroits où l’on pourroit tirer de la tourbe , comme à Bourneuille , à Croué , auprès de Beauvais , à Brunevàî , aux environs de Péronne , dans le diocèse de Troyes en Champagne, etc., et cette matière combustible seroit d’un grand secours, si l’on en faisoit usage dans les endroits qui man- quent de bois. 11 y avoit aussi des tourbes près Vitry-le-Fran- çois , dans des marais le long de la Marne : ces tourbes sont bonnes et contiennent une grande quantité de cupules de gland. Le marais de Saint- Gon , aux environs de Cbàlons, n’est aussi qu’une tourbière considérable, que l’on sera obligé d’ex- ploiter dans la suite par la disette des bois. ( -idd. 3"ff) cher jusqu’à ce qu’on parvienne à la hase, c’est-à-dire à la glaise ou à la terre ferme sur laquelle portent ces rochers, et on ne trouve point d’eau lant que l’épaisseur de pierre n’est pas percée jusqu’au dessous , comme je l’ai observé dans plusieurs puits creusés dans les lieux élevés; et lorsque la hauteur des roches, c’est-à-dire l’épaisseur de la pierre qu’il faut percer , est fort con- sidérable, comme dans les hautes montagnes où les rochers ont souvent plus de mille pieds d’élévation , il est impossible d’y faire des puits , et par conséquent d’avoir de l’eau. Il y a même de grandes étendues de terre où l’eau manque absolument , comme dans l’Arabie pétrée , qui est un désert où il ne pleut jamais, où des sables brûlans couvrent toute la surface de la terre, où n’y a presque point de terre végétale , où le peu de plantes qui s’y trouvent languissent : les sources et les puits y sont si rares que l’on n’en compte que cinq depuis le Cair; jusqu’au mont Sinaï ; encore l’eau en est-elle amère et saumâtre. ^ j Lorsque les eaux qui sont à la surface de: la terre ne peuvent trouver d’écoulement ! elles forment des marais et des marécages Les plus fameux marais de l’Europe son: ceux de Moscovie à la source du Tanaïs ceux de Finlande, où sont les grands ma rais Zavolax et Énasak : il y en a aussi ei | isieurf Hollande, en Westphalie', et dans plusieur autres pays bas. En Asie on a les marais di | l’Euphrate, ceux de la Tartarie , le Palu? Méotide ; cependant en général il y en i jf moins en Asie et en Afrique qu’en Europe " mais l’Amérique n’est, pour ainsi dire qu’un marais continu dans toutes ses plaines cette grande quantité de marais est un» preuve de la nouveauté du pays et du peti nombre des habitans , encore plus que di peu d’industrie. Il y a de très-grands marécages en Angle terre dans la province de Lincoln près de 1 mer, qui a perdu beaucoup de terrain d’ui côté, et en a gagné de l’autre. On trouv dans l’ancien terrain une grande quantit d’arbres qui y sont enterrés au dessous d nouveau terrain amené par les eaux ; on ei trouve de' même en grande quantité ei Écosse , à l’embouchure de la rivière Ness Auprès de Bruges en Flandre , en fouillait ! * à quarante ou cinquante pieds de profon deur, on trouve une très-grande quantil d’arbres aussi près les uns des autres qu dans une forêt : les troncs , les rameaux c , les feuilles sont si bien conservés qu’o N distingue aisément les différentes espèce ART. XVIII. EFFET DES PLUIES. 281 ! arbres. U y a cinq cents ans que cette rre, où l’on trouve des arbres, étoit une 1er, et avant ce temps là on n’a point de émoire ni de tradition que jamais cette jrre eût existé ; cependant il est nécessaire îe cela ait été ainsi dans le temps que s arbres ont crû et végété : ainsi le ter- in qui dans les temps les plus reculés oit une terre ferme couverte de bois, a é ensuite couvert par les eaux de la mer li y ont amené quarante ou cinquante eds d’épaisseur de terre, et ensuite ces ux se sont retirées. On a de même trouvé ie grande cpiantité d’arbres souterrains à mie dans la province d’York , à douze lies au desso'us de la ville sur la rivière îmber : il y en a qui sont si gros qu’on ai sert pour bâtir ; et on assure , peut-être d à propos , que ce bois est aussi durable d’aussi bon service que le chêne : on en upe en petites baguettes et en longs co- aux que l’on envoie vendre dans les villes isines ; et les gens s’en servent pour allu- 31* leur pipe. Tous ces arbres paroissent npus, et les troncs sont séparés de leurs unes , comme des arbres que la violence in ouragan ou d’une inondation auroit >sés et emportés. Ce bois ressemble beau- îp au sapin ; il a la même odeur lorsqu’on brûle , et fait des charbons de la même )èce. Dans Pile de Man on trouve dans marais qui a six milles de long et trois lies de large, appelé Curragh, des arbres tterrains qui sont des sapins; et, quoi- ’ils soient à dix-huit ou vingt pieds de jfondeur, ils sont cependant fermes sur jrs racines T. On en trouve ordinairement as tous les grands marais , dans les fon- ères, et dans la plupart des endroits ma- :ageux , dans les provinces de Somerset , 1 Ghester, de Lancastre, de Stafford. Il y lie certains endroits où l’on trouve des j)res sous terre , qui ont été coupés , sciés , Iharris, et travaillés par les hommes : on H même trouvé des cognées et des serpes ; I entre Birmingham et Brumley, dans la Irnnce de Lincoln, il y a des collines Ivée's de sable fin et léger, que les pluies I les vents emportent et transportent en lisant à sec et à découvert des racines de j|nds sapins, où l’impression de la cognée Iroît encore aussi fraîche que si elle venoit ||tre faite. Ces collines se seront sans Ipte formées , comme les dunes, par des lias de sable que la mer a apportés et ac- nulés , et sur lesquels ces sapins auront . Voyez Rajr’s Discourses , page 232. ..'A . pu croître ; ensuite ils auront été recouverts par d’autres sables, qui y auront été ame- nés , comme les premiers , par des inonda- tions ou par des vents violens. On trouve aussi une grande quantité de ces arbres sou- terrains dans les terres marécageuses de Hollande, dans la Frise , et auprès de Gro- ningue ; et c’est de là que viennent les tourbes qu’on brûle dans tout le pays. On trouve dans la terre une infinité d’ar- bres grands et pet its de toute espèce , comme sapins, chêhes, bouleaux, hêtres, ifs, au- bépins, saules, frênes. Dans les marais de Lincoln , le long de la rivière d’Ouse , et dans la province d’York en Hatfield-chace , ces arbres sont droits et plantés comme on les voit dans une forêt. Les chênes sont fort durs , et on en emploie dans les bâti- mens , où ils durent 2 fort long-temps ; les frênes sont tendres et tombent en poussière, aussi bien’que les saules. On en trouve qui ont été équarris, d’autres sciés, d’autres lercés, avec des cognées rompues, et des lâches dont la forme ressemble à celle des couteaux de sacrifice. On y trouve aussi des noisettes, des glands, et des cônes de sapins en grande quantité. Plusieurs autres endroits marécageux de l’Angleterre et de l’Irlande sont remplis de troncs d’arbres, aussi bien que les marais de France et de Suisse, de Savoie et d’Italie. Dans la ville de Modène et à quatre milles aux environs, en quelque endroit qu’on fouille lorsqu’oni est parvenu à la profon- deur de soixante- trois pieds, et qu’on a percé la terre à cinq pieds de profondeur de plus avec une tarière, l’eau jaillit avec une si grande force, que le puits se remplit en fort peu de temps presque jusqu’au dessus : cette eau coule continuellement et 11e diminue ni n’augmente par la pluie ou par la sécheresse. Ce qu’il y a de remar- quable dans ce terrain , c’est que , lorsqu’on est parvenu à quatorze pieds de profondeur, on trouve les décombremens et les ruines d’une ancienne ville, des rues pavées, des planchers de maisons, différentes pièces de mosaïque , après quoi on trouve une terre assez solide et qu’on croiroit n’avoir jamais été remuée : cependant au dessous on trouve une terre humide et mêlée de végétaux , et , à vingt-six pieds , des arbres 2. Je doute beaucoup de la vérité de ce fait: tous les arbres qu’on tire de la terre, au moins tous ceux que j’ai vus , soit chênes , soit autres , perdent, en se desséchant, toute la solidité qu’ils paroissent avoir d’abord, et ne doivent jamais être employés dans les bàtiinens. THÉORIE DE LA TERRE. 282 tout entiers, comme des noisetiers avec les noisettes dessus , et une grande quantité de branches et de feuilles d’arbres ; à vingt-huit pieds on trouve une craie tendre mêlée de beaucoup de coquillages, et ce lit a onze pieds d’épaisseur, après quoi on retrouve encore des végétaux, des feuilles et des branches; et ainsi alternativement de la craie et une terre mêlée de végétaux jusqu’à la profondeur de soixante-trois pieds , à laquelle profondeur est un lit de sable mêlé de petit gravier et de coquilles semblables à celles qu’on trouve sur les côtes de la mer d’Italie. Ces lits successifs de terre maréca- geuse et de craie se trouvent toujours dans le même ordre , en quelque endroit qu’on fouille, et quelquefois la tarière trouve de gros troncs d’arbres qu’il faut percer ; ce qui donne beaucoup de peine aux ouvriers : on y trouve aussi des os, du charbon de terre, des cailloux, et des morceaux de fer. Ramazzini, qui rapporte ces faits, croit que le golfe de Venise s’étendoit autrefois jusqu’à Modène et au delà, et que par la succession des temps les rivières, et peut-être les inondations de la mer, ont formé suc- cessivement ce terrain. Je ne m’étendrai pas davantage ici sur les variétés que présentent ces couches de nouvelle formation : il suffit d’avoir montré qu’elles n’ont pas d’autres causes que les eaux courantes ou stagnantes qui sont à la surface de la terre, et qu’elles ne sont jamais aussi dures ni aussi solides que les couches anciennes qui se sont formées sous les eaux de la mer. Sur les bois souterrains pétrifiés et char- bonnifiés. * « Dans les terres du duc de Saxe-Co- bourg, qui sont sur les frontières de la Franconie et de la Saxe, à quelques lieues de la ville de Cobourg même, on a trouvé, à une petite profondeur, des arbres entiers pétrifiés à un tel point de perfection , qu’en les travaillant on trouve que cela fait une pierre aussi belle et aussi dure que l’agate. Les princes de Saxe en ont donné quelques morceaux à M. Schœpflin , qui en a envoyé deux à M. de Buffon pour le Cabinet du Roi : on a fait de ces bois pétrifiés des vases et autres beaux ouvrages T. » On trouve aussi du bois qui n’a point changé de nature , h d’assez grandes pro- fondeurs dans la terre. M. Du Verny, offi- 1. Lettre de M. Schœpflin ; Strasbourg, 24 sep- tembre 1746. cier d’artillerie , m’en a envoyé des écha tillons avec le détail suivant. « La ville La Fère , où je suis actuellement en gart son, fait travailler, depuis le 1 5 du nu d’août de cette année 1753, à chercher l’eau par le moyen de la tarière ; lorsqu’ ; fut parvenu à trente-neuf pieds au desso du sol , on trouva un lit de marne , que 1 ; a continué de percer jusqu’à cent vingt- pieds : ainsi , à cent soixante pieds de pi fondeur, on a trouvé, deux fois conséci tives , la tarière remplie d’une marne mêl d’une très-grande quantité de fragmens bois, que tout le monde a reconnus po être du chêne. Je vous en envoie de échantillons. Les jours suivans’, on a trou toujours la mêmq marne , mais moins mê) de bois , et on en a trouvé jusqu’à la pr fondeur de deux cent dix pieds, où l’or cessé le travail. » « On trouve, dit M. Justi, des morcea de bois pétrifiés d’une prodigieuse grande t dans le pays de Cobourg , qui appartient une branche de la maison de Saxe ; et da; les montagnes de Misnie, on a tiré de terre des arbres entiers , qui étoient enlièit ment changés en une très-belle agate. Cabinet impérial de Tienne renferme 1 grand nombre de pétrificâtions en ce genu Un morceau destiné pour ce même Cabir étoit d’une circonférence qui égaloit ce d’un gros billot de boucherie. La parti qui avoit été bois étoit changée dans u j très-belle agate d’un gris noir ; et au lieu l’écorce on voyoit régner tout autour 1 tronc une bande d’une très -belle age blanche. « L’empereur aujourd’hui régnant.... j souhaité qu’on découvrît quelque moy pour fixer l’âge des pétrifications.... Il don 1 ordre à son ambassadeur à Constantinop de demander la permission de faire retir du Danube un des piliers dupont de Traja t qui est à quelques milles au dessous de Bf grade. Cette permission ayant été accordé on retira un de ces piliers , que l’on prés | moit devoir être pétrifié par les eaux < ; Danube ; mais on reconnut que la pétrifie! tion étoit très-peu avancée pour un espa de temps si considérable. Quoiqu’il se 1 passé plus de seize siècles depuis que pilier en question étoit dans le Danube , é n’y avoit pénétré tout au plus qu’à l’épai i seur de trois quarts de pouce , et même quelque chose de moins : le reste du boi » peu différent de l’ordinaire , ne commence i qu’à se calciner. « Si de ce fait seul on pomoil tirer ui ! ART. XVIII. EFFET DES PLUIES. ite conséquence pour toutes les autres trifications , on en concîuroil que la na- •e a eu besoin peut-être de cinquante lie ans pour changer en pierres des arbres la grosseur de ceux qu’on a trouvés pé- fiés en différens endroits; mais il peut fort ;n arriver qu’en d’autres lieux le concours plusieurs causes opère la pétrification plus amplement. . . . « On a vu à Vienne une bûche pétrifiée, i étôit venue des montagnes Carpathes en mgrie , sur laquelle paroissoient dïstincte- ;nt les hachures qui y avoient été faites mt sa pétrification ; et ces mêmes hachures bient si peu altérées par le changement ’ivé au bois , qu’on y remarquoit qu’elles fient été faites avec un tranchant qui avoit e petite brèche.... « Au reste , il paroît que le bois pétrifié ; beaucoup moins rare dans la nature ’on ne le pense communément , et qu’en 3n des endroits il ne manque , pour le dé- tivrir, que l’œil d’un naturaliste curieux, ti vu auprès de Mansfeld une grande antité de bois de chêne pétrifié , dans un droit où beaucoup de gens passent tous i jours sans apercevoir ce phénomène. Il ivoit des bûches entièrement pétrifiées , ns lesquelles on reconnoissoit très-dis- ctement les anneaux formés par la crois- îce annuelle du bois , l’écorce , l’endroit la coupe, et toutes les marques du bois chêne. » lM. Clozier, qui a trouvé différentes pièces bois pétrifié sur les collines aux environs Étampes, et particulièrement sur celle de int-Symphorien , a jugé que ces différens îreeaux de bois pouvoient provenir de j.elques couches pétrifiées qui étoient dans > montagnes : en conséquence , il a fait re des fouilles sur la montagne de Saint- mphorien, dans un endroit qu’on lui avoit iiqué ; et , après avoir creusé la terre de isieurs pieds, il vit d’abord une racine de is pétrifiée qui le conduisit à la souche m arbre de même nature. Cette racine, depuis son commencement Squ’au tronc où elle étoit attachée , avoit i moins, dit- il, cinq pieds de longueur; y en avoit cinq autres qui y tenoient aussi, ais moins longues.... Les moyennes et petites racines n’ont pas p bien pétrifiées; ou du moins leur pétri- [ation étoit si friable , qu’elles sont restées tus le sable où étoit la souche en une es- :ee de poussière ou de cendre. Il y a lieu ! croire que lorsque la pétrification s’est mmuniquée à ces racines, elles étoient a83 presque pourries, et que les parties ligneuses qui les composoient, étant trop désunies par la pourriture , n’ont pu acquérir la soli- dité requise pour une vraie pétrification La souche porte , dans son plus gros , près de six pieds de circonférence ; à l’égard de sa hauteur, elle porte , dans sa partie la plus élevée, trois pieds huit à dix pouces; son poids est au moins de cinq à six cents livres. La souche , ainsi que les racines , ont con- servé toutes les apparences du bois, comme écorce, aubier, bois dur, pourriture , trous de petits et gros vers, excrémens de ces mêmes vers; toutes ces différentes parties pétrifiées, mais d’une pétrification moins dure et moins solide que le corps ligneux , qui étoit bien sain lorsqu’il a été saisi par les parties pétrifiantes. Ce corps ligneux est changé en un vrai caillou de différentes couleurs , rendant beaucoup de feu étant frappé avec le fer trempé , et sentant , après qu’il a été frappé ou frotté, une très-forte odeur de soufre.... Ce tronç d’arbre pétrifié étoit couché presque horizontalement Il étoit couvert de plus de quatre pieds de terre, et la grande racine étoit en dessus , et n’étoit en- foncée que de deux pieds dans la terre. M. l’abbé Mazéas, qui a découvert à un demi-mille de Rome , au delà de la porte du Peuple, une carrière de bois pétrifié, s’ex- prime dans les termes suivans : « Cette carrière de bois pétrifié , dit-il , forme une suite de collines en face de Monte Mario , situé de l’autre côté du Ti- bre.... Parmi ces morceaux de bois entassés les uns sur les autres d’une manière irré- gulière, les uns sont simplement sous la forme d’une terre durcie , et ce sont ceux qui se trouvent dans un terrain léger, sec , et qui ne paroît nullement propre à la nour- riture des végétaux: les autres sont pétrifiés, et ont la couleur, le brillant et la dureté de l’espèce de résine cuite, connue dans nos boutiques sous le nom de colophane; ces bois pétrifiés se trouvent dans un terrain de même espèce que le précédent , mais plus humide : les uns et les autres sont parfaite- ment bien conservés : tous se réduisent par la calcination en une véritable terre, aucun ne donnant de l’alun, soit en le traiiant au feu, soit en les combinant avec l’acide vitriolique. » M. Dumonchau , docteur en médecine et très-habile physicien à Douai, a bien voulu m’envoyer, pour le Cabinet du Roi, un mor- ceau d’un arbre pétrifié, avec le détail histo- rique suivant : 284 THEORIE DE LA TERRE. « La pièce de bois péirifié que j’ai l’hon- neur de vous envoyer a été cassée à un tronc d’arbre trouvé à plus de cent cinquante pieds de profondeur en terre.... En creusant l’année dernière (1754) un puits pour son- der du charbon à Notre-Dame-au-Bois , vil- lage situé entre Condé , Saint- Amand , Mor- tagne et Valenciennes, on a trouvé à en- viron six cents toises de l’Escaut , après avoir passé trois niveaux d’eau , d’abord sept pieds de rocher ou de pierre dure que les charbonniers nomment en leur langage tourtia; ensuite, étant parvenu à une terre marécageuse , on a rencontré , comme je viens de le dire, à cent cinquante pieds de profondeur, un tronc d’arbre de deux pieds de diamètre, qui traversoit le puits que l’on creusoit, ce qui fit qu’on ne put pas en me- surer la longueur; il étoit appuyé sur un gros grès ; et bien des curieux , voulant avoir de ce bois, on en détacha plusieurs mor- ceaux du tronc. La petite pièce que j’ai l’honneur de vous envoyer fut coupée d’un morceau qu’on donna à M. Laurent, savant mécanicien « Ce bois paroît plutôt charbonnifié que pétrifié. Comment un arbre se trouve-t-il si avant dans la terre ? est-ce que le terrain où on l’a trouvé a été jadis aussi bas ? Si cela est, comment ce terrain auroil-il pu augmen- ter ainsi de cent cinquante pieds? d’où se- roit venue toute cette terre ? « Les sept pieds de tourtia que M. Lau- rent a observés, se trouvant répandus de même dans tous les autres puits à charbon , de dix lieues à la ronde , sont donc une pro- duction postérieure à ce grand amas supposé de terre. « Je vous laisse, monsieur, la chose à décider ; vous vous êtes familiarisé avec la nature pour en comprendre les mystères les plus cachés : ainsi je ne doute pas que vous 11’expliquiez ceci aisément. » M. Fougeroux de Bondaroy, de l’Acadé- mie royale des Sciences, rapporte plusieurs faits sur les bois pétrifiés dans un mémoire cpii mérite des éloges, et dont voici l’extrait: « Toutes les pierres fibreuses et qui ont quelque ressemblance avec le bois ne sont pas du bois pétrifié; mais il y en a beau- coup d’autres qu’on auroit tort de ne pas regarder comme telles, surtout si l’on y remarque l’organisation propre aux végé- taux— « On ne manque pas d’observations qui prouvent que le bois peut se convertir en pierre, au moins aussi aisément que plu- sieurs autres substances ,qui éprouvent in- contestablement cette transmutation ; m il n’est pas aisé d’expliquer comment elle fait : j’espère qu’on me permettra de has der sur cela quelques conjectures que je cherai d’appuyer sur des observations. «On trouve des bois qui, étant, pe ainsi dire , à demi pétrifiés , s’éloignent j de la pesanteur du bois ; ils se divisent ai ment par feuillets, ou même par filamei comme certains bois pourris : d’autres, p . pétrifiés, ont le poids, la dureté et l’opac1 de la pierre de taille ; d’autres , dont la pél j fication est encore plus parfaite, prenm le même poli que le marbre, pendant qj d’autres acquièrent celui des belles aga orientales. J’ai un très-beau morceau qu j été envoyé de la Martinique à M. Duham qui est changé en une très-belle sardoin Enfin on en trouve de convertis en ardoi, Dans ces morceaux on en trouve qui c tellement conservé l’organisation du boi ; qu’on y découvre avec la loupe tout ce qu pourroit voir dans un morceau de bois m pétrifié. « Nous en avons trouvé qui sont encroû) jj par une mine de fer sableuse, et d’autriS sont pénétrés d’une substance qui, étal plus chargéeMe soufre et de vitriol , les ra jj proche de l’état des pyrites : quelques-ul sont, pour ainsi dire, lardés par une mi J de fer très-pure; d’autres sont traversés pi des veines d’agate très-noires. 1 « On trouve des morceaux de bois do J une partie est convertie en pierre , et l’aut \ en agate : la partie qui n’est convertie qu’i • pierre est tendre, tandis que l’autre a , dureté des pierres précieuses. « Mais comment certains morceaux , qut j que convertis en agate très-dure , conse vent-ils des caractères d’organisation trè| sensibles, les cercles concentriques , les it i sertions, l’extrémité des tuyaux destinés j porter la sève , la distinction de l’écorci de l'aubier, et du bois? Si l’on imagine, que la substance végétale fût entièremei; détruite , ils ne devroient représenter qu’ur | agate sans les caractères d’organisation dot j nous parlons ; si , pour conserver cette app \ rence d’organisation , on vouloit que le bo j subsistât , et qu’il n’y eût que les pores cp , fussent remplis par le suc pétrifiant , il sen , ble que l’on pourroit extraire de l’agate les pa j ties végétales : cependant je n’ai pu y pat venir en aucune manière. Je pense don j que les morceaux dont il s’agit ne contien t nent aucune partie qui ail conservé la natui j du bois', et , pour rendre sensible mon idée j je prie qu’on se rappelle que si on dislill ! ART. XVIII. EFFET DES PLUIES. . 28 5 cornue un morceau de bois , le charbon restera après la distillation ne pèsera un sixième du poids du morceau de i : si on brûle le charbon , on n’en ob- dra qu’une très-petite quantité de cen- , qui diminuera encore quand on en a retiré les sels lixiviels. Cette petite quantité de cendre étant la tie vraiment fixe , l’analyse chimique dont iens de tracer l’idée prouve assez bien les parties fixes d’un morceau de bois ; réellement très-peu de chose, et que lus grande portion de matière qui con- 1e un morceau de bois est destructible, •eut être enlevée peu à peu par l’eau, esure que le bois se pourrit. . . Maintenant, si l’on conçoit que la plus ide partie du bois est détruite, que le dette ligneux qui reste est formé par terre légère et perméable au suc pétri- t, sa conversion en pierre, en agate, ardoine, ne sera pas plus difficile à cou- rir que celle d’une terre bolaire , créta- I ou de toute autre nature : toute la dif- nce consistera en ce que cette terre vê- le ayant conservé une apparence d’or- sation, le suc pétrifiant se moulera dans [pores, s’introduira dans ses molécules euses , en conservant néanmoins le même ctère » ïoici encore quelques faits et quelques îrvations qu’on doit ajouter aux précé- tes. En août 1773, àMontigny-sur-Braine, liage de Châlons, vicomté d’Auxonne, reusant le puits de la cure, on a trouvé înte-trois pieds de profondeur , un arbre dié sur son flanc, dont on n’a pu dé- jvrir l’espèce. Les terres supérieures ne bissent avoir été touchées de main imme, d’autant que les lits semblent intacts: car' on trouve au dessous du ain un lit de terre glaise de huit pieds , îite un lit de sable de dix pieds; après , un lit de terre grasse d’environ six à pieds , ensuite un autre lit de terre se pierreuse de quatre à cinq pieds , en- je un lit de sable noir de trois pieds; II l’arbre éloit dans la terre grasse. La [ère de Braine est au levant de cet en- t , et n’en est éloignée que d’une portée usil ; elle coule dans une prairie de qua- [vingts pieds plus basse que l’emplacement la cure. il. de Grignon m’a informé que , sur les ds de la Marne, près Saint-Dizier , l’on tve un lit de bois pyriteux dont on re- noit l’organisation. Ce lit de bois est é sous un banc de grès, qui est recou- vert d’une couche de pyrites en gâteaux, sur- montée d’un banc de pierre calcaire, et le lit de bois pyriteux porte sur une glaise noirâtre. Il a aussi trouvé, dans les fouilles qu’il a faites pour la découverte de la ville sou- terraine du Châtelet , des inslrumens de fer qui avoient eu des manches de bois, et il a observé que ce bois étoit devenu une vé- ritable mine de fer du genre des hématites. L’organisation du bois n’étoit pas détruite; mais il étoit cassant et d’un tissu aussi serré cpie celui de l’hématite dans toute son épais- seur. Ces inslrumens de fer à manche de bois avoient été enfouis dans la terre pen- dant seize ou dix sept cents ans, et la con- version du bois en hématite s’est faite par la décomposition du fer , qui peu à peu a rempli les pores du bois. ( Add . Buff.) Sur V éboulement et le déplacement de quelques terrains. * La rupture des cavernes et l’action des feux souterrains sont les principales causes des grands éboulemens de la terre, mais souvent il s’en fait aussi par de plus petites causes; la filtration des eaux, en délayanj les argiles sur lesquelles portent les rochers de presque toutes les montagnes calcaires, a souvent fait pencher ces montagnes et causé des éboulemens assez remarquables pour que nous devions en donner ici quel- ques exemples. « En 1757, dit M. Perronet, une partie du terrain qui se trouve situé à mi-côte avant d’arriver au château de Croix-Fon- taine s’enlr’ouvrit en nombre d’endroits et s’éboula successivement par parties ; le mur de terrasse qui retenoit le pied de ces terres fut renversé, et on fut obligé de transporter plus loin le chemin qui étoit élabli le long du mur. . . Ce terrain étoit porté sur une base de terre inclinée. » Ce savant et pre- mier ingénieur de nos ponts et chaussées cite un autre accident de même espèce ar- rivé, en 1733, à Pardines, près d’Issoire en Auvergne : le terrain, sur environ quatre cents toises de longueur et trois cents toises de largeur , descendit sur une prairie assez éloignée , avec les maisons , les arbres , et ce qui étoit dessus. U ajoute que l’on voit quel- quefois des parties considérables de terrain emportées , soit par des réservoirs supérieurs d’eau dont les digues viennent à se rompre, ou par une fonte subite de neiges. En 1767 . au village de Guet, à dix lieues de Gre noble , sur la route de Briançon , tout le ter THÉORIE DE LA TERRE. 28Ô rain, lecfiiel est en pente, glissa et descen- dit en un instant vers le Drac , qui en est éloigné d’environ un tiers de lieue ; la terre se fendit dans le village , et la partie qui a glissé se trouve de six, huit, et neuf pieds plus basse qu’elle n’étoit : ce terrain étoit posé sur un rocher assez uni et incliné à l’horizon d’environ 40 degrés. Je puis ajouter à ces exemples un autre fait dont j’ai eu tout le temps d’être témoin, et qui m’a même occasioné une dépense as- sez considérable. Le tertre isolé sur lequel sont situés la ville et le vieux château de Montbard est élevé de cent quarante pieds au dessus de la rivière, et la côte la plus ra- pide est celle du nord-est : ce tertre est cou- ronné de rochers calcaires, dont les bancs pris ensemble ont cinquante-quatre pieds d’épaisseur; partout ils portent sur un mas- sif de glaise, qui par conséquent a jusqu’à la rivière soixante-six pieds d’épaisseur. Mon jardin , environné de plusieurs terrasses , est situé sur le sommet de ce tertre. Une par- tie du mur , longue de vingt-cinq à vingt- six toises, de la dernière terrasse du côté du nord-est où la pente est la plus rapide, a glissé tout d’une pièce en faisant refouler le terrain inférieur, et il seroit descendu jus- qu’au niveau du terrain voisin de la rivière si l’on n’eût pas prévenu son mouvement progressif, en le démolissant : ce mur avoit sept pieds d’épaisseur, et il étoit fondé sur la glaise. Ce mouvement se fit très- lente- ment : je reconnus évidemment qu’il n’étoit occasioné que par le suintement des eaux ; toutes celles qui tombent sur la plate-forme du sommet de ce tertre pénètrent par les fentes des rochers jusqu’à cinquante-quatre pieds sur le massif de glaise qui leur sert de base : 011 en est assuré par les deux puits qui sont sur la plate-forme, et qui ont en effet cinquante-quatre pieds de profondeur; ils sont pratiqués du haut en bas dans les bancs calcaires. Toutes les eaux pluviales qui tom- bent sur cette plate-forme et sur les terras- ses adjacentes se rassemblent donc sur le massif d’argile ou glaise "auquel aboutissent les fentes perpendiculaires de ces rochers ; elles forment de petites sources en différens endroits qui sont encore clairement indiquées par plusieurs puits , tous abondans , et creu- sés au dessous de la couronne des rochers ; et, dans tous les endroits où l’on tranche ce massif d’argile par des fossés , on voit l’eau suinter et venir d’en haut : il n’est donc pas étonnant que des murs, quelque solides qu ils soient, glissent sur le premier banc de cette argile humide, s’ils ne sont pas fondés à plusieurs pieds au dessous , comme je ! fait faire en les reconstruisant. Néannn j la même chose est encore arrivée du < j du nord-ouest de ce tertre , où la pente plus douce et sans sources apparentes : avoit tiré de l’argile à douze ou quinze pi de distance d’un gros mur épais de onze pi i sur trente-cinq de hauteur et douze to j de longueur; ce mur est construit de ti bons matériaux , et il subsiste depuis plu; I neuf cents ans : cette tranchée où l’on tii de l’argile et qui ne descendoit pas à t de quatre à cinq pieds, a néanmoins faire un mouvement à cet énorme mur penche d’environ quinze pouces sur sa h ! teur perpendiculaire , et je n’ai pu le r< j nir et prévenir sa chute que par des pili j butans de sept à huit pieds de saillie sur tant d’épaisseur, fondés à quatorze pieds profondeur. De ces faits particuliers j’ai tiré une eu séquence générale dont aujourd’hui on ; fera pas autant de cas que l’on en auroit dans les siècles passés : c’est qu’il n’y a un château ou forteresse située sur des h j teurs qu’on ne puisse aisément faire coé> dans la plaine ou vallée au moyen d’i! simple tranchée de dix ou douze pieds profondeur sur quelques toises de large» | en pratiquant cette tranchée à une petite cj tance des derniers murs , et choisissant pi j l’établir le côté où la pente est la plus rapi Cette manière dont les anciens ne se ®;i pas doutés leur auroit épargné bien des i liers et d’autres machines de guerre , et i I jourd’hui même on pourroit s’en ser i avantageusement dans plusieurs cas : je : j suis convaincu par mes yeux , lorsque ; murs ont glissé , que , si la tranchée qu1 i a faite pour les reconstruire n’eût pas I promptement remplie de forte maçonner j les murs anciens et les deux tours qui su sistent encore en bon état depuis neuf ce i ans , et dont l’une a cent vingt-cinq pi< ; de hauteur, auroient coulé dans le vall j avec les rochers sur lesquels ces tours et 1 murs sont fondés ; et , comme toutes 1 collines composées de pierres calcaires pi i tent généralement sur un fond d’argile d( 1 les premiers lits sont toujours plus ou moi j humectés par les eaux qui filtrent dans l fentes des rochers et descendent jusqu’à j premier lit d’argile , il me paroît cert; i qu’en éventant cette argile , c’est-à-dire » exposant à l’air par une tranchée ces pi miers lits imbibés des eaux , la masse entii il des rochers et du terrain qui porte sur ce m j! sif d’argile couleroit en glissant sur le p ART. XVIII. EFFET DES PLUIES. 28' |er lit, et descendroit jusque dans la tran- Je en peu de jours , surtout dans un temps pluie. Cette manière de démanteler une teresse est bien plus simple que tout ce on a pratiqué jusqu’ici, et l’expérience 1 démontré que le succès en est certain. ■ les ossemens c/ue l’on trouve quelquefois dans l’Intérieur de la terre. « Dans la paroisse du Haux , pays d’entre ix mers , à demi-lieue du port de Lau- ran , une pointe de rocher haute de onze 1s se détacha d’un coteau qui avoit au- avant trente pieds de hauteur , et , par ihute, elle répandit dans le vallon une ide quantité d’ossemens ou de fragmens isemens d’animaux , quelques-uns pétri- . Il est indubitable qu’ils en sont ; mais st très- difficile de déterminer à quels riaux ils appartiennent : le plus grand libre sont des dents , quelques - unes It-être de bœuf ou de cheval ; mais la rart trop grandes ou trop grosses pour être, sans compter la différence de re '; il y a des os de cuisses ou de jambes, nême un fragment de bois de cerf ou an : le tout éloit enveloppé de terre mune, et enfermé entre deux liis de les. Il faut nécessairement concevoir des cadavres d’animaux ayant été jetés s une roche creuse, et leurs chairs s’é- pourries, il s’est formé par dessus cet s une roche de onze pieds de haut , ce a demandé une longue suite de siècles... MM. de l’Académie de Bordeaux , qui examiné toute celte matière en habiles siciens... ont trouvé qu’un grand nom- i de fragmens mis à un feu très-vif sont :nus d’un beau bleu de turquoise , que ques petites parties en ont pris la con- nce , et que , taillées par un lapidaire , » en ont le poli... Il ne faut pas oublier des os qui appartenoient visiblement à ïrens animaux ont également bien réussi ivenir turquoises r. 1 Le 28 janvier 1760, on trouva auprès a ville d’Aix en Provence , dit M. Guet- I, à cent soixante toises au dessus des is des eaux minérales, des ossemens ermés dans un rocher de pierre grise à uperfîcie : cette pierre ne formoit point lits , et n’étoit point feuilletée ; c’étoit (masse continue et entière... j Après avoir , par le moyen de la poudre , iétré à cinq pieds de profondeur dans Histoire de l’ Académie des Sciences, année , page 24. l’intérieur de cette pierre, on y trouva une grande quantité d’ossemens humains de toutes les parties du corps, savoir, des mâchoires et leurs dents , des os du bras , de la cuisse, des jambes, des côtes, des rotules, et plusieurs autres mêlés confusé- ment et dans le plus grand désordre. Les crânes entiers , ou divisés en petites parties , semblent y dominer. « Outre ces ossemens humains , on en a rencontré plusieurs autres par morceaux, qu’on 11e peut attribuer à l’homme : ils sont , dans certains endroits, ramassés par pelo- tons; ils sont épars dans d’autres... « Lorsqu’on a creusé jusqu’à la profon- deur de quatre pieds et demi, on a ren- contré six têtes humaines dans une situation inclinée. De cinq de ces têtes on a conservé l’occiput avec ses adhérences, à l’exception des os de la face : cet occiput étoit en par- tie incrusté dans la pierre ; son intérieur en étoit rempli , et cette pierre en avoit pris la forme. La sixième têle est dans son entier du côté de la face , qui n’a reçu aucune altération ; elle est large à proportion de sa longueur : on y distingue la forme des joues charnues; les yeux sont fermés, assez longs, mais étroits : le front est un peu large ; le nez fort aplati , mais bien formé , la ligne du milieu un peu marquée ; la bouche bien faite et fermée, ayant la lèvre supérieure un peu forte relativement à l’inférieure : le menton est bien proportionné, et les muscles du total sont très-articulés. La cou- leur de cette tête estnxrageâtre , et ressemble assez bien aux têtes de tritons imaginées par les peintres : sa substance est semblable à celle de la pierre où elle a été trouvée ; elle n’est , à proprement parler , que le masque de la tête naturelle... » La relation ci-dessus a été envoyée par M. le- baron de Gaillard-Longjumeau à ma- dame de Boisjourdain, qui l’a ensuite fait parvenir à M. Gueltard avec quelques mor- ceaux des ossemens en question. On peut douter avec raison que ces prétendues têtes humaines soient réellement des têtes d’hom- mes : « car tout ce qu’on voit dans cette carrière, dit M. de Longjumeau, annonce qu’elle s’est formée de débris de corps qui ont été brisés, et qui ont dû être ballottés et roulés dans les flots de la mer dans le temps que ces os se sont amoncelés. Ces amas ne se faisant qu’à la longue, et n’étant surtout recouverts de matière pierreuse que successivement, 011 ne conçoit pas aisément comment il pourroit s’être formé un masque sur la face de ces têtes, les chairs n’élant THÉORIE DE LÀ TERRE. 288 pas long-temps à se corrompre , lors surtout que les corps sont ensevelis sous les eaux. On peut donc très-raisonnablement croire que ces prétendues têtes humaines n’en sont réellement point... il y a même tout lieu de penser que les os qu’on croit appartenir à l’homme sont ceux des squelettes de poissons dont on a trouvé les dents , et dont quelques unes étoient enclavées dans les mêmes quar- tiers de pierre qui renfermoient les os qu’on dit être humains. « Il paroit que les amas d’os des environs d’Aix sont semblables à ceux que M. Borda a fait connoilre depuis quelques années , et qu’il a trouvés près de Dax en Gascogne. Les dents qu’on a découvertes à Aix pa- roissent, par la description qu’on en donne, être semblables à celles qui ont été trouvées à Dax, et dont une mâchoire inférieure étoit encore garnie : on ne peut douter que cette mâchoire ne soit celle d’un gros pois- son... Je pense donc que les os de la carrière d’Aix sont semblables à ceux qui ont été découverts à Dax... , et que ces ossemens, quels qu’ils soient , doivent être rapportés à des squelettes de poissons plutôt qu’à des squelettes humains... « Une des têtes en question avoit environ sept pouces et demi de longueur sur trois de largeur et quelques lignes de plus; sa forme est celle d’un globe allongé , aplati à sa base, plus gros à l’extrémité postérieure qu’à l’extrémité antérieure, divisé suivant sa largeur et de haut en bas, par sept ou huit bandes larges depuis sept jusqu’à douze lignes : chaque bande est elle-même divisée en deux parties égales par un léger sillon ; elles s’étendent depuis la base jusqu’au sommet : dans cet endroit, celles d’un côté sont séparées de celles du côté opposé par un autre sillon plus profond , et qui s’élargit insensiblement depuis la partie antérieure jusqu’à la partie postérieure. « A cette description, on ne peut recon- noître le noyau d’une tèle humaine : les os de la tête de l’homme ne sont pas divisés en bandes comme l’est le corps dont il s’a- git ; une tète humaine est composée de quatre os principaux, dont on ne retrouve pas la forme dans le noyau dont on a donné la description : elle n’a pas intérieurement une crête qui s’étende longitudinalement depuis sa partie antérieure jusqu’à sa partie postérieure, qui la divise en deux parties égales, et qui ait pu former le sillon sur la partie supérieure du noyau pierreux. « Ces considérations me fout penser que le corps est plutôt celui d’un nautile que celui d’une tête humaine. En effet, il j des nautiles qui sont séparés en bandes j boucliers comme ce noyau : ils ont un < nal ou siphon qui règne dans la longue de leur courbure , qui les sépare en cleu et qui en aura formé le sillon pierreux, etc Je suis très-persuadé , ainsi que M. ! baron de Longjumeau, que ces prétende tètes n’ont jamais appartenu à des hommi mais à des animaux du genre des phoqm des loutres marines, et des grands lu marins et ours marins. Ce n’est pas seu 1 ment à Aix ou à Dax que l’on trouve, i les rochers et dans les cavernes , des tê et des ossemens de ces animaux; S. A. prince margrave d’Anspach, actuellemt régnant, et qui joint au goût des bel connoissances la plus grande affabilité, eu la bonté de me donner, pour le Cabii du Roi , une collection d’ossemens tirés < cavernes de Gailenreute, dans son marg: viat de Bareith. M. Daubenlon a eomp;; ces os avec ceux de l’ours commun : ils diffèrent en ce qu’ils sont beaucoup p] grands ; la tête et les dents sont plus longijl et plus grosses, et le museau plus alloi j et pluS renflé que dans nos plus graj;| ours. Il y a aussi dans cette collection, d> t'f ce noble prince a bien voulu me gratifiai une petite tête que ses naturalistes avoitil désignée sous le nom de tête du petit plul de 31. de Buffon ; mais comme l’on ne cjlt noît pas assez la forme et la structure | tètes de lions marins , d’ours marins , et li tous les grands et petits phoques, i|| croyons devoir encore suspendre notre ju i|i ment sur les animaux auxquels ces os jlo mens fossiles ont appartenu. ( Add . Bu \ je !,] ARTICLE XIX. m Des changemens de terres en mers , et | mers en terres. U Il paroit par ce que nous avons dit d les articles I, AI, VIII, et IX , qu’il arrivé au globe terrestre de grands chat mens qu’on peut regarder comme généra , et il.est certain par ce que nous avons 1 porté dans les autres articles , que la sur j de la terre a souffert des altérations part j lières. Quoique l’ordre , ou plutôt la suc i sion de ces altérations ou changemens 1 ticuliers, ne soit pas bien bien connue, 1 en connoissons cependant les causes pri pales : nous sommes même en état d’en tinguer les différons effets ; et si nous j ; vions rassembler tous les indices et tou j 'ART. XIX. CHANGEMENT DE TERRES EN MERS. 289 aiis que l’histoire naturelle et l’histoire ci- lle nous fournissent au sujet des révolutions irrivées à la surface de la terre, nous ne loutons pas que la théorie que nous avons lonnée n’en devînt plus plausible. L’une des principales causes des change- ons qui arrivent sur la terre, c’est le moll- ement de la mer, mouvement qu’elle a prouvé de tout temps ; car dès la création y a eu le soleil, la lune, la terre, les aux, l’air, etc. : dès lors le flux et le rè- ux, le mouvement d’orient en occident, elui des vents et des couraris, se sont fait întir ; les eaux ont eu dès lors les mêmes muvemens que nous remarquons aujour- ’hui dans la mer; et quand même onsup- aseroit que l’axe du globe auroit eu une ître inclinaison , et que les continens ter- :stres , aussi bien que les mers , auraient i une autre disposition , cela ne détruit aint le mouvement du flux et du reflux, >n plus que la cause et l’effet des vents : il ffit que l’immense quantité d’eau qui rem- it le vaste espace des mers se soit trouvée ssemblée quelque part sur le globe de la rre, pour que le flux et le reflux , et les très mouvemens de la terre , aient été pro- lits. Lorsqu’une fois on a commencé à soup- nner qu’il se pouvoit bien que notre cou- lent eût autrefois été le fond d’une mer, se le persuade bientôt à n’en pouvoir dou- ■ : d’un côté ces débris de la mer qu’on iuve partout , de l’autre la situation hori- atale des couches de la terre, et enfin te disposition des collines et des monta- es qui se correspondent , me paroissent tant de preuves convaincantes; car en isidérant les plaines, les vallées, les colli- k , on voit clairement que la surface de terre a été figurée par les eaux ; en exa- nant l’intérieur des coquilles qui sont lit (fermées dans les pierres , on reconnoît I»' demment que ces pierres se sont for- ci' es par le sédiment des eaux, puisque les mt Imilles sont remplies de la matière même ont ja pierre qui les environne ; et enfin en as léchissant sur la forme des collines, dont if angles saillans répondent toujours aux la'1 ;les rentrans des collines opposées, on ne 0 lit pas douter que cette direction ne soit mit ivrage des courans de la mer. A la vérité , ses] [mis que notre continent est découvert, il forme de la surface a un peu changé, no* montagnes ont diminué de hauteur, les et* ines se sont élevées, les angles des colli- sont devenus plus obtus, plusieurs ma- les entraînées par les fleuves se sont ar- Buffon. I, rondies, il s’est formé des couches de tuf, de pierre molle, de gravier, etc. : mais l’es- sentiel est demeuré, la forme ancienne se reconnoît encore , et je suis persuadé que tout le monde peut se convaincre par ses yeux de tout ce que nous avons dit à ce sujet, et que quiconque aura bien voulu suivre nos observations et nos preuves ne doutera pas que la terre n’ait été autrefois sous les eaux de la mer, et que ce ne soient les courans de la mer qui aient donné à la surface de la terre la forme que nous voyons. Le mouvement principal des eaux de la mer est, comme nous l’avons dit, d’orient en occident ; aussi il nous paroît que la mer a gagné sur les côtes orientales, tant de l’an- cien que du nouveau continent, un espace d’environ cinq cents lieues; on doit se souvenir des preuves que nous en avons données dans l’article XI, et nous pouvons y ajouter que tous les détroits qui joignent les mers spnt dirigés d’orient en occident : le détroit1 de Magellan, les deux détroits de Eorbisher, celui d’Hudson, le détroit de File de Ceylan, ceux de la mer de Corée et de Kamtschatka, ont tous cette direction, et paroissent avoir été formés par l’irrup- tion des eaux qui, étant poussées d’orient en occident, se sont ouvert ces passages dans la même direction, dans laquelle elles éprouvent aussi un mouvement plus consi- dérable que dans toutes les autres direc- tions ; car il y Aclans tous ces détroits des marées très-violentes , au lieu que dans ceux qui sont situés sur les côtes occidentales , comme l’est celui de Gibraltar, celui de Sund , etc. , le mouvement des marées est presque insensible. Les inégalités du fond de la mer changent la direction du mouvement des eaux ; elles ont été produites successivement par les sé- dimens de l’eau et parles matières qu’elle a transportées, soit par son mouvement de flux et de reflux , soit par d’autres mouvemens : car nous ne donnons pas pour cause unique de ces inégalités le mouvement du flux et du reflux ; nous avons seulement donné cette cause comme la principale et la première , parce qu’elle est la plus constante et qu’elle agit sans interruption : mais on doit aussi admettre comme cause l’action des vents; ils agissent même à la surface de l’eau avec une toute autre violence que les marées , et l’a- gitation qu’ils communiquent à la mer est bien plus considérable pour les effets exté- rieurs ; elle s’étend même à des profondeurs considérables , comme on le voit par les matières qui se détachent, par la tempête, 19 290 THÉORIE DE LA TERRE. du fond des mers, et qui ne sont presque jamais rejetées sur les rivages que dans les temps d’orage. Nous avons dit qu’entre les tropiques , et même à quelques degrés au delà, il règne con- tinuellement un vent d’est ; ce vent , qui contribue au mouvement général de la mer d’orient en occident, est aussi ancien que le flux et le reflux, puisqu’il dépend du cours du soleil et de la raréfaction de l’air produise par la chaleur de cet astre. Voilà donc deux causes de mouvement réunies , et plus grandes sous l’équateur que partout ailleurs : la première , le flux et le reflux , qui, comme l’on sait , est plus sensible dans les climats méridionaux ; et la seconde , le vent d’est, qui souffle continuellement dans ces mêmes climats ; ces deux causes ont concouru, depuis la formation du globe, à produire les mêmes effets, c’est-à-dire à faire mouvoir les eaux d’orient en occi- dent , et à les agiter avec plus de force dans celte partie du monde que dans toutes ies autres; c’est pour cela que les plus grandes inégalités de la surface du globe se trouvent entre les tropiques. La partie de l’Afrique, comprise entre ces deux cercles, n’est, pour ainsi dire, qu’un groupe de montagnes, dont les différentes chaînes s’étendent, pour la plupart, d’orienWm occident, comme on peut s’en assurer en considérant la direction des grands fleuves de cette partie de l’Afri- que : il en est de même de la partie de l’Asie et de celle de l’Amérique qui sont comprises entre les tropiques, et l’on doit juger de l’in- égalité et de la surface de ces climats par la quantité de hautes montagnes et d’iles qu’on y trouve. De la combinaison du mouvement général de la mer d’orient en occident, de celui du flux et du reflux , de celui que produisent les courans, et encore de celui que forment les vents, il a résulté une infinité de diffé- rens effets tant sur le fond de la mer que sur les côtes et les centinens. Varenius dit qu’il est très-probable que les golfes et les détroits ont été formés par "l’effort réitéré de l’Océan contre les terres ; que la mer Méditerranée, ies golfes d’Arabie , de Bengale , et de Cam- baye, ont été formés par l’irruption des eaux , aussi bien que les détroits entre la Si- cile et l’Italie, entre Ceylan et l’Inde, entre la Grèce et l’Eubée , et qu’il en est de même du détroit des Manilles, de celui de Magel- lan, et de celui de Danemarck; qu’une preuve des irruptions de l’Océaü sur les continens, qu’une preuve qu’il a abandonné différens terrains , c’est qu’on ne trouve que très-peu d’îles dans le milieu des grandes mers, et jamais un grand nombre d’îles voi- sines les unes des autres; que, dans l’es- pace immense qu’occupe la mer Pacifique j I à peine trouve-t-on deux ou trois petites j îles vers le milieu ; que , dans le vaste océan Atlantique entre l’Afrique et le Brésil, on ne trouve que les petites îles de Sainte-Hé- lène et de l’Ascension ; mais que toutes les I îles sont auprès des grands continens , | comme les îies de l’Archipel auprès du con- 1 tinent de l’Europe et de l’Asie, les Cana- { ries auprès de l’Afrique, toutes les îles de I la mer des Indes auprès du continent orien-î j tal , les îles Antilles auprès de celui de l’A- mérique, et qu il n’y a que les Açores qui J soient fort avancées dans la mer entre l’Eu- rope et l’Amérique. Les habitans de Ceylan disent que leur île a été séparée de la presqu’île de l’Inde J par une irruption de l’Océan , et cette fra-q dition populaire est assez vraisemblable. Oh I croit aussi que ! île de Sumatra a été séparée 1 de Malaye; le grand nombre d’écueils et de j bancs de sable qu’on trouve entre-deux sem- blent le prouver. Les Malabares assurent que les îles Maldives faisoient partie du conti- nent de l’Inde, et en général on peut croirel que toutes les îles orientales ont été sépa- j rées des continens par une irruption de l’OM ' céan i. Il paroi t qu’autrefois l’îîe de la Grande- 1 1 Bretagne faisoit partie du continent, et que l’Angleterre tenoit à la France : les lits d( terre et de pierre, qui sont les mêmes de: . deux côtés du Pas-de-Calais, le peu de pro- ( fondeur de ce détroit, semblent l’indiquer H En supposant, dit le docteur Wallis, commt 11 tout paroît l’indiquer, que l’ Angleterre r coramuniquoit autrefois à la France par ui P isthme au dessous de Douvres et de Calais F les grandes mers des deux côtés battoienF les côtes de cet isthme par un flux impé el tueux, deux fois en vingt-quatre heures; ïr mer d Allemagne, qui est entre l’Angleter.r J, 51 et la Hollande, frappoit cet isthme du eôcF de lest, et la mer de France, du côté dj||CJ l’ouest : cela suffit avec le temps pour usfj r et détruire une langue de terre étroite , tell|Cl que nous supposons qu’étoit autrefois cet is If3 thme. Le flux de la mer de France , agissati |j avec une grande violence non seulemeEP contre l’isthme, mais aussi contre les cote ; F de France et d’Angleterre, doit nécessaire P ment, par le mouvement des eaux, avoi ® enlevé une grande quantité de sable, a P i. Voyez Va renii Geograph. general., pages 2o3 j 217 et 220. ii Il 'ART. XIX. CHANGEMENT DE TERRES EN MERS, [ terre, de vase, de tous les endroits contre [lesquels la mer agissoit : mais, étant arrêtée dans son courant par cet isthme, elle ne doit pas avoir déposé , comme on pourrait le croire, des sédimens contre l’isthme; niais jelle les aura transportés dans la grande plaine qui forme actuellement ie marécage jde Romne, qui a quatorze milles de long sur huit de large : car quiconque a vu cette [plaine ne peut pas douter qu’elle n’ait été autrefois sous les eaux delà mer, puisque, dans les hautes marées , elle seroit encore en partie inondée sans les digues de Dim- church, La mer d’Allemagne doit avoir agi de même contre l’isthme et contre les côtes d’Angleterre et de Flandre, et elle aura em- porté les sédimens en Hollande et en Zé- lande, dont le terrain, qui étoil autrefois sous les eaux, s’est élevé de plus de quarante pieds. De l’autre côté sur la côte d’Angle- terre, la mer d’Allemagne devoit occuper cette large vallée où coule actuellement la ri- vière de Sture, à plus de vingt milles de (distance , à commencer par Sandwich , Can- torbéry, Chatam, Chilham, jusqu’à Ashford, et peut être plus loin; le terrain est actuel- lement beaucoup plus élevé qu’il ne Fétoit autrefois, puisqu’à Chatam on a trouvé les os d’un hippopotame enterrés à dix -sept pieds de profondeur, des ancres de vaisseaux et des coquilles marines. ! Or, il est très-vraisemblable que la mer peut former de nouveaux terrains en y ap- portant les sables, la terre, la vase, etc.; ?ar nous voyons sous nos yeux que, dans ’ile d’Orkney , qui est adjacente à la côte [narécageuse de Romne , il y avoit un ter- rain bas toujours en danger d’être inondé par la rivière Rothef : mais, en moins de soixante ans, la niera élevé ce terrain con- sidérablement en y amenant à chaque flux ît reflux une quantité considérable de terre et de vase : et en même temps elle a creusé si fort le canal par où elle entre , qu’en îoins de cinquante ans la profondeur de ce anal est devenue assez grande pour recevoir Me gros vaisseaux, au lieu qu’auparavant p’éloit un gué où les hommes pouvoieut passer. F La même chose est arrivée auprès de la côte de Norfolk , et c’est de cette façon que L’est formé le banc de sable qui s’étend obli- quement depuis la côte de Norfolk vers la Icôte de Zélande; ce banc est l’endroit où | les marées de la mer d’Allemagne et de la limer de France se rencontrent depuis que I l’isthme a été rompu , et c’est là que se dé- V!Ç)Î posent les terres et les sables entraînés des côtes : on ne peut pas dire si avec le temps ce banc de sable ne formera pas un nouvel isthme, etc. Il y a grande apparence, dit Ray, que File de la Grande-Bretagne étoit autrefois jointe à la France , et faisoit partie du con- tinent ; on ne sait point si c’est par un trem- blement de terre ou par une irruption de l’Océan , ou par le travail des hommes , à cause de Futilité et de la commodité du pas- sage , ou par d’autres raisons : mais ce qui prouve que cette île faisoit partie du conti- nent, c’est que les rochers et les côtes des deux côtés sont de même nature et composés des mêmes matières, à la même hauteur, en sorte que 1 on trouve le long des côtes de Douvres les mêmes lits de pierre et de craie que l’on trouve entre Calais et Boulogne ; la longueur de ces rochers le long de ces côtes est à très-peu près la même de chaque côté, c’est-à-dire d’environ six milles. Le peu de largeur du canal, qui, dans cet endroit, n’a pas plus de vingt-quatre milles anglais de largeur, et le peu de profondeur, eu égard à la mer voisine , font croire que l’Angle- terre a été séparée de la Fi ance par accident. On peut ajouter à ces preuves, qu’il y avoit autrefois des loups et même des ours dans celte île, et il n’est pas à présumer qu’ils y soient venus à la nage, ni que les hommes aient transporté ces animaux nuisibles, car en général on trouve Les animaux nuisibles des conlinens'dans toutes les îles qui en sont fort voisines, et jamais dans celles qui en sont fort éloignées , comme les Espagnols Font observé lorsqu’ils sont arrivés en Amé- rique. Du temps de Henri Ier, roi d’Angleterre, il arriva une grande inondation dans une partie de la Flandre par une irruption de la mer; en I44&, une pareille irruption Fit périr plus de dix mille personnes sur le ter- ritoire de Dordrecht, et plus de cent mille autour de Dullart , en Frise et en Zélande, et il y eut dans ces deux provinces plus de deux ou trois cents villages de submergés ; ou voit encore les sommets de leurs tours et les pointes de leurs clochers qui s’élèvent un peu au dessus des eaux. Sur les côtes de France, d’Angleterre, de Hollande, d’Allemagne, de Prusse, la mer s’est éloignée eh beaucoup d’endroits. Hu- bert Thomas dit, dans sa description du pays de Liège, que la mer environnoit autrefois les murailles de la ville de Tongres, qui maintenant en est éloignée de trente-cinq lieues; ce qu’il prouve par plusieurs bonnes I9* aoa THEORIE DE LA TERRE. raisons ; et entre autres il dit qu’on voyoit encore de son temps les anneaux de fer dans les murailles, auxquelles onattachoit les vaisseaux qui y arrivoient. On peut encore regarder comme des terres abandonnées par la mer, en Angleterre les grands marais de Lincoln et l’ile d’Ély , en France la Grau de la Provence ; et même la mer s’est éloi- gnée assez considérablement à l’embouchure du Rhône depuis l’année i665. En Italie, il s’est formé de même un terrain considéra- ble à l’embouchure del’Arno; et Raveune, qui autrefois étoit un port de mer des exar- ques , n’est plus une ville maritime. Toute la Hollande paroît être un terrain nouveau , où la surface de la terre est presque de ni- veau avec le fond de la mer , quoique le pays se soit considérablement élevé et s’é- lève tous les jours par les limons et les terres que le Rhin , la Meuse, etc., y amènent; car autrefois on comptoil que le terrain de la Hollande étoit en plusieurs endroits de cinquante pieds plus bas que le fond de la mer. On prétend qu’en l’année 860, la mer, dans une tempête furieuse, amena vers la côte une si grande quantité de sables, qu’ils fermèrent l’embouchure du Rhin auprès de Catt, et que ce fleuve inonda tout le pays, renversa les arbres et les maisons, et se jeta dans le lit de la Meuse. En 1421, il y eut une autre inondation qui sépara la ville de Dordrecht de la terre ferme , submergea soixante et douze villages, plusieurs châ- teaux , noya cent mille âmes, et fit périr une infinité de bestiaux. La digue de l’Issel se rompit en i638 par quantité de glaces que le Rhin entraînoit. qui , ayant bouché le passage de l’eau , firent une ouverture de quelques toises à la digue, et une partie de la province fut inondée avant qu’on eût pu réparer la brèche. En 1682, il y eut une pareille inondation dans la province de Zé- lande, qui submergea plus de trente villages, et causa la perte d’une infinité de monde et de bestiaux qui furent surpris la nuit par les eaux. Ce fut un bonheur pour la Hollande que le vent de sud-est gagna sur celui qui lui étoit opposé; car la mer étoit si enflée, que les eaux étoient de dix-huit pieds plus hautes que les terres les plus élevées de la province, à la réserve des dunes1. Dans la province de Kent en Angleterre , il y avoit à Hilh un port qui s’est comblé, malgré tous les soins que l’on a pris pour l’empêcher, et malgré la dépense qu’on a 1. Voyez les Voyages historiques de l’ Europe , tonie^V, page 70. faite plusieurs fois pour le vider. On y trouve une multitude étonnante de galets et de co- quillages apportés par la mer dans l’étendue de plusieurs milles, qui s’y sont amoncelés aulrefois, et qui, de nos jours, ont été re- couverts par de la vase et de la terre , sui laquelle sont actuellement des pâturages. D’autre côté, il y a des terres fermes que la mer, avec le temps , vient à gagner et à cou- vrir , comme les terres de Goodwin , qui ap- partenoient à un seigneur de ce nom, et1 qui à présent ne sont plus que des sables couverts par les eaux de la mer. Ainsi la mer gagne en plusieurs endroits du terrain, et en perd dans d’autres : cela dépend de la différente situation des côtes et des endroits où le mouvement des marées s’airêle, où les eaux transportent d’un endroit à l’aulrt les terres, les sables, les coquilles, etc. Sur la montagne de Stella en Portugal, il y a un lac dans lequel on a trouvé des dé- bris de vaisseaux, quoique cette montagne soit éloignée de la mer de plus de douze lieues. Sabinius , dans ses commentaires3 sur les Métamorphoses d’Ovide , dit qu’flj paroît par les monumens de l’hist.ire, qu’en . l’année 1460 on trouva dans une mine des Alpes un vaisseau avec ses ancres. Ce n’est pas seulement en Europe que nous trouverons des exemples de ces chan-i gemens de mer en terre et de terre en mer: les autres parties du monde nous en four-ï niroiënt peut-être de plus remarquables etl en plus grand nombre, si on les avoit bien:? observées. Calicut a été autrefois une ville célèbre et| la capitale d’un royaume de même nom; cei n’est aujourd’hui qu’une grande bourgade |f mal bâtie et assez déserte : la mer, qui, de- | puis un siecle, a beaucoup gagné sur cette' j côte, a submergé la meilleure partie de l’an-i cienne ville, avec une belle forteresse dê , pierre de taille qui y étoit. Les barque! mouillent aujourd’hui sur leurs ruines, et le |a port est rempli d un grand nombre d’écueil! qui paroissent dans les basses marées , et ^ sur lesquels les vaisseaux font assez souvent , naufrage 2. J La province de Jucatan, péninsule dansL le golfe du Mexique, a fait autrefois partie de la mer. Cette pièce de terre s’étend dan! | la mer à cent lieues en longueur depuis le (f continent, et n’a pas plus de vingt-cinq j lieues dans sa plus grande largeur; la qualité: j, de l’air y est tout-à-fait chaude et humide; j quoiqu’il n’y ait ni ruisseaux ni rivières dan! I 2. Voyez Lettres édifiantes , rec. II, page 187. i ART. XIX. CHANGEMENS DE TERRES EN MERS. a93 1 si long espace, l’eau est partout si proche, l’on trouve, en ouvrant la terre, un si and nombre de coquillages , qu’on est >rté à regarder cette vaste étendue comme i lieu qui a fait autrefois partie de la nier. Les habitans de Malabar prétendent ^autrefois les îles Maldives étoient atta- ées au continent des Indes, et que la vio- îce de la mer les en a séparées. Le nom- e de ces îles est si grand , et quelques-uns s canaux qui les séparent sont si étroits , e les beauprés des vaisseaux qui y passent it tomber les feuilles des arbres de l’un de l’autre côté ; et en quelques endroits homme vigoureux , se tenant à une mche d’arbre , peut sauter dans une au- île. Une preuve que le continent des ldives éîoil autrefois une terre sèche, ce t les cocotiers qui sont au fond de la r; il s’en détache souvent des cocos qui t rejetés sur le rivage par la tempête.: îes iens en font grand cas , et leur attribuent mêmes vertus qu’au bézoard. i)n croit qu’autrefois l’île de Ceylan étoit 3 au continent et en faisoit partie, mais les courans, qui sont extrêmement ra- ïs en beaucoup d’endroits des Indes, t séparée, et en ont fait une île. On 1 ;t la même chose à l’égard des îles Ram- r iakoiel et de plusieurs autres. Ce qu’il y 1 certain c’est que l’île de Ceylan a perdu e te ou quarante lieues de terrain du côté 61 mrd-ouest, que la mer a gagnées succes- nent. e' paroît que la mer a abandonné depuis J une grande partie des terres avancées “ es îles de l’Amérique. On vient, de voir e I le terrain de Jucatan n’est composé ltl de coquilles ; il en est de même des ® ;s terres de la Martinique et des autres “ Antilles. Les habitans ont appelé le fond ll® ur terrain la chaux, parce qu’ils font 1 a chaux avec ces coquilles, dont on ™ e les bancs immédiatement au dessous I f terre végétale. Nous pouvons rapporter ïe qui est dit dans les Nouveaux Voyages 'les de l’ Amérique . « La chaux que l’on ^ e par toute la grande terre de la Gua- jrt pe, quand on fouille dans la terre, est ^al ême espèce que celle que l’on pêche à 1S, !i’ : il est difficile d’en rendre raison. ■j t-il possible que toute l’étendue du l3“ ,n qui compose cette île ne fût , dans ^■ferles passés , qu’un haut fond rempli tirantes de chaux qui, ayant beaucoup II rempli les vides qui étoient entre elles 8]. lés par l’eau, ont enfin haussé le ter- nit obligé l’eau à retirer et à laisser à sec toute la superficie? Cette conjecture, tout extraordinaire qu’elle paroît d’abord, n’a pourtant rien d’impossible, et deviendra même assez vraisemblable à ceux qui l’exa- mineront sans prévention : car enfin, en suivant le commencement de ma supposi- tion, ces plantes ayant crû et rempli tout l’espace que l’eau occupoit, se sont enfin étouffées l’une l’autre ; les parties supé- rieures se sont réduites en poussière et en terre ; les oiseaux y ont laissé tomber les graines de quelques arbres qui ont germé et produit ceux que nous y voyons, et la nature y en fait germer d’autres qui ne sont pas d’une espèce commune aux autres en- droits , comme les bois marbrés et violets. U ne seroil pas indigne de la curiosité des gens qui y demeurent de faire fouiller en différons endroits pour connoîire quel en est le sol, jusqu’à quelle profondeur on trouve cette pierre à chaux, en quelle silua- tion elle est répandue sous l’épaisseur de la terre, et autres circonstances qui pourroient ruiner ou fortifier ma conjecture. » Il y a quelques terrains qui tantôt sont couverts d’eau, et tantôt sont découverts, comme plusieurs îles en Norwège , en Écosse, aux Maldives, au golfe de Cam- baye , etc. La mer Baltique a gagné peu à peu une grande partie de la Poméranie; elle a couvert et ruiné le fameux port de Yineta. De même la mer de Nofwège a formé plu- sieurs petites îles , et s’est avancée dans le continent. La mer d’Allemagne s’est avancée en Hollande auprès de Catt, en sorte que les ruines d’une ancienne citadelle des Ro- mains, qui étoit autrefois sur la côte, sont actuellement fort avant dans la mer. Les marais de l’îie d’Ély en Angleterre, la Crau en Provence, sont, au contraire, comme nous l’avons dit, des terrains que la mer a abandonnés; les dunes ont été formées par des vents de mer qui ont jeté sur le rivage et accumulé des terres, des sables, des co- quillages, etc. Par exemple, sur les côtes occidentales de France, d’Espagne et d’Afri- que, il règne des vents d’ouest durables et violens qui poussent avec impétuosité îes eaux vers le rivage, sur lequel il s’esi formé des dunes dans quelques endroits. De même les vents d'est, lorsqu’ils durent long-temps, chassent si fort les eaux des côtes de la Syrie et de la Phénicie , que îes chaînes de rochers qui sont couverts d’eau pendant les vents d’est, demeurent alors à sec. Au .reste , les dunes ne sont pas composées de pierres et de marbres, comme les montagnes qui se sont formées dans le fond de la mer, parce 294 THÉORIE DE LA TERRE. qu’elles n’ont pas été assez long-temps dans l’eau. Nous ferons voir dans le Discours sur les minéraux que la pétrification s’opère au fond de la mer, et que les pierres qui se for- ment dans la terre sont bien différentes de celles qui se forment dans la mer. Comme je mettois la dernière main à ce traité de la Théorie de la terre , que j’ai composé en 1744, j’ai reçu de la part de M. Barrère sa Dissertation sur l’origine des pierres figurées , et j’ai été charmé de me trouver d’accord avec cet habile naturaliste au sujet de la formation des dunes, et du séjour que la mer a fai! autrefois sur la terre que nous habitons; il rapporte plusieurs changemens arrivés aux côtes de la mer. Aigues-Mortes, qui est actuellement à plus d’une lieue et demie de la mer, étoit un port du temps de saint Louis; Psalmodi étoit une île en 8t5, et aujourd’hui il est dans la terre ferme, à plus de deux lieues de la mer : il en est de même de Maguelone; la plus grande partie du vignoble d’Agde étoit, il y a quarante ans, couverte par les eaux de la mer : et en Espagne la mer s’est retirée considérablement depuis peu de Blanes, de Badalona, vers l’embouchure de la rivière Yobregat , vers le cap de Tortosa, le long des côtes de Valence, etc. La mer peut former des collines et élever des montagnes de plusieurs façons diffé- rentes, d’abord par des transports de terre, de vase, de coquilles, d’un lieu à un autre, soit par son mouvement naturel de flux et de reflux, soit par 1 agitation des eaux causée par les vents ; en second lieu par des sédi- mens , des parties impalpables qu’elle aura détachées des côtes et de son fond, et qu’elle pourra transporter et déposer à des* distances considérables; et enfin par des sables, des coquilles, de la vase et des terres que les vents de mer poussent souvent contre les côtes; ce qui produit des dunes et des col- lines que les eaux abandonnent peu à peu , et qui deviennent des parties du continent : nous en avons un exemple dans nos dunes de Flandre et dans celles de Hollande, qui ne sont que des collines composées de sable et de coquilles que des vents de mer ont poussés vers la terre. M. Barrère en cite un autre exemple qui m’a paru mériter de trouver place ici. « L’eau de la mer, par son mouvement, détache de son sein une infinité de plantes, de coquillages, de vase, de sable, que les ^vagues poussent continuellement vers les bords , et que les vents impétueux de mer aident à pousser encore. Or, tous ces différens corps ajoutés au premier atter- rissement y forment plusieurs nouvelles co ches ou monceaux qui ne peuvent serv qu’à accroître le lit de la terre , à l’éleve à former des dunes., desxollines, par d sables , des terres , des pierres amoncelée en un mot , à éloigner davantage le bass de la mer* et à former un nouveau coi tinent. « Il est visible que des alluvions ou d atterrissemens successifs ont été faits par même mécanisme depuis plusieurs sieclei c’est-à-dire par des dépositions réitérées ( différentes matières ; atterrissemens qui 1 sont pas de pure convenance : j’en trou1 les preuves dans la nature même, c’est-à-di dans différens lits de coquilles fossiles d’autres productions marines qu’on rema que dans le Roussillon auprès du village 1 Naffiac , éloigné de la mer d’environ sept 1 huit lieues. Ces lits de coquilles , qui soi inclinés de l’ouest à l’est sous différens a gles, sont séparés les uns des autres par c bancs de sable et de terre, tantôt d’un pi et demi, tantôt de deux à trois pieds d paisseur; ils sont comme saupoudrés de lorsque le temps est sec, et forment ense ble des coteaux de la hauteur de plus vingl-cinq à trente toises. Or, une lonj chaîne de coteaux si élevés n’a pu se forr qu’à la longue, à différentes reprises et la succession des temps; ce qui pourroil < aussi un effet du déluge et du boulevej ment universel qui a dû tout confond, mais qui cependant n’aura pas donné | forme réglée à ces différentes couches de|,!f quilles fossiles qui auroienl dû être ass Cf blées sans aucun ordre. Je pense sur cela comme M. Barrii r seulement je ne regarde pas les atterr mens comme la seule maniéré dont les r 1UI tagnes ont été formées, et je crois poi: . assurer au contraire que la plupart des a® nences que nous voyons à la surface d Posai terre ont été formées dans la mer mêm cela par plusieurs raisons qui m’ont tou paru convaincantes : premièrement. le! qu’elles ont entre elles cette correspond d’angles saillans et rentrans quisuppos cessairement la cause que nous avons gnée, c’est-à-dire le mouvement des coi de la mer; en second lieu , parce qu dunes et les collines qui se forment de tieres que la mer amène sur ses bore sont pas composées de marbres et de p dures comme les collines ordinaires : 1 quilles n’y sont ordinairement que foj au lieu que dans les autres montagn pétrification est entière; d’ailleurs les J prniri kïï Hais c Sauce llrit tantes. nei, •toi li !%|| « ART. XIX. CHANGEMENS DE TERRES EN MERS. 2q5 de coquilles, les couches de terre ne sont pas aussi horizontales dans les dunes que dans les collines composées de marbre et de pierre dure : ces bancs y sont plus ou moins inclinés, comme dans les collines de Naffiac, tu lieu que dans les collines et dans les montagnes qui se sont formées sous les eaux :>ar les sédimens de la mer les couches sont :oujours parallèles et très-souvent horizon- ales; les matières y sont pétrifiées aussi tien que les coquilles. J’espère faire voir pie les marbres et les autres matières calei- lables qui presque toutes sont composées le madrépores, d’astroïtes et de coquilles, >nt acquis au fond de la mer le degré de lureté et de perfection que nous leur con- îoissons : au contraire les tufs , les pierres noiles , et, toutes les matières pierreuses , somme ies incrustations, les stalactites, etc. , pvi sont aussi calculables , et qui se sont ormées dans la terre depuis que notre con- inent est découvert, ne peuvent acquérir ce legré de dureté et de pétrification des mar- nes ou des pierres dures. On peut voir dans X Histoire de l' Acadé- mie , année 1707, les observations de M. Saul- non au sujet des galets qu’on trouve dans dusieurs endroits. Ces galets sont des ailloux ronds et plats , et toujours fort po- is, que la mer poussesur les côtes. A Bayeux t à Brutel, qui est à une lieue de la mer, n trouve du galet en creusant des caves ou ies puits : les montagnes de Bonneuil, de Iroie, et du Quesnoy, qui sont à environ ix-huit lieues de la mer, sont toutes cou- ertes de galets : il y en a aussi dans la val- îe de Clermont en Beauvoisis. M. Saul- non rapporte encore qu’un trou de seize ieds de profondeur, percé directement et orizontalement dans la falaise du Tréport, ui est toute de moellon, a disparu en trente 11s, c’est-à-dire que la mer a miné dans la daise cette épaisseur de seize pieds. En sup- osant qu’elle avance toujours également, lie mineroit mille toises ou une petite demi- eue de moellon en douze mille ans. Les mouvemens de la mer sont donc les rincipales causes des changemens qui sont rrivés et qui arrivent à la surface du globe : tais cette cause n’est pas unique; il y en a eaucoup d autres moins considérables qui outribuent à ces changemens : les eaux cou- anies, les fleuves, les ruisseaux, la fonte es neiges, les torrens, les gelées, etc. , ont Langé considérablement la surface delà erre; les pluies ont diminué la hauteur des noniagnes; les rivières et les ruisseaux ont levé les plaines ; les fleuves ont rempli la mer à leur embouchure ; la fonte des neiges et les torrens ont creusé des ravines dans les gorges et dans les vallons; les gelées ont fait fendre les rochers et les ont détachés des montagnes. Nous pourrions citer une infi- nité d’exemples de différens changemens que toutes ces causes ont occasionés. Varenius dit que les fleuves transportent dans la mer une grande quantité de terre qu’ils déposent à plus ou moins de distance des côtes, en raison de leur rapidité ; ces terres tombent au fond de la mer, et y forment d’abord de petits bancs , qui , s’augmentant tous les jours, font des écueils, et enfin forment des îles qui deviennent fertiles et habitées : c’est ainsi que se sont formées les îles du Nil , celles du fleuve Saint-Laurent, l’île de Landa située à la côte d’Afrique près de l’embou- chure du fleuve Coanza , les îles de Norwège , etc. I. On peut y ajouter l’île de Tong- ming à la Chine , qui s’est formée peu à peu des terres que le fleuve de Nankin entraîne et dépose à son embouchure. Cette île est fort considérable; elle a plus de vingt lieues de longueur sur cinq ou six de largeur. Le Pô , le Trento , l’ Athésis , et les autres rivières de lTtalie, amènent une grande quantité de terres dans les lagunes de Ve- nise, surtout dans le temps des inondations, en sorte que peu à peu elles se remplissent : elles sont déjà sèches en plusieurs endroits dans le temps du reflux , et il n’y a plus que les canaux que l’on entretient avec une grande dépense qui aient un peu de profondeur. A l’embouchure du Nil , à celle du Gange et de 1 Inde, à celle de là rivière de la Plata au Brésil, à celle de la rivière de Nankin à la Chine, et à l’embouchure de plusieurs autres fleuves, on trouve des terres et des sables accumulés. La Loubère , dans son Voyage de Siam , dit que les bancs de sable et de terre augmentent tous les jours à l'em- bouchure des grandes rivières de l’Asie par les limons et les sédimens qu’elles y appor- tent , en sorte que la navigation de ces ri- vières devient tous les jours plus difficile, et deviendra un jour impossible. On peut dire la même chose des grandes rivières de l’Europe et surtout du Wolga, qui a plus de soixante-dix embouchures dans la mer Cas- pienne; du Danube, qui en a sept dans la mer Noire, etc. Comme il pleut très-rarement en Égypte, l’inondation régulière du Nil vient des tor- rens qui y tombent dans l’Éthiopie; il char- rie une très-grande quantité de limon : et ce 1. Voyez Varendi Geograp/t. general., page 2i4* 296 THEORIE DE LA TERRE. fleuve a non seulement apporté sur le terrain de l’Égypte plusieurs milliers de couches annuelles, mais même il a jeté plus avant dans la mer les fondemens d’une alluvion qui pourra former avec le temps un nouveau pays ; car on trouve avec la sonde , à plus de vingt lieues de distance de la côte, le li- mon du Nil au fond de la mer, qui aug- mente tous les ans. La Basse-Égypte, où est maintenant le Delta, n’étoit autrefois qu’un golfe de la mer. Homère nous dit que File de Pharos étoil éloignée de l’Égypte d’un jour et d’une nuit de chemin, et l’on sait qu’aujourd’hui elle est presque contiguë. Le sol en Égypte n’a pas la même profon- deur de bon terrain partout ; plus on ap- proche de la mer, et moins il y a de pro- fondeur : près des bords du Nil il y a quelquefois trente pieds et davantage de pro- fondeur de bonne terre, tandis qu’à l’extré- mité de l’inondation il n’y a pas sept pouces. Toutes les villes de la Basse-Égypte ont été bâties sur des levées et sur des éminences faites à la main. La ville de Damiette est au- jourd’hui éloignée de la mer de plus de dix milles ; et du temps de saint Louis , en 1243, c’étoit un port de mer. La ville de Fooah , qui étoit , il y a trois cents ans , à l’embou- chure de la branche canopique du Nil, en est présentement à plus de sept milles de dis- tance : depuis quarante ans la mer s’est re- tirée d’une demi-lieuede devant Rosette, etc. Il est aussi arrivé des changemens à l’em- bouchure de tous les grands fleuves de l’A- mérique et même de ceux qui ont été dé- couverts nouvellement. Le P. Charlevoix, en parlant du fleuve Mississipi, dit qu’à l’embouchure de ce fleuve , au dessous de la Nouvelle-Orléans, le terrain forme une pointe de terre qui ne paroît pas fort ancienne, car pour peu qu’on y creuse, on trouve de l’eau ; et que la quantité de petites îles qu’on a vues se former nouvellement à toutes les embouchures de ce fleuve , ne laissent au- cun doute que celte langue de terre ne soit formée de la même manière. Il paroit cer- tain, dit-il, que quand M. de La Salle des- cendit 1 le Mississipi jusqu’à la mer, l’em- bouchure de ce fleuve n’étoit pas telle qu’on la voit aujourd’hui. Plus on approche de la mer, ajoute-t-il, plus cela devient sensible ; la barre n’à point d’eau dans la plupart des petites issues que le fleuve s’est ouvertes , et qui ne se sont si fort multipliées que par le moyen des arbres qui y sont entraînés par le courant, et dont 1. Il y a des géographes qui prétendent que M. de La Salle n’a jamais descendu le Mississipi. un seul arrêté par ses branches ou par se racines dans un endroit où il y a peu di profondeur, en arrête mille. J’en ai vu dit-il , à deux cents lieues d’ici 2 des ama ! dont un seul auroit rempli tous les chantier I de Paris : rien alors n’est capable de les dé tacher ; le limon que charrie le fleuve leu sert de ciment et les couvre peu à peu ; cha que inondation en laisse une nouvelle cou che, et après dix ans au plus les lianes e les arbrisseaux commencent à y croître c’est ainsi que se sont formées la plupart de: pointes et des îles qui font si souvent chan ger de cours au fleuve. Cependant tous les changemens que le; j fleuves occasionnent sont assez lents, et ncl peuvent devenir considérables qu’au bou I d’une longue suite d’années : mais il est ar l rivé des changemens brusques et subits paii les inondations et les tremblemens de terre» Les anciens prêtres égyptiens, six cents aniiS avant la naissance de Jésus-Christ, assuroient.il au rapport de Platon dans le Timée , qu’au-ift trefois il y avoit une grande île auprès de' ja colonnes d’Hercule, plus grande que l’Asie* et la Libye prises ensemble, qu’on appeloiil Atlantide , que celte grande île fut inondée! et abîmée sous les eaux de la mer après uni grand tremblement de terre. « Traditunjl « Atheniensis civitas reslitisse olim innume- rce d’impulsion leur est subordonnée ; dépend de la première pour ses effets culiers , et tient à la seconde pour l’ef- général. Comme l’impulsion ne peut jrcer qu’au moyen du ressort , et que le irt n’agit qu’en vertu de la force qui roche les parties éloignées, il est clair l’impulsion a besoin , pour opérer , du ours de l’attraction ; car si la matière it de s’attirer, si les corps perdoient cohérence , tout ressort ne seroit-il pas lit , toute communication de mouve- t interceptée, toute impulsion nulle, jue , dans le fait 1 , le mouvement ne ommunique et ne peut se transmettre corps à un autre que par l’élasticité ; îfin on peut démontrer qu’un corps itement dur , c’est-à-dire absolument cible , serait en même temps absolument pbile et tout-à-fait incapable de rece- F action d’un autre corps 2? Pour une plus grande intelligence , je prie ecteurs de voir la seconde partie de l’article : ouvrage , qui a pour titre : De la nature , ’e vue. La communication du mouvement a toujours gardée comme une vérité d’expérience , et les grands mathématiciens se sont contentés d’en ier les résultats dans les différentes circon- ^s , et nous ont donné sur cela des règles et irmules, où ils ont employé beaucoup d’art; Personne, ce me semble, n’a jusqu’ici consi- . nature intime du mouvement, et n’a tâché [représenter et de présenter aux autres la ma- | physique dont le mouvement se transmet et L’attraction étant un effet général , con- stant , et permanent , l’impulsion , qui, dans la plupart des corps , est particulière , et n’est ni constante ni permanente , en dépend passe d’un corps à un autre corps. On a prétendu que les corps durs pouvoient le recevoir comme les corps à ressort; et, sur cette hypothèse dénuée de preuves , on a fondé des propositions et des calculs dont on a tiré une infinité de fausses conséquences: car les corps supposés durs et parfaitement in- flexibles ne pourroient recevoir le mouvement. Pour le prouver, soit un globe parfaitement dur, c’est-à- dire inflexible dans toutes ses parties ; chacune de ces parties ne pourra, par conséquent, être rap- prochée ou éloignée de la partie voisine , sans quoi cela seroit contre la supposition : donc; dans un globe parfaitement dur, les parties ne peuvent re- cevoir aucun déplacement, aucun changement, aucune acUon; car si elles recevaient une action , elles auroient une réaction , les corps ne pouvant réagir qu’en agissant. Puis donc que toutes les parties prises séparément ne peuvent recevoir au- cune action, elles ne peuvent en communiquer; la partie postérieure, qui est frappée la première, ne pourra pas communiquer le mouvement à la partie antérieure, puisque cette partie postérieure, qui a été supposée inflexible, ne peut pas changer, eu égard aux autres parties : donc il seroit impossible de communiquer aucun mouvement à un corps in- flexible. Mais l’expérience nous apprend qu’on com- munique le mouvement à tous les corps : donc tous les corps sont à ressort ; donc il n’y a point de corps parfaitement durs et inflexibles dans la na- ture. Un de mes amis (M. Gueneau de Montbeillard), homme d’un excellent esprit, m’a écrit à ce sujet dans les termes suivans : «De la supposition de l’immobilité absolue des corps absolument durs , il suit qu’il ne faudroit peut être qu’un pied cube de cette matière pour arrêter tout le mouvement de l’univers connu : et si cette immobilité absolue étoit prouvée , il semble que ce n’est point assez de dire qu’il n’existe point de ces corps dans la nature , et qu’on peut les traiter d’impossibles , et dire que la supposition de leur existence est absurde; car le mouvement provenant du ressort leur ayant été refusé, ils ne peuvent dès lors être capables du mouvement provenant de l’attraction , qui est , par l’hypothèse, la cause du ressort. » 3û2 MINÉRAUX. INTRODUCTION. donc comme un effet particulier dépend d’un effet général ; car au contraire , si toute impulsion étoit détruite, l’attraction sub- sisteroit et n’en agiroit pas moins, tandis cjue celle-ci venant à cesser , l’autre seroit non seulement sans exercice , mais même sans existence : c’est donc cette différence essentielle qui subordonne l’impulsion à l’attraction dans toute matière brute et pure- ment passive. Mais cette impulsion, qui ne peut ni s’exercer ni se transmettre dans les corps bruts qu’au moyen du ressort, c’est-à-dire du secours de la force d’attraction , dépend encore plus immédiatement , plus générale- ment, de la force qui produit la chaleur : car c’est principalement par le moyen de la chaleur que l’impulsion pénètre dans les corps organisés ; c’est par la chaleur qu’ils se forment , croissent , et se développent. On peut rapporter à l’attraction seule tous les effets de la matière brute, et à cette même force d’attraction, jointe à celle delà cha- leur, tous les phénomènes de la matière vive. J’entends par matière vive, non seule- ment tous les êtres qui vivent ou végètent, mais encore toutes les molécules organiques vivantes, dispersées et répandues dans les détrimens ou résidus des corps organisés : je comprends encore dans la matière vive celle de la lumière, du feu , de la chaleur; en un mot, toute matière qui nousparoît être active par elle-même. Or, celle matière vive tend toujours du centre à la circonférence , au lieu que la matière brute au contraire tend de la circonférence au centre ; c’est une force expansive qui anime la matière vive , et c’est une force attractive à laquelle obéit la matière brute : quoique les directions de ces deux forces soient diamétralement opposées , l’ac- tion de chacune ne s’en exerce pas moins ; elles se balancent sans jamais se détruire , et de la combinaison de ces deux forces également actives résultent tous les phénomènes de l’univers. Mais, dira-t-on, vous réduisez loutes les puissances de la nature à deux forces , l’une attractive et l’autre expansive, sans donner la cause ni de l’une ni de l’autre, et vous subordonnez à toutes deux l’impulsion, qui est la seule force dont la cause nous soit connue et démontrée par le rapport de nos sens : n’est-ce pas abandonner une idée claire, et y substituer deux hypothèses ob- scures ? A cela je réponds que, ne connoissant rien que par comparaison, nous n’aurons jamais d’idée de ce qui produit un effet gé- néral, parce que cet effet appartenait tout , on ne peut dès lors le comparei rien. Demander quelle est la cause d< force attractive , c’est exiger qu’on n dise la raison pourquoi toute la matière | tire: or, ne nous suffit-il pas de savoir i ï mnlinrp e’îiHiro ni réellement toute la matière s’attire , et n’ il pas aisé de concevoir que cet effet éj général , nous n’avons nul moyen de le J parer, èt par conséquent nulle espéra d’en connoître jamais la cause ou la raist partial Si l’effet, au contraire, étoit particii comme celui de l’attraction de l’annan du fer , on doit espérer d’en trouver la (■ parce qu’on peut le comparer à d’autr fets particuliers, ou le ramener à l’effej néral. Ceux qui exigent qu’on leur don: raison d’un effet général ne commisses l’étendue de la nature ni les limites de prit humain : demander pourquoi la mal est étendue, pesante, impénétrable* moins des questions que des propos! conçus, et auxquels on ne doit aucun ponse. Il en est de même de toute priété particulière lorsqu’elle est esse a la chose : demander, par exemple, quoi le rouge est rouge, seroit une in gation puérile, à laquelle on ne doi répondre. Le philosophe est tout prj l’enfant lorsqu’il fait de semblables dé des; et autant on peut les pardonner curiosité non réfléchie du dernier, a le premier doit les rejeter et les exclu ses idées. Puis donc que la force d’attraction force d’expansion sont deux effets gène on ne doit pas nous en demander les ci il suffit qu’ils soient généraux et tous n réels, tous deux bien constatés, pourqqj devions les prendre eux-mêmes pour < des effets particuliers ; et l’impulsion est ces effets qu’on ne doit pas regarder q une cause générale connue ou démontr le rapport de nos sens, puisque nous, prouvé que cette force d’impulsion m exister ni agir qu’au moyen de l'attracti ne tombe point sous nos sens. Rien n’eî évident, disent certains philosophes jiq la communication du mouvement pai pulsion; il suffit qu’un corps en chot autre pour que cet effet suive : mais ce sens même, la cause de l’attraction elle pas encore plus évidente et bie générale, puisqu’il suffit d’abandon! corps pour qu’il tombe et prenne du ^ vement sans choc? le mouvement app ^ donc, dans tous les cas, encore plut traction qu’à l’impulsion. «île k ■ DES ÉLÉMENS. PARTIE I. Ite première réduction étant faite , il se- jut-être possible d’en faire une seconde , ramener la puissance même de l’expan- celle de l’attraction, en sorte que toutes ’ces de la matière dépendraient d’une orce primitive : du moins cette idée me troit bien digne de la sublime simpli- t u plan sur lequel opère la nature. Or, : ouvons-nous pas concevoir que cette t dion se change en répulsion toutes les [ue les corps s'approchent d’assez près a éprouver un frottement ou un choc i ns contre les autres? L’impénétrabi- I qu’on ne doit pas regarder comme une , mais comme une résistance essen- à la matière, ne permettant pas que corps puissent occuper le môme es- que doit-il arriver lorsque deux mo- is, qui s’attirent d’autant plus puissam- qu’elles s’approchent de plus près , lent tout à coup se heurter ? cette ré- îce invincible de l’impénétrabilité ne nt-elle pas alors une force active, ou [réactive, qui, dans le contact , re- ;e les corps avec autant de vitesse qu’ils 'oient acquis au moment de se todcher? s lors la force expansive ne sera point force particulière opposée à une force clive, mais un effet qui en dérive, et e manifeste toutes les fois que les corps Loquent ou frottent les uns contre les !§. ivoue qu’il faut supposer dans chaque cule de matière, dans chaque atome jonque, un ressort parfait , pour conce- clairement comment s’opère ce change- : de l’attraction en répulsion; mais cela e nous est assez indiqué par les faits : la matière s’atténue, et plus elle prend îssort : la terre et l’eau, qui en sont les ;ats les plus grossiers, ont moins de rt que lair; et le feu, qui est le plus il des élemens, est aussi celui qui a us de force expansive. Les plus petites icnles de la matière-, les plus petits ato- que nous commissions sont ceux de la ère; et l’on sait qu’ils sont parfaitement iques, puisque l’angle sous lequel la ère se réfléchit est toujours égal à celui lequel elle arrive ; nous pouvons donc îférer que toutes les parties constitutives a matière en général sont à ressort par- et que ce ressort produit tous les effets i force expansive , toutes les fois que les s se heurtent ou se frottent en se ren- rant dans des directions opposées, 'expérience me paroît parfaitement d’ac- avec ces idées ; nous ne connoissons • . ' 3o3 d’autres moyens de produire du feu que par le choc ou le frottement des corps; car le feu que nous produisons par la réunion des rayons de la lumière, ou par l’application du feu déjà produit à des matières combus- tibles, n’a t-il pas néanmoins la même ori- gine à laquelle il faudra toujours remonter, puisqu’en supposant l’homme sans miroirs ardens et sans feu actuel , il n’aura d’autres moyens de produire le feu qu’en frottant ou choquant des corps solides les uns con- tre les autres 1 ? La force expansive pourrait donc bien n’être, dans le réel, que la réaction de la force attractive, réaction qui s’opère toutes les fois que les molécules primitives de la matière, toujours attirées les unes parles autres, arrivent à se toucher immédiate- ment : car dès lors il est nécessaire qu elles soient repoussées avec autant de vitesse qu’elles en avoient acquis en direction con- traire au moment du contact 2 ; et lors- x. Le feu que produit quelquefois la fermenta- tion des herbes entassées, celui qui se manifeste dans les effervescences , ne sont pas une exception qu’on puisse m’opposer, puisque cette production du feu par la fermentation et par l’effervescence dépend, comme tout autre, de l’action ou du choc des parties de la matière les unes contre les autres. 2. 11 est certain , me dira-t-on, que les molécules rejailliront après le contact , parce que leur vitesse à ce point, et qui leur est rendue par le ressort , est la somme des vitesses acquises dans tous les momens précédens par l’effet continuel de l’attrac- tion , et par conséquent dxût-FenrpoTter sur l’effort instantané de l’attraction dans le seul moment du contact. Mais ne s’cra-t-elle pas continuellement re- tardée, et enfin détruite, lorsqu’il y aura équilibre entre la somme des efforts de l’attraction avant le contact, et la somme dés efforts de l’attraction après le contact? Comme cette question pourroit faire naître des doutes ou laisser quelques nuages sur cet objet, qui par lui-même est difficile à saisir, je vais tâcher d’y satisfaire en m’expliquant encore plus clairement. Je suppose deux molécules , ou , pour rendre l’image plus sensible, deux grosses masses de matières, telles que la lune et la terre, toutes deux douées d’un ressort parfait dans toutes les parties de leur intérieur : qu’arriveroit-il à ces deux masses isolées de toute autre matière , si tout leur mouvement progressif étoit tout à coup arrêté, et qu’il ne restât à chacune d'elles que leur force d’attraction réciproque? Il est clair que, dans cette supposition, la lune et la terre se précipiteroient l’une vers l’autre , avec une vitesse qui augmente- roit à chaque moment dans la même raison que diminueroit le carré de leur distance. Les vitesses acquises seront donc immenses au point de contact, ou, si l’on veut, au moment de leur choc; et dès lors ces deux corps, que nous avons supposés à ressort parfait , et libres de tous autres empêche- mens, c’est-à-dire entièrement isolés, rejailliront chacun , et s’éloigneront l’un de l’autre dans la direction opposée , et avec la même vitesse qu’ils avoient acquise au point du contactj vitesse qui , quoique diminuée continuellement par leur attrac- 3o4 MINÉRAUX. INTRODUCTION. que ces molécules sont absolument libres de toute cohérence , et qu’èiles n’obéissent qu’au seul mouvement produit par leur at- traction , celte vitesse acquise est immense dans le point du contact. La chaleur , la lumière, le feu, qui sont les grands effets de la force expansive, seront produits toutes les fois qu’artificiellement ou naturellement les corps seront divisés en parties très- petites, et qu’ils se rencontreront dans des directions opposées ; et la chaleur sera d’au- tant plus sensible, la lumière d’autant plus vive, le feu d’autant plus violent, que les molécules se seront précipitées les unes con- tre les autres avec plus de vitesse par leur force d’attraction mutuelle. De là on doit conclure que toute matière peut devenir lumière, chaleur, feu; qu’il suffit que les molécules d’une substance quelconque se trouvent dans une situation 4 de liberté, c’est-à-dire dans un état de divi- sion assez grande et de séparation telle , qu’elles puissent obéir sans obstacle à toute la force qui les attire les unes vers les autres ; car , dès qu’elles se rencontreront , elles réagiront les unes contre les autres , et se fuiront en s’éloignant avec autant de vitesse qu’elles en avoient acquis au moment du contact, qu’on doit regarder comme un vrai choc, puisque deux molécules qui s’at- tirent mutuellement , ne peuvent se rencon- trer qu'en direction contraire. Ainsi la lumière , la chaleur et le feu ne sont pas des matières particulières , des matières différentes de toute autre matière ; ce n’est toujours que la même matière qui n’a subi d’autre altération , d’autre modification , qu’une grande division de parties , et une direction de mouvement en sens contraire par l’effet du choc et de la réaction. Ce qui prouve assez évidemment que cette matière du feu et de la lumière n’est pas une substance différente de toute autre tion réciproque, ne laisseroit pas de les porter d’abord au même lieu d’où ils sont partis , mais encore infiniment plus loin, parce que la retarda- tion du mouvement est ici en ord.e inverse de celui de l’accélération, et^que la vitesse acquise au point du choc étant immense, les efforts de l’attraction ne pourront la réduire à zéro qu’à une distance dont le carré seroit également immense ; en sorte que si le contact étoit absolu , et que la distance des deux corps qui se choquent fût absolument nvdle , ils s’éloigneroient l’un de l’autre jusqu’à une distance infinie : et c’est à peu près ce que nous voyons arriver à la lumière et au feu dans ie mo- ment de l’inflammation des matières combustibles ; car, dans l’instant même , elles lancent leur lumière à une très-grande distance, quoique les particules qui se sont converties en lumière fussent aupara- vant très-voisines les unes des autres. matière, c’est qu’elle conserve toutes § qualités essentielles, et même la plup; des attributs de la matière commune. i° lumière, quoique composée de partial presque infiniment petites, est néanmo; encore divisible, puisqu’avec le prisme sépare les uns des autres les rayons, o pour parler plus clairement, les alomés <: féremment colorés. a° La lumière , quoiq douée en apparence d’une qualité tout ci posée à celle de la pesanteur, c’esl-à-d d’une volatilité qu’on croiroit lui êlre essi 5 tielle, est néanmoins pesante comme toi 1 autre matière, puisqu’elle fléchit toutes î1 fois qu’elle passe auprès des autres corj 1 et qu’elle se trouve à portée de leur sph< d’attraction ; je dois même dire qu’elle < 1 fort pesante, relativement à son volui J qui est d’une petitesse extrême, puisque 1 vitesse immense avec laquelle la lumière meut en ligne directe ne l’empêche pas d prouver assez d’attraction près des autii corps , pour que sa direction s’incline | change d’une manière très-sensible à r yeux. 3° La substance de la lumière n’n pas plus simple que celle de toute au matière , puisqu’elle est composée de pi ties d’inégale pesanteur, que le rayon rou est beaucoup plus pesant que le rayon vi let , et qu’entre ces deux extrêmes e> contient une infinité de rayons intern’ diaires , qui approchent plus ou moins la pesanteur du rayon rouge ou de la légèrt du rayon violet ; toutes ces conséquent! dérivent nécessairement des phénomèr de l’inflexion de la lumière et de sa réfr; tion 1 , qui , dans le réel , n’est qu’une i J x. L’attraction universelle agit sur la lumière ne faut, pour s’en convaincre, qu’examiner les ' extrêmes de la réfraction : lorsqu’un rayon de f mière passe à travers un cristal sous un cert , angle d’obliquité, la direction change tout à eu 11 et au lieu de continuer sa route, il rentre dans ! cristal et se réfléchit. Si la lumière passe du ve dans le vide, toute la force de cette puissa. s’exerce, et le rayon est contraint de rentrer rentre dans le verre par un eftet de son attract 1 que rien ne balance; si la lumière passe du cri; dans l’air, l’attraction du cristal, plus forte < celle de l’air, la ramène encore, mais avec me de force, parce que cette attraction du verre est1 partie détruite par celle de l’air qui agit en si contraire sur le rayon de lumière; si ce rayl passe du cristal daiis l’eau, l’effet est bien me sensible , le rayon rentre à peine , parce que 1 traction du cristal est presque toute détruite celle de l’eau, qui s’oppose à son action; enfin 1 la lumière passe du cristal dans le cristal, com les deux attractions sont égales, l’effet s’évanri et le rayon continue sa route. D’autres expériex. démontrent que cette puissance attractive , ouc1 force réfringente, est toujours à très-peu près jj DES ÊLÉMENS. PÀB.TÏE I. ion qui s’opère lorsque la lumière passe avers les corps transparens. 4° On peut aonlrer que la lumière est massive, et allé agit , dans quelques cas , comme ;sent tous les autres corps : car , indé- damment de son effet ordinaire, qui de briller à nos yeux , et de son action pre , toujours accompagnée d’éclat et vent de chaleur, elle agit par sa masse qu’on la condense en la réunissant , et agit au point de mettre en mouvement corps assez pesans , placés au foyer d’un miroir ardent ; elle fait tourner une tille sur un pivot placé à son foyer ; elle sse, déplace et chasse les feuilles d’or d’argent qu’on lui présente avant de les Ire , et même avant de les chauffer sen- ement. Cette action produite par sa se est la première et précède celle de ;haleur ; elle s’opère entre la lumière densée et les feuilles de métal, de la ne façon qu’elle s’opère entre deux autres îs qui deviennent contigus , et par con- sent la lumière a encore cette propriété mune avec toute autre matière. 5° En- on sera forcé de convenir que la lumière un mixte , c’est-à-dire une matière com- ie, comme la matière commune, non ement de parties plus grosses et plus tes, plus ou moins pesantes, plus ou ns mobiles, mais encore différemment rées. Quiconque aura réfléchi sur les nomènes que Newton appelle les accès iacile réflexion et de facile transmission ' a lumière, et sur les effets de la double action du cristal de roche, et du spath ilé cristal d'Islande , ne pourra s’em- ter de reconnoîlre que les atomes de la onnelle à la densité des matières transparentes, sception des corps onctueux et sulfureux , dont rce réfringente est plus grande, parce que la ère a plus d’analogie, plus de rapport de na- ayec les matières inflammables qu’avec les au- natières. iis s’il restoit quelque doute sur cette attrac- de la lumière vers les corps , qu’on jette les sur les inflexions que souffre un rayon lors- passe fort près de la surface d’un corps : un ide lumière ne peut entrer par un très-petit dans une chambre obscure , sans être puis- sent attiré vers les bords du trou ; ce petit :au de rayons se divise , chaque rayon voisin circonférence du trou .se plie vers celte cir- rence , et cette inflexion produit des franges ées, des apparences constantes, qui sont l’effet ttraclion de la lumière vers les corps voisins. 1 est de même des rayons qui passent entre | lames de couteaux : les uns se plient vers la supérieure, les autres vers la lame inférieure; f a que ceux du milieu qui, souffrant une S attraction des deux côtés , ne sont pas dé- és, et suivent leur direction. Buffoit. I. 3o5 lumière ont plusieurs côtés , plusieurs faces différentes , qui , selon qu’elles se pré- sentent, produisent constamment des effets différens *. En voilà plus qu’il n’en faut pour dé- montrer que la lumière n’est pas une ma- tière particulière ni différente de la matière commune ; que son essence est la même, ses propriétés essentielles les mêmes; qu’enfm elle n’en diffère que parce qu’elle a subi dans le point du contact la répulsion d’où provient sa volatilité. Et de la même ma- nière que l’effet de la force d’attraction s’étend à l’infini, toujours en décroissant comme l’espace augmente, les effets de la répulsion s’étendent et décroissent de même, mais en ordre inverse ; en sorte que l’on peut appliquer à la force expansive tout ce que l’on sait de la force attractive : ce sont pour la nature deux instrumens de même espèce , ou plutôt ce n’est que le même instrument qu’elle manie dans deux sens opposés. Toute matière deviendra lumière dès que toute cohérence étant détruite , elle se trou- vera divisée en molécules suffisamment pe- tites , et que ces molécules étant en liberté, seront déterminées par leur attraction mu- tuelle à se précipiter les unes contre les autres : dans l’instant du choc , la force ré- pulsive s’exercera , les molécules se fuiront en tous sens avec une vitesse presque infinie, laquelle néanmoins n’est qu’égale à leur vi- tesse acquise au moment du contact ; car la loi de l’attraction étant d’augmenter comme l’espace diminue , il est évident qu’au con- tact l’espace , toujours proportionnel au carré de la distance , devient nul, et que par conséquent la vitesse acquise en vertu de l’attraction doit à ce point devenir pres- que infinie. Cette vitesse seroit même in- finie si le contact étoit immédiat , et par conséquent la distance entre les deux corps absolument nulle: mais, comme nous l’a- vons souvent répété , il n’y a rien d’absolu , rien de parfait dans la nature , et de même rien d’absolument grand, rien d’absolument petit , rien d’entièrement nul , rien de vrai- ment infini ; et tout ce que j’ai dit de la i. Chaque rayon de lumière a deux côtés oppo- sés , doués originairement d’une p oprïété d’où dé- pend la réfraction extraordinaire du cristal , et deux autres côtés opposés, qui n’ont pas cette propriété. ( Optique de Newton, question XXVI, traduction de Coste.) Cette propriété dont parle ici Newton ne peut dépendre que de l'étendue ou de la figure de chacun des côtés des rayons , c’est-à-dire des atomes de lumière. Voyez cet article en entier dans Newton. 20 MINÉRAUX. INTRODUCTION. 3o6 petitesse infinie des atomes qui constituent la lumière, de leur ressort parfait, de la distance nulle dans le moment du contact , ne doit s’entendre - qu’avec restriction. Si l’on pouvoit douter de cette vérité méta- physique , il seroit possible d’en donner une démonstration physique, sans même nous écarter de notre sujet. Tout le monde sait que la lumière emploie environ sept minutes et demie de temps à venir dit soleil jusqu’à nous. Supposant donc le soleil à trente-six millions de lieues , la lumière parcourt cette énorme distance en sept minutes et demie, ou, ce qui revient au même (supposant son mouvement uniforme) , quatre-vingt mille lieues en une seconde. Cette vitesse, quoi- que prodigieuse, est néanmoins bien éloi- gnée d'être infinie, puisqu’elle est détermi- nable par les nombres; elle cessera même de paroître prodigieuse lorsqu’on réfléchira que la nature séhnb'e marcher en grand presque aussi vite qu’en petit : il ne faut pour cela que supputer la célérité du mouvement des comètes à leur périhélie, ou même celle des planètes qui se meuvent le plus rapidement, et l’on verra que la vitesse de ces masses im- menses, quoique moindre , se peut néan- moins comparer d’assez près avec celle de nos atomes de lumière. Et de même que toute matière peut se convertir en lumière par la division et la ré- pulsion de ses parties exclusivement divi- sées, lorsqu’elles éprouvent un choc des unes contre les autres , la lumière peut aussi se convertir en toute autre matière par l’ad- dition de ses propres parties, accumulées par l’attraction des autres corps. Nous ver- rons dans la suite que tous les élémens sont convertibles; et si l’on a douté que la lu- mière , qui paroît être l’élément le plus simple, pût se convertir en substance solide, c’est que , d’une part , on n’a pas fait assez d’attention à tous les phénomènes , et que, d’autre part, on étoit dans le préjugé qu’é- tant essentiellement volatile, elle ne pouvoit jamais devenir fixe. Mais n’avons-nous pas prouvé que la fixité et la volatilité dépen- dent de la même force attractive dans le premier cas, devenue répulsive dans le se- cond? et dès lors ne sommes-nous pas fondés à croire que ce changement de la matière fixe en lumière, et de la lumière en matière fixe, est une des plus fréquentes opérations de la nature? Après avoir montré que l’impulsion dé- pend de l’attraction, que la force expansive est la même que la force attractive devenue négative, que la lumière, et à plus forte raison la chaleur et le feu, ne sont qued ! manières d’ètre de la matière commun { qu’il n’existe , en un mot, qu’une seule for et une seule matière toujours prête à s’at rer ou à se repousser suivant les circo j stances , recherchons comment , avec ce s* J ressort et ce seul sujet , la nature peut i rier ses œuvres à l’infini. Nous mettrons la méthode dans cette recherche, et nous présenterons les résultats avec plus de clar en nous abstenant de comparer d’abord i objets les plus éloignés , les plus opposé j comme le feu et l’eau , l’air et la terre, : nous conduisant au contraire par les ment i degrés, par les mêmes nuances douces c| t suit la nature dans toutes ses démarch. Comparons donc les choses les plus voisil:! et tâchons d’en saisir les différences, c’e [ à-dire les particularités, et de les présenli avec encore plus d’évidence que leurs { | néralités. Dans le point de vue général 1 1 lumière, la chaleur et le feu, ne font qu' l seul objet : mais, dans le point de vue fj|î ticulier, ce sont trois objets distincts, tr ■ choses qui, quoique se ressemblant par;| grand nombre de propriétés, different néji moins par un petit nombre d’autres propr g tés assez essentielles pour qu’on puisse I regarder comme trois choses différentes,^ qu’on doive les comparer une à une. Quelles sont d’abord les propriétés co L munes de la lumière et du feu ? quelles fl J aussi leurs propriétés différentes? La J J mière, dit -on, et le feu élémentaire 1 sont qu’une même chose,- une seule si 2 stance. Cela peut être; mais comme ntl n’avons pas encore d’idée nette du feu é | mentaire, abstenons-nous de prononcert| ce premier point. La lumière et le feu , 1 jù que nous les connoissons , ne sont-ils p; | au contraire, deux choses différentes, de | substances distinctes et composées différé) ment? Le feu est, à la vérité, très-souvi, lumineux ; mais quelquefois aussi le existe sans aucune apparence de lumièt le feu, soit lumineux, soit obscur, n’exi jamais sans une grande chaleur, tandis ^ la lumière brille souvent avec éclat sans moindre chaleur sensible. La lumière pat j être l’ouvrage de la nature ; le feu n’est j le produit de l’industrie de l’homme : lumière subsiste, pour ainsi dire, parel; même, et se trouve répandue dans les paces immenses de l’univers entier; le : ne peut subsister qu’avec des alimens, j (! ne se trouve qu’en quelques points de 1 j pace , où l’homme le conserve , et dans qi ques endroits de la profondeur de la teri DES ELÉMENS. PARTIE I. ù il se trouve également entretenu par des imcns convenables. La lumière, à la vérité, rsqu’elle est condensée, réunie par l’art î l’homme, peut produire du feu; mais ce est qu’autant qu’elle tombe sur des ma- dères combustibles. La lumière n’est donc ut au plus , et dans ce seul cas , que le •iucipe du feu, et non pas le feu ; cë prin- pe même n’est pas immédiat ; il en sup- jse un intermédiaire, et c’est celui de la îaleur, qui paroît tenir encore de plus près îe la lumière à l’essence du feu. Or, la îaleur existe tout aussi souvent sans lu- ière que la lumière existe sans chaleur : :s deux principes ne paroissent donc pas écessairement liés ensemble; leurs effets sont ni simultanés, ni contemporains, uisque dans de certaines circonstances on nt de la chaleur long-temps avant que la mière paroisse, et que dans d’autres cir- mstances on voit de la lumière long-temps rant de sentir de la chaleur, et même sans i sentir aucune. Dès lors la chaleur n’est-elle pas une autre anière d’être, une modification de la ma- re, qui diffère, à la vérité, moins que ute autre de celle de la lumière, mais ’on peut néanmoins considérer à part, et l’on devroit concevoir encore plus aisé- ent? car la facilité plus ou moins grande îe nous avons à concevoir les opérations fférentes de la nature dépend de celle que sus avons d’y appliquer nos sens. Lors- un effet de la nature tombe sous deux de }s sens, la vue et le toucher, nous croyons avoir une pleine connoissance ; un effet li n’affecte que l’un ou l’autre de ces deux ns nous paroît plus difficile à connoître , dans ce cas, la facilité ou la difficulté en juger dépend du degré de supériorité îi se trouve entre nos sens. La lumière , îe nous n’apercevons que par le sens de la îe (sens le plus fautif et le plus incomplet), devroit pas nous être aussi bien connue le la chaleur, qui frappe le toucher, et af- cte par conséquent le plus sûr-de nos sens, ependant il faut avouer qu’avec cet avan- ge on a fait beaucoup moins de décou- rles sur la nature de la chaleur que sur lie de la lumière, soit que l’homme saisisse ieux ce qu’il voit que ce qu’il sent , soit le la lumière se présentant ordinairement )mme une substance distincte eî différente e toutes les autres., elle a paru digne d’une msidération particulière; au lieu que la tialeur, dont l’effet est plus obscur, se pré- ntant comme un objet moins isolé , moins impie, n’a pas été regardée comme une sub- 807 stance distincte, mais comme un attribut de la lumière et du feu. Quand même cette opinion , qui fait de la chaleur un pur attribut, une simple qualité, setrouveroit fondée, il seroit toujours utile de considérer la chaleur en elle-même et par les effets qu’elle produit toute seule , c’est-à-dire lorsqu elle nous paroît indépen- dante de la lumière et du feu. La première chose qui me frappe, et qui me paroît bien digne de remarque ,~ c’est que le siège de la chaleur est tout différent de celui de la lu- mière : celle-ci occupe et parcourt les es- paces vides de l’univers; la chaleur, au con- traire , se trouve généralement répandue dans toute la matière solide. Le globe de la terre, et toutes les matières dont il est composé, ont un degré de chaleur bien plus considérable qu’on ne pourroit l'imaginer. L’eau a son degré de chaleur qu’elle ne perd qu’en changeant son état, c’est-à-dire en perdant sa fluidité. L’air a aussi sa chaleur, que nous appelons sa température, qui varie beaucoup , mais qu’il ne perd jamais en en- tier, puisque son ressort subsiste même dans le plus grand froid. Le feu a aussi ses diffé- rens degrés de chaleur, qui paroissent moins dépendre de sa nature propre que de celle des alimens qui le nourrissent. Ainsi toute la matière connue est chaude; et des lors la chaleur est mie affection bien plus générale que celle de la lumière. La chaleur pénétré tous les corps qui lui sont exposés, et ceTeTsans aucune exception, taudis qu’il n’y a que les corps transparais qui laissent passer la lumière, et qu’elle est arrêtée et en partie repoussée par tous les corps opaques. La chaleur semble donc agir d’une manière bien plus générale et plus palpable que n’agit la lumière; et quoique les molécules de la chaleur soient excessive- ment petites, puisqu’elles pénètrent les corps les plus compactes , il me semble néanmoins que l’on peut démontrer qu’elles sont bien plus grosses que celles de la lumière: car on fait de la chaleur avec la lumière en la réunissant en grande quantité. D’ailleurs, la chaleur agissant sur le sens du toucher, il est nécessaire que son action soit propor- tionnée à la grossièreté de ce sens, comme la délicatesse des organes de la vue paroît l’être à l’extrême finesse des parties de la lumière : celles-ci se meuvent avec la plus grande vitesse, agissant dans l’instant à des distances immenses, tandis que celles delà chaleur n’ont qu’un mouvement progressif as- sez lent, qui ne paroît s’étendre qu’à de petits intervalles du corps dont elles émanent. 20. 3o8 MINÉRAUX. INTRODUCTION. Le principe de toute chaleur paroît être l’attrition des corps : tout frottement , c’est- à-dire tout mouvement en sens contraire entre des matières solides, produit de la chaleur ; et si ce même effet n’arrive pas dans les fluides, c’est parce que leurs par- ties ne se louchent pas d’assez près pour pouvoir être frottées les unes contre les autres, et qu’ayant peu d’adhérence entre elles, leur résistance au choc des autres corps est trop foible pour que la chaleur puisse naître ou se manifester à un degré sensible : mais , dans ce cas , on voit souvent de la lumière produite par ce frottement d’un fluide sans sentir de la chaleur. Tous les corps , soit en petit ou en grand volume, s’échauffent dès qu’ils se rencontrent en sens contraire : la chaleur est donc produite par le mouvement de toute matière palpable et d’un volume quelconque ; au lieu que la production de la lumière, qui se fait aussi par le mouvement en sens contraire, sup- pose de plus la division de la matière en parties très-petites ; et comme celle opéra- tion de la nature est la même pour la pro- duction de la chaleur et celle de la lumière, que c’est le mouvement en sens contraire , la rencontre des corps , qui produisent l’un et l’autre , on doit en conclure que les atomes de la lumière sont solides par eux- mêmes , et qu’ils sont chauds au moment de leur naissance : mais on ne peut pas égale- ment assurer qu’ils conservent leur chaleur au même degré que leur lumière , ni qu’ils ne cessent pas d’être chauds avant de cesser d’être lumineux. Des expériences familières paroissent indiquer que la chaleur de la lu- mière du soleil augmente en passant à tra- vers une glace plane , quoique la quantité de la lumière soit diminuée considérable- ment par la réflexion qui se fait à la surface extérieure de la glace, et que la matière même du verre en retienne une certaine quantité. D’autres expériences plus recher- chées 1 semblent prouver que la lumière t. Un habile physicien (M. de Saussure, citoyen de Genève) a bien voulu me communiquer le ré- sultat des expériences qu’il a faites dans les mon- tagnes , sur la différente chaleur des rayons du soleil, et je vais rapporter ici ses propres expres- sions. «J’ai fait faire, en mars 1767, cinq caisses rectangulaires de verre blanc de Bohême , chacune desquelles est la moitié d’un cube coupé parallèle- ment à sa base : la première a un pied de largeur en tous sens, sur six pouces de hauteur ; la seconde, dix pouces sur cinq; et ainsi de suite, jusqu’à la cinquième, qui a deux pouces sur un. Toutes ces caisses sont ouvertes par le bas, et s’emboîtent les unes dans les autres sur une table fort épaisse de bois de poirier noirci , à laquelle elles sont fixées. augmente de chaleur à mesure qu’elle tra verse une plus grande épaisseur de notr atmosphère. On sait de tout temps que la chaleur de vient d’autant moindre, ou le froid d’autac plus grand , qu’on s’élève plus haut dans le montagnes. Il est vrai que la chaleur qt provient du globe entier de la terre doit êtr moins sensible sur ces pointes avancée qu’elle ne l’est dans les plaines ; mais cett cause n’est point du tout proportionnelle 1 l’effet : l’action de la chaleur qui émane d globe terrestre ne pouvant diminuer qu’ej raison du carré de la distance , il ne paro ! pas qu’à la hauteur d’une demi-lieue, qt n’est que la trois-millième partie du dem diamètre du globe , dont le centre doit êti pris pour le foyer de la chaleur; il ne paro J’emploie sept thermomètres à cette expérienci l’un suspendu en l’air et parfaitement isolé à co des boîtes , et à la même distance du sol ; un aut posé sur la caisse extérieure en dehors de ce! caisse, et à peu près au milieu; le suivant posé f même sur la seconde caisse ; et ainsi des autre jusqu’au dernier, qui est sous la cinquième caiss. et à demi noyé dans le bois de la table. « 11 faut observer que tous ces thermomètrt sont de mercure , et que tous , excepté le dernit ont la boule nue , et ne sont pas engagés , comi les thermomètres ordinaires, dans une planche r dans une boîte , dont le plus ou le moins d’aptitu à prendre et à conserver la chaleur fait entièreméi varier le résultat des expériences. «Tout cet appareil exposé au soleil, dans ■ lieu découvert , par exemple , sur le mur de clùtu d’une grande terrasse, je trouve que le therir mètre suspendu à l’air libre monte le moins haï de tous ; que celui qui est sur la caisse extérier monte un peu plus haut; ensuite celui qui est s la seconde caisse; et ainsi des autres, en observa cependant que le thermomètre qui est posé sur cinquième caisse monte plus haut que celui qui sous elle et à demi noyé dans le bois de la tabl j’ai vu celui-là monter à 70 degrés de Réaumur plaçant le O à la congélation et le 80e degré à l1 bouillante). Les fruits exposés à cetie chaleur cuisent et y rendent leur jus. « Quand cet appareil est exposé au soleil dès matin, on observe communément la plus grau chaleur vers les deux heures et demie après mit et lorsqu’on le retire des rayons du soleil, il e ploie plusieurs heures à son entier refroidisseme « J’ai fait porter ce même appareil sur une me tagne élevée d’environ cinq cents toises au des! du lieu où se faisoient ordinairement les exj riences , et j’ai trouvé que le refroidissement cai par l’élévation agissoit beaucoup plus sur les th momètres suspendus à l’air libre que sur ceux < étoient enfermés dans les caisses de verre, quoiq j’eusse eu soin de remplir les caisses de l’air me: de la montagne, par égard pour la fausse hypothi de ceux qui croient que le froid des montagnes tii de la pureté de l’air qu’on y respire. » 11 seroit à désirer que M. de Saussure, de la ! gacité duquel nous devons attendre d’excellen choses, suivît encore plus loin ces expériences, voulût bien en publier les résultats. ' DES ÉLÉMENS. PARTIE I* 309 [as , dis-je , que cette différence , qui , dans 3tte supposition, n’est que d’une unité sur euf millions , puisse produire une diminu- on de chaleur aussi considérable , à beau- >up près, que celle qu’on éprouve en s’é- vant à cette hauteur : car le thermomètre baisse dans tous les temps de l’année, jus- j’au point de la congélation de l’eau ; la îige ou la glace subsistent aussi sur ces andes montagnes à peu près à cette hau- ur dans toutes les saisons. Il n’est donc ts probable que cette grande différence de taleur provienne uniquement de la diffé- nce de la chaleur de la terre : l’on en sera einement convaincu si l’on fait attention l’au haut des volcans , où la terre est plus nude qu’en aucun autre endroit de la sur- ce du globe , le froid de l’air est à très-peu ès le même que dans les autres montagnes la même hauteur. | On pourroit donc penser que les atomes \ la lumière, quoique très-chauds au mo- ent de leur naissance et au sortir du soleil, refroidissent beaucoup pendant les sept inutes et demie de temps que dure leur ^versée du soleil à la terre , d’autant que durée de la chaleur, ou, ce qui revient même , le temps du refroidissement des rps étant en raison de leur diamètre , il nbleroit qu’il ne faut qu’un très-petit mo- ?nt pour le refroidissement des atomes esque infiniment petits de la lumière ; et aseroit en effet s’ils étoient isolés : mais nme ils se succèdent presque immédia- nent , et qu’ils se propagent en faisceaux allant plus serrés qu’ils sont plus près du u de leur origine, la chaleur que chaque inné perd tombe sur les atomes voisins ; bette communication réciproque de la cha- ir qui s’évapore de chaque atome entretient îs long-temps la chaleur générale de la lii nière; et comme sa direction constante toujours en rayons divergens, que leur ignement l’un de l’autre augmente comme ipace qu’ils ont parcouru , et qu’en même nps la chaleur qui part de chaque atome ùme centre diminue aussi dans la même son , il s’ensuit que l’action de la lumière > rayons solaires décroissant en raison in- 'se du carré de la distance , celle de leur deur décroît en raison inverse du carré- ré de cette même distance. Prenant donc pour unité le demi-diamètre 1 soleil, et supposant l’action de la lumière 11 nme 1000 à la distance d’un demi-dia- “ :tre de la surface de cet astre , elle ne sera 1 îs que comme 4000/4 à la distance de Siîx demi-diamètres, que comme 1000/9 à celle de trois demi-diamètres, que comme 1000/10 à la distance de quatre demi-diamè- tres; et enfin en arrivant à nous qui sommes r éloignés du soleil de trente-six millions de lieues , c’est-à-dire d’environ deux cent vingt- quatre de ses demi-diamètres , l’action de la lumière ne sera plus que comme 1 ooo/5o625, c’esl-à-dire plus de cinquante mille fois plus foible qu’au sortir du soleil : et la chaleur de chaque atome de lumière étant aussi supposée 1000 au sortir du soleil, ne sera plus que comme 1000/16, 1000/81, 1000/2 56, à la distance successive de 1,2, 3 demi-dia- mètres, et en arrivant à nous , comme 1000/2562890625 , c’est-à-dire plus de deux mille cinq cent millions de fois plus foible qu’au sortir du soleil. Quand même on ne voudroit pas admettre cette diminution de la chaleur en raison du carré-carré de la distance au soleil , quoique cette estimation me paroisse fondée sur un raisonnement assez clair, il sera toujours vrai que là chaleur, dans sa propagation , diminue beaucoup plus que la lumière, au moins quant à l’impression qu’elles font l’une et l’autre sur nos sens. Qu’011 excite une très-forte chaleur, qu’on allume un grand feu dans un point de l’espace , on ne le sen- tira qu’à une distance très-médiocre, au lieu qu’on en voit la lumière à de très-grandes distances. Qu’on approche peu à peu d’un corps excessivement chaud , on s’apercevra , par la seule sensahon , que la chaleur aug- mente beaucoup plus que l’espace ne dimi- nue ; car on se chauffe souvent avec plaisir à une distance qui ne diffère que de quelques pouces de celle où l’on se brûleroit. Tout paroit donc nous indiquer que la chaleur diminue en plus grande raison que la lumière, à mesure que toutes deux s’éloignent du foyer dont elles partent. Ainsi l’on peut croire que les atomes de la lumière sont fort refroidis lorsqu’ils arri- vent à la surface de notre atmosphère, mais qu’en traversant la grande épaisseur de cette masse transparente, ils y reprennent par le frottement une nouvelle chaleur. La vitesse infinie avec laquelle les particules de la lu- mière frôlent celles de l’air , doit produire une chaleur d’autant plus grande que le frot- tement est plus multiplié ; et c’est probable- ment par cette raison que la chaleur des rayons solaires se trouve, par l’expérience , beaucoup plus grande dans les couches in- férieures de l’atmosphère et que le iroid de l’air paroît augmenter si considérablement à mesure qu’on s’élève. Peut-être aussi que, comme la lumière ne prend de la chaleur 3io MINÉRAUX. INTRODUCTION. qu’en se réunissant, il faut un grand nombre d’atomes de lumière pour constituer un seul atome de chaleur , et que c’qst par cette raison que la lumière foible delà lune, quoi- que frôlée dans l’atmosphère comme celle du soleil, ne prend aucun degré de chaleur sensible. Si, comme le dit M. Bouguer1, l’intensité de la lumière du soleil à la surface de la terre est trois cent mille fois plus grande que celle de la lumière de la lune , celle-ci ne peut qu’être presque absolument insensible, même en la réunissant au foyer des plus puissans miroirs ardens, qui ne peuvent la condenser qu’environ deux mille fois, dont ôtant la moitié pour la perte par la réflexion ou la réfraction, il ne reste qu’une trois-centième partie d’intensité au foyer du miroir. Or y a-t-il des thermo- mètres assez sensibles pour indiquer le degré de chaleur contenu dans une lumière trois cents fois plus foible que celle du soleil, et pourra-t-on faire des miroirs assez puissans pour la condenser davantage? Ainsi l’on ne doit pas inférer de tout ce que j’ai dit que la lumière puisse exister sans aucune chaleur, mais seulement que les degrés de cette chaleur sont tres-différens , selon les différentes circonstances, et tou- jours insensibles lorsque la lumière est très- foible2. La chaleur, au contraire, paroît exister habituellement , et même se faire sentir vivement sans lumière ; ce n’est or- 1. Essai d’Optique sur la gradation de la lu- mière. 2. On'pourroit même présumer que la lumière en elle-même est composée de parties plus ou moins chaudes : le rayon rouge , dont les atomes sont bien plus massifs et probablement plus gros que ceux du rayon violet, doit en toutes circon- stances conserver beaucoup plus de chaleur, et cette présomption me paroit assez fondée pour qu’on doive chercher à la constater par l’expérience; il ne faut pour cela que recevoir au sortir du prisme une égale quantité de rayons rouges et de rayons vio- lets , sur deux petits miroirs concaves ou deux len- tilles réfringentes , et voir au thermomètre le ré- sultat de la chaleur des uns et des autres. Je ine rappelle une autre>expérience , qui semble démontrer que les atomes bleus de la lumière sont plus petits que ceux des autres couleurs ; c’est qu'en recevant sur une feuille très-mince d’or battu la lumière du soleil, elle se réfléchit toute, à l’ex- ception des rayons bleus qui passent, à travers la feuille d’or, et peignent d’un beau bleu le papier qu’on met à quelque distance derrière la feuille d’or. Ces atomes bleus sont donc plus petits que les autres, puisqu’ils passent où les autres ne peu- vent passer. Mais je n’insiste pas sur les consé- quences qu’on doit tirer de cette expérience, parce que ce'te couleur bleue, produite en apparence par la feuille d’or, peut tenir au phénomène des om- bres bleues, dont je parlerai dans un des mémoires suivans. diuairemenl que quand elle devient exce sive que la lumière l’accompagne. Mais ( qui mettrait encore une différence bie essentielle entre ces deux modifications la matière , c’est que la chaleur qui pénèti tous les corps ne paroît se fixer dans aucun et ne s’y arrêter que peu de temps , au lit que la lumière s’incorpore, s’amortit, s’éteint dans tous ceux qui ne la réfléchi sent pas, ou qui ne la laissent pas passi librement. Faites chauffer à tous degrés d' corps de toule sorte : tous perdront en assi peu de temps la chaleur acquise; tous r viendront au degré de la température gén raie, et n’auront par conséquent que la m me chaleur qu’ils avoient auparavant. Rec vez de même la lumière en plus ou moi] grande quantité sur des corps noirs t blancs, bruts ou polis ; vous reconnoitn aisément que les uns l’admettent , lesautr la repoussent , et qu’au lieu d’être affeci ^ d’une maniéré uniforme comme ils le so par la chaleur, ils ne le sont que d’une m nière relative à leur nature , à leur couleu à leur poli; les noirs absorberont plus lumière que les blancs, les bruts plus q> les polis. Cette lumière une fois absorb reste fixe et demeure dans les corps q< l’ont admise ; elle n’en sort pas comme fait la chaleur ; d’où l’on devrait conclu que les atomes de la lumière peuvent dev nir parties constituantes des corps en s’s nissant à la matière qui les compose; i lieu que la chaleur, ne se fixant pas, ser ble empêcher, au contraire, l’union de to tes les parties de la matière, et n’agir q pour les tenir séparées. lu Cependant il y a des cas où la chaleur ; , fixe à demeure dans les corps , et d’auti e cas ou la lumière qu’ils ont absorbée rej roît et en sort comme la chaleur. Les diamai les autres pierres transparentes qui s’im] beat de la lumière du soleil; les pien opaques, comme celles de Bologne, qu par la calcination , reçoivent les particu d’un feu brillant; tous les phosphores nal rels rendent la lumière qu’ils ont absorbé et cette restitution ou déperdition de ! mière se fait successivement et avec temps , à peu près comme se fait celle la chaleur. Et peut-être la mèrpe chose arri dans les corps opaques , en tout pu en pi tie. Quoi qu’il en soit, il paroîl, d’api tout ce qui vient d’être dit, que l’on d< reconnoitre deux sortes de chaleur ; l’u lumineuse, dont le soleij est le foyer il mense; et l’autre obscure, dont le gra; de! te i 10, Mo fetllei JUrie ta J( I Ben réservoir est le globe terrestre. Notre corj ! llî!lw' Woi.| est q Wl r|, Poil DES ÉLÉMENS. PARTIE I, 3ir une faisant partie du globe , participe à ;e chaleur obscure ; et c’est par cette rai- qu’étant obscure par elle-même, c’est-à- ; sans lumière, elle est encore obscure r nous, parce que nous ne nous en aper- □ns par aucun de nos sens. Il en est de e chaleur du globe comme de son mou- lent : nous y sommes soumis , nous y ticipons, sans le sentir et sans nous en ter. De là il est arrivé que les phy- ms ont porté d’abord toutes leurs vues , es leurs recherches, sur la chaleur du il, sans soupçonner qu’elle ne faisait me très-petite partie de celle que nous mvons réellement : mais, ayant fait des rumens pour reconnaître la différence chaleur immédiate des rayons du soleil été , à celle de ces mêmes rayons en hi- ils ont trouvé, avec étonnement, que e chaleur solaire est en été soixante-six plus grande qu’en hiver dans notre cli- , et que néanmoins la plus grande cha- de notre été ne différoit que d’un sep- e du plus grand froid de notre hiver : ils ont conclu, avec grande raison, idépendamment de la chaleur que nous vons du soleil, il en émane une autre globe même de la terre, bien plus cou- rable, et dont celle du soleil n’est que amplement; en sorte qu’il est aujour- li démontré que celte chaleur qui s’é- ape de l’intérieur de la terre , est dans e climat au moins vingt-neuf fois en et quatre cents fois en hiver, plus ide que la chaleur qui nous vient du il : je dis au moins; car quelque exac- te que les physiciens , et en particulier de Mairan, aient apportée dans ces re- [’ches, quelque précision qu’il aient pu tre dans leurs observations et dans leur ?eHul, j’ai vu, en les examinant, que le iltat pouvoit en être porté plus liant1. if Les physiciens ont pris pour le degré du froid (jlli lu 1000 degrés au dessous de ta congélation : jBloit plutôt le supposer de 10,000 que de 1000 ; Quoique je sois très-per$uadé qu’il n’existe rien | soin, dans la nature, et que peut-être un froid 1 0,000 degrés n’existe que dans les espaces tes éloignés de tout le soleil , cependant, comme j>git ici de prendre pour unité le plus grand jl possible, je l’a ur ois au moins supposé plus 1 , |d que celui dont nous pouvons produire la T! lié ou les trois cinquièmes; car on a produit pl pciellement S92 degrés de froid à Pétersbourg pi jjauvier 1760, le froid naturel étant de 3u de» V J au dessous de la congélation ; et si l’on eut 1 • la même expérience en Sibérie , où le froid na- ïf 1 est quelquefois de 70 degrés , on eût produit fil roid de plus de 1000 degnte, car on a observé A le troid artificiel suivoit la même proportion ’ le froid naturel. Or, 3i : 59a : : 70 : i336 24/3 r . Celte grande chaleur qui réside dans l’in- térieur du globe , qui sans cesse en émane à l’extérieur , doit entrer comme élément dans la combinaison de tous les aulres élémens. Si le soleil est le père de la nature, cette chaleur de la terre en est la mère , et tou- tes deux se réunissent pour produire, entre- tenir, animer les êtres organisés, et pour travailler, assimiler, composer les substan- ces inanimées. Cette chaleur intérieure du globe, qui tend toujours du centre à la cir- conférence, et qui s’éloigne perpendiculai- rement de la surface de la terre, est, à mon avis , un grand agent dans la nature ; l’on ne peut guère douter qu’elle n’ait la principale influence sur la perpendicularité Il seroit donc possible de produire en Sibérie un froid de i336 degrés au dessous de la congélation; donc le plus grand degré de froid possible doit être supposé bien au delà de 1000 ou même de i336 pour eu faire l’unité à laquelle on rapporte les degrés de la chaleur tant solaire que terrestre, ce qui ne laissera pas d’en rendre la différence éncore plus grande. — Une autre remarque que j’ai faite en examinant la construction de la table dans la- quelle M. de Ma ira u donne les rapports de la cha- leur des émanations du globe terrestre à ceux de la chaleur solaire pour tous les climats de la terré, c’est qu’il n’a pas pensé ou qu’il a négligé d’y faire entrer la considération de l’épaisseur du globe, plus grande sous, l’équateur que sous les pôles. Cela , néanmoins , devrait être en compte , et auroit un peu changé les rapports qu’il donne pour chaque latitude. — Enfin une troisième re- marque, et qui tient à la première, c’est qu’il dit (page 160) qu’ayant fait construire une machine qui étoit comme un extrait de mes miroirs brùlans, et ayant fait tomber la lumière .réfléchie du soleil sur des thermomètres, il avoit toujours, trouvé que si uii miroir plan avoit fait monter ta liqueur, par exemple, de 3 degrés, deux miroirs dont on réu- nissoit la lumière , la faisaient monter de 6 degrés, et trois miroirs de 9 degrés. Or, il est aisé de sentir que ceci ne peut pas être généralement vrai : car la grandeur des degrés du thermomètre n’est fondée que sur la divisiotv en inüle parties, et sur la suppo- sition que 1000 degrés au dessous de la congéla- tion font le froid absolu: et comme il sfen faut bien que ce terme soit celui du plus grand froid possible, il est nécessaire qu’une augmentation de chaleur double ou triple par la réunion de deux ou trois miroirs, élève la liqueur à des hauteurs différentes dé celle des degrés du thermomètre , selon que Inexpérience sera faite dans un temps plus ou moins chaud; que celui où ces hauteurs s’accorderont Le mieux ou différeront le moins, sera celui des jours chauds de l’été, et que les expé- riences ayant été faites sur la fin de mai, ce n’est que par hasard qu’elles ont donné le résultat des augmentations de chaleur par lus miroirs, propor- tionnelles aux degrés, de l’échelle du thermomètre. Mais j’abrège cette critique en renvoyant à ce que j’ai dit prés de vingt ans avant ce mémoire de M. de Mairan , sur la construction d’un thermomètre réel, et sa graduation par le moyen de mes miroirs brû- lans. Voyez les Mémoires de l’Académie des. Sciences, année 1747» 6l2 ' minéraux, introduction. de la tige des plantes, sur les phénomènes de l’électricité , dont la principale cause est le frottement ou mouvement en sens contraire , sur les effets du magnétisme , etc. Mais, comme je ne prétends pas faire ici un traité de physique, je me bornerai aux effets de cette chaleur sur les autres élé- mens. Elle suffit seule , elle est même bien plus grande qu’il ne faut pour maintenir la raréfaction de l’air au degré que nous res- pirons : elle est plus que suffisante pour en- tretenir l’eau dans son état de liquidité ; car on a [descendu des thermomètres jusqu’à cent vingt brasses de profondeur, et les re- tirant promptement, on a vu que la tem- pérature de l’eau y étoit à très-peu près la même que dans l’intérieur de la terre à pa- reille profondeur , c’est-à-dire de dix degrés deux tiers ; et comme l’eau la plus chaude monte toujours à la surface, et que le sel l’empêche de geler, on ne doit pas être surpris de ce qu’en général la mer ne gèle pas, et que les eaux douces ne gèlent que d’une certaine épaisseur, l’eau du fond res- tant toujours liquide, lors même qu’il fait le plus grand froid, et que les couches supé- rieures sont en glace de dix pieds d’épais- seur. Mais la terre est celui de tous les élé- mens sur lequel la chaleur intérieure a dû produire et produit encore les plus grands effets. On ne peut pas douter, après les preuves que j’en ai données1, que cette chaleur n’ait été originairement bien plus grande qu’elle ne l’est aujourd’hui; ainsi on doit lui rapporter, comme à la cause pre- mière, toutes les sublimations, précipita- tions , agrégations , séparations , en un mot, tous les mouvemens qui se sont faits et se font chaque jour dans l’intérieur du globe, et surtout dans la couche extérieure où nous avons pénétré , et dont la matière a été re- muée par les agens de la nature , ou par les mains de l’homme ; car , à une ou peut-être deux lieues de profondeur, on ne peut guère présumer qu’il y ait eu des conversions de matière , ni qu’il s’y fasse encore des chan- gemens réels : toute la masse du globle ayant été fondue, liquéfiée parle feu, l’in- térieur n’est qu’un verre ou concret ou dis- cret , dont la substance simple ne peut re- cevoir aucune altération par la chaleur seule ; il n’y a donc que la couche supé- rieure et superficielle qui, étant exposée à l’action des causes extérieures , aura subi i. Voyez, dans cet ouvrage, l’article de la for- mation des planètes , et les articles des Époques de la nature, toutes les modifications que ces causes ré nies à celle de la chaleur intérieure auro pu produire par leur action combiné c’est-à-dire toutes les modifications, tou! les différences , toutes les formes , en i iüe mot, des substances minérales. Le feu , qui ne paroît être , à la premiè vue, qu’un composé de chaleur et de 1 mière , ne seroit-il pas encore une modifit tion de la matière qu’on doive considère]. jii part , quoiqu’elle ne diffère pas essentiel ment de l’une ou de l’autre , et encore moi des deux prises ensemble? Le feu n’exi jamais sans chaleur , mais il peut exis sans lumière. On verra", par mes expérie ces , que la chaleur seule et dénuée de tôt apparence de lumière peut produire les n mes effets que le feu le plus violent. On v aussi que la lumière seule, lorsqu’elle réunie, produit les mêmes effets; elle selefi ble porter en elle-même une substance qui i k»; pas besoin d’aliment : le feu ne peut si sister, au contraire, qu’en absorbant l’air , et il devient d’aulant plus viol qu’il en absorbe davantage , tandis que lumière concentrée et reçue dans un v purgé d’air agit comme le feu dans l’air que la chaleur resserrée , retenue dans s espace clos , subsiste et même augmente a1 une très-petite quantité d’alimens. La di rence la plus générale entre le feu , la cl leur, et la lumière, me paroît donc con ter dans la quantité , et peut-être dans qualité de leurs alimens. L’air est le premier aliment du feu ; matières combustibles ne sont que le secoi j’entends par premier aliment celui qui i km toujours nécessaire et sans lequel le feu pourroit faire aucun usage des autres. ] expériences connues de tous les physicrt’iii] nous démontrent qu’un petit point de fi tel que celui d’une bougie placée dans -lues, c vase bien fermé , absorbe en peu de ter fleniem une grande quantité d’air, et qu’elle s’éttleclei aussitôt que la quantité ou la qualité demis; élément lui manque. D’autres expérien i fitrair, bien connues des chimistes prouvent i les matières les plus combustibles , telles i les charbons , ne se consument pas dans vaisseaux bien clos , quoique exposés à 1 tion du plus grand feu. L’air est don premier, le véritable aliment du feu, et matières 'combustibles ne peuvent lui fournir que par le secours et la médial de cet élément , dont il est nécessaire, aA d’aller plus loin , que nous considérions ie(]uj quelques propriétés. Nous avons dit que toute fluidité o iüd l’aii1 ir est princi aient imuiij # qui chalei DES ÉLÉMENS. PARTIE I. 3i3 chaleur pour cause ; et en comparant quel- ues fluides ensemble, nous voyons qu’il faut eaucoup plus de chaleur pour tenir le fer 1 fusion que l’or, beaucoup plus pour y nir l’or que l’étain , beaucoup moins pour tenir la cire, beaucoup moins pour y te- r l’eau , encore beaucoup moins pour y nir l’esprit de vin, et enfin successive- ent moins pour y tenir le mercure , puis- ’il ne perd sa fluidité qu’au cent quatre- ngt-seplième degré au dessous de celui où au perd la sienne. Cette matière , le mer- re , seroit donc le plus fluide des corps , l’air ne l’étoit encore plus. Or, que nous dique celle fluidité plus grande dans l’air æ dans aucune matière? Il me semble 'elle suppose le moindre degré possible îdhérence entre ses parties constituantes; qu’on peut concevoir en les supposant figure à ne pouvoir se toucher qu’en un int. On pourroit eroire aussi qu’étant uées de si peu d’énergie apparente, et de peu d’attraction mutuelle des unes vers les très , elles sont , par cette raison , moins tssives et plus légères que celles de tous autres corps : mais cela me paroît dé- nti par la comparaison du mercure , le îs fluide des corps après l’air, et dont néan- )ins les parties constituantes paroissent e plus massives et plus pesantes que cel- de toutes les autres matières, à l’excep- n de l’or. La plus ou moins grande flui- é n’indique donc pas que les parties du ide soient plus ou moins pesantes , mais dement que leur adhérence est d’autant co| dndre , leur union d’autant moins intime, leur séparation d’autant plus aisée. S’il 'ci it mille degrés de chaleur pour entretenir (fluidité de l’eau , il n’en faudra peut-être un pour maintenir celle de l’air. L’air est donc , de toutes les matières côn- es , celle que la chaleur divise le plus fa- ijîment , celle dont les parties lui obéissent c le moins de résistance , celle qu’elle met (Ji plus aisément en mouvement expansif et i traire à celui de la force attractive. Ainsi r est tout près de la nature du feu , dont [us principale propriété consiste dans ce mou- us ment expansif; et quoique l’air ne l’ait par lui-même, la plus petite particule chaleur ou de feu suffisant pour le lui (nmuniquer, on doit cesser d’être étonné ce que l’air augmente si fort l’activité du U et de ce qu’il est si nécessaire à sa sub- stance : car étant de toutes les substances |le qui prend le plus aisément le mouve- Imt expansif, ce sera celle aussi que le s entraînera, enlèvera de préférence à toute autre; ce sera celle qu’il s’appropriera le plus intimement , comme étant de la na- ture la plus voisine de la sienne; et par con- séquent l’air doit être du feu l’adminicule le plus puissant, l’aliment le plus convena- ble, Y ami le plus intime et le plus néces- saire. Les matières combustibles, que l’on re- garde vulgairement comme les vrais alimens du feu , ne lui servent néanmoins , ne lui profitent en rien , dès qu’elles sont privées du secours de l’air : le feu le plus violent ne les consume pas, et même ne leur cause au- cune altération sensible, au lieu qu’avec de l’air une seule étincelle de feu les em- brase , et qu’à mesure qu’on fournit de l’air en plus ou moins grande quantité , le feu devient dans la même proportion plus vif, plus étendu, plus dévorant; de sorte qu’on peut mesurer la célérité ou la lenteur avec laquelle le feu consume les matières com- bustibles, par la quantité plus ou moins grande de. l’air qu’on lui fournit. Ces ma- tières ne sont donc pour le feu que des ali- mens secondaires , qu’il ne peut s’approprier par lui-même , et dont il ne peut faire usage qu’autant que l’air s’y mêlant, les rapproche de la nature du feu en les modifiant , et leur sert d’intermède pour les y réunir. On pourra (ce me semble) concevoir clai- rement cette opération de la nature, en con* sidérant que le feu ne réside pas dans les corps d’une manière fixe, qu’il n’y fait or- dinairement qu’un séjour instantané ; qu’é- tant toujours en mouvement expansif, il ne peut subsister dans cet état qu’avec les ma- tières susceptibles de ce mouvement; que l’air s’y prêtant avec toute facilité , la somme de ce mouvement devient plus grande , l’ac- tion du feu plus vive, et que dès lors les Earlies les plus volatiles des matières com- ustibles , telles que les molécules aériennes, huileuses, etc. , obéissant sans effort à ce mouvement expansif qui leur est communi- qué , elles s’élèvent en vapeurs ; que ces va- peurs se convertissent en flamme par le même secours de l’air extérieur ; et qu’enfm, tant qu’il subsiste dans les corps combusti- bles quelques parties capables de recevoir , par le secours de l’air, ce mouvement d’ex- pansion, elles ne cessent de s’en séparer pour suivre l’air et le feu dans leur route , et par conséquent se consumer en s’évapo- rant avec eux. Il y a de certaines matières, telles que le phosphore artificiel , le pyrophore , la pou- dre à canon , qui paroissent à la première vue faire une exception à ce que je viens de, I 3i4 MINÉRAUX. INTRODUCTION. dire; car elles n’ont pas besoin, pour s’en- flammer et se consumer en entier , du se- cours d’un air renouvelé : leur combustion peut s’opérer dans les vaisseaux les mieux fermés; mais c’est par la raison que ces ma- tières , qu’on doit regarder comme les plus combustibles de toutes, contiennent dans leur substance tout l’air nécessaire à leur combustion. Leur feu produit d’abord cet air et le consume à l’instant; et comme il est en très-grande quantité dans ces matières, il suffît à leur pleine combustion , qui dès lors n’a pas besoin , comme toutes les autres, du secours d’un air étranger. Cela semble nous indiquer que la diffé- rence la plus essentielle qu’il y ait entre les matières combustibles et celles qui ne le sont pas , c’est que celles-ci ne contiennent que peu ou point de ces matières légères , aériennes, huileuses, susceptibles du mou- vement expansif, ou que si elles en contien- nent , elles s’y trouvent fixées et retenues , en sorte que, quoique volatiles en elles- mê- mes , elles ne peuvent exercer leur volatilité toutes les fois que la force du feu n’est pas assez grande pour surmonter la force d’ad- hésiou qui les relient unies aux parties fixes de la matière. On peut même dire que cette induction , qui se tire immédiatement de mes principes, se trouve confirmée par un grand nombre d’observations bien connues des chimistes et des physiciens : mais ce qui paroît l’être moins , et qui cependant en est une conséquence nécessaire , c’est que toute matière pourra devenir volatile dès que l’homme pourra augmenter assez la force expansive du feu pour la rendre supérieure à la force attractive qui tient unies les par- ties de la matière que nous appelons fixes ; car , d’une part , il s’eu faut bien que nous ayons u,n feu aussi fort que nous pourrions l’avoir par des miroirs mieux conçus que ceux dont on s’est servi jusqu’à ce jour, et , d’autre côté , nous sommes assurés que la fixité n’est qu’une qualité relative, et qu’aucune matière n’est d’une fixité absolue ou invincible, puisque la chaleur dilate les corps les plus fixes Or, cette dilatation n’est- elle pas l’indice d’un commencement de sé- paration qu’on augmente avec le degré de chaleur jusqu’à la fusion , et qu’avec une chaleur encore plus grande on augmenterait jusqu’à la volatilisation? La combustion suppose quelque chose de plus que la volatilisation : il suffit pour celle-ci que les parties de la matière soient assez divisées, assez séparées les unes des autres pour pouvoir être enlevées par celles de la chaleur ; au lieu que , pour la combus- tion, il faut encore qu’elles soient d’une na- ture analogue à celle du feu; sans cela le mercure, qui est le plus fluide après l’air, serait aussi le plus combustible, tandis que l’expérience nous démontre que, quoique très-volatil, il est incombustible. Or, quelle est donc l’analogie ou plutôt le rapport de nature que peuvent avoir les matières com4 bustibles avec le feu? La matière, en géné- ral , est composée de quatre substances prin-' cipales qu’on appelle élémens la terre, l’eaf * l’air , et le feu , entrent tous quatre en plu ou moins grande quantité dans la composé tion de toutes les matières particu lieras | celles où la terre et l’eau dominent seront: fixes, et ne pourront devenir que volatiles^ par l’action de la chaleur; celles, au coi* traire , qui contiennent beaucoup d’air et de feu, seront les seules vraiment combus- tibles. La grande difficulté qu’il y ait ici, c’est de concevoir nettement comment l’ait 't et le feu, tous deux si volatils, peuvent mÉ fixer et devenir parties constituantes de tout f les corps : je dis de tous les corps; car nom prouverons que quoiqu’il y ait une plut grande quantité d’air et de feu fixes dani les matières combustibles, et qu’ils y soient combinés d’une manière différente que dani les autres matières, toutes néanmoins cou tiennent une quantité considérable de cet! deux élémens , et que les matières les pli2 I fixes et les moins combustibles sont celle qui retiennent ces élémens fugitifs avec 1 plus de force. Le fameux phlogistique deh chimistes (être de leur méthode plutôt qu< de la nature) n’est pas un principe simj. et identique, comme ils nous le présentent X ““ c’est un composé, un produit de l’alliage y un résultat de la combinaison des deux élfL /' mens, de l’air et du feu fixés dans les corps i Sans nous arrêter donc sur les idées obscul f ' 1 res et incomplètes que pourrait nous foqf nir la considération de cet être précaire , $ nons-nous-en à celle de nos quatre éléméï : ,'Sl1 réels, auxquels les chimistes., avec tous leur! ^ nouveaux principes, seront toujours fores n de revenir ultérieurement. Nous voyons clairement que le feu, 0] S(l absorbant de l’air, en détruit le ressort. Or il n’y a que deux manières de détruire ui , ' " ii n y ci t uc ut üa uiauiu es uvu une ui i,m J , . flfUiu ressort ; la première , en le comprimant as jb; S|| sez pour le rompre; la seconde, en l'éteu fifortet pour te rompr dant assez pour qu’il soit sans effet. Ce n’es | P1^ pas de la première manière que le feu peq Fj™' détruire le ressort de l’air, puisque le mçwti I r, dre degré de chaleur le raréfie, que cet® jLiii;,, raréfaction augmente avec elle , et que l’ex DES ÉLÉMENS. PARTIE I. 3i5 ence nous apprend qu’à une très-forte eur la raréfaction de l’air est si grande , occupe alors un espace treize fois plus du que celui de son volume ordinaire : assort dès lors eu est d’autant plus foi- et c’est dans cet état qu’il peut devenir et s’unir sans résistance sous cette nou- forme avec les autres corps. On entend que cet air transformé et fixé n’est point out le même que celui qui se trouve ersé , disséminé dans la plupart des ma- s, et qui conserve dans leurs pores sa re entière : celui-ci ne leur est que mé- é, et non pas uni; il ne leur tient que une très-foible adhérence, au lieu que re leur est si étroitement attaché, si in- iment incorporé, que souvent on ne peut séparer. ous voyons de même que la lumière, en Dant sur les corps , n’est pas , à beau- ) près , entièrement réfléchie , qu’il en ; en grande quantité dans la petite sseur de la surface qu’elle frappe ; que conséquent elle y perd son mouvement, :teint , s’y fixe , et devient dès lors par- :onstituante de tout ce qu’elle pénètre, itez à cet air , à cette lumière , trans- lés et fixés dans les corps, et qui peu- être en quantité variable; ajoutez-y, e, la quantité constante du feu que es les matières , de quelque espèce que lit, possèdent également ; cette quantité tante de feu ou de chaleur actuelle du e de la terre , dont la somme est bien grande que celle de la chaleur qui nous t du soleil , me paroît être non seule- t un des grands ressorts du mécanisme i nature , mais en même temps un élé- t dont toute la matière du globe est :trée ; c’est le feu élémentaire , qui , que toujours en mouvement expansif, , par sa longue résidence dans la ma- , et par son choc contre ses parties , s’unir, s’incorporer avec elles, et s’é- Ire par parties comme le fait la lumière nous considérons plus particulièrement dure des matières combustibles, nous ans que toutes proviennent originaire- Ceçi même pourroit se prouver par une expé- qui inériteroit d’être poussée plus loin. J’ai i!li sur un miroir ardent par réflexion une forte chaleur sans aucune lumière, au moyen : plaque de tôle mise entre le brasier et le r; une partie de la chaleur s’est réfléchie au d.u miroir, tandis que tout le reste dé la cha- l’a pénétré : mais je n’ai pu m’assurer si mentation de chaleur dans la matière du mi- l’étoit pas aussi grande que s’il n’en eût pas ;hi, ment des végétaux, des animaux, des êtres, en un mot , qui sont placés à la surface du globe que le soleil éclaire , échauffe et vivi- fie : les bois , les charbons , les tourbes , les bitumes, les résines, les huiles, les graisses, les suifs, qui sont les vraies matières com- bustibles, puisque toutes les autres ne le sont qu’autant qu’elles en contiennent , ne proviennent-ils pas tous des corps organisés ou de leurs détrimens? Le bois, et même le charbon ordinaire, les graisses, les huiles par expression, la cire et le suif, ne sont que des substances extraites immédiatement ; des végétaux et des animaux ; les tourbes , 1 les charbons fossiles , les succins, les bitumes liquides ou concrets, sont des produits de leur mélange et de leur décomposition, dont les détrimens ultérieurs forment les soufres et les parties combustibles du fer, du zinc, des pyrites, et de lous les miné- raux que l’on peut enflammer. Je sens que cette dernière assertion ne sera pas admise , et pourra même être rejetée, surtout par ceux qui n’ont étudié la nature que par la voie de la chimie : mais je les prie de con- sidérer que leur méthode n’est pas celle de la nature ; qu’elle ne pourra le devenir ou même s’en approcher qu’autant qu’elle s’ac- cordera avec la saine physique, autant qu’on en bannira non seulement les expressions obscures et techniques , mais surtout les prin- cipes précaires, les êtres fictifs auxquels on fait jouer le plus grand rôle, sans néanmoins le connoître. Le soufre, en chimie, n’est que le composé de l’acide vitrioîique et du phlogistique : quelle apparence y a-t-il donc qu’il puisse, comme les autres matières combustibles, tirer son origine du détri- ment des végétaux ou des animaux? A cela je réponds , même en admettant cette défi- nition chimique, que l’acide vitrioîique, et en général tous les acides , tous les alcalis , sont moins des substances de la nature que des produits de l’art. La nature forme des sels et du soufre ; elle emploie à leur com- position , comme à celle de toutes les autres substances , les quatre élémens ; beaucoup de terre et d’eau , un peu d’air et de feu , entrent en quantité variable dans chaque différente substance saline ; moins de terre et d’eau, et beaucoup plus d’air et de feu, semblent entrer dans la composition du soufre. Les sels et les soufres doivent donc être regardés comme des êtres de la nature dont on extrait , par le secours de l’art et de la chimie, et par le moyeu du feu, les différons acides qu’ils contiennent; et puisque nous avons employé le feu, et par MINÉRAUX. INTRODUCTION. 3i 6 conséquent de l’air et des matières com- bustibles, pour extraire ces acides, pou- vons-nous douter qu’ils n’aient retenu et qu’ils ne contiennent réellement des parties de matière combustible qui y seront entrées pendant l’extraction ? Le phlogistique est encore bien moins que l’acide un être naturel ; ce ne seroit même qu’un être de raison, si on ne le regardoit pas comme un composé d’air et de feu devenu fixe et inhérent aux autres corps. Le soufre peut en effet contenir beaucoup de ce phlogistique, beaucoup aussi d’acidé vitriolique ; mais il a , comme toute autre matière , et sa terre et son eau : d’ailleurs son origine indique qu’il faut une grande consommation de matières com- bustibles pour sa production ; il se trouve dans les volcans , et il semble que la nature ne le produise que par effort et par le moyen du plus grand feu. Tout concourt donc à nous prouver qu’il est de la même nature que les autres matières combustibles , et que par conséquent il tire , comme elles , sa première origine du détriment des êtres organisés. Mais je vais plus loin : les acides eux- mêmes viennent en grande partie de la décomposition des substances animales ou végétales , et contiennent en conséquence des principes de la combustion. Prenons pour exemple le salpêtre : ne doit-il pas son origine à ces matières? n’est-il pas formé par la putréfaction des végétaux , ainsi que des urines et des excrémens des animaux ? Il me semble que l’expérience le démontre , puisqu’on ne cherche, on ne trouve le sal- pêtre que dans les habitations où 1 homme et les animaux ont long-temps résidé; et puisqu’il est immédiatement formé du dé- triment des substances animales et végétales, ne doit-il pas contenir une prodigieuse quan- tité d’air et de feu fixes ? Aussi en contient-il beaucoup, et même beaucoup plus que le soufre , le charbon , l’huile , etc. Toutes ces matières combustibles ont besoin, comme nous l’avons dit , du secours de l’air pour brûler, et se consument d’autant plus vite, qu’elles en reçoivent en plus grande quan- tité. Le salpêtre n’en a pas besoin dès qu’il est mêlé avec quelques-unes de ces matières combustibles ; il semble porter en lui-même le réservoir de tout l’air nécessaire à sa combustion : en le faisant détonner lente- ment , on le voit souffler son propre feu comme le feroit un soufflet étranger ; en le renfermant le plus étroitement , son feu , loin de s’éteindre, n’en prend que plus de force , et produit les explosions terrih j pa sur lesquelles sont fondés nos arts rnei ! ( J11 triers. Cette combustion si prompte estll ^ai même temps si complète , qu’il ne re ) * presque rien après l’inflammation , tan l at que toutes les autres matières enflamm ! ® laissent des cendres ou d’autres résidus ( démontrent que leur combustion n’est i * ^ entière , ou , ce qui revient au même , qu’el ^ai contiennent un assez grand nombre de p, , lies fixes, qui ne peuvent ni se brûler, ^ même se volatiliser. On peut de même < SP01 montrer que l’acide vitriolique contilii P aussi beaucoup d’air et de feu fixes , qui i ® ^ que en moindre quantité que l’acide nitreu j * et dès lors il tire, comme celui-ci, son o ^ giue de la même source, et le soufre, da in la composition duquel cet acide entre IfS abondamment, tire des animaux et iii ^ végétaux tous les principes de sa combm bilité. s, d Le phosphore artificiel, qui est le pn mier dans l’ordre des matières combustible N et dont l’acide est différent de l’acide i V treux et de l’acide vitriolique, ne se t: IJlsi aussi que du règne animal, ou, si l’on vei en partie du règne végétal élaboré dans \ “pe animaux , c’est-à-dire des deux sources 0“ < toute matière combustible. Le phosphc ne I s’enflamme de lui-même , c’est-à-dire sa; nde communication de matière ignée , sans fr< j (|ii tement , sans autre addition que celle 1 1 mm contact deTair : autre preuve de la néc< I qvà sité de cet élément pour la combusti- aas même d’une matière qui ne paroît être coi isfa. posée que du feu. Nous démontrerons dà ans la suite que l’air est contenu dans l’eau soi les une forme moyenne, entre l’état d’élastic > ! 1 ag et celui de fixité. Le feu paroit être dans opre phosphore à peu près dans ce même été sla. moyen ; car de même que l’air se déga Iran de l’eau dès que l’on diminue la pressili vra de l’atmosphère, le feu se dégage du ph( lie phore lorsqu’on fait cesser la pression me; l’eau, où l’on est obligé de le tenir su sb mergé pour pouvoir le garder et empêch ïlil son feu de s’exalter. Le phosphore semb et contenir cet élément sous une forme obseu ®h et condensée , et il paroît être pour le f sou! obscur ce qu’est le miroir ardent pour j b feu lumineux , c’est-à-dire un moyen ] condensation. >4 Mais sans nous soutenir plus long-lem j t à la hauteur de ces considérations gén Ht raies , auxquelles je pourrai revenir lorsqu j 5 sera nécessaire, suivons d’une manière pl i J? directe et plus particulière l’examen 1 i /t(] feu ; tâchons de saisir ses effets , et de 1 ! 4 ; t sous un point de vue plus fixe on ne l’a fait jusqu’ici, faction du feu sur les différentes sub- ices dépend beaucoup de la manière t on l’applique; et le produit de son on sur une même substance paroîtra érent selon la façon dont il est adminis- J’ai pensé qu’on devoit considérer le dans trois états différons : le premier , tif à sa vitesse ; le second , à son volume ; e troisième à sa masse. Sous chacun de points de vue, cet élément si simple, informe en apparence , paroîtra, pour ;i dire, un élément différent. On aug- îte la vitesse du feu sans en augmenter volume apparent , toutes les fois que , s un espace donné et rempli de ma- ïs combustibles , on presse l’action et éveloppement du feu en augmentant la sse de l’air par des soufflets , des trom- L des ventilateurs, des tuyaux d’aspira- , etc., qui tous accélèrent plus ou moins apidité de l’air dirigé sur le feu : ce qui prend, comme l’on voit, tous les instru- is , tous les fourneaux à vent , depuis grands fourneaux de forges jusqu’à la pe des émailleurs. ! >n augmente l’action du feu par son vo- e toutes les fois qu’on accumule une ide quantité de matières combustibles, ju’on en fait rouler la chaleur et la mie dans les fourneaux de réverbère : ui comprend , comme l’on sait , les four- lix de nos manufactures de glaces, de jtal , de verre, de porcelaine, de poterie, ussi ceux où l’on fond tous les métaux es minéraux , à l’exception du fer. Le agit ici par son volume, et n’a que sa ire vitesse, puisqu’on n’en augmente la rapidité par les soufflets ou d’autres rumens qui portent l’air sur le feu. Il vrai que la forme des tisards , c’est-à- i des ouvertures principales par où ces ’neaux tirent l’air , contribue à l’attirer \ puissamment qu’il ne le seroit en es- libre ; mais celte augmentation de vi- 3 est très-peu considérable en compa- on de la grande rapidité que lui donnent soufflets. Par ce dernier procédé on ac- re Faction du feu, qu’on aiguise par ■ autant qu’il est possible ; par l’autre cédé, on l’augménte en concentrant sa une en grand volume. 1 y a , comme l’on voit , plusieurs moyens igmenter l’action du feu , soit qu’on ille le faire agir par sa vitesse ou par volume: mais il n’y en a qu’un seul par lel on puisse augmenter sa masse ; c’est 817 de le réunir au foyer d’un miroir ardent. Lorsqu’on reçoit sur un miroir réfringent ou réflexif les rayons du soleil , ou môme ceux d’un feu bien allumé , on les réu- nit dans un espace d’autant moindre , que le miroir est plus grand et le foyer plus court. Par exemple , avec un miroir de quatre pieds de diamètre et d’un pouce de foyer , il est clair que la quantité de lumière ou de feu qui tombe sur le miroir de quatre pieds se trouvant réunie dans l’espace d’un pouce , seroit deux mille trois cent quatre lois plus dense qu’elle ne l’étoit, si toute la matière incidente arrivoit sans perle à ce foyer. Nous verrons ailleurs ce qui s’en perd effectivement ; mais il nous suffit ici de faire sentir que quand même cette perte seroit des deux tiers ou des trois quarts , la masse du feu concentré au foyer de ce miroir sera toujours six ou sept* cents fois plus dense qu’elle ne l’étoit à la surface du miroir. Ici, comme dans tous les autres cas , la masse accroît par la contraction du volume , et le feu dont on augmente ainsi la densité a toutes les propriétés d’une masse de matière ; car indépendamment de Faction de la cha- leur par laquelle il pénètre les corps , il les pousse et les déplace comme le feroit un corps solide en mouvement qui en choque- roit un autre. On pourra donc augmenter par ce moyen la densité ou la masse du feu d’autant plus qu’on perfectionnera davantage la construction des miroirs ardens. Or , chacune de cèsArois manières d’ad- ministrer le feu et d’en augmenter ou la vi- tesse, ou le volume, ou la masse, produit sur les mêmes substances des effets souvent très-différens : on calcine par l’un de ces moyens ce que l’on fond par l’autre; on volatilise par le dernier ce qui paroît ré- fractaire au premier : en sorte que la même matière donne des résultats si peu sembla- bles, qu’on ne peut compter sur rien, à moins qu’on ne la travaille en même temps ou suc- cessivement par ces trois moyens ou procé- dés que nous venons d’indiquer; ce qui est une route plus longue , mais la seule qui puisse nous conduire à la connoissance exacte de tous les rapports que les diverses substances peuvent avoir avec l’élément du feu. Et de la même manière que je divise en trois procédés généraux l’administration de cet élément, je divise de même en trois classes toutes les matières que l’on peut soumettre à son action. Je mets à part, pour un moment, celles qui sont purement com- bustibles, et qui proviennent immédiatement des animaux et des végétaux, et je divise DES ËLÉMENS. PARTIE I. 8 MINÉRAUX. INTRODUCTION. toutes ies matières minérales en trois classes relativement à l’action du feu: la première est celle des matières que cette action long- temps continuée rend plus légères, comme le fer ; la seconde , celle des matières que cette même action du feu rend plus pesantes, comme le plomb ; et la troisième classe est celle des matières sur lesquelles , comme sur l’or, cette action du feu ne paroît produire aucun effet sensible , puisqu’elle n’altère point leur pesanteur. Toutes les matières existantes et possibles, c’est-à-dire toutes les substances simples et composées , seront nécessairement comprises dans l’une de ces trois classes. Ces expériences par les trois procédés, qui ne sont pas difficiles à faire, et qui ne demandent que de l’exactitude et du temps, pourraient nous découvrir plu- sieurs choses utiles, et seraient très-néces- saires pour fonder sur des principes réels la théorie de la chimie : cette belle science , jusqu’à nos jours, n’a porté que sur une no- menclature précaire, et sur des mots d’au- tant plus vagues qu’ils sont plus généraux. Le feu étant, pour ainsi dire, le seul instru- ment de cet art , et sa nature n’étant point connue, non plus que ses rapports avec les autres corps, on ne sait ni ce qu’il y met ni ce qu’il en ôte; on travaille donc à l’a- veugle , et l’on ne peut arriver qu’à des ré- sultats obscurs, que l’on rend encore plus obscurs en les érigeant en principes. Le phlogistique, leminéralisaleur, l’acide, l’al- cali , etc. , ne sont que des termes créés par la méthode , dont les définitions sont adop- tées par convention, et ne répondent à au- cune idée claire et précise, ni même à aucun être réel. Tant que nous ne connoîtrons pas mieux la nature du feu, tant que nous igno- rerons ce qu’il ôte ou donne aux matières qu’on soumet à son action, il ne sera pas possible de prononcer sur la nature de ces mêmes matières d’après les opérations de la chimie, puisque chaque matière à laquelle le feu ôte ou donne quelque chose n’est plus la substance simple que l’on voudrait con- naître, mais une matière composée et mé- langée , ou dénaturée et changée par l’ad- dition ou la soustraction d’autres matières que le feu en enlève ou y fait entrer. Prenons pour exemple de cette addition et de cette soustraction le plomb et le mar- bre. Par la simple calcination l’on augmente le poids du plomb de près d’un quart, et l’on diminue celui du marbre de près de moitié : il y a donc un quart de matière in- connue que le feu donne au premier, et une moitié d’autre matière également in- connue qu’il enlève au second. Toui g raisonnemens de la chimie ne nous onl démontré jusqu’ici ce que c’est que < matière donnée ou enlevée par le feu , est évident que lorsqu’on travaille su plomh et sur le marbre après leur cak tion , ce ne sont plus ces matières sim que l’on traite , mais d’autres matières naturées et composées par l’action du Ne seroil-il donc pas nécessaire, avant t de procéder d’après les vues que je v d’indiquer, de voir d’abord sous un m jj coup d’œil toutes les matières que le fei change ni n’altère , ensuite celles que le détruit ou diminue, et enfin celles i augmente et compose en s’incorporant elles ? 1 Mais examinons de plus près la natur feu considéré en lui-même. Puisque ^ une substance matérielle, il doit être si j(|) à la loi générale, à laquelle toute mat est soumise. Il est le moins pesant de les corps, mais cependant il pèse; et q t que ce que nous avons dit précédemn ^ suffise pour le prouver évidemment, i ^ le démontrerons encore par des expérie ^ palpables , et que tout le monde ser.i . état de répéter aisément. On pourrait [ bord soupçonner, par la pesanteur réci que des astres , que le feu en grande m ' est pesant , ainsi que toute matière ; ; ^ les astres qui sont lumineux comme le sgi ^ dont toute la substance paroît êire de n’en exercent pas moins leur force d’at! { ■ tion à l’égard des astres qui ne le sont j mais nous démontrerons que le feu m ^ en très-petit volume est réellement pes;J ^ qu’il obéit, comme toute autre mâtièrn ^ la loi générale de la pesanteur, et que j conséquent il doit avoir de même des j ^ ports d’affinité avec les autres corps ,j ^ avoir plus ou moins avec telle ou telle : stance , et n en avoir que peu ou pour ^ tout avec beaucoup d’autres. Toutes c ,fi qu’il rendra plus pesantes , comme le plo 9 seront celles avec lesquelles il aura le | ^ d’affinité; et en le supposant appliqué J. même degré et pendant un temps égal, c« de ces matières qui gagneront le plus ' pesanteur seront aussi celles avec lesqu i . cette affinité sera la plus grande. Un j,1 effets de cette affinité dans chaque mat est de retenir la substance même du fe e de se l'incorporer; et cette incorpora suppose que non seulement le feu per<| chaleur et son élasticité, mais même »K- son mouvement , puisqu’il se fixe dans jk corps et en devient partie constituant* ‘ 8311 DES ÉLÉMENS. PARTIE î. 319 | j a donc lieu de croire qu’il en est du feu tomme de l’air, qui se trouve sous une forme Fixe et conerèie dans presque tous les lorps ; et l’on peut espérer qu’à l’exemple Jlu docteur Haïes 1 , qui a su dégager cet ir fixé dans tous les corps et en évaluer la [uantité, il viendra quelque jour un physi- cien habile qui trouvera les moyens de dis- . raire le feu de toutes les matières où il se Vouve sous une forme fixe : mais il faut au- ’j gravant faire la table de ces matières , en établissant par l’expérience les différens apports entre lesquels le feu se combine vec toutes les substances qui lui sont ana- jgues, et se fixe en plus ou moins grande uantité, selon que ces substances ont plus u moins de force pour le retenir. Car il est évident que toutes les matières ont la pesanteur augmente par l’action du su sont douées d’une force attractive, telle ue son effet est supérieur à celui de la force \pansive dont les particules du feu sonS Animées, puisque celle-ci s'amortit et s’é- knt , que son mouvement cesse , et que élastiques et fugitives qu’étoient ces parti- 11 Iules ignées, elles deviennent fixes, solides, at prennent une forme Concrète. Ainsi les tarières qui augmentent de poids par le u, comme l’étain, le plomb, les fleurs de ïnc , etc. , et toutes les autres qu’on pourra découvrir, sont des substances qui, par leur ïfinité avec le feu, l’attirent et se l’incor- orent. Toutes les matières, au contraire, ui, comme le fer, le cuivre, etc. , devien- !ent plus légères à mesure qu’on les câl- ine , sont des substances dont la force at- active, relativement aux particules ignées, "tt moindre que la force expansive du feu; t c’est ce qui fait que le feu, au lieu de se xer dans ces matières , en enlève , au con- fire , et en chasse les parties les moins ées,quine peuvent résister à son impul- ion. Enfin celles qui, comme l’or, le platine, largent , le grès , etc. , ne perdent ni n’ac- luièrent par l’application du feu, et qu’il Je fait, pour ainsi dire, que traverser sans b rien enlever et sans y rien laisser, sont les substances qui, n’ayant aucune affinité vec le feu , et ne pouvant se joindre avec ii , ne peuvent par conséquent ni le retenir i l’accompagner en se laissant enlever. Il st évident que les matières des deux pre- , i. Le phosphore, qui n’est, pour ainsi dire, 'vu’une matière ignée, une substance qui conserve iljt condense le feu , seroit le premier objet des exp- ériences qu’il faudroit faire pour traiter le feu jomme M. Haies a traité l’air, et le premier instru- ment qu’il faudroit employer pour ce nouvel art, mières classes ont avec le feu un certain degré d’affinité , puisque celles de la seconde classe se chargent du feu qu’elles retiennent^ et que le feu se charge de celles de la pre- mière classe et qu’il les emporte , au lieu que les matières de la troisième classe, aux- quelles il ne donne ni ii’ôte rien , n’ont au- cun rapport d’affinité ou d’attraction avec lui, et sônt, pour ainsi dire, indifférentes à son action, qui ne peut ni les dénaturer ni même les altérer. Cette division de toutes les matières en trois classes relatives à l’action du feu , n’ex- clut pas la division plus particulière et moins absolue de toutes les matières en deux autres classes , qu’on a jusqu’ici regardées comme relatives à leur propre nature qui , dit-on , est toujours vitrescible ou calcaire. Notre nouvelle division n’est qu’un point de vue plus élevé , sous lequel il faut les considérer pour tâcher d’en déduire la connoissanee même de l’agent qu’on emploie par les différens rapports que le feu peut avoir avec toutes les substances auxquelles on l’ap- plique. Faute de comparer ou de combiner ces rapports , ainsi que les moyens qu’on emploie pour appliquer le feu, je vois qu’on tombe tous les jours dans des contradictions apparentes , et même dans des erreurs très- préjudiciables 2. 2. Je vais en donner un exemple récent. Deux habiles chimistes (MM. Pott èt d’Arcet) ont soumis un grand nombre de substances à l’action du feu. Le prëmier s’est servi d’un fourneau que je suis étonné que le second n’ait point entendu , puisque rien ne m’a paru si clair dans tout l’ouvrage de M. Pott, et qu’il ne. faut qu’un coup d’œil sur la planche gravée de ce fourneau, pour reconnoîtrô que, par sa Construction, il peut, quoique sans soufflets , faire à peu près autant d’effet que s’il en étoit garni ; car au moyen de longs tuyaux qui sont adaptés au fourneau par le haut et par le bas, l’air y arrive et circule avec une rapidité d’autant plus grande que les tuyaux sont mieux propor- tionnés : ce sont des soufflets conStanS , et dont on peut augmenter l’effet à volonté. Cette construction est si bonne et si simple , que je ne puis concevoir que M. d’Arcet dise « que ce fourneau est un pro- « blême pour lui.... qu’il est persuadé que M. Pott « a dû se servir de soufflets , etc. , u tandis cju’il est évident que sort fourneau équivaut , par sa con- struction , à l’action des soufflets , et que par consé- quent il n’avoit pas besoin d’y avoir recours ; que d’ailleurs ce fourneau est encore exempt du vice1 que M. d’Arcet reproche aux soufflets , dont il a raison de dire «que l’action alterne, sans cesse «renaissante et expirante, jette du trouble et de «l’inégalité sur celle du feu;» ce qui ne peut ar- river ici , puisque, par la construction du fourneau, l’on voit évidemment que le renouvellement de l’air est constant, et que son action ne renaît ni n’expire, mais est continue et toujours uniforme. Ainsi M. Pott a employé l’un des moyens dont on te doit servir pour appliquer le feu? c’est-à-dire MINÉRAUX. INTRODUCTION. *320 On pourrait donc dire , avec les natura- listes , que tout est vitrescible dans la na- ture, à l’exception de ce qui est calcaire ; que les quarz , les cristaux , les pierres pré- cieuses , les cailloux , les grès , les granités, porphyres , agates , ardoises, gypses , argile les pierres ponces , les laves , les amiant avec tous les métaux et autres minéram sont vitrifiables par le feu de nos fourneau ou par celui des miroirs ardens , tandis qi iii ira ta F un moyen par lequel , comme par les soufflets , on augmente la vitesse du feu, en le pressant inces- samment par un air toujours renouvelé; et toutes les fusions qu’il a faites par ce moyen, et dont j’ai répété quelques-unes , comme celles du grès , du quarz, etc., sont tx’ès-réelles, quoique M. d’Arcet les nie : car pourquoi les nie-t-il ? c’est que de son côté , au lieu d’employer, comme M. Pott , le pre- mier de nos procédés généraux , c’est-à-dire le feu par sa vitesse accélérée autant qu’il est possible par le mouvement rapide de l’air, moyen par le- quel il eût obtenu les mêmes résultats , il s’est servi du second procédé , et n’a employé que le feu en grand volume dans un fourneau, sans soufflets ou sans équivalent, dans lequel, par conséquent, le feu ne devoit pas produire les mêmes effets, mais devoit en donner d’autres , que , par la même rai- son , le premier procédé ne pouvoit pas produire. Ainsi les contradictions entre les résultats de ces deux habiles chimistes ne sont qu’apparentes et fondées sur deux erreurs évidentes : la première consiste à croire que le feu le plus violent est celui qui est en plus grand volume ; et la seconde , que l'on doit obtenir du feu violent les mêmes résultats, de quelque manière qu’on l’applique : cependant ces deux idées sont fausses. La considération des vérités contraires est encore une des premières pierres qu’il faudroit poser aux fondemens de la chimie; car ne seroit-il pas très-nécessaire avant tout , et pour éviter de pareilles contradictions à l’avenir, que les chimistes ne perdissent point de vue qu’il y a trois moyens généraux , et très-diffé- rens l’un de l’autre, d’appliquer le feu violent? Le premier, comme je l’ai dit, par lequel on n’emploie qu’un petit volume de feu, mais que l’on agite, aiguise, exalte au plus haut degré par la vitesse de l’air, soit par des soufflets, soit par un four- neau semblable à celui de M. Pott , qui tire l’air avec rapidité : on voit, par l’effet de la lampe d’é- mailleur, qu’avec une quantité de feu presque infi- niment petite , on fait de plus grands effets en petit que le fourneau de verrerie ne peut en faire en grand. Le second moyen est d’appliquer le feu, non pas en petit , mais en très-grande quantité , comme on le fait dans les fourneaux de porcelaine et de verrerie , où le feu n’est fort que par son vo- lume, où son action est tranquille, et n’est pas ■exaltée par un renouvellement très-rapide de l’air. Le troisième moyen est d’appliquer le feu en très- petit volume, mais en augmentant sa masse et son intensité au point de le rendre plus fort que par le second moyen , et plus violent que par le premier ; et ce moyen de concentrer le feu et d’en augmenter la masse par les miroirs ardens , est encore le plus puissant de tous. Or, chacun de ces trois moyens doit fournir un certain nombre de résultats différens : si , par le premier moyen , on fond et vitrifie telles et telles matières, il est très-possible que, par le second moyen , on ne puisse vitrifier ces mêmes matières , •et qu’au contraire on en puisse fondre d’autres qui n’ont pu l’être par le premier moyen ; et enfin il est tout aussi possible que , par le troisième moyen, on obtienne encore plusieurs résultats semblables ou différens de ceux qu’ont fournis les deux pre- miers moyens. Dès lors un chimiste qui , comi M. Pott, n’emploie que le premier moyen, doit borner à donner les résultats fournis par ce moyc faire, comme il l’a fait, l’énumération des matièi qu’il a fondues, mais ne pas prononcer sur la ne fusibilité des autres, parce qu’elles peuvent l’êl par le second ou le troisième moyen ; enfin ne p dire affirmativement et exclusivement, en parh de son fourneau, «qu’en une heure de temps, « deux au plus, il met en fonte tout ce qui « fusible dans la nature. » Et, par la même raiso un autre chimiste qui, comme M. d’Arcet, ne s’i servi que du second moyen , tombe dans l’errec s’il se croit en contradiction avec celui qui ne s’i servi que du premier moyen, et cela parce qi n’a pu fondre plusieurs matières, que l’autre a f couler, et qu’au contraire il a mis en fusion d’a 1res matières que le premier n’avoit pu fondre; c si l’un ou l’autre se fût avisé d’employer succc sivement les deux moyens , il auroit bien senti qij * n’étoit point en contradiction avec lui-même, §, que la différence des résultats ne provenoit que- la différence des moyens employés. Que résulte- donc de. réel de tout ceci , sinon qu'il faut ajou à la liste des matières fondues par M. Pott, cel de M. d’Arcet, et se souvenir seulement que, pc fondre les premières , il faut le premier moyen , le second pour fondre les autres ? Il n’y a par cc séquent aucune contradiction entre les expérienc de M. Pott et celles de M. d’Arcet, que je cr> également bonnes : mais tous deux , après ce conciliation, auroient encore tort de conclure qu! ont fondu par ces deux moyens tout ce qui est i sible dans la nature, puisque l’on peut démont que par le troisième moyen, c’est-à-dire par miroirs ardens , on fond et vitrifie, on volatiîi et même on brûle quelques matières qui leur également paru fixes et réfractaires au feu de le fourneaux. Je ne m’arrêterai pas sur plusiei choses de détail , qui cependant mériteroient a madversion, parce qu’il est toujours utile de ne j laisser germer des idées erronées ou des faits n vus , et dont on peut tirer de fausses conséquene M. d’Arcet dit qu’il a remarqué constamment q la flamme fait plus d’effet que le feu de charb< Oui , sans doute , si ce feu n’est pas excité par vent; mais toutes les fois que le charbon ard< sera vitrifié par un air rapide, il y aura de flamme qui sera plus active et produira de bi plus grands effets que la flamme tranquille, même , lorsqu’il dit que les fourneaux donnent la chaleur en raison de leur épaisseur, cela ne p< être vrai que dans le seul cas où les fournea étant supposés égaux , le feu qu’ils contiennent roit en même temps animé par deux courans d’; égaux en volume et en rapidité. La violence du i dépend presque en entier de cette rapidité du cc rant de l’air qui l’anime ; je puis le démontrer J ma propre expérience : j’ai vu le grès, que M. à’> cet croit infusible, couler et se couvrir d’émail p le moyen de deux bons soufflets, mais sans le c cours cl’aucun fourneau et à feu ouvert. L’effet c j fourneaux épais n’est pas d’augmenter la chalet jj mais de la conserver ; et ils la conservent d’auta plus long-temps qu’ils sont plus épais. ferie liere; :v-. DES ELEMENS. PARTIE I. les marbres, les albâtres, les pierres, les craies , les marnes , et les autres substances qui proviennent du détriment des coquilles et des madrépores , ne peuvent se réduire en fusion par ces moyens. Cependant je suis persuadé que si l’on vient à bout d’aug- menter encore la force des fourneaux , et surtout la puissance des miroirs ardens, on arrivera au point de faire fondre ces ma- tières calcaires qui paroissent être d’une nature différente de celle des autres ; puis- qu’il y a mille et mille raisons de croire qu’au fond leur substance est la même , et que le verre est la base commune de toutes les matières terrestres. | Par les expériences que j’ai pu faire moi- même pour comparer la force du feu, selon qu’on emploie , ou sa vitesse , ou son vo- lume , ou sa masse , j’ai trouvé que le feu Ides plus grands et des plus puissans four- neaux de verrerie n’est qu’un feu foible en comparaison de celui des fourneaux à souf- flets , et que le feu produit au foyer d’un bon miroir ardent est encore plus fort que celui des plus grands fourneaux de forge. IJ’ai tenu pendant trente-six heures , dans l’endroit le plus chaud du fourneau de (Rouelle , en Bourgogne , où l’on fait des glaces aussi grandes et aussi belles qu’à Saint-Gobin en Picardie , et où le feu est aussi violent ; j’ai tenu , dis-je , pendant trente-six heures à ce feu , de la mine de fer, sans qu’elle se soit fondue , ni aggluti- née, ni même altérée en aucune manière, tandis qu’en moins de douze heures celte piine coule en fonte dans les fourneaux de ina forge : ainsi ce dernier feu est bien su- périeur à l’autre. De même , j’ai fondu ou volatilisé au miroir ardent plusieurs ma- tières que ni le feu des fourneaux de réver- bère , ni celui des plus puissans soufflets n’avoient pu fondre, et je me suis convaincu que ce dernier moyen est le plus puissant de tous. Mais je renvoie à la partie expéri- mentale de mon ouvrage le détail de ces ex- périences importantes, dont je me contente d’indiquer ici le résultat général, i On croit vulgairement que la flamme est la partie la plus chaude du feu : cependant rien n’est plus mal fondé que cette opinion; ta on peut démontrer le contraire par les expériences les plus aisées et les plus fami- lières. Présentez à un feu de faille ou même à la flamme d’un fagot qu’on vient d’allu- imer un linge pour le sécher ou le chauffer; il vous faudra le double et le triple du temps j^iour lui donner le degré de sécheresse ou de chaleur que vous lui donnerez en l’ex- Buffon. I. posant à un brasier sans flamme, ou même à un poêle bien chaud. La flamme a été très-bien caractérisée par Newton , lorsqu’il l’a définie une fumée brûlante ( flamma est fumus candens ) , et cette fumée ou vapeur qui brûle n’a jamais la même quantité , la même intensité de chaleur que le corps combustible duquel elle s’échappe ; seule- ment , en s’élevant et s’étendant au loin, elle a la propriété de communiquer le feu , et de le porter plus loin que ne s’étend la chaleur du brasier, qui seule ne suffiroit pas pour le communiquer même de près. Cette communication du feu mérite une attention particulière. J’ai vu , après y avoir réfléchi , que, .pour la bien entendre, il fal- loit s’aider non seulement des faits qui pa- roissent y avoir rapport, mais encore de quelques expériences nouvelles , dont le succès ne me paroît laisser aucun doute sur la manière dont se fait cette opération de la nature. Qu’on reçoive dans un moule deux ou trois milliers de fer au sortir du fourneau, ce métal perd en peu de temps son incandescence , et cesse d’être rouge après une heure ou deux, suivant l'épais- seur plus ou moins grande du lingot. Si , dans le moment qu’il cesse de nous paroître rouge , on le tire du moule , les parties in- férieures seront encore rouges , mais per- dront cette couleur en peu de temps. Or, tant que le, rouge subsiste, on pourra en- flammer, allumer les matières combustibles qu’on appliquera sur ce lingot : mais , dès qu’il a perdu cet état d’incandescence, il y a des matières en grand nombre qu’il ne peTft plus enflammer ; et cependant la cha- leur qu’il répand est peut-être cent fois plus grande que celle d’un feu de paille qui néan- moins communiqueroit l’inflammalion à toutes ces matières. Cela m’a fait penser que la flamme étant nécessaire à la communica- tion du feu , il y avoit de la flamme dans toute incandescence ; la couleur rouge sem- ble en effet nous l’indiquer : mais , 'par l’ha- bitude où l’on est de ne regarder comme flamme que cette matière légère qu’agite et qu’emporte l’air, on n’a pas pensé qu’il pouvoit y avoir de la flamme assez dense pour ne pas obéir, comme la flamme com- mune , à l’impulsion de l’air ; et c’est ce que j’ai voulu vérifier par quelques expé- riences, en approchanl, par degrés de ligne et de demi-ligne, des matières combustibles près de la surface du métal en incandescence et dans l’état qui suit l’incandescence. Je suis donc convaincu que les matières incombustibles, et même les plus fixes, telles 21 322 MINÉRAUX. INTRODUCTION. que l’or et l’argent, sont, dans l’état d’incan- descence, environnées d’une flamme dense qui ne s’étend qu’à une très-petite distance, et qui , pour ainsi dire , est attachée à leur surface ; et je conçois aisément que quand la flamme devient dense à un certain degré , elle cesse d’obéir à la fluctuation de l’air. Cette couleur blanche ou rouge qui sort de tous les corps en incandescence et vient frap- per nos yeux est l’évaporation de cette flamme dense qui environne le corps en se renouvelant incessamment à sa surface ; et la lumière du soleil même n’est-elle pas l’é- vaporation de cette flamme dense dont brille sa surface avec si grand éclat? cette lumière ne produit-elle pas, lorsqu’on la condense, les mêmes effets que la flamme la plus vive ? ne communique-t-elle pas lé feu avec autant de promptitude et d’énergie ? ne résiste-t-elle pas, comme notre flamme dense, à l’impulsion de l’air? ne suit-elle pas tou- jours une route directe , que le mouvement de l’air ne peut ni contrarier, ni changer, puisqu’en soufflant , comme je l’ai éprouvé , avec un fort soufflet , sur le cône lumineux d’un miroir ardent, on ne diminue point du tout l’action de la lumière dont il est com- posé , et qu’on doit la regarder comme une vraie flamme plus pure et plus dense que toutes les flammes de nos matières combus- tibles? C’est donc par la lumière que le feu se communique , et la chaleur seule ne peut produire le même effet que quand elle de- vient assez forte pour être lumineuse. Les métaux, les cailloux, les grès, les briques, les pierres calcaires , quel que puisse *èlre leur degré différent de chaleur , ne pourront enflammer deux corps que quand ils seront devenus lumineux. L’eau elle-même, cet élé- ment destructeur du feu, et par lequel seul nous pouvons en empêcher la communica- tion , le communique néanmoins , lorsque , dans un vaisseau bien fermé , tel que celui de la marmite de Papin 1 , on la pénètre d’une assez grande quantité de feu pour la rendre lumineuse, et capable de fondre le plomb et l’étain; tandis que, quand elle n’est que bouillante, loin de propager et de communiquer le feu , elle l’éteint sur-le- champ. Il est vrai que la chaleur seule suffit pour préparer et disposer les corps combus- tibles à l’inflammation , et les autres à l’in- candescence; la chaleur chasse des corps i. Dans le digesteur de Papin , la chaleur de l’eau est portée au -point de fondre le plomb et l’étain qu'on y a suspendus avec du fil de fer ou du laiton. toutes les parties humides , c’est-à-dire d l’eau , qui , de toutes les matières , est cell qui s’oppose le plus à l’action du feu ; et e , qui est remarquable , c’est que cette mêm chaleur qui dilate tous les corps ne laisse pa de les durcir en les séchant : je l’ai reconm cent fois , en examinant les pierres de me grands fourneaux , surtout les pierres cal caires; elles prennent une augmentation d dureté, proportionnée au temps qu’elles on éprouvé la chaleur : celles , par exemple des parois extérieures du fourneau , et qu ont reçu sans interruption, pendant cinq 01 six mois de suite , quatre-vingts ou quatre vingt-cinq degrés de chaleur constante , de viennent si dures , qu’on a de la peine à le entamer avec les instrumens ordinaires di tailleur de pierres; on diroit qu’elles on changé de qualité , quoique néanmoins elle la conservent à tous autres égards ; car ce mêmes pierres n’en font pas moins de | chaux comme les autres , lorsqu’on leur ap pîique le degré de feu nécessaire à cette opé ration. Ces pierres , devenues dures par la longu4 chaleur qu’elles ont éprouvée , deviennent ei même temps, spécifiquement plus pesantes de là , j’ai cru devoir tirer une inductioi ht ldi qui prouve, et même confirme pleinemen que la chaleur, quoique en apparence tou jours fugitive et jamais stable dans les corp qu’elle pénètre, et dont elle semble constam ment s’efforcer de sortir, y dépose néan moins d’une manière très-stable beaucoup di parties qui s’y fixent, et remplacent, er quantité même plus grande , les partie; aqueuses et autres qu’elle en a chassées Mais ce qui paroît contraire, ou du moin, très-difficile à concilier ici, c’est que cett< même pierre calcaire qui devient spécifique' ment plus pesante par l’action d’une chaleur modérée, long -temps continuée, devien tout à coup plus légère de près d’une moitié de son poids, dès qu’on la soumet au granc feu nécessaire à sa calcination, et qu’ellt perd en même temps non seulement toufi la dureté qu’elle avoit acquise par 1’aclion de la simple chaleur , mais même sa dureté, naturelle, c’ést-à-dire la cohérence de ses 1" parties constituantes; effet singulier, dont je renvoie l’explication à l’article suivant où je traiterai de l’air, de l’eau et de la terre , parce qu’il me paroît tenir encore plus à la nature de ces trois élémens qu’à celle de l’é- lément du feu. Mais c’est ici le lieu de parler de la calci- nation : prise généralement , elle est pour les corps fixes et combustibles ce qu’est la com- ■Hli DES ELEMENS. PARTIE I. 3a3 bustion pour les matières volatiles et inflam- mables ; la calcination a besoin , comme la combustion, du secours de l’air; elle s’opèi’e d’autant plus vite qu’on }ui fournit une plus grande quantité d’air ; sans cela, le feu le plus violent ne peut rien calciner, rien enflam- mer que les matières qui contiennent en elles- mêmes , et qui fournissent, à mesure qu’elles brûlent ou se calcinent, tout l’air nécessaire à la combustion ou à la calcination des substan ces avec lesquelles on les mêle. Celte néces- sité du concours de l’air dans la calcination , comme dans la combustion , indique qu’il y a plus de choses communes entre elles qu’on ne l’a soupçonné. L’application du feu est le principe de toutes deux ; celle de l’air en est la cause seconde, et presque aussi néces- saire que la première : mais ces deux causes se combinent inégalement , selon qu’elles agissent en plus ou moins de temps, avec plus ou moins de force, sur des substances différentes ; il faut, pour en raisonner jusle, »e rappeler les effets de la calcination , et les comparer entre eux et avec ceux de la com- bustion. La combustion s’opère promptement, et [quelquefois se fait en un instant; la calcina- ion est toujours plus lente, et quelquefois longue , qu’on la croit impossible. A me- ure que les matières son! plus inflammables qu’on leur fournit plus d’air, la combus- ion s’en fait avec plus de rapidité : et par raison inverse, à mesure que les matières ont plus incombustibles , la calcination en fait avec plus de lenteur ; et lorsque les larties constituantes d’une substance, telle |ue l’or, sont non seulement incombustibles, nais paroissent si fixes qu’on ne peut les volatiliser , la calcination ne produit aucun dfet, quelque violente qu’elle puisse être. On doit donc considérer la calcination et la ombuslion comme des effets du même rdre , dont les deux extrêmes nous sont dé- ignés par le phosphore, qui est le plus in- lammable de tous les corps , et par l’or , jui , de tous , est le plus fixe et le moins ombustible ; toutes les substances comprises nlre ces deux extrêmes seront plus ou moins ujeltes aux effets de la combustion ou de la alcination, selon qu’elles s’approcheront dus ou moins de ces deux extrêmes : de orte que , dans les points milieux , il se couvera des subslances qui éprouveront au eu combustion et calcination en degré pres- ue égal; d'où nous pouvons conclure, sans faindre de nous tromper , que toute calci- ation est toujours accompagnée d’un peu Le combustion , et que de même toute com- bustion est accompagnée d’un peu de calci- nation. Les cendres et les autres résidus des matières les plus combustibles ne démon- trent-ils pas que le feu a calciné toutes les parties qu’il n’a pas brûlées, et que , par con- séquent, un peu de calcination se trouve ici avec beaucoup de combustion ? La petite flamme qui s’élève de la plupart des matières qu’on calcine , ne démontre-t-elle pas de même qu’il s’y fait un peu de combustion? Ainsi , nous ne devons pas séparer ces deux effets , si nous voulons bien saisir les résul- tats de l’action du feu sur les différentes sub- slances auxquelles on l’applique. Mais , dira-t-on, la combustion détruit les corps, ou du moins en diminue toujours le volume ou la masse, en raison de la quan- tité de matière qu’elle enlève ou consume ; la calcination fait souvent le contraire , et augmente la pesanteur d’un grand nombre de matières : doit-on dès lors considérer ces deux effets , dont les résultats sont si con- traires, comme des effets du même ordre? L’objection paroxt fondée et mérite réponse, d’autant que c’est ici le point le plus diffi- cile de la question. Je crois néanmoins pou- voir y satisfaire pleinement. Considérons pour cela une matière dans laquelle nous supposerons moitié de parties fixes et moitié de parties volatiles ou combustibles : il ar- rivera, par l’application du feu, que toutes ces parties volatiles ou combustibles seront enlevées ou brûlées , et par conséquent sé- parées de la masse totale; dès lors cette masse , ou quantité de matière , se trouvera diminuée de moitié , comme nous le voyons dans les pierres calcaires qui perdent au feu près de la moitié de leur poids. Mais si l’on continue à appliquer le feu pendant un très- long temps à cette moitié toute composée de parties fixes , n’est-il pas facile de concevoir que toute combustion, toute volatilisation ayant cessé , cette matière , au lieu de conti- nuer à perdre de sa masse, doit au contraire en acquérir aux dépens de l’air et du feu dont on ne cesse de la pénétrer ? et celles qui, comme le plomb, ne perdent rien, mais gagnent par l’application du feu , sont des matières déjà calcinées , préparées par la na- ture au degré où la combustion a cessé, et susceptibles , par conséquent , d’augmenter de pesanteur dès les premiers instans de l’ap- plication du feu. Nous avons vu que la lu- mière s’amortit et s’éteint à la surface de tous les corps qui ne la réfléchissent pas ; nous avons vu que la chaleur, par sa longue rési- dence, se fixe en partie dans les matières qu elle pénètre ; nous savons que l’air , pres- 21. 3fi4 MINÉRAUX. INTRODUCTION. que aussi nécessaire à la calcination qu’à la combustion, et toujours d’autant plus né- cessaire à la calcination que les matières ont plus de fixité, se fixe lui-même dans l’inté- rieur des corps, et en devient partie cons- tituante : dès lors , n’est-il pas très-naturel de penser que celte augmentation de pesan- teur ne vient que de l’addiiion des particules de lumière, de chaleur et d’air, qui se sont enfin fixées et unies à une matière contre laquelle elles ont fait tant d’efforts, sans pouvoir ni l’enlever ni la brûler? Cela est si vrai , que quand on leur présente ensuite une substance combustible avec laquelle elles ont bien plus d’analogie, ou plutôt de con- formité de nature , elles s’en saisissent avi- dement, quittent la matière fixe à laquelle elles n’éîoient, pour ainsi dire, attachées que par force , reprennent par conséquent leur mouvement naturel, leur élasticité , leur volatilité , et partent toutes avec la matière combustible , à laquelle elles viennent de se joindre. Dès lors le métal ou la matière cal- cinée à laquelle vous avez rendu ces parties volatiles qu’elle avait perdues par sa combus- tion, reprend sa première forme, et sa pe- santeur se trouve diminuée de toute la quan- tité des particules de feu et d’air qui s’é- toient fixées , et qui viennent d’ètre enlevées par cette nouvelle combustion. Tout cela s’opère par la seule loi des affinités; et, après ce qui vient d’ètre dit, il me semble qu’il n’y a pas plus de difficulté à concevoir comment la chaux d’un métal se réduit . que d’entendre comment il se précipite en disso- lution : la cause est la même , et les effets sont pareils. Un métal dissous par un acide se précipite lorsqu’on présente à cet acide une autre substance avec laquelle il a plus d’affinité qu’avec le métal; l’acide le quitte alors et le laisse tomber. De même, ce métal calciné , c’est-à-dire chargé départies d’air, de chaleur et de feu, qui, s’étant fixées, le tiennent sous la forme d’une chaux , se précipitera, ou, si l’on veut, se réduira, lorsqu’on présentera à ce feu et à cet air fixés , des matières combustibles avec les- quelles ils ont bien plus d’affinité qu’avec le métal, qui reprendra sa première forme dès qu’il sera débarrassé de cet air et de ce feu superflus, et qu’il aura repris, aux dépens des matières combustibles qu’on lui présente, les parties volatiles qu’il avoit perdues. Cette explication me paroit si simple et si claire, que je ne vois pas ce qu’on peut y op- poser. L’obscurité de la chimie vient en 'grande partie de ce qu’on en a peu généra- lisé les principes , et qu’on ne les a pas réu- nis à ceux de la haute physique. Les chi- mistes ont adopté les affinités sans les com- prendre , c’est-à-dire , sans entendre le rap- port de la cause à l’effet , qui néanmoins n’est autre que celui de l’attraction univer- selle ; ils ont créé leur phlogistique sans sa- voir ce que c’est , et cependant c’est de l’aii et du feu fixes; ils ont formé, à mesure qu’ib en ont eu besoin, des êtres idéaux, des mi- ner alisateurs , des terres mercurielles, de* noms , des termes d’autant plus vagues qu< l’acception en estplüs générale. J’ose dirt; que M. Macquer et M. de Morveau sont le.1 premiers de nos chimistes qui aient cormi mencé à parler françois1. Cette science vt donc naître, puisqu’on commence à parler! et on parlera d’autant mieux, on l’entendrj> plus aisément, qu’on en bannira le plus dq mots techniques, qu’on renoncera de mefi leure foi à tous ces petits principes secon daires tirés de la méthode , qu’on s’occuper davantage de les déduire des principes génel raux de la mécanique rationnelle, qu’on cher chera avec plus de soin à les ramener au est lois de la nature , et qu’on sacrifiera plus vc lontiers la comnéodité d’expliquer d’une ma nière précaire et selon Part les phénomène de la composition ou de la décomposition dé substances à la difficulté de les présente pour tels qu’ils sont, c’est-à-dire, pour dé effets particuliers dépendans d’effets plus gé néraux, qui sont les seules vraies causes les seuls principes réels , auxquels on doiv s’attacher , si l’on veut avancer la science è la philosophie naturelle. Je crois avoir démontré 2 que toutes I< petites lois des affinités chimiques , qui p roissent si variables, si différentes entji elles, ne sont cependant pas autres que la l ; générale de l’attraction commune à toute i matière; que cette grande loi , toujours co jj slante, toujours la même, ne paroit vari que par son expression, qui ne peut pas êt la même , lorsque la figure des corps ent comme un élément dans leur distance. Av celte nouvelle clef, on pourra scruter 1 secrets les plus profonds de la nature , < pourra parvenir à connoître la figure des pt ties primitives des différentes substances, i signer les lois et les degrés de leurs affinit< 1. Dans le moment même qu’on imprime < feuilles , paroit l’ouvrage de M. Baume, qui a pi titre , Chimie expérimentale et raisonnée. L’auti non seulement y parle une langue intelligible, m il s’y montre partout aussi bon physicien <] grand chimiste, et j’ai eu la satisfaction de v que quelques-unes de ses idées générales s’accord1 avec les miennes. 2 . V oyez , De la nature , seconde vue. DES ÉLÉMENS. PARTIE I. déterminer les formes qu’elles prendront en se réunissant , etc. Je crois de même avoir fait entendre comme l’impulsion dépend de l’attraction, et que, quoiqu’on puisse la considérer comme une force différente , elle n’est néanmoins qu’un effet particulier de cette force unique et générale; j’ai présenté la communication du mouvement comme im- possible , autrement que par le ressort , d’où j’ai conclu que tous les corps de la nature sont plus ou moins élastiques, et qu’il n’y en a aucun qui soit parfaitement dur, c’est- à-dire entièrement privé de ressort, puisque ii tous sont susceptibles de recevoir du mou- vement; j’ai tâché de faire connoître com- ment cette force unique pouvoit changer de direction, et d’attractive devenir tout-à-coup répulsive ; et de ces grands principes , qui tous sont fondés sur la mécanique rationnelle, j’ai essayé de déduire les principales opéra- j tions de la nature , telles que la production . delà lumière, de la chaleur, du feu, et de j leur action sur les différentes substances : ce [dernier objet, qui nous intéresse le plus , est un champ vaste , dont le défrichement [suppose plus d’un siècle, et dont je n’ai pu cultiver qu’un espace médiocre , en remet- tant à des mains plus habiles ou plus labo- I rieuses les instrumens dont je me suis servi. | Ces instrumens sont les trois moyens d’em- ployer le feu par sa vitesse, par son volume , et par sa masse , en l’appliquant concurrem- ment aux trois classes des substances, qui toutes , ou perdent , ou gagnent , ou ne per- dent ni ne gagnent par l’application du feu. Les expériences que j’ai faites sur le refroi- | dissement des corps, sur la pesanteur réelle |[ du feu , sur la nature de la flamme, sur le progrès de la chaleur, sur sa communica- ij tion , sa déperdition , sa concentration , sur sa violente action sans flamme, etc., sont en- I core autant d’instrumens , qui épargneront | beaucoup de travail à ceux qui voudront s’en I servir, et produiront une très-ample moisson I de connoissances utiles. SECONDE PARTIE. De l’air , de Veau et de la terre. Nous avons vu que l’air est l’adminicule nécessaire et le premier aliment du feu, qui [[ ne peut ni subsister, ni se propager, ni s’aug- [| menter, qu’autant qu’il se l’assimile , le con- | somme ou l’emporte , tandis que de toutes I les substances matérielles l’air est au con- j traire celle qui paroît exister le plus indé- 3a5 pendamment, et subsister le plus aisément , le plus constamment , sans le secours ou la présence du feu; car, quoiqu’il ait habituel- lement la même chaleur à peu près que les autres matières à la surface de la terre, il pourroit s’en passer, et il lui en faut infini- ment moins qu’à toute autre pour entretenir sa fluidité, puisque les froids les plus exces- sifs, soit naturels, soit artificiels, ne lui font rien perdre de sa nature ; que les conden- sations les plus fortes ne sont pas capables de rompre son ressort ; que le feu actif, ou plu- tôt actuellement en exercice sur les matières combustibles, est le seul agent qui puisse altérer sa nature en la raréfiant, c’est-à-dire en affoiblissant , en étendant son ressort jus- qu’au point de le rendre sans effet, et de dé- truire ainsi son élasticité. Dans cet état de trop grande expansion et d’affoiblissement extrême de son ressort, et dans toutes les nuances qui précèdent cet état , l’air est ca- pable de reprendre son élasticité à mesure que les ‘vapeurs des matières combustibles qui l’avoient aftoiblie s’évaporeront et s’en sépareront. Mais si le ressort a été totalement affoibli et si prodigieusement étendu , qu’il ne puisse plus se resserrer ni se restituer, ayant perdu toute sa puissance élastique , l’air, de volatile qu’il étoit auparavant , de- vient une substance fixe qui s’incorpore avec les autres substances , et fait dès lors partie constituante de toutes celles auxquelles il s’unit par le contact, ou dans lesquelles iî pénètre à l’aide de la chaleur. Sous cette nou- velle forme , il ne peut plus abandonner le feu que pour s’unir comme matière fixe à d’autres matières fixes; et s’il en -reste quel- ques parties inséparables du feu , elles font dès lors portion de cet élément ; elles lui ser- vent de base, et se déposent avec lui dans les substances qu’ils échauffent et pénètrent en- semble. Cet effet , qui se manifeste dans toutes les calcinations , est d’autant plus sen- sible, que la chaleur est appliquée plus long- temps. La combustion ne demande que peu de temps pour se faire, même complètement, au lieu que toute calcination suppose beau- coup de temps ; il faut, pour l’accélérer, amener à la surface, c’est-à-dire présenter successivement à l’air, les matières que l’on veut calciner ; il faut les fondre ou les divi- ser en parties impalpables , pour qu’elles of- frent à cet air plus de superficie; il faut même se servir de soufflets, moins pour aug- menter l’ardeur du feu que pour établir un courant d’air sur la surface des matières , si l’on veut presser leur calcination ; et , pour la compléter avec tous ces moyens, il faut MINÉRAUX. INTRODUCTION. 3a6 souvent beaucoup de temps 1 ; d’où l’on doit conclure qu’il faut aussi une assez longue résidence de l’air devenu fixe dans les sub- stances terrestres pour qu’il s’établisse à de- meure sous cette nouvelle forme. Mais il n’est pas nécessaire que le feu soit violent pour faire perdre à l’air son élasti- cité ; le plus petit feu , et même une chaleur très-médiocre, dès qu’elle est immédiatement et constamment appliquée sur une petite quantité d’air, suffisent pour en détruire le ressort : et pour que cet air sans ressort se fixe ensuite dans les corps , il ne faut qu’un peu plus ou un peu moins de temps , selon le plus ou moins d’affinité qu’il peut avoir sous cette nouvelle forme avec le» matières auxquelles il s’unit. La chaleur du corps des animaux , et même des végétaux , est encore assez puissante pour produire cet effet : les degrés de chaleur sont différens dans les clif- férens genre d’animaux, et à commencer par les oiseaux, qui sont les plus chauds de tous, on passe successivement aux quadrupèdes , à l’homme, aux cétacés , qui le sont moins; aux reptiles, aux poissons, aux insectes, qui le sont beaucoup moins ; et enfin aux végé- taux , dont1 la chaleur est si petite , qu’elle a paru nulle aux observateurs, quoiqu’elle soit très-réelle et qu’elle surpasse en hiver celle de l’atmosphère. J’ai observé sur un grand nombre de gros arbres coupés dans un temps froid, que leur intérieur étoit très-sensible- ment chaud, et que cette chaleur duroit pen- dant plusieurs minutes après leur abattage. Ce n’est pas le mouvement violent de la co- gnée, ou le frottement brusque et réitéré de la scie, qui produisent seuls cette chaleur#; car en fendant ensuite ce bois avec des coins, j’ai vu qu’il étoit chaud à deux ou trois pieds de distance de l’endroit où l’on avoit placé les coins, et que par conséquent il avoit un degré de chaleur assez sensible dans tout son intérieur. Cette chaleur n’est que très-médiocre tant que l’arbre est jeune et qu’il se porte bien : mais dès qu’il com- mence à vieillir , le cœur s’échauffe par la fermentation de la sève , qui n’y circule plus avec la même liberté; cette partie du centre i. Je ne sais si l’on ne calcineroit pas l’or, non pas en le tenant , comme Boyle ou Kunckel , pen- dant un très-long temps , dans un fourneau de ver- rerie, où la vitesse de l’air n’est pas grande, mais en le mettant près de la tuyère d’un bon fourneau à vent , et le tenant en fusion dans un vaisseau ou- vert, où l’on plongeroit une petite spatule, qu’on ajusteroit de manière qu’elle tourneroit incessam- ment et remueroit continuellement l’or en fusion ; car il n’y a pas de comparaison entre la force de ces feux, parce que l’air est ici bien plus accéléré que dans les fourneaux de verrerie. prend en s’échauffant une teinte rouge, qui est le premier indice du dépérissement de l’arbre et de la désorganisation du bois. J’en ai manié des morceaux dans cet état, qui étoient aussi chauds que si on les eût fait chauffer au feu. Si les observateurs n’ont pas trouvé qu’il y eût aucune différence entre la température de l’air et la chaleur des végé- taux, c’est qu’ils ont fait leurs observations en mauvaise saison, et qu’ils n’ont pas fait attention qu’en été le chaleur de l’air est aussi grande et plus grande que celle de l'in- térieur d’un arbre, tandis qu’en hiver c’est tout le contraire; ils ne se sont pas souvenus que les racines ont constamment au moins le degré de chaleur de la terre qui les envi- ronne, et que cette chaleur de l’intérieur de la terre est, pendant tout l’hiver, considéra- blement plus grande que celle de l’air et de la surface de la terre refroidie par l’air : ils ne se sont pas rappelé que les rayons du so- leil, tombant trop vivement sur les feuilles et sur les autres parties délicates des végé- taux, non seulement les échauffent, mais les brûlent; qu’ils échauffent de même à un très-grand degré l’écorce et le bois dont ils pénètrent la surface, dans laquelle ils s’amor- tissent et se fixent ; ils n’ont pas pensé que le mouvement seul de la sève , déjà chaude , est une cause nécessaire de chaleur , et que ce mouvement venant à augmenter par l’action du soleil ou d’uneautre chaleur extérieure, celle des végétaux doit être d’autantplus grande que le mouvement de leur sève est plus accéléré, etc. Je n’insiste si long-temps sur ce point qu’à cause de son importance; l’uniformité du plan de la nature seroit violée , si , ayant accordé à tous les animaux un degré de cha- leur supérieur à celui des matières brutes , elle l’avoit refusé aux végétaux, qui, comme les animaux, ont leur espèce de vie. Mais ici l’air contribue encore à la cha- leur animale et vitale, comme nous avons vu plus haut qu’il contribuoit à l’action du feu dans la combustion et la calcination des matières combustibles et calcinables. Les animaux qui ont des poumons , et qui par conséquent respirent l’air , ont toujours plus de chaleur que ceux qui en sont privés ; et plus la surface intérieure des poumons est étendue et ramifiée en plus grand nom- bre de cellules ou bronches, plus, en un mot , elle présente de superficie à l’air que l’animal tire par l’inspiration , plus aussi son sang devient chaud , et plus il commu- nique de chaleur à toutes les parties du corps qu’il abreuve ou nourrit, et cette proportion a lieu dans tous les animaux con- i» I® 1er p ont ll’dll tessi poin fl' ledt Itrai chah è telle Si I; 1 1 n’est tl de mis iiiém dégv aniii des mari iiigiti loin il i jj que jw I m | m liûei sans I tfest Cepe. elle . siens fie I; fonts Ile | fie c j ni >. i ïirli | usob «I au! «ù j aille j hlili | H c | -s mil »ti I adivi DES ÉLÉMENS. PARTIE II. 327 plus. Les oiseaux ont , relativement au vo- lume de leur corps ; les poumons considéra- blement plus étendus que l’homme ou les Iquadrupèdes ; les reptiles, même ceux qui put de la voix, comme les grenouilles, n’ont , au lieu de poumons , qu'une simple jrèssie ; les insectes , qui n’ont que peu ou point de sang, ne pompent l’air que par quelques trachées, etc. Aussi, en prenant e degré de la température de la terre pour erme de comparaison , j’ai vu que cette dialeur étant supposée de 10 degrés, celle les oiseaux étoit de près de 33 degrés , 'elle de quelques quadrupèdes de plus de li 1/2 degrés, celle de l’homme de 3o 1/2 >u 3i, tandis que celle des grenouilles l’est que de 1 5 ou 1.6, celle des poissons ît des insectes de ii ou 12, c’est-à-dire la noindre de toutes, et à très-peu près la nême que celle des végétaux 1 . Ainsi le legré de chaleur dans l’homme et dans les tnimaux dépend de la force et de l’etendue les poumons : ce sont les soufflets de la nachine animale ; ils en entretiennent et pigmentent le feu selon qu’ils sont plus ou noins puissans , et que leur mouvement est dus ou moins prompt. La seule difficulté ;st de concevoir comment ces espèces de ouf fiels ( dont la construction est aussi su- jérieure à celle de nos soufflets d’usage jue la nature est au dessus de nos arts ) leuvent porter l’air sur le feu qui nous mime; feu dont le foyer paroît assez indéter- niné , feu qu’on n’a pas même voulu qua- ifier de ce nom, parce qu’il est sans flamme , ians fumée apparente, et que sa chaleur l’est que très-médiocre et assez uniforme. Üeperidant, si l’on considère que la chaleur :t le feu sont des effets et même des élé- nens du même ordre, si l’on se rappelle pte la chaleur raréfie l’air , et qu’en éten- fant son ressort elle peut l’affoibîir au point le le rendre sans effet, on pourra penser pie cet air tiré par nos poumons , s’y raré- fiant beaucoup , doit perdre son ressort dans 1. Je ne sais pas s’il faut faire une exception mur les abeilles , comme l’ont fait la plupart de ms observateurs , qui prétendent que ces mouches mt autant de chaleur- que les animaux qui respi- rent, parce que leur ruche est aussi chaude que le iorps de ces animaux : il me semble que cette cha- leur de l’intérieur de la ruche n’est point du tout la chaleur demhaque abeille, mais la somme totale le la chaleur qui s’évapore des corps de neuf ou Six mille individus réunis dans cet espace où leur 'nouvement continuel doit l’augmenter encore; et en divisant cette somme générale de chaleur par la Quantité particulière de chaleur qui s’évapore de chaque individu , on trouveroit peut-être que l’a- tltaeille n’a pas plus de chaleur qu’une autre mouche. les bronches et dans les petites vésicules où il ne peut pénétrer qu’en très-petit volume, et en bulles dont le ressort , déjà très-éten- du, sera bientôt détruit par la chaleur du sang artériel et veineux ; car ces vaisseaux de sang ne sont séparés des vésicules pulmonaires qui reçoivent l’air que par dés cloisons si minces, qu’elles laissent, aisément passer cet air dans le sang, où il ne peut manquer de produire le même effet que sur le feu com- mun, parce que le degré de, chaleur de ce sang est plus que suffisant pour détruire en entier l’élasticité des particules d’air, les fixer et les entraîner sous cette nouvelle forme dans toutes les voies de la circulation. Le feu du corps animal ne diffère du feu commun que du moins au plus; le degré de chaleur est moindre : dès lors il n’y a point de flamme , parce que les vapeurs qui s’élè- vent , et qui représentent la fumée de ce feu , n’ont pas assez de chaleur pour s’en- flammer ou devenir ardentes, et qu’étant d’ailleurs mêlées de beaucoup de parties humides qu’elles enlèvent avec elles, ces vapeurs ou cette fumée ne peuvent ni s’allu- mer ni brûler 2. Tous les autres effets sont ?.. J’ai fait une grande expérience au sujet de l’inflammation de la fumée. J’ai rempli de charbon sec et conservé à couvert depuis plus de six mois deux de mes fourneaux, qui ont également qua- torze pieds de hauteur, et qui ne diffèrent dans leur construction queparTes proportions des di- mensions en largeur, le premier contenant juste un tiers de plus que le second. J’ai rempli l’un avec douze cents livres de charbon , et l’autre avec huit cents livres, et j’ai adapté au plus grand un tuyau d’aspiration , construit avec un châssis de fer, garni de tôle , qui avoit treize pouces en carré sur dix pieds de hauteur ; je lui avois donné treize pouces sur les quatre côtés , pour qu’il remplît exactement l’ouverture supérieure du fourneau , qui étoit car- rée, et qui avoit treize pouces et demi de toutes faces. Avant de remplir ces fourneaux , on avoit préparé dans le bas une petite cavité en forme de voûte, soutenue par des bois secs, sous lesquels on mit le feu au moment qu’on commença de char- ger de charbon: ce feu, qui d’abord étoit vif, se ralentit à mesure qu’on chargeoit ; cependant il subsista toujours sans s’éteindre; et lorsque les fourneaux furent remplis en entier, j’en examinai le progrès et le produit , sans le remuer et sans y rien ajouter : pendant les six premières heures , la fumée, qui avoit commencé de s’élever au moment qu’on avoi.t commencé de charger, étoit très-hu- mide ; ce que je reconnoissois aisément par les gouttes d’eau qui paroissoient sur les parties exté- rieures du tuyau d’aspiration ; et ce tuyau n’étoi1 encore au bout de six heures que médiocrement chaud , car je pouvois le toucher aisément. On laissa le feu , le tuyau et les fourneaux , pendant toute la nuit, darts cet état; la fumée, continuant tou- jours, devint si abondante, si épaisse et si noire , que le lendemain, en arrivant à mes forges , je crus qu’il y avoit un incendie. L’air étoit calme; et comme le vent ne dissipoit pas la fumée , elle en- 323 absolument les mêmes : la respiration d’un petit animal absorbe autant d’air que la lu- mière d’une chandelle ; dans des vaisseaux fermés , de capacités égales , l’animal meurt en même temps que la chandelle s’éteint. Rien ne peut démontrer plus évidemment que le feu de l’animal et celui de la chan- delle, ou de toute autre matière combusti- ble allumée, sont des feux non seulement du même ordre, mais d’une seule et même nature, auxquels le secours de l’air est éga- lement nécessaire , et qui tous deux se l’ap- proprient de la même manière , l’absorbent comme aliment , l’entraînent dans leur route, et le déposent, sous une forme fixe, dans les substances qu’ils pénètrent. Les végétaux et la plupart des insectes n’ont, au lieu de poumons, que des tuyaux aspiratoires , des espèces de trachées par lesquelles ils ne laissent pas de pomper tout l’air qui leur est nécessaire ; on le voit pas- ser en bulles très-sensibles dans la sève de la vigne : il est non seulement pompé par les racines, mais souvent même par les feuil- les; il fait partie et partie très-essentielle de la nounâture du végétal, qui dès lors se MINÉRAUX. INTRODUCTION. l’assimile, le fixe et le conserve. Le petit degré de la chaleur végétale, joint à celui de la chaleur du soleil, suffit pour détruire le ressort de l’air contenu dans la sève, sur- tout lorsque cet air, qui n’a pu être admis dans le corps de la plante et arriver à la sève qu’après avoir passé par des tuyaux très-serrés, se trouve divisé en particules presque infiniment petites , que le moindre degré de chaleur suffit pour rendre fixes. L’expérience confirme pleinement tout ce que je viens d’avancer : les matières animales et végétales contiennent toutes une très- grande quantité de cet air fixe; et c’est en quoi consiste l’un des principes de leur in- flammabilité. Toutes les matières combusti- bles contiennent beaucoup d’air; tous les animaux et les végétaux, toutes leurs parties, tous leurs détrimens , toutes les matières qui en proviennent, toutes les substances où ces détrimens se trouvent mélangés, contien-i lient plus ou moins d’air fixe, et la plupart renferment aussi une certaine quantité d’air! élastique. On ne peut douter de ces faits dont la certitude est acquise par les belles expériences du docteur Haies, et dont les lira qui :: veloppoit les bâtimens et les déroboit à ma vue : elle duroit déjà depuis vingt-six heures. J’allai à mes fourneaux : je trouvai que le feu, qui n’étoit allumé qu’à la partie du bas, n’avoit pas augmenté, qu’il se soutenoit au même degré; mais la fumée , qui avoit donné de l’humidité dans les six pre- mières heures, étoit devenue plus sèche, et parois- solt néanmoins tout aussi noire. Le tuyau d’aspira- tion ne pompoit pas davantage; il étoit seulement un peu plus chaud, et la fumée ne formoit plus de gouttes sur sa surface extérieure. La cavité des fourneaux, qui avoit quatorze pieds de hauteur, se trouva vide, au bout des vingt-six heures , d’envi- ron trois pieds; je les fis remplir, l’un avec cin- quante, et l’autre avec soixante-quinze livres de. charbon, et je fis remettre tout de suite le tuyau d’aspiration qu’on avoit été obligé d’enlever pour charger. Cette augmentation d’aliment n’augmenta pas le feu ni même la fumée; elle ne changea rien à l’état précédent. J’observai le tout pendant huit heures de suite, m’attendant à tout instant à voir paroître la flamme, et ne concevant pas pourquoi cette fumée d'un charbon si sec, et si sèche elle- même, qu’elle ne déposait pas la moindre humi- dité, ne s’enflammoit pas d’elle-même après trente- quatre heures de feu toujours subsistant au bas des fourneaux ; je les abandonnai donc une seconde fois dans cet état , et donnai ordre de n’y pas tou- cher. Le jour suivant , douze heures après les trente-quatre, je trouvai le même brouillard épais, la même fumée noire couvrant mes bâtimens ; et ayant visité mes fourneaux, je vis que le feu d’en bas étoit toujours le même , la fumee la même et sans aucune humidité, et que la cavité des four- neaux étoit vide de trois pieds deux pouces dans le plus petit, et de deux pieds neuf pouces seule- ment dans le plus grand, auquel étoit adapté le tuyau d’aspiration : je le remplis avec soixante-six livres de charbon , et l’autre avec cinquante-quatre, et je résolus d’attendre aussi long-temps qu’il se-i roit nécessaire pour savoir si celte fumée ne vien- droit pas enfin à s’enflammer. Je passai neuf heures à l’examiner de «temps à autre; elle. étoit très-sèche, très - suffocante , très - sensiblement chaude , mais toujours noire et sans flamme au bout de cinquante-^ cinq heures. Dans cet état, je la laissai pour la' troisième fois. Le jour, suivant , treize heures après les cinquante-cinq, je la retrouvai encore de même, le charbon de mes fourneaux baissé de même; et, comme je réfléchissois sur cette consommation de charbon sans flamme , qui étoit d’environ moitié de la consommation qui s’en fait dans le même temps et dans les mêmes fourneaux lorsqu’il y a de la flamme, je commençai à croire que je pourrois bien user beaucoup de charbon sans avoir de flamme , puisque , depuis trois jours , on avoit chargé trois fois les fourneaux (car j’oubliois de dire que ce jour même on venoit de remplir la ca- vité vide du grand fourneau avec quatre-vingts livres de charbon, et celle du petit avec soixante livres) ; je les laissai néanmoins fumer encore plus de cinq heures. Après avoir perdu l’espérance de voir cette fumée s’enflammer d’elle-même , je la vis tout d’un coup prendre feu , et faire une espèce d’explosion dans l’instant même qu’on lui présenta la flamme légère d’une poignée de paille; le tour- billon entier de la fumee s’enflamma jusqu’à huit ou dix pieds de distance et autant de hauteur ; la flamme pénétra la masse du charbon, et descendit dans le même moment jusqu’au bas du fourneau , et continua de brûler à la manière ordinaire; le charbon se consumoit une fois plus vite, quoique le feu d’en bas ne parût guère plus animé : mais je suis con- I vaincu que mes fourneaux auroient éternellement fumé, si l’on n’eût pas allumé la fumée; et rien ne me prouva mieux que la flamme n’est que de la fumée qui brûle , et que la communication du feu ne peut se faire que par la flamme. H ff ïi a ort COI Iles fitié bel 011 tld Uséi ! DES ÉLÉMENS. PARTIE II. nistes ne me paraissent pas avoir senti e la valeur : car ils auroient reconnu uis long-temps que l’air fixe doit jouer ;rande partie le rôle de leur phlogistique; t’auroient pas adopté ce terme nouveau, ne répond à aucune idée précise , et ils auroient pas fait la base de toutes leurs ications des phénomènes chimiques ; ils ’auroient pas donné pour un être iden- e et toujours le même, puisqu’il est posé d’air et de feu, tantôt dans un état et tantôt dans celui de la plus grande tilité ; et ceux d’entre eux qui ont re- lé le phlogistique comme le produit du élémentaire ou de la lumière se sont ns éloignés de la vérité, parce que le ou la lumière produisent, par le secours ’air, tous les effets du phlogistique. es minéraux qui, comme les soufres et pyrites , contiennent dans leur substance ! quantité plus ou moins grande des dé- ens ultérieurs des animaux et des végé- , renferment dès lors des parties com- ibles qui, comme toutes, les autres, iennent plus ou moins d’air fixe , mais ours beaucoup moins que les substances îment animales ou végétales. On peut ement leur enlever cet air fixe par la K us lion : on peut aussi le dégager par le en de l’effervescence ; et , dans les ma- is animafes et végétales, on le dégage par mpie fermentation, qui, comme la com- ion , a toujours besoin d’air pour s’opé- Ceci s’accorde si parfaitement avec )érience , que je ne crois pas devoir in- ;r sur la preuve des faits : je me con- erai d’observer que les soufres et les tes ne sont pas les seuls minéraux qu’on re regarder comme combustibles, qu’il 1 a beaucoup d’autres dont je ne ferai il ici l’éniimération , parce qu’il suffit de que leur degré de combustibilité dé- d ordinairement de la quantité de soufre 1s contiennent. Tous les minéraux com- ibles tirent donc originairement cette priélé , ou du mélange des parties ani- jes et végétales qui sont incorporées avec , ou des particules de lumière , de cha- ■ et d’air qui, par le laps de temps , se 1 fixées dans leur intérieur. Rien , selon , n’est combustible que ce qui a été for- jpar une chaleur douce, c’est-à-dire par mêmes élémens combinés dans toutes ces stances que le soleil éclaire et vivifie *, Voici une observation qui semble démontrer la lumière a plus d’affinité avec les substances bustibles qu’avec toutes les autres matières. On que la puissance réfractive des corps transpa- 829 ou dans celles que la chaleur intérieure de la terre fomente et réunit. C’est cette chaleur intérieure du globe de la terre que l’on doit regarder comme le vrai feu élémentaire; et il faut le distinguer de celui du soleil, qui ne nous parvient qu’a- vec la lumière, tandis que l'autre, quoique bien plus considérable, n’est ordinairement que sous la forme d’une chaleur obscure , et que ce n’est que dans quelques circonstan- ces, comme celles de l’électricité, qu’il prend de la lumière. Nous avons déjà dit que cette chaleur, observée pendant un grand nombre d’années de suite, est trois ou quatre cents fois plus grande en hiver, et vingt-neuf fois plus grande en été dans notre climat, que la chaleur qui nous vient du soleii. C’est une vérité qui peut paroître singulière , mais qui n’en est pas moins évidemment démontrée. Comme nous en avons parlé disertement , nous nous contenterons de remarquer ici que cette chaleur constante et toujours sub- sistante entre comme élément dans toutes les combinaisons des autres élémens , et qu’elle est plus que suffisante pour produire sur l’air les mêmes effets que le feu actuel ou la chaleur animale; que par conséquent cette chaleur intérieure de la terre* détruira l’élas- ticité de l’air et le fixera toutes les fois qu’é- tant divisé en parties très-petites, il se trou- vera saisi par cette chaleur dans le sein de la terre; que, sous cette nouvelle forme, il entrera , comme partie fixe , dans un grand nombre de substances, lesquelles contien- rens est proportionnelle à leur densité : le verre , plus dense que l’eau, a proportionnellement une plus grande force réfringente; et en augmentant la densité du verre et de l’eau, l’on augmente à me- sure leur force de réfraction Cette proportion s’ob- serve dans toutes les matières transparentes , et qui sont en même temps incombustibles. Mais les ma- tières inflammables , telles que l’esprit-de-vin, les huiles transparentes, l’ambre, etc., ont une puis- sance réfringente plus grande que les autres ; en sorte que l’attraction que ces matières exercent sur la lumière, et qui provient de leur masse ou den- sité, est considérablement augmentée par l’affinité particulière qu’elles ont avec la lumière. Si cela 11’étoit pas, leur force réfringente seroit, comme celle de toutes les autres matières, proportionnelle à leur densité; mais les matières inflammables at- tirent plus puissamment la lumière, et ce n’est que par cette raison qu’elles ont plus de puissance ré- fractive que les autres. Le diamant même ne fait pas une exception à cette loi ; on doit le mettre au nombre des matières combustibles , on le brute au miroir ardent. Il a avec la lumière autant d’affinité que les matières inflammables, car sa puissance réfringente est plus grande qu’elle ne devroit l’être à proportion de sa densité. 11 a en même temps la propriété de s’imbiber-de la lumière et de la con- server assez long-temps ; les phénomènes de sa ré- fraction doivent tenir en partie à ces propriétés. MINÉRAUX. INTRODUCTION. 33o dront dès lors des particules d’air fixe et de chaleur fixe, qui sont les premiers principes de la combustibilité : mais ils se trouveront en plus ou moins grande quantité dans les différentes substances , selon le degré d’affi- nité qu’ils auront avec elles; et ce degré dépendra beaucoup de la quantité que ces substances contiendront de parties animales et végétales, qui paroissent être la base de toute matière combustible. Si elles y sont abondamment répandues ou foiblement in- corporées, on pourra toujours les dégager de ces substances par le moyen de la com- bustion. La plupart des minéraux métalli- ques , et même des métaux , contiennent une assez grande quantité de parties com- bustibles; le zinc, l’antimoine, le fer, le cuivre, etc., brûlent et produisent une flamme évidente et très-vive , tant que dure la combustion de ces parties inflammables qu’ils contiennent : après quoi , si on conti- nue le feu, la combustion finie, commence la calcination, pendant laquelle il rentre dans ces matières de nouvelles parties d’air et de chaleur qui s’y fixent, et qu’on ne peut en dégager qu’en leur présentant quel- que matière combustible avec laquelle ces parties d’air et de chaleur fixes ont plus d’affinité qu’avec celles du minéral, aux- quelles en effet "elles ne sont unies que par force , c’est-à-dire par l’effort de la calcina- tion. U me semble que la conversion des substances métalliques en chaux et leur ré- duction pourront maintenant être très-clai- rement entendues, sans qu’il soit besoin de recourir à des principes secondaires ou à des hypothèses arbitraires, pour leur explica- tion. La réduction, comme je l’ai déjà insi- nué, n’est, dans le réel , qu’une seconde combustion, par laquelle on dégage les par- ties d’air et de chaleur fixes que la calcina- tion avoit forcées d’entrer dans le métal et de s’unir à sa substance fixe , à laquelle on rend en même temps les parties volatiles et combustibles que la première action du feu lui avoit enlevées. Après avoir présenté le grand rôle que l’air fixe joue dans les opérations les plus secrètes de la nature, considérons-le pendant quelques instans, lorsque, sous la forme élastique , il réside dans les corps : ses effets sont alors aussi variables que les degrés de son élasticité; son action, quoique toujours la même, semble donner des produits dif- férens dans les substances différentes. Pour en ramener la considération à un point de vue général , nous le comparerons avec l’eau et la terre , comme nous l’avons déjà com- paré avec le feu ; les résultats de cette cc j * paraison entre les quatre élémens s’ap ! «Cl queront ensuite aisément à tomes les s stances, de quelque nature qu’elles puiss H être , puisque toutes ne sont composées :i ® I de ces quatre principes réels. 1< Le plus grand froid connu ne peut j don truire le ressort de l’air , et la moindre jç 8 leur suffit pour cet effet, surtout lorsque' ®01 fluide est divisé en très-petites parties. IV d droit et qui se comprimeroit. Donc l’aire da, tenu dans l’eau n’y est pas simplement n et n’y conserve pas sa forme élastique, nà s te y est plus intimement uni dans un état *ir son ressort ne s’exerce plus d’une manîJ »rtît, à la vérité, faire partie constitutive ’animal qu’elle couvre, puisqu’elle se >étue par la génération , et qu’on la voit ; les petits coquillages qui viennent de re, comme dans ceux qui ont pris tout accroissement ; mais ce n’en est pas ns une substance terrestre, formée par écrélion ou l’exsudation du corps de imal : on la voit s’agrandir, s’épaissir anneaux et par couches à mesure qu’il ad de la croissance ; et souvent cette ma- e pierreuse excède cinquante ou soixante j, la masse ou matière réelle du corps de imal qui la produit. Qu’on se représente r un instant le nombre des espèces de animaux à coquilles, ou, pour les tous iprendre, de ces animaux à transsuda- it pierreuse ; elles sont peut-être en plus nd nombre dans la mer que ne l’est sur erre le nombre des espèces d’insectes : an se représente ensuite leur prompt ac- issement, leur prodigieuse multiplica- 1, le peu de durée de leur vie, dont is supposerons néanmoins le terme moyen ix ans 1 ; qu’ensuite on considère qu’il t multiplier par cinquante ou soixante le nbre presque immense de tous les indi- us de ce genre, pour se faire une idée toute la matière pierreuse produite en ans ; qu’enfin on considère que ce bloc a si gros de matière pierreuse doit être puent é d’autant de pareils blocs qu’il y a fois dix dans tous les siècles qui se sont lulés depuis le commencement du monde, l’on se familiarisera avec cette idée, ou tôt cette vérité d’abord repoussante, que îles nos collines, tous nos rochers de |rre calcaii'e, de marbre, de craie, etc. , i viennent originairement que de la dé- jjuille de ces petits animaux. On n’en urra douter à l’inspection des matières |mes, qui toutes contiennent encore des Iquilles ou des délrimens de coquilles très- Iémenl reconnoissables. Les pierres calcaires ne sont donc en jji. La plus longue vie des escargots, ou gros Laçons terrestres , s’étend jusqu’à quatorze ans. i peut présumer que les gros coquillages de mer lent plus long-temps : mais aussi les petits , et les fs-petits, tels que ceux qui forment le corail et us les madrépores | vivent beaucoup moins de mps; et c’est par cette raison que j’ai pris le bue moyen à dix ans. 333 très-grande partie que de l’eau et de l’air contenu dans l’eau , transformés par le filtre animal ; les sels, les bitumes, les huiles, les graisses de la mer, n’en t réh t que pour peu ou pour rien dans la composition de la co- quille : aussi la pierre calcaire ne con tient-elle aucune de ces matières. Cette pierre n’est que de l’eau transformée, jointe à quelques petites portions de ferre vitri- fiable, et à une très-grande quantité d’air fixe qui s’en dégage par la calcination. Cette opération produit les mêmes effets sur les coquilles qu’on prend dans la mer que sur les pierres qu’on tire des carrières ; elles forment également de la chaux , dans la- quelle on ne remarque d’autre différence que. celle d’un peu plus ou d’un peu moins de qualité. La chaux faite avec des écailles d’huître ou d’autres coquilles est plus foible que la chaux faite avec du marbre ou de la pierre dure; mais le procédé de la nature est le même’, les résultats de son opération les mêmes : les coquilles et les pierres perdent également près de moitié de leur poids par l’action du feu dans la calcination; l’eau qui a conservé sa nature en sort la première; après quoi l’air fixe se dégage, et ensuite l’eau fixe dont ces substances pierreuses sont composées, reprend sa pre- mière nature et s’élève en vapeurs poussées et raréfiées par le feu ; il ne reste que les parties les plus fixesrde cet air et de cette eau, qui peut-être sont si fort unies entre elles et à la petite quantité de terre fixe de la pierre, que le feu ne peut les séparer. La masse se trouve donc réduite de près de moitié , et se réduiroit peut-être encore plus si l’on donnoit un feu plus violent ; et ce qui me semble prouver évidemment que cette matière chassée hors de la pierre par le feu n’est autre chose que de l’air et de l’eau, c’est la rapidité, l’avidité avec laquelle cette pierre calcinée reprend l’eau qu’on lui donne , et la force avec laquelle elle la tire de l’atmosphère lorsqu’on la lui refuse. La chaux, par son extinction ou dans l’air ou dans l’eau, r.epi'end en grande partie la masse qu’elle avoit perdue par la calcina- tion ; l’eau avec l’air qu’elle contient , vient remplacer l’eau et l’air qu’elle contenoit précédemment : la pierre reprend dès lors sa première nature; car en mêlant sa chaux avec des détrimens d’autres pierres, on fait un mortier qui se durcit, et devient avec le temps unfe substance solide et pierreuse , comme celle dont on l’a composée. Après cette exposition, je ne crois pas qu’on puisse douter de la traniformation de DES ÊLÉMENS. PARTIE II. 334 MINÉRAUX. INTRODUCTION. ®'ve l’eau en terre ou en pierre par l’intermède des coquilles. Yoilà donc, d’une part, toutes les matières calcaires dont on doit rapporter l’origine aux animaux, et, d’autre part, toutes les matières combustibles qui ne pro- \iennent que dçs substances animales ou végétales : elles occupent ensemble un assez grand espace à la surface de la terre ; et l’on peut juger, par leur volume immense, combien la nature vivante a travaillé pour la nature morte, car ici le brut n’est que îeTmort. Mais les matières calcaires et les sub- stances combustibles, quelque grand qu’en soit le nombre , quelque immense que nous en paroisse le volume , ne font qu’une très- petite portion du globe de la terre , dont le fonds principal et la majeure et très-majeure quantité consiste eji une matière de la na- ture du verre ; matière qu’on doit regarder comme l’élément terrestre , à l’exclusion de toutes les autres substances auxquelles elle sert de base comme terre, lorsqu’elles se forment par le moyen ou par le détriment des animaux , des végétaux , et par la trans- formation des autres élémens. Non seule- ment cette matière première, qui est la vraie terre élémentaire, sert de base à touies les autres sublances, et en constitue les par- ties fixes , mais elle est en même temps le terme ultérieur auquel on peut les ramener et les réduire toutes. Avant de présenter les moyens que la nature et l’art peuvent employer pour opérer cette espèce de réduc- tion de toute substance en verre , c’est-à-dire en terre élémentaire, il est bon de recher- cher si les moyens que nous avons indiqués sont les seuls par lesquels l’eau puisse se transformer en substance solide. U me semble que le filtre animal la convertissant en pierre, le filtre végétal peut également la transformer, lorsque toutes les circon- stances se trouvent être les mêmes : la cha- leur propre des animaux à coquille étant un peu plus grande que celle des végétaux , et les organes de la vie plus puissans que ceux de la végétation, le végétal ne pourra produire qu’une petite quantité de pierres qu’on trouve assez souvent dans son fruit ; mais il peut convertir, et convertir réelle- ment en sa substance une grande quantité d’air, et une quantité encore plus grande d’eau : la terre fixe qu’il s’approprie, et qui sert de base à ces deux élémens, est en si petite quantité, qu’on peut assurer, sans craindre de se tromper, qu’elle ne fait pas la centième partie de sa masse ; dès lors le végétal n’est presque entièrement composé «en la te tes aient ligue Ml ipd’a que d’air et d’eau transformés en bois ; stance solide qui se réduit ensuite en | «d par la combustion ou la putréfaction, mit o doit dire la même chose des animaux fixent et transforment non seulement et l’eau , mais le feu , en plus grande qi tité que les végétaux. U me paroit ort à la distance , ne peut pas être expri- mée par deux termes. Ce qu’il fallait dé- no ntrer. SECONDE DÉMONSTRATION. La même expression ijx 2 dz'ijx 4 , si a; devient très-grand , pourra se réduire à i/x 2 , et si x devient très-petit, elle se réduira à dü i/fA? de sorte quesi î/x 2 dz i/xz, l’exposant n doit être un nombre compris entre 2 et 4 ; cependant ce même exposant n doit nécessairement renfermer x, puisque la quantité d’attraction doit , de façon ou d’au- tre , être mesurée par la distance : cette ex- pression prendra donc alors une forme comme i/x adr tjx tv~ijx 4 ou — ijx-\-r; donc une quantité, qui doit être nécessai- rement un nombre compris entre 2 et 4, pourrait cependant devenir infinie, ce qui est absurde; donc l’attraction ne peut pas être exprimée par deux termes. Ce qu’il fa l/oit démontrer. On voit que les démonstrations seraient les mêmes contre toutes les expressions pos- sibles qui seraient composées de plusieurs termes ; donc la loi d’attraction ne peut être exprimée que par un seul terme. {Add. Buff.) * Je ne voulois rien ajouter à ce que j’ai dit au sujet de la loi de l’attraction, ni faire aucune réponse au nouvel écrit de M. Clairaut : niais comme je crois qu’il est utile pour les sciences d’établir d’une manière certaine la proposition que j’ai avancée , savoir que la loi de l’attraction , et même toute autre loi physique, ne peut jamais être exprimée que par un seul terme, et qu’une nouvelle vé- rité de cette espèce peut prévenir un grand nombre d’erreurs et de fausses applications dans les sciences physico-mathématiques, j’ai cherché plusieurs moyens de la montrer. O11 a vu , dans mon mémoire , les raisons métaphysiques par lesquelles j’établis que la mesure d’une qualité physique et générale dans la nature est toujours simple ; que la loi qui représente celte mesure ne peut donc jamais être composée; qu’elle n’est réelle- ment que l’expression de l’effet simple d’une qualité simple ; que l’on ne peut donc ex- primer cette loi par deux termes , parce qu’une qualité qui est une ne peut jamais avoir deux mesures. Ensuite , dans l’addi- tion à ce mémoire , j’ai prouvé démonstrati- vement cette même vérité par la réduction à l’absurde et par le calcul : ma démonstra- tion est vraie; car il est certain en général que si l’on exprime la loi de l’attraction par une fonction de la distance, et que cette fonction soit composée de deux ou plusieurs termes, comme i/xtnAz i/x 1 2 dr i/#/-, etc., iet que l’on égale celte fonction à une quan- tité constante A pour une certaine distance ; 344 il est certain , dis-je , qu’en résolvant celle équation, la racine x aura des valeurs ima- ginaires dans tous les cas, et aussi des va- leurs réelles, différentes dans presque tous les cas , et que ce n’est que dans quelques cas, comme dans celui de i/Æ2-(-i/a:4r:i, où il y aura deux racines réelles égales, dont l’une sera positive et l’autre négative. Cette exception particulière ne détruit donc pas la vérité de ma démonstration, qui est pour une fonction quelconque; car si eu gé- néral l’expression de la loi d’attraction est i/xx-\- mx" , l’exposant n ne peut pas être négatif et plus grand que i , puisqu’alors la pesanteur deviendroit infinie dans le point de contact : l’exposant n est donc nécessai- rement positif, et le coefficient m doit être négatif pour faire avancer l’apogée de la lune; par conséquent le cas particulier i/xx-\- i/x 4 ne peut jamais représenter la loi de la pesanteur ; et si on se permet une fois d’exprimer cette loi par une fonc- tion de deux termes, pourquoi le se- cond de ces termes seroit-il nécessairement positif? Il y a, comme l’on voit, beaucoup de raisons pour que cela ne soit pas , et aucune raison pour que cela soit. Dès le temps que M. Clairaut proposa, pour la première fois, de changer la loi de l’attraction et d’y ajouter un terme , j’avois senti l’absurdité qui résultoit de cette sup- position , et j’avois fait mes efforts pour la faire sentir aux autres : mais j’ai depuis trouvé une nouvelle manière de la démon- trer, qui ne laissera, à ce que j'espère, au- cun doute sur ce sujet important. Voici mon raisonnement, que j’ai abrégé autant qu’il m’a été possible : Si la loi de l’attraction, ou telle autre loi physique que l’on voudra, pouvoit être ex- primée par deux ou plusieurs termes, le pre- mier terme étant , par exemple, i jxx, il seroit nécessaire que le second terme eût un coefficient indéterminé, et qu’il fût, par exemple, i/mx^; et de même, si cette loi étoit exprimée par trois termes , il y auroit Dm Ê 1er la eriet deux coefficiens indéterminés, l’un au se- cond , et l’autre an troisième terme , etc. Dès lors cette loi d’attraction, qui seroit ex- primée par deux termes i/xx-\- i/mx^ , renfermeroit donc une quantité m qui entre- roit nécessairement dans la mesure de la force. MIN E RÀU X . INTRODUCTION. Or , je demande ce que c’est que ce coe ficient m : il est clair qu’il ne dépend ni t la masse, ni de la distance; que ni l’une i l’autre ne peuvent jamais donner sa valeur comment peut-on donc supposer qu’il y a en effet une telle quantité physique? exist t-il dans la nature un coefficient comme t 4 , un 5, un 6 , etc.? et n’y a-t-il pas ( l’absurdité à supposer qu’un nombre puis; exister réellement, ou qu’un coefficient puis: 1,11 ' être une qualité essentielle à la matière! faudroit pour cela qu’il y eût dans la naïui des phénomènes purement numériques, i du même genre que ce coefficient m ; sai cela, il est impossible d’en déterminer valeur, puisqu’une quantité quelconque i peut jamais être mesurée que par une autitrlf quantité de même genre. Il faut donc qi M. Clairaut commence par nous prouvi que les nombres sont dos êtres réels ac.tue lement exislans dans la nature, ou que ); r‘" coefficiens sont des qualités physiques , s veut que nous convenions avec lui que T“" loi d’atlraclion , ou toute autre loi physiquqP e: puisse être exprimée par deux ou plusiemS termes. Si l’on veut une démonstration plus pai | ticulière, je crois qu’ou peut en donner uni qui sera à la portée de tout le monde; c’eJ que la loi de la raison inverse du carré cl la distance convient également à une sphèi I et à toutes les particules de matière doi | cette sphère est composée. Le globe de i j terre exerce son attraction dans la raisol inverse du carré de la distance; et tout< les particules de matière dont ce globe e composé exercent aussi leur attraction dar m cette même raison , comme Newton l’a dé !fC0I: montré : mais si l’on exprime cette loi d l’attraction d’une sphère par deux termes la loi de l’attraction des particules qui corn •? posent cette sphère ne sera point la mêm que celle de la sphère; par conséquent cett loi , composée de deux termes , ne sera pi générale , ou plutôt ne sera jamais Ja loi d la nature. Les raisons métaphysiques, mathémali ques , et physiques , s’accordent donc toute à prouver que la loi de l’attraction ne peu être exprimée que par un seul terme, et ja mais par deux ou plusieurs termes ; c’est 1; ^ proposition que j’ai avancée, et que j’avoi à démontrer. ( Supp . Buff. ) L V V’fc -*/*,*5-3 PARTIE EXPÉRIMENTALE. )epuis vingt-cinq ans que j’ai jeté sur le ier mes idées sur la théorie de la terre , ur la nature des matières minérales dont lobe est principalement composé , j’ai eu satisfaction de voir cette théorie confir- î par le témoignage unanime des navi- turs, et par de nouvelles observations j’ai eu soin de recueillir. Il m’est aussi u , dans ce long espace de temps, quel- s pensées neuves dont j’ai cherché à con- er la valeur et la réalité par des expé- ices : de nouveaux faits acquis par ces ériences , des rapports plus ou moins éloi- js , tirés de ces mêmes faits ; des réflexions îonséquence ; le tout lié à mon système éral, et dirigé par une vue constante i les grands objets de la nature; voilà ce que je crois devoir présenter aujourd’hui à mes lecteurs, surtout à ceux qui, m’ayant honoré de leur suffrage , aiment assez l’his- toire naturelle pour chercher avec moi les moyens de l’étendre et de l’approfondir. Je commencerai par la partie expérimen- tale de mon travail , parce que c’est sur les résultats de mes expériences que j’ai fondé tous mes raisonnemens , et que les idées même les plus conjecturales, et qui pour- roient paroître trop hasardées, ne laissent pas d’y tenir par des rapports qui seront plus ou moins sensibles à des yeux plus ou moins attentifs , plus ou moins exercés, mais qui n’échapperont pas à l’esprit de ceux qui savent évaluer la force des inductions , et apprécier Ia‘ valeur des analogies. PREMIER MÉMOIRE. Expériences sur le progrès de la chaleur dans les corps. ’ai fait faire dix boulets de fer forgé et u : pouces . remicr d’un demi -pouce de diamètre.. , . 1/2 îcond de 1 pouce 1 ’oisième de 1 pouce 1/2 1 1/2 wâtrième de 2 pouces . 2 jncfuième de 2 pouces 1/2 2 i]i xième de 3 pouces 3 eptième de 3 pouces 1/2 3 1J2 uitième de 4 pouces 4 euvième de 4 pouces 1J2 4 1/2 ixième de 5 pouces 5 e fer venoit de la forge de Cbameçon, ; Châtillon-sur-Seine ; et comme tous les lets ont été faits du fer de cette même e , leurs poids se sont trouvés à très-peu > proportionnels aux volumes. ; boulet d’un demi-pouce pesoit 190 grains, ou os 46 grains. Jî boulet de 1 pouce pesoit i5î2 grains, ou jces 5 gros 10 grains. î boulet de 1 pouce 1/2 pesoit 5i36 grains, ou ices 7 gros 24 grains. 3 boulet de 2 pouces pesoit 12,173 grains, ou re 5 qnces 1 gros 5 grains. i! Le boulet de 2 pouces 1/2 pesoit 23,781 grains, ou 2 livres g onces 2 gros 21 grains. Le boulet de 3 pouces pesoit 4x,o85 grains, ou 4 livres 7 onces 2 gros 4& grains. Le boulet de 3 pouces r/2 pesoit 65,254 grains, ou 7 livres 1 once 2 gros 22 grains. Le boulet de 4 pouces pesoit 97,388 grains , ou xo livres 9 onces 44 grains. Le boulet de 4 pouces 1/2 pesoit 138,179 grains, ou 14 livres i5 onces 7 gros 11 grains. Le boulet de 5 pouces pesoit 190,211 grains, ou 20 livres ip onces 1 gros 5g grains. Tous ces poids ont été pris justes avec de très-bonnes balances , en faisant limer peu à peu ceux des boulets qui se sont trouvés un peu trop forts. Avant de rapporter les expériences , j’ob- serverai : i° Que, pendant tout le temps qu’on les a faites, le thermomètre, exposé à l’air libre, éloit à la congélaiion ou à quelques degrés au dessous 1 ; mais qu’on a laissé refroidir les boulets dans une cave où le thermomètre étoit a peu près à dix degrés au dessus de la x. Division de Réaumuf. 346 MINÉRAUX. INTRODUCTION. congélation , c’est-à-dire au degré de la tem- pérature des caves de l’Observatoire; et c’est ce degré que je prends ici pour celui de la température actuelle de la terre. 20 J’ai cherché à saisir deux instans dans le refroidissement : le premier où les boulets cessoient de brûler, c’est-à-dire le moment où on pouvoiî les toucher et les tenir avec la main pendant une seconde, sans se brûler; le second temps de ce refroidissement étoit celui où les boulets se sont trouvés refroi- dis jusqu’au point de la température actuelle, c’est-à-dire à dix degrés au dessus de la con- gélation. Et, pour connoître le moment de ce refroidissement jusqu’à la température actuelle, on s’est servi d’autres boulets de comparaison de même matière et de mêmes diamètres, qui n’avoient pas été chauffés , et que l’on touchait en même temps que ceux qui avoient été chauffés. Par cet attouche- ment immédiat et simultané de la main ou des deux mains sur les deux boulets on pou- voit juger assez bien du moment où ces bou- lets étoient également froids : cette manière simple est non seulement plus aisée que le thermomètre , qu’il eût été difficile d’appli- quer ici , mais elle est encore plus précise , parce qu’il ne s’agit que de juger de l’éga- lité et non pas de la proportion de la cha- leur, et que nos sens sont meilleurs juges que les insîrumens de tout ce qui est abso- lument égal ou parfaitement semblable. Au reste , il e i plus aisé de reconnoître l’instant où les boulets cessent de brûler, que celui où ils se sont refroidis à la température ac- tuelle , parce qu’une sensation vive est tou- jours plus précise qu’une sensation tempérée, attendu que la première nous affecte d’une manière plus forte. 3° Comme le plus ou le moins de'poli ou de brut sur le même corps fait beaucoup à la sensation du toucher, et qu’un corps poli semble èlre plus froid s’il est froid, et plus chaud s’ii est chaud, qu’un corps brut de même matière, quoiqu’ils le soient tous deux également , j’ai eu soin que les boulets froids fussent bruts et semblables à ceux qui avoient été chauffés , dont la surface étoit semée de petites éminences produites par l’action du feu. EXPÉRIENCES. i. Le boulet d’un demi-pouce a été chauffé à blanc en 2 minutes. Il s’est refroidi au point de le tenir dans la main en 12 minutes. Refroidi au point de la température actuelle en 39 minutes. 2. Le boulet de 1 pouce a été chauffé à blanc 5 minutes 1/2. Il s’est refroidi au point de le tenir dans main en 35 minutes 1/2. Refroidi au point de la température a c1u< en 1 heure 33 minutes. 3. Le boulet de ï pouce 1/ 2 a été chauffé à bl; en 9 minutes. Il s’est refroidi au point de le tenir dans main en 58 minutes. Refroidi au point de la température actiii en 2 heures 25 minutes. 4- Le boulet de 2 pouces a été chauffé à blanc i3 minutes. Il s’est Tefroidi au point de le tenir danJ [fll main en 1 heure 20 minutes. Refroidi au point de la température acta en 3 heures 16 minutes. 5. Le boulet de 2 pouces 1/2 a été cliauffé à 1^ en 16 minutes. Il s’est refroidi au point de le tenir danjj main en 1 heure \ % minutes. Refroidi au point de la température acfo en 4 heures 3o minutes. 6. Le boulet de 3 pouces a été chauffé à blanc mi 19 minutes 1/2. Il s’est refroidi au point de le tenir dan main en 2 heures 7 minutes. Refroidi au point de la température acttüj en 5 heures 8 minutes. Le boulet de 3 pouces 1/2 a été chauffé à b .en 23 minutes 1/2. Il s’est refroidi au point de le tenir dan «y. main en 2 heures 36 minutes. Refroidi au point de la température adti)|Jy en 5 heures 56 minutes. Le boulet de 4 pouces a été chauffé à blam 27 minutes 1/2. Il s’est refroidi au point de le tenir daril main en 3 heures 2 minutes. Refroidi au point de la température acti en 6 heures 55 minutes. Le boulet de 4 pouces 1/2 a été chauffé à ti en 3i minutes. Il s’est refroidi au point de le tenir dara main en 3 heures 2 5 minutes. Refroidi au point de la température acti en 7 heures 46 minutes. . Le boulet de 5 pouces a été chauffé 5 hlan 34 minutes. Il s’est refroidi au point de le tenir dsffl main en 3 heures 52 minutes. Refroidi au point de la température acti en 8 heures 42 minutes Hlontl La différence la plus constante que puisse prendre enlre chacun des termes; expriment le temps du refroidissement, puis l’instant où l’on tire les boulets du jüsqu’à celui où on peut les toucher san brûler, se trouve être de vingt-quatre mîtes; car en supposant chaque terme âiilwii mente de vingt-quatre, on aura 12', i 60', 84', io3', i32', 106', 180', 204', 2 Et la suite des temps réels de ces ref dissemens , trouvés par les expériences j cédentes , est 12', 35' r/2, 58', 80', | 127', i56', 182', 2o5', 232'; ce qui apj N ara ,*u «étér Vérifié on «tauc; PARTIE EXPERIMENTALE. ïe ïa première aillant que l’expérience approcher du calcul. 3 même la différence la plus cons! ante l’on puisse prendre enire chacun des es du refroidissement jusqu’à ia tempé- ’e actuelle , se trouve être de 54 mi- s ; car , en supposant chaque terme aug- é de 54, on aura 89', 9a', 147'» 201', , 809', 363', 417', 471', 525'. ; ia suite des temps réels de ce refroidis- nt , trouvés par les expériences précé- es , est 39', 93', i45'j 196', 248', 3oS', 4i5', 466', 5 22'; ce qui approche aussi coup de la première suite supposée, ù fait une seconde et une troisième fois aêmes expériences sur les mêmes bou- ntais j’ai vu que je ne pouvois compter sur les premières, parce que je me suis eu qu’à chaque fois qu’on chauffôit les jets , ils perdoient considérablement de s; car boulet d’un demi -pouce, après avoir été ’fé trois fois , avoit perdu environ la dix-hui- partie de son poids. I boulet de i pouce, après avoir été chauffé fois , avoit perdu environ la seizième partie de oids. boulet de i pouce 1/2 , après avoir été chauffé fois, avoit perdu la quinzième partie de son boulet de 2 pouces , apres avoir été chauffé fois , avoit perdu à peu près la quatorzième e de son poids. boulet de 2 pouces 1/2 , après avoir été chauffé fois , voit perdu à peu près la treizième partie n poids. boulet de 3 pouces , après avoir été chauffé fois , avoit perdu à peu près la treizième partie n poids. houlet de 3 pouces 1/2, après avoir été chauffé fois, avoit perdu encore un peu plus de la ème partie de son poids. boulet de 4 pouces, après avoir été chauffé fois , avoit perdu la douzième partie et demie n poids. boulet de 4 pouces 1/2 , après avoir été chauffé fois, avoit perdu un peu plus de la douzième e et demie de son poids. boulet de 5 pouces , après avoir été chauffé fois , avoit perdu à très-peu près la douzième e de son poids ; car il pesoit , avant d’avoir été ffé, 20 livres 10 onces 1 gros 5g grains1. Je 11’ai pas eu occasion de faire les mêings riences sur des boulets de fonte de fer ; mais e Montbeillard, lieutenant-colonel du régiment d-Artillerie , m’a communiqué la note suivante y supplée parfaitement. On a pesé plusieurs Pts , avant de les chauffer, qui se sont trouvés oids de 27 livres et plus. Après l’opération, nt été réduits à 24 livres 1/4 et 24 livres 1/2. 1 vérifié sur une grande quantité de boulets , plus on les a chauffés, et plus ils ont aug- tc de volume et diminué de poids; enfin sur ante mille boulets chauffés et âpés >our les ire au calibre des canons, on a perdu dix mille, 347 On voit que celle perle sur chacun des boulets est extrêmement considérable, et qu’elle paroît aller en augmentant, à mesure que les .boulets sont plus gros ; ce qui vient, à ce que je présume, de ce que l’on est obligé d’appliquer le feu violent d’autant plus long-temps que les corps sont plus grands; en tout, celte perte de poids non seulement est occasionée par le dessèche- ment des parties de la surface qui se rédui- sent en scories, et qui tombent 'dans le feu, mais encore par une espèce de dessèchement ou de calcination intérieure, qui diminue la pesanteur des parties constituantes du fer; en sorte qu’il paroît que le feu violent rend le fer spécifiquement plus léger à cha- que fois qu’on le chauffe. Au reste, j’ai trouvé, par des expériences ultérieures, que cette diminution de pesanteur varie beau- coup , selon ïa différente qualité du fer. Ayant donc fait faire six nouveaux bou- lets, depuis .un demi -pouce jusqu’à trois pouces de diamètre , et du même poids que les premiers , j’ai trouvé les mêmes progres- sions tant pour l’entrée que pour la sortie de la chaleur, et je me suis assuré que le fer s’échauffe et se refroidit en effet comme je viens de l’exposer. Un passage de Newton a donné naissance à ces expériences. « Globus ferri candentis , digitum unurn « latus , calorem suum omnem spatio horæ «imius, in aère cônsistens , vix amitleret. « Globus aiitem major calorem diutiùs con- « servaret in ratione diametri . prôptereà « quôd superficis (ad cujus mensuram per « contactent aëris ambientis réfrigéra! ur) in « ilia ratione minor est pro qüanîitate rna- « teriæ suæ calidæ inclusse ; ideoque globus « ferri candentis linic terræ æqualis, id est, « pecles plus minus 40000000 latus , diebûs « totidem et idcirco annis 5oooo , vix re- « frigesceret. Suspicor tara en quôd duratio « calorïsob causas latentes augeatur in minori « ratione quant eâ diametri ; et optarimratio- « tient veram per expérimenta mvestigari. » Newton désiroit donc qu’on fit les expé- riences que je viens d’exposer; et je me suis déterminé à les tenter, non seulement parce que j’en avois besoin pour des vues sembla- bles aux siennes, mais encore parce que j’ai cru m’apercevoir que ce grand homme pou- vait s’être trompé en disant que la durée de la chaleur devoit n augmenter, pàè l’effet des causes cachées , qu’en moindre raison que celle du diamètre: il m’a paru au contraire, c’est-à-dire an quart; en sorte qu’à tous égards , cette pratique est mauvaise. 1 348 MINÉRAUX. INTRODUCTION. en y réfléchissant , que ces causes cachées ne pouvoient que rendre cette raison plus grande au lieu de la faire plus petite. U est certain, comme dit Newton, qu’un globe plus grand conserveroit sa chaleur plus long-temps qu’un plus petit , en raison du diamètre, si on supposoit ces globes com- posés d’une matière parfaitement perméable à la chaleur, en sorte que la sortie de la cha- leur fût absolument libre, et que les parti- cules ignées ne trouvassent aucun obstacle qui pût les arrêter ni changer le cours de leur direction. Ce n’est que dans cette sup- position mathématique que la durée de la chaleur seroit en effet en raison du diamè- tre ; mais les causes cachées dont parle New- ton, et dont les principales sont les obsta- cles qui résultent de la perméabilité non absolue , imparfaite et inégale de toute ma- tière solide, au lieu de diminuer le temps de la durée de la chaleur, doivent au con- traire l’augmenter. Cela m’a paru si clair, même avant d’avoir tenté mes expériences, que je serois porté à croire que Newton, qui voyoit clair aussi jusque dans les choses mêmes qu’il ne faisoit que soupçonner, n’est pas tombé dans cette erreur, et que le mot minoi'i ratione au lieu de majori n’est qu’une faute de sa main ou de celle d’un copiste , qui s’est glissée dans toutes les éditions de son ouvrage , du moins dans toutes celles que j’ai pu consulter. Ma conjecture est d’au- tant mieux fondée , que Newton paroît dire ailleurs précisément le contraire de ce qu’il dit ici ; c’est dans la onzième question de son Traité d’optique: « Les corps d’un grand volume, dit-il, ne conservent- ils pas plus long-temps (ce mot plus long-temps ne peut signifier ici qu’en raison plus grande que celle du diamètre) leur chaleur, parce que leurs parties s’échauffent réciproquement? et un corps vaste, dense et fixe, étant une fois échauffé au delà d’un certain degré, ne peut-il pas jeler de la lumière en telle abon- dance, que par l’émission et la réaction de sa lumière , par les réflexions et les réfrac- tions de ses rayons au dedans de ses pores , il devienne toujours plus chaud , jusqu’à ce qu’il parvienne à un certain degré de cha- leur qui égale la chaleur du soleil ? et le so- leil et les étoiles fixes , ne sont-ce pas de vastes terres violemment échauffées, dont la chaleur se conserve par la grosseur de ces corps, et par l’action et la réaction récipro- ques entre eux et la lumière qu’ils jettent, leurs parties étant d’ailleurs empêchées de s’évaporer en fumée , non seulement par leur fixité, mais encore par le vaste poids et la grande densité des atmosphères, qui, ] sant de tous côtés , les compriment très-f tement , et condensent les vapeurs et exhalaisons qui s’élèvent de ces corps là Par ce passage, on voit que Newton n seulement est ici de mon avis sur la du; de la chaleur, qu’il suppose en raison p grande que celle du diamètre, mais enc< j qu’il renchérit beaucoup sur cette augm tation en disant qu’un grand corps, 1 cela même qu'il est grand , peut augmen sa chaleur. Quoi qu’il en soit, l’expérience a plei ment confirmé ma pensée. La durée dfl chaleur , ou , si l’on veut, le temps emp| au refroidissement du fer , n’est point plus petite , mais en plus grande raison < celle du diamètre; il n’y a, pour s’en asi rer, qu’à comparer les progressions s vantes : DIAMÈTRES. i, 2, 3, 4, 5,6,7, S, 9, io dei pouces.' Temps du premier refroidissement,! posés en raison du diamètre : 12', 24', 3 48', 60', 72', 84', 96', 108', 120'. Temps réels de ce refroidissement, tri vés par l’ expérience : i2,,i35'i/2, j 8o', io2' , 127', i56', 182', 2o5', 282'. Temps du second refroidissement , s| posés en raison du diamètre : 3g', 78', 11 i56' , 195', 284', 278', 3i2( , 35T, 3' Temps réels de ce second refroidissenu trouvés par l’expérience : 39', *93', 14 196', 248', 3oS', 356', 4i5', 466'. 5; On voit , en comparant ces progressi terme à terme, que dans tous les cas la rée de la chaleur non seulement n’est en raison plus petite que celle du diain (comme il est écrit dans Newton), r qu’au contraire cette durée est en rai considérablement plus grande. Le docteur Martine, qui a fait un ouvrage sur les thermomètres , rapport! passage de Newton, et il dit qu’il a’ commencé de faire quelques expériei qu’il se proposoit de pousser plus loin ; c croit que l’opinion de Newton est confo à la vérité , et que les corps sembla conservent en effet la chaleur dans la ] portion de leurs diamètres; mais que qt au doute que Newton forme, si , dans grands corps, cette proportion n’est j ^ moindre que celle des diamètres, il n croit pas suffisamment fondé. Le doc Martine avoit raison à cet égard ; mai: même temps il avoit tort de croire, d’a]| ^ PARTIE EXPÉRIMENTALE. 349 rton , que tous les corps semblables, so- 5 ou fluides , conservent leur chaleur en )n de leurs diamètres. Il rapporte, à la té, des expériences faites avec de l’eau ; des vases de porcelaine, par lesquelles ouve que les temps du refroidissement [’eau sont presque proportionnels aux îètres des vases qui la contiennent : mais » venons de voir que c’est par cette rai- mème que, dans les corps solides, la e se passe différemment; car l’eau doit regardée comme une matière presque freinent perméable à la chaleur, puis- c’est un fluide homogène , et qu’aucune es parties ne peut faire obstacle à la cir- lion de la chaleur. Ainsi , quoique les iriences du docteur Martine donnent u près la raison du diamètre pour lere- lissement de l’eau , on ne doit en rien :!ure pour le -refroidissement des corps aintenant, si l’on vouloil chercher avec ton combien il faudrait de temps à un gros comme la terre pour se refroidir , ouveroit, d’après les expériences pré- ntes, qu’au lieu de cinquante mille ans assigne pour le temps du refroidisse- de la terre jusqu’à la température ac- , il faudrait déjà quarante-deux mille cent soixante-quatre ans et deux cent t-un jours pour la refroidir seulement au point où elle cesserait de brûler, îatre vingt-seize -mille six cent soixante- ns et cent trente-deux jours pour la ùdir à la température actuelle, ir la suite des diamètres des globes étant 3,4, 5 N demi-pouces , celle des ds du refroidissement, jusqu’à pouvoir ber les globes sans se brûler, sera 12 , 60, 84, 108 24 N — 12 min. et amètre de la terre étant de 2865 lieues, au degré, ou de 6037980 toises de eds. a faisant la lieue de 2282 toises, ou de 17580 pieds, ou de 94x461920 demi- es, nous avons N — 941461920 demi- [pes ; et 24 N — 12 — 22595086068 , c’est-à-dire quarante-deux mille neuf soixante-quatre ans et deux cent vingt- ours pour le temps nécessaire au refroi- ment d’un globe gros comme la terre , uuent jusqu’au point de pouvoir le tou- sans se brûler, t de même la suite des temps du refroi- ;ment jusqu’à la température actuelle, 39', 93', 147', 201' , 255' 54 N c5'. t comme N est toujours — 94x461920 demi-pouces", nous aurons 54 ÜV — i5r=: 50888943662 minutes, c’est-à-dire quatre- vingt-seize mille six cent soixante-dix ans et cent trente-deux jours pour le temps néces- saire au refroidissement d’un globe gros comme la terre , au point de la tempéra- ture actuelle. Seulement on pourrait croire que celui du refroidissement de la terre devoit encore être considérablement augmenté , parce que l’on imagine que le refroidissement ne s’o- père que car le contact de l’air, et qu’il y a une grande différence entre le temps du refroidissement dans l’air et le temps du re- froidissement dans le vide ; et comme l’on doit supposer que la terre et l’air se seraient en même temps refroidis dans le vide, on dira qu’il faut faire état de ce surplus de temps : mais il est aisé de faire voir que cette différence est très-peu considérable ; car , quoique la densité du milieu dans le- quel un corps se refroidit , fasse quelque chose sur la durée du refroidissement , cet effet est bien moindre qu’on ne pourrait l’imaginer, puisque dans le mercure, qui est onze mille fois plus dense que l’air, il ne faut , pour refroidir les corps qu’on y plonge, qu’environ neuf fois autant de temps qu’il en faut pour produire le même refroidissement dans l’air. La principale cause du refroidissement n’est donc pas le contaet du milieu ambiant, mais la force expansive qui anime les par- ties de la chaleur et du feu, qui les chasse hors des corps où elles résident , et les pousse directement du centre à la circon- férence. En comparant, dans les expériences pré- cédentes, les temps employés à chauffer les globes de fer avec les temps nécessaires pour les refroidir, on verra qu’il faut environ la sixième partie et demie du temps pour les chauffer à blanc de ce qu’il en faut pour les refroidir au point de pouvoir les tenir à la main, et environ la quinzième partie et demie du temps qu’il faut pour les refroidir au point de la température actuelle 1 ; en sorte qu’il y a encore une très-grande cor- rection à faire dans le texte de Newton , sur l’estime qu’il fait de la chaleur que le soleil a 1. Le boulet de 1 pouce et celui d’un demi-pouce surtout ont été chauffés en bien moins de temps , et ne suivent point cette proportion de i5 1/2 à 1 , et c’est par la raison qu’étant très-petits et placés dans un grand feu, la chaleur les pénétroit , pour ainsi dire, tout à coup; mais, à commencer par les boulets de 1 pouce 1/2 de diamètre, la propor- tion que j’établis ici se trouve assez exacte pour qu’on puisse y compter. 35o MINÉRAUX . INTRODUCTION , communiquée à îa comète, de 1680 : car cette comèie n’ayant été exposée à la vio- lente chaleur du soleil que pendant un petit temps , elle n’a pu la recevoir qu’en propor- tion de ce temps , non pas en entier , comme Newton paroît le supposer dans le passage que je vais rapporter. « Est calor solis ut radiorum densitas , « hoc est reciprocè ut quadratum distantiæ « locorum à sole ; ideoque , cùm distanlia co- « metæ à centro solis december 8 , ubi in « perihelio versabatur , esset ad distantiam « terræ à centro solis ut 6 ad xooo circiler, « calor solis apud cometam eo terapore erat « ad calorem solis æstivi apud nos ut 1000000 « ad 36 , sed 28000 ad x. Sed calor aquæ « ebullientis est quasi tripîo major quàm « calor quem terra arida concipit ad æsti- « vum solem, ut expertus siim, etc. Calor « ferri candentis ( si rectè conjector ) quasi « triplo veî quadruplé major quàm calor « aquæ ebullientis ; ideoque calor quem « terra arida apud cometam in perihelio «versantem ex radiis solaribus concipere « posset, quasi 2000 vicihus major quàm « calor ferri candentis. Tanlo autem calore « vapores et exhalationes , omnisque materia « volaiilis, stalim consumi ac dissipari de- « ps sent. « Cometa igitur in perihelio suo calorem « immensum ad solem concepit , et calorem « ilium diutissimè conservare potest. » Je remarquerai d’abord que Newton fait ici la chaleur du fer rougi beaucoup moindre qu’elle n’est en effet, et qu’il le dit lui- même dans un mémoire qui a pour titre : Échelle de la chaleur , et qu’il a publié dans les Transactions philosophiques de 1701 , c’est-à-dire plusieurs années après la publi- cation de son livre des Principes. On voit dans ce mémoire, qui est excellent, et qui renferme le germe de toutes les idées sur lesquelles on a depuis construit les thermo- mètres ; on y voit, dis je, que Newton, après des expériences très-exactes, fait la chaleur de l’eau bouillante trois fois plus grande que celle du soleil d’été ; celle de l’étain fondant, six fois plus grande; celle du plomb fondant , huit fois plus grande ; celle du régule fondant , douze fois plus grande; et celle d’un feu de cheminée or- dinaire, seize ou dix-sept fois plus grande que celle du soleil d’été : et de là on ne peut s’empêcher de conclure que la chaleur du fer rougi à blanc ne soit encore bien plus grande , puisqu’il faut un feu constamment animé par le soufflet pour chauffer le fer à ce point. Newton paroît lui -même le sentir, et donner à entendre que cette chaleur t fer rougi paroît être sept ou huit fois pli grande que celle de l’eau bouillante. Ainsi faut, suivant Newton lui-même , chang trois mots au passage précédent, et lire « Calor ferri candentis est quasi triplé (se « tulô) veî quadruplé (octuplé) major qui « calor aquæ ebullientis; ideoque calor api « cometam in perihelio versantem qu; « 2000 ( 1000) vicihus major quàm cal, « ferri candentis. » Cela diminue de moitil L chaleur de cette comète , comparée à ce L du fer rougi à blanc. Mais cette diminution , qui n’est, que i lative, n’est rien en elle-même, ni rie* comparaison de la diminution réelle et fe grande qui résulte de notre première cal déralion; il faudrait, pour que la com eut reçu cette chaleur mille fois plus gr® cpie celle du fer rougi, qu’elle eut séjoiii pendant un temps très-long dans le vË nage du soleil , au lieu qu’elle n’a fait! passer très-rapidement , surtout à la f petite distance, sur laquelle seule néann» S(, Newton établit son calcul de comparar Elle étoit , le 8 décembre 1680, à 6/hLj, ri p ta rîïclnnr'é dp la fpvrp an rpnti’p rln tn# tu, de la distance de la terre au centre du sol mais la veille ou le lendemain , c’est-à-< vingt-quatre heures avant et vingt-qia heures après , elle étoit déjà à une distj six fois plus grande, et où la chaleur é par conséquent trente-six fois moindre. Si l’on vouloit donc connoître la q| tité de cette chaleur communiquée I comète par le soleil, voici comment: pourrait faire cette estimation assez ju et en faire en même temps la compara: avec celle du feu ardent, au moyen de eild1 expériences. Nous supposerons comme un fait, cette comète a employé six cent soixant heures à descendre du point où elle encore éloignée du soleil d’une disl. égale à celle de la terre à cet astre, au point la comète recevoit par conscq: une chaleur égale à celle que la terre flj du soleil , et que je prends ici pour l’un nous supposerons de même que la corni employé six cent soixante-six autres lie à remonter du point le plus bas de son rihéiie à cette même distance ; et, snppo Or, aussi son mouvement uniforme, ou t1 que la comèie étant au point le plus ha son périhélie, c’est-à-dire à 6/1000 de tance de la terre au soleil , la chaleur qi a reçue dans ce moment étoit vingt- mille sept cent soixante-seize fois plus gri que celle que reçoit la terre : en donoîi les. pi du |üde c fois a Icon UUI l3J: PARTIE EXPÉRIMENTALE, 3$i ornent une duree de 80 minutes , savoir, limites en descendant et 4° minutes en tant , on aura : 6 de distance, 27776 de chaleur pen- 80 minutes ; 7 de distance, 20408 de chaleur aussi 'ant 80 minutes ; 8 de distance, i5625 de chaleur tou- ; pendant 80 minutes ; et ainsi de suite i’à la distance 1000, où la chaleur est r. iommant toutes les chaleurs à chaque nce, on trouvera 3634 10 pour le total a chaleur que la comète a reçue du 1 tant en descendant qu’en remontant, faut multiplier par le temps, c’est-à-dire 4 /5 d’heure; on aura donc 484547, n divisera par 2000, qui représente la eur totale que la. terre a reçue dans ce 1e temps de i332 heures, puisque la mce est toujours xooo, et la chaleur nirs 1= 1 : ainsi l’on aura 242 547/2000 ■ la i chaleur que la comète a reçue de que la terre pendant tout le temps de périhélie, au lieu de 28000, comme Ion le suppose, parce qu’il ne prend le point extrême, et ne fait mille atten- à la très-petite durée du temps. t encore faudroit-il diminuer cette cha- 242 547/2000, parce que la comète ïouroit, par son accélération , d’autant de chemin dans le même temps qu’elle t près du soleil. lais, en négligeant cette diminution, et idmettant que la comète a en effet reçu chaleur à peu près deux cent quarante- x fois plus grande que celle de notre il d’été, et par conséquent 17 2/7 plus ide que celle du fer ardent , suivant ime de Newton, ou seulement dix fois » grande, suivant !a correction qn’ii faut e à cette estime , on doit supposer que , r donner une chaleur dix fois plus ide que celle du fer rougi , il faudroit fois plus de temps, c’est-à-dire i332o res au lieu de i332. Par conséquent on t comparer à la comète un globe de fer m auro.it chauffé à un feu de forge pen- it i332û heures pour pouvoir le rougir à ne. )r, on voit, par mes expériences, que mite des temps nécessaires pour chauffer globes dont les diamètres croissent , orne 1, 2, 3, 4, 5.... n demi-pouces, , à très-peu près, 2', 5' 1/2, 9', 12' 1/2, ... 7 n — 3/2 minutes. On aura doue 7,7 — 3/2 — 799200 mi- tes. D’où l’on tirera n “ 228342 demi-pouces. Ainsi, avec le feu de forge, on ne pour- roit chauffer à blanc en 799200 minutes ou x3320 heures qu'un globe dont le diamètre seroil de 228342 demi-pouces, et par con- séquent il faudroit , pour que toute la masse de la comète soit chauffée au point du fer rougi à blanc pendant le peu de temps qu’elle a été exposée aux ardeurs du soleil, qu’elle n’eût eu que 228342 demi-pouces de diamètre , et supposer encore qu’elle eût été frappée de tous cotés et en même temps par la lumière du soleil : d’où il résulte que si ou la suppose plus grande , il faut né- cessairement supposer plus de temps dans la même raison de n à 7 n — 3/2 ; en sorte, par exemple, que si l’on veut supposer la co- mète égale cà la terre, on aura n~ 941461920 demi-pouces, et 7 n — 3/2 rrr 32951 167 x 8 minutes, c’est-à-dire qu’au lieu de i3320 heures il en faudroit 549x8612, ou, -si l’on veut, au lieu d’un an 190 jours, il faudroit 6269 ans pour chauffer à blanc un globe gros comme la terre ; et , par la même rai- son , il faudroit que la comète , au lieu de n’avoir séjourné que i.332 heures ou 55 jours 12 heures dans tout son périhélie, y eût demeuré pendant 892 ans. Ainsi les comètes , lorsqu’elles approchent du soleil , me reçoivent pas une chaleur immense, ni . très-long-temps durable, comme le dit New- ton, et comme on seroit porté à le croire à la première vue : lemmséjnur est si court dans le voisinageXîe cet astre , que leur masse n’a pas le temps de- s’échauffer, et qu’il n’y a guère que la partie de la surface, exposée au soleil, qui soit brûlée par ces instans de chaleur extrême , laquelle , en calcinant et volatilisant la matière de cette surface, la chasse au dehors en vapeurs et en poussière du côté opposé au soleil ; et ce qn’on appelle la queue cl'une comète, n’est autre chose que la lumière même du soleil rendue sensible, comme dans une chambre obscure, par ces atomes que la chaleur pousse d’autant plus loin qu’elle est plus violente. Mais une autre considération bien diffé- rente de celle-ci et encore plus importante , c’est que , pour appliquer le résultat de nos expériences et de notre calcul à la comète et à la terre , il faut les supposer composées de matières qui demanderaient autant de temps que le fer pour se refroidir ; tandis ne , dans le réel , les matières principales ont le globe terrestre est composé , telles ne les glaises , les grès , les pierres , etc. , oivent se refroidir en bien moins de temps que le fer. MINERAUX. INTRODUCTION. (fins Pour me satisfaire sur cet objet , j’ai fait faire des globes de glaise et de grès ; et les ayant fait chauffer à la même forge jusqu’à les faire rougir à blanc , j’ai trouvé que les boulets de glaise de deux pouces se sont re- froidis au point de pouvoir les tenir dans la main en trente-huit minutes, ceux de deux pouces et demi en quarante-huit minutes, et ceux de trois pouces en soixante minutes; ce qui étant comparé avec le temps du, re- froidissement des boulets de fer de ces mê- mes diamètres de deux pouces et demi et trois pouces, donne les rapports de 38 à 80 pour deux pouces, 48 à 102 pour deux pouces et demi, et 60 à 127 pour trois pou- ces, ce qui fait un peu moins de x à 2 ; en sorte que , pour le refroidissement de la glaise, il ne faut pas la moitié du temps qu’il faut pour celui du fer. J’ai trouvé de même que les globes de grès de deux pouces se sont refroidis au point de les tenir dans la main en quarante-cinq minutes , ceux de deux pouces et demi en cinquante-huit minutes, et ceux de trois pouces en soixante-quinze minutes; ce qui étant comparé avec le temps du refroidisse- ment des boulets de fer de ces mêmes dia- mètres, donne les rapports de 46 à 80 pour deux pouces, de 58 à 102 pour deux pouces et demi, et de 75 à 127 pour trois pouces, ce qui fait à très-peu près la raison de 9 à 5; en sorte que, pour le refroidissement du grès , il faut plus de la moitié du temps qu’il faut pour celui du fer. J’observerai , au sujet de ces expériences , que les globes de glaise chauffés à feu blanc ont perdu de leur pesanteur encore plus que les boulets de fer, et jusqu’à la neuvième ou dixième partie de leur poids , au lieu que le grès chauffé au même feu ne perd presque rien du tout de son poids, quoique toute la surface se couvre d’émail et se ré- duise en verre. Comme ce petit fait m’a paru singulier, j’ai répété l’expérience plusieurs fois , en faisant même pousser le feu et le continuer plus long-temps que pour le fer ; et quoiqu’il ne fallût guère que le tiers du temps pour rougir le grès, de ce qu’il en falloit pour rougir le fer, je l’ai tenu à ce feu le double et le triple du temps pour voir s’il perdroit davantage, et je n’ai trouvé que de très-légères diminutions ; car le globe de deux pouces, chauffé pendant huit mi- nutes , qui pesoit sept onces deux gros trente grains avant d’être mis au feu , n’a perdu que quarante-un grains , ce qui ne fait pas la centième partie de son poids ; celui de deux pouces et demi , qui pesoit quatorze tu de J’ait Scoi'l tirs 11 11 ser îaleur ïux 0 aient 11e fa onces deux gros huit grains, ayant chau Ve pendant douze minutes, n’a perdu que cent cinquante - quatrième partie de g poids; et celui de trois pouces, qui pes vingt-quatre onces cinq gros treize grait ayant été chauffé pendant dix-huit miuut c’est-à-dire à peu près autant que le fer,i perdu que soixante-dix-huit grains; ce< ne fait que la cent quatre-vingt-unième-* tie de son poids. Ces pertes sont si peu qu’on pourroit les regarder comme mil et assurer en général que le grès pur perd rien de sa pesanteur au feu ; car il r paru que ces petites diminutions que viens de rapporter ont été oceasionéesi les parties ferrugineuses qui se sont trouii dans ces gr s et qui ont été en partie l truites par le feu. Une chose plus générale et qui méi bien d’être remarquée , c’est que les durt de la chaleur dans différentes matières t posées au même feu pendant un temps é sont toujours dans la même proportion,’! que le degré de chaleur soit plus grand 1,3 P1 plus petit; en sorte, par exemple, qu^ »el(l on chauffe le fer, le grès et la glaise à| "’m feu violent, et tel qu’il faille quatre-vi® minutes pour refroidir le fer au point pouvoir le toucher, quarante-six mil» pour refroidir le grès au même point! trente-huit pour refroidir la glaise, et qh une chaleur moindre il ne faille, par exe pie, que dix-huit minutes pour refroidir 1er à ce même point de pouvoir le toucl avec la main, il ne faudra proportionnel ment qu’un peu plus de dix minutes pi) refroidir le grès, et environ huit minutes demie pour refroidir la glaise à ce mèi point. J’ai fait de semblables expériences s des globes de marbre , de pierre , de plot et d’étain, à une chaleur telle seulena que l’étain commençoit à fondre, et j rr.’ trouvé que le fer se refroidissoit en di sn huit minutes au point de pouvoir le teniiij^ la main ; le marbre se refroidit au mêr ’V ,faè [ itle e I0I([1 Gon rps; point en douze minutes , la pierre en 0112 le plomb en neuf et l’étain en huit mîtes. , Ce n’est donc pas proportionnellement leur densité, comme on le croit vulgaiij^ ment , que les corps reçoivent et perde c plus ou moins vile la chaleur, mais dans 1, ■ ■ rapport bien différent et qui est en raisc inverse de leur solidité, c’est-à-dire de let plus ou moins grande non-fluidité ; en sor qu’avec la même chaleur il faut moins c temps pour échauffer ou refroidir le finie PARTIE EXPÉRIMENTALE. plus dense quil n’en faut pour échauffer ! refroidir au même degré le solide le I oins dense. Je donnerai, dans les mémoires J ivans, le développement entier de ce prin- I >e, duquel dépend toute la théorie du I ogrès de la chaleur ; mais pour que mon I leriion ne paroisse pas vaine , voici en ■ u de mots le fondement de cette théorie : J’ai trouvé , par la vue de l’esprit, que corps qui s’échaufferoient en raison de rs diamètres ne pourroient être que ceux 1 i seroient parfaitement perméables à la J deur, et que ce seroient en même temps ix qui s'échaufferoient ou se refroidi-, ent en moins de temps. Dès lors j’ai pensé e les fluides , dont toutes les parties ne se nient que par un foibîe lien, approchaient s de cette perméabilité parfaite que les ides, dont les parties ont beaucoup plus de I lésion que celles des fluides. En conséquence, j’ai fait des expériences | lesquelles j’ai trouvé qu’avec la même |leur tous les fluides, quelque denses j ils soient, s’échauffent et se refroidissent s promptement qu’aucun solide, quelque er qu’il soit ; en sorte , par exemple , que nercure, comparé avec le bois , s’échauffe uicoup plus promptement que le bois, liqu’il soit quinze ou seize fois plus ise. Hela m’a fait reconnaître que le progrès la chaleur dans les corps ne devoit en un cas se faire relativement à leur den- et en effet, j’ai trouvé par l’expérience tant dans les solides que dans les flui- , ce progrès se fait plutôt en raison de ^ fluidité , ou , si l’on veut, en raison in- se de leur solidité. Homme ce mot solidité a plusieurs accep- îs , il faut voir nettement le sens dans ici je l’emploie ici. Solide et solidité se ;nt en géométrie relativement à la gran- I r, et se prennent pour le volume du 1 ps ; solidité se dit souvent en physique tlvement à la densité, c’est-à-dire à la ise contenue sous un volume donné ; so- té se dit quelquefois encore relativement j dureté, c’est-à-dire à la résistance que j t les corps lorsque nous voulons les en- er : or, ce n’est dans aucun de ces sens I j’emploie ici ce mot , mais dans une ac- tion qui devroit être la première , parce die est la plus propre. J’entends unique- ît par solidité la qualité opposée à la flui- et je dis que c’est en raison inverse de l e qualité que se fait le progrès de la leur dans la plupart des corps , et qu’ils hauffent ou se refroidissent d’autant plus 353 vite qu’ils sont plus fluides , et d’autant plus lentement qu’ils sont plus solides , toutes les circonstances étant égales d’ail- leurs. Et , pour prouver que la solidité , prise dans ce sens, est tout à fait indépendante de la densité, j’ai trouvé, par expérience, que des matières plus denses ou moins den- ses s’échauffent et se refroidissent plus promptement que d’autres matières plus ou moins denses ; que , par exemple, l’or et le plomb, qui sont beaucoup plus denses que le fer et le cuivre, néanmoins s’échauffent et se refroidissent beaucoup plus vite , et que l’étain et le marbre , qui sont au con- traire moins denses , s’échauffent et se re- froidissent aussi beaucoup plus vile que le fer et le cuivre , et qu’il en est de même de plusieurs autres matières qui , quoique plus ou moins denses , s’échauffent et se refroi- dissent plus promptement que d’autres qui sont beaucoup moins denses ou plus den- ses ; en sorte que la densité n’est nullement relative à l’échelle du progrès de la chaleur dans les corps solides. Et, pour prouver de même dans lès flui- des , j’ai vu que le mercure , qui est treize ou quatorze fois plus dense que l’eau, néan- moins s’échauffe et se refroidit en moins de temps que l’eau ; et que l’esprit-de -vin , qui est moins dense que l’eau , s’échauffe et se refroidit aussi plus vite que l’eau ; en sorte que généialement le progrès de la chaleur dans les corps , tant pour l’entrée que pour la sortie , n’a aucun rapport à leur densité, et se fait principalement en raison de leur fluidité, en étendant la fluidité jusqu’au so- lide , c’est-à-dire en regardant la solidité comme une non - fluidité plus ou moins grande. De là, j’ai cru devoir conclure que l’on connoîtroit en effet le degré réel de flui- dité dans les corps , en les faisant chauffer à la même chaleur ; car leur fluidité sera dans la même raison que celle du temps pendant lequel ils recevront et perdront cette chaleur : et il en sera de même des corps solides ; ils seront d’autant plus soli- des, c’est-à-dire d’autant plus non-fluides , qu’il leur faudra plus de temps pour rece- voir cette même chaleur et la perdre ; et cela presque généralement , à ce que je pré- sume ; car j’ai déjà tenté ces expériences sur un grand nombre de matières différen- tes , et j’en ai fait une table que j’ai tâché de rendre aussi complète et aussi exacte qu’il m’a été possible, et qu’on trouvera dans la mémoire suivant. Bttffon. I. a3 35'4 MINÉRAUX. INTRODUCTION. V\VW\\WVlî<\UU^ SECOND MEMOIRE. Suite des expériences sur le progrès de la chaleur dans les différentes substances minérales . J’ai fait faire un grand nombre de globes, tous d’un pouce de diamètre , le plus pré- cisément qu’il a été possible , des matières suivantes, qui peuvent représenler à peu près le règne minéral : onc. gros grains. Or le plue pur, affiné par les soins de M. Tillet , de l’Académie des Sciences , qui a fait travailler ce globe à uia prière, pèse 6 2 *7 Plomb, pèse 3 6 28 Argent le plus pur, travaillé de même, pèse 3 3 22 3 3 Cuivre rouge , pèse a 7 56 Fer, pèse 2 5 10 Etain , pèse.. ... . . 2 3 43 Antimoine fondu, et qui avoit de petites cavités à 6a surface, pèse. 2 34 Zinc , pèse 2 I 2 Émeril , pèse I 2 24 1/2 Marbre blanc, pèse I 25 Grès pur, pèse 7 24 Marbre commun de Monthard, pèse. 7 20 Pierre calcaire dure et grise de Montbard , pèse 7 20 Gypse blanc , improprement appelé albâtre , pèse 6 36 Pierre calcaire blanche , statuaire , de la carrière d’Anières près de Dijon , pèse 6 36 Cristal de roche : il étoit un peu trop petit , et il y avoit plusieurs défauts et quelques petites fêlures à sa surface; je présume que, sans cela , il auroit pesé plus d’un gros de plus : il pèse Verre commun , pèse Terre glaise pure non éuite , mais très-sèche, pèse Ocre , pèse Porcelaine de M. le comte de Laura- guais, pèse Craie blanche , pèse Pierre ponce avec plusieurs petites cavités à sa surface , pèse Bois de cerisier, qui , quoique plus léger que le chêne et la plupart des autres bois , est celui de tous qui s’altère le moins au feu, pèse. 55 Je dois avertir qu’il ne faut pas compter assez sur les poids rapportés dans cette table, pour en conclure la pesanteur spécifique exacte de chaque matière ; car, quelque pré- caution que j’aie prise pour rendre les gl bes égaux , comme il a fallu employer d ouvriers de différens métiers , les uns me 1 ont rendus trop gros et les autres trop p tits. On a diminué ceux qui avoient pl d’un pouce de diamètre ; mais quelques-ui qui étoient un tant soit peu trop petit! comme ceux de cristal de roche, de ver t®e et de porcelaine , sont demeurés tels qu’ je étoient : j’ai seulement rejeté ceux d’agaii |ei( de jaspe, de porphyre et de jade, qui étoiei j>aj sensiblement trop petits. Néanmoins ce di ^ gré de précision de grosseur, très-difficilei D1|ej saisir, n’étoit pas absolument nécessaire ; c ia il ne pouvoit changer que très-peu le résull de mes expériences. Avant d’avoir commandé tous ces glob d’un pouce de diamètre , j’avois exposé à i même degré de feu une masse carrée de i | et une autre de plomb de deux pouces da | toutes leurs dimensions , et j’avois trouvi jj I, par des essais réitérés, que le plomb s: .Éetc chauffoit plus vite et se refroidissoit te beaucoup moins de temps que le fer : je fa la même épreuve sur le cuivre rouge; il fei . aussi plus de temps pour l’échauffer et po f ™ le refroidir qu’il n’en faut pour le plomb moins que pour le fer : en sorte que , ces trois matières, le fer me parut celle ar les trois expériences présentes ; et com- [ne ce rapport a été trouvé par les expé- iences précédentes ( article TY) ;; 53 1/2 45, on aura, en ajoutant ces temps, 99 85 r/2 pour le rapport encore plus précis lu premier refroidissement du fer et du :uivre ; et pour le second , c’est-à-dire pour je refroidissement entier, le rapport donné >ar les présentes expériences étant ; ; 35 {— 47 H- 56 j 3 r — j— 43 — j— 5o, ou * * r38 r24, et ;; r42 ; r25 parles expériences irécédentes (art. IY) , on aura , en ajoutant es temps, 280 à 249 pour le rapport encore j)lus précis du refroidissement entier du fer t du cuivre. 20 Que le temps du refroidissement du îr est à celui du refroidissement de l’or, u point de pouvoir les tenir, ’ ' 4 5 1/2 ; 7, et au point de la température ;; 1 3 8 : ï4. 3° Que le temps du refroidissement du br est à celui du refroidissement de l’ar- [ent, au point de pouvoir les tenir, ; ; 45 1/2 34, et au point de la température ;; i38 97- 4° Que le temps du refroidissement du jer est à celui du refroidissement de l’étain, u point de pouvoir les tenir, 45 1/2 ; i par les présentes expériences , et ” 24 ir par les expériences précédentes (ar- ide Y). Ainsi l’on aura, en ajoutant ces emps , 69 1/2 à 32 pour le rapport encore lus précis de leur refroidissement ; et pour le second , le rapport donné par les expé- riences présentes étant *; i38 l 61, et par les expériences précédentes (art. Y) ;; i36 I 78, on aura, en ajoutant ces temps, 274 à i34 pour le rapport encore plus précis de l’entier refroidissement du fer et de l’étain. 5° Que le temps du refroidissement du cuivre est à celui de l’or, au point de pouvoir les tenir, ;; 40 1/2 1 37, et;: 124 ; 114 pour leur entier refroidissement. 6° Que le temps du refroidissement du cuivre est à celui du refroidissement de l’ar- gent , au point de pouvoir les tenir, ; ; 40 1/2 ; 34, et 124 ; 97 pour leur entier re- froidissement. 70 Que le temps du refroidissement du cuivre est à celui du refroidissement de l’é- tain, au point de pouvoir les tenir, ; I4o 1/2 ; 21 par les présentes expériences, et ;; 43 1/2 ; 22 1/2 par les expériences précé- dentes (article YI). Ainsi on aura , en ajou- tant ces temps , 84 à 43 1/2 pour le rapport encore plus précis de leur premier refroi- dissement ; et pour le second, le rapport donné par les présentes expériences étant 124 ; 6iret ;; 123 ; 71 par les expé- riences précédentes ( article YI ) , on aura , en ajoutant ces temps, 247 à i32 pour le rapport encore plus précis de l’entier refroi- dissement du cuivre et de l’étain. 8° Que le temps du refroidissement de l’or est à celui du refroidissement de l’argent, au point de pouvoir les tenir, ;; 37 ; 34, et ;; r 14 ; 97 pour leur entier refroidisse- ment. 90 Que le temps du refroidissement de l’or est à celui du refroidissement de l’étain, au point de pouvoir les tenir, ; ; 3 7 r 21, et ;; 1x4 l 61 pour leur entier refroidis- sement. io° Que le temps du refroidissement de l’argent est à celui du refroidissement de l’étain , au point de pouvoir les tenir, ; ; 34 ; 21, ;; 97 : 61 pour leur entier refroidis- sement. ? XII. Ayant mis dans le même four cinq boulets , placés de même , et séparés les uns des autres, leur refroidissement s’est fait dans les proportions suivantes : Refroidis à les tenir pendant une demi-seconde. minutes. Antimoine, en... 6 1/2 Bismuth, en 7 Plomb , en 8 Zinc, en io 1/2 Emeril , en 1x1/2 Refroidis à la température . minutes 1 En 25 En ?6 En En En XIII. Ayant répété cette expérience avec 358 MINÉRAUX. INTRODUCTION. un degré de chaleur plus fort, et auquel l’étain et le bismuth se sont fondus, les autres boulets se sont refroidis dans la pro- gression suivante : Refroidis à les tenir ■pendant une demi-seconde. minutes . Antimoine , en.. . 7 1/2 Plomb , en 91/2 Zinc, en i4 Émeri! , en 16 Refroidis à la température. minutes. 28 39 5o XIY. On a placé dans le même four et de la même manière un autre boulet de bis- muth , avec six autres boulets , qui se sont refroidis dans la progression suivante : Refroidis à les tenir pendant une demi-seconde. minutes. Antimoine , en. . . 6 Bismuth, en 6 Plomb , en 7 1/2 Argent, en 9 1/2 Zinc , en 10 1/2 Or, en 11 Émeri! , en i3 1/2 Refroidis à la température. minutes. 23 XV. Ayant répété cette expérience avec les sept mêmes boulets , ils se sont refroidis dans l’ordre suivant : Refroidis à les tenir pendant une demi-seconde. minutes. Antimoine , en.. . Bismuth , en. . . . Plomb , en Argent , en Zinc , en Or, en Émeril , en. ... . 6 1/2 7 1/2 7 1/2 ” 1/2 13 1/2 14 15 Refroidis la température. minutes. 23 Toutes ces expériences ont été faites avec soin , et en présence de deux ou trois per- sonnes , qui ont jugé comme moi par le tact , et en serrant dans la main pendant une demi- seconde les différens boulets. Ainsi l’on doit en conclure : i° Que le temps du refroidissement de l’émerii est à celui du refroidissement de l’or, au point de pouvoir les tenir, y 28 1/2 ; 25, et 83 ; 73 pour leur entier refroi- dissement. 20 Que le temps du refroidissement de l’ émeril est à celui du refroidissement du zinc, au point de pouvoir les toucher, ; : 56 : 48 1/2, et 171 : 144 pour leur entier refroidissement. 3° Que le temps du refroidissement de i’émeril est à celui du refroidissement de l’argent , au point de pouvoir les tenir , ; ; 28 1/2 ; 21 , et 83 : 62 pour leur en- tier refroidissement. 4° Que le temps du refroidissement de l’émeril est à celui du refroidissement du plomb , au point de les tenir , ; : 56 ; 32 1/2, et 171 ; 123 pour leur entier refroidis- sement. 5° Que le temps du refroidissement de l’émeril est à celui du refroidissement du bis- muth, au point de les tenir, : : 40 : 20 1/2, et :: 12 1 : 80 pour leur entier refroidisse- ment. 6° Que le temps du refroidissement de l’émeril est à celui du refroidissement de l’antimoine, au point de pouvoir les tenir 56 ; 26 1/2 , et à la température ; ; 1 7 1 ; 99- 7“ Que le temps du refroidissement de l’or est à celui du refroidissement du zinc , au point de les tenir, ;; 25 : 24, et lj 73 : 70 pour leur entier refroidissement : 8° Que le temps du refroidissement de l’or est à celui du refroidissement de l’argent, au point de pouvoir les tenir, y i5 : 21 par les présentes expériences, et ; ; 37 ; 34 par les expériences précédentes (art. XI). Ainsi l’on aura, en ajoutant ces temps, 62 à 55 pour le rapport plus précis de leur pre- mier refroidissement ; et pour le second , le rapport donné par les présentes expériences étant .* T 73 ; 62 , et ; 114 ; 97 parles expériences précédentes (article XI), on aura, en ajoutant ces temps, 187 à i5g pour le rapport plus précis de leur entier refroidissement. Que le temps du refroidissement de Ëie 9 ’or est à celui du refroidissement du plomb, au point de pouvoir les tenir, ; ; 25 ; i5 et 73 : 57 pour leur entier refroidisse- ment. io° Que le temps du refroidissement de l’or est à celui du refroidissement du bis- muth, au point de pouvoir les tenir, ;; 25 ; i3 1/2 , et y 73 : 56 pour leur entier refroidissement. ii° Que le temps du refroidissement dé l’or est à celui du refroidissement de l’anti- moine, au point de les tenir, y 25 ; 12 1/2, et 1 : 73 : 46 pour leur entier refroidisse- ment. i2° Que le temps du refroidissement du zinc est à celui du refroidissement de l’ar- gent , au point de pouvoir les tenir , .*124 : 21 , et :: 70 : 62 pour leur entier refroi- dissement. i3° Que le temps du refroidissement du zinc est à celui du refroidissement du plomb, au point de pouvoir les tenir, " 48 1/2 I 32 1/2, et 144 : 123 pour leur entier refroidissement. ml, tb . PARTIE EXPÉRIMENTALE. 35$ 146 Que le temps du refroidissement du ne est à celui du refroidissement du bis- luth, au point de pouvoir les tenir, :: 4 1/2 ; 20 1/2, et 100 : 80 pour leur itier refroidissement. 1 5° Que le temps du refroidissement du ne est à celui du refroidissement de Pan- moine, au point de les tenir, y 48 1/2 26 1/2, et à la température ;; 144 : 99. 160 Que le temps du refroidissement de irgent est à celui du refroidissement du smuth, au point de pouvoir les tenir r ; i3 1/2, et ;; 62 ; 56 pour leur en- er refroidissement. 170 Que le temps du refroidissement de irgent est à celui du refroidissement de Pau- moine , au point de les tenir, : : 21 : 12 1/2, ; 62 ; 46 pour leur entier refroidis- ment. 180 Que le temps du refroidissement du j/Omb est à celui du refroidissement du 'srnutli, au point de les tenir : : 23 : 201/2, : ; 84 : 80 pour leur entier refroidisse- ent. 190 Que le temps du refroidissement du omb est à celui du refroidissement de Pan- moine, au point de les toucher, 32 1/2 26 1/2 , et à la température 123 ; 99. 20° Que le temps du refroidissement du smuth est à celui du refroidissement de intimoine, au point de pouvoir les tenir, 20 1/2 ; 19, et ;; 80 : 71 pour leur itier refroidissement. Je dois observer qu’en général , dans tou- s ces expériences, les premiers rapports nt bien plus justes que les derniers, parce l’il est difficile déjuger du refroidissement squ’à la température actuelle , et que cette jmpéralure étant variable , les résultats doi- nt varier aussi; au lieu que le point du emier refroidissement peut être saisi assez ste par la sensation que produit sur la ême main la chaleur du boulet, lorsqu’on ut le tenir ou le toucher pendant une demi- conde. XYI. Comme il n’y avoit que deux expé- înces pour la comparaison de l’or avec l’é- éril , le zinc, le plomb, le bismuth, et ntimoine; que le bismuth s’étoit fondu entier, et que le plomb et l’antimoine oient fort endommagés, je me suis servi autres boulets de bismuth, d’antimoine de plomb, et j’ai fait une troisième expé- ence eu mettant ensemble dans le même ur bien chauffé ces deux boulets : ils se >nt refroidis dans l’ordre suivant . Refroidis à les tenir pendant une demi-seconde. minutes. Antimoine , en.. , • 7 En. Bismuth , en.. . . . 8 En. Plomb , en • 9 En. Zinc , en . I Z En. Or, en . i3 En. Émeril , en . i5 1/2 En. Refroidis la température. minutes. 27 29 33 37 4?. 48 D’où l’on doit conclure, ainsi que des ex- périences XIY et XY, i° que le temps du refroidissement de l’émeril est à celui du re- froidissement de l’or, au point de pouvoir les tenir, ;* 44 : 38 , et au point de la température i3i : ii5. 20 Que le temps du refroidissement de Pémeril est à celui du refroidissement du zinc, au point de pouvoir les tenir, " i5 1/2 ; 12. Mais le rapport trouvé par les expé- riences précédentes (art. XY) étant :: 56 l 48 1/2, on aura, en ajoutant ces temps, 71 1/2 à 60 1/2 pour leur premier refroidis- sement ; et pour le second , le rapport trouvé par l’expérience présente , étant y 48 : 37, et par les expériences précédentes (art. XY ), ; : 1 7 1 : 144 ; ainsi , en ajoutant ces temps , on aura 289 à 181 pour le rapport encore plus précis de l’entier refroidissement de l’émeril et du zinc. 3° Que le temps du refroidissement de l’émeril est à celui du refroidissement du plomb , au point de pouvoir les tenir , ; : i5 1/2 : 9. Mais le rapport trouvé par les expériences précédentes (art. XY) étant ;; 56 : 32 1/2, ainsi on aura, en ajoutant ces temps ,711/2541 1/2 pour le rapport plus précis de leur premier refroidissement; et pour le second , le rapport donné par l’expé- rience présente étant y 48 ; 33, et par les expériences précédentes (art. XY) :: 171 : 123, on aura, en ajoutant ces temps, 239 à i56 pour le rapport encore plus pré- cis de l’entier refroidissement de l’émeril et du plomb. 4° Que le temps du refroidissement de l’émeril est à celui du refroidissement du bismuth, au point de pouvoir les tenir, ;; i5 1/2 : 8, et par les expériences précé- dentes (art. XY) :: 40 ; 20 1/2. Ainsi, on aura, en ajoutant ces temps, 55 1/2 à 28 1/2 pour le rapport plus précis de leur premier refroidissement ; et pour le second, le rapport donné par l’expérience présente étant :: 48 : 29, et :: 121 : 80 par les expériences précédentes (art. XY ), on aura, en ajoutant ces temps, 169 à 109 pour le rapport encore plus précis de l’entier refroi- dissement de l’émeril et du bismuth. 5° Que le temps du refroidisssement de ; , , I 36o MINERAUX. INTRODUCTION. l’émeril est à celui du refroidissement de l’antimoine, au point de pouvoir les tenir, 1 5 r/2 ; 7. Mais le rapport trouvé par les expériences précédentes (art. XY) étant 56 : 26 1/2, on aura, en ajoutant ces temps, 71 1/2 à 33 1/2 pour le rapport en- core plus précis de leur premier refroidis- sement ; et pour le second , le rapport donné par l’expérience présente étant II 48 l 27, et : ; 1 7 1 : 99 par les expériences précé- dentes (article XY), on aura, en ajoutant ces temps, 219 à 126 pour le rapport en- core plus précis de l’entier refroidissement de l’émeril et de l’antimoine. 6° Que le temps du refroidissement de l’or est à celui du refroidissement du zinc, au point de pouvoir les tenir, 38 : 36, et ;; n5 ; 107 pour leur entier refroidis- sement. 7° Que le temps du refroidissement de l’or est à celui du refroidissement du plomb , au point de les toucher, 38 : 24, et à la température ;; n5 ; 90. 8? Que le temps du refroidissement de l’or est à celui du refroidissement du bismuth , au point de pouvoir les tenir, ;; 38 : 21 1/2, et à la température y. n5 ; 85. 90 Que le temps du refroidissement de l’or est à celui du refroidissement de l’anti- moine, au point de les toucher, 38 ; 19 1/2, et à la température ; : n5 ; 69. io° Que le temps du refroidissement du zinc est à celui du refroidissement du plomb, au point de pouvoir les tenir, 12 : 9. Mais le rapport trouvé par les expériences précédentes (art. XY) étant 48 1/2 : 32 1/ 2, on aura, en ajoutant ces temps, 60 1/2 à 41 1/2 pour le rapport plus pré- cis de leur premier refroidissement; et pour le second, le rapport donné par l’expérience présente étant ; : 37 : 33, et par les expé- riences précédentes (art. xv) :: 144 : 123, on aura, en ajoutant ces temps, 1S1 à i56 pour le rapport encore plus précis de l’en- tier refroidissement du zinc et du plomb. ix° Que le temps du refroidissement du zinc est à celui du refroidissement du bis- muth, au point de les toucher, : 12 ; 8, par la présente expérience. Mais le rapport trouvé par les expériences précédentes (ar- ticle XY) étant 34 1/2 ; 20 1/2; en ajou- tant ces temps, on aura 46 1/2 à 28 1/2 pour le rapport plus précis de leur premier refroidissement ; et pour le second , le rap- port donné par l’expérience présente étant Il 37 ; 29, et par les expériences précé- dentes (art. XV) ;; 100 : 80, on aura, çn ajoutant ces temps 137 à 109 pour le l’ent Éti ' eril, rapport encore plus précis de l’entier refroi- dissement du zinc et du bismuth. 12° Que le temps du refroidissement di zinc est à celui du refroidissement de l’anti- moine , pour pouvoir les tenir, ” 12 ; 3 par la présente expérience. Mais comme h rapport trouvé par les expériences précé dentes ( art. XY ) est 1 1 48 1/2 : 26 1/: on aura, en ajoutant ces temps, 60 x/2 53 1/2 pour le rapport encore plus préciii y de leur premier refroidissement ; et pour h v second, le rapport donné par l’expérienct présente étant ;; 37 ; 27, et i44 I 9< par les expériences précédentes ( art. XY ) on aura, en ajoutant ces temps, 18 r à i2< pour le rapport plus précis de l’entier re4«f froidissement du zinc et de l’antimoine. i3° Que le temps du refroidissement di plomb est à celui du refroidissement du bis-; mb muth , au point de pouvoir les tenir , .' I c : 8 par l’expérience présente , et : 23 20 1/2 par les expériences précédentes (an ticle XV ). Ainsi on aura, en ajoutant cer temps, 32 à 28 1/2 pour le rapport plus pré- cis de leur premier refroidissement; et poiu le second, le rapport donné par la présente ^ expérience étant : 33 : 29 , et : : 84 : 84 par les expériences précédentes ( art. XY ) on aura , en ajoutant ces temps ,1175 109 pour le rapport encore plus précis de l’en- tier refroidissement du plomb et du bismuth 140 Que le temps du refroidissement dil ^ plomb e^t à celui du refroidissement de l’anti moine, au point de les tenir, ; : 9 : 7 par h présente expérience, et 32 1/2 : 26 i/s par les expériences précédentes (art. XY), Ainsi on aura , en ajoutant ces temps , 41 i/s à 33 1/2 pour le rapport plus précis de leui premier refroidissement ; et pour le second, 1(1 rapport donné par l’expérience présente étant ; ; 33 4 ‘27, et .’ : 123 : 99 par, les expérience! précédentes (art. XV), on aura, en ajou- tant ces temps , i56 à 126 pour le rapport encore plus précis de l’entier refroidisse- ment du plomb et de l’antimoine. x5° Que le temps du refroidissement du bismuth est à celui du refroidissement de l’antimoine, au point de pouvoir les tenir,, , :: 8 : 7 par l’expérience présente, et 20 1/2 : 19 par les expériences précédentes ( article XY). Ainsi on aura, en ajoutant ces temps , 28 1/2 à 29 pour le rapport plus précis de leur premier refroidissement ; el pour le second , le rapport donné par l’ex- périence présente étant ; : 209 : 27, et l : 80 ; 7 1 par les expériences présentes ( ar- ticle XY ) , on aura , en ajoutant ces temps, 109 à 98 pour le rapport encore plus précis lence i|oui |»rti îptei 36r PARTIE EXPÉRIMENTALE. [’entier refroidissement du bismuth et de timoine. LVII. Comme il n’y avoit de même que x expériences pour la comparaison de jent avec l’émeril , le zinc , le plomb , le mth et l’antimoine, j'en ai fait une dème , en mettant dans le même four , s’étoit un peu refroidi , les six boulets imble; et, après les en avoir tirés tous même temps , comme on l’a toujours ils se sont refroidis dans l’ordre sui- ifroidis à les tenir mt une demi-seconde . minutes, noine , en. . . 6 utli , en 7 b , en. .... . 8 x/4 nt, en n 1/2 1 12 1/2 ~il , en i5 iy 2 Refroidis à la température . Ent . , . . minutes. En 34 En 36 En 3g En.. .... n doit conclure de cette expérience et elles des art. XIV et XV : 5 Que le temps du refroidissement de eril est à celui du refroidissement du au point de les tenir , par l’expérience ente ;; 1 5 1/2 : 12 1/2, et 71 1/2 ; /2 par les expériences précédentes ( ar- XVI ). Ainsi on aura , en ajoutant ces js , 87 à 73 pour le rapport plus précis eur premier refroidissement ; et pour le nd , le rapport donné par l’expérience ente étant ; : 47 ; 39, et par les expé- ces précédentes (art. XVI) \ \ 239 \ 181, ura, en ajoutant ces temps, 286 à 220 ' le rapport encore plus précis de l’en- refroidissement de l’émeril et du zinc. > Que le temps du refroidissement de eril est à celui du refroidissement de ent, ; : 44 : 32 1/2 au point de les te- et :: i3o : 98 pour leur entier refroi- ment. ’ Que le temps du refroidissement de l’é- 1 est à celui du refroidissement du plomb, jint de les tenir, ;; i5i/2 ;8 1/2 par l’ex- mce présente, et 71 1/2 : 4.1 1/2 par ^périences précédentes (art. XVI). Ainsi ura , en ajoutant ces temps, 87 à 49 3/4 ’ le rapport plus précis de leur premier ndissement; et pour le second, le rap- donné par l’expérience présente étant 7 ; 34, et :: 239 : i56 par les expé- ces précédentes ( art. XVI ) , on aura , joutant ces temps , 286 à 190 pour le >ort encore plus précis de l’entier refroi- îment de l’émeril et du plomb. Que le temps du refroidissement de O l’émeril est à celui du refroidissement du bis- muth, au point de pouvoir les tenir, .’ i5 1/2:7 Par l’expérience présente, et :: 56 1/2 : 28 1/2 par les expériences précédentes ( art. XVI). Ainsi on aura, en ajoutant ces temps, 77 à 35 1/2 pour le rapport plus précis de leur premier refroidissement; et pour le second , le rapport donné par l’ex- périence présente étant :: 47 : 3i , et 169 : 109 par les expériences précéden- tes ( article XVI ) , on aura, en ajoutant ces temps , 216 à 140 pour le rapport en- core plus précis de l’entier refroidissement de l’émeril et du bismuth. 5° Que le temps du refroidissement "de l’émeril est à celui du refroidissement de l’antimoine , au point de les tenir, *; i5 1/2 : 6 par l’expérience présente, et 71 1/2 : 33 1/2 par les expériences précédentes ( art. XVI). Ainsi , en ajoutant ces temps, on aura 87 à. 39 1/2 pour le rapport plus précis de leur premier refroidissement; et pour le second, le rapport donné par l’ex- périence présente étant 47- 1 29, et par les expériences précédentes ( art. XVI ) :: 219 : 126, on aura, en ajoutant ces temps, 266 à i55 pour le rapport encore plus précis de l’entier refroidissement de l’émeril et de l’antimoine. 6° Que le temps du refroidissement du zinc est à celui du refroidissement de l’ar- gent, au point de pouvoir les tenir, ;; 36 1/2 : 32, et :: 109 : 98 pour leur entier refroidissement. 70 Que le temps du refroidissement du zinc est à celui du refroidissement du plomb, au point de pouvoir les tenir, ;; 12 1/2 : 8 1/4 par l’expérience présente, et .' : .60 1/2 : 41 1/2 par les expériences précédentes ( art. XVI ). Ainsi on aura , en ajoutant ces temps , 73 à 49 3/4 pour le rapport plus précis de leur premier refroidissement ; et pour le second , le rapport donné par l’expé- rience présente étant :: 39 : 33, et par les expériences précédentes ( art. XVI ) : : 1 8 1 ; i56, on aura, en ajoutant ces temps, 220 à 189 pour le rapport encore plus pré- cis de l’entier refroidissement du zinc et du plomb. 8° Que le temps du refroidissement du zinc-est à celui du refroidissement du bis- muth , au point de pouvoir les tenir , 12 1/2 : 7 par la présente expérience, et :: 46 1/2 ; 28 1/2 par les expériences précédentes (art. XVI). Ainsi on aura, en ajoutant ces temps, 5g à 35 1/2 pour le rapport plus précis de leur premier refroi- dissement ; et pour le second , le rapport 36s MINÉRAUX. INTRODUCTION. donné par l’expérience présente étant : : 3g ; 3i, et :: 137 : 109 par les expériences précédentes ( art. XYI) , on aura, en ajou- tant ces temps, 176 à 140 pour le rapport encore plus précis de l’entier refroidisse- ment du zinc et du bismuth. 90 Que le temps du refroidissement du zinc est à celui du refroidissement de l’an- timoine, au point de les tenir, " 12 1/2 ; 6 par la présente expérience , et : 60 1/2 : 33 1/2 par les expériences précédentes (art. XYI ). Ainsi on aura , en ajoutant ces temps, 73 à 3g 1/2 pour le rapport plus précis de leur premier refroidissement; et pour le second , le rapport trouvé par l’ex- périence présente étant : : 3 g : 29 , et ; : 18 r : 126 par les expériences précédentes (art. XYI) , on aura , en ajoutant ces temps , 220 à i55 pour le rapport encore plus pré- cis de l’entier refroidissement du zinc et de l’antimoine. io° Que le temps du refroidissement de l’argent est à celui du refroidissement du plomb, au point de pouvoir les tenir, ; ; 32 1/2 : 23 1/2, et :: 98 : 90 pour leur entier refroidissement. ii° Que le temps du refroidissement de l’argent est à celui du refroidissement du bismuth, au point de pouvoir les tenir, ;; 32 1/2 : 20 1/2, et :: 98 : 87 pour leur entier refroidissement. i2° Que le temps du refroidissement de l’argent est à celui du refroidissement de l’antimoine , au point de pouvoir les tenir , ; : 82 1/2 : 18 1/2 , et : : @8 : 75 pour leur entier refroidissement. i3° Que le temps du refroidissement du plomb est à celui du refroidissement du bis- muth, au point de les tenir, ; : 8 1/4 ; 7 par la présente expérience , et 32 : 28 1/2 par les expériences précédentes (art. XYI). On aura , en ajoutant ces temps , 40 1/4 à 35 1/2 pour le rapport plus précis de leur premier refroidissement ; et pour le second , le rapport donné par l’expérience présente étant :: 34 : 3x , et :: 117 : 109 par les expériences précédentes ( art. XYI ) , on aura, en ajoutant ces temps, 141 à 140 pour le rapport encore plus précis de l’en- tier refroidissement du plomb et du bismuth. 140 Que le temps du refroidissement du plomb est à celui du refroidissement de l’an- timoine , au point de pouvoir les tenir, ; : 8 1/4 : 6 par l’expérience présente , et par les expériences précédentes ( art. XYI ) TI 41 1/2 ; 33 1/2. Ainsi on aura, en ajou- tant ces temps , 4g 3/4 à 3g 1/2 pour le rapport plus précis de leur premier refroi- dissement ; et pour le second , le rappc ;èipl donné par la présente expérience éta Il 34 ; 29, et y i56 : 126 par les exj: riences précédentes ( art. XYI ) , on auri en ajoutant ces temps , 190 à i55 pour rapport encore plus précis de l’entier refri dissement du plomb et de l’antimoine. i5° Que le temps du refroidissement 1 bismuth est à celui du refroidissement l’antimoine , au point de pouvoir les teni l 7 ! 6 par la présente expérience , et 28 1/2 * 26 par les expériences précédenl (article XYI). Ainsi on aura, en ajouta ces temps ,35 1/2 à 32 pour le rapport pl poin précis de leur premier refroidissement ; pour le second , le rapport donné par présente expérience étant y 3i ; 29, et 107 ; 98 par les expériences précédent 38 p (article XYI), on aura, en ajoutant < « temps, 140 à 127 pour le rapport enc' SPP° plus précis de l’entier refroidissement bismuth et de l’antimoine. XVIII. On a mis dans le même four boulet de verre , un nouveau boulet d tain , un de cuivre , et un de fer , pour faire une première comparaison, et ils sont refroidis dans l’ordre suivant : Refroidis à les tenir pendant une demi-seconde. minutes. Étain , en 8 Verre, en 8 1/9 Cuivre , en i4 Fer, en 16 Refroidis pint « la température. n86 | minulii) En *7 fcn„ En.. 22 ! y En 42 pt& En 5o loint XIX. La même expérience répétée, boulets se sont refroidis dans l’ordre s vant : Refroidis à les tenir pendant une demi-seconde. minutes. Étain , en 7 1/2 Verre , en 8 Cuivre, en 12 Fer, en i5 Refroidis à la température, j minu i XX. Par une troisième expérience, Jpetd boulets chauffés pendant un plus long terni Que mais à une chaleur un peu moindre, jLtà< sont refroidis dans l’ordre suivant ; joint de Refroidis Si^L Refroidis à les tenir pendant une demi-seconde. minutes. Étain, en 8 1/2 Verre , en 9 Cuivre, en i5 Fer, en 17 a la température. minu pue | El1 «fcestà En 24 En 43 En 46 XXI. Par une quatrième expérience pétée, les mêmes boulets, chauffés à JWam plus ardent, se sont refroidis dans l’ordre ant : efroidis à les tenir int une demi-seconde. minutes. en 81/2 en 9 , en 11 1/2 en i4 PARTIE EXPÉRIMENTALE. 363 Refroidis a température. minutes. 25 25 35 43 résulte de ces expériences répétées ’e fois , Que le temps du refroidissement du t à celui du refroidissement du cuivre, oint de les tenir, II 62 ; 52 1/2 par résentes expériences , et II 99 : 85 1/2 s expériences précédentes (article XI ). on aura, en ajoutant ces temps, 161 pour le rapport plus précis de leur ier refroidissement ; et pour le second , Ipport donné par les présentes expé- étant II 186 ; i56, et par les iences précédentes (article XI) ; * 280 on aura , en ajoutant ces temps , à 4o5 pour le rapport encore plus de l’entier refroidissement du fer et livre. Que le temps du refroidissement du t à celui du refroidissement du verre, >int de les tenir, ;; 62 ; 34 1/2, et 56 : 97 pour leur entier refroidisse- Que le temps du refroidissement du t à celui du refroidissement de l’étain , jiint de les tenir, " 62 : 32 1/2 par ésentes expériences , et II 69 1/2 ; 32 îs expériences précédentes (art. XI). on aura , en ajoutant ces temps , Ji à 64 1/2 pour le rapport le plus de leur premier refroidissement ; et le second, le rapport donné par les iences présentes étant H 186 l 92, 274 t i34 par les expériences précé- s (article XI), on aura, en ajoutant mps , 460 à 226 pour le rapport en- dos précis de l’entier refroidissement r et de l’étain. Que le temps du refroidissement du est à celui du refroidissement du verre, int de les tenir, :: 5 1 1/2 : 34 1/2, 157 ; 97 pour leur entier refroidisse- Que le temps du refroidissement du ' est à celui du refroidissement de l’é- au point de pouvoir les tenir, " t : 32 1/2 par les expériences pré- , et ; : 84 ; 43 1/2 par les expériences dentes (article XI). Ainsi on aura, )utant ces temps, i36 1/2 à 76 pour le rapport plus précis de leur premier re- froidissement ; et pour le second , le rapport donné par les expériences présentes étant 157 : 92, et par les expériences précé- dentes (art. XI), :: 247 : 132, on aura, en ajoutant ces temps , 3o4 à 224 pour le rapport encore plus précis de l’entier re- froidissement du cuivre et de l’étain. 6° Que le temps du refroidissement du verre est. à celui du refroidissement de l’é- tain , au point de les tenir , ; : 24 1/2 : 32 1/2, et :: 97 ; 92 pour leur entier refroidissement. XXII. On a fait chauffer ensemble les boulets d’or, de verre, de porcelaine, de gypse , et de grès ; ils se sont refroidis dans l’ordre suivant : Refroidis à les tenir pendant une demi-seconde. minutes. Gypse , en. .... . 5 Porcelaine, en... 81/2 Verre > en. t) Refroidis à la température. minutes. En 14 En 25 En 26 Grè* , pn, , io En t . 3 a Or, en 14/12 En.. 45 XXIII. La même expérience répétée sur les mêmes boulets, ils se sont refroidis dans l’ordre suivant : Refroidis à les tenir pendant une demi-seconde. minutes^ Gypse , en. .... . 4 Porcelaine , en.. . 7 Verre , en 9 1/2 Grès , en 91/2 Or, en i3 1/2 Refroidis à la température. minutes. En i3 En 22 En 24 En 33 En 41 ? XXIY. La même expérience répétée, les boulets se sont refroidis dans l’ordre sui- vant : Refroidis à la température. minutes. En. . En.. En. . En.. En.. Refroidis à les tenir pendant une demi-seconde. minutes. Gypse , en 21/2 Porcelaine, en... 5 1/2 Verre , en 81/2 Grès, en 8 1/2 Or, en 10 Il résulte de ces trois expériences , i° Que le temps du refroidissement de l’or est à celui du refroidissement du grès , au point de les tenir II 38 l 28, et :: 118 l 90 pour leur entier refroidissement. 20 Que le temps du refroidissement de l’or est à celui du refroidissement du verre , au point de les tenir, ; : 38 : 27, et II 118 l 70 pour leur entier refroidissement. 3° Que le temps du refroidissement de 364 minéraux, introduction. l’or est à celui du refroidissement de la por- celaine, au point de les tenir , . . 33 . 21 , et 118 : 66 pour leur entier refroidisse- ment. , , 4° Que le temps du refroidissement de l’or est à celui du refroidissement du gypse, au point de les tenir, H a 8 ; 12 1/2,. et, 118 : 39 pour leur entier refroidisse- ment. 5° Que le temps du refroidissement du grès est à celui du refroidissement du verre, au point de les tenir, :: 28 1/2 : 27, et 1' 9° I 7° pour leur entier refroidisse- Refroidis à les tenir pendant une demi-seconde. minutes. Pierre cale, ten- Q En Pierre cale, dure , èn y 11 En Marbre commun , i3 En Marbre blanc, en 14 En Argent, en 16 En . Refroidis à la température min XXVII. La même expérience répétée boulets se sont refroidis dans l’ordre vaut : ! ment. 6° Que le temps du refroidissement du grès est à celui du refroidissement de la porcelaine , au point de pouvoir les tenir , :: 28 1/2 : 21, et :: 90 : 66 pour leur entier refroidissement. 70 Que le temps du refroidissement du grès est à celui du refroidissement du gypse , au point de les tenir, :: 28 1/2 : 12 1/2, et : : 90 : 39 pour leur entier refroidisse- ment. 8° Que le temps du refroidissement du verre est à celui du refroidissement de la porcelaine, au point de les tenir, ,'I 27 ; 21 , et 1 : 70 : 66 pour leur entier refroi- dissement. 90 Que le temps du refroidissement du verre est à celui du refroidissement du gypse, au point de les tenir, :: 27 ; 12 1/2, et : : 70 : 39 pour leur entier refroidissement. io° Que le temps du refroidissement de la porcelaine est à celui du refroidissement du gypse, au point de les tenir, " 21 : 12 1/2, et :: 66 : 39 pour leur entier refroidissement. XXY. On a fait chauffer de même les boulets d’argent, de marbre commun, de pierre dure, de marbre blanc, et de pierre calcaire tendre d’Anières, près de Dijon. Refroidis à les Unir pendant une demi-seconde. minutes. Ti erre calcaire ten- f] |*ft , f>l| . T , , - - 8 Refroidis à la température. minutes. En 25 Pierre dure, en. . . io Marbre commun , pnT r _ . tt En 34 En 33 Marbre blanc, en 12 Argent, en i3 i h En.... 36 En. 4o XXYI. La même expérience répétée , les boulets se sont refroidis dans l’ordre sui- vant : Refroidis à les tenir pendant une demi-seconde. minutes. Pierre cale, ten- dre, en 9 Pierre cale, dure , en 10 1/2 Marbre commun , en 12 1/2 Marbre blanc, en i3 1/2 Argent , en 16 Refroidis à la température min En 2 En 3 En 3 En 3 En 4 U résulte de ces trois expériences : i° Que le temps du refroid issemen; l’argent est à celui du refroidissemenl marbre blanc, au point de les tenir 45 1/2 1 39 1/2, et : 125 ; Ii5 pour entier refroidissement. 20 Que le temps du refroidissemen l’argent est à celui du refroidissement ! marbre commun , au point de les tenir j 45 1/2 : 36, et 125 : n3pour leuij» tier refroidissement. 3° Que le temps du refroidissemen l’argent est à celui du refroidissement c pierre dure , au point de les tenir, : : 45 : 3i 1/2, et 125 1 107 pour leur ei refroidissement. 4° Que le temps du refroidissemen l’argent est à celui du refroidissement d pierre tendre, au point de les tenir, * ; 45 : 26, et :: 125 : 78 pour leur entiei» froidissement. 5° Que le temps du refroidissemenl i marbre blanc est à celui du refroidisser M du marbre commun , au point de les te» :: 39 1/2 : 36, et :: no : u3 pour a entier refroidissement. 6° Que le temps du refroidissemenl II marbre blanc est à celui du refroidisser» de la pierre dure, au point de les tenir!! 391/2 ; 3i 1/2, et :: Ii5 ; 107 pour a entier refroidissement. 70 Que le temps du refroidissement ■ marbre’ blanc est à celui du refroidisser» de la pierre tendre , au point de PARTIE EXPÉRIMENTALE. 365 3g 1/2 : 26, et :: ii5 : 78 pour leur lier refroidissement. ]° Que le temps du refroidissement du jrbre commun est à celui du refroidisse- t de la pierre dure, au point de les tenir, 1 36 : 3i 1/2, et ii3 ; 109 pour leur er refroidissement. 0 Que le temps du refroidissement du bre commun est à celui du refroidisse- t de la pierre tendre , au point de les r, ; : 36 : 26, et :: ii3 : 78 pour j* entier refroidissement. 1 o° Que le temps du refroidissement de la |rre dure est à celui du refroidissement de lierre tendre , au point de les tenir, I I k/2 : 26, et 107 ; 78 pour leur en- refroidissement. LXYIII. On a mis dans le même four 1 chauffé , des boulets d’or, de marbre ne , de marbre commun , de pierre dure e pierre tendre ; ils se sont refroidis dans re suivant : Refroidis à les tenir lant une demi-seconde. - minutes. Ife cale, ten- 're, en 9 ibre commun , re dure, en. . 11 1/2 iffi libre blanc , en 1 3 1 i5 1/2 leur tXIX. La même expérience répétée à '} moindre chaleur, les boulets se sont re- dis dans l’ordre suivant : Refroidis à la température. minutes. l| Refroidis à les tenir lant une demi-seconde. minutes lire cale, ten lelfta, re dure, en bre commun , 9 1118 bre blanc, en 10 Refroidis à la température. minutes. En ... . En ... . En ... . 26 En . . . . En ... , iieil !■ isi ;KXX. La même expérience répétée une 5 k isième fois , les boulets chauffes à un feu s ardent , ils se sont refroidis dans l’or- suivant : , Refroidis -à les tenir it une demi-seconde. minutes, pre tendre , en 7 rre dure, en. . 8 ,| rbre commun , . n . 81/2 rbre blanc, en 9 en i2 Refroidis à la température. minutes. .... 20 .... 24 Il résulte de ces trois expériences: i° Que le temps du refroidissement de l’or est à celui du refroidissement du marbre blanc, au point de les tenir, 39 1/2 : 32, et :: 117 : 92 pour leur entier refroi- dissement. 20 Que le temps du refroidissement de l’or est à celui du refroidissement du marbre commun, au point de les tenir, I : 3g 1/2 : 291/2, et :: 117 : 87 pour leur entier re- froidissement. 3° Que le temps du refroidissement de l’or est à celui du refroidissement de la pierre dure, au point de les tenir, ; ; 39 1/2 : 27 1/2, et II 117 : 86 pour leur entier refroidissement. 4° Que le temps du refroidissement de l’or est à celui du refroidissement de la pierre tendre , au point de les tenir, : : 3g 1/2 : 22, et :: 117 : 68 pour leur en- tier refroidissement. 5° Que le temps du refroidissement du marbre blanc est à celui du refroidissement du marbre commun , au point de les tenir, II 32 : 29, et :: 92 ; 87 pour leur entier refroidissement. 6° Que le temps du refroidissement du marbre blanc est à celui du refroidissement de la pierre dure , au point de les tenir, : : 32 ; 27 1/2, et M 92 : 84 pour leur entier refroidissement. 70 Que le temps du refroidissement du marbre blanc est à celui du refroidissement de la pierre tendre , au point de les tenir, ’.l 32 : 22, et H 92: 68 pour leur entier refroidissement. 8° Que le temps du refroidissement du marbre commun est à celui du refroidisse- ment de la pierre dure , au point de les te- nir, :: 29 : 2.7 1/2, et :: 87 : 84 pour leur entier refroidissement. 90 Que le temps du refroidissement du marbre commun est à celui du refroidisse- ment de la pierre tendre , au point de les tenir, M 29 ; 22, et II 87 I 68 pour leur entier refroidissement. io° Que le temps du refroidissement de la pierre dure est à celui du refroidissement de la pierre tendre , au point de les tenir, H 27 1/2 : 22, et II 84 : 68 pour leur entier refroidissement. XXXI. On a mis dans le même four les boulets d’argent , de grès , de verre , de por- celaine et de gypse ; ils se sont refroidis dans l'ordre suivant : 366 Refroidis à les tenir Gypse , en . . Porcelaine , en Verre , en . . Grès , en. -. • Argent , en. . MINERAUX. Refroidis minutes. minutes. . 3 En . . 61/2 En . . 8 3/4 En . En . . 12 I li En . XXXII. La même expérience répétée et les boulets chauffés à une chaleur moindre , ils se sont refroidis dans l’ordre suivant : Refroidis à les tenir pendant une demi-seconde. minutes. 3 Gypse , en. Porcelaine , Yerre , en . Grès , en. . Argent , en. Refroidis à la température. minutes. En . i3 En . En . En . 26 En . XXXIIi. La même expérience répétée une troisième fois , les boulets se sont re- froidis dans l’ordre suivant : Refroidis à les tenir pendant une demi-seconde. minutes. Gypse , en. Porcelaine , Verre , en . Grès , en. . Argent, en. 3 6 1 3/4 Refroidis à la température. minutes Il résulte de ces trois expériences : i° Que le temps du refroidissement de l’argent est à celui du refroidissement du grès, au point de les tenir, " 36 : 26 1/2, et :: io3 : 80 pour leur entier refroidisse- ment. 20 Que le temps du refroidissement de l’argent est à celui du refroidissement du verre , au point de les tenir, : : 36 : 25, et io3 : 62 pour leur entier refroidisse- ment. 3° Que le temps du refroidissement de l’argent est à celui du refroidissement de la porcelaine , au point de les tenir, : : 36 : 20, et :: io3 * 54 pour leur entier refroi dissement. 4° Que le temps du refroidissement de l’argent est à celui du refroidissement du gypse , au point de les tenir, : : 36 : 9 , et ; ; xo3 : 3p pour leur entier refroidissement. 5° Que le temps du refroidissement du grès est à celui du refroidissement du verre, au point de les tenir, ;; 26 1/2 ; 25 par les expériences présentes, et ; ; 28 1/2 ; 27 parles expériences précédentes (art. XXIY). Ainsi on aura , en ajoutant ces temps, 55 à 52 pour le rapport encore plus précis de leur pre- mier refroidissement ; et pour le second , le INTRODUCTION. rapport donné par les présentes expérie | ï( étant :: 80 : 62 , et :: 90 : 70 par le: I Si périences précédentes (art. XXIY), on ; |aj en ajoutant ces temps, 170 à i32 po; rapport encore plus précis de l’entier re dissement du grès et du verre. 6° Que le temps du refroidissemen grès est à celui du refroidissement de la |4 celaine, au point de pouvoir les terril™' 26 1/2 : 19 1/2 par les présentes e riences, et 28 1/2 ; 21 par les e riences précédentes (art. XXIY). Ains aura, en ajoutant ces temps, 55 à 40 pour le rapport plus précis de leur pre refroidissement ; et pour le second , le port donné par les présentes expérie étant : : 80 ; 54 , et : : 90 : 66 par les cédentes expériences (art. XXIY) , on a en ajoutant ces temps, 170 à 120 pot rapport encore plus précis de l’entier froidissement du grès et de la porcelair 7° Que le temps du refroidissement grès est à celui du refroidissement du gy au point de les tenir, : : 26 1/2 : 9 par le périences présentes, et “ 28 1/2 ; 12 r/s les expériences précédentes (article XX îî Ainsi on aura , en ajoutant ces temps , If 21 1/2 pour le rapport plus précis de a premier refroidissement; et pour le seo* le rapport donné par la présente expéri-Ë étant ; : 80 : 39 , et : : 90 : 39 par lesjr périences précédentes (art. XXIY), on al en ajoutant ces temps, 170 à 78 pour le 4 port encore plus précis de l’entier refro j» sement du grès et du gypse. 8° Que le temps du refroidissement u verre est à celui du refroidissement d Hà porcelaine, au point de les tenir, o.'\{ 19 parles présentes expériences, et ; \ : |a 21 par les expériences précédentes ticle XXIY). Ainsi , en ajoutant ces tei|| on aura 5 2 à 40 1/2 pour le rapport p précis de leur premier refroidissement Mj pour le second , le rapport donné par expériences présentes étant 1:62; 5 r it ; : 70 : 66 par les expériences précédé jss (art. XXIY), on aura, en ajoutant ces lerk ris i32 à 1 17 pour le rapport encore plus prl de l’entier refroidissement du verre et d B porcelaine. 90 Que le temps du refroidissement il verre est à celui du refroidissement du gy 1 au point de les tenir, ;; 25 : 9 par laji sente expérience, et .*: 27 : 12 1/2 par» expériences précédentes (art. XXIY). A ;i en aura, en ajoutant ces temps, 5 2 à 21 a pour le rapport encore plus précis de ljf premier refroidissement ; et pour le secoJ g PARTIE EXPÉRIMENTALE rapport donné par les présentes expé- ences étant :: 62 : 3g, et :: 70 ; 3g par s expériences précédentes (art. XXIY), on ira, en ajoutant ces temps, i3a à 78 pour rapport encore plus précis de l’entier re- ’loidissement du verre et du gypse. i| io° Que le temps du refroidissement de 16 porcelaine est à celui du refroidissement i gypse , au point de les tenir, : : 19 1/2 : f;li" par les présentes expériences , et : 21 : t 1/2 par les expériences précédentes (ar- of ;le XXIY). Ainsi on aura, en ajoutant ces ilDi [nps, 40 1/2 à 21 1/2 pour le rapport plus 4° lécis de leur premier refroidissement ; et Prî lur le second, le rapport donné par l’ex- ^ Irience présente étant ; : 54 ' 39, et par tnt 5 expériences précédentes (art. XXIY) , M 66 : 3g , on aura, en ajoutant ces temps, !1J :o à 78 pour le rapport encore plus précis Fi l’entier refroidissement de la porcelaine ;|e|du gypse. lleD| XXXIY. On a mis dans le même four les 3 6f J®ulets d’or, de craie blanche, d’ocre et de u'Hise; iis se sont refroidis dans l’ordre sui- nt: Refroidis à les tenir ndanl une demi-seconde. minutes. SCCiiaie, en 6 aise , en . . . 6 • 7 Refroidis à la température. minutes. i5 16 36 XXXY. La même expérience répétée ec les mêmes boulets et un boulet de lomb, leur refroidissement s’est fait dans irdre suivant : Refroidis à les tenir ndant une demi-seconde. minutes. [Me, en. .... 4 etj^re , en 5 aise , en . . . . 5 1/2 omb , en . . . . 7 r, en 9 I/2 Refroidis la température. minutes. 29 Z1! II résulte de ces deux expériences : fcjl j o qu6 ]e t_enipS du refroidissement de slfl!!)r est à celui du refroidissement du plomb, F point de pouvoir les tenir, 1:91/2:7 ^ kr l’expérience présente, et 1 : 38 : 24 par ;s expériences précédentes (art. XYI). insi on aura, en ajoutant ces temps, 47 U5II/2 à 3i pour le rapport plus précis de leur 1 J! fremier refroidissement ; et pour le second , pa§ rapport donné par l’expérience présente ^ liant :: 29 : i8,et :: n5 : 90 par les 21 kpériences précédentes (art. XYI), on lîf! |kira, en ajoutant ces temps , 144 à 108 pour le rapport encore plus précis de l’entier re- froidissement de l’or et du plomb. 20 Que le temps du refroidissement de l’or est à celui du refroidissement de la glaise, au point de les tenir, 21 1/2 : 12 1/2, et ; : 65 ; 33 pour leur entier refroidisse- ment. 3° Que le temps du refroidissement de l’or est à celui du refroidissement de l’ocre , au point de les tenir , :: 21 1/2 : nï/2,et 65 : 29 pour leur entier refroidissement. 4° Que le temps du refroidissement de l’or est à celui du refroidissement de la craie, au point de les tenir, :: 21 1/2 : 10, et ; ; 65 : 26 pour leur entier refroidissement. 5° Que le temps du refroidissement du plomb est à celui du refroidissement de la glaise, au point de pouvoir les tenir, :: 7 I 5 1/2 , et ; ; 18 : i5 pour leur entier re- froidissement. ; 6° Que le temps du refroidissement du plomb est à celui du refroidissement de l’o- cre au point de pouvoir les tenir , ; : 7 : 5 , et 18 : 13 pour leur entier refroidisse- ment. 7° Que le temps du refroidissement du plomb est à celui du refroidissement de la craie, au point de les tenir, ;; 7 : 4, et ;; 18 : 11 pour leur entier refroidissement. 8° Que le temps du refroidissement de la glaise est à celui du l’efroidissement de l’ocre , au point de pouvoir les tenir , ; ; 12 1/2 ; 11 1/2, et 33 : 29 pour leur entier refroidissement. 90 Que le temps du refroidissement de la glaise est à celui du refroidissement de la craie, au point de pouvoir les tenir, :: 12 1/2 : 10, et 33 : 26 pour leur entier refroidissement. ( io° Que le temps du refroidissement de l’ocre est à celui du refroidissement de la craie, au point de pouvoir les tenir, :: II 1/2 : 10, et 29 : 26 pour leur en- tier refroidissement. XXXYI. On a mis dans le même four les boulets de fer , d’argent , de gypse , de pierre ponce, et de bois, mais à un degré de chaleur moindre pour 11e point faire brûler le bois ; et ils se sont refroidis dans l’ordre suivant : Refroidis à les tenir pendant une demi-seconde. minutes. Pierre ponce , en. 2 Bois , en 2 Gypse , en . . . . 2 1/2 Argent , en. ... 10 Fer, en. . . , . . i3 Refroidis « la température. minutes* 5 6 3&8 MINÉRAUX. INTRODUCTION. XXXVII. La môme expérience répétée à une moindre chaleur, les boulets se sont refroidis dans l’ordre suivant : Refroidis à les tenir pendant une demi-seconde. minutes. Pierre ponce , en i 1/2 Bois , en 2 Gypse , en. . . . 2 1/2 Argent , en. ... 7 Fer, en 81/2 Refroidis à la température. minutes. En 4 En 5 En 9 En 24 En 3i :: 20 : IX pour leur entier refroidissemen 90 Que le temps du refroidissement c gypse est à celui du refroidissement de pierre ponce, au point de pouvoir les teni v ^ * 3.1/2’ et 20 * 9 pour leur ei tier refroidissement. io° Que le temps du refroidissement < bois est à celui du refroidissement de pierre ponce , au point de les tenir, ; ; ' ! 3 1/2 , et ; ; Il : 9 pour leur entier r froid issemeht. Il résulte de ces expériences : i° Que le temps du refroidissement du fer est à celui du refroidissement de l’argent au point de pouvoir les tenir, 21 1/2 : 1 7 par les présentes expériences, et : : .45 1/2 \ 34 par les expériences précédentes (ar- ticle XI). Ainsi on aura, en ajoutant ces temps , 67 à 5i pour le rapport plus précis de leur premier refroidissement ; et pour le second, le rapport donné par les expériences présentes étant ;; 71 : 5g, et i3S : 97 par les expériences précédentes (art. XI), on aura, en ajoutant ces temps, 299 à i5ô pour le rapport encore plus précis de l’entier refroidissement du fer et de l’argent. 20 Que le temps du refroidissement du fer est à celui du refroidissement du gypse, au point de pouvoir les tenir, ;; 21 1/2 : 5, et 71 : 20 pour leur entier refroidisse- ment. 3° Que le temps du refroidissement du fer est à celui du refroidissement du bois , au point de pouvoir les tenir, y, 21 1/2 : 4, et :: 71 : Il pour leur entier refroi- dissement. 4° Que le temps du refroidissement du fer est à celui du refroidissement de la pierre ponce, au point de les tenir, ; : 12 r/2 : 3 1/2, et 71 : 9 pour leur entier refroi- dissement. 5° Que le temps du refroidissement de l’argent est à celui du refroidissement du gypse , au point de les tenir, ; ; 1 7 : 5 , et ; ; 5g : 3o pour leur entier refroidissement. 6° Que le temps du refroidissement de l’argent est à celui du refroidissement du bois, au point de pouvoir les tenir, y. 17 ; 4 , et :: 5g ; 11 pour leur entier refroidisse- ment. 70 Que le temps du refroidissement de l’argent est à celui du refroidissement de la pierre ponce , au point de pouvoir les te- nir, ;; 17 : i3 1/2, et 59 : 9 pour leur entier refroidissement. 8° Que le temps du refroidissement du gypse est à celui du refroidissement du bois, au point de pouvoir les tenir, y 5 : 4, et XXXVIII. Ayant fait chauffer enseml les boulets d’or, d’argent, de pierre tendr et de gypse, ils se sont refroidis dans l’ord suivant : Refroidis à les tenir pendant une demi-seconde. minutes. Gypse , en . . . . 4 1/2 Pierre tendre, en. 12 Argent , en. ... 16 Or, en ...... 18 Refroidis à la température. min 11' En 14 En 27 En 42 En 47 11 résulte de cette expérience : i° Que le temps du refroidissement l’or est à celui du refroidissement de l’é gent, au point de pouvoir les tenir, y ; 16 par l’expérience présente, et ;; 1 ; 55 par les expériences précédentes ( « ticleXV). Ainsi on aura , en ajoutant < temps, 98 à 71 pour le rapport plus pré« de leur premier refroidissement; et pour second, le rapport donné par l’expérien présente étant : 35 : 42 , et ;; 187 i5g par les expériences précédentes (t ticle XV) , on aura, en ajoutant ces temp 284 à 201 pour le rapport encore plus pi cis de l’entier refroidissement de l’or et l’argent. 2? Que le temps du refroidissement For est à celui du refroidissement de la pieri tendre , au point de les tenir , : 18; 1 et : ; 391/2 : 23 par les expériences pi cédentes (article XXX). Ainsi on aura, ajoutant ces temps, 5 7 1/2 à 35 pour rapport plus précis de leur premier refrc dissement; et pour le second, le rappc donné par l’expérience présente étant 47 ; 27, et par les expériences précéden (article XXX) , 117 : 68, on aura, ajoutant ces temps, 164 à g5 pour le ra port encore plus précis de l’entier refroid sement de For et de la pierre tendre. 3° Que le temps du refroidissement For est à celui du refroidissement du gyps au point de les tenir, ; : 18 : 14 1/2, et 38 : 12 1/2, par les expériences précédé tes (art. XXIV). Ainsi on aura, en ajo PARTIE EXPERIMENTALE. 369 tant ces temps, 56 â 17 pour le rapport plus précis de leur premier refroidissement ; et pour le second, le rapport donné par la présente expérience étant *; 47 ' 14 » fit jt: 118 ; 3p par les expériences précéden- es (art. XXIV), on aura, en ajoutant ces emps, i65 à 53 pour le rapport encore lus précis de leur entier refroidissement. 4° Que le temps du refroidissement de argent est à celui du refroidissement de la lierre tendre, au point de les tenir, ” 16 12 par la présente expérience, et ; I 45 1 /a 26 par les expériences précédentes (ar- ide XXVII). Ainsi on aura, en ajoutant ps temps, 61 1/2 à 38 pour le rapport plus récis de leur premier refroidissement; et our le second , le rapport donné par la pré- bnte expérience étant : : 42 ; 27, et ;; 25 : 78 par les expériences précédentes art. XXVII) , on aura en ajoutant ces ^mps, 167 à io5 pour le rapport encore lus précis de l’entier refroidissement de argent et de la pierre tendre. 5° Que le temps du refroidissement de !>a argent est à celui du refroidissement du /pse, au point de pouvoir les tenir, 6:41/2 par la présente expérience, et : : j7 : 5 par les expériences précédentes (ar- [t jcle XXXVI1). Ainsi on aura, en ajoutant r- îs temps, 33 à 9 1/2 pour le rapport plus |jr récis de leur premier refroidissement; et jen bur le second, le rapport donné par l’ex- .» érience présente étant : : 42 : 14, et :: /.a : 20 par les expériences précédentes irt. XXXVI), on aura, en ajoutant ces '|mps, 101 à 34 pour le rapport encore ejjus précis de l’entier refroidissement de jirgent et du gypse. J 6° Qué le temps du refroidissement de la Jjjerre tendre est à celui du refroidissement ■ji gypse, au point de les tenir, ;; 12 : 4 1/2, et :: 72 : 14 pour leur entier re- ’ ]pidissement. ont XXXIX. Ayant fait eliauffer pendant retongt minutes, c’est-à-dire pendant un temps ■v ip ipeu près double de celui qu’on tenoit or- ant toairement les boulets au feu, qui étoit yen! (mmunément de dix minutes, les boulets uraj : fer, de cuivre, de verre, de plomb, et le ra] étain , ils se sont refroidis dans l’ordre .froi ivant : 1 Refroidis à les tenir Refroidis \idanl une demi-seconde. à la température. minutes. minutes. Il résulte de cette expérience, qui a été faite avec la plus grande précaution : i° Que le temps du refroidissement du fer est à celui du refroidissement du cuivre, au point de pouvoir les tenir, ;; 20 1/2 : 16 1/2 par la présente expérience, et : : x 6 1 ; 1 3 8 par les expériences précé- dentes (article XXI). Ainsi on aura, en ajoutant ces temps, 181 1/2 à i54 1/2 pour le rapport plus précis de leur premier refroi- dissement ; et pour le second , le rapport donné par l’expérience présente étant \ : 5o : 44 s et : 466 : 4o5 par les expériences précédentes (art. XXI), on aura, en ajou- tant ces temps, 5t6 à 449 pour le rapport encore plus précis de l’entier refroidisse- ment du fer et du cuivre. 20 Que le temps du refroidis ement du fer est à celui du refroidissement du verre , au point de pouvoir les tenir, ;; 20 1/2 : 12 par l’expérience présente , et ; : 62 par les expériences précédentes ; 35 x/ 2 (article XXI). Ainsi on aura, en ajoutant- ces temps, 82 1/2 à 46 pour le rapport en- core plus précis de leur premier refroidisse- ment ; et pour le second , le rapport donné par l’expérience présente étant :: 5o : 35, et ;; 186 : 97 par les expériences précé- dentes (article XXI), on aura, en ajoutant ces temps, 236 à i32 pour le rapport en- core plus précis de l’entier refroidissement du fer et du verre. 3° Que le temps du refroidissement du fer est à celui du refroidissement du plomb , au point de pouvoir les tenir, ;; 20 1/2 I 11 par la présente expérience, et ;; 53 1/2 ; 27 par les expériences précédentes (ar- ticle IV). Ainsi on aura, en ajoutant ces temps, 74 à 38 pour le rapport plus précis de leur premier refroidissement ; et pour le second, le rapport donné par la présente expérience étant 5o : 3o, et :: 142 ; 94 1/2 par les expériences précédentes (art. IV), on aura, en ajoutant ces temps, 192 à 124 1/2 pour le rapport encore plus précis de l’entier refroidissement du fer et du plomb. 4° Que le temps du refroidissement du fer est à celui du refroidissement de l’étain, au point de pouvoir les tenir, ;; 20 1/2 I 10, et :: i3i : 64 1/2 par les expériences précédentes (art. XXI). Ainsi on aura, en ajoutant ces temps, i5a à 74 1/2 pour le rapport plus précis de leur premier refroi- dissement ; et pour le second, le rapport donné par l’expérience présente étant ; : 5o : 25, et 460 : 226 par les expériences précédentes ( art, XXI ) , on aura , en ajou- $7° MINÉRAUX. INTRODUCTION. tant ces temps, 5io à a5i pour le rapport encore plus précis de l’entier refroidisse- ment du fer et de l’étain. 5° Que le temps du refroidissement du cuivre est à celui du refroidissement du verre , au point de les tenir, ;; 16 i/a : ia par la présente expérience , et :: 52 1/2 : 34 1/2 par les expériences précédentes (art. XXI). Ainsi on aura, en ajoutant ces temps, 69 à 46 pour le rapport plus précis de leur pre- mier refroidissement; et pour le second, le rapport donné par la présente expérience étant :: 44 : 35, et :: 1 57 : 97 par les expériences précédentes (article XXI), on aura, en ajoutant ces temps, 201 à i32 pour le rapport encore plus précis de l’en- tier refroidissement du cuivre et du verre. 6U Que le temps du refroidissement du cuivre est à celui du refroidissement du plomb, au point de les tenir, ;; 16 x/2 : 11 par la présente expérience, et 45 ; 27 par les expériences précédentes (art. Y). Ainsi on aura, en ajoutant ces temps, 61 i/a à 38 pour le rapport plus précis de leur premier refroidissement ; et pour le second, le rapport donné par la présente expérience étant : : 44 : 3o , et 125 : 94 1/2 par les expériences précédentes ( art. V ) , on aura, en ajoutant ces temps, 169 à 124 1/2 pour le rapport encore plus précis de l’en- tier refroidissement du cuivre et du plomb. 70 Que le temps du refroidissement du cuivre est à celui du refroidissement de l’é- tain, au point de les tenir, 16 1/2 : 10 par l’expérience présente, et ;; i36 1/2 : 76 par les expériences précédentes (ar- ticle XXI). Ainsi on aura, en ajoutant ces temps, i53 à 86 pour le rapport plus précis de leur premier refroidissement ; et pour le second, le rapport donné par la présente expérience étant y. 44 l 25, et ;; 3o4 ; 224 par les expériences précédentes (ar- ticle XXI ) , on aura , en ajoutant ces temps , 348 à 249 pour le rapport encore plus précis de l’entier refroidissement du cuivre et de l’étain. 8° Que le temps du refroidissement du verre est à celui du refroidissement du plomb , au point de pouvoir les tenir, y. 12 : 1 1 , et ; : 35 : 3o pour leur entier refroi- dissement. 90 Que le temps du refroidissement du verre est à celui du refroidissement de l’é- tain, au point de les tenir, y 12 ; 10 par la présente expérience, et y 34 1/2 32 1/2 par les expériences précédentes (art. XXI). Ainsi on aura, en ajoutant ces temps, 46 à 42 1/2 pour le rapport plus précis de leur premier refroidissement ; et pour le second, le rapport donné par l’expérience présente, étant 35 : 25, et 97 : 92 par les expériences précédentes (art. XXI), on aura, en ajoutant ces temps, i32 à 117 pour le rapport encore plus précis de l’entier re- froidissement du verre et de l’étain. io° Que le temps du refroidissement du plomb est à celui du refroidissement de l’é- tain, au point de les tenir ;; 11 1 10 pai la présente expérience, et :: 25 1/2 : 21 1/3 Sar les expériences précédentes (art. VIII) .insi on aura, en ajoutant ces temps, 36 1/3 à 3 1 1/2 pour le rapport plus précis de leui În emier refroidissement ; et pour le second e rapport donné par la présente expérienci étant .* : 3o : 25 , et ; ; 79 1/2 : 64 par le expériences précédentes (art. VIII), 01 aura, en ajoutant ces temps, 109 1/2 à 8 pour le rapport encore plus précis de l’en tier refroidissement du plomb et de l'étain XL. Ayant mis chauffer ensemble lti( boulets de cuivre, de zinc, de bismuth! d’étain et d’antimoine, ils se sont refroid : I s dans l’ordre suivant : Refroidis à les tenir minutes minutei Antimoine , en. . 8 En ... . Bismuth , en. . . 8 En ... . Étain , en . . . . 8 1/2 En ... . Zinc , en. . . . En ... . Cuivre , en. . . . i4 En ... . Refroidis à la température. XLI. La même expérience répétée , lj boulets se sont refroidis dans, l’ordre su; vant : Refroidis à les tenir pendant une demi-seconde. minutes. Antimoine , en. . 8 Bismuth , en. . . 8 Etain , en . . . . 91/2 Zinc , en 12 Cuivre , en. . . . 14 Refroidis à la température. minut Ü 23 24 25 38 4o Il résulte de ces deux expériences : i° Que le temps du refroidissement cuivre est à celui du refroidissement zinc, au point de les tenir, y 28 ; 24 ;; 80 l 68 pour leur entier refroidisseme 20 Que le temps du refroidissement cuivre est à celui du refroidissement de tain, au point de les tenir, ;; 28 : 18 les présentes expériences, et ;; i53 ‘ 86 j les expériences précédentes (art. XXXI3 Ainsi 011 aura, en ajoutant ces temps, t à 104 pour le rapport plus précis de 1 premier refroidissement ; et pour le secot PARTIE EXPÉRIMENTALE. 371 e rapport donné par la présente expérience 3tant ; : 80 : 47 , et par les expériences s Précédentes (art. XXXIX) ; 348 : 249, !m aura, en ajoutant ces temps, 428 à 296 pour le rapport plus précis de l’entier re- 'roidissemeiit du cuivre et de l étain. 13° Que le temps du refroidissement du uivre est à celui du refroidissement de antimoine, au point de pouvoir les tenir, J; 28 : 16, et 80 : 47 pour leur entier efroidissement. ! 40 Que le temps du refroidissement du tuivre est à celui du refroidissement du lismuth, au point de les tenir, ;; 28 ; 16, t 80 : 47 pour leur entier refroidisse- ment. { 5° Que le temps du refroidissement du [line est à celui du refroidissement de Pé- kin, au point de les tenir, ; : 24 : 18, et j l 68 : 47 pour leur entier refroidissement. I 6° Que le temps du refroidissement du line est à celui du refroidissement de l’an- femoine, au point de les tenir, : 24 * 16» jar les présentes expériences, et 73 jl 39 1/2 par les expériences précédentes art. XVII). Ainsi, en ajoutant ces temps, in aura 97 à 55 1/2 pour le rapport plus irécis de leur premier refroidissement ; et jour le second, le rapporl donné par les expériences présentes étant ; : 68 ; 47 , et 220 : i5 5 par les expéxiences précé- dentes (art. XVII), on aura, en ajoutant les temps, 288 à 202 pour le rapport en- tore plus précis de l’entier refroidissement jlu zinc et de l’antimoine, li 70 Que le temps du refroidissement du (fine est à celui du refroidissement du bis- jnuth, au point de pouvoir les tenir, ; ; 24 i 16 , et : 5g : 35 1/2 par les expériences précédentes (art. XVII). Ainsi on aura, en ([joutant ces temps, 83 à 5i 1/2 pour le rap- port encore plus précis de leur premier re- froidissement ; et pour le second , le rapport 1 lonué par la présente expérience étant : : J8 : 47, et :: 176 : 140 par les expé- riences précédentes (art. XVII), on aura, ■in ajoutant ces temps, 244 à 187 pour le [apport encore plus précis de l’entier refroi- dissement du zinc et du bismuth. [ 8° Que le temps du refroidissement de l’étain est à celui du refroidissement de l’an- timoine, au point de les tenir, 18 : 16, lit : : 5o ; 47 pour leur entier refroidisse- ment. 90 Que le temps du refroidissement de étain est à celui du refroidissement du bis- nuth, au point de les tenir, 18 : 16, et : 5o : 47 pour leur entier refroidissement. io° Que le temps du refroidissement du bismuth est à celui du refroidissement de l’antimoine , au point de pouvoir les tenir, 16 : x6 par la présente expérience , et .*; 35 1/2 ; 32 par les expériences précé- dentes (art. XVII). Ainsi on aura, en ajou- tant ces temps, 5i à 48 pour le rapport plus précis de leur premier refroidissement , et pour le second , le rapport donné par l’expérience présente étant ; : 47 : 47 , et par les expériences précédentes (art. XVII) 140 : 127, on aura, en ajoutant ces temps, 187 à 174 pour le rapport encore plus précis de l’entier refroidissement du bis- muth et de l’antimoine. XLII. Ayant fait chauffer ensemble les boulets d’or, d’argent, de fer, d’émeril et de pierre dure, ils se sont refroidis dans l’ordre suivant : Refroidis à les tenir pendant une demi- seconde. minutes. Pierre cale, dure, en 11 1/2 Argent , en. . . . i3 Or, en .... . . i4 Émeril , en. . . . i5 1/2 Fer, en 17 En En En En En Refroidis la température. minutes. 3a 37 4° 46 5i Il résulte de cette expérience : i° Que le temps du refroidissement du fer est à celui du refroidissement de l’émeril, au point de pouvoir les tenir, ;; 17 ; i5 1/2, et ; : 5i ; 46 pour leur entier re- froidissement. 20 Que le temps du refroidissement du fer esi à eelui du refroidissement de l’or, au point de pouvoir les tenir, \\ 17 ; 14 par la présente expérience, et ! : 45 1/2 : 37 par les expériences précédentes (article XI). Ainsi on aura, en ajoutant ces temps , 62 1/2 à 5i pour le rapport plus précis de leur premier refroidissement ; et pour le se- cond , le rapporl donné par la présente ex- périence étant : : 5 1 : 40, et :: i38 : 114 par les expériences précédentes (article XI), on aura, en ajoutant ces temps, 189 à i54 pour le rapport encore plus précis de l’en- tier refroidissement du fer et de l’or. 3° Que le temps du refroidissement du fer est à celui du refroidissement de l’argent , au point de les tenir, .‘I 17 ; i3 par la pré- sente expérience, et :: 67 : 5i par les expériences précédentes (art. XXXVII). Ainsi on aura, en ajoutant ces temps, 84 à 64 pour le rapport plus précis de leur pre- mier refroidissement ; et pour le second , le rapport donné par la présente expérience 24. 372 MINÉRAUX. INTRODUCTION. étant :: 5i : 37, et :: 209 : i56 par les expériences précédentes (art. XXXVÏI), on aura , en ajoutant ces temps , 260 à 193 pour le rapport encore plus précis de l’entier refroidissement du fer et de l’argent. 4° Que le temps du refroidissement du fer est à celui du refroidissement de la pierre dure, au point de les tenir, :: 17 : 1 1 x/4, et :: 5i : 52 pour leur entier refroidisse- ment. 5° Que le temps du refroidissement de l’émeril est à celui du refroidissement de l’or, au point de pouvoir les tenir, ;; i5 1/2 : 14 par la présente expérience, et ; : 44 : 38 par les expériences précédentes (ar- ticle XYI). Ainsi on aura , en ajoutant ces temps, 59 1/2 à 52 pour le rapport encore plus précis de leur premier refroidissement; et pour le second , le rapport donné par la présente expérience étant ; l 46 : 40 , et i3i ; n5 par les expériences précédentes (art. XVI), on aura , en ajoutant ces temps, 177 à i55 pour le rapport encore plus précis de l’entier refroidissement de l’émeril et de l’or. 6° Que le temps du refroidissement de l’émeril est à celui du refroidissement de l’ar- gent au point de pouvoir les tenir, ; ; i5 1/2 : i3 parla présente expérience, et ;; 43 : 32 1/2 par les expériences précédentes (art. XVII). Ainsi on aura, en ajoutant ces temps, 58 1/2 à 45 1/2 pour le rapport plus précis du premier refroidissement de l’émeril et de l’argent ; et pour le second , le rapport donné par la présente expérience étant ; ; 46 l 37 , et ; ; r 25 T 98 par les expériences précédentes (art. XVII) , on aura , en ajou- tant ces temps , 171 à i35 pour le rapport encore plus précis de leur entier refroidisse- ment. 70 Que le temps du refroidissement de l’émeril est à celui du refroidissement delà pierre dure, au point de les tenir, ;; i5 r/2 : 12, et :: 46 : 32 pour leur entier refroi- dissement. 8° Que le temps du refroidissement de l’or est à celui du refroidissement de l’ar- gent, au point de les tenir, ; : 14 : r3 par la présente expérience, et *; 80 ; 71 par les expériences précédentes (art. XXXVIII). Ainsi on aura, en ajoutant ces temps, 94 à 84 pour le rapport encore plus précis de leur premier refroidissement ; et pour le se- cond, le rapport donné parla présente ex- périence étant :: 40 : 37, et ;; 234 : 201 par les expériences précédentes (ar- ticle XXXVIII) , on aura , en ajoutant ces temps, 274 à 238 pour le rapport encore là plus précis de l’entier refroidissement de l’< et de l’argent. 90 Que le temps du refroidissement c l’or est à celui du refroidissement de la pieri dure, au point de les tenir, :: 14 : 12 pj la présente expérience, et ; : 39 1/2 27 1/2 par les expériences précédentes (ai ticle XXX). Ainsi on aura , en ajoutant et temps, 53 1/2 à 3g 1/2 pour le rappoi plus précis de leur premier refroidissement j et pour le second, le rapport donné par 1 présente expérience étant ;; 40 : 32 , « y. 1 17 ; 86 par les expériences précédente (art. XXX) , on aura , en ajoutant et temps, 157 à 118 pour le rapport encor plus précis de l’entier refroidissement de l’c et de la pierre dure. io° Que le temps du refroidissement d l’argent est à celui du refroidissement de 1 pierre dure, au point de pouvoir les tenir i3 : 12 par la présente expérience, t *; 45 1/ 2 : 3i 1/2 par les expériences pré cédentes (art. XXVII). Ainsi , en ajoutau ces temps, ou aura 58 1/2 à 43 1/2 pour 1 rapport encore plus précis de leur premiel refroidissement ; et pour le second , le rap port donné par l’expérience présente étanj 37 ; 32, et : 125 : 107 par les ex périences précédentes (art. XXVIII) aura, en ajoutant ces temps, 162 à i3tj pour le rapport encore plus précis de l’en tier refroidissement de l’argent et de 1 pierre dure. XLIII. Ayant fait chauffer ensemble le boulets de plomb, de fer, de marbre blanc de grès, de pierre tendre, ils se sont re froidis dans l’ordre suivant : Refroidis à les tenir pendant une demi-seconde. minutes. Pierre cale, ten- dre , en . . . . 6 1/2 Plomb , en. Grès , en. . Marbre blanc Fer, en. . . 8 V2 10 1/2 i5 Refroidis à la température. minutes En ... . En ... . En ... . En ... . En ... . .... 43 XLIV. La même expérience répétée , les * boulets se sont refroidis dans l’ordre suivant;; Refroidis à les tenir pendant une demi-seconde. minutes. Pierre cale, ten- dre , en. . , , 7 Plomb , en. ... 8 Grès , en 81/2 Marbre blanc, en 10 1/2 Fer, en. ..... 16 Refroidis à la température. minutes, PARTIE EXPERIMENTALE. 373 Il résulte de ces deux expériences : i° Que le temps du refroidissement du fer ,-ist à celui du refroidissement du marbre Piplanc, au point de les tenir, 3i : 21, >t : : 88 ; 59 pour leur entier refroidisse- ment. 20 Que le temps du refroidissement du fer st à celui du refroidissement du grès , au ioint de les tenir, y 3i : 17 par la pré- ente expérience, et y 53 1/2 : 32 par les expériences précédentes (art. IV). Ainsi on ura, en ajoutant ces temps, 84 1/2 à 49 our le rapport plus précis de leur premier efroidissement; et pour le second, le rap- ort donné par la présente expérience étant ; 88 ; 57, et y 142 : 102 1/2 par les xpériences précédentes (art. IV), on aura, n ajoutant ces temps, 23o à 159 1/2 pour rapport encore plus précis de l’entier re- j’oidissement du fer et du grès. 1 3° Que le temps du refroidissement du er est à celui du refroidissement du plomb, lju point de pouvoir les tenir, y 3i : 16 Bar les expériences présentes, et y 74 : J8 par les expér ences précédentes (arti- le XXXIX). Ainsi on aura, en ajoutant es temps, io5 à 54 pour le rapport encore lus précis de leur premier refroidissement; it pour le second , le rapport donné par les jxpériences présentes étant ; : 88 : 5 7 , et 192 I 124 1/2 par les expériences pré- cédentes (art. XXXIX) , on aura , en ajou- int ces temps , 280 à 181 1/2 pour le rap- ort encore plus précis de l’entier refroi- I issement du fer et du plomb. 4° Que le temps du refroidissement du fer est à celui du refroidissement de la pierre jndre, au point de pouvoir les tenir, " 1 : i3,et ; : 88 : 41 pour leur entier refroi- lissement. 5° Que le temps du refroidissement du Larbre blanc est à celui du refroidissement grès, au point de les tenir, ;; 21 ; 17, 1 TI 5 9 : 57 pour leur entier refroidisse- îent. 6° Que le temps du refroidissement 'du larbre blanc est à celui du refroidissement u plomb, au point de les tenir, H 21 ", ,7 , et H 5p : 57 pour leur entier refroi- 4 issement. ’ Que le temps du refroidissement du larbre blanc est à celui du refroidissement e la pierre calcaire tendre , au point de les :nir, ;; 21 : i3 1/2 par les présentes ex- ériences , et I ; 32 23 par les expériences récédentes (art. XXX). Ainsi, en ajoutant îs temps, on aura 53 à 36 1/2 pour le ipport plus précis de leur premier refroi- dissement; et pour le second, le rapport donné par les expériences présentes étant ; : 5g I 41 , et H 92 ; 68 par les expériences précédentes (art. XXX), on aura, en ajou- tant ces temps, i5i à 129 pour le rapport encore plus précis de l’entier refroidissement du marbre blanc et de la pierre calcaire tendre. 8° Que le temps du refroidissement du grès est à celui du refroidissement du plomb, au point de les tenir, y 17 ; 16 par les expériences présentes , et ;; 42 1/2 1 35 1/2 par les expériences précédentes (ar- ticle VIII). Ainsi on aura, en ajoutant ces temps, 59 r/2 à 5i 1/2 pour le rapport plus précis de leur premier refroidissement; et pour le second , le rapport donné par les présentes expériences étant y 5 7 ; 57, et H i3o : 121 1/2 par les expériences précé- dentes (art. VIII) , on aura , en ajoutant ces temps, 187 à 178 1/2 pour le rapport en- core plus précis de l’entier refroidissement du grès et du plomb. 90 Que le temps du refroidissement du grès est à celui du refroidissement de la pierre tendre , au point de pouvoir les tenir, 11x7 ; i3 1/2, et II 57 ] 41 pour leur entier refroidissement. io° Que le temps du refroidissement du plomb est à celui du refroidissement de la pierre tendre, au point dé les tenir, y 16 : i3 1/2 , et 1 1 57 ; 41 pour leur entier re- froidissement. XLV. On a fait chauffer ensemble les boulets de gypse , d’ocre, de craie, de glaise et de verre ; et’voici l’ordre dans lequel ils se sont refroidis : Refroidis à les tenir pendant une demi-seconde. minutes. Gypse , en . . . . 3 V2 En .... Ocre , en. . . . . 5 17. En ... . Craie , en. . . . . 5 l/2 En .... Glaise , en. . . . G X/2 En .... . ... 18 Verre , en . . . . 8 En ... . Refroidis à la température. minutes. XLVI. La même expérience répétée , les boulets se sont refroidis dans l’ordre suivant : Refroidis à les tenir pendant une demi-seconde. minutes. Gypse , en. Ocre , en. . Craie , en . Glaise , en. Verre . en . . 3 . 5 . 5 • 7 Refroidis à la température. minutes. i4 tG ,16 Il résulte de ces deux expériences : i° Que le temps du refroidissement du 374 MINÉRAUX. INTRODUCTION. verre est à celui du refroidissement de la glaise, au point de les tenir, 16 1/2 : i3 1/2 , et :: 46 : 36 pour leur entier re- froidissement. 2° Que le temps du refroidissement du verre est à celui du refroidissement de la craie , au point de les tenir , : 161/2:11, et ; : 46 : 32 pour leur entier refroidisse- ment. 3° Que le temps du refroidissement du verre est à celui du refroidissement de l’ocre, au point de les tenir , * : 1 6 1/2 : 1 1 , et * * 46 : 32 pour leur entier refroidissement. 4° Que le temps du refroidissement du verre est à celui du refroidissement du gypse, au point de pouvoir les tenir , y. 161/2 : 7 par la présente expérience, et : : 02 : 21 1/2 par les expériences précédentes ( arti- cle XXXTII) Ainsi on aura , en ajoutant ces temps, 68 1/2 à 28 1/2 pour le rapport plus précis de leur premier refroidissement; et pour le second, le rapport donné parles expé- riences présentes étant : : 46 : 29 , et : : 32 : 78 par les expériences précédentes (ar- ticle XXXIII ) , on aura , en ajoutant ces temps , 78 à 107 pour le rapport encore plus précis de l’entier refroidissement du verre et du gypse. 5° Que le temps du refroidissement de la glaise est à celui du refroidissement de la craie, au point de les tenir, :: i3 1/2 : xi par la présente expérience, et ; : 12 1/2 : 10 par les expériences précédentes (art. XXXV). Ainsi on aura, en ajoutant ces temps , 26 à 21 pour le rapport plus précis de leur premier refroidissement ; et pour le second, le rapport donné par les présentes expériences étant 36 : 32 , et :: 33 : 26 par les expérien- ces précédentes ( art. XXXV ) , on aura , en ajoutant ces temps , 69 à 58 pour le rapport encore plus précis de l’entier refroi- dissement de la glaise et de la craie. 6“ Que le temps du refroidissement de la glaise est à celui du refroidissement de l’ocre , au point de les tenir, i3 1/2 ; 11 par les présentes expériences , et :: 12 1/2 : 11 1/2 par les expériences précédentes ( ar- ticle XXXV ). Ainsi on aura , en ajoutant ces temps, 26 à 22 1/2 pour le rapport plus précis de leur premier refroidissement ; et pour le second , le rapport donné par les présentes expériences étant ;; 36 : 32, et ; 33 : 29 par les expériences précédentes (art. XXXV), on aura, en ajoutant ces temps, 69 à 61 pour le rapport encore plus précis de l’entier refroidissement de la glaise et de l’ocre. 7° Que le temps du refroidissement de la glaise est à celui du refroidissement di! {' gypse, au point de les tenir , :; i3 x/a ; 17 et ; : 36 : 29 pour leur entier refroidisse ment. 8° Que le temps du refroidissement d( 1 la craie est à celui du refroidissement de l’ocre , au point de les tenir , : : 1 1 : 1 1 pai I les présentes expériences, et ;: io; n 1/2 pai les expériences précédentes (art. XXXV), Ainsi on aura, en ajoutant ces temps, 21 i 22 1/2 pour le rapport plus précis de lem premier refroidissement ; et pour le second le rapport donné par les expériences pré seules étant :: 32 : 32, et :; 26 : 29 pai les expériences précédentes (art. XXXV) on aura, en ajoutant ces temps, 58 à 6i pour le rapport encore plus précis de l’en tier refroidissement de la craie et de l’ocre 90 Que le temps du refroidissement de il craie est à celui du refroidissement du gypse au point de les tenir , : : 1 1 : 7 , et ; ; 3: ; 29 pour leur entier refroidissement. io° Que le temps du refroidissement d< l’ocreest à celui du refroidissement du gypse au point de les tenir , : 1 1 : 7, et : : 32 : 25 pour leur entier refroidissement. XL VII. Ayant fait chauffer ensemble" le boulets de zinc, d’étain, d’antimoine, d!l grès , et de marbre blanc , ils se sont refroi dis dans l’ordre suivant : Refroidis à les tenir pendant une demi-seconde. minutes. Antimoine , en. . 6 En Étain , en . . . . 6 1/2 En Grès , en 8 En Marbre blanc, en. 9 1/2 En Zinc , en 11 1/2 Eu Refroidis a la température. minute! 16 20 . . 36 il’l 35 XLVIII. La même expérience répétée 1 w les boulets se sont refroidis dans l’ordr suivant ; Refroidis à les tenir pendant une demi-seconde. minutes. Antimoine , en. . 5 Étain , en . . . . 6 Grès , en 7 Marbre blanc, en 8 Zinc , en 9 1/2 Refroidis a la température. , . minute.1' is Il résulte de ces deux expériences ; i° Que le temps du refroidissement d zinc est à celui du refroidissement du mai il bre blanc , au point de les tenir , .’ I 2 : 17 1/2, et :: 65 : 53 pour leur entier rtj froidissement. 20 Que le temps du refroidissement d zinc est à celui du refroidissement du grès il lu point de les tenir , ; : ai | 47 pour leur entier refroidissement. I 3° Que le temps du refroidissement du fine est à celui du refroidissement de l’étain , lu point de les tenir, 21 ; 12 1/2 par les Présentes- expériences , et 24 : 18 par les xpériences précédentes ( art. XLI ). Ainsi , n ajoutant ces temps, on aura 45 à 3o 1/2 our le rapport enco r° puis précis de leur rentier refi Oidissement ; et pour le second, rapport donné par les expériences pré- entes étant ; : 65 : 36 , et par les expérien- es précédentes ( art. XLI ) 68 : 47 , on ura, en ajoutant ces temps, i33 à 83 pour rapport encore plus précis de l’entier re- oidissement du zinc et de l’étain. 4° Que le temps du refroidissement du inc est à celui du refroidissement de Fan- moine, au point de les tenir, ; : 21 ‘ 11 Jar les présentes expériences , et ; : 73 ; 9 1/2 par les expériences précédentes ( ar- cle XVII). Ainsi, en ajoutant ces temps, n aura 94 à 5 o 1/2 pour le rapport plus récis de leur premier refroidissement; et our le second , le rapport donné par les résentes expériences étant i; 65 ; 29, et " 20 ; i5 5 par les expériences précédentes art. XVII), on aura, en ajoutant ces mips, 285 à 184 pour le rapport encore lus précis de l’entier refroidissement du ne et de l’antimoine. 5° Que le temps du refroidissement du brbre blanc est à celui du refroidissement grès, au point de pouvoir les tenir, 1/2 ; 1 5 par les présentes expériences , et 21 : 17 par les expériences précédentes art. XL1V ). Ainsi on aura , en ajoutant ces mps, 38 1/2 à 32 pour le rapport plus récis de leur premier refroidissement ; et our le second , le rapport donné par les résentes expériences étant ;; 53 ; 47, et ; 59 : 57 par les expériences précédentes art. XLIV ) , on aura , en ajoutant ces mps, 112 à 104 pour le rapport encore lus précis de l’entier refroidissement du îarbre blanc et du grès. 6° Que le temps du refroidissement du îarbre blanc est à celui du refroidissement e l’étain, au point de les tenir, ” 17 1/2 12 1/2 , et : : 53 : 36 pour leur entier re- oidissement. 70 Que le temps du refroidissement du îarbre blanc est a celui du refroidissement el’aniimoine, au point de les tenir , y. 7 1/2 ; 11 , et :: 53 : 36 pour leur entier efroidissement. J Que le temps du refroidissement du rèsest à celui du refroidissement de l’étain, PARTIE EXPERIMENTALE. i5, et 65 au point de les tenir, ;; i5 : 12 1/2 375 par les présentes expériences, et :: 3o : 21 1/2 par les expériences précédentes ( art. VIII). Ainsi on aura , en ajoutant ces temps, 45 à 34 pour le rapport plus précis de leur premier refroidissement; et pour le second , le rapport donné par les présentes expériences étant : : 47 : 36, et y 84 : 64 par les expériences précédentes ( art. VIII ), on aura, en ajoutant ces temps , i3i à 100 pour le rapport encore plus précis de l’entier refroidissement du grès et de l’étain. 90 Que le temps du refroidissement du grès est à celui du refroidissement de l’anti- moine, au point de les tenir, :: i5 : 11, et 47 I 29 pour leur entier refroidissement. io° Que le temps du refroidissement de l’étain est à celui du refroidissement de l’an- timoine , au point de pouvoir les tenir , 12 1/2 : 11 par les présentes expérien- ces, et .*;• 18 : 16 par les expériences pré- cédentes ( art. XL ). Ainsi on aura , en ajou- tant ces temps, 3o 1/2 à 27 pour le rapport plus précis de leur premier refroidissement ; et pour le second , le rapport donné par les expériences présentes étant ; : 36 : 29 , et ; I 47 ; 47 par les expériences précéden- tes (art. XL), 011 aura, en ajoutant ces temps, 83 à 76 pour le rapport encore plus précis de l’entier refroidissement de l’étain et de l’antimoine. XLIX. On a fait chauffer ensemble les boulets de cuivre , d’émeril , de bismuth , de glaise, et d’ocre; et ils se sont refroidis dans l’ordre suivant : Refroidis à les tenir pendant une demi-seconde. Refroidis minutes. Ocre , en 6 minutes. TCn. . . . . . f t8 Bismuth , en.. ... 7 Glaise , en. ..... 7 Rn. T _ , - t 23 Cuivre , en i3 Émeril , en. .... . i5 1/2 En 36 En 43 L. La même expérience répétée , les bou- lets se sont refroidis dans l’ordre suivant : Refroidis à les tenir pendant une demi-seconde. Refroidis à la température. minutes. Ocre, en.. 5 1/2 minutes. En i3 Bi6inuth , en .6 Glaise , en. 6 En iS TCn. T r . tq Émeril , en 111/2 En 38 Il résulte de ces deux expériences : i° Que le temps du refroidissement de minéraux, introduction. 376 l’émeril est" à celui du refroidissement du cuivre, au point de les tenir, ;; 27 ; 23, et :: 81 : 66 pour leur entier refroidisse- ment. 20 Que le temps du refroidissement de l’émeril est à celui du refroidissement de la glaise , au point de les tenir, : : 27 : i3, et : : 8 1 : 42 pour leur entier refroidisse- ment. 3° Que le temps du refroidissement de rémeril est à celui du refroidissement du bismuth, au point de les tenir, :: 27 : i3 par les présentes expériences , et .*; 71 : 35 1/2 par les expériences précédentes (ar- ticle XVII). Ainsi 011 aura , en ajoutant ces temps, 98 à 48 1/2 pour le rapport encore plus précis de leur premier refroidissement; et pour le second , le rapport donné par les expériences présentes étant ;; 81 ; 4° ■> et par les expériences précédentes (art. XVII), 216 : 140, on aura, en ajoutant ces 90 Que le temps du refroidissement de b glaise est à celui du refroidissement de l’ocre , au point de les tenir, ;; i3 : n 1/2, par les expériences présentes , et : : 26 ; 22 1/2 par les expériences précédentes (ar- ticle XLVI). Ainsi on aura , en ajoutant ces temps , 39 à 34 pour le rapport plus précii de leur premier refroidissement ; et pour le second , le rapport donné par les expé-1 riences présentes étant : : 41 ; 3 1 , et : : 69 ; 61 par les expériences précédente* , (art. XLVI) , on aura, en ajoutant ces temps iii à 92 pour le rapport encore plus préci* de l’entier refroidissement de la glaise et d< T, l’ocre. 10e Que le temps du refroidissement di bismuth est à celui du refroidissement d( l’ocre, pour pouvoir les tenir, ;; i3 ;j , 11 1/2, et ;; 42 ; 3i pour leur entier re! froidissement. temps, 297 à 180 pour le rapport encore plus précis de l’entier refroidissement de l’émeril et du bismuth. 4° Que le temps du refroidissement de l’émeril est à celui du refroidissement de l’ocre , au point de les tenir, ;; 27 : 11 1/2, et :: 81 : 3i pour leur entier refroidisse- ment. 5° Que le temps du refroidissement du cuivre est à celui du refroidissement de la glaise, au point de les tenir, H 23 ; i3 , et : : 66 : 42 pour leur entier refroidisse- ment. 6° Que le temps du refroidissement du cuivre est à celui du refroidissement du bis- muth, au point de pouvoir les tenir, :: 23 ; i3 parles présentes expériences , et ;; 28 ; 16 par les expériences précédentes (ar- ticle XLI). Ainsi on aura, en ajoutant ces temps, 5i à 29 pour le rapport plus précis de leur premier refroidissement ; et pour le second , le rapport donné par les présentes expériences étant 66 ; 4° , et ; ; 80 ; 47 par les expériences précédentes (art. XLI) , on aura , en ajoutant ces temps , 146 à 87 pour le rapport encore plus précis de l’en- tier refroidissement du cuivre et du bismuth. 70 Que le temps du refroidissement du cuivre est à celui du refroidissement de l’ocre, au point de les tenir, .'I 33 : 11 1/2, et : : 66 : 3 1 pour leur entier refroidisse- ment. 8° Que le temps du refroidissement de la glaise est à celui du refroidissement; du bis- muth, au point de pouvoir les tenir, ;; i3 ; i3 , et : : 42 ; 41 pour leur entier refroi- dissement. LI. Ayant fait chauffer ensemble les bou lets de fer, de zinc, de bismuth, de glaisi et de craie , ils se sont refroidis dans l’ordr< suivant : Refroidis à les tenir pendant une demi-seconde- minutes. minutes Craie , en. . . . , , . . 6 V2 En. . . T 8 Bismuth , en.. Glaise , en^.^ - Rn to • * • y . . . 8 En.. . Zinc, en En... Fer, en En. . . 45 Refroidis la température. LU. La même expérience répétée , le boulets se sont refroidis dans l’ordre sui vant : Refroidis à les tenir pendant une demi-seconde. minutes. Craie , pn, . f , , , . ^ Refroidis à la température. minutes Bismuth , en 7 ip Glaise , en ç En 21 En Zinc , en 16 En 34 l Fer, en 21 1/2 En 53 ; On peut conclure de ces deux expé riences : i° Que le temps du refroidissement dt fer est à celui du refroidissement du zinc au point de les tenir,#;; 40 1/2 ; 3i, et ;; 98 ; 59 pour leur entier refroidissement. 20 Que le temps du refroidissement di fer est à celui du refroidissement du bis muth, au point de les tenir, ;; 40 1/2 ; 14 1/2, et ;; 98 ; 40 pour leur entier re froidissement. 3® Que le temps du refroidissement di fer est à celui du refroidissement de li glaise, au point de «les tenir, ;; 40 r/2 ; 17 PARTIE EXPÉRIMENTALE, pour leur entier refroidisse- :: 98 : lent. 4° Que le temps du refroidissement du jr est à celui du refroidissement de la aie , au point de les tenir, ; : 40 1/2 : A 1/2, et : : 98 : 38 pour leur entier re- * bidissement. 5° Que le temps du refroidissement du ne est à celui du refroidissement du bis- iith, au point de les tenir, ;; 3i : 14 1/2 r les présentes expériences, et ;; 34 1/2 20 r/2 par les expériences précédentes t. XV). Ainsi on aura, en ajoutant ces nps , 65 1/2 à 35 pour le rapport plus Iécis de leur premier refroidissement ; et ur le second , le rapport donné par les ésentes expériences étant :: 59 : 40, et 100 : 80 par les expériences précédentes ’t. XV) , on aura , en ajoutant ces temps, 9 à i2o pour le rapport encore plus précis l’entier refroidissement du zinc et du >muth. 6° Que le temps du refroidissement du ic est à celui du refroidissement de la lise, au point de les tenir, ;; 3i l 17, et 5g ; 44 pour leur entier refroidissement. 70 Que le temps du refroidissement du lie est à celui du refroidissement de la aie, au point de les tenir, ;; 3i l 12 1/2, 5g l 38 pour leur entier refroidisse- nt. °77 le rapport donné par les présentes expé- riences étant ; : 44 : 38 , et : : 69 : 58 par les expériences précédentes (article XLVI) , on aura, en ajoutant ces temps, n3 à 96 pour le rapport encore plus précis de l’entier refroidissement de la glaise et de la craie. LUI. Ayant fait chauffer ensemble les boulets demeril, de verre, de pierre cal- cai. e dure et de bois , ils se sont refroidis dans l’ordre suivant : Refroidis à les tenir pendant une demi-seconde. minutes. Bois , en 2 1/2 Refroidis à la température. minutes. F.n r Verre , en 9 T/2 Grès , en i r En 28 F.n 34 Pierre cale, dure, en i ..... . 12 En 36 Émeril , en i5 En 47 LIV. La même expérience répétée , les boulets se sont refroidis dans l’ordre sui- vant : Refroidis à les tenir pendant une demi-seconde. minutes. Bois , en 2 Verre , en 7 1/2 Grès , en 8 Pierre dure , en.. 81/2 Émeril , en 14 Refroidis a la température. minutes. i3 8° Que le temps du refroidissement du ismuth est à celui du refroidissement de la jjtise, au point de les tenir, :: 14 r/2 : 17 r les présentes expériences , et ; ; 1 3 : 1 3 r les expériences précédentes ( art. L ). nsi on aura, en ajoutant ces temps, I' t/2 à 3o pour le rapport plus précis de îr premier refroidissement ; et pour le pond, le rapport donné par les expériences ésentes étant : : 40 : 44 , et ; : 4r : 42 r les expériences précédentes (art. L) , on ira , en ajoutant ces temps , 81 à 86 pour rapport encore plus précis de l’entier re- udissement du bismuth et de la glaise. 90 Que le temps du refroidissement du smutli est à celui du refroidissement de la aie, au point de les tenir, " 14 1/2 : ; r/2, et :: 40 : 38 pour leur entier re- iiidissement. '10° Que le temps du refroidissement de glaise est à celui du refroidissement de la aie, au point de les tenir, " 17 ; 1 3 1/ 2 r les expériences présentes , et II 26 r 21 r les expériences précédentes (art. XLVI). nsi on aura , en ajoutant ces temps, 43 à . 1/2 pour le rapport plus précis de leur emier refroidissement; et pour le second, Il résulte de ces deux expériences : i° Que le temps du refroidissement de l’émeril est à celui du refroidissement de la pierre dure , au point de les tenir, ; : 29 : 20 1/2 par les présentes expériences, et ;; i5 1/2 : 12 par les expériences précédentes (art. XLII). Ainsi , en ajoutant ces temps , on aura 44 1/2 à 32 r/2 pour le rapport plus précis de leur premier refroidissement; et pour le second, le rapport donné par les présentes expériences étant ; : 89 ; 62 , et : ; 46 : 32 par les expériences précédentes (art. XLII) , on aura , en ajoutant ces temps, i35 à 94 pour le rapport encore plus précis de l’entier refroidissement de l’émeril et de la pierre dure. 20 Que le temps du refroidissement de l’émeril est à celui du refroidissement du grès, au point de les tenir, ;; 29 ; 19, et ; ; 86 : 58 pour leur entier refroidissement. 3° Que le temps du refroidissement de l’émeril est à celui du refroidissement du verre, au point de les tenir, 29 : 17, et ; : 89 ; 49 pour leur entier refroidisse- ment. 4° Que le temps du refroidissement de Refroidis à les tenir pendant une demi-seconde. 378 MINÉRAUX. INTRODUCTION. l’émeril est à celui du refroidissement du bois , au point de les tenir, ; : 29 : 4 1/2 , et :: 89 : 28 pour leur entier refroidisse- ment. 5° Que le temps du refroidissement de la pierre dure est à celui du refroidissement du grès, au point de les tenir, 20 r/2 : 19, et ; : 62 : _5 8 pour leur entier refroi- dissement. 6° Que le temps du refroidissement de la pierre dure est à celui du refroidissement du verre, au point de les tenir, ; 20 r/2 : 17, et :: 62 : 49 pour leur entier refroi- dissement. 70 Que le temps du refroidissement de la pierre dure est à celui du refroidissement du bois , au point de les tenir, \ \ 20 1/2 : 4 1/2 , et ; : 62 : 28 pour leur entier refroi- dissement. 8° Que le temps du refroidissement du grès est à celui du refroidissement du verre, au point de les tenir, :: 19 : 17 parles présentes expériences, et y 55 5 2 par les expériences précédentes (art. XXXIII). Ainsi on aura, en ajoutant ces temps , 74 à 69 pour le rapport plus précis de leur pre- mier refroidissement ; et pour le second , le rapport donné par les présentes expériences étant :: 58 : 49, et :: 170 : i32 par les expériences précédentes (art. XXXIII) , on aura , en ajoutant ces temps, 228 à 188 pour le rapport encore plus précis de l’entier re- froidissement du grès et du verre. 90 Que le temps du refroidissement du grès est à celui du refroidissement du bois, au point de pouvoir les tenir, y i5 [ 4 1/2, et 58 ; 28 pour leur entier refroidisse- ment. xo° Que le temps du refroidissement du verre est à celui du refroidissement du bois, au point de les tenir, :: 17 : 4 x/a, et ;; 94 : 28 pour leur entier refroidissement. Gypse , en. . . . minutes. En minute i3 Grès , en. . . . . ... 61/2 En Étain , en.. . . ... IO En Or, en En Énieril , en. . . ...18 En Refroidis à la température. On peut conclure de ces expériences : i° Que le temps du refroidissement d l’émeril est à celui du refroidissement d l’or, au point de les tenir, ;; 38 : 3i p; les expériences présentes, et 5g 1/2 52 par les expériences précédentes (a: ticle XLÏI ). Ainsi on aura , en ajoutant c< temps, 97 1/2 à 83 pour le rapport pli précis de leur premier refroidissement; 1 pour le second, le rapport donné par h présentes expériences étant :: g5 : 81, 1 ;; 166 ; i55 par les expériences préci dentes (art XLII), on aura, en ajoutai ces temps, 23 1 à 236 pour le rapport er core plus précis de l’entier refroidissemei de l’émeril et de l’or. Que le temps du refroidissement d l’émeril est à celui du refroidissement l’étain, au point de les tenir, ;; 38 21 1/2, et ! : 95 : 57 pour leur entier ru froidissement. 3° Que le temps du refroidissement d l’émeril est à celui du refroidissement de i craie, au point de les tenir, : : 38 : 14 et ; : 95 ; 39 pour leur entier refroidisse ment. 4° Que le temps du refroidissement de l’< meril est à celui du refroidissement du gypsi au point de les tenir, y 38 : 9 , et : g I 28 pour leur entier refroidissement. LY. Ayant fait chauffer ensemble les bou- lets d’or, d’étain , d’émeril , de gypse et de craie , ils se sont refroidis dans l’ordre suivant : Refroidis à les tenir pendant une demi-seconde. minutes. Gypse , en 5 Craie , en 71 f Étain , en 1 1 1/2 Gr, en 16 Énieril , en 20 Refroidis à la température. mioutes. i5 LYI. La même expérience répétée, les boulets se sont refroidis dans l’ordre suivant : 5° Que le temps du refroidissement c l’or est à celui du refroidissement de l’étair au point de les tenir, ;; 3i ; 22 par lt présentes expériences , et ; : 3 7 : 21 p< les expériences précédentes (art. XI). Ain on aura, en ajoutant ces temps, 68 à 4 pour le rapport plus précis de leur premie refroidissement ; et pour le second , le raj port donné par les présentes expérience étant 81 : 57, et :: 114 : 61 par 1< expériences précédentes (art. XI) , on aur£ en ajoutant ces temps, ig5 à 118 pour rapport encore plus précis de l’entigr ri froidissement de l’or et de l’étain. 6° Que le temps du refroidissement d l’or est à celui du refroidissement de la craii au point de les tenir, 3i : 14 par h présentes expériences, et ; ; 21-1/2 : 1 par les expériences précédentes (art. XXXV Ainsi on aura, en ajoutant ces temps, 52 1/ à 24 pour le rapport plus précis de leur pr< 11-»- Mit- PARTIE EXPERIMENTALE. 379 er refroidissement ; et pour le second , le >port donné par les présentes expériences tnt : : 81 : 3g, et ; : 65 : 2 6 par les périences précédentes (art. XXXV), on fa, en ajoutant ces temps, 146 à 65 pour rapport encore plus précis de l’entier re- froidissement de l’or et de la craie. Que le temps du refroidissement de :• est à celui du refroidissement du gypse, point de pouvoir les tenir, 3i : 9 les présentes expériences, et * ; 56 ; 17 ' les expériences précédentes ( arti- XXXVIII). Ainsi on aura, en ajoutant temps, 87 à 26 pour le rapport plus ;cis de leur premier refroidissement ; et ir le second, le rapport donné par les îsentes expériences étant ; : 81 : 28, et i65 : 53 par les expériences précéden- (art XXX VIII), on aura, en ajoutant temps, 246 à 81 pour le rapport encore s précis de l’entier refroidissement de * et du gypse. Que le temps du refroidissement de ain est à celui du refroidissement de la au point de les tenir, 22 : 14, 57 : 39 pour leur entier refroidisse- nt. f Que le temps du refroidissement de ain est à celui du refroidissement du >se, au point de les tenir, ;; 22 : 9, et 57 : 28 pour leur entier refroidissement. io° Que le temps du refroidissement de craie est à celui du refroidissement du )se, au point de les tenir, :: 14 : 9 par présentes expériences, et 11 : 7 par expériences précédentes (art. XL VI). isi on aura , en ajoutant ces temps , 2 5 6 pour le rapport plus précis de leur mier refroidissement ; et pour le second, rapport donné par les présentes expé- nces étant y. 39 ; 28 , et y 32 ; par les expériences précédentes (arti- XLVI), on aura, en ajoutant ces temps, à 57 pour le rapport encore plus précis l’entier refroidissement de la craie et du >se. VTI. Ayant fait chauffer ensemble les ilets de marbre blanc, de marbre com- n, de glaise, d’ocre et de bois, ils se it refroidis dans l’ordre suivant : Refroidis à les tenir dant une demi-seconde. minutes. . 2 1/2 En. . 6 1/2 En. . 7 1/2 En. ise , en bre commun rbre blanc, en 12 Refroidis à la température. minutes. LVIII. La même expérience répétée , les boulets se sont refroidis dans l’ordre suivant : Refroidis à les tenir pendant une demi-seconde. minutes. Rnis j pn 3 à la température. minutes. K n TT Orrfi , en. t . y Glaise , en. ...... 81/2 Marbre commun , en 12 1/2 En 23 En 3a Marbre blanc, en i3 En 36 Refroidis On peut conclure de ces deux expériences : i° Que le temps du refroidissement du marbre blanc est à celui du refroidissement du marbre commun, au point de pouvoir les tenir, 'y. 25 ; 22 par les présentes ex- périences, et ;; 3g 1/2 ; 36 par les expé- riences précédentes (art. XXVII). Ainsi on aura, en ajoutant ces temps, 64 1/2 à 58 pour le rapport plus précis de leur premier refroidissement; et pour le second, le rap- port donné par les présentes expériences étant ;; 70 ; 61, et *4 11 5 ; ii3 par les expériences précédentes (art. XXVII), on aura, en ajoutant ces temps, i85 à 174 pour le rapport encore plus précis de l’en- tier refroidissement du marble blanc et du marbre commun. 2° Que le temps du refroidissement du marble blanc est à celui du refroidissement de la glaise, au point de pouvoir les tenir, 25 : 16, et 70 : 44 pour leur entier refroidissement. 3° Que le temps du refroidissement du marbre blanc est à celui du refroidissement de l’ocre, au point de les tenir, y. 25 ; i3 1/2 , et 70 ; 3g pour leur entier re- froidissement. 4° Que le temps du refroidissement du marbre blanc est à celui du refroidissement du bois, au point de les tenir, ;; 25 5 1/2, et y 70 I 20 pour leur entier re- froidissement. 5° Que le temps du refroidissement du marbre commun est à celui du refroidisse- ment de la glaise , au point de les tenir , ; l 22 : 16, et ; ; 61 I 44 pour leur entier re- froidissement. . 6° Que le temps du refroidissement du marbre commun est à celui du refroidisse- ment de l’ocre, au point de les tenir, y 22 : i3 1/2, et 61 : 39 pour leur en- tier refroidissement. 7° Que le temps du refroidissement du marbre commun est à celui du refroidisse- ment du bois, au point de les tenir, " 22 : 5 1/2, et 61 : 20 pour leur entier re- froidissement. 38o 8° Que le temps du refroidissement de la glaise est à celui du refroidissement de l’ocre, au point de les tenir ;; 16 : i3 1/2, par les précédentes expériences, et : : 12 1/2 ; ri 1/2 par les expériences précédentes (art. XXXV). Ainsi on aura, en ajoulant ces temps, 28 1/2 à 25 pour le rapport plus précis de leur premier refroidissement ; et pour le second , le rapport donné par les présentes expériences étant 44 : 39, et ; : 33 : 29 par les expériences précédentes (art. XXXY), on aura, en ajoutant ces temps, 77 à 68 pour le rapport encore plus précis de l’entier refroidissement de la glaise et de l’ocre. 90 Que le temps du refroidissement de la glaise est à celui du refroidissement du bois, au point de les tenir, ;; 16 : 5 1/2, et 44 ; 20 pour leur entier refroidissement. io° Que le temps du refroidissement de l’ocre est à celui du refroidissement du bois, au point de les tenir, II i3 1/2 1 5 1/2, et : : 39 : 20 pour leur entier refroidisse- ment. MINERAUX. INTRODUCTION. pour le second , le rapport donné par L LIX. Ayant mis chauffer ensemble les boulets d’argent, de verre, de glaise, d’o- cre et de craie, ils se sont refroidis dans l’ordre suivant : Refroidis à les tenir pendant une demi-seconde. minutes. Craie , en. .... . 5 1/2 Ocre , en 6 Glaise , en 8 Verre , en 6 1/1 Argent , en 11 i/a Refroidis à la température. minutes. i5 LX. La même expérience répétée, les bou- lets chauffés plus iong-temps se sont refroidis dans l’ordre suivant : Refroidis à les tenir pendant une demi-seconde. minutes. Craie , en 7 Ocre , en 8 Glaise , en 9 Verre , en.. Argent , en. :/2 ■ h 12 1/2 l6 l/2 Refroidis à la température. minutes. On peut conclure de ces deux expérien- ces : i° Que le temps du refroidissement de l’argent est à celui du refroidissement du verre, au point de les tenir, ;; 29 ; 22 parles présentes expériences, et II 36 l 25 par les expériences précédentes (arti- cle XXXIII. ). Ainsi on aura , en ajoutant ces temps ,65 à 47 pour le rapport plus précis de leur premier refroidissement ; et présentes expériences étant ; : 76 : 67, Il io3 : 62 par les expériences précédent (art. XXXIII), on aura, en ajoutant © temps, 179 à 129 pour le rapport encoi F lus précis de l’entier refroidissement t argent et du verre. 20 Que le temps du refroidissement de l’a gent est à celui du refroidissement de glaise, au point de pouvoir les tenir, ;; 2 ; 17 1/2, et :: 76 : 5i pour leur entii refroidissement. 3° Que le temps du refroidissement ( l’argent est à celui du refroidissement < l’ocre, au point de les tenir, ;; 29 14 r/2, et 76 : 43 pour leur entier ri froidissemenl. 4° Que le temps du refroidissement : l’argent est à celui du refroidissement de craie , au point de pouvoir les tenir , .* I s : 12 1/2, et 76 : 38 pour leur enti. refroidissement. 5° Que Je temps du refroidissement c verre est à celui du refroidissement de glaise, au point de pouvoir les tenir, 1/2 par les expériences présente: 22 et 16 1/2 : 13 1/2 par les expérienc précédentes (article XLVI ). Ainsi on aura b en ajoutant ces temps, 38 1/2 à 3i pour ntt rapport plus précis de leur premier refro dissement; et pour le second, le rappoiiii donné par les présentes expériences étai)^ 67 : 5i, et ;; 46 : 36 par les expi riences précédentes (art. XLYI) , on aur< en ajoutant ces temps, ii3 à 87 pour rapport encore plus précis de l’entier refrc s dissement du verre et de la glaise. 6° Que le temps du refroidissement c 10( verre est à celui du refroidissement de 1 ere , au point de pouvoir les tenir , .* I 2 ; 14 1/2 par les présentes expériences, 1 Il 16 1/2 1 ir par les expériences préo dentes (art. XLYI). Ainsi on aura, en ajoilfj tant ces temps, 38 1/2 à 25 1/2 pour le raj < jai port plus précis de leur premier refroidissi 1 )(I ment ; et pour le second , le rapport donr par les présentes expériences étant 1:67 43 , et ; ; 46 ; 32 par les expériences pr< ; cédentes (art. XLVI), on aura, en ajoutai, B ces temps , 1 13 à 75 pour le rapport encoi! ji;i plus précis de l’entier refroidissement d1 verre et de l’ocre. 7° Que le temps du refroidissement d verre est à celui du refroidissement de ! craie, au point de pouvoir les tenir, 2 l 12 1/2 par les présentes expériences, < 16 1/2 : 11 par les expériences précc dentes (art. XLYI). Ainsi on aura, en ajoi ' PARTIE EXPÉRIMENTALE. it ces temps, 38 1/2 à 23 1/2 pour le rap- jk plus précis de leur premier refroidis- < aent ; el pour le second , le rapport donné f les présentes expériences étant ; ; 67 : j, et : 46 : 32 par les expériences précé- dés (art. XLVI), on aura, en ajoutant temps, ii3 à 70 pour le rapport encore 1s précis de l’entier refroidissement du üre et de la craie. Que le temps du refroidissement de la se est à celui du refroidissement de l’o- , au point de les tenir, :: 17 1/2 ; 1/2 par les présentes expériences, et ; 22 1/2 par les expériences précédentes t. XLVI). Ainsi on aura, en ajoutant temps , 43 1/2 à 37 pour le rapport plus cis de leur premier refroidissement; et r le second , le rapport donné par l’ex- ience présente étant 5i ; 43, et II ; 63 par les expériences précédentes XLVI), on aura, en ajoutant ces ps, 120 à 106 pour le rapport encore | précis de l’entier refroidissement de la |se et de l’ocre. 0 Que le temps du refroidissement de laise est à celui du refroidissement de la e, au point de pouvoir les tenir, :: 1/2 ; 12 1/2 par les présentes expérien- , et I ; 26 ; 2 1 par les expériences pré- entes ( art. XLVI ). Ainsi on aura , en kant ces temps , 43 1/2 à 33 1/2 pour apport plus précis de leur premier re- kissement ; et pour le second , le rapport né par les présentes expériences étant )i ; 38, et 69 : 58 par les expériences pédentes (art. XLVI), on aura, en liant ces temps, 120 à 96 pour le rap- t encore plus précis de l’entier refroi- ement de la glaise et de la craie. Ip<ï Que le temps du refroidissement de re est à celui du refroidissement de la e , au point de pouvoir les tenir , ; : r/2 : 12 1/2 par les présentes expérien- et I ; 11 1/2 : IO par les expériences pédentes (art. XXXV). Ainsi on aura, en itant ces temps, 26 à 22 1/2 pour le >ort plus précis de leur premier refroi- ment ; et pour le second , le rapport né par les présentes expériences étant .2 ; 38, et 29 l 26 par les précé- es expériences ( art. XXXV ) , on aura , joutant ces temps, 72 à 64 pour le rap- encore plus précis de l’entier refroi- îment de l’ocre et de la craie. XI. Ayant mis chauffer ensemble , à un d degré de chaleur , les boulets de zinc , ismuth , de marbre blanc , de grès , et 38i de gypse, le bismuth s’est fondu tout-à- coup , et il n’est resté que les quatre autres, qui se sont refroidis dans l’ordre suivant : Refroidis à les tenir pendant une* demi- seconde. minutes. Gypse , en 11 Grès , en 16 Marbre blanc, en. 19 Zinc , en 23 Refroidis a la température. minutes. En 28 En 42 En 5o En 57 LXII. La même expérience répétée avec les quatre boulets ci-dessus et un boulet de plomb à un feu moins ardent , ils se sont refroidis dans l’ordre suivant ; Refroidis à les tenir pendant une demi-seconde. minutes. Gypse , en 4 1/* Plomb , en 9 1/1 Grès , en 10 Marbre blanc , en 12 1/2 Zinc , en i5 Refroidis à la température. minutes. 16 28 32 36 43 On peut conclure de ces deux expé- riences : i° Que le temps du refroidissement du zinc est à celui du refroidissement du mar- bre blanc, au point de pouvoir les tenir, 38 ; 3i 1/2 par les présentes expérien- ces, et 21 : 17 1/2 parles expériences précédentes ( art. XLVIII ). Ainsi , en ajou- tant ces temps , on aura 59 à 49 pour le rapport plus précis de leur premier refroi- dissement; et pour le second, le rapport donné par l’expérience présente étant : : 100 : 86, et II 65 : 53 par les expérien- ces précédentes (art. XLVIII), on aura, en ajoutant ces temps, i65 à 139 pour le rapport encore plus précis de l’entier re- froidissement du zinc et du marbre blanc. 20 Que le temps du refroidissement du zinc est à celui du refroidissement du grès , au point de les tenir, " 38 : 26 par les présentes expériences, et 21 : ii5 par les expériences précédentes (art. XLVIII). Ainsi on aura , en ajoutant ces temps , 5q à 141 pour le rapport plus précis de leur pre- mier refroidissement ; et pour le second , le rapport donné par les présentes expériences étant :: 100 : 74, et :: 65 : 47 par les ex- périences précédentes (art. XLVIII), on aura, en ajoutant ces temps, i65 à 121 pour le rapport encore plus précis de l’en- tier refroidissement du zinc et du grès. 3° Que le temps du refroidissement du zinc est à celui du refroidissement du plomb , au point de pouvoir les tenir, :: 15:91/2 par la présente expérience, et : 73 : 43 3/4 par 38 a MINÉRAUX. INTRODUCTION. -les expériences précédentes (art. XYII). Ainsi on aura, en ajoutant ces temps, 88 à 53 x/4 pour îe rapport plus précis de leur premier refroidissement ; et pour le second, le rapport donné par l’expérience présente étant 4-3 ; 20, et :: 220 : 189 parles ex- périences précédentes ( art. XYII ) , on aura, en ajoutant ces temps, 263 à 209 pour le rapport encore plus précis de l’en- tier refroidissement du zinc et du plomb. 4° Que le temps du refroidissement du zinc est à celui du refroidissement du gypse, au point de les tenir, ;; 38 : i5 1/2 , et ; : 100 : 44 pour leur entier refroidissement. 5° Que le temps du refroidissement du marbre blanc est à celui du refroidissement du grès, au point de les tenir, :* 3i 1/2 ; 26 par les présentes expériences , et : 38 1/2 ; 32 par les expériences précédentes ( art. XLYI1I ). Ainsi on aura, en ajoutant ces temps, 70 à 58 pour le rapport plus précis de leur premier refroidissement; et pour le second, le rapport donné par les présentes expériences étant ; 86 : 74, et 112 ; 104 par les expériences précéden- tes (art. XLYIII ) , on aura, en ajoutant ces temps, 198 à 178 pour le rapport en- core plus précis de l’entier refroidissement du marbre blanc et du grès. 6° Que le temps du refroidissement du marbre blanc est à celui du refroidissement du plomb, au point de les tenir, ;; 12 r/2 ; 9 1/2 , et r ; 36 : 20 pour leur entier re- froidissement. 70 Que le temps du refroidissement du marbre blanc est à celui du refroidissement du gypse , au point de pouvoir les tenir, : : 3i : i5 1/2, et :: 86 ; 44 pour leur entier refroidissement. 8° Que le temps du refroidissement du grès est à celui du refroidissement du plomb, au point de pouvoir les tenir, H ro* 9 1/2 parla présente expérience, et ;; 5p ; 5i 1/2 par les expériences précédentes ( art. XLIY ). Ainsi on aura , en ajoutant ces temps , 69 1/2 à 61 pour le rapport plus précis de leur premier refroidissement ; et pour le second , le rapport donné par les présentes expériences étant 32 : 20, et :: 187 : 178 par les expériences précédentes (arti- cle XLIY) , on aura , en ajoutant ces temps , 219 à 198 pour le rapport encore plus précis de l’emier refroidissement du grès et du plomb. 90 Que le temps du refroidissement du grès est à celui du refroidissement du gypse, au point de pouvoir les tenir, ;* 26 : i5 1/2 par les présentes expériences, et :: 55 : 2 1 1/2 par les expériences précédentes ( ar ele XXXIII ). Ainsi on aura , en ajouta ces temps, 81 à 37 pour le rapport pl précis de leur premier refroidissement ; pour le second , le rapport donné par 1 présentes expériences étant 74 ’ 44, ;; 170 I 78 par les expériences précédent (art. XXXIII), on aura, en ajoutant c temps, 244 à 122 pour le rapport enco plus précis de l’entier refroidissement < grès et du gypse. xo° Que le temps du refroidissement < plomb est à celui du refroidissement < gypse , au point de les tenir, .* : 9 1/2 ; 4 1/ et ; : 28 : 16 pour leur entier refroidissemer LXIII. Ayant fait chauffer ensemble 1 ' boulets de cuivre , d’antimoine, de marb commun, de pierre calcaire tendre, et craie , ils se sont refroidis dans l’ordre si vant : Refroidis à les tenir pendant une demi-seconde. minutes. Craie, en 6 1/2 Antimoine, en. . . 71/2 Pierre tendre, en 7 1/2 Marbre commun , en ti 1/2 Cuivre , en 16 Refroidis à la température. minut En 3i pt En 1 LXIV. La même expérience répétée , ! j jf boulets se sont refroidis dans l’ordre si vant : -Refroidis à les tenir pendant une demi-seconde. minutes. Craie , en 5 1/2 Antimoine , en . . 6 Pierre tendre, en 8 Marbre commun , Refroidis à la température. minut irbi Cuivre , en i3 1/; On peut conclure de ces deux «xpérienc i° Que le temps du refroidissement cuivre est à celui du refroidissement marbre commun , au point de pouvoir tenir, y 29 1/2 ; 21 1/2 par les présen expériences, et 45 : 35 1/2 par les 1 périences précédentes (art. Y). Ainsi aura , en ajoutant ces temps, 74 1/2 à pour le rapport plus précis de leur prem refroidissement ; et pour le second, le r port donné par les présentes expérien étant :: 87 : 60, et :: 125 : ni par expériences précédentes ( art. V ) , on au en ajoutant ces temps, 212 à 17 1 poui| rapport encore plus précis de l’entier refi dissement du cuivre et du marbre commi 20 Que le temps du refroidissement | PARTIE EXPERIMENTALE. 383 re est à celui du refroidissement de ierre tendre , au point de pouvoir les r, :: 29 1/2: i5 1/2, et: : 871 49 pour entier refroidissement. Que le temps du refroidissement du re est à celui du refroidissement de l’an- ine, au point de les tenir, ;; 29 1/2 1/2 par les présentes expériences, et, s 8 : 16 par les expériences précédentes XLI). Ainsi on aura , en ajoutant ces ps, 57 1/2 à 29 1/2 pour le rapport plus ds de leur premier refroidissement; et r le second , le rapport donné par les ériences présentes étant ;; 87 : 5o, et E^o : 47 par les expériences précédentes XLI ) , on aura , en ajoutant ces temps , à 97 pour le rapport encore plus pré- e l’entier refroidissement du cuivre et ~ ' antimoine. Que le temps du refroidissement du vre est à celui du refroidissement de la ie, au point de pouvoir les tenir, .*: 1/2 : 12 , et :: 87 : 38 pour leur pre- ir refroidissement. Que le temps du refroidissement du rbre commun est à celui du refroidisse- nt de la pierre tendre, au point de pou- les tenir, ;; 21 1/2 14 par les expé- îces présentes, et :: 29 : 23 par les ex- iences précédentes (art. XXX). Ainsi aura, en ajoutant ces temps, 5o 1/ 2 à pour le rapport plus précis de leur pre- er refroidissement ; et pour le second , le >port donné par les présentes expérien étant : : 60 : 49 , et : : 87 ; 68 par les îériences précédentes ( art. XXX ) , on ■a, en ajoutant ces temps, 147 à i3y ur le rapport encore plus précis de l’en- refroidissement du marbre commun et a pierre tendre. 6° Que le temps du refroidissement du trbre commun est à celui du refroidisse- nt de l’antimoine, au point de les tenir, 21 1/ 2 ; i3 1/2, et :: 60 : 5o pour leur lier refroidissement. Que le temps du refroidissement du arbre commun est à celui du refroidisse- Jent de la craie , au point de pouvoir les Kiir, ;; 21 1/2 ; 12, et : : 60 : 38 pour n* entier refroidissement. 8° Que le temps du refroidissement de la ierre tendre est à celui du refroidissement ; l’antimoine, au point de pouvoir les te- r, ;; 14 ; 3 1/2, et 49 : 5o pour leur ilier refroidissement. 90 Que le temps du refroidissement de la erre tendre est à celui du refroidissement Je la craie, au point de pouvoir les tenir, ; : 14 : 12 , et :: 49 : 38 pour leur entier refroidissement. io°. Que le temps du refroidissement de l’antimoine est à celui du refroidissement de la craie, au point de pouvoir les tenir, ;; 1 3 1/2 ; 12, et ;; 5o ; 38 pour leur en- tier refroidissement. LXY. Ayant fait chauffer ensemble les boulets de p'iomb, d’étain, de verre, de pierre calcaire dure, d’ocre et de glaise, ils se sont refroidis dans l’ordre suivant : Refroidis la température. minutes. 16 Refroidis à les tenir pendant une demi-seconde. minutes. Ocre , en 5 Glaise, en 71/2 Étain , en 81/2 Plomb en 9 ï/2 Verre , en 10 Pierre dure, en. . xo 1/2 Il résulte, de cette expérience : i° Que le temps du refroidissement de la pierre dure est à celui du refroidissement du verre, au point de les tenir, ;; 10. 1/2 ; 10 par la présente expérience, et 20 1/2 ; 1 7 par les expériences précédentes ( arti- cle LIV ). Ainsi on aura , en ajoutant ces temps, 3i à 27 pour le rapport plus précis de leur premier refroidissement ; et pour le second, le rapport donné par la présente ' expérience étant :: 29 : 27, et 62 : 49 par les expériences précédentes (art. LIY), on aura, en ajoutant ces temps, 91 à 76 pour le rapport encore plus précis de l’entier refroidissement de la pierre dure et du verre. 20 Que le temps du refroidissement du verre est à celui du refroidissement du plomb, au point de pouvoir les tenir, :: xo : 9 1/2 f)ar la présente expérience , et : : 12 : 11 par es expériences précédentes (art. XXXIX). Ainsi on aura , en ajoutant ces temps , 22 à 20 1/2 pour le rapport plus précis de leur premier refroidissement ; et pour le second , le rapport donné par l’expérience présente étant :: 27 : 23, et .*: 35 : 3o par les expériences précédentes (art. XXXIX ) , on aura, en ajoutant ces temps, 62 à 53 pour le rapport encore plus précis de l’entier re- froidissement du verre et du plomb. 3° Que le temps du refroidissement du verre est à celui du refroidissemeni de l’é- tain, au point de pouvoir les tenir, 10 ; 8 1/2 par la présente expérience , et ; : 46 ; 42 j/2 par les expériences précédentes (article XXXIX). Ainsi on aura, en ajou- tant ces temps, 56 à 5x pour le rapport plus précis de leur premier refroidissement ; et pour le second , le rapport donné par les 384 MINÉRAUX. INTRODUCTION. expériences présentes étant y 27 21, et par les expériences précédentes (art. XXXIX) ;; 132 : 117, on aura, en ajoutant ces temps, 1*59 à i38 pour le rapport encore plus précis de l’entier refroidissement du verre et de l’étain. 4° Que le temps du refroidissement du verre est à celui du refroidissement de la glaise, au point de pouvoir les tenir, 10 l 71 /1 par la présente expérience, et y 38 1/2 ; 3i par les expériences précé- dentes (article LX). Ainsi on aura, en ajoutant ces temps, 48 1/2 à 38 1/2 pour le rapport plus précis de leur premier re- froidissement ; et pour le second , le rapport donné par la présente expérience étant 1:27 : 20 , et : : ii3 : 87 par les expériences précédentes (art. LX), on aura, en ajou- tant ces temps, 140 à 107 pour le rapport encore plus précis de l’entier refroidisse- ment du verre et de la glaise. 5° Que le temps du refroidissement du verre est à celui du refroidissement de l’ocre, au point de pouvoir les tenir, y 10 : 5 par les présentes expériences, et 38 1/2 ; 25 1/2 par les expériences précédentes (art. LX.). Ainsi on aura, en ajoutant ces temps, 48 1/2 à 3o 1/2 pour le rapport plus précis de leur premier refroidissement ; et pour le second, le rapport donné par la présente expérience étant y 27 ; 16, et par les expériences précédentes (art. LX) ;; ii3 : 75, on aura, en ajoutant ces temps, 140 à 91 pour le rapport encore plus précis de l’entier refroidissement du verre et de l’ocre. 6° Que le temps du refroidissement de la pierre dure est à celui du refroidissement du plomb, au point de pouvoir les tenir, :: 10 1/2 : 9 1/2, et :: 29 : 23 pour leur entier refroidissement. 70 Que le temps du refroidissement de la pierre dure est à celui du refroidissement de l’étain, au point de les tenir, y. io 1/2 : 8 x/2 , et * ; 29 ; 21 pour leur entier re- froidissement. 8° Que le temps du refroidissement de la pierre dure est à celui du refroidissement de la glaise, au point de les tenir, .* I 10 1/2 : 7 1/2 , et :: 29 : 20 pour leur entier re- froidissement. 90 Que le temps du refroidissement de la pierre dure est à celui du refroidissement de l’ocre, au point de les tenir, 10 1/2 ; 5, et :: 29 : 16 pour leur entier refroi- dissement. io° Que le temps du refroidissement du plomb est à celui du refroidissement de l’é- iîlel af fi tain, au point de les tenir, * ; 91/2 ; 8 par la présente expérience, et ;; 36 : 3 1 1/2 par les expériences précéder) j (art. XXXIX). Ainsi on aura, en ajout; 0|: ces temps, 46 à 40 pour le rapport p précis de leur premier refroidissement; pour le second , le rapport donné par présente expérience étant ;; 23 : 21, ; ; 109 : 89 par les expériences précéden (art. XXXIX), on aura, en ajoutant i temps, i32 à iio pour le rapport enc< plus précis de l’entier refroidissement plomb et de l’étain. ii° Que le temps du refroidissement plomb est à celui du refroidissement de glaise, au point de pouvoir les tenir, : : 9 1 : 7 1/2 par la présente expérience, et I 5 1/2 par les expériences précédent (art. XXXV). Ainsi on aura, en ajoutai ces temps, 16 1/2 à i3 pour le rapport pli précis de leur premier refroidissement ; pour le second , le rapport donné par présente expérience étant 23 : 20, :: 18 : i5 par les expériences précédent (art, XXXV), on aura, en ajoutant < temps, 41 à 35 pour le rapport encore pl précis de l’entier refroidissement du pion et de la glaise. i2° Que le temps du refroidissement récis de l’entier refroidissement de la glaise de l’ocre. LXVI. Ayant fait chauffer ensemble les mulets de zinc, d’antimoine, de pierre cal- aire tendre , de craie , et de gypse , ils se ont refroidis dans l’ordre suivant Refroidis à les tenir Refroidis endant une demi-seconde. à la température. minutes. minutes. Sypse , en 3 1/2 En. Iraie , en 5 Eu- l ntiinoine , en . . 6 En. 'ierre tendre, en. 7 1/2 En. 23 .inc , en i4 1/2 En. 29 LXVII. La même expérience répétée , es boulets se sont refroidis dans l’ordre uivant : Refroidis à les tenir endant une demi- seconde. minutes. ypse, en 3 1/2 raie , en 4 1/2 ntiinoine , en . . 6 lierre tendre, en 3 inc , en i3 1/2 On peut conclure de ces deux expériences: i° Que le temps du refroidissement du inc est à celui du refroidissement de la ierre tendre , au point de pouvoir les tenir, ; 28 : 1 5 1/2, et :: 57 : 44 pour leur ntier refroidissement. 20 Que le temps du refroidissement du inc est à celui du refroidissement de l’anti- ioine, au point de pouvoir les tenir, ;; 28 12 parles présentes expériences, et y 14 ; 52 par les expériences précédentes irt. XLVIII). Ainsi, en ajoutant ces temps, n aura 122 à 64 pour le rapport plus précis e leur premier refroidissement; et pour le îcond , le rapport donné par les présentes xpérieuces étant : : 57 : 42, et ;; 285 : 84 par les expériences précédentes (arti- le XLVIII), on aura, en ajoutant ces bmps, 342 à 226 pour le rapport encore lus précis de l’entier refroidissement du inc et de l’antimoine. I 3° Que le temps du refroidissement du inc est à celui du refroidissement de la t'aie, au point de pouvoir les tenir, .”28 Buffon. I. PARTIE EXPERIMENTALE. 385 : 9 1/2. par les présentes expériences, et ;; 3i : 12 1/2 par les expériences précédentes (art. LU). Ainsi on aura , en ajoutant ces temps, 5 9 à 22 pour le rapport plus précis de leur premier refroidissement ; et pour le second, le rapport donné par les expériences présentes étant y 5 7 T 3o, et ir 59 ! 38 par les expériences précédentes (art. LU) , on aura, en ajoutant ces temps, 116 à 68 pour le rapport encore plus précis de l’entier refroidissement du zinc et de la craie. 4° Que le temps du refroidissement du zinc est à celui du refroidissement du gypse; au point de pouvoir les tenir, ;; 28 : 7 par les présentes expériences , et y 38 I i5 ;/a par les expériences précédentes (art. LXII). Ainsi on aura, en ajoutant ces temps, 66 à 22 1/2 pour le rapport plus précis de leur premier refroidissement; et pour le second, le rapport donné par les présentes expé- riences étant y 5 7 ; 23 , et y 100 ; 44 par les expériences précédentes (art. LXII), on aura, en ajoutant ces temps, i5y à 67 pour le rapport encore plus précis de l’en- tier refroidissement du zinc et du gypse. 5° Que le temps du refroidissement de l’antimoine est à celui du refroidissement de la pierre calcaire tendre , au point de les tenir, y 12 : i5 1/2, et 42 ; 44 pour leur entier refroidissement. 6° Que le temps du refroidissement de l’antimoine est à celui du refroidissement de la craie , au point de pouvoir les tenir, : : 12 : 91/2 par les présentes expériences, et i: i3 1/2 : 12 par les expériences précé- dentes (art. LXIV). Ainsi on aura, en ajou- tant ces temps, 25 1/2 à 21 1/2 pour le rapport plus précis de leur premier refroi- dissement ; et pour le second, le rapport donné par les présentes expériences étant : : 42 ! 3o, et ; l 5o I 38 par les expériences précédentes (art. LXIV), on aura, en ajou- tant ces temps , 92 à 68 pour le rapport en- core plus précis de l’entier refroidissement de l’antimoine et de la craie. 70 Que le temps du refroidissement de l’antimoine est à celui du refroidissement du gypse, au point de pouvoir les tenir, 12 : 7, et 42 : 23 pour leur entier re- froidissement. 8° Que le temps du refroidissement de la pierre tendre est à celui du refroidissement de la craie , au point de pouvoir les tenir, ; : i5 1/2 : 9 1/2 par les présentes expé- riences, et ;; 14 ; 12 par les expériences précédentes (art. LXIV). Ainsi on aura , en ajoutant ces temps ,29 1/2 à 21 1/2 pour le rapport plus précis de leur premier refroi» 25 Refroidis à la température. minutes. 28 j MINÉRAUX. INTRODUCTION. 386 dissement; et pour îe second, le rapport donné par les présentes expériences étant 44 : 3o, et : : 49 : 38 par les expé- riences précédentes (art. LXIY) , on aura , en ajoutant ces temps, p3 à 68 pour le rapport encore plus précis de l’entier re- froidissement de la pierre tendre et de la craie. 9° Que îe temps du refroidissement de la pierre calcaire tendre est à celui du refroi- dissement du gypse, au point de les tenir, ; ; i5 1/2 ; 7 par les présentes expériences, et II 12 ; 4 1/2 par les expériences précé- dentes (art. XXXVIII). Ainsi on aura , en ajoutant ces temps, 27 1/2 à ri 1/2 pour le rapport plus précis de leur premier refroi- dissement ; et pour le second , le rapport donné par les expériences présentes étant :: 44 : 23, et-:: 27 ; 14 par les expé- riences précédentes ( art. XXXVIII ) , on aura, en ajoutant ces temps, 7 ^ à 3 7 pour le rapport encore plus précis de l’entier re- froidissement de la pierre tendre et du gypse. io° Que le temps du refroidissement de la craie est à celui du refroidissement du gypse , au point de les tenir, : : 9 1/2 : 7 par les présentes expériences , et II 2 5 ; 16 par les expériences précédentes (art. LVI). ; Ainsi on aura , en ajoutant ces temps , 34 1/2 à 23 pour le rapport plus précis dé leur premier refroidissement; et pour le se- 1 cond, le rapport donné par les présentes ; expériences étant II 3o l 23, et ;; 71 ;• 5 7 par les expériences précédentes (arti- 1 cle LVI), on aura, en ajoutant ces temps, ! 101 à 80 pour le rapport encore plus précis | de l’entier refroidissement de la craie et du i gypse. Je borne ici cette suite d’expériences \ assez longues à faire et fort ennuyeuses à * lire; j’ai cru devoir les donner telles cpieje les ai faites à plusieurs reprises dans l’es- pace de six ans : si je m’étois contenté d’en additionner les résultats, j’aurois, à la vé- rité, fort abrégé ce mémoire, mais on n’au- roit pas été en état de les répéter; et c’ est- ce Ile considération qui m’a fait préférer dei donner l’énumération et le détail des expé- riences mêmes , au lieu d’une table abrégée que j’aurois pu faire de leurs résultats accu-! j mulés. Je vais néanmoins donner, par forme de récapitulation , la table générale de ces rapports, tous comparés à 10000, afin que, || d’un coup d’œil, on puisse en saisir les dif-Jj férences. TABLE * DES RAPPORTS DÜ REFROIDISSEMENT DES DIFFERENTES SUBSTANCES MINERALES. FER. Premier t refroidissement. Emeril., ....... i Cuivre. * . . Or , , Zinc Entier refroidissement. 10000 5 91 1 7 — 9020 10000 à 85 12 — 8702 10000 à 8 160 — 8148 10000 à 7654 — 6020 6804 Argent Marbre blanc. . . . Marbre commun. . Pierre cale. dure. . « ' Grès £ Verre 1 Plomb. 1 Étain g Pierre cale, tendre I Glaise I Bismuth ! Craie \ Bois. . ' Pierre ponce 1000057619 — 7428 10000 à 67 7 4 — 6704 10000 à 6636 — 6746 10000 à 66 16 — 6274 1000055796 — 6926 1000055576 — 58o5 10000 5 5 143 — 6482 1000054898 — 4921 1 0000 5 4.1 94 — 4659 1000054198 — 4490 10000 5 358o — 408 1 1000053086—3878 10000 5 2325 — 2817 10000 5 1860 — 1549 1000051627 — 126S ÉMERÏL. Premier . Entier j refroidissement. refroidissement. j I Cuivre.,.. ioooo585ig — 8148! ' Or 10000 5 85i3 — S56o> Zinc ioooo583qo — 7602; 7458 , Argent 1000057778 — 7S93; Pierre cale. dure. . 10000 5 7804 — 6g63 j Grès ioooo56552 — 6517 Verre ioooo55S62 — 55oC Plomb 1000055718 — 6643 Étain 10000 5 5658 — 600c Glaise 10000 5 5i 85 — 5 1 85 i Bismuth 1000054949 — 6060 Antimoine. 10000 54540 — 5827 i Ocré 1000054259 — 3825 Craie..... 10000 5 3684 — 4io£ j Gypse ioooo5236S — 2947 1 Bois 10000 à 1 552 — 3i4Û PARTIE EXPERIMENTALE. CUIVRE. Premier Entier refroidissement. refroidissement. Or... iooooà9i36 — 9194 Zinc xooooà857i — 9250 _ ^619 « Argent. xoooo58395 — 7823 .S Marbre commun. . 10000 à 7688— 8019 N Grès iooooà7333 — 8160 "Verre 10000 à 6667 — 6567 Plomb.......... iooooà6i79 — 7867 Étain 10000 à 5746 — 6916 Pierre cale, tendre 1 0000 5 5 1 6 8 — 5633 Glaise 10000 à 5652 — -6363 Bismuth 10000 à 5686 — 5g5g Antimoine 10000 à 5i3o — 58o8 Ocre 10000 à 5ooo — 4697 Craie.... iooooà4o68 — 4368 OR. H a © 'Zinc 10000 à 9474 — 93o4 g? 8422 ^ Argent 1000058986 — 8686 Marbre blanc 10000 à 8101 — 7863 Marbre commun. . 1000057342 — 7435 Pierre cale. dure.. ioooo5 7383 — 7516 Grès. 1000057868 — 7627 Verre 1000057108 — 5982 Plomb ioooo56526 — 7500 Étain ioooo 56324 — 6o5x Pierre cale, tendre 1000056087 — 58 11 Glaise 10000 5 58 14 — 5077 ZINC. Premier Entier refroidissement. refroidissement. Antimoine 10000 5 5246 — 6608 4i35 Craie * . . . . 1000053729— 586a 2618 Gypse 1000053409 — 4268 1 2298 ARGENT. 'Marbre blanc.... ioooo5868x — 9200 Marbre commun. . 1000057912 — 9040 Pierre cale. dure.. 1000057436 — 858o Grès 1000057361 — 7767 Terre 1000057230 — 7212 Plomb 1000057154—9184 Étain 1000056176 — 6289 Pierre cale, tendre. 100005617 8 — 62 8 7 Glaise 1000056034—67x0 Bismuth 10000 563o8 — 8877 Porcelaine.. 10000 5 5556 — 5242 Antimoine 1000055692 — 7653 Ocre 10000 à 5ooo — 5658 Craie. ioooo543io — 5ooo Gypse 1000052879 — 3366 Bois 10000 5 2353 — 1864 .Pierre ponce.. . . . ioooo'a.2o5g — i525 MARBRE BUANC. I Bismuth 10000 5 5658 — 7043 ! Marbre commun. . 10000 5 8992 — 94o5 f Porcelaine ioooo55526 — 5593 ;/ ' Pierre dure ioooo5 8594 — 9i3o J Antimoine 1 0000 5 6395 — 6348 s Grès 100005828 6 — 8990 1 Ocre 10000 5 5349 — 4462 §! i Plomb 1000057604 — 5555 \ Craie 1000054571—4452 1 Étain 1000057143—6792 \ Gypse..' 1000052989 — 8293 » • ' Pierre cale, tendre 1000056792 — 7218 ZINC. J, j Glaise | Antimoine 10000 à 6400 — 62S6 1000056286 — 6792 / 4i’P,critT 1000058904 — 8990 iooi5 10000 5 83o5 — 8424 , 7A94 1000056949—7333 ' Ocre Gypse 10000 5 5400 — 557 1 1 0000 5 4920 — 5 1 1 6 10000 52200 — 2887 COMMUN. Marbre blanc Grès \ VBois MARBRE < Plomb, ' 5838 ioooo56o5i — 7947 1 Pierre dure 10000 59483 — 9655 1 , . 4940 1 Grès 1000058767 — 9273 Etain 1 0000 5677 7 — 6240 1 Plomb 10000 à 7671 — 85go 5666 3 ( S 1 Étain 1000057424 — 6666 Pierre cale, tendre xoooo55536: — 7719 2 y ' Pierre tendre 1000057327 — 7959 4425 0 \ 0 1 Glaise 1000057272—7213 Glaise 1000055484 — 7453 0) 1 s- Antimoine 1000056279 — 8333 4878 pO JM 1 f Ocre 10000 56x3.0 — 6393 ^ Bismuth., ....... ÏOOOO 55343 — 7547 S1 Craie 10000 5 558 1 — 6333 423a \ Bois 10000 à 2500—3279 25. P.t.et Étain et Plomb et Verre et Grès et Pierre dure et 388 MINERAUX. INTRODUCTION. PIERRE CALCAIRE DURE. Premier Entier refroidissement. refroidissement. rGrès 1000059268 — g355 Verre iooooà87io — 8352 Plomb iooooà857i — 7g3i I Étain iooooà8oo5 — 793 1 Pierre tendre 10000 à 8000 — 8og5 Glaise 10000 à 6190 — 9897 Ocre 1000054762 — 55i7 \Bois 1000052195 — 45i6 GRÈS. /Verre 1000059324 — 7989 1 Plomb 10000 5 856i — 8950 lÉtain 1000057667 — 7633 ] Pierre tendre 1000057647 — 7193 (Porcelaine. 10000 5 7364 — 7059 j Antimoine ioooo57333 — 6170 1 Gypse ioooo5 4568 — 5ooo \Bois. . ioooo5 2368 — 4828 VERRE. /Plomb ioooo593x8 — 8548 [ Étain 1000059107 — 8679 I Glaise 1000057938 — 7643 J Porcelaine 1000057692 — 8863 Ocre 1000056289 — 65oo Craie 10000 5 6x04 — 6ig5 Gypse 1000054160 — 6011 Bois 1000052647 — 55i4 PLOMB. Étain . . xoooo58695 — 8333 Pierre tendre. . . . . 1000058437 — 7192 Glaise . . 1000057878 — 8536 Bismuth . . 1000058698 — 8750 Antimoine . . 1000058241 — 820X Ocre . . 10000 5 6060 — 7073 Craie . . 1000055714 — 6111 Gypse . . ioooo54736 — 5714 ÉTAIN. Glaise . . ioooo58823 — 9524 Bismuth . . ioooo58888 — 9400 Antimoine . . 1000058710 — 9i56 Ocre . . ioooo55882 — 7619 Craie . . 10000 5 6364 — 6842 Gypse . . 1000054090 — 4912 PIERRE CALCAIRE TENDRE. I Antimoine 1000057742 — 9545 Craie. 1000057288 — 7312 Gypse 10000 5 4x82 — 5211 GLAISE. o Premier Entier refroidissement. refroidissement. Bismuth 1000058870 — 941g Ocre 10000 5 8400 — 8571 Craie 1000057701 — 8ooo Gypse 10000 5 5i 85 — 8o55 Bois 1000053427 — 45451* BISMUTH. « 1 Antimoine 10000 59349- S (Ocre ioooo58846- ( Craie 10000 5 8620- -7880 -g5oo PORCELAINE. Porcelaine et gypse... 10000 5 53o8 — 65oc ANTIMOINE. a> | Craie 10000 5843 1- (Gypse ioooo55833- -73gi -547e OCRE. « ( Craie 10000 5 8654- ï | Gypse 10000 5 6364- O ( Bois 1000054074- -833c -906: -5i2£ CRAIE. Craie et gypse 1000056667- GYPSE. -792c « j Bois 10000 5 8000 — 525< çjj j Pierre ponce 1000057000 — 45o< BOIS. Bois et pierre ponce.. 1000058750 — 8i8tjL Quelque attention que j’aie donnée 5 me expériences , quelque soin que j’aie pri pour en rendre les rapports plus exacts j’avoue qu’il y a encore quelques imperfee tions dans cette table qui les contient tous mais ces défauts sont légers et n’influent pa beaucoup sur les résultats généraux : pa exemple, on s’apercevra aisément que le rap port du zinc au plomb étant de 10000 ; 6o5i , celui du zinc 5 l’étain devrait èlr moindre de 6000, tandis qu’il se trouv dans la table de 6777. Il en est de mêm de celui de l’argent au bismuth , qui devrai être moindre que 63o8, et encore de celu du plomb à la glaise, qui devrait être d PARTIE EXPERIMENTALE. 38g ;Jus de 8000, et qui ne se trouve être daus table que de 7878 ; mais cela provient de jj que les boulets de plomb et de bismuth Iont pas toujours été les mêmes : ils se sont ndus aussi bien que ceux d’étain et d’an- noine; ce qui n’a pu manquer de produire s variations , dont les plus grandes sont ; trois que je viens de remarquer. Il ne a pas été possible de faire mieux : les dif- •ens boulets de plomb, d’étain, de bis- ith et d’antimoine , dont je me suis suc- jsivement servi, étoient faits, à la vérité, r le même calibre; mais la matière de acun pouvoit être un peu différente, se- in la quantité d’alliage du plomb et de l’é- | lin ; car. je n’ai eu de l’étain pur que pour Is deux premiers boulets : d’ailleurs , il ste assez souvent une petite cavité dans ces oulets fondus, et ces petites causes suffisent lour produire les petites différences qu’on ourra remarquer dans ma table. Il en est de même de l’étain à l’ocre , qui evroit être de plus de 6000, et qui ne se ■ouve dans la table que de 5882 , parce que ocre étant une matière friable qui diminue ar le frottement , j’ai été obligé de changer rois ou quatre fois les boulets d’ocre. J’a- oue qu’en donnant à ces expériences le ouble du très-long temps que j’y ai em- loyé, j’aurois pu parvenir à un plus grand egré de précision ; mais je me flatte qu’il f en a suffisamment pour qu’on soit con- aincu de la vérité des résultats que l’on peut n tirer. Il n’y a guère que les personnes ac- outumées à faire des expériences, qui sa- illent combien il est difficile de constater un eul fait de la nature par tous les moyens ue l’art peut nous fournir : il faut joindre i patience au génie, et cela souvent ne suf- il pas encore; il faut quelquefois renoncer, nalgré soi , au degré de précision que l’on iésireroit , parce que cette précision en exi- ;eroit une tout aussi grande dans* toutes les nains dont on se sert, et demanderoit en nême temps une parfaite égalité dans toutes es matières que l’on emploie : aussi tout ce pie l’on peut faire en physique expérimen- aie ne peut pas nous donner des résultats ■igoureusement exacts , et ne peut aboutir luu’à des approximations plus ou moins ferandes ; et quand l’ordre général de ces ap - jproximations 11e se dément que par de légères gvariations , on doit être satisfait. 1 Au reste, pour tirer de ces nombreuses «expériences tout le fruit que l’on doit en «attendre, il faut diviser les matières qui en font l’objet en quatre classes ou genres dif- Jférens ; ï® Jes rpétaux; 20 les demi-mé aux et minéraux métalliques ; 3° les substances vitrées et vitrescibles ; 4° les substances cal- caires et calcinables ; comparer ensuite les matières de chaque genre entre elles, pour tâcher de reconnoître la cause ou les causes de l’ordre que suit le progrès de la chaleur dans chacune ; et enfin comparer les genres mêmes entre eux , pour essayer d’en déduire quelques résultats généraux. I. L’ordre des six métaux, suivant leur densité , est : étain , fer, cuivre , argent , plomb, or; tandis que l’ordre dans lequel ces métaux reçoivent et perdent la chaleur est : étain , plomb , argent , or, cuivre , fer, dans lequel il n’y a que l’étain qui conserve sa place. Le progrès et la durée de la chaleur dans les métaux 11e suit donc pas l’ordre de leur densité, si ce n’est pour l’étain, qui, étant le moins dense de tous , est en même temps celui qui perd le plus tôt sa chaleur : mais l’ordre des cinq autres métaux nous démon- tre que c’est dans le rapport de leur fusibi- lité que tous reçoivent et perdent la cha- leur ; car le fer est plus difficile à fondre que le cuivre, le cuivre l’est plus que l’or, l or plus que l’argent , l’argent plus que le plomb, et le plomb plus que l’étain : on doit donc en conclure que ce n’est qu’un hasard si la densité et la fusibilité de l’étain se trouvent ici réunies pour le placer au der- nier rang. Cependant ce seroit trop s’avancer que de prétendre qu’on doit tout attribuer à la fu- sibilité, et rien du tout à la densité; la na- ture ne se dépouille jamais d’une de ses propriétés en faveur d’une autre, d’une ma- nière absolue, c’est-à-dire de façon que la première n’influe en rien sur la seconde : ainsi la densité peut bien entrer pour quel- que chose dans le progrès de la chaleur; mais au moins nous pouvons prononcer af- firmativement que, dans les six métaux, elle n’y fait que très-peu , au lieu que la fusibi- lité y fait presque le tout. Cette première vérité n’étoit connue ni des chimistes ni des physiciens : on n’auroit pas même imaginé que l’or, qui est plus de deux fois et demie plus dense que le fer, perd néanmoins sa chaleur un demi-tiers plus vite. Il en est de même du plomb , de l’argent et du cuivre, qui tous sont plus denses que le fer, et qui , comme l’or, s’é- chauffent et se refroidissent plus prompte- ment ; car, quoiqu’il ne soit question que du refroidissement dans ce second mémoire , les expériences du mémoire qui précède celui- 39o MINERAUX. INTRODUCTION. ci , démontrent , à n’en pouvoir douter, qu’il en est de l’entrée de la chaleur dans les corps comme de sa sortie, et que ceux qui la re- çoivent le plus vile sont en même temps ceux qui la perdent le plus tôt. Si l’on réfléchit sur les principes réels de la densité et sur la cause de la fusibilité, on sentira que la densité dépend absolument de la quantité de matière que la nature place dans un espace donné ; que plus elle peut y en faire entrer, plus il y a de densité, et que l’or est, à cet égard, la substance qui, de toutes, contient le plus de matière rela- tivement à son volume. C’est pour cette raison que l’on avoit cru jusqu’ici qu’il fal- !oit plus de temps pour échauffer ou refroi- dir l’or que les autres métaux. Il est en effet assez naturel de penser que, contenant sous le même volume le double ou le triple de matière , il faudroit le double ou le triple du temps pour la pénétrer de chaleur; et cela serait vrai si, dans toutes les substances, les parties constituantes étoient de la même fi- gure , et en conséquence toutes Arrangées de même. Mais, dans les unes, comme dans les plus denses , les molécules de la matière sont probablement de figure assez régulière pour ne pas laisser entre elles de très -grands es- paces vides ; dans d’autres moins denses , leurs figures plus irrégulières laissent des vides plus nombreux et plus grands; et dans les plus légères, les molécules étant en petit nombre , et probablement de figure très-irrégulière, il se trouve mille et mille fois plus de vide que de plein : car on peut démontrer par d’autres expériences, que le volume de la substance même la plus dense contient encore beaucoup plus d’espace vide que de matière pleine. Or, la principale cause de la fusibilité est la facilité que les particules de la chaleur trouvent à séparer les unes des autres ces molécules de la matière pleine : que la somme des vides en soit plus ou moins grande, ce qui fait la densité ou la légèreté, cela est indifférent à la séparation des mo- lécules qui constituent le plein , et la plus ou moins grande fusibilité dépend en entier de la force de cohérence qui tient unies ces parties massives , et s’oppose plus ou moins à leur séparation. La dilatation du volume total est le premier degré de l’action de la chaleur ; et , dans les différens métaux , elle se fait dans le même ordre que la fusion de la masse , qui s’opère par un plus grand degré de chaleur ou de feu. L’étain qui, de tous , se fond le plus promptement , est aussi celui qui se dilate le plus vite ; et le fer, qui est de tous le plus difficile à fondre , est de même celui dont la dilatation est la plus lente. D’après ces notions générales , qui parais- sent claires , précises et fondées sur des ex- périences que rien ne peut démentir, on serait porté à croire que la ductilité doit suivre l’ordre de la fusibilité, parce que la1 plus ou moins grande ductilité semble dé- pendre de la plus ou moins grande adhésion des parties dans chaque métal ; cependant iij cet ordre de la ductilité des métaux paraît |i!i avoir autant de rapport à l'ordre de la den- lu sité qu’à celui de leur fusibilité. Je dirais I volontiers qu’il est en raison composée des |j deux autres, mais ce n’est que par estime Éi et par une présomption qui n’est peut-être [itr pas assez fondée ; car il n’est pas aussi facile |ai: de déterminer au juste les différens degrés |f de la fusibilité que ceux de la densité ; etafe comme la ductilité participe des deux , et I qu’elle varie suivant les circonstances, no usitée n’avons pas encore acquis les connoissances i j nécessaires pour prononcer affirmativement m sur ce sujet, qui est d’une assez grande im- |I portance pour mériter des recherches parti-tL culières. Le même métal, traité à froid ouilfu à chaud, donne des résultats tout difféi'ens: i la malléabilité est le premier indice de la fst ductilité; mais elle ne nous donne néan-nL moins qu’une notion assez imparfaite duip, point auquel la ductilité peut s’étendre. Le jaii plomb, le plus souple , le plus malléable des |é métaux, ne peut se tirer à la filière en fils aussi, ie fins que l’or, ou même que le fer, qui, de ir tous, est le moins malléable. D’ailleurs, il mo faut aider la ductilité des métaux par l’ad-1 i dition du feu, sans quoi ils s’écrouissent et deviennent cassans; le fer même, quoique j i le plus robuste de tous, s’écrouit comme les f/ autres. Ainsi la ductilité d’un métal et l’éten- t due de continuité qu’il peut supporter, dé- ij; pendent non seulement de sa densité et de sa fusibilité, mais encore de la manière dont im on le traite , de la percussion plus lente ou ! >!1( plus prompte , et de l’addition de chaleur ou i ai de feu qu’on lui donne à propos. j ite J U II. Maintenant, si nous comparons les; 1f substances qu’on appelle demi-métaux et j im minéraux métalliques qui nanquent de duc- ; ,o tilité , nous verrons que l’ordre de leur den- ; 5| sité est . émeril , zinc, antimoine , bismuth, ; |r, et que celui dans lequel ils reçoivent et per- j (jr dent la chaleur est : antimoine, bismuth,) j| zinc, émeril ; ce qui ne suit en aucune façon .j; l’ordre de leur densité , mais plutôt celui de j :i leur fusibilité. L’éméril, qui est un minéral ; ^ PARTIE EXPÉRIMENTALE. 39i rrugineux, quoique une fois moins dense îe le bismulh, conserve la chaleur une fois us long-temps ; le zinc, plus léger que tntimoine et le bismuth, conserve aussi la laleur beaucoup plus long temps ; l’anti- oine et le bismulh la reçoivent et la gar- nit à peu près également. Il en est donc ss demi-métaux et des minéraux méîalli- les comme des métaux : le rapport dans :{uel ils reçoivent et perdent la chaleur est peu près le même que celui de leur fusi- lité , et ne tient que très-peu ou point du ut à celui de leur densité. Mais en joignant ensemble les six métaux les quatre demi-métaux ou minéraux mé- liques que j’ai soumis à l’épreuve, on rra que l’ordre des densités de ces dix sub- limes minérales est: Émeril, zinc, antimoine, étain, fer, cui- e, bismulh, argent, plomb, or; Et que l’ordre dans lequel ces substances chauffent et se refroidissent est : Antimoine, bismuth, étain, plomb, ar- nt, zinc, or, cuivre, émeril, 1er: Dans lequel il y a deux choses qui ne pa- issent pas bien d’accord avec l’ordre de fusibilité : i° L’antimoine, qui devroit s’échauffer se refroidir plus lentement que le plomb, isqu’on a vu par les expériences de New- 1, citées dans le mémoire précédent, que ntimoine demande pour se fondre dix de- 3S de la même chaleur dont il n’en faut e huit pour fondre le plomb ; au lieu que, r mes expériences , il se trouve que l’an- noine s’échauffe et se refroidit plus vite e le plomb. Mais on observera que New- i s’est servi de régule d’antimoine , et que n’ai employé dans mes expériences que l’antimoine fondu : or, le régule d’anti- )ine ou l’antimoine naturel est bien plus fficile à fondre que l’antimoine qui a déjà bi une première fusion ; ainsi cela ne fait jint une exception à la règle. Au reste , gnore quel rapport il y auroit entre Fan- tôme naturel ou régule d’antimoine et les très matières que j’ai fait chauffer et re- lidir; mais je présume, d’après l’expé- înce de Newton, qu’il s’échaufferoit et se Proidiroit plus lentement que le plomb. ! 2° L’on prétend que le zinc se fond bien üs aisément que l’argent ; par conséquent devroit se trouver avant l’argent dans l’or- !e indiqué par mes expériences , si cet ordre bit, dans tous les cas, relatif à celui de la sibilité ; et j’avoue que ce demi-métal inble , au premier coup d’œil , faire une tceptioii à cette loi, que suivent tous les autres : mais il faut observer, x° que la dif- férence donnée par mes expériences entre le zinc et l’argent est fort petite ; 2° que le petit globe d’argent dont je me suis servi étoit de l’argent le plus pur, sans la moindre partie de cuivre ni d’autre alliage , et l’ar- gent pur doit se fondre plus aisément et s’échauffer plus vite que l’argent mêlé de cuivre ; 3° quoique le petit globe de zinc m’ait été donné par un de nos habiles chi- mistes *, ce n’est peut-être pas du zinc ab- solument pur et sans mélange de cuivre , ou de quelque autre matière encore moins fu- sible. Comme ce soupçon m’étoit resté après toutes mes expériences faites, j’ai remis le globe de zinc à M. Rouelle , qui me l’avoit donné , en le priant de s’assurer s’il ne con- tenoit pas du fer ou du cuivre, ou quelque autre matière qui s’opposeroit à la fusibilité. Les épreuves en ayant été faites , M. Piouelle a trouvé dans ce zinc une quanlité assez considérable de fer, ou safran de mars : j’ai donc eu la satisfaction de voir que non seu- lement mon soupçon étoit bien fondé, mais encore que mes expériences ont été faites avec assez de précision pour faire reconnoî- tre un mélange dont il n’étoit pas aisé de se douter. Ainsi le zinc suit aussi exactement que les autres métaux et demi-métaux dans le progrès de la chaleur l’ordre de la fusibi- lité , et ne fait point une exception à la rè- gle. On peut donc dire, en général, que le progrès de la chaleur dans les métaux , de- mi-métaux et minéraux métalliques, est en même raison ou du moins en raison très- voisine de celle de leur fusibilité 2. m. Les matières vitrescibles et vitrées que j’ai mises à l’épreuve, étant rangées sui- vant l’ordre de leur densité , sont : Pierre ponce , porcelaine , ocre , glaise , verre, cristal de roche, et grès ; car je dois observer que quoique le cristal ne soit porté dans la table des poids de chaque matière que pour six gros vingt-deux grains, il doit x. M. Rouelle , démonstrateur de chimie aux écoles du Jardin du Roi. 2. Le globe de zinc sur lequel ont été faites toutes les expériences s’étant trouvé mêlé d’une portion de fer, j’ai été obligé de substituer dans la table générale, aux premiers rapports, de nou- veaux rapports que j’ai placés sous les autres : par exemple, le rapport du fer au zinc de xoooo à 7654 n’est pas le vrai rapport , et c’est celui de xoooo à 6804 écrit au dessous qu’il faut adopter. Il en est de même de toutes les autres corrections que j’ai faites d’un neuvième sur chaque nombre,, parce que j’ai reconnu que la portion de fer con- tenue dans ce zinc avoit diminué au moins d’uq neuvième le progrès de la chaleur. 392 MINÉRAUX. INTRODUCTION. être supposé plus pesant d’environ un gros, parce qu’il étoit sensiblement trop petit ; et c’est par cette raison que je l’ai exclu de la table générale des rapports , ayant rejeté toutes les expériences que j’ai faites avec ce globe trop petit. Néanmoins le résultat gé- néral s’accorde assez avec les autres pour que je puisse le présenter. Voici donc l’or- dre dans lequel ces différentes substances se sont refroidies : pierre ponce , ocre , porce- laine, glaise, verre, cristal, et grès, qui , comme l’on voit, est le même que celui de la densité ; car l’ocre ne se trouve ici avant la porcelaine que parce qu’étant une ma- tière friable il s’est diminué par le frotte- ment qu’il a subi dans les expériences ; et d’ailleurs sa densité diffère si peu de la por- celaine, qu’on peut les regarder comme égales. Ainsi la loi du progrès de la chaleur dans les matières vitrescibles et vitrées est rela- tive à l’ordre de leur densité , et 11’a que peu ou point de rapport avec leur fusibilité, par la raison qu’il faut, pour fondre toutes ces substances, un degré presque égal du feu le plus violent, et que les degrés parti- culiers de leur différente fusibilité sont si près les uns des autres, qu’on ne peut pas en faire un ordre composé de termes dis- tincts. Ainsi leur fusibilité presque égale ne faisant qu’un terme, qui est l’extrême de cet ordre de fusibilité, on ne doit pas être étonné de ce que le progrès de la chaleur suit ici l’ordre de la densité , et que ces différentes substances, qui toutes sont éga- lement difficiles à fondre, s’échauffent et se refroidissent plus lentement et plus vite , à proportion de la quantité de matière quelles contiennent. On pourra m’objecter que le verre se fond plus aisément que la glaise , la porcelaine , î’ocre et la pierre ponce, qui néanmoins s’échauffent et se refroidissent en moins de temps que le verre; mais l’objection tom- bera lorsqu’on réfléchira qu’il faut , pour fondre le verre, un feu très-violent , dont le degré est si éloigné des degrés de chaleur que reçoit le verre dans nos expériences sur le refroidissement, qu’il ne peut influer sur ceux-ci. D’ailleurs, en pulvérisant la glaise, la porcelaine, l’ocre et la pierre ponce, et leur donnant des fondans analogues , comme l’on en donne au sable pour le convertir en verre , il est plus que probable qu’on feroit fondre toutes ces matières au même degré de feu, et que par conséquent on doit regar- der comme égale ou presque égale leur ré- sistance à la fusion , et c’est par cette raison que la loi du progrès de la chaleur dans ces matières se trouve proportionnelle à l’ordre de leur densité. IV. Les matières calcaires, rangées selon t l’ordre de leur densité , sont : ^ Craie, pierre tendre, pierre dure, mar- L bre commun, marbre blanc. L’ordre dans lequel elles s’échauffent et se refroidissent est : craie, pierre tendre, pierre L dure, marbre commun et marbre blanc, qui , comme l’on voit , est le même que celui de leur densité. La fusibilité n’y entre pour rien, parce qu’il faut d’abord un très- grand degré de feu pour les calciner, et que, quoi- que la calcination en divise les parties, on ne doit en regarder l’effet que comme un premier degré de fusion , et non pas comme une fusion complète; toute la puissance des meilleurs miroirs ardens suffit à peine pourrai l’opérer. J’ai fondu et réduit en une espèce de verre quelques-unes de ces matières cal- caires au foyer d’un de mes miroirs , et je me suis convaincu que ces matières peuvent, comme toutes les autres , se réduire ulté- rieurement en verre , sans y employer aucun! fondant, et seulement par la force d’un feil bien supérieur à celui de nos fourneaux. Par conséquent, le terme commun de leur fusibilité est encore plus éloigué et plus ex- trême que celui des matières vitrées ; et c’est par cette raison qu’elles suivent aussi plus exactement , dans le progrès de la chaleur,' l’ordre de la densité. Le gypse blanc, qu’on appelle impropre- ment albâtre, est une matière qui se calcine,! jpj comme tous les autres plâtres, à un degré de feu plus médiocre que celui qui est né cessaire pour la calcination des matières L calcaires : aussi ne suit-il pas l’ordre de laiL, densité dans le progrès de la chaleur qu’il Lt reçoit ou qu’il perd ; car, quoique beaucoup i ,, plus dense que la craie, et un peu plusjy, dense que la pierre calcaire blanche , il s’é- ilL chauffe et se refroidit néanmoins bien plus IL promptement que l’une et l’autre de ces matières. Ceci nous démontre que la calci- nation et la fusion , plus ou moins faciles , produisent le même effet relativement aujtite progrès de la chaleur. Les matières gypseuses ne demandent pas , pour se calciner, autant ^ de feu que les matières calcaires ; et c’est par celte raison que, quoique plus denses , j jtg( elles s’échauffent et se refroidissent plus vite. Ainsi on peut assurer en général que « le « progrès de la chaleur, dans toutes les sub- ; .j: « stances minérales , est toujours à très-peu i ai,t " Îtos ii PARTIE EXPÉRIMENTALE. près en raison de leur plus ou moins grande facilité à se calciner ou à se fondre; » ais que quand leur calcination ou leur iu- jn sont « également difliciles , et qu’elles exigent un degré de chaleur extrême , » ors « le progrès de la chaleur se fait sui- vant l’ordre de leur densité. » Au reste, j’ai déposé au Cabinet du Roi 393 les globes d’or, d’argent, et de toutes les autres substances métalliques et minérales qui ont servi aux expériences précédentes , afin de les rendre plus authentiques , en met- tant à portée de les vérifier ceux qui vou- droienl douter de la vérité de leurs résultats, et de la conséquence générale que je viens d’en tirer. ,/lWWV» l > W\» VfcVïft\VVWWWV\MWVlV»i%VVlVlW\VWWV»V%%^Vl/VVVl%IV\WVl\lV\V\\^ wvwvvvw TROISIEME MEMOIRE. Observations sur la nature de la platine. ' On vient de voir que de toutes les sub- ances minérales que j’ai mises à l’épreuve, ne sont pas les plus denses, mais les moins sibles , auxquelles il faut le plus de temps >ur recevoir et perdre la chaleur : le fer l’émeril , qui sont les matières métalli- les les plus difficiles à fondre, sont en ême temps celles qui s’échauffent et se re- oidissent le plus lentement. Il n’y a dans nature que la platine qui pourroit être en- re moins accessible à la chaleur, et qui conserveroit plus long-temps que le fer. b minéral , dont on ne parle que depuis >u , paroît être encore plus difficile à fon- ’e ; le feu des meilleurs fourneaux n’est pas sez violent pour produire cet effet, ni ême pour en agglutiner les petits grains , ai sont tous anguleux, émoussés, durs, et sez semblables, poifr la forme, à de la ■osse limaille de fer , mais d’une couleur i peu jaunâtre : et quoiqu’on puisse les ire couler sans addition de fondans , et les duire en masse au foyer d’un bon miroir allant, la platine semble exiger plus de îaleur que la mine et la limaille de fer, Lie nous faisons aisément fondre à nos four- baux de forge. D’ailleurs la densité de la latine étant beaucoup plus grande que celle li fer, les deux qualités de densité et de m fusibilité se réunissent ici pour rendre stte matière la moins accessible de toutes 1 progrès de la chaleur. Je présume donc Lie la platine seroit à la tête de ma table, [ avant le fer , si je l’avois mise en expé- lence; mais il ne m’a pas été possible de l’en procurer un globe d’un pouce de dia- lètre : on ne la trouve qu’en grains 1 ; et i. Un homme digne de foi m’a néanmoins as- iré qu’on trouve quelquefois de la platftie en Lasse, et qu’il en avoit vu un morceau de vingt celle qui est en masse n’est pas pure, parce qu’on y a mêlé, pour la fondre, d’autres matières qui en ont altéré la nature. Un de mes amis â, homme de beaucoup d’esprit, qui a la bonté de partager souvent mes vues, m’a mis à portée d’examiner cette sub- stance métallique encore rare , et qu’on ne connoît pas assez. Les chimistes qui ont tra- vaillé sur la platine l’ont regardée comme un métal nouveau, parfait, propre, particulier, et différent de tous les autres métaux : ils ont assuré que sa pesanteur spécifique étoit à très-peu près égale à celle de l’or, que néanmoins ce huitième métal différoit d’ailleurs essentiellement de l’or, n’en ayant ni la ductilité ni la fusibilité. J’avoue que je suis dans une opinion différente , et même tout opposée. Une matière qui n’a ni duc- tilité ni fusibilité ne doit pas être mise au nombre des métaux , dont les propriétés es- sentielles et communes sont d’être fusibles et ductiles. Et la platine, d’après l’examen que j’en ai pu faire, ne me paroît pas être un nouveau métal différent de tous les au- tres, mais un mélange, un alliage de fer et d’or formé par la nature, dans lequel la quantité d’or semble dominer sur la quan- tité de fer; et voici les faits sur lesquels je crois pouvoir fonder cette opinion. De huit onces trente-cinq grains de pla- tine que m’a fournis M. d’Angiviller , et que j’ai présentés à une forte pierre d’aimant, il ne m’est resté qu’une once un gros vingt- neuf grains ; tout le reste a été enlevé par l’aimant , à deux gros près , qui ont été ré- livres pesant qui n’avoit point été fondu, mais tiré de la mine même. 2. M. le comte de La Billardrie d’Angiviller, de l’Académie des Sciences, intendant en survivance^ u Jardin et du Cabinet du Roi. 394 MINÉRAUX. INTRODUCTION. duits en poudre qui s’est attachée aux feuilles de papier , et qui les a profondément noir- cies , comme je le dirai tout à l’heure. Cela fait donc à très-peu près six septièmes du total qui ont été attirés par l’aimant; ce qui est une quantité si considérable, relativement au tout, qu’il est impossible de se refuser à croire que le fer ne soit contenu dans la sub- stance intime de la platine , et qu’il n’y soit même en assez grande quantité. U y a plus : c’est que si je ne m’étois pas lassé de ces expériences, qui ont duré plusieurs jours, j’aurois encore tiré par l’aimant une grande partie du restant de mes huit onces de pla- tine ; car l’aimant en attiroit encore quel- ques grains un à un, et quelquefois deux, quand on a cessé de le présenter. Il y a donc beaucoup de fer dans la platine; et il n’y est pas simplement mêlé comme matière étran- gère, mais intimement uni, et faisant partie de sa substance : ou, si l’on veut le nier, il faudra supposer qu’il existe dans la na- ture une seconde matière qui , comme le fer , est attii able par l’aimant ; mais cette supposition gratuite tombera par les autres faits que je vais rapporter. Toute la platine que j’ai eu occasion d’examiner m’a paru mélangée de deux ma- tières différentes : l’une noire , et très-atti- rablepar l’aimant ; l’autre en plus gros grains, d’un blanc livide un peu jaunâtre et beau- coup moins magnétique que la première. Entre ces deux matières , qui sont les deux extrêmes de celte espèce de mélange, se trouvent toutes les nuances intermédiaires , soit pour le magnétisme, soit pour la cou- leur et la grosseur des grains. Les plus ma- gnétiques, qui sont en même temps les plus noirs et les plus petits, se réduisent aisé- ment en poudre par un frottement assez lé- ger , et laissent sur le papier blanc la même couleur que le plomb frotté. Sept feuilles de papier dont on s’est servi successivement pour exposer la platine à l’action de l’aimant, ont été noircies sur toute l’étendue qu’occu- poit la platine, les dernières feuilles moins que les premières à mesure qu’elle se trioit, et que les grains qui restoienl éloient moins noirs et moins magnétiques. Les plus gros grains , qui sont les plus colorés et les moins magnétiques , au lieu de se réduire en pous- sière comme les petits grains noirs, sont au contraire très-durs et résistent à toute tritu- ration ; néanmoins ils sont susceptibles d’ex- tension dans un mortier d’agate 1 , sous les i. Je n’ai pas voulu tes étendre sur le tas d’acier, dans la crainte de leur communiquer plus de magné- tisme qu’ils n’en ont naturellement. coups réitérés d’un pilon de même matière, et j’en ai aplati et étendu plusieurs grains au double et au triple de l’étendue de leur surface : cette partie de la platine a donc un certain degré de malléabilité et de duc- tilité, tandis que la partie noire ne paroît r être ni malléable ni ductile. Les grains in- i termédiaires participent des qualités des ei deux extrêmes , ils sont aigres et durs ; ils « se cassent ou s’étendent plus difficilement es sous les coups du pilon , et donnent un peu s de poudre noire, mais moins noire que la ? première. si Ayant recueilli cette poudre noire et les ni grains les plus magnétiques que l’aimant ir avoit attiré les premiers , j’ai reconnu que iis le tout étoit du vrai fer , mais dans un état t'a différent du fer ordinaire. Celui-ci, réduit es en poudre et en limaille, se charge de l’hu-i ad midité et se rouille aisément : à mesure que i> la rouille le gagne , il devient moins magné- du tigue , et finit absolument par perdre cette al qualité magnétique lorsqu’il est entièrement! se et intimement rouillé ; au lieu que cette pou-i m dre de fer , ou , si l’on veut , ce sabîon fer-i ait rugineux qui se trouve dans la platine , est,! ;s au contraire, inaccessible à la rouille, quel-! agi que long-temps qu’il soit exposé à l’humi-i u, dilé ; il est aussi plus infusible et beaucoup d’ moins dissoluble que le fer ordinaire; mais sa ce n’en est pas moins du fer, qui ne m’a «i paru différer du fer connu que par une plus tfe grande pureté. Ce sablon est en effet dirai fer absolument dépouillé de toutes les par- lie, ties combustibles, salines , et terreuses , qui sti se trouvent dans le fer ordinaire , et même al; dans l’acier: il paroît enduit et recouvert! lit d’un vernis vitreux qui le défend de toute es1 altération. Et ce qu’il y a de très-remar- ms quable, c’est que ce sablon de fer purn’ap- cc partient pas exclusivement, à beaucoup près,i anc à la mine de platine; j’en ai trouvé, quoi-; ce que toujours en petite quantité , dans piu-jicd sieurs endroits où l’on a fouillé les mines de si fer qui se consomment à mes forges. Comme i jm je suis dans l’usage de soumettre à plusieurs se épreuves toutes les mines que je fais expie# ter , avant de me déterminer à les faire tra- in vailler en grand pour l’usage de mes four- tua neaux,je fus assez surpris de voir que, dans Jrai quelques-unes de ces mines, qui toutes sont; ® en grains , et dont aucune n’est attirable par t, l’aimant, il se trouvoit néanmoins des parti-; jfsj cules de fer un peu arrondies et luisantes; m comme de la limaille de fer, et tôut-à-fait semblables au sablon ferrugineux de la pla- 4 tine ; elles sont tout aussi magnétiques , tout ^ aussi peu fusibles, tout aussi difficilement ,if PARTIE EXPÉRIMENTALE. 3g5 solubles. Tel fut le résultat de la compa- ison que je fis du sablon de la platiné , et ce sablon trouvé dans deux de mes mines ter, à trois pieds de profondeur, dans s terrains où l’eau pénètre assez facile- uit : j’avois peine à concevoir d’où pou- ient provenir ces particules de fer ; cont- int elles avoient pu se défendre de la tille depuis des siècles qu’elles sont expo- îs à l’humidité de la terre; enfin cont- int ce fer très-magnétique pouvoit avoir ; produit dans des veines de mines qui ne sont point du tout. J’ai appelé l’expérience non secours, et je me suis assez éclairé • tous ces points pour être satisfait. Je sa- is , par un grand nombre d’observations , ’aucune de nos mines de fer en grains est altirable par l’aimant : j’étois bien per- adé’, comme je le suis encore , que toutes mines de fer, qui sont magnétiques, mt acquis cette propriété que par l’action feu; que les mines du Nord, qui sont ez magnétiques pour qu’on les cherche ec la boussole , doivent leur origine à l’é- nent du feu , tandis que toutes nos mi- s en grains , qui ne sont point du tout ignétiqùès, n’ont jamais subi l’action du i , et n’ont été formées que par le moyen l’intermède de l’eau. Je pensai donc que sablon ferrugineux et magnétique que je mvois en petite quantité dans mes naines fer , devoit son origine au feu ; et, ayant 'aminé le local , je me confirmai dans cette èe. Le terrain où se trouve ce sablon ma- étique est en bois, de temps immémo- ii 1 ; on y a fait très-anciennement et on y i: t tous les jours des fourneaux de charbon : iiil est aussi plus que probable qu’il y a eu iir jns ces bois des incendies considérables, aj ! charbon et le bois brûlé , surtout en ; ande quantité, produisent du mâchefer, iiij !ce mâchefer renferme la partie la plus à h du fer que contiennent les végétaux ; à ist ce fer fixe qui forme le sablon dont il ut [ question , lorsque le mâchefer se décom- ii |se par faction de l’air , du soleil et des loi aies; car alors ces particules de fer pur, a i ne sont point sujettes à la rouille ni à mt jeune autre espèce d’altération, se laissent s traîner par l’eau, et pénètrent dans la mi rre avec elle à quelques pieds de profon- |U |ur. On pourra vérifier ce que j’avance ici, ili faisant broyer du mâchefer bien brûlé ; iK j y trouvera toujours une petite quantité lui ce fer pur , qui , ayant résisté à l’action jili feu , résiste également à celle des dissol- us , et ne donne point de prise à la rouille x. i i. J’ai reconnu, dans le Cabinet d’Iiistoire na- M’étant satisfait sur ce point, et après avoir comparé le sablon tiré de mes mines de fer et du mâchefer avec celui de la pla- tine assez pour ne pouvoir douter de leur identité, je ne fus pas long-temps à penser, vu la pesanteur spécifique de la platine , que si ce sablon de fer pur, provenant de la composition du mâchefer , au lieu d’être dans une mine de fer, se trouvoit dans le voisinage d’une mine d’or , il auroit , en s’u- nissant à ce dernier métal, formé un al- liage qui seroit absolument de la même na- ture que la platine. On sait que l’or et le fer ont un degré d’affinité ; on sait que la plu- part des mines de fer contiennent une pe- tite quantité d’or ; on sait donner à l’or la teinture, la couleur, et même l’aigre du fer, en les faisant fondre ensemble : on emploie cet or couleur de fer sur différens bijoux d’or, pour en varier les couleurs ; et cet or, mêlé de fer, est plus ou moins gris et plus ou moins aigre , suivant la quantité de fer qui entre dans le mélange. J’en ai vu d’une teinte absolument semblable à la couleur de la platine. Ayant demandé à un orfèvre quelle étoit la proportion de l’or et du fer dans ce mélange, qui étoit de la couleur de la platine, il me dit que l’or de vingt-quatre karats n’étoit plus qu’à dix huit karats, et qu’il y entroit un quart de fer. On verra que c’est à peu près la proportion qui se trouve dans la platine naturelle , si l’on en juge par la pesanteur spécifique. Cet or mêlé de fer est plus dur , plus aigre , et spécifiquement moins pesant que l’or pur. Toutes ces con- venances, toutes ces qualités communes avec la platine, m’onl persuadé que ce prétendu métal n’est, dans le vrai, qu’un alliage d'or et de fer , et non pas une substance particu- lière, un métal nouveau, parfait, et diffé- turelle , des sablons ferrugineux de même espèce que celui de mes mines , qui m’ont été envoyés cîe différens endroits , et qui sont également magné- tiques. On en trouve à Quimper en Bretagne , en Danemarck, en Sibérie, à Saint-Domingue ; et les ayant tous comparés , j’ai vu que le sablon ferru- gineux de Quimper étoit celui qui ressembloit le plus au mien, et qu’il n’en différoit que par un peu plus de pesanteur spécifique. Celui de Saint- Domingue est plus léger, celui de Danemarck est moins pur et plus mélangé de terre, et celui de Sibérie est en masse et en morceaux gros comme le pouce, solides, pesans , et que l’aimant soulève à peu près comme si c’étoit une masse de fer pur. On peut donc présumer que ces sablons magnétiques provenant du mâchefer se trouvent aussi communé- ment que le mâchefer même, mais seulement en bien plus petite quantité. Il est rare qu’on en trouve des amas un peu considérables , et c’est par cette raison qu’ils ont échappé, pour la plupart, aux recherches des minéralogistes. 3q6 MINERAUX. INTRODUCTION. rent de tons les autres métaux, comme les chimistes font avancé. On peut d’ailleurs se rappeler que l’alliage aigrit tous les métaux, et que quand il y a pénétration , c’est-à-dire augmentation dans la pesanteur spécifique, l’alliage en est d’au- tant plus aigre que la pénétration est plus grande, et le mélange devenu plus intime, comme on le reconnoît dans l’alliage appelé métal des cloches, quoiqu’il soit composé de deux métaux très-ductiles. Or, rien n’est plus aigre ni plus pesant que la platine : cela seul auroit dû faire soupçonner que ce n’est qu’un alliage fait par la nature , un mélange de fer et d’or, qui doit sa pesanteur spéci- fique en partie à ce dernier métal , et peut- être aussi en grande partie à la pénétration des deux matières dont il est composé. Néanmoins cette pesanteur spécifique de la platine n’est pas aussi grande que nos chi- mistes l’ont publié. Comme cette matière , traitée seule et sans addition de fondans , est très-difficile à réduire en masse, qu’on n’en peut obtenir au feu du miroir brûlant que de très-petites masses, et que les expériences hydrostatiqués faites sur de petits volumes sont si défectueuses qu’on n’en peut rien conclure , il me paroît qu’on s’est trompé sur l’estimation de la pesanteur spécifique de ce minéral. J’ai mis de la poudre d’or dans un petit tuyau de plume que j'ai pesé très- exactement : j’ai mis dans le même tuyau un égal volume de platine ; il pesoit près d’un dixième de moins : mais cette poudre d’or étoit beaucoup trop fine en comparaison de la platine. M. Til'et, qui joint à une con- noissance approfondie des métaux le talent rare de faire des expériences avec la plus grande précision , a bien voulu répéter, à ma prière, celle de la pesanteur spécifique de la platine comparée à l’or pur. Pour cela, il s’est servi , comme moi , d’un tuyau de plume , et il a fait couper à la cisaille de l’or à vingt-quatre karats , réduit autant qu’il étoit possible à la grosseur des grains de la platine , et il a trouvé, par huit expériences, que la pesanteur de la platine différoit de celle de l’or pur d’un quinzième à très-peu près ; mais nous avons observé tous deux que les grains d’or coupés à la cisaille avoient les angles beaucoup plus vifs que la platine. Celle-ci, vue à la loupe, est à peu près de la forme des galets roulés par l’eau ; tous les angles sont émoussés, elle est même douce au toucher, au lieu que les grains de cet or coupés à la cisaille avoient des angles vifs et des pointes tranchantes, en sorte qu’ils ne pouvoient pas s’ajuster ni s’entasser les uns sur les autres aussi aisément que ceux de 1 i , platine; tandis qu’au contraire la poudre d’o , L dont je me suis servi étoit de l’or en paii î : lettes , telle que les arpailleurs les trouver ( t dans le sable des rivières. Ces paillettes s’a , justent beaucoup mieux les unes contre le L autres. J’ai trouvé environ un dixième d différence entre le poids spécifique de cckj paillettes et celui de la platine : néanmoir L ces paillettes ne sont pas ordinairement d’c § pur, il s’en faut souvent plus de deux oh trois karats ; ce qui en doit diminuer e ^ même rapport la pesanteur spécifique. Ains u tout bien considéré et comparé, nous avor e cru qu’on pouvoit maintenir le résultat d ,t mes expériences, et assurer que la platin ^ en grains, et telle que la nature la produit jj, est au moins d’un onzième ou d’un doin y|, zième moins pesante que l’or. Il y a tou' L apparence que cette erreur de fait sur la dei Cl sité de la platine vient de ce qu’on ne l’aui ia pas pesée dans son état de nature , mais sets ra lement après l’avoir réduite en masse; i jei comme cette fusion ne peut se faire quepc!lt)ll l’addition d’autres matières et à un feu trè. ,llf violent, ce n’est plus de la platine pure, ma aiI un composé dans lequel sont entrées des mi j. lières fondantes, et duquel le feu a enlev j|j les parties les plus légères. ^ Ainsi la platine, au lieu d’être d’une deii, ]aj sité égale ou presque égale à celle de l’or pu j comme l’ont avancé les auteurs qui en oi écrit , n’est que d’une densité moyenne enti ïe celle de l’or et celle du fer, et seulemei ir plus voisine de celle de ce premier métal qi j de celle du dernier. Supposant donc que ! ro] pied cube d'or pèse treize cent vingt-six 1 ^ vres, et celui du fer pur cinq cent quatre ^ vingts livres, celui de la platine en grains ! ! * trouvera peser environ onze cent quatri ^ vingt -quatorze livres; ce qui supposero jr] plus des trois quarts d’or sur un quart cia fer dans cet alliage, s’il n’y a pas de pén 1M tration: mais comme on en tire six septiem )a( à l’aimant, on pourroit croire que le fer r] est en quantité de plus d’un quart, d’autai r plus qu’en s’obstinant à cette expérience,, k suis persuadé qu’on viendrait à bout d’ei L lever, avec un fort aimant , toute la platii ^ jusqu’au dernier grain. Néanmoins on n’|j m doit pas conclure que le fer y soit conter en si grande quantité ; car lorsqu’on le mê j ^ par la fonte avec l’or, la masse qui résulte t, cet alliage est attirable par l’aimant , quoiqi t|c le fer n’y soit qu’en petite quantité. J’ai Y ^ entre les mains de M. Baumé un bouton (, ^ cet alliage pesant soixante-six grains , dai ^ lequel il n’étoit entré que six grains , c’est- PARTIE EXPÉRIMENTALE.’ 397 re un onzième de fer; et ce bouton se lais- it enlever aisément par un bon aimant. îs lors la platine pourroit bien ne contenir ’un onzième de fer sur dix onzièmes d’or, donner néanmoins tous les mêmes phéno- irnes , c’est-à-dire être attirée en entier par imant , et cela s’accorderoit parfaitement ec la pesanteur spécifique, qui est d’un i dème ou d’un douzième moindre que celle l’or. Mais ce qui me fait présumer que la pla- Le contienl plus d’un onzième de fer sur dix zièmes d’or, c’est que l’alliage qui résulte cette proportion est encore couleur d’or beaucoup plus jaune que ne l’est la pla- ie la plus colorée, et qu’il faut un quart fer sur trois quarts d’or pour que l’alliage précisément la couleur naturelle de la pla- ^e. Je suis donc très-porté à croire qu’il mrroit bien y avoir cette quantité d’un tart de fer dans la platine. Nous nous nmes assurés, M. Tillet et moi, par plu- urs expériences, que le sablon de ce fer ir que contient la platine est plus pesant e la limaille de fer ordinaire. Ainsi cette use ajoutée à l’effet de la pénétration suf- pour rendre raison de cette grande quan- é de fer contenue sous le petit volume in- qué par la pesanteur spécifique de la atine. Au reste, il est très-possible que je me bmpe dans quelques-unes des conséquences e j’ai cru devoir tirer de mes observations r cette substance métallique : je n’ai pas |é à portée d'en faire un examen aussi ap- ofondi que je l’aurois voulu ; ce que j’en s n’est que ce que j’ai vu , et pourra peut- re servir à faire voir mieux. Comme j’étois sur le point de livrer ces Juilles à l’impression, le hasard fit que je }rlai de mes idées sur la platine à M. le mte de Milly , qui a beaucoup de connois- pces en physique et en chimie : il me ré- ;>ndit qu’il pensait à peu près comme moi r la nature de ce minéral. Je lui donnai ] mémoire ci-dessus pour l’examiner, et ux jours après il eut la bonté de m’en- yer les observations suivantes, que je crois issi bonnes que les miennes, et qu’il m’a jrmis de publier ensemble. «J’ai pesé exactement trente-six grains de atine; je l’ai étendue sur une feuille de jtpier blanc , pour pouvoir mieux l’observer rèc une bonne loupe : j’y ai aperçu ou j’ai u y apercevoir très-distinctement trois sub- tances différentes ; la première avoit le bril- nt métallique, elle éloit la plus abondante; seconde, vitriforme, tirant sur le noir, ressemble assez à une matière métallique ferrugineuse qui auroit subi un degré de feu considérable , telle que des scories de fer ap- pelées vulgairement mâchefer; la troisième, moins abondante que les deux premières, est du sable de toutes couleurs, où cependant le jaune , couleur de topaze , domine. Cha- que grain de sable , considéré à part , offre à la vue des cristaux réguliers de différentes couleurs; j’en ai remarqué de cristallisés en aiguilles hexagones, se terminant en pyra- mides comme le cristal de roche, et il m’a semblé que ce sable n’étoil qu’un détritus de cristaux de roche ou de quartz de diffé- rentes couleurs. « Je formai le projet de séparer, le plus exactement possible , ces différentes sub- stances par le moyen de l’aimant , et de mettre à part la partie la plus attirable à l’aimant , d’avec celle qui l’étoit moins, et enfin de celle qui ne letoit point du tout; ensuite d’examiner chaque substance en par- ticulier, et de les soumettre à différentes épreuves chimiques et mécaniques. « Je mis à part les parties de la platine qui furent attirées avec vivacité à la distance de deux ou trois lignes , c’est-à-dire sans le con- tact de l’aimant, et je me servis , pour cette expérience , d’un bon aimant factice de M. l’abbé....; ensuite je touchai avec ce même aimant le métal, et j’en enlevai tout ce qui voulut céder à l’effort magnétique, que je mis à part : je pesai ce qui étoit resté et qui n’étoit presque plus attirable ; cette matière non attirable, et que je nom- merai n°4, pesoit vingt-trois grains; n° ier, qui étoit le plus sensible à l’aimant , pesoit quatre grains; n° 2 pesoit de même quatre grains , et n° 3 cinq grains. « N° ier, examiné à la loupe, n’offroit à la vue qu’un mélange de parties métalliques, d’un blanc sale tirant sur le gris , aplaties et arrondies en forme de galets et de sable noir vitriforme, ressemblant à du mâche- fer pilé, dans lequel on aperçoit des parties très-rouillées , enfin telles que les scories de fer en présentent lorsqu’elles ont été exposées à l’humidité. « N° 2 présentoit à -peu près la même chose, à l’exception que les parties métal- liques dominoient, et qu’il n’y en avoit que très-peu de rouillées. « N° 3 étoit la même chose : mais les par- ties métalliques étoient plus volumineuses ; elles ressembloient à du métal fondu , et qui a été jeté dans l’eau pour le diviser en grenailles ; elles sont aplaties ; elles affectent toutes sortes de figures, mais arrondies sur 39g Minéraux, introduction. les bords à la manière des galets qui ont été roulés et polis par les eaux. « N° 4 , qui n’avoit point été enlevé par l’aimant, mais dont quelques parties don- noient encore des marques de sensibilité au magnétisme lorsqu’on passoit l’aimant sous le papier où elles étoient étendues, étoit un mélange de sable, de parties métalliques et de vrai mâchefer friable sous les doigts, qui noircissoit à la manière du mâchefer ordinaire. Le sable sembloit être composé de petits cristaux de topaze, de cornaline, et de cristal de roche ; j’en écrasai quelques cristaux sur un tas d’acier, et la poudre qui en résulta étoit comme du vernis réduit en poudre. Je fis la même chose au mâche- fer : il s’écrasa avec la plus grande facilité , et il m’offrit une poudre noire ferrugineuse, qui noircissoit le papier comme le mâchefer ordinaire. « Les parties métalliques de ce dernier (n° 4) me parurent plus ductiles sous le marteau que celles du n° ier, ce qui me fit croire qu’elles contenoient moins de fer que les premières ; d’où il s’ensuit que la platine pourroit fort bien n’être qu’un mélange de fer et d’or fait par la nature, ou peut-être de la main des hommes , comme je le dirai par la suite. « Je tâcherai d’examiner, par tous les moyens qui me seront possibles, la nature de la platine, si je peux en avoir à ma disposition en suffisante quantité; en atten- dant, voici les expériences que j’ai faites. « Pour m’assurer de la présence du fer dans la platine par des moyens chimiques, je pris les deux extrêmes, c’est-à-dire n° ier, qui étoit très-attirable à l’aimant , et n° 4 , qui ne l’étoit pas; je les arrosai avec l’esprit de nitre un peu fumant : j’observai avec la loupe ce qui en résulterait ; mais je n’y aperçus aucun mouvement d’effervescence. J’y ajoutai de l’eau distillée, et il ne se fit encore aucun mouvement ; mais les parties métalliques se décapèrent, et elles prirent lin nouveau brillant semblable à celui de ’argent. J’ai laissé ce mélange tranquille pendant cinq ou six minutes, et ayant en- core ajouté de l’eau , j’y laissai tomber quelques gouttes de la liqueur alcaline sa- turée de la matière colorante du bleu de Prusse, et sur-le-champ le n° ier me donna un très-beau bleu de Prusse. « Le n° 4 ayant été traité de même , et quoiqu’il se fût refusé à l’action de l’aimant et à celle de l’esprit de nitre, me donna, de même que le n° 1e1', du très-beau bleu de Prusse. « Il y a deux choses fort singulières à re marquer dans ces expériences. i° Il pas& pour constant parmi les chimistes qui on traité de la platine, que l’eau-forte ou l’es prit de nitre n’a aucune action sur elle cependant, comme on vient de le voir, i s’en dissout assez , quoique sans efferves cence , pour donner du bleu de Pruss lorsqu’on y ajoute de la liqueur alcalin1 phlogistiquée et saturée de la matière colo 11 rante , qui , comme on sait , précipite le fe « en bleu de Prusse. « 20 La platine, qui n’est pas sensible te l’aimant , n’en contient pas moins du fer ne puisque l’esprit de nitre en dissout assez ai sans occasioner d’effervescence, pour for 1 mer du bleu de Prusse. Ire « D’où il s’ensuit que cette substance qn i les chimistes modernes , peut-être trop avide : i du merveilleux et de vouloir donner, dï 111 nouveau , regardent comme un huitièm 'l métal , pourroit bien n’être , comme je l’ai é dit , qu’un mélange d’or et de fer. |ie « Il reste sans doute bien des expérience .ni à faire pour pouvoir déterminer commeu lu ce mélange a pu avoir lieu; si c’est l’ou J; vrage de la nature, et comment ; ou si c’est tii le produit de quelque volcan, ou simplei oj ment le produit des travaux que les Espa A gnols ont faits dans le Nouveau-Monde pou |enc retirer l’or des mines du Pérou : je ferai nt mention , par la suite , de mes conjecture e là dessus. tr « Si l’on frotte de la platine naturelle su n’ii un linge blanc, elle le noircit comme pour «1 roit le faire le mâchefer ordinaire; ce qu m’a fait soupçonner que ce sont les partie 1 a de fer réduites en mâchefer qui se trouvera id dans la platine, qui donnent cette couleur to et qui ne sont dans cet état que pour avoi l'e éprouvé l’action d’un feu violent. D’ailleurs p ayant examiné une seconde fois de la platin j « avec ma loupe, j’y aperçus différens globule de mercure coulant ; ce qui me fit imagine ) ») que la platine pourroit bien être un produi oi de la main des hommes ; et voici com te ment. Jj id « La platine, à ce qu’on m’a dit, se tir > des mines les plus anciennes du Pérou, qu ni les Espagnols ont exploitées après la con iiu quête du Nouveau-Monde. Dans ces temp s reculés, on ne connoissoit guère que deu: i manières d’extraire l’or des sables qui 1 i contenoient : i° par l’amalgame du mercure la 20 par le départ à sec : on triturait le sabl< #, aurifère avec du mercure ; et lursqu’on ju 1 geoit qu’il s’étoit chargé de la plus grand< , partie de l’or, on rejeloit le sable, qu’oij f PARTIE EXPÉRIMENTALE. Sqq lïïimoit crasse, comme inutile et de nulle leur, « Le départ à sec se faisoit avec aussi u d’intelligence. Pour y vaquer, on coin- înçoit par minéraliser les métaux ann- ées par le moyen du soufre, qui n’a point iction sur l’or, dont la pesanteur spéci- ue est plus grande que celle des autres staux; mais pour faciliter sa précipitation, ajoute du fer en limaille qui s’empare du îfre surabondant, méthode qu’on suit en- re aujourd’hui. La force du. feu vitrifie e partie du fer ; l’autre se combine avec e petite portion d’or, et même d’argent, i le mêle avec les scories , d’où on ne peut retirer que par plusieurs fontes, et sans 'e bien instruit des intermèdes conve- bles que les docimasistes emploient. La imie , qui s’est perfectionnée de nos jours , piie, à la vérité, les moyens de retirer ; or et cet argent en plus grande partie : iis dans le temps où les Espagnols exploi- ent les mines du Pérou , ils ignoroient is doute l’art de traiter les mines avec le is grand profit ; et d’ailleurs ils avoient si grandes richesses à leur disposition , 'ils négligeoient vraisemblablement les >yens qui leur auroient coûté de la peine, 5 soins et du temps. Ainsi il y a appa- ice qu’ils se contentoient d’une première lte, et jetoient les scories comme inutiles, Lsi que le sable qui a voit passé par le meure ; peut-être même ne faisoient-ils ’un tas de ces deux mélanges, qu’ils re- voient comme de nulle valeur. « Ces scories contenoient encore de l’or, aucoup de fer sous différens états , et cela des proportions différentes qui nous sont tonnues, mais qui sont telles peut-être ’elles peuvent avoir donné l’existence à platine. Les globules de mercure que j’ai servés, et les paillettes d’or que j’ai vues itinctement , à l’aide d’une bonne loupe , os la platine que j’ai eue entre les mains, ont fait naître les idées que je viens d'ê- tre sur l’origine de ce métal ; mais je ne donne que comme des conjectures hasar- es : il faudroit, pour en acquérir quelque ûitude, savoir au juste où sont situées les mes de la platine, si elles ont été exploi- ts anciennement, si on la tire d’un terrain î«f» si ce ne sont que des décombres ; quelle profondeur on la trouve, et enfin la main des hommes y est exprimée ou >n. Tout cela pourroit aider à vérifier ou à truire les conjectures que j’ai avancées T. » i. M. le baron de Sickingen , ministre de l’élec- ir Palatin, a dit à M. de Milly avoir actuellement REMARQUES. Ces observations de M. le comte de Milly confirment les miennes dans presque tous les points. La nature est une , et se présente toujours la même à ceux qui la savent ob- server : ainsi l’on ne doit pas être surpris que , sans aucune communication , M. de Milly ait vu les mêmes choses que moi , et qu’il en ait tiré la même conséquence, que la platine n’est point un nouveau métal dif- férent de tous les autres métaux, mais un mélange de fer et d’or. Pour concilier en- core de plus près ses observations avec, les miennes, et pour éclaircir en même temps les doutes qui restent en grand nombre sur l’origine et sur la formation de la platine , j’ai cru devoir ajouter les remarques sui- vantes : i° M. le comte de Milly distingue dans la platine trois espèces de matières, savoir : deux métalliques, et la troisième non mé- tallique, de substance et de forme quartzeuse ou cristalline. Il a observé, comme moi , que des deux matières métalliques , l’une est très-attirable par l’aimant, et que l’autre l’est très-peu ou point du tout. J’ai fait mention de ces deux matières comme lui ; mais je n’ai pas parlé de la troisième , qui n’est pas métallique , parce qu’il n’y en avoit pas ou très-peu dans la platine sur laquelle j’ai fait mes observations. Il y a apparence que la platine dont s’est servi M. de Milly étoit moins pure que la mienne, que j’ai ob- servée avec soin , et dans laquelle je n’ai vu que quelques petits globules transparens comme du verre blanc fondu, qui étoient unis à des particules de platine ou de sablon ferrugineux , et qui se laissoient enlever en- semble par l’aimant. Ces globules transpa- rens étoient en très-petit nombre ; et dans huit onces de platine que j’ai bien regardée et fait regarder à d’autres avec une loupe très-forte, on n’a point aperçu de cristaux réguliers. Il m’a paru, au contraire, que toutes les particules transparentes étoient globuleuses comme du verre fondu, et toutes attachées à des parties métalliques, comme le laitier s’attache au fer lorsqu’on le fond. Néanmoins, comme je ne doutois point du tout de la vérité de l’observation de M. de Milly, qui avoit vu dans sa platine des par- entre les mains deux mémoires qui lui ont été re- mis par M. Kellner, chimiste et métallurgiste , at- taché à M. le prince de Birckenfeld, à Manheim , qui offre à la cour d’Espagne de rendre à peu près autant d’or pesant qu’on lui livrera de platine. MINERAUX. INTRODUCTION. ticules quartzeuses et cristallines de forme régulière et en grand nombre , j’ai cru ne devoir pas me borner à l’examen de la seule platine dont j’ai parlé ci-devant : j’en ai trouvé au Cabinel du Roi , que j’ai examinée avec M. Daubenton , de l’Académie des Sciences, et qui nous a paru à tous deux bien moins pure que la première; et nous y avons en effet remarqué un grand nombre de petits cristaux prismatiques et transpa- rens , les uns couleur de rubis-balais , d’au- tres couleur de topaze , et d’autres enfin parfaitement blancs. Ainsi M. le comte de Milly ne s’étoit point trompé dans son ob- servation ; mais ceci prouve seulement qu’il y a des mines de platine bien plus pures les unes que les autres , et que dans celles qui le sont le plus , il ne se trouve point de ces corps étrangers. M. Daubenton a aussi re- marqué quelques grains aplatis par dessous et renflés par dessus, comme seroit une goutte de métal fondu qui se seroit refroidie sur un plan. J’ai vu très-distinctement un de ces grains hémisphériques, et cela pour- roi t indiquer que la platine est une matière qui a été fondue par le feu : mais il est bien singulier que, dans cette matière fondue par le feu , on trouve de petits cristaux , des to- pazes et des rubis ; et je ne sais si l’on ne doit pas soupçonner de la fraude de la part de ceux qui ont fourni cette platine , et qui, pour en augmenter la quantité, auront pu la mêler avec ces sables cristallins ; car, je le répète, je n’ai point trouvé de ces cristaux dans plus d’une demi-livre de platine que m’a donnée M. le comte d’Angiviller. 2° J’ai trouvé, comme M. de Milly, des paillettes d’or dans la platine; elles sont aisées à reconnoître par leur couleur, et parce qu’elles ne sont point du tout magné- tiques : mais j’avoue que je n’ai pas aperçu les globules de mercure qu’a vus M.de Milly. Je ne veux pas pour cela nier leur existence; seulement il me semble que les paillettes d’or se trouvant avec ces globules de mer- cure dans la même matière , elles seroient bientôt amalgamées , et ne conserveroient pas la couleur jaune de l’or que j’ai remar- quée dans toutes les paillettes d’or que j’ai pu trouver dans une demi-livre de platine r. D’ailleurs les globules transparens dont je viens de parler ressemblent beaucoup à des globules de mercure vif et brillant , en sorte qu’au premier coup d’œil il est aisé de s’y tromper. t. J’ai trouvé depuis dans d’autre platine des paillettes d’or qui n’étoient pas jaunes , mais brunes et même noires comme le sablon ferrugineux de la 3° Il y avoit beaucoup moins de partie jte ternes et rouillées dans ma première platim jii’ que dans celle de M. de Milly; et ce n’es i( pas proprement de la rouille qui couvre 1* m surface de ces particules ferrugineuses , mai lira une substance noire , produite par le feu n et lout-à-fait semblable à celle qui couvre 1 lié surface du fer brûlé : mais ma seconde pla ' se tine, c’est-à-dire celle que j’ai prise au Ca kléj binet du Roi, avoit encore de commun ave L celle de M. le comte de Milly, d’êire mé rei langée de quelques parties ferrugineuses ks qui, sous le marteau, se réduisoient eifctii poussière jaune et avoient tous les caractère [lit de la rouille. Ainsi cette platine du Cabine L du Roi et celle de M. Milly se ressemblai) piis à tous égards, il est vraisemblable qu’elle l)’a sont venues du même endroit et par la mêm voie; je soupçonne même que toutes dëüjjoi ont été sophistiquées et mélangées de préfet de moitié avec des matières étrangères , cri; fi tallines et ferrugineuses rouillées , qui ne s|e trouvent pas dans la platine naturelle. L 4° La production du bleu de Prusse pa U la platine me paroît prouver évidemment i üd présence du fer dans la partie même de 4«> minéral qui est la moins altirable à l’aiman jn et confirmer en même temps ce que jVfc avancé du mélange intime du fer dans sjtd substance. Le décapement de la platine pa jis l’esprit de nitre prouve que, quoiqu’il nHié ait point d’effervescence sensible, cet acid.L ne laisse pas d’agir sur la platine d’une m&g|( nière évidente , et que les auteurs qui oi j f assuré le contraire ont suivi leur routine oi j dinaire, qui consiste à regarder comme nul! ni toute action qui ne produit pas l’efferve [f[ cence. Ces deux expériences de M. de Mil! me paroissent très-importantes; elles s) l’histoire naturelle de ce minéral, et notii, ne pouvons trop exhorter ceux qui sont | ^ portée de l’examiner sur les lieux , de noi j j faire part de leurs observations. En aller | e dant , nous sommes forcés de nous born< j 0 à des conjectures, dont quelques-unes n ® paroissent seulement plus vraisemblabli j ( que les autres. Par exemple , je ne cro fei pas que la platine soit l’ouvrage des hou ! 0 mes ; les Mexicains et les Péruviens savoiei L fondre et travailler l’or avant l’arrivée d< , platine , qui probablement leur ayoit donné cet l! couleur noirâtre. ■< Iti PARTIE EXPERIMENTALE. 4ôi gnoîs , et ils ne connoissoient pas le fer, auroit néanmoins fallu employer, dans épart à sec, en grande quantité. Les ignols eux-mêmes n’ont point établi de neaux à fondre les mines de fer en cette rée, dans les premiers temps qu’ils l’ont tée. Il y a donc toute apparence qu’ils e sont pas servis de limaille de fer pour êpart de l’or, du moins dans les com- cemens de leurs travaux, qui d’ailleurs emontent pas à deux siècles et demi , )s beaucoup trop court pour une pro- ion aussi abondante que celle de la ne, qu’on ne laisse pas de trouver en : grande quantité et dans plusieurs en- ts. Ailleurs , lorsqu’on mêle de l’or avec du I en les faisant fondre ensemble , on peut jurs , par les voies chimiques , les sépa- !t retirer l’or en entier; au lieu que jus- présent les chimistes n’ont pu faire ; séparation dans la platine, ni déter- er la quantité d’or contenue dans ce éral. Cela semble prouver que l’or y est d’une manière plus intime que dans l’al- ; ordinaire, et que le fer y est aussi , me je l’ai dit , dans un état différent de i du fer commun. La platine ne me pa- donc pas être l’ouvrage de l’homme , ; le produit de la nature , et je suis très- é à croire qu’elle doit sa première ori- au feu des volcans. Le fer brûlé , au- qu’il est possible , intimement uni avec par la sublimation ou par la fusion , it avoir produit ce minéral , qui d’abord ît été formé par l’action du feu le plus ;nt, aura ensuite éprouvé les impres- s de l’eau et les frottemens réitérés qui nt donné la forme qu’ils donnent à tous mtres corps , c’est-à-dire celle des galets es angles émoussés. Mais il se pourroit i que l’eau seule eût produit la platine ; en supposant l’or et le fer tous deux sés autant qu’ils peuvent l’être par la i humide , leurs molécules , en se réunis- , auront pu former les grains cjui la posent, et qui, depuis les plus pesans u’aux plus légers, contiennent tous de et du fer. La proposition du chimiste offre de rendre à peu près autant d’or m lui fournira de platine sembleroit in- îer qu’il n’y a en effet qu’un onzième fer sur dix onzièmes d’or dans ce miné- ou peut-être encore moins : mais l’à- -près de ce chimiste est probablement i cinquième ou d’un quart ; et ce seroit ours beaucoup si sa promesse pouvoit éaliser à un quart près. {A de/. Buff. ) Buffoîî. I. * M’étant trouve à Dijon cet été 1773, l’Académie des Sciences et Belles-Lettres de cette ville , dont j’ai l’honneur d’être mem- bre , me parut désirer d’entendre la lecture de mes observations sur la platine. Je m’y prêtai d’autant plus volontiers, que, sur une matière aussi neuve , on ne peut trop s’informer ni consulter assez , et que j’avois lieu d’espérei de tirer quelques lumières d’une compagnie qui rassemble beaucoup de personnes instruites en tous genres. M. de Morveau, avocat- général au parlement de Bourgogne, aussi savant physicien que grand jurisconsulte , prit la résolution de travailler sur la platine. Je lui donnai une portion de celle que j’avois attirée par l’aimant , et une autre portion de celle qui avoit paru in- sensible au magnétisme, en le priant d’ex- poser ce minéral singulier au plus grand feu qu’il lui seroit possible de faire; et, quel- que temps après , il m’a remis les expérien- ces suivantes , qu’il a trouvé bon de joindre ici avec les miennes. Expériences faites par 1\1. de Morveau , en septembre 1773. « M. le comte de Buffon , dans un voyage qu’il a fait à Dijon , cet été 1773 , m’ayant fait remarquer , dans un demi-gros de platine que M. Beaumé m’avoit remis en 1768, des grains en forme de boutons, d’autres plus plats, et quelques-uns noirs et écailleux , et ayant séparé avec l’aimant ceux qui étoient attirables de ceux qui ne donnoient aucun signe sensible de magné- tisme , j’ai essayé de former le bleu de Prusse avec les uns et les autres. J’ai versé de l’acide nitreux fumant sur les parties non attirables , qui pesoient deux grains et demi. Six heures après , j’ai étendu l’acide par de l’eau distillée , et j’y ai versé de la liqueur alcaline, saturée de matière colorante : il n’y a pas eu un atome de bleu; la platine avoit seulement un coup d’œil plus brillant. J’ai pa- reillement versé de l’acide fumant sur les 33 grains r/2 de platine restante, dont partie étoit attirable : la liqueur étendue après le même intervalle de temps, le même alcali prussien en a précipité une fécule bleue , qui couvroit le fond d’un vase assez large. La platine , après cette opération , étoit bien décapée comme la première. Je l’ai lavée et séchée , et j’ai vérifié qu’elle n’avoit perdu qu’un quart de grain, on 1/28^. L’ayant examinée en cet état , j’y ai aperçu, un grain d’un beau jaune, qui s’est trouv», une paillette d’or. 26 402 MINÉRAUX. INTRODUCTION. « M. de Fourcy avoit nouvelle, ment pu- blié que la dissolution d’or étoit aussi pré- cipitée en bleu par l’alcali prussien , et avoit consigné ce fait dans une table d’affinités. Je fus tenté de répéter cette expérience ; je versai en conséquence de la liqueur alcaline phlogistiquée dans de la dissolution d’or de départ , mais la couleur de cette dissolution ne changea pas; ce qui me fait soupçonner que la dissolution d’or employée par M. de Fourcy pouvoit bien n’être pas aussi pure. « Et , dans le même temps , M. le comte de Buffon m’ayant donné une assez grande quantité d’autre platine pour en faire quel- ques essais, j’ai entrepris de la séparer de tous les corps étrangers par une bonne fonte. Yoici la manière dont j’ai procédé, et les résultats que j’ai eus : PREMIÈRE EXPÉRIENCE. « Ayant mis un gros de platine dans une petite Coupelle , sous la moufle du four- neau donné par M. Macqqer dans les Mé- moires de /’ Académie des Sciences , année Ï758 , j’ai soutenu le feu pendant deux heu- res; la moufle' s’est affaissée , les supports avoient coulé : cependant la platine s’est trouvée seulement agglutinée; elle tenoit à la coupelle , et y avoit laissé des taches cou- leur de rouille. La platine étoit alors terne, même un peu noire, et n’avoit pris qu’un quart de grain d’augmentation de poids, quantité bien foible en comparaison de celle que d’autres chimistes ont observée ; ce qui me surprit d’autant plus , que ce gros de platine, ainsi que toutes celles que j’ai em- ployées aux autres expériences , avoit été enle- vé successivement par l’aimant, et faisoit por- tion des six septièmes de 8 onces dont M. de Buffon a parié dans le mémoire ci-dessus. DEUXIÈME EXPÉRIENCE. « Un demi-gras de la même platine, ex- posé au même feu dans une coupelle, s’est aussi agglutiné; elle étoit adhérente à la coupelle, sur laquelle elle avoit laissé des taches de couleur de rouille. L’augmentation de poids s’est trouvée à peu près dans la même proportion , et la surface aussi noire. TROISIÈME EXPÉRIENCE. « J’ai remis ce même demi-gros dans une nouvelle coupelle ; mais, au lieu de moufle, j’ai renversé sur le support un creuset de plomb noir de Passaw. J’av.ois eu l’attention de n’employer pour support que des têts d*a gile pure très-réfractaire; par ce moyen, i pouvois augmenter la violence du feu etpr ™ longer sa durée, sans craindre devoir coul les vaisseaux , ni obstruer l’argile par les so ries. Cet appareil ainsi placé dans le fourneai j’y ai entretenu, pendant quatre heures, i feu de la dernière violence. Lorsque tout L été refroidi , j’ai trouvé le creuset bien co servé , soudé au support. Ayant brisé cgi, soudure vitreuse , j’ai reconnu que rien n’ ’ voit pénétré dans l’intérieur du creuset , la i' paroissoit seulement plus luisant qu’il n’ L toit auparavant. La coupelle avoit conser sa forme et sa position; elle étoit un pi fendillée , mais pas assez pour se laiss pénétrer : aussi le bouton de platine ^ étoit-il pas adhérent ; ce bouton n’étoit ej (r coi’p mi’a^p-lniinfi mais d’une manière hit core qu agglutiné plus serrée que la première fois : les grai ^ étoient moins saillans; la couleur en étc plus claire, le brillant plus métallique; ce qu’il y eut de plus remarquable, c’est qu s’étoit élancé de sa surface pendant l’opér a tion, et probablement dans les premié instans du refroidissement, trois jets IL verre , dont l’un , plus élevé , parfaiteme L sphérique , étoit porté sur un pédicule d’ui ligne de hauteur , de la même matière trai parente et vitreuse. Ce pédicule avoitàpeii un sixième de ligne, tandis que le globu avoit une ligne de diamètre , d’une coule uniforme, avec une légère teinte de roug que ne déroboit rien à sa transparence. D deux autres jets de verre , le plus petit av( un pédicule comme le plus gros , et le moy n’avoit point de pédicule et étoit seuleme attaché à la platine par sa surface extérieur QUATRIÈME EXPÉRIENCE. « J’ai essayé de coupeller la platine’,’ pour cela j’ai mis dans une coupelle un gr des mêmes grains enlevés par l’aimant , ay deux gros de plomb. Après avoir donné i très-grand feu pendant deux heures , j trouvé dans la coupelle un bouton adhéreu \ couvert d’une croûte jaunâtre et un pi spongieuse, du poids de 2 gro? 12 grain ce qui annonçoit que la platine avoit relei 1 gros 12 grains de plomb. « J’ai remis ce bouton dans une autre co pelle au même fourneau, observant de retourner; il n’a perdu que 12 grains dâ ^ un feu de deux heures : sa couleur et 1 forme avoient très-peu changé. « Je lui ai appliqué ensuite le vent < soufflet , après l’avoir placé dans une no PARTIE EXPERIMENTALE. 4o3 loupelle couverte d’un creuset de Pas- lans la partie inférieure d’un fourneau ion dont j’avois ôté la grille : le bou- jris alors un coup d’œil plus mêlai 11- üujours un peu terne ; et cette fois il [u x8 grains. même bouton ayant été remis dans |neau de M. Macquer, toujours placé ne coupelle couverte d’un creuset de je soutins le feu pendant trois heu- >rès lesquelles je fus obligé de l’arrê- irce que les briques qui servoient de |t avoient entièrement coulé. Le bou- lit devenu de plus en plus métallique : ftroit pourtant à la coupelle; il avoit cette fois 34 grains. Je le jetai dans [nitreux fumant, pour essayer de le il y eut un peu d’effervescence j’ajoutai de l’eau distillée ; le bouton it effectivement deux grains , et j’y fluai 'quelques petits trous, comme îe laisse le départ. le restoit plus que 22 grains de plomb la platine , à en juger par l’excédant [poids. Je commençai à espérer de cette dernière portion de plomb ; et lia, je mis ce bouton dans une cou- fcuve : je disposai le tout comme dans lème expérience; je me servis du iourneau , en observant de dégager lellement la grille, d’entretenir au dans le courant d’air qu’il attiroit , liporation continuelle par le moyen lapsule que je rempîissois d’eau de In temps , et de laisser un moment la '"îtr’ ouverte lorsqu’on venoit de rem- >urneau de charbon. Ces précautions Itèrent tellement l’activité du feu , jloit recharger de dix minutes en lûtes. Je le soutins au même degré quatre heures , et je le laissai re- j'econnus le lendemain que le creuset noir avoit résisté, que les supports que faïencés par les cendres. Je [dans la coupelle un bouton bien lé, nullement adhérent, d’une cou- Itinue et uniforme , approchant plus juleur de l’élain que de tout autre leulement un peu raboteux ; en un gant un gros très-juste , rien de plus, îoins. annonçoit donc que celte platine couvé une fusion parfaite, qu’elle [failement pure ; car, pour supposer cnoil encore du plomb, il faùdroit aussi que ce minéral avoit juste- rdu de sa propre substance autant qu’il avoit retenu de matière étrangère ; et une telle précision ne peut être l’effet d’un pur hasard. « Je devois passer quelques jours avec M. le comte de Buffon, dont la société a, si je puis le dire, le même charme que son style , dont la conversation est aussi pleine que ses livres; je me fis un plaisir de lui por- ter les produits de ces essais, et je remis à les examiner ultérieurement avec lui. « i° Nous avons observé que le gros de platine agglutinée de la première expérience 11’étoit pas attiré en bloc par l’aimant; que cependant le barreau magnétique avoit une action marquée sur les grains que l’on en délachoit. « 20 Le demi-gros de la troisième expé- rience n’étoit non seulement pas attirable en masse , mais les grains que l’on en séparoit ne donnoient plus eux -mêmes aucun signe de magnétisme. « 3° Le bouton de la quatrième expérience étoit aussi absolument insensible à l’approche de l’aimant, ce dont nous nous assurâmes en mettant le bouton en équilibre dans une balance très-sensible, et lui présentant un très-fort aimant jusqu’au contact, sans que son approche ait le moindrement dérangé l’équilibre. « 4° La pesanteur spécifique de ce bouton fut déterminée par une bonne balance hy- drostatique , et , pour plus de sûreté , com- parée à l’or de monnoie et au globe d’or très-pur employé par M. de Buffon à ses belles expériences sur le progrès de la cha- leur; leur densité se trouva avoir les rap- ports suivans avec l’eau dans laquelle ils furent plongés : «Le globe d’or xg i/34 « L’or de monnoie. ... 17 1/2 « Le bouton de platine. i4 2/S « 5° Ce bouton fut porté sur un tas d’a- cier pour essayer sa ductilité. Il soutint fort bien quelques coups de marteau; sa surface devint plane , et même un peu polie dans les endroits frappés; mais il se fendit bientôt après, et il s’en détacha une portion, faisant à peu près le sixième de la totalité ; la frac- ture présenta plusieurs cavités, dont quel- ques-unes , d’environ une ligne de diamètre , avoient la blancheur et le brillant de l’ar- gent; on remarquoit dans d’autres de petites pointes élancées , comme les cristallisations dans les géodes. Le sommet de l’une de ces pointes, vu à la loupe, étoit un globule ab- solument semblable , pour la forme , à celui de la troisième expérience , et aussi de ma- tière vitreuse transparente , autant que son 26 4o4 MINÉRAUX. INTRODUCTION. extrême petitesse permettent d’en juger. Au reste, toutes les parties du bouton étoient compactes, bien liées, et le grain plus fin, plus serré, que celui du meilleur acier après la plus forte trempe, auquel il ressembloit d’ailleurs par la couleur. « 6° Quelques portions de ce boulon ainsi réduites en parcelles à coups de marteau sur le tas d’acier, nous leur avons présenté l’ai- mant, et aucune n’a été attirée ; mais les «ayant encore pulvérisées dans un mortier d’agate, nous avons remarqué que le bar- reau magnétique en enlevoit quelques-unes des plus petites toutes les fois qu’on le posoit immédiatement dessus. « Cette nouvelle apparition du magné- tisme éloit d’autant plus surprenante, que les grains détachés de la niasse agglutinée de la deuxième expérience nous avoient paru avoir perdu eux-mêmes toute sensibilité à l’approche et au contact de l’aimant. Nous reprîmes en conséquence quelques-uns de ces grains ; ils furent de même réduits en poussière dans le mortier d’agate , et nous vîmes bientôt les parties les plus petites s’at- tacher sensiblement au barreau aimanté. U n’est pas possible d’attribuer cet effet au poli de la surface du barreau, ni à aucune autre cause étrangère au magnétisme : un morceau de fer aussi poli, appliqué de la même manière sur les parties de cette pla- tine, n’en a jamais pu enlever une seule. « Par le récit exact de ces expériences et des observations auxquelles elles ont donné lieu, on peut juger de la difficulté de déter- miner la nature de la platine. U est bien certain que celle-ci contenoit quelques par- ties vitrifiables ,. et vitrifiables même sans addition à un grand feu ; il est bien sur que toute platine contient du fer et des parties aliirables : mais si l’alcali prussien ne don- noit jamais du bleu qu’avec les grains que l’aimant a enlevés , il semble qu’on eu pour- roit conclure que ceux qui lui résistent ab- solument sont de la platine pure, qui n’a par elle-même aucune vertu magnétique, et que le fer n’en fait pas partie essentielle. On devoit espérer qu’une fusion aussi avan- cée, une coupellation aussi parfaite, déci- deroient au moins cette question; tout an- nonçoit qu’en effet ces opérations l’avoient dépouillée de toute vertu magnétique en la séparant de tous corps étrangers : mais la dernière observation prouve, d’une manière invincible, que cette propriété magnétique n’y étoit réellement qu’affoiblie, et peut-être masquée ou ensevelie, puisqu'elle a reparu lorsqu’on l’a broyée. » REMARQUES. De ces expériences de M. de Morvt et des observations que nous avons ens g faites ensemble, il résulte : i° Qu’on peut espérer de fondre la ,-t tine sans addition dans nos meilleurs 1 1 neaux, en lui appliquant le feu plusieurs b de suite, parce que les meilleurs creuse jt pourroient résister à l’action d’un feu ; ai violent pendant tout le temps qu’exig j l’opération complète. i r 2° Qu’en la fondant avec le plomb, j coupellant successivement et à plusieur prises , on vient à bout de vitrifier to plomb, et que cette opération pourrait fin la purger d’une partie des matières | j gères qu’elle contient. 3° Qu’en la fondant sans addition paraît se purger elle-même en partie de j tières vitrescibles qu’elle renferme, pui ^ s’élance à sa surface de petit jets de ^ qui forment des masses assez considérai,, et qu’on en peut séparer aisément api|L refroidissement. :lu 4° Qu’en faisant l’expérience du bli.L Prusse avec les grains de platine qukj roissent les plus insensibles à l’aiman r n’est pas toujours sûr d’obtenir de ce comme cela ne manque jamais d’a avec les grains qui ont plus ou moii sensibilité au magnétisme ; mais c< M. de Morveau a fait cette expérienc une très-petite quantité de platine , il s pose de la répéter. «u 5° Il paroit que ni la fusion ni lejL pellation ne peuvent détruire, dans 1 jL, tine, tout le fer dont elle est intime Jse pénétrée : les boulons fondus ou cou paroissent, à la vérité, également inset à l’action de l’aimant; mais les ayant dans un mortier d’agate et sur un tas d nous y avons retrouvé des parties ît tiques d’autant plus abondantes que 1 tine étoit réduite en poudre plus fin premier bouton, dont les grains ne s’é qu’agglutinés, rendit, étant broyé, coup plus de parties magnétiques que cond et le troisième dont les grains a subi une plus forte fusion ; mais néan tous deux, étant broyés , fournirent d< ties magnétiques, en sorte qu’on nt pas douter qu’il n’y ait encore du fe la platine après qu’elle a subi les plus i efforts du feu et Inaction dévorante du dans la coupelle. Ceci semble achever montrer que ce minéral est réellenr PARTIE EXPÉRIMENTALE. 4o5 iiéjige intime d’or et de fer, que jusqu’à i ut l’art n’a pu séparer. Je fis encore, avec JM. de Morveau , U titre observation sur cette platine fon- 1 t ensuite broyée; c’est qu’elle reprend, 1 brisant, précisément la même forme i alets arrondis et aplatis qu’elle avoit • d’être fondue. Tous les grains de cette c e fondue et brisée sont semblables à de la platine naturelle, tant pour la ; que pour la variété de grandeur ; et : paroissent en différer que parce qu’il n’y a que les plus petits qui se laissent en- lever à l’aimant, et en quantité d’autant moindre que la platine a subi plus de feu. Cela paroît prouver aussi que, quoique le feu ait été assez fort non seulement pour brûler et vitrifier, mais même pour chasser au dehors une partie du fer avec les aulres matières vitrescibles qu’il contient, la fusion néanmoins n’est pas aussi complète que celle des autres métaux parfaits , puisqu’en la bri- sant, les grains reprennent la même ligure qu’ils avoient avant la fonte. I^ W\'VV>\'VWVW'IVVV\WV\WWV1.WV%V» wwv\ QUATRIEME MÉMOIRE. t Expériences sur la ténacité et sur la décoynposition du fer. i a vu , dans le premier mémoire , que perd de sa pesanteur à chaque fois le chauffe à un feu violent, et que les :ts chauffés trois fois jusqu’au blanc ont i la douzième partie de leur poids. On ; d’abord porté à croire que cette perte lit être attribuée qu’à la diminution du ne du boulet , par les scories qui se dé- nt de la surface et tombent en petites es ; mais si l’on fait attention que les > boulets, dont par conséquent la sur- ;st plus grande, relativement au volume, ;elle des gros, perdent moins, et que [ros boulets perdent proportionnelle- plus que les petits , on sentira bien a perte totale de poids ne doit pas être lement attribuée à la chute des écailles e détachent de la surface , mais encore ï altération intérieure de toutes les par- le la masse, que le feu violent diminue nd d’autant plus légère qu’il est appli- )lus souvent et plus long-temps en effet , si l’on recueille à chaque fois cailles qui se détachent de la surface des cts, on trouvera que, sur un boulet de uces, qui, par exemple, aura perdu ces par une première chaude , il n’y pas une once de ces écailles détachées , Une expérience familière, et qui semble prom- ue le fer perd de sa masse à mesure qu’on le 'fe, même à un feu très-médiocre, c’est que rs à friser, lorsqu’on les a souvent trempés L’eau pour les refroidir, ne conservent pas le : degré de chaleur au bout d’un temps. 11 ■lève aussi des écailles lorsqu'on les a sou- chauffés et trempés ; ces écailles sont du véri- fer. et que tout le reste de la perte de poids ne peut être attribué qu’à celte altération in- térieure de la substance du fer, qui perd de sa densité à chaque fois qu’on le chauffe; en sorte que si l’on réitérait souvent cette même opération , on réduirait le fer à n’ètre plus qu’une matière friable et légère dont on ne pourrait faire aucun usage : car j’ai remarqué que les boulets, non seulement, avoient perdu de leur poids, c’est-à-dire de leur densité , mais qu’en même temps ils avoient aussi beaucoup perdu de leur soli- dité, c’est-à-dire de cette qualité dont dé- pend la cohérence des parties ; car j’ai vu , en les faisant frapper, qu’on pouvoit les casser d’autant plus aisément qu’ils avoient été chauffés plus souvent et plus long-temps. C’est sans doute parce que l’on ignorait jusqu’eà quel point va cette altération du fer, ou plutôt parce qu’on ne s’en doutoit point du tout, que l’on imagina, il y a quelques années, dans notre artillerie , de chauffer les boulets dont il étoit question de dimi- nuer le volume2. On m’a assuré que le ca- libre des canons nouvellement fondus étant plus étroit que celui des anciens canons , il a fallu diminuer les boulets; que, pour y parvenir, on a fait rougir ces boulets à blanc, afin de les ratisser ensuite plus aisément en les faisant tourner. On m’a ajouté que sou- vent. on est obligé de les faire chauffer cinq, six et même huit et neuf fois pour les ré- duire autant qu’il est nécessaire. Or, il est évident, par mes expériences, que cette a. M. le marquis de Vallière ne s’occupoit point alors clés travaux de l’artillerie. 4o6 MINERAUX. INTRODUCTION. pratique est mauvaise ; car un boulet échauffé à blanc neuf fois doit perdre au moins le quart de son poids , et peut-être les trois quarts de sa solidité. Devenu cassant et fria- ble , il ne peut servir pour faire brèche , puisqu’il se brise contre les murs ; et, devenu léger, il a aussi, pour les pièces de campagne, le grand désavantage de ne pouvoir aller aussi loin que les autres. En général , si l’on veut conserver au fer sa solidité et son nerf, c’est-à-dire sa masse et sa force, il ne faut l’exposer au feu ni plus souvent ni plus long-temps qu’il n’est nécessaire; il suffira, pour la plupart des usages , de le faire rougir sans pousser le feu jusqu’au blanc : ce dernier degré de cha- leur ne manque jamais de le détériorer; et, dans les ouvrages où il importe de lui con- server tout son nerf, comme dans les bandes que l’on forge pour les canons de fusil , il faudroit, s’il étoit possible, ne les chauffer qu’une fois pour les battre, plier et souder par une seule opération; car, quand le fer a acquis sous le marteau toute la force dont il est susceptible, le feu ne fait plus que la diminuer. C’est aux artistes à voir jusqu’à quel point ce métal doit être malléé pour acquérir tout son nerf ; et cela ne seroit pas impossible à déterminer par des expériences. J’en ai fait quelques-unes que je vais rap- porter ici. I. Une boucle de fer de 18 lignes 2/3 de grosseur, c’est-à-dire 348 lignes carrées pour chaque montant de fer, ce qui fait pour le tout 696 lignes carrées de fer, a cassé sous le poids de 28 milliers qui tiroit perpendi- culairement. Cette boucle de fer avoit en- viron 16 pouces de largeur sur i3 pouces de hauteur, et elle étoit , à très-peu près, de la même grosseur partout. Cette boucle a cassé presque au milieu des branches per- pendiculaires , et non pas dans les angles. Si l’on vouloit conclure du grand au petit sur la force du fer par cette expérience , il se trouveroit que chaque ligne carrée de fer, tirée perpendiculairement, 11e pourroit por- ter qu’ environ 40 livres. II. Cependant, ayant mis à l’épreuve un fil de fer d’une ligne un peu forte de dia- mètre , ce morceau de fil de fer a porté , avant de se rompre, 482 livres; et un pareil morceau de fil de fer n’a rompu que sous la charge de 4g5 livres : en sorte qu’il est à présumer qu’une verge carrée d’une ligne de ce même fer auroit porié encore davantage, puisqu’elle auroit contenu quatre segmeus aux quatre coins du carré inscrit au cei j de plus que le fil de fer rond , d’une 1 i de diamètre. Or cette disproportion dans la forc< \ fer en gros et du fer en petit est énorme gros fer que j’avois employé venoit de la f j d’Aisy sous Rougemont ; il étoit sans ne ! à gros grain , et j’ignore de quelle forge 1 , mon fil de fer : mais la différence de la lité du fer, quelque grande qu’on vouli supposer, ne peut pas faire celle qui se tr< : ici dans leur résistance, qui, comme voit, est douze fois moindre dans le J fer que dans le petit. - III. J’ai fait rompre une autre boucle fer de 18 lignes 1/2 de grosseur, du im fer de la forge d’Aisy ; elle ne supports! s même que 28450 livres, et rompit em presque dans le milieu des deux montais ■ IY. J’avois fait faire en même temps n boucle du même fer, que j’avois fait refo 11I pour le partager en deux , en sorte qu’,i iij trouva réduit à une barre de 9 lignes le 18 ; l’ayant mise à l’ épreuve, elle suppc le avant de se rompre, la charge de 1730 I] vres , tandis qu’elle n’auroit dû porter |n au plus que 14 milliers , si elle n’eût pasall forgée une seconde fois. Y. Une autre boucle de fer, de it <1: gnes 3/4 de grosseur, ce qui fait, pour 1 1 ni que montant, à peu près 280 lignes cari : 1 c’est-à-dire 56o, a porté 24600 livres,- j lieu qu’elle n’auroit dû porter que 22 livres , si je ne l’eusse pas fait forger une conde fois. YI. Un cadre de fer delà même quai c’est-à-dire sans nerf et à gros grain , et liant delà même forge d’Aisy, que j’a fait établir pour empêcher l’écartement murs du haut fourneau de mes forges, et avoit 26 pieds d’un côté sur 22 pieds l’autre, ayant cassé par l’effort de la t leur du fourneau dans les deux points lieux des deux plus longs côtés, j’ai vu qu pouvois comparer ce cadre aux boucles 1 expériences précédentes , parce qu’il étoi; même fer, et qu’il a cassé de la même i nière. Or ce fer avoit 2 1 lignes de gros qui fait 441 lignes carrées; et ayant ron comme les boucles aux deux côtés oppos cela fait 882 lignes carrées qui se sont sc rées par l’effort de la chaleur : et cou nous avons trouvé, par les expériences f cédentes, que 696 lignes carrées du me j PARTIE EXPERIMENTALE. 4u trois forges dont on puisse tirer ces fers tour les fileries. La bonne fonte est , à la vérité , la base tout bon fer; mais il arrive souvent que, iar de mauvaises pratiques , on gâte ce bon ’er. Une de ces mauvaises pratiques, la plus énéralement répandue, et qui détruit le dus le nerf et la ténacité du fer, c’est l’u- age où sont les ouvriers de presque toutes es forges, de tremper dans l’eau la pre- mière portion de la pièce qu’ils viennent de travailler , afin de pouvoir la manier et' la reprendre plus promptement. J’ai vu avec quelque surprise la prodigieuse différence qu’occasionne cette trempe , surtout en hiver et lorsque l’eau est froide; non seulement elle rend cassant le meilleur fer, mais même elle en change le grain et en détruit le nerf, au point qu’on n’imagineroit pas que c’est le même fer , si l’on n’en étoit pas convaincu par ses yeux en faisant casser l’autre bout du même barreau , qui, n’ayant point été trempé, conserve son nerf et son grain ordinaire. Cette trempe, en été, fait beaucoup moins de mal, mais en fait toujours un peu; et si l’on veut avoir du fer toujours de la même bonne qualité , il faut absolument proscrire cet usage, ne jamais tremper le fer chaud dans l’eau, et attendre, pour le manier, qu’il se refroidisse à l’air. Il faut que la fonte soit bien bonne pour produire du fer aussi nerveux , aussi tenace que celui' qu’on peut tirer des vieilles fer- railles refondues, non pas en les jetant au fourneau de fusion, mais en les mettant au. feu de l’affinerie. Tous les ans on achète pour mes forges une assez grande quantité de ces vieilles ferrailles, dont, avec un peu de soin, l’on fait d’excellent fer. Mais il y a du choix dans ces ferrailles ; celles qui pro- viennent des rognures de la tôle ou des mor- ceaux cassés du fil de fer, qu’on appelle des riblous , sont les meilleures de toutes , parce qu’elles sont d’un fer plus pur que les autres; on les achète aussi quelque chose de plus ; mais en général ces vieux fers, quoique de qualité médiocre, en produisent de très-bons lorsqu’on sait les traiter. Il ne faut jamais les mêler avec la fonte ; si même il s’en trouve quelques morceaux parmi les ferrailles, il faut les séparer : il faut aussi mettre une cer- taine quantité de crasses dans le foyer, et le feu doit être moins poussé , moins violent que pour le travail du fer en gueuse, sans quoi l’on brùîeroit une grande partie de sa ferraille, qui , lorsqu’elle est bien traitée et de bonne qualité , ne donne qu’un cinquième de déchet , et consomme moins de charbon que le fer de la gueuse. Les crasses qui sor- tent de ces vieux fers, sont en bien moin- dre quantité, et ne conservent pas, à beau- coup près , autant de particules de fer que les autres. Avec des riblous qu’on renvoie des fileries que fournissent mes forges , et des rognures de tôle cisaillées que je fais fa- briquer, j’ai souvent fait du fer qui étoit tout nerf, et dont le déchet n’étoit presque que d’un sixième, tandis que le déchet du fer en gueuse est communément du double, 4ic MINERAUX. INTRODUCTION. c’est-à-dire d’un tiers, et souvent de plus d’un tiers , si l’on veut obtenir du fer d’ex- cellente qualilé. ' M. de Montbeillard , lieutenant-colonel au régiment royal d’artillerie , ayant été chargé, pendant plusieurs années, de l’inspection des manufactures d’armes à Charleville , Mau- beuge et Saint-Étienne, a bien voulu me communiquer un Mémoire qu’il a présenté au ministre, et dans lequel il traite de cette fabrication du fer avec de vieilles ferrailles. Il dit, avec grande raison, «que les fer- railles qui ont beaucoup de surface , et cel- les qui proviennent des vieux fers et clous de chevaux, ou fragmens de petits cylindres, ou carrés tors, ou des anneaux et boucles, toutes pièces qui supposent que le fer qu’on a employé pour les fabriquer étoit souple, liant et susceptible d’être plié, étendu, ou tordu , doivent être préférées et recherchées pour la fabrication des canons de fusil. » On trouve , dans ce même Mémoire de M. de Montbeillard , d’excellentes réflexions sur les moyens de perfectionner les armes à feu, et d’en assurer la résistance par le choix du bon fer et par la manière de le traiter ; l’au- teur rapporte une très-bonne expérience I, qui prouve clairement que les vieilles fer- railles et même les écailles ou exfoliations qui se détachent de la surface du fer, et que bien des gens prennent pour des sco- ries, se soudent ensemble de la manière la plus intime, et que par conséquent le fer qui en provient est d’aussi bonne et peut- être de meilleure qualité qu’aucun autre. Mais en même temps il conviendra avec moi, et il observe même, dans la suite de son Mé- moire, que cet excellent fer ne doit pas être employé seul , par la raison même qu’il est i. Qu’on prenne une barre de fer large de deux à trois pouces, épaisse de deux à trois lignes; qu’on la chauffe au rouge, et qu’avec la panne du marteau on y pratique dans sa longueur une can- nelure ou cavité ; qu’on la plie sur elle-même pour la doubler et corroyer, l’on remplira ensuite la cannelure des écailles ou pailles en question; on lui donnera une chaude douce d’abord en rabattant les bords , pour empêcher qu’elles ne s’échappent , et on battra la barre comme on le pratique pour corroyer le fer, avant de la chauffer au blanc ; on la chauffera ensuite blanche et fondante , et la pièce soudera à meryeille; on la cassera à froid , et l’on n'y verra rien qui annonce que la soudure n’ait été complète et parfaite, et que les parties du fer ne se soient pas pénétrées réciproquement sans laisser aucun espace vide. J’ai fait cette expérience aisée à répéter, qui doit rassurer sur les pailles , soit qu’elles soient plates ou qu’elles aient la forme d'aiguilles , puisqu’elles ne sont autre chose que du fer, comme la barre avec laquelle on les incorpore, où elles ne forment plus qu’une même masse avec elle. trop parfait. Et en effet , un fer qui , sortant de la forge, a toute sa perfeclion, n’est ex- cellent que pour être employé tel qu’il est, ou pour des ouvrages qui ne demandent que des chaudes douces ; car toute chaude vive, toute chaleur à blanc , le dénature : j’en ai fait des épreuves plus que réitérées sur des morceaux de toute grosseur. Le petit fer se 1 dénature un peu moins que le gros ; mais ! tous deux perdent la plus grande partie de leur nerf dès la première chaude à blanc ; [ une seconde chaude pareille change et achève de détruire le nerf; elle altère même la qua- lité du grain, qui, de fin qu’il étoit, devient I grossier et brillant comme celui du fer le plus commun : une troisième chaude rend | 1 ces grains encore plus gros, et laisse déjà I voir entre leurs interstices des parties noi- 1 1 res de matière brûlée. Enfin , en continuant de lui donner des chaudes, on arrive au ! dernier degré de sa décomposition, et on 1 le réduit en une terre morte , qui ne paroît 1 plus contenir de substance métallique, et dont on ne peut faire aucun usage : car cette terre morte n’a pas, comme la plupart J des autres chaux métalliques , la propriété ^ de se revivifier par l’applicalion des matières j 1 combustibles; elle ne contient guère plus M de fer que le mâchefer commun tiré du char- [ f bon des végétaux , au lieu que les chaux des ! 1 autres métaux se revivifient presque en en- ! lier, ou du moins en très-grande partie ; et ! 1 cela achève de démontrer que le fer est une ( matière presque entièrement combustible. ] ( Ce fer que l’on tire, tant de cette terre f* ou chaux de fer, que du mâchefer prove- j1 1 nant du charbon, m’a paru d’une singulière < 1 qualité ; il est très-magnétique et très-infu- \ 5 sible. J’ai trouvé dû petit sable noir aussi f magnétique , aussi indissoluble , et presque f infusible, dans quelques-unes des mines que i e j’ai fait exploiter. Ce sablon ferrugineux et 11 magnétique se trouve mêlé avec les grains P de mine qui ne le sont point du tout, et ^ provient certainement d’une cause tout au- ; e tre. Le feu a produit ce sablon magnétique , |! ^ et l’eau, les grains de mine; et lorsque par M hasard ils se trouvent mélangés, c’est que le £l hasard a fait qu’on a brûlé de grands amas ijj£ de bois , ou qu’on a fait des fourneaux de j i1 charbon sur le terrain qui T'enferme les mi- ;P nés , et que ce sablon ferrugineux, qui n’est que le détriment du mâchefer que l’eau ne P peut ni rouiller ni dissoudre, a pénétré, P par la filtration des eaux, auprès des lits P de mine en grains, qui souvent ne sont I qu’à deux ou trois pieds de profondeur. On P1 a vu, dans le mémoire précédent, que ce U mmAiMA PARTIE EXPÉRIMENTALE. 4n Sablon ferrugineux qui provient du mâche- fer des végétaux , ou si l’on veut , du fer brûlé autant qu’il peut l’être , paroît être le même , à tous égards , que celui qui se trouve dans la platine. Le fer le plus parfait est celui qui n’a pres- que point de grain , et qui est enlièrement d’un nerf de gris cendré. Le fer à nerf noir est encore très-bon, et peut-être est-il pré- férable au premier pour tous les usages où il faut chauffer plus d’une fois ce métal avant de l’employer. Le fer de la troisième qualité, et qui est moitié nerf et moitié grain , est le fer par excellence pour le commerce , parce qu’on peut le chauffer deux ou trois fois sans le dénaturer. Le fer sans nerf , mais à grain fin , sert aussi pour beaucoup d’usages ; mais les fers sans nerf et à gros grain de- vroient être proscrits , et font le plus grand tort dans la société, parce que malheureu- sement ils y sont cent fois plus communs que les autres. Il ne faut qu’un coup d’œil à un homme bien exercé pour connoître la bonne et la mauvaise qualité du fer ; mais les gens qui le font employer, soit dans leurs bâtimens, soit à leurs équipages , ne s’y con- noissent ou n’y regardent pas , et paient sou- vent comme très-bon du fer que le fardeau fait rompre, ou que la rouille détruit en peu de temps. Autant les chaudes vives et poussées jus- qu’au blanc détériorent le fer, autant les chaudes douces, où l’on ne le rougit que couleur de cerise , semblent l’améliorer. C’est par cette raison que les fers destinés à passer à la fenderie ou à la batterie ne de- mandent pas à être fabriqués avec autant de soin que ceux qu’on appelle fers marchands, qui doivent avoir toute leur qualité. Le fer de tirerie fait une classe à part. Il ne peut être trop pur : s’il çôntenoit des parties hé- térogènes, il deviendroit très-cassant aux dernières filières. Or il n’y a d’autre moyen de le rendre pur que de le faire bien suer , en le chauffant la première fois jusqu’au blanc, et le martelant avec autant de force que de précaution , et ensuite en le faisant encore chauffer à blanc , afin d’achever de le dépurer sous le martinet en l’allongeant pour en faire de la verge crénelée. Mais les fers destinés à être refendus pour en faire de la verge ordinaire, des fers aplatis, des languettes pour la tôle , tous les fers , en un mot , qu’on doit passer sous les cylindres , n’exigent pas le même degré de perfection, parce qu’ils s’améliorent au four de la fen- derie, où l’on n’emploie que du bois, et dans lequel tous ces fers ne prennent une chaleur que du second degré, d’un rouge couleur du feu , qui est suffisant pour les amollir, et leur permet de s’aplatir et de s’étendre sous les cylindres , et de se fendre ensuite sous les taillans. Néanmoins, si l’on veut avoir de la verge bien douce, comme celle qui est nécessaire pour les clous à ma- réchal ; si l’on veut des fers aplatis qui aient beaucoup de nerf, comme doivent être ceux qu’on emploie pour les roues, et particulièrement les bandages qu’on fait d’une seule pièce, dans lesquels il faut au moins un tiers de nerf; les fers qu’on livre à la fenderie doivent être de bonne qualité, c’est-à-dire avoir au moins un tiers de nerf ; car j’ai observé que le feu doux du four et la forte compression des cylindres ren- dent , à la vérité , le grain du fer un peu plus fin , et donnent même du nerf h celui qui n’avoit que du grain très-fin , mais ils ne convertissent jamais en nerf le gros grain des fers communs ; en sorte qu’avec du mauvais fer à gros grain on pourra faire de la verge et des fers aplatis dont le grain sera moins gros, mais qui seront toujours trop cassans pour être employés aux usages dont je viens de parler. Il en est de même de la tôle : on ne peut pas employer de trop bonne étoffe pour la faire, et il est bien fâcheux qu’on fasse tout le contraire ; car presque toutes nos tôles en France se font avec du fer commun : elles se rompent en les pliant, et se brûlent ou pourrissent en peu de temps ; tandis que de la tôle faite , comme celle de Suède ou d’Angleterre, avec du bon fer bien nerveux, se tordra cent fois sans rompre , et durera peut-être vingt fois plus que les autres. On en fait à mes forges de toute grandeur et de toute épaisseur ; on en emploie à Paris pour les casseroles et autres pièces de cui- sine , qu’on étame , et qu’on a raison de préférer aux casseroles de cuivre. On a fait avec cette même tôle grand nombre de poêles, de chéneaux, de tuyaux, et j’ai, depuis quatre ans, l’expérience mille fois réitérée qu’elle peut durer, comme je viens de le dire, soit au feu, soit à l’air, beau- coup plus que les tôles communes : mais comme elle est un peu plus chère, le débit en est moindre, et l’on n’en demande que pour certains usages particuliers , auxquels les autres tôles ne pourroient être employées. Lorsqu’on est au fait , comme j’y suis , du commerce des fers, on diroit qu’en France on a fait un pacte général de ne se servir que de ce qu’il y a de plus mauvais en ce genre. MINÉRAUX. INTRODUCTION. 412 Avec du fer nerveux on pourra toujours faire d’excellente tôle, en faisant passer le fer des languettes sous les cylindres de la fenderie. Ceux qui aplatissent ces languettes sous le martinet après les avoir fait chauffer au charbon sont dans un très-mauvais usage : le feu de charbon, poussé par les soufflets, gâte le fer de ces languettes ; celui du four de la fenderie ne fait que le perfectionner. D’ailleurs il en coûte plus de moitié moins pour faire les languettes au cylindre que pour lès faire au martinet ; ici l’intérêt s’accorde avec la théorie de l’art : il n’y a donc que l’ignorance qui puisse entretenir cette pratique, qui néanmoins est la plus générale ; car il y a peut-être sur toutes les tôles qui se fabriquent en France plus des trois quarts dont les languettes ont été faites au martinet. Cela ne peut pas être autre- ment , me dira-t-on ; toutes les batteries n’ont pas à côté d’elles une fenderie et des cylindres montés. Je l’avoue, et c’est ce dont je me plains ; on a tort de permettre ces petits établissements particuliers qui ne subsistent qu’en achetant dans les grosses forges les fers au meilleur marché , c’est-à- dire tous les plus médiocres, pour les fa- briquer ensuite en tôle et en petits fers de la plus mauvaise qualité. Un autre objet fort important sont les fers de charrue : on ne saurait croire com- bien la mauvaise qualité du fer dont on les fabrique fait de tort aux laboureurs ; on leur livre inhumainement des fers qui cassent au moindre effort, et qu’ils sont forcés de renouveler presque aussi souvent que leurs cultures : on leur fait payer bien cher du mauvais acier dont on arme la pointe de ces fers encore plus mauvais , êt le tout est perdu pour eux au bout d’un an, et souvent en moins de temps ; tandis qu’en employant pour ces fers de charrue, comme pour la tôle, le fer le meilleur et le plus nerveux, on pourrait les garantir pour un usage de vingt ans , et même se dispenser d’en aciérer la pointe ; car j’ai fait faire plusieurs cen- taines de ces fers de charrue, dont j’ai fait essayer quelques-uns sans acier, et ils se sont trouvés d’une étoffe assez ferme pour résister au labour. J’ai fait la même expé- rience sur un grand nombre de pioches : c’est la mauvaise qualité de nos fers qui a établi chez les taillandiers l’usage général de mettre de l’acier à ces instrumens de campagne, qui 11’en auraient pas besoin s’ils étoient de bon fer fabriqué avec des languettes passées sous les cylindres. J’avoue qu’il y a de certains usages pour lesquels on pourrait fabriquer du fer aigre ; mais encore ne faut-il pas qu’il soit à trop f gros grain ni trop cassant : les clous pour il les petites lattes à tuile, les broquettes, et f autres petits clous , plient lorsqu’ils sont 1 faits d’un fer trop doux ; mais à l’exception 1 1 de ce seul emploi , qu’on ne remplira tou- ; i jours que trop, je ne vois pas qu’on doive se servir de fer aigre. Et si, dans une bonne ! 1 manufacture, on en veut faire une certaine i ! quantité, rien n’est plus aisé; il ne faut ) qu’augmenter d’une mesure ou d’une mesure ■ s et demie de mine au fourneau , et mettre tà j < part les gueuses qui en proviendront ; la h fonte en sera moins bonne et plus blanche. ■ On les fera forger à part , en ne donnant que deux chaudes à chaque bande, et l’on | ' aura du fer aigre qui se fendra plus aisément i que l’autre , et qui donnera de la verge * [ : cassante. Le meilleur fer, c’est-à-dire celui qui a le j plus de nerf, et par conséquent le plus de ténacité , peut éprouver cent et deux cents I coups de masse sans se rompre ; et comme ; il faut néanmoins le casser pour les usages j | de la fenderie et de la batterie, et que cela j demanderait beaucoup de temps, même en j s’aidant du ciseau d’acier, il vaut mieux j faire couper sous le marteau de la forge les barres encore chaudes à moitié de leur épaisseur : cela n’empêche pas le marteleur de les achever, et épargne beaucoup de ■ temps au fend'e'ur et au platineur. Tout le fer que j’ai fait casser à froid et à grands j coups de masse s’échauffe d’autant plus : qu’il est plus fortement et plus souvent frappé ; non seulement il s’échauffe au point de brûlei très-vivement , mais il s’aimante j comme s’il eût été frappé sur un très-bon j aimant. M’étant assuré de la constance de I cet effet par plusieurs observations succes- sives, je voulus voir si, sans percussion, je pourrais de même produire dans le fer la I vertu magnétique. Je fis prendre pour cela i une verge de trois lignes de grosseur de mon fer le plus liant, et que je connoissois ! pour être très-difficile à rompre ; et l’ayant fait plier et replier, par les mains d’un ! homme fort , sept ou huit fois de suite sans I pouvoir la rompre, je trouvai le fer très- chaud au point où on l’avait plié, et il avoit | en même temps toute la vertu d’un barreau 1 bien aimanté. J’aurai occasion dans la suite j de revenir à ce phénomène , qui tient de très-près à la théorie du magnétisme et de ! l’électricité , et que je ne rapporte ici que | pour démontrer que plus une matière est j tenace, c’est-à-dire plus il faut d’efforts PARTIE EXPERIMENTALE. £i3 pour la diviser, plus elle est près de pro- duire de la chaleur et tous les autres effets qui en peuvent dépendre, et prouver en même temps que la simple pression, produisant le frottement des parties intérieures, équivaut à l’effet de la plus violente percussion. On soude tous les jours le fer avec lui- même ou sur lui-même ; mais il faut la plus grande précaution pour qu’il ne se trouve pas un peu plus foible aux endroits des soudures; car, pour réunir et souder les deux bouts d’une barre, on les chauffe jus- qu’au blanc le plus vif: le fer, dans cet état , est tout prêt à fondre ; il n’y arrive pas sans perdre toute sa ténacité, et par conséquent tout son nerf. Il ne peut donc en reprendre, dans toute cette partie qu’on soude , que par la percussion des marteaux , dont deux ou trois ouvriers font succé- der les coups le plus vite qu’il leur est possible ; mais cette percussion est très- foible et même lente, en comparaison de celle du marteau de la forge, ou même de celle du martinet. Ainsi l’endroit soudé, quelque bonne que soit l’étoffe , n’aura que peu de nerf , et souvent point du tout , si l’on n’a pas bien saisi l’instant où les deux morceaux sont également chauds, et si le mouvement du marteau n’a pas été assez prompt et assez fort pour les bien réunir. Aussi , quand on a des pièces importantes à souder, on fera bien de le faire sous les martinets les plus prompts. La soudure , dans les canons des armes à feu , est une des choses les plus importantes. M. de Montbeillard, dans le Mémoire que j’ai cité ci-dessus , donne de très-bonnes vues sur cet objet, et même des expériences déci- sives. Je crois avec lui que, comme il faut chauffer à blanc nombre de fois la bande ou maquette pour souder le canon dans toute sa longueur , il ne faut pas employer du fer qui seroit au dernier degré de sa perfection, parce qu’il ne pourroit que se détériorer par ces fréquentes chaudes vives; qu’il faut, au contraire, choisir le fer qui, n’étant pas encore aussi épuré qu’il peut l’être, gagnera plutôt de la qualité qu’il n’en perdra par ces nouvelles chaudes. Mais cet article seul demanderoit un grand travail, fait et dirigé par un homme aussi éclairé que M. de Montbeillard ; et l’objet en est d’une si grande importance pour la vie des hommes et pour la gloire de l’État, qu’il mérite la plus grande attention. Le fer se décompose par l’humidité comme par le feu ; il attire l’humide de l’air , s’en pénètre et se rouille , c’est-à-dire se convertit en une espèce de terre sans liai- son, sans cohérence : cette conversion se fait en assez peu de temps dans les fers qui sont de mauvaise qualité ou mal fabriqués ; ceux dont l’étoffe est bonne, et dont les surfaces sont bien lisses ou polies , se dé- fendent plus long-temps : mais tous sont su- jets à cette espèce de mal, qui, delà super- ficie , gagne assez promptement l’intérieur , et détruit avec le temps le corps entier du fer. Dans l’eau il Se conserve beaucoup mieux qu’à l’air ; et quoiqu’on s’aperçoive de son altération par la couleur noire qu’il y prend après un long séjour , il n’est point dénaturé : il peut être forgé ; au lieu que celui qui a été exposé à l’air pendant quel- ques siècles, et que les ouvriers appellent du fer luné, parce qu’ils s’imaginent que la lune le mange , ne peut ni se forger ni ser- vir à rien, à moins qu’on ne le revivifie comme les rouilles et les safrans de mars , ce qui coûte communément plus que le fer ne vaut. C’est en ceci que consiste la différence des deux décompositions du fer. Dans celle qui se fait par le feu , la plus grande partie du fer se brûle et s’exhale en vapeurs comme les autres matières combustibles ; il ne reste qu’un mâchefer qui contient , comme celui du bois, une petite quantité de matière très- attirable par l’aimant, qui est bien du vrai fer, mais qui m’a paru d’une nature singu- lière, et semblable, comme je l’ai dit, au sablon ferrugineux qui se trouve en si grande quantité dans la platine. La décomposition par l'humidité ne diminue pas, à beaucoup près, autant que la combustion, la masse du fer , mais elle en altère toutes les parties au point de leur faire perdre leur vertu ma- gnétique, leur cohérence, et leur couleur métallique. C’est de cette rouille ou terre de fer que sont en grande partie composées les mines en grains : l’eau, après avoir atténué ces particules de rouille et les avoir réduites en molécules sensibles , les charrie et les dépose par filtration dans le sein de la terre, où elles se réunissent en grains par une sorte de cristallisation qui se fait, comme toutes les autres, par l’attraction mutuelle des mo- lécules analogues; et comme cette rouille de fer étoit privée de la vertu magnétique, il n’est pas étonnant que les mines en grains qui en proviennent en soient également dé- pourvues. Ceci me paroîl démontrer d’une manière assez claire, que le magnétisme suppose l’action précédente du feu ; que c’est une qualité particulière que le feu donne au fer, et que l’humidité de l’air lui enlève en le décomposant. 4*4 MINERAUX. INTRODUCTION. Si l’on met dans un vase une grande quan- tité de limaille de fer pure, qui n’a pas encore pris de rouille, et si on la couvre d’eau , on verra, en la laissant sécher, que cette li- maille se réunit par ce seul intermède, au point de faire une masse de fer assez solide pour qu’on ne puisse la casser qu’à coups de masse. Ce n’est donc pas précisément l’eau qui décompose le fer et qui produit la rouille , mais plutôt les sels et les vapeurs sulfureuses de l’air; car on sait que le fer se dissout très-aisément par les acides et par le soufre. En présentant une verge de fer bien rouge à une bille de soufre, le fer coule dans l’instant , et , en le recevant dans l’eau , on obtient des grenailles qui ne sont plus du fer ni même de la fonte ; car j’ai éprouvé qu’on ne pouvoit pas les réunir au feu pour les foi’ger ; c’est une matière qu’on ne peut comparer qu’à la pyrite martiale , dans la- quelle le fer paroîl être également décom- posé par le soufre; et je crois que c’est par cette raison que l’on trouve presque partout à la surface de la terre, et sous les premiers lits de ses couches extérieures, une assez grande quantité de ces pyrites, dont le grain ressemble à celui du mauvais fer, mais qui n’en contiennent qu’une très-petite quantité, mêlée avec beaucoup d’acide vitriolique et plus ou moins de soufre. VWIVXWWVVW V\ WW V\ V\V%\ 1 VX\ VV\WWV\VA\%\\\-VV\V\VVVIVVVVVVV\V\WVIV t\ \V%\lV\VVWV\l'VVt CINQUIEME MEMOIRE. Expériences sur les effets de la chaleur obscure. Pour reconnoître les effets de la chaleur obscure , c’est-à-dire de la chaleur privée de lumière , de flamme , et du feu libre , au- tant qu’il est possible, j’ai fait quelques ex- périences en grand , dont les résultats m’ont paru très-intèressans. PREMIÈRE EXPÉRIENCE. On a commencé , sur la fin d’août 1773 , à mettre des braises ardentes dans le creuset du grand fourneau qui sert à fondre la mine de fer pour couler en gueuses ; ces braises ont achevé de sécher les mortiers , qui étaient faits de glaise mêlée par égale por- tion avec du sable vitrescible. Le fourneau avoit vingt-trois pieds de hauteur. On a jeté par le gueulard ( c’est ainsi qu’on appelle l’ouverture supérieure du fourneau ) les charbons ardens que l’on tiroit des petits fourneaux d’expériences ; on a mis successive- ment une assez grande quantité de ces braises pour remplir le bas du fourneau jusqu’à la cuve ( c’est ainsi qu’on appelle l’endroit de la plus grande capacité du fourneau ) ; ce qui, dans celui-ci, montoit à sept pieds deux pouces de hauteur perpendiculaire depuis le fond du creuset. Par ce moyen , on a commencé de donner au fourneau une cha- leur modérée qui ne s’est pas fait sentir dans la partie la plus élevée. Le 10 septembre on a vidé toutes ces braises réduites en cendres , par l’ouverture du creuset; et lorsqu’il a été bien nettoyé, )K on y a mis quelques charbons ardens, et |( d’autres charbons par dessus , jusqu’à la quantité de six cents livres pesant; ensuite on a laissé prendre le feu ; et le lendemain ; e ir septembre, on a achevé de remplir le fourneau avec quatre mille huit cents livres > de charbon. Ainsi il contient en tout cinq j mille quatre cents livres de charbon, qui y ■ ont été portées en cent trente-cinq cor- beilles, de quarante livres chacune, tare faite. On a laissé pendant ce temps l’entrée du creuset ouverte , et celle de la tuyère bien bouchée , pour empêcher le feu de se com- muniquer aux soufflets. La première im- pression de la grande chaleur produite par le long séjour des braises ardentes et par cette première combustion du charbon, s’est marquée par une petite fente qui s’est faite dans la pierre du fond à l’entrée du creuset, et par une autre fente qui s’est faite dans la pierre de la tympe. Le charbon néanmoins , quoique fort allumé dans le bas, ne l’étoit encore qu’à une très-petite hau- teur, et le fourneau ne donnoit au gueulard qu’assez peu de fumée, ce même jour 11 septembre, à six heures du soir; car cette ouverture supérieure n’éloit pas bou- chée , non plus que l’ouverture du creuset. A neuf heures du soir du même jour, la flamme a percé jusqu’au dessus du four- neau ; et comme elle est devenue très-vive ÊAÏLTIE EXPÉRIMENTALE. 4i5 peu de temps, on a bouché l’ouverture creuset à dix heures du soir. La flamme , oique fort ralentie par celte suppression courant de l’air , s’est soutenue pendant nuit et le jour suivant ; en sorte que le idemain i3 septembre, vers les quatre ures du soir, le charbon avoit baissé d’un u plus de quatre pieds. On a rempli ce vide, :ettemême heure, avec onze corbeilles de arbon , pesant ensemble quatre cent qua- îte livres. Ainsi le fourneau a été chargé tout de cinq mille huit cent quarante li- ;s de charbon. Ensuite on a bouché l’ouverture supé- ure du fourneau avec un large couvercle forte tôle , garni tout autour avec du mor- de glaise et sable mêlé de poudre de irbon , et chargé d’un pied d’épaisseur de te poudre de charbon mouillée. Pendant e l’on bouchoil , on a remarqué que la aime ne laissoit pas de retentir assez for- ment dans l’intérieur du fourneau; mais moins d’une minute la flamme a cessé de entir, et l’on n’entendoit plus aucun bruit murmure ; en sorte qu’on auroit pu pen- que l’air n’ayant point d’accès dans la ité du fourneau, le feu y étoit entière- nt étouffé. On a laissé le fourneau ainsi bouché par- it tant au dessus qu’au dessous, depuis 3 septembre jusqu’au 28 du même mois, st-à-dire pendant quinze jours. J’ai re- rqué pendant ce temps que, quoiqu’il eût point de flamme dans le fourneau , même de feu lumineux, la chaleur ne soit pas d’augmenter et de se communi- er autour de la cavité du fourneau. Le 28 septembre, à dix heures du matin, on lébouché l’ouverture supérieure du four- iu avec précaution , dans la crainte d’être foquépar la vapeur du charbon. J’ai re- rqué, avant de l’ouvrir, que la chaleur avoit ;né jusqu’à quatre pieds et demi dans l’é- sseur du massif qui forme la tour du four- àu. Cette chaleur n’ étoit pas fort grande aux virons de la bure ( c’est ainsi qu’on appelle parlie supérieure du fourneau qui s’élève dessus de son terre-plein ) : mais à me- -e qu’on approchoit de la cavité, les pier- » étoient déjà si fort échauffées , qu’il n’é- t pas possible de les toucher un instant ; mortiers, dans les joints des pierres, [rient en partie brûlés , et il paroissoit que chaleur étoit beaucoup plus grande en- te dans le bas du fourneau ; car lespierres » dessus de la tympe et de la tuyère étoient essivement chaudes dans toute leur épais- 0 jusqu’à quatre ou cinq pieds. Au moment qu’on a débouché le gueu- lard du fourneau , il en est sorti une vapeur suffocante dont il a fallu s’éloigner, et qui n’a pas laissé de faire mal à la tète à la plu- part des assistans. Lorsque cette vapeur a été dissipée, on a mesuré de combien le charbon enfermé et privé d’air courant pen- dant quinze jours avoit diminué , et l’on a trouvé qu’il avoit baissé de quatorze pieds cinq pouces de hauteur; en sorte que le fourneau étoit vide dans toute sa partie su- périeure jusqu’auprès de la cuve. Ensuite j’ai observé la surface de ce char- bon , et j’y ai vu une petite flamme qui ve- noit de naître ; il étoit absolument noir et sans flamme auparavant. En moins d’une heure cette petite flamme bleuâtre est de- venue rouge dans le centre , et s’élevoit alors d’environ deux pieds au dessus du charbon. Une heure après avoir débouché le gueu- lard, j’ai fàit déboucher l’entrée du creuset. La première chose qui s’est présentée à celte ouverture n’a pas été du feu , comme ou auroit pu le présumer, mais des scories provenant du charbon, et qui ressembloient à du mâchefer léger. Ce mâchefer étoit en assez grande quantité, et remplissoit tout l’intérieur du creuset, depuis la tympe à la rustine; et ce qu’il y a de singulier, c’est que, quoiqu’il ne se fût formé que par une grande chaleur , il avoit intercepté cette même chaleur au dessus du creuset, en sorte que les parties de ce mâchefer qui étoient au fond n’étoient, pour ainsi dire, que tièdes; néanmoins elles s’éloient attachées au fond et aux parois du creuset , et elles en avoient réduit en chaux quelques por- tions jusqu’à plus de trois ou quatre pouces de profondeur. J’ai fait tirer ce mâchefer et l’ai fait met- tre à part pour l’examiner ; on a aussi tiré la chaux du creuset et des environs, qui étoit en assez grande quantité. Cette calci- nation, qui s’est faite par ce feu sans flamme, m’a paru provenir en partie de l’action de ces scories du charbon. J’ai pensé que ce feu sourd et sans flamme étoit trop sec ; et je crois que si j’avois mêlé quelque portion de laitier ou de terre vitrescible avec le charbon, cette terre auroit servi d’aliment à la chaleur, et auroit rendu des matières fondantes qui auroient préservé de la calci- nation la surface de l’ouvrage du fourneau. Quoi qu’il en soit , il résulte de cette ex- périence que la chaleur seule, c’est-à-dire la chaleur obscure , renfermée, et privée d’air autant qu’il est possible, produit néan- 4i6 MINÉRAUX. INTRODUCTION. moins, avec le temps, des effets sembla- bles à ceux du feu le plus actif et le plus lumineux. On sait qu’il doit être violent pour calciner la pierre. Ici , c’étoit de toutes lés pierres calcaires la moins calcinabîe, c’est-à-dire là plus résistante au feu, que j’avois. choisie pour faire construire l’ou- vrage et la cheminée de mon fourneau: toute cette pierre d’ailleurs avôit été taillée et posée avec soin ; les plus petits quartiers avoient un pied d’épaisseur , un pied et demi de largeur, sur trois et quatre pieds de longueur ; et dans ce gros volume , la pierre est encore bien plus difficile à calci- ner que quand elle est réduite en moellons. Cependant cette seule chaleur a non seule- ment calciné ces pierres à près d’un demi- pied de profondeur dans la partie la plus étroite et la plus froide du fourneau , mais encore a brûlé en même temps les mortiers faits dé glaise et de sable sans les faire fon- dre ; ce que j’aurois mieux aimé, parce qu’alors les joints de la bâtisse du fourneau se sèroient conservés pleins , au lieu que la chaleur , ayant suivi la route de ces joints, a encore calciné les pierres sur toutes les faces des joints. Mais, pour faire mieux en- tendre les effets de cette chaleur obscure et concentrée , je dois observer : Que le massif du fourneau étant de vingt-huit pieds d’épaisseur de deux faces, et de vingt-quatre pieds d’épaisseur des deux autres faces , et la cavité où étoit contenu le charbon n’ayant que six pieds dans sa plus grande largeur , les murs pleins qui environnent cette cavité avoient. neuf pieds d’épaisseur de maçonnerie à chaux et sable aux parties les moins épaisses ; que par con- séquent on ne peut pas supposer qu’il ait passé de l’air à travers ees murs de neuf pieds ; 20 que cette cavité qui contenoit le charbon , ayant été bouchée en bas , à l’en- droit de la coulée , avec un mortier de glaise mêlé de sable d’un pied d’épaisseur, et à la tuyùre qui n’a que quelques pouces d’ou- verture , avec ce même mortier dont on se sert pour tous les bouchages , il n’est pas à présumer qu’il ait pu entrer de l’air par ces deux ouvertures; 3° c[ue le gueulard du fourneau ayant de même été fermé avec une plaque de forte tôle hitée et recouverte avec le même mortier , sur environ six pou- ces d.’épaisscur , et encore environnée et sur- montée de poussière de charbon mêlée avec ce mortier , sur six autres pouces de hau- teur, tout accès à l’air par celte dernière ouverture étoit interdit. On peut donc as- surer qu’il n’y avoit point d’air circulant dans toute cette cavité , dont la capacité étoit de trois cent trente pieds cubes, et j que l’ayant remplie de cinq mille quatre f cents livres de charbon , le feu étouffé dans cette cavité n’a pu se nourrir que de la pe- tite quantité d’air contenue dans les inter- j, vallès que laissoient entre eux les morceaux de charbon ; et comme cette matière jetée r l’une sur l’autre laisse de très-grands vides, ’ supposons moitié ou même trois quarts , il ! n’y a donc eu dans cette cavité que cent • soixante-cinq ou tout au plus deux cent quarante-huit pieds cubes d’air. Or, le féti [ du fourneau excité par les soufflets, coq- a somme cette quantité d’air en moins d’une demi-minute, et cependant il sembleroit qu’elle a suffi pour entretenir pendant quinze jours la chaleur , et l'augmenter à peu près au même point que celle du fer libre, puisqu’elle a produit la calcination f des pierres à quatre pouces de profondeur F dans le bas , et à plus de deux pieds de pro- ; fondeur dans le milieu et dans toute l’éten* t,£ due du fourneau, ainsi que nous le dirons tout à l’Jiei assez inconeev ure. Comme cela me paroissoi! " iévable , j’ai d’abord pensé qu’il , falloit ajouter à ces deux cent quarante-huit t pieds cubes d’air contenus dans la cavité ( fourneau toute la vapeur de rhuniidité des ^ murs, que la chaleur concentrée n’a pu manqué d’attirer , et de laquelle il n’est guère possible de faire une juste estimation, j. Ce sont là les seuls aliments , soit en air, j)f soit en vapeurs aqueuses , que cette très- i- grande chaleur a consommés pendant quinzt l jours; car il ne se dégage que peu ou poiit ^ d’air du charbon dans sa combustion, quoi J(j qu’il s’en dégage plus d’un tiers du poid: ^ total du bois de chêne bien séché. Cet ail Fixé contenu dans le bois en est chassé: pai . la première opération du feu qui le conver b lit. en charbon; et s’il en reste, ce n’esj f qu’en si petite quantité, qu’on ne peut pa: L la regarder comme le supplément de Fan L qui nianquoit ici à l’entretien du feu. Ains M eette chaleur très-grande , et qui s’est aug- m Calée au point de calciner profondément in| les pierres , n’a été entretenue que par demi ^ cent quarante-huit pieds cubes d’air et pai | les vapeurs de l’humidité des murs ; et quand nous supposerions le produit successif d( celte humidité cent fois plus considérai)!* que le volume d’air contenu dans la cavité du fourneau, cela ne ferait toujours qui vingt-quatre mille huit cents pieds cubes dt vapeurs propres à entretenir la combustion: . ^ quantité que le feu libre et animé par lè< soufflets consommeroit en moins de tien U PARTIE EXPERIMENTALE. nutes , tandis que la chaleur sourde ne consomme qu’en quinze jours. Et ce qu’il est nécessaire d’observer en- c’est que le même t'eu libre et animé -oit consumé en onze ou douze heures trois mille six cents livres de charbon la chaleur obscure n’a consommées ’en quinze jours : elle n’a donc eu que trentième partie de l’aliment du feu libre, isqu’il y a eu trente fois autant de temps ployé à la consommation de la matière nbustible ; et en même temps il y a eu viron sept cent vingt fois moins d’air ou vapeurs employés à cette combustion, anmoins les effets de cette chaleur obs- e ont été les mêmes que ceux du feu re ; car il auroit fallu quinze jours de ce violent et animé pour calciner les pierres même degré qu’elles l’ont été par la cha- i’ seule : ce qui nous démontre , d’une rt , l’immense déperdition de la chaleur squ’elle s’exhale avec les vapeurs et la mme, et d’autre part, les grands effets on peut attendre de sa concentration, , pour mieux dire, de sa coercition, de détention ; car cette chaleur retenue et acentrée ayant produit les mêmes effets e le feu libre et violent , avec trente fois tins de matière combustible et sept cent igt fois moins d’air, et étant supposée en son composée de ces deux aliments , on il en conclure que , dans nos grands four- aux à fondre les mines de fer, il se perd agt-un mille fois plus de chaleur qu’il ne n applique, soit à la mine, soit aux pa- is du fourneau , en sorte qu’on imagine- it que les fourneaux de réverbère , où la aleur est plus concentrée , devroient pro- lire le feu le plus puissant. Cependant j’ai quis la preuve du contraire, nos mines fer ne s’étant pas même agglutinées par feu de réverbère de la glacerie de Rouel- 5 en Bourgogne , tandis qu’elles fondent l moins de douze heures au feu de mes urneaux à soufflets. Cette différence tient i principe que j’ai donné : le feu , par sa tesse ou par son volume , produit des ef- ts tout différents sur certaines substances lies que la mine de fer, tandis que, sur autres substances telles que la pierre cal- fire, il peut en produire de semblables, t fusion est en général une opération ompte, qui doit avoir plus de rapport yec la vitesse du feu que la calcination , i est presque toujours lente , et qui doit ans bien des cas avoir plus de rapport au I olume du feu , ou à son long séjour, qu’à I» xrîto cco vArra îtnv 1 cm. 4*7 vante , que cette même chaleur retenue et concentrée n’a fait aucun effet sur la mine de fer. ■^vitesse. On verra, par l’expérience sui Buffon. T. DEUXIÈME EXPÉRIENCE. Dans ce même fourneau de vingt-trois pieds de hauteur, après avoir fondu de la mine de fer pendant environ quatre mois, je fis couler les dernières gueuses en remplis- sant toujours avec du charbon, mais sans mine , afin d’en tirer toute la matière fon- due ; et quand je me fus assuré qu’il n’en restoit plus , je fis cesser le vent , boucher exactement l’ouverture de la tuyère et celle de la coulée , qu’on maçonna avec de la bri- que et du mortier de glaise mêlé de sable. Ensuite, je fis porter sur le charbon autant de mine qu’il pouvoit en entrer dans le vide qui étoit au dessus du fourneau : il y en en- tra cette première fois vingt-sept mesures de soixante livres , c’est-à-dire seize cent vingt livres , pour affleurer le niveau du gueulard; après quoi je fis boucher cette ouverture avec la même plaque de forte tôle et du mor- tier de glaise et de sable, et encore de la poudre de charbon en grande quantité. On imagine bien quelle immense chaleur je ren- fermois ainsi dans le fourneau : tout le char- bon en étoit allumé du haut en bas lorsque je fis cesser le vent ; toutes les pierres des parois étoient rouges du feu qui les péné- troit depuis quatre mois. Toute cette cha- leur ne pouvoit s’exhaler que par deux pe- tites fentes qui s’étoient faites au mur du fourneau , et que je fis remplir de bon mor- tier, afin de lui ôter encore ces issues. Trois jours après , je fis déboucher le gueulard , et je vis avec quelque surprise, que, mal- gré celte chaleur immense renfermée dans le fourneau, le charbon ardent , quoique com- primé par la mine et chargé de seize cent vingt livres, n’avoit baissé que de seize pou- ces en trois jours ou soixante-douze heures. Je fis sur-le-champ remplir ces seize pouces de vide avec vingt-cinq mesures de mine, pesant ensemble quinze cents livres. Trois jours après , je fis déboucher cette même ouverture du gueulard, et je trouvai le même vide de seize pouces , et par consé- quent la même diminution , ou, si l’on veut, le même affaissement du charbon : je fis remplir de même avee quinze cents livres de mine; ainsi il y en avoit déjà quatre mille six cent vingt livres sur le charbon , qui étoit tout embrasé lorsqu’on avoit commencé de fermer le fourneau. Six jours apx^ès, je fis déboucher le gueulard pour la troisième fois, 4t$ MINÉRAUX. et je trouvai que, pendant ces six jours, le charbon n’avoit baissé que de vingt pouces, en poids et d’environ un vingtième en v< L lume, et cette dernière quantité s’étoit pe; j. due dans les charbons. Ij, U résulte de cette expérience, i° que i ja plus violente chaleur et la plus conceuthjj1 pendant un très-long temps ne peut, sai ei le secours et le renouvellement de Pair, foi l)( dre la mine de fer, ni même le sable vitre j(j cible, tandis qu’une chaleur de même e f] pèce et beaucoup moindre peut calciner to Sl tes les matières calcaires; 2° que le charbc L| pénétré de chaleur ou de feu commence ; ^ diminuer de masse long-temps avant de d I C( minuer de volume, et que ce qu’il perd L premier sont les parties les plus combusl|e| blés qu’il contient; car, en comparant cet U( seconde expérience avec la première, coi k ment se ponrroit-il que la même quantité < charbon se consomme plus vite avec unech ; j leur très-médiocre qu’à une chaleur de ]a derniere violence, toutes deux égale me: J privées d’air , également retenues et couce j trées dans le même vaisseau clos? Dans j première expérience, le charbon, qui, da une cavité presque froide, n’avoit éprou i que la légère impression d’un feu qu’on av( étouffé au moment que la flamme s’ét( ; montrée , avoit néanmoins diminué des dei tiers en quinze jours, tandis que le mèn charbon enflammé autant qu’il pouvoit l’êt par le vent des soufflets , et recevant enco ; PARTIE EXPÉRIMENTALE. 419 chaleur immense des pierres rouges de u dont il étoit environné, n’a pas dimi- ué d’un sixième pendant vingt-deux jours. !ela serait inexplicable si l’on ne faisoit pas tention que, dans le premier cas, le char- 011 avoit toute sa densité et contenoit toutes ;s parties combustibles, au lieu que, dans le îcond cas , où il étoit dans l’état de la plus forte icandescence, toutes ses parties les plus com- ustibles étoient déjà brûlées. Dans la pre- îière expérience, la chaleur, d’abord très- lédiocre, alloit toujours en augmentant, à îesure que la combustion augmenloit et se ommuniquoit de plus en plus à la masse u charbon : dans la seconde expérience , la haleur excessive alloit en diminuant à me- ure que le charbon achevoit de brûler ; et [ 11e pouvoit plus donner autant de chaleur, larce que sa combustion étoit fort avancée u moment qu’on l’avoit enfermé. C’est là a vraie cause de cette différence d’effets, e charbon, dans la première expérience, ontenant toutes ses parties combustibles, irûloit mieux et se consumoit plus vite que :elui de la seconde expérience qui ne con- enoit presque plus de matière combustible, t ne pouvoit augmenter son feu ni même entretenir au même degré que par l’em- irunt de celui des murs du fourneau : c’est >ar cette seule raison que la combustion al- ait toujours en diminuant, et qu’au total elle été beaucoup moindre et plus lente que autre, qui alloit toujours en augmentant, :t qui s’est faite en moins de temps. Lorsque out accès est fermé à l’air, et que les ma- ières renfermées n’en contiennent que peu u point dans leur substance, elles ne se con- umeront pas , quelque violente que soit la îhaleur; mais s’il reste une certaine quan- tité d’air entre les interstices de la matière ombustible, elle se consumera d’autant plus ite et d’autant plus qu’elle pourra fournir Ile-même une plus grande quantité d’air. 0 II résulte encore de ces expériences , que a chaleur la plus violente, dès qu’elle n’est pas nourrie, produit moins d’effet que la plus petite chaleur qui trouve de l’aliment : la première est, pour ainsi dire, une cha- leur morte qui ne se fait sentir que par sa déperdition; l’autre est un feu vivant qui s’accroît à proportion des alimens qu’il con- sume. Pour reconnoître ce que cette chaleur morte , c’est-à-dire cette chaleur dénuée de tout aliment , pouvoit produire , j’ai fait l’ex- périence suivante : TROISIÈME EXPÉRIENCE. Après avoir tiré du fourneau , par l’ou- verture de la coulée , tout le charbon qui y étoit contenu, et l’avoir entièrement vidé de mine et de toute autre matière, je fis maçon- ner de nouveau cette ouverture et boucher avec le plus grand soin celle du gueulard en haut , toutes les pierres des parois du four- neau étant encore excessivement chaudes : l’air ne pouvoit donc entrer dans le fourneau pour le rafraîchir, et la chaleur ne pouvoit en sortir qu’à travers des murs de plus de neuf pieds d’épaisseur ; d’ailleurs il n’y avoit dans sa cavité , qui étoit absolument vide, aucune matière combustible, ni même aucune autre matière. Observant donc ce qui arrive- rait, je m’aperçus que tout l’effet de la châ- le ur se porioit en haut, et que, quoique celte chaleur ne fût pas du feu vivant ou nourri par aucune matière combustible, elle fit rougir en peu de temps la forte plaque de tôle qui couvrait le gueulard ; que cette in- candescence donnée par la chaleur obscure à cette large pièce de ter se communiqua par le contact à toute la masse de poudre de charbon qui recouvrait les mortiers de cette plaque , et enflamma du bois que je fis mettre dessus. Ainsi la seule évaporation de cette chaleur obscure et morte , qui ne pou- voit sortir que des pierres do fourneau , pro- duisit ici le meme effet que le feu vif et nourri. Cetle chaleur tendant toujours en haut et se réunissant toute à l’ouverture du gueulard au dessous de la plaque de fer, la rendit rouge, lumineuse et capable d’en- flammer des matières combustibles: d’01'1 l’on doit conclure qu’en augmentant la masse de la chaleur obscure on peut produire de la lu- mière, de la même manière qu’en augmen- tant la masse de la lumière on produit de la chaleur ; que dès lors ces deux substances sont réciproquement convertibles de l’une en l’autre, et toutes deux nécessaires à l’élément du feu. Lorsqu’on enleva cette plaque de fer qui couvrait l’ouverture supérieure du fourneau, et que la chaleur avoit fait rougir, il en sortit une vapeur légère et qui parut enflammée, mais qui se dissipa dans un instant : j’ob- servai alors les pierres des parois du four- neau, elles me parurent calcinées en très- grande partie et très-profondément : et en effet , ayant laissé refroidir le fourneau pen- dant dix jours, elles se sont trouvées calci- nées jusqu’à deux pieds , et même deux pieds et demi de profondeur; ce qui ne pou- voit provenir que de la chaleur que j’y avois renfermée pour faire mes expériences, at- tendu que, dans les autres fondages, le feu animé par les soufflets n’avoit jamais calciné a7< 4*0 MINÉRAUX. INTRODUCTION les mêmes pierres à plus de huit pouces d’épaisseur dans les endroits où il est le plus vif et seulement à deux ou trois pouces dans tout le reste ; au lieu que toutes les pierres depuis le creuset jusqu’au terre-plein du fourneau , ce qui fait une hauteur de vingt pieds , étoient généralement réduites en chaux d’un pied et demi, de deux pieds, et même de deux pieds et demi d’épaisseur : comme cette chaleur renfermée n’avoit pu trouver d’issue, elle avoit pénétré les pierres bien plus profondément que la chaleur courante. On pourroit tirer de cette expérience les moyens de cuire la pierre et de faire la chaux à moindres frais, c’est-à-dire de diminuer de beaucoup la quantité de bois en se servant d’un fourneau bien fermé au lieu de four- neaux ouverts ; il ne faudrait qu’une petite quantité de charbon pour convenir en chaux, dans moins de quinze jours, toutes les pierres contenues dans le fourneau , et les murs mêmes du fourneau à plus d’un pied d’épais- seur, s’il étoit bien exactement fermé. Dès que le fourneau fut assez refroidi pour permettre anx ouvriers d’y travailler, on fut obligé d’en démolir tout l’intérieur du haut en bas , sur une épaisseur circulaire de qua- tre pieds; on en tira cinquante-quatre muids de chaux, sur laquelle je fis les observations suivantes: i° Toute cette, pierre, dont la calcination s’étoit faite à feu lent et con- centré, n’étoit pas devenue aussi légère que la pierre calcinée à la manière ordinaire ; celle-ci , comme je l’ai dit , perd à très-peu près la moitié de son poids, et celle démon fourneau n’en avoit perdu qn’environ trois huitièmes. 20 Elle ne saisit pas l’eau avec la même avidité que la chaux vive ordinaire : lorsqu’on l’y plonge , elle ne donne d’abord aucun signe de chaleur et d’ébullition ; mais peu après elle se gonfle, se divise et s’élève, en sorte qu’on n’a pas besoin de la remuer comme on remue la chaux vive ordinaire pour l’éteindre. 3° Cette chaux a une sa- veur beaucoup plus âcre que la chaux com- mune ; elle contient par conséquent beau- coup plus d’alcali fixe. 4° Elle est infiniment meilleure, plus liante et plus forte que l’au- tre chaux, et tous les ouvriers n’en emploient qu’environ les deux tiers de l’autre , et assu- rent que le mortier est encore excellent. 5° Cette chaux ne s’éteint à l’air qu’après un temps très-long , tandis qu’il ne faut qu’un jour ou deux pour réduire la chaux vive commune en poudre à l’air libre ; celle-ci résiste à l’impression de l’air pendant un mois ou cinq semaines» fi° Au lieu de se réduire en farine ou en poussière sèchi \ 1 comme la chaux commune, elle conserve sot fr volume; et lorsqu’on la divise en l’écrasant r toute la masse paraît ductile et pénétrée d’un» F humidité grasse et liante, qui ne peut pro ff venir que de l’humide de l’air que la piern fl a puissamment attiré et absorbé pendant le! a cinq semaines de temps employées à son ex* “ tinction. Au reste , la chaux que l’on tir* 1 communément des fourneaux de forge a ir toutes ces mêmes propriétés : ainsi la cha- e leur obscure et lente produit encore ici les ® mêmes effets que le feu le plus vif et le plus r0 violent. J Il sortit de cette démolition de l’intérieui ' du fourneau deux cent trente-deux quartiers S11 de pierres de taille, tous calcinés plus ou moins profondément ; ces quartiers avoient e communément quatre pieds de longueur; la 11 plupart étoient en chaux jusqu’à dix-huit ! a pouces , et les autres à deux pieds , et mêmet e deux pieds et demi ; et cette portion calcinée 6 se séparait aisément du reste de la pierre , e qui étoit saine et même plus dure que quand on l’avoit posée pour bâtir le fourneau. Celte observation m’engagea à faire les ex- £ périences suivantes : 0 QUATRIÈME EXPÉRIENCE. Je fis peser dans l’air et dans l’eau trois morceaux de ces pierres, qui, comme l’on voit , avoient subi la plus grande chaleur qu’elles pussent éprouver sans se réduire en chaux, et j’en comparai la pesanteur spéci- fique avec celle de trois autres morceaux à peu près du même volume , que j’avois fait t prendre dans d’autres quartiers de cette même pierre qui n’avoient point été em- ployés à la construction du fourneau , ni par conséquent chauffés , mais qui avoient été tirés de la même carrière neuf mois aupara- * vant, et qui étoient restés à l’exposition du soleil et de l’air. Je trouvai que la pesanteur spécifique des pierres échauffées à ce grand 1 feu pendant cinq mois avoit augmenté ; 1 qu’elle étoit constamment plus grande que celle de la même pierre non échauffée , d’un 81e sur le premier morceau, d’un 90e sur le second et d’un 85e sur le troisième : donc la pierre chauffée au degré voisin de celui de sa calcination gagne au moins un 86e de masse, au lieu qu’elle en perd trais huitiè- ' mes par la calcination , qui ne suppose qu’un degré de chaleur de plus. Cette différence ; ne peut venir que de ce qu’à un certain de- gré de violente chaleur ou de feu tout l’air et toute l’eau transformés en matière fixe ; PARTIE EXPÉRIMENTALE. 4 21 itériei lartie; ns la pierre reprennent leur première na- re , leur élasticité, leur volatilité, et que s lors ils se dégagent de la pierre et s’élè- nt en vapeurs que le feu enlève et entraîne ec lui : nouvelle preuve que la pierre cal- ii ire est en très-grande partie composée lir fixe et d’eau fixe saisis et transformés matière solide par le filtre animal. Après ces expériences, j’en fis d’autres cette même pierre échauffée à un moin- degré de chaleur, mais pendant un nps aussi long ; je fis détacher pour cela lepl >is morceaux des parois extérieures de la lette de la tuyère , dans un endroit où la aleur étoit à peu près de g5 degrés, parce e le soufre appliqué contre la muraille s’y jjijj'Z [hollissoit et commençoit à fondre, et que * degré de chaleur est à très-peu près celui quel le soufre entre en fusion. Je trouvai, trois épreuves semblables aux précé- ntes , que celte même pierre chauffée à ce gré pendant cinq mois avoit augmenté en santeur spécifique d’un 65e, c’est-à-dire presque un quart de plus que celle qui oit éprouvé le degré de chaleur voisin de ui de la calcination , et je conclus , de le différence , que l’effet de la calcination mmençoit à se préparer dans la pierre qui [oit subi le plus grand feu , au lieu que lie qui n’avoit éprouvé qu’une moindre aleur avoit conservé toutes les parties fixes 'elle y avoit déposées. jPour me satisfaire pleinement sur ce su- , et reconnoître si toutes les pierres cal- res augmentent en pesanteur spécifique r une chaleur constamment et long-temps pliquée , je fis six nouvelles épreuves sur ux autres espèces de pierres. Celle dont ait construit l’intérieur de mon fourneau, qui a servi aux expériences précédentes , ppelle dans le pays pierre à feu , parce 'elle résiste plus à l’action du feu que ates les autres pierres calcaires. Sa sub- nce est composée de petits graviers cal- ires liés ensemble par un ciment pierreux d n’est pas fort dur, et qui laisse quelques terstices vides ; sa pesanteur est néanmoins jus grande que celle des autres pierres cal- ires d’environ un 20e. En ayant éprouvé usieurs morceaux au feu de mes chauffe- il a fallu pour les calciner plus du iuble du temps que celui qu’il falloit pour duire en chaux les autres pierres ; on peut me être assuré que les expériences précé- *ntes ont été faites sur la pierre calcaire la us résistante au feu. Les pierres auxquelles vais la comparer étoient aussi de très- annes pierres calcaires dont 011 fait la plus belle taille pour les bàtimens : l’une a le grain fin et presque aussi serré que celui duf marbre , l’autre a le grain un peu plus gros : mais toutes deux sont compactes et pleines ; toutes deux font de l’excellente chaux grise, plus liante et plus forte que la chaux com- mune , qui est plus blanche. En pesant dans l’air et dans l’eau trois morceaux chauffés et trois autres non chauf- fés de cette première pierre dont le grain étoit le plus fin , j’ai trouvé qu’elle avoit gagné un 56e en pesanteur spécifique, par l’application constante, pendant cinq mois, d’une chaleur d’environ 90 degrés ; ce que j’ai reconnu , parce qu’elle étoit voisine de celle dont j’avois fait casser les morceaux dans la voûte extérieure du fourneau, et que le soufre ne fondoit plus contre ses parois : en ayant donc fait enlever trois morceaux encore chauds pour les peser et les comparer avec d’autres morceaux de la même pierre qui étoient restés exposés à l’air libre, j’ai vu que l’un des morceaux avoit augmenté d’un 60e, le second d’un 62e, le troisième d’un 56e. Ainsi cette pierre à grain très-fin a augmenté en pesanteur spécifique de près d’un tiers de plus que la pierre à feu chauf- fée au degré voisin de celui de la calcina- tion, et aussi d’environ un 7e de plus que cette même pierre à feu chauffée à 95 de- grés, c’est-à-dire à une chaleur à peu près égale. La seconde pierre, dont le grain étoit moins fin , formoit une assise entière de la voûte extérieure du fourneau, et je fus maître de choisir les morceaux dont j’avois besoin pour l’expérience, dans un quartier qui avoit subi pendant le même temps de cinq mois le même degré g5 de chaleur que la pierre à feu : en ayant donc fait casser trois morceaux, et m’étant muni de trois autres qui n’a voient pas été chauffés, je trouvai que l’un de ces morceaux chauffés avoit augmenté d’un 54e, le second d’un 63e et le troisième d’un 66e ; ce qui donne pour la mesure moyenne un 61e d’augmentation en pesanteur spécifique. Il résulte de ces expériences, i° que toute ' pierre calcaire chauffée pendant long-temps acquiert de la masse et devient plus pesante ; cette augmentation ne peut venir que des particules de chaleur qui la pénètrent et s’y unissent par leur longue résidence, et qui dès lors en deviennent partie constituante sous une forme fixe ; 20 que cette augmen- tation de pesanteur spécifique, étant d’un 6 te, ou d’un 56e, ou d’un 65e, ne se trouve varier ici que par la nature des différentes MINÉRAUX. INTRODUCTION. pierres; que celles dont le grain est le plus fin sont celles dont la chaleur augmente le plus la masse , et dans lesquelles les pores étant plus petits, elle se fixe plus aisément et eu plus grande quantité; 3° que la quan- tité de cli deur qui se fixe dans la pierre est encore bien plus grande que ne le désigne ici l’augmentation de la masse ; car la cha- leur, avant de se fixer dans la pierre, a commencé par en chasser toutes les parties humides qu’elle contenoit. On sait qu’en distillant la pierre calcaire dans une cornue bien fermée on tire de l’eau pure jusqu’à concurrence d’un seizième de son poids; mais comme une chaleur de p5 degrés , quoique appliquée pendant cinq mois, pour- roit néanmoins produire à cet égard de moindres effets que le feu violent qu’on ap- plique au vaisseau dans lequel on distille la pierre , réduisons de moitié et même des trois quarts cette quantité d’eau enlevée à la pierre par la chaleur de g5 degrés ; on ne pourra pas disconvenir que la quantité de chaleur qui s’est fixée dans cette pierre ne soit d’abord d'un 60e indiqué par l'augmen- tation de la pesanteur spécifique, et encore d’un 64e pour le quart de la quantité d’eau qu’elle contenoit, et que cette chaleur aura fait sortir; en sorte qu’on peut assurer, sans, craindre de se tromper, que la chaleur qui pénètre dans la pierre lui étant appliquée pendant long-temps, s’y fixe en assez grande quantité pour en augmenter la masse tout au moins d’un 3oe, même dans la supposi- tion qu’elle n’ait chassé pendant ce long temps que le quart de l’eau que la pierre contenoit. CINQUIÈME EXPÉRIENCE. Toutes les pierres calcaires dont la pesan- teur spécifique augmente par la longue ap- plication de la chaleur acquièrent , par cette espèce de dessèchement, plus de dureté qu’elles n’en avofent auparavant. Voulant reconnoitre si cette dureté seroit durable, et si elle ne perdroif pas, avec le temps, non seulement cette qualité, mais celle de l’aug- mentation de densité qu’elles avoient acquise par la chaleur, je fis exposer aux injures de l’air plusieurs parties de trois espèces de pierres qui avoient servi aux expériences précédentes, et qui toutes avoient été plus ou moins chauffées pendant cinq mois. Au bout de quinze jours, pendant lesquels il y avoit eu des piuies , je les fis sonder et frap- per au marteau par Je même ouvrier qui les avoit trouvées très-dures quinze jours aupa- ravant : il reconnut avec moi que la pierre • à feu, qui étoit la plus poreuse, et dont le ? grain étoit le plus gros , n’étoit déjà plus aussi dure, et qu’elle se laissoit travailler \ plus aisément. Mais les deux autres espèces, i1 et surtout celle dont le grain étoit le plus J fin , avoient conservé la même dureté; néaii- ! moins elles la perdirent en moins de six J semaines ; et, les ayant fait alors éprouver à la balance hydrostatique, je reconnus] qu’elles avoient aussi perdu une assez grande l( quantité de la matière fixe que la chaleur y avoit déposée; neanmoins, au bout de plu- sieurs mois , elles étoient toujours spécifi- f quemerit plus pesantes d’un i5oe ou d’un î 160e que celles qui n 'avoient point étéchauf* I1 fées. La différence devenant alors trop diffi- (“ cile à saisir entre ces morceaux et ceux qui ;!t n’avoient pas été chauffés, et qui tous étoient f également exposés à l’air, je fus forcé Se 1" borner là cette expérience; mais je suis per r suadé qu’avec beaucoup de temps ces pierres r .auraient perdu toute leur pesanteur acquise. e Il en est de même de la dureté : après quel- ,e ques mois d'exposition à l’air, les ouvriers r1 les ont traitées tout aussi aisément que le: ; autres pierres de même espèce qui n’avoieni fl point été chauffées. U résulte de cette expérience que les par ticules de chaleur qui se fixent dans la pierri n’y sont, comme je l’ai dit, unies que pat*11 force; que, quoiqu’elle les conserve aprè l1 son entier refroidissement, èt pendant asse; r long-temps , si on la préserve de toute hu es midité , elle les perd néanmoins peu à pet 11"1 par les impressions de l’air et de la pluie r sans doute parce que l’air et l’eau ont plu: |0li d’affinité avec la pierre que les parties de! j\ chaleur qui s’y étoient logées. Cette chaieu ja!| fixe n’est plus active; elle est, pour ains m dire , morte et entièrement passive : dè F lors, bien loin de pouvoir chasser l’hunMr dité, celle-ci la chasse à son tour, et repreni F toutes les places qu’elle lui avoit cédées F Mais, dans d’autres matières qui n-onl pa ^ avec l’eau autant d’affinité que la pierre dàij fe caire, cette chaleur une fois fixée n’y '3§p meure-t-elle pas constamment et à toujours ^ C’est ce que j'ai cherché à constater pa F l’expérience suivante : f Wen SIXIÈME EXPÉRIENCE. J’ai pris plusieurs morceaux de fonte dp fer, que j’ai fait casser dans les gueuses qii i®1 avoient servi plusieurs fois à soutenir BP1 avoient servi plusieurs fois à soutenir le 1 parois de la cheminée de mon fourneau , (j qui par conséquent avoient été chauffée 11 < PARTIE EX PF Ibis fois, pendant quatre ou cinq mois de rite, au degré de chaleur qui calcine la ±rre ; car ces gueuses avoient soutenu les ;rres ou les briques de l’intérieur du irneau , et n’étoient détendues de l’action médiate du feu que par une pierre épaisse trois ou quatre pouces, qui formoit le rnier rang des étalages du fourneau. Ces rnieres pierres , ainsi que toutes les autres Sjnt les étalages étoient construits, s’étoient luites en chaux à chaque fondage, et la i cination avoit toujours pénétré de près « huit pouces dans celles qui étoient expo- , ;s à la plus violente action du feu. Ainsi gueuses qui n étoient recouvertes que de (j atre pouces par ces pierres avoient cer- I nement subi le même degré de feu que h, lui qui produit la parfaite calcination de i pierre, et l’avoient, comme je l’ai dit, i bi trois fois pendant quatre ou cinq mois , ij suite. Les morceaux de cette fonte de n( f, que je lis casser, ne se séparèrent du (j >te de la gueuse qu’à coups de masse très- itérés; au lieu que des gueuses de cette ime fonte, mais qui n’avoient pas subi cl ion du feu , étoient très-cassantes, et se , paroient en morceaux aux premiers coups masse. Je reconnus dès lors que cette . nie , chauffée à un aussi grand feu et pen- j nt si long-temps, avoit acquis beaucoup . as de dureté et de ténacité qu’elle n’en j, oit auparavant , beaucoup plus même à oportion que; n’en avoient acquis les pier- j s calcaires. Par ce premier indice, je jugeai le je trouverois une différence encore plus ande dans la pesanteur spécifique de cette nte si long-temps échauffée. Et en effet , premier morceau que j’éprouvai à la ba- nce hydrostatique pesoit dans l’air quatre u-es quatre onces trois gros, ou cinq cent ; laranle-sept gros; le même morceau pe- it dans l’eau trois livres onze onces deux os et demi, c’est-à-dire quatre cent soixante- latorze gros et demi : la différence est de ixante-douze gros et demi. L’eau dont je e servois pour mes expériences pesoit Laclement soixante-dix livres le pieJ cube, le volume d’eau déplacé par celui du orceau de cette fonte pesoit soixante-douze •os et demi. Ainsi soixante-douze gros et emi, poids du volume de leau déplacée ar le morceau de fonte, sont à soixante-dix vres, poids du pied cube de l'eau, comme inq cent quarante-sept gros, poids du mor- eau de fonte, sont à cinq cent vingt-huit vres deux onces un gros quarante-sept rains, poids du pied cube de cette fonte; t ce poids excède beaucoup celui de cette RIMENT ALE. ft3 même fonte lorsqu’elle n’a pas été chauffée î c’est une fonte blanche qui communément est très-cassante, et dont le poids n'est que de quatre cent quatre-vingt-quinze ou cinq cents livres tout au plus. Ainsi la pesanteur spécifique se trouve augmentée de vingt-huit sur cinq cents par cette très-longue applica- tion de la chaleur, ce qui fait environ un dix-huitième de la masse. Je me suis assuré de cette grande différence par cinq épreuves successive^ pour lesquelles j’ai eu attention de prendre toujours des morceaux pesant chacun quatre livres au moins , et comparés un à un avec des morceaux de meme ligure et d’un volume à peu près égal ; car, quoi- qu’il paroisse qu’ici la différence du volume, quelque grau le qu elle soit , ne devroit rien faire, et ne peut influer sur le résultat de l’opération de la balance hydrostatique, ce- pendant ceux qui sont exercés à la manier se seront aperçus , comme moi , que les ré- sultats sont toujours plus justes lorsque les volumes dçs matières qu’on compare ne sont pas bien plus grands l'un que l’autre. L'eau, quelque fluide qu’elle nous paroisse , a néan- moins un certain petit degré de ténacité qui influe plus ou moins sur des volumes plus ou moins grands. D’ailleurs il y a très-peu de matières qui soient parfaitement homo- gènes ou égales en pesanteur dans toutes les parties extérieures du volume qu’on soumet à l’épreuve. Ainsi, pour obtenir un résultat sur lequel on puisse compter précisément , il faut toujours comparer des morceaux d’un volume approchant, et d’une figure qui ne soit pas bien différente ; car si , d’une part, on pesoit un globe de fer de deux livres, ei d’autre part, une feuille de tôle du même poids, on trouveroit à la balance hydrosta- tique leur pesanteur spécifique différente, quoiqu’elle fut réellement la même. Je crois que quiconque réfléchira sur les expériences précédentes et sur leurs résul- tats ne pourra disconvenir que la chaleur très-long-temps appliquée aux différons corps qu’elle pénètre ne dépose dans leur intérieur une très-grande quantité de particules qui deviennent parties constituantes de leur masse, et qui s’y unissent et y adhèrent d’autant plus que les matières se trouvent avoir avec elles plus d’affinité et d’autres rapports de nature. Aussi, me trouvant muni de ces expériences, je n’ai pas craint d’avan- cer, dans mon Traité des Êtêmens , que les molécules de la chaleur se fixoient dans tous les corps comme s’y fixent celles de la lu- mière et celles de l’air dès qu’il est accom- pagné de chaleur ou de feu. MINÉRAUX. INTRODUCTION. 424 SIXIEME MEMOIRE. Expériences sur la lumière et sur la chaleur qu'elle peut produire. ARTICLE PREMIER. Invention de miroirs pour brûler a de grandes distances. L’histoire des miroirs ardens d’Archi- mède est fameuse; il les inventa pour la dé- fense de sa patrie, et il lança, disent les anciens, le feu du soleil sur la flotte enne- mie , qu’il réduisit en cendres lorsqu’elle approcha des remparts de Syracuse. Mais cette histoire, dont on n’a pas douté pen- dant quinze ou seize siècles, a d’abord été contredite, et ensuite traitée de fable dans ces derniers temps. Descartes, né pour ju- ger et même pour surpasser Archimède , a prononcé contre lui d’un ton de maître : il a nié la possibilité de l’invention, et son opinion a prévalu sur les témoignages et sur la croyance de toute l’antiquité : les physi- ciens modernes, soit par respect pour leur philosophe , soit par complaisance pour leurs contemporains, ont été de même avis. On n’accorde guère aux anciens que cequ’on ne peut leur ôter ; déterminés peut-être par ces motifs dont l’amour-propre 11e se sert que trop souvent sans qu’on s’en aperçoive, n’avons-nous pas naturellement trop de pen- chant à refuser ce que nous devons à ceux qui nous ont précédés? et si notre siècle re- fuse plus qu’un autre, ne seroit-ce pas qu’é- tant plus éclairé, il croit avoir plus de droits à la gloire , plus de prétentions à la supériorité? Quoi qu’il en soit, cette invention étoit dans le cas de plusieurs autres découvertes de l’antiquité qui se sont évanouies, parce qu’on a préféré la facilité de les nier à la difficulté de les retrouver; et les miroirs ardens d’Archimède étoient si décriés, qu’il ne paroissoit pas possible d’en rétablir la réputation; car, pour appeler du jugement de Descartes , il falloit quelque chose de plus fort que des raisons , et il ne restoit qu’un moyen sur et décisif, à la vérité, mais difficile et hardi ; c’étoit d’entreprendre de trouver les miroirs , c’est-à-dire d’en faire qui puissent produire les mêmes effets. J’en avois conçu depuis long-temps l’idée, et j’avouerai volontiers que le plus difficile f de la chose étoit de la voir possible, puis- r que , dans l’exécution , j’ai réussi au delà f même de mes espérances. J’ai donc cherché le moyen de faire des ; miroirs pour brûler à de grandes distances, comme de cent, de deux cents, et trois fi cents pieds. Je savois en général qu’avec les ' miroirs par réflexion l’on n’avoit jamais f brûlé qu’à quinze ou vingt pieds tout au plus , et qu’avec ceux qui sont réfringensla If distance étoit encore plus courte, et je sen- tois bien qu’il étoit impossible, dans la pra- J tique, de travailler un miroir de métal ou a de verre avec assez d’exactitude pour brûler à ces grandes distances; que pour brûler, par exemple , à deux cents pieds, la sphère ‘ ayant dans ce cas huit cents pieds de dia- 3 mètre , on ne pouvoit rien espérer de 1a |! méthode ordinaire de travailler les verres; et je me persuadai bientôt que quand même J on pourvoit en trouver une nouvelle pour 1 donner à de grandes pièces de verre ou de £ métal une courbure aussi légère , il n’eu ,( résulteroit encore qu’un avantage très-peu considérable, comme je le dirai dans la suite. n Mais , pour aller par ordre , je cherchai 11 d’abord combien la lumière du soleil perdoit l par la réflexion à différentes distances , et ,£ quelles sont les matières qui la réfléchissent a le plus fortement. Je trouvai , première- (nl meut, que les glaces étamées, lorsqu’elles ei sont polies avec un peu de soin , réfléchis- !* sent plus puissamment la lumière que les ( métaux les mieux polis, et même mieux que ’l le métal composé dont on se sert pour faire I1 des miroirs de télescopes, et que, quoiqu’il ' y ait dans lès glaces deux réflexions, l’une os à la surface, et l’autre à l’intérieur, elles IJ11 ne laissent pas de donner une lumière plus vive et plus nette que le métal , qui pro- US duit une lumière colorée. En second lieu, en recevant la lumière f du soleil dans un endroit obscur, et en la e comparant avec cette même lumière du so- 11 leil réfléchie par une glace , je trouvai qu’a 111 de petites distances, comme de quatre ou n cinq pieds , elle ne perdoit qu’environ moi- 111 tié par la réflexion; ce que je jugeai en fai- “c PARTIE EXPÉRIMENTALE. 4.2$ tomber sur la première lumière réflé- une seconde lumière aussi réfléchie ; vivacité de ces deux lumières réflé- me parut égale à celle de la lumière te. oisièmement, ayant reçu à de grandes nces, comme à cent, deux cents, et cents pieds , cette même lumière réflé- par de grandes glaces , je reconnus le ne perdoit presque rien de sa force épaisseur de l’air qu’elle avoit à tra- !l\ îsuite je voulus essayer les mêmes cho- eur la lumière des bougies; et, pour urer plus exactement de la quantité oiblissement que la réflexion cause à lumière, je fis l’expérience suivante: me mis vis-à-vis une glace de miroir un livre à la main , dans une chambre ’obscurité de la nuit étoit entière, et ne pouvois distinguer aucun objet ; je Humer dans une chambre voisine, à ante pieds de distance environ, une ; bougie , et je la fis approcher peu à jusqu’à ce que je pusse distinguer les i itères et lire le livre que j’avois à la i t : la distance se trouva de vingt-quatre s du livre à la bougie. Ensuite , ayant îrné le livre du côté du miroir, je cher- à lire par cette même lumière réflé- et je fis intercepter par un paravent irtie de la lumière directe qui ne tom- pas sur le miroir, afin de n’avoir sur livre que la lumière réfléchie : il fallut ocher la bougie, ce qu’on fit peu à peu, u’à ce que je pusse lire les mêmes ca- dres éclairés par la lumière réfléchie , lors la distance du livre à la bougie, y pris celle du livre au miroir, qui n’étoit I d’un demi-pied , se trouva être en tout de ; ize pieds. Je répétai cela plusieurs fois ; eus toujours les mêmes résultats à très- près; d’où je conclus que la force ou bantité de la lumière directe est à celle a lumière réfléchie comme 576 à 225. û l’effet de la lumière de cinq bougies te par une glace plane est à peu près à celui de la lumière directe de deux ;ies. 1 lumière des bougies perd donc plus Ai la réflexion que la lumière du soleil ; et *(e différence vient de ce que les rayons l umière qui partent de la bougie comme la centre tombent plus obliquement sur tf ]miroir que les rayons du soleil , qui fanent presque parallèlement. Cette expé- niice confirma donc ce que j’avois trouvé daord, et je tins pour siir que la lumière du soleil ne perd qu’environ moitié par sa réflexion sur une glace de miroir. Ces premières connoissances dont j’avois besoin étant acquises , je cherchai ensuite ce que deviennent en effet les images du soleil lorsqu’on les reçoit à de grandes di- stances. Pour bien entendre ce que je vais dire, il ne faut pas, comme on le fait or- dinairement , considérer les rayons du soleil comme parallèles, et il faut se souvenir que le corps du soleil occupe à nos yeux une étendue d’environ 32 minutes ; que par conséquent les rayons qui partent du bord supérieur du disque, venant à tomber sur un point d’une surface réfléchissante , les rayons qui partent du bord inférieur, ve- nant à tomber aussi sur le même point de cette surface , ils forment entre eux ûn angle de 32 minutes dans l’incidence , et ensuite dans la réflexion , et que par conséquent l’image doit augmenter de grandeur à me- sure qu’elle s’éloigne. Il faut de plus faire attention à la figure de ces images : par exemple, une glace plane carrée d’un demi- pied, exposée aux rayons du soleil, formera une image carrée de six pouces , lorsqu’on recevra cette image à une petite distance de la glace , comme de quelques pieds ; en s’éloignant peu à peu , on voit l’image aug- menter, ensuite se déformer, enfin s’arron- dir et demeurer ronde, toujours en s’agran- dissant , à mesure qu’elle s’éloigne du miroir. Celte image est composée d’autant de dis- ques du soleil qu’il y a de points physiques dans la surface réfléchissante : le point, du milieu forme une image du disque; les points voisins en forment de semblables et de même grandeur qui excèdent un peu le disque du milieu ; il en est de même de tous les autres points , et l’image est com- posée d’une infinité de disques , qui, se sur- montant régulièrement et anticipant circu- lairement les uns sur les autres , forment l’image réfléchie dont le point du milieu de la glace est le centre. Si l’on reçoit l’image composée de tous ces disques à une petite distance, alors l’é- tendue qu’ils occupent n’étant qu’un peu plus grande que celle de la glace, cette image est de la même figure et à peu près de la même étendue que la glace. Si la glace est carrée, l’image est carrée ; si la glace est triangulaire , l’image est triangulaire : mais lorsqu’on reçoit l’image à une grande distance de la glace, où l’étendue qu’oc- cupent les disques est beaucoup plus grande que celle de la glace , l’image ne conserve plus la figure carrée ou triangulaire de la 426 MINÉRAUX. INTRODUCTION. glace ; elle devient nécessairement circu- laire : et , pour trouver le point de distance où l’image perd sa figure carrée , il n’y a qu’à chercher à quelle distance la glace nous paroit sous un angle égal à celui que for- me le corps du soleil à nos yeux , c’est-à-dire sous un angle de 32 minutes ; cette distance sera celle où l’image perdra sa figure carrée , et deviendra ronde; car les disques ayant toujours pour diamètre une ligne égale à la corde de l’arc de cercle qui mesure un angle de 32 minutes , on trouvera , par cette rè- gle, qu’une glace carrée de six pouces perd sa figure carrée à la distance d’environ soixante pieds, et qu’une glace d’un pied en carré ne la perd qu’à cent vingt pieds environ, et ainsi des autres. En réfléchissant un peu sur cette théorie, on ne sera plus étonné de voir qu’à de très- grandes distances une grande et une petite glace donnent à peu près une image de la même grandeur, et qui ne diffère que par l’intensité de la lumière : on ne sera plus surpris qu’une glace ronde, ou carrée, ou longue, ou triangulaire, ou de telle autre figure que l’on voudra 1 , donne toujours des images rondes ; et on verra clairement que les images ne s’agrandissent et ne s’affoi- blissent pas par la dispersion de la lumière, ou par la perte qu’elle fait en traversant l’air, comme l’ont cru quelques physiciens, et que cela n’arrive, au contraire, que par l’augmentation des disques, qui occupent toujours un espace de 32 minutes , à quel- que éloignement qu’on les porte. De même on sera convaincu , par lasim- le exposition de cette théorie, que les cour- es , de quelque espèce quelles soient, ne peuvent être employées avec avantage pour brûler de loin , parce que le diamètre du foyer de toutes les courbes ne peut jamais être plus petit que la corde de l’arc qui me- sure un angle de 32 minutes, et que par conséquent le miroir concave le plus parfait, dont le diamètre seroit égal à celte corde, ne feroit jamais le double de l’effet de ce miroir plan de même surface 2 ; et si le dia- mètre de ce miroir courbe étoit plus petit que cette corde, il ne feroit guère plus d’ef- fet qu’un miroir plan de même surface. 1. C’est par cette même raison que les petites images du soleil qui passent entre les feuilles des arbres élevés et touffus , qui toinbeni sur le sable d’une allée, sont toutes ovales ou rondes. 2. Si l’on se donne la peine de supputer, on trouvera que le miroir courbe le plus parfait u’a d’avantage sur un miroir plan que dans la raison de *7 à io , du moins à très-peu près. Lorsque j’eus bien compris ce que je vie d’exposer , je me persuadai bientôt , à n’i pouvoir douter , qu’ Archimède n’avoit j brûler de loin qu’avec des miroirs plan car , indépendamment de l’impossibilité i l’on étoit alors, et où l’on seroit encore a jourd’hui , d’exécuter des miroirs conea\ d’un aussi long foyer, je sentis bien que ! réflexions que je viens de faire ne pou voit pas avoir échappé à ce grand mathéma cien. D’ailleurs je pensai que, selon tout les apparences , les anciens ne savoient [ faire de grandes masses de verre, qu' ignoroient l’art de le couler pour en fa de grandes glaces, qu’ils n’avoient tout lus que celui de le souffler et d’en faire < outeilles et des vases , et je me persuat aisément que c’étoit avec des miroirs pl{ de métal poli, et par la réflexion des rayé du soleil, qu’Archimède avoit brûlé au loi mais, comme j’avois reconnu que les ;m roirs de glace réfléchissoient plus puissat ment la lumière que les miroirs du métai plus poli, je pensai à faire construire t j machine pour faire coïncider au même po- 1 les images réfléchies par un grand noml j de ces glaces planes, bien convaincu que moyen étoit le seul par lequel il fût possi | de réussir. Cependant j’avois encore des doutes , | qui me paroissoient même très-bien fond' car voici comment je raisonnois. Suppose que la distance à laquelle je veux brui soit de deux cent quarante pieds : je \ j clairement que le foyer de mon miroir i l peut avoir moins de deux pieds dediamèJ à cette distance ; dès lors quelle sera l’ét j due que je serai obligé de donner à mon jj semblage de miroirs plans pour produire j feu dans un aussi grand foyer? Elle pouv être si grande, que la chose eût été impj ticable dans l’exécution : car, en compar le diamètre du foyer au diamètre du min dans les meilleurs miroirs par réflexion < nous ayons, par exemple, avec le mil de l’Académie, j’avois observé que le < mètre de ce miroir, qui est de trois pie i étoit cent huit fois plus grand que le c mètre de son foyer , qui n’a qu’envij j quatre lignes, et j’en concluois que, pij brûler aussi vivement à deux cent quara ] pieds, il eût été nécessaire que mon asse ; filage de miroirs eût eu deux cent se pieds de diamètre, puisque le foyer aui deux pieds ; or un miroir de deux cent se ; pieds de diamètre étoit assurément ii chose impossible. j A la vérité , ce miroir de trois pieds ! PARTIE EXPERIMENTALE. 427 héi ut lit être brûle assez vivement pour fondre et je voulus voir combien j’avois à ga- r en réduisant son action à n’entlammer ; du bois : pour cela , j’appliquai sur le oir des zones circulaires de papier pour diminuer le diamètre, et je trouvai qu’il voit plus assez de force pour enflammer bois sec lorsque son diamètre fut réduit uatre pouces huit ou neuf lignes. Pre- donc cinq pouces ou soixante lignes îr l’étendue du diamètre nécessaire pour II lier avec un foyer de quatre lignes , je pouvais me dispenser de conclure que ir brûler également à deux cent quarante to^ds, où le foyer auroit nécessairement ix pieds de diamètre , il me faudrait un III roir de trente pieds de diamètre ; ce qui paroissoit encore une chose impossible, du moins impraticable. A des raisons si positives , et que d’au- s auroient regardées comme des démon- ations de l’impossibilité du miroir, je vois rien à opposer qu’un soupçon, mais soupçon ancien, et sur lequel plus j’a- |lis réfléchi , plus je m’étois persuadé qu’il « Ifetoit pas sans fondement : c’est que les ?» iets de la chaleur pouvoient bien n’ètre tss js proportionnels à la quantité de lumière; | , ce qui revient au même , qu’à égale in- a usité de lumière les grands foyers dévoient |É ûler plus vivement que les petits, po !En estimant la chaleur mathématique- îht , il n’est pas douteux que la force des 1 ' !) ers de même longueur ne soit propor- oit innelle à la surface des miroirs. Un mi- nu jir dont la surface est double de celle d’un l’t itre doit avoir un foyer de la même gran- iod *ur , si la courbure est la même ; et ce i« yer de même grandeur doit contenir le M iuble de la quantité de lumière que con- ni] bnt le premier foyer ; et , dans la suppo- rt' fion que les effets sont toujours propor- » pnnels à leurs causes, on avoit toujours m u que la chaleur de ce second foyer devoit nii re double de celle du premier, t: De même, et par la même estimation ma- )ii tématique , on a toujours cru qu’à égale ( intensité de lumière un petit foyer devoit ri rûler autant qu’un grand , et que l'effet de p 1 chaleur devoit être proportionnel à celte ttensité de lumière : en sorte , disoit Des- àrtes, qu'on peut faire des verres ou des tiroirs extrêmement petits qui brûleront avec ûtant de violence que les plus grands. Je jensai d’abord , comme je l’ai dit ci-dessus, iue cette conclusion, tirée de la théorie aalhérnatique , pourrait bien se trouver ausse dans la pratique , parce que la cha- leur étant une qualité physique, de ^action et de la propagation de laquelle nous ne connoissons pas bien les lois , il me sera- bloil qu’il y avoit quelque espèce de témé- rité à ën estimer ainsi les effets par un rai- sonnement de simple spéculation. J’eus donc recours encore une fois à l’ex- périenCe : je pris des miroirs de métal de différents foyers et de différents degrés de poliment; et, en comparant l’action des différents foyers sur les mêmes matières fu- sibles ou combustibles , je trouvai qu’à égale intensité de lumière les grands foyers font constamment beaucoup plus d’effet que les petits , et produisent souvent l’inflammation ou la fusion, tandis que les petits ne pro- duisent qu’une chaleur médiocre : je trou- vai la même chose avec les miroirs par ré- fraction. Pour lé faire mieux sentir , pre- nons, par exemple, un grand miroir ardent par réfraction, tel que celui du sieur Segard, qui a trente-deux pouces de diamètre , et un foyer de huit lignes de largeur , à six pieds de distance, auquel foyer le cuivre se fond en moins d’une minute , et faisons dans les mêmes proportions un petit verre ardent de trente-deux lignes de diamètre, dont le foyer sera de 8/12 ou 2/3 de ligne, et la distance à six poncés. Puisque le grand miroir fond le cuivre en une minute dans l’étendue entière de son foyer, qui est de huit lignes , le petit verre devrait , selon la théorie, fondre dans le même temps la même matière dans l’étendue de son foyer, qui est de 2/3 de ligne. Ayant fait l’expé- rience, j’ai trouvé, comme je m’y attendois bien , que , loin de fondre le cuivre, ce pe- tit verre ardent pouvoit à peine donner un peu de chaleur à cette matière. La raison de cette différence est aisée à donner, si l’on fait attention que la chaleur se communique de proche en proche , et se disperse, pour ainsi dire , lors même qu’elle est appliquée continuellement sur le même point : par exemple , si l’on fait tomber le foyer d’un verre ardent sur le centre d’un écu, et que ce foyer n’ait qu’une ligne de diamètre, la chaleur qu’il produit sur le centre de l’écù se disperse et s’étend dans le volume entier de l’écu , et il devient chaud jusqu’à la circonférence ; dès lors toute la chaleur , quoique employée d’abord contre le centre de l’écu , ne s’y arrête pas, et ne peut pas produire un aussi grand effet que si elle y demeuroit tout entière. Mais si, au lieu d’un foyer d’une ligne qui tombe sur le milieu de l’écu , on fait tomber sur l’écu tout entier un foyer d’égale intensité, 4 2 8 MINÉRAUX. INTRODUCTION. toutes les parties de l’écu étant également échauffées, dans ce dernier cas, non seule- ment il n’y a pas de perte de chaleur comme dans le premier , mais même il y a du gain et de l’augmentation de chaleur ; car le point du milieu profitant de la chaleur des autres points qui l’environnent , l’écu sera fondu dans ce dernier cas, tandis que, dans le premier , il ne sera que légèrement échauffé. Après avoir fait ces expériences et ces réflexions, je sentis augmenter prodigieu- sement l’espérance que j’avois de réussir à faire des miroirs qui brûleroient au loin; car je commençai à ne plus craindre, au- tant que je l’avois craint d’abord, la grande étendue des foyers : je me persuadai , au contraire, qu’un foyer d’une largeur con- sidérable , comme de deux pieds , et dans lequel l’intensité de la lumière ne seroit pas à beaucoup près aussi grande que dans un petit foyer, comme de quatre lignes, pourroit cependant produire avec plus de force l’inflammation et l’embrasement , et que par conséquent ce miroir, qui, par la théorie mathématique, devoit avoir au moins trente pieds de diamètre , se réduiroit sans doute à un miroir de huit ou dix pieds tout au plus ; ce qui est non seulement une chose possible , mais même très -praticable. Je pensai donc sérieusement à exécuter mon projet : d’abord j’avais dessein de brû- ler à deux cents ou trois cents pieds avec des glaces circulaires ou hexagones d’un pied carré de surface, et je voulois faire quatre châssis de fer pour les porter, avec trois vis à chacune pour les mouvoir en tous sens, et un ressort pour les assujettir ; mais la dépense trop considérable qu’exigeoit cet ajustement me fît abandonner cette idée , et je me ra- battis à des glaces communes de six pouces sur huit pouces, et un ajustement en bois, qui, à la vérité, est moins solide et moins précis , mais dont la dépense convenoit mieux à une tentative. M. Passemant, dont l’habi- leté dans les mécaniques est connue même de l’Académie, se chargea de ce détail; et je n’en ferai pas la description, parce qu’un coup d’œil sur le miroir en fera mieux en- tendre la construction qu’un long discours. Il suffira de dire qu’il a d’abord été com- posé de cent soixante-huit glaces étamées de six pouces sur huit pouces chacune, éloi- gnées les unes des autres d’environ quatre lignes ; que chacune de ces glaces se peut mouvoir en tous sens , et indépendamment de toutes , et que les quatre lignes d’inter- valle qui sont entre elles servent non seule- ment à la liberté de ce mouvement , ma i », aussi à laisser voir à celui qui opère l’endro jjfj où il faut conduire ses images. Au moyen c I cette construction , l’on peut faire tomb< sur le même point les cent soixante-hu images , et par conséquent brûler à plusieui distances , comme à vingt , trente , et jusqu cent cinquante pieds , et à toutes les distai ces intermédiaires ; et en augmentant la grai deur du miroir, ou en faisant d’autres m roirs semblables au premier, on est sûr ( porter le feu à de plus grandes distances et core , ou d’en augmenter , autant qu’on vo dra, la force ou l’activité à ces premières di tances. Seulement il faut observer que le mouv ment dont j’ai parlé n’est point trop aisé exécuter , et que , d’ailleurs , il y a un grai j‘‘ choix à faire dans les glaces : elles ne sole e pas toutes à beaucoup près également bonm quoiqu’elles paroissent telles à la premièf1 inspection ; j’ai été obligé d’en prendre pl ^ de cinq cents pour avoir les cent soixanl huit dont je me suis servi. La manière < les essayer est de recevoir à une grande è stance , par exemple à cent cinquante pied l’image réfléchie du soleil contre un plan ve tical ; il faut choisir celles qui donnent u: image ronde et bien terminée , et rebut toutes les autres qui sont en beaucoup pl grand nombre , et dont les épaisseurs éta inégales en différens endroits , ou la surfa un peu concave ou convexe au lieu d’êt plane , donnent des images mal terminée doubles, triples, oblongues, chevelues, et ^ suivant les différentes défectuosités qui trouvent dans les glaces. Par la première expérience que j’ai fa le 23 mars 1747, à midi, j’ai mis le feu, soixante-six pieds de distance, à une pla che de hêtre goudronnée, avec quai-an glaces seulement, c’est-à-dire avec le quai du miroir environ ; mais il faut observer qi n’étant pas encore monté sur son pied, étoit posé très-désavantageusement, faisa avec le soleil un angle de près de 20 degi de déclinaison , et un autre de plus de degrés d’inclinaison. Le même jour, j’ai mis le feu à une pla che goudronnée et soufrée , à cent vinji !" six pieds de distance , avec quatre- vin gt-di “ huit glaces, le miroir étant posé encore pl désavantageusement. On sent bien que, po l ; f brûler avec le plus d’avantage, il faut q le miroir soit directement opposé au sole aussi bien que les matières qu’on veut c flammer; en sorte qu’en supposant un pl perpendiculaire sur le plan du miroir, il fa m u PARTIE EXPERIMENTALE. 429 •*1 passe par le soleil, et en même temps jle milieu des matières combustibles, p 3 avril, à quatre heures du soir, le lir étant posé et monté sur son pied , i produit une légère inflammation sur une fche couverte de laine hachée, à cent te-huit pieds de distance, avec cent le glaces, quoique le soleil fût foible îe la lumière en fût fort pâle. Il faut dre garde à soi lorsqu’on approche de roit où sont les matières combustibles, ne faut pas regarder le miroir; car si eureusement les yeux se trouvoient au on seroit aveuglé par l’éclat de la (ere. 4 avril, à onze heures du matin, le étant fort pâle et couvert de vapeurs nuages légers , on n’a pas laissé de pro- avec cent cinquante- quatre glaces, à j cinquante pieds de distance , une cha- [jsi considérable, qu’elle a fait, en moins îux minutes, fumer une planche gou- linée qui se seroit certainement enflam- si le soleil n’avoit pas disparu tout à ai fi : feu iepli uarî ertj lendemain, 5 avril, à trois heures midi , par un soleil encore plus foible le jour précédent , on a enflammé , à cinquante pieds de distance, des co- de sapin soufrés et mêlés de charbon, oins d’une minute et demie, avec cent ante-quatre glaces. Lorsque le soleil if, il ne faut que quelques secondes produire l’inflammation, ro avril, après midi, par un soleil net , on a mis le feu à une planche de goudronnée, à cent cinquante pieds, cent vingt-huit glaces seulement : l’in- mation a été très-subite , et elle s’est faite toute l’étendue du foyer , qui avoit en- seize pouces de diamètre à cette dis- jour à deux heures et demie l'f ’ porté le feu sur une planche de hêtre 1 jronnée en partie et couverte en quel- "j endroits de laine hachée ; l’inflamma- s “e js’est faite très-promptement ; elle a com- sé par les parties du bois qui étoient ûef (uvertes, et le feu éloit si violent, qu’il 1 ïU)! lu tremper dans l’eau la planche pour "i1 ! jndre : il y avoit cent quarante-huit gla- orel et la distance étoit de cent cinquante M . ïaul ; 1 1 avril , le foyer n’étant qu’à vingt J ot > de distance du miroir, il n’a fallu que ui j ;e glaces pour enflammer de petites ma- linÇi s combustibles. Avec vingt-une glaces , W mis le feu à une planche de hêtre qui avoit déjà été brûlée en partie; avec qua- rante-cinq glaces, on a fondu un gros flacon d’étain qui pesoit environ six livres; et avec cent dix-sept glaces , 011 a fondu des mor- ceaux d’argent mince, et rougi une plaque de tôle : et je suis persuadé qu’à cinquante pieds on fondra les métaux aussi bien qu’à vingt, en employant toutes les glaces du mi- roir ; et comme le foyer à cette distance est large de six à sept pouces , on pourra faire des épreuves en grand sur les métaux 1 ; ce qu’il n’étoit pas possible de faire avec les miroirs ordinaires, dont le foyer est ou très- foible ou cent fois plus petit que celui de mon miroir. J’ai remarqué que les métaux, et surtout l’argent, fument beaucoup avant de se fondre : la fumée en étoit si sensible, qu’elle faisoit ombre sur le terrain ; et c’est là que je l’observois attentivement : car il n’est pas possible de regarder un instant le foyer, lorsqu’il tombe sur du métal; l’éclat en est beaucoup plus vif que celui du soleil. Les expériences que j’ai rapportées ci-des- su$ , et qui ont été faites dans les premiers temps de l’invention de ces miroirs, ont été suivies d’un grand nombre d’aulres expé- riences qui confirment les premières. J’ai enflammé dubois jusqu’à deux cents et même deux cent dix pieds avec ce même miroir, par le soleil d’été , toutes les fois que le ciel étoit pur; et je crois pouvoir assurer qu'avec quatre semblables miroirs on brûleroit à quatre cents pieds , et peut-être plus loin. J’ai de même fondu tous les métaux et mi- néraux métalliques à vingt-cinq , trente et 1. Par des expériences subséquentes, j'ai re- connu que la distance la plus avantageuse pour faire commodément avec ces miroirs des épreuves sur les métaux étoit à quarante ou quarante-cinq pieds. Les assiettes d’argent que j’ai fondues à cette distance avec deux cent vingt-quatre glaces étoient bien nettes , en sorte qu’il n’étoit pas possible d’at- tribuer la fumée très-abondante qui en sortoit à la graisse ou à d’autres matières dont l’argent se se- roit imbibé, et comme se le persuadoient les gens témoins de l’expérience. Je la répétai néanmoins sur des plaques d’argent toutes neuves , et j’eus le même effet. Le métal fumoit très-abondamment , quelquefois pendant plus de huit ou dix minutes avant de se fondre. J’avois dessein de recueillir cette fumée d’argent par le moyen d’un chapiteau et d’un ajustement semblable à celui dont on se sert dans les distillations, et j’ai toujours eu regret que mes antres occupations m’en aient empêché ; car cette manière de tirer l’eau du métal est peut-être la seule qu’on puisse employer. Et si l’on prétend que cette fumée, qui m’a paru humide, ne contient pas de l’eau, il seroit toujours très-utile de savoir ce que c’est, car il se peut aussi que ce ne soit que du métal volatilisé. D’ailleurs je suis persuadé qu’en faisant les mêmes épreuves sur l’or, on le verra fumer comme l’argent , peut • être moins , peut-être plus. 43o quarante pieds. On trouvera , dans la suite de cet article, les usages auxquels on peut appliquer ces miroirs, et les limites qu’on doit assigner à leur puissance pour la calci- nation , la combustion , la fusion , etc. 11 faut environ une demi-heure pour mon- ter le miroir et pour faire coïncider toutes les images au même point : mais lorsqu’il est une fois ajusté , on peut s’en servir à toute heure , en tirant seulement un rideau ; il met- tra le feu aux matières combustibles très- promptement, et on ne doit pas le déranger, à moins qu’on ne veuille changer la distance : par exemple , lorsqu'il est arrangé pour brû- ler à cent pieds , il faut une demi-heure pour l’ajustera la distance de cent cinquante pieds, et ainsi des autres. Ce miroir brûle en haut, en bas, et ho- rizontalement , suivant la différente inclinai- son qu’on lui donne. Les expériences que je viens de rapporter ont été faites publique- ment au Jardin du Roi, sur un terrain ho- rizontal contre des planches posées vertica- lement. Je crois qu’il n’est pas nécessaire d’avertir qu’il auroit brûlé avec plus de force en haut , et moins de force en bas , et , de même, qu’il est plus avantageux d’incliner le plan des matières combustibles parallèlement au plan du miroir. Ce qui fait qu’il a cet avantage de brûler en haut , en bas , et hori- zontalement , sur les miroirs ordinaires de réflexion qui ne brûlent qu’en haut, c’est que son foyer est fort éloigné, et qu’il a si peu de courbure qu’elle est insensible à l’œil : il est large de sept pieds , et haut de huit pieds, ce qui ne fait qu’environ la cent cin- quantième partie de la circonférence de la sphère, lorsqu’on brûle à cent cinquante pieds. La raison qui m’a déterminé à préférer des glaces de six pouces de largeur sur huit pouces de hauteur , à des glaces carrées de six ou huit pouces , c’est qu’il est beaucoup plus commode de faire les expériences sur un terrain horizontal et de niveau , que de les faire de bas en haut , et qu’avec cette fi- gure plus haute que large , les images étoient plus rondes , au lieu qu’avec des glaces car- rées, elles auroient été raccourcies, surtout pour les petites distances , dans cette situa- tion horizontale. Cette découverte nous fournit plusieurs choses utiles pour la physique, et peut-être pour les arts. On sait que cé qui rend les miroirs ordinaires de réflexion presque inu- tiles pour les expériences , c’est qu’ils brû- lent toujours en haut, et qu’on est fort em- barrassé de trouver des moyens pour sus- MINERAUX. INTRODUCTION. pendre ou soutenir à leur foyer les mal qu’on veut fondre ou calciner. Au moyi mon miroir , on fera brûler en bas le roirs concaves , et avec un avantage si sidérable , qu’on aura une chaleur de tt gré qu’on voudra : par exemple , en c sant à mon miroir un miroir concave pied carré de surface , la chaleur que ce nier miroir produira à son foyer , en ployant cent cinquante-quatre glaces ! ment , sera douze fois plus grande que qu’il produit ordinairement, et l’effet le- même que s’il existoit douze soleils ai d’un, ou plutôt que si le soleil avoit < fois plus de chaleur. Secondement, on aura, par lemoyi, ^ mon miroir, la vraie échelle de l’augmi 11 tion de la chaleur, et on fera un the ® mètre réel, dont les divisions n’auronti ™ rien d’arbitraire, depuis la températm f l’air jusqu’à tel degré de chaleur qu’orii dra , en faisant tomber une à une sis ® sivement les images du soleil les une les autres, et en graduant les intervi' soit au moyen d’une liqueur expansive P au moyen d’une machine de dilatatic jcen de là nous saurons en effet ce que c’est qiP augmentation double, triple, quadruplelps de chaleur 1 , et nous connoîlrons létP® tières dont l’expansion ou les autres w seront les plus convenables pour mesuiipi augmentations de chaleur. lirs Troisièmement, nous saurons aujustd 11 bien de fois il faut la chaleur du soleili téi brûler , fondre , ou calciner différente tières, ce qu’on ne savoit estimer jufi jusi que d’une manière vague et fort éld de la vérité ; et nous serons en état diifpé des comparaisons précises de l’activi nos feux avec celle du soleil , et d’avc cela des rapports exacts et des mesure et invariables. Enfin on sera convaincu, lorsqu’orlf examiné la théorie que j’ai donnée , et aura vu l’effet de mon miroir, que le i que j’ai employé étoil le seul par leq fût possible de réussir à brûler au loir ile indépendamment de la difficulté ph; | jt de faire de grands miroirs concaves , fat riques, paraboliques, ou d’une autre bure assez régulière pour brûler à cet ire i. Feu M. de Mairan a fait une épreuve av ! JCI glaces seulement, et a trouvé que les augmer ) i|l{ du double et du triple de chaleur étoient cou divisions du thermomètre de Réaumur ; mai doit rien conclure de cette expérience , .< donné lieu à ce résultat que par une espece sard. Voyez sur ce sujet mon Traité des Eléi « nte pieds , on se démontrera aisément à même qu’ils ne produiraient qu’à peu n te ; autant d’effet que le mien, parce que ûlaje >yer en serait presque aussi large ; que, unit dus, ces miroirs courbes, quand même e rail possible de les exécuter, auraient le ncai ivantage très-grand de ne brûler qu’à rque seule distance, au lieu que le mien brûle u tes les distances; et par conséquent on ndonnera le projet de faire , par le tdeqi 'en des courbes, des miroirs pour rûler I U'* nui • l'P qui a occupé innlilpïtii IJloin oleils avoit inutilement un îd nombre de mathématiciens et d’artistes se trompoient toujours, parce qu ils idéroient les rayons du soleil comme allèles, au lieu qu’il faut les considérer tels qu’ils sont, c’est-à-dire comme fai- tin «t des angles de toute grandeur, depuis ara p jusqu’à 32 minutes; ce qui fait qu il est ipérai aossible, quelque courbure qu’on donne quoi |n miroir, de rendre le diamètre du foyer uuej s petit que la corde de l’arc qui mesure s u® angle de 32 minutes. Ainsi, quand même Intel pourrait faire un miroir concave pour mm àler à une grande distance, par exemple, il/0 eut cinquante pieds, en le travaillant dans a it| s ses points sur une sphère de six cents Impli ds de diamètre, et en employaut une )I1S || sse énorme de verre ou de métal , il est 0jres ir qu’on aura à peu près autant d’avantage mesu l’employer au contraire que de petits mi- rs plans. ijusti Au reste, comme tout a des limites, quoi- solei e mon miroirsoit susceptible d’une grande ,reI1t rfection, tant pour l’ajustement que pour >rju rsieurs autres choses, et que je compte ,l eli en en faire un autre dont les effets seront ai J| périeurs , cependant il ne faut pas espérer Jcti| i’on puisse jamais brûler à de très-grandes .lances: car pour brûler, par exemple, à ;iirg le demi-lieue , il faudrait un miroir deux ille fois plus grand que le mien ; et tout ™J qu’on pourra jamais faire est de brûler fjihuit ou neuf cents pieds tout au plus. Le !’|ei jyer, dont le mouvement correspond tou- ,|eij urs à celui du soleil , marche d’autan! plus ]0|i te qu'il est plus éloigné du miroir ; et à j, îuf cents pieds de distance, il ferait un if"s rxemin d’environ six pieds par minute. JJ II n’est pas nécessaire d avertir qu’on peut ( ce) ire , avec de petits morceaux plats de lace ou de métal , des miroirs dont les Ayers seront variables, et qui brûleront à J je petites distances avec une grande vivacité; coi |t , en les montant à peu près comme l’on ai mute les parasols, il ne faudrait qu’un seul ao u veinent pour en ajuster le foyer. Maintenant que j’ai rendu compte de ma PARTIE EXPERIMENTALE. 43 s découverte et du succès de mes expériences, je dois rendre à Archimède et aux anciens la gloire qui leur est due. Il est certain qu’Archimede a pu faire avec des miroirs de métal ce que je fais avec dés miroirs de verre ; il est sûr qu’il avoit plus de lumières qu’il n’en faut pour imaginer la théorie qui m’a guidé et la mécanique que j’ai fait exé- cuter, et que par conséquent on ne peut lui refuser le titre de premier inventeur de ces miroirs , que l’occasion où il sut les em- ployer rendit sans doute plus célèbres que le mérite de la chose même. Pendant le temps que je travaillois à ces miroirs, j’ignorois le détail de tout ce qu’en ont dit les anciens ; mais après avoir réussi à les faire, je fus bien aise de m’en in- struire. Feu M. Melot, de l’Académie des Belles- Lettres , et l’un des gardes de la Bi- bliothèque du Roi , dont la grande érudition et les talens étoient connus de tous les sa- vans , eut la bonté de me communiquer une excellente dissertation qu’il avoit faite sur ce sujet , dans laquelle il rapporte les témoi- gnages de tous les auteurs qui ont parlé des miroirs ardens d’Archimede. Ceux qui en parlent le plus clairement sont Zonaras et Tzetzès , qui viraient tous deux dans le dou- zième siècle. Le premier dit qu’ Archimède, avec ses miroirs ardens, mit en cendres toute la flotte des Romains. « Ce géomètre, dit-il, ayant reçu les rayons du soleil sur un miroir, à l’aide de ces rayons rassemblés et réfléchis par l’épaisseur et le poli du miroir, il em- brasa l’air, et alluma une grande flamme qu’il lança tout entière sur les vaisseaux qui mouilloient dans la sphère de son activité, et qui furent tous réduits en cendres. » Le même Zonaras rapporte aussi qu’au siège de Constantinople, sous l’empire d’Anastase, l’an 5 14 de Jésus-Christ , Proclus brûla, avec des miroirs d’airain, la flotte de Yilalien, qui assiégeoit Constantinople ; et il ajoute que ces miroirs étoient une découverte an- cienne, et que l’historien Dion en donne l’honneur à Archimède, qui la fit, et s’en servit contre les Romains lorsque Marcellus fit le siège de Syracuse. Tzetzes non seulement rapporte et assure le fait des miroirs, mais même il en expli- que en quelque façon la construction. « Lorsque les vaisseaux, dit-il, furent à la portée du trait, Archimede fit faire une es- pece de miroir hexagone , et d autres plus petits de vingt-quatre angles chacun, qu’il plaça dans une distance proportionnée, et qu’on pouvoit mouvoir à l’aide de leurs char- nières et de certaines lames de métal : i| 43î MINÉRAUX. INTRODUCTION. plaça le miroir hexagone de façon qu’il éloit coupé par le milieu par le méridien d’hiver et d’éte, en sorte que les rayons du soleil reçus sur ce miroir, venant à se briser, allu- mèrent un grand feu qui réduisit en cen- dres les vaisseaux romains, quoiqu’ils fussent éloignés de la portée d’un trait. » Ce pas- sage me paroît assez clair : il fixe la distance à laquelle Archimède a brûlé; la portée du trait ne peut guère être que de cent cin- quante ou deux cents pieds ; il donne l’idée de la construction , et fait voir que le miroir d’Archimède pouvoit être, comme le mien, composé de plusieurs petits miroirs qui se mouvoient par des mouvemens de charnières et de ressorts ; et enfin il indique la position du miroir, en disant que le miroir hexagone autour duquel étoient sans doute les miroirs plus petils , étoit coupé par le méridien , ce qui veut dire apparemment que le miroir doit être opposé directement au soleil : d’ailleurs le miroir hexagone étoit probable- ment celui dont l’image servoit de mire pour ajuster les autres, et cette figure n’est pas tout à-fait indifférente, non plus que celle des vingt-quatre angles ou vingt-quatre côtés des petits miroirs. Il est aisé de sentir qu’il y a en effet de l'avantage à donner à ces mi- roirs une figure polygone d’un grand nom- bre de côtés égaux , afin que la quantité de lumière soit moins inégalement répartie dans l’image réfléchie; et elle sera répartie le moins inégalement qu’il est possible lorsque les miroirs seront circulaires. J’ai bien vu qu’il y avoit de la perte à employer des mi- roirs quadi'angulaires, longs de six pouces sur huit pouces; mais j’ai préféré cette forme, parce qu’elle est, comme je l’ai dit, plus avantageuse pour brûler horizontale- ment. J’ai aussi trouvé dans la même dissertation de M. Melol , que ie P. Kircher avoit écrit qu’Archimède avoit pu brûlera une grande distance avec des miroirs plans, et que l’ex- périence lui avoit appris qu’en réunissant de cette façon les images du soleil, on produi- soit une chaleur considérable au point de réunion. Enfin , dans les Mémoires de V Académie, annee 1726, M. du Fay, dont j’honorerai toujours la mémoire et les talens , paroît avoir touché à cette découverte : il dit « qu’ayant reçu l’image du soleil sur un mi- roir plan d’un pied carré , et l’ayant portée jusqu’à six cents pieds sur un miroir con- cave de dix-sept pouces de diamètre , elle avoit encore la force de brûler des matières combustibles au foyer de ce dernier mi- roir ; » et à la fin de son Mémoire il dit 1 « quelques auteurs (il veut sans doute pai 1 du P. Kircher) ont proposé de former ijk miroir d’un très-long foyer par un gn ,l(j nombre de petits miroirs plans, que plusici Ü personnes tiendroient à la main , et d */, geroient de façon que les images du sc formées par chacun de ces miroirs conco 1 La roient en un même point , et que ce se| fil peut-être la façon de réussir la plus sûr L| la moins difficile à exécuter. » Un peui ssi réflexion sur l’expérience du miroir c y cave et sur ce projet auroit porté M. du * à la découverte du miroir d’Archimède, <) arl traite cependant de fable un peu plus lia lm car il me paroît qu’il étoit tout nature]; lier conclure de son expérience que, puisqi app miroir concave de dix-sept pouces de < fii mètre sur lequel l’image du soleil ne tomu jute pas tout entière , à beaucoup près , peut h 1 pendant brûler par cette seule partie* tor l’image du soleil réfléchie à six cents pj pii dans un foyer que je suppose large de t ht lignes, onze cent cinquante-six miroirs pli semblables au premier miroir réfléchisse doivent à plus forte raison brûler dire ment à celte distance de six cents pieds I, que par conséquent deux cent quatre-vii neuf miroirs plans auroient été plus que fisans pour brûler à trois cents pieds , réunissant les deux cent quatre-vingt-i images : mais, en fait de découverte, le nier pas, quoique souvent le plus fac est cependant celui qu’on fait le plus r ment. Mon mémoire , tel qu’on vient de le a été imprimé dans le volume de YAcadÆ des Sciences, année 1747, sous le tit ion Invention des miroirs pour brûler à grande distance. Feu M. Bouguet, et ç ques autres membres de cette savante c pagnie, m’ayant fait plusieurs objectn tirées principalement de la doctrine de cartes dans son Traité de Dioptrique crus devoir y répondre par le mémoire vaut, qui fut lu à l’Academie la même an L mais que je ne fis pas imprimer par m gement pour mes adversaires en opin Cependant , comme il contient plusi choses utiles , et qu’il pourra servir de servatif contre les erreurs contenues 1 quelques livres d’optique, surtout dans < de la Dioptrique de Descartes, que d’aill |ei il sert d’explication et de suite au mém précédent, j’ai jugé à propos de les joii ici et de les publier ensemble. • ***, lès* Partie expérimentale. 433 ABTICLE SECOND. flexions sur le jugement de Descartes au tujet des miroirs d’Archimède, avec le I développement de la théorie de ces miroirs , 1 1’ explication de leurs principaux usages. ,jC01li La Dioptrique de Descartes, cet ouvrage ’il a donné comme le premier et le prin- flial essai de sa méthode de raisonner dans sciences, doit être regardée comme un ^01r Jef-d’œuvre pour son temps : mais les plus mède, plus, DJtlil les spéculations sont souvent démenties l’expérience, et tous les jours les sû- mes mathématiques sont obligées de se er sous de nouveaux faits ; car , dans Pwsi pplicalion qu’on en fait aux plus petites rties de la physique, on doit se défier de ates les circonstances, et ne pas se con- aux choses qu’on croit savoir assez , ur prononcer affirmativement sur celles sont inconnues. Ce défaut n’est cepen- nt que trop ordinaire ; et j’ai cru que je ois quelque chose d’utile pour ceux qui nient s’occuper d’optique, que de leur poser ce qui manquoit à Descartes pour luvoir donner une théorie de cette science li fût susceptible d’être réduite en pratique, usquffl Son Traité de Dioptrique est divisé en dix piedsj scours. Dans le premier, notre philosophe vingt rie de la lumière; et comme il ignoroit rte, le n mouvement progressif, qui n’a été dé- us fi u vert que quelque temps après par Roë- plus] er, il faut modifier tout ce qu’il dit à cet Çard, et on ne doit adopter aucune des de le plications qu’il donne au sujet de la na- hi' l’homme ne peut rien faire d’infini , mais ; ilüi une distance indéfinie assez considérable ; car supposons que mon miroir , au lieu d’être composé de deux cent vingt-quatre petites , ine glaces, fût composé de deux mille, ce qui est possible, il n’en faut que vingt poiu brûler à vingt pieds ; et le foyer étanl comme une colonne de lumière , ces vingt glaces brûlent en même temps à dix-sept et à vingt-trois pieds : avec vingt-cinq autre glaces , je ferai un foyer qui brûlera depuis vingt-trois jusqu’à trente; avec vingt-neii! glaces, un foyer qui brûlera depuis treatt jusqu’à quarante; avec trente-quatre glaces un foyer qui brûlera depuis quarante jusqu’ cinquante-deux; avec quarante glaces, de puis cinquante-deux jusqu’à soixante-quatre avec cinquante glaces , depuis soixante-qualr |0111 jusqu’à soixante-seize ; avec soixante glaces depuis soixante-seize jusqu’à quatre-vingt huit; avec soixante-dix glaces, depuis quat* vingt-huit jusqu’à cent pieds. Yoilà doij déjà une ligne brûlante , depuis dix-sel jusqu’à cent pieds, où je n’aurai employé que trois cent vingt-huit glaces ; et, pour I continuer, il n’y a qu’à faire d’abord 11 J1'81 foyer de quatre-vingts glaces , il brûlera dt puis cent pieds jusqu’à cent seize ; et quatti Pe^ vingt-douze glaces, depuis cent seize jusqu1 “ cent trente-quatre pieds ; et cent huit glaces !el* depuis cent trente-quatre jusqu’à cent cic quante ; et cent vingt-quatre glaces, depu: cent cinquante jusqu’à cent soixante-dix; i cent cinquante-quatre glaces , depuis cei soixante-dix jusqu’à deux cents pieds. Ain; voilà ma ligne brûlante prolongée de cet pieds, en sorte que depuis dix-sept piec jusqu’à deux cents pieds, en quelque endra de cette distance qu’on puisse mettre q corps combustible , il sera brûlé ; et , poi cela , il ne faut en tout que huit cent quatri vingt-six glaces de six pouces ; et en en! ployant le reste des deux mille glaces , J prolongerai de même la ligne brûlante jui qu’à trois et quatre cents pieds; et avec ijpari plus grand nombre de glaces, par exempl plus avec quatre mille, je la prolongerai beat fout coup plus loin, à une distance indéfini] b lu Or, tout ce qui, daus la pratique, est ina pffli fini peut être regardé comme infini dans! purf théorie : donc notre célébré philosophe! plus eu tort de dire que cette ligne brûlante! ®ml l’infini n’étoit qu’une rêverie. J mil Maintenant venons à la théorie. Rie j 1, gran Ijuettt PARTIE EXPERIMENTALE. 435 Ijïst plus vrai que ce que dit Descartes I! sujet de la réunion des rayons du so- 1 , qui ne se fait pas dans un point , mais ns un espace ou foyer dont le diamètre 'gmente à proportion de la distance : mais grand philosophe n’a pas senti l’étendue j ce principe , qu’il ne donne que comme e remarque ; car, s’il y eût fait atten- >n, il n’auroit pas considéré, dans tout le iste de son ouvrage, les rayons du soleil mme parallèles; il n’auroit pas établi ;mme le fondement de la théorie de sa I nstruction des lunettes la réunion des jyons dans un point, et il se seroit bien jrdé de dire affirmativement1 : « Nous mirons , par cette invention , voir des ob- ts aussi particuliers et aussi petits dans s astres que ceux que nous voyons com- munément sur la terre. » Cette assertion ne jiuvoit être vraie qu’en supposant le parallé- >me des rayons et leur réunion en seul lint ; et par conséquent elle est opposée à j . propre théorie , ou plutôt il n’a pas em- I loyé la théorie comme il le falloil : et en j-fet , s’il n’eût pas perdu de vue Cette re- i arque, il eût supprimé les deux derniers ivres de sa Dioptrique ; car il auroit vu ne , quand même les ouvriers eussent pu ii lier les vers comme ill’exigeoit, ces verres j’auroient pas produit les effets qu’il leur 1 1 supposés , de nous faire distinguer les plus : jetits objets dans les astres, à moins qu’il l ’eût en même temps supposé dans ces ob- jets une intensité de lumière infinie, ou, ce I ui revient au même, qu’ils eussent', malgré leur éloignement, pu former un angle seq- Bible à nos yeux. j Comme ce point d’optique n’a jamais été lien éclairci, j’entrerai dans quelques dé- tails à cet égard. On peut démontrer que deux î bjets également lumineux , et dont les dia- îètres sont différais, ou bien que deux I bjets dont les diamètres sont égaux, et J lont l’intensité de lumière est différente , jjlioivent être observés avec des lunettes dif- férentes : que , pour observer avec le plus I jrand avantage possible, il faudroit des lu- Jiettes différentes pour chaque planète; que, par exemple, Vénus, qui nous paroît bien dus petite que la lune, et dont je suppose jiour un instant la lumière égale à celle de a lune, doit être observée avec une lunette l’un plus long foyer que la lune; et que la perfection des lunettes, pour en tirer le plus grand avantage possible, dépend d’une (combinaison qu’il faut faire non seulement entre les diamètres et les courbures des I i. Page i3 j , verres , comme Descartes l’a fait , mais en- core entre ces mêmes diamètres et l’inten- sité de la lumière de l’objet qu’on observe. Celte intensité de la lumière de chaque ob- jet est un élément que les auteurs qui ont écrit sur l’optique n’ont jamais employé; et cependant il fait plus que l’augmentation de l’angle sous lequel un objet doit nous paroîlre , en vertu de la courbure des verres. Il en est de même d’une chose qui semble être un paradoxe; c’est que les miroirs ar- dens , soit par réflexion , soit par réfraction , feroient un effet toujours égal, à quelque distance qu’on les mît du soleil. Par exem- ple , mon miroir, brûlant , à cent cinquante pieds, dubois sur la terre, brûleroit de même à cent cinquante pieds, et avec au- tant de force, dubois dans Saturne, où ce- pendant la chaleur’du soleil est environ cent fois moindre que sur la terre. Je crois que les bons esprits sentiront bien , sans autre dé- monstration , la vérité de ces deux proposi- tions, quoique toutes deux nouvelles et sin- gulières. Mais, pour ne pas m’écarter du sujet que je me suis proposé , et pour démontrer que Descartes n’ayant pas la théorie qui est né- cessaire pour construire les miroirs d’Arehi- mède, il n’étoit pas en état de prononcer qu’ils étoient impossibles , je vais faire sen- tir , autant que je le pourrai , en quoi con- sistoit la difficulté de celte invention. Si le soleil , au lieu d’occuper à nos yeux un espace de 32 minutes de degré, étoit réduit en un point , "alors il est certain que ce point de lumière réfléchie par un point d’une surface polie , produiroit à toutes les distan- ces une lumière et une chaleur égales , parce que l’interposition de l’air ne fait rien ou presque rien ici; que par conséquent ua miroir dont la surface seroit égale à celle d’un autre brûleroit à dix lieues à peu près, aussi bien que le premier brûleroit à dix pieds , s’il étoit possible de le travailler sur une sphère de quarante lieues, comme on peut travailler l’autre sur une sphère de quarante pieds ; parce que chaque point de la surface du miroir réfléchissant le point lumineux auquel nous avons réduit le dis- que du soleil, on auroit, en variant la cour- bure des miroirs, une égale lumière à tou- tes les distances , sans changer leurs diamè- tres. Ainsi , pour brûler à une grande dis- tance, dans ce cas il faudroit en effet un miroir très- exactement travaillé sur une sphère , ou une hyperboloïde proportionnée à la distance , ou bien un miroir brisé en une infinité de points physiques plans , qu’il 28. 436 MINERAUX. INTRODUCTION. faudrait faire coïncider au meme point : niais le disque du soleil occupant un espace de 32 minutes de degré, il est clair que le même miroir sphérique ou hyperbolique, ou d’une autre ligure quelconque , ne peut jamais , en vertu de cette figure, réduire l’image du soleil en un espace plus petit que de 32 minutes ; que dès lors l’image aug- mentera toujours à mesure qu’on s’éloignera ; que, de plus, chaque point de la surface nous donnera une image d’une même lar- geur, par exemple, d’un demi-pied à soixante pieds : or, comme il est nécessaire, pour produire tout l’effet possible , que toutes ces images coïncident dans cet espace d’un demi-pied, alors, au lieu de briser le mi- roir en une infinité de parties , il est évi- dent qu’il est à peu près égal et beaucoup plus commode de ne le briser qu’en un petit nombre de parties planes d’un demi-pied de diamètre chacune , parce que chaque petit miroir plan d’un demi-pied donnera une image d’environ un demi-pied, qui sera à peu près aussi lumineuse qu’une pareille surface d’un demi-pied, prise dans le miroir sphérique ou hyperbolique. La théorie de mon miroir ne consiste donc pas, comme on l’a dit ici, à avoir trouvé l’art d’inscrire aisément des plans dans une surface sphérique, et le moyen de changer à volonté la courbure de celte surface sphérique ; mais elle suppose cette remarque plus délicate , et qui n’avoit ja- mais été faite, c’est qu’il y a presque autant d’avantage à se servir de miroirs plans que de miroirs de toute autre figure, dès qu’on veut brûler à une certaine distance, et que la grandeur du miroir plan est déterminée par la grandeur de l’image à cette distance, en sorte qu’à la distance de soixante pieds , où l’image du soleil a environ un demi-pied de diamètre, on brûlera à peu près aussi bien avec des miroirs plans d’un demi-pied qu’avec des miroirs hyperboliques les mieux travaillés , pourvu qu’ils n’aient que la même grandeur. De même , avec des miroirs plans d’un pouce et demi , on brûlera à quinze pieds à peu près avec autant de force qu’a- vec un miroir exactement travaillé dans toutes ses parties; et, pour le dire en un mot , un miroir à facettes plates produira à peu près autant d’effet qu’un miroir travaillé avec la dernière exactitude dans toutes ses parties, pourvu que la grandeur de chaque fa- cette soit égale à la grandeur de l’image du soleil; et c’est par cette raison qu’il y a une certaine proportion entre la grandeur des miroirs plans et les distances , et que , pour brûler plus loin , on peut employer , même avec avantage , de plus grandes glaces dans mon miroir que pour brûler plus près. Car si cela n’étoit pas , on sent bien qu’en réduisant, par exemple, mes glaces de six pouces à trois pouces , et employant quatre fois autant de ces glaces que des premières, ce qui revient au même pour l’étendue de la surface du miroir, j’aurois eu quatre fois plus d’effet, et que plus les glaces seraient petites, et plus le miroir produirait d’effet; et c’est à ceci que se serait réduit l’art de quel- qu’un qui aurait seulement tenté d’inscrire une surface polygone dans une sphère , et qui auroit imaginé l’ajustement dont je me suis servi pour faire changer à volonté la courbure de cette surface : il auroit fait les glaces les plus petites qu’il auroit été possi- ble; mais le fond et la théorie de la chose * est d’avoir reconnu qu’il n’étoit pas seule- ment question d’inscrire une surface poly- gone dans une sphère avec exactitude , et d’en faire varier la courbure à volonté, mais i encore que chaque partie de cette surface devoit avoir une certaine grandeur déteil minée pour produire aisément un grand effet; ce qui fait un problème fort diffé- rent, et dont la solution m’a fait voir qu’au lieu de travailler ou de briser un miroir dans toutes ses parties pour faire coïncider les images au même endroit , il suffisoit de le briser ou de le travailler à facettes planes en grandes portions égales à la grandeur de l’image, et qu’il y avoit peu à gagner en le brisant en de trop petites parties , ou , ce qui est la même chose , en le travaillant exacte- ment dans tous ses points. C’est pour cela que j’ai dit dans mon mémoire que, pour brûler à de grandes distances , il falloit ima- giner quelque chose de nouveau et de tout- à-fait indépendant de ce qu’on avoit pensé et pratiqué jusqu’ici; et ayant supputé géo- métriquement la différence , j’ai trouvé qu’un miroir parfait , de quelque courbure qu’il puisse être , n’aura jamais plus d’avan- tage sur le mien que de 17 à 10, et qu’en même temps l’exécution en serait impossi- ble pour ne brûler même qu’à une petite distance , comme de vingt-cinq ou trente pieds. Mais revenons aux assertions de Des- cartes. U dit ensuite « qu’ayant deux verres ou miroirs ardens, dont l’un soit beaucoup plus grand que l’autre, de quelque façon qu’il puisse être, pourvu que leurs figures soient toutes pareilles , le plus grand doit bien ramasser les rayons du soleil en un plus grand espace et plus loin de soi que le plus { point le ce jes n pes ■inilfi -'tins g | Cec rien» iiiotre Biiii par mtr loirs I P • lirden 1 Iren 'loyer [fedis in un ropo m P? [fia 'lion, 1 de pti nièim | le mi '[tombe ' centre i ligne 1 prie dans I J chaud 1 [toute 1 ! «outre etnei que s jsiaul; sur le toute PARTIE EXPÉRIMENTALE. 43 ? us pelit, mais que ces rayons ne doivent int avoir plus de force en chaque partie cet espace qu’en celui où le plus petit ramasse , en sorte qu’on peut faire des rres ou miroirs extrêmement petits , qui nieront avec autant de violence que les us grands. » Ceci est absolument contraire aux expé- uices que j’ai rapportées dans mon mé- oire , où j’ai fait voir qu’à égale intensité lumière un grand foyer brûle beaucoup us qu’un petit : et c’est en partie sur cette ïiarque , tout opposée au sentiment de Des- rtes , que j’ai fondé la théorie de mes mi- irs; car voici ce qui suit Je l’opinion de philosophe. Prenons un grand miroir dent , comme celui du sieur Segard , qui rente-deux pouces de diamètre , et un yer de neuf lignes de largeur à six pieds distance , auquel foyer le cuivre se fond une minute, et faisons dans les mêmes reportions un petit miroir ardent de trente- lignes de diamètre, dont le foyer •a de 9/12 ou de 3/4 de ligne de dia- ètre , et la distance de six pouces : puis- ne le grand miroir fond le cuivre en une inute dans l’étendue de son foyer, qui est neuf lignes, le petit doit, selon Descar- , fondre dans le même temps la même latière dans l’étendue de son foyer , qui est 3/4 de ligne : or j’en appelle à l’expé- ence , et on verra que , bien loin de fondre cuivre , à peine ce petit verre brûlant ourra-t-il lui donner un peu de chaleur. Comme ceci est une remarque physique qui n’a pas peu servi à augmenter mes pérances lorsque je doutois encore si je ourrois produire du feu à une grande dis- nice , je crois devoir communiquer ce que ai pensé à ce sujet. La première chose à laquelle je fis atten- 1 , c’est que la chaleur se communique proche eu proche et se disperse , quand îême elle est appliquée continuellement sur même point : par exemple, si on fait omber le foyer d’un verre ardent sur le entre d’un écu , et que ce foyer n’ait qu’une gne de diamètre , la chaleur qu’il produit le centre de l’écu se disperse et s’étend !ans le volume entier de l’écu , et il devient :haud jusqu’à la circonférence; dès lors ute la chaleur , quoique employée d’abord ontre le centre de l’écu , ne s’y arrête pas , t ne peut pas produire un aussi grand effet ue si elle y demeuroit tout entière. Mais i au lieu d’un foyer d’une ligne , qui tombe ur le milieu de l’écu , je fais tomber sur l’écu out entier un foyer d’égale force au premier, toutes les parties de l’écu étant également échauffées dans ce dernier cas , il 11’y a pas de perte de chaleur comme dans le premier; et le point du milieu profitant de la chaleur des autres points autant que ces points pro- fitent de la sienne , l’écu sera fondu par la chaleur dans ce dernier cas , tandis que dans le premier il n’aura été que légèrement échauffé. De là je conclus que toutes les fois qu’on peut faire un grand foyer , on est sûr de produire de plus grands effets qu’a- vec un petit foyer, quoique l’intensité de lumière soit la même dans tous deux , et qu’un petit miroir ardent ne peut ja- mais faire autant d’effet qu’un grand ; et même qu’avec une moindre intensité de lu- mière un grand miroir doit faire plus d’effet qu’un petit , la figure de ces deux miroirs étant toujours supposée semblable. Ceci , qui , comme l’on voit , est directement op- posé à ce que dit Descartes , s’est trouvé confirmé par les expériences rapportées dans mon mémoire. Mais je ne me suis pas borné à savoir d’une manière générale que les grands foyers agissoient avec plus de force que les petits : j’ai déterminé à très-peu près de combien est cette augmentation de force, et j’ai vu qu’elle étoit très-considéra- ble ; car j’ai trouvé que s’il faut dans un miroir cent quarante-quatre fois la surface d’un foyer de six lignes de diamètre pour brûler, il faut au moins le double, c’est-à- dire deux cent quatre-vingt-huit fois cette surface pour brûler à un foyer de deux li- gnes , et qu’à un foyer de six pouces il 11e faut pas trente fois cette même surface du foyer pour brûler ; ce qui fait , comme l’on voit, une prodigieuse différence, sur la- quelle j’ai compté lorsque j’ai entrepris de faire mon miroir ; sans cela il y auroit eu de la témérité à l’entreprendre , et il n’au- roit pas réussi. Car supposons un instant que je n’eusse pas eu cette connoissance de l’avantage des grands foyers sur les petits , voici comme j’aurois été obligé de raison- ner : Puisqu’il faut à un miroir deux cent quatre-vingt-huit fois la surface du foyer pour brûler dans un espace de deux lignes , il faudra de même deux cent quatre-vingt- huit glaces ou miroirs de six pouces pour brûler dans un espace de six pouces ; et dès lors , pour brûler seulement à cent pieds , il auroit fallu un miroir composé d’environ onze cent cinquante-deux glaces de six pou- ces ; ce qui étoit une grandeur énorme pour un petit effet , et cela étoit plus que suffi- sant pour me faire abandonner mon projet : mais connoissant l’avantage considérable des 438 MINÉRAUX. INTRODUCTION, grands foyers sur les petits, qui, dans ce cas, est de 288 à 3o, je sentis qu’avec cent vingt glaces de six pouces je brûlerois très- ifS3! ùroirs plans, dont il falloit au moins un ombre égal au nombre de fois qu’il faut à lumière directe du soleil pour brûler, ette conclusion, qui eût été la vraie selon principes, est, comme l’on voit, fort ifférente de celle qu’il a donnée. On est maintenant en état de juger si je ai pas traité le célèbre Descartes avec tous s égards que mérite son grand nom , lors- îe j’ai dit dans mon mémoire : « Descartes, 3 pour juger et même pour surpasser Ar- îimède , a prononcé contre lui d’un ton de I laîlre : il a nié la possibilité de l’invention ; ier ij t son opinion a prévalu sur les témoigna- s es et la croyance de toute l'antiquité. » K Jro | Ce que je viens d’exposer suffit pour jus- sotti jfier ces termes que l’on m’a reprochés; et ive (|i eut-être même sont-ils trop forts, car Ar- ien himède étoit un très-grand génie; et lors- dii ue j’ai dit que Descartes étoit né pour le ; ceti Jger, et même pour le surpasser, j’ai senti phÿj u’il pouvoit bien y avoir un peu de com- , Céi 'liment national dans mon expression. >,etj J’aurois encore beaucoup de choses à dire iixm ur cette matière ; mais comme ceci est déjà lu Fa >ien long , quoique j’aie fait tous mes efforts j es tour être court, je me bornerai pour le «Desond du sujet à ce que je viens d’exposer ; j|)i| nais je 11e puis me dispenser de parler en- îp :ore un moment au sujet de l’historique de aagf a chose, afin de satisfaire , par ce seul mé- istai fioire , à toutes les objections et difficultés pi [ju’on m’a faites. Fay t Je ne prétends pas prononcer affirmati- isliyemenl qu’ Archimède se soit servi de pareils irait jniroirs au siège de Syracuse , ni même que ençe’e soit lui qui les ait inventés; et je ne les npf \i appelés les miroirs d' Archimède que parce ni qu’ils étoient connus sous ce nom depuis >1 fa plusieurs siècles. Les auteurs contemporains ies jet ceux des temps qui suivent celui d’Archi- entmède, et qui sont parvenus jusqu’à nous, ne leljfont pas mention de ces miroirs : Tile-Live, re|!à qui le merveilleux fait tant de plaisir à so Raconter, n’en parle pas; Polybe, à l’exac- titude de qui les grandes inventions n’au- fen roient pas échappé, puisqu’il entre dans le détail des plus petites, et qu’il décrit très- soigneusement les plus légères circonstances du siège de Syracuse, garde un silence pro- fond au sujet de ces miroirs; Plutarque, ce judicieux et grave auteur, qui a rassemblé un si grand nombre de faits particuliers de la vie d’Archimède , parle aussi peu des mi- roirs que les deux précédens. En voilà plus qu’il n’en faut pour se croire fondé à douter de la vérité de cette histoire : cependant ce ne sont ici que des témoignages négatifs ; et quoiqu’ils ne soient pas indifférens, ils ne peuvent jamais donner une probabilité équi- valente à celle d’un seul témoignage positif. Galien, qui viveit dans le second siècle, est le premier qui en ait parlé; et après avoir raconté l’histoire d’un homme qui en- flamma de loin un morceau de bois résineux, mêlé avec de la fiente de pigeon , il dit que c’est de cette façon qu’Archimède brûla les vaisseaux des Romains; mais, comme il ne décrit pa$ ce moyen de brûler de loin, et que son expression peut signifier aussi bien un feu qu’on auroit lancé à la main ou par quelque machine, qu’une lumière réfléchie par un miroir , son témoignage n’est pas as- sez clair pour qu’on puisse en rien conclure d’affirmatif. Cependant 011 doit présumer, et même avec une grande probabilité, qu’il ne rapporte l’histoire de cet homme qui brûla au loin que parce qu’il le fit d’une manière singulière , et que , s’il n’eût brûlé qu’en lançant le feu à la main , ou en le je- tant par le moyen d’une machine , il n’y au- roit eu rien d’extraordinaire dans cette fa- çon d’enflammer, rien par conséquent qui fût digne de remarque , et qui méritât d’être rapporté et comparé à ce qu’avoit fait Ar- chimède, et dès lors Galien n’en eût pas fait mention. On a aussi des témoignages semblables de deux ou trois autres auteurs du troisième siècle , qui disent seulement qu’Archimède brûla de loin les vaisseaux des Romains , sans expliquer les moyens dont il se servit ; mais les témoignages des auteurs du dou- zième siècle ne sont point équivoques, et surtout ceux de Zonaras et de Tzetzès que j’ai cités; c’est-à-dire ils nous font voir clai- rement que cette invention étoit connue des anciens; car la description qu’en fait ce der- nier auteur suppose nécessairement ou qu’il eût trouvé lui-même le moyen de construire ces miroirs, ou qu’il l’eût appris et cité d’a- près quelque auteur qui en avoit fait une très-exacte description, et que l’inventeur, quel qu’il fût , entendoit à fond la théorie de ces miroirs; ce qui résulte de ce que dit Tzetzès de la figure de vingt-quatre angles 44o MINÉRAUX. INTRODUCTION. ou côtés qu’avoient les petits miroirs , ce qui est en effet la figure la plus avantageuse. Ainsi on ne peut pas douter que ces mi- roirs n’aient été inventés et exécutés autre- fois, et le témoignage de Zonaras, au sujet de Proclus , n’est pas suspect : « Proclus s’en servit, dit-il, au siège de Constantinople, l’an 5i4, et il brûla la flotte de Yitalien. » Et même ce que Zonaras ajoute me paroît une espèce de preuve qu’ Archimède étoit le premier inventeur de ces miroirs ; car il dit précisément que cette découverte étoit an- cienne, et que l’iiistorien Dion en attribue l’honneur à Archimède, qui la fit et s’en servit contre les Romains au siège de Syra- cuse. Les livres de Dion où il est parlé du siège de Syracuse ne sont pas parvenus jus- qu’à nous ; mais il y a grande apparence qu’ils existoient encore du temps de Zona- ras , et que , sans cela , il ne les eût pas cités comme il l’a fait. Ainsi , toutes les probabi- lités de part et d’autre étant évaluées , il reste une forte présomption qu’Archimède avoit en effet inventé ces miroh’s, et qu’il s’en étoit servi contre les Romains. Feu M. Melot que j’ai cité dans mon mémoire , et qui avoit fait des recherches particulières et très-exactes sur ce sujet , étoit de ce sen- timent , et il pensoit qu’Archimède avoit en effet brûlé les vaisseaux à une distance mé- diocre, et, comme le dit Tzetzès, à la por- tée du trait. J’ai évalué la portée du trait à cent cinquante pieds d’après ce que m’en ont dit des savans très-versés dans la con- noissance des usages anciens : ils m’ont as- suré que toutes les fois qu’il est question, dans les auteurs , de la portée du trait , on doit entendre la distance à laquelle un homme lançoit à la main un trait ou un javelot ; et, si cela est , je crois avoir donné à celte dis- tance toute l’étendue qu’elle peut comporter. J’ajouterai qu’il n’est question dans au- cun auteur ancien d’une plus grande distance, comme de trois stades, et j’ai déjà dit que l’auteur qu’on in’avoit cité , Diodore de Si- cile , n’en parle pas , non plus que du siège de Syracuse, et que ce qui nous reste de cet auteur finit à la guerre d’Ipsus et d’Antigo- nus , environ soixante ans avant le siège de Syracuse. Ainsi on ne peut pas excuser Des- cartes en supposant qu’il a cru que la dis- tance à laquelle on a prétendu qu’Archimède avoit brûlé étoit très-gi’ande , comme par exemple de trois stades , puisque cela n’est dit dans aucun auteur ancien , et qu’au con- traire il est dit dans Tzetzès que cette dis- tance n’étoit que de la portée du trait ; mais je suis convaincu que c’est cette même dis- tance que Descartes a regardée comme for i grande, et qu’il étoit persuadé qu’il n’éloi pas possible de faire des miroirs pour brû 1er à cent cinquante pieds; qu’enfin c’es pour cette raison qu’il a traité ceux d’Ai chimède de fabuleux. Au reste , les effets du miroir que j’ai cou struit ne doivent être regardés que comm des essais sur lesquels, à la vérité, on peu i statuer , toutes proportions gardées , mai *in qu’on ne doit pas considérer comme les plu grands effets possibles ; car je suis convainc que si on vouloit faire un miroir semblable avec toutes les attentions nécessaires , il prc duiroit plus du double de l’effet. La premièr attention seroit de prendre des glaces de fi gure hexagone , ou même de vingt-quatr côtés, au lieu de les prendre barlongues comme celles que j’ai employées, et cela afin d’avoir des figures qui pussent s’ajusteji ensemble sans laisser de grands intervalles et qui approchassent en même temps de 1 figure circulaire. La seconde seroit de faiiïr polir ces glaces jusqu’au dernier degré pa un lunetier, au lieu de les employer telle! qu’elles sortent de la manufacture , où le po [ liment se faisant par une portion de cerch les glaces sont toujours un peu concaves ( irrégulières. La troisième attention seroit d choisir, parmi un grand nombre de glaces celles qui donneraient à une grande distanc une image plus vive et mieux terminée , c qui est extrêmement important , et au poiri qu’il y a dans mon miroir des glaces qi font seules trois fois plus d’effet que d’autre à une grande distance , quoiqu’à une petit (| distance, comme de vingt ou vingt-cini pieds, l’effet en paroisse absolument ! r même. Quatrièmement , il faudrait des ghl * ! ces d’un demi-pied tout au plus de surfac pour brûler à cent cinquante ou deux cent pieds , et d’un pied de surface pour brûlé à trois ou quatre cents pieds. Cinquième ment , il faudrait les faire étamer avec phi de soin qu’on ne le fait ordinairement. J’; remarqué qu’en général les glaces fraîche ment étamées réfléchissent plus de lumièr que celles qui le sont anciennement ; l’étci mage, en se séchant, se gerce, se divise, < laisse de petits intervalles qu’on aperço en y regardant de près avec une loupe ; t ces petits intervalles donnant passage à lumière, la glace en réfléchit d’autant moin, On pourrait trouver le moyen de faire u meilleur étamage , et je crois qu’on y pat viendrait en employant de l’or et du vit-ai gent : la lumière seroit peut-être un pe jaune par la réflexion de cet étamage; ma ♦il' PARTIE EXPÉRIMENTALE, loin que cela fît un désavantage , j’i- ne au contraire qu’il y auroit à gagner, e que les rayons jaunes sont ceux qui nient le plus fol lement la rétine et qui ent le plus violemment , comme je crois être assuré, en réunissant, au moyen verre lenliculaire, une quantité de ns jaunes qui m’étoient fournis par un d prisme, et en comparant leur action une égale quantité de rayons de toute couleur , réunis par le même verre len- aire , et fournis par le même prisme, xièmement, il faudroit un châssis de fer es vis de cuivre, et un ressort pour as- tlir chacune des petites planches qui por- tes glaces; tout cela conforme à un mo- que j’ai fait exécuter par le sieur Cho- 1 , afin que la sécheresse et l’humidité , agissent sur le châssis et les vis en bois, Causassent pas d’inconvénient, et que le lorsqu’il est une fois formé, ne fût sujet à s’élargir , et à se déranger lors- on fait rouler le miroir sur son pivot, ’on le fait tourner autour de son axe ir suivre le soleil : il faudroit aussi y ajou- une alidade avec deux pinnules au mi- de la partie inférieure du châssis , afin ’assurer de la position du miroir par port au soleil, et une autre alidade sem- ble, mais dans un plan vertical au plan la première , pour suivre le soleil à ses érentes hauteurs. Au moyen de toutes ces attentions, je '5 pouvoir assurer, par l’expérience que acquise en me servant de mon miroir, QePe? on pourroit en réduire la grandeur à moi- et qu’au lieu d’un miroir de sept pieds lequel j’ai brûlé du bois à cent cin- ànte pieds, on produiroit le même effet 44 1 me les p| îCOBvaiij sembla! tes, il ipreoiii [laces Je] iagt-quai larlonjuf s, et ci al s'ajust Italie ®ps Je; il Je fai degré jjer où le pi 'ecercll seroiti ace lejli iJislam îiaée, aupoi aces (] iJ'aiili njl-cu aient , desgl surfai ÎC UÎ1 m;roir de cinq pieds et demi , ce !lK® i n’est, comme l’on voit, qu’une très-mé- e )cre grandeur pour un très-grand effet; et, Luiemi même , je crois pouvoir assurer qu’il ne ecPj îdroit alors qu’un miroir de quatre pieds n1, J j demi pour brûler à cent pieds , et qu’un :rai® iroir de trois pieds et demi brûleroit à um!ei ixante pieds , ce qui est une distance bien ijeî nsidérable en comparaison du diamètre du ®i iroir. Perf Avec un assemblage de petits miroirs plans Pej ;xagones et d’acier poli , qui auroienl plus e \ i solidité , plus de durée que les glaces éta- IB01| ées , et qui ne seroient point sujets aux lire' térations que la lumière du soleil fait su- Pa ir à la longue à l’étamage, on pourroit pro- ul-a aire des effets très-utiles , et qui dédom- nPl tageroient amplement des dépenses de la i111* pnslruction du miroir. i° Pour toutes les opérations des eaux sâ- lées , où l’on est obligé de consommer du bois et du charbon , ou d’employer l’art des bâtimens de graduation , qui coûtent beau- coup plus que la construction de plusieurs miroirs tels que je les propose. Il ne faudroit, pour l’évaporation des eaux salées , qu’un assemblage de douze miroirs plans d’un pied carré chacun; la chaleur qu’ils réfléchiront à leur foyer , quoique dirigée au dessous de leur niveau, et à quinze ou seize pieds de distance, sera encore assez grande pour faire bouillir l’eau, et produire par conséquent une prompte évaporation ; car la chaleur de l’eau bouillante n’est que triple de la cha- leur du soleil d’été; et, comme la réflexion d’une surface plane bien polie ne diminue la chaleur que de moitié, il ne faudroit que six miroirs pour produire au foyer une cha- leur égale à celle de l’eau bouillante ; mais j’en double le nombre, afin que la chaleur se communique plus vite, et aussi à cause de la perte occasionée par l’obliquité sous laquelle le faisceau de la lumière tombe sur la surface de l’eau qu’on veut faire évaporer, et encore parce que l’eau salée s’échauffe plus lentement que l’eau douce. Ce miroir, dont l’assemblage ne formerait qu’un carré de quatre pieds de largeur sur trois de hau- teur , serait aisé à manier et à transporter ; et , si l’on vouloit en doubler ou tripler les effets dans le même temps , il vaudrait mieux faire plusieurs miroirs semblables , c’est-à- dire doubler ou tripler le nombre de ces mê- mes miroirs de quatre pieds sur trois que d’en augmenter l’étendue; car l’eau ne peut recevoir qu’un certain degré de chaleur dé- terminée, et l’on ne gagnerait presque rien à augmenter ce degré , et par conséquent la grandeur du miroir; au lieu qu’en faisant deux foyers par deux miroirs égaux , on dou- blera l’effet de l’évaporation, et on le tri- plera par trois miroirs dont les foyers tom- beront séparément les uns des autres sur la surface de l’eau qu’on veut faire évaporer. Au reste , l’on ne peut éviter la perte causée par l’obliquité ; et si l’on veut y remédier , ce ne peut être que par une autre perte en- core plus grande, en recevant d’abord les rayons du soleil sur une grande glace qui les réfléchirait sur le miroir brisé ; car alors il brûleroit en bas, au lieu de brûler en haut; mais il perdroit moitié de la chaleur par la première réflexion, et moitié du reste par la seconde ; en sorte qu’au lieu de six petits miroirs , il en faudroit douze pour obtenir une chaleur égale à celle de l’eau bouillante. Pour que l’évaporation se fasse avec plus I I 442 MINERAUX. INTRODUCTION. de suCdès , il faudra diminuer l’épaisseur de î’ëàü autant qu’il sera possible. Une masse d’eau d’un pied d’épaisseur ne s’évaporera J)as aussi vite , à beaucoup près , que la masse înème réduite à six pouces d’épais- Seur et augmentée du double en superficie. D’ailleurs le fond étant plus près de la sur- face , il s’échauffe plus promptement , et cette chaleur que reçoit le fond du vais - seau contribue encore à la célérité de l’éva- poration. 20 On pourra se servir avec avantage de ces miroirs pour calciner les plâtres et même les pierres calcaires ; mais il les faudroit plus grands et placer les matières en haut , afin de ne rien perdre par l’obliquité de la lumière. On a vu par les expériences dé- taillées dans le second de ces mémoires que le gypse s’échauffe plus d’une fois plus vite que la pierre calcaire tendre , et près de deux fois plus vite que le marbre ou la pierre calcaire dure ; leur calcination res- pective doit être en même raison. J’ai trouvé , par une expérience répétée trois fois , qu’il faut un peu plus de chaleur pour calciner le gypse blanc qu’on appelle albâtre que pour fondre le plomb. Or la chaleur nécessaire pour fondre le plomb est, suivant les expériences de Newton, huit fois plus grande que la chaleur du soleil d’été : il faudroit donc au moins seize petits miroirs pour calciner le gypse ; et à cause des pertes occasionées tant par l’obliquité de la lumière que par l’irrégularité du foyer, qu’on n’éloi- gnera pas au delà de quinze pieds , je pré- sume qu’il faudroit vingt et peut-être vingt- quatre miroirs d’un pied carré chacun pour calciner le gypse en peu de temps : par conséquent il faudroit un assemblage de quarante-huit de ces petits miroirs pour opérer la calcination sur la pierre calcaire la plus tendre , et soixante-douze des mêmes miroirs d’un pied en carré pour calciner les pierres calcaires dures. Or un miroir de douze pieds de largeur sur six pieds de hau- teur ne laisse pas d’être une grosse machine embarrassante et difficile à mouvoir, à mon- ter et à maintenir. Cependant on viendroit à bout de ces difficultés, si le produit de la calcination étoit assez considérable pour équivaloir et même surpasser la dépense de la consommation du bois : il faudroit , pour s’en assurer, commencer par calciner le plâtre avec un miroir de vingt-quatre pièces, et , si cela réussissoit , faire deux autres mi- roirs pareils , au lieu d’en faire un grand de soixante-douze pièces ; car, en faisant coïncider les foyers de ees trois miroirs de P vingt-quatre pièces , on produira une ch ; r leur égale , et qui seroit assez forte pour c, 'J ciner le marbre ou la pierre dure. Mais une chose très-essentielle reste do teuse ; c’est de savoir combien il faudroit i temps pour calciner, par exemple , un pi. cube de matière , surtout si ce pied eu! n’étoit frappé de chaleur que par une façj f je vois qu’il se passeroit du temps avant qj la chaleur eût pénétré toute son épaissaj je vois que , pendant tout ce temps , il sj perdroit une assez grande partie qui soi) roit de ce bloc de matière après y être | f trée : je crains donc beaucoup que la piej n’étant pas saisie par la chaleur de touJ jj^ côtés à la fois , la calcination ne fût ug lente,, et le produit en chaux très-pii L’expérience seule peut ici décider ; mal , faudroit au moins la tenter sur les matiè» f . gypseuses, dont la calcination doit être d f,a'!, fois plus prompte que celle des pierres! |ie caires T. J |'Si En concentrant cette chaleur du so| H dans un four qui n’auroit d’autre ouverl [ que celle qui laisseroit entrer la lumie! n,( on empêcheroit en grande partie la chah ! ‘ de s’évaporer; et en mêlant avec les pier F] calcaires une petite quantité de brasque poudre de charbon , qui de toutes les q tières combustibles est la moins chère, ca légère quantité d’aliment suffiroit pour no rir et augmenter de beaucoup la quantité, chaleur; ce qui produiroit une plus amj et plus prompte calcination , et à très-] de frais , comme on l’a vu par la seconde périence du quatrième mémoire. 3° Ces miroirs d’Archimède peuvent s vir en effet a mettre le feu dans des vo de vaisseau , et même dans le bois g| dronné , à plus de cent cinquante pieds distance : on pourvoit s’en servir aussi con ses ennemis en brûlant les blés et les aut productions de la terre; cet effet, qui roit assez prompt, seroit très-dommageal Mais ne nous occupons pas des moyens, faire du mal , et ne pensons qu’à ceux j peuvent procurer quelque bien à l’I manité. 4° Ces miroirs fournissent le seul unique moyen qu’il y ait de mesurer exac ment la chaleur : il est évident que de i. Il vient de paroître un petit ouvrage reu de grandes vues, de M, l’abbé Scipion Bexon a pour titre : Système de la fertilisation. II prop mes miroirs comme un moyen facile pour réd en chaux toutes les matières : mais il leur attril plus de puissance qu’ils n’en ont réellement n’est qu’en les multipliant qu’on pourroit obte les grands effets qu’il *’en promet. |me , pur c I mo’ b; pr ieffe IfiClll 112 | pile I: î?ARïlE EXPERIMENTALE. oirs dont les images lumineuses se réu- d’un assez petit temps ent produisent une chaleur double dans > les points de la surface qu’elles occu- t ; que trois , quatre , cinq , etc., miroirs neront de même une chaleur triple, druple , quintuple , etc. , et que par séquent on peut par ce moyen faire un mo mètre dont les divisions ne seront ît arbitraires , et les échelles différentes, me le sont celles de tous les thermomè- dont on s’est servi jusqu’à ce jour. La e chose arbitraire qui entreroit dans la truction de ce thermomètre Seroit la losition du nombre total des parties du cure en partant du degré de froid ab- ; mais en le prenant à 10,000 au des- de la congélation de l’eau, au lieu de » , comme dans nos thermomètres or- dres , on approcher oit beaucoup de la té , surtout en choisissant les jours de er les plus froids pour graduer le ther- lètre ; chaque image du soleil lui don- )it un degré de chaleur au dessus de la ; pérature que nous supposerons à celui la glace. Le point auquel s’élèveroit le cure par la chaleur de la première image soleil seroit marqué 1 ; le point où il iveroit par la chaleur de deux images es et réunies sera marqué 2 ; celui où images le feront monter sera mar- ; et ainsi de suite, jusqu’à la plus de hauteur, qu’on pourroit étendre jus- iioyen degré 36. On auroit à ce nentation de chaleur trente-six fois plus ide que celle du premier degré, dix-huit plus grande que celle du second, douze plus grande que celle du troisième, neuf plus grande que celle du quatrième, etc. : nentation 36 de chaleur au dessus elle de la glace seroit assez grande pour Ire le plomb , et il y a toute apparence le mercure , qui se volatilise à une bien n dre chaleur, feroit par sa vapeur casser ièrmomètre. On 11e pourra donc étendre livision que jusqu’à 12 , et peut-être ne à 9 degrés, si l’on se sert de mercure ces thermomètres ; et l’on n’aura par moyen que les degrés d’une augmenta - de chaleur jusqu’à 9. C’est une des >ons qui avoient déterminé Newton à se vir d’huile de lin au lieu de mercure ; et effet, on pourra, en se servant de cette leur, étendre la division non seulement degrés , mais jusqu’au point de cette ile bouillante. Je ne propose pas de rem- ces thermomètres avec de l’esprit-de- coloré ; il est universellement reconnu cette liqueur se décompose au bout ; set ereï que.1 ■afef Bmo» If 443 et que d’ailleurs elle ne peut servir aux expériences d’une chaleur un peu forte. Lorsqu’on aura marqué sur l’échelle de ces thermomètres remplis d’huile ou de mer- cure les premières divisions 1, 2, 3, 4, ëte.t$ qui indiqueront le double , le triple , lé quadruple , etc. , des augmentations dë là chaleur, il faudra chercher les parties ali- quotes de chaque division : par exemple , les points de 1 1/4,2 1/4, 3 1/4, etc., ou de 1 1/2, 2 1/2,3 1/2, etc. , et de 1 3/4, 2 3/4 * 3 3/4, etc.; ce que l’on obtiendra par un moyen facile qui sera de couvrir la moitié, ou le quart, ou les trois quarts de la superficie d’un des petits miroirs ; car alors l’image qu’il réfléchira ne contiendra que le quart , la moitié , ou les trois quarts de la chaleur que contient l’image entière ; et par conséquent les divisions des parties aliquotes seront aussi exactes que celles des nombres entiers. Si l’on réussit une fois à faire ce thermo- mètre réel, et que j’appelle ainsi parce qu’il marqueroit réellement la proportion de la chaleur, tous les autres thermomètres , dont les échelles sont arbitraires et différentes entre elles , deviendroient non seulement superflus , mais même nuisibles , dans bien des cas , à la précision des vérités physiques qu’on cherche par leur moyen. On peut se rappeler l’exemple que j’en ai donné, en parlant de l’estimation de la chaleur qui émane du globe de la terre, comparée à la chaleur qui nous vient du soleil. 5° Au moyen de ces miroirs brisés , on pourra aisément recueillir, dans leur entière pureté , les parties volatiles de l’or et de l’argent , et des autres métaux et minéraux ; car en exposant au large foyer de ces mi- rons une grande plaque de métal , comme une assiette ou un plat d’argent , on en verra sortir une fumee très-abondante pen- dant un temps considérable , jusqu’au mo- ment où le métal tombe en fusion ; et , en ne donnant qu’une chaleur un peu moindre que celle qu’exige la fusion , on fera éva- porer le métal au point d’en diminuer le poids assez considérablement. Je me suis assuré de ce premier fait , qui peut fournir des lumières sur la composition intime des métaux : j’aurois bien désiré recueillir cette vapeur abondante que le feu pur du soleil 1. Plusieurs voyageurs m’ont écrit que les ther- momètres à l’esprit - de - vin , de Réaumur, leur étoient devenus topt-à-fait inutiles , parce que cette liqueur se décolore et se charge d’une espèce de boue en assez ppu de temps. 444 MINÉRAUX. INTRODUCTION. fait sortir du métal , mais je n’avois pas les instrumens nécessaires ; et je ne puis que recommander aux chimistes et aux physi- ciens de suivre cette expérience importante, dont les résultats seroient d’autant moins équivoques que la vapeur métallique est ici très-pure; au lieu que , dans toute opération semblable qu’on voudroit faire avec le feu commun , la vapeur métallique seroit néces- sairement mêlée d’autres vapeurs provenant des matières combustibles qui servent d’ali- ment à ce feu. D’ailleurs ce moyen est peut-être le seul que nous ayons pour volatiliser les métaux fixes , tels que l’or et l’argent ; car je pré- sume que cette vapeur, que j’ai vue s’élever en si grande quantité de ces métaux échauf- fés au large foyer de mon miroir, n’est pas de l’eau , ni quelque autre liqueur, mais des parties mêmes du métal que la chaleur en détache en les volatilisant. On pourroit, en recevant ainsi les vapeurs pures des diffé- rons métaux , les mêler ensemble , et faire , par ce moyen , des alliages plus intimes et plus purs qu’on ne l’a fait par la fusion et par la mixtion de ces mêmes métaux fondus, qui ne se marient jamais parfaitement , .à cause de l’inégalité de leur pesanteur spéci- fique, et de plusieurs autres circonstances qui s’opposent à l’intimité et à l’égalité par- faite du mélange. Comme les parties consti- tuantes de ces vapeurs métalliques sont dans un état de division bien plus grande que dans l’état de fusion , elles se joindroient et se réuniroient de bien plus près et plus fa- cilement. Enfin on arriveroit peut-être , par ce moyen, à la connoissance d’un fait gé- néral , et que plusieurs bonnes raisons me font soupçonner depuis long-temps : c’est qu’il y auroit pénétration dans tous les al- liages faits de cette manière , et que leur pesanteur spécifique seroit toujours plus grande que la somme des pesanteurs spéci- fiques des matières dont ils seroient com- posés ; car la pénétration n’est qu’un degré plus grand d’intimité ; et l’intimité , toutes choses égales d’ailleurs, sera d’autant plus grande que les matières seront dans un état de division plus parfait. En réfléchissant sur l’appareil des vais- seaux qu’il faudroit employer pour recevoir et recueillir ces vapeurs métalliques , il m’est venu une idée qui me paroît trop utile pour ne la pas publier ; elle est aussi trop aisée à réaliser pour que les bons chi- mistes ne la saisissent pas : je l’ai même communiquée à quelques-uns d’entre eux , qui m’en ont paru très-satisfaits. Cette idée est de geler le mercure dans ce climat- tfi et avec un degré de froid beaucoup moin que celui des expériences de Pétersbo ou de Sibérie. U ne faut pour cela que cevoir la vapeur du mercure, qui est le n cure même volatilisé par une très-médic chaleur, dans une curcubite , ou dans vase auquel on donnera un certain degrf froid artificiel : ce mercure en vape c’est-à-dire extrêmement divisé, offrir^ l’action de ce froid des surfaces si grar et des masses si petites , qu’au lieu de degrés de froid qu’il faut pour geler le r cure en masse , il n’en faudroit peut- que iS ou 20 degrés, peut-être même me pour le geler en vapeurs. Je reconnu? U cette expérience importante à tous ceux lF travaillent de bonne foi à l’avancement P sciences. Je pourrois ajouter à ces usages prr paux du miroir d’Archimède plusieurs très usages particuliers ; mais j’ai cru del me borner à ceux qui m’ont paru les I utiles et les moins difficiles à réduiroP pratique. Néanmoins je crois devoir joi ®iei ici quelques expériences que j’ai faites ( la transmission de la lumière à travers! f 01 corps transparens, et donner en même tel quelques idées nouvelles sur les mol ra, d’apercevoir de loin les objets à l’œil simlW ou par le moyen d’un miroir semblable celui dont les anciens ont parlé, parl’lj duquel on apercevoit du port d’Alexat les vaisseaux d’aussi loin que la courbui la terre pouvoit le permettre. Tous les physiciens savent aujourc qu’il y a trois causes qui empêchent lè mière de se réunir dans un point Ion ses rayons ont traversé le verre objectif di lunette ordinaire. La première est la c bure sphérique de ce verre , qui répand partie des rayons dans un espace terir par une courbe. La seconde est l’angle lequel nous paroît à l’œil simple l’objet nous observons ; car la largeur du foye l’objectif a toujours à très-peu près ] diamètre une ligne égale à la corde de qui mesure cet angle. La troisième eji différente réfrangibilité de la lumière ; les rayons les plus réfrangibles ne se ras blent pas dans le même lieu où se ras: 1 11)11 bleui les rayons les moins réfrangibles. On peut remédier à l’effet de la pren 1 101 cause en substituant, comme Descarte P» proposé , des verres elliptiques ou hype liques aux verres sphériques. On remé l’effet de la seconde par le moyen d’uij P®| cond verre placé au foyer de l’obje PARTIE EXPÉRIMENTALE. 445 le diamètre est à peu près égal à la t ur de ce foyer, et dont la surface est illée sur une sphère d’un rayon fort . On a trouve de nos jours le moyen ia Éernédier à la troisième en faisant des 011 ? tes qu’on appelle achromatiques, et qui composées de deux sortes de verres qui irsent différemment les rayons colorés , anière que la dispersion de l’un est cor- par la dispersion de l’autre , sans que fraction générale moyenne, qui consti- a lunette , soit anéantie. Une lunette ois pieds et demi de longueur, faite sur rincipe , équivaut , pour l’effet , aux e recoiiil mnes lunettes de vingt-cinq pieds de tous cm leur. .ancemei u reste, le remède à l’effet de la pre- e cause est demeuré tout-à-fait inutile Ta ce jour, parce que l’effet de la der- étant beaucoup plus considérable , e si fort sur l’effet total , qu’on 11e pou- rien gagner à substituer des verres rboliques ou elliptiques à des verres iques , et que cette substitution ne oit devenir avantageuse que dans le cas on ne pourroit trouver le moyen de ger l’effet de la différente réfrangibilité rayons de la lumière. Il semble donc ertaio dj re en use, ofi ces si )u lieu d s geler I Irait usages p îplusieui j’ai cru 1 paru les à rédul devoir ji i'nifài à (tara rnèmet r les ’ sembla rlé, par; d'Alexa àl'ceil r ujcmrd’hui pon feroit bien de combiner leux moyens , et de substituer, dans les îles achromatiques , des verres ellipti- aux sphériques, lacourbi our rendre ceci plus sensible , supposons l’objet qu’on observe soit un point lu- eux sans étendue, tel qu’est une étoile par rapport à nous; il est certain qu’avec bjectif , par exemple, de trente pieds de toutes les images de ce point lumi- s’étendront en forme de courbe au de ce verre , s’il est travaillé sur une et qu’au contraire elles se réuniront |e in point , si ce verre est hyperbolique : ' . si l’objet qu’on observe a une certaine due, comme la lune, qui occupe environ demi-degré d’espace à nos yeux , alors âge de cet objet occupera un espace îviron trois pouces de diamètre au foyer ’objectif de trente pieds; et l’aberration sée par la sphéricité produisant une con- on dans un point lumineux quelconque, la produit de même sur tous les points ûneux du disque de la lune , et par con- tient la défigure en entier. Il y auroit îc, dans tous les cas, beaucoup d’avantage e servir de verres elliptiques ou hyperbo- 'Jj les pour de longues lunettes, puisqu’on a uvé le moyeu de corriger en grande par- it aujoiif lèchent I point lo objectif] e inipM * oace ter|j3r£ plel’obje s irdnfoj >u près corde de isièrae luœièi| ne scr où se rat ngiblesl lelaprj Descarg o.ui/j )ntrei ven ,e l'obJI tie le mauvais effet produit par la différente réfrangibilité des rayons. Il suit de ce que nous venons de dire que , si l’on veut faire une lunette de trente pieds pour observer la lune et la voir en entier, le verre oculaire doit avoir au moins trois pouces de diamètre pour recueillir l’image entière que produit l’objectif à son foyer, et que, si on vouloit observer cet astre avec une lunette de soixante pieds, l’oculaire doit avoir au moins six pouces de diamètre, parce que la corde de l’arc qui mesure l’an- gle sous lequel nous paroît la lune est dans ce cas de trois pouces et de six pouces à peu près ; aussi les astronomes ne font ja- mais usage de lunettes qui renferment le disque entier de la lune, parce qu’elles gros- siroient trop peu : mais si on veut observer Vénus avec une lunette de soixante pieds , comme l’angle sous lequel elle nous paroît n’est que d’environ soixante secondes , le verre oculaire pourra n’avoir que quatre lignes de diamètre ; et si on se sert d’un objectif de cent vingt pieds , un oculaire de huit lignes de diamètre suffiroit pour réu- nir l’image entière que l’objectif forme à son foyer. De là 011 voit que quand même les rayons de lumière seroient également réfrangibles , on ne pourroit pas faire d’aussi fortes lu- nettes pour voir la lune en entier que pour voir les autres planètes , et que plus une planète est petite à nos yeux, et plus nous pouvons augmenter la longueur de la lunette avec laquelle on peut la voir en entier. Dès lors on conçoit bien que , dans cette même supposition des rayons également réfrangi- bles , il doit y avoir une certaine longueur déterminée , plus avantageuse qu’aucune au- tre pour telle ou telle planète , et que cette longueur de la lunette dépend non seulement de l’angle sous lequel la planète paroît à noire œil , mais encore de la quantité de lu- mière dont elle est éclairée. Dans les lunettes ordinaires , les rayons de la lumière étant différemment réfrangibles, tout ce qu’on pourroit faire dans cette vue pour les perfectionner ne seroit pas fort avantageux , parce que , sous quelque angle que paroisse à notre œil l’objet ou l’astre que nous voulons observer, et quelque in- tensité de lumière qu’il puisse avoir, les rayons ne se rassembleront jamais dans le même endroit : plus la lunette sera longue, plus il y aura d’intervalle 1 entre le foyer des 1. Cet intervalle est d’un pied sur vingt-sept de foyer. 446 MINÉRAUX. INTRODUCTION; rayons rouges et celui des rayons violets , et par conséquent plus sera confuse l’image de l’objet observé. On ne peut donc perfectionner les lunettes par réfraction qu’en cherchant , comme on l’a fait , les moyens de corriger cet effet de la différente réfrangibilité , soit en compo- sant la lunette de verres de différente den- sité , soit par d’autres moyens particuliers , et qui seroient différens selon les différens objets et les différentes circonstances. Sup- posons , par exemple , une courte lunette composée de deux verres , l’un convexe et l’autre concave des deux côtés ; il est certain que cette lunette peut se réduire à une autre dont les deux verres soient plans d’un côté, et travaillés de l’autre côté sur des sphères dont le rayon seroit une fois plus court que celui des sphères sur lesquelles auroient été travaillés les verres de la première lunette. Maintenant , pour éviter une grande partie de l’effet de la difféi’ente réfrangibilité des rayons , on peut faire cétte seconde lunette d’une seule pièce de verre massif, comme je l’ai fait exécuter avec deux morceaux de verre blanc , l’un de deux pouces et demi de longueur, et l’autre d’un pouce et demi : mais alors la perte de la transparence est un plus grand inconvénient que celui de la différente réfrangibilité qu’on corrige par ce moyen ; car ces deux petites lunettes mas- sives de verre sont plus obscures qu’une petite lunette ordinaire du même verre et des mêmes dimensions : elles donnent, à la vérité , moins d’iris , mais elles n’en sont pas meilleures ; et si on les faisoit plus lon- gues toujours en verre massif, la lumière, après avoir traversé cette épaisseur de verre, A adroit plus assez de force pour peindre l’image de l’objet à notre œil. Ainsi , pour faire des Innettes de dix ou vingt pieds , je ne vois que l’eau qui ait assez de transpa- rence pour laisser passer la lumière sans l’éteindre en entier dans cette grande épais- seur : en employant donc de l’eau pour rem- plir l’intervalle entre l’objectif et l’oculaire, on diminuera en partie l’effet de la diffé- rente réfrangibilité1, parce que celle de l’eau approche plus de celle du verrè que t, M. de Lalande, l’un de nos plus savons astro- nomes, après avoir lu cet article, a bien voulu me communiquer quelques remarques qui m'ont paru très-justes , et dont j’ai profité. Seulement je ne suis pas d’accord avec lui sur ces lunettes remplies d’eau ; il croit « qu’on diminueroit très-peu la dif- ù férente réfrangibilité , parce que l’eau disperse «les rayons colorés d’une manière différente du « verre , et qu’il y auroit des couleurs qui provien- « droient de l'eau , et d’autres du verre- » Mais , en celle de l’air ; et si on pouvoit , en c géant l’eau de différens sels , lui donni même degré de puissance réfringente c verre , il n’est pas douteux qu’on ne c geât davantage , par ce moyen , l’effe la différente réfrangibilité des rayon s’agiroit donc d’employer une liqueur t parente qui auroit à peu près la n puissance réfrangible que le verre ; car il sera sûr que les deux verres , avec liqueur entre deux, corrigeront en j l’effet de la différente réfrangibilité rayons , de la même façon qu’elle est rigée dans la petite lunette massive di viens de parler. Suivant les expériences de M. Bou une ligne d’épaisseur de verre détruit 2 la lumière, et par conséquent la dimiri s’en feroit dans la proportion suivante Épaiss. , 1, 2, 3, 4, 5, 6 ligi Himirmt — 1 ° * °- 2^° 12^° — 19 JJ1UU.IUU,, 7, 343 24oï l6bo7> n 7 6 49 3 en sorte que , par la somme de ces si 05 mes , on trouveroit que la lumière passe à travers six lignes de verre , déjà perdu c’est-à-dire envii - -7649 » io/ii de sa quantité. Mais il faut co rer que M. Bouguer s’est servi de bien peu transparens , puisqu’il a vu ( ; ligne d’épaisseur de ces verres détjt b 2/7 de la lumière. Par les expérience 11 j’ai faites sur différentes espèces de blanc , il m’a paru que la lumière diflqn beaucoup moins. Voici ces expérience [F sont assez faciles à faire, et que tout le est en état de répéter ; Dans une chambre obscure dont lee 1,1 étoient noircis , qui me servoit à fair expériences d’optique , j’ai fait allum bougie de cinq à la livre ; la cliambr fort vaste , et la lumière de la bougie H la seule dont elle fût éclairée. J’ai, d cherché à quelle distance je pouvois caractère d’impression , tel que celui ® gazette de Hollande, à la lumière d< bougie , et j’ai trouvé que je lisois as: cilement ce caractère à vingt-quatre quatre pouces de distance de la boug ! ITj suite, ayant placé devant la bougie, : pouces de dislance, un morceau de provenant d’une glace de Saint-Gobi duite à une ligne d’épaisseur, j’ai trou je lisois encore tout aussi facilement à deux pieds neuf pouces ; et en subs' à cette glace d’une ligne d’épaisse se servant du verre le moins dense , et en a j tant, par les sels , la densité de l’eau, on -j j cheroit de très-peu leur puissance réfractive, PARTIE EXPERIMENTALE. 447 e morceau de deux lignes d’épaisseur et même verre , j’ai lu aussi facilement à jt-un pieds de distance de la bougie. îx de ces mêmes glaces de deux lignes jaisseur, jointes l’une contre l’autre et es devant la bougie, en ont diminué la 1ère au point que je n’ai pu lire avec la me facilité qu’à dix-sept pieds et demi de ance de la bougie. Et enfin, avec trois tes de deux lignes d’épaisseur chacune , l’ai lu qu’à la dislance de quinze pieds. la lumière de la bougie diminuant nme le carré de la distance augmente , sa inution àuroit été dans la progression vante, s’il n’y avoit point eu de glaces erposées : H-f. 592"h 22-~. 5 I 7tt. 21. 44i. 1 7T‘ 3o64-. x5 220 ne les pertes de la lumière , par l’inter- ition des glaces, sont dans la progression vante, i5r, 285 7/9. 867 1/4. D’où l’on doit conclure qu’une ligne d’é- isseur de ce verre ne diminue la lumière e de—- ou d’environ 1/7 ; que deux lignes e épaisseur la diminuent de ||A, pas tout-à- jt de 1/4 ; et trois glaces de deux lignes , lél fH-» c’est-à-dire moins de 2/3. # (Comme ce résultat est très-différent de lui de M. Bouguer, et que néanmoins je lu âvois garde de douter de la vérité de ses M périencês , je répétai les miennes en me ij rvant de verre à vitre commun : je choisis îs morceaux d’une épaisseur égale, de trois |t liarts de ligne chacun. Ayant lu de même j, vingt-qualre pieds quatre pouces de dis- (nce de la bougie , l’interposition d’un de s morceaux de verre me fit rapprocher à ngt-un pieds et demi ; avec deux morceaux terposés et appliqués l’un sur l’autre , je p pouvois plus lire qu’à dix-huit pieds un uart , et avec trois morceaux , à seize ieds : ce qui , comme l’on vùit , se rap- roclie de la détermination de M. Bouguer; R la perte de la lumière , en traversant ce îrre de trois quarts de ligne , étant ici ] e 5 921/4 — 462 1/4= i3o, le résultat 3o 65 — -, ou — , ne s éloigné pas beaucoup P*4 296 |e 3/ r 4 , à quoi l’on doit réduire les 2/7 onnés par M. Bouguer pour une ligne épaisseur, parce que mes verres n’avoient ue trois quarts de ligne , car 3 : î 4 ; ; 65 3o3 i/3, terme qui ne diffère pas beau- oup de 296. Mais avec du verre communément appelé 'verre de Bohême, j’ai trouvé, par les mêmes essais, que la lumière ne perdoit qu’un huitième en traversant une épaisseur d’une ligne, et qu’elle diminuoit dans la progres- sion suivante : Épaiss. , 1, 2, 3, 4, 5, 6, n. Dimirmt - — Ai. 843 . lgé°7 Uimmui. , g. û4. 5l2. 4o96. 32768* 262164- — o — 1 — 2 — 3 — 4 — 5 n— 1 7 7 7 7 7 7 7 ou 8. 1 8. 2 8.3 8.4 8.5 8.6 8. n Prenant la somme de ces termes , on aura le total de la diminution de la lumière à travers une épaisseur de verre d’un nombre donné de lignes; par exemple, la somme des six premiers termes est ffffff. Donc la lumière ne diminue que d’un peu plus de moitié en traversant une épaisseur de six lignes de verre de Bohême, et elle en per- droit encore moins si , au lieu de trois mor- ceaux de deux lignes appliqués l’un sur l’autre, elle n’avoit à traverser qu’un seul morceau de six lignes d’épaisseur. Avec le verre que j’ai fait fondre en masse épaisse , j’ai vu que la lumière ne perdoit pas plus à travers quatre pouces et demi d’épaisseur de ce verre qu’à travers une glace de Saint -Gobin de deux lignes et demie d’épaisseur ; il me semble donc qu’on pourroit en conclure que la transparence de ce verre étant à celle de cette glace comme 4 pouces 1/2 sont à deux lignes 1/2, ou 54 à 21/2, c’est-à-dire plus de vingt-une fois plus grande, on pourroit faire de très-bonnes petites lunettes massives de cinq ou six pouces de longueur avec ce verre. Mais pour des lunettes longues , on ne peut employer que de l’eau , et encore est-il à craindre que le même inconvénient ne subsiste ; car quelle sera l’opacité qui résul- tera de cette quantité de liqueur que je suppose remplir l’intervalle entre les deux verres? Plus les lunettes seront longues, et plus on perdra de lumière ; en sorte qu’il paroît, au premier coup d’œil, qu’on ne peut pas se servir de ce moyen , surtout, poul- ies lunettes un peu longues ; car, en suivant ce que dit M. Bouguer, dans son Essai d’ optique sur la gradation de la lumière , neuf pieds sept pouces d’eau de mer font diminuer la lumière dans le rapport de 14 à 5 ; ou , ce qui revient à peu près au même, supposons que dix pieds d’épaisseur d’eau diminuent la lumière dans le rapport de 3 à 1 , alors vingt pieds d’épaisseur d’eau la diminueront dans le rapport de 9 à 1 ; trente pieds la diminueront dans celui de 27 à 1 , 448 MINERAUX. INTRODUCTION. etc. Il paroît donc qu’on ne pourroit se servir de ces longues lunettes pleines d’eau que pour observer le soleil, et que les autres astres n’auroient pas assez de lumière pour qu’il fût possible de les apercevoir à travers une épaisseur de vingt à trente pieds de li- queur intermédiaire. Cependant , si l’on fait attention qu’en ne donnant qu’un pouce ou un pouce et demi d’ouverture à un objectif de trente pieds , on ne laisse pas d’apercevoir très-nettement les planètes dans les lunettes ordinaires de cette longueur, on doit penser qu’en don- nant un plus grand diamètre à l’objectif, on augmenterait la quantité de lumière dans la raison du carré de ce diamètre, et par con- séquent si un pouce d’ouverture suffit pour voir distinctement un astre dans une lunette ordinaire , y/ 3 pouces d’ouverture , c’est-à- dire vingt-une lignes environ de diamètre , suffiront pour qu’on le voie aussi distincte- ment à travers une épaisseur de dix pieds d’eau ; et qu’avec un verre de trois pouces de diamètre , on le verroit également à tra- vers une épaisseur de vingt pieds; qu’avec un verre de ç/ 27 ou 5 pouces 1/4 de dia- mètre , on le verroit à travers une épaisseur de trente pieds, et qu’il ne faudroit qu’un verre de neuf pouces de diamètre pour une lunette remplie de quarante pieds d’eau , et un verre de vingt-sept pouces pour une lu- nette de soixante pieds. Il semble donc qu’on pourroit, avec es- pérance de réussir, faire construire une lu- nette sur ces principes ; car, en augmentant le diamètre de l’objectif, on regagne en par- tie la lumière que l’on perd par le défaut de transparence de la liqueur. On ne doit pas craindre que les objectifs, quelque grands qu’ils soient, fassent une trop grande partie de la sphère sur laquelle ils seront travaillés , et que par cette raison les rayons de la lumière ne puissent se réunir exactement ; car, en supposant même ces objectifs sept ou huit fois plus grands que je ne les ai déterminés , ils ne feroient pas encore à beaucoup près une assez grande partie de leur sphère pour ne pas réunir les rayons avec exactitude. Mais ce qui ne me paroît pas douteux , c’est qu’une lunette construite de cette façon seroit très-utile pour observer le soleil; car, en la supposant même longue de cent pieds, la lumière de cet astre ne seroit encore que trop forte après avoir traversé cette épais- seur d’eau , et on observeroit à loisir et aisé- ment la surface de cet astre immédiatement , sans qu’il fût nécessaire de se servir de verres enfumés , ou d’en recevoir l’image ; un carton , avantage qu’aucune autre espi de lunette ne peut avoir. Il y auroit seulement quelque petite ( férence dans la construction de celte lune j solaire , si l’on veut qu’elle nous présent» face entière du soleil ; car, en la suppoaj L longue de cent pieds , il faudra , dans 'L cas , que le verre oculaire ait au moins ||Dt pouces de diamètre , parce que le soleil L cupant plus d’un demi-degré céleste, l’im jié formée par l’objectif à son foyer à cent pi aura au moins cette longueur de dix pou» Lj et que, pour la réunir tout entière, il fajlL un oculaire de cette largeur, auquel on iL donnerait que vingt pouces de foyer pj[n» * t. Il-i [|an le rendre aussi fort qu’il se pourroit droit aussi que l’objectif, ainsi que l’ocuîa eût dix pouces de diamètre , afin que l’im de l’astre et l’image de l’ouverture del, lunette se trouvassent d’égale grandeur i|e foyer. Qtiand même cette lunette que je jj pose ne servirait qu’à obst;rver exactem le soleil , ce seroit déjà beaucoup : il sert « par exemple, fort curieux de pouvoir Lj connoitre s’il y a dans cet astre des par Jjaj)l plus ou moins lumineuses que d’autres ; Lr y a sur sa surface des inégalités , et de quipj espèce elles seraient; si les taches flottij|jjr( sur sa surface S ou si elles y sont t»Ma|, constamment attachées, etc. La vivacité1 ^ sa lumière nous empêche de l’observe nie l’œil simple, et la différente réfrangib; j|( de ses rayons rend son image confuse 1» jej qu’on la reçoit au foyer d’un objectif sun, ûnn carton; aussi la surface du soleil nous |faj elle moins connue que celle des autres |p rayons ne seroit pas , à beaucoup près lle ès , jL fièrement corrigée dans cette longue lun remplie d’eau : mais si cette liqueur pouvif, par l’addition des sels , être rendue a dense que le verre , ce seroit alors la m» chose que s’il n’y avoit qu’un seul vernp traverser, et il me semble qu’il y auroit ] j si 1. M. de Lalande m’a fait sur ceci la reniai qui suit : « Il est constant , dit-il , qu’il n’y a le soleil que des taches qui changent de fora disparoissent entièrement , mais qui ne chan point de place, si ce n’est par la rotation du so ( ^ sa surface est très-unie et homogène. » Ce sa astronome pouvoit même ajouter que ce n’est par le moyen de ces taches, toujours su ppc fixes, qu’on a déterminé le temps de la révolu j j,|( du soleil sur son axe : mais ce point d’astront physique ne me paroît pas encore absolument montré ; car ces taches , qui toutes changent t* figures , pourroient bien aussi quelquefois chai t ils de lieu. Partie expérimentale. 44g vantage à se servir de ces lunettes rein- es d’eau que de lunettes ordinaires avec verres enfumés. Quoi qu’il en soit , il est certain qu’il faut, ar observer le soleil, une lunette bien férente de celles dont on doit se servir ir les autres astres ; et il est encore très- tain qu’il faut , pour chaque planète , une lette particulière et proportionnée à leur ensilé de lumière , c’est-à-dire à la quan- î réelle de lumière dont elles nous parois- it éclairées. Dans toutes les lunettes, il droit donc l’objectif aussi grand et l'ocu- ’e aussi fort qu’il est possible , et en me temps proportionner la distance du er à l’intensité de la lumière de chaque nète. Par exemple , Ténus et Saturne il deux planètes dont la lumière est fort férente; lorsqu’on les observe avec la me lunette , on augmente également 1’an- sous lequel on les voit : dès lors la lu- ère totale de la planete paroît s’étendre toute sa surface d’autant plus qu’on la * )ssit davantage ; ainsi , à mesure qu’on bandit son image , on la rend sombre , à u près dans la proportion du carré de son mètre : Saturne ne peut donc , sans de- îir obscur, être observé avec une lunette e[| >si forte que Ténus. Si l’intensité de lu- fl« ère c e celle-ci permet de la grossir cent deux cents fois avant de devenir sombre, icil htre ne souffrira peut-être pas la moitié le tiers de celte augmentation sans deve- tout-à-fait obscure. Il s’agit donc de faire e lunette pour chaque planète , propor- îsi nuée à leur intensité de lumière ; et, pour faire avec plus d’avantage , il me semble il ne faut employer qu’un objectif d’au- ît plus grand , et d’un foyer d’autant ins long , que la planète a moins de lu- hi ère. Pourquoi jusqu’à ce jour n’a-t-on ; fait des objectifs de deux ou trois pieds diamètre? L’aberration des rayons, cau- par la sphéricité des verres , en est la .le cause ; elle produit une confusion qui comme le carré du diamètre de l’ouver- e : et c’est par cette raison que les verres îériques , qui sont très-bons avec une pe- î ouverture, ne valent plus rien quand l’augmente ; on a plus de lumière , mais ins de distinction et de netteté. Néan- ins les verres sphériques larges sont irès- *is pour faire des lunettes de nuit ; les glois ont construit des lunettes de cette " >èce , et ils s’en servent avec grand avan- e pour voir de fort loin les vaisseaux is une nuit obscure. Mais maintenant je l’on sait corriger en grande partie les Buffon. I. effets de la différente réfrangibilité des rayons , il me semble qu’il faudroit s’atta- cher à faire des verres elliptiques ou hyper- boliques, qui ne produiroient pas cetle aberration causée par la sphéricité , et qui par conséquent pourroient être trois ou quatre fois plus larges que les verres sphé- riques. Il n’y a que ce moyen d’augmenter à nos yeux la quantité de lumière que nous envoient les planètes; car nous ne pouvons pas porter sur les planètes une lumière addition- nelle , comme nous le faisons sur les objets que nous observons au microscope ; mais il faut au moins employer le plus avantageu- sement qu’il est possible la quantité de lu- mière dont elles sont éclairées , en la rece- vant sur une surface aussi grande qu’il se pourra. Cette lunette hyperbolique , qui ne seroit composée que d’un seul grand verre objectif et d’un oculaire proportionné, exi- geroit une matière de la plus grande transpa- rence ; on réuniroit , par ce moyen , tous les avantages possibles, c’est-à-dire ceux des lunettes achromatiques à celui des lunettes elliptiques ou hyperboliques , et l’on met- troit à profit toute la quantité de lumière que chaque planète réfléchit à nos yeux. Je puis me tromper ; mais ce que je propose me paroît assez fondé pour en recommander l’exécution aux personnes zélées pour l’avan- cement des sciences. Me laissant aller à ces espèces de rêveries, dont quelques-unes néanmoins se réaliseront un jour, et que je ne publie que dans cette espérance , j’ai songé au miroir du port d’Alexandrie, dont quelques auteurs anciens ont parlé , et par le moyen duquel on voyoit de très-loin les vaisseaux en pleine mer. Le passage le plus positif qui me soit tombé sous les yeux est celui que je vais rapporter: « Alexandria.... in pharo vero erat specu- « lum è ferro sinico , per quod à longé vi- « debantur naves Græcorum advenientes ; « sed paulô postquam islamismus invaluit , «-scilicet tempore califalûs Talidi , filii Ab- « dulmelec , Christiani , fraude adhibitâ , « illud deîeverunt T. » J’ai pensé, i° que ce miroir par lequel on voyoit de loin les vaisseaux arriver, n’é- toit pas impossible ; 20 que même , sans miroir ni lunette , on pourvoit , par de cer- taines dispositions , obtenir le même effet , et voir depuis le port des vaisseaux peut- être d’aussi loin que la courbure de la terre le permet. Nous avons dit que les personnes qui ont bonne vue aperçoivent les objets x. Abulfeda, etc., Descriptio Ægjpti. *9 45o MINÉRAUX. INTRODUCTION. éclairés par le soleil à plus de trois mille quatre cents fois leur diamètre , et en même temps nous avons remarqué que fa lumière intermédiaire nuisoit si fort à celle des ob- lets éloignés, qu’on aperçoit la nuit un objet lumineux de dix , vingt et peut-être cent jois plus de distance qu’on ne le voit pen- pant le jour. Nous savons que du fond d’un duits très-profond l’on voit des étoiles en plein jour 1 : pourquoi donc ne verroit-on pas de même les vaisseaux éclairés des rayons du soleil , en se mettant au fond d’une longue galerie fort obscure, et située sur le bord de la mer, de manière , qu’elle ne recevroit aucune lumière que celle de la mer lointaine et des vaisseaux qui pourroient s’y trouver? Cetie galerie n’est qu’un puits horizontal qui feroit le même effet pour la vue des vaisseaux que le puits vertical pour la vue des étoiles ; et cela me paroît si sim- ple, que je suis étonné qu’on n’y ait pas songé. U me semble qu’en prenant, pour faire l’observation , les heures du jour où le soleil seroit derrière la galerie, c’est-à-dire le temps où les vaisseaux seroient bien éclairés , on les verroit du fond de cette galerie obscure dix fois au moins mieux qu’on ne peut les voir en pleine lumière. Or, comme nous l’avons dit , on distingue aisément un homme ou un cheval à une lieue de distance , lorsqu’ils sont éclairés des rayons du soleil ; et supprimant la lumière intermédiaire qui nous environne et offus- que nos yeux , nous les verrions au moins dix fois plus loin , c’est-à-dire à dix lieues : donc on verroit les vaisseaux, qui sont beaucoup plus gros, d’aussi loin que la cour- bure de la terre le permettroit 2, sans autre instrument que nos yeux. Mais un miroir concave d’un assez grand diamètre et d’un foyer quelconque, placé au fond d’un long tuyau noirci , feroit pen- dant le jour à peu près le même effet que nos grands objectifs de même diamètre et de même foyer feraient pendant la nuit; et 1. Aristote est, je crois , le premier qui ait fait mention de cette observation , et j’en ai cité le pas- sage à l’article du Sens de lu vue. 2. La courbure dé la terre pour An degré, ou vingt-cinq lieues de 2283 toises, est de 2988 pieds ; elle croit comme le carré des distances ; ainsi, pour cinq lieues , elle est vingt-cinq fois moindre , c’est- à-dire d’environ cent vingt pieds. Un vaisseau qui a plus de cent vingt pieds de mâture peut donc être vu de cinq lieues, étant même au niveau de la mer; mais si on s’élevoit de cent vingt pieds au dessus du niveau de la mer, on verroit de cinq lieues le corps entier du vaisseau jusqu’à la ligne de l’eau , et, en s’élevant encore davantage, on pourvoit aper- cevoir le haut des mà;s de plus de dix lieues. c’étoit probablement un de ces miroirs con caves d’acier poli (è ferro sinico) qu’on avoi établi au port d’Alexandrie 1 pour voir d loin arriver les vaisseaux grecs. Au resté si ce miroir d’acier ou de fer poli a réelle ment existé , comme il y a toute apparence on ne peut refuser aux anciens la gloire d la première invention des télescopes; rare miroir de métal poli ne pouvoit avoir d’effe qu’aulant que la lumière réfléchie par 1 surface étoit recueillie par un autre miroi concave placé à son foyer ; et c’est en cet que consisfe l’essence du télescope et la fa cilité de sa construction. Néanmoins cel n’ôte rien à la gloire du grand Newton, qu le premier a ressuscité cette invention , en tièrement oubliée : il parait même que d sont ses belles découvertes sur la réfrangi bilité des rayons de la lumière qui l’or conduit à celle du télescope. Comme le rayons de la lumière sont , par leur nature différemment réfrangibles , il étoit fondé , croire qu’il n’y avoit nul moyen de corrige cet effet ; ou , s’il a entrevu ces moyens , i les a jugés si difficiles , qu’il a mieux aim la’ tourner ses vues d’un autre côté , et produir foi)] par le moyen de la réflexion des rayons le1; 1® grands effets qu’il ne pouvoit obtenir pa if leur réfraction. Il a donc fait construire soi ! tes télescope , dont l’effet est réellement bieiff® supérieur à celui des lunettes ordinaires mais les lunettes achromatiques , inventée de nos jours , sont aussi supérieures au té lescope qu’il l’est aux lunet tes ordinaires. Lé meilleur télescope est toujours sombre et comparaison de la lunette achromatique, @1 cette obscurité dans les télescopés ne vieil pas seulement du défaut de poli ou de li couleur du métal des miroirs , mais de i; nature même de la lumière , dont les rayons différemment réfrangibles , sont aussi diffê remment réfîexibles , quoique en degré beaucoup moins inégaux. Il reste donc pour perfectionner les télescopes autan qu’ils peuvent l’être , à trouver le moyei de compenser cëtté différente réflexibililé comme l’on a trouvé celui de compenser 1< différente réfrangibilité. Après tout ce qui vient d 'être dit, je croit qu’on sentira bien que l’on peut faire faire une très-bonne lunette de jour sans em- ployer ni verres ni miroirs , et simplemenl en supprimant la lumière environnante , ai 3. De temps immémorial, les Chinois, et surtout lesJaponois, savent travailler et polir l’acier cr grand et petit volume ; et c’est ce qui m'a fait penser qu’on doit interpréter è ferro sinico pai acier poli. WMi ji - . ^ ^ PARTIE EXPÉRIMENTALE. 45r )yen d’un tuyau de cent cinquante ou ux cents pieds de long, et en se plaçant ti ns un lieu obscur où aboutiroit l’une des i trémités de ce tuyau. Plus la lumière du i îr seroit vive , plus seroil grand l’effet de i tte lunette si simple et si facile à exécuter, i suis persuadé qu’on verroit distinctement juinze et peut-être à vingt lieues les bâti- lf ms et les arbres sur le haut des montagnes, pa seule différence qu’il y ait entre ce long mû yau et la galerie obscure que j’ai proposée, in ist que le champ , c’est-à-dire l’espace vu , la mit bien plus petit, et précisément dans la si son du carré de l’ouverture du tuyau à a, lie de la galerie. ne ARTICLE TROISIEME. vention d’autres miroirs pour brûler à de moindres distances. Miroirs (l’une seule pièce à foyer mobile. : J’ai remarqué que le verre fait ressort, et l’il peut plier jusqu’à un certain point ; et mme , pour brûler à des distances un peu andes, il ne faut qu’une légère courbure, -) que toute courbure régulière y est à peu es ès également convenable , j’ai imaginé de y endre des glaces de miroir ordinaire, d’un lin Jed et demi , de deux pieds et trois pieds KH | diamètre , de les faire arrondir, et de les ol lUtenir sur un cercle de fer bien égal et 4i en tourné , après avoir fait dans le centre ej i la glace un trou de deux ou trois lignes ,e i diamètre pour y passer une vis 1 dont les vin is sont très- fins , et qui entre dans un petit je jrou posé de l’autre côté de la glace. En |f jrrant cette vis , j’ai courbé assez les glaces J ! trois pieds pour brûler depuis cinquante g eds jusqu’à trente , et les glaces de dix-huit rçj luces ont brûlé à vingt-cinq pieds ; ♦mais f ant répété plusieurs fois ces expériences , jjjj ù cassé les glaces de trois pieds et de deux J ieds , et il ne m’en reste qu’une de dix-huit llll jauces , que j’ai gardée pour modèle de ce j |iroir2. Ce qui fait casser ces glaces si aisément ,rU fcst le trou qui est au milieu ; elles se cour- ir liraient beaucoup plus Sans se rompre s’il 11 Voyez les planches i , fig. 8 et io; et pl. 2 , iiei t, i, i il 2. Cés glaces de trois pieds ont mis le feu â des îatières légères jusqu’à cinquante pieds de d- )9l| ance , et alors elles n’avoient pfié que d’une tne 5/8 : pour brûler à quarante pieds , il falloit T s faire plier de deux lignes; pour brûler à trente eds, de deux lignes 3%; rt c’est en voulant les ^ ire brûler à vingt pieds qu’elles se sont cassées. n’y avoit point de solution dè continuité , et qu’on pût les presser également sur toute la surface. Cela m’a conduit à imaginer de les faire courber par le poids même de l'atmo- sphère ; et pour cela il ne faut que metire une glace circulaire sur une espèce de tam- bour de fer ou de cuivre, et ajouter à ce tambour une pompe pour en tirer de l’air: on fera de cette manière courber la glace plus ou moins, et par conséquent elle brûlera à de plus et moins grandes distances. Il y auroit encore un aulre moyen : ce seroit d’ôter l’élamage dans le centre de la glace , de la largeur de neuf oti dix lignes , façonner avec une, molette cette partie du centre en portion de sphère , comme un verre convexe d’un pouce de foyer, mettre dans le tambour une petite mèche soufrée ; il arriveroit que quand on présenterait ce miroir au soleil , les rayons transmis à tra- vers celte partie du centre de la glace et réunis au foyer d’un pouce alîumeroient la mèche soufrée dans le tambour : cette mèche, en brûlant, absorberoit de fair, et par con- séquent le poids de l’atmosphère feroit plier la glace plus ou moins , Selon que la mèche soufrée brûlerait plus ou moins de temps. Ce miroir seroit fort singulier, parce qu’il se courberoit de lui-même à l’aspect du so- leil, sans qu’il fût nécessaire d’y toucher; mais l’usage n’en seroit pas facile, et c’est pour cette raison que je ne l’ai pas fait exé- cuter, la seconde manière étant préférable à tous égards. Ces miroirs d’une seule pièce à foyer iûô- bile peuvent servir à mesurer plus exacte- ment que par aucun autre moyen, la diffé- rence des effets de la chaleur du soleil reçue dans des foyers plus ou moins grands. Nous avons vu que les grands foyers font toujours proportionnellement plus d’effet que les pe- tits, quoique l’intensité de chaleur soit égale dans les uns et les autres : on auroit ici , en contractant successivement lès foyers , toujours une égale quantité de lumière ou de chaleur, mais dans des espaces successi- vement plus petits ; et au moyen de cette quantité constante , on pourroit déterminer, par l’expérience , le minimum de l’espace du foyer, c’est-à-dire l’étendue nécessaire pour qu’avec la même quantité de lumière on eût le plus grand effet : cela nous conduirait en même temps à une estimation plus précise de la déperdition de la chaleur dans les au- tres substances , sous un même volume où dans une égale étendue. A cet usage près, il m’a paru que ces miroirs d’une seule pièce à foyer mobile 29. 452 MINÉRAUX. INTRODUCTION. étoient plus curieux qu’utiles : celui qui agit seul et se courbe à l’aspect du soleil , est assez ingénieusement conçu pour avoir place dans un cabinet de physique. II. Miroirs d’une seule pièce pour brûler très-vivement à des distances médiocres et à de petites distances. J’ai cherché les moyens de courber régu- lièrement de grandes glaces ; et , après avoir fait construire deux fourneaux différens qui n’ont pas réussi , je suis parvenu à en faire un troisième », dans lequel j’ai courbé très- régulièrement des glaces circulaires de trois, quatre et quatre pieds et demi de diamè- tre ; j’en ai même fait courber deux de cin- quante-six pouces : mais quelque précaution qu’on ait prise pour laisser refroidir lente- ment ces grandes glaces de cinquante-six et cinquante-quatre pouces de diamètre , et pour les manier doucement, elles se sont cassées en les appliquant sur les moules sphériques que j’avois fait construire pour leur donner la forme régulière et le poli né- cessaire ; la même chose est arrivée à trois autres glaces de quarante-huit et cinquante pouces de diamètre , et je n’en ai conservé qu’une seule de quaran.te-six pouces et deux de trente-sept pouces. Les gens qui commis- sent les arts n’en seront pas surpris : ils savent que les grandes pièces de verre exigent des précautions infinies pour ne pas se fêler au sortir du fourneau où on les laisse recuire et refroidir : ils savent que plus elles sont minces et plus elles sont sujettes à se fendre , non seulement par le premier coup de l’air, mais encore par ses impressions ultérieures. J’ai vu plusieurs de mes glaces courbées se fendre toutes seules au bout de trois , quatre et cinq mois , quoiqu’elles eussent résisté aux premières impressions de l’air, et qu’on les eut placées sur des moules de plaire bien séché , sur lesquels la surface concave de ces glaces portoit égale- ment partout ; mais ce qui m’en a fait perdre un grand nombre , c’est le travail qu’il falloit faire pour leur donner une forme régulière. Ces glaces , que j’ai achetées toutes polies à la manufacture du faubourg Saint-Antoine, quoique choisies parmi les plus épaisses , n’avoient que cinq lignes d’épaisseur : en les courbant, le feu leur faisoit perdre en pariie leur poli. Leur épaisseur d'ailleurs n’étoit pas bien égale partout , et néanmoins il étoit nécessaire, pour l’objet auquel je les desti- nois, de rendre les deux surfaces concave i. Voyez la planche i, fig. i, a, 3, 4» 5 et 6. et convexe parfaitement concentriques , ( par conséquent de les travailler avec d< molettes convexes dans des moules creux et des molettes concaves sur des moult convexes. De vingt-quatre glaces que j’avo courbées, et dont j’en avois livré quinze feu M. Passemant pour les faire travaille par ses ouvriers , je n’en ai conservé qr trois ; toutes les autres , dont les moindre avoient au moins trois pieds de diamètre se sont cassées, soit avant d’être travaillées soit après. De ces trois glaces que j’ai sat vées , l’une a quarante-six pouces de diami tre , et les deux autres trente-sept pouces elles étoient bien travaillées , leurs surfa ci bien concentriques , et par conséquent l’é paisseur bien égale ; il ne s’agissoit plus qu de les étamer sur leur surface convexe, c je fis pour cela plusieurs essais et un asse grand nombre d’expériences qui ne me rétri sirent point. M. de Bernières , beaucom plus habile que moi dans cet art de l’étamagt vint à mon secours , et me rendit en effet deux de mes glaces étamées ; j’eus l’honneui d’en présenter au roi la plus grande , c’est-à dire celle de quarante-six pouces, et de fair devant sa majesté les expériences de la fore de ce miroir ardent qui fond aisément tou les métaux ; on l’a déposé au château de 1 Muette, dans un cabinet qui est sous 1 direelion du P. Noël : c’est certainement 1 plus fort miroir ardent qu’il y ail en Eu rope 2. J’ai déposé au Jardin du Roi , dam le Cabinet d’Histoire naturelle , la glace di trente-sept pouces de diamètre , dont li foyer est beaucoup plus court que celui dt miroir de quarante-six pouces. Je n’ai pa; encore eu le temps d’essayer la force de c< second miroir, que je crois aussi très-boni Je fis aussi , dans le temps , quelques expé riences au château de la Muette , sur la lu mière de la lune reçue par le miroir d< quarante-six pouces , et réfléchie sur ur thermomètre très-sensible : je crus d’aborc m’apercevoir de quelque mouvement ; mai* cet effet ne se soutint pas , et depuis je n’ai pas eu occasion de répéter l’expérience. Je ne sais même si l’on obtiendroit un degré de chaleur sensible en réunissant les foyers de plusieurs miroirs , et les faisant tomber ensemble sur un thermomètre aplati et noirci ; car il se peut que la lune nous en- voie du froid plutôt que du chaud , comme a;i 2. On m’a dit que l’étamage de ce miroir, qui a été fait il y a plus de vingt ans, s’étoitgàté; il 1k faudroit le remettre entre les mains de M. de Ber- , nières , qui seul a le secret de cet étainage, pour le bien réparer. PARTIE EXPÉRIMENTALE. jijjms l’expliquerons ailleurs. Du reste , ces tir éiiroirs sont supérieurs à tous les miroirs de ü (jiflexion dont on avoit connoissance : ils (■vent aussi à voir en grand les petits ta- ï Jeaux, et à en distinguer toutes les beautés n tous les défauts; et si on en fait étamer vé i pareils dans leur concavité, ce qui seroit )in( en plus aisé que sur la convexité , ils servi- nién ient à voir les plafonds et autres peintures ij|| > J i sont trop grandes et trop perpendicu- n res sur la tète pour pouvoir être regardées liai sèment. ,n f ((Mais ces miroirs ont l’inconvénient com- irfa un à tous les miroirs de ce genre, qui est ml ! brûler en haut ; ce qui tait qu’on ne peut jît tvailler de suite à leur foyer, et qu’ils de- se pnnent presque inutiles pour toutes les as périences qui demandent une longue ac- ; m du feu et des opérations suivies. Néan- iC0 joins , en recevant d’abord les rayons du Ml -|leil sur une glace plane de quatre pieds et e| uni de hauteur et d’autant de largeur qui 11|f| s réfléchit contre ces miroirs concaves , ils , I j|nt assez puissans pour que celte perte , ii est de la moitié de la chaleur, ne les c npêche pas de brûler très-vivement à leur t0 yer, qui par ce moyen se trouve en bas le mine celui des miroirs de réfraction, et l5 iquel par conséquent on pourroit travailler J i suite et avec une égale facilité ; seulement j, seroit nécessaire que la glace plane et le jj iroir concave fussent tous deux montés e| irallèlement sur un même support, où ils mrroient recevoir également les mêmes ouvemens de direction et d’inclinaison , lit horizontalement , soit verticalement, 'effet que le miroir de quarante-six pouces 3 diamètre feroit en bas, n’étant que de oilié de celui qu’il produit en haut, c’est >mme si la surface de ce miroir étoit ré- dite de moitié, c’est-à-dire comme s’il n’a- )it qu’un peu plus de trente-deux pouces ï diamètre au lieu de quarante-six ; et cette mension de trente-deux pouces de diamè- e pour un foyer de six pieds ne laisse pas 3 donner une chaleur plus grande que celle 3s lentilles de Tschirnaüs ou du sieur Se- n d , dont je me suis autrefois servi , et qui mit les meilleures que l’on commisse. Enfin , par la réunion de ces deux mi- )irs, on auroit aux rayons du soleil une lialeur immense à leur .foyer commun, sur- ^ut en le recevant en haut, qui ne seroit iminuée que de moitié en le recevant en as, et qui par conséquent seroit beaucoup lus grande qu’aucune autre chaleur con- ue , et pourroit produire des effets dont ous n’avons aucune idée. 453 III. Lentilles ou miroirs à Veau . Au moyen des glaces courbées et travail- lées régulièrement dans leur concavité, et sur leur convexité, on peut faire un miroir réfringent , en joignant par opposition deux de ces glaces, et en remplissant d’eau tout l’espace qu’elles contiennent. Dans cette vue, j’ai fait courber deux glaces de trente-sept pouces de diamètre , et les ai fait user de huit à neuf lignes sur les bords pour les bien joindre. Par ce moyen, l’on n’aura pas besoin de mastic pour empê- cher l’eau de fuir. Au zénith du miroir, il faut pratiquer un petit goulot , par lequel on en remplira la capacité avec un entonnoir; et comme les vapeurs de l’eau échauffée par le soleil pour- roient faire casser les glaces, on laissera ce goulot ouvert pour laisser échapper les va- peurs; et, afin de tenir le miroir toujours absolument plein d’eau , on ajustera dans ce goulot une petite bouteille pleine d’eau, et cette bouteille finira elle-même en haut par un goulot étroit, afin que, dans les diffé- rentes inclinaisons du miroir, l’eau qu’elle contiendra ne puisse pas se répandre en trop grande quantité. Cette lentille, composée de deux glaces de trente -sept pouces, chacune de deux pieds et demi de foyer, brûleroit à cinq pieds, si elle étoit de verre : mais l’eau ayant une moindre réfraction que le verre, le foyer sera plus éloigné; il ne laissera pas néan- moins de brûler vivement : j’ai supputé qu’à la distance de cinq pieds et demi cette len- tille à l’eau produiroit au moins deux fois autant de chaleur que la lentille du Palais- Royal , qui est de verre solide , et dont le. foyer est à douze pieds. J’avois conservé une assez forte épaisseur aux glaces, afin que le poids de l’eau qu’elles dévoient renfermer ne pût en altérer la courbure : on pourroit essayer de rendre l’eau plus réfringente en y faisant fondre des sels ; comme l’eau peut successivement fon- dre plusieurs sels, et s’en charger en plus grande quantité qu’elle ne se chargeroit d’un seul sel, il faudroit en fondre de plusieurs espèces , et on rendroit par ce moyen la ré- fraction de l’eau plus approchante de celle du verre. Tel étoit mon projet : mais , après avoir travaillé et ajusté ces glaces de trente-sept pouces, celle du dessous s’est cassée dès la première expérience; et comme il ne m’en restoit qu’une, j’en ai fait le miroir concave 454 MINÉRAUX. INTRODUCTION. de trente-sept ponces , dont j’ai parlé dans l’article précédent. Ces loupes composées de deux glaces sphé- riquement courbées et remplies d’eau brûle- ront en bas, et produiront de plus grands effets que les loupes de verre massif, parce que l’eau laisse passer plus aisément la lu- mière que le verre le plus transparent; mais l’exécution ne laisse pas d’en être difficile , et demande des attentions infinies. L’expé- rience m’a fait connoîlre qu’il falloit des glaces épaisses de neuf ou huit lignes au moins, c’est-à-dire des glaces faites exprès : car on n’en coule point aux manufactures d’aussi' épaisses, à beaucoup près; toutes celles qui sont dans le commerce n’ont qu’environ moitié de cette épaisseur. Il faut ensuite courber ces glaces dans un fourneau pareil à celui dont j’ai donné la figure; avoir attention de bien sécher le fourneau , de ne pas presser le feu et d’em- ployer. au moins trente heures à l’opération. La glace se ramollira et pliera par son poids sans se dissoudre , et s’affaissera sur le moule concave qui lui donnera sa forme. On la laissera recuire et refroidir par degrés dans ce fourneau , qu’on aura soin de boucher au moment qu’on aura vu la glace bien affaissée partout également. Deux jours après , lors- que le fourneau aura perdu toute sa chaleur, on en tirera la glace, qui ne sera que légè- rement dépolie ; on examinera , avec un grand compas courbe , si son épaisseur est à peu près égale partout ; et si cela n’étoit pas, et qu’il y eût dans de certaines parties de la glace une inégalité sensible, on com- mencera par l’atténuer avec une molette de même sphère que la courbure cîe la glace. On continuera de travailler de même les deux surfaces concave et convexe, qu’il faut rendre parfaitement concentriques , en sorte que la glace ait partout exactement la même épaisseur ; et pour parvenir à cette préci- sion, qui est absolument nécessaire, il fau- dra faire courber de plus petites glaces de deux ou trois pieds de diamètre, en obser- vant de faire ces petits moules sur un rayon de quatre ou cinq lignes plus long que ceux du foyer de la grande glace. Par ce moyen on aura des glaces courbes dont on se ser- vira, au lieu de molettes, pour travailler les deux surfaces concave et convexe, ce qui avancera beaucoup le travail : car ces petites glaces, en frottant contre la grande, l’use- ront et s’useront également ; et comme leur courbure est plus forte de quatre ligues, c’est-à-dire de moitié d’épaisseur de la grande glace, le travail de ces petites glaces, tant au dedans qu’au dehors, rendra concert ques les deux surfaces de la grande g aussi précisément qu’il a été possible, i là le point le plus difficile ; et j’ai soin vu que pour l’obtenir on étoit obligé d’f la glace de plus d’une ligne et demie chaque surface ; ce qui la rendoit trop mil et dès lors inutile, du moins pour m objet. Ma glace de trente-sept pouces qu poids de l’eau , joint à la chaleur du soh a fait casser, avoit néanmoins , toute I vaillée, plus de trois lignes et demie < paisseur ; et c’est pour cela que je reci mande de les tenir encore plus épaisses. J’ai observé que ces glaces courbées s plus cassantes que les glaces ordinaires : seconde fusion ou demi-fusion que le ve éprouve pour se courber est peut-étret üf cause de cet effet, d’autant que, pour pr ollt dre la forme sphérique, il est nécessc qu’il s’étende inégalement dans chacune, ses parties , et que leur adhérence entre ecï-l change dans des proportions inégales même différentes pour chaque point de courbe, relativement au plan horizontal la glace , qui s’abaisse successivement p< prendre la courbe sphérique. En général , le verre a du ressort , et p< 5 plier sans se casser, d’environ un pouce ] pied , surtout quand il est mince; je l’ai n me éprouvé sur des glaces de deux et tr lignes d’épaisseur, et de cinq pieds de ha !!? teur : on peut les faire plier de plus de qi f1 Ire pouces sans les rompre, surtout en (l! les comprimant qu’en un sens ; mais si les courbe en deux sens à la fois, çomi pour produire une surface sphérique, el J1’, cassent à moins d’un demi-pouce par pi sous cette double flexion. La glaee infériei de ces lentilles à l’eau obéissant donc à pression causée par le poids de l’eau, e cassera ou prendra une plus forte courbiu 'f à moins qu’elle ne soit fort épaisse, ou qu’e ■" ne soit soutenue par une croix de fer; qui fait ombre au foyer et rend désagréal l’aspect de ce miroir. D’ailleurs le foyer ces lentilles à l’eau n’est jamais franc, bien terminé, ni réduit à sa plus petite etc due ; les différentes réfractions que souff la lumière en passant du verre clans l’eau de l’eau dans le verre , causent une aherr lion des rayons beaucoup plus grande quel ne l’est par une réfraction simple dans 1 loupes de verre massif. Tous ces inconv niens m’ont fait tourner mes vues sur 1 moyens de perfectionner les lentilles deven 1 ; et je crois avoir enfin trouvé tout ce qu’i peut faire de mieux en ce genre , coma PARTIE EXPÉRIMENTALE. 455 l’expliquerai dans les paragraphes sui- . ns. Avant de quitter les lentilles à l’eau, je ois devoir encore proposer un môveh de nâtruction nouvelle qui serait sujétte à lins d’inconvéniens , et dont l'exécution oit assez facile. Au lieu de courber, tra- iîler et polir de grandes glaces de quatre cinq pieds de diamètre, il ne faudrait S|| e de petits morcéàux carrés de deux pou- 5, qui ne coutérôiënt presque rien, et les icéf dans un châssis de fer traversé de rg( Ig es minces1 de ce mèmè métal, et ajustées nime’lés vitrés ën plomb. Ce châssis et ces rges dè fei\ auxquelles bn donnerait la res hrburë sphérique et quatre pieds de dia- ;tre, contiendfoient chacun trois cent àrantè-six'de ces: petits morceaux de deux uces ; et en laisSéht quarante - six pour quivalent de l’espace que prendraient les rges (Je fer, i! y adroit tou jours trois cents ques du ‘soleil qui cbiiicideroienî au même rer, que je suppose à dix pieds; chaque )feeau laisserait passer Un disque dé deux Vices de diamètre , auquel, ajoutant la jhîère des parties du carré circonscrit à ' [ cercle' de deux pouces de diamètre , le er n’auroil à dix pieds que deux pouces demi ou deux pouces trois quarts , si la Jjllmture de ces petites glaces etoit réguliê- uèîii exécutée. Or, eiï diminuant la perte é souffre la lumière efi passant à travers tu et les doublés verres qui la contiennent, qui seroli ici à peu près dé moitié, oh rbijt encore au foyer de ce miroir, tout nposé de facettes planes , une chaleur it cinquante fois plus grande que celle du eil. Cette construction ne serait pas chère, je n’y vois d’autre inconvénient que la te de l’eau qui pourvoit percer par lés iits des verges de fer qui soufiendroient petits trapèzes de verre. Il faudrait pré- lir cet inconvénient en pratiquant de pe- ês rainures de chaque côté dans ces ver- et enduire ces rainures de mastic or- “ pire des vitriers, qui est impénétrable à IV. Lentilles (le vei're solide. ÎJ’ai vu deux de ces lentilles, celle du jais-R oy al celle du sieur Segard; toutes jux ont été tirées d’une masse de verre Allemagne, qui est beaucoup plus transpa- ru que le verre de nos glaces de miroir : is personne ne sait en France fondre le te en larges masses épaisses, et la com- sition d’un verre transparent comme celui de Bohême, n’est connue que depuis peu d’années. J’ai d’abord cherché les moyens de fon- dre le verre ën massés épaisses, et j’ai fait eh même temps différons essais pour avoir une matière bien transparente. M. de Ro- ihilly qui , dans ce temps, étoit l’un des di- recteurs de là manufacture de Saint-Gobin, m’ayant aidé de ses conseils , nous fondîmes deux massés de verre d’environ sept pouces de diamètre sur cinq à six pouces d’épais- seur, dans des creusets à un fourneau où i’bh cuisait de la faïence au faubourg Saint- Antoine. Après avoir fait User et polir les deux surfaces de ces morceaux de verre pour les rendre parallèles, je trouvai qu’il h’y en avoit qu’un des deux qui fût parfai- tement net. Je livrai le second morceau, qui étoit le moins parfait , à des ouvriers qui ne laissèrent pas que d’en tirer d’assez bons prismes de toute grosseur, cl j’ai gardé pen- dant plusieurs années le premier morceau , qui avoit quatre pouces et demi d’épaisseur et dont la transparence étoit telle, qu’en posant ce verre de quatre pouces et demi d’épaisseur sur un livre, on pouvoit lire à travers très-aisément les caractères les plus pelits et les écritures de l’encre la plus blanche. Je comparai le degré de transpa- rence de Cette matière avec celle des glaces de jSaint-Gobin , prises et réduites à diffé- rentes épaisseurs ; un morceau de la matière de ces glaces, de deux pouces et demi d’é- paisseur sur environ un pied de longueur et de largeur, que M. de Romiîly me procura, étoit vert comme du marbre vert, et l’on ne pouvoit lire à travers : il fallut le diminuer de plus d’un poncé pour commencer à dis- tinguer les caractères à travers son épaisseur, et enfin le réduire à deux lignes et demie d’épaisseur pour que sa transparence fût égale à celle de mon morceau de quatre pou- ces et demi d’épaisseur; car on voyoit aussi clairement lès caractères du livre à travers ces quatre pouces et demi, qu’à travers la glace qui n’avoit que deux lignes et demie. Voici ia composition de ce verre, dont la transparence est si grande ; Sable blanc cristallin , une livre. Minium, ou chaux de plomb, une livre. Potasse , une demi-livre. Salpêtre, une demi-once. Le tout mêlé et mis au feu suivant l’art. J’ai donné à M. Cassini de Thury ce mor- ceau de verre, dont on pouvoit espère!' de faire d’excellens verres de lunette achroma- tique, tant à cause de sa très-grande trans- 45b MINÉRAUX. INTRODUCTION. parence que de sa force réfringente, qui étoit très-considérable, vu la quantité de plomb qui étoit entrée dans sa composition ; mais M. de Thury ayant confié ce beau mor- ceau de verre à des ouvriers ignorans , ils l’ont gâté au feu, où ils l’ont remis mal à propos. Je me suis repenti de ne l’avoir pas fait travailler moi-même ; car il ne s’agissoit que de le trancher en lames , et la matière en étoit encore plus transparente et plus nette que celle fllnt-glass d’Angleterre , et elle avoit plus de force de réfraction. Avec six cents livres de cette même com- position, je voulois faire une lentille de vingt-six ou vingt-sept pouces de diamètre, et de cinq pieds de foyer. J’espérois pouvoir la fondre dans mon fourneau, dont à cet effet j’avois fait changer la disposition inté- rieure ; mais je reconnus bientôt que cela n’étoit possible que dans les plus grands fourneaux de verrerie. Il me falloit une masse de trois pouces d’épaisseur sur vingt-sept ou vingt-huit pouces de diamètre, ce qui fait environ un pied cube de verre. Je demandai la liberté de la faire couler à mes frais à la manufacture de Saint-Gobin; mais les admi- nistrateurs de cet établissement ne voulurent pas me le permettre , et la lentille n’a pas été faite. J’avois supputé que la chaleur de cette lentille de vingt-sept pouces seroit à celle de la lentille du Palais-Royal comme 19 sont à 6 ; ce qui est un très-grand effet, attendu la petitesse du diamètre de cette lentille, qui auroit eu onze pouces de moins que celle du Palais-Royal. Cette lentille, dont l’épaisseur au point du milieu ne laisse pas d’ètre considérable, est néanmoins ce qu’on peut faire de mieux pour brûler à cinq pieds : on pourroit même en augmenter le diamètre ; car je suis per- suadé qu’on pourroit fondre et couler éga- lement des pièces plus larges et plus épaisses dans les fourneaux où l’on fond les grandes glaces, soit à Saint Gobin, soit à Rouelles en Bourgogne. J’observe seulement ici qu’on perdroit plus par l’augmentation de l’épais- seur qu’on ne gagneroit par celle de la sur- face du miroir, et que c’est pour cela que, tout compensé, je m’étois borné à vingt-six ou vingt-sept pouces. Newton a fait voir que quand les rayons de lumière lomboient sur le verre sous un angle de plus de quarante-sept ou quarante- huit degrés, ils sont réfléchis au lieu d’ètre réfractés. On ne peut donc pas donner à un miroir réfrigent un diamètre plus grand que la corde d’un arc de quarante-sept ou qua- rante-huit degrés de la sphère sur laquelle 'fil! il a été travaillé. Ainsi , dans le cas présen pour brûler à cinq pieds , la sphère aya: environ trente-deux pieds de circonférence le miroir ne peut avoir qu’un peu plus 1 quatre pieds de diamètre : mais , dans < cas , il auroit le double d’épaisseur de u lentille de vingt-six pouces ; et d’ailleurs 1 rayons trop obliques ne se réunissent jama bien. Ces loupes de verre solide sont , de toi les miroirs que je viens de proposer, 1 plus commodes, les plus solides, les moii sujets à se gâter, et même les plus puissai lorsqu’ils sont bien transparens , bien tr, vaillés , et que leur diamètre est bien pri portionné à la distance de leur foyer. Si l’c veut donc se procurer une loupe de cet l ,e espèce, il faut combiner ces différens objet/ et ne lui donner, comme je l’ai dit, qt|locl vingt-sept pouces de diamètre pour brûleri rûjt cinq pieds , qui est une distance commoc pour travailler de suite et fort à l’aise c foyer. Plus le verre sera transparent et p sant, plus seront grands les effets ; la lumiè passera en plus grande quantité en raist de la transparence , et sera d’autant moit dispersée , d’autant moins réfléchie , et j))|i conséquent d’autant mieux saisie par verre, et d’autant plus réfractée, qu’il se; plus massif, c’est-à-dire spécifiquement plii pesant. Ce sera donc un avantage que c faire entrer dans la composition de ce verlr| une grande quantité de plomb : et c’est p; cette raison que j’en ai mis moitié, c’est-t-|ius j dire autant de minium que de sable. Mai, Lo quelque transparent que soit le verre de cirjL lentilles, leur épaisseur dans le milieu et§à non seulement un très-grand obstacle à transmission de la lumière, mais encore Ui|m empêchement aux moyens qu’on pourro trouver pour fondre des masses aussi épai:m0)J ses et aussi grandes qu’il le faudroit : pî SIt exemple, pour une loupe de quatre piec ^ de diamètre, à laquelle on donneroit ut t(]j foyer de cinq ou six pieds, qui est la distant , iD|j| la plus commode, et à laquelle la lumière ,|ai plongeant avec moins d’obliquité , aura pli ^ de force qu’à de grandes distances , il fai I ^ droit fondre une masse de verre de quatr pieds sur six pouces et demi ou sept pouct d’épaisseur, parce qu’on est obligé de 1 travailler et de l’user même dans la partie ] j | plus épaisse. Or, il seroit très-difficile d f fondre et couler d’un senl jet ce gros vc lume, qui seroit , comme l’on voit , de cin ou six pieds cubes ; car les plus amples eu (1.. vettes des manufactures de glaces ne con * tiennent pas deux pieds cubes ; les plu ( PARTIE EXPÉRIMENTALE. 457 ides glaces de soixante pouces sur cent 1 gt , en leur supposant cinq lignes d’épais- ' *, ne font qu’un volume d’environ un i cube trois quarts. L’on sera donc forcé >e réduire à ce moindre volume , et de ployer en effet qu’un pied cube et ii , ou tout au plus un pied cube trois rts de verre pour en former la loupe, ncore aura-t-on bien de la peine à obte- des maîtres de ces manufactures de faire 1er du verre à cette grande épaisseur, ce qu’ils craignent , avec quelque raison , la chaleur trop grande de cette masse isse de verre ne fasse fondre ou bour- fler la table de cuivre sur laquelle on ile les glaces, lesquelles n’ayant au plus ! cinq lignes d’épaisseur1, ne communi- :nt à la table qu’une chaleur très-mé- cre en comparaison de celle que lui oit subir une masse de six pouces d’é- sseur. ^1 Lentilles à échelons pour brûler avec la plus grande vivacité possible. rail loi Je viens de dire que les fortes épaisseurs 'on est obligé de donner aux lentilles squ’elles ont un grand diamètre et un sb ter court , nuisent beaucoup à leur effet : tpi e lentille de six pouces d’épaisseur dans Imilieu de la matière des glaces ordinaires brûle, pour ainsi dire, que par les bords, ec du verre plus transparent, l’effet sera is grand ; mais la partie du milieu reste lai ours en pure perte, la lumière ne pou- ce ht en pénétrer et traverser la trop grande f aisseur. J’ai rapporté les expériences que " : faites sur la diminution de la lumière passe à travers différentes épaisseurs du f| Jèrne verre ; et. l’on a vu que cette diminu- ® >n est très-considérable ; j’ai donc cherché moyens de parer à cet inconvénient, et trouvé une manière simple et assez aisée diminuer réellement les épaisseurs des ||( htilles autant qu’il me plaît , sans pour !i'8 la diminuer sensiblement leur diamèti'e et >1“ ns allonger leur foyer. 811 Ce moyen consiste à travailler ma pièce ili 1. On a néanmoins coulé à Sainî-Gobin, et à ma I ière , des glaces de sept lignes, dont je me suis rvi pour différentes expériences , il y a plus de il ngl i .ns ; j’ai remis dernièrement une de ces glaces trente-huit pouces en carré et de sept lignes épaisseur, à M. de Bernières qui a entrepris de ’re des loupes à l’eau pour l’Académie des Scien- > , et j’ai vu chez lui des glaces de dix lignes épaisseur, qui ont été coulées de même à Saint- ibin : cela doit faire présumer qu’on pourroit , ns aucun risque pour la table, en couler d’encore us épaisses. de verre par échelons. Supposons , pour me faire mieux entendre , que je veuille dimi- nuer de deux pouces l’épaisseur d'une len- tille de verre qui a vingt-six pouces de dia- mètre, cinq pieds de foyer et trois pouces d’épaisseur au centre ; je divise l’arc de cette leniille en trois parties, et je rapproche concentriquement chacune de ces portions d’arc, en sorte qu’il ne reste qu’un pouce d’épaisseur au centre, et je forme de chaque côté un échelon d’un demi-pouce, pour rap- procher de même les parties correspon- dantes : par ce moyen, en faisant un second échelon, j’arrive à l’extrémité du diamèlre, et j’ai une lentille à échelons qui est à très- peu près du même foyer, et qui a le même diamètre , et près de deux fois moins d’épais- seur que la première ; ce qui est un très- grand avantage. Si l’on vient à bout de fondre une pièce de verre de quatre pieds de diamètre sur deux poucès et demi d’épaisseur, et de la travailler par échelons sur un foyer de huit pieds, j’ai supputé qu’en laissant même un pouce et demi d’épaisseur au centre de cette lentille et à la couronne intérieui’e des échelons, la chaleur de celte lentille sera à celle de la lentille du Palais-Royal comme 28 sont à 6 , sans compter l’effet de la diffé- rence des épaisseurs , qui est très-considéra- ble, et que je ne puis estimer d’avance. Cette deinière espèce de miroir réfringent est tout ce qu’on peut faire de plus parfait en ce genre ; et quand même nous le rédui- rions à trois pieds de diamètre sur quinze lignes d’épaisseur au centre et six pieds de foyer, ce qui en rendra l’exécution moins difficile, on auroit toujours un degré de chaleur quatre fois au moins plus grand que celui des plus fortes lentilles que l’on con- noisse. J’ose dire que ce miroir à échelons seroit l’un des plus utiles instrumens de physique ; je l’ai imaginé il y a plus de vingt-cinq ans , et tous les savans auxquels j’en ai parlé désireroient qu’il fut exécuté : on en tireroit de grands avantages pour l’avancement des sciences ; et , y adaptant un héliomèlre, on pourroit faire à son foyer toutes les opérations de la chimie aussi com- modément qu’on le fait au feu des four- neaux , etc. Explication des figures qui représentent le fourneau dans lequel j’ai fait courber des glaces pour faire des miroirs ardens de différentes espèces. Dans la planche 1, figure x, est le plan xlu four- neau, au rez-de-chaussée, où l’on voit AHKB un 453 MINERAUX. INTRODUCTION. vide qui sauve les inconvéniens du terre- plein sous Pâtre du fourneau f ce vide est couvert d’une voûte, comme on le verra dans l'es figures suivantes: ER les écndriers, disposés eii sortie que l’ouver- ture dé l’un est dans la face où se trouve le vent de l’autre. LL deux contre-forts qui affermissent la maçon- nerie du fourneau. MM dèU* autres contre forts, dont l’usage est le même que celui de ceux ci-dessus , et qui n’en dif- forent que parce qu’ils sonttin peu arrondis. G. GG G plans de quatre barres de fer qui affer- missent le fourneau ainsi qu’il sêra expliqué ci- après. La figure 2 est l’çîévation d’une des faces paral- lèles à la ligne CD du plan précédent. HK l’oùWHurè prfitî'qûée dans Pâtre du four- neau', afin qu’il ne s'y trouve point d’humidité. CC la bouche ou grande ouverture du fourneau. A la petite ouverture pratiquée dans la face op- posée , laquelle eét t’Oiité sémblnblè à celle t[ue la même planché représente , à cètt'é différence près , que l’ouverture est plus petite. Mm un des contre forts arrondis, à côté duquel on voit le vent. R ouverture par où Pair extérieur passe sous la grille du foyer. ’ E le cendrier, iV le foyer, P la porte qui Je ferme. Ll un contre-fort carré. GO, GO, deux dés 'barres de fer scellées en ferre, et qui sont unies à celles qui sont pdséès à l’aütre face parles tiens de fer DD, ainsi que Pon verra dans une des figures suivantes. OO deux barres de fer qui unissent ensemble Jes deux barres GO, GO, et retiennent la •voûte de l’ouverture 6’L’ qui est bombée. mDBDl la voûte commune du fourneau et des foyers , dont la figure est ellipsoïde; l’arrangement des briques et autres matériaux qui composent le fourneau së Coniioit àis'émeirt' pat la figure. La figure 3 est la vue extérieure du fourneau par une des faces parallèles à la ligne AB du plan, figure 1 . Ll , Mm, contre-forts. H K extrémités de l’ouverture sous Pitre du fourneau. GOD, GOD, les barres de fer dont on a parlé, qui sont unies ensemble par le lien DD. Les liens DD Couchés sur la Voûte DRD sont unis 'ensemble par un 'troisième lieu de fér. Les figures précédentes font coftnoïtre l’extérieur du fourneau. L’inférieur, plus intéressant, est re- présenté dans les planches suivantes. La figure 4 est une coupe horizontale du four- neau par le milieu de lu grande bouche. X est Pâtre que Pon a rendu concave sphérique. EË les deux grilles qui séparent lë foyer du cendrier, et sur lesquélles on met lé charbon : on a supposé que la voûte était transparente , pour mieux faire voir la direction des barreaux qui com- posent les grilles. A la petite ouverture, CC la grande. DD les marges; LM, LM, les contre-forts La figure 5 est la eoupe verticale du fourneau suivant la ligi.*e CD du plan , ou selon lë grand axe de l’ellipsoïde dont la voûte a la figure. Z le vide sous Pâtre du fourneau. GXK eavité sphérique pratiquée dans l’âtre du fourneau, et sur laquelle la glace G K qui a arrondie est posée, et dôût elle doit prendre exa1 ïÀèût'ta’’- figuré', après qu’elle âUfâ été 'ramollie iê feu. ' FF les grilles ou foyer au dessous desque, sont Jes cendriers. DD lès marges qui empêchent les bords d( glacé 'du côté dès foyers d’ètré trop tôt atteints’ le feu. 1 " • " ' - ■■ i ÇBÇ la voûte, CC lunettes que l’on ouvre ferme à volonté en les couvrant d’un carreau terré' ctiitè , 'LM' côiitre’-foifts.' La figure 6 représente ja coupe du fourneau j un plan vertical-, qui passe par la ligne AB plan. HUI, le vide sous Pâtre du fourneau. GXK eavifè sphérique pratiquée dans l’àtre fournéâu, et 'sur laquelle ja glace X est déjà 1 plitjuée. DD une des marges, P la grande ouvertu Q Ta petite , CC lunèftès. CRC la voûte coupée transversalement ou se le 'petit ave dè P ellipsoïde; On jugera de la grc deur de chaque partie (Je ce fourneau par ' échelles qui sont au bas de chaque figure, qui* été exactement levées sur le fourneau qui Ptoît' ' Jardin royal des Plantes, par M. Goussier. Grand miroir de réflexion , appelé siîp.oir u’archimede. Planche 2 , figure 1. Ce miroir est composé trois cent soixante glaces montées sur un châssis e fer ÇPEF ; chaque glace est mobile , pour que images réfléchies par châèuh'ë "puissent être ri vbyéës Tëi’S îè- mèmè point ,'ét colnéïdër dans' même espace. .. Le châssis , qui a deux tourillons , est porté j une pièce de fer composée de deux montais A LA , assemblés' à t créons et ihoïiofseS dans la cc ché Z O ; ils sont1 asstijeftis dans eéttc situation' j la traverse af) , et par trois .étais à ciaacun X, Q, fixés en P dans le. corps du montant MB, et assc blés par le bas dans une courbe jYÔ Q qui leur si d’empâlëmént ; cés .courbés ont dès entailles q kt fe'éôivèiît des roulettes", au ùibyéra desquelles c© «: machiné, quoique fort pesante, peut tourner jib «e ment sür le plancher de bois XX Y, étant assujel au centre dé cette plate-forme par Taxe RS' jl passé dhns les deux traverses Z O , àb ; 'ehnq montant porte aussi à sa partie inférieure une' re lette , en sorte que toute la machine est portée p dix roulettes • la plate-forme de bois est recouvei- de bandes de fér dans la rouette des roulettes sa |«tf cette attention !a plate-forme de sèrô'rt pas de lo gue duréè. La plate-fonne est portée par quatre fortes re «li lettes de bois, dont l’usage est de faciliter le 1 port de toute la machine d’un lieu à un aVitr Pour pouvoir varier à volonlé Jes inclinaisons é A miroir, et pouvoir l'assujettir dans la situation q l’on juge à propos, on a adapté la crémaillère , qui est unie avec des cercles ; ccttc crémaillère < menée par un pignon en. lanterne , dont la tige traverse le montant et un des étais, et est ter min par une manivelle K, au moyen de laquelle on 1 cline ou 00 redresse Je miroir à discrétion. Jusqu’à présent nous n’avons expliqué que construction générale du miroir ; reste à expliqu par quel artifice on parvient à faire que les hnsg différentes, réfléchies par les différens miroirs, so jnne PARTIE EXPERIMENTALE. 4?0 i ates renvoyées au même point, et c’est à quoi it destinées les figurés suivantes. i Figure 2. XZ une portion clés barres qui occu- ht le derrière dü miroir; ceS barres sont au nom- ordsj e v'ngt, et disposées horizontalement ,' en Iteinl rte que leur plan est parallèle au plan du miroir; acuiie de ces barres a dix-huit entailles TT, et le Min :me nombre d’éminencéà VW qui ' lés séparent : : > barres sont assujetties aux côtés verticaux du assis du miroir par des vis , et entre elles par fis ou quatre barres verticales , auxquelles elles msrf >t assujetties par des vis. Vis à-vi’s de chaque en- , ./ n lie TT il ÿ a des poupées TA , TD , qui y sont ées par les écrous GG, qui prennent la partie ■audée de la queue de la poupée , après qu’elle l'jM traversé l’épaisseur (Je la barre; les parties supé- ! - :ures de chaque poupée , qui sont percées , ser- nt de collets aux tourillons de la croix dont nous mr(i ons parler ; cette croix, représentée figures 3 et 5, ; un morceau dé cuivre ou de fér, dont la figure „ j t conimître l’a Forme. |a„j CD les tourillons qui entrent dans les trous pra- , J ues à chaque poupée, en sorte qu’elle se peut ‘j )uvoir librement dans ces trous. 0jj La vis ML, après avoir traversé l’éminence V, I s’appuyer en dessous contre l’extrémité infé- feure B du croisillon BA; en même temps leres- |rt K va s’appliquer contre l’autre extrémité A 111 même croisillon ; en sorte que lorsque l’on fait uénêr la vis en montant, le ressort en se rétablis- jnt fait que la partie B du croisillon se trouve pi ,j Ujours appliquée sur la pointe de la vis : il résulte ài-sit I cette Construction un mouvement de ginglyme qjj charnière , dont l’axé est BC, figuré ?.. irJ Ce seul mouvement ne suffisant pas, on en a pra- ,y ué un autre , dont l’axe de mouvement croise à Igle droit le premier. )ri('l (Aux deux extrémités A et B du croisillon AB, a adapté deux petites poupées BH, AK , fig. 5, la| tenues, comme les précédentes , par des vis et M s écrous. -JL |Les trous HA , qui sont aux parties supérieures asj ces poupées, reçoivent les tourillons Z>6’, fig. 4> , rj une plaque de fer que nous avons appelée porte- y ice , qui peut se mouvoir librement sur les pou- BC| |éé, et s’incliner sur l’axé CD du premier îriou- ment par le moyen de la vis FG, pour laquelle jJ a réservé un bossage E dans le croisillon AB , ijf'j n de lui servir d’écrous dormans : celte vis s’ap- (j, [que par E contre la partie BBC du porte-glace, r8 force cette partie à monter lorsqu’on tourne la ,;tj L ; mais lorsqu’on vient à lâcher cette vis, le i'és- !|:v; rt L qui s’applique contre la partie BAC du ;Si irte-glace , la force à Suivre toujours la pointé , |j | la vis: au moyen de ces deux mouvemèns de 1 ngly'me , on peut donner à la glace qui est reçue „ r les crochets ACB du porte-glace, telle direc- ia: |>n que l’on souhaite, et par ce moyen faire coïn- ler l’image du soleil réfléchie pàr uiie glacé, avec -, lie qui est réfléchie par une autre. :[l (j n1 La figure 6 représente le porte-glace vu par der- tï| Ire, ou l’on voit la vis FEG qui s’applique en G .e >rs de l’axe de mouvement HK , et le ressort L injj î s’applique en L de l’autre côté de l’axe de ;ii Hivernent. ? La figure 7 représente le porte-glace vu en des- f s , et garni de la glace A'CBD ; le reste est expli- :iiî é dans les autres figures. Miroir de réflexion rendu concave par fa pression d’une ; Vi's appliquée du céiïtYe. La figure 8 représente le miroir monté sur son pied , BBC la fourchtettê qui' porté lé miroir ; cette fourchette est 'irtobilfe dans l'axé vertical , et est rêtenufe sur le'pîcd' à ‘ trois braiichéS FFF par l’écrou G.' ! ‘ ’ ' : DE lé' régulateur des inclinaisons. A la tète de la vis placée au centre du miroir, rendu concavé par stfn moyen. La figure 9 représente le miroir vu par sa partie postérieure, BC les’ tourillons qui entrent dans les collets dé’ la fourchèttte. F G une barre de fer fixée sur l’anneau de même métal qui entouré l'a1 glace : cétte barre sert de point d’appui à là vis DE qui comprimé la glace. BHCK l’ànhèâü ou 1 eercîe dé fer sur lequel la glace est appliquée ; ce céreïé doit être exactement plan et parfaitement ciculaire : on couvre la partie sur laquelle la glace s’applique, avec de la peau , du cuir' ou de l’étoffe , ‘ poiii* que le contact soit plus immédiat, et que la glacé ne soit point ex- posée à rompre. Miroir de réflexion rendu concave par la pression de l’atmosphère. Figure 10. Ce miroir consiste en un tambour ou cylindre , dont une des bases est la glace, et l’autre une plaque de fer. AB la glace parfaitement plane, C une lentille taillée dans l’épaisseur même de la glace. BM la hauteur du cylindre aux extrémités du diamètre horizontal TL, duquel sortent deux tou- rillons, qui entrent dans les yeux de la fourchette, ainsi qu’il est expliqué en parlant du miroir de réfraction. . ' MO le régulateur des inclinaisons. iVrle collet par lequel il passe, et la vis qui sert à l’y fixer. RSPQ le pied qui est semblable à celui du mi- roir de réfraction , à cétte différence près , qu’il est de bois , èt que les pièces ont un contour moins orné; du reste sa fonction est la même. Figure 11 est le profil du miroir coupé par un plan qui passe par l’axe du cylindre, et auquel on suppose que l’œil est perpendiculaire. AB la glace dont on voit lepaisseur. C la lentille qui y est entaillée^ et dont le foyer tombé sué le'point e." ' ED la base dit cylindre , qui est une plaque de fer. AE , BD, la hauteur et la coupe de la surface cylindrique. Uné mèche soufrée que l’on fait entrer dans la catité du miroir, après avoir ôté la vis K , dont l’écrou est un cube solidement attaché à la plaqué dé fer qui sert de fond aü miroir. G la même vis représentée séparément ; II une rondelle dé cuir que l’on' inet 'entre la tète de la vis et son écron pour fermer entièrement le passage à l’air. abc la courbure que la glace prend, après que l’air que le cylindré contient a été consommé par la flamme de la bougie à laquelle la lentille C a mis le feu. DEE le régulateur des inclinaisons , qui est as- semblé à charnière au point D. 46 o MINÉRAUX. INTRODUCTION. Autre miroir de réflexion. Planche 3, figure i. Il consiste aussi en un cy- lindre ou tambour de fer, dont une des bases est une glace parfaitement plane ; la base opposée est une plaque de fer qui est fortifiée par les règles 4 dure pas, à beaucoup près, aussi long temps que les couleurs bleues et vertes produites par le jaune et par le rouge. De même, en regardant fixement et long- temps une tache bleue sur un fond blanc , on voit naître autour de la tache bleue une couronne blanchâtre un peu teinte de rouge; et en cessant de regarder la tache bleue , et portant l’œil sur le fond blanc, on voit une tache d’un rouge pâle , toujours de la même figure et de la même grandeur que la tache bleue , et cette apparence ne dure pas plus long-temps que l’apparence pourpre pro- duite par la tache verte. En regardant de même avec attention une tache noire sur un fond blanc, on voit naître autour de la tache noire une couronne d’un blanc vif; et cessant de regarder la tache noire , et portant l’œil sur un autre endroit du fond blanc, on voit la figure de la tache exactement dessinée et d’un blanc beau- coup plus vif que celui du fond : ce blanc n’est pas mal ; c’est un blanc brillant, sem- blable au blanc du premier ordre des an- neaux colorés décrits par Newton ; et , au contraire , si on regarde long - temps une tache blanche sur un fond noir, on voit la tache blanche se décolorer; et en portant l’œil sur un autre endroit du fond noir, on y voit une tache d’un noir plus vif que celui du fond. "Voilà donc une suite de couleurs acciden- telles, qui a des rapports avec la suite des couleurs naturelles: le rouge naturel produit le vert accidentel , le jaune produit le bleu , le vert produit le pourpre, le bleu produit le rouge , le noir produit le blanc , et le blanc produit le noir. Ces couleurs accidentelles n’existent que dans l’organe fatigué, puis- qu’un autre œil ne les aperçoit pas : elles ont même une apparence qui les distingue des couleurs naturelles; c’est qu’elles sont ten- dres, brillantes, et qu’elles paroissent être à différentes distances, selon qu’on les rap- porte à des objets voisins ou éloignés. Toutes ces expériences ont été faites sur des couleurs mates avec des morceaux de papier ou d’étoffes colorées : mais elles réus- sissent encore mieux lorsqu’on les fait sur des couleurs brillantes , comme avec de l’or brillant et poli, au lieu de papier ou d’étoffe jaune; avec de l’argent brillant, au lieu de papier blanc; avec du lapis, au lieu de pa- pier bleu , etc. : l’impression de ces couleurs brillantes est plus vive et dure beaucoup plus long-temps. Tout le monde sait qu’après avoir regardé le soteil , on porte quelquefois pendant long- MlNÉRAUX. INTRODUCTION. temps l’image colorée de cet astre sur t les objets; la lumière trop vive du sc produit en un instant ce que la lumière dinaire des corps ne produit qu’au fc d’une minute ou deux d’application fixe l’œil sur les couleurs. Ces images coloi du soleil , que l’œil ébloui et trop forlem ébranlé porte partout, sont des couleurs même genre que celles que nous venons décrire; et l’explication de leurs apparei b dépend de la même théorie. j;« Je n’entreprendrai pas de donner ici if»1 idées qui me sont venues sur ce sujet ; qi p que assuré que je sois de mes expérienc e je ne suis pas assez certain des conséquer qu’on en doit tirer, pour oser rien hasar encore sur la théorie de ces couleurs, me contenterai de rapporter d’autres ob. vations qui confirment les expériences prit m dentes, et qui serviront sans doute à éclait itr cette matière. En regardant fixement et fort long-ter un carré d’un rouge vif sur un fond bla lit on voit d’abord naître la petite couronne t vert tendre dont j’ai parlé ; ensuite , en ci xe tinuant à regarder fixement le carré rou on voit le milieu du carré se décolorer, ai les côtés se charger de couleur, et forr ro comme un cadre d’un rouge plus fort' au beaucoup plus foncé que le milieu; ensui icu en s’éloignant un peu et continuant à roi garder toujours fixement , on voit le ca' un de rouge foncé se partager en deux dans ou quatre côtés, et former une croix d’un rotiou aussi foncé : le carré rouge paroît a|i I comme une fenêtre traversée dans son i ' lieu par une grosse croisée et quatre p; neaux blancs; car le cadre de cette esp re de fenêtre est d’un rouge aussi fort que ( croisée. Continuant toujours à regarder a' p opiniâtreté, cette apparence change enco L et tout se réduit à un rectangle d’un roi L si foncé, si fort, et si vif, qu’il offusqL entièrement les yeux. Ce rectangle est de L même hauteur que le carré ; mais il n’a j la sixième partie de sa largeur : ce point le dernier degré de fatigue que l’œil pe supporter; et lorsqu’enfin on détourne i’( de cet objet , et qu’on le porte sur un aul endroit du fond blanc, on voit, au lieu i carré rouge réel , l’image du rectangle rou imaginaire, exactement dessinée et d’u couleur verte brillante. Cette impressi subsiste fort long-temps , ne se décolore q peu à peu ; elle reste dans l’œil , même apr l’avoir fermé. Ce que je viens de dire < i t( carré rouge arrive aussi lorsqu’on regan très-long temps un carré jaune ou noir, < * W §- PARTIE EXPÉRIMENTALE. 465 ppan toute autre couleur ; on voit de même le sut Ire jaune ou noir, la croix et le rectangle; du l’impression qui reste est un rectangle i tu, si on a regardé le jaune; un rectangle ai me brillant, si on a regardé un carré 0 lu ir, etc. col J’ai fait faire les expériences que je viens lotie rapporter, à plusieurs personnes; elles itihi i vu, comme moi , les mêmes couleurs et Di mêmes apparences. Un de mes amis m’a uré, à cette occasion, qu’ayant regardé jour une éclipse de soleil par un petit rit u, il avoil porté, pendant plus de trois ijet;i naines, l’image colorée de cet astre sur lérieii is les objets; (pie quand il llxoit ses yeux >é(|ue • du jaune brillant, comme sur une bor- iliasa re dorée, il voyoit une tache pourpre; et leurs, • du bleu, comme sur un toit d ardoises, •es ol e tache verte. J'ai moi-même souvent re- cespi -dé le soleil, et j’ai vu les mêmes eou- àécli rs : mais je craignois de me faire mal I x yeux en regardant cet astre, j’ai mieux u' tel né continuer nu s expériences sur des ni bü iffes colorées ; et j’ai trouvé qu’en effet ces Ml Pleurs accidentelles changent en se mêlant me ec les couleurs naturelles , et qu’elles sui- ioi ut les mêmes règles pour les apparences : lord r lorsque la couleur verte accidentelle , for] oduite par le rouge naturel , tombe sur un s for [id rouge brillant, cette couleur verte de- eiisu *ut jaune; si la couleur accidentelle bleue, it à oduite par le jaune vif, tombe sur un fond lect ine, elle devient verte : en sorte (pie les dans uleurs qui résultent du mélange de ces îDi’l uleurs accidentelles avec h s couleurs natu- lit al les suivent les mêmes règles et ont les son] ïmes apparences que les couleurs naturelles ir p ns leur composition et dans leur mélange ; esp ec d’autres couleurs naturelles. 1 (|M Ces observations pourront être de quelque fffi ilité pour la connoissance des ineommo- eiaco és des yeux, qui viennent probablement moi m grand ébranlement causé par l’impres- iffusj >n trop vive de la lumière. Une de ces ml de pommodités est de voir toujours de\ant ses n’aj jux des taches colorées, des cercles blancs , oint des points noirs comme des mouches qui il pi liigent. J’ai ouï bien des personnes se ■nef lindre de cette espèce d’incommodité; et mao i lu dans quelques auteurs de médecine lien; le la goutte sereine est toujours précédée ei’Oil f ces points noirs. Je ne sais pas si leur d'n intiment est fondé sur l’expérience , car i éprouvé moi-même cette incommodité; i vu des points noirs pendant plus de ois mois en si grande quantité, que j’en is fort inquiet ; j’avois apparemment fati- ■egaj ié mes yeux en faisant et en répétant trop Büffon. I. souvent les expériences précédentes, et en regardant quelquefois le soleil; car les points noirs ont paru dans ce même temps , et je nen avois jamais mi de ma vie; mais enfin ils m'incommodoient tellement, surtout lors- que je regardois au grand jour des obje’s fortement éclairés, que j’é ois contraint de détourner les yeux ; le jaune surtout m’étoit insupportable, et j’ai été obligé de changer des rideaux jaunes dans la chambre que j’habitois , et d'en mettre de veits; j'ai évité de regarder toutes les couleurs trop furies et tous les objets brillans. l'eu à peu le nom- bre des points noirs a diminué, et actut Hu- ment je n’en suis plus incommodé, ( e qui m’a convaincu (pie ces points noirs viennent de la trop forte impression de la lumière, c’est qu’après avoir regardé le soleil j ai toujours vu une image colorée que je por- tons plus ou moins long-temps sur tous les objets; et, suivant a\ec attention le^ diffé- rentes nuances de ce!te image colorée, j’ai reconnu quelle se décoloroit peu à peu, et qu’à la fin je ne portois plus sur les objets qu’une tache noire, d abord assez grande, qui dimiuuoit ensuite peu à peu , et se ré- duisoit enfin à un point noir. Je vais rapporter à celle occasion un fait qui est assez remarquable; c’est (pie je n’é- lois jamais plus incommodé de ces points noirs que quand le ciel ét> it couvert de nuées blair hes ; ce jour me iàtiguoil beau- coup plus que la lumière d’un ciel serein , et cela parce qu’eu effet la quantité de lu- mière réfléchie par un ciel couvert de nuées blanches est beaucoup plus grande que la quant. lé de lumière réfléchie par l’air pur, et qu’à l’exception des objets éclairés immé- diatement par les rayons du soleil, tous les autres obje’s qui sont dans l’ombre sont beaucoup moins éclairés que ceux qui le sont par la lumière réfléchie d’un ciel couvert de nuées blanches. Avant que de terminer ce mémoire , je crois devoir encore annoncer un fait (pii pa- roîtra peut-être extraordinaire, mais qui n’en est pas moins certain , et que je suis fort étonné qu’on n’ait pas observé; c’est que les ombres des corps, qui , par leur es- sence, doivent êtres noires, puisqu’elles ne sont que la privation de la lumière; que les ombres , dis-je , sont toujours colorées au lever et au coucher du soleil. J’ai observé , pendant l’été de l’année 1743, plus de trente aurores et autant de soleils couchans; toutes les ombres qui tomboient sur du blanc, comme sur une muraille blanche, étoient quelquefois vertes , mais le plus sou- 3o 466 MINÉRAUX. INTRODUCTION. vent bleues , et d’un bleu aussi vif que le plus bel azur. J’ai fait voir ce phénomène à plusieurs personnes qui ont été aussi sur- prises que moi. La saison n’y fait rien ; car il n’y a pas huit jours (i5 novembre 1743) que j’ai vu des ombres bleues : et quiconque voudra se donner la peine de regarder l’om- bre de l’un de ses doigts , au lever ou au coucher du soleil , sur un morceau de pa- pier blanc, verra comme moi cetle ombre bleue. Je ne sache pas qu’aucun astronome, qu’aucun physicien , que personne , en un mot , ait parlé de ce phénomène , et j’ai cru qu’en faveur de la nouveauté on me per- met I roi t de uonner le précis de celte obser- vation. Au mois de juillet 1743, comme j’étois occupé de mes couleurs accidentelles , et que je cherchois à voir le soleil , dont l’œil soutient mieux la lumière à son coucher qu'a toute autre ht ure du jour, pour recon- noiire ensuite les couleurs, et les change- nt eus de couleurs causés par cette impres- sion, je remarquai que les ombres des arbres qui tomboient sur une muraille blanche ét oient vertes. J’étois dans un lieu élevé, et le soleil se couchoit dans une gorge de montagne , en sorte qu’il me pa- roissoit fort abaissé au dessous de mon ho- rizon : le ciel étoit serein , à l’exception du couchant, qui , quoiqu’exempt de nuages, étoit chargé d’un rideau transparent de va- peurs d’un jaune rougeâtre, le soleil lui- mêine fort rouge, et sa grandeur apparente au moins quadruple de ce qu’elle est à midi. Je vis donc très-distinctement les ombres des arbres qui étoieut à vingt et trente pieds de la muraille blanche colorées d’un vert tendre tirant un peu sur le bleu ; l’ombre d’un treillage qui étoit à trois pieds de la muraille étoit parfaitement dessinée sur celte muraille, comme si on l’avoit nouvel- lement peinte de vert-de-gris. Cette appa- rence dura près de cinq minutes, après quoi la couleur s’affoiblit avec la lumière du so- leil , et ne disparut entièrement qu’avec les ombres. Le lendemain, au lever du soleil , j’allai regarder d’autres ombres sur une mu- raille blanche ; mais au lieu de les trouver vertes , comme ^e m’y attendois , je les trouvai bleues , ou plutôt de la couleur de l’indigo le plus vif. Le ciel étoit serein , et il n’y avoit qu’un petit rideau de vapeurs jaunâtres au levant : le soleil se levoit sur une colline , en sorte qu’il me paroissoit élevé au dessus de mon horizon. Les ombres bleues ne durèrent que trois minutes , après quoi elles nie parurent noires. Le même jour , je revis , au coucher du soleil , ombres vertes , comme je les avois vues veille. Six jours se passèrent ensuite sa pouvoir observer les ombres au coucher : soleil , parcè qu’il étoit toujours couvert nuages. Le septième jour, je vis le soleil son coucher ; les ombres n’étoient pl vertes , mais d’un beau bleu d’azur : je 1 marquai que les vapeurs n’étoient pas fc abondantes , et que le soleil , ayant avan pendant sept jours , se couchoit derrière i rocher qui le faisoit disparoitre avant qu put s’abaisser au dessous de mon horizo Depuis ce temps, j’ai très-souvent obser les ombres, soit au lever, soit au coucher t soleil , et je ne les ai vues que bleues , que quefois d’un bleu fort vif, d’autres fois d’i bleu pâle , d’un bleu foncé , mais constan ment bleues. Ce mémoire a été imprimé dans ceux c l’Académie royale des Sciences, année 1 74^ Yoici ce que je crois devoir y ajouter ai jourd’lrui (année 1773) : Des observations plus fréquentes m’oi fait reeonnoître que les ombres ne parois sent jamais vertes au lever ou au couche du soleil que quand l’horizon est chargé d beaucoup de vapeurs rouges ; dans tout ai tre cas , les ombres sont toujours bleues, é d’autant plus bleues que le c-iel est pin serein. Cette couleur bleue des ombres n’es autre chose que la couleur même de l’air et je 11e sais pourquoi quelques physicien ont défini l’air un fluide invisible , inodore insipide , puisqu’il est certain que l’azur cê leste n’est autre chose que la couleur di l’air ; qu’à la vérité il faut une grande épais seur d’air pour que notre œil s’aperçoive d< | la couleur de cet élément; mais aue néan- moins lorsqu’on regarde de loin des objet! sombres , on les voit toujours plus ou moirn bleus. Cette observation , que les physiciens n’avoient pas faite sur les ombres et sur les objets sombres vus de loin , n’avoit pad échappé aux habiles peintres , et elle doit en effet servir de base a la couleur des ob- jets lointains , qui tous auront une nuancej bleuâtre d’autant plus sensible qu’ils seront supposés plus éloignés du point de vue. On pourra me demander comment cette couleur bleue, qui n’est sensible à notre œiS f1 nnp mianrl il v a nnp trPS-Érranrlp pnaiçspulH F que quand il y a une très-grande épaisseuî d’air, se marque néanmoins si fortement à ; quelques pieds de distance au lever et au , coucher du soleil; comment il est nnssihtüjr que cette couleur de l’air, qui est à peine] |T sensible à dix mille toises de distance , j| puisse donner à l’ombre noire d’un treillage PARTIE EXPÉRIMENTALE, 467 1 n’est éloigné de la muraille blanche que trois pieds une couleur du plus beau u : c’est en effet de la solution de cette '! istion que dépend l’explication du plié- 1 nène. Il est certain que la petite épars- r d’air qui n’est que de trois pieds entre ' jreillage et la muraille ne peut pas donner 1 t couleur noire de l’ombre une nuance si forte de bleu : si cela étoit , on verroit îidi et dans tous les autres temps du jour ombres bleues comme on les voit au IM ;r et au coucher du soleil. Ainsi cette arence ne dépend pas uniquement , ni ne presque point du tout , de l’épaisseur l’air entre l’objet et l’ombre. Mais i) faut sidérer qu’au lever et au coucher du so- la lumière de cet astre étant affoiblie surface de la terre , autant qu’elle peut e par la plus grande obliquité de cet e , les ombres sont moins denses , c’esl- re moins noires dans la même propor- , et qu’en même temps la terre n’étant éclairée que par cette foible lumière du il , qui ne fait qu’en raser la superficie , lasse de l’air, qui est plus élevée, et qui conséquent reçoit encore la lumière du u !il bien moins obliquement, nous renvoie \ e lumière , et nous éclaire alors autant ç >eut-être plus que le soleil. Or cet air et bleu ne peut nous éclairer qu’en renvoyant une grande quantité de ei ms de sa même couleur bleue ; et lors- ces rayons bleus , que l’air réfléchit , beront sur des objets privés de toute couleur comme les ombres , ils les ’Pai dront d’une plus ou moins forte nuance >leu , selon qu’il y aura moins de lumière 111 cte du soleil, et plus de lumière réfléchie l’atmosphère. Je pourrois ajouter plu- ,lû rs autres choses qui viendroient à l’appui ette explication ; mais je pense que ce je viens de dire est suffisant pour que ions esprits l’entendent et en soient sa- its. s crois devoir citer ici quelques faits ob- és par M. l’abbé Millot , ancien grand- ire de Lyon, qui a eu la bonté de me communiquer par ses lettres des 1 8 août 4 et 10 février 1 7 55, doni voici l’extrait: n’est pas seulement au lever et au cou- i®1 • du soleil que les ombres se colorent, îidi , le ciel étant couvert de nuages , pté en quelques endroits, vis-à-vis d’une es ouvertures que laissoient entre eux Pe# mages , j’ai fait tomber des ombres d’un i® i beau bleu sur du papier blanc , à quel- àl® pas d’urte fenêtre. Les nuages s’étant ' joints , le bleu disparut, j’ajouterai , en pas- sant , que plus d’une fois j’ai vu l’azur du ciel se peindre comme dans un miroir, sur une muraille où la lumière tomboii oblique- ment. Mais voici d’autres observations plus importantes, à mon avis; avant que d’en faire le détail, je suis obligé de tracer la topographie de ma chambre. Elle est à un troisième étage ; la fenêtre près d’un angle au couchant , la porte presque vis-à-vis. Cette porte donne dans une galerie au bout de laquelle , à deux pas de distance , est une fenêtre située au midi. Les jours des deux fenêtres se réunissent , la porte étant ouverte, contre une des murailles; et c’est là que j’ai vu des ombres colorées presque à toute heure , mais principalement sur les dix heures du matin. Les rayons du soleil, que la fenêtre de la galerie reçoit encore obliquement , ne tombent point , par celle de la chambre, sur la muraille dont je viens de parler. Je place à quelques pouces de celte muraille des chaises de bois à dossier percé. Les ombres en sont alors de couleurs quelquefois très-vives. J’en ai vu qui , quoi- que projetées du même côté , étoient l’une d’un vert foncé, l’autre d’un bel azur. Quand la lumière est tellement ménagée , que les ombres soient également sensibles de part et d’autre, celle qui est opposée à la fenêtre de la chambre est ou bleue ou violette ; l’autre tantôt verte, tantôt jaunâtre. Celle-ci est accompagnée d’une espèce de pénombre bien colorée , qui forme comme une double bordure bleue d’un côté , et, de l’autre , verte ou rouge , ou jaune , selon l’intensité de la lumière. Que je ferme les volets de ma fenêtre , les couleurs de cette pénombre n’en ont souvent que plus d’éclat; elles disparoissent si je ferme la porte à moitié. Je dois ajouter que le phénomène n’est pas à beaucoup près si sensible en hiver. Ma fenêtre est au couchant d’été : je fis mes premières expériences dans cette saison, dans un temps où les rayons du so- leil tomboient obliquement sur la muraille qui fait angle avec celle où les ombres se coloroient. » On voit par ces observations de M, l’abbé Millot qu’il suffit que la lumière du soleil tombe très- obliquement sur une surface pour que l’azur du ciel, dont la lumière tombe toujours directement, s’y peigne et colore les ombres : mais les autres appa- rences dont il fait mention ne dépendent que de la position des lieux et d’autres circon stances accessoires. 3o. 468 MINÉRAUX. INTRODUCTION. HUITIÈME MÉMOIRE. Expériences sur la pesanteur du feu et sur la durée de V incandescence, ■ Mi re Je crois devoir rappeler ici quelques-unes des choses que j’ai dites dans l’introduction qui précède ces mémoires, afin que ceux qui ne les auraient pas bien présentes puis- sent néanmoins entendre ce qui fait l’objet de celui-ci. Le feu ne peut guère exister sans lumière et jamais sans chaleur, tandis que la lumière existe souvent sans chaleur sensible , comme la chaleur existe encore plus souvent sans lumière; l’on peut donc considérer la lumière et la chaleur comme deux propriétés du feu , ou plutôt comme les deux seuls effets par lesquels nous le re- connoissons : mais nous avons montré que ces deux effets ou ces deux propriétés ne sont pas toujours essentiellement liés ensem- ble , que souvent ils ne sont ni simultanés ni contemporains, puisque, dans de cer- taines circonstances, on sent de la chaleur long-temps avant que la lumière paroisse , et que , dans d’autres circonstances, on voit de la lumière long temps avant de sentir de la chaleur, et même souvent sans en sentir aucune, et nous avons dit que, pour rai- sonner juste sur la nature du feu, il falloit auparavant tâcher de reconnoître celle de la lumière et celle de la chaleur, qui sont les principes réels dont l’élément du feu nous paroît être composé. Nous avons vu que la lumière est une matière mobile, élastique et pesante, c’est- à-dire susceptible d’attraction, comme toutes les autres matières : on a démontré qu’elle est mobile , et même on a déterminé le de- gré de sa vitesse immense par le très-petit temps qu’elle emploie à venir des satellites de Jupiter jusqu’à nous ; on a reconnu son élasticité, qui est presque infinie, par l’éga- lité de l’angle de son incidence et de celui de sa réflexion ; enfin sa pesanteur, ou , ce qui revient au même , son attraction vers les autres matières , est aussi démontrée par l’inflexion qu’elle souffre toutes les fois qu’elle passe auprès des autres corps. On ne peut donc pas douter que la substance de la lumière ne soit une vraie matière, laquelle, indépendamment de ses qualités propres et particulières, a aussi les propriétés générales un i. Je sais que quelques chimistes prétendent t les métaux renlus fluides par le feu ont plus et communes à toute autre matière. Tl en de même de la chaleur : c’est une matii qui ne diffère pas beaucoup de celle de lumière ; et ce n’est peut-être que la luniij elle-même qui , quand elle est très-forte réunie en grande quantité, change de forn diminue de vitesse, et, au lieu d’agir « le sens de la vue, affecte les organes toucher. On peut donc dire que , relatin ment à nous, la chaleur n’est que le toucl de la lumière, et qu’en elle-même la chalti n’est qu’un des effets du feu sur les cor| effet qui se modifie suivant les diffère»! substances, et produit dans toutes une dii tation, c’est-à-dire une séparation de 1er parties constituantes: et lorsque, par ce dilatation ou séparation , chaque partie trouve assez éloignée de ses voisines pc être hors de leur sphère d’attraction , matières solides, qui n’étoient d’abord q dilatées par la chaleur, deviennent fluide! et ne peuvent reprendre leur solidité qu’t tant que la chaleur se dissipe, et permet a parties désunies de se rapprocher et se jo dre d’aussi près qu’auparavant *. Ainsi toute fluidité a la chaleur pc cause , et toute dilatation dans le^ corps d être regardée comme une fluidité contint çante; or nous avons trouvé, par l’exf rience, que les temps du progrès de la cl leur dans les corps, soit pour l’entrée, s pour la sortie, sont toujours en raison leur fluidité ou de leur fusibilité, et il d< «j s’ensuivre que leurs dilatations respecté la. pesanteur spécifique que quand ils sont solidi'jP livi len mais j’ai de ta peine à le croire ; car il s’ensuivi que leur état de dilatation, où cette pesanteur sj cifique est moindre, ne seroit pas le premier dej de leur état de fusion, ce qui néanmoins par indubitable. L’expérience sur laquelle ils fond leur opinion c’est que le métal en fusion suppo le même métal solide, et qu’on le voit nager à surface du métal fondu ; mais je pense que cet e) ne vient que de la répulsion causée par la chale et ne doit point être attribué à la pesanteur spe fique plus grande du métal en fusion; je suis contraire très -persuadé qu’elle est moindre que le feu. Ayant donc fait construire u balance capable de porter aisément cinquaui J livres de chaque côté, à l’exécution de 1 * quelle M. Le Roy, de l’Académie des Scie ces , a bien voulu , à ma prière , donn toute l’attention nécessaire, j’ai eu la sat ^ faction de reconnoître à peu près la pesa teur relative du feu. Cetle balance, charg de cinquante livres de chaque côté, penche assez sensiblement par l’addition de ving quatre grains ; et chargée de vingt-cinq livre elle penchoit par l’addition de huit grai seulement. Pour rendre cette balance plus ou moi sensible, M. Le Roy a fait visser sur l’aiguil une masse de plomb, qui s’élevant et s’abai sant , change le centre de gravité ; de sor qu’on peut augmenter de près de moitié sensibilité de la balance. Mais par le grai nombre d’expériences que j’ai faites de cet balance et de quelques autres, j’ai recom;—, qu’en général plus une balance est sensibh ] J et moins elle est sage : les caprices , tant a j| hysique qu’au moral , semblent être des ai- ributs inséparables de là grande sensibilité. balances très sensibles sont si capri- leuses , qu’elles ne parlent jamais de la îême façon: aujourd’hui elles vous indi- uent le poids à un millième près , et de- îain elles ne le donnent qu’à une moitié , est-à-dire à un cinq-centième près , au lieu un millième. Une balance moins sensible st plus constante , plus fidèle ; et, tout con- déré , il vaut mieux , pour l’usage froid u’on fait d’uue balance , la choisir sage que e la prendre ou 1a. rendre trop sensible. Pour peser exactement des masses péné- ées de feu, j’ai commencé par faire garnir e tôle les bassins de cuivre et les chaînes e la balance , afin de ne les pas endomma- er ; et après en avoir bien établi l’équilibre son moindre degré de sensibilité, j’ai fait orter sur l’un des bassins une masse de ;r rougi à blanc , qui provenoit de la se- onde chaude qu’on donne à l’affinerie [près avoir battu au marteau la loupe qu’on l)er"e ppelle renard .-je fais cette remarque , jarce que mon fer, dès cette seconde chaude, e donne presque plus de flamme , et ne laroît pas se consumer comme il se consume brûle à la première chaude, et que, quoi- u’il soit blanc de feu , il ne jette qu’un petit ombre d’étincelles avant d’ètre mis sous le 1,11 îarteau. W | aperçq ifclanj çu, aissoie nce net saisir 'Q dep penli ocelle à 1( ilor ; son! %« tôle recni nioitre lus de la pf erçu lilesi ne lij PARTIE EXPÉRIMENTALE. 47 1 une troisième chaude à celte pièce pour achever la barre , elle ne pesoit plus que 43 livres 7 onces 7 gros ; ainsi son déchet total . tant par l'évaporation du feu que par la purification du fer à l’affmerie et sous le marteau, s’est trouvé de 6 livres 1 once 1 gros sur 49 livres 9 onces; ce qui ne va pas tout- à fait au huitième. Une seconde pièce de fer, prise de même au sortir de l'affinerie à la première chaude, et pesée rouge-blanc, s’est trouvée du poids de 38 livres i5 onces 5 gros 36 grains; et ensuite, pesée froide, de 38 livres 14 onces 36 grains : ainsi elle a perdu 1 once 5 gros en se refroidissant ; ce qui fait environ du poids total de sa masse. Une troisième pièce de fer, prise de même au sortir du feu de l'affinerie , après la première chaude , et pesée rouge-blanc , s’est trouvée du poids de 45 livres 12 onces 6 gros, et, pesée froide, de 45 livres 1 1 onces 2 gros : ainsi elle a perdu 1 once 4 gros en se refroidissant; ce qui fait environ ^ de son poids total. Une quatrième pièce de fer, prise de même après la première chaude, et pesée rouge-blanc , s’est trouvée du poids de 48 livres 1 1 onces 6 gros , et , pesée après son refroidissement, de 48 livres 10 onces juste: ainsi elle a perdu , en se refroidissant , 14 gros ; ce qui fait environ ~ du poids de la I. Une masse de fer rougi à blanc s’est s! If5s 'ouvée peser précisément 49 livres 9 onces ; ® I. * 111 [ayant enlevée doucement du bassin de la llKluaj alance , et posée sur une pièce d’autre fer (Je,‘ lù on la laissoit refroidir sans la toucher, Ile s’est trouvée, après son refroidissement, ^ÜII11J u degré de la température de l’air, qui I3 sail toit alors celui de la congélation , ne peser anjue 49 livres 7 onces juste : ainsi elle a il3fSf |erdu 2 onces pendant son refroidissement. l U™l)n observera qu’elle ne jetoit aucune étin- J'in8 elle, aucune vapeur assez sensible pour ne iqltwt |e\oir pas être regardée comme la pure ïnanation du feu. Ainsi l’on pourroit croire , jne la quantité de feu contenue dans cette 1 111011 aasse de 49 livres 9 onces , étant de 2 onces, '4'"'! file formoit environ ^ ou ^ du poids de s» a masse totale. On a remis ensuite cette jfsffllkasse refroidie au feu de raffinerie ; et loil^f ayant fait chauffer à blanc comme la pre- egia1tiière fois , et porter au marteau , elle s’est ilt trouvée, après avoir été malléée et refroidie, pfoouje peser que 47 livres 12 onces 3 gros; insi le déchet de cette chaude, tant au feu tanh ju’au marteau , étoit de 1 livre 10 onces gros ; et ayant fait donner une seconde et masse totale. Enfin une cinquième pièce de fer, prise de même après la première chaude , et pesée rouge-blanc, s’est trouvée du poids de 49 li- vres 11 onces, et, pesée après son refroidis- sement, de 49 livres 9 onces 1 gros : ainsi elle a perdu , en se refroidissant, i5 gros; ce qui fait ^4 du poids total de sa masse. En réunissant les résultats des cinq expé- riences pour en prendre la mesure commune, on peut assurer que le fer chauffé à blanc , et qui n’a reçu que deux volées de coups de marteau, perd, en se refroidissant, —g de sa masse. II. Une pièce de fer qui avoit reçu quatre volées de coups de marteau , et par consé- quent toutes les chaudes nécessaires pour être entièrement et parfaitement forgée , et qui pesoit 14 livres 4 gros, ayant été chauf- fée à blanc , ne pesoit plus que 1 3 livres 12 onces dans cet état d’incandescence, et 13 livres 11 onces 4 gros apres son entier refroidissement ; d’où l’on peut conclure que la quantité de feu dont cette pièce de fer étoit pénétrée , faisoit ^ de sou poids total. 472 MINERAUX. INTRODUCTION. Une seconde pièce de fer entièrement for- gée, et de même qualité que la précédente, pesoit, froide. i3 livres 7 onces 6 gros ; chauffée à blanc, i3 livres 6 onces 7 gros; et refroidie, i3 livres 6 onces 3 gros; ce qui donne à Ires-peu près dont elle a diminué en se refroidissant. Une troisième pièce de fer, forgée de même que les précédentes , pesoit , froide , i3 livres 1 gros, et chauffée au dernier de- gré, en sorte quelle étoit non seulement blanche, mais bouillonnante et pétillante de feu , s’est trouvée peser 12 livres 9 onces 7 gros dans cet état d’incandescence ; et re- froidie à la température actuelle, qui étoit de 16 degrés au dessus de la congélation , elle ne pesoit plus que 12 livres 9 onces 3 gros; ce qui donne ■— à très-peu près pour la quantité qu’elle a perdue en se re- froidissant. Prenant le terme moyen des résultats de ces trois expériences, 011 peut assurer que le fer parfaitement forgé et de la meilleure qualité , chauffé à blanc , perd , en se refroi- dissant, environ ~ de sa masse. III. Un morceau de fer en gueuse, pesé très-rouge, environ 20 minutes apres sa coulée, s’est trouvé du poids- de 33 livres 10 onces; et lorsqu’il a été refroidi, il ne pesoit plus que 33 livres 9 onces: ainsi il a perdu 1 once, c’est-à-dire de son poids ou masse totale en se refroidissant. Un second morceau de fonte, pris de même très rouge, pesoit 22 livres 8 onces 3 gros; et lorsqu’il a été refroidi, il ne p soit plus que 22 livres 7 onces 5 gros ; ce qui donne pour la quantité qu’il a perdue en se refroidissant. Un troisième morceau de fonte qui pesoit chaud 16 livres 6 onces 3 gros 1/2 11e pesoit que 16 livres 5 onces 7 gros 1/2 lorsqu'il fut refroidi ; ce qui donne pour la quantité qu’il a perdue en se refroidissant. Prenant le terme moyen des résultats de ces trois expériences sur la fonte pesée ciiaude couleur de cerise , on peut assurer qu’elle perd, en se refroidissant, environ jj-j de sa masse; ce qui fait une moindre diminution que celle du fer forgé : mais la raison en est que le fer forgé a été chauffé à blanc dans toutes nos expériences, au lieu que la fouie n’étoit que d’un rouge couleur de cerise lorsqu'on l’a pesée, et que par conséquent elle n’étoit pas pénétrée d’autant de feu que le fer; car on observera qu’on ne peut chauffer à blanc la fonte de fer sans lenilummer et la brûler en partie, en sorte que je me suis déterminé à la faire peseï seulement rouge , et au moment où elli f vient de prendre sa consistance dans 1< \ moule, au sortir du fourneau de fusion. IV. On a pris sur la dame du fourneai des morceaux du laitier le plus pur et qu formoit du très-beau verre de couleur ver dàtre. Le premier morceau pesoit chaud 6 livre ; 14 onces 2 gros 1/2 ; et refroidi il 11e peso que 6 livres 14 onces 1 gros ; ce qui donn ’ j pour la quantité qu’il a perdue en se ri froidissant. Un second morceau de laitier, semblabl : au précédent , a pesé chaud 5 livres 8 onci : 6 gros 1/4 ; et refroidi, 5 livres 8 onci ; 5 gros ; ce qui donne ~ pour la quanti! dont il a diminué en se refroidissant. Un troisième morceau , pris de même sis la dame du fourneau, mais un peu moiii ardent que le précédent, a pesé chaud 4 ! I a vres 7 onces 4 gros 1/2; el refroidi. 4 livri 7 onces 3 gros 1/2; ce qui donne pot la quantité dont il a diminué en se refro dissant. -j. Un quatrième morceau de laitier, qi 1 éloit de verre solide et pur, et qui pesoi froid, 2 livres 14 onces r gros, a\ant é .! chauffé jusqu’au rouge couleur de feu , s Y Sl trouvé peser 2 livres 14 onces r gros 2/;/ m ensuite, après son refroidissement , il a pes f! connue avant d’avoir été chauffé, 2 livr m 14 onces 1 gros juste; ce qui donne — — «f DOO pour le poids de la quantité de feu dont ,;( étoit pénétré. ^ Prenant le terme des résultats de t ^ quatre expériences sur le verre pesé chai 4 couleur de feu , on peut assurer qu'il pe K eu se refroidissant ; te qui me pan être le vrai poids du feu, relativement poids total des matières qui en sont péty m trées : car ce verre ou laitier ne se brûle ^ ne se consume au feu ; il 11e perd rien | son poi ls, et se trouve seulement peser 1 j|s de plus lorsqu’il est pénétré de feu. .4 V. J’ai tenté plusieurs expériences sei ™ blables sur le grès ; mais elles n’ont pas bien réussi. La plupart des espèces de gi , s’égrenant au feu, on 11e peut les chaut > qu’a demi, et ceux qui sont assez durs d’une assez bonne qualité pour support! j ' sans s’égrener, un feu violent, se couxrt d’émail; il y a d’ailleurs dans près ue te j des especes de clous noirs et ferrugine J qui brûlent dans l’opération. Le seul f PARTIE EXPÉRIMENTALE. 473 ain que j’ai pu tirer de sept expériences s différens morceaux de grès dur, c’est 1 ne gagne rien au feu, et qu’il n’y perd très-peu. J’avois déjà trouvé la même se par les expériences rapportées dans le mier mémoire. ■ ; )e toutes ces expériences , je crois qu’on t conclure : 161 P Que le u a, comme loute autre ma- e, une pesanteur réelle, dont on peut i noitre le rapport à la balance dans les ( j stances qui, comme le verre , ne peuvent ; altérées par son action , et dans les- Dj| ;lles il ne fait , pour ainsi dire, que .jj0! ser, sans y rien laisser et sans en rien * ■f 0 Que la quantité de feu nécessaire pour gir une masse quelconque, et lui donner couleur et sa chaleur, pèse ou, si veut, une six-cenlième partie de cette ; en sorte que si elle pèse froide 6oo ■es, elle pèsera chaude 6oi lorsqu’elle rouge couleur de feu. 0 Que dans les matières qui , comme le sont susceptibles d’un plus grand degré feu, et peuvent être chauffées à blanc se fondre , la quantité de feu dont sont alors pénétrées, est environ d’un ième plus grande; en sorte que sur 5oo res de fer il se trouve une livre de feu. uis avons même trouvé plus par les ex- riences précédentes , puisque leur résultat nm un donne mais il faut observer fer, ainsi que toutes les substances alliques , se consume un peu en se re- dissant, et qu’il diminue toutes les fois on y applique le leu : cette différence [Ire j~~ et provient donc de cette di- llj nution; le fer, qui perd une quantité /» ps-sensible dans le feu, continue à perdre peu tant qu’il en est pénétré , et par nséquent sa masse totale se trouve plus « tninuée que celle du verre , que le feu ne ut consumer, ni brûler, ni volatiliser. Je viens de dire qu’il en est de toutes les i'i|bstances métalliques comme du fer, c.’est- dire que toutes perdent quelque chose par longue ou la violente action du feu, et puis le prouver par des expériences in- imteslables sur l’or et sur l’argent, qui, de ms les métaux, sont les plus fixes et les oins sujets à être altérés par le feu. J’ai Ixposé au foyer du miroir ardent des pla- ies d’argent pur, et des morceaux d or ussi pur ; je les ai vus fumer abondamment pendant un très-long temps : i! n’est donc as douteux que ces métaux ne perdent elque chose de 1e r substance par I ap- plication du feu ; et j’ai été informé , de- puis, que cette matière qui s’échappe de ces métaux et s’élève en fumée n’est autre chose que le métal même volatilisé, puisqu'on peut dorer ou argenter à cette fumée métallique les corps qui la reçoivent. Le feu, surtout appliqué long-temps , vo- latilise donc peu à peu ces métaux , qu’il semble ne pouvoir brûler ni détruire d’au- cune autre manière ; et en les volatilisant il n’en change pas la nature , puisque cette fumée qui s’en échappe est encore du métal qui conserve toutes ses propriétés. Or il ne faut pas un feu bien violent pour produire celte fumée métallique; elle paroît à un de- gré de chaleur au dessous de celui qui est nécessaire pour la fusion de ces métaux. C’est de cette même manière que l’or et l’ar gent se sont sublimés dans le sein de la terre : ils ont d’abord été fondus par la cha- leur excessive du premier état du globe, où tout éloii en liquéfaction ; et ensuite la cha- leur moins forte, mais constante, de l'inté- rieur de la terre les a volatilisés, et a poussé ces fumées métalliques jusqu'au sommet des plus hautes montagnes, où elles se sont ac- cumulées en grains ou attachées en vapeurs aux sables et aux autres matières dans les- quelles on les trouve aujourd’hui Les pail- lettes d’or que l’eau roule avec les sables tirent leur origine, soit des masses d’or fondues par le feu primitif, soit des surfaces dorées par cetle sublimation , desquelles l’action de l’air et de l’eau les détache et les sépare. Mais revenons à l’objet immédiat de nos expériences. Il me paroît qu’elles ne laissent aucun doute sur la pesanteur réelle du feu , et qu’on peut assurer en conséquence de leurs résultats, que toute matière solide pé- nétrée de cet élément, autant qu’elle peut l’être par l’application que nous savons en faire, est au moins d’une six-centième partie plus pesante que dans l’état de la tempéra- ture actuelle, et qu’il faut une livre de ma- tière ignée pour donner à 6oo livres de toute autre matière l’état d’incandescence jusqu’au rouge couleur de feu , et environ une livre sur 5oo pour que l’incandescence soit jus- qu’au blanc ou jusqu’à la fusion ; en sorte que le fer chauffé à blanc, ou le verre en fusion , contiennent dans cet état de ma- tière ignée dont leur propre substance est pénétrée. Mais cette grande vérité, qui paroitra nouvelle aux physiciens , et de laquelle on pourra tirer des conséquences utiles, ne nous apprend pas encore ce qu'il seroit ce- 474 MINÉRAUX. INTRODUCTION. pendant important de savoir ; je veux dire le rapport de la pesanteur du feu à la pesan- teur de l’air, ou de la matière ignée à celle des autres matières. Cette recherche suppose de nouvelles découvertes auxquelles jp ne suis pas parvenu , et dont je n’ai donné que quelques indications dans mon Traité des élémetis : car, quoique nous sachions par mes expériences qu’il faut une cinq-centième partie de matière ignée pour donner à toute autre matière l’état de la plus forte incan- descence, nous ne savons pas à quel point cette matière ignée y est condensée , com- primée, ni même accumulée, parce que nous n’avons jamais pu la saisir dans un état constant pour la peser ou la mesurer ; en sorte que nous n’avons point d’unité à la- quelle nous puissions rapporter la mesure de l’état d’incandescence. Tout ce que j’ai donc pu faire a la suite de mes expériences, c’est de rechercher combien il falloit con- sommer de matière combustible pour faire entrer dans une masse de matière solide cette quantité de matière ignée qui est la cinq-centième partie de la masse en incan- descence , et j’ai trouvé , par des essais réi- térés , qu’il falloit brûler 3oo livres de char- bon au vent de deux soufflets de dix pieds de longueur pour chauffer à blanc une pièce de fonte de fer de 5oo livres pesant. Mais comment mesurer, ni même estimer à peu près, la quantité totale de feu produite par ces 3oo livres de matière combustible? com- ment pouvoir comparer la quantité de feu qui se perd dans les airs avec celle qui s’at- tache à la pièce de fer, et qui pénètre dans toutes les parties de sa substance? Il faudroit pour cela bien d’autres expériences, ou plu- tôt il faut un art nouveau dans lequel je n’ai pu faire que les premiers pas. VI. J’ai fait quelques expériences pour reconnoître combien il faut de temps aux matières qui sont en fusion pour prendre leur consistance, et passer de l’état de fluidité à celui de la solidité ; combien de temps il faut pour que la surface prenne sa consis- tance ; combien il en faut de plus pour pro- duire cette même consistance à l’intérieur, et savoir par conséquent combien le centre d’un globe dont la surface seroit consistante et même refroidie à un certain point pour- roi t néanmoins être de temps dans l’état de liquéfaction : voici ces expériences : SUR LE FER. N° i. Le 29 juillet, à 5 heures 45 mi- lite nutes , moment auquel la fonte de fer a ce de couler, on a observé que la gueuse a ç de la consistance sur sa face supérieure 3 minutes à sa tête, c’est-à-dire à la par la plus éloignée du fourneau, et en cinq 1 mites à sa queue , c’est-à-dire à la partie* plus voisine du fourneau : l’ayant alors soulever du moule et casser en cinq endro on n’a vu aucune marque de fusibilité in rieure dans les quatre premiers morceat seulement, dans le morceau cassé le p près du fourneau , la matière s’est trouv intérieurement molle, et quelques part se sont attachées au bout d’un petit r gard , à 5 heures 55 minutes , c’est-à-d 12 minutes après la fin de la coulée : on conservé ce morceau numéroté ainsi que le suivans. N° 2. Le lendemain, 3o juillet, on j coulé une autre gueuse à 8 heures r minutt txce et à 8 heures 4 minutes, c’est-à-dire troi minutes après, la surface de sa tête étoj consolidée ; et en ayant fait casser deu morceaux , il est sorti de leur intérieur un petite quantité de fonte coulante; à 8 heurç 7 minutes il y avoil encore dans l’intérieï des marques évidentes de fusion, en sort que la surface a pris consistance en 3 miuu tes , et l’intérieur ne l’avoit pas encore pris en 6 minutes. N° 3. Le 3i juillet, la gueuse a cessé d couler à midi 35 minutes ; sa surface , dafl la partie du milieu , avoit pris sa consistant à 39 minutes, c’est-à-dire en 4 minutes, « l’ayant cassée dans cet endroit à midi 44 mliioit nutes , il s’en est écoulé une grande quantiti de fonte encore en fusion : on avoit remai qué que la fonte de cetle gueuse étoil plu liquide que celle du n° précédent , et on conservé un morceau cassé dans lequel l’é coulement de la matière intérieure a laissj une cavité profonde de 26 pouces dans l’in térieur de la gueuse. Ainsi la surface ayan pris en 4 minutes sa consistance solide, l’in térieur étoit encore en grande liquéfactioi après 8 miwutes 1/2. N° 4. Le 2 août, à 4 heures 47 minutes la gueuse qu’on a coulée s’est trouvée d’un fonte très-épaisse, aussi sa surface dans Ij milieu a pris sa consistance en 3 minutes et 1 minute 1/2 après, lorsqu’on l’a cassée toute la fonte de l’intérieur s’est écoulée et n’a laissé qu’un tuyau de 6 lignes d’épais seur sous la face supérieure, et d’un pouci environ d’épaisseur aux autres faces. N° 5. Le 3 août, dans une gueuse d^ fonte très-liquide, on a cassé trois morceau) d’environ 2 pieds 1/2 de long, à commence] PARTIE EXPÉRIMENTALE. 47$ côté de la gueuse , c’est-à-dire dans la tie la plus froide du moule et la plus ignée du fourneau , et l’on a reconnu , îme il étoit naturel de s’y attendre, que jartie intérieure de la gueuse étoit moins nci« Bsistante à mesure qu’on approchoit du lâ aloii iqean ibilitéjj rneau , et que la cavité inférieure pro- te par l’écoulement de la fonte encore lide , étoit à peu près en raison inverse la distance au fourneau. Deux causes évi- tes concourent à produire cet effet : le nie de la gueuse formé par les sables est tant plus échauffé qu’il est plus près du rneau, et en second lieu, il reçoit d’au- t plus de chaleur qu’il y passe une plus nde quantité de fonte. Or la totalité de onte qui constitue la gueuse passe dans i que partie du moule où se forme sa queue , rès de l’ouverture de la coulée; tandis 3 la. tête de la gueuse n’est formée que de icédant qui a parcouru le moule entier, est déjà refroidie avant d’arriver dans te partie la plus éloignée du fourneau , la s froide de toutes, et qui n’est échauffée par la seule matière qu’elle contient. h ssi de trois morceaux pris à la tête de te gueuse , la surface du premier, c’est-à- e du plus éloigné du fourneau , a pris sa isistance en i minute 1/2 ; mais tout l in- orep ieur a coulé au bout de 3 minutes 1/2. surface du second a de même pris sa con- oessé tance en 1 minute 1/2 , et l’intérieur doit de même au bout de 3 minutes 1/2. fin la surface du troisième morceau , qui fit le plus loin de la terre , et qui appro- it du milieu de la gueuse , a pris sa con- quani tance en 1 minute 1/4 , et l’intérieur cou- rt t encore très-abondamment au bout de ninutes. et 01 Je dois observer que toutes ces gueuses 0 ! I tient triangulaires , et que leur face süpé- ure , qui étoit la plus grande , avoit en- on 6 pouces 1/2 de largeur. Cette face aj, aérieure, qui est exposée à l’action de l’air, consolide néanmoins plus lentement que deux faces qui sont dans le sillon où la itière a coulé : l'humidité des sables qui ment cette espèce de moule refroidit et nsolide la fonte plus promptement que car, dans tous les morceaux que j’ai t casser, les cavités formées par l’écoule- fasse jbnt de la fonte encore liquide étoient bien je us voisines de la face supérieure que des ux autres faces. Ayant examiné tous ces morceaux après îr refroidissement , j’ai trouvé, i.° que les orceaux du nQ 4 ne s’étoient consolidés e de 6 lignes d’épaisseur sous la face su- d’épa 1 pou périeure ; 20 que ceux du n° 5 se sont con- solidés de 9 lignes d’épaisseur sous cette même face supérieure ; 3° que les morceaux du n° 2 s’étoient consolidés d’un pouce d’é- paisseur sous cette même face ; 4° que les morceaux du n° 3 s’étoient consolidés d’un pouce et demi d’épaisseur sous la même face; et enfin que les morceaux du n° 1 s’étoient consolidés jusqu’à 2 pouces 3 lignes sous cette même face supérieure. Les épaisseurs consolidées sont donc 6 , 9 , 12 , 18,27 lignes , et les temps employés à cette consolidation sont 1 1/2, 2 ou 2 1/2, 3,41/2, 7 minutes ; ce qui fait à très-peu près le quart du numérique des épaisseurs. Ainsi les temps nécessaires pour consolider le métal fluide sont précisément en même raison que celle de leur épaisseur : en sorte que si nous supposons un globe isolé de toutes parts , dont la surface aura pris s'â consistance en Un temps donné , par exem- ple, en 3 minutes, il faudra 1 minute 1/2 de plus pour le consolider à 6 lignes de pro- fondeur ; 2 minutes 1/4 pour le consolider à 9 lignes, 3 minutes pour le consolider a 12 lignes, 4 minutes pour le consolider à 18 lignes, et 7 minutes pour le consolider à 27 ou 28 lignes de profondeur; et par conséquent 36 minutes pour le consolider à 10 pieds de profondeur, etc. SUR LE VERRE. Ayant fait couler du laitier dans des mou- les très-voisins dit fourneau, à environ 2 pieds de l’ouverture calculée, j’ai reconnu, par plusieurs essais, que la surface de ces morceaux de laitier prend sa consistance en moins de temps que la fonte de fer, et que l’intérieur se eonsolidoit aussi beaucoup plus vite : mais je n’ai pu déterminer, comme je l’ai fait sur le fer , les temps nécessaires pour consolider l’intérieur du verre à diffé- rentes épaisseurs ; je ne sais même si l’on en viendroit à bout dans un fourneau de verre- rie où l’on auroit le verre en masses fort épaisses : tout ce que je puis assurer, c’est que la consolidation du verre , tant à l’exté- rieur qu’à l’intérieur, est à peu près une fois plus prompte que celle de la fonte du fer. Et en même temps que le premier coup de l’air condense la surface du verre liquide et lui donne une sorte de consistance solide , il la divise et la fêle en une infinité de petites parties , en sorte que le verre saisi par l’air frais ne prend pas une solidité réelle, et qu’il se brise au moindre choc ; au lieu qu’en le laissant recuire dans un four très- 476 MINÉRAUX. INTRODUCTION. chaud il acquiert peu à peu la solidité que nous lui connoissons. Il paroît donc bien difficile de déterminer, par l’expérience, les rapports du temps qu’il faut pour consolider le verre à différentes épaisseurs au dessous de sa surface. Je crois seulement qu’on peut, sans se tromper, prendre le même rapport pour la consolidation que celui du refroidis- sement du verre au refroidissement du fer, lequel rapport est de 1 32 à 236 par les ex- périences du second mémoire , ci-dessus , page 354. VIT. Ayant déterminé, par les expériences précédentes, les temps nécessaires pour la consolidation du fer en fusion, tant à sa surface qu’aux différentes profondeurs de son intérieur, j’ai cherché à reconnoître , par des observations exactes , quelle étoit la durée de l’incandescence dans cette même matière. 1. Un renard, c’est-à-dire une loupe dé- tachée de la gueuse par le feu de la chauf- ferie , et prête à être portée sous le marteau, a été mise dans un lieu dont l’obscurité étoit égale à celle de la nuit quand le ciel est couvert : cette loupe, qui étoit fort en- flammée , n’a cessé de donner de la flamme qu’au bout de 24 minutes; d’abord la flamme étoit blanche, ensuite rouge et bleuâtre sur la fin : elle ne paroissoit plus alors qu’à la partie inférieure de la loupe qui touchoit la terre, et ne se montroit que par ondulations ou par reprises, comme celle d’une chandelle qui s’éteint. Ainsi la première incandes- cence, accompagnée de flamme, a duré 24 minutes; ensuite la loupe, qui étoit en- core bien rouge, a perdu cette couleur peu à peu, et a cessé de paroître rouge au bout de 74 minutes, non compris les 24 pre- mières, ce qui fait en tout 98 minutes; mais il n’y avoit que les surfaces supérieure et latérales qui avoient absolument perdu leur couleur rouge ; la surface inférieure , qui touchoit à la terre , î’étoit encore aussi bien que l’intérieur de la loupe. Je commençai alors, c’est-à-dire au bout de 98 minutes, à laisser tomber quelques grains de poudre à tirer sur la surface supérieure ; ils s’en- flammèrent avec explosion. On continuoit de jeter de temps en temps de la poudre sur la loupe, et ce ne fut qu’au bout de 42 mi- nutes de plus qu’elle cessa de é faire explo- sion : à 43, 44 et 45 minutes, la poudre se fondoit et fusoit saus explosion , en donnant seulement une petite flamme bleue. De là, je crus devoir conclure que l’incandescence à l’intérieur de la loupe n’a voit fini qu’alors, c’est-à-dire 42 minutes après celle de la sur- face, et qu’en tout elle avoit duré 140 mi- nutes. Cette loupe étoit de figure à peu près 1 ovale et aplatie sur deux faces parallèles; son grand diamètre étoit de i3 pouces, et le petit de 8 pouces : elle avoit aussi , à très- peu près , 8 pouces d’épaisseur partout , et elle pesoit 91 livres 4 onces après avoir été refroidie. 2. U11 autre renard, mais plus petit que le premier, tout aussi blanc de flamme et pétillant de feu , au lieu d’être porté sous le marteau, a été mis dans le même lieu obscur, où il n’a cessé de donner de la flamme qu’au bout de 22 minutes; ensuite il n’a perdu sa couleur rouge qu’après 43 minutes; ce qui fait 65 minutes pour la durée des deux états d’incandescence à la surface, sur laquelle ayant ensuite jeté des grains de poudre, ils n’ont cessé de s’enflammer avec explosion qu’au bout de 40 minutes; ce qui fait en tout xo5 minutes pour la durée de! l’incandescence , tant à l’extérieur qu’à l’in- térieur. Cette loupe étoi’ à peu près circulaire , sur 9 pouces de diamètre, et elle avoit en- viron 6 pouces d’épaisseur partout; elle s’est] trouvée du poids de 54 livres après son re- froidissement. J’ai observé que la flamme et la couleur rouge suivent la même marche dans leun dégradation; elles commencent par dispa- roître à la surface supérieure de la loupe, tandis qu’elles durent encore aux surfaces latérales, et continuent de paroître asse? long-temps autour de la surface inférieure, qui , étant constamment appliquée sur h terre, se refroidit plus lentement que les autres surfaces qui sont exposées à l’air, 3. Un troisième renard, tiré du feu très- blanc. brûlant et pétillant d’étincelles et de flamme, ayant été porté dans cet état sous le marteau, n’a conservé cette incandescence enflammée que 6 minutes ; les coups préci- pités dont il a été frappé pendant ces 6 mi nutes, ayant comprimé la matière, en on! en même temps réprimé la flamme , qu auroit subsisté plus long-temps sans cette opération , par laquelle on en a fait une pièce de fer de 12 pouces 1/2 de longueut sur 4 pouces en carré, qui s’est trouvée peser 48 livres 4 onces après avoir été re- froidie. Mais, ayant mis auparavant cette pièce encore toute rouge dans le même lier obscur, elle n’a cessé de paroître rouge à se surface qu’au bout de 46 minutes, y com- pris les 6 premières. Ayant ensuite fait l’é- I.Ï PARTIE EXPÉRIMENTALE. 477 preuve avec la poudre à tirer, qui n’a cessé le s’enflammer avec explosion que 26 nu- llités après les 46 , il en résulte que l’incan- ïescence intérieure et totale a duré 72 mi- îutes. En comparant ensemble ces trois expé- riences, on peut conclure que la durée de l’incandescence totale est comme celle de la prise de consistance proportionnelle à l'épais- seur de la matière : car la première loupe, jui avoit 8 pouces d’épaisseur, a conservé ion incandescence pendant 140 minutes; la seconde , qui avoit 6 pouces d’épaisseur, ’a conservée pendant io5 minutes; et la Itroisièine, qui n’avoit que 4 pouces, ne l’a conservée que pendant 72 minutes. Or io5 140 6 : 8, et de même, 72 : 140 à leu près ;; 4 I 8 , en sorte qu’il paroi t y voir même rapport entre les temps qu’entre les épaisseurs. 4. Pour m’assurer encore mieux de ce fait important, j’ai cru devoir répéter l’ex- périence sur une loupe prise, comme la pré- cédente, au sortir de la chaufferie. O11 l’a inrlée tout enflammée sous le marteau ; la ilflamme a cessé au bout de 6 minutes , et , «dans ce moment , on a cessé de la battre : ilon l’a mise tout de suite dans le même lieu jlobscur; le rouge n’a cessé qu’au bout de (39 minutes; ce qui donne 45 minutes pour les deux états d’incandescence à la surface: ensuite la poudre n’a cessé de s’enflammer ! avec explosion qu’au bout de 28 minutes; ainsi l’incandescence intérieure et totale a duré 73 minutes. Or, cette pièce avoit, ! comme la précédente, 4 pouces juste d’é- paisseur sur deux laces en carré, et 10 pou- ces 1/4 de longueur; elle pesoil 39 livres 4 onces après avoir été refroidie. Cette dernière expérience s’accorde si parfaitement avec celle qui la précédé et avec les deux autres, qu’on ne peut pas douter qu’en général la durée de l’incan- descence ne soit à très-peu près proportion- nelle à l’épaisseur de la masse, et que par conséquent ce grand degré de feu ne suive la même loi que celle de la chaleur mé- diocre; en sorte que, dans des globes de même matière , la chaleur ou le feu du plus haut degré, pendant tout le temps de 1 in- candescence , s’y conservent et y durent pré- cisément en raison de leur diamètre. Cette vérité, que je voulois acquérir et démontrer par le fait , semble nous indiquer que les causes cachées ( causœ latentes) de Newton , desquelles j’ai parlé dans le premier de ces mémoires , ne s’opposent que très-peu à la sortie du feu , puisqu’elle se fait de la même manière que si les corps étoient entièrement et parfaitement perméables , et cjue rien ne s’opposât à son issue. Cependant on seroit porté à croire que plus la matière est com- primée, plus elle doit retenir de temps le feu ; en sorte que la durée de l’incandescence devoit être alors en plus grande raison que celle des épaisseurs ou des diamètres. J’ai donc essayé de reconnoître cette différence par l’expérience suivante. 5. J’ai fait forger une masse cubique de fer, de 5 pouces 9 lignes de toutes faces ; elle a subi trois chaudes successives , et , l’ayant laissée refroidir, son poids s’est trouvé de 48 livres 9 onces. Après l’avoir pesée, on l’a mise de nouveau au feu de raffinerie , où elle n’a été chauffée que jusqu’au rouge couleur de feu , parce qu’alors elle commen- çoit à donner un peu de flamme, et qu’en la laissant au feu plus long-temps, le fer auroit brûlé. De là on l’a transportée tout de suite dans ie même lieu obscur, où j’ai vu qu’elle ne donnoit aucune flamme ; néanmoins elle n’a cessé de paraître rouge qu’au bout de 52 minutes, et la poudre 11’a cessé de s’en- flammer à sa surface avec explosion que 43 minutes après; ainsi l’incandescence totale a duré g5 minutes. On a pesé cette masse une seconde fois après son entier refroidis- sement ; elle s’est trouvée peser 48 livres 1 once : ainsi elle avoit perdu au feu 8 onces de son poids, et elle en auroit perdu davan- tage si 011 l’eût chauffée jusqu’au blanc. En comparant cette expérience avec les autres, on voit que l’épaisseur de la masse étant de 5 pouces 3/4, 1 incandescence to- tale a duré 95 minutes dans cette pièce de fer, comprimée autant qu’il est possible, et que dans les premières masses, qui n’avoient point été comprimées par le marteau, l’épais- seur étant de 6 pouces, l’incandescence a duré io5 minute-, et l’épaisseur étant de 8 pouces, elle a duré 140 minutes. Or 140 : 8 ou io5 : f» : : 95 : 5 9/21 , au lieu que l’expérience nous donne 5 3/4. Les causes cachées, dont la principale est la compres- sion de la matière , et les obstacles qui en résultent pour l’issue de la chaleur, semblent donc produire cette différence de 5 3/4 à 5 9/21 ; ce qui fait 27/84 , ou un peu plus d’un tiers sur i5/3, c’est-à-dire d’environ 1/16 sur le tout; en sorte que le fer bien battu, bien sué, bien comprimé, ne perd son incandescence qu’en 17 de temps, tandis que le même fer qui n’a point été comprimé la perd en 16 du même temps. Et ceci paroît se confirmer par les expériences 3 et 4 , où les masses de ter ayant été comprimées par 478 MINÉRAUX. INTRODUCTION. une seule volée de coups de marteau n’ont perdu leur incandescence qu’au bout de 72 et 73 minutes, aw lieu de 70 qu’a duré celle des loupes non comprimées; ce qui fait 2 1/2 sur 70, ou 5/i4o ou 1/28 de différence pro- duite par cette première compression. Ainsi l’on ne doit pas être étonné que la seconde et la troisième compression qu’a subies la masse de fer de la cinquième expérience , qui a été battue par trois volées de coups de marteau, aient pi’oduit 1/16 au lieu de 1/28 de différence dans la durée de l’incan- descence. On peut donc assurer en général que la plus forte compression qu’on puisse donner à la matière pénétrée de feu autant quelle peut l’être 11e diminue que d’une seizième partie de la durée de son incan- descence, et que , dans ia matière qui ne reçoit point de compression extérieure, cette durée est précisément en même raison que son épaisseur. Maintenant, pour appliquer au globe de la terre le résultat de ces expériences , nous considérerons qu’il n’a pu prendre sa forme élevée sous l’équateur, et abaissée sous les pôles, qu’en vertu de la force centrifuge combinée avec celle de la pesanteur; que par conséquent il a dû tourner sur son axe pen- dant un petit temps , avant que sa surface ait pris sa consisiance, et qu’ensuite la ma- tière intérieure s’est consolidée dans les mêmes rapports de temps indiqués par nos expériences ; en sorte qu’en partant de la supposition d’un joui' au moins pour le petit temps nécessaire à la prise de consistance à sa surface, et en admettant, comme nos ex- périences l’indiquent , un temps de 3 mi- nutes pour eu consolider la matière intérieure à un pouce de profondeur, il se trouvera 36 minutes pour un pied, 216 minutes pour une loise , 342 jours pour une lieue, et 490086 jours , ou environ 1842 ans, pour qu’un globe de fonte de fer qui auroit , comme celui de la terre , 1432 lieues 1/2 de diamètre , eut pris sa consistance jusqu’au centre. La supposition que je fais ici d’un jour de rotation pour que le globe terrestre ait pu s’élever régulièrement sous l’équateur, et s’abaisser sous les pôles , avant que sa sur- face fût consolidée, me paroît plutôt trop foible que trop forte ; car il a peut-être fallu un grand nombre de révolutions de vingt- quatre heures chacune sur son axe pour que la matière fluide se soit solidement établie , et l’on voit bien que , dans ce cas , le temps nécessaire pour la prise de consistance de la | matière au centre se trouvera plus grand. Pour le réduire autant qu’il est possible , nous n’avons fait aucune attention à l’effet de la force centrifuge qui s’oppose à celui de la réunion des parties , c’est-à-dire à la prise de consistance de la matière en fusion. J Nous avons supposé encore, dans la même vue de diminuer le temps, que l’atmosphere de la terre, alors tout en feu , n étoil néan- moins pas plus chaude que celle de mon fourneau à quelques pieds de distance où se sont faites les expériences ; et c’est en con- séquence de ces deux suppositions trop gra- tuites que nous ne trouvons que 1342 ans pour le temps employé à la consolidation du globe jusqu’au centre. Mais il me paroit cer- tain que cette estimation du temps est dt beaucoup trop foible , par l’observation con- stante que j’ai faite sur la prise de consistance des gueuses à la tête et à la queue ; car il faut trois fois autant de temps et plus pour que la partie de la gueuse qui est à 18 pieds du fourneau prenne consistance, c’est-à-dire que si la surface de la tète de la gueuse , qui est à 18 pieds du fourneau, prend consis- tance en 1 minute 1/2, celle de la queue, qui n’est qu'à 2 pieds du fourneau, ne prend consistance qu’en 4 minutes 1/2 ou 5 mi- nutes ; en sorte que la chaleur plus grande de l’air contribue prodigieusement au main- tien de la fluidité; et l’on conviendra sans peine avec moi que , dans ce premier temps de liquéfaction du globe de la terre , la cha- leur de l’atmosphère de vapeurs qui l’envi- ronnoit étoit plus grande que celle de l’air à 2 pieds de distance du feu de mon four- neau , et que par conséquent il a fallu beau- coup plus de temps pour consolider le globe jusqu’au centre. Or nous avons démontré , par les expériences du premier mémoire , qu’un globe de fer, gros comme la terre, pénétré du feu seulement jusqu’au rouge , seroit plus de 96670 ans à se refroidir, aux- quels ajoutant 2 ou 3ooo ans pour le temps de sa consolidation jusqu’au centre, il résulte qu’en tout il faudroit environ 100,000 ans pour refroidir au point de la température actuelle un globe de fer gros comme la terre, sans compter la durée du premier état de liquéfaction ; ce qui recule encore les limites du temps , qui semble fuir et s’étendre à mesure que nous cherchons à le saisir. Mais tout ceci sera plus amplement discuté et dé- terminé plus précisément dans les mémoires suivans. PARTIE EXPÉRIMENTALE. 47g NEUVIÈME MÉMOIRE. Expériences sur la fusion des mines de fer. Te ne pourrai guère mettre d’aulre liaison re ces mémoires , ni d’autre ordre entre s différentes expériences , que celui du ips ou plutôt de la succession de mes es. Comme je ne me trouvois pas assez truit dans la connoissance des minéraux , î je n’étois pas satisfait de ce qu’on en i dans les livres, que j’avois bien de la ne à entendre ceux qui traitent de la mie, où je voyois d’ailleurs des principes ;caires, toutes les expériences faites en :it et toujours expliquées dans l’esprit ne même méthode , j’ai voulu travailler • moi-même ; et consultant plutôt mes sirs que ma force , j’ai commencé par faire blir, sous mes yeux , des forges et des irneaux en grand, que je n’ai pas cessé :xercer continuellement depuis sept ans. Le petit nombre d’auteurs qui ont écrit • les mines de fer ne donnent , pour ainsi •e, qu’une nomenclature assez inutile, et parlent point des différens traitemens de acune de ces mines. Ils comprennent dans mines de fer l’aimant , l’émeril , l’hé- itite , etc. , qui sont en effet des minéraux •rugineux en partie , mais qu’on ne doit s regarder comme de vraies mines de fer, opres à être fondues et converties en ce étal ; nous ne parlerons ici que de celles nt on doit faire usage, et on peut les ré- ire à deux espèces principales. La première est la mine en roche, c’est- lire en masses dures, solides et compactes, l’on ne peut tirer et séparer qu’à force de ins, de marteaux et de masses, et qu’on urroit appeler pierre de fer . Ces mines roches de fer se trouvent en Suède , en llemagne, dans les Alpes, dans les Pyré- ;es, et généralement dans la plupart des lûtes montagnes de la terre , mais en bien us grande quantité vers le Nord que du lté du Midi. Celles de Suède sont de cou- ur de fer pour la plupart, et paroissent re du fer presque à demi préparé par la iture : il y en a aussi de couleur brune , >uge ou jaunâtre ; il y en a même de toutes (anches à Allevard en Dauphiné, ainsi que autres couleurs ; ces dernières mines sem- blent être composées comme du spath , et on ne reconnoît qu’à leur pesanteur, plus grande que celle des autres spaths , qu’elles contiennent une grande quantité de métal. On peut aussi s’en assurer en les mettant au feu; car de quelque couleur qu’elles soient, blanches , grises, jaunes, rousses, verdâtres, bleuâtres, violettes ou rouges, toutes de- viennent noires à une légère calcination. Les mines de Suède, qui, comme je l’ai dit, semblent être de la pierre de fer, sont atti- rées par l’aimant ; il en est de même de la plupart des autres mines en roche, et géné- ralement de toute matière ferrugineuse qui a subi Faction du feu. Les mines de fer en grains, qui ne sont point du tout magné- tiques, le deviennent lorsqu’on les fait griller au feu ; ainsi les mines de fer en roche et en grandes masses étant magnétiques doivent leur origine à l’élément du feu. Celles de Suède, qui ont été les mieux observées, sont très-étendues et tres-profondes ; les fdons sont perpendiculaires , toujours épais de plusieurs pieds , et quelquefois de quelques toises ; on les travaille comme on travailleroit de la pierre très-dure dans une carrière. On y trouve souvent de l’asbeste, ce qui prouve encore que ces mines ont été formées par le feu. Les mines de la seconde espèce ont , au contraire , été formées par l’eau , tant du détriment des premières, que de toutes les particules de fer que les végétaux et les ani- maux rendent à la terre par la décomposition de leur substance : ces mines formées par l’eau sont le plus ordinairement en grains arrondis , plus ou moins gros , mais dont aucun n’est attirable par l’aimant avant d’avoir subi Faction du feu , ou plutôt celle de l’air par le moyen du feu ; car, ayant fait griller plusieurs de ces mines dans des vais- seaux ouverts, elles sont toutes devenues très-attirables à l’aimant, au lieu que dans les vaisseaux clos , quoique chauffées à un plus grand feu et pendant plus de temps , elles n’avoient point du tout acquis la vertu magnétique. On pourroit ajouter à ces mines en grains '1 48o MINERAUX. INTRODUCTION. formées par l’eau une seconde espèce de mine souvent plus pure, mais bien plus rare, qui se forme également par l’eau : ce sont les mines de fer cristallisées. Mais comme je n’ai pas été à portée de traiter par moi- même les mines de fer en roche produites par le feu, non plus que les mines de fer cristallisées par l’eau, je ne parlerai que de la fusion des mines en grains, d’aulantque ces dernières mines sont celles qu’on ex- ploite le plus communément dans nos forges de France. la première chose que j’ai trouvée, et qui me paroît être une découverte utile, c’est qu’avec une mine qui donnoit le plus mauvais fer de la province de Bourgogne , j’ai fait du fer aussi ductile, aussi nerveux , aussi ferme que les fers du Berri, qui sont réputés les meilleurs de France. Voici comme j’y suis parvenu : le chemin que j'ai tenu est bien plus long; mais personne , avant moi , n’ayant frayé la route, on ne sera pas étonné que j’aie fait du circuit. J’ai pris le dernier jour d’un fondage , c’est-à-dire le jour où l’on alloit faire cesser le feu d'un fourneau à fondre la mine de fer, qui duroit depuis plus de quatre mois. Ce fourneau, d’environ 20 pieds de hauteur, et de 5 pieds 1/2 de largeur à sa cuve, étoit bien chauffé, et n’avoit été chargé que de cette mine, qui avoit la fausse réputation de 11e pouvoir donner que des fontes très- blanches, très-cassantes, et par conséquent du fer à très-gros grain , sans nerf et sans ductilité. Comme j’étois dans l’idée que la trop grande violence du feu ne peut qu’ai- grir le fer, j’employai nia méthode ordinaire, et que j’ai suivie constamment dans toutes mes recherches sur la nature, qui consiste à voir les extrêmes avant de considérer les milieux : je fis donc, non pas ralentir, mais enlever les soufflets ; et ayant fait en même temps découvrir le toit de la halle , je sub- stituai aux soufflets un ventilateur simple , qui n’étoit qu’un cône creux , de 24 pieds de longueur sur 4 pieds de diamètre au gros bout, et trois pouces seulement à sa pointe, sur laquelle on adapta une buse de fer, et qu’on plaça dans le trou de la tuyère ; en même temps, on continuoit à charger de charbon et de mine , comme si l’on eût voulu continuer à couler : les charges des- cendoient bien plus lentement, parce que le feu n’étoit plus animé par le vent des souf- flets; il l’étoit seulement par un courant d’air que le ventilateur tiroit d’en haut , et qui , étant plus frais et plus dense que celui du voisinage de la tuyère, arrivoit avec assez de vitesse pour produire un murmure constant dans l’intérieur du fourneau. Lorsque j’euj fait charger environ deux milliers de char f bon , et quatre milliers de mine , je fis dis 5,1 continuer, pour ne pas trop embarrasser l< jr fourneau ; et le ventilateur étant toujours i P” la tuyère, je laissai baisser les charbons ef la mine sans remplir le vide qu’Üs laissoieSr au dessus. Au boni de quinze ou seize heures f1 il se forma de p t i tes loupes, dont on tin quelques-unes par le trou de la tuyère , e r ! qnelques autres par l’ouverture de la coulée r1 le feu dura quatre jours de plus, axant qui F le charbon fût entièrement consumé; et, dan f cet intervalle de temps, on tira des loupe r plus grosses que les premières ; et après le r1 quatre jours, on en trouva de plus grossir encore en vidant le fourneau. Après avoir examiné ces loupes , qui m parurent être d’une très-bonne étoffe , É dont la plupart portoient à leur circonféil®1 reuce un grain fin et tout semblable à celûf de l’acier, je les fis mettre au feu de l’affif'1 nerie et porter sous le marteau : elles ej'F soutinrent le coup sans se diviser, sans s’é'p6 parpiller en étincelles, sans donner unir grandi1 flamme , sans laisser couler beaueomj®c de laitier; choses qui toutes arrivent lorsifj1 qu’011 forge du mauvais fer. On les forge#5 à la manière ordinaire : les barres qui eile provenoient n’étoient pas toutes de la mèmiP qualité; les unes ét oient de fer, les autre 'f01 d’acier, et le plus grand nombre de fer pa |a un bout ou par un côté, et d’acier par l’autref1» J’en ai fait faire des poinçons et des ciseau» P par des ouvriers qui trouvèrent cet acieide aussi bon que celui d’Allemagne. Les barre qui n’étoient que de fer étoient si fermes qu’il fut impossible de les rompre avec 1 masse, et qu’il fallut employer le cisea d’acier pour les entamer profondément dt deux côtés avant de pouvoir les rompre; c fer étoit tout nerf, et ne pouvoit se sépare qu’en se déchirant par le plus grand effor E11 le comparant au fer que donne ceti même mine fondue en gueuse à la manièt ordinaire , on ne pouvoit se persuader qu’ provenoit de la même mine , dont on n’avo jamais tiré que du fer à gros grain, sans 11e] et très-cassant. La quantité de mine que j’avois employé dans cette expérience auroit dû produire a moins 1 200 livres de fonte , c’est-à-dire ei viron 800 livres de fer, si elle eût été fondi par la méthode ordinaire, et je n’avois ol tenu que 280 livres, tant d’acier que de fe de toutes les loupes que j’avois réuuies ; < en supposant un déchet de moitié du mai F coibij |i? ieèj je fis rrassd wjniij iriiont bi> sehea Ion jin «Mil aiilt is fer au bon , et de trois quarts de mau- is fer à l'acier, je voyois que ce produit pouvoit équivaloir qu’à 5oo livres de a u vais fer, et que, par conséquent, il y oit eu plus du quart de mes quatre milliers mine qui s’étoit consumé en pure perte, en même temps près du tiers du charbon ülé sans produit. Ces expériences étant donc excessivement lères, et voulant néanmoins les suivre, je is le parti de faire construire deux four- aux plus petits ; tous deux cependant de pieds de hauteur, mais dont la capacité térieure du second étoit d’un tiers plus 'lite que celle du premier. Il falloit, pour îarger et remplir en entier mon grand four- ^au de fusion, i35 corbeilles de charbon ; 4o livres chacune, c’est-à-dire 5400 livres ; charbon, an lieu que, dans mes petits urneaux , il ne falloit que 900 livres de îarbon pour remplir le premier, et 600 vres pour remplir le second ; ce qui dimi- uoit considérablement les trop grands frais uisjle ces expériences. Je fis adosser ces four- , ,| eaux l’un à l’autre , afin qu’ils pussent pro- m ter de leur chaleur mutuelle : ils étoient (0I> ‘parés par un mur de 3 pieds, etenviron- fj és d’un autre mur de 4 pieds d’épaisseur; jiii| ; tout bâti en bon moellon, et de la même y ierre calcaire dont on se sert dans le pays J our faire les étalages des grands fourneaux. er p .a forme de la cavité de ces petits fourneaux y toit pyramidale sur une base carrée . s éle- 1, ant d’abord perpendiculairement à 3 pieds afj je hauteur, et ensuite s’inclinant en dedans y ur le reste de leur élévation, qui étoit de J 1 pieds : de sorte que l’ouverture supé- J ieure se trouvoit réduite à 14 pouces au y lus grand fourneau, et 11 pouces au plus ,iil j>etit. Je ne laissai dans le bas qu’une seule »; 1 Ouverture à chacun de mes fourneaux ; elle y :toit surbaissée en forme de voûte ou dé |f| unette, dont le sommet ne s’élevoit qu’à cJ s pieds r/2 dans la partie intérieure, et à nie j. pieds en dehors ; je faisois remplir cette J mverture par un petit mur de briques , art lans lequel on laissoit un trou de quelques ut muces en bas pour écouler le laitier, et un lutre trou à 1 pied 1/2 de hauteur pour oj ïomper l’air. Je ne donne point ici la figure ü le ces fourneaux , parce qu’ils n’ont pas et assez bien réussi pour que je prétende les ndi ionner pour modèles , et que d’ailleurs j’y ol ai fait et j’y fais encore des changemens es- fe senliels à mesure que 1 expérience m’apprend uelque chose de nouveau. D’ailleurs, ce que e viens de dire suffit pour en donner une lidée,et aussi pour l’intelligence de ce qui suit. Buffon. I. PARTIE EXPÉRIMENTALE. 481 Ces fourneaux étoient placés de manière que leur face antérieure , dans laquelle étoien' les ouvertures en lunette, se trou- voit parallèle au courant d’eau qui fait mou- voir les roues des soufflets de mon grand fourneau et de mes affineries, en sorte que le grand entonnoir ou ventilateur dont j’ai parlé pouvoit être posé de maniéré qu’il recevoil sans cesse un air frais par le mou- vement des roues ; il portoit cet air au four- neau auquel il aboutissoit par sa pointe, qui étoit une buse ou tuyau de fer de forme conique, et d’un pouce et demi de diamètre à son extrémité. Je fis faire en même temps deux tuyaux d’aspiration, l’un de ro pieds de longueur sur 14 pouces de largeur pour le plus grand de mes petits fourneaux , et l’autre de 7 pieds de longueur et de 1 1 pou- ces de côté pour le plus petit. Je fis ces tuyaux d’aspiration carrés, parce que les ouvertures du dessus des fourneaux étoient carrées, et que c’étoit sur ces ouvertures qu’il falloit les poser; et quoique ces tuyaux fussent faits d’une tôle assez légère, sur un châssis de fer mince, ils ne laissoient pas d’être pesans , et même embarrassans par leur volume, surtout quand ils étoient fort échauffés : quatre hommes avoient assez de peine pour les placer et les replacer; ce qui cependant étoit nécessaire toutes les fois qu’il falloit charger les fourneaux. J’y ai fait dix-sept expériences, dont cha- cune duroit ordinairement deux ou trois jours et deux ou trois nuits. Je n’en don- nerai pas le détail, non seulement parce qu’il seroit fort ennuyeux, mais même assez inutile , attendu que je n’ai pu parvenir à une méthode fixe, tant pour conduire le feu, que pour le forcer à donner toujours le même produit. Je dois donc me borner aux simples résultats de ces expériences qui m’ont démontré plusieurs vérités que je crois très-utiles. La première, c’est qu’on peut faire de l’acier de la meilleure qualité sans employer du fer comme on le fait communément, mais seulement en faisant fondre la mine à un feu long et gradué. De mes dix-sept expériences, il y en a eu six où j’ai eu de l’acier bon et médiocre , sept où je n’ai eu que du fer, tantôt très-bon, et tantôt mauvais, et quatre où j’ai eu une petite quantité de fonte et du fer environné d’excellent acier. On ne man- quera pas de me dire : Donnez-nous donc au moins le détail de celles qui vous ont produit du bon acier. Ma réponse est aussi simple que vraie : c’est qu’en suivant les mêmes procédés aussi exactement qu’il m’é- 3i ! . 48s MINÉRAUX. INTRODUCTION. toit possible, en chargeant de la même façon, mettant la même quantité de mine et de charbon, ôtant et mettant le ventilateur et les tuyaux d'aspiration pendant un temps égal, je n’en ai pas moins eu des résultats tout différens. La seconde expérience me donna de l’acier par les mêmes procédés que la première, qui ne m’avoit produit que du fer d’une qualité assez médiocre; la troi- sième, par les mêmes procédés, m’a donné de très-bon fer; et quand après cela j’ai voulu varier la suite des procédés et chan- ger quelque chose à mes fourneaux, le pro- duit en a peut-être moins varié par ces grands changemens qu’il n’avoit fait par le seul caprice du feu, dont les effets et la con- duite sont si difficiles à suivre, qu’on ne peut les saisir ni même les deviner qu’après une infinité d’épreuves et de tentatives qui ne sont pas toujours heureuses. Je dois donc me borner à dire ce que j’ai fait, sans anti- ciper sur ce que des artistes plus habiles pourront faire ; car il est certain qu’on par- viendra à une méthode sûre de tirer de l’acier de toute mine de fer sans la faire couler en gueuses , et sans convertir la fonte en fer. C’est ici la seconde vérité, aussi utile que la première. J’ai employé trois différentes sortes de mines dans ces expériences ; j’ai cherché, avant de les employer, le moyen d’en bien connoitre la nature. Ces trois es- pèces de mines étoient, à la vérité, toutes les trois en grains plus ou moins fins ; je n’étois pas à portée d’en avoir d’autres, c’est-à-dire des mines en roche , en assez grande quantité pour faire mes expériences: mais je suis bien convaincu, après avoir fait les épreuves de mes trois différentes mines en grains, et qui toutes trois m’ont donné de l’acier sans fusion précédente, que les mines en roche, et toutes les mines de fer en général , pourroient donner également de l’acier en les traitant comme j’ai traité les mines en grains. Des lors il faut donc bannir de nos idées le préjugé si ancienne- ment , si universellement reçu , que la qua- lité du fer dépend de celle de la mine. Rien n’est plus mal fondé que cette opinion; cest au contraire uniquement de la conduite du feu et de la manipulation de la mine que dépend la bonne ou la mauvaise qualité de la fonte du fer et de l’acier. Il faut encore bannir un autre préjugé, c’est quW ne peut avoir de l’acier qu’eu le tirant du fer ; tandis qu’il est très-possible au contraire d'en tirer immédiatement de toutes sortes de mines. On rejettera donc eu conséquence les idées de M. Yonge et de quelques autres chimistes I qui ont imaginé qu’il y avoit des mines qui avoient la qualité particulière de pouvoir donner de l’acier à l’exclusion de toutes les autres. Une troisième vérité que j’ai recueillie de mes expériences, c’est que toutes nos mines de fer en grains, telles que celles de Bour- gogne, de Champagne, de Franche-Comté, 1 de Lorraine, du Nivernois, de l’Angou- mois, etc., c’tst-à-dire presque toutes les mines dont on fait nos fers en France , ne contiennent point de soufre comme les I mines en roche de Suède ou d’Allemagne, j et que par conséquent elles n’ont pas besoin i d’être grillées, ni traitées de la même ma- nière. Le préjugé du soufre contenu en grande quantité dans les mines de fer nous est venu des métallurgistes du Nord , qui , ne connoissant que leurs mines en roche qu’on tire de la terre à de grandes profon- deurs, comme nous tirons des pierres d’une carrière, ont imaginé que toutes les mines de fer étoient de la même nature, et conte- noient , comme elles , une grande quantité ! de soufre; et, comme les expériences sur les mines de fer sont très-difficiles à faire, nos j chimistes s’en sont rapportés aux métallur- j gistes du Nord, et ont écrit, comme eux, I qu’il y avoit beaucoup de soufre dans nos mines de fer, tandis que toutes les mines en | grains que je viens de citer n’en contiennent j point du tout, ou si peu, qu’on n en sent pas l’odeur, de quelque façon qu’on les j brûle. Les mines en roche ou en pierre dont j’ai fait venir des échantillons de Suède et ; d’Allemagne, répandent au contraire une forte odeur de soufre lorsqu’on les fait griller, et en contiennent réellement une j tres-grande quantité, dont il faut les dé- i pou illcr avant de les mettre au fourneau ; pour les fondre. Et de là suit une quatrième vérité tout aussi intéressante que les autres : c’est que nos mines en grains valent mieux que ces ’ mines en roche tant vantées, et que si nous 11e faisons pas du fer aussi b >n ou meilleur ji que celui de Suède, c’est purement notre ! faute, et point du tout celle de nos mines, jj qui toutes nous donneroient des fers de la i! première qualité, si nous les traitions avec ! le même soin que prennent les étrangers ;! pour arriver à ce but; il nous est même plus j aisé de l’atteindre, nos mines ne demandent pas, à beaucoup près, autant de travaux j que les leurs. Voyez dans Swedenborg le j détail de ces travaux : la seule extraction | de la plupart de ces mines en îoche qu il UIDlSl *S fil siiiiii ! Bon Corn! Angoo. 'les le'lej ça besoi le ma nu i moi , qui rorh rofon d’un mine lonle anlil u rie m PARUE EXPÉRIMENTALE. faut aller arracher du sein de la terre , à 3 ou 400 pieds de profondeur, casser à coups de marteau, de masse et de levier, enle- ver ensuite par des machines jusqu’à la hauteur de terre, doit coûter beaucoup plus que le tirage de nos mines en grains, qui se fait, pour ainsi dire, à fleur de terrain, et sans autres instrumens que la pioche et la pelle. Ce premier avantage n’est pas encore le plus grand ; car il faut reprendre ces quartiers , ces morceaux de pierres de fer, les por er sous les maillets d’un boeard pour les concasser, les broyer et les réduire au même état de division où nos mines en grains se trouvent naturellement; et comme cette mine concassée contient une grande quantité de soufre, elle ne produiroit que de très-mauvais fer si on ne prenôit pas la précaution de lui enlever la plus grande partie de ce soufre surabondant , avant de la jeter au fourneau. On la répand à cet effet sur des bûchers d’une vaste étendue, où elle se grille pendant quelques semaines. (Jette consommaiion très -considérable de bois, jointe à la difficulté de l’extraction de la mine , rendrait la chose impraticable en France, à cause de la cherté des bois. Nos mines heureusement 11’ont pas besoin d’ètre grillées, et il suffit de les laver pour les sé- ij parer de la terre avec laquelle elles sont mêlées ; la plupart se trouvent à quelques pieds de profondeur ; l’exploitation de nos mines se fait donc à beaucoup moins de frais, et cependant nous ne profitons pas de tous ces avantages, ou du moins nous n’en avons pas profilé jusqu’ici, puisque les étran- gers nous apportent leurs fers qui leur coû- tent tant de peines, et que nous les achetons de préférence aux nôtres , sur la réputation qu’ils ont d’ètre de meilleure qualité. Ceci tient à une cinquième vérité , qui est plus morale que physique : c’est qu'il est plus aisé, plus sûr, et plus profitable de faire, surtout en ce genre, de la mauvaise marchandise que de la bonne. Il est bien plus commode de suivre la routine qu’on trouve établie dans les forges, que de cher- cher à en perfectionner l’art. Pourquoi vou- loir faire du bon fer? disent la plupart des maîtres de forge ; on ne le vendra pas une pistole au dessus du fer commun, et il nous reviendra peut-être à trois ou quatre de plus, sans compter les risques et les frais des expériences et des essais, qui 11e réussissent pas tous à beaucoup près. Malheureusement cela n’est que trop vrai ; nous ne profiterons jamais de l'avantage naturel de nos mines, ni même de noire intelligence , qui vaut bien celle des étrangers , tant que le gouver- nement ne donnera pas à cet objet plus d’at- tention, tant qu’on ne favorisera pas le petit nombre des manufactures où l’on fait de bon fer, et qu’on permettra l’entrée des fers étrangers. Il me semble que l’on peut dé- montrer avec la dernière évidence le tort que cela fait aux arts et à 1 État ; mais je m'écarterais trop de mon sujet si j’enlrois ici dans cette discussion. Tout ce que je puis assurer comme une sixième vérité, c’est qu’avec toutes sortes de mines on peut toujours obtenir du fer de même qualité. J’ai fait brûler et fondre suc- cessivement dans mon plus grand fourneau, qui a 23 pieds de hauteur, sept espèces de mines différentes, tirées à deux, trois et quatre lieues de distance les unes des au- tres, dans des terrains tous différens, les unes en grains plus gros que des pois, les autres en grains gros comme des chevro- tines, plomb à lièvre, et les autres plus me- nues que le plus petit piomb à tirer; et de ces sept différentes espèces de mines dont j’ai fait fondre plusieurs centaines de mil- liers, j’ai toujours eu le même fer. Ce fer est bien connu , non seulement dans la pro- vince de Bourgogne, où sont situées mes forges, mais même à Paris, où s’en fait le principal débit, et il est regardé comme de très-bonne qualité. Ou serait donc fondé à croire que j’ai toujours employé la même mine, qui, toujours traitée de la même façon, m’auroil constamment donné le même pro- duit; tandis que, dans le vrai, j ai usé de toutes les mines que j’ai pu découvrir, et que ce n’est qu'en vertu des précautions et des soins que j’ai pris de les traiter diffé- remment, que je suis parvenu à en tirer un résultat semblable et un produit de même qualité. Voici les observations et les expériences que j’ai faites à ce sujet ; elles seront utiles et même nécessaires à tous ceux qui voudront counoître la qualité des mines qn’ils emploient. Nos mines de fer en grains ne se trouvent jamais pures dans le sein de la terre; toutes sont mélangées d’une certaine quantité de terre qui peut se délayer dans l'eau, et d’un sable plus ou moins fin, qui, dans de cer- taines mines, est de nature calcaire, dans d’autres de nature vitrifiable, et quelquefois mêlé de l’une et de l’autre ; je n’ai pas vu qu il y eût aucun autre mélange dans les sept espèces de mines que j’ai traitées et fondues avec un égal succès. Pour recon- noitre la quantité de terre qui doit se dé- layer dans l'eau, et que l’on peut espérer 3i. 4*4 MINÉRAUX. INTRODUCTION. de séparer de la mine au lavage , il faut en peser une petite quantité dans l’état même où elle sort de la terre , la faire ensuite sé- cher, et mettre en compte le poids de l’eau qui se sera dissipée par le dessèchement. On mettra cette terre séchée dans un vase que l’on remplira d’eau, et on la remuera; dès que l’eau sera jaune ou bourbeuse, on la versera dans un autre vase plat pour en faire évaporer l’eau par le moyen du feu ; après l’évaporation, on mettra à part le résidu terreux. On réitérera cette même manipulation jusqu’à ce que la mine ne co- lore plus l’eau qu’on verse dessus; ce qui n’arrive jamais qu’après un grand nombre de lotions. Alors on réunit ensemble tous ces résidus terreux, et on les pese pour reconnoî- tre leur quantité relative à celle de la mine. Cette première partie du mélange de la mine étant connue et son poids constaté, il restera les grains de mine et les sables que l’eau n’a pu délayer : si ces sables sont cal- caires, il faudra les faire dissoudre à l’eau- forte, et on en reconnoîtra la quantité en les faisant précipiter après les avoir dissous; on les pèsera , et dès lors on saura au juste combien la mine contient de terre, de sable calcaire et de fer en grains. Par exemple , la mine dont je me suis servi pour la pre- mière expérience de ce mémoire contenoit par once i gros 1/2 de terre délayée par l’eau , i gros 55 grains de sable dissous par l’eau-forte, 3 gros 66 grains de mine de fer, et il y a eu 59 grains de perdus dans les lotions et dissolutions. C’esl M. Daubenton, de l’Académie des Sciences, qui a bien voulu faire cette expérience à ma prière, et qui l’a faite avec toute l’exactitude qu’il apporte à tous les sujets qu'il traite. Après cette épreuve, il faut examiner at- tentivement la mine dont on vient de sé- parer la terre et le sable calcaire , et tâcher de reconnoître , à la seule inspection , s’il ne se trouve pas encore, parmi les grains de fer, des particules d’autres matières que l’eau-forte n’auroit pu dissoudre , et qui par conséquent ne seroient pas calcaires. Dans celle dont je viens de parler, il n’y en avoit point du tout, et dès lors j’étois assuré que sur une quantité de 576 livres de cette mine, il y avoit 2S2 parties de mine de fer, 127 de matière calcaire, et le reste de terre qui peut se délayer à l’eau. Cette connoissance une fois acquise, il sera aisé d'en tirer les procédés qu’il faut suivre pour faire fondre la mine avec avantage et avec certitude d'en obtenir du bon fer, comme nous le dirons dans la suite. Dans les six autres espèces de mines que j’ai employ ées, il s’en est trouvé quatre dont le sable n’étoit point dissoluble à l’eau-forte, et dont par conséquent la nature n’éloit pas calcaire , mais vitrifiable ; et les deux autres, qui étoient à plus gros grains de fer que les cinq premières , contenoient des graviers calcaires en assez petite quantité, et de pe- tits cailloux arrondis, qui étoient de la na- ture de la calcédoine, et qui ressembloient par la forme aux chrysalides des fourmis : les ouvriers employés à l’extraction et au lavage des mines les appeloient œufs de fourmis. Chacune de ces mines exige une suite de procédés différens pour les fondre avec avantage et pour en tirer du fer de même qualité. Ces procédés , quoique assez simples , ne laissent pas d’exiger une grande attention; comme il s’agit de travailler sur des milliers de quintaux de mine , on est forcé de cher- cher tous les moyens et de prendre toutes les voies qui peuvent aller à l’économie : j’ai acquis sur cela de l’expérience à mes dé- pens, et je ne ferai pas mention des mé- thodes qui, quoique plus précises et meil- leures que celles dont je vais parler, seroient trop dispendieuses pour pouvoir être mises en pratique. Comme je n’ai pas eu d’autre but dans mon travail que celui de l’utilité publique, j’ai tâché de réduire ces procédés à quelque chose d’assez simple pour pouvoir être entendu et exécuté par tous les maîtres de forges qui voudront faire du bon fer, mais néanmoins en les prévenant d’avance que ce bon fer leur coûtera plus que le fer commun qu’ils ont coutume de fabriquer, par la même raison que le pain blanc coûte plus que le pain bis ; car il ne s’agit de même que de cribler, tirer et séparer le bon grain de toutes les matières hétérogènes dont il se trouve mélangé. Je parlerai ailleurs de la recherche et de la découverte des mines ; mais je suppose ici les mines toutes trouvées et tirées ; je suppose aussi que par des épreuves sembla- bles à celles que je viens d’indiquer on con- noisse la nature des sables qui y sont mé- langés. La première opération qu’il faut faire, c’est de les transporter aux lavoirs , qui doi- vent être d’une construction différente selon les différentes mines ; celles qui sont en grains plus gros que les sables qu’elles con- tiennent doivent être lavées dans des lavoirs foncés de 1er et percés de petits trous comme ceux qu’a proposés M. Robert, et qui sont très-bien imaginés; car ils servent en même temps de lavoirs et de cribles : l’eau emmène PARTIE EXPÉRIMENTALE. 485 vec elle toute la terre qu’elle peut délayer, et les sablons plus menus que les grains de la mine passent en même temps par les pe- tits trous dont le fond du lavoir est percé ; et dans le cas où les sablons sont aussi gros, mais moins durs que le grain de la mine , le râble de fer les écrase, et ils tombent avec ’eau au dessous du lavoir; la mine reste nette et assez pure pour qu’on la puisse fon- dre avec économie. Mais ces mines , dont les grains sont plus gros et plus durs que ceux des sables ou petits cailloux qui y sont mélangés , sont assez rares. Des sept espèces de mines que j’ai eu occasion de traiter, il ne s’en est trouvé qu’une qui fût dans le cas d’être lavée à ce lavoir, que j’ai fait exécuter et qui a bien réussi ; cette mine est celle qui ne contenoit que du sable calcaire, qui com- munément est moins dur que le grain de la mine. J’ai néanmoins observé que les râbles de fer, en frottant contre le fond du lavoir, qui est aussi de fer, ne laissoient pas d’é- craser une assez grande quantité de grains de mine, qui, dès lors, passoienl avec le sable et tomboient en pure perte sous le lavoir ; et je crois cette perte inévitable dans les lavoirs foncés de fer. D ailleurs la quan- tité de castine que M. Robert étoit obligé de mêler à ses mines, et qu’il dit être d’un tiers de la mine, prouve qu’il restoit encore, après le lavage, une portion considérable de sablon vitrifiable, ou de terre vitrescible , dans ces mines ainsi lavées; car il n’auroit eu besoin que d’un sixième ou même d’un huitième de castine, si les mines eussent été plus épurées, c’est-à-dire plus dépouillées de la terre grasse ou du sable vitrifiable qu’elles contenoient. Au reste, il n étoit pas possible de se servir de ce même lavoir pour les autres six espèces de mines que j’ai eues à traiter; de ces six il y en avoit quatre qui se sont trou- vées mêlées d’un sablon vitrescible aussi dur et même plus dur et en même temps plus gros ou aussi gros que les grains de la mine. Pour épurer ces quatre espèces de mines, je me suis servi de lavoirs ordinaires et foncés de bois plein, avec un courant d’eau plus rapide qu'à l’ordinaire : on les passoit neuf fois de suite à l’eau ; et à me- sure que le courant vif de l’eau emportoit la terre et le sablon le plus léger et le plus petit , on faisoit passer la mine dans des cri- bles de fil de fer assez serrés pour retenir tous les petits cailloux plus gros que les grains de la mine. En lavant ainsi neuf fois et criblant trois fois, on parvenoit à ne laisser dans ces mines qu’environ un cin- quième ou un sixième de ces petits cailloux ou sablons vitrescibles, et c’étoient ceux qui, étant de la même grosseur que les grains de la mine, étoient aussi de la même pesanteur, en sorte qu’on ne pou voit les séparer ni par le lavoir ni par le crible. Apres cette première préparation, qui est tout ce qu’on peut faire par le moyen du lavoir et des cribles à l’eau, la mine étoit assez nette pour pouvoir êlre mise au fourneau; et comme elle étoit encore mélangée d’uu cinquième ou d’un sixième de madères vitrescibles, on pouvoit la fondre avec un quart de castine ou matière calcaire , et en obtenir de très- bon fer en ménageant les charges, c’est-à- dire en mettant moins de mine que l’on n’en met ordinairement : mais comme alors on ne fond pas à profit, parce qu’on use une grande quantité de charbon , il faut encore tâcher d’épurer sa mine avant de la jeter au fourneau. On ne pourra guère en venir à boui qu’en la faisant vanner et cribler à l’air, comme l’on vanne et crible le blé. J’ai séparé par ces moyens encore plus d’une moitié de matières hétérogènes qui restoient dans mes mines; et, quoique cette dernière opération soit longue et même assez diffi- cile à exécuter en grand , j’ai reconnu , par l’épargne du charbon, qu’elle étoit profitable : il en coûtoit vingt sous pour vanner et cri- bler quinze cents pesant de mine ; mais on éparguoit au fourneau trente-cinq sous de charbon pour la foudre. Je crois donc que quand cette pratique sera connue on ne manquera pas de l’adopter. La seule diffi- culté qu’on y trouvera, c’est de faire sécher assez les mines pour les faire passer au cri- ble et les vanner avantageusement. Il y a très-peu de matières qui retiennent l’humi- dité aussi long-temps que les mines de fer en grains 1 ; une seule pluie les rend humides pour plus d’un mois. Il faut donc des han- gars couverts pour les déposer; il faut les étendre par petites couches de trois ou quatre pouces d’épaisseur, les remuer, les exposer au soleil ; en un mot , les sécher au- tant qu’il est possible; sans cela, le van ni le crible ne peuvent faire leur effet. Ce n’est i. Pour reconnoître la quantité d’humidité qui réside dans la mine de fer, j’ai fait sécher, et , pour ainsi dire, griller dans un four très-chaud , trois cents livres de celle qui avoit été la mieux lavée , et qui s’étoit déjà séchée à l’air; et ayant pesé cette mine au sortir du four, elle ne pesoit plus que deux cent cinquante livres : ainsi la quantité de ta ma- tière humide ou volatile que la chaleur lui enlève est à très-peu près d’uu sixième de sou poids total, et je suis persuadé que si on la grilloit à un feu plus vio teut j elle perdroit encore plus. i 486 MINÉRAUX. INTRODUCTION. qu’en été qu’on peut y travailler ; et quand il s’agit de faire passer au crible quinze ou dix-huit cents milliers de mine que l’on brûle au fourneau dans cinq ou six mois, on sent bien que le temps doit toujours man- quer, et il manque en effet ; car je n'ai pu par chaque été faire traiter ainsi qu’environ cinq ou six cents milliers : cependant , en augmentant l’espace des hangars, et en dou- blant les machines et les hommes, on en viendroit à bout ; et l’économie qu’on trouve- roit par la moindre consommation de char- bon dédommageroit et au delà de tous ces frais. On doit traiter de même les mines qui sont mélangées de graviers calcaires et de petits cailloux ou de sable vitrescible ; en sé- parer le plus que l’on pourra de cette se- conde matière, à laquelle la première sert de fondant , et que , par cette raison , il n’est pas nécessaire d oter, à moins qu’elle ne fût en trop grande quantité : j’en ai tra- vaillé deux de cette espèce; elles sont plus fusibles que les autres, parce qu’elles con- tiennent une bonne quantité de casliue, et qu’il ne leur en faut ajouter que peu ou même point du tout , dans le cas où il n’y auroit que peu ou point de matières vitres- cibles. Lorsque les mines de fer ne contiennent point de matières vitrescibles , et ne sont mélangées que de matières calcaires, il faut tâcher de reconnoitre la proportion du fer et de la matière calcaire, en séparant les grains de mine un à un sur une petite quan- tité, ou en dissolvant à l’eau-forte les par- ties calcaires, comme je l’ai dit ci-devant. Lorsqu’on se sera assuré de cette propor- tion, on saura tout ce qui est nécessaire pour fondre ces mines avec succès. Par exemple, la mine qui a servi à la première expérience , et qui contenoit i gros 55 grains de sable calcaire, sur 3 gros 66 grains de fer en grains, et dont il s’éloil perdu 5g grains dans les lotions et la dissolution, éioil par conséquent mélangée d’en\iron un tiers de castine ou de matière calcaire, sur deux tiers de fer en grains. Cette mine porte donc naturellement sa castine; et on ne peut que gâter la fonte si on ajoute en- core de la matière calcaire pour la fondre : il faut , au contraire, y mêler des matières vitrescibles, et choisir celles qui se fondent le plus aisément. En mettant un quinzième ou même un seizième de terre vitrescible , qu’on appelle aubue, j’ai fondu cette mine avec un grand succès , et elle m’a donné d’excellent fer, tandis qu’en la fondant avec une addition de castine, comme c’étoit l’usage dans le pays avant moi, elle ne pro- duisoit qu’une mauvaise fonte qui cassoit par son propre poids sur les rouleaux en la conduisant à raffinerie. Ainsi , toutes les fois qu’une mine de fer se trouve naturellement surchargée d’une grande quantité de ma- tières calcaires , il faut , au lieu de castine, employer de l’aubue pour la fondre avec avantage. On doit préférer cette terre au- bue à toutes les autres matières vitresci- bles , parce qu’elle fond plus aisément que le caillou, le sable cristallin et les autres matières du genre vitrifiable qui pourroient faire le même effet, mais qui exigeroient plus de charbon pour se fondre. D’ailleurs cette lerre aubue se trouve presque partout, et est la lerre la plus commune de nos cam- pagnes. En se fondant elle saisit les sablons, les pénèlre , les ramollit , et les fait couler avec elle plus promptement que ne pour- roit le faire le petit caillou ou le sable vi- trescible, auxquels il faut beaucoup plus de feu pour les fondre. On est dans l’erreur lorsqu’on croit que la mine de fer ne peut se fondre sans cas- tine ; on peut la fondre non seulement sans castine , mais même sans aubue et sans au- cun autre fondant , lorsqu’elle est nette et pure : mais il est vrai qu’alors il se brûle une quantité assez considérable de mine qui tombe en mauvais laitier, et qui diminue le produit de la fonte. Il s agit donc , pour fon- dre le plus avantageusement qu’il est possi- ble , de trouver d’abord quel est le fondant qui convient à la mine , et ensuite dans quelle proportion il faut lui donner ce fon- dant pour qu’elle se convertisse entièrement en fonte de fer, et qu’elle ne brûle pas avant d’entrer en fusion. Si la mine est mêlée d’un tiers ou d’un quart de matières vitrescibles, et qu’il ne s’y trouve aucune matière cal- caire, alors un demi-tiers ou un demi-quart de matières calcaires suffira pour la fondre ; et si, au contraire , elle se trouve naturelle- ment mélangée d’un tiers ou d’un quart de sables ou de graviers calcaires, un quinzième ou un dix-huitième d’aubue suffira pour la faire couler et la préserver de l’action su- bite du feu , qui ne manqueroit pas de la brûler en partie. On pèche presque partout par l’excès de castine qu’on met dans les fourneaux; il y a même des maîtres de cet art assez peu instruits pour mettre de la castine et de l’aubue tout ensemble ou sé- parément , suivant qu’ils imaginent que leur mine est trop froide ou trop chaude: tandis que , dans le réel , toutes les mines de fer. S.-W PARTIE EXPERIMENTALE. 487 du moins toutes les mines en grains , sont également fusibles, et ne diffèrent les unes des autres que par les matières dont elles sont mélangées, et pas du tout par leurs qualités intrinsèques , qui sont absolument les mêmes, et qui m’ont démontré que le fer, comme tout autre métal, est un dans la Inature. O11 reconnoîtra par les laitiers si la pro- jportion de la castine ou del’aubue que l’on jette au fourneau pèche par excès ou par (défaut : lorsque les laitiers sont trop légers, spongieux, et blancs, presque semblables à la pierre ponce, c’est une preuve certaine qu’il y a trop de maiiere calcaire; en dimi- nuant la quantité de cette matière on verra de laitier prendre plus de solidité, et former lun verre ordinairement de couleur verdâtre, qui file, s’étend, et coule lentement au sortir du fourneau. Si au contraire le lai- tier est trop visqueux , s’il ne coule que très-difficilement, s’il faut l’arracher du sommet de la dame, on peut être sût qu’il n’y a pas assez de castine, ou peut-être pas assez de charbon proportionnellement à la mine; la consistance et même la cou- leur du laitier sont les indices les plus sûrs du bon ou du mauvais état du fourneau , et de la bonne ou mauvaise proportion des matières qu’on y jette : il faut que le laitier coule seul et forme un ruisseau lent sur la pente qui s’étend du sommet de la dame au terrain ; il faut que sa couleur ne soit pas d’un rouge trop vif ou trop foncé, mais d’un rouge pâle et blanchâtre; et lorsqu’il est refroidi , on doit trouver un verre so- lide , transparent, et verdâtre, aussi pesant et même plus que le verre ordinaire. Rien ne prouve mieux le mauvais travail du four- neau, ou la disproportion des mélanges, que les laitiers trop légers, trop pesans , trop obscurs ; et ceux dans lesquels on remarque plusieurs petits trous ronds, gros comme les grains de mine, ne sont pas des laitiers proprement dits, mais de la mine brûlée qui n’est pas fondue. Il y a encore plusieurs attentions néces- saires et quelques précautions à prendre , pour fondre les mines de fer avec la plus grande économie. Je suis parvenu, après un grand nombre d’essais réitérés, à ne con- sommer que 1. livre 7 onces 1/2 ou tout au plus 1 livre 8 onces de charbon pour 1 livre de fonte; car, avec 2880 livres de charbon, lorsque mon fourneau est pleinement ani- mé , j’obtiens constamment des gueuses de 1875 , 1900, et 1950 livres, et je crois que î’est le plus haut point d’économie auquel on puisse arriver : car M. Robert, qui, de tous les mailres de cet art, est peut-être ce- lui qui , par le moyen de son lavoir, a le plus épuré ses mines , consommoit néan- moins i livre 10 onces de charbon pour chaque livre de fonte, et je doute que la qualité de ses fontes fût aussi parfaite que celle des miennes ; mais cela dépend , comme je viens de le dire , d’un grand nombre d’observations et de précautions dont je vais indiquer les principales. x° La cheminée du fourneau , depuis la cuve jusqu’au gueulard, doit être circu- laire, et non pas a huit pans, comme étoit le fourneau de M. Robert, ou carrée comme le sont les cheminées de la plupart des four- neaux en France. Il est bien aisé de sentir que dans un carré la chaleur se perd dans les angles sans réagir sur la mine , et que par conséquent on brûle plus de charbon pour en fondre la même quantité. 20 .L’ouverture du gueulard ne doit être que la moitié du diamètre de la largeur de la cuve du fourneau. J’ai fait des fondages avec de très-grands et de très-petits gueu- lards; par exemple, de 3 pieds r/2 de dia- mètre , la cuve n’ayant que 5 pieds de dia- mètre , ce qui est à peu près la proportion des fourneaux de Suede ; et j’ai vu que chaque livre de fonte consommoit près de 2 livres de charbon. Ensuite ayant rétréci la cheminée du fourneau, et laissant tou- jours à la cuve un diamètre de 5 pieds, j’ai réduit le gueulard à 2 pieds de diamètre; et, dans ce fondage, j’ai consommé 1 livre i3 onces de charbon pour chaque livre de fonte. La proportion qui m’a le mieux réus- si, et à laquelle je me suis tenu, est celle de 2 pieds 1/2 de diamètre au gueulard, sur 5 pieds à la cuve , la cheminée formant un cône droit, portant sur des gueuses circu- laires depuis la cuve au gueulard, le tout construit avec des briques capables de résis- ter au plus grand feu. Je donnerai ailleurs la composition de ces briques , et les détails de la construction du fourneau , qui est toute différente de ce qui s’est pratiqué jus- qu’ici , surtout pour la partie qu’on appelle l'ouvrage dans le fourneau. 3° La manière de charger le fourneau ne laisse pas d’influer beaucoup plus qu’on ne croit sur le produit de la fusion. Au lieu de charger, comme c’est l’usage , toujours du côté de la rustine, et de laisser couler la mine en pente, de manière que ce côté de rustine est constamment plus chargé que les autres , il faut la placer au milieu du gueu- lard , l’élever en cône obtus, et ne jamais 488 MINÉRAUX. INTRODUCTION. interrompre le cours de la flamme, qui doit toujours envelopper le tas de mine tout au- tour, et donner constamment le même degré de feu. Par exemple , je fais charger com- munément six paniers de charbon de 40 li- vres chacun , sur huit mesures de mine de 55 livres chacune , et je fais couler à douze charges; j’obtiens communément 19a 5 livres de fonte de la meilleure qualité. On com- mence, comme partout ailleurs, à mettre le charbon ; j’observe seulement de ne me servir au fourneau que de charbon de bois de chêne, et je laisse pour les affim ries le charbon des bois plus doux. On jette d’abord cinq paniers de ce gros charbon de bois de chêne , et le dernier panier, qu’on impose sur les cinq autres, doit être d’un charbon plus menu, que l’on entasse et brise avec un râble, pour qu’il remplisse exactement les vides que laissent entre eux les gros char- bons. Cette précaution est nécessaire pour que la mine, dont les grains sont très-menus, ne perce pas trop vite, et n’arrive pas trop tôt au bas du fourneau. C’est aussi par la même raison qu’avant d’imposer la mine sur ce dernier charbon , qui doit être non pas à fleur du gueulard , mais à deux pouces au dessous , il faut , suivant la nature de la mine , répandre une portion de la casline ou de l’aubue , nécessaire à la fusion , sur la surface du charbon ; cette couche de ma- tière soutient la mine et l’empêche de per- cer. Ensuite on impose au milieu de l’ouver- ture une mesure de mine qui doit être mouillée, non pas assez pour tenir à la main, mais assez pour que les grains aient entre eux quelque adhérence et fassent quelques petites pelotes. Sur cette première mesure de mine on en met une seconde , et on re- lève le tout en cône , de manière que la flamme l’enveloppe en entier ; et s’il y a quelques points dans cette circonférence où la flamme ne perce pas , on enfonce un petit ringard pour lui donner jour, afin d’en en- tretenir l’égalité tout autour de la mine. Quelques minutes après, lorsque le cône de mine est affaissé de moitié ou des deux tiers, on impose de la même façon une troi- sième et une quatrième mesure qu’on releve de même, et ainsi de suite jusqu’à la hui- tième mesure. On emploie quinze ou vingt minutes à charger successivement la mine; cette maniéré est meilleure et bien plus pro- fitable que la façon ordinaire qui est en usage , par laquelle on se presse de jeter, et toujours du même côté, la mine tout ensem- ble en moins de 3 ou 4 minutes. 4.0 La conduite du vent contribue beau- coup à l’augmentation du produit delà mim et de l’épargne du charbon. Il faut, dans hi commencement du fondage, donner le moin dre vent qu’il est possible, c’èst-à-dire à pei près six coups de soufflet par minute , e augmenter peu à peu le mouvement pendan les quinze premiers jours , au bout desquels I on peut ailer jusqu’à onze et même jusqu’; douze coups de soufflet par minute; mais i faut encore que la grandeur des soufflets soit proportionnée à la capacité du fourneau , et que l’orifice de la tuyère soit placé d’un tiers plus près de la rustine que delà tympe, afin que le vent ne se porte pas trop du côté dt l’ouverture qui donne passage au laitier.' 01 Le buses des soufflets doivent être posées à; RI 6 ou 7 pouces en dedans de la tuyère, et lét Ff milieu du creuset doit se trouver à l’aplombl du centre du gueulard ; de cette manière let ie vent circule à peu près également dansi; " toute la cavité du fourneau . et la mine des-, cend, pour ainsi dire, à plomb, et ne s’at-t lâche que tres-rarement et en petite quan-i tité aux parois du fourneau ; dès lors il s’enil1'0] brûle très-peu, et l’on évite les embarras |n qui se forment souvent par cette mine atta-aJH chée , et les bouillonnemens qui arrivent P dans le creuset lorsqu’elle vient à se détacher; * et y tomber en masse. Mais je renvoie les' Df détails de la construction et de la conduite des fourneaux à un autre mémoire, parcee que ce sujet exige une très-longue discus- sion. Je pense que j’en ai dit assez pour que les maîtres de forges puissent m’entendre, et changer ou perfectionner leurs méthodes d’après la mienne. J’ajouterai seulement que par les moyens que je viens d’indiquer, et î en ne pressant pas le feu , en ne cherchant point à accélérer les coulées, en n’augmen- tant de mine qu’avec précaution , en se te- nant toujours au dessous delà quantité qu’on ij pourroit charger, on sera sûr d’avoir de très- bonne fonte grise, dont on tirera d’excel- lent fer, et qui sera toujours de même qua- lité, de quelque mine qu’il provienne. Je puis l’assurer de toutes les mines en grains , puisque j’ai sur cela l’expérience la plus constante et les faits les plus réitérés. Mes fers , depuis cinq ans , n’ont jamais varié pour la qualité, et néanmoins j’ai employé sept espèces de mines différentes : mais je n’ai garde d’assurer de même que les mines de fer en roche donneroient , comme celles en grains, du fer de même qualité; car celles qui contiennent du cuivre ne peuvent guère produire que du fer aigre et cassant, de quelque maniéré qu’on voulût les traiter, parce qu’il est comme impossible de les pur- PARTIE EXPÉRIMENTALE. 4*9 r de ce métal , dont le moindre mélange il ite beaucoup la qualité du fer. Celles qui mtiennent des pyrites et beaucoup de ufre demanderoient à être traitées dans ! petits fourneaux presque ouverts, ou à la anière des forges des Pyrénées : mais 31)116 )mine toutes les mines en grains, du moins iis(|[|' )utes celles que j’ai eu occasion d’examiner nais i t j’en ai vu beaucoup, m’en étant procuré ■ts soi un grand nombre d’endroits) , ne contien- ■i/i, et jent ni cuivre ni soufre, on sera certain lien "avoir du très-bon fer, et de la même qua- , afin lé, en suivant les procédés que je viens itéij indiquer; et comme ces mines en grains litil >nt , pour ainsi dire, les seules que l’on séesj^ploite en France, et qu’à l’exception des et II rovinces du Dauphiné, de Bretagne , du loml oussillon, du pays de Foix, etc., où l’on re le 3 sert des mines en roche, presque toutes dans os autres provinces n’ont que des mines des. n grains, les procédés que je viens de don- s’a(. er pour le traitement de ces mines en uan- rains seront plus généralement utiles au s'Jbyaume que les manières particulières de M'ai ter les mines en roche , dont d’ailleurs on i.peut s’instruire dans Swedenborg, et dans fttt|uelques autres auteurs. Imr |l Ces procédés , que tous les gens qui con- Joissent les forges peuvent entendre aisé- liJnent, se réduisent à séparer d’abord, au- rce liant qu’il sera possible, toutes les matières iJjîtrangères qui se trouvent mêlées avec la |iie|nine ; si l’on pouvoil en avoir le grain pur e |t sans aucun mélange, tous les fers, dans jPJous pays, seroient exactement de la même lieÉualité ; je me suis assuré, par un grand et nombre d’essais, que toutes les mines en Jgrains, ou plutôt que tous les grains des Jiifférentes mines, sont à très-peu près de , la même substance. Le fer est un dans la n i nature , comme l’or et Jous les autres mé- Jtaux, et, dans les mines en grains , les dif- I tereuces qu’on y trouve ne viennent pas de j. | la matière qui compose le grain , mais de celles qui se trouvent mêlées avec les grains, et que l’on n’en sépare pas avant de les faire fondre. La seule différence que j’ai observée entre les grains des différentes mines que j’ai fait tirer un à un pour faire mes essais, c’est que les plus petits sont ceux qui oui la plus grande pesanteur spécifique, et par conséquent ceux qui , sous le même volume, contiennent le plus de fer ; il y a commu- nément une petite cavité au centre de cha- que grain ; plus ils sont gros, plus ce vide est grand ; ils n’augmentent pas comme le te seulement , mais en bien plus grande | proportion ; en sorte que les plus gros grains sont à peu près comme les geodes ou pierres d’aigle, qui sont elles-mêmes de gros grains de mine de fer, dont la cavité intérieure est très-grande. Ainsi les mines en grains très-* menus sont ordinairement les plus riches; j’en ai tiré jusqu’à 49 et 5o par 100 de fer en gueuse, et je suis persuadé que si je les avois épurées en entier, j’aurois obtenu plus de 60 par 100; car il y restoit environ un cinquième de sable vitrescible aussi gros et à peu près aussi pesant que le grain, et que je n’avois pu séparer ; ce cinquième déduit sur 100, reste 80, dont ayant tiré 5o, on auroit par conséquent obtenu 62 1/2. On demandera peut-être comment je pouvois m’assurer qu’il ne restoit qu’un cinquième de matières hétérogènes dans la mine, et comment il faut faire en général pour re- connoître cette quantité : cela n’est point du tout difficile; il suffit de peser exactement une demi-livre de la mine , la livrer ensuite à une petite personne attentive , once par once , et lui en faire trier tous les grains un à un ; ils sont toujours très-reconnoissables par leur luisant métallique; et lorsqu’on les a tous triés, on pèse les grains d’un côté et les sablons de l’autre , pour reconnoître la proportion de leurs quantités. Les métallurgistes qui ont parlé des mines de fer en roche disent qu’il y en a quelques- unes de si riches, qu’elles donnent 70 et même 75 et davantage de fer en gueuse par 100 : cela semble prouver que ces mines en roche sont en effet plus abondantes en fer que les mines en grains. Cependant j’ai quel- que peine à le croire ; et ayant consulté les Mémoires de feu M. Jars, qui a fait en Suède des observations exactes sur les mines, j’ai vu que , selon lui , les plus riches ne donnent que 5o pour 100 de fonte en gueuse. J’ai fait venir des échantillons de plusieurs mines de Suède, de celles des Pyrénées et de celles d’Allevard en Dauphiné, que M. le comte de Baral a bien voulu me procurer, en m’envoyant la note ci-jointe 1 ; et les ayant comparées à la balance hydrostatique 1. « La terre d’Allevard est composée du bourg d’Allevard et de cinq paroisses, dans lesquelles il peut y avoir près de 6000 personnes toutes occu- pées , soit à l’exploitation des mines , soit à con- vertir les bois en charbon , et aux travaux des fourneaux , forges et martinets. La hauteur des montagnes est pleine de rameaux de mines de fer ; et elles y sont si abondantes, qu’elles fournissent des mines à toute la province de Dauphiné. Les qualités en sont si fines et si pures , qu’elles ont toujours été absolument nécessaires pour la fabri- que royale de canons de Saint-Gervais , d’où l’on vient les chercher à grands frais ; ces mines sont toutes répandues dans le cœur des roches ; où elles 4go avec nos mines en grains vérité, trouvées plus pesantes : mais cette épreuve n’est pas concluante , à cause de la cavité qui se trouve dans chaque grain de nos mines , dont on ne peut pas estimer au juste , ni même à peu près , le rapport avec le volume total du grain. Et l'épreuve chi- mique que M. Sage a faite, à ma prière, d’un morceau de mine de fer cubique, sem- blable à celui de Sibérie , que mes tireurs de mine ont trouvé dans le territoire de Montbard, semble confirmer mon opinion, M. Sage n’en ayant tiré que 5o pour xoo 1 ; cette mine est toute différente de nos mines en grains, le fer y étant contenu en masses de figure cubique, au lieu que tous nos grains sont toujours plus ou moins arrondis, et que, quand ils forment une masse , ils ne sont , pour ainsi dire , qu’agglutinés par un ciment terreux facile à diviser; au lieu que dans cette mine cubique, ainsi que dans toutes les autres vraies mines en roche , le fer est intimement uni avec les autres ma- tières qui composent leur niasse. J’aurois bien désiré faire l’épreuve en grand de cette mine cubique; mais on n’en a trouvé que quelques petits morceaux dispersés çà et là dans les fouilles des autres mines, et il m’a été impossible d en rassembler assez pour en faire l’essai dans mes fourneaux. Les essais en grand des différentes mines MINÉRAUX. INTRODUCTION, elles se sont, à la de fer sont plus difficiles, et demanden i forment des rameaux , et dans lesquelles elles se re- nouvellent par une végétation continuelle. « Le fourneau est situé dans le centre des bois et des mines: c’est l’eau qui souffle le feu, et les courans d’eau sont immenses. Il n’y a par consé- quent aucun soufflet; mais t’eau tombe dans des arbres creusés dans de grands tonneaux , y attire une quantité d’air immense, qui va par un conduit souffler le fourneau ; l’eau , plus pesante , s’enfuit par d’autres conduits. » i Cette mine est brune , fait feu avec le briquet, et est minéralisée par l’acide marin : on remarque dans sa fracture de petits points brillans de pyrites martiales; dans les fentes, on trouve des cubes de fer de deux lignes de diamètre , dont les surfaces sont striées ; les stries sont opposées suivant les faces. Ce caractère se remarque dans les mines de fer de Sibérie : cette mine est absolument semblable à celles de ce pays par la couleur, la configuration des cristaux et les minéralisations ; elle en diffère en ce qu’elle ne contient point d’or. Par la distillation au fourneau de réverbère j’ai retiré de 600 grains de cette mine vingt gouttes d’eau insipide et très-claire ; j’avois enduit d’huile détartré par défaillance le récipient, que j’avois adapté à la cornus; la distillation finie, je l’ai trouvé obscurci par des cristaux cubiques de sel fébrifuge de Sylvins. Le résidu de la distillation étoit d’un ronge pour- pre et avoit diminué de 10 livres par quintal. J’ai retiré de cette mine 52 livres de fer par quintal ; il étoit très-ductile. plus d’attention qu’on ne l’imagineroit. Lors ! qu’on veut fondre une nouvelle mine, e! ei ! comparer au juste le produit avec celui de mines dont on usoit précédemment, il fait prendre le temps où le fourneau est en plei exercice, et s’il consomme dix mesures d1 mine par charge , ne lui en donner que sep ou huit de la nouvelle mine : il m’est arriv d’avoir fort embarrassé mon fourneau, faut d’ avoir pris cette précaution, parce qu’un ‘ mine dont on n’a point encore usé pei 1 pci | exiger plus de charbon qu’une autre, o f 0 ■ ‘ s d r fil 1)0 plus ou moins de vent, plus ou moins d castine ; et, pour ne rien risquer, il fai commencer par une moindre quantité charger ainsi jusqu’à la première coulée. LI produit de celte première coulée est uii fonte mélangée environ par moitié de 1 mine ancienne et de la nouvelle; et ce n’es qu’à la seconde, et quelquefois même à 1 troisième coulée , que l’on a sans mélang la fonte produite par la nouvelle mine, £ la fusion s’en fait avec succès, cest-à-diri sans embarrasser le fourneau , et si les chan ges descendent promptement , on augmen tera la quantité de mine par demi-mesure non pas de charge en charge, mais seulei ment de coulée en coulée, jusqu’à ce qu’o: parvienne au point d’en mettre la plu grande quantité qu’on puisse employer san gâter sa fonie. C’est ici le point essentiel , e auquel tous les gens de cet art manquen par raison d’intérêt : comme ils 11e cher client qu’à faire la plus grande quantité d !!!1 fonte sans trop ‘ se soucier de la qualité* qu’ils paient même leur fondeur au millier et qu’ils en sont d’autant plus contens qu cet ouvrier coule plus de fonte loules le vingl-quatre heures , ils ont coutume d faire charger leur fourneau d’autant de min qu’il peut en supporter sans s’obstruer; ei par ce moyen, au lieu de 400 milliers d bonne foule qu’ils feroient en quatre mois ils en font, dans ce même espace de temps 5 ou 600 milliers. Cetle fonte, toujour très-cassante et très-blanche, ne peut pro duire que du fer très-médiocre ou mauvais mais comme le débit en esl plus assuré qui celui du bon fer qu’on ne peut pas donne) au même prix, et qu’il y a beaucoup plus { 1U| gagner, celte mauvaise pratique s’est intro- duite dans presque toutes les forges, et riei n’est plus rare que les fourneaux où l’oi fait de bonnes fontes. On verra dans le mé! moire suivant, où je rapporte les expé riences que j’ai faites au sujet des canons di la marine , combien les bonnes fontes son es , puisque celle même dont on sé sert ir les canons n’est pas, à beaucoup près , ’eluii ne aussi bonne qualité qü’on pourroit et l.ili on devroil la faire. iffiill en coule à peu près un quart de plus .j nr faire de la bonne fonie, que pour en re de la mauvaise : ce quart , que , dans plupart de nos provinces, on peut éva- r à io francs par millier, produit une dif- ence de i5 francs sur chaque millier de et ce bénéfice , qu’on ne fait qu’en mpant le public , c’est-à-dire en lui don- oju’Ihr de la mauvaise marchandise au lieu de en fournir de la bonne , se trouve encore ;menté de près du double par la facilité c laquelle ces mauvaises fontes coulent à ’finerie ; elles demandent beaucoup moins charbon , et encore moins de travail pour e converties en fer, de sorte qu’entre la icalion du bon fer et du mauvais fer, il trouve nécessairement, et tout au moins, e différence de francs ; et néanmoins îs le commerce, tel qu il est aujourd’hui depuis plusieurs années, on ne peut es- rer de vendre le bon fer que io francs Mïe lit au plus au dessus du mauvais ; il n’y a ‘l( ne que les gens qui veulent bien, pour , onneur de leur manufacture, perdre i5 fr. ' r millier de fer, c’est-à-dire environ oo écus par an, qui fassent de bon fer par i‘t idre, c’est à-dire gagner moins ; car, avec ’ l’intelligence et eu se donnant beaucoup peine, on peut encore trouver quelque 1 néfice en faisant du bon fer ; mais ce bé- liléij ualitf F nillil n fice est si médiocre, en comparaison du qu’on fait sur le fer commun, qu’on il être étonné qu’il y ait encore quelques Mf nufactures qui donnent du bon fer. En I endant qu’on réforme cet abus, suivons ijours notre objet; si I on n’écoute pas ma min lix aujourd’hui, quelque jour on y obéira consultant mes écrits, et l’on sera fâché Hoir attendu si long-temps à faire un bien on pourroil faire dès demain, en proscri- nt 1 entrée des fers étrangers dans le jaunie, ou en diminuant les droits de la arque des fers. Si l’on veut donc avoir, je ne dis pas dé fonte parfaite et telle qu il la faudroit jur les canons de marine , mais seulement la fonte assez bonne pour faire du fer Tint, moitié nerf et moitié grain, du fer, un mot, aussi bon et meilleur que les rs étrangers , on y parviendra ti ès-aisé- ut par les procédés que je viens d’indi- er. On a vu dans le quatrième mémoire, |SQ fi j’ai traité de la ténacité du fer, combien 1)11 ; y a de différence pour la force et pour la PARTIE EXPÉRIMENTALE. 49 1 durée entre le bon et le mauvais fer ; mais je me borne , dans celui-ci , à ce qui a rap- port à la fusion des mines et à leur produit en fonte. Pour m’assurer de leur qualité , et reconnoître en même temps si elle ne varie pas, mes garde-fourneaux ne manquent jamais de faire un petit enfoncement hori- zontal d’environ trois pouces de profondeur à l’extrémité antérieure du moule de la gueuse ; on casse le petit morceau lorsqu’on la sort du moule , et on l’enveloppe d’un morceau de papier portant le même numéro que celui de la gueuse. J’ai de chacun de mes fondages deux ou trois cents de ces morceaux numérotés, par lesquels je con- nois non seulement le grain et la couleur de mes fontes , mais aussi la différence de leur pesanteur spécifique ; et par là je suis en état de prononcer d’avance sur la qualité du fer que chaque gueuse produira ; car, quoi- que la mine soit la même et qu’on suive les mêmes procédés au fourneau , le change- ment de la température de l’air, le hausse- ment ou le baissement des eaux, le jeu des soufflets plus ou moins soutenu , les retar- demens causés par les glaces ou par quelque accident aux roues, aux harnois ou à la tuyère et au creuset du fourneau, rendent la fonte assez différente d’elle-même pour qu’on soit forcé d’en faire un choix, si l’on veut avoir du fer toujours de même qualité. E11 général , il faut , pour qu’il soit de cette bonne qualité, que la couleur de la fonte soit d’un gris un peu brun , que le grain en soit presque aussi fin que celui de l’acier commun, que le poids spécifique soit d’en- viron 5o4 ou 5o5 livres par pied cube , et qu'en même temps elle soit d’une si grande résistance qu’on ne puisse casser les gueuses avec la masse. Tout le monde sait que quand on com- mence un fondage, on ne met d’abord qu’une petite quantité de mine, un sixième, un cinquième, et tout au plus un quart de la quantité qu’on mettra dans la suite, et qu’on augmente peu à peu cette première quantité pendant les premiers jours , parce qu il en faut au moins quinze pour que le fond du fourneau soit échauffé. On donne aussi assez peu de vent dans ces commen- cemens , pour ne pas détruire le creuset et les étalages du fourneau en leur faisant subir une chaleur trop vive et trop subite. Il ne faut pas compter sur la qualité des fontes que l’on tire pendant ces premiers quinze ou vingt jours ; comme le fourneau n’est .pas encore réglé, le produit en varie suivant les différentes circonstances : mais lorsque le 49* MINÉRAUX. INTRODUCTION. fourneau a acquis le degré de chaleur suffi- sant, il faut bien examiner la fonte, et s’en tenir à la quantité de mine qui donne la meilleure ; une mesure sur dix suffit sou- vent pour en changer la qualité. Ainsi l’on doit toujours se tenir au dessous de ce que l’on pourroit fondre avec la même quantité de charbon, qui ne doit jamais varier si l’on conduit bien son fourneau. Mais je ré- serve les détails de cette conduite du four- neau , et tout ce qui regarde sa forme et sa construction , pour l’article où je traiterai du fer en particulier, dans l’histoire des mi- néraux , et je me bornerai ici aux choses les plus générales et les plus essentielles de la fusion des mines. Le fer étant, comme je l’ai dit, toujours de même nature dans toutes les mines en grains , on sera donc sûr, en les nettoyant et en les traitant comme je viens de le dire , d’avoir toujours de la fonte d’une bonne et même qualité; on le reconnoîtra non seule- ment à la couleur, à la finesse du grain, à la pesanteur spécifique, mais encore à la téna- cité de la matière ; la mauvaise fonte est très-cassante ; et, si l’on veut en faire des plaques minces et des côtés de cheminée, le seul coup de l’air les fait fendre au moment que ces pièces commencent à se refroidir, au lieu que la bonne fonte ne casse jamais, quelque mince qu’elle soit. On peut même reconnoitre au son la bonne ou la mauvaise qualité de la fonte : celle qui sonne le mieux est toujours la plus mauvaise ; et, lorsqu’on veut en faire des cloches, il faut, pour qu’elles résistent à la percussion du battant, leur donner plus d’épaisseur qu’aux cloches de bronze, et choisir de préférence une mauvaise fonte , car la bonne sonneroit mal. Au reste , la fonte de fer n’est point en- core un métal ; ce n’est qu’une matière mêlée de fer et de verre, qui est bonne ou mauvaise, suivant la quantité dominante de l’un ou de l’autre. Dans toutes les fontes noires , brunes et grises , dont le grain est fin et serré , il y a beaucoup plus de fer que de verre ou d’autre matière hétérogène. Dans toutes les fontes blanches, où l’on voit plutôt des lames et des écailles que des grains, le verre est peut-être plus abondant que le fer; c’est par cette raison qu’elles sont plus légères et très-cassantes : le qui en provient conserve les mêmes quali On peut , à la vérité , corriger un peu ci mauvaise qualité de la fonte par la man de la traiter à raffinerie ; mais l’art du n teleur est, comme celui du fondeur, i pauvre petit métier, dont il n’y a que maîtres de forges ignorans qui soient duj Jamais la mauvaise fonte ne peut prodi d’aussi bon fer que la bonne; jamaii marteleur ne peut réparer pleinement ce < le fondeur a gâté. Cette manière de fondre la mine de et de la faire couler en gueuses , c’est-à-c en gros lingots de fonte, quoique la j générale, n’est peut-être pas la meilleure la moins dispendieuse: on a vu par le sultat des expériences que j’ai citées dansi mémoire, qu’on peut faire d’excellent 1 et même de très-bon acier, sans les faf passer par l’état de la fonte. Dans nos pj vinces voisines des Pyrénées, en Espagr; en Italie, en Styrie et dans quelques auti endroits, on tire immédiatement le feri la mine sans le faire couler en fonte. ' fond ou plutôt on ramollit la mine sans fcf J" dant, c’est-à-dire sans castine, dans de j tits fourneaux dont je parlerai dans la suin ,e et on en tire des loupes ou des masses s “ fer déjà pur, qui n’a point passé par l’é< de la fonte , qui s’est formé par une den fusion, par une espèce de coagulation toutes les parties ferrugineuses de la min Ce fer fait par coagulation est certaineme le meilleur de tous : on pourroit l’appet fer à 24 karats : car , au sortir du foc neau, il est déjà presque aussi pur que lui de la fonte qu’on a purifiée par de chaudes au feu de l’affinerie. Je crois do cette pratique excellente; je suis même p( suadé que c’est la seule manière de tiii] immédiatement de l’acier de toutes les ni lies , comme je l’ai fait dans mes fournea1 1 de 14 pieds de hauteur. Mais n’ayant fi5 exécuter que l’été dernier 1772 les pet fourneaux des Pyrénées, d’après un M moire envoyé à l’Académie des Sciences, j ai trouvé des difficultés qui m’ont arrêté, me forcent à renvoyer à un autre inémoi tout ce qui a rapport à cette manière < fondre les mines de fer. PARTIE EXPÉRIMENTALE. i%«WVk%AJWW’WV%^vvwxv/vw%'^v^v%v%.-v%.-v^vvjv*v% \w»>tn^vw\v%ti uttwMWiw^v w-iti\ mine d$ c’est-àj ique neilletir i par le éesdai cellent la les f| a dos Espaj pues aul Ile fa i vite, i wii ns île is Ih sui 4g3 w(ej;|| œes qui Upea irlam l’art di foodetg ]) a qi ioientdi M proi Les canons de la marine sont de fonte de en France comme en Angleterre, en llande et partout ailleurs. Deux motifs pu donner également naissance à cet ge. Le premier est celui de l’économie: canon de fer coulé coûte beaucoup moins un canon de fer battu, et encore beau- ûp moins qu’un canon de bronze ; et cela il a peut-être suffi pour les faire préférer, uitant que le second motif vient à l’appui premier. On prétend, et je suis très- ^rlé à le croire , que les canons de bronze, nt quelques-uns de nos vaisseaux de pa- de sont armés, rendent dans l’instant de xplosion un son si violent, qu’il en résulte ins l’oreille de tous les habitans du vaisseau tintement assourdissant qui leur feroit rdre en peu de temps le sens de l’ouïe, n assure, d’autre côté, que les canons de r battu , sur lesquels on pourroit , par l’é- j ,1 irgne de la matière, regagner une partie ja(|. 1 îs frais de la fabrication , ne doivent point 1 pitre employés sur les vaisseaux, par cette 2 ra!l tison même de leur légèreté qui paroîtroit levoir les faire préférer; l’explosion les fait ,JJ, luter dans les sabords, où l’on ne peut , 01 it-on, les retenir invinciblement, ni même llf,f ssez pour les diriger à coup sûr. Si cet in- 11 r onvénient n’est pas réel , ou si l’on pouvoit parer, nul doute que les canons de fer jjUprgé ne dussent être préférés à ceux de fer oulé : ils auroient moitié plus de légèreté t plus du double de résistance. Le maré- chal de Vauban en avoit fait fabriquer de 1 ,s ^ès-beaux dont il restoit encore , ces années s peli entières, quelques tronçons à la manufac- ure de Charleville ’. Le travail n’en seroit ière,d DIXIEME MEMOIRE. Observations et expériences faites dans la vue (T améliorer les canons de la marine. pas plus difficile que celui des ancres ; et une manufacture aussi bien montée pour cet « Ceux de 8 , io pouces ; « Ceux de i a , i pied ; « Ceux de 24 livres , i4 pouces; « Ceux de 36 livres, t6 pouces i /■>. « Ces proportions sont plutôt trop fortes que trop foibles : peut-être pourra-t-on les réduire à 6 pouces 1/2 pour les canons de 4 ; ceux de 8 livres, à 8 pouces 1/2 ; ceux de 12 livres, à 9 pouces i/a ; ceux de 24, à 12 pouces ; et ceux de 36, à 14 pouces. « Les longueurs pour les canons de 4 seront de 5 pieds 1/2 ; ceux de 8, de 7 pieds de longueur ; ceux de 12 livres, 7 pieds 9 poüces de longueur; ceux de 24, 8 pieds 9 pouces; ceux de 36, 9 pieds 2 pouces de longueur. « L'on pourroit même diminuer ces proportions de longueur assez considérablement sans que le ser- vice en souffrît, c’est-à-dire faire les canons de 4 de 5 pieds de longueur seulement; ceux de 8 livres , de 6 pieds 8 pouces de longueur; ceux de 12 livres , à 7 pieds de longueur; ceux de 24 , à 7 pieds ro pouces; et ceux de 36, à 8 pieds, et peut-être même encore au dessous. « Or il ne paroît pas bien difficile , i° de faire des canons de 4 livres qui n’auroient que 5 pieds de longueur sur 6 pouces 1/2 d’épaisseur dans leur plus grand diamètre ; il suffiroit pour cela de souder ensemble quatre barres de 3 pouces forts en carré , et d’en former un cylindre massif de 6 pouces 1/2 de diamètre sur 5 pieds de longueur ; et comme cela ne seroit pas praticable dans les chaufferies ordinaires, ou du moins que cela de- viendroit très-difficile , il faudroit établir des four- neaux de réverbère , où l’on pourroit chauffer ces barres dans toute leur longueur pour les souder ensuite ensemble, sans être obligé de les remettre plusieurs fois au feu. Ce cylindre une fois formé , il sera facile de le forer et tourner; car le fer battu obéit bien plus aisément au foret que le fer coulé. « Pour les canons de 8 livres qui ont 6 pieds 8 pouces de longueur sur 8 pouces 1/2 d’épaisseur, il faudroit souder ensemble neuf barres de 3 pouces foibles en carré chacune, en les faisant toutes chauffer ensemble au même fourneau de réverbère, pour en faire un cylindre plein de 8 pouces i/a de diamètre. « Pour les canons de 13 livres de balles qui doi- vent avoir 10 pouces 1/2 d’épaisseur, 011 pourra les faire avec neuf barres de 3 pouces 1/2 carrées , que l’on soudera toutes ensemble par les mêmes moyens. « Et pour les canons de 24 , avec seize barres de 3 pouces en carré. « Comme l’exécution de cette espèce d’ouvrage Mi ICH,j N^i,1 ! 1. Une personne très-versée dans la connoissance lemoil le l’art des forges m'a donné la note suivante : Il me paroît que l’on peut faire des canons de er battu, qui seroient beaucoup plus sûrs et plus égers que les canons de fer coulé , et voici les pro- >ortions sur lesquelles il faudroit en tenter les xpériences : « Les canons de fer battu, de 4 livres de balles, fmront 7 pouces 1/2 d’épaisseur à leur plus grand diamètre ; 494 objet que l’est celle de M. de La Chaussade pour les ancres », pourroit être d’une tres- grande utilité. Quoi qu’il en soit , comme ce n’est pas l’état actuel des choses , nos observations ne porteront que sur les canons de fer coulé. On s’est beaucoup plaint dans ces derniers temps de leur peu de résistance : malgré la rigueur des épreuves , quelques-uns ont crevé sur nos vaisseaux ; accident terrible , et qui n’arrive jamais sans grand dommage et perte de plusieurs hommes. Le ministère, voulant remédier à ce mal, ou plutôt le prévenir pour la suite, informé que je faisois à mes forges des expériences sur la qualité de la fonte, me demanda mes conseils en 176S, et m’invita à travailler sur ce sujet impor- tant. Je m’y livrai avec zèle , et , de concert avec M. le vicomte de Morogues, homme très-éclairé , je donnai, dans ce temps et dans les deux années suivantes, quelques observations au ministre , avec les expé- riences faites et celles qui restoient à faire pour perfectionner les canons. J’en ignore aujourd’hui le résultat et le succès ; le mi- nistre de la marine ayant changé, je n’ai plus entendu parler ni d’expériences ni de canons. Mais cela ne doit pas m’empêcher de donner, sans qu’on me le demande , les choses utiles que j’ai pu trouver en m'occu- pant pendant deux à trois ans de ce travail; et c’est ce qui fera le sujet de ce mémoire, qui tient de si près à celui où j’ai traité de devient beaucoup plus difficile pour les gros canons que pour les petits, il sera juste et nécessaire de les payer à proportion plus cher. « Le prix du fer battu est ordinairement de deux tiers plus haut que celui du fer coulé. Si l’on paie ao livres le quintal des canons de fer coulé , il fau- dra donc payer ceux-ci 60 livres le quintal; mais comme ils seront beaucoup plus minces que ceux de fer coulé, je crois qu’il seroit possible de les faire fabriquer à 4° livres le quintal, et peut-être au dessous. « Mais quand même ils coûteroient 4» livres , il y auroit encore beaucoup à gagner : i° pour la sûreté du service , car ces canons ne creveroient pas; ou s’ils venoient à crever, ils n’éclateroient jamais, et ne feroient que se fendre, ce qui ne causeroit aucun malheur. « 2° Ils résisteroient beaucoup plus à la rouille, et dureroient pendant des siècles , ce qui est un avantage très-considérable. « 3° Comme on les foreroit aisément, la direction de l’àme en seroit parfaite. « 4° Comme la matière en est homogène partout, il n’y auroit jamais ni cavités ni chambres. « 5° Enfin , comme ils seroient beaucoup plus lé- gers, ils chargeroient beaucoup moins, tant sur mer que sur terre, et seroient plus aisés à man- œuvrer. » 1. A Guérigny, près de Nevers. MINÉRAUX. INTRODUCTION. la fusion des mines de fer, qu’on peut 1 regarder comme une suile. Les canons se fondent en situation p pendiculaire, dans des moules de plusiei pieds de profondeur, la culasse au fond la bouche en haut : comme il faut plusien milliers de matière en fusion pour faire gros canon plein et chargé de la masse c doit le comprimer à sa partie supérieui on étoit dans le préjugé qu’il falloii deux même trois fourneaux pour fondre du gi canon. Comme les plus fortes gueuses q l’on coule dans les plus grands fourneaux sont que de 2Ôoo ou tout au plus 3ooo vres , et que la matière en fusion ne séjour jamais que douze ou quinze heures dans creuset du fourneau , on imaginoit que double ou le triple de cette quantité de m tière en fusion , qu’on seroit obligé de la ser pendant trente-six ou quarante heur dans le creuset avant de la couler , non set te lement pouvoit détruire le creuset, ma; même le fourneau, par son bouillonnemeü et son explosion; au moyen de quoi 011 avo pris le parti qui paroissoit le plus prudent et on couloit les gros canons, en tirant e même temps ou successivement la foute d deux ou trois fourneaux, placés de manièi que les trois ruisseaux de fonte pouvoiei arriver en même temps dans le moule. Il ne faut pas beaucoup de réflexion potii sentir que cette pratique est mauvaise; est impossible que la fonte de chacun d ces fourneaux soit au même degré de cha leur , de pureté , de fluidité ; par conséquent le canon se trouve composé de deux ou troi) matières différentes , en sorte que plusieurs de ses parties, et souvent un côté tout en tier, se trouvent nécessairement d’une ma tière moins bonne et plus foible que li reste; ce qui est le plus grand de tous le inconvéniens en fait de résistance, puisque l’effort de la poudre agissant également de tous côtés 11e manque jamais de se faire joui par le plus foible. Je voulus donc essaye! et voir en effet s’il y avoit quelque dangei à tenir pendant plus de temps qu’on ne Ici1 fait ordinairement une plus grande quan- tité de matière en fusion : j’attendis pour cela que le creuset de mon fourneau, qui avoit dix-huit pouces de largeur sur 4 pieds de longueur et 18 pouces de hauteur, fût encore élargi par l’action du feu , comme cela arrive toujours vers la fin du fondage ; j’y laissai amasser de la fonte pendant trente-six heures; il n’y eut ni explosion ni autre bouillonnement que ceux qui arrivent quel- quefois quand il tombe des matières crues Mon au fuQ tpliiii u' faifl ma® ipérie ns le creuset : je fis couler après les trente- : heures, et l’on eut trois gueuses pe- nt ensemble 4600 livres d’une très-bonne nte. Par une seconde expérience , j’ai gardé la nte pendant quarante-huit heures sans au- n inconvénient ; ce long séjour ne fait que purifier davantage, et par conséquent en minuerle volume en augmentant la masse : 11 toi >mme la lonle contient une grande quan- é de parties hétérogènes, dont les unes se ulent, et les autres se converlissent en ’rè , l’un des plus grands moyens de la purer est de la laisser séjourner au four- au. M’étant donc bien assuré que le préjugé la nécessité de deux ou trois fourneaux fdet oit très-mal fondé, je proposai de réduire 11 un seul les fourneaux de Ruelle en An- umois 1 , où l’on fond nos gros canons : 3 conseil fut suivi et exécuté par ordre du m linistre; on fondit sans inconvénient et avec Mit||)ut succès, à un seul fourneau, des canons vingt-qualre ; et je ne sais si l’on n’a pas udt» >ndu depuis des canons de trente-six , car j«(|ai tout lieu de présumer qu’on réussiroit ijalement. Ce premier point une fois ob- Qnu, je cherchai s’il n’y avoit pas encore autres causes qui pouvoient contribuer à x. Voici l’extrait de cette proposition faite au iainistre ; Comme les canons de gros calibre, tels que ceux trente-six et de vingt - quatre , supposent un rand volume de fer en fusion , on se sert ordinai- OCI ement de trois ou tout au moins de deux fourneaux l|,j mur les couler. La mine fondue dans chacun de ■ j:es fourneaux arrive dans le moule par autant de J uisseaux particuliers. Or cette pratique me paroît tül ivoir les plus grands inconvéniens ; car il est cer- g ain que chacun de ces fourneaux donne une fonte e j le différente espèce, en sorte que leur mélange ne ■ >eut se faire d’une manière intime, ni même en ap- ç xrocher. Pour le voir clairement, ne supposons que (|UI pux fourneaux , et que la fonte de l’un arrive à df |lroite , et la fonte de l’autre arrive à gauche dans jol Ie moule du canon : il est certain que l’une de ces peux fontes étant ou plus pesante, ou plus légère, T pu plus chaude, ou plus froide, etc., que î’au- ]}Jtl}:re, elles ne se mêleront pas, et que par consé- i'l( quent Lun des côtés du canon sera plus dur que J l’autre ; que dès lors il résistera moins d'un côté que de l’autre, et qu’ayant le défaut d’être corn- , Posé de deux matières différentes , le ressort de ces [|lll parties, ainsi que leur cohérence, ne sera pas égal, ci et quo par conséquent ils résisteront moins que fjji «eux qui seroienl faits d’une matière homogène. IL , n’est pas moins certain que si l’on veut forer ces 1 jjcanons, le foret, trouvant plus de résistance d’un ÎBIcôté que de l’autre, se détournera de la perpendi- culaire du côté le plus tendre, et que la direction de l’intérieur du canon prendra de l’obliquité, etc. Il me paroit donc qu’il faudroit tâcher de fondre les canons de fer coulé avec un seul fourneau, et je crois la chose très-possible. PARTIE EXPÉRIMENTALE. 495 la fragilité de nos canons; j*en trouvai en effet qui y contribuent plus encore que l’in- égalité de l’étoffe dont on les composoit en les coulait 1 à deux ou trois fourneaux. La première de ces causes est le mauvais usage qui s’est établi depuis plus de vingt ans, de faire tourner la surface extérieurê des canons ; ce qui les rend plus agréables à la vue. Il en est cependant du canon comme du soldat, il vaut mieux qu’il soit robuste qu’élégant; et ces canons tournés, polis et guillochés , ne dévoient point en imposer aux yeux des braves officiers de notre ma- rine ; car il me semble qu on peut démon- trer qu’ils sont non seulement beaucoup plus foibles , mais aussi d’uue bien moindre du- rée. Pour peu qu’on soit versé dans la con- noissance de la fusion des mines de fer, on aura remarqué en coulant des enclumes , des boulets, et à plus forte raison des canons, que la force centrifuge de la chaleur pousse à la circonférence la partie la plus massive et la plus pure de la fonte ; il ne reste au centre que ce qu’il y a de plus mauvais , et souvent même il s’y forme une cavité : sur un nombre de boulets que l’on fera casser4 on en trouvera plus de moitié qui auront une cavité dans le centre, et dans tous les autres une matière plus poreuse que lé reste du boulet. On remarquera de plus qu'il y a plusieurs rayons qui tendent du centre à la circonférence, et que la matière est plus compacte et de meil eure qualité à me- sure quelle est plus éloignée du centre. On observera encore que l’écorce du boulet , de l’enclume, ou du canon, est beaucoup plus dure que l’intérieur; cette dureté plys grande provient de la trempe que l’humi- dité du moule donne à l’extérieur de la pièce, et elle pénètre jusqu’à trois lignes d’épais- seur dans les petites pièces, et à une ligne et demie dans les grosses. C'est en quoi con- siste la plus grande force du canon : car cette couche extérieure réunit les. extrémi- tés de tous les rayons divergens dom je viens de parler, qui sont les lignes par où se fera la rupture ; elle sert de. cuirasse au canon , et elle en est la partie la plu pure, et, par sa grande dureté, elle contient toutes les parties intérieures qui sont plus molles , et céderoient sans cela plus aisément à la force de l’explosion. Or que fait-on lorsque l’on tourne les canons ? on commence par enle- ver au ciseau , poussé par le marteau , toute celte surface extérieure que les coireaux du tour ne pourroient entamer; on pénètre dans l’extérieur de la pièce jusqu’au point où elle se trou\e assez douce pour se laisser 496 MINERAUX. INTRODUCTION. tourner, et on lui enlève en même temps, par cette opération, peut-être un quart de sa force. Cette couche extérieure, que l’on a si grand tort d’enlever, est en même temps la cuirasse et la sauvegarde du canon; non seulement elle lui donne toute la force de résistance qu’il doit avoir, mais elle le dé- fend encore de la rouille qui ronge en peu de temps ces canons tournés : on a beau les lustrer avec de l’huile, les peindre, ou les polir; comme la matière de la sur- face extérieure est aussi tendre que tout le reste , la rouille y mord avec mille fois plus d’avantage que sur ceux dont la surface est garantie par la trempe. Lorsque je fus donc convaincu, par mes propres observa- tions, du préjudice que portoit à nos ca- nons cette mauvaise pratique, je donnai au ministre mon avis motivé pour qu’elle fût proscrite; mais je ne crois pas qu'on ait suivi cet avis, parce qu’il s’est trouvé plu- sieurs personnes très-éclairées d ailleurs , et nommément M. de Morogues, qui ont pensé différemment. Leur opinion , si contraire à la mienne, est fondée sur ce que la trempe rend le fer plus cassant , et dès lors ils re- gardent la couche extérieure comme la plus foible et la moins résistante de toutes les par- ties de la pièce , et concluent qu’on ne lui fait pas grand tort de l’enlever ; ils ajoutent que, si l’on veut même remédier à ce tort, il n’y a qu’à donner aux canons quelques lignes d’épaisseur de plus. J’avoue que je n’ai pu me rendre à ces raisons. Il faut distinguer dans la trempe, comme dans toute autre chose, plusieurs états et même plusieurs nuances. Le fer et l’acier chauffés à blanc et trempés subite- ment dans une eau très-froide deviennent très-cassans ; trempés dans une eau moins froide , ils sont beaucoup moins cassans ; et dans de l’eau chaude, la trempe ne leur donne aucune fragilité sensible. J’ai sur cela des expériences qui me paroissent décisives. Pendant l’été dernier 177a , j’ai fait tremper dans l’eau de la rivière, qui étoit assez chaude pour s’y baigner , toutes les barres de fer qu’on forgeoit à un des feux de ma forge ; et comparant ce fer avec celui qui n’étoit pas trempé, la différence du grain n’en étoit pas sensible, non plus que celle de leur résistance à la masse lorsqu’on les ras- soit. Mais ce même fer travaillé de la même façon par les mêmes ouvriei's , et trempé cet hiver dans l’eau de la même riviere qui étoit presque glacée partout , est non seulement devenu fragile, mais a perdu en même temps tout son nerf , en sorte qu’on auroit cru qt| ce n’étoit plus le même fer. Or la trem| qui se fait à la surface du canon n’est a surément pas une trempe à froid ; elle n’e produite que par la petite humidité qui sot du moule déjà bien séché : il ne faut don | pas en raisonner connue d une autre tremj j ( à froid, ni en conclure qu’elle rend cet couche extérieure beaucoup plus cassa» 1 | qu’elle ne le seroit sans cela. Je supprin j plusieurs autres raisons que je pourrois a, , léguer, parce que la chose me pareil assn pût employer pour s’assurer de leur ré- stance. Le canon ne peut subir le trop oient effort des épreuves qu’en y cédant , liant que la cohérence de la matière le îrmet, sans se rompre; et, comme il s’en ut bien que cettê matière de la fonte soit ressort parfait, les parties séparées parle fonte 'Op grand effort ne peuvent se rapprocher couli |t se rétablir comme elles étoient d’abord, (jette cohésion des parties intégrantes de la If. jrnte étant donc fort diminuée par le grand 1res., jffort des épreuves, il n’est pas étonnant ue le canon crève ensuite à la charge or- étaj jiinàire; c’est un effet très-simple qui dérive uire ’une cause tout aussi simple. Si le premier m'à |pup d’épreuve écarte les parties d’une moi- é ou d’un tiers de plus que le coup ordi- naire , elles se rétabliront , se réuniront de loins dans la même proportion; car, quoi- ue leur cohérence n’ait pas été détruite , uisque la pièce a résisté, il n’én est pas iiôïhs vrai que cette Cohérence n’est pas si rande qu’elle étoit auparavant, et qu’elle a iminué dans la même raison que diminue à force d’un ressort imparfait ; dès lors un econd ou un troisième coup d’épreuve fera dater les pièces qui auront résisté au pre- nier, et celles qui auront subi les trois preuves sans se rompre ne sont guère plus ûres que les autres; après avoir subi trois ois le même mal , c’est-à-dire le trop grand cartement de leurs parties intégrantes , lies en sont nécessairement devenues bien lins foibles, ét pourront par conséquent ;éder à l’effort de la charge ordinaire. Un moyen bien plus sûr, bien simple, t mille fois moins coûteux , pour s’assurer le la résistance dés canons, seroit d’en faire aeser la fonte à la balance hydrostatique : sn coulant le eanon , i’on mettroit à part un morceau delà fonte; lorsqu'il seroit refroidi, on le pèseroit dans l’air et dans l’eau ; et si a fonte ne pesoit pas au moins 520 livres le pied cube , on rebuter oit la pièce comme non recevable : l’on épargnerait la poudre , la peine des hommes , et on banniroit la crainte très- bien fondée de voir crever les PARTIE EXPÉRIMENTALE. 499 pièces souvent après l’épreuve. Étant une fois sûr de la densité de la matière , oh se- roit également assuré de sa résistance ; et si nos canons étoient faits avec de la fente pe- sant 520 livres le pied cube , et qu’on ne s’avisât pas de les tourner ni de toucher à leur surface extérieure , j’ose assurer qu’ils résisteroient et dureroient autant qu’on doit se le promettre. J’avoue que, par ce moyen, peut-être trop simple pour être adopté , on ne peut pas savoir si la pièce est saine , s’il n’y a nas dans l’inlérieur de la matière des défauts , des soufflures , des cavités ; mais connoissant une fois a bonté de la fonte, il suffiroit , pour s’assurer du reste, de faire éprouver une seule fois, et à la charge ordinaire, les canons nouvellement fondus , et l’on seroit beaucoup plus sûr de leur ré- sistance que de celle de ceux qui ont subi des épreuves violentes. Plusieurs personnes ont donné des pro- jets pour faire de meilleurs canons : les uns ont proposé de les doubler de cuivre , d’au- tres de fer battu , d’autres de souder ce fer battu avec la fonte. Tout cela peut être bon à certains égards ; et dans un art dont l’ob- jet est aussi important et la pratique aussi difficile, les efforts doivent être accueillis, et les moindres découvertes récompensées. Je ne ferai point ici d’observations sur les canons de M. Feutry, qui ne laissent pas de demander beaucoup d’art dans leur exécu- tion ; je ne parlerai pas non plus des autres tentatives , à l’exception de celle de M. de Sou ville, qui m’a paru la plus ingénieuse, et qu’il a bien voulu me communiquer par sa lettre datée d’Angoulême le 6 avril 1771, dont je donne ici l’extrait 1 ; mais je dirai i, « Les canons fabriqués avec dés spira'es ont opposé la plus grande résistance à la plus forte charge de poudre, et à la manière la plus dange- reuse de les charger. Il ne manque à cette mé- thode, pour être bonne, que d’empêcher qu'il ne se forme des chambres dans ces bouches à feu; cet incon vénient , il est vrai , m’obligeroit à l’aban- donner si je n'y parvenois; mais pourquoi ne pas le tenter? Beaucoup de personnes ont proposé de faire des canons avec des doublures ou des enve- loppes de fer forgé ; mais ces doublures et ces en- veloppes ont toujours été un assemblage de barres inflexibles, que leur forme, leur position et leur roideur rendent inutiles. La spirale n’a pas les mêmes défauts ; elle se prête à toutes les formes que prend la matière ; elle s’affaisse avec elle dans le moule : son fer ne perd ni sa ductilité ni son ressort; dans La commotion du tir, l’effort est dis- tribué sur toute son étendue. Elle enveloppe pres- que toute l’épaisseur du canon , et dès lors s’oppose à sa rupture avec une résistance de près de 3o,ooo livres de force. Si îa'onte éprouve une plus grande dilatation que le fer elle résiste avec toute cette force , si cette dilatation est moindre , la spirale ne 3a. I al 5oo MINÉRAUX. INTRODUCTION. seulement que la soudure du cuivre avec le fer rend celui-ci beaucoup plus aigre; que quand on soude de la fonte avec elle- même par le moyen du soufre , on la change de nature, et que la ligne de jonction des deux parties soudées n’est plus de la fonte de fer, mais de la pyrite très-cassante ; et qu’en général le soufre est un intermède qu’on ne doit jamais employer lorsqu’on veut souder du fer sans en altérer la qua- lité : je ne donne ceci que pour avis à ceux qui pourroient prendre cette voie comme la plus sûre et la plus aisée pour rendre le fer fusible et en faire de grosses pièces. Si l’on conserve l’usage de forer les ca- nons, et qu’on les coule de bonne fonte dure , il faudra en revenir aux machines à forer de M. le marquis de Montalembert , celles de M. Maritz n’étant bonnes que pour le bronze ou la fonte de fer tendre. M. de Montalembert est encore un des hommes de France qui entend le mieux cet art de la fonderie des canons , et j’ai toujours gémi que son zèle, éclairé de toutes les connois- sances nécessaires en ce genre , n’ait abouti qu’au détriment de sa fortune. Comme je vis éloigné de lui , j’écris ce mémoire sans le lui communiquer : mais je serai plus flatté de son approbation que de celle de qui que ce soit; car je ne connois personne qui entende mieux ce dont il est ici ques- tion. Si l’on mettoit en masse, dans ce royaume, les trésors de lumière que l’on jette à l’écart, ou qu’on a l’air de dédaigner, nous serions bientôt la nation la plus floris- sante et le peuple le plus riche. Par exem- ple, il est le premier qui ait conseillé de reconnoitre la résistance de la fonte par sa pesanteur spécifique ; il a aussi cherché à perfectionner l’art de la moulerie en sable des canons de fonte de fer, et cet art est perdu depuis qu’on a imaginé de les tour- ner. Avec les moules en terre dont on se reçoit ,que le mouvement qui lui est communiqué. Ainsi , dans l’un et l’autre cas , l’effet est le même. L’assemblage des barres, au contraire, ne résiste que par les cercles qui les contiennent. Lorsqu’on en a revêtu l’âme des canons , on n’a pas aug- menté la résistance de la fonte; sa tendance à se rompre a été la même; et lorsqu’on a enveloppé son épaisseur, les cercles n’ont pu soutenir égale- ment l’effort qui se partage sur tout le développe- ment de la spirale. Les barres d’ailleurs s’opposent aux vibrations des cercles. La spirale que j’ai mise dans un canon de six, foré et. éprouvé au calibre de douze , ne pesoit que 83 livres ; elie avoit 2 pouces de largeur et 4 lignes d’épaisseur. La distance d’une hélice à l’autre étoit aussi de 2 pouces ; elle étoit roulée à chaud sur un mandrin de fer. » servoil auparavant, la surface des canon étoit toujours chargée d’aspérités et de ru gosités; M. de Montalembert avoit trouv le moyen de faire des moules en sable qu donnoient à la surface du canon tout le liss et même le luisant qu’on pouvoil désirer Ceux qui connoissent les arts en grand sen tiront bien les difficultés qu’il a fallu sur monter pour en venir à bout , et les peine qu’il a fallu prendre pour former des ou vriers capables d’exécuter ces moules, aux quels ayant substitué le mauvais usage di tour, on a perdu un art excellent poui adopter une pratique funeste i. L’outil à langue de carpe perce la fonte di fer avec une vitesse presque double de celle di l’outil à cylindre. 11 n’est point nécessaire , avec c< premier outil , de seringuer de l’eau dans la pièce comme il est d’usage de le faire en employant ht second, qui s’échauffe beaucoup par son frottemer.'i très-considérable. L’outil à cylindre seroit détremp» en peu de temps sans cette précaution : elle es!' même souvent insuffisante ; dès que la fonte st trouve plus compacte et plus dure , cet outil n«i peut la forer. La limaille sort naturellement avec l’outil à langue de carpe, tandis qu’avee l’outil à cylindre il faut employer continuellement un cro- chet pour la tirer ; ce qui ne peut se faire assez exac- tement pour qu'il n’en reste pas entre l’outil et la j pièce , ce qui la gêne et augmente encore son frot- j tentent. Il faudroit s’attacher à perfectionner la moulerie. Cette opération est difficile, mais elle n’est pas impossible à quelqu’un d’intelligent. Plusieurs choses sont absolument nécessaires pour y réussir: i° des mouleries plus étendues, pour pouvoir y placer plus de chantiers et y faire plus de moules à la fais , afin qu’ils pussent sécher plus lente- ment:; 2° une grande fosse pour les recuire debout, ]e| ainsi que cela se pratique pour les canons de cui- S vre, afin d’éviter que le moule ne soit arqué, et j par conséquent le canon ; 3° un petit chariot à j j( quatre roues fort basses avec des montans assez j élevés pour y suspendre le moule recuit , et le ■! (1 transporter de la moulerie à la cuve du fourneau , i J comme on transporte un lustre ; 4° un juste mé- ! ]| lange d’une terre grasse et d’une terre sableuse , j . tel qu’il le faut pour qu’au recuit le moule ne se I ' fende pas de mille et mille fentes qui rendent le II canon défectueux , et surtout pour que cette terre , | f avec cette qualité de ne pas se fendre , puisse con- j : server l’avantage de s’écaler, c’est-à-dire de se dé- L tacher du canon quand on vient à le nettoyer. Plus j la terre est grasse, mieux elle s’étale, et plus elle j1 se fend; plus elle est maigre ou sableuse, moins J elle se fend, mais moins elle s’écale. Il y a des j moules de cette terre qui se tiennent si fort attachés j au canon, qu’on ne peut, avec le marteau et le ciseau , en emporter que la plus grosse partie ; ces sortes de canons restent encore plus vilains que ceux cicatrisés par les fentes innombrables des moules de terre grasse. Ce mélange de terre est donc très-difficile; il demande beaucoup d’atten- tion „ d’expérience : et , ce qu’il y a de fâcheux , c’est que les expériences dans ce genre, faites pour les petits calibres , ne concluent rien pour les gros. Il n’est jamais difficile de faire écaler de petits canons avec un mélange sableux ; mais ce même PARTIE EXPÉRIMENTALE» 5oi I de it aille 'I lel| dès and illu 5 CT des s s, au) sagei it jlOI >emaç itilel wlene. Une, attention très-nécessaire lorsque l’on troj :oule du canon, c’est d’empêcher les écumes ui surmontent la fonte de tomber avec elle ans le moule. Plus la fonte est légère, et jgj'l plus elle fait d’écumes ; et l’on pourroit ju- ll)(jS( er, à l’inspection même de la coulée, si la onte est de bonne qualité : car alors sa sur- ace est lisse et ne porte point d’écumes, dais , dans tous ces cas , il faut avoir soin le comprimer la matière coulante par plu- ieurs torches de paille placées dans les oulées. Avec cette précaution il ne passe [ue peu d’écumes dans le moule ; et si la fonte étoit dense et compacte, il n’y en i un oit point du tout. La bourre de la fonte îe vient ordinairement que de ce qu’elle est rop crue et trop précipitamment fondue. D’ailleurs la matière la plus pesante sort la ot'temerij première du fourneau; la plus légère vient feœp a dernière : la culasse du canon est, par :ette raison , toujours d'une meilleure ma- ière que les parties supérieures de la pièce ; iv« nais il n’y aura jamais de bourre dans le D canon si, d’une part, on arrête les écumes 0 par les torches de paille , et qu’en même temps on lui donne une forte masselotte de natière excédante , dont il est même aussi îécessaire qu’utile qu’il reste encore, après a coulée , trois ou quatre quintaux en fusion 2 dans le creuset : cette fonte qui reste y en- tretient la chaleur ; et , comme elle est en- core mêlée d’une assez grande quantité de aitier, elle conserve le fond du fourneau , t empêche la mine fondante de brûler en 'y attachant. Il me paroît qu’en France on a souvent fondu les canons avec des mines en roche, “ tjui toutes contiennent une plus ou moins grande quantité de soufre ; et comme l’on n’est pas dans l’usage de les griller dan^ nos provinces où le bois est cher, ainsi qu’il se pratique dans les pays du Nord où le bois est commun , je présume que la qualité cas- sante de la fonte de nos canons de la ma- rine pourroit aussi provenir de ce soufre qu’on n’a pas soin d’enlever à la mine avant de la jeter au fourneau de fusion. Les fon- deries de Ruelle en Angoumois, de Saint - Gervais en Dauphiné, et de Baigorry dans Basse-Navarre , sont les seules dont j’aie connoissance , avec celle de La Nouée en Bretagne, dont j’ai parlé, et où je crois que le travail est cessé : dans toutes quatre , je crois qu’on ne s’est servi et qu’on ne se sert mélange ne peut plus être employé dès que les calibres passent celui de douze ; pour ceux de trente-six surtout , il est très-difficile d’attraper le point du mélange. encore que de mines en roche , et je n’ai pas ouï dire qu’on les grillât ailleurs qu’à Saint- Gervais et à Baigorry. J’ai tâché de me procurer des échantillons de chacune de ces mines, et, au défaut d’une assez grande quantité de ces échantillons, tous les ren- seignemens que j’ai pu obtenir par la. voie de quelques amis intelligens. Yoici ce que m’a écrit M. de Morogues au sujet des mines qu’on emploie à Ruelle : « La première est dure , compacte , pe- sante, faisant feu avec l’acier, de couleur rouge brun , formée par deux couches d’in- égale épaisseur, dont l’une est spongieuse , parsemée de trous ou cavités, d’un velouté violet foncé , et quelquefois d’un bleu indigo à sa cassure, ayant des mamelons, teignant en rouge de sanguine ; caractères qui peu- vent la faire ranger dans la septième classe de l’art des forges , comme une espèce de pierre hématite : mais elle est riche et douce. « La seconde ressemble assez à la précé- dente pour la pesanteur, la dureté et la cou- leur; mais elle est un peu salardèe ( on appelle salard ou mine salardèe celle qui a des grains de sable clair, et qui est mêlée de sable gris blanc, de caillou et de fer). Elle est riche en métal ; employée avec de la mine très-douce , elle se fond très-facile- ment : son tissu à sa cassure est strié et par- semé quelquefois de cavités d’un brun noir. Elle paroît de la sixième espèce de la mine rougeâtre dans l’art des forges. « La troisième, qu’on nomme dans le pays glacieuse , parce qu’elle a ordinairement quelques-unes de ses faces lisses et douces au toucher, n’est ni fort pesante ni fort riche ; elle a communément quelques petits points noirs et luisans , d’un graiu sembla- ble au maroquin. Sa couleur est variée ; elle a du rouge assez vif, du brun, du jaune, un peu de vert, et quelques cavités. Elle paroît, à cause de ses faces unies et luisantes, avoir quelque rapport à la mine spéculaire de la huitième espèce. « La quatrième, qui fournit d’excellent fer, mais en petite quantité , est légère , spongieuse, assez tendre, d’une couleur brune presque noire, ayant quelques ma- melons, et sablonneuse : elle paroît être une sorte de mine limoneuse de la onzième espèce. « La cinquième est une mine salardèe , faisant beaucoup de feu avec l’acier, dure , compacte, pesante, parsemée à la cassure de petits points brillans, qui ne sont que du sable de couleur de lie de vin. Cette mine MÏNERAUX. INTRODUCTION. 5o2 est difficile à fondre : la qualité de son fer passe pour n’ètre pas mauvaise ; mais elle en produit peu. Les ouvriers prétendent qu’il n’y a pas moyen de la fondre seule , et que l’abondance des crasses qui s’en sépa- rent l’agglutine à l’ouvrage du fourneau. Cette mine ne paroit pas avoir de ressem- blance bien caractérisée avec celle dont Swe- denborg a parlé. « On emploie encore un grand nombre d’autres espèces de mines ; mais elles ne diffèrent des précédentes que par moins de qualité, à l’exception d’une espèce d’ocre martiale, qui peut fournir ici une sixième classe. Cette mine est assez abondante dans les minières : elle est aisée à tirer ; on l’en- lève comme la terre. Elle est jaune, et quelquefois mêlée de petites grenailles; elle fournit peu de fer : elle est très-douce. On peut la ranger dans la douzième espèce de l’art des forges. « La gangue de toutes les mines du pays est une terre vitrifiable, rarement argileuse. Toutes ces espèces de mines sûnt mêlées , et le terrain dont ori les tire est presque tout sableux. « On appelle s chiffre en Angoumois un caillou assez semblable aux pierres à feu, et qui en donne beaucoup quand on le frappe avec l’acier. Il est d’un jaune clair, fort dur : il lient quelquefois à des matières qui peuvent avoir du fer; mais ce n’est point le schiste. « La castine est une vraie pierre calcaire assez pure, si l’on en peut juger par l’u- liiforînité de sa cassure et de sa couleur, qui est gris blanc; elle est pesante, assez dure, et prend un poli fort doux au tou- cher. » Par ce récit de M. de Morogues, il me semble qu’il n’y a que la sixième espèce qui ne demande pas à être grillée, mais seulement bien lavée avant de la jeler au fourneau. Au reste, quoique généralement parlant* et comme je l’ai dit, les mines en roche, et qui se trouvent en grandes masses, solides, doivent leur origine à l’élément du feu , néanmoins il se trouve aussi plusieurs mines 1 de fer en assez grosses masses , qui se sont formées par le mouvement et i’intermède de l’eau. On dislinguera, par l’épreuve de l’aimant , celles qui ont subi l’action du feu, ,, car elles seront toujours magnétiques; au j. lieu que celles qui ont été produites par la C stillation des eaux ne le sont point du tout, et ne le deviendront qu’après avoir été bien grillées et presque liquéfiées. Ces mines en .. roche, cpii ne sont point attirabies par l’ai- iS niant, ne contiennent pas plus de soufre • que nos mines en grains : l’opération de les , griller, qui est très-coûteuse, doit dès lors I être supprimée , à moins qu’ elle ne soit né- cessaire pour attendrir ces pierres de fer assez pour qu’on puisse les concasser sous les pilons du boeard. ,C( J’ai tâché de présenter dans ce mémoire ejj tout ce que j’ai cru qui pourroil être utile à 1 l’amélioration des canons de notre marine ; , f je sens en même temps qu’il reste beaucoup ^ de choses à faire , surtout pour se procurer ,e dans chaque fonderie une fonte pure et assez / compacte pour avoir une résistance supé- ^ rieure à toute explosion. Cependant je ne ra crois point du tout que cela soit impossible * “ et je pense qu’en purifiant la fonte d : fer aulant qu’elle peut l’être, on arriveroit au point que la pièce ne feroit que se fendre au lieu d’éclater par une trop forte charge. ® Si l’on obtenoit une fois ce but, il ne nous " resteroit plus rien à craindre ni rien à dé- lC0 sirer à cet égard. FIN DU TOME I. il. k il, kVV\WV\VVUVi\«Vm oge de Buffon par Condorcet . . . Page oge de Buffon par Yicq d?Azyr .... DISCOURS ACADÉMIQUES. i (oitj ébiei soufri scours prononcé à l’Académie fran- çoise par M. de Buffon le jour de sa àlJlréception : /y 27 , Iresse à Messieurs de l’Académie francoise 30 TABLE DES ARTICLES CONTENUS BARS LE PREMIER VOLUME. MATIÈRES 34 : BOUS m ojet d’une réponse à M. Coetlosquet. 31 ponse à M. Watelet le jour de sa ré- ception à l’Académie françoise. . ... 33 ponse à M. de la Condamine le jour de sa réception à l’Académie fran- çoise ponse à M. le chevalier de Chatelux le jour de sa réception à l’Académie françoise 35 ponse à M. le maréchal duc de Du- ras le jour de sa réception à l’Acadé- mie françoise. 38 HISTOIRE NATURELLE. m xer discours. De la manière d’é- udier et de traiter l’Histoire naturelle 43 ond discours. Histoire et Théorie de la terre 63 REUYES DE LA THEORIE DE LA TERRE. t. 1. De la formation des planètes. 84 t. 2. Du système de M, Whiston . . 98 t. 3. Du système de M. Burnet. ... 102 t. 4. Du système de M. Woodward. 103 t. 5. Exposition de quelques autres systèmes 104 t. 6. Géographie 109 t. 7. Sur la production des couches ou lits de terre 119 [t. 8. Sur les coquilles et autres pro- ductions de la mer qu’on trouve dans l’intérieur de la terre 133 it. 9. Sur les inégalités de la surface e la terre 150 GENERALES. Art. 10. Des fleuves 162 Art. 1 1 . Des mers et des lacs 177 Art. 12. Du flux et reflux. 200 Art. 13. Des inégalités du fond de la mer et des courans 204 Art. 1 4. Des vents réglés 211 Art. 15. Des vents irréguliers, des ou- ragans , des trombes , et de quelques autres phénomènes causés par l’agita- tion de la mer et de l’air 212 Art. 16. Des volcans et tremblemens de terre 231 Art. 17. Des îles nouvelles, des caver- nes, des fentes perpendiculaires, etc. 205 Art. 18. De l’effet des pluies , des marécages, des bois souterrains, des eaux souterraines 279 Art. 19. Des changemens de terres en mers et de mers en' terres 288 Conclusion 298 HISTOIRE DES MINÉRAUX. des élémens. Première partie. De la lumière, de la chaleur et du feu. . . . 301 Seconde partie. De l’air , de l’eau et de la terre 325 Réflexions sur la loi de l’attraction. . . 339 PARTIE EXPÉRIMENTALE. Premier mémoire. Expériences sur le progrès de la chaleur dans les corps. 345 Second mémoire. Suite des expériences sur le progrès de la chaleur dans les différentes substances minérales. . . . 354 Table des rapports du refroidissement des différentes substances minérales. 386 Fer id, Émeril. id. Cuivre 387 Or id. Zinc id. Argent id. Marbre blanc , . id. Marbre commun «... .id. Pierre calcaire dure 388 Grès id. 5o4 * ÎA.BLË. Verre 388 Plomb .. . . . id. Étain id. Pierre calcaire tendre. id. Glaise. . id. Bismuth id. Porcelaine id. Antimoine id. Ocre id. G’ raie id. Gypse id. Bois id. Troisième mémoire. Observations sur la nature de la platine 393 Quatrième mémoire. Expériences sur la ténacité et la décomposition du fer. 405 Cinquième mémoire. Expériences sur les effets de la chaleur obscure 414 1 re expérience id. 2e expérience 417 3e expérience 419 4e expérience 420 5e expérience 422 6 e expérience • Sixième mémoire. Expériences sur la lu- mière et la chaleur qu’elle peut pro- duire Art. 1. Invention de miroirs pour brû- ler à de grandes distances Art. 2. Réflexions siïr’le jugement de Descartes au sujet des miroirs d’Ar- chimède, avec le développement de la théorie de ses miroirs et l’expli- cation de leurs principaux usages.. . Art. 3. Invention d’autres miroirs pour brûler à de moindres distances Septième mémoire. Observations sur les couleurs accidentelles et sur les om- bres colorées Huitième mémoire. Expériences sur la pesanteur du feu et sur la durée de l’incandescence Sur le fer Sur le verre Neuvième mémoire. Expériences sur la fusion des mines de fer 42 42 i ic 43 | 4 a 41 1 4 47| « JHt CÆT'fY CENTER UBftARY