|. di cc'inES ST 38857 QE 904.52 H47Z45 1880 SLRA °) NOTICE BIOGRAPHIQUE 0 À par 1 ZEILLER, Ingénieur en chef au Corps des Mines de France. Oswald Heer est assurément l'un des savants qui, depuis près d'un demi-siècle, ont fait faire à la paléontologie végétale les plus grands progrès et à qui nous devons les connaissances les plus importantes sur la distribution des flores et la réparti- tion des climats aux différentes époques de l'histoire de la terre. La liste bibliographique qui va suivre montre mieux qu'aucune parole combien son œuvre a été considérable et ce que peut produire une vie consacrée toute entière à la science. Depuis l'âge de vingt-six ans, auquel il fit paraître ses premiers tra- vaux, chacune des années de sa vie jusquà la soixante-quin- zième, cest à dire jusqu'à la dernière, a été marquée par la publication d'ouvrages nouveaux, dont quelques-uns, d’une im- portance capitale, auraient à eux seuls suffi pour illustrer son nom. Heer n'avait cependant pas été dirigé tout d’abord vers la carrière scientifique: né le 31 août 1809 à Niederutzwyl, dans le canton de $° Gall, où son père était pasteur, il était destiné par celui-ci à l'exercice du ministère évangélique; instruit par lui jusqu'à l’âge de dix-neuf ans, il puisa dans son éducation première une solide foi religieuse que rien n’altéra jamais et quil n'a pas craint de manifester hautement dans ses œuvres. Entré en 1828 à l'Université de Halle pour y étudier la théo- 1 Les renseignements contenus dans cette notice sont extraits, pour la plus grande partie, de la biographie d'Oswald Heer publiée par M. le D° C. Schrôüter dans la Neue Zürcher Zeitung (octobre 1883) ainsi que du travail de M. le M'° de Saporta sur Oswald Heer et son oeuvre (Revue des Deux Mondes, 1% juillet et 15 août 1884). J'ai mis à profit en outre les communications qu'ont bien voulu me faire divers savants, notamment M. le M de Saporta et M. Alfred Nathorst, à qui je suis heureux de Rae adresser ici tous mes remercîments. 190392 U 4 | | PR ANS NS ensù ; BIOGRAPHIQUE. logi je, il conquit ses bre esta <} Gall “e 1831 deti y Fataoue | come Z e évangélique. Mais ses ses gôûts lebpontaien OX T'esfancofr léétiénces naturelles: à Matt, dans la vallée de sé la Sernft, où son père avait été appelé à résider à la ‘fin de 1816, il consacrait toutes ses heures de loisir à recueillir deg plantes et des insectes, les deux groupes d'êtres à l'étude des- quels il devait plus tard vouer sa vie. Aussi profita-til de son séjour à Halle pour se livrer, sous la direction de Sprengel, de Kaulfuss, de Germar et autres maîtres, à ses études préférées, sans négliger cependant celles qui devaient le conduire au but où son père le destinait et dont il ne songeait pas encore à se détourner. Mais après une année passée à Matt, il se trouva tout à coup, en 1832, en présence de deux propositions oppo- sées, et obligé de faire un choix entre les deux voies qui s'ou- vraient devant lui, l'une conforme aux vœux paternels, l’autre au contraire à ses goûts dominants: en même temps en effet qu'on l'appelait à exercer les fonctions de pasteur dans le village de Schwanden, M. Escher Zollikofer, de Zürich, lui demandait sa collaboration pour classer ses importantes collections d'insectes. Le sentiment bien net de sa véritable vocation lui donna le courage de résister aux désirs de son père pour se donner tout entier à ses études de prédilection et embrasser la carrière où il devait conquérir une réputation universelle. Il alla donc s'établir à Zürich, et deux ans après il y était chargé, comme Privatdocent, de professer la botanique et l'entomologie à l'Université; recu docteur en 1835, il publiait à cette époque ses premiers travaux, l'un sur la géographie botanique, l'autre comme thèse, en 1836, sur ses observations entomologiques. Pendant ces premières années, du reste, c'est surtout à l'étude des insectes qu'il consacra son temps, mettant à profit les riches matériaux que lui offraient les collections confiées à ses soins. Des insectes vivants il fut conduit aux insectes fossiles, dont le gisement ciassique d'Œningen, sur les bords du lac de Constance, lui fournit une magnifique série d'empreintes. (C’est à la faune entomologique de ce gisement et de celui de Radoboj en Croatie quil consacra son premier travail paléontologique, publié de 1847 à 1555, dans lequel il inaugura un nouveau système de détermination et de classi- fication, fondé sur les caractères des ailes et des élytres et bien: tôt consacré par la science. CRE | PF ] & Fo q NOTICE BIOGRAPHIQUE. Ou Au cours de ce travail il fut atteint, en 1850, d'une grave maladie de poitrine, qui inspira à sa famille et à ses amis les plus vives inquiétudes. Revenu plus souffrant d'un séjour à Bex, où il s'était rendu dans l'espoir d'y recouvrer la santé, il céda aux sollicitations qui lui venaient de tous côtés et parti- culièrement à celles de Léopold de Buch, et il alla passer à : Madère l'hiver de 1850 à 1851. Marié depuis 1858, il fut accompagné dans ce voyage par sa femme, qui eut le bonheur de le ramener l'été suivant complètement rétabli. Il est à peine besoin de dire que Heer avait su mettre à profit ce séjour au milieu de la végétation subtropicale pour recueillir d’intéressantes observations, qui ne lui furent pas inutiles dans ses études ultérieures sur la flore et le climat de l'époque tertiaire. Il en rapportait en outre les matériaux de plusieurs notices scienti- fiques, sur la géologie de l'île de Madère, sur la fourmi de Madère, sur les plantes fossiles du gisement de San Jorge, publiées par lui de 1851 à 1855. Nommé en 1852 professeur titulaire de botanique à l'Uni- versité, il fut également chargé, en 1855, de la chaire de bo- tanique spéciale à l'Ecole polytechnique fédérale qui venait d'être fondée à Zürich, postes qu'il devait occuper sans une défaillance jusqu'en 1882. Amené par ces fonctions mêmes à se vouer plus complétement à la botanique, il entreprit l'étude des innombrables empreintes végétales que lui avait fournies, en outre des insectes, le gisement exceptionnellement riche d'Œningen, et complétant ces matériaux par ceux des autres dépôts tertiaires de la Suisse, il donnait dès 1853 un aperçu de la flore tertiaire de son pays natal, auquel succédaient, de 1855 à 1859, les trois volumes de la Flora tertiaria Helvetie, l'un des monuments les plus considérables de son œuvre. A partir de ce moment la paléontologie végétale devint son occupation principale, et chaque année vit paraître de nou- veaux travaux, consacrés à l'étude des plantes fossiles, qui jetaient sur le nom de leur auteur un éclat toujours grandissant. Presque tous les pays d'Europe furent mis par lui à contribution: sa réputation et ses relations avec les savants étrangers s'éten- dant sans cesse, il se vit confier l'étude et la détermination de collections provenant des régions les plus diverses et les plus éloignées. (C’est ainsi qu'outre ses travaux sur la flore fossile des couches tertiaires de Bovey Tracey et de Hempstead dans l'ile de Wight, qu'il avait étudiées sur place dans un voyage + 6 NOTICE BIOGRAPHIQUE. en Angleterre entrepris en 1861 avec ses amis A. Escher de la Linth et Pierre Merian, il publia la description de la flore de nombreux gisements d'Allemagne appartenant soit à l’époque tertiaire, soit à l'époque crétacée; la Hongrie lui doit la connais- sance des plantes permiennes de Fünfkirchen et de la flore des lignites du Zsilythal en Transylvanie; l'Amérique celle des phyllites crétacés du Nebraska, étudiés par lui avec la colla- boration de M. Capellini; le Portugal une étude générale du plus haut intérêt sur la flore de toutes ses époques géologiques. Citons encore les travaux de Heer sur les plantes fossiles de Vancouver et de la Colombie Anglaise, et sur celles de Sumatra. Cependant, au milieu de l'examen de tant d'objets si divers, son amour profond pour son pays natal le ramenait sans cesse à l'étude des restes fossiles de toute nature provenant des formations sédimentaires de la Suisse et à celle de l’histoire géologique de ce beau pays. Son ouvrage sur le Monde pri- mitif de la Suisse, publié en 1865, traduit bientôt en français et en anglais, réédité en 1879, montre que, s'il cultivait plus spécialement certaines branches de l'histoire naturelle, il n’en négligeait aucune et qu'en géologie surtout il pouvait rivaliser avec tous les maîtres. Moins de dix ans avant sa mort, il couronnait ses magnifiques travaux sur la Suisse en complétant sa flore tertiaire par la description des plantes fossiles rencontrées dans les autres dépôts de son pays, depuis le carbonifère jusqu'au crétacé. Mais ce qui devait, à côté de ce monument élevé à la géologie et à la paléontologie de la Suisse, jeter le plus d'éclat sur son nom et occuper la plus grande partie des vingt dernières années de sa vie, c'est l'étude de la flore des régions arctiques, œuvre si considérable et si féconde en résultats qu'elle aurait pu suffire, semble-t-il, à occuper la vie entière de son auteur. Il n'est que juste de mentionner ici, comme ayant pris à cet admirable travail une part de premier ordre, le nom de M. Nordenskiüld, qui n'a cessé, dans ses voyages à travers les régions polaires, de recueillir des matériaux dont il confiait, au retour, l'examen à l'illustre professeur de Zürich. Leurs relations avaient commencé à l'occasion du premier voyage de M. Nordenskiüld au Spitzherg, en 1858, voyage pendant lequel furent découvertes les empreintes de plantes miocènes décrites dans le tome I de la Flora fossilis arctica. Ces relations devinrent de plus en plus étroites, et l'intérêt avec lequel le NOTICE BIOGRAPHIQUE. T savant paléontologiste accueillait les découvertes de l'intrépide voyageur, les importants résultats quil tirait de leur étude, encourageaient celui-ci à de nouvelles recherches. Un tel exemple ne devait pas rester sans imitateurs, et peu à peu Heer voyait arriver entre ses mains les empreintes recueillies par tous les autres explorateurs des régions arctiques sans distinction de nationalité, notamment par M. E. Whymper au Groënland, par M. M. Schmidt, Maak et Czekanowski en Sibérie et dans le bassin de l'Amour, par M. Hartung en Norvège, à la terre de Grinnell enfin par M. le Capitaine Feilden et M. le D° Moss, sous l’une des latitudes les plus élevées que l’homme ait atteintes. Toutefois la plus riche part dans ce magnifique ensemble restait due à M. Nordenskiôüld et aux autres membres des expéditions suédoises, et c'est à l'un de ces derniers qu'était réservé l'honneur d'être un jour désigné par Heer comme le continuateur de son œuvre: lié avec M. Alfred Nathorst -depuis 1872, ayant suivi avec le plus vif intérêt ses travaux sur les flores rhétiennes de Suède, Heer le poussa vivement à entreprendre aussi l'étude des plantes tertiaires, et notamment celle des empreintes recueillies autour de Mogi, au Japon, par M. Nordenskiôld au cours de la mémorable expédition de la Véga, étude dont il ne voulait pas se charger lui-même et pour laquelle il lui prêta le concours de son expérience et de ses conseils. En 1383, au moment où M. Nathorst partait pour le Groënland avec M. Nordenskiüld, Heer lui traçait un programme détaillé des questions dont la solution lui paraissait la plus importante pour la science, et exprimait le désir de lui voir décrire les plantes fossiles qu'ils rapporteraient et poursuivre ainsi l'œuvre de la Flora fossilis arctica, dont il venait de publier le septième volume et qu'il pensait ne pas pouvoir continuer. À la fin du mois de septembre de la même année, les deux explorateurs rentraient en Suède, rapportant une riche moisson de matériaux qui devaient donner à Heer la satisfaction de voir ses opinions confirmées sur un grand nombre de points qu'il regardait encore comme douteux; mais le jour même où l'expédition arrivait à Gothembourg, le 27 septembre 1883, Heer rendait le dernier soupir à Lausanne. Retombé malade de la poitrine en 1870, il s'était résigné à aller de nouveau chercher la santé dans le Midi, et il était allé passer à Pise l'hiver de 1871—72; mais cet hiver fut si rigoureux même en Italie, qu'il ne retira de ce déplacement & NOTICE BIOGRAPHIQUE. qu'une amélioration insensible, et de plus il contracta pendant ce séjour, à la suite d'un refroidissement, un mal de pied des plus graves qui ne céda à aucun traitement ni à aucune opération. Obligé, peu de mois après son retour, à prendre le lit pour plus d’une année, il n'en continua pas moins ses travaux et même ses leçons, et accepta sans un murmure cette pénible épreuve. Depuis lors sa santé demeura fort précaire, mais cet état de souffrance n'eut aucun contre-coup sur l'activité de son esprit ni sur son humeur toujours égale. Assisté avec le plus tendre dévouement par sa femme et sa fille, il poursuivait avec la même énergie l'étude des innombrables empreintes des régions polaires qui lui étaient envoyées en communication, et il voyait ses travaux couronnés par les plus flatteuses récom- penses: en 1874 il recevait la médaille de Wollaston et en 1878 la grande médaille de la Société Royale de Londres; l'Académie des Sciences de Stockholm lui décernait en 1874 une médaille d'or; enfin, en 1882, l'Académie des Sciences de Paris, dont il était Correspondant depuis un an, lui décernait. le prix Cuvier. Ces distinctions si méritées n'étaient, du reste, pas les premières, car il avait recu en 1859 le grand prix de la Société des Sciences de Harlem pour sa flore tertiaire de la Suisse, en 1861 une médaille d'or pour son travail sur les insectes fossiles d'Œningen, et il avait été successivement admis comme membre étranger ou correspondant par les Académies des Sciences de presque toutes les capitales de l’Europe et des principales villes de l'Amérique du Nord. Sentant ses forces décliner et tenant à consacrer tout entières. celles qui lui restaient à l'achèvement de son œuvre, il avait, en 1882, résigné ses fonctions de professeur à l'Université et à. l'Ecole polytechnique pour se donner exclusivement à l'étude de la flore des couches crétacées supérieures et des dépôts. tertiaires du Groënland; il put ainsi, dans les premiers mois de 1883, livrer à l'impression, et non sans une vive et légitime satisfaction, les dernières feuilles du tome VII‘®®° de la Flora fossilis arctica. Maïs un esprit aussi actif ne pouvait songer à prendre du repos, et il consacra dès lors tout son temps à sa Flore nivale de la Suisse, qui devait être son dernier travail: il le communiqua lui-même à la réunion des naturalistes suisses qui eut lieu à Zürich au commencement du mois d'août, et au cours de laquelle il exposa également les résultats de ses dernières recherches sur la flore fossile des régions polaires. NOTICE BIOGRAPHIQUE. ® Bien que souffrant déjà de violentes quintes de toux, il put encore, après cette réunion, se rendre à Bex avec sa famille et reprendre, dans l'espoir d'y mettre la dernière main, son manuscrit de la Flore nivale: mais le 19 septembre :il fut saisi de crises d’étouffement de plus en plus pénibles et de plus en plus fréquentes, qui l’obligèrent à abandonner son travail; transporté sur sa demande chez son frère à Lausanne, il y expira dans la nuit du 26 au 27 septembre, à 2 heures du matin, cherchant encore, par la dernière parole qui sortit de ses lèvres, à rassurer sa fille qui le veillait. Il n'entre pas dans le cadre de cette notice de tenter une analyse, si succincte soit-elle, de l'œuvre immense d'Oswald Heer: quil nous soit seulement permis de rappeler que la Suisse, d'une part, et les régions arctiques, de l’autre, doivent à Heer la publication de tout ce qui a été recueilli jusqu'à présent en fait de plantes fossiles à tous les niveaux géologiques des terrains qui les constituent, œuvre qu'aucun autre pays ne possède encore aussi complète. Depuis les couches carbonifères les plus anciennes jusqu'aux formations les plus récentes, il a scruté la végétation de tous les âges de la terre, maïs c'est à la flore du terrain tertiaire, puis à celle du terrain crétacé, quil à fait faire les plus grands progrès, et ensuite, dans une mesure peut-être un peu moindre, à celle du terrain jurassique. Au moment où il a commencé à étudier les plantes des dépôts tertiaires de la Suisse, les premiers jalons de la déter- mination des empreintes de feuilles dicotylédonées fossiles venaient à peine d'être posés par Unger, et presque tout était encore à faire. Ce sont les travaux de Heer avec ceux de M. d'Ettingshausen en Autriche et peu après ceux de M. de Saporta en France et de M. Lesquereux en Amérique, qui ont assis sur des bases définitives cette partie, hérissée de difficultés toutes particulieres, de la paléontologie végétale. Aussi Heer voyait-il avec une satisfaction toute spéciale les découvertes qui sy rapportaient et ne cessait-il de suivre avec le plus grand intérét les travaux de ses confrères en paléophytologie sur cette branche de la botanique fossile, qui donnait lieu, entre eux et Jui, à un échange constant de correspondance et de com- munications. La flore du terrain crétacé était, de son côté, fort mal connue, par suite de la rareté des dépôts d’eau douce appartenant à ce niveau; les études de Heer sur la flore des couches crétacées 10 NOTICE BIOGRAPHIQUE. des régions polaires, et particulièrement du Groënland, ont jeté -un jour tout nouveau sur l’histoire de la végétation de cette époque géologique, à laquelle ont apparu bon nombre des genres actuellement vivants et qui a vu l’une des plus grandes révolu- tions du règne végétal, la naissance et l'essor rapide du groupe, si important aujourd'hui, des Dicotylédones. Sous ce dernier point de vue les dépôts arctiques ont révélé un fait d'un intérêt considérable, déjà soupçonné, il est vrai, mais resté incertain, à savoir la soudaineté de l'expansion des plantes dicotylédones. Sur les divers points de l'Europe où l'on avait vu apparaître, vers l'époque cénomanienne, les premières d'entre elles, on n'avait pas trouvé de dépôts immédiatement antérieurs où. chercher des traces plus anciennes de leur origine, et l'on pouvait se demander si elles n'étaient pas depuis longtemps en possession du sol sur lequel elles semblaient seulement, faute de documents plus complets, s'être installées brusquement. La découverte, sur les côtes du Groënland, d'une série de dépôts crétacés d'eau douce se succédant presque immédiatement l'un à l’autre a permis à Heer de répondre à cette question: tandis que les couches inférieures, de Kome, renferment encore une flore de caractère éminemment jurassique, dans laquelle prédo- minent les gymnospermes, Conifères et Cycadées, au milieu desquelles apparait une seule dicotylédone, un peuplier, l'étage suivant, celui d'Atané, renferme une quantité considérable de feuilles d'arbres dicotylédonés, comme si ces plantes s'étaient montrées d’un seul coup sous un aussi grand nombre de leurs formes, avec leurs caractères génériques immédiatement et définitivement arrêtés !. Un tel fait, si frappant, joint à la persistance presque indéfinie de certaines espèces, comme le cyprès chauve, resté aujourd'hui ce qu'il était dès l'origine de l'époque miocène, semble bien de nature à légitimer l'idée de Heer, qui, sans rejeter absolument la théorie de la descendance, _admettait que les modifications des types organiques s'étaient faites, non par transformation graduelle, mais brusquement, et qu'à certaines époques il y avait eu une sorte de refonte des espèces, équivalant à une création nouvelle. Enfin, de l'étude des flores tertiaires comme des flores crétacées de divers âges recueillies dans les régions arctiques, 1 Il faut noter cependant que l’on n’a trouvé sur aucun point les couches d’Atané recouvrant immédiatement les couches de Kome. NOTICE BIOGRAPHIQUE. 11 Heer a su tirer les renseignements climatologiques les plus précieux, non seulement au point de vue de la géographie - botanique, mais au point de vue même de la cosmogonie. Il résulte en effet de ses recherches que ce n'est qu'à l'époque crétacée et même seulement vers sa fin qu'ont commencé à se manifester sur notre globe les premières différences de climats suivant les latitudes, l’uniformité presque absolue jusque là de la végétation, du pôle jusqu aux tropiques, attestant l'uniformité des conditions climatériques. Il a prouvé en outre que, depuis ce moment, aux divers âges du monde tertiaire, les plantes appartenant aux différents types végétaux, inégalement exigeants sous le rapport de la température, ont affecté une répartition semblable à celie que nous constatons aujourd'hui, par zônes circulaires successivement échelonnées autour du pôle suivant les parallèles, ou du moins ne s'écartant pas plus de ceux-ci que ne sen écartent aujourdhui les lignes isothermes dont nous avons pu déterminer le tracé par nos observations sur le monde vivant. Il à fait voir, enfin, qu à l'époque tertiaire la flore des régions arctiques se montrait, comme aujourd'hui, tout en étant beaucoup plus riche, remarquablement uniforme, quel que soit le méridien sous lequel on l'observe, et que ces régions avaient été certainement depuis longtemps un centre de diffusion, d'où s'étaient répandues en rayonnant vers des latitudes plus basses bon nombre de formes génériques ou spécifiques quon retrouve ensuite identiques à elles-mêmes dans des régions fort éloignées les unes des autres et séparées par de vastes étendues de mer. Heer a fourni ainsi à la géographie botanique un point de départ nouveau, et ses décou- vertes ont été largement mises à profit pour le développement de cette branche de la science. Toutefois, au point de vue de l’histoire astronomique de la terre, les résultats ont été plus importants encore: ïil faut conclure en effet, de ses études sur les flores tertiaires et sur leur distribution par zônes concentriques au pôle, que le pôle géographique de notre globe n’a subi aucune variation, ainsi que l'avaient affirmé les théories de la mécanique céleste, maïs que, par contre, il n'a pas toujours présenté cet aspect de désolation qui en rend aujourd'hui l'accès impossible à l’homme. Occupé jusqu'à l'époque crétacée par une végétation semblable à celle qui peuplait les régions tempérées ou même tropicales, il ne s'est refroidi que peu à peu, et au milieu de l'époque miocène 12 | -__ NOTICE BIOGRAPHIQUE. la terre de Grinnell possédait encore,.par 81° 44° de latitu des arbres feuillus et des essences résineuses qui attestent, suivant les évaluations de Heer, une température annuelle moyenne de 80 à 90 et qui semblent incompatibles avec Je nuits de près de cinq mois qui règnent actuellement sur « point. Il faut donc admettre, non seulement que la températu: générale était alors plus élevée, mais surtout que la chaleur | était moins inégalement répartie et que les pôles ne connaissaient à pas encore ces jours et ces nuits de six mois entre lesquels. l'année se partage aujourd'hui pour eux. Comment expliquer de telles différences entre le passé et le présent de la terre? On ne peut faire sur ce point que des hypothèses plus ou moins plausibles, et ce n'est pas ici le lieu de discuter celles qui ont été mises en avant; mais on voit par là comment, des travaux de Heer, se dégagent, malgré leur spécialisation, des problèmes de l'intérêt le plus général, dont la portée s'étend bien au-delà ; des bornes de notre globe et dans lesquels son âme, profondé- ment religieuse, trouvait un nouveau sujet de méditation sur la grandeur mystérieuse des œuvres de son Créateur. 3 9088 00862 8091