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LE STAR te sf a: € We eh ya ssarrs hais, ee en » ER L À ou TT”; Sr: a seu ns rade a. sn sb «quil « CP euc 1] e PRÉCIS ANALYTIQUE DES TRAVAUX DE L’'ACADEMIE DES SCIENCES, BELLES - LETTRES ET ARTS DE ROUEN, PENDANT L'ANNÉE 1812, D’ \ / . C4 Ld L APRES le comple qui en a été rendu par MM. les Secrétaires , à La Séance publique du 7 Août de la méme année. OUVERTURE DE LA SÉANCE. M. Lezurier de la Martel, Vice-Président >» a ouvert la séance par un discours dans lequel ïl à fait sentir le secours que les Sciences, les Lettres et les Beaux-Arts ürent de leur union. Il a rappelé combien les Sayants, en cultivant les Lettres, ont A C2) prêté de charmes aux Sciences les plus austères et combien les Arts eux-mêmes ont concouru à leur propagation et à leur perfectionement. Il est à regretter que ce discours, dont l'auteur a perdu le manus- crit, ne puisse étre consigné en entier dans les actes de l'Académie. MR D Em meme | SCIENCES: ETiAR TS. RAR PPARARE"T Fait à l’Académie des Sciences , Belles-Lettres ef Arts de Rouen , sur les travaux relatifs aux Sciences et aux Arts qui en dépendent , dans la Séance publique du 7 Août 1812 , par J.-B. Virazss , Secrétaire perpétuel de la classe des Sciences. MESSIEURS, : DÉja dix années se sont écoulées depuis que l’Académie a repris les travaux dont les événements politiques qui ont signalé Ja fin du 18° siecle l'avaient forcé d'interrompre le cours. De nouveaux athlètes ont été appelés dans l’hono- rable carrière parcourue avec tant d'éclat par les Cideville , les Lecat , les Dambourney , les Pingré, les Giraud , les Dulague, les Lallemant, etc. Pour se rendre dignes de succéder: à ces pre- miers fondateurs de l'Académie, il fallait se péné- trer de leur esprit, marcher d'un pas ferme dans la route qu’ils avaient tracée, et poursuivre avec activité l'ouvrage qu'ils avaient si habilement et si heureusement commencé. ; Héritiers du vaste domaine qu'ils vous ont légueé , on vous a vus, MESssIEURS , constamment occupes du soin d'en cultiver et d'en améliorer toutes les parties, d'entretenir la richesse de son sol et d’en AAA _ C4) accroître même la fertilité. Les Lettres , les Sciences et les Arts vous sont redevables d'une foule de productions qui attestent votre zèle pour le progrès des connaissances humaines. Parmi ces productions , les unes, fruits d'une imagination brillante et féconde , intéressent éga- lement par le choix des sujets, la pureté du goût et les graces de l'élocution; les autres , moins sus- ceptibles des ornements et de la pompe du style, ont , en revanche , le précieux avantage d'offrir l'heureuse application des principes des sciences aux nombreux établissements consacrés ,; parmi nous , à l’industrie manufacturière. En présentant à ses concitoyens l’hommage public et solennel de ses travaux, l'Académie veut en méême-temps qu’il leur en soit rendu un compte exact et fdile, afin de les mettre à portée de juger en quoi ils pourraient être pour eux de quelque utilité, Chargé de la partie des ouvrages qui regardent les Sciences et les Arts qui en dépendent, je vais avoir l'honneur , Messieurs , de vous les faire con- naître le plus succinctement qu’il me sera possible. Sciences MATHÉMATIQUES ET PHYSIQUES. M. Le Priol, proviseur du Lycée de Rouen , a communiqué à l'Académie deux mémoires. Le premier a pour titre : Observations sur l’ordre et les démonstrations de quelques théorèmes relatifs à la résolution des équations numériques à une seule inconnue, Dans le second , notre confrère a donné la solution analytique du probléme suivant : Déter- miner , par une seule expérience, l'angle refringent d’un prisme triangulaire donné , et le pouvoir re- cl C5) fringent de la matière dont ce prisme est composé: L'Académie a délibéré que ces deux mémoires seraient imprimés en entier , à la suite de ce rapport. ( Zoyez ci-après. ) = L'Académie a reçu de M. Francœur , Profes- seur de la Faculté des Sciences de Paris, et ‘membre non résidant, un ouvrage de sa compo- sition , qui a pour titre : Uranographie ou Traité élémentaire d’astronomie. Une Commission , composée de MM. Lhoste , Meaume et Lepriol, avait été chargée d'examiner cet ouvrage et d’en rendre compte à la Compagnie : le temps ne lui a pas encore permis de faire son rapport. = M. Periaux, membre résidant , a fait hommage à l'Académie de ses Tables de conversion des livres tournois en francs et des francs en livres , pour toutes sommes depuis 1 jusqu’à 1000 , et en nom- ères ronds au-dessus de mille. L'empressement du public à se procurer ces Tables en montre suffisamment l’exactitude et l'utilité. = M. Periaux vous a aussi communiqué, Mes- StEURS , un mémoire rempli de recherches et d’éru- dition , dans lequel il examine cette question : La Lune pascale doit -elle être appellée Lune de Mars ? En d'autres termes : 4 quel mois solaire un mois lunaire est-il censé appartenir ?*(1) La modestie de notre confrère l'ayant porté à prier la Compagnie de nommer des Commis- saires pour examiner son travail, l'Académie à (1) Ce mémoire est imprimé , et se trouve à Rouen chez l’Au- teur et chez les principaux libraires. 3 (6) chargé MM. Meaume et Bonnet de cet examen. » M. Periaux, dit M. Meaume , Commissaire- Rapporteur , a divisé son mémoire en deux parties. Dans la première , l'auteur accumule toutes les preuves qui établissent la véritable époque à laquelle doit être célébrée la fête de Pâques , d’après la décision du Concile de Nicée ; et il résulte de ces preuves , puisées dans les sources les plus pures , que la fête de Pâques doit être célébrée le Dimanche après le 14° jour de la lune qui arrive le 21 Mars ou après le 21.,... C’est donc mal interpréter la décision du Concile de Nicée que de dire que Ja fête de Päques doit étre célébrée le Dimanche d’après la pleine lune qui suit l'équi- moxe du printemps ,; ou encore que la fête de Pâques est fixée au déclin de la lune de Mars, c’est-à-dire , de la lune qui a son plein le jour de l’équinoxe. » Dans la deuxième partie de son Mémoire ( c’est toujours M. le Rapporteur qui parle}, M. Periaux revient à la question principale qu'il s’est proposé d'examiner : à quel mois solaire un mois lunaire est-il censé appartenir ? et , fondé sur des autorités auxquelles il croit devoit déférer , l'auteur du mémoire regarde comme bien décidé qu’une Junaison ap partient au mois ou elle finit, d’après l'ancienne règle : - In quo completur , mensi lunatio detur. » Cette opinion a été celle de plusieurs Savants tels que Clavius, Blondel , etc ; et Lalande affirme que Pusage d'attribuer chaque lunaison au mois où elle finit a du être adopté préférablement à tout autre. 679 » Néanmoins , continue M. Meaume , la question pe nous parait pas résolue , parce qu’elle peut l'être d'une maniére arbitraire. » En effet , une lunaison présentant trois époques principales, savoir : La nouvelle lune , la pleine lune et la fin de la lunaison, on peut l'appeler du nom du mois solaire pendant lequel se passe l'une ou l’autre de ces trois époques . ... C’est entre ces trois systèmes qu'ont été partagées les opinions de ceux qui ont voulu faire correspondre les mois lunaires aux mois solaires, Chacun a fait valoir en faveur de son opinion des raisons plausibles, et a opposé de solides objections contre les autres «. M. je Rapporteur discute rapidement les opinions diverses , et conclut qu'aucun des systèmes pro- posés pour la répartition des lunes entre les mois solaires ne semble à la Commission offrir assez d'avantages sur les autres pour devoir être exclusivement adopté. » D'ailleurs, il est reconnu que cette question n'intéresse ni l'astronomie , ni le calendrier , ni l'agriculture , ni les besoins de la vie civile, et c’est pour cela sans doute qu’elle a été laisséo indécise. » Quoiqu'il en soit, reprend M. le Rapporteur, en ne prononçant point sur la question de savoir quels noms de mois il convient de donner aux lunaisons , vos Commissaires ne balancent pas à déclarer que le mémoire de M. Periaux leur a paru trés-intéressant par le grand nombre de citations qu'il contient et qui ont exigé beaucoup de recherches et de lectures , par l'exposition très-clairement établie des principes d’après lesquels est réglée la fête de Pâques, et par l'indication de presque toutes les sources où l’on peut puiser À 4 (8) pour connaitre ce qui a été dit sur la question qui fait lPobjet du mémoire «, — Dans la séance du 30 Novembre 1810 , M. Boismare a communiqué à l'Académie un Mé- moire très-étendu sur la position de la ville de Quillebeuf , sur les causes d’insalubrité qui peuvent en résulter ,et les maladies qui s’y observent. Ce premier mémoire , qui a été accueilli avec un grand intérêt par la Compagnie, a obtenu l'ap- probation de S. Ex. le Ministre de l'Intérieur , auquel M. Boismare a eu l'honneur d’en adresser une copie. M. le Comte de Montalivet s'occupait alors de recueillir tout ce que l'embouchure de la Seine peut offrir de remarquable : les dangers de la navigation et l'amélioration dont elle peut être sus- ceptible excitaient sur-tout sa sollicitude. S. Ex. , par une lettre qui contient des remer- ciments flatteurs pour notre confrère , l'invita a lui donner la solution d’une serie nombreuse de questions qui n’entraient point dans le plan du premier mémoire. M. Boismare a répondu à l'invitation de S. Ex. par un second mémoire dont l'Académie a délibéré l'insertion dans le Précis analytique de ses travaux. ( Voyez à la suite de ce Rapport.) PHYSIOLOGIE ANIMALE. MEDECINE. Organe de la Commission chargée de rendre compte d'un travail adressé à l'Académie par M. Thillaye, D.M. P., sur une Nouvelle Théorie de la Vision à distances variables, dans l'homme et les animaux , M. Vigné a fait uu rapport dont ces ni une (9) nous regrettons de ne pouvoir offrir iei qu'un court extrait. » M. Thillaye , dit M. le Rapporteur , dans l'explication du phénomène qu'il se propose d’é- claircir , rejette les deux opinions relatives à lPaction des muscles droits ; conteste l'existence de celui que l'on a dit correspondre à louver- ture de iris ; nie l'effet contractile du cercle ciliaire sur la cornée, des processus eiliaires sur le cristallin , les changements de forme et de position de ce corps lenticulaire, la nécessité indispensable de l'action de Piris , et revendique, en faveur de la choroïde, le privilége de faire changer de forme à l'œil, de le rendre plus saillant et susceptible de voir également bien des objets placés à diverses distances , dans les limites de la vision; il défère à la turgescence des vaisseaux dont cette membrane est abondam- ment pourvue, l'effet de pousser en avant les humeurs de l’œil, et d'augmenter ainsi la con- vexité de la cornée. » Le pecten des oiseaux , selon l'auteur de l'essai , remplit les mémes fonctions que celles qu'il attribue en nous à la cornée «. Après avoir discuté les raisons alléguées par M. Thillaye en faveur de la théorie nouvelle qu'il soumet au jugement de l'Académie , M: Vignë conclut ainsi : » La Commission se croit autorisée à ne point admettre la turgescence de la choroïide comme le principe de la convexité plus grande et tem- poraire de la cornée transparente , et nous nous garderons bien, après avoir éloigné cette opinion, de Jui en substituer une autre en faveur de telle ou telle partie de l'œil, soit externe , soit interne , TE jusqu’à ce que le temps ou l'expérience nous aient mis à portée de le faire. » Mais, continue M. Vigné , pour ne point adopter le sentiment de M. Thillaye , nous ne l'en félici- terons pas moins de lavoir émis, puisqu’en cela même il a donné la preuve d'un esprit de recher- ches qui fait honneur à son zèle pour le progrès de la physique animale. » = Dans un ouvrage dont il a fait hommage l’année dernière à l'Académie , M, Girard, D. M. à Lyon, avait exposé sur la Rage une opinion qui a rencontré, parmi les hommes de l’art, un grand nombre de contradicteurs, et qui, sur le rapport de M. Boismare , a semblé à l'Académie elle-même n’être pas suflisamment appuyé sur les principes reçus , ni d'accord avec les faits que fournit l'observation. M. Girard, en adressant à la Compagnie une Morice sur la Rage, insérée dans la gazette de santé, la prie de vouloir bien donner son attention à quel- ques faits qu’il croit propres à confirmer l'opinion qu'il s'est formée sur la nature de cette maladie. L'Académie a examiné ces faits ,et aucun d’eux ne Jui à paru concluant en faveur de la nouvelle opinion , qu’elle persiste à regarder comme dénuée jusques à présent de preuvessuflisantes pour l’établir solidement. — M. Cosseaume , dans divers rapports qui réu« missent l'exactitude à la précision, a rendu compte des numéros 25, 24, 25 et 26 du Bulletin des Sciences médicales du Département de l’Eure. Notre confrère, sans rien omettre d’essentiel, a trouvé le moyen de faire connaître en peu de mots le grand nombre d’articles dont se composent les cahiers soumis à son examen. Cu) M. Gosseaume conclut que ces derniers bulletins des sciences médicales d’'Evreux contiennent une foule d’articles très-importants , qu’ils sont rédigés avec soin ,;et se font lire avec le plus grand intérêt, = M. J’igné nous a communiqué l’Eloge que vous l'aviez chargé de faire, de M. M.-A. Peut, D. M. à Lyon , membre non résidant de l'Académie. Par délibération de PAcadémie , cet Eloge sera imprimé en entier à la suite de ce rapport. ( l’oyez ci-après. ) = M. Robert a donné lecture d’un Essai sur l’Opium. Depuis Hippocrate jusqu’à nos jours , l'opium a été regardé tantôt comme un médicament héroïque , tantôt comme un des poisons les plus redoutables. Des idées aussi contradictoires mavaient pu prendre leur origine que dans l'ignorance où lon était de la nature et de la composition chimique de lopium. M. Derosne , pharmacien distingué de Paris, dans un excellent mémoire qu'il a publié ( Ann. de Chim., 1ome 45 ), avait dejà répandu un grand jour sur les principes constitutifs de lopium; mais il restait encore quelques incer- ütudes à lever, quelques doutes à éclaircir. Par des recherches particulières , par des expériences qui lui sont propres, M. Robert est heureusement parvenu à fixer enfin l'opinion sur un des médica- ments les plus intéressants pour l'art de guérir, Dans l'impossibilité où nous sommes de soumettre à la précision de l'analyse des détails historiques (12) assez étendus et une suite d'expériences nombreuses , nous nous bornerons à exposer les principaux résultats du travail: de notre confrère ; ils suff- ront pour en faire connaitre le mérite et l'im- portance. L'opium jouit de deux propriétés très-distinctes : l'une calmante, l'autre narcotique. De-là les efforts d’un grand nombre de pharmacologistes pour arriver à la séparation de la substance exclusive- ment calmante. M. Robert, après avoir rapporté les travaux entrepris à ce sujet par ceux qui l'ont précédé , continue ainsi: » En attribuant à un acide, quel qu'il soit, la dissolution du Sel d’opium , qu'on regarde au- jourd'hui comme le principe narcotique par excellence, M. Derosne a entrevu la vérité.... Il s'agissait de reconnaitre la nature de cet acide, » M. Robert entre ici dans le détail des expé- riences qu'il a faites pour déterminer ce point essentiel , et il conclut que l'acide soupconné par M. Derosne n’est autre chose que l'acide acétique. , Notre confrère remarque que lorsqu'une infusion d'opium a été précipitée par l'ammoniaque en excès, l'extrait qu’on en obtient n'est plus sus- ceptible de précipiter par ce réactif: d’où il tire cette conséquence très-importante que si la propriété narcotique de l'opium réside dans la substance saline qu'il contient, une goute d’am- moniaque suffira pour lindiquer dans les extraits d'opium qui n'auraient pas été préparés par la méthode particulière qu'il a suivie et qu'il developpe dans le cours de son mémoire. » I reste donc démontré , dit M. Robert, 1° que (525 } l'opium du commerce contient de l'acide acétique. » 2° Que c’est à cet acide que lon doit attri- buer la solubilité du Se! d'opium dans l'eau ; solubilité qui n'aurait pas lieu sans le secours de cet intermède. » 5° Qu'en enlevant l'acide acétique, soit par la distillation , soit au moyen des alcalis, on parvient à séparer la plus grande partie du sel narcotique qui en se précipitant trouble la liqueur et prend le plus souvent la forme cristalline. » Notre confrère a terminé son mémoire en pro- mettant à l’Académie de lui communiquer les expériences qu’il a entreprises à la suite de ces premiers trayaux. = Nous devons à M. Dubuc un Mémoire sur les Baies de nerprun ( Rhamnus catharticus ) et sur le suc qu'on en extrait, en pharmacie, pour l'usage médicinal , avec l'analyse de cette substance , et un procédé nouveau tendant à régulariser la confection du sirop purgatif qu'elle fournit. De savants médecins, des pharmaciens très-expé- rimentés , avaient remarqué que l'action du rob ou du sirop de nerprun n’est pas toujours uni- forme ; qu'elle se montre même quelquefois si peu énergique, qu’on serait tenté de refuser à ces deux préparations les propriétés qu'on leur attribue généralement. L'objet du mémoire de M. Dubuc est de rechercher la cause de ces variations dans le mode d'action du sirop de nerprun et du rob de la même substance , et d'examiner sil ne serait pas possible de préparer ces deux médicaments de manière à pouvoir en attendre des ellets aussi utiles que coustants. C4) Suivant notre confrère , l'inégalité d'action du sirop de nerprun , en médecine , tient à plusieurs causes: 1° il arrive souvent que les baies qu’on emploie à sa préparation n’ont pas acquis le dégré de maturité convenable ; 2° on se permet quelquefois d'ajouter de l’eau au suc exprimé des baies, ou même de le méler avec un suc étranger , celui des baies de bourdaine; 5° on ne suit pas exactement la recette indiquée dans le Codex de Paris, qui prescrit d'employer trois parties de suc épuré de nerprun sur deux parties de sucre ; 4° dans quelques pharmacies , aux deux substances qui entrent essentiellement dans la composition du sirop de nerprun, on ajoute du miel, de la can- nelle et du mastic. Pour prévenir les inconvénients qui résultent de ces modes vicieux de préparation , M. Dubuc indique les caractères auxquels il a reconnu , par l'expérience, le dégré de maturité que doivent avoir les baies de nerprun , et la densité qui caractérise un suc de bonne qualité et récem- ment préparé. Cette densité doit être de 12 degrés au moins à l’aréomètre de Baumé , ayant d’avoir fermenté, et de 10 dégrés après avoir subi la fermentation. La diminution de densité qui a lieu, soit par le calorique , soit par l'effet de la fermenta- tion, a pour cause la soustraction d’une matière qui se précipite de la liqueur dans lun comme dans l'autre cas, et que l’auteur du mémoire regarde comme un mélange de gluten et d'amidon. En évaporant le suc fermenté, jusqu’à consistance de miel, on obtient le rob ou S$apa de nerprun, dont une partie représente quatre parties de suc, ce qui permet de faire aisément le sirop dans tous les pays et dans tous les temps de l'année. (359) À ces deux moyens de faire le sirop, notre confrère en ajoute un troisième , qui consiste à faire dessécher les baies de la plante, en les ex- posant à une température de 32 à 55 dégrés. Les baies peuvent alors se conserver en bon état pendant plusieurs années , et servir également à préparer le sirop ou l'extrait de nerprun, et méme le vert de vessie, si utile en peinture. À ces renseignements si précieux pour art pharmaceutique ,; M. Dubuc ajoute l'analyse du suc du Rhamnus catharticus, comparée à celle du suc que fournit le Rhamnus frangula , la bourdaine ou faux nerprun. Sans entrer dans les détails analytiques présentés par notre confrère , nous dirons seulement que le rob de nerprun, évaporé d’abord à siccité et privé ensuite, 1° de la gomme, par l'alcool, 2° par léther , de la résine qu’il contient , n’est presque plus amer, et que ce résidu offre toutes les propriétés de l’extractif, D'après les données du mémoire , 100 parties de rob de nerprun , amené , par la dessiccation , à l’état pulvéculent , contiennent : Creme en ee Board in 0 Résine. 44. Au ste ce 8 i Extractil, dei ne lee sOIUS EAU nee Re Portes 5 CERTES 100, L'examen du Rhamnus frangula a présenté à notre confrère les observations suivantes : 1° le suc de cette espèce de Rhamnus est plus épais, plus visqueux, moins coloré, moins amer ; il ne verdit pas la salive comme celui du Ahamnus catharticus ; 2° les olcalis donnent au premier une (16) nuance d’un vert sale , tandis qu’ils colorent le second en beau vert clair ; 5° l'alcool faible sépare du suc du faux nerprun une quantité considérable de mucilage, et n’occasionne qu'un léger précipité dans le suc du vrai nerprun; 4° l’eflet de l'alcool rectifié et de l'éther est presque nul sur le rob*des baies de bourdaine, parce qu'il ne contient qu’une quantité presqu’inappréciable de résine. = Le même membre (M. Dubuc ) a fait connaitre à l'Académie l'analyse de la plante connue des botauistes sous le nom de V’ergerette äcre , ou d’Erigeron de Canada ( Erigeron Canadense ) , ayec une note sur la potasse et les matières salines qu'elle contient. Après avoir exposé ce que M. Bouillon-Lagrange a dit de l’Erigeron Canadense , en messidor an VI, dans le journal de pharmacie , et parlé de l’ou- vrage de MM. Perthuis et Lesage sur le méme sujet , notre confrère décrit les propriétés physiques de la plante , et donne le détail des expériences auxquelles il s'est livré pour en découvrir les propriétés chimiques. La conclusion principale de ce mémoire est que l’Erigeron Canadense est de toutes les plantes celle qui, sur un poids donné, fournit, par linci- nération , la plus grande quantité de potasse. — Organe de la Commission nommée pour cet objet, M. Robert a fait connaître à l’Académie le mémoire qui lui a été adressé par M..Boullay , pharmacien distingué à Paris, et membre non ré- sidant,. Ce mémoire a pour titre : Examen d'un nouveau principe immédiat auquel la coque du Levant ( ménisperme lacuneux }) doit ses qualités vénéneuses. » Les C17) » Les Indiens , dit M. le Rapporteur, sont les pre- Mmiers qui aient fait usage du méuisperme lacuneux pour prendre du poisson. Ils broyent ses baies demi-mûres avec des crustacés, et en forment une espèce de pâte qu’ils jettent dans l’eau après Pavoir divisée en boulettes, Le poisson qui les avaie éprouve une sorte d'ivresse qui le ramène à la surface de Veau , et permet de le prendre à la main. Bergius semble croire que le poisson pêché au moyen de cet appât peut être mangé sans danger. Bosc n’est pas de cet avis : il ne faudrait, dit-il, qu'un cuisinier négligent , qui aurait oublié de vider un poisson pris par ce moyen, pour occasionner au moins un yomissement violent, » M. Boullay s'est proposé de découvrir à quelle parue du fruit du ménisperme lacuneux apparte- nait la propriété vénéneuse qu'il manisfeste, et il ÿ est parvenu par le moyen suivant. On fait bouillir dans l'eau les semences de la coque du Levant, mondées de leur péticarpe; on filtre la décoction et on précipite par l'acétaie de plomb. On filtre de nouveau et on évapore avec précaution la liqueur jusqu'à consistance d'extrait. On dissout l'extrait dans l'alcool à 40 degrés ; on évapore de nouveaü, et on répète cette opération jusquà ce que le résidu de fl'évaporation soit soluble en totalité dans l'alcool et dans l'eau : ce résidu contient la substance amère unie à une partie colorante jaune. On agite une très-petite quantité d’eau à la surface de la ma- uüère ; l'eau dissout la partie colorante , et laisse des cristaux amers qu’il faut laver et purifier au moyen de l'alcool ». » M. Boullay donne ensuite les caractères à rap- peler eux-mêmes tout le bien qu’il a su faire ! Imposez donc, pour quelques instants , silence à votre douleur , vous, MEssiEURs, qu’anime un mème intérêt pour la vérité, pour la mémoire d’un collègue auquel vous avez voulu rendre publique- ment hommage, parce qu'il est digne de vous de oo €) Je dois des remerciments à M, le docteur Cartier pour avoir bien voulu laisser prendre , dans son excellent Eloge de D. Petit, des renseignements qui m'ont été transmis et me sont devenus fort utiles, | (3) propager, d’honorer l'amour des sciences et de l'humanité. Désigné pour remplir cette tâche, j'en ai reconnu toute la difüculté, et l'aurais remise en des mains plus exercées si je n'avais dû vous témoigner mon respectet ne m'étais flatté de vous trouver encore indulgents à mon égard. Ne serai-je pas sur-tout excusable à vos yeux si ce que j'aurais involontairement dérobe à l'éloge du sayant je le rends à l’homme qui toujours fut sen- sible et généreux ? Marc-Antoine Petit naquit à Lyon, le 5 novembre 2766. Dès le berceau, pour ainsi dire, s’annon- cèrent en lui les plus aimables qualités du cœur , et d’heureuses étincelles décelèrent l'un de ces géuies pour qui le temps n’a point d'intervalle , la science point de secrets , point de bornes. Un si doux présage appelait tous les moyens de le réaliser , et ce devoir fidèlement rempli a été une cause perpétuelle de satisfaction. Prompt à concevoir, à exécuter , à manifester sa reconnaissance , ainsi répondait l’ardent élève aux soins de ses premiers instituteurs , dans lesquels on croit voir l'industrieux agricole secondant les pro- grès d'un jeune arbre dont les rameaux prêteront un jour au voyageur fatigué leur ombre hospita- lière, et paieront au centuple le prix de sa culture. Cette attention scrupuleuse, de la part de ses maîtres, à bien enseigner leur plus cher disciple , devait entièrement tourner à l'avantage de l'art mé- . dical, qui, en revanche, lui assurait tant d’occa- sions de se faire estimer. 11 y fut initié par un homme de mérite, et put bientôt profiter de linstruc- tion pratique des hôpitaux, instruction fondamen- tale , inépuisable, Maïs combien ne Jui en coûta-t-il pas (33) pas pour s’accoutumer aux plaintes, aux gémisse« ments , et disposer, en quelque sorte, son ame compatissante à se taire devant l'appareil formidable de la douleur ! S'il est une science capable de rendre l'homme aussi parfait qu’il puisse être, c’est, sans contredit celle de l’homme lui-même , de l'homme invoquant de la pitié la plus tendre le remède aux maux qui l’assiégent ; puisque si, d’un côté , le besoin, le bonheur de soulager, de guérir son semblable Pattachent à la terre, de l’autre, ses regards se portent vers l'Auteur dont il admire la sagesse et la toute-puis- sance dans le plus grand de ses œuvres. Petit ne pouvait donc arriver par une voie plus sûre à cette perfection désirable, La médecine, offrant à son génie ses nombreuses difficultés, à son imagination ses beautés, ses mer- veilles, à son cœur le bat qu’elle se propose, ne l'excitait-elle pas à cultiver ses rares dispositions ? Aussi , toujours le trouvait-on attentif aux lecons de l'expérience, soigneux de les recueillir, de les mé- diter, habile à les mettre en pratique, et suppléant au nombre d’années qu’exige en général une grande étendue de connaissances par son aptitude singulière à les acquérir. Tandis qu’il en donnait ostensiblement les prémices à sa patrie, secrètement il lui vouait tous les avan- tages que, par la suite, il pourrait en obtenir : sen- timent vertueux qui n'avait pas peu contribué , sans doute, à ses premiers succès dans l’école de Lyon, et le suivit dans celle de Paris, dont il reçut le prix qu'à la fin de ses exercices elle décernait à Pelève qui s'y était le plus distingué, Peu de temps après , la place de chirurgien en chef de l'Hôtel-Dieu de Lyon ayant été mise au [e; (34) concours, il eut la gloire de la conquérir , malgré son jeune Âge, malgré tous les talents qui la lui dis- putérent, et l’on se félicita de voir , à cette époque mémorable, l’art triompher de lui-même, et l'amour- propre vancu par cette passion sublime qui nous porte à louer le mérite par-tout où ilest, et nous fait ardemment désirer de l'imiter. Petit ne se dissimula point la gravité des fonctions qu’il aurait à remplir, et s'expatria une seconde fois pour aller puiser dans la doctrine de Desault ces grands principes que lui-même il devait trans- mettre dans toute leur intégrité. Ensuite, il se rendit auprès de la faculté de Mont- pellier, satisfaite de pouvoir lui deferer le titre de docteur. Revétu de ce titre , qui dans sa personne acquit un nouveau lustre , il songea sérieusement aux obli- gatons que lui avait imposé le suffrage unanime de ses juges, de ses rivaux eux-mêmes, et se mit en possession de sa place, après la guerre cruelle qui avait désolé son pays, Remédier, s’il se pouvait, à de si tristes effets fut son premier désir et lun des puissants motifs de sa sollicitude pour les malheureux, dont il se montra moins encore le médecin que le père. Ami de ses élèves, il leur communiquait ses vastes connaissances avec tant de zèle que lou eût dit d’un prêt qu'il s'était obligé de rendre avec usure. Entrainé par ce zèle infatigable , il fonda dans l'Hôtel-Dieu de Lyon les cours publics d'anatomie et de chirurgie qui manquaient à ce magnifique éta- blissement, et, certes, personne ne fut plus digne que Marc-Antoine Petit de professer la science des Chauliac, des Paré, des Wiseman, des J.-L. Petit, des Desault; celle des Hérophile , des Vesale, des ET | Vieussens, des Malpighy, des Ruysch, des Wins- Jow ; des Morgagny , des Haller , des Mascagny, des Vicq-d’Azir, des Bichat, des Spallanzani , et de tant d’autres vrais praticiens, vrais anatomisies et physiologistes anciens et modernes, On aimera toujours à se rappeler sa méthode ct son exactitudé dans la démonstration, la facilité, la pureté de son élocution, et l'on croira toujours le voir et l'entendre , car il avait l'éloquence de la voix, des gestes et du cœur. Au commencement de chaque année scholaire, il prononcait un discours solemnel. Le premier est leloge de Desault. Avec quelle chaleur d'imagination , quel touchant intérêt, quelle dignité de style, quelle force de‘vérité n’y fait-il pas connaître ce grand-homme , dont le nom seul commande le respect ! Le second discours traite des rapports de la révo« lution française avec la santé publique, et tend à prouver spécialement l'eflet tonique de la terreur sur l’économie animale. Parmi les exemples que l'on y trouve, un surtout démontre invinciblement que la première action de cette passion véhémente est d'imprimer aux forces vitales une exaltation prodi- gieuse , à tous nos organes la plus grande énergie. Mais ne dois-je pas vous en épargner le récit, pour ne point jeter la tristesse dans vos ames? D’autres sentiments sont attachés à l'examen de la vie et des ouvrages de Marc-Antoine Petit. Et quoi de plus aimable que ses conseils sur la manière d'exercer la bienfaisance dans les hôpitaux ! et quel maïtre plus estimable, soit qu'il inspire à ses disciples l'amour du devoir, en leur exposant que l'homme porte en Jui-même un juge impartial et sévère de toutes ses actions ; l'amour du travail, eu C2 (56) les plaçant au milieu de l’immense carrière qu'ils ont à parcourir ; l’amour de leur art, en leur faisant envisager toute son importance ; l'amour de l'huma- nité, pour les mettre à portée d'opposer la douceur à l'emportement , la patience au reproche, le zèle à la méfiance, à l'incrédulité, l'espérance au décou- ragement , le bienfait à l'ingratitude ; soit qu’il cherche à les intéresser au sort de l’infortuné que la douleur et l’indigence conduisent dans ces asiles destinés à lui faire oublier l'une et Pautre; soit qu’il leur en- seigne à rivaliser du soin religieux d’alléger le poids de ses maux, de l'en affranchir , d’éloigner de sa vue l'affreux spectacle d'un malade expirant, et, sil faut que lui-même il périsse , le dérober , pour ainsi dire , à ses derniers instants ! Nous venons d'admirer le médecin vertueux, maintenant admirons, dans son discours sur la dou- leur, le médecin doué du meilleur esprit d’obser- vation ; €t, pour vous en convaincre, MESSIEURS , qu’il me suffise de dire ici que votre savant collègue a signalé toutes les causes de la douleur sous toutes ses formes , en a calculé tous les degrés et distingué le traitement , selon qu’elle est symptomatique, sym- pathique, etc.; qu'il l'a suivie dans ses effets meur- triers, dans ses eflets salutaires. Ainsi, la douleur aurait été créée pour notre conservation, pour notre perte, serait tout à-la-fois ministre de la vie et de la mort, A la suite de ce discours , éloquent comme tous ceux qui le précèdent, comme eux, monument du- rable du sentiment récl des infirmités, des mal- heurs d'autrui, se présente le compte que Petit rend à ses disciples de toutes les années qu'il a consa- crées à leur instruction particulière. Combien leur ame ne fut-elle pas émue par ce 37 ) compte exact d'un temps si bien employé pour eux, pour l’humanité soufirante ; par l'exposé fidèle de ses opérations , Où toujours ils avaient vu réunies l'adresse la plus rare et la plus douce compassion à l'aide de laquelle semblait s’effacer le sentier dou- loureux que sa main venait de se frayer ! Ceute partie si essentielle de l'art de guérir a été pour Marc-Antoine Petit l’objet de réflexions conti- nuelles, d'essais sans nombre , a été l’occasion prin- cipale de la haute réputation à laquelle il est parvenu, et du surnom glorieux que lui donne l’auteur de la Mosographie Chirurgicale , déjà si célèbre lui-même. Je ne saurais donc assez louer ce praticien, qui, marchant sur les traces des Guérin , des Pouteau, des Bouchet , a mér'té de revivre avec eux dans le cœur de ses concitoyens ; ce praticien , lémule de tous ses modèles, jusque dans le sincère aveu qu’ils ontfait de leurs propres fautes ; leur émule dans les opérations les plus délicates, puisqu'il égala Wenzel en dextérité; dans les opérations les plus graves, puisqu'il pourrait étre comparé, comme lithotomiste, à Raw , Chéselden, Côme, Le Cat, et leurs dignes successeurs ; dans celles qui laissent à peine entrevoir un rayon d'espérance, puisque , à l'instar de Manne, il extirpa complètement un polype nasal que son volume énorme rendait presque inexpugnable ; puis- qu'il sut, armé d’un fer ardent , combattre et vaincre le charbon le plus redoutable : expériences qui, comme celles de White, de Cooper, de Duret, d’Imbert de Lonnes, de Larrey, attestent moins la hardiesse de l'opérateur que la conscience de ses moyens, son courage héroïque et son extréme habi- leté, Mais, autant que dans l’art d'opérer , il excellait daus l'art de choisir les méthodes, de réduire au C5 ( 38 ) plus petit nombre d'instruments cet arsenal terrible qui rappelle la multiplicité des procédés, leurs com- plications, leurs dangers, et met dans toute son évidence la perfection actuelle de la médecine opé- ratoire , fondée sur l'anatomie ; de rendre plus rare, à l'exemple de Pibrac, de Louis, de Bilguer, de Desault, l'application de ces mêmes ageuts de dou-. leur et de destruction ; cependant, d’atiliser quels Ques-uns d'entre eux dans les cas mêmes où leur usage avrait été proscrit, témoin le succès éclatant qu’il obtint de la suture faite à l'extenseur de l'index, qui, depuis long-temps demeuré perclus, recouvra son état primitif ; d'observer toutes les ressources de la nature, et de l'abandonner à elle-même quand elle peut se suffire; témoin encore le part qu’il pre- nait relativement à la section, à la rupture du tendon d'Achille, en moins de trente jours parfaitement guéri dans la position moyenne entre l'extensiou et la flexion, de manière que , le malade étant debout, la plante du pied reposät sur le sol, Et pourquoi, Messieurs, faut-il que la crainte d’abuser de vos moments l'emporte sur le désir que j'aurais de vous faire connaître une infinité d’autres preuves de la sagacité de Marc-Antoine Petit, de son activité constante pour la gloire et les progrès de son art; comme si j'avais dû, par un sacrifice , vous disposer à celui de son dernier ouvrage ma- nuscrit, intitulé : Collection clinique , digne fruit, sans doute, de ses prefondes lumières , de son immense pratique ; sans doute aussi, dépositaire d’ebservations propres à faire apprécier le secret qu'il a révélé sur le mode heureux d'enlever aux dépôts les plus profonds l'humeur qu'ils contiennent , et à faire mettre la bonté , la franchise de son caractère en parallèle avec les élans de son génie créateur? (59) Tant de droits à la confiance publique ne pouvaient être méconnus, aussi lui fut-elle accordée sans ré- serve, aussi le suivit-elle jusqu'au tombeau , après avoir au loin porté son nom et ses brillauts succès. Cependant, si multipliées que fussent ses occu- pations, il ne put résister à son goût pour la poésie. C'est elle qui de tous ses charmes embellit les Epitres à Forlis, embellit les Leçons de l’Art, les Préceptes du cœur ; et quel témoignage plus irrécu- sable à cet égard que l'accueil fait notamment à la seconde de ces épitres par l'un des corps savants les plus illustres ! Ainsi , toujours accompagné des talents et des graces , il fixait tous les regards , attirait sur lui toutes les récompenses auxquelles il püt aspirer. Honoré dans sa patrie, recherché par tous ses collègues, agrégé à la plupart des réunions formées par leur utile et noble penchant pour les sciences, les arts et les lettres ; associé à la gloire de l’Institut, dont le choix flateur élevait la sienne à son plus haut période ; chéri des indigents , objet de sa pré- dilection , de ses largesses ; chéri de ses malades, auxquels il portait le plus vif intérêt ; jouissant de la félicité domestique et de toutes les délices de l'amitié, il n'avait plus que des vœux à faire pour la durée de son existence, qui devait, hélas! se terminer à l'époque où serait comblée pour lui la mesure des prospérités humaines. L'une de ces maladies supérieures à toutes les ressources de l’art est venue porter atteinte à cette existence précieuse , et l’a détruite par des coups d'autant plus certains que d'abord ils étaient plus leuts et plus obscurs. Ainsi, consumé par uu insecte rongeur, se flétrit et penche sur sa tige mourante le lys, ornement de nos jardins. C4 Cao) Dans cette longue épreuve à laquelle furent mis le courage et la constance de Marc-Antoine Petit, se fit éminemment remarquer sa confiance dans les vérités éternelles, et, le 7 juillet 1811, son ame remonta vers sa source, au milieu des vertus qu’il avait tant aimées, Heureux donc, à le meilleur des hommes, heureux Je siècle, heureuse la cité qui vont vu naître, puis- que tu les honores incontestablement lune et l'autre! Heureux tes disciples, puisqu'ils furent témoins de l'esprit de recherche, de perfectionnement, d'utilité publique qui présidait à tous tes instants et déter- minait leur emploi, puisque tant de fois ils tadmi- rérent alliant les sentiments les plus élevés avec la manière la plus noble de les exprimer , le bienfait avec cet air de complaisance qui lui donne tant de valeur ! Heureux moi-même si pour te louer digne- ment J'avais eu ton génie , tes talents! Heureux au moins situ me pardonnes d’avoir osé, avec la douce persuasion que tes mânes erraient autour de moi, acquitter devant eux Île juste tribut d’éloges que jamais tu n’ambitionnas, uniquement sensible aux jouissances que tes bonnes actions pouvaient te pro= curer ! C41) LS 1 RS AA Te MÉMOIRES Dont l'Académie a délibéré l'impression en entier dans ses Actes. OBSERVATIONS Sur l’ordre et les démonstrations de quelques théo« rémes relatifs à la théorie des équations numériques à une seule inconnue, 1. Avant la publication du Traité de la résolution des équations numériques , par M. Lagrange, toute la théorie des équations se bornait, dans nos auteurs classiques, à la recherche des racines commensu- rables, à la résolution générale des équations des quatre premiers degrés, et à quelques observations isolées sur les équations des degrés supérieurs. Depuis cette époque, l'enseignement de cette partie impor- tante des mathématiques a entièrement changé de face. Cet ouvrage admirable, où l'auteur expose d’une manière lumineuse ses belles découvertes et celles des grands géomètres qui l'ont précédé dans la même carrière, a servi de type à tous les traités qui ont été écrits depuis sur le même sujet, et l'algèbre est devenue comme une science nouvelle. Il ne nous resterait, sans doute , rien à désirer sur cette matière y, si des recherches d’un ordre encore plus élevé avaient permis à l'illustre auteur de la Résolution des équa- tions de refondre son ouvrage. Mais il a voulu con+ C4) server en son entier le mémoire qu'il avait publié dans le recueil de l'Académie de Berlin pour 1767, et s’est contenté d'y adapter des additions et des notes qui portent bien l'empreinte da génie de l’auteur, mais semblent, par leur forme méme , peu propres à présenter l’ensemble d’un édifice très-régulier et parfaitement coordonné dans trutes ses parties. 2. L'arrangement des parties n’est pas la seule difficulté qui se présente dans Pexposition de la thcorie des équations numériques : il faut encore poser un fondement solide et convenable , et trouver pour base de cetie théorie une proposition que lon puisse démontrer rigoureusement sans rien emprun- ter de cette même théorie ni de principes étrangers à la pure algèbre. M. Lagrange , dans le mémoire que je viens de citer, prend pour base ce théoréme, connu depuis jong-emps : » Si l’on a une équation quelconque, » et que l’on connaisse deux nombres tels qu’étant » substitués successivement à la place de l’inconnue » de cette équation ils donnent des résultats de signes » contraires, l’équation aura nécessairement au moins » une racive réelle, dont la valeur sera entre ces » deux nombres » ; et, après avoir fait la remarque qu’on n'avait coutume de le démontrer que par la ihéorie des lignes courbes , il essaie de le demon- trer directement. Mais sa démonstration est fondée sur la théorie même des équations ou sur la décom- position des polynomes en facteurs du premier degré, et l’auteur a observé depuis qu'elle supposait aussi connu le théorême sur la forme desracines imaginaires, dont la démonstration, d'après la marche qu’il avait suivie, dépendait elle-même du théorème qu’il s'agissait de démontrer. En conséquence, il a cherché de nouyeau à démontrer ce théorème par la nature (43) même des équations, indépendamment d'aucune de leurs propriétés. Cette nouvelie démonstration, qui a été adoptée par tous ceux qui ont donné, depuis cette remarque, les éléments de la théorie des équa- tions , m'est pas elle-même exempte d’un inconvé= mient assez grave; car elle est fondée sur le prin- cipe de continuité , principe qui , sans doute, est généralement vrai, mais tout aussi étranger à l'algèbre pure que le mouvement de deux points placés sur Ja même ligne droite qui sert à en éclaircir l'appli- cation. D'où il suit que cette démonstration, quoi- qu’elle ne laisse aucun doute sur la vérité de la pro- position , laisse cependant à désirer une autre qui soit tirée uniquement de la nature de la chose. La première démonstration donnée par M. Lagrange dans les mémoires de Berlin , remplirait parfaitement cette condition si les théorémes sur la forme des racines imaginaires et sur la composition ou décom- position des équations étaient démontrés d’une ma nière absolue et indépendante de la théorie des équations. 3. Le premier de ces deux ‘points est un de ceux dont les géomètres se sont le plus occupés dans le siècle dernier, On lit dans la neuvième note de M. Lagrange que d'Alembert est le premier qui ait envisagé cette question d’une manière générale. Pour la résoudre , il a employé avec beaucoup d'adresse la différentiation et l'intégration , et méme la théorie des courbes; et, malgré ces ressources étrangères à l’algébre, sa démonstration est restée incomplète. M. Lagrange a rempli cette lacune en faisant usage du calcul des dérivées; mais il faut convenir avec l'auteur que cet emploi n’est nullement naturel dans une question où il ne s’agit que d’une simple trans- formation algébrique. On peut ajouter que Ja base (44) de la théorie des fonctions dérivées dépend elle- méme de la théorie des équations. 4. Il est aisé de voir que le théoréme sur la forme des racines imaginaires peut se réduire à faire voir que toute équation de degré pair est décomposable en facteurs réels du second degré. Descartes l’a dé- montré pour les équations du quatrième degré , Hudde pour celles du sixième , etle P. Le Seur pour celles du degré 4 n + 2. La question, considerée dans sa généralité, a été l'objet des travaux d’Euler dans les mémoires de Berlin , 17951 ; de ceux de Foncenex dans les Miscellanea de Turin, 1759, et des re- cherches que M. Lagrange a consignées dans les mémoires de Berlin, 1772. Mais personne ne parait avoir été aussi heureux que M. Laplace dans cette recherche. Sa démonstration , imprimée dans Île recueil des Lecons de l’Ecole normale, a été plus ou moins heureusement adoptée par tous ceux qui ont écrit depuis sur la même question, et elle ne laisse rien à désirer comme simple preuve; mais elle re- pose sur la proposition n° 2, et j'ai déjà fait observer que la démonstration de celle-ci dépendait d’un prin- cipe étranger à l'algèbre. Je ne dirai rien du beau travail de M. Lagrange sur la résolution effective d'une équation donnée en ses facteurs réels de deux dimensions, et qui fait l'objet de sa dixième note. Il y suppose démontrés les théorèmes dont nous recherchons ici les démons- trations. 5, Il semb'e résulter de cet exposé historique , extrait des notes de M. Lagrange , que pour asseoir la théorie des équations sur une base prise dans la nature méme de la chose, il reste encore à trouver , 10 pour Je théorème sur la forme des racines imagi- waires, 2° pour la composition des équations, des C4) démonstrations qui soient fondées uniquement sur les simples opérations de l'algèbre ordinaire , et soient en même- temps indépendantes de cette même théorie des équations et de tout principe étranger à l’algèbre élémentaire. Dans le temps que j'étais professeur à Strasbourg, j'essayai de résoudre ce double probléme, et je donnais tous les ans à mes écoliers le résultat de mes essais sur cet objet. J'ai même publié, dans un pro- gramme imprimé en juillet 1807 , l'énoncé et l'ordre des propositions que j'en déduisais, Ce sont unique- ment ces souvenirs que je me propose de retracer dans ce mémoire. 6. Pour arriver à la forme des racines imaginaires, je partirai de ces deux définitions ou principes : 1° Que les quantités algébriques ne résultent que des opérations ordinaires de l'algèbre , qui sont: l'addition , la soustraction, la multiplication , la di- vision, l'élévation aux puissances et l'extraction des racines ; : 20 Que toute imaginaire algébrique n’est que le résultat de l'extraction de racines de degré pair de quantités algébriques négatives ; Et je démontrerai que toute expression de cctte nature peut se réduire à la forme AT D y — 1. 7. Je représenterai par g la quantité sous le signe radical, prise positivement, et je la regarderai d'abord comme ne provenant que des quatre premières opéra- üons de l’alsèbre. Je ferai observer ensuite que tout nombre pair peut être représenté par une puissance entière ide2, multipliée par un nombre impair L. Ainsi toute ima- ginaire de la nature de celles que je considère ici, C46) * JTE pourra étre représentée par PHR}/—39,P et R étant des quantités réelles quelconques. 2 Mais par la nature des radicaux 2 qg = VV a VTVLE I V/— 1 = — 1. Faisant donc, pour abréger, la quantité réelle R Vi V/g = Q, on aura P+rÿ—5 = ro ÿ Tout se réduit donc à faire voir que W/— 1 peut se mettre sous la forme À + B W— 1. Si i = 1, la chose est évidente. Faisons donc È— 2, puis ra V—i=a+s y: et voyons si l'on peut toujours trouver pour a et à des valeurs réelles. En carrant les deux membres de cette équation, on aura W/— 1 = a° + 2abÿ/—:1 — &*, équa- tion qui se partage dans les deux suivantes a° — £* =o,2ab =1; ce qui domea = += +—— 2e PER =: Donc, P+Q = 1 est réductible à la forme (47) À+B#/—1:,et peut étre représentée par cette expression. e Soit maintenant ? = 3; on aura |/— 1 — — 4 y —————— Vy— = PERRE V— 1. Faisons de plas (ire EN a =za+BV—:, nous en tirerons . A+BV—i1=e +248 /—1— 6; d'où A=a—{f",et B=2af; et par conséquent : IA CRT ERRRT 8 = VASE Donc « et 8 sont réelles, et P + Q es 1 peut sa ramener à la forme A + B W—1. Faisant successivement i = 4,i=5,i=06,etc., 16 32 6: on aura] — 1, Fu x; 7 —1, etc ;ét l'on dé- montrera de la même manière qu’elles sont réduc tibles à cette mé — (4 peut aussi se ramener à cette même forme , tant que g ne résulte que des quatre premières opérations de l'algèbre. 8. En se permettant l'usage des sinus et des cosi- nus , On arriverait tout de suite à ce résultat. En effet , tout nombre pair peut être represente par 2n,n étant un nombre entier. Représentons aussi par m un autre nombre entier, et par æ le quart C4) de la circonférence ou 100° centésimaux ; on aura at V—i1=(V—:) = { cos. (2m +1) = +V—: sin Cam4t)e À. Or , l'on sait que cette dernière expression est égale à co. [ Em | £ y sin [2241 | Donc aussi ” NT men cos. [eme « | 112 + ÿ/—:1 sin. pe z | : expression dont la forme revient à celle que nous avons annoncée. | Il est aisé de se convaincre que toutes les expres- sions de cette forme, combinées entr’elles d'une manière quelconque par les quatre premières voies de l'algèbre , pourront toujours se ramener à cetté même forme. 9. Généralisons maintenant le résultat que nous venons d'obtenir, et concevons que la quantité radi- cale, réelle d’ailleurs ou imaginaire, soit élevée à une puissance quelconque, réelle ou imaginaire. Tant que l’exposant ne sera pas lui - même affecté d'exposants , cette imaginaire ne pourra étre , d'après ce que nous venons de voir , que de la forme m+nV= (9 ie) , » 4» b, met n étant des quantités réelles , d’ailleurs positives, négatives ou uulles , comme op voudra. Or, C 49 ) Or, l'on sait que, par le simple développement du binome, qui peut être démontré d’une manière générale et indépendante de la théorie des équations, on peut toujours ramener l’expression précédente à la forme A +BV—1. On sait même qu’on pourrait en obtenir l’expres- sion finie sous cette méme forme , en introduisant dans le calcul des expressions trigonométriques et logarithmiques. Car en faisanta =—r cos.x,b=rsin.x, e = la base des logarithmes népériens, et en dési- gnant par / les Jogarithmes pris dans ce systéme, on aura Cie V—: m —nz, ire cos. (mx ds +n L'HLET nlr) + W—:1 sin. Cm +nir) À. 10. Enfin, si l’exposant a lui-même un exposant, et que l’imaginaire soit de la forme IP Q/R goss Pam jm + He ? r+l V—r onfera, par le n° précédent, ee +nV/—: ) (a +8 W—x) ; puis on réduira l'expression ( a+BY/—: a+tbW—: à la forme A + B W/—1. La marche de cette démonstration est évidente, et nous conclurons enfin le théorème énoncé ; savoir : que toute expression algébrique imaginaire est réduc- tible à La forme À + BV—1. 15. D'où il suit que, dans un polynome qui n'a que des coëfjicients réels , les facteurs imaginaires du pre- D C5) rnier degré sont toujours en nombre pair ; et s’il y en a un roprésenté par x—@—{@{W{—\,ily en a né- cessairement un autre représenté par x — a +8 V—: . Cette conclusion est connue depuis long-temps, et se trouve démontrée dans plusieurs traités d’'al- gébre. 12. Le produit des facteurs de chaque couple est donc de la forme (z—a) +6. ape Or, cette quantité est évidemment réelle et positive, tant que l’on ne substitue pour x que des nombres réels. Donc, dans tout polynome qui n’a que des coëf- Jficients réels, le produit des facteurs imaginaires de la même couple est toujours réel et positif. 15. D'où il suit évidemment, 10 Que tout polynome qui n’a que des coéfficients réels et n’est composé que de facteurs imaginaires du premier degré, reste toujours positif, quelque valeur réelle que l’on y substitue à la place de l'inconnue ; ° Que tout polynome de degré pair, et dont tous les coëfficients sont réels, est décomposable en fac- teurs réels du deuxième degré, s’il l’est en facteurs soit réels soit imaginaires du premier degré. 14. Ceute condition même fait l'objet de la seconde ques!ion, que nous avons annoncée au n° 5, sur la composition des polynomes. C’est uniquement, dit M. Lagrange, dans la transformation des polynomes qui en résulte, que consiste la théorie des équations , et les relations qui existent entre les seconds termes des facteurs simples et les coëfficients des polynomes, constituent les propriétés générales des équations. La possibilité de décomposer tout polynome en autant de facteurs du premier degré qu'il y a d'unités dans C51) l# nombre qui marque le degré du polynome, est donc le point fondamental de la théorie des équa- tions. Noûs'essaierons de la démontrer de deux mas nièrés, dont la première, moins rigoureuse peut- être , nous conduit seule directement au but que nous nous sommes proposé dans cet essai : elle est indiquée par la composition méme des polynomes. _15. Si l’on a un nombre quelconque m de binomes Ta, z—b,x—c,x—d, etc, à müliplier entre eux ; il est évident que, dans le développe- ment de ce produit, m 1° Le 1‘ terme sera æ , et l’exposant de x, ent passant d’un terme quelconque au suivant , dimi- nuera d’une unité jusqu’au dernier terme, où il des viendra nul ; 2° Tous les termes seront de la même dimension m; 5° Les 2 termes &, 8, c,d, etc., des binomes. entreront tous. de la même manière et n’entreront chacun qu’une fois dans chacun des termes de ce développement, D'où il est aisé de conclure que, dans le déve- loppement du produit d'un nombre m de binomes qui ont chacun x pour premier terme , mi I Le 2° terme est x multipliée par la somme des seconds termes des binomes ; 1 = 2 Le 5° terme, x multipliée par la somme des produits distincts de ces seconds termes , pris deux à deux ; m— 5 .-Le,4 terme, x multipliéé par la somme des produits distincts des seconds termes, pris trois x trois, DRM NE UT sd à Ve "5 à: à: à AUONNUSRAL NS. AF VS (52) Enfin, le n° terme est le produit de x multipliée par la somme des produits des seconds termes , pris n—1 àn—1 (*). m—n<+Li ant LES 16, D'où il suit que , par la multiplication d’un nombre m» de binomes x—a,x—b,rx—c,x—d, etc. , entre eux, on peut toujours former une équa- tion ii Ham né Ra + Bx Cr A Es: 24 ALPINE 0 du degré m , et dont tous les coëfficients soient tels que l’on veut, — A, + B,—C, etc. , pourvu toute- fois que l'on puisse toujours faire les #2 suppositions qui suivent : ÈS ANR SRE ee B = ab + ac + ad + be + bd + cd +, etc. [2], C = abc + abd + acd + bed + , etc. notes M 4DGAX,. sors Or , les indéterminées a, b,c, d, etc., qui sont au nombre de "7, permettent toujours de faire ces m supposilions. La preuve la plus directe de cette dernière pro: position consistérait, sans doute, à faire voir qu’il est toujours possible de déterminer a, & , c, d, etc., de manière à satisfaire à ces équations ; mais une pareille entreprise n’aboutirait tout au plus, suivant les apparences , qu'à ramener la ques- tion au même point. Heureusement il ne parait pas a (*) Un auteur anonyme et un autre qui s'est fait connaitre, ont fait i imprimer cette démonstration : je m'en servais loug-tempe avant cette publication, © 55,) impossible d'arriver au but sans toucher à cette diffi- culté. En effet, en éliminant des équations [>] toutes les indéterminées, excepté une, par exemple a, on trouvera m MI M — 2 m— 535 a —Aa +Ba —Ca se. M0, équation qui ne diffère de la proposée que par la dénomination de l’inconnue , et qui donne par con- séquent les mêmes valeurs pour cette même in- connue. Donc, les suppositions [2] reproduisent seules, et indépendamment de toute autre hypo- thèse , l'équation proposée. On peut donc toujours, en multipliant un nombre m de binomes simples entre eux , composer une équation quelconque donnée , et du degré m. Donc aussi Toute équation est décomposable en autant de fac- teurs du premier degré qu'il y a d'unités dans le nombre qui marque le degré de cette équation , et les racines en sont liées par les rapports méme qui exis- tent entre les coéfficients des polynomes énoncés au n° précédent. 17. Si donc on représente par æ, b, c, etc, les racines réelles, et par Fx le produit des facteurs imaginaires d'une équation quelconque, cette équa- tion pourra se mettre sous la forme (xz—a)(x—db) (x—c).....Fx = o. Soient maintenant p et 9 deux nombres tels que, substitués à la place de x dans cette équation, ils donnent des résultats de signe contraire, ou que l'on ait (p—a)(p—8) (p—c}.....Fp 20 (g—a)(q—b)(q—c)h.....Fqg S$ =0;, D 5 (C:.54) Pars ces deux inégalités, les facteurs Fp, F9 sont nécessairement de même signe (15, 1°). Il faut donc qu’il y ait un nombre impair de facteurs réels , comme P—aetq—a, qui soient de signe contraire. L’équa- ton a donc un nombre impair de racines réelles, qui sont chacune plus grandes ou plus petites que P; et plus petites ou plus grandes que g. Cette conclusion resterait la méme en supposant des racines égales en nombre quelconque dans l'équation proposée. Donc, si l’on a deux nombres pet q tels qu'étant substituëés successivement dans une équation quel- conque à la place de l’inconnue ils donnent des ré- sultats de signes contraires , cette équation aura né- cessairement un nombre impair de racines réelles dont les valeurs seront comprises chacune entre les nombres Ps. C’est le théoréme que nous avons déjà énoncé au commencement du n° 2. 18. Il suit de là, 19 Que toute équation de degré impair a nécessai- rement une racine réelle d’un signe contraire à celui de son dernier terme ; 2° Que toute équation d’un degré pair, et dont le dernier terme est négatif, a deux racines réelles , lune positive et l'autre négative. 19. Ces conséquences vont nous eonduire à dé- montrer de nouveau que toute équation a autant de racines qu'il y à d'unités dans le nombre qui en marque le degré, Si l'équation proposée en x est de degré impair } elle aura nécessairement une racine réelle a (n° 18), et sera, par conséquent, divisible par x— a, Cette division abaissera d’une unité le degré de l'équation. C55 Ÿ I suffira donc de considérer ici les équations dé degré pair. Faisons m nombre pair dans l'équation générale du n° 16 [1], et concevons d’abord que le dernier terme M soit négatif, L’équation aura nécessairement deux racines réelles, par le n° précédent ; et, quoi- que dans l’état actuel de l'algèbre il soit impossible d'assigner la valeur ou même la forme de ces ra- cines, il est cependant évident que ces valeurs ne peuvent étre que des fonctions des coëfflicients A , B,C,...... M, ou que Hi: 2 = RCARB,C,..... M} Eu divisant l'équation proposée par le produit des facteurs correspondant à ces deux racines , on. aurait un quotient de la forme IN == 2 M — 3 FRÈRE +Px Porte .…. a 5 V=0o, quation dont le degré est inférieur de deux unités celui de la proposée. Si le dernier terme M de la proposée était positif, on changerait , dans les valeurs [1] de x, les signes des termes affectés des puissances impaires de M, et , puisqu’en algèbre on opère de la même manière sur les quantités négatives et sur les quantités posi- tives , les valeurs n'en seraient pas moins celles de linconnue., À juger de la nature de ces racines par celle des racines que l’état actuel de l'algèbre permet d'obtenir, elles seront toutes deux réelles , où toutes deux les imaginaires de la même coûple ; et, dans ces deux cas, on obtiendrait éncore Péquation [2], dont tous les coéfficients seraient réels, et l'on en déduirait les mêmes conclusions. Mais, pour ne rien appuyer sur une analôgie done D 4 é “ à C56) nous ne connaissons pas les lois, supposons que l’une de ces racines soit réelle et l’autre imaginaire, ou qwelles soient toutes deux imaginaires et appar- tiennent à des couples différentes ; dans ce double cas , le produit des facteurs simples correspondant à ces deux racines sera imaginaire , et, en divisant l'équation proposée par ce “brbdait, on obtiendra un quotient de la forme TN = 2 TN = 5 MN— 4 [5e æ - <+px + gx 2 — dont un ou plusieurs coëfficients seront aussi ima- ginaires. En prenant, au lieu de cette équation, celle que nous avons désignée plus haut par [2], dans laquelle nous supposerons V négatif, on concevra encore que + aura deux valeurs réelles dont chacune pourra être représentée par T=f(P,Q,.... V); et comme les opérations se font sur les quantités positives et imaginaires de la même manière que sur les quautités négatives et réelles, on substituera dans ces racines de x, à la place de P,Q,....V, leurs valeurs p,q, .... #, qui conviennent à l'équa- uon [5], et cette dernière équation donnera elle- même deux valeurs pour x. En la divisant par le produit des facteurs correspondant à ces deux ra- cines , on aura un quotient dont le degré sera moindre de quatre unités que celui de la proposée. Ce quotient sera réel comme l'équation [>], ou ima- ginaire comme l’équation [5]. On y appliquera done les mêmes raisonnements, et l’on en couclura enfin la proposition qu’il s'agissait de démontrer. Cette démonstration n’est que le développement (57) des réflexions que M. Lacroix a présentées sur le méme sujet dans son Complément des éléments d’al- gèbre. En adoptant cette démonstration et celle du théoréme n° 17, fondée sur le principe de continuité, on pourrait, comme en suivant l’ordre que nous avons indiqué, commencer la théorie des équations par les propositions qui en découvrent le mieux la nature et les propriétés les plus générales. AR A AT A TS MÉrTaoDs très-simple pour déterminer les petits angles réfringents et la force réfractire d'un Prisme diaphane. 1. Pour déterminer la réfraction ordinaire dans un milieu donné, on a coutume de prendre un prisme triangulaire fait avec la matière méme qu’on veut soumettre à l'expérience, si cette matière est solide , ou bien lon forme avec trois verres plans, bien polis , et dont les faces opposées soient exactement parallèles, un prisme creux, propre à contenir le fluide dont on se propose de connaître la réfrac- tion. On introduit ensuite dans une chambre obscure un petit faisceau de rayons solaires , que l’on fait tomber sur ce prisme perpendiculairement à son axe. La lumière se réfracte en traversant le prisme, et le spectre coloré va se peindre sur le mur ou sur un carton qu’on a disposé à cet effet dans une situa- tion verticale. Si l'on a placé l'axe du prisme dans une position horizontale, et que les côtés de l'angle réfringent soient dirigés vers le haut, on remarque qu'en faisant tourner doucement le prisme autour de son axe, le spectre coloré monte ou descend, suiyant une verticale , et qu’il y a un point au-des- € 58) sous duquel il ne descend point : il y reste station- naire.. Dans cette position du prisme, la somme des réfractions par les deux faces du prisme est la plus petite possible ; ces deux réfractions sont égales entre elles, et l'angle de réfraction du rayon lumineux ;, à son entrée dans le prisme, est égal à la moitié de l'angle réfringent, Pour connaître l'angle d'incidence du rayon lus mineux sur le prisme, on mesure avec uu cercle, un quart de cercle, etc, , les angles que le rayon incident et le rayon émergent font avec l’horizon, 2t l’on ajoute ces deux angles ensemble ; ou l'on retranche Je second du premier , suivant que le spectre solaire est au-dessus ou au-dessous du plan horizontal, mené suivant l'axe du prisme, La moitié de cette somme ou de cette différence, ajoutée à langle de réfraction ou au demi-angle réftivgent , donne l’angle d'incidence. Ot, lon sait que le sinus d'incidence et le sinus de réfraction ordinaire sont entre eux dans un rapport constant pour les mêmes milieux. Pour déterminer ce rapport dans la matière du prisme démmé, il ne reste donc plus qu’à mesurer l'angte réfringent , et c'est ici, à mon avis, que se présente la plus grande difficulté attachée à cette méthode. On mesure ordinairement cet angle au moyen de deux règles que Pon dispose sur une table bien unie ; on place entre elles l’angle du prisme, et Von fait varier celui que forment les règles jusqu’à ee que cehes-ci ceineident avec les côtés du prisme. On trace ensuite sur la table Pawgle aïnsi formé par les deux règles, et on le suppose égal à l'angle ré- fringent du prisme, Mais il faut convenir qu'on ne sdwrait Compter sur lexactitude de ce procédé, et que ; dans l'application , l'erreur sera d'autant plus à craindre que l'angle réfringent sera plus petit, C59 ) À l'appui de cette opinion, j'oserais en appeler aux différences énormes que l'on remarque entre les valeurs des pouvoirs réfringents trouvés par Newton, et celles données par M. Rochon, membre de l’Institut de France. Aussi M. Rochon , malgré sa dextérité bien connue dans l'art délicat des expé- riences d'optique , paraît-il avoir soupçonné lPinexac- titude de ses résultats. Au mois de juillet 1805 , il envoya à M. Charles, son confrère à l’Institut, un petit prisme de diamant, et le fit prier d’en déter- miner l'angle réfringent. M. Charles, de concert avec M. Gonichon, opticien à Paris, mesura cet angle d’après la méthode graphique dont je viens de parler , et le trouva beaucoup trop petit, comme M. Rochon l'avait trouvé lui-même. Frappé de lim- perfection de ce procédé, et persuadé, d’ailleurs , qu'il ny a jamais de réfraction sans réflexion (?), j'entrevis la possibilité de déterminer et l'angle et le pouvoir réfringents du prisme par la même expe- rience. M. Charles voulut bien, à ma prière , faire cette expérience en présence de M. Gonichon; et, quoiqu'il ny eût pas apporté tout le soin dont il est capable , le résultat ne différa pas d’un 40"€ de celui de Newton. C'est cette méthode que je me propose de soumettre à l'Académie , en résolvant le probléme suivant : 2. Déterminer par une seule et même expérience l'angle réfringent d'un prisme triangulaire donné , et la force réfractive de la matière dont ce prisme est composé. @) M. alus a trouvé, depuis cette époque, un moyen de modifier la lumière de manière à ce qu’elle échappe à la ré flexion partielle qu’elle éprouve ordinairement à la surface des corps diaphanes et à celle des corps opaques polis, (Go) Je commencerai par faire observer que l’on est toujours maitre de donner la direction que l’on veut au rayon de lumière que l'on introduit dans une chambre par une petite ouverture. La meilleure machine pour cet effet est l'héliostat de Grayesande, Sur-tout ayec les changements qu'y a faits M. Malus. Mais on peut aussi y réussir par le moyen d'une machine trés-simple , composée de deux tuyaux de carton noir, doit l’un, intérieur et mobile autour de l'axe commun aux deux, porte à son extrémité un miroir plan, mobile aussi autour d’un axe per- pendiculaire à celui des tuyaux. Cette machine est, si je ne me trompe, de l'invention du P. Boschovich , qui l'a décrite dans la première de ses Dissertat'ons sur la lumière, Nollet en décrit une troisième au com- mencement du cinquième volume de ses Lecons de À hi rsique. Soit donc I une petite ouverture pratiquée dans le volet de la fenêtre d’une chambre obscure, Il la direction horizontale d’un rayon Jumineux qui , sans l'interposition du prisme, irait tomber perpendicu- lairement en L sur le mur ou sur le carton MN; ABC une section faite dans le prisme réfringent par un plan perpendiculaire à ses arêtes , et disposée horizontalement , de manière que le côté antérieur AB soit perpendiculaire au rayon incident ID. On s’assurera de cette dernière disposition en remar- quant que ce n’est que dans le cas de la perpen- dicularité que le rayon ID tombant en D est réflé- chi en I. On observera aussi que la situation cons- tante des rayons réfléchi et réfracté dans le pian du rayon incident et de la normale au point d’in- cidence, permet de considérer la section ABC du prisme à la place du prisme même. La partie du rayon lumineux ID qui pénétrera (61) dans le prisme en D, ira directementtomberenE, sur la face postérieure AC, où elle se partagera en deux ; June, en traversant AC, sera réfractée , et ira, en s’écartant de la cathète EP , se peindre quel- que part en R sur le mur MN; l’autre se réfléchira sur la face antérieure en F, en faisant l'angle de réflexion FEG égal à l'angle d'incidence DEG. En F, le rayon lumineux repassant en partie dans Pair, se réfractera suiyant une certaine droite FR’, en s'écartant encore de la normale HK , et se peindra en R’ sur le volet, sur le mur ou sur un carton dont le plan passe par 1 ; perpendiculairement aux droites horizontales 1D, FK. On mesurera les distances EL’, i’R, et l’on en conclura l'angle VER , dont la tangente = — : nous représenterons cet angle par #. De méme, les longueurs des droites FK-=1D,e RK=R'I—DF feront connaître l’angle R’ FK , que nous ferons = 4”. Il s’agit maintenant de déduire de ces données , 1° l'angle rétringent B A C , que nous désignerons par w; 29 le rapport 1 : 2, que nous supposerons être Ja rai- son constante du sinus d'incidence et du sinus de réfraction. D'abord , à cause de la similitude des triangles rectangles AEG, EDG, l'angle d'incidence DEG sur la face postérieure du prisme est égal à l'angle réfringent ©. D'ailleurs, l'angie de réfraction par cette même face est PER = © + «. On aura donc 1 :n 2: sin. © : sin, (w + «),ou, ce qui est la même chose, [r]..... n sin. w = sin. (w Lx). De plus, l'angle d'incidence en Fest EFH = FED 2 Fe] = 26, et l'angle de réfractiou est KFR' = 4. On aura donc aussi CG) L]l-:..,n sin, 2 © = sin, #. Eliminant » de ces deux équations , et substituänt à sin. 2 © sa valeur 2 sin, © cos, w, nous aurons [5]... sin, «’ = 2 cos. © sin. (w + ). ‘ C’est la formule qu en juillet 1805 je priai M: Charles de remettre à M. Rochon. On peut la mettre sous une forme plus commode pour le calcul, On sait, en eflet, que e étant la base des loga- rithmes népériens, l’on a 2 cos, © sin, (w + selaoipus LE 2 Ha) Vs (oO a) Vi — € Dh C2o+a)W—1 —(20+au) V—: e —e 2V—: aV—i ai PAC 0 ‘ + = sin, (20 + 4) + sin. & 2VW/—: Mettant cette valeur dans l'équation [5], on en dé- duira = sin. (20 +4) = sin. —sin.«, ou, enfin, [4]. sin. (20 + a) = 2 sin, (2) cos. : (a + a) (D (*) A la fin de 1807 , M. Henry, ingénieur-eéographe et astronome distingué, me demanda la solution du problème qui fait le sujet du n° à : je lui donnai cette formule [41. (65) . Cette équation fera connaitre l'angle à © 4 2,et, par conséquent , l'angle réfringent & : c’est la première, partie du probléme. La valeur de © , substituée dans [1] ou dans [2], donnera celle de n. Or, la différenoel des carrés des sinus d'incidence et de réfraction , divisée par le carré du sinus de réfraetion , et mul pliée par le carré de la vitesse de la lumière dans le vide, laquelle est constante, exprime l'action du milieu sur la lumière. Cette expression, divisée par la densité du milieu , sera donc celle de la force réfractive de ce même:milieu. La deuxième partie du probléme est donc aussi résolue, puisque le rapport » est connu. 5. Il faut cependant remarquer que la méthode, telle que je viens de l'exposer, n’est applicable qu'aux angles réfringents assez petits pour permettre aux rayonsincidents DE, sur la face postérieure AC, de se réfléchir sur la face antérieure A B. À cet effet, il est évident que l'angle réfringent doit être plus petit qu’un demi-angle droit : sans cette condiion ; le rayon réfléchi EF rie cor irait point de cet angle. Il faut aussi que le côté A B du triangle B A C ait une certaine longueur pour être rencontré par ce même rayon réfléchi. Pour éviter les tâtonnements dans cette recherche, on pourra, par la méthode graphique, déterminer la valeur approchée de «; puis faisant AF = a, AE=6,EF=c, on aura 7e J- Here c? cos. © — 2ab < d'où l'on tire a = b cos. © + (c + 6 sin: © ) (C—b sin.o ). Pour l'application de la méthode, il faut que le (64) côté AB soit plus grand que cette valeur de a , la- quelle sera elle-même d’autant plus petite que le rayon lumineux tombera plus près du sommet de l'angle réfringent. Je terminerai ces réflexions par rappeler que, vers la fin de 1807 , on s’est servi avec le plus grand avantage du cercle répétiteur pour résoudre le probléme dont je viens de m'occuper. On peut voir le parti qu’en a tiré M. Malus , au commencement de la deuxième partie de sa Théorie de la double réfraction de la lumière ,; mémoire couronné par l'Institut. MEMOIRE 1 N 20 RAA, Po A Pa MÉMOIRE Sur la Topographie et la Statistique de la ville de Quillebeuf et de l'embouchure de la Seine , ayant pour objet principal la navigation et la péche (*) ; Par M. Borsmarr , D. M. P. Cet amour de la vérité, ce besoin irrésistible de la découvrir , cette curiosité qui fait chercher à homme observateur des connaissances utiles, se développent en lui dès l’âge même où il ne peut encore montrer que du zèle. Avide de connaitre la nature jusque dans ses opérations les plus cachées, à peine est-il capable de quelque raisonnement, que sans cesse il s'exerce à considérer sous toutes leurs faces les phénomènes qui frappent ses yeux ; chacun de ses regards ajoute à ce qu’il a précédemment acquis un nouveau degré de consistance et de réalité. C'est ainsi que, peu-à-peu, son jugement se rectilie par l’application , et qu’il approche de plus près du résultat qui fait l'objet de ses recherches. Né avec ce goût décidé pour l'analyse et l'obser- vation, rien ne me paraissait plus propre à l'exercer (*) Ce mémoire fait suite à un autre mémoire sur la to- pographie et les constitutions médicales de la ville de Quille- beuf et des lieux circonvoisins , lu à l’Académie des Sciences , Belles-Lettres et arts de Rouen , le 30 novembre 1810, E (66) que les phénomènes variés qni se remarquent à l'em- bouchure de la Seine; aussi fixèrent-ils mon atten- tion pendant tout le temps que j’habitai ces parages- Sans autre but que ma propre satisfaction , et sans espoir de jamais voir mes observations utiles , je recueillis tout ee qu’offrait d'intéressant à mes yeux cette agréable contrée. La lecture de l'ouvrage justement estimé de M. Lepecq de la Clôture sur les maladies et constitu- tions épidémiques de la Normandie , m'offrit une occasion d'appliquer quelques-unes de mes remar- ques. J'y apperçus, dans la description de la ville de Quillebeuf et de ses épidémies , des erreurs qua je crus nécessaire de rectifier. J'en fis le sujet d’un mémoire que j'ai eu l'honneur de vouslire , MEsst&URS, dans votre séance du 30 novembre 1810. L'examen des maladies épidémiques qui peuvent régner à Quillebeuf étant l’objet principal de ce mémoire , il était utile de décrire les localités avec précision, de porter l'attention sur les phénomènes météorologiques qui, par leur action permanente ou accidentelle sur les habitants, modifient leurs consti- tutions ; de considérer la position de la ville de Quille- . beuf relativement aux vents , la nature de son sol, celle de ses eaux , les mœurs de ses habitants , leurs professions, la distribution des rues et des maisons, les émanations qui s’en exhalent, etc., pour en déduire les causes d’insalubrité qui peuvent en ré- sulter, et passer à l'examen des maladies qui s'y observent. Telle fut la base de ce travail, auquel je crus devoir joindre un plan des localités (*). a ——————————————— — —— —————— — ————— © Û_ — ûÛ — 2e (*) Ce plan est joint au premier mémoire, 67) Son Excellence le Ministre de l'intérieur, qui, malgré l'immense étendue des travaux du ministère, ne néglige rien de ce qui peut reculer les limies des connaissances humaines et procurer à ia France quelque nouveau moyen de prospérité, s’occupait alors de recueillir tout ce que l'embouchure de la Seine peut offrir de remarquable. Les dangers de sa navigation et l'amélioration dont elle pourrait être susceptible excitaient sur-tout sa sollicitude. Ou essaya de me persuader que mon faible travail pourrait offrir à Son Excellence quelques rense'grements utiles, et je crus devoir céder au conseil qui me fut donné de lui en adresser copie. Le Ministre , toujours plein de bienveillance pour ceux de ses administrés qui lui prouvent de la bonne volonté, a bien voulu l’accueillir favorable- ment , et na fait l'honneur de me charger , par une lettre contenant des remerciments flarteurs , de ui donner un travail supplémentaire qui puisse lui offrir la solution d'une série de questions sur les- quelles il appelle spécialement mon attention. Jaloux de prouver à Son Excellence mon respec- tueux dévouement , j'ai eu l'honneur de lui pré- senter ce qui m'a paru digne de remarque à l'em- bouchure de la Seine , et qui n'a pas été placé dans mon premier mémoire. $es questions out formé la base de ce nouveau travail, et l'ont divisé en autant de chapitres particuliers. Je m'étais proposé, Mes- sIEURS, de le rédiger dans l'unique intention d’en faire hommage à l’Académie ; mais j'ai dû souscrire à la demande de Son Excellence, et j'ai l'honneur de vous en offrir un double aujourd'hui. En vain, Messieurs , vous y chercheriez la pompe et les ornements du style oratoire ; je parlerai le längage simple d'un témoin qui dépose fidèlement Ha (68 ) ce qu'il a vu, ce qu'il a observé avec la plus scrupu- leuse attention, Embouchure de la Seine. Par cette désignation, on doit entendre rigoureu- sement l'espèce de baie dont les rivages sont formés, au nord, par les côtes du pays de Caux qui, en partant de la ville du Havre, remontent le long de Ja Seine jusqu'aux approches de Lillebonne, et ,au sud, par la chaîne de rochers qui s'étend des en- virons de Villerville jusqu’à Quillebeuf ; mais notre objet principal étant de considérer les obstacles qu'éprouve la nayigation à l'embouchure de la Seine, nous étendrons cette dénomination jusques à la Mailleraye, où cessent les écueils à redouter. Ce n’est point ici le lieu de décrire avec détail les rives de cette partie de la Seine ; ce serait don- ner à mon travail une extension pour le moins inu- le. Parmi les différents pays qui la bordent, la ville de Quillebeuf, célèbre par les dangers que son passage offre à Ja navigation, fixera spéciale- ment mOn attention sous le rapport de sa situation, de son commerce, de l'importance de son port, de l'industrie de ses habitants , de leur langage ; je décrirai ensuite les bancs de sable , les rochers et les autres écueils funestes qui se rencontrent soit à Quille- beuf, soit dans embouchure de la Seine en genéral, etje rapporterai les phénomènes auxquels donnent lieu la barre, les courants, les marées, les vents, les pluies , etc. Tels sont les différents points sur lesquels Son Excellence a désiré des renseignements. La ville de Quillebeuf, comme je lai dit dans mon premier mémoire , est placée à l'extrémité d'une langue formée par la pointe d’un rocher qui se pro- (69 ) jète dans la Seine. Son port n'offre aucun commerce intéressant ; on ny embarque rien; on n’y débarque maintenant que la brique et la pierre nécessaires aux constructions de la ville, du bois à brüler qui se tire de la forét de Brotonne, et quelque peu d’avoine venant du pays de Caux. Lorsque la navi- gation du long cours était praticable, on y débar- quait des cuirs pour les manufactures de Pont-Aude- mer et un peu de savon. Mais tous les navires qui font la navigation de Ÿa Seine étant rigoureusement forcés de poser à Quille- beuf, sauf quelques légères exceptions ; son port devient, sous ce point de vue, d’une assez grande importance, En montant la rivière , si les navires apportent avec eux vent et marée favorables, ils peuvent se dispenser de poser à Quillebeuf ; alors ils gagnent Villequier d'une seule marée. Mais en descendant il n’en est pas ainsi : forcés de passer la traverse d’Aïzier à la pleine mer, ou même un peu plus tard , ils w’arrivent à Quillebeuf qu’à mer basse, et doivent nécessairement y poser et y séjourner plus ou moins long-temps. On a vu souvent, dans les temps où la liberté des mers permettait à la ville de Rouen d’étendre son commerce, 100 navires et plus à-la-fois à la posée de Quillebeuf, attendant un concours favorable des vents et des grandes ma- rées pour continuer leur route. Les navires d'un grand tirant d’eau restaient quelquefois à Quillebeuf cinq à six semaines avant de pouvoir en sortir, si les vents d’amont ne soufflaient point dans les marées dont ils avaient besoin. Pour donner à-la-fois une idée de l'importance du port de Quillebeuf et du commerce de Rouen par la rivière, j'ai fait le dénombrement des navires qui ont posé à Quillebeuf, en descendant la Seine, pen= E5 RATS D grandes En Co) dant, 1° l’année 1780, qui m’a paru occuper le terme moyen parmi les années de liberté des mers avant Ja révolution ; 2° l’an 10, durant lequel cette même liberté permit aux négociants de Rouen de reprendre leurs anciennes relations commerciales ; 3° enfin, l’année 1810, qui n'a permis que le petit cabotage de la rivière. Dans l'intention de faire connaître aussi d’une manière complète les rapports de la place de Rouen avec les puissances étrangères en temps de paix , j'ai placé dans une colonne particulière les navires de chaque nation , ‘et j'ai fait pour tous une masse du port en tonneaux , ainsi que le présente le tableau suivant : ‘sal IAB N u? 2P s10d np 21quou np Em | IVLOL *xneouu07 *S2JITAUNT us 2Pp 104 21QUON "SIVTIONV *xurouuo] *S2ITAUNT ua 2P 1104 31qtu0 NT ‘SIONY(I 19 SI0agnsS SNAISSANG ‘SIVANV'11OH ‘XnEJuuUO] *SHITACN] ua ap 1104 91qtu0 NT ‘SIVONVUA *OTQ1 «dos e[opor C72) On voit par ce tableau qu’en temps de paix mari. time , il montait à Rouen , année moyenne , 2075 uavires donnant 137,818 tonneaux de marchandises , que lon peut facilement porter à 150,000, les na- vires étant ordinairement jaugés au-dessous de leur véritable port, ce qui, à raison de 2000 livres pesant le tonneau , donne 500,000,000 livres pesant de mar- chandises apportées à Rouen, d’où il en est expé- dié à peu-près la même quantité pour le dehors. Mais , revenons à Quillebeuf en particulier : Les moyens d'existence de ses habitants se tirent principalement de la péche , du pilotage , et en gé- néra! de la navigation pour les hommes, et de la fabrication de la dentelle pour les femmes. Je parlerai d’abord de cette dernière branche d'industrie comme devant occuper une très-petite place parmi les ressources des Quillebois. Toutes les femmes se livrent exclusivement à ce genre de travail; mais leurs dentelles ne sont pas d'un grand prix. Tissues d'un fil assez résistant, ces dentelles ont le mérite de supporter le blanchissage sans en beaucoup sonfirir , mais elles ne flattent pas l'œil ; eiles ressemblent en tout à celles connues dans le commerce sous la dénomination de den- te les d'Hontleur ; leur prix s'élève de 75 centimes à 25 francs laune , et ne produit point à l’ouvrière un gain proportionné à sa peine. Elle est en général peu recherchée , et ne se vend qu'aux paysannes. Dans les remps où la navigation procure de l'aisance à Quiliebeuf, les femmes vendent peu de dentelle , elles la réservent pour leurs ajustements qui d’ail- leurs en exigent beaucoup. (75) Péche, La péche n’est pas d’une grande importance dans la baie qui se trouve entre Honfleur , le Havre et Quillebeuf , et le nombre des pécheurs y est peu considérable, C'est sur le banc du Tot qu'elle de- vient plus intéressante sous le rapport du produit ; mais le poisson qu’on y pêche est en général moins bon que celui qui se trouve un peu plus haut en rivière. Dans la baie dont il vient d’être parlé, la pêche ne se fait qu'au moyen de guideaux : la violence de la barre et des courants qui la suivent ne permet pas l'emploi d’autres procédés. Malgré les reproches qu’on peut faire à ces filets , ils sont employés depuis des siècles à l'embouchure de la Seine. Le poisson qu’on en retire est le plus souvent mort et mutilé à raison de la force avec laquelle il est entassé par les flots dans les guideaux ; il y est battu depuis l’arrivée de la barre jusqu’à la pleine mer , instant où la cessation des courants permet aux pêcheurs d'en charger des chaloupes et de le déposer sur le quai pour en faire un choix. Les guideaux présentent encore un autre inconvénient d’une plus grande con- séquence ; beaucoup de petits poissons encore sus- ceptibles d'accroissement s y trouvent arrêtés comme les gros et y périssent avant qu’on puisse les re- jeter. Le Gouvernement , pour éviter cette fà- cheuse destruction , fixa autrefois , par des ordon- pances , l'ouverture. à donner aux mailles des gui- deaux. M. le lieuteuant-général de lamirauté de Quillebeuf était chargé de l'exécution des statuts ; en conséquence il visitait les guideaux à des époques assezrapprochées , et faisait brûler publiquement ceux C74) qui n'étaient pas dans les dimensions prescrites, Les pêcheurs , n’éprouvant actuellement aucune opposi- tion , se servent de filets à trop petites mailles, parce qu'ils augmentent ainsi le volume de leur pêche. Les guideaux sont en général placés d'une manière fixe. Il en existe une rangée sur le rocher de la pointe de Quillebeuf , dans la direction indiquée sur le plan déjà cité ; des pieux fortement enfoncés dans le roc et soutenus par des haubans les retiennent contre la violence des courants auxquels ils ont à résister. Une autre ligne de guideaux est placée à Berville, quatre lieues au-dessous de Quillebeuf, sur la rive qui conduit à Honfleur ; on en trouve peu vers le nord , où ils géneraient la navigation , le chenal con- servant presque toujours cette direction. La dernière rangée de guideaux qui se trouve dans la Seine est établie sur l'extrémité sud-est du banc du Tot. On en place quelquefois , en été, sur les bancs de sable du milieu de la Seine, mais en très-petit nombre et pour quelques marées seulement. Les guideaux reçoivent de toutes les espèces de poissons ; cependant il en est quelques-unes qui s’y rencontrent rarement , quoique fort abondantes dans la Seine , et qui font l’objet d’une péche particulière dont j'indiquerai les procédés après avoir donné la nomenclature des poissons qui fixent l'attention des pécheurs à l'embouchure de la Seine, en suivant les dénominations adoptées par M. Lacépède, Beaucoup de petits poissons de différentes espèces sont engloutis dans les guideaux, et n'ont d'autre utilité que de servir d'appât pour la péche des autres : ils ne méritent point d’être cités ici; je ne parlerai que de ceux qui peuvent se vendre au marché. Parmi (78) ceux-ci on distingue : le saumon (genre salmones), l’alose ( genre clupées ) , le cahuhau et la feinte , le cradeau , l’anchois , le hareng ( même genre ), l'éperlan (genre osmères), la flondre ( genre pleu- rouectes) , l’anguille et le congre (genre murènes) , la lamproie et le lamproyon ( genre petromyson ) , la loche (genre cobites), l'épinoche ( genre gasté- rostées ), le mulet ( genre muges. ) Les crustacées fournissent aussi deux espèces assez abondantes, le crabe et la creveite. Dans les gros temps, on trouve dans la Seine le marsouin (genre dauphins ). La chair de ce cétacée est peu estimée dans le pays , cependant les pauvres en mangent ; mais il est recherché à cause de la grande quantité d'huile qu’on eu retire. Les poissons qui se péchent autrement qu'avec les guideaux sont l’alose, la feinte, l'éperlan , la flondre et l'anguille, ? L’alose est assez abondante sur le banc du Tot et plus haut en rivière ; elle se péche avec un filet appelé #ramail , dont la description se trouve dans l’histoire naturelle de M. Lacépède. La feinte et Pé- perlan se péchent sur le même banc et avec un filec de même forme que le tramail, mais plus petit et à plus petites mailles que celui-ci, et qu’on appelle par cette raison sramillon, On emploie quelquefois le filet connu sous le nom de seine, mais il est peu en usage dans le bas de la rivière, La pêche de l’alose commence aux premiers jours du printemps et se prolonge pendant six semaines au plus ; la feinte lui succède immédiatement et continue pendant une grande partie de l'été. ‘ L’eperlan se pêche en tout temps à Quillebeuf , mais il west beau et plein que du mois de novembre au mois de mars ; on le péche abondamment aussi (76) dans les guideaux , mais il est moins beau; il est battu et mou., ce qui lui fait perdre de sa qualité. Les pêcheurs ont remarqué que , dans les temps doux , l’éperlan repose plus ordinairement sur les bancs et se tient haut , et que , lorsqu'il fait froid, il ne se pêche que dans le chenal où il se tient à une grande profondeur d’eau. ] La flondre est un des poissons les plus abondants à Quillebeuf ; elle $ y pêche toute l’année , mais elle est meilleure en hiver. Elle se trouve dans les gui- deaux , où elle est battue comme les autres poissons ; cependant elle est dure et en souffre smnoins. Elle est aussi l’objet d’une pêche particulière qui se fait à la ligne ou avec un filet qu'on appelle fourée ; Y'hamecon de la ligne destinée à la péche de la flondre est fait avec l'aubépine. On appelle fourée un filet qu’on attache sur les bancs de sable avec de petits pieux placés circulairement de manière à former un pare ouvert dans une petite partie par laquelle les flondres sintroduisent. On environne ainsi les portions de bancs qui offrent des petits lacs ; les flondres y restent avec assez d'eau , et quand la mer se retire on les prend à la main. L’anguille est aussi fort commune à Quillebeuf et se pêche de diflérentes manières. Les guideaux en reçoivent beaucoup ; on en prend à la ligne , àla vermille et dans les nasses. La ligne est le procédé le plus avantageux et celui que l'on préfère. Les haims en sont de fer ; on les garnit de petits poissons, mais sur-tont de vers. La vermille a le grand défaut de détruire les petites anguilles , mais on en use peu; elle n'est guère employée que par les enfants, comme un amusement, La nasse est exemple d’in- convénients ; on s'en sert le long des rivages, La creyelte ne se pêche que dans les guideaux ; (pr) elle est très - abondante à Berville et à Quillebeuf. Les crabes se ramassent à la basse-mer, dans les rochers et sous les pierres. Le marsouin se trouve quelquefois entrainé dans les guideaux que souvent il déchire ; les petits seu- lement y sont retenus. C’est ordinairement à la marée basse qu’on les trouve dans des lacs formés sur les bancs par quelques souilles de navires, où on les tue , soit à coups de fusil , soit avec des ins- truments piquants ou tranchants, Avant de terminer ce qui est relatif aux poissons, je m'arréterai un instant à leur importance , sous le rapport de leur prix. L’alose est le poisson dont on retire un plus grand produit pendant le peu de temps qu’elle se pêche ; après elle, c’est la feinte qui paie le mieux les peines des pêcheurs. L’éperlan , la flondre et l'anguille se pêchent toute l’année, mais ne sont pas d'une abon- dance ni d’un prix proportionné à celui de l'alose. La lamproie se vend cher, mais elle ne se trouve qu’en petite quantité. Le lamproyon est d’un prix médiocre, quoiqu’assez généralement recherché pour le goût , et on en pêche peu. Le cradeau ne se pêche qu'au mois d'avril, et en nombre prodigieux, Il est très-délicat lorsqu'il sort de l’eau ; cependant il a peu de valeur, à raison de la facilité avec laquelle il se gâte. On n’est point dans l'usage à Quillebeuf de le saler comme on fait de la sardine dans là mé- diterranée. On pêche peu d'anchois. Le hareng ne se trouve également à Quillebeuf qu'en petite quaa- tité , let cela dans certains printemps seulement. Les autres poissons, dont nous avons cité le nom plus haut ,se pêchent en si petit nombre que leur produit doic être d’une faible considération. La crevette se retire des suideaux par corbeilles, (78) mais elle est d'un très-médiocre prix; il en est de méme des crabes. Le marsouin ne se pêche qu'accidentellement et ne doit pas entrer dans le patrimoine des pêcheurs. La pêche a toujours été libre à laval de la rade de Quillebeuf comme en mer; mais on ra jamais pêché à l'amont de la ville sans payer un droit ou louer les bancs sur lesquels les pécheries s'éta- blissent. Pour déterminer les limites de l’exercice des droits , on conçoit une ligne droite ayant pour extrémités l’église de Saint-Georges et le bout du quai de l’amont de Quillebeuf, Les pécheurs fabriquent eux-mêmes les filets et les lignes qu'ils emploient, mais ils n'en font point commerce ; c’est pour eux une occupation dans l'intervalle des marées. En hiver, lorsque la crainte de voir leurs filets emportés par les glaces prive les Quillebois des produits de la pêche, ils en trouvent une indemnité dans un autre genre d'industrie, Lors des gelées , les oiseaux de mer se réunissent sur les bancs qui bordent les rivages, et y cherchent leur nourriture; alors, on y place des filets appelés plantières ; c'est une ficelle à laquelle sont attachés des nœuds cou Jlants de crin. On assujétit cette plantière avec de petits pieux à uue élévation d’environ quatre pouces; on sème dans le trajet de ces nœuds un appt que les oiseaux viennent manger , et les crins dans lesquels ils s'engagent les retiennent. On prend par ce moyen , des canards, des sarcelles , des vingeons, des graves, des bécassines , des vaneaux , etc. Un filet de même forme et de même nom , à crins plus fins, est employé encore pour prendre des alouettes à Quillebeuf , où elles se trouvent par milliers. Lorsque la neige couvre la terre , (79) elles s'attroupent le long des rivages ; mais, forcées par le flot de se retirer, elles se jettent dans la campagne de Saint-Aubin, où, pendant la nuit, on a eu soin de tendre les plantières. On balaye la neige dans la direction de la plantière et on y sème du grain pour les attirer. Pilotage. Les dangers de la navigation de la Seine exigent rigoureusement le secours de pilotes qui, connaissant les rochers et les bancs fixes , et observant sans cesse les variations des bancs mobiles , des posées, des courants , etc. , puissent garantir les navires du péril qui les menace à claque instant. Cette nécessité reconnue , 11 était indispensable de régler/les droits et les devoirs tant des capitaines que des pilotes pour la sûreté du commerce. On pouvait craindre que les capitaines ,trop confiants dans leurs moyens , ou pressés par la cupidité , ne récla- massent point le secours du pilote, ou que celui-ci, profitant de la facilité avec laquelle l'homme en danger sacrifie sa fortune , n’exigeit des salaires trop élevés, ou refusàt ses services. Il etait utile aussi de fixer le nombre des pilotes de chaque partie de la Seine , afin que tous les navires pussent étre secourus. Toutes ces considérations ont donné lieu à diverses ordonnances des amiraux et des ministres de la marine. Je vais rapporter l’ordre établi dans le pilotage par celles actuellement en vigueur. Tout navire faisant la navigation du long cours, du grand et du petit cabotage , est tenu de prendre un pilote. On excepte cependant de ceue rigueur les navires au-dessous de 20 tonneaux , commandés par un maitre ou patron résidant daus le cercle ou ( 80 ) les limites des lamaneurs de Quillebeuf , et faisant babituellement le cabotage de la rivière de Seine ; mais alors le maître ou patron est responsable de tout événement. Les pilotes de la Seine sont divisés en troïs stations : la première à Quillebeuf, la seconde à Villequier et la troisième à Rouen. Le nombre des pilotes de Quillebeuf est fixé à 81, et sera porté à la paix à 99; il y aura en outre 12 aspirants. Les pilotes de Quillebeuf doivent conduire les navires du Havre ou d’Honfleur à Villequier , et réciproquement. À cet effet , ils sont tenus de se rendre dans ces différentes stations pour y attendre les navires, et de s’y faire inscrire sur un registre, afin d'établir le tour de service, Ils doivent visiter souvent les chemins du Havre à Villequier, et s'assurer des changements qui se seraient opérés dans la disposition des bancs. Leurs salaires sont fixés par un tarif basé sur le port en tonneaux du navire. Les bâtiments faisant la navigation du long cours paient davantage, et les étrangers y ajoutent encore un tiers en sus. Les bâtiments sur leur lest ne paient que moitié du salaire fixé par le tarif. Les aspirants sont assimilés en tout aux pilotes ; ceux-ci ont seulement la préférence lorsqu'ils se trouvent en concurrence pour la conduite d’un navire. Nul n’est reçu pilote sil n’est âgé de vingt-cinq ans au moins, et s’il ne justifie de mois de navigation sur les bâtiments de commerce , et de mois sur les bâtiments de l'Etat. Le candidat qui réunit toutes les conditions exi- gées se présente devant le commissaire de marine de sou quartier, pour y être admis à un examen qui CS) qui sé fait par d'anciens pilotes ; le commissairé ie marine désigne les examinateurs , préside à l’examen et en dresse un acte qu'il envoie à Son Excellence le Ministre de la marine. Le nombre des pilotes de Villequier est fixé à 59, et celui des aspirants à 4. Ils sont tenus de conduire les navires de Villes quier à la Mailleraye , et de la Mailleraye à Ville- quier. Ils doivent même aller jusqu’à Rouen ils en sont requis par les capitaines ; mais ils ne peu vent exiger de ceux-ci qu’ils les conservent. De la Müilleraye à Rouen il n’y a point de pilotes; cependant d'anciens capitaines et maitres au cabo= tage sont choisis par le commissaire de marine , le tribunal de commerce et le capitaine de port, pour conduire et piloter les navires pendant ce trajet, lorsqu'ils en sont requis par les capitaines, ce qui arrive rarement, Les étrangers seulement ont besoin de leurs services. Aucun pilote ne peut piloter un navire pendant la nuit, depuis l'embouchure de la Seine jusqu’au- dessus de la Mailleraye , à moins qu’il ne soit déjx en route et exposé à quelque danger. Il est maintenu én résidence , à Quillebeuf, un ancien officier de marine qui, sous le ütre de chef du pilotage , a la police directe sur les pilotes de Quillebeuf et de Villequier , quilui sont subordonnés. Il est obligé de rendre compte toutes les semaines, au chef maritime de l’arrondissement du Havre , de tout ce qui s’est passé d’intéressant pour lé ser- vice, et de joindre à son rapport un détail exact des changements des bancs. Il est chargé de faire placer sur les roches et les carcasses de navires perdus, des balises, des bouées ou des tonnes , pour servir de renseignement aux pilotes. E (8) Le chef du pilotage exige des pilotes des rap- ports sur les sondes des passages et les change- ments des bancs ; il en tient registre, et note avec soin les vents qui règnent pendant le jour et la marée. Il prononce sur les difficultés qui s'élèvent pour les salaires des pilotes, des lamaneurs , etc. Il pu- nit ceux qu’il juge coupables, et en rend compte, dans son rapport , au chef militaire des mouvements maritimes au Havre. Dans le cas d’avaries, il reçoit les déclarations des capitaines , en dresse procès-verbal ; etl'envoie avec son opinion aux tribunaux de commerce des ports où se rendent les bâtiments. Le chef du pilotage dirige le service des pilotes, exerce la police sur les bâtiments qui montent et descendent la rivière , ordonne les secours à porter à ceux qui courent des dangers, veille à ce que les bateaux toueurs (*) soient armés et en état d’aller au secours des bâtiments au premier signal de détresse. Bancs à fonds de roche er de suble mouvant. Les bancs qui présentent des écueils , plus ou moins dangereux, à la navigation de la Seine , sont placés entre la rade du Havre et la Mailleraye. Les uns sont fixes, et par conséquent moins difficiles à éviter ; les autres changent de position et d’étendue d’une marée à l'autre, et sont par-là plus redoutables, Les premiers qui se présentent à l'embouchure cs (*) On appelle toueurs des bateaux armés de six hommes ; dont la fonction est de secourir les navires, soit en portant des ancres , des grelins, etc., dans l’appareillage ou les gros temps , soit en les amenant au port, à la rame , en temps calme, (85) de la Séine ñne sont sujets qu'à quelques légers changements dans leurs dimensions ; leur fond est de roche et leur gisement est constammeni le même. En partant de la rade du Havre pour entrer en ris vière , on trouve successivement, 1° le long de la côte du nord le banc de l'Eclat, entre lequel et le cap la Hève est un passage pour les navires , connu sous le nom de Passe du Nord-Ouest ; 2° plus au sud, le banc appellé les Hauts de la Rade, séparé du pré cédent par une passe étroite désignée sous le nom de Passe du Ouest ; et 5° le banc d’Amfar, qui, un peu plus en rivière que les deux premiers, occupe environ le milieu de l'ouverture de la Seine. Entre le banc d'Amfar et les Hauts de la Rade est un troi= sième passage pour les navires , plus ouvert que les précédents, et appellé Passe du Hoc. Dans le midi du banc d'Amfar, en se reportant vers la côte du sud , on trouve encore plusieurs autres bancs fixes, tels que le banc à Bœuf, le Ratier , les Ratelets; mais ils ne forment point po- sitivement obstacle à la navigation de la Seine : ils établissent les passes qui conduisent à Honfleur. Après ces bancs, en avançant davantage en rivière, on ne trouve plus de bancs fixes que ceux qui tiennent aux rivages et dont l'étendue seulement varie. Nous allons les décrire successivement, En partant du port d'Honfleur et suivant la côte du sud, on trouve d’abord un banc qui occupe toute la rive depuis Honfleur jusqu’à Ficquefleur. De tous les bancs fixes , celui-ci offre le plus de variation dans son étendue ; il est quelquefois im- mense et rejette le chenal du sud presqu’au milieu de la Seine. Son élévation est assez considérable , et souvent la partie la plus voisine de la terre se recouvre de christe marine et d'herbe qui, pendant F 2 (84) quelque-temps, peut servir de pâture aux bestiaux. La rivière de Saint-Sauveur, en serpentant le long de la rive qui tend du bourg de ce nom à Hon- fleur, forme une erique qui en détache le banc dans ce trajet , et va se jeter dans la mer à l’en- trée du port d'Honfleur qu’elle nétoie concurrem- ment avec les écluses de chasse des bassins. La peute rivière de Ficquefleur traverse aussi ce banc dans une direction moyenne , à-peu-près per- pendiculaire aux courants de la Seine, où elle va se perdre. Quelquefois le grand banc de Saint-Sauveur se prolouge devant les jetées d'Honfleur , au point d'en rendre l'entrée et la sortie fort difficiles, et d'exposer les navires à sy échouer , surtout lorsque les vents y portent en même-temps que le flot. Le banc de Saint-Sauveur est toujours écore dans son contour , c’est-à-dire coupé verticalement ou même miné à sa base par les courants , et plus particulièrement par l'ebe qui agit plus long-temps et plus bas sur les bords des bancs qui bordent le chenal. En suivant la rive du sud et remontant la Seine, on trouve, après le banc dont il vient d’être parlé , un autre banc ordinairement contigu à la terre, occu- part toute la région de Joble , Grestain et Berville , et divisé seulement par plusieurs criques que for- ment les sources plus ou moins abondantes qui s'é- coulent des rivages de la Seine. Quelquefois aussi la barre se porte vers les côtes du sud et creuse , entre ces bancs et les villages qui viennent d’être cités , un chenal étroit, praticable pour les bâtiments d’un faible tirant d’eau , qui alors y trouvent des posées: Dans ce cas , l'embouchure de larivière de Risle s’é- 1ablit dans ce chenalet , en longeantla terre , procure une posée à la canardière. (85) Le banc de Berville se continue encore souvent avec un autre appelé le banc du nord, qui touche au couchant de la pointe de la Roque. Ce dernier banc ,en partie couvert d'herbe, n’est séparé du banc de Berville que par la rivière de Risle qui se creuse un canal étroit dont la direction varie. La pointe de la Roque , formant un cap très-saillant dans la Seine , qu’elle rétrécit considérablement , n’est jamais bordée de bancs : la barre y frappe toujours avec violence et ne permet pas l'accumulation des sables ; mais entre cette pointe et celle de Quille- beuf , on trouve presque toujours un banc de sable qui borde le chenal et qui n’est qu'un prolongement des immenses marais de Saint-Aubin et du Marais- Vernier. Il est sujet à de grandes variations pour la forme et l'étendue : tantôt écore , tantôt incliné vers le chenal, il s’avance plus ou moins dans la Seine , se couvre de christe marine, d’herbe, et ajoute aux marais , quelquefois en peu de temps, des centaines d’arpents de pâturages que le flot détruit et emporte plus tard. En continuant de parcourir la côte du sud , on franchit la pointe de Quillebeuf. Aucun banc n’oc- cupe le rivage depuis son port jusqu’à Aizier , où commence un banc qui se prolonge le long des ma- rais de Vatteville auxquels il est contigu. Son étendue n'étant pas toujours la même, il influe sur la largeur et conséquemment sur la. profondeur de la traverse d’'Aizier. Au-dessus de ce banc , la rivière touche immé- diatement aux terreins qui bordent son lit , et là cessent les obstacles de la navigation. Les bancs qui touchent au riva# du nord de la Seine sont en très-petit nombre ; près du Havre , il ne s'en trouve point, Le chenal longe ordinairemens F5 (86 ) Ja terre et est bordé par des masses de galet que la mer y apporte cênstamment. En se rapprochant du Hode sous Orcher , on remarque quelquefois un petit banc de sable , mais cela est infiniment rare. Les courants suivent les falaises élevées du pays de Caux, et procurent aux navires différentes posées quelquefois dangereuses à la vérité ; mais ces dan- gers sont dus à la violence du flot qui en rend la tenue difficile et ron aux bancs. Dans l'anse que termine le Nez de Tancarville , on trouve successi- vement les posées du Hoc, de la Carrière, de Saint- Jacques , de Cressonval et la Vieiïlle-Posée. En contournant le Nez de Tancarville, on remarque quelquefois , le long des rochers qui conduisent à ce village, un banc qui se continue avec le rivage ; mais le plus souvent il existe un chenal offrant une posée sous le château : elle est mauvaise à cause des roches détachées qui s'y trouvent et sur lesquelles les courants de l’ebe portent. Les marais de Radicatel et du Mesnil bordent ordi- nairement le chemin du nord , mais quelquefois ils en sont séparés par un banc écore ou à pente douce qui se projète plus ou moins en Seine. Nous arrivons au banc du Tot, connu par le nombre considérable de navires qu’il a engloutis et le dernier des bancs de la rive du nord. Le banc du Tot est quelquefois adjacent aux falaises de Saint- Georges et de Petitville ; mais le plus souvent il en est séparé par un chenal peu profond qui se trouve creusé par le flot dans les grandes marées, et que peu de bâtiments peuvent parcourir sans danger. Le courant des deux rivières réunies de Lillebonne et de Gravanchon® forme un petit canal qui limite la pointe de ce banc vers le nord-ouest ; l'extrémité sud-est du méme banc répond au Vieux-Port dont il est séparé par le canal de la Seine en entier. (87) Le banc du Tot est à bords inclinés ou écores , selon lPaction qu’exercent sur eux les courants des flux et reflux. Cette influence en détermine également Pétendue , mais avec de légères différences , ce banc se trouvant toujours formé par dépôt entre les limes de flot et de verhole (1) , qui observent assez la même direction. Après avoir décrit tous les bancs des deux rives de la Seine , il nous reste à parler de ceux qui occupent le milieu de son embouchure, et qui, peu constants dans leur forme et leur position ; sont transportés d'un lieu dans un autre à toutes les grandes marées, et exigent des pilotes une étude particulière pour les éviter. Aucun des bancs mouvants ne peut être décrit avec précision à raison de leur extrême mobilité. On peut se faire une idée de masses de sable plus ou moins étendues ,placées dans le milieu de l'espèce de golfe qui s'étend du Havre et d'Honfleur à Quille- beuf, et séparées par des chemins praticables pour les navires. Ces bancs sont presque tous écores ; l'ebe , en rongeant leurs bords à la partie inférieure , en fait écrouler les masses supérieures qui tombent avec fracas dans le courant, et sont emportées dans une autre partie de la Seine où elles se déposent à la pleine mer et forment un nouveau banc. Tous ces bancs mobiles redoutables ont cependant un avantage : en divisant la Seine entière en plusieurs canaux plus étroits à la basse mer , ils en augmentent les courants qui procurent à ce moyen une plus grande profondeur d’eau dansla partie où ils ereusent le lit du fleuve. I | NO sr sn " à SS (1) On entend par _verhole un contre-courant dont nous expliquerons la marche en parlant des courants en général, (88) Malgré l'extrême variation des bancs, on distingue toujours dans leur disposition deux chemins princi- paux, l'un qui suit les sinuosités des côtes du pays de Caux , et l’autre plus ou moins rapproché de celles du sud , mais moins constant et moins profond que celui du nord , et souvent séparé des rivages par des bancs, comme nous l'avons vu plus haut. Rochers. Ainsi que je l'ai déjà dit , le banc de l'Eclat ; les hauts de la rade et le banc d'Amfar sont formés par un fond de roche recouvert de sable. Ce sont les premiers rochers qui se rencontrent à l'embou- chure de la Seine ; ceux qui se présentent ensuite sont vers Quillebeuf. Au couchant de la pointe du quai est un rocher plat s’'ayvançant , en pente douce, assez loin dans la baie et se redressant un peu à son extrémité nord-ouest où une balise est entretenue pour en indiquer les limites aux pilotes. Dans le nord-nord-ouest de l’église de Quillebeuf, et à une distance d'environ 250 toises du quai, se trouve un autre rocher appelé la Roche-& Mouton , du nom d’un capitaine dont le navire y échoua, Ce rocher offre à-peu-près 250 toises de longueur, dans la direction est etouest, et 8 à 9 toises de largeur, nord et sud; il est plat dans toute son étendue , excepté vers l'est, où il présente trois têtes assez saillantes , séparées par un intervalle de 9 à 10 pieds, et sur lesquelles il reste ordinairement 2 à 5 pieds d'eau; elles découvrent cependant quelquefois, et cela s'est remarqué quatre à cinq fois depuis quarante ans. À l'amont de la Roche-à-Mouton, les courants ont creusé un puits dans lequel on trouve environ 15 pieds d’eau de basse mer. La plate-forme de ce (89) rocher est le plus souvent de niveau avec le fond du, chenal ; les parties saillantes seulement sont redot- tables, A 5oo toises environ, dans le nord de la Roche- à-Mouton, et vers les marais de Radicatel , il existe encore plusieurs roches saillantes et très-rapprochées; tout annonce même qu’elles ont formé autrefois une seule masse. Elles sont également assises sur un fond deroche plus profondément situé ; elles ne découvrent point; on trouve ordinairement dessus 3 à 4 pieds d’eau à la marée basse, Lorsque la direction du chenal est sur ces roches, elles sont environnées de bouillards et de forts d'ebe dangereux. Dans le milieu de la rade de Quillebeuf, environ à 300 toises est quart-nord-est dela pointe du quai, on trouve une autre roche enfoncée dans le lit de la Seine, mais plus élevée vers amont, et sur la- quelle il reste 2 x 5 pieds d’eau dans les plus basses marées ; elle est toujours marquée par des bouil- lards, mais une bouée indique aux pilotes sa véri- table situation. Au sud-est de ce rocher, l’ebe -a creusé un puits trés-profond et fort étendu, dans lequel est un navire naufragé dont il sera parlé ci- après , et qui se trouve plus bas que la roche d’en- viron 3 pieds. Le long des côtes de Quillebeuf, du Vieux-Port et d'Aizier, quelques roches se sont détachées des falaises et se trouvent sur les bords du chenal, mais elles nuisent peu à la navigation; seulement celles qui se trouvent à la posée de Quillebeuf exposent les navires à se crever et à couler bas lorsqu'ils s'appuient sur ces roches, que le sable couvre quelquefois de manière qu’elles ne sont point apperçues. Les capitaines, pour éviter ce genre de danger, s'obligèrent, en 1757, envers le sieur (90 ) Letellier , ancien maître de quai à Quillebeuf, à lui payer un droit pour chaque navire montant et descen- dant la rivière , parce qu'il prit l'engagement de nettoyer la posée de Quillebeuf dans toute son éten- due et de l’entretenir à toujours, à ses frais, sans pierres ni roches. Ce traité fut exécuté scrupuleuse- ment de part et d’autre, et le sieur Letellier fils, en succédant à son père dans sa place de maitre de quai, continua de prendre les mêmes soins, et perçut le droit jusqu’à l'époque où la révolution rompit cet engagement. Le sieur Letellier fils n’a pas néanmoins cessé entièrement de veiller au nettoie+ ment de la posée de Quillebeuf, mais sa fortune ne lui a pas permis de faire des travaux dispendieux sans en être indemnisé. A l'ouest de Villequier, on remarque une autre roche, dite la Pierre-du-Poirier. Elle est toujours hors de l’eau ; sa distance de la terre ferme n’est que d’environ 5 toises. Plusieurs autres roches plus petites l'entourent, mais toutes sont visibles. La Pierre- du-Poirier sert de limite aux pilotes de Quillebeuf pour quitter le commandement du navire en mon- tant la rivière, A l'est de Villequier est une autre roche de la grosseur d’un tonneau ; elle est éloignée de la terre d'environ 15 toises; il reste peu d’eau dessus, et souvent méme elle se découvre : on trouve à son approche plus de 25 pieds d'eau. C’est vers cette roche que les pilotes de Quillebeuf doivent prendre la conduite des navires qui descendent la rivière. Un autre rocher est placé entre Caudebec et la Mailleraye, vers la pointe de Bliquetuit, à-peu-près à 25 toises de la terre du sud, Sa forme est plate; sa longueur est d'environ 200 toises , et sa largeur de 15 à 20 toises ; il reste toujours dessus 4 à 5 pieds d'eau. Cor) Après avoir fait connaître tous les écueils de l’em- bouchure de la Seine , il nous reste à décrire la ma- nière dont ils nuisent à la navigation ; mais les dan- gers auxquels ils exposent les navires étant subor- donnés aux vents, aux brouillards et aux marées, nous rapporterons d'abord les phénomènes météoro- logiques qui s'observent à Quillebeuf et dans ses environs , puis nous passerons à l'examen des flux et reflux et des courants en général , pour nous occuper ensuite de la navigation de la Seine. Vents. Les vents, à Quillebeuf, sont assujétis à une marche assez constante et dont ils s’écartent rarement, et ils exercent sur les autres météores en général une action qui les fait participer à cette régularité. Les saisons y apportent peu de changements; ils soufflent seulement avec plus ou moins de violence, et quel- ques-uns sont accompagnés de pluie ou de grêle dans l'automne, l'hiver et le printemps. Le vent de sud-ouest est celui qui règne le plus souvent à Quillebeuf; les autres sont, pour la plu- part , d’une courte durée. Cependant les vents partant de la région comprise entre le nord et l'est, sont un peu plus fréquents que les autres. Le vent de sud-ouest semble étre le point de dé- part des autres, et après les tempêtes et les orages c’est toujours là qu'il revient. La marche des vents influe sur leur durée et sur les pluies. Si, en quittant le sud-ouest, ils se dirigent vers le sud, la pluie tombe tant que le vent tient dans cette direction ; mais il revient presque tou- jours au sud-ouest à la prochaine marée du jour : alors les nuages se divisent et la pluie cesse. Lorsque C9) les vents, en suivant cette marche , gagnent jusqu’à l'est-sud-est , et même à l’est, ils n’y tiennent ordi- nairement que vingt-quatre heures, et quelquefois quarante - huit heures. Dans ce cas une petite pluie fine tombe jusqu'à ce que le vent, en faisant une courte station par les différents points de lhorison , revienne, en passant par le sud , à sa direction pri- mitive, c’est-à-dire au sud-ouest. Rarement le vent gagne au-delà de l’est en passant par le sud. Si les vents, au lieu de remonter par le sud, suivent au contraire l'horizon vers le nord, ils con- servent plus long-temps la direction qu’ils adoptent. Les vents d’ouest sont assez durables et produisent des nuages, mais presque toujours sans pluie. Is ne passent au nord-ouest que dans une tempête ; ils sont alors très-violents, froids, et accompagnés de grêle qui ne tombe que par instants, et cela arrive plus particulièrement au mois de mars, où les vents uennent davantage dans cette partie. Presque toujours le vent de nord-ouest est suivi de vent de nord, qui persiste plus ou moins long- temps, ou qui gagne chaque jour de plus en plus vers l’est, et se promène dans la région de l’amont pendant plusieurs jours, quelquefois même pendant une lune entière ; il revient ensuite au sud-ouest, soit en suivant une marche rétrograde , soit en pas- sant par le sud, et, s’il s'arrête dans le trajet de l'est au sud-ouest par cette dernière direction , il y tent plus que dans le cas où il remonte comme je l'ai dit précédemment. Il tombe infiniment peu de pluie à Quillebeuf, Je. n’en ai pas mesuré la quantité , mais je suis persuadé qu’elle ne s'élève pas au sixième de ce qu’il en tombe annuellement à Paris. En hiver, les vents sont telle- ment forts que les nuages, mus avec une vitesse étonnante, passent sur la ville sans se déchirer. (95) * En été, le ciel est presque toujours pur. Les vents suivent les courants ; ils soufflent de l’aval à l’amont à la marée montante, et prennent la direction con- traire au retour de l'ebe ; leur intensité augmente vers le soir, Les orages se forment le plus souvent vers le cou- chant, et se dirigent tantôt vers l'est-sud-est, tantôt vers le nord-ouest , et rarement ils passent sur la ville de Quillebeuf. Ils n’offrent rien de particulier. Les brouillards s’observent en tous temps et de tous vents, mais ils disparaissent ordinairement à la marée montante; quelquefois cependant ils devien- ment plus épais, et sont fort dangereux pour les navires en chemin , à raison de l'impossibilité où sont les pilotes de reconnaître leurs amers. Marées , barre et courants. Les marées, comme on le sait, se répètent deux fois par jour, en retardant de trois-quarts d'heure. Dans les ports qui bordent la mer, au Havre, à Hon- fleur, on ne s’apperçoit du flot que par le change- ment de direction des courants ; la mer monte plus ou moins rapidement pendant environ six heures, et baisse ensuite pendant le même temps. Le port de Quillebeuf n'est point assujéti aux mêmes règles; les courants ny changent point de direction avec le même calme que dans les autres ports dont nous venons de parler. Une masse d’eau connue sous le nom de barre , vient frapper avec violence le quai de l’ouest de la ville de Quillebeuf. La barre est d'autant plus élevée et les courants qui la suivent sont d'autant plus rapides que les marées sont plus fortes, c’est-à-dire deux jours après les nouvelles et pleines lunes, La position des bancs (94) et la direction des vents influent encore beaucoup sur la force et la direction de la barre. C'est vers Grestain , sur la rive du sud , et Orcher , sur la rive du nord, que la barre commence ordinaire at à se faire appercevoir ; bientôt elle s'élève de plasen plus, parcourt la Seine avec un murmure qui se fait entendre à quatre à cinq lieues , et augmente considérablement jusqu’à ce qu’elle vienne se briser contre la pointe de Quillebeuf, qui la détruit pour un instant. La barre est plus forte à Quillebeuf que dans toutes les autres parties de la Seine ; son volume y est plus grand et les courants y sont plus rapides. Elle prend naissance à l'endroit où la Seine , en se rétrécissant , force le volume d’eau qui s y introduit à se resserrer : il prend alors une élévation qui s’accroit à mesure que ce rétrécissement augmente. Les bancs , que le flot recouvre rarement en entier dès son arrivée, ajoutent encore à ce rétrécissement , et la barre, forcée de se diviser en autant de branches que ces bancs établissent de chemins pour les navires, exerce ses ravages sur les rives et sur les bords des bancs, dont elle emporte toujours quelques débris. Toutes ces divisions cessent par laréunion des diverses barres en une seule, vers le Nez de Tancarville ; mais la pointe de Quillebenf diminuant considérablement et tout-à-coup la largeur de la Seine, la barre prend beaucoup plus d’élévation. S'il existe entre Tancarville et Quillebeuf un banc assez élevé pour que la barre ne le recouvre point ;, elle se divise en deux bronches ; alors deux barres se font sentir à Quillebeuf , et suivent, l’une lærive du sud, et l’autre la rive du nord. Cette dernière, lorsqu'elle est forte, est la plus dangereuse pour la rade de Quillebeuf, parce qu’elle vient frapper la C9) ville à l'endroit même où posent les navires ? elle arrive toujours cinq à six minutes , quelquefois même dix minutes plus tard que celle du sud, dont elle traverse les courants pour venir se briser contre les quais. Lorsqu'un banc de sable occupe tout le milieu de l'espèce de golfe formé par le Nez de Tancarville, la Roque et Quillebeuf, et qu'il ne laisse qu'un chenal étroit au sud et un autre au nord, la barre du sud est terrible à Quillebeuf ; elle arrive à la jetée avec une violence extrême , et présente alors 15 à 16 pieds d’élévation. Dans ce cas, celle du nord est moins redoutable, parce que celle-ci lui oppose une résistance qui la tue. Lorsqu'au contraire le banc adjacent aux marais de Saint-Aubin savance beaucoup vers le nord , la barre se fait moins sentir à Quillebeuf. Dans ce cas, toute sa masse, dirigée vers les marais de Radi- catel et du Mesnil, ronge le banc du Tot, quelque- fois même établit entre lui et la campagne de Saint- Georges un chenal presque toujours dangereux, et que les petits navires seulement peuvent parcourir. Alors les courants sont excessivement redoutables dans Ja traverse d’Aizier ; il s'y forme des forts de flot par le choc des courants, qui se heurtent dans une direc:; tion presque perpendiculaire. La barre prend la forme que lui donnent les bords du chenal dans la partie où elle les touche : s'ils sont inclinés, la barre, dont la surface supérieure s'étend horizontalement, reconvre une partie de ces bancs, et sa hauteur se réduità zéro sur les bords; si, au contraire, les bancs sont écores , on conçoit que la barre est coupée verticalement comme eux. La barre n’a donc de forme constante que dans sa partie antérieure , dont la coupe serait perpene C96) diculaire si les parties supérieures de la masse d’eau ; quoique mues d’une vitesse égale à celles inférieures ; n’ajoutaient à la vitesse de celles-ci par la pression qu’elles exercent sur elles. Le plan antérieur de la barre présente donc une légère inclinaison qui lui donne la forme d’un talus composé de vagues super- posées et écumantes. La barre établit des courants qui, dans les grandes marées , sont d’une vitesse et d’une force étonnantes. Vers Quillebeuf, elle ne parcourt qu'environ 2 lieues à l'heure , à cause des bancs qui génent sa marche et la retardent ; mais lorsqu'elle les a franchis et qu’elle avance en rivière, elle acquiert une rapidité telle qu’elle n’emploie que deux heures à faire le trajet de Villequier à Rouen, c’est-à-dire, environ 18 lieues, . Il est reconnu que la vitesse de la barre est d’au- tant plus grande qu’elle rencontre plus de profondeur d'eau; elle est cependant moins dangereuse dans les endroits où elle marche avec grande rapidité. Au-dessus de la Mailleraye, les navires se tiennent méme au milieu de la rivière pour la recevoir , et se laissent entraîner par elle : ils n’ont rien à redouter lorsqu'ils ne touchent pas la terre. La marée monte avec une vitesse qui diminue graduellement. Dans les premiers instants , elle four- nit en cinq minutes trois pieds d’eau verticalement dans toute l’étendue de la rivière. Cette impulsion est si grande que le courant se maintient encore lorsque la mer a déjà baissé d’un pied. L'élévation moyenne des eaux à Quillebeuf, en toute saison, est, à la pleine mer, de 15 pieds dans les syzygies, et d'environ 6 pieds dans les quadra- tures, abstraction faite des accidents qui peuvent faire monter plus ou moius la marée. Lorsque (97 ) Lorsque les vents soufflent de l'aval avec violence ; et que cela arrive ou à la pleine et nouvelle lune, ou dans les deux jours après, la marée monte beau coup plus haut ; quelquefois même elle s'introduit dans les rues, sur-tout si ces circonstances se trou+ vent réunies aux approches des équinoxes et des solstices ; mais cela n'arrive que très-rarement ? aussi ne l’a-t-on remarqué que trois ou quatre fois dans l'espace de irente ans. La plus grande élévation. des marées qu’on ait vue , eut lieu,le 11 novembre 1810 : la mer monta à-peu-près à 20 pieds, et comme les quais n’ont que 18 pieds de haut, il se trouva e nviron 2 pieds d’eau dans les rues. La marée monte à Quillebeuf, dans les syzygies ; pendant deux heures à deux heures et demie; mais à mesure qu’on se rapproche des quadratures elle prend un peu plus de temps, et cela va jusqu’à trois heures. Les vents modifient un peu ce temps dela marée montante, Il est ordinairement pleine mer à Quillebeuf à dix heures ou dix heures et demie, dans les syzygies , et à quatre heures dans les quadratures, sauf encore la modification exercée par les vents. La marée em- ploie le même temps à monter depuis Qaillebeuf jusqu’à Rouen; mais depuis cette dernière ville jus- qu'à Pont-de-l'Arche , où le flot se fait sentir un peu dans les grandes marées, elle monte d'autant moins long-temps qu’elle approche davantage de ce termes Non-seulement le port de Quillebeuf n’est point soumis aux règles générales des marées qui, dans tous les ports de mer , montentet baissent dans des temps égaux, mais il offre encore avec ceux-ci une autre différence , c’est que la mér y baisse davan- tage dans les mortes marées que dans la grande mer ; tandis qu'au contraire c'est dans les grandes G (98 ) marées qu'il reste moins d’eau dans tous les ports de mer en général. Dans les mortes marées du mois d'août, si le temps est calme et que la sécheresse ait existé pendant long-temps, le chenal entre Quille- beuf et le banc du Tot se vide tellement qu’on pour- rait, dans quelques endroits, le traverser avec des bottes de pêcheur. Les courants établis par le flot suivent des direc- tions déterminées par la disposition des bancs, et varient donc autant que ceux-ci; mais on peut dire qu’en général ils suivent parallèlement les rivages du fleuve, La plus grande déviation qu'ils éprouvent est opérée à la pointe de Quillebeuf, qui force le flot à se diriger vers le pays de Caux; disposition heu- reuse pour la navigation, puisque toute la rade de Quillebeuf s’en trouve affranchie. Le flot forme, en partant de la pointe de Quillebeuf, une ligne circu- laire de démarcation entre lui et l’ebe, qui se dirige en sens contraire le long de la rade et va se jeter dans cette ligne que les marins appellent lime de flot. Le courant qui subsiste dans la rade jusqu’à la pleine mer se nomme verhole. Il est séparé de la lime de flot par une eau tranquille. Les courants s’observent seulement le long des rivages, où ils ont une direc- tion entièrement opposée ; ils diminuent progressive- ment; enfin la mer est étale, puis elle commence à baisser et l'ebe se rétablit. Chaque navire profite de l'un ou de l'autre de ces courants, selon la route qu’il veut parcourir. Dans quelques endroits de la Seine, les courants de la marée montante sont dangereux ; ils forment des bouillards appelés forts de flot qui peuvent étre funestes aux navires en leur faisant perdre l'action du gouvernail. Ces forts de flot ne se re- marquent que dans les lieux où le nouvezu cou- ( 99 ) rant rencontre le cours habituel du fleuve dans une direction trop perpendiculaire et dans les endroits où il reste peu d’eau à mer basse : c'est sur-tout à cette dernière cause qu'il faut attribuer les forts de flot. Il existe aussi des forts d’ebe , et ils sont plus à craindre que les forts de flot : ceux-ci cessent promp- tement , parce que la mer en montant rapidement fournit bientôt l’eau propre à faire cesser le tumulte des flots, tandis qu’au contraire, la mer en se reti- rant de plus en plus, donne aux forts d’ebe une augmentation redoutable. Pour se soustraire à leurs dangers ; les navires doivent arriver à la pleine mer dans ces parages. « Les forts d’ebe sé remarquent dans les raz d'Aizier, dans la rade de Quillebeuf , et quelquefois sur divers points du trajet de Quillebeuf au Havre. Navigation. Un grand nombre de personnes parlent des dan- gers de la navigation de la Seine. Chacun demandé avec instance des travaux propres à les faire cesser :. plusieurs, entraînés par leur zèle, vont même jus- qu'à en offrir les moyens avec une confiance qui peut être appuyée sur des talents consommés; mais les hommes les plus recommandables par leurs lu- mières ne sont pas toujours exempts d’illusion sur le bien qu'ils désirent faire. Je ne pense pas qu’on ait assez porté son attention sur les dangers en eux- mêmes, et qu’on ait considéré jusqu’à quel point on peut les détruire ou les diminuer. Signaler le mal est déjà un grand pas vers cet heureux résultat ; c'est ce que je vais essayer de faire ; et, pour mieux y parvenir, je suivrai les navires dans leur G2 ( 100 ) marche soit en montant la Seine, soit en la des- cendant. Dangers auxquels sont exposés les Navires en montant la Seine. Tout navire doit diriger sa route en parcourant le chenal qui lui est le plus commode. Cest au pilote à en faire le choix et à prendre les amers qui lui sont utiles. Pour entrer en rivière, il doit attendre la marée montante. S'il est sur la rade du Havre , il do't prendre une des trois passes décrites en parlant des bancs. Plusieurs considérations déterminent le moment de l’appareillage , et le pilote, par une heureuse habitude , se trompe rarement dans la juste mesure de leur réunion. La force des marées , la direction des vents , la marche plus ou moins bonne du navire, sont autant de moyens qu’il sait saisir à propos pour donner le signal du départ. - Les navires en montant la Seine ont à redouter , 1° de toucher sur un banc ou sur quelque point du chenal ; 2° de manquer de vent et de courants suffisants pour gagner une posée qui les mette à l'abri du danger. Pour éviter le premier accident, ils doivent ap- porter avec eux assez d’eau en rivière pour passer sur les hauts fonds du chenal dont les pilotes con- naissent les dispositions. Le pilote avant de mettre à la voile doit donc évaluer la quantité d’eau qu’il trouvera dans le trajet qu’il se dispose à parcourir ; s’il se trompait , il exposerait , à la fois, le navire et la vie de l'équipage. J'ai vu deux naufrages de ce genre peu de temps avant la revolution. ( rot ) Un brick français, bon voilier, entra trop tôt em rivière ; il toucha dans le chenal du nord entre le Hode et Tancarville, et renversa à l'instant même. L'équipage put cependant se sauver dans la chaloupe et le canot; une demoicelle de 18 ans, fille du second capitaine , qui se trouvait alors dans la cham- bre , fut seule victime de ce malheureux événement. Le pilote fut interdit de ses fonctions. L’antre navire qui périt à-peu-près de la méme manière , était un sloop anglais dort le naufrage fut dû à un brouillard épais qui se déclara tout-à-coup lorsqu'il était en route , et qui ne permit pas de reconnaître les amers. Le navire toucha sur un banc près le Nez de Tancarville et renversa en ne laissant à l'équipage que le temps de se jeter dans la cha- loupe. Au retour de l'ebe il redressa; mais il s’en- fonça dans le sable verticalement avec une rapi- dité telle que le lendemain on ne voyait plus qu'en- viron dix pieds de la tête de son mât. Loriqu'un navire manque de ventet de courants, c'est presque toujours entre Tancarville et Quille- beuf qu'il se trouve dans ceite inquiétante position. Il sent à peine son gouvernail , et, s’il n’est pas promp- tement secouru , les courants l’entraînent sur les bancs où il est exposé à renverser par la force de Ja barre à la marée suivante , où même avant, sil est placé surle bord d'un banc que l’ebe mine en- dessous, J'en citerai un exemple capable d’étonner ceux qui ne conuaissent point la nature de ces dangers. Uu brick français venant de Cette , chargé de vins et d’eau-de-vie, fut pris de calme à une distance d'environ une lieue du port de Quillebeuf. Les secours ordinaires ne purent lui être admiaistrés » et le pilote fit jeter l'ancre pour attendre la marée G5 { 102 } de nuit, Néanmoins, dans la crainte d’un danger que Jui seul sur le navire prévoyait, il engagea le capi- taine à débarquer avec son équipage et sa famille, et à se saisir des choses précieuses qu’il pourrait facilement emporter de son bord. Le capitaine , qu’un beau ciel d’été et le peu de force du flot rassuraient, résista longtemps aux instances du pilote, qui, ce- pendant, donna l'exemple et entraina l'équipage. Enfin le capitaine , pressé par son épouse et son fils, s'embarqua avec eux dans son cauot, et il eut la douleur de voir son navire renverser lorsqu'il n’en était éloigné que d'une portée de canon. L’ebe avait échoué sur le bord d’un banc écore qui céda au poids du navire et le fit chavirer dans le chenal. Un bâtiment pris de calme aux approches de Quillebeuf a besoin d’être secouru à l'instant méme du danger. Des bateaux toueurs toujours prêts au prenÿer signal de détresse vont le remorquer et V'amènent à force de rames, en refoulant les cou- rants, jusques à la portée des grelins , au moyen desquels il est assuré ensuite de gagner le port. L'importance de cessecours détermina, longtemps avant la révolution , la chambre de commerce de Rouen à établir à Quillebeuf un dépôt d’ancres, grélins et autres ustenciles nécessaires au sauvetage des navires ; elle en confia l'administration à un maître de quai chargé de veiller à tout ce qui pou- vait être utile aux bâtiments, et de placer un fanal sur le quai dans les marées de nuit. Tous les grélins et cables de ce dépôt ont été détruits par da vétusté. Le commerce de Rouen par la rivière étant, depuis pombre d’années, d’un faible intérêt pour les négo- ciants, ils ont négligé de l’entreterir , et sans le zèle vraiment admirable de l’ancien maître de quai qui, malgré son peu de fortune, s’est procuré des cables (105) et grélins neufs à ses frais, beaucoup de navires auraient péri au passage de Quillebeuf, à défaut de secours, La chambre de commerce de Rouen paraît néanmoins vouloir rétablir ce dépôt, et les ordres qui viennent d’être donnés pour la construction d’un phare à Quillebeuf, annoncent qu’on s'occupe de son port. On à vu dans la description des courants que le flot prend à la pointe de Quillebeuf une direc- tion qui le porte sur le banc du Tot; d’après cela il est facile de concevoir qu’un nayire qui arrive- rait trop tôt après la barre, et qui ne pourrait résis- ter à la violence des premiers courants qu’elle éta- blit, serait jeté sur ce même banc où il renverserait soit à l'instant , soit à la marée suivante. Par la méme raison , tous les navires échoués à l'aval de Quillebeuf, qui ne seraient point engloutis par la barre , seraient entraînés sur le banc du Tot, aux dangers duquel il leur serait difficile de se sous- traire, à moins que les mâts ne se rompissent à leur base, ce qu'on a vu quelquefois. Alors le navire roule comme un tonneau et peut se trouver sur sa quille à la pleine mer, instant où il est facile de le remorquer ; et cela suppose que les écoutilles n’ont pas été enlevées. Après le passage de Quillebeuf , la traverse d’Aiïzier est le premier endroit périlleux qui se présente , en montant la rivière. Les forts de flot qui s’y ren- contrent obligent à y passer de pleine mer ; quel- quelois il existe une posée assez près de la traverse, mais il est souvent imprudent d'y chercher un refuge. Beaucoup de navires ont péri dans ce passage qui est peut-être un des plus dangereux de la Seine. Au-delà de la traverse on peut craindre encore d'échouer sur le banc de Vatteyille ; mais il est souvent facile de l’éviter. G4 Cio4 ) Plus haut en rivière il se rencontre peu d’écueils: des navires y ont péri, mais par imprévoyance de la part des capitaines ou par quelques-uns des incon- vénients attachés à la navigation en général, Dangers redoutables pour les navires en descendant la Seine. De Rouen à la Mailleraye , comme nous venons de le dire , les navires ne sont exposés qu'aux acci- dents inséparables de la navigation ; mais les capi- taines ne peuvent pas parcourir avec la même sé- curité le trajet de la Mailleraye au Havre. De la Mailleraye à Villequier il arrive peu de naufrages , il faudrait pour cela quelqu’imprudence “de la part des pilotes, ou une tempête qui jetât le navire à la côte ou sur le banc de Güer- baville. Mais de ce dernier point à Quillebeuf on trouve plusieurs écueils qu’il est souvent difficile d'éviter. La traverse d’Aïzier offre en descendant les mêmes inconvénients qu’en montant. Les forts d’ebe y sont aussi redoutables que les forts de flot, et la pru- dence veut qu'on la passe également à la pleine mer. Il est des temps cependant où elle présente une grande profondeur d’eau , et alors les navires peuvent y passer un peu avant ou après la pleine mer sans danger, On peut craindre encore de ne pas trouver assez d’eau dans-lé chenal du Vieux- Port à Quillebeuf ; mais cet inconvénient ne se trouvant jamais dans le temps où la traverse est mauvaise, on na qu'une de ces difficultés à com- battre à-la-fois. C’est ordinairement deux à trois heures après la pleme mer que les navires descendant la rivière ( 106 } arrivent à la posée de Quillebeuf et souvent plus tard. Les pilotes doivent donc apporter le plus grand soin à connaître les sondes, pour ne pas s'engager impru- demment. Je vais donner une idée des accidents qui pourraient s’en suivre , en rapportant un événement qui s’est passé sous mes yeux. Au mois de janvier 1793, trois navires ayant passé la traverse d'Aïzier après la pleine mer, firent voile pour Quillebeuf avec un vent favorable, En appro- chant du port , les pilotes s'appercurent que le che- nal n'offrait qu'à peine la profondeur d'eau qui leur était nécessaire, Ils jetèrent l'ancre à l’amont de la ville et filèrent du cable peu-à-peu, comme cela se pratique ordinairement, dans l'intention de dimi- nuer graduellement la vitesse du navire et de mettre le cap à lébe; mais les ancres dérapèrent. Il fut impossible de gouverner les navires , et bientôt ils cédèrent à l’action des courants. Un d'eux, plusavancé que les autres, rencontra la roche du milieu de la rade de Quillebeuf, dont nous avons parlé plus haut, et renversa , toutes voiles dehors. Un autre alla s'échouer sous Radicatel , et le troisième renversa assez près du quai pour que ses mâts y trouvassent un appui. Ces deux derniers furent sauvés; mais le premier est encore englouti à l’amont de la roche, malgré les frais considérables qu'on a faits pour l'en tirer. Les moyens qui furent employés, quoique sans succès , pouvant faire connaître la force de la marée montante, je ne crois pas inutile de les rap- porter iei Jlaconiquement. Ce navire pouvait, par sa position , nuire à la na- vigation , en gênant l’'apparcillage dans la rade, et cette raison détermina à tenter son émersion. Après en avoir enlevé les mâts et tout le gréement, des plougeurs ceintrèrent le corps du navire avec un ( 106 } câble auquel on attacha des tonnes réunies, à la basse mer. On pensait que les tonnes, soulevées par la mer à mesure qu’elle monterait, enlëveraient avec elles le navire, et qu’on pourrait ainsi l'amener au rivage; mais les câbles cassèrent, quoiqu'ils eussent 18 à 20 pouces de circonférence , et l'effet désiré ne fut pas obtenu. On crut ensuite qu’on fa- voriserait l'effort des tonnes en excitant le mouve- ment du navire. En conséquence, on y porta des cäbles auxquels on attacha des cayornes fixées sur le quai à des cabestans : tout cela fut également sans effet ; les câbles cassèrent comme auparavant, et le navire abandonné s’est enfonce dans un puits que lui ont creusé les courants , ce qui le rend moins nuisible à la navigation. Les dangers auxquels sont exposés les navires de- puis Quillebeuf jusqu'au Havre sont d'échouer sur les bancs et d'y recevoir le coup de la barre. Nous en avons précédemment examiné les conséquences. Dans les mortes marées, on peut cependant échouer : sans courir aucun risque, et souvent les petits na- vires font leur route en échouant sur les bancs pour attendre la marée suivante. Je crois avoir suffisamment étendu mes observa- tions sur l'embouchure de la Seine, pour satisfaire aux questions que Son Excellence le Ministre de l'Intérieur a bien voulu m'adresser , et qui ont servi de base à la rédaction de ce mémoire. Il me reste cependant à répondre à une derniére question , à celle relative au langage populaire des habitants de Quillebeuf : c'est ce que je vais faire avant de terminer. Ce qu'il offre de particulier doit être attribué à la prononciation seulement , et il est difficile de la peindre. Les Quillebois chantent en quelque sorte les syllabes etles articulent si mal qu’on Cio7) croirait entendre des expressions étrangères à la lan- gue française ; est sur-tout la prononciation du get de lÿ, du ch qui dénature les mots et embarrasse l'oreille qui n’y est pas exercée. Les Quillebois sont en général ignorants, et cependant ils ont des pré- tentions à bien dire. Alors ils cherchent des expres- sions peu ordinaires, dont ils ne connaissent point la valeur, et en font un emploi d’autant plus ridi- cule qu'ils les dénaturent par la prononciation et qu’il est impossible de les reconnaitre. Pour bien juger l'originalité de leur langage, il faudrait nécessaire- ment les entendre : il ressemble beaucoup à celui des habitants du Polet de Dièppe. Je ne pense pas qu'il puisse rien indiquer d’utile à l’histoire des peuples. Il n’a point d’analogie avec aucune langue étrangère, et c’est d’après M. Mouton, quia long- temps exercé à Quillebeuf la fonction d’interprète des langues du nord, que je donne cette assertione (108 } PROCÉDÉ NOUVEAU Pour extraire lIndigo du Pastel. Par M. BENJAMIN PArrr. Messieurs , Dans une de vos Séances de 1811, j'ai eu l'hon- neur de vous soumettre le procédé que j'employais alors pour extraire l'Indigo de la plante dn Pastel, Ce procédé consistait à mettre des feuilles noa- vellement cueillies dans de l'eau froide que l'on amenait, en 24 heures au plus, de 20 à 22 dégrés de chaleur ( thermomètre de Réaumur ) , au moyen d'un courant d'air chaud. On soutirait la liqueur et on précipitait la fécule avec de l'eau de chaux. Le produit n'était qu'un Indigo trèsimpur que j'étais parvenu à raffiner par la manière décrite dans mes Observations sur le procédé pour teindre en bleu à chaud au moyen de l’Isatis tinctoria , V’ouède ou Pastel, Par ce procédé de raffinage on obtient du Pastel un Indigo supérieur au plus bel Indigo guatimalo- flore du commerce ; mais, pour l’exécuter , il faut posséder des connaissances qui ne sont pas à la portée de tout le monde, et, pour les acquérir , il faut une longue expérience , afin de pouvoir vaincre tous les obstacles qu'on y rencontre. Pénétré de cette vérité , je me suis livré à de nouvelles recherches , et je suis parvenu à un procédé plus simple et d’une exécution plus facile, par lequel on obtent un Indigo très-beau et qui nexige pas, pour être employé en teinture , d’autres procédés (:09 ) que ceux de lPIndigo exotique. Cependant il est moins pur que ce dernier , et son prix est plus élevé que celui qu’on obtiendraïit par le rafnage. Voici en quoi consiste le procédé nouveau dont je me sers actuellement : Da s un tonneau placé au-dessus d'un second , on met 200 kilogrammes ( 4ooliv. } pesant de feniiles de Pastel récemment cuelies, et , après les avoir assujetties avec une cla'e d'osier, on verse par-dessus 600 kilogrammes ( 1200 livres) d’eau froide , de manière que les feailies soient recouvertes de 5 cen- timètres ( 1 pouce ) d'eau tout au plus. On laisse le tout en cet état pendant 20 ou 40 heures , suivant le dégré de maturité du Pastel et la température de l'atmosphère. On s'assure que la macération est suflisante en examinant une pete portion du liquide dans un verre ordinaire, Si ce liquide, regardé à contre-jour , offre à l'œil une couleur verdâtre , et si sa surface présente une apparence bleuâtre , on verse 12 kilogrammes et demi ( 25 livres) de ce liquide dans un vase , et par-dessus 15 grammes ( une demi-once ) d’ammo- niaque liquide , et on agite le mélange avec une baguette. Lorsque la nuance de l'écume qui se forme à la surface est d’un petit-bleu très-vif, on peut étre assuré que la macération est parvenue à son terme. Alors on fait couler la liqueur dans le tonneau inférieur , et on ajoute 6 décagrammes (2 onces ) d'ammoniaque liquide par 50 kilogrammes ( 100 liv, } de liqueur. On agite, pendant un quart - d'heure environ. Le précipité se forme peu-à-peu, On se débarrasse successivement de la liqueur > au moyen de robinets placés à diverses hauteurs. (110 ) Le précipité déposé au fond de la cuve peut être lavé si on a de l’eau à sa disposition : l’'Indigo en acquiert une nuance plus brillante ; mais on peut le mettre sur-le-champ dans des sacs de toile un peu serrée et le laisser égoutter pendant deux ou trois jours. Quand il a la consistance d’une pâte un peu ferme , on lui donne telle forme que l’on veut, et on le fait dessécher sur des claies de bois. Plus la dessication est prompte , plus l’Indigo est agréable à l'œil. Le procédé dont je viens , Messtxurs , de vous donner la description , a été exécuté sur du Pastel semé à la fin d'Avril 1812, et qu'on a commencé à récolter le 2 juillet suivant , pour la première coupe qui a fourni 2 hectogrammes ( 7 onces ) d’Indigo par 5o kilogrammes ( 100 livres ) pesant de feuilles. La seconde coupe a eu lieu le 20 Juillet, et le produit a été plus fort, car on a obtenu par 50 ki- logrammes ( 100 livres) de feuilles, 2 hectogram- mes et demi (8onces) d’Indigo supérieur en qua- lité au précédent. On a opéré de même sur du Pastel semé en Avril 1811 , et qui, quoique coupé cinq fois l’année dernière , ne l’avait cependant pas été assez fréquem- ment. C’est la quatrième fois qu’on le coupe cette année , et le produit qu'on obtient de ce Pastel, à poids égal et comparativement à celui qui a été semé cette année , donne un Indigo plus riche en substance colorante , et en plus grande quantité , puisqu'on en a retiré 5 hectogrammes (9 onces ) par 50 kilogrammes ( 100 livres ) de feuilles. D’après ces observations , je me crois fondé à dire que les personnes qui c'ltiveront le Pastel ont un grand intérêt de multiplier les coupes , puisque les jeunes pousses produisent plus de fécule. TABLEAU GÉNÉRAL des Observations météorologiques faites à Rouen pendant l’année 1812 ; par M. J.-B. Vitaris, Professeur dé Sciences physiques , du Lycée, A N 1812. (Les principaux phénomènes sont indiqué s ont été plus considér bles. 0e à re | Maximum Ms : BAROMETRE , . . s par une apostrophe , © ‘Minimum. » J AN VIE R. 28 pouces 3 lignes 2 le 18. 27 2 6 le 5, THERMOMÈTRE à Mercure,) Maximum. . Échelle de Réaumur. ) Minimum . Maximum . + HYGROMÈTRE p5 SAUSSURE.( | Minimum 7 degrés o les 19 et 50. o les 53, 10 et 24. = \ 98 degrés. 7o le2r. SIX PREMIERS MOIS. JOUM"N: FÉVRIER. 28 pouces 2 lignes o le 10, 27 5 3le 4. 11 degrés o le 22. o o le 11 98 degrés les 4, 6, 14, 16. 70 les 22 et24. VENTS DOMINANTS , « + 7 N.-O., NE. ( Grand-Vent le 23, ) SAOMENTONMISEE (Grand Ventles2,6,14,22', 24,25.) JOURS DE PLUIE.. JoURS DE NEIGE. + . . . TOURS IDRICRÉLES == ee Ce UDOMÈTRE f Quantité d'eau de plie, de neige Vent Perle. 14 Jours DE GEtËt. h Nors. Aux jours de gel en décembre 111, ajoutez les 27, 58, 29, 30 er 31 1025010 0h 0720101120), 20), 29, 30. 1 pouce 11 lignes 10/16. 1,939; 10,11,19, 24. JOURS DE BRUME ET BROUILLARD,. « , à « « « « 11,12,13,14, 19, 2432 JOURS DE TONNERRE . . Néant. MARS. 28 pouces 5 lignes 8 le 26. 27 0 8 le 20. 14 degrés 5 le 5r. o o le 26, 99 degrés le 24. 70 les 5 et 27. N.-0., S.-0., N. ( Grand Vent le 28.) 254567; 8 30) 15, 14,20,22, 25%, 24, 25}, 27; 285 20, 30}, 31. 0, 15,10,071% 10) 10);120: 2 pouces 7 lignes 4/16. 8. 2 pouces 8 lignes 9/6, Néant, Act. de l’Académie 1812. ( page 110 bis ). A VRIL. 28 pouces 2 lignes 5 le o le 16, 7 7 15 degrés 5 le 30. 1 o les 9, 10, 11. 100 degrés, 68 o le rr. N.-E., N.-0. NZ ON Lo 145110223120 ;2031474 28, 30°. 25. Néant. 2 pouces G lignes 14/16. 93 10 3 113 ZI. Néant. MA I. pouces 4 lignes o le 24, 7 6 le 12. 28 27, 21 degrés o le 19. 6 o le rer. 100 degrés. 68 o les 6 et 9. S.-E., S.-0. 9% 10,11,120,15, 14, 15”, 16,17,11,2 55, 10, 14,15, 16,°1ÿ, 18, 19, 20!, 21, 25, 2), 28, 29, 50, 51. Néant. 5 pouces 5 lignes 9/16. Néant. A — 28 pouces 5 lignes o le 9. 27 7 5 le 20. 21 degrés 0 le 14, 10 Oo: 100 degrés. 70 S.-0. , N.-0.,0.-N.-0., N.-E: (Grand Vent le 16.) 0. 20,21, 22,24 , 25, 26, 28. Néant. 1 poucé 6 lignes 12/16, Néant: a Néant, 20, 21,024 TABLEAU cÉnÉRAz des Observations météorologiques faites à Rouen pendant l’année 1812 ; par M. J.-B, Virazis, Professeur de Sciences physiques , au Lycée. (Maximum. . BAROMÈTRE. . . } Minimum . THERMOMÈTRE à Mercure,) Maximum. , « .. Échelle de Réaumur. Minimum .... \ Maximum. . .., HYGROMÈTRE pe sn M + LÉ V Minimum See VENTS DOMINANTS, , 4 4 «1. Jouns p8 pLuin... Total pour l'année 164 jours. Jours pe NeiGr. . « Total. .. . ,. . 15 jours. Jouns De Gréce... Total , . . 6 jours. Quantité d’eau de pluie, neige et grêle. “ .. 24 pouces 5 1. 12/16. UDOMÈTRE, \ Tr 2| JUN LATNENT 28 pouces 4 lignes 2 le 11. 27 7 Sex 25 degrés o le 19 8 o le 5, 100 degrés o le 2. 7o o NE MOSN::0 5.0: ( Grand Vent le 27 }. 2,5, 5542,16; 19,20, 24, 26, 275 28,29, 30, 51. SLI DéE AR NV NE RAS MIONTLS: ATONUME » 27 9 o le 3. ———…———_—————…_———.———— 22 degrés. o le 2r, 10 o le 10, 97 degrés o les 2 Bo 0, S.-0., N.-0., N.-E. 1,23 5,43 5365 19:22:27 528,29; 50, 51. Néant, Néant. Néant, Néant. o pouce y lignes 8/16. 2 pouces 3 lignes 9/6. Jours DK GELÊE . . . Total... 54 jours. Jours DE BRUMS ET HRoUILLARD. {utal 58 jours. Jouns DE TONNERRE, Total. : ,1,. + « 15 jours. | cr 19, 27 3 264 Néant. Néant. Néant. Néant. SEPTEMBRE. 28 pouces 4 lignes o les ra el 15. 27 10 2 le 28. 1Q degrés o, 6 o le 19. 98 degrés o le 27. 75 ON CI" OXCYLNOB'R LE: } 25 pouces 1 ligne o le 3. 27 o 5 le 14. 18 degrés o le 6, 4 o le 50, 98 degrés o le 9. 6a o les m et 51. N.-E. (Les Ra RER Ras pe | 17, 25, 24,25, 28, 30. S.-E,, O0.-S.-0., N.-0. (Grand Ventles6,7,8,.18, 19.) 146:6%7,8,193410, 411,112, 14.14; Cr à ni 15,16,17,18,19,20,21,22, 25, 24, 25°, 26,27 ,28!, 29 Néant. Néant. Néant. o pouce 4 lignes 10/6. Néant. Néant, 5 pouces 11 lignes 13/16. Néant, Néant. NOVEMBRE. 28 pouces 3 lignes 8 le 25. 27 o 4 le 17. 12 degrés © le 4. —4 o le 25, 100 degrés o les 15 et 14. 72 o le 22. N.-O,, NeE. BIG, UE, 12", 10; 147110, Néant. Néant. 1 pouces 6 lignes 1/16. 73 8 213 22, 23, 24, 25 ; 26, 1, 554973 109 11,12”, 25, 24,2, 26:, 27 , 29 30: Néant, . DÉCLMBRE 28 p.5lig.4. (haut.rem.les7et 28). 26 10 2 le 17. 9 degrés o le 2. —ù o les 14 et 26. 95 degrés o le 1°. 67 o le 27. N.E., N.-0.,E, € Grand Vent le 16, ) 17, 18, 22. L15 10, 25! Néant, 1 pouce o ligne 2/16, 758» 9»10, 11,123 13, 14,15, 16, 20,24 ,°25, | 1,3,4, 10,21, 26,26, 20. Néant, (ur) A — —— BELLES-LETTRES. ReA:P PQ: RUE Fait par M. Piwarn De BoisxégerrT , Secrétaire perpétuel de l’Académie , pour la classe des Belles- Lettres. Messieurs, Vous venez d'entendre le rapport des travaux de la classe des Sciences. Chargé de vous rendre compte des différentes productions qui sont du domaine des Lettres , et forcé de me renfermer dans les bornes d’une simple analyse, je crains de ne pouvoir vous les présenter avec le mérite qui leur appartient. Autant qu'il sera possible, par des citations choisies, je donnerai au public éclairé , qui honore cette séance une idée de la manière de chaque auteur. Les communications qui existent entre l'Académie et plusieurs Sociétés savantes et quelques individus qui cultivent les Arts et les Lettres, donneront à l’as- semblée une preuve de cette belle harmonie dont le résultat ne peut qu’avancer le progrès des lumières. = M. Poitevin, secrétaire perpétuel de l'Académie des Jeux Floraux, vous a envoyé le recueil de l’Aca- démie , pour l’année 1812, = M, Delandine, bibliothécaire à Lyon, vous a (112) fait hommage d’une brochure qui présente l'état de la bibliothèque publique, avec une notice intéres- sante des livres et des mémoires qui ont été envoyés dans le cours de 1811. = Vous ayez reçu de l'Académie des Sciences , Belles-Lettres et Arts de Lyon le compte rendu de ses travaux pendant le premier semestre de 1811, par M. Martin, président de cette Compagnie. — De la Société des Sciences, Belles-Lettres, Arts et Agriculture de Nancy , le précis analytique de ses trayaux en 1810. = De la Société Académique de Cherbourg, le sommaire des ouvrages lus aux séances publiques et particulières, depuis le 7 juin 1810 jusqu'au 14 novembre 1811. = De l'Académie de Marseille, le programme des prix proposés par la classe des Sciences. — De l’Académie de Caen, un rapport général de ses travaux pendant dix années entières. = Vous avez reçu une brochure ayant pour titre: Séance publique de l’Académie des Sciences , Belles- Lettres et Arts de Dijon. = M. Dauvers vous a fait hommage d'un mémoire intitulé : Essai sur la Théorie de la Musique, — M. Cubissol vous a adressé un opuscule en prose, sous ce titre : Mes Souvenirs ; ou le charme de da Solitude, Tels (113 3 Tels sont, Messteurs , les objets qui vous ont été communiqués. Je regrette de ne pouvoir présenter l'analyse qu’en ont fait avec bien de l'intérêt nos confrères , sur-tout le rapport de M. Duputel, sur le charmant recueil des Jeux Floraux. Ces productions n'étant pas la propriété de l'Académie, j'ai cru devoir employer les moments dont je peux disposer, à vous remettre sous les yeux les travaux de nos collègues. ELOQUENCE. M. le Président a ouvert la séance de rentrée par un discours. L'orateur présente la France , dont les conquêtes de Napoléon-le-Grand ont fait le plus vaste empire, comme destinée à donner aux nations des lois dans tous les genres. Il observe que, sous ce rapport, l’Académie embrassant à-la-fois, dans le domaine de ses études) les Sciences, les Lettres et les Arts , est appelée à seconder les vues du Gouver- nement. » Grâces à nos efforts, dit notre collègue, et à ce concert d’émulation qui règne entre les savants de l'empire , nos arts et nos fabriques vont bientôt se passer des productions exotiques qui nous rendaient tributaires de l’étranger. » Les prétentions d’une nation rivale ne seront bien- tôt plus funestes qu’à elle-même; cette nation, qui nous hait et nous estime, sait à ses dépens que le peuple francais, si brave dans les combats, est patient et laborieux dans ses ateliers «. M. le Président, adressant la parole à l'Académie, dit que la langue française, devenue la langue de l'Europe , un goût sage et sévère doit régner dans nos productions littéraires. Il invite la Compagnie à profiter de l'avantage attaché aux réunions des lu- I C114) mières chez les Corps savants, celui d'une censure douce et fraternelle , avantage dont est privé le Savant absolument isolé. M. le Président termine ainsi : » Avec cette urba- nité qui est personnelle à chacun de nous, avec cette cordialité qui unit tous les membres de cette Compagnie, exerçons entre nous, MessiEURS, une censure utile; qu’un heureux concours produise de nouveaux efforts, atteigne À de nouveaux succès, enrichisse , pendant cette année, les Sciences par des découvertes importantes au bien général ». = M. Boieldieu a donné lecture d'une Notice nécro- logique sur M. Thieullen , Premier Président de la Cour impériale de Rouen, et membre de l’Académie. Cette notice est imprimée en entier à la suite de ce rapport. ( /’oyez ci-après, ) = M. Delaporte Lalanne a prononcé son discours de réception. Dans un exorde modeste , notre collègue ne veut attribuer le choix de l'Académie qu'aux fonctions qui le placent à la tête de l'instruction publique dans ce département. L'alliance de l'Université avec les Sociétés savantes lui parait une suite naturelle de l’organisation de cet établissement , fruit du génie vaste qui préside aux destinées de l'empire français, établissement où les jeunes nourissons des Muses reçoivent aujourd’hui le complément à toutes leurs études. » Les leçons de l'histoire , dit l’orateur , donnent à cette jeunesse une expérience anticipée, utile à tous, et sur-tout à ceux qui auront à exercer des fonctions publiques. Et le tableau développé de tous les systèmes de philosophie , les met en Cn5) possession des vérités qu'ils présentent ; et leur en découvre les erreurs «, Ceci conduit M. de Lalanne à passer rapidement en revue tout ce que l’homme , abandonné à ses propres forces, a pu énfanter pour découvrir l'homme à lui-même, » Dès les premiers pas, dit notre collègue, les phi- losophes se divisent ; c’est l'empirisme qui ne voit que des faits, et cependant est forcé de Îles rap procher pour en déduire des analogies ; c’est le dogmatisme qui , ne voulant d'autre source de cer- titude que le raïsonne “ent , se voit encore forcé d’avoir recours aux faits pour donner un appui à sa théorie; c’est le matérialisme , obligé de recon- naître la pensée qui échappe à la matière ; cest l'idéalisme qui conteste aux corps leur existence , et ne met pas ses partisans, dit l’orateur , à l'abri des jugements que fait naître à chaque instant l'impression des objets extérieurs : tant il est vrai qu'il n'y a rien de tranchant , rien d’absolu dans la nature de l'homme. L'unité est le partage ex- clusif de l'essence souveraine ; l'infini le borne de toutes parts, et malheur à lui s’il veut en sonder les profondeurs «, » Descartes rappelle , dans l’étude de la philo- sophie, ce doute méthodique; mais c'est là son point de départ et non le terme de ses recherches, » Entouré desystêmes, qui tous sé combattent et se détruisent, dont aucun ne satisfait ni le cœur ni l'esprit, l'homme ne trouve de refuge que dans l'idée d'un étre unique, source de toute existence et de toute pensée. » » C'est dans cette idée féconde et consolatrice que Platon ‘a puisé cette élévation, ce feu, cet esprit de vie qui anime toutes les conceptions philosophiques, H 2 (116 ) Dans nos temps modernes, Descartes, Bacon , Malle- branche, Leibnitz y ont trouvé le repos à l'appui de leurs méditations. Locke, le judicieux Locke, a cru pouvoir en négliger le secours, Malgré la force de raisonnement qui le caractérise , et la pureté de ses vues , sa philosophie est aride et ne dit rien au cœur « Ici s'offrent naturellement à l’orateur les Bossuet, les Fénélon. Il voudrait les citer. Cette réflexion sage se présente @ l’arrête : mais ils étaient Théo- logiens ; il ne s’agit ici que des eflorts de l'esprit humain livré à lui-même. M. de Lalanne dit un mot de Volf qui veut en- tourer sa philosophie de lappareil des formes ma- thématiques. La sécheresse de sa méthode a éloigné tous les esprits. » Bayle avait ouvert la voie du doute indéfini ; Fontenelle y entre après lui ; mais, sous le voile d’un badinage ingénieux , il sut couvrir les conséquences de ce système dangereux. Voltaire saisit après lui le sceptre de l'opinion , et employa , pour dominer son siècle, toutes les ressources d’un génie habile, toute l'autorité que lui donnaient des talents supé- rieurs. Cet homme, qui a épuisé tout le blâme et tous les éloges, a traité la philosophie à la manière de Lucien ,et, si l’ou veut, d’Aristophâne , et s'est plu à ébranler le fondement de toutes les certitudes. » D’'Alembert a voulu imiter Fontenelle , dont le style était bien mieux assorti à son caractère per- sonnel et à ses talents. » Condiilac , dans le même-temps, rendait aux sensasions l'empire absolu sur nos idées ; Helyvétius pressait les conséquences de ce système que Con- dillac n'avait pas apperçues. Il osa professer le matérialisme pur, théorie qu’il désavouait par sa sensibilité et ses verius domestiques «. C7) Tout fut mis en question, dit encore l’orateur; et, tandis que Leibnitz retrouvait chez les anciens ce qu'il appelle nova inventa antiqua , on se crut autorisé à refaire l'édifice des connaissances humaines. L'origine des Sociétés fut recherchée ; l’état de nature fut trouvé dans la vie sauvage , qui n’en est que la dégradation. C’est encore Rousseau , cher- chant à expliquer l'origine des langues , après avoir tourné en ridicule cette recherche, par ce mot bien connu : comme si la parole n’était pas nécessaire pour établir la parole, » Homme étrange , s’écrie notre collègue, qui, dans ses nombreuses contradictions , a quelque- fois trouvé le vrai, dont il s'était proclamé l'apôtre ; et, malgré ses paradoxes , à l’aide d'un style plein de nombre et de chaleur, d'une dialectique vive et pressante, el sur = tout d'un ton dogmatique et absolu , a balancé lPascendant de Voltaire , et exercé , comme lui, une grande autorité sur les esprits «, Ces deux hommes célèbres n'étaient plus, lorsque, dans un coin de l'Allemagne, Kant , professeur d’une vigueur d'esprit bien rare , vint annoncer que jus- qu’à lui il n'y avait pas eu de philosophie. Tout-à-coup. cet homme devint le pythagore de son pays. Le maïtre l’a dit, était le mot qui im- posait silence au contradicteur. Ses disciples , déjà partagés, font prévoir que le Kantisme aura plus d'éclat que de durée. Il est à peine connu parmi nous, et il est permis de n'en avoir pas de regret, dit M. de Lalanne; on rest pas étranger à la philosophie lorsqu'on est à la suite de Descartes et de Leibnitz, L'enseignement tiré de leurs leçons, peut étre encore la base de celui que reçoivent les élèves de H 3 C(u8) l'Université ; et si, pour remplir les vues vastes et élevées de son anguste fondateur , les professeurs présentent aux jeunes élèves le tableau des diverses opinions philosophiques , ce sera pour les convaincre que tout est incertitude et tenèbres pour l'homme, s’il dédaigne de marcher à la lamiè-e des grandes vérités qui, pour parler le langage de Platon , pren- nent leur source dans les idees éernelles. C'est par ce paragraphe , qui renferme toute la pensée de notre collègue, que je termine l'analyse de ce discours plein de sagesse et d'erudition, = M. Priquet, membre non résidant , vous a fait hommage de trois ouvrages : l'£loge de Nicolas Boileau Despréaux , celui de la Quintinie , et celui de Jules-César Scaliger. L'auteur , dit M. Duputel , chargé d’un rapport sur les deux premiers , divise l'Eloge de Boileau en trois parties ; dans la première , il examine le mérite de ses ouvrages ; dans la deuxième , ses qualités morales , et dans la troisième , son influence ‘sur la littérature de son siècle, M. le Rapporteur croit devoir peu s'arrêter sur le mérite littéraire du poëte que l'on peut regarder ‘comme l'oracle de Ja raison et du goût. Mais si les détracteurs de Boileau , sous le rapport de ses talents , ne peuvent être que des gens pleins d’ignorance où de mauvaise foi , il n’en est pas de méme de ceux qui, faute d'avoir assez réfléchi , se permettent d’avoir une opinion défayorable de ses mœurs, » On peut, dit M. Briquet , pardonner à Des- » préaux plus qu’à tout autre , d'avoir censuré les » mœurs de son siècle, parce qu'il etait irreprochable » dans les siennes ; sa vie fut pure comme ses éCrits ; C119) » il ne portait pas dans la société l’äpreté dont ses » satyressontempreintes. Sa douceur lui fit plusieurs » amis , et les lui conserva ; sa tendresse, sa » constante amitié pour Racine, qui lui rendit cet honorable témoignage , qu’il ne connaissait pas un » meilleur ami ni un meilleur homme au monde «. Tous les traits que raconte M. Briquet vengent Boileau de l’injuste accusation de dureté , d'avarice et d'insensibilité. » Je regrette , dit M. Duputel , de ne pouvoir vous faire connaître en entier le passage dans lequel l'au- teur développe en quelque sorte le secret de la sympathie qui existait entre l'ame sensible et déli- cate de l’auteur d’Athalie et l'ame de Boileau , si bien faite pour l'entendre et Jui répondre. Ce mor- ceau est plein de verve , de chaleur et de véritable éloquence «. Dans la troisième partie , l’orateur examine qu’elle a été l'influence du législateur du Parnasse sur son siècle. Elle a eu deux caractères , celui de défendre et de venger le génie , et celui de fonder l'empire du goût. Il ne fallait rien moins qu’un grand courage et une grande supériorité de talents pour oser élever, contre ce torrent du mauvais goût , une digue qui dès-lors devait étre respectée. » C'est dans l'ouvrage même , dit M. Duputel, qu'il faudrait voir le développement de ce que je viens d'indiquer ; et , malgré quelquestaches légères, on ne peut que féliciter l’Institut d’avoir reçu des discours plus dignes que celui-ci de la palme aca- démique «. = Le même Rapporteur vous a rendu compte de l'Eloge de la Quintinie. Cet ouvrage ne donne pas H 4 (120 } nne idée moins favorable du talent de M. Briquet: Après un exorde d’une élégante simplicité , l’o- rateur entre dans l'examen des services que 1a Quintinie a rendus à l’agriculture. Destiné, par ses premières études , à la profession d'avocat , il se distingua par €t nous eussent mis en état de n'avoir rien à envier, sous ce rapport, aux nations voisines , si le grand développement qu'acqu't tont-à-coup une autre branche de notre poésie n’eût changé la direction de leurs travaux littéraires, Le Français s'était divisé, dès son origine, en deux dialectes extrémement distincts, la langue d'or et la langue d’oc, parlées exclusivement, l’une en-decà, Pautre au-delà de la Loire. La première avait été employée par les Trouvères ; la langue d’oc, plus douce et plus rapprochée des idiomes harmonieux et sonores de l'Espagne et de l'Italie, acquit bientôt, grâce aux productions des poëtes provençaux, une grande vogue. Il est même probable qu’elle eût en- tiérement pris le dessus sur la langue d’oil, moins brillante et moins flatteuse à l'oreille , si la situation du siége de l’'Erat dans les provinces septentrionales v’eût puissamment contre-balancé l'influence des causes qui tendaient à amener ce résultat, L'apparition des Troubadours est un des faits les plus intéressants des annales de l'esprit humain ; on ne peut sans injustice se refuser à reconnaître tout ce que leur institution eut d’aimable et de séduisant, ni les services importants qu'ils ont rendus à la Littérature, en en répandant le goût parmi les classes élevées de la société, à qui elle avait été jusques-là presqu'entièrement étrangère; mais om TT (123) voit avec regret qu'ils aient substitué à la simplicité, à la naïveté et au Jaconisme des anciens récits, une poésie lyrique sans inspiration, la métaphysique ga- lante des cours d'amour et les faux brillants du bel esprit, Les Français de la langue d’oil adoptèrent bientôt leursystême poétique ; mais, guides par un goût plus délicat, par un sentiment plus jnste des règles de l'art , ils élaguèrent de leurs imitations les défauts les plus frappants de leurs nouveaux modèles. De toutes les formes de composition qu’ils dnrent aux Trou- badours, la Chanson fut peut-éire celle qu’ils ac- cueïllirent avec le plus d’empressement, et culti- vérent avec le plus de succès. Parfaitement appro- priée au caractère français, elle devint bientôt pour nous un genre de poésie national, et remplaça dans notre Littérature les chants historiques. Une autre cause concourut d’ailleurs à faire dispa- raître chez nous ces derniers , C’est la grande quan- tité d’ouvrages en prose qui parurent dans le cou- rant des XIV* et XV°siècles. Le charme de la versi- fication est nécessaire dans l'enfance des Langues pour en rendre supportables les bégaiements encore informes, Les premières productions de toutes les Littératures connues sont en vers. La prose ne com- mence à y paraitre qu'après que l’idiome a déjà acquis une élégance assez soutenue pour pouvoir se passer du prestige de la mesure et de Ja rime. Les nombreux ouvrages consacrés à la peinture des mœurs chevaleresques, écrits d’abord en vers, furent ensuite pour ainsi dire traduits en prose. Ce genre d’écrits se multiplia bientôt prodigieusement. La poésie française soufrit beaucoup de cette préfé- rence exclusive ; les anciennes formes de composition furent négligées et même oubliées. La Romance se C124) trouva enveloppée dans cet arrêt et ne produisit plus que quelques ébauches grossières destinées à faire l'amusement des dernières classes du peuple. Depuis la renaissance des Lettres, quelques écri- vains ont tenté de reproduire ses chants simples et doux, mais entièrement étrangers à son esprit : ils ont peu réussi à donner à leurs essais en ce genre Ja couleur locale, à les rattacher à des souvenirs historiques importants, et à leur prôter un intérêt -matioual en y présentant quelques portions de ce -riche patrimoine de gloire qui nous a été transmis par nos ancêtres. On doit convenir anssi que le caractère actuel de notre langue, si éloigné de la naïveté , opposait de grands obstacles aux succès de leurs eflorts. Je n'entrerai point dans le détail de ce qui a été fait sous ce rapport; les résultats d’un sem- blable examen seraient peu remarquables et ne ser- viraient qu’à altester notre indigence ; j'aime mieux passer rapidement à l’histoire de la Romance chez les laliens et les Espagnols. De tous les pays où les nations gothiques s’éta- blirent à la chute de l'Empire romain, l'talie, plus éloignée de leur patrie et placée au centre de la civi- lisation , fut peut-être celui ou leurs institutions et leurs mœurs subirent les plus rapides altérations. Les fréquentes révolutions qu’elle éprouva dans le moyen âge, les factions qui la divisèrent concou- rurent à empêcher ses nouveaux habitants de garder leur caractère distinctif, et de se livrer à la culture de leurs poésies nationales ; il n’en est resté que quelques Hymnes militaires, écrits dans un latin rimé et barbare : les chants des Bardes ont peu reten- tit sur ces bords heureux que les Muses latines avaient naguères charmés de leurs doux accords. Le patois grossier qui avait succédé en Jtalie à la (125) Jangne latine ne commença à prendre une forme régulière qu’à l'époque où les poésies provençales y péueétrèrent. La grande influence qu’elles ont con- servée jusqu'à nos jours sur la Littérature italienne ne permit pas aux récits historiques et chevaleres- ques de s'y introduire ; d’ailleurs, c'est sur-tout dans l'enfance des langues que ce genre de composition est cultivé avec le plus d’ardeur et de succès. Or, l'Italien a acquis presque dès sa naissance toute sa maturité sous la plume de Dante, de Pétrarque et de Bocace , et sa courte enfance, consacrée toute entière à limitation servile des poësies provençales, n’a pu produire beaucoup d'ouvrages analogues à ceux qui nous occupent en ce moment. Il faut renoncer à en trouver dans une littérature d'ailleurs extrémement recommatdable, mais qui le serait encore plus sans la richesse et l'afféterie qui déparent souvent les plus beaux monuments. Si la Romance fut étrangère à la poésie italienne, elle tient peut-être le premier rang dans celle d’un peuple voisin chez qui des circonstances particu- lières la portèrent à un dégré de perfection peu com- mun; je veux parler de l'Espagne, de ce pays de forte et intéressante mémoire , qui vit pendant près de huit siècles lutter dans son sein les peuples du Midi et ceux du Septentrion , la religion de Jésus et celle de Mahomet, les mœurs européennes et les mœurs orien- tales. Enlevéepar les Goths aux successeurs dégénéres des Césars, elle dut pendant long - temps à sa posi- uon isolée et presqu'insulaire un repos qui devint fatal à ses possesseurs. Les délices de son climat amol- lirent ces guerriers farouches, accoutumés jusques- là à braver l'inclémence des saisons, et à supporter des privations de toute espèce sur une terre avare et iuhospitalière, Pendant que les Goths perdaient (156) dans les plaisirs cette énergie et cette vigueur qui avaient amené leurs succès, le fanatisme religieux poussa vers leurs belles demeures les enfants de l'Orient chez qui un culte nouveau et guerrier venait de développer l'amour des combats et des conquêtes. Appelés par un traître, les sectateurs de Mahomet inoudèreut les plaines de l'Andalousie et se répan- dirent promptement par toute l'Espagne, Rien ne put résister à leur premier choc; les Goths , obligés de se retirer au sein de montagnes inaccessibles, y cachèrent quelque-temps leur honte et leurs revers; mais , bientôt retrempés par ladversité, ils rentrèrent en lice avec leurs vainqueurs, en balancèrent la puissance , et les repoussèrent enfin sur les bords africains après huit cents ans de combats. On sent tout ce qu'une lutte aussi longue et aussi soutenue dut enfanter de prodiges de valeur chez deux peuples remarquables par leur esprit guerrier, et si diflérents d'origine, de culte, de mœurs et de langage; ces contrastes donnèrent à leurs habitudes et à leurs institutions civiles, militaires et religieuses, un ca- ractère d'enthousiasme et d'exaltation extrérnement prononcé, Les idées chevaleresques, reçues avec une égale avidité par les chrétiens et par les mahométans, se liérent intimement avec leurs mœurs publiques et privées, et y portèrent au plus haut degré d'énergie tous les sentiments nobles et généreux, surtout ceux qui les attachaient à la religion, à la patrie, au prince et à la beauté, Cependant, le besoin de la gloire, l'amour et une estime mutuelle rapprochèrent souvent deux peuples entre lesquels il existait mille points de contact, L’'Epagne gagna beaucoup à ces communications, et reçut d'une nation originairement armée couire la (127) civilisation tout ce qui pouvait en hâter le dévelop- pement. Les sciences et les arts de l'Orient v nrent à la voix des rois mahométans fixer leur demeure dans la péniusule. La galanterie maure adoucit la fierté castillane, modifia les institutions de la cheva- lerie, et lui prêta ses séductions sans en altérer esprit. Accoutumés à méler les jeux aux combats, les Maures introduisirent en Espagne ces fêtes, ces tournois, ces carrousels, où le courage et l'adresse étaient couronnés par les mains de la beauté, et où Ja présence de l’objet aimé portait au plus haut degré l'enthousiasme et l’ardeur des combattants. Ce caractère de gaieté, de galauterie et de pompe était particulier aux Maures d'Espagne; il se soutint et s’accrut même pendant les derniers moments de leur existence politique. Ce fut au sein des fêtes et des jeux qu’ils perdirent leur dernier asyle, et cédérent à l'ascendant toujours croissant de la puissance castillane. Avides de tous les genres de gloire, ils cultivèrent avec ardeur la poésie, et s'attachèrent surtout à celle qui retraçait leurs exploits et leurs plaisirs. Les chants historiques, si familiers aux peuples de lOrient, furent pour eux l'objet d’une prédilection particu- lière. Ils les employérent à célébrer tour-à-tour la valeur des guerriers, les peines et les plaisirs des amants, l’éclat des fêtes et les délices de leur nou- velle patrie. Plus tard, la Romance leur rappela également les malheurs et la décadence de leur Empire , et sembla prendre des couleurs encore plus vraies et plus enier- giques pour peindre ce triste tableau. Celles qui furent composées sur la prise de Grenade , et les circons« tauces qui la précédèrent , sont peut-étre les plug (128) parfaites de leurs productions en ce genre; pendant Jong-temps elles firent couler les larmes de tous les yeux lorsqu'on les chantait dans les rues de cette ville, et les conquérants se crurent obligés d’inter- dire aux vaincits cette triste et innocente consolation. Les Espagnols adoptèrent avec empressement un genre de poésie si conforme à leurs mœurs guer- rières et aux anciennes habitudes de toutes les nations gothiques. La Romance passa chez eux en conservant des vestiges frappants d’une origine orien- tale : des pensées fortes et grandes, des sentiments nobles et élevés, des images empruutées à une na- ture imposante et fière continuërent de la caractéri- ser. Tous les souvenirs propres à flater l’orgueil na- tional ou à intéressér le cœur humain, mais surtout les exploits du Cid et les nobles et aventurenses cir= constancés de sa vie devinrent le sujet de ses chants; une langue grave et sonore revétit de sa pompe, un peu sauvage, leur austère simplicité. Un rithme simple , et soumis seulement à la règle peu gênante des assonances, permit aux individus le plus étran- gers aux études liuéraires de se livrer à ce genre de composition. Les Romances espagnoles ont été féunies dans de volumineuses collections connues sous le nom de Romanceros et Cancioneros. Sans doute , toutes les productions que contiennent ces livres n’offrent pas le même gevre, ni le même degré de mérite; mais il en est un grand nombre qui peuvent être mises au rang des productions les plus distinguées du moyen âge. C’est surtout vers le XVe siècle que ce genre de poésie acquit en Espagne toute sa perfection. Plus tard , l'introduction de la littérature provençale et celle de la litiérature italienne altérèrent la franchise et la simplicité des chants historiques. À cette époque, d'ailleurs, ( 129 } d’ailleurs, la chute de l'Empire des Maures donna aux Espagnols l'occasion de connaître encore mieux tout ce qui concernait celte nation. Ils peignirent avec plus de vérité ses mœurs et ses institutions , et traduisirent ses Romances les plus remarquables. C’est dans ces imitations que lon peut le mieux étudier le génie d’un peuple aimable, illustre et malheureux. Rien n’est plus parfait dans ce genre que celles qui sont renfermées dans un ouyrage de Ginez-Perez-de-Hita, consacré à l'histoire des événe- ments qui amenérent la prise de Grenade. Si une critique éclairée doit rejeter dans la classe des his- toires fabuleuses toutes les aventures romanesques qui remplissent le texte de ce, livre, on ne saurait refuser le plus haut degré d'intérêt aux Romances dont il est parsemé , et que l’auteur cite à l'appui de ses récits. Qui ne serait profondément attendri par le fidèle tableau de la consternation et des regrets d'Abou-Abdallah et de son peuple à la nouveïie de Ja prise d'Alhama (*) ! Qui refuserait son admiration au noble orgueil du Maure Abenamar, montrant à ua roi d’Arragon les pompeux édifices de Grenade; à la surprise du monarque chrétien, lorsqu'il découvre tant de merveilles, et à la sublime prosopopée qui termine cette belle Romance (**) ! Qui peut suivre (*) Pascabase el rey moro Por la ciudad de Granada Desde las puertas de Elvira Hasta las de bivarambla Ay demi Alhama ! etc, ‘ (**) Abenamar, Abenamar, Moro de la Moreria, ete, #C 130 ) sans intérét dans tous les détails de son existence in- térieure et extérieure certe Hation si poétique, et dont les annales fourniraient-de si beaux sujets à la Muse de l'Épopée ! Honreur au peuple vainqueur qui sauva de l'oubli quelques-unes des productions de sa liutrature , etiqui ne dédaïgna pas d'y chercher des modèles! Puisse ce noble exempie être à jamais suivi dans touteslesrévolutions des Empires, presque touiours si fatales-aux productions de Pesprit et du gcuie ! FABLES, Par M. Le Fiireur Des GuErrors, Les deux Chiens. Bairsur dit à Médor : Toi qu’au logis on aime, Qui caresses le maitre, amuses les enfants, Et, jusqu'aux valets de céans, Sais tout charmer par ta douceur extrême A Tu conviendras que par moments Tu diffères bien de toi-même, Parait-1l un chien étranger ? Loin de lui faire politesse, De Le gratifier d’un mot, d’une caresse ;' Tu lui montres les dents et le fais déloger, Doit-on traiter ainsi les gens de son espéce ; £t d'humeur à ce poiut, dis-moi, peux-tu changer ? — Ami, dit Médor, en ce monde g Où les bons sont toujours vexés par les méchants, Pour jouir d’une paix profonde, Il faut savoir par fois épouvanter les gens. Vas, ce que je fais est dans l’ordre : Envers tout étranger défiance est vertu ; Je montre les deuts non pour mordre | Mais pour ne pas être mordu, ( 132 ) ‘L’Avare et le Chat. | “x Chat d’un vieil avare habitait Ja maison, Vous devinez sans peine , avec un tel patron D l , Que le pauvre animal faisait fort maigre chère. Aussi qu’arriva-t-il? Raton k : | Se vit réduit pour vivre à devenir fripon. 11 avait pour cela peu de chemin à faire : F% moins de rien Raton sut son métier, Or, un bêau jour que dans le colombier ; Les yeux en l'air, mon galant rôd'e Il aperçoit avec transport Certains Pigeons presque sans plume «1 encor. Ils étaient en un lieu favorable à Ja fraude, Jui suffisait d’ allonger,, Pour les avoir, uu peu | Ja patte. Aussi n’eut-il qu'à prendre et qu’à manger, TFranquillement, conune ordonne Hippocrate, “Le drôle, bien repu, digérait à à l'écart, Quand Harpagon survient , mais un peu tard, Le Chat le voit et lestement s'échappe er Disabt : les Pigeonneaux, mon maitre, sont fort bons, Meilleurs encore, j’en réponds, - Quand c’est à vous qu'on les attrappe. * . Au larcin de Raton à mal faire occupé, Je suis loin d’applaudir ; tout fripon est à craindre : Mais pourquoi donc l'Avare , alors qu’il est dupé, ‘Æst-il de ces mortels que je ne saurais plaindre ? (.135:) Lisez. LAS FABLE, , Par M. GurriNcouen. L'Enfant et le Cerf-volant. Ox rit des chagrins de l'enfance ; On blème leur frivolité, Mais anx yeux de l’exfiérience Les nôtres offrent-ils plus de réalité ! Ah! me disait un ami sage, En consultant ma raison et mon cœur, Je m'afllise souvent des peines du jeune àge Pius que de la folle douleur De certrin grave personnage. Hier, ajoutait-il, tout en philosophant, + J’errais dans une vaste plaine, Où bientôt s'offre un jeune Enfant, De tous côtés courant à perdre haleine, Pour lancer dans les airs un léyer Cerf-volant D'abord , incertain et tremblant, Il regarde, il observe, et respirant à peine, Long-temps il consulte le vent! Jl se trompe, il revient et vingt fois recommence, Tantôt rempli de crainte et tantôt d'espérance ; * À la fin saisissant un fortuné moment, I redouble d'efforts , et, d’un vol imposant, ’élève, approche des nuages, L'’aérostat s Et va braver les vents, les cieux et les orages !! Alors vous eussiez vu mon héros triomphant, L’œil satisfait, la contenance fière : La C154) Ce n’est plus cet adolescent Échappé des bras de sa mère , C’est un homme important, c’est un grand de la terre} La fortune a comblé ses vœux, Sera-t-il jamais plus heureux ? Cédant à sa vive alégresse, Il appelle à grands cris Ses rivaux, qu’il croit ses amis, Les appelle sans cesse, Et montre à leurs regards surpris Cet astre qui des airs franchissant l’étendue Plane et s’agite dans la nue! C’est à moi , disait-il , il bénit ses destins ! En est-il de plus beaux en la machine rondet Il.ne changerait pas pour les rênes du monde Ce fil heureux qu’il serre dans ses mains! Jeune insensé! du sort redoute l’inconstance , Bientôt tout va s’évanouir! Tremble !! quand le bonheur commence JT! est souvent près de finir! Des succés si brillants ont excité lenvie, Et tandis que vainqueur des airs, Mon nouveau Montsolfer entonne ses concerts, Use main ennemie Se glisse... et tranche indignement Ce hl qui semble en ce moment Etre le lien de sa vie, ' J1 jette un cri, s’élance, il court... c’est vainement, Au sein de Ja plaine liquide À ses yeux disparait Pobjet Dont il ne sera plus le guide, Et son désespoir est complet! Chacun riait de sa démence ; Moi, je l’observais en silence : Ses pleurs, ses tourments enfantins ( 155 1). + Faisaient renaître en ma mémoire ; Mes prétendus revers ct nes plus grands chagrins ! Je disais : comme lui j’ai reehexché la gloire, Et comme lui séduit par un éclat trompeur , Bien au-dessus de moi j'ai placé mon bonheur! Vaines illusions , séduisantes chimères, Projets ambitieux, Combien de fois vous avez de mes yeux Fait couler des larmes amères! Quand Églé me trabit au mépris de sa foi, De pleurer, de gémir, n’eus-je pas la faiblesse Aimable Enfant, Gans ta tristesse, N'’étais-tu pas moins fou que moi! re LR STANCES A LA BIENFAISANCE: DÉDIÉEs AUX MANES DE MARC - ANTOINE Perir. “Par J. B. FV'icxé, D. M. Les bons cœurs sentent l'obligation de faire du bien plus qu’on ne sent les autres besoins de la vie. — Mad. la marquire de LAMFERT. mm O toi, divine Bicufaisance, Dont je révére les antels j Toi dont l'unique jouissance Est de consoler les mortels s À te chanter si je m’empresse, Daisne approuver mon zèle ardent ; Frête ta grace enchanteresse Au langage du sentiment, Avec le charme inexprimable Qui caractérise ta voix, Je dirais combien est aimable Le plaisir de suivre tes lois ; Et de la touchante harmonie * De nos concerts religieux , Je ferais à l’âme attendrie Goûter l'effet délicieux. Mais ce même effet que j’admire Mais ce transport si ravissant ; Ai-je encor besoin de dire Que je l’éprouve en te voyant ? Sous quelle couleur assez pure : Pourrai-je présenter tes traits, ( 137 3, Car, enest-il, dans la nature #, D'aussi doux et d’aussi parfaits? Ni les grandeurs , ni l’opulence ; N'ont le pouvoir de t’éblouir ; Toujours auprès de l’indigence On voit ton front s’épanouir ; De l'Eternel il est le trône, Et l’on trouve écrit dans tes yeux : Un cœur tendre, une main qui donne (*) ; Sont les plus beaux présents des Cieux« Quelle plume aurait l’art de rendre Le meintien noble, affectueux, Qu’à ton exemple on devrait prendre Dans l’asile des malheureux, Et cette déférence extréme, Ce ton et çe geste discrets Qui semblent te montrer toi-même Acceptant les dons que tu fais? Sur tous les rangs, sur tous les âges | Digne de régner à-la-fois, s Tu prodigues tes avantages Aux 3 aussi bien qu'aux rois; L’ado pr? 1 L'adresse et son cœur et ses vœux , ent qui, pour la vie, Le vieillard qui sur toi s’appuie (**) ; Des humains sont les plus heureux. Ct) Je ne crois point m'être écarté des règles de la versification en faisant rimer rrône avec donne : Voltaire er Gresset , entr'autres Auteurs célèbres » ayant donné cet exemple , le premier dans la tragédie d'Eryphile etc., le second dans trois de ses odes. C*#) Ce vers représente le Vieillard ne prenant conseil que de la Bienfaisances (138 y Que vers Le séjour du tonnerre. Je porte un œil observateur, Que j'interroge aussi la terre Sur les secrets du Créateur, Partout je crois voir ton image Et voir tout par toi prospérer, Partout distinguer ton langage, Et partout te voir adorer, Soit décerné pareil hommage De reconnaissance et d’amour À l'Homme hubile autant que sage- Qui te fait bénix chaque jour! Tous jes talents qu’en lui j’honcre Scraient par lui comptés pour rien. S’ii ne savait y joindre encore Le grand art de fäire le bien. Des travaux de l’active abeille Qu'il reeneille toujours le fruit! Que le bonheur toujours s’éveille Et toujours s’endorme avec lui ! Que bientôt occupant la place- Des plus douces réalités Un même songe lui retrace Ü Toutes ses libéralités ! Et toi, mes plus chères délices; Toi qui n’imposes en effet Que d’agréables sacrifices, De mes vœux sois aussi l’objet ; Puissent céder à ton empire Les cœurs le moins compatissants ; Que tout mortel enfin aspire À offrir le plus pur encens! TABLE DES MATIÈRES. AS AT Te A TT Ovrsrrurr de la Séance publique, page 1 S'CINE N CE S VE TL AVRADS: Rapport fait par M. Vitalis , secrétaire perpétuel de l’Académie , pour la classe des Sciences. ibid. Ouvrages annoncés ou analysés dans ce Rapport. Rapport fait par M. Meaume , sur un ouvrage de M. Francœur , ayant pour titre : Uranographie ou Traité d’Astronomie ; à l'usage des personnes peu versées dans les Mathématiques. 5 Réflexions sur les retardements que font éprouver les frottements aux corps en mouvement. 4. Rapport fais par M1. le Tellier, sur les Eléments de Statique, par M. Labbey. 5 Géométrieexpérimentale sur la quadrature du cercle, 6 Traité et définition des Comètes , par M. Delaune, ibid Hypothèse dela solidification du globe terrestre , par M, J, R. Jacquelin Dubuisson, ibid. Rapports de MM: Lhoste er Vigné, sur un ouvrage ayant pour titre : Examen des principaux Systèmes de la nature du fluide électrique , et sur son ac- tion dans les corps orgauisés et vivants ; par A7, Lebouvyer-Desmortiers , 8 Fapport fait par M. Pinard de Bois-Hebert sur nn manuss crit ayant pour titre : Perfectionnement des pendu- les ordinaires pour l'usage civil ; par A, Destigny, &1 Cr40) Rapport fait par M. Robert sur un manuserit intitulé : Essai sur les Plantes de la famille des Orchidées, qui croissent spontanément dans le Département de la Seine-Inférieure , page 13 Discours de réception , prononcé par M. Marquis, 18 Compte rendu pur M. Marquis , du premier numéro du Journal de Botanique , rédigé par M Desv: aux , 21 Notice sur les alcools, par M, Dubue, 22 Mémoire sur l’histoire et l'analyse des-eaux de Fi orges , par M. Robert, 26 Analyse des eaux d’une source ER à l’Hôpital général ; par M, Vitalis, | 56 Observations sur les phénomènes que présente la charx dans son extinction au moyen de l’eau; par M, Vitalis, 59 De l’action de la lumière solaire sur Le phosphore ; par 21. Vogel, , 46 Rapport de M. En E sur une dissertation con- cernant la r ; par M. Dubuisson, 47 Bulletin des ne, médicales d'Evreux , ibid, Rapport de D. Vigné sur une partie des ouvrages de M. Maccary, 48 Traité analytique de la folie et des moyens de la guérir ; par M. Amard , 5t Compte rendu par M. Godefroy PE 4 ur ouvrage inti- tulé : Traité des maladies aiguës des femmes en couches ; par B1, Gastellier , : 55 Procès-verbal de la Séance publique de la Société de médecine de Lyon, à 54 Mention honorable faite par la Société de médecine de Lyon, de l’Essai sur la médecine légale, de M. Vigné, et d’un Mémoire de M. Golefroy, 54, 55 Kapport de M. Dubuc, sur un mémoire concernant le sucre de betterave , envoyé par M. Legrip, ibid. (141) Compte rendu par M1. Boismare , d'observations rela- tives au cordon ombilical ; par DM, Girard, page 56 Traité sur la culture et les usages du maïs ; par M. Parmentier , j 57 Instruction sur la culture des fèves et de la pomme de terre ; par D. Lair , ibid. Annuaire de la Société d’agriculture et de commerce de la ville de Caen, ibid, Travaux de la Société d'agriculture du département de la Svine , adressés à l’Académie par S. Ex. le Ministre de l'Intérieur , 58 Projet d’almanach pour les cultivateurs ; par 21. . Feburier , 59 Moyens de prévenir les disettes ; par M1. Cadet. de-Vaux, 60 Compte rendu par 21. Periaux , de la première par- tie d’un ouvrage sur la Statistique du département . de la Seine-{nférieure ; par M. Cabissol, ibid. Précis des travaux des Amateurs des Sciences et des Arts de Lille. a DR Gt Programme des Prix proposés par la Société d’encou- ragement ,ibid. — par les Académies de Caen, Lyon , Dijon et Bordeaure. ibid. Rapport fuit par M. le Priol, au nom d’une commis- sion , sur le Mémoire envoyé au Concours de 1815, ‘classe des Sciences , 65 Prix décerné êh 1813, page 85; — proposé pour 1814 , ibid. BELLES-LETTRES. Rapport fait par M. Pinard de Bois-Hébert , Secré- taire perpétuel pour la classe des Lettres, 57 Cr) Ouvrages annontés ou analysés dans ce rapport. Résultat des travaux de la Société académique des Sciences, Belles - Lettres et Arts de Besançon, page 87 Proces-verbal de la Séance publique de la Société d’émulation de Rouen , 58 Recueil des ouvrages de l’Académie des Jeux flo- raux , ibid. Eloge de Florian, par A. de Rosny, ibid. ÆEssais historiques et anecdotiques sur le comté et les comtes d’Evreux; par 17, le chevalier de Saine Amand, ibid. Deux pièces de vers, l’une ayant pour titre : Coffin où les Minéurs sauvés , l’autre : Sur la naissance de ma Fille; par M. Gutinguer , 89 Æssai sur la Romance ; par 21. le Prevost , ibid, Thémistocle et Philippe IL , tragédies ; par M. Licquet, ibid, Buste de Michel Montaigneÿenvoyé par 21. Gois, ibid. Discours prononcé par M. le Comte de Girardin , Président de l’Académie, à la Séance de rentrée, ibid. Discours de réception de JH. le Prevost, gt — de M. Licquet, 92 — de M. Guttinguer, 03 — de 31. Lamandé, g5 — de 2. Cabissol, u 07 Premier acte d’une tragédie nouvelle; par 21. Licquet,98 La Duchesse de la Valière, comédie ; par leméme, ibid. Les deux Chiens , l'Avare et le Chat, fables ; par A1. Lefilleul des Guerrots, ibid, L'Enfant et le Cerf-volant , fable, par M. Cuitin- guer , ibid. Stances à la Bienfuisance , par M. Vigné, ibid. C143) La näissance du Plaisir ; par M. Lebouvyer-Des- mortiers , page 98 Deux pièces de vers, la première ayant mour titre : à Madame Victorine Babois, la seconde : Aux mânes de M. Legouve;, par M, Bainvilliess, 99 Fepport par M, Gourdin , sur une dis ertation de A1. Penhonet, relative à trois monuments trouvés dans le Morbihan , ibd, Mémiire sur la Crypte ou Chapelle souterraine de Saint-Gervais ; rar D, le Prevost, ibid. Introduction au Traité de la Législature , par M. Boïeldieu , 101 Dissertations sur l’Iliade d'Homère ; par 4. Lemesle, ibid. Mémoires sur les Trouvères et les Troubadours ; par le méme , ibid. Tubleau des principales situations de l'Odissée ; par M. de Glanville, 102 Opuscule relatif aux travaux de l Académie de Caen ; par 1. Toustain de Richebourg , 104 Dissertation sur cette question : Le culte d'Isis étrait- il connu dans les Gaules avant que Jules-César en fit la conquête ? par M Gonrdin , ibid. Dissertation sur Le même sujet ; par 31, Lemesle , 105 Observations relatives au voyage des Israëlires dans le Désert ; par M. Gosseaume , 106 Prix proposé pour 1814, 109 Ouvrages dont l'Académie a délibéré l'impression en entier dans ses actes, Essai sur les Romances historiques ; par M. le Pre- vost, 111 Les deux Chiens , l'Avare et le Chat , fables ; par AT. Lelilieul des Guerrots , 195 CMD 4 L'EsrAxr et le Cerf-volant , ‘fable ; par M. Guttin- D'EES page 133 Sraxcess à la Bienfaisance ; par M. Vigné, 156 Fin de la Table, Led Vent étuey XY dEvrvv AREAS Ÿ- y MAY VUE LUE LIEN “MMMAUONE MAMMA W. AA Ÿ AMMMAN \èy FPPOMICPEEMESE RES AA HMAE AV NNUT ME RTET PARA MÆRNE IE de Die SENS NNE SEEN NE yy À 2 LI NUNNE NN AMMÉE 5 35 8x € AA CE AIN VEuNy INNNN WIN Ÿ CMS MAUR] \ À CEE A W s AV M ‘ IQ0US VU MECS ÉMENUEE , JV DANSE À / vvyur SONT DEEE KR ANT nt Re \ JON VU ÿÿ UNS LE Y UV V AU NT uns | ds MMA AT MAT 00" ONE NN AN EN Mit “y nn Nos HAUTE CR CEANUNN L W ” “. F4 SMS LE à 1 ENV ‘ AAC “Mie LU LU AA ÿ 5h EE ? FVUÙ ÿ MMM ) ic tn PAM NME MT Y14 w vu? RARATT US AA Ù M LA MYVOVUN 14A | y MASSE ES À M NM HA TT My MU PME CUS Wv ANA, ANNEES SE 7 UN ENV SEM LE ERA CM MAS M / A NEA ARR EM Et NA MN A EE ee À CON LR HAE Fe ete UN ut CES A AV MAN nt MAMAN WW w M rer ane du AN vin nt” Wu MARS V: 5 SM EME VV MES es “a RER , SCEOUUM CE RE V M M Ms” mn Ÿ nc V Ÿ $ EMA £ KE CAEN NA Ne FEU UES | W' Ÿ RAA ) PA | V TEE RAT Porn v US : 4 É TARA AAA A nAîR ASE ee fs NA 5 MA Ra AA | Ana À A A AAA SAP ADN ARR TERME " MA FAR AA) FA