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ROUEN, IMPRIME CHEZ NICÉTAS PERIAUX, RUE DE LA VICOMTÉ , N° 55. D © ron amÉNTAoAU QUES RATE PAIE », ÉPOMAINA BEC # CM OUT Ma BELL ex ant AA A L MATOR ASIE ANTAONN SA FETE SE. tn MNT LAURE MA l PRÉCIS ANALYTIQUE DES TRAVAUX DE L'ACADÉMIE ROYALE Des Sciences, Belles-Lettres et Arts DE ROUEN, PENDANT L'ANNÉE 1832. © DISCOURS D'OUVERTURE De La Séance publique, PRONONCE PAR M. HELLIS. Messieurs, Dans ce jour solennel où l'Académie vient offrir à ses concitoyens le tribut de ses travaux d'une année, chacun sentira ce que doit ôter à cette séance d'intérêt et de charme l'éloignement d'un membre qui, après avoir long-temps figuré dans nos rangs avec distinction, avait . 2 ACADÉMIE DE ROUEN. par d'unanimes suffrages , été appelé à l'honneur de prési- der la Compagnie. Le mérite personnel de M. Lepasquier, l'étendue de ses connaissances, sa longue expérience des affaires, le devaient naturellement porter aux postes élevés de l'administration. Qu'il me soit permis de méler quelques regrets aux félicitations qui l'ont accompagné dans le dépar- tement confié à ses soins, car ma voix ici doit remplacer la sienne. La comparaison que je vais subir justifiera mes craintes et suppl'era à mes éloges. Que votre bienveillance me soutienne : le zèle, chez moi, tiendra lieu de tout autre mérite. Si je vous laisse trop vivement sentir que celle tâche ne m'était point ré- servée, de grâce n'oubliez pas que je m'acquitte d'un devoir auquel il ne m'a pas été donné de me soustraire. Des études spéciales et toujours sérieuses m'ont éloigné du culte des Muses; je sens combien la moindre de leurs faveurs me serait nécessaire. Pour me conformer à l'usage, jinvoquerai la plus sévère d'entre elles : puisse -t-elle répondre à mes vœux, et ne pas dédaigner d'aussi tardifs hommages ! Je ne puiserai point dans ces pages brillantes de gloire ou embellies par les arts ou le génie; je ne retracerai point ces faits héroïques ou ces grands crimes qui, tour à tour, sont l'horreur ou l'admiration de la postérité : je recueillerai, dans notre ville surtout , des faits analogues à ceux dont mes veux faillirent être les témoins; je réu- Le) calamités, si fréquentes au milieu de notre civilisation , nirai ce que l'histoire nous a transmis sur ces grandes qu'elles ont souvent troublée et où elles ont laissé de si profonds souvenirs. En examinant de sang-froid ce qui s'est passé en ce genre aux siècles écoulés, nous pourrons faire la part de ce qui était inévitable et de ce qui fut le produit des troubles politiques , de l'imprévoyance , des préjugés et des vaines DISCOURS D'OUVERTURE. 3 erreurs; nous nous convaincrons que , dans ce genre de mal, le danger n'est pas égal pour tous, car la nature ne fut point maratre; et, quels que soient les maux aux- quels elle nous condamne, ils sont bien faibles au prix de ceux que nous y ajoutons. | La nature a des secrets que l'homme ne saurait péné- trer : toute sa science parvient à peine à saisir et à cal- culer quelques effets dont les canses Jui échappent. 1 ignore comment l'herbe pousse, comment le fruit mürit, comment le brouillard se forme ; peut-il s'étonner de res- ter muet en présence de ces grandes épidémies qui ont souvent afiligé Fhumanité? Cependant, lorsque tout autour de nous révèle une main divine, lorsque les annales du temps attestent que ees catastrophes datent de l'origine du monde, peut-il répugner d'admettre qu'elles découlent des lois primordiales sujettes à des révolutions, à des aberrations dont chaque élément nous offre des exem- ples? Qui sait méme si ee que nous regardons comme un désordre, parailrait tel à nos yeux dessillés et dignes de contempler l'œuvre de la création dans ses mystères et dans toutes ses profondeurs ? Cet univers, si beau , si fécond, si riche en merveilles, ne manifesie pas seulement sa puissance par la parure qui le revêt, les saisons qui se succèdent et les phéno- mènes qu'il nous est donné de saisir : sa masse entière est pénétrée d'un principe de vie, sans lequel tout péri- rait autour de lui. Ce principe, qui existe jusque dans la pierre, est soumis à des lois qui nous sont inconnues; sa force, calculée par la divine sagesse, tantôt se dévoile à nos yeux par des signes d'harmonie et de régularité, tantôt par des scènes de désordre et d'agitation qui nous feraient craindre la dissolution du globe, si la main qui régla les sphères n'avait mis à leurs écarts des limites qu'elles ne pourront (ranchir. 4 ACADÉMIE DE ROUEN. Les mers, balancées par des flux et reflux constants , sont aussi agitées par d'horribles tempêtes : on a vu des terres habitables disparaître pour toujours , et des iles sur- gir là où n'existaient que des abimes sans fond. Au mi- lieu de ces convulsions, de brülantes explosions sont sorties du sein des ondes, et des pays se sont trouvés divisés par d'affreux déchirements. La terre parfois s émeut et tremble, le continent oscille, des montagnes dispa- raissent , des feux séchappent par des bouches toujours béantes et sèment au loin la terreur. L'air offre aussi ses tempêtes : des trombes ont mar- qué leur passage par des ruines et des traces de sang ; la sécheresse ou l'humidité menacent nos champs de sté- rilité , et des miasmes sortis des entrailles de la terre, des eaux stagnantes ou spontanément développées, por- tent la désolation et la mort dans nos hameaux et nos cités. Qu'on se garde de croire, néanmoins, que l'homme doive périr victime des éléments déchainés. Deux armes lui ont été données pour lutter avee avan- tage : l'intelligence et une force intérieure qui combattra pour lai tant qu'il n'en aura pas altéré la source et folle- ment détourné l'usage; par l'une, il oppose aux périls un front invulnérable ; par l'autre, il fait des conquêtes sur une terre qu'il peut rendre ainsi sa propriété. S'il se plait à dépasser les limites du continent qui l'a vu naître ; si, sur une frèle embarcation, il ne craint pas de s'exposer aux tempêtes, il ne doit pas sen plaindre, car rien ne l'y force, et, pour conjurer les mers en cour- roux , ilne suffit pas d'y lancer une flotte. Les éruptions des volcans n'inspirent pas autant de frayeur dans l Amérique que dans le royaume de Naples. Depuis long-temps, lHécla tonne et s embrase sans consu- mer aucune ville; on pourra fouiller aux pieds du Quito DISCOURS D'OUVERTURE. 5 sans y découvrir d’'antiquités précieuses, et cependant cette montagne vomit la lave et la flamme depuis autant de temps que le Vésuve. Lorsque des marais dégagent des vapeurs pestilentielles , l'homme peut porter sa demeure en d'autres lieux ou .les assainir, car les lois de la décomposition ne change- ront point pour son bon plaisir. La plupart des germes de mort qui déciment nos villes prennent naissance dans leur sein , et par cela même pourraient être anéanties. Quant à ceux dont la cause nous échappe, et qui étendent leur action bien au-delà des lieux qui les ont vu naître, s'ils font d'aussi grands ravages, il ne faut bien souvent s'en prendre qu'à l'in- curie, qu'à l'oubli des lois les plus simples de l'hygiène, qu'aux agitations, qu'à la misère, suites trop fréquentes de notre état social. Interrogeons l'histoire, nous verrons que toujours un fléau n'a régné qu'après un autre fléau, un désastre a préparé un autre désastre. C'est lorsque la contagion tombe de tout son poids sur des masses émues, misérables et imprévoyantes ,; qu'on rencontre ces scènes dont les récits nous glacent d'effroi. Dans ces moments, la stupeur sempare de tous; la confusion, le désordre sont à leur comble; les populations sont en proie à des préjugés funestes, et le mal s'accroît de tout ce qu'y peuvent ajouter l'ignorance et la crédulité. Puis, ces grandes cala- mités passées , les morts pleurés et oubliés, la gaîté renaît. et le monde appartient de nouveau aux vivants et à toute l'activité des affaires humaines. La plus ancienne des grandes épidémies qui ont sévi sur notre France date de 583. C'était un temps bien malheureux que le 6° siècle! Les provinces souflraient horriblement de la discorde des rois : les troupes mar- chaient de tous côtés, ravageaient , brûlaient tout ; il n'y 6 ACADÉMIE DE ROUEN. avait plus de discipline, mais une si intolérable licence, que les gens de guerre se ruaient aussi bien sur leurs chefs, quand ils voulaient les retenir, que sur le simple peuple. Pour faire comprendre les misères du temps, il suflira de dire que Chilpéric était sur le trône, et qu'il avait Frédégonde pour épouse. A ces désolations , dit Mezerai, vint se joindre une contagion qui parcourut toute la France, mais qui fut plus furieuse à Paris que partout ailleurs. On la nomma la peste en laine ( pestis inguinaria ), parce qu'elle pa- raissait en ces parties, et brülait ceux qui en étaient atteints avec d'étranges douleurs. La plupart mouraient en poussant des hurlements effroyables; on n'y trouvait de remède que dans les églises, et spécialement dans celle de Notre-Dame. Tout porte à croire que la ville de Rouen, une des plus fortes du royaume, n'aura pas été épargnée; mais comme on n'écrivait pas autant en ce temps là qu'au nôtre, je n'ai pu trouver à celte époque rien qui nous concernât spécialement. Il n'en est pas de méme de l'épidémie qui se déclara au 14° siècle, et qui a recu le nom de peste noire. Ce fut, je crois, la plus terrible qui soit restée dans la mé- moire des hommes. Sa marche, analogue à celle du cho- léra, me fera, je pense, pardonner d'entrer dans quelques détails à ce sujet. Le nom de peste noire lui fat donné à cause des taches noires et des gangrènes qui survenaient en peu de jours. Aux symptômes ordinaires de la peste, il s'en joignit de plus graves qui ne se sont point reproduits en d'autres temps : car chaque grande épidémie se distingue tou- jours par un cachet particulier. Les organes de la res- piration furent frappés d'inflammations gangréneuses ; les DISCOURS D'OUVERTURE. 7 malades avaient des crachements de sang , ressentaient de vives douleurs dans la poitrine et exhalaient une odeur infecte. Ce fut là le symptôme prédominant dans l'occident; les autres se montrèrent de préférence en orient. On observa surtout en France cette gangrène du poumon qui tuait en deux ou trois jours, et parfois plus rapidement. Ce n'était qu'après plusieurs mois de séjour dans le même lieu qu'on voyait des taches noires et que l'on pouvait espérer quelques guérisons , car, des premiers pris, il n'en échappait aucun. Boccace , à Florence , vit ses ravages et fut témoin d'in- croyables calamités ; l'Italie, cette belle terre, fut sillon- née dans tous les sens. Florence, Rome, Gênes, se couchèrent dans le cercueil. Pétrarque suspendit son luth aux sources de Vaucluse, pour pleurer celle qui lui avait inspiré des chants purs et mélodieux. Capricieuse et vagabonde, cette peste indomptable pénètre en France par Avignon, frappe comme la foudre et moissonne par milliers. De la France elle passe en Angleterre, où elle fait les mêmes ravages; elle n'épargna point le Nord, où elle sévit avec, la méme fureur. Cette peste ne suivit point le méme chemin que le choléra ; née comme lui dans la haute Asie, elle descendit vers le Caucase et la Médi- terranée , au lieu de franchir les montagnes et d'envahir la Moscovie ; elle se répandit sur l'occident de l'Europe . et n'atteignit la Russie qu'après les autres contrées. On pourra se faire une idée des désastres qu'elle causa , en songeant qu'en France, sur vingt habitants, il n'en resta en beaucoup d’endroits que deux vivants. La capi- tale du royaume sentit les rigueurs du fléau. Deux reines et un évèque en furent victimes. IL mourait plus de cinq cents personnes par jour à l'Hôtel-Dieu. Les cime- tières furent encombrés , et des maisons totalement dé- peuplées furent abandonnées et tombérent en ruines. 8 ACADÉMIE DE ROUEN. D'autres calamités avaient précédé celle-là ; la France avait souffert d'une grande famine en 1338, et, depuis ce temps là, les courses des gens de guerre avaient causé une disette continuelle par tout le royaume ; des exactions multipliées accablaient les peuples, et, je ne sais par quelle malé- diction, plus elles croissaient et plus le Roi était dans l'in- digence. C'est en 1348 que la peste noire régna à Paris. Heu- reuses les villes où elle laissa le tiers des habitants! Dans beaucoup il ne resta que la quinzième ou la vingtième partie. Il parait qu'elle ne fut vue à Rouen que tardi- vement, car si les chroniqueurs sont exacts, ils n’en font mention dans notre ville qu'en 1350. Il y eut alors une grande mortalité, dit Farin ; la troisième partie du monde mourut. Ils crachaient tous du sang, et la communication était si contagieuse, qu'ils expiraient en se regardant l'un l'autre. Nous ignorons les causes du choléra né sous nos yeux ; à plus forte raison ne hasarderons-nous aucune conjec- ture sur l'origine d'une peste qui date de cinq siècles ; mais un savant auteur allemand, M. Hesler, pense que ces grandes actions sur les masses vivantes ne sont que les effets de causes générales et d'influences cosmiques , dont il trouve des traces dans l'histoire. Ainsi, depuis 1333, il signale des tremblements de terre en Asie, et des éruptions volcaniques, violentes et dévastatrices, non seu- lement dans l'Asie, mais en Grèce, en Italie et dans l'Allemagne, qui s'ébranlèrent tour à tour. À ces mou- vements fébriles du globe se joignent des inondations inaccoutumées , la disette, suivie de mortalités eflroyables ; des nuées de sauterelles envahissent les plaines de l'Eu- rope, périssent par millions et empoisonnent l'air d’exha- laisons putrides : enfin, l'atmosphère elle-même participe à ces désordres meurtriers, DISCOURS D'OUVERTURE. ÿ La misére énerve le corps, flétrit l'ame ; le malheur rend superstitieux , et, accréditant les contes les plus ab- surdes, porte l'homme à des actes dont les brutes auraient à rougir. Des excès de tout genre signalèrent cette époque, et, ce que l'on croirait à peine, quand les rues étaient jon- chées de cadavres, on vit naître à Florence une associa- tion pour le plaisir. On s'enivrait de compagnie, on se couronnait de fleurs, on chantait tout le jour et le soir, on faisait des contes, contes d'amour, contes de galan- terie, contes dont comprendront l'esprit ceux que n'ont point effarouché la bonhomie plus que naïve des dernières pages de notre La Fontaine. D'un autre côté, une monomanie de pénitence et de deuil saisit un grand nombre d'esprits en Europe. On vit des villes se soulever en masse pour faire de rudes pélerinages et se soumettre à d'austères pratiques de dé- votion, Un vertige de cruauté accompagna celui de supers- lition. Nous avons vu comment le vulgaire cherche à expliquer les morts soudaines et mystérieuses des épidé- mies : comme au dix-neuvième siècle , le quatorzième crut aux empoisonneurs. Les juifs en furent accusés, et les fureurs de l'homme aveuglé se joignirent à toutes celles de la nature. Ils furent traduits, jugés, condamnés, et rarement la rage populaire attendit l'action de cette exécrable Justice. Ils furent brülés par milliers dans leurs synagogues, ou en- tassés sur de vastes büchers. A Mayence, douze mille s'enfermérent dans leurs quartiers et sy brülérent : on veut les convertir, leur fanatisme s'en irrite , ils préfèrent se jeter aux flammes. La vengeance et la cupidité furent le motif de noires persécutions. Ce fut surtout l'Europe qui offrit ce spectacle, et les malheureux fugitifs, mas- 2 10 ACADÉMIE DE ROUEN, sacrés dans les villes, traqués comme bêtes fauves dans les campagnes , ne trouvèrent de refuge que dans la Lithuanie , où le roi Casimir-le-Grand les reçut sous sa protection. C'est pour celte raison que les juifs, encore aujourd'hui, sont en si grand nombre dans toute la Pologne. Nous chercherions en vain, dans les annales du temps, un second exemple d'une calamité aussi générale. Nous y verrons bien des mortalités dues à des pestes, à des maladies contagieuses parfois aussi meurtrières ; mais elles furent circonscriles à une province, à une ville, à un royaume; les causes en pouvaient être pressenties, et rarement elles dépassèrent de beaucoup les lieux où elles avaient pris naissance. Pour retrouver la trace de ces fléaux inexplicables, envahissant successivement plusieurs hémisphères, il nous faut parcourir cinq siècles et des- cendre jusqu'au choléra. Si notre ville fut ménagée lors de la peste noire, en ne perdant que le tiers de ses habitants, elle était réser- vée à de plus vives douleurs au seizième siècle. A des tempêtes et des trombes telles que les plus lourds mo- numents en furent ébranlés, succéda, en 1520 , une disette qui saccrut encore en 1521. Le blé doubla, tripla de prix dans les marchés. Beaucoup d'habitants furent ré- duits à vivre d'avoine, de pois gris, de vesce et de sar- rasin. Les animaux domestiques ne furent pas épargnés. L'autorité crut devoir taxer le prix du blé déjà fort cher, et dès-lors on n'en apporta plus. On en fit venir de loin , et, pour obtenir à prix d'argent une faible ration, on voyait des groupes se former à la porte des boulan- gers dès deux heures du matin, sans quoi l'on courait risque de s'en passer, car on n'en exposait point en vente. Cette détresse dura depuis le caréme jusqu'a la Made- leine ; elle fut telle, que le Vendredi-Saint on n'apporta DISCOURS D'OUVERTURE. 11 à la Vieille-Tour aucun comestible; on ny vit pour tout qu'un marchand d'oignons. Toujours nous verrons la guerre ou la famine préparer les grandes mortalités. Elle fut affreuse en notre ville. Marseille, Florence, Milan, ne nous ont point légué de plus lugubres souvenirs. On eut d’abord recours aux prières; mais les réunions dans les lieux consacrés ne firent que répandre la conta- gion. Bientôt les secours spirituels manquérent , tant était grand le nombre des malades. La médecine n'était d'au- cun secours; alors le désespoir s'empara des ames, et lon fut témoin de scènes déchirantes. La terreur rem- placa tout autre sentiment; les liens de famille furent rompus; on ne Ssabordait qu'avec défiance. On vit des serviteurs abandonner leurs maitres, des fils leur pere, et, chose horrible, des chiens se disputer dans les rues des enfants abandonnés, Les bras manquaient aux sépul- tures. Chaque maison devint un foyer infect, et partout la mort engendrait la mort. C'est à cette époque que quatre hommes ; vêtus de robes bleues, furent payés par la ville pour marquer d'une croix blanche les maisons qu'il fallait fuir. Ces préposés recevaient soixante sous par mois, et la nuit ils se retraient dans un lieu situé pa- roisse S.-Nicaise, près de la rue de la Cage, et qui porte encore le nom de clos des Marqueurs. La désolation fut à son comble. Les malheureux, aux premières atteintes du mal, poussaient des cris de rage ou tombaient frappés de stupeur. Plusieurs s'enveloppèrent encore vivants d'un drap mortnaire, pour s'assurer au moins d'un linceul. Notre cité, déjà riche et florissante ; notre eité, alors la premiére ville de France après la capitale, eut peine à se relever de cette secousse. Long-temps elle fut morne et silencieuse ; la solitude fut telle que l'herbe poussa d'un pied dans les rues, et qu'une partie des maisons 12 ACADÉMIE DE ROUEN. tomba fante d'habitants. Au jour de Pâques de l'année suivante , on ne compta que quarante personnes à la messe paroissiale de St-Maclou. Tout ce que nous pourrions retracer depuis serait pâle auprès d'un pareil tableau, et pourtant, dans ce même siecle, les épidémies n'ont pas manqué. Elles ne cessèrent de désoler la France, singulièrement favorisées par le désordre des saisons. Pendant cinq ans, l’été les remplaca toutes : les arbres poussaient, sans discontinuer , des fleurs et des fruits qui ne pouvaient mürir ; les blés multipliaient si peu, qu'on en récoltait à peine pour les semences. Cette disette causa une famine universelle, et engendra uve foule de maladies cruelles, parmi lesquelles se trouve le choléra , signalé pour la premiere fois à Paris, en x 538. Il recut dés-lors le nom de Trousse-Galant. Notre ville partagea tous ces maux, et, dans l'an 1580, elle perdit en peu de mois huit mille de ses habitants. Jusque là on n'avait opposé à ces terribles adversaires que la fuite ou la prière; on tenta davantage. Le flam- beau des lettres se rallumait; on était tourmenté du dé- sir de voir et d'approfondir : c'était le siècle des Médicis, de Léon X, de François I. On osa fixer le monstre et braver la fascination. C'est à dater de cette époque que la médecine possède quelque chose d’exact sur la nature et la marche des épidémies modernes ; auparavant l'histoire avait seule pris le soin d'enregistrer leurs ravages. On ne tarda pas à reconnaitre que si, dans la production de certaines maladies , il y avait quelque chose d'inexplicable , le plus grand nombre provenait de causes qui n'avaient rien de surnaturel. À la colère de Dieu, qui passait pour engendrer la peste, on ajouta l'incurie des hommes. On voit seulement par le mot peste, repété fréquemment dans les auteurs de médecine et les anciennes chroniques, que les idées étaient loin d'être exactes sur ce point. On DISCOURS D'OUVERTURE. 13 confondait sous cette dénomination toute maladie meur- trière , contagieuse ou non, indigène ou importée , pourvu qu'elle sévit avec quelque malignité. C'est ainsi qu'on signala une peste survenue à Venise, par suite de l'ouverture d'un aqueduc long-temps fermé. Une baleine putréfiée fait naître la peste sur les côtes d'Italie. Des laines venues de Picardie donnent naissance à la peste, dans la rue des Charrettes. Ambroise Paré décrit une peste due à la fermentation des corps d'un grand nombre de protestants, victimes de la Saint-Bar- thélemy. Le seiziéme siècle fut remarquable par la continuité de ces grandes épidémies. C'est une chose bien étonnante , dit Langins, médecin observateur de cette époque , que la peste ne cesse de nous afliger : elle se développe chaque année, tantôt dans une province, tantôt dans une autre. Si elle s'éloigne pour peu de temps, elle ne tarde pas à revenir sur ses pas, et elle moissonne sans pitié l'espoir des générations. Les veilles des savants ne furent pas sans résultat; on comprit bientôt que l'air et les aliments étant les soutiens de la vie, leur altération était une des sources les plus fréquentes des maux que l'on déplorait, et que l'un et l'autre devaient etre l'objet d'une égale serveillance. Dès-lors on commenca à s'occuper de l'hygiène publique. Les villes furent assainies , les rues élargies, les demeures embellies; le pavé fut substitué à la fange, les sépultures bannies de l'intérieur des villes, et une suite non inter- rompue d'efforts ont amené nos cités au dégré d'aisance, de douceur et de salubrité , dont nous jouissons avec tant d'insouciance. Au siècle de Francois Ie", les épidémies ne discontinuérent point. Dans le suivant, on n'en compta que quatorze , et ce nombre diminua encore de moitié dans celui d'après. 14 ACADÉMIE DE ROUEN. Il nous est facile, par les souvenirs de nos pères, d'assister à la durée d'un siècle : qui d'entre nous citera, dans notre ville, rien qui approche des catastrophes dont je n'ai esquissé que quelques traits? Notre province a perdu le souvenir de ces grandes mortalités, qui jadis semblaient une cruelle nécessité. La plus récente en ce genre est celle de Louviers, où Le Pecq, notre compa- triote, rendit tant de services; elle date déja de plus de soixante ans. Jusque-là , Messieurs, nos prévisions n'avaient eu à combattre que des maladies nées sur notre sol, dont les causes pouvaient être présumées et l'action combattue. Il restait à voir notre moderne civilisation aux prises avec un de ces fléaux venus de loin, que rien n'arrête, et qui, ne paraissant qu'apres plusieurs siècles, semblent, dans leur marche inexorable, signaler le bras de Dieu appe- santi sur les peuples. Le voilà qui s'éveille et s'agite dans son aire, comme un vautour affamé; pour préluder à l'invasion d'un nouvel hémisphère , il couvre celui qui l'a vu naître d'un long crèpe de deuil. Sûr de ses coups, il franchit les monts, marche à pas de géant, et s'avance audacieux pour nous braver dans nos foyers. Il assiste aux luttes sanglantes des peuples du Nord , et court ajouter à l'horreur des combats d'une nation héroïque sacrifiée sur l'autel de la liberté. Dans sa rage aveugle, il perce des mêmes traits vainqueurs et vaincus, et confond les nations rivales dans une même fosse. Conquérant des temps modernes, c'est au cœur qu'il frappe les empires. Vienne et Berlin ressentent ses atteintes ; mais là sa rage expire , ses dards semblent émoussés. Sans le prestige qui l'environne, sans le cri d'alarme qui le précède, on douterait presque de sa présence. Il passe outre et s'adresse à la vieille Angleterre, laissant intacte la France comme DISCOURS D'OUVERTURE. 15 pour l'endormir dans une trompeuse sécurité. Vaincu sur les bords de la Tamise, il s'abat aux rives de la Seine, où il semble s’applaudir du succès de sa ruse. J'ai vu le choléra de près, Messieurs, et je lève sou- vent au ciel des mains reconnaissantes de ce que son aile meurtrière n'ait fait que nous eflleurer; il est digne de sa renommée : ses arrêts sont sévères et sa justice est prompte. Indomptable et bizarre, mystérieux et ter- rible comme la peste noire, il sort du méme berceau, il est de la même famille. Jusqu'ici nous avons moins de victimes à regretter que Vienne, Berlin, Sunderland , qui passérent pour heu- reuses. Notre ville a été vraiment privilégiée, quoique la souf- france de l'industrie et l'insalubrité de plusieurs quartiers semblassent lui présager de plus dures épreuves. Si le calme, la résignation et le sain jugement qui caractérisent sa population; si des mœurs douces, une position favorable , si des améliorations successives , pour- suivies avec ardeur depuis longues années, ont préparé ce résultat, il y aurait ingratitude à ne pas signaler, comme exemple , le zèle de nos autorités et la noble rivalité de plusieurs de nos concitoyens. Alors, plus d'opinions, plus de partis, plus de bannières diverses ; un seul sentiment dominait tous les autres; il s'a- gissait d'alléger des douleurs et de sécher des larmes. La demeure du pauvre à été visitée, sa couche renou- velée et sa nudité couverte d'un voile. Un prélat, des filles du seigneur, des hommes généreux, ont fait l'offre de leurs personnes et l'abandon de leurs demeures. Le fléau aurait pu long-temps sévir avant de rencontrer chez nous un malade sans secours, un malheureux sans abri. Ces pieux devoirs ont, je le sais, révélé bien des souf- 16 * ACADÉMIE DE ROUEN. frances , attesté d'étranges misères; mais si la source en était trop profonde pour pouvoir être tarie, rien n'a été épargné pour en adoucir la rigueur. Témoin du dévouement des administrateurs de nos hospices, de la sollicitude des magistrats qui veillent à nos destinées, qu'il me soit permis de leur offrir ici le témoignage d'une reconnaissance qui doit être gravée au cœur de leurs concitoyens. CLASSE DES SCIENCES. Rapport FAIT PAR M. DES ALLEURS, SECRÉTAIRE PERPÉTUEL DE LA CLASSE DES SCIENGES:, @ Moxraiexe a dit : « C'estune bonne drogue que la science ; mais nulle drogue « n'est assez forte pour se préserver sans altération et cor- on sel ce di l’estuye ! « ruption selon le vice du vase qu l'estuye: » Cette exclamation est pleine de sens et de profondeur, " Les alinéas marqués de ce signe * ont été supprimés à la lecture, en séance publique. Les chiffres romains , mis à la suite des titres des ouvrages énoncés dans ce rapport , sont ceux qui indiquent les numéros d'ordre des ma- nuserits, pour l’année 1832, dans les archives. Les chiffres arabes indiquent les numéros d'ordre des ouvrages impri- més dans la bibliothéque de l'Académie, 18 ACADÉMIÉ DE ROUEN. Messieurs; je l'emprunte au premier livre des Essais da philosophe bordelais. H le publiait en 1580 ; c'était alors le plus affreux temps de la Ligue. Hélas! il ne lui fut pas donné de voir la fin de cette crise déplorable, par Fen- trée de Henry IV dans sa capitale. Ce penseur si profond , dont les œuvres offrent à chaque pas des conseils pour toutes les positions ; des consolations pour toutes les peines, aimait les sciences utiles et mo- destes; il les méprisait orgucilleuses ; il ne séparait pas, dans son ame pure, les moyens du but, et voulait que l'on fûüt fourni d'entendement et de conscience comme on pouvait l'être de science! Or, il ne fault pas, dit-il, attacher le sçavoir à l'ame , il l'y fault incorporer ; il ne l'en fault pas arrouser, il l'en fault teindre, et s'il ne la change et meliore son estat imparfaict, certainement tl vault beaucoup mieulx le laisser là. C'est un dangereux glaive et qui empesche et offense son maistre , sil est en main foible et qui n'en scache l'usage. F1 plus loin il ajoute : toute aultre science est domageable à celuy qui n'a science de la bonté. On pourrait, sans pousser jusqu'aux dernières consé- quences la comparaison du temps où vécut Montaigne avec celui où nous vivons, établir cependant des rapports nombreux et frappants entre la période qui le vit écrire ses Essais et celle que nous parcourons. Or, Messieurs, qui ne sent aujourd'hui que les sociétés savantes sont ce vase qui estuye les doctrines conservatrices ; qu'elles seules sont appelées à amener le vrai progrès, puisque, gar- diennes des vérités connues, elles ont mission de cher- cher avec bonne foi, partant avec succès , celles que nous avons l'espoir de connaitre. Je proclame ici un fait qui réunit, au moins lacitement , toutes les convictions; c'est que l'époque scientifique dont la publication de l Encyclo- pédie signale l'apogée, est aujourd'hui sur son déclin ; oo giaquea?. $ OS N'y , 3 108 (OR EN | a SEE À Fi 3] JE | Si—Tt--+ Î Ve ET | | + ES) I BE St [ jen LE h + ! } FR] GE] FL NET EL + + EE Qt —+ se , LOL RE + + LES SI ER Nheatrot- Eole Il D + fes mi eue ILE Je ten een: sf ES | + f 27 24 39 30 SJ ré … Datouuelie (Hautaurs redutes a 0. De à. 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En de nos confrères nous en à fourni des preuves surabondantes, toutes pui- sées aux sources les plus pures, et nul d'entre vous n'a sans doute oublié ces paroles qu'il prononçait il y a un an à pareil jour, dans cette enceinte, et que le caractère dont il est revétu rendaient encore plus imposantes : « U n'y a que le mensonge qui gagne à s'environner de « ténèbres ; la religion ne veut que la vérité; la vérité est « aussi le but des sciences ! », Honneur donc à ceux qui les cultivent dans l'intention de la découvrir ! Cette pensée à dominé nos travaux , Messieurs; c'est en en dévelop- pant rapidement la liste, que j'en fournirai la preuve. $ I. — Phusique et AMatljématiques. ’ Vous avez entendu, pendant deux années successives, MM. Lévy et Girardin vous donner des renseignements avantageux sur le projet de correspondance météorolo- gique générale proposé par M. Morin, ingénieur. M. Lévy a voulu prouver sa conviction des avantages qu'il espérait de cette correspondance, en lui fournissant le contingent de ses propres observations, recueillies dans nos murs depuis le 1% novembre 1831 jusqu'à ce jour. L'on a fort approuvé le moyen simple et ingénieux adopté par notre confrère pour retracer à l'esprit comme à l'œil, au premier aspect, les relations réciproques, pour tous les jours du mois, des variations barométriques et ther- mométriques. M. Lévy à complété depuis ces tableaux, en y joignant l'indication des vents qui ont régné, et * Discours de réception de M, le mimistre Paumier (page 23q du Précis de 1831 ). 20 ACADÉMIE DE ROUEN. celle des quantités d'eau tombées durant le mois. IL a été décidé, qu'à partir du mois de novembre 1831 jus- qu'au mois de novembre 1832, ils seraient insérés dans le précis (xu). Ce renseignement ‘authentique, fourni à la science , méritera sa reconnaissance , et d'abord celle des médecins, qui devront y avoir recours pour coordonner leurs observations cliniques, surtout dans ces derniers temps. M. Destigny a ajouté aux observations quil avait re- cueillies sur la dilatation et la condensation de la pierre , au moyen de l'instrument qu'il a inventé, et dont la des- cription et la gravure sont insérées dans un de nos re- cueils périodiques ; les observations récentes qu'il vient de faire, à l'aide du même instrument, sur la lave de Volvic, employée depuis long-temps dans les trottoirs de la capitale, et récemment chez nous, pour une portion de ceux eu'on vient d'établir sur le port. Lorsque les sciences ont atteint un point aussi élevé que celui où sont parvenues les mathématiques, certains esprits , dont la portée est insuffisante pour prolonger une route dont la partie frayée est déjà si rude , écoutant plus leur ambition que la saine raison ; essaient de faire rétrograder avec eux les hommes faibles, en leur persua- dant que les voies ouvertes jusque - là sont et doivent demeurer sans issue : M. Martin, qui nous a adressé un traité de Trigonométrie rectiligne sans algèbre (580), sem- ble avoir été victime d'une pareille préoccupation ; aussi M. Lévy, dont le jugement peut ici faire loi pour nous, n'hésite-til pas à placer son traité à côté de ceux qui soccupent de la quadrature du cercle; question désor- © Contre les maisons du quai, dansles parties comprises entre les rues Grand-Pont, Corneille et des Jroquois. CLASSE DES SCIENCES. 21 ais mise au ban de la science par une proclamation de l'Institut (xxx ). $ II. — Chimie. La chimie appliquée à la découverte des crimes d'emi- poisonnement a bien mérité de l'humanité, car on peut espérer maintenant qu'en songeant aux ressources que les expériences modernes offrent au chimiste pour re- connaitre un faible atome de matière vénéneuse jusque dans les derniers débris de l'organisation animale, les plus läches des criminels, les empoisonneurs, forcés de renoncer à la complicité du silence de la tombe, renon- ceront en même temps à leurs odieux attentats. M. Morin, auquel la justice a souvent recours dans des circonstances délicates, nous a lu deux mémoires sur des analyses chimico-légales; dans lun, il s'agissait d'un empoison- nement par la mort aux mouches, et la difiiculté consis- tait, pour l'expert, dans la nécessité de juger si un aliment qui nageait dans une certaine quantité de graisse, avait communiqué à cette matière les qualités vénéneuses dont il était lui-méme imprégné, ou bien si la graisse avait été isolément empoisonnée. M. Morin a présenté une so- lution qui a satisfait l’art ainsi que la justice (xx). Dans l'autre, il fallait apprécier les résultats obtenus et les conclusions déduites par deux experts, consultés isolément, dans un cas d'empoisonnement présumé par l'oxide d’ar- senic; M. Morin à puisé d'abord dans l'examen des malieres primitives, et dans celui des résidus obtenus par les experts, la preuve de l'existence du poison; il a su faire apprécier ensuite Le mérite des conclusions présentées par les deux premiers expérimentateurs , en les réduisant à leur juste valeur (xxxn). Les analyses de M. Morin se- rout imprimées en entier dans le précis de cette année. >2 ACADÉMIE DE ROYEN. $ I. — Arts mécaniques et industriels, Commerce. L'industrie a cherché, depuis quelques années, dans la perfection des machines qui fonctionnent avec prompti- tude et économie, un contrepoids au déficit que devaient produire pour les manufacturiers la concurrence et le bas prix des objets fabriqués. La lutte s'est donc établie sur la masse seule de la production. Mais, Messieurs , dès l'instant où la consommation, par des circonstances toujours trop fréquentes, n’a plus répondu à cette méme production, la dépréciation s'est aussitôt fait sentir sur la valeur des objets manufacturés en magasin, et par suite aux possesseurs d'usines; et je comprends ici ceux qui ont eu le bonheur de se tenir au pair pour la confec- tion et l'expédition de leurs produits. Cette depréciation , funeste aux grands manufacturiers par la modicité forcée des bénéfices, a été mortelle aux petits. Or, il ne faut pas se le dissimuler , la fabrication vit au jour le jour : il est donc urgent, surtout pour les grandes cités industrielles, de trouver dans les circonstances générales, dans la stabilité des institutions, les moyens de fonder, de peuple à peuple, de populations à populations, un équilibre commercial permanent , que la nature même des choses rende durable, et qui permette au négociant de se lancer avec sécurité sur cette mer trompeuse de la spéculation, aujourd'hui si fertile en naufrages. Ces pensées, que je crois vraies, Messieurs, n'empéchent pas de chercher à perfectionner les procédés mécaniques, sinon dans l'intérêt d'une fabrication plus prompte, du moins dans celui d'une exécution plus parfaite : c’est donc avec plaisir que nous avons entendu M. Destigny, dans des rapports successifs qu'il nous à faits, 10 sur plusieurs recueils de la Société d'agriculture, sciences et arts du CLASSE DES SCIENCES. 25 département de l'Eure (ur); 2° sur les Annales de la So- ciété académique de Nantes (1v) ; 3° enfin surle Manuel de lhorloger, par M. Le Normand, notre correspondant (1v ). nous exposer les améliorations notables introduites dans la construction des machines en général. Quant à la perfection où tend aujourd'hui celle des pièces d'hor- logerie, et de leur disposition dans les ingénieux instru- ments que nous devons à cet art , Son expérience per- sonnelle lui a permis d'indiquer d'une main sûre la route à suivre pour obtenir les résultats les plus satisfaisants dans l'établissement des échappements, des régulateurs , ete. PS LE Destigny a cru devoir relever une erreur commise par l’auteur, d'après Berthoud qu'il a copié, à l'article Echappement, en ce qu'il donne une formule générale pour fixer la quantité du recul de l'échappement à ancre , tandis que le plus ou moins de recul ne peut être déter- miné que d'apres la connaissance de quatre éléments varia- bles dans presque toutes les horloges. * Notre confrère profite de celte circonstance pour rappeler les observations critiques qu'il avait eu lieu de faire sur l'article Echappement du Dictionnaire technolo- gique', et il s'étonne que le savant auteur de cet ar- ticle , qui postérieurement à ce même article a publié une addition , ait cependant laissé subsister les graves erreurs qui lui avaient été signalées par lui; ce qui est d'autant plus ficheux, que sa doctrine, qui est celle de Lepaute , devient plus dangereuse appuyée d'une grande réputation justement méritée. * Et d'abord , selon notre confrère , les échappements à recul et à repos y sont mal définis , et l'on pourrait pres- que , pour savoir ce que c'est que le premier , prendre la définition donnée du second , et réciproquement. * yme volume , page 372 et suivantes. 24 ACADÉMIE DE ROUEN. * M. Destigny signale en outre plusieurs autres erreurs et contradictions, qu'il considère comme trés graves, et qu'il désirerait voir rectifier par l'auteur , dont le nom a déjà, sans doute , trompé plus d'un jeune artiste confiant dans sa renommée. En terminant son rapport sur le Manuel de l'horloger de M. Le Normand, notre confrére dit que ce livre obtient de lui des éloges qu'il devait naturellement mé- riter, puisque les connaissances théoriques qu'il renferme sont exposées par un homme qui leur offre la garantie de ses talents pratiques. M. Pimont a confirmé la vérité d'une pareille asser- tion, en en faisant l'application à M. Le Normand lui- même, lorsqu'il nous a exprimé son opinion sur le manuel de cet auteur, intitulé : Manuel du fabricant d'étofjes imprimées et de papiers peints. 1 a, en effet, démontré qu'ici l'expérience pratique avait manqué à la théorie , et il a prouvé la défectuosité de plusieurs procédés vantés dans ce livre, surtout de ceux qui s'appliquent au blan- chiment, au garancage, à la teinture en bleu , etc. (xv ). M. Pimont a fait, au contraire, un rapport avantageux sur le Journal de l'Académie de l'Industrie, publié par M. César Moreau, notre correspondant (1vr). Placé honorablement dans nos archives, il y sera consulté avec fruit par les amis de l'industrie, de l’agriculture et des arts (608). L'ingénieur qui préside en ce moment à l'achèvement de notre port, M. Courant, prenant place parmi nous, a choisi pour sujet de son discours de réception un objet qui avait un à propos encore plus grand dans notre industrieuse cité (xx). Il a senti que les voies CLASSE DES SCIENCES. 25 de communication accélérées, multipliées sur touts les points, pouvaient aider le commerce dans la crise dont nous parlions il n'y a qu'un instant. Chargé par état de coopérer à la confection de ces voies, il rous a entre- tenus des chemins en fer; il nous à fait sentir les divers avantages de ces routes, qu'on peut exécuter avec autant de rapidité que d'économie ; il nous a donné des détails techniques sur leur tracé, sur le mode de leur construc- tion, sur la manière de placer et de fixer les rails, etc. L'Académie a recueilli avec empressement ces ren- seignements, et pensant qu'ils seraient recus avec le méme plaisir par le public, elle a ordonné l'impression du dis- cours de M. Courant dans son Précis. M. Lepasquier, qui occupait alors le fauteuil de la présidence avec distinction, et que nous aurions désiré conserver plus long-temps au poste où lavaient placé nos suffrages, mais dont nous n'avons plus la force de regretter la perte, en songeant à la position brillante et honorable quil a su récemment conquérir, a ré- pondu au récipiendaire , dont il a approuvé les idées. 11 a terminé celte -réponse par ces mots quil lui a adressés : « Cet exposé, Monsieur, justifierait les préventions favo- « rables que vous nous avez laissé entrevoir en faveur des « chemins en fer, si la confiance que doivent inspirer des « études toutes positives et un caractere réfléchi, permettait « d'hésiter encore à partager votre opinion ». M. Lepasquier, en prononcant ce Jugement, le rendait plus flatteur pour l'auteur et plus imposant pour nous, Messieurs, puisque vous vous rappelez qu'il s'était beau- coup occupé lui-même de recherches statistiques sur les transports, notamment sur ceux qui ont lieu pour les diverses marchandises entre le Havre, Rouen et Paris. Un mémoire sur ce sujet enrichit notre précis de 1831. L'auteur nous a oflert cette année deux tableaux , tracés f 4 6 ACADÉMIE DE ROUEN. d'après la méthode suivie dans ce premier mémoire, dont ils forment la suite et le complément, et qui répondent au mouvement commercial opéré dans cette partie pen- dant les années 1830 et 1831. J'ai pu indiquer moi- méme , à l’aide de calculs nombreux , mais tres simples, les résultats comparatifs entre ces deux années et les précédentes; ils sont loin d'être consolants, sans doute , mais la facilité avec laquelle ils peuvent étre obtenus par chacun , montre que les tableaux sont heureusement concus; c'est déja un service réel que de donner les moyens de bien déterminer là où est le mal, puisqu on est certain dès-lors d'y appliquer plus sûrement le remede. J'énonce ici les résultats à côté de ces mêmes tableaux. * L'auteur, dans le premier, a rangé les compagnies séparément , comme dans son précédent mémoire. Elles sont au nombre de huit. Nous allons dire les résultats antérieurs comparés à ceux qu'on énonce aujourd'hui. * 1° Bateaux accélérés normands ; leurs transports s'étaient augmentés, de 1828 à 1829, de 10,007,497 kil. ; ils ont diminué, en 1830, de 8,334,169 kil. ; ils ont été réduits, en 1831, à la somme totale de 639,922,619 kil. : c'est une diminution, sur 1829, de 24,026,731 kil. * 0 Les bateaux Fleury, qui, en 1829, avaient perdu sur leurs produits de 1828, à l'opposé de la compagnie précédente, et qui avaient presque ratteint, en 1830, le chiffre de 1828, c’est-à-dire 30,090,800 kil., sont re- tombés, en 1831, à la somme totale de 18,448,800 kil. : c'est une diminution, sur 1830 , de 11,642,000 kil. * 3o Les bateaux accélérés Bertin et C° avaient peu ajouté, en 1829, à la masse de leurs transports de 1528 ; en 1830, ils étaient méme retombés au-dessous des pre- miers de 1,944,985 kil. — En 1531, soit par le per- fectionnement de leurs moyens, soit par leur activité , leur crédit, etc.. ils ont atteint de nouveau le chiffre CLASSE DES SCIENCES. 27 de 1029, et l'ont même dépassé de 678,149 kil., quan- tité peu considérable il est vrai, mais notable pourtant dans un moment où toutes les autres compagnies ont subi une réduction aussi forte. * 4° Les bateaux Mollet avaient fait de rapides pro- grès en 1830 ; ils avaient augmenté leurs produits, de 1828 à 1830, de r1,527,984 kil.; ils sont retombés, en 1031, à 23,948,505 kil. : c'est une diminution de 6,142,295 kil. * 5° Les bateaux à vapeur et chalands de la compa- gnie Jordan, après avoir changé leurs arrangements primitifs avec les bateaux accélérés normands, n'ont commencé à porter Îles marchandises jusqu'à Paris qu'en 1829; pendant cette année et les suivantes, ils n'avaient effectué leurs transports que durant six à sept mois, et ils avaient maintenu leur chiffre à la faible différence , entre 1828 et 1830, de 94,200 kil. En 183, ils n’ont suspendu leurs voyages dans aucun mois, et leurs produits se sont élevés à 12,724,215 kil.; c'est une augmentation de 11,293,155 kil. sur 1829; c'est déjà, en partie , une compensation de lénorme perte faite par les accélérés normands en 1831, puisque ces derniers ne sont plus chargés aujourd'hui de porter à Paris les marchandises amenées du Havre par la compa- gnie Jordan. * 6° Les bateaux articulés à vapeur, sous la raison Habert-Delanneau et C®, avaient présenté plusieurs mois manquants en 1828, 1829 et 1830, et cela par des raisons que M. Lepasquier expose dans des notes ajou- tées à ses tableaux ; leurs produits s'étaient augmentés en 1830, et montaient à 4,540,645 kil; cette compa- guie a liquidé et s'est dissoute, et celle qui lui a suc- cédé, en 1831, n'a marché que pendant les quatre pre- miers mois de cette même année : son chiffre s'est élevé , 28 ACADÉMIE DE ROUEN. durant cette période, à 1,103,210 kilog. ; si elle eût ea pouvoir de continuer et de maintenir sa clientelle ; elle aurait probablement atteint, ou à peu près, le chiffre de 1530. * 7° Nous ne pouvons établir les mêmes comparaisons pour la compagnie Herfort, qui n'existe que depuis les deux derniers mois de 1830 ; les produits, durant ces deux mois, avaient été, en somme, de 1,390,814 kil.; en 183r, elle a marché sept mois, et n’a transporté que 2,669,000 kil. * 8° Enfin, les bateaux naviguant à longs jours, qui, en 1828, ne portaient que 3,428,083 kil., et qui avaient atteint, en 1829, le chiffre considérable de 33,595,651 kil. avaient encore augmenté, en 1830, de 20,602,469 kil. En 1831, ces mêmes bateaux n'ont plus transporté que 23,766,650 kil. : c'est une diminution , sur 1830, de 33,859,523 kil. , diminution plus forte, de 13,251,054 kil. , que n'avait été l'augmentation relative de 1829 à 1830; cest encore, cependant, pour ces bateaux , une augmentation ; sur 1828, de 20,338,597 kil. Ces mémes bateaux, qui, avec les accélérés normands, font la plus grande masse d'aflaires, ont cependant subi, en 1831, un dommage relatif plus considérable que la compagnie normande , puisque leur déficit, sur les exer- cices antérieurs, est de 33,859,523 kil., tandis que celui des accélérés n’est que de 24,026,731 kil. , réduction qui devient encore moins onéreuse pour ces derniers , puisque, plus faible en somme, elle s'applique d'ailleurs à une masse générale de produits excédant celle des entreprises rivales individuelles, de 6,323,177 kil. * De cet apercu rapide du premier des tableaux de M. Lepasquier , il résulte que la progression ascendante qui avait eu lieu durant les trois années précédentes , ainsi que l'auteur lui-même l’a constaté dans son pre- CLASSE DES SCIEN CES. 29 aer mémoire, par le chiflre de 26,641,890 kil., de 1829 à 1530, est devenue décroissante, en 1831, par celui de 63,255,347 kil. C'ést, à 9,773,068 kil. près, la compensation complète de la progression ascendante , et ces 9,773,068 kil. sont loin d'être en rapport avec les proportions que devraient établir les perfectionnements introduits dans les moyens de transport, par la réduc- tion des droits de navigation , de passage de pertuis et d'écluses, etc., depuis 1828. C'est donc uniquement à la diminution des affaires qu'il faut s'en prendre, à moins que cette énorme quantité de marchandises, qui représente le déficit signalé , n’ait été transportée par la voie de terre, ce que nous ne pouvons vérifier , mais ce qui nous paraît peu probable. * Que sera-ce donc si nous faisons remarquer que cette réduction de 63,255,347 kil., fait, à la faible somme près de 408,671 kil., qui ne vaut pas la peine d'être notée, les produits totaux représentés par cinq compagnies sur huit entreprises ; c'est-à-dire par les compagnies Herfort , Ganneron-Delanneau et C*, Jordan et C°, Bertin- Rey et C*, Mollet et C*, dont les produits généraux 5 forment ; d’après le relevé des tableaux que j'analyse, 63,663,018 kil.? * Je vous laisse à penser , Messieurs , quelles pertes ont dû éprouver ces maisons , sans parler de l'immense préjudice qui a dù en résulter pour la classe ouvrière de notre port. * Je second tableau est un exposé, par quinzaine , et pour chaque nature de marchandises, du prix de fret, par eau , de Rouen à Paris, pendant les années 1830 et 183. Peu de mots sufliront pour vous faire apprécier les résultats énoncés dans le tableau de 1831, et pour les coordonner avec ceux obtenus du premier tableau , dont le second est le complément indispensable. 30 ACADÉMIE DE ROUEN. * Les marchandises transportées sont : 1° Le blé ; 2°le sel: 30 les marbres et granits; 4° les épiceries ; 5° les liquides ; 6° Les métaux ; 7° les bois. * Eu établissant des prix moyens pour toute l'année , sur les natures diverses de transports , on voit qu'ils étaient, en 1830, par tonneau , pour les bois, de 15 francs; pour les métaux , de 15 francs ; pour les liquides , de x 1 fr. 25 cent.; pour les épiceries, de 15 fr. 25 cent. ; pour les marbres et granits , de 16 fr. ; pour le sel , de 16fr. ; pour les blés, de 15 fr. En 1831, ils sont tombés, pour ces diverses matières, en les rangeant dans l'ordre où je viens de les énoncer , à 10 fr. 85 cent. , 9 fr. bo cent., 1ofr., 10 fr. 5o cent. , 10 fr. 75 cent. , 11 fr. 5o cent. et 11 fr. * La moyenne générale du prix du tonneau était donc, en 1830, de 14 fr. 95 cent. : elle a été, en 1831, de 10 fr. 54 cent. Le nombre total des tonneaux transportés , en 1830 , a été de 209,056 ; en 1831, il n'a été que de 145,801, qui ont produit, au prix moyen de 14 fr. 95 c., en 1830, une somme de 3,083,576 fr. ; en 183: , au prix moyen de 10 fr. 54 c., 1,546,834 francs ; déficit de 1831 sur 1830, 1,546,834, c'est-à-dire la moitié, à 10,092 fr. près ! Il serait bien à désirer qu’une semblable statistique füt continuée pour cette année et les suivantes , sur les mêmes bases, afin de rassurer ceux qui se livrent à cette branche de commerce. * En supposant que le prix moyen de 10 fr. 54 cent. pour le fret, soit suffisant, ce que nous nous gardons d'affirmer , pour couvrir les frais de toute nature des entre- prises bien combinées, il aurait fallu, du moins , que la somme totale des transports fût en augmentant, pour servir de compensation à la réduction du fret : c'est le contraire qui a eu lieu ; il est facile de juger , par consé- CLASSE DES SCIENCES. 31 quent , quelle doit être en ce moment la détresse de cette industrie. Mais, nous le répétons, il est encore plus facile d'apprécier le service que M. Lepasquier rend au com- merce, aux spéculateurs et à l'administration ; en coordon- nant ainsi des renseignements positifs dont ils tireront si facilement parti. Mais, Messieurs, que les transports aient lieu par eau ou par des chemins en fer ; la vapeur est le moteur le plus généralement employé; cela suflirait,sans les besoins journa- liers et sans cesse renaissants des usines , pour rendre encore plus précieuses les mines de charbon de terre partout où elles se trouvent. Dans nos contrées , ce seraient des mines d'or ; dans celles où elles existent, ce sont des sources intarissables de prospérité. On a donc dù chercher à multiplier les carrières de charbon fossile dans les pays qui en possèdent déjà ; le département du Pas-de-Calais n'est pas resté en arrière, et la Société de Boulogne-sur-Mer a proposé un concours sur cet objet, dont M. Garnier , ingénieur des mines , a remporté le prix (549). M. Lévy, qui nous à fait un rapport sur le travail de ce lauréat , nous à prouvé que la couronne lui avait été justement décernée (1. ). Je dois saisir cette occasion de rappeler une communi- cation verbale que nous à faite M. Pimont, en mettant sous nos yeux plusieurs échantillons d'une production fossile de la nature des tourbes , qu'il a eu le bonheur de découvrir dans une de ses prairies, située à Saint- Léger-du-Bourg-Denis , pres Rouen , à deux pieds de profondeur seulement. La couche est peu épaisse, mais étendue. M. Pimont brüle avec avantage ce combustible dans sa fabrique ; et utilise même pour ses constructions les scories qui en proviennent. Il nous à promis une note dé- taillée sur cette curieuse exploitation , et il a été décidé que 32 ACADÉMIE DE ROUEN. des échantillons de cette tourbe seraient envoyés à M. Passy , préfet de l'Eure, notre correspondant , duquel j'aurai l'honneur de vous parler bientôt. S IV. — fjistoire naturelle. M. Moreau de Jonnès, correspondant de l'institut et le nôtre , Messieurs , en adressant ses félicitations à l'auteur du mémoire sur les volcans, inséré dans nos Annales , nous a envoyé un ouvrage sur les Antilles françaises. M. Girar- din, qui nous l'a fait connaître dans un rapport étendu (11), a eu le bonheur de saisir cette occasion de rendre , avec justice , à M. Moreau de Jonnés , les éloges quil en avait recus lui-même. Le docteur Ch. Pauquy , d'Amiens, a soumis à notre examen la Flore du département de la Somme et des envi- rons de Paris (567 à 572). M. A. Leprevost, qui a exa- miné cet ouvrage avec une scrupuleuse attention , à voulu encourager les naturalistes qui se livreront aux recherche; botaniques de localité, par l'exemple du succès que vieni d'obtenir M. Pauquy , auquel notre confrère donne la même approbation qu'il avait précédemment accordée à MM. Des- mazières de Lille et à feu notre confrère M. Leturquier des Longchamps. Après quelques critiques de détail , il fait à M. Pauquy et à tous ceux qui se livreront dorénavant à ces utiles investigations , une recommandation importante ; c'est de prendre avec soin les hauteurs barométriques des régions où ils recueilleront les espèces, afin de coordonner les travaux botaniques avec tous ceux de géologie et d'his- toire naturelle entrepris et à entreprendre ; soit dans les mêmes lieux , soit dans des zônes différentes ( zu. ). M. Dubuc, en mettant sous nos veux une grosse pyrite CLASSE DES SCIENCES. 33 trouvée à 70 pieds sous terre, dans une marnière apparte- nant à M. le marquis de Blosseville, nous a exprimé ses idées sur Les marcassites en général, sur leur gisement, leurs variétés , etc. ; il a offert cette notice comme un sim- ple renseignement à ceux qui s occupent de la géologie d'une maniere spéciale (xxvi ). M. Dubreuil a encore été appelé cette année à résoudre un problème végétal. Il s'agissait du développement anor- mal et extraordinaire d'une racine de vernis du Japon, découverte dans un jardin appartenant à M. le baron Adam. M. Dubreuil a démontré qu'une blessure accidentelle faite sous terre à la racine, par le contact de quelque pierre tranchante , avait déterminé dans cet endroit une végéta- tion qui présentait un aspect singulier, parce qu'elle avait été snbterranée et développée au milieu d'obstacles ; végé- tation d’ailleurs naturelle chez les arbres de la famille des térébinthacées, qui se reproduisent par leurs racines , et dont l’Æilanthus glandulosa fait partie (xxxiv ). M. le docteur Pouchet ; notre confrère , professeur de botanique et d'histoire naturelle aux écoles municipales et au collége royal de cette ville, nous a fait hommage du Traité de zoologie qu'il vient de mettre au jour. Chargé moi-même de l'analyse decette œuvre importante, je mesuis efforcé de faire apprécier le mérite d'exécution d'une en- treprise d'aussi longue haleine ; j'ai prouvé qu'elle avait été exécutée tout-à-fait dans l'intérêt des élèves. Aussi je n'ai pas craint d'ajouter : « qu'ils sauraient gré à l'auteur d'une pu- « blication qui, dès à présent et pour toujours, est et « sera pour lui un titre honorable aux suffrages des amis « de la science » (z1v ). C'est dans la section qui m'occupe ici, Messieurs, qu'avait 34 ACADÉMIE DE ROUEN. été choisi le sujet de prix pour cette année, dans l'espoir qu'il offrirait à de nombreux concurrents le double attrait de l'intérèt scientifique et de l'intérêt local. Un seul mé- moire nous est parvenu (zxvn), et il est écrit en vers. Cette forme , rarement usitée et peut-être trop peu sérieuse pour la science, a cependant été déja employée par des médecins et des naturalistes célèbres; aussi n’eût-elle pas été un obstacle au succès, si la commission chargée d'examiner ce mémoire , ne nous eùt convaincus que l'auteur n'avait pas atteint le but ( zxvui). $ V. — Agriculture. Nos travaux , dans cette branche , ont été nombreux comme de coutume , Messieurs; mais il ne faudrait pas, de leur nature même ( ils consistent presque tous en rap- ports ) ; tirer cette conséquence qu'ils sont peu intéressants. En agriculture , comme dans le reste, on n'invente pas toujours, et certes l'on rend à la science, et surtout au pays, un plus grand service , en propageant dans son sein les découvertes publiées par d’autres et justifiées par l'ex- périence , qu'en proposant des choses nouvelles, mais dont le succès est encore problématique. Les rapports prennent , de cette maniére, une véritable importance locale. La ré- putation et le savoir pratique de leurs auteurs fixent nécessairement l'attention sur les matières qu'ils approu- vent , et la confiance qu'ils inspirent , non-sevlement triomphe des répugnances et des routines, mais forme dans le peuple des convictions souvent inébranlables. Nous avons eu cet avantage , Messieurs ; nous pouvons le dire sans flatterie, dans les nombreux rapports que nous ont présentés M. Dubuc sur plusieurs numéros des Annales de la Société académique d'Indre-et-Loire , séant à Tours CLASSE DES SCIENCES. 90 (xxvur ); sur ceux de la Société royale et centrale d'agri culture de Paris, pour 1831 (xxxvur ); M. Leprevost, trésorier , sur les quatre premiers cahiers pour 1831, du Recueil de la même Société d'Indre-et-Loire (nu), et sur le recueil de 1831 de la Société de Seine-et-Oise (axvi); M. Girardin, sur un mémoire de M. Ch. Derosne , relatif à l'emploi du sang séché comme engrais ( xxix ) ; M. Gossier, sur un mémoire de M. Girardin , qui traite de l'emploi des os broyés , aussi comme engrais ( xut ). L'on pourra , en effet, remarquer , insérées dans ces analyses , des dissertations qui équivalent à des mémoires originaux ; et J'ai pu dire avec raison, en rappelant les ré- flexions de MM. Leprevost, vétérinaire, et de M. Dubuc, sur le météorisme, sur la cachexie aqueuse, elc., que c'étaient de véritables traités en abrégé sur la matière. M. Duputel, dans deux rapports circonstanciés sur le 44° cahier des travaux de la Société centrale d'agriculture de la Seine-Inférieure (xvi), sur trois autres cahiers de ces mêmes travaux , ainsi que sur les annales, pour 1831, de la Société académique de Nantes (xv1 bis), a fait preuve d'impartialité ; lon a généralement approuvé la franchise avec laquelle, rendant compte de la solution donnée par la Société de la Seine-Inférieure à deux questions impor- tantes d'économie et de droit agricoles, il a dit : « qu'il était « porté à croire qu'il serait prudent de ne point soulever « de pareilles questions, ou de ne point les résoudre par « des réponses générales, mais en les variant selon la « diversité des circonstances et des localités. » Ce même mérite appartient à deux rapports de M. Des- tigny , sur les travaux de diverses Sociétés des départements de l'Eure et du Calvados ( n° 11 et 1v ). 36 ACADÉMIE DE ROUEN. Une réflexion judicieuse de notre confrère , qui termine l'un de ces rapports, peut trouver place ici. Il rappelle , d'après M. Pattu , les dépenses de construction d'un far- delier et les frais d’étayage du pont Saint-Jacques, que nécessita le transport, sur la place Royale de Caen , du bloc de marbre destiné à former le piédestal monolithe de la statue de Louis XIV qui la décore. Il pesait brut plus de quarante milliers ; ce poids fut réduit des deux tiers envi- ron par le seul dégrossissage. M. Destigny s'écrie très sensé- ment : «que n’eut-on l'idée d'opérer ce dégrossissage avant le transport ? » Ce nouvel exemple d'une inadvertance incroyable, en pareille matière, me rappelle un trait dont je demande la permission d'égayer ce rapport. Il regarde cet homme doué à un si haut point du génie de la mécanique , qui a inventé ces appareils étonnants au moyen desquels on nettoie et l'on répare, avec tant de fa- cilité , les voûtes colossales de la basilique de Saint-Pierre de Rome. N'étant encore que simple charpentier, il donna une preuve publique de son bon sens et de sa sagacité, qui commença sa renommée. Le Pape voulait rendre aux arts et sauver des outrages des pâtres et de leurs troupeaux un des plus beaux restes de la sculpture antique, à moitié en- seveli sous l'herbe dans le Campo-Vaccino; en conséquence, il donna l’ordre de le transporter dans son palais, pour orner la grande cour de Belvédère, au Vatican. A l’aide des moyens si familiers aux architectes de la ville des chefs-d'œuvre , il fat bientôt conduit auprès du lieu désigné; mais, arrivé là , les ingénieurs s'aperçurent que le bassin antique était trop haut de plusieurs pieds pour passer sous l'arcade qui en formait l'entrée ; honteux et désappointés , ils allaient chercher à s'excuser et renoncer à l'entreprise, quand Za- baglia , riant de leur embarras, dit qu'il ferait bien entrer le monument dans la cour : mal accueilli, il demande à tenter l'entreprise ; on le lui accorde, et, à l'aide de quelques to mas CLASSE DES SCIENCES. 37 ouvriers auxquels il fait creuser le sol sous le seuil de l'ar- cade , il introduit avec facilité dans l'intérieur du palais , aux applaudissements de la multitude et à la confusion des ingénieurs , qui n'avaient pas imaginé un moyen aussi Sim- ple , la masse imposante que les artistes et les amateurs y admirent encore aujourd'hui. M. Dubuc à lu une notice inspirée par un rapport de M. Gossier , cité plus haut, et intitulée : Notice sur deux engrais speciaux (xvn). IL a pour but de prouver que les os, l'un de ces engrais, sont employés depuis long- temps en Normandie pour cet usage. Son père, il y a plus de 50 ans, en faisait enfouir | avec succès, de gros- sièrement Concassés , aux pieds des entes et des arbres à noyaux , qui se couvrent de chancres et de lichens dans les sols frais et argileux. Les râpures d'ivoire, de cornes de cerf, etc., produisent le méme effet, Le second engrais vanté par notre confrère , est celui que l'on retire du moût des pommes de terre et de l'eau qui en provient. Une série d'expériences atteste l'eflicacité de ce stimulus, et doit engager les cultivateurs à en tenter l'usage. Le développe- ment et les belles couleurs d'un fruit du cucurbita pepo, mis sous nos yeux par M. Dubuc, et attribués par lui à l'action de cet engrais, doivent engager les jardiniers et les propriétaires à en tenter l'usage. Nous avons encore entendu de la bouche de M. Dubuc des renseignements sur une lithographie qu'il nous a offerte au nom de M. Vanier ( 11), et qui a pour objet d'annoncer l'importation faite par ce propriétaire , dans son domaine de Plein-Chène, département du Calvados, d'un superbe bélier africain de pure race. Il n'y aura qu'une voix, Messieurs, pour féliciter M. Vanier du sacrifice ou plutôt du don précieux qu'il fait à l'agriculture. g ACADÉMIE DE ROUEN. 2 2, Je passe naturellement ici aux sciences économiques , dépendance immédiate de l'agriculture. M. Girardin nous avait fait hommage d’un mémoire im- primé dans lequel, après avoir reproduit et confirmé les expériences de M. Darcet , il s'efforcait d'amener Les admi- nistralions des hôpitaux , des prisons, ete. , à créer de grands appareils pour préparer du bouillon d'os, suivant la mé- thode du chimiste parisien (484 }. M. Gossier , que son long séjour à l'étranger , et surtout en Angleterre’, a rendu familier avec tous les procédés économiques institués sur une vaste échelle, nous a fait un rapport sur l'œuvre de M. Girardin , dans lequel il a confirmé par son adhésion l'espoir des avantages promis par l'auteur ( vu ). M. Hellis, auquel on avait renvoyé l'examen du volume publié par la Société d'Emulation de Rouen en 1831, a trouvé le mémoire dont il vient d’être question imprimé dans ce Recueil par ordre de la Société. Médecin en chef d'un grand hôpital, il a dù examiner la proposition faite aux administrations de bienfaisance de la ville de Rouen, sous le point de vue médical , et surtout sous le double aspect hygiénique et diététique. Guidé par une juste solli- citude pour les malades et les convalescents confiés à ses soins , opposant d'ailleurs d'autres raisonnements à ceux dont on étayait l'opinion qu'il a cru devoir combattre, il a été conduit à conclure, tout en rendant justice aux mo- tüifs qui avaient guidé M. Girardin et aux efforts qu'il avaittentés, que le bouillon fait par les procédés ordinaires était meilleur que le bouillon d'Arcet en général, et de- vait être préféré , surtout pour les malades aflaiblis et dans les convalescences longues et pénibles (xvi }; L'opinion de M. Girardin ne s'est pas trouvée ébranlée par ces raisons, Messieurs , et il a cru devoir persister dans ses propositions , qu'il a reproduites et appuyées par la ré- pétition de ses premiers arguments , présentés avec encore CLASSE DES SCIENCES. 59 plus de force dans un mémoire spécial (xxr) , en réponse à celui de M Hellis. Il n'a pas même cru devoir conve- nir que le bouillon fait par les procédés usités eût des avan- tages réels sur le bouillon d'os préparé avec les précautions et les soins convenables. Les convictions différentes des deux adversaires s expli- quent par la nature des études chimiques de l'un, et par les occupations médicales de l'autre. Au surplus , Messieurs , elles ont eu l'avantage de nous faire assister à une lutte in- téressante el tout académique , qui a complétement épuisé la question théorique. Reste à présent l'arrêt du grand juge , l'expérience : at- tendons-le. Nous retrouvons, suivant l'usage ,; M. Dubuc dans les questions économiques. Il nous a lu une notice sur la pa- nification de la fécale de pommes de terre'(xxrr ). IL se garde bien, imitateur imprudent de l'enthousiasme aveu- gle ou intéressé de quelques économistes , de comparer en tout le pain de pommes de terre au pain dé froment ; mais il voit avec plaisir cette nouvelle ressource , aussi sa- lubre qu'économique, offerte à l'indigence dans des années de disette. S VI — Maidecine, Chirurgie, Physiologie. M. Moreau de Jonnès, que j'ai déjà eu l'occasion de nommer plus haut, a fait de longues recherches sur le choléra-morbus. Bien avant que ce mal redoutable sem- blät menacer l'Europe et la France , il avait décrit ses affreux ravages sur le continent indien. En lisant le récit de ses ex- cursions, en divers sens, sur ce vaste territoire, les esprits, comme le fait observer M. Vingtrinier, rapporteur (1), par leur tendance naturelle à douter d'un danger encore 4o ACADÉMIE DE ROUEN. éloigné , taxèrent les calculs de M. de Jonnès d'exagérationt, Une fausse sécurité dut alors s'emparer des populations ; mais cependant le fléau s'avançait, Il marche , marche tou- jours, du Gange à la Vistule, de la Vistule à la Seine , il est à Paris: je n'examine point ici la responsabilité qui pourra peser sur ceux qui avaient recu de la loi, éclairée par la science, la mission sacrée de protéger notre patrie ; le choléra est dans la capitale. Il y triomphe ! de là il s'étend dans toutes les directions et parcourt nos provinces qu'il décime ! Alors, à une sécurité imprudente , succède à l'instant une crainte exagérée ; c’est le sort de tout ce qui occupe vivement l'opinon publique dans cette trop ardente et trop généreuse France ! Espérons que M. de Jonnès , sur le théâtre de l'épidémie, ajoutera bientôt la page dou- loureuse de son séjour parmi nous , à l'histoire générale de cette peste, qui semble destinée à parcourir le globe. C’est encore M. Vingtrinier qui, au nom d'une com- mission , nous a lu un rapport sur l'ouvrage du docteur Brière de Boismont ( zxur ), qui retrace l'histoire du choléra-morbus en Pologne. Nous avons admis l'auteur , notre compatriote , parmi nos correspondants ; cet hom- mage éclatant rendu à son dévoüment , est aussi justifié par son ouvrage, dont les imperfections, dit le rappor- teur , empruntent une excuse plus que valable aw temps et aux circonstances dans lesquelles il a été publié (339 ). Avant que la peste indienne fit irruption dans les murs de Rouen ; lorsque nous étions arrivés à ce moment solen- nel qui précède la bataille, qu'on me passe cette compa- raison ; à cet instant où le talent et le dévoüment sont également éveillés, prêts à faire face aux dangers, deux de nos confrères, dans la louable intention de rassurer CLASSE DES SCIENCES. 41 notre cité alarmée , et pour répandre encore à temps des idées justes et des conseils utiles , composérent deux mé- moires qui fixèrent à un haut degré notre attention : l'un est un travail original de M. Dubuc sur le choléra (578), et l'autre (xxv) une dissertation sur le méme sujet , par le docteur Hellis, présentée par lui à l’occasion du rap- port ( xxvir) dont il était chargé sur l'ouvrage du doc- teur Emile Dubuc (557) de Rouen, qui, renouvelant le dévouement de la commission polonaise , se rendit sponta- nément , et à ses frais, à Sunderland et à Newcastle , pour y observer la maladie qui venait de faire sa première appa- rition sur le territoire britannique”. Je n'ai point de jugement à porter sur les ouvrages de nos deux confrères , Messieurs , car , par le sentiment commun de la plus ho- norable philantropie , il les ont publiés au profit des malheureux cholériques. Ils nous ont privés par-là du plaisir d'en ordonner l'impression dans notre Précis , mais les suffrages et la reconnaissance du public leur tiendront lieu de cet honneur , et leur seront un éloge plus flatteur que celui que j'essayerais de leur adresser ici. Mais enfin , Messieurs , le choléra règne à Rouen : l'un de nos anciens praticiens, le docteur Le Prevost, est appelé à donner des soins à plusieurs malades atteints d'une ma- nière grave par l'épidémie ; il imagine aussitôt un traite- tement fondé sur ce qu'il voit et sur des inductions chimi- ques , physiologiques et médicales toutes rationnelles ; il réussit, et il nous a lu ses curieuses observations ; en pro- testant contre l'intention qu'on pourrait essayer de lui pré- ter, d'avoir cru découvrir un spécifique infaillible dans toutes ‘ Le conseil municipal de Rouen a voté une médaille d’or à M, Dubuc. \ 6 42 ACADÉMIE DE ROUEN. les circonstances et dans tous les cas. L'Académie a vote, avec empressement , l'insertion de ce mémoire dans le Pré- cis de 1832. (xxxvir ). M. Hellis, médecin en chef de l'Hôpital où le plus grand nombre de cholériques à été traité ; a dû vous dire les causes qui l'ont déterminé à retarder la publication des résultats cliniques obtenus dans 'Hôtel-Dieu de Rouen. Je ne puis qu'approuver ici, en les invoquant pour mon propre compte, les raisons décisives qui ont guidé mon confrère dans cette circonstance (2x1). Certes, l'histoire du choléra dans l Hôtel-Dieu de Rouen serait bien incom- plète , si elle était privée des chapitre; qui traiteront des changements notables que la période que nous parcourons en ce moment même a imprimés à l'épidémie. Quand le danger est pressant, il est naturel de cher- cher de tous côtés des secours : c'est ce qu'a fait M. Du- putel (xxx1) ; il a rappelé aux médecins qu'un traitement dit Traitement de Douglass , était consigné dans l'Ency- clopédie , et il a demandé qu'une commission compétente en fit l'épreuve, pour constater son eflicacité jadis tant vantée ; les médecins n'avaient pas oublié ce traitement, Messieurs, et ils ont prouvé que la pensée philantro- pique de M. Duputel serait sans résultat dans l'appli- cation. Là ne se bornent pas nos travaux relatifs à l'art de guérir. Nous devons encore à M. Fôville { vr), au nom d’une com- mission, deux rapports étendus sur les œuvres de M. Ben- nati (485), médecin du théâtre italien à Paris, et sur celles du docteur Fortin, médecin à Evreux (48, 459 et 90 ). Quelques objections ont été faites par notre con- frère à plusieurs des propositions avancées par ces deux auteurs, mais nous devons constater que son rapport, CLASSE DES SCIENCES. 43 favorable sur tout le reste, leur a valu le titre de membres correspondants , qui leur à été décerné. M. Vingtrinier nous a fait aussi, au nom d'une commission , un rapport sur l'ouvrage dans lequel M. Tanchou, de Paris, a consigné les modifications et les améliorations qu'il a fait subir à l'art de la lithotritie (x }; nous lui avons également conféré le titre de membre correspondant. ( 497.) M. Vingtrinier a traité avec indulgence une thèse de M. Navet, docteur-médecin , demeurant à Dieppe, qui, sous la forme de propositions, parle du tempérament de la femme. M. le baron Adam nous à fait connaître le recueil des premiers travaux exécutés par les conseils de salubrité récemment constitués à Rouen et dans les autres arrondis- sements du département. Ce rapport nous à mis à même d'apprécier lutilité de ces conseils, leur composition et l'a-propos de leurs recherches ( xxx ). M. Vingtrinier, dans un rapport verbal sur le compte rendu des séances du comité central de vaceine , à reconnu le zèle des secrétaires de ce comité, auxquels il a rendu briévement justice. La Compagnie a ordonné l'impression dans son Précis d'une observation d'aliénation mentale , que nous à lue le docteur Vigné (1x), et que par conséquent je ne ferai que mentionner ici : cette observation , recueillie par lui à l'hospice général, lorsqu'il y exercait les fonctions de médecin en chef, est déja ancienne; mais, en nous Ka communiquant , il cédait à cette réflexion de l'un de ses plus estimables collègues : que Les observations ne vieillissent jamais. Une chose que je dois rappeler ici, Messieurs . 44 ACADÉMIE DE ROUEN. c'est que c'est aux efforts généreux de M. Vigné que lon dut, dans nos murs, il y a dix-sept ans, la suppression de l'usage barbare des chaines et autres moyens violents dont on accablait jadis les malheureux aliénés. Le docteur Chaponnier , notre correspondant, à Paris, nous à adressé une observation manuscrite , dans laquelle il expose les modifications qu'il a apportées au procédé de M. Dupuytren, pour éviter, lors de la résection de bourrelets hémorroïdaux, dansle prolapsus de l'intestin, lhémorrhagie consécutive , par la seule contraction du sphincter, et soustraire ainsi les malades aux tortures du tamponnement ou de la cautérisation. Le docteur Le Prevost a trouvé les modifications proposées ingénieuses et utiles, puis- qu'elles épargnent aux malades de cruelles douleurs (zvnr). Enfin, Messieurs, pour terminer cette longue liste de nos travaux médicaux , je dois rappeler que j'ai eu l'honneur de faire un rapport (zx1r ) sur le recueil mensuel de la Gazette médicale (556) de Paris, par le docteur Jules Guérin , journal qui fait suite à la Gazette de Santé. * J'ai dit, en terminant ce rapport , que « la Gazette médicale de Paris est à la médecine ce que peut être à la politique la Gazette de France. Toutes les deux sont les plus anciens journaux de la capitale, par leur filiation directe ; l'une, rédigée avec beaucoup d'art et de talent, au niveau des connaissances positives les plus approfondies , tant anciennes que modernes, dans l'ordre politique, a pour but de prouver que la France, dans sa propre histoire, dans cette constitution traditionnelle née de la nature des choses et des besoins réels et des vœux conformes du pays, peuttrouver, sans secousses et sans perturbations, CLASSE DES SCIENCES. 45 une ressource certaine contre les passions des partis et leurs suites, et puiser dans cette même constitution les vrais éléments d'ordre, de liberté, de prospérité et de gloire , avec la condition la plus désirable, celle de la stabilité ! La Gazette médicale a pour but , à son tour , de retrouver, dans les annales de la médecine, et dans la pratique des vrais maîtres de l'art, tant anciens que modernes , un refuge contre linvasion des doctrines pernicieuses; elle veut le progrès dans les sciences, et non le bouleversement ; c'est-à-dire le progrès dans la seule ligne où il peut véritablement se faire. * Il est encore un autre point de ressemblance entre la Gazette médicale et son homonyme politique; le voici : c’est qu'elle compte , comme cette dernière , sur cette portion de la jeune France, qui, riche de connaissances vraiment bien acquises, doit tourner nécessairement sa généreuse ardeur vers la conquéte des moyens qui lui permettront enfin d'utiliser ce qu'elle sait , au profit de la gloire nationale. * Ces deux Gazettes arriveront-elles enfin au but qu'elles se proposent ? Pour la Gazette politique, je n’en dois rien dire : quant à la Gazette médicale, je serai plus hardi, étant plus compétent : Oui ! elle l’atteindra , j'en ai l'intime conviction. 5 Matières Diverses. Je range d'abord dans ce paragraphe un rapport de M. Dubuc sur les numéros trois et quatre du tome onzième des Annales de la Société d'Orléans, et je consigne ici le témoignage public de l'estime que le rapporteur nous a 46 ACADÉMIE DE ROUEN. inspirée pour ce recueil, qui se compose de matières variées , presque toujours utiles et souvent agréables, On a regardé comme un charlatanisme ou comme un rêve l'invention de procédés rationnels pour aider la mémoire. La Mnémonique où Mnémotechnie , professée d'abord par M. de Feinaigle, ily a une vingtaine d'années, l'a été depuis, récemment même dans nos murs, par M. Aimé Pâris. M. Ballin nous a lu une histoire complète de cette science, de ses procédés, de ses méthodes diverses, etc. (xxxvi) ; son mémoire sera un renseignement et un guide précieux pour ceux qui voudraient se livrer à cette étude ; les difficultés qu’elle présente au commencement s'applaniront , et les élèves puiseront dans l'œuvre de notre confrère cette persévérance qui prévient le découragement et fait arriver sûrement au but. Le projet d'association normande pour les progrès de l'industrie provinciale , par M. de Beaurepaire, à pour objet d'introduire, dans des contrées dont les habitants languissent encore dans une ignorance profonde , et suivent aveuglément des routines surannées , les lumières de l'instruction et la pratique des procédés rationnels de l'agriculture perfectionnée. M. Pimont a fait sentir la noblesse etl'utilité du résultat que l’associationse propose d’atteindre, à travers les obstacles de plus d'un genre qu'elle devra rencontrer (Lvn ). Statistique. Dans mon rapport général de l'année dernière , j'annon- cais que l'Académie allait acquérir de nouveaux titres à CLASSE DES SCIENCES. 47 l'estime publique, par l'exécution d'un vaste plan de sta- tistique départementale , qu'elle avait dressé et coordonné, sur l'invitation de l'administration supérieure. Je disais alors que les développements nécessaires de ce plan seraient incessamment soumis à cette même autorité : ce second travail a été en effet exécuté, et M. Ballin , au nom d'une commission nombreuse , nous a lu, dans la séance du vingt janvier dernier, un rapport motivé sur cet objet (xr) : nous l'avons adopté , etil a , en conséquence , été adressé immédiatement à M. le préfet, qui nous en a accusé récep- tion, en y joignant l'expression de son approbation et de sa reconnaissance. M. Lepasquier, qui tenait lui-même un des premiers rangs dans l'administration de notre province, en occupant au commencement de cette année le fauteuil de la prési- dence, prononça un discours consacré entiérement à la statistique. Après qu'il eut exposé ses propres idées sur l'exécution de ce grand travail , il ajouta ces mots, que je rappelle ici comme preuve du fait et comme un hommage que je me plais à rendre au talent de l'orateur : « Telle est, Messieurs, la direction toute spéciale qu'il « paraîtrait convenable d'imprimer à nos travaux , dès « le commencement de cette année académique. L'épo- « que où nous vivons est celle des idées positives : étu- « dions-nous à lui payer notre tribut. L'antique Egypte « avait écrit dans le sanctuaire de ses temples, pour ceux « qui venaient y chercher la sagesse : GONNAIS-TOr Tor- « MÊME ! Et nous , Messieurs, nous dirons , en donnant un « sens matériel à ce précepte moral : connaissons et faisons « connaître le pays que nous habitons, sa constitution phy- « sique, ses productions , son importance dans le système « de l'économie politique du royaume , et les éléments de « prospérité dont il renferme les germes féconds. » (1 bis.) Ce qui doit augmenter encore l'impatience qu éprouve 48 ACADÉMIE DE ROUEN l'Académie de commencer enfin cette tâche utile, c'est de savoir qu'elle a été devancée dans cette carrière par plusieurs départements ; car, sans parler de celui des Bouches-du- Rhône , dont la statistique a recueilli d'unanimes suflrages , M. Floquet, au nom d'une commission, nous à fait un rapport sur l'Annuaire statistique du Doubs ( xxxv }), que M. Laurens, chef de la première division à la préfecture de Besancon, publie par éditions successives depuis plu- sieurs années , et qui renferme des recherches curieuses qui doivent faire ranger ce livre , dit le rapporteur, parmi les meilleurs de ceux qui traitent de semblables matières 65357 Ainsi donc , l'Académie est prête , Messieurs : il ne lui manque que le signal de l'administration ; je dois exprimer publiquement ici le vœu qu ‘elle forme pour qu'il soit enfin donné ! J'avais encore fait au public , en 1531 ; une se- conde promesse , celle de la publication prochaine de l'ouvrage couronné , sur la géologie de la Seine-Inférieure, enrichi d'une carte, de plans et de dessins exécutés avec soin. L'auteur, M. Antoine Passy, préfet à Evreux, l'a revu , corrigé et augmenté, mis en un mot au niveau des connaissances actuelles en cette partie; il paraît en ce moment même : : on reconnaîtra donc que si nos promesses ont été différées , elles ont du moins été tenues. IL est temps maintenant d'offrir le témoignage de la re- connaissance de l'Académie aux Sociétés correspondantes et aux auteurs qui nous ont adressé des ouvrages imprimés * Les premiers exemplaires ont été livrés aux membres de l'Académie, le 25 août 1832, CLASSE DES SCIENCES. 49 ou manuscrits! dont je ne présente pas ici la liste, les rapports auxquels ils donneront lieu devant me fournir, durant le prochain exercice , l'occasion certaine d'en faire mention. Tels sont nos travaux en 1832, pour la classe des scien- cés, Messieurs ; à ceux auxquels les chiffres semblent un moyen d'apprécier les choses scientifiques, je pourrais dire leur nombre comparé à celui des années précédentes ; mais à vous, Messieurs, qui jugez ces mêmes travaux par leur nature et par leur but, ne dois-je pas redire avec Montaigne : « C'est une bonne drogue que la science ; mais « nulle drogue n’est assez forte pour se préserver sans alté- « ration et corruption, suivant le vice du vase qui l'es- « tuye ! » Je réclame de vous encore quelques instants d'une attention bienveillante , pour remplir un dernier devoir. Nécrologie. Je dois maintenant, Messieurs, vous rappeler les noms et les travaux de ceux que la mort a retranchés de la liste de nos membres depuis la dernière séance publique. C’est peut-être la partie la plus triste de mes fonctions ; mais elle n'est pas sans douceur, cette grave obligation que la confiance de l'Académie m'impose d'offrir un dernier et solennel hommage à la mémoire de ceux qui ont brillé dans ses rangs. Dans les familles d'élection qu'on nomme Académies, les regrets sont touchants, parce qu'ils sont sincères , et que nul ne peut les entacher de l'odieuse ‘ Je mentionne spécialement M. Germain, pharmacien à Fécamp, correspondant 50 ACADÉMIE DE ROUEN. suspicion d'être inspirés par l'intérêt ou par les conve- nances. Ces pensées s appliquent certainement à celui dont j'ai à vous parler, à M. Virauis, l'un de nos vétérans, qui a laissé dans cette ville , comme professeur , et surtout dans cette Académie comme oflicier de son bureau , des sou- venirs qui seront durables, parce qu'ils sont le prix du mérite et des services. Nous sommes dans un temps où les formes usitées sont impuissantes à fixer l'attention ; je m'affranchirai done à mon tour des regles suivies dans les notices nécrologiques. Pour celui dont j'ai à vous entretenir, c'est de l'époque où il fut à nous que je dois m'occuper ; c'est donc de ce qu'il a fait pour nous et avec nous que je parlerai. Un autre pourra dire , avec exactitude , le lieu de sa naissance, ses premières études , ses premiers succès ; sa première voca- tion ; moi, je le prends dans nos murs, à l'époque où, professeur à l'Ecole centrale de cette ville , il reçut l'ho- norable mission de professer ce cours si utile et si impor- tant pour notre cité manufacturière , le cours de Chimie appliquée aux arts. Je puis le dire hardiment, Messieurs, le protesseur fut digne de la chaire, et nul d'entre vous n'a oublié son exactitude et son zele. Parmi ses nombreux élèves , en est-il un seul qui ne se rappelle ce soin minutieux avec lequel, pour s'assurer de leur application et de leurs progres , il leur fusait répéter , presque textuellement , ses lecons précédentes? Je ne puis me rappeler sans atten- drissement et reconnaissance combien de fois son intérêt bienveillant fit tomber son choix sur moi pour cette ins- tructive répétition. Cette méthode , dans laquelle il persista constamment, a été blamée, je le sais , et je suis loin de prétendre qu'elle doive toujours etre préférée ; mais, Messieurs, n'a-t-on pas le droit de dire que M. Vitalis , convaincu de ses avantages CLASSE DES SCIENCES. 5x par ses succès mémes, et pénétré des principes qu'il cherchait à enseigner aux autres, voulait employer d'abord la faculté qui manque le moins à la jeunesse , la mémoire, et, à l'aide de ce puissant instrument , parvenir à coup sûr à faire pénétrer dans son esprit des connaissances scientifiques dont son jugement saurait faire ensuite usage ? IL y a dans cette intention, Messieurs , une pensée profondément philosophique , dont nous devons fure bon- neur à M. Vitalis ; elle sera sentie partout, et surtout ici, où des hommes compétents ont reconnu, en principe , les avantages que lon pourrait obtenir de la méthode du célèbre professeur de Louvain, appliquée avec discer- nement. Mais , Messieurs, ces témoignages d'estime donnés au professeur conciencieux ne sont pas ceux qui doivent le plus retentir en ce lieu ; c'est surtout sur ceux que mérita le secrétaire perpétuel capable et zélé, que je dois in- sister. Vous vous rappellerez, en effet, Messieurs, que depuis la renaissance de l'Académie en 1804 jusqu'en 1822, c'est- à-dire pendant un espace de dix-huit années, M. Vitalis remplit chez nous, avec une rare distinction , les fonc- tions de secrétaire perpétuel de la Classe des sciences. Il suflit d'ouvrir nos Précis , pour trouver à chaque pas. durant cette longue période , une foule de mémoires, de notices , de rapports , etc. , qui prouvent le zèle infatigable et la va- riélé de connaissances positives que possédait mon hono- rable prédécesseur. Mais , en cet instant même , Messieurs, je fais mvolontairement et sans y songer son éloge, et je suis heureux de le faire partager à ceux de nos confrères qui ont rempli apres lui les fonctions dont je suis moi- méme honoré ; qui de vous, dis-je, en entendant le rapport général que je viens de vous soumettre , ne s'est pas rap- pelé, à mon immense désavantage , ceux que M. Vitalis vous 52 ACADÉMIE DE ROUEN. a présentés pendant dix-huit années consécutives , et dans lesquels il avait constamment résolu le problème difhcile de rendre intéressants pour le public les travaux sérieux et les recherches abstraites de la science ? Mais je dois dire maintenant, Messieurs, ce qui re- commandera surtout son nom à la mémoire du monde savant. Vous savez avec quelle ardeur, tout en propageant les connaissances théoriques , il se livra , autant qu'il dépendait de lui, à l'application de ces mêmes théories à l'ane des industries principales de notre cité , à la teinture, surtout à celie dont le secret , ravi aux Indiens et transporté chez nous, à acquis une si grande célébrité et conquis une si grande prospérité à nos ateliers ; sous le nom de rouge d'Andrinople ou des Indes. Notre trésorier honoraire ; le respectable M. Pavie, pourrait vous raconter comme il le seconda dans les géné- reuses entreprises que son patriotisme , si mal récompensé , lui fit tenter pour affranchir l'industrie française du tribut onéreux qu'elle paie à l'étranger ; et surtout à l'Angleterre, en cherchant à substituer avec succès, à l'indigo, cette substance si chère , l'/satis tinctoria ou pastel, que lon récolte avec facilité dans nos climats. Le Traité de teinture publié par M. Vitalis, ouvrage qui a obtenu les suffrages unanimes des savants et des pra- ticiens , est Le plus beau titre de son auteur à la reconnais- sance de l'art et de nos concitoyens, pour lesquels il fut surtout composé. C'est par cette publication remarquable que M. Vitalis fit ses adieux au monde savant , et par conséquent à cette Académie. Honoré à cette époque , celle de sa retraite, du titre d'oflicier de l'Université et de la croix de la Légion- d'Honneur ; rien ne lui manquait pour mériter l'estime de ses confrères et la gratitude de ses concitoyens. Là doit se CLASSE DES SCIENCES. 53 terminer pour nous sa carrière, qu'il prolongea cependant encore de quelques années , puisqu'il est mort, il y a deux mois à peine , curé de la paroisse de Saint-Eustache, à Paris. Nous ne ferons sur ces derniers temps de sa vie qu'une seule remarque , c'est que les dispensateurs des grâces , qui avaient voulu le distinguer par la décoration de la Légion- d'Honneur, en 1820, voulurent depuis lui conserver le rang honorable où le placait cette distinction, décernée il y à douze ans; il est mort, en eflet, en 1832, oflicier du méme ordre. Mais, Messieurs , le temps me presse ; je me hâte donc de quitter ce deuil de famille pour vous associer à ce grand deuil public que la France, que dis-je ! que le monde ci- vilisé tout entier portera long-temps de cet homme que nous comptions avec orgueil au nombre de nos correspon- dants, dont il était lun des plus illustres et sans doute le plus savant, Vous avez Lous nommé le professeur Cuvirr. Quand on songe que cette prodigieuse capacité, peu de jours avant celui qui nous l'a enlevée , présidait à ses travaux si importants, si nombreux, si variés, avec celte facilité , cette aisance et cette profondeur habituelle qu'on ne pouvait se lasser d'admirer ; quand on se rappelle qu'il était à peine âgé de soixante-six ans, au sentiment douloureux d'une perte si grande se joint aussitôt la pensée désespérante qu'elle à été prématurée. Je ne viens point ici faire l'éloge de l'illustre secrétaire perpétuel de FInstitut ; il faudrait à cette grande tâche , sinon une autre tribune, à coup sûr un autre orateur. Et d'ailleurs, notre immortel Bossuet n'a-t-il pas dit: « Le génie n'a pas besoin d'éloges : sa « gloire lui suffit, et elle va toujours croissant & mesure que « l'on médite sur ses œuvres. » Ici donc point de panéey- riques , point d'épitaphes pompeuses ! L'histoire recueillera 54 ACADÉMIE DE ROUEN. ce mot si vrai, qui les remplace tous, qu'une voix illustre fit entendre sur sa tombe , au moment où, pour lui adresser un dernier adieu , toutes nos célébrités contemporaines se pressaient autour de son cercueil : « Messieurs , il fut notre maître à tous ! » Ah ! pour que la postérité la plus reculée s'arrête avec reconnaissance devant cette tombe ; pour qu'elle sin- cline avec respect sur la terre qui contient la dépouille mortelle du grand homme, il sufira qu'elle lise ces trois mots gravés sur la pierre qui doit la recouvrir : Ci-git Cuvier : ! : L'Académie a voté, par une délibération spéciale, une somme de 200 francs qu’elle a fait adresser au comité de souscription pour le monument à élever à Cuvier, dans le Jardin des Plantes de Paris, 227000007770 052000000006007060700200500060607000000050007700® PRIX PROPOSÉ POUR 1833. L’Acan£mE n'ayant recu qu'un mémoire en réponse à la question proposée pour 1832 , dans la classe des Sciences , et ne l'ayant pas trouvé digne du prix , proroge ce même concours au premier juin 1833. En conséquence ; les concurrents devront exposer L'Histoire naturelle du puceron lanigère. IL faudra rechercher quelle est son origine , décrire ses habitudes , ses moyens de conservation et de reproduc- tion ; dire l’époque où les jeunes pucerons naissent où éclosent, quelle est la durée de leur vie? Les mâles sont- ils seuls pourvus. d'ailes ? Estil constant que le puceron lanigère s'enfonce dans la terre pendant l'hiver ? Vital sur les racines , de la même maniere que sur les branches? À quelle cause peut-on attribuer sa disparition subite de quel- ques arbres? A-til des ennemis qui puissent Le détruire ou le faire fuir des contrées où il se trouve ? Comment se trans- porte-t-il d'un pays dans un autre ? Le trouve-t-on sur d’au- tres arbres ou arbustes que le pommier ? Combien, enfin, y a-til d'années qu'il a commencé à se montrer en Nor- mandie ? Le prix sera une médaille d'or de la valeur de 300 fr. Chacun des auteurs mettra en tête de son ouvrage une devise , qui sera répétée sur un billet cacheté , où il indi- 56 ACADÉMIE DE ROUEN quera son nom et sa demeure. Le billet ne sera ouvert que dans le cas où l'ouvrage aurait obtenu le prix. Les Académiciens résidants sont seuls exclus du concours. Les ouvrages des concurrents devront être adressés , francs de port, à M. Des ALLEURS , Docteur-Médecin, Secrétaire perpétuel de l’Académie pour la classe des Sciences , rue de l'Ecureuil , n° 19 , avant le 1° juin 1833. Ce terme est de rigueur. RE 200000000000 00 7000000027 50700000707005050000007 560500520500 Mémoires DONT L'ACADÉMIE À DÉLIBÉRÉ L'IMPRESSION EN ENTIER DANS SES ACTES. AFFAIRE D'EMPOISONNEMENT , PORTÉE DEVANT LA COUR D’ASSISES DU DÉPARTEMENT DE LA SEINE -INFÉRIEURE , Le 19 Décembre 1831 ; Par M. Morix, Pharmacien, Membre de plusieurs Académies nationales et étrangères Masseurs ; Dans le courant d'avril dernier , nous füûmes requis, M. le docteur Vingtrinier et moi, par M. Barré, juge d'instruc- tion , d'examiner diverses substances qui consistaient par- üiculièrement 1° en un estomac et les intestins duodenum et jejunum extraits du cadavre d'une femme Dumont, dont l'inhumation datait de plusieurs mois; 2° en un aliment connu sous le nom de boudin blanc , avec une certaine quantité de graisse qui l'entourait; 3° en matières de vo- missement recueillies chez une femme Pilet. Plusieurs autres substances nous furent remises par ce magistrat ; mais nous ne mettrons point sous les yeux de 8 58 ACADÉMIE DE ROUEN. l'Académie les résultats de leur analyse, qui, d'ailleurs , n'offrent rien d'intéressant sons le rapport chimique ; nous ne nous sommes même décidés à entretenir la Compagnie de ce travail , que parce qu'il nous a présenté une question neuve de chimie judiciaire à résoudre. Nous avons procédé à l'analyse de chacune des substances, dans l'ordre de leur énumération. Les questions auxquelles nous avions à répondre étaient celles-ci : 19 La mort de la femme Dumont est-elle le résultat d'un empoisonnement ? 2° Le boudin blanc, et la graisse qui l'environne, contien- nent-ils une matière vénéneuse ? Dans l'hypothèse où la question serait résolue aflirmativement, établir si la graisse a recu le poison par le contact du boudin pendant la cuisson ; ou bien, la graisse at-elle été empoisonnée primitivement ? 3v Enfin . la matière du vomissement recueillie chez la femme Pilet renferme-t-elle une matière vénéneuse. Examen de l'estomac. L'estomac renfermait un liquide trouble , sanguinolent , d'une fétidité repoussante. On le filtra ; mais il conserva sa couleur ; alors, pour apprécier l'action des réactifs ; on le décolora au moyen du chlore, qui produisit des flocons brunätres. La liqueur , filtrée de nouveau, ne précipitait point par l'acide hydrosulfurique , méme additionné d'acide bydrochlorique ; l'hydrosulfate d'anmmoniaque pur y pro- duisit un précipité Jaune-verdätre ; qu'on sépara par le repos. Ce précipité , desséché , n'exhala point d'odeur allia- cée lorsqu'on le mit en contact avec les charbons ardents. D'ailleurs, ce précipité se dissolvait dans l'acide bydrochlo- rique, et l'ammoniaque n'en opérait point la dissolution. L'eau de chaux y forma un précipité qui, desséché et mis sur les charbons ardents , ne donna nullement l'odeur d'ail. CLASSE DES SCIENCES. 5g Une portion de ce liquide fat évaporée jusqu'à siccité , après avoir été additionnée de potasse pure. Le résidu, partagé en deux parties, fut soumis aux expériences suivantes : l'une fut mélée à son poids de charbon en poudre ; puis on l'in- troduisit dans un tube de verre fermé à l'une de ses ex- trémités, et l'autre fut effilée à la lampe. On placa le tube au milieu du feu , et on le chaufla jusqu'à l'incandescence. Pendant l'opération il ne se produisit point d'odeur d'ail , et en brisant le tube on ne remarqua aucune particule mé- tallique. L'autre portion du mélange potassé fut introduite par petites quantités dans un matras contenant du nitrate de potasse en fusion. Lorsque la réaction fut opérée, on a dis- sous la masse dans l'eau distillée, et on a saturé le liquide par l'acide nitrique pur. Après la filtration , on le mit en contact avec le nitrate d'argent ; qui ne donna aucun pré- cipité rouge-brique. Les sels de cuivre n'y déterminèrent point de précipité blanc-bleuâtre. Le précipité que nous avons signalé plus haut n'était que du sulfure de fer mélangé d'une petite quantité de soufre très divisé, provenant de l'action du chlore sur l'hy- drosulfate d'ammoniaque. IL résulte de ces expériences que le liquide que renfermait l'estomac ne contient aucune substance métallique véné- neuse, Pouvons-nous , par ce résultat négatif, dire que la mort de la femme Dumont n'est pointle résultat d'un empoison- nement? Non, sans doute ; car il pourrait se faire que le poison eût été absorbé par les visceres eux-memes. Nous raisonnämes d'abord dans l'hypothèse où le deuto- chlorure de mercure aurait été employé pour donner la mort à la femme Dumont. Alors il ne s'y retrouverait pas sous le même état qu'une main coupable l'aurait administré ; il se serait converti en proto-chlorure de mercure , par suite de la réaction de la matière animale. Dans cet état, il n'exis- 60 ACADÉMIE DE ROUEN. terait point disséminé à la surface des organes que nous examinons ; il formerait avec eux une combinaison intime, De là la nécessité de rompre cette union par un agent énergique. L'intermède que nous employämes fut l'acide nitrique , qui, détruisant le tissu animal, devait transformer le proto-chlorure en deuto-chlorure. En conséquence, nous fimes bouillir une certaine quantité de l'estomac et des in- testins dans de l'acidenitrique étendu d'eau, jusqu'à ce que la désorganisation füt complète. Alors, après avoir chassé l'ex- cès d'acide par une chaleur ménagée , la liqueur devait se comporter avec les réactifs comme une dissolution de su- blimé corrosif, et on l'étendit d'eau pour isoler une ma- tière grasse qui s'était formée par la réaction de l'acide sur le tissu animal. Alors on y versa de l'hydrosulfate d'ammo- niaque pur en excès, qui donna naissance à un précipité noir peu abondant. Ce précipité recueilli fut mis à bouillir avec de l'acide nitrique ; il en résulta une dissolution qui précipitait en noir par l'hydrogène sulfuré, et donnait par l'ammoniaque un précipité gélatineux , lequel fut reconnu contenir du phosphate de chaux, de l'alumine et de l'oxide de fer. Il résulte de ces expériences que si Les tissus de l'esto- mac et des intestins eussent renfermé de l'arsenic blanc ou du proto-chlorure de mercure, ces corps, par suite de la réaction de l'acide nitrique, auraient été transformés , le premier en acide arsenique ; et le second en deuto-chlorure de mercure , facilement appréciables par les agents chimiques. Mais les résultats qu'on a obtenus ont été tout-à-fait négatifs. Comme en médecine légale on ne peut accumuler trop de preuves pour établir l'absence ou la présence du poison, nous avons cru devoir faire encore cette dernière expé- rience : nous avons coupé par petits morceaux une certaine quantité de l'estomac et des intestins , que nous avons mélés ensuite avec de la potasse pure ; puis nous avons introduit le mélange dansune cornue, au col de laquelle nous avons CLASSE DES SCIENCES. 6x adapté une alonge qui communiquait avec un récipient ; l'appareil, parfaitement luté, a été chauflé de maniere à décomposer la matière animale ; nous n'avons obtenu au- cune sublimation métallique dans le col de la cornue , ni dans le récipient; et en brisant l'appareil de décompo- sition , on ne remarqua aucun métal mis à nu. De toutes ces recherches, il faut conclure que la mort de la femme Dumont n'a point été occasionnée par un poison métallique. Quoiqu'un laps de temps trop long se fût écoulé depuis la mort jusqu'à l'époque de nos expériences, pour admet- tre la possibilité de reconnaître un poison organique dans le liquide de l'estomac et des intestins, cependant nous avons fait des recherches pour en établir l'existence ; et les résultats ont été négatifs. Maintenant se présente l'examen de l'aliment connu sous le nom de boudin blanc. Examen du boudin blanc. Cet aliment, contenu dans une assiette de terre , était entouré de graisse qu'on laissa pour étre examinée à part, suivant le vœu de l'ordonnance de M. le juge d'instruction. Une certaine quantité de ce boudin fat mise à bouillir dans de l'eau distillée pendant une demi-heure. La li- queur filtrée était presque sans couleur; on y versa de l'hy- drogène sulfuré et quelques gouttes d'acide hydrochlori- que. Tout à coup il se forma un précipité jaune-serin ; qui ne se dissolvait point dans l'acide hydrochlorique , mais qui était soluble dans l'ammoniaque. Une portion de ce préci- pité, placée sur les charbons ardents, exhalait une odeur d'ail très prononcée. Cette expérience suflit au chimiste pour affirmer la présence de l'oxide blanc d'arsenie , puis- qu'aucun corps connu ne jouit de ces propriétés réunies. Mais nous ne bornâimes point là nos expériences : une por- 62 ACADÉMIE DE ROUEN. tion de décoctum de boudin fut additionnée de potasse pure” pour fixer l oxide blanc d'arsenic , puis elle fut évaporée Jus- qu'à siccité. Le résidu de l'évaporation, mélé à du charbon en poudre , fat introduit dans un tube de verre , fermé à l’une de ses extrémités, et dont l'autre fut eflilée à la lampe. L'appareil fut chauffé graduellement jusqu'a L incandes- cence ; bientôt on vit apparaître , par la partie interne du tube , une sublimation lamelleuse , d’un aspect métallique et d'un gris d'acier. Cette matière, retirée du tube, exhalait l'odeur d'ail par son contact immédiat avec un fer rouge , en répandant des vapeurs blanches. Ces vapeurs , recues dans un verre pour en opérer la condensation , furent mises en contact avec l'eau distillée bouillante. Il en résulta un liquide qui précipitait l'eau de chaux en blanc , le sulfate de cuivre ammoniacal en vert- pré ; l'hydrogène sulfuré , versé dans cette dissolution, addi- tionnée d'acide hydrochlorique, donna naissance à un préci- pité jaune insoluble dans cet acide, mais se dissolvant très bien dans l'ammoniaque. Il résulte de ces expériences que le corps métalloïde trouvé dans le tube était de l'arsenic. Examen de la graisse environnant le boudin. Une portion de la graisse fut traitée par l'eau distillée bouillante, à diverses reprises. La liqueur filtrée n'avait pas de couleur sensible. Mise en contact avec les réactifs, elle pré- senta les caractères suivants : elle précipitait l'eau de chaux en blanc ; l'hydrogène sulfuré y produisit, par l'addition de l'acide hydrochlorique, un précipité jaune-serin solu- ble dans l'ammoniaque ; le sulfate de cuivre ammoniacal , un précipité vert-pré, qui, recueilli et mis sur les charbons ardents , exhalait une odeur d'ail. Une certaine quantité de cette liqueur, additionnée de potasse pure , fut réduite à siccité et mélée à du charbon en poudre. On l'introduisit CLASSE DES SCIENCES. 63 daus un tube de verre disposé comme nous l'avons décrit pré- cédemment ; nous avons obtenu des résultats qui ne laissent aucun doute que la graisse ren‘erme de larsenie blanc, puisque nous avons réduit ce corps à l'état métallique. Ce résultat étant obtenu , il nous fut fait, par le magis- trat qui nous confia ce travail, une question qui annonce dans son auteur une grande sagacité. Le problème à résoudre était celui-ci : Etablir si la graisse a été empoisonnée par le contact du boudin pendant la cuisson, ou bien si la graisse avait recu ce poison primilivement ? Nous regardämes d'abord la question comme insoluble ; mais, apres quelques réflexions, nous fümes conduits aux expériences suivantes , à l'aide desquelles nous ne craignons pas d'aflirmer qu'elle a été résolue complétement. Nous avons pris soixante-quatre grammes de pâte à saucisse , et nous y avons incorporé, avec beaucoup de soin , huit grammes d'ox.de blanc d'arsenic. Le mélange étant fait, nous l'introduisimes dans un intestin, ainsi que le pratiquent les charcutiers. Je liai ensuite l'intestin à cha- cune de ses extrémités , puis je pratiquai à la saucisse plu- sieurs piqures , pour donner issue à l'air et faciliter l'exsu- dation de la graisse. Dans cet état, on fit cuire la saucisse avec trente-deux grammes de graisse pure dans une assiette de terre, sur un feu doux. Aprés la cuisson, on sépara la graisse et on la partagea en deux parties, L'une fut traitée par l'eau bouillante , et il en résulta une liqueur qui ren- fermait de l'oxide blanc d'arsenie , facilement appréciable par les réactifs ; mais les précipités que l'on a obtenus étaient loin d'être aussi abondants que ceux fournis par le décoctum obtenu en faisant bouillir la graisse du boudin , quoique nous eussions ajouté à la saucisse une grande quantité d'oxide blanc d'arsenie. De là il résultait évidemment que ce poison était peu soluble dans la graisse. 64 ACADÉMIE DE ROUEN. D'après cette propriété , si l'empoisonnement de la graisse n'était point le résultat du contact du boudin , l'oxide blanc d’arsenic devait , non-seulement s'y trouver en dissolution , mais encore à l'état d'isolement. Alors nous avons pris hui grammes de graisse qui entourait le boudin, et nous l'avons maintenue en fusion pendant quelque temps à l'aide de la chaleur du bain-marie. Il se déposa une poudre blanche, qu'on isola par décantation, et qu'on traita ensuite par l'éther pour la priver de la graisse qu'elle aurait pu retenir. Cette poudre était du poids de trois décigrammes ; elle exhalait l'odeur d'ail lorsqu'on la mettait sur les charbons ardents ; elle se dissolvait dans l'eau distillée ; et communiquait à ce liquide la pro- priété de précipiter en blanc l'eau de chaux, en vert- pré le sulfate de cuivre ammoniacal , et donnait, par l'hy- drogène sulfuré , un précipité jaune insoluble dans l'acide hydrochlorique , mais se dissolvant très bien dans l'ammo- niaque. Tous ces caractères appartiennent seulement à l’oxide blanc d’'arsenic. Maintenant, il devenait important , pour mettre notre expérience à l'abri de toute objection , de soumettre la graisse fournie par notre saucisse aux mêmes moyens d'in- vestigation ; mais elle n'a point fourni d’oxide blanc d'ar- senic à l'état d'isolement ; il s'y trouvait seulement en dis- solution. De là nous devons conclure, et nous l'affirmons avec confiance, que la graisse avait reçu du poison pri- mitivement, et que ses propriétés vénéneuses ne lui ont point été communiquées par le boudin. Matière du vomissement. La matière du vomissement avait été rendue par la femme Pilet, qui, d'après l'accusation, avait mangé du boudin blanc. Cette matière était liquide , d'une couleur gris sale ; CLASSE DES SCIENCES. 05 son odeur était acide. On en filtra une certaine quantité pour l'examiner par les réactifs ; mais la couleur qu'elle avait nous obligea à y verser du chlore pour la décolorer. Il se pro- duisit des flocons qui furent séparés par une seconde filtra- uon. Ce liquide précipitait en jaune-serin par l'hydrogene sulfuré additionné d'acide hydrochlorique ; le précipité ne se dissolvait point dans cet acide, mais il était très soluble dans l'ammoniaque. Le sulfate de cuivre ammoniacal y for- mait un précipité vert-pré; le précipité recueilli exhalait une odeur alliacée lorsqu'on le placait sur les charbons rouges. Une autre portion de cette liqueur, addiuonnée de potasse pure , fut évaporée à siccité. On méla le résidu de l'opération avec du charbon en poudre, et on l'introduisit dans un tube de verre disposé comme nous l'avons déjà in- diqué , et, en opérant à la manière accoutumée , on vit apparaître sur la paroi interne du tube une sublimation mé- tallique qui possédait tous Les caractères de l'arsenie. La matière du vomissement renfermait donc un poison tout-à-fait identique à celui qui existait dans le boudin et dans la graisse. Des faits ci-dessus établis , il résulte 10 que la mort de la femme Dumont n'a point été occasionnée par un poison de nature métallique ; 2° Que le boudin blanc renfermait de l'arsenie ; 3° Que la graisse qui l'entourait avait recu le poison pri- mitivement ; 4° Enfin, que la matière du vomissement contenait de l'arsenic. 220000700560 7576057700000c0606000008 FPEREREEEEEEEEEEEPEEC 00 VÉRIFICATION D'UN RAPPORT CHIMICO-JUDICIAIRE SUR UN EMPOISONNEMENT PAR LA MORT AUX MOUCHES; Par M. Morin, Pharmacien, Membre de plusieurs Sociétés savantes. Messieurs = Dans une ville peu éloignée de Rouen, une famille en- tière éprouva tous les symptômes de l'empoisonnement , après avoir mangé d'un aliment connu sous le nom de haricot, lequel était composé de viande de mouton et de pommes de terre. Le commissaire de police du lieu, qui avait eu connaissance de ces accidents , ayant appris que l'harmonie ne régnait pas toujours dans la famille , con- cut quelques soupcons sur l'aliment dont il s’agit. Bien- tôt il confia l'analyse de ce mets à deux pharmaciens de la ville, MM. M** et DX*, qui décidérent très promptement qu'il y avait eu empoisonnement. Ces messieurs, en hommes de conscience , conservéren' leurs produits et les remirent sous cachet au magistrat qui leur avait confié ce travail. C'est dans ces circonstances qu'on nous appela pour répon- dre aux questions suivantes : 10 Déterminer si, dans les produits résultant des expé- CLASSE DES SCIENCES. 67 riences de messieurs les pharmaciens *** , il existe quelque préparation arsenicale ; 20 Si la portion de haricot qui nous à été remise ren- ferme de la mort aux mouches ; 30 Si ce mets a recu du poivre pour assaisonnement. Les produits obtenus des expériences de M. M#* con- sistaient en quatre liquides. Ceux fournis par M. D** étaient au nombre de trois. Il paraît que nos confrères avaient opéré isolément. Examen des produits de M. MX**. 1‘ Liquide. Il était trouble , d'une couleur jaune-serin. Il était dési- gné ainsi : Décoction essayée par le sulfure de potasse. Nous partageâmes cette liqueur en deux parties. L'une fut conservée , en cas de contre-épreuve, et remise au ma- gistrat qui nous avait appelé ; l'autre fut filtrée pour recueil- lir le précipité qui en troublait la transparence , puis on le lava avec de l’eau distillée. Par ce lavage, le précipité devint presque blanc , et avait tout-à-fait l'aspect du soufre préci- pité des hydrosulfates par le concours des acides, et qu'on appelait autrefois magistere de soufre. Ce précipité ne se dissolvait pas à froid dans l'ammoniaque ; tandis que le sul- fure d'arsenic y est soluble. Mis sur les charbons ardents, il brûla avec une flamme bleuitre , ne répandant que l'o- deur du soufre en combustion , sans aucun indice d’odeur d'ail. Chauffé dans un tube de verre avec de la potasse, il ne donna point d'arsenic métallique, mais seulement du sulfure de potassium. Ces résultats prouvent que l'arsenie ne se trouve point dans le précipité obtenu par M. M** à l'aide du sulfure de potasse. 68 ACADÉMIE DE ROUEN. Ce pharmacien n'a pu obtenir le précipité que nous exa- minons qu'à l'aide d'un acide, ee qu'il aurait dû déclarer dans son procès-verbal ; car tout le monde sait que l'oxide blanc d'arsenic n'est point précipité par le solutum de sulfure de potasse, et cela en raison du peu d'aflinité de l'arsenic blanc pour la potasse. 2* Liquide. Le deuxième liquide était désigné sous le nom de Decoc- tion essayée par l'eau de chaux. Ce liquide était trouble et bleuitre. L'emploi de l'eau de chaux, pour reconnaitre l'oxide blanc d'arsenie et la mort aux mouches qui a séjourné dans l'eau aérée, en état de mélange avec certaines substances alimen- taires , offre un caractère de peu de valeur, surtout dans le cas dont il s'agit. Il est plus que probable que le préci- pité obtenu par M. M#* n'est point composé seulement d’arsenie blanc et de chaux , si toutefois il contient la pre- mière de ces substances, ce qu'il était impossible de vérifier, à cause de la petite quantité de précipité ; mais il est évident que l'action de la chaux n'a pas dù se borner à précipiter l'oxide d'arsenic : cet alcali s'est encore combiné , pour former un sel insoluble blanc, avec l'acide citrique qui existe dans les pommes de terre qui composaient le haricot. Le précipité renfermait, de plus, du phosphate de chaux , formé par l'union de la chaux avec l'acide phosphorique , qui existe aussi dans les pommes de terre et la viande de mouton. Nous nous en sommes assurés en dissolvant le pré- cipité dans l'acide nitrique pur, et précipitant par l'ammo- niaque, qui nous a fourni des flocons gélatineux qui ont été reconnus pour étre du phosphate de chaux. L'eau de chaux est donc un réactif défectueux pour re- connaître l'oxide blanc d'arsenic mélé à un décoctum de CLASSE DES SCIENCES. 69 pommes de terre , puisque cet alcali peut former , avec les acides qui existent dans cette production végétale, des sels insolubles. Cependant, M. M grande quantité de l'aliment , aurait pu obtenir un précipité $ ayant la faculté d'agir sur une plus plus volumineux , et le caleiner dans un appareil convenable pour mettre en évidence larsenic métallique. Telle était la marche à suivre. 3° Liquide. Ce troisième liquide restait des opérations de M. M*#; il a été obtenu en faisant bouillir une certaine quantité de haricot dans l'eau distillée. Nous avons employé une par- tie de ce décoctum pour y constater la présence de l'arsenic. En conséquence , nous avons versé dans la liqueur du sul- fate ammoniaco-cuivreux , qui lui a communiqué une teinte verte-bleuâtre qui n'est point du tout celle de l'arsenite de cuivre. Ce mélange, exposé à l'air, n'a laissé apparaître aucun précipité. La liqueur , soumise à l'action combinée des acides hydresulfurique et hydrochlorique, n'a point donné instantanément de précipité. On n'a remarqué ; après douze heures de réaction, qu'un léger louche d'une cou- leur jaune-citron , qui a disparu entièrement par l'addition de l'ammoniaque. Ce caractère appartient au sulfure d’'ar- senic ; mais doit-on, sur un caractere isolé, affirmer que la liqueur renfermait de l'oxide blanc d'arsenic ? Non , sans doute; n'ayant pu constater si ce précipité exhalait une odeur d'ail par son contact avec les charbons ardents. 4 Liquide. Elle avait pour inscription : Décoction essayée par le ni- trate d'argent. La couleur de cette liqueur était violacée ; ce réactif ne peut fournir des caracteres propres à établir ACADÉMIE DE ROUEN. l'existence de l'arsenic, lorsque ce poison est mêlé avee des substances alimentaires, parce que toujours l'aliment a été assaisonné avec du sel de cuisine , qui précipite le nitrate d'argent. D'ailleurs , les matières végétales et animales qui existaient dans la liqueur obtenue par M. M#*# ont, en outre , sur le nitrate d'argent, une action décomposante très prononcée. En effet, le précipité violacé obtenu par M. M#* était composé de chlorure d'argent et de matières organi- ques; il ne disparaissait qu'en partie par l'acide nitrique pur ; tandis que l'ammoniaque ; en dissolvant le précipité, donnait au mélange une couleur jaunâtre , ce qui indiquait la présence d'une substance étrangère au chlorure. Il résulte donc des opérations de M. M** qu'il na obtenu aucun résultat qui pût le conduire à une conclusion précise. Nous pensons donc que ce pharmacien a affirmé trop légèrement que l'arsenic existait dans le haricot. Enfin , nous avons procédé à l'ouverture d'un petit paquet portant le cachet de ce chimiste. Il contenait quelques grains d'un brillant métallique. Cette substance avait été trouvée par M. M** au fond du vase dans lequel il avait fait bouil- lir le haricot, Séparés mécaniquement d'une certaine quan- tité de pommes de terre , ils ont été soumis aux expériences suivantes. Déposés sur un fer rouge, ils exhalaient une odeur d'ail très prononcée , et répandaient une fumée blan- che. Traitée à l’aide de la chaleur par l'acide nitrique con- centré, on a obtenu un résidu qui précipitait le nitrate d'argent en rouge-brique , et les sels de fer deutoxidés en blanc-bleuitre. Ces propriétés, jointes à celle d exhaler une odeur d'ail par son contact avec un fer rouge , n'appartien- nent qu'à l'arsenic métallique. Il est à regretter que M. M** n'ait point analysé ces grains brillants, qui seuls l'autorisaient à affirmer la présence de l'arsenic métallique , ou mort aux mouches, dans le haricot. CLASSE DES SCIENCES. 71 Produits fournis par M. DF*. 10 Quant aux opérations de M. D**, aussi très-incom- plètes, elles recevront les mêmes objections. L'emploi de l'eau de chaux pour constater la présence de l'arsenic mêlé à‘de la chair musculaire et à des pommes de terre ; est très défectueux , puisque ce réactif, qui précipite en blanc l'oxide d'arsenic à l'état d'isolement | occasionne également un précipité blanc, sans aucun changement de nuances, dans un simple décoctum de pommes de terre , à cause de l'acide citrique et de l'acide phosphorique qui existent dans ce tubereule, et qui ont la propriété de former avec la chaux des sels insolubles. 20 La couleur verte ; développée dans le décoctum de haricot à l'aide du sulfate de cuivre ammoniacal , sufit-elle pour constater la présence de l'arsenic? Non, sans doute, car toutes les fois qu'on verse du sulfate de cuivre ammonia- cal dans une liqueur acide quelconque , il se développe une couleur verte, parce que l'ammoniaque, tenant en dissolu- tion l'oxide de cuivre, se trouvant saturée , il arrive une époque où elle laisse précipiter l’oxide. Ce caractere , considéré isolément, ne suflit donc point pour accuser la présence de l'arsenic. 3° 11 nous restait à examiner , des opérations de M. D*#, le produit de l'évaporation du décoctum de haricot. Cette matière à été placée sur des charbons rouges, comme l'a re- laté ce pharmacien. Flle s'est tuméfice , puis elle a exhalé une odeur piquante particulière , n'ayant rien d'alliacé , contrairement à ce que M. D#* à éprouvé. Comment , alors, se rendre compte d'un résultat si opposé, sans dire que l'éducation de notre nez, si l'on veut bien nous passer cette expression, n'a pas été aussi bien faite que celle du sien ? La matière animale soluble provenant de la viande, se 2 ACADÉMIE DE ROUEN. 4 trouvant dans ce résidu avec une certaine quantité de fécule amilacée fournie par les pommes de terre ; en se décom- posant par suite de son contact immédiat avec les charbons ardents , ne devait-elle pas masquer l'odeur de l'arsenie qui existait dans le haricot, d'après M. D**? Cette expé- rience ne nous ayant fourni aucun indice de matière vénéneuse , nous avons eu recours à l'emploi des réactifs; alors nous avons fait dissoudre une petite quantité d'extrait de haricot dans de l’eau distillée bouillante , et nous y avons versé du chlore , qui a décoloré le liquide et en a précipité des flocons qu'on a séparés par la filtration. Le liquide filtré aété concentré en l'évaporant et mis en contact avec l'acide hydrosulfurique ; qui ne lui a communiqué aucun chan- gement de couleur. L'acide hydrochlorique, ajouté au mé- lange, na point fait paraître de précipité ; le sulfate de cuivre ammoniacal ne produisit dans la liqueur qu'une cou- leur bleuätre , sans précipité. Il suit de tout ce qui précède que M. D** n'a obtenu aucun résultat qui pût le porter à aflirmer que l'aliment sou- mis à son examen contenait une préparation arsenicale. Comment expliquer, alors, pourquoi MM. les pharmaciens M** et D** n'ont point obtenu de liquide qui renfermät de l'arsenic, puisque l'un d'eux, M. M** , a rencontré au fond du vase dans lequel il a fait bouillir le haricot, des grains brillants qu'il n'a point analysés et que nous avons reconnus pour de l'arsenic métallique? Cependant , il est ad- mis par tous les chimistes , et l'expérience le confirme , que l'arsenic métallique mis à bouillir dans l'eau avec le contact de l'air, en absorbe l'oxigène et se convertit en partie en acide arsenieux , qui se dissout en quantité appréciable par les réactifs. Probablement que messieurs les experts n'ont point soutenu l'ébullition assez de temps pour obtenir le résultat que nous annoncons ; Ce que nous prouverons dans le cours de nos travaux sur le haricot qui nous a été remis. CLASSE DES SCIENCES. s] ee) Expériences analytiques sur le haricot. Soixante-quatre grammes de haricot ont été mis à bouillir avec de l'eau distillée pendant quatre heures , ayant eu bien soin de remuer la masse, pour favoriser les points de contact : puis, on débarrassa le liquide de la plus grande partie de pommes de terre, et on y insufila de l'air, dans le but d'aci- difier l'arsenie métallique que nous devions y rencontrer. En effet, le décoctum agité et filtré , mis en contact avec les réactifs convenables, nous a fourni des caractères non équivoques de la présence de l'acide arsenieux formé par la combinaison de loxigène avec l’arsenic métallique. L'acide hydrosulfurique y produisit une couleur jaune, et, par l'addition d'une goutte d'acide hydrochlorique, il apparut un précipité jaune qui se dissolvait dans l'ammoniaque. Ce précipité, mis sur les charbons ardents, exhalait une odeur d'ail bien caractérisée. Le sulfate de cuivre ammoniacal donna naissance à un pré- cipité vert-pré, qui, rassemblé, répandait aussi une odeur alliacée par son-contact avec les charbons rouges. Ces pro- priétés mettent hors de doute l'existence de l'acide arse- nieux dans le décoctum de haricot. Il est donc évident, par ce qui précède,que messieurs les experts n'ont point soutenu l'ébullition pendant un temps suflisant pour acidifier l'arse- nice métallique qui formait les grains brillants isolés par M. M**, et sur la nature desquels il n'a donné aucun renseignement. Pour répondre à la question qui nous est posée, d'établir si la substance vénéneuse n'est point de la mort aux mou- ches , nous avons examiné le résidu de la décoction, et nous en avons extrait mécaniquement une poudre grossière grisätre, qui, mise sur un fer rouge, exhalait l'odeur allia- cée. Traitée par l'acide nitrique concentré et bouillant, elle 10 -A ACADÉMIE DE ROUEN. a été convertie en acide arsenique, reconnaissable à sa propriété de précipiter Île nitrate d'argent en rouge brique, et le sel de cuivre en blanc bleuâtre. Quelques-uns de ces grains, débarrassés de la couche terne qui les re- couvrait, abandonnés pendant quelque temps dans du sulfate ammoniaco-cuivreux , ont donné naissance à un précipité vert-pré d'arsenic de cuivre. Il ne peut rester aucun doute que la substance délétére qui existait dans l'aliment soumis à notre examen ne fût de la mort aux mouches. D'après l'accusation, la mort aux mouches ayant été mise dans le haricot , en remplacement de poivre, il nous fut demandé d'établir si l'aliment avait recu cette der- nière substance comme assaisonnement. En conséquence , nous avons traité par l'alcool à 40° les 64 grammes de ha- ricot épuisés par l'eau ; il en est résulté un liquide à peine coloré, que nous avons évaporé jusqu'à siccité avec beau- coup de précaution. Il à fourni un résidu jaunätre, au milieu duquel on remarquait des stries verdätres. Afin de déterminer si cette matière jouissait des propriétés de la matière grasse verte du poivre, nous avons mis le résidu en contact avec l'éther, qui s'est emparé de la substance verte. Celle-ci, obtenue par évaporation , était graisseuse au toucher, d'une saveur âcre mordicante ; elle se dissolvait dans les huiles grasses et volatiles. Ces propriétés appar- tiennent à la matière grasse du poivre ; mais il ne nous est pas permis de conclure à l'existence du poivre , puisque nous n'avons pu en extraire de piperin ; cependant, il est probable que la matière grasse renfermait ce principe im- médiat , d'après sa propriété de se colorer en rouge cra- moisi par son contact avec l'acide sulfurique. Nous nous exprimons d'une manière douteuse , parce que diverses substances voisines des résines partagent cette propriété. CLASSE DES SCIENCES. SI Q+t Résumé. 1° De tout ce qui précède il faut conclure que MM. M## et D** à aflirmer l'existence d'une préparation arsenicale dans n'ont obtenu aucun résultat qui püt les conduire le haricot ; 2° Que la portion de haricot qui nous a été remise par M. le juge d'instruction renfermait de la mortaux mouches ; 3° Qu'il est probable que l'aliment avait été assaisonné avec du poivre, à en juger par la nature de la matière grasse verte que nous en avons extraite. DISCOURS DE RÉCEPTION PRONONCÉ PAR M. COURANT, A LA SÉANCE pu 40 rÉvRtER 14839. Messrurs , En me trouvant pour la premiere fois au milieu de vous , j'éprouve malgré moi un sentiment de trouble, que vous excuserez d'autant mieux qu'il vous sera plus facile d'en apprécier le motif. Si, d'un côté , votre accueil bienveillant doit me rassurer , d’un autre , je vous l'avouerai , je ne suis pas sans éprouver quelque embarras à mesure que je vois approcher le moment où je vais être associé à vos travaux. J'ai besoin, je le sens, de toute votre indulgence ; je la réclame, et j'ose y compter comme sur une chose qui m'est acquise. En échange , vous trouverez toujours en moi un désir bien prononcé de concourir avec zèle à tout ce qui peut contribuer au développement de notre in- dustrie. En m'admettant, des à présent, au nombre de vos mem- bres , vous m'avez plutôt tenu compte de mes efforts que de mes succès ; je puis dire que la récompense a en quelque sorte devancé les services. Je tâcherai , Messieurs, de metire à profit vos lumières et votre expérience , et vous prie de croire que je ne négligerai rien pour mériter la distinction honorable dont je viens d'être l’objet. CLASSE DES SCIENCES. 77 Dans un temps qui est encore près de nous, et que tant de glorieux souvenirs nous rendront toujours cher, les esprits étaient dirigés vers un but de conquéte : tous sui- vaicnt l'impulsion qui leur était donnée , et sacrifiaient aveuglément leurs intérêts à l'ambition d'un illustre guerrier qui ne révail, pour nous, que l'agrandissement de l'empire et l'asservissement des autres peuples; qui pensait que plus il étendrait sa domination, plus il assu- rerait le bonheur d'une nation qui l'avait choisi pour chef. Nous n'avons joui qu'un jour de toutes ces brillantes con- quêtes obtenues par tant de sacrifices ; elles nous ont été enlevées avec une effrayante rapidité ; le géant de notre gloire militaire , accablé par le nombre , est tombé avec un horrible fracas, entrainant avec lui tout ce qui l'environ- nait, et sa chute s'est fait sentir jusqu'aux derniers rangs de la société. La nation francaise, forte maintenant des grandes lecons du passé , a dirigé toutes ses impulsions vers un autre but : elle a compris que les conquêtes sont loin de faire seules le bonheur des peuples ; que ceux-ci doivent se borner à maintenir l'intégrité de leur territoire ; et qu'enfin la véritable gloire consiste ; pour eux , dans les institu- tions sages et dans les entreprises qui tendent à développer l'industrie et à lui donner toute l'extension dont elle est susceptible. Au nombre de ces dernières, vient se ranger naturellement , et en première ligne, comme contribuant d'une maniere spéciale à la prospérité des États, tout ce qui tient au système des communications ; ce sont elles, en effet, qui servent à la fois les intérèts de l'agricul- ture, du commerce et de l'industrie ; qui établissent entre les habitants d'un même royaume et de diflérents états, ces relations qui augmentent, par des échanges mutuels , les richesses d'un pays, et qui étendent enfin les progres des lumières et de la civilisation jusqu'aux régions les plus -8 ACADÉMIE DE ROUEN. 4 lointaines. Tous les gouvernements ont tellement senti l'importance de cette vérité, qu'il n'est presque aucun pays où l'on ne s occupe aujourd'hui , avec persévérance , d'amé- liorer le système des communications. En France , on a beaucoup fait dans ce but à différentes époques ; mais il est permis d'ajouter que les ingénieurs n'ont pas toujours été encouragés, comme ils auraient dù l'être dans leurs eflorts continuels pour rendre moins coûteux l'éta- blissement et l'entretien des communications ; et que ce n'est véritablement que de nos jours que le gouvernement a consenti à s'associer à leurs travaux , en s occupant sérieu-" sement des moyens de les perfectionner. Il a senti qu'au milieu d'une population si nombreuse, si active, et dont l'industrie tend sans cesse à prendre de l'accroissement , l'administration ne devait pas rester seule stationnaire dans ses moyens d'exécution, et qu'elle devait mettre un terme aux plaintes trop fondées sur la situation des routes, en do- tant leur entretien avec moins de parcimonie. Aujourd'hui une ére nouvelle s'ouvre devant nous ; une révolution entière tend à s opérer dans le système des com- munications ; partout on parle de l'immense avantage que doivent offrir les chemins en fer. Espérons que le gou- vernement français, à l'exemple de nos voisins d’outre- mer, sempressera d'encourager toutes les entreprises qui pourraient se former pour ce nouveau mode de construc- tion de route , et que bientôt nous serons appelés à jouir des bienfaits qu'il nous fait espérer. De tout temps il a existé des chemins d'un lieu à un autre ; mais on s'occupait peu de leur tracé, et le sol sur lequel ils se trouvaient faisait seul les frais de leur établis- sement. Ce ne fut qu'à une certaine époque qu'on eut l'idée de les raffermir et d'en régulariser la surface , au moyen d'une couche de pierres placées suivant un certain ordre. On pense assez généralement que ce furent les Cartha- CLASSE DES SCIENCES. 79 ginois qui les preiniers pavèrent leurs chemins , et que les Romains n'usèrent de ce moyen qu'après eux. En eflet, la voie Appienne, la plus ancienne de toutes , ne fut cons- truite que vers l'année 442 de la fondation de Rome. Les restes des chemins romains nous ont permis de reconnaitre les moyens employés pour leur construction. Nicolas Ber- gier les a décrits dans un ouvrage qu'il a composé au com- mencement du XVI: siècle. Au reste , quels que soient ces divers procédés, que nous nous dispenserons de décrire ici , il est constant que les Romains étaient parvenus à rendre certaines voies très roulantes 3 puisque , au rapport de Pline, Tibère Néron, envoyé en Allemagne pour visi- ter son frère malade, parcourut 158 lieues de poste en vingt-quatre heures. On voit qu'à cette époque le système de con:truction mis en usage pour les ‘routes offrait déjà une grande perfection ; car , aujourd'hui même, sur nos routes les mieux entretenues, on pourrait difcilement se flatter d'aller plus vite. L'esprit de conquête porta seul les Romains à entrepren- dre la plupart de leurs grands chemins , auxquels ils dou- nèrent le nom de voies militaires. Le commerce en profita aussi; mais, comme ils étaient encore trop peu nombreux pour lui être d'une grande utilité, et que les chemins en terre, qui existaient entre les principales villes de l'em- pire, étaient rarement praticables pour de lourds fardeaux , surtout à certaines époques de l'année , il devint beaucoup plus économique de se servir des communications par eau , lorsque cela était possible. La navigation des fleuves et rivières de l'empire romain semble âvoir été, dans le siècle d'Auguste, un objet d'in- térèt général. Strabon , géographe et contemporain de cet empereur , indique , comme un très grand avantage dans les Gaules, les nombreuses communications par ses fleuves et rivières ; 80 ACADÉMIE DE ROUEN. et, quoiqu'il n'ait jamais voyagé dans ce voyage , il fait néanmoins connaitre , avec exactitude , les routes que suivaient les marchandi es pour passer de la Méditer- ranée dans la Manche , par le Rhône et la Seine , et de la Méditerranée dans l'Océan , par l'Aude et la Garonne. Et ces routes sont véritablement les plus courtes , et coinei- dent avec le tracé des canaux qu'on à exécutés depuis, pour opérer la jonction de ces mers. La navigation fluviale , quoique présentant de grands avantages sur les communications par terre , offre néan- moins de bien graves inconvénients, puisqu à certaines époques elle peut se trouver tout-à-fait interrompue, à cause des glaces ou des hautes eaux ; qu'elle offre tou- jours des dangers, et que souvent même le régime parti- culier des rivières la rend entièrement impossible. On s'occupa long-temps des moyens de remédier aux inconvénients graves que nous venons de signaler, par l'établissement d'un système de navigation artificielle, et ce ne fut enfin qu'au XV: sièele qu'on inventa les écluses à sas. Léonard de Vinci en fit construire , vers la fin de ce siècle , sur le canal de Milan; etles premieres furent établies , en France, sous le règne de Henri [V , au canal de Briare. Cent cinquante ans plus tard , on multiplia ces sortes d'ou- vrages sur le canal du Languedoc , dù aux conceptions de Riquet de Bonrepos , et l'un des plus beaux monuments du siècle de Louis XIV ; mais il est à regretter que les di- mewusions de ce canal ne soient plus appropriées aux besoins de notre époque. De grandes améliorations ont été successivement intro- duites dans la construction des canaux ,qui sont aujourd'hui, pour la plupart , à petite section ; ce système économique de navigation , qui remplace avec un grand avantage les communications par terre, et avec non moins d'avantages encore, celles des fleuves et rivières , a ouvert au commerce CLASSE DES SCIENCES. 51 intérieur de l'Angleterre la principale source de sa prospérité, Pour en donner une idée précise, il nous suflira d'ajouter que , dans ce pays, pendant une période de moins de cinquante ans, depuis 1760 jusqu'en 1803 , on à ouvert près de mille lieues de longueur de canaux , tandis qu'en France , pendant les deux derniers siècles, on n’en a exécuté que deux cent vingt-cinq lieues environ, Il fau- drait bien se garder de tirer de ce rapprochement des conséquences défavorables à notre pays : ce grand déve- loppement , que prit la navigation intérieure en Angleterre, tient, en partie, aux nombreuses exploitations de houille qui couvrent son sol, et à l'impossibilité de transporter de lourds fardeaux sur ses routes, qui offrent généralement peu de résistance. La France , pour les découvertes utiles , n’a jamais marché à la remorque de l'Angleterre ; c'est nous qui , les premiers, avons appliqué, d'une manière si utile pour les arts, la mécanique rationnelle ou la science qui explique et soumet au calcul les divers phénomènes de l'équilibre et du mouvement ; et, depuis un demi-siècle , nos savants l'ont poussée à un tel degré de perfection , qu'il est permis de la regarder comme offrant Le premier exem- ple d'une science achevée et complète ; c'est elle qui, na- guère encore, prêtant son appui à la physique et à la chimie, a conduit à des résultats si importants pour notre industrie. Revenant aux communications, on peut dire avec rai- son que les divers perfectionnements qui ont été intro- duits dans le système de leur établissement , suivirent les degrés de la civilisation, et qu'ils pourraient, pour ainsi dire , en retracer l'histoire. Ainsi, les routes pavées furent substituées , à une certaine époque , aux chemins en terre ; plus tard, la navigation artificielle remplaça la naviga- tion naturelle des fleuves ; sujets d'ailleurs à tant de graves inconvénients. C’est elle qui, au moyen des canaux 11 52 ACADÉMIE DE ROUEN. à point de partage , présenta le spectacle étonnant de ba- teaux franchissant des montagnes ; permit ainsi de réunir plusieurs bassins ; et porta les bienfaits de l'industrie ma- nufacturière et agricole dans des pays qui présentaient au- paravant l'aspect de la misère. Enfin, de nos jours, dans ces derniers temps, on à pensé que les canaux pouvaient être remplacés avec avan- tage par les chemins en fer ; leur adoption , comme moyen de communication intérieure, est un événement non moins remarquable que l'établissement des canaux, et il doit nécessairement en résulter, pour le transport des marchan- dises et des voyageurs , un changement et des avantages plus importants encore , etque notre siècle est le premier appelé à recueillir. Les premiers chemins avec rails en fonte de fer ont été construits en Angleterre, pour l'exploitation des mines, vers l'année 1738. Cette propriété d'adoption de ces che- mins tient évidemment , ainsi que nous l'avons déjà in- diqué, à l'abondance des mines de houille de ce pays et au bas prix auquel les Anglais ont fait descendre la fonte et le fer forgé , par le perfectionnement de leurs pro- cédés métallurgiques et de leur industrie manufactu- rière. Pendant les vingt-cinq années qui viennent de s’écouler, les chemins en fer se sont rapidement multipliés en An- gleterre, surtout dans le voisinage de Newcastle et de Sunderland ; on a dépensé des sommes énormes, on a mis beaucoup d'habileté dans l'établissement de ces chemins et dans celui des différents mécanismes qui y sont em- ployés; mais ces routes à ornières sont , jusqu'à présent, peu étendues : elles appartiennent à des entreprises parti- culières, et elles ont exclusivement pour objet de trans- porter les charbons aux différents quais d'embarquèment. Le premier chemin en fer livré à la circulation publique CLASSE DES SCIENCES. 83 est celui de Stockton à Darlington , sur une longueur de vingt-cinq milles. Pour diminuer le nombre des joints des rails, on à, depuis quelque temps, substitué des bandes en fer forgé aux bandes en fonte ; le premier essai de ce genre a été fait en 1815, à des mines de houille, dans le duché de Cumberland ; mais comme, d'un côté, le fer forgé est beau- coup plus cher que la fonte , et que , de l'autre, son emploi ue présente pas un avantage bien marqué, les ingénieurs sont encore en dissidence sur ce point. Le frottement des roues sur les chemins pavés disparaît presque entiérement sur les chemins en fer , à cause du poli et de la régularité de leurs rails ; cette circonstance , qui est un si grand avantage pour la force motrice, lors- que ces derniers sont de niveau ou ont une pente insen- sible , tourne, au contraire , au détriment de cette force à mesure que l'inclinaison de ces chemins augmente ; en effet, le frottement ne s'opposant plus au glissement du fardeau sur le plan incliné , il faut que la force motrice surmonte en totalité la pesanteur relative de ce fardeau ; en couséquence , les chemins en fer ne peuvent présenter des avantages réels que lorsqu'ils sont de niveau , et les inégalités de terrain doivent être rachetées par des plans inclinés , placés de distance en distance ; pour être franchis à l'aide d'une force qui leur soit spécialement appliquée , au moyen, par exemple, d'une machine à vapeur fixe. Il n'en a pas été des canaux comme des chemins en fer ; ceux-ci ont profité des expériences nombreuses qui ont eu lieu pour reconnaître et apprécier les résistances que les voitures éprouvent à rouler sur ces chemins ; tandis que les canaux n'ont été améliorés que par de légers changements dans la méthode employée pour faire passer les bateaux d'un ‘bief dans un autre, et qu'ils n'ont, pour ainsi dire, pas participé aux perfectionnements dont les progrès de 84 ACADÉMIE DE ROUEN. la mécanique ont enrichi l'art de construire les chemins en fer. Dans ces derniers temps, le chemin de Liverpool à Manchester a fixé l'attention des savants d'une manière toute particulière ; la dépense faite pour ce chemin s’éle- vait, au 31 mai 1830, à 739,165 L. st., et elle dépassera 800,000 L. st., compris les lieux de stations et de dépôts , les machines , voitures à vapeur, chariots, etc. Ce chemin , construit par M. Stepheason à Newcastle , a trente-un milles de longueur. Sur un semblable chemin , construit de niveau avec rails en fer forgé , la résistance n'est que le septième de ce qu'elle serait sur une route ordinaire. En conséquence, sans changer le moteur, la charge peut être sept fois plus grande , et, par le même motif, quand la gra- vité sera mise en action sur un plan ascendant , l'effort qu'il faudra y opposer devant être proportionnel à la charge, sera sept fois plus considérable que sur une route ordinaire. La grande supériorité des chemins en fer n'existe, en effet, que pour un plan de niveau ; car une pente insen- sible pour les chaussées pavées, telle qu'un cinquantième, réduira , sur un chemin en fer , la force motrice au cin- quième environ de ce qu'elle serait en plaine. Le chemin de Liverpool n'offre que deux pentes d'un quatre-vingt-seizième, qu'on franchit au moyen d’une force additionnelle ; les autres pentes , qui ne sont que d'un huit cent quatre-vingtième , sont insensibles et n’exigent l'emploi d'aucune force supplémentaire. Les machines employées sont loco-motives , et pareourent de dix à quinze milles à l'heure. Une nouvelle machine , dont le poids n'excédera pas cinq tonnes ( 5075 kilog. ), qui en traînera quarante (40600 kilog. ), doit être incessamment établie sur ce chemin ; elle fera le trajet de Liverpool à Man- chester en deux heures, au moyen de l'emploi d'une force additionnelle pour les plans inclinés, et cette machine ne .%@ CLASSE DES SCIENCES. 85 consommera qu'une demi-livre de cook par tonne et par mille. Les diligences pour les voyageurs parcourent au- jourd'hui vingt-cinq milles par heure, et quelquefois davantage. Les rails du chemin de Liverpool pésent trente-cinq livres anglaises par yard courant , ou dix-sept kilog. trente-cinq gr. par mêtre courant ; ils sont posés sur des dés en pierre ; distants entr'eux de trois pieds ; chaque dé cube environ quatre pieds ; on y fore deux trous ayant six pouces de profondeur sur un pouce de diamètre , dans lesquels on enfonce deux chevilles en chéne , et les soutiens ou coussi- nets en fonte sur lesquels les rails s'ajustent immédiate- ment, sont fixés à ces dés au moyen de clous chassés dans les chevilles en chéne ; ce système offre beaucoup de solidité. Si lon a à craindre les tassements , il est essentiel de poser les rails sur des semelles ou solives en chêne. Nous croyons inutile de faire remarquer que sur un chemin de fer en plaine , le frottement constitue toute la résistance ; que ce frottement augmente en proportion de la vitesse , et que le moteur doit être proportionnel à cette derniere. Le chemin de Liverpool à Manchester doit procurer au commerce les plus heurenx résultats, principalement pour le transport des marchandises , évalné entre ces deux villes, moyennement par jour , de mille à douze cents tonnes. On a calculé que le transport pourrait se faire en trois heures environ , et qu'il ne coûterait que cinq schellings par tonne. Précédemment, Les marchandises mettaient trente-six heures par la voie navigable, et le prix moyen du fret était de quinze schellings par tonne (chaque schelling vaut 1 £. 16 ce. ). Peut-être conviendrait-il d'attendre les résultats d'une lon- gue série d'expériences pour ajouter foi entière à ceux que nous venons d'indiquer; néanmoins on peut, dès à présent, 86 ACADÉMIE DE ROUEN. considérer les chemins en fer comme devant apporter une très grande économie dans les prix ordinaires des transports. Les avantages obtenus au moyen des chemins en fer , chez nos voisins de la Grande-Bretagne , et la nécessité plus impérieuse encore de soutenir une concurrence devenue indispensable à l'existence de nos manufactures, ont depuis long-temps fixé d'une manière particulière l'attention des ingénieurs francais ; divers projets pour réunir le bassin de la Loire à celui du Rhône sont devenus les sujets de leurs plus sérieuses études ; et aujourd'hui le chemin en fer d'Andrezieux à Roanne est déjà terminé sur une longueur de cinquante-quatre kilomètres; la dépense totale, pour cette longueur , est d'environ 3,500,000 francs , ce qui fait revenir le mètre courant à 64 fr. Aujourd'hui l'impulsion est donnée, et déjà l'administra- tion supérieure s'est oceupée de l'établissement de chemins en fer sur divers points importants , et notamment de celui de Paris au Havre par Pontoise. Ce chemin, qui rempla- cerait avec avantage le canal maritime dont on s'est tant occupé dans ces dernières années, aurait deux cent vingt kilomètres de longueur, et coûterait, compris tous frais d'établissements quelconques, 30 millions, ce qui ferait revenir le méêtre courant de 130 à 140 francs. C'est ici le lieu de relever une erreur assez grave, ré- pandue dans le monde , relativement à la dépense des che- mins en fer, pour lesquels on croit que la principale consiste dans l'achat et l'emploi du fer; les rails en fer forgé ne doivent peser que dix kilogrammes environ par mètre courant; ainsi, pour un chemin à deux voies, cette partie de la dépense ne serait que de 20 fr. La grande dépense ; celle qui exige une étude spéciale , bien approfondie et appropriée aux localités , est celle re- lative aux déblais et remblais et à tous les ouvrages d'art CLASSE DES SCIENCES. 87 à construire pour satisfaire à la condition de} donner aux courbes un rayon convenable ( 500 mètres), et de ne pas dépasser une pente de o mètre 005 millimètres par mètre courant. En résumé, les chemins en fer présentent un avantage réel sur les moyens de transport ordinaire , même par eau ; puisque leur établissement n'est guère plus considérable que celui d'une route pavée, qu'il n'est environ que le tiers de ce que coûterait un canal ordinaire à petits secteurs, qui n'est pas, d'ailleurs, possible dans toutes les localités , et qu'enfin , sur un chemin en fer de niveau , un moteur peut trainer un fardeau sept fois plus considérable que sur une route payée. L'Angleterre ; la France, l'Allemagne et l'Amérique ont déjà leurs chemins en fer ; il s'ouvre donc devant nous une ére toute nouvelle pour favoriser le développement de l'industrie ; et avec l'impulsion qui est donnée aujourd'hui, il est impossible de calculer et de prévoir jusqu'où peuvent aller ses progrès. Nous terminerons ces considérations, bien imparfaites sans doute , en faisant remarquer que le tracé des routes n'est plus aujourd'hui abandonné au hasard; c'est un art sujet à des règles certaines , et qui exige une longue expérience jointe à des connaissances spéciales approfondies. Le talent avec lequel les routes ont été ouvertes, dans nos temps modernes, de manière à éviter les pentes trop rapides et à profiter de tous les avantages des localités, sans nuire à l'économie dans leur établissement , place bien certainement la France à la tête des nations civilisées , et on peut ajouter que le soin particulier et la perfection méme avec lesquels ont été exécutés nos grands travaux publics , qui seuls sufliraient à la gloire d'une nation , con- tribueront encore à lui assurer , pendant de longues années , le rang distingué où elle a su se placer. 88 ACADÉMIE DE ROUEN. RÉPONSE DE M. LEPASQUIER, PRÉSIDENT MoxsiEUR ;, Ayant que votre nom fût prononcé dans cette enceinte , il n'était point étranger aux membres de l'Académie royale des Sciences, Belles-Lettres et Arts de Rouen, et la plupart connaissaient les titres qui vous appellent aujourd'hui à siéger parmi eux. Elève d'une École célèbre en Europe, et qui a fourni des sujets à toutes les carrières, vous aviez eu déjà occasion d'exercer vos talents dans plusieurs localités , lorsque nous ayons pu apprécier par nous-mêmes tout ce qu'ils ont de recommandable. Nous savons surtout avec quel zèle et quel désintéressement vous vous êtes offert pour remplir les vues d'une Société amie , qui s occupe spécialement des intérêts de l'art agricole. Elle vous doit le travail inportant qui servira de base à une entreprise dont il est facile de calculer les favorables résultats ; votre pre- mière récompense est de voir votre nom attaché aux projets de cette entreprise. Que l'accueil qui vous est fait parmi nous devienne aussi un témoignage de l'estime et de la considé- ration publique que vous avez su vous concilier. En nous rappelant , Monsieur, tous les avantages d'un bon système de communications , si favorable à la prospérité de l'agriculture, du commerce et de l'industrie, vous nous avez fait passer rapidement en revue les progrès de l'art de l'ingénieur, sous ce rapport, à plusieurs époques succes- sives. Ainsi, Les Romains avaient leurs routes militaires, leurs CLASSE DES SCIENCES. 80 doubles routes, leurs routes souterraines ou voûtées , dont il existe encore des vestiges remarquables ; ils pratiquaient aussi la navigation des fleuves et rivières. Dans les temps modernes, la navigation artificielle procura de nouvelles relations de peuple à peuple, de province à province. On ouvrit des canaux à écluses et à points de partage. Etablis d'abord sur une échelle trop vaste on les a successivement ramenés à des dimensions plus appropriées aux besoins réels. Enfin , les chemins de fer paraissent aujourd hui devoir succéder aux canaux d'une manière avantageuse dans presque toutes les circonstances. Les détails curieux dans lesquels vous êtes entré relativemeut à ces voies nou- velles , les considérations scientifiques que vous avez expo- sées, ont fixé à un haut degré l'attention et l'intérêt de la Compagnie ; qu'il me soit permis de placer ici quelques réilexions à l’occasion du projet d'établissement d'un che- min en fer de Rouen au Hävre, que vous avez raprelé vers la fin de votre discours. Ce projet remonte à l'année 1825 : une compagnie s était alorsofferte à le réaliser; consultée à cet égard, la Chambre du commerce de Rouen pensa qu'il aurait pour résultat immé- diat lanéantissement de la navigation entre Rouen et le Havre ; elle fit considérer que cette navigation contribue d'une maniere eflicace à former les marins endurcis aux fatigues , qui montent plus tard les navires au long cours , sorte d'apprentissage d'autant plus précieux que la péche étant graduellement devenue moins productive , le nombre des matelots des bâtiments pêcheurs diminue de jour en jour. Une semblable considération était puissante , sans doute , puisqu'il entre essentiellement dans les intérèts gé- néraux du pays qu'il se forme annuellement des hommes de mer pour le service de la marine marchande et de la marine militaire. Ce projet paraît avoir été abandonné , et celui dont les 1° 90 ACADÉMIE DE ROUEN. feuilles publiques nous ont récemment entretenu en difière essentiellement. Suivant ce nouveau projet , le chemin de fer, dont une compagnie riche en capitaux a sollicité la concession , doit partir du bassin de la Villette, et se conti- nuer, en traversant Pontoise et Gisors , jusqu'à une demi- lieue environ de Croisy-la-Haye. Là , il se divisera en deux embranchements ; l'un se prolongera jusque sur le port de Rouen , en suivant les vallées de l'Aubette , l'autre jusqu'à Dieppe, à travers les vallées de l'Epte et de la Béthune, et au moyen d'une tranchée profonde dans le fond de Forges-les-Eaux. Toutes les objections qui avaient pu s'élever contre le projet concu en 1825 , et dont j'ai succinctement rappelé la principale , tombent devant le second projet. On peut méme dire que si l'on parvient plus tard , et rien n'est im- possible à l'homme , lorsqu'il a pour mobile un puissant intérêt, à rendre plus facile la navigation de la basse Seine, Rouen deviendrait une des premières places de commission du monde , et acquerrait en peu d'années un degré de splendeur et de prospérité jusqu'alors inconnu. On s'en convaincra aisément en réfléchissant que le rou- lage non accéléré , sur ce nouveau chemin , aura une vitesse quadruple de celle du roulage actuel sur la route existante et coûtera deux fois moins. Des voitures particulieres,établies dans l'intérêt des voya- geurs, les transporteront avec une vitesse de deux myria- mètres et demi (plus de cinq lieues) par heure , au prix de trente centimes pour chaque distance parcourue.Cette vitesse, selon les circonstances , pourrait être triplée moyennant une augmentation proportionnelle dans les frais de transport. Ainsi, un négociant de Rouen, après avoir ouvert sa correspondance du matin, irait à Paris régler ses aflaires , étudier les cours et les nouvelles de la bourse , et reviendrait CLASSE DES SCIENCES. 91 dans la soirée prendre connaissance des opérations faites pour son compte pendant le jour. Cet exposé, Messieurs , justifierait sans doute les préventions favorables que vous nous avez laissé entrevoir en faveur des chemins de fer, sila confiance que doivent inspirer des études toutes posilives et un caractere réfléchi permettait d'hésiter encore à partager votre opinion. LE CHOLÉRA-MORBUS ET SUR SES EFFETS; Par M. LE PREVOST, D.-M. Messeurs, / La maladie qui règne actuellement en France sous le uom de choléra-morbus , et particulièrement dans notre ville de Rouen, est-elle inflammatoire, nerveuse, catharrale ou bi- lieuse ? Dans les ouvertures de cadavresauxquelles j'ai assisté je n'ai remarqué aucun signe d'inflammation, mais seule- ment des congestions sanguines dans les différents organes ; chez les malades que j'ai vus, et particulierement ceux à qui j'ai donné mes soins, je n’ai vu que des signes de langueur dans l'action du cœur,aux extrémités du corps. Quand le cœur a perdu son action vitale, quandle sang, décomposé dansses principes constituants , n’a plus le stimulus nécessaire pour mettre en action sa force circulatoire , l'harmonie qui doit exister entre les différents organes pour l'entretien de la santé et de la vie se trouve interrompue , alors l'action nerveuse, la respiration et les sécrétions éprouvent des secousses plus où moins violentes , suivant la constitution des individus ; c'est ce qui arrive dans le choléra-morbus. CLASSE DES SCIENCES. 93 Ainsi, la maladie n’est ni inflammatoire , ni nerveuse, ni Catharrale, ni bilieuse; mais c'est une complication de toutes ces aflections , à cause du désordre perturbateur qui existe dans toute la machine. Quelle est la cause de cette grande perturbation ? Je vais donner mon opinion sur cette cause , qui n est peut-être qu'une pure hypothèse. Au milieu des nombreuses variétés qui existent dans les autopsies des individus morts cholériques , il existe un signe constant et invariable ;, c'est que le sang est toujours noir ;, plus on moins liquide et carbonisé, tant dans les artères que dans les veines ; qu'il y en a presque toujours autant dans le ventricule gauche du cœur que dans le ventricule droit ; au contraire, dans les autopsies des personnes mortes d'autres maladies, on trouve le ventricule gauche et les artéres vides de sang. Si nous cousidérons la maladie à son début, nous trouvons la circulation profondément affectée , l'action du cœur est languissante , les extrémités , et quelquefois tout le corps perdent leur chaleur naturelle, le sang s’'arréte au visage et aux extrémités par la dimmu- tion de l'action:circulatoire , et donne une teinte bleue ou violette, ou d'un rouge brunätre ; assez souvent on ne peut sentir le battement des artères radiales et temporales , la respiration est des plus laborieuses , ete. , etc. Les traits du malade annoncent qu'une atteinte profonde et formida- ble a été portée au principe de la vie; nous avons d'autres maladies dans lesquelles on trouve le sang noir et liquide après la mort comme dans le choléra-morbus : ce sont des asphyxies par le gaz acide carbonique ; par le gaz hydrogène carboné ou sulfuré. Dans le cours de ma carriere médicale j'ai eu occasion d'ouvrir les cadavres de trois individus morts ; l'un par la vapeur du charbon , l'autre dans un puits plein d'ordures et dont on n'avait pas tiré d'eau depuis huit ans, et le troisième dans une fosse d'aisance; dans tous, le sang fut trouvé noir 94 ACADÉMIE DE ROUEN. et liquide , tant dans les ventricules du cœur que dans les artères et les veines; ainsi, d'après ces différents rapprochements et cette similitude de signes pendant la vie et après la mort, je suis porté à croire que le choléra- morbus asiatique est une véritable asphyxie ; en eflet, nous voyons que c'est dans les pays bas, humides , où il y à des eaux croupissantes, dans les habitations peu aérées, malpropres , chez les individus affaiblis par différents ex- cès , surtout des liqueurs alcooliques, qu'il exerce parti- culièrement ses ravages ; c'est dans ces endroits que le gaz hydrogène carboné ou sulfuré et le gaz oxide car- bonique se trouvent en plus grande proportion dans l'air atmosphérique que dans tout autre endroit, et plusieurs chimistes distingués ont observé qu'il suffisait que Fair que nous respirons füt vicié par une très petite quantité de ces gaz délétères, pour occasionner de grands désordres dans l'économie animale ; mais il faut une cause qui pro- duise plus de gaz hydrogène carboné ou sulfuré, dans un pays, dans une ville, dans une localité , que dans tout autre temps ; celte cause nous reste encore inconnue ; peut-être pourra-t-on prouver un jour qu'il sufit des miasmes échappés d'un corps malade pour opérer cette infection dans l'air des environs; mais cette matière sera à discuter dans un autre temps; convaincu donc que le choléra était une asphyxie ; J'ai traité les malades comme S'ils étaient asphyxiés par la vapeur du charbon, et j'ai eu le bonheur de les guérir tous, ou pour mieux dire , toutes, car je n'ai eu que des femmes à traiter, et je n’en ai eu que quatre ; il en aurait fallu un plus grand nombre pour prétendre que mes moyens thérapeutiques sont meil- leurs que ceux des autres ; d'ailleurs, j'ai soigné des femmes qui toutes étaient dans l'aisance , soit par elles- memes, soit par les personnes chez qui elles étaient, à qui les secours ont été donnés promptement , et à qui il CLASSE DES SCIENCES. 95 n'a rien manqué. Ainsi, en exposant ce que J'ai fait je ne bläme la pratique de personne , et je livre la mienne à la critique des médecins, mes confrères ; j entendrai leurs observations avec plaisir et reconnaissance, Mon traitement a donc été particulièrement dirigé contre l'asphyxie, les antispasmodiques , les sudorifiques et les acides, le vinaigre surtout, ont été les principaux remèdes que j'ai employés, en les variant suivant la constitution des malades , et les indications qui se sont présentées dans le cours de la maladie. Pour en donner un apercu je vais exposer ma méthode dans une observation clinique ; je tâcherai de n'être pas prolixe , sans toutefois rien omettre d'intéressant ; j'ai choisi celle qui m'a présenté la maladie avec plus de gravité. Observations sur le Choléra-Morbus. Madame Foliot, âgée de cinquante-sept ans, demeurant à Rouen, rue des Arpents, n° 15, s'occupant habituelle- ment avec son mari à la vente de la tuile, de la brique , du pavé, etc., au Pré-au-Loup, mais n'y allant pas très souvent depuis quelque temps à cause de la faiblesse de sa santé ; néanmoins elle avait assez d'appétit ; elle ne faisait aucun excès et ne buvait que de l'eau et du lait à ses repas. Le samedi, veille de Pâques, elle soupe avec des lentilles et n'éprouve aucune incommodité , si ce n'est un peu d'altération , elle se couche et s endort. Le 22 avril 1832 elle est réveillée tout à conp à une beure du matin , par un grand froid , par des vomissements, des selles fréquentes, des douleurs dans le ventre , et des crampes. On la réchauffe avec une bouteille pleine d'eau bouillante et des serviettes très chaudes ; on lui donne du thé : elle se trouve si mal, qu'elle demande son confesseur avant le mé- 96 ACADÉMIE DE ROUEN. decin. On vient chez moi à quatre heures et demie du ma- tin, j'arrive chez elle à cinq heures, et voici ce que je remarque. Vomissement des lentilles, qu'elle avait mangées la veille , ensuite d'eaux sales et glaireuses, selles épaisses d'abord , de couleur d'excréments, ensuite blanchätres , liquides et semblables à du petit lait trouble , avec un dépôt blanchâtre ; vomissements et selles très fréquents, ventre mou et sonore , point d'urines , crampes douloureuses et successives aux pieds AUX jambes , aux cuisses, aux mains, aux bras , à l'épisastre , aux parois de la poitrine et au cou ; elles se succèdent de cinq minutes en cinq minutes , travail et battements extraordinaires dans la tête ; yeux enfoncés dans les orbites , cornée transparente enduite d'un mucus visqueux, vue triple : elle voit trois médecins qui lui tâtent Le pouls, et trois gardes qui la font boire, et iln'y a qu'un médecin et qu'une garde; bourdonnements et tintements d'oreilles, bouche sèche , langue blanche et plus froide que dans l'état naturel, peau peu refroidie ; pouls petit et à peime sensible , serrement de la poitrine , grande gène de la respiration, voix rauque et faible ; co- loration du visage, des mains et des poignets, par une teinte d'un rouge brunâtre ; néanmoins , aucune altération des fonctions intellectuelles. Remèdes. Vinaigre et fumigations en le faisant bouillir continuelle- ment dans la chambre de la malade ; frictions avec des mor- ceaux de flanelle imbibés de vinaigre chaud sur les membres , l'épigastre et la poitrine pendant les crampes ; on frotte de même avec des linges imbibés du même li- quide les narrines et les tempes ; on lui place autour du corps des briques chaudes, enveloppées de serviettes, pour CLASSE DES SCIENCES. 97 exciter la sueur , tisanes avec des fleurs de tilleul et de sureau séparément ; l'après-midi il se déclare une sueur copieuse ; on change la malade de linge et on lui donne un clystère avec la décoction de racine de guimauve après la sueur ; les vomissements sont de même nature que ceux du matin ; seiles un peu moins blanchätres ; la malade rend un peu d'urine , qui paraît avoir été sécrétée avant l'attaque de la maladie ; la gêne de la respiration est augmentée , voix basse et comprimée , on ne l'entend qu'à peine ; cependant le pouls est un peu plus développé. On ajoute deux cuillerées de vinaigre dans la tisane de tilleul. Le 2e jour de la maladie. Les vomissements ont été moins fréquents dans la nuit: selles peu abondantes , d'un jaune brunätre ; point de som- meil ; à quatre heures du matin, les crampes ont cessé par les frictions avec le vinaigre ; la malade a rendu un peu d'urine trouble ; dans la matinée , les vomissements sont devenus plus fréquents et plus abondants, répugnance pour les «eux tisanes , qui sont rejetées chaque fois qu' Îles sont prises ; néanmoins, la malade a l'air moins oppressé , on entend un peu mieux sa voix, quoique toujours faible et rauque ; elle se trouve mieux, elle se félicite d'être délivrée de ses crampes; les yeux sont moins enfoncés dans les orliites, elle ne voit plus les objets triples. On continue les fumigations avec le vinaigre , on change les deux Lisanes ; elles sont remplacées par de la limonade cuite et nitrée , par une infusion de fleurs de coquelicot. Potion avec l'eau de laitue, eau de fleurs d'oranger et le sirop d'éther, à prendre par cuillerées, de même que les ti- sanes ; on applique sur la région de l'estomac un morceau de flanelle imbibé de vinaigre chaud ; il survient dans l'après-midi une sueur assez abondante ; la malade est très fatiguée par les vomissements et les selles, qui conti- D ] 1, 98 ACADÉMIE DE ROUEN. è nuent, nausées, renvois et hoquets très fréquents ; clys- tère à l'eau de guimauve après la sueur ; grande envie d'uriner sans pouvoir la satisfaire , pouls petit et fréquent , grand mal de tête, boissons continuées. On ajoute quelques gouttes de suc de citron dans la potion. Le 3° jour. Les vomissements se sont calmés hier à huit heures du soir , ils ne sont revenus qu'à quatre heures du matin ; la malade a dormi de temps en temps, les selles n'ont pas été fréquentes, les matières sont brunûtres et mélées de glaires, répandant une odeur infecte ; la teinte du visage et des mains est plus blanche que les deux jours précé- dents ; les nausées , renvois et hoquets sont encore assez fréquents; respiration un peu plus libre; un peu d'urine a été rendue , envies fréquentes d'en rendre sans le pou- voir; langue et bouche sèches. Les remèdes sont continues ; on prescrit un liniment composé d’une once d'huile et de buit grains d’acétate de morphine, pour frictions sur le ventre et la poitrine; le soir il est survenu une fièvre assez vive ; les vomissements ont été fréquents dans l’après- midi ; grandes douleurs dans le ventre , selles liquides et brunâtres, chaleur vive aux yeux; la soif tourmente la malade ; on cesse le liniment. Le 4e jour. Il n'y a pas eu de vomissements dans la nuit, mais encore des nausées et des hoquets ; la malade à un peu dormi , une petite quantité d'urine a été rendue , elle a l'odeur des excré- ments ; elle est trouble , épaisse et glaireuse; point de douleur en urinant , selles moins brunâtres ; douleurs et gargouillements dans le ventre; la poitrine parait plus libre. La journée a été assez calme , il n’y a eu que trois vomisse- ments ; elle a vomi une fois un peu de bile verte ; nau- CLASSE DES SCIENCES. 99 sées et renvois assez fréquents ; les selles ont été fréquen- tes; elles sont peu abondantes et plus brunes que le matin ; un peu d'urine a été rendue en trois fois : elle est trouble, visqueuse et blanchätre ; pouls peu fiévreux. On cesse les Yaporisations de vinaigre. Le 5e jour. Un peu de sommeil dans la nuit; point de vomissements, mais des nausées ; selles assez copieuses et jaunâtres ; vents rendus par l'anus, ayant l'odeur des excréments ; urine moins trouble et un peu plus abondante ; pouls à peu près naturel ; limonade continuée , tisane de coquelicot remplacée par du petit lait nitré. On fait trois fois dans la journée des aspersions de vinaigre froid dans la chambre de la malade ; le soir, elle a rendu une assez forte quantité d'urine claire et visqueuse, elle a eu quelques selles ; pouls un peu fiévreux , sans altération ; les mêmes remèdes sont Ccontinués. Les 6€ et 7 jours. Il y à eu, pendant les nuits, un sommeil plus prolongé , point de vomissements, mais des nausées et des hoquets ; il n'y a eu que quelques selles ; les excréments ont com- mencé à devenir un peu plus solides , urines plus abon- dantes , blanches , tenant quelques glaires en suspension, pouls à peu près naturel. Le 8 jour. Les vomissements sont revenus, deux fois la malade a vomi de la bile verte ; les nausées et les renvois sont un peu moins fréquents ; il y a eu trois selles de matières liquides brunâtres ; le pouls est peu fiévreux , mais le visage est pâle, et la malade se désespère ; elle attribue le retour des vo- missements à une décoction de laitue avec le sirop d'or- 100 ACADÉMIE DE ROUEN. geat que je lui avais prescrite ; cette décoction est supprimée, on recommence les fumigations avec le vinaigre, et on continue le petit lait et la limonade nitrés. Le 9e jour. La malade a un peu dormi, elle est plus tranquille , elle a eu deux vomissements de matière visqueuse et verdâtre , et deux selles plus jaunes et plus épaisses que la veille ; l'urine à été abondante et plus claire , la dernière rendue est un peu citronnée ; la fièvre n’a été sensible que le soir. Les 10e et 11e jours. Il y a eu, chaque nuit , quelques heures de sommeil , peu de vomissements , un seul a donné une bile jaune ; il y a eu quelques nausées , et deux selles contenant des matières semblables à desexcréments un peu mous , urines abondantes et de couleur naturelle ; il n'y a eu un peu de fièvre que le soir. Le onzième jour, dans l'après-midi , la malade à éprouvé de grandes démangeaisons à la paume des mains ; la langue , qui était toujours restée blanchäâtre , commence à se nettoyer dans son milieu. Le 12e jour. Sommeil assez prolongé pendant la nuit , un seul vomis- sement de matière visqueuse , hoquets peu fréquents , point de selles, urine citronnée et naturelle ; il survient dans la journée une éruption de pustules rouges faisant saillie au-dessus de la peau, de la grandeur d'une lentille, aux mains , aux bras, aux jambes, aux cuisses ; elles ressem- blent aux pustules de la fièvre urticaire ; elles occasionnent de grandes démangeaisons ; cette éruption a duré pendant les treizième, quatorzième et quinzième jours de la maladie ; elle a commencé à disparaître le seizième , et avec elle les vomissements , les nausées , Les hoquets ; le dévoiement CLASSE DES SCIENCES. 101 et les autres symptômes de la maladie. Le dix-septième jour , la malade est entrée en convalescence ; mais elle aura besoin de grands ménagements , à cause de la faiblesse de son tempérament. J'ai employé les mêmes remèdes pour les trois autres malades ; je les ai variés suivant les différentes indications qui se sont présentées dans le cours de la maladie. Cepen- dant, le vinaigre en vapeur, en frictions et pris à l'intérieur, a toujours été la base de mon traitement ; les crampes, combattues par des frictions avec le vinaigre chaud , n'ont jamais duré plus de vingt-huit heures ; les vomissements ont duré plusieurs jours : je n'ai jamais cherché à les arrêter , parce que je les crois utiles pour la guérison de la maladie ; car, par les secousses qu'ils donnent au foie , ils contri- buent à débarrasser la vésicule de cette bile verte dont on la trouve ordinairement gorgée dans les cadavres de ceux qui succombent à la maladie ; mais j'ai tâché de les modérer par quelques anti-spasmodiques quand ils étaient trop vio- lents ou trop fréquents, et, en suivant cette marche, je suis parvenu à guérir mes quatre cholériques. On sera peut-être étonné que je n'aie pas employé les bains chauds , les saignées , les sangsues , la glace , l'opium à l'intérieur, les calomélas, le vin , l'ammoniaque, les vomitifs, les purgatifs , les vésicatoires et une foule d'autres remèdes tant vantés ; mais si ces remedes ont eu des succès, ils ont à peu près eu autant de revers, et si j'eusse eu un plus grand nombre de malades à soigner, mon traitement aurait peut-être éprouvé le sort de celui des autres ‘. Je n'ai donc Depuis le 18 mai 1832, jour où j'ai lu ces réflexions 4 l'Académie, j'ai eu occasion de traiter deux cholériques : une petite fille de quatre ans, qui a guéri, et un homme de cinquante ans, qui est mort en dix- huit heures; il était arrivé la veille de Paris, bien portant : il n’a pu prendre que peu de remèdes, et encore lui ont-ils été mal administrés. 102 ACADÉMIE DE ROUEN. pas la prétention de le croire infaillible ; d'ailleurs, on a déjà administré les acides , sans en obtenir des succès plus satisfaisants que des autres remèdes ; mais il n'est pas venu à ma connaissance qu'on ait employé le vinaigre en vapeur et en frictions pour la guérison du choléra. Cette variété de succès et de revers avec les mêmes remèdes a fait penser à de célébres médecins que la nature seule faisait les frais de la guérison , et que la médecine n'y était pour rien ; bienheureux encore si cette bonne nature n'est pas contrariée par des remèdes violents ou intempestifs ; pensée désolante pour le vrai médecin. Espérons que , par la suite, elle sera combattue par des faits bien concluants , et que la médecine sortira triomphante de cette lutte si peu honorable ; mais il faut, pour obtenir ce résultat avantageux, que la science commence par empêcher la moitié des malades au moins de succomber aux atteintes du choléra. Du reste, Dieu veuille que cette affreuse maladie disparaisse promptement de nos climats, et qu’elle ny revienne jamais ! DO 0T 070000000700 000005000000 70000000707000082567725027086 OBSERVATION SUR L'ALIÉNATION MENTALE: Par M. ViIGNÉ, D.-M. Masseurs, Je viens vous offrir un exemple d'aliénation mentale. IL serait toujours demeuré dans l'obscurité, si l'un de mes estimables confrères ne m'eût déterminé à l'en tirer, par la raison que les observations ne vieillissent jamais. Celle dont il s'agit, et les réflexions qui la précèdent, auront mérité de paraitre si vous leur accordez votre suffrage , et je me féliciterai de vous avoir fait une restitution à laquelle m'engageaient d’ailleurs vos bontés pour moi. AUX MANES DE L’ILLUSTRE PINEL. Introduction, La triste persuasion que les aliénés ne pouvaient étre domptés que par la force, et qu'il était également impos - sible de les guérir , explique la négligence et la dureté dont on usait à leur égard. 104 ACADÉMIE DE ROUEN. En eflet, représentons-nous tel de nos semblables qui , naguère , excitait notre admiration par ses talents, par ses vertus ; supposons-le assis sur une pierre, exposé nu aux injures de l'air, enchaîné comme un criminel , et cédant à l'impulsion d'une horrible fureur; ou, dans une mobi- bilité incoércible, errant au hasard et sans guide comme sans volonté, sans but, sans désirs; ou, dans son hébétitude , condamné à traîner une existence encore plus déplorable, et nous aurons une Juste idée de la conduite que l'on tenait envers les malheureux atteints d'aliénation. Mais un homme que la nature enrichit de ses dons les plus précieux , paraît au milieu de ce désordre de toutes les opérations de l'entendement, et bientôt, aux cris les plus affreux, aux gestes les plus insultants, aux menaces les plus terribles , succèdent le calme, la docilité, l'atta- chement , la reconnaissance ; aux pensées les plus bizarres, au babil le plus insupportable , aux actions les plus extra- vagantes, les idées les plus justes et les manières les plus décentes ; enfin, à l'imbécillité la plus affligeante , l'usage de toutes les facultés intellectuelles et affectives, et ces prodiges sont l'œuvre du génie conduit par la sagesse, éclairé par les sciences , et puissamment secondé par cette vertu qui nous rend sensibles aux maux d'autrui et nous fait ardemment désirer de les soulager , de les guérir. IL fallait donc, pour la gloire et Le bonheur de l'humanité, que Pinel donnät toute son attention au genre de mala- die le plus triste, le plus humiliant pour elle ; que, préci- pitée du trône de la raison, elle y fût replacée par la raison méme , et recüt d'elle encore sa dignité , ses droits in- contestables. Réflexions. Si l'on pouvait songer à faire un secret des moyens de guérir l'aliénation , pour le deviner il sufhrait de consulter CLASSE DES SCIENCES. 105 son cœur , le traitement étant pour l'ordinaire l'applica- tion des douces lois que nous prescrit lhamanité, par conséquent , le noble exercice de cette bonté si naturelle et de ce tendre intérét que lon a vu triompher des manies les plus rebelles. J'ai dit qu'il n'était pas de maladie plus affligean te que l'aliénation ; c'est aussi celle qui exige du médecin le plus de précautions pour ne pas blesser une imagination trop exaltée ; le plus d'attention à choisiret mettre en usage tous les moyens indiqués par le caractère de l'individu , par la cause et l'espèce d'affection mentale ; le plus de courage pour sexposer aux dangers d'un excès de zèle ou d'une trop grande sécurité. Apres avoir fait l'éloge du traitement moral, je dois tenir compte des autres secours souvent indispensables , souvent aussi très eflicaces ; mais je m'abstiendrai de les passer en revue , le seul but qu'ici je me propose étant de prouver que, si la raison la plus forte n'est point impassible , l'ancienneté de ses lésions ne les rend pas désespérées , ne les rend pas incurables , et que surtout elles pourraient céder aux sentiments qu'inspire le malheur , et que l'on doit toujours s empresser de lui témoigner. OBSER V ATION. Un homme , exerçant de la manière la plus distinguée les fonctions les plus honorables, est tout à coup frappé d'aliénation. Il se disait le plus grand des papes, et portait en consé- quence la tiare et l'anneau du pécheur. L'un et l'autre étaient de paille , et par lui-même artistement travaillés. Il s'élevait au dessus de l'Eternel ; puis aussitôt , par hu- milité, par esprit de pénitence, il se résignait à porter les fers qu'il avait aux pieds et aux mains , lorsque je fus VA 14 106 ACADÉMIE DE ROUEN. chargé de lui donner mes soins, comme médecin en chef de l'Hospice-Général de Rouen. Dans l'accès, il mettait tout en pièces, et pourtant il n'a jamais fait de mal à une petite chatte qui ne le quit- tait pas, et dont le calme contrastait singulièrement avec la violence de ses emportements. Dans les intervalles lucides, il tenait note exacte de tout ce qui se passait dans l'hospice, en sorte que mes nom, prénoms et qualité étaient, à ma premitre visite, écrits sur les parois de sa cellule. Pourquoi , lui dis-je, après m'être fait connaître , écri- vez-vous ainsi sur les murs de votre chambre ? Il se mit à rire. Ne serait-il pas, ajoutai-je , plus digne de vous de confier au papier vos pensées, vos chagrins ;, vos remarques; et, parmi ces dernières , s'il en était de consolantes , ne pour- riez-vous les graver dans votre cœur ? Un signe d’appro- bation et d'amitié fut sa réponse. Je l'interrogeai sur ses besoins, il n'en avait aucun ; seulement il se plaignait de son esclavage ; ensuite il sem- blait faire le sacrifice de sa liberté. Le lendemain, je lui donnai un crayon et de jolies tablettes ; il fut tres sensible à cette attention et me pro- digua les noms les plus doux. Deux jours apres cette entrevue , dans un terrible accès, il brise crayon et tablettes, insulte et ne reconnaît plus celui qu'il avait appelé son ami , son bienfaiteur. Les soins les plus particuliers , les plus allectueux , et de petits présents , qu'il recevait toujours avec plaisir , lui ren- daient pénibles les absences que je faisais pour mieux l’é- prouver et tirer de nos entretiens le parti le plus avantageux. Je reconnus bientôt l'efficacité de ce traitement. Dans un nouvel accès, où l'infortuné s'épuisait en invec- tives contre les gens de service , il cessa de s'agiter dès CLASSE DES SCIENCES. 107 qu'il m'apercut , et versa des larmes en écoutant mes douces remontrauces. Le lendemain, je tâchai d'obtenir qu'il se laissät vêtir proprement , et qu'il renonçät à coucher sur la paille. Tout était prêt, on n'attendait plus que sa volonté pour lui retirer de vieux haillons et lui faire un bou lit; mais il fallut encore différer. Pendant quelques jours je réitérai mes instances. Voyant qu'elles étaient infructueuses , je me décidai à lui dire que, voulant lui rendre la liberté, et me trouvant, par son obstination , réduit à l'impossibilité de le faire , je devais renoncer à l'espoir de lui être utile. IL soupire et promet d'obéir. Il souffre que la porte et la fenêtre de sa chambre restent ouvertes plus long-temps que de coutume , et se laisse aisément approcher de ses gardiens ; enfin, on rétablit la propreté dans son asile , on lui fait un lit commode, on l'habille, et, le 4 février 1815, trente-cinquième jour de mon entrée en exercice, je le fais sortir de sa cellule. La joie que j'en éprouvai fut au moins égale à la sienne. Ainsi, pour la première fois depuis quatre ans , il put librement respirer l'air d'une petite cour dans laquelle étaient plusieurs personnes de la maison , et tous les gens de service avertis de s y trouver pour le contenir s'il en était besoin. Mais quelle fut notre surprise ! Après avoir fait quelques pas ; il se mit à genoux, et , levant les yeux au ciel, bénit la main qui le délivrait de ses fers ; puis il rentra paisi- blement. Ne pouvant parvenir à faire substituer la camisole et le gilet de force aux chaînes que portaient la plupart des aliénés, et toujours impatient de les en affranchir , je ré solus de le faire malgré tous les obstacles que javais à 108 ACADÉMIE DE ROUEN. vaincre, et les moments que j'ai employés à l'exécution de ce projet ont été , sans contredit , les plus beaux de ma vie. Ainsi, moins irrités , ces malheureux ont toujours été plus tranquilles , et se sont peu à peu familiarisés avec toutes les personnes dont les services pouvaient leur être agréables. Mais cet heureux changement a surtout été remarquable chez l'un d'entr'eux ; le calme le plus parfait ayant succédé à des accès dans lesquels de vives étincelles semblaient , avec impétuosité , Jaillir de ses yeux, tandis qu'il aiguisait ses dents contre les barreaux de sa triste demeure, et ne souffrait aucun vêtement sur son corps, qu'une chaleur dévorante lui faisait exposer au froid le plus rigoureux. Dirai-je toutes les précautions qu'il m'a fallu prendre pour obvier aux accidents qui pouvaient résulter de ma confiance en ces malheureux, de la négligence de leurs gardiens , et de l'indiscrétion d'étrangers dont je leur épar- gnais la visite autant qu'il était en moi de le faire ? Ce dernier soin fut encore bien profitable à l'infortuné sujet de cette observation, Un geste, un propos inconsidérés, le jetaient dans une agitation difhcile à calmer. Apprenant, chaque jour, à connaître l'élévation de ses sentiments et la bonté de son cœur, je me plaisais à pré- venir tous ses désirs. La cessation entière des accès, et le progrès sensible de sa raison m'autorisant à l'éloigner des aliénés, je le fis transférer dans une chambre particuliére assez agréa- ble; mais bientôt, ennuyé de sa solitude , il voulut retourner en sa premiere habitation. J'obéis à cette singularité, la regardant comme un avertissement de me tenir sur mes gardes , et comme le prélude de nouveaux accès qui, néanmoins, n'eurent pas lieu, CLASSE DES SCIENCES. 109 Peu de temps après, je quittai l'Hospice-Général , avec le regret de ne pouvoir plus être utile aux pauvres que j'avais été glorieux de servir. Quelques bains, une saignée du pied, deux légers pur- gatifs , joints aux secours moraux , laissent à ces derniers tout l'avantage du traitement dans cette observation, Ainsi, combattre avec réserve les caprices et les pré- tentions ridicules des aliénés ; à leur fureur opposer la modération, compätir à leur misère , peuvent être autant de moyens de les guérir. Mais il existe un autre sentiment supérieur à celui de la pitié ; c'est l'affection réelle que savent inspirer quelques- uns d'entr'eux , et celle-ci, plus encore que toute autre chose, à produit chez mon pauvre maniaque l'améliora- tion que je désirais obtenir. Vous allez, Messieurs, juger à quel point il y fat sensi- ble, et combien il en avait gardé le souvenir. Dix-huit mois apres ma retraite , étant au lit de la mort, il me fait prier instamment de venir le voir. Je m'empresse de le satisfaire ; ik me reconnaît, me tend les bras, les laisse aussitôt retomber sur moi ; il me regarde avec amitié et cherche encore à prononcer mon nom; enfin, pres d'expirer, il semble s'eflorcer de renaître pour la recon- naissance. Également invité à vous soumettre les observations sui- vantes , je le fais avec l'espoir qu'elles obtiendront aussi votre approbation. Vous y verrez, Messieurs , que j'ai voulu mettre à profit le peu de temps que j'avais à vivre au milieu des pauvres de l'Hospice-Général de Rouen. Les deux premieres viennent encore à l'appui de ce 110 ACADÉMIE DE ROUEN. que j'ai dit du traitement psychique de l'aliénation ; les autres prouvent qu'il peut aider beaucoup au succès de celui qu'on appelle médical, 1" OBSERVATION. Francois-Antoine D... , âgé de vingt-cinq ans , de retour dans ses foyers après quinze mois de captivité en Russie , trouve sa femme enceinte , et d'indignation et de chagrin il tombe dans la manie la plus déplorable. Entré à l'Hospice-Général le 14 novembre 1814, il est aussitôt chargé de fers. Cet infortuné , dans ses accès, poussait les cris les plus aigus , provoquait par des paroles et des gestes insul- tants toutes les personnes qui voulaient l'approcher, et souvent écumait de colère. Après l'avoir accoutumé à m'entendre lui parler avec douceur , je lui annoncai que s’il voulait être honnête en- vers les gens de service , qu'il ne cessait d'injurier , je le ferais délivrer de ses fers. Il me le promit , et tint parole. Je ne tardai pas à tenir la mienne ; et, depuis ce jour 14 février , jusqu'à celui de mon départ, ses accès ont toujours diminué sensiblement. D... ne parlait que de guerres , que des blessures qu'il avait recues , que des sommes considérables qu'on lui devait, et qui cependant se réduisaient à deux mille francs pour lesquels il avait vendu sa liberté. Averti que, pour les toucher ; sa femme cherchait à le faire mettre en curatelle, j'ai pris toutes les précautions nécessaires pour conserver à ce malheureux son unique ressource ; en même temps que je le disposais , comme cela est arrivé un peu plus tard, au bonheur d'en user et d'en sentir tout le prix. CLASSE DES SCIENCES. 111 22 OBSERVATION. Ambroise A... , ägé de trente-neuf ans, est entré à l'Hospice-Général le 23 février 1815. On venait de lui mettre les fers aux pieds; je les ai fait retirer sur-le-champ. La spoliation de son héritage l'avait jeté dans un égare- ment d'esprit difiicile à dépeindre. Il ne cessait, pour ainsi dire, de crier au feu , aux vo- leurs ; il s'agitait horriblement , puis il demandait pardon et promettait de ne plus recommencer. J'appris qu'il avait une sœur, et qu'elle jouissait pai- siblement , à une lieue de la ville, du bien de ce malheu- reux. Je fus la trouver, lui reprochai doucement sa conduite à l'égard de son pauvre frère , et la suppliai de venir elle- même opérer sa guérison. En eflet, par de fréquentes visites, et surtout par un petit arrangement favorable aux intérêts du malade, elle lui fit plus de bien que n'en aurait produit toute autre ma- nière de traiter cette maladie. À..., tranquillisé sur l'avenir, devint aussi plus calme, plus heureux , et, le 30 juillet, il avait entièrement recouvré l'usage de sa raison. 3° OBsERVATION. Isidore C..., âgé de vingt-neuf ans, entré à l'Hospice- Général le 19 octobre 1814 , en est sorti le 18 juin 1815, guéri d'une manie érotique , à laquelle ont été opposés tons les anti-spasmodiques et toutes les ressources du traite- ment moral. 4° OBSERVATION. Louis de B....., âgé de vingt-six ans, entré à l Hospice- 112 CLASSE DES SCIENCES. Général le 23 février 1815, a été rendu à sa famille le 16 juin suivant. Réformé à la faveur d'une maladie feinte, mais trahi presque aussitôt , il est vivement poursuivi par ordre supé- rieur. Saisi de crainte , il fuit et perd la raison, en cherchant à conserver sa liberté. Ce malheureux paraissait insensible au langage le plus doux , aux promesses les plus séduisantes. S'il trouvait l'occasion de pincer et de mordre, il la saisissait avidement. Un rien le fichait, souvent même le faisait entrer en fureur ; mais l'accès était de courte durée. A force de patience et de soins particuliers, j'ai pu m'introduire dans sa confiance et le déterminer à faire ma volonté. Des bains , des boissons tempérantes, et quelques ecco- protiques ont achevé sa guérison. 5° OBSERVATION. Honorine T... , âgée de vingt-deux ans,entrée le 5 janvier 1815 à l'Hospice-Général, en est sortie le 29 mai suivant. Elle avait voulu se noyer, se pendre, mettre le feu à la maison de ses maitres, croyant être ailleurs que chez eux, et les en avait avertis, afin qu’ils pussent se sous- traire au danger dont ils étaient menacés. Le lendemain de cette confidence , on l’a renvoyée chez sa mère, qui, après quatre mois de soins infructueux, la fit admettre au nombre des aliénes dudit hospice. Naturellement calme, honnête et bonne , elle était de- venue très irascible , impertinente, et prête à frapper les antres , à se frapper elle-même , pour peu qu'on la con- trariât. CLASSE DES SCIENCES. 115 Un jour, n'obtenant pas assez tôt ce qu'elle demandait , elle mit son fichu en pièces, disant qu'elle ferait encore pis si l'on cherchait à la chagriner. J'usai de tous les ménagements possibles, et parvins à calmer son impatience , sa fureur , préparant ainsi la gué- rison qu'ont opérée des bains tièdes, deux saignées du pied et quelques emménagogues , en délivrant cette pau- vre fille d'une aménorrhée qu'elle éprouvait depuis deux ans. Honorine , avant de me quitter, m a procuré la douce satisfaction de voir couler de ses yeux les larmes de la re- connaissance et de l'amitié. SIXIÈME OBSERVATION. Une bonne mère, âgée de trente-sept ans, heureust dans ses foyers, el sans cause évidente d'égarement d'es- prit, devient triste, rêveuse , cherche la solitude , parle toujours entre ses dents, perd le sommeil , refuse les ali- ments les plus nécessaires à l'entretien de la vie , et tombe dans une maigreur extrême. Entrée à l'Hospice-Général , elle est l'objet de soins empressés, et d’abord en paraît peu satisfaite ; puis elle s y montre sensible, et se prète à ce que l'on peut exiger d'elle, lorsqu'une aliénée , dont j'avais eu la précaution de l'éloigner , prise, au milieu de la nuit, d'un affreux délire , l'épouvante par ses cris, an point qu'elle se croit entourée d'horribles fantômes prêts à la saisir ; et, pour leur échapper, s'efforce de briser la porte de sa triste demeure. J'eus le bonheur de l'apaiser en l'assurant que j allais redoubler de zèle pour la guérir, la rendre à sa famille . et cette promesse fut accomplie. Les bains tièdes , des emménagogues spécialement indi- 15 114 ACADÉMIE DE ROUEN. qués et dont l'effet répondit à mon attente ; des analepti- ques, le quina , et la continuation des secours moraux , -ont fait recouvrer à cette pauvre femme ses forces et toute sa raison. Je pourrais ajouter d'autres exemples à ceux que je viens de produire; mais, comme ils sont incomplets, je m abstiendrai de les faire connaitre. CLASSE DES BELLES-LETTRES ET ARTS. Rapport FAIT PAR M. A.-G. BALLIN, ARCHIVISTE, A cause de l’indisposition de M. LICQUET, Secrétaire perpétuel 1. M ESSIEURS , Je viens essayer de m'acquitter d'une mission qui ne dut pas être la mienne , et je ne puis me défendre d'éprou- ver quelque embarras en songeant au double regret que cette circonstance doit vous faire éprouver. Accoutumés depuis plus de quinze ans au talent original de M. Bignon, votre secrétaire , pour la elasse des Lettres et des Arts, vous avez voulu le remplacer dignement , lorsqu'il vous à fait Voyez les notes placées en tète du rapport de M, le Secrétaire des Sciences, P+ 17. 116 ACADEMIE DE ROUEN. connaître , au mois de mai dernier, que ses aflaires et sa santé ne lui permettaient plus de remplir ses fonctions ; un homme, également distingué comme poële et comme prosaleur , siégeail parmi vous, et votre vœu unanime le porta au bureau ; mais malheureusement M. Licquet , atteint d'une indisposition grave, n'a pu se livrer à la ré- daction des proces-verbaux de vos dernières séances et du rapport de fin d'année. Vous deviez compter sur un tableau animé, tracé par la plume élégante du traducteur de l'Histoire d'Italie de M. Botta ; il faut vous résigner à accepter une faible esquisse , où je m'eflorcerai du moins de rappeler vés travaux avec exactitude , à défaut d'autre mérite. S I — Craités généraux, Gustèmes D'Ensci- gnement. M. Ballin vous a lu un rapport sur quelques imprimés envoyés par dl. Lourmand, secrétaire de la Société des Méthodes d'enseignement (xvr). On y voit l'origine, le but et les progrès de cet intéressant établissement et de l'institution formée dans son sein sous le nom d'Æcole Orthomatique. * Vous avez décidé, conformément à la proposition du rapporteur , que des remerciments seraient adressés à M. Lourmand pour ses communications , que l'Académie recevra toujours avec plaisir, en attendant qu'elle trouve l'occasion de concourir efficacement au louable but de la Société des Méthodes d'enseignement. Le méme rapporteur a entretenu l'Académie d'un dis- cours sur la (hcorie plulosophique de l'enseignement des Sourds-muets, par M. Piroux, fondateur et directeur de l'Institut royal des Sourds-muets de Nancy (482 et xvu). CLASSE DES BELLES-LETTRES. 117 Il vous à présenté depuis un tableau statistique des aveu- oles et des sourds-muets qui existent dans le départe- ment ( XVII }. L'un et l'autre ouvrage seront insérés dans le Précis de cette année. $ I. — Littérature, — frose, Dans son discours de réception, M. de Stabenrath vous a présenté des considérations sur la direction imprimée aux connaissances humaines pendant ces dernières années Caxxw). Les guerres de la République et de l'Empire transpor- térent en pays étrangers une quantité innombrable de fran- cais, qui en revinrent avec des idées nouvelles. « La voix, « long-temps impuissante, d'une femme célèbre, ne fut plus, « dit-il, seule à proclamer que la froide Allemagne possédait « une littérature forte et réveuse; que ses philosophes , « ses historiens ; ses poètes ; ses savants , avaient une ori- « ginalité, un savoir, une profondeur dont la France se se- « rait enorgueillie. » On traduisit, on imita, on exagéra même les auteurs allemands; l'Italie, l'Espagne et l'Angleterre fournirent aussi leur tribut. Walter-Scott et lord Byron furent surtout les modeles qu'on s'eflorca de reproduire. Une foule de jeunes gens s élancerent dans [a carrière ; l'audace de quelques-uns fut couronnée d'un succès brillant , et c'est ainsi qu'une révolution complète s'opéra dans le goût littéraire de nos jours. L'orateur est loin de repousser les innovations ; mais il se range sous la bannière des hommes qui jugent sans passion et sans esprit de coterie toutes les productions nou elles. « Quand un ouvrage est remarquable, dit-il, prenons-le . 118 ACADÉMIE DE ROUEN. « de quelque côté qu'il nous vienne > Mais atlaquons sans « pitié celui que réprouvent le goût et la morale ». M. de Stabenrath jette ensuite un coup d'œil rapide sur l'immense développement des sciences, et entre dans quelques détails relatifs aux progrès de l'archéologie , dont il démontre l'utilité. Il termine son discours par des vœux que nous partageons tous : « Espérons, dit-il, que le temps n'est pas loin où les « fausses doctrines tomberont pour ne plus se relever, où « la littérature | unie aux sciences et plus brillante que « Jamais, couvrira la France des reflets de sa gloire. « Espérons que notre patrie , respectée au-dehors , et jouis- « sant au dedans du bonheur et de la tranquillité , verra « ses enfants cultiver en paix les lettres et les sciences , « premier besoin des nations civilisées ». — M. Hellis, en répondant à ce discours, trace à son tour un tableau rapide des causes de la révolution qu'a éprouvée de nos jours la république des lettres. * « Dans un siècle, dit-il, où tout ce qui se rattache « au bonheur physique et aux intérêts matériels est d'un si « grand poids, on ne doit pas s'étonner que la science « ait fait des pas de géant ; la littérature ne pouvait prendre « un pareil essor : elle succomba dans cette lutte inégale. « L'industrie avait passé dans la science ; elle pénétra jus- « qu'aux lettres, qui , pour offrir aussi leurs progrès, « désavouèrent tout ce qui, jusqu'alors , les avait placées si « haut dans l'esprit des hommes , et une nouvelle école se « forma ». ssaseseres es vessseresses dde vitale L'efe battre teis taie “« On fut inondé de productions exotiques; mais ces plantes, nées sur un autre climat, ne devaient guère prospérer chez nous ». « On voulut du nouveau . n'en fût-il plus, et les no- CLASSE DES BELLES-LETTRES. 119 « vateurs se mirent à l'œuvre. Qu'en résulta-t-il? ce qu'on « devait attendre du rapprochement d'éléments que la « nature repousse : on vit naître des monstres qui heu- « reusement ne sont pas viables, ni capables de se perpé- « tuer. L'excès du mal en apportera le remède, et le dégoût _ « seul suflirait au besoin pour en faire justice ». « Non, Monsieur, dit en terminant M. le Vice-Président. « le sentiment du beau, l'amour des lettres, ne périra « point dans notre patrie : il est encore des cœurs géné- « reux et des ames pénétrées du souffle divin ; votre discours « et vos ouvrages en sont la preuve ». La Maison de Rochester (639 et xxvn), dit M. Auguste Le Prevost, en parlant de cet opuseule de M. de Staben- rath, est un récit agréable au sujet d'une fondation bizarre qui existe réellement à Roche:ter. Fans Un chapitre des mémoires de Franck Pierre- Point, ( 629 et xxvn), le même auteur raconte une scène de magnétisme qu'il regarde comme une grossière Jonglerie. M. Auguste Le Prevost estconvaincu des dangers des singulières fascinations exercées par les magnétiseurs, et du peu de confiance que méritent leurs fastueuses promesses; néanmoins, il ne pense pas que tout soit jonglerie dans le magnétisme ; il croit, au contraire , qu'une étude faite de bonne foi des étranges effets qu'il produit, pourrait rendre d'importants services à la phy- siologie, à la psychologie , et peut-être à la médecine. Le charme que M. Floquet a su répandre dans le récit d'une Ænecdote rouennaise du temps de Louis XI (xx), ne me permel pas d'essayer d'en faire l'analyse , qui serait d'ailleurs superflue ; puisque vous avez décidé qu'il en serait donné lecture en séance publique , ainsi que de Lintéressante narration d'une Æscension au Righi, fragment d'un voyage en Suisse , par M. Blanche ( x: ). 120 ACADÉMIE DE ROUEN. En vous exprimant son admiration pour l’Hymne à lu Cloche, de M. Langlois ( 525 et xxxu) , M. Auguste Le Prevost a rendu hommage à la variété des talents de notre habile et savant confrère. Privée du prestige du mètre et de la rime , cette composition n'en paraît pas moins poé- tique à M. le rapporteur, qui, à l'appui de son assertion , vous l'a lue tout entière. La longueur de ce rapport ne me permettant pas de limiter, je me bornerai à vous en rap- peler le commencement et la fin. « Salut , fille de l'antique cité de Nole ! Salut à toi, « qui chantas la naissance et qui pleuras la mort de vingt « générations éteintes ! Tu les vis descendre tour à tour « immobiles et muecttes dans l'oubli du tombeau; et toi, « compagne des siècles, dans tes balancements rapides , tu « relrouveras sans cesse les mâles accents dont tu frappas « les oreilles de Guillaume-le-Conquérant et de Napoléon. « Au victorieux clairon d'Hastings , au glorieux canon « d'Austerlitz , tu fis également succéder ton écho triom- « phal ». Après avoir chanté le baptème de la cloche et ses divers usages , l'auteur lui adresse ces derniers mots : « Cloche fortunée , adieu continue de régner sur la cité, « sous le dais sublime dont l'ouragan politique arracha « tes compagnes. Aujourd'hui sans rivale, oublie celles « qui, durant tant de’siècles, unirent leur harmonie à la « tienne ! Heureusement échappée à leur étrange méta- « morphose , laisse-les, parcourant la terre et les mers, « sous leurs formes nouvelles, simuler, de la bouche « rétrécie de leur corps cylindrique, le fracas du ton- « nerre, et vomir comme lui, dans leur mugissement « enflammé , le carnage et la mort. Pour toi, reste avec « nous : reste pour y chanter l'allégresse et la paix... mais « la paix glorieuse comme la victoire » ! CLASSE DES BELLES-LETTRES. 121 $ LIL. — Porsie, M. Eugène de Pradel, qui possède l'art si difficile d'im- proviser en vers français , a ranimé la verve de notre véné- rable doyen. Voici les vers que M. d'Ornay lui adressa , lorsque cet improvisateur alla le visiter dans sa retraite de Saint-Martin-de-Bocherville , le 25 août 1831 ( v). Avant-hier j'avais cent deux ans1, Aujourd'hui je n’en ai que trente. De cette énigme embarrassante, Voici le mot et le vrai sens. Un nouvel Amphion et ses enchantements, Ou, si vous l’aimez mieux, Pradel et ses talents Ont su me rajeunir, hélas! pour peu d’instants! Le charme va finir, mais mon ame enchantée En gardera long-temps la précieuse idée. Conformément à votre décision , ces vers ont été men- üonnés honorablement et transcrits au registre de vos procès-verbaux . M. Duputel vous a fait, au nom d'une Commission , un rapport sur un Recueil intitulé : Promenades poétiques , suivies de trois scènes historiques bretonnes , envoyé à l'Aca- démie par M. Edmond du Petit-Bois (604 et xxv1), qui vient de mourir au moment même où nous l'admettions au nom- bre de nos correspondants. Quelques-unes des pièces contenues dé ce Recueil ont déja été l'objet d'un compte rendu à l'Académie par le méme rapporteur , au commencement de l'année dernière ; l'éloge l'emportait alors sur le blâme. Parmi les nouvelles EE dutns , le Délire et le Souvenir sont encore l'objet M, d'Ornay est né le 23 août 1720 122 ACADÉMIE DE ROUEN. de la critique du rapporteur : le vague des idées , l'incohé- rence des images, la hardiesse des expressions et la bizar- rerie des coupes de vers, lui semblent trahir un élève de Victor Hugo, s'attachant à imiter ses ridicules et ses tra- vers, à l'exemple des courtisans d'Alexandre ; qui s'ima- ginaient lui ressembler, parce qu'ils aflectaient de pencher, comme lui, la tête sur une épaule. Toutefois, M. Duputel se hâte d'ajouter que, dans plusieurs antres pièces, on aime à retrouver un poète qui suit l'inspiration de la nature , et sait unir la naïveté à la grâce et la justesse de l'expression à la vérité du sentiment, * M. Magnier rend compte à l'Académie de l'opuseule intitulé : Précis historique et littéraire sur Eustache Des- champs, poète du XIV: siècle, par G. A. Crapelet. (597 bis et xxv. ) * Ce poëte , né vers 1328, est mort en 1422. Il à laissé plus de quatre-vingt mille vers. * Une jeunesse fort agitée ; des voyages en Asie, en Afrique, des emplois divers à la cour de Charles V et à celle de Charles Vi, à la guerre et dans la magistrature ; une grande variété d'aventures et de situations, tout promet de nombreux renseignements sur l'époque où s'est écoulée cette vie de près d'un siècle. L'esprit satirique qui forme le caractère dominant de ses ouvrages , el qui s exerce sur toutes sortes de sujets, y donne un caractère extrémement piquant. * M. le rapporteur se livre à des considérations géné- rales sur les Troubadours et les Trouvères, les véritables poëtes du XI° et du XIIe siècle, et sur les sujets de leurs vers, dont le principal but était d'amuser et de plaire. * Dans le moyen âge, dit M. Magnier , la poésie dé- chut en avançant ; nous n'avons done pas beaucoup à re- gretter la perte de tant de vers morts avec leurs auteurs, CLASSE DES BELLES-LETTRES. 123 et iln y aurait pas grand avantage à les arracher tous à leurs ténebres. Les savants qui se livrent à ce genre de travail doivent choisir entre les auteurs , et s'occuper moins de leur poésie que du siècle qui doit sy peindre. C'est li l'esprit qui a dirigé M. Crapelet, érudit aussi distingué cu habile imprimeur. * « Tout entier à son art, dit en terminant M. le rap- « porteur, il s'est aussi dévoué à un autre genre de travail. « C'est lui qui va chercher et scruter, dans les rayons où « ils reposent oubliés, ces vieux manuscrits dont ses presses « ont déjà rendu un grand nombre à la lumière, qu'ils « n'auraient peut-être jamais revue. * « Ces publications ne sauraient lui offrir de bénéfice ; « mais il en recueillera un avantage plus précieux , celui « d'être compté , avec les Estienne , parmi ce petit nombre « d'imprimeurs qui ont joint à l'honneur de leur pro- « fession la gloire de la science et d'un dévouement sans « borne aux lettres. » M. Floquet , au nom d'une Commission , lit un rapport «ur les Hélodies françaises , chants sacrés et autres poésies, sdressées à la Compagnie par M. Alphonse Le Flaguais. : 600 à 603 et xxur. ) Chacune de ces pièces , dit M. le rapporteur, est presque «ujours correcte, harmonieuse , élégante et facile ; mais, écrite sous l'influence d'un méme sentiment , l'ensemble n'est peut-être pas sans quelque uniformité pour celui qui les lit de suite. * L'auteur est plein d'admiration pour M. de Lamar- tine ; mais il s'est trop souvenu peut-être de son poète favori, des sujets favoris de ce poète, et de la manière dont il les traite, Cependant, M. Le Flaguais compte s'ouvrir une route nouvelle, 124 ACADÉMIE DE ROUEN. Peut-être , dit-il : Peut-être, un jour, plus fière et moins mélancolique, Ma Muse chantera sur la lyre héroïque, Et, comme un jasmin blanc qui s'attache au laurier, Ornera de ses vers les exploits du guerrier. Je peindrai les Anglais chassés de la Neustrie , Et la victoire enfin consolant ma patrie. Déjà M. Le Flaguais a publié un petit poème intitule : ] 5 PES P Le Chäteau de Falaise , où il raconte , avec grâce et nalu- rel , les amours de Robert et d'Arlette. * En voici un passage : ARLETTE ET ROBERT. ( 1029.) Arlette, un jour, dans les flots purs de l’Ante, Rendait au lin sa première blancheur ; Ses pieds baignés par l'onde caressante Avaient du lis la grâce et la couleur. Elle mélait sa voix douce el naïve Aux légers bruits du zéphyr et des eaux. Se croyant seule, à cette onde plaintive, En souriant elle adressait ces mots : « Coule sans trouble, ainsi que ma jeunesse, « Ruisseau limpide où brille un ciel d’azur ; « N'ai point l’orgueil des dames de noblesse, « Comme le tien, mon destin est obscur. « Veux rester libre et dépenser ma vie « En doux plaisirs, sans regrets, sans effroi; « De la grandeur n'ai point connu l’envie, « Du tendre amour n'ai point connu l’émoi. » CLASSE DES BELLES-LETTRES. Mais, l'observant de son castel antique, Le due Robert formait un autre espoir : Simplicité rendait sa grâce unique; De ses attraits l'onde était le miroir. « À bien aimer, dit-il, mon ame est prête; « De cette enfant j’obtiendrai doux retour. « Mon cœur me guide ; encore une conquête, « Le prix sera décerné par lamour. » Sans nul retard, volant au devant d'elle, Dans son palais il la fit pénétrer. Sans le vouloir, la gente jouvencelle Sentit alors son cœur s’enamourer. A la splendeur, à la maguificence Du lieu superbe à ses regards offert, Arlette encore aimait de préférence Un seul objet. C'était le duc Robert. Près d’un seigneur, on apprend bien des choses ; Timidité soudain cesse à la cour, Et l’on ÿ voit maintes métamorphoses, Maints passe-temps qu'autorise l'amour. Mais laissons-les seuls discourir ensemble ; Sur leurs plaisirs soyons un peu discrets. Ils sont heureux, je crois; mais, ce me semble, L'histoire peut s'arrêter désormais. Disons pourtant qu'Arlette fit un rève Qu'à son réveil elle apprit à Robert : De son beau sein, qu'un doux transport soulève, Elle crut voir sortir un arbre vert; Ses longs rameaux sur toute la Neustrie En s'élevant formaient un vaste abri, Et jusqu'aux cieux sa tête enorgueillie Portait l'éclat de son dôme fleuri. 126 ACADÉMIE DE ROUEN. Or, ce présage annonçait la naissance Du conquérant qui domina l'Anglais. Une ame hante, une rare vaillance Légitima son nom par des succès. Ainsi, le fils d'un amoureux caprice Sur les Normands fit luire un nouveau jour. N’en doutons pas, il est un Dieu propice Qui rend heureux les enfants de l'amour. M. Auguste Le Prevost vous a entretenus de deux pièces de vers de M. de Stabenrath : l'une est la traduction de la Ballade de Lénore , de Bürger (626 et xxvir), pièce qui obtint une vogue prodigieuse en Allemagne. * C'est, dit M. le rapporteur, un des chefs-d'œuvre de la littérature fantasmagorique des nations septentrionales de l'Europe , qui se complaisent dans ces récits d'appa- ritions , en harmonie avec les longues ténèbres de leurs nuits d'hiver et les clartés douteuses qui leur succedent, avec les murmures plaintifs da vent dans leurs forêts d'ar- bres verts et dans les sombres corridors de leurs demeures féodales. Wilhelm avait suivi la glorieuse armée Du grand roi Frédéric; sa triste bien-aimée Ignore si le sort, au milien des combats, Dans les plaines de Prague a retenu ses pas. Depuis long-temps la paix est signée; Lénore tombe dans le désespoir , invoque la mort et se répand en blas- phèmes. Cependant une nuit, Wilhelm frappe à sa porte, la conjqure de le suivre : Sur le sombre coursier elle s’est élancée, Et, près du cavalier rapidement placée, CLASSE DES BELLES-LETTRES. 127 Le saisit et le presse avec ses blanches mains Le cavalier s'éloigne et les échos lointains Murmurent sourdement. Tout couvert de poussière, Il pousse son coursier qui sillonne la terre ; De bleuâtres éclairs jaillissent sous ses pas , Des veines des cailloux qu'il réduit en éclats. Comme tout semble fuir : les villes, les campagnes, Les arbres, les forêts, les vallons , les montagnes, Tout s’efface à leurs yeux dans leur rapide essor. Ma Lénore, as-tu peur? Pourquoi trembler encor ? Vois, la lune est brillante, et douce est sa lumière. Hurrah! les morts vont vite, ils effleurent la terre Tu ne crains pas les morts? —— Oh! non, laisse en repos, Laisse, laisse les morts au sein de leurs tombeaux. — Porte les ‘yeux au loin, vois-tu cette potence ? Les Esprits à l’entour exécutent leur danse Aux rayons incertains de l’astre de la nuit. Esprits, venez, Esprits que l’Enfer seul conduit. Accompagnez mes pas, suivez ma fiancée : Esprits, vous danserez, quand près de moi placée Nous serons tous les deux dans le lit nuptial; De vos danses, Esprits, ce sera le signal. Ainsi qu’un vent qui souffle à travers le feuillage , Ainsi des noirs Esprits la cohorte sauvage , Fait retentir les airs. Ils suivent le coursier Qui s'éloigne toujours avec le cavalier. Celui-ci haletant, tout couvert de poussière Excite son coursier qui sillonne la terre : 128 ACADÉMIE DE ROUEN. | De bleuätres éclairs jaillissent sous ses pas, Des veines des cailloux qu’il réduit en éclats. Par la lune éclairé, mais perdu dans l’espace, Chaque objet disparaît et l'horizon s’efface. Les astres semblaient fuir dans leur rapide essor. — Ma Lénore, as-tu peur? Pourquoi trembler encor? Vois, la lune est brillante, et douce est sa lumière. Hurrah! les morts vont vite, ils effleurent la terre, Tu ne crains pas les morts? — Malheur! laisse en repos, Laisse, laisse les morts au sein de leurs tombeaux. — J'entends le chant du coq ; le sablier s’épuise, Hätons-nous, le temps fuit, que l'Enfer me conduise ; Hätons-nous, mon coursier, je sens l'air du matin; Hurrah! les morts vont vite... accomplis ton destin '; Va, nous serons bientôt au terme du voyage; Nous sommes arrivés, nous touchons au rivage : Nous voilà, nous voilà, le lit est préparé, C’est le lit nuptial; il doit être paré. Ils arrivent enfin, mais, à bride abattue, Vers une grille en fer, fermée et retenue Par d'énormes verrous. Sa houssine à la main, Le cavalier s’élance et frappe un coup... Soudain Les verrous sont brisés, la porte gémit, tremble, Et s'ouvre avec fracas.... Les voilà tous ensemble, Au milieu des tombeaux ; et Ja lune éclairait Ces monuments nombreux que la mort habitait. : Dans le désir de rendre le texte plus exactement le traducteur avait dit d’abord : Hätons-nous , le temps fuit, que mon noir me conduise; Hâtous-nous, mon coursier, je sens l'air du matin; Mon noir, les morts vont vite........ etc . CLASSE DES BELLES-LETTRES. 129 Hélas! en cet instant, quel prodige effroyable ! Le cavalier n’est plus qu’un . Le local et les bâtiments du couvent des ci- « devant Célestins, situé à Paris près l'arsenal, seront, « sans distraction , employés à l'établissement des écoles « destinées à l'instruction des sourds-muets et des aveu- « gles-nés. » Un autre décret, du 28 septembre—12 octobre 1791, confirme le précédent , et contient des dispositions parti- culières à l'institut des aveugles, sur lequel je vais en- trer dans quelques détails. Des fonds assez considérables furent, en outre , accordés pour l'entretien de ces deux éta- blissements. En 17983, mademoiselle Paradis , aveugle et célèbre pianiste de Vienne , donna des concerts à Paris; et, ce qui était plus étonnant encore à cette époque , elle fit preuve de connaissances étendues en géographie, qu'elle avait acquises an moyen de cartes en relief , inventées par un autre aveugle célèbre, Weyssembourg , de Manheim, Valentin Haüy , né à Saint-Just en Picardie , le 13 novembre 1746 , savant modeste, qui possédait plusieurs langues et avait un talent prodigieux pour expliquer, je : Sicard (Roch-Ambroise-Cucurron), membre de l’Institut, ete., né à Fousseret près Toulouse, le 28 septembre 1742, mort à Paris le 10 mai 1822, Il avait abandonné depuis une dixaine d'années la direction de son établissement à M. Paulmier, instituteur. 200 ACADÉMIE DE ROUEN. dirais presque pour deviner les signes de convention em- ployés dans la diplomatie et les correspondances secrètes , frappé des talents de mademoiselle Paradis, coneut le dessein de se consacrer à l'instruction des infortunés privés de la vue. IL avait remarqué , à la porte de l'église de Saint-Germain-des-Prés, un jeune aveugle nommé Lesueur , de Lyon ; il lui donna quelques lecons , dont le succès surpassa ses espérances; et, avec l'aide de la Société philanthropique , qui lui fournit des fonds , il éta- blit, d'abord pour douze élèves pauvres, l'Institut des jeunes aveugles-travailleurs , dans une maison de la rue Notre-Dame-des-Victoires, On vient de voir qu'il fut trans- féré aux Célestins, en 1791, et le nombre des élèves gratuits fut porté à quatre-vingt-six. Ce rapprochement, en excitant une noble émulation entre deux hommes justement célèbres, aurait dû leur inspirer aussi une douce intimité ; malheureusement il n'en fat pas ainsi. Lors de la tourmente révolutionnaire , des opinions opposées au nouvel ordre de choses fail- lirent coûter la vie à l'abbé Sicard , qui dut en partie son salut aux démarches actives et courageuses d'Haüy. Ce- pendant , quand la tranquillité fat rétablie , Sicard , qui voyait avec peine la gloire du fondateur d'un établisse- ment analogue au sien , dont il n’était que le continuateur , ne négligea rien pour s'élever sur les ruines de son émule. Les deux institutions furent séparées en l'an IL Les sourds-muets furent placés à Saint- Magloire , rue du Faubourg-Saint-Jacques, où ils se trouvent encore , et les aveugles à Sainte-Catherine, au coin des rues Saint-Denis et des Lombards , où ils furent installés Le 10 thermidor an HE ( 28 juillet 1595 ). Par un arrêté du 4 nivose an IX ( 25 décembre 1800 ), le gouvernement consulaire ordonna la réunion à l'hospice des Quinze-Vingts des CLASSE DES BELLES-LETTRES. 203 aveügles-travailleurs , qui restèrent pendant quatorze ans confondus avec les pauvres mendiants, jusqu'à ce que M. Guillet , nommé directeur de l'établissement, obtint, par ordonnance du 8 février 1815 , que l'institution fût ren- due à sa première destination, et placée dans un local séparé. Haüy, étranger à toute intrigue , en proie à des cha- grins domestiques, ne put résister aux altaques dont son établissement fut l'objet ; et , lorsque la suppression en fut arrêtée , il se décida à quitter une ingrate patrie ; pour aller fonder une nouvelle institution à Saint-Pétersbourg , où l'appelait l'impératrice-mère, Après cinq ans de séjour en Russie, il revint à Paris, et se retira chez son frère, l'abbé Haüy , où il demeura jusqu'à sa mort, arrivée au mois d'avril 1822, peu de jours avant celle du célèbre minéralogiste. Pardonnez-moi, Messieurs , cette digression à laquelle je me suis laissé entraîner par le souvenir de l'intimité qui a régné entre M. Hauy et mon père; je me hâte de ren- trer dans mon sujet, en jetant un coup-d'æil rapide sur les diverses manières d'instruire les sourds-muets. Aiusi que je: l'ai déjà dit, l'ancienne méthode consiste à les faire parler ; mais elle exige beaucoup de temps et de travail, et ne permet d'instruire qu'un seul élève à la fois. Elle est cependant encore usitée dans quelques écoles allemandes ; et M. l'abbé Moralejo , docteur en théo- logie de l'Université d'Alcala-de-Henarès, veut la faire revivre à Lille , où il vient d'établir un pensionnat pour les sourds-muets. J'observe toutefois que, dans son prospectus , il reproche à tort à l'abbé Sicard de n'avoir point appris à parler à ses élèves, car je l'ai vu moi- même en faire parler quelques-uns ; mais leur prononcia- tion caverneuse et monotoue élait pénible à entendre, 26 202 ACADÉMIE DE ROUEN. et ressemblait beaucoup à celle des automates de Maëlzel. Encore, un résultat si imparfait était-il le fruit d'une longue et courageuse persévérance de la part du maitre et de l'élève. En effet, quand on est parvenu à faire compren- dre au sourd-muet le jeu des organes de la parole, et qu'il cherche à limiter avec plus ou moins d'exactitude , il est encore muet; car l'une des plus grandes difficultés à vaincre est de lui faire prendre l'habitude d'expirer en même temps l'air nécessaire pour produire un son. La prononciation des gutturales demande un exercice parti- lier : pour l'enseigner, M. Sicard prenait les deux mains de son élève, plaçait l'index de l’une sur sa gorge , aux endroits convenables , et celui de l'autre sur la gorge de l'élève ; il prononcait alors fortement les consonnes qu'il voulait faire répéter, et l'élève averti, par le tact, de ce qu'il avait à exécuter , cherchait à reproduire , sur le doigt qui touchait sa propre gorge, la même sensation qu'avait éprouvée celui qui touchait la gorge de son mai- tre. Si l'on ajoute que tous ces soins n’aménent souvent aucun résultat, que Massieu ; cet homme d'une intelli- gence si remarquable , et qui était pour ainsi dire l'ame des séances publiques de l'abbé Sicard, n’a jamais pu pro- noncer une syllabe , on conviendra que l'abbé de l'Épée et son successeur ont fort bien fait de ne considérer ce moyen d'éducation que comme un accessoire pour ainsi dire de luxe, auquel on ne devait pas sacrifier un temps précieux , qui pouvait être employé plus utilement. L'abbé de l'Epée a suivi une méthode beaucoup plus féconde , celle des signes, avec lesquels un grand nombre de sourds-muets peuvent recevoir à la fois Les lecons d'un seul maitre. L'abbé Sicard y a fait d'importantes améliorations ; ce- pendant , il avoue lui-même qu'il ne l'a point portée à la perfection. En eflet, obligé d'avoir souvent recours à de _ CLASSE DES BELLES-LETTRES. 203 longues pantomimes pour développer le sens d'un mot, ses signes n'étaient pas constamment identiques pour le même mot ; et, d'un autre côté, le même mot pouvait être représenté par plusieurs signes. M. Jamet, qui ne connaissait , assure-t-il, ni l'une ni l'autre méthode lorsqu'il a eu la première idée d'ins- truire des sours-muets, en a inventé une qui lui sem- ble préférable : « Je ne me borne point, ditl, comme M. Fabbé de l Épée , à faire écrire mes élèves sous la dictée des i5nes. [72 « Je ne m astreins point, comme M. Sicard , à rendre toujours les mots de notre langue par de longues pan- tomimes. Je n'emploie les scènes mimiques que lorsqu'il s'agit de faire concevoir au sourd-muet le vrai sens ou les diverses acceptions d'un mot; mais une fois qu'il est compris , nous n'avons plus besoin du secours de la pan- tomime. Un signe unique , simple et concis, la remplace. Dans les entretiens que nos élèves ont entr'eux , ou avec leur maître, ce signe tient lieu du son de la voix, Cest une parole manuelle , presque aussi simple que la parole orale, » Peut-être , Messieurs, trouverez-vous que je me suis un peu éloigné de M. Piroux. Je m'empresse d'y revenir : son discours ne fait connaître sa méthode que d'une ma- nière très générale ; on voit seulement qu'il a adopté la dactylologie inventée par le portugais Pereirès , qu'il ne nomme pas , mais qu'il désigne d'une manière inexacte , par ces mots : Monneur à l'ingénieux rsracxoL qui fit une découverte si précieuse ! I ne parle d’ailleurs d'au- cun des hommes célébres qui se sont consacrés à l'éducation des sourds-muets. Ce discours n'étant guère susceptible d'analyse , je vais vous citer les passages les 204 ACADÉMIE DE ROUEN. plus propres à vous donner une idée des bases de son système , qui ne me paraît pas très clairement exposé : « La science de l'homme consiste, dit-il, dans la science des rapports des deux parties qui le constituent ; c'est-à- dire, dans la classification et la subordination des phéno- mènes que présente leur réunion. Or, nous rencontrons dans l'homme, tel qu'il est dans la société, cinq ordres de phénomènes distincts, dérivant les uns des autres. Tels sont, 1° ceux de la vie; 2° ceux du mouvement ; 3° ceux du geste; 4° ceux de la parole ; 5° ceux de l'écriture. Ainsi vivre, agir, paraître , parler et écrire ;, c'est tout ce qui compose le domaine de l'homme social, » « Comme nous, ajoute-t-il plus loin, les sourds-muets jouissent naturellement de la vie , du mouvement et du geste ; mais ces trois ordres de phénomènes composent toute la sphère de leur existence : la parole et lécri- ture , si nécessaires au commerce des intelligences , leur manquent totalement. « Nous ne chercherons pas à prouver par des raisonne- ments ou des faits que la parole peut être rendue aux sourds-muets , ainsi que l'écriture considérée comme la peinture des sons et des articulations de la voix , parce qu'un pareil résultat, quelque avantageux qu'ilsoit, est un accessoire qu'on ne peut procurer à la généralité des individus ; mais nous démontrerons qu'en eux la parole et l'écriture peu- vent être merveilleusement suppléées. Chez nous le geste perfectionné a dù conduire à la parole , et la parole à l'écriture ; pourquoi, chez les sourds-muets, le geste per- fectionné ne conduirait-il pas à une parole visuelle analogue à la parole ordinaire, et cette parole visuelle et perfec- tionnée à une écriture analogue à l'écriture ordinaire » ? M. Piroux appelle le dessin à son secours, pour faire L CLASSE DES BELLES-LETTRES. 20) connaître à ses élèves la liaison qui existe entre le geste, la dactylologie , l'écriture et les objets de la nature. Au reste, le mode d'enseignement du nouvel instituteur est mixte; C'est-à-dire qu'il est tour à tour simultané et mutuel. Je ne doi: pas manquer d'ajouter que le discours dont j'ai l'honneur de vous eutretenir a été composé par M. Piroux, pour sa réception à la Société royale de Nancy, et que , d'apres les usages de cette Société , il devait être lu à la séance publique annuelle, de sorte qu'il est présumable que l'auteur aurait evaint de fatiguer une nombreuse assemblée, s'il avait donné sur ses procédés, de plus longs développements, qui se trouveront d'ail- leurs dans un ouvrage élémentaire qu'il publie par livrai- sons. IL paraît en avoir déjà obtenu de grands succès, qui doivent s'accroître encore avec le temps, si lon en croit la réponse que lui à faite M. Giroude, président de la Société. Je terminerai ce rapport par vous en citer quelques passages. « Vous m'avez prévenu , Monsieur, en disant que cette institution était due à la philosophie, qui, de nos jours, a jeté une si vive lamière. C'est là que vous puisez, par une habile pénétration ; les moyens de venir au secours de tant de malheureux privés du bienfait de pouvoir com- muniquer avec les autres hommes. J'entends cette phi- losophie prudente, éclairée, modeste quoique sublime , se renfermant dans les bornes prescrites à l'intelligence humaine ; non ce philosophisme ambitieux, irréfléchi, qui séduit , trompe et égare les esprits superficiels ou paresseux ; qui décide de tout sans rien approfondir ; qui tranche les questions les plus ardues, soit en morale, soit en politique , enfante la vanité, erreur, l'entétement, et répand dans la société les doctrines les plus funestes à sa tranquillité et à son bonheur, 206 ACADÉMIE DE ROUEN. « Il n’en est pas ainsi de vous, Monsieur, vous avez senti, apprécié ce qu'une douce philantropie avait insinué à vos maîtres, à vos guides dans la carrière que vous parcourez, Votre nom s'associera aux noms glorieux des de l'Epée , des Sicard. Comme eux, vous avez compris combien il est beau de consacrer ses talents à restituer aux inno- centes victimes des jeux bizarres de la nature, les facultés dont elles étaient privées, et d'opérer en leur faveur un prodige qui les étonne autant que ceux qui sont témoins de leur métamorphose ». siecle ue ls se en otn eo ee sn es se d'e'e sinliole sos ea ses + po gi qe. « Les développements théoriques que vous avez donnés à votre méthode n'ont pas manqué de frapper les es- prits qui se sont un peu occupés d'idéologie. Ils ont reconnu que vous n'êtes point étranger aux doctrines qui servent a expliquer l'homme. « Vous avez aussi, à vous , une opinion particulière, et, comme vous le dites, l'ambition de vous créer un sys- tème. Après vous avoir entendu, on ne peut vous en contester le droit, et, quand il n'aurait pas un assen- timent général , la critique serait impuissante contre les résultats positifs qui sont les conséquences de votre théorie. « Oui, c'est par les opérations des deux principes qui constituent l’homme, que l'on peut juger de ses facultés et de sa nature. Ces bases, sur lesquelles vous yous appuyez, sont reconnues par tous les philo- sophes, et vous avez sur eux l'avantage d'en déduire des vérités précieuses dans la pratique ». « Vous modifiez l'existence des élèves confiés à vos soins , vous agrandissez la sphère de leur intelligence ; vous réparez les erreurs de la nature ; et, non content CLASSE DES BELLES-LETTRES. 207 de leur faire comprendre les avantages de l'instruction et de la vertu , vous élevez leur pensée vers ces objets si dignes de leur affection. L’estime publique , le témoignage d'une bonne conscience , voilà, sans aucun doute , les premiers biens de l'homme , la source de la paix et du bonheur. Vos élèves trouvent ces maximes sur le tableau de vos leçons, et une heureuse habitude de les y voir répétées les grave profondément dans leur cœur ». » Ainsi, éclairer leur esprit , former leur jugement , diriger leurs sentiments vers tout ce qui est juste, utile , honorable , voila la noble tâche que vous vous êtes im- posée et le but de votre louable ambition. « Les succès qui ont répondu à vos premiers eflorts et qui vous ont attiré les suffrages de tous les amis de l'hu- nité, répondent assez de votre avenir ». NOTICE STATISTIQUE SUR LES AVEUGLES ET LES SOURDS-MUETS DU DÉPARTEMENT DE LA SEINE-INFÉRIEURE, PRÉSENTÉE A L'ACADÉMIE ROYALE DE ROUEN, Dans sa séance du 13 juillet 1832, Par M. A.-G. BALLIN, ARCHIVISTE. Messieurs , J'ai eu l'honneur de vous entretenir , il y a peu de temps, des établissements fondés pour l'instruction des aveugles et des sourds-muets ; je vais vous présenter aujourd'hui, comme la suite naturelle de mon premier travail , une notice statistique sur ceux de ces infortunés qui existent dans le département de la Seine-Inférieure. . Le gouvernement, qui s occupe depuis long-temps d'amé- liorer leur sort, a demandé, en 1831, des renseignements fort étendus sur les aveugles et les sourds-muets ; je m'em- presse de mettre sous vos yeux un tableau contenant les Observations . CR ec e 2 ; ] U . F4 à ®. » apilukatios Du Ca £ Le Er - coudre”. ? Lô. De . | avenue accrdmels | / DD nr — TER ne e = nn. . U , = wiuwct DdiqenH | aiscs. J nflaisese T Coral Rs ——— Eotal GE PB 1 Cortal 1800 lite) 139.139 22.10 D Le] 41122 10 | 406 D 9 Etre y #1 155 | 30. 12 80. 92|%4 16 Qures 43 u m2 | 4e 7492 | 50 | 222 55h Fire re | L Vrois Souvds-mudts nl 08 | Dont aus ave ugles. ques dont la cetil est LONDRES. SNS: ADN «fc hirde 38 loue 27 ae Honesd51 \ j 404, RENE EL: : LPOET brendigents ou rendant parité lesgiuels Sos Conpir is prié Ceux ) MES DESSoLA' CES dans L faible Jareduf te Leur Travail elceux quié Bud, Au rtombre de #, ensemble ._.... ME 2) À of Valrance dont au nombre ce... Ne Li: FR $ veugles -nés n'esl que du à uarE de celut des Oonsxs- muelg, reed Les malades ou accidents élit sronbrecsses le blil des aveugles 31 lu i des Jours - muets . QE obsrvafen cafilique pour qu 4 Jarre Zs —+ ont depasse Fo arw, landis gu æ Jresrte La nike des our red . . ‘ nl + que, aÿyarrl ur pion de vue, doivenr pie gustS| 993 raie 2 | É tderés CPOITII112 aveugles . hs emiuries #00) rend‘ velot Gcÿ 2 Jr] eds ture fille 274 a onfele islruils a l'ingflahor de Zar'is, re Cr tre Ca fairr que Les Éravaux trhdustriels il sronlren fer: gens, Eux que Sonba l hospuce 2er al ComMruiliquentt erilr eux du RLOYEIE af Partad wuneleve def, abbe de t Eye, ladbe Auby ,nort loufreceminentt-d£ves ur «13 Juillet LE? par œu.d. all y Archiwiste. Fu gra des Fo nn den sourds - muet sxuilamt Daus Le Départanent- di (te Share {ufexieure au Counmenrceimeu. De 1822. 7 ÉLvemales pau ncnDda ds on male Goo Drns nel Ce Observations ; e Vestes - MC - 2 & [a = L dt _— == ee de : { 5) dr: à » Ou Dessous au -Deosoud au dessu Tous A Au “desious De15 à aa dessus tous ea NX écaprtulatior au ak [Pre - coudre”. Æ Te SES Ÿ E De 15 am. Ne 15 aw. De 30 am. avale. De 15aus. 30 ams. De 3oaus. Don eu b. Se ne. Ta rule ecole s | Cu Toi è a —_— : ——s— — 2 Ê 2 wi m. | S ù wé Cora m2. avul md. ais qeméral aude ous MA aus sud nul sud: aued ud. ay a ii et En Qu dessous De Jo ans - derus Pine Û 29.1] 5 È ou ||) DÉSo ar : 9 6 9 Havre - , 43 Lt M] ] 1146852 Vufihadt 3 48 1 1 " 2? 11/2 3 | Vrois Souxd- muals £ | Sont aus aveugles. y | | n SPRICE Mes JVernbre d'avcugles dent ln cecile est complete 2 rss 391 ï j 1 p ANémibre de ceëx que, æyarit ur pue ne de vie, divers 404. ; 923 : ù ; cependarébre Cornhidères Grnme aveugés. -. : 7 el | F | : A Wombre d'aveugles cadets ottrmierdand prarrrté né Bsguels. tent conspiris 1êrie Ceux: « n G lr06) 1 1 L1 LITE ui (ouvert giéelques jesfources dans Le faible aredeuitite leur lravail cer gitè jrs oc) Le Te Aépiitaux , au nombre de $g ensentle 355 / larren, 4od. use qui anFaed'aisancevonl-au nombre de. Lee CPE 3 GS $ ’ 6 LAN CE] MECS, C) Le nombre des aveugles -nés nes que du quart de celut des dot. mue, roues Les causes de cécité par mélaches ou accidents éant nombres le tobxl des ave ls est presque double de celui des Jours - muets. Ge obsrvañen caplique Jrourquf h, par me Les = — he ee ee aveugles Jelaat des 376 or dopasse Jo arts, landis gu & preine- La inoile des dourrls rl C2 hi cf 6 ; 11h 6 140$ ah 2 os 33 29 |ÿ) o Deux re rues: une fille étre garenonfele ursfrui@ à linsflahon de Zaris Tama ] ‘ Lasteurs aubres Javent-lire écrire C4 faire quelques Favaux endustriels 14 rmonlrenfes, ds A —— —=— —— Rare 00 ru ceux qui nb l'haypite gent al communiquent er au mogers 218 100 26 18 giu leur ontele Aciqnés pou anelève de l'abbé de { Epreé, labbéAuby, nor pp. age, forFavancé” Present à L'Académie Hoyalerde Houen , dort Ja wexrce dei 73 Juillet 1832, jar x. Bali : Archiviste. CLASSE DES BELLES-LETTRES. 209 résultats des recherches faites pour répondre à cette demande. Vous y verrez que Le nombre des aveugles est de quatre cent huit, et celui des sourds-muets de deux cent vingt-deux, distingués en diverses classes. Des quatre cent huit aveugles, plus de trois cent cin- quante le sont devenus, soit par accident , soit par maladie ; les autres sont aveugles-nés. Quelques familles inspirent un intérêt particulier : un tisserand de la commune de Biville-la-Baignarde , arron- dissement de Dieppe, a trois garcons de six, huit et douze ans, et une fille de quatorze ans, tous quatre sourds-muets, Une pauvre veuve de la ville d'Eu , même arrondissement , a deux filles sourdes-muettes , dont une infirme ; à Saint- Martin-le-Gaillard , aussi dans l'arrondissement de Dieppe , trois pauvres orphelins , un frère et deux sœurs, sont égale- ment sourds-muets ; à Valmont , arrondissement d’'Yvetot , un journalier, père de cinq enfants, a deux filles sourdes- muettes. Il est à remarquer qu'à Saint-Nicolas-de-Blicquetuit, même arrondissement, une femme de trente et un ans, sourde-muette , a une fille de treize ans, aussi sourde- muette, et deux autres enfants qui ne sont pas privés de l'ouie. On n'a reconnu aucune circonstance locale qui füt de nature à déterminer plus particulièrement la cécité ou la surdi-mutité ; on ne peut donc attribuer ces infirmités qu'à des causes générales que je vais rappeler brièvement, d’après des notes dues en partie à M. Desjardins, médecin au Havre , et à notre confrère M. Blanche. Tous nos organes sont modifiés par les influences du climat ; par les tempéra- tures sèches où humides, par la position des lieux , par leur état électrique et par la nature du sol. Ces diverses circonstances exercent principalement leur action sur organe de la vue, et tendent à y déterminer des maladies 27 210 ACADÉMIE DE ROUEN. qui peuvent entrainer la cécité. Au rang des causes de cette affection , il faut placer en première ligne la blancheur éblouissante d’un sol couvert de neige, la clarté presque aussi vive des terrains calcaires et des sables blancs, qui réfléchissent fortement les rayonssolaires. L'exercice de certaines profes- sions y dispose également ; celles, par exemple, de fondeurs de métaux , de verriers , de fabricants de cristaux, de forge- rons, de graveurs et des personnes qui sont obligées de travailler à une clarté vive et de se servir de microscopes ; enfin , l'exposition à la vapeur de certains gaz irritants, aux émanations marécageuses ou aux vents, qui portent avec eux des substances calcaires et salines : ce fut à cette dernière cause que l'on attribua l'ophthalmie qui régna sur notre armée en Egypte. Quant aux causes de l'infirmité non moins déplorable qui afllige les sourds-muets de naissance , elles résident toutes dans une anomalie de l'organisation ; ainsi, un sourd de naissance est nécessairement muet, puisque la parole n’est que limitation de ce qu'on entend prononcer par ses semblables. IL serait impossible de trouver dans certaines conditions de l'atmosphère ou deslocalités , une cause à cette infirmité , et, en supposant qu'elle sobservät plus fréquem- ment dans certaines contrées que dans d’autres , il ne paraît pas que la cause püt en être trouvée ailleurs que dans une organisation incomplète , sur laquelle l'air , les lieux et les saisons ne sauraient exercer une influence appréciable. A l'égard du mutisme accidentel , il est fort rare et résulte presque toujours de la surdité , elle-même acci- dentelle. Ainsi, qu'une personne devienne sourde : si elle est jeune , elle perdra peu à peu la mémoire de quelques paroles, et progressivement elle oubliera tout ce qu'elle aura su précédemment, et deviendra muette ou ne pro- noncera plus que des mots méconnaissables. On en cite un exemple récent chez un jeune homme en qui le CLASSE DES BELLES-LETTRES. 211 mutisme a suivi la surdité. Cette observation vient à l'appui de ce que j'ai dit précédemment sur le peu d'utilité qu'on doit attendre des essais toujours pénibles et souvent in- fructueux qu'on voudrait tenter pour rendre la parole aux muets. Il serait bien à désirer qu’on pût former, en faveur des aveugles et des sourds-muets, des établissements où tous ceux qui sont encore jeunes pussent recevoir quelque instruction et apprendre un élat ; mais leur grand nom- bre paraît y mettre un obstacle insurmontable. Toutefois, Messieurs , vous apprendrez avec satisfaction que le con- seil municipal de Rouen vient d'acquérir de nouveaux droits à la reconnaissance publique, en s'occupant des moyens de donner un digne successeur à l'abbé Huby, qui, pendant quarante ans, a lransmis aux pauvres sourds- muets de cette ville les lecons qu'il avait reçues du célèbre abbé de l'Épée. 022257700700 07006000000000000000000600506000006050005000000 DISCOURS DE RÉCEPTION DE M. BREVIÈRE. Msseu RS y Depuis long-temps l’homme a cherché les moyens d'étendre le domaine de ses plaisirs et de multiplier ses jouissances. Son active industrie , quai ne s'endort jamais., a trouvé le secret de reproduire à ses yeux tous les ob- jets visibles. Par des arts admirables et variés, sur une infinité de corps différents , il a su faire revivre le passé avec tout son charme , toutes ses sensations, toutes ses impressions ; en un mot, tout ce qui pouvait égayer ses yeux et parler à son imagination. La peinture fut in- ventée ; mais il n'a pas craint de multiplier les merveilles d'un art enchanteur , en les reproduisant par une foule de procédés nouveaux , de l'emploi desquels näquirent les professions diverses qui se rattachent à l'art du dessin. L'idée de graver une figure quelconque sur ua corps dur, remonte sans doute à l'antiquité la plus reculée ; mais cet art n'a véritablement acquis ses plus importants résultats que depuis la découverte du procédé de tirer des épreuves , empreintes où estampes de ces mêmes figures. Depuis cetie découverte admirable, le génie des artistes est étudié à reproduire , avec une fidélité souvent scru- CLASSE DES BELLES-LETTRES. 213 puleuse, tous les objets qui peuvent tomber sous nos sens, et tous les jours il cherche à étendre ses conquêtes sur une foule de choses dont le souvenir même nous échap- perait sans son secours. Et vous le savez, Messieurs ; l'art de la gravure a contribué plus qu'aucun autre au déve- loppement des arts, des sciences et de l'industrie, en facilitant singulièrement l'intelligence d'un texte qui sou- vent, sans l'aide d'une estampe , présenterait infiniment moins de clarté. La simple gravure au trait, par exemple , de la figure du lion, donnera une idée plus complète des formes de cet animal, que les plus belles descriptions ne le pourraient faire. Malgré l'opinion de quelques auteurs qui ont écrit sur l'origine de cet art, il est fort dificile de déterminer l'époque précise de l'invention ou de l'introduction en Europe de la gravure en bois. Je ne chercherai pas à percer l'obscurité qui couvre cette phase de l'art ; je dirai seulement qu'on a cru apercevoir des traces de l'invention de la gravure en bois dans la fabrication des cartes à jouer, qui étaient, comme on sait , d'un usage déjà ancien au quin- zième siècle, Suivant la chronique du petit Jehan de Saintré (1364—:1367 ):, les pages du roi Charles V jouaient aux dés et aux cartes ; mais rien ne prouve que ces cartes étaient imprimées au moyen de formes gravées. Le baron de Heineken , dans son curieux ouvrage intitulé : Idée générale d'une collection d'estampes ; rapporte le passage d'une ancienne chronique manuscrite ; déposée dans la bibliothèque publique de la ville d'Ulm, ainsi conçu : « On envoya des cartes à jouer, en ballots, «tant en Italie qu'en Sicile, et en d'autres endroits par «mer, pour les troquer contre des épiceries et autres « marchandises. On peut voir par-là quelle quantité de car- «tiers et de peintres demeuraient ici. » M. de Heineken ne cite point la date de cette chronique ; mais il n'en 214 ACADÉMIE DE ROUEN. conclut pas moins qu'une déclaration du Sénat de Venise fut motivée par l'introduction dans cette ville des cartes de fabrique allemande. En effet, un décret du Sénat de Venise, rendu en 1441, pour la prohibition des cartes à jouer , peintes ou imprimées , venant du dehors, à cause du dommage qui en résultait pour les fabricants de cette ville, semblerait corroborer cette opinion. Toutefois, ce document historique , relaté dans les Lettere pittoresche, prouve évidemment que l'art de graver sur bois était pratiqué en Italie avant cette époque. Néanmoins , Messieurs , la plus ancienne estampe connue , portant une date certaine , est de l’année 1423. Grossière- ment gravée sur bois, elle représente un saint Christo- phe , elle est sans marque et sans nom d'auteur, mais le goût de dessin qu'on remarque dans celte pièce, en la comparant avec d’autres images pienses conservées dans les bibliothèques de l'Allemagne , fait penser qu'elle est due à un graveur de cette nation. Le premier artiste français, connu jusqu'à présent, qui ait pratiqué la gravure en bois, est Bernard Milnet. On connaît de sa main une estampe portant la date de 1454 ; ainsi, plus de doute, dans le quinzième siècle, la gravure en bois servait à multiplier les images de piété et les cartes à jouer. C'est ainsi que s'est frayée la route qui devait conduire à cette immense conception, appelée à avoir tant d'influence sur l'humanité : je veux parler de l'imprimerie. A peine cette découverte , due à Laurent Coster, per- fectionnée par Schoeffer , puis par Guttemberg , avait-elle produit les premiers livres , que la gravure en bois contri- bua bientôt, par un luxe étonnant d'encadrement, de vignettes et de figures , à l'ornement des éditions de ce temps. Avant que Guttemberg eùt mobilisé les types, on imitait par la gravure en bois les caractères de l'écriture. CLASSE DES BELLES-LETTRES. 215 C'était une économie ; le peuple satisfaisait sa piété à peu de frais. On lui vendait des prières, des indulgences, imprimées au moyen de formes en bois. Souvent ces pages grossières , misérablement taillées , étaient ornées de dessins , de figures grotesques ou diaboliques , d’anges ou de bienheureux. l'imprimerie naissante détruisit une partie de cette industrie nouvelle ; elle en conserva seu- lement le genre de décoration. Toutefois , si les impri- meurs firent paraitre d'abord quelques ouvrages avec des gravures entièrement gouachées et rehaussées d'or, c'était un sacrifice fait à d'antiques habitudes et au besoin des calligraphes et des enlumineurs dont la profession était de décorer de larges bordures , de miniatures brillantes d’or, de carmin et d'azur, leurs précieux manuscrits. Mais, dans cette lutte inégale, la calligraphie devait aussi nécessairement succomber ; après avoir produit dans ses derniers efforts ces chefs-d’'œuvre d'une exquise beauté que nous admirons encore aujourd hui. Restée seule en possession du plus puissant moyen d'éclairer les siècles à venir , l'imprimerie continua de s'embellir des pensées des habiles peintres et graveurs qui illustrèrent le quinzième et le seizième siecle. C'est dans les livres imprimés à cette dernière époque, qu'il faut chercher les chefs-d'œuvre du talent des Æ#{bert Durer, des Holbein , des Æltorfjer , des Bernard Salomon , des Voëiriot, des Mont, des Fichem , et d'une foule d'autres artistes dont les productions ont marqué la plus belle époque de la xilographie. L'empressement que nous met- tons encore à la recherche et à la possession des gravures dont nous venons de citer quelques auteurs, s'explique facilement; car, outre la manière admirable et facile dont la plus grande partie de ces estampes sont dessinées, on à peine à concevoir de quel degré d'habileté, de quelle patieuce extraordinaire il a fallu être doué pour accomplir 216 ACADÉMIE DE ROUEN. cette tâche difficile, à laquelle les fibres du bois, d'uné contexture quelquefois inégale ou läche, opposaient , surtout dans les lignes croisées , un obstacle continuel et presque invincible. La gravure en bois donna aussi naissance , vers le com- mencement du seizième siècle, à un autre procédé , qui nous a transmis des productions fort remarquables des artistes de ce temps; je veux parler de la gravure en clair-obseur , vulgairement appelée camaïeu. Quelques auteurs en attribuent l'invention à François Mazzuol , dit le Parmesan ; d'autres, à /ugo da Carpi, artistes ita- liens. Les Allemands en revendiquent l'honneur en faveur de l'illustre {/bert Durer, de Nuremberg , célèbre pein- tre, graveur en taille-douce et en bois. Quoiqu'il en soit, ce procédé offrit alors, outre le mérite de la nou- veauté, l'avantage très réel de traduire fidelement les dessins des grands maîtres de ce temps, qui, presque tous largement exécutés sur un papier coloré , présen- taient un mélange piquant de lavis et de travaux hardis à la plume, rehaussés de blancs rapportés au pinceau , ce qui produisait des eflets approchant de l'espèce de pein- ture z2onochrôme des anciens. André Andreani, dont presque toutes les estampes sont en clair-obscur ; eut dans ce genre des succès étonnants. Mais bientôt la gravure à l'eau forte étant devenue , par ses procédés prompts et faciles , le patrimoine des peintres et des dessinateurs , elle jeta, sinon dans le discrédit, au moins dans l'abandon, la taille ou gravure en bois, et notamment celle du camaïeu, qui nécessitait plus de planches , et partant plus de combinaisons dans les travaux. Cependant, vers 1730, un amateur célèbre d'Italie , le comte Antoine-Marie Zanetti , fit avantageusement revivre dans sa patrie la gravure en bois , trop injustement rejetée, si lon considère le genre de mérite qui la caractérise, CLASSE DES BELLES-LETTRES. 217 et la quantité prodigieuse d'épreuves qu'elle produit , sans subir d'altération sensible. Zanetti donc exécuta de sa main , d'apres les dessins de Raphaël et du Parmesan, de la collection du comte d'Arundel, une suite considé- rable d'estampes, gravées et imprimées en clair-obseur , dont les planches montaient quelquefois , dit-on ; pour la confection d'un seul morceau , jusqu'au nombre de cinq *. Au surplus, soit mécontentement, soit caprice, Zanetti , quelques années avant sa mort, brüla toutes ses formes, dont la perte aujourd'hui rend son recueil extrêmement rare , et cette espèce de gravure retomba de nouveau dans l'abandon. Au reste, on peut, avec bien moins de planches que Zanetti , graver le clair-obscur , puisqu'il est constant que les anciennes estampes n'offrent, en général, que le résultat de l'impression successive de deux formes disposées de manière que la première opérait le travail d'attente, en couvrant entièrement le papier blanc d'une demi-teinte transparente , excepté seulement aux endroits où les lu- mières ou réchampis se trouvaient réservés au moyen de tailles en creux où la couleur teignante ne pénétrait pas ; et la seconde perfectionnait l'épreuve ; en y rapportant les contours et les ombres par traits et hachures impri- més en noir : ce travail n'est donc qu'une association de * En 1830 , j'eus l’occasion d'exécuter plusieurs morceaux de gravure dans le genre du clair-obseur, où les planches se sont élevées , pour l'impression d’un seul dessin , jusqu’au nombre de cinq. Ces gravures font partie de l'Ælbum typographique de l'imprimerie royale , exécuté pour LL. MM. Siciliennes, par les soins éclairés de M, le baron de Villebois , et d’après les dessins de M. Chenavard. Ce n'était, en quelque sorte , qu'un travail d'essai, auquel le temps n’a pas permis de mettre tout le soin qu'il pouvait exiger. Cependant, tel qu'il est, il peut donner une haute idée du parti avantageux que l’on pourrait tirer de ce genre de gravure, exécuté surtout avec intelligence. 28 118 ACADÉMIE DE ROUEN. tailles d'épargnes et de gravures en creux, et l'on na fait que le détourner de son premier but , lorsqu'environ cent cinquante ans après son invention , on l'a appliqué à la fabrication des papiers peints et des indiennes ou toiles fleuronnées et à ramages. Parmi les artistes nés ou originaires de cette ville, qui ont exercé la gravure en bois avec distinction , je ne dois pas omettre de vous signaler Pierre, Vincent et Nicolas Le Sueur ; ce dernier, qui vivait au dix-huitième siècle, a exécuté une suite considérable de beaux camaïeux, d'après les dessins de Raphaël, du Parmesan et autres, pour le cabinet de Crozat, qui se font remarquer par la précision, la correction et la justesse des rentrées. Une femme, Elisabeth Le Sueur, parente des précédents , se distingua aussi dans cet art, qui avait amusé les loisirs d'une reine de France, Marie de Médicis. Cependant, la décadence dans laquelle tomberent les arts dans le dix-huitième siècle , la difficulté de former de bons graveurs sur bois, jointe à la lenteur naturelle du procédé alors en usage , peut-être aussi le caprice de la mode, idolâtre du fini précieux et maniéré des tailles-douces, firent abandonner presque entièrement ce genre de gravure, ou du moins il ne fut plus employé que pour des vignettes d'une petite dimension, des culs-de-lampe insignifiants, des lettres grises, où le mauvais goût qui dominait alors se fait remarquer d’une manière notable. Enfin cet art, qui avait produit dans l’espace de deux siècles tant de chefs- d'œuvre, abandonné presque aux seuls dominotiers, rétro- grada pour ainsi dire vers son enfance, et les ballades populaires furent bientôt les seuls ouvrages qui s’'enri- chirent de ses dernieres et tristes productions. Papillon est en quelque sorte le dernier graveur du dix-huitième siècle qui ait montré quelque habileté dans la xilographie. Nous lui devons un Traité historique et CLASSE DES BELLES-LETTRES. 219 pratique de la gravure en bois, où l'on peut trouver d'ex- cellents conseils pour ceux qui seraient tentés d'entre- prendre de grands morceaux dans ce genre; mais l'extrème crédulité de l'auteur l'a fait tomber, quant à la partie his- torique , dans de graves erreurs ; qu'ont relevées ceux qui ont écrit depuis sur cet art. : Tandis qu'en France la gravure en bois tombait dans une désuétude presque absolue, un artiste anglais, Thomas Bewick\, retrouvait un procédé plus expéditif, plus facile 1 Élève de Bielby, graveur au burin de Newcastle, né en 1753, dans le petit village de Cherryburn, hameau du Northumberland, mort en 1828. L'an 1555 fut la première époque de la réputation de Thomas Bewick. Cette même année, la Société des Arts de Londres avait proposé, pour le concours annuel, un prix pour la meilleure gravure sur bois. Thomas Bewick laissa bien loin derrière Ini tous ses concur- rents, par la production d'une estampe représentant un vieux chien de chasse, d'après son propre dessin, Les Anglais font honneur à Thomas Bewick de l'invention de la gravure sur bois debout. Je suis convaincu que ce procédé a été connu des graveurs en bois du seizième siècle; plusieurs estampes de cette époque en fournissent la preuve évidente. Peut-êtie la difficulté de se procurer des planches obtenues dans le diamètre du bois, d’une dimen- sion suffisante pour l'exécution des grands morceaux de gravure, est-elle une des causes qui ont fait abandonner ce procédé. Qu'il me soit permis d'extraire de l'ouvrage de Papillon une petite anecdote qui trouve ici naturellement sa place; elle nous servira à prouver que cet artiste, aveuglé (comme tant d’autres gens fort esti- mables d’ailleurs) par cet esprit de routine, ennemi mortel de tout progrès et de toute perfection, rejetait, avec cette assurance que donne une longue expérience, un procédé qui devait, quelques années plus tard, jeter tant d'éclat sur l’art qu'il exerçait. Voici ce qu'il rapporte dans son Traité historique et pratique sur la gravure en bois, tome Il, page 216: « [ya quelques années (1766) qu'un étranger parut à Paris, qui « gravoit avec le burin sur bois debout ; il prétendoit avancer beaucoup & par cet artilice; mais cet homme raisonnoit sans principes et san & art; il ignoroit que le bois debout ne peut se graver proprement avec o a tel outil que ce puisse être; car le burin ne fait qu'enlever le bois, et 220 ACADÉMIE DE ROUEN. que l'ancien, qui en même temps lui permettait de rivaliser avec la taille-douce , soit pour le fini, soit pour le gracieux. Il substituait ; pour la gravure des vignettes el ornements des livres , le bois debout au bois de fil, ce qui lui permettait d'employer des outils à peu près semblables à ceux des gra- veurs en taille-douce , au lieu de l'ancienne pointe où canif des graveurs anciens. Par cette substitution , l'art a gagné , l'artiste n'ayant plus dans son travail à traverser le fil du bois. Les premiers essais de Bewick furent loin sans doute des admirables productions sorties du burn des Nesbitt, des John Tompson , des Harvey, des Gubitz, des Clennell, et autres artistes formés à son école ; mais on ne peut s empé- cher d'y remarquer une aisance et une facilité de travaux , une vigueur d'effet et des détails rendus avec une pureté qui devaient déjà faire pressentir ce que deviendrait un jour cette invention, soutenue par l'étude et par l'exercice. Le procédé de Thomas Bewick fut importé en France , il y a environ quinze aus , par un artiste anglais qui s'est fixé à Paris. Les succès qu'il obtint dans ce genre encouragerent quelques artistes français à chercher aussi tous les moyens de rendre à cet art son ancienne splendeur 1, « il ne coupe point les tailles nettement et vivement comme il faut, qui « plus est , 1] les rend toutes barbelées, d'où il s'ensuit qu'elles pochent « toujours à limpression ; d’ailleurs, les contre-tailles faites avec le « burin paroïssant blanches à l'épreuve, ne sont pas recevables; d’un « autre côté, la pointe à graver ne peut couper et enlever facilement « le bois debout, à cause de la force du fil qui l’entraîne toujours en « dessous des tailles, malgré toutes sortes de précautions : ainsi, cette « méthode ne peut être estimable, de quelque façon qu’on prétende « l’exécuter, et elle n’est que trop réfutable par elle-même ». Que dirait aujourd'hui Papillon, s'il lui tombait sous les yeux une vignette sur bois debout , exécutée par Bewick, Harvey ou J. Tompson? 1 Je citerai avec plaisir un nom déjà bien cher aux amis des arts, M.Tony-Johannot, dont le talent si remarquable a beaucoup contribué à nationaliser en France ce genre de gravure. La reconnaissance m'impose aussi le devoir de citer notre estimable CLASSE DES BELLES-LETTRES. 221 Mais, sans parler ici de la facilité d'intercaler les planches en bois dans le texte d'un ouvrage , de l'économie , de la propreté, de la rapidité de l'exécution , de la quantité d'épreuves qu'on peut obtenir d'une forme, je dois signaler, comme une des causes de la prospérité de ce genre de gravure , l'avantage non moins grand de son application au procédé de la polytypie, procédé qui consiste à multiplier l'empreinte du dessin en la transportant du bois sur une planche de composition métallique. Cette opération a, du reste, beaucoup d'analogie avec la stéréotypie. Un fait bien digne de remarque, c'est que le procédé de la stéréotypie , qu'on croit avoir été pratiqué à Paris vers la fin du dix-septième siècle , n'ait pas été appliqué plutôt à la reproduction des planches en bois: Ce moyen était tout-à- fait inconnu au graveur Papillon, qui n'eùt pas manqué de le décrire. Cependant , le siecle dernier vit naître diverses ten- tatives plus ou moins heureuses, qui vinrent se réunir et se fondre, pour ainsi dire, dans la grande entreprise des assignats. La première émission qui fut faite de ce papier-monnaie nécessita la gravure de trois cents planches en taille-douce , portant le médaillon de la tête du roi. Les assignats furent répandus dans le public, la cupidité ne tarda pas à les contrefaire. L'examen des assignats contrefaits et des pro- cédés employés pour y parvenir , démontra que le premier contrefacteur d'assignats était le gouvernement lui-même , puisque, hors la premiere planche dont on se servait, toutes et savant confrère M. E.-H. Langlois, professeur de l'Académie de peinture et de dessin de cette ville. Les conseils éclairés de cet habile artiste ont dirigé mes essais dans la gravure en bois, Qu'il me soit permis de consigner ici un témoignage que sa modestie récusera peut-être; c’est que la libéralité avec laquelle il communique sa science, son talent si original et si varié, a puissamment contribué aussi à ranimer dans notre ville le feu sacré de la science et des beaux-arts, 222 ACADÉMIE DE ROUEN. les autres n'étaient que des imitations et des copies plus ou moins fidèles. Il était en effet impossible d'arriver à une identité parfaite, si l'on était obligé d'imiter une seule fois. Cette identité ne pouvait avoir lieu qu'autant que les planches ou formes seraient toutes le produit d'une planche ou type unique multiplié autant de fois que le nombre des exem- plaires à obtenir l'exigerait. Cette importante fabrication, confiée à des artistes et savants distingués , arriva , après des tentatives bien différentes ; au point d'identité qui seul pouvait calmer les craintes justement fondées que la première émission avait fait naître. En effet, Messieurs, le procédé le plus simple employé alors pour arriver à la reproduction du type en relief, était parfaitement semblable à celui de la fonte des caractères d'imprimerie, avec celte différence que, pour le polytypage, l'opération s'exerçait sur une plus grande surface , et qu'au lieu d'être en métal le moule ou la matrice ne pouvait se former qu'au moyen d'une espéce de plâtre durci et entié- rement dégagé d'humidité. Ainsi préparée , cette matiere, quoique fragile , pouvait, par un choc vertical, s'appliquer sur le métal en fusion , et donner une reproduction parfaite du type gravé. Depuis la fabrication des assignats cet art s'est encore perfectionné, et l'on obtient aujourd'hui, avec assez de facilité, à l'aide de l'alliage métallique connu sous le nom de Darcet3, des matrices plus solides des formes que l'on veut multiplier. 1 La composition métallique qui porte le nom du savant distingué à qui nous la devons, se compose de huit parties de bismuth, cinq de plomb et trois d'étain : elle se fond dans l'eau bouillante, c'est-à-dire au 93° degré du thermomètre centigrade. Je dois le dire pourtant, plusieurs établissements ont déjà abandonné, en y substituant une autre matière , l'emploi de ce métal, à cause de son peu de solidité et de la difficulté d'obtenir des clichés cxempts de soufflures. CLASSE DES BELLES-LETTRES. 223 Ce procédé assure donc à la gravure en bois un avantage immense de durée sur les aatres procédés inventés pour la reproduction d'un dessin ; car, de chaque type en bois, à l'aide de ce moyen, on peut obtenir un certain nombre de matrices ; chaque matrice peut, à son tour, produire un nombre beaucoup plus considérable de clichés. Ce dernier résultat, qui est la reproduction identique du type primitif, pouvant fournir à peu pres, sous la presse de l'imprimeur , pour chaque cliché seulement , environ cent mille épreuves, on concoit qu'une seule planche gravée aura servi à donner un nombre presque incalculable d'exemplaires , sans que la pureté du type en bois en paraisse sensiblement altérée r. Tant d'avantages réunis , et l'espèce de faveur dont Le nou- veau procédé de gravure sur bois paraît entouré , n'ont pu toutefois, jusqu'à ce jour, parvenir à procurer à nos graveurs dans ce genre le succès et la vogue dont les artistes anglais sont en possession. Mais cela tient à des difficultés tout-à-fait étrangères au mérite des artistes, difficultés qu'une persé- vérance soutenue fera, n'en doutons pas , disparaître. Alors l'Angleterre ne fournira plus, comme aujourd'hui, les gravures d'ouvrages imprimés à Paris; mais, pour cela, il faut aux artistes français des encouragements , la prospérité publique et la paix. Ces importantes conditions une fois remplies, nul doute que la xilographie n'atteigne un haut degré de splendeur ; ce que ferait prévoir seule cette soif de jouissances nouvelles si naturelle à l'homme, soif si ardente , si fébrile chez les générations actuelles. D’ailleurs , Messieurs , la gravure supplée depuis long-temps à l'iné- 1 Pour donner ici une idée de la quantité d'épreuves qu'une seule forme en boïs peut fuurnir, sans le secours du polytypage, sous la presse de l'imprimeur , je citerai la vignette gravée par J.-M. Papillon, en 1575, pour le Mercure de France. Cette vignette , imprimée comme spécimen dans son ouvrage sur la gravure en bois, ayait tiré, avant qu’il s’en servit pour lui-même, plus de quatre cent cinquante mille épreuves. Toutes Les tailles sont encore fort distinctes. 224 ACADÉMIE DE ROUEN. galité des fortunes ; les belles productions des peintres et des sculpteurs ne peuvent convenir qu'à l'ornement des palais ; mais si les tailles-douces des grands maîtres parais- sent, à cause de leur prix élevé, exclusivement réservées à la haute bourgeoisie, la gravure en bois a pénétré jusque dans la modeste chaumière ; perfectionnée comme elle nous parait susceptible de l'être, un jour (j'en ai l'espoir du moins ) nous la verrons lutter dans les grandes com- positions avee ses rivales ! ; en attendant, elle va sous mille formes, et en présentant les sujets les plus divers, satisfaire tous les goûts, toutes les imaginations , soit qu'elle retrace l'aventure périlleuse ou galante d'un preux du moyen âge, ou quelque trait de la légende dorée ; soit qu'elle offre la vénérable image de la céleste madone , ou enfin, ce qui est à l'ordre du jour, une scène d'élection. 1 Déjà les productions des artistes xilographes anglais peuvent sou- tenir sans désavantage la comparaison avec les plus belles planches en taille-douce. Une estampe de quatorze pouces de haut sur onze de large, gravée par Harvey et représentant l'assassinat de Sicinius Den- tatus, prouve jusqu'à quel degré ce genre est susceptible de s’élever. Tout dans ce morceau est digne de fixer l'admiration des artistes. Lors— qu'on connait ce chef-d'œuvre on est étonné que les graveurs français n'aient pas cherché à reculer les limites de la xilographie, qui est encore, pour eux, emprisonnée dans le cadre resserré de la vignette. Le succès d'une bonne estampe serait sans doute un pas immense vers l’'émancipa- tion de cet art, tandis qu’une vignette ordinairement imprimée sans soin, avec un texte dont elle n'est pas toujours l'accessoire obligé, est trop souvent soumise aux chances du débit de l'ouvrage auquel elle sert de frontispice , quand par bonheur elle n’est pas, dans son double emploi, empâtée sur la couverture. _MT fé Î Las \ bip o toto SE = f : RE (e J ÿ GAL + * Éspirance {oegleis èd ) — ; ee SP D PS LE 00 FA l'abth LIRE MES TD 2772 A G 761 ar be 7 2 A « < à 27. C MH age AA ee vont frise PA De hf TE Tara Han Pod 74 4e lue Pr ESSAI HISTORIQUE ET DESCRIPTIF SUR L'ABBAYE DE SAINT-WANDRILLE ; Par M. E.-H. LANGLOIS, DU PONT-DE-L ARCHE. S1 quelque chose pouvait adoucir aux yeux de l'humanité l'âpreté des tableaux qu'offrent les premières phases de notre monarchie , ce serait sans doute les réunions spon- tanées de ces hommes pacifiques qui, fuyant une société avilie par la bassesse et désolée par la violence, s'enfon- caient dans la solitude pour y méditer sur un meilleur monde , etrallumer , à l'abri du cloitre , le flambeau presque éteint des lumières. Mais , S'il était facile à ces pieux émigrants de renoncer aux espérances du siècle , de mépriser les superfluités de la vie, souvent ils n'emportaient au sein de leur retraite , avec ces besoins , inséparables tyrans de notre frêle nature , qu'un grand courage et de nobles désirs. Un 29 226 ACADÉMIE DE ROUEN. miracle seul, alors, pouvait les investir des moyens compli- qués , des ressources colossales qu'exigaient la solennité de leur entreprise et la naturalisation de plusieurs centaines d'hommes au fond d'un désert inculte et sauvage. Ce miracle s'opérait' ; les rois eux - mêmes volaient au secours de ces exilés volontaires , leur assuraient un vaste domaine, édifiaient leur temple et leur asile, les com- blaient de dotations, d'immunités et de franchises, A l'exemple des monarques, les grands seigneurs s'empres- saient de corroborer par des bienfaits, par des présents magnifiques , ces corporations naissantes, et les évèques manquaient rarement de les favoriser de tout leur pouvoir , immense alors , surtout lorsque, par le lieu de leur situa- tion , ces établissements religieux relevaient de leur diocèse. Le prélat ambitieux les voyait avec orgueil ajouter à l'importance de sa juridiction , augmenter le nombre de ses prérogatives 2 ; celui qui marchait humblement dans la voie de l Évangile , n'apportait pas moins de zèle à les portéger , dans l'espoir de voir fleurir dans leur sein les ! Ces associations nombreuses n'étaient pas toujours, il est vrai, le résultat d’une opération collectivement et simultanément entreprise et dirigée vers une fin combinée d'avance; quelquefois un simple ermite devenait seul, et sans lavoir prévu, la cause indirecte d’un grand établissement cénobitique : c'était quand son exemple, joint à impulsion du siècle, lui attirait beaucoup de compagnons qui venaient succes— sivement , adoptant le mème genre de vie, élever leurs cellules dans les environs de la sienne ; lorsque ces hommes, animés d’un même esprit, se régularisaient, de leurs travaux secondés par les libéralités des grands, et souvent par les pieuses corvées du peuple, naissait le monastère, ? Un peu plus tard, et pendant fort long-temps, l'autorité des évèques sur les monastères fut exclusivement restreinte, CLASSE DES BELLES-LETTRES. 227 doctrines sacrées et les vertus qu'elles recommandent. Une pareille attente n'était jamais déçue. L'oisiveté, la débauche , lambition, la haine , l'avarice , l'égoisme au cœur de glace, n'avaient point encore souillé de leur odieux cortége ces enceintes sacrées. Tout entiers à leurs devoirs, ces premiers solitaires n'abandonnaient la prière et l'étude que pour remplir le vœu de leur saint patriarche : , en se livrant avec ardeur au travail manuel. Il était pour eux lantidote salutaire contre les maux réels et les illusions ficheuses qui naissent de l'inaction corporelle et de l'ennui; il leur offrait dans une source nouvelle de richesses le garant de leur indépendance. Ainsi ie monastère , foyer d'une industrie vivifiante , asile de la tendre charité, devenait le canal par lequel refluaient sur une population esclave , misérable et dédaignée , des bienfaits émanés du trône et des consola- tions en tout genre. Cette peinture ; loin d’être flattée , serait même impar- faite si nous n'y ajoutions ce dernier trait : lorsque ces hommes utiles acquéraient de tels droits à la reconnais- sance de leurs. contemporains ; ils prélevaient encore un tribut différent sur celle des siècles à venir. En eftet ( compensation trop inappréciée des désastres de ces âges ténébreux }), quand le politique absurde , quand le guerrier féroce semblaient avoir pris pour devise : Ruine et ravage ; Construire , préserver et transmettre était celle des laborieux, des persévérants solitaires. C'est en la mettant successivement en action qu'ils réussirent à frayer en silence la brillante carrière où, depuis le dernier Constantin, s'élancèrent tant d'hommes illustres dans les sciences et les arts, et particulièrement les écrivains ’ Saint Benoît. 228 ACADEMIE DE ROUEN. célèbres dont s'honore l'ordre auquel nous faisons allusion 1. " « J’estime, dit Naudé ( Apologie des grands hommes accusés « de magie, 2e partie, pag. 346 et 347), qu'il est à propos de parler « maintenant des religieux, et de monstrer quelle ingratitude ce nous « est de recognoistre si mal l'obligation que nous leur deuons auoir « de la conseruation des lettres depuis le siècle de Boece, Symmaque « et Cassiodore jusques enuiron la dernière prise de Constantinople , « que l’on a commencé à les tirer hors des monastères , lesquels pendant & tout ce temps-là auaient été comme les eseholes publiques et chres- « tiennes , où non- seulement la jeunesse, mais aussi les hommes & qui s’y vouloient addonner estoient instruits et enscignez en toutes « sortes de lettres, de sciences et bonnes mœurs, jusques là mesme que, « non contents de ce tant célèbre guadriuium des mathématiques qu'ils « enseignoïent outre ce que l’on monstre aujourd’huy dans les colléges, «ils cultivérent aussi tellement la médecine pratique et théorique, « que les escrits d’Ægidius, Constantin Damascène , Joannitius, Pierre « d'Espagne et Turisan, nous sont preuves assez suffisantes combien ils « estoient versés en icelle; de sorte qu’il me seroit facile de respondre « à ceux qui les accusent de rudesse et d’ignorance, si je n’aimois « mieux porter le remède où il en est le plus de besoin, etc., etc. » C’est surtout par le soin qu'ils prirent de nous conserver les monu- ments de la littérature payenne que les anciens moines se rendirent véritablement dignes des éloges de la postérité, car ces éloges, il fallut quelquefois, pour les mériter, oser être chrétien et, pour employer cette expression de saint Jérôme, cicérontien en mème temps. Ces deux qualités, en effet, étaient incompatibles au jugement d’une foule de personnages que l’église écoutait comme ses oracles : saint Ouen, par exemple, sous les auspices duquel s’éleva l’abbaye de Fontenelle, saint Ouen réforma les mœurs encore entachées d’idolâtrie, propagea la connaissance et la pratique de l'Evangile; mais il proscrivit aveuglé- ment, il faut le dire, le goût de la littérature antique. Ecoutons le parler lui-même : « Quid Pithagoras, Socrates , Plato et Aristoteles , nobis philoso— « phando consulunt ? Quid sceleratorum neniæ poetarum , Homeri « videlicet , Virgilii et Menandri , legentibus conferunt? Quid, « inquam , Sallustius, Herodotus et Livius, gentilium textendo historias, « christianæ prosunt familiæ ? Quid Lysias, Gracchus, Demosthenes « et Tullius, arti oratoriæ insistendo, Christi puris atque præclaris CLASSE DES BELLES-LETTRES. 229 Tel fut, dans nos siècles de fer, l'âge d'or de la vie cénobitique ; tels furent ces hommes antiques qu'une injuste prévention confondit, sans distinction d'époques , de règle et de mœurs, avec ceux que trop souvent une existence inutile et scandaleuse fit qualifier avec raison de membres parasites du corps social, et comparer comme tels au ventre gourmand et paresseux. On ne se contenta pas d'épuiser sur les moines de tous les temps les traits du ridicule ; la haine, cherchant avidement dans leurs propres chroniques matière à les avilir, divagua jusqu'à diriger contre eux l'allégation des coupables excès à l'expiation desquels ils durent souvent une partie de leurs richesses. Eh! qu'importe, après tout , que le crime puissant , mais bourrelé par les terreurs d'un éternel châtiment, ait cherché jadis des accom- modements ou sa réconciliation avec le ciel en fondant des monastères ! Ces établissements philanthropiques en furent-ils moins utiles, surtout dans leur origine? Le plus grand nombre en fut-il moins honoré par les vertus sans tache et la piété calme et désintéressée de leurs fonda- teurs ? » Ainsi brilla cette auguste Saxonne , que sa douce inno- cence, encore plus que ses charmes, éleva de l'esclavage « possunt compararé doctrinis ? Quid Flacci, Solini, Varronis , & Democriti, Plauti et Ciceronis , aliorumque solertia , quos enumerare « supervacaneum puto, nostras juvat utilitates.» (Vita 8, Eligür, auct. Audoeno, prologus,) Dans les IXe et Xe siècles, la calligraphie, presqu'exclusivement pratiquée par les moines, propagea considérablement les œuvres des prosateurs et des poètes antérieurs à Constantin Ier, dont s’enrichirent les bibliothèques d’un grand nombre de cathédrales et de monastères, Mais, lors de ce retour vers les auteurs profanes, on n'avait plus, dit le savant abbé Le Bœuf, comme sous Charlemagne, d'Alcuin dont la présence obligeât encore de les lire en secret, 230 ACADÉMIE DE ROUEN. au trône des Francs, et dont d'imbéciles légendaires firent , dans une fable célèbre par son absurdité même, une mère dénaturée ; sainte Bathfide enfin ". Epouse du plus indolent des monarques, ce fut réelle- ment sous les auspices de cette princesse, douée d’une ame énergique et d'une piété active , que le règne de Clovis II l'emporta sur celui de Dagobert I*, pour le grand nombre de fondations religieuses. Entre les abbayes fameuses datant de cette époque, on doit distinguer surtout Chelles, Corbie, et en Normandie Jumiéges2 et Fontenelle, dont nous allons spécialement nous occuper , qui shonoraient , avec beaucoup d’autres , d’avoir Bathilde pour fondatrice , ou de tenir de sa main royale les principes essentiels de leur splendeur temporelle 3. Parmi ces divers monasières , celui qui fait l'objet de ce récit brille d'un éclat particulier dans l’histoire. Sous le rapport des études , principalement , il s'acquit une réputa- tion que peu d’autres ont égalée, qu'aucun autre ne surpassa. L'abbaye est à peine créée que les lettres y fleurissent ; une bibliothèque nombreuse et choisie s y forme tout à coup par Les soins de son premier abbé, saint Wandrille, dont elle prendra bientôt le nom. La jeunesse y accourt de toutes parts , et remplit ses écoles. Elle fournit de grands person- nages de tous genres : tels furent Génésion et Lambert, qui ® Voyez ma Notice sur le tombeau des énervés de l'abbaye de Jumièges, lue à la séance publique de la Société libre d’émulation de Rouen; 1824, in-80 , figures. 2 M.C.-A. Deshayes a publié une histoire complète de cette abbaye, avec figures. Nous croyons pouvoir signaler cet ouvrage comme intéressant sous beaucoup de rapports. 3 Bathilde Baudour ou Baultheur, PBaltechildis ou Bathildis, mourut le 30 janvier 685, âgée de cinquante-rinq ans. Elle fut canonisée par le pape Nicolas ler, dont le pontificat dura depuis le 24 avril 858 jusqu’au 13 novembre 867, époque de sa mort. CLASSE DES BELLES-LETTRES. 231 sortirent de son cloitre pour monter sur le siége épiscopal de Lyon ; tel fut surtout Ansbert , qui mérita de succéder à saint Ouen sur celui de Rouen. Ce fut de Fontenelle que sortit Wulfranc, accompagné de plusieurs religieux , pour aller précher l'Evangile aux Frisons, C’est au savant Ansé- gise, abbé de ce monastère au neuvième siéele , que nous devons le premier recueil qui ait été fait des Capitulaires de Charlemagne et de Louis-le-Débonnaire, C'est encore des murs élevés par saint Wandrille que sont arrivées jusqu'à nous les seules annales locales , antérieures à l'établissement des hommes du Nord dans notre province , ce précieux Chronicon Fontanellense , publié pour la première fois par dom Luc d'Achery, et que ne sauraient trop feuilleter les amis de notre histoire 1, Enfin les moines de Fontenelle eurent l'avantage de contribuer peut-être les premiers de la France aux progrès de la calligraphie. Ce furent eux qui travaillerent le plus eflicacement au perfectionnement de la minuscule caroline ou carlovingienne , qui fraya le chemin aux caractères de l'imprimerie, et du renouvellement de laquelle l'honneur appartient à Charlemagne, quoiqu'on eût commencé à la * Pour tout ce qui regarde l'histoire littéraire de Fontenelle depuis sa fondation jusqu'au commencement du dixième siècle , voyez le mémoire de M. Théodore Licquet, intitulé : Recherches sur l'histoire reli- gieuse, morale et Littéraire de Rouen, depuis les premiers temps jusqu'à Rollon ; mémoire couronné par la Société d'émulation de Ronen, dans la séance du q juin 1826, Cet ouvrage, écrit d’un style élégant et rempli d'érudition, présente, malgré l’exiguité voulue de son cadre, une peinture extrêmement curieuse des temps de notre histoire, sur lesqnels la disette ou l'influence des anciens écrivains avaient laissé se répandre le plus d'obseurité, La vive lumière que font jaillr sur les évènements, les mœurs et le génie de ces siècles reculés, le discernement délicat et les savantes recherches de l’auteur, dont nous déplorons la perte récente, n’est pas son moindre titre aux éloges qui lui sont dus pour la manière heureuse dont il a su remplir sa pénible tâche. 232 ACADÉMIE DE ROUEN. rectifier dès le règne de Pepin, et même un peu aupa- ravant !. Quel que soit, dans l'intérêt de la science , le résultat des travaux des hommes studieux nés parmi nous qui désirent contribuer à l'illustration de notre province, en éclairant son territoire du flambeau de l'archéologie , on ne doit pas moins applaudir au sentiment qui les dirige. Ce n'est point une vaine curiosité qui les anime, c'est ce respect , c'est cet amour inné du pays où nous venons au jour. Qui oserait affirmer que le plus magnifique des édifices de la Grèce et de Rome , en le supposant encore debout et sous nos yeux , excitât dans nos ames ces émotions touchantes , ces affec- tions de famille, si je puis le dire, que nous inspire la vue de nos monuments nationaux ? Non, j'en suis certain , celte parité de sentiments serait impossible. La gloire des beaux siècles de Périclès et d'Auguste nous est entièrement étran- gère. Elle ne peut réfléchir aucun éclat de notre existence politique , et nous réclamons , au contraire, comme notre patrimoine, tout ce qui nous rappelle que Charlemagne et saint Louis furent français comme nous. Le berceau de notre ancienne architecture fut entouré des ténèbres de la barbarie, je le confesse ; mais quand il serait vrai que le style , improprement appelé gothique , ne connût, pour tenir le langage de ses dépréciateurs , d'autres principes que ceux d'une imagination désordonnée, ne mériteraient-ils aucun tribut d’éloge, ces vieux artistes dont l'habile audace introduisit dans nos temples cette combinaison d'effets mystérieux comme nos dogmes sacrés, ces formes légères comme l'air où nous les voyons s’élancer, ‘ Dictionnaire raisonné de diplomatique, par dom De Vaines, tome 1, p. 453, verbo Ecritures ; et l'Hist, littér. de la France, t. IV, ps 20. CLASSE DES BELLES-LETTRES. 233 ces proportions grandes, vastes, majestueuses comme l'idée du souverain Etre ? Puisque la main des hommes à opéré sur nos anciens monuments des ravages que les siècles n'auraient pu pro- duire; puisque, au lieu de ces masses vénérables auxquelles, de nos jours et sous nos yeux, l'ignorance na pas craint d'appliquer le {er et le feu, nous ne retrouvons plus que des ruines chancelantes et des débris épars , l'archéologie doit en consacrer le souvenir, et le burin en retracer les modèles. L'antique église de Saint-Wandrille, par son état de dévastation , réclamait plus impérieusement qu'au- cune autre nos investigations laborieuses ; puissent-elles consoler les antiquaires et les artistes de la chute totale de cette basilique : ! I n'en est pas ainsi des bâtiments claustraux ; l'impor- tance, la solidité, la beauté de leurs masses, la vaste étendue des pièces nombreuses dont ils sont composés , doivent en faire une propriété trop précieuse dans un département manufacturier comme le nôtre , pour que nous puissions craindre de les voir bientôt grossir l'amas de ruines dont ils sont entourés. Nous présageons avec plaisir que leur conservation sera le garant de celle du réfectoire et du cloître, les seuls édifices gothiques restés à peu pres intacts dans ce magnifique monastère, dans lequel nous allons enfin introduire nos lecteurs. * Depuis 1825, époque à laquelle nous avons, ma fille et moi, dessiné et gravé les planches de cet Essai, la ruine de l'église a marché avec une rapidité telle, qu'il ne reste, dit-on, aujourd'hui, de ce beau monu- ment, que des tas de pierre et d’informes débris. 234 ACADÉMIE DE ROUEN. FoxTENELLE était sans contredit un des monastères les plus illustres de l'ordre de Saint-Benoît , et mème de l'Europe chrétienne , et nos fastes historiques en ont, depuis un grand nombre de siècles, consacré la célébrité *. Si j'ai, dans mon texte, ajouté à mes propres observations beaucoup de documents relatifs à l'histoire monumentale de Saint- Wandrille , puisés dans les manuscrits de sa propre biblio- thèque, c'est dans la persuasion que ce n'est que par l'intervention réciproque de la plume et du pinceau , qu'on parvient souvent à conserver l'idée complète d'un objet qui n'est plus. 5 Comme il n’est point question de retracer ici l'histoire ecclésiastique de cette abbaye , mais les observations et les faits qui se rattachent à la structure de ses édifices les plus remarquables , je passerai rapidement sur les événements antérieurs au treizième siecle, époque de la construction de la basilique actuelle 2. ! En dessinant, d’après nature, en 1825, la vue générale de Saint- Wandrille dont nous offrons la gravure, nous n'avons eu d’autre restitution à faire que celle de l’église, d’après les ruines de cet édifice et les planches du Monasticon Gallicanum, dont nous allons bientôt parler, ? Les ouvrages que j'ai principalement consultés dans mon travail, sont les manuscrits suivants, provenant de Saint — Wandrille même, et conservés à la bibliothèque publique de Rouen, dans la classe de ceux qui concernent spécialement la Normandie : Historiæ Fontanellensis compendium, n. 101. Le Sanctuaire de la sainte et royale Abbaye de Fontenelle, n. 105. Le Trisergon de la sainte Abbaye de Fontenelle, par dom Alexis Bréard, n. 109. Traité des hommes illustres de la très sainte et très royale Abbaye de Kontenelle, n. 112, Histoire de l'Abbaye de Saint-Wandrille, depuis l'introduction de la réforme, n. 115. CLASSE DES BELLES-LETTRES. 235 L'origine de ce monastère , le plus ancien de la Norman- die après celui de Saint-Ouen de Fouen, remonte à la onzième année du règne de Clovis I, règne malheureux , et pourtant si fécond en grands établissements du même genre. Le fondateur de celui-ci, saint W andrille ( W'an- dregisilus ), était originaire de Verdun. Issu de parents illüstres , descendu même des rois de France par une de ses aïeules, Blithide, fille de Clotaire Fr, malgré les honneurs que lui promettaient son mérite et sa naissance , ce pieux personnage résolut de renoncer au monde pour se consacrer à Dieu. Dans ce dessein , il choisit , à sept hieues de Rouen, à trois quarts de lieue de Caudebec, et non loin de la rive droite de la Seine, un bois dépendant du désert de Ju- miéges, et portant alors le nom de Bothmar ou Bothmari\. Ce fut au fond d'un vallon de cette sauvage retraite que Wandrille érigea son nouveau monastère, en 6842, sous le titre de Saint-Pierre 3. Outre la principale église du nom de cet apôtre, à laquelle il donna, dit-on , deux cent quatre- vingt-dix pieds de long sur trente-sept de large (grandeur peut-être exagérée } , il en construisit encore deux autres , dont il dédia la première à saint Laurent, la deuxième ! Le texte porte Bothmariacas, mais il parait qu'il faut lire Rothmariacas, du nom de Rothmarus, qui avait reçu ce lieu de la munificence royale. Cette observation est de M. A. Leprévost, qui pense que le nom de la forèt de Roumare se rattache à la même étymologie. 2 Suivant le Gallia Christiana. — Selon dom Bréard, Triserg., page 731, ce saint en jeta les fondements le 1er mai 645. 3 Une multitude d’autres grands monastères, élevés vers la même époque, furent également dédiés au prince des apôtres. Cela tenait peut-être, non moins à la vénération particulière que l’on avait pour ce bienheureux , qu'à l'influence prodigieuse que le Saint-Siége exerçait déjà sur toute la chrétienté. 236 ACADÉMIE DE ROUEN. à saint Pancrace , puis y placa des reliques de ces denx martyrs, qu'on lui avait apportées de Rome. Dans les actes les plus anciens de ces temps, l'abbaye est quelquefois appelée du nom de ces deux saints; mais on lui donnait bien plus communément celui de Fontanella où Fontinella, à cause du ruisseau sur lequel elle est assise, et qui prend sa source à cinq cents pas du monastére, près du sol où s'élevait la chapelle de Caillouville. Une quatrième église fut encore érigée par le même fondateur : c'était celle de Saint-Paul , que D. Alexis Bréard appelle , dans son 7riser- gon de Fontenelle , le Sancta sanctorum du monastère. En effet, dans cette dernière , détruite par les religieux eux-mêmes dans le siècle passé, malgré la vénération que le peuple conservait pour elle, on avait déposé les dé- pouilles mortelles de saint Wandrille même, celles de saint Ansbert, le quatrième de ses successeurs, devenu depuis archevêque de Rouen, enfin les corps de saint Wulfran et de saint Frembert , qui, de simples religieux de Fontenelle, furent élevés aussi aux plus hautes dignités ecclésiastiques. En 704 , saint Bain ( Bay nus ) , sixième abbé de ce monastère et évèque de Térouanne , translata les trois premiers dans la grande église, et les ossemens du fonda- teur furent remplacés , dans le tombeau qu'ils occupaient , par ceux de saint Erembert. Ces premiers temples, renfermés probablement dans l'enceinte primitive de Fontenelle , ne furent point les seuls qu'éleva la piété de ces antiques cénobites. Bientôt ils s'en- tourerent encore des églises de Saint-Amand de Goville , de Saint-Saturuin , de Saint-Michel , devenue depuis église paroissiale | et construite des matériaux romains de /ulio- bona , aujourd'hui Lillebonne ; enfin , de celle de Notre- Dame de Caillouville, devenue dans la suite la plus curieuse sous le rapport de l'art. Nous pourrions citer encore, en nous éloignant plus ou CLASSE DES BELLES-LETTRES. 23 I moins de Fontenelle, beaucoup d’autres fondations reli- gieuses , églises, chapelles, léproseries, qui faisaient éga- lement partie de ses dépendances. Mais il en était une à laquelle nous devons une mention toute particulière ; en raison de sa proximité de cette illustre abbaye dont elle était en quelque sorte la fille , et qu'elle égala peut-être par l'importance de ses édifices. C'était le monastère de Belcinac , élevé dans l'île de ce nom située jadis au milieu de la Seine , un peu au-dessus de Caudebec. Cette île, dont l'étendue était, au septième siècle, de trois milles pas de long sur quinze cents de large , fut donnée par le roi Thierry , fils de Clovis IT et de Ba- thilde, à saint Condède, religieux de Fontenelle. Ce pieux solitaire y fonda le monastère dont nous venons de parler , et trois églises, dont il consacra la première à la sainte Vierge, la seconde à saint Pierre, et la troisième à saint Valery. En 655, le saint fondateur fit, à l'abbaye de Fonte- nelle, le don de l'île et du monastère de Belcinac. Cette donation, confirmée par le même roi Thierry , le fut encore plusieurs siéeles après par Philippe-le-Long, en 1319, et par le roi Jean , n'étant alors que due de Normandie , en 1 349: Depuis , Belcinac fut entraînée par les flots : terres, églises, monastères, tout disparut, tout fut englouti dans les gouffres du fleuve. Image frappante du néant des gran- deurs et des vicissitudes de la vie ! Aujourd'hui, l'esquif naufragé repose au fond de l'abîme, sur les ruines inconnues de ces voûtes audacieuses , de ces faîtes altiers qui semblèrent si long-temps suspendus dans les airs. En 1641, l'île reparut au-dessus de l'onde, mais hideuse et nue comme la mort. Le soleil ne devait plus vivifier ses plages désolées : la barre, son antique et * La barre est un flot terrible qui, se prolongeant d'une rive à , qe LÉ l'autre, remonte périodiquement la Seine à contre-courant avec un 238 ACADEÈMIE DE ROUEN. imdomptable ennemie , la détruisit et la submergea de nouveau. Dans les premiers temps de sa fondation, Fontenelle comptait jusqu'à trois où quatre cents religieux. Plusieurs de nos monarques et leurs royales épouses, la plupart de nos ducs, les comtes d'Evreux et d’autres grands person- nages, la comblèrent successivement de bienfaits, dont elle fit long-temps le plus saint, le plus honorable emploi. « Ce « monastère, dit Noël dans ses Essais sur le département « de la Seine-Inférieure, était siége d'instruction pour les « lettres et la musique. C'est dans son enceinte que Théo- « doric, fils de Childéric, dernier roi de France de la dynas- « lie mérovingienne , termina ses jours. Ecole pour la jeu- «messe, retraite pour la vieillesse , asile de ce qu'il y avait « alors de beaux-arts et de sciences ; tout cela se trouvait à « Fontenelle, avant que le relâchement de la discipline « monastique, l'oubli des mœurs qui en fut la suite, la soif « des honneurs, des titres et des priviléges , eussent rem- « placé la ferveur exemplaire, la vie simple et laborieuse fracas et des mugissements épouvantables jusqu'aux approches de Rouen. Peu sensible dans la plupart des marées, aux époques de la pleine et de la nouvelle lune, surtout au temps des équinoxes , cette vague re- doutable pousse, renverse ou détruit dans sa course impétueuse tout ce qui lui oppose quelque résistance. Les Études de la Nature, de Bernardin de Saint-Pierre , offrent une peinture admirable de ce phé- nomène, qu'ont aussi parfaitement décrit MM. F. Rever, correspondant de PInstitut, et Morlent ; le premier, dans un de ses ouvrages inti- tulé : Voyage des élèves de l'École centrale de l'Eure ,et le second, dans son Histoire du Havre et de ses environs. Tel est le fléau qui détruisit jadis les autels élevés par le pieux Condède. « On a « demandé dernièrement si les écueils voyageurs qui embarrassent le « passage de Quillebeuf ne seraient pas les débris submergés de l'ile de « Belcinac, cherchant à se réunir encore à la surface des eaux. » CT: Licquet, Rouen, Précis de son histoire, ete. Frère, libr.- édit. Paris, 1827. In-80, p, 281.) CLASSE DES BELLES-LETTRES. 239 « des premiers temps. » Dans ce passage, l'auteur oppose évidemment l'état florissant de Fontenelle , sous Charle- magne et plusieurs de ses successeurs , à quelques époques bien moins brillantes de ses annales , et surtout à l'abjection profonde dans laquelle ce monastère était tombé à l'époque de la Ligue. Au reste, il fut, dans son âge d'or, regardé comme un véritable sanctuaire, et plusieurs écrivains ecclé- siastiques lui déférérent jadis ce titre, que le P. Duplessis justifie , en remarquant que dix-huit de ses abbés, et dix ou douze de ses religieux, eurent anciennement un culte public dans l'église et des temples consacrés en leur honneur. IL serait facile , quand même nous manquerions de docu- ments à cet égard, de se figurer, d'après la quantité d'édifices religieux groupés autour de la basilique de Fon- tenelle, la complication, l'importance et l'étendue de ce premier monastère. De cet immense amas de constructions antiques, il ne restait, dans le siècle dernier, rien de visible qui fût antérieur à l'an 1250, que la chapelle de Saint-Sa- turnin et quelques vestiges de église de Saint-Laurent , bâtie par saint Wandrille ; encore ces derniers étaient-ils presque inapercus dans l'enceinte de l'avant-dernier logis abbatial , situé au nord de l'abside de la principale église. IL est vrai que, plusieurs fois engloutie sous ses ruines , plusieurs fois Fontenelle s'était relevée sous des formes toujours nouvelles. Mais la main destructrice des années avait eu moins de part à ces diverses métamorphoses que les ravages de l'incendie et la brutale furie des hommes du Nord. Parcourons rapidement cette triste série d'événements. En 954, les flammes ayant, par une funeste négligence , consumé la grande église de Saint-Pierre, le roi Pépin la fit relever en 756, pendant le gouvernement de Gui IT, quatorzième abbé. En 8/42, le monastère allait être détrait at ACADÉMIE DE ROUEN. par les Normands, si saint Foulques , vingt-unième abbé , ne l'eût, au poids de l'or, racheté de ces barbares : Extinæit faces, dit un historien de l'abbaye, quas œdibus Fontanelle Dani jam inferebant. Louis, un de ses successeurs, est forcé d'employer plusieurs fois le même moyen avec ces avides pirates. Mais, à leur quatrième irruption ;, en 862, cet abbé lui-même et ses religieux, emportant avec eux les reliques de tous leurs saints, ne trouvérent de ressource que dans la fuite. Les Normands , trouvant Fontenelle sans moines et presque totalement dépouillée, s'en vengérent en réduisant l'abbaye en cendres. En 960, le vénérable abbé Maynard, d’abord moine à Gand, releva ce monastère qui, depuis près d'un siècle , était enseveli sous ses ruines; mais l'église ne fut reconstruite, ou plutôt entièrement achevée qu'au commencement du onzième siècle , par l'abbé saint Gérard. On rapporte qu'en examinant dans l'église de Saint-Pierre, en 1009, les fondations des cryptes de l'ancienne basilique , pour en construire de nouvelles, il trouva le corps de saint \Vulfran ,; sans la moindre corruption. Rien n'empêche de croire que la terre recele aujourd'hui des vestiges curieux de ces antiques construc- tions. Saint Gradulphe , successeur immédiat de saint Gérard , fit bénir , en 1033, l'église que ce dernier avait construite , par Robert [‘", archevêque de Rouen. Ce fut dans cette circonstance solennelle , qu'outre le nom de Saint-Pierre qu'avaient porté les précédentes églises, celle-ci recut le nom de Saint-Wandrille, qui n'a cessé de prévaloir depuis. Nous arrivons à l'époque où cette basilique devait voir , dans sa structure , succéder aux pleins cintres, aux robus- tes et lourds piliers de l'architecture romane, les formes élancées du système gothique, et l'agive qui constitue son principal caractère, Il est inutile de faire observer que CLASSE DES BELLES-LETTRES. 241 test de l'édifice mutilé depuis la révolution que nous allons maintenant parler. Eglise abbatiale. Dans le cours de l'an 1250 , un effroyable incendie détruisit de nouveau la grande église, sous le gouverne- ment de Pierre Mauviel. Cet abbé , assez mal traité par le P. Duplessis, dans son article de Saint-Wandrille, s'empressa néanmoins de travailler sans relâche à sa reconstruction. Constamment à la tête des ouvriers, il employait avec eux un langage au moyen duquel on est presque toujours sûr de stimuler les hommes , même dans les conditions plus élevées : «Courage , enfants , leur disait- «il, la pierre vous manquera plutôt que l'argent !» On a dit qu'en parlant de la sorte, Mauviel ne voulait que faire une espèce de calembourg allusif à son âge avancé et à son prénom. Que cela soit ou ne soit pas, le bon abbé se servait là d'une rude antithèse , sil est vrai, comme on le prétend, que les carrières d'où l'on tirait les matériaux existent sur des montagnes voisines , mais presque encombrées aujourd'hui. Le temps ne ma pas permis d'accepter l'offre qu'on m'a faite de m'y conduire. Cette vérification, qu'il sera long-temps encore possible de faire, n'est certainement pas sans intérêt pour le géo- logue et pour l'antiquaire. Après la mort de Pierre Mauviel , arrivée en 1255, son successeur, le vénérable Geoffroy de Noitot, pour- suivit avec la même ardeur la construction de la basili- que , dont il fit élever le chœur , entreprise qui valut à sa mémoire le distique suivant ; inséré dans un ancien Cata- logue des abbés de Fontenelle : Gaufnidus sequitur quem movit adusto sæva : Atque novum fecit ædificare chorum. 242 ACADÉMIE DE ROUEN. Au commencement du seizième siècle , le prieur D. Guil- laume Lavieille , administrateur zélé , excellent religieux , mais poète comme il y en a tant, parfuma de l'encens de ses vers la mémoire des saints et des autres personnages illustres de Saint-Wandrille. Sa muse prêta au réédifica- teur de l’abside sacrée le langage suivant : Sous Pierre Mauuiel, natif de Fontenelle Et uraiment desireux de la uie éternelle, Le feu tout pétillant et aidé par le uent, Le temple ayant brulé de ce très sainct couuent , Moy, Geoffroy de Noytot, poussé de révérence, En rebatis le chœur auec telle despence Qu’à peine en uoyait-on un seul en ce tems-là Auec qui en hauteur de pareil il n’alla. La crosse abbatiale ayant, en 1288, passé, par le décès de Geoffroy , dans les mains de Guillaume de Norville, Guillaume de la Douillie ou de la Doublie, successeur de ce dernier en 1303 ou 1304, fit bâtir la moitié de l'église, c'est-à-dire une partie de la croisée et la nef , avec l'aile du cloître qui s'y trouve contigué du côté du nord. Il paraît que les travaux éprouvaient dès-lors de ficheuses suspensions ; puisque ce ne fut que vers la trentième année de son gouvernement, c’est-à- dire en 1331, que cet abbé fit ériger la belle et haute tour de pierre qui s'élevait au-dessus de la lanterne, au centre de la croisée. En 1631 , époque de sa chute dé- sastreuse , elle renfermait six cloches , dont la plus grosse avait été donnée en 1520 par le bon Jacques Hommet, dernier abbé régulier de Saint-Wandrille. Cette cloche portait sur son listel le quatrain suivant : Je fus nomme par l'abbe acques. Pris Dieu pour Le poure Sommet ; Aille VU cent; vingt, aimst que on met Éscript au cierge de Pasques. CLASSE DES BELLES-LETTRES. 243 D'aprés cette inscription ; on peut regarder comme probable qu'avant 1564, époque où Charles IX décida, par l'ordonnance de Roussillon ; que l'année commen- cerait désormais au 1‘ janvier , on avait coutume d'apposer sur le cierge pascal le chronogramme du nouvel an , soit pour en proclamer, soit pour en sancüfier l'avènement *. Lors de l'écroulement de la tour, dans le dix-septième siècle, des six cloches qu'elle renfermait une seule ne fut pas brisée. Si ce fut celle à laquelle je viens d'accorder une mention particulière, elle était destinée à périr plus tard avec les sept autres qui retentissaient, avant la révo- lution, dans le dernier clocher de Fontenelle. Elles furent , suivant l'usage, rompues à la porte du couvent; et, ce que j'ai peine à croire quoique plusieurs témoins oculaires me l'aient unanimement aflirmé, c'est que le plus volumineux de ces corps sonores résista une partie du jour, avec des mugissements épouvantables , aux énormes coups de masses 1 Une nouvelle lecture des Voyages liturgiques de France, par le sieur de Moléon (Le Brun des Marrettes), m'a rappelé qu’on pouvait mème regarder ce fait comme certain, l’auteur précité disant affirma- tivement , p. 318, que l’église de Rouen observait un fort ancien usage, consistant à attacher la table pascale, écrite sur un beau vélin , à une grosse colonne de cire haute d'environ vingt-cinq pieds. H rapporte ensuite l'inscription qui fut rédigée en quarante-huit articles pour l'année 1697, époque bien postérieure à l'édit de Roussillon. C’est une espèce de calendrier ecclésiastique et Aistorial terminé par cette formule : Consecratus est iste cereus in honore Agni immaculati et in honore gloriosæ Virginis ejus genitricis Marie. Jean Beleth, dans son livre des Divins Offices, chapitre 108, parle de cette coutume en ces termes : Annotatur quidem in cereo paschali annus ab incarnatione Domini : inscribuntur quoque cereo paschali Indictio vel OŒra, aique Epacta, 544 ACADÉMIE DE ROUEN. de fer qué lui assénaient , en se relayant, les hommes es plus vigoureux. Avec Guillaume de la Douillie, mort en 1341, cesse- rent, jusqu'au dix-septième siècle, les reconstructions les plus remarquables auxquelles la basilique de Fonte- nélle ait jamais donné lieu ; et, depuis cet abbé jusqu'à nos jours, ce vaste et beau monument demeura toujours imparfait. Ce fut en vain que Clément VII, pape d'Avi- gnon, comme l'appelle D. Duplessis, octroya aux reli- gieux, à la prière de Charles VI, la réunion à leur abbaye du prieuré de Quitri, dansle Vexin normand ; la modicité de ce secours , les évènements déplorables qui signalèrent ces époques de crimes, de deuil et de sang, la peste enfin, semblérent de concert s'opposer à l'achève- ment de cette entreprise. Peut-être pourrions-nous citer encore une raison un peu postérieure et bien différente , mais non moins puissante : le découragement et l'humeur assez fondés des moines, qui, depuis le fameux concor- dat de Léon X et de François It", voyaient avec dépit les deux tiers de leurs revenus passer dans les mains des commendataires , hommes du siècle, qui souvent les ho- noraient de la plus profonde indifférence , quand ils ne les accablaient pas de ruineuses procédures 1. Aussi, à “IL est certain que les religieux véritablement attachés à leurs institutions primitives regardèrent toujours les commendataires comme des espèces d'intrus, et ne virent jamais de bon œil la révolution que le concordat avait opérée dans le régime monastique. Près de deux siècles encore après cet évènement, le P. Bréard, historien de Saint-Wandrille, exprimait à cet égard, sans la moindre réserve, son chagrin, ses regrets et ses espérances. En parlant, dans ses Vies des hommes illustres de Fontenelle, de Jacques Hommet , dernier abbé régulier de ce monastère : « son corps fut enterré, « dit-il, devant l'autel matutinal de la grande église, et avec lui « la dignité abbatiale de Fontenelle, dignité qui ne subsiste plus que I RCD TROT EP MALTE ÿ ï 2 EE: | # = + il 4 = LR —— nn: ne Anal à F % ne 0—— 4 C'ÉROMINNNNNNNQU “il ( f £'e X° Gr Jurglos dd. «+ Sc. VII LA ) 2 = Abarts (44 CLASSE DES BELLES-LETTRES. 245 dater de cette époque , sauf quelques notables exceptions, soit pénurie , soit refroidissement de zèle , s'occupa-t-on beaucoup plus, au fond des cloitres , des commodités des la vie et d'un vain luxe méme, que de ce qui pouvait ajouter à la magnificence, à la majesté des lieux saints. Grande Eglise abbatiale, La grande église de Saint-Wandrille étant restée in- complète , il en résultait, dans ses dimensions, un étrange contraste avec celles des autres grands monuments reli- gieux , puisque le chœur, à le prendre du fond de la chapelle du Saint-Esprit, située au centre du chevet ; au milieu de la croisée , présentait moitié plus de longueur que la nef; j'entends la partie close et voûtée de cette dernière portion de l'édifice. Elle ne se composait, en effet, que de trois travées fermées à l'ouest par une chétive porte abritée , comme dans les églises rurales les plus vulgaires, par un simple porche ouvert et en charpente. La partie extérieure et imparfaite comportait quatre autres travées qui s'élevaient, sans voûtes et sans toits , jusqu'à une assez grande hauteur, et, selon les appa- rences, sans que rien ait jamais, à leur extrémité occi- dentale , annoncé les premiers travaux d'un portail accom- « de nom, le véritable pasteur de cette abbaye ne portant que « le titre deprieur, tandis que Les commendataires et œconomes « s'arrogent les vénérables noms d'ablés, « Louous nostre bon Dieu, poursuit le zélé religieux, parmi ces « désordres, et portons courageusement les iniquité* ou plus-tost les « fruits des péchés de nos pères, Peut-estre que ce débonnaire seigneur « ne sera pas toujours fasché , et qu'il se servira, pour remettre les abbayes en règle, de ceux-là mesme dont il a usé pour en donner l'administrarion aux laïqs et séculiers. Ainsi soitl, » 246 ACADÉMIE DE ROUEN. pagné de tours ( voy. pl. II, fig. vu). Ce que je viens de dire m'engage d'autant plus à quelques réflexions sur la collection de vues des abbayes bénédietines de France, recueillies par D. Michel Germain , mort à quarante-neuf ans, en 1694, que la vue générale de Saint-Wandrille , comprise dans les planches destinées à l'ouvrage de ce religieux , offre l'église abbatiale avec sa nef complète et terminée par un beau portail flanqué de deux magnifiques tours gothiques. Tel était sans doute le projet inexécuté, puisque cette basilique était représentée de la même maniere dans un grand dessin original conservé dans Saint-Wandrille , et qui servit probablement de type aux artistes de D. Michel Germain. Toutefois, la vérité n'en est pas moins blessée dans cette gravure, d'après laquelle on ne doit s’en rapporler aux autres qu'avec circonspection , quant à leur complète exactitude. Il faut l'avouer cependant : si cet ouvrage ne présente pas toujours les monuments tels qu'ils ont existé , il est comme certain , du moins , qu'il les offre, d'après de sûrs garants, tels qu'on les avait projetés ; et, sous ce rapport seul, cette collection , que ne possède pas la Bibliothèque royale , serait infiniment précieuse , quand méme elle ne serait pas excessivement rare. On assure, en effet, qu'on n'en connait aujourd'hui que deux exemplaires, dont l'un fait partie de la riche bibliothèque de mon honorable confrère M. le marquis Le Ver. Ce magnifique volume, dans lequel ne se trouve aucune abbaye de femmes, contient cent quarante-deux plans de maisons bénédictines , formant deux cent quatre-vingt-quatre feuillets grand in-folio. Parmi les vingt-deux monastères normands qui s'y trou- vent représentés , Saint-Ouen de Rouen occupe pour sa part sept gravures, dont six se retrouvent dans l'histoire de cette abbaye, par le P. Pommeraye. Les six planches CLASSE DES BELLES-LETTRES. 247 de cuivre qui servirent pour les deux ouvrages existent aujourd'hui dans les mains de M. le curé de Saint- Ouen, de Rouen, et sont encore en état de service. Au surplus ; il paraît que tout le reste est perdu. Cette col- lection, dont on n'a jamais publié le texte, prouve à quel point on a perfectionné depuis , surtout de nos jours , l'art de dessiner et de graver les monuments :. Dom Alexis Bréard , en tête d'une lettre latine adressée à D. Michel Germain, en 1682, appelle ce religieux, résidant alors à Saint-Germain-des-Prés, cusor et compilator Monastici Gallicani, titre qui comprend évidemment celui que de- vait porter l'ouvrage dont nous venons de parler 2. ! Une école célèbre donnait cependant à l’Europe, depuis près de deux cents ans, c'est-à-dire long-temps mème avant Péternef, de grandes leçons dans le genre gothique. Mais il n’était réservé qu’à notre siècle de voir éclore en France les belles productions des Granet, des Bouton, des Daguerre, etc., etc., et en Angleterre, celles des F. Mackensie, des Blore, des Wild et des Pugin. Quelle extension immense, en effet, a pris cette branche de l’art dans la Grande-Bretagne, depuis les publi- cations informes du dessinateur et graveur Daniel King, et celles mème de Wenceslas Hollar, de Terrasson, de Muller et de tant d’autres , qui vivaient presque de nos jours, jusqu'aux habiles artistes que j'ai cités plus haut, et dont les dessins sont si admirablement traduits par le burin, je dirai presque le pinceau délicat et brillant de Jean et Henri Le Keux! 2 Les planches qui composent le Recueil du Morasticon Galli- canum , sont presque toutes d'un dessin läche et vague dans les détails, et d’un burin sec et dur, Elles portent de vingt à vingt-un pouces, sur seize à dix-sept de dimension. Des différents noms d'artistes dont elles sont revêtues, le moins obscur est celui de Guillaume Château. Toutes ces vues sont prises en perspective cavalière ou à vol d'oiseau. Mon savant ami M. Auguste Le Prévost, des Sociétés royales des Antiquaires de Paris et de Londres ,a donné , dans les Archives de la Normandie, publiées par L. Du Bois, pour l'an 1824, une notice sur cet ouvrage. Cet antiquaire l'a parfaitement jugé sous le rapport de l'art, et déplore la perte des matériaux qui le composaient , et qu'il 248 ACADÉMIE DE ROUEN. Malgré l'usage établi depuis le treizième siècle de sculpter , sur les murs et les clefs de voûtes des édifices, les armoiries ou les devises des personnages, clercs ou laïques , qui les faisaient construire ou réparer ; je n'ai trouvé dans Fontenelle que fort peu d'objets de ce genre, dont deux seulement occupent encore leur emplacement pri- mitif. Le premier, situé au-dessus d'une des portes qui communiquent de l'église au cloître (v0y. pl. IE, fig. var, n°6),se compose d'un écu sans indices de couleurs ou suppose, avez beaucoup de vraisemblance ; avoir péri dans l'incendie de la bibliothèque de Saint-Germain-des-Prés. « Nous eroyons, dit-il « devoir donner Ja liste des planches représentant des monuments de notre province (la Normandie), pour mettre à portée de les consulter ceux de nos concitoyens qui s’occuperaient particulièrement de ce genre de recherches , et pour les signaler à l’attention des personnes qui COR CR rencontreraient le recucil complet ou quelques-unes de ses parties *. » C'est dans la même vue que nous reproduisons cette liste, dont Îles titres sont, ainsi que l’a fait M Le Prévost, textuellement copiés sur les gravures. N. 5. Abbatia S. Michaelis de Ulteriori-Portu. — Saint-Michel au TFréport, N. 34. Abbatia Beatæ Mariæ de Lonlayo in desertis. — Notre- Dame de Lonlay. N. 35. Monasterii S. Vigoris Bajocensis scenographia. — Saint- Vigor de Bayeux. N. 36. Regalis abbatiæ S. Stephani Cadomensis scenographia , 1684. — Saint-Etienne de Caen. N. 38. Abbatiæ S. Martini Sagiensis topographia, — Saint-Martin de Sées. N. 39. Regalis abbatiæ 8. Wandregisili iconographia. — Saint- Wandrille. N. 40. Regalis abbatiæ B. M de Bernayo scenographia, 1687. — Notre-Dame de Bernay. N, 41. Regalis abbatiæ Gemmeticensis topographia, 1678. — Jumiéges. # On trouve effectivement quelquefois des estampes isolées de cet ouvrage. (Remarque de l'auteur.) CLASSE DES BELLES-LETTRES. 249 d'émaux, comme cela se pratiquait en sculpture dans les temps les plus reculés de l'art héraldique ; cet écu , sur- monté d'une crosse, est à la bande chargée de trois coquilles où vannets, armoiries communes , sauf la variété des couleurs , à plusieurs familles de Bretagne, de Picar- die, etc. Le deuxième écusson , placé dans un des angles de la chapelle de Saint-Pierre , offre un monogramme crucifére accompagné de deux coquilles. Quoique le chœur, où se trouve ce dernier, ait été construit par l'abbé Geoffroy de Noitot, et la partie du 44. Abbatiæ $. Petri de Conchis topographia. — Saint-Pierre de Conches. 46. Prioratüs B. M. de Bello Monte in Algiä topographia, 1675. — Notre-Dame de Beaumont-en-Auge. 47. Abbatiæ B. M. $S. Petri super Divam scenographia. — Notre-Dame de Saint-Pierre-sur-Dive. . 48. Abbatiæ B. D. de Ybreio scenographia, 1687. — Notre- Dame d'Yvry. . 49. Regalis abbatiæ $. Taurini Ebroycensis topographia, 1680. — Saint-Taurin d'Evreux. 50. Abbatiæ B. M, de Lyr& topographia , 1678. — Notre-Dame de Lyre. 32 250 ACADÉMIE DE ROUEN. cloitre où se voit l'autre, par Guillaume de la Douillie, je n’en suis pas moins tenté de les considérer tous deux comme sculptés après coup, et de les attribuer au dernier abbé régulier, Jacques flommet, mort au commencement du scizième siècle. Je ne marrête à ces remarques, qui peut-être paraïtront peu importantes à quelques lecteurs , que pour rappeler quil est bon de se tenir en garde contre les inductions quon croit pouvoir tirer , en faveur des dates des monuments, d'indices semblables, qui souvent ne sont que des supertétations plus où moins postérieures à la construction générale. Chute de La Œour de pierre, en 1631. L'an 1631 devait, à son déclin, laisser dans Saint- Wandrille des souvenirs bien douloureux ; par un évène- ment dont la gravité subvertit non-seulement les formes physiques , mais encore celles des premières institu- tions de ce monastère. La nuit du 20 au 21 décembre, N. 51. Abbatiæ S. Georgii prope Rothomagum topographia , 1683, — Suint-Georges de Bocherville. . 52. Regalis abbatiæ S. Ebrulfi iconographia. — Saint-Evrould, . 53. Abbatiæ $. Petri Pratellensis topographia , 1683. — Saint- Pierre-de-Préaux. N. 54. Rezalis abbatiæ SS. Trinitatis Fiscamnensis Lopographia, 1687. — La très sainte Trinité de Fecamp. N. 55. Prioratés B. M. de Bono Nuntio Rothom. topographia , 1683. — Notre-Dame de Bonne-Nouvelle. N. 56. Celebris abbatiæ Beccencis delineatio, 1677. — Le Bec. N. 57. Mons S. Michaelis, — Le Mont Saint-Michel, Z Z N. 58. Regalis abbatiæ S. Audoeni Rothomagensis scenographia, — Saint-Ouen de Rouen, Les titres en français n'existent pas sur les planches, et les chrono- grammes qui se trouvent inscrits au bas des gravures indiquent l’année de leur exécution. CLASSE DES BELLES-LETTRES. 251 par un temps très tranquille , la tour, supportée par quatre gros piliers qui séparent le chœur de la nef, s'écroula subitement, parce qu'on avait négligé d'y faire quelques réparations. Cette 1our, bâtie en 1331, était un des plus beaux ouvrages qu'on vit en ce genre. Sur une base en pierre ; dont la hauteur égalait les plus hautes montagnes environnant cette abbaye , s'élevait une pyra- mide ou flèche d'un ouvrage singulier. Les lames de plomb , artistement découpées, dont elle était revétue de toutes parts ; en augmentaient le poids, en méme temps qu'elles lui servaient d'ornement 1. Quelles ruines ne devait pas causer la chute d'une tour si pesante et si exhaussée ! Aussi le dommage fut-il immense. La plus grande partie du chœur fut renversée , la nef entiérement détruite, le croisillon méridional accablé, les sous-ailes abattues, la chapelle de la Vierge ruinée, les chaises du chœur , parfaitement belles , brisées en morceaux et ensevelies sous les débris de la tour et des voûtes, aussi bien que les calices, les ornements et les cloches. Les choses res- tèrent long-temps dans cet état, et cet affreux spectacle devenait chaque jour d'autant plus afiligeant pour les moines, qu'ils se voyaient sans moyens pour relever cet énorme amas de ruines. Ferdinand de Neuville , abbé de Saint-Wandrille depuis 1622, sentant vivement de son côté la dépense dans laquelle il allait s'engager , s'il était obligé de concourir aux frais immenses de la restau- * Ce revétement en plomb semblerait indiquer que la pyramide qui surmontait cette tour était alors en charpente. Cependant le Gallia Chris- tiana nous donne une autre idée de sa construction primitive. Turrim lapideam extruxit, y est-il dit en parlant de l'abbé de la Douillie, montibus vicinis adæquatam cum ACUMINE LAPIDEO cércumpositæ plagæ imminentem. Au reste, je n'ai trouvé aucun indice des changements que cette tour a pu subir depuis l’époque de sa eonstruction jusqu'à celle de sa chute. 257% ACADEMIE DE ROUFN. ration de la basilique , ne se montra pas moins zélé que ses moines à solliciter l'introduction de la congrégation de Saint-Maur dans Saint-Wandrille. Ce dessein ayant réussi, les réformés vinrent, en 1636 , se mettre en possession du spirituel et du temporel de l'abbaye , dans laquelle ils eurent la gloire, non-seulement de réparer les désastres précédents, mais encore de cons- truire d’autres édifices aussi vastes et somptueux. Le chapitre général, célébré à Vendôme en 1639 , ayant élu pour prieur de Saint-Wandrille D. Philibert Cotelle , celui-ci, tout en s'occupant de l'ornement du monastère , fit sa principale occupation de la réparation de la grande église. Le reste du chœur tombait en ruine , les murs qui soutenaient la voûte , succombant sous le poids de la couverture de plomb , étaient poussés en dehors, et les ares-boutants mêmes reculés en arrière. La pesanteur excessive d'un tel fardeau, qui ne pou- vait plus être soutenu depuis la chute de la plus grande partie de l'église, avait fait entr'ouvrir les voûtes, dont les clefs ne joignaient plus; en un mot, tout annonçait une ruine prochaine et si complète, qu'en voyant l'édifice achever de se détruire d'un côté, pendant qu'on le ré- parait de l'autre ; on se crut au moment d'être forcé de rebâtir de fond en comble une église nouvelle. Tel était encore l'état des lieux , au dire des experts, en 1641 Effrayé d'une semblable entreprise ; le prieur Philibert Cotelle crut, ainsi que ses religieux, qu'on devait se borner à réparer le chœur. À cet eflet, il réclama du général de l'ordre, D. Grégoire Tarisse , la permis- sion d'abattre toute la nef et le croisillon méridional de l'église, en réservant seulement celui qui est tourné vers le nord. D. Tarisse , craignant que son refus ne fit trainer les choses en longueur , accorda tout ce qui lui fut demandé, On se disposa donc à démolir la croisée CLASSE DES BELLES-LETTRES. 253 et les voûtes de la nef; mais, avant toutes choses, on jugea à propos de creuser les fondements de la tour pro- jetée, qu'on voulait élever au lieu méme du croisillon méridional. Dans ce travail , on découvrit sept sépulcres blancs contigus et parfaitement semblables les uns aux autres, mais dont on négligea de transmettre à la pos- térité les indices qui auraient pu les faire connaître. Les fondements, creusés très profondément , furent aussi- tôt remplis des magnifiques pierres qu'on commençait à détacher avec force du haut de la nef. Pendant ce premier travail, dont la suite et l'accom- plissement eussent complètement dénaturé la première ordonnance de l'église de Saint Wandrille, D. Harel, prieur de Jumiéges, s'arracha pour quelques moments de sa retraite, afin de s'assurer par ses propres yeux de la vérité des faits qu’on lui rapportait au sujet de cet édifice. Il ne put, à son arrivée, s'empècher de gémir et d'être extrémement surpris de l'étrange résolution qu'on avait prise, et plus encore de ce que le général l'eût approuvée. Il lui écrivit fortement à cet égard ; et D. Tarisse , mieux informé , s'empressa de se rétracter et d'écrire aux religieux qu'il ne devait plus étre désormais question de démolir, mais uniquement de bätir, ordre qui fut depuis ponctuellement exécuté. Quand on a vu le vaisseau de l'église de Saint-Wan- drille , tel qu'il était depuis cette importante et dernière restauration, on n'est pas étonné qu'à peine il ait été rétabli après plus de vingt ans, quoiqu'on n'en laissät passer aucun sans y employer des sommes considérables. D. Aichadre Picard fut le premier prieur , depuis la réforme , qui y rétablit la célébration du service divin, interrompu pendant prés de quinze ans. Ce fut lui qui, du chapitre où le Saint-Sacrement avait reposé depuis l'introduction de la réforme, le reporta solennellement, 254 ACADÉMIE DE ROUEN. le 1 juillet 1647 , dans la grande église, où l'on recom- mença dés-lors à faire l'office divin , tant de jour que de nuit. La restauration de ce monument était cependant loin d'être complète ; puisqu'en 1649 encore D. Bede Peru en conduisait les travaux. En 1678 , il y restait même tant de choses à faire , que ce fut , selon D. Bréard , une des con- dérations qui déterminèrent la promotion au priorat de Saint-Wandrille de D. Marc Rivard , que l’on regardait comme fort habile dans l'architecture et dans la conduite des bâtiments ; comme un homme, enfin, très capable de remédier à quantité de fautes dans lesquelles on était tombé pour avoir pris confiance en des faiseurs de devis qui savaient même à peine dessigner. En 1679, D. Rivard donna beaucoup de soins aux travaux de la basilique , soit pour la préserver de quelques dangereux accidents dont elle pouvait être menacée , soit pour le complet achévement de ses décorations. Ce fut alors que plusieurs cloches, qui étaient demeurées suspendues sur les voûtes de l'église, furent élevées avec les quatre que renfermait déjà le nouveau dôme depuis 1661. Mais, avant de le charger de ce fardeau, il fallut faire de grandes réparations à la charpente, qui portait à faux , et la fortifier de plusieurs grosses pièces de bois, qui la mirent en état de recevoir , sans péril , toute la son- nerie de Saint-Wandrille. En même temps, l'on perca le clocher à jour, et on lui donna une forme de couronne qui ne servit pas moins à l'embellir qu'à étendre le son des cloches. Ce fut enfin sous l'administration de D. Rivard que les vitrages furent renouvelés en très grande partie, et que l'on commença à entourer le chœur de belles grilles, entre- prises quelques annéesauparavant, mais qui ne furent cepen- dant complètement terminées qu'en 1686 , sous D. Gabriel Dudan. Le pavage des chapelles n’était antérieur que de fort peu de temps aux travaux dont nous venons de parler. CLASSE DES BELLES-LETTRES. 255 On voit, par les titres manuscrits provenant de Saint- W'andrille , que les réparations de l'église ; suites du ter- rible désastre de 1631, se prolongérent près d'un siècle , si l'on veut comprendre dans cette longue suite d'opé- rations , celles que fit entreprendre , dans le dix-huiième siecle meme, la pieuse ambition de renchérir sur la ma- gnificence de ce temple. En 1727 , en eflet , on s occupait encore à démasquer les chapelles circulaires, en suppri- mant l'immense contre-retable du sanctuaire ; et l'on décorait le fond de l'abside en y placant deux grands vitrages de verres peints. Nous remarquerons, à ce propos, que cette église ayant été à demi-détruite, presque reconstruite à neuf, ou du moins entièrement remaniée , ses anciennes verrières avaient dù souffrir de terribles avaries. IL à donc lieu de croire que ses vitrages , à l'époque de la révolution , se composaient principalement de verres blancs entourés de bordures de couleur : telles sont encore en partie les fenêtres des lieux réguliers. Les encadrements de ces dernieres ; peints en apprét, en 1688, oflrent des arabesques dont l'excellence est rehaussée par l'éclat des plus admirables couleurs. En admettant que le portail représenté dans les plans du P. Michel Germain eût oceupé l'extrémité de la partie de la nef restée imparfaite, et que cette nef eüt été ter- minée, l'église de Saint-Wandrille eût présenté, dans son extérieur, une longueur totale d'environ deux cent cinquante-deux pieds. Mais ce monument n'ayant été clos el voûté qu'à la troisième travée inclusivement de cette même nef, il n'en résultait qu'une longueur de cent quatre-vingt-douze pieds depuis l'entrée occidentale jus- qu'au fond de la chapelle du Saint-Esprit, placée au centre et au fond du rond-point. La nef avait cinquante-cinq pieds de large, y comyris les collatéraux ; la croisée, quatre-vingt-dix-sept pieds du nord au sud; le chœur, 256 ACADÉMIE DE ROUEN. cent huit'pieds de long, depuis les gros piliers de la lanterne jusqu'au fond de la chapelle du centre de l'abside ; et, dans sa partie la plus ancienne et la plus régulière, soixante-douze de large, du mur d'une aile à celui de l'autre. N'ayant pas voulu souffrir qu'on prit des mesures d'élévation , dans la crainte dés éboulements qu'il était aisé de prévoir , je ne puis que men rapporter à une estimation approxima- tive, mais au moins très probable, d'apres laquelle je crois pouvoir donner à l’ancienne élévation de ce monu- ment environ soixante-dix pieds sous clefs de voüte. Le pourtour du chœur se composait ; à partir de la lanterne , de dix-sept arcades ogives , reposant sur des colonnes ou piliers monostyles, dont les chapiteaux , relevés de cou- leurs, avaient été, dans le dix-septième siècle, chargés d'une tête de chérubin d'assez mauvais goût (voy.p. 245, pl. I, fig. vi). L'entrée de ce chœur était décorée d'un jubé surmonté de statues, et placé sous la grande arche de la croisée du côté de l'est. Il avait été commencé en 1670, et terminé en 1672 par Emmanuel Boynet , architecte habile , originaire de Loudun ; auquel on doit la construction de la plupart des vastes bâtiments qui subsistent encore aujourd'hui. Au lieu de la haute lanterne qui portait le beau clocher construit dans le quatorzième siècle , le centre de la croisée était couronné par une coupole dans le goût antique; elle reposait immédia- ment sur les quatre grands arcs centraux, et chacun de ses pendantifs était occupé par un bas-relief, offrant un évangéliste dans un cartouche formé de fruitages et de fleurs (voy. pl. IT. ). Au-dessus de cette coupole, une tour en charpente , revêtue de plomb :, renfermait la ‘ La couverture du chœur, des chapelles qui l'environnent et du cloitre, était également en plomb. Deux ou trois ans avant la révolution, les religieux firent enlever ce métal en lui substituant de l'ardoise , et | HUE LAVAL NS NA NL EE es F fe a) RS SIN +4 RY= 1 AUR 2 Le a 64 ‘ à am RS RS Cr. em RE EL Le 1825 Ne 22721 Lule 7 2 le ’ ? 2/7 JULIE Al. 2 ATUE der nd. de L'absrde ? 1 Ÿ ue 2, PLAT Le / 442 a 2 CLASSE DES BELLES-LETTRES. 257 sonnerie ; elle offrait, à l'extérieur , la forme d’un dôme oblong ou d'un calice renversé ( voy. pl 1, p. 225), et le coq qui la surmontait ne s'élevait, dit-on, qu'à la hauteur du seuil de la chapelle de Saint-Saturnin , située sur le coteau voisin qui regarde le sud. Après ce que nous avons dit de la tour écroulée en 1631, on voit combien , depuis cette catastrophe, la partie culminante de Saint-Wandrille avait perdu de son élévation. Cette église offrait, dans ses détails, de choquantes variétés de style qui résultaient des travaux qu on y avait exécutés depuis le treizième siècle jasqu'au commence- ment du dix buitième ; et, malgré les soins et l'habileté qui présiderent à sa grande et dernière restauration , il était aisé de remarquer que, soit impossibilité , soit né- gligence , on ne se piqua pas scrupuleusement de mettre les parties nouvelles en accord avec les anciennes. Les chapiteaux de ce temple présentaient peu de variété : nous en avons gravé quelques-uns des plus remarquables (voy. pl. II, pag. 245 ). Le n° 1v appartenait aux piliers de la lanterne. Le n° v, à ceux des chapelles circulaires du chœur ; Et le n° vi, aux piliers monostyles qui l’entouraient. Eu apportant tous nos soins au plan de cette basilique (woy. pi. I, fig. vu), nous avons attaché d'autant tirèrent de sa vente environ trente ou quarante mille francs, Vers la mème epoque, les religieux de Jumiéges firent la même speculation, mais avec moins de bonheur : ils dépouillèrent leur église et plusieurs autres de leurs édifices dela lus grande partie de leurs plombs, dont ils traitèrent sur le pied de cinquante mille francs au moins, avec un individu qui disparut, dit-on, nanti.de ces matériaux, mais en oubliant de payer les bons benédictins. Ce désappointement rappelle celui que leur fit éprouver, dans le seizième siecle, leur abbe Gabriel Le Veneur, en les faisant consentir à la demolition de leur admirable et prodigieuse pyramide, par des promesses captieuses dont il éluda l'exécution, 33 258 ACADÉMIE DE ROUEN. plus d'importance à le réunir à ceux des autres édifices de style gothique , encore existant à Fontenelle , que leur disposition respective fait juger d'un coup-d'œil la jastesse d'une remarque intéressante de l'abbé Fleury. « Je m'imagine, dit ce savant écrivain dans son ouvrage « intitulé {es Mœurs des premiers Chrétiens ( page 276, « édit. de 1777), troaver encore, dans les monastères, « des vestiges de la disposition des maisons antiques ro- « maines , telles qu'elles sont décrites dans Vitruve et dans « Palladio. L'église, que l'on trouve toujours la premiere, « afin que l'entrée en soit libre aux séculiers , semble tenir « lieu de cette première salle que les Romains appelaient « atrium. De là on passait dans une cour environnée de « galeries couvertes, à qui l’on donnait d'ordinaire le nom « grec de péristyle ; et c'est justement le cloître où l'on «entre de l’église, et d'où l'on entre dans les autres « pieces, comme le chapitre, qui est l’exhèdre des anciens, « le réfectoire , qui est le triclinium ; et le jardin est ordi- « nairement derrière tout le reste, comme il était aux « maisons antiques. » Au plan partiel dont nous venons de parler, nous en avons ; sur la même planche , joint, sous le n° vu, un général de l'état de Saint- Wandrille vers la fin du dix- septième siècle. Ce dernier , malgré la petitesse de ses dimensions , est plus propre encore à faire valoir la compa- raison de l'illustre auteur de L Æistoire ecclésiastique ; nous l'avons établi d'après la vue perspective incluse dans le Monasticon Gallicanum de D. Michel Germain, dont le point de vue est tellement élevé, qu'il laisse distinguer l'assiette de tous les bâtiments. L'église de Caillouville est le seul que l'exiguité du cadre n’a pu admettre, non plus que l'extrémité orientale de l'enclos, qui se trouvait fort voisine de ce monument. OCZErRemOmmO OR > CLASSE DES BELLES-LETTRES. 259 Renvois explicatifs du plan n° Var, pl. W, p. 245. Chapelles. . De Saint-Laurent. . Des Saints Sébastien, Roch et Adrien. . De Sainte-Géneviève. . De Saint-Wulfran. . De Saint-Éloi. Des Douze-Apôtres. . De Saint-Pierre. . Du Saint-Esprit. De Saint-Nicolas. . Des Trois-Vierges. (On y remarquait leurs trois statues. ) De Saint-Martin. . De Sainte-Anne. . Du Saint-Sépulcre. . De Notre-Dame de Fontenelle. (Elle occupait l’espace de deux travées, et ne se trouvait pas, comme dans presque toutes les églises, située au centre de l’abside. ) p° Q. De Saint-Benoît. Monuments divers. Tombe en cuivre de: l'abbé Jean de Rochoiïis. (Les habitants du village de Saint-Wandrille regardaient, par erreur, cette tombe comme celle du saint fondateur. ) D Ne dm NZ . Mausolée de l'abbé Guillaume de Norville. Mausolée de l'abbé Guillaume de la Doublie. . Mausolée de l’abbé Geoffroy de Noitot. . Jubé. . Escalier du Jubé. . Porte du dix-septième siècle donnant dans le dortoir. . Sacristie. . Porte donnant dans les enclos. . Tourelle conduisant aux cloches. . Porte donnant dans le cimetière. . Grilles de fer entourant le chœur et partageant la croisée du nord au sud. 3. Entrée du cloitre, répondant à la porte gothique décrite p. 283. 4. Grande statue de la Vierge, décrite p. 286 (voy. la vignette.) 260 ACADÉMIE DE ROUEN. 5. Tombe de Jean Bailli de Fontenelle. 6. Porte du cloître, au bas de laquelle est enterré le sacristain Gruchi. 7,8, 9. Portes de formes vulgaires, donnant dans les appar- tements du dortoir. 10. Lavabo (vor. pl. v, p. 280). 11. Porte gothique du réfectoire. 12. Porte de la cuisine. 13. Porte du réfectoire, donnant dans les cours. 14. Porche d'entrée de l’église. 15. Grille de fer. 16. Corridor. 17. Cuisine. 18. Anciensateliers des tailleurs ou couturiers, et autres ouvriers attachés au monastère. 19. Partie non voûtée de l’église. 20. Partie du dortoir. 21. Cloitre (voy. pl. IV ). 22. Réfectoire. 23. Porte conduisant au dortoir. Renvois explicatifs du plan n° NKx, pl. H”. Église de Saint-Paul. B. Église abbatiale ou de Saint-Pierre. Églisé ou chapelle de Saint-Pancrace, Chapelle de Saint-Saturnin. Retraite des solitaires. Greniers. . Ateliers des ouvriers et chambres des domestiques. . Pressoir et écuries. I. Cour. Principale porte de l’abbaye. . Office. . Logement des hôtes. Infirmerie. Dortoir. HRrHOomnmEOow> os 02% © 2 * On ne doit pas oublier, dans l'examen de ce second plan, que la vue d’après laquelle il a été exactement dressé offre la grande église complète dans toutes ses parties, quoique la nef n’ait jamais été termi- née, comme nous l'avons dit plus haut. CE pe. CL É- 1PICINE | k. Von SE s. 2 | 4 D 221 . | 2 & E = f = | L Z AA \ A G : = | (te é | me MS Qi Ç F b # Q-C))p à on Er x. PKLLA #2 | =; EU = = x 7 | ê ] = à 44 E 3 Ë É ) | | = » /l x 2 7 TT 29 , VIE; nelle: 2 D Gare hr ee clore + CLASSE DES BELLES-LETTRES. 261 P. Cloitre. Q. Réfectoire. R. Fontaine ou jet d’eau. S. Cour intérieure de l’abbaye. T.T. Ruisseau duquel l’abbaye prit son ancien nom. U. U. Jardins. V. V. Logis abbatial. “X.X. Enclos du logis abbatial. Y. Vivier. Z. Bois taillis. &. Chemin public. Combeaux. L'église de Fontenelle était encore loin de sa ruine com- plète, qu'il ne restait déja plus aucunes traces de ses -_ anciens tombeaux. IL en existait trois dans le chœur ; qui renfermaient les restes de trois abbés, et c'étaient les seuls, dans cette partie du moins, qui s’élevassent au-dessus de terre ( voy. pl. I, fig. vu, p. 245), en forme de mausolée ; ils étaient placés çà et là entre les colonnes qui soutenaient les arceaux et la voûte de l'église. Du côté de l'épitre, était celui de Geoffroy de Noitot mort en 1288: il était supporté par quatre lions. Du côté de l'évangile se voyaient ceux de Guillaume de Norville, mort en 1303, et de Guillaume de la Doublie, mort en 1341. Ces trois monuments, ornés des statues des défunts, passaient pour étre fort beaux , et n'ont été détruits que dans la révolution. Je n'en ai retrouvé d'autres vestiges que quelques lions du sépulere de Geoffroy de Noitot, qu'on a transportés dans le voisinage de la cha- pelle de Saint-Saturnin. Le milieu du chœur était remarquable par la tombe d'airain , admirablement ciselée , du cinquante-sixième abbé, Jean de Rochois, mort en 1412. Ce fut sur cette tombe même que Gabriel de Montgowmery , à la tête d'un 262 ACADÉMIE DE ROUEN. parti de calvinistes, fit brûler, en 1564, les magnifiques ornements de l'église. Jean de Bourbon, cinquante-neuvième abbé , avait autre- fois sa tombe près de l'autel matutinal , ainsi que le dernier abbé régulier, le vénérable Jacques Hommet ; celles des abbés Jean de Brametot et Jean Mallet étaient situées dans l'ancienne chapelle de la Vierge, la première dans le haut (in cervice ), et la seconde (in tibiis } dans le bas de l'édifice. Dans le courant du dix-septième siècle , la plupart de ces tombeaux avaient été renversés avec beaucoup d’autres, et les inscriptions tumulaires brisées ou ensevelies dans des reconstructions. Dès-lors on ne connaissait plus même le lieu de la sépulture du moine Théodoric , fils de notre der- nier roi mérovingien ; et ce fut vers le même temps que celles de la noble et pieuse Herlève , des comtes d'Evreux et de plusieurs abbés révérés comme des saints, furent , en quelque sorte , profanées et détruites par des dignitaires mêmes de l’abbaye. Il n'en résulta néanmoins d'autres avan- tages réels que quelques exhumations curieuses, dont ces mêmes officiers ne firent encore que fort peu de cas. Ancien Dortoir et vieux Chapitre. Je ne puis passer sous silence quelques extraits de la relation de ces événements , insérée dans l'Æistoire ( mss. ) de Saint-Wandrille, depuis la réforme. Ces détails se rattachent , d’ailleurs , à la destruction des deux édifices les plus importants de ce monastère après la basilique, et qui, sans contredit, présentaient un bien plus haut degré d'intérêt sous le rapport de l'archéologie. C'était l'ancien dortoir et le vieux chapitre. Le premier était construit par Herlève , femme de Robert de Normandie , archevêque K CLASSE DES BELLES-LETTRES. 265 de Rouen , qui depuis y fut inhumée 1. Il avait trente-cinq pieds de haut sur cent vingt de large. Au-dessous de ce monument régnait, également édifiée par Herlève, la premiére partie du chapitre , qui n'avait que douze pieds d'élévation ; mais celle qui l'excédait en portait trente de hauteur et autant en longueur et en largeur. Cette deuxième partie, ouvrage de Maynard , vingt-sixième abbé et restau- rateur de Fontenelle dans le dixième siecle , était éclairée par quatre grandes croisées , deux à l'orient et deux au septentrion ; mais il est présamable que ces grandes croisées avaient été percées à une époque postérieure à l'érection de cet édifice, où qu'on avait considérablement agrandi les anciennes, dont les baies devaient étre, selon le style du temps, d'une très médiocre dimension. Malgré la singularité de sa disposition, ce double chapitre ; pris dans son ensemble , était regardé comme un chef-d'œuvre de l'architecture de ces temps reculés. Cependant , mal- gré tout ce qui devait le rendre respectable, D. Laurent Hunaalt, prieur , entreprit et consomma sa perte, ainsi que celle du vieux dortoir, en 1671. Il paraît que ce moine , doué d'un zèle actif, mais souvent mal entendu, était un de ces hommes qui ne balancent pas à réaliser leurs aveugles conceptions aux dépens de ce que les siècles passés nous ont transmis de plus admirable. Son insensibilité fit, au rapport de l'auteur qui me fournit * Herlève, aliäs Hélène. Malgré les titres de fœmina potens, illustris, pia , etc,, qui lui furent conférés par ses contemporains et ceux qui en avaient reçu des bienfaits, des écrivains moins complaisants n'ont pas balancé à faire remplir à cette noble dame, auprès de Robert, un rôle moins respectable que celui d'épouse. Quoi qu'il en soit, il naquit de cette union, dont l’archevèque fit sur ses vieux jours une pénitence exemplaire, trois fils, Richard, Raoul ou Radulphe, et Guillaume , qui succéda au comté d'Evreux que son père ayait eu em partage. 264 ACADÉMIE DE ROUEN. ces détails, verser bien des larmes à l'estimable D. Alexis Bréard , l'infatigable historien de cette abbaye , et à tous ceux qui pensaient comme lui. L'obstiné prieur n'en poursuivit pas moins son entreprise. Anciens tombeaux, Déjà les ouvriers étaient près de défoncer le chapitre et de le démolir jasqu'aux fondements , lorsqu'en creusant la terre à son entrée, on rencontra quatre sépulcres de pierre , dont toutes les parties étaient si bien unies et si entières, qu'on aurait cru que l'ouvrier venait d'y mettre la dernière main, Quand on les eut ouverts, on trouva dans tous, sans exception , des bottines d'un cuir si excellent qu'on pouvait encore s'en servir. On remarqua de plus , dans le premier, une baguette de coudrier, de la longueur du tombeau. La chevelure blonde de la tète du troisième corps s était aussi conservée sans altération. Mais le quatrième sépulcre renfermait ce qu'il y avait de plus remarquable et de plus intéressant pour l'histoire : je veux dire une épitaphe en vers gravée sur une lame de plomb. Il est certainement ficheux que cette inscription n'ait pas été entièrement déchiffrée. La voici telle que les PP. Bonnefont et Bréard nous l'ont laissée dans leurs écrits. Comme ils ne s'accordent pas entre eux dans la manière de la lire, nous renvoyons dans les notes les variantes du dernier. Hic inhumatus' jacet Willelmus? nomine. .... Nobilium de stirpe parentum mascitur esse Ricardi ducis Malgerius unde refulsit : Ad cujus lævam requiescit filius ejus * Breardus legit i72humata, > Willelmus deest apud Breardum. CLASSE DES BELLES-LETTRES. 205 Nomine Rodolphus, major natu fuit inquam II. Hie IL jdus junii obüt, et uxor ejus Arectrix. .. . Qué juxta eum quiescit Malgero : +-.... is succedentibus sibi tribus In laicali2 (minor natu Fontanella, ..... Est consecratus divino) numini monachili ? habitu, Telle est l'épitaphe qu'on découvrit dans le quatrième monument. Voici maintenant les conjectures de D, Alexis Bréard. Selon lui, Mauger comte d'Evreux, fils de Richard IT comte de la méme ville, de la nation des Normands, choisit sa sépulture , en 1118 , à l'entrée du chapitre de Fonte- nelle , auprés de son père ; et dans la suite, Raoul, ou Rodul- phe, fils de Mauger , et sa femme Arectrix, furent aussi inhumés au même lieu. Cela supposé , D. Bréard soup- çonne qu'il y a une méprise dans le Veustria pia du P, Artus du Moutier, qui aura confondu Mauger avec Guillaume , lorsqu'il prétend que ce comte d'Evreux fut enterré à Saint-Wandrille, dans le tombeau de Richard son père, en 1118. Le P. Mabillon, néanmoins , dans ses Ænnales , à l'année 1108 , dit que le comte Guillaume fut inhumé à Fontenelle, auprès de son père. S'il faut lire avec D. Bonnefont hic inhumatus jacet Willelmus , la difficulté sera levée, mais non pas à l'avantage du P. Bréard. Ce dernier auteur va néanmoins encore plus loin : il croit que Richard, Mauger et Rodulphe sont trois comtes d'Evreux qui se sont succédé les uns aux autres ; que les quatre tombeaux défoncés sont ceux de ces trois comtes et d'Arectrix , épouse de Rodulphe ; qu'ainsi ceux qui ont dressé les divers catalogues des comtes d'Evreux ont eu grand tort d'en exclure ce dernier. Au reste, on " Apud Breardum sic habetur : M...oro.... 2 Quæ includuntur uncinis, desunt apud Breardum. 3 Breard. monachali, 34 266 ACADÉMIE DE ROUFN. ne peut que louer la modestie de notre auteur, qui s'est contenté de nous donner toutes ces observations histori- ques pour de fortes conjectures, sans vouloir les ériger en faits certains. Quant à D. Benoit Bonnefont , il est plus hardi et plus décisif ; il dit nettement que la lame de plomb fit connaître aux religieux de Saint-Wandrille « que Richard, comte « d'Evreux , avec sa femme et ses deux enfants , avaient été « ensevelis audit lieu en l'année 1118 ». Mais, dans son troisième volume des Fes des Saints de Fontenelle, p. 156, il rapporte un autre sentiment ; suivant lequel « Le Richard « dont il est parlé dans l’épitaphe était comte d'Evreux, « auquel succéda son fils, appelé Guillaume ; tous deux « furent ensevelis à Saint-Wandrille, avec la femme du « second et un de leurs enfants, qui avait été revêtu de « l'habit de la sainte religion, et était décédé dans ce « monastère. » Peut-être qu'en examinant de plus près l'épitaphe en elle-méme , et en la comparant à l'histoire du temps, on eût pu dire quelque chose de plus net et de plus exact que ces auteurs. Les ouvriers, continuant à creuser la terre, rencontre- rent, proche d'un gros pilier qui soutenait le devant du chapitre , un cercueil d’une seule pierre. On ne douta point que ce ne fùt celui de Girard IT, trente-cinquième abbé de Fontenelle ; qui , en 1126 , avait été enterré pré- cisément en ce lieu-là, comme on l'apprend par un ancien catalogue anonyme des abbés de ce monastère. La tête de cet abbé était si entière, qu'il ne lui était pas tombé une seule dent. IT avait une crosse de bois fort légère, et qui était tres bien conservée : sa grosseur était de trois pouces et sa longueur de cinq pieds. Au côté gauche de l'abbé Girard , parut, bientôt après, un autre tombeau de pierre : c'était celui de Gerbert ou CLASSE DES BELLES-LETTRES. 267 Girbertle-Teutonique , trente-troisiéme abbé de Fontenelle, compté parmi les saints, et que Guillaume-le-Conquérant ne fit point difficulté de mettre en parallele avec saint Anselme et le bienheureux Lanfranc. On ne trouva dans son sépulere qu'un bâton noir, un peu plat, et une lame de plomb , avec ces paroles : Ix Nomive Domixs mic JACET GERRERTUS NATIONE Teuronicus. D. Bonnefont semble supposer que ce n'était qu'une partie de l'épitaphe , et qu'on n'avait pu lire le reste. Il avance même, comme un fait certain , que ce saint abbé n'avait point de crosse, quoique D. Bréard n'en convienne point. Enfin, les ouvriers pénétrèrent dans le chapitre même. Apres en avoir déplacé le cercueil d'un religieux ancien, mort depuis l'introduction de la réforme , ils rencontrérent cinq sépuleres sur une méme ligne. Quand on eut fait l'ouverture du premier, on fut surpris de voir, au lieu d'ossemens, un habit de la méme forme que ceux des bénédictins de la congrégation de Saint-Maur ; quoique d'une étafle plus grossière ; et d'une couleur tirant sur le minime. On apercut aussi une ceinture de cuir avec une boucle de fer. °Le capuchon avait été baissé sur le visage et le couvrait tout-à-fait ; mais, lorsqu'on voulut le relever, les habits et la ceinture s'en allérent presque entièrement en poussiére. On ne doute point que ce ne fût le sépulcre de Roger , trente-huitième abbé de Fontenelle, mort en 1165. Quoi- qu'en exhaussant le chapitre de quelques pieds, un an avant l'introduction de la réforme , on eût négligé, au rapport de D. Bréard , de relever les briques sur lesquelles était son épitaphe ; en quoi l'on fut plus attentif à l'égard des quatre autres abbés dont les sépulcres, aussi bien que celui de Roger , étaient devant la chaise du supérieur, on ne profita pas néanmoins de cette attention dans le défon- cement du chapitre : tous les pavés furent confondus et 268 ACADÉMIE DE ROUEN. jetés pêle-méle, sans nulle précaution ; en sorte qu'on fut obligé de recourir à d'autres moyens pour avoir connais- sance de ces cinq abbés. Du reste, l'admiration redoubla à l'ouverture des quatre autres tombeaux. Tous ces abbés, sans en excepter le premier , avaient des bottines qui leur montaicnt jusqu'au-dessus des genoux. Trois avaient des crosses, parmi lesquelles il s'en trouva une garnie de clous dorés et de quantité de fausses pierres précieuses de diverses couleurs. Un serpent replié en formait le sommet, et une pomme d'or en terminait le bout '. Ces corps, ou plutôt ces ossemens , étaient revêtus de chasubles semblables à celles dont on se servait dans le douzième siècle. 11 y en avait deux parmi elles qui jetaient beaucoup d'éclat. Mais; outre des bracelets de drap d'or très artistement travaillés, * L'auteur de la relation qui m'a fourni ces détails entendait sans doute par ce bout terminé par une pomme d'or, la partie inférieure de la volute , ou crosseron, qui s'adapte sur la tige on bâton de la crosse. Les crosses formées par des serpents enroulés furent long- temps extrèmement communes, et il y a lieu de croire qu’on attachait un sens symbolique à la figure de ces reptiles, dont le mouvement natu- rellement turbiné imite parfaitement d’ailleurs celui du Lituus antique. On introduisait fréquemment aussi dans les ornements accessoires de cet attribut pontifical, d’autres animaux et surtout des monstres fictifs dont la forme rappelait celle qu'on prètait à ces dragons terribles , si communs dans les légendes des saints et si fameux dans l’histoire de plusieurs villes, tels que la Gargouille de Rouen, la Tarasque de Tarascon, le Graouilli de Metz , la Chaiïr-Sallée de Troyes , etc. Au reste, quels que soient les noms bizarres que nos pères ont imposés à ces êtres fantastiques, il n'est aucun d’eux dans lequel on ne doive reconnaitre, sous le voile de l’allégorie , le prince des ténèbres , l'ennemi de l'Eglise enfin, mais l'ennemi vaincu; de là probablement vint le fréquent usage de représenter, dans les enroulements des crosses, saint Michel terrassant le Dragon infernal. J'en vais citer quelques exemples. Notre confrère M. Achille Deville, amateur distingué des arts, qu'il cultive avec goût , a bien voulu m’en confer une en ce genre , de forme fort élégante, pour en prendre le dessin : elle provient du tombeau d’un CLASSE DES BELLES-LETTRES. 269 la chasuble et l'étole du troisième surpassaient tous les autres ornements par leur prix et la vivacité de leurs eou- leurs. D. Bonnefont, qui avait eu les bracelets quelque temps entre les mains, les fit remettre dans le trésor de Saint-W andrille. Nous avons déjà remarqué que Roger était le premier des cinq abbés ; le deuxième était Anfroy , ou Anfrède, trente-neuyième abbé ; le troisième, Geoffroy If ou Gau- fride, quarante et unième abbé : c'est celui qui portait des crnements si magnifiques ; le quatrième était Pierre Mauviel, quarante-septième abbé ; et le cinquième , Geoffroy HT, surnommé Savary , Cinquante-quatrième abbé de ce monastère. Les cinq abbés furent , avec Girard IT, transférés dans l'église principale et enterrés au pied 4 grand autel. ancien abbé du monastère de Glanfeuil (Glandifolium ). près Angers, et paraît remonter au treizième ou au douzième siècle. La volute, garnie d’une crête de cuivre doré qui parcourt son contour exterieur, se termine par une tête de reptile, hormis laquelle tout le reste est orné d’une espèce d'opus reticulatum figurant des écailles et incrnsté d’une pâte bleue, Dans ce-crosseron , un saint Michel en cuivre, plaqué d’or moulu , frappe un lézard bipède du mème métal, décoré sur chaque flane d'un rang de turquoises, La tête de l’archange et celles des deux monstres sont enrichies par des yeux de jais extrêmement brillants La douille de cette crosse est également couverte d’une pâte bleue égayée d'ornements courants en or moulu , représentant des fleurs dont les pétales offrent des inerustations de couleurs variées. Ce ne fut point sans surprise que je remarquai, dans le précieux cabinet de mon excellent ami M, le chevalier Alexandre Le Noir, plusieurs crosses tellement semblables à celle que je viens de décrire, que sans les traces de calcination qu'y a laissées l'incendie de Saint-Germain-des-Prés, d’où elles proviennent, on pourrait, en les considérant isolément, prendre chacune d'elles pour la crosse de l'abbé de Glanfeuil, L’utile et magnifique ouvrage de mon laborieux camarade M, N.-X, Willemin, publié sous le titre de Monuments français inédits, renferme les gravures de plusieurs crosses antiques de la plus haute curiosité, 270 ACADÉMIE DE ROUEN. Après avoir défoncé le chapitre et l'avoir creusé deux pieds plus bas que les fondements de l'église , les travailleurs se mirent en devoir d'en enlever les terres. Dans cette action , ils sentirent un nouveau sépulcre , que D. Bonne- font prend pour celui de saint Anségise , dix-neuvième abbé de Fontenelle , au milieu du neuvième siècle. Vis-à-vis celui-ci, on trouva un autre sépulcre de pierre, trois pieds au-dessous de la place où l’on avait découvert les tombeaux que l'on avait jugé pouvoir renfermer les comtes d'Evreux. D'abord on n'y apercut que des ossemens d'une blancheur extraordinaire ; on y trouva aussi néan- moins une lame de plomb si oxidée, que personne ne pouvait la lire. Elle fut portée au P. prieur, qui négligea quelques jours d'en faire détacher la rouille. Enfin on y lut cette inscription : Hic REQUIESCIT ABBAS GERARDUS IV. KAL. DECEMBRIS AB INJUSTO INJUSTE INTERFECTUS !. On reconnut alors que eet abbé n'était autre chose que le saint Gérard, martyr, dont on célébrait la fête à Saint Wandrille le 9 novembre, et que Gerbert-le-Teutonique était le saint Girbert ou Gilbert dont on chômait aussi la fête le 4 septembre. Il n’était plus temps, néanmoins, de recueillir précieusement ces reliques, ni méme de les distinguer. D. Pierre Lastelle, dépositaire de l'abbaye, choqué du concours de peuple que la dévotion attirait dans ces lieux depuis la découverte de ces tombeaux , et pour plusieurs autres raisons, avait malicieusement mélé les ossemens de ces deux saints avec ceux d'un ancien religieux et des comtes d'Evreux. IL n'avait pas plus favorablement ® Saint Gérard fut tué d’un coup de hache, pendant son sommeil, par un moine indigné de ses remontrances. CLASSE DES BELLES-LETTRES. 271 traité le corps qu'on présumait être celui de saint Anségise. Tous ces débris humains furent inhumés pèle-mêle, et confondus derrière le grand autel de l'église abbatiale , au milieu des plaintes amères des religieux, On ne sera poin surpris de la découverte de ces divers étages de sépultures dans l'ancien chapitre , S'il est constant, comme le prétend D. Bréard, que cet édifice subsistait au méme lieu que les précédents, et que son aire avait été exhaussée deux ou trois fois. Dans l'année 1671 , qui précéda celle de cet événement, en réparant les fondements des murs de l'église, du côté du midi, qui dépérissaient par l'humidité , on avait trouvé des fondements fort épais que l'on regarda comme les restes de l'ancienne église de Saint-Servais, construite par saint Wandon , douzième abbé de ce monastère. L'on y découvrit aussi beaucoup de corps placés par étage, et dont quel- ques-uns étaient renfermés dans des cercueils de pierres maçonnées, Tous ces ossemens furent remis plus haut, presque contre la muraille dont on voulait prévenir la ruine. La démolition du chapitre excita le mécontentement de plusieurs supérieurs et de beaucoup de religieux de la province. Ce fut sans doute à cette occasion que le chapitre général de 1678 défendit de détruire les tombeaux et autres semblables monuments sans la permission du révérend père général. On croit aussi que ce fut par suite de la même entreprise que dom 4. Hunault fut éloigné de Saint- Waudrille , en 1678. Il fut alors élevé au rang de visiteur de Bretagne, et mourut dans cette province , en 1697, prieur de Saint-Nicolas-d'Angely, Peintures. Fontenelle ayant été, dans le milieu du neuvième siècle, entièrement détruite par les hommes du Nord , il est inutile 272 ACADÉMIE DE ROUEN. de dire que lors des diverses restaurations postérieures à ce grand désastre, ilne devait plus rien y rester des peintures que l'abbé saint Auségise avait, environ trente ans avant l'irruption des danois , fait exécuter par Madalulphe , artiste célèbre de ce temps, qu'il avait fait venir de Cambrai : au reste, l'église abbatiale de Saint-Wandrille fut depuis, à diverses époques, couverte de peintures dont on croyait dé- corer l'intérieur de cet édifice. Leschapiteaux mêmes furent, en grande partie , chargés , comme ceux de Jumiéges , de couleurs et d’ornements faits au pinceau , qui paraissent avoir été renouvelés dans la dernière reconstruction. Un sujet pieux, exécuté vers le quatorzième siècle sur le mur de la chapelle de Saint-Laurent, dans le croisillon septentrional , est une des plus anciennes peintures que j'aie remarquées dans ces vastes ruines (v0y. pl. Il, fig.1, p. 245). I représente le martyre de saint Etienne, dont Fontenelle révérait et possédait depuis long-temps les reliques. En effet, dans l'année 1036 , sous l'abbatiat de Gradulphe , Gérard Flaitel, chevalier normand, avait fait don à ce monastère d'un doigt du proto-martyr, qu'il avait obtenu de la générosité du duc de Normandie, Robert-le-Magnifique, à Nicée de Bythinie; ce doigt opéra de grands miracles dans Fontenelle. Cette fresque, divisée par un meneau , n’est (tant le rouge y domine } qu'une espèce de camayeu, dont les figures s'enlèvent sur un fond d'ocre jaune. La première partie montre le saint tombant sur les genoux, sous les coups de pierre que lui lance un bourreau vêtu d'habits mi-partis. La deuxième offre un lapidateur équipé comme le premier ; et, derrière celui-ci, une plus petite figure à laquelle le peintre a voulu , sans le pouvoir, donner un caractère d'adolescence , est assise sur un vêtement du saint, déployé sur un siége élevé : c'est le jeune Saül. Il étend la main gauche , comme pour exciter les exécuteurs ; et l'autre élève un objet oblong ; qui, malgré sa roideur CLASSE DES BELLES-LETTRES. 273 et l'insignifiance absolue de sa forme, est un véritable phylactère , moyen si généralement adopté à cette époque pour prêter un discours aux figures inanimées , qu'elles étaient censées parler , quand même il n'y avait rien de tracé sur ces espèces d'écriteaux. Or, celui que tient le fatur apôtre des nations est l'approbation de la mort d'Etienne : car Saulus erat consciens necr ejus. (Act. vu, 59.) On doit, au reste , regarder cette peinture , malgré la grossière inhabileté de son auteur , comme admirablement conforme aux moindres détails de la scène quelle repré- sente. Ces figures ont environ vingt pouces de haut. Un grand nombre d'autres sujets peints vers la même époque , mais avec moins de barbarie et plus de luxe de cou- leurs, offraient encore, dans l'intérieur de l'église, beaucoup de sujets et d'événements relatifs à l'histoire de Fontenelle. Un de ces derniers, entre autres , représentait l'abbé Teutsind recevant des mains d'un architecte un plan sur lequel on reconnaissait aisément l'église de Saint-Michel dans son état actuel 1. L'artiste commettait en cela un des anachronismes si communs de son temps, puisque Teutsind, neuvième abbé de Fontenelle, érigea l'ancienne église de Saint-Michel vers 735, et que celle qui se voit aujourd'hui ne fut construite que dans le onzième siècle. Ce petit monument , qui subsiste à cinquante pas de l'église abbatiale, n'est certainement pas indigne de l'attention d'un archéologue. Dans le grand ouvrage intitulé : Voyage romantique et pittoresque de l'ancienne France , on en trouve une vue intérieure qui répond à l'admirable talent du baron Athalin , qui l'a lithographiée, De tous les dignitaires qui exercèrent quelque autorité dans Saint-Wandrille, le prieur D. Guillaume Lavieille , cet édifice, comme nous l'avons déjà fait observer, est l'église paroissiale du village de Saint-Wandrille, 35 274 ACADÉMIE DE ROUEN. auquel l'abbaye dut mille obligations en tout genre, fut un de ceux qui montrérent le plus de goût pour les cou- leurs et pour les peintures édifiantes, « Ce fut lui, dit, dans « ses Æommes illustres de cette maison, Alexis Bréard , « dont je rapporte les propres expressions , qui fit peindre « (au commencement du seizième siècle ) les saints qui se « uoient encore de présent autour du chœur de Fonte- « nelle , reuestus d'aubes , de chasubles et de mitres , s'ils « sont euesques ; d'aubes, de chappes et de mitres, la « croce en main , s'ils sont abbés ; et seulement d’aubes « et de chappes , s'ils sont simpies religieux. » Ces saints, la tête desquels se trouvait avec cette raison saint Wan- drille , étaient au nombre de trente-six. Ayant en partie disparu par la chute de la tour, en 1631 , ils furent, avec d'autres, restaurés ou remplacés par les soins du prieur D. Vincent Humery, en 1669, quelques années après la réparation du chœur. J'ai recueilli , avec le dessin de la mort de saint Étienne, dont j'ai parké plus haut , celui d'une peinture beaucoup mieux exécutée qui s'aperçoit encore sur les murs de la chapelle de Saint-Sébastien , située du côté du nord. Ce sujet, qui paraît appartenir à la fin du seizième ou au commencement du dix-septième siècle , rappelle les fré- quentes licences que, dans des temps plus reculés, les artistes se permettaient dans les temples € voy. pl. II. fig. 11, p. 245). C'est le martyre d'une jeune sainte attachée à un arbre et entièrement dépouillée de ses vêtements : elle souffre avec résignation les tortures que lui font endurer deux bourrerux armés de lampes ardentes suspendues à des branches de fer. On ne pourrait sans frémir et sans blesser la pudeur décrire l'horrible manière dont un des satellites remplit son cruel emploi. Le supplice des lampes ardentes se rencontre assez fréquemment dans les martyrologes. &- CLASSE DES BELLES-LETTRES. 275 Le personnage dont il s'agit ici est très probablement sainte Marguerite, qui, selon quelques hagiographes , éprouva cette espèce de tourment parmi plusieurs autres qu'on lui fit subir. Une ancienne vie de cette sainte , en vers français, et qui n'est qu'une traduction de celle qui se lit dans la Zégende dorée, rapporte cette circonstance. On a reproduit cette vie dans plusieurs livres liturgiques du seizième siècle , notamment dans des heures gothiques de Notre-Dame , à l'usage de Rouen, imprimées en 1595. On y voit d'abord Olibrius employant vainement auprès de Marguerite tous les moyens de séduction ; puis viennent les vers suivants : Ja done quand si ferme la veue, La fist despouiller toute nue Et flambeaux ardans apporter, Dont les costez luy fist brusler ; Puis luy a dit quelle le creust Laissant Jesus et Mahom creust ; Elle respond que non feroit, Dans son second Essai sur le département de la Seine- Inférieure, publié en 1795, M. Noël de la Morinière, déjà cité dans cet ouvrage , décrit le déplorable état où Saint- Wandrille se trouvait dèes-lors. « Plusieurs morceaux « de la main de Sacquépée , dit-il en parlant de la grande « église, analogues à la fondation du monastère, n'ont « pas eu un meilleur sort, » Il est très probable qu'il s'agit ici de morceaux exécutés à fresque et totalement disparus, puisque je n'ai rien trouvé qui rappelät le style de Sacquépée, habile peintre normand né au commencement du dix-septième siècle , ni rien qui approchät de sa manière. Une partie des voûtes de l'église était bigarrée d'ornements exécutés au pinceau. Celles de la chapelle où se voit le martyr de saint Étienne , dont nous avons parlé plus haut, offrent encore une décoration en ce genre que nous nous 276 ACADEMIE DE ROUEN. abstiendrons de décrire , l'ayant gravée dans cet ouvrage (voy. pl. IF, fig. m1, p.245 ). Elle est , comme la fresque précitée, peinte en vermillon fort grossier sur un fond d'ocre jaune. £e Cloître. Le cloître de Saint-Wandrille est, à n’en pas douter , un des plus magnifiques monuments de ce genre qui soit échappé au vandalisme des derniers temps'. Au moyen de deux portes situées aux deux extrémités de la nef, on descend , par quelques degrés, dans cette belle et pittoresque galerie , dont le sol est à six pieds environ au-dessous de celui de la basilique. Une sépulture vouée à l'exécration et placée au bas d'une de ces entrées, rappelait aux moines de Fontenelle de mortifiants et fâcheux souvenirs. En voici le motif tel que le rapportent les historiens de cette abbaye. A son dernier retour de la Frise, saint Wulfran avait donné à l'abbaye de Fontenelle une croix, un calice en or et sa patène. Ces précieux objets, sauvés en 1566 des déprédations des hérétiques, ne purent échapper en 1571 aux mains criminelles de l’infime De Gruchy (Gruchœus), sacristain de Fontenelle. Nourri dans le mépris de l'obser- vance régulière et dans la dépravation que les guerres intestines du royaume avaient introduite, il ne put résister au coupable désir de fournir un aliment à ses passions. II fit, à cet effet, société avec d'autres fripons qui reconnaissaient pour chef un nommé Frenage ou Fournage (Frenagium), laïque , bâtard et rebut de la société. Secondé par de tels hommes , il forca, pendant la nuit, la serrure de Fonte- nelle, et enleva les manuscrits les plus anciens et les plus précieux de la bibliothèque , qui était fort riche, (une partie : M. Bouton en a sûrement jugé de même lorsqu'il a puisé dans cet édifice un nouveau sujet de diorama. titi CLASSE DES BELLES-LETTRES. 277 passa dans la suite dans les mains des savants André Duchesne et Emeric Bigot) , et ne respecta pas davantage la croix , l'évangile ( pour l'évangiliaire ou évangélistairet ), et le calice dont saint Wulfran avait fait don à l'abbaye. Frenage expia par son sang son audace sacrilége : il fut pendu et réduit en lambeaux. De Gruchy seul ne ressentit point les effets de la vengeance des hommes ; mais il fat, après sa mort , tellement poursuivi par la vengeance céleste , que lors- qu'on l'eut inhumé dans le cloître , en face de la porte par laquelle on entre dans le bas de la nef de l'église2, il naissait tous les jours sur sa tombe une si grande quantité de crapauds, que les soins continuels des moines purent à peine les faire disparaître. Ce cloitre renferme une autre tombe où reposent les mânes d'un homme qui laissa dans Fontenelle une mémoire bien différente de celle du malheureux De Gruchy : elle est située presque aux pieds de la statue de la Vierge. C’est une pierre plate, gravée en ereux et longne de huit pieds quatre pouces et demi. Sa largeur est, du côté du chef, de trois pieds trois pouces et demi, et de trois pieds à l'extrémité opposée. C'est le sépulere de Jean , premier bailli de Fontenelle , mort vers la fin du treizième siècle. La tête du défant, représenté les mains jointes et dans l'habit de l'ordre, est sur- montée d'un pignon gothique accompagné de deux anges portant , d’une main l'encensoir , et de l'antre l'aceta- ! On appelait ainsi le livre des Evangiles. Ces volumes étaient souvent reliés avec le plus grand luxe; leurs couvertures, enrichies de dyptiques et de pierreries : le texte, écrit fréquemment en lettres d’or ou d'argent sur un vélin ordinairement teint en pourpre, quelquefois en vert ou de toute autre couleur. 2 Cette porte était celle par laquelle il avait introduit ses complices et s'était enfui avec eux. 278 ACADÉMIE DE ROUEN. bulum ou navette. Deux autres anges, beaucoup plas petits, tendent, chacun de leur côté, les mains sur une épaule du religieux , comme pour l'aider à monter au ciel. Cette tombe paraît occuper son premier lieu ; mais la gravure en est tellement effacée , que la figure ne se voit plus à peine. Il en est de même du listel sur lequel est inscrite, en fort belles onciales , l'épitaphe à laquelle manquent des mots tout entiers. Je rapporte néanmoins ici la trans- cription que j'en ai prise, quoique le sens ne sy trouve pas toujours complet : ( Tête. ) ANNO : MILLENO : CENTUM : BIS : OCTUAGENO : (Premier côté, sur la longueur. ) GEMMA : MONACHORUM : MIGRAVIT : ET : ARCHA : BONORU : 1: (pour Joannes ou primus) FONTANELLE : BALLIVUS : VIR : SINE : P..... (Fou P, peut-étre peccato ) CLEMENS : PECCATORIBUS : CASTUS : ( Côté des pieds. ) FIDELIS : HONESTUS :..... ( Grande lacune. ) ( Deuxième côté, sur la longueur. ) ...E : MODESTUS : FLET : FONTANELLA : NUDA : JACET : PA...E : CELLA : IN : CELICA : PATRIA : DETUR : ET : GLORIA : AM : Cette sépulture , la seule dans Saint-Wandrille qui présente aujourd'hui quelque intérêt, est brisée en trois fragments : celui du milieu paraît profondément enfoncé. Le propriétaire : me disait , en le frappant du pied, qu'il avait toujours soupconné qu'il existait un vide sous cette * M. Cyprien Lenoir père, ancien négociant , natif d’Yvetot , dont la mémoire nous sera toujours chère par l'hospitalité patriarchale qu'il exerça envers nous pendant notre séjour à Saint-Wandrille. CLASSE DES BELLES-LETTRES. 279 pierre, mais sans vouloir s'en assurer, s'étant toujours imposé la loi de ne jamais violer le dernier asile de ceux qui dorment en paix dans son domaine. Je ne pus m'em- pécher d'applaudir à la résolution religieuse de ce vénérable nonagénaire , un tel sentiment étant, en eflet, plus respec- table encore que l'amour de la science , qui dérive bien plus des idées acquises que des inspirations du cœur. Tombeaux anonymes. On voit encore dans le cloître plusieurs autres pierres sépulcrales de dix-huit pouces à deux pieds et deux pieds et demi de dimension en tous sens. Les ornements les plus remarquables de ces humbles monuments sont une petite croix grecque et une simple larme. On ne jugeait point à propos d'y disputer au temps des noms qu'il devait dévorer un jour, les noms de ceux qui, déjà morts pour le siècle , avaient franchi la limite de leur existence. On y inscrivait seulement en latin le quantième, le mois et l’année de leur passage à l'éternité. DECEMBRIS Dans le nombre de ces dates , postérieures toutes à l'introduction de la réforme , il n'en est point qui descende 280 ACADÉMIE DE ROUEN. au-dessous du milieu du siècle dernier. Le specimen précé- dent est pris au hasard parmi ces lugubres témoignages du néant de la vie , dont la muette et rigoureuse éloquence rappelle si laconiquement à l'homme son inévitable et dernier tribut. Le cloître, construit à diverses époques , est, comme je l'ai dit plus haut, un des plus beaux qu'il soit possible de voir. La galerie regardant le nord , qui regne le long de la net de l’église , fat élevée par l'abbé Guillaume de la Douillie , mort en 1342. Elle n'est percée que de cinq arcades ; mais les trois autres ailes, qui sont d'une architecture beaucoup plus élégante, en ont toutes une de plus. La majeure partie de ces dernières est due au prieur Guillaume Lavieille, mort en 1531, ainsi qu'une portion de l'aile qui fait face au midi. Mais on doit très probablement accorder au vénérable Jacques Hommet , dernier abbé régulier, mort en 1522, l'honneur d'avoir fait construire l’admirable lavabo en pierre contigu à la porte du réfec- toire ( voy. pl. v ). Cette fontaine, chef-d'œuvre de l'aurore de la renaissance des arts , n est pas moins élégante dans son ensemble que dans ses arabesques exquis compris sous le cintre surbaissé qui couronne la totalité de cette charmante composition. Ces sculptures délicates sont divisées en six panneaux , dont chacun offrait un écusson armorié occupant le centre de l'ogive. Quelque soin qu'on ait pris d'en gratter les blasons , il est encore aisé de reconnaître dans l'un de ces écus les armes de Charles VIII ou de Louis XII, écartelées de France et de Bretagne. La base de cette riche décoration se compose d'un bassin oblong formant une espèce d’auge dans laquelle six robinets versaient jadis une eau pure et limpide. Cette eau cireule encore de toutes parts dans les édifices de Fontenelle, par des canaux renfermés dans Les murs, précieuse ressource que les religieux durent également à la paternelle sollicitude PV, x » Fe ° + cvabro eu Ponlirne La ! Es ,; ; , / «_ lenlié ie rPeclS" dx SU attérit(le tn 404 ts L NT ùTe 1 ren | f ( } à Ù AL" Es | - : AR ANR ts Me À s | We ie 4 " D … e l CNET fl ‘à PT 4 *i 1m} Aix | MEN AST UVD PROS pps UT / CLASSE DES BELLES-LETTRES. 281 de Jacques Hommet. Dans l'intérieur du réfectoire, un bassin semblable , mais sans ornements , est pratiqué dans l'épaisseur de la muraille | et correspond à celui dont nous venons de parler. Les membrures supérieures du cintre aplati de cette belle fontaine sont, suivant l'usage, ornées de larges toufles de.chardon , s'élèvent en se courbant vers le centre commun , et se joignent pour ne former qu'une seule pyramide. Le tympan compris dans cette espèce de fronton renferme un sujet dont la bizarrerie donnerait lieu de préter au sculpteur des intentions malicieuses, sil était raisonnable de supposer dans les moines assez d'inat- tention ou d'inintelligence pour ne pas s'en être aperçus ( voy. pl. VI ). Ce sujet offre le buste d'un homme dont on ne voit que le visage et les bras ; le reste est couvert de grands feuillages en forme de lambrequins qui , tous, se rattachent à la coiffure du personnage, dont la figure est excessivement triviale ; et cette coiffure , en espèce de capuchon ;, de carapoue où caban, est ornée de deux oreilles d'âne des plus évidentes. Sa main droite tient un instrument dont la sommité , à demi brisée, offre la forme d'une espèce de maillet , et la gauche soutient un grand gobelet à boire , orné de cannelures. Mes réflexions ne mont point encore mis, je l'avoue, à portée de préciser le rôle que joue cette énigmatique sculpture , à l'entrée d'un lieu où devaient présider la décence et la sobriété. Cependant , ce symbole de l'intempérance et de la folie renferme indubitablement un sens grave : N'était-il point ici pour rappeler aux bénédictins , aux moments du repas, la leçon que leur patriarche leur donne dans sa règle , au chapitre de mensurii potus , en les invitant à se contenter d'une légère portion de vin : quia , inquit, vinum aposta- tare facit eliam sapientes. Peut-être le passage suivant 36 282 ACADÉMIE DE ROUEN. de l'Écriture offrirait-il un rapport encore plus intime avec ce bas-relief : Luxurosa res vinum , et tumulluosa ebrietas : quicumque his delectatur non erit sapiens. ( Prov. xx, 3, 1.) Nous trouvons, dans le bas-relief, l'ivrognerie évidem- ment caractérisée par le grand gobelet; la folie, par l'accoutrement grotesque du personnage , qui, certainement, est dans le costume obligé ; et, dans l'instrument tenu de la main droite , qui ressemble beaucoup plus à celui dont je vais parler qu'à toute autre chose; on reconnaîtra peut- être jusqu'à l'expression tumultuosa ebrietas , en se rappelant que, selon Mézeray, le surnom de Hutin fut donné à Louis X dans son enfance , parce qu'il était querelleur et bruyant , par allusion à un petit maillet dont se servent les tonneliers, et qu'ils nomment Autinet, parce qu'il fait beaucoup de bruit1. : On ne peut, malgré les services réels que les bénédictins rendirent à l'Église et aux lettres, dont ils nous conservérent les antiques et précieux monuments, se dissimuler qu’ils eurent quelquefois , ainsi que beaucoup d’autres ordres religieux , le plus pressant besoin d’être rappelés à l'esprit de la règle; et pour en fournir au moins une preuve, puisque nous sommes sur l’article d’un réfectoire, nous citerons un fait qui se rattache à cette importante partie d'une maison claustrale. C'était en croyant user d’une grande condescendance envers ses enfants que saint Benoit leur avait permis deux sortes de mets cuits et un peu de vin (Reg. S. Bened., cap. XXXV et XL). Cependant , vers le milieu du douzième siècle, la table d'un grand nombre de monastères était devenue d’une abondance et d’une somptuosité d'autant plus choquantes , que celles des rois de France et d'Angleterre offraient précisément alors une frugalité qui révolterait aujourd’hui beaucoup de minces particuliers. Le prieur et les moines de Saint-Swithin *, de la * En vieux saxon, Saint-Swithum. Ce personnage était évêque de Winchester, et mourut, selon Alban Putler, en 862; d’autres le nomment Swintun ; et l'auteur des Lettres historiques sur Les Parlements, qui raconte aussi l’anecdote ci-dessus, le désigne, probablement par erreur, sous le nom de WVintzun. (Remarque de lord E. Arundell de Wardouf). CLASSE DES BELLES-LETTRES. 283 À l'extrémité orientale de l'aile du cloître, qui fait face au nord ; on rencontre une jolie porte ogive par laquelle on accédait dans Fintérieur de léghse ; elle est du plus pur ville de Winchester, vinrent un jour se jeter aux pieds du roi Henri Il, implorant sa protection contre la dureté de leur évêque, qui etait aussi leur abbé, Ils fondaient en larmes et montraient une douleur amère, tant la conduite du prelat leur paraissait affreuse, intolérable.... De quoi s’agissaitil donc ? et quelle fut la surprise de Henri, en apprenant que les lamentations des bons Pères tenaient à ce qu'on venait de les réduire à dix mets au lieu de treize, dont leur table était journellement chargée! Les pauvres moines s’adressaient mal pour de semblables doléances : « Et moi, dans mon palais, je me contente « de trois, leur répondit le monarque. Malheur à votre évèque, si, « des dix que vous avez encore , il vous en laisse plus que w’en a « votre roi. — Æt ego, inquit rex, ir curi& me tribus contentus « sum, Pereat episcopus vester, nisiad hunc numerum ferculorum « meorum redigat fercula vestra. » (Baussez, Anglia sacra.) Il est à remarquer qu'Henri était cependant le prince le plus riche, et, pour parler comme alors, le plus grand terrier ou terrien de la chrétienté. Louis-le-Jeune, sou contemporain , se contentait aussi du mème ordinaire, et, comme Henri Ier, son aïeul, ne connaissait point de plus précieux breuvage que le vin d'Orléans, qu'il appelait 7aeumn vinum optimum aurelianense. L'anecdote précédente n’est pas la seule qui dépose contre la tempérance des moines et leur résignation en matière de réformes réfectoriales; mais peut-être aussi la malignité publique s’est -elle amusée quelquefois à charger le tableau; quoi qu'il en soit, d’après lindignation des religieux de Saint-Swithin contre leur prélat, il est permis de croire qu'ils étaient capables de se venger de lui, comme ceux qui décorèrent l'effigie de leur abbé de deux superbes oreilles d'âne, allégorie dont ils donnaient la clef dans le distique suivant Auriculas asini meritè fert improbus Abbas, Quod monachis pintas fecerit esse breves. Quant au sens emblèmatique du grotesque du mème genre sculpté au-dessus de la porte du réfectoire de Saint-Wandrille, dont nous publions la gravure, il renferme évidemment une leçon, et non une satire. 284 ACADÉMIE DE ROUEN. et du plus excellent gothique, tant dans son ensemble que dans ses détails. Six figures , revêtues d'habits pontifi- caux, en enrichissent le cintre. Elles représentaient pro- bablement des saints abbés de Fontenelle , ainsi que deux autres que l'on voit à genoux dans le tympan qui couronne la baie de cette porte. Au milieu de ces deux derniers, le Père-Eternel et Jésus-Christ , assis l'un près de l'autre sur le même banc, élèvent simultanément la main , comme pour soutenir un objet quelconque qui s'est trouvé brisé avec les têtes des figures, et qu'un ange, placé à la pointe de l'ogive, paraissait recevoir en avançant les bras. La partie supérieure de ce bas-relief est encore occupée par deux autres esprits célestes , dont l’un joue du psaltérion 1. : Psaltérion, Saltérion, Saltère, etc. , instrument à cordes, de forme triangulaire ; il en existait, je pense, de plusieurs espèces : les uns se pinçaient comme la harpe, les autres se touchaient avec des espèces de plectres. Ils eurent la plus grande vogue autrefois ; quoique fort sonores, comme on en obtenait des effets harmonieux et suaves, on les employait particulièrement à accompagner la voix. L'usage de représenter des anges chantant vu jouant des instruments, est d’une haute antiquité , et ne tire point sa source de l'imagination des peintres et des sculpteurs, à laquelle on attribue, sans réflexion et comme par habitude , tout ce qui présente dans leurs productions quelque singu- larité. Je pnis, au moins, quant au point dont il s’agit, invoquer, en faveur de mon assertion, le témoignage d’un des plus illustres Pères de l'Eglise latine. Le saint évêque Hippone, parlant des jouissances célestes, dit : « Quæ cantica ! quæ organa ! quæ cantilenæ ! quæ melodiæ ibi « sine fine decantantur! Sonant ibi melliflua hymnorum organa, « suavissima Angelorum melodia, cantica canticorum mira, quæ « ad laudem et gloriam tuam à supernis civibus decantantur. » (Auçusr., Manual., cap. VI, num. 2.) « Peut-être n'ignorez-vous pas, m'écrivait un de mes amis, amateur « passionné de nos antiquités, M. André Pottier*, que la porte du * Aujourd'hui bibliothécaire de la ville de Rouen. CLASSE DES BELLES-LETTRES. 285 Auprès de cette porte se voit adossée contre le mur , et faisant face au couchant , une grande statue de la Vierge dans le goût du quinzième siècle ; une couronne en tête , elle supporte d'une main l'enfant Jésust, et de l'autre relève le manteau bleu dont elle est couverte par-dessus sa robe rouge, maintenue dans une ceinture dorée à longs pendants. Cette robe , suivant le luxe du temps, est diaprée de larges fleurons d'or 2. Cette figure est debout, sous un dais gothique « cloître de Saint-Wandrille, que vous avez gravée pour votre frontis— « pice, a une ressemblance frappante avec la porte rouge de la Cathé- « drale de Paris, située du côté du nord. Un seul cordon de figures « sculptées dans les voussoirs ; même nombre et même disposition des « cordons ou chapelets de fleurons, qui, cependant , à Paris, sont de « feuilles et de fleurs de rosier, etc.; et ce qui est encore bien remar- « quable, même ordonnance du bas-relief, composé, comme à Saint « Wandrille, de deux personnes à genoux et de deux autres assises; « excepté qu'il n'existe à Paris, dans le tympan, qu'un seul ange « couronnant Jésus-Christ et la Vierge, et que les figures à genoux « remplaçant les deux abbés de Fontenelle, sont Jean-sans-Peur et « Marguerite de Bavière, son épouse. M. Gilbert, qui décrit cette « dernière porte , en fait remonter la construction à l'époque comprise « entre 1404 et 141. » On peut, d’après ces observations , regarder comme à peu près certain qu'une de ces deux portes n’est qu’une réminiscence très prononcée de l'autre, si mème elle n’en est pas la copie. ‘ Il est revêtu d'une Jacquette, suivant l'usage des peintres et des statuaires gothiques qui, soit par le sentiment de leur peu de connais- sance en anatomie, soit par des convenances particulières, évitaient autant que possible de représenter le nu. Il était fort rare qu'ils figurassent le crucifix autrement qu’à demi-voilé d’une draperie qui lui descendait, , ; ’ eu s’arrondissant vers le bas, de la ceinture aux genoux. 2 « C'est par vanité et fantaisie, » dit Raymond Bonal, dans son Cours de Théologie morale, tome Il, page 121, « que les peintres ont pris « la coustume d’habiller Nostre- Dame et les Saints d’habits mondains « et pompeux. » Il y a, dans cette assertion, plus de mauvaise humeur que de vérité, Cet usage, originairement grec, tenait à l’observance d'un 286 ACADÉMIE DE ROUEN. surmonté de plusieurs pyramides ( voy. la vignette ). C'est à quatre à cinq pieds de sa base que se voit, comme nous l'avons déjà dit, la tombe de Jean, bailli de Fontenelle. Aux environs de cette madone, le mur offre quelques vestiges de couleurs diverses : j'avoue que je ne les ai point remarquées avec assez d'attention pour me souvenir si l'on y distingue les traces d'une peinture que Jacques Hommet fit exécuter en ce lieu au commencement du seizième siècle, decorum respectueux envers les bienheureux, et particulièrement celle à laquelle l'Eglise a déféré les titres de Regina cœlorum, Regina angelorum, Regina mundi, et fait enfin élever , près de Saint-Jean— de-Latrau , un temple sous le nom de Sancta Maria imperatrix. C’était cette souveraine, en effet, et non , malgré l'identité de la personne, la modeste épouse du pauvre charpentier de Nazareth, que les vieux artistes voulaient et croyaient caractériser parfaitement en la décorant des attributs matériels de la majesté royale. Pendant une longue suite de siècles, nos pères gratifièrent indistinctement d'applications honorifiques tous les habitants dn céleste séjour ; et, n’eussent-ils parlé que de celui auquel on attribue la plus humble des professions, ils auraient cru commettre une sorte d’irrévérence s'ils l’eussent fait autrement qu’en le désignant par les mots de monseigneur ou monsieur sainct Crespin. Au reste, sauf l'addition de la couronne, du sceptre et des autres insignes aussi fréquemment que mal à propos employés par les peintres et les statuaires du moyen äge, ils out presque tous été d’accord pour donner à la Vierge Marie un costume que l'abbé Fleury juge avec raison fort analogne à celui des premières religieuses grecques. On trouve la description suivante de celui-ci dans une homélie de saint Jean Chrysostôme : une tunique bleue serrée d’une ceinture, des souliers noirs et pointus, un voile blanc sur le front, un manteau noir couvrant la tête et tout le corps. C'est au burin de notre estimable confrère M. Henri Brevière, graveur, membre de l’Académie royale des sciences de Rouen et de la Société libre d'émulation de 12 même ville , que nous sommes redevable de la vignelte en bois représentant Notre-Dame de Fontenelle. La figure agenouillée offre une Cauchoise dans le costume de son pays. Notre-Dame de Fontenelle. : DA fon pu os AC MONET LRU La DOTE réudicans porataies À eur le viguétehit LA ETES DNS, ft en Duenb-Qpun, 4e st , OU DR ET ) Veurilus 219 alim .: L.dié de. l'anied: oûre mutd « ‘je [LA les ab pe 10 CONLT re arenit. af coms Hofl CLASSE DES BELLES-LETTRES. 289 « Ce fut lui, dit D. Bréard, dans les écrits duquel j'ai « puisé ce document, qui fit aussi peindre ce bel arbre , « lequel est au bout du cloiitre, du costé de la nef, vers « le septentrion, et qui composa les vers françois pour « mettre proche chaque saint dudit arbre ; lesquels j'ai vus « et recueillis, etc. » L'idée la plus probable qu'on puisse se former de cette fresque, c’est qu'elle offrait les saints de Fontenelle disposés par ordre chronologique de succes- sion , dans des espèces de rameaux, dont saint Benoît ou saint Wandrille occupait le tronc, comme, dans les sculptures ou les peintures représentant la généalogie de Jésus-Christ, on voit les rois, ses ancêtres maternels , former les fruits d'un arbre dont la souche sort de la poitrine d'Abraham 1. * Lorsque Charles vit fit son entrée à Troyes (en Champagne), en 1486, les habitants de cette ville le régalèrent de spectacles dans le goût du temps, parmi lesquels ils introduisirent un arbre representant le lignage de ce roi; ilest décrit dans les vers suivants, extraits de la relation rimée de cette solennité, publiée par Grosley. ( Éphémérides troyennes, pour l'an 1763. ) « Un très-bel arbre qui lys représentoit, « Auquel le roy à le voir prist plaisance. « Pres les croisettes en hault escu estoit, « Des fleurs auoit en très-grande abondance , « Aux pieds duquel estoit la remembrance « De saint Louis fort proprement faite , « Car hault estoit trois fois plus qu'une lance, « Et très-bien fait, droitement à souhait. « D'une chacune d'icelles fleurs issoit « Un petit roi habillé richement , « L'un comme l'autre et chascun d'eux tenoit « Sceptre royal bien fait et proprement , « Leurs noms tenoient escrits bien grossement , « Selon leur ordre estoient , je vous aflie, ele. » En tète du Monasticon Anglicanum, une estampe exécutée par Wenceslas Hollar représente un arbre, des rameaux duquel sortent, 37 290 ACADÉMIE DE ROUEN. Comme on n'avait pas pensé , dans les immenses travaux exécutés dans le dix-septième siècle , à ménager des com- munications faciles entre les lieux réguliers , on résolut, en 1680 , de pratiquer plusieurs ouvertures du côté oriental du cloître; ce sont les portes de forme vulgaire qui s'y voient encore. L'on se crut amplement dédommagé de ce travail par la découverte qu'on fit, en perçant la muraille, d'une porte en ovale ( ovale probablement pour ogive 1), haute de six pieds et large de quatre. Sur sa partie supé- rieure se lisaient, en lettres gothiques, les vers suivants, que nous allons rapporter d'après dom B. Bonnefont : Sontanella bonum semper venerare patronum Qui pracsul Senonum fuit et doctor Éresjonum $rancorum regimen Dagobertus nobilitavit Since tibi munimen se Sontanella paravit. Il ne paraît point douteux que saint Wulfran ne füt l'objet de cette inscription , à laquelle, dit-on , plusieurs personnes donnèrent dans le temps une antiquité beaucoup extrèmement nombreux, les plus grands personnages attachés à l'ordre de Saint- Benoît ; ce bienheureux abbé se voit au bas dela gravure ayant à sa droite saint Grégoire, pape, et saint Dunstan, et à sa gauche, saint Augustin et saint Cuthbert ; ces cinq figurent sont entières , debout ; et comme il s’agit dans cette allégorie d’une filiation purement spirituelle, la tige de l'arbre paraît tirer simplement son origine de la tête du patriarche des bénédictins. t On a cependant imaginé, à une époque peu reculée, un gothique détestable composé d’ares à brisure arrondie; telle est , par exemple, à Rouen, la figure des nervures du cloître de la première maison de la Visitation, bâtie rue Beauvoisine, sous Le règne de Louis XIII. C'est à ce style équivoque et mou que les Anglais ont donne le nom d'elliptic. Quoi qu'il en soit, il n’est pas moins présumable que ie mot ovale est employé dans le manuscrit de Saint-Wandrille pour celui d'ogive, que l'écrivain ne connaissait pas. CLASSE DES BELLES-LETTRES. 291 trop reculée. Nous allons rétrograder nous-même vers la galerie septentrionale du cloître, pour y jeter un coup- d'œil sur l'entrée du réfectoire. Elle se compose d'un portail percé de deux baies à cintres surbaissés ; elles sont partagées par un pilier dont les ornements attestent , comme les autres parties de cette double porte, la délica- tesse du ciseau des sculpteurs du seizième siècle. Malheu- reusement, ce portail est surmonté d'un couronnement dont le mouvement mollasse et tourmenté offre le mauvais goût qui présidait , à la méme époque , aux encadrements des fenêtres de la jolie tourelle du Palais-de-Justice de Rouen. Cette aberration choquante relève d'autant plus, dans Saimt-Wandrille, les formes pures, franches et décidées de l'admirable lavabo dont nous avons parlé plus haut, qu'il est contigu à cette entrée du réfectoire. Le cloître ne présente plus le moindre vestige de ses anciens vitraux, dont la beanté devait singulièrement ajouter à celles de ces fraiches et pittoresques galeries. Ils représentaient des saints, parmi lesquels se trouvaient tous ceux auxquels Fontenelle devait particulièrement sa renommée et sa gloire. Le Réfectoire. Le réfectoire a plus de trente-trois mètres de longueur, sur une élévation analogue. Il est éclairé , du côté du nord, de huit grandes fenétres de forme ogive, et d'un nombre égal du côté opposé ; mais ces dernières sont en plein cintre , et me paraissent , ainsi que la portion de l'édifice qu'elles occupent , fort antérieures à tout le reste. La partie inférieure du mur , de ce méme côté , était autrefois décorée, comme le réfectoire tout entier sans doute, 292 ACADÉMIE DE ROUEN. d'une suite d'ares en plein cintre , symétriquement entre- lacés!, dont le diamètre , de neuf pieds quatre pouces , était coupé dans son centre par la réunion de deux autres arcs. Sans doute les retombées de ces eintres reposaient alternativement sur une espèce de corbel, ou sur le chapiteau d'un pilier engagé dans la courtine du mur. Je crois devoir m arrêter à cette dernière supposition , ayant dégagé du plâtre qui couvre cette décoration quelques parties d’une espèce de chapiteau dont les fleurons et l'abaque m ont semblé porter le cachet du onzième ou du douzième siècle. Je n’ai point voulu , par quelques motifs particuliers de discrétion , pousser alors ce dépouillement plus loin ; mais je ne renonce point à l'espoir de vérifier mes doutes sur cette partie des constructions actuelles de Saint-Wandrille , que je regarde comme la plus ancienne et la plus curieuse de toutes, excepté peut-être la chapelle de Saint-Saturnin. Le réfectoire n'est point voüté en pierres; un simple assemblage de charpente s'élève en tiers-point, cCest-à-dire en décrivant une ogive depuis le haut des murailles jusqu'au faîtage , qui est fort élevé , ce qui fait, comme dans la grande salle du Palais-de-Justice de Rouen, ressembler cette construction à la carcasse renversée d'un vaisseau. Les fenêtres, divisées par un seul meneau , étaient décorées par des figures de saints peints en grisaille, sur des fonds de verres blancs ; et l'extrémité orientale de cette vaste pièce était ornée d'une grande composition du peintre Daniel Hallé , exécutée dans le dix-septième siècle. Elle est d'une belle ordonnance, et représente le miracle de la multiplication des cinq pains. Hallé a reproduit dans plusieurs copies ce tableau, dont l'original orne actuellement la chapelle de la Vierge , dans l'église de Saint-Ouen de Rouen. * C'est ce que les Anglais appellent ares entrecoupés, intersecting. CLASSE DES BELLES-LETTRES. 293 L'importance des masses et la vaste étendue des autres édifices de Saint-W andrille méritent que, malgré l'infériorité de leur date, nous accordions au moins deux mots de mention aux beaux bâtiments construits dans le dix-septième siècle par l'architecte Emmanuel Boynet , originaire de Loudun 1; ils sont à peu près conservés tels qu'ils existaient en 1791. Le bâtiment des hôtes et des infir- mes offre, sur la longueur de deux cent quatre pieds et la largeur de trente , un double rang de dix-sept grandes croisées ; il est à deux étages, et renferme un nombre infini de pièces , qui toutes avaient leur usage particulier. Les travaux de cet édifice durérent depuis 1658 jusqu'en 1668. £e Dortoir. Le dortoir, bâtiment d'un goût austère et d'un style assez pur, est de deux cent quatre-vingt-six pieds de long sur quarante de large , y compris l'épaisseur des murailles. Le peu de solidité du terrain occasionna des obstacles et des avaries sans nombre pendant l'élévation de cet édifice ; on en vint pourtant à bout en bâtissant souvent sur pilotis , et en donnant à quelques parties des fondations douze ! Cet artiste, qui depuis trois ans dirigeait les travaux de l’abbaye, abjura, le 5 mai 1657, la religion protestante entre les mains du sous- prieur de Saint-Wandrille, D. F. Constantin Mauger, ainsi que deux jeunes demoiselles ses filles ; les religieux , par suite de la haute considération qu’il avaient pour lui, attachèrent beaucoup d'importance à cet événement, Trois ans après, le père de Boynet, architecte et sculpteur fixé depuis long-temps à Rouen , et alors extrèmement Agé, suivit dans les mêmes lieux l'exemple de son fils. Ilest probable qu’une partie des maisons les plus remarquables de Rouen et de ses environs, datant de la dernière moitié du dix-septième siècle, furent construites ou décorées par ces deux artistes. 294 ACADÉMIE DE ROUEN. pieds de profondeur sur neuf de large. Ce vaste bâtiment , offrant une double voûte dans toute sa longueur , renferme une pièce extrêmement remarquable : c'est le grand pro- menoir , long d'environ cent vingt pieds. Dans son centre, une file de colonnes, supportant les arcs arrondis des voûtes , forme une espèce de double galerie éclairée de deux rangs de grandes fenêtres en plein cintre , l'un à lorient et l'autre au couchant. Leurs vitraux blancs sont ornés de larges bordures, où l'on voit représentés toutes sortes d'oiseaux , de poissons, de quadrupèdes, de vases chargés de fleurs et de fruits , de rinceaux , etc. Ces admi- rables listels, qui furent posés en 1688, sont peints en apprêt et ne présentent presque aucune opacité de couleur, même dans le rouge et le bleu , preuve de la haute perfection que cette partie de l'art avait acquise sous Louis XIV. Malheureusement ils ont déjà beaucoup souffert , le prome- noir étant la principale pièce de l'atelier de filature de M. Lenoir fils. On eüût vainement , dès 1789 , cherché dans le vaste pourpris de Saint-Wandrille plusieurs édifices importants représentés dans le plan du père Michel Germain ; quelques- uns n’existaient plus dans leur entier, et déjà depuis long- temps il ne restait rien du logis abbatial ni de l'église de Saint-Pancrace. Quant à celle de Saint-Paul , les religieux l'avaient détruite postérieurement encore, il y a soixante-dix ans environ , pour dégager la vue des deux gros pavillons, qu'ils substitunèrent en méme temps aux bâtiments de l'ancienne entrée gothique. Le peu d'ordre, l'insouciance et la dilapidation qui régnaient à l'époque de l'expulsion des moines et de la spoliation des abbayes , laisseront de longs regrets aux amis des sciences et des arts. La bibliothèque de Saint- Wandrille renfermait encore, malgré les larcins du sacristain De Gruchy, beaucoup de manuscrits précieux échappés à 4 ee | 7. P1. VIN. ES pu se si 2,2 don) | a w = ve. 71 DE AT LEE" “ LE £ @ Langlois Jel & Se Chsple 1 ‘ TL ur TuIt eF dcufhltres ae. 4, CD, 4 AE PE - ; CLASSE DES BELLES-LETTRES. 299 ses mains sacriléges : il en était ainsi de quelques reliquaires curieux par l'antiquité de leur fabrique, qu'on avait sous- traits à la rapacité des calvinistes; les premiers ont presque tous disparu au milieu d’un gaspillage imbécile ; les seconds, dans l'impitoyable creuset révolutionnaire. En 17933, l'accroissement considérable de la bibliothèque conven- tuelle avait nécessité son changement de local ; M. de Fourcy, abbé de Saint-Wandrille , venait, par une rare générosité , d'en réparer les anciennes pertes, et de l’enri- chir des dons les plus variés. Dans son enceinte le numis- mate trouvait, en 1789, le plus beau choix de médailles antiques et de médaillons modernes ; l'artiste et l'amateur , un recueil innombrable d'estampes les plus rares de toutes les écoles; le savant et le bibliophile , une foule de livres choisis avec autant de goût que de discernement. Par combien de canaux et dans combien de mains se sont écoulés ces précieux et déplorables gages de la munificence de l'abbé de Fourcy ? C'est ce que nous ne savons pas, et ce que probablement nous ne saurons jamais. A l'époque de la révolution , le cardinal de Brienne ferma le long catalogue des abbés de Saint- Wandrille, montant à près de quatre-vingts. Il était également abbé de Saint- Ouen. Chapelle de Saint-Saturnin. Après avoir aussi long-temps fatigué mes lecteurs dans les nombreux détours de Fontenelle, je ne Les engagerai point à gravir avec moi la colline sur laquelle subsiste encore entière , hormis de graves mutilations dans ses frisest, l'antique chapelle de Saint-Saturnin, D'ailleurs , ‘ Voyez les ornements qui s'ÿ remarquent encore, planche vint, numéros 4, 5, Get 7; le nyméro 8 offre le profil de ces frises et son achelle, 296 ACADÉMIE DE ROUEN. notre planche offre le dedans , les détails et le plan de ce petit monument, Seulement je reviendrai, pour un instant, à ce que je rappelais plus haut, qu'en 862, les Normands, furieux de se voir frustrés dans l'espoir de recueillir encore de l'or dans Fontenelle , et de s'enrichir de ses dépouilles , avaient assouvi leur vengeance sur ces édifices restés déserts. Le monastire ayant été saccagé , réduit en cendres, ainsi que des chapelles voisines citées par les historiens , celle de Saint-Saturnin pouvait-elle échapper à des hommes chez lesquels l'habitude de la destruction et du ravage était devenue une espèce de besoin ? Pour moi, je ne puis le croire , ni donner conséquemment à ce curieux sacellum l'antiquité qu'on est tenté de lui accorder au premier aspect. Je conçois seulement que sa reconstruction puisse, en raison de son peu d'importance ; avoir précédé même de près de cent ans les grands travaux entrepris par saint Gérard, au commencement du onzième siècle ; mais je ne lui accorde pas un seul jour d'antériorité sur l'horrible dévastation des Danois. Sous le règne de Charlemagne , un saint homme nommé Hardwin vécut long-temps en état de réclusion dans une cellule contigué à cette chapelle, et s'y occupa d'écrits ascétiques sur les livres saints. Aujourd'hui le peuple des environs conserve pour ce monument une vénération qui dut en partie son origine à une vieille tradition de Fontenelle même ; qui prétend que ce lieu renferme la sépulture d'un saint, d'Hardwin peut-être, dont le corps sy conserve sans la moindre corruption, ainsi que les vêtements dont il est couvert. Cette chapelle, long-temps avant la révolution, n’était plus qu'un simple oratoire; un curé de Gueuteville , qui se retira dans Fontenelle à l'âge de quatre-vingt-deux ans, en 1680, la fit clore de murs ainsi que la colline sur laquelle elle est située , qui domine le monastère du B.f { glois del. et Se « Honbisriér DOS FLAT ES CLASSE DES BELLES-LETTRES. 297 côté du nord. Ce bon prêtre donna six mille francs pour ce travail , au moyen duquel l'enclos de Saint-Wandrille acquit près de deux mille deux cents toises de circuit, lotre-Dame de Caillouville. J'aurais été fâché de quitter Saint- Wandrille sans visiter la masure située à cinq cents pas à l’est de l'abbaye, sur laquelle s'élevait autrefois la célèbre église de Notre-Dame de Caillouville , dont je ne puis m'empècher de retracer succinctement l'histoire. Ce monument , fondé, comme nous l'avons dit, dès les premiers temps de Fontenelle , fut détruit par les Normands en 862. Rebäti dans des circonstances plus prospères , il était tombé de vétusté, lorsqu'en 1331 il fut reconstruit par le sacristain de l'abbaye, aidé des oblations des fidèles. La voûte du chœur s'étant écroulée en 1631, on ne lui substitua qu'un simple plafond de charpente et de menuiserie. La nef était couverte de la méme manière Les dimensions de cet édifice, qui, avant le milieu du siècle passé, avait déjà fort souffert de l'injure des temps, étaient de cent quatre pieds de longueur en dedans, dont cinquante pour le chœur , qui était fort beau , et cinquante- quatre pour la nef, qui était d'un ouvrage très commun. Le chœur était éclairé de dix vitraux larges chacun de sept pieds et hauts de quinze. Une corniche de pierre qui régnait en dedans , tout le long de l'édifice, à la hauteur de dix pieds où environ, portait quantité de groupes qui représentaient toute l'histoire de Jésus-Christ. On y avait joint un si grand nombre d'images ou de statues, sans compter les peintures dont le lambris de la nef avait été orné, que l'on disait communément parmi le peuple que 38 298 ACADÉMIE DE ROUEN. tous les saints du paradis s'y trouvaient 1. « On y voit entre « autres, dans le mauvais goût du temps (disait un écrivain « du siècle passé ) , une image de la crèche , où la Sainte- « Vierge étend un bras hors du lit et tient l'Enfant-Jésus « sous l'haleine du bœuf ou de l'âne pour le réchauffer. » On ne sait si le P. Duplessis, auquel j'emprunte ces premiers détails sur Caillouville , entend par mauvais goût, en parlant de ce groupe , bizarrerie de composition ou médiocrité de travail : c’est à cette dernière pensée que je : On peut évaluer , d'après l'extrème rapprochement des groupes et les dimensions de l'édifice, le nombre des figures sculptées à cinq ou six cents. Ou dit encore aujourd’hui proverbialement#en Normandie , assés comme les saints de Caillouville. J'ai rapporté, dans mon Mémoire sur le célèbre tombeau des Énervés de l'abbaye de Jumiéges, une légende populaire fort répandue dans le pays, relative à l'érection de la chapelle en question , que je ne crois pas hors de propos de rappeler ici. Cette légende se rattachait , comme on va le voir, à un incident fort simple, à une niche extérieure restée sans figure, probablement depuis plusieurs siècles. L'architecte ou maître maçon de cette chapelle, s'étant aperçu trop tard qu'il s'était chargé de la bâtir à des conditions dont l'exécution devait le réduire à la mendicité, s’avise, pour sortir d’embarras, de recourir au pouvoir surnaturel du démon, Evoqué par de coupables incantations , celui-ci paraît et se charge du prompt et complet achève_ ment de l’entreprise. Mais quel salaire exige-t-il, bon Dieu ! La cession que Jui fait le maître maçon de ses deux enfants, /ivrables à Va fin du travail. De cet instant fatal, et sans que Satan paraisse en rien dans l'affaire , la besogne languissante ou suspendue avance avec une effrayante rapidité. Bientôt il va falloir payer le terrible compte; mais déjà le malheureux maçon a reconnu sa faute : déchiré de remords, il invoque à son aide (ce qu'il eùt dù faire d’abord }) tous les habitants du céleste séjour. Hélas! il a beau leur adresser prière sur prière, aucun d'eux ne lui répond , aucun d'eux ne le rassure; et, dans son aveugle désespoir, il veut se donner la mort, lorsqu’enfin saint Regnobert , touché de ses larmes, lui apparaît et lui recommande surtout de ne pas agréer le travail qu'il ne soit parlait en tous points. Il était temps, grand temps que ce secours arrivât , car c’est dans l'horreur de la nuit prochaine que doit avoir lieu l’épouvantable et finale entrevue. Yientôt, enveloppés des voiles du mystère, les deux contractants se CLASSE DES BELLES-LETTRES. 299 n'arrête, ayant eu lieu, dans plusieurs autres passages du même auteur, de m'apercevoir, ou qu'il parlait d'après les autres, ou qu'il jugeait peu sainement de certains objets d'art. J'ai découvert le buste de la Vierge du groupe en question : il est d’un travail gothique , j'en conviens, mais d'une grâce et d'une naïveté charmantes (voy. pl. VI, n° 1x 1). Ce que dans les arts on appelait grâce, du temps de Duplessis, n’était rien autre chose qu'une prétentieuse et théâtrale afféterie : donc le charme de la naïveté n’était plus senti, n'était plus retrouvent tête-à-tête, À la lueur infernale qui jaillit des prunelles enflammées de l'ange réprouvé, le chétif mortel, le cœur palpitant d'effroi, promène en silence un œil effaré sur toutes les parties de l’edifice.... Misérable ! rien n’est omis... rien qui ne soit admirablement terminé... Pauvre homme! quelles transes sont les siennes! Il va s’évanouir de douleur... , quand tout à coup il s'aperçoit, à fortunée remarque! que la statue de saint Regnobert est absente de sa place. Le charitable bienheureux l’en avait enlevée lui-même , et transportée bien loin de là. Le maître maçon sent renaître ses espérances, se retranche hardiment dans les clauses du marché. Le débat se prolonge; le jour commence à poindre , et le prince des ténèbres disparait , en se soumettant , par une espèce de délicatesse fort singulière chez lui, à réparer la chose dès le lendemain même. Le lendemain arrive; le diable avait, en maugréant, replacé la figure; mais Regnobert lui avait joué le même tour que la veille, et ce bon saint persista à lelui jouer tant de fois , que Satan se vit contraint à renoncer à son affreux salaire. Honteux et fatigué , il laissa jouir en paix du fruit de ses travaux et de sa défaite le maçon reconcilié avec le Ciel, et dont le divin protecteur ne jugea pas à propos de replacer sa statue sur son assiette. Saint Regnobert ou Renobert, évèque de Bayeux, mourut en 644. Ces paroles de sa prose : « Dœmon fugit et tabescit », attestent qu'il donna de bien plus graves mortifications au diable que le plaisant désappointement que nous venons de rapporter. On avait représenté cette bizarre légende sur un bas-relief de l'abbaye de Jumièges, Ce morceau curieux, dont on ne peut trop regretter la perte, devait appartenir àquelque restauration très partielle ,exécutée dans le quinzième siècle. 1 Je dois à l’extrème complaisance de M. Lesage, aîné, de Caudebec, P Be, , l'envoi et la possession de cette pièce de conviction, dont nous n'avions eu le temps de prendre, sur le lièu, qu'un croquis assez vague. 300 ACADEMIE DE ROUEN. estimé, quand, par un singulier contraste, on était tombé dans des formes flasques et vulgaires, en croyant se rapprocher de la nature. En rendant justice au très petit nombre de peintres et de statuaires qui , guidés par un goût plus sûr, ne dédai- gnèrent point de respecter , sous Louis XV, les grandes traditions de l'art , je ne crains point de dire qu'une foule de sculptures exécutées dans le moyen âge, spéciale- ment depuis saint Louis jusqu'à la renaissance , se rappro- chaient de l'antique par de bien plus frappantes analogies, que la plupart des productions qui attestèrent, depuis la régence de Philippe d'Orléans jusqu'au professorat de Vien, la dégénération de l'école française. Devons-nous mainte- nant nous étonner du jugement peu fondé du P. Duplessis, quand les artistes, ses contemporains , Ségaraient eux- mêmes et dans leur système et dans l'emploi de leur talent ? Sur le sol où s'élevait Notre-Dame de Caillouville gissent encore quelques figures éparses , horriblement mutilées. Elles m'ont paru de proportions fort différentes et d'un mérite d'exécution assez inégal. Elles devaient être, pour la plupart, de demi-bosse et appliquées contre le mur comme une espèce de parement. Jadis, une statue haute au moins de douze pieds s'offrait aux regards du specta- teur, à gauche et la première en entrant dans la nef: c'était celle du puissant préservateur de la mort subite, de saint Christophe 1. Plusieurs autres figures , moins élevées de moitié que ce colosse , se trouvaient disposées ‘ Ce saint, que les légendaires font naître cananéen, et mourir confesseur et martyr sous l'empire de Dèce, le 25 juillet 254, n’est connu que par des actes qui, depuis près de deux siècles, sont regardés comme au moins extrèmement suspects. Iln’en fut pas moins extraordinai- rement honoré danstoute l’égliselatine, et surtout eu Espagne et en France. Il était le plns souvent représenté dans des dimensions énormes, et Notre- Dame de Paris n’était pas la seule basilique qui renfermät un semblable colosse; mais il n’en existait pas én France qui égalât en proportions celui de Ja cathedrale d'Auxerre. Au reste, on ne peut être surpris du rèle CLASSE DES BELLES-LETTRES. 301 ca et là; mais tout le reste, d'une dimension moindre encore ; ceignait, entassé par groupes , tout l'intérieur de ce précieux panagion. Ces groupes représentaient un grand nombre de sujets des deux testaments , et cette curieuse décoration n'était pas , à coup sûr, d'un médiocre intérêt aux yeux de nos pères , qui se complaisaient à retrouver, excessivement important et presque unique que ce saint géant remplissait dans le culte des images, quand on songe qu’on était alors persuadé qu'il suffisait d'envisager la sienne avec quelque dévotion, pour être garanti, au moins pendant la journée, des plus graves accidents physiques. Mais la confiance de nos bons aïeux en lui nese bornait pas la: outrele soin de leur santé, ils lui commettaient encore la garde de leur réputation et celle de leur tranquillité domestique : aussi son effigie, grossièrement gravée en bois, format in-folio, dès 1/23, dut-elle étre aussi abondamment répandue qu’uni- versellement et avidement accaparée. On ne connaît aujourd'hui cependant, de cette rarissime et gothique production, qu’une ou deux épreuves au plus. Outre la date précitée, on y lit, au pied du sujet, les vers suivants : Cristophort (sic) faciem die quacumque tueris. 9la nempe die morte mala non morteris. Le vers pentamètre suivant se voyait inscrit au bas de quelques statues de ce mème bienheureux : Christophorum videas ; posteù tutus cas. Dans la plus grande partie des Heures manuscrites ou imprimces dans les quinzième et seizième siècles, l’image de saint Christophe est suivie de prières latines ou françaises, dans lesquelles on attribue à ce martyr le pouvoir de prévenir tont ce qui peut arriver de fàächeux à l'homme, tant par la fragilité de son être que par la perfidie ou la malice de ses semblables, Ajoutons à cela que, dans beaucoup de pays, il était invoqué par les femmes enceintes, pour obtenir, par son intercession, une heureuse délivrance et un fruit vigoureux. À propos du saint Christophe de Notre-Dame de Paris, voué par Antoine des Essarts, chambellan de Charles VI, et posé le 24 mai 1413, un chronologue du siècle passé* dit ingénuement, que « ce fut en raison « d’un ancien usage des chrétiens, établi pour abolir peu à peu la « superstition des payens, qui mettaient à l'entrée de leurs temples la « statue d'Hercules, » * Féritable calendrier chronol. etc. , pour l'année 1528. Paris, H.S. P. Gisssx, p.28 302 ACADÉMIE DE ROUEN. dans les embellissements des temples, ce qu'ils couraient avec empressement admirer dans les représentations scéni- ques des mystères. Dans l'irréparable perte de ces antiques productions de l’art, ce qu'on doit regretter le plus ce sont les effigies des personnages appartenants à notre histoire. On ne peut , je crois, voir autre chose qu'un déplorable débris de ces derniers dans un fragment offrant, assise sur une espèce de trône, une figure tronquée derrière laquelle est debout nn sergent-d'armes armé de sa masse , également mutilé (woy. pl. VI ,n. x, p. 295). Là , suivant un usage assez commun alors, on n'avait point oublié de mettre en opposition la béatitude des élus avec les tourments des réprouvés 1. J'ai trouvé sous l'herbe : On construisit, en effet, peu d’églises gothiques remarquables par leurs seulptures , dont on ne puisse dire, comme dans le fabliau du Sougretair de Bethléem : Ovriers i ot et biax et gentz, Tailléeurs qui pierres tailloient , Qui en leur taille devisoient Paradis et Enfer encoste, Qui chascun an reçoit maint hoste. Anges i véoit qui tenoient Les ames qui sauves estoient ; Et li Déable d'autre part Les danpnées ot à sa part, Qui par semblant se delitoit En ce que bien les tormentoit. Les artistes de ces temps d’ignorance, où l'imagination des peuples était plus facilement subjuguée par les impressions des sens que par le raisonnement , s’évertuaient tellement à donner aux malins esprits des formes non moins effroyables que grotesques , que, plus tard, les Breughel, les deux Téniers, Callot et autres, ne manquèrent pas de modèles dans le genre du Démon en pierre dont parle le fabliau précité, lequel Si horribles fu et si lez Que trestouz cels qui le véoient, Seur leur serement afermoient C'onques mès si laide figure Ne en taille, ne en peinture Navoient à nul jor véue, Qui si éust laide véue, Ne Déable miex contrefet. CLASSE DES BELLES-LETTRES. 303 et recueilli une relique des images de ces derniers. Ce sont deux torses, nus et de sexe différent, accolés de la plus étranye manière ; et dont les bras sont singulièrement renversés. Des serpents qui traversent leurs chairs les enlacent de leurs hideux replis; les uns leur mordent les mamelles, les autres les déchirent plus étrangement encore, mais d'une façon fort propre à donner au peuple une leçon de continence (v0y. pl. VIE, n. x1, p. 295 ). La fameuse tour de Montmorillon offre plusieurs statues dans une situation de même genre , et l'abbaye de Moissac renfermait aussi, je crois, des basreliefs à peu près semblables. C'est à tort, je présume, qu'on a cherché dans ces derniers sujets un sens différent et bien plus éloigné que celui qu'il faut absolument donner au fragment de Caillou- ville. Les Grecs eux-mémes avaient introduit aux enfers les serpents que la férocité humaine employa quelquefois comme instruments de supplice. Les prédicateurs , les artistes , les poëtes, les y ont maintenus pendant la durée du moyen äge. Jusque dans la religion musulmane on retrouve celte croyance , ou , si l'on veut , cette parabole 1. Michel-Ange tourmente un de ses damnés comme ceux de notre sculpture ; et, cent ans après ce grand peintre, Jérémie Drexelius, dans son livre De Æternitate Consi- derationes , produit une estampe où les réprouvés sont dévorés par des reptiles, horribles agens de la vengeance céleste. J'avouerai cependant que ce jésuite paraît donner à celle image un sens purement allégorique, en ne parlant dans son texte que de vermes conscientie. ‘« Le souverain juge, au dernier jour, attachera, autour de celui « qui n'aura point fait l’'aumône, un effroyable serpent, dont le dard « piquera sans cesse sa main avare, qui ne s'ouvrit point pour les mal « heureux. » (Religion de Mahomet, etc. RÉLAND , 10e Leçon.) 304 ACADÉMIE DE ROUEN. La chapelle de Caillouville, à en juger par ses vestiges , n'était point en forme de croix. Ce monument devait avoir environ quinze pas de large de dedans en dedans. Sur son emplacement s'élève aujourd'hui une espèce de petit calvaire, au pied duquel on a amoncelé quelques têtes de saints , et placé la partie supérieure d'un groupe repré- sentant Joachim et Anne , tous deux debout et se tenant chastement embrassés (voy. pl. VIII, n. XII, p. 295). Telle était autrefois la manière , en même temps expressive et modeste , de présenter aux sens l'immaculée conception de Marie 1. Nous remarquâmes aussi, parmi plusieurs autres débris plus ou moins déformés, une espèce de terme d'un aspect fort bizarre ; c'est la figure classée sous le n° x111 > dans notre huitième planche. A dix pas de ce lieu se trouve la fontaine miraculeuse dont la renommée n’a , depuis plusieurs siècles, rien perdu de son crédit, Autrefois le retour du Vendredi-Saint appelait à Notre-Dame de Caillouville un concours prodigieux de peuple, qui venait pour y entendre un sermon et pour y faire ses dévotions ; on n'y préche plus aujourd'hui , mais, tous les premiers vendredis de mai, on voit la même affluence accourir sur ce sol dévasté. Là, dans ce même jour, plus de deux mille évangiles sont récités par le curé de Saint-Wandrille et les ecclésiastiques des environs , qui l'assistent dans cette circonstance. Qui ne bénirait avec moi la foi de ces bons pélerins, qui, les consolant du malheur de la vie , apporte en même temps dans cette agreste contrée I Joachim s'est trouvé A la porte dorée, En la bouche à baisé Son ancienne épousée De qui vient la lignée De ce précieux fruit. 4° couplet du vieux noël : Noble ficur de la vigne. ) CLASSE DES BELLES-LETTRES. 305 des moyens d'existence annuels, dont elle ressentit vive- ment la privation pendant le détestable règne de la terreur ! En eflet, jusqu'à l'arrivée de l'arrière-saison, les baigneurs abondent à Caillouville ; d’autres y viennent simplement, soit pour y prier, soit pour $ y acquitter d'un vœu. Pendant tout ce temps, par un petit calcul assez bien entendu , mais quelque peu teinté de simonie , on ne laisse plus, dit-on, emporter de l'eau de la fontaine, devenue la pro- priété d'un particulier, à moins de cinq à six sous la pinte. Cette fontaine, entourée de haies, est située à la source du ruisseau dont l’abbaye naissante emprunta son premier nom ; elle est de figure carrée , et l'on descend jusqu'au fond par des degrés de maconnerie occupant son pourtour , au-dessous de la surface de l'eau ; tels étaient disposés , hormis leur forme ronde , les premiers baptistères , lorsque le sacrement régénérateur s'administrait par immersion 1. Le fond de la fontaine est revêtu de dalles de pierres, sur l'une desquelles est gravée en creux une figure que l'on dit être celle de la sainte reine Radegonde. Cette image, que , malgré toutes mes tentatives, je n'ai pu distinguer , à cause de l'épais limon dont elle était couverte , devient apparente lorsque l'on cure la fontaine, ce qui se pratique ordinairement aux premiers jours de mai. Enfin, contre la clôture de cette source révérée , s'élève, à l'intérieur, un petit hangar couvert en chaume ; il abrite deux statuelles hideuses , censées représenter , l'une, encore sainte Rade- gonde , l'autre saint Clair ; elles sont aux deux côtés d'une figure assise, beaucoup plus grande et revêtue d'une robe verte. Cette dernière, qui, par son horrible diflormité, ressemble à certaines pagodes indiennes, n'a point d'enfant dans les bras; mais un écriteau, eloué à contre-sens , " Anastas. in Sylvest,, Greg. Tur., lib. », 39 306 ACADÉMIE DE ROUEN. présente , en gros caractères , ces mots renversés : Norrr- Dawe-Niéce, orthographe barbare, malgré laquelle il faut lire Notre-Dame-des-Neiges. J'ai trouvé Fontenelle renversée sous ses ruines, quand le pouvoir du temps et les révolutions de l'esprit humain n'ont pu détruire ni altérer seulement des croyances plus antiques que ces religieux débris. Puissent ces mêmes croyances , préservatrices des angoisses du doute, com- pagnes innocentes et naïves de la plus solennelle des espé- rances , toujours contribuer , transmises d'âge en âge, au bonheur des habitants de ces paisibles vallons ! SÉRIE DES ABBÉS DE SAINT-WWANDRILLE, Rédigée d'après plusieurs manuscrits de cette abbaye, le Chronicon Fontanellense, /e Gallia christiana , /e Neustria pia , l’Almanach royal, etc., etc. 1. Sat Wanprizze. ( Wandregesilus où Wandregi- silius ). IL fonde le monastère de Fontenelle vers 654 ou 655 ; il bâtit les églises de Saint-Pierre, de Saint-Paul , de Saint-Laurent et de Saint-Pancrace. ( Il parait que ce monastère s'accrut tellement par la protection et les libé- ralités de Clovis II, de Bathilde et de plusieurs grands personnages du royaume , qu'Orderic-Vital a cru pouvoir dire, en parlant de saint Wandrille : (2x diebus sancti Audoeni pontificis ; sanctus Wandregesilus ingens mona- chorum agmen Fontinelle adunavit.) Va culture des lettres ne fut pas un des moindres soins de ce fonda- teur pour la prospérité de son monastère ; car, dans le temps même où le code Théodosien, cité par Isidore, CLASSE DES BELLES-LETTRES. 307 était expliqué à Clermont, Wandrille envoyait exprès à Rome son neveu, pour y recevoir, du pape Vitalien, les manuscrits que ce pontife destinait à Fontenelle. Quelques années avant la mort de ce saint abbé, arrivée en 665, vivait dans son monastère saint Génésion (Genesius), qu'il avait constitué , pour quelque temps, son lieutenant ou vicaire , pro-abbas, selon Dumoustier , qui fait cette réflexion , en parlant de ce dernier : « On l'a omis sur « le registre des abbés de Fontenelle, où parce qu'il « a été très peu de temps en charge, on parce qu'il a « quitté le monastère pour aller à la cour, avant la mort « de saint Wandrille ». Nommé archevêque de Lyon en 668, Génésion mourut en 670. 2. Sant Lameerr. Il jouit d'un grand crédit auprès du roi Thierry , qui fait de grandes donations à l'abbaye de Fontenelle , et contribue ainsi à son accroissement. ( Mais les titres de ces donations sont perdus , probablement aussi celui par lequel Thierry accordait à cette abbaye une propriété en Provence, pour la fournir d'huile et d'autres choses nécessaires. ) Nommé abbé de Saint-Wan- drille en 665, et archevèque de Lyon en 678. 3. Sanr Awssert succède à saint Lambert, en 638 ; il bâtit une hôtellerie ? (xerodochium ) à la porte de l'abbaye. "Le mot hôtellerie est le seul par lequel on puisse littéralement traduire l'expression latine à laquelle on substitua plus tard, dans les monastères, celle de domus hospitum, maison ou logement des hôtes, Sa destination était, en effet, d'héberger gratuitement et pendant un nombre de jours presque toujours déterminé, les étrangers et les pélerins valides. On a quelquelois employé synonymiquement pour xenodochium le mot nosocomium, qui ne peut être traduit que par hôpital, maladrerie , infirmerie. C’est une erreur , au surplus , de considérer étymologiquement la chose. Les mots hôtellerie et hôpital, qui désignent aujourd'hui deux établissements de nature si différente, tirent également leur origine de celui d’Aospes, hôte, 308 ACADÉMIE DE ROUEN. Nommé archeyèque de Rouen en 684, il n'en conserva pas moins le gouvernement et la dignité d'abbé de Fonte- nelle, jusqu'au moment de sa mort, arrivée en 695. L'intrigue l'ayant fait exiler , il se retire à Omont, monas- tère du Hainaut, où il meurt; on rapporte ses restes à Fontenelle , et on les dépose dans l'église de Saint-Paul , à la gauche de ceux de saint Wandrille. On trouve , dans un manuscrit fort précieux provenant de cette abbaye et conservé à la Bibliothèque publique du Havre, que le corps de saint Ansbert fut embaumé avec des aromates, imbibé d'odeurs, et que sa figure fut peinte avec du vermillon, pour lui donner l'aspect d'un homme qui dort , « et juventis effigiem gerens ». 4. Sawr Huwserr où Hioesent [*. Elu abbé à la fin du septième siècle , il rend les honneurs funebres à son prédécesseur , lorsque l'on rapporte ses restes d'Omont, dans le Hainaut, à Fontenelle, à l'endroit où le corps de saint Ansbert était posé. ( Ce lien , selon. Dumoustier ; se nommait en latin Paldriacus, et dépendait du territoire de Rouen, et le Gallia christiana le désigne sous le nom de métairie de Berthold et de Radamiste. ) À quatre mille pas de l'abbaye, il élève, en remplacement de la croix qu'on y a plantée, une église d'un beau travail, en l'honneur de ce saint prélat ( ecclesiam augusto et polito opere cons- truxit ). 11 meurt en 699 ou 700 ; enterré d'abord dans l'église de Saint-Paul, on rapporta ses restes dans l'église principale ; et on les plaça sous le maitre-autel. 5. Saivr Banv ( Baynus ), On ne parle , dans ce qui le concerne , que de la translation qu'il fait de l'église de Saint-Paul dans celle de Saint-Pierre , des reliques de saint Wandrille, de saint Lambert, de saint Ansbert et de plusieurs autres moines. Il est nommé abbé, et succède à saint Hildebert vers 700 ; mais on ne connait pas l'époque CLASSE DES BELLES-LETTRES. 309 de sa mort. C'est pendant son administration que le due Pepin fit élever le monastère de Fleury, dans le Vexin, dont il donna la direction à saint Bain. (Il fut aussi évêque de Térouanne. ) 6. Sawr Béniexe. Successeur de saint Bain, vers 710 ; il gouverne Fontenelle jusqu'en 722, époque où il meurt. Confirmation faite par Childebert Il, à l'abbaye, des priviléges accordés par les rois ses prédécesseurs . et des donations faites par les fideles, comme aussi de plusieurs nouveaux priviléges octroyés à Fontenelle par le méme prince, et de quelques autres donations dues à des per- sonnages notables, où par leur rang, ou par leur piété. 7. Sant Hucurs. Succède à saint Bénigne, en 724 ; et fait plusieurs donations à l'abbaye de Fontenelle, qu'il gouverne jusqu'en 730 , avec la dignité d'archevéque de Rouen ; mort dans la même année. Il fut inhumé à Jumiéges, dont il avait été aussi abbé. 8. Sat Lawnox. Entré en charge en 731, il meurt en 734, et est inhumé dans l’église de Saint-Pierre de Fontenelle. 9. Teurenne ( Teutsindus ). Celui-ci fut un de ces abbés militaires qui s'emparérent des monastères sous Charles- Martel. D'abord abbé de Saint-Martin de Tours, il le devient ensuite de Fontenelle, en 734. Son gouvernement est tel, qu'il lui mérite le surnom de malus rector, malus administrator. I dépouille Saint-W andrille des trois quarts de ses propriétés, qu'il aliène en faveur de ses parents et d'hommes de la cour. Il donne au seul comte Rothaire ou Rathaire, vingt-neuf métairies avec leurs dépendances. C'en était fait de l'abbaye si, parmi les religieux, qui, selon la Chronique de Fontenelle, étaient alors au nombre de trois cents, elle n'avait compté Erinhard (Erinhardus ). 310 ACADÉMIE DE ROUFN. Ce dernier éleva l'église de Saint-Michel , aujourd'hni église paroissiale. Sed hujus denique tempore (837 ), Erinhardus ædificavit basilicam beatissimi archangeli Michaelis, licet modico pulcherrimo tamen opere, allatis videlicet petris politis de Julio-Bon& castro * quondam nobilissimo ac Jirmissimo , ad construendos arcus seu frontispicium ejusdem templi. (Chronicon Fontanellense , apud Acherium , cap. X.) Teutsinde mourut en 738. 10. Guy I. Digne successeur de Teutsinde , dont il suit les traces. Il ne gouverne Fontenelle que pendant un an. Mort en 739. 11. Racewrroy. Nommé abbé de Fontenelle en 739. IL est déposé pour ses déprédations en 742 ; il est égale- ment déposé comme archevêque de Rouen. 12. Saixr Waxpov. Nommé sur la demande unanime des religieux , il succède à Ragenfroy en 742. Il bâtit une église en l'honneur de saint Servais ; elle était contigué à celle de Saint-Pierre , qui fat brülée en 746, Saint Wandon gouverna l’abbaye de Saint-Wandrille jusqu’en 748, époque à laquelle , frappé de cécité , il donna sa démission. Mort en 756; inhumé dans l’église de Saint-Pierre. Il parait que, du temps de cet abbé, les collections monastiques s'étaient mieux conservées qu'ailleurs dans les régions da nord de la France. On remarque l'Histoire des Goths, par Jornandès , dans le catalogue des livres que Wandon avait ajoutés, peu de temps avant sa mort, à la bibliothèque de Fontenelle , et c'est peut-être à cet abbé ou à saint Wan- drille lui-méme , que nous devons l'introduction de cet auteur en France. Il se trouve , à la fin du même catalogue , une Æistoire * Lillebonne, en Caux, aujourd’hui connue par ses antiquités romaines et ses monuments du moyen âge, CLASSE DES BELLES-LETTRES. 311 d'Apollonius de Tyr, qui doit être la même traduction latine que nous avons conservée d'un roman grec portant ce titre, et dont le texte original est perdu. 13. ASTRULF Où AusTRULPRE. Successeur de saint Wandon, en 748. Il se rend recommandable par son admi- nistration ; il fait un pélerinage à Rome , et meurt à Saint- Maurice en Savoie , en 753. 14. Winozarcus, Guyzaic ou Guy IL. Loin de se signaler, comme son prédécesseur, par son zèle pour les intérêts du monastère , il aliène, en faveur de personnages de la cour, plusieurs métairies appartenant à Fontenelle, Aide de la faveur de Pepin , qui vint pendant le cours de son abbatiat faire ses dévotions au tombeau de saint Wandrille , il fit reconstruire beaucoup plus belle la basilique de Saint-Pierre. Abbé en 753, il mourut en 787, et fut inhumé dans cette même église. 15. SAINT GERWOLDE. Évéque d'Évreux , il abandonne son évêché et devient abbé de Fontenelle, en 787. Il fait couvrir en plomb l'église de Saint-Paul, et reconstruit entièrement plusieurs édifices ; il en restaure d'autres qui tombaient en ruine ; il établit une école , parce qu'il trouve la plupart des moines illettrés, et leur apprend même à chanter ; car, ajoute naivement l'écrivain dont les auteurs du Gallia christiana ont tiré ces documents , quoiqu'il ne fût pas trop versé dans les lettres, cependant il était habile dans le chant , et avait une voix belle et agréable. Mort en 806, il fut enterré à Saint-Wandrille. 16. Samr Trasare. Nommé abbé en 807, il obtient de ‘ Louis-le-Débonnaire , pour son abbaye, de grands bienfaits, P ) 5 de nouveaux priviléges, et la confirmation de ceux dont elle jouissait auparavant. IL se démet de ses fonctions en 810. 312 ACADÉMIE DE ROUEN. 17. SaiT Hiserr ou Hizverert IL Entré en charge en 815 ou 816, il mourut, dit-on, en 817, s'étant fait remarquer par sa piété. 18. Ecinnarp. Il gouverne Fontenelle pendant sept ans, c'est-à-dire depuis 817 jusqu'en 823, époque à laquelle , appelé à d'autres fonctions par Louis-le-Débonnaire ; il cède la crosse abbatiale à saint Anségise. 19. SAINT ANSÉGISE, ANGÉSILE , Où ANGÉSILDE (Ansegisus). Il fait tant de bien à son abbaye et déploie de si grandes vertus , qu'on le regarde comme un nouveau saint Wan- drille, ou comme un autre saint Ansbert. Ilrestaure plusieurs bâtiments, il en construit de nouveaux , parmi lesquels on ne doit pas oublier le chapitre , au nord de l'église Saint- Pierre. Par son testament , il lègue une livre d'argent au monastère de Logium :, dont la reine Bathilde avait été la bienfaitrice et même la fondatrice , vers 656, et Wisle la première abbesse , aux environs de l'an 700. C'est dans le : Ce monastère tirait son nom du lieu de son emplacement , autrement appelé Lotium, Loium ou Lotum. C’est de la dernière manière qu'il est désigné comme lieu de mansion dans l'Itinéraire d'Antonin ; on croit que c’est Caudebequet. Milon, religieux de Fontenelle et fils de l'abbesse Wisle, se retira près de Logium , sur le bord de la Seine, pour y mener la vie érémitique, et l’y pratiqua parmi les roches qui bordent la rivière, dans une grotte qui se nommait encore , long-temps après, la grotte de Milon. Ce pieux solitaire demanda, avant sa mort , d'être enterré à l'entrée du monastère de Logium, qui fut probablement détruit par les Normands lorsqu'ils brûlèrent et ruinèrent de fond en comble celui de Saint-Wandrille, en 862, ( Voyez les diverses opinions émises sur ce monastère, et le lieu de sa situation, dans D. Toussaint Duplessis, Description géographique et historique de la Haute-Normandie ; dans l'abbé Belley, Mémoire sur Juliobona, t. xix des Mémoires de l'Académie des Inscriptions , p. 634, et dans la Notice de l’ancienne Gaule, de Danville, p. 419.) ( Note de M. le marquis Le Ver.) CLASSE DES BELLES-LETTRES. 313 chapitre élevé par lui , qu Anségise fut inhumé , après avoir gouverné l'abbaye de Fontenelle pendant environ dix ans, c'est-à-dire depuis 823 jusqu'en 833. La vie de cet abbé rapporte qu'il avait donné à son monastère trente et un volumes, parmi lesquels on lit le titre de l'Histoire écrite par Josephe ; comme , parmi les quarante-neuf dont il avait enrichi une autre abbaye , on remarque l Histoire ecclésias- tique d Eusèbe, la Chronique du même auteur, et le Traité d'Arithmétique de Cassiodore. Il fit alors bâtir exprès une tour à Fontenelle, pour y garder ses livres avec plus de sûreté. Domum verd quà librorum copia conservaretur , que gracè müpyos dicitur antè refectorium collocavit , cujus tegulas clavis ferreis configi fecit. Les détails que donne ie contemporain de cet abbé font connaître le nom de Madalulfe , célèbre peintre de plafonds et de fresques, qu'il avait fait venir de Cambray , circonstance qui semble- rait assigner à l'école flamande une grande ancienneté. On pourrait également penser , d'après l'emploi des clous dont parle la citation latine , qu'il était déjà question de couver- tures en ardoises. On doit à saint Anségise une collection des Capitulaires de Charlemagne et de Louis-le-Débonnaire, et plusieurs missions diplomatiques furent confiées à cet abbé par le premier de ces princes. La chronique de Fontenelle (Spic. d'Ach., tom. 2, p. 280-281) donne le détail des nombreux manuscrits el des ornements précieux dont Anségise enrichit ce célébre monastère. 20. Josern. Il ne gouverne que pendant sept mois et douze jours l'abbaye de Fontenelle; il est chassé, d'abord parce que les religieux craignent que les intérêts spirituels et temporels de leur monastère ne se trouvent compromis . administrés par un abbé qui occupe en même temps le siége épiscopal d'Evreux, et ensuite parce qu'il a embrassé le parti de Lothaire. # 40 314 ACADÉMIE DE ROUEN. 21. Saiwr Fouroues. Le vénérable Foulques gouverne Saint-Wandrille depuis 834 jusqu'en 845. Pendant le cours de son abbatiat , les Normands viennent à Saint-Wandrille , et il le sauve de leurs ravages moyennant six livres d'argent, (libris sex. ) 22. Saint Hériwsert, ou Hérisert, abbé de Fontenelle, depuis 845 jusqu'en 850 ? 23. Josern. C'est peut-être le même que celui dont on a parlé un peu plus haut. Les auteurs du Gallia christiana disent : /dem ne sit cum episcopo superits memorato , non liquet. As le comptent comme abbé. 24. Louis, chancelier de France et abbé de Saint- Denis. Il gouvernait , en 853, les religieux de l'abbaye de Fontenelle , qui fut entièrement détruite par les hommes du Nord en 862. Cet événement explique la lacune considérable qui se trouve dans la liste des abbés de ce monastère , depuis 862 jusqu'en 960 environ. 25. Esoce , ou Esze, homme de guerre qui combattit vaillamment contre les Normands pendant le siége de Paris, en 885, porta le titre d'abbé de Fontenelle plutôt qu'il n'en remplit les fonctions , l’abbaye étant détruite et les moines ayant transporté à Gand les reliques de saint Wandrille, de saint Ansbert, de saint Wulfran, etc. 26. Mavwarp , qui fut aussi abbé du Mont-Saint-Michel, en 966, relève, sous Richard duc de Normandie, l'abbaye de Fontenelle; ce qu'il fait en si peu de temps, que l'histo- rien dit : Divino fretus juvanime templum in parvo tempore nobiliter consumavit. 27. EnsuzserT , ou EusuzserT , ou ENGELBERT. Doyen de Jumiéges, puis abbé de Fontenelle , il se fait remarquer CLASSE DES BELLES-LETTRES. 315 par ses vertus et son zèle à embellir et à agrandir son abbaye. 28 et 29. Assés dont les noms sont inconnus. Ils ont gou- verné Saint-Wandrille jusqu'en 1008. M. Deville a constaté, d'après un Cartulaire de ce monastère , qu'un de ces deux abbés se nommait Adam. 30. SainrT Gérarp Ier. Cédant aux instances de Richard IF, duc de Normandie , il se chargea , en 1008 , du gouverne- ment de Saint-Wandrille, La foudre renverse la basilique de Saint-Pierre ; il la reconstruit, mais d'une forme plus élégante. IL est puissamment secondé dans ses entreprises par le prince dont nous venons de parler. En 1024, ce duc perfectionne et achève l'abbaye; lui rend, augmente, confirme ses revenus, et lui donne l'aleu que tenaient de lui Osbert et Ansfrede, ses beaux-frères. L'abbé Gérard , en butte à la jalousie par les vertus éclatantes qu'il déploie , meurt sous la hache parricide d'un moine , l'an de N.-S. 1031. 3x. Saint GRapuLPuE. Il fait la dédicace de l'église cons- truite par son prédécesseur, sous le vocable de saint Pierre et de saint Wandrille. Il avait été précédemment chargé de diriger la construction du monastére de Sainte-Catherine- du-Mont près Rouen , par Gosselin, vicomte d'Arques, fondateur. L'église de cette dernière abbaye, détruite sous Henri IV, ayant été, suivant Farin, construite entièrement dans le goût de celui qui présida, vingt-cinq ou trente ans après, à l'érection de Saint-Georges-de-Bocherville , ce précieux monument , qui subsiste encore aujourd'hui dans son intégrité, nous donne sans doute, vu l'extrême rapprochement des époques de construction, une idée positive du style de l'église de Fontenelle consacrée par Gradulphe. Ce personnage, nommé abbé en 103r, meurt en 1048. 11 est inhumé dans le Trésor. 316 ACADÉMIE DE ROUEN. 32. Rosenr Ier. Abbé en 1048, il régit le monastère jusqu'en 1063, qu'il fut appelé à l'abbaye de Saint-Germain- des-Prés, où il mourut et fut inhumé, 33. Giuvert , Girserr ou Gerserr. Son abbatiat se fait surtout remarquer par les hommes de mérite qui fleurirent à cette époque dans l’abbaye de Fontenelle : les deux Godefroy , Guntard ; Ingulfe, Gaultier. Guillaume-le- Conquérant rend à cette abbaye des propriétés qui lui appartenaient avant qu'elle fût dévastée ; Gilbert a une discussion avec Guillaume, archevêque de Rouen, au sujet de la preuve par le fer et de la juridiction de Saint-Wandrille sur quatre paroisses. Le duc de Norman- die lui rend, dans une assemblée tenue à Oissel , ses droits sur ces deux points. Abbé en 1063 ; mort en 108g. Ingulphe , écrivain anglais, moine de Fontenelle et secrétaire de Guillaume-le-Conquérant, rapporte qu'au moment où ce prince était près d'accomplir sa fameuse expédition , lui Ingulphe , fut lui offrir à Saint-Valery, où se rassemblait la flotte , douze cavaliers d'élite bien armés, de la part de l'abbé Gerbert, avec cent marcs d'argent pour l'entretien de leur équipage. « Duodecim juvenes electos equites et armalos , Cum Centum marcis pro suis sumptibus in suam expeditionem offerebam. » ( Xngulph. , Hist. abb. Croy.) 34. Lanrraxc. Nommé abbé en 1089, il est chassé en 1091. 35. Géraro I. Il succède à Lanfranc en 1091 , et meurt en 1126. Inhumé dans le chapitre : ses ossemens sont reportés, en 1672 , aux pieds du maitre-autel. 36. Azaw. Choisi pour abbé en 1126 , il ne veut point reconvaitre l'autorité de l'archevèque de Rouen, et en est chassé en 1137. 37. Sat Gauzrier Ier ou WVauzrnier ( Walterius ou CLASSE DES BELLES-LETTRES. 319 Gallerus ). Abbé en 1137, il meurt en 1150 , laissant après lui une mémoire honorée. 38. Rocer. De prieur il devient abbé de Fontenelle en 1150, et la régit jusqu'en 1165, époque de sa mort. Imhumé dans le chapitre , en 1672 , ses restes sont trans- portés sous le maître-autel , avec ceux de son successeur. 39. Awrren, Axsrrep, AuFRED, ou ANFROY. Il remplis- sait la charge de camérier ; il est nommé abbé de Fontenelle en 1165. Il meurt en 1178 , et est inhumé dans le chapitre. 40. GaurTuiEr IT. Successenr d'Anfred , en 1178, il meurt en 1187. Inhumé dans le chapitre. 41. Georroy où Gonerroy I ( Gaufridus ). Protégé par Philippe-Auguste, il est nommé abbé en 1187, et meurt en 1198. Inhumé dans le chapitre , ses restes furent reportés , en 1672 , sous le maître-autel. 42. Rosert IL Il ne régit le monastère de Saint-Wan- drille que pendant un an : il meurt en 1194. 43. Ranozn ou Recxauzn ( Rainaldus , Reginaldus ). Abbé de Saint- Wandrille en 1194, ses propres intérêts l’appellent en Angleterre ; il y meurt en 1207. 4%. Rosert HE. Choisi pour abbé en 1207, du consen- tement unanime des religieux , il meurt en 1219. Il est iuhumé dans le chapitre, et on lui élève un superbe tombeau. ( Præclaro in tumulo.) 45. GuizLauue Ie, pe Bray, ou pes Foxraives. Nommé, en 1219, à l'abbatiat de Saint -Wandrille , il se démet de cette charge en 1235. IV. B. C'est en suivant, quant à ce qui concerne le personnage ci-après , la nomenclature du Gallia christiana . 318 ACADÉMIE DE ROUEN. que nous ne parlerons qu'incidemment de Guillanme de Suille , désigné par le P. Dumoustier comme quarante- sixième abbé de Fontenelle , dans son MVeustria Pia. Au rapport de cet auteur, Guillaume de Bray se démit de l'abbatiat en 1236 , et Guillaume de Suille le remplaca dans le cours de cette année, qui fut aussi l’époque à laquelle, toujours suivant Dumoustier, le méme Guillaume de Suille dut quitter le gouvernement de Saint-W andrille, pour la crosse de Citeaux. 46. Rosent IV, dit D'AuTomnEe (De ÆAutumno ). Successeur de Guillaume, en 1225, il cesse de vivre en 1244. 47. Pierre Ier, Mauviez, nommé abbé en 1244. L'église de Saint-Pierre est réduite en cendres ; il la reconstruit à partir des fondations (à fundamentis ). Il eût achevé cet ouvrage ; si la mort ne l'eût frappé en 1255. Inhumé dans le chapitre. 48. Gopgrroy IL, ne Norror. Abbé en 1255, il achève le chœur de l'église de Saint-Pierre ; il meurt en 1288, et est enterré du côté de l'épitre. 49. GuizraumE IT, pe Norvizze. Élu abbé en 1288 , il se rend recommandable par des vertus dignes de l'âge d'or, et meurt en 1303 ou 1304. Inhumé dans le sanctuaire de l’église de Saint-Pierre. ‘5o. Guisaume HI, La Douze ou LA Dour. Il succède à Guillaume de Norville en 1304; il s'applique particulièrement à remettre en vigueur la discipline mo- nastique, qui semblait se relâcher. Par son économie , il acquitte les dettes du monastère , en accroît les revenus ; il fait construire la moitié de la nef de la basilique. / Basi- licæ majoris navim ad medium perduxit. ) N fait élever une tour en pierre, surmontée d'une aiguille également CLASSE DES BELLES-LETTRES. 319 en pierre , qui égalait en hauteur les montagnes voisines et dominait sur les plaines d'alentour : il construit le côté du cloître qui tient à l'église , et une très vaste cui- sine pour les frères. Il revêt de sceaux les chartes et diplômes qui , auparavant, en étaient dépourvus , et les fait confirmer par Philippe V. Il meurt en 1342. Les religieux reconnaissants lui élévent un superbe tombeau dans le sanctuaire de la basilique , au nord. 51. Jean DE Sair-Lécer. Nommé en 13/42, il meurt en 1344. Inhumé dans la chapelle de la Vierge. 52. Ricnarnp DE CHANTEMERLE. Après huit mois d'abba- tiat, il meurt en 1345. 53. Rosrrr V, dit Bazser. Entré en charge en 1345, il meurt en 1362. 54. Gonerroy HI, Savary. Abbé depuis 1363 jusqu'en 1367; il meurt et est inhumé dans le chapitre, puis transporté au pied du maïître-autel en 1672. 35. Goperroy IV, pe Horor. Il achève la voûte (testu- dinem ) et le sanctuaire , commence la réédification de la chapelle de Saint-Paul , et se démet de sa charge en 1489, en faveur d'un des religieux nommé Guillaume Burnel ; mais, au mois de juin de la même année, les religieux demandent pour abbé Jean de Rochois. 56. Jrax IT, pe Rocuois. Nommé en 1389, il termine la nouvelle chapelle de Saint-Paul et meurt en 1413. In- humé dans le sanctuaire de la basilique , sous une tombe couverte d'une lame d'airain d'un riche travail. » 57. Jean IT, pe Bouqueror. Abbé en 1413 ; mort en 1419. 58. Guisaume IV, pe Frncnaz. Élu en 1419, il se démit en 1431, en faveur de Jean de Bourbon. 320 ACADÉMIE DE ROUEN. 59. Jeax IV, DE Boursox. Mort en 1444, inhumé devant l'autel du Matin , ou de l'Aurore (matutinali ). 60. Jeax V, ne Brameror. Nommé abbé en 1444, il meurt en 1483. Enterré dans la chapelle de la Vierge, répondant au côté droit du chœur. Gr. Anpré p Era. Cardinal et archevéque de Bor- deaux. Abbé en 1483, mort en 1500. 62. Jean VI, Mazcer. Il est nommé abbé en 1500. Des contestations le contraignent de résigner, en 1502, son abbatiat à Philippe de Clèves. Il revint ensuite à Saint- Wandrille , et fut enterré dans la chapelle de la Vierge. 63. Pnupre pe CLièves. Abbé en 1502, il mourut en 1505 , et ne vint jamais à Saint- Wandrille. 64. Jacques Houuer ( dernier abbé régulier ). Nommé abbé par les religieux de Saint- Wandrille , il a de grands débats à soutenir contre quelques seigneurs du royaume , qui se déclarent pour le cardinal Guillaume de Clermont , à qui Le pape Jules IT a donné la même abbaye. On l’enferme (pendant ce temps Guillaume Lavieille gouverne le mo- nastère ); mais l'échiquier de Normandie confirme sa nomination. Entré en charge en 1508, il termine le cloître commencé ( peristylium ) , fait décorer l’église de nouvelles peintures , donne à son monastère des ornements, six grosses cloches, fait construire plusieurs bâtiments, et meurt en 1523. Il est inhumé dans une modeste tombe , près du maitre-autel. ABBÉS COMMENDATAIRES. 65. CLaupe DE Poitiers , également abbé de Marmou- tiers ( Montis-Majoris ). Depuis 1523 jusqu'en 1546. 66. Micner Bayarn, De 1546 à 1565. IL a beaucoup CLASSE DES BELLES-LETTRES. 321 à souffrir des calvinistes, commandés par Gabriel de Montgommery. 67. Pierre IT, Gourneau (docteur en théologie ). De 1965 à 1569. 68. Cnarzes pe Boursox ( cardinal et archevêque de Rouen }). De 1569 à 1578. 69. Girzes DE Vaucirauzr ( docteur en théologie ). De 1578 à 1585. 70. Nicozas pe Neurvize. Conseiller du roi, égale- ment abbé de Ligny ( Latiniacensis ). De 1585 à 1616. 71. Camizze De NeurviILLE, aussi abbé d'Ainay ( 4tha- nacum ), pres de Lyon, de plusieurs autres monastères , et archevèque de Lyon. De 1616 à 1622. 72. FerpivaxD DE NEUFVILLE , aussi abbé de Lagny et de Chéty, conseiller du Roi au parlement de Paris, évêque de Saint-Malo ; puis de Chartres. De 1622 à 1690. 73. Baurazar Henry De Fourcey succède, en 1690 , à Ferdinand de Neufville , et meurt en 1754, après avoir joui pendant soixante-quatre ans de l'abbatiat de Saint- Wandrille. La date de son décès est relatée dans l'inscrip- tion suivante, gravée sur une grande lame de marbre noir, aujourd'hui déposée dans un des bâtiments du monastère : « Par contrat passé le 9 décembre 1726, par-devant « M° Cornu chevalier Notaire Royal à Caudebee , il a été « fondé par M.'° Baltazar de Fourcy, prètre docteur de la « Maison et Société de Sorbonne , Abbé commendataire de « celte abbaye, un service avec vigiles, à perpétuité, le « 4° lundy d'après Pâques, pour le repos de l'âme de « très haut et très puissant Seig.® Monseigneur Louis de « Boucherat, Chancelier de France, Chevalier Commandeur 41 322 ACADÉMIE DE ROUEN. « des Ordres du Roy, son ayeul maternel ; pour le repos « de celle de haut et puissant Seig." Messire Henry de « Fourcy, Con. d'Estat ordinaire du Roy, de haute et « puissante Dame Magdelaine de Boncherat son épouse , « ses père et mère, et encore pour le repos de celle du d. « Seigneur Abbé lorsqu'il sera décédé , le tout aux charges, « clauses et conditions portées par le d. contrat. Le d. « Seig." Abbé est décédé le 24 avril 1754. « Priez Dieu pour eux. » Cette inscription se lit au-dessous d'un écusson égale- ment gravé en Creux ; supporté par deux lévriers , surmonté d'une couronne de comte , et accoté d’une crosse et d'une mitre ; il se compose , au premier et au quatrième, des armes de Fourcey ; et aux deuxième et troisième , de celles de Boucherat : le tout sans couleurs. Si, comme le dit le P. Anselme , les père et mère de cet abbé se marièrent en 1659, il sécoula quatre-vingt-quinze ans depuis cette époque jusqu'à sa mort. En 1755 , Saint-W andrille était en économat. ( Alma- nach Royal de la même année. ) 74. Frépéric-JÉRÔME DE RoyE , cardinal de la Roche- foucauld , archevêque de Bourges. De 1756 à 1759. 75. Pirrre-PauL DE QuayLar, évêque de Digne. De ñ 2 TE 1759 à 1760. 76. Louis-Sexre pe JARENTE ; évêque d'Orléans, com- mandeur de l'ordre du Saint-Esprit. De 1760 à 1785. 77. Érrexve-Cnarces Loménie DE Briexwe ( le cardinal ), né à Paris en 1727 ; d'abord évêque de Condom , puis archevèque de Sens, succède à Louis de Jarente en qualité d'abbé de Saint-Wandrille en 1785, et ferme , à l'époque de la révolution française , la longue liste des abbés des CLASSE DES BELLES-LETTRES. 32 » ES monastères de Saint-Wandrille et de Saint-Ouen. Mort le 16 février 1794. Nora. IL serait sans doute très curieux et très important à la fois de donner un état des revenus que percevaient , et des taxes que payaient au Saint-Siége nos plus célèbres abbayes, aux différentes époques de notre histoire. Ce résultat jetterait un grand jour sur l'étude embrouillée de l'économie politique , des mœurs et des abus de ces temps reculés, Mais, pour l'établir, à combien de recherches ne faudrait-il pas se livrer? Nons laissons donc cette tâche aux esprits investigateurs et laborieux qui tenteront de l'accomplir , et nous nous bornerons à établir ce fait, qui n’est point indifférent pour notre travail spécial , que, sui- vant l'Almanach royal de 1789, l'abbaye de Saint-W an- drille était taxée en Cour de Rome à {000 florins ; et que son revenu était évalué à 50,000 francs. LISTE Des Ouvrages manuscrits consultés pour la composition de cet Essai, et qui se trouvent à la Bibliothèque publique de Rouen". Uxe grande partie des manuscrits et titres de Saint- Wandrille s'est trouvée détruite ou perdue dans le cours de la révolution. * La Bibliothèque publique de Saint-Omer possède une Vie de saint Wandrille, que l’on croit ètre du neuvième siècle. Ce précieux manuserit est orné de miniatures dans lesquelles on remarquait plusieurs specimen de l'architecture de cette époque reculée. M, le marquis Le Ver, auquel je dois ce renseignement, ajoute qu'il croit cette légende écrite sur du parchemin gratté, cause à laquelle il attribue plusieurs trous répandus dans le texte, 324 ACADÉMIE DE ROUEN. Une autre est encore répandue, mais conservée sous la tutelle de l'autorité publique , sur plusieurs points du dé- partement de la Seine-Inférieure. Par exemple, une des dépouilles les plus curieuses de cette abbaye consiste dans un manuscrit déposé à la bibliothèque du Havre, qui renferme , entre autres objets précieux , un exemplaire , sinon original, au moins très antique ; du Chronicon Fontanellense. Ce livre offre, parmi ses ornements, une peinture - très remarquable représentant saint Wulfran. L'on doit regarder comme probable que beaucoup d'autres pièces plus ou moins intéressantes, provenant du même fonds, sont ensevelies dans les dépôts publics, où le témps ne m'a pas permis d'en faire la pénible recherche. Au reste , nous allons faire connaître les sources où l'on-peut encore puiser aujourd'hui, sur l'antique monastère de Fontenelle , des documents dont le plan de notre ouvrage n'admettait ni le nombre ni l'étendue. Apparatus ad historiam Fontanelli. N°% gg et 100. Historiæ Fontanellensis compendium. 101. Chronicon minus Fontanellense. 104. Trisergon de Tabbaye de Fontenelle, par D. Alexis Bréard. 109 et 110. Secundus tomus Fontanelle in Normannid , par D. Alexis Bréard. 103. Historiæ regalis abbatiæ Sancti-W andregisil :compen- dium. 116. Vie des saints abbés religieux de Fontenelle , par D. Benoît de Bonnefond , religieux de ladite maison. 111. Traité des hommes illustres de la très sainte et très royale abbaye de Fontenelle. x 12. Le Sanctuaire de la sainte et royale abbaye de Fonte- nelle. 105. Particularités relatives à l'abbaye de Fontenelle. 102. CLASSE DES BELLES-LETTRES. 325 Histoire de l'abbaye de Saint- Wandrille depuis l'intro duction de la réforme. 115. OUVRAGES IMPRIMÉS DONT ON A FAIT AUSSI USAGE, Gallia christiana , 13 vol. in-folio , édition des Béné- dictins. ; Neustria pia ; par Arthur Dumoustier ; in-folio. Chronicon Fontanellense. Cette chronique se trouve dans le Spicilége de D. Luc d'Achery. Recueil des historiens normands , par André Duchéne ; in-folio. Annales ecclesiastici Francorum ; par Lecomte ; 8 vol. in-folio. Acta sanctorum ordinis sancti Benedicti , par d'Achery et Mabillon ; 9 vol. in-folio. Annales ordinis sancti Benedicti, par Mabillon ; 6 vol. in-folio. Description géographique et historique de la Haute- Normandie , par dom Toussaint Duplessis. Essais sur le département de la Seine-Inférieure , par Noël; 2 vol. in-8°. Recherches sur les Bibliothèques anciennes et modernes , par Petit-Radel, rmtocilé publique, din sis cais prions de ln :Seëm-tnierienne, Par be ne à dpi Ag RAYALTUNTA AO F6OR-ARMANAT EMA TE dons vu apatuniet. déposé Là vu Fiifiatheque gun Elta ; ul bnèllirh soie soil-ui:dos remis té LATTAL CAR su detre trés quaiquee ; : dr Se du clean : iso au dise 4, See T. | € M RUN SAP ANS TVR ramené LS ah ait pninlnr. eseneprostalfhi ami: LS si En Ises Pme rt at els, Parit emiereelles latte drr dépünemublie, otiétthhn ler 8; simoopil eg :nanésaank wtanisissn ae. à ii orcas allée ire océans :ba)senrens ‘li! oo | Léon dax à * Bose aaenaresenmaestéosstose MX rt Vudiéiedté” dti deze “0e 10ftéBainlos ee s6hfdélf rame “loi de valid : Vrai tonntet bo on aildni - nindtiit dt side omptqergoés nalqiiotl | DE RTE Lo rep laibésnott 164 péril aséése [2 spriiéont oÙ 0e EE Jrséoréon \d# : Falhbséve de Fo Dali dir À . drabôre #5 2stinniattn eanpôdioildiél est nue » en Libre OMAN ER * Nora ras LS à Aer trail droit Nm 7e en” PRET ir à NL: Ai eg Le 4 | Vie lite attats oh eulialuus de Votes ; part D! 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Des Alleurs, secrétaire perpetuel de la classe des Sciences ; a prononcé , sur la tombe de son collègue ; le discours suivant , dont l'Académie a ordonné l'impression dans son Précis de 1832. 328 ACADÉMIE DE ROUEN. Messieurs , Avant que cette tombe se referme pour toujours , je viens ; au nom de l'Académie royale des Sciences , Belles- Lettres et Arts de Rouen, offrir à l'un de ses membres les plus distingués , et en mon propre nom ; à un collègue affectionné, un dernier tribut de regrets, d'estime et d'amitié ! Je ne vous lirai point ici, Messieurs, une Notice nécro- logique sur notre infortuné confrère ; cet hommage mérité pourra lui être rendu plus tard ; je le concevrais mal dans un tel lieu et dans un pareil moment ! Eh ! d'ailleurs, au milieu de ceux qui m’écoutent, entouré de rouennais et de vous tous qui l'avez connu et apprécié, ai-je besoin de compter ses nombreux et utiles travaux ; de dire ces richesses des littératures italienne et anglaise dont sa plume fidèle et toujours élégante a doté celle de son pays"! Chargé, depuis longues années, par l'administration municipale, de surveiller et d'augmenter notre bibliothèque publique , les hommes studieux qui la fréquentent n'ou- blieront pas que c'est à son zèle désintéressé qu'ils doivent la rédaction et l'impression de ce catalogue raisonné qui sert à diriger leurs recherches au sein de la mine féconde que leur ouvre cette riche et précieuse collection : ils oublieront encore moins cette affabilité et cette bien- veillance avec lesquelles le savant conservateur accueillait leurs réclamations, leur prodiguait ses conseils et leur transmeltait les avis les plus lumineux sur des points obscurs de notre histoire, que son érudition persévérante et conscien- cieuse avait éclaircis; avis qu'il appuyait, au besoin , de * Les traductions de l’ Histoire d'Italie, de C.BorrA , et du Voyage archéologique en Normandie, du révérend Frognal Disnix, CLASSE DES BELLES-LETTRES. 329 preuves invincibles , qu'il avait eu l'art de découvrir dans nos vieux manuscrits. L'administration perd en lui un mandataire fidèle et éclairé ; pour nous, Messieurs , nous regrettons un excellent confrère. Il fut admis dans l Académie, dont il a toujours été l'un des membres les plus dévoués et les plus assidus , il y a bientôt vingt ans 1, après ces premiers succès si {lat- teurs , obtenus dans sa patrie 2, qui avaient prouvé que de solides et brillantes études lui avaient inspiré le goût de la saine littérature. La noblesse, la pureté et la simplicité de son style avaient , dés-lors, révélé un talent réel, et les hommes réfléchis avaient aussitôt pressenti qu'à l'éclat brillant , mais trop souvent éphémère de la littérature dra- matique , il préférerait des triomphes plus sérieux mais plus durables Il ne tarda pas, en eflet, à se vouer tout entier aux études historiques ; mais, par le sentiment du patriotisme le plus pur, ce fut à la ville de Rouen 3, ce fut à la province de Normandie qu il résolut de consacrer toutes ses veilles, toute l'activité d'un esprit judicieux , guidé par un jugement sain , toute une capacité désormais incontestée. Les preuves qu'il s'était imposé cette noble mission n'ont pas manqué, vous le savez, Messieurs ; sa patrie lui en sera reconnaissante ! Ah ! combien d'entre nous, en voyant s'affaiblir, par une maladie impitoyable, cette voix qui devait bientôt s'éteindre tout-à-fait , renoncérent avec douleur à l'espoir * En 1813. 2 M. Licquet a fait représenter sur le Théâtre des Arts de Rouen, en 1812 et 1813 les tragédies de T'hémistocle et de Philippe IT, qui y obtinrent beaucoup de succès. 3 Il a publié un ouvrage sur la ville de Rouen et sur ses monuments, qui est un guide précieux pour l'étranger, et même pour le rouennais qui veut avoir des notions exactes et curieuses sur cette antique ville. 42 330 ACADÉMIE DE ROUEN. de profiter de ce cours public et gratuit qu'il se porposait d'ouvrir à ses concitoyens, sur l'histoire de leur pays ! Mais, Messieurs , personne ici n'ignore qu'il s était occupé , il y a déjà long-temps, de mettre en œuvre les matériaux qu'il avait amassés, et si la mort n’eût point été si pressée de nous l'enlever , il eùt, à coup sûr, promptement fait «paraître cette Aistoire de Normandie, Vobjet de ses constants travaux depuis plusieurs années, et que nous attendions avec une si vive et si juste impatience. Une main amie et désintéressée viendra , sans délai, nous avons droit de l'espérer , livrer au public ce monument de l'éru- dition patriotique de notre confrère , et rendre profitable à sa famille éplorée et glorieuse à sa mémoire cette œuvre capitale et d'autant plus précieuse pour nous, que nous l'avons sans doute acquise au prix de la santé et de la vie méme de son auteur ! Mais oublions un moment ici l'homme de lettres, le savant auteur de travaux utiles ; celui-là ne meurt pas, Messieurs ! Parlons de l'homme, puisque c’est lui que nous venons de perdre. Licquet, vous le savez tous, était d'un caractère doux et communicatif, dévoué confrère , honorable citoyen, bon père de famille ; sa conversation instructive et spirituelle charmait tous ceux qui en jouis- saient ; nul ne lui reprochera jamais d'avoir médit de lui ! Aussi, Messieurs, dans ce temps où la loyauté , la bonne foi , les sentiments les plus purs et les plus honorables sont trop souvent impuissants à vaincre d'injustes préven- tions , aujourd'hui que le malheureux esprit de parti se plaît à favoriser clandestinement l'entrée de la haine dans de nobles cœurs, si peu faits pour la sentir, Licquet n'eut point d'ennemis ; et je ne crains pas d'aflirmer au bord de sa tombe , dans ce lieu où la flatterie perd son empire, qu'aimé de tous ceux qui avaient des rapports avec lui, il jouit aussi de l'estime et de la considération générales, CLASSE DES BELLES-LETTRES. 331 Qu'il repose done en paix dans une meilleure vie TI a peu demeuré dans celle-ci ,il est vrai ; mais cette carriere, trop courte pour sa famille et pour ses amis , a été bien remplie pour la société et pour la science ! Et cependant, dans ce jour, encore si près de nous', où, d'une voix unanime , l'Académie lui décernait le titre de secrétaire perpétuel de la classe des Belles-Lettres et des Arts , lors- que j'insistais moi-méme pour le déterminer à accepter des fonctions si flatteusement conférées , et dont sa modestie répudiait l'honneur avec l'excuse, hélas !trop légitime de sa mauvaise santé; malgré la triste prévision que mon art me donnait d'une issue funeste et inévitable, j'aimais, avec d'autres confrères, à me flatter que cet hommage, doux à son cœur, lui rendrait une sécurité et un courage qui l’aideraient peut-être à faire suspendre l'arrêt fatal : espoir trompeur ! vœux superflus ! Recois donc ici, Licquet, l'adieu solennel que t'adressent nous l'avons perdu. par ma voix tes confrères profondément aflligés ! Mais, avant de quitter pour jamais ta dépouille mortelle ; que je te rende, par avance , un hommage que tu as mérité! Toi aussi, tu fus fidèle au vrai culte de l'histoire ! Toi aussi, d'une main pieuse et hardie , tu essayas d'effacer en partie ce fard imposteur dont la main audacieuse des passions avait osé souiller sa face imposante et vénérable ! Ouvrier habile, que sais-je ! peut-être involontaire ! tu auras travaillé à ce grand œuvre d'émancipation et de vrai progrès auquel tant de beaux talents, tant d'honorables caractères, consacrent aujourd'hui tous leurs eflorts, toute leur science, toutes leurs convictions ! Aussi, dans ce moment , plus près de nous que ne le croient les esprits ‘ [l'avait été élu secrétaire perpétuel, à l'unanimité, daus la séance PCrp ; du 11 mai 1952, 33# ACADÉMIE DE ROUEN. légers, que ne le pensent les esprits prévenus on perver- tis, dans ce moment où un système vraiment nationa aura reconquis ses droits imprescriptibles, qu'on lui ravit jadis par fraude, quon lui marchande aujourd'hui, et achevé sa destinée véritable vers laquelle il court à grands pas, c'est-à-dire lorsqu'il sera redevenu populaire, ton nom ettes travaux ne seront point oubliés ! Je ne crains pas d'en étre le garant pour tous ceux de ta Normandie , dont le cœur et les yeux sont constamment lourués vers cette consolante espérance ; ils brilleront d'un éclat plus vifet plus pur dans ce jour fortuné, Jour de régénération , de salnt et de gloire ! FABLEAU Dr L’ACADEMIE ROYALE DES SCIENCES , BELLES-LETTRES ET ARTS DE ROUEN, , ER IE 9 Q99 POUR L'ANNÉE 10932—1833. SIGNES POUR LES DÉCORATIONS. % Ordre royal de la Légion-d’ Honneur. 0. signifie Offcrer. € —— Commandeur. G. —— Grand-Officier. G.C. — Grand'Crorr. TABLEAU DE L'ACADÉMIE ROYALE DES SCIENCES BELLES-LETTRES ET ARTS DE ROUEN, POUR L'ANNÉE 1832— 1833. OFFICIERS EN EXERCICE. M. Hezuis, Président. M. À. Devise, Vice-Président. M. Des-ALLeurs, Secrétaire perpétuel pour la Classe des Sciences, M. BrGxon (N.), Secré/aire perpétuel pour la Classe des Belles- Lettres et des Arts. M. Bazuix (A.-G.), Brbliothécaire-Archiviste. M. LEPREvOST , vétérinaire, 7’ésorier. rte ACADÉMICIENS VÉTÉRANS , MM. on ce. 1803. BeuGxor (le Comte) G. C. # , ancien Préfet du 1806. département de la Seine-Inférieure, à Paris, rve de la Michodière, n° 8. 1562 D'Orxay (Jean-François-Gabriel) , doyen des Acadé- 1803. miciens , membre de l’Académie de Lyon , de celles des Arcades de Rome et des Georgifiles de Florence, à St-Martin-de-Bocherville. 1811 ASSELIN DE ViLEQUIER ( le Baron ) O. X , premier 1819. Président de la Cour royale, membre de la Chambre des Députés, rue de la S'eille, n° 10. 815. Brière %X , Conseiller à la Cour de cassation , 1822. à Paris, rue de Bondy , n° 62. 356 1808. 1819. 1805. 1816. 1824. 1830. 1803. MEMBRES LezurteR DE LA Martez (le Baron) O. # , 1823. ancien Maire de Rouen , à Hautot. -5. Descamps (Jean-Baptiste), Conservateur honoraire du 1824. Musée de Rouen, membre de l’Académie des Arcades de Rome , ze Beauvoïsine, n° 31. . Pavre (Benjamiu), Manufact., Trésorier honoraire, 1827. faubourg S.-Hilaire, n° 75. Rigarn (Prosper) #, ancien Maire de Rouen, 1828. rue de la Vicomté, n° 34. Perraux ( Pierre), ancien Imprimeur du Roi, mem- 1830. bre de l’Académie de Caen, et des Sociétés d’agri- culture et de commerce de Rouen et de Caen, 4o/. Peauvoisine, n° 74. MeaumE (Jean-Jacques-Grégoire ), ancien Professeur de Mathématiques spéciales au Collége de Rouen, Doct. ès-Sciences, Oflic. de l’Université, Inspecteur de l’Académie , à Amiens. Levreux, Commissaire du Roi près la Monnaie de 1831 Rouen , à 2’ Hôtel des Monnaïes. ACADÉMICIENS HONORAIRES , MM. S. E. Mgr le Cardinal Prince pe CRoY, Archevèque de Rouen, etc., au Palais archiépiscopal. Teste (le Baron) 0. X , Lieutenant-Général, Commandant la 14e division militaire. Duronr-Decporte (le Baron) O. X, Conseiller d'Etat, Préfet de la Seine-lnférieure , ez l’hd/el de la Préfecture. Bareer (Henri) #, Maire de Rouen, éoulev. Cauchoïse, n° 5x, ACADEÉMICIENS RÉSIDANTS , MM. Vicné (Jean-Baptiste), D.-M , correspondant de la So- cicté de médecine de Paris, rte de la Seille, n° 4. 1803. 1804. 1508. 1809. 1813. 1815. 1817. 1818. 1819. RÉSIDANTS. 337 LerTeLLieR, Inspecteur de l'Académie universitaire, re de S'olteville, n° 3, faubourg S.-Sever. GoperroY , D.-M., 7ve des Champs-Maïllets, no 11. Brnox (N.), Docteur ès-lettres, ancien professeur émérite de rhétorique au Collége royal de Rouen et à la faculté des lettres , offic. de l'Université de France , rue S'énécaux , 1955. Dusuc l'aîné, Chimiste ; ancien Pharmacien à Rouen, membre de lintendance sanilaire du département de la Seine-Infé- rieure, de la Société centrale d'agriculture du même dépar- tement, correspondant de l’Académie royale de médecine de Paris, etc., etc., re Percière, n° 20. Dorvurez ( Pierre), rze du Duc de Chartres, no 12. Le Prevosr (Auguste), Membre honoraire de la Société des antiquaires de Londres; Membre des Sociétés des anti- quaires de France , d'Ecosse et de Normandie; de la Com- mission des antiquités de la Seine-Inférieure ; de la Société géologique de France; de la Société linnéenne de Nor- mandie; Correspondant de la Société royale et centrale d'agriculture ; des Sociétés d'agriculture de Rouen, Evreux et Caen; de la Société d’émulation d’Abbeville, re de Buffon, n° 21. Fraugert #X, Docteur-Médecin, Chirurgien en chef de l'Hô- tel-Dieu, rze de Lecat, n 5. LEprEvOsT , Vétérinaire, rve S'-Laurent, n° 3. Anam (le Baron) #, Président du Tribunal de première instance, place S.—-Ouen , n° 25. Du Rouzeau #, chevalier de l’ordre de l'Eperon d’or de Rome, Conseiller à la Cour royale, place S'arnt-Elor, n°6, Le Prevosr , Docteur-Médecin, rve Malpalu, n° 112. BLaxcue , Médecin en chef de l'Hospice général, re Bour- gerue, vis-à-vis l'Hospice général. Tac %, Conseiller à la Cour de cassation, rve Dinanderie, n° 15, DesriGnY, Horloger, Adjoint à M. le Maire de Rouen, place de la Cathédrale. 43 338 1820. 1922. , 1824. 1825 1827. MEMBRES Heccis fils, D.-M., Médecin en chef de l'Hôtel-Dieu, p/ace de la Madeleine. MARTAINVILLE (le Marquis de) #, ancien Maire de Rouen, rue du Moulinet, n° 11. DE LA Quériëre (E.), Négociant, ve du Fardeau, n° 24. Lévy, Professeur de mathématiques et de mécanique ; Mem- bre des Académies de Dijon, Bordeaux et Metz, des So— ciétés académiques de Strasbourg, Nantes et Lille; Chef d'institution, rve S'aint-Patrice, n° 36. Des-ALreurs , D.-M., Médecin adjoint de l'Hôtel-Dieu , membre du Jury médical, Secrétaire du Comité central de vaccine , etc. , 7ue de L'Écureuil, n° 19. Gosster (l'Abbé), Chanoine honoraire à la Cathédrale, rve du Nord , n° x. Mancer-Dugouccax, Architecte en chef de la Ville, gvar du Hayre , n° 72. Prévost, Pépiniériste, au Bois-Guillaume, ( son adresse à Rouen, 71e du Champ-des-Orseaux , n° 65 ). DuereuiL, Directeur du Jardin des plantes, 24 Jardin des plantes, à Rouen. LancLors (E.-H.), Peintre, Professeur de dessin à l'École municipale, 7ze Poussin, enclave Sainte-Marie. Reiser X , Receveur général des finances, gzar d’Harcourt. HouTou-LaBiLLARDIÈRE , ancien Professeur de chimie appli quée aux arts, à Méville-les-Rouen. Bazrix (A.-G.), Secrétaire des Commissions des antiquités et des archives du département de la Seine-{[nférieure; Chef de la re division à la Préfecture , rue de Crosne, no 14. Domesniz (Pierre), rue de la Chaine , n° ax. Morin , Pharmacien , correspondant de l’Académie royale de médecine, de la Société de chimie médicale de Paris , de la Société linnéenne et des Sciences physiques et chi- miques de la même ville; de la Société académique de Nantes, et de plusieurs autres Sociétés savantes, rue Bou- sreuil, 0° 27. 1827 1828. 1529. 1830. 1851. 1832. RESIDANTS. 339 Devirre (Achille), membre des Sociétés des antiquaires d'Écosse et de Normandie, des Commissions des antiquités et des archives du département de la Seine-Inférieure, et de la Société d’émulation de Rouen; Receveur des contributions directes, re de Fontenelle, n° à bis. VixGrmnier, D.-M., Chirurgien en chef des Prisons, rue de la Prison, n° 33. Pimoxr (Prosper), Manufacturier, rze Herbière, n° 28. Froquer (A) fils, Greffer en chef à la Cour royale de Rouen Girarnin (J.), Professeur de chimie industrielle ; collabo- rateur du Bulletin des sciences naturelles et de géologie, de la Revue normande ; membre résidant de l'Académie royale des sciences, de la Société libre d’émulation de Rouen; membre de l’intendance sanitaire de Rouen, du conseil central de salubrité du département; correspondant de la Société d'histoire naturelle de Paris, de la Société géologique de France, de l’Académie royale des sciences de Bordeaux; de la Société linnéenne de Normandie , industrielle de Mul- hausen, de pharmacie de Paris, polymatique du Morbihan, hygiénique et industrielle de Paris; des Sociétés d'agriculture et des sciences de Lille, de Clermont-Ferrand, de Seine-et- Oise, etc., re Beauvoisine, enclave Sainte-Marie. Poucuer, D.-M., Professeur de botanique, rze Poussin. Fôvirre, Médecin en chef de l’Asile des aliénés, rve de So- cratle , n° 12. MaGnier, Docteur ès-lettres, oflicier de l'Université, Pro- fesseur de rhétorique au Collége royal, 4ow/evard Bou- sreuil, n° 6. Paumier (L.-D.), Pasteur, Président du Consistoire de Rouen, rampe Bouvreuil, n° 16 bis. CouranT #, Ingénieur des ponts et chaussées, rve de Crosne, n° 14. BRÉVIÈRE, graveur sur bois el en taille-douce, ve Saint- Nicolas , no 3. LEJEUNE, architecte, rue Porte-aux-Rats, n°9 34. 340 1832. MEMBRES GaïcrArD (Emmanuel), Membre de la commission des antiquités de la Seine-Inférieure, rze des Bons-Enfants, n° 105. DE SraBenrAtTn, Substitut du Procureur du Roi, rue de l'Avalasse , n° 9. ACADÉMICIENS CORRESPONDANTS , MM. 1803. 1804. 1805. . Tousrtain DE RICHEBOURG (le Colonel Vicomte), à St-Martin- du-Manoir , près Montivilliers. . Levavasseur le jeune, Officier d'artillerie. . DescexeTres (le Baron ) C. #, Médecin, membre de l’Aca- démie royale de médecine , à Paris, gzar Voltaire, n° 1. . Moxnxer , ancien Inspecteur des Mines, à Paris, rue de l'Uni- versilé, n° Gr. Tessier (le Chevalier Henri-Alexandre) #, membre de l’Académie des sciences de l’Institut, de la Société centrale d'Agriculture, Inspecteur général des Bergeries royales , à Paris, ve des Petits-Augustins , n° 26. GuERSENT XX, Professeur agrégé à la Faculté de médecine, à Paris, ve Gaïllon, no 12. LrostE , à Sartilly, près Avranches, départt de la Manche. MorzevauLxr (C. L), membre de l’Institut, à Issy, près Paris DE La Rue (l'Abbé), membre de l’Académie de Caen, cor- respondant de l’Institut, à Caen. DEGzaxp (J.-V.), D. M., Professeur d'histoire naturelle, à Rennes. DemanrÈnes (le Baron Pierre-Prosper) #, à Paris, 7ze Notre-Dame-des-Victoires , n° 40. Boucer, correspondant de l’Académie des sciences, de l’Ins- titut, ancien Directeur des Douanes, à Abbeville. 1806. 180$. 1809. 1810. 1811. CORRESPONDANTS. 34x De Geraxno (le Baron) C. #, membre de l'Institut, à Paris, #rpasse Ferou, n° 7. Decagoursse , Homme de lettres, à Paris. Boïeznreu , Avocat, à Paris, Palais des Pairs. SemaIN, ancien Oflicier de santé, à Canon, près Crois= sanville. ( Calvados.) Larr ( Pierre-Aimé) , Conseiller de Préfecture , Secrétaire de la Société royale d'Agriculture et de Commerce, etc.; à Caen. Decancy X#, à Paris, ve Duphot, n° 14. Fraxcœur # , Professeur à la Faculté des sciences, à Paris, rue du Cherche-Midi, n° 25. Herxaxpez, Professeur à l'Ecole de médecine de la Ma- rine , ete., à Toulon (Var) Lamoureux (Justin), à Bruxelles. Rosxax DE Viicers ( André-Marie-Memmie), à Nevers. ( Nièvre.) Dueurssox (J.), D.-M., membre de plusieurs Académies et Sociétés médicales, à Paris, re Hauteville, n° 10, faubours Poissonnière. Dunors-Marsonneuve, Homme de lettres, à Paris, 7ve des Francs-Bourgeois-S'aint-Michel, n° 3. Denis (Jean-Pierre-Auguste ) , D.-M., à Argentan, dépar- tement de l'Orne. Decanue, Pharmacien, secrétaire de la Société d’agricul- ture, médecine et arts, à Evreux. Donatien DE Sesmatsons ( le Comte) C.'#, Pair de France, à Paris, rue de Vaugirard, n° 54. Saissx , Docteur-Médecin, à Lyon. Bazme, docteur-médecin, membre de plusieurs Sociétés savantes, nationales et étrangères, secrétaire de la Société de médecine, à Lyon. Leroux pes Trois-Prerres, Propriétaire , aux Trois-Pierres, près St-Romain-de-Colbose. LepnoL (l'Abbé), ancien Recteur de l'Académie universitaire de Rouen , à Paris. 342 1811. 1812 1813. 1814. 1815. 1816. MEMBRES LAPORTE— LALANNE 2, ancien Recteur de l’Académie universitaire de Rouen, ancien Conseiller d'Etat, à Saint- Germain-en-Laye. (Seine-et-Oise ). Le SAUVAGE, D.-M., membre de plusieurs Sociétés savantes nationales et étrangères , professeur de médecine, chirurgien en chef des hospices civils et militaires, à Caen. (Calvados). LAFISSE, D.-M., à Paris, rve de Ménars, n° 9. Herzor (Alexandre) #, à Paris, rve de Londres , n° 22. Bouccax ( Pierre-François-Guillaume) #, Docteur de la Faculté des Sciences, Membre de l’Académie royale de Médecine, Pharmacien, à Paris, rve des Fossés-Mont- martre , n° 17. BriQuer (B.-A.), ancien Professeur de Belles-Lettres, à Niort (Deux-Sèvres ). LamanDé (Mandé-Corneille) #, Inspecteur divisionnaire des Ponts et Chaussées, à Paris, rue du Regard, w 1, faubourg S'aint-Germaïn. Gois fils (E.) , Statuaire, à Paris, au Palais des Arts. FLAUGERGUES , Astronome , correspondant de l'Institut , à Viviers ( Ardèche ). Targé DES SABLons (Sébastien-André) #, ancien Chef de division au Ministère du commerce, à Paris, rve du Grand- Chantier, n° 12. Pécaeux (B.), Peintre, à Paris, re S-Florentin, n° 14. Masson DE SarT-AmanD X, Maître des Requêtes honoraire, ancien Préfet du département de l'Eure, à Paris, rze de Bellechasse, n° 15. JourDAN (le Maréchal Comte) G. C. #, Pair de France, rue de Bourbon, n° 52. PERCELAT, ancien Recteur de l’Académie universitaire de Rouen , Inspecteur de l’Académie de Metz. FABrE ( Jean-Antoine) , correspondant de l’Académie des sciences de l’Institut et de diverses Académies, Ingénieur en chef des Ponts et Chaussées, à Brignoles (Var). Borx O. #, Médecin en chef des Hospices, à Bourges. 1816. 1817. 1818. 1819. CORRESPONDANTS. 343 Lorseceur DesLoNGcHAMPsS (Jean-Louis-Auguste) #, D.-M., Membre honoraire de l’Académie royale de médecine , ete , à Paris, rve de Jouy, n° 8. Durrocuer (Réné-Joachim-Heuri), D.-M., Membre de l'Institut, de l’Académie royale de médecine, etc., à Paris Paix, maître des conférences à l'École normale , à Paris, rae Cassette, n° 15. Mérar (François-Victor) #, D.-M., membre de l’Aca- démie royale de médecine, ete., à Paris, rve des Saints- Pères, n° 17 à. HurTrez D’ARBOvAL (Louis-Henri-Joseph), correspondant de plusieurs Sociétés savantes nationales et étrangères, à Montreuil-sur-Mer ( Pas-de-Calais ). Moreau DE JONNEs (A.) #, Officier supérieur au Corps royal d'État-Major, membre du Conseil supérieur de santé, chargé au Ministère du commerce des travaux statistiques, correspondant de l’Académie des sciences de PInstitut, Chef de bataillon, à Paris, place Vendôme, n° 8. DE Gourxay, Avocat et Docteur-ès-lettres, à Caen (Cal- vados), rue Gémare, n° 18. Parru, Ingénieur en chef des Ponts et Chaussées , à Caen. Bora, ancien Recteur de l'Académie de Rouen, Homme de lettres, à Paris, place S.-S'ulpice, no 8. DE KerGarrou (le Comte ) O. X , Pair de France, à Paris, rue du Petit-V'augirard, n° 5. AussAN DE Cnazer (le Chevalier) O. X, Homme de lettres, à Paris, rve de Clichy, n° 48. De Monrauzt (le Comte) #, à Nointot, près Bolbec; ( à Rouen, rue d'Ecosse, n° 10.) Eunes DE Minvizee, (le Marquis) à Gommerville, près St- Romain. BoucharLAT, membre de la Société philotechnique, à Paris, rue de S'avoie, n° 9, près du quai de la Vallée. Macouer (le Baron) C. #, ancien Préfet de la Seine- Inférieure, Maitre des comptes, a Paris, rue Veuve des Matkurins , n° 20. 344 1819. 1820. 1821. 15922. 1824. MEMBRES Dgpauzis (Alexis-Joseph), Graveur de médailles, à Paris ; rue Furstenberg, n° 8 ter. Garon, Receveur principal des Douanes, membre de plu sieurs Sociétés savantes, à Abbeville (Somme). Berraer (P.) #K, Ingénieur en chef des Mines, Profes- seur de chimie à l'Ecole royale des Mines, membre de l'Institut, à Paris, ve d'Enfer, n° 34. Jamer (l’Abbé Pierre-François), Prêtre, Supérieur de la Maison du Bon-Sauveur, Instituteur des sourds-muets, à Caen (Calvados). Cuaugrx X#, Inspecteur général honoraire des Ponts et Chaus- sées, à Paris, rue de l'Université, n. 44. | Lagouperte (l'Abbé Jean), Vicaire général d'Avignon, à Paris, cloitre Notre-Dame , n° 20. Lemoxxrer ( Hippolyte), Secrétaire-Bibliothécaire de l'Aca- démie royale de France, à Rome. De Moréox X, Ingénieur, à Paris, ze Godo!, n° 2. TaégauT DE BERNEAUD , Secrétaire perpétuel de la Société linnéenne, à Paris, rue de Verneuil, n° 51 , faubourg S1.- Germain. Beuexor (le Vicomte Arthur), Avocat, à Paris, ve du faubourg S.—-Honoré, n° 110. Desrouet , D.-M., à Paris, rze Se-Marguerite, n° 34. Sozcrcorrre ( Louis— Henri - Joseph) #, Directeur des Douanes , à Saint-Malo (Ille-et-Villaine). Esrancezrn , Membre de la Chambre des Députés, à Eu. Fonranier ( Pierre), Homme de lettres, Officier de l'Uni- versité, à St-Flour (Cantal). Maczer (Charles ) X, Inspecteur divisionnaire des Ponts et Chaussées, à Paris, rze du Regard, n° 14. Jourpax (Michel) #, D.-M., à Paris , rue de Bourgogne, n° 4. Mowrazcox, D.-M., à Lyon. BourGgors (Ches) #, Peintre de portraits, à Paris, rue de l'Oratoïre-du-Roule, n° 50. Janvier (Antide), Horloger ordinaire du Roi, à Paris, Pa- lais de l'Institut, (pavillon de l'Ouest). 1826. CORRESPONDANTS. 345 DELAQUESNERIE, correspondant des Sociétés d’émulation et d'agriculture de Rouen, de la Société centrale d'agriculture de Paris, ete, à St-André-sur-Cailly. Descaames , Bibliothécaire-Archiviste des Conseils de guerre, à Paris, rue du Cherche-Midi, n° 39. SazGues, D.-M., à Dijon (Côte-d'Or). BouzLenGER ( le Baron ) O. #, ancien Procureur général à la Cour royale de Rouen, 7ve de la Chaïne, n° 12. Pinez K , Juge de paix, au Havre. D'AxGcemont ( Edouard), à Paris, rue de S'avore , n° 24. Desmarest (Anselme-Gaëtan), Professeur à l'Ecole royale vétérinaire d'Alfort, membre titulaire de l'Académie royale de médecine, correspondant de l’Académie des Sciences, de l’Institut, etc., à Paris, 72e S.—Jacques, n° 161. Benoist , Lieutenant au corps royal d'État-Major, Chef d’es- cadron, à Paris, re S'aint-Dominique, n° 23. Juzra DE FoxTENELLE, D.-M., Chimiste, à Paris, rze de L'École-de-Médecine, n° 12. Civraze K, D.-M., à Paris ,rve Neuve-St-Augustin, no 23. FEereT aîné, Antiquaire, à Dieppe. Payex X, Manufacturier, Professeur de Chimie, à Paris, rue des Jeuneurs , n° 4. BcancnARD DE LA Musse (le Comte), ancien Conseiller au Parlement de Bretagne, Homme de lettres, à Montfort sur-Meu (1lle-et-Villaine ). Moreau (César) Y, Fondateur de la Société française de statistique universelle et de l’Académie de l’industrie, etc., à Paris, place Vendôme, n° 24. Moxrémoxr (Albert), Homme de lettres, à Paris, Croix-des-Petits-Champs, n° 25. LADEVÈZE, D.-M., à Bordeaux ( Gironde ). Savin (L.), D.-M., à Montmorillon (Vienne). LexormanD , Professeur de technologie, à Paris, rue Percée- S'.—-André, n° 11. Tue Boïecnieu 2, membre de l'Institut, à Paris, Zoulevart Montmartre, n° 10. +- +- 346 1827. 1328. MEMBRES BenGasse (Alph.) X, ancien Procureur général, ve Beffroi , n. 4c. GERMAIN (Thomas-Guillanme-Benjamin), correspondant de la Société des pharmaciens de Paris et de la Société royale de médecine, Pharmacien, à Fécamp. Huco { Victor), Homme de lettres, à Paris, ve Jean- Goujon, n° 0. De Bcossevicre ( Ernest), Conseiller de préfecture, à Ver- sailles ( Seine-et-Oise ). DE Bcossevizce (Jules), à Paris, rue de Richelieu. DesmaziÈres (Jean-Baptiste-Henri-Joseph), Naturaliste, à Lambersart, près Lille ; chez M. Maquet, propriétaire , ve de l'Hôpital-Militaire, n° 110, à Lille (Nord). Maro (Charles), Homme de lettres, à Paris, rve Dauphine, no 33. pe Vasssay (le Baron Charles-Achille) C. #, ancien Préfet dela Seine-Inférieure , à la Barre, près St-Calais (Sarthe). Court , Peintre, à Paris, rxe des Beaux-Arts, n° x. Viry (J-J.), Docteur-Médecin, à Paris, re Souffot, n° 1. Boxriss ( Joseph-François) fils aîné, Docteur-Médecin, Pro- fesseur à l'Ecole secondaire de médecine de Nancy, membre de plusieurs Sociétés savantes, à Nancy (Meurthe). Marcer-Lacosre ( Pierre-Laurent), Professeur à la Faculté des lettres de Caen. LaurTarD (le Chevalier J.-B ), D.-M., secrétaire perpétuel de l’Académie de Marseille, membre de plusieurs sociétés savantes, nationales el étrangères, à Marseille (Bonches- du-Rhône ). Duprras, Homme de lettres, à Paris. Spencer SMITH (Jean), membre de l'Université d'Oxford, de la Société royale de Londres, de la Société des Anti- quaires de Londres, de la Société pour l'encouragement des arts, etc., de Londres, et de plusieurs Sociétés savantes, à Caen, ze des Chanoïnes. ve MorremartT-Boisse (le baron) 2#, Membre de la Société 1829. 1829. 1830. CORRESPONDANTS. 347 royale et centr. d'agric., etc, à Paris, rze Jean-Goujon, n° 4, Monix ( Pierre-Etienne ), Ingénieur des Ponts et Chaussées, à St-Brieux (Côtes-du-Nord ). CorrTerEAu (Pierre-Louis), D.-M., Professeur agrégé de la Faculté de médecine de Paris, médecin du Bureau de charité du 5e arrondissement et du 2° dispensaire de la So- ciété philantropique, à Paris, ze Cadel, n° 14. Fée, Chimiste, Pharmacien en chef de l'hôpital militaire , à Lille (Nord ). Porez , D.-M., à Evreux (Eure). GurrinGuer (Ulric), Homme de lettres, à Paris; (à Rouen, rue de Fontenelle, n° 35). Cazauis , Professeur de physique au Collége royal de Bour- bon, à Paris, rue des Grands-Auguslins, n° 22. SCHWILGUÉ , Ingénieur des Ponts et Chaussées, Chef des bureaux de la navigation, à la direction générale des Ponts et Chaussées, à Paris. ALAVOINE (Jean—-Antoine) 2, Architecte, chargé des tra- vaux de la flèche de la Cathédrale de Rouen, à Paris, rue Neuve-des-Bons-Enfants, n° 25. BéGrx, Homme de lettres, à Metz ( Moselle ). BERGER DE XIVREY (Jules), Homme de lettres , à Paris, ve du Cherche-Midi, n° 14, (faubourg S1-Germain). CHaponniEr, (le chevalier), D.-M., professeur d'anatomie et de physiologie, à Paris, 7ze de Cléry, n° 16. Passy (A.), Préfet de l'Eure, à Evreux. Soyer-VViczemMEeTt (Hubert-Félix) Bibliothécaire en chef et conservateur du cabinet d'histoire naturelle de la ville, à Nancy (Meurthe ). LecoQ (H.), Professeur d'histoire naturelle de la ville, à Clermont-Ferrand (Puy-de-Dôme ). RirauD , Naturaliste, membre de plusieurs Sociétés savantes, à Paris, rue de la Rochefoucault, n° 15. BanR£ DE JALLAIS, ancien Administrateur, Homme de lettres, à Chartres, pavé de Bonneval (Maine-et-Loire ). Hovuez (Juste), membre de plusieurs Sociétés savantes, Pré- sident du Tribunal civil, à Louviers (Eure ). [22 LE a 1331. MEMBRES Murar (le Comte de ) C. #, ancien Préfet de la Seine - Inférieure, à Euval, près Vayre (Puy-de-Dôme), ou à Paris, rue S'aint-Honoré , n° 345. FRivaup DE LA RAFFINIÈRE (le Comte de) G. O. #, Lieute- nant-Général, à la Raflinière, près Civray (Vienne); (à Rouen, ve Porte-aur-Rats, n° 13, chez Mme de Bra- quemont ). Lericeur pes Guerrors, chevr de l’Eperon d’or de Rome, aux Guerrots, commune d’Heugleville-sur-Scie, par Bel- lemare , arrond. de Dieppe. Le Teccrer #, Inspecteur divisionnaire des Ponts et Chaus- sées , à Paris, guar d'Orsay, n° 1. BoucHer DE PEntHEs (Jacques ) # , directeur des douanes, Président de la Société royale d’Abbeville (Somme ). De Srnxer (Louis), helléniste, rze des Saints-Pères, n° 14, à Paris. BouLrENGER DE Bors-FRÉMONT, Peintre d'histoire, ue du Æocher, n° 34, à Paris. Taxcaou, D.-Médecin, rue d'Amboise, n° 7, à Paris. BexxaTr, Médecin du Théâtre Italien, à Paris. Fortix, D.-M. à Evreux ( Eure). Dusevez (Hyacinthe), avoué à la Cour royale d'Amiens, Membre de la Société des antiquaires de France , et de plusieurs autres Sociétés savantes, à Amiens (Somme ). BrRiERRE-DE-BorsmonrT ( A.-D.-M.), Chevalier de l’ordre du Mérite militaire de Pologne, Membre du Comité central de Varsovie, et de plusieurs Sociétés savantes , à Paris, rue du Bouloy, n° 2. Le FLaGuais (Alphonse), Associé-Correspondant de l’Acadé- mie de Caen, à Caen (Calvados). Lepasquren ( Auguste) #, Préfet du Finistère , à Quimper. Nora. M. Du Petit-Bois (Edmond), membre de l’Académie de Caeu, et des Sociétés royalesfd'Orléans, St-Quen:‘a, etc. à Ambrières, (Mayenne) est décé é à l'époque mème où l'Académie venait de l’ad- mètre au nombre de ses correspondants. CORRESPONDANTS. 349 CORRESPONDANTS ÉTRANGERS, MM. 1803. 1812. 1816. 1817. 1818. 1821. 1823. 1825. 1827. 1828. 1830. Demozr , Directeur de la Chambre des finances , et corres- pondant du Conseil des mines de Paris, à Salzbourg. DE Bray (le Comte), Ministre et Ambassadeur de S. M. le Roi de Bavière, à Vienne. GErFroY , Professeur d'anatomie à l'Université de Glascow. ExGgcstorr, Docteur en philosophie , Prafesseur adjoint d'Histoire à l'Université de Copenhague. Srncz£AIR (John), Président du Bureau d'agriculture, à Edimbourg. Vocez , Professeur de chimie à l’Académie de Munich. Campsecz, Professeur de poésie à l'Institution royale de Londres. DE KrrckHorr (le Chevalier Joseph-Romain-Louis DE KErCkHOYE , dit), ancien Médecin en chef des hopitaux militaires, commandeur et chevalier de plusieurs ordres, a Anvers. Dawson TurNER , Botaniste, à Londres. Le R. Th. FroGwarz Dignix , Antiquaire , à Londres. Vène X, Capitaine de génie, au Sénégal Cnaumerre Des Fossés, Consul général de France , à Lima. ViNCENZO DE ABBATE ( le Comte), Antiquaire , à Alba. Dezuc (J. André), Professeur de Géologie, à Genève. BruxeL #, Ingénieur, correspondant de l’Institut, Membre de la Société royale de Londres, à Londres. Rarn (le Chevalier Gratien), Professeur, Secrétaire de la Société royale des antiqnaires du Nord, à Copenhague, rue du Prince-Roy al, w 40. SOCIËTÉS CORRESPONDANTES, Classées selon l'ordre alphabétique du nom des Villes ox elles sont établies. Abbeville. Société royale d'Emulation (Somme). Aix. Société académique (Bouches-du-Rhône ). 350 SOCIETES Amiens. Académie des Sciences. (Somme. ) Angers. Société industrielle (Maine-et-Loire). Besançon. Académie des Sciences, Belles-Lettres et Arts. (Doubs. } — Société d'Agriculture et des Arts du département du Doubs. Bordeaux. Acad. royale des Scienc., Belles-Lettres et Arts. (Gironde. ) — Société royale de médecine. Boulogne-sur-Mer. Société d'Agriculture , du Commerce et des Arts. (Pas-de-Calais. ) Bourg. Société d'Emulation et d'Agriculture du départemt de l'Ain. Caen. Acad. royale des Sciences, Arts et Belles-Lettres (Calvados.) — Société royale d'Agriculture et de Commerce. — Société des Antiquaires de la Normandie. — Société Philharmonique. Cambrarï. Société d'Emulation (Nord). Chélons-sur-Marne. Société d'Agriculture, Commerce, Sciences el Arts du département de la Marne. Chäteauroux. Société d'Agriculture du département de l'Indre. Cherbourg. Société d'Agriculture , Sciences et Arts. ( Manche.) Dijon. Académie des Sciences, Arts et Belles-Lettres. (Côte-d'Or. ) — Société de Médecine. Douai. Société royale et centrale d'Agriculture, Sciences et Arts du département du Nord. Draguignan. Société d’Agricult. et de Commerce du départ. du Var. Evreux. Société d'Agriculture, Sciences, Arts et Belles-Lettres du département de l'Eure. Lille. Société royale et centrale d'Agriculture, Sciences et Arts du département du Nord. Limoges. Société royale d'Agriculture, des Sciences et des Arts (Haute-Vienne.) Lons-le-S aulnier. Société d'Émulation du Jura. Lyon. Académie royale des Sciences, Belles-Lettres et Arts. (Rhône.) — Société royale d'Agriculture, Histoire Naturelle et Arts utiles. — Société de Médecine. Mäcon. Société des Sciences, Arts et Belles-Lettres. (Saône-et-Loire) Mans (le). Société royale d'Agriculture , Sciences et Arts. (Sarthe.) Marseille. Acad. royale des Sciences, Lettres et Arts. (Bouches-du-R }) CORRESPONDANTES. 351 Melun. Société d'Agriculture de Seine-et-Marne. Metz. Académie royale des Lettres, Sciences et Arts et d’Agricul- ture. ( Moselle. ) Montauban. Société des Sciences, Agriculture et Belles-Lettres du département du Tarn-et-Garonne. Mulhausen. Société industrielle. (Haut-Rhin.) Nancy. Société royale des Sciences, Lettres et Arts. ( Meurthe.) Nantes. Société royale académique des Sciences et des Arts du département de la Loire-Inférieure Nimes. Académie royale du Gard. Niort. Athénée; Société libre des Sciences et des Arts du dépar- tement des Deux-Sèvres. Orléans. Société royale des Sciences, Belles-Lettres et Arts. (Loiret.) Paris. Athénée royal, rue de Valois, n° 2. — Institut de France, au Palais des Quatre-N'ations. Acadé- mie des Sciences et Académie Française — Société d'Economie domestique et industrielle, 77e Ta- ranne, n° 12. — Société de Géographie, passage Dauphine. — Societé de la Morale chrétienne, zxe T'aranne, n° 12. — Société d'Encouragement pour l'Industrie nationale, rve du Bac, n° #42. — Société de Pharmacie, rve de l'Arbalète, n° 13. — Société des Méthodes d'Enseignement, rue du Faubourg- Saint-Germain , n° 35 — Société des Sciences physiques. — Société d'Horticulture, rue T'aranne, n° 12. — Société Linnéenne, rue de Verneuil, no 51, faub. St-Germain. — Société médicale d'Emulation, à a Faculté de Médecine — Société Phrénologique, 71e — Société royale et centrale d'Agriculture, à /'Hôtel-de-V'ille. Perpignan. Société royale d'Agriculture, Arts et Commerce des Pyrénées-Orientales. Poitiers. Société académique d'Agriculture , Belles-Lettres, Sciences et Arts. ( Vienne.) Le Pay. Société d'Agr., Sciences, Arts et Commerce. (Haute-Loire. ) 352 SOCIÉTÉS Rouen. Société centrale d’Agricult. du départ, de la Seine-Inférienre. — Société libre d'Emulation pour le progrès des Sciences, Lettres et Arts. —— Société libre pour concourir au progrès du Commerce et de l'Industrie. — Société de Médecine. — Société des Pharmaciens. —— Société pour l’encouragement de l’Instruction élémentaire par l’enseignement mutuel, dans le département de la Seine—Inférieure. Saint-Etienne (Loire). Société d’Agr., Sciences, Arts et Commerce. Saint-Quentin. Société des Sciences, Arts, Belles-Lettres et Agriculture. ( Aisne.) Srasbourg. Société des Sciences, Agriculture et Arts du départe- ment du Bas-Rhin. Toulouse. Académie des Jeux floraux. (Haute-Garonne. ) — À cadémie royale des Sciences , Inscription et Belles-Lettres. Tours. Société d'Agriculture, Sciences, Arts et Belles-Lettres du département d’Indre-et-Loire. Versailles. Société centrale d'Agriculture et des Arts du départe- ment de Seine-et-Oise. SOCIÉTÉS ÉTRANGÈRES. Anvers. Société des Sciences, Lettres et Arts. Copenhague. Société royale du Nord d’Ecritures antiques. Liége. Société libre d’Emul. et d'Encour. pour les Sciences et les Arts. Londres. Société des Antiquaires de Londres. Nota. Treize exemplaires du Précis sont en outre distribués ainsi qu'il suit : À M. Frère, Libraire à Rouen. ( Décision du 12 janvier 1827. — R. des Lettres, p. 318.) A M. Lance, Libraire à Paris, et aux trois Journaux qui se publient à Rouen. ( Déc. du 18 nov. 1831. — KR. desL.,p.2.) A M. H Canwor, Directeur de la Revue ency- clopédique , à Paris, ( Déc. du 10 fév. 1832, — R. des L., p. 48.) Aux Bibliothèques de la Préfecture , et des villes de Rouen , Dieppe, le Havre, Neufchatel , Gournay et Yvetot. ( Déc. du 16 nov, 1832. — Reg. des Délib. , p. 153, ) TABLE MÉTHODIQUE , OUTRE LES MATIÈRES CONTENUES DANS LE PRÉSENT VOLUME, La mention de tous les ouvrages reçus par l’Aca- démie, ou dont les rapports ont ele Jaits pendant l'annee académique 1831—1832. Discours d'ouverture de la Séance publique , par M. Hellis , D.-M., vice-président , page # CLASSE DES SCIENCES. RaPporT fat par M. Des-Alleurs , D.-M. , secrétaire perpétuel , 17 S 17. — PuysiQUE ET MATHÉMATIQUES. Tableau des variations barometriques et thermometriques , par 19 Observations sur la dilatation et la condensation de la pierre , M. Levy , de novembre 1831 à novembre 1832 D EE au moyen d'un instrument de l'invention de M. Destigny , 20 Trigonometrie rectiligne sans algèbre, par M. Martin, b, 1 354 TABLE S 2. — Curie. Analyses chimico-légales, par M. Morin, dans deux cas d’empoisonnement , 21 Imprimées en entier p. 57 et 66. $ 3. — ARTS MÉCANIQUES ET INDUSTRIELS, COMMERCE. Rapports de M. Destigny , sur plusieurs recueils de la Société d'agricullure , sciences et arts du département de l'Eure ; sur les annales de la Societé académique de Nantes, et sur le Manuel de l'horloger , par M. Le Normand, 22 Rapport de M. Pimont, sur le Manuel du fabricant d’etoffes imprimées et de papiers peints , par M. Le Normand , 24 Rapport de M. Pimont, sur le Journal de l’Académie de l’industrie publié par M. César Moreau , 1b. Discours de M. Courant, sur les chemins de fer, ib. Imprimé en entier p. 76. Recherches statistiques sur les transports par eau entre le Havre , Rouen et Paris , par DT. Lepasquier, 2 PL Imprimées en enfier p. 88. Prix propose par la Suciété de Boulogne-sur-Mer , et rem- porté par M. Garnier , ingénieur des Mines , 3x Nouveau combustible , tourbe fossile ; communication faite par M. Pimont , 1b. $ 4. — HISTOIRE NATURELLE. apport de M. Girardin, sur l'ouvrage de M. Moreau de Jonnès , intitulé : les Antilles françaises , 32 Rapport de M. Auguste Le Prevost sur la Klore du dépar- tement de la Somme, par le docteur Ch. Pauquy . 32 d'Amiens , MÉTHODIQUE. 355 Observations sur une grosse pyrite el sur les marcassites en géneral, par M. Dubue , 33 Explications de NM. Dubreuil , Sur un développement anormal el'extraordinaire d’une racine de vernis du Japon , ib. > + Ar r A Rapport de M. Des-Alleurs sur Le 'Yrailé de Zoologie de M, Pouchet , 1b. Memoire en vers sur Le prix propose par la classe des Sciences, pour l’année 1832, D: $ 5. — AGRICULTURE. Rapports de MM. Dubuc , sur plusieurs numéros des annales de la Societe académique d'Indre-et- Loire ; sur ceux de la Societé royale et centrale d'agriculture de Paris , pour 1831 ; — Leprevost, médecin-vetérinaire , sur les quatre premiers cahiers de 1831 du recueil de la Societé précitée d’'Indre-et-Loire , et sur le recueil de la Societé de Seine-et-Oise ; — Girardin, sur un mémoire de M. Ch. Derosne , relatif à l'emploi du sang séché comme engrais ; — l'abbé Gossier, sur un mémuire de M. Girardin , qui traite de l'emploi des os broyés, aussi comme engrais , 35 Réflexions de MM. Leprevost , vétérinaire, et Dubuc , sur le méléorisme, la cachexie aqueuse , etc., 1h. Rapport de M. Duputel, sur les cahiers 4o à 44 des travaux de la Société centrale d'agriculture de la Seine-Inferieure , et sur les annales, pour 1831, de la Societe académique de Nantes, ib. Rapports de M. Destigny, sur les travaux des Sociétés de l'Eure et du Calvados , ib. Réflexions relatives aux dépenses de transport d'un bloc de marbre, pour former le piédestal de la statue de Louis XIV, à Caen, 56 Citation , à ce propos, d'une idée ingénicuse de Zabuglia b. Notice, par M. Dubuc, sur des engrais Spéciaux , 37 45. 356 TABLE Renseignements donnés par M. Dubuc , sur le superbe bélier africain de M. Vanier, 37 Rapport de M. l'abbé Gossier, sur un mémoire où M. Girardin reproduit et confirme les expériences de M. Darcet , rela- tives au bouillon d'os. — Réflexions de M. Hellis et de M. Girardin sur le même sujet , 38 Notice de M. Dubuc, sur la panification de la fécule de pommes de terre , 3q $ 6. — MEDECINE , CHIRURGIE , PHYSIOLOGIE. Rapport au conseil supérieur de santé, sur l’irruption du choléra pestilentiel en Russie , pendant l'été et l'automne de 1830, par M. Alex. Moreau de Jonnès.—R. M. Vingtrinier ; 3q Histoire du choléra-morbus en Pologne, par M. Brierre de Boismont. — R. M. Vingtrinier , 40 Mémoire chimico-medical sur le choléra-morbus et autres épidémies , par M, Dubuc, chimiste , 41 Rapport adressé à l'intendance sanitaire de Kouen, sur le choléra-morbus observe à Sunderland, Newcastle et les environs, par M. Emile Dubuc , D.-M., 1b. Réflexions sur l'ouvrage qui précède, par M. Hellis, médecin en chef de l'Hôtel-Dieu de Rouen , ib. Observations sur le traitement du choléra-morbus , par M, Le Precost, D.-M., 1b. Tmprimées en entier p. 92. Traitement de Douglass, contre le cholera-morbus , 42 Rapport de M. Fôville, au nom d'une commission , sur les ouvrages envoyés par M. Bennati, médecin du Theâtre italien à Paris, (Du mécanisme de la voix humaine , pendant le chant ; — Dissertatio inauguralis medica sistens diagnosim diarrhææ , etc. ); — et M. Fortin, médecin à Evreux, (Topographie medicale de la ville d'Evreux ; — Hydrocéphalie , absence presque complète de la substance cérébrale), ib. MÉTHODIQUE. 557 Rapport de M. Vingtrinier , sur la Vithotritie de M. Tanchon, et sur une thèse de M. Navet , 43 Rapport de M. Adam , sur le recueil des travaux des Conseils de salubrité, récemment institués dans le département de la Seine-Inférieure , ib. Rapport verbal de M. Vingtrinier sur les travaux du comite central de vaccine , 1b. Observation et Réflexions sur l’aliénation mentale, par M. le docteur Vigne , ; ib: Imprimées en entier p. 103. Modifications apportées par le docteur Chaponnier au pro- cédé de M. Dupuytren, dans la résection des bourrelets hémorroïdaux. — R. M. Le Prevost, D.-M., 44 Rapport de M. Des-Alleurs , sur le Recueil mensuel de la Gazette médicale de Paris, par le docteur Jules Guérin, 1b. MATIÈRES DIVERSES. Rapport de M. Dubuc sur les numéros 3 et 4 du tome 11° des annales de la Société académique d'Orléans , 45 Notice historique sur la mnémonique et la mnémotechnie, par M. Ballin , 46 Projet d'association normande pour les progrès de l'industrie provinciale, par M. de Beaurepaire. — R, M. Pimont , 1b. STATISTIQUE. Plan de statistique départementale , 47 Annuaïre statistique du Doubs , par M. Laurens. — R: , 48 Géologie de la Seine-Inférieure, par M. Antoine Passy ; ib. M. Floquet, au nom d'une Commission NéGROLOGIE, Notice sur M. Vitalis , 50 3: TABLE Mort de Cuvier , Souscription de l’Académie , pour le monument à lui élever , 54 Cr Co Prix PROPOSÉS pour 1833. Pour la classe des sciences , 55 Pour la classe des lettres , 157 MÉMOIRES DONT L'ACADÉMIE A DÉLIBÉRÉ L'IMPRESSION EN ENTIER DANS SES ACTES. Affaire d’empoisonnement portée devant la Cour d'assises du département de la Seine-Inférieure ; analyses chimiques , par M. Morin, pharmacien (».p. 21), 57 Vérification d'un rapport chimico-judiciaire sur un empoi- sonnement par la mort aux mouches , par le méme, 66 Discours de réception de M. Courant , sur les routes, la navi- gation par les rivières, les caraux et les chemins en fer (».p. 26), 76 Réponse de M. Lepasquier ; président , 88 Considerations sur le choléra-morbus et sur ses effets, par M. Le Prevost, D.-M. (V.p. 41), 92 Observation et réflexions sur l’aliénation mentale, par M. Vigne, D.-M. (». p.43), 103 CLASSE DES LETTRES ET ARTS. Rapport fait par M. A.-G. Ballin, archiviste, 115 BELLES-LETTRES. $ 197 — TRAITÉS GÉNÉRAUX , SYSTÈMES D'ENSEIGNEMENT. Imprimés envoyés par M. Lourmand , secrétaire de la Societe des méthodes d'enseignement. — R. M. Ballin , 116 MÉTHODIQUE. 35q Théorie philosophique de l’enseignement des sourds-muets , par M. Piroux. — R. M. Bullin , 116 Le rapport est imprimé en entier p. 193. Il est suivi d'une tableau statistique des aveugles et des sourds-muets du, département de la S'eine-Inferieure. $ 2. — LITTÉRATURE. — PROSE. Discours de réception de M. de Stubenrath , 117 Réponse de M. Hllis , vice-président, 118 La Maison de Rochester ; un chapitre des mémoires de Franck Pierre-Point ; ouvrages de M. de Stabenrath. — kK. M. Auguste Le Prevost , au nom d'une commission , 11% Anecdote rouennaise : Louis XI et la Normande, par M. Floquet , ib. Imprimée en entier p. 182. Ascension au Righi, fragment d'un voyage en Suisse , par M. Blanche , ib. Imprimée en entier p. 172. Hymne à la cloche, par M. E.-H. Langlois. —R. M. Auguste Le Prevost , 120 $ 3. — PofésiE. Vers de M. d'Ornay à M. de Pradel , 121 Promenades poétiques ; suivies de trois scènes historiques bretonnes , par M. Edmond du Petit-Bois.—R. M. Duputel, au nom d’une COMMISSiOoR , 121 Précis historique et littéraire sur Eustache Deschamps , poète du XAV® siècle, par M. Crapelet.—R. M. Magnier, 22 Mélodies françaises, par M. Alphonse Le Flaguais. — R. M. Floquet, au nom d'une commission , 123 Arlette et Robert , 124. Ballade de Lénore de Bürger , traduction de M. de Stabenrath, — À. M. Auguste Le Prevost , 126 Pièce de vers intitulée: À M. KRever , auteur du savant 360 TABLE ouvrage sur les ruines du Vieil-Evreux, par M. de Stabenrath. — R. M. Auguste Le Prevost , 129 Autre pièce de vers , sous le titre de Navarre ; par le méme , 130 Epitre à une Lorraine inconnue, par M. Albert Monté- mnont , 1b. Plusieurs pièces de vers, dont une sur les poètes du 19° siècle, par M. Blanchard de la Musse, ib. S 4 — HISTOIRE. Notice historique des principaux faits concernant l’Académie de Rouen , par M. Ballin , 131 Histoire de l’Académie de Marseille, par M. Lautard, D.-M. — R. M. Vigne, 136 Notice historique et descriptive de la cathédrale d'Amiens. — Notice sur Amiens. — Lettres en prose et en vers sur le département de la Somme , par M. Hyacinthe Dusevel. — Notice sur l'arrondissement de Doulens , par M. Eugène Dusevel. — R. M. Auguste Le Prevost , 137 Histoire d’ Amiens ( 1°* et 2° cahier ), par M. Hyacinthe Dusevel. — R. M. Auguste Le Prevost, ib. Annales de la Socteté royale des sciences , belles-lettres et arts d'Orléans. — L'Indicateur Orleanais ; par M. Vergnaud- Romagnési. — R. M. Floquet, 139 $ 5. — GÉOGRAPHIE. Bulletin de la Société de géographie, numéros 96 à 100, — R. M. Magnier , ib. Deux mémoires sur Samarobriva, par M. Mangon de la Lande. — R. M. Floguet ( V. p.:50.), 140 MÉTHODIQUE. 361 S 6. — ARCHÉOLOGIE. Lonsidérations sur les tombeaux de la Cathédrale de Rouen , par M. Deville , 140 Seconde dissertation sur les sceaux de Richard Cœur-de-Lion, par M. Deville , 141 Mémoires de la Societé des antiquaires de Normandie , 1829—1830. — R. M. Deville, ib. Supplément à la notice imprimée en 18530 , sur la découverte des restes d’une habitation romaine dans la mielle de Cher- bourg, par M. Asselin. — R. M. Deville, ib. Notice historique et archéologique sur l: département de l'Eure, par M. Auguste Le Prevost. — R. M. Deville, ib. Notice sur la statue pédestre en marbre blanc trouvée à Lillebonne le 31 mai 1828, par M. Emmanuel Gaillard. — R. M. Deville , 142 Discours de réception de M. Emmanuel Gaillard , ib. Imprimé en entier p. 159. Réponse de M. Hellis, vice-président , ib. Lettre de M. Emmanuel Gaillard, sur Bézu et son croneleck , 143 Opuscules de M, de Stabenrath : Critique ; Henri d’'Andelis ; Notice historique sur Orderic Vital ; Considérations sur les histoires locales, et en particulier sur celle du comté d’Evreux ; Rapport sur les fouilles faites en 829 , dans l'emplacement du Vieil-Evreux ; Notice sur les fouilles pra- tiquées en 1830, duns la forét de Beaumont-le-Roger.— R, M. Auguste Le Prevost , 145 Essai historique et descriptif sur l'abbaye de Saint-W andrille , par M. E.-H. Langlois , 146 Imprimé en entier p. 235. 46 362 TABLE BEAUX-ARTS. - Restauration de l'arc de Septime-Sévère , et notice historique sur ce monument , par M. Lejeune, architecte. — R M. Deville (V1 et non xvn) , 146 Discours de réception de M. Lejeune , architecte , ib. Réponse de M. Lepasquier , président , 147 Vignettes gravées sur bois debout, par M. Brevière. — R. M. Maillet- Duboullay , 148 Discours de réception de M. Brevière , graveur , 1b. Imprimé en entier p. av2. Réponse de M. Lepasquier , président , ib. Compte rendu des travaux de la Societé philharmonique du Calvados , pendant les années 1827 , 1828 et 1829. — R. M. Blanche , ib. MATIÈRES DIVERSES. Rapport de M. Bullin sur ses travaux , comme archioiste, 149 Considerations sur la mort, par M, le baron Adam , ib. Manuscrits ayant pour titres : l’un, la Dent : l'autre , Périls, Dangers, Risques , Chances , Hasard , Probabilités, Étoile, par M. le baron de Bonardi, 149 Note sur la mort de l’auteur , ib. Essai historique et descriptif sur la peinture sur verre , par M, E.-H. Langlois. — R. M. Auguste Le Prevost , ib Discours, dans la discussion du budget de 1832, sur les enfants trouvés et abandonnés , par M. Henri. Barbet. — R. MI. l'abbé Gossier , Paumier et Blanche , 150 De la Pairie : pétition à la Chambre des Députés ; par M. J. Houël, président du tribunal civil de Louviers, ib. Un incident électvral, par M. le vicomte Toustain-Richebourg, ib. Sur la fertilité comparative de l'ancien et du nouveau monde ; MÉTHODIQUE. 363 Notice géographique sur l'empire de Maroc , traduction de l'anglais ; Mœurs et usages des naturels dans la terre du roi Georges (Nouvelle-Hollande) , par M. Albert Montémont. — R. MM, Magnier , pour les deux premiers ouvrages , et l'abbé Gossier , pour le dernier , 150 Nouvelles , par M. Boucher de Perthes. — R. M. Floquet. Opinion de M. Cristophe , 3° partie , par le même, ib. La ville des expiations , par M. Ballanche.—R. M. Paumier , ib. Sur l'association normande pour les progrès de l'industrie provinciale , par M. de Beaurepaire.—R. M. Pimont , 1b. Dissertation préliminaire sur le Code pénal de France, traduit de l'anglais, par M. F.-P. Dudouit , ib. Samarobriva, ou Examen d'une question de géographie an- cienne , par M. de Cayrol. — R. M. Magnier (». p.140.) , ib. Mémoire généalogique sur la famille de Van den Kerckhove , etc. ; par M. Borcht , 191 Note sur les bergeries nationales et sur la nécessité de les conserver. — R.M. Leprevost, vétérinaire , ib. Livret de l'Académie française, relatif aux prix de vertu fondés par M. de Montyon. — R. M. l'abbé Gossier, ib. Fac-simile d'une lettre de Paganini , ib. Eloges de M. de La Place et de sir Williams Herschel, par Le baron Fourier; Discours lu dans la séance annuelle des quatre Académies , le 24 avril 1828 , par le même ; Recueil de discours lus dans les séances de l Académie royale des sciences ; par le baron Cuvier , et le Nouveau Testament ; ouvrages offerts à l’Académie par M. Lepasquier ; au moment de son départ de Rouen , ib. Note sur les traductions en vers des psaumes de David, par M. Paumier ; pasteur , 1b. Catalogue des livres de l'ancienne Académie , et Journal du Bibliothécaire de l Académie , par l'abbé Vrégeon ; ouvrages très rares donnés par MM. Duputel et Destigny , 152 46. 364 TABLE Classiques latins, publiés par M. Lemaire , huit volumes envoyés par M. le préfet( numéros 117 à124), 152 Rapport sur le concours pour le prix proposé par la classe des lettres (XXX ) , extrait du rapport de la commission , par M. Ballin , archiviste , 154 M. Bignon , après avoir été nommé vice-président, consent à reprendre les fonctions de secrétaire des lettres, à La mort de M. Licquet, 158 MEMOIRES DONT L'ACADÉMIE A DÉLIBÉRÉ L'IMPRESSION EN ENTIER DANS SES ACTES, Recherches archéologiques pour seroir d'introduction à un voyage dans lu Seine-Inférieure et dans l'arrondissement des Andelys ; Discours de réception de M. Emmanuel Gaillard (». p.142), 159 Ascension au Righi, fragment d'un voyage en Suisse, par M. Blanche, D.-M. (».p. 119), 172 Louis XI et la Normande , anecdote rouennaise | par M. Floquet ( ». p. 119), 182 Rapport sur un discours de M. Piroux , relatif à l’enseigne- ment des sourds-muets , par M. Ballin , archiviste, (2:p-16 y; 193 Notice statistique sur les aveugles et les sourds-muets du dépar- tement de la Seine-Inférieure , par M. Ballin, archiviste , 208 Notice historique sur la gravure en bois , discours de réception de M. Brevière (». p. 148 ), 212 Essai historique ct descriptif sur l’abbaye de St-Wandrille , par M. E-H. Langlois ( ». p. 146), 225 Tableau de l’Académie royale des sciences, belles-lettres et arts de Rouen ( Liste des membres ), pour l’année 1832— 1833, 327 Fin DE LA TABLe. mer“ TABLE DES OUVRAGES ENVOYÉES PAR DES SOCIÉTÉS SAVANTES, ET DES OUVRAGES PÉRIODIQUES , Classes suivant l’ordre alphabétique du nom de la Ville où ils sont publiés. Amiens. Académie des sciences. Règlement du 16 mai 1831. Rapports analytiques de ses travaux 1806 , 1807, 1808 et 1811. ( 573 à 577.) esançon. Académie des sciences. Séance publique du 28 Janvier 1832. — R, M. Blanche. ( 560.) Bordeaux. Académie. Séance publique du 22 juillet 1830. — R. M. Du Rouzeau. ( 505.) Caen. Société royale d'agriculture. Rapport sur la fabrique d'eaux minérales ; acidules gazeuses que vient d'établir à Caen M. Courdemanche. — R. M. Blanche. (5o1.) — Societe libre d'agriculture , etc. Règlements constitutif et administratif. (656. ) — Societé des antiquaires de Normundie. Mémoires , annees 1829 et 1830. — R. M. Deville. ( 480. ) — Societé de Médecine. Séance publique du 30 décembre 1828.— R. M. Le Prevost , D.-M. ( 663.) — Revue normande | par M. de Caumont y 101, , 3° et L° partie, mai et septembre 1831.—R. M, Auguste Le Prevost- (608 et611.) Châteauroux. Société d'agriculture. Ephémerides de 1830- ( 550. ) Dijon. Académie. Mémoires, — 1830 , a°° et 2° lv. — 1831, 1,20,3°e/°%o. — R. M. Auguste Le Prevost. (540 et 615.) 366 TABLE Draguignan. Société d'agriculture. Bulletins n°° 3x à 35 , xa® et 12° année. — R. M. l'abbé Gossier et M. Du Rouzeau. (532 et 543 ) — Annuaire du Var. (667.) — R. M. Floquet. Evreux. Societé d'agriculture , etc. Recueil n°° 7 «8, Juillet et octobre 1831. — R. M. Floquet. (510.) — Règle- ments constitutif et administratif. ( 656. ) Lille. Societé royale des sciences. Mémoires , x829 et 1830, — À. M. Girardin (562.)— Reçu pendant la varance- le volume de l’année 1832, x'° partie; Vie de Linné. Lyon. Academie.—Ecole de la Martinière (x823). Mémoire sur les dispositions testamentaires du major général Martin (1827). Éloge de Marc-Antoine Petit (1811). Éloge de Raymond Verniac (1826). Éloge de M. l'abbé C. L. Roux (1830). Notice sur J.-B. Balbis (1831). — R. M. Du Rouzeau. ( 528 à 531. ) — Suciète royale d'agriculture. Séance publique du 5 août 1851. — R. M. Du Rouzeau. (523. ) Marseille. Académie. Mémoires de 1803 à 1814, 12 vol. C6:7.) Montauban. Societé des sciences , etc. Recueil agronomique, PR UE D Ta Qu 0 ES ae LAS TS dE JS — R. M. Leprevost , vétérinaire. (494, 526 , 561, 604 à 648. ) n°6.— R. M. Pimont. (648. ) Nîmes. Académie. Notices des travaux pendant les années 1804—1805, 1807 , 1808, 1809, 1810 et 1811, et les statuts de l’Académie | 1805. Orléans. Societé royale des sciences. Annales, t. x1, n°3 et4.— R. M. Dubuc. ( 492.) n% 5 et 6, 4. 12 n° 2, — R. M. Floquet. (554 et 651.) Paris. Société de géographie. — Bulletin n° 98, gg, 100, 102, 10, 107 , 109 et 110.— R. M, Magnier. (481, 551, 610, 637, 649; — 1v. ) — Societé de la morale chretienne. Journal , t. 1%, n® x ey 2.—R. M, Paumier. (564.) = N°4. — R. M. l'abbe , DES OUVRAGES. 367 Gossier. ( 612.) = N° 6. — R. M. Vingtrinier. (646) = T. 1% , n% 3 et5, parvenus pendant les vacances. — Société phrénologique. Journal, t. 1%, 1° trimestre , 1832. — R. M. Fôville. ( 566.) — Societé royale et centrale d'agriculture. Mémoires ; 1829. — K. M. Dubuc. ( 548.) Mémoires , t. 1 et 2, 1828, réclamées par Ll'archiviste. ( 583.) Notice sur les moyens d'utiliser les animaux morts, par M. Payen. Du dessèche- ment des terres cultivables , sujettes à étre inondées. Pro- gramme d'un concours pour la fabrication d'une râpe à pommes de terre. Rapport sur les moyens de prévenir et d'arrêter les ravages de l’alucite des grains , etc. Programme d'un concours pour la propagation des bonnes espèces d'arbres à fruits. Rapport sur le concours pour le percement des puits forés, par M, le vicomte Héricart de Thury. (640 à 645.) — Reçu pendant la vacance, 2 vol. de 1830 et x vol. de 1531. — Societé d'encouragement pour l’industrie nationale. Pro - gramme des prix proposés pour 1832 , 33, 34 et 35. — R. M. Levy. (561 bis.) — Recueil mensuel de la Gazette médicale de Paris, publié par M. Jules Guérin , D.-M. , 1"° année , janvier 1832. — R. M. Des-Alleurs. ( 556.) — Bibliothèque classique latine, publiée par M. N.-E. Lemaire , vol. 125 à 131. ( 597.) — Journal des travaux de l'académie de l'industrie agricole , manufacturière et commerciale, vol. 1%, n% 1 à Jo Recueil supplémentaire des Mémoires. Vol. 2, n°13 à 17, par M. César Moreau. (584 à 591, 6o8. ) Poitiers. Suciété académique. Bulletin ; 1°° partie, n°° 31 et 32. 2° partie, n®7et8. — KR. M. Dubreuil. (504.) Rouen. Societé centrale d'agriculture. Cahiers 4o à 44. (495 à 500, 606.) — Séance publique du 22 octobre 1831. {5og. ) — R. M. Duputel. 168 TABLE DES OUVRAGES. — Société libre d'émulation. Séance publique du 6 juin 1831. — R. M. Hellis. ( 503.) — Société libre du commerce et d'industrie. Mémoire sur le projet de loi sur les entrepôts réels à l'intérieur. — R. M. Pimont. (538.) — Comité central de vaccine. Rapport. — Conseil central de salubrité de la Seine-Inferieure. Rap- port général sur les travaux de 1831. — R. M. le baron Adam. ( 597.) Saint-Quentin. Kapport de M. Fouquier d'Hérouël , au nom d’une commission, sur les causes de la baisse de laines mérinos , elc.; Notice en faveur des cultivateurs de lin, par M. Moret, de Moy. Essai sur la culture du Un, par M. Ad. Rogé, de Cambrai. Rapport de la commission sur la réunion agricole de Moy , relatif aux instruments aratoires de lu Belgique. Réponses sur la production et la vente des céréales dans l'arrondissement de Saint-Quentin. Séance publique du 2x1 octobre 1830. (517 à 522.) Tours. Société d'agriculture. Annales, t. 11 , n° 6, novembre et décembre 1831. — R. M. Dubuc. ( 596.) T. 12, nSxet2,1832. — R. M. Leprevost, vétérinaire. (598 et 650.) Versailles. Societé royale d'agriculture. Mémoires , 31° année. — R. M. Leprevost , vétérinaire. ( 496 et 507.) Fix. PLACEMENT DES GRAVURES ET DES PLANCHES. Observations météorologiques, par M. Lévy, 4 planches , en regard de la pere. 1". ta . Mer ete Navigation de la Haute-Seine, 1er tableau . 4 . . . . . nendem en... 0. 2 Etat des aveugles et sourds-muets dans le département. PLANCHES de l'Essai sur Saint-Wandrille. Planche Jre.,,, ES ou cd a ae AOL it NICE VII (vignette sur bois). . . . . . . . « . . AUTRE ARC O0 010 0-00 OO 19 26 3x .. 208 Page ERRA'TA. 5, ligne 12: vu naïtre, Lis, : vus. 9; 21: comme au, /is,: comme le. 1e: touts, Lis. : tous. 12: opinon, Lis. : opinion. 4e de la note: 1732, Lis. : 1702, 14: (xvr), dis, : (vn). av. dern.: ce pourrait, is. : ce pourraient. 12: ramp, lis: camp. 14: mouvements , /is. : monuments, 7: c'est la, Lis, : c'est-la, 28: bourguignone , Lis, : bourguignonne, dernière lig. de la note: supprimer ces mots: (voir page 211). 15: nâquirent , lis, : naquirent. dre :exclusivement , Lis. : excessivement. LIBRAIRIE DE NICÉTAS PERIAUX, f - n . ? ! - 0 A pi pe ! «Tmfruncuvr- Cdateur, que de le À tome, 2C° 55, & Abouen. OUVRAGES NOUVEAUX. DESCRIPTION GÉOLOGIQUE DU DÉPARTEMENT DE LA SEINE- Ivrérieure, par M. 4. Passy , préfet de l'Eure. — Ouvrage couronné par l'Académie royale des Sciences , Belles-Lettres et Arts de Rouen, dans sa séance publique de 1829. — Un volume in-4°, accompagné d'un Atlas composé de 20 planches lithographiées et d'une Carte géologique. ... 20of. Exemplaire de choix, sur grand-raisin vélin , 40 Depuis long-temps les amis des sciences s’affligeaient qu'aucun savant ne se fût occupé de la géologie de la Seine-Inférieure, et que les habitants de cette importante portion du territoire français fussent encore privés des moyens d'étudier, en ce qui la concerne, la plus importante des trois branches de l'histoire naturelle, celle qui sert de base à l’agriculture, à la statistique , à toutes les industries, à toutes les connaissances qui s'appuient sur le sol; celle que l’on doit considérer comme le point de départ de ce cercle immense de recherches qui embrasse le ciel et la terre dans ses travaux et dans ses leçons. L'Académie royale de Rouen , reconnaissant qu'une pareille lacune était une calamité dans un département où l’industrie dispose d'autant de bras et de capitaux, mit au concours la Statistique minéralogique du département de la Seine-Inférieure, et, en 1829, le prix fut décerné à l’auteur de l'ouvrage que nous annonçons. Depuis cette époque , M. A. Passy n’a cessé de s'occuper, avec le plus grand zèle, d'améliorer encore son excellent ouvrage ; il a profité des renseignements et des observations que plusieurs savants se sont empressés de lui adresser, et nous ne craignons pas de dire qu'il l'a porté au plus haut point de perfection. Dans une introduction à la fois savante et claire, l'auteur rappelle à grands traits les phénomènes et les révoluions qui ont formé l'enveloppe actuelle du globe, les circonstances qui la modifient encore sous nos yeux, l'utilité scientifique et industrielle de la géologie, la marche que cette étude doit suivre , et les révolutions qu'elle a subies 2 Dans le premier chapitre, il examine notre département sous Îe rapport de la topographie physique , et fait connaître successivement la configuration du sol, ses vallées, ses rivières, et enfin ses deux plateaux principaux. Il donne une idée aussi neuve que précise et heureuse de l'influence que la nature de chaque terrain exerce sur la disposition de ses plaines et de ses vallons. On y remarque encore la description et l'explication de ces espèces de gradins qui, dans les environs de Dieppe surtout, impriment une physionomie particulière à la plupart des coteaux. Après avoir déterminé les divisions dans lesquelles peuvent être rangés les terrains qui se rencontrent dans la Seine-Inférieure , l’auteur indique sommairement la nature de chacun de ces terrains , puis leur gisement dans le département ; au moyen de cinq grandes lignes qu'il tire : 1° du Havre à Aumale ; 2° d’Elbeuf au Tréport ; 3° de Rouen à Gournay ; 4° du Pont-de-l'Arche au Havre , en suivant le cours de la Seine; 5° du Havre au Tréport , en suivant les falaises. Un appendice étendu a été consacré aux fouilles de Meulers. Il est suivi de la liste des terrains de la Seine-Inférieure , avec des planches à l'appui, qui en donnent une coupe idéale. Le paragraphe des alluvions et attérissements est fort complet et fort instructif; nous en dirons autant de ceux qui concernent les tourbières et le tuf. Le chapitre Il est consacré aux terrains superficiels anciens , trop long-temps confondus ensemble; l’auteur les divise en terrains transportés par les eaux, et en terrains qui n’ont été que remaniés par elles. L'argile plastique a été traitée dans cet ouvrage avec tous les développements qu’elle réclamait, et sous le rapport scientifique, et sous celui de l’industrie. Le chapitre III est consacré à la formation crayeuse. Le chapitre IV traite des terrains inférieurs à la craie. On trouve à la fin de l'ouvrage le catalogue des fossiles recueillis jusqu’à ce jour dans la Seine-Inférieure , et un tableau des hauteurs barométriques et trigonométriques d’un grand nombre de points de la Seine-Inférieure et des départements limitrophes. Enfin , le texte est accompagné de vingt dessins lithographiques , en partie coloriés, représentant des coupes et vues des terrains de la Seine-Inférieure et quelques-uns de leurs fossiles les plus remarquables, outre une très belle carte, faisant suite à celle de MM. Cuvier et Brongniart, et qui fournira désormais d’inappréciables renseignements, même aux personnes les plus étrangères à la science. On vend séparément La Carre pe LA Sewe-Ivrérieure. — Une feuille grand-aigle vélin. — Prix : 6 fr., coloriée ; 5 fr. , non-coloriée. 3 Essai MSTORIQUE ET DESCRIPTIF SUR ÉGLISE ET L'ABBAYE Dr Sar-Grorces-ne-Bocnervize , près Rouen ; par M. 4ch. Deville. — Un vol. grand in-4°, avec un grand nombre de figures dessinées et lithographiées ou gravées par l'auteur, 1 5f. Hisrome pu Cnareau-Gaizzarp , et du Siége qu'il soutint contre Philippe-Auguste, en 1203 et 1204, par M. Ach. Deville. — Un volume grand in-4° , orné de planches litho- graphiées ou gravées, d'un Jac-simile, et de plusieurs vignettes. « sereneseesssesessonosressesesteene. 15 f. l'oMBEAUX DE LA CATHÉDRALE DE Roue, par M. Ach. Deville. — Un beau volume in-8°, orné de dix planches dessinées et gravées par M. E.-H. Langlois, du Pont-de-l'Arche, par mademoiselle Espérance Langlois et par l'auteur.. 7 fr. 50. Exemplaire grand in-8°, sur nom de Jésus vélin, épreuves sur papier de Chine, CAN ONE Ne bete eds aies Des nombreux tombeaux qui jadis ornèrent la Cathédrale de Rouen, six seulement sont parvenus jusqu'à nous : ceux de notre premier duc Rollon, de Guillaume Longue-Epée son fils, de Maurice, archevêque de Rouen sous S. Louis, de Pierre de Brézé, grand sénéchal de Normandie, de Georges d’Amboise et de Louis de Brézé , mari de Diane de Poitiers. Les autres ont disparu dans le ravage des guerres de religion , et nous avons ainsi perdu de précieux monuments propres à éclaircir peut-être des points douteux de notre histoire, Le laborieux auteur de l'Essa' sur Saint-Georges-de-Bocherville et de l'Histoire du Chäteau-Gaillard a donc rendu un nouveau service à la science en conservant à la posté- rité l'héritage des souvenirs que nos devanciers n'ont pas dissipés. ExCURSIONS DANS L'AMÉRIQUE MÉRIDIONALE , le nord-ouest des Etats-Unis et les Antilles, dans les années 1812, 1816, 1820 et 1824 ; par Ch. Waterton , esq. ; traduit de l'anglais. — Un beau volume in-8°, d'environ 500 pages, orné d'une lithographies:. as sise nos cocon ue cmonpesmesse. G fr. L'ouvrage dont nous offrons la traduction parut à Londres , pour la première fois , en 1815, et vient d'y arriver à sa troisième édition. Ce succès nous fait espérer qu'il sera accueilli en France avec quelque faveur. L'originalité des récits, les détails piquants qu'il contient sur plusieurs faits d'histoire naturelle, et particulièrement sur le poison 4 de wwourali, sur le fourmilier et le paresseux, et sur quelques oiseaux rares et curieux, en forment une production des plus intéressantes. Cet ouvrage se termine par un traité sur la conservation des oiseaux , contenant des instructions entièrement neuves. Il est suivi d’une notice sur les sauvages de l'Amérique septentrionale, également traduite de l'anglais de M. Washington Irving. Essai HISTORIQUE , ARCHÉOLOGIQUE ET STATISTIQUE SUR L'ARRON- DISSEMENT DE PonvT-AubEMER (Eure); par M. 4, Canel, avocat, — Deux forts volumes in-8° , avec atlas : pour les souscripteurs. ........... 16fr. pour les non-souscripteurs ....,.., 20 La première partie du premier volume est en vente; elle contient l'Aistoire de la ville de Pont-Audemer. La seconde partie, qui paraîtra très incessamment , renfermera la statistique des communes du canton de Pont-Audemer, et des documents historiques sur chacune de ces communes. Le second volume paraîtra dans le courant de 1833, et offrira les mêmes renseignements pour chaque commune des autres cantons. Publication périodique. REVUE DE ROUEN. La première livraison a été publiée le 10 janvier dernier , et les autres continuent de paraître le 10 de chaque mois. Chaque livraison se compose de trois feuilles d'impression, et d’une lithographie ou d’une gravure , ou enfin d’un morceau de musique. Le prix d'abonnement , pour Rouen , est de 24 francs pour un an ; pour Paris et les départements, 26 francs. Ces différents Ouvrages se trouvent aussi , A PARIS, Chez TREUTTEL et WURTZ , Libraires , rue de Lille, n° 17. LANCE, Libraire, rue du Bouloy, n° 7. LEVRAULT , Libraire, rue de la Harpe, n° 81. DELAUNAY, Libraire, au Palais-Royal. 2 © MAY NY Q 0 A T8 hi 4 ve JET © MENMORATEUTE FPS VO IV VUS DELA = LUE . DA À HO RACE NII HU ee See EE rere V VyvwV VE RCE vrErus VVY VA APE error MC VASE | LU CACEU TT AAA EU VVY AUS : V UT É V CM Vu KE YU LU VV) JYN vw LAND PVR VACVOURE $ ORNE 2: pv MN Ati CPR UMA Fvwd WYC AE VUy £ d SPAM CAE ver Vars HR PL FOEPIPT ua + | V RES V Y ne FNSESE UE YNVSVE UE VEUVE ve LATTES PTS MVy AVE YMVŸ ee LH LL VW NZ VER HE DONNE LA UN IN ESA Fais y US EE ie, | , % Ari ; VOS MIX RU MN NN NU CE Le CFA VEN | “| D vs Ÿ a w de FAS MA VV AFLAMEREE ÿ v YEN Y TS # RNA VUE 5 A4 V VW Y Y* VV UN WE Sauver 4 NAT N° # Y NAN WE DE es ME ÿ À ju " VE dé vév v Vye Jude MAMA AMC ARE à ÿ 334 rs v AMEN MS | V'f # M CH y MFP Ty% 4 AE AVE VU FAR ve Viv PC “y + AC MN 2 Du. is sv S EN « 3) vl han Re CE CAMERA Ù 0 ve Pete UE UN VV y v NA VOUS / + RES LA VI Cyvb, Ÿ? 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