SAUVONS NOS FORETS UN GRAVE PROBLEME NATIONAL PAR E. B. BIGGAR TRADUCTION FRANCAISE ET PREFACE MGR C. LAFLAMME Professeur a I'L'nivcisitc Laval, (iiiibec BIHGAR-WILSON, LIMITED CONFEDEKATIOX LiKK Bl-ILDIX(} TOKOXTO Prix: 5 sous I'exemplaire $2.00 pour cent copies PREFACE DE L'EDITION FRANCAISE Le travail de M. E. B. Biggar que nous avons I'honneur de pre- senter aujourd'hui a nos compatriotes canadiens franqais est avant tout I'expose d'une these economique; c'est un eloquent plaidoyer en faveur de la conservation de nos forets. Cette these peut se resumer en deux ideas principales qui, toutes les deux, conduisent a la meme conclusion, mais par des voies differentes. Tout d'abord, d'apres I'auteur, nous devons mettre fin a I'exportation de notre bois brut aux Etats-Unis, afin de creer chez nous, par le fait menie, une grande Industrie de pulpe et de papier. Ensuite nous devons con- server nos forets autant que faire se peut, et cela parce qu'elles constituent le plus clair de nos richesses nationales; parce qu'elles sont en elles-memes la sure garantie de la valeur economique per- manente de nos cours d'eau ; parce qu'elles contribuent, pour une large part, a garder dans leur etat actuel les conditions climateriques de notre province, si favorables aux exploitations agricoles. La seconde partie de la these ne peut guere etre discutee. En eflfet, tous les habitants de Quebec, meme ceux qui connaissent le moins la geographic locale, savent parfaitement, qu'au point de vue des forets et des forces hydrauHques, Quebec occupe un rang hors de pair dans le monde americain. On sait aussi que ces deux sources de richesses se trouvent providentiellement reunies surtout dans les parties nord et nord-est. Or il est certain d'autre part que la valeur des pouvoirs hydrauHques est intimement liee a la conservation des forets, surtout de celles qui sont placees aux sources des rivieres. En eflfet, ne I'oublions pas, I'energ^e de nos cours d'eau vaudra d'autant plus qu'elle sera plus reguliere. Une machine dont la puissance mecanique varierait notablement d'un mois a I'autre ne serait guere de service, surtout si elle devait servir a la production de Tenergie electrique. Done, plus le debit de nos rivieres sera constant, plus grande sera leur valeur; et nos cours d'eau n'auront cette regularite qu'en autant que les endroits ou ils prennent leurs sources seront assez boises pour diminuer la rapidite du ruissellement super- ficiel, et permettre a I'eau meteorique de penetrer plus avant dans le sol. Ajoutons encore que, chaque printemps, il se produit sur plusieurs de nos cours d'eau, surtout dans la partie sud-est de la province, la ou le defrichement a ete pousse plus avant, des inondations desastreuses, empoi tant ponts et edifices, lavant le plus riche du sol et I'appauvrissant lutant. Or ces inondationr, qui augmentent maintenant a chaque decade, n'ont pris un tel caractere, que depuis que le defrichement a atteint les zones ou ces rivieres prennent leurs sources. Eiifin, depuis assez longtcmps deja, on a remarque que la prticipitation annuelle tend a diminuer dans la province. On dirait, qu'en nioyenne, les etes sont plus sees qu'autrefois. Des ruisseaux qui jadis debitaient de I'eau toute I'annee, en assez grande quantite meme pour actionner des moulins, ne coulent plus guere pendant I'ete, ou n'ont qu'un debit insignifiant. Et comnie on sait que la foret a pour efifet d'augmenter la quantite de pluie dans un pays boise, sa disparition progressive peut bien etre la cause de cette secheresse relative. Et alors ne peut-on pas craindre que, les changemcnts de climat se faisant, dans la grande et fertile vallee du St-Laurent, dans le sens que nous venons de dire, les industries laitieres et I'elevage, ces deux grandes ressources de notre population agricole, ne soient exposees un jour a en souffrir? Cette perspective serait vraiment navrante, d'autant qu'a ce premier malheur s'ajouterait, comme nous I'avons dit plus haut, le danger de voir nos forces hydrauliques perdre une grande partie de leur valeur industrielle. Done, pour cette double raison, conservons nos forets. Dans une autre partie de son travail, la plus longue, M. Biggar se prononce carrement contre I'exportation du bois de pulpe ; il voudrait qu'elle fut absolument prohibee (*). Et cela dans le but de develop- per au Canada une grande Industrie de pulpe et de papier, capable, comme il le laisse entendre quelque part, d'alimenter de ses produits la moitic '^f'" rations du monde. Pour en ar/iver la, il sufifirait que le peuple de Quebec commencat par se rendre compte de la situation, qu'il patientat pendant quelques annees (le temps qu'il faudrait pour mettre la nouvelle Industrie en marche) et qu'il s'avancat ensuite sans crainte vers son brillant avenir. A I'appui de cette affirmation, M. Biggar demontre que les avantages a retirer de la creation, dans notre pays, d'une grande industrie de pulpe et de papier sont dix, cent fois superieurs a ceux qu'on retire maintenant de la vente du bois de pulpe. Si, dit-il, I'exportation de ce bois etait prohibee et les etrangers obliges de venir fabriquer leur pulpe chez nous, il ne s'ecoulerait que peu d'annees avant que les bienfaits de cette politique ne fussent ressentis par tous. En efifet — nous resumons toujours notre auteur — les editeurs, americains ou autres, doivent de toute necessite se procurer le papier qui leur est necessaire, et, s'ils ne le trouvent pas chez eux, ils seront obliges de venir le chercher au Canada ou dans les autres pays producteurs de pulpe. Que si, par represailles, les Etats-Unis s'adressaient a la Scandinavie, ce serait autant de pulpe enlevee aux marches europeens (x\ngleterre, France, etc.). Les prix s'y eleveraient, et les marches europeens seraient ainsi ouverts a la pulpe canadienne. (*). Cette prohibition ne peut 6tre d^cr^t^e que par le Gouvernement F^d^ral. Une telle mesure d^passe le pouvoir des grouvernements locaux, qui se trouvent quelquefois en face de promesses faites ou de droits acquis. D'ailleurs — et c'est la un point important developpe par I'auteur — I'histoire du commerce du bois de pulpe, pendant les quatre dernieres annees, etablit clairement I'avantage que nous aurions a garder notre bois et a creer chez nous I'industrie de la pulpe et du papier sur une grande echelle. Les chiffres cites a la page 13 sont tres concluants a ce point de vue. Done garder notre bois de pulpe et creer une grande Industrie de pulpe et de papier, voila non seulement la politique la plus sure, mais encore la seule qui nous permettra de conserver les plus precieuse des ressources naturelles que Dicu a confiees a la garde du peuple canadien. Et si on pent dire que, pour toutcs les autres provinces, la conservation de la foret est une des plus importantes questions qui doivent occuper la generation presente, pour Quebec, c'est le probleme des problemes. Car une fois que la quantite de bois accessible a I'heure actuelle aura e^e epuisee pour alimenter les usines americaines, il nous faudra depenser des millions pour faire des chemins de fer capablcs d'atteindre les forets plus eloignees avant de jouir de leurs produits. Ne nous laissons pas acculer de gaite de coeur a une telle necessite. Dans les conditions presentes, si Ton comprend bien la situation, si Ton a a coeur de faire naitre ici cette Industrie pour laquelle rien nc nous manque, ni la matiere premiere, ni I'energie nu'canique, ni la main-d'oeuvre, les hommes de notre generation pourront esperer voir Quebec classe bientot parmi les plus grands producteurs de papier de toute I'Amerique et du monde. Alors la.demande du travail parmi nous deviendra plus grande, et Ton enrayera ainsi cet exode qui pousse un trop grand nombre de nos enfants a chercher ailleurs les avantages qu'ils ne trouvent pas chez nous. En resume, aprcs avoir bien etudie la condition economique du pays, le quebecois doit se demander si les quelqucs piastres que lui rapporte aujourd'hui la vente du bois de pulpe peuvent bien compeiiser la disparition des ressources naturelles dont profiterait toute la popu- lation presente et future. Peut-il dire et croire que la generation actuelle a le droit de vendre, pour de si futils motifs, ce qui sera neces- saire plus tard a la prosperite generale? A-t-il le droit de laisser la gene en heritage a ses enfants, quand la nature lui a donne toutes les facilites possibles pour fonder une grande Industrie et assurer ainsi la prosperite de son pays? Le canadien franqais. si attache a sa famille et a ses enfants, sera le dernier homme du monde a ne pas reculer devant cette triste perspective. II comprendra bien vite que la destruction in- consideree de la foret. pour la seule fin de A-endre quelques cordes de bois, sans s'occuper autrement des avantages qu'il y aurait a faire naitre ici une grande Industrie locale, sans plus se soucier des modifications desavantageuses que !e deboisement provoquera infailliblement dans la quantite annuelle de pluie et le regime normal de nos pouvoirs hydrauliques, il comprendra, dis-je. que cette pobtique est un veritable suicide national. Done tcvut canadien qui desire voir sa patrie plus prospere doit tenir a ce que la foret soit traitee scientifiquement, de fagon a ce que cette ressouree benie soit perpetuelle, de faqon a ce que sa patrie puisse abriter et sustenter les millions de canadiens a venir, tout coninie elle a abrite et fait vivre la poignee de colons qui vinrent autrefois setablir sur les rives du St-Laurcnt. Telle est en resume la these de M. Biggar, et la haute capacite de I'auteur lui donne une valeur a part. Sans dotite, elle renferme des points discutables. On a deja dit, par exemple, qu'il fallait des raisons bien graves pour que I'Etat inter- dise un commerce qui afJecte la propriete privee; que chacun est le maitre de faire de son bien I'usage ciu'il voudra et de le vendre a qui il lui plaira. Puis, comment faire face au bouleversement economique qui serait bien assurement le resultat d'un changement aussi radical chez les gens qui, depuis des annees, comptent sur les revenus qu'ils tirent de cette exportation pour faire face a leurs affaires? Et ensuite, quelle serait la duree de cette crise ; combien de temps faudra-t-il poiir que la nouvelle Industrie soit solidement etablie dans notre province? Voila autant de questions — et il y en d'autres — que M. Biggar ne touche pas et qui vaudraient d'etre serieusement examinees. Toutefois, on lira son travail avec grand profit. II ,'st difficile de rencontrer de plus serieux arguments pour etablir un point d'economie politique, encore discute, il est vrai, mais qui, pour nous quebecois, est de la plus haute importance. Et s'il est vrai de dire que cet opuscule n;e clora probablement pas le debat, on devra du moins lui rendre le temoignage d'etre de toute bonne foi, et d'exposer tres serieusement les Hrg-uments qui militent en faveur de la these defendue par I'auteur. C. LAFLAMME, ptre, Universite Laval, Quebec. UN PROBLEME NATIONAL Les hommes qui reflechissent commencent a comprendre qu'a part les mines et les pecheries, la base de notre richesse materielle est la culture du sol, et que cette derniere elle-mcme depend de la conserva- tion de nos bois en futaie. Les applications merveilleuses de I'electricite, la relation de cause a effet qui existe entre les forces hydrauliques et I'energie electrique, voila un fait qui etablit sans conteste que, dans ce 2oe siecle, les ressources d'un peuple proviendront des surfaces boisees du pays qu'il habite. LES LECONS DE L'HISTOIRE De plus, I'histoire nous apprend que I'appauvrissement de quelques-unes des plus grandes nations des temps anciens et modernes peut etre attribue a la destruction de leurs forets. La Mesopotamic (*), chez les anciens, I'Espagne chez les modernes, en sont des exemples frappants. II a ete demontre que le reboisement d'une contree jadis denudee y avait augmente et regularise la quantite de pluie ; de meme, c'est un fait d'observation que la disparition des arbres dans un pays autrefois boise, a rendu irreguHer le debit des cours d'eau, modifie le climat et change des terres fertiles en sols arides. Nous avons, au Canada et aux Etats-Unis, des preuves evidentes que la disparition du bois compromet la regularite du debit des cours d'eau et des rivieres et peut quelquefois causer de terribles catastrophes. Ainsi, depuis le deboisement des Alleghanys, cette region a ete reduite a une sterilite relative. De plus, on peut encore attribuer a la meme cause de veritables desastres, tel que I'inondation de Johnstown, qui balaya d'un seul coup toute une ville ; un reservoir superieur avait cede sous la pression des eaux de la fonte subitc des neiges. C'est a la meme cause, c'est-a-dire a la disparition du bois qui recouvra'ii. autrefois les collines ou s'alimentent les ruisseaux qui forment les rivieres, que sont dues les inondations printanieres qui (*) Le professeur W. K. Prentice, de I'universit^ de Princeton, a explor* r^cemment une partie de la Syrie septentrionale, i peu pr^s quarante milles carr^s. Dans ce district, il a d^couvert les mines d'environ cent cinquante villes, toutes Horissantes du 4e au 6e siecle. Quelques-unes avaier.t une population de 3,000 i 30,000 Ames; I'une d'elles, Antiorhe, d^passait un demi million. Les collines qui se trouvent dans cette r^pion appartiennent ^ cette chatne de montagnes qui fournit jadis les fameux cadres du Liban. Plusieurs de ces villes sont aujourd'hui compl^tement abandonn^es ; d'autres ne sont plus occupies que par les mis^rables demeures de trois ou qut'.tre families. Antioche elle-m6me ne compte que 30,000 habitants A. la suite de ces obser- vations, le professeur Prentice Etablit d'une mani^re ^vidente que la mine de cette r^g-ion, autrefois si florissante, a ^t^ cau^^^e par la destmction de ses forftts, et il donne ce fait comme un solennel avertissement ^ ses concitoyens. 8 causent de si frequents desastres et detruisent tant de proprietes dans les vallees de la Grande Riviere et de la Tamise, dans Ontario, dans celles des rivieres Magog et St-Fran^ois, dans Quebec, (* J. Dans ces memes regions, les anciens gardent encore le souvenir de ruisseaux coulant toute I'annee, assez puissants menie pour faire marcher des moulins, qui sont maintenant completement a sec pendant I'ete. La raison de ces changements est bien simple. Lorsqu'une riviere prend sa source dans un terrain boise, la pluie et I'eau de neige penetrent plus avant dans le sol et y circulent avant de rencontrer les niveaux de drainage naturel qui les conduiront aux rivieres. II en resulte que le debit de celles-ci se maintient plus regulier toute I'annee. Au contraire, si le terrain est denude, les eaux ruissellent tres vite a la surface ; elles coulent en torrents le printemps et laissent la riviere :' sec pendant Tete. Ces inondations torrentueuses, non seulement emportent les ponts, detruisent les proprietes, etc., mais encore laven'. la surface du sol, enlevant le plus riche de la terre et la laissant tellenient appauvrie qu'elle devient incapable de faire pousser les moissons et meme quelquefois de nouveaux arbres. Voila des changements qu'on pent constater dans plusieurs endroits d'Ontario, de Quebec et du Nouveau- Brunswick, et qui sc sont produits depuis un siecle a peine. SOURCE D'ENERGIE Rappelons ici I'importance toujours croissante des forces hydrauliques comme sources d'energie electrique ; d'autre part, ne perdons pas de vue le fait qu'il y a au Canada de vastes regions — Ontario, Quebec, le Nouveau-Brunswick et File du Prince Edouard — qui sont depourvues de gisements houillers : et alors nous compren- drons mieux I'interet vital que nous avons a maintenir intactes nos forces hydrauliques, avec leur valeur maximum, si nous voulons que mos industries puissent lutter avec elles des pays ou la houille est a bon marche. Nous voyons par la de quel crime nous nous rendrions coupables envers nos successeurs, si, par un veritable acte se folie, nous changions en deserts des regions maintennant fertiles et, du meme coup, amoindrissions les energies hydrauliques des quelles dependront necessairement un jour nos grandes industries. Les premiers colons canadiens et imericains ont dii faire dis- paraitre la foret pour fonder leurs etablissements, et, comme le bois couvrait alors des surfaces immenses dans I'Amerique du nord, plusieurs d'entre nous ont peut-etre herite de cette notion fausse que 1 arbre est plutot un ennemi dont il faut se debarrasser, qu'un des elements essentiels de notre richesse nationale. Aux Etats-Unis ou la destruction des forets s'est faite dans une mcsure plus etendue et plus desnstreuse qu'an Canada, le peuple commence a comprendre que la foret est une necc^site nationale. Dans environ quarante Etats de I'Union, on a deja fait des lois. ou en prepare, pour conserver ce qui reste encore des forets, ou pour retablir ce qui en a ere detruit, et cela tout particulierement a la tete des cours d'eau et des rivieres les plus importantes. (') Dans la vall^ de I'Ohio, les dommasies causes par les inondations, pendant les quatre derni^res ann^es, on ^t^ de $18,000,000. LA PRESSE Au nombre des agents destructeurs qui sont les plus a redouter pour les forets, il convient de mettre la presse au premier rang-. En 1844, Keller, en Allemagne, fabriqua le premier la pulpe en broyant le bois. En 1854, Watt et Burgess, en Angleterre, arriverent au memo resultat par des precedes chimiques. Depuis lors, le cout d papier a journaux a diminue de beaucoup. Le precede de fabrication de la pulpe mecanique fut introduit aux Etats-Unis en 1870, et, dans I'espace de dix ans, on vit le prix du papier a gazette tomber de neuf sous a quatre sous la livre. Depuis, grace au perfectionnement des precedes et a I'extension de cette industrie, ce papier ne vaut plus guere que deux soois. Ce nouvel etat de chose a permis aux editeurs d'agrandir le format de leurs journaux, d'en augmenter la circulation et de donner une importance encore plus grande a cette presse, veritable merveille de notre temps, autant a redouter pour le mal qu'elle pent faire, qu'a louer pour le bien qui pout en sortir. Pour apaiser cette faim toujours croissante de la presse (|uotidienne, des forets entieres d'epinettes, de sapins, de peupliers, etc., ont etemassacrees aux Etats-Unis, par comtes et par Etats. A tel point que ceux qui ont etudie la situation de pres commencent a s'apercevoir que, en Ameriquc, la provision de pulpe a bon marche touche a sa fin, etant donne que ce qui reste des forets a pulpe est ou bien inaccessible, ou bien insufifisant. Chaque annee, les fabricants de pulpe sont obliges d'aller chercher plus loin leurs provisions de bois, et chaque annee ils sont forces d'en tirer une plus grande proportion des forets canadiennes. Dans le cours de I'annee finissant en juin 1907, les Etats-Unis ont importe du Canada 650,366 cordes de bois de pulpe, c'est-a-dire, I'equivalent de 520,000 tonnes de papier a journaux. Pendant la meme annee. leurs importations de pulpe mecanique canadienne atteignait le chifire de 149,827 tonnes, evaluees a $3,230,272. En outre, ils ont importe d'ailleurs, surtout de Norvege, 63.283 tonnes de pulpe (surtout chimique), evaluees a $3,118,585. Tels sont les chiffres officiels des Etats-Unis. D'un autre cote, bien que les rapports autorises du Canada donnent, pour les neufs nois finissant en mars 1907, une ex- portation aux Etats-Unis de 452,846 cordes de bois. soit, annuellement, 603,794 cordes, le "Paper and Pulp Magazine" croit qu'en realite notre exportation de ce cote a ete de 800,000 a 1,000,000 de cordes (*). Ce chififre est plus eleve que celui qui represente la consommation faite par les americains de I'epinette prist, dans leurs forets. En effet, la quantite de celle-ci, d'apres un rapport special du Bureau du recensement de Washington se serait elevee de 47% et le prix de 122% de 1900 a 1905. Pendant le meme temps, la consom- mation de I'epinette canadienne aux Etats-Unis aurait augmentee de 102% avec une elevation de prix de 150%. Par consequent, dans le court cspace de cinq ans. le prix du bois de pnlpe, sauf celui du peuplier. aurait plus que double. Cette regie appliquee a 1907 donnerait un accroissement encore plus gfrand. (*) Voir Rapport de I'Ass, For. du Canada, 1906. io PROBLEME MONDIAL A mesure que le nombre et le tirage des journaux se developpent, la difficulte de leur fournir le papier necessaire s'accroit en propor- tion ; ii en sera ainsi tant qu'on n'aura pas trouve quelque chose pour remplacer le bois dans la fabrication de la pate a papier. Et, comme on ne voit encore rien venir de ce cote, dans peu d'annees, la question du papier, qui est deja un probleme aux Etats-Unis et dans les autres pays grands producteurs de papier, diviendra un probleme mondial. Car ce n'est pas seulement la demande du papier a journaux qui augmente, mais encore les usages du bois qui deviennent de plus en plus nombreux dans les differentes industries. Cet emploi toujours croissant du bois d'oeuvre contribue pour une large part a devaster nos forets et a hater la crise. En effet, de recentes statistiques font voir qu'a mesure que I'emploi du beton, de I'acier, etc., se generalise, la con- sommation du bois devient plus grande par habitant, et cela dans tous les pays civilises. A raison du developpement enorme des fabriques americaines de bois d'oeuvre, I'epuisement des forets s'est fait si rapidement dans ce pays, que c'est a peine si nos voisins commencent a le comprendre. Ainsi, il y a a peine quelques annees, les documents officiels donnaient les forets du Michigan comme etant inepuisables. Et aujourd'hui un grand nombre de fabriques de cet Etat sont obligees d'importer le bois brut d'autres regions du continent. C'est pour cette meme raison que les scieries du Michigan faisaient venir, les annees dernieres, leur bois brut d'Ontario ; mais tout recemment une loi provinciale a etd adoptee obligeant tous les industriels exploiiant le bois canadien a le travailler de notre cote des lignes, et cela au grand avantage de I'industrie du bois dans Ontario. Les fabriques de pulpe de I'Etat de New York ('), apres avoir draine jusqu'au coeur des Adirondacks, doivent maintenant demander au Canada une partie de leur matiere premiere. De meme les fabriques du Wisconsin qu'on disait avoir a leur disposition, elles aussi, des reserves inepuisables, ont ete obligees, en 190;, de faire venir a grands frais de Quebec, par chemin de fer, 70,000 cordes, afin de couvrir le deficit de I'exploitation locale. II faut dire que ceci est du en grande partie aux conditions nouvelles des rivieres de cet Etat et a la difficulte de sortir le bois des forets. Mais cette disette d'eau n'est-elle pas elle-meme le resultat de la disparition des grandes surfaces forestieres? Toutes les observations vont done a faire redouter I'arrivee prochaine de la crise dont il etait question plus haut. Aussi vingt-sept Etats ont deja pris des mesures, par l%islation ou autrement, pour arreter cette devastation. Dans une douzaine d'autres on songe a en faire autant. (*) Les 108 fabriques de cet Etat peuv.-nt consommer par ann^e 087,000 cordes, et, en supposant une pousse annuelle de 10 cordes par acre, ces fabriques d^pouilleraient annuellement pris de 100,000 acres de forets. Si nous ajoutons ^ cela la consommation du bois d'oeuvre (245,000,000 de pieds de planche, d'apr^s le recensement de igoo). dans I'espace de sept ans, la reserve d'^pinette des Adirondacks serait compl^tement ^puis^e, si ces fabriques ne s'approvisionnaient que 1^. II A part les Adirondacks, le Wisconsin et les contrees voisines, on a dit que les forets du Maine etaient capables de fournir une provision inepuisable de bois, suffisante pour alimenter indefiniment toutes les usines americpines. Sans doute ceux qui ont fait ces avances etaient de bonne foi, ut comme ceux qui affirmaient jadis la meme chose du Michigan. Cependant, I'ait digne de remarque, "I'lrternational Paper Co.," de New York, s'est assure dernierement des av?ntages d'entrepots dans le port de Portland, Me. Et maintenant elle transporte en cette derniere ville des cargaisons de bois qu'elle vient prendre dans le Nouveau-Brunswick et dans Quebec et cela pour alimenter ses fabriques de la Nouvelle-Angleterre ei du Maine lui' meme. D'autres compagnies americaines ont loue des limites tres ^tendues au Nouveau-Brunswick, a la Nouvelle-Ecosse et dans les regions orientales et septentrionales de Quebec, toujours dans le meme but, leur provision de bois etant epuisee chez eux ou I'exploitation en devenant trop dispendieuse. En tenant compte des limites que les compagnies americaines de pulpe et de papier sont en train d'acquerir dans le Canada oriental, ces compagnies possedent de 12,000 a 15,000 milles carres de nos forets d'epinette. La "Union Bag and Paper Company," bien qu'elle ait deja 2,000 milles carr's de limites a epinette dans Quebec, reduisit dennierement ses dividendes de 7 a 4%, et elle en donnait comme raison a ses actionnaires, I'obligation ou elle etait d'acquerir de larges limites au Canada, vu I'accroissement incessant du prix du bois de pulpe et la disparition rapide sur le continent americain des forets qui le fournissent. LIMITES INEPUISABLES De tons les pays du monde, le Canada possede a la fois les plus vastes forets et la plus grande somme de pouvoirs hydrauliques. Etant donnee la relation qui existe entre les forets et la valeur industrielle de ces derniers, entre ceux-ci et le developpement de I'energie clectrique, surtout dans un pays qui n^anque de hou'lle, comme sent nos provinces centrales; etant donnees de plus les relations des forets avec les industries du bois dans lesquelle le canadien excelle, ne peut-on pas dire que la conservation de nos forets est le probleme vital le plus grave, au point de vue materiel, que nous aurons jamais a resoudre? M. le Dr. Robert Bell, du service geologique canadien, evalue la superficie totale des forets canadiennes a 2,600,000 milles carres. environ 1,657,600,000 acres, dont la moitie est couverte en bois de pulpe. A premiere vue, cette richesse peut paraitre inepuisable. Mais de vastes regions de cette zone sont encore inaccessibles, et, par consequent, inexploitables : et il en sera ainsi tant qu'on aura pas depense des sommes enormes (en chemins de fer, etc.), pour en rendre I'exploitation possible. De plus, la croissance dans les climats du nord est plus lente qu'au sud. Aussi devons-nous en arriver pour nos bois a la conclusion a laquelle les Americains se voient aujourd'hui accules avec surprise, a savoir que notre provision est loin d'etre inepuisable. Par bonheur, nous pouvons profiter de I'experience de nos voisins, nous rappelant qu'une once de prophylaxie vaut mieux qu'une livre de m^decine. 12 ARDEUR RUINEUSE C'est I'ardeur et I'energie qu'ont mises les Americains a developper rapidement de vastes entreprises, c'est leur soif de I'argent qui a conduit plusieurs d'entre ttux a des exces qui ont bien vite cause du malaise dans tout le peuple et qui, si on continue, en causeront un plus grand encore chez les generations a vcnir. L'epuisement, par une culture inconsideree, de leurs prairies de I'ouest est en grande partie la cause de I'emigration des cultivateurs americains vers le nord-ouest ,canadien ; le depeuplement sans merci du poisson blanc et du hareng sur la rive americaine du lac Erie, a force leurs pecheurs a envahir les eaux canadiennes, sans s'occuper de nos lois ni du danger qui pouvait en resulter pour les bons rapports entre le? deux pays; les hauts cris jetes par les interesses americains, revendiquant le nionopole de la chasse aux phoques dans la mer de Behring et la rapide diminution des troupeaux qui en a ete la consequence ; la peche faite sans discre- tion, a I'aide d'engins destructeurs, sur les cotes de I'Atlantique, et, comme resultat, I'extinction presque complete de plusieurs especs de poissons ; I'envahissement des eaux du Canada et de Tcrreneuve par les americains, cause de tant d'embarras et de friction de part et d'autre ; voila autant d'exemples de cette soif, de cette avidite du gain qui ne regarde que I'heure presente, sans s'occuper autrement des interets de ceux qui nous suivront. Cependant, tous ces malheurs qui resultent d'une exploitation a jOutrance ne sont, pour ainsi dire, rien si on les compare a la destruc- tion des forets americaines. Voila bien le mal qui, dans I'avenir, seta pour les Etats-Unis I'abomination de la desolation. DANGER POUR NOUS Ces tendances economiques capables produire tant de mal aux Etats-Unis si on n'y apporte pas remede, se rencontrent aussi chez nous. Aux pouvoirs publics de ne pas permettre que,, par egoisme ou au profit d'une classc de citoyens en particulier, on detruise la plus importante de nos richesses naturelles, celle que la Providence a pris des siecles a accumuler pour notre peuple. Deux dangers economiques menacent maintenant le Canada. L'un est la destruction irreflechie, par ses propres habitants, des forets qui regularisent et assurent la valeur de nos pouvoirs hydrauliques, tout en garantissant a I'agriculture la quantite de pluie necessaire aux moissons. L'autre est la diminution de nos forets d'epinette, de sapin, de peuplier et autres essences exportees a I'heure actuelle pour alimenter les usines americaines dont les approvisionnements locaux sont epuises. LE CAS DE QUEBEC. II est deplorable de voir nos forets traitees avec si peu de discerne- ment, et cela par nos propres mains. ]\Iais il est encore plus regret- table de nous voir inviter les etrangers a venir nous aider a detruire riieritage que nous devrions conserver pour nos enfants. Et meme si cette politique n'aflfectait que la generation actuelle, que les annees presentes, elle manquerait encore absolument de sagesse, et voici pourquoi : 13 La valeur d'une corde de bois de pulpe (epinette) expediee des Cantons de I'Est aux Etats-Unis etait, il y a quatre ans, de $3.50. En, 1907, elle etait montee a 6 ou 7 piastres pour le bois brut a 8 ou 10 piastres pour le bois ecorce. C'est le plus haut prix qui ait jamais ete paye dans la province ; et c'est en meme temps un signe certain de la gene qui regne aux Etats-Unis. Pour avoir la somme totale que rapporte a la province chaque corde de bois exporte, il faut ajouter au prix de vente celui du transport, 3 piastres ; soit en tout, environ 10 piastres. Maintenant chaque corde de bois donne 1850 livres, environ une tonne de pulpe mecanique, laquelle vaut 20 piastres ; si on en faisait une tonne de papier a journal, elle vaudrait 50 piastres; sa valeur atteindrait de 50 a 100 piastres, si on en faisait du papier fin. Appliquons ces calculs a la quantite de bois exportee aux Etats-Unis. En supposant exacts les rapports officiels des neuf derniers mois, on arrive a la conclusion qu'avec ce bois exporte le Canada pourrait fabriquer un produit d'une valeur de 30,000,000 de piastres. Ces calculs ne tiennent aucun compte des avantages que les cihemins de fer et la population en general retireraient de cette In- dustrie. De tous les tarifs de fret, celui du bois de pulpe est le plus bas, au Canada et aux Etats-Unis ; celui de la , pulpe et du papier est dix fois plus eleve. Par consequent, comme la creation d'une grande nidustrie de papier suppose un commerce intense de machineries, de marchandises et d'appareils de toute sorte, elle aurait pour effet de decupler, de centupler, de ce chef seul, I'intensite du trafic. Cctte grande Industrie abaisserait encore le prix des jourriaux canadiens. Elle permettrait I'etablissement d'industries connexes, nouvelles pour notre pays, dans lesquelles on emploie le papier: Hbrairie de luxe, boites en carton, ustensiles divers fabriques avec de !a pulpe ou du papier, comme cela se fait dans tous les pays grands producteurs de papier. Et ces industries rapporteraient des millions de piastres. Ajoutons cependant que cela devrait se faire en surveillant de tres pres I'exploitation de nos forets, del fagon a leur conserver indefiniment leur valeur. La France, I'Autriche, etc., grace a I'exploitation raisonne de leurs bois, ont pu reboiser les parties epuisees et, en meme temps, conserver leurs reserves, et les revenus qu'en retirent maintenant ces pays accroissent plutot la fortune publique que celle des exploiteurs particuliers. Le resultat economique de la prohibition de I'exportation du bois de pulpe canadien pent etre encore deduit de ce qui s'est passe entre les marchands de bois d'Ontario et ceux du Michigan. Lorsque les marchands de bois du Michigan virent leur provision de bois a peu pres epuisee chez eux, ils acheterent des limites dans Ontarip et f^otterent leurs billots a travers la Bale Georgienne et la lac Huron jusqua'a leurs moulins du Michigan. Le resultat fut que I'industrie du bois continua a fleurir dans cet Etat, pendant qu'elle languissait dans Ontario. Ce fut dans ces circonstances que le gouvernement de cette derniere province defendit I'exportation du bois non travaille. On vit alors les proprietaires des moulins americains, apres avoir pretendu qu'ils ne dependaient en aucune fa<;on des bois d'Ontario pour alimenter leur industrie, transporter leurs scienes dans leurs limites M d'Ontario; depuis lors, I'industrie du bois est en pleine prosperite dans cette province, et retablissement des moulins americains a cause un developpeHiCnt notable au commerce general, en dehors du com- merce de bois lui-meme. QUE FAIRE? En terminant, qu'on me permette de dire ce qui devrait etre fait pour conserver a notre patrie sa richesse nationale. D'abord, defense d'expoTter le bois de p'alpe ou n'importe quel bois non travaille ; en- suite creatijn de res'^rves forestieres aux sources des rivieres, surtout de celles qui peuvent tournir des pouvoirs hydrauliques utilisables ; enfin reboisement systematic je des terres plus propres a donner des recoltes de bois que des recoltes de cereales. II ne manque pas dans le pays de vastes etendues de terre qui, etant donnee la valeur economique toujours croissante du bois, paieraient mieux en forets qu'en lots cultives, J'ai cite ici le fait de la puipe et du papier simplement comme exemple, afin de demontrer I'avantage qu'il y aurait, au point de vue •industriel, a empecher I'exportation du bois de pulpe; Mais la crea- tion de cette grande industrie canadienne ne serait, a vrai dire, qu'un incident dans cette politique nationale dont le but principal est la con- servation de nos richesses naturelles. Lorsque nos forets auront ete devastees, nos forces hydrauliques compromises, nos regions agricoles soumises a des alternatives de secheresse excessive et de pluies tor- rentielles, nos principales industries actuelles, I'elevage et les produits de laiterie, declineront necessairement a leur tour. Alors nos terres si fertiles seront remplacees par des surfaces arides et steriles, tout comme on en trouve en Espagne, en Mesopotamie et en plusieurs endroits des Etats-Unis. Peu importe I'avantage momentane qu'un petit nombre d'interets prives peuvent retirer de I'exportation du bois de pulpe ; nous n'avons ' pas le droit de compromettre pour cela la fortune de nos enfants ou de rliiner notre patrie, car c'est bien la que conduira tot ou tard la destruc- tion de nos forets. Celui qui etudiera a tete reposee et sans parti pris I'histoire des forets dans les autres pays, en arrivera necessairement a la conclusion, qu'au point de vue materiel, la question forestiere est une question de vie ou de mort pour I'avenir du Dominion. Quel est le canadien dignc de ce nom qui, afin de jouir pendant sa courte vie d'un revenu grossi de quelques piastres, consentirait a leguer a ses enf?nts une terre sans valeur ou, du moins, considerablement appauvrie? APPENDICE D'apres le "Pulp and Paper Magazine," la premiere fabrique de pulpe au Canada a ete ouverte par M. Jackson en aout 1800, a Jacques- Cartier, Quebec. Elle a fonctionne jusqu'en 1857. La seconde fut erigee a St-Andr^, Quebec, en 1803, justement I'annee ou la machine Foudrinier, qui devait revolutionner la fabrique du papier, fut introduite en Angleterre. D'apres le recensement de 1851, le Haut et le Bas-Canada comptaient alors chacun cinq de ces fabriques. Le recensement de 1871 donnait douze fabriques dans Ontario, sept dans Quebec, une dans la Nouvelle-Ecosse et une autre au Nouveau-Brunswick Celui de 1881 comptait trente-six fabriques de papier et cinq de pulpe pour tout le pays. Le tableau suivant nous fait voir le progres subsequent de cette Industrie. Les chifTres en sont tires du "Pulp and Paper Handbook of Canada." Usines a pulpe. Annees. N ombre d'usines. Capacite par 24heurs. 1888 34 154 tonnes. 1892 37 312 1899 39 1,145 1907 58 2,361 En 1899, les usines de pulpe chimique pouvaient produire environ 500 tonnes de pulpe par 24 heures ; elles ne donnaient que 550 tonnes en 1907. Par consequent, le developpement s'est produit a peu pres exclusivement dans la pulpe mecanique. Usines a papier. Annees, Nombre d'usines. Capacite par 24 heurs. 1888 40 173 tonnes. 1892 38 209 1899 33 328 1907 46 966 " La fabrication de la pulpe de bois a commence serieusement au Canada dans la decade de 1880 a 1890. Actuellement, la capacite de production annuelle est d'environ 700,000 tonnes de pulpe et 290,000 tonnes de papier. En 1890, les Rapports du commerce et de la naviga- tion du Canada donnent 168,180 piastres comme valeur de I'exportation totale de pulpe. Cette somme se {.'-irtage comme suit: $840 pour la Grande-Bretagne, $147,098 pour les Etats-Unis et $20,622 pour les autres pays. En 1897, I'exportation totale etait de $741,959; 164,138 a la Grande-Bretagne et 576,720 aux Etats-Unis. Pendant neuf mois de la derniere annee fiscale, c'est-a-dire, de juillet 1906 a mars 1007, I'exportation de pulpe a ete de $2,984,945 ; dont $558,600 a la Grande- Bretagne et $2,397,448 aux Etats-Unis; le reste a ete expedie en France, au Mexique, au Japon, aux Antilles et en Italic. Les exportations du papier canadien, pendant le meme laps de temps ont ete de $1,657,740. plus $20,412 de papier a tenture. La Grande-Bretagne en a importe la plus large part, soit $020,272 ; TAustralie vient ensuite avec $333,326, puis la Nouvelle-Zelande, $139,687 et enfin les Etats-Unis $109,273. On constate done, pour les i6 dernieres annees, une augmentation tres marquee de ce commerce ; Texportation pour toute I'annee 1903 n'a teignaii pas le chiffre de $900,000, y compris le papier a tenture. L. C. Glen, de I'universite Vanderbilt, d!t dans un rapport de la Commission geologique de la Caroline du nord: "J'ai parcouru presque tout le sud, etudiant le regime des riviere". Presque toutes, grandes ou petites, se remplissent de gravier ou de sable. Les chaussees sont deLruites et des barres se forment qui sont tres nuisihles au commerce. La grande riviere Ohio elle-meme est serieusement affectee. Le gouvernement depense chaque anr ee des millions pour creuser tons ces chenaux, mais cet ouvrage es*. en parti perdu ; le sable et la terre descend du flanc des montagnes plus vite que les dragues ne I'enlevent. La cause en est au deboisement des Appalaches. Le resultat, directement ressenti par les navigateurs, les marchands de bois et ceux qui utilisent les forces hydrauliques, atteint aussi, indirectement, les actionnaires des compagnies d'exploitation et ceux qui utilisent les produits du sud, ou qu'ils se trouvent. Le seul remede est la prise de possession des forets par le Gouvernement, afin de controler les sources des rivieres. Theophilus Parson, le representant des interets manufacturiers de la Nouvelle-Angleterre, dit de son cote: "Les usines de la Nouvelle- Angleterre dependent dans une large mesure des pouvoirs hydrauliques. Or le debit des rivieres devient chaque annee plus incertain, les inondations, les secheresses sont plus frequentes, C'est I'abondance ou la disetce. Cet etat de chose est le resultat du deboise- ment exagere aux sources des rivieres de la Nouvelle-Angleterre. Gifford Pinchot, forestier en chef du governement americain, apres un tour d'inspection de plus de 5,000 milles dans les divers Etats, disait aux reporters, a son retour a Washington : "Dans vingt ans, si on continue a couper comme on le fait maintenant, la provision de bois sera epuisee aux Etats-Unis, les reserves du Gouvernement et les proprietes privees y auront passe. Peut-etre, tout au plus, la croissance annuelle pendant ces vingt ans pourra-t-elle retarder de cinq ans cette famine de bois." Pour donner plus de force a cet avertissement. M. Pinchot declare solennellement que le danger de la situation actuelle doit etre envisage dans toute sa realite. "Aux Etats- Unis. dit-il, on emploie plus de bois que dans n'importe quel autre pays du monde, et, par consequent, tous les habitants, hommes, femmes et enfants, ressentiront le contre-coup de cet etat de chose." Cet avertissement d'un savant expert s'adresse aussi bien aux canadiens qu'aux americain?, car. apres tout, en 1905, on evaluait encore la superficie des forets americaines a 500,000,000 d'acres. 3734)ti.';o f^,- V