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Présentée to the

LIBRARY ofthe

UNIVERSITY OF TORONTO

by HENRI PILON

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University of Ottawa

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RÉCOMPENSES

HEBDOMADAIRES ET MENSUELLES.

DEUXIÈME ANNÉE.

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RÉCOMPENSES

HEBDOMADAIRES ET MENSUELLES,

LECTURES

MORALES , INSTRUCTIVES ET AMUSANTES

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AUX ECOLES CHRÉTIENNES.

DEUXIÈME ANNÉE.

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CHEZ l'éditeur, BEAU J", IMPRIMEUR, Rus Satory, 28.

PROPRIÉTÉ.

SOMMAIRE.

I. Religion et Morale. Le Vendredi -Saint à Jé- rusalem. — Le duc de Brabant. IL Education. La vanité. L'Oie et le Serpent.

III. Histoire. Ruines de Jérusalem (Fin).

IV. Personnages célèbres. Le Père Brydaine.

Un petit Martyr.

V. Morceaux littéraires. Mort du Sauveur.

VI. Histoire naturelle. Le camphre. VIL Hygiène. Convulsions.

VIII. Industrie. Du gantier. IX. Variétés. Un homme exemplaire. X. Proverbes et Maximes. Charade.

I. Religion et Morale.

LE VEUDREDI-SÂmT A JERUSALEM.

Le Vendredi-Saint, l'office du matin se fit au Calvaire avec les cérémonies les plus tou- chantes par les révérends Pères franciscains, et j "y assistai. Vers neuf heures, de grands cris venant des environs de l'église interrom- pirent tout à coup les prières ; le tumulte allait croissant ; nous en reconnûmes bientôt la cause : il y avait une lutte violente entre les Arméniens et les Grecs. Impatients d'at- tendre, les uns et les autres demandaient avec une sorte de fureur qu'enfin la porte s'ouvrît, et se poussant, se heurtant, criant, ils s'efforçaient réciproquement d'écarter les opposants pour entrer les premiers. Quelques minutes après, nous apprenons , non sans effroi, que la force ou la trahison a ouvert la porte, et que, comme un torrent qui a brisé sa digue, la foule pénètre de toutes parts. « Grand Dieu ! et le très-saint Sacrement ! »

s'écrie alors le P. Perpétue, secrétaire di Terre-Sainte, qui était à côté de moi. A ces mots je m'élance au bas du Calvaire, je tra- verse avec beaucoup de peine les flots de la multitude, et je me précipite dans le saint sé- pulcre, décidé à perdre la vie plutôt que de souffrir une profanation sacrilège. Je me trouvais seul; heureusement la garde turque parvint à contenir les plus obstinés, et, par une résistance énergique, donna le temps d'achever les cérémonies saintes. Le très- saint Sacrement fut reporté processionnelle- ment à l'église des Pères franciscains, et les sanctuaires ne furent livrés aux Grecs que lorsque tous les catholiques se furent retirés.

A diner, toute la communauté, le père gar- dien en tête, mangea à genoux ; on ne servit que du pain, de l'eau et quelques feuilles de salade.

A trois heures et demie, les Pères allèrent à l'office des Ténèbres comme les deux jours précédents. C'était la dernière fois que je de- vais entendre, à Jérusalem, la voix du pro- phète d'Anathoth, et cette idée me rendit encore plus sensible la vivacité et la tendresse de ses plaintes.

Afin de graver plus profondément dans Les

ils le souvenir de la passion et de la mort du Sauveur, et d'exciter plus fortement d les cœurs les sentiments de componction, de □naissance et d'amour qu'elle doit pro- duire, les Pères font, le Vendredi-Saint de chaque année, une cérémonie tout à fait con- forme au génie des Orientaux, et dont on ne trouve d'exemples que dans les missions d'Asie, qui probablement. l'ont empruntée de ce qui se pratique en Palestine.

Au. moyen d'une figure en relief de gros- seur et de gfandeur naturelles, dont la tête, les bras et les pieds sont flexibles et se prêtent aux divers mouvements qu'on veut lui impri- mer, ils représentent le crucifiement, la cl s- cente de croix et la sépulture de Jésus-Christ, de manière à en rendre sensibles el frappantes toutes les circonstances principales.

Cette cérémonie, à la fois touchante et ter- rible, eut lieu sur le déclin du jour, au milieu d'une multitude immense d'hommes, de fem- mes, d'enfants, attirés, les uns par une piété sincère, les autres par une curiosité toute profane.

Les Pères de Terre-Sainte , réunis dans la

8 chapelle de la Sainte-Vierge, en sortirent vers six heures, ayant à leur tête celui d'entre eux qui, escorté des jeunes Arabes du monastère, portait le grand crucifix. Les religieux et les fidèles, marchant lentement, sur deux lignes, un flambeau à la main, récitaient, sur un ton aigu et plaintif, tantôt le Miserere, tantôt le Stabal .

La procession s'arrêta d'abord à l'autel de la Division des Vêtements, ensuite à celui de ïlmpropere, pour y entendre quelques paro- les simples, mais pleines d'onction, que lui adressa un Père espagnol sur les scènes dou- loureuses de la passion que rappellent ces deux endroits. Puis elle continua sa marche sans interruption vers le sommet du Golgotha.

Là, le religieux qui portait le crucifix le dé- posa respectueusement au pied de l'autel, et le Père espagnol, revenant à son discours, poursuivit, en présence de la multitude atten- drie et fondant en pleurs, le lamentable récit des souffrances et des ignominies du Sauveur, jusqu'au moment il fut mis en croix.

En cet instant il cessa de parler, et l'image de Jésus ayant été attachée avec des clous sur le bois, ce crucifix fut élevé et posé à la place

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même avait été enfoncée la véritable croix sur laquelle fut consommé le salut du genre humain. Le bon Père alors, d'une voix inter- rompue et presque étouffée par les gémisse- ments, retraça les dernières paroles et les der- niers moments de l'auguste victime s 'immolant encelieupour expiernos péchés et nous récon- cilier avec son Père. Mais il devenait de plus en plus difficile de l'entendre : la foule, déjà violemment remuée par ce qui avait précédé, n'était plus attentive qu'à ce qu'elle voyait, et les paroles arrivaient à peine à elle au mi- lieu des cris, des sanglots, des soupirs et des larmes.

Après un quart d'heure accordé à la dou- leur pour lui donner le temps de se soulager en s'exhalant, un des Pères , muni d'une tenaille et d'un marteau, monta à la hauteur de la croix, enleva la couronne d'épines, 'et tandis que des frères soutenaient le corps au moyen d'écharpes blanches passées autour des bras, il arracha les clous des mains et des pieds, et bientôt l'effigie du Christ fut descen- due à peu près de la même manière qu'avait été descendu le Christ lui-même.

Le célébrant, et successivement tous les re-

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10 ligieux, s'avancèrent en silence, se proster- nèrent et baisèrent avec respect la couronne d bs clous, qui furent immédiatement pré- sentés à la vénération de la multitude.

Bientôt la procession se remit en marche dans le même ordre qu'elle avait suivi pour monter au Calvaire. La couronne et les clous étaient portés dans un bassin d'argent par un religieux, et l'effigie par quatre autres, delà même manière que l'on porte un mort au tombeau. On s'arrêta à la pierre de l'Onction, pour imiter en cet endroit la pieuse action de Joseph d'Arimathie, de Nicodème et dessaintes femmes. Toutes les choses nécefsaires avaient été préparées; la pierre était recouverte d'un linge blanc très-fin; sur les coins étaient les vases de parfum. Le corps, enveloppé d'un suaire, y fut déposé, la tète appuyée sur un coussin. Le célébrant l'arrosa d'essence, et a- près avoir prié quelques instants en silence, exposa, dans une courte exhortation, le motif de cette station. De là, on reprit le chemin de l'église; la sainte etfigie fut placée sur le marbre du saint sépulcre, et un dernier dis- cours mit fin à la cérémonie. »

R. P. deGERAMB.

Il

LE DUC DE BRABANT.

Dans le courant de janvier, à Nanmr (Bel- gique), tandis qu'un ouragan de neige glacée tourbillonnait dans les rues et sur les places publiques, un jeune homme enveloppé dans les amples plis d'un manteau qui le garantis- sait à peine de l'âpre tourmente, débouchait de la place des Palais sur la place Royale. -Des rafales de neige glaeée, poussées par un vent nord-est des plus violents, aveuglaient les rares passants qui marchaient d'un pas rapide. En ce moment, une femme d'un extérieur modeste, tenant dans ses bras un enfant qu'elle s'effor- çait en vain de couvrir d'un maigre petit schall, coudoya, aveuglée par la neige, le jeune hom- me au manteau. Celui-ci s'arrêta un moment, et jetant les yeux sur la pauvre robe d'in- dienne et le schall léger de cette femme, il lui lit d'une voix pleine de sQÏlicitude :

Vous devez avoir bien froid, Madame, sous ce léger costume?

Hélas! Monsieur, répondit -elle, l'hi- ver est cruel, et nous sommes obligés de choi- sir souvent entre le froid et la faim , et le

12 Mont-de-piété nous donne à peine de quoi acheter le pain de; nos enfants. »

Une larme roula dans les yeux du jeune homme. Il interrogea la femme et apprit d'elle que son mari, excellent ouvrier décorateur, était depuis deux mois sans ouvrage; toutes les économies du ménage avaient été dé- pensées. Puis on s'en était pris aux vête- ments les plus confortables, les plus chauds, et en ce moment la pauvre mère portait au mont-de-piété de la rue des Capucins sa der- nière robe.

L'étranger échangea encore avec elle quel- ques paroles, à la suite desquelles tous deux s'acheminèrent vers la montagne de la Cour et entrèrent dans un magasin d'habillements. Quelques minutes après, la femme en res- sortait couverte d'un bon et ample man- teau de drap, l'enfant était enveloppé dans un schall chaud et épais, et la mère remerciait avec larmes le jeune homme, lequel ve- nait de donner sa bourse à l'enfant qui lui souriait. Mais l'étranger, après avoir ramené sur sa figure les plis de son manteau, s'était éloigné rapidement en laissant la pauvre mère confondue de joie et d'étonnement. Un ou-

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vrier qui avait suivi du regard toute la scène s'approcha et lui dit :

Eh bien, vous venez d'avoir une fa- meuse chance, hein ! un bon manteau pour les épaules et des pièces d'or pour faire dé- geler la marmite !

Ah ! dit-elle, je donnerais beaucoup pour- savoir le nom de ce brave jeune homme.

Quoi! dit l'ouvrier, vous ne l'avez pas reconnu ?

Vous le connaissez donc, vous? alors, je vous prie ! dites-moi à qui je dois la vie de mon mari et celle de mon enfant !

—Eh ! dit l'ouvrier, c'était le duc de Bra- bant ; je l'avais vu sortir du palais, et je l'ai reconnu pendant qu'il avait ôté son manteau de sa figure pour vous parler. »

4§&— II. Éducation.

LA VANITE.

Rien de plus ridicule que de se louer soi- même. L'homme sage et judicieux ne tombera

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pas dans cette fatuité. Celui qui a du mérite n'en parle pas ; il laisse aux autres le soin de le publier. Qu'un autre vous loue, dit Salomon, et non votre bouche.

Celui qui pense qu'il est sage ne le sera pas longtemps; s'il le dit, il ne l'est déjà plus; peut-être même ne l'a-t-il jamais été. On perd oujoursà se louer; et l'on persuade ordinai- rement le contraire de ce qu'on se propose.

Un jeune homme se vantait d'avoir appris en peu de temps beaucoup de choses, et d'a- voir dépensé mille écus pour payer ses maîtres. Quelqu'un de ceux qui étaient pré- sents lui dit : « Si vous trouvez cent écus de tout ce que vous avez appris, je vous conseille de les prendre sans hésiter. »

Le plus grand plaisir qu'on puisse faire aux personnes vaines n'est pas de les louer, c'est de les écouter paisiblement se louer elles- mêmes. Pour être applaudi, il ne faut pas s'applaudir soi-même. Le vrai moyen de n'a- voir l'approbation de personne, c'est de la mendier par nos paroles ou par nos regards.

Evitez donc avec soin, mes enfants, de parler de vous-mêmes : et lorsque la politesse des autres vous force de répéter quelque évé^

15 uement dont le détail vous fait honneur. soyez courts, surtout parlez-en avec un ! ex* trème modestie.

L OIE ET LE SERPENT.

Sur le bord d'un étang se promenait une oie, Et dai's pa vanité (quelle bête ici-bas

M on a pas ?) Elle disait : « Que de sujets de joie ! Je marche, nagp, vole, et je puis, à mon gré,

Habiter l'air, la terre et l'onde ! E-t-,1 oiseau dans ce monde

Qui puisse m'êire comparé? »

l'a vieux serpent du voisinage

Rabattit ainsi son caquet: « Pour te vaincre à la course i! suffit d'un roquet, D'un roitelet au vol, d'un goujon à la nage ;

Rappelle toi>, sot animal, Que c'est ne rien savoir que de savoir tout mal. » [Magasin de l'Enfance chrétienne.)

III. Slisîoâre.

RUINE DE JÉRUSALEM. [Fin.)

Les Juifs continuaient de se défendre avec une nouvelle fureur, en sorte que le général

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romain fut obligé d'employer tout Tari des siè- ges pour réduire Jérusalem. Il fit élever, pour attaquer la citadelle, quatre terrasses avec quatre machines éuormes pour battre les murs; mais comme on se disposait à les faire jouer, deux s'écroulèrent embrasées, les factieux les avaient minées, et avaient ensuite mis le feu au bois qui les étayait; en même temps ils firent une sortie, ruinèrent les deux autres terrasses, brûlèrent les machines, et repous- sèrent les Romains jusque dans leur camp. Le travail eût été infini pour réparer tant de dégât, le général alors prit le parti d'investir par un mur de deux lieues de circuit ce qui restait de ville aux Juifs, accomplissant, sans le savoir, la prédiction du Sauveur dans toutes ses circonstances.

Après cette circonvallation, la famine de- vint affreuse, et Jérusalem présenta l'image de l'enfer. On voyait par troupes, sur les pla- ces publiques, des gens enflés et défigurés se traîner comme autant de fantômes, puis tom- ber tout à coup. Les rues ainsi que les maisons regorgeaint de morts. On entreprit d'abord de les enterrer, et, par une seule porte de la ville, on enleva, dans l'espace de deuxlnois

17 et demi, cent seize mille cadavres de pauvres seulement; mais après cela, on n'eut plus le courage d'inhumer personne, en sorte que Pair fut corrompu à un tel point que le vent en porta l'infection jusqu'au camp de Tite qui leva les yeux au ciel eu soupirant, et prenant Dieu à témoin que ce peuple intraitable ne devait imputer qu\à lui-même l'excès de ses calamités.

Les séditieux se montraient insensibles et cruels. Ils essayaient leurs épées sur les mal- heureux qui venaient d'expirer, et quelque- fois sur ceux qui respiraient encore. La plu- part de ceux qui pouvaient échapper passaient au camp des Romains ; là, ils trouvaient une nourriture abondante, mais ne pouvant plus digérer ils périssaient aussitôt. Plusieurs de ces transfuges, dans la crainte d'être volés, avaient avalé, en désertant, quelques pièces d'or, débris de leur fortune; des soldats de l'armée romaine les virent retirer cet or de leurs excréments ; aussitôt le bruit se répan- dit que tous les Juifs qui sortaient de Jérusa- lem avaient les entrailles pleines d'or, ce qui excita tellement la cupidité des soldats, qu'ils leur ouvrirent le ventre. Dans une seule nuit

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18 deux mille périrent ainsi. Tiie fit publier les plus terribles peines contre ceux qui com- mettraient désormais de semblables atrocités,, elles ne laissèrent pas de continuer., mais se- crètement.

Ennuyée de la longueur du siège, l'armée commençait à se mutiner. Le général fut obligé d'attaquer derechef à force ouverte. On prépara de nouvelles terrasses et de nouvelle- machines. L'entreprise offrait un obstacle insurmontable. On en vint à bout malgré les difficultés et les sorties des assiégés , qui étaient terribles. On fit jouer le bélier, le mur ébranlé s'écroula, et les Romains se rendirent maîtres de toute la ville basse.

Cependant la famine devenait de plus en plus générale. Elle se faisait sentir aux fac- tieux même, lis couraient, comme des loups affamés, sur la moindre apparence de nourri- ture, pour forcer l'entrée des maisons. Tout leur manquant à la fin, ils mangeaient le cuir de leurs ceintures et de leurs boucliers. Des ronces, des orties, des restes foulés de vieux foin étaient des mets recherchés!...

Une femme d'une naissance et d'un rang distingués était venue dans la ville sainte

19 pour célébivr la Pàque. Les séditieux lui ciirent bientôt enlevé tout ce qu'elle avait apporté, sans lui laisser la moindre chose pour se nourrir, elle, et un jeune enfant qu'elle allaitait . Dans le désespoir ils la réduisi- rent, elli- les accabla d'injures, ne cherchant qu'à tes mettre en fureur pour se faire égor- ger. N'y ayant pu réussir, elle se retira avec son enùnt, fixa un instant les yeux sur cet innocent. « Mal h* ureux, lui dit-elle, à quoi te réservé-je ? à souffrir mille horreurs avant d'expirer, ou à subir un indigne esclavage ! » Puis, elle l'égorgé, le fait rôtir, en mange la moitié, et serre le reste. Bientôt l'odeur eut attiré les factieux qui lui mettent l'épée sous la gorge en lui demandant ce qu'elle a caché. « Je vous en ai gardé une bonne part, leur dit-elle, voyez et mangez. » A l'aspect des gestes encore fumants de son horrible festin, glacés d'épouvanle, ils demeurèrent immobi- les. « C'est mon enfant, reprit-elle, c'est moi qui l'ai tué, vous en pouvez bien manger après sa mère. » Ils s'éloignèrent en frisson- nant. Les Romains eurent tant d'horreur de ce forfait, qu'ils résolurent d'exterminer une nation qui engendrait de tels monstres.

20 Il restait aux Juifs le Temple et la ville haute. Ils s'aveuglaient par la confiance qu'ils avaient dans la solidité et dans la hauteur extraordinaire des murs du Temple, et dans les bâtiments immenses et également forts qui l'accompagnaient. Les assiégés ne purent en effet escalader les murs, ni les ébranler avec le bélier. Tite se vit donc contraint de mettre le feu aux portes de la seconde enceinte du Temple, ordonnant néanmoins de conser- ver le corps de l'édifice. Les flammes gagnè- rent les galeries qui brûlèrent une partie du jour et la nuit entière. Les assiégés qui mon- taient à l'assaut étaient chargés avec une fu- rie qui n'avait pas d'exemple, impossible de résister. Alors un soldat romain ne se pos- sédant plus, et par une impulsion surnatu- relle, saisit un tison du feu qui embrasait l'enceinte extérieure; puis, se faisant soule- ver par ses compagnons d'armes, il le jeta par une fenêtre des appartements qui tenaient au Temple. Le feu prit partout avec une ra- pidité qui parut extraordinaire. Les Juifs, en voyant brûler les sacrés parvis, demeu- raient immobiles comme des statues. Tite ac- courut pour donner des ordres et faire arrê-

21 ter l'incendie , mais il ne put se faire obéir. Ainsi, ce fameux Temple, objet de la véné- ration et de l'admiration de tous les peuples, en exécution des décrets du Tout-Puissant, malgré les vaincus et les vainqueurs, fut ré- duit en cendres le même mois, le môme jour que le premier Temple bâti par Salomon, c'est-à-dire le 10 d'août de l'an 70 de Jésus- Christ.

Tous ceux qui s'y étaient réfugiés furent massacrés, sans distinction de rang, d'âge ni de sexe ; des monceaux de cadavres entassés autour de l'autel en égalaient la hauteur, le pavé ne paraissait nulle part sous l'affreux amas de sang et de carnage.

Les chefs des séditieux, s'étant fait jour l'épée à la main, se retirèrent dans la ville haute située sur la montagne escarpée de Sion, ils continuèrent de se défendre. Le Romain irrité fit brûler toute la ville basse, et mit la ville haute en état de siège. Elle fut bientôt forcée; tout fut mis à feu et à sang. Tite fit raser les édifices que la flamme avait épargnés, et, afin de ne plus laisser pierre sur pierre dans ce lieu d'anathème, il y fit passer la charrue.

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On trouva dans les égouts souterrains les corps d'environ deux raille personnes mort '.s de misère, ou qui s'étaient égorgées les unes les autres plutôt que de se soumettre aux vain- queurs. Il est impossible de déterminer au juste le nombre de Juifs qui périrent dans cette guerre, la plus meurtrière que jamais nation ait essuyée. On compte onze cent mille morts dans le cours du siège. En y ajoutant ceux qui périrent dans les autres places de la Palestine, le nombre en dépasse 1,337,000, sans ceux qu'il fut impossible de compter. Il yen eut 97,000 réduits en esclavage.

Tel fut, mes enfants, l'accomplissement de la prophétie de Notre-Seigneur, lorsque 40 ans auparavant, jetant sur cette ville un regard de compassion et pleurant sur elle, il disait : « Des jours malheureux viendront , tes ennemis t'environneront de tranchées, ils t'enfermeront et te serreront de toutes parts. Ils raseront tes maisons, extermineront!:-, habitants et ne te laisseront pas pierre sur pierre, parce que tu as méconnu le temps tu as été visitée. »

23 - 5V. I*Oi\«!»o3BSflttg4»js célèbres.

LE TKRE WtYDAïNE.

Le P. Brydaine , célèbre prédicateur fran- çais, naquit à Chusclam (Gard), le 21 mars 1701. À peine revêtu des premiers ordres, il fut envoyé à Aiguës-Mortes pour y prê- cher le carême. Le mercredi des cendres, ayant attendu vainement des auditeurs, il sortit de l'église couvert d'un surplis et par- courut les rues en agitant une clochette. A ce spectacle et à ce bruit inaccoutumé, la fouit s'amasse et sait le missionnaire jusque dans le temple. Brydaine alors monte en chaire , entonne un cantique sur la mort, et para- phrase ce terrible sujet avec une énergie qui remue profondément l'auditoire et le frappe d'admiration et d'effroi.

Doué d'une imagination hardie, et d'une voix puissante qui pouvait se faire entendre en plein air par plus de dix mille personnes, s'abandonnant aux inspirations du moment, ne reculant jamais devant l'étrangeté d'une image, la hardiesse d'une expression, la bi- zarrerie des contrastes, Brydaine atteignit aux

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plus grands effets de l'éloquence, et fut le type le plus accompli de l'orateur populaire; prêchant souvent en plein air, à l'exemple des premiers Apôtres, dominant comme eux la multitude, et ne négligeant aucun secours qu'il pouvait tirer du jour, du lieu, de l'heure, du rang et de l'esprit de ses auditeurs.

Voici un des traits de l'éloquence particu- lière du P. Bry daine, tiré d'un de ses sermons :

« Savez- vous ce que c'est que l'éternité? C'est une pendule dont le balancier dit et re- dit sans cesse ces deux mots seulement dans le silence des tombeaux : Toujours, jamais f jamais, toujours! et toujours, pendant ces effroyables révolutions, un réprouvé s'écrie : Quelle heure est-il? et la voix d'un autre misérable lui répond : L'éternité t a

UN PETIT MARTYR.

Le journal américain Daily Argus raconte le fait suivant, que le tribunal de Madisson a

eu à juger.

Un jeune garçon de neuf ans, gentil comme un chérubin, à la blonde chevelure et aux yeux bleus, retiré de l'hospice des orphelins de Milwankee, avait été confié à un fermier

de Marquette, membre de la secte des baptis- tes, qui le regardait comme son fils.

Quelque temps après son installation dans sa nouvelle famille, le petit garçon divulgua une faute grave qui avait été commise par la fermière. Celle-ci repoussa l'accusation avec énergie, et son indignation fut telle que le mari resta persuadé que sa femme avait été calomniée. Elle insista auprès de son mari pour que l'enfant fût fouetté jusqu'à ce qu'il eût rétracté ce qu'il avait dit; et le mari, s'é- tant armé d'un martinet de cordes, suspendit l'enfant à une poutrelle de la chambre et le fouetta pendant près de deux heures jusqu'à ce que le sang ruisselât sur le sol.

Il s'arrêta alors et demanda à l'enfant s'il persistait dans ce qu'il avait dit. « Papa, ré- pondit l'enfant, j'ai dit la vérité, et je ne me rétracterai pas pour dire un mensonge. »

La femme insista de nouveau auprès de son mari pour qu'il continuât ce qu'elle appelait « son devoir, » et les coups recommencèrent jusqu'à ce que le pauvre petit tombât presque inanimé dans les bras de son bourreau, à qui il dit, en passant ses bras autour de son cou et en l'embrassant : « Papa.. . je me meurs... » et il expira.

26 Les débats ont démontré que cet enfant avait eu raison d'accuser la femme du fermier, et qu'il avait préféré les tortifres et la mort au mensonge qui aurait pu le sauver.

Slorceaux littéraire».

MORT DU SAUVEUR.

.fours de calamités, ô remords éternels,

Comme un vil imposteur entre deux criminels,

Sur la honteuse croix les Hébreux retendirent,

Et du sans de Jésus les flots se répandirent.

La tache de ce sang sur ce front s'imprimi,

Dès lors, des nations la guerre s'alluma ;

Et toutes rejetant cette race perfide,

Pour elle ont inventé le nom de déicide.

A peine d'Israël le crime est accompli,

Que la foudre a grondé, la terre a tressailli;

Avant' l'heure du soir de profondes ténèbres

Couvrent de Josaphat les monuments funèbres;

Les gardiens du supplice, alors saisis d'effroi,

Proclament le Messie et confessent la foi,

Et soudain abjurant leur fureur insensée,

Adorent à genoux la croix qu'ils ont dressée.

Tout s'émeut, chaque objet emprunte un sentiment.

Pour dire à l'Univers le saint événement.

Le temple sent mouvoir sa base de porphyre,

Du dôme jusqu'au pied son voile se déchire;

Les vents impétueux, se croisant dans les airs,

Font voler vers Sion la poudre des déserts;

Les nuages surpris s'arrêtent dans leur course,

Le fleuve épouvanté remonte vers sa souroe,

De leurs linceuls vieillis écartant les lambeaux,

Les morts ressuscites sortent de leurs tombeaux:

Le soleil s'obscurcit, les mantagae&fie fendent,

D'eux-mêmes dam l'enfer [es tourments se suspendent.

Les démons à leur tour connaissent la téireur ;

Sur son trône ébranlé, Satan, plein de fureur,

Du serpent favori voit la (été écrasée;

La chaîne de la mort entre ses mains brisée.

En vain de ses sujets il réclame l'appui,

ptife rachetés s'échappent malgré lui; Faisant taire leurs chants, les célestes, cohortes, Du royaume éternel ouvrant déjà les portes, Vers les cieux attentifs un cri s'est élevé, L'àme de Dieu s'exhale.... et le monde est sauvé !

Delp. Gay.

VI. Histoire naturelle.

LE CAMPHRE.

Le camphre est une substance particulière qui constitue un des matériaux immédiats des végétaux- Il ne parait pas avoir été connu ni des Grecs ni des Romains. Les Arabes sont les premiers qui en aient fait mention, sous le nom de kamphur, d'où notre mot camphre.

Cette substance se rencontre dans un graul nombre de plantes, et notamment dans plu- sieurs lauriers. On l'extrait particulièrement du laurier-camphre, arbre qui est très-abon- dant en Chine et au Japon. Pour l'obtenir, on coupe les racines et le bois de cet arbre en petits morceaux, que Ton fait bouillir avec

28 de l'eau dans des pots de fer en forme d'alam- bic, et surmontés d'un chapiteau en terre, dont l'intérieur est garni de paille de riz. Le camphre se sublime et s'attache en se concré- tant à la paille, sous forme de petits grains grisâtres.

Tout le camphre qui arrive en Europe vient de la Chine et du Japon; on l'envoie dans des tonneaux à l'état brut et sous forme de poudre grise. Autrefois on ne le raffinait qu'à Venise, aujourd'hui les raffineries de camphre sont très-multipliées.

Le camphre se volatilise sans cesse à la température de l'atmosphère, de les cris- taux de camphre que l'on trouve à la partie supérieure des parois des vases dans lesquels il est enfermé depuis quelque temps. Il est très-peu soluble dans l'eau ; il se dissout dans l'alcool, dans l'acide sulfurique concentré.

Le camphre est employé à l'intérieur comme stimulant diffusible, c'est-à-dire comme excitant par une action propre qui se transmet rapidement à toutes les parties de l'organisation, et dont l'effet est de courte durée. Dans les petites véroles dont l'éruption se fait attendre ou dont les boutons noir-

29

cissent, le camphre est utile en excitant la transpiration, il peut encore le devenir par la propriété qu'il a de s'opposer aux progrès de la putréfaction.

A l'extérieur, le camphre est souvent employé à l'état d'alcool camphré (eau-de-vir camphrée), qui contient un trentième de son poids de camphre. On emploie ce liquide seul en friction, ou on le mêle à quelque stimulant, tel que le savon ammoniacal, pour combattre des douleurs rhumatismales chroniques, des douleurs sciatiques, des engourdissements, des paralysies, etc.

L'alcool camphré s'emploie aussi en fomen- tation dans les gangrènes locales. On le donne en gargarisme dans les angines gangreneuses en le mêlant à des proportions variées de miel ou de sirop de mûres.

VII. —Hygiène.

CONVULSIONS.

On peut presque toujours prévenir les con- vulsions des enfants. Quand un enfant est souffrant, rouge, grognon, porté à dormir aux

30 heures habituellement il ne dort pas.. quand le regard semble fixe et se meut péni- blement adroite et à gauche, quand il y a des vomissements, on peut être certain que des convulsions a ont arriver.

Il faut alors empêcher le mal de faire des progrès. Pour cela, prenez un verre de vinai- gre , faites-le bouillir. Quand il est bouillant, mêlez-y du son ou de la mie de pain, pour en faire comme un cataplasme. Etendez cette bouillie sur deux linges, et quand elle ne vous brûle plus au toucher, enveloppez-en les pieds de l'enfant, et recouvrez le tout d'un morceau de laine, pour l'empêcher de refroidir Si l'enfant est au lit, mettez à ses pieds une brique bien chauffée ou une bouteille d'eau chaude. Laissez ces cataplasmes une heure ou deux, jusqua ce que l'enfant en témoigne de la douleur; alors retirez-les, essuyez bien les pieds et tenez-les très chaudement.

Si au bout de quelques heures les mêmes symptômes de convulsion continuent ou re- paraissent, recommencez le même remède avec du vinaigre nouveau. Ne donnez aucune nourriture à l'enfant tant qu'il est souffrant, mais seulement à boire tant qu'il en voudra.

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Si vous n'avez pas de vinaigre., prenez de la cendre chaude (mais qui ne brûle pas),met- t<v.-la. sèche , sur deux linges et enveloppez- sépaTément chaque pied de l'enfant. Lais- sez cela deux ou trois heures et même plus, si l'enfani ne parait pis en souffrir. Le but de ces remèdes est de dégager la tète et d'attirer le sang aux jambes.

Si les convulsions sont déjà venues, mettez une pincée de sel sur la longue de i 'enfant. En outre, appliquez les mêmes cataplasmes de vinaigre ou de cendre sèche, dont nous ve- nons de parler. Mettez une sangsue à chaque cheville, au-dessus du cataplasme, et laissez couler le sang deux heures. Arrêtez ensuite le sang avec des toiles d'araignée que vous mettez sur les piqûres et que vous .y mainte- nez avec un linge tourné autour de la jambe. L'amadou produit le même effet. Ne serrez pas trop le linge pour ne pas intercepter la circulation. {Petites lectures).

32 VIII. Intliisf rie.

DU GANTIIR.

On appelle gantier l'ouvrier et le marchand qui font et vendent toutes sortes d'ouvrages de ganterie.

Les gants se font ordinairement de peaux d'animaux passées en huile ou en mégie, telles que celles du chamois, de la chèvre, de l'a- gneau, du daim, du cerf, de l'élan. On fait aussi des gants à l'aiguille et sur le métier avec la soie, le fil, la laine, le coton, etc.

Le gantier ne prépare pas les peaux, il doit seulement s'attacher à faire un bon choix dans l'achat qu'il en fait. L'usage des gants est très -ancien. Comme on se revêtait autre- fois de peaux pour mettre son corps à l'abri des injures de l'air, on en étendit l'usage aux mains, pendant l'hiver, pour se garantir du froid.

Cette profession exige beaucoup de propreté, et peu d'outils. Les principaux dont on se sert sont les ciseaux de tailleur, le couteau à do- ler, et le tourne-gant. Après que les gants ont été coupés, le gantier les envoie à la coutu- rière, qui les coud avec de la soie, ou avec

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une sorte de fil très-fort appelé fil à gant.

Les gants, au retour de la couturière, sont vergetés, paire par paire', avec une brosse qui ne doit être ni dure ni molle. On prend en- suite du blanc d'Espagne, on en frotte les gants et on en ôte le surplus, en les battant, par un temps sec, sur une escabelle, jusqu'à ce qu'ils n'en rendent plus. On les brosse de nouveau, et pour lors ils sont prêts à être gommés. Pour cet effet, on fait dissoudre la gomme dans de l'eau, on la passe à travers un linge, on la fouette avec des verges, jus- qu'à ce qu'elle blanchisse et s'épaississe. Quand elle paraît avoir une consistance légère, on étend le gant sur un marbre, on trempe dans la gomme dissoute une éponge fine, et on gomme le gant à toute sa surface. Cette opération est destinée à y attacher le blanc qu'il a reçu.

Les gantiers ne perdent rien des peaux qu'ils achètent aux mégissiers, parce qu'ils revendent les enlevures ou retailles aux tis- siers et aux blanchisseurs de murailles pour faire ce qu'on appelle de la colle à gant.

M V2L. —Variétés.

UN HOMME PLÂTRÉ.

Le journal Le Yexin raconte le fait suivant :

« Dans une commune des environs de Ver- non, un serrurier pensa qu'il devait se donner une enseigne , et quand il eut suffisamment cherché, il se dit tout joyeux : «Mon enseigne sera un bras tenant une clef : » et comme ses regards tombèrent en ce moment sur son bras fort, nerveux et velu, il prit la résolution de faire mouler son bras et sa main robuste mon- trant aux passants une clef superbe.

» L'appétit vient en mangeant, dit le pro- verbe : l'opération du moulage réussit à sou- hait. Le serrurier ne se sentait pas d'aise. Il lui vint une autre pensée : ce fut de se faire mouler du haut jusqu'en bas. Il en parla au mouleur, qui trouva la chose faisable; jour fut pris pour mener à bien cette artistique opération, et au jour dit, le mouleur se mit à l'œuvre. Le plâtre fut gâché avec tout l'em- pressement possible, et le- serrurier ne tarda pas à se sentir étreint sous cette blanche cui- rasse dont il commençait à se plaindre.

» Plus vite ! criait-il.

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» On alla plus vite, aussi vite qu'on le pou- vait, et quand le serrurier fut tout de plâtre habillé, qu'il ne restait plus à mouler que cette figure virile encadrée de favoris épais, on plaça un chalumeau dans la bouche du patient pour qu'il pût respirer, et on lui dit :

Fermes les yeux !

» Le serrurier obéissant les ferma, et sa fi- gure disparut sous le plâtre. Il n'en pouvait plus, il étouffait. Il voulait se plaindre, et la plainte e\] tirait au chalumeau. Il aurait voulu briser son enveloppe, mais aucun mou- vement ne lui était permis. Il crut qu'il allait mourir. Enfin il fit un effort, secoua les poings contre la muraille, brisa les gantelets de gypse qui les rendait impuissants, et parvint à arracher son masque, qui tomba tout cou- vert de la barbe qui y avait adhéré. Il put donc parler, mais ce fut pour maudire l'idée qu'il avait eue, et le mouleur qui n'avait pas combattu cette idée.

» Ce n'était pas une petite affaire de le dé- barrasserdu supplice de sa carapace. On avait beau faire, rien ne faisait. Force fut de pren- dre les marteaux qui frappaient ordinaire- ment sur l'enclume et de s'en servir pour

36 hâter la délivrance du malheureux moulé. Tout ce qu'il souffrit, lui seul le sut : il y avait des endroits de son corps sa chair vive saignait, d'autres la peau était bleue ou marbrée. Il resta longtemps malade de cette malencontreuse opération, et Jura, mais un peu tard, qu'on ne l'y prendrait plus.

T Proverbes et Vax fines

Qui apprend à ses dépens, Apprend chèrement.

La véritable manière de se venger digne- ment, c'est de ne pas ressembler à celui qui nous fait injure.

Le corps se soutient par les aliments, et l'âme par les bonnes actions.

Le mot de la dernière énigme est : Ténèbres.

CHARADE.

Chez tous les boulangers on trouve mon premier; En cherchant dans la gamme on trouve mon dernier. Allons donc, paresseux, imitez mon entier!

DE L'wrilMIIII »E BEAU, i. SilSTCEnMilK-EÏ-EiTE,

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HEBDOMADAIRES ET MENSUELLES,

DEUXIÈME ANNÉE.

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CHEZ L'EPITEUR, BEAU J»e, IMPJUMKBB , Rue Sttory, 28.

PROPRIÉTÉ.

SOMMAIRE.

I. Religion et Morale. Le nid d'aigle.— Un ba- taillon d'infanterie devant le Saint-Sacrement.

II. Education/— Pierre-le-Grand.

III. Géographie et Histoire. Darfour , contrée

d'Afrique. L'Australie.

IV. Personnages célèbres. Alexandre enfant.

V. Morceaux littéraires. Le jugement dernier.

VI. Histoire naturelle. Fidélité d'un chien.

Un poireau.

VII. Hygiène. Des appartements humides. VIII. Industrie. Le batteur d'or.

IX. Variétés. La rue du Chantre. Procès-verbal. X. Proverbes et Maximes. Charade.

1. Religion et Morale.

LE >'ID D'AIGLE.

Bien loin, bien loin, derrière un rocher noir, vous distinguez un toit, une chaumière ; c'est la demeure du vieux Bernard. Nous al- lons d'un bond nous introduire dans sa mai- sonnette. Frappons ! Donnez- vous la peine d'entrer. Vous êtes couché, pauvre Ber- nard : vous êtes donc malade ? Ben ma- lade ! ben malade ! Avez-vous vu le méde- cin?— Jehan est allé le chercher. Tenez, j'en- tends les pas de son cheval, c'est probable- ment lui, c'est lui.

Le médecin savoisien s'avance avec gra- vité, tâte le pouls, fait tirer la langue, exécute une grimace, et, tapotant la joue du bon vieux : « Ce ne sera rien, mon ami, ce ne sera rien. » Mais il fait un signe aux trois gar- çons qui sont bouche béante, front décou- vert, et dans l'anxiété d'un accusé attendant

6 la sentence. Les voilà tous les quatre réunis dans un coin ; le docteur hoche la tête et avance démesurément la lèvre inférieure : « C'est grave, mes enfants, c'est grave. C'est une fièvre pernicieuse. Nous sommes en plein accès dans ce moment-ci; mais, l'accès fini, il faut absolument du sulfate de quinine. De qui... qui..., monsieur le docteur? De quinine, mon ami ; une substance qui coûte fort cher, et que vous trouverez à Sallanches, bien sûr. Entre les deux accès il faut en faire prendre au moins pour trois francs. Au sur- plus,, je vais écrire mon ordonnance. Vous savez lire, vous Guillaume ? Oui, Monsieu. Vous veillerez à l'exécution. Soyez tran- quille. »

Trois francs dans les montagnes de Savoie font plus de trois pièces de 20 francs dans nos grandes villes. Quand le médecin fut sorti, Guillaume, Peters et Jehan, les trois fils de Bernard, se regardèrent avec inquiétude, il y avait en tout dix-sept sous dans la maison.

« Ecoutez , dit Peters , je connais dans la montagne un moyen de gagner dès ce soir trois ou quatre pièces de cinq francs. La seule chose qui me tient c'est le danger qu'il faut courir ;

7 mais pour la conservation du vieux pèrej il n'y a plus rien à calculer. Si nous voulons nous l'aurons clans deux heures. Il s'agit d'un nid d'aigle, bâti sur un épouvantable préci- pice. — C'est moi qui Tirai chercher, dit Guil- laume. — C'est moi, dit Jehan. Non pas, non pas, c'est moi qui l'ai découvert. »

Les trois garçons voulaient se dévouer, et la discussion était d'autant plus émouvante que Ton se disputait à qui serait tué; car le péril était effrayant et le précipice épouvanta- ble, et le nid convoité était à peu près inacces- sible, a Ecoutez, dit Peters, il y a un moyen de tout arranger. Nous allons tirer au sort. Ecris trois numéros, Guillaume; voici mon chapeau. Le numéro 1 descendra et ramènera le nid. » Tous les cœurs battaient outre mesure. Le vieux Bernard râlait la fièvre, et chacun de ses trois garçons voulait avoir la consola- tion de jouer sa vie pour sauver celui qui la leur avait donnée.

Le sort tomba sur Peters ; c'était lui qui avait fait la découverte, cette bonne fortune lui était bien due. Il alla tout d'abord em- brasser Bernard. «Adieu, père, adieu. a liez-vous, enfants ? Travailler pour avoir

8 le médicament que le médecin prescrit. Qu'allez- vous faire ? Nous te dirons, à no- tre retour, ce que nous aurons fait. »

Et chacun des trois fils embrassa successi- vement le vieux père malade. Guillaume dé- tacha de la muraille un vieux sabre qui avait appartenu à Bernard quand il servait dans les cuirassiers; ,lehan alla chercher dans un coin une vieille corde; Peters courut s'age- nouiller devant une statue de la très-sainte Vierge.

On part. On arrive au bord du précipice, et Ton organise l'attaque du nid. Le danger n'é- tait pas seulement dans la possibilité d'une chute de près de 40 mètres, mais encore dans l'agression des oiseaux de proie que pouvait renfermer l'abîme.

Celui que le sort avait désigné pour une si périlleuse entreprise, était un beau jeune homme d'environ 22 ans, d'une force athléti- que, et ne reculant jamais devant les difficultés . Ayant donc mesuré hardiment la profondeur qu'il doit parcourir, il se ceint d'une corde à gros nœuds que ses frères se chargent d'abais- ser ou de hisser à volonté; puis, muni du sa- bre de son père, il descend jusque dans le

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précipice. Il arrive heureusement devant l'in- terstice qui recèle le nid d'aigle. Ce nid contenait quatre aiglons à plumage isabelle clair. C'est un trésor pour le courageux mon- tagnard, et son cœur palpite de joie à la vue d'un si riche butin. Malheureusement le plus difficile n'est pas accompli, il faut remonter avec cette proie, et c'est surtout que se trouve le péril. Peters prend le nid, l'enlace dans sa main gauche, et tient dans sa droite le sabre tranchant dont il est armé.

Déjà la voix du jeune chasseur a retenti joyeusement dans les cavités sonores du pré- cipice.— « Je les tiens, ils sont à nous ! enle- vez ! ! ! Déjà la corde se meut dans un mouve- ment ascensionnel, lorsque tout à coup Peters se voit assailli par deux aigles énormes, qu'il reconnaît à leur fureur et à leurs cris pour le père et la mère des petits dont il s*est empa- ré. — Courage ! frère, défends-toi, n'aie pas peur. » Peters serre le nid d'aiglons contre sa poitrine, et de sa main droite il fait le mou- linet avec le grand sabre de son père. Alors s'engage une lutte épouvantable; les aigles crient, les petits hurlent, le montagnard sif- fle et brandit avec dextérité son sabre qui

50.

10 brille au soleil comme l'éclair, comme la fou- dre, frappe les aigles qui n'en sont que plus acharnés, frappe le roc dont il jaillit des étin- celles. Tout à coup la corde qui le soutient au-dessus des profondeurs de l'abîme est ébranlée par un choc inattendu. Peters lève les yeux, et il s'aperçoit que dans ses évolu- tions, tout en faisant le moulinet avec son sabre, il a touché la corde, et que cette corde de salut est déjà tranchée à moitié.

Que cette corde casse et le montagnard est perdu, et son butin roule avec lui dans le précipice, et le vieux Bernard court l'effroyable danger de mourir, faute d'un médicament que ses fils ne pourront acheter.

Les yeux de Peters, démesurément dilatés, restèrent immobiles un instant, puis se fer- mèrent avec effroi. Un frisson glacial parcou- rut tout son corps, il faillit lâcher du même coup, et le nid qu'il rapportait, et le terrible sabre qui lui servait de défense.

Au même instant l'un des aigles s'abattit sur sa tête et chercha à lui déchirer le visage ; alors notre Savoisien se ranima, fit un su- prême effort, et se débattit le mieux qu'il put. Jamais un homme ordinaire n'en aurait eu

11

la force ; mais Peters songea d'une part à son vieux père, de l'autre à la Madone qu'il avait implorée avant son expédition. Il eut le bonheur de réussir.

La corde monte, monte toujours; des voix anùes font entendre des paroles d'encourage- ment et de triomphe, mais Peters était hors d'état de leur répondre. Quand il eut atteint le bord du précipice avec le nid d'aigle qu'il n'a point abondonné, ses cheveux, aupara- vant d'un beau noir d'ébène, sont devenus si complètement blancs, que Guillaume et Jehan ont peine à reconnaître leur frère. Qu'importe ! les aiglons sont de l'espèce la plus rare. Ils furent le jour même portés, vendus. Le vieux Bernard put avoir du sul- fate de quinine, et le médecin, en venant le voir le lendemain, le trouva en convales- cence. [Magasin de l'Enfonce chrétienne.)

CM BATAILLON D INPAN.TEEIE LEVANT LE SAINT- SACREMENT.

Je descendais la rampe qui mène de Y Ara Cœli à l'arc de triomphe de Septime-Sévère, dit l'auteur des Petites Lectures, lorsque j'a-

12 perçus un bataillon d'infanterie française qui venait de passer l'inspection du colonel. 11 mar- chait tambour battant, se dirigeant du côté de la colonne de Phocas. Au moment il arriva près des trois colonnes du temple de Jupiter- Stator, un prêtre sortit de la petite église voisine, portant le saint viatique abrité, sui- vant l'usage, d'un large parasol, et suivi par une foule de fidèles qui récitaient des prières. Je me mêlai aux groupes dont je remarquais l'attention sur ce qui allait advenir de la ren- contre inévitable, et j'attendis.

Quand l'officier qui marchait en tète de la troupe fut à certaine distance, il comman- da : « Halte ! présentez armes ! genou terre ! » Et le mouvement s'exécuta avec une mer- veilleuse précision. Je ne saurais peindre l'im- pression que produisit sur les nombreux spectateurs cette spontanéité à rendre les hon- neurs militaires au saint viatique, et l'attitude grave et religieuse des soldats, pendant que le prêtre passait devant le front du bataillon. J'entendais dire autour de moi : « Ces Français qu'on disait plus turcs que chrétiens, ce sont des anges. »

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II. Education.

PIERRE LE GRAND.

« Vous êtes heureux, disait Pierre le Grand à ses enfants, qu'il avait trouvés occupés à lire , vous êtes heureux de ce qu'on vous donne ainsi de bonne heure le goût des livres. Je vaudrais, au prix de mes doigts, avoir été bien élevé : c'est un avantage dont je suis bien fâché d'être privé, o

Prévenez de pareils regrets, mes enfants, et imitez la sage conduite de la fourmi qui fait ses provisions dans la belle saison pour avoir de quoi subsister pendant les frimas.

Vous êtes maintenant vous-même dans la belle saison, c'est à-dire dans l'âge le plus propre à acquérir des connaissances dont vous aurez besoin dans la suite. Ayez donc soin d'en bien profiter. Une fois que cet âge heu- reux est passé, on n'est plus à temps de reve- nir sur ses pas, et on reste toute sa vie dans l'ignorance.

50..

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Un passant avait soif; il trouve une fontaine : Tout autre se fût mis à boire promptement; Mais, ce qu'on ne croira peut-être qu'avec peine,

Notre homme fit tout autrement. Laissons couler cette eau, dit-il, et tout à l'heure 11 en pourra sortir une qui soit meilleure. Il attend donc, mais vainement, L'eau ne change point de nature. N'importe, toujours il attend Qu'elle devienne encor plus pure. Le bonhomme attend tellement, Qu'il vit enfin tarir la source, Et qu'il ne trouva plus, pendant toute sa course, De quoi calmer la soif qui faisait son tourment. De maint et maint enfant ce passant est l'image : Pour orner leur esprit ils ne font nul usage

Des heureux jours de leur printemps : Ils attendent un plus bel âge ; Ce bel âge s'enfuit, ils n'y sont plus à temps.

III. CicograpEsie et Histoire.

DARFOUR, CONTRÉE H AFRIQUE.

Le Darfour s'étend au sud de la Nubie, à l'ouest du Kordofan , sur une longueur d'en-

trime lôoliiius et sur une largeur de 16o.

Il compte i millions d'âmes.

Les habitants du Darfour ont pour princi- pal'' richesse leur nombreux bétail, une grande quantité de bananes et de dattes, puis des oignons, du poivre-long, des mûriers, des melons d'eau. Ils tirent aussi un grand profit des éléphants, autruches, girafes, rhinocéros, bons et bœufs sauvages...

Le Darfour, toujours vivifié par le soleil, rafraîchi par les rosées de chaque nuit et par des pluies régulières, est d'une fertilité admi- rable. Il y a une si grande quantité de bétail sur les montagnes, que les habitants ne pou- vent consommer tout le lait qu'il produit, et dans la pleine le riz croit sans culture. Le dourrah (sorte de blé de Turquie) pousse d'une hauteur démesurée. Avec le coton qu'ils cultivent très-bien, les habitants du Darfour tissent l'étoffe de leurs habits : de Yohar ils tirent un fil qui ressemble à la soie, et dont ils se servent pour coudre ; de Vanable ils tirent la gomme arabique ; le dattier d'E- gypte et le doulad leur donnent de grosses noix dont ils tirent un lait huileux et très- agréable au goût ; sur le loulon ils recueillent

16 un fruit qui ressemble à nos marrons ; Yomeid produit une sorte de pomme légèrement acide; et le mouhais a un fruit qui, réduit en farine, remplace au besoin les céréales. Ils ont encore Yharraz, dont les branches s'étendent de façon à former de l'ombre à plus de 100 personnes ; le sabeloi dont le vaste tronc sert de citernes : le haghlig dont chaque partie est d'une utilité particulière; ses jeunes rameaux servent à assaisonner les mets , ses feuilles réduites en pâte guérissent merveilleusement les plaies venimeuses , son fruit vert sert de savon, ses rameaux' résineux sont employés à éclairer durant la nuit; sur les mêmes, sciés et arran- gés en petites tables, on trace les alphabets pour les enfants; et finalement sa cendre remplace le sel.

La forme du gouvernement du Darfour est une espèce de régime féodal dirigé par un sultan, maître absolu. La capitale du Dar- four est toujours la ville que le nouveau sul- tan choisit pour sa résidence; aujourd'hui c'est Tendetti. 11 dispose de la vie et des biens de ses peuples. Quand il parait en public, il a toujours le visage couvert, afin de ne pas éblouir les regards de son peuple

17 par sa splendeur et sa majesté. Personne ne peut lui adresser directement la parole : un officier, qui reste toujours à ses côtés, lui dit au besoin : « Un tel te salue age- nouillé, etc., etc. » S'il arrive que le sultan éternue, tous ceux qui l'entourent doivent l'imiter. Si, durant une promenade, il tombe de cheval, tous ceux qui l'accompagnent doi- vent aussitôt en faire autant, et si quelqu'un restait en selle, une pluie de coups de bâton tomberait sur les épaules de l'imprudent, afin de lui persuader qu'il ne lui est pas permis d'être plus habile et plus adroit que son sou- verain. Quand il va à la chasse, les grands qui s'y trouvent portent un parasol et des éventails afin de lui rendre moins sensible l'ardeur des rayons du soleil ; d'autres, investis de fonc- tions plus importantes, portent le nom d'une des parties de sa personne : ainsi l'un s'appelle sa tête, l'autre son bras droit, le troisième son bras gauche, etc.. Celui qui porte ses armes est nommé Yaba-amor, ou colonne vertébrale. La cérémonie de l'installation du sultan est on ne peut plus curieuse. Il doit d'abord se reposer pendant sept jours, après lesquels une cohorte de vieilles femmes vient le trou-

50...

18 ver, tenant à la main des bâtonnets qu'elles croisent ensemble de diverses manières ; une de ces vieilles arrose ensuite avec de l'eau le corps du futur monarque, pendant que les autres murmurent des paroles dont jamais personne n'a pu comprendre le sens. Il est ensuite conduit, au son d'une grande quantité d'instruments bruyants, dans un palais ré- servé pour cette cérémonie, et dès ce jour il prend le nom de sultan...

{Journal des connaissances utiles.)

L AUSTRALIE.

Les principaux arbres de l'Australie sont les arbres à gomme et à quinquina, les ceri- siers sauvages, les chênes, la menthe poi- vrée, les acacias et les mimosas. Les gommes sont de la meilleure espèce et peuvent devenir une branche de commerce très-lucrative.

Les fleurs sauvages y croissent en abon- dance : les géraniums, les rhododendrums et toutes les variétés de cactus. Le vin est bon en Australie, et les vignes sont cultivées à la manière française.

Jamais en Australie les arbres ne perdent

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complètement leur feuillage, ce qui leur donne une monotonie très-grande ; jamais ces teintes jeunes et fraîches du printemps ne viennent réjouir l'œil. Les montagnes sont très-élevées. Des chaînes entières sont tou- jours couvertes de neige et atteignent une hau- teur de 2,000 à 2,500 met. Dans les environs de Ballarac, le paysage a le cachet de l'Amé- rique du Nord. Les rochers sont énormes et presque toujours d'une couleur sombre.

Dans tous les cours d'eau des environs de Victoria, les anguilles sont fort helles et en très-grande quantité; quelques-unes pèsent près de 2 kilogram. Les autres poissons sont- des hrochets, une espèce de lamproie, des goujons et un animal appelé dans le pays hareng blanc, mais qui ne ressemble en rien aux harengs ordinaires. Les crabes et les homards sont inconnus ; il n'y a que quel- ques petites écrevisses dans certaines criques du bord de la mer.

Les kangourous, les sarigues, les colima- çons et une espèce particulière de ver d'un pouce de long, sont presque les seuls ani- maux indigènes qu'il est possible de manger.

Les perroquets, les kakatoès sont d'une

20 belle espèce et très-nombreux; ils font sou- vent de grands ravages dans les plantations, et sont très-redoutés des cultivateurs et des jardiniers.

Il y a plusieurs espèces de kangourous : le grand kangourou, gris-brun, ayant environ 1 met. 50 de hauteur et une queue de 1 met.; d'autres sont presque blancs et quelques-uns couleur de lièvre ; le petit kangourou lillipu- tien, gros comme un écureuil, mais pouvant aisément sauter 2 m. 60 c, et dont la chair est excellente ; les autres sont moins bons à manger. Les chiens, dans ce pays, sont énor- mes ; leur corps ressemble à celui d'un re- nard : ils sont très-craintifs et fuient à la pre- mière résistance; ils ont le caractère du loup, et aiment à sucer le sang des moutons, dont ils tuent un grand nombre.

Les insectes de toute espèce sont très-re- doutables en Australie ; les plus grands, ap- pelés bull dogs, ont 4 centimètres de lon- gueur, le corps noir et une queue rouge ; ils mordent comme de petits crabes. Les fourmis atteignent souvent la taille de 3 centim.; elles ne fuient pas à la moindre attaque comme celles d'Europe : elles font bravement face à

21 l'ennemi et le poursuivent elles-mêmes très- souvent. Les centipèdes et les triantelopes ou tarentules sont très-dangereux ; mais l'animal le plus redouté est la vipère sourde, ainsi nommée parce qu'elle ne bouge jamais, à moins d'être touchée ; sa piqûre est mortelle. Les serpents sont de plusieurs espèces : le ser- pent noir a plus de 3 mètres de longueur, et est très-venimeux; en quelques heures sa morsure cause la mort.

>~^èM.y£^-*~

IV. Personnages célènrev.

ALEXANDRE ENFANT.

L'histoire d'Alexandre nous a transmis une parole bien sensée de ce héros encore jeune. Après la mort d'Aristote son précepteur, il parut tout pénétré de la perte de ce grand phi- losophe. Un courtisan, étonné de cette tris- tesse :« Seigneur, lui dit-il, que feriez -vous donc si vous aviez perdu votre père? Croyez- vous que je sois moins redevable à

22 Aristote qu'à mon père ? C'est du second que je tiens la vie à la vérité, j'ai reçu du premier la manière de m'y conduire. » Cette réponse est belle, mais Alexandre fut bien éloigné de la mettre en pratique.

Le même historien rapporte que pendant l'absence de son père Philippe, des ambassa- deurs du roi de Perse vinrent à la cour de Ma- cédoine. Alexandre, qui n'avait alors que onze ans, les reçut avec la plus grande politesse ; ils en furent enchantés. Il ne leur fit au- cune question puérile; mais il leur demanda quels étaient les usages, les mœurs et le com- merce du grand roi; quel chemin était le plus court pour se rendre dans la Haute-Asie ; en quoi consistait la puissance et la force des Perses; quelle place le roi prenait dans une bataille, comment il se conduisait à l'égard de ses ennemis, etc..

Les ambassadeurs admirèrent tant de sa- gesse dans image si tendre, et l'un d'eux, sen- tant dès-lors ce que le jeune Alexandre pourrait devenir un jour, remarqua en pré- sence de ses collègues la différence qu'il trou- vait entre l'héritier de la Macédoine et Ar- taxercès, et l'exprima fort bien par ces mots :

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« Ce jeune prince est grand, et le nôtre est riche. »

Qu'il est déplorable qu'un prince avec un si grand génie et doué des plus beaux dons de la nature, ne se soit servi de ses lu- mières que pour désoler le monde !

-<£S§562>-

ISorceanx littéraires.

LE JUGEMENT DERNIER.

Déjà je crois le voir, j'en frémis par avance,

Ce jour de châtiment comme de récompense;

Déjà j'entends des mers mugir les ilôts troublés ;

Déjà je vois pâlir les astres ébranlés;

Le feu vengeur s'allume, et le son des trempettes

Va réveiller les morts dans leurs sombres retraites.

Ce jour est le dernier des jours de l'univers.

Dieu cite devant lui tous les peuples divers;

Alors, pour séparer les saints, son héritage,

De la Religion vient consommer l'ouvrage.

La terre, le soleil, le temps, tout va périr,

Et de l'éternité les portes vont s'ouvrir.

Elles s'ouvrent! Le Dieu si longtemps invisible

S'avance, précédé de sa gloire terrible !

Entouré du tonnerre, au milieu des éclairs,

^on trône étincelant s'élève dans les airs.

Le grand rideau se tire, et ce Dieu vient en maître.

MaUieureuï qui pour lors commence à le connaître !

24

Les anges ont pourtant fait entendre îeurs voix ,

Et, sortant de la poudre une seconde fois,

Le genre humain tremblant, sans appui, sans refuge,

Ne voit plus de grandeur que celle de son juge.

Ebloui des rayons dont il se sent percer,

L'impie avec horreur voudrait les repousser:

Il n'est plus temps; il voit la gloire qui l'opprime;

Et tombe enseveli dans l'éternel abîme...

Et, loin des voluptés fut livré son cœur,

Ne trouve devant lui que la rage et l'horreur.

Le vrai chrétien lui seul ne voit rien qui l'étonné,

Et, sur ce tribunal que la foudre environne,

Il voit le même Dieu qu'il a cru, sans le voir,

L'objet de son amour, la fin de son espoir.

Mais il n'a plus besoin de foi, ni d'espérance,

Un éternel amour en est la récompense.

VI. il i Moire naturelle.

FIDELITE D UN CHIEN.

Le Siècle contient dans ses faits divers une anecdote qu'on lira avec plaisir. Il y a deux ans, dit ce journal, Pierre L..., manœuvre aux environs de Paris, avait trouvé un jeune chien dont la maigreur et l'œil suppliant attestaient qu'il était perdu depuis longtemps et qu'il mourait de faim. L'ouvrier, comprenant ce

25 qu'il y avait de souffrance dans le regard du pauvre animal, avait eu pitié de lui et l'avait emmené. Sa ménagère, en voyant arriver ce nouveau commensal dont les énormes pattes annonçaient qu'il deviendrait très-gros, se récria d'abord, car elle avait quatre enfants qui avaient bon appétit, et le nouveau venu devait être une charge de plus; mais le chien avait l'air si malheureux, et les marmots té- moignaient une si grande joie de son arri- vée, qu'elle se laissa attendrir, et consen fit à le garder. Barbet, c'était le nom qu'on lui don- na, bien que ce fût un mâtin de pure race, Barbet, disons-nous, s'acclimata vite chez ses nouveaux maîtres, devint l'ami inséparable des enfants, et par sa douceur s'attira l'af- fection de tout le monde ; mais malheureuse- ment, ainsi que la mère de famille l'avait prévu, il grossissait à vue d'oeil, promettait de devenir un chien de première force et mangeait de telle façon, que, malgré tout l'at- tachement qu'on avait pour lui , il fallut songer à s'en défaire.

Vers la fin de l'année dernière, un inconnu, passant dans le village, aperçut Barbet qui jouait avec les enfants devant la porte du

26

journalier ; il entre et demande à l'acheter. Les braves gens songeaient bien à s'en dé- barrasser, mais ils ne voulaient donner le fidèle animal que lorsqu'ils auraient trouvé une bonne condition, et, quoique l'inconnu s'offrît à le payer, il avait un air si dur qu'on le lui refusa. Celui-ci, à l'aspect de la misé- rable demeure, comprit le moyen de vaincre la répugnance de l'ouvrier ; il lui offrit alors 125 fr. de son chien. 125 francs ! le pauvre journalier mettait presque deux mois pour gagner pareille somme; aussi se laissa-t-il séduire, et, malgré sa femme et malgré ses enfants qui se récriaient à qui mieux mieux, il conclut le marché. Le pauvre Barbet fut donc appelé; on lui passa une corde au cou, et après avoir recules adieux de la famille en pleurs, il partit avec sonnouveau maître, mais bien à contre-cœur, car il avait l'air triste, et il se retourna bien souvent du côté de la maison il avait reçu l'hospitalité.

Cependant près d'une année s'était écoulée, et chaque jour encore, dans la pauvre famille, on parlait du malheureux chien que l'on re- grettait toujours. Dans la nuit du 24 au 25 novembre dernier, vers 2 heures du matin,

'21 L... est éveillé par des aboiements qu'il croit reconnaître; il éveille sa femme, et celle-ci, après avoir écouté, assure que c'est Barbet qiù est à la porte. Vite l'ouvrier se lève, ouvre et voit dans l'obscurité son cbien qu'il reconnaît à ses joyeuses démonstrations ; mais il voit sur le dos de l'animal quelque cbose de volu- mineux dont il ne peut se rendre compte et qui l'empêche d'entrer. Il court allumer sa chandelle, revient et reconnaît que Barbet est hâté, sanglé et chargé comme une bète de somme : il comprend aussitôt que son chien était employé à faire la contrebande, et qu'au lieu de reporter sa charge à destination, il était revenu au logis de ses anciens maîtres. 11 le débarrassa donc, et le bon animal, tout cou- vert de boue, court prodiguer ses caresses à tout le monde, caries bambins s'étaient éveil- lés sur ces entrefaites, et poussaient des cris de joie dans leurs lits.

Dès le petit jour, L... porta les balles de marchandises chez le maire de la commune, elles furent ouvertes : ces balles conte- naient des dentelles d'un prix considérable, et le magistrat apprit au journalier que la loi lui accordait sur cette épave une part qui lui

28 permettra désormais de garder le pauvre Bar- bet malgré son appétit.

UN POIREAU.

Il est arrivé, à la halle à la verdure, un poi- reau d'une taille phénoménale. Il a 1 mètre 11 centimètres de hauteur, et son corps, à 15 centimètres au-dessus de l'espèce de crosse qui forme la racine, a 27 centimètres de cir- conférence. Il a été acheté 25 fr. parmi res- taurateur marchand de vin du boulevard du Temple, qui va le conserver immergé dans un magnifique bocal rempli d'esprit-de-vin pour s'en faire une enseigne.

VII. Hygiène.

DES APPARTEMENTS HUMIDES.

Les personnes qui habitent des apparte- ments bas, humides et peu éclairés, perdent leurs forces, deviennent pâles, bouffies, et

29 tombent quelquefois dans l'hydropisie et le scorbut. Pour diminuer l'insalubrité de sem- blables lieux, il faut y faire de grands feux. Les personnes qui sont forcées d'y demeurer doivent élever leur lit au-dessus du sol ; le tenir isolé, éloigné des murs et le plus près possible de la cheminée. Elles doivent aussi avoir, la précaution de faire sécher souvent leurs draps et leurs couvertures. Leur régime doit être tonique et fortifiant, elles doivent boire du vin, vivre d'aliments nourrissants, dormir peu, et prendre beaucoup d'exercice.

Les pays situés sur le bord des marais, au- dessous du niveau de la mer, offrent les mêmes inconvénients. Les habitants de sem- blables lieux doivent, pour résister à l'in- fluence du climat, prendre beaucoup d'exercice à pied, faire des frictions longues et répétées avec la vapeur du succin ou d'autres aroma- tes ; le sommeil doit être court ; les fenêtres des appartements doivent être à l'abri des vents humides; les chambres chauffées de feux étincelants et brûlants.

Il faut faire usage de bons vins : les fari- neux doivent être bien fermentes et bien cuits. Les aigres, les oléagineux, les laitages,

30 les amples boissons doivent être interdits; les épices, les aromates deviennent salutaires, dans cette constitution des assaisonnements.

VIII. ludustrie.

LE BATTEUR D OR.

Le batteur d'or est un ouvrier qui, à force de battre l'or ou l'argent sur le marbre, avec un marteau, dans des moules de velin ou de boyau de bœuf, réduit ces deux métaux en feuilles très-légères et très-minces, propres à dorer ou à argenter le cuivre, le fer, l'acier, le bois, etc.

Cet art est très-ancien. Quoique les Romains ne l'aient pas poussé aussi loin que nous, il est siir qu'aussitôt après la ruine de Carthage on commença à dorer les planchers des maisons de Rome ; que les lambris du Capi- tole furent les premiers sur lesquels on en fît l'essai ; que dans la suite le luxe devint si

m

grand, que les particuliers tirent dorer [es plafonds et les murs de leurs appartements. Pline nous assure qu'ils ne tiraient d'une once d*or que cinq ou six cents feuilles de quatre doigts en carré , mais qu'on aurait pu en tirer un plus grand nombre, vu leur épaisseur. Nos batteurs d'or font leurs feuil- les si minces et si déliées,, qu'on est surpris que l'industrie et la patience de ces ouvriers aient pu aller jusque là. On a remarqué que 40 grammes d'or se peuvent diviser en 1600 feuilles de 9 centimètres carrés. On le bat sur un bloc de marbre ordinairement noir, très-uni, d'environ 32 centimètres carrés, élevé de terre de un mètre. On se sert pour le battre de trois espèces de marteaux, en forme de masses ou maillets de fer poli; le premier pesant 2 kilog. sert pourchasser; le second de 6 kilog. pour former, et le dernier de 7 kilog. pour étendre et achever.

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IX. Variétés.

LA. RUE DU CHANTRE.

La rue du Chantre est l'une des plus an- ciennes de Paris. Elle reçut le nom de Chan- tre en raison d'un chantre de Saint-Honoré qui y demeurait : la voix de cet homme était si forte et si puissante, que l'on venait de tous les quartiers de Paris pour le voir et l'enten- dre; il se nommait Pierre Bouley. Dans la nuit, quand il chantait sur la porte de l'é- glise , on l'entendait distinctement du Pré- aux-Clercs.

L'embonpoint de Pierre Bouley était extra- ordinaire ; il mangeait 9 kilog. de viande par jour, que lui fournissaient la fabrique de l'é- glise et les dames des halles de cette époque . Sa femme, Désirée Pendelet, était aussi forte que lui ; à eux deux, ils tenaient toute la largeur de leur rue, qui n'avait à cette époque que trois mètres.

(Journal des Faits.)

_ 33

PROCÈS- VERBAL.

Vous lirez peut-être avec plaisir la copie exacte d'un procès-verbal dans lequel on re- trouve le stylo simple, naïf et sans prétention des candides chroniqueurs du moyen âge. Curieuse, sous plus d'un rapport, cette pièce n'est point apocryphe, et sa, date ne permet pas de la faire remonter au temps des icono- clastes.

Voici le document en question. En le co- piant, on a religieusement conservé son or- thographe ainsi que son style, et discrètement effacé les noms honorables qu'il renferme : «J'ons soussignais... adjoint de la com- mune de... certifions que nous teurtous ha- bitants d'ici, j'avons entrepris audit sieur X... tailleur de pierres la fabrication et tailliage en pierre d'un Saint-Michel patron de ladite commune pour le mettre dans.1' église moyen- nant ce que nous sommes convenus avec le- dit X... 11 a donc fabriqué et taillié notre dit Saint-Michel de tous les cotiés et il nous a dit d'assembler tout le pays et nous étant com- pris, pour de nous transposer dans noute église pour prendre livraison dudit Saint-Mi-

34 chel qu'il a fait au nombre des saints qui se trouent ici. Je nous sont trouvé réuni ensem- ble dans l'église autour dudit Saint-Michel: Ledit X... tailleur de pierre présent, j 'avons tourné à Tenviron dudit Saint-Michel et Sa- vons trouvé qu'il y manquait une oreille, de plus qu'a ne ressemble pas tant seulement à un Saint-Michel qua un baucard, de plus qu'a i a fait des soins aussi gros qu'une pail- lasse de truffes, de plus qu'a i a fait deux joues aussi grosses qu'un fluteux, de plus qu'a i a fait une calotte bleue et une veste rouge si bien si biau qua leur semble à un comme - guin, de plus qu'a i a fait un livre dans sa main qu'a tout l'air d'une tabaquière, de plus que la pierre avec quoi il a bâti Saint-Michel est tendre tout comme du fromage mou dont auquel je touchons qui se casse.

« J'ons teurtous dit au sieur X... j'en vou- lons point de son Saint-Michel qu'a peu garder pour li et qu'il Remporte tout de suite sinon je vous l'impulser de noute église parla force du paiis. »

Henri TV avait un cheval malade qu'il ai- mait beaucoup : il avait dit qu'il ferait pendre

35

celui qui lui apprendrait sa mort. Le cheval paya le tribut à la nature. Un Gascon apprit ainsi cette perte au roi : a Hélas ! sire, dit-il, votre cheval !.... ce beau cheval !.... le che- val de votre majesté!... O ciel ! ce magni- fique cheval ! Je pense qu'il est mort,

s'écria le monarque alarmé. Vous serez pendu, sire, reprit le Gascon; vous vous en êtes donné la première nouvelle. »

Philippe II, roi d'Espagne, venait d'accor- der une modique pension à l'un de ses sol- dats. Ce guerrier se présente une seconde fois devant son maitre. « Ne vous ai-je pas donné une récompense '? lui dit le roi. Oui, sire, répondit le soldat ; votre majesté m'a donné de quoi manger; mais je n'ai pas de quoi boire. » Le monarque sourit, et ajouta une nouvelle graiication à la première.

Un Anglais se trouvant à une table d'hôte , et voyant apporter un gros morceau de viande, demande comment cela s'appelle. « C'est du bouilli, lui répondit quelqu'un. Oh! yes, dit-il, j'ai rencontré ce matin un grand trou- peau de bouillis qui entra dans la ville. »

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X. Maxime* et sentences

Qui se Mte finit tard.

11 n'y a de bonheur sur la terre que dans l'accomplissement de ses devoirs.

Les diamants ont leur prix, les bons conseils n'en ont pas.

La meilleure vengeance, c'est le mépris de l'offense.

Sois plutôt aveugle que de voir mal.

Le mot de la charade dernière : Fourmi.

ENIGME.

Chercher Qu'est-ce qui devient plus grand A mesure qu'on en ôte.

DE L'mPIUBERIK DE BEAU, A SAINT-GBRMAIN Mi-LATB.

RÉCOMPENSES

j HEBDOMADAIRES ET MENSUELLES,

DEUXIÈME ANNEE.

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SA3ÎST LiC l/ÊVAAGELlSTE.

RECOMPENSES

HEBDOMADAIRES ET MENSUELLES,

oc

LECTURES

MORALES, INSTRUCTIVES ET AMl'SAÎiTES,

Dl TijÉn;

iUX ÉCOLES CHRÉTiEWES.

DEUXIÈME ANNÉE.

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chez i/ÉBnE'JE, BEAU J"-, impb m ur. Bue Sal-.rv. î8.

PR0PRJÉT É.

SOMMAIRE.

1. Religion et morale. La rage. II. Éducation. L'envie. Les deux pageé. II:. Géographie;et Histoire. Le lac deCit-kniz. IV. Personnages célèbres. Joseph. V. Morceaux littéraires. Traduction de l'hymne

Jrc, maris Stella. VI. Histoire naturelle et physique. De la cha- leur ou calorique. Le renard pécheur de crabes. VIL Hygiène. Des engelures. VIII. Industrie. Ruines de Ninive. I\. Variétés. Monsieur de Crac. X. Proverbes et Maximes. Enigme.

B. Religion saoE'ale.

LA FTAGE.

Le docteur V., médecin à Livron (départe- mi nt de la Drpme ) avait été mordu par un chien enragé.

Le Vendredi-Saint, en venant de Visiter ses malades, il se plaignit d'une douleur au bras, puis à l'épaule, puis à la gorge. Il se sentit perdu. On accès de rage se déclara. «Liez-moi ! liez-moi ! s'éeria-t-il aussitôt, et faites venir M: le curé. »

Le curét quoique malade lui-même, accourt. Il trouve l'infortuné docteur couvert de sang... Dans son accès de rage, il s'était arraché les cheveux et déchiré la figure. «Oh! que je souffre! M. le curé, que je souffre! Oh! qne j'ai besoin de Dieu! priez, oh! priez bien pour moi. Embrassez-moi ? » Le prêtre l'em- brasse avec transport, et se met à pleurer et à prier.

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Le malade en fut soula é, s'en montra re- connaissant; il parut se recueillir : «Ah! voilà bien le bon prêtre, dit-il, voilà ce que c'est qu'un curé; les autres ont peur de me toucher la main; lui m' sse eouvert de

sang!. . .Oh! que vous me faites de bien ! je vais mourir, monsieur, mon ami, mais Dieu me soutiendra... Vous ne m'abandonnerez jamais, n'est ce pas? » Le curé le lui promit, et il a tenu parole... Après que le malade i ;i1 communié, comme il - était plus calme, le prêtre lui disait que Di u pouvait le rendre à la vie : « Oh ! je le lui demande, dit le docteur avec attendrissement; je le lui demande pour ma pauvre mère.,.., jour ma malheureuse femme..., pour mon enfant. Il se recueillit et ajouta : Mon Dieu ! mon Dieu! je m'aban- donne à votre sainte volonté ! »

ïl y avait des assistants tout émus. Le malade se tourna vers eux : «Mes amis, leur dit-il, on ne fait pas d'bypocrisie en présence de la mort : je vais mourir; sou venez- vous de la parole d'un mourant : le catholique qui n'ose pratiquer sa religion est un lâche! Le curé se mit à faire des prières. « Oh ! que la prière me rafraîchit ! dit le malade. Mes amis.

priez, oIj : pri z.» A un tor-

turait sa I ûiK lie écuo s ercl a ta n ;ùn

du bon curé : «Oh.! <jue votre présence me

fait du bien' I : mon Diew,

que j s tiffre :... j sais qi e n m;: ;ïn: i st immortelle. Mon Dieu, mon Dieu, abrégez ma souffrance; fait s que j'aide li utôt vers vous. M. le curé, i! s un iasl

de calme, je voudrais vçir m n épouse..., ma mère... et ma sœur... Oh ! elles m'aimai ul tant ! » Le prêtre le pria d'être fort pour elles ( t d'abréger une visite qui pourrait leur ê i funeste.

Au moment favorable on fit entrer sa sœur : en voyant son frère, elle s'évanouit. Revenue à elle-même, elle se jeta sur lui ? « Nous nous * sommes toujours, aimés., ma pauvre sœur, lui dit le malade. Mais, vois tu, nous nous re- trouverons au ciel... Aime toujours bien ma mère... » Et on arracha de ses bras la mal- heureuse sœur qui se mourait.

On introduisit sa mère, veuve, âgée, in- firme. Elle se précipite sur le lit de son fils qu'elle inonde de ses larmes : « Bonne mère, ob ! je vivais pour vous... Dieu veut que je meure. Soumettons-nous, la vie est bien

courte ; vous viendrez me rejoindre dans le sein de Dieu... Ah ! que je vous aimais bien ! 'et que tout ce que j'ai fait pour vous n'était rien auprès de ce que votre amour a fait pour moi!... Bonne mère, pauvre mère! que je vous embrasse pour la dernière fois..., que mon dernier baiser vous dise que vous avez un fils au ciel... Adieu! adieu! »

Rempli d'un courage surhumain, le malade demanda son épouse : « Mon Dieu, dit-il , donnez-moi le courage dont j'ai besoin. » Madame V. fut enfin introduite par le curé en larmes... On la soutint jusqu'au lit du mou- rant. Après un silence interrompu par des soupirs étouffés : « Ma chère Louise, ma chère amie .. oh ! rappelle ta foi! C'est un voyage que je vais faire... eh bien ! je ne reviendrai pas, moi... Toi, tu viendras me rejoindre un jour... au ciel!... sont ton père et ta mère. Je sens que je vais au ciel; toi tu resteras pour pr ndre soin de ma mère... Oh! que je vais prier là-haut pour toi, pour ma mère, pour vous tous ! Oh !' mon Dieu ! mon Dieu ! soute- nez-moi. . que votre volonté soit faite! »

Les assistants ne pouvaient plus soutenir cette scène de désolation ; ils emportèrent la

9 jeune dame Foide el froid.'. Un accès de ragi survint; on entendît des hurlements mêlés à des prières...

!.<■ jour de Pâques an matin : «J'ai froid aux pieds, dit le malade; mettez-moi mes couvertures; récitez les Litanies de la très- sainte Vierge. Je vous recommande mon épouse..., ma mère... » Sa tète se pencha. Le docteur V. était mort comme il avait vécu, plein de foi, plein d'amour et plein d'espé- j'iiie ■.

( Petites Lectures. )

II. Éducation.

L ENVIE.

11 n'est fien de sacré pour un cœur que l'envie aigrit et infecte. Elle a porté le jaloux Caïn à tremper ses mains dans le sang de son frère ; elle a excité la haine homicide de Salii contre David, le héros d'Israël, à qui ce prince ne pouvait reprocher que d'avoir trop hien servi la patrie, et d'avoir obtenu dés

10

éloges trop justement mérités; elle a fait commettre le plus grand de tous les crimes, le déicide. On est capable de tout, dès qu'on peut être ennemi du mérite et de l'innocence. Incapable de tout mérite, l'envie ne le peut souffrir dans les autres. Un officier d'un génie très-médiocre, envieux de la gloire d'un capitaine qui avait fait une belle action, écrivit à M. de Louvois que ce capitaine était sorcier. Le ministre répondit : « Monsieur, j'ai fait part au Roi de l'avis que vous m'avez donné. Sa Majesté m'a dit là-dessus que, si le capitaine était sorcier, pour vous, vous ne l'étiez pas. »

les deux r.\GEs. (Légende.)

Sainte Élisabeh, reine de Portugal avaitun page très-vertueux, auquel elle confiait ordi- nairement le soin de distribuer flux pauvres ses secrètes aumônes. Mais un autre page, jaloux de la faveur dont jouissait son confrère auprès delà pieuse souveraine, le calomnia si odieusement auprès du roi, que celui-ci ré- solut immédiatement la mort du prétendu coupable.

1)

Dans ce fatal projet, il alla trouver le maî- tre d'un four à chaux, qui cuisait son plâtre à quelque distance d s murs de sa capitale, et lui dit : Je vous enverrai dans la journée un page qui vous demanderai le&ordres du roi sont exécuté?; à ces mots, saisisst z le et le jetez dans le fnir pour qu'il soit consumé par les flammes; il a mérité la mort.

De retour à son palais le roi manda près de lui le page inculpé : Va, lui dit-il, va de- mandi r au maître des fours à chaux, qui sont hors de la ville, si mes ordits ont été exécutés. Et le jeune page se mit en route. Mais, en traversant la capitale, il entendit tinter pour une messe dans une église devant laquelle il passait. Il obéit à sa religion in- time , entra dans la chapelle se disait la sainte messe, durant laquelle il pria jusqu'à la bénédiction finale du prêtre.

Cependant le roi de Portugal, impatient de connaître le résultat de sa vengeance, si ter- rible et si prompte, envoya un second page au maître des four à chaux, pour lui deman- der si les ordres du roi avaient été exécutés. €e page était précisément le calomniateur. A peine eut-il prononcé le dernier mot de

12 l'interrogation fatale, que, saisi par les ser- viteurs et les ouvriers du maître des fours, il fut lancé et roula dans les flammes qui le consumèrent avec la rapidité de la foudre».

La messe étant terminée, le page que le roi avait envoyé le premier, arriva au four à chaux, il lui fut dit que les ordres du roi avaient été exécutés. De retour au palais il parut devant le prince, qui pensa mourir de stupeur. Mais apprenant ce qui s'était passé, il adora les jugements de Dieu, et renuit justice à l'innocence du vertueux page.

(Magasin de l'Enfume chrétienne.)

SB? Géoi B"a^-Iîie.

LÏÏLAC DE ClSKNIZ.

11 existe dans la Carniole, à six milles de Laybach, auprès du village d'Àdelsberg, re- marquable par sa grotte à stalactites, un lac très-curieux à cause du pbénomène singulier

.13

qu'il présente. Tantôt il est rempli d'e contient des unissons, tantôt c'est une terri ferme dans laquelle on peut semer du blé el récolter de riches moissons. M. Depping en a donné une curieuse description dans la col- lection du Voyageur moderne.

a Au fond du hc de Ciskniz il y a dix- huit cavités qui donnent une retraite aux eaux et font disparaître le lac en entier. Les eaux s'engouffrent d'abord dans l'ouverture appelée Kumine, et disparaissent pi u à peu, de manière qu'au boutde cinq jours, le fond du lac se montre autour du gouffre ; au bout de cinq autres jours, on en voit autant autour de l'ouverture nommée Vodonas. 11 en faut cinq autres pour faire disparaître Feau autour du trou de Keschelto; deux autres trous, ceux de Kotvn et de Levische, se vident pareillement et nécessairement au bout de cinq jours.

» Ainsi, la retraite totale du lac se fait en vingt-cinq jours, à la tin desquels le fond en est à sec, et offre, au lieu d'une nappe d'eau, un terrain fertile, très-propre à la culture, Dès-lorSj on commence à le labourer et à le semer. Une nouvelle végétation couvre bientôt ce lieu, trois mois après les paysans y récol-

51..

li

tenl du foin et du millet, el chassenl du gi- bier là où; peu auparavant, il n'y avait d'êtres vivants (; s poisson aent

au boni de quatre mois que le lac se remplit d nouveau.

» On voit d'abord l'eau s'élever avec vi- gueur de différentes ouvertures, à un i hauteur de k à 12 mètres; puis, dans un espace très- court, remplir lout le bassin; et, quoiqu'il lui faille vingt- cinq' jours pour disparaître, elle n'emploie que vingt-quatre heur s pour repa - rail re entièrement. »

Causeries du foyer domésh nous trouvons la description d'un lac jonis-

dans le Kârz, du village de Brëitungen.

i 1 : temps le plussec, ce lac se remplit n tout à coup sans qu'on puisse en de virier la cause; l'e '' d'une roche appelée

Bûvernstein3 et déverse dans la fosse une telle masse de liquide, que lés champs et les prés en sont inondés. Ou; lquefois même il est arrivé que l'écoulement de l'eau a eu lieu pen- dant la nuit et en si grande abondance, qu'il était impossible de moissonner les blés qui s'y trouvaient. L'eau reste ainsi quelques

-. ou bien plusieurs mois, quelque- fois même une année ; mais ce cas est rare; puis cil."* s'engouflre sans qu'aucun phénc- mène puisse fain | sa retraite dansles

cavernes creuséi s à travers les roches calcaires, et on ne la voit plus apparaître à la surface que sous la forme d'un petit ruisseau. Les poissons mêmes, pii, chaque fuis, s'y mon- trent , sans que la main des hommes ait i u besoin de les y déposer,-se retirent en même temps que le lac dans les fissures des rochers. » Ce sont des Lroch't s que l'on prend comme dans le lac de Ciskniz ; dans ce dernier on les pêche en très-grand nombre , surtout quand les eaux sont resté s lôngfemi s sans se retirer. En 10^5, lorsque le lac disparut pour la première fois après cinq ans de repos, l'ouverture de Keschetto seule fournit au premier pêcheur vingt et une charretées de poissons, au second dix-sept, et au troisième neuf. Ce qu'il y a de fâcheux, c'est que le tonnerre tombe quelquefois dans le lac et tue un grand nombre de ses habitants. On fait revenir ceux qui ne sont qu'engourdis en les mettant sur-le-champ dans l'eau fraîche.

16

IV. Persoaîîïases célî'Bn'es.

JOSEPH.

Joseph, fils do Jacob et de Raehel, n'avait, que seize ans lorsqu'il conduisait avec ses frères les troupeaux de son père dans les ri- ches pâturagi s du pays de Chanaan. L'inno- cence, la modestie, la douceur, étaient comme naturelles à cet enfant ; sa docilité,, son obéis- sance, étaient parfaites. 11 fut impossible à Jacob de dissimuler sa prédilection pour ce' fils vertueux. Aussi ses autres enfants en conçurent- ils de l'envie. Une robe que Joseph r eut de son père, le rapport qu'il fit d'un crime que ses frères avaient commis, mais surtout le récit de deux songes^qui présa- geaient sa grandeur future, et que cet enfant il;1 grâce eut la simplicité de raconter, toutes ces choses excitèrent contre lui la haine de ses frères.

Un jour qu'ils étaient allés près de Sichem

17

faire paître les troupeaux de leur perej J< - - ph l'ut envoyé près-d'eux afin de voirsi tout était en bon état. L'apercevant venir: « Voici. dirent-ils, notre songeur, tuons-le, non- di- rons qu'une bête sauvage l'a dévoré. » Ruben, l'ainé do tous, entendant ce discours, leur seilla de le jeter dans nue citerne sans eau; car il avait dessein de l'en tirer, et de le rendre à son père. Ils le dépouillèrent de sa pi ibe e! le jetèrent dans la fosse ; mais ils l'enli- rèr nt bientôt pour le vendre à des marchands ismaélites qui allaient en Egypte. Ils convin- rent de vingt pièces d'argent, et le leur livrè- rent. Ces malheureux trempèrent sa robe dans le sang d'un chevreau qu'ils avaient tué et l'envoyèrent à leur père, en lui faisant dire : « Voici une robe que nous avons trou- vée, voyez si ce n'est pa- celle de votre bis.» Jacob la reconnut aussitôt et s'écria : « C'est vraiment la robe de mon fils : une bête cruelle l'a dévoré '. une bête a dévoré Jo- seph!.... » Ayant déchiré ses vêtements, il le pleura longtemps. Il ne vuulait recevoir aucune consolation. « Je pleurerai toujours j disait-il, jusqu'à ce que je descende dans la tombe avec mo n fils. »

31...

18 Cependant Joseph captif était arrivé en Egypte. Ce qui est admirable, c'est qu' on n'entendit sortir de la bouche de ce charmant enfant aucunes paroles de plaintes ou de mur- mures contre sers frères qui le séparaient de son père chéri, et le plongeaient dans la ser- vitude. Le Seigneur était avec lui ; aussi les marchands n'eurent pas de peine à le vendiv. Putiphar, l'un des principaux officiers de la cour de Pharaon, l'acheta; dès lors il remarqua que tout réussissait merveilleusement entre les mains de son jeune esclave, en sorte qu'il lui donna toute son effection et toute sa con- fiance, et l'établit pour gouverner sa maison. Il n'eut pas lieu de s'en repentir, le Seigneur bénit tellement ses biens, tant à la ville qu'à la campagne, qu'il n'avait d'autre soin que de se mettre à table et de manger, dit l'Écri - tare.

L'esprit de discorde vint troubler l'heu- reuse harmonie qui régnait dans cette mai- son. La femme de Putiphar poussa l'impu- dence jusqu'à calomnier, de la manière la plus infamante, l'innocent Joseph, auprès de son mari qui, trop crédule à ses paroles, entra dans une grande colère , et fit' jetei

19 Joseph dans la prisou l'on retenait ceux que le roi faisait arrêter ; mais le Seigneur, en qui ce saint jeune homme mettait toute son espérance, ne l'abandonnait pas; il lui fit trouver grâce auprès du gouverneur qui lui confia le soin de tous les détenus.

L'échanson et- le panne tier de Pharaon ayant offensé leur maître furent envoyés dans la même prison. Un matin. Joseph, à qui il-, avaient été confiés, s"étant rendu près d'eux, et les trouvant tristes et rêveurs, leur en de- manda le sujet ; ils répondirent qu'ils avaient eu chacun un songe qui 1< s plongeait dans une grande inquiétude, et ils le lui racontèrent. Joseph, les ayant entendus, dit à l'échanson que. dans trois jours, Pharaon le rétablirait dans sa première charge, et qu'il lui présen- terait la coupe comme il avait coutume de le faire auparavant. « Souvenez-vous de moi, ajouta-t-il, lorsque vous serez rentré en grâce, car c'est injustement que j'ai été jeté dans cette prison obscure. » Il le lui promit. Pour le pannetier, Joseph lui annonça que, dans le même intervalle de temps, on lui trancherait la tète , et que les oiseaux du ciel mange- raient sa chair.

'20 Rentré dans les bonnes grâces de son maî- tre, l'échanson avait complètement oubli''1 sa promesse, lorsque, deux ans plus tard, Dieu, satisfait de la constance et de l'admirable ré- signation de son serviteur Joseph, envoya à Pharaon deux songes. Plongé dans un pro- fond sommeil , il vit sept vaches grasses sor- ties du Nil qui paissaient dans les marais; puis, sept autres maigres qui se mirent à dévorer les premières. Il vit encore sept épis parfaitement pleins qui forent dévorés par sept autres extrêmement maigres. Le roi, saisi de frayeur , consulta les sages de L'E- gypte : il ne s'en trouva pas un seul qui pût interpréter ce qu'il avait vu. C'est alors que l'échanson se ressouvint de Joseph. Il le fit aussitôt tirer de prison et le présen- ta à Pharaon qui lui raconta ses songes -n le priant de les lui expliquer. «Ce sera Dieu, dit Joseph, et non pas moi, qui rendra à votre majesté une réponse favorable. Les deux songes. signifient la même chose. Les sept vaches grasses et les sept épis pleins sont sept années d'abondance; les sept autres mai- gres et les sept épis vides sont sept années '.l'une famine affreuse. Que le roi, mon sei-

21 gneup, choisisse un homme sage; qu'il lui donne le commandement sur l'Egypte, afin qu'il établisse des officiers dans toutes les provinces qui, pendant les sept années de fer- tilité, amàss w! des vivres dans~a*es - niers publics, pour 1< s sept années de famine.» Cette explication el ces consjeils plurent telle- ment à Pharaon, qu'il s'écria: «Où pour- rions-nous trouver an homme aussi rempli de l'esprit de Dieu q . celui-ci ? » et s'adres- sant à Joseph : « Je vous donne autorité sur tout mon peuple, il n"\ aura désormais que moi au-dessus de vous. » En même temps il tire l'anneau qu'il avait au doigt et le mit au doigt de Joseph; il le revêtit aussi d'un-' rohe de fin lin, et lui passa autour du cou un collier d'or; il le fit monter sur un de ses chars, ordonnant à un de ses hérauts de crier que tout le monde eût à fléchir le genou de vaut lui, et voulut qu'il lût appelé le sauveur du monde. Joseph avait pour lues trente ans.

Vous voyez, mes enfants, que Dieu n'a bandonne pas ceux qui espèrent en lui ; 1 gloire à laquelle ii éleva son fidèle serviteur i st la figure de celle qu'il réserve à ceux qui supportent sans murmure et avec résignation

les mauvais traitements, les calomnies, les persécutions qui leur arrivent en ce monde. (La suite au prochain 'numéro.)

V. îîorrcaux littéraires.

TMduction t>e l'hymne Ave, maris Stella.

Salut, mère d'un Dieu pour sauver le monde, Porte heureuse du ciel, étoile de la mer ; Dont la virginité merveilleuse et féconde Ouvrit le paradis et désarma l'enfer.

Marie! au nom du ciel, Gabriel vous salue : D'Eve, vous réparez la faute et les malheurs. A ce signal heureux la terre s'est émue : Ah ! donnez-nous la paix, en nous rendant meilleur.-

Dissipez de nos sens les erreurs déplorables ; De nos crimes rompez les funestes liens ; Eclairez nos esprits ; à vos enfants coupables Epargnez tous les maux, obtenez tous les biens.

Montrez que le Très-Haut vous appela sa Mère ; A son trône par vous que nos vœux soient transmis. Peut- il vous refuser ? Jésus est notre frère, Et c'est pour nous servir qu'il devient votre fils.

0 Vierge incomparable! auguste protectrice, D'un Dieu juste et vengeur fléchissez le courroux.

: tnts du souffle ijnpur du \ ice : ndez no-; cœurs chastes et doux, pas; Armez-nous de courage \\ wv braver I a«ts d'ua monde criminel.

Faites nous voir Jésus après ces jours d'orage, Et jouir avec vous d'un bonheur éternel.

■■■ a. Dieu, gloire et louange au Père ! et fait aimer ses lois; GÎQ're à vi uSj ô Jésus! dont Marie estja Mère ; d'une Vierge, et mort sur une croix.

Hisîtûrc ni»t8ireHe (1) el Phy- sique.

DE LA CHALEUR OU CALORIQUE.

Il existe un fluide d'une incomparable sub- tilité, dans lequel on n'a pu découvrir aucun signe dep -saut ur, qu'on ne peut saisir, etqui pénètre avec ame facilité étonnante tous les corps; ce fluide impondérable, insaisissable, incoercible , nous manifeste sa présence par y principaux effets, par la s?nsation de- la chaleur qu idfaitéprouverlorsqu'ons'approcke d'un corps il se trouve en grande quantité,

(1) Dans la 47e livraison, \ Va t. Histoire naturelle, page 2(i, lignes 22 tt 23, au lieu de décimètres, lisez

coitiiuvtres.

el par la dilatation, c'est-à-dire par une aug- mentation de volume qu'il produit dans ce même corps : ce fluide se nomme chaleur ou

calorique.

Le calorique est donc un fluide invisible qui se trouve répandu partout, qui pénètre tous les corps et en sort avec la même facilité. La terre » n recel ! une quantité extraordinaire; plus on pénètre dans son intérieur, plos -a , m nie. Les dogues s'accordent à dire qu'à l kilomèt. île profondeur éÛe peut mettre : eau en ébullition, à 30 kilomèt. elle doil sez forte pour nu ttre en fusion les

métaux les plus durs, et à 60 elle serait ca- pabl . oiliv les diamants. Quelle serait donc sa force à 6,366 , c'est-à-dire au centre de laierre!

La chaleur a la propriété d'écarter les par- ti s infiuimenl petites dont les corps sout composés, de les dilater, d'augmenter leur volume. Ci tté propriété de la chaleur est ba- lance,- par une propriété opposée dont jouis- sent ces petites parties ou molécules, qui est de s'attirer I s une- le- autres. En sorte qu'il s'é- tablit, entre cette attraction na turelle des molé- cules elles efforts de la chaleur pour les sépa-

rer. une lutte quis'offrepartoutdansla uaï

Approchez du feu un morceau de - bientôt vous n'aurez plus que de l'eau, con- tinuez à chauffer celte -au. faites-la bouillir, die diminuera, et, au bout de quelques in- stants, elle aura entièrement disparu. La rai- son de cela est que la grande chaleur écartant lés molécules, l'attachement est oV venu extrê- mement faible, les molécules se sont sépaiées au point que le corps est devenu liquide, puis tout à fait invisible. Ainsi un même c rrps, sui- vant que la chaleur écarte plus ou moins - - molécules , peut se transformer de solide en liquide et de liquide en vapeur.

Sous l'influence du Calorique, les barres de fer se dilatent, s'allongent, en sorte qu'on s'en sert avec avantage pour redresser des murail- les ; un grand nombre de métaux s î liquéfient, il en est même qui passent à l'état gazeux.

Tout le monde sait quelle puissance le ca- lorique exerce sur la vapeur, comme il la di- late, et quelle force prodigieuse il lui imprime.

Supprimez le calorique, l'homme, les ani- maux, les végétamx ne pourront plus subsis- er. Et puis les parlies infiniment menues, ou les molécules qui composant les eorp"-'. ne

26 se touchent j»,; s, le calorique y étant toujours en opposition. Ces molécules tenuVnt conti- nuellenn'ntàsi' rapprocher ; faites disparaître l'obstacle, c'est-à-dire 1 1 chaleur, elles as rap- procheront ; et qui sait? l'univers condensé sera peut-être réduit à la grosseur d'un petit caillou, d'un grain de sable.

LE ROARD PECHEUR DE CRABES.

La Norvège, cette région inhospitalière, ex porte chaque année une quantité prodigieuse de crabes, deliomards et de langoustes, qu'on prend le long de ses rives, soit à la main, soit au moyen de filets de fer qu'on traîne au fond de la mer. Mais comment, me direz- vous, fait le renard pour les pêcher, lui qui n'a ni mains ni filets? Votre question est juste; mais pour vous répondre, je vous dirai que le renard est rusé, qu'il a une queue, laquelle queue lui sert de mains, d'hameçons et de filets. Voici comment. 11 parcourt le rivage ; sitôt qu'il aperçoit un crabe cherchant sa proie au bord de la mer, il s'approche doucement, s'étend tout de son long en plaçant le bout de sa queue dans l'eau. Le crabe s'imaginant que

27 celte queue est le corps il i quelque animal mort, la saisit avec ses pinces. Aussitôt le perfide renard la relève précipitamment par- dessus sa tète, et rejette le crabe sur le sable. Alors la question de « qui de nous deux dî- nera ? » est bientôt décidée, et

Maitiv renard, qui certes nlest pas bête, En un instant du crabe s'est gorgé, Et" ce dernier, qui s'était mis en tète D'4tre mangeur, au contraire est mangé.

VII. Hygiciae.

DES ENGELURES.

Lorsqu'on a les pieds ou les mains engour- dis par le froid, il faut, quand on entre dans un appartement, éviter de se présenter de. suite au feu. On doit attendre au moins que le plus fort du froid soit passé, avant de s'en approcher, En se comportant autrement, l'on s'expose à gagner des engelures aux pieds ou aux mains, selon que les unes ou les

98 _

28

autres de ces parties auront été exposées les premières au feu.

Lorsqu'on est mouillé, il faut changer de suite de linge et de vêtements. Rien de plus pernicieux^ et de plus capable de causer des rhumatismes aigus, dus douleurs chroniques, que de laisser sécher ses habits sur soi. Bien des personnes sont devenues perdues de leurs membres par cette imprudence.

%I1I. BîBîSaB&Srie et «I^eosiverie».

Il CINES DE NIXIVE.

Une personne de Bourg a reçu de jNinive Ja lettre suivante, émanant d'un membre de la commission envoyée par le gouvernement français pour faire des fouilles sur les ruines de cette antique cité :

« Ninive, 5 octobre 1853.

» Vous Savez sans doute que je suis parti

29 pour la Turquie d'Asie , dans la province qu'où appelle l'Assyrie, attaché à la missi i scientifique de Mésopotamie en qualité de photographe et d'ingénieur civil : cette m s- sion est du plus haut intérêt pour ! histoire.

» Nos instructions étaient celL s-ci : retr< u- Verles ruines de l'ancienne Ninive, cette ville qui joue un rôle si important clans l'his- toire saint' , et dont le nom remplit tout* - s fiages la Bihle. Rendus sur les lieux, nous croyions qu'il était bien difficile, sinon ini-

;sible, d'envoyer à l'Académie des no;/ - les de Sémiramis, de Saigon, de Sennai rib, de Sardanapale, < te. Après six mois de recherches inutiles, avec trois cents ouvriers portant la bêche sur une épaule et la lance sur I'autre; comme les anciens Juifs, nous com- mencions à désespérer, lorsque, par un heu- reux hasard, nous avons eu le bonheur de découvrir une des portes de cette ville ai - que, la première fondée d- puis le déluge.

» Cette porte, véritable arc de triomphe, ornée de peintures en briques émaillées, de sculptures, bas-reliefs, supportée par deux énormes taureaux en marbre don; je vous en- voie le dessin, avec sa têti In

30 d'une tiare el ornée d'une barbe énornv . nous a f;tit pénétrer dans la ville, nous avoue ouvert les choses les plus surpre- nantes et les plus extraordinaires.^ maisons, palais, statues, bas reliefs, tous les métapx connus de nos jours : or, argent, fer, acier, plomb, cuivre, cylindr s, cachets inscrits et seul}, tés, on plutôt gravés. Aussi ces messii urs de Paris sont dans le ravissement.

» Nous.avons encore découvert une infinité d'inscriptions, mais écrites dans une langue si ancienne et si étrange-, que personne n'a encore pu, jusqu'à présent, en déchiffrer un mot, quoiqu'un savant anglais prétende que

ceci I ) signifie Gabriel ; je compare celte

écriture à une poignée de clous jetés an ha- sard contre un mur. Ce qui ajoute à l'intérêt de nos découvertes, c'est l'existence, à quel- ques pas de Mossoul, du tombeau de Jouas et celui du prophète Nahum, qui tous deux avaient prédit la ruine de Ninive.

IX. Variétés.

MONSIEUR DE CB \'\

Un Gascon s trouvait un jour, au milieu d'un bon nombre d'étrangers, en tète à têt. Provençal, rond comme une mappemonde, et tellement brûlé du soleil qu'il avait la couleur du bitume.

M. de Crac, pour intéresser la société, se mit en tète de raeonler quelques-unes de ses aventuri s, et c fut avec l'accent gascon bien prononce qu'il s'écria :

CadédiSj capitaine, la belle chose qiv les voyages '.— Troun de l'air! mousseu, à qui le dites-vous ? J'ai voyagé en France, eu B 1- gique, m Angleterre ; c'est beau, mais c'. st peu drôle, et les mœurs n'y sont pas plus extraordinaires qu'une chope de bière, qu'un morceau de bifteck, ou tout simplement le pot-au-feu. Parlez-moi de l'Espagne; c'est le pays des fandangos, des cigarettes et du tabac superflu!! Avez-vous jamair* puise

32 dans une tabatière espagnole, capitaine ? Za'mais, ze ne prise pas, ze cique. Chacun son goût ; moi je prise, je fume, je chique, au point que la régie devrait me donner une pension. En Espagne, capitaine, je dépensais trois livres de tabac par jour, cinq cents ci- garettes, une carotte de tabac longue d'une aune, mais le tabac d'Espagne est si succu- lent, si aromatisé, si pénétrant, si parfait ! Tenez, j'ai fait dans ce pays-là une chasse aux lapins que Ton n'exécute nulle part ailleurs. Point de chiens, point de fusils, pas même de filets. Ze comprends, dit le gros Pam- phile, on leur z'y met un grain de sel sur la queue.

Point du tout, cadédis ! on prend sa taba- tière, et l'on s'en va, en s; promenant la canne à la main, on va droit au terrier, et là-bas les terriers foisonnent. Devant chaque trou de lapin, on met une pierre bien pMe ; on verse sur cette pierre trois ou quatre prises de ta- bac ; l'on se retire dans un coin, et l'un pré- pare sa gibecière. Le tabac commence par développer son arôme ; le lapin, réveillé par le parfum, sort tout dpû.cemënt de son terrier ; il est très-friand dulabac d'Espagne, il s'ap-

oo

pro >be d i a pi sn i . et il renifle Le tabac connu i an deux glouton qu'il est : il en rë- niil tant i si bien, que tout à coup : Ahh- ahij il ri rnue, se frappe le nez sur la pierre, et, comme il a le museau très-délieatj il reste mort sur le coup. Autant de pierres, autant de lapins. J'en ai pris comme cela une douzaine en moins d'un petit quart d'heure. Toute l'assistance se mit à rire, et le capi- taine Pamphile seul ne se dérida pas. Mous- seu, dit -il au Gascon. a v /.-vous zamais voyazé dans le Piémont ? Cadédis ! je l'ai parcouru dans tous les sens, en long, en large, en dia- gonale; je n'y ai jamais rien trouvé d'extraor- dinaire. — ïroun de l'air ! c'est que vous êtes trop z 'une ; tel que ze vous parle, ze suis été à Turin en 1812, z'ai trouvé des res- taurants comme il y en a peu, comme il n'y en aura zamais : z'entre à la première cantine venue, et ze demande de quoi lester mon na- vire. — « Pardon, mousseu, me dit le maître delà maison ; c'est moi que ze vais vous ser- vir; mais, si vous voulez Lien venir par ici, nous allons faire une opération préalable. Troun de l'air ! une opération? Ne vous effrayez pas il n'y aura pas de sang

- 34 - ndu. » Il m conduisit sous un hangar ■jù se trou grande balance. «Don-

nai p ine de vous asseoir, » me dit le coq en ch f; et il me pèse comme une véri- table balle de coton ou comme un gros sac de café. C'est S 18 kilog. , qu'il me fait; zé- iais fort et robuste alors, mais auzourfl'hui _;rins m'ont fait fondre; ze ne peso plus que cent Z" restai dans la balance tranquille comme -. .iiit qu'on allait m'apporler ma ration ; mais l'aub rziste il me fait des- i il me c »ndiiit à la salle à manzer: ;:: boiSj ze nranze, ze mairze encore, z'avais tant d'appétit alors ! Depuis, tes çagrins do- mestiques... Eofin c'est connu c la! Quand z'ai fini, ze demande la noi i à yer. Le même mous nduitàlaba»

lance, et il nie repèsé : « Moiisseu, qu'il me dit, c'est 118 kilog.; à deux francs çaque, ça fait quatre francs. » Ze paie, ze me relire, et ze suis content.

Le lendemain, ze dresse mon plan de ba- taille : ze mets deux grosses pierres dans les poees de ma tunique, et ze me présente au restaurant. On me pèse ; ze laisse passer, par

35 i'"I:: uBi rziste qui m'avait coiiduit.

Ze file la main clans la poce; et ze me dé- barrasse de mes deux cailloux. Ze vais manzer comme quatre, el ze me fais repeser : avant le r. | ,. ze pesais 118, après le rer,; . sais 116. a :. dit-ze à l'ai I

c'est deux kilog. que vous me devez. - Mous- - î;- trop zuste; deux kilog. à 2 francs

celja fait i fra ics. » Et il me remit ï francs. Voilà commeal z'ai manzé deux zours et z*ai ' it franc- dans la ville d>i Tuj

■'■ tout entière partit d'un iim et :,I. de Crac s'écria : « Cad: tous me montrez un restaurant il, je vous donne un merle blanc. Mou iiquement le Pro-

vençal, montrez-inoi une fois votre casse au '. 1 1 troun de Pair ! ze vous le zure, ze vous retrouverai l'auberze à la balance! o (Magasin de l'Enfance ckrétia

36

X. Hnximes et a»ri>vea*I»/'s.

Ne l'émettez pas au lendemain la bonne action que vous pouvez faire aujourd'hui.

Quand tu es seul, songe à tes défauts ; quand tu es en compagnie, oublie ceux des autres.

Pardonne tout aux autres et rien à toi.

La poule sauvage ne se désaltère jamais par une goutte d'eau qu'elle n'élève ses re- gards vers le ciel.

Le mot de la dernière énigme est : Une fosse.

ENIGME.

Sans eau, je bois de l'eau, Triste effet du destin! Mais beaucoup d'eau Me fait boire du vin.

DE L'IMPRIMERIE DE BEAU", A SAINT-GERUAIN-ENLAYE.

RÉCOMPENSES

HEBDOMADAIRES ET MENSUELLES.

DEUXIÈME ANNÉE

" ". IV3T u»i:=-.ïi: ,

S\I>T JEAN L EVAPtGKbISTE.

RÉCOMPENSES

HEBDOMADAIRES ET MENSUELLES ,

ou

LECTURES

MORALES, INSTRUCTIVES ET AMUSANTES,

DESTIRÉES

AUX ECOLES CHRÉTIENNES. DEUXIÈME ANNÉE.

A TXRSAÏIXES ,

CHE? L'ÉDITEUR, BEAU J", mPRHRCK, Rae Satory, 28.

PROPRIÉTÉ.

SOMMAIRE

I. Religion Morale. l'n régiment île cuirasài rs en pèlerinage.

II. Education. Amour filial. Amour fraternel.

III. Histoire. Recbcrches sur les rois de France qui se sont distingués par leur piété. Extrait d'un rapport adressé à M. le ministre de la ma- rine.

IV. Personnages célèbres. Le général Cambronne. V. Morceaux littéraires. Un Enfant à son ange

gardien.

VI. Histoire naturelle. De la Carpe.

VII. Hygiène. Dangers, des fourneaux.

VIII. Industrie.— Moyen de détruire le; limaces. IX. Variétés. Un Chiffonnier. X. Proverbes et Maximes. Locogr phe.

-fiîSE-O

2îi*ÏJgi;iJï et SI«s-iî3<*.

IX HLGIMtXT EE CUIRASSIERS EX PELERINAGE.

Un spectacle tout à fait inattendu et bien consolant pour la foi a été donné le 27 décem- bre 1853, dans l'église de Notre-Dame-de- Foùrvières, par un des régiments de cuiras- siers en garnison à Lyon.

La promenade du régiment s'était dirigée vers le sommet de la sainte colline. Arrivé» dans le voisinage du cloître de Fourvières, les cavaliers mettent pied à terre, et tandis qu'un petit nombre d'entre eux veillent à la garde des chevaux, sur la place, tous les autres, le colonel en tète, se dirigent vers la porte du sanctuaire.

Le colonel demande à parler à M. le recteur afin d'obtenir que toute sa troupe puisse rendre ses 'hommages à Notre-Dame. M. le recteur s'empresse avec joie d'accueillir cette demande , et propose au colonel de ter- miner la visite par la bénédiction du Saint-

6 - Sacrement, ce qui est accepté avec reconnais- sance.

Les soldats entrent donc, et saluent l'image de la Vierge ; la musique exécute en son hon- neur de brillantes fanfares Le Tantum ergo est ensuite chanté, et tous reçoivent la béné- diction, le genou en terre. Le drapeau était venu se placer vers la table de la communion avec son escorte ordinaire, et le sanctuaire et le chœur étaient occupés par le colonel, le lieutenant-colonel, les chefs d'escadrons et le reste de l'état-major du régiment. Les chants finis, le R. P. Maurel, accouru à la cérémonie, et qui n'a pas même eu le temps de prendre un surplis, adresse du sanctuaire quelques paroles aux soldats, qui l'écoulent avec la plus grande attention. Se livrant à l'inspira- ion du moment , le Père a rappelé quelques souvenirs qui devaient aller spécialement au cœur de son auditoire.

« Depuis le triomphe que Jean Sobieski remporta sous les murs de Vienne sur les infidèles, a-t-il dit, il fit toujours porter avec lui une image de Notre-Dame-de-Lorette, sur- montée de cette inscription : Par cette image de Marie, Jean sera vainqueur. Le maré- chal Suchet, chargé du commandement de

7 Lyon, en 1815, monta un jour à Fourrières, <■(, après avoir du haut du clocher observé sa ville natale, il entra dans la sacristie, et, .^adressant au prêtre qui remplaçait le rec- teur ? Monsieur l'abbé, lui dit-il, veuille: faire célébrer quelques messes à mon intention. Quand j'étais enfant, ma mère m'amenait souvent ici aux pieds de Notre-Dame ; je ne perdrai jamais ce souvenir. Le maréchal alla ensuite s'agenouiller en présence de Marie, il pria de tout son cœur. On attribue, Messieurs, la mort édifiante de cet illustre guerrier à son amour pour la Sainte Vierge.

» A l'exemple de ces hommes illustres, aimons la Sainte Vierge , Messieurs ; est-il si pénible de l'aimer ? Vous avez sur la terre une mère que vous aimez tendrement; Marie est votre Mère du ciel ! Aimez Marie : telle est la volonté de Dieu, qui a établi la Sainte Vierge comme le canal des grâces qu'il envoie à la terre ; aimez Marie, telles sont les inten- tions de l'Eglise, qui fait tout pour inspirer cette dévotion au cœur de ses enfants. »

Cette improvisation pleine de chaleur a fait couler plus d'une larme.

Après un nouveau morceau de musique* nos cuirassiers ont quitté le sanctuaire.

II. ^«ïaïfîjîâoïB.

AMOUR FILIAL.

C'est principalement dans la vieillesse, et lorsqu'ils sont faibles et infirmes que les pa- rents oht.besoin du secours de leurs enfants : c'est alors que ceux-ci doivent redoubler de zèle et d'affection.

Une pauvre veuve, souffrante et infirme, était privée depuis bien longtemps du plaisir si pur de prendre part au culte public, qui était un besoin pour son âme pieuse.

Souvent, lorsque le dimanche arrivait, elle disait à ses deux fils : « Combien je serais heureuse, s'il m'était possible d'assister au- jourd'hui à l'église : mais je suis faible et infirme, et la distance est trop grande d'ici au village, pour que je puisse y aller à pied. »

En disant ces mots, la bonne mère était triste ; car elle sentait le prix des réunions religieuses, et elle éprouvait un pressant be- soin de s'y rendre.

Ses deux fils, qu'elle avait élevés dans la crainte de Dieu, et qui cherchaient par tous

9 les m in eus p< issibles à lui prouver leur amour filial, se concertèrent ''usemblepour satisfaire son pieux désir.

Ils ajustèrent deux pièces de buis à an fau- teuil, en firent ainsi une espèce de chaise à porteur, y placèrent leur mère, et la trans- portèrent eux-mêmes à l'église, qui était éloignée de près d'une lieue; car ils habi- taient une ferme écartée, située sur le p n- chant de la montagne.

Tous les 'assistants furent touchés de la piété de la mère et du dévouement de ses enfants. On sema des fleurs sur leur route, et ces fleurs devinrent l'image des bénédictions que Dieu répandit lui-môme sur cette inté- ressante famille.

La piété sincère est la première des ver- tus-et la source du vrai bonheur; c'est par elle que les parents forment leurs enfants à la véritable sagesse, et que les enfants s? montrent reconnaissants envers leurs pa- rents.

AMOUK FRATERNEL.

L/heureus alliance, l'accord si naturel de sentiments et de volontés qui doivent régner

52.

10

entre des frères, avaient pour symbole chez les anciens deux pièces de bois parallèles que liaient ensemble deux traverses également distantes. A cet emblème qui exprimait aux yeux une idée touchante, les Grecs ajoutaient cette maxime : « Il n'en doit pas être de deux frères comme des deux bassins d'une balance, dont l'un ne peut s'élever qu'à mesure que l'autre s'abaisse. »

Le fils d'un riche négociant, nommé Dorval, s'était livré dans sa jeunesse à tous les excès; il irrita tellement son père en méprisant tous ses avis, que le vieillard, près de finir sa carrière, fit un acte par lequel il déshéritait son jeune fils, puis mourut peu après. Dorval, instruit de la mort de son père, fait de sérieuses ré- flexions, rentre en lui-même et pleure ses éga- rements passés. 11 apprend bientôt qu'il est déshérité : cette nouvelle n'arrache de sa bouche aucune plainte, aucun murmure in- jurieux à la mémoire de son père ; il la res- pecte jusque dans l'acte le plus désavantageux à ses intérêts ; il dit seulement ces mots : Je l'ai mérilé. Cette modération parvint aux oreilles de Genneval, son frère, qui, charm de voir le changement de mœurs de Dorval et

11

son admirable résignation, >a Le trouver, l'embrasse, et lui adresse ces paroles à jamais mémorables : a Mon frère, par un testament, notre père m'a institué son légataire univer- sel; mais il n'a voulu exclure que l'homme que vous étiez alors en vous déshéritant, et non celui que vous êtes aujourd'hui; je vous rends la part qui vous est due. »

III. Histoire.

RECHERCHES SUR LES ROIS DE FRANCE QUI SE SONT DISTINGUÉS PAR LEUR PIÉTÉ.

La France ne compte pas seulement des monarques fameux par leurs conquêtes ou leurs lois, comme Philippe-Auguste, Henri IV, Louis XIV et Napoléon Ier ; elle est encore fière de ses saints, comme Charlemagne et Louis IX. Voici une courte notice sur ceux qui ont été honorés d'un eidrfce public par l'Église.

1. Clovis. Tous les historiens regardent Clovis comme le fondateur véritable de la monarchie française, quoique plusieurs au- res rois aient gouverné la nation avant lui.

12 Mais ce qu'on ne saurait lui contester, c'est 'l'avoir été notre premier roi chrétien. Con- verti^ à la célèbre bataille de Tolbiac, il fut baptisé solennellement à Reims, par saint Rémi, le 25 décembre 196. Le sacrement de la régénération ne lui ôia pas, sans doute, son ambition et ses autres défauts; mais Clovis resta toujours fidèle à la religion, protégea l'Église, fonda et enrichit beaucoup d'éta- blissements pieux. Il fut enterré, en 511, dans l'église de Saint-Pierre et Saint-Paul, dite depuis Sainte-Geneviève; les religieux de cette abbaye faisaient autrefois sa fête du rite double le 26 novembre. De savants auteurs, tels que Savaron et Baronius, ont écrit en faveur de sa sainteté ; cependant l'Église n'a jamais mis le nom de Clovis dans son marty- rologe.

2. S. Sigisaiond, roi de Bourgogne. Quoique ce prince fût fils deGondebaud, qui avait em- brassé l'arianisme, il eut le bonheur d'être élevé catholiquement par saint Avit, évêque devienne. Il succéda à son père en 517, et fonda l'abbaye d'Agaune ou de Saint-Maurice en Valais. En 521, il eut à soutenir une guerre malheureuse contre les fils de Clovis. L'un d'eux, Clodomir, l'ayant fait prisonnier avec

13 sa femme et ses enfants, eut la cruauté de les jeter dans un puits, à S. -Péravy-la- Colombe, à v2o kilomètres d'Orléans. Saint Sigismond est honoré comme martyr le 1er mai.

3. S. GoNffiANj roi d'Orléans. Fils de Clo- taire I'1 et petit-iils de Clovis et de sainte Glotilde, Contran hérita du royaume. d'Or- léans et de Bourgogne en 561. On eut d'abord de graves reproches à lui faire; il effraya quelque temps par ses cruautés et ses désor- dres, mais il les expia par une sincère péni- I- nce, et ses sujets ne l'appelèrent bientôt que notre bon roi Gontran. 11 mourut en 593 et fut inhumé dans l'abbaye de Saint-Marcel, près de Ghâlon- sur-Saône, qu'il avait fondée. Son nom se trouve dans, martyrologe romain, a* 28 mars.

i. S. Sigebert, roi d'Austrasie. Il était iiis (1 Dagobert Ier et fut baptisé splennelieinent à Orléans, par saint Armand, évêque de Maes-r trieht. Son éducation fut confiée au B. Pétmi de Landen, maire du palais, qui l'éleva da is les principes de la piété, et qui lui servit de père quand ce jeune enfant eut été nommé roi d'Austrasie en 633. Parvenu à l'âg de régner, Sigebert se fit chérir de ses sujets. 11 fonda

52..

14 jusqu'à douze monastères, entre autres Saint- Martin, près de Metz, il fut enterré en 636 ; il n'avait que vingt-cinq ans. La plupart des diocèses il régna l'honorent le 1er février. 5. S. Dagobert III, roi d'Austrasie. Da- gobert II ou III était fils de saint Sigebert et lui succéda dans un âge fort tendre, en 656. Il ne fut que quelques mois sur le trône, car l'ambitieux Grimoald, maire du palais, le fit secrètement conduire en Irlande, et lui sub- stitua son propre fils, Childebert. Cette usur- pation amena des révoltes, et l'Austrasie s'é- tait donnée à Clotaire III, lorsqu'on apprit que Dagobert vivait. Il revint et fut reconnu roi à Metz ; son règne ramena la paix; la religion fleurit; les peuples furent heureux. Mais les intrigues d'Ébroïn ne tardèrent pas à mettre fin à ces beaux commencements. Il excita Thierry II, roi de Neustrie, à la guerre contre Dagobert , et durant la campagne il surprit ce dernier prince dans la forêt de Vaivre, à 6 kilomètres de Stenay (Meuse), et l'y fit massacrer, en 678. S. Dagobert est honoré comme martyr le 23 décembre.

6. Le B. Charlemagne. Monté sur le trône en 768, et sacré empereur d'Occident en 800, Charlemagne a été l'un des plus illustres mo»

15 narques du moyen âge. A la gloire de con- quérant, il a joint celle de législateur et de restaurateur des lettres. Mais le titre qui le recommande aux yeux de l'Église, c'est qu'il a été le protecteur du Saint-Siège, et le zélé défenseur de la Religion. Non-seulement il fît observer aux autres la morale évangélique, mais il gardait lui-même scrupuleusement toutes les fêtes et tous les jeûnes, si nombreux et si austères alors. Il mourut et fut enterré à Aix-la-Chapelle en 31 i. L'Église le mit au rang des saints en 1165, et l'honore le 28 jan- vier. En 1661, l'Université de Paris le choisit pour son patron.

7. Robert le Pieux. Ce prince régna de 996 à 1031 ; sa vie est trop connue pour que aous ayons besoin da la raconter ici; nous nous bornerons à rappeler son zèle pour la Religion, sa piété franche et sincère, la patience avec laquelle il supporta l'humeur acariâtre de la reine Constance, et surtout son inépuisable charité envers les pauvres. Il mourut à Melun, et y fut longtemps honoré le 20 juillet, mais seulement sous le titre de vénérable.

8. S. Louis. L'histoire de ce glorieux mo- narque est encore plus connue que celle de

16 Robert le Pieu? : il nous suffira donc de le nommer à la fin de cette liste des bienheureux rois de France. On sait qu il mourut sous les murs de Tunis, en S 270, dans les sentiments les plus héroïques de l'humilité et de la piété. Le pape r.oniface VIIÏ l'inscrivit au catalogue des saints, vingt-sept ans seulement après sa mort. Ce furent les Dominicains d'Évreux qui, les premiers, lui dédièrent une église, en 129K.

Extrait 'l'on rapport adressé à M. le Ministre de la marine.

Frcgale à vapeur, le Monlêzuma ; Gibraltar, le 7 jaimer 1834.

« J'ai quitté la haie de Gibraltar le lrr jan- \ier. A peine en dehors du détroit, j'ai été pris par des vents d'ouest qui m'ont bien con- trarié. Le §, la mer était très-grosse, le vent grand frais, de l'ouest; la frégate fatiguait beaucoup sans avancer. Dans la nuit du 2 au 3, la brise, très fraîche, devient un violent coup de vent du sud-ouest, la mer énorme. La frégate ne peut plus tenir en roule. Il est in- utile de lutter contre les éléments si violem- ment contraires;] il est donc plus sage de retourner à Gibraltar , d'y compléter notre charbon et d'attendre la lin de ce coup de vent.

17

» Les journées du 3 et du 4 sonl horrible- ment mauvaises; Le coup de vent est dans toute s;i violence: très-grosse mer; la pinte continuelle. Notre position est trop incertaine pour faire route sur le détroit : je me délie, au contraire, des courants portant vers Test, et je fais tous mes efforts pour ni' élever dans l'ouest.

» Lu nuit du 3 au 4 a été particulièrement tourmentée ; le pauvre Montézuma tangue et roule d'une manière affreuse, avec des se- cousses dures, des craquements de cloisons et des coups de mer faits pour effrayer ceux qui n'ont pas l'habitude du métier. Le fait est que, môme à bord des vaisseaux, jamais je n'ai assisté à mouvements aussi désordonnés.

» Cette journée du 3 a été bien douloureuse pour nous tous; le temps était affreux; les coups de' mer se précipitaient sur la frégate. Ln paquet de mer envahit le jardin des tam- bours de l'avant, et enlève un brave quartier- maître de manœuvre nommé Coïën.

» Aussitôt le cri lamentable à'un homme à la mer! retentit sur le pont ; tout le monde est sur pied. On jette la bouée de sauvetage; autorise plutôt que je n'ordonne la mise à

52...

18 l'eau d'une yole, frôle embarcation qui devait faire merveille, mais me donner bien de l'in- quiétude.

» Un jeune enseigne de vaisseau, M. Desprez (Marie-Martin-Eugène) , donnant Pexemple avec un dévouement au-dessus de tout éloge, se précipite dans la yole; il est suivi de six généreux matelots, et tous, dans cette délicate embarcation, se lancent en pleine mer à la recherche du malheureux quartier-maître. J'éprouvais un horrible serrement de cœur en voyant s'éloigner ces sept hommes courageux que je craignais de voir devenir victimes de leur générosité. La mer se déroulait en grosses et longues lames; le vent, dans sa violence, faisait crier le bois, et les cordages rendaient des sifflements aigus ; le ciel était assombri par d'épais nuages ; officiers et matelots étaient haletants sur la dunette, suivant avec anxiété ces sept hommes qui luttaient avec courage et sang-froid contre cette mer et ce vent en courroux. C'était une scène bien émouvante, et chacun avait plus de crainte que d'espoir pour ces braves compagnons.

» Enfin, l'homme tombé à la mer est rejoint par les yoliers et placé dans l'embarcation. Nous vîmes cela, et nous nous écriâmes :

m

« L'homme est sauvé, vive l'empereur ! » Hé- las ! notre joie ne fut pas de longue durée : on ne ramenait à bord qu'un cadavre; l'infortuné Colen avait été asphyxié par l'immersion. La yole revint donc avec son trophée qu'on croyait vivant. Ce fut une opération bien délicate et bien difficile que celle de ramener à bord ces braves gens qui venaient d'exposer si géné- reusement leur vie. Accoster la frégate était impossible, vu l'état de la mer; la yole eût été écrasée au moindre contact. Je fis le sacrifice de la yole. On lui jeta une amarre tenant à la frégate ; puis de la dunette, on lança des cordes maniables. Chacun successivement s'amarra cette corde autour du corps, se jeta à la mer, et l'on hala ces braves à bord comme on fait d'un poisson au bout d'une ligne. M. Desprez monta le dernier.

» J'embrassai avec effusion cet excellent jeune homme.

» Une fois tous les hommes à bord, je fus assez heureux pour sauver la yole, que l'on parvint à remettre à poste. J'ai fait conserver et veiller le corps du quartier- maitr;' Colen, et l'ai fait enterrer à Gibraltar. Il a été accom- pagné à sa dernière demeure par ses cama- rades et un ecclésiastique. {Moniteur.)

20 1^. l9er&<m!34)s<>& coïél&rc.*?.

LE GENERAI CAMBR0NNE.

Le célèbre Camhronne, un des plus braves généraux de l'Empire, commença sa carrière mlitaife par les grades les plus humbles.

Il était caporal en 170o , et en garnison à Nantes. Malgré sa jeunesse (il était âgé à peine vingt ans), il avait déjà contracté la déplo- rable habitude, qui perd tant de nos soldats, l'habitude de boire et même de s'enivrer souvent. Et comme le gaillard avait du sang dans les veines, il ne faisait pas bon de le contrarier , quand les vapeurs du vin exci- taient son ardeur déjà trop grande.

Un jour étant ivre, il s'oublia jusqu'à frap- per un officier qui lui donnait un ordre. Il passa devant le conseil de guerre et fut con- damné à mort, comme il est de règle en pareil cas. Il était puni par il avait péché.

Le colonel de son régiment avait su cepen- dant apprécier l'énergie, la bravoure et l'in- telligence du jeune condamné. Il va trouver un représentant du peuple, commissaire du gouvernement, alors à Nantes, et lui demande

la grâce de Cambronnc. « Impossible, répond le commissaire...» Néanmoins le colonel in^- sistëj, et l'ail si bien qu'il obtient la grâce du soldat, mais à une condition expresse, c'est que celui-ci ne s'enivrera jamais plus de sa vie. Le colonel se rend à la prison militaire. Il l'ait venir Cambronne. « Tu as commis une grande faute, caporal, lui dit-il. C'est vrai, mon colonel ; aussi vous voyez je suis. Je vais la payer de ma vie. Peut-être, dit le colonel. Comment peut-être? Vous savez la rigueur de la loi militaire. Je n'ai point de grâce à attendre ; et je n'ai plus qu'à mourir.

Non, mon ami, tu ne dois pas mourir. Je t'apporte cette grâce dont tu désespères ; je l'ai arrachée à grand' peine au commissaire du gouvernement. 11 te remet ta peine et te rend même ton grade, mais à une condition.

Une condition ! Parlez, mon colonel, par- lez ! je ferai tout pour sauver ma tête et sur- tout mon honneur ! C'est à condition que lu ne te griseras jamais à l'avenir. Oh ! mon colonel, ça c'est impossible! Comment, impossible ! pour échapper à la mort ! Tu vas être fusillé demain ; penses-y donc ! Voyez- vous, mon colonel, il faudrait, pour que je ne m'enivrasse plus, que je ne busse jamais

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plus de vin ; car Cambrcnne et la bouteille, ça s'aime tant, qu'une fois que c'est commen- cé, il faut que cela finisse. Impossible de s'ar- rêter ! Je ne peux donc pas promettre de ne plus me griser. Mais, malheureux, ne peux-tu pas promettre de ne plus boire de vin ? Plus du tout ? Sans doute. Hum ! c'est une grande affaire que vous me proposez là, mon colonel. Ne plus boire de vin.... ne plus jamais, jamais boire! Et il baissa la tête. Mais, mon collnel, si je vous promettais de ne plus boire de vin de ma vie, qui est-ce qui vous garantirait cette promesse? Ta parole d'honneur. Et comme le condamné bais- sait encore la tête sans rien dire : Eh bien! Cambronne , que choisis-tu ? Vous êtes trop bon pour moi, mon colonel, dit-il d*un ton grave et pénétré. Merci de votre confiance : je jure que jamais de ma vie une goutte de vin ne touchera mes lèvres... Etes-vous content, mon colonel? Oui, mon ami, lui dit celui- ci ému et heureux de ce qu'il venait d'enten- dre. Oui, je suis content de toi. Demain tu seras libre. Sois un brave soldat et emploie au service de la patrie la vie qu'elle te rend aujourd'hui. »

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Le lendemain le caporal Cambronne rentra au corps et reprit son service.

Vingt ans après le caporal Cambronne était devenu le général Cambromie ; il avait com- mandé la vieille garde impériale à Waterloo, et avait déployé un merveilleux courage dans cette retraite héroïque que chacun connaît. Rentré dans ses foyers, après la chute de l'Empire, il vivait paisiblement à Paris, aimé et honoré de tous. Son ancien colonel, brisé par l'âge et plus encore par les fatigues du service, s'était, lui aussi, retiré dans sa fa- mille. Il sut que le général Cambronne était à Paris, et il voulut un jour l'invitera dîner. Il convoqua plusieurs vieux frères d'armes, et leur prépara le meilleur repas qu'il pût ima- giner. La place d'honneur fut pour Cam- bronne à droite du maître de la maison.

Etant à table, celui-ci offre à son hôte un verre de vieux vin, d'un prix très-élevé et conservé précieusement pour les grandes oc- casions. Cambronne regarde le colonel, et, avec surprise et vivacité : « Que me présentez- vous là? lui dit-il. Mais du vin du Rhin, mon général; et du fameux encore ; il a plus de cent ans ; vous n'en trouverez guère de sem- blable à Paris.»— Et comme Cambronne sem-

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Liait s'irriter de ces paroles Mais, mon général, je vous assure qu'il est excellent. (joutez plutôt, et vous... «< Et ma parole d'honneur, mon eolonel, ma parole d'hon- neur! s'écria Gambronne en frappant sur la table. Et Nantes ! et la piisonî et la grâce ! et mon serment ! Ayez-vous donc oublié tout cela, mon excellent ami'.' Pour qui prenez- vous Gauibronne ? Depuis ce jour, pas une goutte de vin n'a touché mes lèvres. Je vous l'avais juré, et j'ai tenu ma parole. »

Le colonel admirant cette énergique fidélité, se garda bien d'insister, et s'applaudit une fois de plus d'avoir conservé un tel homme à la France.

l'abbé I. Mullûis.

Cette histoire, mes enfants, vous fait voir qu'on se corrige de ses fautes, si on le veut, il ne s'a it que d'avoir du caractère. Le mot im- possible n'est pas français, encore moins est-il chrétien.

25 V. lIorceHiix lit tcraircs.

UN ENFANT A SON ANGE &ARDIEN. Air : Ave Maria.

Ange du bon Dieu, Tendre ami de l'enfance, Fois ma défense , Ange du bon Dieu.

C'est ton aile blanche, C'est ton front si beau, Qui sur moi se penche, Au bord du berceau.

Ange du bon pieu, etc. C'est ta main, je pense, Qui, le soir, encor Doucement balance L'enfant qui s'endort.

Ange du bon Dieu, etc.

Sois près de ma couche, Quand, la nuit, j'ai peur ; Qu'un mot de ta bouche Rassure mon cœur. Ange, etc.

Je vois dans mon rêve Ton beau voile bleu : Il me prend, m'enlève Tout près du bon Dieu. Ange, etc.

Ton doigt me réveille, Dès i^ue le jour luit :

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Ta voix me conseille, Ta main me conduit.

Ange, etc. Quand ma bonne mère Unit mes deux mtiins, Dis-moi la prière Que faisaient les saints. Ange, etc.

Arrache l'épine Le long du chemin ; Près de la ravine, Donne-moi la main. Ange, etc.

. Reçois ma prière Et, d'un soin pieux, Porte-la, bon frère, Aux frères des cieux.

Ange, eto» Porte mon offrande A Jésus-Enfant: Mon cœur qu'il demande, Mon cœur qu'il attend. Ange, etc.

Quand tu vois Marie, 0 mon beau gardien, Dis-lui, je t'en prie, Que je l'aime bien. Ange, etc.

Et, chaque semaine, Le jour du bon Dieu, Que ta main me mène Prier au saint lieu. Ang'1, etc.

Offre ma louange A mes saints patrons,

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Et dis-leur, bel ange, Que j'ai leurs doux nom=.

Ange, etc. Que nia dernière heure Soit douce pour moi, Et que nul ne pleure, Non, pas même toi. Ange, etc.

Mets-moi sous ton aile, En ce jour heureux ; Que ta main fidèle Me conduise aux deux. Ange, etc.

Isidore Gbnkb&u.

-o-«S>»§)«<2»-

VI. Hi&toïrc naturelle.

DE LA CARPE.

La carpe se plaît dans les étangs, dans les lacs, dans l^s rivières qui coulent doucement. Elle abonde quelquefois dans une partie d'un lac ou d'un fleuve, et se trouve rarement dans une autre partie peu éloignée de la première...

Les couleurs de la carpe varient suivant les eaux dans lesquelles elle séjourne. Celle des grands lacs et des rivières est, par exemple, plus jaune ou plus dorée que celle des étangs; et Ton connaît sous le nom de carpe saumo-

- 28 née, relie dont la chair doit à dés circon- stances locales une couleur d'un jaune rou- geâtre.

Quand les carpes sont bien nourries, elles croissent vite et parviennent à une grosseur considérable. Celles des étangs sont ordinai- r> ment fort maigres, et leur chair sent la vase. Avant de faire cuire une carpe d'étang, il suffira, si elle est encore vivante, de lui faire avaler un demi-verre de vinaigre. Au bout de quelques minutes, elle *se couvrira d'une couche d'écume épaisse et gluante. On la lavera, et sa chair n'aura aucun goût désa- gréable. Je ne vous assure pas que ce moyen plaise beaucoup aux carpes, victimes de notre gourmandise, mais il est certain qu'en l'em- ployant elles sont meilleures.

Dans plusieurs lacs de l'Allemagne septen- trionale, on pêche des carpes qui pèse at plus de 15 kilogr. On en a pris une dans le Bran- debourg qui pesait 19 kilogr. Dans le Wolga, on en a trouvé qui ont une longueur de ! in. §0. En 171 !, on en a péché une près de Francfort-sur-1'Oder, qui avait plus de 3 mè- tres de long, plus de 1 mètre de haut, et qui pesait 35 kilogr. On assure qu'on en a pris du poids de 35 kilogr. daus le lac de Jug, en

-29 Suisse; el enfin il y en ;i dans le Dniester de

si grasses, que leurs arêtes peuvent servir à l'aire des manches de couteau.

Les carpes deviennent très-vieilles. Buffon parle de carpes de 150 ans, qui vivaient alors dans les fossés de Pontchartrain. Dans les étangs de la Lusace, on a vu des individus de la même espèce âgés de plus de 200 ans.

Les carpes ont la vie très-dure : elle- résis- tent aux contusions, aux bl< ssur. s, à un séjour très-prolongé dans l'atmosphère. C'est en rai- son de cette faculté qu'on peut les transporter à de très-grandes distances sans les faire pé- rir, pourvu qu'on les renferme dans de la neige, et qu'on leur mette dans la bouche un petit morceau de pain trempé dans de l'alcool affaibli : c'est encore cette propriété qui fait que pendant l'hiver, on peut les conserver en vie dans des caves humides, et même les en- graisser beaucoup , en les enveloppant de mousse, en l'arrosant souvent, leur donnant du pain, du lait, et les suspendant.

Tous les cyprins et surtout les carpes, re- connaissent parfaitement les personnes qui ont soin d'elles et leur donnent à manger : elles distinguent leurs pas, -viennent au son d'une clochette sur le bord de Veau et mani-

- 30 festent leur joie par des bonds, des pétille- ments de la queue.

De Waify.

VII. Hygiène.

DANGERS DES FOUKNEAUX.

11 ne faut jamais se renfermer dans une chambre allumée... Je sais que certaines pro- fessions exigent la présence d'un fourneau ea combustion ; dans ce cas-là il faut placer le fourneau dans une cheminée, ou tout au moinsprès d'une fenêtre entr'ouverte. De l'air! autrement le charbon consume, en brûlant, tout l'air atmosphérique et vital de la chambre ; on respire, à la place, des gaz délé- tères, et si l'on vient à s'endormir dans cet état de chose, on est perdu infailliblement. On ne se réveille que pour les souffrances de l'agonie, sans la force ni la présence d'esprit nécessaires pour écarter le danger.

(Petites Lectures.)

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VIII. Industrie.

MOYEN DE DETRUIRE LES LIMA '.ES.

Dans une lettre qu'il adresse à M. le prési- dent de la société d'agriculture du Puy-de- Dônie, M. de Féligonde fait connaître un moyen fort simple de détruire les limaces :

« J'ai pris, dit-il, de la chaux éteinte depuis plus d'un mois, et j'en ai répandu sur mes légumes, comme on répand le plâtre sur les prairies, 5 kîlog. environ par are; à l'in- stant même on a vu les limaces se tortiller et crever.

» Des pluies très-abondantes ayant lavé mon terrain, j'ai recommencé la même opération et j'ai samé mes légumes, tandis que j'ai complètement perdu un champ voisin de col- lets verts que je n'avais pas chaulés.

» J'ai employé de préférence la chaux éteinte depuis longtemps, pour ménager mes ouvriers, dont les mains auraient été gercées par l'emploi de la chaux vive.

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» Les limaces qui ravageai nos jardins et nos récoltes sont petites et d'une coulera blanchâtre ; elles sortait surtout les matins et les soirs, et se cachent clans la journée. 11 vaut mieux leur faire la chasse le matin que le soir, parce qu'il y a toujours les malins un peu de rosée, qui fixe la chaux sur les feuilles des plantes, et les protège contre ks limaces que le chantage aurait épargnées.

» Le procédé que je viens d'indiquer est trop simple pour n'avoir pas déjà été employé, et je ne l'aurais pas livré à la publicité, si je n'avais cru qu'il était du devoir des membres d'une société d'agriculture de faire connaître aux agriculteurs tous les moyens de sauver leurs récoltes exposées à tant de dangers. »

IX. Varlëï^s.

UN CHIFFONNIER.

Un homme d "une haute stature est amené sur 1 1 anc de la police correctionnelle. Quoi-

33 que vêtu de méchants haillons, il y a une cer- taine distinction dans sa perséfine ; il porte la tète droite; sa ligure est fière, son œil dur et intelligent ; un sourire de dédain contracte ses lèvres lorsqu'il promène ses, regards ï l'auditoire; et il se drape dans ses giteiia - avec toute la fierté d'un Castillan dans - ] manteau.

Aux questions de M. le président, il n qu'il se nommé H..., qu'il est chiffoni et âgé île 57 ans.

M. le.yrésidènt : Vous êtes en état de vaga- bondage; vous n'avez pas de domicile, v s n'exercez pas- de profession. Je. viens vous dire que je suis chiffonnier, et je le répète tout liant... je n'en rougis pas.

Vous avez raison. Mais il parait que n'exercez pas votre état ? Je n'ai jamais cessé de l'exercer. Ce n'est pas ma faute si aujourd'hui il ne nourrit plus son homme.

Cependant c'est un état qui va toujours ; qui vous permet d'avoir un asile ! C'est

un état qui va toujours pour les gâife-métiêrs et les massacres.. . Ceux-là, tout leur est ; ils n'ont pas le moindre amour-propre, pas moindre dignité de leur professLn.., Moi, je

U

ne suis pas comme ça.... Je laisse aux autres les épluchuresde légumes, les vieilles savates, toutes les immondices dont ils se régalent... Je suis plus difficile que ça... Jamais rien de tel n'entrera dans ma hotte. Aussi il y a des jours je n'étrenne pas.

Ainsi vous êtes sans ressources, vous n'avez pas les moyens de vous procurer un asile? Impossible pour le moment... c'est à peine si je fais pour le boulanger et le mar- chand de vin.

Dans ce cas-là, on boit de l'eau et on a un gîte. Chacun s'arrange comme il re- tend.... Moi, je trouve qu'il vaut mieux rem- plir son corps que de le loger... D'ailleurs, je couche dans ma hotte... Le chiffonnier est comme le limaçon, il porte sa maison sur son dos.

Vous devez avoir un domicile, la loi l'exige. J'en aurais un, si le gouvernement avait fait son devoir envers moi.

Qu'a de commun le gouvernement avec le délit qui vous est reproché ? Il y en a eu de commun, entre nous... Je lui ai donné un fameux coup d'épaule en février.... J'ai aussi couché dans la rue ces jours -là, et on ne m'ap-

- 35 pelait pas vagabond... On m'avait promis de l'argent, des récompenses; mais quand je me suis présenté, bernique ! plus rien duktout.... Ni vu ni connu.... On m'a dit qu'il fallait être blessé... Ainsi, il faut mourir de faim quand on n'a pas une patte de moins. .. Au surplus, cen'estpasma faute, j'ai bien fait tout ce qu'il fallait pour les perdre toutes deux.

Quand on vous a arrêté, vous avez dit à l'agent que vous le retrouveriez un jour, et vous avez cri." : Vive la sociale. Au surplus, vous n'êtes pas incriminé pour cela ; c'est une simple observation que je vous fais... Cela nfrait penser qu'au lieu de travailler vous vous occupiez de politique.— Je n'ai pas crié vive la sociale ! je n'aime pas assez la société pourra... Et, d'ailleurs je ne sais pas seule- ment ce que c'est.

Avez -vous déjà été arrêté ? Jamais ! Il y a quarante ans que je suis dans le crochet toujours pur et intact.

Le tribunal condamne H.... à un mois d'emprisonnement.

36

X. E»E*©ver3se&; et Maxime.

Jouir tout seul est un plaisir barbare.

L'avare est comme un chien dans une roue.. qui tourne la brocha pour les autres.

ta bouche soit la prison de ta langue.

L?s babillards peuvent être compares ci - vases qui, plus ils sont vides, plus ils réson- nent.

Le mit de la dernière énigme est : Le "<

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tro pie suis d'un fard .tien ;

n h rf, que le plaisir d'un chien.

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