CONTES =: 8 Ft SÉSRESE Cest rrES TES erers HOCITHE pts rfi CHASSE ET LOLSASLE SRE 1225 JOrC RES file POCHE STE MCÉSETES FH 152: 32 Frisht Lt CET qeiitetae délit ieiit CPerel ê: Hi Hit! min à + . 2 tiiretiriatt éjetitqrat tint Hyls HUE “TRE à ai Tati #58 si à ou HARVARD UNIVERSITY OR LS): LIBRARY OF THE Museum of Comparative Zoology "OA TRES hi a Re 1 CA AP 0 (e TE AUS 4 N DU cu FL o | PAT TU LE nr | A (# | : Ft A NPA Dia n | Wan D LUE m'ont | " 1 Dh l N wi tt hr f (4) eV PARA n IR $ IN AL F TAN Pl La ] RAT '& LS Fe" OR PI ne b Ari 192 LA THÈSES | # » PRESENTEES A LA FACULTÉ DES SCIENCES DE PARIS POUR OBTENIR LE GRADE DE DOCTEUR ES SCIENCES NATURELLES PAR FERNAND LAHILLE 22 x ml LICENCIÉ ES SCIENCES PHYSIQUES ET NATURELLES PRÉPARATEUR DE ZOOLOGIE A LA FACULTÉ DES SCIENCES DE TOULOUSE 1e THÈSE. — RECHERCHES SUR LES TUNICIERS. 2me THESE. — PROPOSITIONS DONNÉES PAR LA FACULTÉ. Soutenues le décembre 1890, devant la Commission d’examen MM. DE LACAZE-DUTHIERS, Président. BONNIER, VÉLAIN. Examinaleurs, = TOULOUSE IMPRIMERIE LAGARDE ET SEBILLE kk, RUE SAINT-ROME, #4 1890 Cou EAN | > . ’ Y! 7 , CONTRIBUTIONS A L’ÉTUDE ANATOMIQUE ET TAXONOMIQUE DES TUNICIERS PAR FERNAND LAHILLE, Licencié ês-sciences physiques, licencié ès-sciences naturelles, Préparateur à la Faculté des sciences de Toulouse. « Je ne sais ce que le monde pensera de mes travaux, » mais pour moi il me semble que je n’ai été qu’un enfant » jouant 'sur le bord de la mer et trouvant tantôt un » caillou plus poli, tantôt une coquille un peu plus » brillante, tandis que le grand océan de la vérité s’éten- » dait inexploré devant moi. » NEWTON. « J'ai si souvent fait fausse route pour avoir trop » facilement accepté comme exacts les résultats donnés » par les autres, que j'ai résolu de publier seulement » les observations que je puis attester par ma propre » recherche, » DALTON. I. INTRODUCTION. 1. Plan du Travail. — Sur les conseils de M. de Lacaze-Duthiers, j'avais entrepris, à Banyuls, dès le mois de décembre 1884, l'étude des Synascidies. Je n’ai pas tardé, malheureusement, à m’apercevoir de la difficulté extrême de ces recherches et de la nécessité absolue où je me trouvais d'étudier auparavant les types les plus simples : les Appendiculaires et les Salpes, ainsi que les types plus faciles à disséquer et par suite mieux connus : les Monascidies. C’est ainsi que j'ai été amené à une étude générale des Tuniciers. Si ce travail a exigé beaucoup de temps, en revanche il m’aura permis, je l’espère, d'éviter de nombreuses erreurs dans lesquelles sont tombés des naturalistes qui se sont contentés d'étudier quelques formes isolées. Comme l’a très bien dit Spring, dans un récent travail : « Une conclusion, déduite d’un nombre restreint de faits, a presque toutes les chances d’être erronée ; nous approchons de la 2 FERNAND LAHILLE. vérité seulement dans la mesure du complément de nos connais- sances. » Examiner en détail l'anatomie de quelques genres de Tuniciers, pris dans les familles les plus naturelles, grouper autour de ces genres les formes voisines en faisant ressortir les affinités morpholo- giques, dresser sur cette base la systématique des Tuniciers inférieurs en précisant les caractères vraiment distinctifs des familles, des genres et des espèces, représentés sur nos côtes, tel est le plan que je me propose de suivre. Je ne m’occuperai pas, toutefois, dans le présent travail, du groupe pourtant si intéressant des Appendicu- laires, que je me propose d'étudier dans un mémoire spécial. Les zoologistes qui se sont occupés des Tuniciers et qui savent combien les déterminations de ces animaux sont mal aisées, trouveront peut- être dans ce travail d’utiles renseignements ; ils se montreront, en tous cas, indulgents pour les erreurs qui auront pu s’y glisser, et que je serai heureux de corriger lorsqu'on me les signalera. C'est avec le plus grand plaisir que je mettrai à leur disposition ma collection tout entière et que je leur communiquerai les prépara- tions histologiques qu'ils désireraient vérifier ou examiner. Les plus savantes discussions bibliographiques ne peuvent jamais valoir l’exa- men des mêmes types originaux. Certaines reproductions de mes dessins ne m'ont pas donné tous les résultats que j'attendais. Mais je suis convaincu que des figures assez grossières en regard du texte valent mieux que des gravures artistiques, qu'il faut parfois aller chercher dans un dédale de numéros, de planches et d’explications générales et partielles. 2. Orientation. — Le but de l'anatomie descriptive étant d’arriver, par l’analyse, à la science synthétique des homologies, il est néces- saire d'adopter, pour tous les animaux, une orientation comparable. Prenant l’homme pour type, on dispose généralement les individus de telle façon qu'ils aient l’orifice buccal en haut et le dos en arrière. La bouche des Tuniciers, comme on peut s’en convaincre par l'étude des Appendiculaires et des Salpes, n’est autre que l’orifice RECHERCHES SUR LES TUNICIERS. 3 inspirateur de la cavité branchiale. On ne peut donner ce nom à l'entrée de l’œsophage qu’en s’aidant d'artifices morphologiques, contredits par l’embryologie, rejetés aujourd’hui par presque tous les Ascidiologues et contestés, même très anciemment, par notre illustre Lamarck. « C’est toujours par trop de précipitation dans nos jugements que nous nous exposons à l'erreur; et, en effet, il me semble que l’on s’est trop hâté de ranger les Ascidies et les Biphores parmi les Mollusques. » La face dorsale des Tuniciers est indiquée par le ganglion nerveux et le cordon ganglionnaire. Dans l’évolution ontogénique, l’ectoderme de la face dorsale venant, chez certaines formes, occuper le plancher de toute la cavité cloacale, on ne peut réserver, avec la plupart des Ascidiologues, le nom de dos à l’espace inter-siphonal. Mais, pre- nant l’'Appendiculaire comme type, on doit comprendre, sous le nom de face dorsale, toute la partie du corps occupée par le ganglion et le cordon ganglionnaire ou qui se trouve sur son prolongement. Il peut bien arriver que l’espace inter-siphonal corresponde, comme chez les Botrylles, Salpes, Pyrosomes, ete., à toute la face dorsale, mais Ce fait est loin d’être général. J'orienterai donc toujours les Tuniciers de façon à ce qu’ils aient le tube inspirateur ou buccal en haut et la face dorsale ainsi définie en arrière. 3. Technique. — Afin que tout le monde puisse vérifier les résultats auxquels je suis arrivé, je dois indiquer, ce me semble, les difficultés qu’on rencontre dans l'étude des Tuniciers inférieurs et quels sont les moyens les plus propres à les surmonter. Les Didemnidæ sont d’une taille fort petite, puisqu'elle ne dépasse presque jamais un ou deux millimètres ; en outre, la plupart sont englobés dans une tunique très coriace, renfermant souvent des spi- cules calcaires. La blastogénèse directe, très rapide chez ces animaux, complique encore singulièrement les individus. Enfin, leur grande adhérence à la tunique et leur grêle pédicule œsophago-rectal qui se rompt avec la plus grande facilité, rend leur extraction du cormus fort difficile. Tous ces animaux ne peuvent donc guère s’étudier que par la méthode des coupes, et on sait combien ces recherches sont 4 FERNAND LAHILLE. pénibles lorsqu'il faut reconstruire tout un individu complexe à l’aide de plans successifs. La liqueur de Fol et l'acide acétique cristallisable sont les deux réactifs fixateurs qui m'ont fourni les meilleurs résultats. De longs lavages à l’eau douce et à la température de 40° sont nécessaires avant de transporter les pièces dans la série des alcools. L’examen des spicules doit être fait en dilacérant des tuniques non fixées. On peut encore se servir du réactif de Schweizer, employé après un traitement de la tunique par une solution de potasse caustique au vingtième, et lavage à l’eau douce. Un dernier procédé, qui m'a permis d'isoler rapidement les spicules des cormus qui en renferment un grand nombre, consiste dans l’incinération d’un morceau de tuni- que imbibée, au préalable, d'alcool; mais ces dernières préparations doivent se monter ensuite à sec. Les Distomiadæ et les Polycliniadæ sont des animaux d’une taille relativement beaucoup plus considérable que les Didemnideæ, et ils ne renferment généralement pas de spicules. En revanche, on se trouve en présence d’une difficulté contre laquelle je me suis heurté long- temps. La branchie de ces animaux est souvent fort développée en longueur, et, dans tous les cas, le corps de ces Tuniciers est muni d’une musculature fort puissante. Aussi, les individus s’étalent-ils bien rarement en entier dans les cuvettes et se contractent-ils très vivement à la première influence des réactifs fixateurs. Pour obtenir des cormus épanouis, il faut les recueillir aussi délicatement que possible, les rapporter de la grève sans secousse et en isolant chaque cormus dans un bocal. Enfin, les placer dans de l’eau très fraîche et très pure. Un fait montre bien leur grande sensibilité : Quoique très pure, l’eau du vivier de Roscoff ne leur suffit pas, on est obligé d’aller leur en cherher en pleine grève, et pas plus à Banyuls qu'à Roscoff, je n’ai vu s'épanouir les cormus rapportés des draguages. Après avoir obtenu des individus étalés, il faut les tuer dans cet état, et pendant longtemps j'ai essayé en vain tous les réactifs usités. Les individus se contractaient toujours vivement au premier contact, et le plus souvent ils devenaient impropres à tout travail. nt RECHERCHES SUR LES TUNICIERS. 5 Une anesthésie préalable par l’éther, le chloral ou le chloroforme , ou une mort lente par l’alun, l’acide chromique à 12/0, la nicotine, etc., ne m'ont donné que de mauvais résultats. Le chlorhydrate de cocaïne m’a permis, enfin, d'atteindre mon but. Lorsque je veux fixer un petit cormus de 30 centimètres cubes environ, voici comment j'opère : Je laisse les individus s'épanouir dans 50 centimètres cubes d’eau très pure, très fraîche, refroidie même au besoin. J’y ajoute alors, avec précaution, 10 à 20 gouttes d’une solution de chlorhydrate de cocaïne (1 gr. pour 25 gr. d’eau de mer). J'attends quelques instants, et lorsque je puis, avec une aiguille, toucher les lobes buccaux, sans provoquer leur contraction, l'anesthésie est complète. Je puis plonger alors le cormus dans l'acide acétique cristallisable sans craindre la rétraction des animaux. Si le cormus est épais, il est bon de le fendre avant de le fixer. Après la fixation (5 minutes) et de longs lavages à l’alcool à 70°, je me sers des carmins chlorhydriques à l'alcool (90° et 95°), qui permettent d'économiser beaucoup de temps et d'éviter presque tou- jours les surcolorations. Les Botryllidæ présentent des difficultés toutes particulières. Leurs cormus sessiles et très minces, fixés généralement sur les rochers, ne peuvent se détacher sans déchirures, ils se contractent alors et meurent très rapidement. Le mieux est de les tuer à la grêve même, lorsque c’est possible, en les arrosant avec la liqueur de Lang. Les cormus recueillis sur les algues ne tardent pas à se déformer, il faut donc, comme pour les Polycliniadeæ, les fixer quelques heures après leur capture, alors que les individus ont vidé un peu leur intestin et que les cœnobies n’ont pas encore trop changé de forme. L’anesthésie préalable par la cocaïne est indispensable. Les prolongements ecto- dermiques très nombreux et la soudure intime des bords des orifices à la tunique, rendent l'extraction des animaux bien difficile, par- fois même impossible. Pour l’étude de Botryllidæ, je me suis quel- quefois servi, avec avantage, d’une solution faible d’hypochlorite de chaux. Ce réactif dissocie les tissus et décolore en même temps les cellules pigmentaires fort abondantes qui rendent les observations 6 FERNAND LAHILLE. de ces animaux fort pénibles , mais ce réactif demande à être manié avec une très grande prudence. Je me suis bien trouvé de fixer et colorer en même temps les petites pièces à l’aide du carmin acétique de Schneider. L’acide osmique peut être employé avantageusement pour les Appendiculaires et les petites Salpes. Après l’action de ce fixateur, le meilleur colorant pour les Tuniciers est peut-être l’hématoxyline d’Erlich. Les grandes Salpes se fixent à merveille par l'acide picro-sulfu- rique si on veut procéder ensuite à l’histologie, ou par la liqueur d’'Owen si on veut étudier simplement leur anatomie ou préparer des pièces de collection. 4. Bibliographie et sujets d’études. — Une ancienne coutume, excellente autrefois, consistait à rappeler, dans chaque travail, tous les mémoires antérieurs publiés sur le même sujet. Cette bibliogra- phie, souvent fort incomplète et parfois inexacte, facilitait toutefois les recherches des naturalistes qui désiraient approfondir les mêmes études ou en contrôler les résultats. Mais aujourd’hui que paraissent de tous les côtés de si nombreux recueils mettant les savants au cou- rant de tout ce qui se publie dans le monde entier, il est parfaitement inutile d'augmenter le volume d’un travail par des catalogues d’ou- vrages, d’opuseules et de notes parfois insignifiantes. Je me conten - terai donc de signaler dans des renvois, lorsque j'aurai à les citer, les travaux les plus récents ou les plus importants. Ceux qui désire- raient, du reste, de plus amples renseignements bibliographiques, les trouveront dans les listes si complètes qui ont été publiées par Herdman dans le travail si remarquable qu'il a consacré aux Tuni- ciers recueillis par Le Challenger. Les matériaux qui ont servi à mes études proviennent des points les plus variés de nos côtes de France : Roscoff, Saint-Malo, Gran- ville, Biarritz, Arcachon, La Rochelle, Concarneau, Banyuls, Cette, Nice et Marseille. Je me suis même procuré les espèces de Naples, et j'ai pu, en étendant ainsi mes recherches, arriver à quelques con- clusions intéressantes sur la distribution géographique de certains RECHERCHES SUR LES TUNICIERS. 1 genres et sur l'identification de types, considérés comme distincts. Je manquerais à tous mes devoirs, si je n'adressais ici, à M. de Lacaze-Duthiers et à M. Moquin-Tandon, l'expression de ma reconnaissance pour toutes les facilités de travail qu’ils m'ont offert. Je dois également un souvenir tout particulier à un de mes meilleurs amis, M. L. Jammes, ainsi qu'à MM. Jourdain, Roule, Durègne, Exibard de Nice, ct Pleyber de Roscoff, qui m'ont communiqué de nombreux et intéressants Tuniciers. 5. Classification. — La classification que je me propose de suivre dans cette étude sera celle que j'ai essayé d'établir dans un travail présenté à l'Association française (Congrès de Toulouse, 1887) ; elle est basée sur la constitution de l'organe respiratoire qui, on ne saurait (rop le répéter avec M. de Lacaze-Duthiers, est l’organe dominateur du type Tunicier. Ce type peut se diviser en trois classes : la première renferme les Tuniciers à forme larvaire persistante et dont le pharynx communique direetemert avec l'extérieur à l’aide de deux fentes branchiales. Ce sont les Appendiculaires. Ne possédant jamais la cavité péripharyn- gienne que l’on rencontre chez tous les autres Tuniciers, ils ne possè- dent pas non plus de trémas, en désignant par ce mot les stigmates branchiaux des Ascidies. Les Appendiculaires constituent donc une première classe, caractérisée par l’absence de ces fentes, et que pour ce motif je nommerai : classe des Atremata. Les Salpes ont bien une cavité péripharyngienne, mais, comme nous allons le voir tout à l'heure, les deux fentes branchiales primi- tives persistent chez ces animaux. Toutefois, les Salpes possèdent en outre des trémas rudimentaires représentés par des culs-de-sac ou même par de simples bandes vibratiles. On peut donc désigner sous le nom d’Hemitremata la classe qu'ils forment. Dans une dernière classe, je réunis enfin, sous le nom d'Eutre- mata, tous les Tuniciers qui possèdent un pharynx communiquant à une cavité péripkaryngienne par de véritables trémas, c’est dire que ce dernier groupe renferme les Ascidies simples, sociales, composées et salpiformes, ainsi qu’une partie des Thaliacées. 8 FERNAND LAHILLE. Dans mon Étude sur la systématique des Tuniciers, et auparav an dans une note à l’Institut (28 juin 1886), j'ai exposé les motifs qui. m'ont amené à réunir ces différents types. En outre, j'ai indiqué comment on pouvait diviser les Eutremata d’après la complication plus ou moins grande de leur branchie, complication qui est toujours liée, comme je le disais, à celle de l'organisme tout entier. Je rappel- lerai done simplement ici les diagnoses des trois ordres que je crois devoir admettre. sans côtes longitudinales et sans sinus anastomotiques longitudinaux.... Aplousobranchiata EUTREMAA à sinus anastomotiques longitudi- Branchie : M'AUEX SEE else rie cie lee ee the ee 5e Phlebobranchiata. à côtes longitudinales. . ......... Stolidobranchiata. Le tableau d'ensemble suivant indique, du reste, les subdivisions. CLASSES ORDRES SOUS-ORDRES FAMILLES ( hi \ Kowalevskiadæ. Kowalevskidæ. tremata .. . . ) Archipneusta.... ? à ET fie ( l { Appendiculariadæ. Appendicuiaridæ. ( DRE hi ( Salpidæ. itremata.. }? Svringobranchiata. ..... Set os À ; Ha F Se ui | Octacnemidæ. Doliolidæ. << ; - Pyrosomidæ. Didemniadæ.. . , , Didemnidæ. an Distomidæ, | Aplousobranchia(a. NE { Polyclinidæ. Polycliniadæ. . se o | Aplididæ. Cioniadæ...... Cionidæ. | —— / Eutremata..... ( L | Ascididæ s \ Phlebobranchiata. ! | Ascididæ. | Ascidiadæ..... Corellidæ. \ Corynascididæ. Botryllideæ. | Cynthiadæ .... { Styelidæ. PL A, Stolidobranchiata. Cynthidæ. Moleulièd ( Eugyridæ. OI1S CET À | BE Molealiees RECHERCHES SUR LES TUNICIERS. 9 II. CLASSE DES HEMITREMATA. FAMILLE DES SALPIDÆ Caractères propres. — Présence constante d’hémi-trémas plus ou moins développés. — Fixation de l’œuf dans une poche incubatrice. — Agrégation polyadelphe. Caractères communs à d’autres Tuniciers. — Animaux pélagiques, transparents, fusiformes ou cylindriques. — Muscles du corps for- mant des anneaux toujours interrompus du côté ventral (Hemimya- ria de Herdman). — Polymorphisme. — Orifice buccal muni le plus souvent d’une valvule. — Absence de larve urodèle. — Persistance des fentes branchiales primitives. — Blastogénèse pharyngienne. Les Salpes se reconnaissent à première vue; et pratiquement on peut les définir : animaux pélagiques, transparents, dépourvus de queue natatoire et de trémas, et présentant des bandes musculaires puissantes, interrompues du côté ventral. Au point de vue de la détermination des espèces, les caractères les plus importants qu'il faut noter tout d’abord sont : 40 la position des orifices buccal et eloacal par rapport à l’axe du corps; 2° le nombre et l’arrangement des bandes musculaires ; 8 la présence, le nombre et la forme des appendices du corps; enfin #° la disposition de la chaîne. C’est à la famille des Salpidæ que doit se rattacher la famille des Octacnemidæ formée pour l’Octacnemus bythius, découvert par Le Challenger dans le sud Pacifique, par des profondeurs de 1,070 e! 2,160 brasses, décrit pour la première fois par Moseleyt et dont la branchie ne présente que des cavités imperforées ou hémitrémas. L'aspect de l'Octacnemus est des plus bizarres, et ses huits bras ou prolongements coniques qui entourent un disque présentant une ! Transactions Linn. Soc. Lond. 1866, p. 287. 10 FERNAND LAHILLE. bouche à son centre et un anus excentrique, évoquent tout de suite l'idée d’un Echinoderme brachié. L'étude systématique (Bildrag til Kundskab om Salperne. Spolia Atlantica) publiée par Traustedt, en 1885, sera toujours consultée avec fruit dans les recherches sur les Salpes, ainsi que les travaux anatomiques et embryologiques de Todaro! et de Salensky?. Les Doliolidæ, que l’on réunissait jusqu'à présent aux Salpidæ dans une même classe, celle des Thal'acea, doivent en être définiti- vement séparés et rattachés aux Ascidies inférieures. Leurs trémas complets, souvent très nombreux, ainsi que leur larve urodèle, les éloignent des Salpes. Ils représentent des formes primitives de Didemniens, et leur développement le montre jusqu’à l'évidence. Si des bourgeons d’Anchinia venaient à se fixer sur le sol au lieu d’aller se fixer sur le stolon du progéniteur, personne u'hésiterait un instant à ranger ces animaux dans la famille des Didemnide. Les Salpidæ sont encore des formes plus primitives que les Dolio- lidæ, puisque, chez ces animaux, les deux fentes respiratoires, qui correspondent à celles des Appendiculaires, persistent durant toute la vie, après s'être largement agrandies pour former une cavité péri- branchiale, qui, anatomiquement, se confond ici avec la cavité branchiale elle-même. Sous le nom générique de Salpa, on a réuni des formes qu'il faut absolument séparer. Avec De Blainville, je grouperai sous le nom de Cyclosalpa (BI., 1827), les Salpes qui sont dépourvus de nucléus et dont les chaînes sont disposées en couronne. Ce genre est äu 1875. Sopra lo sciluppo e l'anatomie delle Salpe. Mem. dell’Acc. dei Lincei. 1885. Studi ulteriori sullo sciluppo delle Salpe. Mem. dell'Acc. dei Lineei. ? 1875. Ucber die embryonale Entwicklungsgeschichte der Salpen. Zeit. für wiss. Zoologie. 1877. Ucber die knospung der Salpen. Morp. Jarbuch, IT Band. 1878. Ucber die Entwicklung der hoden und ueber der generationswechsel der Salpen. Zeit. für wiss. zoo. 1882. Noue untersuchungen uber die embryonale Entwivklung der Salpen. Mitth. Noapel, PRET AT TN EE LE entell PE PAC TT RE" PP PONT RECHERCHES SUR LES TUNICIERS. 11 genre Salpa (Forsk, 1875) ce que le genre Fritillaria est au genre Oikopleura chez les Appendiculaires. Je crois devoir conserver également les genres Thalia (Blumenbach, 1810), Pegea et lTasis (Savigny, 1816), en leur attribuant les caractères suivants qui, à mon avis, motivent amplement la création de genres spéciaux. dépourvus de nucléus et à chaînes circulaires. . . . . . . . Cyclosalpa. | | Branchie à hémi-trémas . Pegea. nu Branchie à bandes ciliées. Thalia. età chaînes Salpidæ{ à nucléus | 1 En) rubanées. | RÉFPCOUNER EE. ed ir 4 DAÎDA PInSeurS EME Len Cite Iasis. 4 Sous le nom de Pyrosomopsis, Mac-Donald avait déerit la forme à chaîne de Cyclosalpa pinnata. Ce genre Pyrosomopsis ne peut donc être conservé, pas plus que les genres Dagysa (Gmelin, 1788), Biphora (Bruguière, 1787), Thetys (Tilesius, 1802), Pterolyra (Lesson, 1830), Dubreullia (Lesson, 1830), qui correspondent à diverses es- pèces de Salpes nucléées. Le genre Cyclosalpa comprend toutes les Salpes ortoentérés de Todaro, c’est-à-dire S. pinnata, S. affinis, S. virgula. Tandis que les autres genres Pegea, Salpa, Thalia, lasis, correspondent aux Salpes que ce même auteur nomme Carioentérés. Le genre lasis renferme deux espèces : I. polycratica (S. polycra- tica, Forskal, 1775 = S. zonaria, Cham., 1819) et I. Tilesii (S. Tile- sit, Guv., 1804 = S. infundibuliformis, Q. et G.). Quant à l'espèce désignée par Savigny sous le nom de lasis cylindrica (S. cylindrica, Cuv., 1804), elle appartient, par tous ses caractères, au genre Salpa proprement dit. Le genre Thalia ne comprend que l'espèce T. mucronata (S. mu- cronata, Forsk.), et le genre Pegea l'espèce P. confœderata, Forsk. En 1882, Salensky avait groupé ces deux dernières espèces sous le nom de Salpæ gymnogonæ, par opposition aux autres Salpes qu'il appelait Salpæ thecogonæ. Le mode de développement de Thalia mucronata et Pegea confæderata présente, en effet, des particularités essentielles qu'on ne retrouve pas chez les autres Salpidæ. A: 12 FERNAND LAHILLE. La synonymie des Salpidæ n’est que trop compliquée, et il serait à souhaiter qu’on cessät de désigner chacun de ces animaux par deux noms différents. Je sais que je me heurte à l’opinion de C. Vogt, qui voulait qu’on nommät « les espèces connues en joignant les deux noms les plus anciens des deux formes, et en mettant le nom de Ja forme solitaire en avant. » Mais, pourtant, le polymorphisme sexuel des Polypoméduses, des Aphidiens et de bien d’autres animaux, n’em- pêche pas de réunir les diverses formes sous un même nom, suivi au besoin de signes conventionnels. On n’a jamais eu l’idée de don- ner des noms différents aux blastozoïdes et aux oozoïdes des Dolio- lums. Pourquoi donc le ferait-on encore pour les Salpes ? Les Salpes solitaires étant généralement considérées comme asexuées, on devrait conserver le nom donné aux Salpes à chaînes, les formes se repro- duisant directement par ovogénèse méritant seules un nom spécifique. On ajouterait ensuite à ce nom simple l’abbréviation Ag. ou Sol., pour designer, soit la forme agrégée, soit la forme solitaire. Pegea confæderata (Forsk.). Synonymie. — De toutes les Salpes, Pegea confæderata est celle dont la synonymie est la plus embrouillée. Les anciens zoologistes qui se sont occupés de l’étude des Salpidæ tenaient compte, dans la création des espèces, de caractères extérieurs insignifiants; cela provenait : 4° du petit nombre d'individus dont ils pouvaient disposer, petit nombre qui rendait toute comparaison impossible ; 2 de la grossière anatomie dont ils se contentaient ; 3° des descriptions im- parfaites et insuffisantes ; 4e souvent aussi de leur peu de connais- sances bibliographiques, qui leur faisait considérer comme nouvelles des formes très anciennement connues. La coloration, la taille, la présence ou l’absence d’appendices pos- térieurs, etc., ont fait donner à l’animal qui va nous occuper les noms suivants : Salpa confæderata, Forsk. (Descript., 1715, p. 115). — socia, Bosc (Hist. nat. des vers, t. Il, p. 180). — ferruginea, Cham. (De Salpa, 1820, p. 23). RECHERCHES SUR LES TUNICIERS. 13 Salpa lævis, Lesson (Coquill., 1830 p. 273). — nephodea, Lesson (Coquill., p. 275). — octofora, Cuv. (Biphores, Ann. du Museum, t. IV, 1804, p. 379). — bicaudata, Q. et Gaim. (Astrolabe, 1834 p. 585). — Femoralis, Q. et Gaim (A4strolabe, p. 587). La forme solitaire a reçu elle aussi des noms divers : Salpa Gibba, Bose (l. c., p. 179). — dolium, Q. et Gaim. {L. c., p. 575). — vivipara, Per. et Lesueur (Voy. de découvertes, 1824, tab. 31). — scutigera, Cuv.(l. c., p. 371). — quadrata, Herd. (Rep. on the Tunicata, P. III, 1888, p. 84). La synonymie de Pegea confæderata étant élucidée, je vais main- tenant examiner en détail l’anatomie de cet animal pour signaler quelques particularités non encore observées et pour relever en même temps quelques erreurs. Si j'ai choisi ce type de Salpe, c’est que j'ai reconnu en lui une forme des plus instructives pour faciliter les comparaisons de ces animaux avec les autres Tuniciers. Caractères extérieurs de la forme agrègée. — Le corps est trans- parent, incolore ou légèrement rougeâtre (cellules pigmentaires de la cavité générale). Il à la forme d’un parallélipipède, les faces ven- trales et dorsales sont quatre fois plus larges que les faces latérales. La partie postérieure du corps est quelquefois arrondie, mais le plus souvent elle présente deux longs appendices qui avaient motivé le nom de Salpa bicaudata que lui donnaient Quoy et Gaimard. D'ordinaire, l’appendice de droite est un peu plus court que l’ap- pendice de gauche. La tunique forme huit petites éminences (d’où le nom deS. octofora Cuv.) disposées au nombre de quatre sur les faces latérales de l’animal tandis que les quatre autres sont placées sur la face ventrale. C’est par ces éminences que sont fixés entre eux les individus d’une même chaîne. L’orifice buccal est antérieur ; l’orifice cloacal, situé un peu en avant dunucléus, est dorsal. Le caractère extérieur le plus frappant du P. confæderata est la présence de quatre bandes musculaires dis- 14 FERNAND LAHILLE., posées par paires en X et placées sur le dos (fig. 1). Ces bandes ne se prolongent pas au delà des parties latérales du corps de l'animal. L’œuf, ainsi que la poche incubatrice qui le renferme, sont situés à droite entre les deux bandes musculaires postérieures. La disposition en chaîne de ces animaux est la suivante : La chaîne est générale- ment double. Les individus sont accolés latéralement dans chaque rangée, et, en- suite, les deux rangées sont accolées ven- tralement l'une à l’autre. Dans ces agré- gations, à l'inverse de ce qui a lieu chez les Pyrosomes, Botrylles, etc., les orifices cloacaux occupentla périphérie du système, les orifices buccaux en occupent le cen- tre. Enfin il faut remarquer que l'orientation des individus est semblable dans une même E $ rangée, c’est-à-dire que les bouches sont Fig. 1.— Pegea confæderata. Forme agrégée, On aperçoit latéralement situées toutes, à la fois du côté droit, par les quatre prolongements d’altache. La ligne médiane grèle représente le sillon ventral vu par transpa- rence. Gr. *À exemple, tandis que tous les cloaques sont situés du côté gauche. Parfois, les deux rangées présentent une orientation semblable (fig. 2) et, dans ce cas, la chaîne de P. confœderata peut être comparée à une chaîne de run CE as 2 > _ = à ÈS É—-É a — HELSF Fig. 2. — Schéma de la disposition normale de la chaîne de Pegea confæderata. OB, orifices buccaux dirigés en avant du plan de la figure; OC, orifices cloacaux dirigés en dehurs ; Pe, prolongements eclodermiques soudant les individus placés en alternance. Cyclosalpa pinnata qui, au lieu d’être circulaire, serait devenue ellipsoïdale et très allongée, à cause du plus grand nombre et de la plus grande taille des individus. Parfois les deux rangées de la chaîne de P.confæderata présentent des orientations inverses, comme aussi quelquefois une des rangées peut être incomplète. RECHERCHES SUR LES TUNICIERS. 15 Le stolon de la forme solitaire a la même constitution que celui des Pyrosomes, les individus y sont disposés sur un seul rang et leur sillon ventral est dirigé comme chez les Pyrosomes en avant, ce n'est que plus tard qu’ils chevauchent les uns sur les autres. La fig. 2 repré- sente la disposition normale de la chaîne de P. confæderata devenue libre. OB et OC représentent les orifices buccaux et cloacaux ; Pe, les prolongements de la tunique qui soudent les individus entre eux. La longueur des individus est fort variable ; ceux que j'ai ren- contrés à Banyuls ne dépassaient pas 6 centimètres de longueur (prolongements caudaux compris) sur 4 centimètre et demi de large. Savigny indique les dimensions suivantes : 5 centimètres de lon- gueur sur 2,5 de large. Les individus étudiés par Cuvier variaient de # à 10 centimètres. D’après Quoy et Gaimard, quelques variétés tropicales atteindraient même 18 centimètres de longueur. Enfin, Le Challenger a rencontré des individus mesurant 8 centimètres de longueur (Pacifique sud), tandis que dans une autre colonie recueillie aux îles Philippines, les individus ne dépassaient pas 1, 7 centimètres. Caractères extérieurs de la forme solitaire. — La forme solitaire de cette espèce, que j'ai re- r , 5 : Fig. 3. — Pegea confœde- présentée fig. 3, est ovoide ; si on la regarde du sata. Forme solitaire.Vue L . ; k de dos en A et de profil en côté dorsal et presque rectangulaire si on la voit Bb, orifice buccal; a, É orifice cloacal. — Demi- de profil; les deux orifices sont dorsaux etter- Sandeur naturelle. minaux. La glande germinative, ici hémisphérique, recouvre tout le nucléus et l’ensemble de ces organes occupe la partie postérieure ventrale du corps. La partie ventrale antérieure est légèrement arrondie. La partie postérieure, au contraire, est oblique par rapport à l’axe longitudinal du corps. L’orifice buccal, vu de profil, rappelle entièrement l'aspect d’une corolle de Personnée. L'orifice cloacal présente six petits lobes arrondis. Les deux paires de muscles en X que l’on rencontre dans la forme à chaîne, affectent ici la même disposition. La musculature des orifices diffère seule. 16 FERNAND LAHILLE. Les quelques individus que j'ai rencontré à Banyuls, présentaient les dimensions moyennes suivantes : 2 de long sur 4 de large. L'animal qu'Herdman a décrit sous le nom de Salpa quadrata, n’est, à mon avis, qu'une simple variété de P. confæderata, forme solitaire. La forme générale du corps, la disposition des muscles, le sillon ventral court et recourbé, l’anatomie des centres nerveux, tout concourt à le démontrer. Pour résumer tout ce que je viens de dire au sujet des caractères extérieurs de P. confœæderata, on peut en donner la diagnose suivante : P. confœderata : forme agrégée. — Bouche terminale; orifice cloacal dorsal. — Quatre bandes musculaires dorsales disposées en X.— Nucléus. — Hemitrémas.— Presque toujours, deux appen- dices postérieurs. P. confæderata : forme solitaire. — Bouche terminale ; orifice cloacal terminal. — Muscles du corps disposés comme chez la forme agrégée. — Nucléus. — Hémitrémas. — Pas d'appendices postérieurs. Cette espèce étant ainsi nettement déterminée, je vais passer à l'étude détaillée de la forme agrégée. PEGEA CONFÆDERATA, Forsk. — Forme agrégée. Tunique et Ectoderme. — La tunique est mince et gélatineuse, sauf au niveau du nucléus où elle devient fort épaisse en même temps que sa consistance devient en cet endroit presque cartilagineuse. Elle est partout entièrement transparente et intimement unie à l'ectoderme. Elle forme huit élévations ou crampons d'attache, désignés par les anciens anatomistes sous le nom de spiracules et que Cuvier considé- rait comme autant de suçoirs. Deux paires de ces crampons sont ventrales et situées chacune à une extrémité du sillon ventral. Les deux autres paires occupent des positions latérales au même niveau du corps que les précédentes. L'’ectoderme fait une légère saillie dans chacun de ces crampons ; mais, dans tous les cas, les cavités générales des individus adultes sont entièrement indépendantes les RECHERCHES SUR LES TUNICIERS. 17 unes des autres, et la chaîne ne constitue ici, comme chez toutes les Salpes adultes du reste, qu’une simple agrégation. Les cellules tunicières sont de deux sortes (fig. 4). Tout contre l’ectoderme elles sont étoilées ; à la surface extérieure elles sont va- cuolaires. Quelquefois, au lieu d’une vacuole les cellules en contiennent plusieurs ; elles ont alors l’aspect d’une sorte de morula irrégulière et on les a désignées, parfois, sous le nom de cellules en rosette sans expliquer leur constitu- tion. Les éléments vacuolaires sont très rares de part et d’autre du sillon ventral ; ; S : Fig. 4. — Eléments de la tunique ils sont très abondants, au contraire, autour Ge Pegea confæderata, F. ag. — du nucléus. C’est, du reste, un fait à noter RS Rae ON dunlarhes que la consistance cartilagineuse de la Sniin tunique des Tuniciers est d’autant plus prononcée que le nombre de cellules vacuolaires qu’elle renferme est plus considérable. Chez P. confæderata les cellules vacuolaires et étoilées sont plon- gées dans une masse de tissu hyalin homogène, et ces deux sortes de cellules sont toujours séparées les unes des autres. L’ectoderme est fort difficile à mettre en évidence. Le plus sûr moyen de réussite consiste à traiter l'animal par une solution d’acide osmique au centième. Dans ce cas, on aperçoit, en outre, à la sur- face externe de la tunique, un revêtement épithélial incomplet sem- blable à celui que je décrirai chez le Pyrosome et les Botrylles. Ce fait conduit à penser que la substance tunicière se forme entre deux couches ectodermiques, car il me semble très improbable que la couche externe formant un épithélium pavimenteux se produise par voie de la transformation de cellules tunicières proprement dites. Quant aux cellules vacuolaires, elles sont inertes, paraissent avoir atteint le dernier degré de leur évolution, et il est impossible de leur attribuer le moindre rôle dans la formation de l’épithélium externe. Cette constitution de la tunique chez les Salpes, Pyrosomes et 2 18 FERNAND LAHILLE. Botrylles peut expliquer l'impossibilité qui existe à séparer chez ces animaux la tunique de l’ectoderme sous-tunical ou ectoderme proprement dit des auteurs. La tunique se formant, en réalité, entre deux feuillets ectodermiques. Les recherches de M. Maurice sur les Fragaroïdes aurantiacum, l'ont du reste amené à la même conelusion en ce qui concerne l’animal qu'il a étudié, Système musculaire. — Les muscles du corps forment deux paires de bandes disposées en X et situées à égale distance des extrémités du corps. Ces bandes ne s’étendent jamais au-delà du dos des invidus. Parfois, il arrive que la bande antérieure de la première paire se dédouble et cette dis- position rappelle alors celle des bandes musculaires antérieures de Thalia mu- cronata (f. agr.). Lorsque nous étudieronsles Doliolidæ nous verrons à quels muscles corres- pondent, chez les Ascidies, les muscles du corps des Salpes. La disposition des muscles buccaux est représentée dans la figure 5. La lèvre supérieure présente une large bande (Bsm) qui naît de chaque côté de la Fig. 5. — Muscles huccaux, commissure gauche. SAr, sillon antérieur; Brm, bouche en avant du sillon antérieur. muscles rétracteurs de la bouche ; Bim- Bim,, muscles de la lèvre inférieure; AU Er & RS Bsm-Bsms, muscles de la lèvre supé- Cette bande se trifurque aux commis rieur'e. . ON sures labiales. Une première branche (Bsm,) va se perdre sur le bord de la lèvre supérieure; une se- conde branche (Bim,) forme la bande antérieure de la lèvre inférieure et se continue avec le bord antérieur de la bande buccale. Quant à la bande postérieure (Bim) de la lèvre inférieure, elle prend naissance en avant de la terminaison des deux muscles rétracteurs de la bou- che (Brm) entre lesquels passe le sillon antérieur et cette deuxième bande est double à son origine. En résumé, on peut dire qu’autour de l’orifice buccal se trouvent trois bandes musculaires entre- croisées et anastomosées aux deux angles, afin d'assurer, précisément à RECHERCHES SUR LES TUNICIERS. 19 par le fait de leurs anastomoses, la simultanéité de leur action. Ces muscles sont les constricteurs de la bouche, tandis que les muscles obliques (Brm) remplissent le rôle de rétracteurs. | Les muscles cloacaux sont représentés par une bande musculaire unique située sur la lèvre antérieure de l’orifice cloacal; elle s’épa- nouit en se trifurquant aux deux angles et une de ces trois branches va s'étendre un peu sur la lèvre postérieure. Histologie : Si on traite un muscle par la potasse caustique à froid (25 co) celle-ci dissout le protoplasma du muscle tandis qu'elle en respecte la substance contractile. Chaque bande se dédouble alors en deux couches, et la fig. 6 montre à un fort gros- mu cu y Eu - il ne ee D PR AE Î INT ne qu = sissement une petite partie de l’une d’elles. Les fibrilles musculaires moniliformes sont rangées côte à côte au nombre de huit à : Le : qe Fig. 6. — Portion d’un muscle dorsal dix et forment ainsi de petits faisceaux. ?jt Men L. “ br de 800 — Fibrilles musculaires et es disques sompres Sont plus larges que faisceaux primitifs. Les stries som- k ; be bres des disques clairs ne sont pas les disques clairs. Au milieu de ces der- a RE niers on aperçoit une strie noire. Mais cette strie n’est qu’un jeu de lumière, comme on s’en assure en sondant la préparation à l’aide de la vis micrométrique du microscope. Les faisceaux primitifs de fibrilles se réunissent à leur tour en faisceaux secondaires entre lesquels on aperçoit, avant le traitement par la potasse, des épaississements placés de distance en distance et qui m'ont paru être des terminaisons nerveuses. Les stries de la figure 5 représentent les limites de ces faisceaux secondaires. Chaque faisceau secondaire se termine au point d’ori- gine des bandes en s’effilant beaucoup. Je n'ai pu suivre le développement des bandes musculaires des Salpidæ, aussi je ne puis dire ce que représentent les gros noyaux que l’on rencontre à des distances régulières au milieu de chaque bande. Tout ce que l’on peut dire, c’est que les cellules musculaires primitives occupent simplement la largeur d’un faisceau secondaire et ne s'étendent jamais sur toute la largeur de la bande. Parfois, on 20 FERNAND LAHILLE. rencontre, en effet, aux points d’origine des bandes, quelques cel- lules contractiles isolées. Ces éléments sont allongés dans le sens de la bande et leur plus grande largeur ne dépasse jamais celle des faisceaux secondaires. Centres nerveux.— Les centres nerveux (fig. 1 et fig. 3) sont situés entre les muscles rétracteurs de la bouche au milieu de l’espace com- Fig. 7. — Région nerveuse vue de profil. Le sillon antérieur Sar, est coupé vers le milieu de l'organe neural Gn. In, pavillon de l'organe ; Œn, œil ; Cn, centre nerveux ; 7{, tunique commune ; Fm,, section de la première bande musculaire du corps ; Pa, plancher cloacal ; Et, ectoderme. — Le nerf optique était exceptionnellement court chez l'individu dont cette figure représente la région nerveuse. pris entre la bande musculaire de la lèvre supérieure et la bande antérieure de la première paire des muscles du corps. La figure 7 les représente fortement grossis et vus de profil. Ganglion nerveux. — Le ganglion pyriforme est intimement accolé à l’ectoderme très épais à son niveau. Sur une coupe transversale (fig. 8) le ganglion présente une section presque rectangulaire. Il surplombe l'angle supero-postérieur de l'organe neural qui m'a toujours paru indépendant de lui. Le ganglion fait saillie au-dessus de l’ectoderme qui forme en ce pointune cavité demi-cireulaire à con- cavité antérieure. En avant du ganglion et en son milieu s’avance un gros pédicule (fig. 9) représentant un véritable nerf optique. En effet, il se bifurque à son extrémité et porte deux yeux sphéri- ques plus ou moins soudés sur la ligne médiane. Tout au tour de RECHERCHES SUR LES TUNICIERS. 21 l’œil les cellules ectodermiques sont particulièrement minces et plates. L'œil est formé de longues cellules en bâtonnets disposés en rayons autour du centre de l'organe. Ces cellules ont la forme de prismes hexagonaux. Tout autour de l’œil, sauf dans les parties antérieure et Fig 8, Fig. 9. Fig. 8. — Conpe transversale du ganglion Gn. — Et, ectoderme ; Tf, tunique commune. — Gr, 192 Fig. 9. — Coupe longitudinale du ganglion. — Et, ectoderme ; Œn, œil réuni au ganglion par un court pédoncule. — PGr. 100 supérieure, se trouve une couche de petites cellules pigmentaires arrondies à granulations de couleur rouge ou brun-foncé et dont le noyau est entièrement hyalin. La figure 8 montre la constitution histologique du ganglion. Une ou deux rangées de grandes cellules multipolaires dirigent leurs prolongements vers le centre de l’organe, tandis qu’elles en occupent la périphérie. La plus grande partie du ganglion est constituée par des cellules plus petites, transparentes, qui sont comme éparses dans la masse du ganglion qui est granuleuse. De cette dernière circonstance, il résulte qu’on ne peut distinguer aisément les cellules centrales. Du ganglion nerveux partent en rayonnant huit ou neuf paires de nerfs. Ceux-ci renferment quelquefois des éléments cellulaires. Jamais, et cela chez toutes les Salpes que j’ai pu observer, je n’ai rencontré un cordon nerveux qui fût comparable au cordon ganglion- naire dorsal des Ascidiens. Terminaisons sensitives. — Les deux paires de nerfs antérieurs se dirigent directement vers la lèvre supérieure de la bouche. Ils y forment un véritable plexus à mailles d'autant plus serrées que l’on se rapproche davantage du bord libre de la lèvre. À chaque point 22 FERNAND LAHILLE. d’anastomose on distingue une ou plusieurs cellules nerveuses. Sur le bord libre au milieu des cellules ectodermiques devenues eubiques, on aperçoit des éléments deux fois plus volumineux (fig. 10). C’est dans ces dernières cellules, au milieu d’un grand noyau, que viennent se ter- miner les dernières ramifications des nerfs. La face externe des cellules sen- sitives est hémisphérique et supporte un cil rigide, dressé, deux fois plus long _ qu'elles. Fig. 40. — Plexus nerveux bnccal. (Bord de la lèvre supérieure.) Les cellules sen- Organe neural. — Comme je l’ai sorielles sont hémisphériques et munies ’un cil rigide. — Gr. 120 TEE Are 2 : . RE déjà dit, il n'existe, entre lui et le gan- glion nerveux, aucune rela- tion directe. Non seulement je n’ai vu aucun nerf spé- cial s’y rendre, mais encore le ganglion est parfois assez éloigné de l’organe. Celui- ci est enfoncé dans la lame dorsale. Il a la forme d’un sac aplati latéralement, et il vient déboucher dans la cavité branchiale par une ouverture infundibuliforme. Les parois de ce sac sont fort minces et constituées par un simple épithélium pavimenteux, en continua- Fig. 11.— Coupe horizontale de l'organe neural. Sur les tion directe avec l’épithé- côtés on aperçoit le sillon antérieur Sar, coupé oblique- ment. Les deux yeux Œn, paraissent plongés dans la tuni- 1; 116 Smhr que ; Sn, sillon de l'organe neural. — Gr. 5° lium de la cavité péribran- chiale. L’arête de ce sac présente au contraire un épithélium cylindrique spécial très déve- loppé, formant une grande gouttière ciliée, en forme d’Y, que nous allons étudier dans un instant. La fig. 14 représente une section RECHERCHES SUR LES TUNICIERS. 23 horizontale à travers l’organe neural au niveau des deux yeux. On voit de chaque côté de cet organe, et coupé obliquement, le sillon an- térieur de la branchie qui s'étend en diagonale et d’arrière en avant. Dans la fig. 9, ce sillon antérieur a été interrompu pour rendre le dessin plus lisible. Cette même figure montre l'indépendance du sillon antérieur et de l’enton- noir de l'organe neural. Celui- l | | | ci s'ouvre en avant du sillon, à la limite postérieure de la cavité buccale. Les cellules de la gouttière (fig. 12 et 13) évoquent, à pre- Fig 12, Fig. 43. Fig.12. — Sillon Sn, de l'organe neural. Gr. 12° mière vue, lidée de cellules Fig. 13.— Cellules du sillon de l'organe neural. Gr.99 sensorielles en bâtonnets pré- sentant chacune une partie claire, fibrillaire, et une partie plus som- bre renfermant le noyau. Ces cellules sont prismatiques, volumi- neuses, leur noyau est ovalaire et rapproché de leur base. Leur extrémité libre se termine par un plateau sombre. Le protoplasma cellulaire est plus dense immédiatement au-dessus du plateau qu'ailleurs. Les cellules sont séparées les unes des autres par une matière unissante au-dessus de laquelle émergent les plateaux. Ceux-ci sup- portent des cils aussi longs que la cellule elle-même. Ces cils ont un aspect soyeux et paraissent agglomérés, et chacun d'eux semble correspondre à une fibrille protoplasmique intracellulaire qui abou- tirait au noyau. M. de Lacaze-Duthiers a observé, depuis fort long- temps, cette dernière disposition dans l’épithélium œsophagien d’un mollusque, de la Patelle si je ne me trompe. M. A. Sabatier ! a rencontré également, dans la gouttière supérieure de l'estomac de Mytilus, edulis des éléments morphologiquement semblables. Enfin, M. Maurice? signale la présence dans l’œsophage 1 Etudes sur la Moule commune. 1877, l'e part., pl. XX VII ter, fig. 4. ? Etude monographique d’une esvèce d'Ascidie composée. 1888, pl. V, fig. 50. 24 FERNAND LAHILLE. du Fragaroides aurantiacum, de cellules qui offrent une structure analogue. Ces cellules prismatiques passent brusquement sur les côtés de la gouttière de Pegea à un épithélium pavimenteux. En se dirigeant vers le fond de la gouttière, on les voit au contraire devenir cubiques, perdre leurs cils en conservant, toutefois, longtemps leur plateau. Les deux lèvres de la gouttière ciliée se continuent directe- ment l’une l’autre, et constituent ainsi l’arête à paroi double de cet organe. J’ai représenté, à la fig. 11 et 42, un épithélium pavimenteux, qui paraît se continuer avec la paroi latérale de l'organe neural. Malgré toutes mes recherches, je n’ai pu arriver à me rendre compte de _ sa signification, et l’embryologie ?. HSE 2 pourra seule, je crois, en fournir : l'explication. Branchie. — Ce qu'on nomme #). Lex communément la branchie chez | les Salpes, ne constitue que la [Gr partie dorsale de l’organe respira- toire. Il ne faut pas, en effet, per- “ ce Sg, dre de vue que le sillon ventral et ses annexes font également partie Fig.44. — Portion supérieure de la branchie vue de profil. Pa, plancher cloacal. Br, bande ciliée ; Tr, hemi-tréma, poche en forme d’écusson ; Ter CRE + canal de l’hémi-tréma ; Sdr, gouttière dorsale ; Cr, CIErs. Seulement, chez les Salpes partie supérieure de la cavité branchiale ; Csr, cul- = : £ de-sac supérieur du refoulement péribranchial. les deux fentes respiratoires pri- Gr. 4ë de cet organe chez tous les Tuni- mitives étant et demeurant très larges, les sillons ventral, antérieur et postérieur, sont complètement isolés de la partie dorsale de la branchie. Ceci posé et pour la com- modité des descriptions, je continuerai toutefois d'appeler branchie l'organe qui s'étend obliquement de l'entrée de l’œsophage à la région nerveuse et qui présente les bandes vibratiles. De fait, lui seul est spécialement chargé d'assurer l’hématose, tandis que les autres parties du pharynx servent surtout à la préhension des aliments, grâce au mucus qu’elles sécrètent ou qu’elles transportent. Si on examine la branchie à un fort grossissement (fig. 44), on Lot RECHERCHES SUR LES TUNICIERS. 25 observe à sa partie supérieure une sorte de toit (Pa) ou plancher cloacal, formé par des cellules allongées, produisant une substance amorphe, quelquefois fibrillaire, qui les recouvre (fig. 15). De chaque côté du plancher cloacal, un épithélium pavimenteux forme un feuillet mince qui descend en se plissant plus ou moins. Ces deux feuillets, réunis par des tractus conjonctifs, se continuent l’un l’autre en formant, à leur partie inférieure, une sorte de gout- . der AN NN NS AN ANNEES « NN ANT 10e Fig. 45. Fig. 46. Fig. 45. — Coupe transversale de la portion dorsale du pharynx (Branchie des auteurs). — Cr, portion dorsale de la cavité branchiale ; Br, bandes ciliées interrompues çà et là, la coupe étant un peu oblique ; Csr, cul-de-sac supérieur du refoulement péribranchial ; Tr, cavité de l’hémitréma ; Ter, canal de l’hémitréma ; Pa, plancher cloacal. — Gr. £2 Fig . 16. — Coupe longitudinale oblique des hémitrémas, Tr. — Ter, canal de l’hémitrema ; Br, bande ciliée. — Gr. $2 tière qui représente la portion dorsale de la cavité pharyngienne. Immédiatement au-dessous du plancher cloacal, ils se rapprochent, s’accolent presque, et la paroi qu’ils forment ainsi représente la cloi- son dorsale que je décrirai chez les Didemniens. Au- dessous de cette cloison, les deux feuillets s’écartent de nouveau, et chacun d’eux présente les rangées de bandes vibratiles placées à des distances régulières les unes des autres. Ces bandes ne dépassent pas, vers le bas, la gouttière et se terminent sur son bord libre en s’arrondissant (fig. 14). Leur extrémité supérieure, au contraire, est dilatée en 26 FERNAND LAHILLE. forme de bouteille à large panse, et plonge dans l’intérieur de la branchie, à un niveau plus éloigné du plancher cloacal que de la gouttière vers laquelle elle est dirigée. Des coupes transversales (fig. 15) et des coupes longitudinales (fig. 16), expliquent la consti- tution de ces dilatations. Elles sont produites par une invagination de Ja portion dorsale très dilatée de chacune des bandes ciliées. Le cul- de-sac de ces invaginations est fort large et communique avec la cavité péribranchiale à l’aide d’un canal rétréci. Le plancher du cul- de-sac est formé par un épithélium cylindrique cilié , tandis que l'épithélium de la voûte est dépourvu de cils et passe peu à peu à l’épithélium pavimenteux de la paroi branchiale. Ces invaginations sont toutes dirigées obliquement de haut en bas en convergeant, comme je l'ai déjà dit, vers la gouttière, portion dorsale de la cavité pharyngienne. Chez les Ascidies, si on suit la formation des trémas, on voit d’abord se produire, des deux côtés de la partie dorsale de la bran- chie, de petits épaississements ciliés, produits par une modification de l’épithélium péribranchial. C’est le premier stade qui se retrouve à l’état permanent chez les Salpidæ, dont la branchie ne présente que de simples bandes vibratiles. Les épaississements ciliés s’invagi- nent, s’enfoncent ensuite de plus en plus dans l’espace compris entre les deux épithéliums branchiaux (épith. péribranchial et épith. pharyngien). Chaque invagination représente un tréma en voie de formation et mérite le nom d’hémitréma. La branchie de Pegea s'arrête à ce stade, et les invaginations de la paroi péribranchiale ne parviennent pas à s'ouvrir dans la portion dorsale (Cr., fig. 45) de la cavité pharyngienne, tandis que chez les Ascidies, surtout chez les Glossophorum, où j'ai pu suivre facilement ce processus, l’invagina- tion se poursuit et vient déboucher dans la cavité branchiale. Ceci est le troisième et dernier stade de la formation des trémas chez les Ascidies. Il faut ajouter, pour être complet, que, chez quelques types, chez Circinalium, par exemple, il se forme, vis-à-vis de chaque épaississement cilié de l’épithélium péribranchial, un épais- sissement correspondant dans l’épithélium pharyngien. Dans ce cas, RECHERCHES SUR LES TUNICIERS. 27 comme Kowalevsky l’a remarqué du reste également chez Perophora, les trémas se forment par la soudure de deux invaginations allant en sens inverse l’une de l’autre. En résumé, nous devons considérer les invaginations branchiales dorsales de Pegea, comme des trémas rudimentaires qui n’arrivent pas à déboucher dans la cavité pharyngienne. C'était du reste phy- siologiquement inutile, puisque cette dernière cavité communique toujours largement avec l'extérieur, et que l’hématose peut, dans ce cas, s’accomplir tout aussi bien à l’aide de bandes ciliées et d’hé- mitrémas qu’à l’aide de trémas complets. Bien plus, on conçoit tout l’avantage qui résulte pour la natation de l’absence de treillis inter- posés entre les deux orifices d'inspiration et d'expiration de l’eau. Savigny, qui a étudié la branchie de Pegea, n’en a pas compris la constitution. Il considérait le cylindre branchial comme formant un seul feuillet représentant un seul côté de la branchie des Asci- dies. « La surface respiratoire est principalement composée de vais- seaux transverses. Dans Salpa octofora, il y en a plusieurs rangs, ce qui suppose l'existence de plusieurs vaisseaux longitudinaux, et rapproche ce tissu branchial de celui des Ascidies » (3"e Mémoire, page 126). Nous avons vu qu'il n’y a pas plus de vaisseaux longitu- dinaux que de vaisseaux transverses. Les hémitrémas plongent dans la cavité générale et baignent dans le liquide sanguin qui y cir- cule. Au dessous de chaque bande, on ne rencontre jamais les vais- seaux qu'y supposaient Savigny, Quoy et Gaimard, et qu'a peut-être cru y voir Todaro. Les bandes ciliées sont toujours formées par un simple épaississe- ment de l’épithélium branchial. Pour Savigny, la branchie proprement dite des Salpes ne repré- sentant, nous l’avons vu, qu’un des côtés de la branchie des Asci- dies, il croyait rencontrer l'autre côté dans une petite portion qui s’étend de la base de la précédente au sillon dorsal. Mais cette bran- chie postérieure, comme il la nommait, n’est pas autre chose que le feuillet gauche de l’organe respiratoire, présentant encore quelques hémitrémas plus ou moins rudimentaires et s'étendant sur le côté 28 FERNAND LAHILLE. gauche de l’orifice œsophagien, tandis que le feuillet droit s'arrête en avant de cet orifice. Le repli droit de la branchie situé sous le plancher cloacal, se re- lève au-dessus de ce plancher et forme une cloison horizontale sé- parant l'anus de l’œsophage et empêchant l'introduction des excré- ments dans le tube digestif. C’est une particularité qu’il importe de signaler. Sillon ventral. — Ce sillon est plus long que la portion dorsale de la branchie, car son extrémité antérieure se trouve située sous la lèvre buccale inférieure. Les figures 17 et 18 sont destinées à mon- trer sa constitution, Comme chez tous les Tuniciers, on y distingue trois paires de zones glandulaires, symétriquement disposées de part et d’autre de la zone médiane, pour- vue de cils très allongés. La zone glandulaire inférieure est formée d’une douzaine de cellules coniques dont les sommets convergent vers l'intérieur du sillon, et qui présentent les caractères suivants, que l’on re- trouve dans les cellules des autres zones glandulaires. La partie infé- rieure de la cellule est claire, ren- ferme un noyau arrondi pourvu d’un nucléole très apparent. La partie supérieure, au contraire, est plus sombre et présente assez souvent un Fig. 17. — Coupe transversale du sillon ven- tral. Gr. 299, — Mr, zone médiane ; G,r, Gor, Gr, zones glandulaires, inférieure, moyenne, supérieure ; Cyr, Cer, Cr, zones moyenne ne se COoMpose que de six intermédiaires ; Rr, replis marginaux. aspect fibrillaire. La zone glandulaire à huit cellules également convergen- tes. Elle est séparée de la première par une zone ciliée (ciliée infé- rieure). Les cils, ici très courts, forment un tapis serré. Les éléments cellulaires de cette zone sont cylindriques, fort petits, et leurs limites RECHERCHES SUR LES TUNICIERS. 29 sont difficiles à préciser ; leur hauteur est moitié moindre que la hauteur des cellules glandulaires. La zone glandulaire supérieure est constituée par une quinzaine de cellules allongées, prismatiques par compression et formant ainsi, en les observant de face, une véritable mosaïque, tandis que les autres zones, vues de la même manière, simulent chacune une triple bande. La coupe du sillon (fig. 17) explique cette apparence. La partie libre des cellules de la zone glandulaire supérieure pré- sente une sorte d’épaississement ou plateau, mais celui-ci ne porte Jamais de cils. La zone intermédiaire qui la réunit à la zone glandu- laire moyenne est fort réduite. Les replis marginaux sont très déve- loppés chez Pegea confœderata, et ils représentent chacun, du côté interne du sillon, une zone ciliée supérieure rappelant tout à fait, par sa constitution, la zone ciliée inférieure. Le sillon ventral contient quelquefois une grande quantité de mucus qui, coagulé, devient blanchâtre, et que Cuvier supposait pouvoir être des œufs. « Lorsqu'on écarte les bords du sillon, on y voit, dit-il, plusieurs petits filaments blanchâtres et courts, sem- blables à de petits vers qui s’y reposent librement et sans y être attachés. On peut aisément les extraire. J’ignore ce qu’ils sont : peut- être sont-ce des œufs. » (Cuv., Mém. sur les Salpes, p. 371). Normalement, les deux replis marginaux sont toujours en contact. Aussi le sillon ventral de Pegea, comme celui de la plupart des Tu- niciers, ne laisse-1-il échapper que par ses deux extrémités le mucus qu'il sécrète. Sillon antérieur. — Ce sillon forme une courbe gracieuse dont on peut suivre aisément le trajet dans la figure 1. Ce qu'il importe de noter surtout, c’est son mode d'union avec le sillon ventral (fig. 18) et avec la branchie (fig. 7). Ce sillon est constitué, comme chez tous les Tuniciers, par deux lèvres. La lèvre antérieure forme un repli mince transparent et continu, surplombant la lèvre postérieure ciliée et sombre. Celle-ci est également interrompue du côté dorsal, et forme en cet endroit un rudiment de sillon dorsal qui se continue 30 FERNAND LAHILLE. avec la gouttière de la branchie (fig. 7). Du côté ventral elle s’unit aux lèvres du sillon ventral et contribue à former ainsi le cul-de-sac antérieur (fig. 18). Sillon postérieur. — En arrière du sillon ventral, les deux zones ciliées supérieures se soudent entre elles pour former une zone Fig. 18. — Csr, Cul-de-sac antérieur du sillon ventral. On voit la lèvre inférieure du sillon antérieur Sar se continuer avec les replis marginaux du sillon ventral. — Gr. 52 Fig. 19. — Coupe transversale du cul-de-sac postérieur Cir montrant la disposition de la bande ciliée postérieure. Cette coupe passe par le point indiqué Cer, dans la figure suivante. — Gr. vibratile unique qui vient occuper la lèvre gauche du sillon posté- rieur, Cer (fig. 19). Ce sillon, formé par la continuation des replis marginaux du sillon ventral, est orienté dansla même direction que lui et vient se terminer sur le côté droit de l’orifice œsaphagien qu’il échancre. La zone ciliée postérieure (Cer) au point où les deux zones ciliées supérieures se réunissent pour la constituer, forme une sorte de selle qui met en communication l’intérieur du sillon ventral avec l'intérieur du sillon postérieur. En ce point précis s'arrête la zone glandulaire supérieure et commence le cul-de-sac postérieur. Ce cul-de-sac postérieur plonge de tous les côtés dans la cavité générale du corps; ilest fort long et les figures 19 et 20 montrent qu’il y est formé principalement par des zones ciliées inférieures et par les zones glandulaires inférieures et moyennes très réduites. Il se termine en pointe quelquefois au niveau de l’angle antérieur de l’aire œsophagienne. Mais le plus souvent (fig. 19) il se prolonge RECHERCHES SUR LES TUNICIERS. 31 en un long tube endodermique tel qu’on le rencontre dans les formes solitaires chez lesquelles il constitue le stoion prolifère. Ici, dans la forme agrégée, le tube endodermique ne bourgeonne pas, mais s'il reste à l’état d’organe rudimentaire, il] n’en démontre pas moins la tendance à la blastogénèse, tendance primitive et géné- rale que l’on retrouve même chez des Tüniciers très supérieurs. Ce tube correspond au tube stolonial des Ascidiens ; il est entière- ment homologue par son origine, sa structure et ses fonctions au tube endodermique des Pyrosomes. Seulement, chez ces derniers 0722///118> AREASSR à Fig. 20. — Cir, cul-de-sac postérieur du sillon ventral et sillon postérieur ; Ccr, le eul-de-sac se pro- longe au dessus du cœur ç, en un long tube endodermique ; Œi, aire œsophagienne ; Sur, sillon ventral ; Rr, replis marginaux. — Gr. 22, -animaux, tous les individus (oozoïdes et blastozoïdes) bourgeonnent, tandis que les oozoïdes des Salpes possèdent seuls cette propriété Chez les Pyrosomes et les Salpes, le tube stolonial n’est qu’un pro- longement du sillon ventral. Chez les autres Tuniciers le tube endo- dermique (Epicarde de MM. Van Beneden et Julin) est produit par la soudure de deux tubes endodermiques constitués eux-mêmes par une invagination symétrique de la paroi pharyngienne postérieure. Mais, en définitive, c'est toujours de la paroi branchiale que dérivent les bourgeons. Lorsqu'on voit chez les Pyrosomes et les Salpes la multiplication de l'espèce être dévolue au sillon ventral, il me semble permis de mettre en doute l’homologie de cet organe avec la glande thyroïde. Pour terminer ce qui a trait à l’anatomie de la branchie de Pegea 32 FERNAND LAHILLE. confæderata, il ne me reste plus qu’à signaler une paire d'organes rudimentaires qui sont ici de la plus haute valeur pour établir les relations réciproques des Salpes et des Tuniciers. Je veux parler des deux éminences plus ou moins allongées, dans le sens longitu- dinal, formées par l’endoderme et situées de part et d’autre de la portion antérieure du sillon ventral. Ces deux éminences, que j'appellerai : crêtes pharyngiennes, re- présentent les limites inférieures du pharynx et séparent virtuelle- ment les cavités pharygiennes et péripharyngiennes. Les Schémas suivants, qui représentent des coupes transversales passant au niveau de ces crêtes, montrent l’évolution de la cavité péribranchiale, des fentes respiratoires et des trémas chez les Tuni- ciers. Dans les schémas IIT, IV et V on voit ces crêtes disposées de chaque côté de la gouttière ventrale ou sillon ventral. Le schéma I représente la cavité pharyngienne d’un Appendieulaire (Oikopleura dioïica, par exemple). Les deux fentes respiratoires fran- chement ventrales de ces formes montent peu à peu latéralement en s’élargissant en leur milieu (Fritillaria haplostoma, par exemple). Ainsi apparaissent les crêtes pharyngiennes qui se retrouvent chez les autres Tuniciers. Dans un remarquable travail sur Phallusia scabroïîdes, MM. Van Beneden et Julin ‘, ont constaté que les orifices branchiaux externes, d’abord très éloignés l’un de l’autre sur les faces latérales du corps, se rapprochent progressivement chez cet animal de la ligne médiane dorsale. « En même temps le plancher du cloaque, qui n’est autre chose que la paroi primitive du corps, subit un mouvement de descente lent et progressif, tandis que les orifices branchiaux externes se rapprochent l’un de l’autre pour se confondre dans l’orifice unique du siphon cloacal de l'adulte » (p. 616). Mes observations sur de jeunes P. confæderata non détachés encore de leur progéniteur concordent exactement avec les faits précédents, * Les orifices branchiauæ externes des Ascidiens et la formation du cloaque chez Phallusia scabroides (N. sp.), par E. Van Beneden et C. Julin, Mém. Acad., Bruæelles, 1884. RECHERCHES SUR LES TUNICIERS. 33 et le schéma III peut représenter aussi bien ce qui passe chez Pegea que ce qui se produit chez Phallusia scabroïdes. ‘Le schéma IV montre les hémitrémas formés au-dessous du cul- de-sac dorsal de la cavité péribranchiale, dont les crêtes pharyngiennes limitent le cul-de-sac ventral. Enfin, dans le schéma V, qui représente un jeune bourgeon de Perophora, les fentes respi- ratoires (end, sch. III) se sont oblitérées ou ne sont plus représentés que par des stigmates placés du côté ventral. Les hémitrémas rétablissent ou complètent la communication de la cavité péribranchiale avec la cavité branchiale en venant déboucher dans l'intérieur de celle-ci. Si on compare le schéma IV avec la fig. 15, on s’expliquera sans difficulté la valeur morphologique du plancher eloacal Pa et sa constitution histologique si particulière. Il est naturel de le considérer comme un épithélium d’origine ectodermique produisant, comme l’ectoderme du corps lui-même, une couche de substance tunicière. On s'explique éga- lement la valeur des invaginations (Cr et Csr). La première représente réellement la partie dorsale de la cavité pharyngienne ; les deux autres, les culs-de-sac dorsaux de la cavité péri- branchiale. Cœur. — Le cœur de Pegea (fig. 20, 26 et 27) est placé longitudinalement en arrière et un peu Fig. 21. — Schéma des modifications de la bran- chie chez les Atrerata, Hemitremata, Eutremata. — L'ectoderme ect est représenté par une ligne plus épaisse, l’endoderme end par une ligne plus grèle. à droite du sillon ventral. Il s’étend depuis le cul-de-sac postérieur de ce sillon jusqu’au niveau de l'extrémité antérieure de l'estomac. Sur une coupe transversale on voit qu'il est constitué par un vési- cule dont la face dorsale se serait invaginée pour former la paroi contractile. Le cœur de Pegea ne présente pas de tube endodermi- 3 34 FERNAND LAHILLE. que venant recouvrir les bords de l’invagination cardiaque qui sont simplement rapprochés l’un de l’autre. La cavité du cœur est, toute- fois, fermée par un endothélium incontestable. L'absence d’un endothélium cardiaque chez les Tuniciers, admise par MM. Beneden et Julin, presentée par eux comme étant la seule différence anatomique entre le cœur de ces animaux et celui des Vertébrés, n’est donc pas réelle. « Les cellules plates, légèrement renflées autour du noyau où le protoplasma accumulé offre l'apparence d’un fuseau (pl. X, fig. 6a et 6b), » considérées par Van Beneden ! comme constituant le péricarde de Salpa pinnata, ne sont très probablement que des cellules endo- Fig. 22. — Pegea confedærata, For. ag. Endothélium du cœur. — Gr. 15° Fig. 23. — Portion de l’épithélium péricardique. De nombreuses cellules renferment deux noyaux. La 460 figure est une image négative obtenue après une imprégnation à l'argent. — Gr. 169 Fig. 24.— Muscles cardiaques vus par leur face externe. La paroi contractile, striée, est indépendante du noyau et située du côté interne. -- Gr. 222 théliales du cœur de cet animal. Chez Pegea, ces cellules présentent, en effet, un aspect identique (fig. 22). Généralement fusiformes, elles sont quelquefois étoilées, souvent très espacées ; d’autres fois, en quelques points, elles se trouvent au contraire très rapprochées les unes des autres. L'histologie du péricarde (fig. 23) est toute différente. Iei les cel- lules sont toujours polygonales. Leurs parois sont épaisses et trans- parentes, leur protoplasma homogène. Leurs noyaux volumineux, clairs et granuleux, présentent souvent des figures cariokynétiques, et, dans de nombreuses cellules, on rencontre deux noyaux ; donc la bipartition nucléaire précède ici la division cellulaire. ‘ Morphologie des Tuniciers, Van Beneden et Julin. Archic, belges de Biologie, 1886. RECHERCHES SUR LES TUNICIERS. 35 La paroi cardiaque proprement dite ou la paroi contractile, est formée d’une assise unique de cellules épithélio-musculaires. Ces cellules sont fusiformes, très longues et très étroites. Chacune ren- ferme un noyau sphérique à nucléole sombre. La substance contrac- tile des cellules se trouve sur leur face interne, c’est-à-dire qu’elle est immédiatement en contact avec le sang qui traverse le cœur. La face externe de ces cellules, c’est-à-dire celle qui est tournée du côté de la cavité péricardique, est toujours dépourvue de fibrilles contractiles. Il est à noter que les fibrilles d’une cellule ne se conti- nuent point avec les fibrilles des cellules voisines. En outre, si la striation longitudinale est peu apparente, en revanche la striation transverse est très nette. Enfin, il est à remarquer que ces stries . occupent une position oblique par rapport à l’axe de la cellule. La connaissance que nous avons maintenant de l’histologie des muscles chez les Salpes, jointe à celle que nous fournira l'étude pos- térieure des cellules musculaires chez les Ascidies, nous permet Ye Éa d'indiquer les phases de l’évolu- : ; 3 ; : tion progressive de l’élément Con- Fig. 25. — Evolution de la cellule musculaire chez les Tuniciers. Le protoplasma est représenté par tractile chez les Tuniciers (fig. 25). des hachures ; la substance contractile est repré- sentée en noir. Les muscles, toujours en acti- vité, comme ceux du cœur, ont besoin d'être en rapport avec une grande quantité de protoplasma qui, seul, peut leur assurer un échange rapide de matériaux. Aussi, nous voyons, dans ce cas (a), la substance contractile ne former qu’une mince couche sur le côté interne des cellules cardiaques. Les muscles du corps des Salpes présentant une activité moins soutenue, le protoplasma y est aussi moins abondant. La substance contractile se produit sur les deux côtés de la cellule (b, fig. 25); mais ici encore, comme dans les cellules du myocarde des Chélo- niens, il reste autour du noyau une quantité notable de proto- plasma. 1 Voir à ce sujet : Ranvier, Lecons d'anatomie générale. Paris, 1880, p. 31. 36 FERNAND LAHILLE. Dans les cellules musculaires de la queue larvaire des Tuniciers, la substance contractile occupe toute la périphérie de l’élément. Enfin, chez les Ascidies adultes, les muscles ne se contractant plus avec autant de fréquence, le protoplasma est encore moins abon- dant que partout ailleurs. Il ne constitue plus alors qu’une couche très mince renfermant les noyaux et interposée aux fibrilles (d). Nucléus. — Le nucléus de Pegea est constitué par le tube digestif et l'organe reproducteur mâle. Le nucléus est ici fort petit par rap- port au volume de l’animal, et il est situé en entier en arrière de l’orifice cloacal, sur la ligne médiane du corps (fig. 1 et fig. 26). Tube digestif. — L'animal étant supposé progresser en avant et se diriger vers l’ob- servateur, le tube digestif présente une torsion de 90° en sens inverse du mouve- ment des aiguilles d’une montre. Cette Fig. 26. — Tube digestif vu du côté torsion fait prendre à l’estomac une posi- droit, Le cœur est situé immédiate- ment en arrière du sillon ventralet 1; : i à + nt: ne éoiice dB ane ON dorsale, taudis que la première partie Cr esse poséeur dualon du rectum vient occuper la face ventrale. nee Les cinq divisions du tube digestif que j'ai retrouvées chez tous les Tuniciers, ne sont ici visibles qu’à la dissec- tion. Les follicules testiculaires qui empâtent souvent la partie moyenne et inférieure du tube digestif, en rendent l'examen direct très difficile. Des masses d’un pigment brunâtre, souvent abondant et entourant le nucléus, n’en facilite pas du reste l'examen. L’œsophage, dont nous avons vu les rapports avec le sillon posté- rieur et la portion dorsale de la branchie, présente un orifice losan- gique ; la branchie arrive à l’angle supérieur de l'æsophage, le cœur est placé sous l'angle inférieur. À l’angle de gauche aboutit le sillon postérieur, et de l’angle supérieur à l’angle droit s’étend le repli du feuillet branchial droit, repli qui a pour but, comme nous l’avons vu, de séparer l’orifice œsophagien de l’orifice anal. L’orifice œsopha- gien est oblique par rapport à l’axe longitudinal du corps, et offre une petite bordure plane (aire œsophagienne rudimentaire). L’œso- RECHERCHES SUR LES TUNICIERS. 37 phage forme un tube aplati, contourné sur lui-même, et vient s'ouvrir dans la partie antérieure de l'estomac, dont il déprime la paroi pour former une sorte de valvule cardiaque, comme chez Diplosoma et Distaplia, par exemple. L’estomac est volumineux, arrondi en des- sus et présente à sa face ventrale deux volumineux cœcums partant de sa base, contournés sur eux-mêmes et parfois digités. Les coupes trans- versales du nucléus (fig. 271) montrent ces dispo- sitions. Le post-estomac et l’in- testin moyen sont fort courts et terminent la branche descendante du tube digestif. Le rectum constitue à lui seul toute la branche ascendante. Il forme, à son point d'union avec l'intestin moyen,une pe- Fig.217-30,— Coupes horizontales du nucléus. — €, cœur ; Pc, : £ : péricarde; Œi, œsophage; Ei, estomac ; Ri, rectum; Fi, tite dilatation rectale, et, cœcums gastriques ; Ds, spermiducte. Daos la coupe inférieure représentée à droite, on voit l'orifice qui fait communiquer plus haut "ION aperçoit l'estomac avec un des cœcums gastriques. — Gr. #2 sur sa surface les petits canaux blanchâtres de la glande rénale. Ces canaux sont rares et présentent, à quelques-unes de leurs extrémités, des ampoules sphériques assez volumineuses qui sont même visi- bles à l’œil nu. Le rectum se termine par un anus (45, fig. 26) formant une fente étroite, horizontale et dépourvue d’oreillettes. Cet anus présente un rebord qui est la continuation du plancher cloacal. Donc, ici comme chez les Appendiculaires, l’anus débouche encore, en réalité, au niveau de l’'ectoderme quoique s’ouvrant toutefois dans la cavité cloacale. Si maintenant nous étudions l’histologie du tube digestif, nous ver- rons que l'estomac présente un sillon dorsal cilié. Les parois stoma- 38 FERNAND LAHILLE. cales (fig. 31) sont formées par un épithélium cylindrique cilié, dont les cellules sont disposées en éventails qui forment tout autant de pe- tites saillies dans la cavité stomacale. L’estomac de Mytilus edulis présente une constitution identique (V. Sabatier, L. c., pl. XX VIT ter, fig. 3). Du côtéventral et principalement au niveau des ouvertures cœ- cales (fig. 29 et 20), l’épithélium stomacal est bien différent (fig. 32). Il est constitué, dans cette région, par des cellules cylindriques deux et trois fois plus longues que les précédentes. Ces cellules sont dépour- vues de cils, mais présentent encore un plateau légèrement ponctué. Les noyaux sont arrondis et oceupent le milieu de chaque cellule. Leur nucléole est très net. Les cœcums stomacaux sont exclusivement glan- dulaires, ne renferment jamais d’ali- —= ments, mais contiennent quelquefois de nombreuses Grégarines. La fig. 34 : - 7 qu Lol représente l’histologie de leurs pa- rois. Intercalées à des cellules eylin- driques, on remarque des cellules quatre à cinq fois plus volumineuses, qui sont de véritables glandes unicel- lulaires. Presque toujours elles pré- sentent, à leur extrémité libre, une goutelette de mucus. Leur contenu se colore plus fortement que celui des cellules voisines. Quelquefois, elles sont lagéniformes, et leur partie infé- Fig. 31. — Epithélium stomacal au voisinage , : du sillon stomacal. — Gr. 522 rieure n’atteint pas la membrane ba- Fig. 32 — Epithélium stomacal de la face ven- a LR LT re - trale de l'estomac. — Gr, 522 sale de l’épithélium glandulaire. Dans les culs-de-sac des cœcums gastri- Fig. 34. — Epithélium des cœcums stomacaux. $ : 320 . Cie ques, on peut suivre la transforma- tion des cellules épithéliales cylindriques en cellules glandulaires. Les parois du rectum (fig. 33) sont formées par un épithélium cy- lindrique cilié. Les cellules sont presque cubiques et présentent un RECHERCHES SUR LES TUNICIERS. 39 gros noyau arrondi, placé entre la partie inférieure sombre et granu- leuse de la cellule et la partie supérieure transparente et claire. Organes reproducteurs mâles. — Le testicule est formé par de nombreux canalicules séminifères ramifiés, placés entre les divers lobes des cœcums gastriques. Ils s'unissent pour constituer un spermiducte (Ds, fig. 27) qui vient déboucher à côté de l’anus, dans la cavité cloacale. Les spermatozoïdes de Pegea sont munis d’une double queue, et leur tête présente en avant une pointe très effilée. Notons, en passant, que Todaro a également signalé des sper- matozoïdes à double queue chez Cyclosalpa pinnata, forme ag. Organes reproducteurs femelles. — Ils sont très simples chez Pegea, et leur évolution chez cet animal est des plus intéressantes. Dans ses derniers travaux, Brooks, confirmant ses premières observations qui, du reste, concordent avec les miennes, montrent que l’œuf ou les œufs renfermés dans les Salpes à chaîne proviennent de la Salpe solitaire, qui doit être considérée comme une femelle véritable. Les individus des chaînes sont donc des mâles que l’on pourrait appeler mâles ovigères. De même, toutes mes recherches me portent à croire que, chez Pyrosoma, l’oozoïde mérite seul le nom de femelle. Chez tous les blastozoïdes de la colonie, les follicules testiculaires m'ont paru naître indépendamment du follicule ovarien qui provient de l’oozoïide. Tous les blastozoïdes d'une colonie de Pyrosoma devraient donc, selon moi, être considérés également comme des mâles ovigères. Seulement, au lieu de former une association polya- delphe, comme chez les Salpes, ils forment une agrégation de frères et de cousins provenant de nombreuses générations successives. Dans une note à l’Académie, du 11 juin 1883, le regretté M. Joliet { examinait cette question de la génération alternante chez les Salpes et les Pyrosomes, et concluait, contre Todaro et Brooks, à sa non-existence chez ces animaux. Au fond, il suffit de s’en- tendre, et tout dépend de la définition que l’on donne de la forme agame. Si on pose en principe, avec M. Jolict, que, dans « la généra- ‘ Observations sur la blastogénèse et sur la génération alternante chez les Salpes et les Pyrosomes. — Comptes rendus, p.176, 40 FERNAND LAHILLE. tion alternante procédant par blastogénèse, la forme agame est celle qui est produite par voie sexuée et possédant un tissu sexuel, soit non encore différencié et simplement en puissance, soit déjà diffé- rencié et reconnaissable, mais étant incapable de le conduire au terme de son évolution, le confie, pour cet objet, à une ou plusieurs formes successives qu’elle produit par blastogénèse et dont la der- nière au moins est sexuée, » il est certain que les Salpes, les Pyro- Somes, etc., présentent la reproduction alternante. Si, au contraire, on définit l'apparition du sexe par l'apparition du tissu différencié, et il me semble bien impossible de le définir autrement, la Salpe so- litaire est alors réellement une femelle. Le cordon génital du stolon prolifère est constitué par un amas de cellules mésodermiques diffé- renciées en cellules germinatives. Voilà le fait. Maintenant, que chaque cellule germinative se transforme directement en ovule ou qu'auparavant elle se multiplie encore, peu importe. Il n’en est pas moins vrai que chaque bourgeon présente dans sa cavité générale, avant même la formation de ses organes de nutrition et de relation, avant la formation des organes mâles, un véritable tissu ovarien pro- venant entièrement de la forme solitaire. Dans ce cas, il est impos- sible de refuser à celle-ci la qualité et le nom de femelle. Chez Pegea confæderata, forme solitaire, tout l'ovaire passe dans le stolon sous forme d’un tube ventral. Lorsque le stolon se fragmente pour donner naissance aux blastozoïdes, chacun d'eux renferme une partie du tube germinatif primitif qui s'ouvre ensuite par un pore génital dans la portion dorsale postérieure du cloaque de chaque individu. L'autre extrémité de tube germinatif individuel s’amincit et forme plus tard ce que Todaro nomme l’appendice du sac proligère. Chez d’autres types de Salpidæ , la lumière du tube germinatif disparaît en certains points ou même sur la plus grande partie de son trajet, et le tube n’est même plus représenté que par une rangée de cellules. Alors, ce n’est qu’à la fin de la maturation de l'œuf que le tube germinatif se reforme pour laisser passer les spermatozoïdes. Dans ce cas, cette seconde formation reçoit le nom d’oviducte. Chez Pegea, le tube germinatif primitif ne m'a jamais paru s’oblitérer. 13e ga RECHERCHES SUR LES TUNICIERS. 41 Lorsqu'une des cellules de la portion médio-dorsale du tube germinatif se développe en œuf, les cellules voisines s’aplatissent contre elle et lui constituent une follieule. A ce niveau, la lumière du tube germinatif devient beaucoup plus grande qu'ailleurs et on lui a donné le nom de sac proligère. L’appendice de ce sac n’est que l'extrémité postérieure du tube germinatif. La surface cloacale, située autour du pore génital, s’invagine de très bonne heure et forme, comme chez Dista- plia, par exemple, une poche incubatrice nommée utérus où se développera l’oo- zoïide. Le pore génital refoulé viendra déboucher à la partie postérieure dorsale de la poche incubatrice, tandis que l’ex- trémité postérieure du tube germinatif viendra s'appliquer contre sa portion pos- térieure ventrale. L’anatomie et l’histo- logie de ces organes, chez l'adulte, ont été fort bien exposées par Todaro, dans ses Fig. 35. — Poche incubatrice, vue de l'intérieur de la cavilé péribran- remarquables recherches sur les Salpes, chiale. — Orf, orifice de la poche + ; ; ! incubatrice; Fmn;, Fm,, 3®* et 4° et je n’ai done pas à m'occuper ici de bande musculaire du corps. ces questions. IL me suffit d’avoir indiqué mes observations sur le déve- loppement de ces mêmes organes. La fig. 35 et la fig. 36 indiquent M. la disposition de la poche incubatrice de Pegea confæderata. Le follicule ovarien, l’oviducte et l’appendice du sac proligère n’ont pas été repré- Fig. 36.— Coupe transversale de la poche incu- batrice. — Tt, tunique; M, Mésoderme sentés. La coupe transversale fig. 36, entouré par une couche de cellules pavimen- 2 “EC teuses ectodermiques. L’ectoderme est repré- c , senté par la couche de cellules” cubiques passe par la poche incubatrice au entourant la cavité incubatrice fermée en ce ] , oint par le « bouchon ». niveau de l'organe nommé: bou- Pt chon. Celui-ci est constitué par un réseau de nombreuses cellules étoilées sombres, à noyaux clairs. La coupe (fig. 36), montre encore dans la portion de la cavité générale, comprise entre l’ecto- 42 FERNAND LAHILLE. derme et l’endoderme, un beau type de tissu conjonctif embryon- naire, M. Salpidæ de Banyuls. — Voici, en terminant, la liste des Salpidæ que j'ai rencontrés à Banyuls, dans les environs immédiats du labo- ratoire. (Anse du Troc. Anse de l’abattoir. Cap Béarn. Jettée de Port- Vendres.) Cyclosalpa pinnata. Forme agrégée. Rare. Salpa maxima. Forme agrégée. Assez rare. Pegea confæderata. Forme agrégée et solitaire. Communes. Thalia democratica. Forme agrégée et solitaire. Très communes. Cette dernière espèce existe aussi à Roscoff, et elle s’y trouve en compagnie de lZasis Zonaria. Position des Salpes dans la classification. — Si on compare les Salpes adultes avec les Appendiculaires, d’une part, et avec les formes larvaires des Tuniciers à trémas, d'autre part, on voit que les Salpes occupent une place intermédiaire entre les premières et les secondes. Reste à savoir si les Salpes proviennent des Ascidies par régression, ou des Appendiculaires par évolution. Voici les divers motifs que l’on peut invoquer en faveur de ces deux opinions. Régression. — Savigny va nous indiquer par quel moyen la Nature a pu passer des Ascidies thétydes (fixées) aux Ascidies thali- des ou Salpes. L’adhérence complète de la tunique à la paroi du corps, adhérence qu’il est si facile de constater chez les Salpes, a dé- terminé, d’après lui, toutes les autres modifications. En voicila série : 1° L’enveloppe extérieure, obligée de se prêter dans ce cas au jeu des muscles dans l'inspiration et l'expiration de l’eau, doit devenir mince, délicate et souple. 20 Cette qualité a procuré nécessairement une sensibilité plus grande que la tunique, plus compacte ou plus épaisse des Ascidies, ne paraît pas avoir. 30 Cette sensibilité était incompatible avec la privation totale de la locomotion. 4° De cette nécessité de locomotion sont venues : la conformation Le RECHERCHES SUR LES TUNICIERS. 43 anatomique de ces animaux, la situation des deux orifices et vraisem- blablement celle des branchies qui, étendues sur les parois de la tunique intérieure, eussent supporté avec peine des contractions trop souvent répétées. 5° La soudure de toutes les tuniques entre elles comme chez les Synascidies, se serait opposée aux mouvements particuliers des individus et eût de même arrêté tous les phénomènes de l’ins- piration et expiration de l’eau. Aussi, les Biphores ne tiennent-ils les uns aux autres que par quelques protubérances gélatineuses, disposées de manière à ne point gêner les mouvements des muscles. Il est très intéressant de voir Savigny énoncer en termes si f ormels, en même temps que Lamarck, et bien avant Darwin, le principe de la transformation des espèces, transformation provoquée par une suite d’adaptations aux milieux, et aller choisir, pour cette démonstration, les deux types de Tuniciers, justement les plus dis- semblables : les Salpes et les Ascidies. C’est précisément pour faire ressortir ce point de l’histoire de transformisme que j'ai reproduit ici la théorie de Savigny. Toutefois, il faut s’empresser d’ajouter, avec Savigny lui-même, que tout ce paragraphe suppose certaines restrictions : « Si j’omets d’en noter quelques-unes, j'espère que le lecteur y suppléera. » Nos connaissances actuelles de la morphologie des Tuniciers et de la morphologie générale permettent de bien simplifier la série d’adaptations successives indiquées par Savigny. | Si on suppose un Aplidien primitif, il sera libre comme toutes les formes embryonnaires primitives, et on n’aura plus besoin d’invoquer des motifs pour le faire passer de l’état fixe à l’état péla- gique. La locomotion se fera plus facilement si les deux fentes bran- chiales larvaires restent largement béantes, et, dans ce cas, les trémas n'ayant plus leur raison d’être, resteront rudimentaires. C'est sous ce rapport, notamment, que le genre Pegea constitue un type intermédiaire entre les Ascidies et les autres Salpes. Les muscles deviendront de plus en plus puissants et se disposeront pour produire 44 FERNAND LAHILLE. des contractions de plus en plus grandes de la cavité pharyngienne ; ils seront donc principalement transverses. Le Cyclosalpa virgula reproduit exactement ces conditions. Le tube cloacal, d’abord perpendiculaire à la surface dorsale comme chez les Aplidiums, viendra se placer peu à peu à l’extrémité postérieure, presque vis-à-vis de l’orifice buccal. La locomotion deviendra ainsi plus parfaite. En même temps, les organes repro- ducteurs ne dépasseront plus l'intestin. La nourriture des espèces pélagiques étant plus abondante que celle des formes fixées, l'intestin pourra devenir court, et cette brièveté du tube digestif favorisera la locomotion, tout en diminuant en même temps la visibilité de l'animal. Des formes orthocœliennes de Salpes on passera donc aux formes à nucléus. La poche incubatrice des types primitifs d’Aplidiens, Distaplia (par exemple), simple diverticule de la paroi externe de la cavité péribranchiale, se retrouve chez les Salpes, où on lui a donné, comme nous l'avons dit, le nom d'utérus. Chez les Salpes et les Aplidiens, la constitution du stolon bourgeonnant est la même ; les blastozoïdes se forment par séries et par fragmentation stoloniale. Il est done bien permis de regarder les Salpes comme constituant un rameau pro- duit par des transformations successives d’Aplididæ primitifs. Evolution. — Il paraît, toutefois, bien plus naturel de considérer les Salpes comme formant un rameau distinet qui s’est modifié dans le même sens que les Aplididæ. En effet, nous ne constatons aucune régression proprement dite dans le développement individuel des Salpidæ. En outre, nous ne connaissons aucune Salpe dont le cœur soit placé en arrière des organes reproducteurs et des viscères à l'extrémité du stolon bour- geonnant, comme c'est le cas particulier et constant chez tous les Aplididæ. De plus, l'ovaire des Salpes ne correspond, ni par son origine ni par sa position, à l'ovaire des Aplididæ. Enfin, si l’on tient compte des données embryogéniques, on verra que de grandes différences séparent encore ces deux groupes d'animaux. Tous ces motifs, que je ne puis exposer ici avec les délails qu'ils RECHERCHES SUR LES TUNICIERS. 45 comporteraient, me font admettre que les Salpidæ constituent une branche séparée de bonne heure du trone commun des Tuniciers, et proviennent directement d’une souche Appendicularienne. La constitution de la branchie, telle qu’on la rencontre chez Pegea confæderata, ainsi que la constitution orthocælienne de certaine Salpes (Cyclosalpa virqula, par exemple), rattachent en particulier les Salpidæ aux Ascidiens ou Eutremata. De ces types de Salpes à caractères mixtes ont pu dériver des types plus favorisés dans la lutte pour l'existence ; soit que, comme dans le genre Tasis, chaque indi- vidu agrégé renferme plusieurs embryons au lieu d’un seul ; soit que, comme dans le genre Salpa proprement dit, les muscles du corps soient plus développés, et que l'embryon soit recouvert et protégés par de plus nombreuses enveloppes fœtales. HI. CLASSE DES EUTREMATA PREMIER ORDRE : APLOUSOBRANCHIATA Tous les Tuniciers de cet ordre présentent une branchie à trémas complets et le plus souvent à côtes transverses bien développées. Mais, dans aucun cas, l'organe respiratoire ne possède de papilles bifurquées ou de sinus anastomotiques longitudinaux ou bien encore de côtes longitudinales. Dans mon étude sur la systématique des Tunicierst, j'avais di- visé les Aplousobranchiata en deux sous-ordres, caractérisés par l'absence ou la présence d’organes reproducteurs dans le stolon. En ne spécifiant pas davantage, les Pyrosomes se trouvaient dans le ‘ Association Française, Congrès de Toulouse, 1887, p. 8. 46 FERNAND LAHILLE. même groupe que les Polycliniens, et ce rapprochement pouvait induire en erreur sur les véritables affinités de ces animaux, l’en- semble de tous les caractères des Pyrosomes en faisant, comme nous le verrons tout à l'heure, de véritables Didemnidæ. Pour obvier à cet inconvénient, il suffit simplement de préciser le sens que l’on doit attribuer au mot : stolon génitalifère. J'entends done par stolon génitalifère : un stolon susceptible de bourgeonner et renfermant les organes reproducteurs entièrement développés et en activité fonctionnelle. Dans ce cas, les Aplousobran- chiata se divisent en deux sous-ordres si naturels que l’on peut trouver, pour les distinguer, un second caractère dont personne ne contestera l'importance et que j'avais déjà mis en lumière dans le travail que j'ai rappelé ci-dessus. ( Absent. — Cœur au niveau des viscèrees.. Didemniadæ. Stolon génitalifère : L À ve ë Présent et cœur à son extrémité. . . . . Polycliniadæ PREMIER sOUs-O0RDRE : DIDEMNIADÆ Ce sous-ordre renferme quatre familles naturelles, que l’on peut caractériser à leur tour de la manière suivante : À rangée de trémas horizontaux à nombreuses côtes intermédiaires. Pyrosomidæ Nombreuses rangées de trémas verticaux (exceptionnellement 3-4). & 4 rangée de trémas obliques, sans côtes intermédiaires. . . . . . Doliolidæ. aq ; ; : Fe : = 3-4 rangées de trémas verticaux. — Follicules testiculaires très = PEU HOMDFOUX. & 002 5 4 RENE" .. .... Didemnidæ. TS -— A — Nombreux follicules testiculaires. . . . . . . . . . . . Distomidæ. En examinant quelques types dans chacune de ces familles, je préciserai la diagnose de celles-ci en indiquant de nouveaux carac- tères différentiels. Dans les tableaux dichotomiques que je donnerai, et tout en respectant les rapports naturels des groupes, je tâcherai de concilier, autant que possible, l'importance des caractères et la facilité des déterminations. RECHERCHES SUR LES TUNICIERS. 47 LE FAMILLE DES PYROSOMIDÆ. Caractères propres. — Une seule rangée de trémas horizontaux. — Nombreuses côtes intermédiaires transverses. — Deux amas de cellules mésodermiques phosphorescentes en avant de la branchie. — Nombreux follicules testisulaires pyriformes, juxtaposés en couronne. — Quant à la blastogénèse des Pyrosomes, elle est pha- ryngienne, directe et ventrale, comme chez les Salpes. Comme chez les Salpes, le tube endodermique du stolon n’est que la continuation du sillon ventral de l’individu bourgeonnant. Cette famille ne renferme que le seul genre Pyrosoma. Ce genre fut créé en 1804, par Péron, qui considéra tout d’abord la colonie tout entière comme formant un animal unique : Pyrosoma : Corpus librum, subconieum, extremitate ampliore apertum. Vacuum. Aper- turæ margine intus tuberculis cincto (Ann. du Muséum, 1804). Le Sueur, collaborateur de Péron, releva cette erreur en 1815, reconnut l’existence d’une colonie, mais ce fut Savigny qui, le premier, donna une description anatomique détaillée des individus, et qui découvrit le premier les orifices buccaux et cloacaux des Asci- diozoides. Cet auteur rapprochait Pyrosoma de Botryllus, genres présentant l’un et l’autre, d’après lui, deux ovaires. Une bouche et un anus non surmontés de tentacules extérieurs. Dans les deux genres, les orifices cloacaux des individus convergent, et l’orifice branchial tend à se rapprocher de la circonférence. Dans les deux genres, les œufs présentent des germes composés. Le cercle membraneux des Botrylles est représenté dans le Pyrosome par le diaphragme annulaire. Ces ressemblances parais- saient à cette époque si frappantes que Cuvier ne vit pas d’autres motifs pour distinguer Pyrosoma de Botryllus, que l’état de liberté ou de fixation de la colonie. Mais, à côté de ces faits qu'il signalait avec son exactitude habi- tuelle, Savigny énoncait des opinions malheureuses. C’est ainsi qu’il 48 :_ FERNAND LAHILLE. prenait le testicule pour un foie, les deux organes lumineux pour les ovaires, le cul-de-sac antérieur du sillon ventral pour un second ganglion nerveux, l'ovaire rudimentaire dorsal el un reste de l'aire œsophagienne primitive pour un oviducte. Il croyait, en outre, que le rectum avait la faculté de s’allonger et de s'adapter à l’oscule cloacal. Depuis Savigny, des travaux importants ont paru au sujet des Pyrosomes, les principaux sont dus à Huxley1, Kowalevsky?, Kefers- tein et Ehlers5, Joliet{, Seeliger5. Dans son travail remarquable, malheureusement inachevé, M. L. Joliet a étudié en détail certaines questions que je laisserai, par suite, de côté, en y renvoyant le lecteur. Tels sont, par exemple, l'historique, la bibliographie, la morphologie générale des cormus et des individus, la constitution de la branchie, la disposition et la marche des nerfs. Je me contenterai, du reste, de signaler quelques observations nouvelles que j'ai faites en étudiant Pyrosoma comparativement aux autres Tuniciers. Ce genre doit être considéré comme un des représentants inférieurs de la souche des Eutremata actuels, aussi l'étude de ses organes est-elle des plus intéressantes. Tunique. — La surface extérieure de la colonie présente une assise de cellules épithéliales aplaties, à contours polygonaux irréguliers. Le protoplasma de ces cellules est granuleux, tandis que le noyau est hyalin. En certains endroits ces cellules font défaut, tandis qu’en d’autres elles se présentent isolées et arrondies. Je les ai représentées fig. 37. Si on examine avec attention les orifices buccaux des individus, on voit que ces cellules épithéliales externes de la tunique se continuent avec l’épithélium buceal. M. Maurice a constaté également le même fait chez le Fragaroides aurantiacum. Ces éléments cellulaires proviennent d’un dédoublement de l'ecto- ‘ On the anatomy and development of Pyrosoma. — Trans. Lin. soc., 1852, * Ueber die Entwickelungsgeschischte der Pyrosoma. — Archio. f. mikr. anat., 1875. 3 Bemerk. ub. die anat. von Pyrosoma. — Zoolog. beiträge, 1861. * Etudes anatomiques et embryogéniques sur le Pyrosoma giganteum. — Paris, 1888. * Entwick. der Pyrosomen. Jenaische. Zeit. f. nat., XIII, 1889. ccrériite RECHERCHES SUR LES TUNICIERS. 49 derme, et j'ai observé très nettement ce processus chez le Polycycles. La surface interne de la cavité cloacale commune présente, elle aussi, une sorte de revêtement particulier, formé par des cellules tunicières rapprochées, parallèles entre elles, très étirées dans une direction perpendiculaire à l’axe du cloaque commun. La masse de la tunique commune est formée par des cellules étoi- lées rares, plongées au milieu d’une masse considérable de substance tunicière amorphe et transparente ne présentant jamais de cellules vacuolaires. Enfin, il est à remarquer que chez les individus adultes la tunique forme, comme chez quelques Leptoclines, chez le L. aspe- rum par exemple, une éminence plus ou moins considérable placée à côté de chaque orifice buccal. Panceri, puis Joliet, ont décrit un système musculaire colonial qui relierait les individus et serait produit par une différenciation des cellules tunicières. Un pareil système n'existe pas. Les éléments que ces auteurs ont pris pour des muscles, ne sont que des cellules tunicières devenues fibrillaires, comme on en rencontre chez beau- coup de Cynthiadæ. Panceri avait imaginé le système colonial pour expliquer comment la phosphorescence se propageait d’un individu à toute la colonie, et comment aussi la colonie paraissait jouir d’une véritable individualité. Or, ces deux faits peuvent parfaitement s'ex- pliquer sans faire intervenir un appareil hypothétique. Les muscles des individus sont accolés à la couche ectodermique interne. Comme cette couche est très transparente, ainsi que la tunique, et qu'elle ne devient visible qu’à l’aide de colorants énergiques, on comprend qu'une grande attention soit nécessaire dans les observations par transparence pour décider de la position des muscles par rapport aux couches ectodermiques interne et externe. Ectoderme. — L’ectoderme est intimement uni à la tunique, ou plus exactement la tunique est située entre deux couches ectoder- miques. Les cellules du feuillet externe n’existent pas en certains points ou sont séparées les unes des autres par la substance tuni- cière ; les cellules du feuillet interne, au contraire, sont polygonales par suite de leur pression réciproque, et forment une membrane 4 50 FERNAND LAHILLE. continue. L'ectoderme se réfléchit à peine dans le tube buccal, aussi la couronne tentaculaire, qui limite toujours la tunique réflé- chie, se trouve-t-elle tout à fait près de l’orifice buccal, immédiatement au-dessous des muscles circulaires buccaux. Cette disposition empêche Fig. 38. Fig. 37.— Cellules superficielles de la tunique. — Gr. 542 Fig. 38. — Orifice buccal montrant le développement inégal des filets tentaculaires. — Ct, feuillet ectodermique externe ; T£, substance tunicière ; Et, feuillet ectodermique interne; Bm, muscles buccaux ; Cb, couronne tenlaculaire ; Ed, endoderme (paroi branchiale). — Gr. 150, le développement de la couronne tentaculaire, aussi, presque toujours, les tentacules ; sont-ils très petits et arrondis. On en compte seize. Dans tous les cas, le filet tentaculaire ventral est beaucoup plus grand que les autres ; les deux filets médians et latéraux, ainsi que le filet dorsal, sont ensuite les plus allongés de tous. Ici, comme chez les Botrylles, il y a done quatre tentacules plus développés que les autres, et le nombre total de ces organes est encore iei un multiple de quatre. Toutes ces constatations auront plus tard leur importance. Je dois faire remarquer que M. Joliet, dans son travail cité plus haut, désigne sous le nom de couronne de dentelures, la couronne tentaculaire dont il n’a su reconnaître l’existence chez Pyrosoma, n'ayant pas, sans doute, observé l'anatomie de cet appareil chez les Ascidies inférieures où il se trouve parfois peu développé. Pour M. Joliet, la grande languette « paraît, à elle seule, représenter le cercle de tentacules érectiles qui garnit l’orifice inspirateur des Ascidies. » L’ectoderme des quatre premiers blastozoïdes, comme aussi plus tard l’ectoderme des individus les plus voisins de l’orifice cloacal commun, se prolonge en un appendice postérieur qui part du niveau de l’œsophage et de la base du tube cloacal. Une partie des fibres musculaires dorsales des individus se rendent dans ces organes. PR OS OT NE 7 sien ur Re dd. Ce RECHERCHES SUR LES TUNICIERS. 51 Lorsque ces appendices sont développés, l’ectoderme est constitué en ces points par des cellules étirées transversalement et fortement saillantes à l'extérieur. Ces appendices viennent tous aboutir au diaphragme du cormus et par leur origine, ainsi que par leur cons- titution, ils sont homologues aux appendices fixateurs que je décrirai chez les Didemnideæ. Ici, toutefois, ces organes accomplissent une double fonction, et ne sont pas exclusivement fixateurs, comme chez les Didemnide. C'est grâce à eux que les colonies de Pyrosomes paraissent jouir d’une individualité propre ; grâce à eux, la natation du cormus est facilitée, car ils assurent la concordance de tous mouvements indi- viduels et voici par quel mécanisme : Supposons qu'un Ascidiozoïde vienne à se contracter ; il chasse l’eau dans le cloaque commun. Mais, en même temps, son appendice musculaire se rétractant également, le diaphragme s’élargit, et tous les individus avertis par ce dernier mouvement se contractent à leur tour. De même, quand dans une cœnobie de Botrylles, un individu se contracte, tous ses voisins s’en ressentent et se contractent également si l'excitation a été un peu forte, de façon à produire un effort simul- tané ct concordant. On n’a donc pas besoin de chercher un système colonial nerveux ou musculaire pour expliquer les effets de simultanéité et d’indivi- dualité que l’on observe dans un cormus de Pyrosome. Système nerveux. — Les centres nerveux se forment, comme l’a signalé M. Joliet, après Kowalevsky, et la fig. 43 (page 56) montre leur évolution. Une couche mésodermique se différencie et constitue ensuite un long tube situé au-dessus de l’endoderme. Ce tube pro- lifère dorsalement au point où doit apparaître le ganglion ner- veux. Celui-ci, en se formant, déprime le tube neural et, en même temps, on voit apparaître une petite invagination endodermique allant obliquement à la rencontre de l'extrémité antérieure du tube nerveux. Cette invagination finit par faire communiquer la cavité du tube neural avec la cavité branchiale. Quant à la constitution du ganglion nerveux, personne ne s’en est D? FERNAND LAHILLE. occupé à ma connaissance. Son étude est pourtant fort instructive. Il se compose, en réalité, de deux ganglions. Le premier (On, fig. 39 et 40), est sphérique, situé au-dessus du pavillon vibratile. Il présente trois paires de nerfs qui, tous, innervent le tube buccal. Je n'ai vu aucun nerf spécial se rendre aux organes phosphorescents. \ Ÿ TA \ À Fig. 39. * Fig. 39. — Centres nerveux vus en-dessous. — 7n, représente ici la portion postérieure et atrophiée du tube neural; N, N', No N'o, N; N':, les deux paires de nerfs qui partent de chaque ganglion. Les deux premiers nerfs N, N',, sont soudés à leur base. Fig. 40. — Centres nerveux. Coupe longitudinale. — Cn, ganglion cérébroïde ; Vn, ganglion viscéral réuni au premier ; /n, pavillon vibratile ; Tn, tube neural ; Gn, organe neural. — Gr. 222, Ces organes sont constitués par des agglomérations d’amas de cellules arrondies souvent granuleuses, le diamètre de chagune d’elles ne dépasse pas un centième de millimètre. Les organes phosphores- cents sont accolés à l’ectoderme et apparaissent un peu après le stade, représenté par le bourgeon le plus développé de la fig. 43. La partie ventrale du ganglion antérieur envoie, sous le ganglion postérieur et sur le tube neural, un amas de fibrilles nerveuses. Les cellules ganglionnaires sont arrondies, multipolaires, et la partie ponctuée centrale des ganglions est fort réduite. On y aperçoit quelques petites cellules éparses. A l’origine des nerfs, on voit égale- ment d'autres cellules dont tous les prolongements se dirigent vers la périphérie. Le ganglion postérieur est conique, et sa grosse extrémité, tournée en avant, présente une sorte de cupule où s’enchasse le ganglion antérieur. RECHERCHES SUR LES TUNICIERS. 53 Les deux ganglions sont intimement unis entre eux par deux faisceaux fibrillaires situés l’un près de la base des centres nerveux (fig. 40), l’autre en leur milieu. Du ganglion postérieur partent deux paires de nerfs qui, toutes les deux, se dirigent directement vers les viscères, de part et d’autre des papilles dorsales. Le ganglion postérieur est done viscéral. L’antérieur est cérébroïde. Si on admet, en s'appuyant sur ce que l’on observe chez quelques larves de Tuniciers, que de chaque ganglion partent toujours deux nerfs antérieurs et deux postérieurs, on pourra considérer le ganglion cérébroïde de Pyrosoma comme formé de deux ganglions coalescents, et, dans ce cas, ces animaux offriraient trois ganglions soudés ensemble. On ne voit pas, il est vrai, le dédoublement du ganglion antérieur Cn ; mais des trois paires de nerfs qui en partent, la paire antérieure se dédouble très près de la masse nerveuse et semble formée de deux nerfs accolés à leur origine, N,, N’,. Chez quelques Appendiculaires, l’Oikopleura spissa par exemple, j'ai observé également la présence de trois ganglions distincts. Aussi, est-ce de cette constitution primitive qu’on peut surtout rapprocher la constitution des centres nerveux de Pyrosoma. Le tube neural persiste quelquefois chez l'adulte sur la ligne médio- dorsale, mais le plus souvent il n’est bien reconnaissable que sous les ganglions. Sous le ganglion viscéral, ces cellules sont devenues arrondies ou ovalaires et très pressées à l'extrémité postérieure où elles sont parfois en dégénérescence. La véritable glande neurale (Gn, fig. 39 et 40) ne se forme que fort tard et semble rester à l’état d’ébauche. Elle a été décrite jusqu'à présent comme un simple appen- dice Kowalevsky et Joliet donnent le nom de glande neurale à toute la portion du tube comprise au-dessous des ganglions. La fig. 40 indique si nettement la constitution histologique de ces organes, que je n'ai pas besoin d'insister sur ce point. Branchie et Cœur. — Le sillon ventral est le premier organe en- dodermique qui se différencie chez les Blastozoïdes. Il apparaît par suite d’un simple épaississement et plissement de la paroi supérieure du tube endodermique. Dans le stolon, l'extrémité antérieure du 54 FERNAND LAHILLE. tube endodermique forme le cul-de-sac postérieur du sillon ventral du blastozoïde le plus développé. Le sillon ventral des individus semble se trouver d’abord placé du même côté que le tube neural, comme chez les larves de la plupart des Amarouques, maïs bientôt l'axe longitudinal des individus qui se confondait d’abord avec l’axe du stolon, forme avec celui-ci un angle de plus en plus grand (fig. #3), et l’inva- gination buccale qui se produit achève de préciser le côté dorsal et le côté ventral de l’adulte. Le sillon ventral différencié (fig. #1) présente la même disposition générale Fig. 41, — Sillon ventral. Coupe trans- e ; : dr ; Sersaie, — Mr, zone médiane ; G,r, JU NOUS AVONS VObSerVÉ Chez PETE fa Cu me NP Ce confæderata. Aussi est-il bien inutile de nn NUE s'étendre sur la description des trois zones glandulaires, des trois zones vibratiles, du cul-de-sac posté- rieur et de la gouttière postérieure ; les figures suffisent. Les explica- tions détaillées d’une coupe ou d’un dessin, comme bien des discus- sions du reste, n’ont souvent pour but que d'augmenter le nombre de pages d’un mémoire, afin de mieux dissimuler le vrai nombre des observations réelles. Chez Pyrosoma, le cœur est formé par un diverticule endodermique (fig. #3) perpendiculaire au sillon ventral alors horizontal. En d’autres termes, vers l'extrémité effilée du tube endodermique stolonial, et sur le côté droit de ce tube aplati latéralement, se forme un court diverticule vertical qui s’isole pour constituer la vésicule péricardi- que. La paroi antérieure de cette vésicule est refoulée et forme la paroi musculaire du cœur. Mais ici, de même que chez les Salpes, aucune production endodermique ne vient recouvrir les lèvres de l'invagination cardiaque. Le sillon ventral se relevant de plus en plus, le cœur devient oblique par rapport à lui, et la fig. 43 c montre sa position chez l'adulte. Comme dans les bourgeons de Botrylles, les deux sacs péri- RECHERCHES SUR LES TUNICIERS. 55 branchiaux s'étendent de plus en plus sur le sac endodermique. Il se produit ainsi trois sacs ovoides accolés, dont le médian consti- tuera la cavité branchiale et le tube digestif. Ce dernier est produit par un diverticule qui naît sur le côté ventral du tube endodermique, à mi-hauteur du blastozoïde, immédiatement au-dessous des étran- glements qui séparent les uns des autres les divers indivi- dus. Ce diverticule s’allonge horizontalement en avant et arrive jusqu'au niveau du cœur, il se recourbe en arrière en Fig. 42. — Tube digestif vu du côté gauche. — Œ, œsophage ; Si, sillon stomacal; Pi, post-estomac ; Mi, intestin moyen ; Ri, intestin rectal ; Gu, glande rénale. devenant horizontal, et il se termine à mi-hauteur de l’es- tomac, où il s’ouvrira dans la cavité cloacale. L’estomac n’est qu'une dilatation quise produit postérieurement à la tormation du tube digestif. L'invagination ectodermique qui produit l’orifice buccal est obli- que et vient à la rencontre du ganglion nerveux (fig. #3). Ce fait explique l’origine du tentacule ventral parfois si développé de l’adulte. En effet, ce tentacule représente une partie de la cloison double qui séparait au début l’invagination ectodermique et la vésicule endodermique. La couronne tentaculaire marque exactement le niveau où s'arrête l’ectoderme réfléchi. La face supérieure des tentacules est d’origine ectodermique, tandis que leur face inférieure est endodermique. La constitution de la branchie de l’adulte étant bien connue, je la passerai sous silence. Je dois faire remarquer toutefois que les neuf papilles de Lister qu’elle présente, sont ici exactement dorsales et indépendantes de toute côte transverse. Chez les Ascidies inférieures, elles sont au contraire réparties sur le côté gauche du corps et sont constituées par une dilatation des côtes transverses de la branchie. Chez Pyrosoma, les côtes intermédiaires au nombre de quatorze en moyenne, sont produites par un plissement de la paroi interne du pharynx, et, comme chez Distaplia, elles n’apparaissent qu'après la différenciation complète des trémas. 56 FERNAND LAHILLE. Tube digestif. (La fig. #2 le représente.) — Nous avons vu com- ment il se formait. Comme chez les Distaplia, la courbure intestinale est d’abord perpendiculaire au grand axe des trémas. Chez l’adulte, elle leur devient parallèle par suite de la rotation de 90° qu’éprouve l'organe respiratoire. L'œsophage présente de nombreux replis. L'estomae est ovoide, possède un sillon inférieur et présente quel- quefois des replis irréguliers. La glande rénale provient chez les blastozoïdes d’un vo- lumineux diverticule stomacal qui se bifur- que en rencontrant l'intestin qu'il enfour- che et qu’il contourne ensuite. Decet anneau naissent les canaux rénaux irréguliers qui serpentent sur le rec- tum sans s’anastomo- Fig. 43. — Blastogénèse du Pyrosoma. — C;r, zone supérieure du ser et sans présenter sillon ventral de l'adulte; Cpr. cul-de-sac postérieur de ce sillon ; Spr, sillon postérieur ; c, cœur de l'adulte ; Foa, ovaire d'avenir de l’adulte ; Fo, Foa,, Fos: ovaire définitif, d'avenir et dégénéré du blastozoïde ; Œi, Ei, ce, œsuphage, estomac et cœur du blasto- 7 ur » zoide ; Bm, muscles buccaux ; Fbi, filet tentaculaire ventral ; de varicosités ou d’am- Cn, centres nerveux ; 7n, tube neural. — Gr. +2 jamais sur leur trajet poules terminales. Le post-estomac, l'intestin moyen et le rectum ne présentent aucune particularité importante à signaler. La figure supplée encore ici aux descriptions. Organes reproducteurs. — L'évolution de ces organes est la sui- vante (fig. #3). Considérons (Fo) l'ovaire situé sous l’anse intestinale et qui deviendra l'ovaire de l’adulte. Il s’étrangle en deux portions. La portion antérieure (Foa,;) que je nommerai volontiers ovaire d'avenir ou ovaire latent, va se séparer complètement du précé- dent, la portion postérieure formant seule, comme je viens de le dire, l'ovaire actif. Quand l'individu sera devenu adulte, le cul-de- sac du sillon ventral se prolongera en un tube endodermique et l'ovaire latent s'étendra au-dessous de lui sous la forme d’un tube ger- RECHERCHES SUR LES TUNICIERS. 57 minatif rempli d’ovules à tous les degrés du développement. Tandis qu'au-dessus du tube endodermique se différenciera le tube neural. Ce tube germinatif s’étranglera ensuite dans chaque segment du stolon et un ovule qui, dès le début, était plus volumineux que les autres, s’accroîtra encore de plus en plus dans la portion antérieure de chaque segment. Cet ovule ne m’a jamais paru subir la moindre division cariokynétique, et il deviendra l’œuf unique de l'adulte, tandis que les ovules voisins seront en partie résorbés par lui. La paroi du tube germinatif lui constituera un follicule, mais je n'ai jamais constaté aucun fait qui permette de croire à l'intervention directe de l’œuf dans la formation de ses propres enveloppes. La réunion du côté ventral des deux sacs péribranchiaux, ainsi que l’invagination cloacale, divise en deux le segment du tube ger- minatif que possède chaque blastozoïde. Le segment le plus voisin de l’œsophage (Fo;, fig. 43), persistera chez l'adulte et formera un ovaire rudimentaire ou dégénéré, s'étendant de l'aire œsophagienne à la cinquième papille de Lister. Le Pyrosoma adulte possède donc trois ovaires : 1° un ovaire actif ; 2° un ovaire d’avenir ou latent ; 3° un ovaire dégénéré. Tous les individus d’une même colonie portent des ovaires qui ne leur appartiennent pas en propre. Ce sont, comme les Salpes à chaîne, de véritables mâles ovigères. L'oozoïde du Pyrosoma est en réalité la seule véritable femelle. Chez les Botryllidæ, comme je l'ai constaté, tous les individus d’un même cormus, tous les blastozoïdes par conséquent, sont également des mâles ovigères. Dans ce dernier cas, comme chez Pyrosoma, comme chez les Salpidæ, et comme l’a démontré également M. de Varennes chez quelques polypes hydraires, les ovules émigrent dans les bourgeons qui paraissent eux-mêmes incapables de les former directement. Chez les Pucerons il en serait de même, et l’'ovopédèse nous apparaît ainsi comme un phénomène fort général. Mais ce n’est pas le lieu de développer ici les conséquences théoriques de ce fait si intéressant pour la biologie générale. Chez Pyrosoma, le follicule testiculaire m'a toujours paru être une 58 FERNAND LAHILLE. formation indépendante du follicule ovarien. Mais quand bien même le testicule se formerait, comme chez les Ascidies supérieures, à l'aide d’un diverticule de l’épithélium ovarien primitif, ce fait n’en- lèverait en rien à l’oozoïde son caractère de femelle, puisque de l'oozoïde dérivent toujours directement les ovules qui se transfor- ment en œufs. Le follicule testiculaire, unique au début chez Pyrosoma, se forme au-dessus et à gauche du follicule ovarien. Il est sphérique, formé de cellules arrondies etune traînée de cellules qui en partent en se dirigeant vers le eloaque, formera le spermiduete futur. Plus tard, ce follicule subit des divisions longitudinales et successives qui produi- sent les nombreux follicules testiculaires pyriformes disposés en cou- ronne que l’on rencontre chez l'adulte. L'éléoblaste est une formation mésodermique entièrement indé- pendante des organes reproducteurs, et comme l’a fort bien fait remarquer M. Joliet, cet organe ne peut être homologué à la queue des larves d’Acidies. Il entoure l'extrémité du tube endodermique du stolon et donne naissance très probablement aux globules sanguins et au tissu mésodermique de l’adulte. Il est formé de cellules étoilées disposées en réseaux qui rayonnent autour du cul-de-sac postérieur du blastozoïde le plus développé. Le mode de bourgeonnement de Pyrosoma est très instructif en ce qu'il est intermédiaire entre celui des Doliolidæ et celui de la plupart des Salpidæ. Chez le Doliolum la blastogénèse est directe, . c’est-à-dire que les blastozoïdes se forment successivement au niveau du corps du parent ; ils s’en détachent de très bonne heure comme chez Distaplia et vont se développer sur le prolongement dorsal de l’oozoïde. Chez Pyrosoma la blastogénèse est encore directe, mais ici, lorsque le premier blastozoïde se forme, il ne subit qu’un léger étranglement qui ne le détache pas du parent. Le second blastozoïde venant à se former à son tour, il pousse le premier devant lui et, en définitive, au bout de quelque temps, on a une chaîne d'individus “dont les plus développés sont les plus éloignés du parent. L'aîné RECHERCHES SUR LES TUNICIERS. 99 des blastozoïdes, c’est-à-dire le premier individu de la chaîne, bour- geonnant à son tour et ainsi de suite, on a, à partir du parent, une succession de petites chaînes inégalement développées. On a donné le nom de stolon à ces chaînes quoique ici les indi- vidus se forment avant le développement de cet organe. Chez la plupart des Salpes, le bougeonnement est plus actif; les blastozoïdes ne sont pas différenciés ou ils le sont à peine lorsqu'ils s’éloignent des parents. Il se produit donc dans ce cas un véritable stolon qui ensuite se fragmente incomplètement, chaque segment devant constituer un individu de la chaîne. La blastogénèse est donc ici indirecte, mais elle correspond toutefois exactement à ce qu'on observe chez les Pyrosomes. Enfin, disons-le tout de suite, les Polycliniadæ présentent, à quelques modifications près que nous étudierons plus tard, un mode de blastogénèse comparable à celui des Salpes. Position des Pyrosomes dans la classification. — Savigny, nous l'avons vu, plaçait Pyrosoma tout à côté des Botrylles et Cuvier adop- tait la même manière de voir. La présence de deux amas cellulaires situés de part et d'autre du tube buccal, la disposition du tube digestif, la disparition des pre- miers blastozoïdes, la présence de deux ovaires, enfin et principa- lement les côtes branchiales longitudinales de Pyrosoma m'ont quelque temps porté à admettre l’opinion de Savigny et de Cuvier. Mais une étude plus approfondie de ce genre et des différents genres de Didemnidæ m'ont conduit à modifier mes premières appréciations. Pyrosoma ne présentant, comme nous l'avons vu tout à l'heure (fig. 43), qu'une seule rangée de trémas possédant le même mode de bourgeonnement que les Salpes, une ontogéuie condensée, telle qu’on la retrouve chez le genre Diplosomoïdes; la forme de son aggrégation reproduisant celle du Cælocormus, Didemnien incon- testable ; sa tunique commune présentant parfois (Pyrosoma spi- nosum, Herd.) des papilles comme chez Distaplia; tout oblige à le considérer comme un représentant des formes inférieures de Tu- niciers et à le rapprocher des Didemniadæ dont il n’est qu'un 60 FERNAND LAHILLE. type très évolué, il est vrai, par suite de son adaptation particulière à la vie pélagique, mais dont il conserve toutefois les caractères indéniables. Pyrosoma elegans (Le Sueur). Syn. P. giganteum (Le Sueur). P. atlanticum (Le Sueur et Péron). Tous les Pyrosomes décrits par Le Sueur comme espèces dis- tinctes basées uniquement sur des caractères extérieurs, doivent, à mon avis, être réunis. À Banyuls, j'ai rencontré de nombreuses aggrégations de Pyrosoma giganteum, mais beaucoup étant loin de mériter ce nom spécifique, il vaut peut-être mieux les désigner sous le nom de P. elegans. Ce nom avait été donné, du reste, par Le Sueur à de jeunes colonies du P. giganteum, qu'il consi- dérait, à tort, comme formant une espèce distincte. Dans les jeunes aggrégations les quatre premiers blastozoïdes bourgeonnant simultanément produisent quatre chaînes d'individus dont les tailles vont en s’accroissant également à partir du point d'origine et qui forment par suite des verticilles réguliers. L’orifice cloacal commun est encore dépourvu du diaphragme annulaire. Dans les jeunes cormus, dont les individus sont disposés en ver- ticilles, le sillon ventral de tous les zooïdes est tourné vers l’extré- mité fermée de la colonie. Il en est de même dans les grands cormus. Keferstein et Ehlers seraient seuls, d’après Joliet, d’un avis opposé. Plus tard, les nouveaux blastozoïdes, bourgeonnant à leur tour, la complication devient si grande que la disposition verticillée dis- paraît. Les blastozoïdes les plus voisins de l'ouverture cloacale com- mune, c’est-à-dire les individus les plus âgés, développent chacun leur prologement musculaire dorsal, et l’ensemble de ces prolonge- ments vient former le diaphragme annulaire. Dès lors, il est difficile d'adopter les deux groupes de Pyrosoma verticillata et paniculata de Savigny, car les premiers ne sont que des formes jeunes des seconds ou quelquefois des formes plus régulièrement dévelop- PRE, TU NNT ER RECHERCHES SUR LES TUNICIERS. 61 pées. L’anatomie des individus n’offre aucune différence. La longueur moyenne des colonies que j'ai recueillies à Banyuls était de 7 centi- mètres. Une fois, pourtant, j'ai observé une colonie de 20 centimètres de long. Le Sueur a signalé des colonies qui atteignaient jusqu’à 13 et 14 pouces de long. Plus les colonies sont courtes, plus elles sont coniques. Ainsi, une colonie de 10 centimètres de long présente un diamètre de 2 centimètres à la base et d’un centimètre à l'extrémité, tandis que le rapport des diamètres reste le même chez les colonies géantes. D’après Panceri on pourrait caractériser les espèces de Pyrosomes d’après la phosphorescence ; elle serait toujours azurée chez P. gi- ganteum ou elegans, elle serait polychromatique chez P. atlanticum. Si ce fait est constant, ainsi que rigoureusement vrai, suflit-il pour distinguer deux espèces qu'aucune différence anatomique ne sépare ? Les Pyrosomes que j'ai rencontrés à Banyuls produisaient tous une lumière bleu saphir. Les trémas des Pyrosomes ne correspondraient pas, d’après Herd- man, aux trémas ordinaires des Tuniciers, mais bien aux mailles branchiales des Culeolus, Fungulus, Bathyoncus et Pharyngodictyon, par suite, les côtes longitudinales de Pyrosoma seraient les homo- logues des sinus anastomotiques longitudinaux des Ascidiadæ. C'est, à mon avis, une profonde erreur ; et il suffit pour s’en con- vaincre d'étudier le développement des Pyrosomes (fig. #3, p. 56 et fig. 51, p. 65), ainsi que l’histologie comparée des trémas chez ces animaux et chez tout autre Tunicier normal. La diagnose de P. atlanticum donnée par Péron (Æquatorio At- lanticum, gregarie pelagivagum vividissime phosphorescens. Colori- bus eximiis tunc effulgens. In aquis viginti duobus calidioribus occurens. 10-12-14-16 centimetros æquans) est complètement insufli- sante. Mais comme P. elegans se rencontre aussi dans l'Océan et que la figure donnée par Péron de P. atlanticum n’en diffère en rien, je suis très porté à croire que ces espèces se confondent. Les formes pélagiques ont presque toujours une extension géographique des plus considérables. Thalia mucronata, pour ne citer qu’un exemple, 62 FERNAND LAHILLE. vit dans la Méditerranée, la Manche, l'Atlantique nord et sud, le Pacifique nord et sud, ete. Aussi, avant de créer des espèces d’après les localités où on les rencontre, pour si éloignées qu’elles soient, je crois qu'il faut auparavant établir de sérieuses différences ana- tomiques. Dans son ouvrage intitulé : Les explorations sous-marines (1880, p. 227), M. Perrier indique un nouveau Pyrosome, mais n’en donne aucun caractère précis. Voici à quoi se bornent ses indications. Le Talisman a rapporté des mers tropicales un Pyrosoma apparte- nant à une espèce nouvelle, « le P. excelsior, E. Perr., qui n’avait guère moins de 2 mètres de long sur 2 décimètres de diamètre à l’état vivant. Sur le manchon de cristai, les viscères écarlates de chaque Ascidie semblaient autant de rubis enchässés. Ce splendide Tunicier paraît avoir été rencontré aussi par Le Challenger. » C’est du P. spinosum (Herd.) que se rapprocherait donc P. excel- sior (Perr.). Les cormus de P. spinosum dépassent, en effet, 1",20. Les individus sont très régulièrement disposés dans la colonie et pré- sentent, comme caractères particuliers, de nombreux follicules tes- ticulaires (plus de vingt) et une glande neurale triangulaire nette- ment distincte du pavillon vibratile qui est tubulaire et allongé. Entre les rangées d’animaux, la tunique forme des crêtes longitudinales épineuses.Ces colonies géantes proviennent de fonds de #,000 mètres environ. Que l’on considère maintenant P. giganteum et atlanticum, soit comme espèces distinctes, soit comme variétés, voici de quelle façon on peut caractériser pratiquement les Pyrosomes connus : A.— Cormus conique : disposés en verticilles — Pas de diaphragme. . . P. elegans, Le Sueur. Ani ; 2 ; PE | non verticillés. — Diaphragme annulaire . . . . P. atlanticum, Pér. B. — Cormus cylindrique : Tee . { lancéolées et disposées sans ordre. . P. giganteum, Les. Aspérités de la tunique : ! ARS : coniques et en séries longitudinales.. P. spinosum, Herd. sb dis. à med, “à it he A pod RECHERCHES SUR LES TUNICIERS. 63 Li FAMILLE DES DOLIOLIDÆ. Caractères propres. — Tuniciers pélagiques transparents, à orifices opposés et lobés. — Branchie munie de trémas toujours plus ou moins obliques par rapport à l'axe longitudinal du corps et toujours dépourvus de côtes intermédiaires. — Le corps des Doliolidæ pré- sente généralement la forme d’un tonnelet défoncé à ses deux extré- mités et dont les cercles seraient représentés par des faisceaux de fibres musculaires qui font tout le tour de l'animal. — Il n'y a qu'une seule exception, chez l’Anchinia rubra, Vogt, la musculature est réduite à deux petits faisceaux latéraux repliés en forme d’S. — La larve des Doliolums est munie d’une queue natatoire. Les diverses espèces de Doliolums déerites jusqu'à présent peu- vent se caractériser par le développement plus ou moins grand pris par les trémas qui peuvent n’oceuper que le fond du sac branchial ou dontles rangées se recourbent pour s'étendre en avant. C’est sur ce principe que j'ai dressé le tableau suivant : À. — Branchie droite. DÉDUIrCS AR rest Le D. rarum, Grb. Nombre de trémas : 104 paires 21 mare . D. Mulleri, Kr. ADP Paire Lust ere re = DrKrohni Herd: B. — Branchie coudeée. DO et 7 uatte D. Gegenbauri, Ulj. BE RS ETES EMEA D. Tritonis, Herd. hu: LLC FRERE EEE ... D. Challengeri, Herd. À CARS SE NO RPC . D. denticulatum, Q. et G. LETECS PER ME POS .. . D. affine, Herd. CS NP SEEN EYE D. Ehrenbergi, Kr. Le Doliolum Mulleri (Krohn) est assez commun à Banyuls, et on peut suivre aisément son évolution. Dans cette localité, on ren- 1 Siles trémas d’un Doliolum sont situés dorsalement, de la deuxième bande musculaire jusqu’à la sixième, par exemple, pour revenir ventralement jusqu’à la troisième bande, j’énonce ce fait par par la formule branchiale : 2-6-3, 64 FERNAND LAHILLE. contre également D. Ehrenbergi; mais ce dernier est beaucoup plus rare, et je n'ai pu en reçueillir que deux individus. Enfin, à Roscoff, je n’ai jamais trouvé de Doliolums. Après la belle monographie d’Uljanin sur ces Tuniciers, je ne pourrais présenter actuellement que quelques observations de détail. PRELCCOCULS CUT) QCCOQEEAE Fig. 45. Fis, 46. Fig. 41. Fig. 48. Fig 44. — Schéma d’un Amaroucium. — Fig. 45. Schéma d’un Aplidium. — Fig. 46. Schéma d'un Dideinnum.— Fig. #7. Poliolum Ehrenbergi (Blastozoïde encore fixé au stolon). — Fig. 48. Jeune nourrice du D. Ehrenbergi dont on n’a pas représenté le prolongement dorsal et dont la 2me bande musculaire est anormalement dédoublée. Aussi, je me contenterai, pour le moment, de comparer ces animaux à quelques genres voisins, les Didemnes et les Pyrosomes, afin d'éclairer leur constitution morphologique. Si d'un Amaroucium (fig. #4) nous passons à un Aplidium (fig. 45), nous voyons le nombre de rangées de trémas diminuer, le stolon génitalifère se raccourcir, et l’orifice cloacal se porter vers le bas en même temps que sa direction fait un angle de 90° environ avec la di- rection du tube buccal. Si maintenant nous examinons un Didemnum (fig. 46), nous voyons le nombre de trémas s’abaisser à trois, la portion inférieure du tube digestif s’incurver et remonter vers la branchie. Nous voyons également le tube cloacal descendre encore, RECHERCHES SUR LES TUNICIERS. 65 en s'inclinant de plus en plus vers le bas, de façon à venir se placer presque sur le prolongement du tube buccal. Si maintenant nous considérons un bourgeon de Doliolum Ehren- bergi (fig. 47), la réduction du nombre de trémas atteint son maximum. En même temps, le tube cloacal accentue sa tendance à venir occu- per le prolongement du tube buccal, et les viscères qui, en définitive, plongent toujours librement dans la cavité générale, viennent se pla- Fig. 50. Fig. 49. — Doliolum Ehrenbergi. (Blastozoïde encore fixé.) — Fig. 50. D. Ehrenbergi. Gastrozoïde. — Fig. 51. Pyrosoma elegans. Individu jeune vu du côté gauche. cer entre l’ectoderme du tube cloacal et l'épithélium cloacal. Par suite, les muscles cloacaux viennent les enserrer, pour ainsi dire. Un pas de plus, et on arrive au Doliolum adulte (fig. 48). Ici, les muscles des tubes buccal et cloacal sont devenus parallèles, et on ne peut les distinguer les uns des autres qu’en observant la position du ganglion nerveux, qui est toujours situé entre les muscles des orifices. Cette dernière modification entraîne avec elle une rotation correspondante des trémas, qui deviennent obliques par rapport à l’axe des tubes buceal et eloacal. Chez certains bourgeons de D. Ehrenbergi (fig. 50), l’obliquité des trémas est telle que ceux-ci semblent presque horizontaux. Les an- gles des trémas, par lesquels se fait l’accroissement de ces organes et qui présentent des cellules cubiques, petites, granuleuses, con- trastant fortement avec les longues cellules de bordure, aplaties et ciliées, se trouvent donc situées de part et d'autre du sillon ventral. 5 66 FERNAND LAHILLE. La branchie de Pyrosoma nous présente le même fait (fig. 51). Nous sommes donc en droit de conclure qu'ici aussi l’opposition des ori- fices buccal et cloacal à produit une rotation des trémas de 900. L'ontogénie, du reste, s'accorde avec l'anatomie pour arriver à cette démonstration qu’il est très utile de mettre en évidence. En effet, étant admis que les trémas de Pyrosoma sont horizontaux, ces ani- maux doivent être considérés comme ne présentant qu’une seule rangée de trémas. Ces trémas étant très allongés, auraient pu céder sous l'effort de contractions énergiques de l'animal. Aussi, comme chez les Distaplia et pour le même motif, ces trémas sont-ils soutenus, de distance en distance, par des côtes intermédiaires nombreuses qui ap- paraissent tardivement. Sans cette étude de morphologie com- parée, un examen superficiel de la branchie de Pyrosoma aurait pu faire croire à la présence, chez cet animal, de côtes longi- tudinales, et, par suite, on aurait pu être amené à le placer dans l’ordre des Stolhi- dobranchiata et à le rapprocher d’Ascidies très supérieures dont, en réalité, Pyrosoma reste fort éloigné par tous ses caractères. Fig. 1.— Pegea confæderata. Forme | É agrégée., On aperçoit latéralement Sj enfin, nous comparons le boureeon les quatre prolongements d'attache. ? 2 2 a ligne médiane grèle représent 3 + L M “ransu de D. Ehrenbergi (fig. #9) avec Pegea con- rence.— Gr. 2: . s fœderata (fig. 1), nous voyons que les mus- cles des Salpes correspondent également aux museles intersiphonaux des Ascidiens, en particulier aux muscles cloacaux. Le ganglion ner- veux des Salpes se trouve bien plus rapproché de l’orifice buceal que de lorifice cloacal, la cavité péribranchiale et cloacale de ces animaux s'étendant très en avant. Par le fait de la constitution de leur branchie et de la prédomi- nance des muscles cloacaux sur les muscles buccaux, les Salpidæ sont peut-être mieux adaptés à la vie pélagique que les Doliolidæ, RECHERCHES SUR LES TUNICIERS. 67 quoique chez ces derniers, les muscles, organes de natation, entou- rent complètement le corps. En comparant la branchie des Doliolums et des Salpes, on voit que celle-ci doit être considérée comme formée d’une rangée unique d’hé- mitrémas, chaque bande ciliée, avec ou sans invagination, corres- pondant à un tréma des Ascidiens. Du reste, à propos de l’anatomie de la branchie de Pegea, j'avais déjà indiqué ce fait. Conclusions. — 1° La branchie des Pyrosomes est constituée par une seule rangée de trémas horizontaux munis de nombreuses côtes intermédiaires, que l’on ne doit pas confondre avec des côtes longitudinales vraies. 20 La branchie des Salpes est constituée par une seule rangée oblique d’hémitrémas plus ou moins développés. 3° Les muscles de Salpidæ et Doliolidæ sont les homologues des muscles des tubes buccal et cloacal des autres Ascidiens. ko Doliolum Mulleri, et D. Ehrenbergi se rencontrent à Banyuls. NPA 1151 FAMILLE DES DIDEMNIDÆ. Caractères se retrouvant isolément chez d’autres Tuniciers : Cormus toujours sessiles,. — Cœnobies nulles ou très irrégulières. — Individus petits (Oligosomidæ de Jourdain) et divisés en deux masses. — Aplousobranches à rangées de trémas peu nombreuses (3 à #)1. — Orifice buccal à 6 lobes?. Les lobes sont quelquefois peu prononcés. — Orifice cloacal muni d’un tube plus ou moins réduit ou d’une languette. — Appendices musculaires fixateurs. — Esto- mac à parois toujours lisses. — Ovaire très simple accolé au spermiducte et dépourvu d’oviducte. — Œufs souvent très volu: mineux. — Blastogénèse directe, œsophagienne. ‘ Exceptionnellement six chez Eucæœlium. * Le genre Cœlocormus n’en possède que cinq. 68 FERNAND LAHILLE. Caractères propres à quelques Didemnidæ : Cormus souvent fort mince et à individus disposés sans ordre. — Spicules calcaires étoi- lés. — 2 invaginations ectodermiques latérales. — 1 ou 2 follicules testiculaires latéraux ou inférieurs à l'intestin. — Spermiducte spiralé,. Pratiquement, on peut reconnaître un cormus d'animaux de cette famille à une des diagnoses suivantes : 3 : é sans spicules. — Aspect gélatineux. Le cormus étant sessile, est fort mince et L À avec spicules. — Aspect souvent coriace. sans spicules. — Animaux (en deux masses) très Le cormus étant sessile, est épais et | difficiles à extraire du cormus. avec spicules étoilés. Je crois devoir réunir en une seule famille les Didemnidæ et Diplo- somidæ de Giard, ainsi que les Cælocormidæ de Herdmann ; aucun ca- ractère anatomique constant et d’une certaine valeur ne se rencon- trant, en effet, dans les différents genres qui constituent ces groupes. Je ne crois également pouvoir admettre les genres Didemnoides (Dr.) et Diplosomoides (Herd.), qu’en modifiant et précisant les diagnoses données par leurs Auteurs. On peut invoquer comme caractères distinctifs des six genres qui forment la famille des Didemnideæ, les caractères suivants : { Pas de spicules. . . Didemnoides, Dr. | Spicules.. . . . . . Didemnum, Say. Orifice buccal Pas de spicules. . . . Diplosoma, Mac-Don. à 6 lobes. | 4 rangées de trémas. { Spicules. { Plusieurs. Diplosomoides, Lab. | Foll. test. / Un seul. . Leptoclinum, M. Edw. 6 rangées de trémas. — Spicules étoilés. . . Eucælium, Sav. 3 rangées de trémas. Orifice buccal à & lobes. — Spicules étoilés. — Nombreux follicules testiculaires. — Spermiducte spiralé.. . . . . . Gœlocormus, Herd. A Genre : Didemnoides. — Drascne, 1883. (Nov. acc.) Caractères communs aux Didemnums : Cormus épais. — 6 lobes buccaux. -— Tube cloacal. — 8 tentacules. — 3 rangées de trémas. — À follicule testiculaire à spermiducte spiral. € RECHERCHES SUR LES TUNICIERS. 69 Caractères distinctifs : Absence de spicules dans la tunique et bran- chie à trois rangées de trémas. Dans son travail sur les Synascidies de Rovigno, Drasche a séparé les Leptoclines épais des Leptoclines minces, et il a donné aux pre- miers le nom de Didemnoides, en conservant aux seconds le nom de Leptoclinum. L'épaisseur plus ou moins grande de la tunique com- mune ne pouvant être considéré comme un caractère anatomique, ne peut servir à la création d’un genre, d'autant plus qu'entre les cor- mus très minces et les cormus plus épais on pourra trouver une foule de types intermédiaires qui rendront les déterminations impos- sibles. Il faudrait établir une épaisseur conventionnelle, en deçà de laquelle on aurait des Leptoclinums, au delà de laquelle on n'aurait plus que des Didemnoides. Le genre créé par Drasche est donc en- tièrement arbitraire, et il doit, ce me semble, être supprimé. Son nom semble indiquer des ressemblances frappantes avec le genre Didemnum, ressemblances qui, en définitive, se réduisent toutes à un aspect extérieur commun, à une épaisseur assez considérable des cormus, tandis que, par tous leurs caractères anatomiques, les indi- vidus restent toujours de véritables Leptoclines. En revanche, il existe des Didemnes dépourvus de spicules et qui, de ce fait, s’éloignent de tous leurs congénères, ainsi que de la diagnose de Savigny, le créateur du genre. Comme l’incrustation de la tunique joue un rôle important dans la défense passive des cor- mus, et comme, en outre, certains genres naturels (Diplosoma et Leptoclinum, Distoma et Cystodytes) ont été basés, au moins en partie, sur la présence ou l'absence de spicules, je crois devoir ran- ger dans un genre à part les Didemnums inermes, et, pour ne pas créer un terme nouveau, je préfère leur attribuer le nom de Didem- noides, en modifiant dans ce sens l’acception primitive de Drasche. 1. — Didemnoides inarmatum, Dr. Didemnum inarmatum, Dr. J'ai recueilli à Banyuls trois cormus de cette espèce. Ils prove- naient de draguages exécutés dans les environs du cap Béarn et de 70 FERNAND LAHILLE. Port-Vendres. Leur épaisseur atteignait 8 millimètres et leur super- ficie était de # à 5 centimètres carrés. Ils se trouvaient fixés sur une épave. Leur aspect est gélatineux, leur surface lisse et brillante, leur couleur jaune-brunâtre. La pigmentation ectodermique des individus aperçus par transparence parsème, en quelque sorte, les cormus de points noirs. Les six amas pigmentaires situés à la base des lobes buccaux et indiqués dans le type de Drasche, se retrouvent chez la plupart des individus. D’autrefois, comme dans le Didemnum fallar, ces cellules à pigment noir forment, à la base du tube buccal, un cercle continu. Les trois rangées de trémas ne s’aperçoivent que dif- ficilement à travers l’ectoderme pigmenté. Ce n’est que par la dissec- tion que J'ai pu m'assurer du nombre de rangées de trémas; cette constatation est du reste indispensable dans la détermination des Di- demnidæ, car l'aspect extérieur peut fréquemment induire en erreur. Le tube digestif ne diffère en rien de celui des Didemnums. Le follicule testiculaire est d’un jaune vif, ainsi que le spermiducte spiral qui enserre sa portion inférieure. Le Didemnoiïdes tortuosum (Didemnum tortuosum, Dr.) diffère du Didemnoides inarmatum par ses cormus beaucoup plus charnus et par leur couleur qui est d’un vert foncé à l'extérieur, tandis qu'à l'intérieur elle est grise. 2e Genre : Didemnum. — Savicny, 1816. Caractères du genre : Cormus sessile. — 6 lobes buccaux et 8 filets tentaculaires. — Tube cloacal situé à la partie inférieure de la branchie et dirigé vers le bas. — Pas de muscles dans les sinus inter-trématiques. — ? invaginations ectodermiques latérales. — Fol- licule testiculaire unique, entouré d’un spermiducte spiralé. Caractères distinctifs : Présence de spicules étoilés dans la tunique et branchie à trois rangées de trémas. Dans la diagnose qu'il donne de ce genre, M. Giard a commis une erreur, en lui assignant quatre rangées de fentes branchiales. Les espèces de Didemnums sont très difficiles à caractériser, et RECHERCHES SUR LES TUNICIERS. 71 toutes mes observations me portent à croire que des phénomènes fréquents d’hybridation doivent intervenir dans l'apparition de cer- taines formes. J'espère reprendre, du reste, cette question et l’étu- dier dans un autre travail. Pour distinguer les espèces les unes des autres, Herdman a été obligé de recourir à la couleur et à la plus ou moins grande abon- dance de spicules. Il est bien certain que ces deux caractères, émi- nemment variables, ne sont pas naturels. On peut en dire autant de l'épaisseur plus ou moins considérable du cormus Quant à la forme des spicules, elle ne saurait pas davantage servir ici à caractériser les espèces. Tous les spicules de Didemnidæ que j'ai vus présentent, au début de leur formation, l'aspect d’un polyèdre à faces étoilées et à angles plus ou moins aigus. Plus tard, la partie centrale venant à s’encroûter entièrement, il en résulte une sorte de sphère qui se trouve hérissée de pointes à sa périphérie et qui rappelle les an- ciennes massues d'armes. Savigny, créateur du genre qui nous occupe, en a décrit deux es- pèces, et ces deux espèces, chose curieuse, doivent être rangées maintenant dans des genres voisins. En effet, d’après la description de ce naturaliste et surtout d’après la figure qu'il donne de son Di- demnum candidum, on voit que ce dernier est un véritable Lepto- cline. Quant à son D. viscosum, la description qu’il en donne, quoi- que incomplète, tend à faire assimiler cette espèce, soit au Diplosoma spongiforme, soit au Diplosoma Listeri. On peut diviser les Didemnums en deux groupes qui me parais- sent naturels. Penn tangées de trémas \ s'étendent sur toute FA ARBNÈUE du pharynx. | n’occupent que la portion supérieure du pharynx. Dans ce dernier cas, la place existe pour une quatrième rangée de trémas, et on pourrait se croire tout d'abord en présence d’une bran- chie de Leptoclinum arrêté dans son développement. Mais Le long tube cloacal toujours dirigé vers la partie inférieure du corps que présen- tent ces Didemnes, l’absence constante, dans le cormus, d'individus 72 FERNAND LAHILLE. à quatre rangées de trémas, montrent bien que l’on n’a nullement affaire à des Leptoclines. J'ai toujours vu, du reste, les quatre ran- gées de trémas apparaître presque simultanément chez les larves de ces derniers animaux. Les Didemnums qui présentent, entre la rangée inférieure de leurs trémas et le fond de la branchie, une large bande imperforée, sont des formes très intéressantes, en ce qu’elles semblent montrer la tendance primitive du pharynx à s’allonger, indépendamment de la formation des trémas dont les rangées se produisent d'avant en ar- rière. On peut, en outre, considérer ces Didemnums comme une forme de passage vers le genre Leptocline. Le nombre de tours de spire du spermiducte m'a paru propre à caractériser certaines espèces. Chez la plupart des Didemnums que j'ai examinés, le spermiducte entourait toujours une douzaine de fois le follicule testiculaire ; chez Didemnum niveum, seul, je n’ai ja- mais observé qu’un enroulement de huit tours. De même, chez Lept. Lacazi, G., le spermiducte ne fait jamais que deux ou trois tours, alors qu’il en présente toujours une douzaine chez L. maculatum, M. Edw. Je crois donc que, par sa constance, ce caractère possède une certaine valeur. Enfin, la longueur moyenne du tube cloacal, comparée à la lar- geur de la branchie, peut être invoquée dans la diagnose, quoiqu'il soit souvent difficile d'obtenir des individus étalés. En définitive, je caractérise ainsi les Didemnums que j'ai ob- servés. I. Les trémas occupent toute la longueur du pharynx. ’ long que la demie largeur 9 rs DE D à D EE ER EENENE de la branchie. , . . . . . D. cereum, Gt. ermiducte à 5 ; P Tube cloacal, plus { court que la demie largeur. D. fallax, Lab. 8 ÉDULS dOTSDITPE ss Re Dee UE .. «+ Dove II. Les trémas n'occupent que la partie supérieure du pharynx. Spermiducte à 42 tours de spire, . , . . . « . . . . . . .. D. graphicum, Lab. Pratiquement, on peut déterminer ces espèces d’après l’aspect ex- L | $ É L RECHERCHES SUR LES TUNICIERS. 73 térieur ; mais, dans ce cas, il faut toujours vérifier ensuite, par l’étude anatomique, les déterminations obtenues. jauve, fauve brunâtre, quelquefois grisâtre. . . . . . . . D. cereum. d’un beau noir, Orifices buccaux d’un blanc très pur. . . . D. fallax. Cormus : - bl DIN EM NILOEME. 1 5. 2,12 24.2 D: niveum: a ; 1 ; 3 parsemé de lignes droites, brunes et courtes. . . . D. graphicum. 1. — Didemnum cereum, Giard. C’est à M. Giard que l’on doit la connaissance de ce Didemne, le plus beau de tous sans contredit. Sa couleur uniforme et très brillante peut être reproduite exacte- ment en mélangeant par parties égales de l’ocre jaune et du cad- mium rouge. Les cormus sont fixés presque toujours sur les zostères, mais on en rencontre également de petites colonies sur des sargasses en compagnie du Didemnum Sargassicola qui, nous le verrons, doit être considéré comme une variété du premier. Le Didemnum cereum est très localisé et, comme l’a remarqué M. Giard, on ne le rencontre que dans les endroits où les prairies de zostères sont parcourues par des courants rapides, mais il n’est pas juste de dire que cette espèce soit très commune. Durant un premier séjour de deux mois environ, je n'ai pu, à Roscoff, en recueillir qu'un seul échantillon et, pourtant, j'explorais alors la grève chaque fois que le permettaient les marées. J'ai rencontré plus tard D. cereum dans la localité signalée par M. Giard, à gauche de l'entrée du port. Ensuite, devant Per’haridi ; enfin près de Paimpoul, à Trebunnec. Dans ce dernier en- droit, les courants sont aussi très profonds et rapides et les cormus de D. cereum réunissent souvent ensemble plusieurs zostères et atteignent une longueur fort considérable (25 centimètres et plus sur 3 centimètres de large). La surface du cormus est lisse et l’aspect en est spongieux. Les cormus sont mous au toucher. Si on les observe à la loupe, on voit 74 FERNAND LAHILLE. les orifices buccaux indiqués par trois petits amas de spicules qui simulent trois petites dents. M. Giard prétend t que les spicules sont également répartis dans la masse et ne forment pas de cercles ou d’ellipses autour des orifices buccaux ; c’est une erreur. Les cercles de spicules existent réellement et quelquefois même on les voit se souder entre eux. Ils sont peut-être un peu moins marqués que chez d'autres espèces, mais ils se retrouvent toujours. Les individus peuvent atteindre 2%" lorsqu'ils sont adultes et bien épanouis. Dans ce cas, les 6 lobes buscaux sont aigus, et le tube buccal, court et cylindrique, est presque aussi large que le sac branchial. [ n’en est plus de même lorsque les animaux sont con- tractés; le tube prend alors une forme hexaédrique, devient bien moins large que la branchie, et les lobes rappellent par leur aspect ceux du Diplosomoides Lacazii. Le tube cloacal, assez court, est muni de muscles circulaires puis- sants et s'étend depuis la première côte transverse de la branchie Jusqu'au niveau inférieur de cet organe. Au niveau de la deuxième côte transverse de la branchie, se ren- contre, de chaque côté du corps, une invagination ectodermique. J'ai observé cette formation chez tous les Didemnidæ et son impor- tance morphologique est grande. Dans son Diplosoma pseudo-Leptoclinum, Drasche avait signalé, de part et d’autre de la branchie, un amas constant despicules, sans indiquer pour quelle cause et par quel mécanisme ces spicules se trouvaient toujours réunis en ces mêmes points. L'observation de jeunes larves et les méthodes microtomiques m'ont permis d’élucider cette question. Dans le développement des Didemnidæ, on voit se produire laté- ralement au niveau du milieu du pharynx une invagination ectoder- mique, paire et symétrique, qui correspond aux fentes branchiales des Appendiculaires. Ici, cette invagination s’élargit beaucoup et forme la cavité péri- ! Recherches sur les Synascidies, p. 184. RECHERCHES SUR LES TUNICIERS. 75 branchiale. Mais ensuite, au lieu de remonter peu à peu vers la face dorsale et se souder lun à l’autre pour constituer le tube cloacal, comme l’ont décrit Van Beneden et Julin chez A. scabra, les orifices de ces invaginations paires et latérales s’oblitèrent au niveau de la paroi du corps, tandis que c’est une invagination ectodermique indé- pendante qui vient former le tube cloacal. Il résulte de ceci que les deux sacs péribranchiaux chez les Didemnums sont presque entière- ment séparés l’un de l’autre du côté du dos par une cloison que j'appelle la cloison dorsale (cr, fig. 52) et qui est constituée par la paroi épithéliale des sacs péribranchiaux eux-mêmes. Ces sacs ne communiquent ensemble que grâce à l’invagination cloacale dorsale qui s’est mise en rapport avec eux. Les portions de la tunique Ccom- pig. 52. — Did. cereum Giard. Coupe trans- versa'e de la branchie, à la hauteur de la mune, réfléchie dans le tube buccal, côte transverse inférieure. Or, orifices branchiaux primitifs ; Lr, papille de Lister ; le tube cloacal et les tubes latéraux Gr, cloison dorsale séparant les deux cavi- tés péribranchiales ; Br, bordure ciliée de la côte transversale ; Pm, faisceaux mus- 90 ou tubes branchiaux primitifs, Let culaires de la paroi péribranchiale. — Gr. 2? ferment toujours une plus grande quantité de spicules que les autres parties de la tunique ; aussi, lorsqu'on isole les individus, on est de suite frappé, comme l’a été Drasche lui-même, par l'aspect des masses spiculaires qui paraissent suspendues sur les faces latérales de la branchie. Pour terminer ce qui a trait à l’ectoderme, Je dois signaler, chez D. cereum, l'existence de prolongements ectodermiques nombreux. On en compte généralement quatre par individu, mais ce nombre m'a paru n'avoir rien de fixe et J'ai pu en compter une fois jusqu’à huit. Ces prolongements, grêles et sinueux, mais toujours sim- ples, partent tous d’un point d’origine commun situé vis-à-vis de l'orifice inférieur du cœur. Ils se terminent par un renflement réniforme. Système musculaire. — Outre les muscles siphonaux, ici très dé- 76 FERNAND LAHILLE. veloppés, on observe de nombreux muscles longitudinaux disposés de chaque côté du corps au nombre de dix à vingt. Cinq d’entre eux relient le tube buccal et le tube cloacal, les au- tres viennent se réunir un peu au-dessous et en arrière du sillon ventral. [ls forment, en ce point, un petit appendice fixateur, homo- logue à l’appendice fixateur si développé que j'édudierai chez les Diplosoma. Il existe des muscles branchiaux transverses et ceux-ci, comme chez les Diplosoma encore, n’ont aucun rapport avec les museles longitudinaux du corps. Cette disposition est donc bien différente de celle qui existe chez les Distaplia et chez les Aplididæ. Chez les Didemnidæ la paroi branchiale est com- plètement isolée de la paroi de la cavité péribranchiale et il n’y a jamais trace de sinus péribranchiaux. Les sinus inter-trématiques ne renfer- ment point de muscles, et ce caractère contribue à distinguer la branchie d’un Didemnum de celle d’un Leptoclinum. Fig. 53. — Did cereum Giard. Gan- P glion nerveux et organe vibratile vus en dessus. Sn», tube neural ; In, pavillon vibratile ; Sar, sillon : : AD Qi te Fbd, filet” tentaculaire JOngitudinaux dorsaux, situés en avant du dorsal — Gr. 390 On remarque enfin une paire de muscles grand sinus dorsal de la branchie et c’est toujours entre ces muscles que l’on distingue le cordon ganglion- naire dorsal ici peu développé. Centres nerveux (fig. 53). — Chez l’espèce que j'ai choisie pour l'étude du genre Didemnum, le ganglion est ovoide et son petit axe mesure en moyenne #8 p. Ilen part cinq paires de nerfs qui sont tous latéraux et dont il est fort difficile de suivre le trajet. Des deux côtés et au-dessus du gan- glion nerveux, on aperçoit les deux faisceaux de muscles longitudi- naux dorsaux de la branchie qui vont s'épanouir sur le tube buccal. Sur la ligne médiane du corps, et situé au-dessous du ganglion, on aperçoit, le tube neural. Celui-ci se dilate immédiatement en avant du ganglion en un pavillon vibratile volumineux qui vient RECHERCHES SUR LES TUNICIERS. 71 s'ouvrir au-dessous du sillon antérieur et au-dessous du filet tenta- culaire dorsal. À mesure que l’on s'éloigne en arrière du ganglion, le tube neural s’atrophie et n’est plus alors représenté que par une traînée de cellules. Souvent, il n'existe pas trace de l'organe neural; et lorsqu'on l'observe, dans tous les cas il est rudimentaire et formé alors par une simple dilatation de la partie du tube neural au-dessous du ganglion nerveux. Branchie.— A la base du tube buccal, on rencontre huit filets ten- taculaires filiformes disposés en deux cycles. Presque immédiate- ment au-dessous, on observe le sillon antérieur qui affecte, avec le sillon ventral, les mêmes rapports que j'ai déerits chez Pegea confæ- derata. Les lèvres du sillon ventral sont quelquefois fort proémi- nentes dans la cavité branchiale. Le sillon ventral présente comme toujours ses deux culs-de-sacs, ses deux zones ciliées, ses trois zones glandulaires et ses replis marginaux. La troisième zone glandulaire est toujours la plus déve- loppée des trois. IL existe trois rangées de trémas, la longueur moyenne de ceux-ci est de 420 & et on en compte 10 à 12 par rangée. Leur forme est un ovale irrégulier, car, à leurs deux extrémites, aux points où se produit leur allongement, les cellules marginales plus étroites sont, comme chez les Doliolidæ également, beaucoup plus rapprochées. La figure 56 indique cette disposition. La première rangée de trémas se trouve souvent très éloignée du sillon antérieur. Entre chaque rangée, on observe une très large côte transverse continue du côté dorsal, à bordure libre ciliée et présentant, sur le côté gauche et vers son milieu, un prolongement filiforme de la longueur des trémas et constituant une papille de Lister. Dans chaque sinus transverse contre la paroi externe de la branchie, on observe un faisceau musculaire interrompu seulement par le sillon ventral. Quelquefois, ce faisceau est dédoublé en deux, mais ce fait est sans importance. Ces muscles étant toujours plus ou moins contractés, la branchie observée du côté ventral ou dorsal 78 FERNAND LAHILLE. affecte dans la cavité péribranchiale l’aspect d’un sablier. Les côtes transverses alors très rapprochées dans le sens horizontal divisent l'intérieur de la branchie en trois chambres superposées. Appareil digestif. — Il offre une constitution semblable à celle que nous étudierons chez les Diplosoma. La longueur du pédieule œsophago-rectal est fort variable; en général, il est plutôt long que court. L'intestin présente une double courbure et offre, comme toujours, les cinq parties différenciées suivantes : œsophage, estomac ovoide à parois lisses, post-estomac, intestin moyen et rectum. Arrivé à la hauteur de la branchie, le rectum, au lieu de continuer à se diriger vers la partie supérieure, se recourbe brusquement dans la direction du tube cloacal et se termine par une paire d’oreillettes anales souvent volumineuses. L’organe rénal existe bien chez D. ce- reum, mais il est fort diflicile de l’apercevoir sans préparation. Organes reproducteurs. — La maturité sexuelle de D. cereum a lieu au printemps. Le follicule testiculaire, situé dans l’anse intestinale un peu au-dessous de l’estomace, soulève l'intestin moyen. Il est en- touré d’un spermiducte qui décrit autour de sa base douze tours de spire. L’ovaire, situé au-dessus du follicule testiculaire, est accolé au spermiducte ; il forme un sac cylindrique dans lequel les ovules les plus développés sont les plus inférieurs. Variétés. — Je regarde D. Sargassicola, Giard, comme étant une simple variété de l'espèce précédente. Aucun caractère anatomique ne permet de séparer ces formes. Ils ne diffèrent guère que par la couleur. Chez D. cereum, celle-ci est toujours plus ou moins oran- gée, tandis que chez D. Sargassicola elle rappelle celle de l’Aplidium zostericola où encore l’aspect de groseilles blanches. La forme des spicules de D. Sargussicola, représentée par Giard, est tout à fait exceptionnelle et ne peut servir à établir une différence spécifique. À ce propos, je dois faire remarquer que, pour les déterminations, les spicules doivent être observés dans des cormus frais sans l'inter- vention de réactifs. Sous l'influence de fisateurs, même légèrement acides, on peut voir les prismes qui constituent les spicules se dé- composer en petites aiguilles, et on obtient alors des formes analo- RECHERCHES SUR LES TUNICIERS. 10 gues à celles représentées sous les chiffres 7 et 14 de la planche XXII de M. Giard. Les quatre autres variétés de D. Sargassicola admises par M. Giard (D. saccharinum, hyemale, mixtum et griseum) sont dues à une aug- mentation ou à une modification du pigment renfermé, soit dans la tunique commune, soit dans les cellules ectodermiques des individus. La variété D. hyemale-cereum (PI. XXVIIT, fig. 2 y) se rapproche du Didemne suivant par sa coloration gris foncé ; mais ses contours souvent peu arrêtés et son aspect généralement glaireux, permettrait, en dehors de toute dissection, de distinguer ces deux espèces. Je n’ai pas étudié l’action du froid sur la formation du pigment chez les Tuniciers inférieurs ; mais je puis aflir- mer qu'à Roscoff, dès les premiers Jours du mois d’août, bien avant l'hiver par conséquent, on trouve en abondance les D. saccharinum-cereum et hyemale- cereum, qui, d'après M. Giard, n’apparat- traient qu'en automne ou avec les pre- miers froids. Fig. 54. — Did. cereum Giard. Larve. Or, orifice branchial droit ; a, orifice cloacal ; Pe, Prolongements ectoder- : ] . : miques ; Ve, ventouses ; Æà, estomac ; certains cormus de D, Sargassicola- Mi, intestin moyen ; Ri, rectum. Gr. 5° Le pigment très sombre qui colore cereum se montre tout d’abord à l’extré- mité antérieure du sillon ventral des individus ; il entoure ensuite leur tube buceal, et les cellules ectodermiques se remplissent de plus en plus de granulations pigmentaires. On peut en rencontrer également dans la tunique, et, dans ce cas, on voit le cormus par- semé de petites taches noirâtres qui tranchent vivement sur le fond jaune ou grisâtre de la colonie. J'ai représenté (fig. 54) la larve de D. Sargassicola-cereum au moment de l’éclosion. Pour éviter des redites inutiles, je ne décrirai pas ce dessin et je renvoie, pour l'étude détaillée des centres nerveux de cette larve, à l’anatomie de ces mêmes centres chez Distaplia. 80 = FERNAND LAHILLE. 2. Didemnum fallax, Lahille. Dans une promenade zoologique que je fis à Cette, au mois de mars 1887, je rencontrai sur les piles du pont que l’on construisait au sud de la tourelle des signaux du chemin de fer du Midi, un Didemnum particulièrement abondant en cette localité, et que je crois devoir dé- crire comme une nouvelle espèce. Les colonies y revêtent des algues, des tubes d’'Hydroïdes pectinata et une Phallusiadée : l’Ascidiella aspersa, qui est fort commune en ce point. Les caractères extérieurs des cormus sont ceux d’un Leptocline, et comme c’est à ce genre qu’on est tenté, par conséquent, de le rapporter à première vue, j'ai donné à cette forme le nom de Didemne trompeur. Les cormus constituent de grandes croûtes lobées de 2 à 3 millimètres d'épaisseur. Leur couleur, parfois d’un gris très sombre, est le plus souvent d’un beau noir. Elle est produite principalement par la formation de pigment dans les cellules ectodermiques et dans la tunique. La surface est lisse et parsemée de petits points blancs, consti- Dr tués par des amas de spicules abondants g. 56. Fig. 55. — Did. fallaz Lah. Orifices dans cette espèce, mais dont la forme buccaux étalés et disposition des L bte SET filets tentaculaires. — Gr.#* étoilée n'offre aucune particularité distin- Fig. 56. — Did.fallax Lah. Bran- É chie vue du côté droit. Œi, æso- çtive. phage ; Ri, rectum; Cr, cloison dorsale ; Am, appendice fixateur ; [June manière générale, on peut toute- Or, orifice branchial primitif. — Gr. 50 fois dire que les pointes des spicules sont bien moins aceusées que chez les autres Didemnes et se rappro- chent de ceux que M. Giard attribue au D. griseum-cereum (fig. 10, pl. XXIT). Les cloaques communs sont nombreux, entourés d’une bordure cy- RECHERCHES SUR LES TUNICIERS. 81 lindrique, élevée et continue; quelquefois, les cônes cloacaux sont entièrement blancs, et cet aspect est dû à un entassement de spi- cules. On n’aperçoit pas de dépressions cloacales. Quand les individus sont un peu contractés, les orifices buccaux sont indiqués ici, comme chez la plupart des Didemnidæ du reste, par trois taches spiculaires. Quand, au contraire, les individus sont étalés, on aperçoit autour du tube buccal, dilaté en forme de coupe, une zone plus transparente, que J'avais essayé d'indiquer dans la figure 55, mais que la reproduction n’a pu rendre. Elle provient d’une moindre épaisseur de la portion de la tunique située immédiatement au-dessus de la branchie. Les individus ont de 1 milllimètre à 1"%,2 de longueur, et la bran- chie occupe la moitié de la longueur totale. L’anatomie du D. fallax ne diffère pas sensiblement de celle du D. cereum, la figure 56 le démontre. Les trémas sont au nombre de huit par rangée, et à leurs deux extrémités ils présentent, comme chez les Doliolums, des rétrécissements assez brusques. Les trois languettes de Lister, placées toujours à gauche, sont plus longues que les trémas. L’ectoderme présente, au niveau de la côte transverse inférieure de la branchie, les restes des deux invagina- tions ectodermiques primitives. Les deux cavités péribranchiales sont presque entièrement séparées l’une de l’autre. Le tube cloacal est dentelé à son bord. | L'anus présente deux oreillettes anales, volumineuses, contournées et réfléchies vers le bas. 3. Didemnum niveum, Giard. Cette espèce est fort abondante à Roscoff, dans les localités signa- lées par M. Giard. On peut la déterminer à première vue. Les cor- mus ont en moyenne À à 2 centimètres de long, les plus allongés atteignent # et 5 centimètres, mais ne dépassent pas cette grandeur. Ils sont fixés principalement sur les Sargasses. La surface de la co- lonie offre un aspect alvéolaire, produit par les individus qui bom- 6 82 FERNAND LAHILLE. bent au dehors. Comme je l’ai fait remarquer à propos du D. fallax, à la base de chaque tube buccal, la tunique commune étant plus mince qu'ailleurs, laisse apercevoir la couleur ectodermique des animaux, laquelle est ici bleuâtre. La surface du cormus est par suite d’un beau blanc légèrement bleuté. L'anatomie des individus n'offre rien de bien particulier à signaler. Le nombre de tours que décrit le spermiducte en s’enroulant sur le follicule testiculaire est constamment ici de huit, tandis qu’il est en général de douze chez les autres Didemniens. C’est dans le mois d'avril qu'on observe la maturité sexuelle de Didemnum niveum. La figure de cette espèce, donnée par M. Giard dans sa plan- che XXII, n'est qu'un schéma d’un Didemnum quelconque, et ce schéma est encore bien incomplet. La plupart des individus présentent cinq prolongements ectoder- miques qui se renflent à leur extrémité en une ampoule réniforme, volumineuse et aplatie. Chez cette espèce, le ganglion nerveux est sphérique, et le pavillon vibratile, également circulaire en coupe optique longitudinale, est presque aussi volumineux que lui. Les ou- vertures branchiales primitives se voient très nettement chez cette espèce vis-à-vis de la deuxième côte branchiale transverse. 4. Didemnum graphicum, Lahille. Ce Didemne ressemble, encore plus que le précédent, à un Lepto- celine, en particulier au £. maculatum. Je l'ai rencontré pour la pre- mière fois à Banyuls. Depuis, je l’ai trouvé dans un envoi d'espèces de Marseille, que je dois à l’obligeance de mon excellent ami L. Roule. Les cormus sont fixés généralement sur des Dromies, quelquefois sur des tubes d’Annélides. Leur épaisseur ne dépasse guère 45 millimètres. Tranchant sur un fond blanc-grisâtre, on aper- çoit les dépressions cloacales superficielles dessinées en brun sombre et formant de courtes lignes droites et brisées. Ces lignes imitent le dessin qu’affecte le feldspath dans la pegmatite graphique, el c’est cet aspect qui m'a fait donner à ces cormus le nom de Didemne graphique. Cr LT RECHERCHES SUR LES TUNICIERS. 83 Ce caractère, joint à celui de la branchie, dont les trois rangées de trémas sont situées dans la partie tout à fait supérieure du pharynx, distingue ce Didemne de tous les autres. Entre la troisième rangée de trémas el l’orifice œsophagien, il existe une large bande imperfo- rée qui indique la place d’une quatrième rangée de trémas ne se rencontrant que dans le genre Leptoclinum. Chaque rangée bran- chiale complète est farmée par 12 X 2 trémas. Immédiatement au-dessous du tube buccal et dans une zone s’éten- dant parfois jusqu’à la première côte transverse, on remarque que les cellules ectodermiques renferment des granulations de pigment sombre, tandis que leur noyau est fortement rosé. L'époque de la maturité sexuelle de cette espèce paraît s'étendre du mois d’octobre au mois de mars, les organes reproducteurs étant à peine développés chez les individus recueillis en été. 3e GexRE : Leptoclinum. — Miixe-Enwanrps, 1842. Caractères du genre : Cormus sessile, ordinairement très mince. — 4 rangées de trémas. — Spicules étoilés. — 1 follicule testiculaire à spermiducte spiral. — Présence de muscles dans les sinus inter- trématiques. — Absence de tube cloacal. L'absence de spicules, de museles dans les sinus inter-trémati- ques, la présence de deux follicules testiculaires à spermiducte droit permettent de distinguer aisément Diplosoma de Leptoclinum. L'absence d’un tube cloacal et la présence de quatre rangées de trémas distinguent toujours Leptoclinum de Didemnum. Herdman n’admet pas, dans le genre qui nous occupe, comme caractère cons- tant la présence de quatre rangées de trémas. Aussi, faut-il de toute nécessité discuter avec soin ce caractère. Chez le Leptoclinum Thom- sont, Herd., on rencontre dans le même cormus, des individus à trois rangs de trémas et à quatre rangs. Mais ce fait indique seulement que quelques blastozoïdes éprouvent un arrêt dans leur développement, et que leur constitution définitive rappelle un état 84 FERNAND LAHILLE. ancestral. Chez tous les oozoïdes de Leptoclinum que j'ai observé, les quatre rangées de trémas apparaissent simultanément ou presque, et il est très probable qu'il doit en être de même chez L. Thomsoni, qu'ensuite certains blastozoïdes ne se développent qu'incomplètement, il n’y a là rien qui permette d’infirmer la règle générale d’autant plus que le cas est exceptionnel et que la majorité des blastozoïdes présente les quatre rangées normales. Chez les L. Edwardsii, Herdman signale, chez un des individus examinés, la présence de cinq rangées de trémas. Le dessin qu'il donne permet de résoudre également cette difficulté. On doit définir le nombre de rangées de trémas par le nombre de papilles de Lister, ou, ce qui revient au même, par le nombre de côtes transverses ; le nombre de rangées de trémas étant égal à n-1 côtes transverses. Il est nécessaire d'agir ainsi, car souvent, surtout chez les formes dont les trémas sont allongés, on voit l’espace compris entre deux côtes successives se perforer, non pas d’une seule rangée d'ouvertures, mais de deux, quelquefois même de plusieurs. Dans ce cas, très souvent, à côté d’une série de trémas qui occupent toute la longueur comprise entre deux côtes transverses, on voit une double série de trémas d’une longueur moitié moindre. J’exposerai de nombreux exemples de ce fait chez les Clavelines, Diazones, Ascidielles, ete., etc. C'est précisément ce qu’on observe chez l'individu étudié par Herdman et qui, en réalité, ne possède comme tous les Leptoclines que trois côtes transverses et, par suite, quatre rangées régulières et normales de trémas. Le naturaliste Anglais signale bien un Leptoclinum (L. propinquum) qui ne posséderait d'une manière constante que trois rangées de trémas. D’après tous les caractères qu’il en donne, je suis convaineu que cette forme est, malgré la minceur de son cormus, un Didemnum véritable. De tous les caractères génériques que l’on peut invoquer, l'épaisseur est le moins important de tous au point de vue taxono- mique. Au point de vue biologique, c'est une autre affaire ; M. Giard a fait remarquer, avec raison, que la diminution des espaces cloacaux communs, et la réduction des cormus à une très faible RECHERCHES SUR LES TUNICIERS. 85 épaisseur, mettaient ceux-ei mieux à l’abri des commensaux ct des parasites. Enfin, au point de vue anatomique, l'épaisseur plus ou moins grande d’un cormus de Didemnidæ a pour effet constant un change- ment de position des viscères par rapport à la branchie. Lorsque les cormus sont épais, le tube digestif est étendu longitudinalement au-dessous de la branchie et le pédicule œsophago-rectal est sou- vent fort long. Si, au contraire, le cormus est mince, ce pédicule est très court, les viscères sont recourbés transversalement et se trouvent situés alors contre la portion inférieure de la branchie. Il existe un grand nombre de formes de Leptoclines et Herdman a pu décrire seize espèces nouvelles, mais il faut avouer qu’on en est réduit à invoquer des caractères qu’on peut qualifier de misérables : tels que l'épaisseur, la couleur, la consistance de la tunique, l’état de la surface, ete., ete. Je compte reprendre plus tard la monographie détaillée du genre Leptoclinum et, en attendant, voici comment je crois devoir caractériser, au point de vue pratique, les espèces que j'ai rencontrées sur nos côtes : | e CRE ÉLÉS re - : à +. D PérspICuUM, G: DRE Pare pseudo-lenticulaires . . . . L. resinaceum, Dr. à | flabellés. .. . . . . . . . L. perforatum, G. E aciculaires . . . . . . . . L. gelatinosum, G. — [Minces. — Spicules à plus de 40 sommets L. candidum, Sar. étoilés {à moins de 40 somm. (lisse. L. fulgidum, Edw. (Surface du cormus :}bosselée, L. maculatum, Edw. 1. L. perspicuum, Giard. Syn.: Didemnum rubellum, Grube, 18601; Astellium perspicuum, Giard, 1873 ?; Didemnoïides macroophorum, Drasche, 1883 3. M. Giard pensait qu'à chaque variété de Lamellaria correspondait une Synascidie ou un Bryozoaire, aussi fut-il surpris d'en rencontrer Ein Ausflug nach Triest und dem Quarnero, Breslau. * Hist. nat. des Synascidies. — Archives de zoologie, p. 186. * Die Synascidien der bucht von Rocigno, Wien. 86 FERNAND LAHILLE. une à Roscoff qui présentait une teinte jaune rosée, avec des espaces pellucides et régulièrement disséminés. Cette variété ne se rappor- tait à aucun des Leptocliniens ou des Pseudodidemniens connus. « La drague me procura enfin, dit-il, l’Ascidie dont je supposais l'existence et que j'ai retrouvé depuis fort au bas de l’eau. C’est un bel Astellium à cormus très vaste et plus épais que ceux de ses con- génères antérieurement connus : je l’appelerai Astellium perspicuum. Il habite surtout les prairies de zostères, situées dans la troisième zone, et découvertes seulement aux basses eaux des marées da l’équinoxe. Une de ces prairies s’étend à Roscoff, au-delà du rocher de Roléa, jusque vers les roches du Loup. L’A. perspicuum est fixé sur les tiges de zostères et forme parfois des cormus très volumi- neux. » C'est dans la localité signalée par M. Giard que j'ai rencontré, à mon tour, ce superbe Tunicier. Seulement ce n’est pas un Astel- lhium et M. Giard a été, sans doute, induit en erreur par les carac- tères extérieurs du cormus. Ii n'indique, en effet, aucun caractère anatomique et il est probable qu'il n’a pas cherché à isoler les in- dividus. Peut-être aussi les spicules et les organes reproducteurs étaient-ils peu ou pas développés chez les cormus qu'il a examinés. Les spicules étoilés, pésentant un petit nombre de sommets et le follicule testiculaire unique autour duquel le spermiducte déerit dix tours de spires, ne laissent aucun doute sur la position que doit oc- cuper ce type. La languette cloacale, les quatre rangées de huit trémas chacune, le long pédicule œsophago-rectal et le tube digestif divisé en cinq parties très nettes, ne permettent pas de placer cette espèce ailleurs que dans les Leptoclinums. Drasche qui l’a souvent rencontré sur nos côtes de l'Ouest, notam- ment aux îles Chausey à marée basse, et dans des draguages à Saint-Malo, en fait, à cause de l'épaisseur du cormus, un sous genre de Leptoclines et la nomme : Didemnoïdes macroophorum, n'ayant peut-être pas eu connaissance du travail de M. Giard. Il en rap- proche le D. rubellum, Grübe, dont il a pu étudier les échantillons originaux. La figure du L. perspicuum donnée par Prasche dans sa ago RECHERCHES SUR LES TUNICIERS. 87 planche VII, fig. 30, est d’une exactitude rigoureuse et concorde absolument avec la description primitive donnée par M. Giard. Le cormus présente comme celui des A. perspicuum, G. une certaine translucidité. Il est orangé et tandis qu’en certains points le jaune domine, en d’autres c’est le rose ou plutôt un rouge vineux violacé. Les espaces pellucides sont le plus souvent dépourvus d'animaux. Plongés dans l'alcool le pigment rouge disparaît et les cormus deviennent d’un blanc opaque comme ceux du Diplosomoïdes Lacazti, type auquel se relie du reste, étroitement, le L. perspicuum. 2. L. resinaceum, Drasche. Didemnoïîdes Resinaceum, Dr. Cormus jaune d’or rougeâtre et dépressions cloacales nulles ou faiblement marquées.— L'épaisseur, assez faible pourtant puisqu'elle ne dépasse pas même 7m", au dire de Drasche, avait conduit ce naturaliste à créer pour ce Leptocline un sous genre nouveau. Il est d'autant plus difficile de l’admettre que, dans certains cas, l’épais- seur de D. resinaceum atteint à peine #m®" et n’est alors guère plus considérable que chez quelques ZL. perforatum. J'ai eu à ma disposition deux échantillons du L. resinaceum ; ils proviennent tous deux des fonds coralligènes de Marseille et sont fixés sur des débris de coquilles. Les cormus rappellent par leur aspect le L. gelatinosum. Le même éclat résineux qui se re- trouve chez ces espèces semble dû à la rareté des spicules. Mais, tandis que ceux-ci sont aciculaires chez L. gelatinosum, ils sont len- ticulaires chez L. resinaceum. Ces derniers n’ont pas, toutefois, la même constitution que les spicules lenticulaires du genre Cysto- dyte. Ici, en effet, ils sont toujours, au début, étoilés et flabellés comme chez L. perforatum, tandis que chez les Cystodites ils sont lenticulaires dès le début et s’accroissent par l’adjoncetion de couches concentriques. En outre, Le bord libre des spicules de L. resinaceum présente toujours quelques divisions radiales alors même que les cristaux constitutifs ne sont pas mieux indiqués ; chez les Cystodites 88 FERNAND LAHILLE. au contraire, le bord libre des spicules est toujours uni, et ceux-ci ne présentent pas de trace de divisions radiales. 3. L. perforatum, Giard. Diplosoma pseudo-leptoclinum, Drasche. Cette espèce se reconnaît très facilement à ses spicules flabellés et ce caractère indiqué par M. Giard ne permet pas la moindre hési- tation surtout si on le rapproche de celui qui est fourni par l'aspect extérieur. Les cormus sont d’un blanc le plus souvent jaunâtre, parfois gri- sâtre, sur lequel les ouvertures buccales sont nettement dessinées sous forme de petits points noirs arrondis. Les cormus sont généra- lement assez mous au toucher, ils ont un facies d’éponge. Leur bord est toujours dépourvu d'animaux et les cloaques communs sont fort visibles. Leur surface est d'ordinaire entièrement lisse et on n'y re- marque pas de dépressions cloacales. Quelquefois, mais rarement pourtant, les spicules forment à la surface de petites granulations. Dans ce cas, l’examen des spicules permet de ne pas confondre ce Leptocline avec le L. candidum auquel il ressemble alors beaucoup, comme aspect extérieur bien entendu. Un dernier caractère frap- pant de cette espèce est le suivant. Quand on cherche à détacher les cormus des supports sur lesquels ils se trouvent fixés, on les dé- chire et la tunique commune, se divise en deux portions, comme chez les Diplosoma, une portion supérieure qui s’enlève avec la plus grande facilité et à laquelle sont attachés les animaux qui pen- dent librement dans l'intérieur de cloaques communs très vastes et une portion inférieure qui demeure fixée aux supports à l’aide de ses crampons d'attache. C'est cette paticularité qui a induit probablement Drasche en erreur. Il fait du L. perforatum un Diplosoma (Dipl.pseudo-Leptoclinum) malgré la présence des spicules et sans avoir observé les organes reproduc- teurs qui distinguent si aisément ces deux genres. Il signale en outre onde cat y A re LA « RECHERCHES SUR LES TUNICIERS 89 comme un fait très particulier la présence de deux amas de spicules sur les côtés du corps des individus. « Hôüchst eigenthümlich ist der « umstand, das auf der rechten und linken seite des thorax zwei « kleine scheiben hängen, welche aggregate von den oben beschrie- « benen kalspicula sind.!» Ce fait qui a surpris Drasche, est causé par la persistance des orifices ou tubes branchiaux primitifs et la formation postérieure d’amas de spicules dans ces tubes. Ce sont ces amas atteignant ici trois, quelquefcis quatre dixièmes de millimètre qui produisent l'apparence signalée. Les formes simples de spicules représentées par ce naturaliste sont assez rares et se rencontrent principalement dans les jeunes cormus. Cette espèce est fort répandue. Elle vit généralement dans des eaux peu profondes. À Roscoff on la rencontre principalement dans l'herbier situé entre l’île verte et le Laboratoire. Je l’ai trouvée aussi à Chausey, Granville, Arcachon et Banyuls. M. Giard a signalé également sa présence à Noirmoutiers. La reproduction sexuelle chez cette espèce, commence dès le mois de mai. Les cellules axiales de la queue des larves disparaissent de très bonne heure, bien avant l’éclosion. 4. L. gelatinosum, Giard. De même que le précédent, ce Leptocline ne se rencontre jamais à Roscoff sur les plantes ; je l’ai toujours trouvé fixé sous les rochers ou sur des coquilles. Della Valle l’a signalé à Naples où il est très commun sur les trones de zostères. Drasche, de son côté, l’a re- cueilli fréquemment à Rovigno : «Je me suis moi-même convaincu, dit-il, sur les côtes françaises de l'identité de l'espèce de Giard avec celle de Rovigno. Dans les deux localités les spicules sont presque exclusivement entassés au niveau des viscères, tandis que le reste du cormus est translucide et jaunâtre. » Dans la planche VIII, fig. 43, le cormus représenté diffère de ceux que l’on rencontre ‘ Loc. cit. page 40. 90 FERNAND LAHILLE, dans la Manche, par une plus grande incrustation de spicules dont les amas produisent des taches blanches qui n'existent pas dans les nombreux échantillons que j'ai recueillis soil à Roscoff, soit à Gran- ville. Dans ces localités les cormus sont entièrement translucides et les spicules sont rares. Leur forme est caractéristique, ils sont cons- titués par un amas de nombreuses aiguilles fines rayonnant autour d'un centre. Ils rappellent les cristallisations de la margarine et la figure qu'en donne M.Giard ‘ rend mieux cette impression que la figure donnée par Drasche. ? À propos de la formation du tube digestif chez Perophora, M.Giard prétend que « la portion terminale faisant suite à l'estomac se forme indépendamment de la partie antérieure par une invagina- tion spéciale. » Partant ensuite de cette interprétation fausse, M. Giard a cherché de retrouver quelque chose d’analogue chez la larve de L. gelatinosum et il y représente en g fig. 5, pl. XXII, «une première partie du tube digestif dépendant de la branchie » et en à « une deuxième partie du tube digestif de formation indépendante. » Malheureusement pour la théorie de l’auteur, cette deuxième partie est tout simplement un bourgeon. J'ai pu suivre la formation du tube digestif non seulement chez L. gelatinosum, mais encore chez d'autres larves de Tuniciers et toujours j'ai vu le tube digestif pro- céder d'une formation unique. Je ne puis donc accepter à ce sujet ni l'opinion de M. Giard, ni l'opinion analogue et peu différente de MM. Van Beneden et Julin. Chez L. gelatinosum la blastogénèse est plus précoce que chez les Didemnes et la plupart des autres Leptoclines. Cette rapidité dans le bourgeonnement, ainsi que quelques autres caractères, spicules rares, Constitution vacuolaire de la tunique, etc., rapprochent L. ge- latinosum des Diplosoma, mais la constitution des organes repro- ducteurs et la présence des muscles dans les sinus inter-trématiques les en éloignent. L'étude des organes des sens chez la larve de L. gelatinosum LOC ACILApI NII AE- NE ? Loc. cit. pl. XL fig. 49. RECHERCHES SUR LES TUNICIERS. 91 montre à l’évidence les trois faits suivants : 1° l’intérieur de la vési- cule des sens communique avec la cavité branchiale ; 2 le gan- glion cérébroïde est formé par une prolifération cellulaire de la vési- cule ; 3° la glande neurale, au contraire, est une prolifération cellu- laire, ici peu considérable, de la partie ventrale du tube neural comprise au-dessous du ganglion. Les larves de L. gelatinosum ont, au moment de l’éclosion, une forme très ovalaire (7 dixièmes de millimètres sur # dixièmes) et ne possédant alors que trois rangées de trémas, chaque rangée présentant six fen- tes. Les prolongements ectodermiques, au nombre de huit, se terminent en massue et se trouvent situés de part et d’autre des trois ventouses qui occupent la ligne médiane de la larve. L'anatomie des individus de L. gelatino- ni hi À resinaceum et du Diplosomoides Lacazir. 7. | ‘h sum se rapproche beaucoup de celle du L. | f 1 à || ES À l DUMITEE ÊB : : : à ne Fig. 57 — L. Gelatinosum Giard. leur branchie cylindrique atteint 4 millim. Face ventrale de la region ner- A veuse. Fbd, filet tentaculaire dor- de longueur sur 3/10 de millim. de Jar sali Jr. pavillon vibratile; Gn, glande neurale ; Sn, tube neural. — Gr. 599 Lorsque les animaux sont bien épanouis, geur. L'ouverture cloacale occupe toute la hauteur de la branchie, de telle sorte qu'ici comme chez Diplosomoides Lacazii les cavités péribranchiales sont, chez les adultes, plutôt virtuelles que réelles. Le tube buccal est court, conique et surmonté de six petits lobes. La couronne tentaculaire est formée de seize filets de trois longueurs différentes et disposés toujours d’après le type 4. La fig. 57 représente une portion de cette couronne et montre éga- lement la constitution des centres nerveux chez ce Leptocline. Comme dans le genre Cystodyte, chaque individu se trouve logé dans une petite niche calcaire. En effet, dans le L. gelatinosum les spieules étoilés de la tunique forment aux animaux un revêtement treillissé au niveau des viscères. Les muscles branchiaux sont très puissants, principalement les 92 FERNAND LAHILLE. les muscles dorsaux qui sont externes, par rapport aux muscles des sinus transverses, et qui contribuent à former, avec les muscles ventraux, l’appendice fixateur. L'intestin ne présente rien de bien particulier. La partie inférieure du post estomac est très dilatée, et l'intestin moyen qui lui fait suite est fortement étranglé à son origine. En coupe optique l'entrée de l'intestin moyen n’est que le cinquième de la largeur du post estomac. Chez cette espèce, il n'existe, bien entendu, qu'un seul follicule testiculaire, et le spermiducte décrit autour de lui sept tours de spire seulement. À côté du L. gelatinosum type, dont le cormus translucide est d’un Jaune pâle pouvant devenir grisâtre par l'accroissement du nombre des spicules (voir Drasche, fig. 43, taf. VIII), on peut admettre la variété L. mellinum-gelatinosum Giard pour les cormus plus foncés en couleur et rosés. On rencontre en effet, quelquefois, le L. gelati- nosum type et sa variété juxtaposés et ne présentant pourtant aucune soudure. Je sais bien que ce fait ne constitue pas un caractère bien scientifique, mais je sais aussi qu'on ne doit pas habituellement attacher aux variétés plus d'importance qu’il ne convient. A Roscoff, j'ai rencontré presque partout le L. gelatinosum type ; il est particulièrement abondant à Roléa. Le L. mellinum-gelatinosum est plus rare ; il vit d'ordinaire dans des eaux plus profondes que le précédent, et on le rencontre assez fréquemment à Astan, sur des débris de coquilles ou sur des Gorgones. À Banyuls, je n'ai Jamais recueilli cette espèce. 5. Leptoclinum candidum, Savigny. Eucælium parasiticum, G. Avec le L. candidum, nous abordons l'examen des Leptoclines mal définis. En commençant leur étude, j'avais espéré qu'à des diffé- rences très tranchées de couleur correspondraient des types anato- miques différents : cormus blane : type L. candidum et asperum ; cormus violet, indigo ou bleu : type L. maculatum ; cormus Jaune, RECHERCHES SUR LES TUNICIERS. 93 orangé ou rouge : type L. fulgidum. Je m'étais bien trompé. Non seulement je n’ai pu observer de caractères anatomiques particu- liers correspondant à chacune de ces espèces, mais encore j'ai ren— contré à Roscoff, ailleurs et partout, des cormus que l’on pourrait appeler mixtes, et qui sont en partie violets et en partie orangés, par exemple. La couleur des cormus ne doit donc être invoquée, ici surtout, qu'avec la plus grande prudence, et ce sont les spicules qui per- mettent encore le mieux d'établir une première division. Chez toutes les formes de Leptoclines qu'il nous reste à étudier, les spicules sont étoilés et la plupart correspondent à cette figure polyé- drique à laquelle les géomètres donnent le nom de dodécaèdre régulier de troisième espèce à faces étoilées. Chez quelques formes, le nombre des sommets est beaucoup plus considérable, et chez celle-ci ce grand nombre est alors un fait constant. Le L. candidum peut être choisi comme le type de ces formes. Voici comment je crois devoir le définir : Surface du cor- mus : granuleuse, chagrinée, jamais épineuse. Cormus le plus sou- vent d'un blanc de lait très pur, rarement d'une autre couleur et formant une croûte mince très calcaire. Spicules très nombreux, étoilés à plus de quarante sommets. J'ai pris comme type du L. candidum des échantillons de 2 mil- limètres d'épaisseur, provenant des fonds coralligènes de Mar- seille, et qui se rapportaient exactement à la diagnose de Savigny. Cet auteur indique dans le texte que les colonies sont aussi blanches que le lait, et pourtant celle qu’il dessine est jaunâtre. On trouve, en effet, quelques cormus qui présentent une légère coloration fauve. La forme que M. Giard a décrite sous le nom d’Eucælium parasiticum, ne diffère pas, comme je m'en suis assuré à Roscoff, des L. candi- dum typiques. Quelquefois la surface est unie et les orifices parais- sent sous forme de points sombres. La surface du cormus est parfois alvéolaire, et on pourrait les confondre avec L. perforatum1, d'autant plus que la partie supérieure de la tunique s’enlève 4 Mais, ici, on distingue six lobes buccaux (quatre paraissant plus gros). ; 5 I 5 94 FERNAND LAHILLE. avec assez de facilité en entraînant les branchies. J'en dirai de même du L. marginatum Dr., et à propos de cette espèce je ferai remarquer que les bords des cormus sont chez tous les Leptoclines colorés en teinte plus claire que la partie centrale et qu'ils sont tou- jours dépourvus d'animaux. En d’autres termes, tous les Leptoclines colorés sont marginés, et on ne peut donc créer une espèce d’après ce seul caractère. Le L. marginatum Dr. n’est qu’une variété colorée en jaune ou en brun du £L. candidum. Les spicules de l’Eucælium parasiticum de M. Giard, représentent l’état jeune des spicules des cormus adultes du candidum type. Je n’ai trouvé, à Banyuls, que la variété L. marginatum-candidum. Elle se trouve assez abondamment au cap Creux, dans les fonds coralligènes. Sa couleur est d’un jaune rosé et les cormus ne dépas- sent pas un centimètre carré. A côté du L. candidum Sav., on doit placer également le L. granu- losum Dr., même surface granuleuse, mêmes spicules, seulement sa couleur est d’un brun chocolat avec dépressions cloacales plus sombres. Il peut aussi, au dire de Drasche, présenter de belles teintes violettes. C’est une forme de transition entre L. candidum, L. marginatum et L. maculatum. 6. Leptoclinum fulgidum, Milne-Edwards. Surface du cormus granuleuse, presque lisse. — Couleur jaune orangé ou rouge. — Dépressions cloacales nulles ou peu nettes. — Spicules étoilés, présentant un petit nombre de sommets. _ Milne-Edwards se contente de caractériser le L. fulgidum par sa couleur. « Une quatrième espèce, qui se trouve dans les mêmes localités que les précédentes, est le Leptocline éclatant, que je nomme ainsi à cause de sa belle couleur d’un rouge saturne. Elle ressemble, du reste, beaucoup à l’espèce précédente ». Mais cette espèce elle- même, le L. durum, n’est pas mieux décrite et, en outre, elle res- semble à son tour à toutes les autres, elle ne s’en distingue que par «sa couleur uniforme d’un jaune chamois ». Comme je m'en suis | À | RECHERCHES SUR LES TUNICIERS. 95 assuré très souvent, à Roscoff, ces cormus jaunätres sont produits par une simple modification de couleur liée au développement. Les cormus quine dépassent pas encore trois à quatre centimètres carrés, sont toujours d’un beau rouge saturne, bien plus foncé même que ne l'indique la figure de Milne-Edwards. On pourrait alors les con- fondre avec le Diplosomoides Lacazii mais, chez celui-ci le cormus est épais, velouté au toucher, parfois même visqueux, et sa couleur est plutôt rouge carmin que jaune. Le L. fulgidum est toujours mince, sec au toucher et sa couleur rouge est toujours mélangée de jaune. A mesure que se développent les cormus de L. fulgidum, leur cou- leur rouge s’atténue de plus en plus ‘, et la teinte brune ou jaunâtre s’accentue de plus en plus. J'ai trouvé aux Per-rech-hier des colonies très développées s'étendant sur une surface de cinquante centimètres carrés. L’épaisseur des colonies de L. fulgidum est de un à deux millimètres. La surface est presque toujours lisse à l'œil nu. A la loupe, elle est granuleuse et son aspect rappelle celui d'une peau d'orange. Les dépressions cloacales sont nulles ou très peu marquées. Dans ce cas, il faut même une grande attention pour les distinguer, car leur couleur et leur teinte sont les mêmes que celle des autres parties des cormus. La surface de la colonie est parsemée de petits points blancs, entassements plus ou moins considérables de spicules qui corres- pondent aux orifices buccaux des individus. Lorsque ces orifices sont épanouis, les six lobes buccaux sont très nets et s'élèvent au- dessus de la surface du cormus ; mais, à la moindre alerte, les animaux venant à se contracter les lobes buccaux ne sont plus mis en évidence que par les six amas de spicules correspondants. On distingue alors, autour de chaque orifice, six petits points blancs, de dimensions inégales ; on en observe trois grands et trois petits. Si je m’étends sur tous ces caractères extérieurs, c’est pour mon- trer leur valeur relative et la nécessité absolue de spécifier, dans les diagnoses, l’état de contraction ou d’épanouissement des individus. 1 Voyez Drasche : loc. cit., pl. IL, fig. 11. FERNAND LAHILLE, 96 Presque toujours, les cormus se rencontrent fixés sous les rochers. Cependant, à Astan, on trouve le L. fulgidum fixé sur des lami- naires. L’échantillon que Drasche représente paraït également fixé sur des algues. Les individus sont de très petite taille, et je n’ai observé chez eux aucune particularité assez importante pour mériter d’être signalée. Les larves ont une taille qui égale celle des individus. Leur couleur est également rouge saturne. Les trois ventouses qu’ils présentent sont presque sphériques et sessiles. Du L. fulgidum je rapprocheraï le L. commune Della Valle, sans décider, toutefois, si on doit considérer cette forme comme représen- tant une espèce distincte ou une simple variété de la précédente. Les spicules sont semblables et très abondants, la surface du cormus est également granuleuse ; les dépressions cloacales sont toujours peu nettes. Les colonies sont de couleur uniforme jaune vif un peu orangée, et naturellement elles sont marginées. Les individus sont petits, ils ne dépassent pas un millimètre de long et ressemblent entièrement à ceux du L. fulgidum type. La couleur est donc le seul caractère qui permette de distinguer ces deux formes. Je n’ai rencontré le L. commune qu'à Banyuls seulement ; il est assez commun dans les fonds coralligènes où il se trouve fixé sur des Bryozoaires. Les cormus peuvent présenter de larges ilots blancs, et les amas de spicules, entassés autour des orifices fermés, ressemblent à de petits boutons. 7. L. maculatum, Milne-Edwards. Surface du cormus bosselée ou épineuse. — Couleur générale blanche, grise, mauve, quelquefois jaune. — Dépressions cloacales toujours nettes. — Spicules étoilés présentant un petit nombre de sommels. Cette espèce ne peut pas se définir mieux que la précédente ; à côté du type décrit par Milne-Edwards se renconlrent en effet une foule de variétés. Le L. asperum en est lui-même une, comme Hébhon “si. dé RECHERCHES SUR LES TUNICIERS. 97 cet auteur l'avait pressenti. Voici, en effet, ce qu’ilen dit : « Je désignerai, sous le nom de L. rude (L. asperum), un autre Didemnien qui est très voisin de l’espèce précédente (L. maculatum), et qui peut- être même v’en est qu’une variété, mais qui en diffère par l’existence d’un gros tubercule conique situé auprès de chacun des orifices buc- caux, dont la surface de la masse commune est parsemée; cette masse présente du reste la même conformation que le Leptocline tacheté ; il est seulement à noter que sa couleur est en général blanchâtre. On trouve le L. rude dans les mêmes localités que l’es- pèce précédente. » (Obs. sur les Ascidies comp., p. 298). L’anatomie vient pleinement confirmer les vues de Milne-Edwards, et quoique Drasche, réunissant dans une même série L. asperum, L. maculatum et d’autres formes encore qui ne diffèrent entre elles que par l'aspect extérieur, leur accorde la valeur d’espèces ; l'opinion de Milne-Edwards me paraît bien plus légitime, et tant que je n’aurai pas trouvé quelques différences anatomiques pour distinguer ces formes, je préfèrerai ne les considérer que comme des variétés d'un même type, et les caractériser ainsi : blancs ou gris.. . . . . . . . L maculatum (type) M.-Edw. : bosselée. . . L. coriaceum -maculatum. non épineux. Jaunes. — Surface Corne non bosselée. L. exaratum-maculatum. va blancs ou gris... . . . . . . L. asperum-maculatum. epineux, c : P jaunes et charnus. . . . . . . L. tridentatum-maculatum. L. maculatum type, Milne-Edwards. Croûte très coriace assez mince (épaisseur moyenne, 2m), — Surface lisse, sans dents. — Dépressions cloacales, très nettes, colorées en violet foncé ou mauve. — Ilots d’un blanc pur ou lavés de violet. On en compte six à sept sur une longueur d’un centimètre. — Les cormus sont toujours marginés. Les individus sont disposés de chaque côté des dépressions cloa- cales. Les ouvertures buccales, presque imperceptibles lors de leur contraction, sont indiquées par de petits points blancs régulièrement espacés, au nombre de seize à vingt autour de chaque îlot de subs- 7 98 FERNAND LAHILLE. tance tunicière. Ceux-ci ont souvent un contour sinueux, et chaque petit enfoncement est occupé par un individu. Tous les individus correspondant à un même îlot, ont leur sillon ventral tourné vers le centre même de l’îlot. A côté du L. maculatum type, on peut rencontrer deux sous- variétés de couleur, qui sont surtout communes à Banyuls. Les dépressions cloacales peuvent être en effet d’un noir bleuâtre, et les ilôts sont alors gris ; ou bien les dépressions sont colorées en brun et les îlots sont d’un blanc pur. L. maculatum type est une espèce des plus communes. L. coriaceum-maculatum, Drasche. Milne-Edwards avait remarqué que quelquefois la surface du cormus est bosselée. Les dépressions cloacales forment alors des systèmes très irréguliers. L’épaisseur du cormus est devenue en même temps plus considérable et peut atteindre trois, quatre et einq millimètres. Le cormus n’est plus coloré en violet seulement, mais encore en jaune brun. La figure 39, pl. 8, de Drasche, reproduit très exactement l'aspect d’un de ces cormus, nommés par Drasche : L. coriaceum, à cause de l’abondance des spicules étoilés que renferme la tunique. En réalité, le nombre de spicules n’est pas plus considérable que chez L. maculatum type. Seulement, l'épaisseur du cormus étant parfois bien plus grande, la tunique paraît plus calcaire. A Roscoff, on rencontre principalement cette variété sous les rochers des Per- rech-hier. Il existe même des cormus d’un jaune foncé, ne présentant aucune tache violette, mais ces derniers sont bien plus rares. Localités : Roscoff (Per-rech-hier, Guerhéon), Arcachon. L. exaratum-maculatum, Grübe. A Perroch, on trouve un Leptocline semblable, comme aspect général, au L. maculatum type, et n’en différant que par la couleur jaune brillant des ilots qui ressortent d'autant mieux qu'ils se trou- vent bordés par des dépressions violettes régulières. Il n'existe pas SES SSII RECHERCHES SUR LES TUNICIERS. 99 de véritables dents au-dessus des orifices buccaux, mais on distingue pourtant à côté de chacun d’eux une légère élévation. Quelquefois, les dépressions, au lieu d’être violettes, sont brunes, ou encore de la couleur des îlots. C’est pour ces dernières variétés que Grübe avait créé le L. exaratum. Les cormus ont 1mm 5 à 2mm d'épaisseur. Lorsque leur couleur est d’un jaune uniforme, on pour- rait confondre ces colonies avec celles du L. commune ou du L. coriaceum. Mais les dépressions cloacales si nettes et si régulières qu’elles présentent les éloignent du premier, tandis que d’autre part, leur surface presque lisse et leurs petites dents émoussées, ne per- mettent pas de les confondre avec les cormus de L. coriaceum. Je dois à l’obligeance de mon ami Roule d’avoir pu étudier deux colonies de Leptoclines provenant de Marseille, et dont les caractères extérieurs concordaient exactement avec ceux que crübe lui-même donne de son L. exaratum. L’anatomie des individus était identique à celle des Ascidiozoïdes du L. maculatum type. Le L. exaratum se rencontre aussi à Roscoff (Perroch). — Rare. L. asperum-maculatum, Milne-Edwards. Cormus d’un blanc pur. Très calcaire. 4 2" 5 à 2mm d'épaisseur moyenne. — Dépressions cloacales nettes, de la couleur du cormus. — 5 à 8 individus autour de chaque îlot. — Petite dent conique élevée à côté de chaque orifice buccal, et généralement recourbée et proéminente au-dessus de l’orifice. — Cormus toujours marginés. Les dents qui hérissent le cormus, se développent principalement dans les parties qui se trouvent à l’abri des frottements. Le L. asperum type présente trois sous-variétés : 1° il peut rester d’un blanc pur, et les dents peuvent prendre un développement considérable. Elles forment alors comme une sorte de crête dentelée, surplombant les orifices buccaux et les dépressions cloacales. Deux ou plusieurs dents voisines pouvant s’accroître inégalement, la crête peut prendre un aspect ramifié. Les cormus blancs, à crête dentelée, ont reçu de Della Valle le nom de L. dentatum ; j'en ai observé dont 100 FERNAND LAHILLE. l'épaisseur atteignait 3 à 4"; 2e la couleur générale peut être jau- nâtre: L. aurantium Giard ou 3° elle peut être d’un gris un peu mauve : L. griseum Lahille. Le L. asperum et ses sous-variétés sont partout abondants. L. tridentatum-maculatum, Drasche. Je viens de dire comment le L. asperum produisait le L. dentatum par un développement plus considérable des dents qui, parfois, paraissent même ramifiées. Lorsqu’elles sont régulièrement trifurquées, et qu’en même temps les dépressions cloacales sont d’un jaune verdâtre avec irradiation de couleur sur les îlots blancs, et qu’enfin les cormus sont assez épais (4 à 7), Drasche leur donne le nom de L. tridentatum. Leur épaisseur les rapproche du L. resinaceum, et leur aspect, un peu velouté, est produit, comme chez D. Lacazt, par de nom- breuses petites élévations papillaires et non calcifiées de la surface. Le L. tridentatum vit à Roscoff, sur le banc d’Astan, et se trouve fixé sur des Gorgones. Cette espèce est assez rare. Pour résumer cette rapide étude des Leptoclines de nos côtes, j'ai essayé d'exprimer, dans le tableau suivant, les principales affinités morphologiques des diverses espèces et variétés de ces animaux : L. perspicuum, Gd. à tridentatum, Dr. L. L. dentatum, D.Valle. L. asperum, M. Edw. L. L. coriaceum, Dr. griseum, Lah. L. maculatum, M. Edw. L.aurantium, Gd. L. resinaceum, Dr. L. commune, D. Valle.— L. exaratum, Gr. 1B à pa M. Edw. | L. candidum, Saw. L. fulgidum, M. Edw. L. marginatum, Dr. — ? L. perforatum, Gd. — L.granulosum, Dr. L. mellinum, Gd. L. gelatinosum, Gd. OR RECHERCHES SUR LES TUNICIERS. 101 &e Genre : Diplosoma, — Mac-Donarn, 1858. - Caractères communs à d’autres genres. — Cormus sessile, gélati- neux. — Lorsque les larves se fixent sur une surface large et unie, le cormus recouvre parfois plusieurs décimètres carrés. — 6 lobes buccaux. — Orifice cloacal est un simple trou. — # rangées de trémas branchiaux. — Absence de muscles dans les sinus inter- trématiques. — Appendice fixateur très développé. — Absence de spicules. — Larves gemmipares. Caractère propre. — 2 follicules testiculaires à spermiducte droit. Caractères pratiques. — A l’époque de la maturité sexuelle : Ab- sence de spicules jointe à la présence de larves gemmipares. — En dehors de l’époque de la maturité sexuelle : Absence de spicules jointe à la présence de # rangées de trémas et d’un appendice fixa- teur. Ce genre fut établi en 1858 par Mac-Donald, pour un Tunicier qu’il nomma Diplosoma Rayneri, et dont les caractères distinctifs étaient les suivants : cormus mince et gélatineux constitué par une aggrégation d'individus soudés deux à deux. Leurs œufs, très volu- mineux, produisaient des larves présentant, comme l'adulte, un double corps. De plus, on remarquait chez quelques individus « un petit appendice semblable à un éperon ou à une queue, quelquefois visible distinctement et situé juste au-dessous des chambres bran- chiales » (Trans. Linn., XII, p. 373). Giard retrouva chez quelques Tuniciers de Roscoff les caractères du Diplosoma de Mac-Donald ; mais ses observations à ce sujet fu- rent imparfaites, et il commit plusieurs erreurs qu’il importe de rele- ver. C’est ainsi que ce zoologiste signale la présence d’un réticulum vasculaire unissant les animalcules et n’étant pas englobé dans la ta- nique, comme chez les autres Synascidies ; il annonce, en outre, que les espèces de Roscoff présentent la blastogénèse stoloniale, ne possè- dent pas quelquefois de lobes buccaux, jamais d’appendice endosty- laire. Le réticulum vasculaire et stolonial de M. Giard est formé 102 FERNAND LAHILLE. précisément par ces appendices recouverts d’une couche de subs- tance tunicière et nous avons vu qu'ils existent aussi bien chez les Didemnes et Leptoclines que chez les Diplosomes. Ce sont de simples appareils de fixation qui n’établissent aucune communication entre les divers individus du cormus'; ceux-ci forment donc une aggré- gation, comme l’a soutenu Mac-Donald, et non une colonie, comme le pensait M. Giard. La blastogénèse directe œsophagienne (bourgeonnement pylorique de Giard) existe seule chez les Diplosomes comme chez les Didemnes et les Leptoclines, car ces animaux ne possèdent pas de stolons comparables à ceux des Clavelines, par exemple, et leurs prolon- gements ectodermiques ont été nommés bien à tort par Milne- Edwards tubes gemmifères. L'orifice branchial des Diplosoma n’est jamais simple. Chez quel- ques types, il est vrai, les lobes buccaux paraissent absents, maison les aperçoit fort nettemment lorsqu'on a extrait les animaux des cormus. Les larves des Diplosoma ne m'ont jamais présenté, au moment de l’éclosion, que deux individus : l’oozoïde et le premier blastozoïde. Par suite, le premier genre et la première espèce de M. Giard, le Pseudodidemnum cristallinum se confond avec le Diplosoma Ray- neri, qui n’en restait distinct que par le caractère, tiré du nombre d'individus renfermés dans la larve. Le second genre Astellium, Giard, fondé sur l’absence supposée des lobes buccaux, doit être réunie également au genre Diplosoma. Drasche a supprimé lui aussi les deux genres Pseudodidemnum et Astellium, en invoquant d’autres motifs : « Ce que Giard regarde comme le prolongement endostylaire de la Sigillina est tellement inintelligible et obscur, qu’on ne doit lui attribuer absolument au- cune valeur, et, par conséquent, le genre Pseudodidemnum (G.) doit disparaître comme reposant sur une manière de voir erronée. Le genre Astellium (G.) ne saurait non plus être maintenu, car nous possédons chez les Diplosomiens des transitions par trop nom- 1 Lahille, sur Le système vasculaire colonial des Tuniciers. 24 janv. 1887. nm: oi 4e morte mie uit Été ou ne dé de NS LS Sd net RECHERCHES SUR LES TUNICIERS. 103 breuses de bouches à dents émoussées, jusqu'aux bouches privées de dents. » Cette privation, comme je l’ai déjà fait remarquer, n’est ja- mais, du reste, qu’apparente ; et en supposant même qu'elle fût quelquefois réelle,‘ il est certain qu’elle ne serait suffisante pour mo- tiver à elle seule la création d’un genre. Une question se pose main- tenant. Le genre Diplosoma présente-t-il des caractères suffisants pour en faire le type d’une famille spéciale, la famille des Diploso- midæ ? Pour y répondre, il suffit d'examiner les diagnoses qu’en ont donné, soit Drasche, soit Herdman. Voici la première : Cormus formé de deux membranes parallèles : une inférieure, l’autre supérieure contre laquelle sont attachés les individus. Les deux membranes, ainsi que les individus, sont réunis par un tissu lâche de prolongements de la tunique. Systèmes constamment irré- guliers. Cloaques communs coniques, élevés, membraneux, délicats, à ouverture arrondie. Très rarement, spicules calcaires. Orifice buccal à six dents très délicates ; la plupart d’entre elles, émoussées, sont quelquefois totalement absentes. Branchie longue, très délicate, pré- sentant quatre rangées de trémas. [Intestin horizontal, souvent laté- ral, recouvrant la branchie. Estomac ellipsoïdal. Orifice cloacal à peine visible à l'extérieur. Deux gros testicules à droite de l'intestin aboutissent à un long spermiducte placé le long du rectum. Ovaire inférieur à l'intestin. Point d’oviducte. Blastogénèse intestinale et embryonnaire complète. Prolongements ectodermiques pourvus de muscles. Herdman (1886), de son côté, définit ainsi les Diplosomide : Colonie mince, incrustante, rarement épaisse, jamais pédonculée. Systèmes irréguliers, ordinairement invisibles. Cloaques com- muns, ordinairement visibles. Individus divisés en deux ré- gions : thorax et abdomen. Test mince et gélatineux, ordinaire- ment transparent, contenant rarement des spicules calcaires. Appendice ectodermique vasculaire muni de muscles. Branchie grande, à quatre rangées de trémas. Côte dorsale représentée par des languettes. Intestin au-dessous de la branchie. Estomac à parois lisses. Organes reproducteurs au-dessous ou à droite de l'intestin. 104 FERNAND LAHILLE. Testicule formant plus d’une vésicule. Canal déférent, non spiralé. Gemmation pylorique. Larves gemmipares. Si on recherche dans ces deux longues diagnoses les caractères constants et vraiment propres aux Diplosomidæ, on ne rencontre que l'existence de larves gemmipares et de testicules doubles à canal déférent droit. Or, d'une part, j’ai rencontré des colonies qui ne pouvaient être séparées des Leptoclines et qui, pourtant, présentaient des larves gemmipares identiques à celles des Diplosomes. D’autre part, il arrive quelquefois que le follicule testiculaire du Diplosoma, toujours unique au début du développement, ne se débouble pas. Par suite, comme les Leptoclinum, les Diplosoma, dans ce cas, ne présentent qu’un seul follicule. Le canal déférent reste, il est vrai, toujours droit, mais nous verrons que ce canal peut être à peine spiralé chez Dipl. Lacazii, Giard. Il résulte de tout ceci que la famille des Diplosomidæ ne possé- dant pas un seul caractère anatomique propre et important, doit être réunie à la famille des Didemnidæ, dont elle présente, du reste, tous les caractères généraux. Le genre Lissoclinum (Verril, 1871), très voisin des Diplosomes, en différerait par l'absence de cloaques communs. Je crois qu'une étude plus approfondie de ce genre américain est nécessaire pour être fixé sur son existence, sa valeur et sur sa véritable position. Je n’ai rencontré que deux types de Diplosoma, que je considèrerai provisoirement comme deux espèces. Rien n'est plus facile que de les distinguer pratiquement. Individus très visibles à travers la tunique. . . Diplosoma Listeri, Lister. Individus invisibles à travers la tunique. . . . . Diplosoma spongiforme, Giard. I. — Diplosoma Listeri, Lister, 1834. Caractères spécifiques : Cormus toujours mince et translucide. — Les lobes buccaux, les trémas branchiaux et les viscères sont parfai- tement visibles, sans préparation aucune. Les cônes cloacaux, très | É É RECHERCHES SUR LES TUNICIERS. 105 transparents, élevés, délicats, ne peuvent se bien observer que sur les échantillons très frais. Leur bord arrondi présente quelquefois un petit liseré jaunâtre. Historique. — En 1834, Lister fit connaître, sous le nom de Po- lyclinum, une Ascidie fort intéressante. La description de l'auteur anglais est particulièrement exacte en ce qui concerne la branchie et les phénomènes de déglutition, qu'il fut le premier à observer. Voici les principaux caractères qu'il attribue à ce Tunicier : Croûte mince, gluante. Individus disposés sans aucun ordre. Bran- chie à quatre rangées de fentes. Orifice buccal à six lobes. Anus situé près de la base de la branchie. Cloaques communs, de dimen- sions considérables en comparaison des orifices buccaux, entourés les uns et les autres de taches blanchâtres. La minceur et la trans- parence du manteau sont telles qu’elles permettent de voir distincte- ment la circulation du sang dans la branchie et le cœur des indivi- dus. On n'aperçoit dans le manteau lui-même aucune circulation. « Je n’ai pas vu non plus de système nerveux et je n'ai pas eu l’idée de le rechercher, n'étant pas préparé à cette observation par la lec- ture des travaux d'autrui. « Entre chaque rangée de fentes branchiales se trouve une mince lame proéminant dans l’intérieur de la branchie et présentant, à sa partie antérieure, une languette mobile et pointue, tantôt horizontale, tantôt repliée vers le bas et contournée en spirale. Ces languettes semblent soutenir une membrane verticale invisible et diriger la nourriture vers l'estomac. En effet, comme dans le Perophora, les aliments se meuvent horizontalement le long des côtes et se dirigent ensuite vers le bas, après avoir atteint la partie antérienre de la branchie. Celle-ci se contracte de temps en temps avec force pour rejeter les objets arrêtés par les tentacules ou trouvés impropres pour la nourriture. L’orifice buccal, au lieu de se projeter alors en avant, est tiré sous le manteau qu'il déprime. Les cils des fentes respiratoires restent alors immobiles et, par leur grand nombre, donnent l'apparence d’une membrane continue. » Lister renonça à l'étude difficile de la masse intestinale et se con- 106 FERNAND LAHILLE. tenta de dire que, du côté opposé au cœur, se trouvait un amas de viscères mal définis. à La blastogénèse de cette espèce passa ainsi inaperçue. La prépa- ration de Lister pour l'étude de ce Tunicier était, comme il l'avoue, insuffisante, et le seul fait d'avoir rangé l'Ascidie de Brighton dans le genre Polyclinum le démontre amplement. Toutefois, ce que Lister a décrit est un modèle de netteté et d’exac- titude ; aussi est-il bien juste de donner son nom à cette Ascidie, qui appartient au genre Diplosome. L'observation de cette espèce, qui se rencontre dans les localités les plus diverses, est relativement plus facile que celle des autres Diplosoma ; aussi je l’ai choisie comme type pour l'étude de ce genre. Della Valle a fait, au sujet de cet animal, une intéressante remar- que. « Les cormus de D. Listerianum se développent spontanément sur les parois des bacs de l’aquarium de la station zoologique de Naples, et, dans ce cas, les colonies sont entièrement transparentes et dépourvues de pigment. En revanche, les cormus qui vivent dans la mer présentent toutes les gradations de la transparence parfaite à l'opacité complète, et de la couleur blanchätre au jaune taché de noir et au noir absolu. » Diagnose des variétés et synonymie. — Quand on examine, comme je l'ai fait, de nombreux Diplosoma Listeri provenant de di- verses stations d’une même localité ou de localités les plus diverses, on ne tarde pas à voir qu’on peut les rapporter à quatre formes ; dis- tinctes par des caractères tirés du mode de pigmentation de l’ecto- derme et de la tunique. En voici le tableau : ‘ absent de la tunique et de lectoderme. . . . . . D. gelatinosum, M -Edw. seulement. . . . . D. Listeri, Lister. la tunique ; : | 5 et l’ectod. viscéral. D. Kœæhlerianum, Labhille. Pigment : présent dans € ue > Smeg oeil ï | l’ectoderme, à l'extrémité anté- rieure du sillon ventral. . . . D punctatum, Forbes. Je considère ces formes comme autant de variétés dont il est né- cessaire de préciser tout d'abord la synonymie, | , ÿ $ ; RECHERCHES SUR LES TUNICIERS. 107 A. — Diplosoma gelatinosum-Listeri, Milne-Edwards. Syn. : Didemnum gelatinosum, Edw.; Leptoclinum gelatinosum, Edw., non Giard ; Didemnum gelatinosum, Gegenbaur. — En par- tie : Diplosoma cristallinum, Drasche. Le cormus étudié par Milne-Edwards ayant été obtenu par la drague, il n’est pas étonnant que les eloaques communs, si délicats et si transparents de cette espèce, n'aient pas été aperçus et que l'auteur ait cru pouvoir distinguer, d’après ce caractèré, son Did. gelatinosum de son L. gelatinosum. La description d'Edwards se rapporte entièrement à un Diplo- soma ; mais la contraction inévitable des animaux a été cause de deux erreurs. Les muscles dorsaux, beaucoup plus puissants que les muscles ventraux, ont rapproché l’anus de l’orifice buccal, et, en outre, le nombre de rangées de trémas, difficiles à compter sur des animaux contractés, n’a pu être indiqué avec exactitude. Milne- Edwards, dans son mémoire, signale l'existence de ciuq rangées ; mais, ce qui est étrange, c’est qu'aucun des dix-huit individus qu'il représente ne les montre: ils possèdent tous les quatre rangées normales. Le Didemnum gelatinosum d'Edwards ne diffère du Diplosoma Lis- teri que par l'absence d’amas de pigment dans la tunique qui reste entièrement transparente. Milne-Edwards, pas plus que Lister, n’observa la blastogénèse œsophagienne reconnue et étudiée plus tard chez cette espèce par Gegenbaur. Le rapprochement fait par ce dernier auteur de l’Aseidie d'Helgoland avec l’Ascidie des îles Marcnuff est, en effet, très exacte. Les principaux caractères énumérés par Gegenbaur sont les suivants : « Ces Ascidies vivent en colonies de 10-50 individus, bien visibles à travers une tunique mince, gélatineuse et entièrement transparente. Les individus apparaissent, dans la colonie, comme autant de points jaunâtres. Règle générale, on compte quatre rangées de fentes res- 108 FERNAND LAHILLE. piratoires. » Ces caractères, comme on le voit, s’appliquent parfaite- ment au Diplosoma gelatinosum. C’est par erreur que la figure 5 de Gegenbaur représente huit lobes buccaux, le texte et la figure suivante en font foi. Quant à la présence, chez quelques Blastozoïdes, de trois ou cinq rangées de trémas, nous l'expliquerons dans un moment. Localités. — J'ai rencontré cette variété à Roscoff, dans les mêmes localités que la suivante. Elle est moins abondante sur les sar- gasses que sur les frondes de laminaires (Ruisseaux à l’ouest de l’île Verte). : B. -— Diplosoma Listeri (type), Lister. Syn.: Polyclinum, Lister; Leptoclimum Listerianum, M. Edw. ; Leptoclinum Listerianum, Forb.; Diplosoma Rayneri, Mac-Don. ; Pseudodidemnum cristallinum, Gd.; Pseudodidemnum Zosterarum, Jourdain. Lister n'indique pas formellement l'absence de pigment dans les cellules ectodermiques de l’Ascidie qu'il décrit. Mais puisqu'il a pu voir nettement la circulation du sang dans la branchie et dans le cœur, cette absence était indispensable, et son dessin, du reste, ne laisse subsister aucun doute à cet égard. C’est pourquoi je consi- dère les cormus, dont les animaux sont dépourvus de pigment ecto- dermique, comme représentant la forme typique du Diplosoma Lis- teri. Le cormus décrit par Lister étant mince, pourvu de cloaques communs, et le corps des individus formant deux masses, Milne- Edwards le rangea dans son genre Leptoclinum sous le nom de L. Listerianum. L'Ascidie mentionnée, dit-il, par M. Lister comme étant un Polycline, appartient évidemment à mon genre Leptocline. Il ressemble beaucoup à l'espèce précédente (Milne-Edwards parle du L. gelatinosum), mais s’en distingue par l'existence d’un cercle de taches autour de l'orifice buccal, disposition qui n'existe pas chez le Leptocline gélatineux. un ne tn Et Me dd. at Si RECHERCHES SUR LES TUNICIERS. 109 De ceci nous devons à conclure l’identité du Leptoclinum gelatino- sum, Edw., et du Diplosoma gelatinosum-Listeri, tel que nous l'avons défini. Le Pseudodidemnum cristallinum, G., doit également (comme M. Giard l’a, du reste, reconnu lui-même en 1873) être identifié à cette forme, ainsi que le Ziplosoma Rayneri. Cette dernière espèce ne différerait du Pseudodidemum cristalli- num que par la présence, dans la larve, de deux individus au lieu de trois. Or, toutes les larves du Ps. cristallinum que j'ai recueillies à Roscoff ne m'ont jamais présenté, au moment de l’éclosion, que deux individus, et, par suite, les espèces de Mac-Donald et de Giard doivent être réunies. M. Jourdain a eu l'extrême obligeance de m'envoyer plusieurs croquis d’une espèce de Saint-Vaast-de-la-Hougue, qu'il a nommé Pseudodidemnum (Diplosoma) Zosterarum. J'ai constaté qu’elle ne différait en rien du Diplosoma Listeri (type), et on doit done l'y rattacher. Localités. — Le Diplosoma Listeri (type) est commun à Roscoff, sur les sargasses, principalement aux Per-rech-hier et dans l’her- bier situé en avant de la pointe ouest de Perharidi. Je l’ai retrouvé également à Chausey. M. Jourdain l’a signalé, comme nous venons de le voir, à Saint- Vaast, et je rappellerai aussi qu'Herdman l'indique dans son tableau des espèces de l’île de Man (Port-Erin et Port-Saint- Mary). C. — Diplosoma Kæhlerianum-Listeri, Lah. Syn. : Pseudodidemnum cristallinum, G. (variété automnale). — Diplosoma Kœhleri, Lah ; En partie : Diplosoma cristallinum, Dr. Dans cette variété, les cellules ectodermiques sont pigmentées, mais elles ne le sont qu'au niveau des viscères. Comme chez Diplo- soma Listeri (type), on peut rencontrer quelquefois, autour des ori- fices buccaux et cloacaux, de gros amas de cellules pigmentées 110 FERNAND LAHILLE. situées dans la tunique commune. C’est cette variété que j'avais d’abord décrite comme une espèce nouvelle!. Localités. — Le Diplosoma Kæhlerianum-Listeri est fort commun à Guernesey. À Roscoff, je l’ai rencontré sur les récifs de Guerhéon. Il existe également à Arcachon. D. — Diplosoma punctatum-Listeri, Forbes. Syn. : Leptoclinum punctatum, Forbes, 1850 ; non Astellium petri- cola, Giard, 4873 ; Pseudodidemnum Listerianum, Della Valle ; non Diplosoma chamaæleon, Dr. Forbes définit ainsi son espèce : « Croûte mince, luisante, trans- lucide, couvrant les pierres aux basses eaux.Les animaux sont petits et distribués par paires. Chaque individu est marqué par une tache noire bien visible. Habitat : île de Man (Forbes), Cullercoats (Alder). J'ai rencontré à Granville, sous les rochers situés à l’ouest du phare, des cormus répondant exactement à cette diagnose. Le point noir présenté par chaque animal est très net. Il est produit par la pigmentation des cellules ectodermiques situées au niveau de la partie antérieure du sillon ventral. Les cellules de l’ectoderme peuvent être également pigmentées ou non au niveau de l'intestin, mais, dans tous les cas, la tache noire antérieure existe et impressionne immé- diatement la vue par sa grande netteté. J'ai pu étudier des échantillons du Pseudodidemnum Listerianum, Della Valle, provenant de Naples, et je me suis convaincu de l'iden- tité de cette espèce avec le Diplosoma punctatum-Listeri. Les cormus sont minces, très transparents, les individus sont très visibles et chacun présente sa petite tache noire. Giard rapproche, avec doute il est vrai, Astellium petricola de l’es- pèce de Forbes ; mais ce sont des types bien distincts qui ne peuvent être confondus. Le premier se rapporte au Diplosoma spongiforme, le second au Diplosoma Listeri. { Comptes-rendus de l'Institut. 22 fév. 1886. bn AE dé à à 4 er midi ss à Pie ré m D / 2 + "LUS Dé A À, ns ns. latin < Rs RECHERCHES SUR LES TUNICIERS. 111 Je dois en dire autant du Diplosoma chamæleon de Drasche, iden- tifié par cet auteur avec le Pseudodidemnum Listerianum, Della Valle. L'espèce de Drasche, par l'épaisseur de sa tunique, par sa pigmen- tation diffuse, ses orifices buccaux arrondis, l’opacité de son ecto- derme, qui ne permet pas d’apercevoir lestrémas, etc., appartient au second type de Diplosoma, le D. spongiforme. Localités. — Ile de Man (Forbes. — Herdman), Granville, Naples. — J'ai recueilli à Banyuls un cormus appartenant à cette variété. Il se trouvait fixé sur la tunique d’une Phallusia mamillata provenant des environs immédiats de Cerhère. Anatomie de Diplosoma Listeri (type). Les colonies de D. Listeri (type) sont toujours fixées sur des sar- gasses ou des laminaires, une ou deux fois j'en ai rencontré, sur des zostères, mais en tous cas jamais sous des rochers. A la grève les cormus échappent parfois à l'observation à cause de leur parfaite transparence. Leur épaisseur peut atteindre # à 5". Leur diamètre moyen est de 40 à 50" sur les sargasses. Sur les laminaires, les cormus peuvent s'étendre sur un à deux décimètres carrés. Ils ne vivent pas longtemps en captivité et du jour au lendemain ils de- viennent visqueux et diffluents. Les cellules tunicières ne prolifèrent que fort peu; les prolonge- ments ectodermiques sont rares (l’oozoïde n’en présente que trois et les blastozoïdes m'en ont paru souvent dépourvus). Il en résulte que la tunique comm'ime est peu développée et, par suite, que les cavités cloacales sont très vastes. On peut donc considérer le cormus comme formé de deux mem- branes limitant une grande cavité communiquant avec l'extérieur par le ou les cloaques communs. La membrane inférieure fixe la colonie au support à l’aide d’expansions en forme de crampons. Ces crampons sont formés par des cellules tunicières devenues fibrillaires (fig. 58). A la membrane supérieure sont suspendus les Ascidiozoïdes dont 112 FERNAND LAHILLE. la partie inférieure du corps, recouvert d’une mince couche de substance tunicière, flotte pour ainsi dire dans la grande cavité cloacale commune où débouchentles cloaques individuels. Les individus sont disposés sans aucun ordre, et la colonie s'accroît aussi bien à l’aide d'oozoïdes non expulsés au dehors qu’à l’aide de blastozoïdes. Les uns et les autres paraissent suspendus, comme nous l’avons dit, à la membrane supérieure, mais ils se relient à la mem- brane inférieure par un prolongement ectodermique, renfermant des fibres musculaires, qui leur permettent de se fixer, de se rétracter et de diminuer en même temps la cavité cloacale. Tunique. — La tunique est mince, gélatineuse et transparente. Elle est presque exclusivement formée de cel- lules vacuolaires entre lesquelles on aperçoit quelques cellules à prolonge- ment amæboïdes. Autour de quelques-uns des orifices buccaux, mais non de tous, sont dis- Fic. 60 posés des amas de cellules pigmen- Fig. 58. — D. Listeri. Coupe d’un taires. cormus. C{, crampons d'attache situés sous la membrane inférieure ; a N as Ga attéleloncale epmnanc: Ces amas ressemblent à des vésicules Fig. 59. — D. Listeri. Un des amas formées de cellules polygonales i se cellulaires qui entourent les orifices Poye USE buccaux. — Gr. 100 Fig. 60.— D. Listeri. Extrémités des prolongements ectodermiques chez { centième de milimètre et le diamètre les blastozoïdes. — Gr. À seraient dissociées. Ces cellules ont des amas qu’elles constituent varie de 5 à 7 centièmes de millimètre (fig. 59). Des cellules pigmentaires isolées se rencontrent, en outre, ça et là dans la tunique, mais elles sont rares. Les prolongements ectodermiques qu'on ne rencontre jamais dans la membrane supérieure des cormus, sont courts et se terminent par des renflements de formes diverses. La fig. 60 en montre les types principaux. Les cellules de l'extrémité des prolongements É M 4 F É À 1 L ; | 1 à L f F A € : 2 RECHERCHES SUR LES TUNICIERS. 113 constituent un épithélium cylindrique passant sans transition à l’épithélium pavimenteux des prolongements eux-mêmes. Chez les Ascidies « dont l’organisation est relativement peu com- plexe, ces prolongements donnent naissance à de nouveaux individus et déterminent ainsi la formation d’une colonie ». Cette idée em- pruntée à Milne-Edwards par M. Roule‘ et reproduite par d’autres naturalistes est une erreur. Les prolongements des Ascidies inférieures ne sont pas des or- ganes de reproduction asexuée, mais bien les homologues des vais- seaux de la tunique des Ascidies supérieures, ni les uns ni les autres n’ont jamais pu bourgeonner, car aucun d’eux ne renferme une por- tion du feuillet endodermique. Leur cavité est une simple dépendance de la cavité générale. Puisque ces prolongements ne possèdent pas la fonction blastogé- nétique qu’on leur attribuait et puisqu'on ne peut même les consi- dérer comme des organes rudimentaires ayant servi au début à cette fonction, on doit se demander quel est leur rôle. Herd- man les considère comme représentant un nouvel organe respira- toire, etil se base sur leur disposition dans l’épaisseur de la tunique et sur leur développement inverse à celui de la branchie. Quand une branchie est petite, dit-il, les prolongements ectodermiques sont nombreux ; quand elle est grande, ils sont plus rares. Je ne puis accepter cette interprétation. Il est bien certain que le sang peut s’oxygéner dans ces organes dont les renflements sont le plus souvent situés immédiatement au- dessous de la surface externe de la tunique. Mais ils ne remplissent là qu’un rôle accidentel, et pour si peu développée que soit la bran- chie, il est incontestable que l’hématose s’y fera bien plus aisément qu’à travers des couches plus ou moins épaisses de substance tuni- cière. Je crois que la fonction essentielle des prolongements ecto- dermiques est l’aceroissement de la tunique. Sur des cormus vivants, principalement chez les Botryllide, il est 1 Recherches sur les Ascidies simples des côtes de Procence, L. Roule, Marseille, 1884, p. 39. 114 FERNAND LAHILLE. facile de voir la multiplication et la migration de cellules ectodermi- ques qui se détachent des extrémités de ces prolongements pour se transformer ensuite en cellules tunicières. Ces prolongements seront donc situés surtout aux points où doit se produire plus facilement l'accroissement de la tunique, c’est-à- Fig. 61.— Larve de P. Renieri, montrant ses huit prolongements ectodermiques à extrémités dilatées. Fig. 62. — Larve de D. Lasteri. Didemnien à tunique très-mince. 3 prolongements ectodermiques. Fig. 63. — Larve de D. Cereum. Didemnien à tunique épaisse. 8 prolongements ectodermiques. Fig. 64. — Larve de D. Lacazii. Didemnien à tunique très-épaisse. Prolongements ectodermiques très nombreux. dire, près de la surface ; et il n’est plus alors nécessaire d’invoquer, pour expliquer leur position, le besoin d’une respiration plus active. Je crois qu'Herdman a également tort lorsqu'il prétend, d’une manière absolue, que le nombre des prolongements et la complica- tion de la branchie sont dans des rapports inverses. Pour s’en con- vaincre, il suffit d'examiner des larves ou de jeunes individus qui n'ont pas encore bourgeonné, afin de pouvoir compter plus facilement mit und : Né del ns à à. sc à, émise st dé sr, Le hé ne à mit inc. : 4 RECHERCHES SUR LES TUNICIERS. 115 le nombre de prolongements ectodermiques qui doivent être attribués à un même Ascidiozoïde. Les Polycycles présentent une branchie bien plus développée que celle des Didemnes, pourtant les uns et les autres possèdent huit prolongements (fig. 64 et 63). Les Styela glomerata ont une branchie bien supérieure sous tous les rapports à la branchie des Diplosomes ; malgré cela, Styela présente vingt-deux prolongements ectodermi- ques, tandis que Diplosoma n'en présente que trois seulement. Je pourrais multiplier beaucoup ces exemples, mais je ne le crois pas nécessaire. Le nombre des prolongements ectodermiques semble toujours proportionnel au développement de la tunique (fig. 62, 63 et 64), et leur principale fonction me paraît donc être l'accroissement de celle-ci. Forme des individus. — Les animaux complètement étalés atteignent une longueur de 4"",5 ordinairement. Leur corps est divisé en deux masses par un pédicule œsophago-rectal assez court. Quand le prolongement musculaire fixateur est contracté, les viscères viennent se placer alors contre la partie inférieure de la branchie. Certains individus semblent présenter celte disposition d’une manière permanente ; chez d’autres, elle est essentiellement transitoire. L'orifice buccal présente six lobes aigus, disposés de la sorte : un lobe ventral, un lobe dorsal et quatre lobes latéraux. Je dois faire remarquer en passant que, d’après M. Giard, il n’existerait que des lobes latéraux chez les Synascidies à six lobes (v. pl. XXV, fig. 40), Cette erreur d'observation est d'autant plus étonnante que chez les adultes et chez toutes les larves on rencontre une disposition toute différente. A la base du tube buccal cylindrique et très court se trouve la couronne tentaculaire présentant, chez les jeunes individus, douze tentacules alternativement grands et petits, correspondant, les pre- miers aux lobes buccaux, les seconds aux espaces interlobulaires. Les individus adultes présentent ordinairement seize tentacules (fig. 65). Quelquefois on en rencontre vingt-quatre. Dans l’un et l’autre de 116 FERNAND LAHILLE. ces derniers cas, les tentacules sont disposés en trois cycles. Le Diplosoma punctatum-Listeri possède trente-deux tentacules. Le sillon antérieur ne présente aucune particularité bien impor- tante à signaler. Il semble se continuer avec le pavillon vibratile volumineux et situé au-dessous du ganglion cérébroïde. La glande neurale est ici, aussi réduite que chez les Didemnum. Branchie. — La branchie est exactement cylindrique lorsque les muscles dorsaux ne sont pas contractés. Dans le cas contraire, elle paraît plus ou moins courbée en arc de cercle. Elle est constituée par quatre rangées de trémas allongés, présentant chacun une vingtaine de cellules ciliées. Ces cellules sont tabulaires à l’état normal, mais sous l’action de certains réactifs elles deviennent coniques. La mort naturelle produit également cette transfor- mation. Ce fait n’est pas particulier aux Diplo- somes et se retrouve chez tous les Tuniciers. Les trémas se présentent quelquefois sous la forme d’hexagones très allongés, et ils occupent Fig. 65. — D. Listeri. Cou- alors des positions alternes dans les rangées ronne, tentaculaire. Svr sillon ventral ; Un, gan- SUCCESSIVES. glion nerveux. Les filets pale sont D La branchie du Diplosoma Listeri présente dix trémas par chaque demi-rangée. Elle n’est reliée à la paroi péribranchiale par aucun sinus péribranchial, comme cela se produit chez les Distaplies, les Aplides et les types supérieurs. Aux trois sinus transverses de la branchie correspondent trois côtes transverses bien développées, qui se continuent sans interrup- tion du côté dorsal et dont le bord est muni de cellules ciliées. Ces trois côtes transverses se prolongent du côté dorsal et un peu sur la gauche, en trois papilles de Lister. Ces papilles filiformes attei- gnent la iongueur des trémas. Système musculaire. — Le système musculaire de Diplosoma Listeri est fort simple. Dans sa note à l’Académie, du 15 juin 1885, M. Jourdain en a signalé la disposition principale. Les muscles peuvent se diviser en muscles transverses et en atitistnus D é ÉBE.._A ,Don RECHERCHES SUR LES TUNICIERS. 117 muscles longitudinaux. Les muscles transverses se rencontrent tout d’abord autour du tube buccal, où viennent s’entre croiser, avec eux, les fibres musculaires longitudinales. Les autres fibres musculaires transverses forment trois groupes situés chacun dans un des sinus transverses de la branchie, et leurs faisceaux sont interrompus seu- lement au niveau du sillon ventral. Les sinus inter-trématiques de la branchie ne renferment jamais de fibres musculaires, et ce caractère est excellent pour séparer les Diplosoma des Diplosomoïdes et des Leptoclinum. Les muscles longitudinaux forment quatre faisceaux importants, disposés en deux paires : la première suit les côtés du sillon ventral et chaque faisceau se subdivise en trois autres à la hauteur du sillon antérieur, la seconde est située dans le grand sinus dorsal. Elles se terminent vers le haut en s’entre-croisant entre elles autour du tube buccal après s'être divisées en nombreux faisceaux secondaires à la hauteur du sillon antérieur. À la partie inférieure de la branchie, juste au-dessous de la base du sillon ventral, elles se réunissent en un faisceau conique qui pénètre dans le long prolongement ectodermique qui constitue le prétendu appendice de l’endostyle des anciens auteurs. Le sillon ventral n’est pour rien dans la formation de cet organe qui atteint souvent la longueur de l'animal lui-même. Cet appendice fournit, comme nous l'avons dit, à l’Ascidiozoïde un point fixe qui lui permet de se rétracter au besoin. En même temps la membrane supérieure du cormus s’abaisse vers la membrane inférieure, de manière à diminuer momentanément la cavité cloacale commune, et les indivi- dus peuvent rejeter de la sorte au dehors : les parasites, les produits sexuels et les excréments. Les fibres musculaires se terminent à l'extrémité de cet appendice d’une façon toute particulière que nous étudierons chez les Aplidiens où l'observation est plus facile. L'appendice musculaire se trouve chez tous les individus, qu’ils soient le produit d’un œuf ou d’un bourgeon. Il est situé le plus souvent sur la gauche du corps, de sorte que la contraction a pour effet d'amener les viscères sur la droite de la branchie. Dans les larves (fig. 62), la position des viscères est, du reste, celle que j'in- 118 FERNAND LAHILLE. dique ici. Parfois, le faisceau musculaire ventral droit est très déve- loppé. Il ne suit plus la courbure du raphé ventral, et l’appendice fixateur paraît provenir directement du tube buccal!. Le Diplosoma spon-- giforme présente les mêmes dispo- sitions musculaires que le D. Listeri, seulement les faisceaux sont plus développés et le mode d’entrecroi- sement des fibres autour du tube buccal se prête mieux à l'étude. Tube digestif. — L’œsophage et le rectum occupent toujours une position verticale, mais l’estomae, le post-estomac, l'intestin moyen et la dilatation rectale sont généralement horizontaux (fig. 67), quelquefois même relevés vers le haut par le grand développement des organes reproducteurs (fig. 66). L'œsophage allongé, pouvant pré- senter des bourgeons à sa partie tout à fait inférieure, conduit à un estomac ovoïde à parois lisses. Le refoulement de ces parois par l’œso- Fig. 61. phage d’un côté, par le post-estomac Fig. 66. — D. Listeri. Vu par la face ven- NU trale ; les viscères sont recourbés contre le de l’autre, produit à chacun de ses côté droit de la branchie ; Pe, prolongement 23 : ectodermique. — Gr. 42 orifices une sorte de valvule cardia- Fig. 67. — D. Listeri. Viscères. Pi, post- que et pylorique. estomac ; Mi, intestin moyen ; Ri rectum, q Pÿ q Ai, anus; Sur, sillon ventral, Am, appen- Lt É dice fixateur ; Fs. follicule testiculaire ; Le post estomac est souvent pres Rs, réservoir séminal. Ds, spermiducte. Z4, bourgeon — Gr. que aussi long que l’estomac lui- même. Il est cylindrique et il termine la première courbure du tube digestif La partie qui fait suite au post-estomac présente, à l'exté- rieur, un aspect réticulé. ‘ V. Drasche, L. C., pl. XI, fig. 54. b Éd Mie DÉS TS a à, RECHERCHES SUR LES TUNICIERS,. 119 Cet aspect est causé par la présence de nombreuses bosselures internes, Ces bosselures sont produites par des faisceaux de cellules très allongées et disposées en éventail. L’épithélium de l'intestin rectal de la Ciona présente une disposition analogue. La fig. 47 du mémoire de M. Roule est, à cet égard, très démonstrative. L'intestin moyen de D. Listeri, que j'avais d’abord nommé région godronnée pour indiquer sa particularité histologique, est ovoide et se termine brusquement dans la dilatation rectale. Il est étranglé à ses deux extrémités. Je le considère comme spécialement chargé de l’absorption. La dilatation rectale présente également des parois épaisses, mais celles-ci sont lisses. Les cellules sont ciliées, cylindriques, disposées en palissade, et leurs noyaux sont situés près de leur base. La dila- tation rectale du D. Listeri ne présente pas de trace, des cæcums plus ou moins développés que l’on rencontre chez d’autres familles. Le rectum remonte à gauche de l’œsophage et se termine par un anus dépourvu d'oreillettes et situé à mi-hauteur de la rangée infé- rieure de la branchie (fig. 67). Cœur. — Le cœur se trouve placé dans l’anse intestinale, sur la face ventrale du tube digestif, du côté opposé aux organes reproduc- teurs. Tout comme la glande neurale et tout comme l'ovaire, le cœur présente à l’état permanent chez les Diplosoma une disposition qui n’est que transitoire chez les Tuniciers plus élevés en organi- sation. Les premiers phénomènes de sa formation sont les mêmes que ceux que MM.Van Beneden et Julin ont signalés chez la Clavelinef. Le sillon ventral arrive chez les Diplosoma presque au contact de l'aire æsophagienne. De chaque côté de la branchie, entre la base de ce sillon et l’orifice œsophagien, naît un tube endodermique primitif (cylindres procardiques de Van-Beneden). Les deux tubes se soudent à leur partie inférieure qui se renfle en vésicule. Celle-ci, après s'être invaginée sur sa face dorsale, constituera le cœur et le péricarde. En même temps la partie supérieure des deux tubes s’atrophie, le tube droit disparaît le premier. ! Morphologie des Tuniciers, p. 304, Bruxelles, 1886. 120 FERNAND LAHILLE. Le tube gauche persiste plus longtemps, et j'en ai rencontré quel- quefois des traces chez l'adulte. Tandis que chez la Claveline les deux tubes endodermiques primitifs continuent à se développer, se soudent de nouveau, constituent alors un tube unique à sa base (Epicarde de M.Van Beneden),qui vient fermer la gouttière cardiaque; chez les Diplosoma cette formation secondaire n’a pas lieu, et on voit sur les coupes du cœur que les lèvres de la gouttière cardiaque sont simplement rapprochées l’une de l’autre, comme chez les Salpes (fig. 27), et chez les Pyrosomes. L'absence du tube endodermi- que secondaire (Epicarde) existe chez tous les Didemnidæ que jai examinés, et je considère cette absence comme étant en rapport avec le mode de bour- geonnement de ces animaux. Le Fig. 68.— D. Listeri. Organes reproducteurs ; Fs, tube endodermique secondaire est les deux follicules testiculaires ; Rs, réservoir séminal ; As, ampoule séminale ; Fo, Ovaire; avant tout chargé de la fonction de Œi, œsophage; Ei, estomac. — Gr. #0 reproduction asexuée. Mais du moment que les bourgeons du Didemnidæ naissent directement de l’œsophage, le tube endodermique secondaire devient alors superflu, etne se développe pas chez ces animaux. La blastogénèse œæsopha- gienne directe a fait place peu à peu à une blastogénèse œæsopha- gienne indirecte ou pharyngienne bien plus avantageuse aux colonies. Organes reproducteurs. — Les organes reproducteurs des D'plosoma (fig. 66 et 68) se développent dans l’anse intestinale. L’organe mâle se compose de deux follicules testiculaires sphéri- ques et volumineux. Chacun d'eux présente un spermiducte propre, et ceux-ci viennent s’ouvrir dans une dilatation pyriforme du sper- miducte commun. Cette dilatation, véritable réservoir séminal, se trouve situé immédiatement en arrière de la base de l'ovaire. Elle est toujours remplie de spermatozoïdes mûrs. Le spermiducte commun remonte sur la droite du rectum, et se termine à la hauteur L | È { et ns RECHERCHES SUR LES TUNICIERS. 121 de l’anus par un second renflement ovoide ou ampoule séminale, gonflée de spermatozoïdes. Généralement, les deux follicules testiculaires sont aussi dévelop- pés l’un que l’autre ; mais parfois ils sont inégaux, parfois même on n'en rencontre qu'un seul. Ce dernier cas, fort rare du reste, ne s'accompagne pas de la torsion du spermiducte et est certainement tératologique, car cet arrêt de développement n’est pas général à tous les individus d’un même cormus. L'ovaire est constitué par une vésicule allongée qui s'étend au- dessus du spermiducte commun et du réservoir séminal jusqu'aux environs de l’ampoule séminale. Il n'existe pourtant pas d’oviducte véri- table. Les œufs les plus inférieurs sont les plus développés. Lorsqu'ils sont mûrs, leur diamètre moyen atteint 300 p. Ils tombent dans la cavité du cormus par suite de la rup- ture de l’ectoderme du parent, et Fig. 69. — D. Listeri. Larve à l'éclosion 5 Re < Ei, Pi, Mi, estomac, post-estomac, intestin C est dans la cavité même du cormus moyen de l’oozoïde. Les extrémités des trois DSABADENLs ectodermiques. FE disposés qu'ils sont fécondés. La segmentation de l’œuf de Diplosoma n’a jamais lieu dans l’intérieur du corps du parent. On n’a done pas besoin d'imagi- ner, avec Della Valle, un pore qui s’ouvrirait à un moment donné dans l'ectoderme, qui laisserait passer les spermatozoïdes et qui se refermerait ensuite après la fécondation. Les jeunes ovules de Diplosoma Listeri sont complètement entourés par les cellules de l’épithélium germinatif de l'ovaire qui lui forment ainsi une première enveloppe folliculaire primitive. Ces cellules sont sphériques et présentent un noyau très net, surtout après le traite- ment des coupes par le carmin acétique. Le noyau de ces ovules pris à tous les états de développement ne m'a jamais présenté de traces de division ; et il n’intervient donc en rien dans la formation des enveloppes folliculaires. Les œufs fécondés se développent avec une très grande rapidité ; 122 FERNAND LAHILLE. le bourgeonnement larvaire est aussi très précoce, et il est difficile de l’étudier en détail; j'ai représenté (fig. 69), une larve du Diplo- soma Listeri au moment de l’éclosion. L’oozoïde, toujours facile à reconnaître, grâce à sa vésicule des sens, occupe une position per- pendiculaire par rapport à la position du premier blastozoïde. La larve ne présente que trois prolongements ectodermiques, et ce caractère permet de la distinguer des larves des genres voisins. Les prolongements ectodermiques du Diplosoma paraissent provenir tous les trois de la partie inférieure du sillon ventral du premier blastozoïde. Ce n’est, en réalité, qu’une apparence, car c’est l’oozoïde qui les produit. Ici se pose naturellement la question de savoir si le cormus s'accroît uniquement par la formation de nouveaux blastozoïdes ou bien si des oozoïdes viennent également s’adjoindre à la colonie. Gegenbaur (Arch. für anat. phys., 1862), penchait pour la seconde opinion, tandis que la première a été soulenue par Della Valle. Je ne puis admettre les conclusions de ce dernier, et je suis convaincu que toute colonie, au moins chez les Didemniens, renferme plusieurs oozoides. En effet, si on examine à l’époque de la reproduction sexuée de nombreuses colonies de Diplosoma Listeri, on parvient toujours à rencontrer quelques individus fixés dans la tunique commune et présentant des restes des organes larvaires sensoriels. Du reste, la concrescence entre tissus semblables, est un fait très fréquent, et on conçoit aisément que, dans certains cas, lorsque les larves ne peuvent parvenir facilement au dehors, leur tunique se soude à la tunique commune du cormus. Chez une espèce que nous étudierons tout à l'heure, le Diploso- moides Lacazii, nous verrons qu'il existe dans l’intérieur même du cormus, des larves dont la queue est déjà résorbée, et qui paraissent enchassés dans la tunique commune. En résumé, on peut affirmer que tout cormus de Diplosoma et de Diplosomoïdes s’accroissent à la fois par blastogénèse et ovogénèse. RECHERCHES SUR LES TUNICIERS. 123 2. Diplosoma spongiforme, Giard, 1872. Caractères spécifiques : Cormus aplatis ou lobés plus ou moins épais (5 à 10wm). — Orifices buccaux, dépourvus en apparence de lobes. — Individus invisibles ou très peu visibles à travers la tunique. La tunique du Diplosoma spongiforme renferme d’abondantes cel- lules pigmentaires éparses (fig. 70). Elle est toujours fort développée et, par suite, les cloaques communs sont beaucoup plus réduits que chez Diplosoma Listeri. Au lieu de former une grande cavité unique, ils constituent le plus souvent une série d’égoûts plus ou moins ramifiés. Sous ce rapport, c’est donc un type de passage entre Diplosoma Listeri, Leptoclinum ct Didemnum. Les animaux ne paraissent plus sus- pendus uniquement par le pourtour de leur orifice buccal, mais ils sont entièrement enchassés Fig. 10. — D. spongiforme. Tunique. Entre les cellu- dans la tunique dont il est très difficile de les les vacuolaires on aperçoit de nombreuses cellules tunicières et de nom- breuses cellules pigmen- tées. — Gr. 190, extraire. Au-dessus de chaque branchie la membrane supérieure forme des sortes de coupoles qui de l’extérieur donnent, comme chez Did. fallax, l'impression d’un cercle moins coloré, entourant l’orifice buccal de chaque individu. Les orifices buccaux paraissent complètement circulaires et dépour- vus de lobes : si on veut apercevoir ceux-ci, il faut arracher du cormus des individus épanouis et fixés. Chez le Diplosoma Listeri, les lobes se voient au contraire facilement, surtout en observant à la loupe le cormus de profil. Les cellules ectodermiques de D. spongiforme sont le plus souvent toutes pigmentées, et il en résulte une difficulté beaucoup plus grande pour l'étude directe des organes. Diagnose des variétés et Synonymie. — Toutes les variétés de D. spongiforme que l’on rencontre peuvent se rapporter à trois formes. Celles-ci se distinguent entre elles, non plus par le mode de 124 FERNAND LAHILLE. pigmentation comme c'était le cas pour D. Listeri, mais par la couleur même du pigment. violet, indigo, bleu, vert. . . . . . D. chameæleon-spongiforme Dr Cormus :{ gris, teinté de bleu ou de jaune. . . D. spongiforme (type), Gd. | jaune, orangé, rouge. . . . . . . . D. carnosum-spongiforme, Dr. Procédons maintenant à l’étude de ces diverses formes : Diplosoma spongiforme (type), Giard. Syn. : Astellium spongiforme G. (Var. : «)— Brevistellium spongi- forme, Jourdain. Les cormus ont souvent un aspect gélatineux, mais cet aspect est moins prononcé que chez D. Listeri. Les colonies toujours épaisses forment des masses aplaties, lobées, à surface lisse. Chaque lobe du cormus présente d'habitude, en son milieu, un grand cône cloacal translucide autour duquel les orifices buccaux arrondis paraissent disséminés sans ordre. Lorsque les individus sont bien étalés, on aperçoit leurs tentacules généralement au nombre de douze ; quelque- fois, il n’en existe pourtant que huit, comme chez les Didemnum. La couleur du D. spongiforme varie du gris bleuté au gris jaunâtre, il est donc, sous ce rapport, intermédiaire aux D. chamæleon et D. carnosum-spongiforme. La musculature des individus est plus développée que celle du D. Listeri. On remarque notamment trois paires de faisceaux muscu- laires péribranchiaux puissants, situés de chaque côté du sillon ven- tral. Ces faisceaux se subdivisent à la hauteur du sillon antérieur en nombreux petits faisceaux secondaires qui prennent une direction circulaire et qui joignent ainsi leur action à l’action des muscles constricteurs du tube buccal. La taille des individus est un peu plus petite que celle des D. Lis- teri, mais leur anatomie est en tous points semblable. Localités. — Le Diplosoma spongiforme type est une espèce rare. A Roscoff, je l’ai rencontré principalement à l’ouest de l’île Verte, | | 4 : à | RECHERCHES SUR LES TUNICIERS. 125 sous les rochers, au bas de l’eau. Je l’ai retrouvé à Chausey, dans l’herbier situé à la partie sud-ouest du Sund. Della Valle a signalé l'existence, à Naples, du D. spongiforme, fixé le plus souvent sur les pierres, et le zoologiste italien note également la rareté relative de cette forme. Diplosoma chamæleon-spongiforme, Drasche. Syn. : Astellium nigricans et petricola, G., non Pseudodidemnum Listerianum, D. Valle. La description du Diplosoma chamæleon de Drasche s’applique exactement aux variétés foncées du Diplosoma spongiforme, que l’on rencontre à Roscoff, et que Giard avait signalé sous le nom d’Astel- lium nigricans et petricola. Par suite, il n’est pas étonnant que Drasche n'ait rencontré à Rovigno que la variété « de D. spongiforme, vu qu'il considérait comme espèce distincte les deux autres variétés. Le pigment ectodermique est ici indigo foncé presque noir, ou vert plus ou moins sombre. Les viscères conservent toujours une coloration brune. La tunique commune renferme quelquefois des sellules pigmentées jaunâtres. La superposition de tous ces pigments variés et plus ou moins abondants produit une grande diversité d’as- pect du cormus. Cette variation de coloration du D. spongiforme justifie donc le nom imposé à cet animal. L’épaisseur des colonies, moindre que chez l'espèce type et que chez la seconde variété rappelle les D. Listeri minces et la plupart des Leptoclines. Localités. — Roscoff, surface inférieure des roches, à la limite des basses eaux (Roléa, Perharidi). Arcachon : parc aux huîtres, sur les tuiles (envoi de M. Durègne, 2 décembre 1886). Diplosoma carnosum-spongiforme, Drasche. Sous le nom de D. carnosum, Drasche décrit ainsi un Tunicier de Rovigno : « Cormus grand, charnu, épais jusqu’à 6 millimètres, sur- face mamelonnée par les individus qui soulèvent un peu la tunique commune. Couleur brun-jaune. Cônes cloacaux membraneux et 126 FERNAND LAHILLE. grands. Lobes buccaux émoussés. Prolongements ectodermiques. Espèce rare. » La couleur est le seul caractère propre à cette variété du D. spon- giforme, comme je m'en suis assuré, du reste, par la dissection. L'état de la surface est insignifiant, car chez les cormus gélatineux elle peut paraître légèrement mamelonnée ou lisse, suivant la con- traction plus ou moins grande des individus. Localités. — Ce Diplosoma se rencontre dans les environs de Banyuls, fixé sur des algues ; mais il n’est pas commun. Les cormus ne sont pas aussi étendus que ceux de Rovigno, et cela provient cer- tainement de la nature du support. Sous des roches, les cormus peuvent s'étendre bien davantage que sur les plantes. La couleur des colonies de Banyuls est plutôt d’un jaune d’or très vif que brune. Elle rappelle tout à fait celle de l’orpiment. Les orifices buccaux cir- culaires sont, en apparence, dépourvus de lobes. Les animaux sont très petits, pressés les uns contre les autres et disposés sans ordre. Les trémas sont moins nombreux que dans les variétés précédentes, on en compte 6 à 7 par rangée. L’acide acétique fait disparaître la couleur du pigment. Les cormus que J'ai recueillis avaient en en moyenne 0,04 à 0,05 de long sur 0,02 de large. L’épaisseur produite par une seule couche d'individus était de 0,003. Je n'ai jamais rencontré cette variété sur les côtes de la Manche. 5e GENRE : Diplosomoides. — HEerpman 1885. Caractères communs à d’autres genres : Cormus sessile. — 6 lobes buccaux. — Orifice cloacal avec ou sans languette. — 4 rangées de trémas branchiaux. — Museles dans les sinus inter-trématiques. — Appendice fixateur très développé. — Spicules étoilés. — Larves gemmipares. Caractère propre : Plusieurs follicules testiculaires à spermiducte commun spiralé. En dehors de l’époque de la reproduction, les animaux de ce genre peuvent se confondre facilement avec les Leptoclinum, prinei- RECHERCHES SUR LES TUNICIERS. 127 palement avec certaines formes à tunique épaisse et peu incrustée de spicules. Mais lorsque les organes reproducteurs sont développés, la distinction des deux genres devient des plus aisée. On trouve de nombreux follicules testiculaires chez Diplosomoïdes , tandis qu'il n’en existe toujours qu’un seul chez Leptoclinum. En outre, comme nous le verrons, la rapidité de la blastogénèse larvaire est bien dif- férente chez ces deux types. Drasche avait décrit, sous le nom de Diplosoma pseudo-leptocli- num, un prétendu Diplosoma dont la tunique renfermait des spicules et qui s’éloignait ainsi des formes typiques. Herdman, acceptant sans discussion cette manière de voir, rapprocha de l’espèce de Drasche un Tunicier des îles Arrou, et créa pour eux un genre nouveau, le genre Diplosomoïdes. Or, nous l’avons vu, D. pseudo-leptoclinum, Dr., est un véritable Leptoclinum, et très probablement il en est de même du Diplosomoi- des molle, Herd., car tous les caractères de l’unique et petit échan- tillon du Challenger peuvent être attribués avec plus de raison à un Leptoclinum à tunique assez transparente, au L. gelatinosum, G., par exemple, qu'à un Diplosoma. Le seul caractère qui eût permis de trancher le débat et de rapprocher de Diplosoma certains cormus à spicules, eût été la constatation, chez ces formes, d’un spermiducte droit accompagné de deux follicules testiculaires. Or, ni Drasche ni Herdman n’ont pu étudier les organes reproducteurs de leurs es- pèces. Voici, du reste, ce que dit Herdman à cet égard : « The re- » productive organs were not well developed in any of the Ascidio- » zooïds examined (p. 313, Report. on the Tunicata. Pars 2). » Le genre Diplosomoïides n’avait donc aucune raison suffisante d’exis- tence. Une remarque est ici utile. Le savant Ascidiologue angjlais a eu tort de vouloir créer des espèces et des variétés sur des débris de cormus uniques, contractés, et souvent en très mauvais état. Il décrit quelquefois même des débris de tunique dépourvus d’Asci- diozoides!! Lorsqu'on n’a pas à sa disposition des matériaux frais ou ‘ Genus doubtful : ? clava, n. sp. ? pyriformis, n.sp. (Report, Pars 2, p.132). 128 FERNAND LAHILLE. au moins suffisants, il vaut peut-être mieux, avant de procéder à des descriptions, attendre de nouvelles et meilleures occasions. L'étude et les déterminations des Tuniciers sont difficiles, alors même qu'ils ont atteint l’état adulte et qu'on les étudie vivants. Aussi, à plus forte raison, ne devrait-on jamais baser des conclusions taxonomi- ques sur des échantillons uniques, jeunes ou mal conservés. En étudiant, à Roscoff, Leptoclinum Lacazii, G., je me suis assuré que cette forme était exactement intermédiaire entre les Diplosoma et les Leptoclinum sans pouvoir être rangée cependant dans aucun de ces genres. Il fallait donc en faire le type d’un genre nouveau et j'ai adopté le nom choisi par Herdman en le définissant mieux par l’adjonction de caractères tirés des organes de reproduction. La diagnose du genre Eucælium, Sav., conservé par MM. Giard et Herdman, repoussé par Drasche, doit, elle aussi, être modifiée. Comme Diplosomoides, Eucælium présente, en effet, un caractère que l’on ne retrouve que chez Cælocormus et sur lequel personne n’a insisté : la multiplicité des follicules testiculaires. La fig. 2, pl. XX de Savigny montre très bien cette particularité essentielle, quoique ici, comme ailleurs du reste, Savigny ait confondu le testicule et l'ovaire. Les spicules étoilés assez rares (fig. ? B, pl. XX), la tunique molle, les lobes buccaux si peu prononcés qu'ils paraissent nuls, les six parties du tube digestif bien accentués, sont autant de caractères qui rattachent encore le genre Eucælium au genre Diplosomoides. D'un autre côté, ce genre, par le nombre élevé de trémas, ainsi que par l’orifice cloacal des individus s’ouvrant, d’après Savigny, directement à l'extérieur, se rapproche des Distomidæ, qui, eux aussi, présentent parfois des spicules. Voici comment je crois devoir caractériser le genre Eucælium : Didemnien à cormus sessile, gélatineux. — Spicules étoilés. — 6 rangées de trémas. — Plusieurs follicules testiculaires. Comme je n’ai pas encore rencontré d'Eucælium, je ne puis malheu- reusement indiquer si le spermiducte est droit ou spiralé et si les larves sont gemmipares. Actuellement, ce genre se distinguera donc du genre Diplosomoïdes par le nombre des rangées de trémas. RECHERCHES SUR LES TUNICIERS. 129 Diplosomoïdes Lacazii, Giard, 1872. Syn. : Leptoclinum Lacazii, G. — Leptoclinum coccineum, Dr. Le cormus décrit par Drasche sous le nom de L. coccineum et ad- mirablement reproduit dans la planche IV, fig. 17, de son mémoire, n’est autre que le L. Lacazü de Giard. C’est là un fait sûr et certain. Si, comme Drasche le fait remarquer, « le dessin défectueux de Giard ne montre pas le dessin foliacé typique » que l’on rencontre chez les cormus de Rovigno, cela tient uniquement à l’imperfection de la gravure et aussi au petit nombre d’échantillons que M. Giard put se procurer. Aspect des colonies. — Les cormus sont sessiles, irréguliers et de consistance assez molle, quoique la tunique commune soit elle- même fort résistante. Leur épaisseur, ordinairement de 5 millimètres, atteint quelquefois et dépasse même 1 centimètre. Les colonies peu- vent s'étendre sur de grandes surfaces (45 et même 20 centimètres carrés). Leur couleur uniforme est tantôt rouge et écarlate, tantôt rouge cramoisi, quelquefois pourpre. La tunique commune présentant de petites élévations, celles-ci donnent à la surface du cormus un bel aspect velouté. En captivité, les cormus se décolorent très rapidement, deviennent jaunâtres et, en même temps, leur surface se recouvre d’une sorte de mucosité. Cette dernière particularité n’est pas, du reste, uniquement propre à ce genre. Le résean des égoûts cloacaux se révèle à l’extérieur par des dé- pressions formant ce que Drasche nomme « un dessin foliacé. » Ce dessin est naturellement beaucoup plus apparent sur les grandes colonies que sur les petites, car chez ces derniers les cœnobies sont encore assez régulières. Ces dépressions sont, en général, plus nettes chez les cormus de la Méditerranée que chez ceux de la Manche. 130 FERNAND LAHILLE. Les spicules de Diplosomoïides ne présentent rien de particulier et rappellent ceux du L. maculatum. Is sont principalement abondants autour des lobes buccaux et entourent ainsi chaque orifice d’une mince bordure blanche devenant beaucoup plus apparente lors de la contraction des animaux. Si on examine le cormus à la loupe, des six taches buccales trois paraissent alors plus grandes. La même observation a été faite, on s’en souvient, à propos de la plupart des Didemniens. Les spicules de Diplosomoïides forment également de petits amas dans la tunique, sortes d’îlots blanchâtres tranchant vive- ment sur le fond cramoisi du cormus. On rencontre souvent à Roscoff, sur les colonies de D. Lacazii, la Doris coccinea, Forb. Il faut alors, si le mollusque est immobile, la plus grande attention pour le distinguer du cormus. Que de fois, à Roscoff, présentant le mollusque et le Tunicier côte à côte à des na- turalistes non prévenus, ceux-ci les ont confondus ! La branchie de cette Doris, entièrement rétractile, ainsi que ses tentacules, simulent des cloaques communs, tandis que les petits tubercules réguliers de sa surface produisent l'impression de velouté et simulent la présence d’Ascidiozoïdes. Si D. Lacazii est mimé, à Roscoff, par un mollusque, il simule à son tour, à Banyuls, une éponge siliceuse qui est très pro- bablement le Suberites lobatus de Schmidt, qui se rencontre dans les mêmes stations que lui. Tunique. — Les éléments cellulaires qui la constituent peuvent s’observer facilement en râclant la surface du cormus. On rencontre des cellules petites, incolores, amæboïdes, à prolongements très dé- liés ; ce sont les cellules tunicières. Un grand nombre ont un proto- plasma rempli de granulations rouges ou brunes, et leur noyau seul est incolore. Ces cellules s’accroissant, les granulations paraissent moins abondantes et les parois s’épaississent par l’adjonction de couches concentriques hyalines. On rencontre également des cellules vésiculaires, à noyau appliqué contre la paroi, et des cellules sem- blables, aux éléments du sang des Phallusies. Enfin, des spicules étoilés, grands et réguliers. Anatomie des individus — Le corps des individus forme deux RECHERCHES SUR LES TUNICIERS. 131 masses très distinctes séparées par un pédicule œsophago rectal de 1 millimètre de longueur. La bran- chie cylindrique (2 millimètres) est deux fois plus longue que la masse viscérale. Le tube buccal est sur- monté de six petits lobes étroits, courts et obtus. La couronne tenta- culaire se compose de douze tenta- cules disposés en deux cycles (fig. 71). La paroi péribranchiale, fort réduite, laisse la branchie presque entièrement à découvert (fig. 72). Chez les individus qui avoisinent les orifices cloacaux du cormus, elle est étalée et forme, du côté dorsal, une languette qui peut prendre parfois un grand développement (fig. 71), et contribue alors à former le bord de l’orifice cloacal commun, à le main- tenir ouvert ou à le fermer. La lan- guette cloacale est, au contraire, nulle ou à peu près chez les individus éloignés des cloaques communs et qui, par suite, ne peuvent avoir une action directe sur l'élargissement ou l’occlusion de cet orifice. De chaque côté de la paroi péri- branchiale, et généralement au ni- veau du premier sinus transverse supérieur de la branchie, on observe Fig. 72. les orifices branchiaux primitifs. Fig. T.— D. Lacazii, G. Individu situé au bord d’un orifice eloacal commun. Branchie contractée vue du côté ventral. Tla, paroi péribranchiale étalée et formant une grande languette ; Pm, faisceaux museulaires ; Or, orifice branchial primitif. — Gr. 55, Fig. 72. — D. Lacazii, G. Individu éloigné d’un orificecloacal commun. Branchie vue du côté gauche. Cb, couronne tentaculaire à mi-hanteur du tube buccal ; Am, appendice fixateur. On aperçoit les fibres musculaires des sinus transverses et inter-trématiques. — Gr. #. 132 FERNAND LAHILLE. Un long appendice musculaire puissant se trouve situé au-dessous du sillon ventral et se détache du corps de l’animal, le plus souvent dans la région du pédicule œsophago-rectal. Ce fait me paraît inté- ressant à signaler, car, à mesure que l’on s'éloigne des Didemnidæ inférieurs pour se rapprocher des Distomidæ et Aplididæ, on voit les muscles rétracteurs de la branchie se séparer du corps à des niveaux de moins en moins élevés, jusqu’à ce qu’ils ne s’en séparent plus du tout. Chez les Aplidide, en effet, l'appareil fixateur est même situé à l'extrémité inférieure du stolon géni- talifère. La branchie présente quatre ran- gées de trémas allongés. Ceux-ci sont au nombre de 12 environ par rangée. Il existe trois côtes transverses fort développées, présentant chacune une » Lister filiforme. Comme Fig. 73. — D. Lacazii, G. — Viscères. Za, languette de Lister filiforme bourgeon; ÆEi, estomac ; Pi, posl-estomac; - , Mi, intestin moyen; Li, dilatation rectale; chez les Leptoclines, la musculature Ri, rectum; Fo, Fs, ovaire et follicules tes- . .« = ticulaires en voie de développement ; Du, de la branchie de D. Lacazii est fort glande rénale. — Gr. 22, développée ; aussi, la contractilité de cet organe est extrême et on a beaucoup de peine à obtenir des indi- vidus entièrement étalés. Les sinus inter-trématiques renferment des fibres musculaires, tout comme les autres sinus : transverses, dorsal et ventral. Les viscères s'étendent au-dessous de la branchie, suivant un plan vertical. L’œsophage, qui atteint souvent { millimètre de long, ne présente jamais qu’un seul bourgeon situé immédiatement au- dessus de l’orifice cardiaque de l'estomac. Chez D. Lacaztt, les blas- tozoïdes sont produits toujours par l’évolution d’un bourgeon uni- que, tandis que chez Diplosoma Listeri deux bourgeons semblent intervenir souvent dans Ja formation du même individu. L'estomac a son axe vertical (Ei, fig. 73) et ne peut être mieux comparé qu'à une mître d’évêque. En effet, il constitue un ovoïde tronqué à sa base et présentant à son sommet un refoulement trans- RECHERCHES SUR LES TUNICIERS. 133 verse. Les parois sont lisses, mais très glandulaires. Le post-esto- mac est large et, de même que l'estomac, il se termine par une partie évasée et tronquée. L'intestin moyen est petit; ses parois sont comme toujours très épaisses, mais ne présentent pas l'aspect reticulé de l'intestin moyen des Diplosoma. Il débouche dans la dilatation rectale, trois fois plus large que lui, et dont les deux cœcums latéraux sont peu prononcés. La glande stomacale est fort difficile à voir ; son canal, très grêle, fort long, ne présente aucune dilatation sur son trajet et vient dé- boucher à la partie inférieure de l’estomac, quelquefois dans un angle (fig. 73), mais le plus souvent à l'endroit où le post-estomac se sépare de l'estomac. Le rectum ne présente rien de particulier et se termine à la base de la rangée inférieure des trémas. Les oreillettes anales sont presque nulles. Les organes reproducteurs sont situés dans l’anse in- testinale. On peut facilement observer leur mode de formation, con- forme à celui qu'ont observé MM. Van Beneden et Julin chez Clave- lina. Un amas de cellules mésoblastiques se dispose en une vésicule qui se continue par une traînée de cellules destinées à former le spermiducte. Pe la vésicule primitive se sépare une petite vésicule secondaire qui deviendra l'ovaire et qui, dans la suite, se trouvera éloigné des testicules par l’accroissement en longueur du spermi- ducte. Le premier follicule testiculaire qui apparaît, par suite de ja proli- fération et différenciation cellulaire de Ja vésiculaire mâle, ne tarde pas à subir une première division longitudinale. Les follicules sont alors doubles, comme chez les Diplosoma ; mais les divisions se ré- pétant, il s'en forme 4-6-8 qui produisent, en définitive, une grappe arrondie. Le spermiducte s’enroule autour pour constituer une spire de 3-4 tours assez espacés. L'ovaire se sépare peu à peu de bas en haut de la vésicule mâle, ainsi que du spermiducte ; mais, dans aucun cas, il n’y a formation d’un oviducte. Lorsque les œufs sont fécondés, un certain nombre se développent 134 FERNAND LAHILLE. entièrement dans l’épaisseur même de la tunique, et sur des coupes on rencontre parfois des larves dont la queue est résorbée en Fig. 76. Fig. 74. — D. Lacaxii. Larve provenant d’un œuf pauvre en vitellus nutritif. La queue est résorbée de très-bonne heure. L’ascidio- zoïde ne quittera pas le cormus. — Gr. 5$ Fig. 75. — D. Lacazii. Jeune larve provenant d'un œuf riche en vitellus nutritif. La blas- togénèse est rapide. L'ascidivzoide peut aller fonder une nouvelle colonie. — Gr. #5, Fig. 76. — D Lacazii. Larve à l’éclosion. Pe, prolongements ectodermiques disposés en couronne. La colonie est en voie de for- malion. grande partie, et qui se trouvent plon- gées dans la tunique commune. Done, chez les Diplosomoïdes comme chez les Diplosoma, les cormus s’accrois- sent à la fois par oozoïdes et blasto- zoides. Les œufs fécondés peuvent corres pondre à divers degrés sinon de ma- turation du moins de grosseur. J’ai pu m’en convaincre directement par des fécondations artificielles. J’ai vu, en dilacérant des cormus bien vivants dans une eau très fraîche, la seg- mentation commencer et se continuer dans des œufs de grosseur bien iné- gale. [l en résulte un phénomène des plus intéressants qui m'avait frappé dès 1885 lorsque, pour la première fois, J'examinai à Roscoff des cormus du D. Lacazii. Dans l'épaisseur de la tunique commune, on rencontre deux sortes de larves de taille fort différente. Les petites proviendraient d'œufs renfermant, lors de la fécon- dation, peu de vitellus nutritif, les grandes larves dériveraient, au con- traire, d'œufs qui en sont abondam- ment pourvus. C’est ce dont je me suis assuré en suivant le développement d'œufs artificiellemen) fécondés. On ne peut pas soutenir, comme nous allons le voir du reste, que les grandes larves représentent un état postérieur de développement des petites. La fig. 74 représente une larve dérivée RECHERCHES SUR LES TUNICIERS. 135 d’un œuf pauvre en vitellus nutritif et trois jours après la fécon- dation. La fig. 75 montre une larve du même âge, placée dans des conditions identiques, mais dérivant d’un œuf riche en substance nutritive. La fig. 76 représente la même larve dessinée à la fin du quatrième Jour. A la fin du troisième jour, les petites larves (fig. 74) n’ont pas encore bourgeonné, les ventouses sont déjà atrophiées et la queue est rentrée dans le corps de la larve, s’y est morcellée pour être résorbée peu à peu. Les prolongements ectodermiques sont très nombreux et disposés sans ordre dans la tunique commune qu'ils vont accroître rapidement. Les fibres musculaires longitudinales sont entièrement développées et s'étendent de l'orifice buccal jusqu'à la base même du vitellus nutritif ; elles doivent donc jouer un certain rôle mécanique dans la résorption de celui-ci. Le prolongement ectodermique musculaire de l’oozoïide adulte est formé, comme on le voit, par la vésicule qui ren- ferme, chez la larve, le vitellus nutritif, et qui est situé sur le côté ventral de l'intestin directement au-dessous de la branchie. Si nous considérons maintenant les grosses larves, elles vont nous présenter des faits bien différents. Au lieu d’être atrophiées, les trois ventouses et la queue sont fort développées. Les prolongements ectodermiques, d’abord triangulaires et au nombre de quatre paires, présentent à leur centre les trois ventouses encore sessiles à la fin du second tour. Chaque prolongement primitif se divise bientôt en trois autres, d'aspect digitiforme. Leur ensemble constitue une cou- ronne du millieu de laquelle s’élèvent les ventouses supportées alors chacune par un long pédicule. L'oozoïde, facilement reconnaissable à sa vésicule des sens, est fort petit relativement au volume de la larve elle-même. C’est ainsi que le diamètre du jeune individu n’est que le sixième du grand dia- mètre de la larve. Juste au-dessous de la branchie de l’oozoïde se rencontre une masse de vitellus putritif opaque qui gène l'observation du tube digestif et de la blastogénèse. Cette dernière est extrême- ment rapide, puisqu’au quatrième jour on voit apparaître le premier 136 FERNAND LAHILLE. et le second blastozoïde. Ceux-ci sont situés de part et d’autre du reste du vitellus nutritif. C'est surtout après la fixation, lorsque la queue se rétracte et qu’elle fournit ainsi une nouvelle réserve alimentaire importante, que l'on voit la colonie s’accroître avec rapidité : ce spectacle est des plus curieux ; au bout d’une douzaine d'heures on a une colonie composée d’une dizaine de blastozoïdes. Giard avait fait, du reste, une observation analogue sur le Diplosoma spongiforme. Tous ces faits sont intéressants à signaler, car ils montrent une fois de plus que la blastogénèse et la rapidité de ce phénomène sont proportionnelles à l'abondance de nourriture. La reproduction n’est vraiment que l’excès de nutrition qui déborde ; les Ascidies qu’on appelle simples dérivent de larves renfermant peu de vitellus nutritif, par suite, la blastogénèse n'a pas lieu. Leurs organes de reproduc- tion sexuée apparaissent tardivement, et c’est précisément un très grand avantage pour ces formes. Cela leur permet de se différencier davantage et d’atteindre une organisation supérieure. Chez tous les êtres vivants, en effet, le développement cesse dès que les appareils de reproduction sexuée commencent à fonctionner. Localités.— M. Giard dit n'avoir pu recueillir, à Roscoff, que trois ou quatre échantillons du Diplosomoïdes Larazii. Cette superbe espèce est pourtant assez commune. Sa rareté apparente provient de ce qu'on ne peut visiter les loca- lités où elle se rencontre que lors des grandes marées. Je citerai particulièrement les rochers des Per-rech-hier, l’île de Duon (côté ouest), ainsi que les récifs de Trébunnec, au sud de la balise rouge (plage de Paimpoull). On rencontre également cette espèce au banc d’Astan ; mais les cormus obtenus ainsi par la drague sont le plus souvent en mauvais état. J’ai retrouvé le Diplosomoïdes Lacazii à Saint-Malo et à Chausey. À Banyuls il est quelquefois fixé sur les éponges, comme à Rovigno, ou sur l'Halimeda Opuntia. Il se trouve également en assez grande abondance sous la terrasse de la salle des machines du laboratoire, ainsi que sous les rochers de l'île Grosse et de l’anse du Troc. 244 RECHERCHES SUR LES TUNICIERS. 137 Affinités zoologiques des Didemnidæ. Après avoir déterminé exactement les ressemblances et les diffé - rences des formes animales d’un groupe en comparant leur dévelop- pement et leur structure avec le développement et la structure des formes voisines, on peut et on doit en tirer des conclusions théo- riques. Il nous faut donc, maintenant que nous avons étudié les Didemnidæ, préciser les affinités respectives de ces animaux entre eux et les familles voisines. Entre les Didemnidæ et les Appendiculaires, on constate les res- semblances suivantes : 1° les deux tubes cloacaux des Didemnidæ, indépendants de la dépression cloacale médiane où débouche l’anus, sont les homologues des trémas branchiaux des Appendiculaires ; 20 chez les Didemnidæ, comme chez les Appendiculaires, l’œso- phage médian s'ouvre au début au milieu du plancher d’un sac pharyngien plus ou moins conique. Leur tube digestif est toujours différencié en cinq parties et l’anus vient déboucher primitivement à la surface même de l’ectoderme. Entre les Didemnidæ et les Doliolidæ, les ressemblances sont encore plus étroites : 1° Les œufs atteignent souvent un volume considérable, dépassant quelquefois le volume des viscères. La grande quantité de vitellus nutritif qu’ils renferment, produit chez l’oozoïde un excès de nutrition se traduisant par une blastogénèse précoce et souvent répétée ; 20 Le grand développement de l'ovaire déplace les viscères des Didemnidæ de 90°, et l'intestin moyen prend une direction perpen- diculaire aux trémas. Chez les Doliolidæ, ce déplacement est plus marqué et devient persistant, grâce à la déviation correspondante de l'oritice cloacal venant se placer en face de l’orifice buccal. Cette seconde déviation est liée du reste à l’adaptation à la vie pélagique ; 3° Le spermiducte spiral si caractéristique des Didemnidæ se retrouve chez quelques Doliolums, et montre l’étroite parenté de ces formes ; | 138 FERNAND LAHILLE. ko Au-dessus de l’orifice buccal se trouve parfois un prolonge- ment plus ou moins considérable (Anchinia, Pyrosoma giganteum, Leptoclinum asperum). Entre les Didemnidæ et les Distomidæ, on rencontre les ressem- blances suivantes : 1° Chez les Distomidæ inférieurs (Distaplia), les œufs et les larves sont énormes, comme chez les Diplosomoïdes et quelques Leptoclines. Comme chez ces types, on ne compte encore que quatre rangées de trémas ; 2° Certains cormus de Distomidæ (Cystodites) renferment des spi- cules, comme la plupart des Didemnideæ ; 3° Le spermiducte des Distomidæ est droit, comme il l'était déjà chez les Diplosoma, et leurs nombreux follicules testiculaires consti- tuent des grappes, tout comme chez les formes supérieures des Didemnidæ (Diplosomoides. — Cælocormus). On peut donc considérer les Didemnidæ comme alliés aux Appen- diculaires et aux Doliolidæ, et se rattachant, par le genre Diplosoma, à la famille des Distomidæ qui renferme les types les moins diffé renciés d'Eutremata où qui représente, si l’on veut, dans la nature actuelle, les formes les plus primitives de Tuniciers à trémas. Si on veut maintenant se faire une idée exacte des rapports qu’affec- tent les Didemnidæ entre eux, il suffit d'étudier les perfectionnements apportés à la conservation plus parfaite des individus et de l'espèce. M. Giard'! a fait ressortir, avec sa netteté de vue habituelle, les différents modes de protection passive employés par les Didemnidæ pour consolider leur tunique commune par des incrustations caicai- res, « défenses qui rappellent en quelque sorte celle des guerriers du Moyen-Age », et pour rendre moins fréquente la présence de commensaux et d'endoparasites par la réduction des cavités cloa- cales, cette réduction s’opérant du reste de deux manières bien distinctes : 1° par l’aplatissement de la colonie (Leptoclinum) ; 2 par une production plus grande de substance tunicière (Didemnum, Diplosomoïdes). * Loc. cit., p. 159, RECHERCHES SUR LES TUNICIERS. 139 Mais à côté de ces modes de protection passive on en rencontre d’autres dans lesquelles l'animal agit directement sur les milieux. Ces modes de protection active sont : 1° Perfectionnement de l’orifice cloacal des individus. Cet orifice est d’abord un simple trou (Diplosoma) fort large, et par suite la vitesse du courant d’eau qui le traverse est assez faible. En outre, la branchie peut être facilement lésée par les commensaux qui se sont introduits dans les cavités cloacales du cormus. Aussi, chez les Didemnoïdes et Didemnum trouve-t-on un tube bien développé et pourvu de muscles. La force du courant destiné à expulser au dehors les excréments et les produits sexuels est augmentée et en même temps la branchie est efficacement proté- gée. Un pas de plus et on assiste à la formation d’une languette cloacale rendant possible le groupement des individus dans un but commun et maintenant ouverte la lumière des égoûts ramifiés des cormus. Les cœnobies ainsi constituées sont encore imparfaites dans le genre Leptoclinum , où les cloaques communs sont fort ramifiés. Elles deviennent plus nettes chez les Diplosomoïdes. Enfin, chez les Cælocormus, la colonie tout entière ne forme plus qu'une vaste cœnobie constituant, comme chez Pyrosoma, une véritable indivi- dualité coloniale ; 20 Le perfectionnement de la branchie par l'accroissement du nombre et des dimensions des trémas augmente la surface respira- toire. Les courants d’eau, alors plus énergiques, favorisent une respi- ration plus active et une nutrition plus abondante. En même temps une musculature plus puissante se développe, elle diminue l’endoparasitisme et vient encore en aide à la respiration et à la nutrition. Les Doliolidæ présentent une rangée plus ou moins longue de trémas. Chez les Doliolums supérieurs cette rangée se coude et en forme deux pour ainsi dire. Un pas de plus et nous ren- controns les types inférieurs de Didemnidæ (Didemnoïdes, Didem- num), qui en possèdent trois rangées. Enfin, on en rencontre quatre chez les formes supérieures (Diplosoma, Leptoclinum, Diplomosoïdes). 140 FERNAND LAHILLE. Le genre Eucælium en présenterait même six, mais je crois que ce genre a encore besoin d’être observé de nouveau; 3° L'augmentation du nombre des follicules testiculaires assure davantage la fécondation des œufs. Aussi, sous ce rapport, Didem- noïdes, Didemnum, Leptoclinum n'ayant qu’un seul follicule, sont inférieurs aux Diplosoma qui en possèdent deux, aux Diplosomoides, aux Cælocormus et aux Eucælium qui en présentent davantage. L’accélération de la blastogénèse est aussi un caractère de per- fectionnement. Chez Doliolum, l’oozoïde ne bourgeonne que tardive- ment après l’éclosion. Chez Diplosomoïdes, dès que la larve est mise en liberté, on ren- contre, à côté de l’oozoïde bien développé, les deux premiers blas- tozoïdes. Enfin, chez Pyrosoma, l'oozoïde (Cyathozoïde) reste tou- jours rudimentaire ; mais la blastogénèse est fort rapide et lors de l'éclosion, les quatre premiers blastozoïdes forment déjà une véritable colonie. Une dernière remarque est enfin nécessaire : Si l'accélération blastogénétique rapproche Pyrosoma de Diplosomoïdes, si sa dispo- sition coloniale le rapproche en même temps de Cælocormus , l'exis- tence d’une rangée unique de trémas horizontaux rattache ce type aux Doliolums. La constitution de son stolon l’écarte encore des Didemnidæ pour le rapprocher des Doliolums, des Salpes et des Aplididæ. IV. FAMILLE DES DISTOMIDÆ. Dans son Système des Ascidies, Savigny s’est contenté d'établir les caractères des genres qu'il avait étudiés, sans essayer de les grou- per en familles proprement dites ; ou, pour être plus exact, il avait divisé son premier ordre des 4scidies Tethydes en deux grandes fa- RECHERCHES SUR LES TUNICIERS. 141 milles : 4° les Tethyes, renfermant toutes les Ascidies ; 2° les Lucies, ne comprenant que le genre Pyrosoma. Le genre Distoma formait, avec Diazona et Sigillina, la troisième section des Tethyes, caractérisées par « les orifices ayant tous deux six rayons réguliers. » M. Giard conserva ce groupe sous le nom de Distomidæ, en formulant toutefois de sages réserves pleinement justifiées aujourd’hui. « Je crois, disait-il!, que la plupart de mes groupes secondaires sont naturels et resteront. J’excepte le groupe des Perophoridæ,dont le genre Chondrostachys ne m’est pas connu,et le groupe de Distomidæ, qui est de Savigny et composé également d'espèces que je n’ai pu me procurer. » Sous le nom de Didemniens bistellés, Milne-Edwards avait rapproché les Distomidæ des Didem- nidæ proprement dits, qui formaient pour lui le groupe des « Didem- niens unistellés. » Ce n’est, en effet, qu’en 1881 que Della Valle fit connaître une Ascidie (Distaplia) qui, quoique unistellée, appartenait sans aucun doute à la famille des Distomidæ. La caractéristique prin- cipale, la présence d’un tube cloacal, assignée par Savigny, Milne- Edwards et M. Giard aux Distomidæ, devait donc être modifiée. Ac- tuellement, cette nécessité est d'autant plus grande que d’autres genres : Cystodites, Drasche, Colella et Symplegma, Herdman, sont venus s'ajouter aux Distomidæ primitifs. Mes recherches sur l'anatomie des Tuniciers inférieurs m'ont amené à modifier les limites de cette famille. C’est ainsi que j’en éloignerai Sigillina, Diazona et Symplegma, pour y rattacher, au contraire, Clavelina, Oxycorynia et Chondrostachys. Sigillina est un Aplidien nettement caractérisé par la position du cœur à l'extrémité d’un stolon génitalifère. Diazona et Symplegma, par la constitution si particulière de leur branchie, doivent être réu- nis aux Cionidæ. Enfin, l’étude de l'anatomie des Clavelines, de leur mode de développement et de blastogénèse, ne permet pas de placer ces animaux ailleurs qu'à côté des Distomes, avec les genres Oxyco- rynia et Chondrostachys, auxquels ils se relient étroitement. SU Cp 4108 142 FERNAND LAHILLE. Pour définir la famille des Distomidæ comprise dans ces nouvelles limites, on n’a donc qu’à rechercher les caractères communs aux genres : Distoma, Cystodites, Colella, Distaplia, Chondrostachys, Oxycorynia et Clavelina, et voici quel est le résultat de cet examen : Caractères des Distomidæ. — Ascidies aplousobranches. — Vis- cères inférieurs à la branchie. — Cœur et organes reproducteurs dans l’anse intestinale. — Follicules testiculaires nombreux. — Spermiducte droit. — Jamais de spicules calcaires étoilés. — Dispo- sition cœnobitique fort rare. — Blastogénèse pharyngienne ou sta- loniale. — Blastogénèse larvaire nulle ou très tardive. La constitution de la branclie sépare les Distomidæ des Cionidæ ; la position des organes reproducteurs et du cœur les sépare des Polycliniadæ ; le nombre des follicules testiculaires, l'absence de spicules étoilés et de blastogénèse œsophagienne permettent enfin de les distinguer des Didemnidæ. Quant aux divers genres de Distomidæ, voici comment on peut les caractériser t : A. — Orifice buccal à 6 lobes. Tube cloacal. Pas de poche incubatrice. Distoma, Geært. 4774. | Spicules discoïdes. . . . . . . . . . Cystodites, Dr. 1883. | 0 spicules. A° | Poche incubatrice.. . . Golella, Herd. 4885. Languette cloacale. — 4 rangées de trémas. — Pas de’spicules. : . 15, he se ustottelt stér al Distanlia; DNS: B. — Orifice buccal circulaire ou à 6 lobes. en réseau, — Individus libres. . . . . (Clavelina, Sav. 18146. | Individus presque englobés en grappes. dans la tunique commune. Chondrostachys, M.-D. lus. entièrementenglobés Oxycorynia, Dr., 1882. B. — Follicules testiculaires | | 1 On ne peut faire entrer,en ligne de compte dans la diagnose des genres comme l’a fait Herdman, la présence ou l'absence d’un pédoncule. On trouve, en effet, dans le mème genre, des espèces, les unes sessiles et les autres pédonculées : Distoma Panceri et Adriaticum, — D. magnilarca et rosea. RECHERCHES SUR LES TUNICIERS. 143 er Genre : Gystodites. — Drascne, 1883. Ce genre de Distomidæ est nettement caractérisé par la présence de spicules calcaires lenticulaires, formant autour des viscères de chaque Ascidiozoïde une capsule pyriforme. Les cormus sont toujours sessiles, épais et cartilagineux, et sont communs dans toute la Médi- terranée. Les deux espèces décrites à Rovigno par Drasche, se ren- contrent, en effet, à Banyuls et à Cette. J’en ai étudié également des échantillons provenant de Marseille. Enfin, à Naples, où il est très commun, Della Valle a décritune variété de C. durus sous le nom de Distoma Delle Chiajæ. 1. — Cystodites durus, Drasche Syn. : Aplidium lobatum (d’après Delle Chiaje). — Distoma Delle Chiajæ, Della Valle. Caractères spécifiques : Orifices buccal et cloacal à 6 lobes arron- dis. — 4 rangées de trémas. — Estomac lisse. — 6-8-10 follicules testiculaires pyriformes et disposés en secteurs de cercle. Les cormus sont sessiles, largement lobés, leur surface est lisse, leur consistance cartilagineuse. Leur longueur moyenne est de 0",40 et atteint quelquefois 0,15 et même 0,20. Leur épaisseur varie de 0%,004 à 0,02. La couleur, d’un brun tirant tantôt sur le jaune, tantôt sur le rouge, est due à des cellules arrondies, éparses dans la tunique commune et renfermant de nombreuses granulations pig- mentaires insolubles dans l’alcool. Lorsque ces cellules sont peu abondantes, les cormus sont d’un brun café au lait. Lorsque ceux-ci sont en état d'hivernage, ils acquièrent une certaine translucidité qui leur donne un aspect résineux. Les colonies de Naples, d’après Della Valle, sont violacées, et c'est avec la plus grande facilité que cette coloration disparaît dans l’aicool. Vu la contractilité excessive des Distomidæ en général et des 144 FERNAND LAHILLE. Cystodites en particulier, il est nécessaire, avant de fixer les cormus, d’anesthésier les individus par la cocaïne avec le plus grand soin, sinon l'étude de leur branchie est des plus difficiles. Les Ascidiozoïdes sont le plus souvent disposés sans aucun ordre dans la colonie ; quelquefois, pourtant, autour de dépressions arron- dies ou elliptiques, on aperçoit les orifices de huit à douze individus. Les tubes cloacaux convergent bien vers le centre de la dépression, mais comme ils ne concourent pas à la formation d’un orifice cloacal commun, les individus ne constituent pas, à vraiment parler, des véritables cœnobies qui, chez les Distomidæ, ne se rencontrent avec tous leurs caractères que chez Distaplia. Si on examine à un faible grossissement la section verticale d’un cormus, on voit que chaque animal occupe une double logette dont les chambres sont séparées par un étroit couloir, occupé par le pédicule œsophago-rectal. La chambre supérieure cylindrique renferme la branchie, et ses parois ne sont pas revêtues de concré- tions calcaires. L’inférieure est pyriforme, calcaire et renferme les viscères. Le système musculaire des Cystodites étant, avons-nous dit, fort développé (on compte jusqu’à vingt faisceaux principaux de fibres musculaires longitudinales), lorsque la contraction des animaux est énergique, la branchie passe tout entière dans la chambre inférieure à revêtement calcaire. Dans ce cas, si on examine sans être prévenu, l'anatomie d’indi- vidus mal fixés, on pourra commettre de nouveau les erreurs de Drasche, qui prétend que les viscères sont toujours sessiles « Einge- weidesack stets ungestielti», et qui représente, fig. 4, pl. IX, l’intes- tin moyen replié sur le côté ventral de l'estomac. Tunique. — La surface de la tunique présente souvent nom- breuses arborisations calcaires affectant une disposition grossière- ment étoilée. Ces arborisations pénètrent plus ou moins dans l’inté- rieur du cormus. Les cellules vacuolaires sont abondantes, 1 Loc. cit. p. 18. RECHERCHES SUR LES TUNICIERS. 145 principalement dans le voisinage de la surface. Au niveau des viscères elles sont rares, et là on voit prédominer les cellules tuni- cières. Ces dernières forment, autour du pédicule œsophago-rectal, une sorte de bague résistante, bague que l’on retrouve chez la plu- part des Leptoclines. Les cellules pigmentaires sont fort abondantes chez C. durus, et d'ordinaire une granulation plus volumineuse que les autres simule dans ces cellules un noyau. Les spicules du €. durus sont lenticulaires, d'ordinaire biconvexes, et ne présentent que des zones concentriques d’accroissement. Ils atteignent À à # de millimètre, et se recouvrent l’un l’autre comme les tuiles d’un toit pour constituer la capsule qui entoure les viscères et la partie inférieure du pédicule œsophago-rectal. Sous l’action des acides faibles, leur texture devient réticulée, mais ils ne se décom- posent jamais en pyramides, comme c’est le cas chez Lept. resina- ceum, dont les spicules peuvent affecter une apparence pseudo- lenticulaire. On doit remarquer, toutefois, que chez Cyst. Draschii et Cyst. Philippinensis Herd, outre les zones concentriques d’accroissement, les spicules présentent des stries radiales. La tunique de C. durus présente de nombreux amas formés par la réunion de dix à douze petites cellules arrondies et très réfringentes, dont j'ignore l’origine, la nature et le rôle. Description des individus. — Les Ascidiozoïides adultes et bien étalés atteignent 3 à # millimètres, et le pédicule œsophago-rectal est égal à un tiers environ de la longueur totale. Le tube buccal court est surmonté de six lobes arrondis el pré- sente à sa base la couronne tentaculaire, souvent pigmentée en brun, et dont les filets sont nombreux, filiformes et tous sensiblement égaux. Le tube cloacal peut être quatre ou cinq fois plus long que le tube buccal. Chez les Ascidiozoïdes disposés en cœnobie rudimen- taire et éloignés du centre commun, il arrive parfois que le sillon ventral d'un individu est tourné vers ce centre, et, dans ce cas, le tube cloacal est coudé à sa base, de manière à s’appliquer contre la branchie, afin de pouvoir se diriger encore vers ce centre commun. 40 146 FERNAND LAHILLE. Cette tendance si puissante à former une aggrégation cœnobitique est un des faits les plus intéressants de la biologie des animaux infé- rieurs et en particulier de celle des Tuniciers. La branchie de C. durus est cylindrique et présente quatre rangées de trémas seulement. Le nombre de ces organes est ordinairement de 18 par demie-rangée (fig. 77), etleur longueur moyenne de & de millimètre. Le bord des côtes transverses de la branchie est droit, épaissi et cilié et se prolonge toujours du côté gauche en une longue languette de Lister. Chez les jeunes blastozoïdes de Cystodites, la rangée inférieure de trémas se trouve, comme chez D. graphicum, notablement éloigné de la base de la branchie. Un œsophage allongé et infundibuliforme vient déboucher dans un estomac régulièrement ellip- soidal, dont les parois sont lisses à l'extérieur comme à l’intérieur. Le post-estomac, un peu moins long que l'estomac, a, comme lui, son axe à peu près vertical, et présente l’ébauche de la différenciation Fig. 11. — Cystodites durus.Dr.—Individu vu du côté gauche.Ei, Pi, estomac et post- estomac ; Fs, Ds, fol- licules testiculaires et spermiducte ; Af, cel- lules tunicières dispo- sées en couronne au- tour du pédicule æso- phago-rectal. Les muscles n'ont pas été représentés afin de ne passurcharger le des- sin. — Gr. nat, 4mm, en deux parties, propre aux Aplididæ et dont l’Ama- roucium Nordmani offre le dernier degré. L'intestin moyen termine exactement la branche descendante du tube digestif et se trouve recouvert à gauche par les follicules testiculaires. Le rectum, fort long, vient déboucher à la hauteur de la deuxième rangée branchiale. Par leur position et leur constitution les organes reproducteurs de C. durus rappellent tout à fait ceux de D. Lacazi. La forme du spermiducte, qui est spiralé chez D. Lacazii, tandis qu’il ne l’est pas ici, est la seule différence bien nette que l’on puisse signaler. En revanche, les larves sont entièrement dissemblables. Larve. — Chez C. durus, la larve à l’éclosion présente une lon- gueur de 1m®,2 sur un diamètre de 0mm,8. Les orifices buccal et cloacal ont chacun six lobes et sont disposés en angle droit (fig. 78). RECHERCHES SUR LES TUNICIERS. 147 La branchie présente déjà les quatre rangées de trémas de l’adulte et se trouve placée au-dessus d’un amas de vitellus nutritif aussi volumineux qu’elle, et qui empêche de distinguer aisément le tube digestif. La vésicule des sens, volumineuse, est située à droite du plan vertical et médian. La tunique est presque exclusivement constituée par des cellules vacuolaires. Les pédicules des trois ventouses sont longs et s'élèvent au centre d’une sorte de coupe dont les parois cellulaires, d’ori- gine ectodermique, sont si minces qu'une observation très attentive est nécessaire pour les apercevoir. En revanche les cellules qui for- ment le bord de cette coupe sont cu- Fig. 18. — Cystodites durus, Dr. — Larve à biques, volumineuses, fixent forte= l'éclosion. Les prolongementsectodermiques forment une couronne continue qui semble ment les réactifs colorants etsemblent indépendante des organes voisins. Gr. #22. constituer autour des pédicules des ventouses, une sorte d’anneau indépendant des organes voisins. Par son origine, sa position et son rôle, cette couronne est l’homologue des prolongements ectoder- miques ventraux des autres larves, et caractérise celles des Cysto- dites. Je n'ai, en effet, rencontré cette formation chez-aucune autre espèce. Les prolongements ectodermiques situés autour des ventouses peuvent être, chez quelques autres Distomidæ, encore moins marqués. Chez Distaplia, Colella, ainsi que chez Clavelina, ils n'existent plus et se confondent avec la base des ventouses. Les Distomidæ, en dehors de toute hypothèse phylogénétique et au simple point de vue morphogique, constituent donc réellement une des familles les plus inférieures des Tuniciers, leur organisation à l’état larvaire et à l’état adulte étant des moins différenciée. Les prolongements ectodermiques ventraux apparaissent dans le genre Distoma et rappelent}, par leur disposition, ceux des Aplidide. 148 FERNAND LAHILLE. 2. — Cystodites cretaceus, Drasche, 1883. A côté de Cystodites durus, Drasche a décrit une seconde espèce le C. cretaceus. Elle se rencontre également à Marseille, à Banyuls, à Port-Vendres. Mais tandis que dans ces deux dernières localités toutes les colonies que j'ai recueillies étaient fixées sur le dos de Dromies , les colonies provenant de Marseille étaient attachées sur des coquilles de Cardium. Par son anatomie, C. cretaceus ne diffère en rien de C. durus. Drasche le reconnaît lui-même expressément : « Im uebrigen wei- chen die Einzelthiere, sowie die Beschaffenheit des Kalkgehäuses in keiner Weise von Cystodites durus ab. » {L. C., p. 18). Le seul caractère que l’on puisse invoquer, est l'absence de cel- lules pigmentaires dans la tunique. Les cormus restent donc trans- lucides et blanchâtres. Dans les diagnoses qu'il donne de Cystodites durus et cretaceus, Drasche indique formellement, et dans les deux cas, la présence de quatre rangées de trémas à la branchie. Cette observation est fort exacte ; mais alors comment se fait-il qu’il ait figuré C. durus avec six rangées de trémas (pl. IX, fig. 3), surtout après avoir dit qu’il ne différait en rien du C. cretaceus qui est dessiné avec ses quatre ran- gées ? Comment se fait-il, en outre, que les organes reproducteurs soient représentés sur le côté gauche des viscères chez C. durus et sur le côté droit chez C. cretaceus ? Herdman a décrit deux nouvelles espèces de Cystodites C. Draschii (côtes du Brésil, 400 brasses) et C. Philippinensis (Sam- boangan, 10 brasses). Les caractères qui différencient entres elles ces deux formes sont de bien petite valeur. En revanche, elles se distinguent aisément de C. cretaceus et durus par la brièveté de leur pédicule œsophago-rectal, brièveté qui se traduit dans les cormus par la présence d’une logette unique renfermant l'animal tout entier. Les spicules de ces types présentent, en outre, un double système de stries : stries concentriques et stries radiaires. RECHERCHES SUR LES TUNICIERS. 149 En résumé, les diverses espèces ou variétés de Cystodites décrits jusqu’à présent peuvent pratiquement se distinguer ainsi : DANCE PC C. cretaceus, Dr. deux chambres. Branche LP ARS BEun TRS 0 Cdurus, Dr: + violet. . . . . . . C. Delle Chiajæ, D. V. viscères dans / uneseule chambre, | peu vacuolaire. . . C. Draschii, Herd. | — Tunique: très vacuolaire. . . C. philippinensis, Herd, Qme GENRE : Distoma. — Gærtner, 1774. Le genre Distome, nom malheureux en ce qu’il prête à confu- sion, fut créé par Gærtner pour une colonie dont il n’examina que les caractères extérieurs. Voici, du reste, sa diagnose qu’il est utile de rappeler : Distomus variolosus. — « Crusta coriacea, tenax, crassiuscula, subtus » plana, supra verrucis crebris, variæque magnitudinis conspersa, coloris » vel dilute rubicundi, vel ex croceo albicantis. » Verrucæ seu tubercula maximam partem ovalia et ex croceo rubra sunt ; » singulum autem duplici perforatum est orificio minimo coccineo, quod » turgidulus margo ejusdem coloris atque sex distinctus radiis, quasi in » tot discissus fuerit dentes cingit ». GÆRTN. apud Paz. Spicil. Zool. fase. x. Les caractères propres à ce genre nouveau étaient les suivants : Colonie sessile, assez épaisse, renfermant des individus dont les ori- fices débouchent tous deux directement à l'extérieur en présentant chacun six lobes. En étudiant une espèce, que je considère comme très voisine de la précédente, sinon identique, l’Alcyonium rubrum, Plancus, Sa- vigny caractérisa les Distomes au point de vue anatomique par leurs viscères longuement pédiculés et par la position des organes repro- ducteurs placés dans l’anse intestinale, [Il faut donc s’en tenir à cette double diagnose de Gærtner et de Savigny et caractériser de la ma- nière suivante le genre Distoma. Caractères génériques : Cormus épais, presque toujours sessiles. — Tube buccal et tube cloacal à six lobes. — Cœnobies presque 150 FERNAND LAHILLE. toujours nulles ou imparfaites. — Pédicule œsophago-rectal souvent plus long que la branchie. — Organes reproducteurs situés au niveau des viscères et disposés d’ordinaire sur le côté droit. — Pas de poche incubatrice. — Développement des larves dans la cavité cloacale. — Pas de spicules. Dans son mémoire sur les Ascidies composées de Naples, Della Valle semble attacher à la situation des Distomes dans le cormus une grande importance, mais cette importance est imméritée. Savigny avait même, à propos de D. rubrum, donné l'explication de l'absence d'animaux dans les couches superficielles. A l’ouver- ture du corps gélatineux, dit-il, on voit souvent avec surprise que les petits animaux qu'il contient sont à plusieurs lignes de dis- tance de la surface extérieure, comme s'ils n'avaient aucune communication au dehors. La véritable cause de ce phénomène me paraît exister dans la contraction violente et subite de ces animaux plongés dans l'alcool ; contraction qui rompt leur adhérence avec les oscules de l’enveloppe et qui les repousse au fond des cel- lules. Un accident analogue arrive quelquefois à l’Ascidia intestinalis (Sav. Mém., p. 40). Le Challenger, dans son long voyage, n’a pas rencontré un seul Distome. Les colonies qui s’en rapprochaient le plus étaient toutes pédiculées ; les animaux présentaient tous une poche cloacale incu- batrice pour le développement des larves et, enfin, les organes re- producteurs étaient placés sur le côté gauche des viscères. Ces deux derniers caractères différentiels on conduit Herdman à créer le genre Collela, genre dont nous diseuterons plus tard la valeur. Les cormus de certains Distomes de Rovigno (D. Adriaticum, par exemple) sont bien aussi pédiculés, mais les individus ne présentent jamais de poche incubatrice. Collela est surtout voisin de Distaplia qui présente quatre rangées de trémas, un diverticule dela paroi péri- branchiale où se développent les larves et des colonies pédiculées. Je n’ai pas encore trouvé de Distomes sur les côtes de l’Atlantique ou de la Manche. Et depuis Savigny, qui a signalé D. rubrum comme habitant les mers d'Europe, et Sars qui décrivit le D. vitreum des RECHERCHES SUR LES TUNICIERS. 151 mers du nord, on n’a, à ma connaissance, signalé des Distomes proprement dits, que dans la Méditerranée. La constitution des parois stomacales peut, ainsi que le nombre de rangées de trémas, servir avantageusement à la spécification de ces animaux que l’on peut caractériser de la manière suivante : brun-résineux. D. mucosum, Dr. ARRET Con noirâtre non sab. D. plumbeum, D. V. lisses. Trémas plus de 3 R. ; noirâtre sablonneux.. D. Costæ, D. V. Cormns:Miironge era D. rubrum, Sav. Parois stomacales réliculées. — 24 R. trémas. — Cormus claviforme. D. adriaticum, Dr. cannelées. — 12 R. trémas. — Cormus hyalin. . . D. cristallinum, Ren. Je ne signale pas dans ce tableau : 4° Le D. rariolosum, Gært. Cette espèce doit être, en effet, réunie au D. rubrum de Savigny qui n’en diffère que par l'aspect extérieur. Encore faut-il ajouter que les petites bosselures de la suface, signa- lées par Gœrtner, sont causées par l’action de l’alcool sur les cormus ; 2° Le D. fuseum, D. Ch. Cette espèce n’est très probablement que le Styela glomerata, Ald. Della Valle, qui connaît fort bien les Tuni- ciers de Naples que Della Chiaje a pu rencontrer, partage, du reste, cette manière de voir ; 3° Le D. Delle Chiajæ, D. V., qui appartient, comme nous l'avons vu (p. 143), au genre Cystodites et non au genre Distoma ; &° Le D. Pancerii, D. V., qui n'est qu’une simple variété du D. plumbeum. Les espèces de Distomes que j'ai pu étudier sont au nombre de deux ; ce sont : D. cristallinum, Ren., et D. plumbeum, D. V. 1. — Distoma cristallinum, Renier. Syn. : Polycitor cristallinum, Ren. — Amaroucium albicans, M.-Edw., d’après Grübe. Je n'ai eu à ma disposition que deux échantillons de cette espèce. Ils provenaient des fonds coralligènes de Marseille. Les cormus sont 152 FERNAND LAHILLE. presque sessiles, entièrement transparents, et mesurent 0,02 de largeur sur 0,03 de longueur. Les animaux sont disposés absolu- ment sans aucun ordre, et, comme l’a fort bien représenté Drasche (fig. 4, tab. IX), les prolongements ectodermiques basilaires sont, chez cette espèce, ramifiés. Ce caractère me semble particulier à ce distome; aussi, j'attire volontiers sur ce point l'attention des nouveaux observateurs. Les individus ayant été tués sans précaution, il m'a été impossible, vu leur état de contraction, de compter exacte- ment le nombre de leurs rangées de trémas. Tout ce que je puis dire,c’est que ce nombre dépasse neuf et ne surpasse pas quinze. Le pédicule œsophago-rectal est fort long. Dans le tableau dichotomique précédent, j'ai caractérisé D. cris- tallinum par la présence d’un estomac cannelé ; mais je dois fournir à ce sujet quelques explications. Si on étudie le développement de l'estomac, chez l'oozoïide du Parascidium elegans, on voit d’abord que cet organe, régulièrement ovoide, possède au début des parois lisses. Quatre à cinq jours après la fixation de la larve, il se produit, suivant une dizaine de méridiens, une différenciation cellulaire. En ces points les cellules sont plus pressées qu'ailleurs ; elles se mul- tiplient plus activement et produisent de la sorte une série d’évagi- nations méridiennes ou cannelures. La couleur jaunâtre de ces cellules devient plus sombre et un grand nombre d'entre elles de- viennent glandulaires. Chez le D. cristallinum, je n’ai pas observé de cannelures propre- ment dites ; mais les estomacs des nombreux individus que j'ai exa- minés présentaient tous le stade qui les précède immédiatement. Les parois étaient régulièrement épaissies suivant des méridiens, et il est fort possible que ces cannelures rudimentaires soient entière- ment développées dans des cormus plus âgés que ceux que J'ai pu examiner. 2. — Distoma plumbeum, Della Valle. J'ai rencontré ce Distome pour la première fois à Cette, je l'ai re- trouvé ensuite devant la jettée de Port-Vendres par une prafondeur RECHERCHES SUR LES TUNICIERS. 153 de 30 mètres environ. Les cormus que j'ai observés s’étendaient sur une surface d’une dizaine de centimètres carrés. [ls étaient sessiles, incrustants, et leur plus grande épaisseur ne dépassait pas 1 centi- mètre. Leur surface est lisse, leur couleur noire, parfois brunâtre, le plus souvent bleuâtre (ardoisé). Il est à remarquer que cette couleur se conserve dans l'alcool. La tunique commune est de consistance cartilagineuse, n’agglutine pas le sable, mais renferme souvent de nombreux excréments reje- tés par les individus qui, par une contraction violente, se sont éloi- gnés de la surface du cormus. Les éléments vacuolaires de la tunique sont très visibles et on aperçoit entre eux des sortes de traînées de cellules très étirées, renfermant des granulations de pigment noir. Vers la surface, principalement, on observe en outre de nombreuses et grandes cellules migratrices dont le protoplasma est légèrement granuleux. Les individus, presque toujours disposés sans ordre dans le cormus, mesurent 3-4-5 millimètres de long dans leur plus grande extension. La branchie est cylindrique, et comme quelques sinus inter-trématiques renferment des muscles dans leur intérieur, cet organe est rarement étalé. On n’observe jamais que trois rangées de trémas. Ceux-ci sont très étroits et très allongés (7/10 de millimètre) et ne présentent pas toutefois de sinus anastomotiques transverses, comme nous en verrons chez Distaplia. La glande neurale est cordiforme et volumineuse (4/10 de milli- mètre) et en contact immédiat avec un pavillon vibratile de forme sphérique. Les filets tentaculaires, au nombre de huit, s’insèrent à deux niveaux différents sur le tube buccal. Le pédicule œsophago- rectal de D. plumbeum est ordinairement plus court que la branchie et aboutit à un estomac plus ou moins rond, à parois lisses et d’un diamètre de 3/10 de millimètre. Le post-estomac mesure 2/10 de mil- limètre, et il esttrès nettement différencié, ainsi que l'intestin moyen qui lui fait suite. Ce dernier est avoïde, vertical, est aussi long que le post-estomac. Les follicules testiculaires petits, sphériques ou py- riformes, au nombre d’une trentaine environ, sont disposés sans ordre dans l’anse intestinale qu'ils débordent. 154 FERNAND LAHILLE,. Chez aucun des Distomes qu’il décrit, Della Valle n'indique le nombre de rangées de trémas, et ses descriptions incomplètes d'ail- leurs, n’étant accompagnées d'aucune figure, rendent difficile La re- connaissance de ses espèces. Son 1). Pancerii n'est probablement qu'une simple variété du D. plumbeum, car la seule différence qui l'en distingue n’est qu'une plus grande longueur du pédicule œso- phago-rectal. Jusqu'à présent, on ne connaissait que le D. mucosum, D., qui possédât trois rangées de trémas seulement. Ce fait était d’autant plus singulier qu'on était habitué à considérer le nombre de trémas comme constant dans le même genre : 1 chez les Doliolums, 3 chez les Di- demnums, # chez les Leptoclinums. Tandis qu’à côté du D.mucosum, Drasche signalait le D. adriaticum, qui rpésentait vingt-quatre ran- gées de trémas! L'observation que j'ai faite du nombre de rangées de trémas du D. plumbeum prouve d’abord une fois de plus qu'il n'y a pas de règles sans exceptions, et que l'absolu n'existe pas en histoire naturelle, ensuite qu’au point de vue de la constitution de la bran- chie, quelques Distomes ne sont pas plus élevés que les Didemnes et qu'ils représentent mieux qu'eux, à cause de la différenciation moins profonde de leur appareil reproducteur et de toute leur orga- nisation, les formes inférieures et primitives de Tuniciers. Le D. mucosum se distinguera toujours facilement, au point de vue anatomique, du D. plumbeum, par ses trémas très courts, son pédicule æsophago-rectal plus long que la branchie, son post-esto- mac non différencié de l'intestin moyen, enfin par son tube cloacal presque étalé en languette. 3me GENRE : Colella. — Herdmann, 1885. N'ayant pas eu à ma disposition des colonies appartenant à ce type, je ne puis présenter que quelques criliques générales. À mon avis, ce nouveau genre de Tuniciers n’a pas une bien grande valeur, et je crois qu'Herdmann aurait bien pu rattacher au genre Distaplia toutes les neuf espèces qu'il réunit sous le nom de Colella. RECHERCHES SUR LES TUNICIERS. 155 Tout d’abord, le caractère et la particularité si singulière du genre Distaplia, la présence d’une poche incubatrice se retrouve chez Co- lella. Chez la plupart des Colella, le nombre de rangées de trémas de la branchie est de quatre, comme chez Distaplia. L’estomac, d’abord horizontal chez les larves de ces deux genres, devient vertical chez les adultes, et ce changement de direction se trahit ensuite chez eux par l’asymétrie de l'organe. La larve de Colella pulchra rappelle tout à fait celle de D. magni- larva. On peut noter chez toutes les deux l'absence de prolong e- ments ectodermiques et le renflement volumineux de la base des ventouses. Enfin, comme chez les Distaplies, les Colelles forment des cormus toujours plus ou moins pédiculés et leurs viscères sont semblable- ment disposés. La principale différence qui sépare Colella de Distaplia est l'ab- sence de cœnobies et, par suite, de cloaques communs. Mais ce ca- ractère perd presque toute sa valeur si on fait attention que dans le genre voisin, Distoma, certaines espèces présentent la disposition cœnobitique, tandis que chez d’autres, au contraire, tous les indivi- dus se trouvent épars dans le cormus. Par ses caractères extérieurs, Colella se rapproche, d’un autre côté, du genre Oxycorynia, Dr. Sa blastogénèse franchement stolo- niale (Colella Thomsoni), les languettes de Lister qui, de latérales sont devenues exactement dorsales, sont, enfin, tout autant d’affi- nités qui les rattachent à la section des Clarelinidæ. &me GENRE : Distaplia. — Della Valle, 1880. Ce genre fut créé en 1880 par A. Della Valle pour deux formes de Tuniciers qu'il avait rencontrées dans les environs de Naples. Ce na- turaliste en donna une diagnose très précise (Nuove contribuziont, p.18); mais, comme nous le verrons, il n’en étudia que très incom- plètement l'anatomie. C’est pour ce motif que j'ai cru devoir repren- dre l'étude de ce type intéressant à tant de points de vue, type qui 156 FERNAND LAHILLE. permet de mieux comprendre les rapports qu’affectent entre eux les Tuniciers inférieurs. Drasche n’a-pas rencontré à Rovigno le D. rosea, mais une forme extrêmement voisine, au moins quant à l’aspect extérieur, et il Pa nommée D. lubrica. Il n’en décrit pas l’organisation interne ; il se contente de dire que la forme des individus est parfaitement sem- blable à celle de D. magnilarva. Pourtant, dans le dessin qu'il donne (pl. IX, fig. 8), on remarque entre ces animaux de profondes diffé- rences. C'est ainsi que chez D. lubrica ni les faisceaux musculaires, ni les prolongements ectodermiques ne se trouvent indiqués. La branchie ne possède à chaque rangée que six trémas égaux. L’œso- phage est spiralé. L’estomac a une forme régulière. L’ovaire est in- férieur aux follicules testiculaires et dépasse légèrement les viscères. Enfin, D. lubrica s'éloigne des deux autres formes décrites par Della Valle par les mucosités que sécrète la surface du cormus. Tous ces caractères, et principalement la symétrie de l'estomac, font done de D. lubrica une espèce bien distincte. Drasche a donc commis une erreur de rédaction, car il n’est pas permis de supposer que le des- sin qu'il donne soit fantaisiste. Herdmann a créé, sous le nom de D. Vallii, une espèce rencontrée dans la Méditerranée par le Porcupine et qui n’est qu'une simple va- riété du D. rosea. C’est, du reste, à cette dernière espèce qu'Herd- mann l'avait d’abord rapporté, mais le cormus étant pédiculé et pré- sentant des amas de pigment passant du violet sombre au pourpre, le naturaliste anglais modifia sa première manière de voir. Della Valle et Drasche nous apprennent pourtant que l'on voit chez D. magnilarva et chez D. lubrica la coloration pigmentaire passer fré- quemment du rose carmin au brun rougeâtre et du rouge vif au violet. En outre, les cormus du D. rosea sont toujours plus ou moins pédieulés. Dans toute la longue description que donne Herd- manon du D. Vallii, je n’ai pas remarqué un seul caractère qui ne pût s'appliquer à D. rosea. Ceci prouve une fois de plus qu’on ne doit at- tacher à la couleur du pigment et à la forme de la colonie qu'une va- leur très secondaire, et que ces différences ne peuvent autoriser la création d'espèces nouvelles. RECHERCHES SUR LES TUNICIERS. 157 Après ces quelques remarques, voici comment je crois devoir Ca- ractériser le genre Distaplia et les trois espèces qui le représentent actuellement. Caractères génériques communs à d’autres genres : Cormus plus ou moins pédiculés. — Animaux disposés en véritables cœnobies sim- ples ou composées. — Distomidæ à quatre rangées de trémas et pré- sentant une poche incubatrice pour le développement des œufs. — A l’éclosion des larves, les pédicules de leurs ventouses sont renflés à leur base. Caractère générique propre : Les quatre rangées de trémas de la branchie présentent des sinus transverses de soutien. Caractères distinctifs des espèces : ne. : SSSR. er eue D. rosea, D. V. asymétrique, à parois AVE £ Estomac : ris lréticulées. Sue. . D. magnilarva, D. V. EU T ON EN RRREES DR Pen ee . D. lubrica, Dr. 1. — Distaplia magnilarva, Della Valie. Syn. : Cellulophana pileata, Schmidt; — Polycitor Clodiensis, Re- nier; — Didemnium styliferum, Kowalevsky ; — Didemnum (?), Huxley (Icones zoot. Carus, fig. 27, 28, 29, tab. XVIIT). Caractères spécifiques : Cormus nettement pédiculés. — Couleur rose clair lavé de pourpre. — Ordinairement une seule cœnobie com- posée par cormus. — Languette cloacale très développée. — Esto- mac asymétrique à parois réticulées. — Tubes rénaux présentant des ampoules terminales. — Ovaire situé au-dessus des follicules testi- culaires. — Largeur de la branchie : 2-3 millimètres. — Longueur maxima des individus : 9 millimètres. L'aspect extérieur des colonies de D. magnilarva rappelle tantôt celui de certains Fragarium elegans de forme ellipsoïdale à pédicule court et large, tantôt celui de gros Morchellium argus, de forme co- nique, à base ramifiée et serpentante. La hauteur moyenne totale des colonies est de 3-4 centimètres, la hauteur du pédicule ne dé- passant pas À centimètre. La couleur de la tête est d’un rose chair 158 FERNAND LAHILLE. lavé de pourpre. Le pédoncule est jaunâtre, et on distingue dans son intérieur les prolongements stoloniaux renfermant des masses de pigment rose carminé. Il n'existe d'ordinaire dans chaque colonie qu’un seul cloaque commun placé à la partie la plus élevée du cormus, et les individus forment à l’entour une cœnobie composée. La branchie translucide s'aperçoit à travers la tunique, sur le fond de laquelle tranchent en blanc-jaunâtre : les filets tentaculaires, le sillon ventral et le ganglion nerveux. Chez D. rosea, le pigment ré- pandu dans la tunique est si abondant qu’on ne peut plus, comme ici, distinguer les animaux à travers la tunique commune. Les Distaplies hivernent, comme la plupart des Aplididæ. Les co- lonies acquièrent alors une consistance cartilagineuse, les orifices disparaissent, comme chez Amaroucium Nordmani, et la couleur rose passe au brun vineux. Della Valle a observé, du reste, de son côté, ces diverses modifications. Tunique. — A propos de la constitution de la tunique, je dois si- gnaler une particularité qui n’a pas été encore décrite. Toute la sur- face du cormus est hérissée de nombreuses papilles coniques, assez volumineuses, hyalines, disposés sans ordre et renfermant à leur extrémité une cellule de nature toute spéciale et dont le protoplasma est fort réfringent. L’existence d’une tunique commune papillaire est un caractère qui s'ajoute à bien d’autres pour rattacher les Distaplies aux Didemnidæ et aux Leptoclines en particulier. Les cellules vacuolaires, très visibles dans la tunique de la larve, le sont bien moins dans les cormus adultes. Ici les cellules tunicières étoilées prédominent. Leur protoplasma est chargé de granulations pigmentaires, tandis queleur noyau reste toujours clair et forte- ment refringent. Blastogénèse.— Il ne rentre pas dans mon plan d'exposer le pro- cessus de la blastogénèse chez Distaplia, je me bornerai à relever, à ce sujet, une erreur commise par Della Valle. D’après cet observateur, les prolongements postérieurs du corps seraient uniquement formés par l’ectoderme et n’interviendraient pas RECHERCHES SUR LES TUNICIERS. 159 dans la blastogénèse. Les bourgeons seraient tous produits par une série de scissions répétées d’une double vesicule, formée à la base du sillon ventral et provenant d’une extroflexion des tissus ectoder- mique et endodermi- que. Ce mode de bour- geonnement, au lieu d’être constant, comme le prétend Della Valle, n’est que transitoire et ne subsiste qu'autant que les tubes endoder- miques ne se sont pas développés complète- ment. Fig. 19. — Pyrosoma elegans. — Stolon panblastique. — Le cul-de-sac postérieur du sillon ventral fournit le diverticule en- Un peu avant l’éclo- dodermique du stolon. — Gr.1°°. sion de la larve, le cul-de-sac postérieur ventral s'allonge en un tube très court, poussant devant lui l’ectoderme et il se forme ainsi un premier stolon, entièrement comparable à celui de Py- rosoma (fig. 79). Mais, tandis que chez Pyrosoma ce stolon s'al- longe beaucoup et se divise en trois ou quatre blastozoïdes tout en restant fixé au parent, ici on le voit s’en séparer de fort bonne heure. Il continue, toutefois, à s’allonger un peu et s’étrangle ensuite en son milieu (fig. 80 Z.). Ce phénomène se répétant un certain nombre de fois, il se forme tout autant de blastozoïdes. Ceux-ci sont dépourvus d’organes reproducteurs, comme l’a bien reconnu Della Valle. Ce fait, du reste, s'explique facilement si on songe aux faibles moyens de nutrition dont disposent ces animaux séparés, dès l’origine, du parent et dépourvus de réserves alimen- taires. Plus tard, lorsque l’anse intestinale de l’oozoïde est devenue verticale, on voit les bourgeons naître sur les prolongements postérieurs. Morphologiquement, ces stolons sont homologues à ceux des Salpes, des Pyrosomes et des Distaplies très jeunes. Ils sont, en effet, constitués par un diverticule endodermique de la cavité bran- 160 FERNAND LAHILLE. chiale et par un diverticule ectodermique de la paroi du corps. Physiologiquement, ils s’en distinguent toutefois en ce qu'ils ne se fragmentent plus tout entiers en blastozoïdes (fig. 81). Ceux-ci ne l naissent plus qu’en certains points, com- me cela se passe chez les Colelles, les Cla- A CSS] res D ‘J A velines, les Péropho- res. Pour exprimer ces différences dues DAPRRRELE LA à des adaptations, à nn , Et la vie coloniale péla- Fig. 80. — D. magnilarva, D. V. — Larve à l’éclosion. Za, stolon 6j ù 1 e panblastique détaché de très bonne heure de l'individu et se divisant CES et à la vie colo en deux bourgeons. On voit également l'origine d’un second stolon. niale fixée, je propose de nommer les premiers stolons : stolons panblastiques, et les seconds : stolons méroblastiques. Bouche et cloaque des individus. — Le tube buccal des animaux adultes est presque aussi large que la branchie elle-même (2"®). Il est court, légèrement évasé, et présente six lobes obtus peu nets, renfermant dans leur intérieur quelques cellules chargées de pig- ment. Les lobes buccaux sont bien marqués chez la larve à l’éclosion (fig. 80), et aussi chez les jeunes blastozoïdes (fig. 83). La museu- lature du tube buccal est presque entièrement circulaire, et c’est à peine si on observe quelques rares filets longitudinaux. Le sillon antérieur, assez éloigné, chez la larve, de la couronne ten- taculaire, en est rapproché chez l'adulte. Au début, cette couronne est formée de quatre tentacules triangulaires qui arrivent presque au contact. A l’éclosion, 1l s’en forme un nouveau de chaque côté du filet dorsal (fig. 82) ; il s’en produit ensuite un autre de chaque côté du filet ventral, puis du filet dorsal. C’est ainsi que la plupart des Distaplies présentent dix tentacules, filiformes, pigmentés et très courts. Le nombre de ces organes s'élève exceptionnellement jus- qu'à seize. Les larves, à l’éclosion, possèdent un tube cloacal plus développé RECHERCHES SUR LES TUNICIERS. 161 que le tube buccal, mais les lobes cloacaux sont souvent à peine indiqués. Quelquefois, cependant, ils sont distincts et on en compte six (fig. 80). Chez les jeunes blastozoïides (fig. 83), l’ori- fice cloacal est circulaire, et le tube cloacal, à peine indi- qué par le rapprochement de fibres musculaires circu- laires, passe d’une manière insensible à la paroi cloa- cale, ici très renflée. Chezles blastozoïdes adul- tes, la large cavité cloacale précédente n'existe plus. Le plafond du cloaque s'est, en effet, prolongé en une longue languette à sommet pointu, tandis que le plancher et les côtés de la cavité avaient cessé de s’accroître.Les trois rangées supérieures de tré- mas sont ainsi mises à dé- couvert, et la cavité péri- Da BG Scémade stolon branchiale devient virtuelle panblastique. Tout le stolon = ; ne ; - se transforme en bourgeons dU NIVEAU des deux rangees Fig. 83. (Salpes, Pyrosomes).— D, sché- 4 Fe SO Diematis ma de siolon méroblastique. moyennes, le bord libre de #5 ianea Velo Certains points du stolon pro + : | SE Dee AS LE duisent seuls des bourgeons l’orifice cloacal étant alors aire vue de l’intérieur re BANEe = de la branchie; b, orifice , olon panhb'astique de à à Er. : x ea # Doliolum ; B, stolon panblas- fort rappi oché en ces points DE Pro ee tique des Distaplies jeunes. : J , AN Mo nes ne À Dans ces deux derniers cas, du sillon ventral. C’est exac- rieur: D: paxiion xibrar la séparation du stolon et de à ee FEAT l'individu a lieu avant la forma- fement Ce qui se passe chez É d tion des bourgeons. qe 83. nr aus NT 9 J eune bastozoïde, Œi, D. Lacazi (fig. 72, p.131). pi M œsophage, _ estomac, post-estomac, Système musculaire. — Les muscles sont fort iiestin moyen; Se, sto! L 5 5 ‘ 5 lon — Gr. 15 développés chez les Distaplies. Outre les filets cir- * culaires buccaux et cloacaux, on en observe de nombreux dans la paroi du corps. Ceux-ci présentent une direction générale d'avant en 41 162 FERNAND LAHILLE. arrière et de bas en haut, de telle sorte qu'ils sont parallèles aux filets du tube cloacal. La figure 83 indique cette disposition. Ils ne sont interrompus ni sur le dos ni sur le ventre ; mais, en ces points, les fibres d’un même faisceau s’écartent l’une de l’autre. Les sinus transverses de la branchie renferment également des muscles qui se relient aux muscles de la paroi du corps en traver- sant des sinus péribranchiaux. Ces sinus sont au nombre de deux ; de chaque côté de la branchie et à chaque rangée; ils rattachent et fixent l'organe respiratoire à la paroi du corps. Chez les Ascidies supérieu- res, ces sinus sont bien plus nom- breux, et chez les Aplididæ ils attei- gnent leur plus grand développement. Lä, en effet, les sinus transverses communiquent latéralement et pres- que entièrement avec la portion de la cavité générale comprise entre l’ecto- derme et la paroi péribranchiale. En d’autres termes, comme je le disais Fig. 85. dans une note à l’Institut (C. R., Fig. 84. — D. magnilarva, D. V. Coupe A . transversale du sillon ventrale Lfr,limite. Sept. 1886), les côtes "iranSrerses de la cavité branchiale ; Tr,trémas; Rr, à replis marginaux ; Mr, zone médiane; G#r, SONt soudées sur presque toute leur Gsr, Gr, zones glandulaires ; C,r, zone x : S ciiée; Fm, muscles ventraux.— Gr. 4%, étendue à la paroi du corps par un Fig. 85. — Coupe du rectum et de la portion dorsale de la branchie. Les muscles der- grand sinus sanguin. M. Ch. Maurice saux s’aperçoivent en coupe de part et ; d'autre du sinus dorsal Sde. — Gr. 45°, a énoncé, de son côté, dans sa Mono- graph'e du Fragaroïides, 1888,le même fait, en disant : « Les bandes transversales du tissu fondamental de la branchie sont soudées direc- tement à la tunique interne de chaque côté de la gouttière hypobran- chiale sur un tiers environ de leur pourtour » (loc. cit., p. 150.) Les muscles longitudinaux de la branchie de Distaplia sont bien plus développés que les muscles circulaires. Du côté ventral, ils sont situés dans les lèvres du sillon ventral (fig. 84). Ils s’incurvent vers le bas, entre la portion ventrale de l’aire œsophagienne et le cul-de-sac postérieur du sillon, et les muscles du côté droit se conti- RECHERCHES SUR LES TUNICIERS. 163 nuent avec ceux du côté gauche. Ils limitent vers le haut le cul-de- sac antérieur du sillon et les muscles d'un côté vont s’irradier de l’autre en devenant horizontaux et se reliant aux filets circulaires buccaux. Les muscles dorsaux courent de chaque côté du sinus dorsal de la branchie (fig. 85). Vers le haut, quelques rares filets se rendent dans la languette cloacale et ne se prolongent guère au-delà de sa base. La plus grande partie des deux faisceaux s'étend de chaque côté du ganglion nerveux et s'anastomose avec les filets buccaux. Vers le bas, les muscles dorsaux se trouvent placés entre la branchie et le rectum ; une portion va former une bague autour de la partie anté- térieure de l’œsophage, tandis que les autres faisceaux se conti- nuent directement en arrière en suivant le rectum et viennent se perdre sur les stolons. Disons, enfin, tout de suite, qu’il existe un sphincter musculaire, véritable sphincter anal placé immédiatement au-dessous des oreil- lettes du rectum. Pour terminer ce qui a trait au système musculaire de Distaplia, voici ce qu'on observe dans sa formation. Les cellules mésodermiques qui deviendront musculaires se dispo- sent sur deux, trois ou même quatre rangs parallèles et s’étirent beau- coup suivant ces directions. Le filet musculaire de l'adulte est done formé, le plus souvent, de plusieurs rangs de cellules placées bout à bout et que la potasse à 40 0/0 permet de mettre en évidence. Sur des coupes perpendiculaires à la direction des filets muscu- laires, on voit la substance contractile différenciée sur toute la péri- phérie des cellules sous forme de prismes transparents, à sommets dirigés vers l'intérieur. MM. Van Beneden et Julin ont observé, du reste, chez Clavelina, une constitution analogue. Branchie. — Della Valle, dans son étude anatomique du genre Distaplia, ne consacre que quatre lignes à l'examen de la branchie. La particularité la plus essentielle de cet organe, la présence de sinus intermédiaires transverses n’est pas indiquée, et la présence de languettes de Lister est formellement niée! Voici, en effet, toute sa 164 FERNAND LAHILLE,. description (loc. cit., p. 6). « Le serie delle fessure branchiali sono quattro ben visibili negli animali giovani a cagione della grande transparenza della tunica esterna. Non vi esiste nel lato neurale, nè altrove alcun, prolungamento della parete del sacco branchiale verso l'interno. L'endostilo non presenta nulla di specialmente notevole. » Il est donc nécessaire de reprendre toute cette étude. La branchie de Distaplia est cylindrique, sa longueur est égale à deux fois celle des viscères et atteint 5°" dans son plus grand développement. Elle est constituée par quatre rangées de trémas très allongés (1"") qui diminuent réguliè- rement de longueur du côté ventral, comme on le voit sur les fig. 83 et 87. Cet aspect est surtout marqué chez les jeunes indivi- dus. Les côtes transverses sont très déve- loppées, et continues du côté dorsal. Leur bord est fortement cilié et se prolonge du côté gauche,au niveau du 8e ou 1A0"etréma, en une longue languette de Lister (0mm5), toujours très visible , et il est fort surpre- nant que Della Valle ne l’ait pas aperçue. Il HU: | Les trémas sont au nombre de 25 à 30 Fig. 87, . r 4 °4r par demi-rangée.Leurs deux extrémités pré- Fig. 86.— Portion dorsale de la bran- É AS chie. Dm, muscles dorsaux ; Dr, sentent des cellules marginales très épaisses sinus dorsal ; Lr, languette de Lister, — Gr. qui affectent une disposition ogivale. Ils Fig. 87. — Distaplia magnilarva. Fe Portion ventrale de la branchie sont soutenus en leur milieu par une côte vue du côté interne. Am, muscles transverses; Cr, côle transverse; intermédiaire transverse qui ne les inter- C3:7, Sinus intermédiaire transverse Svr, sillon ventral. — Gr. rompt pas d'habitude. Ce n'est que très ex- ceptionnellement (fig. 87) qu’on voit les trémas ne pas s'étendre d’une côte transverse à une autre côte. L'étude de la branchie de Distaplia permet de préciser ce qu’on doit entendre par rangée normale de trémas chez les Clavelines, les Ciones et les autres genres RECHERCHES SUR LES TUNICIERS. 165 supérieurs. La rangée normale est celle qui est comprise entre deux côtes transverses vraies. Celles-ci sont caractérisées : 1° par la pré- sence d’une bordure ciliée ; 2 d’une languette de Lister ; 3° de filets musculaires ; 4° elles ne sont pas interrompues du côté dorsal ; 5° elles sont sou- vent rattachées à la paroi du corps par des sinus péri- branchiaux. Toutes les côtes transverses qui ne présentent pas au moins les quatre premiers Caractè- resprécédents,sont des côtes surajou- tées, de nouvelle formation,côtes in- termédiaires de der et 2e ordre qui exis- tent chez les types LS D TEE Fig..88. — D. magnilarva, D. V.— Jeune larve. Le vitellus DRE EH ÈL ï ï core à peine résorbé. Ve, vésicule cardiaque ; Ecd, Ecg, tubes endoder- organisation. miques droit et gauche. à ; ë Fig. 89. — D. magnilarva, D. V. — Larve à l'éclosion. Le vitellus est Ce» m'est HU arte et l'intestin est devenu horizontal. Formation des côtes anasto- peu avant l'éclo= motiques transverses dans la rangée inférieure de trémas.— Gr. nat, 2°». sion des larves de Distaplia que se forment chez cet animal les sinus anastomotiques transverses de la branchie et voici par quel procédé : Au début, on voit les trémas se constituer comme d'habitude par une inégalité de développement cellulaire. Trois à quatre cellules de la paroi péribranchiale interne s’épaississent en certains points; il se produit une invagination (hémi-tréma) qui vient s'ouvrir ensuite dans la cavité pharyngienne. Je dois ajouter que jamais je n'ai observé ici d’invagination endodermique allant à la rencontre de la première. Les trémas forment d’abord de simples boutonnières arrondies; les 166 FERNAND LAHILLE. quatre rangées se produisent simultanément à partir de la région dorsale et sous-cloacale (fig. 88). Il en résulte que la rangée la plus inférieure se trouve relativement très éloignée de la partie inférieure du pharynx. Ce caractère ici transitoire, persiste, comme nous l'avons vu, chez des Tuniciers inférieurs, chez certains Didemnum notam- ment. Les côtes transverses apparaissent en même temps que les trémas. Le refoulement qui doit former la cavité péribranchiale s'étend ensuite de plus en plus vers la partie inférieure du pharynx, à mesure que l'animal grandit. La rangée inférieure de trémas présente une cer- taine avance dans son développement. On aperçoit bientôt sur le milieu des sinus inter-trématiques de cette rangée de petites papilles bifurquées dont les deux branches horizontales ne tardent pas à se souder entre elles (fig. 89) pour constituer ce que j'ai appelé un vais- seau ou sinus anastomotique transverse. Puisque cette formation ne se produit qu'après la constitution des trémas, il est naturel que les tré- mas ne soient pas interrompus, et pour le dire tout de suite, ces sinus transverses se retrouvent non seulement chez Clavelina, mais chez les Cionidæ et les Ascididæ. Leur rôle est évident : les trémas atteignent, chez Distaplia, 1%" de longueur; les sinus inter-trématiques, en 2 revanche, n’ont que 5 de millimètre et, par suite, afin d'assurer leur soutien, ils se trouvent reliés ensemble par le milieu de leur hauteur. En employant une comparaison vulgaire, on peut dire que ces sinus transverses jouent Le rôle des fils de fer qui relient les divers piquets verticaux d’une clôture. Outre ce rôle de soutien, ils augmen- tent la surface respiratoire et favorisent, par suite, la nutrition gé- nérale des individus. Après la fixation de la larve, chez les adultes, ces sinus se déve- loppent par un autre procédé. Le plissement de la paroi interne de la branchie précède alors la formation des trémas (C,r fig. 87). La branchie de Distaplia présente, entre les côtes transverses, une côte dorsale (Dr., fig. 85) formé par le grand développement qu'a pris le sinus sanguin dorsal Sde. Cette côte, visible surtout sur les coupes, est constituée par un épithélium pavimenteux fort mince, RECHERCHES SUR LES TUNICIERS. 167 et si on compare les fig. 85 et 90 on verra que la côte dorsale n’est que le reste du plafond du pharynx, reste plus considérable chez là larve que l'adulte et qui n’a pas été ajouré de trémas. Sillons de la branchie.— Le sillon ventral, légèrement recourbé chez la larve (fig. 88 et 89), est presque rectiligne chez l'adulte. Si on l’examine sur une coupe transversale (fig. 84), on constate que les zones glandulaires inférieures ou moyennes sont seules dévelop- pées. La zone supérieure G3r. est seulement indiquée par un léger épaississement de l’endoderme. La zone ciliée supérieure, qui n’a pas été bien rendue par le cliché, se trouverait placée entre Ger et G;r. La zone ciliée inférieure est toujours Fig. 90.— D. magnilarva, D. V. — Larve sur les coupes la plus fortement à l'éclosion. Coupe horizontale de la portion dorsale du corps ; Ri, rectum ; Dr, côte dor- ré = à sale ; Dm, muscles dorsaux ; Tn, tube neural; colorée. Au-dessus de la zone glan Sde, sinus sanguin dorsal ; Tt, tunique ; Et, : Paie ctoderme. dulaire supérieure, l’ectoderme de- ‘ vient très mince, comme chez Pegea confederata (fig. 17), et comme chez cette même salpe, l'extrémité libre ou replis marginaux Rr des lèvres du sillon sont fortement ciliées. Une particularité des plus intéressantes à signaler, consiste dans la présence des muscles placés dans l’intérieur des replis margi- naux. La contraction de ces muscles rapproche les lèvres du sillon qui devient ainsi, physiologiquement, un véritable tube glandulaire venant s'ouvrir dans le sillon antérieur. Chez les Distaplies la paroi pharyngienne, percée de trémas, est relativement fort éloignée du sillon ventral (fig. 84 et 87). En d’autres termes, la cavité péribranchiale ne s’étend pas jusqu’au sillon. Les culs-de-sac postérieur et antérieur du sillon ventral sont très accentués chez l’adulte, mais ils le sont fort peu chez les larves et chez les jeunes blastozoïdes. L'oozoïde jeune n’occupe que le tiers environ du corps de la larve (fig. 88), et il en résulte un aspect des plus bizarres. A cette époque, le sillon ventral est extrêmement large et il semble que les 168 FERNAND LAHILLE. deux côtés de la branchie sont appliqués sur le sac vitellin et l’'embrassent. À mesure que le vitellus est résorbé, le sillon devient de moins en moins large. Les ventouses deviennent pédiculées et le reste du sac vitellin se sépare de la bran- chie, au moins dans sa partie supérieure, et constitue alors le support des ventouses. Peut-être contribue-t-il à former, comme chez Clavelina, la paroi ectodermique du stolon définitif. FN Sa Le sillon antérieur, dont la figure 91 re- présente une section verticale passant par un des grands filets tentaculaires Fb, est immédiatement situé au-dessous de la cou- Fig.91,— D.magnilarva, D.V.Coupe verticale du sillon antérieur. Bm, muscles circulaires buccaux; Rf, tu- À . 1e LL: = nique séféchies FD, filet dentacu. S’arrête la tunique réfléchie R£ qui paraît, laire ; Sar, sinus antérieur ; Sars, ; . S a: NE lèvre” supérieure du sillon ; Sar,, en Ce point, revêtue d’un véritable épithé- lèvre inférieure. — Gr. 222 ronne tentaculaire, au niveau de laquelle lium. La lèvre supérieure Sar, du sillon est fort mince; elle surplombe la lèvre inférieure Sar: qui forme un épais bourrelet cilié. Entre le sillon antérieur et la cou- ronne tentaculaire se trouvent trois ou quatre filets musculaires Bm. Du côté dorsal, 'les deux lèvres du sillon sont continues (fig. 92), mais l’inférieure prend un plus grand développement et le pavillon vibratile vient s'ouvrir dans l'intérieur du sillon antérieur. Du côté Fig 92. — Coupe verticale du pavillon ventral, la lèvre supérieure est égale- vibratile, In, qui vient s'ouvrir dans le DE L s x Sillon antérieur au-dessus d'une dilaa- ment ininterrompue; quant à la lèvre tion triangulaire de la lèvre inférieure ; . ,, . . Sars, lèvre supérieure.— Gr. 250, inférieure, elle se continue des deux côtés avec les replis marginaux du sillon ventral. Comme ceux-ei sont rapprochés l'un de l’autre, le sillon ventral ne communique alors que par un orifice triangulaire avec le sillon antérieur. Au point de vue embryogénique et anatomique on ne peut considérer, avec M. Roule, « les deux moitiés de la gouttière péricoronale comme pro- duites par la bifureation du raphé ventral.» (Monog. de la Ciona, p. 61.) RECHERCHES SUR LES TUNICIERS. 169 Le sillon postérieur est également formé par la portion ciliée des replis marginaux de la branchie, portion qui s’est en quelque sorte dilatée. Ce sillon est parallèle aux côtes transverses de la branchie et se continue directement avec l’aire œsophagienne. Sa longueur est à peu près égale à la demi-largeur de la branchie. Tube digestif. — Chez la larve à l’éclosion, le tube digestif est horizontal, l'estomac est situé du côté droit, le rectum du côté gauche, et les organes reproducteurs se développent dans l’intérieur et au-dessous de l’anse intestinale, comme nous l’avons vu se produire chez les Diplosoma et Di- plosomoïides. Chez l'adulte, le tube digestif, tout en restant situé au-dessous de la branchie, devient vertical et le plus souvent éprouve en même temps une rotation vers la droite de 4800. Par suite, la portion descendante du tube diges- tif, qui était situé à droite, devient ventrale, et la portion ascendante de ce tube, qui était à gauche, devient dorsale. Les organes reproducteurs se trouvent alors placés sur le Fig. 95. côté droil du corps. Fig. 93. — Coupe verticale passant par le milieu de la : 9 : queue larvaire à son origine, (im, cellules muscu-— L'œsophage de Distaplia est laires caudales ; Ca, Cellules de la corde formant en IR « se résorbant des vacuoles, V. situéau-dessous de la côte dor- Fig. 9%.— Céupe horizontale des viscères d’une larve au À moment de l’éclosion. On voit la vésicule de l’or- sale de la branchie. Sa lon-— gaue rénal déboucher en Ow dans l'estomac, Ei. DOCS AN ORRO Me M coma OU ones de Tergee rl. ses parois sont ciliés. L’aire Re œsophagienne occupe presque toute la base de la branchie et forme un vaste entonnoir. C’est au niveau de l’entrée de l’œsophage que la queue de la larve s'insère sur le corps. Plusieurs auteurs, Della Valle lui-même, veu- lent retrouver dans la queue larvaire des Tuniciers une portion de l'endoderme , une sorte de tube digestif caudal (Van Beneden et 170 FERNAND LAHILLE. Julin). Or, quelque soit le stade de développement de la larve de Distaplia, on observe toujours ce qu'indique la figure 93. L'endo- derme œsophagien Ed s'applique contre l’ori- gine de la queue, mais ne se prolonge dans aucun Cas, entre la chorde et l’ectoderme, pas plus qu’au centre même de la queue, comme l'indique Della Valle dans les figures 30 et 31 de sa planche IV. L'estomac est ovoïde, lisse à l'extérieur, mamelonné à l’intérieur ; les longues cellules non ciliées et glandulaires (fig. 95) qui le constituent étant souvent disposées en éven- tail. Sa forme asymétrique est causée par sa position primitivement horizontale. Le refou- lement de ses parois par l’œsophage forme une sorte de valvule cardiaque. C’est dans la partie supérieure de l'estomac et non dans la Are portion du duodenum, comme le dit Della Valle, que vient déboucher la glande rénale. Les figures 94 et 95 mettent hors de doute ce fait, fort facile du reste à constater chez tous les Tuniciers et qui n’a pourtant pas été admis par M. Roule, dans ses recherches sur la Ciona. Fig. 96. — Portion du rectum [Le post-estomac de Distaplia est très peu montrant les terminaisons de Cire Fin 96 Mur sr . . . tubes rénaux. — Gr ifférencié (fig. 98); il se continue directement Fg. 97. — Coupe verticale des oreillettes anales Oi. Ppr,pa- avec l'estomac et ne s’en distingue que par roi de la cavité péribranchiale ; Ri, rectum à parois ciliées ; sh] 1 ir Sm, sphincter musculate anal Ses Parois plus minces et non glandulaires. 200 : ä à ë ÉRAu Les limites de l'intestin moyen ne sont pas mieux précisées chez l'adulte. Cette portion est ovoide et occupe le point le plus inférieur de l’anse intestinale. Le rectum, formé de cellules, petites, cubiques, et ciliées, est fort long ; il remonte directement vers la bouche et s'ouvre dans la cavité cloacale, au niveau de la côte transverse moyenne de la RECHERCHES SUR LES TUNICIERS. 171 branchie. Examiné sur des coupes, sa section est le plus souvent triangulaire (fig. 85). Un des sommets est dorsal, les deux autres latéraux, et tout le long de l’arête droite s'étendent l'oviducte et le spermiducte. Sur la surface du rectum, rampent les tubes rénaux, très nombreux chez Distaplia. La direction de ces tubes est parfois très sinueuse, le plus souvent, pourtant, ils se dirigent verticalement (fig. 96) en s’anasto- mosant entre eux. Dans leur portion terminale, ces tubes se renflent sur leur trajet en ampoules ovoïdes, irré- gulièrement placées. Ces ampoules se touchent quelquefois et il en ré- sulte de gros tubes variqueux. Vers le bas, tous les tubes rénaux aboutissent à un tube collecteur hori- zontal qui enserre incomplètement le rectum. Ce tube débouche dans une vessie volumineuse, dont les parois sont formées de cellules à contours régulièrement polygonaux et à noyaux bien visibles. Cette vessie vient déboucher à l’aide d’un court canal dans la cavité stomacale. Vers sa terminaison, les parois du rectum s’amincissent beaucoup et deviennent brusquement ensuite très épaisses (fig. 97). Au niveau de l’amincissement se rencontre un Fig. 400. Fig. 98. — Coupe verticale de la partie infé- rieure du tube digestif. Æi, estomac; Bi, rectum ; Fs, Follicules testiculaires. — Le post-estomac et l'intestin moyen sont peu différenciés. Fig. 99. — D. magnilarva, D. V. Centres nerveux de l'adulte. Cn, ganglion céré- broïde et nerfs qui en partent ; Sar, sillon antérieur ; In, pavillon vibratile ; Gn, glande neurale ; /n, reste du tube neural; Dm, muscles dorsaux. Gr. 459, Fig. 100. — Coupe horizontale de la glande neurale. La moitié supérieure est seule re- présentée. Gr. #52, anneau musculaire Sm, qui joue le rôle de sphincter anal. Au-dessus du sphincter s’étalent deux larges oreillettes anales, formées en 1724: | FERNAND LAHILLE. dedans par l’épithélium rectal, en dehors par celui de la cavité péri- branchiale. J'ignore le rôle que peuvent remplir ces organes. Centres nerveux. — La figure 99 représente la région nerveuse de D. magnilarva adulte. On remarque tout de suite l'existence de quatre paires de nerfs volumineux, dont les deux antérieurs vont innerver le sillon antérieur et le tube buccal. Des deux nerfs postérieurs partent quelques filets qui se rendent dans la languette cloacale. La glande neurale Gn est moins volumi- neuse que le ganglion Cn. Elle est située Fig. 101. — Coupe oblique passant un peu en arrière de lui et communique par l’origine de laqueue. Qm, cel- lules musculaires de la queue; Qin, \ » 1 . œ Le ° ete fard De elfe avec la branchie par un long canal étroit dorsale de la branchie. Gr. 292. qui aboutit à un pavillon vibratile dont j'ai représenté la section médiane et verticale (fig. 92). En arrière de la glande neurale, on aperçoit un petit prolongement qui semble être le reste du tube nerveux atrophié. fo L'examen histologique de la glande 44 A lium pavimenteux. Quelques-unes de SA ces cellules (b, c) proéminent dans la cavité de l'organe (d), se détachent et Fig. 402. — Coupe horizontale passant au- : dessous des oreillettes anales de la larve. Tn, deuxième ganglion compris entre le rectum Zi et le sinus sanguin dorsal Sdc. — : : Grs200, $ cellules libres qui se colorent forte- se multiplient.On a ainsi de petites ment par les réactifs. Ces éléments grandissent beaucoup ; ils se remplissent de vacuoles (e), et se comportent alors, vis-à-vis des colorants et des acides, comme des cellules à mucus. Si on examine une larve à l’éclosion (fig. 88), on voit, qu'entre la vésieule sensorielle et le pavillon vibratile, il existe deux ganglions nerveux qui en sont bien distincts. Ils sont tous les deux situés dans la portion dorsale de la branchie ; le premier, au niveau de la pre- mière rangée de trémas; le second, au niveau de la quatrième. Ils sont reliés entre eux par le tube neural, dont ils dérivent par proli- RECHERCHES SUR LES TUNICIERS. 173 fération. Le ganglion inférieur /n (fig. 101 et 102), est placé juste au- dessus de l'insertion de la queue de la larve, et je crois qu’on doit le considérer comme un véritable ganglion caudal, puisque toutes les fibres nerveuses qui en partent se rendent dans la queue (fig. 404). Si on compare la larve de Dista- plia avec un Appendiculaire, on voit que, chez ce dernier, le gan- glion caudal n’est plus situé dans l'angle inférieur et dorsal de la cavité brachiale; mais cela tient uniquement, comme le montre la figure 103, à ce que l’appendice caudal s'insère chez ces derniers animaux sur la face ventrale du corps et non plus sur la face dorsale. Fig. 403. — Schéma d’un Appendiculaire. La queue Comme chez les autres Tuni- a été sectionnée. Le ganglion caudal se trouve dans la queue et non dans la paroi dorsale de la ciers, le tube neural des larves branchie comme chez Distaplia. de Distaplia vient déboucher dans la branchie, et son orifice branchial n’est pas autre chose que le pavillon vibratile. Un peu en arrière du pavillon, la por- tion dorsale du tube fournitla vésicule sensorielle (fig. 104, VI), rejetée ici sur le côté droit par le développement du ganglion nerveux. Cette position asymé - trique détermine l’atrophie du côté droit des organes sensoriels de vision et ire : d’audition dont on retrouve toujours les traces très nettes. Les trois capsules Fig. 104.— Distaplia magnilarva, D.V. : c A ue ) Coupes horizontales successives des cristallines sont même formées (C 1, centres nerveux de la larve à l'éclosion. ) r : Can, vésicule sensorielle.— Gr. 222 Can, C'sn, fig. 104, VI), mais elles 1 restent toujours rudimentaires. Chez les larves de Clavelina nana (n. sp.), les organes sensoriels sont pairs, et M. Chabry a, du reste, 174 FERNAND LAHILLE. mis hors de doute, par ses belles expériences de tératologie expé- rimentale, la parité originelle de ces organes chez les Tuniciers. Organes reproducteurs. — Je n’insisterai pas sur l'anatomie des organes reproducteurs de Distaplia, qui rappellent ceux de Distoma cristallinum. Les follicules testiculaires, légèrement pyriformes, au nombre d’une vingtaine, sont disposés en grappe dans la partie infé- rieure droite de l’anse intestinale qu’ils débordent le plus souvent (fig. 98). Le spermiducte est droit, accolé au rectum, et se termine par une papille qui dépasse, le plus souvent, les oreillettes anales et qui se prolonge librement dans la cavité cloacale. Della Valle prétend qu'il n'existe pas d’oviducte. C’est là une erreur que toutes les cou- pes permettent de relever facilement. L’oviducte s’arrête à la base de la cavité cloacale, vis-à-vis du point où se formera, plus tard, la poche incubatrice où évoluent les embryons. Les follicules ovariens sont disposés en grappe comme les follicules testiculaires et se développent avant eux chez les blastozoïdes. 2. — Distaplia rosea, Della Valle. Caractères spécifiques : Cormus rosés, claviformes ou sessiles, sou- vent réunis par leur base. — Tubes rénaux dépourvus de dilatations terminales. — Ovaire situé généralement au-dessous des follicules testiculaires. — Longueur maximum des individus : 3 millimètres. — Pigment rosé, jamais brun, très abondant dans la tunique commune. Tous les caractères anatomiques de D. rosea se retrouvent chez les jeunes D. magnilarva. La taille seule reste toujours très différente. Comme, d’une part, la position de l'ovaire n’est pas constante, qu'il existe de nombreux individus cheztesquels il est, comme d'habitude, étendu sur le spermiducte ; comme, d'autre part, la couleur du pigment est un caractère sans importance, Je crois que l’on pourrait considérer D. rosea comme une variété naine de D. magnilarva, variété produite par un arrêt de développement, causé sans doute par l'apparition très précoce que l’on constate des organes reproducteurs. Si l'estomac de D. rosea paraît lisse et non réticulé, comme celui RECHERCHES SUR LES TUNICIERS. 175 de D. magnilarva, cela provient de ce que chez cet animal, l’épithé- lium stomacal n’est pas mamelonné en dedans, comme chez le second. M. Giard, dans une note à l’Institut (26 oct. 1886), signale la pré- sence de D. rosea dans la baie de la Forest (Concarneau), et, d’après lui, cette espèce serait également abondante dans les environs de Wimereux. Malgré de longues et attentives recherches, je n'ai jamais rencontré cette espèce ni à Roscoff, ni à Granville, ni même à Con- carneau. Si sa présence, sur les côtes de France, avait été signalée par tout autre naturaliste que par M. Giard, j'aurais peine à croire à l'exactitude de la détermination. Gexre : Clavelina. — Savigny, 1816. Savigny créa ce genre pour réunir : Ascidia clavata, Pallas et Ascidia lepadiformis, Müller. Il ne se contenta pas d’en donner une diagnose très exacte (loc. cit., p. 171), mais encore il précisa, dans son troisième mémoire, la position de ce genre dans la classifica- tion. C’est ainsi qu’il fit précéder son étude de celle de la Phal- lusie intestinale (Ciona), et qu'il put dire : les « véritables rap- ports des Clavelines sont avec les Phallusies ; » tandis que pour les proportions, le groupement des viscères, la position de l’ovaire dans le repli de l'intestin, les Clavelines ont d’étroits rapports avec les genres Diazona et Distoma (loc. cit., p. 110 et 112). Milne-Edwards (1842), dans ses « Observations sur les Ascidies des côtes de la Manche » ne tint pas un compte suffisant de ces relations. Cela, du reste, se conçoit facilement, vu qu'il ne put étudier ni Distome, ni Diazone. Portant son attention sur le mode de bour- geonnement stolonial des Clavelines, que Savigny ne paraît pas avoir observé, il y attacha une grande valeur, aussi créa-t-il sa divi- sion des Ascidies sociales, pour ces animaux réunis aux Pérophores. M. Giard (1872) ne conserva pas cette division, et les Clavelinidæ devinrent la première tribu de sa première section des Catenatæ qui comprenait, en outre, les Perophoridæ et les Botryllide. 176 FERNAND LAHILLE, En 1883, Drasche, reprenant l'idée de Savigny, groupa dans la famille des Clavelinidæ les genres Clavelina et Diazona. En 1882, Herdman avait rattaché cette famille aux Ascidies sim- ples, et elle comprenait, d’après lui, les genres Ecteinascidia, Clare- lina et Perophora. L'existence de sinus anastomotiques longitudinaux que j'ai indiqué le premier dans la branchie de Diazona et de Perophora Banyulensis, et qui se retrouvent également chez Ecteinascidia doit faire ranger ces animaux parmi les Phlebobranchiata, et ne permet pas de les réunir aux Clavelines dont la branchie est parfois d’une simplicité extrême. Du reste, cherchons les caractères qui peuvent être communs à ces animaux. Nous venons de constater tout d’abord une très grande différence dans la constitution de la branchie. La position des vis- cères qui est si importante dans la classification (Cionidæ et Asci- diidæ), et qui a autorisé M. Giard à séparer les deux familles des Clavelines et des Pérophores, s'oppose à la réunion de ces animaux. Le seul caractère que l’on puisse invoquer est l'absence de cœno- bies résultant de l'isolement plus ou moins considérable des individus. Mais on doit remarquer en même temps le peu de valeur de ce caractère. N’existe-t-il pas, en effet, des Distomes dépourvus de cœnobies ? Toutes les Ascidies sociales d’un même cormus ne sont- elles pas, en définitive, enveloppées par la même tunique commune ? Les individus, il est vrai, ne sont pas toujours immergés comme les Distaplies ou les folelles dans une même masse. Mais, sous ce rapport, qui pourra indiquer la limite qui sépare les Ecteinascidia des Diazona, des Chondrostachys et des Orycorynia. Ne trouve-t-on pas dans le genre Clavelina lui-même des espèces chez lesquelles les individus sont très isolés (Cl. Rissoana) et d’autres (CL. enormis) où ils forment, comme Chondrostachys, de véritables épis ? En résumé, les genres Clavelina, Perophora, Diazona, Ecteinas- cidia, n'ayant aucun caractère commun, essentiel ou propre à eux, ne peuvent être réunis, et la famille des Clavelinidæ de Drasche ou de Herdman n’est pas naturelle et doit être démembrée. Perophora, RECHERCHES SUR LES TUNICIERS. 177 par sa branchie, et par la position de ses viscères, se rattache aux Ascididæ ; Diazona et Ecteinascidia viennent se ranger dans les Cionidæ avec les Rhopalona. Les Clavelinidæ, réduites ainsi au seul genre Clavelina, ne se distinguent pius par aucun caractère des Distomidæ et doivent par conséquent rentrer dans cette dernière famille. Caractères du genre. — Individus entièrement libres ou réunis seulement par leur base. — Orifices bucceal et cloacal circulaires. — Branchie munie de simples côtes transverses, — Languettes de Lister dorsales. — Follicules testiculaires en réseau. — Estomac présentant un sillon vibratile et le plus souvent quatre larges can- nelures. — Incubation dans la cavité péribranchiale. — Les autres caractères de ce genre (Filets tentaculaires. — Position du tube di- gestif, — du cœur, — des organes reproducteurs) sont ceux des Distomideæ. Les différentes espèces de Clavelines qui ont été décrites jusqu’à ce jour, peuvent se caractériser de la manière suivante : HÉCUIÉS EE RE T0 suce ut: DOTOAlIS, SAN: | A : Branchie à lignes pigmentées. — Egale : LA 1/5 de la longueur totale. . . . . . Savigniana, Edw. = « . . . .. = igt jaune. . . . . . Lepadiformis, Müll. mn 22 1/2 de la long. ne e 5 = pigt blanc. . . . . . Rissoana, Edw. E(8)5+ à 5 |& ! © © } B : Branchie sans lignes pigmentées. 5 A © F S1$ Æ | 3 rangées de trémas. . . . . . . . . Producta, Edw. | 2 rangées de trémas. . . . . . . . . Pumilio, Edw. tes (Disposés en épi. "7" "N11-000blonga; Herd. I s 2 3 \ | Non disposés en épi. . . . . .. . . Enormis, Herd. Cl. Borealis (Asc. clarata, Cuv.), est une espèce qui se distinguera toujours facilement par le nombre élevé de ses rangées de trémas (35 R) et par ses tentacules disposés sur deux rangs. Le prétendu pédicule de ces Clavelines n’est pas autre chose que le stolon qui peut se dresser assez souvent, comme l’a représenté Savigny (fig. 2, pl. XI), et la distinction entre les individus entièrement sessiles ou plus ou moins pédiculés est sans valeur. 12 Ci 178 : FERNAND LAHILLE. Cl. Rissoana ne différant, d’après le dire même de Milne-Edwards, du Cl. lepadiformis que par la couleur du pigment, doit être réuni à cette espèce, comme l’a du reste indiqué depuis longtemps M. Giard. Cl. Savigniana, Edw., et CI. producta, sont caractérisés par la lon- gueur de la branchie, qui est de 1/5 par rapport à la longueur totale. CI. producta se distingue de Cl. Savigniana non seulement par l’ab- sence de lignes pigmentées, mais encore par la présence de bourgeons qui naissent presque au niveau de l’estomac et non seulement plus sur les stolons rampants. En outre, chez Cl. Savigniana on compte une dizaine de rangées de trémas, tandis qu'on n’en rencontrerait que trois chez Cl. producta, Pour le dire en passant, cette dernière observation me paraît inexacte. En effet, quand la branchie d’une Claveline se développe, il se forme d’abord simultanément, et au niveau de l’orifice cloacal, deux rangées de trémas, séparés par un côte transverse. Deux autres rangées apparaissent ensuite, une de chaque côté des premières, et celles-ei n’en sont pas d’abord séparées par une côte transverse. Ces côtes se forment plus tard. Dans tous les cas, d’une branchie à deux rangées de trémas on passe à une branchie qui en présente quatre. Je crois d'autant plus volontiers à une erreur de rédaction de Milne-Edwards, que l'individu représenté à gauche de sa figure 3, pl. II, montre bien quatre rangées, et que sur la Claveline dessinée à droite on distingue parfaitement toutes ces rangées, quoique les trémas inférieurs ne soient pas représentés. CL. pumilio n'est pas autre chose qu’un oozoïde de Cl. lepadiformis cinq jours après la fixation. La description et la figure de Milne- Edwards ne laissent à ce sujet pas l'ombre d'un doute. Qu'on veuille bien, du reste, la comparer à la figure 70, pl. VII, de Seeliger (Entwick. der socialen Ascidien. — Jen. zeit. Bd. XVIII N.F. XI) et on verra que « la branchie est assez vaste, mais ne pré- sente de chaque côté que deux rangées transversales de stigmates, qui, au nombre de cinq par rangée, diffèrent beaucoup entre eux, quant à leurs dimensions ; ceux situés près du sinus dorsal sont très RECHERCHES SUR LES TUNICIERS. 179 grands, tandis que les suivants deviennent de plus en plus petits, de façon que l’ensemble de ces organes représente de chaque côté du thorax une bande triangulaire. [l est aussi à noter, que les stigmates de la rangée supérieure, sont moins grands que ceux de la rangée inférieure, et qu’il existe un espace considérable entre ces organes et la bouche. L’œsophage est court, l'estomac globuleux, le cœur est très grand », (Milne-Edw., loc. cit., p. 279). CI. oblonga et CI. enormis proviennent l’une des Bermudes, l’autre du Cap de Bonne-Espérance. Toutes deux sont fort intéressantes. Supposons que la portion dressée de Cl. producta soit plus grande et que son bourgeonnement soit un peu plus rapide, nous aurons alors une colonie de Clavelines (CI. oblonga), en forme d’épi, très voisine sinon identique avecle genre Chondrostachys (Mac-Donald). Si les tuniques des divers individus viennent alors à se souder entre elles, on arrive au genre Oxycorynia. D’autre part, si les tuniques des divers individus toujours très rapprochés (fig. 2, pl. I, M.-Edw., loc. cit.) d’une colonie de CI. producta s’accroissent et se soudent, on passera à des formes en tout semblables à CI. enormis, Herd. | Si on laisse de côté ces deux espèces exotiques décrites par Herd- man et Cl. borealis des mers du Nord (35 rangées de trémas), voici comment on pourra caractériser les Clavelines de nos côtes ; Longueur de la branchie par rapport à la longueur totale des individus égale : 1 { Branchie incolore, 12-13-16 Rangées de trémas. . Lepadiformis, Müll. 2 | Branchie jaune-verdâtre, 6-7-8 R. T. . . .. .. Nana, Lah. 4 ( Pas de lignes pigmentées, 4 R. T.. . . . . . . . Producta, Edw. 5 | Lignes pigmentées, 10-12-15 R. T.. ...... Savigniana, Edw. Le tableau suivant indique les relations morphologiques de ces diverses Clavelines et des genres voisins. 180 FERNAND LAHILLE. ACC: Ciona Rhopalona Diazona Ecteinascidia Tylobranchion P Oxycorynia Distaplia Cole "t | Chondrostachys Distoma Borealis pro | Lepadiformis | Enormis Gystodites Savigniana . na ur RE D) Producta | Clavelina Hypobythius | Dis P°D; Fig. 105. — Diagramme des aflinités morphologiques des Distomidæ et des Cionidæ. — D, Didemnidæ; P, Polycliniadæ; 4.C.C, Ascididæ, Corellidæ et Corynascididæ; P. D, Formes primitives des Distomidæ. RECHERCHES SUR LES TUNICIERS. 181 1. — Clavelina lepadiformis, Müller. Par son abondance, sa taille, sa transparence, l'isolement de ses individus, la lenteur de ses transformations embryogéniques, pour tous ces motifs, dis-je, cette espèce ou sa variété Rissoana ont été les plus étudiées, par les zoologistes et embryologistes : Milne- Edwards (loc. cit.), Giard (loc. cit.), Seeliger!, Van Beneden et Julin?. Aussi je ne veux faire que quelques remarques sur l’anatomie de l'adulte. Lorsque l'animal se contracte, le cercle branchial supérieur observé d'en haut, dessine huit lobes et l’orifice buccal paraît alors nettement constitué par quatre lobes; il est, au contraire, parfaitement arrondi lorsque l'individu est épanoui. La longueur moyenne des individus est de 25 à 3°. Si la bran- chie a une longueur de un centimètre, l’œsophage, d’une part, l'estomac et le post-estomac, de l’autre, ont chacun une longueur de 0c,7. Les filets tentaculaires sont généralement au nombre de vingt- quatre et disposés comme ceux de la Diazona violacea. (Voir plus loin.) On compte onze, treize, quinze rangées de trémas, quelquefois sept seulement, et dans ce cas, pourtant, les organes reproducteurs peuvent être en activité, alors qu’ils ne se trouvent quelquefois point développés chez des individus à quatorze rangées. Je ne puis confirmer ce que dit M. Giard (loc. cit., p. 11%), «je me suis assuré que les Synacidies peuvent encore grandir et acquérir de nouvelles rangées de boutonnières après avoir atteint l’état adulte ». En ce qui concerne Clavelina, toutes mes observations m'ont plutôt montré que l’activité précoce ou tardive des organes reproducteurs produi- sait un arrêt dans le développement de la branchie ou au contraire favorisait ce développement. 1 Eibildung und Knospung von CI. lepadiformis. Sitz. der K. Akad der Wiss. Wien. 1882. — Die Entwicklungsgeschishte der Socialen Ascidien. lenais. Zeit. f. Wiss. Bd. X VIII. N. B. XI. ? Recherches sur la morphologie des Tuniciers, Gand, 1886. 182 FERNAND LAHILLE. A côté de Cl. lepadiformis, type dont les lignes pigmentées sont d’un jaune soufre (jaune un peu verdâtre), on trouve deux variétés : CL. auronitens lepadiformis et Cl. Rissoana lepadiformis. Ces deux ee AUEL ms Variétés correspondent exactement à celles Lu Te. que l’on rencontre chez l'espèce suivante. Les lignes pigmentées de la première sont jaune orangé, elles sont blanches chez la seconde. Si la couleur du pigment permet la rigueur la création de ces variétés, il n’en est pas de même de la disposition des lignes qui est des plus variables. La pré- Fig.106— C1. Riss. lepadif. Portion sence ou l'absence, soit d’un cerele tenta- ventrale d’une branchie irrégulière, montrant la tendance à la formalion Cuylaire ou labial, soit d'un cercle branchial de rangées de ,trémas supplémen- joues RER supérieur ou inférieur, se constate très sou- vent dans une même colonie, et, sous ce rapport, je ne puis admettre l’assertion trop absolue de M. Giard, qui prétend que toujours « tous les individus d’un même cormus sont modifiés simultanément ». Dans le tableau qu'il donne (loc.cit., p.114) des variétés de CL. lepadiformis, cet au- teur a attribué plus d'importance à l’exis- tence du cercle labial qu'à la couleur du Fig. 407. — Clavelina lepadiformis, Müller. Coupe transversale du pigment. Je ne puis Sillon ventral. — C,7, Car, C7, z0nes ciliées ; Mr, zone médiane ; Gr, Ger. G37, zones glandulaires; Br, replis marginaux ; Et,ecto- ôtre de cet avis et je derme ; Fvm, frisceaux musculaires ventraux ; Ltr, limite des tre- Ro ar crois qu'on doit con- sidérer Cl. sulphurea comme une sous variété de Cl. lepadiformis type, Cl. bicincta etCl. monocycla comme sous-variété, de Cl. Ris- soana lepadiformis. La branchie des Clavelines ne présente jamais que des côtes trans- verses simples. Ces côtes se trouvent rattachées à la paroi péribran- chiale à l’aide d’un três petit nombre de sinus péribranchiaux (sinus RECHERCHES SUR LES TUNICIERS. 183 dermato-branchiaux de Roule). Les languettes de Lister se trouvent placées, comme chez les types supérieurs, à peu près exactement sur le milieu du dos. Les trémas sont ovales et fort réguliers. Ce n’est que du côté ven- tral qu'on observe, parfois, le dédoublement des rangées que repré- sente la figure 405. Ce dédoublement a lieu parfois très régulièrement sur une grande étendue. Mais la moindre longueur des trémas et l'absence de côte transverse, permettent toujours de reconnaître ces rangées acces- soires. La figure représente une coupe transversale du sillon ventral de C{. Rissoana lepadiformis. A l'inverse de ce qui existe chez Distaplia, la zone glandulaire S 0 DERIeUNrE est la plus Fig. 408. —’Clavelina lepadiformis, Müller. Coupe transversale des viscères.Æi, estomac ; Si, sillon stomacal ; Ci, cannelure stomacale; : Pt, ligne pigmentée ; Ri, rectum; Du, tubes toujours largement ouvert ; quelque- rénaux ; Do, Ds, oviducte et spermiducte. — Gr. 5, développée des trois. Le sillon est fois même, comme l’a représenté Seeliger (Eib. und Knop., t. II, fig. 97), ses parois sont complète- ment étalées et sa cavité devient presque virtuelle. Le pigment se trouve localisé entre la zone glandulaire supérieure G;r et les replis marginaux Rr. Il existe aussi, parfois, deux autres lignes pigmentées plus étroites entre l’ectoderme Et et la zone glandulaire inférieure Gr. La côte dorsale de C{. Rissoana lepadiformis a une section rectan- gulaire. Les deux arêtes supérieures, qui se continuent avec la paroi branchiale, renferment les lignes de cellules pigmentaires entre lesquelles se trouve le cordon nerveux dorsal. Sous les arêtes infé- rieures s'étendent les deux faisceaux musculaires dorsaux. Chez les jeunes Cl. lepadiformis l'estomac est cubique, comme il l’est chez CI. nana durant toute la vie. Plus tard, les faces latérales de cet organe se dépriment, tandis que les cellules pigmentaires 184 FERNAND LABHILLE, viennent former sur ses arêtes des bandes colorées. Il se produit ainsi quatre grandes cannelures, fig. 108, qui ne sont pourtant pas homologues à celles que l’on rencontre chez les Aplidiens, car l’épithélium stomacal n'est pas ici plus spécialement différencié en ces régions. Le post-estomac, très court et à peine distinct de l'estomac, se trouve généralement caché par les glandes reproductrices, L’intestin moyen qui lui fait suite est régulièremeut ovoide et termine la bran- che droite du tube digestif. La branche gauche ou ascendante est uniquement formée par le rectum sur lequel s’étalent, en lacis irrégulier etvariqueux, les tubes rénaux très développés. Au niveau de la branchie, la section transver- sale du rectum a une forme très particulière, Fig. 109. — Clavelina nana, celle de la lettre majuscule H, ses parois Lah. Coupe transversale des viscères passant par la partie inférieure de l'estomac Ei. — Si, sillon stomacal ; Ou, orifice RAS de la glande rénale; Ri, rec-, CÔté dorsal et ventral. tum ; Ec,épicarde; Pe, cavité ; à péricardique ; Do, Ds, oviducte Le développement et la structure de l’appa- et spermiducte.— Gr. 252, s'étant fort rapprochées l’une de l’autre du reil sexuel de Clavelina se trouve si complè- tement et si exactement décrit par MM. Van Beneden et Julin (loc. cit., p. 346-370), que je ne puis que renvoyer les lecteurs au mé- moire des savants naturalistes belges. J'indiquerai plus loin (V. Diazona) l'anatomie de la glande neurale de Clavelina. Lorsque les Clavelines sont âgées, elles s’isolent souvent complète- ment les unes des autres. Ces Ascidies sociales deviennent ainsi des Ascidies simples. Milne-Edwards, du reste (loc.cit., p. 267), en avait déjà fait la remarque. D’autres fois, au contraire, au lieu de s’isoler, les animaux semblent se rapprocher beaucoup les uns des autres, et le cormus ressemble à l’Ecteinascidia turbinata Herd. Clavelina lepadiformis type et ses variétés, est commune à Roscoff, surtout dans les prairies de zostères, où, mème à la fin de septembre, j'ai rencontré des individus renfermant de nombreuses larves. M. Giard dit que « dès le 10 juillet on ne trouve plus d'individus RECHERCHES SUR LES TUNICIERS. 185 chargés d’œufs » (loc. cit., p. 115). Cela prouve que l’époque ou la durée de la ponte sont fort variables. D’après Della Valle, cette Clave- line, très abondante dans le port de Naples, ne se reproduirait point dans cette localité, du mois d’avril au mois de mai. Clavelina lepadifornis (var. Rissoana) se rencontre à Port-Ven- dres {sur les parois des quais) et à Banyuls où on la ramène souvent fixée sur des tubes de sabelles. 2. — Clavelina nana, Lahille. Cette nouvelle espèce qui est abondante à Banyuls, dans les fonds coralligènes de 25 à 30 mètres, existe aussi à Roscoff. On la trouve fixée sur des algues calcaires ou sur des gorgones. Sa longueur ne dépasse pas un centimètre et sa largeur est de 4 à 3", La branchie est extrêmement contractile et se sépare facilement de la tunique, comme chez les Ciona. L'animal est alors recoquillé sur lui-même au fond de cette sorte de tube formé par son enveloppe extérieure, et ilest ensuite bien rare de le voir s'étendre et s'épanouir de nou- veau. La plupart des individus ramenés par la drague sont dans cet état. La tunique est mince, transparente, incolore, gélatineuse, et sa surface présente de nombreux plis extrêmement nombreux. Sa partie inférieure est agglutinante et toujours recouverte de vase ou de petits corps étrangers. Les rangées de trémas sont généralement au nombre de sept; ceux-ci sont toujours très réguliers et sont formés par seize cellules marginales. Le sillon ventral dépasse de beaucoup la rangée supérieure de trémas. Le type est jaune verdâtre très pâle, rappelant tout à fait la cou- leur du phylloxera de la vigne ou du protosulfate de fer. Cette couleur est due aux globules sanguins, dont les mouvements amæ-— boïdes très rapides sont fort faciles à suivre, grâce précisément à leur coloration verte. Après la mort des individus, leur sang devient bleu verdâtre, presque noir, comme cela se produit également chez Peropho- ropsis, Glossophorum humile et Phallusia mamillata. 186 FERNAND LAHILLE. Les stolons de Clavelina nana sont toujours fort grêles et les individus se trouvent souvent isolés. Dans d’autres cas, au contraire, ils se trouvent fort rapprochés. L'œsophage de Clavelina nana est court et conduit dans un esto- mac cubique, dont la figure 109 représente une coupe ‘transversale passant par sa partie inférieure. Le pigment ne s’est pas ramassé ici dans le mésoderme, suivant les arêtes de l'estomac, comme chez CI. Rissoana. Le sillon stomacal St est fort développé et occupe comme chez toutes les Clavelines, l'angle dorsal extérieur de l'estomac. Le cœur est volumineux relativement à la taille de l’animal. Accolé contre le tube endodermique Etc (épicarde), on voit la vésicule péri- cariique Pc invaginée des deux côtés, pour former les deux branches du cœur, gouttière contractile fermée en dessus par l'épithélium ventral du tube endodermique. A côté du type de couleur jaune verdâtre, se rencontrent deux variétés : Cl. alba nana et Cl. aurantiaca nana. L'organisation interne est exactement semblable à celle du type. Seulement, dans le premier cas, le cercle tentaculaire, le sillon ventral et les côtes transverses sont gorgées d’un pigment blanc de lait, tandis que dans la seconde variété, le pigment, tout en occupant les mêmes parties, est d’un cadmiun orangé ou jaune safran. Le 20 juin 1889 j'avais décrit et indiqué (Bull. soc. hist. nat. Toulouse) cette dernière variété, de beaucoup la plus répandue sous le nom de Cl. aurantiaca. Le pigment blanc ou orangé n'existe pas chez les larves, qui ne présentent que la coloration verdâtre uniforme due au sang. C'est très certainement de la Clavelina nana que veut parler M. Giard (t. II, Archiv. de zool. exp., p. #97) quand il signale, dans les grands fonds de Roscoff, «une petite espèce de Claveline très abondante sur les tiges de laminaires ramenées par l’engin et proba- blement identique à la Clavelina producta, M.-Edv. » Quant à cette dernière assimilation elle n’est pas soutenable, car la constitution de la branchie, la longueur de l'œsophage et le mode de bourgeonne- ment de ces deux espèces, présentent de trop grandes différences. RECHERCHES SUR LES TUNICIERS. 187 Genre : Oxycorynia. — Draschet, 1882. Ce genre a été créé pour une Ascidie provenant des îles Rouk (archipel des Carolines) extrêmement voisine, au moins comme aspect extérieur de Colella pedunculata. Sa diagnose a été fort peu précisée par Drasche. Les orifices buccal et cloacal sont circulaires. L’orifice buccal est quelquefois divisé en quatre lobes. — Huit filets tentacu- laires, dont quatre beaucoup plus grands que les autres. — Nom- breuses rangées de trémas. — Œsophage court, Estomac lisse. — Organes reproducteurs dans l’anse intestinale. Les colonies de l’Oxycorynia fascicularis formaient de petits troncs cylindriques de 5"" de diamètre et de 6 cent. de longueur. GExRE : Ghondrostachys. — Mac-Donald?, 1858. Le tunicier du détroit de Bass qui a reçu ce nom, a été encore bien moins étudié que le précédent. La description donnée par Mac-Donald est tout à fait insuffisante. Comme chez Oxycorynia, l’orifice buccal est quadrilobé. Les individus sont disposés en épi sur un tronc commun et ne sont pas immergés dans une masse com- mune de substance tunicière. Comme l'anatomie de la branchie est décrite si imparfaitement, il est impossible de savoir si ce cormus, caractérisé par l'indépendance relativement grande des individus, doit être rattaché aux Ecteinascidia ou aux Diazona ou si ce n’est pas simplement une variété de la Clavelina oblonga, Herd. 1 Zool. anzseiger 1882 et Verhandl. d. K. K. Zool-Bot. gesellsch. Wien. 1882, Bd. XXXIL p. 175-177, tab. XIII ? Anat. obs. on a new form of comp tun. Ann. mag. nat. hist. ser. TIT, vol, 1, p.401. 188 FERNAND LAHILLE,. DEUXIÈME sous ORDRE : POLYCLINIADÆ. Le sous-ordre des Polycliniadæ tel que je le conçois correspond à la tribu des Polycliniens de Milne-Edwards et à la famille des Po- lyelinidés de Herdman et de Drasche. Ses caractères essentiels sont les suivants : 4° Branchie sans pa- pilles ou à papilles simples ; 2° Intestin inférieur à la branchie, stolon bourgeonnant inférieur à l'intestin ; 3° Glandes reproductrices ren- fermées dans le stolon ; 4° Cœur inférieur aux glandes reproductrices : On peut résumer ces caractères en disant que les Polycliniadés sont des Aplousobranches dont le cœur est situé à l'extrémité d’un stolon génitalifère. Les Polycliniadæ méritent, à mon avis, d’être divisés en deux fa- milles. 1° Chez certains d’entre eux la portion descendante de l'intestin (œsophage, estomac, post-estomac, intestin moyen) croise la portion ascendante(rectum),de telle sorte que l'animal étant vu du côté droit, la seconde portion passe devant la première. Le plus souvent l'estomac est lisse, comme chez les formes inférieures. 2° Chez tous les autres types, l’estomac est aréolé, rayé ou cannelé en longueur, et l’animal étant vu du côté droit, le rectum se trouve caché par l'estomac ou le post-estomac. Le caractère tiré de la disposition du tube digestif a été mis en lumière par M. Giard. Comme la torsion de l’organe, lorsqu'elle existe, s’accompague d’une très forte pédicularisation du stolon entraînant avec elle l’absence de muscles stoloniaux devenus inutiles, cette torsion retentit en définitive sur tout l'organisme et lui donne un cachet spécial. Aussi peut-on, ce me semble, grouper toutes ces formes en deux familles, l’une aura pour type les Polyclinum de Savigny et on la nom- mera pour ce motif : famille des Polyclinidæ, par opposition à la se- conde dont le type sera le genre Aplidium et qui constituera la famille des Aplididæ. RECHERCHES SUR LES TUNICIERS. 189 UE FAMILLE DES POLYCLINIDÆ Caractères de la famille : — Une partie de l'intestin descendant, située le plus ordinairement à gauche du rectum. — Le plus sou- vent le stolon est fortement pédiculé. — Estomac exceptionnellement cannelé (Polyclinoides, Dr.). — Le plus souvent il n’existe pas de muscles stoloniaux. — Jamais plus de 6 lobes buccaux. Cette‘famille ne peut se définir que par l’ensemble de ses caractères. Chaque fois que l’estomac d’un Polycliniadæ sera lisse à l’exté- rieur, l'animal devra être rangé dans les Polyclinidés. De même, si avec un estomac cannelé on constate la torsion intestinale accom- pagnée de la pédicularisation du stolon. M. Giard, revenant sur de premières appréciations, et discutant en 1875 les caractères du genre Sydnium de Savigny, rapprocha ce genre des Polyclinum. Se basant ensuite sur une description incom- plète de Milne-Edwards, il réunit Sydnium turbinatum (Sav.) et Poly- clinum aurantium (Edw.). J'ai rencontré à Chausey un Polyclinum qui répond exactement à P. aurantium et qui, en aucune façon, ne peut être identifié avec le genre de Savigny. Sous le nom de Polyclinoïides, Mac-Donald a décrit une Aseïdie dont le cormus est mince et incrustant comme celui des Botrylles. L'orifice buccal est à 6 lobes, l’ouverture cloacale présente une lan- guette trilobée à son extrémité. Le nombre des individus disposés en cœnobies est moindre que chez Polyclinum, et il diffère en outre de ce genre, par la présence de prolongements ectodermiques com- muniquant entre eux. Tous ces caractères ont si peu de valeur, qu'ils ne sauraient motiver la création d’un genre spécial. Afopogaster gigantea (Herd.), et Amaroucium Nordmani rappellent tout à fait, par la disposition de leurs cœnobies simples et régulières, le genre trouvé en Australie par Mac-Donald. Sous le nom d’Aplidiopsis, je propose de réunir tous les Polycli- niadæ à estomac lisse, dépourvus de papilles branchiales, ne présen- 190 FERNAND LAHILLE. tant pas de torsion intestinale et possédant un stolon non pédiculé. Ce stolon pouvant être indifféremment long ou court. Ces formes, qu'Herdman a fait connaître le premier, paraissent très voisines des Distaplia et constituent, à mon avis, la souche de tous les autres Polycliniadæ, Psammaplidium spongiforme (Herd.), peut être pris comme type de ce genre, auquel se rattachent également Polyclinum minutum (Herd.) et P. incertum {Herd.). La branchie des Polyclinum était ainsi caractérisée par Savigny. « Thorax cylindrique, grand, mailles du tissu respiratoire dépourvues de papilles. » Or, quel n’a pas été mon étonnement de rencontrer chez P. sabulosum (G.) des papilles arrondies, exactement semblables à celles du Perophora Listeri, mais beaucoup plus rapprochées. On ne peut pas admettre que Savigny ne les ait pas aperçues car, du moment qu’il a compté chez P. constellatum le nombre de lan- guettes de Lister, il aurait aperçu les papilles branchiales si elles avaient existé chez ces types. Herdman n’en signale pas non plus l'existence chez les Polyclines qu'il décrit. Comme j'attache la plus grande importance à ce caractère, je n'ai pas hésité à créer pour les formes dont la branchie présentait une semblable constitution, le genre Glossophorum. Ce nom a l'avantage de rappeler la particularité anatomique essentielle qui les sépare si nettement des Polycelines typiques de Savigny. Les Polyclinidæ com- pris dans ces limites renferment six genres que l’on peut caractériser de la sorte : ‘ papilles branchiales. . . . . . . . . Glossophorum, Lah. 1886 e lisse. « pas de papilles. torsion intestinale. Polyclinum, Sav. 1816. £ pas de torsion. . . Aplidiopsis, Lah. 1887. EL SO \ ITANSVETSES PMR EEE ENTRE Atopogaster, Herd.1886. Po) longitudinaux.— Torsion intestinale. Polyclinoides, Dr, 1883. Aer Genre : Glossophorum. — Lah., 1886. Caractères du genre. — Polyclinidé. — Papilles branchiales arron- dies. — Torsion intestinale. — Estomac lisse. — Stolon pédiculé. Tous les Glossophorum que j'ai rencontrés agglutinent le sable, RECHERCHES SUR LES TUNICIERS. 191 et cette particularité, jointe à la difficulté qu’on éprouve à les extraire de leur tunique commune qui est très coriace, rend leur étude fort pénible. Aussi, M. Giard n’at-il donné du P. sabulosum aucun renseignement anatomique ; il se borne à dire que les œufs de cette espèce ne demeurent pas dans le cloaque comme ceux des Aplidium, mais séjournent dans une chambre d’incubation latérale, où ils se disposent en cercles concentriques. Le tétard présente deux tubes gemmifères ramifiés et très développés. M. Giard n'est pas plus explicite sûr la constitution du cormus: « Le cormus petit, sub- globuleux, agglutine les grains de sable et on le rencontre sur les sargasses avec lesquelles il remonte un peu dans la zone des zostères. » C'est ce petit nombre de renseignements donnés sur cette espèce qui m'a porté à l’étudier avec quelques détails. I. — Giossophorum sabulosum, Lahille. Syn : Polyclinum sabulosum, G. 1872. Aspect extérieur. Le Glossophorum sabulosum est une espèce poly- morphe. Fixés sur les sargasses(Per-rech-hier, Perharidi , le Loup), les cormus ont une forme plus ou moins globuleuse ne dépassant guère 10-12nn de diamètre. Souvent, ils sont plus petits et agglomérés. Chacun de ces cormus ne renferme qu'une cœnobie, et d'ordinaire celle-ci est simple. Le plus souvent les colonies agglutinent le sable et ressemblent alors aux Molgules qui habitent les mêmes localités. Au bas de l’eau et à Duhon se trouvent des cormus qui ont un tout autre aspect. Ils sont fixés sous les rochers, et leur diamètre varie de 30 à 40 mm, leur épaisseur atteint 40 mw à 15m, Ils n’agglutinent le sable qu’à leur base et sur les côtés. Leur couleur est d’un blanc jaunâtre, passant parfois au brun foncé. L'aspect général de ces colo- nies rappelle alors celui de l’'Amaroucium densum. Le plus souvent les cœnobies sont encores simples, mais quel- quefois aussi elles sont composées et les cormus pourraient être con- fondus alors avec P. aurantium (Edw.) dont la couleur et la forme s’en rapprochent beaucoup. La présence de papilles branchiales chez 192 FERNAND LAHILLE. le Glossophorum, l'absence des mêmes papilles chez le P. aurantium permet de résoudre promptement la difficulté. Les orifices buccaux des individus sont fort visibles, car ils tran- chent en noir sur le fond jaunâtre. Aspect des individus. — Comme tous les Polyclinum (Sens. St.) le Glossophorum présente un corps divisé en trois masses, séparées les unes des autres par de très minces pédicules ; par suite, l'animal occupe dans la tunique commune trois logettes séparées par deux étroits couloirs. C’est cette disposition particulière qui rend si difficile l'extraction des individus. Chez les Aplididæ, une pression légère du cormus suffit au con- traire pour chasser les animaux de leur tunique commune. Cest là du reste un caractère fort pratique pour distinguer les Aplididæ des Polyclines. Lorsqu’à l’aide de patience et d'artifices on est parvenu à isoler quelques Glossophorum, il faut les examiner dans une grande quantité de liquide, sans les recouvrir d’une lamelle, si on ne veut pas altérer les rapports de position des diverses parties de l'intestin. Plusieurs naturalistes n’ayant pas pris ces précautions dans l’examen des ani- maux qui constituent le sous-ordre des Polycliniadæ sont tombés dans des erreurs qu'il eut été facile d'éviter. La branchie est ovalaire ou cylindrique, surmontée d’un tube buc- cal très variable de forme, suivant la contraction plus ou moins grande de ses muscles. Dans l’état d'extension complète, ce tube est infun- dibuliforme, presque aussi large que la branchie elle-même, et pré- sente 6 lobes aigus. Il ressemble au tube buccal de Did fallax. La hauteur des lobes égale alors le tiers de sa hauteur totale. Contracté, le tube devient conique ou cylindrique et les lobes paraissent alors plus développés (1/2 de la hauteur totale). L’orifice cloacal est grand, situé vers le haut de la branchie et est muni d’une languette très développée, quelquefois pointue à son extré- mité, mais le plus souvent carrée et supportant un nombre variable de petits lobes (3-7-9-12). La masse intestinale a une longueur qui est d'ordinaire égale à la moitié de la branchie. Le grand axe de l’esto- mac est parallèle ou oblique aux rangée de trémas. RECHERCHES SUR LES TUNICIERS. 193 A propos de l’appareil digestif, nous reviendrons du reste sur ces questions de position qui sont ici très importantes. Le stolon fortement pédiculé est généralement aussi long que l’en- semble de la branchie et du tube digestif. Il est dépourvu de fibres musculaires et se prolonge le plus souvent au-dessous des glandes reproductrices et du cœur. Tunique commune. — La tunique commune ne renferme pas de cellules vacuolaires. On y rencontre des cellules à prolongements amæboïdes, accompagnées de nombreuses cellules sphériques plon- gées, commeles précédents, dans une masse homogène de substance tunicière. La tunique renferme aussi parfois de grandes cellules dont tout le contenu paraît condensé autour du noyau central. En outre, on ren- contre, principalement sur les côtés des branchies, des concrétions très irrégulièrement mamelonnées. Système musculaire. — Je crois devoir reproduire ici en partie la note que j'ai fait paraître à ce sujet le 10 novembre 1886 dans le Bulletin de Société d'histoire naturelle de Toulouse. 1. Muscles longitudinaux. — Les premiers muscles qui frappent l'observateur sont les muscles latéraux ou muscles du corps, Le plus souvent au nombre de six paires, correspondant aux six lobes buc- caux de l'animal. Quelquefois, pourtant, il existe jusqu'à huit paires de muscles. Chezles Aplididæ, lesmuseles latéraux s'étendent depuis l’extrémité des lobes buccaux jusqu'à l’autre extrémité du corps à la partie posté- rieure dustolon, oùils se terminent dans deux cônes fixateurs.Chezles Polyclinums etle Glossophorum en particulier, ces muscles ne dépas- sent jamais l'extrémité postérieure de la branchie, jamais ils ne s’éten- dent le long des viscères et du stolon. Ces caractères, tirés de la musculature, n’ont pas été employés jusqu’à présent dans la taxono- mie. [ls me paraissent pourtant excellents et très naturels pour dis- tinguer les Polyclines des Aplidiens. Chez le Glossophorum, les muscles latéraux atteignent, du côté gauche, presque l'extrémité postérieure de la branchie ; mais à droite, 43 194 FERNAND LAHILLE. ils s'arrêtent à la hauteur de l'anus. Cette musculature asymétrique est causée par une adaptation de l’animal. Les œufs, en effet, se développent toujours à droite le long du rectum, et ily aurait un grave inconvénient à ce qu'ils fussent pressés lors de la contraction des muscles. Ceux-ci ne se développent donc pas au niveau de la chambre incubatrice. Traustedt, en étudiant les Ascidies simples, avait remarqué que chez ces animaux l’asymétrie de la musculature pouvait être pro- duite par l'intestin, et que celui-ci se trouvait toujours du côté opposé aux muscles les plus puissants. Le Glossophorum nous montre que la formation d’une chambre incubatrice peut aussi amener le même résultat. Voici alors une conséquence nouvelle de ce fait. Lorsque l’animal viendra à se contracter, sa musculature étant inégale, les faces de la branchie seront inégalement resserrées, et si le tube di- gestif est libre, il viendra forcément occuper le côté le moins con- tracté. Comme cette position latérale des viscères est favorable, pour pläsieurs motifs, aux animaux qui la possèdent, elle tendra à se maintenir; et c’est ainsi que les formes ascidiennes, dont le corps est divisé en deux masses, ont produit, par évolution, les formes chez lesquelles le corps entier se présente sous l'aspect d’une masse unique. Pour Traustedt, la déviation de l'intestin produit l’asymétrie musculaire ; à mon avis, c’est l'inverse qui a lieu le plus souvent, et l’asymétrie musculaire produit la déviation de l'intestin. S'il en est ainsi, et si du Glossophorum dont la musculature droite est plus faible que la gauche dérivent des formes condensées, l'intestin de ces dernières se trouvera reporté sur le côté droit. C’est précisément ce que nous voyons dans le Chevreulius callensis et le Perophora, espè- ces dont la branchie présente une constitution semblable à celle du Glossophorum et que l’on en peut supposer dérivés. Si les muscles latéraux des Polyclinums s'arrêtent vers l'extrémité postérieure de la branchie, c’est que leur but est ici restreint. Ils ne servent, en effet, qu’à protéger l'animal et à produire le raccourcisse- ment de l'organe, de manière à provoquer de grands courants d’eau qui augmentent la respiration par l'oxydation, l'alimentation par l'ap- RECHERCHES SUR LES TUNICIERS. 195 port de matières nutritives et qui chassent les produits sexuels et les excréments. Chez les Aplididæ, ils servent, en outre, comme chez tous les Diplosomidés, à la fixation des animaux dans la colonie, etils doivent alors chercher un point d’appui fixe à l'extrémité postérieure de chaque loge. Ils se prolongent par suite le long des viscères et du stolon. En revanche, lorsque les Polyclinums veulent se retirer dans le cormus, ils n'ont pas besoin d’un point d’appui, leur masse viscérale en tenant lieu; celle-ci, en effet, ne peut se rapprocher de la branchie, qui en est séparée par un étroit corridor formé par la tunique commune coriace. Il n’y a done pas de motifs pour que les muscles latéraux s'étendent,chez ces animaux, au-delà de la branchie. Chez le Glossophorum, ces muscles ont une direction le plus sou- vent oblique et se dirigent de bas en haut, presque parallèlement aux faisceaux qui entourent l’orifice cloacal. Cette marche des faisceaux vient bien à l'appui de ce que j'ai dit sur leur rôle exclusif : la pro- duction de courants d’eau puissants. Les six paires de muscles latéraux qui, quelquefois, se divisent et s’accolent entre eux le long de la branchie, se terminent directement : trois aux espèces interlobulaires, trois aux extrémités des lobes buccaux dans lesquels ils s'épanouissent en éventail et qui sont tou- jours dépourvus de fibres transverses. Afin d'assurer une contraction simultanée et régulière de tout Le tube buceal et de la branchie, les muscles latéraux se divisent à la hauteur du sillon péricoronal et cha- cun d’eux envoie des fibres aux lobes et aux espaces interlobulaires voisins. La forme du tube buccal et des lobes dépend de la contraction plus ou moins grande des muscles ; par suite elle est des plus varia- bles, et c'est bien à tort qu’on y a attaché quelque importance. Chez le Glossophorum, le tube buccal est tantôt allongé, étroit, et les lobes sont plus ou moins grêles, quelquefois presque filiformes ; tantôt, au contraire, le tube est court, d’un diamètre presque égal à celui de la branchie, et les lobes sont grands et triangulaires. Tous les états intermédiaires existent. 196 FERNAND LAHILLE. De chaque côté de l’orifice cloacal se trouvent trois à quatre fais- ceaux musculaires longitudinaux beaucoup plus petits que les mus- cles latéraux, et je les nommerai muscles cloacaux. Ils se rendent, en effet, dans la languette cloacale et s’y divisent. Les muscles latéraux et cloacaux sont toujours externes par rapport aux muscles trans- verses qui se trouvent dans le tube buceal et dans la languette cloacale. Les muscles latéraux, accolés d’abord à la paroi externe du tube buccal, s’accolent à l’endoderme, à la hauteur du cercle tentacu- laire, alors que les muscles circulaires du tube buccal n'existent plus. Ils parviennent jusqu’à la première rangée de trémas et à cette hauteur ils s'appliquent contre la paroi externe de la cavité péribranchiale. Tous ces détails sont nécessaires pour pouvoir inter- préter les préparations microtomiques. On rencontre enfin deux autres paires de muscles longitudinaux moins volumineux que les précédents et pouvant être considérés comme muscles branchiaux. La première paire est dorsale ; elle court de chaque côté du cordon ganglionnaire et se trouve située dans le sinus dorsal, à l'extérieur des muscles circulaires de la branchie. La seconde paire se trouve à l’intérieur de ces mêmes muscles cireu- laires et court de chaque côté du sillon ventral. En résumé, les muscles longitudinaux du Glossophorum se répar- tissent de la manière suivante : six paires de muscles latéraux, trois paires de muscles cloacaux, une paire de muscles dorsaux et une paire de muscles ventraux. II. Muscles transverses. — Les muscles transverses n'existent chez les Synascidies que dans le tube buccal, la languette cloacale et :la paroi de la branchie. J'ai signalé déjà, il y a plus d’un an, l'existence de ces muscles branchiaux chez tous les Polycliniens, et j'ai fait re- marquer, à plusieurs reprises, que la branchie des Synascidies était bien moins simple qu'on ne le croyait. Les muscles buccaux et cloacaux ne présentent rien de bien parti- culier. Toutefois, il faut remarquer que les premiers ne sont pas plus développés à la hauteur de la couronne tentaculaire que dans les RECHERCHES SUR LES TUNICIERS. 197 autres régions du tube. En outre, les lobes sont dépourvus de mus- cles transverses, l'épanouissement des muscles latéraux leur en tenant lieu. Les muscles buccaux ne descendent qu’un peu au des- sous de la couronne tentaculaire. Les muscles branchiaux se trouvent, dans l’intérieur de chaque sinus transverse, appliqués contre la paroi interne de la cavité péribranchiale. Pour peu que ces muscles soient contractés, ils paraissent situés dans l’intérieur même des sinus. Cet aspect est sur- tout frappant au dessous des muscles dorsaux. Le faisceau muscu- laire est toujours unique chez le Glossophorum, continu du côté dorsal et interrompu du côté ventral ; chacun d’eux forme, par suite, une sorte de bague incomplète. IL est très intéressant de retrouver ici cette disposition primitive, qu’on n'avait signalée jusqu’à présent que chez les Salpes. Lorsque le faisceau musculaire arrive vis-à-vis du sixième tréma ventral, il se dédouble une première fois, et les deux faisceaux secondaires restent pourtant sensiblement parallèles. Chaque faisceau secondaire se bifurque une seconde fois inégalement au dessous du premier tréma ventral, et les plus petits de ces faisceaux tertiaires vont à la rencontre l’un de l’autre en encadrant ainsi incomplètement les rangées de trémas. Le grand faisceau tertiaire va, lui, se terminer près du sillon ventral en subissant quelquefois une dernière bifur- cation. Mon savant ami, M. Roule, a signalé aussi, chez les Ciones, la présence de muscles branchiaux que j'ai retrouvés également chez les Diplosomidæ, Aplididæ, Clavelinidæ, ete. Chez le Glossophorum, il n'existe pas de sinus péribranchiaux (ou dermato-branchiaux) comme chez Ciona et Distaplia. Aussi les muscles branchiaux sont-ils complètement isolés des muscles latéraux. D'après ce qui précède, chez le Glossophorum, les rangées de trémas se présentent sous l’aspect de bandes rectangulaires. Mais supposons que le dédoublement des faisceaux primitifs s’accentue, il y aura alors une paire de faisceaux musculaires dans chaque sinus transverse, et si les faisceaux tertiaires augmentent et se rejoignent, 198 FERNAND LAHILLE. les rangées de trémas seront encadrées complètement et prendront l'aspect de bandes ovalaires. C’est cette disposition musculaire que j'ai rencontré chez presque tous les Aplididæ. Dans son étude sur les Ascidies composées de Naples, le profes- seur Della Valle dit, à la page 47 : In nessun caso le fibre muscolari si trovano fra l’endoderma ed il foglietto viscerale del peritoneo. On voit maintenant combien cette erreur est grande, puisque c’est précisément dans cette situation que l’on rencontre les muscles bran- chiaux de tous les Polycliniens. Les théories sont excellentes lors- qu'on les établit après l'observation des faits. Elles sont, au con- traire, pernicieuses, lorsqu'on les suppose démontrées à l’avance et qu’on ne veut pas en démordre. Le professeur Della Valle part de cette idée préconçue et malheureuse de l’homologie complète des Ascidies et de l’'Amphioxus adulte ; il dit : Nell” Amphioxus io non ho potuto constatare la presenza di fibre muscolari fra la parete intesti- nale e la membrana involgente, lo stesso è avenuto anche al Rolph. Puisque lAmphioxus, d’après Della Valle et Rolph, ne présente pas de fibres musculaires dans sa branchie, les Tuniciers ne doivent pas en avoir. Nous avons démontré le contraire. Disons aussi, en ter- minant, que le professeur Della Valle a considéré bien à tort la cavité péribranchiale comme représentant la cavité générale du corps des Tuniciers. III. — Organogénèse du système musculaire. — Si on considère une larve très jeune, on distingue nettement un ectoderme, un endo- derme et un mésoderme représenté par des cellules libres amæ- boiïdes. Le blastocèle se confond donc en ce moment avec un schizocèle pour se servir de la terminologie d'Huxley. Il se produit de chaque côté de l'animal une double invagination des deux feuillets primitifs, et il se forme ainsi deux sacs péribran- chiaux qui se réuniront plus tard l’un à l’autre vers la face dorsale pour constituer la cavité péribranchiale unique. C’est sur les parois externes des sacs péribranchiaux que viennent se fixer quelques cel- lules mésodermiques qui s'allongent ensuite peu à peu. Les cellules placées entre le sac péribranchial et l’ectoderme produisent les mus- RECHERCHES SUR LES TUNICIERS. 199 cles latéraux ; les cellules disposées, au contraire, entre l’endoderme primitif et le sac péribranchial, donnent les muscles branchiaux. Le double sac péribranchial ou la cavité péribranchiale s'enfonce done peu à peu entre les deux feuillets primitifs dans la cavité générale du corps qu'elle restreint de plus en plus latéralement. Le feuillet interne du sac se soudant en certains points à l’endoderme primitif forme les trémas ; l'espace libre qui reste compris entre ces deux feuillets renferme les muscles branchiaux et n’est qu’un reste du schizocèle. Quant à la partie du corps comprise entre le feuillet ex- terne du sac et l’ectoderme, on lui a donné, en l’appelant manteau, tunique externe, ete.,un nom très impropre. Ce n’est, en effet, qu'une partie plus ou moins restreinte du cœlome; on ne doit donc pas s'étonner de voir s'y développer quelquefois le tube digestif et les or- ganes sexuels. Elle communique toujours de toutes parts avec la ca- vité générale du corps. Chez les espèces transparentes (Perophora, Elavelina), on voit le sang y circuler, et la marche des courants sanguins confirment chez l’animal vivant ce que l’anatomie démontre à son tour. Pour la commodité des descriptions, je conserverai toutefois un nom distinct à cette partie du corps qui n’est jamais distincte du reste de l’animal ni séparable du schizocèle, et qui, dans aucun cas surtout, ne saurait correspondre au manteau des mollusques. Je substituerai done au terme de manteau celui de paroi de la cavité péribranchiale ou simplement paroi péribranchiale, terme qui n’ex- prime que la réalité. Pour en revenir au Glossophorum et pour terminer, je dirai que les cellules mésodermiques, qui se sont allongées et qui donnent naissance aux fibres musculaires, présentent,contre leur paroi interne, des épaississements réfringents de substance contractile. Ces épaississements se développent de la périphérie de la cellule vers le centre ; par suite, ils se montrent dans les coupes sous forme de petits triangles réfringents, ayant leur base appliquée contre la paroi cellulaire. Les prismes de substance contractile augmentent de plus en plus, de telle sorte qu’à la fin ils se juxtaposent l’un l'autre, 200 FERNAND LAHILLE. en ne laissant entre leurs faces latérales qu’une couche extrêmement mince de protoplasma. Les professeurs Van Beneden et Julin ont fait la même observation sur Clarelina et Molgula ampulloïdes, et je conclurai comme eux en disant que les muscles des Tuniciers adultes sont mésenchymatiques par origine, épi- thélioïdes par formation. En outre, comme chez tous les Disto- midæ et Aplididæ que j'ai observés j'ai retrouvé les mêmes phénomènes histogé- nétiques, Je me crois autorisé à dire que l’organogénèse des muscles a lieu d’une manière identique chez tous les Tuniciers. L'histogénie des muscles chez les Salpes et les larves urodèles se ramène égale- ment à ce même plan fondamental. Seulement iciles cellules mésodermiques ne s’allongent pas, conservent des limites très nettes, et la substance contractile se forme régulièrement contre leurs parois, qui augmentent ainsi peu à peu d’épais- seur. Ces cellules rectangulaires ou poly- Fig. 411. gonales peuvent aussi devenir cylindriques. Fig. 110. — Glossophorum sabulo-- sum,L — Branchie des jeunes blas- La gaîne musculaire, formée de six ran- tozoïdes ; Lr, languettes de Lister ; Cz, Côtes transverses ; Am, muscles œ6es longitudinales de cellules musculaires de ces côies. — Gr. 50 D ® Fig. 411. — Glossophorum sabulo- qui entourent la chorde de la Styela glo- sum, L.— Branchie normale ; Pr, TE ne Dares ne merala, présente quatre rangées de ces NUS OTER ES + cellules cylindriques. Si ces cellules ve- naient à s’étirer en longueur jusqu'à devenir filiformes, nous aurions alors les cellules musculaires des formes adultes. Branchie. — La forme générale de la branchie est cylindrique : elle est ovoïde chez les individus jeunes. Le nombre des rangées de trémas varie de 9 à 14, le plus souvent on compte 11 ou 12 rangées. Chaque rangée possède au maximum 18 trémas. Ceux-ci sont géné- ralement grands et ovales. Quelquefois, pourtant, du côté dorsal principalement, ils affectent une forme hexagonale. RECHERCHES SUR LES TUNICIERS. 201 Les trémas, chez les jeunes blastozoïdes, sontau début arrondis, et iln’est pas rare d'observer, chez des adultes, une persistance de cette forme (fig. 110). Les côtes transverses sont fort prononcées et leur bord libre se découpe en papilles arrondies (fig. 111). Ces papilles sont presque à égal nombre que les trémas, et une d'elles, au-dessus du quatrième tréma dorsal gau- che de chaque rangée, s'allonge, devient filiforme et constitue une papille de Lister. Ces organes, chez les adultes, sont tou- jours plus longs que les trémas. Les côtes transverses ne sont pas interrompues du côté dorsal. Il n'existe pas de sinus péri- branchiaux ni des filets musculaires inter- trématiques. Couronne tentaculaire et centres ner- veux. — Les filets tentaculaires, chez les individus les plus développés, sont au nom- bre de 32 (fig. 112) et sont alors disposés sur trois rangs. Il existe dans tous les cas quatre filets plus longs que tous les autres et situés plus bas qu'eux. Un d’eux est ventral, l’autre dorsal, et les deux derniers sont dans le plan perpendiculaire aux premiers. La cou- ronne tentaculaire se trouve située à la limite inférieure des muscles circulaires de Fig. 412. Fig. 112. Glossophorum sabulosum, L. Portion de la couronne tenta- culaire montrant les filets disposés en 3 cycles. — Gr. 22 Fig.113. Glossophorum sabulosum, L. Centres nerveux ; In, pavillon vibratile et tube neural ; Cn, gan- glion nerveux ; Gn, glande neurale. Gr. 2 la bouche. Le ganglion nerveux est presque sphérique ; il donne naissance à six nerfs principaux et recouvre entièrement la glande neurale. Celle-ci vue de l'intérieur (fig. 113) de la branchie est réniforme, disposée transversalement, sa partie concave étant dirigée en avant. L'organe vibratile forme un long tube campanuliforme qui s'insère presque directement sur la glande neurale et se continue en arrière avec le tube neural. 202 FERNAND LAHILLE. Appareil digestif. — Le tube digestif du Glossophorum (fig. 114 s'étend au-dessous de la branchie et sa longueur est égale à la moitié de la longueur de l'organe respiratoire. On y retrouve les cinq parties qui constituent le tube digestif typique des Tuniciers. 4° Œsophage, s’ouvrant au-dessous des papilles de Lister, lisse, formant une courbe dont la cavité est tournée du côté ventral et débouchant à la partie inférieure de l'estomac ; 2° Estomac : ses parois sont lisses et son grand axe horizontal : sa forme asymétrique rappelle celle de l’estomac des Diplosoma, Pero- phora et Pyrosoma. Il est plus large du côté du cardia que du côté du pylore ; 3° Postestomac fort allongé, présente une courbure inverse de celle de l'estomac, c'est-à- dire à concavité dirigée du côté dorsal. Il est différencié en deux régions; la première grêle fait suite immédiatement à l’estomac et ne pré- sente pas, dans sa paroi, de cellules glandu- laires, celles-ci sont, au contraire, nombreuses Fig. 114. — Glossophorum : AO! i s s Sabulosum L. Tube diges. dans la seconde région qui est séparée de la tif vu du côté gauche ; Se : 5 : : Ei, estomac; Pi, Post: Première par une sorte de dilatation circulaire du estomac divisé en 2 por. 3 x : k > tions; Mi, intestin moyen tube digestif, et dont le diamètre est plus consi- Li, cœcum rectal; Ai, F ; SE rectum ; Ds, spermiducte ; dérable. Le post-estomac est toujours situé, chez Svr, sillon ventra!, Gr. 52 le Glossophorum, à gauche du rectum. Il est toujours à droite chez les Aplididæ. À propos de la position relative de la partie descendante et ascendante de l'intestin, je dois renou- veler ici une remarque importante que j'ai déjà faite. On doit observer les individus des Polycliniadæ en les faisant flotter dans un verre de montre. La pression des couvre-objets ou l'orientation sur une lame à l’aide d’aiguilles, produit fréquemment des torsions intesti- nales qui ne sont qu'apparentes et qui peuvent facilement induire en ERTEURE 4° L'intestin moyen, petit, ovoide, se continue inférieurement par une partie cylindrique très étroite qui vient déboucher entre les deux dilatations rectales ; RECHERCHES SUR LES TUNICIERS. 203 5 Le rectum remonte d’abord directement vers la branchie, puis au niveau de la dilatation circulaire post-stomacale ; il devient horizontal pour redevenir vertical au niveau de l’œsophage. Les oreillettes ana- les sont très peu développées. C’est au niveau de l'estomac que la surface du rectum présente en plus grande abondance les tubes rénaux. Leur trajet est irrégulier et quoique variqueux, ils ne présentent pourtant pas de vésicules comparables à celles que l’on rencontre, par exemple, chez Distaplia et surtout chez Diazona. Organes reproducteurs. — Ces organes sont situés dans le stolon normalement et fortement pédiculé, qui s'étend au dessous des vis- cères. La constitution du stolon est semblable à celle que l’on retrouve chez les Aplidiens, seulement, comme je l’ai déjà dit, les muscles longitudinaux sontici absents. Les follicules testiculaires arrondis, au nombre d’une vingtaine, forment une grappe composée. Cette grappe est déprimée en son milieu et du côté dorsal par les follicules ovariens. Le spermiducte et l’oviducte décrivent un demi tour au niveau de l'intestin moyen, et ils remontent ensuite tout le long du côté gauche du rectum en occupant une position dorsale. À sa terminaison, le spermiducte se renfle légèrement en massue. Quant à l’oviducte sa terminaison est dilatée etrecourbée vers le bas, de telle sorte que son orifice, au lieu d’être terminal est latéral ; 1l s’ensuit que les œufs après s'être élevés jusqu’au niveau de l'anus, se dirigent vers la partie inférieure de la ça vité péribranchiale droite, et forment ainsi deux demi-cercles ; les œufs les plus voisins du rec- tum étant toujours les moins développés. On compte en moyenne, dans cette dilatation de l’oviducte, véritable poche incubatrice, une douzaine de larves et d'œufs fécondés. Le cœur au lieu d’être exacte- ment à cheval sur l'extrémité bifurquée du tube endodermique, comme cela se présente chez les Aplididæ, occupe ici, dans le stolon, une position ventrale ; et les deux extrémités du tube endodermique se prolongent plus ou moins loin en arrière de lui. J'ai constaté, en juillet, août, septembre et octobre ; l'existence chez cette espèce de la reproduction sexuée, mais je ne puis déter- 204 FERNAND LAHILLE. miner l'époque à laquelle la reproduction commence ni celle à laquelle elle finit. Lorsque les larves deviennent libres, leur longueur égale 1/2 milli- mètre. Leur sillon ventral est alors encore disposé horizontalement en avant des centres nerveux de l’autre côté de l’orifice buccal. L'intestin ne présente encore aucune trace de torsion. Localités. — Le Glossophorum sabulosum est une espèce fort commune à Roscoff ; elle abonde principalement dans l’herbier situé entre Roléa et Perharidi. J’ai retrouvé cette même espèce à Granville, dans l’ancien pare aux huîtres. Fischer l’a signalée parmi les espèces qui vivent sur les blocs argilo-sablonneux de Moulleau dans le bassin d'Arcachon où j'en ai recueilli effectivement de fort nombreuses colonies. Je n’ai pas rencontré le genre Glossophorum à Banyuls; toute- fois, il est représenté, dans la Méditerranée, par une espèce très voisine que je nommerai G. humile. 2. — Glossophorum humile, Lahille. À Marseille, les chaluts rapportent parfois des cormus recouverts entièrement de sable fin et d’une largeur moyenne de 8 centimè- tres sur une longueur de 10 centimètres. L’épaisseur de ces cormus est généralement de 6 à 8 millimètres. Les animaux des quelques colonies que j'ai eues à ma disposition, présentaient des orifices buccaux si contractés, que ceux-ci n'étaient pas visibles à l'extérieur. Les cormus sont aplatis, horizontaux et lobés. Si on fend un de ces cormus, on aperçoit les individus si serrés les uns contre les autres et entre les deux surfaces de la tunique commune, qu'ils semblent former à eux seuls le cormus entier. Leur couleur est vert foncé, bleuâtre, et c’est à peine si le tube diges- tif tranche un peu en jaune sur la teinte générale. RECHERCHES SUR LES TUNICIERS. 295 Les individus sont toujours fort difficiles à extraire, et un examen approfondi permet seul de les distinguer du G. sabulosum. Le G. humile possède une branchie de forme cylindrique et plus développée que chez G. sabulosum. Les trémas sont allongés et on en compte une vingtaine par rangée. La glande neurale est ovoide au lieu d’être réniforme et dépasse, en arrière, le ganglion nerveux. La languette eloacale, très grande, se termine toujours par une simple pointe effilée. La couronne tenta- culaire présente seulement seize filets. Les cormus de G. humile sont toujours larges et aplatis au lieu d’être petits et globuleux comme chez G. sabulosum. 2e Gexre : Polyclinum. — Savigny, 1816. Caractères du genre : Cormus sessiles. — Branchie à simples côtes transverses. — Estomac lisse. — Branche ascendante du tube digestif située, au moins en partie, du côté droit. — Stolon génitali- fère et tube digestif toujours fortement pédiculés. M. Giard avait subdivisé les Polyclinum en deux sous-genres (Polyclinum et Aurantium), suivant que les individus formaient des cœnobies simples ou composées. Deux motifs principaux me font repousser celte manière de voir : 1° les genres et les sous-genres doivent être basés sur des différences anatomiques et non sur des dif- férences dans l’activité blastogénétique ; 2 chez quelques Polyclines, P. constellatum, Sav., par exemple, on observe le passage des cœno- bies simples aux cœnobies composées. 1. — Polyclinum aurantium, Milne-Edwards. À Granville, dans l’éboulis de rochers situés sous le phare, j'ai rencontré, à marée très basse, deux cormus du P. Aurantium, Edw. L'aspect extérieur rappelle entièrement celui de quelques Gloss. sabu- losum, de Roscoff. La couleur est plutôt jaune-brunätre qu'orangée. « Le pédoncule court et gros » de la diagnose d'Edwards était ‘si 206 FERNAND LAHILLE, court et si large, que l’on pouvait le considérer comme absent. Les cormus, sans être globuleux, étaient fortement convexes. Il n'existe pas d’autres languettes branchiales que les papilles de Lister, et ce caractère permet de distinguer de suite Polyclinum aran- tium de Glossophorum. Les autres caractères de cette espèce peu- vent se résumer ainsi : Cormus semi-Cartilagineux, non sablonneux. — Lobes buccaux toujours petits et obtus. — Bord inférieur de l’ori- fice cloacal situé assez bas, à la hauteur de la cinquième rangée de trémas.— Languette cloacale simple et pointue. — Branchie ovoïde, présentant 13-15 rangées de trémas. — Torsion intestinale. — Esto- mac entièrement lisse. — Pédicule œsophago-rectal court; l'anus s’ouvrant à la hauteur de la huitième rangée de trémas. — La lon- gueur du stolon est des plus variables, elle égale une à deux fois et demie celle du corps. Ce Polycline a été trouvé par Drasche (loc. cit., t. X. fig. 17) à Saint-Malo. Mais ni à Roscoff, ni à Banyuls, je ne l'ai encore ren- contré. Les six espèces de Polyelines décrites par Savigny provien- nent de l’ile-de-France ou du golfe de Suez. Les six nouvelles, découvertes par le Challenger, sont également exotiques et ont été trouvées sur les côtes de l'ile Kerguelen ou sur les côtes Australiennes. Le Polyclinum ficus, Giard (Aplidium ficus, Say.) serait commun sur la côte de Granville!, je n'ai pu l’y rencontrer. 3° Genre : Aplidiopsis. — Lahille, 1887. Caractères du genre : Polyclinidé. — Pas de torsion intestinale. — Estomac lisse. — Stolon non pédiculé. Tous les types de la famille des Aplididæ ont un estomac rayé, aréolé ou cannelé. Les Polyclinidés, au contraire, sauf les deux gen- res exotiques Atopogaster, Herd. et Polyclinoïides, Dr., ont un esto- mac à parois lisses. Comme ce caractère a dans ces deux familles une incontestable valeur, j'ai rattaché aux Polyclinidés la nouvelle espèce ‘ Hist. nat. des Synascidies, Giard., Arch. eæp. de zoologie, 1873. RECHERCHES SUR LES TUNICIERS. 207 . que j'ai rencontré à Banyuls et que j'avais décrite dans une commu- nication à la Société d'histoire naturelle d2 Toulouse (20 juillet 1887) sous le nom d’Aplidium vitreum. D'un autre côté, comme ce Tunicier ne présente, ni la torsion intestinale, ni la pédicularisation du stolon, caractéristiques du genre Polyclinum, que sa branchie ne possède pas les nombreuses papilles du Glossophorum et que la nature de ses parois stomacales ne permet de le rapprocher ni des Atopogaster ni des Polyclinoïdes, j'ai cru devoir créer pour lui un genre nou- veau, et pour indiquer ses ressemblances avec le genre Aplidium je le nommerai Aplidiopsis. Sous les noms de Polyclinum incertum, de P.minutum, de P. py- riformis et de Psammaplidium spongiforme ; Herdman a décrit quatre espèces qui se rapportent à ce nouveau genre. Voici leurs caractères : / très pelits. { SADIORRON ES STE à eee A. spongiformis, Herd. Cormus: {| non sablonneux. . . . . . . A. incertus, Herd. Trémas (vertical. . . . .. A. minutus, Herd. ‘Hans \ rire | [horizontal. 0. A pyriiormis,)Herd. | globuleux et régulier . . . . . A. vitreus, Lah. 1. — Aplidiopsis vitreus. — Lahille. Syn. Aplidium vitreum, Lah., 1887 Cormus gélatineux, transparent, globuleux, sessile. Deux centi- mètres de diamètre. Cœnobies irrégulières et peu distinctes. 9-10 rangées de trémas. — 14 trémas par rangée. — Orifice buccal à six lobes aigus. Orifice cloacal dépourvu de tube mais présentant quelquefois trois lobes arrondis et s’ouvrant vers le milieu de la branchie au niveau de la sixième rangée de trémas. Œsophage court. Estomac globuleux. Post-estomac à peine dis- tinct. Instestin moyen horizontal. Dilatations rectales prononcées. Le stolon est plus court que le corps et n’est pas pédiculé. Cette es- pèce provient des environs du cap Creux. Elle paraît être rare car je n’en ai recueilli que trois cormus. Profondeur : 30 mètres environ. 208 FERNAND LAHILLE. VI FAMILLE DES APLIDIDÆ Caractères de la famille : Polycliniadés. — Côté droit de la branche descendante du tube digestif jamais caché par le rectum. — Estomac toujours rayé, aréolé ou cannelé. — Stolon jamais pédiculé à l’état adulte et normal. — Orifice buccal à six ou huit lobes. — Muscles stoloniaux. L'absence de toute torsion intestinale jointe à la constitution des parois stomacales rayées, aréolées ou cannelées, caractérisent abso- lument les Aplididæ. Chez eux, le stolon n’est jamais pédiculé normalement. Le léger étranglement qui s’observe chez quelques Parascidium ne peut s’appeler pédicule que par un étrange abus de mots. Le stolon des Aplididæ, à l'époque de l’hivernage, s’étrangle au-dessous des vis- cères et finit même par s’en séparer complètement pour constituer une sorte de bourgeon dormant. C'est surtout chez Morehelliopsis Pleyberianus que j'ai pu observer tous les stades de ce phénomène. A un moment le stolon est franchement pédiculé, mais même alors, à défaut d’un examen portant sur d’autres colonies ou d’autres indi- vidus, l’absence de toute torsion intestinale et la position terminale du cœur permettront de distinguer ce pédicule transitoire des Aplidiens du pédicule constant des Polyclines. La famille des Aplididæ renferme un très grand nombre de genres fort difficiles à caractériser car ils ont été établis sur des particula- rités ou variables ou insignifiantes. Quelquefois même (Amaroucium, Edw.), ils font double emploi avec d’autres genres. Il faut, de toute nécessité, se résoudre à des suppressions, car autrement les caractères génériques dans cette famille n'auraient pas plus de valeur que les simples caractères spécifiques. RECHERCHES SUR LES TUNICIERS. 209 C’est ainsi qu'Herdman a créé le genre Psammaplidium qui ne se distingue essentiellement des Aplidiums que par la présence de grains de sable dans la tunique commune. Mais alors pourquoi ne pas subdiviser également les Polycelines en deux genres, suivant que leur tunique est sablonneuse ou non? L'absence ou la présence de corps étrangers dans la tunique des Aplidiens varie avec les loca- lités qu'ils habitent. A Roscoff, dans les endroits où l’eau est très pure, les Aplidium zostericola fixés sur les zostères ne renferment jamais de sable ; dans les localités où de puissants remous soulè- vent les fonds (Per-rech-hier) et où l’Aplide est fixé sur les rochers ou même sur les sargasses, les cormus sont toujours plus ou moins sablonneux. Cet exemple, parmi bien d’autres que je pourrais signaler, montre, je crois, qu’on ne saurait admettre le genre Psam- maplidium. La présence ou l'absence d’une languette cloacale ne suflit pas pour créer des espèces. Dans Am. cristallinum, d’après Della Valle, et surtout chez Circinalium, on rencontre des individus dé- pourvus très souvent de languette cloacale. Chez de nombreux Dis- tomidæ, dans le même cormus, le tube cloacal se modifie tantôt en languette et tantôt il persiste. Pour ces motifs, je ne crois donc pas pouvoir admettre le genre Triglossium, Giard, qui ne diffèrerait que par sa languette trilobée du genre Amaroucium. Une languette trilobée se retrouve, du reste, chez Synoïicum, quelquefois chez Aplidiopsis vitreus, chez Morchelliopsis Pleyberianus, chez Am. fus- cum et même chez Circinalium, elle ne peut donc, à elle seule, définir un genre nouveau. Milne-Edwards créa, pour les formes d’Ascidies composées pré- sentant huit lobes buccaux, le genre Parascidia (Parascidium, Mac- Don.non Parascidia, Alder, 1863). La colonie représentée dans le « Règne animal de Cuvier» (pl. 130, fig. 3), possède des cœnobies composées et l’estomac des individus est cannelé. C’est donc par suite d’une erreur qu'Herdman attribue à ce genre un estomac aréolé. M. Giard, rencontrant à son tour des Ascidies à huit lobes, à cœnobies composées et à estomac cannelé, créa le genre Fragarium. 14 210 FERNAND LAHILLE. Il est pourtant bien évident que ce dernier genre se confond avec Parascidium et qu'on n’a aucun motif de le conserver. Les caractères tirés du nombre des lobes buccaux sont commodes, car, faciles à observer, ils rendent souvent les déterminations aisées. Fig. 115. — Estomacs, post-estomacs el intestins moyens de divers Apli- didæ. — Gr. 2, — I. Morchelliopsis Pleyberianus Lah.; II. Apli- dium %ostericola G. ; NI. Circinalium concrescens G. (variété isolée); IV. Amaroucium Nordmani Edw.; V. Parascidium areolatum D. Ch. VI. Amaroucium proliferum Edw. (var. roseum); VII. Morchellium argus G Dans la famille des Aplididæ ils ont, malheureu- sement, peu de valeur, car tout porte à penser, qu'ils sont fort va- riables ; aussi je crois que c’est à peine s'ils peu- vent caractériser des sous-genres. Aussirattacherai- je Morchellium, Morchelliopsis et Parascidium,res- pectivement aux genres Synoîicum Circinalium et Amaroucium. Sion compare attentivement les genres Morchel- lioides, Herd., et Synoïicum, Say., on s’aperçoit vite que le premier ne diffère du second que par ses cænobies, composées, et le nombre de ses lobes buccaux. Morchellioides, Herd., se confond ainsi avec le sous-genre Morchellium, tel que celui-ci doit être défini. RECHERCHES SUR LES TUNICIERS. 211 M. Giard attribue à Circinalium un estomac cannelé ; d’après Drasche, au contraire, ce genre possèderait un estomac aréolé. Comme je l’ai vérifié moi-même, ces deux savants naturalistes ont raison faute d’avoir défini exactement ce qu'on doit entendre par les termes : cannelure et aréole. Si nous examinons l'estomac de l'Aplidium zostericela, nous constatons qu'il présente une série de culs-de-sac longitudinaux, formant tout autant de côtes saillantes régulières. Si, au contraire, nous étudions ce même organe chez Morchellium argus, nous ver- rons la paroi stomacale former ici de nombreux culs-de-sac, arron- dis, pédiculés et souvent disposés sans ordre. Si ces deux types d’estomac existaient seuls, il serait fort facile de définir une paroi cannelée et une paroi aréolée. Malheureusement, il n’en est pas ainsi. Chez certains Parascidium, les cannelures sont très étroites, nombreuses, obliques, quelquefois contournées. Chez d’autres, elles sont souvent, en outre, interrompues. Enfin, chez quelques types, dont le Circinalium est du nombre, les cannelures, tout en restant parallèles au grand axe de l’estomac, peuvent être inter- rompues comme chez quelques Parascidium (fig. 115, V). Le nom d’estomac pseudo-aréolé conviendrait parfaitement à ces deux derniers types, et on doit préciser ainsi les définitions : 4° Es- tomac cannelé : culs-de-sac parallèles, réguliers et ininterrompus (ig. 115, I, IT, III, IV) ; 2° Estomac aréolé : culs-de-sac pédiculés, généralement globuleux et disposés sans ordre (fig. 4145, VIT); 3° Estomac pseudo-aréolé, culs-de-sac longitudinaux et interrompus (V) ou obliques et contournés (VI), jamais pédiculés. Le genre Amaroucium, créé par Milne-Edwards, pour les Apli- diums disposés en cœnobies, avait une valeur absolument nulle, car tous les Aplides présentent ce caractère. Savigny l'indique «systèmes très nombreux, peu saillants, annulaires, sub-elliptiques, qui n’ont point de cavité centrale, mais qui ont une circonscription visible » (loc. cit., p. 182). L'état de contraction des cormus conservés dans l'alcool ne lui permit pas de voir les cloaques communs.Comme le fait très justement remarquer M. Giard, Milne-Edwards a perdu une belle occasion de nous éviter le mot Amaroucium. 212 FERNAND LAHILLE. N'’osant, toutefois, supprimer ce genre, M.Giard essaya de le conser- ver en changeant sa diagnose. C’est ainsi que tout Aplidien à ovaire plus court que le corps, devint un Aplidium $S. Str., tandis que les animaux à ovaire plus long rentraient dans le genre Amaroucium. Ce caractère est à peine suffisant pour justifier la création d'un sous-genre. En effet, chez l’Am. Nordmani le stolon est souvent plus court que le corps. Della Valle a même remarqué quelquefois l’ab- sence complète de stolon chez Am. proliferum. Le cœur se trouve alors situé immédiatement au-dessous des viscères. Pour essayer de motiver quand même la conservation des genres Aplidium et Amaroucium, Drasche a fait remarquer que, chez toutes les espèces d’Aplidium authentiques, décrites par Savigny, Giard, ou observées par lui, l’orifice cloacal se trouvait relativement très éloigné de l’orifice buccal. C’est bien là encore un caractère; malheureuse- ment, il n’est pas plus constant que les autres. Chez Am. fuscum, en effet, dont le grand développement de la branchie et des viscères ne permet pas de ranger à côté des Aplidium typiques, l’orifice cloacal est situé très en arrière. Il en est de même chez 4. gibbulosum qui est, soit pour M. Giard, soit pour Drasche, un véritable Amaroucium. En résumé, aucun caractère propre et général ne permet de sépa- rer Aplidium d'Amaroucium ; mais, vu le nombre si considérable d'espèces (une trentaine environ), qui devraient rentrer dans le genre primitif de Savigny, je crois qu'il vaut mieux, pour faciliter l'étude, conserver encore les deux divisions de M. Giard en complétant toutefois et en précisant plus loin leur caractéristique. Sous le bénéfice de toutes ces observations, voici comment on peut établir les caractères génériques des Aplididæ : Branchie sans trémas. . . . . . .. . . . . . . . Pharyngodictyon, Herd., 4886. entièrement filiforme, . . . . . Sigillina, Sav., 1816. …. | disposées sur deux rangs. . . . . . . . .. Pleurolophium, Giard, 4874. d Ê = plus court que le corps. . . . . . . Aplidium, Sav., 1816. © = E& © / RE : 2 Ë rer us {cannelé réunies, . . Amaroucium, Edw., 1842. E À Stolon /PLUS *cœnobies/ nulles ou isol. Circinalium, Giard. 4872, 5 2 Estomac 3 ù # & f général Jlong [aréolé. + + + + SYNOICUM, Phipp AE L = RECHERCHES SUR LES TUNICIERS. 213 Le diagramme (fig. 116) exprime moins incomplètement que le tableau précédent, les relations morphologiques quirelientles genres et les sous-genres d’Aplididæ avec les types de la famille des Poly- clinidæ et avec les familles des Cionidæ et des D'stomideæ. GC Tylobranchion | Morchellium Parascidium Morchelliopsis | Amaroucium Synoïcum —Pleurolophium | Aplidium Circinalium | Glossophorum Polyclinoïdes Atopogaster Polyclinum Sigillina Aplidiopsis Pharyngodictyon Fig. 116. — Diagramme des affinités morphologiques des Polyclinidæ. C. Cionidæ ; D. Distomidæ. fer Genre : Aplidium, Savigny, 1816 (Sens. mut.) Caractères génériques : Cormus toujours sessiles, souvent petits et minces. — Individus le plus souvent de petite taille. — Orifice buccal à six lobes. — Orifice cloacal éloigné de l'orifice buccal, 214 FERNAND LAHILLE. dépourvu souvent de languette cloacale. — Estomac jamais aréolé. — Stolon presque toujours plus court que le corps. Lorsque le tube cloacal sera lobé ou circulaire, sans trace de lan- guctie et surtout si en même temps il est éloigné du tube buceal, les déterminations seront fort faciles. S'il existe une languette cloacale, le genre Aplidium sera caractérisé par la position dorsale de l'orifice, jointe, soit à une faibie longueur du stolon, soit à un petit nombre de cannelures stomacales. Dans tous les cas, la longueur du stolon n’aura et ne peut avoir qu'une importance secondaire. Le caractère mis en lumière par Drasche a une toute autre valeur, puisqu'il est, pour ainsi dire, l'expression de la tendance encore faible des Apli- diens inférieurs à former des cœnobies puissamment centralisées, dont les Botrylles offrent le type le plus parfait. Par leur orifice cloacal entier ou lobé, la plupart des Aplidiums rappellent les Disto- midæ, et par la position et la direction de leur tube, les Didemnidæ (v. fig. 45 et 46, p. 64 ; fig. 56, p. 80). Le nombre des rangées de trémas est le plus souvent moindre chez les Aplidium que chez les Amaroucium; et, en résumé, on peut dire, d’une manière générale, que le genre Aplidium renferme les Aplidiens inférieurs ; le genre Amaroucium les Aplidiens supérieurs. Les Aplidium typiques de Savigny, et ceux que j'ai pu étudier, peuvent se caractériser de la sorte : |‘ cannelures stom. ( brunes, sur 2 rangs . . tremulum, Sav. à languette! Taches dorsales : | absentes. . lobatum, Sav. ne cannelures en haut de l’estomac seulement. . fallax, John. griseum, Lab. Cormus : {sablonneux. ..... A. gibbulosum, Sa. > p>rp> > > 8-10-14 cann. stom.{pigmentée. cœruleum, Lah. Orifice cloacal &-6 cannelures stom. (non sablonneux. . . circulaire “ Branchie : Înon pigmentée. . . . . A. zostericola, Giard. Cormus sablonneux. Branchie non pigmentée. . . asperum, Dr. à six lobes > > > Cormus non sablonneux. Branchie pigmentée. . pellucidum, Dr. RECHERCHES SUR LES TUNICIERS. t = Qt 1. — Aplidium griseum, Lahille. Les cormus de cette espèce ont en moyenne 0,04 de long, sur 0,01 de large. Ils proviennent du cap Béarn, où je les ai recueillis sur des tubes d’annélides. La tunique commune gélatineuse, incolore et complètement trans- lucide, laisse apercevoir des points blancs et bruns. Les premiers correspondent aux branchies des individus, les seconds aux viscères. Les individus sont petits (1"® de long, sans compter le stolon); la paroi péribranchiale, opaque et très musculaire, ne permet pas d’apercevoir la branchie. Il n'existe que six rangées de trémas, et les côtes transverses sont à peine indiquées. L'orifice cloacal ne présente ni tube ni languette et s'ouvre au niveau du milieu de la branshie. Le pédicule œæsophago-rectal est très court. L’estomac ne présente que six cannelures qui s'étendent d'un bout à l’autre de cet organe. La longueur du stolon égale la longueur du tube digestif (0mm,5). Des deux côtés du sillon ventral se trouvent de petits amas de cel- lules pigmentaires, d’un gris cendré; on en rencontre également eutre les cannelures de l'estomac. Cette espèce est fort voisine de l’Aplidium tremulum de Savigny. Elle en diffère par les caractères suivants : Chez A. tremulum la branchie est bien plus développée (onze rangées de trémas). Il existe une languette cloacale. « Le thorax, d’un jaune ferrugineux, est marqué de deux rangs de taches dorsales brunes. » En outre, l’esto- mac de 4. tremulum ne présente que quatre cannelures. A. gibbulosum, Sav. (Am. gibbulosum, D. V.), qui a été trouvé à Naples, par Della Valle, se rapproche aussi de A. griseum, seulement les cormus de 4. gibbulosum sont toujours sablonneux, les rangées de trémas nombreuses (une vingtaine) et le stolon très allongé. 2. — Aplidium cœruleum, Lahille. On rencontre cette espèce à Roscoff, sur les souches de laminaires {banc d’Astang et Duhon); elle est abondante, et je m'étonne qu'elle 216 FERNAND LAHILLE. n'ait pas été signalée par M. Giard. Elle forme de petites masses de 0,01 à 0,02 de diamètre, irrégulièrement enchevêtrées dans les souches. Les cormus lobés, sessiles, ne dépassent presque jamais 0,005 d'épaisseur. Lorsqu'ils se touchent, ils produisent l'apparence d’un cormus unique cérébriforme, mais la concrescence est le plus souvent très faible, et les cormus primitifs se séparent aisément les uns des autres. Ils agglutinent très légèrement le sable. La tunique commune est transparente, présente une sorte d’éclat résinoide et laisse apercevoir les individus colorés. Ceux-ci sont disposés sans aucun ordre en cœnobies composées autour d’orifices cloacaux communs peu visibles. Le tube buccal, très court, présente six lobes arrondis, au-dessous de chacun desquels on aperçoit un filet tentaculaire coloré en beau bleu cendré. Les six filets tentaculaires apparaissent à l'extérieur sous la forme de six taches. Une est située au-dessus du pavillon vibratile, l’autre à l'extrémité supérieure du sillon ventral, les deux dernières paires sont latérales. L'orifice cloacal correspond au milieu de la branchie, et est dépourvu de tube, languette ou lobes. Les cellules pigmentaires bleues se retrouvent dans toute la cavité générale, principalement dans les côtes transverses de la branchie. L'acide acétique décolore instantanément ces cellules. Les extrémités supérieure et inférieure du sillon ventral sont très fortement pigmentées en blanc. La paroi péribranchiale et la branchie sont transparentes. On compte neuf rangées de trémas. Ces fentes étant au nombre d’une dizaine par rangée. L'’estomac présente huit à dix grandes cannelures. Le post-estomac présente deux régions et l'intestin moyen est vertical. 2. — Aplidium zostericola, Giard. M. Giard qui, le premier, a fait connaître cette espèce de Roscoff, est, à son égard, très sobre de renseignements. Il se contente de dire que les cormus ne dépassent pas en volume l'extrémité du petit doigt, RECHERCHES SUR LES TUNICIERS. 217 qu'ils ont la couleur d’une groseille blanche et que les individus qui les constituent présentent des lobes buccaux peu développés et sept rangées de trémas. Aspect extérieur : Les cormus sont fixés indifféremment sur les sargasses et les zostères, on en rencontre quelquefois même sous les rochers. Ils sont sessiles, légèrement convexes ; leur épaisseur maxima est de 0,01, et leur longueur varie généralement de 0,01 à 0,04. Leur couleur est d’un blanc jaunätre. La tunique commune ne renferme pas de cellules vacuolaires, elle est constituée par une substance fondamentale, homogène et trans- parente, renfermant de très nombreuses cellules tunicières étoilées. On y remarque également, éparses çà et là, quelques vésicules arrondies et à noyau très visible. En certains endroits, ces vésicules donnent à la tunique de l’Aplidium zostericola l'aspect représenté par Herdman dans la fig. 9, pl. XXVI (Apl. fumigatum), et la fig. 15, pl. XXX (Am. lœvigatum). Ces vésicules ne sont autre chose que les extrémités ampulliformes de prolongements ectodermiques. La tunique de l’Apl. zostericola n'agglutine pas normalement les corps étrangers. Toutefois, lorsque les cormus sont fixés sous des rochers, il n’est pas rare de trouver des colonies dont la tunique soit sablonneuse. Le tube buccal est très court, il surmonte une branchie cylindri- que et présente six petits lobes arrondis. À sa base, on aperçoit la couronne tentaculaire formée de huit filets alternativement grands et petits. Le tube cloacal est également très court et ne possède ni lobes ni languette. Lorqu'’il est dans son état d'extension complète, on le voit situé à mi-hauteur de la branchie, au niveau de la deuxième, troi- sième et quatrième rangée de trémas. Le ganglion est presque sphérique, et il en part six paires de nerfs. Il est situé en avant de la première rangée de trémas, à la hauteur du cul-de-sac antérieur du sillon ventral. Celui-ci dépasse la branchie d’une longueur souvent égale à la dimension des trémas. La glande neurale n’est qu'une dilatation ventrale du tube neural, qui se prolonge ici très visiblement en arrière du ganglion. 218 FERNAND LAHILLE. La glande est arrondie, très petite, située sous la partie antérieure du ganglion qu’elle ne dépasse jamais sur les côtés. Le pavillon vibratile forme, avec le tube neural, un coude très prononcé. Il vient déboucher dans la branchie, sous forme d’un simple orifice situé presque au milieu d’une aire triangulaire, formé par la lèvre infé- rieure du sillon péricoronal. L'angle inférieur de cette aire ciliée est un premier indice du sillon dorsal que l’on trouve développé chez les types supérieurs. La branchie est cylindri- que, transparente et possède sept rangées de trémas. Ces ouvertures sont au nombre de 12, 13 ou 14 par rangée. Les côtes transverses sont bien déve- loppées. Les papilles de Lister sont petites, trian- Fig. 417. — Aplidium xostericola, gulaires et situées au-dessus du quatrième Giard. — Coupe transversale au à , niveau de l'estomac, Zi. Ci, can- tréma dorsal gauche. Leur longueur égale nelures ; Ri, rectum ; Du, tubes rénaux ; Ec, tubes endodermiques la demi-hauteur d’un tréma. soudés en partie ; Do, Ds, oviducte NE ES De chaque côté de la branchie, on compte 13 à 14 filets musculaires. La cloison dorsale persiste en grande partie, et la chambre péribranchiale droite ne communique avec la gauche qu’à la hauteur du tube cloacal. C’est encore un caractère qui rapproche les Aplidium des genres inférieurs (Didemnum, par exemple). L'estomac et la portion inférieure du rectum sont colorés en Jaune, le reste du tube digestif est de couleur très pàle. On compte le plus souvent 12 cannelures stomacales (fig.115, IT). Si on examine une coupe horizontale passant par le milieu de l'estomac (fig. 117), on voit que les parois de cet organe paraissent soudées suivant les arêtes des cannelures, ilen résulte que la section de chacune d'elles a une forme ogivale. Ce qui frappe surtout dans cette coupe, c’est la grande épaisseur du côté ventral, des deux tubes endodermiques Ec qui sont encore à ce niveau presque séparés l’un de l’autre. L'oviducte Do et le spermiducte Ds longent, comme chez tous les Aplididæ, la face dorsale de l’anse. D’après M. Giard (loc. cit., p. 136), RECHERCHES SUR LES TUNICIERS. 219 la ponte d’A. zostericola cesserait à la fin de juin. À la fin du mois d'août, j'ai encore trouvé pourtant de très nombreuses larves. 3. — Aplidium asperum, Drasche. Syn. Apl. Exibardi, Lahille, 1890. Dans les premiers jours de mai 1890, je reçus de M. Exibard, pré- parateur naturaliste, un envoi de Tuniciers de Nice. Parmi des es- pèces très communes dans la Méditerranée (Diazona, Polycyclus Renieri, Lept. candidum, etc.), je rencontrai un cormus sessile, mince, d’un gris sale et tout bourré de sable fin. Ma première impres- sion fut de le rapporter à une variété grisâtre du Leptocline gélati- neux. La surface de la colonie présentait en effet les lignes ramifiées, des dépressions cloacales des Leptoclines typiques. Quelle fut ma surprise en reconnaissant, à la dissection, un Aplidium qui me parut d’abord nouveau et que je décrivis à la Société d'Histoire naturelle de Toulouse (séance du 18 juin), sous le nom d’Aplidium Exibardi. Une étude plus approfondie m'oblige de rattacher cet animal à l’A. asperum, Dr. L’orifice buccal présente 6 lobes obtus, le tube cloacal perpendi- culaire à l'axe de la branchie est très éloigné du tube buccal et présente également, comme lui, six lobes ; les trois supérieurs sont plus développés que les autres. On compte une douzaine d’individus par cœnobies. La branchie présente dix à douze rangées de trémas. L’'estomac est à huit cannelures régulières. Le stolon génitalifère est un peu plus long que le corps. L'épaisseur des quatre cormus que j'ai eus à ma disposition, ne dépassait pas 2"m5. Cette espèce, très rare à Rovigno, atteindrait dans cette localité la grosseur d’une petite châtaigne. 2e Genre : Amaroucium, Milne-Edw., 1846 (Sens. mut.) Caractères génériques : Cormus quelquefois pédiculés. Le plus souvent larges, épais et sessiles. — Individus de grande taille. — Orifice cloacal toujours muni d’une languette et le plus souvent très 220 FERNAND LAHILLE. rapproché du tube buccal. — Presque toujours chez les adultes le stolon est plus long que le corps. Quelquefois il existe un tube cloacal circulaire ; mais, dans ces cas exceptionnels, la languette persiste comme formation indépendante entre le tube buccal et le tube cloacal (V. Herdman, pl. XXXI, fig. 3). M. Giard a également observé, à Roscoff, cette très curieuse modification chez Am. Nordmani (loc. cit., p. 55); d’après lui, elle serait produite, chez ce dernier type, par la présence d’un petit crustacé parasite. Quoiqu'il en soit, on peut dire que, dans tous les cas, il existe chez Amaroucium une languette cloacale. En outre, le nombre des cannelures stomacales est presque tou- jours très élevé, quoiqu’elles ne s'étendent parfois que sur la partie supérieure de l’estomac, tandis que la partie inférieure reste lisse. Les parois stomacales sont parfois aussi pseudo-aréolées. Milne-Edwards, comme nous l’avons vu, créa pour les Amarou- cium à huit lobes buccaux, à estomac cannelé et à cœnobies composées ou réunies, le sous-genre Parascidium qui doit être conservé. À : GENRE : Amaroucium, Milne-Edw. (S. str.) Caratères : Six lobes buccaux. — Estomac cannelé ou pseudo- aréolé. — Cœnobies composées ou sinon réunies, le plus souvent composées et réunies. Les Amaroucium vrais que j'ai pu étudier et les espèces à estomac simplement rayé que Drasche a décrites, peuvent se reconnaître et se caractériser de la manière suivante : Oligozoïques et régulières. . . . . . . . +. . À. Nordman ft trilobée:-2 28 ne Eee Re A. albicans, Edw. cannelé. | non sablon,, rouge-orangé. A. proliferum, Edw. ae (simple. x s : 8/]8 :: \Languette (jaunegrisètre. A. densum, Giard. e\rS Cormus : /sablonneux.: ES 8 (cloacale : | [brun sombre . A. fuscum, Dr. De à : É s À L transparent, incolore. . , . . . . . A. cristallinum, Ren. rayé. blanc-opaque - . .. . . . . . . A lacteum ir Cormus : ; ù de | rouge-orangé . . . . . . « . . .« . A. conicum, Olivi. RECHERCHES SUR LES TUNICIERS. 221 1. Amaroucium Nordmani, M.-Edw. Les cormus de cette espèce sont toujours sessiles et charnus (épaiss. moy. 6"). Le plus souvent leur couleur est jaune-rou- geâtre. « Au premier abord, dit Milne-Edwards (loc. cit., p.289), on pour- rait prendre cette Amarouque pour un Botrylle. » Ce fut le premier mot que m'adressa, en voyant un de ces cormus, M. Jezéquel, le garçon de laboratoire de Roscoff, dont tous les naturalistes qui ont travaillé à cette station se plaisent à reconnaître l'intelligence et le dévouement. Le caractère le plus frappant de l’Am. Nordmani est, en effet, ses nombreuses cœnobies oligozoïques et régulières. Les six lobes buccaux, les douze filets tentaculaires, le sillon ven- tral et la languette cloacale sont pigmentés en jaune très clair. On compte le plus souvent neuf rangées de trémas, mais ce nombre peut s'élever à treize. Les languettes de Lister sont larges et trian- gulaires. L’estomac, d'ordinaire, est régulièrement cannelé (fig. 115, IV); mais si les cannelures deviennent très nombreuses, l'estomac devient pseudo-aréolé. Jamais le rectum ne remonte sur le côté droit de l'estomac, comme l’a représenté, sans doute par er- reur, Milne-Edwards. Le stolon est plus court que le corps ou à peine plus long. A l’époque de la reproduc- pi 118. — 4m. Nordmani, M.-Euw. — Larve à l'éclo- sion, vue du côté gauche. — Gr. 5?, tion, la cavité cloacale pré- sente, à sa partie inférieure, un diverticule qui peut atteindre la partie supérieure de l'estomac. Les œufs s’y trouvent presque toujours disposés sur deux rangs. Je représente (fig. 118) la larve de cette espèce au moment de l’éclosion. Les colonies sont presque toujours aplaties. Elles atteignent par- fois 6 centimètres de large sur 8 centimètres de long. A l’époque de l'hivernage, la tunique devient blanche, cartilagineuse, opaque et épaisse, et les animaux deviennent très colorés 222 FERNAND LAHILLE. Dans les environs immédiats de Roscoff, cette espèce est à peu près localisée, comme l'indique M. Giard, à l’est des rochers des Bourguignons et l’espace compris entre ces rochers et l’île Verte. Elle est également commune à Trébunnec et à Duhon. Parmi les divers Tuniciers d'Arcachon que m'a envoyé M. Durègne, le sympathique et bienveillant directeur de la station zoologique, j'ai rencontré deux cormus qui se rapportaient à la description que Fischer ! donne del’Am. Lafonti (n. sp.) et quine sont qu’une variété de l'Am. Nordmani. M. Fischer confond les lobes buccaux avec les filets tentaculaires, et une étude des plus incomplètes lui a fait croire que le genre Fragarium Giard était basé sur le nombre de ces filets ! « Apertura branchialis, 7-8 dentata, denticulis acutissimis. Cette espèce diffère de l’Am. Nordmani, dit M. Fischer, par les den- ticules des ouvertures branchiales au nombre de sept ou huit seule- ment; par la forme de ses ouvertures qui ne sont pas lobées. Le nombre de denticules supérieurs à six fera ranger notre espèce dans le sous-genre Fragarium Giard » (loc. cit., p. 9). L’Am. Lafonti ne diffère de l’Am. Nordmani que par la coloration de la branchie qui est ici jaunâtre au lieu d’être rosée, par suite les cormus sont plus päles que ceux de l'espèce type. 2. — Amaroucium albicans, M. Edw. Syn.:? Am. lacteum, Drasche. (V. M.-Edw., loc. cit., p. 287.) Cette espèce que j'ai trouvée à Granville (sous le phare, entre la côte ouest et le rocher à balise noire), est transparente et ne peut se confondre avec les colonies opaques de l’Am. Nordmani en train d’hiverner. La languette cloacale trilobée des individus et leur branchie incolore les feront du reste aisément distinguer de l'espèce précédente. 3. — Amaroucium proliferum, M. Edw. Var. : Am. roseum, D. V. ; Am. aureum, Edw.; Am. commune, Dr. ? Am. simulans, G. Cette espèce est fort répandue et a été décrite sous des noms 1 Actes de la soc. Lin. de Bordeaux, t. XXX, 1876. RECHERCHES SUR LES TUNICIERS. 223 divers. Comme le dit, en effet, avec trop juste raison M. Giard (Hist. nat. des syn., p. 501), « la plupart des auteurs trouvent plus simple de se dispenser des recherches bibliographiques. C’est ainsi que la science s’encombre e{ s’embarrasse d’un fatras inutile, chacun vou- lant de son côté poser la première pierre au lieu de continuer l'édifice commencé par ses devanciers. » Sous prétexte de diagnoses trop concises ou de dessins trop vagues, on s’empresse de créer des espèces nouvelles, sans même étudier, par d’attentives comparaisons, la valeur des caractères que l’on propose. C’est à La Rochelle que j'ai rencontré pour la première fois l’Am. proliferum, Edw.; depuis je l’ai retrouvé dans un envoi que m'a adressé de Marseille mon excellent ami Roule. L’Am. aureum, Edw. représenté pl. 130 dans le règne animal de Cuvier, m'a été communiqué par M.Exibard,de Nice même. Je me suis procuré enfin, à Naples, l’Am. roseum décrit par Della Valle. C’est cet examen qui m’a permis de rattacher au même type ces divers animaux, qu'on ne peut considèrer que comme de simples variétés de l’Am. proliferum, M.-Edw. Voici leurs divers caractères. rouge. . À. proliferum type, Edw. non sablonneux, jaune-rougeâtre ou rosé A0 R. T. — Branchie : . . . . . . . lincolore. A. roseum proliferum, D.V. Cormus sabl,, brun clair ou orangé. 44 R.T. Branchie jaune. À. aureum proliferun, Edw. 1. Am. proliferum, M.-Edw. — Cœnobies toujours composées, polyzoïques et peu nettes. 10-12 filets tentaculaires. Muscles branchiaux très développés : deux faisceaux musculaires dans chaque sinus transverse. Muscles circulaires de l'orifice cloacal puissants. Deux muscles longitudinaux se rendent jusqu'à l’extré- mité de la languette cloacale. Estomac globuleux à cannelures inter- rompues et ramifiées (fig. 115, VI). Post-estomac court et intestin moyen presque toujours horizontal. Longueur du stolon fort varia- ble, le plus souvent court. 2. Am. roseum proliferum, D. V. — D'après Della Valle, ces colonies diffèreraient des précédentes par les caractères suivants : 1° Coloration rosée du cormus ; 2* Branchie incolore ; 3° Can- 221 FERNAND LAHILLE. nelures stomacales moins ramifiées ; 4° Pédoncule stolonial grêle; 5° Stolon grêle aussi long que le corps. Je ferai remarquer tout d’abord que la couleur du pigment ou son absence ne peut suffire pour caractériser une espèce; d’autant plus que, chez Am. proliferum type, on trouve des colonies à peine rou- geâtres à côté d’autres dont la couleur est d’un rouge assez intense (M.-Edw., loc. cit., p. 285). Que les cannelures stomacales soient plus ou moins ramifiées, cela n’a aucune importance, car, dans la même colonie, on trouve tous les états. Enfin, nous avons vu qu'il ne fallait attribuer à la pédicularisation du stolon qu'une valeur insignifiante, et quant à la longueur de cet organe, l’Am. proliferum présente, comme Della Valle l’a lui-même reconnu, toutes les variétés possibles depuis son absence totale jusqu'à une très grande longueur. Les cormus d’Am. roseum que j'ai étudiés avaient une forme conique (3 centimètres de diamètre et 4 centimètres de hau- teur). Chacun d’eux renfermaient une douzaine de cœnobies, parfois simples, le pius souvent composées. Les cloaques communs ne se trouvaient pas au centre de ces systèmes ; ils étaient tous plus rap- prochés du sommet du cône que de sa base. Sous l'influence de l'alcool, les dépressions cloacales étaient fort marquées et les colonies avaient un aspect cérébriforme. Le nombre de rangées de trémas est le même que Am. proliferum type. 3. Am. aureum, M.-Edw. (? Am. simulans, Giard. Am. commune, Dr.). Comme la précédente, dont elle est plus voisine que du type, cette variété affecte le plus souvent la forme conique", et présente en même temps, comme elle, une certaine translucidité. Les cœno- bies sont polyzoïques, régulières et rares. On compte 14-15 rangées de trémas à la branchie. Les cannelures de l'estomac sont toujours très étroites et très nombreuses ; mais rarement ramifiées. Le stolon est grêle et fort allongé. i C’est très probablement à cette variété que doit se rapporter l’Am. 1 (V. Dr., pl. V, fig. 25, et Milne-Edw., Règne animal de Cuv., pl. 180). RECHERCHES SUR LES TUNICIERS. 225 simulans, Giard : Amaroucium d’un bel orangé formant de petits groupes au milieu de Cynthia de teinte identique (loc. cit., p. 494). 4. — Amaroucium densum, Giard. Syn. : Am. subacutum, Dr. Cormus charnus, sessiles, polymorphes (ellipsoïdaux, lobés ou coniques). Tunique commune, entièrement sablonneuse. Couleur jaune-brunâtre sale (ocre jaune, parfois jaune de Naples). Orifice buccal à six dents aiguës. Longue languette cloacale. Onze rangées de dix-huit trémas. Estomac globuleux (10-16 cannelures), le plus souvent très régulier. Quand les individus sont contractés, le rectum semble spiralé comme chez À. tremulum (Sav., loc. cit., pl. XVI, fig. 2). M. Giard admet les variétés suivantes : 1e HAUTES IAE TS A. densum. Type. non lobés. Individus Cormus ancs, . . . . . . . . « À. pallens densum. RUES MER TER MN ME ete ere ie oh à 8 A. rupestre densum. Je n'ai jamais rencontré pour ma part la variété «. Am. densum est assez commun à Banyuls; sa couleur, dans cette localité, tire souvent sur le vert et ses cormus, comme ceux de Rovi- _gno, sont le plus souvent coniques. 5, — Amaroucium fuscum, Drasche. Dans les fonds coralligènes de Banyuls, notamment au cap Peyrefitte, on rencontre, sur des Bryozoaires ou des Gorgones, des cormus sessiles, irrégulièrement lobés, pouvant atteindre parfois des dimensions très considérables (48 cent. de longueur sur 8 cent. de largeur.) L'épaisseur moyenne est de 0,015-0,02. La surface est lisse et on ne distingue pas les cœnobies; les ori- fices buccaux apparaissent toutefois sous forme de petites taches sombres. L'action de l'acide acétique fait apparaître les animaux. La couleur générale brun sombre (terre de Sienne brûlée), devient parfois rougeâtre après la capture. Ce fait explique la coloration de 45 226 FERNAND LAHILLE. la colonie représentée par Drasche (fig. 21, pl. V). Les cormus rap- pellent tout à fait ceux des Distomes ; principalement ceux de D. mucosum ou de Cystodites durus. Ils ont quelquefois même l’aspect résinoide de ces derniers. La tunique est remplie de sable fin, mais en assez petite quantité. Les individus présentent six lobes buccaux arrondis, six tenta- cules fortement pigmentés par des cellules irrégulières remplies de granulations de couleur sépia. Ces cellules donnent un aspect plus sombre à toute la partie antérieure du corps, car elles se retrouvent dans les côtes transverses de la branchie et dans les sinus inter-tré- matiques des premières rangées de trémas. Ces rangées sont presque toujours au nombre de treize. L'orifice cloacal, souvent très allongé, s'ouvre assez bas, de la troisième à la septième rangée. Par sa position et sa direction, il rappelle celui des Aplidium, d'autant plus qu'il présente souvent six lobes. Le lobe supérieur, plus développé que tous les autres, forme une longue languette. L’estomac présente une dizaine de cannelures régulières et sa forme est plutôt allongée que sphérique. Le stolon génitalifère est souvent court. _ Cette espèce montre combien, en définitive, est peu naturelle la division entre les Aplidium et les Amaroucium. Il existe chez cette espèce, à l'époque de la reproduction (comme chez Distaplia), un diverticule cloacal destiné à l’incubation des œufs. Cette poche incubatrice se rencontre aussi chez Am. densum, mais elle y est moins prononcée. B : Sous-GEenRE : Parascidium, Milne-Edwards. Syn : Fragarium, Giard ; Fragaroïides, Maurice ; Parascidia, Herd. Caractères : Cormus ellipsoïdaux ou sphéroïdaux. — Huit lobes buccaux. — Estomac cannelé ou pseudo aréolé. — Cœnobies com- posés. J'ai déjà (V. p. 210) exposé les motifs qui nécessitent la réunion des genres Parascidium, Edw., et Fragarium, G., aussi n’y revien- RECHERCHES SUR LES TUNICIERS. 227 drais-je pas; mais je dois indiquer les raisons qui me font rejetter également le sous-genre Fragaroïdes, Maurice. Dans sa remarquable « Etude monographique d'une espèce d’Ascidie composée », M. C. Maurice commence par témoigner à son tour une profonde et légitime aversion contre la création de nouvelles espèces qui ne font qu'encombrer la systématique des groupes et des familles ; il désire suivre le conseil souvent cité d’Audouin et de Milne- Edwards : « il y a moins d’inconvénients à modifier légèrement les caractères déjà existants, car la multiplicité des noms et des divi- sions nuit toujours au progrès de la science. » Aussi l’étonnement est-il grand lorsqu'on le voit proposer à la fois une espèce et un sous-genre nouveaux. Quels sont les puissants motifs qui déter- minent cette nouvelle manière de voir. « Deux faits, dit-il, m’em- pêchent de réunir ces deux espèces (Fragarium elegans et Fra- garoïides aurantiacum) sous une même dénomination générique. C’est d’abord le nombre des filets tentaculaires qui, d’après Giard, est nettement de douze tentacules chez Fragarium, tandis que notre espèce en présente certainement quatorze. C'est ensuite, et ceci est beaucoup plus important, le mode d'union de l'ovaire avec le corps de l’Ascidie. Chez les Fragarium, en effet, l'ovaire est relié au reste du corps par un pédicule. Chez notre espèce, au contraire, il n’existe aucune trace de pédicule. » Je ferai observer à mon tour, que s’il est un caractère variable chez les Tuniciers, c’est bien le nombre des filets tentaculaires. Il suffit, pour s’en convaincre, d'examiner sous ce rapport plusieurs individus d’un même cormus. Chez les Distaplies, pour ne citer qu'un exemple, la variation va de dix à seize ; les très nombreux Fraga- rium elegans que j'ai observés présentaient tantôt douze, tantôt quatorze, quelquefois même seize filets, ete., etc. Du reste, M. Maurice ajoute à la page 96 du mémoire cité : « J'ai bien constaté parfois de petites excroissances qui sem- blaient être des rudiments de tentacules..., mais ces légères protubérances ne se trouvaient d'ailleurs en aucune façon sur le repli constituant la base de la couronne tentaculaire. » Ces excrois- 228 FERNAND LAHILLE. sances sont pourtant de véritables tentacules, car souvent, comme le montre la figure 119, les filets sont indépendants les uns des autres et naissent à des niveaux différents. Nous avons observé également le même fait chez Glossophorum (V. p. 204). Le second caractère invoqué par M. Maurice a peut-être encore moins de valeur. Car la légère constriction que F. elegans peut présenter en temps ordinaire n’est pas plus prononcée que ne l’est celle de l’Am. proliferum, M.-Edw. (loc. cit., pl. II, 2 a). Dans la ce SN) diagnose du genre Fragarium, M. Giard dit ex- pressément : ovaire très long, légèrement pédiculé (loc. cit., p. 138). Du reste, grâce à l'extrême obligeance de M. Maurice, j'ai pu examiner, com- parativement au Fragarium elegans, quelques Fig. 119. — Perophora Cormus de ses Fragaroïdes. Il y a non seulement Banyulensis, Lah. Cou- ronne tentaculaire vuede ressemblance, mais identité absolue. l'intérieur dela branchie. Te on M. Maurice rencontrera des Fragaroïdes auran- tiacum à Roscoff, dans Ja partie ouest de la prairie des zostères, située devant le laboratoire. En cet endroit, en effet, les cormus du Fragarium elegans ne sont plus rosés mais orangés. Cette couleur accidentelle est due, comme l’a fait observer M. Maurice, à la pré- sence d'algues jaunes dans la tunique commune du cormus. C'est également du Parascidium (Fragarium) elegans qu'on doit rapprocher Am. torquatum, Dr., et Frag. areolatum, D. Ch. Quant à P. flavum, M.-Edw., des échantillons que j'ai reçus de Nice et des colonies que j'ai recueillies moi-même à Banyuls, me permet- tent de le considérer comme une espèce bien distincte. Dans tous les cas, l'assimilation qu'a proposée M. Giard de P. flava, Edw., et de Circinalium concrescens ne peut être maintenu. Voici comment on peut distinguer les trois espèces de Parasci- dium que l’on peut conserver : & { absents. { cannelé. Presque toujours 12-13 r, detrémas. P. elegans, Giard. n = £ £ Estomac : { pseudo-aréolé. P. toujours 48-20 r. detrémas. P. areolatum,D.Ch. À 3 G c : 8 | présents. Cormus jaune-pâle ou incolore . . . . . . . P. flavum, M.-Edw. RECHERCHES SUR LES TUNICIERS. 229 1. — Parascidium elegans, Giard. Var : Fragaroïides aurantiacum, Maurice. Cormus ellipsoïdaux sessiles ou largement pédiculés. Dimensions moyennes : 0,05 de longueur sur 0,03 de largeur. Ea colonie la plus développée que j'ai observé à Roscoff (Perharidi), mesurait 0,07 de long sur 0,05 de large. La couleur de l’espèce type est d’un beau rose pur, parsemé de points blanc de lait. Les cœnobies sont com- posées et rares ; on n’en compte parfois que deux ou trois. La sur- face du cormus est entièrement lisse; mais lorsque les cœnobies sont contractées, les dépressions cloacales s’accentuent comme chez Am. roseum, et forment des sillons. Le pédicule, incolore, est très court et légèrement sablonneux. Toute la tunique commune est remplie de cellules pigmentaires d'un blanc opaque, elles sont surtout nombreu- ses autour des orifices buccaux des individus. La distribution des spicules, lorsqu'ils sont rares, est soumise, chez les Didemniens, à la même loi. Huit lobes buccaux, pigmentés en blanc, obtus et terminés chacun par une petite pointe. Ce fait n’est pas, du reste, particulier à cette espèce. Je n’ai jamais observé moins de huit lobes. Exception- nellement, chez des individus voisins d’un cloaque commun, il existe dix ou onze lobes buccaux, mais alors ils sont irréguliers, quelques- uns présentent leur largeur habituelle, tandis que d’autres paraissent fendus. L'orifice cloacal est muni d’une languette souvent pigmentée en blanc, les tubes cloacaux apparaissent alors rayés de petites bandes longitudinales blanches. Les extrémités de quelques lan- guettes font parfois saillie sur le bord du limbe qui se trouve alors dentelé. Sous la languette cloacale on observe souvent deux petits lobes latéraux. Les filets tentaculaires blancs, courts et alternes, sont presque toujours au nombre de douze.Au-dessous des lobes buccaux se trouve également un cercle de points blancs qui forment presque toujours un collier continu. 230 FERNAND LAHILLE. Les rangées de trémas sont habituellement au nombre de douze ou treize. C’est le P. elegans que j'avais choisi, dans mes premières études, comme type d’Aplidien. Je n'insisterai pas toutefois sur son anatomie. Les figures 120 à 125, qui datent de mes premières observations, montrent quelques-unes des particularités de cet animal. Dans ma note à l'Institut (6 sept. 1886), on trouvera également le résumé des principaux faits nouveaux, auxquels M. C. Maurice allait donner, dans sa thèse soutenue en 1888, un si grand développement. Je renvoie le lecteur à cette monographie si complète et si remarquable sous tous les rapports, et dans laquelle les discussions bibliographiques ou de théorie pure viennent agréablement reposer l'esprit. C'est ainsi que l’auteur consacre cinquante-quatre pages à l'étude pourtant si simple des centres nerveux de l'animal adulte et je m'empresse d'ajouter qu'on ne saurait pas s’en plaindre. 2. — Parascidium areolatum, Delle Chiaje. Syn. : Am. torquatum, Drasche. Cette espèccest si voisine de la précédente, que je ne l’ai considérée longtemps que comme une variété de P. elegans. Comme P. aurantiacum-elegans, les cormus sont d’un rose un peu jaunâtre ; ellipsoïdaux ou sphéroïdaux, à surface entièrement lisse. Les colonies présentent toujours une certaine transparence et, d’après Della Valle, leurs dimensions peuvent atteindre deux décimètres de diamètre et parfois plus. Elles peuvent peser plus d’un kilo ! Ce volume n’est dépassé quelquefois que par Diazona violacea (Sax.), Amaroucium conicum (Olivi), ou Polycyclus Renieri (Ren.). Le plus ordinairement P. areolatum ne dépasse pourtant pas 6 cen- timètres de long sur 3 de large. Un caractère qu'il partage avec P. elegans est la présence d’un collier de pigment blane, situé à la base du tube buccal. Les huit lobes buccaux sont émoussés et parfois tous blancs. La languette cloacale est médiocrement développée. RECHERCHES SUR LES TUNICIERS. 231 Le nombre de rangées de trémas, dans aucune des colonies que j'ai examinées, ne s’abaisse au-dessous de quatorze, le plus souventilestde dix-huit ou dix-neuf, parfoismêmede vingt. C’est surtout la cons- tance de ce caractère qui me fait considérer P. areolatum comme espèce distincte. En outre, l'estomac ne m'a jamais paru régu- lièrement cannelé, comme il l’est le plus souvent chez P. ele- gans. Ses parois sont pseudo-aréolées (fig. 115, V), et les canne- lures sont souvent obliques, moins larges et plus nombreuses que dans la figure citée ci-dessus. Le post-estomac est très allongé, il ne l’est pas autant chez P. ele- gans. L'’intestin moyen est globuleux. 127 rencontre assez sou- areolatum se vent aux environs de Banyuls (plage d’Ar- gelès}, ainsi qu’à l’en- trée du port de Cette. 195 Fig. 124. Fig. Fig. 120.— P. elegans, G. — Coupe transversale épaisse de la bran- chie au niveau de l’orifiee cloacal. Du côté droit de la figure la coupe passe exactement par une côte transverse ; du côlé gauche un peu au-dessus. — Gr. T2. Fig. 12.— P. elegans, G. — Coupe transversale au niveau del’es- tomac Ei ; rectum Ri, Ec, tube épicardique. Le spermiducte et l’oviducte setrouvent du côté dorsal. — Gr. 32. Fig. 122-193. — P. elegans, G. — Coupe transversale du stolon au niveau de l'ovaire et du testicule. Fo, follicules ovariens; Do, oviducte; D, et Ds, spermiducte; Fs, follicules testiculaires ; Poe, sac pericardique ; Ec, épicarde — Gr. 4. Fig. 124. — P. elegans, G. — Larve un peu avant l’éclosion, elle ne s’est pas encore allongée suivant l'axe transversal. — Gr. <. Fig. 125. — P, elegans, G. — Coupe transversale de la queue pres- que à son origine. 77, tube neural; (m, cellules musculaires ; Ca, cellule axile qui, en se résorbant, a produit la vacuole V; Et, ectoderme ; Tt, tunique.— Gr. 400, Sous le nom d’Am. torquatum, Drasche a représenté une colonie de P. areolatum. Il n’a pu en recueillir qu'un seul exemplaire à Rovi- 232 FERNAND LAHILLE. gno et, par suite, il n’est pas surprenant qu'il n’ait pu compter exacte- ment le nombre des lobes buccaux de ces animaux.Le dessin et toute la description qu'il donne s’appliquent si exactement à P. areolatum, qu'il faut admettre ou bien l'opinion ci-dessus, ou bien que le nombre des lobes buccaux peut quelquefois varier chez cette espèce. Dans les deux cas, crois-je être autorisé à la maintenir dans le sous-genre Parascidium. 3. — Parascidium flavum, Milne-Edwards. Le 18 mai 4887, j'ai recueilli, à Banyuls, quatre cormus d’un Parascidium qui doit être rapporté à P. flarum, M.-Edw. La compa- raison que j'ai pu faire, du reste, avec des types provenant de Nice, ne permet aucun doute à cet égard. Les cormus sont petits, légèrement pédiculés, assez souvent globu- leux, quelquefois ramifiés ; ils atteignent deux à trois centimètres de hauteur. Les cœnobies sont composées et peu distinctes. La couleur générale est d’un jaune parfois excessivement pâle. Les huit dents sont émoussées et entièrement blanches. Le tube buccal présente à sa base un collier blanc, et un peu au-dessous du collier on distingue quatre points oculiformes de couleur orangée. Quelquefois, les deux taches ventrales existent seules. La languette cloacale est simple et très développée. On compte de 10-14 rangées de fentes branchiales. L'estomac est cannelé (vingt cannelures environ), quelquefois, mais très rarement, pseudo-aréolé. Le rectum s'étend toujours sur le coté gauche des viscères et n’occupe dans aucun cas la position indiquée dans le dessin de Milne-Edwards. Comme chez tous les Parascidium, le stolonest un peu étranglé à son origine et plus long que le corps. Les larves, de couleur brunâtre, sont souvent au nombre de dix à douze dans chaque cavité cloacale. La tunique résistante, le cercle labial pigmenté, le nombre toujours plus élevé de rangées de trémas, estomac très rarement pseudo- aréolé, les cæœnobies toujours composées éloignent cette espèce de Circinalium. RECHERCHES SUR LES TUNICIERS. 233 gue Genre : Circinalium, Giard, 1872 (sens. mut.) Caractères génériques : Cormus sessiles ou pédiculés. — Cœnobies nulles, simples ou composées, mais toujours isolées. — Estomac cannelé ou pseudo-aréolé. — Tube cloacal ou bien languette cloacale trifide. — Stolon toujours très long et à certaines époques forte- ment pédiculé. L'aspect des cormus et le nombre des lobes buccaux (8 ou 6) ser- viront à caractériser rapidement le genre Circinalium ou son sous- genre Morchelliopsis. À : Genre : Circinalium, Giard (S. str.). Caractères : Cormus sessiles. — Cœnobies nulles, simples ou com- posées, toujours isolées. — Huit lobes buccaux. — Estomac cannelé ou pseudo-aréolé. Ce genre intéressant n’est représenté, Jusqu'à présent, que par une seule espèce, et trois variétés (?) qui ne sont, comme le montre le tebleau suivant, que de simples degrés de développement des cormus. MANS iSnlÉSe >: 7. : Le. + re simplex concrescens. PC pas de limbe cloacal, ppd. GC. concrescens. C. C. . LA Individus réunis isolées. en cœnobies limbe cloacal, ppd.. . . democratium concrescens. très rapprochées et très colorées. fœderatum concrescens. 1. — Circinalium concrescens, Giard. Syn : Sidnyum turbinatum, Savigny et Forbes. C'est sur les bords de l’herbier qui s'étend devant le laboratoire de Roscoff que l’on rencontre le plus aisément des individus isolés, fixés sur des débris de zostères. La transparence de ces animaux et leur taille, qui ne dépasse pas 3-4 millimètres de longueur, sur 1 milli- mètre de largeur à peu près, rendraient leur recherche des plus dif- ficiles, si à côté de ces individus isolés on ne rencontrait également des individus réunis en cœnobies. A la grève, il ne faut même s’atta- cher qu'à la recherche des colonies ; et si on a soin de les recueillir 234 FERNAND LAHILLE. en prenant également les débris végétaux qui les environnent, on peut être assuré de découvrir, au laboratoire, quelques individus isolés. La tunique, entièrement transparente, n’agglutine pas le sable, ne présente pas de cellules vacuolaires. Le tube buccal est court ; il est surmonté de huit lobes petits et aigus. Ce nombre est constant chez cette espèce. Le tube cloacal se dirige un peu en arrière. Il présente, chez les formes isolées, six lobes aigus, égaux entre eux. Les deux tubes buccal et dorsal sont entourés de muscles circulaires puissants. A la base du tube buccal se trouve la couronne tentaculaire, for- mée de huit filets filiformes, alternativement grands et petits. Ra- battus, ils n’atteignent pas le sillon antérieur. Parfois, des deux côtés des tentacules dorsal et ventral, il s’en forme un nouveau. La cou- ronne est alors constituée par douze filets. La branchie est cylindrique, et lorsqu'elle est étalée, sa longueur est égale à la longueur des viscères. Elle se compose de sept rangées de trémas, chez les individus isolés ; tandis qu’on en compte d’ordi- naire huit rangées dans les formes cœnobitiques. Chaque rangée se compose ordinairement de neuf trémas. Ceux-ci sont ovales et pré- sentent, de chaque côté, 5-6 cellules marginales ciliées. Ces cellules sont normalement aplaties, mais elles deviennent coniques lorsque meurt l'animal. Les papilles de Lister sont icitrès courtes, triangu- laires, situées toutes sur le côté gauche de la branchie, au niveau du troisième ou quatrième tréma dorsal. Les côtes transverses sont peu prononcées, et chaque sinus corres- pondant renferme, comme d'ordinaire, un faisceau musculaire con- tinue du côté dorsal et qui s’épanouit en arrivant au niveau du sillon ventral. La cavité péribranchiale présente la disposition propre aux Apli- diens, et la paroi péribranchiale est parcourue par 8-10 faisceaux musculaires longitudinaux, externes par rapport aux muscles trans- verses et ne s’anastomosant généralement pas avec les muscles bran- chiaux. Ils se terminent, à l'extrémité du post abdomen, dans deux appendices fixateurs latéraux. RECHERCHES SUR LES TUNICIERS. 235 Quelquefois, le sillon ventral est pigmenté en blanc jaunâtre ; par- fois, la pigmentation s'étendant à la partie supérieure de la branchie, aux lobes buccaux et cloacaux, ceux-ci deviennent plus faciles à distinguer. Cette espèce présente, au sommet de la cavité branchiale, des taches de pigment rouge orangé. Deux sont situées de part et d'autre du ganglion nerveux, ce sont les plus constantes. Deux autres se trouvent au niveau de l'extrémité du sillon ventral, elles sont touiours plus petites, le plus souvent même elles n'existent pas. L'intestin descendant n’est pas croisé par l'intestin ascendant, placé du côté gauche. Un œsophage cylindrique, assez long, aboutit à l'estomac globuleux, qui occupe le milieu de l'intestin descendant. Chez la plupart des individus isolés et chez quelques individus vivant en cœnobies, l'estomac est cannelé d'une manière très régu- lière (fig. 115, III). Les cannelures sont au nombre de dix à quinze. Mais il arrive aussi, fréquemment, que les cannelures ne s’étendent pas d’un bout à l’autre de l’estomac. Parfois interrompues et comme fragmentées, elles restent parallèles entre elles. Les tubes rénaux, ici très visibles, ne présentent ni ampoules ni varicosités et forment, en partant de l'estomac et avant d'arriver sur le rectum, un faisceau divergeant. Ce fait semble particulier à cette espèce, et Drasche l'avait déjà signalé (loc. cit., p. 25). Le post-estomac a la forme d’un entonnoir et se compose par conséquent de deux parties : une très évasée faisant suite à l'estomac et d’une longueur à peu près égale à celle de cet organe ; la seconde, plus étroite, communiquant à l'intestin moyen par un orifice étroit. L'intestin moyen, ovoide allongé, occupe la partie inférieure de l'intestin descendant. Il vient déboucher entre deux cœcums rectaux très prononcés, en formant un tube très étroit. La partie inférieure du rectum, trèslarge, est aplatie parallèlement au plan vertical. La partie supérieure est cylindrique et s'étend sur le dos de la branchie. L'anus se trouve situé au niveau de la troisième ou quatrième rangée inférieure de trémas et présente deux petites oreillettes anales. 236 FERNAND LAHILLE. La reproduction sexuée a lieu non seulement au mois d’août, mais encore en septembre et octobre. Se prolonge-t-elle même plus tard ? Je l'ignore; en tout cas, l’assertion suivante de Giard n’est pas exacte. « C.concrescens cess? de pondre vers la fin du mois d'août ; il devient rare sous les zostères dès le 15 septembre, rare même sous les rochers au commencement d'octobre. » Je n'insisterai pas sur les phénomènes si intéressants de concres- cence et sur les degrés de ce phénomène chez Circinalium, ils ont été suffisamment mis en lumière par M. Giard : des six dents cloacales les trois inférieures ne tardent pas à disparaître ; ensuite, les deux latérales supérieures. La branchie s'accroît d'une à deux ran- gées de trémas. La pigmentation devient plus intense. Les cormus les plus développés que j'ai vus à Roscoff provenaient de Roléa et du banc de Bistarz. Ils étaient cylindriques ou formaient un petit tronc de cône renversé. Leur diamètre était de 0,01 sur une hauteur qui pouvait atteindre 0,02. Ces grandes dimensions sont exceptionnelles; moindres de moitié, elles sont normales. Les cormus paraissent souvent ramifiés; en réalité, ils naissent sur des stolons rampants en des points très rapprochés les uns des autres, et comme la concrescence ne paraît pas avoir lieu entre eux, ils forment comme autant de petits morceaux d’une mosaïque. Chaque cormus ne renferme qu'une cœnobie, mais si celle-ei est ordinairement simple, il n’est pas rare non plus d'en rencontrer de composées. On distingue parfaitement alors un caractère assigné par Savigny à son Sidnyum turbinatum «les orifices des individus sem- blent figurer par leur arrangement des ellipses étroites dirigées du centre vers la circonférence » et dont l'absence faussement supposée chez Circinalium, a conduit M. Giard à l’éloigner de Sidnyum pour le rapprocher de Polyclinum. Je suis intimement convaincu que le type décrit par Savigny sur des cormus conservés dans l'alcool, puis par Forbes sur des colonies vivantes, est identique aux grandes colonies de Circinalium fœderatum concrescens. Les études bibliogra- phiques que M. Giard recommande tant à ceux qui, « accablant RECHERCHES SUR LES TUNICIERS. 237 de leur dédain ceux qui travaillent dans une carrière si ingrate, res- suscitent sans vergogne des découvertes datant d’un demi-siècle et parviennent à en imposer, par ce procédé fort commode, à leurs trop nombreux imitateurs » ! auraient peut-être pu nous éviter la création du genre Circinalium. Je n'ai pas rencontré le C. concrescens à Banyuls, mais, en re- vanche, j'ai eu à ma disposition de nombreux échantillons de cette espèce provenant de Marseille. D'après Drasche, Circinalium serait abondant à Rovigno, et Della Valle le cite comme étant très commum à Naples : Comunissimo, spécialmente quella varietà che somiglia al syn. Turgens figurato del Savigny. B : Sous-Gexre : Morchelliopsis, Lahille. Syn. : Triglossium, Giard {in part.). « Caractères : Cormus toujours fortement pédiculés, le plus souvent ramifiés.— Cœnobies composées et isolées. — Sixlobes buccaux. — Estomac toujours régulièrement cannelé. Ce sous-genre se distinguera facilement des Amaroucium par ses cormus à cœnobies isolées, supportés par un pédicule toujours long et grèle ; des Morchellium par ses cannelures stomacales larges, peu nombreuses et régulières; des Circinalium, par sa grande taille et parle nombre de ses lobes buccaux. I. — Morchelliopsis Pleyberianus, Lahille. Syn. : Amaroucium punctum, Giard (Arch. exp. de zool. 1873, p. 459). Cette espèce présente les caractères du sous-genre ; elle est très commune à Roscoff au bas de l’eau (marée de 3), sous les rochers à Trébunnec, à Tisaoson et à Perroch, entre Gaurrec et Per-rech-hier. Deux taches, très rarement absentes, de pigment cadmium-orangé sont placées de part et d’autre du cul-de-sac supérieur du sillon ven- tral et sont si rapprochées qu’elles semblent ne former qu'une seule tache. On n’en observe aucune du côté dorsal. ? Arch, 2001. cxp., t. IL, p. 501. 238 FERNAND LAHILLE. La plupart des cormus sont ramifiés. Leur longüeur moyenne est de 4 centimètres, la largeur du pédicule est de 0,005 et celle de la tête de est 0,01. J'ai rencontré une fois, suspendu sous un rocher, un cormus non ramifié qui avait jusqu’à 7 centimètres de long, mais comme la partie stoloniale mesurait 3 centimètres, la longueur de la colonie était en réalité moins extraordinaire. Chez cette espèce, en effet, la portion stoloniale rampante des Morchellium, se trouve le plus souvent dans le prolongement même des pédicules. Par suite, dans les cormus de Morchelliopsis Pleyberianus, on distingue trois parties : 4° la tête, transparente, incolore, ovoide, constituée par les branchies et les viscères des nombreux individus (souvent 40 et 50) qui forment des cœnobies composées très irrégulières ; 2° le pédicule renfermant les stolons, blanchâtre, presque opaque, non sablonneux à surface lisse ;, 3° le stolon du cormus à surface rugueuse, plissée, colorée en jaune et parfois très légèrement sablonneuse. Les individus possèdent seize filets tentaculaires pigmentés et dis- posés en trois séries. Le nombre de rangées de trémas varie de neuf à douze ; il est le plus souvent de dix. L’estomac (fig. 115, T) cylindrique, comme chez Apl. gibbulosum, Sav. (loc. cit., pl. XVIT), présente six larges canne- lures très régulières, quelquefois peu accusées dans leur partie in- férieure. Des cellules pigmentaires sont disposées autour de chaque cannelure. | Le post-estomac est allongé ainsi que l'intestin moyen, et ne présente pas de dilatation annulaire. Les cœcums rectaux paraissent d'autant plus prononcés que la constriction de l'intestin moyen est fort grande. Le stolon génitalifère est gréle, deux ou trois fois plus long que le corps; au moment de l’hivernage il se pédicularise de plus en plus et se sépare enfin totalement des viscères. L'orifice cloacal présente trois grandes languettes, supérieures et égales. Quelquefois on en observe également une, deux ou trois plus petites du côté inférieur de l’orifice. Les larves du Morchelliopsis ressemblent beaucoup à celles du Morchellium. Elles sont d’abord globuleuses, ensuite cylindroïdes. Les FES RECHERCHES SUR LES TUNICIERS. 239 prolongements ectodermiques situés entre les ventouses sont grands et triangulaires. Je dédie cette espèce à mon excellent ami, M. Pleyber, de Roscoff, qui m'a souvent accompagné en mer et sur la grève et dont je me fais un doux devoir de reconnaître les bons offices et le dévouement. &me GENRE : Synoïcum, Phipps, 1774. Je crois devoir grouper sous le nom générique de Synoïicum tous les Aplidiens qui possèdent un estomac véritablement aréolé, c’est- à-dire présentant un grand nombre de diverticules généralement arrondis, pédiculés et irrégulièrement disposés. L'étude de Circina- lium nous a montré que, dans une même espèce, on pouvait rencon- trer des cormus simples et d’autres composés ; nous avons vu, en outre, que le stolon s’étranglait fort souvent au niveau des viscères. Par conséquent, les genres basés sur ces caractères ne sauraient être maintenus. Le nombre des lobes buccaux seul permet à la rigueur d'établir le sous-genre : Morchellium. On distinguera donc : Aplidiens à estomac aréolé | 5 lobes buccaux. . . . . .. +: + Synoicum. et à : 8 lobes buccaux. . . . . . . . . . Morchellium. A : Genre : Synoïcum, Phipps, 1774. Syn : Sidnyum, Herd. non Sav. — Morchellium, Herd. non Lah. Caractères : Cormus sessiles ou pédiculés. — Cœnobies simples ct isolées , ou simples et réunies ou composées. — Six lobes buccaux. — 12-13 rangées de trémas. — Estomac aréolé et asymétrique. Le tube cloacal des Synoïques persiste le plus souvent et, comme chez Circinalium, ce sont trois lobes supérieurs qui se développent pour former la languette trilobée. Lorsque celle-ci est simple, comme chez S. Giardi, les cœnobies restent oligozoïques et leur aspect rappelle celui de l’Am. Nordmani, de l’Atopogaster gigantea ou des Botrylles. La longueur du stolon génitalifère est généralement égale à la 240 FERNAND LAHILLE. moitié de la longueur totale. Les diverses espèces décrites peuvent se caractériser de la sorte : édiculé. . . . . . . S. turgens, Phipps. à 6 lobes. Cormus È À J à Orifice cloacal sessile . . . . . . . S. pallidus, Herd. à languette. Cormus sessiles . . . . . . . S. Giardi, Herd. B : Sous-GEenre : Morchellium, Giard, 1872. Syn. Morchellioïides, Herd. (in part.) Caractères : Cormus pédiculés (le pédieule est parfois très court). — Cœnobies composées, le plus souvent isolées. — Huit lobes buc- caux. — Estomac aréolé. Milne-Edwards décrivit le premier, sous le nom d’Amaroucium argus, le type de ce sous-genre, qu'il rapprocha avec juste raison des Synoïques de Phipps. « Si l’on poussait, ajoute-t-il (loc. cat., p. 291), les divisions génériques aussi loin que l’a fait M. Savigny, il faudrait former un genre nouveau pour cette Ascidie..….; les parois stomacales présentent des alvéoles..…. ; mais si l’on descendait à des caractères de cet ordre pour en faire la base des divisions génériques, on serait conduit à multiplier inutilement ces coupes et on rendrait les déterminations d’une difficulté extrême. » Ces réflexions sont fort justes, surtout si on songe que Milne-Edwards n’observa point chez cet Amarouque un second caractère qui l’autorisa plus tard à créer le genre Parascidium ; la présence de huit lobes buccaux. Il n’en signale, en effet, que six chez 4. argus, quoique dans la figure qu’il donne (4 a, pl. 1), quelques individus en possèdent davantage. Comme à propos de Cl. producta, il y a donc ici encore discordance entre le texte et les planches. Dans tous les cormus trouvés à Roscoff et à Granville, J'ai tou- jours observé l’existence constante de huit lobes buccaux. A part cette difiérence, les individus et les colonies présentaient absolu- ment tous les autres caractères décrits par Milne-Edwards, et se rapportaient sans hésitation à l’Am. arqus. Il faut donc admettre, ou que le nombre des lobes buccaux de cette espèce s’est modifié mabotnmstiiet sont RECHERCHES SUR LES TUNICIERS. 241 depuis les premières observations, ou, ce qui est bien plus probable, que les lobes étant contractés, leur nombre exact a échappé facile- ment au premier observateur, dont l'attention n'était pas spéciale- ment portée à cette époque sur ce point particulier. Peut-être, enfin, les individus examinés étaient-ils anormaux. M. Giard n'a pas précisé davantage le nombre des lobes buccaux de l’Am. argus, et pour l’anatomie de cette espère il renvoit simplement le lecteur au mémoire de Milne-Edwards. Je crois avoir donc le droit de modifier ou plutôt de compléter simplement la diagnose de ce sous-genre tel que l’a établi M. Giard, et d’ajouter le caractère tiré du nombre des lobes buccaux à celui qu'offrent les parois stomacales. Sous le nom des Morchellioides affinis, Herdman a fait connaître une espèce qui vient se ranger dans le sous-genre ainsi défini et qui se distingue facilement de lespèce type de la manière suivante : , absents. —4 taches pigmontaires. M. argus, M.-Edw, Prolongements ectodermiques présents. — Pas de taches pigt. . M. affinis, Herd. 1. — Morchellium argus, M.-Edw. Cette belle espèce est peut-être l’Ascidie composée la plus com- mune de Roscoff. Les cormus mesurent généralement #4 centimètres de longueur ; lorsqu'ils sont suspendus sous des rochers, ils atteignent assez souvent une longueur double. Le pédicule est légèrement conique, rempli de sable fin et émet parfois de nom- breuses ramifications stoloniales. Son diamètre moyen est de un centimètre. Le plus souvent celui de la tête est de 0,02 à 0,03. La tête des cormus est transparente, blanchâtre, parsemée de petits points rouges, et sa délicatesse est extrême. Elle est, en effet, formée presque exclusivement par les branchies des individus de la colonie. La consistance du pédicule est bien plus grande et sa couleur la plus habituelle est un vermillon écarlate légèrement teinté de jaune. Quelquefois la couleur orangée s’accentue davan- 16 242 FERNAND LAHILLE. tage, quelquefois le vermillon est très atténué et les pédicules sont d’un jaune paille tirant un peu sur le brun. A côté du type à tête globuleuse et à pédicule cylindro-conique, on rencontre une variété littorale, dans les prairies que la marée abandonne presque tous les jours. Les pédicules sont toujours aplatis, ainsi que les têtes, et les individus se trouvent tous disposés sur un demi-cerele. Les colonies rappellent alors, comme le dit M. Giard (loc. eit., p. 67), « ces Amaranthes qui font l’ornement de nos jardins. » Je ne puis admettre, toutefois, l'explication qu'il donne au sujet de leur mode de formation. D’après cet auteur, les pêcheurs, en se promenant en gros sabots et pour la plupart suivis de voitures (loc. cit., p. 66), écraseraient un certain nombre de cormus. Les animaux tués seraient éliminés, remplacés par d’autres, et certaines colonies conserveraient leur forme écrasée. Entre autres objections que l’on peut adresser à cette théorie singulière, je ferai remarquer que partout où l’eau est un peu profonde, entre la plage et l’île Verte, et quoique les charrettes et les pêcheurs circulent également en ces points, on n'observe jamais de colonies aplaties. On ne ren- contre, au contraire, qu'elles seules dans la zone supérieure, même sous des rochers qui n’ont pas pu être soulevés. D'après mes observations, voici ce qui se passe. Lorsque la mer se retire de la première zone littorale, les feuilles de zostères s’aplatis- sent contre le sol et compriment les colonies entre elles et le sable. A marée basse, en effet, si on soulève les zostères, on voit en ces points toutes les colonies de Morchellium couchées et aplaties sur le sol. C'est sous l'influence de cette cause mécanique, non violente et jour- nalière, que les cormus se modifient dès leur origine et s’adaptent au milieu. Partout où l’eau est assez profonde pour que les zostères ne pressent point les colonies, les cormus restent toujours dressés et globuleux. 3 C’est par des scissions accidentelles que M. Giard tâche également d'expliquer la bifurcation des pédicules du Morchellium. Toutefois, «certains cormus, bifurqués, dit-il, peuvent avoir une origine un peu différente. S'il arrive qu'un bourgeon ovarien de la tige commune in tabant 6 ù RECHERCHES SUR LES TUNICIERS. 243 se développe vers le milieu de cette tige, il se forme une petite éminence qui proliférant à son tour, donne naissance à une tête latérale reliée par un pédoncule au tronc principal de l’Amarouque, Mais ce n’est certainement pas le cas général pour le Morchellium, et j'incline même à penser que les choses ne se passent jamais ainsi dans cette espèce » (loc. cit., p. 67). La vérité est justement tout le contraire. Les cormus ramifiés (j'en possède plusieurs qui rappel- lent, par leur forme et leur disposition, les colonies de Pennatula), se développent principalement sous les rochers; ils se trouvent précisément moins exposés aux traumatismes que les cormus qui vivent dans les prairies. En outre, on remarque, comme chez À. pro- liferum, «des têtes latérales à tous les états de développement, depuis celui de blastozoïde jusqu’à celui de cœnobium, aussi volumi- neux que la masse terminale du cormus ». Donc, si les divisions artificielles du pédicule peuvent produire accidentellement des colo- nies ramifiées, normalement c’est toujonrs à la blastogénèse qu’elles sont dues. Je transcris, de mon cahier de notes d’excursions, quelques autres indications sur la distribution et le polymorphisme de cette espèce aux environs de Roscoff. 8 septembre 1885. — Abondance vraiment extraordinaire du M. argus, dans l’herbier non vaseux qui s'étend entre l’île Verte et le laboratoire et qui se prolonge jusqu'à Perharidi. 9 septembre. — M. arqus très rare, ainsi que les Amaroucium, à Guerhéon et dans l’herbier vaseux de Pempoull. Les Aplididæ sont au contraire bien représentés dans les rochers voisins de Trébunnec. 30 juillet 1886. — Sous les grands rochers, à l’ouest de Perharidi, les Morchellium sont suspendus par leur base et les cormus sont longuement pédiculés. Les colonies juxtaposées n’entrent point en concrescence , mais les surfaces de frottement sont dépourvues d'animaux. Quelques colonies atteignent une longueur de 0,10. 31 juillet. — Duon, côté est de la tourelle, Morchellium rares petits, situés dans les fentes des rochers. Cormus à peine pédiculés. Il est à noter que cette île est toujours battue par de très fortes vagues et que les courants y sont des plus violents. 244 FERNAND LAHILLE, fer août (marée du 3). — Une variété jaunâtre se rencontre sous les rochers, entre Gaurrec et Per-rech-hier. La couleur ne dépend pas de la station, car, sous les mêmes rochers, on rencontre des cormus d’un rouge-orangé, à côté de ces cormus jaunes. Ils sont souvent bifurqués. On ne peut invoquer ici, pour expliquer ce phé- nomène, une scission accidentelle produite par les gros sabots des pêcheurs et leurs voitures (v. Giard, loc. cit., p. 66). 1 août. — Banc d’Astan (25-30 m). Nombreux cormus pédiculés sur des Gorgones. 13 août. — Perharidi : Cormus ovoïde de 0,04 sur 0,03. Pédicule très court. Aspect de Par. elegans; mais les tâches pigmentaires existent et l'estomac est franchement aréolé. Serait-ce P. areo- latum ? Mardi, 47 août. — Parce de l'Ile-Verte : C’est la première fois de cette année-ci que je rencontre des colonies en train d’hiverner (?) Elles se trouvent fixées à l’air sur les rochers, au-dessus du niveau des basses eaux. Est-ce que l'extrémité supérieure des cormus n'aurait pas été simplement dévorée par quelque animal ? Il existe, dans ces cormus, quelques individus intacts présentant des œufs et des larves. C’est fort curieux de voir disparaître tout à coup, sans cause appréciable, des individus très vigoureux ct en pleine activité sexuelle. Serait-ce les fortes pluies des jours derniers qui, en arro- sant les cormus découverts, les auraient tués ? 20 août. — Herbier du port de l’île de Batz, fond vaseux, Morchel- liums assez rares. En revanche, nombreux Circinalium. (Vingt à trente individus dans les grandes cœnobies composées, larves abon- dantes.) 30 août. — Duhon : Dans le premier chenal, au nord-est de la tour et dans des endroits qui ne découvrent jamais, j'ai trouvé des cormus de Morchellium, ainsi que des cormus d’Am. nordmani, tous en hivernage. Il semble donc qu’on ne puisse invoquer l’eau de la pluie comme étant la cause de la transformation des cormus ; on ne peut, ce me semble, invoquer davantage le froid. Jusqu'à présent la température est restée très élevée. sénat mises donne tennis) RECHERCHES SUR LES TUNICIERS. 245 Aer septembre. — Passage de Bistarz aux Per-rech-hier. Chenal profond et difficile, courants violents, roches instables, à arêtes aiguës, Himantalia. — Les Morchellium sont rares et peu pédiculés. J'ai rencontré également des Morchelliums à Saint-Malo, à Gran- ville et à Chausey (côté sud-ouest du Sund). Cette espèce à été signalée également par Fischer, qui l’a rencontrée au grand banc, à l'entrée du bassin d'Arcachon. Voici ce que dit ce naturaliste : « Cette espèce n'a pas été recueillie par M. Lafont. Je l’ai trouvée, il y a quelques années, sur les bancs qui ne découvrent qu'aux grandes marées. Elle n’est pas pédiculée et elle forme des masses plus ou moins élevées, et de forme identique à celle que Milne-Edwards a représentée pl. I, fig. #a ». Je n'ai pas encore recueilli le Morchellium arqus dans la Médi- terranée, et Della Valle, de son côté, ne le mentionne pas dans la liste des espèces qui vivent dans le golfe de Naples. L'’anatomie de Morchellium ne nous arrêtera pas longtemps, car c’est à peine si elle diffère, en quelques points, de celle du Parasci- dium aurantiacum, si bien parfaitement étudiée dans tous les détails par M. Ch. Maurice. L'immersion rapide dans l'alcool à 90°, d’un cormus bien épanoui permet d'obtenir des individus en parfait état d'extension. On observe alors que la hauteur moyenne de la branchie est de 3 à 4mm, celle du tube digestif de 39, celle du stolon, de 25", J'ai observé quel- quefois des stolons de 40 à 50 "m! Chez les blastozoïdes jeunes, cet organe égale à peine la longueur du corps. Les huit lobes buccaux sont très aigus, mais assez courts. L’orifice cloacal présente une languette simple. Les quatre taches pigmen- taires sont d’un rouge carminé. Deux se trouvent placées du côté ventral, au niveau du sillon antérieur. Elles sont éloignées et com- plètement indépendantes du sillon ventral, quoique chez les individus contractés elles paraissent lui être accolées. Les deux taches dorsales sont placées entre le sillon antérieur et la première rangée branchiale, de part et d’autre du pavillon vibratile. Le rôle de ces taches constantes est, pour moi, très énigmatique, aucun nerf spécial 246 FERNAND LAHILLE, ne s’y rend, et elles sont formées par de simples amas de cellules mésodermiques. Les filets tentaculaires sont généralement au nombre de seize, huit grands et huit petits , Les premiers correspondent aux lobes, les seconds aux espaces interlobaires. La branchie présente de dix à quinze rangées de trémas, le plus souvent on compte douze ran- gées de seize trémas chacune. Elle est transparente, et sa partie supé- rieure parfaitement visible de l'extérieur du cormus. Sa portion infé- A) oS 1 Too 0! ne Fig. 197. Fig. 196. M. argus, M-Edw. — Centres nerveux d'un oozoïde. Coupe longitudinale. Zn, pavillon vi- Pratile Cn, ganglion nerveux ; Gn, glande neurale; Gen, ouverture de fa glande dans le conduit neural. — Gr. 522 Fig. 197. — rue elegans. Le S. — Coupe longitudinale des centres nerveux. — Cn, ganglion antérieur; Vn, ganglion postérieur ; In, pavillon vibratile ; ; Tn, tube neural ; Gn, DES neurale formée comme chez Morchellium, par une sorte de dilatation du lube neural. — Gr.220 rieure est cachée par la pigmentation de la paroi du corps. Les côtes transverses sont très larges par rapport à la longueur des trémas. Les papilles de Lister sont triangulaires, placées sur le côté gauche entre le cinquième et sixième tréma dorsal. Il est très facile de constater, chez cette espèce, le rôle que jouent ces organes dans la déglutition du cordon alimentaire. Les centres nerveux du blastozoïde adulte se font remarquer par le grand développement de la glande neurale, qui est presque aussi volumineuse que le ganglion et qui se continue directement avec le pavillon vibratile. Chez les oozoïdes, au contraire (fig. 126), la glande neurale paraî annexée au tube neural et sa disposition rappelle tout à fait celle qui existechez Pyr. el egans (fig. 127). Chez Morchellium, RECHERCHES SUR LES TUNICIERS. 247 toute la cavité de l'organe est remplie par un tissu spongieux, formé de petites cellules à nombreux prolongements anastomosés, constitutant un véritable réseau. Parfois on croirait voir un amas de grosses cellules vacuolaires pressées les unes contre les autres. Les éléments nerveux semblent toujours passer par transilions insen- sibies à l’épithélium du tube neural. On voit encore mieux ce fait sur des coupes transversales (fig. 128, IT) pratiquées chez une iarve ar- rivée à la période de la résorption de la queue. La portion inférieure Mn, très développée en arrière ([II), occupe tout l’espace compris entre le plancher cloacal et l’épithélium branchial, et constitue le principal ganglion ner- yeux de la larve. Si on compare les figures 126 et 128, IL, il semble que la glande neurale dérive, au moins en partie, de ce ganglion Mn. Fig. 498. — M. argus, M-Edw.— Larve. Coupes transversales du ganglion Cn et de la masse cerébroïde Mn qui parait former L’intestin descendant plus tard, au moins en partie, la glande neurale. Tn, tube neural. — Gr. 499,— J, Coupe immédiatement en arrière du est situé ; ANA pavillon vibratile ; ZJ, Coupe passant par le milieu du ganglion ; t situé sur le côté da oif, III, Coupe postérieure. La vésicule des sens existe encore, le rectum ou intestin mais n’a pas été représentée. ascendant, sur le côté gauche. L'’estomac (fig. 115, VII), est ovoide, symétrique, et sa longueur est de de millim. Le plus sou- vent ses parois sont nettement aréolées, comme le représente le dessin. Mais, fait qui montre combien toutes nos classifications n’ont qu’une valeur relative, quelquefois le haut de l'estomac présente des cannelures droites et nettes, d’autres fois c’est le bas de l’organe qui possède des cannelures ramifiées. Dans tous les cas cependant, des aréoles très caractérisées existent dans la partie moyenne. C’est dans cette partie que vient déboucher l'organe réna!, formé de tubes ramifiés et anastomosés, mais dépourvus toujours d'ampoules ou de varico- sités. Le post-estomac est infundibuliforme. L'intestin moyen est vertical et les cæcums rectaux peu prononcés. Dans le stolon, l’oviducte et le spermiducte occupent la cavité dorsale dont le plancher est formé par le tube épicardique. L'ovi- ducte est extérieur par rapport au spermiducte. 248 FERNAND LAHILLE. Les filets musculaires occupent les faces latérales du stolon géni- talifère et se terminent dans deux cônes fixateurs qui dépassent tou- jours légèrement l'extrémité inférieure du stolon. Les larves, à l’éclosion, ont une longueur de -5 de millim., sur une RUN O4 ANXIP ÿ) Z a à S sa ÊÉL Fig. 432. Fig. 133. Fig. 134 { Fig. 429-134.— Morchellium argus, M.Edw.— Coupes verticales d’une larve à l'éclosion. — Gr. #2. Cr, cavité branchiale ; Cpr, cavité péribranchiale ; Ve, vésicule cardiaque ; Æde, Ege, tubes endoder- miques droit et gauche ; Œi, Ei, Pi, Mi, Ri, Les diverses parties du tube digestif. In, Œn, On, Cn . les diverses parties des centres nerveux. Ou diverticule stomacal, formation de l'organe rénal. largeur de -5. Les ventouses sont très larges, leur pédicule est grêle. Les trois prolongements ectodermiques sont grands, triangulaires, et le sommet des deux inférieurs atteint très souvent la surface externe de la tunique. Ils produisent un très grand nombre de vésicules cel- lulaires qui se détachent et se disposent en avant et de chaque côté de l’oozoïde. La résorption de la queue est très tardive. RECHERCHES SUR LES TUNICIERS. 249 Les figures 129 à 134 sont destinées à montrer l'anatomie de la larve à l’éclosion, et les rapports qu’affecte la cavité branchiale Cr, avec le vitellus nutritif N. Les coupes sont perpendiculaires au gran axe de la larve. La figure 129 passe par la partie antérieure du corps, la figure 134 par la partie posté- rieure. La comparaison avec la fig. 118 (page 220) permet, du reste, de préciser les divers ni- veaux intéressés. On voit l'organe rénal se former par évagination (fig. 133), aux dé- pens de l’épithélium stomacal. Mais, ce qui est autrement intéres- sant, c’est la formation du cœur par invagination de l'épithélium dorsal de la vésicule cardiaque (Ve, fig. 129 et 130), et la forma- tion des tubes endodermiques. Ceux-ci occupent, à cette époque, tout le plancher de la cavité bran- chiale et forment deux profonds Fig 135 — Schéma d’un Doliolum sexué mon- 1 1 - , trant la position normale du cœur chez les Tuni- sillons qui ne communiqnent entre EN S pu. A pe han ; Rs 4 À chiale ; G. cavité cloacale; Lb, Le, lobes buccaux et eux qu en arriére, Pour former un lobes cloacaux ; M, à M, les huit bandes mus- . re culaires buccales et cloacales ; V, sillon ventral ; tube unique : l’épicarde Ec, fi- E, estomac ; An, anus; O, ovaire; T, testicule ; : P, pavillon vibratile; a, sillon antérieur ; N, gan- gure 131. Les cellules endodermi- glion nerveux; f, trémas; s, terminaisons sen silives dans les lobes buccaux. ques W, gorgées de vitellus nutritif, sont cylindriques et de très grande dimension. Elles se colorent fort mal. Leurs noyaux, situés contre la paroi branchiale, retiennent au contraire facilement les teintures. Souvent, régulièrement disposés, ils simulent alors un véritable épithélium endodermique. C’est cet aspect exceptionnel que J'ai représenté dans les figures 129, 130, 131 et 132. Il faut, quelquefois, une très grande attention pour ne pas se laisser induire en erreur par cette apparence. Le cœur des Tuniciers dérivant d’un diverticule endodermique de 250 FERNAND LAHILLE. la cavité branchiale au-dessous du sillon ventral, se trouve normale- ment situé dans le prolongement même de ce sillon. Chez les formes inférieures (fig. 135) il n’occupe pas d’autre place, et chez les larves de Didemnidæ, Distomidæ et des Ascidies supérieures, on ne le rencontre jamais ailleurs. Chez les larves d’Aplididæ (fig. 129 et 130),il n’en est pas de même, et le cœur occupe une position ven- trale, tandis que le sillon ventral s’étend du côté dorsal. Cette différence morphologique n’est qu’apparente et provient uni- quement de l’abondance excessive du vitellus nutritif, qui soulève pour ainsi dire la cavité branchiale de la larve et qui l’éloigne ainsi des viscères. (V. fig. 118, p. 221.) On voit également, sur les coupes 131, 132,133, que la paroi bran- chiale, se développant à cette époque plus rapidement que la paroi du corps, est obligée de se ployer en dedans des deux côtés. Les rangées de trémas sont au nombre de quatre. Les côtes trasverses ne sont pas encore formées. Le genre Morchellium, par ses cormus pédiculés ne renfermant presque toujours qu'une seule cœnobie, par son estomac franche- ment aréolé, semble dériver directement du genre Synoïicum. D'un autre côté, ses ressemblances avec le genre Parascidium sont des plus éroites. Si on compare les cormus quelquetois sessiles de M. arqus avec Par. areolatum, on est fort embarrassé pour préciser les limites de ces deux genres. On ne l’est pas moins si on compare Par. elegans et Morchellium afjinis. C’est pourquoi, dans la fig. 416, p. 213, je place les genres Parascidium et Morchellium sur le même rang en les faisant dériver tous deux à la fois des Amaroucium et des Synoïicum. 4 | RECHERCHES SUR LES TUNICIERS. 251 DEUXIÈME ORDRE : PHLEBOBRANCHIATA Les Tuniciers qui forment cet ordre se reconnaissent très aisé- ment à la constitution de leur branchie. Cet organe présente en effet des sinus anastomotiques longitudinaux qu’on ne retrouve nulle part ailleurs. La présence de ces sinus est absolument caractéristi- que, mais on ne peut toutefois dire d’une manière générale que leur absence soit suffisante pour éloigner de cet ordre certaines formes qui n’en présenteraient pas. Chez les représentants supérieurs d’une famille ou d’un ordre les caractères sont toujours très nets ; au contraire, chez les types inférieurs qui relient ce groupe aux groupes voisins, les caractères sont de moins en moins accentués. Dans le cas présent, il faut donc surtout bien préciser la limite inférieure de Phlébobranches. Chez certaines variétés d’Ascidiella, de Perophora, ete., il peut arriver que les sinus anastomotiques s’arrêtant dans leur dévelop- pement ne soient représentés que par une papille branchiale. Le plus souvent, cette papille est bifurquée, et alors le doute n’est pas possible. Mais il arrive aussi parfois que la papille reste simple. Dans ce cas, l'examen de nombreux individus permet de constater l’exis- tence de l'exception. À côté des formes jeunes, ou bien arrêtées dans leur développement, on en trouve en effet d'adultes et de normales. Lorsque cet examen est impossible ou qu'on ne rencon- tre aucun individu présentant des sinus longitudinaux, le caractère qui permettra d’assigner à l’animal sa véritable place dans la classi- fication (Rhodosoma, Perophora) sera la position du tube digestif rejeté sur le côté d'une branchie à papilles. En résumé, voici donc comment se craractérisent les Phlebodranchiata : Tuniciers à branchie pourvue de sinus anastomotiques longitudi- naux ou de papilles bifurquées. Quelquefois les papilles peuvent rester simples, mais alors le tube digestif est rejeté sur un côté de la branchie. 252 FERNAND LAHILLE. Cet ordre ainsi défini comprend les deux familles des Ascididæ et Clavelinidæ de Herdman, moins le genre Clavelina , et correspond par conséquent à la famille des Phallusiadées de Roule, à laquelle il faut rattacher les genres Ecteinascidia, Diazona, Rhopalona, Pe- rophora et Tylobranchion. C’est dans une note que j’adressai à l'Académie le 28 juin 4886, que j'indiquai le mode de formation des sinus longitudinaux, tel que je l'avais constaté en 1885 à Banyuls, chez Diazona, Ecteinascidia, Perophora et chez les Phallusies. Au début du développement, après l'apparition des premières ran- gées de trémas, apparaissent chez ces tuniciers, des côtes transversales parfois rudimentaires et des papilles. La branchie de ces animaux correspond alors à celle du Glossophorum sabulosum. « Les papilles, d'abord simples, ne tardent pas à se bifurquer à leur extrémité. Les deux ramifications de la papille primitive s’allongent, se contournent, s'orientent suivant la longueur de la branchie et se soudent avec les ramifications des papilles voisines. Il se forme aussi des vais- seaux longitudinaux communiquant avec la branchie par la base des papilles primitives. « Si la papille primitive a bourgeonné à quelque distance de son extrémité, cette extrémité libre persiste comme une papille secon- daire implantée sur le sinus anastomotique longitudinal. » Un développement incomplet ou un arrêt plus ou moins précoce, peut produire, chez les animaux de ce groupe, diverses modifica- tions qu'il est aisé de prévoir. » Si on remarque que chez tous les Tuniciers supérieurs (Cynthia, Molqula, Phallusia, etc.) le tube digestif se trouve rejetté sur un côté de la branchie, tandis qu'au contraire, chez les formes infé- rieures, il se trouve toujours situé au-dessous (Didemnum, Lepto- clinum, Clavelina, Distoma), nous sommes justement en droit d'attribuer une grande importance à ce caractère général et cons- tant dans les groupes les plus naturels. Je diviserai done les tuni- ciers phlébobranches en deux sous-ordres : Perse tes nes inférieurs à la branchie. . . . . . Cioniadæ. î scère Mn l latéraux à la branchie. . . . . . Phallusiadæ. RECHERCHES SUR LES TUNICIERS. 253 Ensuite, comme M. Roule l’aremarqué fort judicieusement, la posi- tion relative de la branchie et des viscères, permettra de subdiviser le sous-ordre des Phallusiadæ en trois groupes. Les Phlébobranches constitueront done les quatre familles suivantes : Cioniadæ. Mèmes caractères que le sous-ordre. . . . . . . . Cionidæ. ÉÉUOC R MR ER MEE REERS Ascididæ. Phallusiadæ. Viscères { à droite. . . . . . . . . . . . . . Corellidæ. SUD AUS MS rever e ce lolo ra Corynascididæ. VIT. FAMILLE DES CIONIDÆ. Caractères de la famille : Ascidies phlébobranches à nombreuses rangées de trémas. — Viscères inférieurs à la branchie. — Les formes bourgeonnantes ne constituent jamais de cœnobies. Je range dans cette famille, non seulement les Rhopalona de Philippi, mais encore les genres Diazona, Tylobranchion et Ectei- nascidia, et le tableau suivant indique les caractères différentiels de ces animaux. [absents Organes sexuels dépassant l'intestin. . . Tylobranchion, Herd., 4886. circulaire, . . . Ecteinascidia, Herd., 4882. à six lobes. . . Diazona, Sav. 1816. (gaufrée. 0... 0 Rhopalona, Phil, 1843: à papilles secondaires. . . . . . . . Ciona, Flem., 1828. plane. sans papilles. Bouche : in” Branchie. Sinuslongitudinaux : Pratiquement, on peut déterminer ces animaux de la manière suivante : circulaire ou irrégulièrement lobée. . . . . . . . . .. Ecteinascidia. individus en partie libres. . . . . , . . . Diazona. à six lobes Bouche individus entièrement englobésdans la tunique Tylobranchion. COTRS CVIINOFIQUE NAS LL 52e Ciona. à huit lobes | Corps ClavifOrMe Re Us eee 0, Rhopalona. 254 FERNAND LAHILLE. 1er Genre : Tylobranchion, Herdman, 1886. Herdman, le créateur de ce genre, l’a placé parmiles Polycliniadæ; mais le grand ascidiologue anglais ne s’est pas mépris sur la valeur de ce rapprochement. En effet, dans son tableau phylogénétique, il place Tylobranchion tout près des Distomidæ, presque parallèlement à son genre Ecteinascidia qui lui ressemblerait sous de nombreux rapports. À mon avis, cette conclusion n’est pas suffisante. Les orga- nes reproducteurs, la branchie, la musculature, la constitution du stolon, l’absence de cœnobies dans les cormus pourtant si dévelop- pés de Tylobranchion, tout s'oppose à ce qu'on réunisse celui-ci aux Polycliniadæ. On ne peut pas le réunir davantage aux Disto- midæ, car la branchie de ces derniers présente constamment des côtes transverses et jamais de papilles. Il n’y a que les Cionidæ qui présentent à la fois des papilles branchiales bifurquées, des viscères inférieurs à la branchie, ainsi que des follicules testiculaires disposés en tubes ramifiés. En outre, le nombre des lobes buccaux et cloa- caux 6-6 de Tylobranchion, se retrouve chez les Diazona. D'après l’ensemble de tous ses caractères, Tylobranchion dérive directement des Distomidæ, se trouve placé à la base des Cionidæ et sert égale- ment de passage aux Polycliniade. Qme GENRE : Ecteinascidia, Herdman, 1882. Parmi les types les plus intéressants découverts par le Challenger, on doit citer ce genre que l’on peut caractériser par ses orifices buccal et cloacal Le plus souvent circulaires, par sa branchie plane, sans côtes intermédiaires et à sinus toujours dépourvus de papilles et eufin par l'existence, comme chez Diazona et Tylobranchion, de la blastogénèse. Chez E. crassa (corps de forme pyramidale) et chez E. fusca (corps en massue), la branchie présente une constitution toute particulière que je n’ai retrouvée nulle part ailleurs. Les côtes transverses sont très développées comme les Ascidies inférieurs et leur bord présente de nombreuses et larges papilles triangulaires sm jé RECHERCHES SUR LES TUNICIERS. 255 dont les sommets se trouvent reliés par les sinus anastomotiques longitudinaux. Chez E. turbinata, au contraire, la constitution de l'organe respiratoire rappelle celle des types supérieurs des Phlébo- branches. Les côtes transverses n'existent pour ainsi dire plus et les languettes branchiales sont très étroites. Par son aspect général et par ses orifices buccal (7-8 lobes), et cloacal (6 lobes), E. fusca se relie aux Rhopalones. Par sa tunique mince et transparente, par ses filets tentaculaires disposés en trois cycles, par sa branchie et la disposition de sa colonie, E. turbinata rattache les Ecteinascidia aux Diazones. 3e Genre : Diazona, Savigny, 1816. Syn : Synthetys, Forbes. — Estouffat, des pêcheurs catalans ; Cavolo-fiore, des pêcheurs napolitains. Ascidies phlébobranches et polyzoïques à six lobes buccaux et six lobes cloacaux. — Branchic lisse, sans sinus intermédiaires et sans papilles. — Pédicule œsophago-rectal le plus souvent long. Le type de ce genre fut découvert, dans les premières années de ce siècle, par Delaroche, aux îles Baléares (port d'Ivica), mais ce fut Savigny qui en décrivit l'anatomie en 1816 et lui donna le nom de Diazone. Depuis, cet animal fut retrouvé par Delle Chiaje qui le nomma Polyclinum viride et par Forbes et Goodsir qui en firent leur genre Synthetys (Synthetys hebridica, F.). Enfin, Della Valle l’a longtemps étudié à Naples, mais principalement au point de vue du rajeunissement et de la forme extérieure des cormus. En définitive, depuis les quelques renseignements anatomiques donnés par Savi- gny, on n’a plus eu de détails précis sur ce genre. Pour le dire tout de suite, c’est ce manque de renseignements qui a fait placer par M. Giard ce genre parmi les Distomidæ et qui fait dire à Herdman « is therefore extremely difficult to place ». Della Valle a créé pour Diazona une tribu particulière. Drasche, enfin, le range dans la famille des Clavelinidæ en le distinguant de Clavelina par ses orifices lobés, l'existence de papilles branchiales et d’une tunique 256 FERNAND LAHILLE. commune. Après avoir étudié ce genre à notre tour, non plus dans les livres mais dans la nature, il nous sera très facile de déter- miner la véritable position qu’il doit occuper. Les colonies de Diazona sont constituées par de très nombreux individus, disposés sans ordre et presque entièrement libres. Au niveau de la branchie, la tunique est mince, gélatineuse et transpa- rente; au niveau des viscères et des stolons, elle devient plus résis- tante et constitue la masse commune d’où les individus s'élèvent plus ou moins perpendiculairement. Della Valle compare avec juste raison l’aspect extérieur des Diazones à des colonies de Clavelines dont les ascidiozoïdes très pressés les uns contre les autres auraient émis de très nombreux stolons horizontaux et seraient ainsi réunis par leur base dans une masse commune de substance tunicière formant un large pédoncule au cormus. Les Diazones ne peuvent vivre en captivité dans les aquariums même les mieux établis. Dans un temps plus ou moins court, leur branchie et la partie supérieure de leur corps tombe en diffluence, et à leur couleur, qui au début, était légèrement jaunâtre, succède la coloration bleuâtre ou violacée observée par Savigny, et que l’action directe de l'alcool produit plus rapidement encore. Dans ce dernier cas, la couleur améthyste est naturellement bien plus pure; elle est produite par la transformation de cellules pig- mentaires éparses dans la tunique et dans les portions supérieures des individus. La coloration n'apparaît jamais chez les cormus fixés par des acides ou par le sublimé. Lorsque tous les animaux ont disparu et qu'il ne reste que la grosse masse pédonculaire, il se produit un phénomène des plus intéressants qui a été observé pour la première foist par Della Valle et que je puis confirmer à mon tour. Les stolons se meitent à bourgeonner activement et une nouvelle colonie se reforme sur l’ancien pédoncule. C’est bien un rajeunissement total du cormus. Les Diazones sont fort communes sur les côtes de Banyuls, par { Sul Ringiovanimento delle colonie di Diazona violacea, Sav. Rend. d. real. Accad. di Napoli, fevr. 1884. | 1 4 RECHERCHES SUR LES TUNICIERS. 257 les fonds vaseux de trente à cinquante mètres. En revanche, à Roscoff je n’ai observé cette espèce que deux fois seulement. C’est bien elle que Forbes et Goodsir ont recueillie sur les côtes d’Angle- terre et qu’Alder a décrit! sous le nom de Synthethys hebridica. La plupart des colonies ont un contour ovalaire de 0,10 sur 0,07. D'après Della Valle elles peuvent atteindre un diamètre de 0,15 à 0,18 et peser un kilo environ, Lorsque les individus sont bien épanouis, leur iongueur totale est de 0,03 à 0,05; la longueur de la branchie, y compris le tube buccal, étant de 0,015 à 0,02. J'ai même Fig. 131. Fig. 138. observé des individus dont Fig. 136. — Diazona violacea, Sav. — Portion de la couronne tentaculaire et de la branchie. — Gr. 25. la branchie avait 3 centi- Fig. 437. — Diazona violacea, Sav. — Portion d’une branchie irrégulière. On remarque en haut du dessin la mèlres de long et pl us de convergence des trémas vers un sinus péribranchial et en bas le dédoublement des trémas. — Gr. =, cent rangées de trémas. La Fig. 138. — Diaxona violacea, Say. — Papilles de Lister longueur moyenne Da es situées un peu à gauche de la ligne dorsale. — Gr. 25, cères est de 10 millimètres et le pédoncule œsophago-rectal est presque aussi long. Quelquefois, pourtant, il est court et, à une branchie de 10"® peut correspondre un pédicule de 4"m seulement. La branchie est cylindrique, un peu plus large toutefois dans sa portion supérieure que vers le bas. Les deux tubes, buccal et cloacal, sont terminaux et présentent chacun six lobes obtus. Il n'existe point entre eux de taches pigmentaires. Le tube buccal est plus large que le tube cloacal et sa longueur est double. Les muscles de la paroi du corps forment dans la partie antérieure 1 Ann. and. Mag. of Nat. Hist., vol XI, 1863. 17 258 FERNAND LAHILLE. de larges faisceaux parallèles et à peu près longitudinaux. Environ à mi-hauteur de la branchie ils se divisent et deviennent horizon- taux ; et leur disposition est alors celle que l’on rencontre chez les Distomes et les Colelles. Ils se relient aux muscles des côtes bran- chiales en traversant des sinus péribranchiaux assez nombreux. Les filets tentaculaires, au nombre de vingt-quatre et non de quinze à seize, comme l’a prétendu Savigny, sont disposés comme l'indique la figure 136. La cou- ronne est comme régulièrement ondulée et les six filets les plus longs correspondent aux six lobes buccaux et aux six invaginations les plus profondes de la couronne. Fig. 139. — Diazona violacea, Sav. — Coupe La branchie est extrêmement transversale du sillon ventral ; Mr, zone mé- À 4 x diane ; Gr, Gr, Gr, les trois zones glandu- développée chez les Diazones; les laires; Car, Cor, Cr, les trois zones ciliées ; Rr, replis marginaux. — Gr. 252, rangées de trémas sont au nom- bre de 70-80-100 et plus. Les ouvertures sont très régulières, mais les côtes transverses sont fort peu développées, sauf : du côté dorsal (fig. 138), où elles se prolongent sur la gauche en papilles de Lister, longues et filiformes, et du côté ventral, de part et d’autre du sillon. La figure 137 montre deux particularités assez communes qu'on observe dans la branchie de Diazona : 1° la convergence des trémas vers les points où la branchie se rattache à la paroi du corps à l’aide des sinus péribranchiaux ; 2° le dédoublement très fréquent des rangées de trémas. Dans ce cas, entre les nouvelles rangées se forment des languettes qui viennent se souder aux sinus anastomotiques longitudinaux. On n'observe jamais de côtes inter- médiaires de premier ou second ordre. Les languettes branchiales sont au début triangulaires et horizon- tales comme chez Ect. fusca et crassa ; elles sont, toutefois, beaucoup plus éloignées les unes des autres. Sur chacune d'elles naissent, près de leur extrémité, deux diverticules aplatis qui se recourbent d’abord l’un vers l’autre. I’aspect des languettes branchiales rappelle alors celui d’une gueule. Les diverticules s’allongent, s’arrondissent, se RECHERCHES SUR LES TÜNICIERS. 259 retournent l’un vers le haut, l’autre vers le bas, ils s’anastomosent avec les diverticules des rangées adjacentes, et pendant un certain temps le point de jonction, plus épais que le reste du sinus ou quelquefois légèrement con- tourné, simule une papille intermédiaire. Lors- que le développement normal est achevé (fig. 136), on n’observe que des sinus longitu- 2 x £ . . Le 49 e Ne Se dinaux très réguliers, sans papilles d'aucune < A ’ . ë, : e do2 ae sè sorte. C’est done bien à tort que Savigny CS . d’abord, puis Della Valle, signalent leur exis- tence chez Diazona. Ce qui peut induire en Fig. 140, — Clavelina leradi- erreur, ce sont les restes épaissis des lan- formis, Müll.— Coupe trans- versale des centres nerveux. guettes branchiales primitives qui débordent FE, El @n, clande new légèrement en dessous des sinus longitudi- "* (6% "+. naux au point de division. Le sillon ventral de Diazona (fig. 139) est si régulier, qu’il pourrait à bon droit servir de schéma de cet or- gane. Les trois zones glandulaires sont très nettement séparées les unes des autres, et les replis marginaux forment à cette gouttière un véri- table rebord. Les centres nerveux sont situés à la base des deux tubes buccal et AMD vieu ig 1e 9 cloacal. La glande neu- Fig. 141. Fig. 142. Fig. 141. — Diazona violacea, Sav. — Coupe longitudinale . = des centres nerveux. Cn, ganglion nerveux; /n, pavillon vi- rale est plus volumineuse bratile ; Gn, glande neurale ; Sar, sillon antérieur ; Ed, paroi : branchiale. u anglion et le ca- que le Sans Fig. 142. — Les mêmes organes vus de l’intérieur de la bran- che entièrement si on Chie. La glande Gn cache entièrement le ganglion. — Gr. 190, l’observe par la face interne de la branchie (fig. 141 et 142). Le pavillon vibratile est très voluminenx et son orifice est le plus souvent formé par une fente verticale dont les extrémités sont légèrement rapprochées l’une de l’autre, mais qui ne sont jamais aussi contournées que chez Ciona; l'ouverture du pavillon a donc l'aspect d'un croissant vertical. Celui-ci, comme chez Clarelina, est 260 FERNAND LAHILLE. en contact immédiatavecle ganglion nerveux. ChezClavelina, la glande neurale (fig. 140) était constituée par des tubes ramifiés, enchevé- trés les uns dans les au- tres. Les pa- rois étaient formées de cellules sou- vent arron- dies et si Fig. 143. Fig. 144. Fig. 145. volumineu - Fig. 143-145. — Diaxona violacea, Sav. — Coupes transversales au niveau des sps que la viscères, destinées à montrer la disposition du cœur. Pc, péricarde ; Æc, épi- carde ; Ei, Pi, Mi, Ri, estomac, post-estomac, intestin moyen et rectum; Du, SE tubes rénaux; Do, Ds, oviducte et spermiducte. La fig. 444 représente la face lumière du antérieure de la coupe, les coupes, fig. 143 et 145, sont dessinées par leur face postérieure. Dans les fig. 143 et 144 les lèvres de la gouttière cardiaque ont été tube deve- figurées intentionnellement éloignées de la paroi épicardique Ec. — Gr. 11, nait à peu près nulle. Chez Diazona (fig. 141) la disposition est identique, seulement les tubes sont bien plus pressés les uns contre les autres, les limites cellulaires sont devenues souvent très peu nettes Fig. 146. — Diazona violacea, Say. — Portion de l'organe rénal. Du, tubes rénaux serpentant sur le rectum; Au, ampoules rénales; Cu, Concrétions rénales. — Gr 7®, et les tubes sont entièrement remplis de cellules en voie de désorganisation. La disposition et la constitution du tube digestif, des organes reproduc- teurs, et du cœur est si semblable à ce qui existe chez Rhopalona, que je n’in- sisterai pas sur ce sujet, les figures 143- 145 suppléent à toute description. Le rectum, très allongé, vient s'ouvrir près de la base du siphon cloacal en se terminant par deux larges oreillettes anales. Sur sa surface courent les tubes rénaux qui présentent, à l'extrémité, de petites branches disposées sur tout leur trajet, des ampoules volumineuses arrondies (fig. 146) qui renferment dans leur intérieur des concrétions brunâtres. Chez les Ascidia ces am- poules se multiplient beaucoup et le plus grand nombre devient libre. RECHERCHES SUR LES TUNICIERS. 261 L'étude de Diazona est à c’est égard des plus instructives et nous montre la formation et l’origine de ces vésicules rénales des Ascididæ. Chez D. violacea il existe toujours des lignes de pigment blanc constantes et régulières. Della Valle (loc. cit., p. 13) en a indiqué très exactement les dispositions. Deux lignes s'étendent sousles replis marginaux, une autre de chaque côté du rectum. Il existe un cercle branchial inférieur, un cercle buccal et un cercle cloacal, les deux derniers sont ordinairement réunis par une courte ligne. Qn rencontre quelquefois, à Banyuls, des Diazones qui ne présen- tent aucune ligne pigmentaire et aucun cercle coloré. C’est à ces colonies que j'avais donné le nom de D. intacta (Bull. soc. h. n. Toul., 1887). Mais leur anatomie est tellement semblable à celle de D. violacea, quoique leur branchie soit toujours plus développée, que je préfère ne voir actuellement en elles qu'une simple variété. Dans une note à l’Institut (26 oct. 1886), M. Giard annonce qu'il a rencontré à Concarneau «au sud-est des Glénans et au sud de Basse-Jaune, par une profondeur de cinquante mètres, une Ascidie qui appartient incontestablement au genre Diazona, mais qui semble différer du type méditerranéen ». L'auteur la nomme Diazona hebridica, en l’assimilant à Synthethys hebridicus de Forbes. Son principal caractère serait l’absence de cercles pigmentaires au pour- tour des siphons. Le cercle branchial supérieur existe, ainsi que les lignes longitudinales, dorsales et ventrales, identiques à celles de D. violacea. On ne peut donc considérer cet animal, au moins jusqu'à nouvelle étude, que comme une simple variété du type. Clavelina lepadiformis présente des lignes pigmentaires très diverse- ment disposées sans qu'on puisse attribuer la moindre valeur spécifique à ces différentes modifications. En résumé, on peut admettre les deux variétés suivantes : Cercles au pourtour des tubes. : vi type), Sav. Cercle branchial inférieur. . D. violacea (type) pigmentés Pas de cercles autour des tubes. Individus | D. hebridica-violacea, For. Cercle branchial supérieur. } NON PISIRENEES: ele 21e 0 el enente re ch D. intacta-violacea, Lah. 262 FERNAND LAHILLE, Affinités morphologiques. —On ne saurait trop se tenir en garde contre les hypothèses et aussi contre les conclusions que l’on se croit en droit de tirer de la simple lecture d’un mémoire, car, dans ce cas, on risque de se baser sur une erreur. C’est ce qui est arrivé à De Blainville (Dict. des Sc. nat., 1824, vol. 32, p. 366). Quoique Savigny ait parfaitement observé que les deux orifices des Diazones débouchaient directement au dehors et avaient chacun six lobes, et les eût en conséquence placées dans sa première division (VW. loc. cit., p. 64) à côté des Distomes et des Sigillines, il représente (fig. 3, pl. IT), une colonie avec une cavité centrale et dit dans le texte, page 174, qu’elle formait un système. De Blainville, mécon- naissant les plus frappantes dissemblances, partit de cette erreur pour réunir dans le même genre Botryllus, les Diazones et les Botrylles vrais ! Savigny, plaçant leur étude immédiatement après celle des Clave- lines, avait formellement indiqué ainsi la première et incontes- table affinité de Diazona. Dans la note citée plus haut, M. Giard dit : «Le genre Diazona représente évidemment, parmi les Clavelinidæ, le type Synascidie. C’est une Claveline composée. » Les Clavelines sont des Ascidies composées, de véritables Synascidies, et Diazona ne peut donc pas mieux qu’elles représenter ce type. En outre, la constitution de la branchie et du cœur éloigne ces deux genres l’un de l’autre. Les Ecteinascidia Herd. sont venus toutefois diminuer l'intervalle qui les séparait et la transition est devenue on ne peut plus ména- gée. Les relations avec les Rhopalones ne sont pas moins intimes, et pour distinguer celles-ci des Diazona, il faut invoquer des caractères secondaires, tels que le gaufrage de la brauchie ou la blastogénèse normale. Le nombre des lobes buccaux ne peut pas même servir, puisque certaines variétés de Rhopalona en présentent six tout comme Diazona. Les affinités des Diazones avec les Ciones ne sont pas moins étroites, quoiqu'un peu plus éloignées. Le pédicule œæsophago-rectal est devenu très court comme chez quelques Diazones et quelques RECHERCHES SUR LES TUNICIERS. 263 Ecteinascidies ; les papilles branchiales se sont développées et le nombre des lobes buccaux s’est élevé le plus souvent à huit. La tendance que montrent les Diazones à la multiplication du nombre de rangées de trémas à l’aide de sinus intermédiaires, s’accentue et se régularise chez les Ciones. La constitution particulière de Ja glande neurale de Diazona se retrouve chez Ciona. L’estomac pré- sente la même conformation; chez les deux types s'observent les mêmes cannelures longitudinales nombreuses. Les muscles, dans la paroi antérieure du corps de Diazona, sont disposés, comme chez Ciona, en faisceaux longitudinaux et parallèles. L’organe rénal des Diazones est enfin semblable à celui des Ascididæ. En résumé, il est incontestable que les Diazones dérivent immé- diatement des Ecteinascidies ; qu’elles sont très voisines des Rho- palones et des Ciones, tout en étant plus rapprochées des premières que des dernières. 4me Genre : Rhopalona, Philippi, 1843. Caractères génériques : Ascidies phlébobranches. — Corps en massue. — Branchie gaufrée sans sinus intermédiaires et à sinus longitudinaux sans papilles. — Pédicule œsophago-rectal presque aussi long que la branchie. Depuis Philippi qui le découvrit!, ce Tunicier si curieux n’a été étudié que par Roule? et par M. E. Van Beneden*. Au point de vue anatomique, J'ai fort peu d'observations à ajouter à celles de ces deux derniers auteurs. Les Rhopalona sont assez communs aux envi- rons de Banyuls. Comme l’étranglement correspondant au pédicule œæsophago-rectal est long et grêle ; comme, d’un autre côté, l'animal est très fortement fixé sur les supports à l’aide de ses nom- breuses expansions stoloniales, on ne recueille le plus souvent, avec 1 Philippi. Ein neues genus d. cinf. Ascidien. Müll. Arch. 1843, p. 45. 2 Roule. Révision des espèces de Phallusiadées des côtes de Provence. Rec. zool suisse, t. III. 5 E. Van Beneden. Les genres Ecteinascidia, Herd., Rhopalona, Phil. et Sluiteria (nov. gen.), Bull. de l’Ac. roy. des sciences, n° 7, Bruxelles, 1887. 264 FERNAND LAHILLE. la drague, que la portion supérieure du corps. Mais il n’est pas rare de rencontrer à Banyuls des Rhopalones fixées dans des valves vides de Pinna nobilis ; on peut ainsi, grâce à cette heureuse circonstance, s’en procurer des échantillons en parfait état de conservation. L'individu le plus développé que j'ai pu étudier mesurait 0,12 cent. de long ainsi répartis : branchie, 0,05, pédicule, 0,04, viscères, 0,03. Les stolons ramifiés formaient de larges expansions foliacées, et leur longueur atteignait 0,05 et 0,06 centimètres. Comme chez Cla- velina producta, ils naissent souvent aussi bien de tous les côtés de la partie postérieure des viscères qu’au niveau du pédicule. C’est ainsi que parfois on rencontre des Rhopalona fixés par tout le côté gauche des visceères et du pédicule et n’ayant de libre que la partie correspondante à la branchie. La tunique de R. Neapolitana est cartilagineuse et translucide. Les deux tubes buceal et cloacal sont fort courts et situés à la partie supérieure et tronquée de l'animal. L’orifice buccal présente le plus souvent huit lobes, parfois dix. Les lobes cloacaux sont constamment au nombre de six. Une ou deux taches pigmentaires orangées existent constamment entre les lobes. La couronne tentaculaire ressemble en tous points à celle des Diazona : six longs tentacules filiformes, six moyens et douze petits. La branchie est gaufrée. Longtemps j'ai cru que les petits enfon- - cements de la trame branchiale (Minute plications des auteurs anglais) étaient produits par la contraction de l'organe. J'ai anes- thésié, avec le plus grand soin, par les vapeurs d’éther ou le chlorhy- drate de cocaïne, des individus très épanouis, et après les avoir fixés dans les meilleures conditions, j'ai toujours observé ces plis. Les coupes transversales de la branchie m'ont ensuite montré que cette disposition était bien réellement normale. Si une section un peu épaisse est faite en effet au-dessus d’une côte transverse, on voit sur cette côte, qui conserve toujours la même largeur et qui est rectili- gne, les sinus intertrématiques implantés suivant une ligne très régulièrement ondulée. Le terme de branchie plissée conviendrait à ces formes, mais comme cette expression pourrait facilement s'ap= RECHERCHES SUR LES TUNICIERS. 265 pliquer aussi aux branchies à plis méridiens des Cynthiadæ et Molguliadæ, je préfère employer le mot de branchie gaufrée qui exprime encore mieux la réalité. Comme l’a remarqué M. Van Bencden, les sinus intermédiaires transverses n'existent pas chez Rhopalona, et toutes les côtes sont de premier ordre. Quant aux prétendues papilles branchiales, leur apparence est due à deux causes : 4° la languette branchiale primitive, après s'être bifurquée à son extrémité, se recourbe le plus souvent soit à droite, soit à gauche, et ce qui ressemble alors à une papille placée sur les sinus anastomiques n’est pas autre chose que la courbure ou le coude de la languette primitive ; 2 dans d’autres cas, la branchie étant légérement contractée, les sinus s’infléchissent entre les lan- guettes primitives et celles-ci forment de la sorte de petites saillies. La conception fausse que M. Roule se fait au sujet de la cavité générale des Tuniciers, qu'il confond très certainement avec la cavité épicar- dique, l'amène à désigner sous le nom de parois épaisses de l'estomac et de l’intestin, non seule- ment l’épithélium intestinal qui constitue à lui seul le tube digestif de toutes les formes infé- rieures, mais encore une portion du véritable cœlome très réduite par de nombreuses cellules et de nombreux tractus d'origine mésodermi- que. C’est l’épicarde Ec, figure 148, qui, chez NT Fig. 148. Fig. 1417. Fhopalona Neapolitana,Ph.— Histo- logie du sillon stomacal,. 370 Gr. are Fig. 148. — Rhopalona Neapolitana,Ph.— Coupe transversale au niveau de l'estomac ÆEi ; Ri, rec- tum; Ec, épicarde; Pe, péricarde ; GC, paroi du cœur. — Gr, À pl Rhopalona, s'in- sinue entre le rectum Rt et l'estomac Eï et simule ainsi une cavité générale. Les glandes sexuelles ne se développent pas ici dans l'épaisseur des parois intestinales (loc. cit., p. comme toujours, dans la cavité générale propren parois intestinales, l’épicarde et l’ectoderme. L’es 232), mais bien, ent dite, entre les tomac ne présente pas seulement à sa face interne des stries longitudinales (loc. cit., 266 FERNAND LAHILLE. p.228), mais il est réellement cannelé, comme l'estomac de Diazona. Chez Rh. Neapolitana, on compte une cinquantaine de cannelures, le plus souvent elles sont alternativement grandes et petites. Comme chez Clavelina, du côté dorsal et externe on observe un sillon sto- macal dont j'ai représenté (fig. 147) une moitié. Ce sillon est ici moins net que chez Diazona , il pourrait être facilement confondu avec une cannelure. Ce qui l’en distingue toujours, c'est un tapis de cils vibratiles très serré. Les vraies cannelures en sont toujours dépourvues. Les cellules glandulaires de l'estomac sont éparses, ovoïdes, leur noyau est volumineux et clair. 2. — Rhopalona cerberiana, Lahille. A côté de Rh. Neapolitana, on rencontre, à Cerbère, une forme très voisine qui n'en est peut-être qu’une variété. Sa taille ne dépasse pas 0,05-0,06. (Branchie, 0,02; pédicule, 0,015; viscères, 0,02.) Le gaufrage de la branchie est peu prononcé, quoiqu'il existe toujours. On peut facilement suivre chez cette espèce la formation des sinus anastomotiques longitudinaux (fig. 149). Tandis que chez Rhopalona Neapolitana on compte normalement huit lobes buccaux et six lobes cloacaux, chez R. cerberiana il n'existe normalement que six lobes buccaux ; mais, en revanche, les lobes eloacaux sont au nombre de douze. Les taches pigmentaires interlobaires sont toujours très nettes. | La tunique de R. cerberiana est plus épaisse et plus opaque que chez R Neapolitana. On rencontre souvent deux ou trois individus soudés par leurs stolons sans qu’il soit possible de savoir s’il y a simplement concrescence ou bourgeonnement. Je penche toutefois pour la première manière de voir, car les individus sont toujours à peu près de même taille. Si cette espèce bourgeonnait réellement, il semble qu’on devrait trouver sur les stolons des blastozoïdes à dif- férents stades. Mais, d’un autre côté, dans une colonie adulte de Diazones, ascidies essentiellement bourgeonnantes, tous les indi- vidus ont pourtant sensiblement la même taille. DS NS RECHERCHES SUR LES TUNICIERS. 267 Peut-être chez Rhopalona le bourgeonnement a-t-il lieu de très bonne heure pour cesser à l'apparition des organes reproducteurs ; peut-être, enfin, les individus s’isolent-ils alors comme cela 8e passe chez Clavelina. Je ne puis être à ce sujet plus affirmatif que je ne l'ai été dans ma note à l’Institut, du 24 janvier 1887, car depuis Je n'ai rien observé, ni en faveur de cette opi- nion, ni contre. M. Van Beneden (loc. cit., p. 27) interprète mal mes paroles lorsqu'il dit : « M. Lahille exprime l'opinion que les formes isolées de Rhopalona sont produites aux dépens de colonies par suite de l’atrophie des stolons quiles réunissaient entre elles. » Encore une fois, je le répète, ce fait est très probable, mais ne pourra être démontré que par l'étude complète du développement de Fig. 449. — Rhopalona cerbe- l'animal. riana, Lah. — Formation des sinus anastomotiques longitu- L : nee : : dinaux On n’a pas représenté Affinités morphologiques. Le motif qui; le gaufrage de la branchie. On pour Herdman, ne permet pas de réunir Ec- nue cu De à 7 ie rangées de trémas. — Gr. 32, teinascidia et Rhopalona, est la présence de é papilles branchiales chez ce dernier type. L’ascidiologue anglais n'ayant eu à sa disposition que le mémoire de Philippi, n’a pu relever cette grossière errcur. Pour M. Roule, le seul motif qui s'oppose à cette réunion est la blastogénèse : « Si l’on trouvait un individu isolé d’Ecteinascidia, on ne pourrait établir entre lui et un individu de Rhopalona aucune diffé- rence bien importante et on devrait le considérer comme appartenant à une espèce naine de Rhopalona » (loc. cit., p. 235). Il ajoute, avec fort juste raison : « Il est certain que la faculté de bourgeonner ne constitue pas un caractère anatomique. » Mais, malheureusement, quelques lignes plus bas il écrit : « La faculté de bourgeonner est plus qu'un caractère anatomique ; elle est un caractère biologique dans le sens du mot..., son rôle dans une classification naturelle doit être considéré comme primordial. » En parcourant le mémoire cité plus haut de M. Van Beneden, j'ai 268 FERNAND LAHILLE. été tout heureux de voir que je partageais avec lui des idées entière- ment opposées. «On peut citer dans le groupe des zoophytes plusieurs exemples de genres renfermant, à côté d'espèces se multi- pliant par bourgeonnement, des espèces à peine différentes, dépour- vues de cette faculté, sans que l’on ait songé à se fonder sur cette différence pour les ranger dans des genres distincts. L'Actinia mesembryanthemum se multiplie par bourgeonnement, alors qu’une foule d'espèces voisines sont dépourvues de cette faculté. Des faits du même genre ont été révélés chez les Fungies et les Flabellum. Et à supposer qu’une Hydre ou une Claveline, sous l'influence de conditions particulières, contrariant sa multiplication par bourgeonnement, en fut réduite à ne se reproduire plus que par voie sexuelle, cesserait-elle pour ce motif d’être une Hydre ou une Claveline ? En quoi l'organisation de ces êtres s’en trouverait-elle modifiée ?» (loc. cit., p. 27). M. E. Van Beneden propose donc de réunir à Rh. Neapolitana les Ecteinascidia crassa et fusca. Quant à E. turbinata, il le conserve comme type du genre ÆEcteinascidia qui comprendrait, en outre, l'E. diaphanis de Sluiter'. Le caractère anatomique propre à ce genre ainsi limité, serait la brièveté de l'œsophage qui entraînerait la diminution de longueur du pédicule, de telle sorte que l'estomac se trouverait ainsi, «au moins en partie, sur la face gauche du sac branchial » (loc. cit., p. 29). À mon avis, ce caractère est insuffisant pour diviser en deux genres, les Ecteinascidia connus, surtout étant donné que la plupart de ces animaux n’ont été étudiés que sur des échantillons conservés dans l'alcool. Dans ce cas, il peut arriver, en effet, comme je l'ai souvent remarqué chez Diazona, dont le pédicule œsophago-rectal est pourtant normalement long, que, par suite de la contraction de l’animal, la branchie vienne occuper une position semi-latérale aux viscères. Ce caractère ne peut done avoir de valeur que s’il est ob- servé sur des animaux frais et parfaitement étalés. En outre, un 1 Ueber einige einf. Asc. v. d. insel Billiton. Natuurk. Tijdsch, v. Nederl. Indie. Bd. XIV. RECHERCHES SUR LES TUNICIERS. 269 caractère fort important, le gaufrage de la branchie, ne permet pas, à mon avis, de réunir E. fusca et E. crassa au genre Rhopalona. C’est, en effet, un caractère de supériorité incontestable qu’on ne retrouve que chez les Ascididæ les plus évolués; tandis que EÆ. fusca et E. crassa possèdent, au contraire, une branchie à parois entièrement lisses et à côtes transverses très développées, comme cela se pré- sente chez les formes inférieures. Toutefois, il est hors de doute que les Ecteinascidies, les Rhopa- lones, les Diazones et les Ciones sont des genres fort voisins et que les trois premiers dérivent directement des Clavelines par l’appari- tion des sinus anastomotiques transverses et la multiplication du nombre des cannelures stomacales. 5me Genre : Giona, Fleming, 1828. Caractères génériques : Si on compare le genre Ciona aux genres voisins et si on recherche les caractères anatomiques constants qui lui sont vraiment propres, on n’en rencontre que trois : 1° Les sinus longitudinaux de la branchie présentent des papilles ; 2° des bandes musculaires longitudinales et parallèles sont disposées le long du corps ; 3° le pédicule œsophago-rectal est très court et visible seu- lement à la dissection. Les autres caractères principaux sont les suivants : 4° individus sessiles, non bourgeonnants ; 5° normale- ment : huit lobes buccaux et six lobes cloacaux ; 6° branchie non gaufrée, présentant presque toujours des sinus ou côtes intermé- diaires transverses. Les côtes intermédiaires de premier ordre et les côtes transverses présentent des papilles à leur point d'union avec les sinus longitudinaux. Les Ciones peuvent être caractérisés de la manière suivante : absentes. Long. du corps : 0,022... . . G. Flemingi, Herd., 1882 de 4er ordre (lisse. L. ducorps : 0,08.0,09. G. Roulii, Lah., 4887 ; Lu Tunique : }rugueuse.L. du corps: 0,045. G. aspera, Herd., 1886 intermédiaires: Fe RAR P UM Ù - de 4er et 2e pe du corps : 0,02-0,07. G. Savignyi, Herd., 1882 ordre. Long. du corps : 0,08-0,42. G. intestinalis,Lin.,1766 270 FERNAND LAHILLE. 4. — Ciona Roulii, Lahille, 1887 Cette Cione, que j'ai rencontrée assez souvent à Ban yuls (cap Béarn), présente une longueur moyenne de 0,085 sur une largeur de 0,04. En définissant la longueur du tube buccal et cloacal par la distance comprise, dans l’état de dilatation parfaite, entre l'extrémité des lobes buccaux et le sillon antérieur de la branchie ou le ganglion nerveux; chez C. intestinalis, le tube buccal est en moyenne deux fois plus long que le tube cloacal, tandis qu'on observe l'inverse chez C. Roulii. Le tube buccal mesure, en effet, chez cette espèce 6mm, tandis que le tube cloacal est de 12m, La Cione de Roule est fixée par la partie ventrale et postérieure de son corps à l’aide de stolons réunis en un faisceau de quatre centi- mètres de longueur. La tunique est lisse, et lorsque l'animal se retracte, elle ne le suit point dans sa contraction ; cela se produit également chez Ciona Savignyt. Entre les huit lobes buccaux et les six lobes cloacaux se trouvent des taches de pigment orangé très allongées. Les tentacules sont presque toujours au nombre de trente-deux. - De chaque côté du corps on compte quatre faisceaux museulaires principaux qui se divisent à la hauteur du sillon buccal. L'animal est transparent, sa teinte est rougeûtre, car les sinus péribranchiaux et les sinus transverses de la branchie présentent, comme chez Asc. aspersa, des amas de pigment rouge-orangé ou rouge-brun. La branchie de C. Roulii ne possède jamais qu'un sinus intermédiaire de premier ordre par rangée de trémas. Ceux-ci ne se trouvent jamais interrompus. 2. — Ciona Savignyi, Herdman, 1882. Deux fois j'ai rencontré à Banyuls cette Cione, dont la forme trapue, même lorsque l’animal est bien étalé, permet de la distinguer de suite de C. intestinalis. Les individus que j'ai recueillis ont été trouvés dans une localité (Massa-d’Oro) où les marins du laboratoire RECHERCHES SUR LES TUNICIERS. 271 et les pêcheurs de la côte ne vont que rarement, aussi je me gar- derai de conclure à la rareté de cette espèce. Les sinus intermé- diaires transverses de second ordre n'existent parfois que par places, mais on les retrouve toujours. D'après M. Roule, au con- traire (loc. cit , p. 198), leur absence est le plus souvent la règle chez les individus des côtes de Provence. 3. — Ciona intestinalis, Fleming, 1828. Cette espèce est caractérisée par sa grande taille et par la présence constante de côtes intermédiaires de premier et deuxième ordre. Le mode de fixation des individus et la longueur relative du tube buccal et du corps, permettent d'établir un certain nombre de varié- tés. L'animal est fixé : ere 2 de la long. totale C. macrosiphonica-int. Roule de courtes villosités postres, | ; DES. D +ous.... .. G.intestinalis, Linné (type). Long. du tube buccal : , 1 : Par nuit Gs caruna-mt:; OF: M des stolons postérieurs . . . . . . . . . . . . C. fascicularis-int Hanc.1870 tout le côté gauche du corps. . . . . . . . . . C. Edwardsi-int., Roule. Dans sa révision des Phallusiadées de Provence, M. Roule a créé le sous-genre Pleurociona pour les Giones fixées par tout un côté du corps. Ces formes ne différaient des autres que par l’obliquité de la lame péritonéale (?) par rapport à l’axe du corps ; et encore faut-il ajouter que cette obliquité « n’est pas très accentuée > (p. 240, loc. cit.). Les espèces et, à plus forte raison, les sous-genres doivent être basés sur des caractèree anatomiques ; si le mode de fixation suffi- sait pour créer des espèces, Ascidiella aspersa, Morchellium argus,etc., en formeraient vite un certain nombre. Ciona Savigny elle-même n’est pas fixée par sa base comme C. intestinalis. « Les villosités postérieures qui servent aux C. intes- tinalis pour adhérer aux corps étrangers n'existent pas, et les indi- vidus se fixent à la manière de la plupart des Phallusidées, par un empâtement de la cuticule autour d’un point d'attache ; cet empâte- 272 FERNAND LAHILLE. ment chez les C. Savignyi, se produit assez en avant de l’extrémité postérieure du corps. » (Roule, Monogr. de la Ciona, p. 196.) En parcourant les grèves de Roscoff, on rencontre, dans les endroits abrités, des Ciona intestinalis fixées par la partie postérieure correspondante aux viscères. Mais dans les endroits où de grands courants existent normalement, les Ciones que l’on trouve sont fixées par toutle côté gauche de leur corps. Cela se conçoit, car un individu presque entièrement libre serait très facilement arraché de son support. On voit done que le mode de fixation provient des conditions différentes du milieu et d’une adaptation à ce milieu. Le même fait se constate chez les Amaroucium pédiculés ou sessiles. Cette adap- tation particulière des Ciones entraîne certaines conséquences qu'il est peut-être bon d'indiquer. La branchie, en se développant, tendra à se placer plutôt au-dessus des viscères qu'au-desous, afin de pou- voir se dilater plus aisément. En même temps l’asymétrie de position produira une asymétrie musculaire et les muscles du côté libre se développeront plus que les muscles du côté fixé. Chez Ciona Ediwardsi-intestinalis ces tendances se trouvent indiquées par l'obliquité de la lame péritonéale, et cette. disposition vient consti- tuer un terme de passage vers les Ascidiens à viscères entière- ment latéraux à la branchie et fixés par tout un côté de leur corps. La branchie tend en effet chez, les Pleurociona, à occuper la région postérieure du corps et à refouler les viscères en avant. (Roule, loc. cit., p. 243.) Les formes de Ciona intestinalis fixées latérale- ment sont donc très intéressantes au point de vue biologique, puis- qu’elles montrent l'avantage qui a déterminé peut-être, chez les Tuniciers supérieurs, ce mode de fixation. Dès lors, il est naturel de ranger ces formes dans une variété particulière. Les Pleurociona Edwardsi qui ne présentent aucune différence anatomique avec les C. intestinalis ne peuvent constituer une espèce nouvelle, et à plus forte raison un sous-genre nouveau ; ils doivent donc, à mon avis, former une simple variété : Ciona Edwardsi-intestinalis. PPS LL SLT LE LS CT le he er RECHERCHES SUR LES TUNICIERS. 273 VIII FAMILLE DES ASCIDIDÆ. La famille des Ascididæ est caractérisée par sa branchie munie de sinus anastomotiques longitudinaux et par ses viscères situés sur le côté gauche de l'organe respiratoire. Réunie aux Corellidæ et aux Corynascididæ, elle constitue le sous-ordre des Phallusiadeæ. Toutes les Monascidies ou Téthyes simples étaient rangées par Linné dans le même genre Ascidia. Ce genre fut scindé en quatre autres par Savigny qui ne conserva pas même le nom primitif et qui adopta ceux de : Phallusia, Cynthia, Boltenia et Clavelina. Forbes, Hancock et Küpffer, à mesure que les types nouveaux se multipliaient, ont précisé davantage les diagnoses et ont donné le nom d’Ascidia (nov. sens) aux Phallusiæ pirenæ de Savigny ; tandis que les Phallusiæ simplices et les Phallusiæ Cionæ formaient les genres : Phallusia et Ciona. Ce dernier, comme nous l’avons vu, doit être rattaché à d’autres genres qui constituent avec lui la famille des Cionidæ. Quant aux deux types Ascidia et Phallusia, on doit les rapprocher des genres Asci- diella, Roule, Sluiteria, Van Ben. (Ect. rubricollis, Sluiter) et Pachy- chlæna, Herdman. Je réunis, enfin, dans cette même famille des Asci- didæ, les genres Perophora et Perophoropsis pour des motifs que j'exposerai plus loin. Les quatre derniers genres du tableau suivant ont généralement huit lobes buccaux et six lobes cloacaux (par exception, quelques A. mentula ne possèdent que sept lobes buccaux et cinq lobes cloa- caux). Les deux premiers genres ont six lobes cloacaux et six ou douze lobes buccaux. Le genre Pachychlæna (Herd.) ne me paraît pas avoir une grande valeur, ne différant en réalité d’Ascidia que par la consistance de la tunique et le gaufrage plus prononcé de la branchie. 18 t : 274 FERNAND LAHILLE. . (Quatre rangées de trémas, . Perophora, Wieg., 1835, Languettes de Lister Rangées nombreuses . . . . Perophoropsis, Lah., 4887. a 15 et OC à7lobes. Sluiteria, V. Ben., 4887. 2 JE Cte dorsale au contact. à È sr. 2(£ ôle dorsale. (0Bà 81. OC à6lob. Ascidiella, Roule, 1884. & Ganglion et 4, ., ' , Re F= pavillon vibratileéloignés. (flexible et mince. . . Ascidia, Lin., 1766. Tunique: | résistante et très épaisse Pachychlæna, Herd., 4880. FéCOUrDÉS. 1... ee EDR à eu . . Phallusia, Sav., 1816, Comme je l'ai fait précédemment pour les Aplididæ, je fais suivre ce tableau dichotomique des genres d’Ascididæ, du tableau (fig. 450) des affinités morphologiques de ces animaux. A Genre : Perophora, Wiegmam, 1835. Le Perophora, dont on ne connaissait jusqu’à présent qu’une seule espèce étudiée en 1834 par Lister et nommée par Wiegmann : Perophora Listeri, avait été réuni à tort, par M. Giard, aux Chon- drostachys. Ce savant naturaliste avait fait, du reste, des réserves expresses à cet égard, en avouant que ce dernier genre ne lui était pas connu. (Rech. sur les Synascidies, p. 108.) La transparence des Perophora en rend l'examen facile, aussi ce type a-t-il été étudié au point de vue anatomique par Lister, Giard et Chandelon, et au point de vue de la blastogénèse par Kowalevsky, et dernièrement par E. Van Beneden et Julin. Il restait encore quelques détails à signaler, de nombreux faits à préciser, quelques fausses interprétations à relever, et c’est ce que je me propose de faire rapidement. Caractères génériques : Individus toujours petits (4-5w" au plus), transparents, fragiles, réunis par des stolons basilaires pouvant s’atrophier à l’état adulte. — Estomac lisse à l’intérieur et à l’exté- rieur. — Six lobes buccaux. — Quatre rangées de trémas. En tenant compte d’une nouvelle espèce que j'ai rencontrée pour la première fois à Banyuls, le genre Perophora peut se diviser de la sorte : languettes simples et arrondies. . . . . . . . P. Listeri, Wiegmann. Branchie à { . k Ge ÿ (sinus anastomotiques longitudinaux . . . . . P. banyulensis, Lab. RECHERCHES SUR LES TUNICIERS. 275 1. — Perophora Listeri, Wiegman. Caractères spécifiques : Papilles branchiales toujours simples et arrondies. — Les Perophora forment de petites masses transparentes Corynascidia Phallusia Corella | Pachychlæna | Ascidia CHER D - Abyssascidia — Hypobythius Ascidiella De E Sluiteria D T Perophoropsis Rhodosoma Perophora td | | Fig. 150. — Diagramme des aflinités morphologiques des Ascidies phlébobranches. — D, Distomidæ primitifs; T, Tylobranchion; G, Glossophorum; E, Ecteinascidia; CG, Ciona; D, Diazona; R Rhopalona ; S, Symplegma et souche des Ascidies stolidobranches. ») comme le cristal, presque aussi larges que hautes, et comprimées latéralement. On aura une idée encore plus exacte des individus vus de côté en supposant un quart de cercle qui présenterait à son 276 FERNAND LAHILLE. centre : l’origine du stolon et sur sa circonférence les deux orifices buccal et cloacal. L'intestin brunâtre, situé contre la partie postérieure gauche de la branchie, tranche parfois vivement sur le reste de l’animal et permet souvent de découvrir cette espèce, qui sans cette particularité passe- rait inaperçue. Les individus qui vivent dans les eaux profondes présentent souvent une coloration jaune-verdâtre produite par une modification des globules du sang. Les dimensions moyennes des individus sont de 3-4mm de longueur sur 2-3" de largeur, l'épaisseur étant de mm, La tunique n’agglutine aucun corps étranger; étant très mince, elle peut suivre la contraction du corps et se débarrasser ainsi des particules qui pourraient se déposer sur elle. La longueur des siphons est faible ($ environ de la longueur du corps). Les lobes sont arrondis. On en compte six à l’orifice buccal, &-5-6 à l’orifice cloacal. Il existe des taches pigmentaires orangées entre les lobes et non à leur sommet, comme M. Giard l'a représenté par erreur dans la figure 8 de la première planche de son mémoire. Ces taches sont constantes à l’orifice cloacal, elles existent fort rarement à l’orifice buccal. Les tentacules filiformes et incolores sont au nombre de vingt-quatre : quatre sont grands, huit sont moins longs, les douze derniers sont courts. [ls sont tous recourbés vers le bas, les plus longs atteignent et dépassent même un peu le sillon antérieur. Le cercle coronal se trouve situé à la limite infé- rieure des muscles circulaires buccaux. Les colonies vivent facilement en captivité, surtout si on à la précaution de maintenir les cuvettes à l’obseurité. Si on suit la formation d’une colonie, on voit qu'autour de l’oozoïde s'étendent et se fixent 3-4 stolons, qui proviennent comme je l'ai constaté égale- ment pour les Clavelinidæ et Botryllidæ, des prolongements ectoder- miques antérieurs de la larve. Au moment de la fixation de Pero- phora, ces appendices se trouvent à la partie inférieure du sillon ventral et le reste de la queue larvaire est du côté dorsal, presque immédiatement en arrière du siphon cloacal. Autour de l’oozoïde RECHERCHES SUR LES TUNICIERS. 277 naissent alors les blastozoïdes, et sur les jeunes colonies qui sont encore régulières, on voit la taille des individus décroître en allant du centre vers la périphérie. Les animaux une fois développés ne sont plus implantés sur le stolon commun, mais présentent chacun un véritable stolon par- ticulier qui les met en rapport avec le stolon colonial. Dans une colonie on observe assez souvent des individus qui se trouvent isolés par suite d’une atrophie normale ou accidentelle du stolon. Tunique. — Le Perophora possède une véritable tunique com- mune, elle s'étend sans interruption ni changement de structure tout aussi bien sur les corps des individus que sur les stolons eux-mêmes. Eu prétendant qu'il n'existe pas de tunique commune chez Perephora, Clavelina et Chondrostachys, Drasche veut proba- blement indiquer que ces individus ne sont réunis que par leur base. Toute autre interprétation serait évidemment erronée. La tunique extrêmement mince, lisse, transparente de Perophora, est toujours dépourvue de cellules vacuolaires. Les éléments figurés y sont rares, les uns ont un aspect amæboïde, les autres, qui parais- sent en dériver, sont sphériques et le plus souvent granuleux. Quant aux prétendues cellules fenestrées de M. Giard (loc. cit., pl. XXI, fig. 12), ce ne sont, comme je m'en suis assuré, que des spores d’al- gues dont on peut suivre aisément la segmentation. Les coupes trans- versales de la tunique montrent avec évidence qu’on a affaire à des corps étrangers. On ne les rencontre pas du reste chez tous les indi- vidus, ce qui écarte le rôle que M. Giard voudrait leur faire jouer dans la formation de la tunique. Celle-ci se réfléchit dans les deux siphons et descend dans leur intérieur jusqu’à leur base. Système musculaire. Cavité générale. — La paroi péribran- chiale de Perophora est toujours très mince, transparente et permet l'étude directe de la branchie. Ses lacunes sont rendues visibles par le sang que l’on y voit circuler et dont il est facile de suivre le cours. Les deux siphons possèdent un système propre de fibres muscu- 278 FERNAND LAHILLE,. laires, transverses et longitudinales. Les premières sont externes par rapport aux secondes, elles n'existent pas dans les lobes buccaux et ne descendent guère au-dessous de la couronne ten- taculaire. La musculature du corps est presque entièrement symétrique ; pourtant, comme chez les autres Ascididæ, elle se trouve plus déve- loppéc du côté droit que du côté gauche. Chez le Perophora comme chez tous les autres Tuniciers, il n'existe que des muscles rétracteurs. L'état d'extension complète est l'état normal. Lorsque la contraction musculaire cesse, les siphons et tout l'organisme redeviennent peu à peu turgescents. L'eau pénètre de nouveau dans les chambres branchiale et péribranchiale, et le sang revient dans les parties dont il avait été chassé lors de la con- traction du corps. Si on examine un Perophora vu du côté gauche, on aperçoit l'in- testin comme suspendu dans une cavité distincte des lacunes du reste du corps. Cette cavité semblerait correspondre à celle que Roule a indiqué chez les Ciona. M. Chandelon‘ de son côté a décrit une membrane formée de cel- lules polygonales, à noyaux ovalaires, qui fixe les conduits de la glande stomacale à l'intestin. « Les ramifications de la glande, dit-il, p. 922, sont maintenues en place par une membrane très délicate qui les fixe très lâächement à l'intestin; on en aperçoit le contour sous forme d’une ligne très fine. Le tout est situé dans un long sinus sanguin. » Pour cet auteur, il existe donc, chez Perophorua, une cavité aistinete des lacunes sanguines et renfermant l'intestin, ainsi que la glande stomacale. Ce ne sont là que de simples apparences, et les coupes longitudi- nales permettent d’en donner l'interprétation. La paroi externe de la cavité péribranchiale constitue la membrane dont parle M. Chan- delon ; elle se moule sur l'intestin qu’elle enveloppe plus ou moins, mais jamais entièrement. Donc, dans tous les cas, l'intestin n'est 1 Recherches sur une annexe du tube digestif des Tuniciers. 1870, Bull. de l’Ac. roy. de Belg., série II, t, XXXIX. RECHERCHES SUR LES TUNICIERS. 279 jamais situé dans une cavité spéciale, distincte du reste des lacunes du tissu conjonctif. Il se trouve au milieu de ces lacunes mêmes, et ne fait que proéminer plus ou moins dans la cavité péribranchiale. La figure 151, qui représente une coupe verticale de la portion inférieure du corps chez un genre extrêmement voisin, pourrait s’appli- quer aussi, quant à la disposition des viscères, au genre Perophora et mon- tre très clairement les rapports du tube digestif, de cavité péribranchiale, et de la cavité générale du corps qui n’est plus ici représentée que par les sinus sanguins Sm. Branchie. — La forme de la bran- chie qui détermine ici celle du corps, est presque carrée. Elle présente constamment quatre rangées de 20-24 Fig. 151. — Perophoropsis Herdmani, Lah. Coupe verticale de la portion inférieure du De ] réculier corps. La tunique n’a pas été représentée. lémaspovalaires et régulier s. Les Ei, Ri, Estomac et rectum; Du, tubes ré- ? Ke , Sinus sanguins ; €, péricarde; trémas alternent souvent d’une ran- Hire De Qt RE A chiale ; Pr, languette branchiale ; Sir, sinus gee à l’autre. Les côtes transverses anastomotiques ; Spr, sillon postérieur ; Der, paroi du corps. — Gr.1£22, sont à peine développées et chacune présente huit papilles branchiales, arrondies, à bord cilié. Les papilles de Lister, filiformes, se trouvent placées presque sur le côté gauche, très près de la ligne dorsale. Il n'existe pas de sinus péribranchiaux, et les muscles branchiaux dans les sinus transverses sont nuls ou très peu développés. Le sillon ventral est droit, un peu recourbé vers le haut, et sa constitution histologique n'offre rien de particulier. Il existe un sillon postérieur qui réunit le sillon ventral à l'œso- phage. Il est horizontal et formé par une gouttière dont les cellules ne sont ciliées et développées que sur la lèvre gauche. Tube digestif. — Le tube digestif de l’adulte (fig. 152), est entiè- rement latéral à la branchie, et présente une double courbure. La courbure inférieure est formée par l’œsophage, l'estomac, le post- estomac, l'intestin moyen et la dilatation rectale. Le rectum constitue, à lui seul, la courbure supérieure. 280 FERNAND LAHILLE, L'orifice œsophagien, quadrangulaire, se trouve situé presque à l'angle dorsal inférieur de la branchie. L'aître œsophagienne forme une sorte d’infundibulum régulièrement arrondi du côté dorsal et échaneré du côté ventral par le sillon postérieur, qui se prolonge dans l’œsophage en formant ainsi une gouttière. Celle-ci n'atteint pas l'estomac. L’estomac horizontal, lisse à l'intérieur comme à l'extérieur, est d'abord régulièrement pyri- forme chez les blastozoïdes. Il ne tarde pas à se différencier en deux portions : la première, qui avoisine l'œsophage, cons- tituera l'estomac proprement dit, avec ses longues cellules ; à = = 1 Fig. 152. — Perophora Listeri, Wieg. — Un indiviau La SeConde formera ie post- vu du côté gauche. Les muscles sont représentés moins nombreux qu'ils ne sont en réalité. Tf, tunique; estomac.Chez Perophora, cette Gn, ganglion nerveux; Sur, sillon ventral ; Se, stolon ; Bm, Cm, muscles buccaux et cloacaux; Œ, Pi, Mi, partie du tube digestif, à pa- Li, Ri, les différentes parties du tube digestif. — Gr. 1. rois relativement assez minces, communique toujours largement avec l'estomac, comme chez Dista- plia et Clavelina. Par suite de son accroissement, l'œsophage refoule la paroi inférieure de l'estomac et forme ainsi, à l’orifice du cardia, une sorte de valvule. Entre le post-estomac et le rectum, on rencontre une portion ovoide régulière, à parois très épaisses et ne laissant à ses deux extrémités qu’une lumière très étroite. C’est l'intestin moyen où les aliments sont malaxés avec les sucs gastriques et où les matières digérées prennent, chez le Pérophore, la forme de boulettes. Le rectum naît au même niveau que l’anus et présente à son ori- gine un renflement rectal muni de quatre petits cœcums peu prononcés chez cette espèce. Il se dirige en haut jusqu’au niveau de la deuxième côte transverse inférieure ; il redescend en passant un peu sur la gauche de l’estomac, et croise parfois même l’œsophage avant de | F 4 | RECHERCHES SUR LES TUNICIERS. 281 remonter vers le cloaque. L’anus présente deux oreillettes assez peu dévoloppées, et quelquefois il se trouve surplombé par une languette anale, produite par expansion de la paroi péribranchiale. La glande rénale de P. Listeri a été décrite exactement par Chan- delon. Les tubes et les varicosités sont constitués par des cellules cubiques ciliées, à petits noyaux. Les renflements terminaux sont, au contraire, formés par de grandes cellules aplaties polygonales, à gros noyaux ovalaires. La glande débouche chez l'adulte dans le post- estomac, juste à la limite de séparation de cet organe avec l'estomac. Chez Perophora elle est toujours d’unetransparence parfaite, et jen'ai jamais aperçu la moindre concrétion dans les ampoules terminales. Küpffer considère la glande stomacale des Ascidies comme formée de deux réseaux superficiels : un plus gros situé à l'extérieur, un plus serré, capillaire, se trouvant appliqué contre l’épithéliam intes- tinal. Le réseau superficiel de Küpffer n’est pas autre chose qu’un réseau de lacunes sanguines, n'ayant aucun rapport avec la glande elle-même. (V. fig. 151.) Système circulatoire. — Le cœur, situé à droite de la branchie, s’étend horizontalement le long de la dernière rangée de trémas, de- puis l’entrée de l’æœsophage dans l’estomac jusqu’au sillon ventral. Il se recourbe légèrement du côté dorsal, atteint la première côte transverse et s’infléchit vers le bas pour lancer le sang dans le sinus du sillon ventral et principalement dans un des tubes endoder- miques faisant communiquer directement le cœur avec le stolon. À gauche, il existe également un second tube endodermique pre- nant naissance à la hauteur de la dilatation rectale. Les deux tubes endodermiques droit et gauche s’accolent dans le stolon ; quelquefois ils se fusionnent, d’autres fois ils restent séparés. Pour expliquer l'équilibre de pression sanguine qui s'établit dans les divers animaux d’une colonie, M. Giard a trop schématisé la circulation du sang chez le Perophora. Le sang qui pénètre par l'orifice ventral du cœur d’un individu ne vient pas exclusivement du stolon, mais aussi de tout le corps de l’animal. Organes sexuels. — Les organes sexuels de Perophora sont 282 FERNAND LAHILLE. placés dans l’anse intestinale, et chez l’adulte l'ovaire est au centre des follicules testiculaires. Ceux-ci peuvent être au nombre de huit ; quant au follicule ovarien, il est toujours unique. L’organogénèse et l'anatomie des glandes sexuelles de Perophora ont été étudiées der- nièrement par MM. E. Van-Beneden et Julin (loc. cit., p. 328) et je n’ai rien à ajouter à leur description. À Roscoff, l’ovogénèse et la blastogénèse se produisent encore à la fin de septembre. Les embryons se développent à droite de la bran- chie. Ils occupent la cavité péribranchiale, au nombre d’une dizaine quelquefois, et masquent alors de ce côté tout l'organe respiratoire. Affinités morphologiques. — Le Perophora Listeri se rapproche des Distomidæ inférieurs à quatre rangées de trémas (Distaplia) par le nombre de ses rangées ; il s’en rapproche également par son es- tomac lisse à l'extérieur et à l'intérieur, ses deux orifices débouchant directement à l'extérieur, et enfin par son mode de bourgeonnement stolonial. Ses papilles branchiales arrondies rappellent celles du Glossophorum sabulosum qui, lui aussi, dérive des Distomideæ. D'après M. Giard (Rech. sur les Syn., p. #9) : « quand les bourgeons de Perophora sont très rapprochés, il se produit parfois des soudures entre les parties homologues des blastozoïdes voisins, et j'ai vu ainsi trois individus présenter un commencement de cloaque com- mun. » La tendance à la formation des cœnobies existe, par consé- quent, chez les Pérophores, aussi bien que chez les Distomes dont les colonies présentent souvent de nombreux individus isolés, à côté d’autres groupés autour d'un centre commun. L'espèce suivante, P. banyulensis, est tellement voisine de P. Lis- teri, que je suis forcé de ranger ce dernier dans les Tuniciers phlé- bobranches, quoique en réalité il ne possède pas les vaisseaux anas- tomotiques longitudinaux, caractéristiques de ce sous-ordre. Les Hypobythies et quelques Ascidielles n’en possèdent pas non plus; on doit les considérer pourtant comme appartenant à ce même groupe par tous leurs autres détails anatomiques, par les caractères des espèces voisines et enfin par l'impossibilité de les ranger dans un autre sous-ordre. RECHERCHES SUR LES TUNICIERS. 283 Herdman n’a pas rencontré de Perophora dans la collection des Tuniciers du Challenger. Il place ce genre à côté des Clavelina et de son genre Ecteinascidia, pour en former, comme nous l'avons vu, sa famille hétérogène des Clavelinidæ. Drasche a créé, pour P. Listeri, une famille spéciale ; mais si on examine l’espèce suivante et sur- tout le nouveau genre : Perophoropsis, la réunion des Perophoridæ aux Ascididæ, dont ils ne diffèrent que par le nombre des lobes buc- caux et la blastogénèse, s’imposera à tout le monde sans aucune contestation possible. Habitat. — Le Perophora Listeri se trouve répandu sur les côtes de l'Angleterre, où Lister le rencontra et le déerivit. Il est commun sur toutes les côtes de la Manche. Je l’ai trouvé à Granville fixé sur des fucus au pied du phare. — A Chausey, fixé sur des rochers.— A Roscoff, il abonde, certaines années, dans les prairies de zostères, sur de vieilles souches de ces plantes ou sur de petites algues de la famille des Floridées. D’autres années, on en découvre à peine quel- ques cormus. Il est surtout commun en juillet et août. Je n’en ai rencontré en aucune saison dans l’herbier situé au sud de Per-rech- hier et dans les endroits parcourus par de violents courants. M. Jourdain (in litteris) m'a signalé le Perophora Listeri à Saint- Vaast, et Herdman l'indique comme faisant partie de la faune asci- diologique de l'ile du Man (port Saint-Mary). Je l'ai rencontré dans l'Océan, à la Roclelle, sur une Cynthia papillosa, provenant d'un fond d’une trentaine de brasses environ. Kowalesvky l'a signalé à Naples, ainsi qu’à Trieste, quoique Drasche n’en fasse pas mention dans son travail sur les Ascidies composées de l’Adriatique. D'après Della Valle, cette espèce serait très abondante dans la Méditerranée au printemps. En revanche, en été, on n’en rencon- trerait pas un seul cormus. 2. — Perophora banyulensis, Lahille. Caractères spécifiques. — Papilles branchiales bifurquées. — Présence de quelques sinus anastomotiques longitudinaux. Cette espèce très intéressante que j'ai rencontrée pour la première 284 FERNAND LAHILLE. fois à Banyuls, où elle vit dans les fonds coralligènes, se distingue nettement du Perophora Listeri par l’organisation de sa branchie. Il existe 20-30 tentacules : dans ce dernier cas, 20 sont disposés sur le cercle tentaculaire; les autres, forment deux cycles alternant avec les premiers, sont situés au-dessous de la couronne et paraissent être nés isolément (fig.153). La branchie de P. banyulensis se compose tou- jours de quatre rangées de grands trémas ovalai- res; seulement, chez cette espèce, toutes les & Fig. 453. — Perophora - : = S nain : à Bangulensis, Lah, Cou- Papilles branchiales qui restaient simples et ronne tentaculaire vue de : : 3 SN l'intérieur dela branchie, arrondies chez P. Listeri, se sont divisées et ont LS 30 Gr. 2, un aspect trifurqué. En réalité, comme chez Dia- zona et Rhopalona, la trifureation n’est qu'apparente, la papille se trouvant divisée en deux à son extrémité (fig. 454). Ses deux bran- ches s’allongent de plus en plus en se dirigeant suivant la longueur des trémas, et finissent par. se souder avec leurs congénères de la côte branchiale voisine pour former les sinus anastomotiques longitudinaux. Chez les blastozoïdes, les trémas médians sont toujours les plus âgés et les plus déve- loppés, aussi, voit-on les premiers vais- seaux anastomotiques se former toujours sur les parties médianes de la branchie. Chez P. banyulensis adulte, on compte Fig. 154. — Perophora banyulen- ner 1 sis, Lah. — Portion dela branchie d'ordinaire 2-3, quelquefois quatre de ces montrant : Pr, languettes bran- chiales ; Shr, sinus transverse de la branchie ; Ppr, branches des lan- gueltes et sinus anastomotiques. sinus. Toutes les autres languettes bran- chiales ont simplement leurs deux branches plus ou moins allongées; mais non encore soudées entre elles. L'anatomie des autres organes est semblable à celle de P. Listeri. La reproduction sexuée a lieu à Banyuls en septembre, octobre et même en novembre. La taille de Perophora banyulensis est un peu inférieure à celle de P. Listeri. Les individus de Banyuls sont aussi un peu plus opaques etcomme teintés de jaune-verdâtre. Cet aspect dépend de l'abondance Xe 2, riques. Le dia- IT z ATELITETEN AR MS gramme, ci-joint oc CR’ ‘4, NW D que J'emprunte à p 4% dd” D LL Herdman,dispense es dy Ph Poe e® Q ve, de plus longs com- < 4 < ——— pu apps mentaires. ADM obsstssosss, CLPYYUOM En résumé, une IT RO CR î où !T blastogénèse très Fig. 1460. — Schéma montrant la formation des cœnobies ramifiées chez active produit des les Ascidies bourgeonnantes en général, et chez les Botryllidæ en par- ticulier. Oec, orifice cloacal commun ; Cr, cœnobie arrondie ; Ce, cœno- bie elliptique ; Cr’, Cr”’, cœænobies de plus en plus ramifiées ; Ce, cloaques COMMUNS ; IT”, portion plus résistante de la tunique commune ; IT, cœnobies inverses. cœnobies ellipti- ques, s’allongeant de plus en plus, et rencontrant d'ordinaire, un moment ou l’autre, une résistance qui produit la dichotomie. Lorsque cette résistance ne se rencontre pas, et cela se passe pour Botrylloïdes rubrum (M.-Edw.), quand il se développe sur les feuilles de zostères, dont il occupe toute la largeur, la cœnobie forme une ellipse, dont le grand axe égale jusqu’à dix et quinze fois le petit. Si on observe, au contraire, des cormus de B. rubrum développés sur des colonies de Salicornaria, on ne rencontre guère que des cœnobies ramifiées. Les individus étant très pressés les uns contre les autres, sont forcés d'occuper la moindre place possible, ils sont done verticaux, cylindriques, et ont leurs deux orifices buccal et cloacal voisins. Dans une excursion que je fis le 10 septembre 1885, aux environs de Roscoff, à Kaïnou (Guerhéon), je rencontrai, sur de vieux pieds 310 FERNAND LAHILLE. de laminaires, à moitié pourris, de superbes cormus d’un Botrylle rose saumon; quelques colonies étaient légèrement jaunâtres. Les cœnobies formées de 8-10 animaux étaient circulaires et toutes fort ré- gulières. Je crus d’abord avoir trouvé une espèce nouvelle, aussi, à mon retour au laboratoire, j'en fis une dissection des plus attentives, etje pus me convaincre de l'identité de ce Botrylle et du Botrylloïdes rubrum ! Cette division des Botrylloïdes est done, en définitive, toute arbi- traire, et ce n’est qu'à titre provisoire qu’on peut la conserver, en attendant qu'une étude très approfondie des Botryllidæ et de leurs variations permette de rattacher les Botrylloïides actuels aux Botrylles dont ils dérivent, ou de découvrir pour certains types un caractère anatomique ou blastogénétique sérieux. | Reste enfin à examiner la valeur du dernier genre : Sarcobotryl- loïdes, créé par Drasche, Ce genre est basé sur l'épaisseur assez considérable de la tunique commune, et il est aux Botrylloïdes, ce que les Polycycles sont aux Botrylles. Les Sarcobotrylloïides sont donc simplement des Botrylloïdes épais. La critique que Je viens de faire des genres Botrylloides et Polycyelus me dispense donc d’insister davantage, car on peut l'appliquer à Sarcobotrylloides. Comme conclusion de cette étude préliminaire sur les principales divisions des Botryllidæ, et en n’oubliant, toutefois, aucune des réserves expresses que je viens de formuler on pourra déterminer ces animaux de la manière suivante : A : Cœnobies pour la plupart circulaires ou elliptiques. — Epais- seur du cormns : Ne dépassant jamais 5%, Genre : Botryllus Sens.str. (Gœrtn.). Dépassant toujours 5"... sous-GENre : Polycyclus (Lam.). B : Cœnobies pour la plupart ramifiées. — Epaisseur du cormus : Ne dépassant jamais 5", sous-cexre : Botrylloïdes (M. Edw.). Dépassant toujours 5"M.. sous-Gexre : Sarcobotrylloïdes (Dr.). M. Giard a signalé l'existence, à Roscoff, de trente-huit Botrylles ou Botrylloïdes, qu'il décrit! De mon côté, je pourrais aisément RECHERCHES SUR LES TUNICIERS. 311 augmenter cette liste, la doubler même, en énumérant et étiquetant les variétés que j'ai recueillies, soit à Roscoff ou à Granville, soit à Arcachon ou à Banyuls. Mais je n’en ferai rien. À quoi bon en- combrerais-je la bibliographie de descriptions nouvelles, alors que je ne pourrais m’appuyer que sur des caractères de dimensions re- latives ou de pigmentation ! Il faut, avant tout, reprendre très atten- tivement une étude comparative et très détaillée de tous les Botryl-- lidæ ; il faut, surtout, chaque fois que cela sera possible, soumettre ces animaux à des hybridations artificielles, ainsi qu’à des observa- tions prolongées, en modifiant les milieux. Aucun caractère, dans cette famille n’est plus variable que la couleur, et je dois, à ce sujet, entrer dans quelques détails. Dans les lacunes sanguines du corps des Tunieiers circulent, avec les éléments amæboïdes du sang, des cellules chargées de pigment, et chaque individu possède, en général, des granules pigmentaires de trois couleurs différentes, qui sont : le bleu foncé, le rouge brun, et le jaune s’éclaircissant jusqu’au blanc. La coloration verte de certains cormus n’est presque jamais produite par un pigment unique. Dans la répartition des différents pigments dans je corps des indi- vidus, on observe les faits suivants : le pigment bleu se trouve prin- cipalement dans les sinus transverses et longitudinaux de la branchie ; et il est bien rare que les sinus intertrématiques soient pigmentés. Le pigment brun est localisé : 1° à l’extrémité des côtes longitudina- les, et forme ainsi, souvent, un cercle de six points autour de l'orifice buccal ; 2 de chaque côté du sinus dorsal et du sinus ventral où il produit des amas qui correspondent d’abord aux rangées de fentes respiratoires et qui peuvent finir par se toucher. Dans ce cas, les rangées d’amas dorsaux constituent les bandes radiales : 3° à l’ex- trémité de la languette cloacale, sur les bords de l’orifice buccal et au voisinage du ganglion nerveux. En ces points, la couleur rouge- brun passe souvent au rouge carmin ; 4° quelquefois le pigment brun oule pigment jaune remplace, dans les sinus branchiaux, le pigment bleu. Dans ce cas, les bandes radiales sont formées par du pigment jaune-clair, allant jusqu’au blanc. Enfin, le pigment qui 312 FERNAND LAHILLE. prédomine dans les renflements ectodermiques est, d'ordinaire, celui qui constitue les bandes radiales. Ces remarques sur la distribution des divers pigments doivent être rapprochées des faits suivants : 1° sous l’action de la lumière, le pigment bleu devient jaunâtre. Le Botryllus smaragdus (M.-Edw.), var. Helleborus (Giard), et d’un vert très foncé, lorsqu'on le rencon- tre à Roscoff, sous les pierres de l’embarcadère avancé de l’île de Batz. Si on peut rapporter le cormus au laboratoire sans le détacher de son support pour ne pas l’abîmer, et si on le laisse exposé au soleil, quoique en le maintenant dans un courant d’eau très fraîche, on voit les bandes radiales jaunes devenir de plus en plus nettes, et au bout d’une journée seulement, le cormus tout entier est devenu très clair. Si l’action de la lumière se prolonge, le pigment peut disparaître presque entièrement. M. Giard signale (loc. cit., fig. 4, pl. 27) une observation comparable, faite sur Botryllus violaceus ; 2 Herdman (on a new organof respiration in the Tunicata, Liverpool, 1884), con- sidère les prolongements et les renflements ectodermiques des Tuni- ciers comme étant de véritables organes respiratoires, et, pour ma part, je ne vois aucune impossibilité à ce qu'ils remplissent ce rôle qui serait pour eux, dans tous Îles cas, accessoire ; leur fonction principale étant la production des cellules tunicières. Quoiqu'il en soit, en observant d’une manière continue, sur un jeune cormus de de B. smaragdus, le contenu de quelques-uns de ces renflements ectodermiques, j'ai pu assister à l’arrivée de cellules pigmentaires bleues qui s’y sont transformées un peu plus tard en cellules pigmen- taires jaunes. Faut-il y voir l'influence de l'oxydation seule ou de la lumière seule ou de ces deux facteurs réunis? (est ce que je ne puis dire. Toutefois, ces observations permettent de concevoir le rôle impor- tant que doit jouer, dans les innombrables modifications de Botryl- lidæ, ces deux puissants agents : lumière et oxydation. Les cellules pigmentaires ne contractant jamais d'adhérence entre elles ou avec les autres cellules de l'organisme, leur localisation peut Vus + TS RECHERCHES SUR LES TUNICIERS. 313 être facilement modifiée. On conçoit fort bien qu'une contraction plus puissante que les autres des muscles péribranchiaux, par exem- ple, puissent faire rentrer dans la circulation des cellules pigmentées stationnaires. Par suite, et je l'ai souvent remarqué chez quelques Polycycles de la Méditerranée, l'aspect des cormus, ER que l'on pourrait appeler polychromes, par opposition œ aux cormus monochromes, plus rares, qui ne pré- sentent qu’une seule espèce de cellules pigmentées, peut varier dans un temps très court. Dans ce cas, toutefois, les variations sont peu considérables et portent principalement sur les bandes radiales et sur les terminaisons &es prolongements ectodermi-- ques. On ne peut donc, dans les classifications, attri- buer à la couleur de ces derniers organes, l’impor- tance que leur assignait M. Giard. Après leur mort, les Botryllidæ prennent tous une même couleur uniforme, qui est d’un rouge vineux ou rose sale. En même temps, la tunique Fig. 461. — Styela ; s , glomerata, Alder.— commune se boursoufle en certains points, etil se Larve à l'éclosion. On, nageoire caudale ; Om, cellules muscu- culaires caudales; 0e, : : 7. : cellules axiales ; Tt Je terminerai l'exposition de ces quelques faits tunique Da C Te Ë Pc, prolongements concernant les Botryllidæ en général, en disant un ectodermiques ; LB, mamelon ; Fe, orga- mot de leurs formes larvaires. Celles-ci ressem— nesfixateurs. Gr. 4. forme des œædèmes plus ou moins volumineux. blent, à s’y méprendre, aux larves des Cynthiadæ. Les unes et les autres sont dépourvues des trois ventouses, que Ganin dési- gnait sous le nom d'organes médusiformes, et que l’on rencontre constamment chez les Ascidies inférieures. Ces organes fixateurs sont remplacés ici par trois petites éminences coniques, véritables papilles adhésives (fig. 161, Fe). Ganin, méconnaissant et leur structure et leur rôle, les nomme des soies tactiles. A un faible grossissement, ces papilles ont, en effet, un aspect fibrillaire. Déjà, en 1846, Külliker les avait remarquées etles considérait comme formant l'épanouissement de nerfs (?) provenant du mamelon de la larve, c'est-à-dire de la portion de la larve comprise dans l’intérieur du 314 FERNAND LAHILLE. cercle des prolongements ectodermiques. Ce cercle continu, particu- larité qui frappe au premier abord l'observateur, est encore un caractère qui relie étroitement les Botryllidæ (fig. 163) et les Cyn- thiadæ (fig. 164). Il se retrouve, toute- cas, la présence des ventouses et l’exis- fois, chez quelques tence de la blastogé- Didemniens : Diplo- nèse larvaire per- somoîides Lacazii (fig. 162) et Jack- soni.(Voir Herdman, mettent à simple vue d'éviter toute erreur de détermination. loc. cit., pl. 38, fig. Le nombre des ren- 22), mais dans ce flements ectodermi- ques qui forment ce qu’on pourrait appeler la couronne, est cons- tamment de huit chez B. smaragdus, B. violaceus et Polycyclus Fig. 163. Fig. 164 Fig. 162. — Diplosomoïdes Lacazii, Giard. — Larve à l’éclosion. — Gr. 35, — Pe, prolongements ectodermiques ; Œi, Ei, œsophage et estomac de l'Oozoïde ; Za,, Za,, blastozoïdes. Fig. 463. — Polycyclus Renieri, Lam. — Larve, peu de temps après l'éclosion. @r, queue en train de se résorber; Or, vésicule des sens ; Tt, tunique; Pe, les huit prolongements ectodermiques à extrémités dilatées ; El, mamelon. — Gr. °°. Fig. 16%. — Styela glomerata, Ald. — Larve, deux jours après la fixation. (r, queue résorhée. On aperçoit trois cellules musleuaires en voie de dégénérescence et renfermant encore chacune deux amas pigmentaires. Pe, prolongements ectodermiques disposés en couronne autour du mamelon cen- tral. — Gr. 45 Le Renieri. Je n'ai pas observé d’autres larves de Botryllidæ, aussi j'ignore si ce nombre huit se retrouve chez toutes les formes ; mais j'incline à le penser. Les larves de Botryllidæ, comme les larves de Cynthiade, ont un amas de vitellus, disposé au centre de la couronne, qui se résorbe plus ou moins rapidement, et dont la couleur peut différer RECHERCHES SUR LES TUNICIERS. 315 de la partie postérieure larvaire d’où dérive le corps de l'adulte. Cet amas, auquel on peut conserver le nom de mamelon donné par Kôül- liker, est rouge-saturne chez Styela glomerata, tandis que l'autre partie de la larve de cet animal est d’un beau jaune. Le mamelon est quelquefois aussi volumineux que le corps de la larve proprement dit. Il se pédicularise tout comme les renflements cetodermiques. À ce stade, et surtout un peu avant, la larve du Pol. Renieri, présente un aspect des plus singuliers, qui rappelle celui de certaines colonies d’HyGrozoaires. On comprend facilement alors, pourquoi quel ques auteurs, même après Sayigny, ont cru que les cænobies de Botrylles naissaient toutes formées de l'œuf. Ce n’est que depuis les ob- servations de Della Valle qu’on a cessé d’attri- buer aux renflements ectodermiques la valeur et le rôle de véritables bourgeons. L'étude comparée de la queue chez les Fig: 165. Fig. 166. Coupes transversales de la queue de Botryllus smaragdus (fig. É 165) et de Steyla glomerata encore de nouveaux rapprochements. La na- (fig. 166). Ne, nageoire; Et, : . ectoderme ; Tn, lube neural; geoire caudale se trouve dans Le plan vertical Qm, cellules musculaires ; Ca, cellule axiale ; V, vacuole pro- du corps de la larve. Les cellules axiales sont duite par résorplion de la cel- lule axiale. — Gr. 152, larves de Cynthiadæ et de Botryllidæ montre au nombre d’une trentaine, et elles sont recou- vertes de chaque côté par trois (quelquefois par quatre) rangées de cellules musculaires. Ces cellules sont cylindriques, allongées, la substance contractile striée, se trouve à la périphérie, et quelquefois, comme chez Styela glomerata, chaque cellule musculaire présente dans son intérieur deux petits amas fusiformes de pigment rouge. A chaque cellule musculaire correspondent cinq à six plis de l’ec- toderme, et chacun d’eux sert de point de départ à un épaississe- ment de la nageoire. Il ne faut pas exagérer outre mesure l'importance de l’embryo- génie dans les classifications ; toutefois, les rapports des Botryllidæ et des Cynthiadæ, très étroits à l’état adulte, et se retrouvant encore chez les larves, il faut, de toute nécessité, rapprocher ces deux 316 FERNAND LAHILLE. groupes l’un de l’autre, eton ne peut concevoir qu’une souche com- mune qui serait très voisine des Didemnidæ, dont un certain nombre de types possède également des larves à renflement ectodermiques, disposés en couronne autour de la portion antérieure du corps. Le diagramme suivant (fig. 167), montre les rapports qu'affectent entre eux les principaux types de Styelidæ et de Botryllideæ. Glandula | Polycarpa | Styela | | Polystyela Goodsyria Alderia DE Ses Polycyclus Sarcobotrylloïdes Pandocia—|-—Styelopsis Botrylloïides ——Botryllus Chorizocormus ——Pelonaia Symplegma Bathyoncus D Distomidæ primitifs Fig. 167. — Diagramme des affinités morphologiques des principaux genres de la famille des Styelidæ et de la famille des Botryllidæ. D. Diplosomoides. Ayant l'intention de publier prochainement une étude détaillée sur la famille des Botryllidæ, je me contenterai de présenter, pour le RECHERCHES SUR LES TUNICIERS 317 moment, quelques observations sur le sous-genre Polycyclus. Les Polycycles sont peut-être les Tuniciers les plus communs de Banyuls et, sans exagération, c’est par centaines que je devrais compter les colonies que J'ai eues à ma disposition. Quoique l’épaisseur des colonies soit un carac- tère de valeur assez faible, il est certain qu’on peut l'utiliser avec quelque avantage dans la spécification des Botryllidæ. Mais il est néces- saire de préciser exactement ce qu'on doit en- tendre par : épaisseur d’un cormus. Supposons, en effet, un cas très fréquent chez les Poly- cycles : les larves se sont fixées sur des zostères ou des algues ; la colonie ne pou- vant s'étendre et s’étaler librement, con- tourne de fort bonne heure son support, l'enveloppe de toutes parts, et lorsqu'il vient à être détruit ou à disparaître, le cormus forme une masse volumineuse, ellipsoïdale et charnue, dans laquelle la portion dé- Fig. 169. x rie Fig. 168. — P. Vallii, Lah. Oozoïde. aux bords libres du cormus primitif, est Coupe longitudinale des centres Le ee nerveux. Cn, ganglion nerveux; 7, fort réduite. Dans un semblable cormus, Tube neural; Jn, pavillon vibratile ; Ppr, paroi péribranchiale; Ft, Ec- . . pl 300 la plupart des coupes perpendiculaires au tderme. — Gr: 757. . ; _ Fig. 169. — P. Valli, Lah. Blas- plus grand axe de la colonie sont circulaires tozoide. — Région nerveuse vue de l’intérieur de la branchie. — et leur circonférence présente, sur presque &: *- pourvue de cœnobies, et qui correspond toute sa longueur, des sections de cœnobies. Il s’ensuit logiquement que l’on doit prendre pour épaisseur le demi-diamètre ou le rayon du cormus. C’est ainsi qu'on pourra comparer les Botrylles et les Polycycles étendus en croûte avec les colonies développées autour d’un’support étroit. 318 FERNAND LAHILLE. 1 Sous-GExre : Polycyclus, Lamarck, 1815. Caractères : Cormus volumineux, charnus, ayant au moins 5um d'épaisseur, mais le plus souvent 30-40-50"%m, — Presque tou- jours les cormus forment des masses convexes très exceptionnelle- ment lobées. — La branchie présente généralement trois paires d’ondulations ou plis méridiens rudimentaires. — La taille des indi- vidus épanouis dépasse presque toujours SU Les caractères suivants se retrouvent aussi chez les Botrylles : Cœnobies presque toujours cireulaires ou elliptiques. — Animaux ovoides, étendus horizontalement dans les cormus.— Orifices buccal et cloacal éloignés l’un de l’autre. — Viscères semi-latéraux à la branchie. — Organes reproducteurs pairs disposés de chaque côté du corps. — #-8-16 filets tentaculaires. Drasche, dans la diagnose qu'il donne du genre Polycyclus, indi- que la présence de « deux grands tentacules latéraux en forme de dents »; mais ceux-ci existent aussi chez les Botrylles et, chez les uns et les autres, ils ne sont jamais seuls. Le nombre des tentacules étant variable, on ne peut, avec Herdman (loc.cit., p.62), diviser les Polycycles suivant que ces animaux ont deux, huit ou seize filets. Drasche n'indique, chez P. cyaneus, que les deux tentacules latéraux qui s’aperçoivent le plus facilement de l'extérieur; mais dans la splendide chromolithographie qu'il donne de cet animal (pl. Je fig. I), on distingue pourtant les six autres. La variabilité de pigmentation des Botryllidæ fait qu’on ne peut attribuer qu'une importance bien relative à la couleur des colonies décrites par les auteurs, surtout lorsque ceux-ci n’ont pu disposer que d’une seule colonie ! Ce qui ne les a pas empêché, du reste, de créer, sur Ces échantillons uniques, des espèces distinctes. Je ne veux citer, comme rentrant dans ce cas, que P. cyaneus, Dr., P. vio- laceus, Dr., P. Jeffreysi, Herd., et P. Lamarki, Herd. Herdman confond sous le même nom (internal-longitudinal bar), les côtes longitudinales des Botryllidæ et les sinus anastomotiques D» RECHERCHES SUR LES TUNICIERS. 319 longitudinaux des Ascidies phlébobranches, et pourtant ces deux formations sont bien est formée par une simple extroflexion longitudinale de l’é- pithélium branchial interne ; la seconde est due à la soudure des extrémités bifur- différentes l’une de l’autre. La première ,, creuses. Le nombre de trémas compris entre les côtes lon- gitudinales, le sillon ventral et la côte dorsale peut fournir d'utiles renseigne- D quées de papilles ments pour carac- iériser les espèces. Ce nombre est presque toujours le même de part et d’autre de la côte médiane latérale, ainsi que dans les bandes Fig. 170; — Coupes tranversales du sillon ventral : Pyrosoma elegans, Le S. Gr, 290,— Fig. 471. Diazona violacea, Sav.Gr.2%9,— Fig. 172, Polycyclus Vallii, Lah. Gr. 220,— M, zone médiane ; Gir, Ger,G3r, les trois zones glandulaires ; C;r, Gar, Cr, les trois zones ciliées. ventrales et dorsales. On peut, dans tous les cas, représenter la disposition des trémas par une formule du genre suivant : V. 10— 6—6—10. D. Les lettres V et D indiquant les lignes ventrale et dorsale, et chaque tiret représentant une côte longitudinale. Les Polycycles décrits jusqu’à nos jours sont fort peu nom- breux, et pourtant, ils ont été si mal étudiés, qu’on ne peut les caractériser qu'avec la plus grande difficulté. Je crois devoir les rapporter tous aux quatre espèces suivantes : 1 8 tentacules, 8-44 indiv. par cœnobie. . , . P. Lamarcki, Herd, absente. 46 filets tentaculaires, 6-8 indiv. p. cœnobie. P. Jeffreysi, Herd, . P. Renieri, Lam. Aire vibratile présente. is 3mm ou moins. Cormus aplatis, , . . Individus.{ de 4m et plus. Cormus ellipsvidaux. . , . . P. Vallii, Lab, 320 FERNAND LAHILLE. 4° P. Lamarcki, Herdman. Cette espèce provient des draguages du Porcupine (Féroë, 363 brasses). — Cormus brun-jaunâtre. — 15" d'épaisseur. — Lon- gueur individuelle 4m 5, — Formule branchiale : D. 6—3—3—6 V. 20 P. Jeffreysi, Herdman. Cette espèce provient également des draguages du Porcupine (Gibraltar, 35 brasses). — Cormus jaune-pâle. — 8"® d'épaisseur seulement. — Longueur individuelle 2m, — Les cœnobies sont remarquables par le petit nombre d'individus (6-8) qui les compo- sent. — Formule branchiale : D. 8—5—6—9. V. 3° P. Renieri, Lamarck. La diagnose de P. Renieri, Lam., est fort précise : P. elongatus, convexus, utrinque atltenuatus. — Luteolus. — Orbulis azureis sparsis. Savigny ayant rencontré des colonies relativement minces et n’admettant pas le genre Polycyclus, désigne sous le nom de B. Polycyclus une variété du P. Renieri. Je suis convaincu que P. cyaneus Dr., n’est pas autre chose que P. Renieri Lam. Le cormus s'étend en une croûte oblongue (con- vexus utrinque attenuatus), la couleur générale est d’un brun-clair (luteolus), les cæœnobies sont d’un beau bleu d’azur homogène (orbu- lis azureis sparsis). En outre, comme si Drasche avait voulu lui- même lever toutes les hésitations, il ajoute : L’anatomie de P. cyaneus concorde parfaitement avec celle de P. Renieri. « Ist vollkommen übereinst immend mit, P. Renieri. » (Loc. cit., p. 44.) Parmi les localités où vit P. Renieri ou B. polycyclus, Savigny cite l’Adriatique; ce fait vient donc encore à l’appui de l'assimilation que je propose. D'après Savigny, la grandeur individuelle de P. Renieri serait de Amm68 à 2nm5. D’après Drasche, qui a pu observer des cœnobies vivantes, elle alteindrait 3"M, Sous ce rapport, la concordance est PTT OT | RECHERCHES SUR LES TUNICIERS. 321 donc encore très suffisante. Je crois qu’il faut revenir de toute nécessité à la diagnose de Lamarck, et considérer comme P. Renieri type, les cormus brun-clair, étendus en croûtes, à cœnobies d’un bleu d'azur, les individus ne dépassant pas 3"" de long et possédant huit filets tentaculaires. P. elongatus, D. Ch., est très probablement une variété de P. Re- mieri type, et P. Savignyi, trouvé par Herdman dans les eaux de l'île de Man et identifié par cet auteur au Botryllus polycyclus de Savigny, en est certainement une, ainsi que le P. violaceus, Dr. On peut différencier le type et les variétés de la façon suivante : 1 d’un bleu d'azur. P. Renieri, type, Lam. 8. Cœnobies Filets tentaculaires : violeltes ou indigo. P. violaceus, Dr. AO ME LS ele P. Savignyi, Herd. Je n'ai rencontré P. Renieri, Lam. (P. cyaneus, Dr.), ni à Banyuls, ni à Roscoff, ni à Arcachon. En revanche, j'ai pu étudier quelques cormus de P. violaceus, provenant de Marseille et dûs à l’obligeance de mon ami M. L. Roule. Polycyclus violaceus, Drasche. Les colonies de ce superbe Polycycle se trouvent toutes fixées sur de vieilles tiges de zostères qu’elles enveloppent entièrement. Elles forment des tubercules presque sphériques de 150 centimètres cubes environ. L’épaisseur moyenne du cormus atteint 15 millim. Les cœnobies sont : soit circulaires et se composent alors de 6-10 individus, soit elliptiques et dans ce cas on compte 18-20 individus associés. Les animaux, régulièrement ovoïdes, présentent une lon- gueur de 3" sur une largeur de 4m" 5. La couleur des individus passe du bleu violacé au bleu indigo et tranche vivement sur le fond du cormus qui est semi-transparent et renferme des renflements ectodermiques dans lesquels dominent des cellules pigmentaires jaunes. Les orifices buccal et cloacal sont bordés de rouge. Les filets tentaculaires sont au nombre de huit, les deux latéraux sont fort volumineux et sont insérés au-dessous 21 322 FERNAND LAHILLE. de la couronne tentaculaire proprement dite. La figure 173 indique Ja constitution histologique des amas de pigment situés à la base des gros tentacules et que je nommerai : organes coronaux, pour ne préjuger en rien de leur nature et de leur rôle. _ Il existe deux bandes radiales blanches, qui souvent sont à peine séparées l’une de l’autre. Chez les individus dont la taille est petite ou qui sont contractés, ces bandes se réduisent à une simple tache trapezoiï- daloe blanche. J'ai rencontré quelquefois, dans une même cœænobie, des individus dépourvus de bandes radiales à côté de voisins qui en présentaient; etil faut donc conélure, de ce fait, que les ani- Fig. 173.— P, Violaceus, Dr. — Histo- 2 A VIE logie des organes coronaux.— Gr.sse, Maux groupés dans une même associa Au centre les cellules sont claires, pressées les unes contre les autres et reuferment un noyau très réfringent. A 3... DE la périphérie les cellules sont granu- ditions de milieu en apparence sembla- leuses et épaisses. tion peuvent présenter (malgré des con- bles) des modifications individuelles. Les bandes radiales de ce Polyeycle s’atténuent vers le centre des cœnobies qui est légèrement brunâtre. La formule branchiale la plus commune est D. 9—7—7—9 V. (voir fig. 159, p. 308). Les follicules testiculaires sont au nombre de huit à dix. Le P. violaceus se rencontre, paraît-il, à Marseille en assez grande abondance, dans les prairies de zostères, par 25-30 mètres de profondeur. Je n’ai pas encore découvert ce Polycycle à Banyuls. P. Vallü, Lahille. Syn : P. Renteri, Della Valle; P. Renieri, Drasche. Je considère comme devant former une espèce distincte tous les Polyeyeles dont la taille individuelle atteint ou dépasse 4m de lon- gueur, dont les cormus ne s'étendent jamais sous forme de couver- tures charnues, et enfin dont les cœnobies ne sont jamais d’un bleu pur. Le nombre de filets tentaculaires est de huit, et les filets laté- raux sont fort développés. On compte ordinairement une vingtaine RECHERCHES SUR LES TUNICIERS. 323 de rangées de trémas, tandis que les rangées sont généralement au nombre de huit à douze dans l’espèce précédente. La formule bran- chiale moyenne de P. Vallii, est D. 8—6—6—8. V. Parfois : D. 12—8—8—12 V. Les cœnobies présentent le plus souvent une vingtaine d’indivi- dus, quelquefois trente, et il n’est pas rare d’ob- Fig. 174. — P. Valli, Lah. Terminaisons des tu r : bes rénaux sur le rectum, Les tentacules latéraux sont toujours fortement Gr. 20, server des cœnobies méandriques ou composées. pigmentés, et la couleur de leurs granulations pigmentaires est ordinairement celle des cel- lules que renferment les dilatations des prolon- gements ectodermiques. Les diverses espèces de Botrylles admises jusqu’à présent, sont fondées sur la couleur. C’est ainsi que les espèces indigo, violettes ou bleues forment : B. violaceus, Edw., et B. 4 Fig 1175. — P. Vallii, Lah. pruinosus, G.., les espèces vertes : B. smarag- Goupe transversale d'une can- s É S nelure de l'estomac. Cc, cel- dus, Edw., les espèces jaunes : B. Schlosseri lules médianes. — Gr. 24, Sav., et B. calendula, Giard ; les espèces fauves et brun clair, B. Marionis G. et B. rubigo, G., les espèces d’un brun sombre : B. aurolineatus, Edw., et B. morio, G. Je pourrais enfin décrire, sous F le nom de B. aurantiacus, le Bo- A . £ : Fig. 116. — P. Vallii, Lah. — Tube digestif vu } [ex D trylle orangé, presque rouge, que TT M Os EC: r. r diverticule hépatique; Pi, post-estomac; Mi ) h RE ha { ë : À É 5 , J a rencontré à Gurhéon (v. P: 309). intestin moyen; Ri, rectum ; Ai, oreilleltes Toutes les couleurs du spectre se RC Poe trouvent ainsi représentées et, fait extrêmement intéressant à noter, les P. Vallii présentent aussi toutes les mêmes modifications de coloration. De telle sorte qu’à chaque type de Botrylles correspond exactement un Polycycele. Je crois devoir considérer comme représentant P. Vallii type les cormus appartenant à la série cyanique, et que Della Valle à 324 FERNAND LAHILLE. a parfaitement décrits sous le nom de P. Renieri (loc. cit., p. 22). Je donnerai, au contraire, le nom de P. xanthus aux cormus de couleur jaune, légèrement verdâtre ou jaune soufre ou jaune de Naples. Partant du P. xanthus, on rencontre d’un côté des types de plus en plus orangés, qui conduisent à des cormus rouges, tandis que, d'un autre côté, les cormus deviennent d’un brun de plus en plus foncé, jusqu'à une teinte presque noire. On peut obtenir toutes les couleurs de la première série en ajoutant progressivement à de la gomme-gutte ou à du jaune de Naples du cadmium orange puis du vermillon ; la seconde série : en ajoutant à la gomme-gutte de la terre de sienne brûlée, puis de la sépia. Il est nécessaire, pour l'étude de la pigmentation des Botryllidæ, de ses causes et de ses modifications, de donner un nom aux diver- ses variétés de couleur les plus tranchées et les plus communes. Voici celles que je propose : MOI OP INAIED NE SAME TENUE EEE . P. ianthinus. Le DRE PR re Re PTE PIRE P. cœruleus. ranchie .. , PE 2 Rs Re PE EN ns Se HUUR S OPSMINE RE colorée en | JAUNE AU EE Me PE TRE CS P. xanthus. OFADRÉ, TOUSEN LEE rite LONEUIe PCAET, Sade re 4 4e 1: RTS: Quant aux cormus de couleur café au lait ou bruns, on pourra les désigner sous le nom de P. ochreus, réservant le nom de P. orphnus aux cormus presque noirs. À Banyuls, les variétés appartenant à la série xanthique, principa- lement P. ochreus, sont de beaucoup les plus communes. On ren- contre, toutefois, en assez grande abondance, D. Vallii type, dont les individus sont d’un vert grisätre, qui tire tantôt sur le violet, tan- tôt sur Le jaune. Les renflements ectodermiques, ainsi que les filets tentaculaires, renferment des cellules pigmentaires jaune-citron, qui fontressortir vivement, sur le fond bleuté, les deux tentacules latéraux. Le tube cloacal et la paroi du corps dans son voisinage, sont brunä- tres ou d’un rouge vineux. Presque toujours les deux orifices sont bordés d’un mince filet rouge carmin. RECHERCHES SUR LES TUNICIERS. 325 J'ai représenté, dans les figures 168-176, quelques particula- rités anatomiques de P. Vallii (Var. P. xanthus); et j'ai rapproché, afin d’en rendre les comparaisons aisées, les coupes du sillon ventral de Pyrosoma et de Diazona de celle de ce Polycycle. Ce serait aug- menter bien inutilement le nombre de pages de ce travail et faire en même temps une injure au lecteur que de décrire des figures si claires. CONCLUSIONS Pour terminer cette longue étude anatomique et taxonomique des Ascidies inférieures, je ne puis mieux faire que de dresser le tableau suivant (fig. 177) quirésume, en dehors de toute hypothèse, les prin- cipales affinités morphologiques qui relient entre eux les principaux groupes de Tuniciers. Si, de longtemps encore on ne peut rattacher scientifiquement les Tuniciers à des groupes voisins ; du moins, les enchaînements que présentent entre eux ces animaux sontindéniables. Sans doute, entre deux genres déterminés on pourra ordinairement concevoir divers modes de transition ; sans doute, quelques types pa- raîtront encore bien isolés, mais la conviction intime qui, néanmoins, se dégagera toujours d’une étude générale, approfondie, et sans parti- pris des Tuniciers inférieurs, sera précisément cette profonde unité du plan dominant les modifications insensibles qui conduisent des types les plus inférieurs et les plus simples aux types les plus supé- rieurs et les plus différenciés. Quelle est la cause de ces enchaî- nements ? Contentons-nous de les constater, car, répondre à cette question, serait vouloir se payer de mots; etil vaut mieux avouer son ignorance et dire avec Cicéron : nec me pudet fateri nescire quod nesciam. (Tusc. quæst., I, 25.) Il n'est guère possible de résumer tous les principaux points d'anatomie que j'ai fait connaître. Parmi les plus importants, je 326 FERNAND LAHILE. citerai la constitution des centres nerveux et de la branchie chez Pegea confæderata et Pyrosoma elegans. Cette même étude chez les Molguliadæ Cynthiadæ Ascidiadæ Cioniadæ ——_—— PLEBOBRANCHIATA STOLIDOBRANCHIATA Polycliniadæ ——— & TD B| Didemnidæ Doliolidæ Le er Pyrosomidæ = APLOUSOBRANCHIATA EUTREMATA Salpidæ | 0 = HEMITREMATA Ê > Appendiculariadæ s Kowalevskiadæ Fig. 177. — Diagramme général des principales affinités morpho- logiques des divers groupes de Tuniciers. O, Octacnemidæ. Didemnes, les Diplosomes et les Aplidiens. L'existence et la persis tance des orifices branchiaux latéraux chez quelques Didemnidæ,ete. RECHERCHES SUR LES TUNICIERS. 327 Les dates des diverses notes que j'ai fait paraître soit dans les comptes-rendus de l’Institut, soit dans le Bulletin d'histoire natu- relle de Toulouse, indiquent quelques étapes de mes recherches. Par une étude assidue des variations produites par les milieux extérieurs, j'ai tâché d'observer les limites de ces variations, afin de mieux préciser les différents groupes de Tuniciers. J'ai ajouté de nombreux renseignements biologiques à l’histoire des espèces qui vivent sur nos côtes et l'étude anatomique des Diplosomoïdes, Glossophorum, Distaplia, Per. banyulensis, Perophoropsis, Diazona, Polycyclus, ete., nous a permis de mieux comprendre la classification des Tuniciers et leurs enchaînements dont je viens de parler. Enfin, au point de vue physiologique, j'ai exposé la théorie méca- nique du renversement de la circulation, théorie à laquelle m’ont conduit des observations longtemps répétées et de multiples expériences. Toutefois, c’est la classification des Tuniciers inférieurs qui a été le but principal de toutes mes recherches. Elle est certainement encore fort imparfaite, et je ne me fais à ce sujet aucune illusion ; les classifications se transforment et se renouvellent avec les découvertes, Multa renascentur quæ jam cecidère, cadentque Quæ nunc sunt in honore. Hor. Ars poet., 70. Leur seul mérite est d’exprimer le mieux possible, et à l’heure actuelle, les liens qui semblent relier les êtres les uns aux autres, dans un même groupe et dans l’immense réseau des formes organisées. J'ai insisté particulièrement sur la nécessité absolue de réunir, dans toute classification naturelle, les Ascidies simples aux Ascidies composées. (Note à l’Institut, 28 juin 1886. — Et. syst. des Tuniciers, Ass. Franç., 1887.) C’est ainsi que j'ai rattaché les Pérophores et Perophoropsis aux Ascididæ ; les Diazones et les Ecteinaseidies aux Rhopalones et aux Ciones; les Polystyela aux Styelidæ, enfin les Botryllidæ aux Cynthiade. Du reste, dans l’avant-propos de la deuxième partie de l’histoire 328 FERNAND LAHILLE. des Ascidies simples des côtes de France!, M. de Lacaze-Duthiers avait déjà expressément reconnu la nécessité de cette réunion. « Il n’y aura pas un naturaliste honnête et consciencieux qui puisse n'attribuer la pensée de vouloir isoler morphologiquement et zoolo- giquement les Aseidies simples des Ascidies composées. Mais, bien longtemps encore, on décrira séparément celles des Ascidies qui restent toujours isolées et ne jouissent pas de la propriété blastogé- nétique ; de même qu’on continuera à appeler les Didemnum, les Amarouques, etc., par opposition aux premières, des Ascidies com- posées. Dans la préface de son splendide travail sur les Actinies du golfe de Naples, M. Andres expose des idées fortjustes sur l'importance et le rôle des classifications scientifiques, et indique des règles très sages qu'il est regrettable de ne point voir adopter par tous les naturalistes. Pour terminer je lui emprunterai une de ses premières réflexions. Negli ultimi tempi...... la moda (perocchè anche nelle scienze biologiche siavi la dea capricciosa) era tutta per i dettagli istiologici, per le figure cariolitiche, per i fogli blastodermiei e per gli alberi genealogici; ed al giorno d’oggi sebbene con minore cecità, la corrente va tuttora per la stessa china. In tali condizioni un grosso volume di contenuto quasi eselusivamente specigrafico (o sistematico, se più si vuole) susciterà nella maggioranza dei miei colleghi in scienza un sorriso di compassione, postillato forse da poco benevole commento. Il raccogliere e determinare specie senz’'altro scopo che di fare collezioni e stendere aridi cataloghi di nomi à impresa pressochè inutile ; lo ammetto. Ma chi le raccoglie e le determina con il fermo proposito di studiarne abitudini e struttura compie lavoro proficuo ; — e se per sua sventura trova il sentiero ostruito da materiali antichi e moderni, gittati là alla rinfusa senza cernita e senza ordine, farä opera doppiamente utile quando nello stesso tempo si accinga a separare il loglio dal grano e distribuire tutlo secondo un unico pensiero (loc. cit., Pref. p., VIII). 1Arch. de szool. eæp., t. VI, 1877. TABLE DES MATIÈRES INTRODUCTION Tableau général de la classifi- AHON adopte. LA. CLASSE DES HEMITREMATA. FAMILLE DES SALPIDÆ.. . . . Type : Pegea confæderata. . . CLASSE DES EUTREMATA. . 1er Ordre : APLOUSOBRAN- CHA PAT RM Est Le FAMILLE DES PYROSOMIDÆ . . Type : Pyrosoma elegans. . . FAMILLE DES DOLIOLIDÆ . . . CCM ET OUT UNE FAMILLE DES DIDEMNIDÆ. . Genre : Didemnoïdes . . . .. Espèce : D. inarmatum. . . .. Genre : Didemnum . . . ... Espèce : D: cereum.… - . - . . ND jallan "174 Le LD nivem. mu — D. graphicum. . . .. Genre : Leptoclinum. . . . Espèce : L. perspicuum. . . . . — L.resinaceum. . . .. — L. perforatum, . . . — L. gelatinosum . . .. — L. candidum. .. .. — L. fulgidum. . .... — L. maculatum. . . .. 92 Genre : Diplosoma. . . . ... Espèce : D. Listeri. — D. spongiforme.. . . Genre : Diplomosoïdes. . . . . Espèce : D. Lacazii . . Famizze DES DISTOMIDÆ . . Genre : Cystodites. . . . . . . Espèce : C. durus. . — CNcreltaceus "0e Genrer:-Distomanr hNon TA Espèce : D. cristallinum . . — D. plumbeum. . ... Genre COINS rm. Genre) 1Distaplia rss." 5000 Espèce : D. magnilarva. . . . . NN DE TOUS RONA AE Genre AGlavelina 1e Espèce : C. lepadiformis . = à MO NUNG ibn Es Re Genre : Oxycorynia. Ho Genre : Ghondrostachys. . . . FAMILLE DES POLYCLINIDÆ. . Genre : Glossophorum. . . .. Espèce : G. sabulosum.. . . . . — G. humile. . . Genre : Polyclinum.. . . . . . Espèce : P. aurantium. . . . . Genre : Aplidiopsis. . . .. .. Espèce : À. vitreus. . . . . .. FAMILLE DES APLIDIDÆ. . . . Genre : Aplidium. . . . . . .. Espèce : À. griseum . . . — À. cœruleum. . . . — A ZOSTETICOIR Re ee à — A. asperum. .« . . . . Genre : Amaroucium . . . .. Espèce : Am. Nordmani.. . . — AR. GIDICUNS ee -E Am. proliferum.. . . . — Am. densum. . . — Am. fuscum. . . . . . Sous-genre : Parascidium. . . Espèce : P. elegans. . . . . . . — P. areolatum . . — P. flavum. ... Genre : Circinalium.. . . . .. Espèce : C. concrescens. . . . . Sous-genre : Morchelliopsis. . Espèce : M. Pleyberianus. . . . Genre : Synoicum.. . . .« . . . Sous-genre : Morchellium. . Espèces. argus... 2e .. 2me Ordre PHLEBOBRAN- CHTATAT 7. hernie FAMILLE DES CIONIDÆ. « . . . Genre : Tylobranchion. . . . . Ecteinascidia. : . .. Diazona. 0.0 Espèce : C.Rouli.. 2 C. Savignyi. C. intestinalis. . . . . FAMILLE DES ASCIDIDÆ.: . . . Genre : Perephora "27 Espèce : P. Lister PER P. banyulensis es Genre .: Perophoropsis.. . . . Espèce: P. Herdmant 00 Genre SIUiteria — Ascidia et Ascidiella. — Phallusia. 22 FAMILLE DES CORELLIDÆ. . , . FAMILLE DES CORYNASCIDIDÆ.. Ordre : STOLIDOBRAN- CHIATA..: : se ce . FAMILLE DES BOTRYLLIDÆ.. . . gme Genre : Symplegma. . . . .. Botryllus.: ... "+ Sous-Genre : Polycyclus.. . . Espèces : P. Lamarcki. . . .. — P. deffreysi:.75700 — P. Rimertw ee 1 — P.Valls: 4 CONCEUSIONS. +. 5e CRE Pages | 251 262 269 270 270 271 273 274 275 276 285 286 288 289 290 99e 149 299 302 390 302 304 318 320 320 320 322 325 EEE Toulouse. — Imprimerie LAGARDE et SEBILLE, rue Saint-Rome, #4. ; {| F f ON TNE ue ï : \ j aa À , | Du, “18 | fit 2e POUR mn {, qe | LR A KL 1] \ Î RACE A l ; j % b AR Le, iRee EI | Wii k CR AS ‘| nf lle DAD NU 1 NE ge NTI Date Due Hi LT ec HAN C :#4 BHTCHIMEENE pere cris F 1:14 Hipers 1252 His F3