^■^n COLLECTION ACADEMIQUE. TOME NEUVIEME, Partie Fran^oife. ^■9 ~ ■ - '■ — ~~^ COLLECTION ACADEMIQUE, COMPOSiE Des Memoires, Aftes ou Journaux des plus Celebres Academies & SociETEs LiTTERAiRES de I'Europe. CONCERN ANT L'HISTOIRE NATURELLE, la BOTANIQUE, lA PHYSIQUE, LA CHYMIE, la CHIRURGIE, I'ANATOMIE, LA MECHANIQUE, &c. Ita res acccdunt lumina rebus'. TOME NEUVIEME, Partie Francoife. Contenant la fuite de THifloire & des Memoires de fjcademie Royale des Sciences de Paris. A T A R I S , Chez G. J. C u C H E T , Libraire , .Rue & Hotel Serpente. A LIEGE, Chez C. Plomteux, Imprimeur de MefTeigneurs les Etats. IM. D C C. L X X X V. Arte ^fpTob,H:oa 6< Privilege 4u Roi TABLE D E S M E M 0 I R E S CONTENUS DANS CE VOLUME. PHYSIQUE. V l3ur les tonrlillons Cartefiens Page i OBfervations fur lYtendue & la hauteur de I'inondation du mois de Dccembre 1740, Par M. Buache S Viverfis Obfervauons de Phyfique Sur les coukurs cccideatelles _ Sur la formation de la Glace dans les grandes Rivieres Diverfs ohfcrvations de Phyfique \ ' T Accord de dtffcrentes loix de la nature , qui avoient jufqu'ici paru incompatlbles , par M. de Maiipertuis Sur I'Imbibition des Bois dans I'eau , & leur dcfechement dans I' air libre Ohfervations de Phyfique gene'rale Sur line maniere fnguliere d'aimanter I'Acier. ibid, Sur les cauj'es de ilLlecIricite. eg Sur la dilatation des Mc'taux. go Ohfeiyations de Phyfique gene'rale g. 47 54 HISTOIRE NATURELLE. o. BSErvatioks d'Hifoire N^nurelle. , ^p Sur quelques Produclions Marines qui ant e't/ mifes au nombre des plantes , & qui font I'ouvrcge & I' habitation d'une infinite d'animaux _ o Mimoire pour fervir a I'Hifoire des Infecles ^ Tome VI ".'"** Si Obfervations d'Hifoire Naturelle '...* ^7 y] TABLE Sur Vouk dcs poijfons , &' Jiir la tmnjmijjion des fans dans I'eau. 90 ' Ohjervatlons d'HiJIoire h\:turelk •.■■•. 93 EJj'ai I'ur la formation des Dendrites des environs d'Aiais , par M. I'abbd deSaiivages 98 BOTANIQUE, u R une efpece d'Ouate ou de matiere cotonneufe trouvee au fond d'un EtanF, '" Experiences fur la force du hois 1 1 * Obfervations botanico - m^tc'orologiques j pour I'annie 1740 par M. du Hamel • lio Ohfervation nouvelle fur les fleurs d'une efpece de Plantain, nom- m^e , par M. de Tournefort, dans fes Elcmens de Botanique , Plantago paluftris gramineo folio monanthos Vix\[\in(\i,pag. lo^. par M. Bernard de Jullieu i 5 5 M/moire Jiir la culture des forets, par M. de Biiffon i +0 Obfcnations de Botanique 149 Sur les Boutures & les Marcotes i '5 2. Sur le Sifn^ka ou Polygala de Virginie 15+ Sur V adherence de la Cufcute aux autres Plantes 1 5 iJ Obfervations Jiir une efpece de plante appelUe Franca ; par M. Giiet- tard • 157 Defcription d'une plante de Mexique a la racine de laquelle les EJpagnols ont donn^ le nom de Contrayerva , par M. de Juirieu , i'aine i (^5 Sur la confervation des Grains j ^fur-tout du froment 168 Sur les Glandes 6' les filets des Plantes , & les matieres qui en fortent i 7° s. ANATOMIE. 'i/iJ le fiege de I'Ame dans le cerveau '...."...... .'...'., 175 Sur la reunion des fraclures des Os 179 Sur de nouvelles Arteres & Veines Lymphatiques 180 Sur I'organe immidiat de la voix , & de J'es dijferens tons 18? Sur les niauvais ejfets de I'ufage des corps a haleine 1 8 (5 Sur les remedes de Mademoifelle Stephens , pour la pierre 188 Pierres de Fiel fmgulieres s 189 Diverfes obfervations Anatomiques 19° Sur les Monfires i99 D E S M L M O I R E S. vij Ohfervations Anatomiques 200 Stir Us Monflres ici Sur le Strabifme 1 : i Sur la formation des Os ,tii fur la reunion de hurs fraclurcs i i 5 Obfervation Anatomique j par M. du Himel 115 Troifieme Me'moire renfermant plufieurs Ohjirvations Jiir iind r,ui- ladie du Siphon lacrymal , dont les Auteurs n'ont point pnrle. 1 1 6 Diverjes ohfervations d'Anatomie 2 1 1 Sur les mouvemens de la Mdchoire infirieure , par M. Fcrrciii 255 Sur le mouvenient des deux Mdchoires pour I'ouverture de la houche , 0 furies caufes de leurs mouvemens j par M. Ferrciii. 249 Quatrieme Me'moire fur hs maladies du Siphon lacrymal. 280 Sur quelques parties du Cerveau 288 Sur la Structure des Reins 290 Diverfes ohfervations Anatomiques 191 Veau monfirueui 194 Me'moire fur une des caufes qui peuvent rendre les Ckevaux poufjifs J & fur les precautions que I' on peut apporter pour pre'venir cette maladie , par M. Giiert:ird ibid. Ohfervations fur le Bandage comprefjif deflind- d la cure de la tumeur lac ry male , par M. Petit 50} Sur la maladie du gros Bdtail 510 Ohfervations Anatomique 511 M. C H Y M I E. OVENS de congiler I'Efprit de Vin , & de donner aux huiles graffes quelques-uns des caracleres d'une huile effentielle. 5 1 7 Thdorie Chymique de la teinture des Etoffes 51^ Sur un Etain prifenti a I' Academic 531 Sur les moyens de volatilifer I' huile de Vitriol j de lafaire paroi'tre fous la forme d'une Huile effentielle , ^ de la redulre enfuite a fin premier itat 5 ; j Sur V Analogic qui fe trouve entre le ^inc & I' Etain 354 Sur le Succin 33^ Sur la teinture d'Orfeille 538 Deux procedis nouveaux pour obtenir fans le fccours du feu une liqueur ithirie fort approchante decelle dlaquclle M.Frohinius , Chymife Allemand J a donndle nom d'EtheT,parM. diiHamel. 359 Sur le Zinc 34. vii] TABLE DES ME MOIRES. Sur Id Urre d'Alun }74 Sur les Eaux Minirales da Mont-d'Or 375 Mi'moires fur les Sels neutres , &'c. 577 Sur la cryfkllifiition du Scl Marin 384 Sur la caiije de la diffe rente dijfolubilit^ des hulks dans I'efprit-de-vin. 3 S (S Cjiir le Sel de la Chaux 3 S3 Sur une preparation de verre d' antimoine ,fpicifique pourla dyjf'enterie. 3 9 z Sur la maniere d'appliquer aifment des bas-reliefs en orfiir I'or & fir r argent 393 Ohfervations Chymiques 595 CHIRURGIE. \^ BSERV^TIONS de Chirurgle ;..'.. 395) Sur la maladie des Enfans nouveau-nis , qu'on appelle Filet 401, Sur line Paralyfe accompagnesm£moires MtMmi»^wMra.aMBa que I'eau fe trouvant plus pefaiite qiie ces corps, & tendant avec plus de p force i gngner Ics extremites , on i fiiivre la tangcnte dii ccrcle, devoit "repouflcr vers !e centre tout ce qu'clle rencontroit de pins leger qu'elle. An!i^ s ' Q u E. important de favoir combien il y a d'eau aii-deirus-, c'eft pour cet objet yinn^e 1741. «iue cette ^chelle a cte conflruite , & que le niaitre du ponc-royal fait favoir aux marchands de Rouen quelle eft la hauteur de I'eau au-deffus de ce banc de chaillot. On voit par-li que pour avoir par cette echelle la veritable hauteur de la riviere au-deffiis du fol de fon lit , il fjut y ajouter la diftirence qui fe trouve entre le fol du fond au pont- royal & celui du banc du nosud d'aiguillette. Cette difference eft de 14 pieds, dont le deffus de ce banc eft plus eleve ijue le fol de la riviere fous I'arclie du milieu du pon:- royal. DIVERSES OBSERVATIONS DE PHYSIQUE. Sur k rapport des diffirens degre's de fluiditi des Liquides. M—l E s qualitcs fenfibles des corps ne font pas feulement difficiles ^ con- Hiit. noitre en elles-memes & dans ce qu'elles ont de mechanique , indepen- damment de nos fens, elles font encore un Uijet de recherche trcs-difficile par rapport k leurs intenlites, ou k revaluation de leur quantite & de leur force plus ou moins grande. C'eft ainfi que la quantite ou I'intenlite du fon & de la lumiere, ont fait de tout temps des problemes de phydquc aufli curieux que mal-aifes h refoudre. La durete & la moUeire, la foliditc & la fluidite, qualites convertibles, comme la grandeur & la petiteffe, & prefque toujours relatives k la refiftance que nous eprouvons en voubnt divifer les corps, ne font ni plus faciles i determiner, ni moins dignes de la curiolite du phyficien. Elles femblent meme avoir un rapport plus immediat ^ nos beloins que les autres , par les lumieres que leur mefure exacVe peut fournir fur le different degre d'aftivite de diverfes fubftances employees dans la medecine. C'eft dans ce point de vue que M. le Monnier, medecin , fils & frere d'academicien dans cette compagnie , & digne i^mule de fes parens , a cherche une meihode pour determiner les differens degres de fluidite des liqueurs , & qu'il a prcfente ^ I'academie le memoire dont nous allons rendre compte. M. le Monnier definit le fluide , un corps dont les parties font fi peu liees entr'elles , qu'elles cedent i la moindre force qui tend h les defunir , & fe mettent audi tot en mouvement au milieu les unes des auties. II avertit cependant que cette definition ne doit pas etre prife i la rigueur , puilque I'experience nous apprend , que quelque peu de liaifon qu'il y ait entre les parties d'un fluide , il leur en refte toujours affez pour fe fairc appercevoir, & pour apporter une refiftance fenfible h leur feparation. Tome IX. Panic Frmpoi/e. B 10 ABREGEDESMEMOIRES ■^»'™— — ^ Le defaut d'adherence ou de tenacite entre les parties dun fluide faifant p , o r ^^ caraiVere effentiel de la fluidite , & le fluide parfait ne pouvant etre que. ' celui oil I'adherence & la tenacite feroient nulles , on voit clairement, Anncc iJ4t. qu'une liqueur fera d'autant plus fluide, que I'adherence entre fes parties. fera plus petite. M. le Monnier s'abftient fagement d'entrer dans la difcuflion cpineufe de ce qui produit cette adherence de parties, foit preflion de la part d'uti fluide ambiant plus fubtil , foit attraction quelconque ', il ne s'agit ici que d'en determiner la quantite. Ce fera la mefure qu'on cherche. Newton s'eft fervi d'un pendule , qu'il a fait ofciller dans differens fluides , pour determiner la refiftance de differens milieux au mouvement des corps qu'on y a plonges , & il a conclu de fes experiences , que les milieux, ou ce qui eft ici la meme chofe, les fluides, reliftent ^-peu-prcs en raifon de leur denfite. II trouve, par exemple, que felon la regie, la r^liftance de I'eau eft k celle de I'air i peu-pres en raifon de 850 i i; mais il a fenti que cette regie n'avoit pas lieu i I'egard des milieux t^na- ces , qu'il avoue refifter plus que d'autrcs de mcme denfite. Ainli , ajoute- t-il, I'huile froide relifte plus que I'huilc chaude, celle-ci plus que I'eau commune , & I'eau commune plus que I'efprit de vin. II laiffe done entre- ▼oir ici une maniere de determiner les degres de tenacite des liqueurs , puifque dans celles qui font egalement denfes ou de meme pefanteur fpe- cifique , les refiftances du pendule feroient proportionnelles ^ leur tena- cite. Le meme philofophe donne ailleurs une methode plus pofitive pour decouvrir la refiftance qui refulte de la tenacite des parties d'un fluide , favoir , en y faifant tomber d'une meme hauteur des corps fpecifiquement {ilus pefans les uns que les autres , & en comparant les temps effedifs de eurs chutes i ceux que donneroit la theorie degagee de cette circonftance. M. le Monnier convient de I'excellence de ces methodes pour decou- vrir la refiftance des milieux •, mais il les juge peu praticables pour eftimer les differens degres de tenacite entre les parties integrantes des liqueurs. Elles en exigent, felon lui , une trop grande quantite, & qui doit etrc au moins de 5 i (5 pieds cubiques. Voici la methode qu'il leur fubftitue , & qui peut faire connoitre le degre de fluidite que Ton cherche , dans telle quantite de liqueur qu'on voudra. II a pris une boutellle fpherlque de verre d'environ 4 pouces de dia- metre : il y a fait fouder vis- i- vis du centre deux petits tuyaux de verre d'environ trois lignes de diametre , & qui communiquent avec le dedans de la bouteille. II a fait retrecir ^ la lampe des emailleurs I'orifice extc- rieur d'un de ces tuyaux , jufqu'^ ce que fon ouverture flit tout au pliu d'un I i* de Hgne , I'autre tuyau demeurant tout-^-fait ouvert , pour laiffer une entree libre k fair, fans quoi la liqueur, qu'on devoit mettre aufli par-I^ dans la bouteille, n'auroit pu couler par le petit orifice. II a rempli fucceffivement cette bouteille de differentes liqueurs , & I'ayant fituee perpendiculairement ^ I'horizon , par rapport it I'axe indique par les deux tuyaux , I'orifice rctreci fe trouvant en embas , il a obferve avec un DE L'ACAD^MIE ROYALE DES SCIENCES. ir pendiilc k fecondcs, en combieu dc temps totite la Ji<^ucur sccouJoit par— — — ™— » cet orifice. Chaque goutte de la liqueur qui fort de la bouteillc s'ecoule en vertu Physique. de la pefanteur fpecifique & du poids de toute la mafle du fluide fupc- ytnnie 1741. rieur qui la prefle , I'axe ou Ics deux tuyaux (^tant fitucs verticalemeiit. Done li les parties iiitegrantcs dcs liqueurs etoient abfolument dcnuees de tcnacite ou d'adhcrence cntr'elles , les temps dc lecoulement enticr des quantites egales feroient rcciproqaement proportionnels aux pefanteurs ou gravitcs fpecifiques. Mais en meme temps que la gravitc fpecifique de la liqueur cntr.iine fes gouttes en embas , la tcnacite de fes parties les retient unies k la maffe qui lui eft contiguc , & aux bords du verre , dont elle tend ^ fe detacher , jufqu'i ce qu'enfin la goutte ainii fufpendue , foit devenue aflez groffe pour que fa pefanteur I'emporte fur fon adherence , & la detache enticrement de I'orifice qui la retenoit. Ou il eft aife de remarquer que les gouttes qui font partie des liqueurs plus tenaces , font toujours plus groffes avant Icur chute, que celles des liqueurs plus fluides. La goutte reftera done plus ou moins long-temps fufpendue ^ I'orifice du tuyau retrcci , felon que la tcnacite de la liqueur dont elle fait partie , & dont elle doit fe feparer, fera plus ou moins grande. Done dans les liqueurs de meme gravite fpecifique , les temps de I'cfcoulement feront en meme raifon que leurs tenacitcs , & dans celles de gravite fpecifique & de tcnacite difterentes , ces temps feront en raifon compofee, inverfe des gravitcs, & direfte des tenacites. D'ou Ton voit que les tenacites font diredement comme les produits des temps dc I'ecoulement , par les pefanteurs fpecifiques , & entin les degres de fluir dJt^ reciproquement comme ces produits. D'apres cette methode & les experiences faites en confequence, M. le Monnier a dreflc une table ou font exprimes les rapports de diffsrentcs liqueurs les plus connues , & qui eft partagee en 5 colonnes. La premiere de ces colonnes contient les noms des liqueurs confiderees dans leur different ctat dc condenfation & de rarefadion •, la fecondc indique le degre de chaleur correfpondant de ces liqueurs , tel qu'il a hi pris fur le thermometre k mercure de M. Delifle, & reduit ^ la gradua- tion du thermometre de M. de Reaumur ; & la troifieme marque Ic temps de I'ecoulement. On voit dans la quatrieme la pefanteur fpecifique & aduelle de chaque liqueur, comme elle fe trouve au moment de I'ex- perience i I'eau d'arcueil fuppofee d'un poids quelconque exprime par 1000 , en eft le terme de comparaifon. La cinquieme colonne doiine enfin le rapport des fluiditis , dont I'eau d'arcueil eft encore b cominune riefure. II paroit par cette table que la fluidlte du vin de Bourgogne , par cxemple , eft un peu moins grande que celle de I'eau , & ne va qu'i environ <)^6 t^j celle de I'huile d'olive n'eft que de 45 ^ — •, celle de y •> ft ^ Thiule de noix, de iiz ; de I'huile de lin, dc 149 , &c. L'efprit 1000 ' '^ 1000 ' B ii II ABREG]^ DES MEM0IRE!S >^— ^^^M de vln & I'hiiile de terebenthine, qui par leur grande facilitii ^ s'evaporer» femblent etre fi fluides , n'ont pas cependant des fluidites bien differentes P H Y s I Q u E. jg j.g^i^j commune, celle de I'lm n'etant que d'environ 1098, & celle de ^nnit 1741. I'aiitrc ^^ ^°°9 '■> encore ces liqueurs, quand elles ont etc mifes en expe- rience, etoient-elles un peu moins froides que I'eau. Enfin , les liq"'-"' ininerales , telles que le mercure & Thuile de vitriol , qu'on ne k ueurs auroit appellcr ni aqucufes ni buileufes, cnt des degres dc fluidite bien au-deffous de ceiui de I'eau & de I'huile, le mercure ne donnant que i }+ degres de fluidite par rapport k I'eau, que nous fuppofons en avoir 1000, & I'huile de vitriol ne paffant guere 60 de ces memes degres. Nous ne toucherons que fuccin€tement quelques objedions qu'on pourroit faire contre la methode de M. le Monnier , & qu'il s'eft faites lui-meme pour la plupart, Le tuyau inferieur d'ou la liqueur decoule par un tres-petit orifice , tombe dans le cas des tuyaux capillaires. Or on fait que I'adhefion des liqueurs au verre , ou leur afcenlion dans les tuyaux capillaires de verre , ditfere queiquefois confiderablement en differentes liqueurs , & apparem- ment aufll dans la mcme liqueur, foit par la temperature aduelle ou elle eft , foit par celle de I'air qui I'environne. D'ou il fuit , qu'il reftera tou- jours dans le tuyau inferieur une certaine quantite plus ou moins grande de liqueur, qui fe refufera i I'entier ecoulement. Mais il eft clair qu'il n'y a qn'k tenir compte de ce refte , par rapport S» la maffe totale, oil mieux encore , qu'^ prendre la fin de Tecoulement h I'endroit dii tuyau , ou Ton aura eprouve auparavant que la liqueur dont il s'agit , dans I'etat donne, fe foutient par la (imple adhefion. Et Ton previendra meme une f)artie de cet inconvenient en faifant toujours I'experience i-peu-pres dans a meme temperature d'air. La temperature que M. le Monnier a choific par preference, eft celle de deux degres au-deffus de la congelation. Quant aux changemens que la froideur ou la chaleur des liqueurs pour- roit cauler k la capacity de la bouteille qui les contient , par le retreciffe- ment, ou par la dilatation du verre, iis ne fauroient apporter ici d'erreur fendble , pourvu qu'on ne rempliffe pas entierement la bouteille , & que la quantite de liqueur qu'on y met ne foit reglee que par le poids, comma I'a pratique M. le Monnier. Mais relargilfement , ou le retreciffement que la meme caufe doit produire en pareils cas , fur le petit trou du tube in- ferieur par oil la liqueur decoule , nous paroit de plus grande confe- quence, & nous ne voyons pas par quelle voie on pourroit y remedier. Nous remarquerons feulement que cet inconvenient n'a lieu qu'4 I'egard de la meme liqueur dans fes differens ^tats , & n'influe point fur la plu- part des refultats de la table , ou les liqueurs font conhderees ^ un meme degri de chaleur. La gravity fp^cifiqiie & relative de chaque liqueur dans fes differens ^tats, entre neceffairement , comme nous I'avons vu, dans le produit qui conftitue le degre de fluidite des liqueurs. Audi M. le Monnier a-t-il pris grand foin de la bien determiner. II s'eft fervi pour cela de la balance hy- droftatjque decrite dans plufieurs auteurs modernes , & ^ laquelle il « t: DE L'ACADEMIE ROYALE DES SCIENCES. ,, ajiide, an lieu du puids de verre tolide qu'on a cciimme dc fufpendre h p—^i^^^^m^ Tun de fes bras , une bulle de verre fort mince , & prefqnc plciiie de p mercirre. II a trouve que la diminution de poids de cette bulle ainfi char- " " '''^ ^ ■ '2 " ^• gee etoit dans I'eau bouiUante, de izS grains, & dans I'eau froidc appro- Annie I'-Ai. chante de la congelation , de 133 grains; d'ou il a calcule , confomicment au tenne de comparaifon qu'il a choili pour toutes les autrcs liqueurs, que la graviti fpecifique de I'eau ^ ce degrc de froideur , etoit ^ cellc de I'eau bouiUante , comme i-ooo eft: ^ ^(Ji. M. Halley avoit conclu d'une femblable e"xperience qu'il fit en 1695, que c'etoit comme icoo i 965: difference prefque infenlible d'avec le refuitat de M. le Monnier , & qui prouve I'extreme attention qu'il a donnee a cette partie de fa recherche. Du rcft:e M. le Monnier ne donne tout ceci que pour un premier ffai , qui ne lui lailfe pas ignorer corabien la miriere qui en fait I'ob- jet, exigeroit encore d'expifriences , tant fur le meme plan que fous de nouveaux points de vue, pour ctre portie au degre de certitude que i'on pourroit y delirer. I I. Sur Evaporation de I'Eau. Il eft affez furprenant que la terre imblbie d'eau , 8: qui fait en tout Une niaffe plus folide & plus pefante qu'un pareil volume d'eau pure, fourniffe une evaporation plus prompte que I'eau. C'eft cependant ce qui refulte de I'expcrience qu'on va voir , & qui eft due h M. Bazin deji connu dans le monde favant par d'excellentes cbfervations de phyfique & d'hiftoire naturelle. Cette experience nous a ete communiquee par M. de Reaumur , i qui M. Bazin en a fait part dans une lettre qu'il lui a ecrite de Strasbourg. Le fait eft d'autant plus digne de remarquc, qu'il contredit une obiervation de M. Hales, I'un dcs plus habiles obfervateurs de I'Europe •, car on trouve en propres termes dans la Statique des ve fair comme une petite languette de drap prend & boit I'eau oii elle j> trempe par un bout. L'air mouille par la premiere furface de la liqueur jj s'incorpore avec elle, il n'a plus que le mouvement de liquidite quelle s) a, & par ce mouvement celui qui etoit a la premiere furface eft ports JJ ailleurs, s'enfonce, fi Ton veut , dans la liqueur, & il arrive h cette J3 furface fuperieure de nouvel air qui fe mouille pareillement de la JJ liqueur , s'y mele , & toujours ainfi de fuite , jufqu'^ ce quelle ait bu JJ tout ce qu'elle en peut boire. jj Cette theorie etant laien con^ue, voici le raifonnement de M. Bouillet. Puifque I'eau boit & abforbe fair qui touche h fa furface , qu'elle le loge dans fes interftices , que ne faifaiit plus qu'un meme corps avec lui , elle I'entraine avec elle par fon mouvement de liquidite jufqu'au fond du vafe qui la contient , & que l'air , malgr6 fa pefanteur fpecifique de beau- coup moindre que celle de I'eau , s'unit avec elle , il faut aufli que fair prenne , abforbe & boive f eau fur laquelle il flotte , & contre laquelle il eft continuellement pouffi par tout le poids de I'atmofphere , & que I'eau, malgre fa pefanteur fpecifique beaucoup plus grande, s'infinue dans Fair , s'uniffe avee lui , en fuive tous les mouvemens , & ne fafle qu'un effort inutile pour retomber , tant qu'elle y eft intimement melee. C'eft- i-dire , que l'air qui roule fur la furface de I'eau , en detache continuelle- nient des particules qu'il loge dans fes interftices , & qu'il foutient tant qu'elles font unies ^ fes molecules. Celui qui le fuit , & auquel il cede DE L'ACADfiMIE ROYALE DES SCIENCES. ,9 la place, cnleve i Ton tour autant de parties aqueufes qu'il en pent fou- ^^1^^— ■— tenir, & ainli de fuite, ^-peu-pres comme le colon qu'on paffe legere- " ment & i plufieiirs reprifes fur de I'huile qu'on a niife au-defFus d'une """"■*' Q u e. liqueur pour la conferver, fe charge des particulcs de ce liquide, les enleve ylnne'e 1 741. & fe les incorpore. II faut done que I'eau ou route autre liqueur, quoique fpecifiquement plus pefante que I'air , s'eleve dans I'air par I'evaporation , quelle y nage , qu'elle en fuive tous les mouvemens , & quelle ne retombe point tant qu'elle eft ainfi engagce dans fes interftices. Cell ainli a-peu- prcs que les particules du cuivre , de I'argent & de Tor mcme , le plus pefant de tous les metaux , denieurent fufpendues entre les parties des caux- fortes qui les ont diffoutes. D'oil Ton voit que comme I'abforption de I'air dans I'eau eft , phyll- quement parlant, un enfoncement & une efpece d'evaporation qui, malgrc les loix ordinaires d'hydroftatique , fe fait d'un fluids moins pefant dans un plus peiant , & de haut ea bas , de mcme I'abforption de I'eau dans I'air eft une elevation & uiic evaporation qui, fins donner atteinte i ces memes loix , fe fait d'un liquide plus pefant dans un moins pefant , & de bas en haut ; la mechanique de I'une n'eft que I'inverfe de la mechanique de I'autre. Voil^ le precis de I'idee de M. Bouillet fur I'exportation des liquides , le refte n'etant que des preuves de I'adherence de fair avec I'eau & les autres liquides, tirees des experiences de M. Petit, mcdecin , {a) 8c une explication fuccinte des caufes particulieres qui concourent i I'evaporation des liqueurs , & aux principaux phenomenes qui I'accompagnent , tels qu'ils ont etc obferves par M's. Sedileau , Homberg , Gauteron , MulTchen- broeck, &c, ^ quoi il veut bien ajouter ce que nous donnames fur cc fujet dans une cUflertation fur la glace , prefentee a I'acadsmie de Bor- deaux en 1 7 1 6 , & reimprimee depuis a Paris en 1750, dans un recueil de divers traites fur ks vert us midicinales de I'eau commune. M. Bouillet applique fa theorie de I'evaporation des liquides i I'intro- dudion de I'air dans les humeiirs du corps animal , foit ^ travers les poumons , foit ^ travers toute I'habitude du corps. C'eft le fujet d'une ieconde partie de fon memoire, de laqiielle nous rendrons compte qiiand il I'aura coinmuniquee ^ I'acadcmie , perfuades que le public deji prevenu en faveur des ouvrages de I'auteur, apprendra avec plaifir le delTein qu'il a de donner it celui-ci toute i'etendue dont il eft fufceptible. (ri) Voyez I'Hiftoire de 1731 , Collection Acad^mique, Partie Fransoife , Tome VII, page I. Cij 20 ABREC^DESMEMOIRES V I I. Physique, Ann^e 174^. Sur la Rouille Jlnguliere dont il a M parU dans VHiJloire de ty^z , & fur un autre accident arrivi au grand rejfort d'une Pendule , par la coagulation des Huiles. Nous fommes prefentemeiu plus particiilierement informes des cir- conft.inces qui avoient concoiiru h. la formation de cette rouille, & tout nous confirme dans I'idee que le voifinage & I'abondance du vernis dont la boite de la pendule avoit etc recemment peinte , en ^toient la princi- pale caufe. M. Gaudron qui a une grande connoiffance de la theorie & de la pratique de I'horlogerie , avoit ete pris pour Juge dans le difterend furvenu ^ cette occalion entre le proprietaire de la pendule & rhorloger qui I'avoit falte : il ne voulut point cependant en decider fans avoir con- iiilte I'academie , qui fe trouva etre de I'avis que nous venons de dire, lequel fut conforme )l celui de M. Gaudron. Entre tomes les raifons qu'il avoit eues pour porter ce jugement , nous avons parlc de celle qu'il tiroit du temps qui s'etoit ecoule de plus , depuis la premiere rouille jufqu'^ la feconde, compare au temps que Ton comptoit depuis la livraifon jufqu'k la premiere, vingtdeux mois dans Tun & vingt-lix dans I'autre. Cette raifon devient encore plus concluante dans le nouveau memoire qu'il nous a prefente fur ce fujet. La porte de derriere de la boite de cette pendule , & qui touche prefque i la platine fuperieure du mouve- ment, etant verniflee en plein des deux cotes, prefentoit vers le dedans de la pendule une furface de plus de loo pouces quarres, toute chargee d'une matiere d'oii s'exhaloient continuellement des corpufcules corrolifs qui ne pouvoient manquer de s'attacher aux pieces voifines du metal , & fur-tout du cuivre; car le vernis etoit de vermilion ou de cinnabre , & par confequent compofe de vif-argent. Audi toutes ces pieces en etoient- elles li profondement attaquees, que le charbon doux ne put fuflSre ^ en effacer les piquures, & qu'il fallut y employer la pierre ^ adoucir. M. Gau- dron fe determina en dernier lieu i faire racier & enlever ce vernis per- nicieux de deflusla porte de la boite & des autres endroits les plus proches du rouage, & il a eu la fatisfadion de voir que depuis ce moment juf- qu'au temps oil il dcrivoit fon memoire , c'eft-il-dire , depuis 45 mois accomplis , le mouvement de la pendule s'eft conferve fain & entier, & fans la moindre atteinte. II a examine , avec le meme efprit d'obfervation , un grand reffort de pendule qui s'etoit rompu tout d'un coup en trente-cinq endroits : autre fait fingulier qu'il a juge digne de remarque , & dont il eft k propos que le public foit inftruit. Tout ce defordre a ete vifiblement occafionne par I'huile qu'on a coutume de mettre aux pivots , & qui par fucceffion de temps s'etant inlinuee entre les fpires du reffort, s'y etoit coagiilee Jufqu'i les coUer enfemble en divers endroits , & ^ y former une efpece de maftic fi ferme & fi adherent , qu'il a fallu avoir recours au cifeaii 5»aii DE L'ACADEMIE ROYALE DES SCIENCES. n niarteau pour fepnrcr cjiielqucs-uncs de ces doubles pieces de la lame frac- ^m^—^^^— turee, eiitre lelquelles il s'ttoit amaffe. Dcs que M. Gaudron cut vu cet effet furprenant , il chercha dans fes ^ " ''^ ^ ' "2 " ^• m^noires quelles etoient les pendules qui avoient ete nettoyces chez lui ytnn^e t74Z. ^-pcn-pres vers le temps ou celle-ci I'avoit ete; il obtint dcs proprietaires qu'elles lui fuffent envoyees pour Ics examiner, & il y trouva prefque tous les grands refforts vicies par la meme caufe , & plus ou moins prets it caffer : fur quoi voici fes remarques ou ce qu'on en peut recueillir. On fait que le grand reffort d'une pendule conlifte en une ame d'acier qui a communement 8^9 pieds de longueur, &: qui eft roulee en fpirale dans un burillet ou cylindre creux, ^ la furface interieure dtiquel elle eft attachee par un de fes bouts , & par I'autre ^ I'axe ou k I'arbre de ce meme cylindre. On fait aufli que quand on monte la pendule ou fon reffort , c'eft par le moyen d'une clef qui fait tourner I'arbre du barillet \ diverfes reprifes d'environ un demi-tour chacune , & qu'i chaque tour ou demi-tour les fpires du reffort fe rapprochent d'autant , & fe refferrent de plus en plus autour de I'arbre qui en occupe I'ccil ou le centre. Cela pofe , il eft clair qu'a mefure qu'on tourne I'arbre & qu'on refferre les fpires du reffort, on tend plus ou moins ^ le rompre, felon qu'on le relferre davantage, & cela par un double efl'ort, favoir, entant que Ton en courbe toutes les parties , & entant qu'on les tire. Dans I'etat ordi- naire , lorfqu'aucun obftacle ne s'oppofe au mouvement fpiral de la lame entiere qui forme ce reffort, I'effort qu'on fait en la montant , en ref- ferrant , en nniltipliant les fpires , fe diftribue dans toute fa longueur , & ne tend ^ la courber que circulairement , ^-peu-pres ; car il n'eft pas ici queftion de la nature particuliere de cette courbure , & plus ou moins , ^ raifon de fes diftances au centre commun : il ne tend aufli en meme temps ^ la rompre en la tirant dans tous fes points, que felon dcs direc- tions toujours paralleles ^ elle-meme ou a la tangei'ne de chaque point. Ah contraire, dans le cas d'un obftacle fixe entre les fpires du reffort, & qui les tient collees de maniere qu'elles ne peuvent gliffer les unes au- deffus des autres , & cedcr au mouvement commun de revolution qiii leur eft imprime , ce n'eft plus une courbure reguliere & une traftion felon les tangentes que produit la rotation de I'arbre, mais des plis, des angles plus ou moins fenlibles , & un tiraillement plus ou moins oblique ^ cote de toutes les parties embarraffees. Ces plis, ces angles y feronc bientot naitre ce que les horlogers appellent des craques ou dcs com- menccmens de fradure , qui deviendront enfin des fraftures totales de la lame dans fa largeur. II eft meme podible que plulieurs de ces der- nieres arrivent tout-^-coup & prefque en un meme inftant, par le derou- lenient lubit, la fecouffe violente & V^tonnement que la premiere partie qui vient ^ manquer communique I toute la maffe •, & c'eft ainii vr.iifem- blablement que le rellort dont il s'agit , s'eft roiiipu en tant d'endroits a la fois. M. Gaudron prend delk occafion d'exhorter les horlogers ^ choilir avec grand foin leshuiles qu'ils emploient dans leiirs oiivrages, & les phyliciens 21 ABREGEDESMl&MOIRES ■ ^ chercher le moyen de procurer k ces huiles toutes les qualites requifes p pour rhorlogerie. Mais (es defirs feroient prevenus depuis long-temps , & i* H Y S 1 Q u i.^^^ j^ trcs-habiles chymiftes qui en ont fait la tentative, s'il ne s'y etoit 'j4nnee 1742. trouve des diificultes qui paroiffent infurmontables. Les huiles rendues plus fluides qu'elles ne font communement , deviennent corrolives, moins coulantcs, plus degagees de leurs fels; elles font trop graffes, fe coagulent & fe durciffent , en un mot , le probleme eft demeure jufqu'ici comma infoluble : peut-erre cependant ne Teft-il pas, & c'eft bien notre avis qu'il ne faut pas litot fe rebuter quand la matiere eft importante. VIII. Trombe qui a (ti vue fur le Lac de Geneve. Nous avons fait mention , I'annee derniere , {a) de la trombe qui avoit paiu fur le lac de Geneve au mois d'odobre de la meme annee •, en voici line feconde qui y a cte vue le 9 de juillet fuivant i 6 heures du matin , pres des bords de ce lac fous Laufanne , & dont nous avons ^te informes par M. Cramer , profeffeur de philofophie & de mathematiques. II feroit ^ fouhaiter quelle eut etc obfervec par des yeux aufli eclaires que les fiens. Ce qu'il en avoit pu recueillir de plus certain dans le pays, c'eft que cette trombe s'ctoit elevee ^ une hauteur confiderable , & jufqu'i un nuage fort obfcur qui etoit au-deffus; mais M. Jallabert, de qui nous tenons la premiere , & qui avoit eu des nouvelles de celle-ci , en ecrivit quelques joiu-s apres ^ M. Cramer en ces termes : « On a vu s'elever fur le lac , j> i environ trois coups de fulil de fes bords, une vapeur noire & ^paiffe J) qui paroilToit occuper un efpace de 1 6 ^ 1 8 toifes de largeur & un peu »j plus en hauteur, & qui montoit avec des elancemens affez violens. )j Apres avoir paru pendant une bonne demi-heure , elle fe forma en >j une colonne fort droite & fort elevee , & fubfifta de cette maniere >3 jufqu'^ ce que s'etant avancee 50 ou 60 pas fur terre vers la pointe dc 3} Puilly , elle fe diflipa prefque dans un inftant. » Ce phenomene qui eft affez ordinaire fur la mer, mais qui etoit tota- lement jnconnu fur ce lac , paroit done deformais deux fois en moins d'un an ; car la reffemblance de celui-ci avec celui de I'annee paffee eft (1 grande dans toutes fes circonftances , qu'on peut bien affurer que c'eft le meme, & qu'il eft produit par la meme caufe. Des matieres bitumi- neufes & inflammables qui s'amaffent en des lieux fouterrains ou il n'y en avoit point auparavant , ou qui s'allument dans ceux ou elles ne bruloicnt pas, peuvent produire tous ces changemens, tres-dignes fans doute d'etre obferves par les favans phyliciens que nous venons de nommer. C") Ci-deffu5. DE L'ACADEMIE ROYALE DES SCIENCES. 2j I X. Seiches ou Flux & Reflux du Lac de Geneve. En rapportant dans I'hifloire de 1741 [a] la premiere des deux trom- bes dont il eft parle dans I'article precedent , nous avions touche nuelque cliofe d'un phenomene beaucoup moins rare , & que nous offre encore le lac de Geneve 5 c'eft cette efpece de flux & reflux qii'on y reinarque fous le nom de feiches , & dont M. Jallabert avoit aurfi fait mention : nous annon93mes en meme temps qu'il travailloit \ I'approfondir. II s'eft ac- quitte de cet engagement , & nous allons rendre compte de fes obferva- tions & de fes conjedures fur ce fujet, conformement ^ I'inftruiflion qu'il nous a envoyce. On obferve ce flux & reflux fingulier \ la partie fuperieure & inferieure du lac, c'eft i-dire, \ I'entree du Rhone qui le^traverie felon (a longueur, & \ I'iffue de ce fleuve oii fe trouve la ville de Geneve. L'eau croit fu- bitement d'un pied plus ou moins, & decroit bientot aprcs avec vitefle, cette alternative de hautes & de baffes eaux fe fucccde plufieurs fois de fuite en un meme jour, de maniere cependant que les intervalles de temps cntre les crues font plus ou moins grands , fiiivant que I'elevation des eaux eft plus ou moins confiderable. M. Jallabert a remarque k Geneve fur I'un des piliers de la machine hydraulique qui eleve les eaux du Rhone , que lorfque les eaux du lac montent de 7 i 8 pouces, I'intervalle entre deux crues eft d'environ 14 i 15 minutes, & de 24 ^ 26, lorfqu'elles montent d'un pied. II n'eft pas aife d'affigner la caufe de ce phenomene, quelques perfonnes I'ont attribiiee \ des vents fouterrains , qui s'echappant avec violence & par reprifes , foulevent les eaux du lac ; mais (1 cette caufe avoit lieu , on appercevroit les crues d'eau ailleurs qu'aux extremites du lac , il bouillon- neroit , & Ton verroit fortir des bulks d'air de fa furface , ce que M. Jallabert n'a pas obferve. M. Fatio de Duillier , iavant geometre , qui connoiffoit parfaitement rhiftoire naturelle des environs du lac de Geneve, & qui en a ecrit {h)-, attribue cette efpece de flux & reflux aux vents orageux du midi , lefquels fouftlant avec violence , foutiennent les eaux de ce lac & les empechent de s'ecouler dans le Rhone avec la meme abondance, jufqu'i ce que le vent venant \ diminuer , ou l'eau furmontant par fa pefanteur I'effort du vent , elle coule avec plus de liberie , & en plus grande quantite qu'au- paravant. Mais comment accorder cette explication avec les feiches qui arrivent en temps calme, comme on I'a fouvent remarque? & comment rendre raifon par-li de ce qu'elles arrivent i I'extrdmitc meridionale du lac ou eft fituee la ville de Geneve, & d'oii en montant vers le nord-eft, fa) Lii-mcme. (4) Rcmarguis, &c. impiim^es il la fin du fecond vol. de I'Hiftoire de Geneve de Spon. P H V s I Q u r. Physique. i4 ABREG^ DES M^MOIRES ; ce lac eft renferme dans un canal d'environ quatre lieues de longueur fur une demi-Iieue ou une lieue de largeur tout au plus? M. Addiffon dans fes remarques fur le voyage d'ltalie de Miffon, fait Annie 174Z, ^^^^ mention des feiches du lac de Geneve, & compte en avoir penetre la veritable caufe. ct En et6, dit-il, il y a dans ce lac une efpece de flux 5> & de reflux caufe par la fonte des neiges qui y tonibent I'apres-midi 55 en plus grande quantite qu'en d'autres heures du jour. 55 Sur quoi M. JalLibert remarque que le peu de fejour qu'a fait M. Addiffon ^ Ge- neve , ne lui a pas permis de s'inftruire affez i fond des circonftances de ce phenomene, qu'on obferve le matin comme le foir , en hiver comme en etc , quoique dans cette premiere fiifon il foit moins frequent. On lui auroit appris auffi qu'il ne regne pas dans toute I'aendae du lac, ce qui devroit etre pourtant, s'il dependoit des eaiix que les rivieres groflies pat les neiges y verfent en plus grande abondance. M. Addiffon n'explique pas non plus pourquoi I'on obferve plufleurs flux & reflux en un meme jour , circonftance linguliere & bien digne d'attention. M. Jallabert avant que de propofer Texplication qui lui paroit la plus vraifemblable , fait ces deux remarques. 1°. Que vers I'embouchure du Rhone dans le lac on n'obferve les feiches qu'au Bouveret & ^ Villeneuve , bourgs fitues au fond de deux petits golfes , I'un ^ gauche , I'autre ^ droite des bouches de ce fleuve. Dans les endroits plus eloignes de cette extremite du lac , ^ Saint-Gingo , par exemple , qui n'eft pas i une lieue du Bouveret , & ^ Vevei qui ne s'eloigne pas de deux lieues de Vjlleneuve, ce phenomene eft tout- ^- fait inconnu, A I'autre extremite vers Geneve, le flux & reflux n'a lieu que dans la partie du Rhone qui eft au-deffus du confluent de ce fleuve & de la riviere d'Arve qui fe jette dans le Rhone k moins d'un mille au-deffous de Geneve •, c'eft-^-dire , que les feiches ne fe manifeftent dans cette partie du lac qu'^ deux ou trois rallies au-deffus de Geneve , qui eft a-peu-prcs le terme ou le lac commence ^ acquerir de la pente pour fe faciliter la fortie des eaux qu'il a recues dans fon fein. 2°. Que les temps auxquels on appercoit les feiches font ordinairement des temps couverts qui menacent de la pluie, oii I'air eft fort adouci , & pendant lefquels les neiges fondent en plus grande quantite fur les mon- tagnes; I'experience ayant appris qu'un pareil temps accelere plus la fonte des neiges que ne feroit un beau Ibleil. Ces faits etablis , M. Jallabert entre dans I'explication du phenomene , en commencant par les feiches qu'on appercoit pres de rembouchure du Rhone. On flit que ce fleuve prend fa fource au mont Fovea ou de la Four- che , qui eft k I'extremit^ orientale du pays de Valais , & qu'avant que de fe jetter dans le lac, il coule entre d'autres montagnes du meme pays, toujours couvertes de neige. Dans les temps doux la neige fond, le Rhone s'enfle confid'^rablement, & entrant alors avec impetuolite dans le lac, il en chaffe les eaux h droite & ^ gauche dans les deux petits golfes, htues prcs de fon embouchure, & au fond defquels font Villeneuve & le Bouveret •, DE L'ACAD^MIE ROYALE DES SCIENCES. zj Bouveret ; ces eaux s'elcvent fijr les rives de part & d'aiitre , refombcnt , n enfiiite par Icur propre poids devenii Aipericur ^ I'adion des eaux du '" Rhone contre elles, & repreniient Ic niveau du refte du lac; & comnic ^ h v s i q u I'impetuolite du Rhone ainli cnfle fublifte un certain temps, il doit rcfulter ^nn^e trsz de Ion adion fur les eaux du lac & de la readion de celles ci un flux & reflux qui fe fitccedent i-peu-prcs comme les allees & les venues d'un pc-ndule. Du refte il ne faut que jetter les yeux fur une carte du lac de Geneve p9ur voir que les feiches qui fe font fentir ^ cette extremite, ne lauroient paffer au-deli de Villeneiive & du Bouveret , parce que ce lac >• aequiert d'abord une (\ grande largeur , qu'unc pareiUe crue d'eaux, repandues fur fa furfice , ne peut y etre fenfible. Une explication toute femblable , ou fon inverfe, aura lieu pour le flux & reflux qu'on obferve ^ I'autre extremite. La riviere d'Arve qui prend fa fource dans les Alpes de Savoie toujours chargees de neige , & qui, comme nous lavons dit , fe jctte dans le Rhone I environ un m'ille au-deflbus de Geneve, ne peut manquer de grollir conlldcrablement pen- dant la fonte des neiges. Ses eaux groffies, & d'autant plus elevees que fon lit eft plus etreit, arreteront done celles du Rhone, ou les feront groffir, & celles-ci, en quoi confifte une grande partie de celles du lac dans cc canal etroit qui le contient au-delius de Geneve, produiront I leur tour relevation des eaux du lac Jufqua environ deux ou trois milles au-dela, & tout au plus jufqu'i Gentou & BcIIerive, ou I'experience nous npprend que fe terminent les feiches qui fe font fentir ^ cette extremite. Leur reflux ou leur abaiffement fe fera de meme par I'adion de leur poids , lorfqu'elles feront parvenues I une certaine hauteur, qui eft ordinairement d'un pied plus ou moins •, & cette aftion & la readion alternative des eaux du lac, qui s'achevent dans I'intervalle de 15 i 20 minutes ou plus, produiront le flux & reflux qu'il s'agiUoit d'expliquer. En un mot, I'Arvc groffie fait ici fur le Rhone , & par le moyen du Rhone fur les eaux con- tigues du lac , ce que les eaux de ce fleuve & celles du lac faifoient reci- proquement les unes fur les autres i I'autre extremite de ce lac. II eft clair que tous ces effets feront d'autant plus confiderables , que k caufe qui les produit, felon M. Jallabert, fera plus marquee & plus fubite, & c'eft ce que I'experience juftifie encore en fa faveur. Lorfque la fonte des neiges & la chiite des pluies ont eti extraordinaites , & que la cruc de I'Arve atteint ou furpaffe la hauteur des eaux fuperieures du lac, ces eaux & celles du Rhone ne pouvant plus s'ecouler toutes au-delTou's de Geneve, font contraintes de refluer vers la ville & vers le lac; & alors celles du Rhone remontent le long de fa rive droite fuperieure & fepten- trionale , & celles de I'Arve le long de la rive gauche & meridionafa , les unes & les autres demeurant diftindes par la couleur qui leur eft propre , ou qu'elles ont accidentellement : c'eft ce qui fut obfervd le 5 de- cembre 1570 , le 21 novcmbre 1651, le ic fevrier 171 1, le 15 fep- tcmbre 1755 & le 21 dscembre 1740, oii Ion vit avee lurprife ks eaux du Rhone entrainer vers le lac tous les bateaux & tous les autres corps qui furnageoienf, & faire tourner les roues demouliu en fens contraire. Tome IX. Fartie Fran^oife. D E. i6 ABREGE DES ME MOIRES =:::i-- 0» poiirroit all^guer centre l'hypoth«fe de M. Jallabert , que Ton a P II Y s I Q u E. quelquefois appercu des feiches aiipres de Geneve, en iin temps ou les 'eaux de I'Arve eloient badesj mais outre que ces cas font trcs-rares, & AnrJe zy^z. que les feiches font alors peu fenfibles , elles n'arrivent jamais que dans des temps ou les eaux du Rhone font auffi fort baffes. Ces feiches font toujours precedees d'uii vent chaud. M. Jallabert en a obferve de cette efpece au commencement d'avril de I'annee 1741, qui etoient hautes de 7 i 8 pouces. Un vent du fud-oueft qui regna pendant 24 heures , fit monter le thermometre de M. de Reaumur , du 6^. degre au-deffus de o qui repond i la congelation, jufqu'au ii^.,8c les neiges fondirent en affez ' grande quantitci pour faire fuffifamment enfler I'Arve qui etoit auparavant fort baffe. Comme le lac ne commence k croitre qu'au mois de mai aprcs la fonte des neiges, le Rhone eft pour I'ordinaire fort bas au mois d'avril, & il I'etoit en cffet lorfque les feiches dont nous venons de parler, fu- rent obferv^es. M. AddiiTon etoit fonde en general ^ dire que cette efpece de flux & reflux etoit caufee par la fonte des neiges , mais ce n'eft Jufqucs-lk qu'une conjedure vague qui laiffe le phenomene indecis, & qui femble meme le contrarier h certains egards. On ne tient rien en phylique , fi Ton n'entre , conme a fait M. Jallabert, dans un detail exad: & raifonne des faits & des circonftances. I SUE LES COULEURS ACCIDENTELLES. I E fyfteme de Newton fur les couleurs , C\ conforme aux loix de la jinnife 1143. r^fra(9:ion , & fi independant de tout autre fyfteme, meme de celui de la propagation de lalumiere, foit par eniiffion de corpufcules, comme dans " les odeurs, foit par vibrations de predion, comme dans les fons, emporte aujourd'hui prefque tous les fufFrages. Ce fyfteme , que M. de Buffbn expofe en peu de mots ^ la tete de fon memoire fur les couleurs acci- dentelles, le lie parfaitement avec ce que nous allons dire ici de ces cou- leurs; mais nous le fuppoferons fuffifamment connu, & nous pourrions meme, k la rigueur, nous en paffer. On ne fauroit avoir un peu reflechi fur les qualites fenfibles des corps, tcllcs que la lumiere & les couleurs, les odeurs, la chaleur, les fons, les faveurs , fans etre pleinement convaincu qu'elies ne font rien en eux qui reffemble le moins du monde au fentiment que nous eprouvons ^ leur occafion : configuration de parties & mouvement , vibrations communi- quees au fluide qui eft entre eux & nous , & qui vient frapper les orga- nes de nos fens , c'eft ^ I'egard des corps tout ce qu'ils ont de reel pour la produdion de ces qualites que nous leur attribuons. Ce que je vois en regardant cette prairie eclairee du foleil, ce que j'entends dans I'air emu par les fremiffemens de cette cloche , ces modifications de mon etre entant que fenfible , que je qualifie de lumiere , de couleur , & de fon DE L'ACADEMIE ROYALE DE.S SCIENCES. 27 dans les objets qui en exciteiit chez moi la feiilation , ne leur appartien- ^^^"^— ™— nent certaiiiemcnt pas davantage que la doulcur ou la piquure que je fens p h v s i o u f ^ ma main, iorfqu'on en divife les fibres, appartient au fer qui me blelTe. Toute la difference qu'un fentiment confus me porte k imagiiier entre Ann^c IJ42, ces deux efpeces de fenfations , relativement aux objets qui les font nai- tre , n'eft fondee que fur la fage inftitution de la nature qui nous livre fans danger ^ I'erreur dans celles qui ne nous touchent que foiblcment, mais qui ne permet pas que nous nous trompions ^ legard dcs autres , entant qu'elles nous avertilfent de la deftruftion aftuelle ou prochaine de nos organes. Ces impreffions lirgeres, ces perceptions qui ne femblent artefter nos fens d'aucune trace corporelle, nous les repandons volontiers fur les corps qui nous environnent", mais la douleur ou un plaifir vif nous rappellent trop fortement k nous-memes , pour nous laiffer ignorer que ce qui le palie alors en nous , eft uniquement ik nous , & ne fauroit appartenir aux objets exterieurs : li on ne croit qu'agir , appercevoir , juger , icj Ton ne peut fe cacher que Ton fent. Les qualitss fendbles des corps, &, pour ne parler que de celles dont il s'agit dans cet article, les couleurs ne font done en un fens qu'apparence & iUulion , & ii'exiftent reeilement dans les corps qu'on nonime colores, que par I'elpece de lu- niiere qu'ils font capables de reflechir vers nous , & qui conftitue telle ou telle couleur, ou enfin par les vibrations communiquees par eux au milieu propre de la lumicre, & portees jufqu'au fond de notre osil. Cette theorie generale nous conduit k celle-ci , que toutes les fois que par quelqiie accident , ou par quelque caufe interne ou externe que ce foit, les fibres de notre nerf optique, ou celles de notre ccrveau qui leuf repondent, feront ebranlies de la meme maniere qu'elles ont coutume de I'etre par la lumicre & par les couleurs , nous verrons de la lumiere & des couleurs femblables k celles dont la prelence dcs corps lumineux & colores a coutume d'exciter en nous le fentiment. II n'eft perfonne qui ns I'ait eprouvc mille fois , ou par un coup fubitement recu lur les yeux , ou par I'indifpolition ou la (imple laffitude de I'organe, ou en preffant volon- tairement le coin de I'ceil , ou en fongeant", car les couleurs & les images que nous voyons dans nos fonges, ne lont pas moins vraies ^ notre egard que celles que nous appercevons en ouvrant les yeux fur une vafte campagne. Deli cette divifion bien naturelle des couleurs, en couleurs reelles dans le fens que nous I'avons explique, nccelfaires & permanentes , du moins tant que les parties exterieures de I'objet demeurent les mcmes, & en couleurs accidentelles & variables qui ne rclident abfolument qu'en nous. Lorfqu'apres avoir regards fixement le foleil , on vient a fernier les yeux , ou que , les yeux ouverts , Ton entre tout-k-coup dans un lieu oblcur , on voit fuccefTivement fur le djfque du foleil qui dtm:ure cm- Ereint dans I'imagination , & plus fouveiit conime fur une murailli , dil lane, du Jaune, du rouge, du verd , du bleu ou du violet, & enfin du noir , h-peu-prcs dans I'ordre des couleurs prifmatiques , & quclqu-fois lans ordre & k diverfes reprifes , felon que les cbranlemens & les con- vullions du nerf optique s'aft'oibliffent plus ou moins promptemeotj D ij Physique. iS abr^gie: des me moires ; couleurs vraiinent accidentelles, & qui changent fans qii'il arrive aucim changemeiit ^ la fiirface des corps auxqiiels nous les rapportons. Obfervons audi que les couleurs reelles fe peindront coiiftamment & Annii Z/^J- dans tous les cas fur le fond de Tail, meme inanime & fepare de I'ani- mal, au-lieu que les couleius accidentelles & variables, uniquement pro- pres ^ roeil vivant , & entierement dues ^ des mouvemens dent nous renfermons acftuellement la canfe mechanique , n'ont pas meme dans nos yeux, & au moment oil nous les voyons, cette exiftence fuperficielle des premieres. Car il eft plus que vraifemblable que les couleurs accidentelles ne font accompagnees fur le fond de I'oeil d'aucune peinture qui s'y rap- porte , ou plutot qu'elles fubfiftent par le feul ebranlement interieur qui nous en fait eprouver la fenfation malgre la peinture toute differente des couleurs reelles qui ne cefTent point de fe projetter dans I'osil , lorfqu'il eft ouvert fur des objets eclaires, & dont refulteroient d'autres ibranle- mens, d'autres fenfations, s'il fe trouvoit dans fon etat ordinaire. Les couleurs accidentelles peuvent done ctre produites par une infinite de caufes, & font innombrables par leurs nuances, comme les couleurs reelles & neccffaires. L'examen n'en eft pas moins curieux que de celles-ci j & il a cet avantage , qu'il pent conduire plus direftement ^ la connoiflance & a la guerifon des maladies de I'organe qui en eft le fujet. Quelques auteius ont parle des couleurs accidentelles dont on epronve la fenfation par le trop grand ebranlement, ou par la trop grande tenlion .de Tasil ; mais perfonne avant M. de Buffon , n'avoit remarque la corref- pondance fyftematique de ces couleurs avec celles qu'on nomme reelles \ Ear exemple , que le rouge y produit le verd , qu'au jaune fuccede le leu, & que CCS couleurs accidentelles, melees avec les reelles, donnent les memes phenomenes que ces dernieres melees avec d'autres de meme nature , correfpondance qui s'accorde parfaitement avec la theorie expli- qu6e en 1758, (a) des viteffes de vibration ou de tranfport du fluide, ou des corpufcules lumineux , felon le fyfteme Newtonien , & par I'ana- logie des cbranlemens plus ou moins prompts de I'organe avec ces viteffes. Parmi les experiences que M. de Buffon a faites fur les couleurs acci- dentelles, & qu'on trouve dans fon memoire, nous en choifirons une, & qui fuffira pour faire fentir I'ctendue ^ue pourroit avoir cette recherche. Si Ton regarde fixement & long- temps une tache, par exemple, un petit Carre de papier rouge fur du papier blanc , on verra naitre autour da Carre rouge une efpece de couronne d'un verd foible*, & li, en ceffant de regarder ce petit carre, on porte I'osil fur le papier blanc, on y apper- cevra tres-diftindlement un carr6 d'un verd tcndre, lirant un peu fur le bleu, & de la meme grandeur que le carre rouge. Cette apparence, ce carre verd imaginaire, fubdfte plus ou moins long-temps, felon que I'impreflioa de I'organe, qui s'y rapporte, a ete plus ou moins vive, & il ne s'cvanouit qu'apres que I'aeil s'eft porte fucceffivement fur pluficiirs autres objets dont les images , & la nouvelle impreffion moins forte que la precedente , ont («) CoII« II faudroit done favoir il I'obftacle que le mouvement apporte h la poii- gilation de la furface de I'eau , peut prevaloir fur celui que le moins de froideur doit caufer vers le fond. Mais nous n'examinerons point ici une raifon qui ne fauroit etre admife qu'autant que le fait quelle fuppofe , fe- roit certain. II ne s'agit que de le conftater ce fait , ou de le detruire, ou de demeler ce qu'il pourroit y avoir d'^quivoque. Le temoignage de M. Hales meritoit bien une pareille difcuflion , d'ailleurs afTez curieufe par elle-meme , & digne de tons les foins que s'eft donncs M. I'abbe Nollet pour la rendre concluante & decifive. II remarque d'abord , i°. Que les obfervations rapportees par M. Hales,' ont etc faites dans un endroit de la riviere qui fert d'abreuvoir , & oii , par confequent , elle avoit peu de profondeur. lo. Que la glace qu'il y a vue n'ayant qu'un tiers de pouce d'epaiffeur, n'a pu lui permettre de marcher deffus , pour I'examiner plus avant. 30. Que le temoignage des pecheurs eft (i fouvent employe dans ce r6- cit , qu'il eft h craindre que M. Hales n'y ait mis trop de confiance. II convient qu'en general le defTous de la glace qui fe forme fur les rivieres n'eft point uni, conime on le voit ordinairement k la glace des eaux dormantes -, qu'il eft moins compade , & comme enduit d'une pouf- fiere de pctits giacons plus ou moins grumeles, en cela afTez feniblable anx pierres qu'on tire de la carriere , & qui font couvertes de cette partie tendrj; DE L'ACADfiMIE ROYALE DES SCIENCES. jj :.■ ^' ~ '■ minent , tandis que les autres continuent de rouler avec le courant; enfin charges de toutes les particuies de matiere etrangere qu'ils portent avec eux ou qu'ils rencontrent fur leur chemin , de terre , de vale , d'ecume , de jpaille, de brins d'herbe , iis forment au-deffous, aux cotes, ou au- "deffus des gros glacons, tantot cette- efpece de duvet rare & fpongieux qu'on y obferve, tantot cette luperficie apre & grumeleufe qui n'y eft pas "moins ordinaire, & ou Ton croiroit voir Tempreinte d'un terrein fur lequel lis auroient pris nailfance. Et il ne faut pas douter que parmi tons ces glagons qui couvrent les rivieres pendant les fortes gelees, il ne s'en trouve plulicurs oii cette apparence d'empreinte n'eft pas trompeufe , & qui re- tienncnt meme des fragmens de la rive dont ils fe font detaches, ainii que nous I'avons fait entendre au commencement de cet extrait , mais ceux- ci , felon M. I'abbe Nollet, font en tres- petit nombre. En un mot, on n'a nullement befoin de recourir ^ la pretendue congelation du fond de Teau , pour expliquer les differences qui caracfterifent les glacons des gran- des rivieres, compares k ceux des eaux dormantes, & e'en eft afiez pour oter toute la force au grand argument de I'opinion vulgaire. Mais en admettant toutes ces explications comme vraifemblables , & memes fuffifantes, ne pourroit-on point demander encore s'il eft bien prouve que le lit des rivieres en un temps de gelee , ne fe refroidilTe pas plutot que la furface exterieure de I'eau ou du terrein expofe i I'air? car enfin il y a une chaleur centrale ou fouterraine , quelle qu'en foit la caufe , dont les effets ne font pas douteux , & dont la temperature aftuelle de I'atmofphere participe infiniment, ou n'eft en grande partie que le reful- tat, conjointement avec ce qu'il faut en attribuer aux caufes generates & particulieres de la viciffitude des faifons. Cette chaleur qui varie fans ceffe aupres de la furface de la terre, mais dont la privation totale ne feroit du globe terreftre qu'une maffe de glace , interceptee ou diininuee par des circonftances que nous ignorons , & qui entrent peut-etre pour beau- coup dans la caufe de la gelee, ne donneroit-elle pas occafion ^ un plus prompt refroidiffement du fond du lit des rivieres & de i'eau qui en ap- pro^he , par cela meme qu'il eft plus profond & k couvert de fair extc- rieur qui n*en a pas encore fenti la diminution ? J'avoue qu'il n'y a pas grande apparence k cette conjedure , & que d'autres eft'ets , tels , par cxemple , que celui de la glace qu'on ne trouve jamais au-deli de quel- ques pieds Ibus terre, s'oppofcnt manifeftement au fujet de doute qu'on en pourroit tirer dans la queftion prefente. Ne negligeons point cepen- dant de difliper ce doute par I'infpedion meme du fait. M. i'abbe Nollet a plonge plulieurs fois & en difterentes annees des thermometres au fond de la riviere, foit au commencement de la gelee, foit lorfque la glace de la fuperficie avoir 2 , 3 , 6 & jufqu'ii 8 pouces d'^paiiTeiw, & il n'a jamais trouve I'eau dc ce fond au degre de froid DE L'ACAD^MIE ROYALE DES SCIENCES. j^ niceCfiite pour la convortir en gl.ice. 11 eft vrai quVUe en a gm i^yif fnit ■' ■ n"' ii approclii , mais ce n'a iti qu'aprcs plulieiirs jours d'une forte gelce , & p ,, y s i o u i nullement lorfque la glace de la fuperficie ii'avoit que trois quarts de pouce d'ipailleur, encore moins lorfqu'elle netoit que d'uti tiers de pouce, Annie iJ4$- qui eft ie cas oii M. Hales fuppofe qu'il sen etoit forrac une de demi- pouce fur Ie fond nieme. Nous ne fuLvrons point M. I'abbe Nollet dans un plus grand dtftail de ces obfervations qu'il deduit avcc beaucoup de clarte, non plus que dans I'examen de quelques autrcs phenomenes de la glace & de la gelce qu'il a touches par occafion , & qu'il taut lire dans fon memoire. DIVERSES OBSERVATIONS DE PHYSIQUE. L Sur la Scintillation des Etoiles fixes. T J—i A plupart des phyliciens modernes s'accordent "k expliquer par les tre- Hid, mouiremens de I'air , ou des vapeurs qui s'clevent dans I'air, la fcintilLa- fion des etoiles fixes , ces fecoulles , ccs vibrations de la lumiere qu'elles lancent vers nous, cet etincellement qui les diftingue des planctes. II n'cft perfonne qui n'ait pu fe convaincre d'un femblable eftet, qu'on ne peut guere attribuer qui cette caufe, en regardant I'horizon par-dedus une vafte campagne dans un jour de foleil fort chaud : tout y paroit en mou- vement de vibration. On verra encore la meme apparence ^ quelques pouccs au-delTus d'un pocle , fi Ton y regarde vis-i-vis d'une fenetre , ou de quelque autre objet fur lequel donne Ie grand jour. La force refract ■ tive d'un air differemnient echauffe ou mele de vapeurs en mouvement, n'ctant pas la meme , il faut neceffairement que la lumiere qui paffe ^ travers , y fouffre des rcfradions differentes. qui elevent & qui abailfent alteriiativement les objets, & y caufe ce tremblottcment apparent. M. New- ton ajoute k cette explication generale une {*) circonftance moins con- (•)P?g. 29. in ^to. nue, & tres-inginieufement remarquee. Cet air tremblottant , dit-il, (**) (»*) Pnncip. I. g. diitourne continuellement de la prunella etroite de nos yeux une parties- 41- des rayons de lumiere qui devoient y tomber , ou ne les y fait entrer que par reprifes. II n'en eft plus de meme lorfque nous regardons les fixes ^ travers de grandes lunettes, parce qu'alors ces memes rayons trouvant un Elus large paffage k I'ouverture de I'objedif de la lunette , & fe raflem- lant ^ fon foyer, arrivent toujours dans notre cjil ^-peu-prcs en meme quantite. Ainfi la fcintillation a lieu dans Ie premier cas , & elle cefie dans Ie fecond. II faut encore prendre garde que ces efFets, k I'egard des corps celeftes, ne font fcnllbles que fur une grande lumiere ou fort vive : c'eft pourquoi on ne les remarque point communement dans les planetes. Venus St, Oierciue ont cependant quelquefois un peu de cet etincellement , 4 caufe Eij 3» AB R i G t DES Ml^MOIRES »— — — i" de leur proximite du foleil , & par la vivaciti de la Iiimiere qu'elles r^- _ flechiffcnt vers nous-, & le foleil liii-mcme , vu avec la lunette & an tra- rHYsiQui. ygj.j j^'jiij verre colore ou cnfume , paroit prefijue toiijours tremblotter jinn/e 1747, ^ ondoyer par les bords de foii difqiie. On ne fauroit done guere dou- ter que la Icintillation des ctoiles fixes ne foit principalenient due aux vapcurs qui s'elevent dans I'atmofphere -, mais enfin il ne fera pas inutile de s'en aflurer, s'il fe peut , par I'obfervation immediate faite dans un pays oil la puret^ de I'air n'admette aucune de ces vapeurs. ' M. Carcin , dodeur en medecine , de la fociete royale de Londres , & correfpondant de I'Academie , nous la fournit cette obrervation , accom- pagnee de plufieurs circonftances curieufes , dans une lettrc qu'il a ecrite a M. de Reaumur, & dont nous aliens donner I'extrait. C'eft en Arabic, & diredemcnt fous le tropique du Cancer, de meme qu'i Gomron ou Bander- Abafli , port fameux du golfe Perfique , que M. Garcin a obferve ce ciel , ou cet air exempt de vapeurs. On fait que ce pays eft fort chaud , & que I'air y eft parfaitement ferein prefque toute I'annee, Le printemps , let^ & I'automne fe paflent , dit M. Garcin , fans qu'on y voie la moindre rofee. Dans ces memes temps tout le monde couche dehors fur le haut des maifons qui font en plate-forme; le lit conlifte en une piece de toile coupee en quarre long , & attachee par fes quatre angles aux bouts fuperieurs de deux p!iants ou de deux pieds dont les branches fe croifent en fautoir & s'ouvrent autant que la toile peut s'etendre; c'eft fur cette toile toute fimple que Ton dort tout nud, apres avoir mis un ou deux coaffins fous fa tete , la grande chaleur ne permet- tant pas de dormir avcc quelque chofe de plus. Quand on eft ainfi cou- che , & qu'on vient ^ s'cveiller , il n'eft pas poffible d'exprimer , dit M. Garcin , le plaifir qu'on prend i contempler tranquillement & dans le filence de la nuit , la beaiite du ciel , I'eclat des etoiles , & leur commune revolution d'orient en Occident. La magnificence de ce fpcdtacle fait nai- tre miile reflexions, & frappe egalement le lavant & I'ignoranf, c'eft une lumiere pure, ferme & eclatante, nul etincellement. Ce n'eft qu'au milieu de I'hiver que la fcintillation , quoique tres- foible , s'y fait appercevoir. M. Garcin ne revoque done pas en doute qu'il ne faille artribuer la fcin- tillation des etoiles ^ une conftitution d'.iir toute contraire , aux vapeurs qui s'y roelent, & qui s'elevent fans ceffe dans I'atmofphere des pays moins fees , & fon explication fur ce phenomene revient ^-peu-pres 'k celle que nous en avons donnee au commencement. La fecherefle des environs du golfe Perlique eft telle , que non-feule- ment on n'y voit Jamais fortir de terre aucunes vapeurs , mais qu'on n'y apper9oit pas meme un brin d'herbe pendant les trois faifons chaudes de I'annee dans les lieux decouverts & les plus expofes aux rayons du foleil > c'eft prefque de la cendre plutot que de la terre , elle y eft conime cal- cinee. II n'y a que trois on quatre fortes d'arbrcs qui puiffent y fubfifter dans les lieux incultes , encore y font-ils bien rares. Le royaume de Bengale, o^ M. Garcin a fait auffi fes obfervations , eft bien different; car quoique ce royaume foit ^ la meme latitude, ou qu'il foit meme plus DE L'ACAD^MIE ROYALE DE«> SCIENCES. ^7 meridional que le golfc Perlicjue & la plus grande partie dc I'Arabie , les ^— ^^— m^ plaiites y croiffent en abondance, & les vapeiirs s'y font appercevoir fur- ^ tout par !a rofee. On s'y garde bicn de coucher audi fouvcnt dehors que " " ■"■ ^ ' Q u ^ dans le midi de la Perfe, & par une fuite de tout ce que nous venons Anne'e 174^. de dire, la lumiere des etoiies y eft prefque toujours vacillantc , moius cependant qu'en Europe. Ceci nous rappelle une fembiable obfervation faite par M. de la Con- damine dans le Pt!rou , pays renonimc par la fingularite qu'il n'y picut Jamais, ou, pour parlcr plus exaftement, prefque jamais, du moins dnns les lieux depouilles de forcts, au bas de la cordeliere, par exeniplc , cntre cette chaine de montagnes & la mer , & tout le long de la cote depuis le golfe de Guayaquil jufqu'a Lima , capitale de la province , k environ 1 1 degres de latitude auftrale. Aufli M. de la Condamine qui a parcouru toute cette cote , s'apper9ut que la fcintillation des fixes y etoit bien moins fenl.ble que dans nos climats. M. Garcin nous a prevenus dans la reflexion qu'il fait , & qui fe pr4- fente ici natnrellement, fur les contrees Aiiatiques, qui furent le premier berceau de I'aftronomie. On comprend aflez quel avantage un ciel toujours pur & ferein a du leur donner h cet egard fur le refte du monde. II nous apprend de plus que la commodite de voir toujours ce ciel avec le cor- tege briliant qui Tacconipagne , ou plutot rimpoflibilite de ne le pas voir fans cefle, a fait de tous les habitans de Bander- Abafli & des environs, prefque autant d'aftronomes. Les interruptions du fommeil deviennent pour eux la fource de mille obfervations que des foins p^nibles nous preparent, & que fonvent un ciel ingrat nous enleve. Tous favent lire plus ou moins diftinftement dans ce grand livre , &: determiner au jufte, quand ils s'eveillent pendant la nuit , I'heure qu'il eft i ce vafte & magni- fique cadran qui s'offre a leurs yeux. Si les talens fe devcloppent k mel'ure qu'il fe prcfente plus d'occafions de les exercer , & s'ils font affez egale- ment repandus iur la totalite du genre-humain, combien de femblables pays, la Chaldee, I'Egypte & I'Arabie, n'ont-ils pas du produire d'aftro- nomes, lorlque les fciences & I'aftronomie fur-tout y ^toient en honneur? Le different degri de force & de frequence qu'on peut remarquer dans la fcintillation des fixes en Europe , relativement aux difFdrentes faifons de I'annee , felon qu'elies font plus ou moins elevees fur I'horizon , & par rapport ^ quelques autres circonftances , fournit encore h M. Garcin de «juoi fe confirmer dans I'hypothefe des vapeurs. C'eft un detail qu'il traite, comme tout le refte , avec intelligence , msis qu'il eft aife de ramener aux memes principes, & que nous fupprimons ici, pour laifier au ledteur le plaifir d'y fupplcer. P u y S 1 Q V E. ABR^G^ DBS MEMOIRES I I. Ann^e 174 J. Pierres ponces vues fur la mer, cntrc le Cap de Bonne Efp^rance & Us ijles de Saint-Paul & d'AmJlerdam. Nous devons encore ^ M. Garcin robfervation fuivante qu'il apprit ^ Bat.ivia en 1726, d'un capitaine des vaiffeaux de la compagnie Hollan- doife, homme eclaire, & dent il connoiffoit rcxa(5titiide. Le vaiffeau faifoit route du Cap de Bonne-Efperance aiix ifles de Saint- Paul & d'Amftcrdam , par un vent oueft-nord oueft dans le mois de mars de I'annee iji6 , pour gagncr cnfuite vers les ifles de la Sonde. II etoit entre le 58 & le i^rnc. degre de latitude auflrale, lorfqu'on vit la mer couverte d'une quantite prodigieufe de ces picrres calcinees , poreufes & legcres, qu'on nomme pierres ponces, depuis la groffeur d'une noix juf- qu'i celle de la tete d'un homme & davantage. On vogua parmi ces pierres ou ces fragmens de pierre pendant neuf ou dix jours, fur un elpace de plus de 500 lieues : elles etoient r^pandues nord & fud , & flottoient au gre du vent , fans qu'on en vit les Dornes. On s'informa Tannic luivante des habitans du Cap , s'il ne s'etoit rieii pafle dans les terres voilines qui put y faire foupgonner I'eruption de quelque volcan -, mais ils rcpondirent qu'ils n'en avoient aucune connoillance , quoiqu'ils euffent vu quantite de ces pierres que la mer avoit jettees fur leurs cotes dans le temps oii le capitaine Hollandois avoit fait fon obfervation. M. Garcin ne doute pas que ces fragmens de pierre ne vinflent du fond de la mer -, il croit auui que les montagnes oii Ton trouve beaucoup de pierres ponces, portent une marque certaine de leur origine, & qu'elles ont ete volcans , mais il ne penfe pas pour cela que toutes les grandes montagnes, ni le plus grand nombre doivent leur formation ^ I'eruption des volcans-, il a li-deifus un fentiment qui nous fera plus particuliere- ment developpe dans quelque autre occadon , dont le public profitera. Quoi qu'il en foit , on n'ignore pas qu'il y a des feux fouterrains au- deffous des mers, de vrais volcans qui fe manifeftent par leurs eruptions. Les ifles formees de nos jours auprcs de celle de Santorin dans la Medi- terranee , & entre les Acores dans I'Ocean , en fourniflent des preuves fenlibles. Les pierres ponces qui flottent de temps en temps fur la mer en tres-grande abondance & fort loin des terres, ne le juftifient guere moins ; on le fait , mais de nouveaux exemples fur une queftion curieufe & intereffante , & fur- tout lorfqu'ils font auffi marques que celui qu'on vient de voir , meritent toujours d'avoir place dans le rccueil de faits Sc d'obfervations que I'academie a principalcment en vue. DE L'ACAD^MIE ROYALE DES SCIENCES. I I I. 59 P H V s : Q U T. Bardie olfervi a Rkeims, Annie Ha:^. M. i)E lA Croix, chapelain de Saint-Symphorien de Rheimj, a icrit \ M. Caflini que le 1 6 du mois de mai de cette annee, vers les 7 heiires & demie du matin, il avoir obfervd un parelie, dont voici Ja dcfcription. C'iStoit un grand ccrcle luminenx & colore dont le foleil occupoit le centre, & dont le diamctre avoit environ 40 degres de longueur-, la largeur de fon limbe pouvoit etre de 2. degres, une bande coloree & audi luinineufe que ce limbe , dirigee d'orient en Occident, & d'environ un demi-dcgre moins large , en formoit le diametre , & pafloit par confe- quent par Ton centre & par le foleil. Aux deux extremites de ce diametre ^toient deux petits foleils affez mal formes, de figure ovale, & eloignes du cercle de pres d'un degre , la vivacite de leur lumiere alloit Jufqu a ne pouvoir etre regardce fixcment ; les rayons qui en partoicnt , etoient en plus grande quantite ou plus denfes que ceux du limbe lumineux, & dans celui de ces deux faux ioleils qui etoit vers I'orient , ils s'etendoient uii peu plus loin qu'ils ne faifoient dans fon pareil vers le cote oppofe; leur diametre n'etoit guere que le tiers de celui du veritable foleil. Vers le bord fupirieur & feptentrional du limbe du cercle on voyoit une bande parallele \ la precedente , de meme couleur & de meme largeur vers foil milieu; mais fes extremites fe terminoient un peu en fufeau, c'etoit, quant i fa longueur, comme une tangente de 30 degres fur le milieu d'un arc. M. de la Croix ajoute que le ciel etoit ferein, excepte vers I'orient ou il y avoit quelques nuages , & que le parelie fubfifta Jufques vers les dix heures •, ce qui lui donne une tort longue duree. Ces bandes & ces trainees de lumiere dont nous venons de parler , font la partie du phenomcnc oii les ditterens obfervateurs femblcnt le plus varier cntr'eux par la maniere dont ils les dccrivent. Dans tons les parclies que Hevelius , Huyghens & plulkurs autres auteurs nous ont rap- portes , CCS bandes font prelque toujours formees , ou par les queues des faux foleils, lefquelles s'etendent en ligne droite de part & d'autre & les joignent au veritable, conime ici peut-ctre dans la bande diametrale, ou par Tare tronquc ou entier du limbe de quelquc autre cercle beaucoup plus grand, & qui joint les trois foleils, ou par le fragment d'un cercle qui touche celui qui a le foleil pour centre, comme pourroit etre encore ici cette efpecc de tangente de jo degres. Nous ne pretendons point par-li infirmer I'obfervation de M. de la Croix, qui nous paroit exadc, nous voulons fculement indiquer des circonftances auxquelles on pourroit ne pas faire attention , & qui fe font montrees fenliblement dans les pa- relies que nous avons obferves, de meme que dans la plupart de ceux dont les auteurs nous ont donne les defcriptions & les figures, & oii les cercles lumineux & les foleils fe trouvent quelquefois en tres-grand nom- bre. Tous ces phenomenes nous femblent s'accorder avec la conjecture 40 abr£g^ des memoires M^M^^i^^— ■ qui fut propofee fur ce fujet dans I'hidoire de 17 n, que les p.-irelie$t alfez dirterens en app-irence pir le noinbre de ctrcks & de foleils, ne P M y S I Q U H. ^^^j j.iinais que le mcme , ainfi que I'arc-en-ciel ; que leurs differences ne Annie 174^. viennent que des parties qui manquent i quelqu.^s uns , parce qu'en ces endroits les matieres refraAives ou reflechiirantes , les particules d'eau, de neige oil de glace repandues dans I'air , ont manquees, ou le (ont trouvees obfcurcics par des matieres plus opaques , ou enfin parce que dans ces endroits douteux I'obfervation elle-meme a ete imparfaite ; que les faux foleils ne refiiltent que d'une complication de lumiere ou do la iuperpoli- tion qui sen f.iit aux points d'iuterfe(5tion des cercles oil en effet ces fo- leils font toujours places , &c. I V. Siir un Arc-en-cid extraordinaire vu en DaUcarlie. Les parclies entourent toujours le foleil, le foleil eft toujours au cen- tre d'un ou de plulieurs de leurs cercles concentriques. Les arcs-en -ciel ou iris paroiffent toujours au contralre dans la partie du ciel aui eft di- red:ement oppofee au foleil, & lorfqu'il en paroit plulieurs ^ la fois , ils font prefque toujours concentriques cntr'eux. C'eft fur ce pied-li que cc mettere , qui paflbit chez les anciens pour un effet de la nature des plus jnexplicables, eft aiijourd'hui I'un des mieux expliques, des mieux calcules. Marc-Antoine de Dominis, Defcartes , & enfin Newton en ont mis la theorie dans le dernier degre d'evldence. L'obfervation de celui-ci nous a hh communiquee par M. Cellius , profeffeur d'aftronomie ^ Upfal , dont nous avons deji fait mention honorable dans notre hiftoire. {a) II a iii vu en Dalecarlie province de Suede, & c'eft M. Celfius lui-meme qui I'a obferve le 8 aout de cette annee 174.3 , vers les chifiant de I'caii , oil entre ce point & I'arc en ciel , piiifqu'on vient de „ voir, par robfcrvatioii de M. Eftienne & par celle de M. Cellius , que le""'''^^'^^^ phenomene a lieu dans Tune & I'autre polition. M. Haliey fuppofe dii Annie t743 nicnie cote que la ville de Chefler, etoit dans le cas de M. Cellius, la riviere fe trouvant de meme vers le couchant , entre Tobfervateur & le loleil i & ii Ton en Juge par I'dvenement , c'eft le cas le plus favorable. V. Stir le Haujfement vrai ou apparent de la Mer aupris de certalnes Cotes. M. l'aeb!^ Conti voulant donner raifon du hauflement de la mer par rapport ^ quelques edifices de Venife oil Ton croit i'avoir apper^u , s'eft adrcfle \ Tacademie pour favoir fi Ton avoit des obfervations precifes fur ce fujet , & pour lui en demander la communication 5 on n'a pu le fatif- f.iire. M. Caffini, qui a beaucoup travaiile fur les marees, comme on le voit dans piulicurs volumes de nos memoires , a dit qui I'egard de celles de la Mediterranee , eiles etoient (i peu fenlibles, qu'on n'avoit fait aucune obfervation dc la hauteur ou elles avoient pu monter en diffcrens tempf. II en eft ipeu-pres de meme de celles de I'Ocean pour la comparaifon que M. Conti deliroit , quoiqu'elles foient beaucoup plus grandes & que Ton en ait plulieurs obfervations exaftes, faites en divers ports du royau- mc. Nous n'avons nulle connoiffance qu'on ait marque ancienncment la hauteur de la mer dans fon flux & reflux, par le moyen de quelque point fixe, pour la comparer i celle qu'on y remarqueroit dans la fuite ; I'efprit d'obfervation & des experiences eft trop moderne pour cela. Nous avons ccrit li-deffus \ M. Bigot de Morogues , capitaine des vaifleaux du roi , correfpondant de I'academie, & tres-capable d'un pareil exam en , qui n'a pu nous ^ciaircir davantage fur cette matiere. II eft entre feulement dans un detail qui nous en fait mieux fentir la difliciilte , du moins i I'egard du port de Breft , ou il etoit lorfqu'il a repondu k nos queftions. M. Froget de I'Eguille , lieutenant des vaiffeaux du Roi du departement de Roche- fort, en a mande quelque chofe d'equivalent i M. du Hamel. On ne peut nier cependant que le niveau de la mer n'ait change )i I'egard de certaines cotes, ou, ce qui n'eft ni moins intereflaut ni moins vraifemblable , que les cotes n'aient baiffe ou hauffc , & I'hiftoire nous fournit li-deffus des temoignages qui ne permettent pas d'en douter. Mais ces temoignages , ou I'on n'a guere eu en vue d'inftniire les phyliciens, ne les inftruifent guere en eftet, par le defaut de mille circonftances dont il feroit i fou- haiter qu'on eut accompagne les faits. Dire au public que nous manquons d'obfervations fur ce nijet, c'eft inviter les fa vans ^ en faire. 44 ABREG£ DES MEMOIRES V I. Physique. Ann/e 1743. Hauteur extraordinaire du Barometre. M. Allaman de Lcydc , qui s'appliqiie avec zele an progres de la phyfique , editeur de la tradiidion Francoife des ouvrages de M. s'Gra- .vefande, a mande h. M. I'abbe Nollet, avec qui il eft en commerce de lettres, que le 2 du mois de Janvier de cette annce 1743 , par un vent d'oueft & pendant une pluie aflez abondante , le barometre avoit ete plus haut k Leyde qu'on ne I'y avoit vu depuis 40 ans. Le mercure etoit monte ^ ij pouces 9 lignes du pied du Rhin , c'eft k zS pouces 8 lignes | du pied de Paris , felon le rapport connu de celui - ci an precedent en raifon de 144 ^ 159. Le barometre de I'obfervatoire eft ' monte le merae jour k 18 pouces 7 lignes , de i ligne | moins qu'^i Leyde , fur quoi il refteroit ^ comparer les niveaux des lieux ou les deux obfervations ont etc faites. Tout ce que nous favons fur ce fujet par divers nivellemens de la riviere de Seine depuis Paris jufqu'^ fon embouchure , c'eft que la grande falle de I'obfervatoire eft de 45 ^ 46 toifes plus haute que le niveau de la mer, ce qui repond ^ environ 4 lignes ^ de hauteur du mercure, & donneroit au barometre 20 pouces 1 1 lignes {•, ainfi la hauteur du barometre \ Leyde le 2 Janvier, pourroit bien n'avoir pas ete plus grande ni meme aufli grande qu'^ Paris le meme Jour , rela- tivement aux lieux de I'obfervation , & fuppofe que la ville de Leyde foit affife fur un terrcin moins eleve que celui de Paris, ^ quoi il y a beau- coup d'apparence, vu la proximite de la mer & U fituation de la ville de Leyde , qui eft dans une plaine fur un bras du Rhin. Kn ce cas il faudroit que le barometre fut ordinairement , toutes proportions gardees, plus bas ^ Leyde qu'i I'obfervatoire de Paris , ce qu'il feroit toujours bon de favoir , & pourquoi 5 car il n'eft pas fort rare a Paris que le barometre monte ^ 28 pouces 7 lignes-, cette annee & Tannce 1741 nous en fournif- fent des exempies, & li Ton remonte plus haut, on en trouvera de tout femblabk'S ou plus forts, favoir en 1757, 28 pouces 7 lignes; en 1726, 28 pouces 8 lignes; en 1722, 28 pouces 7 lignes i, &c. ce qui eft bien different d'une revolution de 40 annees pour une feule de ces hauteurs de 28 pouces 7 lignes. M, Allaman ajouteroit i I'obiigation que nous lui avont de I'avis qu'il nous a donne, {\., par la verification des lieux & par la ccmparailon de plufieurs annees entre Paris & Leyde, il vouloit con- tribuer ^ eclaircir ce point particulier de phylique. Deux confidsrations peuvent rendre le fait digne de remarque. L'une, qu'en general les hauteurs du mercure dans le barometre font d'autant plus grandes en differens pays , que ces pays font plus eloignes de I'equa- teur & approchent du pole : or la latitude de Leyde ou fon eloignement de I'equateur furpaffe de pres de 3 degrcs } la latitude de Paris. L'autre , que les hauteurs & les variations du barometre , toutes compenfations faites, confervent un grand accord & beaucoup de conformite entr'elles DE L'ACADEMIE R'OYALE DES SCIENCES. 45 dans des lieux fort eloignes; par exemple , ^ Uraniboiirg, Genes, Malaca ^HHaaHOKma & Paris, comme on I'a conclu de pluncurs obfervations correfpondantes; ' & la diftance de Leyde ^ Paris n'eft pas, ^ beaucoup prcs, aufli grande que * h y s 1 q u i. cclle de tons ces licux. On ne peut doiiter cependaiu qii'il ne s'y trouve Ann^e 7'^dJ d'affez grandes differences par rapport ^ plufieurs aiitres endroits ; & c'cft ' ce qii'il faiit tacher de connoitre, ou du moins d'oblervcr. Cette grande cnveloppe d'air qu'on 'nomme ratmofphere, & dont la pefantcur locale & aduclie i"e fait fentir fur le barometre , doit par clle-meme tciidre fans cefle ^ lequilibrc, & i une forte de parallelifme autour du globe terreflre, ainii que tout autre fluide ; mais elle a fes viciflltudes & fes tempetes , auffi-bien que la mer, fes flux & fes reflux difFcrens, felon Ics circonf- Unces & par le concours dune infinite de caufes generalcs & particulieres. V I I. Boutdlles d'une fragilite finguUere. Ces bouteilles, dont le celebre M. Wolff a envoye la defcription & les proprictes ^ M. de Reaumur , furent apportees cet etc par un Italien , i Hall, en Saxe, ou M. Wolff fait fa refidence. EUes ont la forme d'une pomme de canne ou d'une poire fort alongee ; leur longueur eft d'envi- ron S pouces fur deux ou trois de largeur •, le verre en eft par- tout affez mince, excepte i leur fond qui eft convexe en-Uehors , & de deux ou trois lignes d'epaiffeur. Si par leur ouverture , qui peut avoir un ou deux pouces de diametre , on laiffe tomber perpendiculairement une pierre audi groffe que cette ouverture le peut permcttre, qui ne foit ni fort dure, ni anguleufe , ou une balle de plomb beaucoup plus pefante , le fond & toute la bouteille demeurent dans leur entier, fans fe caffer ni fe feler. Ainll il eft clair que ce n'eft pas abfolument la percuflion , quoiqu'affez forte, qui fait caller le fond de ces bouteilles : mais pour peu qu'on y faffe tomber un petit fragment anguleux de pierre i fulll , leur fond fe cafle en plulieurs morceaux , ^-peu-prcs comme les larmes de Pruffe on de Hollande. La bouteille fe brife aufli jufqu'i quelqucs doigts au-delTus, mais li elle fe rompt plus haut & au-del^ du milieu de fa longueur, c'eft en gros morceaux , fouvent irreguliers , & quelquefois en forme de cou- ronne ou d'anneau, peut-etre par le retentilTement foudain de toutes fes parties. M. Wolff croit que ces bouteilles , de meme que les Inrmes de Verre, ont ete refroidies dans I'eau en fortant du four, & L conjcdure ne paroit pas douteufe ; on connoit les larmes de Hollande, lours pheiio- menes font decrits dans la plupart des traites de phylique ; elles fouffrent le marteau quand on en frappe la tete , mais elles fe reduifent en poudre lorfqu'on les rompt par I'extremite de la queue qui eft quelquefois pref- que aulll deliee qu'un cheveu. Le meme effet arrive ii Ton ufe la tete de la larme fur une pierre a eguifer, jufqu'i la profondeur de quelqu'une des petites foufflures ou bulles qu'on y appercoit. II n'eft pas etorinant qu'elies reliftent a d'affez grands coups de marteau , le verre dont elles font faites 4 y jetta la plus grande conftcrnation , Ic peuple la prit pour un prelage de la fin du monde , & ce nc fut qu'avec beaucoup dc peine que M. le marquis de Valle umhroj'o , corregidor de cette ville , parvint i fairc comprendie \ cette populace effrayec , que le phcnomene ctoit produit par des caufes purement naturelles. Ce fait a etc inande \ M. de la Condamine par D. Ignacc de Chiriboga, chonoine de la catlii- drale de Quito. V I I. M. l'abe^ de Fontenu, de Tacademic royale des infcriptions & belles-lettres , qui joint i la plus grande erudition , I'efprit & I'art des obfervations, a dit ^ M. de Reaumur, que dans la paroilTe de Brof- figny, prcs Fougeres, fur les frontieres de Bretagne, il y a un etang qui pcut palfer pour une des merveilles de cette province : il eft litue dans \\\\ valion d'environ '- de lieue de circuit dont il occupe le fond, & re^oit fes eaux de quantite de fources qui lortcnt des coteaux qui I'entourenti independamment d'un petit nombre d'ifles flottantes qu'on voit fur fa fur- face , & dont quelques-unes font garnies d'arbres, il eft prefque enticre- ment couvert d'une grande prairie fermement adherente \ la chauffee , fans tenir en aucune maniere aux autrcs bords de I'etang : cette prairie eft entierement foutenuc fur I'eau •» quand I'etang eft plein , elle eft de niveau avec la chauffee, & quand les eaux baiffent, elle forme une efpece de glacis. On voit bien par cette defcription , qu'elle doit neceffairement couvrir la bonde de I'etang ; ainli , quand on veut le mettre \ fee pour le pecher , il faut de neceflite y faire une ouverture •, c'eft dans une occa- (ion pareille, que M. I'abbe de Fontenu a pu mefurer I'epaiffeur de cette iile, qu'il a trouvee d'environ 6 pieds •, il obferva en meme temps que cette efpece de terrein etoit formie de differentes couches entre-melces de racines-, les plus voifines de la furface de I'eau font les plus noiratres, elles ne paroiffent qu'un terreau fort leger , forme par la pourriture des racines des herbes & des arbriffeaux qui y naiffent & y periffent chaque annee, il eft bien certain qu'il n'a pu parvenir \ cette epailleur & 'k cou- vrir prefque entierement I'etang , que dans une longue luite d'annees. M. I'abbe de Fontenu penfe qu'en obfervant pendant quelques annecs foil accroiffement en epaiffeur , on pourroit en conclure i-peu-pres le temps auquel il a commence k fe former-, cette efpece de croute eft d'un tilfu fpongieux & humide , on peut, en y enfoncant un long baton, traverfer toute fon epaiffeur ; ccpendant le dcffus en eft lolide & ferme , on peut s'y promener, &: on croit marcher fur du duvet, parce qu'il eft revctu de mouffe entre-melce de quelques autres herbes : on pourroit meme y mener paitre dtsbeftiaux, mais les bords de c;tte prairie flottante ne font pas aulli folides que le milieu , dans lequel meme il fe trouve quelques Totm IX. Partie Fran^oife. _ I P H Y S I Q U B. eg ABRfiG6 DES MfiMOIRES,&c. endrolts qui pourroient 6tre fiineftes aux anitnaux qu'on y conduiroit. II feroit affez nature! de croire q'le cet etang ainfi convert devroit etre pen ' poiffonneux , cependant la peche y eft tres-abondante & le poiflbn tres- ^ne'e 174 A. gros-, M. I'abbi de Fontenu y a vu prendre entr'autres gros poiffons, un brochet de 14 livres & un de 16. II etoit refervd a un phydcien audi Verfe que Kii dans la connoiffance de I'antiquite, de trouver dans une dcs fingularites de I'hiftoire naturelle de France , un modele en petit de la fameuTe ifle de Dclos. VIII. L'acadcmie a dit en lyz^ , (a) d'apres une obfervation de M. Dachery, qu une bouteille de verre vuide de liqueur & bouchee avec de grandes precautions , ayant et^ plongee dans la mer ^ la profondeur d'environ 150 braffcs & retiree ^ Tinftant, elle s'etoit trouvce pleine d'eau qui panit au gout des | nioins falee que I'eau de la mer. M. Wolf a maiide k M. de Reaumur, qu'un de ics amis nomme Kraafft, avoit repctc cette ex- perience pinfieurs fois dans la mer Baltique avec un fucces trcs- different , fa bouteille a ete plongee ^ differentes profondeurs , dont ^ la verite la plus grande n'excede pas 60 brafl'es, elle y a etc tenue pendant plus de trois heures & demie, fans que la moindre goutte d'eau y ait penetre : il faut ou que dans la premiere experience la bouteille n'ait pas ete aflez bien bouchee , ou que la colonne d'eau plus courte de moitie dans la feconde , n'ait pas eu la force de faire filtrer I'cau h travers le bouchon. I X. Le 8 d^cembre 1745 » ^ Wilna en Lithuanie, on vlt le foleil^^ fon le- ver, furmonte d'une efpece de pyramide lumineufe , & accompagne de deux faux foleils plus eleves & rouges , compris eux-memes dans deux autres pyramides de lumiere colorce des couleurs de I'iris, le rouge tourne vers le foleil : ce phenomene dura environ deux heures. («) Hijl. 1715, CoHeftion Acadtoique , Pariie Franjoift, Tome V. HISTOIRE NATURELLE. lii 69 HISTOIRE NATURELLE. O B S E R V A T I O N S D'HISTOIRE MATURELLE. I- ; D £ If T S Z> E L A M 1 S. J.V±R. Geo?froy nous a fait part d'une Icttre qu'on lul a ecrite de — ^— ^^ Marfeille , en lui envoyant qiiatre dents d'une lamie qui a et(5 prife aiix iflcs Sainte-Marguerite. La lamie eft un grand poiffon ou chien de mer,^^' s t o i r x qu'on croit etre le carcharias des anciens , & qu'on voit quelquefois fur -f^^TURiLLE. les cotes de Languedoc & de Provence, d'ltalie & d'Efpagne. Les pr^- jinnee 1741. tendues dents de ferpent qu'on trouve montees en argent chez les orfe- vres , ne font autre chofe que des dents de lamie ■, car entre autres vertiis ^^'"* qu'on leur attribue , quelques naturaliftes fe font figures, je ne fais fur quel fondement, qu'etant pendues au cou des enfans, clles leur faifoient grand bien quand les dents leur fortoient , & , ce qui eft encore plus merveilleux , qu'elies les garantiffoient de la peim Ces dents font trcs- durcs & tresaigues, de forme triangulaire , tranchantes & decoupces des deux cotes , comme une fcie •, il y en a llx rangs ^ chaque machoire , celles du premier rang fc montrent hors de la gueule du poiffon , & ten- dent vers le devant-, celles du fecond font droites, & celles des autres rangs font courbecs en dedans. La lamie, prife aux ifles Sainte-Margue- rite, fe trouva embarraffee dans la thounine , ou filet ^ prendre le thon •, elle pefoit pres de cent quintaux, & Ton fut oblige de la remorquer avec une felouque Jufqu'i Cannes , qui eft h environ deux lieues de li. C'eft apparemment une des plus grandes qu'on connoiffe, puilque Rondeiet, dans fon hiftoire des poiflbns, en parlant de la grandeur ordinaire des lamies, dit en avoir vu une qui pefoit dix quintaux. On I'eventra, Sz on lui trouva un cheval encore tout entier dans I'cftomac. C'eft ce dont I'jU- teur de la lettre , qui etoit alors fur les lieux , dit avoir ete temoin ocu- laire. On en fit beaucoup d'huile , & Ton en auroit mange la chair qui eft reput^e laine & de bon gout, fans ce cheval mort qu'on avcit trouve dans le corps , & qui en degouta les habitans de Cannes. Cepcndant cettc chair £ut vendue i des strangers qui n'en favoient ricn, 7» ABRliG^DESMEMOIRES II. ^ H 1 S T O I R E Naturelle. -CAcitAtoT EcnovA PRks DE Bayoi^ne. Annie t74t- ^ , , „ Voici encore un poiffon cetacce, & dune toute autre grandeur que le precedent. C'eft une forte de baleine appellee communement cachalot, du nombre de celles cjui ont des dents & des nafeaux ou events , par oil clles rejettent uiie partie de I'eau qui eft entree dans leur gueule •, car la plupart des balcines n'ont point de dents, & pluUeurs manquent de ces nafeaux , qnoiqu'elles aient routes des poumons & pludeurs autres parties femblables ^ celles des quadrupedes terreftres, ce qui les diftingue de prefque tous les autres poilTons. De longs fanons ou barbes qui pendent de leur niachoire fuperieure, leur tiennent lieu de dents, & fe terminent en une efpece de frange aiTez fembJable aux/oies de langlier -, c'eft la ma- tiere qu'on appcUe proprement bakine , & qui fert ^ divers ouvrages . . . _... K. : : de I'art.' Le cachalot dont il s'agit ici , vint echouer auprcs de la barrc de Bayonne, dans la riviere de I'Adour , le i avril de cette annee. Nous en allons donner la defcription avec quelques autres details i d'apres les me- nioires & le deffein que M. de la Peyronie nous a remis (ur ce fujet , & qui lui ont ete cnvoyes k diverfes reprifes , par M. Defpelette, chirurgien- niajor de I'hopital militaire de Bayonne. Ce deffein montre le poiffon de profit , & pofe horizontalemcnt felon fa longueur , & le cachalot qu'il reprefente , & qu'on dit etre un des plus grands qu'on ait vus fur ces cotes , a en ce fens 49 pieds de longueur , depuis I'extremite de fa queue jiifqu'au bout de fon mufeau , fur environ 1 1 pieds r de largeur ou de hauteur -, fon pourtour , qu'on a mefuri ^ I'endroit le plus large, qui fe trouve i-peu-prcs vis-h-vis de I'osil, eft de 27 pieds. II a fur le dos vers les deux tiers de fa longueur, ^ prendre depuis la tete, une petite eminence qu'on appelle taquet , d'environ un pied de hauteur ; fa tete eft fort grande & fort large vers le mufeau , dont le bout eft applati en avant comme un mufle de taureau ■, elle par- tage prefque toute la longueur du corps en deux parties egales. La figure cxterieure de I'oeil reffemble affez ^ celle de I'ocil humain , il n'eft que de 5 pouces de longueur fur 4. de largeur. Le milieu des trous de fes na- feaux ou events, eft ^ environ t pieds de la partie iuperieure du mu- feau, & ces trous paroiffent avoir au moins un pied de diametre : c'eft par oil ces poiffons foufflent I'eau, ce qui les a aufll fait nommei Jouf- jieurs. La longueur de fa gueule eft de 5 pieds. II a 1 8 dents de chaquc cot^ de la machoire infirieure feulement, n'y ayant ^ la fuperieure que des trous places vis-^-vis , & ou ces dents peuvent fe loger. A 14 pieds de diftance du bput de d queue eft I'anus, d'environ un pied d'ouver- ture en longueur , ,& de 5 i (5 pouces de large. En fuivant ainfi le def- fous du ventre , & 6 pieds au-del.^ vers la tete , fe trouve une ouverturc un peu plus grande ) d'ou fort le baUiias ou membre genital de ce poiffon \ DE L'ACADEMIE ROYALE DES SCIENCES. 71 car les balcines ont encore ccia de commun avcc les quadnipedes ter- ^i^"^— i^ reftrcs, qu'elles s'accouplcnt &: engendrent de meme. Cc menibre eft d'a- „ bord k la fortie de pres d'lin pied de diametre , & long fculement de -kj^ ^ ^ ° ^ ^ 18 polices, d'une fubft.incc charnue & mulculeure -, niais il fe termine par turelli. une verge droite & pointiie, d'environ 4 pieds de longuciir fur 6 a Annu ly^i. 7 polices de diametre vers Ton milieu , de la meme fubftance a-pcu-prts aue les fanons , & qu'on emploie aux mcmes ufages. Les nageoires de la queue ont 13 pieds d'ouverture •, celles qui font a 10 pieds en deci de Ictil, un peu au-deffous, n'en ont que 4 de longueur & 1 | de largeur; ainfi c'cft principalement la queue de ce poillon , comme on le fait d'ail- leurs , qui lui fert ^ fe mouvoir & ^ fe conduire dans I'eau. Ce cachalot a fourni une prodigieufe quantite de/perma cett , d'une beautc admirable. Le fperma ceti n'eft autre chofe que la cervelle de I'a- nimal, preparee fous la forme de cette drogue. On a rempli dix barriques de la cervelle & du cervelet de celui-ci , quantite que la preparation re- duit crdinairement k la moitie ou au tiers. On lui trouva dans I'eftomac une grofle boule , du poids d'environ 7 livres , qui fut prife pour de I'anibre gris •, c'etoit une fubftance affez niolle , & d'un rouge clair lorf- qu'on la retira du corps de I'animal; elle avoit une odeur defagreable & approchant de celle du poiffon corrompu', mais en ■s'obftinant k la fenlir, cene odeur paroifloit bientot furmontie par une autre qui approchoit de celle de I'ambre gris. Un marchand qui pretend s'y connoitre , a achetc la boule entiere 650 livres, ne doutant point que dans peu d'annees, & en fe deffcchant , elle ne perdit fa couleur rouge & toute fa mauvaife odeur, pour prendre cntiercment la couleur & I'odeur de I'ambre gris, ce qu'il affure avoir dej^ eptouve plufieurs fois; & il eft vrai que depiiis quclques mois feulement que cette lubftance a ete tiree du corps du poif- fon , elle a pris une couleur plus brune, & une odeur fort femblable k celle de rambre gris. M. de la Peyronie a fait voir h la compagnie, des echantillons dii fperma ceti prepare, qu'on a tire de la cervelle de ce cachalot, & qui a paru fort beau, & aufli de ce vrai ou pretendu ambre gris dont nous venons de parler. M. de la Peyronie eft cependant bien cloigne de croire que I'ambre gris prenne fon originc dans le corps de ce poiffon-, il pcnfe, au contraire , que fi Ton en trouve quelquefois dans I'eftomac de ces ani- maux, c'eft parce qu'ils I'ont avale-, car voraces comme ils font, que n'a- Valent-ils pas? Le rcfte du corps du cachalot de Bayonne n'etoit prefque que du lard OH une graille , dont on a fait beaucoup d'huile. H I s T o I n. E Naturelle. 71 ABREGfi DES M^MOIRES S III. Crapaud male accoucheur de la femelle. Jnne'e Z74i. ^^ feroit k fouhaiter pour qiielqiies ledeurs , que ce que nous avons ^ dire dans cct article, put regarder les colombes & les tourterelles , plu- tot qu'une efpece d'animaux qu'on ne voit ou qu'on n'iniagine ordinaire- ment qu'avec horreur. Mais rimagination & les yeux du phylicien ne font pas h delicats , ils font accoutumes ^ voir la nature agir bien diffcremment de ce que nos goiits & nos prejuges voudroient lui prefcrire > & partager Ibuvent, avec diftinction , les animaux les plus vils en apparence, & les plus hideux. Les crapauds font un genre particulier dans la claffe des amphibies , & quoique amphibies , ils fe divifent en aquatiques & terreftres -, parce que ces derniers qu'on divife encore en grande & petite efpece , quoique nes dans I'eau , n'y paflent que les premiers jours de leur vie. C'eft du crapaud terreftre de la petite efpece dont nous avons i parler , d'apres le memoire que M. Demours, medecin, eft venu lire ^ la compagiiie fur ce fujet. L'occalion de ce mdmoire eft un de ces heureux hafards , dont les na- turaliftcs feuls peuvent connoitre le prix. Sur le foir d'un grand jour d'ete , M. Demours etapt dans le jardin du roi , appercut deux de ces crapauds accouples .au bord d'un trou que formoit en partie une grande pierre qui etoit au-deffus. La curiofite le fit approcher pour voir quelle itoit la caufe des mouvemens qu'ils fe donnoient. Deux faits egalement nouveaux le furprirent •, le premier etoit I'extreme difficulte qu'avoit la femelle h pondre fes ceufs, de maniere que fans un fceours etranger elle ne paroiffoit pas pouvoir les faire fortir de fon corps •, le fecond , que le male travaillojt de toufe fa force , & avec les pattes de derriere , h lui ar- racher fes tcufs. Pour bien comprendre la m^chanique de cet accouchement , il faut favoir, 1°. Que les pattes de ces animaux, tant celles de devant que celles de derriere , font divifees en plulieurs doigts. C'eft par le moyen de ces doigts que le male tiroit les ccufs du fondement de la femelle. 10. Que les ccufs fortent du fondement de la femelle , parce que le re- ceptacle dans lequel ils font contenus Jufqu'au temps de la ponte, s'ouvre k la partie iiiferjeure du reclum. 30. Que les crapauds s'accouplent comme les grenouilles , c'eft-^-dire , que le male monte fur le dos de la femelle , Tembraffe avec fes pattes de devant : la feule difference qu'il y a , eft que le male des grenouilles a les pattes de devant affez longues pour embraffer entierement la femelle , & pour entrelacer les propres doigts au-deflbus les uns avec les autres; au-lieu que les pattes du crapaud mile etant beaucoup plus courtes , il ne peut les Joiiidre de mcme , elles n'atteighent qu'aux cotes de la poi- trine de la femelle, ou il les applique quelquefois fi fortement, qu'il y furvient une inflammation avant que les deux animaux fe feparent. 40. Enfin , DE L'ACADEMIE ROYALE DES SCTENCES. 75 Eiifin , que les ccufs de cctta elpece decr.ip.iuds font rcnfermc' . cliacun dniis une coqu^ luembranciife trcs-tcrme , dans laquelle eft con- u ttini renihiyon, &- que ccs crufs qui font oblongs, & qui pcuvfnt avoir JjT._ „ .Tit' di ux iignes de longueur , font attaches Ics uns aux autres par un court fili't tres-tbrt ■, iis forment une efpece de chapelct , dont les grains font Annie ff4t, diftans les uns des autres d'environ la moitie dc leur longueur. Ces conformations ctant bien entenducs, il y a lieu de cruire que la fe- riL-lle fiit beaLiciiup d'eftnrt pour fe procurer la fortie du premier oeufv mais dcs qu'il eft lorti, cVft au male a tiire le tefte. C'eft alors qu'il com- mence i exercer d fonCtion d'accoucheiir , & il s'en acquitte avec uneJ adrcUe qu'on ne (oupconneroit pas dans un animal qui paioit li engourdi. Cclui-ci avoit de]i tire le fecond ccuf , lorfque M. Demours arrcta fur lui fes regards, & il redoubloit fcs efforts pour tirer le troifieme. Le premier auf ctoit eni^agc entre Its deux doigts du milieu de l.i pntte droite dc derriere , par 1." tilet qiu I'attachoit au fecond, & c'cft en aiongeant cettc patte qu'il tendoit le cordon du chapclct vlsi-vis le fondement de la fe- melle , qui pendant ce temps-b. reftoit immobile. II tadioit aulli de fc faifir du cordon avec la p.Ute gauche, & il en vint ^ bout aprcs plufieurs tentativcs. Cependant la prelence dc I'obfervateur ne I'embarrairoit pas pc u , & lui cauloit fins doute bicn des diftractions •, car tantot il s'arrctoit tout court , & alors il jettoit fur cc curieux importun des regards fixes qui marquoient fon inquietude & la crainte v tantot il reprenoit fon travail avec plus de precipitation qu'auparavant, & un moment aprcs il paroiffoi: inddcis, s'il devoir continuer ou non. La femelle marquoit aulli loii em- b.irras , par des mouvemens qui interrompoient quelquffois le mile dans fon operation. Mais enfin, foit que le lilence & I'unmobilit^ du fpccftateur eulfcnt dillipe leur crainte, foit que le cas fiit prellant, le male reprit fon ouvrage avec la meine vigueur, & toujours avec de nouveaux fucces. La curiolitc de M. Demours avoit encore un autre objict ; il oblervoit attentivement li , \ melure que le male tiroit les ceufs , il ne les arrofoit )as de (a liqueur feminaleicar c'eft par un femolable arrofement, comme e rapportent plullcurs auteurs, que les ocufs de ces animaux aquatiques & amphibies lont fifcondes, & en particulier les ceufs des grenouilles. C'eft: ainfi , felon Swamnierdam, I'un des plus fameux naturaliftes dc ce fiecle, qu'apres un accouplement d'environ 40 jours, la grenouille male fcconde les aiifs de la femtlle au moment quelle Jes a pondus. Mais comme M. Demours n'appercevoit ri.rn de pareil aux deux crapauds accouples, & que I'endroit ou ils fe.tiouvoient ctpit un pcu lombrc, il le determina 'k les mettre fur fa main. L'ouvrage tut encore interrompu pendant quclques inftans, & repris ""nfuite comme 3uparav,uif. nuis le male ne donna ja- mais le moin jrc lign." de ce que r')bfervateur s'attenJoit ^ dccouvrii par fes yeux , ou ^ lentir iur la main oiiil les tint un quart-d'heure. Swanuiierdam avoit rcmarque que le male de la gr?nouille aide aufli t r o 1 r e en impofer aux premiers obfervateurs-, elles ont pour la plupart la figure, ^ v e i. l;.. Ic port, & exterieuremcnt tt>ntes lcs parties d'une plante , unc tige , dcs /Invc'c T'dZ. nanids , des branches , line ecorce , des boutons de flcur , & dcs tleurs mcme. Le corail, par exemple, qui eft mou & laiteux dans fon origine, porte fur plubenrs endroits de ies branches de petits corps blanch.ilrcs ipanouis, qui fortent d'une efpece de mamelons ou de boutons repandus fur fon ecorce , tandis qu'il eft cnvironne de I'eau de la mer , & qui y rentrent & difparoiflcnt dcs qu'il en eft tire ou plonge dans I'eau douce. C'eft 1^ ce qu'on a prii pour fes flours , & cette decouverte, qui en eli une, quant au fait, attira de juftes cloges i fon auteur, M. le comte tie Marligli , d'venu depuis encore plus illuftre par I'ctabltffement de I'aca- deinie de I'inftitut de Boulogne. M. Shaw de la fociete royale de Lon- drcs, a converti ces fleurs apparentes du corail en fes racines, ruais c'eft toujours en revcnir h I'idee qui a feduit Ies naturaiiftes. Ce qui auroit dii cependant jetter quelque foupcon fur Ies pr^tendues plantes marines , & aider ^ y reconnoitre Ies animaux qui Ies habitent & qui en font ks ouvricrs , c'eft qu'cn general leurs tiges & leurs branches , quoique couvertes d'une ^corcQ pierreufe & friable , tiennent intcrieure- ment de la nature de la corne & de la baleine , & qu'etant briilees elles en ont toute la mauvaife odour-, car c'eft, comme on fait, par le moyen du feu & dcs differentes odeurs qu'il fait cxhaler de differentes fubftances, aniraales, vegetales & nictalliques , que Ton connoit en plulleurs rencon- tres le regne ou le genre auquel elles appartiennent. Aufli Ies chyraiftes ^toient-ils fort etonnes en failant I'analyle de ces plantes , d'y trouvcr i-peu prcs tousles principes qu'on tire du corps animal. Ce (igne diftinc- tif des deux lubftances devcnu equivoque , dans la fuppohtion que Ies productions marines dont il s'agit , n'ctoient efFedivement que dcs plan- tes, pourroit bien avoir determine un auteur celebre k dire que U rap- port & la dijfe'rence qu'il y a entre un v^g^table 6' un animal , ne con- Jijioit qu'en ce que Ies alimens des plantes font tire's par des racines extirieures , & ceux des animaux par des racines inte'rieures. La conjedure de M. Shaw imaginee pour prevenir robje<5tion qui nait de ce que le corail, Ies lithophytes, Ies madrepores & la plupart de ces fortes de productions n'ont communement point de racines ou de par- ties qui s'y rapportent , eft d'ailleurs aflez forcec & pcu recevable , en ce Suelle attribue la foncflion de racines k la partie de la plante la moins vi- ble, la plus variable, la plus delicate, & qui a le moins de conllftance. M. de Tournefort qui etendoit la ftnidure organique des corps & la ve- getation Jufqu'aux pierres memcs, ne fe fcroit peut-ttre pas eloign^ de ce lentiment-, mais il n'a pu s'en expliquer, Ies pretendues fleurs du corail & des autrcs productions de cette efpece n'ctant pas encore connues de fon temps. II dit fculcment que Ies plantes marines doivent rcccvoir lour nourriture d'une maniere fort ditfercnte des plantes tcrreftrcs , & qu'il y So A B R e; G £ D E S M K M O I R E S 1,1 beaiicoup d'apparence que c'cft de ce limon faI6, gras, gluant, mueila«^ ^ glncux & lemblable k de la gelee, dont le fond de la mer eft eiidiiit, n I s T o ^ ^^^^ j,^^^ decouvre aifement apres le reflux de fes eaux , que les plan- iNATURL . j^^ marines font nourries. Elles viennent fur le roc , fur des cailloux Ann^e tJ^Z. trcs-durs & trcs-fecs, & fur des coquillages qu'clles embraffc-nt, & aux- quels elles font fortement attachees par un empateinent prefque toujours fort liffe , & M. de Tournefort nc concevoit pas qu'elles pulTent y croi- tre & s'y nourrir. M. Peyffonel , medecin de Marfeille , & dcpuis medecin du roi ^ la Guadeloupe, ofa le premier trancher le nceud; il avanca en 1727, que ce qu'on avoit pris pour les flcurs dans les plantps marines , & en parti- cuiier dans le corail , d'aprcs robfervation de M. le comte de Marligli , ^toient de vrais animaux ou infedes de la nature de I'ortie de mer , & fe confirma dans ce fentiment par plulieurs oblervations qu'il fit enfuite en Afrique fur les lieux mcmes ou Ton peche le corail. Mais malgre tant de raifons de douter de la realite de ces plantes , ou plutot malgre tant d'indices de I'exiftence des animaux qu'clles renferment , comme on ne voyoit pas encore clairement qu'elles en fuffent I'ouvrage , ropinion commune a prcvalu jufqucs aujouid'hui, & s'eft foutenue prefque fans coa- tradidion parmi les naturaliftes les plus eclaires. C'cft h M. Bernard de Juffieu , qu'ils auront dcformais I'obligation de les avoir entierement tires d'erreur lur cc lujet , & d'avoir mis ce point d'hiftoire naturelie k un degre d'evidence qui ne pent manquer d'cntrainer tous les fuftragcs. II ne s'agit plus que de rcgarder , &: Ton verra, meme avec furprife, de n'avoir pas vu plutot des objets tres-diftindls , &- quel- quefois allez gros pour etre appercus fans le fecours du raicrofcope ni de la loupe •, car telle eft la nature de nos organes , qu'ils ont en quelquc maniere bcfoin d'etre avertis pour exerccr parfaitcment leurs fondtions , I'imagination eft une fenlation commencee qui les y difpolc. Ces animaux font communement des polypes fort i;mbl,iblcs i ceux dont nous avons parle I'annee derm re d'apres M. Trembley, (a) & dont la figure approche de celle d'un cyliiidre creux, ou d'un entonnoir ferme par le petit bout, ouvert & evale par le grand, & garni par fes bords dc plufieurs cornes ou filets flcxiblts & mobiles, capables d'cxtenlion & de contradion. Ces cornes au nombre de 8, 10 , 16 & davantage dans ceux que M. de Juflitu a obfervis, forment comme une houpe k cette extre- mite de leur corps qu'on p;ut prendre pour leur tete •, elles fervent I I'anima! pour fai(ir d'autres mfedes dont il fe nonrrit, pour fe defendre centre fes enncmis, & lans doute h. beaucoup d'autres ufages que nous ignorons. Chacun d'tux eft loge dans une petite cellule qui fait corps avec le tronc , la branche ou la feuille de la pretendue plante , ou il paroit tenir par la plus petite extremite de Ion corps ou par fa queue , & d'oii il fort ^ moitic ctant dans I'cau , mais oii il fe renferme des qu'on retire k plante de I'eau & qu'il fent I'impreffion de I'air. Les bords dc (it) Voyez rHiltoire de 1741, ci-devanu la DE L'ACADl^MIE ROYALE DES SCIENCES. 8i la cellule font ordinairement an pen elevis , dc mniiiere que dans la pre- '^^^^■^^" vention oil I'on etoit que tout cct alFemblage n'oftoit qu'une plante , ces u protuberances n"en reprefentoient pas mal les boutons , & les poivDCS aui xt ^ o i r i en lortoient, les rieurs. Celt done dans leau qail faut obierver ces in- feftes, foit k la vue hmple , foit avec la loupe & le microfcope. 11 y en Ann{e tj^^z, a qui ont une ou deux lignes de diametre , & plulieurs lignes de lon- gueur , Tur-tout avec leurs cornes ; mais quelques autres font fi petits, que dans I'efpace d'un pouce quarre de celies de cos productions qui fem- blent avoir des feuilles aufli minces que dii papier , on en comptcroit plulieurs centaines. Quant ^ la maniere dont ils conftruifent leur logement, & dont fe fait cet amas prodigieux de cellules d'oii refulte une ramification fi fembiablc ^ celle des plantes , c'eft ce que M. de Juffieu nc nous explique pas en- core, & qui fera apparemment le fujet de quelque autre mcmoire. Tout ce qu'on peut Juger par I'infpedion de ce lingulicr edifice, & par ce que M. de Judieu a bien voulu nous en dire d'avance , c'eft que I'ouvrage itant commence h fa bafe par un &u plulieurs de ces animaux , il eft con- tinue par ceux qui les fuivent & qui font produits par les premiers , on entcs lur eux bout \ bout ow par le cote , & ainii de fuite , ce qui forme une efpece de cliapelet ou de chaine , & bientot une infinite de cliaines qui fe divifent & fe fubdivifent jufqu'i I'extremite des rameaux les plus eloignes du tronc ; c'eft une faniille nombreufe , ou plulieurs families jointes enfemble, un peuple innombrable, une ville immenfe ^ raifon de its habitans. Les polypes de M. Trtmbley fe multiplient aulli quclqucfois de cette maniere, ioit d'eux-niemes, foit apres la dilledlion qu'on en a faite ; mais on n'a pas encore eprouvd fi les polypes des plantes marines auront de memc la propriete de fe reproJuire dans leurs panics feparees, & de faire autant de nouveaux individus. Toutes les apparences font pour I'affirmative , on en a deji fait I'cHai fur I'ortie & fur I'etoile de mer , qui pcuvent etre rcgardees comme des polypes. La figure de leurs loges eft ordmairement un pen conique, ainfi que I'animal qui y eft contenu. Nous avons remarque qii'il n'en faifoit guere fortir que la moitie de fon corps oil eft cette partie garnie de cornes que nous avons appellee fa tete. Pour peu qu'on touche alors ces infedles , ou qu'on remue I'eau de la mer qui les entoure, foit fur les lieiix memes, foit dans le bocal de verre oii on les a mis pour les obferver, ils retirent d'abord leurs cornes, & enfuit* toute cette partie de leur corps qui ctoit hors de la cellule. Si on les touche trop rudemcnt , ll I'eau dans laquelle on les conlerve, vient i fe corrompre, les uns, comme dans la retcpore, fe renferment enticrement dans leurs loges, & n'en fortent plus, les autres, comme dans la main de mer, rcftent pendans hors de leurs loges &- (ans mouvement, quclques-uns enfin abandonnent enticrement leurs cellules, comme dans la millepore , & tombcnt morts au fond du bocal , ou du moins fans aucune apparence de vie-, d'ou Ton peut Juger qu'ils ne de- meurent pas toujours adherens entr'eux ni au fond de leurs tuyaiix, o« • que les liens qui les y attachent , font bien aifes i rompre. Tome IX. Partie Fran^oiji. L Si ABR^GE DES MfiMOIRES Nous ne devons pas oublier de dire que lorfque M. de Juflieu fc tranfporta, raniiee dcrnicre, fur les cotes de Normandie, accompagne de I s T o I R i ^_ Blot, jeune medecin de Caen , pour obferver les plantes marines , il JN ATUUEiLH. ^jpjj tr^s-indecis entre ropinion de M. le comte de Marhgli & celle de ^nne'e ly^X. ^- Peyffonel, & que c'eft danS cet etat de doute anime de curiofite & (i digne dun philofophe, qu'il s'eft pleinement convaincu de I'exiftence de nos polypes, du moiiis ^ I'egard d'un bon nombre de ces produdtions qui avoient pafle jufqu'ici pour de veritables plantes marines. II en faut voir le denombrement & le detail dans Ton memoire. On pourroit done affurer fans trop de temcrite, que toutes les autres, ou une infinite d'autres produdlions femblables , fe trouvcront dans le meme cas. La nature n'a pas coutume de fe mettre en frais pour un (i petit nombre d'efpeces dans les divers genres de merveillcs qu'elle offre a nos yeux; avare dans la depenfe, clie eft toujours prodigue & inagiiifi- que dans I'execution. C'eft ici oii I'analogie ne fauroit guere nous troinperj inais nous ferons encore micux d'imiter la fage retenue de rObfcrvateur, & d'attendre que les nouvelles recherches qu'il nous laiffe efpdrer fur ce fujct , donnent ^ cette partie de I'hiftoire naturelle toute I'etendue quelle doit vraifemblablement avoir. MEMOIRES POUR SERVIR A L'H I S T O I R E DES INSECTES, Tome VI. nitt. Xl eft etonnant qu'il nous reftat encore de fi grands pas \ faire dans la connoiflance des infedtes les plus communs, 150 ans apres la decouverte du microfcope. C'eft fans doute que les yeux ont beau etre amies des inf- trumens les plus parfaits , fi I'efprit n'eft muni en meme temps d'une ex- cellente philofophie, d'une penetration finguiiere , dune patience qui mi- lite fans ceffe contre la difficulte de Ion objet , & de pluiicurs autres qualites qui fe trouvent difficilement reunies dans un meme obfervateur. II a deji paru cinq volumes de ce recueil immenfe d'obfervations que M. de Reaumur nous donne fous le titre de mimoire pour jervir a I'hif- toire des infecles : le lixieme paroit cette annee , & il n'eft pas moins rem- pli que les precedens. Les neuf derniers memoires du cinquieme volume contiennent fes ob- fervations fur les abeilles , matiere que les anciens & les modernes fem- bloient avoir epuifee, & qui devient neuve entre les mains de M. de Reau- mur , par le nombre de decouvertes qu'il y a ajoutees , & par tout ce qu'il a reftifie dans les connoiflances qu'on avoit fur ce lujet. Ce fixieme tome en eft comme la fuite , 6tant deftine h nous faire connoitre plufieurs autres efpeces de mouches qui fiennent pour la plupart dc la nature des abeilles, foitpar leui figure, foitpar leur travail, & que M. de Reaumur DE L'ACAD^MIE ROYALE DES SCIENCES, 85 nomme aufli cjiielquefois abeillcs , avec une cpithete qui cii dcligne I'cf ■ "^■^^— ■ ■ 1 i-> pecc particulicre, I'ouvrage, & pour ainli dire, Ics niaurs, comme abciJles „ perce-bois, abeillcs ma9(jnnes, tapiffieres, &c. \^' S r o i k i Ces noHveaux memoires au nombre dc cjuatorze , font precid^s d'une ■"■^-^i-'i^'-i-i'^' preface qui a deux parties. Annie ij^z. La premiere eft purement relative \ ce volume, & doane une idee gc- ncrale des matieres qui le compoftnt. La fcconde peut ctre regardee comme \\n fuppicment hiftorique oii M. de Reaumur nous apprend ce qui a ete nouvellement decouvert fur les infedtes , tant par rapport i ceux qu'on multiplie en les coupant par luorceaux, & dont il a ete tait mention I'annee derniere , [a) que par rap- port ^ ces nouveaux polypes dont nous avons parle dans celle-ci , & ^ ces produ(!iions marines qui lont leur ouvrage & leur domicile. M. de Reaumur ne dillinnile pas qu'il avoit pris ces produ(Sions pour de vcritabks piantes, & qu'il avoit ete ^ cet egard du ientinient general des naturaliftes •, il nous rappelle meme k cette occalion le memoire qu'iI donna ^ I'academie en 1727 , 011 il combat I'opinion contraire , car, comme nous I'avons dit en fon lieu , c'eft dans cette meme annee que M. Peyllonel avoit avance 1 ctrange paradoxe qui va devenir delormais I'o- pinion commune. Trop ami du vrai , & trop riche en dccouvertes pour envier ccUes de quelque autre favant , M. de Reaumur n'eut pas plutot connoilFancc de la certitude de cclle-ci par les oblervations dc M. de Juf- fieu, qu'il en fut un des plus zeics promoteurs, qu'il en chercha de nou- velles preuves, & I'affermit par de nouvelles oblervations conjointement avec M. Guettard , qui a aufli fort travaille fur ce fujet. Les preuves de M. Peyllonel lui avoient paru inluffilantes. II s'enfuivoit bien de fes obfer- vations que les piantes marines dont il s'agit , etoient couvertes ou rem- plies d'animaiix; mais devoit-on en conclure que^la plante meme n'etoit que leur ouvrage? On auroit pu jufques-li en dire autant de pluUeurs pian- tes terreftres. Cette verite reftoit done ^ prouver , & perfonne depuis ne I'a mieux prouvee que M. de Reaumur. C'eft li tout ce qui lui avoit fait prendre la plume centre rhypothefe de cet habile naturalifte , dont il me- nagea d'ailleurs la reputation au point de ne vouloir pas le nommer tandis qu'il le croyoit dans I'errcur. Les fept premiers memoires de ce volume nous donnent I'hiftoire des mouches qui ont le plus de rapport aux abeilles, tant par leur figure que )ar leur raaniere de le loger & de vivre en iociete. De cette efpece font es bourdons velus dont les nids font de mouffe , les abeilles perce-bois, les abeilles ma^onnes, celles dont les nids font faits de membranes foyeu- fes, & les abeilles tapiflieres, le guepes en general, & en particulier celles qui vivent lous terre , les frelons & les guepes cartonnieres , ainli nom- mecs parce qu'elles fe font en effet un guepier dont la fubftance & le tiflu font ablolument les memes que dans notre carton , & qui par fa ftruc- tiire admirable peut aller de pair avec les gateaux de cire des abeilles. (a) Vovez I'Hiftoiie de 1741, ci-devant. L ij f. 84- ABR^CE DES M^MOIRES M. de Renumur nous avoit deji donne la defcription d'un femblable Ti guepier qui venoit de Cayenne, dans les Memoires de 1719. -, Le hiiitieme memoire traite des guepes folitaires en general , & en par- ticulier des guepes ichneumons. Les anciens ont ainli nonime ccs mouches AnrJe l'J4^- courageufes qui attacjucnt & dcvorent les araignees, les plus cruels enne- mis de leur efpece , d'aprcs I'ichneumon d'Egypte , qui eft un petit qua- drupede de la groiltur d'un chat , & qu'on dit qui caffe les CEufs du cro- codile, & le fue en lui rongeant les inteftins. Dans le neuvieme M. de Reaumur nous donne I'hiftoire des mouches ichneumons proprement dites, genre tres-^tendu, & qui renferme des ef- peces trcs-ditferentes par la forme & par la grandeur : il les diftingiie foi- gneufement des guepes dont nous venons de parler. Ce n'cft qu'apres bien des chaffes , des courfes & des fatigues que les guepes ichneumons parviennent \ renfermer dans un nid , prepare lui-meme avec beaucoup de travail, la quantity de vers, de chenilles, de mouches ou d'araignees qui eft neceffaire k I'accroiffement complet du petit qui y doit naitre ; mais les m.ouches ichneumons proprement dites , favent faire I'equivalent par des moyens plus fimples & en meme temps plus linguliers : plufieurs d'entr'elles donnent pour nid ^ leurs petits luifede meme dont elles veu- lent les nourrir. Le formica-leo de)i cclebre par la fingularite des pieges qvi'il tend \ plu- fieurs autres petits animaux , fournit la matiere du dixieme memoire. Cet infette ne nous oftVe fous cette forme qu'une efpece de cloporte de me- diocre grandeur qui auroit deux comes. II ne fembleroit pas jufques-li devoir entrer dans la claffe des infe<3:cs ailes ; mais il n'eft pas piutot .ir- rive \ fon entier accroiffement , qu'il fe conftruit une coque , qu'il s'y renferme, s'y metamorphofe en une nymphe , & qu'il devient enfin une de ces fortes de moucjjes qu'on nomme demoifdles. ' L'hiftoire de celles-ci dans toutes leurs efpeces , remplit le onzieme memoire. Le douzieme traite des rnouches qu'on appelle EpMmeres , nom qui n'exprime pas meme affez la courte duree de leur vie •, car , felon M. de Reaumur, une vie d'un jour eft, par rapport aux mouches de quelques-unes de ces efpeces, ce que la vie des patriarches eft par rap- port ^ la notre. Les unes n'ont jamais vu coucher le foleil , les autres n'ont connu que d'epaiffes tenebres ; mais elles n'en font pas moins atten- tives ^ s'affurer une femblable pofterite. Si le fentiment de] la duree de notre vie eft abfolument relatif \ la fuitc & au nombre de nos idees & de nos fenfations , il ne feroit pas impoflible qu'une vie d'un jour on de quelques heures ne flit equivalente \ celle de pluiieurs fiecles. Les ephe- meres font d'ailleurs de tres-jolies mouches qui doivent etre rangees parmi celles qu'on nomme papillonnacies. Une addition a l'hiftoire des pucerons que M. de Reaumur avoit deji donnee dans le troifieme volume de cet ouvrage, fait le iujet du trei- zieme memoire. Le quatorzieme , qui efl le dernier , roule fur la maniere fingiiliere DE L'ACADEMIE ROYALE DES SCIENCES. 85 dont quelques mouches h deux ailes , appellees mouches araignees , vlen- *— ■«— ^^ nent ail monde. Elles naiffcnt d'un auf, & d'liii auf d'abord aulfi gros rj qu'elles doivcn; jjinais Ictre , aufTi gros que la mere qui I'a pondu, & ja <' R i dont on a peine i concevoir qu'un tel enfant ait pu naitre. C'eft encore ^^^' un fupplcment b ce que M. de Reaumur nous avoit doniie dans fon qua- Ann^e 1J4Z, trieme volume fur les mouches k deux ailes. On trouvera par-tout dans ce grand ouvrage I'efprit de recherche , Fa retenue i decider, la fagacite a decouvrir, qui fe font fait remarquer dans les volumes precidens -, une adrelTe linguliere h demeler les procedes, Ics rufes de ces petits animaux qui par leur petiteffe meme n'en font que plus en etat de nous derober leurs manceuvres. L'anatomie de leurs organes & de leurs vifceres n'y eft: pas oubliee •, I'utilite que nous en pouvons rctircr pour nos befoins ou pour nos commodites, fait toujours un des principaux objets de I'obfervateur , car les arts utiles font infiniracnt plus lies avec la connoifTance des infeftes qu'on ne I'im.igine communement. Enfin cctte merveilleufe induftrie des animaux qui brille li particulierement dans les infedes , & qu'on croiroit ne fe dcmentir quelquefois que pour mieux reffembler i la notre , M. de Reaumur la releve en homme qui fait ce qu'il yak dire pour & conu'c le principe interieur qui Ics fait agir. Que les betes penfent ou ne penfent pas , il eft toujours certain qu'elles ■ — fe conduifent en mille occafions comme fi elles penfoient ; I'iJludon en cela , fi e'en eft une , nous avoit ete bien preparee. Mais fans pretendre toucher b cette grande queftion , & quelle que foit la caufe, livrons-nous un moment aux apparences , & parlons le langage ordinaire. Des geometres, & il faut compter parmi eux M. de Reaumur, fe font exerces a faire fentir tout I'art qu'il y avoit dans les gateaux de cire, & dans ces guepiers de carton fi ingenieufement diviles par etages foutenus de colonnts , & ces etages ou tranches par une infinite de cellules fexan- gulaires. Ce n'eft pas fans fondement qu'on a obferve que cette figure ^toit entre tons les polygones poflibles, le plus convenable , ou meme le feul convenable aux intentions qu'on eft en droit d'attribuer aux abeilles & aux guepes qui (avent les conftruire. II eft vrai que I'hexagone regulier fuit neceffairement de Tappolition des corps ronds, mous & flexibles, lorf- qu'ils font preffes les uns contrc les autres , & que c'eft appareniment pour cette raifon qu'on le rencontre li fouvent dans la nature, comme dans les capfules des graines de certaines plantes , fur les ecailles de divers animaux, & quelquefois dans les particules de neige, k caufe des petites gouttes ou buUes d'cau Iphcriqucs ou circulaires qui fe font applaties les unes contre les autres en fe gelant. Mais il y a tant d'autres conditions k remplir dans la conftruclion des cellules hexagones des abeilles & des gue- pes, & qui s'y trouvent fi admirablement remplies, que quand on leur difputeroit une partie de I'honneur qui leur revient de celle-ci , U n'eft prefque pas pofTible de leur refufer qu'elles n'y aient beaucoup ajoute par choix, & qu'elles n'aient habilement tourne k leur avantage cette efpece de neceflite que leur impofoit la nature. 8(5 ABRiiGEDESMl^MOIRES Millc autres exeroples detailles dans ce volume, qiioii^iie moins bril- ,. lans pent etre & moins connus que cekii qu'on vient de voir, ne meiitent -^ pas une moindrc attention , & ne prouvent pas moins la prevoyance induf- TUiiELLE. ffjgyjg jgj infedes pour preparer ^ leurs petits une demeure commode & Annife 1743. tout ce qui eft neceffaire ^ leur accroiffement •, nous nous contenterons d'en rapporter un , qui fera pris de cctte efpece de mouches folitaires que M. de Reaumur appelle abeilUs coupeufes de feuilUs. Celles-ci depolent leurs cL-ufs dans un nid creule en terre , & revetu de morceaux de feuille artiftement contournes en forme de cylindre ou d'etui 4 cure-dents. Cet etui en contient cinq ou lix autres mis bout ^ bout, faits, comme I'enveloppe, avec des morceaux de feuille, & affez femblables ^ des des ^ coudre dont Touverture n'auroit point de rebord. Ce font autant de cellules dans cha- cunc defquclles la mouche depofe un ceuf. Elle n'oublie pas d'y mettre une patee oii il entre beaucoup de miel, pour la nourriture du petit lorf- qu'il viendra k eclorre & ^ croitre •, apres quoi elle ferme foigiieufement la cellule avec un couvercle circulaire aulu exa(5tement applique lur fes bords que le pourroit etre le fond d'un de nos tonneaux centre fes dou- ves. Le bout arrondi de chaque cellule & le plus etroit , eft recourbe comme le fond du de, & le bout plus large forme partie du contour de I'ouverture. Ce couvercle eft aufTi fait de feuille; il eft triple, conliftant en trois pieces lemblables en recouvrement les unes llir les autres. Li mouche les coupe, les cerne dans la feuille par le moyen de fes dents, avec autant de promptitude & fiirement avec plus de precifion que nous ne ferions avec des cifeaux, fi nous n'en avions pas trace la circonference auparavant. II y a encore du choix dans ces feuilles , loit par rapport ^ celles du meme rameau , foit par rapport ^ I'arbre dont elles font prifes , felon I'efpece particuliere de la mouche •, car les coupeufes de feuilles fe fubdivifent encore en plulieurs autres efpeces. Les unes choilifTent le ro- fier , les autres le marronier, I'orme, &c. les unes conftruifent leur nid fous terre dans un jardin , les autres en plein champ , & qiielquefois dans la Crete d'un llilon. Comment cette mouche ii peine aufli groife qu'une abeille ordinaire , s'y prend-elle pour recourber ces pieces de feuilles & en former les parois cylindriques de fon nid ? C'eft ^ Ion egard ce que feroient au notre de grandes & groffes planches que nous aurions \ plier fans autre fecours que ceiui de nos mains. Mais quel compas la guide pour trancher ft jufte & li regulierement le couvercle qu'elle adapie i I'ouverr ture de chaque etui ! Eft-ce, dit M. de Reaumur, que I'idee du diametre de ce petit vafe que la mouche a laifle loin deli & cache fous terre, eft reftee dans fa tete? Ajoutons que (i elle le tenoit renfermee & infcrite dans le cercle qu'elle coupe & qu'elle fepare de la feuille, on pourroit croire que fon corps lui en determineroit la grandeur, & que pirouettant fur elle-meme & autour de quelque point, comme centre, elle en decri- roit la circonference par I'extremite de la fcie toujours egalement eloignee de ce point •, mais il eft de fait que le corps de la mouche demeure tou- jours exterieur au cercle pendant qu'elle le coupe, & i-peu-prcs dans la polition oil feroient fuccellivement les cifeaux que nous tiendrions d'une DE L'ACADEMIE ROYALE DES SCIENCES. 87 main , en Icur prefcntaiit de I'aiitre le papier dont nous voudrions retran- nii— —— — cher line portion ninfi arrondic. Auciine partie dii petit animal ne pent done alors lui lenir lieu de modclc par rapport au ccrcle dont il trace en " ' s t o i r t memc temps le contour avec tant de regularite. A cjuoi attribucr un coup ^ aturllll", d'oeil fi Jufte ? Seroit-ce par voie de redudion , & comme nous en ufons /inncc tJ4X., avec nos doigts ou avec la paume de notre main , qu'il auroit pris les di- menlions de fon ouvrage ? Mais que ne fuppofe pas une fcmbiable ope- ration ? Que ce foit entendement, ou menioire , ou feulement queique organe particulier, quelque iens que nous n'avons pas & dont nous ne faurions nous faire aucune idee, on ne s'accoutume pas aifcmcnt i voir dans les infedes une telle induflrie , acconipagnee d'ailleurs d'unc conduitc /i conforme i leurs befoins , li fuivie , & h digne de cette railon que no- tre philofophie , & peut-ctre notre orgueil voudroient bien Icur refiiler. OBSERVATIONS DHISTOIRE NATURELLE. M Cajlration des Poijfons. R. Sloan E, ci-devant prelident de la focicte royale de Londrcs , Ilit't. a ecrit k M. Geoffrey vers la fin du mois de decembre dernier, qu'un inconnu I'ctoit venu voir pour lui communiquer le fecret qu'il avoit trouve de chatrer les poiffons , & de les engraiffer par ce moyen. Cet horame qui n'etoit au commencement qu'un faifeur de filets , & qui re- fidoit auparavant h. cinq ou fix lieues de la maifon de campagne de M. Sloane , sctant rendu habile ^ connoitre & ^ nourrir les poiffons, ctoit parvenu ^ en faire un commerce coniidcrable. La hngularite du fait excita la curiofite du favant naturaliflc , & le marchand de poiffon lui offrit d'en fiire I'tfpreuve fous fes yeux. II fut chercher huit carruchens , efpece de petites carpes qu'on a apportees depuis peu de Hambourg en Angleterre , & qu'il mit dans deux grandes veffies remplies d'eau •, cette eau avoit ^te renouvellee une ou deux fois en chemin. D'abord il diffequa .une des huit carpes en prefence de M. Sloane , & lui montra I'ovaire avec fon conduit qui s'ouvre dans la partie qu'on appelle la cloaque. II fit enfuite I'operation de la caftration fur tine feconde en lui ouvrant I'ovaire, & en rempliffant la plaie avec un morceau de chapeau noir. La carpe chatree ayant ete remife avec les fix qui refloient , parut nager avec un peu moins de facilite que les autres , aprcs quoi elles furent toutes jet- tees dans le baflin du Jardin de M. Sloane , dont I'eau eft fournie par la riviere voifine , & ou il les croyoit encore en vie, lorfqu'il a ecrit ^ M. Geoffiroy. On ne nous en dit pas davantage. Samuel Tull, c'efl le noni de cet honime , promit ^ M. Sloane de lui faire manger au printemps fuivant de ces poiffons chatres , qu'il affure furpaffer les autres en deli- catcffe de gout, autant qu'une poularde furpafTe un coq, & un baufgras SS ABRfiG^DESMl^MOIRES I un taiireau. Get efFet de la caftration des poiffins eft allcz vraifemblable par foil analogic avec ce qui arrive aiix aiiimuix terreftres , & M. Sl')ane n I s r u 1 R Ep^j^p^ qu'une pareille decoiiverte merite d'etre fiiivie, & peut etre utile, ^^" foit pour rendre le poilfon plus gras & plus delicat, foit pour en dutii- Anne'e ir^z, m'^r la multiplication dans les etangs & dans les viviers trop abondans en fretin , & par-li peu favorables ^ ion accroilJement. I I. Sur un Organe particulier du Chien de Mer. M. Lamoriir, de la fociete royale de Montpellier, qui nous donna," en 175;, {a) un memoire fur ce que les chevaux ne vomilTent point, a ecrit a M. de Reaumur qu'on avoit apporte dans cette ville une efpece ^efqualus ou chien de mer de la Mediterran^e , que les naturaliftes nom- ment , dit-il , Galeus Glaucus dentihus granulofis j foraminibus circa oculos. C'eft un poiflon fort long, & dont la peau eft ties rude. Celui-ci avoit 10 pieds de longueur fur S pieds fculement de pourtour k la partic du corps la plus grofle , & il pefoit environ 50 quintaux. M. Lamorier fe propofoit d'en faire la diffe(2:ion , pour s'alTurer d'un organe particulier qu'il a vu i un autre chien de mer de la meme efpece , & qui fs ren- contre audi dans ceux d'efpece diilerente. Get organe qui n'a pas ete decrit par les naturaliftes, confifte en un filtre place entre la pointe du mufeaii & du cerveau, ^ peu-pres de la groffeur de ce vifcere, de la confiftancc & de la couleur du corps vitre , & il tranfude par les petits trous de U peau ■, ce qui fert , felon M. Lamorier , ^ grailfer la pointe ou la proue avec laqucUe ce poiffon fend I'eau. Prefque tous les poiffons font enduits plus ou moins d'une efpece de coUe , d'huile ou de graiife , qui fert audi ^ les defendre des impreflions nuifibles que I'eau pourroit faire fur leur peau & fur leiurs ecailles , & qui eft apparemment un produit de leur tranfpiration •, mais celui-ci eft encore doue ^ fa partie anterieure & def- tiiiee h fendre I'eau, d'un magafin abondant de cette maticre,qui lui fert fans doutc i lubrifier cette partie, comme le conjecture M. Lamorier, & peut-etre k bien d'autres ulages ; car quel eft I'organe dont les aninnux ne retirent pas toutes les utilitcs que la plus fubtile mechanique pourroit imaginer J I I L Ivoire ramolli, A l'occasion de quelques os ramollis , M. de Fouchy a dit avoir vti une cuiller d'ivoirc qui, ayant ete long temps oubliee dans du lait, y ctoit devenue fouple comme du cuir , ce qui pourroit fournir qutlques vues pour les arts, & merite d'etre approfondi. Les os dont il s'agilfoit, furcnt («) CoIlecSion Acad^mique , Putie Fransoife , Tome VII. apportes DE L'ACAD^MIE RO^'^LE DES SCIENCES. 89 apportes dans raffemblie par M. Hunauld. lis avoieiit etc ramoUis dins ^mmmmmammmmmm dii vinaigre, durcis enfuitc comme dans letat naturel , apres avoir trempc „ dans I'eau , & ramollis une feconde fois par le vinaigre. M. Hiuiauld de- |^ voit repcter cette experience & nous ei> donner une note plus circonf- * urellf. tancice , mais une niort trop prompte nous la enleve au milieu de fej Annie tl^*^ travaux. La cuilier ramollie pourroit bien ne I'avoir etc que parce que le lait avoit eu tout le temps de fc corrompre , & de devenir une efpece dc vinaigre, I V. Noix phrifiies. M. Vacher, correfpondant de I'acadcmie , chlrurgien-major \ Be- fancon , a envoys \ M. Morand des noix petrifiees , qui ont ccla de remarquable qu'il n'y a que I'amande qui en foit petrifice. La double robe qui la couvre , cellc qu'on nomme I'ecale, & la coque proprement dite, le font confervees en entier & dans leur confiftance naturelle , le zefte meme qui occupe let interftices des lobes de I'aniande, & qui eft renfermc fous les memes enveloppcs , n'a cte nullement attcint du (uc pierreux , il eft feulement fort d^ffcchc. Ces noix ont ete trouvees dans la terre, ^ en- viron 50 toifcs de profondcur, \ Lons-le Saunier, petite ville de Franche- Comte, lorfqu'on y a creufc de nouveau les anciens puits des falines , qui avoient ete aoandoniiees depuis pres dc cent cinquante ans , & qui ont ite reparees du moins en partie cette annce. L'eau chargce de particules terreftres , la liqueur lapidihque qutlconque a-t-elle traverfe I'ecale & la coque de la noix fans y lailfer aucune imprefTion de fa qualite , ou n'a- t-elle fait qu'enfiler des canaux qui I'ont port(ie feulement \ I'amande ? S'eft-elle inlniuee dans cette partie par les conduits du fuc nourricier, ou n'a-t-elle fait que s'engager dans fa lubftance poreufe ? Eft-ce enfin cette fubftance qui a etc veritablement convertic en caillou , ou apres fa deftruc- tion, la liqueur petrihante ou petrifice elle -meme n'a-t-elle fait que rem- plir la concavitc ou le moule qu'elle y a trouve ? Ce feroient tout autant de queftions \ trailer, mais dans la difcuffion defquelles nous n'entre- rons point. La plupart des echinites petrifies & changes en vrai filex ou pierre ^ feu , qui fe trouvent autour de Breuillepont , & dont il eft parle dan» I'hiftoire de 1711 , {a) ne reprelentent que la fubftance molle & la chair de I'animal fous fon icaille. Une partie de cette ecaille tient encore \ quelques-uns , & paroit avoir ete epargnee par le fuc pierreux, de mcmc. que les enveloppes des noix trouvees \ Lons-le-Saunier. C<) Colleftion Acad^mique, Tome V, Partie Franjoife. Tome IX. Partie Frajifoife. M 90 ABRiGfi DESM^MOIRES u i s t o i k. e Naturelle. SUR L'OUIE DES POISSONS, Annie 1^43, ^ ^ SUR LA TRANSMISSiaN DES SONS DANS L'EAU. HXt. J_jEs poiflbns different affez de nous & de la plupart des animaux ter- reftres par leur figure , par la ftrudiire tant interne qii'externe de leurs par- ties , par 1 element dans lequel ils vivent , & par leiirs befoins , pour en diff^erer audi par les organes des memes fens, & par leurs fens memes. On ne devroit pas ctre furpris qu'ils en cuffcnt quelqu'un que nous n'avons pas, ou qu'ils fuflent prives de quelqu'autre que nous avons. L'ouie, par cxemple, femble leur avoir ete refufie avec la voix dont I'ufage eft (1 ana- logue ^ l'ouie •, mais coinme I'analogie , telle du moins que nous la con- cevons dans la nature, eft affez fouvcnt trompeufe , la raifon de la diver- fite , & meme des contraires , ne I'eft pas moins quelquefois. C'eft que uous rapportons fouvent I'une & I'autre 4 de pretendues fins auffi bornecs que notre intelligence, &: qui s'ecarteroient en bicn des occafions du plan general auquel elles font fubordonn^es. Confultons done uniquement I'ex- pericnce dans le cas dont il s'agit , elle nous conduira du moins ^ un doute plus dclaire. Ce qui fait croire qu'en general les poiflbns manquent du fens de l'ouie, c'eft qu'on ne trouve dans la plupart aucun organe qui paroiffe repondrc i ce (ens. La parfie de leur tete qu'on nomme les ouies , hranchice , par oil , felon M. Duverney, (a) ils refpirent I'air qu'ils expriment de I'eau, & par oil I'on croit communement qu'ils entendent, etant bien examinee, n'a parii nultement propre ^ cette derniere fonftion. Les naturaliftes & les anatomiftes s'accordent fur ce point, quoiqu'ils different d'ailleurs en par- ticulier fur la queftion, les uns voulant que les poilloiis foient abfolument prives du fens de l'ouie, les autres affirmant qu'ils en font dones, fans ex- pliquer comment, & quelques-uns n'etant pas trop d'accord avec eux- memes fur ce fujet. Les cetacees , tels que les baleines , les fouffleurs , & quelques autres grands poiflons qui fe tiennent long-temps fur I'eau ou qui fortent meme- de i'eau pour paitre fur le rivage i la maniere des animaux tcneftres, doi- vent etre exceptes. On leur trouve des conduits auditifs qui ne paroiffcnt pas equivoques, tandis qu'on ne voit ricn de pireil dans les poiflbns or- dinaires, fur- tour dans ceux qui font converts decailles; mais aufli les ce- tacees difterent-ils beaucoup des autres poiflbns par la frrudture interne & externe de leurs parties, par leur maniere de fe nourrir, de s'accoupler, & par mille autres psrticularites. Ceux d'entre les petits oil I'on trouve (a) CoI'.ciSion AcadiJmique , Partie Fransoife, Tome I. DE L'ACADETVIIE ROYALE DES SCIENCES. ^r des conduits propres h I'oiiie , conime dans la rale & dans la Lroprolc , i— i— »«««— fortent viliblement de la cbire des ccailleux. La difference que Ton remarque entre ces deux efpeccs dc poiflbns, ' ^ t o i r k pourroit bien cepcndant en niettre beaucoup dans lour fa^on d'entendre, '^ ^'^^^^^'■^' & dans les organes qui occsfionnent ce fentiment , fans I'cxclure. M. Klein Annie t74Z- fecretaire de la republique de Dantziclc, connu par Ton favoir & par les esccllens morceaux d'hiftoire natiirelle qu'il publie depuis quelques annees, pcnche pour raftirmatiTC. II nous a donnc dans un de ces ouvrages le de- nombrement & la figure de certains petits olT^lets qui fc trouvcnt dans Ic crane de plufieurs fortes de poilTons , & qu'il conjedlure pouvoir confti- tuer en cux I'organe de Touie. Mais de quelque poids que foicnt les ob- fervations de M. Klein en faveur de I'ouie des poiflbns par un organe im- nicdiat, la fageffe avec laquelle il les propofe, nous permet de fufpendrc encore notre jugemcnt. Quand on fait attention aux (ignes extericurs que les poiflbns nous don- nent de ce qui fe pafle en eux par rapport aux fons, on ne fauroit d'a- bord fe dcfendre de croire que le fens de I'ouie n'a pas ^te refufe ^ leur efpece. La pratique conftante des pecheurs, lorfqu'il s'agit de les furpren- dre , plutot que de les entraJner de force avec le filet, eft d'y proccderen grand (ilence ; ce qui fuppofe du tnoins qu'on a ^prouvc que le bruit etoit contraire ^ la pcche. Mais que penfer dc ces poiflbns domeftiques, qui, felon le temoignage de tant d'autcurs, tels que Pline, Rondelet, Boyle, &c. s'aflemblent au bruit dune cloche, ou de quelque autre inftrument, lorf- qu'on veut leur donrcr A manger ? Pline ajoute que les poiflbns qu'on gar- doit i Baies, aujourd'hui Pouzoles , dans les viviers de Domitien, accou- roient lorfqu'on les appelloit par leur nom. Ce fameux naturalifte n'igno- roit pas que les poiflbns font prives, tout au moins en apparence, des organes de I'ouie, & nonobftant cette privation, ou avec les exceptions ju'il y mettoit pcut-etre, il croit que quelques-uns, coreme le muge, k aupe, le cromis, & le loup , quoique ccailleux, entendeut. II y a dans Martial une epigramme qui roule toute entiere fur les poiflbns facris dc Baies, & qui fuppofe le fait rapportc par Pline comme tres-connu : cha- cun de ces poijjbns , dit le pocte , vient a la voix du maitre qui I'appelle. On en raconte autant d'un poifibn qui ctoit nourri dans les viviers da Louvre du temps de Charles IX. Toutes ces autorites cependant, ou autrcs femblables en faveur de Touic des poiffons, n'ont pas paru fuitlantes i M. I'abbe NoUet dans le niemoire qu'il a lu \ I'academie fur ce fujet. Les auteurs dont il s'agit, n'auront pas toujours etc tcmoins de ce qu'ils avancent , ou ils ne I'auront point examine avec toute la rigueur qui etoit \ delirer en pareille matiere •, ils peuvent y avoir ajoute des circonftances qui nous deguifent les faits, ou en avoir fuppriine quelqu'une qui nous en auroit indique la veritable caufc; une vue fubtile, ou quelque autre fenfation , des ebranlemens communi- ques au fond ou aux parois du baflin , de pctites agitations dans I'eau, aver- tiront les poiflbns de mille mouvemens extcrieurs qui fe lient avec I'ha- bitude qu'ils ont prife de venir \. certaines heures au bord & h la furfacc M ij ?, a a 91 ABR^GEDESMEMOIRES *— ™T^^"t en montant de gauche ^ drolte , & an contraire , s'il eft regarde par fon ouverture tournce vers le fpcdatcur-, car parnii ce nombre infini de lima- Ann/e f^ :. cons, de buccins, de pourpres,. dc trompes , &'c. qui couvrent la terre & qui rcmpiiffent les fleuves & Ics mers , il eft plus rare qu'on nc croiroit d'en trouver dont les fpires foient toumees en ce fens, & n'aillent pas de droite k gauche dans la polltion oil celui-ci va de gauciie i droite. Mais nous ne (uivrons pas M. Daubenton plus loin dans la defcripti-on de cctre coquille & de I'aniinal qu'clle renferme , non plus que dans les confe- quences qu'il en tire par rapport k fon fujet •, il pourra lui-mcme , s'il le jugc ^ propos , faire ulage de toutes ces recherches dans Tacademie , oil il a etc rc^u quclques mois aprcs y avoir lu le mcmoire dojit nous venous dc parler. I L Sur une ejpece de Ver qui vient a la langue des Chiens. Cette efpece de ver, qu'on peut appeller Sublingual,, qui nait ou qui sattache aii-deilbas de Li langue des chiens, fc trouve etrc fort comnum dans certains pays , & fur-tout en Rouflillon & ^ Perpignan , oii M. Bar- rere, correfpondant de I'academie, & profelTeur. en mcdecine, I'a obferve. II eft pour I'ordinaire blanchiitre, rond , de la longueur d'environ deux pouces, & d'une ligne de dinmetre vers le milieu du corps, pointu par les deux bouts , principalcmcnt par fa queue , qui eft fort eftilce fur la longueur de trois ou quatre ligncs, & aflez fembiable ^ celle d\in tctard. II le ticnt cache fbus le milieu de la langue de I'aniraal , & s'y etend cojnmunement depuis le filet ou \e frein Jufqu'i la pointe, adhcraiit ^ la fuperficie fous la membrane externe ou dpidermdide , a travers laquelle il eft aife de I'appercevoir. Vu avec la loupe , il relfemble \ un petit inteftin bourfouftle, luifmt & poll dans toute fi fuiface, & i'on y dif- tingue ttcs-bien la tetc & la queue. La tcte a une petite fente, & qui en eft apparemment la bouche , d'environ une denii- ligne, un peu en dcci de fon extrcmite. II feroit i fouhaiter que M. Barrere , qui a joint une figure k fon memoire , nous exit envoye le ver mcme avec la langue du chien qui en etoit attaque. Les petits chiens couchans & les chiens de berger font les plus fujets i cette maladie , du moins en Rouflillon oii M. Barrere ne I'a point remarquee en aucune autre efpece. Lc mal s'annonce par une faim & une maigreur extraordinaires qui augmentent \ mefitre que le ver devient plus grand , & dont la fuite eft une mort certaine , li Ton n'a; foiii d'y renicdier. Toute la cure confifte \ enlever ce ver avec une aiguille ou avec un petit morccau de bois dur & pointu •, inais il faut attendre pour cela qu'il ait acquis une certaine grofieur , parce qu'auparavant on ne lauroit I'appercevoir. On ne met rien fur la plaie; il eft meme bon de la lailier faigner. Nous u'entrcrons point dans un plus grand detail de 98r , & dont M. Perra-.iit nous a donne la defcription anatomique avec les figu- res , avoit 7 pieds & dcmi de hauteur , ^ prendre depuis le haut du dos jufqu'i terre, quand il fut diffeque, & n'ayant encore que 17 ans. On fait que les animaux de fon efpece croiffent bien au-deli de cet age, & que, felon Ariftote, Pline & quelques autres auteurs, leur jeunelTe ne com- mence qui 50 ou 60 ans. Son omoplate etoit cependant de zi pouces de longueur. Done , par une regie de proportion , & en fuppolant que cette partie croilfe h-peu-pres en mcme raifon que les autres , l'elephant de notre omoplate foffile aur.i cu tout au plus 10 pieds 5 pouces de hau- teur : celi fait, je Tavoue, un grand elephant ■, mais on trouvera dans les livrcs DE rACADJiMIE ROYALE DES SCIENCES. 97 livres des iiaturaiiftes ancicns Sc modernes , 8c dins Ics relations des voya- l^rs:::^^^::^^ eeijrs, qii'il y en a de plus cranJs dans les Indes. Gillius dit en avoir rr , „ „ , nielure un qui etoit i Conltantinoplc, & qui avoit 10 picds y pouces de jj._j.,. ,,, c iiauteur, &, felon Scaliger dans fes notes fur I'hifloire des aniiiuux d' Aril- tote, il y en a de i? coiidces ou dc 1 5 pieds & demi. Annie 174^- I V. Grand morceau de Cryflal rempli d'Amiante. On voit (biivent de petits morceaux de cryftal de roche dans lef- quels paroiflent differentes fubftanccs h^terogenes ; des paiiles , des brlns d'herbe, de laterre,&:, ce qui eft plus rare, de raniiantc , autremcnt asbefte oil lin incombuftible, matiere mincrale & talqueufe, qui reffemblc beaucoup k I'alun de plume i & tout petits que font ces cryftaux, on Icur donne place dans les cabinets d'liiftoire natureile. Au/li at- on regarJc comme fort curieux & fort rare par la grolfeur , un grand morceau de cryftal de roche rempli d'amianre, que M. Morand a montre ^ I'aca- demie. C'eft un bloc irregulier & 4 plulieurs faces, les unes planes & po- lies, les autres convexes ou concaves, brutes & raboteules , qui a 5 pou- ces & demi de hauteur, depuis une efpece de bafe un peu arrondie, jufqu'^ une pointe pyramidale & ^ quatre pans irreguliers qui le termine, & de 4 pouces dans fa plus grande laigeur; il pefe 4 livres moins 1 onces. Cc bloc de cryftal fenible refulter de trois morceaux qui s'a]uften: en- femble , & qui en quelque facon fe penetrent , & dont le plus gros laifle i decouvert trois faces & quatre angles , les deux autres morceaux lui etant unis dans I'efpace qu'auroient occupe les deux autres faces & le cinquieme angle de rextrcmitc d'un prilme pentagonal , dont il a la figure , ce qui n'eft pas le plus ordinaire •, car en general , c'eft la figure hexaedre que les cryftaux affedlent plus que toute autre , foit comme prif- mes , foit comme pyramides. lis font fouvent I'un & I'autre, prifmes par le milieu , pyramides plus ou moins oblongues par les deux bouts, & cela i)ar la feulc induftrie de la nature des Icur premiere formation, & jufqu'i e montrer fbus ces figures dans leurs plus petites parties , & reduits en poudre. Celui-ci, comme nous I'avons dit, contient beaucoup d'amiante dans fon interieur-, cet amiante y eft loge & ralfemble par filets ou faifceaux de ditferentes grolfeurs, dans des tuyaux ^-peu-prcs cylindriques qui traver- fent obliquement & parallelement entr'eux toute la maffe du cryftal, de- puis la bale oil Ton voit I'ouverture de quelques uns , jufqu'i la pointe & ^ fes faces (uperieures ou ils fe terminent fins les percer. La tranfparence du cryftal permet ^ TcEil de fuivre les filets d'amiante dans ces conduits dont ils paroiflent remplir exadtement la cavitc. Ce morceau avoit etc pris dans les Pyrenees, & donne i un general Autrichien qui etoit \ Barege •, ce general vint ^ Paris , & en fit prefent ^ M. Morand qui avoit acheve de le guerir d'un coup de feu, pour lequel il etoit allc aiix eaux. Tome IX. Panie Frangoife. N H I S T O 1 R E Natu r llle. Annie ij^^- 98 ADRI-GE DES ME MOIRES V. lyoire rendu flexible & tranfparent. M. GiOFFROY a fait voir \ la compagnie line petite ciiiller d'ivoire que de la moiitarde 011 elle a trenipc long-temps, a rendu flexible & tranfparcnte comme de la come. Ce fait que I'acadcmie a Jiige digne de remarque , peut aider ^ en eclaircir un autre fort femblable, que nous avons rapporte dans I'hiftoire de I'annee derniere. MeJfieuTs de la SocUd Roy ale des Sciences itablie a Montpellier , ont emoyi a I'Acadimie I'Ouvrage qui fiiit , pour entretenir I'union intime qui doit etre entr'elles , comme ne faifant qu'un J'eul Corps , aitx termes des Statuts accordds par le Roi au mois de Fhrier ijoG. E S S A I SvR LA Formation des Dendrites des environs d'Alais. Par M. I'Abbe ue Sauvages. ^^^^^^'^^^ J_i E s dendrites font des pierrcs le plus fouvent opaques , fur lefquelles Anne'e 2745. on voit des ramifications peintes qui imitent des arbres, & quelquefois des payfages. J'ai range fous trois clafles celles que j'ai trouvees dans mes courfes. Les dendrites ou pierres arborlfees de la premiere , extremement rates , ont leurs ramifications etendues en tous fens dans I'interieur de la pierre , il faut la fcier & la polir pour en faire des tableaux , un heureux hafard y fait quelquefois decouvrir des figures regulieres. Dans celles de la fe- conde & de la troifieme clafle , les ramifications font fur un nieme plan & couchees ^ plat dans I'interieur d'une fente •, fi le marteau ne les de- tache point, il eft inutile de les fcier ou de les polir, on ne feroit que gater la pierre & les deffeins fans rien decouvrir. Les dendrites que j'ai vues en differens pays peuvent fe rapporter ^ quelqu'une des precedcntes -, elles convicnnent toutes en ce qu'elles n'ont que des ramifications tou- jours brunes, & qu'elles font appliquees fur la pierre toute nue. Les den- drites de la troifieme clafle , que j'ai principalement en vue dans ce memoire, font affez abondantes dans un vallon pres d'Alais, appellc vul- g.iirement Rujfeau ; ce qui les caradlerife & les diftingue de toutes les autres , ce font fur-tout les couleurs du fond du tableau differemment combinees avec les ramifications & les terrafles, d'oii il relulte une prodi- gieufe variete de payfages en mignature, dont on pourroit faire une fiiite curieufe & un affez ample recueil. Chaque coup de marteau ouvre tou- jours une nouvelle decoration, & donne quelquefois des tableaux parfaits. DE L'ACADEMIE ROYALE DES SCIENCES. 95 des deffeins finis & d'apres nature : on eft ch.iqiie fois agreabi .-mcnt fur- 1 pris dc troiiver fans effort d'imagination & au premier coup d'a-il , uii ,, ciel , dts nuagcs , un horizon , uii aurore ou un crcpulcule , dcs tcrraiH-s , \J ^ ^ '' • » * des coteaux, des arbres de tige , des forets epaiffes , des fuites & des ^a"""" •'■H- le. lointains : tout y eft net & bicn tetmine, tout y eft de bon goiit, ricn qui Ann^c T^Ai. ne foil dclTine corredemenf, j'ajouterai qu'il y a certains traits fi fins, li delicats , qu'ils ne per dent rien pour etre vus de pres, lors mcmc qu'ils font groflis par la loupe , h travers laquelle les cuvrages de I'art les plus finis ne iailFent entrevoir que rudeife & groflieretc. Sur ce portrait de nos dendrites, dans lequel il n'y a rien d'outre, h curiofite fournit milie queftions touchant la maniere dont elles fe forment; je vais effayer de repondre aux principales-, mais comme I'explication que je donne , depend du detail de quelques obfervations , c'eft par elles que je commence : ces obfervations regardent & les pierres qui fervent de toile au tableau , & la matiere des couleurs. En premier lieu , le rocher qui fournit les dendrites eft par lits plus ou Observation- I. nioins epais , diverfemcnt inclines & fendus en plulieurs morceaux fepa- Le rocher dcs Dcn- res, Chaque morceau eft encore traverfe de plufieurs fentes en differens "^"'^^ fens, au moyen defqucUes on peut en feparer les parties, mais non fans quelque difficult^ : ce n'eft que dans ces derniercs fentes qu'on trouve les payfages; elles ne laiffent poirtt d'ouverture , & ne font d'ailleurs fenfi- bles que par des filets ou la couleur de la pierre paroic alteree , & parce que c eft felon leur diredion que la pierre fe cafle. Ces fentes partent de la fuperficie de la pierre & la divifent , quelque- fois nettcment, en deux pieces, quelquefois elles laiffent une adherence vers le milieu des deux plans , ou fur I'un des bords : dans ce dernier cas la pierre , lorfque ces deux plans font fepares , paroit vive au-lieu de I'adherence , & y conferve fa couleur natiurelle qui eft uii bleu terne & fonce. J'ajoute enfin que les fentes aux payfages font fi multipliees , que dans line piece de la grolleur du poing , il y en a quinze ou vingt •, chacune a un deffein qui lui eft propre , qui n'eft copie d'aprcs aucun autre, dont I'emprcinte eft cependant double & exaftement la meme fur les deux plans qui fe touchent , avec cette feule difference, que la droite de I'une repond i la gauche de I'autre. Les couleurs font I'autre partie effentielle i nos dendrites-, J'en diftin- Observatiow II. gue de deux fortes , celles du fond du tableau , & celles des figures tra- 5" '" couleurs. cees deffus-, les unes & les autres font etrangeres ^ la pierre fur laquelle elles ne lont qu'appliquees , fans avoir plus de relief ni de profondi. ur que celles des eftampes gravees & enluminecs, avec lefquelles nos den- drites ont d'ailleurs beaucoup de reffemblance. Les couleurs du fond font des ochres & des craies Jaunes, rouges, jonquille, blanches & brunes : les deux premieres font founiies par une mine de fcr dont le rocher des dendrites eft entour6 : on trouve de meme tout auprcs, la mititre dcs autres dans diiierentes couches, k des hauteurs & h des diftances incgalcs. N if ICO A B R E G E D E S M E M O I R E S Les couleurs des figures oil des traits dellines fur le fond ne different entr'flles que par des tcintes plus ou moins fortes, c'eft la msme cou- ■* ' ^ ^ ^ ° ' "■ ^- leur d'un brun plus ou moins foncc , quelquefois tir.int fur le noir , quel- ls at u RLLLE. £J^;^.fQis fur le gris de lin •, eft-elle d'une natiu^e dirferente de la premiere? Annie 114'. ^'^'^o't'e^'c une teinture de vitriol ? c'eft ce que j'examinerai dans la fuite. On voit par I'invcntaire que je viens de donncr, que nous avons deJ4 les materiaux de nos payfages tout ramaffes , il nc s'agit que de les affem- bler & de les nicttre en oeuvre, ou d'indiquer les loix qu'ils iliivent dans leur arrangement. On croit d'abord entrevoir quelqu'analogie entre les figures de nos dendrites & celles qu on forme fur un porpliyre , lorfqu'apres y avoir broye des couleurs on eleve la molctte ^ plomb •, des phyficicns meme apportent cet cxcmpie avcc celui du givre ou des rainceaux qui paroif- fent en hiver fur les vitres , commc une explication ou comme un fait femblable \ celui dont nous parlons •, mais il me fera aife de dctruire ce fcntiment, & de montrer qu'il regne dans la formation de nos dendrites un mechanifme tout different. En eft'et , pour ne parler que du premier exeniple qui parcit fournir I'explication la plus plaufible , fes ramifications de la couleur broyee entre is molette & le porphyre , ne fe formeroient jamais fi on ne feparoit \ plomb ces deux plans ; cela eft fi vrai , que ll pour detacher la molette on la fait gliller horizontalement au-deli du porphyre 5 il n'y a point de ramification, au contraire on en forme tou- jours \ coup fur, en feparant ces plans de la premiere facon. La raifon en eft , comme je crois , que Tair cnvironnant qui preffe la molette fur le porphyre, fans avoir aucun acccs dans I'entre-deux bouche par la couleur, I'air, dis-jc, pret i s'indnuer de toutes parts, & dont le fecours eft nicelfaire k la main pour elever la molette , perce cette cou- leur dans les cndroits des bords les plus foibles , penetre dans cet entre- deux au premier & plus petit ecartement des deux plans-, & comme il ne pcut chaffer entierement cette couleur gluante , il I'ccarte i fes cotes , la fend par plufieurs ruiffeaux , & I'oblige enfin ^ fe ramaffer en petits filets rcleves : ce font ces filets qui imitent, quoique de loin , des ramifications ou des arbres , mais des arbres entaffes ians ordre, & dans lefquels on ne diftingue ni les branches ni les tiges. Dela il eft aife de voir qu'on ne peut trouver dans ce phenomene I'explication de celui dont nous parlons •, je ne dis rien de la difference des couleurs du fond d'avec celle des traits , toujours diftinguees dans nos payfages , & de bien d'autres caraderes qui leur font propres , dont un feul lufliroit pour rendre ce fait inexplicable dans I'exemple de la molette & du porphyre : je ne m'arrete qu'aux ramifications produites unique- ment par I'ecartemcnt des deux plans mobiles, ecartement qu'on ne peut cependant admcttre dans les plans imraobiles des dendrites ■-, bien plus , en I'aecordant on n'en eft pas pour cela plus avance, car ce mouvement fe feroit fans doute dans le rocher d'une mani^re uniforme & ielon une meme diredlion •, mais les femes aux payfiges traverfent la pierre en plu- fieurs fens contralres ; il y en auroit do.K un grand nombre qui ne f. DE L'ACADEMIE ROYALE DES SCIENCES, ici recevroient point cette imprcffion , & dans len.]uelles il n'y aiiroit point dc • • ramifications : or I'experience y eft contraire , ce o^iii Aiftit fans doiite „ pour rejctttr Jans k- cas prcfent cette explication , & mcinc toute autre , x^' ' ^ " ' '^ ^ comme je crois , c]ui s'eloignera trop dc celle enfin egalement par-tout & ims (a) Hamberget eiem. Phyfic. J741, 104 ABREGE DES ME MOIRES interruption, felon que I'ouvertUre de la tentc ,i ete plus on nioins Iirge ,' Tj ic'lon que le pailage a et^ plus ou moins bouche par la premiere couLiir. T IRE Q^^ jj.gjj dirferentes inanieres ont produit les points, les ramifications TURELLE. ^ j^j terraffes; je commence par ces dernieres pour fuivre I'ordre qu'elles Ann^e f^i^. gard^'nt ordinairement dans nos paylages. Je dis d'abord que (i I'entree de la fente a ete ruftifimment large, & la couleur ^ la detrempe peu abondante , celle qui eft ^ I'hiiiie a trouve pen de reiiftance, elle a enfonce la premiere couleur jufqu'i une ccrtaine hau- teur , elle a occupe entierement tout le terrein qu'elle a gagne , & voili I deji les tcrralfes {a) ou ces maffes qui fervent de bafe aux arbres dans les payfages , c'eft un lavis dans nos dendrites , dont le plus haut eft le plus fonce, parce que la couleur qui tend de bas en haut, s'y eft ramaflee en plus grande quantite , faute d'une iffue fuffifante pour sechapper. Cependant la couleur ^ la detrempe , chaffee de fon premier pofte, s'eft trouvee plus refferree, Sc eufin elle a arrete par la denllte ce premier torrent ; d'un autre cotd , la couleur ^ I'huile toujours fous la meme prefHon , a fait effort pour percer encore ■, la gene ou elle s'eft trouvee , _lui a preti de nouvelles forces , elle n'a pu avancer en liberte comme la premiere fois, & chaffer la couleur ^ la detrempe-, mais fes parties les plus deliees en ont pu percer les endroits foibles , s'y pratiquer des paiiagc? etroits qui lui ont lervi de fiiiere , elle eft entree par de petits ruiffeaux qui ont avance en fendant ou ecartant la couleur h la detrempe : ces ruilleaux eux-memes ont-ils rencontre fur leur route de petits vuides ? ils fe font partages pour fe mettre au large , ils ont pouffe des branches k droite & ^ gauche , & ces branches ainli que leurs tiges , ont fuivi I'im- preflion uniforme qui les pouifoit de bas en haut : les unes & les autres feroient droites fi rien ne s'y etoit oppofe, mais h en s'elevant elles ont heurte centre des maffes trop denfes de la couleur qu'elles traverloient , il a fallu biaifer, alors les ruiffeaux ou les branches ont obei ^ ces deux directions , & elles en ont fuivi une moyenne en prenant difterentes cour- ■ tures , & elles ont imite par-1^ plus au naturel celles des arbres-, voilk, (i je ne me tromp? , la caule des ramifications en general dans celles qui fe forment les premieres ^ I'entree des fentes. L'explication que je viens de donner , contient les principes qui peuvent fervir ^ reiidre raifon des au- tres pieces du tableau qui ne lont que des varietes de celles-ci. Telles font i°. les ramifications monftrueufes -, i°. celles qui forment les lointains •, ^°. celles qui font detachees & arrondies -, 4°. les points, & enfin les arbres de tige : c'eft toujours la meme caufe , favoir , la diffe- rente inclinaifon des deux plans, combinee avec les obftacles qu'oppole la couleur du fond. Ramiiicat'ons monf- Ainti les ramifications monftrueufes qui s'elevent immediatement des trucuks. bords de la fente, & qui par leur port reffemblent affez au falicor peu ^'S- 3- branchu, audi gros ^ fes fommets qu'au pied des tiges i ces ramifications, dis-je, fe font formees lorfque la couleur ^ i'huile a trouve des paffages (a) Voyei Us figures de la Pianche I. affez DE L'ACADEMIE ROYALE DES SCIENCES. 105 aflez grands pour s'y cpancher abondimment, & peu de redftance fur la „ route : elle s'eft elevee jufqu'au haiit dc la feiite, elle a ren'flc quelqucfois h'j j ^ o i R e le fommet de fes branches en s'y ramall'ant ; toute la ramification cit plus NATURhLLf, haute, plus droite, moins branchue que les autres, parce que la coulcur a eu un cours plus libre en fuivant la diredion de bas en haut qui ctoit la Annk 1745- phis forte. Les lointains font des maffes dc ramifications feparecs , pofees les unes Les lointam. au-deffus des autres, qui diminuent par degres k nielurc qu'cUes s'elevent, en forte que les plus hautes font toujours plus greles , plus raccourcics & d'une teinte plus foible. J'ai reniarque deux fortes de lointains qui different entr'eux par Icur forme &- par leur origine -, les premiers fe trouvent fur les plans qui , I*'- '• ^'i- *• n'ayant aucune adherence, font egalcment diflans I'un dc i'autrc dans toute leur furface : ces plans font traverfes dans leur cpaiffcur par des fentes doiit ]a diredtion eft parallele aux premieres ramifications du bas du tableau ; mais ces memes fentes en gardant ce parallclKrae , coupent le plan tantot obliquement , tantot ^ angles droits ; la couleur ^ I'huile a pcnctre des plans jnfcrieurs ou du dehors , dans ces fentes tranfverfales , & s'eft venu rami- fier dans le plan du payfage, en fe repliant egalement en bas comme en haut : fi la fente tranfverfale a coupe IcpailTcur du plan ^ angles droits , parce qii'clle a trouvc une cgale facilite , & que rlen ne I'a determinec plutot vers un cote que vers I'autre , cela a produit des maffes de ramifica- tions oppofces par la b,ife & d'un pareil volume , telles que des arbres planti* fur le bord d'un ruiffeau, dans I'eau duquel on les voit exadtement repetes. Ces ramifications au refte font plus greles , plus petites , plus foibles que celles du bas du tableau , & cela a caufe de la difficulte des paffagcs plus etroits , & parce que la couleur d'une feule fente s'eft partagee des deux cotes : par-li ces ramifications imitent les lointains, quoique fouvent celles de differentes fentes paralleles foient d'une meme nuance k caufe da runiformite des memes pallages. Del^ il eft evident pourquoi les maffes des ramifications, mifes les unes au-deffus des autres, font fsparees dans cette premiere efpece de lointains-, mais la caufe de cette feparation eft plus difficile h decouvrlr dans la fe- conde efpece : les plans de ces autres lointains ne lont point perces par des fentes qui traverfent leur epailfeur comme dans les premiers , mais ils font adherens par le haut, & la fente va en s'clargiffant , au moins je le fuppofe, du lieu de I'adherence vers le cote oppoie. Je retrouve dans les principes diiji pofes , fur tout dans rinclinaifon des deux plans , & dans les obftacles de la couleur du fond , I'explication des circonftances les plus remarquables dans cette leconde efpece de lointains, favoir, la feparation des maffes raniifiees, leur dircdion vers le lieu dc I'adherence, leur affoiblifferaent dans toutes les dimenfions , & enfin les pctits points de la meme couleur qui leur fervent de terraffe : ces points lont extremement ferrcs vers la bafc des ramifications , mais ils devicnnent Fig. v plus rares par degrts, i mefure qu'ils s'approchent du fommet des rami- fications infcrieures. Tome IX. Partie Franfoife. O iV^ A B R E G ^ D E S U i U O 1 RE S ■ II faut fe rappeller que la cowleur a rhiiilc qui a forme les premieres „ ramifications k I'entree de la fente, n'a pu les prolonger, arretee, comme ^ nous I'avons dit, par I'obftacle de la premiere couleur; roais li fes parties TURiiLE. gjofjjeres ^^^ ^(^ arretees, les plus petites molecules out pu obcir i I'im- j^iir.t'e n^S- P'^'^'^°" 1"' perievcroit 'k s'ouvrir des palfages : cette couleur ainli filtree h. travers celle du fond , n'a pu s'echapper que goutte i goutte du fom- met des premieres ramifications, parce ^^u'il ne s'devoit pas ^ la fois de cette couleur fine autant qu'il en falloit pour former une ■ continuite qui alongeat les m^mes ramifications •, ces petites gouttes ddtachifes par inter- valle & arrondies, comme celles de I'huile qui nage dans I'eau , fe font elevees jufqu'i ce que des paflages plus etroits de la couleur du fond leur ont prefente un nouvel obftacle : les gouttes n'ont pu forcer ce defili qu'apres etre devenues plus fortes par leur reunion , & par les fecouffes continuelles des gouttes qui arrivoient & qui fe joignoient aiix premieres; elles ont enfin furmonte I'obftacle , peut-etre , en fe filtrant de nouveau, & la quantite de couleur ramaflee a ete fufEfante pour donner des filets fuivis, c'eft-^-dlre, des ramifications : & voil^ diji une maffe feparee, & au-deffus de celle qui eft i I'entree de la fente ; lorfqu'il y en a plus de deux , la troiheme s'cft formee de meme , I'une a foiirni de la couleur ^ I'autre, & ce font les gouttes qui I'ont apportee, & qui ont fait la com- munication. Les autres circonftances que j'ai remarquees s'expliquent encore d'une facon plus aifce : Tiinfi i°. les ramifications des differentes terraffes ont routes la meme direiflion , parce qu'elles ont recu une impreflion com- mune qui a pouffe la couleur des bords de la fente vers le cote oppofe •, 2°. les ramifications deviennent toujours plus greles , parce que les paf^ fages de la fente devenant toujours plus etroits , la couleur ^ la detrempe qu'elles contiennent, eft proportionnellcment plus fine i mefure qu'elle s'approche de I'adherence , & partant les filieres & les couloirs qu'elle a donnes ^ I'autre couleur, ont augmejite en finefle ; 3°. les nuances s'af- foibliffent de plus en plus , parce que la couleur en s'epurant decroit tou- jours en quantite, chaque filtre en arrete une partie plus groUiere-, 4". les ramifications fe raccourciffent i melure qu'elles font plus loin de I'entree de la fente , parce que le mouvement de la couleur fe ralentit ^ raifon des frottemens & des autres difficultes qu'elle eprouve fur fa route. Ces difficultes arretent enfin le cours de la couleur ^ I'huile , tout ^tant plein 5 il ne fe fait plus ni filtration , ni nouvelle ramification ; les gouttes & les points que leur grofiieretc refpedlive a arrctes i I'entree des cou- loirs, demeurent dans la place qu'ils occupoient au moment que la cou- leur a ccfle de s'elever •, les couleurs fe font fechees & le tableau a recu la derniere main. Je finirois , s'il ne me reftoit encore deux mots k dire , tant fur les petites ramifications detachees & repandues dans la partie fuperieure da quelques-uns de nos payfages , que lur ces arbres qui s'elevent d'une ter- raffe , dont la tige bien marquee furpaffe toutes les autres. T'S- -I- La premiere variete a fon originc dans de gvoflss gouttes de la codeur DE L'ACADliMIE ROTALE DES SCIENCES. 107 k I'huile, qui ont trouve peu d'obftacle dans la couleur dii fond-, dc$ que — » la premiere impuliion qui les failoit elever a cell'e , celie qui eft propre „ aux liquidcs preffes entre deux plans , les a fait ramificr eii tout fens , en ^ 9 T CT t R E forte que la goutte a etc le centre des ramifications. On peut encore rap- atuutlle. porter ici les petites ramifications ifo lees des agathes arboriiees, li cepen- Apnie 17^5. dant elles ne /ont pas une agreable illulioni de I'art Enfin les arbres , dont la tige trcs clevce efl; garnie de branches dans (a Fig. 2. longueur , font fortis de fentcs pareillcs ^ cclles de la premiere elpece da lointain , & ils n'en different qu'en ce qu'ils fe trouventi ici dabout . fiur nne terrafle 5 felon que la fente a cte entr'ouverte dans fa longueur , il a, pafle plus ou moins de couleiu' , les branches ont etc plus longues ou plus courtes, & elles ont imitc dcs.pcupliers., des ifs , des picea cm <^e&. melazes. . ;i/i'f..iii..'i-, . ., ni- ' J J'ajouterois bien d'autrcs pbfervatlons liir les dendrites. qui m'ont cto apportees de differens cndroits , je pourrois m'cteiidre encore lur les notres , mais la prolixitc eft infeparable de I'ennui , li d'ailleurs elle n'eft rachetce par les graces du ftyle , dont les ouvrages de cette forte ne font guere fuiceptlbles : outre qu'on peut ramener tout ce qui regarde les dendrites ^ quelques-uns des principes repandus dans ce memoire , on leut les confronter de meme que les confequences que j'en ai tirces avec es phdnomenes rapportes , & on trouvera , au moins je m'en flatte , que li je n'ai pas touche au but , je ne m'en fuis guere ecarte. k EXPLICATION DES FIGURES. P I. A N C H E I. Fig. I. Lointain de la feconde efpece , c'eft-k-dire , dont les maffes ra- mifices fur des lignes pofces au-deffus les unes des autres , ont pour ori- gine une fente qui traverfe I'epaifleur du plan fur lequel eft deffine le payfage. a , bj e{[ une fente qui coupe I'epaiffeur du plan Jt j par une ligne b, c, oblique au mcme plan •, elle n'a donne des ramifications que d'un cote. d , f, eft une feconde fente qui traverfe I'epaiffeur du plan k, ^ angle droit. Cette fente ne va pas plus loin ici que de f en e , elle donne des ramifications en haut & en has oppofees par la bafe. g, h, eft une fente qui partage la pierre k , en deux couches, dont les faces qui fe touchent ont chacune un paylage qu'on diroit ctre fait fur la mcme planche •, & il en eft de mcme de toutes les autres fentes \ payfages. La terraffe / ^ fe trouve ainfi fur certaines pierres , elle paroit comme lavee \ I'encre de la Chine. Fig. i. Elle reprcfente des arbres plus eleves que les autres , & dont la tige eft une fente telle que les precedentes , par oil la couleur a paffe pour former les branches. Fig. ;. Ce font des ramifications plus nourries de couleur, & que j'ai appellees monfrueufes. O ij ic8 A B R £ G fi D E S M £ M O I R E S , Ac ^^— '^^'— — Fig. 4. Lointain de la premiere efpece , dont les difFiirentes terrafle* H I s T o 1 RE ^°'^^ form^es par des points. Sur le haut dii tableau fe trouvent audi de« Naturlile P°'"*^ ^^^'- ^^ petites ramifications ifolees. Toiites les pieces des figures pr^cedentes ont ite" dcflinees d'apres na- Anne'e fj^^. ture , avec toute la fidelite dont on a et^ capable. On comprend , fans que Je le dife , que les ciels & leurs varietes , qui font un des principaux ornemens de nos pierres , n'ont pas pu ctrc reprifentes dans un delfein ^ I'encre •> le feul defaut que je trouve dans le refte , & il etoit inevita- ble , c'eft que les copies , quoique reffemblantes , vues de loin , font pourtant fort au-deflous des originaux vus de pres. Pour ne pas manquer \ la finceriti dans les plus petites chofes, je fuis oblige d'avertir que dans la premiere & dans la feconde figure , on a raffemble dans un meme ta- bleau des ramifications & des arbres de differens gouts , rcpandus dans plufieurs pierres doat en n'a pas voulu multiplier les dcdeins. J[) c -ij BOTANIQUE. »»v fc»r.ir • ''■■' «*■■» ^ .. . £««P:«>* V •. -i*'***-- Ill u BOTANIQUE. SUR UNE ESPECE D'OUATE o u DE MATIERE COTONNEUSK Trouvde au fond d'un Etang. N amas d'eanx dormanres , cju'on nomme V Etang de Petre , )i line I lieue & demie de Mctz , s'etant troiive deffecW par des accidens qu'il ■□ „ ..,,„,, ^ /-.. .11 111. 1 ■ r ^ rJOTANlQUE. leroit inutile de rapporter , les habitans des environs furent extremement fiirpris d'en voir le fond tout couvert d'une matiere blanche & coton- Annie 1^41- neufe , tout-i-fait femblable i de I'ouate : il fut fait li-deffus quantite de „.„ raifonnemens , & Ton ne manqua pas de concevoir de grandes efpcrances ftour le commerce dii pays. M. Lamy de Bezanges, commiffaire d'artil- erie , qui etoit fur les lieux , en ecrivit k M. de Valiiere , & lui cnvoya one delcription exadte du phenomene & du local , avec des dchantillons de la mntiere en queftion , pour etre communiques ^ I'acadcmie. Ces echantillons ayant ete conlidcres attentivemcnt , meme avec le microfcope, on a reconnu que la matiere blanche qui les compofe , obfervee pour la premiere fois fur le fond de I'etang de Petre , au mois d'avril de cette ann^e , & confidant en des filets tres-delies , n'eft: autre chofe que la plants appellee Conferva, commune dans les eaux dormantes , dont elle tapiffe ordinairemcnt le fond. Cette plante n'eft en eftet qu'un amas pro- digieux de filets noncux & delies qui demeurent verds tant qu'ils font dans I'eau , iTiais qui blanchiffent plus ou moiiis i I'air ou au foleil , des qu'ils font \ fee. M"- Bernard de Juflieu & Hellot ont obferv6 foigneu- fem?nt la meme plante aprcs I'avoir tiree des badins du jardin du roi , ils I'ont fait deffecher & blanchir ^ I'air, & I'ayant examinee au microfcope, & comparee avec I'ouate de I'etang de Petre , ils I'ont trouvee entierement femblable ^ cclle-ci. Quant aux eiperances que cette decouverte .ivoit fait iiaitre , elles ont para peu fondees , les filets de la conferva etant trop fragiles & trop friables pour etxe employes avec fucces 4 aucune forte de manufadurcs. Ill ABR^GfiDESMfiMOIRES BoTANiQUE. EXPERIENCES Nc S u R LA Force d u B o i s. lous avons donnc en entier , dans le volume precedent, le premie* memoire de M. de Biiffon fur la force du bois. Nous allons extraire le fecond. Apres avoir reconnu , par des epreuves exadies , que la difference de poids entre le cceur & I'aubicr du bois de cheiie, etoit environ d'un quinzieme ; que le bois du pied pefoit plus que celui du tronc au milieu de fa hauteur , que le bois du milieu pefoit plus que celui du fommet , & cela i-peu-pres en progreflion arithmetique tant que I'arbre prenoit de raccroiffement •, mais qu'il venoit un temps oii le bois du centre & celui de la circonference du cceur pefoient ^-peu-pres egalement, favoir, lorfque le bois etoit dans fa perfection •, apres ces preliminaires , dis-je , M. de Buffon a recherche , par un grand nombre d'experiences , quelle etoit la diffcfrence de la force du bois dans fes differens ages , & il a trouve que fa force etoit proportionnelle \ fa pefanteur , quelle diminuoit toujour* du centre ^ la circonference, & du pied au fommet de I'arbre ; & quoi- qu'on ne puiile pas abfolument affujettir cette diminution ^ une propor- tion invariable, cependant les moyens aufli dilpendieux qu'ingenieux que M. de Buffon a employes ^ cette recherche, I'ont conduit k la decouverte d'une regie fixe de la redftance ou de la force du bois. Nous fupprimons le detail de ces experiences. Nous dirons feulement que M. de Buftbu ayant frit equarrir des pieces de bois de differentes longueurs & de diftc- rentes groffeurs , depuis quatre jufqu'k huit pouces d equarriffage , il les a fait charger de bois jufqu'i les faire rompre , & qu'ayant calcule leur reliftance Ipecifique depuis le premier eclat jufqu'i I'inftant de leur rup- ture totale , meme les fleches de la courbure , avant qu'elles commencaf- fcnt d'eclater , il a trouve que la reliftance du bois etoit comme la largeur de la piece cquarrie, multipliee par le quarre de fa hauteur. II a drefle des tables de ces experiences, que nous donnerons ici telles qu'il les a jointes ^ fon iavaiit memoire. Toils les auteurs qui ont ecrit fur la refiffance des folides en gefteral , & du bois en particulier , ont donne comme fondamentale la regie fui- vante : La rififtance efl en raijbn inverje de la longueur, en raifon di- recle de la largeur, & en raifon doubUe de la hauteur. Cette regie eft celle de Galilee , adoptee par tons les mathematiciens , & elle feroit vraie pour des folides qui feroient abfolument inflexibles & qui romproient tout-^-coup, mais dans les folides elafliques , tels que le bois, il eft aife d'appercevoir que cette regie doit etre modifiee ^ plulieurs egard?. M. Ber- nouilli a fort iSien obferve que dans la rupture des corps elaftiques une partie des fibres s'alonge , tandis que I'autre partie fe raccourcit , pour jiiiili dire , en refouJaiit fur elle-meme. On volt par les experiences de M. de DE L'ACADfiMIE ROYALE DES SCIENCES, iij M. de Biiffon , que dans les pieces de meme groflbur, la regie dc la refift.iiice — ^— ^— en raifon inverfe de la longueur, s'obferve d'autaiit moins que les pieces p font plus courtes. II en eft tout aiitrenient de la regie de la rcliftance en°°'^^^'Q"^- raifon diredre de la largeur & du quarre de la hauteur; M. de Buffon a Ann^e 1741. calcule la table feptieme I deffein de salliirer de la variation de cette recle-, on voit dans cette table les refultats des experiences , & au-deffous , les produits que donne cette regie ; il a pris pour unites les experiences faites fur les pieces de 5 ponces dequarriiiage , parce qu'il en a fait un plus grand nombre fur cette dimendon que fur les autres. On peut obfjrver dans cette table , cjue plus les pieces font courtes , & plus la regie ap- proche de la verite , & que dans les plus longues pieces, comme celfes de i8 & de 10 pieds, elle s'en eloigne •, cependant i tout prendre, on peut fe fervirde la regie generate avec les modifications neccfl'aircs pour calculer la reliftance des pieces de bois plus grolfes & plus longues qua celles dont il a eprouve la reliftance ; car en jettant les yeux fur cette iep- tieifle table , on voit un grand accord entre la regie & les experiences pour les difftirentes groffcurs , & il regne un ordre alfez conftant dans les differences par rapport aux longueurs & aux grolTeurs , p&ur jugcr de la modification qu'on doit faire k cette regie. TABLES DES- EXPERIENCES S U R LA F O R C F. D U B O I S. PREMIERETABLE, Pour les pieces de quatre pouces d'e'quarriffhge. Longueurs des pieces. Poids des pieces. LilTiS. Charges. Temps employe \ char- ger les pieces. Fleche de la courbure des pieces dans I'infiant ou elles commencenc i rompre. Pieds. Livres. HeuTCS. Mutates. PoMes. Ligiies. 7 60 ^6 5^75 0 19 0 11 5 6 4 6 8 68 6? 4600 45 CO 0 15 0 15 5 9 4 8 9 ID 77 71 41 CO 5950 0 14 0 11 4 10 5 6 84 Hi 3615 5 Aoo 0 15 0 15 5 10 6 6 11 ICO 98 5050 1915 s Tome IX. Partie Franfoije, 11+ BOTANIQUE. Annie 1741. ABREGi DES MEMOIRES SECONDE TABLE, Pour les pieces de cinq pouces d'iquarrijfage. Longueurs des pieces. Poids des pieces. Temps depuis le pre- ^,^^5^^^. j^ [^ courbure Charges. mier eclat julqu'k I'ml- ^^.^^^ d'^ciater. tant de la rupture. Pieds. LiVrcj. Lints. Heures. Minutes. /•duces. Lignes. 1 94 88i 11775 I I 275 0 58 0 55 2 6 2 6 8 104 102 9900 9675 0 40 0 59 2 8 2 II 9 118 116 IIS 8400 8525 8200 0 28 0 28 0 16 5 ? 6 10 15^ 150 ,28i 7225 7050 7100 0 21 0 20 0 18 3 i 5 6 4 11 156 15 + 6050 6100 0 30 5 6 5 9 1 + 178 i7« 5400 5200 0 21 0 18 8 8 3 1(5 18 209 205 44^5 4^7') 0 17 0 15 8 I 8 2 Mi 251 575° 3650 0 II 0 10 8 8 2 10 26? i5 9 3^75 ?'75 0 10 0 8 8 10 10 21 16 281 ^975 0 18 II 3 510 2200 2125 0 16 0 15 1 1 i; 6 i8 J64 1800 1750 0 17 0 17 18 22 DE LACADjEMIE ROYALE DES SCIENCES. 115 TROISIEME TABLE, BoTANIQU£. Pour Us pieces de fix pouces d'equarrijjage. Annie iiAZ. Longueurs des pieces. Poids des pieces. Charges. Temps depuis le pre- mier, ^clatjufqu'i i'inf- Qnc de la rupture. Fleches de la courbure avant que d'Sclater. Puis. LUrcs, Livres. Hcures. Minutes. Pouces. Lignes. 7 ii8 ii6i 19250 18650 I 49 38 On n'a pas pu obferver la quancite dont les pie- ces de 7 pieds ont pli^ dans leur milieu , h caule de I'epailTeur de la boucie' 8 149 146 15700 15550 I 12 I 10 i 4 ^ 5 9 166 15450 J 2850 0 56 0 51 2 6 2 lO 10 188 186 "475 1 1025 0 4$ 0 44 J 5 6 li 114 211 9200 <)000 0 31 0 32 4 4 I '4 ^55 i5+ 7450 75CO 0 15 0 22 4 6 4 » 16 29+ 195 6250 6475 0 20 0 ip 5 6 5 'o 18 354 531 5625 5500 0 16 0 14 7 5 8 6 10 577 575 5025 4S75 0 12 0 11 9 6 8 10 p ij BOTANIQUE. 116 ABR^GE DES MfiMOIRES QUATRIEME TABLE, Pour les pieces de fipt pouces d'iquarrijfage. Longueurs dcs pieces. Poids des pieces. Charges. Temps depuis le pre- mier eclat jufqu'a I'inl- tant de la rupture. Fleche de la courbure ivant que dMcIater. PleJs. Liires, Li^Tes, Jleures. Minutes. Ponces. Lignes. . 7 8 204. 201 i 26150 25950 2 6 i 9 1 6 9 ii7 22800 21900 I 40 I 37 5 I 2 II 10 ^5^ 19650 19300 f 15 1 16 * 7 12 302 301 16S00 '555° I J 2 1 1 3 4 H 551 35' 1 3600 12S50 0 55 0 48 4 i 3 5? ' i6 406 403 1 1 1 00 10900 0 41 4 10 0 56 5 5 i8 454 450 9+50 9400 0 27 0 22 5 <5 5 '° 20 5^5 50c 8550 8000 0 15 0 1 3 7 '° 8 6 DE L'ACADEMIE ROYALE DES SCIENCES, ny CINQUIEME TABLE, Pour Us pieces de huit pouces d'e'quarrijfage. BoTANIQU£. Annie fj^i. Longueurs pieces. Puids des pieces. Charges. Temps depuis le pre- mier iciat jufqu'i I'inf- tant de la rupture. Fleche de la courbure avant que d'^clater. Pliii. Livra. Litres. Hemes. Minutes. Pouces. Ligries. 10 5)1 35° 17S00 27700 1 50 2 58 i 3 11 395. 13900 I50CO 2 I I H 461 453 ICO50 19500 I 6 I 1 5 10 3 2 1$ 52S 5H i58oo 15950 0 47 0 50 5 2 3 9 j8 594 555 135 = 0 129C0 0 32 0 30 4 6 4 « iO 664 66c'-, 1^775 1 1200 0 24 0 28 6 6 6 BoTANIQUE. 118 ABRfiGEDESMfiMOIRES SIXIEME TABLE, Pour Us charges moyenncs de tautes les exp&iences prMdentes. Longueurs des pieces. G R 0 S S E U R. S. 4 ponces. 5 pouces. 6 pouces. 7 polices. 8 pouces. Pitds. Lions. Liptes. VwriS. LiVres. Lh-rts. 7 55'^ I1515 18950 8 455° 9737 T 15525 16050 9 4015 8308} IJ150 22550 lO 3611 712.5 11250 '9475 27750 \l 29871 «C75 J) I 00 I6I75 15450 14 5500 7475 13115 19775 16 4550 6561 T 1 1000 '6575 18 5700 5562 i 9425 1 3100 20 3ii5 4950 8175 11487! il 1975 ^4 zi6ii t8 1775 DE L'ACADEMIE ROYALE DES SCIENCES. 119 SEPTIEME TABLE. BOTANIQUI. Comparaifon de la rififlance du bois , trouvie par Us exp/riences pri- Annii 174 1. ddentes , d de la refijiance du bois Juivant la regie que ceite riljlp tance efi comme la largeur de la piece , multipli/e par le quarri de fa hauteur, en Jiippojiint la mime longueur, Nota, Les aft^ril'mes marquent que les experiences n'ont pas iti faicct. Longueurs des pieces. Grosseurs. 4 pouces. 5 pouces. 6 pouces. 7 pouces. 8 pouces. PkJs. LiVres. Vu-tiS. Vnns. himi. [Lhrts. 1 5901 II525 181)50 19915 f " 32200 51624I 48100 " 47649 { 47198 1 s 455° 501'T 97S7T I55M 16912 f 26050 * ;975° 40089} 9 4025 8508 \ 15150 14556* 22550 22798! * 32800 34051 10 }6l2 7125 11250 12; 12 '9475 19551 27750 291S4 11 ^9877 3"of ^075 5ICO 1049-1 16175 16669 Y 25450 14885 i 14 5 100 74-' 5 88rz{- 15225 «599? i 19-75 20889 ;- 16 4550 636ii 751^ 1 1000 11956J '6375 17817I iS 5700 556^1 6595? 94^5 10152 1 1 ?2C0 i5i5^T 20 5ii5 4950 55-^? 8275 8S49-; 1 1487 1 152091 Voye\ ciapres la fuite de ce Mimoirc, 110 ABREGE DES MEMOIRES BoTANiQUE. OBSERVATIONS Ann^e 1741. BOTANICO-METEOROLOGIQUES, Pour Vann^e 1740. Par M. D u H A M E L. Wm. Xl eft certain que les biens de la campagne , ces biens (i neceffaires qu'on pent les regarder comme les feuls vrais biens , les bleds , les vins , les chanvres , les fruits , les bois , &c. ne viennent pas tons les ans audi abondamment ni d'aufli bonne qualite , & Ton lait en general que ces va- rietes dependent de la diiFcrente temperature des faifons. Mais ces connoiffances generales ne fuffifent pas , & on conviendra qu'il feroit egalement utile pour I'agriculture & pour la phyfique , de connoitre pofidvement le rapport qu'il y a entre la temperature des faifons & les produftions de la terre. On fent de refte que la connolffance de ce rapport peut dans la fuite con- duire infenfiblement i celle des principaux phenomenes de la vegetation , de meme qu'^ appercevoir I'effet que telle ou telle circonftance dans les faifons peut produire fur les vegetaux. Or, dans quantite de cas de cettc efpece il eft fouvent tres-avantageux de prevoir, ne fut- ce qu'i-peu-pres, puifque quelquefois on fera ^ portee de prevenir une partie des accidens , & que dans d'autre cas pn s'epjrgnera bien des inquietudes : en voici des exeniples. A peine cet automne 1 740 les bleds ont-ils he on terre , qu'il eft fur- venu des gelees affez vives pour la faifon; on craignoit qu'elles ne devinl- fent plus confiderables & qu'elles ne fiffent du tort aux bleds, qui n'itoient que germes, mais on avoit de quoi calmer fon inquietude, quand on favoit que I'hiver dernier 1 740 il y a eu beaiicoup de bleds qui etant en cet etat, ont fupporte pendant pres de deux mois & demi une gelee fort vive. II faut avouer que nos obfervations ne feront pas toujoiirs aufll conlb- lantes, elles nous annonceront quelquefois une mauvaife recolte de bleds ou de vins, &c. mais c'eft le cas oil la prevoyance devient infiniment plus utile , puifqu'elle peut nous mettre en etat de prevenir les grandes difet- tes, quelquefois, li la faifon le permet, en femant des menus grains en abondance, comme on I'a fait avcc un fucccs prodigicux en 1709, on quand la faifon fera trop avancee , en fe precautionnant de bleds etran- gers, comme on I'a fait en 1758. Outre ces vues d'utilite qui peuvent s'etendre fort loin , fai lieu d'efpe- rer que le journal que j'entreprends, fera intereffant; on ne peut ctre in- diflerent fur ce qui regarde les biens de la campagne, & ne pas fouhaitcr d'en avoir I'hiftoire. Majs DE L'ACADlfMIE ROYALE DFS SCIENCES, iii Mais il eft plus difficile de L bien fuivrc cctte luftoire qu'on nc fe I'i- ^— ''■'— 1 magine d'abord. ,,.,, Botankjuf. L'obCerv.iteur Ic plus exad , le phylicien le plus eclaire (car pour cet ouvrage il faudroit etre I'lin & I'autre) ne pourra rendre comptc* que de Annie 17^1. ce qui fera arrive dans une province ou il auri he i portce dc fiire f;s obfervations •, & qu'eft cl- que Ictendue d'une province en comparaifon de cclle du royaume ? Souvcnt il fait fort doux en Provence, pendant qu'il gele trcs-fort h I'autre extrimicc du royaume •, qur-lquefois on fe plaint dans un canton dc Tabondance des pluies , pendant q j'on en delire dans un autre. Toutes ces chofes & mille autres circonftances qui varient fuivant les licux , influent neannioins beaucoup fur les produdions de \z terre, c'cft pour cela qu'on voit (cette annce , par exemple) les rerolt;s trcs-abondantcs en Languedoc , pendant qu'cllcs iont fort mejiocrcs dans le centre du royaume, Ce que je viens de dire, prouve que pour rendre cette hiftoire com- plette , il faut avoir dans routes les provinces du royaume , des corrcfpon- dans exadls & eclaires. Un particulier ne pourroit guere efperer de teh fecours , mais Tacadeniie a lieu de les attendre de (cs correipondans ; ils ont les connoiffances necefiaires , ils font rcpandus dans plufieurs provin- ces, & les oblervations meteorologiques & aftronomiques que I'acadcmic recoit de tous cotes, me font efperer que la plupart de ces correfpondans fe chargeront avec plaifir de lui envoyer les autres oblervations dont ellc tcmoignera avoir befoin. * Je vais rapporter celles que j'ai faites dans nos terres anprcs de PIu- viers , ville lituee entre la Beaucc & le Gatinois , ce fera une invitation pour ccux qui voudront bien s'intereiler ^ la perfedion de cet ouvrage; & commc mon journal pourra leur fournir des idces , j'ai cru qu'il etoit it propos de I'etendre plus que je ne compte le faire dans la fuite, pous qu'on puiiFe micux comprendre les vues de ce travail, A U T O M N E IJ^S- Pour rendre plus complette, I'hiftoire des bleds qu'on vient de rc- cueillir, je me trouve oblige de dire quclquc chofe de I'automne de 1755. Les pluies qui ont etc tres-frequentes dans cette faifon , ont beaucoup letardc les femailles-, on a feme jufqu'aux dernieres femaines de I'Avent, & il y a eu beaucoup de terres fortes & argilleufes qui n'ont pas etc en- fcmencics. Les bleds les premiers faits ont leve aflez bien , quelques-uns feulement ^toient un peu clairs , ce qu'on attribuoit i ce que la terre ctant, con.me Ton dit, en mort'ur , toute la femence n'avoit pas ete cnterrce, & Ics pi- gecns , les corneilles & les autres oifeaux en a-.oicnt mange une partie, A la fin de d^cembre il y avoit beaucoup de bleds qui ne faifoient ^ue lever, & d'autres qui n'ctoieut point encore fortis de terre. Tome IX ?aTtii Franioife. Q ,11 ABRECE DES Ml-MOIRES Janvier 1740- BoTANIQUE. J J Le I". & le i Janvier 11 gela affez fort pour cmpecher qu'on put tra- '^ ^ vailler ^ la terre , & les arbres furent charges de beaucoiip de givre. Le 4 le temps s'adoucit un peu , & le 5 il lomba une pluie douce qui didipa tout le givre, & qui degela la terre en quelques endroits; mais il y en eut d'autres ou il re^loit encore de la gelee au fond de la terre. La nuit du 5 au 6 la gelee reprit fi fort , que dcs le 6 on pouvoit tra- vcrfer les bleds i cheval & meme en voiture fans enfoncer. Voili ce qu'on appelle veritablement un faux d^gel, qui mettoit beaucoup de bleds dans les circonftances en apparence les plus facheufes ; car , conime nous I'avons dit, 1°. les terres etoient tres-humedees , quantiti de pieces de bled etoient k moitie couvertes par des mares d'eau. 2°. Beaucoup de bleds ne faifoient que lever, & il y en avoit qui ue letoient pas encore. }°. La gelee prenoit tout d'un coup trcs-vivement. 4°. II y avoit des endroits oil le bled etoient entre deux glaces. ^ 5°. Enfin il n'y avoit point de neige qui put mettre ces bleds ^ I'abriv n^anmoins cette gelee dura tout le mois de Janvier , & fut meme affez forte le 9, le 10 & le II pour faire defcendre le thermometre de M. de Reaumur i i o degres } au-deffus de la congelation. F E y R I E R. Tout le mois de ftvrier la gelee continua i-peu-pres de la meme force-, fur la fin cependant la chaleur du foleil qui commencoit I s'elever fur I'horizon, degeloit fur le haut du Jour la iuperficie de la terre, mais elle rcgeloit la nuit , ce qui formoit un verglas qu'on lait etre ordinairement trcs-prejudiciable aux vegetaux. II y avoit des Jours 011 le temps paroiffoit s'adoucir, il fortoit des mu- railles un peu d'humidit^ qui fe congeloit I leur furfa:e, puis il tomboit un peu de neige , & bientot le froid devenoit auffi vif qu'auparavant. II y a eu des endroits ou il s'eft conferve un peu de neige fur les bleds, mais dans d'autres , & en particulier aux environs de Pluviers, le foleil faifoit fondre le peu qui en etoit tombe , & la terre reftoit entierement decouverte , ce qui fait que le gibier n'a point fouffert. Cependant la duree de la gelee & les autres circonftances que J'ai rap- portecs , caufoient beaucoup d'inquietude •, les fermiers alloient viliter feurs terres , & n'y appercevoient pas plus de bled que fi elles n'avoient pas ^te enfemcncees •, en fe mettant i terre les meilleurs yeux apperce- voient feulemeni un peu de verd qui etoit au milieu de quelques teuilles mortes. Mais que devoit devenir cet atome de verdure apres le degel ? Pour eflayer de le decouvrir, on leva I grands coups de pioche des mottes de terre, on les mit dans dcs caves, & quand clles furent dcgelees, on DE L'ACADEMIE ROYALE DES SCIENCES. 115 apper9iu ^ chaque brin dc bled une petite racine vive & iin peude yer d . — ■«■ d'ou oil conclut que Ics blsds n ctoicnt pas pais. „ La confttjiience ctoit bonne, die a ete conftatee par I'l-venement ; mais ° t a n i q u h. le bled doit taler pendant I'hiver , il doit poulier beaucoup de racines en Annie f?/\i. terre, & il fe doit former une efpcce d'oignon ou une grolFeur a IVndroit ou les feiiilles fe joignent aux racines; tout cela n'etoit point, 6: on vcrri d.ins Ja fuite que cell li une des caufcs de la mcdiocritc de U rccoltc. Mars. Environ le 4 de mars il s'cleva un vent de nord tre';-froid , qui parut faire plus de tort i plulicurs de nos plantes , & particulicrement \ nos jeunes cypres, que n'avoient fait les gejees precedentes. Le 9 mars le vent tourna au fud , il tomba une petite pluie fine, & la terre fe degcia tres.-doucenient , il plut tres peu. L'humidite nc tut pas audi con(id^rablc quelle left ordinairement dans les vrais degels , les mu- railles ne fuerent prefque pas. Peut etre eft-on redevable de la confervi- tion de bien de choles h la douceur de ce dcgel , car il ell: certain que les deJordres que produifent les gelces, dependent beaucoup des degels: nous en avons rapporte beaucoup d'exemples en 1758 {a) dans le mc- moire que nous avons donnc M. de BufFon & moi fur les effets des ge- lces d'hiver & du printenips, & je ne crois pas devoir negliger de rap- porter une obfervation de riieme genre, que le hafard m'a fournie cette annee. On avoit oubiie une quantite de pommes affez conlidcrable dans un gre- nier, ou elles n'etoient en aucune fa9on \ I'abri de la gelee. II n'eft pas douteux qu'elles ont ete prcs de deux mois dures comme des pi-ires, & gelces Julqu'au cccur ; cependant ^ la Pcntecote elles ^toient aufli belles &: aulli faines que celles qu'on avoit confervees avec beaucoup de foin dans la fruiterie. II eft bon de remarquer que ces pommes etoient d'une efpecc qui a toujours un gout de fauvageon , & qui ie garde tres- long-temps -, car peut etre la reinette & d'autres efpeces de pommes plus dclicates au- roient-elles ete plus endommagees par la gelee. On juge bien que les productions de la campagne etoient tres retardees, les ouvrages I'etoient aulIi , & au 15 du mois il n'y avoit prefque point de terres labourees pour les mars ■, cependant les fermiers ayant augnu-nte le nombre de leurs chc-vaux , & le temps ayant continue \ etre au beau , prefque toutes les terres ont ete femees i temps , il y a meme eu des fer- miers qui ont retournc quelques-unes de leurs pieces de bleds qui etoient dans des fonds , pour y mettre de I'orge, dont la re«olte letur a ete plus avantageufe que celle de leurs meilleures pieces de bkds. Malgre le derangement des faifons, on a vu des hirondelles les premiers )ours de mars , mais il en eft mort beaucoup , faute de nourriture , cc qui n'eft pas feulement arrive aux environs de Paris & de Pluviers , mais (a) Vcyez le Tome VIII. de cette CoUeftion Acad^mique, Panic Fraii?oife. 11+ ABR^GE DES m£MOIRES ■ ' ' ' ' " ^— * encore en plufieiirs provinces elolgnees, fuivant les obfervations qui en ont B o T A N I Q u I. ^'"^ envoyecs i M. de Reaumur. C'eft vers la fin du mois qu'on a commence ^ bien connoitre les de- Annee fJ4l. fordres que la gelee avoir occafionnes-, j'ai cru devoir les rapporter ici un peu au long en faveur de ceux qui prennent plaihr ^ cultiver & h multi- plier des arbres & des arbuftes de route efpece. Cette partie d'agricuiture eft trop louable & trop utile ^ la foci^te , pour qu'on neglige de prefer des fecours ^ ceux qui Tent choifie entre tant d'autres qui , conime les fleurs, n'ont que ramufement pour objet. Ceux qui veulent elever des arbres, ou rares dans ce pays, ou Stran- gers, out ordinairement pour guide une petite brochure, qui a pour tlrre, catalogue des arbres 6' des arhujies qui fe peuvent dever en pleine terre cux environs de Paris. On a compris dans ce catalogue fans dtdinition ]es arbres qui paffent communement I'hiver en pleine terre fans ctre en- dommages par la gelec, quoiqu'on n'apporte aucunc. precaution pour les en garantir, & ceux qui ne le paflent qu'i de bons abris & avec quelques precautions. L'htver qu'on vient d'effuyer , etant un fort hiver , fans ce- pendant etre de ces hivers rares ^ qui rien ne relifte, tel que celui de 1709, j'ai cru qu'il etoit trcs-propre ^ faire diftinguer les arbres & les arbuftes qui ne craignent point les grands hivers, de ceux qui ont befoin de quel- ques precautions pour les iupporter ; & pour donner quelque chofe de plus certain , j'ai reuni ici les obfervations que Mr-'- de Bufton & Bernard de Juflieu ont faites au jardin du roi, celles que le frere Philippe, char- treux , a faites ^ Paris dans les jardins de fa niaifon , &: celles que j'ai fai- tes dans les notres aux environs de Pluviers. Outre les arbres des forets & des vergers qu'on fait refifter ^ prefque tous les hivers , en voici une aflez grande quantite qui n'ont point non flus cte endommages par la longue gelee du dernier hiver; le xylofteon, agnus caftus, I'erelle , les thymelea, les tuia, les therebinthes, les tamariC- ques, le liege, les fpirea , les fabines , les ramnoides, les philirea , les fafeoloides, le periclymenum , le pavia, le paliurus , les acacia de Caroline & de Virginie, le benjoin, le pourpier maritime, le catalpa, celui des chartreux a perdu quelques branches, le bignonia \ feuilles de frcne , le micacoulier, les differentes efpeces de clematitis, la diervilla, I'eleagnus, le faux gayac, le pavia, les cedres de Virginie, le ketmia ordinaire, la inelaize, le menifpermum ou Here de Canada, le bonduc, les lauriers- ccrifes & les lauriers- francs, qui ont ete un peu i I'abri du vent-, les gros lulipiers du jardin du roi n'ont pas foufFert, mais les jeunes font morts aux chartreux-, il en a etc de meme des lauriers- tulipiers. Je n'ai perdu aucun arbre de Judee , quoique j'en euffe de fort petits , il en a ete de meme au Jardin du roi , cependant il en eft mort plufieurs jeunes aux char- treux : les gros pins n'ont pas fouffert , mais les petits font prefque tous morts, j'en ai feulenient rechappe quelques-uns de ceux qu'on appelle le pin maritime ; I'arboutier , moyennant une legere couverture , a reliile dans le jardin des chartreux , mais il eft mort dans celui du roi , jufqu'aux ra- cines, qui ont repouflc au printemps ;, les gros barba-jovis ont liiidc an DE L'ACADfiMIE ROYALE DES SCIENCES. 115 jardin du roi, mais les petits ont peri & au j.irdin dii roi & aux cliartreux', - tons les chcvrcLuilles , mime celiii qui eft touloiirs verd , ont relifte , »ls g ^ ^ ^ j, , ^ y j_ ont feulement perdu bcaucoup de menues branches. Les cedres du liban qui ctoient en place dcpuis pluheurs annees, ont bien rilifti, mais les jeu- Ann^c t/4i- nes des chartreux qui ctoient nouvellement plantes , ont peri \ les grcna- dilles ont peri feulement julqu'au res de terre , il en a etc de nieme du coriaria, cependant il y a eu quelques pieds qui out peri entiercment. Les jcunes pieds d'alatcrne & ccux qui avoient cte replantes , font morts , mais les gros pieds ont relifte. Les jafminoides de la grande 8c de la petite ef- Eece , etant en efpalier & bien en racines , ont feulement perdu quelques ranches •, il en a etc de meme du genet d'Efpagne, de I'emerus & du jaf- min blanc , mais le jafmin jaune commun & celui d'ltalie n'ojit pas fouf- fert. Quelques azedaracs font morts entierement, & d'autres n'ont perdu que leurs branches ; les pieds de futet qui ctoient un pcu gros, n'ont pas fouffert , mais les jeunes font morts juiqu'aux racines ; I'arbre dc cire eft mort jufqu'aux racines. Les oliviers , qui ctoient en efpaliers & un peu couverfs , n'ont pas peri, mais les autres font morts; les grenadiers en efpalier n'ont pas fouf- fert •, plufieurs lauriers alexandrins font mortj , il en a dtc de meme des genefons de Virginie. Les lauriers-thyms ont perdu plufieurs de leurs branches-, les figuiers qui n'ont pas ete couvers, ont perdu beaucoup de jeune bois , fur-tout ceux qui donnent des figues violettes ■■, plufieurs jardiniers les ont cru ge- les jufqu'aux racines, & les ont coupes, mais ils ont eu grand tort, car les notres & ceux des chartreux ont bien repoufTe, & ont meme donne du fruit dans les deux faifons. Quelques Jeunes pouifes de gros cypres ont etc gelees , mais les jeunes ont beaucoup fouffert , J'en ai perdu plus de fix cans. On fera peut-etre furpris de me voir former de grandes pepinie- res d'un arbre qui a eu le malheur de deplaire, qu'on pretend porter I'cn- rui par-tout ou il eft , & qu'on a banni de tous les jardins j mais outre qu'il ne me paroitpas aufli defagreable qu'on le dit, je lui ai reconnu des avantages finguliers qui m'ont fait fouhaiter d'en avoir beaucoup. On fait que les pieux de chene , d'orme , de charme , de frene , de fa- pin , Sec. perilfent tres-promptement au res de terre , & c'eft cet entretien onereux qui a fait abandonner les contrefpaliers en beaucoup d'eudroits ; or j'ai reconnu qu'un pieu de cypres en peut ufer au moins fix de chene. les uns aprcs les autres, car j'ai entr'autres la cloture dune raelonniere qui eft encore fort bonne , quoiqu'elle ait ete faite en 1709 avec des cypres geles , & que quelques- uns des poteaux qui la forment, ne foient pas plus gros que le bras, encore y a-t-il plufieurs de ces poteaux au- pres defquels il y a prefque toujours eu des couches dc fumier, ce qui certainement avance beaucoup la pourriture. J'ai cru ne devoir pas ncgliger de rapporter cette propriete du cypres, qui peut le rendre utile en bien des occalions. Je reviens aux delordres de la gelee. Les charmilles anciennement pkntces n'ont point fouffert , mais prefque ii(J A B R ^ C E D E S M i: M O I R E S .■—.oil I I ■null ■■! tcnites cellf s qui avoii;nt cte plantces avant l.i gelee , font morccs iufqu'.ui res de tene. Lcs rnyrtes , les laiiriers-rofcs , les roinarins , les vicux picds B o T A N 1 Q u E. j^ tliym , les ciftes font tons peris -, il eft rechappti aufli tres-peu d'ar- Ann^e 7741. tichaux. Voici quelques confequences qii'on pent tlrer de ces obfervations, Premterement , les jeunes arbres font plus tendres ii la gelee q^uc ceux qui font plus gros , je ne dis pas que les vieux, car ceux-ci louftrent quelqucfois beaucoup de grandes gelties-, done qu.'nd on veut elever des arbres qu'on fait ctre tendres ^ la gelee , il faut les tenir dans des lerrcs ou k de bons abris jufqu'i ce qu'ils foient iin peu gros. Secondcment, les arbres nouvellement plantes font plus fujets k etre endommag(^s par la gelee , que ceux qui n'ont point cte replantes depuis plulieurs annees •, c'eft une obfervation que j'ai fouvent faite, & qui m'a determine h ne planter qu'au printemps les arbres qui peuvent founrir dc grandes gelees. Enfin nous avons dit dans le mcmoire que nous avons donne en 1758, oii nous avons examine les effets de la gelee fur les ve- getaux , que les gelees d'hiver faifoient plus dc defordres dans les endroits qui ctoient expofes au vent de nord; j'ai fait la meme obfervation cette annee , car j'ai remarque que les arbres qui ctoient abrites du vent de nord par qiielques buis ou par quelques murs , avoient et^ moins endom- inages que les autres. Pkifieurs vieilles fouches de vignes font entterement mortes. II y a eu bien des oignons de lafran de gcles , cependant ce n'eft pas cc qui a fait le plus de tort k cette plante , c'eft que les oignons n'ont pii fe former pendant I'hiver. Pour concevoir ceci , il faut (avoir que tous les ans I'oignon qu'on a mis en terre , meurt , & qu'il s'en forme trois oil quatre jeunes au-dcffus, qui fe nourriffent de fa lubftance & le rempla- cent •, or c'eft ^ la fin de I'automne & pendant I'hiver que ces oignons le forment : la continuite de la gelee y ayant fait obftacle , ils ne fe font for- mes qu'au printemps, & ils font reftes gros comitie des aveltnes, au lieu qu'ils auroient dii etre trois ou quatre fois plus gros, & ces petits oignons ne paroilfoient pas pouvoir donner de fleurs I'automne fuivante. Pendant tout le mois il a toujours fait froid, il eft tombe peu de pluie , mais feulement de temps en temps quelques ondees de gicle & de iieige , en un mot ce qu'on appelle des gibouk'es. A V R I L. La fecherefle , les ondees de neige , de grele & de pluie froide , les vents d'ouert , de nord & de nord oueft & Ic froid ont continue jul- qu'au 20. Le folcil echauffoit les ejidroits qu'il eclairoit , mais il faiioit froid ^ I'ombre , & il geloit prefque toutes les nuits , audi rien ne pro- fitoit ^ la campagne. Le 6 , il n'y avoit encore que les fleurs des ormes qui fuflent forties de leurs boutons. Le i> , les boutons de deux maronniers d'Inde , que je coiuiois depuis DE L'ACADEMIE ROYALE DES SCIENCES. 117 [)liifieiirs annees pour etre des plus hatifs , s'oiivrirent, & en rcftcrent la '^"^ es feiiilles nc s'epanouirent que beaiicoiip de temps aprcs. P Bo u I. Le 1 1 , on entendit le roftignol chanter, quoiquc le froid fut toujours ° "•" '^ ^ i q incommode. ^^^3,', , Le zo , on entendit le coucou. Le 21 , le vent tourna h left, & le temps devint fort doux •, alors les amandiers , les abricotiers , les pcclu-rs & les pruniers mirabolans fleiiri- rent, mais bicntot le froid revint affez vif pour qii'on filt oblige de fe chauffer comnie en hiver, & tous ces arbrcs reflerent long- temps en fleur. Cependant ces temps froids & fees n'avan^oient pas les bleds, & ne faifoient pas lever les aveincs qui avoient eti femees dans la poufTiere •, pour la mcmc raifon I'herbe ne poufloit ni aux champs ni dans les prcs, & on ctoit oblige d'afFourer tous les belUaux comme en hiver , ce qui a occalionne une grande confommation de bled , & a fjit perir pluiieurs moutons & bcaucoup d'agneaux ; cependant vers la fin du mois les avei- iies leverent , 6c les pruniers flcurirent. M ^ I. Jusqu'au 14 de Mai le vent s'eft prefque toujours tenu entre le nord & I'oueft, les ondees de neige & de grcle & le froid ont continue; nean- moins les feigles commencerent h cpier. Le 12, on entendit un bruit conliderable qui fortoit d'une nuee, & prefque dans I'inftant il tomba de la grele , dont la plupart des grains avoient prcs de deux pouces de longueur fur un pouce de largeur, & un peu moins de demi-pouce d'epailleur. Ces grains formoient pour la plu- part une lentiile ovale qui etoit bordee par un collier de petits grains ronds qui etoient gros comrae des pois : heureufement que cette grele ne dura qu'une demi-minute, & qu'il n'en tomba guere que quatre grains par cliaque pied en quarre ; ainfi elle ne fit pas beaucoup de tort aux biens de la terre , ce fiirent les vitres qui en fouffrirent le plus. ^ II vint enfuite des gelees affez fortes pour endommager beaucoup les vignes , & bien des tfpis de feigie furent geles par la pointe. Les bleds n'avancoient prefque pas, & paroilfoient meme fouflVir, fur- tout dans les terres blanches de Beauce, qui paffent pour les meillcures. Cependant les abricotiers, les amandiers & les pechers qui avoient refte long- temps en fleur, etoient dtffleuris, leurs fruits etoient noues, & quoiqu'ils ne priffent point de groffeur , ils paroilfoient en bon etat. Ceux qui connoiffent les abeilles, fe perfuaderont volontiers que la rigueur & la duree de I'hiver fuivies du froid & du vilain temps du printemps, leur devoient etre tres-contraires. Comment aller chercher leur vie par le froid qu'il faifoit ; & quand elles auroient pu braver les rigueurs de la faifon , qu'auroient elles trouvc ? il n'y avoit prefque point de fleurs h la campagne; aufli n'y a t-il eu que les forts paniers , ceux oil il y avoit beaucoup de mouches & de mitl, qui aient liibliftc. Enfiu vers le 25 mai il commenca I ne faire plus froid , on fortit alors ii8 A B R E G E D E S M fi M O I R E S Ml ■ M^M5— Ics or.ingi?rs , ils etoieiit en fort bon etat & bien gariiis Jl' feuilles , cc „ qui nVfl; pas (urprenant , car on lait que quaiid les lerres font bonnes, o T A N I Q u b. i'i,j,„,ijit^ fait plus de tort aux Grangers qut- le frcid. Ann^e T'dt. Pendant le courant de ce mois une maladie cpideinique tri^s-fachcufb fe repandit dans tout le royaume , c'etoient ventabl nvnt dcs h>.-vres malignes, vermineufes, qui, dans quelques endroits que j'ai ete ^ portee d'cxamincr , s'annon^oient comme des peripneumonies , & fiins qu • les fymptonies paruircnt trcs-facheux, les nialades etoient emportes en deur ou trois jours ; cetre maladie a principalement attaque les paiivres gens , dont elle a fait niourir un nonibre prodigieux. J U J N. QroiQUE le temps fut fort adouci, il y a eu peu de chileur pendant tout Ic mois de juin, & les nuits etoient toujours fraiches-, s'il faifoit deux ou trois jours de chaleurs , elles etoieni fort vives , il fe formoit de I'orage , il tonnoit , il greloit , & la fraicheur revenoit. Les menus grains etoient fort beaux, quoiqu'un peu tardifs, les bleds ue promettoient pas tant, ils etoient clairs & fort retard(^s -, cepcndant quelques jours de beau temps firent des merveiiles i la campagne , & on efperoit encore une recolte paflable. A I'ecard des fruits, on n'^Tperoit point de poires, ni de gland, ni de frene, mediocrement de fruits rouges, un peu plus de prunes & d'aman- des , beaucoup d'abricots , de peches, de pommcs, de noix & de noifet- tes; les legumes, pois, feves, lentilles venoient \ mcrveille. Vers la mi Juin il s'deva un vent brulant qui delfscha en un jour toutes les feuilles de nos peupliers ; il refterent affez long temps fees comme its le font en hiver, enfuite ils pouflerent quelques feuilles nouvelles qui les regarnirent en partie. Le 25 il y eut un orage terrible qui commen9a i Orleans, & qui s'eten- dit jufques dans la haute Champagne, faifant de grands defordres par-tout oil il palfoit ; pluficurs paroilfes de nntre voifinage , qui fe font trouvees dans le fort de la mice , ont cte entierement ruinees , les bleds & autres grains abfoUiment aneantis , les vignes cbourgeonnces jufques fur la fouche, nombre d'arbres arraches ou rompus, I'ecorce d.s jeunes etoit meurtrie v quatre ou cinq moulins out etc enleves de defliis leurs bourdons & cul- butes au loin^ le clocher de la Cour-Dieu a ete renverfe par urn boii- rafque de vent li violente, qu'il n'auroit pas touche au toit li 'e vent ne lui avoit pas manqu4 quand il fut plus bas que le faite de Tegiife, des beftiaux & des hommes qui etoient aux champs , ont etc blellcs par k grele , & il y a eu du gibier tu^. Les grains dc grele n'excedoient pas la groffeur d'une petite noix n-.isf- cade , mais ils etoient lances avec tant d'impetuolite par des tourbillons de vent epouv.intables , qu'ils brifoient tout ce qu'ils rencontroient. La grele & le vent etoient accompagnes du toiincrre 1 4Ui a fait aufli quelques defordres. Dans DE L'ACADtMIE ROYALE DES SCIENCES, li^ Dans quclques endroits qui ii'avoient pas effuye le fort de I'orage, on • a effaye de coiiper Ics bleds pour Jes lailler repoullcr ; ils ont repouffe en „ cftet, qiiclqiiefois trois perits tuyaux au-lieu d'un , mais ces fuyaux ne*^^*" portoient que de petits cpis dans lefquels il n'y avoit point ou trcs-peu Ann^e 1741. de grains. A uue demi-Iieue de I'endroit ou Torage a cti Ic plus violent , on nc fentoit pas le moindre vent, on entendoit feulement fortir de la nuee iiii bruit femblable i celui des carroffes qui roulcnt fur Ic pave, J U I L L E T. Pendant tout ce mois les nuits continuerent k etre fraiches , il y cut encore de temps en temps des nuees de grcie qui fuivirent i-peu-pres la mcme route que le grand orage , & pluUeurs paroiifes en foufFrirent. Dans bcaucoup d'endroits les vignes blanches , c'eft i-dire , celles qui portent du railin blanc , furent plus endommagees par la coulure qu'elles ne ravoient ete par la gelee. On n'a pu faire les foins que vers la fin du mois , tant toutes les pro- duftions de la terre ^toicnt retard(fes , encore I'herbe etoit-elle trcs- eourte , & il s'en faut plus de la nioitie qu'on ait eu autant de foin que I'aiinee derniere. Vers la fin du mois il vint quelques brouillards fees qui rouillerent beaucoup de bleds ; or on fait que les bleds rouilles nc pro- fitent prefque plus. Plufieurs efpeces d'infeiflres ont ete fort rares cette annec ; feroit-ce que la rigucur de I'hiver auroit fait perir leurs oeufs ? ou les fraicheurs du printemps & de I'ete auroient-elles empeche beaucoup d'ocufs d'eclorre } luquel cas ils pourroient bien n'etre pas peris, & etro reftes eu etat d'e- clorre I'annee prochaine. Quol qu'il en foit, il y a eu un peu moins de hannetons & de canta- rides qu'i I'ordinaire, encore moins de chenilles, de grillong & de fau- terelles. Depuis cinq ou fix ans, il y avoit, dans le clos des chartreux de Paris, des mouches noires qui faifoient perir les feuilles tendres des poiriers , ^ mefure qu'elles fortoient des boutons, elles s'attachoient particulicrement aux poiriers de virgouleufe, qui reftoient prefque tous les ans depouillcs de leurs feuilles jufqu'i la feve d'aoilt ; on n'y a pas vu cette annee une feule de ces mouches. Mais vers le 15 du mois, toutes les feuilles des ormcs fe trouverent chargees d'une prodigieufe quantite de petits vers bruns , qui mangerent tout le parenchyme de ces feuilles, qui, en trcs-peu de temps, devinrent brunes , comme celles qui font fous les arbres en hiver-, ils defcendirent au pied des ormes pour fe metamorphofer , & ils y formoient des tas aifez conliderables, pour qu'on eut pu les ramaffer i poignee. Pendant cet intervalle vint la feve d'aout qui produilit de nouvellcs feuilles, & les ormcs reprirent un peu de verdure , qui a enfuite fervi de p.iture k Tome IX. Panic Fran^olje. R ijo ABREGE DES MEMOIRES —iMii—^M^w des fcarab^es que les vers bruns dont nous veiions de parler, ont pro- duits, & malgre le froid de I'automne, ces fcatabees ont lublifte line bonne BoTANiQUE. p^^f-g jg cg„e faifon. Ann^e fj4i. A O V T. A IT commencement de ce mois , les bleds n'ay.mt pas encore leiirs ipis formes , il vint quelqiies Jours de clialeur , des rayons de foleil trcs- vifs qui jaunirent beaucoup les fromens, qui, jufques-U, avoient prefque toujours etc ^ I'ombre & au froid •, le grain ne pouvant plus recevoir aflez de nourriture, refta, comme difent les fermiers, retrait ou echaude, & quand on vihtoit les ^pis, on trouvoit un tiers de leur longueur qui ctoit vuide , & les deux autres tiers ne contenoient que des grains mal nourris. On oommen9a la moiffon des bleds vers la fin du mois par un temps pluvieux & firoid : les bleds coupes, de menie que ceux qui etoient ver- ies , germoient aux champs , quelque attention qu'on eut : on les ferroit fort humides , & on ctoit ^ la veille de voir tous les grains perir h. la campagne. Septembre. HEUiEUStMiNT il vint un peu de beau temps au commencement de ce mois, on ferra aflez ^ propos les orges & les aveines, mais il ne faifoit pas aflez chaud pour les bleds , & pour m'exprimer comme les fer- miers , on les ferroit un peu gourds. La moifibn n'a etc entierement finie que vers le 20 ou le 15 •, cette moiflon etoit bien tardive, puifque quelqiiefois tous les grains font en- grangcs avant le 10 d'aout : cependant j'ai appris qu'il y avoit tres-certai- nement des grains fur terre dans le Boulonois les premiers jours de novembre , quand les premieres neiges font tombees , & il y a eu beau- coup de vefces qui , n'ayant pu mtirir , ont pourri dans les champs. Rcvenons aux environs de Pluviers. Dans le temps de la moiflon , les pailles etoient prefque aufli noires que le font ordinairement les chaumes qui font reftes aux champs jufqul la Touffaints •, les pailles etoient aufli fort courtes, ce n'eft pas toujours une preuve qu'il y aura peu de grains, on verra dans I'article fuivant qu'il y en a eu effedivement tres-peu cette annee. Je ne fais fi on en a ^te redevable ^ la continuity des gelees , mais les bleds ont ete aflez nets de mauvaifes herbes , il n'y a eu que le centinode ou la renoude qui eft venue cette annee plus abondante & plus haute que je ne I'ai encore vue. La graine de cette plante ne fait point de tort aux bleds -, quelques fermiers meme ont fu tirer parti de cette herbe , ils I'ont fait faucher & faner pour fuppleer aux fourrages qui leur manquoient ; d'autres, au-lieu de la faucher, en ont nourri pendant aflez long- temps line grande quantite d'oies. Cette efpece de melons hatifs qu'on appeWele melons des carmes ^n ont muri que pendant le courant de ce mois-, & ce qu'il y a de fingulier, DE L'ACADEMIE ROYALE DES SCIENCES. 151 c'eft qu'ils fe lont trouvis tous trcs- bons , mais les melons ordinaires n'ont point reufli. „ O C T O B R E. Annie IJ41 L E temps ayant iti ailez favorable pour les labours dans les mois de feptembre & d'odobre , on a beaucoup avance ces fortes d'ouvrages , & (i quelqiies femailles ont ete retardees , ce n'a etc que par la dirticultd qu'on a eue k battre les grains , comme je vais le faire I'entir , en rap- portant 1 etat oil Us fe font trouvcs dans les granges , quand on eft vcnu % les battre. J'ai dit qu'apres I'hiver les bleds m'avoient paru prcs d'an quart plus clairs qu'ils ne le font ordinairement , ce qui pouvoit venir, ou de ce que les femailles ayant eti tres-difficiles ^ caule de rabondance des pluies qui ctoient tombees en automne , une partie du grain feme fe feroit perdue, ou de ce qu'une partie du bled feroit morte pendant I'hiver, ou enfin de ce que le bled avoit peu talli , & c'eft cette derniere raifon que je crois la meilleure -, ainfi prcs d'un quart moins de tuyau & une paille tort courte. \'^oili pourquoi il y avbit dans les granges la moitic moius de tas que I'annee derniere. On efperoit que ce petit tas rendroit beaucoup en grain, raais on s'eft trompe , au lieu que 11 i 14 gerbes rendent ordinairement une mine de grain, il en failloit 30 cette annee. On en fentira la raifon li on fe fou- vient que nous avons dit qu'a prefque tous les epis, il y avoit un tiers de leur longueur qui etoit vuide , & que dans le refte le grain ctoit petit 3c retrait. Ce n'eft pas tout , on fait que les grains retraits rendent beaucoup cii fon & peu en farine, aulll quatre mines de bled nouveau ne foumiffoient- elles pas plus de farine que trois de bled vieux. Enfin nous avons fait remarquer que ces bleds avoient ete ferres gourds, il s'enfuit qu'ils doivent moins boire d'eau quand on les petrit, & c'eft encore un dcchet dont les boulangers s'appercoivent bien. Nous avons dit auffi que les fermiers avoient eu beaucoup de peine ^ battre le bled pour leurs femailles-, on en doit fentir la caufe, puifqu'on fait qu'il a fallu beaucoup battre de gerbes pour avoir la quantite de grain qui etoit ncceffaire pour les lemailles •, outre cela le grain tenoit extremement dans les epis , qui fe brifoient ious le fleau plutot que de I'abandonncr , commc il arrive ordinairement quand les bleds font retraits. La recolte ayant ete mediocre , il auroit fallu prefque vuider les gran- ges pour avoir le grain neceflaire pour les femaiilles , ce qui auroit etc lujct ^ de grands inconveniens , il ne feroit plus reftc de fourrages pour les beftiaux. Pour privenir cet inconvenient, plulieurs fermiers entendus ont pris Je parti de ne faire battre les gerbes qu'i moitic & fans les delier, puis ils les ont fait entaffer dans un autre coin de la grange , dans le defi'ein d'achever de les battre i net peu-i-peu pendant le refte de I'anne^-. Par cette pratique, ils ont retire le mcilleur grain pour femer leurs ttrres, ils RiJ i}i ABR^G^ DES M]^MOIRES — ^i^^^MM auront toujours de la paille fraiche pour leiirs chevaux , du petit bled „ pour leurs agneaux ; & fans doute que ces gerbes qui auront ete ainfi re- boTANiQUE. ,„u^ps , fe dellechcront & ie battront plus airement , far- tout s'il vient des Annie 1742. gsUes pendant Thiver. MalgriJ la peine qu'on a eue ^ battre les bleds, prefque toutes les terres ont ete emblavees avant la St. Martin •, & comme elies etoient bien meu- bles & fuffifamment humides , il y avoit lieu d'efpirer une belle levee. II n'y a eu que les terres fortes qui n'ont pu etre entierement enfemen- cees que quinze jours ou trois femaines plus tard , ^ caufe des pluies & des nciges qui font tombies vers le 10 de novcmbre. II y a long-temps que nous n'ayons parle des vignes , & ce n'eft que fiarce qu'il n'y avoit rien ^ en dire. La maturity des raifins, comme toutes es autres prodiidlions de la terre , etoit tres retardee , les raifins com- jnencoient i peine ^ rougir h la fin de feptembre. Vers le 9 d'odtobre, il vint des gclees affez fortes pour la faifoa , elles depouillerent prefque toutes les vignes & fanerent les raifins; on les laiffa neanmoins aux vignes jufqu'au 15 ou au io , qu'on fe determina h les couper, voyant qu'ils ne niuriffoieot point, ils dtoient cependant extremement verds. Prefque tout le monde a eu la precaution de faire deux vendanges, mettant dans une cuve les raifins les moins verds , & les autres fous le prefl'oir pour en faire du vin prompt. Les cuvees de raifins tries ont ^te bien long-temps ^ s'echauffer ■, quel- ques-uns , pour les engager ^ bouillir , ont fait rougir des paves , qu'ils ont jettes dans leurs cuves , d'autres y ont jette de la chaux vive , d'autres ont fimplement couvert le deffus de leurs cuves. Nous n'avons employe aucun de ces moyens, que nous croyons inu- tiles •, nos vins ont relle dans la cuve pres de trois femaines , & apres ce temps ils n'etoient pas fi cuves qu'ils le iont quelquefois au bout de huit jours. Je parlerai dans le niois de dccembre de la qualite de ess vijas. NoyEMBRE. Les fafrans commencerent h fleurir quelques jours arant la fete de h Touflaints , & la veille de cette fete , tel qui avoit cueilli une livre & demie de fleurs, en efp^roit autant le jour fuivant, mais le vent, accom- pagn6 de pluies, empecha de les cueillir , & elles furent perdues. Le vent tourna au nord , & rcfta entre le nord & le nord-ouefl: , pem- dant une quinzaine de jours , il gela affez fort pour la faifon , il tomba de la neige, & les arbres fiirent tres-charges de givre, ce qui interrompit la fleurailon du fafran , & la moitie du mois fe palla fans qu'il parut une (eu\e fleur •, enfin le temps s'etant adouci , les fleurs reparurent quand on n'en attendoit plus, & on en a cueilli pendant quinze jours, ^ la verite , en petite quantite, car tel qui, I'annee dernicre, avoit recueilli 14 ^ 15 li- vres de fafran , n'en a eu cette annee que i livres quelques onces, encore n'a-t-il pas ete h. beaucoup pres U beau h caufe des niauvais temps qui font venus 5 quand on a fait is recolte. DE L'ACADi^MIE ROYALE DES SCIENCES. 153 Les gelies qui font fiirvenues an commcncenicnt de ce mois , faifoient —— i^— ^-— craindrc pour la levcp dvrs bk-ds. J'.ii fait voir au commencement de ce _ Journal que cette inquietude dtoit frivole , mais il ctoit trcs raifonnable " 0 t a i.; i q u i, d'apprchciider qu'on ne pilt achcver les leraaillcs : heurculL-mcnt le temps Ann^e 1-41. s'eft adouci, & on les a achevccs avaiit la fin du mois. J'ai parlc , dans I'article precedent, dc Ictat ou le lent trouvcs les bleds dans la grange, il eft ^ propos de dire ici quelque chofe des orges & des avoines. Les orges ont ^te des meilleures, & feront d'un grand fecours pour la fubllftance de la careipagne. Les avoines, quoique trcs bnfles, etoient fort gren^es , mais le grain en ctoit leger , & ne nourrilloit pas bien les chevaux. Je n'ai point encore parle des chanvres, c'eft cependant une plante qui fait un des principaux revenus de quelques villages de notre province. II y en a eii de geles dans le printemps ; d'autres n'ont pu milrir parfaite- ment, les gelces qui iont venues de bonne heme I'automne, ont em- peche de les rouir comme il faut, & les mieux condidonnes font trcs- lendres. On conceit aifemeiit qu'une annec froide & orageufe comme celle-ci , n'a pas hi propre pour les abeilles, elles ont pen travaille I'ctc & I'au- tonine , elles ont etc attaquees de dcvoiemens, qui ont fait perir prefque tous les paiiiers. L'annce n'a pas non plus itc favorable poilr les arbres foreftiers, ils ont peu poulfe , & la feve a ew ii peu de vigueur , que beaucoup d'arbres nouvellement plantes, n'ont poulle qu'a la feve d'aoiit , & il en eft mort bien plus qu'i i'ordinaire •, le bois des bourgeons n'a pas bien muri , il ne s'eft pas aouU , comme difcnt les jardiniers, c'eft pourquoi les ofiers n'ont point de force , ils fe rompent tres-aifcraent : pour cette meme raifon , les pepinieres ont ete long temps en feve , de forte qu'on a ecullonne des pechers dans les pepinieres des chartreux de Paris, les premiers jours de novembre, pendant que la terre etoit toute couverte de neige, ces ccuf- fons paroiffent neanmoins etre en bon etat. Les chataignes etoient fort petites , & le peu qu'on en a recueilli ayant muri fort tard , il y en a eu beaucoup de gelees. Mais ce qui prouve bien ^ quel point I'annee a ete tardive , c'eft qu'on a cueilli des peches fur les efpaliers Jufqu'aprts la Touffaints. Les gclc^s qui ont perdu les vignes , obligerent de cueillir les pcclies , qu'on mit dans la fruitierc , ou elles fe font confervces fort belles jufqu'^ la moitie du mois de decembre. D'abord elles etoient fort ameres , & n'ctoient fupportables qu'en compottes , elles font enfuite devenucs pateulcs , & cnhn la pourriture qui avoit commence aupres du noy.iu , a gagne tout le fruit , & en general on peut dire qu'il n'y a eu que les peches qui ont muri en feptembre , qui aient ete paffablement bonnes. L'annce n'a pas feulement etc tardive pour les vegetaux , elle I'a aufR etc pour les animaux ; car beaucoup de perdreaux n'ctoient pas plus forts ^ la fin du mois de fepttmbrc qu'ils le font fouvent ^ la fin d'aoiit •, de i;4 A'BR^GE DES MEMOIRES ,— .^M^—^— mcmc les colombiers fe font garnis fort tard de pigeonneaux , 8c ils ea ont ete garnis fort long-temps. boTANiQUE. Enhn , tout le courant du mois a eti tres- favorable pour planter des Ann^e ij^i-. »rbres. DZCEMSRE. E N general , pendant tout ce mois le vent a ete tres-violent , variant entre le nord oueft & le fud oueft ; les pliiies prefque continuelles qui ve- noient avec autant d'abondance que les orages d'ete , rendoient le dedans des maifons aufli humide qu'il Teft ordinairement dans les grands degels. Ce temps a dure jufqu'au zo de decembre , que le vent s'etant porte au nord , il eft venu de la gelee , & il eft tombe un peu de neige le jour de Noelj il tomba le matin une pluie qui occafionna un (i grand verglas, qu'on ne pouvoit fe foutenir , mais le lendemain le vent etant tourne an midi, les murs commencerent ^ fuer prodigieufement , & il tomba, ainfi que les jours fuivans , luie quantite prodigieufe d'eau qui ctoit pouffee par un vent tres-violent. La campagne etoit couverte d'eau, la riviere d'Effonnes qui borde nos terres , deborda, elle couvrit les chauffees & inonda les moulins, & I'eau qui s'egouttoit de la tbret d'Orleans dans cette riviere, etoit li abondante , quelle a refte long temps debord^e , & quelle a di- niinue fort lentement. La prodigieufe humidite qu'il a fait , I'abondance d'eau qui eft toni- bee, a fait ecrouler une quantite prodigieufe de murailles. Comme le mois de novembre a ete affez froid , il y avoit bien des bleds qui n'etoient point leves, & qui ne font fortis de terre que quand le vent a tourne au fud-oueft •, ils ont tres-bien profitc , & font devenus fort beaux , I'herbe paroit feulement un peu fine , ce qui vient ou de cc qu'ils font fort drus, ou de ce que la terre etoit fort battue, & on con- cevra pourquoi ils font (i drus, (1 on fait attention que le grain qu'on a feme , etoit petit & retrait ■■, car il eft Evident qu'il en tenoit beaucoup plus dans la main des lemeurs. On auroit done pu , dira-t-on , diminuer un peu la femence •, cela eft vrai , mais on n'a pas ofe le faire , le bled ii'etoit pas beau , & Ton apprehendoit qu'il n'y en cut beaucoup dont le germe fiit mauvais. On fouhaitera , fans doute , favoir quelle eft la qualite des vins dont nous avons parle j pour fatisfaire 4 cette queftion , j'en diftinguerai de quatre eipeces. La premiere regarde les vins qui ont ete cures & faits avec les railins les plus murs , qu'on avoit tires dans Ic temps de la vendange ; ce vin eft fort clair , il a une affez belle couleur , & eft affez bon pour I'annde. Les vins de la feconde elpece font ccux qu'on a faits fur le prefloir & fans cuver , avec les verjus ou raifins tres-vcrds dont on avoit tire les iniirs •, ces vins , ft Ton peut appeller de ce nom un foible verjus , n'ont point du tout de couleur, cependant ils font moins troubles, & n'ont pas un gout fi defagrcable que celui dont nous allons parler. Nous mettons pour la troilieme elpece les vins qu'oa a faits avec les DE L'ACADISMIE ROYALE DES SCIENCES. 295 verjus , mais qu'on a fait ciiver ; ces vins font fort troubles , & ont un ^— — ■ gout tri'S-defagrcable. Enfin , la quatrieme efpece de vins eft de ceux qui ont cte fails avec " " ^ ^ ^ i q u I. Ics railins murs & les verds, nicies enfcmble •, ils ont un peu de couleur, Anrnfe t-TAi. niais ils u'eclairciilent pas. ' A I'egard des vins faits avec du raiJin blanc, c'eft plutot de bon verjns que du vin. II ne faut pas oublicr de remarquer que ceux qui ont vendangc immc- diatement aprcs la gelce, ont fait de nieilleur vin & en plus grande abon- dance que ceux qui ont laiffe les railins aux vignes pendant quinze jours ou trois femaines , & que ces petits vins fe font conferves ^ merveille ; on en a bu en 1741 qui avoient perdu de leur verdeur & pris un peu de qualite. Les grands vents, les fraicheurs A: les humidit^s extremes du mois de decembre n'ont prefque point occalionne de rhumes. OBSERVATION NOUVELLE Sur les Fleurs d'une efpece de Plantain , nommie, par M. de Toumefort, dans Jes EUmens de Botanique , Plantago paluftris gramineo folio nionaiithos Parilienlis , pag. 104. Par M. BtRNARD DE JuSSIEU. F JLJntiie plufieurs c^Iebres botaniftes, tels que M"- dc Tournefort , 5^^— Vaiilant , Dillenius & Linnxus , qui ont obfervc dans Jes pays oa ils ont . , herborife, & fur-tout aux environs de Paris, I'efpece de plantain dont '^"■'^^^ il s'agit , il paroit iurprenaiit qu'ils aient oublie d'y remarquer deux fingu- Mom. larites des plus effentielles , qui font celles qui font I'objet de ce memoire. Sous quelques noms que les botaniftes qui avoient precede ceux-ci en eulfent donne la defcription & la figure , les (ingularites dont je veux parler leur ont echappe entierement. Ceux qui ont futvi M. de Tourne- fort , ont jufqu'ici adopte i-peu-pres la phrafe dont il s'etoit fervi pour indiquer cette efpece \ ils conviennent unanimement quelle eft diftinouee des autres par une fleur unique qui terminc chacun des pedicules qui prcnnent leur naiffance dans les ailfelles des feuilles, a la difference des autres efpeces du mcme genre fur les pedicules defquellcs on appercoit ■plufieurs fleurs ramaffees en epi. Mais les (ingularitcs auxquelles ils n'ont fait ancune attention , font I'une que la fleur qu'ils voyoient, etoit \ eramines, c'eft h-dire, male & fterilc; & j'autre, qu'au bas du pedicule de cette mcme fleur il en naiiToit deux ou trois fleurs ^ piftile ou femelles , qui font fecondes : Siiigularitss qu'il eft^^ propos de Ipecifier dans la denomination de cette efpece; en forte qu'au-lieu de me fervir pour I.1 dcligner, des terraes de Plantago fcapo 174^. 1^6 ABREGt DES MISMOIRES — — ii— M^ unifloro , employes par M. Linnarus dans I'hiftoire des plantes de Lappo- -, nie, ie mettrois \ la place, Plantago floribus fcenuneis fellilibus ad exor- Ann^e Z74Z. Pour decrirc cette plante avec plus d'exaditude , j'ai obferve que fa raciiie eft ferme, folide, charnue, cylindrique, ordinairement bianchatre, longue d'un pouce, epaiffe vers fon collet d'environ trois i quatre lignes, & qu'elle eft garnie de plufieurs fibres longues , meiuies , blanches , on- doyantes & chevflues , qui partent de tous les cotes & fe repandent eii> tout fens. Que les fcuilles naiffent proche Ics unes des autres & forment une toiiffe fur le fommet de la racine •, elles font fimples , longues , etroites , lerminees en pointe moufle , vertes , Icgerement velues , applaties en def- fus, un peu convexes en deffous, plus larges vers leur bale, evaf^es dans cet endroit & creufees en gouttiere, dont les cotes fe terminent infenfi- blement en un feuillet mince & membraneux. De ces feuilles les unes s'elevent prcfque verticalement , les autres s'in- clinent plus ou moins vers la terre •, les premieres occupent le centre & font de difKrente longueur , felon qu'elles font plus ou moins develop- pees ■, les dernieres qui s'etendent & fe repandent dans la circonferencc en fe couchant vers la terre , ont dans leur plus grande longueur enviroa cinq pouces & un pcu plus d'une ligne de largeur vers le milieu. Si I'on rompt ces feuilles on apperijoit dans leiu: interieur une fubftance verte , cellulaire , percee de pkideurs trous ou canaux , qui fe prolongent dans toute I'etendue de la feuille depuis fa naiflance jufqu'^ fon extrcmite; cette facon d'etre interieurenient percee de diftcrens trous d'inegale gran- deur , eft ordinaire dans les tiges des plantes aquatiques , & dans les queues des feuilles de la plupart, il n'en eft guere dans lefquelles on ne remarquc cette forte d'organifation ■, il paroitroit que ce font des tuyaux de ditlSrens diametres appliques les uns )l cote des autres, ^-peu-prcs commc les cellules d'un guepier ou d'un gateau de cire : audi cette plante eft-elle du nombre des aquatiques, & c'eft toujours pres des mux ou dans des lieux humides qu'on la trouve. Je ne dois pas oublier ici que les feuilles font telles que je les ai dccrites, lorfque les pieds de cette plante croiflent hors de I'eau, & que dans ceux qui font tout-^-fait baigncs , les feuilles deviennent liffes, cylindriques , plus epaiffes, & d'un verd jaunatre; j'ajouterai encore que les pieds de ces plantes , en prenant plus d'embonpoint , font ordi- nairement fteriles & ne produifent point de fleurs tant qu'ils reftent cou- verts d'eau. II n'en eft pas de meme des pi-eds de celles qui viennent fur le terrein feulement humide , les fleurs commencent h fe montrer des le niois de Juin , & il en pouffe continuellement Jufqucs vers la fin d'ocftobre, du moins on trouve encore dans ce mois-li des pieds charges de fleurs pretes k s'epanouir, & des fruits en maturite : ces fleurs naiffent dans I'aif- ielle des feuilles, & de chacune il part une fleur male, portee fur un Ijng pedicule qui eft garni h fa bafe de deux ou trois fleurs femelles ; ce p(fdi- eule eft grele , flexible , d'un verd jaunatre , long d'environ i pouces ~ dans fa plus grande elevation p il eft entoure vers fou milieu par une petite feuille DE UACADEMIE ROYALE DES SCIENCES. 137 feuille membraneufe en maniere dccaillc, & c'eft taiitot plus haut on plus ^M^iM^"^— bas qu'on la rcmarqiic fur les pediculcs, felon leur age; cette ecaille enve- „ loppoLc & cachoit aiiparavant la jeiine fleur dans fa naiffaiice : on trouve parcillcment h la bale des flcurs de toutes les efpeces de plantain connues, /InnU it^Z, tine femblable ecaille , mais dont la forme & la conliftance varient. La fleur male qui tcrmine Ic haut de chaque pedicule , n'eft d'abord en naiffant qii'un bouton conique cache dans raiirelle d'une feuille, lequel k montre peu-i-peu, groflit , s'alonge & paroit enfuitc quadrangulaire ; lorfqu'il a acquis environ 1 lignes \ de longueur & un peu plus dune Jignc d"6pailTeur, il s'ouvre & fe fend jufqu'i fa bafe en quatre pieces igales, itroites, minces fur les bords, plus epaiffes dans le milieu, con- Tcxes exterieurement , & intirieurcment un peu concaves , de couleur vcrte, jaunatre& panachce d'un peu de rouge clair; cette partie du bouton de fleur en eft le calice , du fond duquel s'clcve un tuyau delicat & mcm- braneux , de couleur purpurine , dont rcxtremite , en fortaiit du calice, eft divifce en quatre quartiers ou lobes aigus , rabattus en dehors , & d'eii- viron demi-ligne de longueur. L'int^rieur de ce tuyau eft rempli de quatre ctamines & d'un embryon fterile , ou d'une apparence de piftile qui occupe le centre •, chaque cta- niine eft compofee dun filet trcs-dclie & d'un fommet triangulaire, ^chan- cre neanmoins en maniere de coeur par I'un de fes cotes : les filets font courb^s & plies fur le dos des fommet* avant leur fortie hors du tuyau , cette courbure devient moindre & s'elface lorfqu'ils font tout-h fait de- veloppes. J'ai quclquefois oblerve une double courbure h chaque filet, ce qui n'eft pas ordinaire-, les fommets en fortant, prelentent celui de leurs angles qui eft le plus aigu , & cette partie qui alors ctoit fuperieure, de- vient iiifcricure; lorfque les filets fe font totalement redreffes, les fom- mets s'ccartent, fe renverfent & montrent en dehors la face par laquellc ils fe touchoient auparavant. Les filets lont blancs , menus , delies , longs de 7 i 8 lignes , attaches dans le centre de chaque fommet, & naifTent tous des cotes & de la bafe de cet embryon fterile qui occupe le fond du tuyau ; chaque fommet a environ une ligne \ de longueur & une de largeur , & eft forme par deux bourfes oblongues , reunies dans prefque toute leur etendue , elles font jaunatres, s'ouvrent longitudinalement & rtpandent une pouffiere fine d'un jaune pale. Ce que nous avons dit de la courbure des filets & du renverferaent des fommets, s'obferve dans les etamincs des fleurs des auires elpeces de plantain. Le piftile ou cet embryon ftirile eft un petit corps blanchatre , arrondi par Ic bas & termine par une pointe fort courte en maniere de ftyle ; ce corps a tout au plus deml-ligne de longueiu: , & ne fe change jamais en fruit. Pour appercevoir les fleurs femelles ou les fleurs fertiies , il faut ecar- ter k feuille qui les cache & les embraffe par fa bafe, car ces fleurs nc font paroitre au-dehors que les ftyles dont leurs cmbryons font furniontcs. Tome IX. Fame Frangoije. S rj8 ABREGEDESMEMOIRES 1 elles n'ont point de pediciile , & font attachecs ^ I'endroit de l.i naif- r. lance dc celiii qui porre la fleur male : lorfqus ce pedicule n'eft charge ' ^ ■ que de deux fieurs femelles , I'une eft difpofee k droite , & I'autre & gaii- Anne'e t'/dz. che ; mais lorfqu'il s'y rencontre trois fleurs fL-melles, ce qui eft trcs-ordi- naire , la troifieme occupe la face antcrieure & eft placce entre les deux autres : chaque fleur feinelle eft foutenue par une petite ecaille ou feuille blanche , etroite & membraneufe , audi longue que le calice de la fleur auquel elle eft attachee antetieurement ; ce calice eft divife profondemenf jufqu'i fa bafe en trois pieces longues d'environ i ligne y, etroites, min- ces & blanches, il donne naiffance h un tuyau de meme longueur, mem- braneux , tres-mince , colore de meme , termine vers Ic haut par trois petitcs dentelures -, il fort du fond de ce tuyau un piftile dont le bout jnfirieur qui en remplit la cavite, eft un petit corps blanc , ovoide , oil un embryon de fruit , & dont I'autre partie qui fe trouve hors du tuyau, eft un ftyle, tres-delie, long d'un pouce , blanchatre & entierement velu ; I'embryon en muriflant , devlent une coque ferme & folide qui a envi- ron I ligne \ de longueur , qui s'ouvre en travers , & qui ne renferme qu'une (eule femence oblongue , mcnue & noiratre ■, cette coque en fe feparant , conferve la femence, & a par le bas une ouverture d'oii fort la jeune plante dans {i premiere germination en pouflant alors deux feuilles , fcminales , oblongucs & oppofces. L'etat que je viens de decrire eft celui dans lequcl on trouve ce plan- tain pendant une partie du printemps , tout 1 etc & une partie de I'au- tomne : les aiifelles des feuilles ne donnent pour lors que des fleurs naif- fantes , des fleurs epanouies ■, & aux memes endroits des feuilles les plus avancees , on voit des fruits en parfaite maturity ou prets i milrir : dans tout autre temps cette plante qui eft vivace , continue de pouffer des feuilles qui dans leurs aiifelles ont au-lieu de fleurs, des bourgeons, lef- quelles en grandiflant , forment tout autour de la plante fur laquelle ils croilTcnt, de nouveaux pieds que Ton trouve fouvent encore attaches ^ la tige de cette plante par un cordon limple, blanc, plus ou moins long; circonftance qui a fait regarder cette plante comme tra^ante , & en eifet on pourroit ^ cet egard la confiderer comme telle. La racine des vieux pieds eft fouvent detruite 'k moitic , clle perit par le bas , pendant que le iommet pouffe de nouvelles racines fibreufes , & des feuilles en abondance. Quoique cette elpece de plantain porte deux fortes de fleurs , & qu'elle ait une difference remarquable dans le nonibre des divihons du calice & du tuyau de fes fleurs femelles , je ne croirois pas ncanmo«is ces diftinc- tions luffifantes pour en ^tablir ^ leur occalion un nouveau genre de plante, vu que celle-ci ne difliere du caraftere general des autres plantains , ni par la forme de la fleur male qu'elle porte, ni par la figure du piftile des fleurs femelles , ni (ur la facon dont fe partage le fruit dans fa maturite, II faut conclure de routes ces obfervations que les figures que Morifon & Pluknet ont donnees de cette plante font imparfaitcs , & que la notre /era la plus complette. DE L'ACADliMIE ROYALE DES SCIENCES, 15:) Voici les differens noms dont les botaiiiftes fe font fervis pour dcligiier — — — ^— — dans leurs ouvraMS cette efpece de plantain : „ " ^ ' BOTANIQUE. Plantago Ccapo unifloro. Linn. Flor. Lapp. q^. n». 64. Ann(t i ■'42. Plaiitago paliiftris , gramineo folio monanthosParilicnlis, Toum. Elem. Botnn. 104. Injlit. R. herb. tzS. Hifl. Par. f,ij. Vaill. Botan. Par. i6o. Kaji SynopJ'. q. ^iG. Raii Hifior. torn. edit. £. 4^4. Martin. Hijf. PLmt. yingl. vol. 2. pag. tjg. Hololteiiiii aquaticum alllnanthemum. If. R. Par. app. Caroyophyllus marinus pumilio reptans. Mart. Burjl 501. Acl, Sueciie. ann. i'P-4. Gramen junceum minus capitulis longidlmis filamentis donatis. Mor. Seel. 8. Tab. g. fig. ^0. Gramen Junceum , live Holofteum minimum, paluftre, capitulis longif- limis filamentis donatis, Raii ftijl. ijio. Mor. hifi. part. j. ijo. n". j?o. Gramen junceum , (iye Holofteum minimum , paluftre , cspinilis qua- tiior longiffimis ftaminibus donatis. Raii Synopf. edit. z. zj6. Plukn. Alrnag. 180. Phytogr. Tab. 3£.fig. z.Rudbeek elyj', i. pag.46.fg. t. Petiv. Coneord. Gram. 8. «". 2.18. On ne connoit encore aucuns ufagcs fpecifiques de ce plantain , on fait feuiement qu'i! a etc obferve en Suede , en Angleterre & en France. Mrs. de Tournefort & Vaillant dans I'hiftoire & le denombrcmcnt dcs plantcs qui croilfent aux environs de Paris, I'indiquent fur les bords dc lYtang de Saint- Graticn & fur I'Otie, Je I'ai vu auffi en allant iSaint-Leger en Yvelines, dans un foffe humide & marecageux , que Ton rencontre fur le cheniin de Cognieres aux Elfarts. Si par quelque curiolite on vou- Joit culiiver dans les jardins cette efpece de plantain , il faudra la phcer dans les licux oii i'eau fejourne , ou dans des terrines non percees ; c'efl par ce moyen que cette plante s'eft confervce d?puis plulieurs annees au jardin du roi. EXPLICATION DES FIGURES. PlancheII. / A , la plante de grandeur naturelle , avec fes fleurs en differens ititJ, B, fleur male en bouton , dont le pedicule porte deux fleurs fe- melles i fa bafe. C, fleur male ouverte , pour faire voir la courbure dcs filets dcs ctamines. D, calice dune fleur male. E, fleur male leparce de fon calice. F, la mcmc ouvcrtc. Sij 143 A B Ri G E D E S M £ M O I R E S —— ^^— — GjGjG, pKificiirs paquets de fleurs, dont I'uiie eft male & les autres fe- „ mellcs : dans les fleurs males les ctamines font repr^fent^es en boTANiQui, differentes fituations lorfqii'elles s'epanouiffent. Jnnee tj^z. -^^ fleiir fcmelk-. /j la meiiie avec Ton calice plus oiivert. Kj la meme dont on a cnlevd le calice. Xj le piftile fepare. M, la capfiile feminale. A'', line feuille. M ]^ M O I R E S V R LA CULTURE DBS F 0 R i T S. Par M. deBuffon. Mrfm. JLx ANS les arts qui font de neceflit^ premiere, tels qu'eft Tagriculture , les hommes memes les plus groffiers arrivent ^ force d'expcriences k des pratiques utiles : la maniere de cultiver le bled , la vigne , les legumes & les autres produdions de la terre que Ton recueille tous les ans , eft mieux & plus generalement connue que la facon d'entretenir ou de culti- ver une foret ; & quand meme la culture des champs fcroit dcfecftueufe k plufieurs cgards, il eft pourtant certain que les ulages etabiis lent fondes uir des experiences continuellement rcpetees , dont les relultats font des efpeces d'approximations du vrai. Le cultivateur eclaire par un int^ret tou- jours nouveau, apprend i ne fe pas tromper, ou du moins ^ fe tromper pen fur les moyens de rendre Ton terrein plus fertile. Ce meme iiiteret fe retrouvant par- tout, il feroit naturel de penfer que les hommes ont donnc quelque attention h la culture des bois ', cependant rien n'eft moins connu , rien n'eft plus neglige : le bois paroit etre un pre- fent de la nature , qu'il fuffit de recevoir tel qu'il fort de fes mains. La n^ceflite de le faire valoir nc s'eft pas fait fentir, & la maniere d'en jouir n'etant pas fondee fur des experiences affez repetces, on ignore jufqu'aux moyens les plus fimples de confcrver les forets & d'augmenter leur produit. Je n'ai garde de vouloir inlinuer par- Ik que les recherchcs & les ob- fervations que j'ai faites fur cette matiere , foient des decouvertes admi- rables , je dois avertir au contraire que ce font des chofes communes , mais que leur utilite peut rendre importantes. J'ai deji communique en 1759 mes vues fur ce fujet, je vais dans ce memoire etendre ces vues en prefentant de nouvcaux faits. Le produit d'un terrein peut fe mefurer par la culture ; plus on travaille la terre , plus elle rapporte de fruits , mais cette verite d'ailleurs fi utile , fouftre quelques exceptions, & dans les bois une culture prematuree & mal entendue caufe la dilette au-lieu de produire rabondance •, par cxemple , DE L'ACAD1!;MIE ROYALE DES sciences. 141 on imagine, & je I'ai cru long- temps, que la mcilleure manicre dc met- mmmij n jx^m. mmmm tre un terrcin en nature de bois, eft de nettoyer ce tcrrcin & de le bicn cultiver avant que de femer le gland ou les autrcs graines qui doivent "^ " "^^ lin Jour le couvrir de bois, & je n'ai etc dcfabufe dc ce prejuge qui pa- ylnni'e 17. iZ. ro'it li raifonnable, que par une longue fuite d'obfcrvations. J'ai fiit des feniis conlidirables & des plantations allcz vaftes, je les ai faitcs avec pre- caution ■, j'ai foiivent fait arraciier les genievres, les bruyeres & jufqu'aiix moindres plantes que je regardois comme nuifibles , pour cultiver a fond & par pluneurs labours les tcrreins que je voulois enfemencer : je ne dou- tois pas du fucccs d'un femis fait avec tous ces foins •, mais au bout de quelques annecs j'ai reconnu que ces memes foins n'avoient fervi qui retarder raccroiffcment de mes jeunes plants , & que cette culture prcce- dente qui m'avoit donne tant d'efperance, m'avoit caufe des pertes confi- derablcs ; ordinairement on dcpenfe pour acqucrir , ici la ddpcnfe nuit i racquifition. Si Ton vent done reuflir h faire croitre du bois dans un terrein de quclque qualite qu'il foit , il faut imitcr la nature , il faut y planter & y lenier des cpines & des builFons qui puiflent rompre la force du vent , diminuer celle de la gelee , & s'oppofcr i I'intemperie des faifons ■, ces buiflons font des abris qui garantiffent les jeunes plants & les protegent contre I'ardeur du foleil & la rigueur des frimats. Un terrein couvert on plutot i demi- couvert de genievres , de bruyeres, eft un bois \ moitie fait , & qui peut-etre a dix ans d'avance fur un terrein net & cultivd : voici les obfervations qui m'en ont afTiire. J'ai deux pieces de terre d'environ 40 arpens chacune, femees en bois depuis neuf ans •, ces deux pieces font environnees de tous cotes de bois laillis, I'lnie des deux etoit un champ bien cultive •, on a feme egalement & en meme temps plufieurs cantons dans cette piece, les uns dans le mi- lieu de la piece, les autres le long des bois taillis •, tous les cantons du railieu font depeuples, tous ceux qui avoiflnent le bois font bien garnis: cette difference n'^toit pas fenfible i la premiere annee , pas mcme a la fe- conde, mais je me fuis appercu ^ la troifieme annee dune petite dimi- nution dans le nombre des jeunes plants des cantons du milieu , & les ayant obferves exadlement , j'ai vu qu'^ chaque etc & i chaque hiver des annies fuivantes il en a peri confiderablement , & les fortes gelees de 1 740 ont acheve de defoler ces cantons, tandis que tout eft floriffant dans les parties qui s'etendent le long des bois taillis •, les jeunes arbres y font verds , vigoureux, plantes tous les uns contre les autres, & ils fe font eleves fans aucune culture i 4 ou 5 pieds de hauteur : il eft evident qu'ils doivent leur accroillement au bois voifin qui leur a fervi d'abri contre les injures des faifons. Cette piece de 40 arpens eft aduellement environnee d'une lifiere d'environ 5^6 perches [a) de largeur d'un bois naiffant qui donne les plus belles efpcrances ; i mefure qu'cn s'iloigne pour gagner L- milieu, le terrein eft moins garni , & quand on arrive i 1 2 ou 1 5 perches de («) La p«xche a 13 pie jg " ° ■"" ■^ >< ' Q u t. diminiiai audi le nombre des labours, craintc de trop deflLcher la terre, Annie Z74Z. & je fus affcz content dii fucces de ces petites attentions : la fcve d'aoiic fiit abondante, & mes jcunes plants pouirerent plus vigoureufcmcnt qit'au printemps-, mais le but principal etoit manque, le grand 8c prompt accroii^ femcnt que je dedrois , le reduifoit au quart de ce que j'avois cfpiire & de cc que j'avois vu dans mon jardin : cela ralcntit beaucoup mon ardeur, & je me contentai aprt-s avoir fait un peu claguer mes jcunes plants, dc leur donner deux labours I'annee fuivante •, & encore y eiit-il un efpacc d'environ un quart d'arpent qui fat oublie & qui ne rc^ut aucune cul- ture. Cet oubli me valut une connoillance, car j'obfervai avec quelque furprile que les jcunes plants de ce canton ctoient audi vigourcux que ceux du canton cultivc •, & cettc rcmarque changea mes idees au fujet de la culture, & me Ht abandonner ce terrein qui m'avoit tant coute. Avant que de le quitter, Je dois avertir que ces cultures ont ccpendant fait avan- cer conliderablement I'accroiflement des Jeunes arbres, & que je ne me fuis trompc fur cela que du plus au moins : mais la grande erreur de tout ceci eft la depenfe , le produit n'eft: point du tout proportionne , & plus on repand d'argent dans un terrein qu'on veut convertir en bois, plus on fe trompe •, c'eft un intiret qui decroit k mefure qu'on fait de plus grands fonds. II faut done tourner fes viies d'un autre coii , la depenfe devenant trop forte, il taut renoncer k ces cultures extraordinaires , & meme h ces cultures qu'on donne ordinairement aux jeunes plants deux fois I'annee, en ferfouitfant legerement la terre k leur pied ■, outre des inconveniens reels de cette derniere efpece dc culture , ceiui de la depenfe eft fufHfaiit pour qu'on s'en digoute aifcment, fur-tout fi Ton pcut y fubftituer quelque chofe de meilleur , & qui coiite beaucoup moins. Le moyen de fupplcer aux labours & prefque i toutes les autres efpeccs de culture , c'eft de couper les jeunes plants jufqu'aupres de terre : ce moyen , tout limple qu'il paroit, eft d'une utilite inhnie, & lorfqu'il eft mis en auvre h propos , il accelere de plufieurs annees le fucces d'une planta- tion. Qu'on me permette h ce fujet un peu de detail qui , peut-ctre , ne dcplaira pas aux amateurs de 1' agriculture. Tous lesterreitis peuvent fe reduire a deux cfpeces, favoir, les terreins forts & les terreins legers •, cette divifion , quelque generale quelle foit , fuffit k mon dvffein. Si Ton veut femer dans un terrein leger, on peut le faire labourer : cette operation fait d'autant plus d'effet Sc caufe d'autant moins de depenfe, que le terrein eft plus leger : U ne faut qu'un feul labour, & on feme le gland en fuivant la charrue. Comme ces terreins font ordinairement fees & brillans , il ne faut point arrachcr les maiivaifes herbes que produit I'ctc fuivant, elles entretiennent une frakheur bicnfji- fantc, & g.irantilfent les petits chenes de I'ardcur du foleil, enfuite venant i perir & i ftichcr pendant I'automnc , elles fervent de chaume & d'abri To/m IX. Faitic Fnmcoife. T 1^6 ABRfiGfi DES M^MOIRES ^— Mi^M^^i* pendant I'hiver, & empechent les racines de geler; il ne faut done auciine -r, cfpece de culnire dans ces terreiiis lablonneux. J'ai leme en bois un grand ■ nsmbre d'arpens de cettc nature de terrein, & j'ai reudi au-deli de mes .^nn^e ijdz. efperances; les ricineS des Jeiines arbres, trouvant une terre legere & aifce i divifer , s'etendent ^ profitent de tons les fiics qui leur font offerts , les pluies & les rofees penetrent facilenient jafquaux racines ■, il ne faut qu'un peu de couvert & d'abri pour faire reuffir un femis dans des terrcins do eette efpece. Mais il eft bien plus difficile de faire croitre du bois dans des terreins forts, & il faut une pratique toute differente •, dans ces tcr- reins , les premiers labours font inutiles & fouvent nuiiibles , la ineilleure nianiere eft de planter les glands ^ la pioche fans aucune culture prece- dcnte; mais il ne faut pas les abandonner, comme les premiers, au point de les perdre de vue & de n*y plus penfer , il faut au contraire les viliter louvent •, il faut oblcrver la hauteur )l laquelle ils fe feront eleves la pre- miere annee, obferver enfuite s'iis ont pouffe plus vigoureufement h la feconde annee qu'^ la premiere, & ^ la troifieme qu'a la feconde : tant que leur accroiifcment va en augmentant, ou mcme tant qu'il fe foutient lur le meme pied , il ne faut pas y toucher ; mais on s appercevra ordi- nairement h la troilicme annee, que I'accroiffement va en diminuant, & !i on attend la quatrieme, la cinquieme , la lixieme , &c. on reconnoitra que I'accroiiTement de chaque anni^e eft toujours plus petit •, ainli des qu'on s'appercevra que fans qu'il y ait eu des gelees on d'autres accidens , ks jeunes arbres commencent \ croitre de moins en moins, il faut les faire couper jufqu'i terre au mois de mars , & Ton gagnera un grand nombre d'annees : le jeune arbre, livre ^ lui-meme dans un terrein fort & ferre, ne peut ^tendre fes racines , la terre trop dure les fait refouler fur elles- memes, les petits filets tendres & herbaces qui doivent nourrir I'arbre & former la nouvelle produdlion de I'annee, ne peuvent penetrer la fubftance trop fcrme de la terre •, ainfi I'arbre langiiit prive de nourriture , & la produdlion annuelle diminue fouvent jufqu'au point de ne donner que des feuilles' & quelques boutons. Si vous coupez cet arbre-, toute la force de la feve fe porte aux racines, elle en developpe tons les germes, & agif- fant avec plus de puiffance contre le terrein qui leur refifte , les Jeunes racines s'ouvrent des chemins oouveanx, & divifent par le furcroit de leur force, cette terre qu'ils avoient jufqu'alors vainement attaquee , elles y ' trouvent abondamment des fucs nourriciers , & des qu'elles font etablies dans ce nouveau pays , elles pouflent avec vigueur au- dehors la furabon- dance de leur nourriture , & produifent , des la premiere annde , ud jet plus vigoureux & plus dleve que ne I'etoit I'ancienne tige de trois ans. J'ai li fouvent reitere cette experience que jc dois la donner comme un fait fur , & comme la pratique la plus utile que je connoiffe dans la culture des bois. Dans un terrein qui n'eft que ferme fans etre trop dur , il fuflfira de couper une feule fois le jeune plant pour le faire reuffir. J'ai des cantons affez confiderables d'une terre ferme & pttriffabie, oii les jeunes plants n'ont etc coupes qii'une fois, ou ils croilfent ^ merveille, & ou j'aurai da DE L'AC:»DEMIE ROYALE DES SCIENCES. 147 bois taillis , prct h coiipcr dans qutlqiies annecs, Mais j'ai rcmarque dans 1 un autre cndroit oil la tcrre eft entidrcment forte & dure , qti'ayant (nit n couper k h I'ecoiide anii^e mes jcuiies plants, parcc tju'ils dtoient langiiil- ^ n i q u e. lans, cela ii'a pas cmpechiJ qu'aii bout de quatre autres annces, on n'ait it6 Ann^e 27^2 oblige de les couper une feconde t'ois, & je vais rapporter unc autre expe- rience qui fera voir la neceflite do couper deux fois dans de certains cas, J'ai fait planter depuis dix ans un nombre trcs-confiderable d'arbres de pluficurs eipeces , coninie des crmes , des frcnes, des charmes, &c. La Jirtmiere auntie tons ceux qui reprirent, poufferciit affez vigoureuftment, a feconde annee ils ont poulfc plus foiblement, la troiheme annee encore plus languKramment •, ceux qui me parurent les plus malades, ctoient ceux qui etoient les plus gros & les plus agcs.^orfque je les fis tranfplanter. Je voyois que la racine n'avoit pas la force de nourrir ces grandes tiges , cela me dctermiiia ^ les faire couper ■, je fis faire la mcmc operation aux plus petits les annees fuivantes , parce que leur langueur devint telle que , fans un prompt fecours , elle ne laiffoit plus rien ^ cfperer. Cctte premiere coupe renouvella mes arbres, & leur donna beaucoup de vigueur, fur- tout pendant les deux premieres annees ; mais i la troifieme , je m'appercus d'un pcu de diminution dans raccroillement , Je I'attribuai d'abord k la temperature des (ailons de cette annee-li, qui n'avoit pas ete audi favo- rable que ccUe des annees prccedentes ; mais je reconnus clairement, pen- dant I'annee fuivante, qui fut heureufe pour les plantes, que le mal w'avoit pas ete caufe par la feule intemperie des fiifons ; I'accroiffement de mes arbres continuoit h diminuer, & auroit toujours diminue, comnie je m'eii fuis affur^ en laiflant lur pied quelques-uns d'entr'eux , U je nc les avois pas fait couper une feconde fois. Quatre ans fe lent ecoules depuis cette feconde coupe, fans qu'il y ait cu de diminution dans raccroiilement , & ces arbres qui lont plantes dans un terrein qui eft en friche depuis plus de 20 ans, & qui n'ont jamais ete cultives au pied, ont autant de force & la feuille aulli verte que des arbres de pepiniere : preuve evidente que la coupe faite a propos peut iuppleer k toute autre culture. Les auteurs d'agricultare font bien eloignes de penler comme nous fuf ce fujet ; ils rcpetent tous , les uns aprcs les autres , que pour avoir une futaie , pour avoir des arbres d'une belle venue , il faut bien fe garder de couper le fommet des jeunes plants, & qu'il faut conferver avcc grand foin le montant , c'eft-^-dire, le jet principal. Ce confeil n'eft bon que dans de certains cas particuliers ; mais jl eft generalement vrai , & je puis '' I'allurer aprcs un trcs grand nombre d'experiences , que rien n'eft plus erri- cace pour rcdrcfler Ics arbres &z pour leur donner une tige droite & nette , que la coupe faite au pied. J'ai meuie oblerve fouvent que les fu- taies venues de graincs on de jeunes plants, n'etoient pas 11 belles ni fi droites que les futaies venues fur de jeunes fouches -, ainll on ne doit pas heliter ^ mettre en pratique cette efpece de culture h facile & li pcu coiiteufe. II n'eft pas neccflaire d'avertir quelle eft encore phis indifpenfable lorf- que les jeunes plants ont etc gelcs, il n'y a pas d'autre moyen pour les Tij 148 ABRfiGE DES MEMOIRES ^^■^^™^— ' retablir que de les couper. On aiiroit dii , par exemple , receper tons les ■n taillis de deux ou trois ans qui out cte celes au niois d'o(Stobre 1 7+0 , jamais gelee d automne n a rait autant de mal : la ieule facon d y rcma- Anne'e ij^z. dier c'eft de couper , on facrifie trois ans pour n'en pas perdre dix on douze. A ces obfervations generates fur la culture du bois, qu'il me foit permis de joindre cjuelques remarques utiles, & qui doivent meme preceder toute culture. Le chene & le hetre font les feuls arbres, ^ I'exception des pins & de quelques autres de moindre valeur , qu'on puilfe femer avec fucces dans des terreins incultes. Le hetre peut etre feme dans les terreins legers , la graine ne peut pas fortir dans une terre forte , parce qu'elle pouffe au- dfhors fon enveloppe au-deffus de la tige naiffante , ainli il lui faut une terre mcuble & facile \ divifer , fans quoi elle refte & pourrit. Le chene peut ctre feme dans prefque tons les terreins, nous avons donnc en 173? les dirterens precedes felon les difterens terreins : toutes les autres efpeces d'arbres veulent etre elevees en pepiniere , & enfuite tranfplantecs ^ I'age de deux ou trois ans. II faut eviter de mettre enfemble les arbfes qui ne fe conviennent pas, le chene craint le voillnage des pins , des lapins , des hetres & de tous les arbres qui pouffent de groffes racines dans la profondeur du fol. En general , pour tirer le plus grand avantage d'un terrein , il faut planter enfemble des arbres qui tirent la fubftance du fond en pouffant leurs ra- cines I une grande profondeur , & d'autres arbres qui puiffent tirer leur nourriture prefque de la furface de la terre, comme font tous les arbres dont les racines s'etendent & courent \ quelques pouces feulement de profondeur fans penetrer plus avant. Lorfqu'on veut femer du bois , il faut attendre une annee abondante en glands , non - feulement parce qu'ils font meilleurs & moins chers , mais encore parce qu'ils ne feront pas devores par les oifeaux, les mulots & les fangliers , qui trouvant abondamment du gland dans les forets , ne viendront pas attaquer votre femis , ce qui ne manque Jamais d'arriver dans des annees de difette. On n'imagineroit pas jufqii'^ quel point les feuls mulots peuvent detruire un femis •, j'en avois fait un il y a deux ans de quinze ^ feize arpens, J'avois feme au mois de novembre, au bout de quelques jours je m'ap[>ercus que les mulots eniportoient tous les glands : ils habitent feuls , fouvent deux , & quelquefois trois k quatre dans un meme trou •, je fis decouvrir quelques trous , & je fus epouvanti de voir dans chaque trou un demi-boiffeau & fouvent un boiffeau de glands qu'ils avoient ramaffes pour vivre pendant I'hiver. Je donnai ordre fur le champ qu'on dreflat dans ce canton un grand nombre de pieges , oil pour toute amorce on leur mit une noix grillee : en moins de trois femaines de temps on m'af>porta prcs de treize cents mulots •, je ne rap- porte ce fait que pour faire voir combien ils font dangereux &. par leur nombre & par leur prevoyance ^ ferrer autant de glands qu'il peut en entrer dans leurs trouy. DE L'ACADiMIE ROYALE DES SCIENCES. 149 Les bornes que je me fiiis prefcrites dans ce mcmoirc, ne nie permettent f)as de fuivre plus loin notre bois naili.int ; je donnerai dans la fuite p a maniere dc condiiire le bois dans fi jeiUKlle , cellc de le traiter daiii r A n i q u £ un age plus avance , & quelques moyens de le i'outenir lorfqii'il eft fur Ic AnrJc 2 -41, retour : les obfervations que j'ai faitcs fur I'exploitation des bois taillis & ' des futaies , feront partie de cette fecoiide culture qui eft audi inipor- tante , & qui peiu-ctre eft d'une utilitc encore plus immediate que la premiere. L OBSERVATIONS DE BOTANIQUE, I. Culture du Ri^. «E riz, ainfi que la plupart des autres plantes , demande une culture particuliere , Sc qui "doit etre d'autant niicux circonftanciee , qu'on veut Jnn/ en tranfmettre la pratique en des pays oii il ne croit pas naturellement. • Cette plante poullc des tiges ou tuyaux de trois ou quatre pieds de hau- HL't, tcur , plus gros & plus fermes que ceux du bled , noues d'efpace en ef- pace •, les feuilles font longues , charnues , alfez femblablei i celles de la caniie ou du poireau. Ses fieurs naiffent i fes fommites , & reflemblent ^ celles de I'orge i mais les graines qui les fuivent , aulieii de former im cpi , font difpofces en pannicule ou en bouquet , enfermces dans une capfule jaunatre ou coque formee de deux balles nides au toucher, & dont I'nne fe terreine en un long filet. On fait que ces graines font blan- ches & oblongnes. En general , le riz fe cultive dans des lieux huniides & marecageux , & dans des pays chauds , du moins i en juger par les conrrees oil il eft le plus en ufage , & ou il fait la principale uourriture des habitans. Tout le Levant, I'Egypte, I'lnde, la Chine, font dans ce cas. Les Etats de I'Eu- rope oil Ton en reaieille davantage font I'Efpagne & I'ltalie , & c'eft de 1^ que nous vient prefque tout le riz que Ton confomme en Prince. M. Bar- xere , docteur & profeiTeur royal en medecine dans I'univerhte de Per- pignan , & correfpondant de I'academie , ayant fait beancoup d'attention a la culture de cette plante , tant a Valence eii Efpagne , qu'en Catalogue & dans le Rouflillon , nous en a envoye un m^moire dont voici la partie la plus eifentielle. Pour clever utilement le riz & en multiplier le produit , on choilTt un terrein bas , huinide , un peu fablonncux , facile ^ deffecher , & oil I'oa puiffe faire couler aif^ment I'eau. La rcrre oil on le feme doit etre labou- rce une fois feulement , dans le mois de mars. EnfuLte on la partage en pliilieHrs planches cgales , ou carreaux , chacun de quinze ^ vingt pas de cote. Ces planches de terre font feparces les unes des autres par des bor- dures en forme de banquettes d'environ deux pieds dc hauteur fur environ [50 ABREG]^ DES MEMOIRES -'.. ■ tin pied de largeiir, pour y potivoir marcher k fee en tout temps, pour H o T A N 1 Q u E, ficiliter I'ecoulcment de Tcm d'uiie plaiiche ds riz k I'autre , & pour I'y r;tenir ^ volonte ians quelle fe repaiide. On applanit audi ie terrein qui ^nnie tj'fj- a ete foul , de maniere qu'il foit de niveau , & que I'eau puitfe s'y fou- tenir par- tout k k ineme hauteur. La terre etant ainfi preparce , on y fait couler un pied ou un demi- pied d'eau par-dellus, dcs le commencement du mois d'avril -, aprcs quoi on y Jette ie riz de la maniere luivante. II faut que les grains en aient etd conlerves dans leur balle ou enveloppe , & qu'ils aient trempe aupa- ravant trois ou quatre jours dans I'eau , oii on les tient dans un fac , juf- qu'^ ce qu'ils foient gonfles , & qu'ils commencent h germer. Un homme pieds nuds jette ccs grains fur les planches inondees d'eau , en fuivant des alignemens i-peu-pres fcmblables k ceux qu'on obferve dans les lillons en femant le bled. Le riz ainh gonfle, & toujours plus pefant que I'eau, s'y precipite , s' attache k la terre , & s'y enfonce meme plus ou moins , felon qu'elle eft plus ou moins delayee. Dans le royaume de V.ilencc , c'eft un homme a cheval qui enfemence le riz. On doit toujours entretenir I'eau dans les champs enremenc& Juff^ues vers la mi-mai , oii Ton a foin de la faire (^couler. Cette condition eft regardee comme indilpenfable pour donner au riz raccroiffemcnt necef- laire & pour le faire poulfer avantageufement. Au commencement du mois de juin , on amene une feconde fois I'eau dans les rizieres , & Ton a coutume de Ten retirer vers la fin du meme mois , pour farcler les mauvaifes herbes , fur-tout la prele & une efpecc de fouchet, qui naiffent. ordinairement parmi Ie riz, & qui I'empechent de profiter. Enfin on lui donne I'eau une troifieme fois, favoir, vers la mi-juillet, & il n'en doit plus manquer jufqu'^ ce qu'il foit en bouquet , c'eft-k-dire , julqu'au mois de feptembre. On fait alors ecouler I'eau pour la derniere fois , & ce deffechement fert h faire agir le folcil dune fagon plus im- mediate fur tous les iucs que i'eau a portes avec elle dans la riziere , k faire grainer & mvirir le riz, & ^ le couper enfin commodement •, ce qui arrive vers la mi-odobre , temps auquel ce grain a acquis tout fon com- plement. On coupe ordinairement le riz avec la faucille k fcier Ie bled , ou , comme on le pratique en Catalogne, avec une faux dont Ie tranchant eft decoupe en dents de Icie fort delides. On met le riz en gerbes, on Ie fiit fecher, & aprcs qu'il eft fee on le porte au moulin , pour Ic depouiller da fa balle. Ccs fortes de moulins reffemblent affcz k ceux de la poudre k canon , excepte que la boite ou chaujfure du pilon y eft difFerente. Ce font pour I'ordinaire lix grands mortiers ranges en ligne droite , & dans chacun defquels tombe un pilon dont la tete , qui eft garnie de fer , a la figure d'une pomme de pin de demi pied de long , & de cinq pouces de diame- tre : elle eft tailladce tout autour comme un baton 4 faire mouffer Ic chocolat. Nous iie nous arrcterons pas ^ decrire Ij force oiotricc qn'on y DE L'ACADfiMIE ROYALE DES SCIENCES. 151 crnploie , & qui pent difiercr (elnii la conimodite dcs lieux. En Efpdgne — ■— i— »i & en Catalognc on fc fcrt d'un cheval atrach(5 i unc grande roue , &:c. „ Le riz qu'on feme dans line terre falee y pullule ordinaircment beau- t a .-. i q u t. coup plus qu'en toute autre. On en retire julqii'^ trentc 011 qiiarante pour Aniu'e fd^, un. Par coniequent, & toutcs chofcs d'ailleurs egales, les cotes & les pays maritimes y ieront les plus proprcs. Du refte , il ne s'agit pas prcfcntemcnt de difcuter , s'il convient de favorifer, de permettre ou de defendrc la culture du riz dans le royaume. II y a quclques annccs qu'elle a ete dcfcndue en Rouflillon par un arret du conil'il louverain de cettc province, fur ce qu'on a cru que les cxha- lailons des licux marec.igeux ou Ton feme le riz , y caufoient dcs maladies & des mortalitcs. M. Barrcre donne bicn des raifons capables de raffurcr les efprits lur ce fujet, & propofe en meme temps dcs moyens pour pre- vcnir tous les inconveniens que Ton en pourroit craindre. Mais quoi qu'il en foit, & dans unc queftion qui peut avoir tant de branches par clle- rricme, & relativenient au commerce, il eft toujours utile de i'avoir com- , ment il fauJra s'y prendre pour fe procurer une plante de (i grand ufage, lorfqu'on jugera ;"> pfopos de la cultiver. I I. Sapins fojjiles. M. Slo j1 NE, a fait part h M. de Reaumur d'une curiolit^ que M. Sout- wel, fccretaire d'etat en Irlande, lui avoit envoyee. C'eft une corde alTez longue & audi groffe qu'un cable de navire , qui avoit ete achctee au mar- che de Ncnry, petite ville au nord de ce royaume, oii on en vcndoit beaucoup de parcilles i vil prix. Elle eft faite des fibres ligncufes du tronc d'un de ces gros fapins fouterrains qu'on trouve frequemuient dans les nia- rais de ce pays-li, quelquefois en Angleterre, & qui paroiflent etre li an- cjens que quclques naturaliftes les ont juges anterieurs iu deluge. Comme M. Sloane n'cft pas hmplement polfelTeur de la plus riclie coileCtjon d'hil- toire naturelle qu'il y ait en Europe , & que perlonne ne coniioit mieux que iui I'origine, les proprietcs & I'ufage de ce qu'il poifede, il a voulii uvoir de quelle efpcce etoient ces arbres antedilimens ou reputes tels, & il a fait a cette occalion bien des rechcrches de botaniquc. On trouve dans les troncs de ces arbres une reline fort femblable i celle que donne le pinus fdveflris maritima , conis firmitcT ramis adahrentihus de Jean Bauhin , & qui croit aupres de la rner dans le voilinige de Montpcllicr -, ce qui lui fit penfer que ce pourroit etre la meme elpecc de pin, mais il a change d'avis , & il ne doute point aujourd'hui que ce ne ioit le pinus Jihejiris ^ foliis brevibus glaucis , conis parvis dlbentibus de Ray, qui croit au nord de I'Ecoffe & en Norwege, &.qui, felon route appa- rence , fait partie de ces pins ou fapins que dcs vcyageurs ont oblerves dans pUilieurs contrees du nord-cft. La preuve n'en eft pas douteiilc', c'eft d'aprcs le fruit meme que M. Sloane en a Juge. On a trouve dans la i5t ABREGE DES MEMOIRES M^— ^— — > province de Lanca(lre, & auprcs de quelques-iins de ces troncs d'arbrcs fof- liles , des cones on pommes de pin , tout-h-fait lemblables ^ celles dii pin J1 o T A N I Q u t. jg j.jy q^jg PQJJ5 venons d'indiquer. M. Sloane ne nous dit point h quelles Arm^e 274"^ marques on a reconnu Tantiquite des arbres dont il s'agit. Ce qui eft cer- tain , c'efl: que parmi ce nombre prodigieux de fubftances folfiles , tant animales que vegetales , qui font repandues dans la terre, & fouvent k de tres-grandcs profondeurs , celles qui paroiffent les plus anciennes fe trou- vent prelque toujours appartenir aujourd'hui k des continens fort eloignes da notre. C'eft ainii , par exemple , qu'entre toutes ces pierres de Saint- Chaumont dans le Lyonnois, oil i'on voit I'empreinte de plulieurs plantes, & dont M. de Juflieu I'ain^ nous a donne la defcription, (a) il n'y a pas une feule de ces pierres qui porte I'iniage d'une plante du pays, & qu'elles reprefentcnt toutts des plantes qui ne croiiTent aujourd'hui que dans les In des. SUR LES BOUTURES ET LES MaRCOTES. A nianicre de multiplier les arbres par les boutures & les marcote* eft extrcmement ancienne & connue de tous ccux qui fe melent d'agri- ylnnci tJ44. culture. II n'a pas fallu beaucoup de foin pour remarquer qu'une branche Hift. de certains arbres fraichement coupee etant piquee en terre, devenoit un arbre de la meme efpece que celui duquel elle avoir etc feparee •, cette maniere de multiplier les arbres eft beaucoup plus prompte que la voie de la femence,mais de plus elle eft unique pour les arbres etrangers tranf- portes dans ces climats, & qui n'y produifent point de graine. C'eft aulli ce qui a engage M. du Hamel i y porter des regards de phylicien , pour flffurer autant qu'il eft poflible , le uicccs d'une methode fi avantageufe. Faire des marcottes ou des boutures, c'eft faire enforte qu'une branche nvii n'a point de racines s'en garniffe, avec cette difference que fi la bran- che eft feparee de I'arbre qui I'a produite, c'eft une bouture, & que fi ellp y tient pendant le cours de I'operation , c'eft une marcotte. II etoit done neceffaire d'examiner .ivec foin comment fe faifoit le de- veloppement des racines, ^i on vouloit parvenir ^ le faciliter. Sans vouloir ctablir dans les arbres une circuLition de feve analogue i \i. circulation du fang qui fe fait dans le corps animal , M. du Hamel y re- connoit une feve montante qui fert ^ nourrir les branches, les feuilles & les bourgeons , & une defcendante qui fe porte vers les racines. L'exiftence de ces'deux efpeces de feve eft demontrec par plufieurs ex- periences -, celle-ci fur-tout la prouve avec la derniere evidence. Si on in- terrompt par un anneau circulaire enleve i I'ecorce , ou par une forte liga- ture, le cours de la feve, il fe forme aux extremites de I'ecorce coupee, deux bourrelets-, mais le plus haut, celui qui eft au bas de I'ecorce fupe- rieure , eft beaucoup plus fort que I'infericur , celui qui couronue la partie Cartie fupcrieure. L'union de ccs filets n'eft pas cepcndant (i intinie que, Anne'e 1744. orfque les petales fe font developpees, les ewmines ne fc puiffent detacher d'elles memes, & tomber feparemcnt dc chaque petale, fi on en tire uii du calice. Le fommet eft pofe fur le bout du filet, il eft attaclii un peu au- deffous de fa partic moyenne , il eft oblong , marque dans fi longueur d'un petit (illon , conipofe de deux bourses remplies d'une poufficre jaune. Le piflille eft compofe d'un embryon oblong , furmont^ d'un ftyle de la longueur des plus grandes etainines, ou qui les furpaffe un peu, qui finit par une pointe divifee en trois parties cgales, oblongues, appellees fligmates. L'embryon devient un fruit qui eft une capfule , qui s'ouvre en trois ^ fa partie fupjrieure, qui n'a qu'une cavite ou font renfermees plulleurs pc- tites femences , marquees interieureraent d'un fillon , applaties dc ce cote & convexes de I'autre. Aprcs une defcription audi detaillee de cette plante, il eft facile d'en determiner le caradere generique, & je crois qu'il peut etre enonc^ de la fagon fuivante. Le calice eft en cloche ^ plufieurs nervures , decoupe ^ (a partie fupe- Carafiere ginin- rieure en pludeurs parties; il fert d'enveloppe au fruit. ^"«' Les petales font pofcs circulairement , ils font larges i leur partie fupc- rieure , etroits i leur partie infericure , qui eft de la longueur du calice & renfermee dedans. Le neclarium ou alveole eft une petite gouttiere faillante , angulaire , pofee fur la furface interieure de la partie ctroite du petale. Les ctamines font inegales , cinq , fix ou fept en nombre , dont les filets forment une gaine au piftille :,les fommets font oblongs \ deux bourfes, le piftille eft compoie d'un embryon pofe dans le milieu de la fleur & fur le fond du calice , il porte un ftyle qui diminue jufqu'i (a pointe divifee en trois parties egales ; cet embryon devient un fruit ou capfule qui s'ouvre par le haut en plufieurs parties , qui n'a qu'une loge ou cavite remplie de femences plates d'un cote & convexes de I'autre. Dans I'efpece que j'ai decrite , & dans celles que j'ai vues feches , j'ai rcmarque que les feuilles font oppofees. On ne doute plus fous quel ordre naturel on doit ranger ce genre de plante, de meme que I'aljine; il doit etre place avec les plantes ^ fleurs en a-illet. Le nombre des etamines que j'ai trouve diffcrer dc celui que M. Linnaus a adopte, ne doit pas empecher qu'on ne lui afllgne le lieu oii il fe trouve naturellement place par tous les autres rapports qu'il a avec les fleurs en ocillet ■, il pourroit meme fe trouver des fleurs ^ dix etamines , ce que je n'ai jamais rencontre , je n'en ai point vu au-deffous de cinq ni plus que feptj & quel qa'ait etc ce nombre, la fleur avoit toujours ein(| i.foralea folio integro J'ubrotundo , five loto ajjinis , co- ryli folio ;, acl. Acad. Doryonium foliis fmplicibus ovatis. Van-Royen prodr. fl. Leydenf. pag. ^8c). Anthyllis ulmifolia quibufdam Pluk. Phyt. tab. ()6. fig. 5. Dans I'ouvrage de I'academie des iciences , intitule Me- moires pour lervir ^ I'hiftoire des plantes , cette efpcce eft figuree & de- critc , elle vient de la cote de Coromandel , oii elle eft employee pour les demangeaifons & pour la gale , on nous I'a envoyee de ce pays-li fous le nom de corbovire , qui lignifie femence brune. On voit par ce denombrcment d'efpeces indiquecs de ce genre, que DE L'ACADEMIE ROYALE DES SCIENCES. \(,^ quatte pays trcs- eloigners & trcs-diifcrcns les ont fournies , ce qiii doit pa- ■■ ■■ roitre d'autant nioins fiirprcnaiit , que les plantes legiiminciires out cct p avantage de naitre dans les quatre parties du monde , & dans tons les ' t .1 n i q l e, climats. _ Annie 2-^4 Mais ce qui eft plus particiilier zux efpeces de ce genre , c'cft quVlles font toutes aromatiques, & que leurs feuillcs font commc criblecs ^ la maniere de celles du mille-pcrtuis, ce qui depend ^galenient d'unc infi- nite de petites velicules claires, repanducs dans leur parenchynie, & piei- nes d'une liqueur balfamiquc. II eft i juger que c'eft precifenient cette liqueur qui peut en rendre toutes fes parties aromatiques, & les f.iire re- gardcr comme utiles dans les maladies de la peau, telles que la gratelle, ' la gale , les dartres & les ircHpelles , qui toutes caufent des demangcaifons k la peau. EXPLICATION DES FIGURES. Planciie IV. A J La plante diminuee de grandeur, avec fcs feuilles & ks epis de fleurs. B , Epi de fleurs de grandeur natiircUe. Cj Fleur dctachce vue de cots. D J hi mcme vue en-dcffous. EjEjEj Pctale fuperieur de la flcur , ou I'etendard vu de coti & par fa face interieure. F, Les quatre petales inferieurs, commc lis font reunis. Gj Gj G, Les menics vus feparement. Hj Le piftil avec les etamines qui I'enveloppent, I J Le meme avec les etamines ccartees. K , Le calice rcnfcrmant le fruit. Zj Le fruit. M, M , La femence. A^, La racuie. 1(58 ABRECE DES MEMOIRES B O T A N 1 Q U E. SUR LA CONSERVAT lO N DES G RA I N S , ET SUR-TOUT Ann^e 1745. ^^^ Froment. Hlft. J_i A neceflite de la confervation des grains , & fur-tout du froment , n'a pas befoin detre prouvee, il feroit i fouhaiter que les annecs fertiles puf-. lent fournir par une fage referve , aux dilettes que les mauvaifes recoltes occalionnent, il paroit meme que ce feroit aflez I'interet de ceux qui cul- tivent la terre, pour les y engager. L'expcrience cependant fait voir com- bien on doit pen compter fur ces reffources, le bled des annees abon- dantes en occalionne feulement une plus grande conlommation •, on en emploie beaucoup 'k faire des engrais de divers animaux, & fouvent le gouvernement eft oblige de permettre d'en tranfporter une partie chez I'etranger. Pour peu que Ton reflcchifle fur ces inconveniens , on en trouvera bientot la raifon •, il n'en eft pas du bled comme de beaucoup d'autres marchandifes qu'on peut conferver aifement & ^ peu de frais, celle-ci exige des emplacemens & des dcpenfes conliderables : le bled eft charge an fortic de I'epi d'une grande quantitc d'eau , il eft aife de s'en appercevoir ■, il ne faut pour cela qu'en mettre une mediocre quaniite dans un vafe de verre ferme, on verra bientot rhumidtte qui s'en exhalera, s'attacher aux parois du vaiffeau & y former des gouttes d'eau tres-fenfibles •, de plus le grain contienr, comme tous les vegetaux , plufieurs principes adifs, deftines ^ favorifer le developpement du germe dans ceux qui feront femes. II eft done neceffaire lorfqu'on veut conferver du bled , de faire ea forte que I'air puifle emporter cette humidite, qui ne manqueroit pas d'occalionner dans les tas de grain une fermentation nuifible qui degene- reroit bientot en pourriture, on n'en voit que trop fouvent des exemples; pour cela on eft oblige de choifir pour ferrer les grains, des endroits ex- tremement vaftes & fpacieux , de n'y entaffer le bled qu'^ la hauteur de 18 ponces, de laiffer autour du tas un chemin qui permette aux ouvriers d'y paffer, & enfin de tenir une partie conliderable du lieu libre pour y paffer le bled pelleree i pelleree ■, travail qu'il faut recommencer frequem- ment, fur- tout la premiere annee qu'on le garde, fi on ne veut pas s'ex- pofer ^ le perdre. Un grenier contenant 1515 pieds carres de furface , ne fournit avec toutes ces reftridions que 500 pieds carrds d'emplacement pour le bled, & n'en peut contenir que 1550 pieds cubes, ce qui fait 3600 boiffeaux, mefure de Paris, ou 15 muids, & cette quantite doit etre, dans les coni- mencemens , remuee ^ la pelle tous les qu.itre jours , & enfuite de plus loin en plus loin jufqu'au bout de I'annee , alors il fufEt de le remuer tous les mois. II faut de plus garantir le bled des animaux qui s'en nourrilTent, comme les rats, les foiiris & les oifeau.x, & de ceux qui, comme les chats, pourroient I DE L'ACADEMIE ROYALE DES SCIENCES. 1^9 poiirroient contribucr au dcchct par lems excrcnicns , qui remplilTeiit Je ^i-— ^^Mi^ bled de nuffes dc grain infcftc. ^ Mais les plus rcdoiitables cnnemis qii'on ait ^ combattre pour conferver " t a n 1 q u t. fc bled, font les teigtics & les charancons ; ces infecles, une fois logcs Annie t7 de rien avancer qui ne foit appuyc da B^ ^ . ., . ^ .. - temoicnage de I'expineiice. OTANIQ-UE. T ° I I ' 1 1 I I r i i n i. . Le nombre des glandes de quelqucs elpeces de plantes eft prodigieux ; Aan^e tj^£. dans I'ortie en arbre & le chanvre de la Chine > chaque feuille en contient an nioins 7168 : quel prodigieux nombre d'organes pour une plante S mepriiable en apparence ! L'ortie de la Chine eft couverte d'un duvet qui fe peut feparer aif(f- inent , ce qui n'arrive pas quand le duvet eft forme par des poils ; ce duvet n'eft forme que par la tranfpiration des gl.indes de cette plante, qui eft capable de prendre quelque confiltance ^ I'air , & il y a grande apparence que la meme caufe produit audi les duvets cotonneux non adhe- rens , qu'on obferve fur plulieurs de nos plantes. Lorlque dans les vegetaux il y a dans la meme efpece des individus males & des individus femelles , on obferve fur I'un & fur I'autre les memes glandes. De la reffemblance ou de la difparite des glandes & des poils il nait neceffairement un ordre botanique , fous lequel on peut ranger les vege- taux, cette idee n'a point echappe ^ M. Guettard; mais il n'eft point encore temps de prononcer li cet ordre fera preferable ^ celui que donnent les fyftemcs deji etablis , ce n'eft que la fuite des obfervations qui peut en faire juger , & dans une matiere aufR etendue , il s'en doit trouver affea pour qu'on ne puiife pas fe flatter d'en avoir fitot un nombre fuffifant. A N A T O M I E. »75 A N A T O M I E. iiiii. S U R L E .SIEGE D E L'A M E DANS LE CERVEAU. J-X E quelque manicre que Ton conceive ce qui penfe en nous , il eft ' _^^^^ certain que les fondions en font dependantes de lorganifation & de Ictat "T aftuel de notre corps pendant que nous vivons. Cette dependance mu- ■'^ ^ a t o m i k. tiielle du corps & de ce qui penfe dans Thomme, eft: ce que Ton appelle Ann^e i-tai, I'union du corps & de lame : union que la faine philofophie & la reve- ' ' Jatioii nous apprennent etre uniquement I'effet de la volonte libre du Createur. Du nioins n'avons nous nulle idee immediate de dependance , d'union, ni de rapport entre ces deux chofes, corps & pcnfde. Cette union eft douc un fait que nous ne pouvons rcvoquer en doute , mais dont les details nous font abfolument inconnus : c'eft k la feule experience de nous les apprendre & de decider fur toutes les queftions qu'on peut propofer iiir cette matiere. Uoe de ces queftions des plus curieufes, des plus intc- relTantes & la feule dont il s'agit ici , eft de favoir l\ I'ame exerce ^gale- ment fcs fondions Ans toutes les parties du corps auquel elle eft unie, ou s'il n'y en a pas queiqu'une h qui ce privilege foit particulierement at- tache, & quelle eft cette partie, de maniere que fes bleffures ou fa def- truftion eniportant neceflairement la celfation ou I'interruption des fonc- tions fpiritueiles, tandis que toutes les autres parties peuvent etre alterees ou detruites , fans que le llijet celfe de raifonner & de fentir. Nous diJons & de fentir, parce que tout ce qui s'appelle fenfition, voir, entendre, &c, n'appartient pas moiiis k Tame que la faculte de recevoir des idees, de les comparer &. de raifonner; quoique, felon le langage ordinaire, ce ne foit f)refque jamais qu'i ces dernieres qu'on accorde le nom de penfce. Les enfations n'expriment, il eft vrai, que des manieres de penfer trcs-con- fufes, ou des modifications purement paflives du fujet penfant, tandis que les penfces proprement dites femblent en etre I'adion ; mais ces modifica- tions font reellcment auffi incompatibles avec I'idee du corps, que les fpe- culations metaphyliques les plus fubtiles & les plus profondes. S'il y a done quelque partie dans le corps humain d'oii partent nos penfees & nos fen- htions, ou plutot i laquelie toutes les affections corporeiles & tous les mouvemens unis par inftitution i nos penfces & h nos fenfations aillent aboutir, comme h une efpcce de foyer ou de commun organe, c'eft cette partie que nous appellcrons le /lege de fame. La premiere idee qui s'eft prelentee aux philofophes fur ce fujet, a cts fans doute, que I'ame ne pouvant etre par la nature plus en un lieu qu'en ■iy6 ABR£G^ DES MEMOIRES — ^Bagaxiwi— un autre , & i la rigueur ii'occupant aiicun lieu , il falloit en vertu de fon union intinie avec le corps, I'imaginer comrae r^pandiie dans toutes fes A N A T o M I E. p^jjj(,5 ^ toutes etant capables de fentiment. Et s'il y avoit quelque prefe- Annic 1741. rence h donner k une portion de notre corps plutot qu'i I'autre, pour en faire I'organe immediat des operations de I'ame, il femble que ce devroit etrc au genre nerveux, puifque les nerfs font la fource & les Inftrumens du mouvetnen^ & du fentiment , & quits fe diftribuent par tout le corps, depuis kur origine dans le cerveau Jufqu'aux extremit(Js les plus reculees. Mais c'eft un fait connu & que mille exeinples ne permettent pas de re- voquer en doute, que les nerfs d'une partie du corps, telle qu'un bras ou une Jambe , peuvent etre coupes , & la partie abfolument retranchee , fans que I'on ceffe d'y eprouver ou d'y rapporter les memes fenfations, les memes douleurs, que fi elle fubliftoit encore. II faut done neceffaire- nient reconnoitre qui! y a dans le corps Inimain quelque lieu privilegie, ou I'ame exerce fes fonftions , & oii les corps qui viennent frapper celni quelle anime , vont aulli I'affefter, &, pour ainfi dire, la frapper elle- nicme. La queftion du fiege de I'ame, reduite ^ fes veritables termes, n'efi: done pas I'objet d'une recherche vaine , mais elle eft tres-difficile h reloudre. Nous ne nous arreterons point aux opinions de ceux qui ont plac^ ce fiege hors du cerveau, dans le cceur , par exemple, dans I'eftomac , & meme dans la mafle du fing, trop de faits en atteftent la faiiffcte. Le cerveau feul eft aujourd'hui & depuis long-temps en poffeflion de fournir matiere aux conjecStures des philofophes & des anatomiftes fur ce fujet-, mais parmi tant de parties qui compofent le cerveau , laquelle choilirons-nous pour donner le mouvement aux autres, & pour en faire le fiege des foniftions de I'ame? Defcartes s'eft determine en faveur de la giande pineale , Willis anatomifte Anglois , celebre fur-tout par fon traite du cerveau , I'a mis dans les corps canneles, & il n'y a pas de partie dans ce vilcere 4 laquelle quelque auteur n'ait attribue'la meme prerogative. Quelqu'un a done nommc ou rencontre la partie du cerveau qui eft veritablement le fiege de I'ame; mais rencontrer ainfi la verite & fans preuves fuffifautes, c'ell deviner & non pas decouvrir. M. de la Peyronie qui s'eft applique il y a long-temps ^ cette recherche, & qui en avoit donne une ebauche ^ la (ociete royale de Montpellier des {'annee 1705 , Ta prefentee cette annee-ci k I'academie des fciences , avec plus d'ordre & d'etendue, & I'a appuyee d'un f\ grand nombre de preuves & d'obfervations tant anciennes que nouvelles , qu'on peut regarder fon memoire fur ce fujet, comme un nouvel ouvrage. Apres avoir bien etabli I'dtat de cette queftion delicate, & avoir pris les precautions qu'elle pouvoit exiger, il place le fiege de i'ame dans le corps calleux , ce petit corps blanc un peu forme & oblong, qui eft comme de- tache de la mafle du cerveau, & que Ton decouvre quand on eloigne les deux hemifpheres I'un de I'autre , leurs faces internes etant contigues & fimplement couchces fur lui par leurs bords infericurs. .Ce n'cft ni fur I'infpefflion de la partie , ni iur fa ftru£ture particuliere, qu'il A T O M I r. DE L'ACADEMIE ROYALE DES SCIENCES. 177 qu'il liii accorde ccttc noble fondlion , le corps calleiix n'ayant ricn par '^ lui-iiKiiie dc plus analogue avec la penfce & Ic Icntiinent que toute autre partie du cervcau & qu'iine niatierc quelconque, niais d'aprcs les fails, par ^ voie d'cxclulion, & en montrant que les blellures ni la dc-ftruclion cnticre yinn^e 1741 d'aucune des autres parties de ce vilcere n'influent point fur les optJrationS de Tame, tandis que celle que nous en avons nomnie le fiege, ne fauroit ctre afiedce le moiiis du inonde, fans que ces operations ne foient trou- blces, ou qu'elles ne cedent totalement. L'on voit affez que cette methode & cette efpece de dcmonftration indirede ctoit la feule qu'il convenoit d'employer en femblable matiere. L'exclulion ayant etc donnee ^ tout ce qui n'eft pas le cerveau, on a dd chejcher d'abord (i c'eft dans toute fon ctendue que le cerveau conftitue le iicge de Tame; niais pour fe convaincre du contraire, il ne faut que fe lappeller une infinite d'exemples de cerveaux al teres , pourris, gangrenes dans prefque toute leur fubftance, fans ^ue la raifon & le fentiment en aient ieuHert, ces nicnies fondlions s'executanr encorp dans tous ces cas avec la mcme force, la meme promptitude & la mcme vivacite que dans I'ctat de fantc. La deperdition nieme d'une grande partie de la fubftance du cerveau, comme on la vii aprcs ccrtaines bleffures ou apres certaines operations chirurgiques, n'a pas empeche les nialades de raifonner, de fentir & de vivre coramc auparavant. M. de la Peyronie a ouvert plulieurs de ces cerveaux alteres ou defedueux, dont les fujets n'avoient cependant eprouve aucune des fuites facheufcs qu'il fembloit qu'on en devoit atteii- ' dre. L'ame ne relide done pas dans toute letendue du cerveau. Venons-en au detail , & cominencons par la glande pineale. Defcartes qui avoit beaucoup obferv^ en anatomie, qui avoit fait une attention toute particuliere a la nature & au mechanifme de nos fenfations, & qui a ete auffi le premier des philofophes qui nous en ait donne une notion exadle, qui ait ramene les qualites fenlibles des corps a leur veritable principe, avoit jiige cette glande plus propre qu'aucune autre partie , ^ etre I'organe des fondions de l'ame. Elle eft unique , & comme fufpendue au milieu des vcntricules du cerveau par deux filamens nerveux & flexibles qui lui per- mettent de ie mouvoir en tout fens , & par ou elle regoit toutes les im- rreflions que le cours des efprits ou du fluide qnelconque qui coule dans Ls nerfs, y peiit apporter de tout le refte du corps; elle eft entouree d'une infinite d'arterioles, tant du lacis choroide que des parois interieu- res des ventricules, ou elle eft renfermee, & dont les plus deliees tendent vers cette glande. C'eft du moins par ces circonftances & par cette iitna- tion avantageufe , que Defcartes , & apres lui quelques anatomiftes , ont cru que la glande pineale etoit le veritable fiege de l'ame & I'organe com- muii de toutes nos fenfations. Mais enfin on a decouvert que la gl.uide pineale manquoit dans certains fujets , cu quelle y etoit enticrement obli- teree , fans qu ils eulTent perdu I'ufage de la raifon & des fens; elle a he trouvee pctrifice dans quelques autres dont le fort n'avoit pas ete diffe- rent, & M. de la Peyronie I'a vue pourrie dans une femme de i8 ans , qui avoit conlerve la r.ifon & le fcatimcnt jufqu'i la fin de fa vie. II Tome IX, Partie Francoije. Z 178 ABREGE DES M^MOIRES — — ^— ^^ remarqua aulTi dans le meme fujet quelques autres parties du cerveau , telles ~ que les nates & les tejles , detiiiites par la pourritiire-, preiive que celles-ci A N A T o M I E. j^^ font pas non plus dcftinees ^ etre le fiege de Tame. Annie tisi. Nous en dirons autant des corps canneUs ^ malgre leur ftru£l:ure fin- guliere •, les obfervations de feu M. Petit medecin , fe reuniffent avec celles de M. de la Peyronie, pour montrer que ces corps ne fauroient etre le centre de nos fenfations ou \e fenforium commune j ainfi que I'appelle Willis , qui le placoit dans cette partie. Les couches des nerfs optiques qui nc font que des protuberances des iierfs qui fervent ^ la vilion , le cervekt & toutes les autres parties intc- lieures de la tete, excepte le feul corps calleux j paffent en revue de la neme maniere , c'eft-ii-dire , que M. de la Peyronie apporte une foule d'cxemples oil Ton voir que les maladies les plus marquees & les plus dangereufes de ces parties n'ont point interrompu les fondions de Tame, ni meme quelquefois attaque celles de la vie. La confequence apres cela eft aifee h. tirer en faveur du corps calleux, & elle eft d'autant'plus legitime, que par une fuite contraire d'exemples aufll formels que les precedens , cette partie paroit etre plus conftamment liee avec I'exercice de la raifon & des fens. Ce que M. de la Peyronie e'eft attache ^ prouver de la maniere la plus folide. Comme il y a long- temps que I'efprit & la main travaillent chez lui de concert pour eclaircir cette fameufe queftion , & qu'il a hi attentif i faifir tout ce qui pouvoit y conduire , il n'a manque ni d obfervations ni d'exem- ples. II fait voir que dans tous les cas, foit de bleffures accidentelles, foit de maladies internes , le corps calleux ne fauroit etre atteint , comprime on vicie par quelque caufe que ce puiffe etre , fans que les etourdiffemens , Taftaiffement des membres , la leth.irgie , le delire & la ceffation torale des fondions de I'ame ne s'enfuivent; & il y a tel de ces cas parmi ceux qu'il rapporte , oii ces fondions etoient alternativement & comme i vo- lonte de la part du chirurgien, fufpendues ou retablies, felon qu'avant ou apres le paniement, le corps calleux fe trouvoit furcharg^ ou ddivr(i de la matiere etrangere qui s'amaffoit & qui fejournoit fur un des cotes de fa furface. C'eft M. de la Peyronie lui-meme qui faifoit I'operation , & qui a vu ainfi plufieurs fois la raifon & le fentimtnt du malade s'eclipfer & reparoitre. II conclut done, & il eft mal-aife de ne le pas conclure avec lui, d'apres routes les obfervations & tous les faits que nous venons d'indi- quer, que le corps calleux eft vcritablement cet organe primitif de la rai- Ion & des fenfations, auquel tous les autres ne font, pour ainfi dire, que porter le refultat de ce qui fe paffe chez eux , & les impreffions qu'ils ont revues des objets, en un mot, le fiege de Tame. Cette theorie peut eclairer celle des maladies & des derangemens du cerveau , & determiner par confequent les fecoius qu'on eft en ctat d'y apporter. Tout eft lie dans la nature, & il feroit difficile d'y trouver quelque decouverte h faire qui ne flit que curieufe, & qu'avec le temps de nouveaux points de vue, de nouveaux faits, ou quelqu'autre decou- verte ne puffent rendxe utile. DE fACADfiMiE ROYALE DES SCIENCES. 17? O _ Anatomi£. SuR lA Reunion des Fractures des Os. Annie tJ4t. N a vii dans I'hiftolre de 1759 > (a) t^ue Ics os des animaiix, dans Hift. les alimens defquels on avoit mele de la racine de garence, fe coloroient en peu de temps d'lin rouge plus on moins vif , & cjuelquefois aulTi vif que du carmiii. Cctte hngiilarite , dont la premiere connoiflance eft due auhafard, ayant cte obfervee par M. Belchier, chirurgien de Londres, 8c communiquee k I'academie par M. Sloane , prefident de la focieti royale , M. du Hamel la jugea digne d'une plus ample recherche ; il en repcta les experiences avec grand foin , & fur un grand nombre d'aiiimanx de tout age. Le refultat de ces obfervations fut, 1°. que les os des jeunes animaux fe coloroient beaucoup plutot que ceux des vieux. 1°. Que les progrcs dc la teinture des os , & I'offification meme, etoient d'autant plus prompts, que les animaux croiffoient plus vite & parvenoient en moins dc temps k leur grandeur ordinaire. 3°. Que quand on fupprimoit la garence des ali- mens d'un animal dont les os avoient acquis ainfi la couleur rouge , cette couleur difparoilloit peu-^-peu , & que les os redevenoient blancs. 40. Que ce r^tabliffement des os dans Icur couleur naturelle , fe faifoit par la fu- perpofition des couches blanches fur les couches rouges , k mcfure que U couleur de celles-ci s'afFoibliHoit , & difparoiffoit enfin entleremcnt. Nous rappellons ces premieres obfervations , pour mieux faire fentir quelle a ete leur feconditi entre les mains de M. du Hamel. Eilcs I'ont conduit aux plus importantes dccouvertes fur le developpement & la for- mation des OS, fur la caufe & fur la gu^rifon de leurs maladies, & prin- cipalement fur la reunion de leurs fradures , qui feit le fujet des deux memoires qu'on trouvera dans ce volume. C'eft le commencement d'une theorie plus etendue qu'il prepare fur la meme matiere •, mais d'une thioric toujours fondee fur de nombreufes experiences, & tres-applicable i la pra- tique. L'anatomie, la chirurgic & la phylique meme, dans cette partie de I'hiftoire naturelle , ne peuvent qu'en retirer de grands avantages. On avoit pfnfe jufqu'ici que la reunion des os fradlures fe faifoit par I'effufion du fuc ofleux , qui , venant k couler dans les interftices de la fra(5hire , en rejoignoit les bouts k-peu-pres comme la coUe rejoint lei parties d'un morceau de bois rompu : penfee (i naturelle & (i analogue k ce que I'art nous enfeigne , qu'il n'cft pas ^tonnant qn'on s'y fut arretc. Mais M. du Hamel prouve par un nouvel enchainement d'obfervations & d'experiences , que c'eft le periofte fcul qui reunit les os. Cette mem- brane fe tiimdfie d'abord & s'epaiffit, elle devient enfuite cartilagineufe & enfin offeufe , ce qui forme le cal , ou cette efpece de virole qui en- toure I'endroit rompu , & qui en affujettit les parties. C'eft en fuivant pas ^ pas cette oflification & cette reunion , que M. du Hamel s'eft con- vaincu de la route que tenoit la nature pour y arriver , route qui ne Ca) Voyei le Tome VIII. de b CoUeffion Acsd^mique, Partie Fran?oif8. z 4 i8o ABR^GE DES MEMOIRES '* iiiM^'H s'ecarte pss dii mechanlfme qu'on peut remarquer dans la reunion des N A T o M I E P'^rties rompues des arbres & des plantes. Quoique le corps humain foit le fiijet propre de I'anatomie , on fait Annie 1^4^ • cependant de quelle utilite eft la dilTedion des brutes , par la comparaifoii quon fait de leurs vifceres avec ceux de rhomme. Ceite comparaifon etoit en ufage des le temps de Galien. Mais une autre efpece d'anatomic comparie , cclle des vegetaux , a ete encore cultiv^e par les modernes ; & Ton peut voir \ cette occafion dans I'hiftoire de I'academie , {a) com- bien la generation & la ftrutture de ces deux efpeces de Corps vivans , les plantes & les animaux, fe reffemblent. M. du Hamel, qui a beaucoup itudie I'une & I'autre , avoue que ce font fes recherches fur la reunion des arbres rompus, qui I'ont conduit \ I'utile & curieufe decouverte qu'rl nous donne aujourd'hui fur la formation du cal dans les fradtures des os. L'ecorce des arbres eft leur periofte , leurs parties ligneufes font leurs OS. Or , comme M. du Hamel le fera voir plus particulierement dans la fuite, c'eft par un alongement de I'lkrorce que la fra(3:ure ou la plaie de I'arbre eft remplie , & non par I'alongement de fes fibres ligneufes , on par TefFulion du fuc nourricier qui fuinte de leurs bouts rompus. L'ecorce fe tumdfie , s'dpaiflit fur la plaie , & elle y forme enfin un cal tout fem- blable ^ celui qui fe fait fur les os par roffification du periofte. Quand ces fortes d'analogies fe trouvent foutenues d'aut«nt d'obferva- tions & de recherches reitdrees que I'eft celle-ci , elles deviennent de furs guides pour les phyficiens ; car enfin la nature n'eft pas moins fimple ni nioins uniforme dans fes precedes, que variee dans fes ouvrages. Sv R DE SOVVELLES ARTERES ET VeINES Lr MP H AT iqu E S. 5J«"r. I ^IS decouvertes qui nous intereffent Ic plus , font celles qui fournif^ fent des vues gencrales, ou qui tiennent de plus pres aux principes fon- damentaux des fciences. Telles font en anatomic , celles qui ont rapport ^ la ftrufture ou k I'ufage de tous les organes du corps anime. L'anatomie ne connoilfoit autrefois dans leconomie animale de fluidc univerfel que le fang , mais la phyfiolegie on la phylique du corps humain en fuppofoit deux autres , I'un etoit I'efprit animal ou vital , I'autre une rofee ou lyniphe nourriciere, qu'on croyoit renfermee dans les extremites des vaifTeaux qui doivent porter le fang du centre 'k la circonference. Des medecins celebres firent dans la fuite une decouverte ^ jamais tn<5morable dans l'anatomie , ce fiit celle des vaiffeaux lymphatiques & de la liqueur qu'ils contiennent. Ces vaiffeaux font de vdritables' veines qui recoivent de routes les parties du corps une liqueur limpide , & qui la verfent par des froncs remarquables dans les refervoirs du chyle , dans le canal tora- . chique , &c. (a) Voyez I'Hiftoixe de 1711, Tonw in. de la Golle<5ipn Acad^mique , Partje Franj. DE L'ACAD^MIE ROYALEDES SCIENCES. iSi La connciflance dcs veines lymphatiques donna lieu d'im.iginer aulii ' des arteres d'lm genre" noiiveau , dcftinces a recevoir la .fcrQlit» ou l-i a ^ lymphe du iang , en laiifant la partie rouge dans les vaiileaux fanguins.' ' ' M. Boerhaave , qui eft cclui qui a donnc le plus de credit ^ ce fyfteme , Annie fj^l- it ctut en droit de fuppoler autant de diflcrens genres d'arteres qu'il y a de liqueurs dans le corps liumain •, niais cette opinion , quclque poids que put Ini donner un nom fi t'ameux , n'a pas eiileve tous les fullrages ; I'ana- tomie n'a reconnu conftamment julqu'ici , que les arteres qui portent le fang dans toutes les parties du corps. Et d'ailleurs , il n'ctoit pas naturel de penfer que ti les arteres lymphatiques exiftoient, elles euffcnt echappc "^aux recherches de tant d'habilcs anatomiftes, qui ont paru depuis qu'il c« eft queftion , & fur-tout d.ws un temps oii Tufage du inicrofcope & des injedions anatomiques eft devenu fi faniilier. Les partifans des arteres lymphatiques repondoient qu'on n'avoit pu les obferver ^ caufe de leur extreme petiteffe, & de plus, parce qu'il n'eft pas plus facile de les diftinguer d'avec les vaiffeaux languins ; tous les petits vaiHeaitx, quelle que foit la liqueur qui les remplit, vus au mictofcop?., paroiffant ^-peu-pres de la meme couleur & comma cryftallins : mais ce n'eft-li qu'une raifon de poflibilit^ & non d'exiftence. On voit done que I'idee des arteres lymphatiques n'a ete jufqu'ici qu'une .Bypothcfe dont on a pu fe fervir pour expliquer des faits concur , mais non pas pour dcyelopper ceux qui etoient caches. En un hiot, I'anatomie, qui n'admet de veritables preuves que le teraoignage des fens, n'avoit . pjs encore prononce fur cet article ", mais les fciences exadles profitent quelquefois des conjcdures ks plus hafardees : il y. a peu de dqcouvertes iiTiportantes que I'imagination n'ait faifies ou e01ei?rees d'avance , & la queftion dont il s'agit en fournit un exemple. , M. Ferrein a ennii decouvert & conft.ite I'ej^iftence des arteres lyinpha- liques , & avec elles de nouvellcs veines lymphatiques qui \t^ accorapa^ ^gnent. II regardoit I'idce de ces arteres comrae line hyppthefe quin'avojt aucun fondenient , loriqu'il obfervn djns riqtcrieur de la,iT)a^iGe Une .nify- niere de velouii blanchatre & extreniemqnt raince , qu'il exainiua en di^- ferens temps & en diffdrens etats. La comparaifon qu'il fit de toutes fes p.lv- fervations, lui donna lieu de juger que ce veloUte n'ctoit cr» effiet qu'un ti(fu de vaiffeaux lymphatiques arteriels & veineuxj, mais tout cela etoit encore fort eloigne d'une dcmonflration anatomique. |1 jippercut enfuite for Iffhaut de I'osil d'un chien r un appareil de vaiffeaux qui le frapp4,-, c'ctoit.UOfjotTi- bre conlidirable de petits tuyaiix ramifies \ la maBierc'des artere^&.Kdes veines, & pleins d'un fluide qui avort toutes les apparences.du lyraphatique. lis lui parurent tres-diffirens des veines lymphatiques deji connucs, & il ne pouvoit guere les foupconner d'etre autre chofe que les arteres memes dont il s'agit. II appercut ces memes tuyaux dans une autre occafion •, mais il lui fut impoflible de reconnoitre leur origine , & d'eclaircir les diffi- cultcs qu'il avoit \ ce fujet. II revint done h la raatrice , & y fit de nou- velles tentatives , qui lui devoilerent enfin le fecret que la nature fem- bloit cacher depuis (i long-temps. La fineflc extreme de ces vaiffeaux ne ,8i A B R E G £ D E S M fi'M O I'R E S • ,^— ^—1 les empecha pas de fe montrer pour ce qu'ils etoient , & avec des ramifi- ' cations tout-i-fait femblables k celles des arteres ordinaires. Ce ne fut pa$ A N A T o M I E- dependant fans beaiicoup de peine que M. Ferrein vint 4 bout & de les Annc'e f7dt bien voir & de s'aflurer de leur veritable nature •, mats que ne furmontc- ' * t-on point en des occafions fi intereffantes , & oii I'avancement dune fdence que Ton chirit, I'utilitd publique & les mouvemens les plus, legi- times de I'amour-propre concourent i nous animer? 11 reftoit ^ M. Ferrein de feire voir aux autres ce qu'il s'etoit demontr^ i lui-mcme. II avoit pris garde que les objets k demi-tranfparens regard^s avec une forte loupe, paroiffent d'ordinaire plus diftindtement fur un fond noir que fur des couleurs claires, & il fe rappella que luv/e . cette tu- nique de I'ttil qu'on a ainCi nomraee , parce quelle reffemble i un grain de raifin noir, fe trouvoit par Ik tres-propre i faire paroitre les vaiffeaux -diaphanes qui la tapifTent. L'uvie des enfans eft preferable pour cela k celle des hommes faits, & I'uvee des yeux bleus ou bleuatres , k celle des yeux noirs. M. Ferrein tira done de I'orbite I'oeil d'un fujet age de dx ans, mort depuis environ i+ heures -, il cnleva la partie anterieure de la fclerotique ou la cornee , pour mettre la choroide & I'uvee k decouvert •, il regarda ces deux membranes de front , avec une lentille de 5 lignes de foyer. La choroide lui ofFrit une quantit6 extraordinaire de vaiffeaux fan- guins •, il n" en vit aucun dans I'uvee , mais il y decouvrit , & avec une efpece de raviffement, une multitude innombrable de vaiffeaux blancha- tres & tranfparens, qu'il ne put douter qui ne fuffent les nouvelles_ arteres 4ympliatiques tant defirees. G'eft principalement fur cette partie qu'il en a 'demontri I'exiftence k I'academie, leur drigine, leur progres & leurs rami- fications, femblables I celles des arteres fanguines, & difpofees d'une ma- niere qui n'eft pas moins merveilleufe. On trouvera dans fon mcmoire un detail curieux & exad de tout ce qu'il faut obferver pour appercevoir clairement ces tuyaux, aufll-bien que les nouvelles veines lymphatiques , & une idie generale de la difpofition naturelle des vaiffeaux fanguins avec les lymphatiques , & les fecretoires du corps. II a touchc en paffant & par la liaifon des matieres ,_ quelques autres points d'anatomie qui peuvent paffer pour autant de decouvertes particsulieres. Tel eft le nouvei anneau de la choroide , un refeau de vaif- feaux fanguins dans cette membrane , &c. _ On fent affez combien la connoiffance certaine d'une nouvelle efpece de tuyaux dans une machine hydraulique, telle (^ue le corps animal, doit fournir de nouvelles vues, tant par rapport ^ fon economic, qu'aux moyens de remedier k fcs dcrangemens. Slip r.. DE L'ACADEMIE ROYALE DES SCIENCES. iS; A N'A T O M I E. SUR L'ORGANE IMMl^DIAT DE LA VOIX, Annc'e ty^t I E T DE SES DIFFEItENS TONS. t femble cju'on ait ^te nn pcu trop fcvere i I'egard des anc^ens , lorf- Hilt u'on les a repris d'avoir compare I'organe de la voix humaine h une flute. 1 n'eft pas vraifemblable qu'ils aient entendu autre chofe par-li , finoti que cct organe etoit fait i-peu-pres comme cet inftrument, & que I'un & I'autre agiflent ou donnent leurs tons par le moyen de I'air ou du vent qui palle par leurs cavites : & en efFet, la trachee-artere eft un tuyau par oil paiie I'air qui vient des poumons , & fa tete ou le larynx qui la termine du cote de la gorge , & au milieu duquel eft la petite ouverturc ou fente qu'on nomme la glotte , reprefente aflez bien la tcte & I'em- bouchure de la flute \ bee. II eft vrai que dans la fliite le vent qui pro- duit le foil, eft poufle de I'embouchnre vers I'autre exrremite du tuyau, & que c'eft tout le contraire dans I'organe de la voix •, en quoi il n'eft pas pomble que les anciens non plus que les modcrnes aient jamais errcj mais il y a tout lieu de croire que les uns & les autres fe font trompes, quand ils ont cru que I'organe de la voix n'etoit , \ proprement parler , qu'un inftrument \ vent, comme la fiiite, le flageolet ou le hautbois. M. Ferrein fe trouve l^-deflus d'une opinion tres- diflerente , &, fi Ton veut, tres-paradoxe, mais fondee en mcme temps fur des experiences dont il fera difficile d'cluder la conclulion. L'organe de la voix eft felon lui , un inftrument ^ corde & ^ vent, & beaucoup plus \ corde qu'i vent, I'air qui vient des poumons & qui paffe par la glotte, n'y faifant proprement que I'oflice' d'un archet fur les fibres tendineufes de fes levres , que M. Ferrein appelle cordes vocales ou rubans de la glotte. C'eft la col- lifion violentc de cct air & des cordes vocales qui les oblige ^ frcmir, & c'eft par leurs vibrations plus ou moins promptes qu'elles rendcnt diiK- rens tons , felon les loix ordinaires des inftruraens ^ cordes. Ces deux fortes d'inftrumens de mulique , ^ corde & ^ vent , different entr'eux , en ce que dans les uns le fon depend & de leur conftrudtion & de la matiere dont ils lont faits , tandis qu'il ne rcfulte dans les autres que de leur fimple conftruftion. Dans les premiers, tels que la viole, le claveflin , les cloches , la qualite de la matiere infiue fur la nature ^u fon , parce que c'eft des vibrations de cette matiere, prefque toujours fenfibles i la vue ou au toucher , que dependent le fon & les differcns tons qu'on en tire : au-licu que les feconds ne fonncnt ou ne rendent tel & tel fon, qu'en confi^quence de leurs dimenfions , des ouvertures , des fentes & des bifeaux qu'on y a menagcs, & par le nioyen diiqucls les parties tcniques de I'air font differemment aeitecs & mifes en contradtion. Ainfi les metaux les plus mous comme les pms durs, I'ivoire, le bois, le carton mcme & ,i;g4 ^ - : A B R E G £ D E S M ^ MO I 1^ ES .^mi^— —— ■■ Ij cire, y produifent ^-peu-pres Ics memes effets -, &: ce phenomene, (|iielque extraordinaire qu'il paroiffe , fe trouve conftate par rexperieuce. Ana t o k 1 e. q.^^ ^^^^ j^ ^^^^ ^^^^ rendent la plupart des inftriiinens h vent, & fur-touf jinti/e 174!. ''^5 flutes, n'eft point du aiix vibrations totales & fenllbles de la matiere '"•■ • qui les compofe. On pent eniouffer ces vibrations ^ volonte, les inter- rompre & les arreter entierement par la preffion , on par qiielque autre caufe que ce foit, fans que le fon de rinftrument change {enablement de force ni de nature. Et s'il y a la-defius quelques diftinftions delicates , Sc -. T, ouekiue choix i faire pour la perfei5i:ion de ces inftrulnens , e'eft un detail de pratique dans lequel noUs n'entrerons point ici. L'organe de la voix de riiomme & des quadrup.edes , eft au contraire , felon M. Ferrein, un inf- tmm?nt ^cprde, raais up inftriiiment ^ corde qwe le vent fait agiir en qui'^ lite d'arvhet. .' ..■■.• i . > M. Dodart, (a) qxA eft celui de tous Jes.wodenies qui a le plus trai* vaillc fur la voix humaine , fur fesdifferens tons , & fur le mechanilme que la nature y emploie, a admis , ou plutot n'a pas exclu les fremiife-t mens des parties inlenfibles des levres de la glotte ; mais il parolt par le rcfurae de tout ce qu'il tn a dit , & qui, fdlon M. Ferrein, differe pen de ce qu'en avoit deji dit M. Perrault , qu'il ne les a admifes .que comme accelToire?, & non comrne caufe principale. Ce font, ielon M. Dodart, les dilierentes ouvertures dent la glotte eft lufceptible , qui conftitueut cettc caufe; (avoir, les grandes ouvertures pour les tons graves , & les petites pour les tons aigus. Ckft ainli du moins que M. de Fontenelle dans fes extraits, & les auteurs qui font venus depuis , & qui out traite la jiieme matiere, I'ont entendu, Mais fans nous embarrafl'er davantage de ce qu'on a cru jufqu'ici, voyons ce qu'il convient de croire, & quelles font les preuves que M. Ferrein apporte de fon fentiment. Cotiime il n'y a que deux rubans ou cordes vocales ^ la glotte , & qu'elles y font fenfiblenient de la mcnie longueur, il eft vifible qu'elles ne iauroient fuffire h donner cette multiplicitc de tons hauts & bas dont la voix humaine eft capable , k moins qu'elles ne foient prolongees ou ac- Gourcies, ou, ce qui reviendra an meme, plus ou moins tenducs. Mais leur longneur ne peut changer que par voie de diftenlipn ou de contrac- tion •, done toute la difference des tons en graves & aigus , fera due au plus ou moins de tcnfion des fibres tendineufes de la glotte, & fair qui viendra k dtfe, poufle des poumons dans la trachee-artere , & i frokr coii- tre les bords, de-Ji, fente etroite qu'elles y forment, ne produira des tons plus ou moins aigus, qii'aUtant que ce6 fibres, ou ces cordes qu'il met en vibration , fe trouveront plus ou moins tendues , & qu'elles feront par-1^ cjes vibrations plus on moins promptcs, independamment, du plus ou dii moins d'ouverture da la glotte. ; Voili ce qui doit arriver, felon M. Ferrein; mais eft-ce II ce qui ar- vive ;- II n'y a pas affuremeHt de meilleure maniere de k juftifier & de (o) Voyez' les Memoires de I'Acad^mia , anne'es 1700, 1701 , 1706, & 1707, T.otne I. &' II. de la Colleiftion Acadtoique , Partie Fianjoife-, refiitcr i DE L'ACADJ^MIE ROYALE DES SCIENCES. 1S5 r^fater le fyftenie de M. Dod-irt , que de ir.ettre cet efftt foiis les yeux > — m en donnnnt, par exeniple, dilicrentes oiiverturcs h la glotte avec uiie mcme . tenfion dcs rubans, oil an contraire difterentes teiilions avec la meme on- - " ■^^ ° •' ' ^• vcrtiire, on enfiii une plus petite ouverture avec une moindre ten'.ion, & ^nrJe 1741. an contraire. Dans le premier de ces quatre cas, il faut que le ton de- mcure le meme , quoique Fouverture change •, dans le fecond , ce doit ctre le contraire , il faut que le ton change , malgre une ouverture de glotte conftante; & dans le troilleme ou le quatrieme , il faut que le ton qu'on vient d'entendre avec une teniion & une ouverture donnces, de- vienne plus aigu par une plus grande teniion , malgre une plus grande ou- verture, ou au contraire plus grave, malgre une tenfion & une ouverture plus petites. Or c'eft ce que M. Ferrein a eprouve de mille manieres, rant fur I'honime que fur divers animaux, avant que de compofer fon me- moire , & c'efl audi ce qu'il a fait voir ^ I'acadimie alTemblee , & h plu- lieurs de fes membres en particulier. II prend une trachee-artere dctachee du cadavre avec fon larynx, il fouftie dans la trachee, tenant en meme temps les rubans de la glotte plus ou moins bandcs, Sc Ton entcnd la voix humainc ou animale hauffer &: baiffer de ton , ou dcmcurer fur la tenue , dans toutes les circonflances que nous vcnons d'enoncer. Ce qui ell digne de remarque. Si h quoi fans doute Ton ne fe feroit pas attendu , en accordant meme ^ M. Ferrein tout ce que fuppofe fon lyftcnie , c'eft que les diff erentes voix que donne cette experience , chan- gent peu de nature , & qu'elles font encore tres-rcconnoiffables. Le mugiffement d'un taureau , le cri d'un chien qui foufFre , &c. s'y font parfaitement diftinguer, Cependant combien y manqne-t-il de parties ca- pables de modifier & de caraderifer ces voix ? Plus de palais , de dents , ni de levres -, le larynx meme arrache de la gorge de I'animal , a ete pour I'ordinaire tres-mutilc , on a retranche dans quelques-uns I'epiglotte , & tous les morceaux de cartilage qui environnent ou qui couvrent la glotte, & les cordes vocales , pour mieux voir le jeu & les vibrations en effet vifibles de ces cordes : & malgre tous ces retranchemens la voix de cha- que animal y conferve encore prefque tout ce qui la diftingue de celle des autres animaux. Enfin , M. Ferrein a fait voir que les rubans tendineux qui bornent la glotte )l droite & 'k gauche, fonnent comme les cordes fonores, & qu'ils ont les memes proprietes qu'elles. II montre par fes experiences , coni- inent les cordes vocales peuvent rendre enfemble & feparement differens tons', comment on peut accorder, par exemple , I'odave aiguc de I'une, avec I'odave grave de I'autre; comment on peut partager ces cordes fulvant leur longueur , & faire fonner leurs parties , leurs moities , leurs tiers , <5L-c. Dans I'animal vivant ce font ceux des cartilages du larynx , ou les bouts des cordes vocales font attaches , qui tirent ou qui relachent ces cordes. M. Ferrein decouvre par I'anatomie de ces parties, les articulations & les mufcles qui leur donnent le mouvement neceflaire, & il va meme jufqu'i montrcr la maniere de s'affurer par le iiik dans I'homme vivant, nun- Tome IX. Fartie Franfoife. A a iS & dont on fera convaincu par la ledure du memoire de M. Winflow, c'eft que les corps ^ baleine peuvent caufer & caufent en effet trcs-fou- vent aux femmes & aux jeunes perfonnes qui en font ufage , des incom- modites facheufes , & des maladies qu'on attribue ordinairemcnt i de tout autres caufes, qu'on traite par-I^ fans fucccs, & qui deviennent quelque- fois incurables. M. Winflow avoit obferve dans plufieurs femmes & filles de condition; que les cotes inferieures fe trouvoient plus baffes, & les portions cartila- gineufes de ces cotes plus courbees que dans les hommes & les enfans, & dans les femmes & filles du bas-peuplc. II jugea que cette difference ne pouvoit etre mife fur le compte de la nature , qui ne connoit ccrtai- nement point de ces diftindions d'etat, ni venir d'aucune autre circonf- tance etrangere, mais feulement de I'ufage frequent & habituel des corps forts , qui font d'ordinaire extremement ferres par embas, & qu'on fait (a) Nous en avons donn^ I'exuait dans le volume prdcddent. i DE L'ACAD^MIE ROYALE DES SCIENCES. .S/ porter ainfi aux Jeiines perfonnes pour leiir doniier ou pour leur conferver ^— — ^^-^^ ce que felon la mode prefcnte ou appclie une belle taiilc. Les reflexions . 2u'il fit fur cet ufage , lui fournirent blentot la folution de philleurs dif- ■"■ ^ ^ ''^ o *' ■ ^• cultcs qu'il s'etoit formees fur la caufe de certaines indifpolitions locales, Ann^e t74t. & de certaines infirmites qu'il avoit rcmarquees dans les femmcs accoutu- mies k porter des corps i baleine. II concut que les inteftins violemment jreifes de bas en haut devoient comprimer lellomac, le foie & la rate, es poufl'er fortement contre le diaphragrae , & non-feulement forcer ce mufcle k fe vouter plus que ne le demande la rcl'piration , mais encore retarder ou empecher le mouvement des dift'erentes parties necefl'aires ^ la refpiration. La refpiration genee par le ferrement des cotes inferieures & par la voute for^e du diaphragme , rrouble la circulation du fang dans le casur & dans les gros vaitfeaux qui en dependent, & d'autant plus que la preffion de I'aorte defcendante & de la veine cave inferieure, retient en partie le fang dans les gros vaiffeaux luperieurs, non-feulcment dans ceux de la poitrine , mais audi dans ceux de la tete & du cerveau , & y occa- fionne une efpece de regorgement, qui, felon les ditfcrcntes dil'politions du fujet, peut occalionner des palpitations, des polypes, des maladies pul- monaires, des maux de tete, des vcrtiges , des anevrifmes, & nieme tot ou tard I'apoplexie. La comprefllon de I'eftomac, du foie & de la rate produira des accidcns plus ou moins facheux par rapport aux nerfs , aux glandes mefentiriques , ^ la route du chyle, aux reins, i la veflie, & aux autres parties contenues dans la capacite du bas-ventre. Du genre nerveux oftenfe naitront les foibleffes , les fuftbcations , vulgairement appellees va- peurs , les tremblemens, les difpofitions ^ la paralyse, &c. Voili, felon M. Winflow , les accidens plus ou moins facheux que les corps ^ baleine doivent occafionner par leur partie inferieure & moyenne, felon que I'ufage qu'on en fait , eft plus outre ou plus continu , & tela cntant qu'ils font plus roides, plus titroits, & qu'ils etranglent, pour ainfi dire , davantage la partie du corps ^ laquelle ils font appliques. On croi- roit aprcs cela que leur partie fuperieure etant toujours evafee & plus large, ne fauroit etre nuihble-, mais on va voir que M. Winflow y dccou- vre des inconveniens qui, pour etre moins k craindre, ne laiffent pas de devoir etre evites. Les echancrures des corps au-deflbus des bras, & qui r^pondent ^-peu-prcs au creux de Tailfelle , brident violemment deux mufcles, favoir, le grand pedoral & le grand dorfal, qui forment le creux de I'aiffelle, & qui fervent aux principaux mouvemens des bras; le trarr- chant & les bords de ces echancrures (errent audi les vaiffeaux & les nerfs axillaires , de maniere que quelques perfonnes en ont les bras rouges , & fouvent tout livides, avcc plus ou moins d'engourdiffement, & qu'elles ne peuvent les etendre en avant. D'ailleurs les epaulettes, ces bandcs qui paffent par-deffus I'^paule , reculent tellement les moignons des epaiUes que les cxtremites anterieures des clavicules au haut dnjiernum , devien- nent quelquefois par-li trcs-i'aillantes, & font comme pretes ^ fe debol- ter , ce qui paroit fur-tout aux perfonnes maigres. Enfin M. Window explique par-li un phcnomene qui avoit fort embarraffe le celebre Riolan 5 Aa ij A N A T O M I E. ,8S AB R t G t DES M#. MOIRES 1 cet auteur qui etoit premier medccin de la reine Marie de Medicis , & qui vivoit par confequent dans un fiecle ovi Ton fait que les corps etoient ' encore plus en ufage parmi les femmes du grand monde que dans celui- Ann^e 1741. "' avoit obferve que la plupart de ces femmes avoient I'epaule droite plus groffe & plus charnue que Tepaule gauche-, & il ne favoit, comme il ravoiie dans un de fes ouvrages d'anatomie, k quoi attribuer cette diffe- rence. II penfa d'abord que ce pouvoit etre I'effet du mouvement du bras droit qui, etant plus frequent que celui du bras gauche, tirailloit & ^car- toit I'omoplate de ce cote , & en dilatoit les mufcles , en y faifant couler le fuc nourricier & les efprits en plus grande abondance. Mais cette caufe qui pcut agir jufqu'i un certain point, pourquoi ne fe manifefte-t-elle Eas de meme, ou par des effets encore plus marques da^s les femmes dii as-peuple & dans les hommes ? II faut done neceffairement en venir h quelque circonftance qui foit propre aux fujets dont il s'agit , & c'eft ce que M. Winflow trouve dans Tabus des corps i baleine. Les perfonnes accoutumees i en porter, ne laiffent pas de remuer pour I'ordinaire beau- coup plus le bras droit que le bras gauche-, la partie de ces corps qui fe termine au-deffous de Taiffelle, & la bande qui paife par-deifus Tepaule du bras droit , fe doivent done relacher peu-^-peu par le frequent mou- vement de ce bras , & beaucoup plus que du cote gauche -, apres quoi il n'eft pas furprenant que la matiere de la nutrition & de I'accroiffement y coule & s'y arrete en plus grande abondance que dans I'epaule gauche, oil tout eft plus contraint & plus refferr^. II n'y a pas d'apparence que cette diffbrmite foit li fenfible aujourd'hui. Si elle Tetoit, M. Window n'auroit pas fans doute manque de le dire , & ce n'eut pas ete un des moindres motifs dont il auroit pu accompagner ces confeils falutaires. S U R LES R E M E D E S DE MADEMOISELLE STEPHENS, POUR L yt PIERRE. xN o u s avons vu dans le tome precedent de cette colleftion acadcr niique que M. Morand, dans le compte qu'il avoit rendu i I'academie, des remedes de MI'e- Stephens pour la pierre , ne s'etoit pas cru autorifc par fes obfervations ^ prononcer fur leur vertu diflblvante. De nouvelles rccherches lui ont fonrni la preuve qu'il cherchoit, dans trois pierres de trois malades qui ont fait ufage plus ou moins long-temps des remedes. La premiere , groffe comme un gros marron , etoit criblie dans toute fa furface, mais plus profondement entamee ^ fa face pofterieure & tronquee par en bas , de fa9on que M. Morand juge que le quart de la pierre avoit itc dctniit. Le malade avoit pris les remedes pendant trois mois. La fe- conde, un pen plus groffe, etoit comme cifelee j elle paroiffoit avoir eu DE L'ACADEMIE ROYALE DES SCIENCES. 189 unc ecorce raboteufe qui etoit detriiite prefqiie par-tout •, & dont il ne — — i^ reftoit que quelqucs veftiges en f.i ftirface : les couches rcngeatres qui . itoient fous cette ecorce ctant entamees iiiegalement , on pouvoit compter >■■ ^ t o m i t cellcs qui avoicnt ete dctruites , & il y avoit des endroits ou on en comp- xinm'e ijAt. toit Julqu'i fix d'ufees, & au-deffous Ton decouvroit unc couche grife , qui conimenijoit cllc-meme i ctre entamee. La troilieme pierre , dont le malade n'avoit pris les remedes que pendant un niois & quelques jours, etoit de la grofleur d'un petit ccuf de poule. La premiere couche avoit etc prefque emportje, la feconde etoit detruite en philieurs endroits, & dc- couvroit la troifieme qui etoit dune couleur plus foncee, cc qui donnoit ^ la furface de cette pierre une forte de relFembfance avec celle d'un os vernioulu , & demontroit I'adion des remedes par les traces profondes que le diiFolvant y avoit faites. Ccux qui fe refufent meme aux vraifemblances fur cette- maticre, diront peut-etre que ces pierres ccorchees , entamees , ufees , criblees, lelorj M. Morand par ladlion des remedes, etbient telles dans la vcflic , inde- pendammcnt de I'effet qu'il attribue 'k ces remedes. M. Morand repond deux chofes \ cette objedlion. 1°. n On n'a vu, Jj dit-il, tant de pierres It bizarrement cifelees , travaillees , rongees, que »» depuis que les remedes de M"e- Stephens font en ufage. Pourquoi , ij dans les cabinets des curieux qui en raffemblent, n'en voit-on pas de JJ pareilles; & U par ha(ard il s'y en trouve, pourquoi font-eiles plus com- >5 munes i^ prcfent. 2°. J'ai une preuve complete que, dans I'ufage de ces >j remedes, rn rend par la voie des urines, )e ne dis pas des ecailles, »5 mais des fragmens qui ont la meme furface que la pierre qu'on retrouve j> enfuite d.ms la veffie. jj Pierres de Fiel Si jsi gu li eres. JL-iES pierres de fiel ordinaires font compofces d'lffie bile epaiflle, durcic peu-^-peu , & appliquee par couches concentriques autour d'un noyau tres-petit, qui eft fait de la meme matiere , avec cette diftiirence que ce n'eft qu'un allemblage de plulieurs grains diverfement figures. M. Geoffrey a fait voir k I'acadcraie la moitic d'une pierre de fiel d'une Aru(5hire differente-, elle paroit faite de deux lubftances : I'extcrieure on Tecorce eft compofee de petits grains jaunatres, dont il y a deux couches diftindles, le centre ou noyau eft fait de la meme matiere, mais entre le noyau & I'ecorce eft une autre fubftance d'une couleur de blanc-fale, lui- fante & arrangee par cotes, pofees dcbout , de fa9on que la furface large ou le dos de ces cotes regarde I'ecorce, & que la partie mince ou le tran- chant regarde le noyau. M. Morand , en voyant cette pierre , s'eft reflbuvenu qu'en faifant I'ou- verture d'un cadavre , il en avoit trouve une , qui I'avoit furpris par fon brillant , «Sc dont toute la furface exterieure avoit la meme couleur que iy» ABREG^ DES M^MOIRES jma^i^^i^— celle de M. Geofhoy en dedans. Comme il I'a confervee avec foln, il a ete curjeiix de voir li fa compolition interieure ne feroit p.is la meme que A N A T o M I E. ^g[|g qii'of, a remarquee dans la fiibftance de la pierre, dont nous venons Anne'e tjdt, ^^ parler. II I'a coupee en deux, & f.i conjefture s'efl; trouvee jufte. Sa pierre eft entierement faite de cette fubftance , arrangee par cotes , depuis la circonference jufqu'au centre oii clle eft un peu obfcurcie par qiielques rayons de couleur brune ; fans quoi cette pierre , qui eft tranfparente ^ lecorce, le feroit pirefque dans toute fon epaiffeur. Voil^ done trois efpece's de pierres de fiel , differentes par leur compo'- (ition : (avoir , celles qui font faites par couches h. I'ordinaire , celies qui font faites par cotes, comme celle de M. Morand, & celles qui tiennent des deux premieres compofitions, & oii Ton diftingue feparement dcs cou- ches & des cotes , comme celle de M. GeofFroy. On reconnoit que toutes ces pierres font faites de bile , & fi Ton veut expliquer la difference ob- fervee dans leur ftrudlure , on fera oblige de fuppofer que les parties qui entrent dans la compofition de la bile , le decompofent quelquefois •, alors, dit M. Morand, on conclura naturellement que du different affemblage des parties decompofees, il doit refulter des concretions difFcrentes. DIVERSES OBSERVATIONS ANATOMIQUES. I. Sur la Struclure cellulaire du Corps vitrt. Ilift. JLVXr. Demours , dont nous avons parle dans un des articles de I'hiP' toire naturelle , qui eft connu par fon favoir &: fon habilete dans le trai- tement des maladies des yeux, eft venu lire cette annee \ I'academie, trois memoires fur I'anatomie de I'oeil. Dans le premier deuces memoires il demontre anatomiquement la ftruc- ture cellulaire du corps vitre. II prouve dans le fecond , que la cornea tranfparente n'eft point une continuation de la fclerotique , comme on I'a cru jufqu'^ prelent. Le troilieme contient plufieurs experiences , d'oii il fuit que les cellules du corps vitre communiqucnt les unes avec les autres. Nous allons rendre compte de ces trois memoires , & fans nous atta- cher \ I'ordre dans lequel ils ont ete lus ^ I'academie, nous parlerons du troificme a la fuite du premier, comme ne faifant qu'une continuation du meme fujet. L'organe de la vue fur lequel les anatomiftes, les philofophes & les phyficiens femblent s'etre exerces \ I'envi , & qui en eftet n'eft pas moins neceffairc pour I'inftrudlion , la conduite & I'orneme'nt de I'efprit de I'homme, que pour la confervation de fon corps, fournit encore & four- nira fans doute long-temps une ample matiere \ nos recherches & & nos decoavertes, Entre les parties qui compofent cet organe , On fait qu'il -y t DE L'ACAD^MIE ROYALE DES SCIENCES. 151 a trob humeurs ou fubftaiices renfermies dans le globe de Tceil i Tante- ^— — ' « rieure ou la premiere eft Thiimeiir aqueufc ■■, la feconde , improprcment appellee htimciir, puifcju'elle eft plutot folide que fluide, eft la cryftallincj oil llniplemtiit le cryftallin , elpcce de lentillc ou de loupe •, & la troi- Anii^e ty^t. fieme qui tient un milieu entre la foliditif & la fluidite , eft I'luimeur vi- tree. Ce qii'elles ont de coiiiinun eft de laiffer par leur tranfparence im libre paff.ige ^ la lumiere , & par leur configuration d'en rcunir les rayons fur la retiiie & fur la choroide qui tapiffent le fond de I'cEil, & qui conf- tituent I'organe iiiim^diat de la vifion. L'humcur vitree ou le corps vitre , qui fait I'objet du meraoire de M. Dcmours , remplit beaucoup plus des trois quarts de la capacite du globe de I'ceil, & confifte, felon plulieurs modernes, en un amas de cel- lules formees par la membrane hyalo'ide ou tunique vitree > & pleine d'une liqueur femblable "k I'humeur aqueufe ; d'aiitres pretendcnt que c'eft uii tilfu de vaifleaux de differens genres. Quoi qii'il en foit , c'eft un allem- blage de petites membranes ou de petits vailfeaux, & d'une liqueur qui les remplit, ou qui en occupe les interftices , qui doiine ^ I'humeur vitree plus de conllftance que n'en a I'humeur aqueule , & qui la rend moins coulante. M. Demours examine tous les differens fentimens qu'on a eus li-deffus avant que de nous expofer le fien. Riolan eft le premier qui ait dit que la tunique hyalo'ide jettoit dans toute la fubftance de la malfe vitree quantitc d'alongc'mens , defquels de- pendoit I'cfpcce de foliditc qu'on apperccvoit k cette humeur, & que ces alongemens que M. Winflow appelle cellulaires , & qu'il dit etre une con- tinuation de la lame interne de la tunique vitree , etant rompus , I'humeur vitree proprement dite , fe montroit avec toute fa fluidite, & paroilioit femblable h I'humeur aqueufc. ,. ;, Hovius pretend au contraire , & M. Boerhaave femblc etre de ce fenti- itient , que le corps vitre eft forme d'un amas de vaifleaux de different genre renfermes dans la membrane hyalo'ide , & dont I'arrangement eft > dit-il , mcrveilleux. II allure avoir fait cette decouverte \ la faveur d'une nouvelle injedion preparee chymiquement : mais Hovius ne dit point ni en quoi conlifte cette injedion, ni de quelle maniere il s'y eft pris pour en remplir les vaiifeaux du corps vitre. Le premier de ces deux fentimens oppofes n'eft qu'une conjecture dont perfonne n'a donne jufqu'ici aucune preuve fuffifante , & cette conjedure leroit meme detruite par la pretendue decouverte d'Hovius, fi cet autcur meritoit affez de confiance. Le fecond eft une pure imagination : Hovius a beau dire daos fon traite De circulari kumorum motu in oculis , qu'il y a vu par le lecours de fon injedion chymique , que le corps vitre etoit iin amas de nerfs extrememcnt tranfparens, & de vaifleaux nevro-lympha- tiques qui entrent par un cote & Ibrtent par I'autre, fans prefque fouflrir de divillon ; on ne Ten a pas cru fur la parole , non plus que Waldfch- miedt , medccin Allemand , qui avance avec plus de railon , que ce corps eft un compofe de cellules parallepipedes. M. Morgagni , dont I'autorite feroit biea d'un autre poids, a du auffi qu'il etoit vrailerablable que 101 ARREGli DES MEf/iOl'FCES — i^^i— — n rhimieur vitree fut contenue daiis la membrane iiyaioide, ^-peu-pres de la meme maniere que le fuc du raifin eft contenu dans un grain de ce fruit j A N A T o M 1 M. j^^^jj j.g f^ivjnt anatomifte avoue en meme temps que ce n'eft que par Aniue 174!- conjedure qu'on parle des cellules du corps vitre, & qu'il ne connoit nerfoiuie qui les ait demontrees. Or conjeilurer ou foupconner , meme iorfqu'on rencontre la verite, n'eft pas demontrer ni decouvrlr, quoique ce foit toujours une chofe louable & infihiment propre k faire naitre des decouvertes. M. Wiuflow dit en parlant du corps vitre , qu'on en decouvre la ftruc- ture cellulaire en le mettant tremper dans une liqueur aigrelette & lege- rement coagulante •, mais il ne fpecifie pas quelle eft cette liqueur. II I'in- diquera fans doute dans I'ouvrage qu'il doit publier fur les dilledions & les preparations anatomiques. En attendant , M. Demours a fait tremper des corps vitres dans des liqueurs aigries par tous les acides mineraux , & il n'a pas trouve que ce moyen fut fuffifant pour penetrer dans la ftruc- ture de ces corps. Tout ce qu'il a remarque, c'eft que Iorfqu'on les plonge dans une liqueur acide, ils y perdent un peu de leur tranfparence & de- viennent plus fermes. Or ce changemenr n'indique pas plus des cellules, que des vailfeaux , ou toute autre conftru£tion. La meme chofe arrive aii cryftallin & ^ la cornee Iorfqu'on les fait tremper dans des liqueurs acides , & Ton fait cependant que la ftrudlure de ces parties n'eft pas cellulaire. M. Morgagny, aprcs avoir examin^ des corps vitres qui avoient trempe dans de I'eau rendue acide par le melange du jus de citron , ^ dcffein de decouvrir la ftrudture interieure de ces corps , n'a pas ^te plus heureux , & il n'ofe meme affurer qu'il ait vu aucune portion de la membrane hyalo'i'de. Enfin, I'auteur des eflais anatomiques imprimes depuis peu, dit en par- lant du cryftallin , quelques recherches qu'on ait faites fur fa fruBure , on " peut dire quelle n'efi pas mieux d^velopp/e que celle du corps vitri. II y a cependant un moyen bien facile de s'alfurer de la ftrucSure de cette partie •, mais ce qui eft fimple & facile ne fe prefente pas toujours le premier, & il n'eft pas elonnant qu'un tel moyen fut referve aux recher- ches d'un anatomifte qui a tant d'interet ^ connoitre I'organe de la vue. II ne s'agit , dit M. Demours, que dc faire geler un cril : Iorfqu'on ou- vrira en deux cette partie ainfi preparee, on trouvera I'humeur vitree gelee par petits glacons qu'on feparera facilement les uns des autres. Si I'on pri- iente la pointe d'une aiguille ^ catarade ou de tout autre inftrument , ^ la furface des glacons, on foulevera des portions d'une membrane extreme- ment tranfparente , & plus forte qu'on n'auroit ofe le croire. Voili dt]\ une maniere bien llmple de demontrer anatomiquement les produclions ou extenfions de la membrane hyaloide & la ftrudture cellu- laire du corps vitri. Mais M. Demours n'en eft pas reft6 1^. II a examine avec foin la forme & la difpofition des glacons de I'humeur vitree , pour avoir une jufte idee de la forme & de la difpolition des cellules qui les contiennent •, connoiffance , dit-il, tres-utile pour fixer le diagnoftic de certaines maladies des yeux , & fur lefquelles on ne trouve rien dans les DE L'ACADiMIE UOYALE DES SCIENCES, i^j les auteurs •, car il ne perd pas de vue le motif principal de fes re- ■ cherches. . 11 a obferv^ 1°. Que les glacons qui font C\tais vers la furface du corps •'^ *< ^ t o m i f, vitrc, font les plus gros de tons, & que les autres diminuen«>de groffeur Ann^e 1741, ^ mefure qu'ils s'en ^ioignent. 20. Que les plus gros de ccs glacons font apphtis , plus longs que larges, aifez rcgulicrcment difpoles en maniere de rayons autour du centre de la partie pollerieure du cryftallin , & plus epais par leur extriimiti exterieure que par celle qui eft tournee vers le cryf- tallin. 30. Que les gla9ons qui lont lituis h la partie antcrieure du corps vitre, font les moins gros de tous, & paroiflcnt fous la forme de petits polyedres , ou folides tailles i plulieurs faces , dont la figure n'eft point r^guliere , non plus que celle de tous les autres. C'eft d'abord (ur des yeux de boeuf & de mouton que M. Demours fit cette obfervation en 17)4, & il la repcta quelques jours aprcs fur des yeux humains. Toute la difference qu'il rcmarqua dans ces derniers , c'eft que les glacons qui ctoient litues vers la partie anterieure de I'humeur vitr^e, ^toient ^ proportion beaucoup plus petits que dans I'ocil de bosuf , & qu'ils n'excedoient pas la tete d'une tres-petiie epingle : il appercut audi une grande quantite de bullcs d'air d'iiiegale groffeur , renaiiducs parmi les glagons. Ces buUes d'air peuvcnt fervir i demontrer bien ficilement les productions cellulaires de la lame interne de b tunique vitrce. 11 n'y a tiour cela qu'i comprimer la membrane qui redent fair, ou I'ouvrir avec a pointe d'une aiguille ^ catarafle. Pour bien obferver routes ces choles , il faut , avant que d'ouvrir un ail gele, le tenir pendant une demi-heure ou une heure dans un air tem- Pere, ou ne le diffequer que lorfque le degel commence, li Ion vouloit ouvrir pendant qu'il eft fortemcnt gele , on auroit plus de peine k ob- ferver la forme des glacons de I'humeur vitree , parce que la predion dc ces glacons les uns centre les autres itant alors trcs-grande , ils ne fe fepa- rent pas i\ facilement. M. Demours finit ce premier memoire par un aveu fort ordinaire atix vrais favans, c'eft qu'il y auroit encore bien des connoiflances ^ delirer pour perfedtionner ia decouverte , & qu'il ignore fi les cellules du corps Titr^ communiquent ou ne communiquent pas entr'elles-, mais nous allons voir que de nouvelles recherches le mirent bientot en dtat de s'eclaircir fur cet article qui fait le fujet de fon troilieme memoire. On fait que le corps vitrc tire de fes enveloppes laifle echapper la li- queur qu'il contienr , la meme chofe arrive lorfqu'on I'ecrafe entre les doigts', mais la premiere de ces experiences eft equivoque, puilqu'on peut foup^onner que dans ce cas le corps vitre ne lailfe echapper fa liqueur que parce quen le tirant hors du globe de I'eeil, on en a dechiri la mem- brane i & Il la feconde avoit lieu, on en pourroit audi concliure que les grains d'une grappe de railin qu'on auroit ecrafe entre fes mains , & dont- on auroit exprime la liqueur , communiquoient entr'eux. M. Demours ayant regarde fans deffein quelques corps vitres qui lui reftoient dans un vafe, avant que de les jetter comme inutilcs, fut liirpri? Tome IX. Panic Frangoije. Bb 154 ABR]feGfiDESMfiMOIRES ,— ^— — — » de la mollcffe d'lin de ces corps qii'il avoit mis dans une liqueur ncide, . II fe rappella qii'il I'avoit tire la veille d'lin ceil de bccuf H-.ns en detacher ^ ' ^'le cryftallin , & qu'aprcs en avoir ouvert hiperhciellcment la tiiniqiie , il Ann^e t74t. avoit pouflie de I'air dans cette ouverture par le moycn d'lin tiiyau h foiif- fler , pour tacher de foulever quelque portion de la lame externe de. la niembrane hyalo'ide , ce qui lui avoit reuffi quelquefois. Ce corps vitr6 lui parut bcaiicoup plus nnou que ne doivent I'etre ceux qu'on met trem- per dans une liqueur acide fans en ouvrir la tunique, e'en etoit aflez pour faire foupconner que ce qui s'en etoit perdu, pouvoit s'etre echappe par I'ouverture faite ^ la membrane hyalo'ide , & pour fuppofer la communi- cation des cellules du corps vitre; mais ce n'etoit encore 1^ qu'une con- jecture, & quoiqu'elle ne fut pas fans fondement, elle ne fuffifoit pas pour prouver cette communication des cellules entr'elles. II falloit de nou- velles experiences qui ne laiffaflent li-deffiis aucun doute. M. Demours en a done fait un grand norabre , parmi lefquelles nous choifirons celles qui paroiffent les plus decilives. II repeta d'abord celle dont nous venons de . parler , & qui a donne lieu ^ toutes les autres. Pour cet effet il tira avec beaucoup de precaution le corps vitrc d'un tell de boEuf fans en detacher le cryftallin, & il le mit dans une liqueur acide apres avoir ouvert fuperficiellement la tunique vitree ; au bout de 24 heures de maceration il le trouva confiderablement plus mou. En fup- pofant que la membrane ne fiit ouvcrte que dans un endroit , il etoit na- turel de conclure de la molleffe de ce corps, qu'il avoit non-feulemcnt perdu une partie de I'humeur contenue dans fes cellules , mais encore que ce qui s'en ^toit echappe, etoit forti par I'ouverture faite k fa tunique, ce qui fuppofe neceflairement une communication des cellules du corps vitre entr'elles, II ne manquoit h ce raifonnement qne d'etre confirme par des expe- riences dans lefquelles on ne put pas foupconner que le corps vitre fut ouvert en plus d'un endroit-, celle qui fuit eft de nature h ne laiffer li- deffus aucun fujet de doute. M. Demours a tire d'un ocil de bosuf tres- frats, le corps vitre enveloppe de la retine & de la choroide fans en deta- cher le cryftallin , & ayant ouvert dans un feul endroit toures les membra- nes, c'eft-.Vdire , la choroide, la retine & la tunique vitree, il a mis cette mafle dans de I'eau rendue acide par le moyen de quelques gouttes d'huile de vitriol ; apres 24 heures de maceration il a trouve cette mafle dimi- nuee d'environ un fixieme de fon poids, d'oii il conclut que ce qui s'etoit echappd de la liqueur contenue dans fes cellules , etoit forti par I'ouverture faite i fa tunique. Mais comme les cellules qui repondoient ^ I'endroit qui avoit etc ouvert, ne poiivoient pas contenir cette quantite de liqueur, il s'enfuit que les cellules voifines de celles qui avoient ete ouvertes, s'etoient aufll vuidees , cc qui fuppofe neceflairement une communication entr'elles. II reftoit encore une experience ^ faire , c'etoit de voir fi le corps vi- tre contenu dans fes enveloppcs, & mis dans I'eau commune fans en ou- vrir la tunique , diminueroit de poids , & i'expericnce a fait voir que Ic poids de cc corps demeuroit le meme. DE LACADJ^MIE ROYALE DES SCIENCES. 197 Dans toute-s les experiences que nous venons de rapporter, r.uitcur ai toujours prefcrc des yeux d'animaux aiix yeux humains ; car ccs derniers . font ordinairemcnt trop flctris lorfqu'ils parvienncnt entre les mains des '^ t o m i e. anatomiftes, & ils font par-li peu propres ^ des experiences oii il faut que Annie I74t, le corps vitre n'ait rien , on prefque ricn perdu de fon poids. Nous palFons, pour abrcger, plulleurs obfervations acceffoires qui n'ont aucun rapport 'k la communication des cellules du corps vitrc entr'cUcsi niais il y en a une qui merite quelque attention. L'on fait que le corps vitre plonge dans unc liqueur acidc y perd quel- que choie de fa tranfparence. M. Demours a toujours remarque que I'o- pacite qui furvenoit ^ ce corps ctoit plus grande i la partie antcrieure, & ilir-tout vers le centre du chaton qui revolt le cryftailin , que dans tout le refte de la malfe. Pour rcndre railbn de ce fait particulier , il faut fe rappeller ce que nous avons dit ci-dcffus d.Vns I'extrait du premier memoire , favoir , que les cellules du corps vitre font beaucoup plus petites vers la partie antd- rieure de la maffe vitree, & fur-tout aux environs du chaton, que par- tout ailleurs. Cela pofc il n'eft pas difficile de comprendre pourquoi , quand on plonge le corps vitre dans une liqueur propre ^ lui fairc perdre la tranfparence, I'opacite qui lui furvient, eft toujours plus grande vers la partie antericure de ce corps. Les cellules y etant beaucoup plus petites , les portions membraneufes qui fonnent ces cellules y font en plus grand nombre, & comme c'eft la tunique vitree qui perd fa tranlparence par I'attion de la liqueur acide , I'endroit ou cette membrane eft plus multi-« pliee & oii ellc prefente plus de furfaces , doit reflechir une plus grande quantitc dd rayons de lumicre, & paroitre par confequent plus opaque. I I. Obfervations fur la Cornfe. Vol CI maintenant un precis du fccond memoire de M. Demours fur ti ftrudture de I'ceil. Les anatomiftes donnent le nora general de comec ou de fclerotique, • k cettc membrane dure & cpaiffe qui forme la coque de I'oeil , & qui fert d'envcloppe commune k toutes les parties qui concourent k la formation de cct organe •, mais ils la diftinguent en deux portions inegales , I'une dclquellcs , & qui eft la plus petite de beaucoup , ils nomnient corncc tranfparente. C'cft I'antcrieure , & ccUe \ travers laquelle on voit la pru- nclle & I'iris. lis appcllent I'autre cornee opaque , & ils s'accordent tous \ regarder la cornee tranfparente comme une continuation de celle-ci. Ce- pcndant pour plus de brievete & de clarte, nous ne qualifierons du nora de cornee que la premiere, favoir, la cornee tranfparente, & nous refcr- verons celui de fclerotique pour la feconde. Frappc des difierences fenfibles qu'on appercoit entre ccs deux mem- branes , M. Demours s'eft toujours defie du fciUimeut generalement recu Bb ij 195 ABR^G^DESMEMOIRES ■' fur ce fiijet-, & il penche h croire que M. Winflow a eu le nieme doutp; A N A T o M 1 E. loili^u'il s'eft exprimd ainfi dans Con expofition anatomique, la corn^e tranf- parente paroit (tre une continuation de la fcUrotique ou cornie opaque, /n 'lie iy4^- quoique d'un tiffii different. La cornee en effet eft audi diaphane que le cryftal le plus pur, & ne recoit que des vaiffeaux lyraphatiques : la fclerotique au contraire eft opa- que & parfem^e de vaiffeaux fanguins. La cornee peut fe divifer en plufieurs lames , il n'en eft pas de meme de la fclerotique •, & ce qui fait encore une difference conliderable , la premiere fe gonfle beaucoup & promptement par la maceration, ce qui n'arrive point ^ la feconde. La cornee dans i'homme & dans la plupart des animaux eft un fcgment de fphere ou approchant, dont ie diaraetre eft plus petit que le diametre de la fclerotique. Dans les oifeaux la fclerotique eft formee par raffemblage de plufieurs lames offeufes, longues, etroitcs, difpoftes felon la diredion de I'axe dii globe , & artiftcment ajaft^es les unes ^ cote des autres : elle eft cartillagi- neufe dans les gros poiflbns; la cornde au contraire eft raembraneufe , & ne fauroit etre une continuation de ces lames offeufes ou de ce dur cartilage. Ennn , on peut ajouter \ tous ces dificrens cara(5Veres , que fi la cornie n'etoit que la fclerotique meme devenue tranfparente ^ la p.irtie anterieure du globe de I'oeil, I'endroit qui en fepare la partie opaque de la partie dia- phane fouffriroit plus de variation qu'on n'en obferve entre ces membra- nes; c'eft-^-dire, que la cornee n'auroit pas aufli conftamment 'k peu de chofe pres le meme diametre dans tous les fujets de meme efpece. D'ail- leurs quelle fcroit la caufe mechanique qui rendroit toujours aufli tranf- parente que le cryftal une portion r^guliere & determince de la fcHroii- que , qui eft une membrane opaqus ? Ces raifons ont toujours fait douter M. Demours que ces deux parties fuflent une continuation I'une de I'autre, & diverfes experiences qu'il a faites. Tout enfin convaincu que la cornee & la fclerotique font deux membranes diftindles , mais fortement unies enfemble par un tiffu fibreux trcs fin & tres-ferri. II a fait macirer pendant long temps des yeux d'hommes & de difterens animaux dans I'eau commune, oii il les a lailfes jufqu'i ce qu'ils commen- caffcnt ^ fe corrompre ; & les ayant enfuite lufpendues ^ un fil, illes a plongds pendant un demi-quart d'hcure dans I'eau bouillante. Par le moyen de cette preparation , il a fepare fans peine & ave c le manche du fcalpel , la cornde d'avec la fclerotique ; & il a appercu le tiffu fibreux qui unit ces deux membranes. II a remarque auffi que le bifeau que forme la Iclcro- tique \ I'endroit ou elle s'lmit 4 la cornee, fe trouve apres cette prepara- tion creufe en gouttiere. Le racorniffcmcnt furvenu \ cette membrane par la chaleur de I'eau bouillante, produit cette difference. Du refte M. Demours remarque fort bien que la cornee ne reprtifente point ^ la rigueur un fcgment de fphere, com:r:e on le dit coramunement. DE L'ACADEMIE ROYALE DES SCIENCES. 197 mais qu'elle fait portion d'lin fphefoide un pew alongt , ce qui eft > s dit il, line fiiite ncceffaire de la difpofition dcs mufcles droits qui com- j\ ^ ^ ^ o m i i. prjment Tail felon la dire(ftion de fon axe , & qui Ic tirent en ineme temps vers le fond de Torbite , conformcment aux obfervations 8c an fen- Annte i~4i- timent dc feu M. Petit niidccin , qui avoit besucoup travaillc fur la figure & fur les dimenfions des parties de I'ajil. Le favant P. Schcincr a connu, il y a plus d'un (ieclc, que la cornie n'ctoit pas fphWque; raais il la corit- pare au fommet d'un fphiroide parabolique ou hyperbolique. M. Demours ajoiite encore ici fes reflexions fur Ics lumicres qu'on pent tircr de tous ces faits pour le traitement des maladies des yeux , mais c'eft un detail qu'il ne fait que toucher fuccindement , en attendant que les exemples lui en apprcnncnt davantage. I I I. Sur les Noy/s, Dii'UiS que Beclcer, & apres lui M". Littre (a) & Senac, (^ ; ont fjit Voir que ce n'eft point k force d'avaler de I'eau que les noyes periffent , il n'eft plus qucftion que de favoir comment ils lent fuffoques. Beclcer veut que ce foit par la rarefiiflion de I'air dans le poumon i M. Littre par le defaut d'air feulement, ne comptant pour rien le peu d'eau ecumcule qu'on y trouve , puifque felon lui les piilir.oniques , les aflhmatiques & les hydropiques cnt le poumon bien plus embarrafie qu'il ne pent I'etre par cettc petite quantite de liqueur, & ne laiifeiit pas de vivre. M. Senac croit aiifn que c'eft par le defaut d'air & de refpiration que les noyes mcu- rent ; mais il congoit en mcme teirps que la trachce-artcre qui ne peut recevolr que de I'air, s'irrite ^ I'approche de I'eau, entre en convulnon , & caufe ^ I'animal qiii fe noie des ruptures de vaifleaux pulmonaires, comme on voit qu'il arrive aux paticns qui meurent de la queftion telle qu'on la donne ^ Paris. Le fait une fois conftate que les noyes ne piriffent point par I'eau ,qu'ils avalent , mais par la futiocation , il feroit egalement curicux & utile de favoir en combien de temps un homme qui fe noie, pcut perdre la vie. C'eft fur quoi M. Petit bachclicr en medecine, fi!s de M. Petit mede- cin , dont on trouvera I'cloge h la fin de cette hiftoire, eft venu lire fes experiences & un mtmoire k I'academie. II a retenu fous I'enu des animaux de diffjrente efpece, & meme des infedtes k I'imitation de M. de Reau- mur, & il en a trouve de ccs derniers, tels que les hannetons, qui font revenus aprcs une pareille epreuve de 40 h 50 hcures. II n'en eft pas de meme ^ beaucoup pres des oileaux 8c des quadnipe- de?. Les pouli's, les poulets , les pigeons, les moineaux mis en epreuve, y perdent la vie en n.oins de } ou 4 minutes. Les canards y ont vccu (j) Voycz I'Hiftoire de 1719, Tome IV. de la CoHeftion Acade'mique, Panic Franj. (*) Vojei I'HifK'ire de 1715 , Tome V. de ia CoUeiSion Acad^miqi-.e, Par:ic Franj. i<)8 ABREGE DES MEMOFRES — —— — jufqu'^ 8 Oil 10 minutes, & m5me Jufqii'^ iin quart-d'Iieiue , ce qui n'eft pas difficile i comprendre , quand on fait que leur trachee-artcie i I'en- A N A T o M IE. JjqJj ^^^^ pjig ^g divife en bronches, devient offeufe, & y forme une po- Annce 1741. '^'^^ remplie d'air. Les quadriipedes tels que les chiens & les ciiats ont ex- pire en deux minutes, ou tout au plus tard en z {. De ces experiences rcitcrees & faites avec ioin, & de la conformity qu'il y a des parties de la refpiration dans I'homme & dins les quadrupe- des, M. Petit fe croit en droit de foupconner qui la rigueur I'hommc ne vivroit pas plus long-temps fous I'eau que les animaux dont nous venons de parler , s'il y etoit retenu de la meme maniere. Mais s'enfuit-il deli qu'il foit inutile de fecourir les noyes, de les letirer de I'eau lorfqu'ils y ont ete pludcurs minutes ou meme plufieurs heures : C'eft ce que M. Petit n'a garde de conclure, & voici les raifons qu'il en donne. I °. Les hommes qui fe noient fe donnent toujours machinalement de« mouvemens qui les font revenir i la furface de I'eau , ou ils refpirent par rcprifes, & oii ils fe remettent pour des inftans i-peu-prcs dans I'etat na- ture!. M. Petit a imite ces refpirations momcntanees, & en a fait I'eSxi fur des chiens qu'il retenoit fous I'eau pendant une minute, & qu'il laif- foit alternativement revenir au-delfus & s'y debattre. II en a trouve qui vivoient encore fort bien aprcs 10 k li minutes qu'ils avoient cte ainfi plonges & replonges. i°. On fait que les plongeurs employes i la peche des peries, reftent quelquefois jufqu'i 1 5 minutes & plus au fond de la mer fans perdre la vie, & que c'eft vraifemblablement parce qu'ils font, avant de plonger, une grande infpiration , & qu'ils retiennent enfuite cet air aufli long-temps qii il leur eft poffible ■, ce qui leur facilite le paflage du farrg du ventri- cule droit au ventriaile gauche du coeur , en quoi confifte principalement la mechanique de la refpiration. Or, ne peut-il pas fe fairc que les noyes en revenaiit i la furface de I'eau, & en retenant ainii de I'air dans leur poitrine , la dilatent par ce moyen , & y facilitent de meme la circulation du fing? 5°. Enfin il y a des aldultes dans lefquels le trou ovale ou botal, qui fupplee i la refpiration dans le foetus, & le canal de communication font encore ouverts. On lit dans I'hiftoire de I'academie de 1700 & 1701, que M. Littre avoit trouve le trou ovale ouvert dans deux lujets , dont I'un etoit ags de 20 i zi ans , & I'autre de 40. En 1714 M. Petit mc- decin lit voir h I'academie le coeur d'un homme age de 40 ^ 4^ ans , qui avoit dc meme le trou ovale & le canal arteriel ouverts. C'eft apparem- ment le cas oii fe trouvoit ce Sicilien nomme Colas , qui au rapport de Cardan , pouvoit refter trots ou quatre heures fous I'eau , le meme que Jovien Pontanus avoit celebre avant lui dans fon pocme intitule Uranie. Ces remarques font autant de motifs de fecourir promptement les noyes. Pes faits tout recens & qu'on ne pent revoqucr en doute, nous appren- ncnt qu'on en a fauve plufieurs qui avoient etc des heures entieres dans I'eau. Eh ! que ne doit- on point tenter en leur favour aprcs la fimeufe thefc da M. Winflow fur I'incertitudc des fignes de la mort! Ai'lli M. Petit DE L'ACADfiMIE ROYALE DES SCIENCES. 15,9 »*a-t-il pas oublii: d'ajoutcr dans foil mctuoire tout cc que la mcdccine i— — — »»■ pouvoit pratiquer dc plus efticice fur les vrais ou pritendiis cadavres des . noycs, pour Ics rappeller h la' vie. Mais nons nous difpenferons de rap- ' ^ ■* t o w i e. porter ici cfs prcccptes, parce qu'ils lout i-peu-prcs les mcmes que ccux Ann^< ^74'. que I'acadcniie fit iniprimcr fur ce Tujet I'annee dernicre 1-40, dans uii avis particulicr que M. le comte de Maurepas niiniftre de la marine, M. d'Argenlbn intcndant de P.iris, & M. de Marville lieuteaint de police, fircnt rep.vidrc dnns tous Ie5 lieux de leurs diftrids. Ce mcme avis fera mis encore h la fuite d'une traduiflion francoife de la tliefe de M. Winrtow, acconip.-ignee de lavnntes & utiles additions que M. Brvihier, do.»j [.«... .~ — , — d'aprcs rhypotheCe , & felon les regies prefcrltes par les geomctres pour determiner le degre de poflibilite dans les evenemens contingens. Celui- ci ne peut arriver par le fyfteme de la confu(ion des germes fans qu'il n'y ait en meme temps dans le fein de la mere au moins deux ger- mes developpes ou deux embryons tout prets i croitre •, & autant que le cas eft rare, autant faut-il diminuer le degre d'attente pour le phenomene en queftion. La hngularite des accidens qui vont detruire I'un des deux jumeaux fans attaquer la vie de I'autre , doit audi entrer dans le calcul. De plus , nous n'avons jufqu'ici confidere & calcule la difficuite que fur les hafards de quatre doigts quelconques de I'un des foetus , qui vont fe placer & recevoir une nouvelle vie lur les mains ou fur les pieds quel- conques de I'autre foetus-, mais par I'infpedion du fait, il faut que chaque doigt tel de I'un fe foit alle articuler fur chaque main telle, droite ou gauche, de I'autre, & de meme k I'egard de chaque pied; puifqu'il y a tel doigt de la main droite , par exemple, qui ne conviendroit point I la gauche & encore moins i un pied. 11 paroit ici que c'eft le petit doigt de chacune de ces parties qui fait le doigt furnumeraire , ce qui donne 6z5 cas, parmi lefquels il n'y en a qu'un feul qui foit favorable & qui refulte du concours de chacun des quatre exprime par i , en fuppofant , comme nous devons faire, que le foetus detruitavoit cinq doigts i chaque main & \ chaque pied. Mais chacun de fes quatre petits doigts pouvoi: ctre portd k telle main & a tel pied du fostus vivant , oii il auroit pro- duit une difformite qu'on n'y a point obfervee \ Sc quatre chofes jettees au hafard donnent vingt-quatre changemens d'ordre differens •, c'eft done encore un element k introduire dans la compofition generale du cas for- tuit. Nous pouvons faire grace des combinaifons dont les os de meta- carpe & de metatarfe de ces doigts avcc tous leurs accompagnemens font fufceptibles. Done il faudra multiplier par I'expreffion numerique de tous ces elemens & de tous ces produits , la difficuite repiefentee ci-deflus par quatre-vingts zeros precedes de I'unite, & par confequent 11 faudra, comme on le voit affez, y en ajouter des centaines. Si des prefomptions de cette efpece centre le fyfteme propofe ne font pas une certitude morale, je ne fais ce qu'on pourra qualifier de ce nom. Voili cependant ce qu'on fuppofe , & les prodiges qu'il faut devorer , lorfqu'on dit du bout des levres que la formation des monftres peut etre expliquee par la confullon des germes. Repondra-t-on que I'enfant I vingt-quatre doigts n'etoit pas un monf- tre, puifqu'il n'avoit rien de diffbrme ni de choquant ? autre diftinftion peu philofophique , & fur laquelle nous ne ferons que renvoyer i ce que nous avons deji dit en pareille occafion fur le foldat des invalides, i qui DE L"ACADfilvIIE ROYALE DES SCIENCES. ic> Ton trouva toutes Ics parties internes (ituees k contre-fens. Ce fcra done — —— — Uii germe bien extraordinaire, line conformation dilTerente de cclle de . I'efpece commune , & dKferente d'origine. Mais I'enfant i deux tctcs que ^ n a t o m i e. M. Lemcry examina dans fon premier memoire , etoit certainement un yirui^e 1747. nionftre. Voyons ce qu'il faut oppoier de halards , & de hafards compli- ques, qui en renfcrmcnt cent autres , pour le former, pour faire que deux poitrines qui s ecrafent ou qui fe compriment I'une contrc I'autre , vicnncnt ^ nc faire qu'une poitrine enticre & parfaite ; que de deux cccurs il n'en demeure qu'un qui donne le mouvement & la vie ^ cettc poitrine par tous les vailleaux , tous les nerfs , tons les ligamcns & toutes les membranes qui doivent s'y rapporter-, que les debris adjacens de tout ce qui vient de fe detruire , ne nuifent ni all mouvement, ni i la circula- tion des liqueurs dans tout ce qui eft confervi •, qu'une feconde fuite de vertcbrcs, une feconde epinc du dos s'clcve du milieu des lombes ^ cote de celle du fa:tus epargnd , & que les deux partant fymmetriquement de ce point commun , comme deux branches qui pouflent d'un meme tronc, aillent chacune foutenir une tete vivante bien organilee fur un corps unique ^ tous autres egards ; car c'eft li le monftre de M. Lemcry. Comment la tete & I'cpine du dos du jumeau dont le refte a peri, ont-elles pu fe de- barrailcr de leur poitrine & sailer tranfplanter au-deffus , & dans une autre poitrine fans la faire perir ou fans pair clles memes? Si Ton fe donne la peine d'appiiquer ici la methode & le calcul dont nous venons de don- ner un cxemple fur I'enfant ^ vingt-quatre doigts , j'ofe affurer qu'oa n'y troHvera pas de moindres difficultcs. Mais qu'oppofe-t-on enfin ^ des diflicultes ii cnormes? des raifons d'ani- logie & de convenance. On ne concolt pas que I'Auteur de la na:urc , fi lage , (i regulier & fi conftant dans fes produftions , ait voulu direde- ment produire des monftres , en creant des germcs monftrueux •, comme fi nous etions dans le confeil de I'Auteur de la nature, & (i le monde entier ne nous oftroit pas mille autres irregularites plus importantes , i en juger d'apres des vues auffi bornees que les notres. Nous cherchons la volonte du Createur dans nos lumieres, tandis quelle fe manifefte d.ms I'execution , & au-licu d'attribuer la formation de ces etres merveilleux , malgre le nom odicux de monftres que nous leur avons impofe , ^ une Sageffe infinie qui nous c.iclie fes motifs , nous aimons mieux les regarder comme I'ouvrage du halard ou d'une vertu formatrice aveugle. Et li Ton infifte que le Createur ne produit des monftres que pour latisfaire ^ la fimplicite des loix de la nature dont ils font une fuite neccflaire , nous repondrons que les loix de la nature ne font point difierentes des volontcs du Createur. On objefte encore que la plupart des monftres vivent pen , & qu'ils n'engendrent point. Mais ces fails font tout au moins fujcts k mille excep- tions , & leur examen nous conduiroit bien .lu-deli des bornes que nous nous fommcs prefcrites ; fans compter que la difficulte qui en peut re- fulter eft d'un ordre tout ditterent de celle que nous avons expofie contre la formation des monftres par cas fortuit. Le peu de foin qu'on prcad. Tome IX. Panic Fran^oife. Dd A N A T O M 1 E. lie ABR^Gl^ DES MEMOIRES jcommuncment des enfms moiidriieiix , aprcs leur naiffiiice, line mauvaife honte & nos prejuges ne leur couteiit que trop fouvcnt la vie. AufR cft-il ' plus ordinaire de trouvcr dans Ics forets & parmi Ics brutes , des monllres Annie z^^?. vivans , \ deux tetes ou avec d'autres membres doubles, que parmi les hommes. Mais npres tout, qu'importe ii la nature fi riche & fi feconde en individus merveillcufcmcnt organifes, que la vie de quelqucs-uns foit II courte ? elle en produit \ tous les inftans des milliers qui n'ont ^ vivre qu'un jour , & il en perit chaque Jour d'autres milliers ious nos pas , ou qui n'etoient nes que pour fervir de pature \ leurs femblables. Quant \ la generation ou \ la propagation de refpece \ legard des monftres , ■ c'eft encore une grande queftion , & fur laquelle nous manquons d'ex- periences. Les infedes qu'on a decouverts qui fe reprodulfent dans chacune de leurs parties apres avoir ete coupes par niorceaux , les plantes qui fe nuil- tiplient par boutures , fi analogues par-li & par tant d'autres endroits aux infedles, & fur-tout les fruits doubles ou monftrucux & les plantes irregulieres , ont paru \ quelques perfonnes fournir des indudions favo- rables \ la produftion des monftres par accident , tnduftions vagues , & qui la plupart rouient fur des effets dont la caufe eft encore tres-oblcure. II ne faut qu'un leger examen pour en difliper Tillufion. Car ou ces infeftes & ces plantes naiffent de germes deji tout formes felon I'ordre commun , & contenus dans chacune des parties qui repro- dulfent I'infeite ou la plante , ou il fe forme dans ces parties de nou- veaux germes , ou il nait de nouveaux infedes & de nouvelles plin- tcs fans Tintervention des germes 3 L'alternative ne fouftre point d'excep- tion •, il faut necellaircment que I'une de ces trois caufes ait lieu , ou que deux d'entr'elles ou que toutes les trois concourent \ la formation du monftre. Le premier cas n'influe en rien fur la queftion , puifqu'il ne porta que fur des produdlions dues ^ des germes anterieurs dont la neceflite eft re- conime de part & d'autre. Le fecond & le troilieme fuppofent ce qui eft dgalcment rejctti dans les deux fyftemes , favoir, la formation accidentelle des germes, ou de I'animai & de la plante fans germe preexiftant : & \ I'egard de la complication ou du concours de ces caufes, deux \ deux, trois \ trois, & de quelque maniere qu'on les prenne, on ne peut I'ad- niettre , parce qu'il y en aura toujours au moins une des deux demieres qui font incompatibles avec I'hypothefe. Les vegetations irregulieres ne font fi communes, & les fruits monf- trucux , qu'on peut meme fe procurer par art , ne font fi frequens , qui caufe de la multitude infinie de germes que renfermcnt toutes les parties des plantes, & par la facilite avec laquelle on peut faire couler & circuler le fuc nourricier de I'une dans les vaitfeaux de I'autre. Le d^veloppement de quelques-uns de ces germes qui fe trouvent accouples par leurs cap- fules ou par leurs parenchymes, s'acheve aifement fans que leur organifa- tion en foit detruite , & il en r^fulte un fruit monftrucux. La meme chofe arrive, quoique plus rarcmcnt, \ certains fa-tus doubles qui ne tieunent I DE L'ACADl^MIE ROYALE DES SCIENCES, tu Tun ;» I'autrc que par lenrs tegumcns •, mais deux tetes fur uii fcul tronc , T— .. , - deux caurs dans inie feiilc poltrine ou dans un fciil pericarde , font '^'^^ A n a x o m i E. monftres d'line toute autre clpecc, & qui exigent viliblcment unc flrud'.ire preexiftante qui n'cd: ni moins determince , ni moias admirable que celle An/ufe iJ43- des animaux les plus parfaits. Dans tous les monflres qui out etc exami- nes, difoit M. Duverney, & fans exception , il y a toujours eu une ftruc- turc interne audi extraordinaire que leur figure extcrieure Texigcoit, & paroiffoit diffcrente de celle des autres animaux de la mcme efpece. Qu'aprcs cela les plantes aicnt aufll leurs monftres d'origine , il n'y aura rien que de trcs conformc ^ I'ordre general dc la nature. On ne fauroit done tirer aucun avantage de tous ces exemples, ni de toutes ees convenances en fiveur du fyfteme des produftions monftrueufes ar le melange & par le dcfordre des germes dans le fein de la mere : es difEcultes qu'on vient de voir ne balanceront point cellcs que nous y avons oppofiies d'aprcs les idees de mechanique les plus claires & les plus exadtes. Si nous nous montrons Ik-deffus un peu plus d^cififs que M. Window, notre guide & notre maitre, ce n'eft pas cependant que nous nous flat- tions d'avoir mis la queftion hors de doutc. Nous reconnoiffons que c'eft ici une efpece d'enchere oii il ne s'agit que de donner la preference ^ celui des deux partis qui all6guera de meilleures raifons, c'eft-i-dire , plus vrai- femblables -, car de preuve fans replique , ou de demonftration abfolue , il ne fauroit y en avoir. C'eft h le fort de toutes les queftions de phyfique qu'on ne peut foumettre 'k des experiences riglees , & qu'on ne fauroit eclaircir du flambeau de la geometric •, mais il eft toujours utile de les difcuter , & s'il eft pofRble , d'en apprecier I'incertitude : les efprits en feront d'autant plus difpofes ^ recevoir les nouvelles connoiflances que les temps peuvent y amener. M. Window nous fait efperer , en finiflant fon m^moire, qu'il nous donnera bientot les obfervations particulicres qu'il avoit promifes fur les effets attribues k I'imagination des meres enceintes. Ce fera de quoi jetter un nouvcau Jour fur la queftion des monftres, malgre la refolution qu'il dit avoir prife de n'en plus parler. Nous ofons aflurer M. Winflow que le public ne lui tiendra pas rigueur fur ce dernier engagement. Dd 9 Ill ABREGE DES MEMOIRES A N A T O M 1 E. Annie i/^?. L S U R L E STRABISME. Hilt. _Lj e ftrabifme ou le regard louche confifte dans cette difpofition vicieufc de I'organe de la viie, qui fait que quand !'un des deux yeux fe dirige vers I'objet, I'autre s'en ecarte & fe dirige fenllblement vers un autre point. Les auteurs de niedecine & de phylique ont im.igine ditferentes caufes de cette difpofition , & ils en ont donnc difterentcs explications en confequence de leurs hypothefes. M. de BufFon , apres avoir montre I'in- fuftilance de leurs idees llir ce fujet, prouve d'apics un grand nombre d'obfervations , que la caufe ordinaire du ftrabifme eft Tintgalite de force dans les deux yeux. Lorfque I'un des deux yeux fe trouve etre beaucoup plus foible que I'autre , on ecarte cet osil foible de I'objet qu'on veut re- garder , ou Ton ne fait pas Teffort neceffaire pour I'y diriger , & Ton ne fe fert que de I'ceil le plus fort. C'efl: fans doute par un femblable fenti- nient de force dans une partie plus que dans I'autre , que le commun des honimes fe iert plus volontiers d'unc main que de I'autre , & d'ordinaire plus aifement de la droite que de la gauche, foit par une fuite de I'edu- cation , foit parce qu'en general la difpolition interieure y eft plus favora- ble; car I'education meme & I'ufage iminemorlal des nations, h cet egardj doit avoir une caufe qui n'eft pas vraifcmblablenient le hafard, & encore moins une convention exprefle ou tacite entre des peuples qui different ii fort de lieux , de temps & de coutumes. Quoi qu'il en foit , il ne re- fulte deli aucune diiformite , au-lieu que le regard louche gate les plus beaux vifagcs. M. de Buflon determine le degre d'inegalite qui le produit, & les cas ou Ton pent efperer de diminuer ce defaut , & meme de le cor- riger entieiement. Le moyen en eft fort fimple, & a I'avantage d'avoir reuffi piulieurs fois. II ne s'agit que de couvrir pendant quelques jours le bon dil avec un bandeau d'etofte noire. C'eft i peu-pres comme fi on lioit le bras gauche ^ un enfant qui , de naillance ou par education , fe trouveroit etre gauche •, car dans le cas d'une inegalite oii la plus grande force n'eft pas infurmontable ni la foiblefle fans relTource , I'art, la con- trainte, & enfin I'habitude viennent h bout de modifier, de changer meme la nature ou une autre habitude , de maniere que le fang & les efprits fe portent enfuite vers la partie la plus foible avec plus de facilite qii'ils n'auroient fait par un premier fentiment. M. de Button a gueri par cette pratique un grand nombre d'enfans & quelques adultes. Nous renvoyons au inemoire ou I'on en lira avec pl.iifir la theorie & les details , tous fondes fur des oblervations & des indudions dclicates, qui perdroient beaucoup i etre leparees de leurs preuves. DE L'ACADEMIE ROYALE DES SCIENCES. iij A N A T O M 1 E. SUR LA FORMATION DES OS, Annie 1^43' E T sua LA REUNIO^f DE LEURS FRACTURES JLiES recherches & les decouvcrtes de M, du Hamel fur la formation lijft. & I'accroiffement des os, fur la caufe & fur la guerifon dc- kurs maladies, & principaiement fur la reunion de leurs fraftiues, mcritoient d'etre por- tees audi loin qu'elles pouvoicnt letre par les nouvelles obfervations & les nouvelles remarques dont il les a accompagnees. Nous avons donnd une idee de fa theorie fur ce fujct dans I'hifloire de 17+1. (^2) II avoit commence de mediter fur cette iniporrante matiere des I'annce 1759, ^ Toccadon des os teints en rouge dans les animaux qui avoient ^te nourris d'alimcns ou Ton avoit mele de la racine de garencej nous en avons rendu compte. {b) On a vu en 1741 que la generation & la ftrudure des deux efpeces de corps vivans , les plantes & les animaux, & en particulier la reunion de leurs parties par le cal , fe refTembloient extremement •, c'eft ce qui eft beaucoup plus approfondi dans les nouveaux memoires de M. du Hamel. II fe propofe cnfuite d'etablir fur de nouvelles prcuves , que les os croif- fcnt en groffeur par I'addition des couches offeufes qui tireiit leur origine du periofte , comme le corps ligneux des arbres croit en groffeur par I'ad- dition des couches ligneules qui fe forment dans I'ecorce. L'accroiflement des os en longueur eft traite fort au long. II s'opere aufli par un mechanifme tres-approchant de celui que fuit la nature pour Talongement du corps ligneux dans les bourgeons des arbres. D'habiles chirurgtens avoient demande ^ M. du Hamel I'explication de quantite d'operations de chirurgie & d'obfervations anatomiques qui leur paroilToient inexplicables par fes principes ; il y fatisfait , & c'eft par cin- quante & une obfervations toutes aum detaillies qu'elles doivent letre , & auxquellcs ii a Joint des reflexions pour montrer qu'elles s'accordent parfaitement avec la theorie. Enfin M. du Hamel donne dans un m^moire particulier le detail d'une nialadic Iniguliere , pendant laquclle une tille a perdu i differentes fois prefque tout Yhumerus , cet os qui s'ctend depuis I'epaule Jufqu'au coude , fans que fon bras fe foit raccourci , ni quelle en ait ^te aucunement cftropice. Nous allons donner le refumi de ce nombre immenfe d'obfervations, C'eft M. du Hamel qui I'a fait lui-meme. (a) Voyez ci-defTus. (.i) Tome VUI, Colleftion Acad(!mique, Pariie Franjoift. ii4 ABR)5g£ des m^moires ■"■"— ■■■^■— Pour fe former une idee dii periofle des os & de 1 ecorce des arbres i . il f.uit concevoir des fibres extremement fines, roiilees en fpirales, & raf- ' femblees par faifceaux qui font difpofis en forme de refeau •, voili la char- ■ Annie 1743- p<^nte des lames du p6rio(le ou de I'ecorce, & li Ton imagine plufieurs de ces plans reticiilaires pofes les uns fur les autres , & dont les mailles font rempiies par une fubftance veficulaire ou parenchymateufe , on aura une idee generate de la texture de ces enveloppes. L'ecorce recouvre le tronc, toutes les branches & tous les bourgeons des arbres dont racme I'extremiti .eft toute ecorce. Le periofte recouvre tous les ligamens, tous les tendons & tous les 01 dont les extremitds dans les foetus font tout periofte. Les bourgeons des arbres commencent par n'etre que de l'ecorce. Les OS commencent par n'etre que du periofte , car ]e regarde les carti- lages comme un periofte fort epais , & effediivement le periofte tumcfic fur les fra(3:ures reffemble bcaucoup ^ un cartilage. L'alongement des bourgeons & des os eft d'autant plus confidcrablc qu'ils font plus mous que les os, approchans plus de I'etat de periofte & les bourgeons de I'etat d'ecorce 5 l'alongement diminue ^ proportion que I'endurciffcment fait du progres, & il ceffc quand rendurciifement eft par- fait ; quand I'interieur d'un bourgeon eft bien convert! en bois , il ne s'alonge plus , & de meme I'os ceffe de s'alonger quand U a acquis prefque toute /a durete. Les OS croiffent done en longueur comme les bourgeons des arbres •, aprcs les experiences que j'ai rapportces dans ce memoire , je ne crois pas qu'on fefle difEculte de me I'accorder , & c'cft ce que je m'etois propofe de prouver. Mais outre cela les principes que je viens de rapporter, ctant une fois bien etablis , j'ai cru pouvoir rendre raifon de toutes les obfervations qu'on trouve dans les meilleurs livres d'anatomie au fujet des os , & pouvoir expliquer la formation des epiphyfes, pourquoi elles ne font point adherentes aux os dans les enfans , pourquoi elles ne font plus qu'une piece avec les os dans les vieillards , comment fe forme la fubftance fpon- gieufe & la fubftance corticale des os , pourquoi le cartilage intermediairc qui eft fi confiderable dans les enfans , s'efFace avec I'age , pourquoi la mbftance fpongieufe des os eft continue avec celle des epiphyfes dans les animaux ages, pourquoi la fubftance corticale eft bien plus epaiffe ^ la partie moyenne des os longs que vers les extremites, pourqUoi on apper- 9oit des eminences plus confldcrables aux os des vieillards qui ceux de« enfans, comment les ligamens & les tendons s'inferent dans les os-, moyen- nant mes obfervations toutes ces chofes qui auparavant paroiffoient des myftercs prefque impenetrables , s'expliquent avec facilite. J'ai paffe de I'examen des os fains i celui des os malades , & connoif* fant une fois que le periofte , les tendons & les ligamens qui ont re^u une contufion , une violente extenfion , une irritation confiderable , ou qui fe font enflammes par des caufes internes , tendent i I'oflification , il m'eft tres-aife d'expliquer la formation de prefque toutes les cnchylofes & Ie» exoftofes, de mcme que la reunion des fradurcs. DE L'ACADfiMIE ROYALE DES SCIENCES. 2,5 L'extenfion da tifiii vcficulaire dans Ics nlaies des arbrcs qui forme h -»■'*' leur cxt^rieur dcs loupes ligiuufes , m'a encore facilite I'explication de a quelques cnchylofes Sc dcs cicatrices des os. n A t o m i g. Sitot que Je I'ais qu'un os continue de s'etendre dans la partie ou il eft Anne'e 1743. encore tendjJJ > fitot que je fais qui! y n des caufes particulieres qui peu- vent ralentir I'endurciircmcnt dcs os feulcment dans certains endroits , & en nieme temps que la propriete de s'etendre en longueur diminue i me- fure mie rendurcilTcmcnt fait du progrcs , j'appercois une caufe plus que probable de la difformiti dcs os des rachitiques. Les obfervations queles plus celebres anatomiftes & les meilleurs chirurgiens ont faites fur ies os malades, bien-loin de contredire ma thcorie , femblent done la confir- mer ; c'cft ce que j'ai cm devoir fairc fentir avant de finir ce memoire. Je lais qu'il s'cn faut bcaucoup que je n'rie epuife toutes les obferva- tions qu'on a faites tant fur les os fains que fur ceux qui font malades, Je crois bien mcme que Ton en pourra trouver qui paroitront contraires ^ ma theorie, & (1 j'avois eu le temps de faire une recherche plus exadle des obfervations qui fe trouvent dans les trait^s d'anatomie & de chirur«- gie, j'cn aurois rapportd un plus grand nombre, & j'aurois principalement inlifte fur celles qui m'auroient paru contraires ^ mon fentiment-, car quoi- que je n'apper9oive pas qu'on puilTe me faire d'autres objcdions que celles que j'ai difcutees dans ce memoire , je fuis neanmoins perfuade qu'il s'en prefentera peut-etre mcme de bien fortes , c'eft le fort des dccou- vertcs : mais J'aurai lieu d'etre fatisfait de mon travail li I'academie juge que j'aie jettc quelque lumiere fur un point de phylique qui eft tres-inte- reflant & qui n avoit prelque pas ite ebauchc. O B S E R V A T I O N ANA T O M I Q U E. Par M. D u H A M E L. SqUELETTf: V U R E N A R D ^ R M i. E, iNTiiE plufieurs morccaux d'hiftoire naturelle que M. d'Aprcs de Man- t,iim. nevillette, premier lieutenant des vaiffeaux de la compagnie dcs Indes & correfpondant de I'academie, m'a rapportes de fon dtrnier voyage, il y avoit le fquelette de la tcte d'un animal que les Indicns du Madurg, pays naturel de cet animal , appcUent le n-nard arn-.L Les OS de la nuchoire indiqucnt qu'il eft de la nature des animaux qui cnt quafre grandes dents inciilvcs , tels que les licvrcs , les lapins , &c. fon cervelet eft renferme dans une boite olieufe, ce qui s'obferve de menie dans la tete des loups & de la plupart dcs animaux carnaiHers. Mais ce qu'il y a de plus lingulier dans cet atiinul , c'eft une apophyfe pointue , ou une efpece de corne longue d'environ ^ lignes , recouverte d'une fubftance dure , blanche & polie comme riraail des dents , qui eft ii6 A B R E G E D E S M E M O I R E S I htuee h la riiinion des deux temporaiix avec Toccipita!. Ceux qui ont vu de ces animaux vivans ont affure M. d'Apres qu'ils fe fervent de cette ' come pour leur defenfe ; neanmoins elle eft bien courte pour ieur etre Ann^e Z74?. *^'^'" grand fecours, & elle eft fituee de facon que I'animal feroit oblige de mettre fa tcte entre fes jambes, pour fe fervir de cette<^fenfe. A N A T o M I E. (^)TROISIEMEMiMOIRE Rcnfermant plujieurs Obfervations fur une maladie da Siphon lacrymalj dont Us Auteurs n'ont point parU, Par M. Petit. Mim. X_/ A maladie dont il s'agit ici eft quelquefois la fulte de la fiftule lacry- male & de la tumeur lacrymale qui n'eft point fiftule , mais elle eft encore Elus fouvent caufee par la rougeole & par la petite verole. Dans la fiftule crymale la longue branche du fiphon eft bouchee , le fac lacrymal eft perce , les points lacrymaux font ouverts & les larmes tombent fur la ;oue •, dans la tumeur lacrymale qui n'eft point fiftule , les points lacry- maux font ouverts, la longue branche du (iphon eft bouchee, & les lar- mes ne pouvant palTer dans le nez dilatent le fac nazal & forment une tumeur au grand angle de I'cEil; quand les larmes ont rempli cette tumeur, le furplus tombe fur la )oue & produit le larmoiement. La maladie dont il s'agit , eft I'obftruftion totale des conduits lacrymaux , en confequence de laquclle les larmes tombent continuellement fur la Joue. On voit que le fiphon lacrymal peut perdre fes fondtions, 1°. Lorfque la longue branche de ce fiphon eft bouchee, commc il ar- rive ^ la tumeur & ^ la fiftule lacrymale. 2°. Lorfque cette longue branche fe trouve percee k la hauteur de la pe- tite, comme lorfqu'un abces ou un ulcere la ronge , ou lorfqu'on a fait I'operation ^ la tumeur ou k la fiftule lacrymale fuivant la methode de ceux qui percent le fac lacrymal & I'os unguis. 5°. Enfin , ce fiphon fera prive de fes fondions toutes les fois que les Eoints & conduits lacrymaux, qui font la courte branche, fe trouveront ouches , foit ^ la fuite de la petite verole ou de quelque autre inflamma- tion des paupieres. C'eft ce que j'ai annonce dans men fecond m^moire, & ce qui fera le fujet de celui-ci. Dans tous ces cas, le fiphon lacrymal prive de fes foncftions ne pouvant plus depofcr les larmes dans le nez , il s'enfuit neceffairement un larmoie- ment continuel •, c'eft apparemment parce que cet accident, je veux dire le larmoiement, eft commun i toutes ces maladies, que quelqu'un a pu (a) Voyez le Tome VUI. de la Colleflion Acad^miquc , Partie Franjoife. tomber DE L-ACADEMIE ROYALE DES SCIENCES. 117 tomber dans I'erreiir dc les croire & de les noinmer tomes fijiules lacry- — ^■^■■m i i ■ males , quelqiies differences d'aillcurs qu'il y ait entr'clles. Ces difftfrences . font 1°. que lorfqiie la longiie branche dii (iphoii eft boiichce , k'S larmes ^ a t o 11 1 c peiivent bien entrcr dans les conduits lacrymaux par I'acHon des paupie- Annie fA--. res , elles paffent meme dans le lac lacrymal & dans Ic canal nazal , juf- qu'au lieu ou fe rencontre I'obftrudion de cette longue branche du fiplion ; mais ne pouvant paffer outre pour secouler dans le nez, elles s'amaffent dans cet endroit, dilatent le lac & forment la tumeur lacrymale qui n'eft point fiftulc, ainll que je I'ai dcniontrc plus haut dans le premier manoi- re, dent cette maladie a fait le fujet. 1° . Si Ton neglige cette tumeur elle flit du progrcs , les larmes retenues s'accunnilent de plus en plus , elles crevcnt le fac, ou bien elles y caufent inflammation, d'ou s'enfuit un ab- ccs qui le perce & forme la vraie fiftule limple ou compliquee , ce qui a donne lieu \ mon fecond memoire. Ces deux maladies, comnie on le voit, different entr'elles, mais toutes deux different d"une tumeur au grand angle de Tail , qui fera le (ujet de cette troilieme partie. Celle-ci eft ditierente de la tumeur lacrymale qui n'eft point fiftule, parce quelle n'eft point remplie de larmes ■■, elle n'eft point fiftule , puif- qu'elle n'eft point ouverte, & quand meme elle s'ouvriroit & deviendroit nftuleufe , elle ne feroit point nommee fiftule lacrymale , parce que les points lacrymaux etant bouches, les larmes ne pourroient point couler par ion ouverture •, car fi les larmes dans les deux premieres font le principal delordre , elles ne doivent contribuer en rien , ni a la formation , ni aux accidens de celle-ci, puifque les points lacrymaux etant bouches, elles nc peuvent entrer dans le liphon lacrymal. Quoique le paffage des larmes foit interdit du cote du fiphon, il fe forme cependant dans ce meme (iphon une tumeur lemblable en apparence \ la tiunenr qui n'eft point fiftule; je dis femblable en apparence, parce qu'il s'en faut bien quelle loit la meme. Premierement elle n'eft point formee par les larmes : en fecond lieu , li Ton preffe la tumeur lacrymale tjui n'eft point fiftule, elle fe vuide dans Tasil par les points lacrymaux, & il n'en lort que des larmes ou quelquefois un peu de pus; au-lieu que li Ton preffe la tumeur dont il s'agit ici, quelquefois elle ne fe vuide point quand les deux ouvertures du liphon font bouchees , & li elle fe vuide , c'eft dans le nez , mais il n'en fort pour I'ordiiiaire que du pus , ou dj moins une matiere puriforme. La premiere fois que je vis cette efpece particuliere de maladie, je la pris d'abord pour la tumeur lacrymale, mais I'ayant en vain comprimce pour la vuider , je fufpendis mon jugement -, comme cette tumeur etoit non-feulement douloureufe & enflammee, mais que j'y fentois de la fluc- tuation, je penlois d'abord quelle pouvoit etre un abces, je ne voulus cependant rien dticider fans avoir auparavant interroge la malade. Elle m'apprit que cette tumeur etoit venue i la fuite de la petite verole quelle avoit eue il y avoit douze ans, quelle avoit cte preccdee d'un lar- moiement conliderable , & quelle n'avoit paru qu'un peu avant I'entier deffcchement des puftules. Tous Its remedes qu'on avoit employes pour Tome IX, Partie Francoije. E e 2i8 ABR^G]6DESM]£M0IRES ■HI ■■■— ^— ■■ retablir le cours des larmes, avoient etc iiiutiles, aufli-bien que le bandage . compreflif dont elle avoit fait ufage des le commencement •, ce bandage • avoit caufe de fi vives douleiirs quelle avoit ete obligee de le quitter : Annie 1743. quelque temps apres elle fentit un ecoulement par la narine du cot6 de I'oEil mabde, & la matiere qui en fortoit ctoit du pus. La tumeur qui s'e- toit vuidee par cctte narine, s'etant remplie peu-^-peu, reparut le lende- main auffi groire qu'auparavant , alors la malade comprima fa tumeur, elle la vuida par la narine, & depuis douze ans quelle faifoit la meme ma- nceuvre deux ou trois fois par jour, elle en tiroit conftamment, i chaque compreflion , de la matiere femblable i telle qui s'etoit echappee la pre- miere fois, avec cette difference feulement quelle n'etoit ni li epaiffe ni fi formce •, cela venoit fans doute de ce que la malade la compriraant fi fouvent, ne lui donnoit pas le temps de fejourner & de scpaiflir. Sur ccs premieres connoiffances je jugeai que cette maladie etoit une fuppuration dans tout I'interieur du fiphon lacrymal , & que li elle ne fe vuidoit que par le nez , c'efl parce que les points lacrymaux ^toient bouches : cette juppuration eft bien difFerente de celle qui fort quelquefois de la tumeur lacrymale conjointement avec les larmes-, le pus & les larmes coulent en- femble du cote de Tceil par les ouvertures des conduits lacrymaux , au-lieu que dans I'autre, ce qui s'evacue par le nez, n'eft que du pus fans aucune goutte de larmes. Tel fut le jugement que je portai fur cette maladie. Je penfois done que le pus qui s'ecouloit, pouvoit avoir fon fiege dans le lac nazal, mais on m'objedoit qii'un abces forme aux environs du fac auroit pu egalement fe vuider par le nez, en fuivant la gouttiere ofleufe dans laquelle ce fac eft loge : on difoit de plus que les points lacrymaux fe trouvant bouches , il ne paroilfoit pas que le fac feul put fournir toute la matiere que rendoit cette tumeur \ chaque fois qu'on la preffoit. Tout cela pouvoit etre , mais comme cela ne changeoit en rien I'indication cu- rative, les moyens de guerir la maladie etant les memes , je perfiftai dans ma fjgon de penfer, d'autant mitux que je trouvois beaucoup de facilitc \ expiiquer la formation de cette tumeur, fans fortir de mon fentinient, & en fuivant toujoiirs la mechanique du llphon lacrymal , fur laquelle J'ai fond^ tout ce que j'ai dit de ces maladies & des operations que j'y ai fai- tes ; j'etois done non-feulement convaincu que le fac lacrymal etoit le ve- ritable fiege de la maladie , mais Je concevois encore la maniere dont elle avoit pu s'y former. La malade dans fa petite virole avoit kxk. plufieurs jours fans pou- voir ni ouvrir les yeux ni fe moucher, tant elle avoit de gr.iins aux pau- pieres & au nez ; Tinflammation qui furvint au canal nazal & aux points lacrymaux, caufa I'adhcrence de leurs orifices, ce qu'il y avoit alors de lar- mes dans le fiphon, s'etoit trouve enferme fans pouvoir fe faire Jour ni du cote de Toeil ni du cote du nez ; les larmes ainfi retenues comme dans une prifon , setoient aigries , avoient irrite la partie, & y avoient caufe une inflammation qui s'etoit foutcnue pendant tout le temps de la fuppu- ration de la petite verole-, le fac etant enflaninie, avoit fuppurc lui-merae, &: la matiere contenue dans la cavite avoit occallonnc la tumeur \ cette DE L'ACADEMIE ROYALE DES SCIENCES. 119 tumcur avojt fublifte long-temps fans fe vuidt-r ni du cote de Tail ni da cote du nez , parce que les ouvertures du fiphon lacrymal ctoient abfoiu- , ment bouchees. / A n A t o M i E. Si tout cc que je vicns de dire ne prouve pas fufEfamment que Ic pus Ann^e 174-: ctoit renferini dans le (iphon lacrynial , du moins jVfpere que ce qui fuit ne laiffera aucuii doute iur cet article. Cette tunuur ayant ceffe dc couler pendant quelque temps, s ctoit remplie peu-k-peu , & ctoit devenue aufli grolFe qu'elle I'avoit etc dans le commencement-, quelque temps aprcs fur- vint inflammation avec douleur, 4 quoi on remedia par quclqucs (aignees & un cataplafme de pommes cuites, dont le fucccs fut tel que la maladc fe crut guerie, d'autant mieux que fa tumeur avoit difparu, & qu'il netoit rien forti par le nez ■■, mais ce qui la trompoit , c'eft que la matiere avoit change de route , car au-lieu de fe vuider dans le nez par le canal n.izal , elle s'ctoit fait jour par le point lacrymal inferieur •, j'aurois bien voulu deboucher I'autre point lacrymal , afin de mettre les chofes dans un etat ^ pouvoir nous promettre un heureux fucccs de I'operation , mais toutes les tentatives que je fis, furent inutiles; ne pouvant y introduire la fonde la- crymale, je me contentai d'injefter celui qui dtoit ouvert : enfin, dcs que le grand angle & fes environs furent degonflcs, je fis louverture du fac , & je pafiai la bougie dans le canal nazal de la maniere que je I'ai dit. Je ne crois pas qu'on puilfe douter maintenant que le fiphon lacrymal ne tiit le fiege de la matiere purulente qui formoit la tumeur; il me refte done 3l faire remarquer que la guerifon complete de cette maladie , loin dctic une chofe facile, n'eft pas meme toujours poflible , car il ne futHt pas de dctruire la tumeur, de tarir la fuppuration & de confolider I'ulcere, il faut encore eviter le larmoiement, & c'eft ce que je n'aurois pu faire fans doute, [\ les points lacrymaux (ou I'un des deux au moins) n'eulfent etc ouvcrts •, car s'ils font bouches tous deux , & qu'on ne puiile pas les di- boucher par les moycns que j'ai propof^s , on gucrira bien ^ la verite la tumeur , mais il eft conftant que les malades auront I'ceil larmoyant toutc leur vie , c'eft ce que Ion va voir. Un jeune homme de vingt ans, pendant la petite vcrole qu'il avoit eue ^ I'age de quatorze, avoit ete vingt jours fans pouvoir ouvrir I'ccil droit; il avoit eu la narine du meme cote feche , enfl.immee & pleines de crou- tes pendant un mois : apres la guerifon de la petite virole, il I'.ii refta au grand angle de \'cc\\ une tumeur de la grolTeur d'une aveline, laquelle, ouoiqu'on l.i prelfit, ne fe vuidoit ni par l'a:il , ni par le nez: dans les fix premiers mois cette tumeur s'enflammoit de temps i autre , & I'on avoit rccours aux cataplalmes anodins qui diffipoient rinflanimation fans dimi- nuer la tumeur, parce que celle-ci ne fe vuidant pas, fe maintenoit tou- jours dans le meme etat ; elle ne devenoit douloureufe que lorfqu'eile s'enflammoit, & cette inflainmation etoit quelquefois plus ou moins coii- liderable. Un jour entr'autres qu'elle occupoit les deux paupieres, le nez & une partie du front, on crut qu'il le formoit abccs , & qu'il pourroit y avoir quelque changement avantageux , mais I'inflammation fe dlflipa fans qu'il parut fe faire une evacuation fenfiblc , & confcquemment fans que la Ee ij no A B RiG i DES M^MOIRES Mil iMiw—— — tiimeur dimimiat : enfin le malade cnniiye de Ton mal, confiilta plufieurs . h.ibiles gens, il Ce fervit dii bandage lacrymal que quelqn'iin lui confeillaj ■ ce bandage lui caufa beaucoup de douleur, & J'inHammation etant furve- Ann^e 1743, ""^ ■' ^^^ oblige de le quitter jufqu'i ce qu'elle fut paffee : alors il s'en fervit pendant un mois avec moins d'incommodite , mais il fut encore contraint d'y renoncer ^ caufe de rinflammation qui cette fois fut plus con- fiderable qu'i Tordinaire-, celle-ci n'etoit point dans la tumeur meme, elle etoit au-dthors inimediatement fous la peau dans le corps graiffeux, audi ne fe termina-t-elle pas comme les autres , elle fuppura, la matiere perca la peau & fe fit jour au-dehors. Le malade fe fervit quelque temps d'emplatres que lui donnoient des ames charitables qui crurent I'avoir gueri , parce que pendant cinq ou fix jours I'enflure extraordinaire avoit dilpani, & I'ouverture que le pus avoit faite , s'etoit entierement fermee-, mais fi I'abces qu'avoit forme cette nou- velle tumeur etoit gueri , loin que la premiere tumeur le fut , elle etoit an contraire augmentee , & cette augmentation pouvoit bien avoir pour caufe le gonflement des membranes du fac, occafionne par Tinflanimation & la fuppuration qui s'ctoient faites k la circonference de ce (ac , elle etoit ac- compagnee des memes fymptomes qu'auparavant. On recommenca I'ulage du bandage compreffif, il fut encore inutile, on ne put jamais determiner la matiere ^ pafTer d'un cote ni d'un autre : le malade qui jufques li n'a- voit voulii fuivre aucun de mes confeils, fe mit enfin entre mes mains, bien refolu de faire tout ce que je lui prefcrirois. J'^tois bien convaincu qu'il ne pouvoit guerir completement , Je veiix dire, fans qu'il lui reft.it un larmoiement toute fa vie, parce que les points lacrymaux etoient obliteres an point de ne pouvoir etre debouches ni par la fonde ni par les injeiftions •, mais du moins falloit-il le delivrer de cette tumeur, qui, outre qu'elle le rendoit difiorme & lui caufoit de temps en temps des inflammations, pouvoit encore lui attirer quelque depot capa- ble de carier les os, & produire un ulcere difficile ^ conlolider. J'ouvris done cette tumeur, la matiere qui en fortoit, etoit dpaiife, recuite, mais fans mauvaife odeur, les parois de cette cavite etoient garnies de chairs rouges, moUalTes, fans douleur, & femblables h des chairs baveufes qui fc forment fur la furface de tous les ulceres fimples quand on neglige de con- fommer les chairs. La plaie fut panfee ^ I'ordinaire & guerit en peu de jours, mais il refta au malade , comme je I'avois prevu, le larmoiement, ce qui ne pouvoit arriver autrement, puifque les points lacrymaux etoient bouches, & qu'il m'avoit ete impoflible de les deboucher , comme je I'ai fait remarqucr -, mais, toutes les fois qu'il y a feulement un de ces points ouvert, oii peut guerir cette maladie & le larmoiement tout enfemble , parce qu'il eft tou- jours ou prefque toujours poflible de dcboucher le conduit nazal , en paf- fant la fonde par le fac lacrymal , & en fuivant la gouttiere qui le conduit daiis le nez. Sur cette obfervation Ton peut en faire une autre , c'eft qu'il eft eton- nant que la matiere de cette tumeur ait refte un temps (1 conliderable fans DE L'ACADfiMIE ROYALE DES SCIENCES, m fe f.iire jour ellc-manc par la pourriturc -, mais on ne trouvera ricn dc^»^^^^^^^m /urprcnant dans ce f.ut quand on aara fait reflexion tjue ]a matiere conte- niie n'etoit point acre, puifquc la tumeiir n'ctoit point doiilourcufe, (J ce "^ ' *■ ii'eft dans des temps fort cloignis Ics iins des autres, oil cc-tte matiere en Ann^e t743 s'^ch.iurtant, devenoit piqiiante, & cxcitoit quelquc inflammation pafla- gere , ce qui mcme n'cft arrive que quatre ou cinq fois pendant le coiirj de Cix annecs que la nialadie a duri. On ne s'ctonncra pas, disje, dc ce flit, quand on aura encore obferve que dans bien d'autres cas on voit des inatieres cpanchces refter des temps bien plus confiderables fans s'echaufter ni ferraenter , ne fiit-ce que dans les hydroceles , les ganglions arthritiques & autres, qui contiennent un fluide qui n'a aucune communication avec I'air extericur ; car lorfque I'air y peut communiquer, le liquide reiifermc ne tarde pas k s'altcrer, il fermente , caufe douleur, inflammation, fuppn- ration, & quelquefois pourriture, commc on I'a pu voir dans Ja premiere obfervation. J'ai vu une dariie qui nous en fotirnit encore une preuve : apres une inflammation quelle cut (ur Tccil droit, accompagnee d'un larmoiement abondant, il lui refta au grand angle une femblable tumcur qui ne fe vui- doit ni par le nez, ni par I'ceil, & qui pendant plus de hiiit mois demeura toujours en mcme etat, fans augmenter ni diminuer,& fans caufer auciine douleur. Un jour que cctte dame fe trouvoit enchifren^e & qu'elle fe mouchoit fouvent avec force, elle fentit tout-^-coup dans fa tumeur une douleur fi vive , qu'il lui fembla que I'air y avoit paffe ; en eifet , (a tu- meur en devint plus groffe, plus tendue, & en fix henres de temps il fur- vint avec inflammation une li grande douleur , que la hevre qui s y joi- gnit, me fit craindre la pourriture. Les faignecs copieufes, I'applicatioii des catjplafmcs, & fur-tout une evacuation de pus qui fe fit par le nez ap- paifcrcnt entierement la douleur-, en preffant la tumeur pour achever de la vuider, je fentis unc«efpece de gargouillement femblable k ceiui que pro- duifent ordinaircment I'air & I'eau melcs enfemble : comme la nialade ne fouffVoit plus, ou du moins tres-peu, elle ne voiilut plus rien faire; j'etois cepcndant d'avis de lui faire I'operation, mais elle s'y oppofa, dif.int que puilqiie le pus s'econloit, elle efperoit giierir fins operation; elle n'eiit pas lieu de penfer de meme le lendemain , fa tumcur s'etoit remplie de iiouveau , & elle n'ofoit la preffer ni fe rooucher de pcur de renouveller les accidens. Y ayant ete mande je preffai la tumeur, & je n'en fis pref- que fortir que de I'.iir, le peu de fluide qui s'ecliappa avec I'air, etoit une matiere puriforme plus fctide que ce qui en etoit forti la premiere fois. Le meme jour la tumeur s'etant remplie, fut au/Ii preffee par la malade, & il n'en fortit que de Fair; quatre heures apres la trouvant encore plcine je la preffai , & il s'en echappa de meme beaucoiip d'air avec tres-peu de [lus, je propofii derechef I'operation ^ la malade qui s'obftina toujours i a refufcr : comme je la voyois de temps en temps , je iui confeillai le bandage lacrymal , dans le dell'ein de rapprocher les parois du fac pour * les confolider, elle confentit i s'en fcrvirj mais ce fut fan? fucccs, parce quelle ne vouloit le porter que la nuit. lit ABREGE DES MfiMOIRES ^^^■^— — ■ EiiRit setant livree k toutes Ibnes de reinedes de charlatans, d'enipy- riques, toujours fans fiicccs, & voyant d'ailleurs que fa maladie uuifoit i A N A T o M 1 E. j-^ beaute, elle confentit i I'operatioii •, je la lui fis de la maniere que j'ai Annie 174^. decrite, & la reuffite fu: telle que je I'avois efperee , au larmoiement prcs auquel il eft irapoflible de remedier quand on ne peut deboucher les con- duits lacrymaux •, de forte que fi les operations que Ton fait aux fiftult's & aux tumeurs iacrymales, tendent toutes h conferver le fyphon lacrymal en fon entier , celles que Ton pratique k la tumeur que je viens de traiter , dolvent tendre au contraire k eftacer H bien le fyphon lacrymal , que les deux branches & le fac qui les joint n'aient aucune cavite , & que les parois ou les chairs qu'ils renferment , foient fi bien confolidees que lo fyphon foit nul. DIVERSES OBSER VATJ0 1^,S, P'A.NATqmie. Sur la refpiration, Hift. 1 t A corrcfpondance fenfible & continiielle dcs mouvemens de la poi- trine ou du thorax , avec les contradions & les dilatations du poumon , en quoi conlifte la refpiration , a fait croire avec beaucoup de vraifem- blance que la refpiration ou les mouvemens du poumon etoient abfoUi- ment dependans de ceux de la poitrine. On fait cependant que les plaies qui penetrent dans la capacitc de la poitrine, pourvu qu'elles n'intereffent point le poumon , n'empechent pas la refpiration , & fouvent meme nc L genent pas. Mais comment peut-on refpirer , c'eft4-dire , infpirer Sc expirer en cet etat ? L'air qui entre alors librement dans la poitrine , & qui appuie fur les poumons, ne doit-il pas y produire un perpetuel affaif- lement, s'ils n'ont de quoi fe relever d'eux-mcmes , & independamment du thorax ? Ces curieufes & importantes queftions font le principal objet d'un memoire que M. Herilfant, medecin de la faculte de Paris, eft venii lire ^ la compagnie fur la refpiration , & dont nous allons rendre compte. Un de ces hafards dont les habiles gens favent profiler , engagea M. Heriflant dans cette recherche, Un homme s'etoit caffe deux cotes , dont I'une fe caria dans la fuite , de maniere qu'on fut oblige de la lui cnlever ; cette operation qui ne put fe faire fans ouvrir la poitrine au ma- lade, ^ qui Ton fut audi contraint d'emporter une portion de la plevre qui fe trouvoit adherente ^ la cote carice , n'empecha pas qu'il ne vecut long-temps depuis, & en bonne fante. A cette occalion M. Heriflant fc rappella ces bleffures revues dans la poitrine, dont nous venons de parler, & enfin Toperation de I'empyreme , ou I'on ouvre le thorax , & apres lnquelle on ne laifle pas de vivre & de refpirer comme auparavant. II ri- fofut des-lors d'en faire des experiences fur les animaux , & il choilit les DE L'ACADEMIE ROYALE DES SCIENCES, ii^ chats, comme ceux qu'il jugea avoir la vie plus dure, & Ics plus capablcs — ^i^^— dc foiitenir long- temps les operations n^ceflaires it fon deffcin. . Ce n'eft pas que de favans anatomiftes n'aient formi de fcmblables ** ■* ^ o m I i. doutes fur la correfpondance des mouvemens de la poitrine & du pou- Ann^e 1743. mon , & n'aient fait diverfes experiences pour s'en dclaircir; mais M. He- riflant y remarque un dcfaut qui les rend dcfeftueufes , & qu'il croit, non /ans fondement , avoir Jettc ces anatomiftes dans I'erreur, c'eft qu'cn oii- vrant la poitrine des animaux iis ont enlevi le fternum, d'ou il eft arrivi ■" que les poumons de I'animal fe font affaiffes , fans qu'on foit en droit d'en conclure , comme ils ont fait , que cet affaiffement etoit caufe par I'ou- Verture de la poitrine. Car d'un cote, dit-il , la perte du fang qui fort en abondjnce & avec impetuohte par I'ouverture des arteres fternalcs & me- diaftines, & du diaphragmc ou ce fluide trouve moins de reliftance, aft'oi- biit S: derange extrcmement le corns de la circulation ■■, de I'autre le mc- diaftin & une partie du diaphragme etant coupes, les contradions du coEur alors depourvu de fes points fixes, & qui n.ige fans appui dans la poitrine , ceffent de poufler le fang avec la meme force dans tous les vaif- ieaux, & de produire les efiets qui en font la fuite. M. Herilfant s'eft done contentc dans fes experiences, de faire une in- cifion longitudinale fur la peau , fur la grailfe & fur les mufclcs du cote droit ou gauche de I'animal, \ un doigt de diftance du fternum, en me- nageant le plus qu'il lui ^toit poffible tous les vaiffeaux fanguiris de ces parties , & il a brife enfuite plulieurs cotes qu'il a renverfees ^ plat fur la table oi\ il faifoit la dilfedion. A la premiere ouverture de la poitrine il a vu le poumon , qui , loin de s'affaiffer au moment oil I'air eft entre dans la capacite du thorax , s'eft aufli tot prcfentc pour, fortir, comme s'il fe fut trouve trop relferre dans ce lieu-, ce qui eft arrivi, non dans le temps de la contradion ou du reflerrement du thorax, mais dans le temps de ti dilatation, & il a obferv6 plulieurs de ces mouvemens oppofes & alternatifs, toujours tres-reguliers. II eft vrai qu'ils n'etoient pas oien confiderables , & qu'ils diniinuoient peu-i peu des que I'animal commencoit ^ entrer en convullion , par le de- labrement enorme que I'ouverture du thorax & la rupture des cotes avoient caufe dans toutes ces parties , & par I'hemorragie inevitable qui s'en enfui- voit ^ mais il eft certain, ajoute M. HerilTant, que les mouvemens alter- natifs d'infpiration & d'expiration , tels qu'on vicnt de les decrire , s'y cxecutoient du plus au moins, plulieurs fois aprcs le thorax ouvert : ce qu'il a vu encore plus long-temps en ne faifant qu'une petite ouverture de chaque cote , & en y introduifant une petite cannule de plomb ; car par- li I'animal rcpandant beaucoup moins de fang infpiroit & expiroit long- temps affez regulierement , & avoit encore la force de poulfer de grands cris. M. Heriffant panfa enfuite les deux petites plaies , & malgre cette operation, quoiqu'aflez nide , I'animal vecut en fante comme auparavant. Ces experiences & ces obfervations concourent ^ prouver que le pou- mon ne s'affailTe pas par I'ouverture de la poitrine , qu'il continue fes mouvemens d'inlpixation & d'expiration, que ces mouvemens ne dependent 114. ABRtGt DES MfiMOIRES ^^mmmimmmmm done pas de I'exaifbe cloture de la poitrine, & qu'etiRii la refpiratioii a niceffairement une autre caufe qu il faut chercher dans le mechanifme A N A T o M I E. jgj organes que la nature a deftines ^ cette fondion. C'eft ce que M. He- Annee 1743. riffant s'eft propofe d'expliquer. j, .„' j II fait preceder fon explication par une delcnption detaillee du pou- mon & des parties qui fervent aux mouvemens de ce vifcere ■, aprcs quoi il diftingue trois fortes de refpiration. La premiere, qu'il nomme fpontanee, eft celle qui fe fait des I'inftant que nous venons au monde , & qui ne finit qu'avec la vie. La feconde eft celle qui s'execute plus foiblement & avec difficulte, lorfque la poitrine eft ouverte. La troilieme eft purement volontaire. La ftrudure du pounion bien entendue , ainfi que nous le fuppofons , il paroit que la caule de la premiere efpece de refpiration , ou de la ref- piration proprement dite, doit fe prifenter d'elle-meme. Nous abregerons encore ici le detail, quoique curieux , qu'on trouve fur ce fujet dans le memoire de M. Heriffant. Le fostus venant k faire des efforts pour fortir de la matrice, contradte tous les mufcles de fon corps, & par confcquent les mufcles infpirateurs-, I'air entre des-lors dans les bronches, les alonge & les fouleve-, les branches de I'artere pulmonaire eprouvant le meme chan- gement de figure, doivent recevoir, & recoivent en eifet, une plus grande quantite de fang dont I'impullion les developpe & les alonge encore •, ce nouvel alongement des arteres en occafionnc i fon tour un nouveau dans les bronches qui, en fe developpant , augmentent de plus en plus de ca- pacite , & admettent par conlequent un nouveau volume d'air propor- tionne k la dilatation de plus qui leur eft furvenue •, & comme en meme temps elles fe font audi fort alongees, M. Herillant pretend qu'elles cau- fenr fur les filets nerveux du plexus pulmonaire un tiraillement qui fe communique aux nerfs des mufcles inipirateurs •, voili done les mufcles infpirateurs contrades , & la premiere infpiration executee. L'expiration fuivra bientot par I'inverfe de cette mechanique. Le fang qui avoit ete poufTe dans les arteres pulmonaires s'etant vuide dans les veines de meme nom , & la caufe qui tenoit les bronches alongees & dilatees n'ayant plus lieu, leur propre rcffort les fera fe raccourcir & fe retrecir tout-k la fois , & alors plus de tiraillement dans les nerfs, ni de contradion dans les muf- cles intercoftaux, le thorax fe refferre, & voilk la premiere expiration faite & I'entiere refpiration achevee. Or il eft clair que ces mouvemens une fois etablis doivent fe perpetuer pendant toute la vie de I'animal, puifqu'ils dependent de la circulation du fang. Du refte, I'irritation des nerfs du poumon que M. Heriffant conlidere comme la caufe qui determine les mufcles infpirateurs ^ fe contracter & h produire I'infpiration fpontanee , ne diflere de celle qui excite le baillement, h pandiculation j la toux, reternuement, &c. qu'en ce quelle eft moins vive & moins prompte. La feconde efpece de refpiration , cette foible dilatation & conftridion du poumon, qu'on remarque apres avoir fait une large ouverture i la poi- trine de i'animal vivant, s'executera ^-peu-prcs felon les memes principes. DE L'ACADEMIE ROYALE DE8 SCIENCES. 225 fi ce n eft .quelle fera caiifce par la feiile iiDpiiliion du fang dans I'artere 55 A T o M ; b. pulmanaiie. Cctte artcrc Tc lamifiant prefque par-tout ^ angles fort aieus, ^ ^^ & dont les branches font extremement rapprochces dans le temps do Fex- piration, le premier effet du fang qui y lera pouffc avec force, fera de ^nnife iJ4$. ioulcver , d'alonger ces branches , de Ics ecarter les uncs des autres \ & comme la nieme conftrudion regiie dans tout le corps du poumon , le iiicmc eftet aura lieu dans toute la fubftance , il fera dilate dans tous fcs points, &. fa dilatation ouvrira de toutes parts une entree i I'air qui fc prefente continucllemen6^ I'orifice de la trachee artcre, 3c qui eft con- traint d'y entrer pour en remplir le vulde. Ce railonnement eft encore appuye d'une experience. Si Ton met un petit corps leger , du duvet , paf exemple , ^ I'orifice de la trachee-artere d'un animal qui vient tout re- cemment de mourir , & qu'on injedte I'artere pulmonaire avec de I'eaii tiede , on verra k chaque coup de pifton le duvet faire un mouvement pour entrer dans la trachee-artere, I'injedion produifant ici le mcme eflet que I'impulhon du fang. La troifieme enfin & derniere efpece de refpiration , eft celle que nous faifons venir i notre fecours quand il s'agit de parler , de chanter , de crier , & en general pour toutes les infpirations fortes & laborieufes. La volonte feule fufEt alors pour determiner les mufcles infpirateurs )l entrer en contradtion, au-lieu"qiie dans la refpiration ordinaire tout fe palTe in- d^pendamment de notre volonte &; h. notre infu. D'oil I'on voit que la contradlion des mufcles infpirateurs eft tantot voloptaire & tantot invo- lontaire. Elle n'eft volontaire cependant, comme on fait, que jufqu'4 un certain point & pour un temps fort limite. Cetce elpece de refpiration , aufli-bien que la premiere, ne s'exccute avec fa:ilitc qu'autant que la ca- pacite de la poitrine eft bien dofe ; car s'il s'y trouvoit quelque ouver- ture , les infpirations & les expirations feroient genees & laDoricufes , mais elles ne feroient point detruites , comme on I'a vu par les experiences dc M. Heriffant. L'academie , toute refervee qu'elle eft fur les fyftcmes, a Juge celui-ci digne d'etre communique au pulalic, & a trouve une grande connoiffance de la matiere dans le memoire ow il eft expofe. Les experiences fur lef- quelles il eft fonde , lui ont paru faites avec beaucoup de foin & de md- nagement, & prefcrables ^ celles des autres anatomiftes, en ce qu'elle* tnettent I'animal dans un etat moins eloigne du naturel. Non-feulement le fternum n'y eft point enleve , mais il y en a plulieurs oil M. HcrilTant; $*eft contcnte de faire une ouverture ^ la poitrine fans en briler les CQtes. Si les experiences de M. Heriffant ont quelque rapport avec celles qu'ont expofees Mrs. Houfton & de Breniond , ce qui ne pouvoit guere etre autrement , les uns & les autres ayant travaille fiur le meme lujet ; elles en different par bien des circonftances , & fur-tout par les refultats, M. Houfton conclut des liennes , qu'une plaie qui penetre dans la poi- trine d'un chien fans offenfer le pcumori , n'empeche pas I'animal de ref- pirer ni meme d'aboyer , & que le poumon ne s'aitaiffe pas pour cela , ce- Tome IX, Fartie Fran^oiji. Ff 216 A B R E C E D E S M E M O I R E S immmmmmammmim qui eft confirm^ par cclles de M. Hcriflant •, mais il pretend que les mon- . vemens du thorax & dn ponmon Jont (imiiltanes & le font dans le meme An A T o M I i-pjjre de contradtion & de diLitation •, au-lieu que, felon M. Hiriffant, Jtnn^e 174''. '■'^^ ^'"'^ ^^ contraire, ces mouvemens paroiffent oppofes , la contradlion du poiimon repondant i la dilatation du thorax, & la dilatation i la coii- tradion de celui-ci. Le refultat des experiences de M. de Bremond , qui font fort nom- breufes , eft plus refervc & moins pofitif. II fe contente de dire que fi le mouvement du thorax & celui du poumon font, comme il y a grande apparence , iimultanes dans I'hit naturel , il paroit tout le contraire dans I'^tat violent ou les experiences ont mis I'animal , & par le delabrement de fa poitrine , comme on peut voir dans le mcmoire qu'il donna fur ce fujet ^ J'acaderriie. (a) . II. Sur rintroduclldn de I'air dans le corps animal. Les liquides s'evaporent dins Fair , I'air reciproquement sevapore on s'infinue dans les liquides. On en a vu la caufe & Texplication d'apres M. Bouiliet , dans I'hiftdire de I'annee derniere. Le corps animal eft una machine hydraulique ; compofee d'une infinite de tiiyaux remplis de dif- fcrentes liqueurs, & ees liqueurs font certainement chargees d'une grande quantite d'air. ConSment s'y eft-il mtroduit ? Eft-ce par les alimens ? Per- fonne ne doute qu'il ne puiffe entrer & qu'il n'entre par ce moyen beau- coup d'air dans le chyle , dans le fang & dans les autres humeurs •, mais Tair ne peut-il point encore s'y introduire ^ travers les velicules du pou- mon par la refpiration , & meme ^ travers la peau qui rev£t Thabitude du corps ? Ceftce qui eft ici en queftion & ce qui fait le fuJet d'un fecond memoire prefente par M. Bouiliet , & que nous annoncames en finiffant Tarticle cite ci-deffus. On frouve parmi leS ouvfages de I'acadimie, annee 1707, un memoire de M. Mery, ou I'affirmative de cette queftion eft fuppofee comme cer- t»ine , quoique cet habile anatomifte y ait principalement pour objet de montrer que I'air que nous refpirons ne fauroit paffer ^ travers les veli- Q^hs du poumon ni s'echapper par les pores de la peau : contradiftion apparente qui eft fort bien eclaircie dans ce memoire , & qui ne roule que fur la difference qu'il faut mettre entre fair conlidcre dans fon ^tat naturel , I'air en maffe ou en bulles , & I'air intimement mele avec les liqueurs ; car on fait que cette difference eft tres-grande , & que le der- nier paffe librement avec ces liqueurs ^ travers une infinite de corps que }e premier rie peut penetrer. Mais outre que le fait ne fauroit etre trop bien pronve ni trop detaille ^ I'egard du corps animal , il s'agit encore iei de le Iter avec la thtorie propofee de I'evaporation des liquides. •';Jl SiL !.. J! J, , ■-'^»J-6t)!fe*Sirfi Acade'mique, Partie Frangoife, Tome VIII. 1 DE L'ACAD£MIE ROYALE DIvS SCIENCES, t: M. Bouillet avoue d'abord qu'il croyoit autrefois avcc M^s. Pitcarne &: | Boerhaave , que I'air ne pouvoit point entrer dans les hunieurs du corps . animal , ni i travers les velicules du pouinon , ni h travers la peau qui "■ ^ ^ '^ '^ -'■' ' t. revet I'habitude du corps , & il ajoute qu'il n'a change dc fentiment que Annie 1743. depuis qu'i I'occalion des experiences de Mrs. de Reaumur, Petit &: Hales, il a penfc que ccla n'etoit pas impollible ^ de i'::ir dilTous dans un lii- quide & qui en eft deji charge , & comme il I'explique , de la mcme maniere que le coton le charge d'huiie lorfqu'on le paile k pluilcurs re- prifes fur cette liqueur. II ne priitend pas que I'air , tel qu'on le refpire, puiiTe penctrer les velicules du poumon & s'inlinuer dans le fang , niaij il ne doute point que ce mcme air imbibe de fcrolite ou dilFous dans I'humeur bronchiale qui tapilte les parois interieures des rameaux 8c des velicules par ou le termine la trachee-artere dans le poumon , &: dont ces velicules font continucllement abreuvees , ne puilTe en peiietrer les mem- branes , s'inlinuer dans les humeurs de I'animal , & ne s'y inlinue en effet. Le corps humain eft permeable ^ I'eau , aux dccocT:ions des plantes , au niercurc , comme on le prouve par les eftets du bain & des fridions : pourquoi ne le feroit il pas k I'air, & fur-tout ^ I'air revitu, pour ainfi dire , de toutes les proprietes penetrantes des liqueurs & intimement melc avec elles ? Mais voici quelque chofc de plus politif : une experience faite par Sylvius , Swammerdam & Thrufton , & vcrifiee par Bergerus , nous apprend que I'eau feulement tiede , colorce & verfce a plulieurs re- priles dans les bronches des poumons d'un chien ou dun autre animal , penetre les membranes des tuyaux Ixonchiques, & revient par la veine f)ulmonaire , fans qu'on y ait employe aucune force ou qu'on ait ccmprune es lobes du poumon. Le poumon recevra done continuellcment de i'air , qui , felon cette theorie , en penetrcra les velicules , & qui paflant dans les veines , s'y inelera avec le fang. II ne refte qu'i decouvjrir par quelles voies cette eau verfce dans les velicules pulmonaires ou la ferohtc qui en abreuve les parois, pafle ^ tra- vers leur liilu & s'inlinue dans les veines ; & c'eft ce que M. Bouillet con9oit qui arrive par le moyen des vaijjiaui abforbans de M. Vieuifens , aprcs avoir refute le fentiment de quelques medecins qui vouloient y employer d'autres voies. Ces vaifleaux , que nous n'entreprendrons point de decrire ici , & dont on comprend alfez I'ulage par le nom qui leur a ete donne, etant fuppofes , il eft naturel de pcnfcr que dans 1 infpiration les velicules pul- monaires venant i s'etendre, les oritices des vaijfeaux eihalans ou excre- toires , decouverts par M. Ruyfch , fe trouvent moins preUes , & don- nent un libre palTage i la matiere tranfpirable ou k I'humeur bronchiale qui fe fepire du fang de I'artere pulmonaire , & que dans I'expiration ces memes velicules venant i fe relTerrer , une partie de I'humeur eft em- portee au-dehors avec lair grolller & elaftique qui relfort des poumons , Eendant que I'autre eft obligee d'enfiler les orihces des vailTeaux abfor- ans avec Ic nouvel air qu'ellc a bu & qui y adhere , pour rentrer daiu ii8 ABRfiG^DESMEMOIRES ^^™°^^'^"^™ les vaiffeaux lymphatiqiies de cette partie. Et tout cela fe fait par la pref- A M A T o M I E. ''°" ^^^ velicules ou par le reilort de I'air qui n'en a pas cte enti^remcnt chaffe dans I'expiration , fans qu'il foit necellaire de recourir i la force , ylnn/e IJ43- attradive , fuppofee par M". Jacques Kei!l & Hales. C'cft-i-dire, qu'4 travers les velicules des poumons & par les vaiiieaux exhalans il fort con- tinuellcment des vapeurs aeriennes ou de I'air abforb^ dans la niatiere de la tranfpiration qui fe fepare du lang, & qu'^ travers ces iT.eiues vcficules & par les vaiffeaux ablorbans il entre continuellemcnt dans le fang de nouvel air mouille ou une ferolite imbibee de I'air qu'elle a abforbd •, car la niaticre tranlpirable contient beaucoup d'air , comme on le voit dans la machine pneumatiquc , & il eft conftant d'ailleurs par les experiences de M. Hales, qu'une grande partie de I'air refpire eft abforbc dans les poumons , & qu'il y perd fon jeu de reffort. II ne faut prefentement qu'appliquer ^ I'habitude du corps & aux mem- branes qui revetent exterieuremcnt les laniCs cribleufes de I'os ethmoide qui occupe le milieu de la bafe du front & le liaut de la racine du nez , ce qua dit M. Bouillet des vaiffeaux exhalans & abforbans des velicules pulmonaires , & imaginer que I'air mouille & abforbe dans la ferofite qui abreuve toutes ces parties , ne fait avec elle qu'un meme fluide. On com- prendra aifement par-1^ que d'un cote il doit continuellement fortir par les vaiffeaux exhalans du corps animal, des vapeurs adriennes fous la forme d'une tranfpiration infenfible, & que de I'autre il doit auffi continuelle- ment entrer dans le corps animal de nouvel air mouille & deguife fous la forme d'une vapeur fubtile , non-feulement par les vaiffeaux abforbans de la peau , mais encore par ceux des produiftions mamillaires du cerveau, d'oii il doit penetrer julques dans ce vifcere par les pores de la membrane qui en tapiffe les ventricules. En un mot, on verra, dit M. Bouillet, que ce n'eft pas fans fondement qu'Hippocrate a avance qu'il fe faifoit dans tout le corps , ^-peu-pres comme dans les poumons , une expiration & une infpiration continuellcs , & que M. Keill a eu raifon de dire qu'il y cntroit & qu'il en fortoit continuellement de I'air. Mais quel eft I'ufage de cet air mouille qui entre dans le corps animal par toutes les voies dont nous vcnons de parler ? M. Bouillet croit qu'il fert principalement ^ reparer celui qui fait partie de la conftitution natu- relle des humeurs en leur donnant le degre de fluidite neceffaire, & que fi ce dernier n'etoit continuellement renouvelle , il s'cpuiferoit bientot par la tranfpiration, foit cutanee , foit pulmonaire, foit certbrale j ce qui feroit decheoir les humeurs de leur etat naturel. D'oil il fuit, ajoute M. Bouillet, lo. Que lorfque par quelque caufc que ce foit les humeurs recoivcnt dans les interftices de leurs parties plus ou moins de cet air etranger qu'h I'ordinaire , ou que celui qui y ^toit dej^ loge vient ^ fe degager , ^ fe reunir en petites bulles & a re- firendre fon reffort , la conlilbnce naturelle des humeurs , leur fluidite , eur mouvement & le jeu des parties folides de I'animal en doivent con- fiderablement fouffrir -, ce qui donnera naiffance h differentes fortes de maladies. 2°. Que lorfque cet sir eft plus chaud ou plus froid , plus ou DE L'ACADEMIE ROYALE DES SCIENCES. 119 > nioins hiiraide qu'il ne doit ctre , il prodiiit dans les humeurs diff,j|Q^g(.^. p,^ |-g,,5 contraire. Velale , Gafpaf d Bartholin & plulieurs aiitres Ann^e tJ43. out (liivi Galien , & out Ibuvent copie jufquaiix exprciuons. Harve , Wallee & Lower oferent i'e declarer contre , & leur aiitorite paroiffoit avoir emporte tons les fuft'rages & fixe les efprits , lorfque I'illuftre Bo- relli propofa uiie noiivelle opinion qui tenoit un milieu entre celle de Galien & de Lower. II entreprit de prouver que dans la fyftole & dans la diaftole la grolleur & la longueur du cttur demeuroient les memes ex- terieurement , & que tout le changemcnt qui lui arrivoit, confiftoit en ce que dans la fyftole les fibres charnues fe raccourciffoient , ^paiffiffoient les parois des ventricules , & par-li faifoient difparoitre leur cavite en la rempliffant. Quoiqu'il foit affez difficile de concevoir toutes ces contraftions de fibres fans que le volume exterieur du coeur en recoive aucun change- ment , & qu'on n'imagine pas trop comment Borelli , qui 6toit geo- metre, les a concues, fon fentiment n'a pas lailfe d'avoir fes partifans. Enfin I'opinion de Galien a audi retrouve les fiens, & a ete vigoureufe- raent defendue dcpuis quelques annees. On a pu voir, dans rhiftoirc de 1751, {a) la conteftation qui s'clev, fur ce fujet entre deux pretendans ^ uiie chaire de medecine de Mont- pellier •, I'academie fut confultee & prife pour Jage -, honneur dont elle n'abufa pas, & quelle recevra encore aujourd'hui fans s'ccarter de la meme retenue. Elle fe contenta de charger un de fes plus habiles anatomiftes , M. Hunauld , d'examiner les raifons de part & d'autre , & de faire k ce fujet de nouvelles experiences. II en refulta un favant mcmoire oil cet academicien parut fe determiner pour le raccourciffement dans la fyftole •, & le tout fut envoye fur ce pied-lk fans autre decihon. M. Ferrein , aujourd'hui alfocie de I'academie, & qui etoit alors I'un de ces pretendans , foutenoit le raccourciffement. M. Perfon , digne eleve de cet habile maitre , ayant embraffe la meme opinion, mais independam- ment du poids que lui pouvoit donner une telle autorire , nous I'expofe dans tout le memoire qui fait le fujet de cet article , revetue de nouvelles preuve & de nouvelles experiences. Nous n' entrerons pas dans une dif- cufllon anatomique d'un h grand detail , il nous fuffira de dire que M. Perfon y montre une parfaite connoiffance de la ftrudure des fibres charnues du cocur , & bcaucoup de fagacite ^ d^meler I'aftion fimultan^e de ces fibres, conformement i ce qu'en a donne M. Winflow dans Ion anatomie ; qu'il decrit avec beaucoup d'exaftitude les experiences faites fiar lui-meme fur un grand nombre d'animaux d'efpeces diflerentes, fivoir, e moineau, le chat, le chien, le cochon d'inde, la tortue, la grenouille, la carpe , la tanche ; & qu'enfin fes recherches fur cctte fluiicure queftion lui ont m^ritd des eloges de la part de I'academie. (•) Collefiion Academique, Panic Fran goife , Tome VII. DE L'ACADliMIE ROYALE DES SCIENCES. ijr I V. A N A T O M IE. Organe de I'ouie. Annie 1743. M. Masttani, medccin Sicilien, pcnfionnaire du fciiat de'Palerme, & cnvoyi h Paris par ce fenat pour y rcctieillir les nouv'ellcs connoillinces de cliirurgie, eft venii montrer h. Tacademic plulieurs pieces en bois, de frandeiir quadruple par rapport au iiaturel , pour deinontrcr I'organc de ouic, qui eft, comme on (ait, (i compoft, & d'uiic ftrudure Ci dt-licatc. II a fait voir aufli de femblablcs pieces, de grandeur double, pour I'organc de la vue, le tout conform^mcnt i I'expofition anatomique dc M.Winflow. L'academie a M fort conteiite de fon travail , qui lui a parti etrc utile , & marquer autant d'adrcffe que d'intelligence de la part de I'auteur. Sur le dedans extraordinaire de la louche d'un enfant , ni hec- L delievre. M. Herissakt, dont nous avons dej^ parle, eft venu lire i la com- pagnie un mcmoire fur la ftrudlure linguliere du dedans de la bouche dun enfant qui etoit bec-de-lievre. II y a quantite d'cxemples de ce vice de conformation , qui confifte principalement dans la divifion de la Icvre fuperieure, & qui eft quelquefois accompagn^ de I'lrcartement des deux OS maxillaires & palatins , & meme de la divifion de la luette en deux portions , dont chacune demeure attachee ^ chacun des os du palais. Ce qui n pam extraordinaire dans le fujet obferv^ par M. Hcrilfant , confifte en ce que les cornets infcrieiirs du nez manquoient , & que vers la partie moyenne, & h chaque cote de la divilion du palais, il y avoit uii trou oblong tres-fenlible. C'etoient les orifices des canaux excretoires tresgros , de deux glandes placees au voilinage des deux parties de la luette. De cetre conftruftion extraordinaire s'enfuivoieiit plulieurs effcts fmguliers & fort bien decrits par M. Heriffant, foit dans la deglutition des alimens folides & liquides de cet enfant , foit dans fa refpiration. Par exemple , une grande partie de ce qr/il buvoit lui refluoit par le nez , & quelquefois aufli en fe jouant il cmplifloit (a bouche d'eau , & la tenant exadenient fermee , il faifoit jaillir cette eau par fes narines en forme d'arcade, comme font ces poiffons cctacces qu'on nomme foiiftleurs. rji A B R E G E D E S M E M O I R E S VI. A N A T O M I £. Annie .iJ4-i- Double Matrice. M, MoRAND a lu^ k compagnie une lettre de M. Cniger chinirgien du roi de Daiiemaick , coiuen.mt I'obfervation qu'il a faite da deux matrices dans line femme iiiorte en couche , ayant chaciine une trompe , un liga- ment large, un ligament lond, un orifice, le tout pour uu feul vagin qui leur ^toit commua. On iait que la matrice dans Li ftrudure ordinaire a deux trompes ou conduits qui naifTent dcs cotes de fon fond & vont abou- tir aux ovaires, & qui portent communement le nom de Fallope , anato- mifte Modenois mort en i5(?2 , comme le premier ou un dcs premiers qui lesait decrites. Elle a audi deux ligamens larges qui viennent des lom- bes , & deux ligamens ronds qui vont fe rcndre aux aines. C'efl: done ici une de ces motiftruofitis (ingulieres dont il eft (i difficile de concevoir la generation par la confulion des germes dans le fein de la mere, & par la juxtapohtioii de leurs parties reciproqucs. L'academie en attend un plus grand detail. On a vu un autre exemple de deux matrices dans un meme fiijet , ob- fervees par M. Littre en 1705 , {a) & dont chacune n'avoit qu'une trompe & un ovaire , qu'un ligament large , & qu'un ligament rond. M. Winllow en a fait ufage dans un de fes memoires fur les monftres. VII, Mufcle fingulier. M. DE CouRCELLES , medccin de la marine h. Bred: & correfpondant de l'academie , a fait part ^ M. du Hamel d'une variete linguliere qu'il a ren- contrde dans I'un des trois cadavres qu'il a difleques. C'eft un mufcle bien diftingue du cubital interne, du radial interne, & du long palmaire, qui a fon attache fuperieure par un tendon grele au bord inferieur du con- dyle interne de I'humerus. II defcend le long de la partie interne de I'a- vant-bras, & il eft prefque entierement confondu avec le fublime flechif- feur des doigts. Arrive ^ la partie inferieure de I'avant-bras , & ^ fon paf- fage fur le ligament annulaire interne & commun , il fouffre une diminu- tion confiderable dans fes fibres qui fe refferrent & forment une efpece de tendon continu jufqu'i un autre corps charnu aiTez conliderable. Ce fe- cond corps va s'inferer par un petit tendon \ la face interne de la bafe de la premiere phalange du petit doigt, en traverfant le mufcle hypothenar duquel il re9oit quelques fibres : il en recoit aulTi quelques-unes du pal- maire. Ce mufcle eft un nouveau digaftrique , qui par fa fituation & par fes attaches ne pent avoir d'autre fondiion que celle de flechir Ic (0) Hijl. 1705. CoIIeft. Acad. Partie Fran9oife, Tom. U. . petit f A N A T O M I ti DE L'ACADEMIE ROYALIi DES SCIENCES. »jj petit doigt. M. de Courcellcs ne la point trouve dans les deux autres fujets. Les gens de I'art, pour qui nous venons de rapporter ici ccttc fingu- laritc, fans nous (fcarter des ternies de I'obfervateur , feront i portce de ^ntz^e tJ^Tk verifier jufqu'i quel point elle mcrite cc nom. VIII. Ovaires ou Von a trouvi des cheveux , des os & des dents. Nous rapporterons ici une obfervation curieufe qui avoit M omife en 1 741 , & que M. Morand nous a communiquee d'aprcs M. le Riche, chirurgien major de Strasbourg. A I'ouvertiire du corps d'une femme de cette yille M. le Riche trouva dans le bas-ventre une poche trcsgroffe qui rempliffoit prefque I'hypocondrc gauche, & qui parolflbit avoir des atta- ches h la matrice, h la veflle & k I'inteftin colon. Cette poche contenoit une matiere jaunatre , figee en certains endroits h-peu-prcs comme de I'huile, & une pelote de cheveux de la grofleur dun citron. Les cheveux duquel il y avoit trois dents bien diftindes enchaffees dans leurs alveoles. Toute cette poche ayant etc dilFequee avec foin , M. le Riche reconnut que c'etoit lo- vaire du cote gauche. L'ovairc du cote droit ctoit rempli d'une femblablc matiere, 8c contenoit audi vers le centre un os pareil I celui de I'ovaire gauche. Ruyfch a rapporte plufieurs exemples d'os trouves avec des cheveux dans des ovaires , mais il n'y en a point de cette lingulariti dans les deux ovaires d'une racnie perfonne. I X. Douiieme vertebre du dos d'un homme , traverfie par le bout d'une Lime d'ipie qui s'y cajfa. M. Feriiein qui nous a donne I'hiftoire de cette blefliire & dcj ac- cidens dont elle fut fuivie, la tient de M. Cuvilliers, medecin de I'hopital de Niort. ^ Un foldat qui dtoit )i Clermont en Auvergne fut bleffe d'nn coup d'e- pee ^ la partie infcrieure du dos. Un chirurgien de cette ville panfa la plaie affez fimplement & la guerit, du moins en apparcnce, en fort peu de temps , aprcs quoi le foldat partit pour aller joindre fon regiment qui etoit alors i I'ifle de Rtf. II fit ce voyage, qui eft bien de So lieues, avec beaucoup de peine, ne pouvant marcher que ditHcilemcnt i caule des violentes douleurs qu'il reffentoit dans la partie ou il avoit rccu le coup. Du refte il paroiffoit jouir d'une fante parfaite, &: fon capitaine,'qui I'avoit Totne IX. Fartie Frangoije. Gg 154 ABRfiGE DES MfiMOIRES fait vifiter par plufieurs chiriirgiens , crut fur leur rapport que ces dou- . Icurs ne venoicnt que de la cicatrice nouvellement formee, & qu'elles fe A N A T o M I E. difliperojent avec le temps. Cependant le foldat peu apres fon arrivee fui Annct IJ47. ^ttaque du fcorbut ; on Tenvoya k I'hopital des freres de la charitc de Niort; il y tut traite & parfaitement gueri de cette maladie en un mois ou envi- ron. Comme il n'avoit pu faire entendre le fujet de fes juftes plaintes par rapport h fa bleffure , il demanda inftamment qu'on I'examinat de nou- veau ■, car outre les vives douleurs qu'il y fentoit , il fe plaigiioit encore de la tete, & d'un engourdiffement affez confiderable dans les extremites inferieures : il ajouta qu'il ne pouvoit fe tenir debout , s'affeoir , on fe plier, fans reflentir une efpece de dechirement \ I'endroit de cette blef- fure. On y decouvrit en effet une fluctuation affez profonde, & rouver- ture en ayant etc faite, il en fortit un bon verre de liqueur fcreufe de cou- leur rouffe. Lorfqu'on eut dilate la plaie , le Frere chirurgien de la Cha- rite y porta le doigt indice, il fentit un corps dur & stranger, il le faifit avec ce doigt & le pouce, & tira avec beaucoup de furprife de fa part & de celle des fpedateurs le bout d epee long de deux pouces qui etoit refte dans la plaie fans qu'on en eut ricn foupconne jufques-lk. Le malade fut faifi de mouvemens convuhifs tres-violens , & il fe vuida beaucoup par toures les voies; la tranquillite fucccda quelque temps aprcs, avec I'elpe- rance d'une promptc guerifon. Mais douze heures apres cette operation , la iievre s'alluma , le delire furvint, il tomba enfuite dans un etat Icthargi- que, & il mourut trente-fix heures apres, malgre les faignees & les autres fecours. On reconnut par I'examen du cadavre, que I'epee avoit perci la partie pofterieure de la douzieme vertebre du dos, entre I'apophyfe cpi- neufe & les apophyfes obliques du cote gauche •, que le troncon qui etoit refte dans la plaie faite \ la vertebre, traverfoit le corps de la moclle de I'epine, & le canal des vertebrcs; que la pointe alloit mcme fe loger au- deli, du cote droit de la onzieme & douzieme vertebre du dos, comme on peut encore I'obferver dans la piece meme , qui a etc envoyee par M. Cuvilliers, & que M. Ferrein a montree k la compagnie. On y voit audi les bords offeux de la plaie qui ont pouffe & vegete autoiir du tron- con pendant le temps qui s'eft ecoule depuis la bleffure jufqu'i l.i morf. Cette vegetation attefte les fails avanc^s ci-deffus, & diflipe tout loup9on de fupercherie. X. Suites d'une blejjure a la tite. Un Homme ag^ d'environ vingt-huit ans tomba du cote gauche fur la tiBte, & y recut une bleffure pour laquelle il fut faigne deux fois; apres quoi il paffa dix huit mois fins s'en reffcntir. Au bout de ce temps- Ik il fut attaque d'une douleur violente dans I'oreille gauche, d'ou il fortit dit pus. Cette douleur plus ou moins vive dura jufqu'k la mort arrivee dix- huit mois apres. Pendant cet intervalle il lui furvint huit depots en dif- ferentes parties de la tete, du cote bleffe, qui percerent en dehors & DE L'ACADEMIE ROYALE DES SCIENCES, i:^ fiirent fuivis d'autant de troiis fifluleux. On imagina difierens vices dans > le fang da malade, pour lelqucls on liii donna Ics rcmcdes convenables, ■ Hiais fans fiicccs : la maladie toiijours rebelle arix remedcs connus le con- "^ '' •* T o m i e. diiillt an tombeaii. La tete fut ouvcrte par M. Vacher qui y trouva du Ann^e t74->. cote ifFcCti un depot dont la matiere purulente moiiilloit toute la furface externe de la diire-mere , jufqii'i la J'elle du fphsnoide , qui eft un os comiium au crane & i la niachoire fuperieure. Cette matiere avoit perc^ le crane du dedans au dehors vis-i-vis les huit fiftules cxteriearcs. Un intervalie de dix-huit mois entrc la -blcffure & les premieres apparcnces du depot, s'il fut produit par la bleffure, eft digne de remarque ; & ui» pareil intervalie de temps entre la mort & an depot capable dc caufer dc H grands ravages , eft encore plus lingulier. SlTR LES MouyEMENS DE LA MaCHOIRE INFArieVRE. Par M. F E R R E I N. J-i B S fingiilarites qu'on obferve dans rarticulatlon & les mouTcmens de ^m^m^^mm^^ la machoire inferieure, ont porte les anatomiftes ^ en ^tudier jufqu'aux moindres circonftances , & il eft aife de comprendre par les recherches -^"-"-^^ ^744' que des hommes cilebres ont faites depuis peu fur cette matiere, combien Vlim. elle peut fournir de nouveautes ■■, I'ufage d'un feul de fes mufclcs vient d'exercer la plume de trois grands anatomiftes, (a) & Ton ne craint pas de dire que le fujet ctoit digne de leur attention. Au milieu des doutes & des difputes qui ont pu naitre fur ce fujet, on a toujours etc d'accord fur les notions fondamentales qu'on doit avoir des mouvcmens de la machoire , & ces notions ont ete regardees comme des principes dont il n'etoit pas permis de s'ecarter •, c'eft cependant Ic peu d'exaditude que j'ai trouvc dans ces notions , qui m'a engage I don- ner les obfervations que j'ai faites li-dcfllis : mais avant que de comraen- cer , je crois devoir rappeller quelques faits anatomiques. Quoique la machoire inferieure foil faitc d'un feul os, on peut cepen- Obfervations preli- dant la confiderer comuie formee de deux pieces, qui font en effet fepa- niiniires. rees dans I'enfance , non par le moyen d'un cartilage , comme on le dit communcmcnt, mais par I'interpoJUion du periofte qui s'engage entre ces deux pieces , conformement ^ une regie que j'ai trouve que la nature fuit par rapport i tous les autres os de la tete ; car j'ai fouvent obferve non- feulement que les os du crane, mais encore que ceux de la face du fcetus & des petits enfans ne font nuUement contigus les uns aux autres, qu'ils font au contraire fepares par des cloifons membraneufes qui viennent du Ca) M. Monro dans les ades d'Edimbourg traduits en Fransois, Tome T, trticU ii, & Tome in, ankle 13. M. Window dans les Memoires de TAcademie , annie i"'42, & M. Plainer dans fon Programme lur le Mufcle digaftrique , imprimtf avec la DilTorta- tjon di JJeglutitioiic nttarali if pncpojlera , de M. Wallher. 2}5 ABRfiGE DES MEMOIRES 'p6riofte, & qui doivent etre confiderees elles-memes comme an veritable A N A T o M 1 £ P^i'i°^^ ' parce qu elles en font des prolongemens & qu'elles participent de fa nature , de fa compolltion & de les ufages. On s'aflurera aifement Ami'fe tj^^. des fairs que j'avance en dcmontan: les os de la tete , particulierement apres une maceration de pluheurs jours •, on trouvera la membrane dent je parle entre les deux os maxillaires, entre ceux-ci & les os du palais, de la po- mette 8c du nez, entre I'os unguis & I'os ethmo'ide, entre le bee du fphc- noide & le vomer, entre les os communs du crane & ceux de la face, auITI-bien qu'entre les os propres du crane. Je ne connois d'autre excep- tion parmi les os de la tete que la Jondion des offelets de I'ouie , fi Ton veut les compter ici , & celle de I'os fphenoide avec I'occipital. Quand on examine ces deux derniers os avant que roflification ait fait beaucoup de progrcs , on decouvre , comme Je I'ai fouvent obfcrvc , que les por- tions voilines de ces deux os font form^es par un feul & meme cartilage ; mais a mefure que loflification avance de part & d'autre , le cartilage di- ininue & fe reduit 4 une fimple lame qui fublifte pendant long-temps , mais qui s'offifie enfin entre trcnte & quarante ans, en forte que les deux pieces du crane dont nous parlons , ne forment plus qii'un feul & meme OS , comme elles ne formoient originairement qu'un feul & meme carti- lage. Je reviens aux deux pieces de la machoire. Ces pieces peuvent etre diftinguees chacune en deux parties , Tune an- tirieure & I'autre pofterieure , qui forment un angle par leur reunion. La partie anterieure s'etend prefque horizontalement depuis Tangle jufqu'au menton-, la partie pofterieure qu'on nomme branche de la machoire, monte vers la tete , fuivant une diredion qui approche de la verticale •, I'angle forme par ces deux parties eft plus grand qu'un droit, & d'environ 115 ou lio degres, le fommet en eft moulfe ou arrondi. La branche longue d'environ deux pouces fe partage fuperieurement en deux parties , I'une eft placee en devant , I'autre en arriere -, celle ci dege- nere en une efpece de cou furmonte d'une tete ovalaire qu'on nomme condyle ou tlte condyldide. Le petit diametre de la tete eft de pres de quatre lignes , & le grand diametre d'environ neuf lignes : I'une des ex- tremites du grand diametre eft en dehors & un peu en devant, I'autre eft en dedans & un peu en arriere. Si Ton conceit un plan vertical qui divife cette tete fuivant fa lon- gueur en deux portions , I'une anterieure & I'autre pofterieure , la pre- miere eft la feule qui foit garnie de I'enduit cartilagineux, la partie pofte- rieure en eft depourvue. La cavite glenoide qui loge en partie la tete de la machoire , eft creufee dans I'os temporal •■, cette cavite eft divifee en deux parties par une efpece de fente prefque tranfverfale qu'on nomme felure glenoidale : la portion qui eft en arriere de la felure , eft occupee par des parties molles , la portion qui eft en devant , eft celle qui lege la tete de la machoire, elle eft terminee antcrieurement par un foiide ou rebord qui fe confond avec une Eminence appellee tranfverfale; ce rebord peut etre nomme jrebord autaieur de la cavite glenoide , ou partie pofterieuie de DE L'ACAD^MIE ROYALE DES SCIENCES. 137 I'^minence tratifverfalc -, il eft couvert d'uii endiiit cartilagiiieux qui fc ■»^nLa» , Continue d'arricre en avant , en fuivant le contour de cc'ttc eminence. Lc ~~" fond de la cavite glcnoide depuis le rebord jufqu'i la felure clcnoidale ■'^ ^ ''^ t o m i e. femhlc d'abord garni du mcnie enduit cartilagineux •, on y voit en ciFct Ann^e line fubftance blanche, difterente de I'os, avec une furface unie , polie & gliffante, femblable ^ celle des cartilages qu'on trouve dans Ics autres ca- vitcs de cette nature, mais j'ai obfervc que ce corps n'eft qu'une llmple membrane, an vrai periofte, & non pas un cartilage, comma on I'avoit cru jufqu'ici ; c'eft en voulant le detacher de la cavite gl^n^de que j'ai reconnu I'errcur ou Ton etoit i cet cgard. L'articulation de la mkhoire infirieure avec le temporal eft du nombre de cellcs que je nomme articulations avec moyen. Ccs deux os, de msme que la clavicule & le fternum , le femur & le tibia , le carpe & le cubi- tus , &c. font lepar^s par lc moyen d'une lame claftique d'une conliftancc jsrefque cartilagineufe i cette lame eft de figure i-peu-prcs ovale, elle a fes deux faces unies, polies & gliffantes , fon epaiifeur eft moindre vers le milieu & plus conliderable vers la circonference qui tient au ligament Capfulaire dc {'article. Cette lame , que je nomme interarticulaire , a etc mife an rang des cartilages, j'avoue memc quelle paro'it I'ctre au premier coup d'ail , mnis en I'examinant avec attention , j'ai reconnu quelle n'cn avoit que I'appa- rence, & qu'elle en diffciroit d'ailleurs par fa nature, fa compolition & fes f>rincipaux caradieres •, que c'etoit , en un mot , un corps veritablement igamenteux , ne diflcrant des autres ligamens que par la fermete & fes ulages. J'ai obferve quatre cordes ligamenteufes , deux de chaque cote de la machoire , dont les auteurs que j'ai lus , n'ont pas parle ; I'une de ces cordes eft en dehors , I'autre en dedans : la premiere vient de I'extremite de I'eminence tranfverfalc , & fe termine 4 I'extremite du condyle extd- rieurement; I'autre en fait de meme intcrieiirement ; elles font formees de fibres blanches, elaftiqucs, paralleles entr'elles, comme dans les ligamens ordinaires. Ce font principalement ces cordes qui borncnt I'etendue des mouvemens que nous allons voir dans la machoire. Si I'on vcut fe faire une jufte idee de l'articulation de ces os , il ne fuftit pas de la conliderer fur le fquelette , il eft necellaire de I'examiner fur le cadavre, c'eft alors qu'on reconnoitra : 1". Que la portion du condyle qui eft garnie de I'enduit cartilagineux, regarde tres-obliquement en haut & en devant. i°. Que cette merae portion recouverte encore de la lame ligamenteufe dont j'ai parle , eft articulee non-fculement avec la cavite glenoide du temporal, mais encore avec la partie poftcrieure de I'eminence tranfverfale. Telle eft la dilpofition de cet os dans fa lituatlon naturelle, c'eft-^-dire, lorfque les dents incilives de cette machoire touchent celles de I'autre. Ces obfervations fuffifent pour entendre la fuite de ce memoire, je crois feuleraent devoir avertir qu'en parlant de la direction ou de fetendue des mouvemens de la machoire , je les conbderc toujours par rapport i i5S A B R E G fi D ]• S M 6 M O I R E S — ^— ^— » la fiuution naturelle de cet os , ^ nioins que je n'avertifle exprcffiraent A ATOMiE*^" contraire. Les mouvemeiis qu'on a reconniis dans la machoire infcrieure , font Annie 1^44. 1°. le mouvement d'arriere en avant , i°. celni d'avant en arriere, 5'. le mouvement lateral ou du milieu vers les cotes, 4". le mouvement d'abaif- machoiie!""" * ^lemeiit ou de haut en bas, & enfin celui delevation. Les notions eflentielles que les anatomiftes donnent de ces raouvemerisj ne font autres que celles qui s'offrent natureliement h I^efprit. 1°. lis difent, & je conviens, que dans le mouvement en devant lc9 condyles recouverts de la lame interarticulaire fortent tout-ifait des ca^ vites gleno'ides , pour prendre une nouvelle pofition en gliffant d'abord obliquement de haut en bas,& fe detournant enfuite peu-^-peu, fuivant le contour de Teminence tranfverfale qui les dirige par degres d'arriere en avant , jufqu ^ ce qu'ils aillent fe placer fous elle. Voil^ ce qu'on ap- pelle le mouvement horizontal en devant de la machoire , fans doute parce qu'on ne tient pas compte de Tobliquite du mouvement des con- dyles k la fortie des cavites gleno'ides. i°. Quoique les anatomiftes faffent fouvent mention du mouvement d'avant en arriere, je n'en connois point parmi eux qui fe foit donnc la peine d'entrer dans quelque detail Ik-deffus, & il me feroit impoflible da rendre compte ^ ce fujet des idees d'autrui. 5°. Pour ce qui regarde le mouvement lateral, on convient qu'il eft le meme pour toutes les parties de la machoire, que les condyles, les angles, le menton fe portent egalement du milieu vers les cotes, ou, fi Ton veut, de droite i gauche & de gauche \ droite , par un mouvement horizon- tal , fans qu'on y ait foup^onne rien de plus myftcrieux. 4°. Quant au mouvement d'abaiffement , les anatomiftes en ont toujours eu la meme idee que le vulgaire •, il n'eft , felon en-x , que ce qu'il paroit etre, un mouvement de charniere qui fait tourner la machoire fur les condyles confideres comme centre. On voit fur cela I'idee qu'on a du mouvement d'elevation, c'eft toujours celle d'un levier qui le meut fur I'une de fes extrimites. Telles font les premieres notions , les notions generales qu'on donne des mouvemens de la mSchoire , elles ont paru jufqu'ici fi claires & fi evi- dentes qu'on n'a jamais ete partage la-deffus-, mais la conftrudtion des pieces articulees, la difpofition des ligamens & la lituation meme de 1* machoire m'ayant paru dementir la plupart de ces notions , j'ai fait ^ cettc occafion plulieurs experiences tres-iimples , mais egalement propres k faire voir les verites qu'on doit fuivre & les erreurs qui lont i eviter for cette matiere , c'eft ce que nous aliens developper dans la fuite de ce mcmoire. AbailTement de la Comme mon deffein eft. de me borner h ce qu'il y a de plus eflentiel mJchoire. dans ces mouvemens , je ne reviendrai pas fur ce qui peut avoir rapport au moiivement en devant , je me fuis di]h explique , je penfe , li-defliis comme les autres anatomiftes : je me contenterai de faire obferver que les deox cordes ligamenteul'cs dontfai parle, font principalement ce qui DE L'ACAD^MIE ROYALE DES SCIENCES, ij? borneTctcnduc de cc mouvenient; cctte ctendue eft d'environ cinq ligncS) ■— ^— w^^^ & pourroit aller beaucoup plus loin fi les condyles n'ctoient alors rcteniis par Ics ligamens arrives prefqiie au dernier degre d'cxtenfion. A n a t o m i t. Je ne parle point du mouvenient que la michoirc doit avoir d'avaiit en Ann^e 1744. arriere aprcs avoir ete portee d'arriere en avant, on voit bien que ce n'eft qu'un limple rctour de cet os dans fa fituation natvirelle dont il etoit forti Mouvement «n ar- par fon mouvement en devant; il nous fuffira d'examiner (\ les condyles partant de Icur podtioii ordinaire n'ont pas encore un mouvement en arriere independant du retour dont j'ai parle : c'eft un point fur lequel les auteurs que j'ai lus , s'expliquent d'une maniere (i obfcure, qu'il ni'a ct^ impoflible de favoir ce qu'ils en penfcnt. Quoi qu'il en foit, voici ce que j'ai obferve. La machoire infcrieure partant de fa (itaation naturelle a un mouvement d'avant en arriere, c'eft un fait dont il eft aife de s'afTurer, lorfque fai- fant effort pour la retirer le plus qu'il eft pofllble, on fait en nicme temps attention au changement qui arrive dans h pohtion des dents incilives des deux machoires comparees enfemble •, mais il faut avoucr que I'cten- due de ce mouvement eft peu conhderable, & ne va guere au-del^ dc demi-ligne-, c'eft que la conftrudlion de I'articulation ne le permct pas, & quaiid elle le permettroit , les cordes ligamenteiifes que j'ai decrites , s'y oppofent. Leur attache fixe eft en devant, rextrcmite mobile qui tieiit aux condyles eft en arriere •, il faudroit les forcer 011 les rompre pour les faire preter ^ un plus grand mouvement, comme on peut s'en convaincre en confiderant I'effet de ces ligamens fur le cadavre. Au refte , on ne compte ordinairement en anatomic que les mouvemens reniarquables & non forces, on fait peu d'attcntion ^ ceux que la nature ne femble pas s'etrc propofes , & qui ne paroiffent etre qu'une fuite neceffaire de la libertc que les os doivent avoir pour executer des mouvemens plus coii- fid^rables. Je n'en dirai pas davantage fur le mouvement, foit en avant, foit en arriere, Je ne parlerai pas meme des ufages que la lame interarticulaire fteut avoir ^ cet egard. Je viens aux autres mouvemens de la machoire, iir lefquels j'ofe dire que les anatomiftes n'ont pas eu jufqu'ici des idees affez juftes. Je commence par le mouvement lateral , ou du milieu vers Ics cotes. On convient, comme je I'ai dcjh dit, que toutes les parties de la ma- Mouvement \::.i\xl. choire , que les condyles , comme le menton , fe portent alors egalement \ droite ou ^ gauche, en forte que I'un des condyles fait faillie en dehors & que I'autre s'enfonce en dedans : mais quoique tout cela paroille de- montre non-feuk-ment par le confentcment unanime des anatomiftes, mais encore par les feules lumieres du bon fens, il ne me fera pas difficile de faire voir que les condyles font incapables d'un pareil mouvement; il fuffit pour cela de comparer Icurs dimentions lorfqu'ils font garnis de la lame interarticulaire , avec I'etendue des cavites glenoides qui fervent i les loger. 11 eft certain qu'en vertu du mouvement nomnii ktlral , Ics dents 240 AB RE G t DES M^MOIRES — BO— ■■■■■■■ incifives peuvent etre portees du milieu vers I'un des cotes de la quantitc d'environ cinq lignes, ce qui produit un niouvement total depuis un c6t6 o M I E. jyfqy'^ I'autre d'environ dix lignes ■, mais les condyles font trop ^ Tctroit Arm/e 1744. '^^"^ '^* cavites gleno'ides pour faire ce mouvcment, le rebord interieur de ces cavites forme un obftacle invincible, le condyle qui devroit s'enfon- cer , rencontre aufli-tot ce rebord , il n'y fauroit faire ^ beaucoup pres line ligne de chemin en allant du milieu vers le cote , fans fe trouver ar- rete, & il lui eft abfolument impolTible de forcer I'obftacle ; c'eft un fait que j'ai eu grand foin de verifier & dont il eft fort aife de fe convaincre en examinant la lituation des condyles & I'articulation fur le cadavre : I'inf- peftion meme du fquelette fuftit pour le juftifier, quoique les condyles y foient beaucoup plus au large que dans le cadavre ou dans i'homme vi- vant. II eft etonnant qu'une obfervation aufli fimple & une verite audi frappante aient echappe aux yeux de tant danatomiftes : mais quand on fuppoferoit , ce qui eft evidemment faux , favoir, que le bord de la cavitc gleno'ide ne gene en rien le condyle , les ligamens de I'articulation nc manqueroient pas de les retenir ; c'eft ce qu'on verra clairement quand on fe donnera la peine d'exaniiner le fait fur le cadavre. Si I'on pent avoir encore quelque difficulte Ik-deffus , qu'on prenne la tete d'un fquelette , & qu'on metre les condyles de la machoire dans la polition qu'on croit qu'ils ont par le mouvcment lateral , on rcconnoitra iiir le champ que dans cet etat ils fe trouvent tous deux luxes , Tun en dehors , I'autre en dedans ; c'eft une experience egalement aifee & con- vaincante. On conceit deji que le mouvement appellc lat&al n'eft point tel , i proprement parler, voyons done quelle eft la veritable idee qu'on doit s'en faire & ce que I'obfervation peut nous apprendre I^-deflus : Je dis Mouvement circu- done que ce n'eft reellement qu'un mouvement circulaire de la machoire '2"^' qui tourne horizontalement, en forte que fcs difterens points decrivent des arcs de cercle k I'entour d'un autre point pris dans la ligne qui pafle par les deux condyles. Pour etre entendu plus aifcment, Je fuppoferai qu'on s'efForce de porter la machoire de droite ^ gauche , & d'executer du mieux qu'on peut le mouvement nomme lateral; )e dis que le condyle du cote droit fe meut alors d'arriere en avant , & que toutes les parties de la machoire decrivent des arcs de cercle k I'entour du condyle gau- che conlidere comme centre. C'eft ^ quoi fe reduit le mouvement dont nous parlous-, del^ un mouvement tant d'arriere en avant que de droite ^ gauche dans le menton , les dents incifives , &c. On n'a fans doutc fait attention qu'au dernier, & c'eft ce qui a caufe la meprife que Je re- Icvc ici. 11 n'eft pas mal-aife de donner des preuves evidentes de ce que J'a- vance-, car le mouvement lateral des condyles etant demontre impoflible, on ne peut plus imaginer que deux caufes qui foient capabies de tirer la machoire de fa lituation naturelle , en faifant porter le menton avec les dents incifives vers I'un des cotes ; ces caufes font le mouvement en ar- rierc de i'un des condyles , ou le mouvement en devant de I'autre , mais j'ai DE L'ACAD^MIE ROYALE DES SCIENCES, i+i J'ai dcjk fait voir rinipolUbilitc d'un ttiouvement en arriere un peu conii- — i«^i^^^^^ derable. On ne peut done aitribuer cct etfet qii'au mouvement en devant , dun condyle. A n a t o « i e. Ce n'eft pas fur des inductions feulement que je fonde iiia propofition, Annc'e i 744. je nc veux d'autre g.irant que I'experience. I °. Si Ion jette les yeux fur Ics dents molaires infcrieures du cote op- pofe i celiii vers lequcl le mouvement fe fait, on verra que ces dents font portces d'arricTc en avant de la quantitc de 4 i 5 lignes. 1". Si Ton enfoncc iiii peu Ic bout du doigt au-delTous du conduit au- Si Ton ouvroit la bouche , dit un grand anatomifte , (a) dans le » temps que le condyle eft appuye fur I'apophyfe tranfverfale , la partie » inferieure & plate de I'apophyfe condyloide fe trouveroit appliqu^e fur u le cartilage , dont I'eminence anterieure n'auroit que tres-peu d'effet «> pour empecher le condyle de glifier en devant, de (orte que le moindre » effort qui Icroit alors employe pour tirer ou poufier en devant la ma- (a) M. Monro dans les Eflais de Me'decinc de la Socie'te d'Edimbourg j traduits en Franjois, Toms I , ankle ii, ftige 15^ if fu'waRUi DE L'ACADfiMIE ROYALE DES SCIENCES. 147 >j choire inferieure, occafionneroit infaiiliklcmcnt une luxation de cct 05. ————»— » Pour prcvcnir cet accident , Ics mufdes qui ouvrcnt la bouchc font « • »> litiics de maniere que lorlqii us agilicnt , ils doivcnt aulii tircr la ma- »> choire en arriere -, c'eft pourqiioi quand on tache d'oiivrir la boiiche Ann^c 1^44. )j tandis que la machoire inferieure eft avancee en dcv.int, on fcnt auffi-tot j> qu'elle glilFe en arriere, & il n'arrive aucunc luxation fans Ic concours »> d'une caufe cxterieure , li ce n'eft quand Ics relevcurs dc la machoire, » par une contradion convullive telle quelle arrive dans le baillemcnt >> & dans les grands vomitTcmens , tirent la machoire en devant dans le »> temps que les abaiffeurs la tirent en embas. >> II faut avouer que ce fentiment a pour lui le fuftrage des plus grands anatomiftes, & qu'il eft fonde fur I'idee qu'on a des mouvemens de la ma- choire & de la luxation de cet os •, je ne croirois pas mcme qu'on piit s'y reftiler, li I'experience ne m'apprcnoit pas le contraire. Mais nous avons vu que rabaillement du corps de la machoire etoit naturellcment accom- pagne du niouvement en devant des condyles , bien-loin d'etre incom- patible avec lui comme on le pretend communemcnt, & il eft bien affurc que la machoire ayant ^te portee en devant par un mouvement horizontal, la bouche s'ouvre impunement fans que la machoire gliffe en arriere , ou que les condyles fe remettent dans les cavites glcno'ides. Les raifons que je pourrois donner pour etablir ce fait, font inutiles, c'cft I'experience qui le demontre , & cette experience fe fait encore en portant le bout du doigt entre I'apophyfe mafto'ide & la branche ou le cou de la machoire pour juger de la polition & du mouvement du condyle •, on obferve cepen- dant h cet egard, quelques varictes qui meritent d'etre rapportees. ( Je parle toujours de I'abaillement qui fuccede an mouvement horizontal en devant.) 1°. Apres avoir avancc la machoire par un mouvement horizontal, li I'on fait agir les mufcles propres i retenir les condyles fous les eminences tranfverfales dans le temps qu'on vient h abaiffer la machoire, ces con- dyles tournent d'abord fur leurs appuis fans gliffer, foit en avant, foit en arriere , jufqu'i ce que I'abaiffcment foit au degre qui repond naturelle- ment ^ une pareille pofition , aprcs quoi la machoire continuant h s'a- baiffer, les condyles partent pour aller plus en avant, Jufqu'4 ce qu'etant arrctes par les ligamens, ils arretcnt h leur tour le refte de la machoire. i°. La machoire etant fnppolee dans le meme ctat d'avancement, ti I'on fait effort non-feulcmcnt pour I'abailler, mais encore pour la titer en ar- riere , les condyles ont coutume de rentrcr d'abord dans leurs cavittis , lTiais'1'ahaiirement continuant h fe faire, ils font obliges d'en fortir pref- qu'au msmp inftant, luivant les regies qui ont etc ci-deffus etablies. 50. La fuppohtion etant encore la mcme, i\ Ton vient i abaiffer la ma- choire fans faire d'ailleurs aiicun effort, foit pour retenir les condyles fous les eminences tranlverlales, ioit pour les retirer dans les cavites glenoides, les condyles gliffent d'abord un pen en arriere, mais fans rentrer jamais ou prcfque jamais dans ces cavites •, ce mouvement en .arriere ne dure mcme qu'un inftant , bientot le mouvement en devant lui fuccede > k moins qu'on ne fe borne ^ ouvrir trts-mediocrement la bouche. i48 ABR^GIE DES Ml&MOIRES I Nous venous d'examiner comment la machoire portee en devant pent A o M r c^'^ciiter les inouvemeiis precedens ; voyons \ prelent ce quelle eft a- ' p.ible de faire dans cette autre litiiation que nous avons dit meriter d'etre Annit IJ44- conliderce , c'eft lorfque la machoire fe trouve daus un etat d'abaiffement & la bouche plus ou moins ouverte; dans cet etat la machoue efi: capa- ble dc tons les mouvemens horirontaux , qui font les mouvemcns en avant , en arriere , & celui qu'on nomme lateral. Four coniprendre la maniere dont ils s'cxccutent, il faut diftinguer princip.ilement deux dif^ ferens decres d'abaiffement de la machoire ou d'ouvertnre de la bouche ; le premier eft cekii que j'ai dej^ appelle ouverture mediocre de la bouche, comme lorfque les dents inciiives des deux machoires ne font ecartees que de 6, 8 & ID ligiies -, le fecond eft celui que j'ai nomme grande ouverture de la bouche , & qui paffe de beaucoup le degre precedent, Suppofons d'abord la bouche mediocrement ouverte , & par confequent la depreffion de la machoire au premier degre, dans cet etat on voit, lo. Que les condyles n'etant pas arretes par les ligamens qui font encore en etat de fouftrir une diftenlipn plus confidcrable , pourront gliffer en avant fans qu'il foit neceffaire pour cela de changer I'ouverture de la bouche. 10. Que ces condyles peuvent egalement gliffer en arriere & revcnir dans les cavites glenoides , fans qu'on ferme ou qu'on ouvre davantage Ja bouche-, car une ouverture mediocre de celle-ci n'a rien d'incompatible avec le retour des condyles dans ces cavites,- puilqu'i la rigueur on peut les forcer d'y refter lorfquon n'abaiffe pas beaucoup la machoire , coaime je I'ai demontre plus haut. II fuit de tout cela : 1°. Que dans les ouvertures mediocres de la bouche & fans en changer Je degre , la machoire eft fufceptible d'un mouvement horizontal , foit en avant , foit en arriere , Sc meme que la quantite totale de ce mouve- ment egale i-peu-prcs celle que la machoire pourroi: avoir d'arriere en avant en partant de fa jituation naturelle. 1°. II fuit de meme que la machoire pourra executer le mouvement mal nomme lateral j puifqtie I'un des condyles a la liberie de fe mouvoir en avant, I'autre en arriere, en faifant tourner'horizontalement la machoire fur un point de la ligne menee d'un ccHidyie i I'autre, ce qui fuffit pour ce mouvement que nous avons dit n'etre autre chofe qu'un mouvement circulaire horizontal; il eft meme evident qu'il ne fera pas moins con- fiderabJe que li la machoire partoit de fa lituation naturelle. Voyons h prcfcnt ce qui doit arriver lorfque I'abaiffement de la ma- choire & I'ouverture de la bouche font au-deh du premier degre. Si Ton fuppofe I'ouverture fi grande qu'on ne puiffe pas I'augmenter encore, il eft certain aprcs tout ce qui a cte dit, que les condyles ne fauroient s'avanccr davantage : il eft egalement certain qu'il leur eft impoffible de rcvenir en arriere en laiffant fubfifter la meme ouverture de la bouche •, par ou Ton voit que la machoire ne fera fufceptible nl du mouvement iiorizontal en avant , ni du mouvement horizontal en arriere , au moins ^ndis que I'ouverture de la bouche fubfiftera dans le meme degre -, au contraire, fi cette ouverture, quoique confidcrable, u'eft pas tout-i-fait DE L'ACAD^MIE ROYALE DES SCIENCES. 249 it fon dernier termc , les condyles pourront fe mouvoir encore , foit en — ^i^— — avant, foit en arriere , inais d'une quantitc pen confiderable ; ils pourront . fe mouvoir en avant , parcc que les ligamcns ne font pas encore arrives ^ '^ ^ "^ ° ''^ ' '— au dernier degre de diftenlion-, ils pourront fc mouvoir en arriere, parcc Annc'e f^44. qu'i la rigueur on peuc avec un peu de contention , donncr i la bouche un mcme degre d'ouverturc, fans que les condyles foient toujours egale- ment avances, commc nous I'avons di]h fait obfervcr en parlant de I'a- bailfement de la machoire : il n'y a qu'un cas ou cela foit autrement , c'eft lorfque I'abaiffement eft k fon dernier terme. Enfin ces condyles ne pourront fc mouvoir, foit en avant, foit en arriere, que d'unc afl'ez petite tjuantite , parce que d'an cote ils font fi avances quits ne fauroient gucre I ctre davantage , & que de I'autre ils ne peuvent ctrc fort recule* quand I'ouverture de la bouche eft bien grande ; car nous avons vu qu'en baiffant beaucoup la maclioirc , il (itoit impollible de les retenir dans les cavites glcnoides , par ou il eft evident que la machoire etant fort en devant fans etre tout-i-fait au dernier terme, tous les mouvemens ho-* rizontaux peuvent s'exicuter , mais dans uiie etendue peu conllderable. Je n'ai pas cru neceffaire de rapporter en detail toutes les experiences qui juftifient les diffirentes propohtions que je viens d'avancer, il eft aifc de comprendre que le doigt place entre I'apophyfe maftoide & la bran- che dc la machoire tient lieu de bouflble en ces occallons. Sue le Mouvement d is peux Machoiees pouU l'ouvertur.e U£ la Bouche. D Et fur les Caufes de kiirs mouvemens. Par M. F £ R K. E I N. ANS le memoire que j*ai dorme/iir les mouvemens de la mdchoire Mt'ai, infi'rieure , je n'ai eu pour objet que la defcription de fes mouvemens-, je vais maintcnant parler d'un nouveau mouvement de la machoire fupc- rieure qui accompagne celui de la machoire inferieure, & je traiterai en- fuite des mufcles qui font les caufes de tous ces mouvemens j c'eft ce qui fera le fujet des deux articles fuivans. I. Sur un nouveau Mouvement de la Machoire fupirieure. M. BoERHAAVE {a) avoit foupconni que 1 elevation de la tete produite par la contraction des mukks Jpleniiis j compleius , & autres elevateurs, (a) Herman. Botrhaavt Pr^Uaiones Academics in proprias iiiflitutiones , edidit AlbertUS Haller, vol. I , §. 60, pag. 118. Tome IX. Punie Franfoife. li i5o ABRfiGlfi DES MEMOIRES I contribiioit k ouvrir la bouche. M. Monro , c61ebre anatoniifte d'Edim- . bourg , parle Ik-dcfliis d'uiie maiiiere plus decidee ; il ne craiiit pas d'af- ■fiirer, aprcs le doifteur Pringle & fcs propres experiences, (a) que I'ou- jinn/e 1744. vcrture de la bouche ne depend pas de I'abaijfermnt feul de la mdchoire infirieure , mais que I'dlevation de la mdchoire Jupirieure par la con- que/aueo ^ '^^ ' traclion des mufcles divateurs de la tlte (comme le fplenius, le com- plexus, & autres) y a aujji beaucoup de part. Ce fentiment a centre lui I'aiitorite d'un grand maitre en anatomic, {b) qui nie que lelevation de la tcte ou de la machoire fuperieure contribue en rien k ouvrir la bouche i il fe fonde fur deux railons, Tunc de fait, I'autre de droit. La premiere eft que nous ne faifons cette elevation que dans certains cas & par des vues particnlieres , par exemple, pour di- nger I'ouverture de la bouche vers I'objet qu'on veut ou doit recevoir par la bouche , lorfqu'il ejl au-dejfus du niveau de I' attitude acluelle de la bouche. Sa feconde raiton eft que dans le cas meme ou la tcte s'eleve au moment qu'on ouvre la bouche , cette elevation ne fert nuUement ^ I'ouvrir, & que c'ejl toujours I'abaijfement Jeul de la mdchoire infe'rieure qui fait I'ouverture de la bouche , foit que cette ouverture foil grande ou petite ; ainii , quand il fe trouve un obj/acle externe quelconque qui diminue la diflance entre le menton & le haut de la poitrine , de forte qiiil n'y a pas affe\ d'efpace pour faire par I'abaiJJement de la mdchoire infe'rieure une grande ouverture de la bouche , on ejl naturellement porti a haujfer ou pencher la tete en arriere , mais c'ejl pour fe procurer I'efpace nicejfaire pour faire par I'abaijfement de la mdchoire infe'rieure cette ouverture , comme les crocodiles qui haujfent la tete pour ouvrir une grande gueule par le feul abaiJJ'ement de la mdchoire infe'rieure , felon I'obfervation fur trois crocodiles , rapportie dans le recueil des anciens M/moires de I'Acad^mie des Sciences. On voit aifez qii'il ne s'agit dans tout ce que nous venons de rappor- ter , que du mouvement naturel d'elcvation de la tete, c'eft ainli que 5'appelle celui qui fe fait volontairement par I'adion des mufcles fplenius , complexus , & autres clevateurs : or il eft bien certain que ce mouve- ment n'a lieu que dans quelques cas , & qu'alors meme il ne contribue nullement \ ouvrir la bouche : on ne doit le regarder que comme un mouvement commun qui emporre egalement la tete & la machoire infe- rieure, fans epargner \ celle-ci la peine de s'abaiffer par fon mouvement propre, pour faire Touverture de la bouche. II ne fera pas hors de propos d'oLferver que le mouvement naturel d'elcvation & d'abaiffement de la tcte ne fe fait pas uniquement fur la premiere vertebre du cou , les trois ou quatre vertebres fuperieures y contribuent en s'inclinant I'une fur I'autre ', ainfi le cou fe porte en devant ou en arriere , fuivant qu'il s'agit d'incliner ou d'elever la tete , c'eft un (a) Effai de M^decine de la Society d'Edimtourg , ouvrage traduit de i'Anglois, Tomi I , page 165 6" 170. (4) M. Petit. DE L'ACAD^MIE ROYALE DES SCIENCES. 151 fait dont on pent s'affurer par experience ; on voit par-Ii que le inou- ^ vemcnt naturcl delcvation a fon axe fort aii-dcffous dc la premiere vcr- . tebre, & qii'il doit faire porter de bas en haiit les condyles, rarticulation ^ ^ a t o m i r, Sc I'axe dii inouvenient d'abaiflement de la machoire inferieiire. Annife Qiioique je penfc autrement que Mrs. Berhaave & Monro fur le mou- vemcnt dont on a pnrle, je fuis cependant bicn cloigne de croire que la bouche s'ouvre par rabaiflement ieul de la machoire intcricure-, Je vais demontrer que la tcte contribuc k faire cette ouvertiire , & qu" die y con- tribue meme beaucoup , mais par un mouVement ind^peiidant de la vo- lontc & de la contradion dcs mufcles JpUnius , complexus , oil autres .elevateurs dc la tete , en un mot par nn iiiouvement reciproque \ celui ta mSchoire fup<. de la machoire inferieure , refultant de reffbrt qu'on fait pour abaiffer ''"^"^e a ur> mouve- celle-ci, & occalionne par la refiftance quelle oppofe ^ fon abaiffement ; l""l",'^'''",T*^"' 11 • J- • 1 L .- r r ' lui de la machoire m- mais avant que de ie prouver , je dirai quelque chole fur cette forte de ferieure. iiiouveraent en general. Je fuppofe deux corps A Sc B attaches aux deux extrimites d'une corde Loi de m^cbinique. qui fe raccourcit , il eft evident que la corde tire ces deux corps I'un vers I'autre en leur faifant parcourir des efpaces reciproqucs i leurs malTcs, & que li la maffe A eft double ou triple de la maffe B , I'efpace parcourii par la maffe B fera double ou triple de I'efpace parcouru par le corps A^ tout cela eft egalement vrai, en fuppofant que la corde paffe fur deux poulies, & que les deux corps foicnt ikues de maniere que la contradlion de la corde les eloigiie i'un de I'autre. Les mulcles font des efpeces de cordes dont les cxtremites font ordi- nairement attachees ^ deux os articules enfemble, par exemple, au bras & ^ I'avant-bras , au femur & i la Jambe , \ la tcte & i la machoire infe- rieure. Prenons done ces os deux ^ deux , & comparons leiir rcliftance \ celle des corps A Sc B , fans pretendre pour cela que la comparaifon foit bien exade. II eft clair que les mulcles ne fauroient fe contrader fans ti- rer les points auxquels ils lont attaches I'un vers I'autre , & leur faire par- courir des efpaces recioroques \ leurs refiftances; ainli le bras & I'avant- bras, la cuiffe & la jambe doivent s'approcher ou s'eloigner mutueliement, \ moins qu'unc nouvelle caufe ne vienne tout-^ coup \ empecher cet effet. Quand on coiilidere la rellftance des parties dont nous parlons , on trouve ordinairement que la plus eloignee du tronc ou de I'appui de la machine eft libre, ifolie & extremement aifee \ mouvoir, tel eft I'avant- bras confidere par rapport au bras ; au contraire la partie la plus voilinc du tronc ou de I'appui eft tres-gcjiee &: relifte beaucoup au mouvement dont nous parlons , deli vient que I'efFort des mufcles qui devroient la rapprocher ou I'eloigner de la premiere , produit rarement fur elle un eftet fenfible , & qu'on s'imagine meme qu'un niufcle ne meut prefque ja- mais en meme temps qu'une feule de ces parties. La raifon de cette difle- rence n'eft pas difficile \ trouver , tandis que les mufcles attaches , par exemple , au bras & \ I'avant-br.is fe contradtent & qu'ils font un effort igal pour tirer ces deux parties I'une vers I'autre , le bras ne pent s'.ip- procher de i'avant-bias li fon extrcmitc fupcrieure ne fuit ■, c'eft ce quelle li ij i^i ABRIDGE DES MfiMOIRES I — — — feroit fans doiite trcs- aifement li elle etoit librc & ifolee , mais les liaifons . quelle a avec Tomoplate, la claviciile, i'epine, &c. ne lui permettent pas A N A T o M I £. j-ob^i^ fj,,3 entrainer le refte dti corps : or renfemble dii corps & du Annce iJdd- '"■'^ ^■'''^ ""^ maile prefque eiiorme en comparaifon de cellc de I'avant- bras & de la main, je viens an mouvement reciproque de la tete. Les principes qu'on a etablis fuffifent fans douce pour demontrer que I'efibrt qu'on fait pour ouvrir la bouche , doit tendre en meme temps \ abaiffer la machoire infcrieure & ^ clever la fupericure , mais on ne voit pas que cette elevation doive etre fenllble ou meriter la moindre atten- tion , les exemples meme que nous avons de pareils mouvemens dans d'autres parties du corps , femblent infinuer le contraire •, cependant j'ai promis de demontrer que celui de la machoire fuperieurc etoit tres- remarquable , & qu'il contribuoit beaucoup a I'ouverture de la bouche. Je pretends meme fonder en partie la demonftration de ce paradoxe fur Application Jecttte'e principe de mechanique que j'ai rapporte d'abord , c'efl: que la tete loi h la m.^choire fu- confideree par rapport ^ ce mouvement fe trouve dans un cas bien difte- pifneiire. ^^^^ j^j autres parties du corps •, la tete tient ^ la verite de plus pres an tronc que la machoire inferieure , mais j'ai decouvert que malgre cela la reliftance qu'cllc fait ^ ce mouvement , eft extrememcnt petite , & telle J»-peu-pres quelle feroit li la tete etoit totalement detachee de I'epine •, j'ai reconnu audi que la reliftance de la machoire inferieure, quoique recl- liiment moindre, ne laiifoit pas d'etre affez conliderable pour occafionner dans la tete le mouvement que je lui ai attribue. J'ai dit que le bras, par excmple , ne peut s'approcher ou s'eloigner dc I'avant-bras par I'aftion des mufcles qui tienncnt en meme temps i ces deux parties , (i fon extremite fuperieure articulee avec I'epaule ne fuit , ce quelle ne fauroit faire fans entrainer le refte du corps, je n'ai meme rapporte Facilite dii mouve- ce fait que comme un exemple de ce qui fe pafle communement ailleurs , tnent r^aproque de ^^^jjj ^-gf^g propofition ne regarde nuUement la tete : ^ la verite le mou- Umachoircfuperieu- , f ' , , » r i -^ i • • .-■ • r -^ r c ■ re. vement reciproque de la tete lur la machoire interieure ne lauroit le laire fi les eminences articulees avec I'epine ne fuivent la determination que Ic mouvement de la tete leur imprime , mais cette determination n'entraine 111 I'epine ni le refte du corps, elle ne fait meme aucune violence aux ligamens & aux mufcles qui lient la tete avec I'epine, & qui aftermiffent leur articulation , c'eft que le mouvement que cette articulation permct ^ la tete fe trouve le meme que celui qui rcfulte de I'articulation de celle-ci avee la machoire inferieure , ou , ce qui eft la meme chofe , le^mouvement de la tete fur la premiere vertebre du cou & fur la machoire inferieure, ont ^ peu de chofe pres le meme axe. Si Ton cnleve la tete d'un cadavre avec le cou , qu'on decharne grof- ficrement le cou, qu'on arrete la machoire inferieure fur un plan, qu'on , aifujettiffe de meme le cou , en forte que ces deux parties foient par- faitement immobiles , & que tout etant ainli difpofe , on faffe mou- voir la tete fur la machoire inferieure , de la meme maniere que la machoire inferieure fe meut naturellement fur la tete , on eprouvera 1°. que la tete fe meut en meme temps fur la premiere vertebre fui-. DE L'ACADEMIE ROYALE DES SCIENCES. 155 vant la determination qui reliiltc de leiir articulation ■, 1°. que tDiitc.'; i»i— m^— les vcrtebres du cou font parfaitcment immobiles , i I'exccption de Ja * premiere dont la partie poflcrieurc s'inclinc un pen fur la feconde pour faire place aux eminences de la tete ; 3°. que tout cela fe fait avec une Ann^e X"44. grandc aifance , en forte que le mouvcment de la tete fur la niachoire infcrieure ne paroit pas Icniiblemcnt plus gene que fi la tcte n'ctoit pas liife avec le cou. II faut cependant avouer que fi I'clevation de la maclioire fuperieurc eft portee au-deli d'environ neuf lignes , I'cxpirience n'a plus le mcnie fucccs, il ell prefque impofTible d'aller jufqu'au dernier dcgrc d'ouverture de la bouchc , h moins dc donner au cou la liberie de dcfcendre, ou aux angles de la machoire infcrieure celle de monter de la quantite dc deux ou trois lignes. On pout faire la meme obfervation fur foi-mcme", fi Ton tient la hafe de la machoire inKrieure parfaitenicnt immobile fur un corps , & qu'on vienne k faire effort pour I'abaiffer, la machoire fupericure obcit d'abord avec une facilite extreme, mais lorfque I'elevation va au-deii d'environ neuf oil dix lignes , on fcnt que la tete commence a preffer le cou de haut en bas , & que pour lui faire place on eft oblige de le niettre dans line attitude forcee. Quoiqire j'attribue k la machoire fuperieure un mouvement affez confi- dcrable lorfqu'on vicnt i ouvrir naturelleraent la bouche, je fuis cepen- dant bien eloigne de pretcndre que cctte cltivatiofi foit portee a neuf lignes; ainll la tcte a toute la liberie qii'il faut pour fuivre la determina- tion de ce mouvement, c'eft a-peu-prcs comme fi die n'avoit aucune liaifon avec I'epine. J'ai encore avance que la reilftance de la machoire infcrieure n'eft pas fi petite qu'on fe I'imagine , & qu'elle peut occallonner un mouvement confiderable dans la tete. Les rehllances capables de produire en elle cet effet, lont 1°. I'inertie de la machoire de la langue & de quantite de par- tics qui doivcnt etre mues toutes enfcmble, car on fait que pour mouvoir un corps, il faut ncceffairement furmonter une certaine reliftance i 1°. le ployement de tout cet allemblage de parties qui batitlent le devant du cou , ou qui font enfcrmees dans I'enceinte de la machoire -, car il eft evi- dent qu'cUes forment toutes enfemble une efpece de colonnc, qui, quoi- que flexible, ne lailTe pas de foutenir la machoire infcrieure, & d'oppoler une reilftance affez conlidcrable i Ion abaiffement ■, 5°. toutes les con- nexions de cette miichoire avec la panic fuperieure du cou , foit par le moyen des tcgumens communs, loit par le moyen de toutes les parties interpofccs qui tiennent les unes aux autres , & qui refiftent au mouve- ment du haut en bas de la partie anterieure de la machoire & k cclui d'avant en arriere des angles ; 4°. le corps charnu du pharinx qui a des liaifons avec la partie anterieure & luperieure du cou , & s'attachc plus bas & plus anterieurement vers le dedans de I'angle de la machoire. _ j , ■ Prefentement qu'on faffe une lomme de toutes ces refiftances, fans par- f,i)|(jt^ jg j^ n,g,jyg. Icr de celles que Je pourrois ajouter , & qu'on fe reffouvicnne qu'elles ment. 254 ABREGE DES MjEMOIRES M.— ^^— ^— doivciit aller beaiicoup plus loin dans I'homme vivant que dans le cadavre,' fera-t-il difficile de comprendre que cette fomme peut ^galer une partie A N A T o M I £• tr^s-confiderable, comme Ton diroit un fixieme, un quart, un tiers, plus yinn/e 2744. *^" moins de la refiftance de la tete? or cela pofc , il eft evident que I'elc- vation de la machoire fupirieure ira ^ la iixieme , ^ la quatrieme par- tie , &c. de la quantite dont la machoire inferieure s'abaiile , ce qui eft tout ce que nous pretendons. En effet, j'ai eprouve qu'en loutenant le menton ou la bafe de la machoire inferieure avec une force tres-mediocre, cela fuffifoit pour empecher cette machoire de defcendre , & pour deter- miner la fuperieure ^ faire feule une grande ouverture de la bouche : or il eft aife de voir qu'une reiiftance qui produit cet effet , eft beaucoup plus grande que celle que doit faire la machoire inferieure, pour deterr miner la machoire fuperieure i monter d'une quantite igale leulement ^ la fixieme ou k la quatrieme partie de la quantite dont la machoire infe- rieure s'abaiffe , & par confequent qu'une r^hftance pareille ^ celle que nous y avons reconnue , doit etre plus que fuffifante pour produire cet eftet. Picuvesdc fa reality. L'experience s'accorde parfaitement avec ce raifonnement , J'ai conftaiu- ment eprouve que la machoire fuperieure fait en s'elevant, une partie con- liderable de I'ouverture de la bouche-, je ne parle pas ici du mouvement que le Jplenius , le complexiis , &c. donnent \ la tete lorfqu'oii fe pro- pofe de I'elever, foit pour donner plus d'efpace au jeu de la machoire inferieure, foit pour voir plus commodement un objet, &c. ma propofi- tion ne regarde que le mouvement reciproque que la tete fait machinale- ment lorfqu'on ie propofe feulement d'abaiffer la machoire inferieure, comme il arrive \ tout moment quand on crle, quand on chante , quand on mange, en un mot, quand on ouvre naturellement la bouche. Pour reconnoitre cette elevation , on n'a qu'k fixer vis-^-vis le concours des dents incifives des deux machoires, une aiguille, une lame fort mince, un fil tendu horizontalement, ou meme le bout du doigt-, on trouvera que la machoire fuperieure monte naturellement d'une quantite dgale , tantot "k la fixieme, tantot \ la cinquieme , \ la quatrieme partie de la quantite dont la machoire inferieure s'abaiffe ■, cette elevation m'a paru diminuer quand on regarde attentivement un objet, parce qu'on tache alors de fixer la tete dont le mouvement derange plus ou moins I'axe optique. J'ai cru pendant long temps qu'en ufant de contention , c'eft-^-dire , qu'en s*effor9ant de retenir la machoire fuperieure par le moyen des muf- cles abaiffeurs de la tete , on pouvoit reuffir ^ la fixer parfaitement , mais J'ai reconnu enfuite que cela n'etoit vrai qu'en partie •, J'ai place une bou- gie allumee 'i. trois toiles ou environ loin de moi, J'ai enfuite viie comme par une pinnule aii-deffus d'un corps fixe fort pres de mon ceil , & J'ai toujours eprouve que malgre I'eftort que Je faifois pour retenir la machoire fuperieure, Je decouvrois , en ouvrant k bouche, la flamme qui ctoit ca- chee avant & apres cet inftant -, preuve evidente que la tete montoit au moment de I'abailfement de la machoire inferieure. Rcniarquts. Je terminerai cet article par les remarques fuivantes , i*. I'axe du mou- vement d'abaiffement de la machoire inferieure & celui d'elcvation de la DE L'ACADEMIE ROYALE DES SCIENCES. 255 machoire riiperteure font ^ pcu de chofe prcs les mcmcs ; 1". ils font run SIIS:^:^^:^^^ & l.iutre trc-s difterens de I'axe dii niouvement naturcl de la tctc, tcl cjn'on A n a t o m i e Ic t'.iit naturcllcmcnt & (ans fe gcncr par le moycn du JpUnius & dii compUxus; }°. le niouvemenr rcciproqiie de la machoire fapcricure eft Ann^e IJ44. indcpendant dc la contraar la rcliftance de celle-ci , & que les lix mufcles qu'on a trouves derriere es vertebras, n'y ont pas plus de part dans le crocodile que \e Jplenius & le complexus , &c. dans I'homme ; ccs mufcles n'agiffent en ouvrant la bouche que quand on joint a la volonte de I'ouvrir celle d'elever encore la tete-, par-li ce mouvement dans le crocodile, comme dans I'homme, doit ctre diftingue de celui qui fe fait par la volenti de mouvoir la tete, & Ton peut \ jufte titrc le nommcr mouvement de la mdchoire fupi- rieure J parce qu'il ne contribue pas moins que celui de la machoire in- ferieure h. I'ouvcrture de la bouche ; mais c'eft afiez parler de ce mouve- ment, venons aux caufes qui le produifent. (a) Mimoires pour fervir k I'Hifioirc des Animaux, feconde partie , titre, Difaipum tvatomiquc dt troii CncoJiks. A N A T O M I E, 25 i ABREGE DES MJ^MOIRES I I. Annc'e 1744- ^^^ Mufcles qui produifent les mouvemens de I'une & de I'autre mdchoire, Je me propofe de traiter lei de I'lifage des mufcles qui produifent les mouvemens des deux machoires, ces ulages font egalement compofes & eloignes des id<5es que les anatomiftes en ont donnees, & je ne faurois en parler fans etre oblige de couper mon difcours par des digreflions frequen- tes , li je ne commencois par quelques obfervations qui ferviront dc prin- cipes pour la fuite de ce mcmoire. O B S E R VA T I O N PRELIMINAIRE. Premiere OLferva- Dans Us mufcles polygajlriques , la contraclion d'un ventre ejl in-- """• d^pendante de la contraclion de I'autre. II eft certain que Tadion mufculaire n'eft pas toujours fimultanee dans letendue entiere d'une meme fibre , j'ai fouvent remarquc uh mouve- ment fucceffif, non-feulement dans les fibres des inteftins , mais encore dans celles du pannlcule charnu, des linus veineux, des orelllettes & du cocur mcnie des animaux, & il m'eft arrive deux fois , en examinant le coeur de la grenouille , de voir par extraordinaire une fi grande difference 'k cet egard , que la contraition de la bafe & celle de la pointe etoient dans ' une alternative parfaite. S'il eft vrai, comme on vient de le prouver, qu'une partie d'une fibre puiffe agir avant I'autre, il fera vrai ^ plus forte raifon que I'un des ven- tres d'un mufcle polygaftrique pent fe contrader, tandis que I'autre ventre eft dans I'inadion •, en effec, I'intermede tendineux qui fepare ces ventres-, n'eft pas plus capable d'aiftion que le feroit un os , un cartilage, Sec. Sc il importe peu , ce me femble , que la feparation des ventres fe LiTe par i'un ou par I'autre, ces ventres n'en agiront pas moins comme des mufcles fepares , c'eft ce qu'on peut reconnoitre par experience dans les mufcles droits de I'abdomen. Si Ton fait effort pour tirer le milieu ou quelqu'au- tre point de la llgne blanche vers le cartilage xiphoide en eloignant ce point des os pubis , on eprouvera en ce moment que les ventres fuperieurs du mufcle droit places au-deffus de ce meme point , font dans im etat de contradtion marquee non-feulement par un raccourclffement tres-fiinfible , riials encore par la tenfion & la durete qu'on y fent avec la main , tandis que la partie inferieure de ce mufcle eft dans un etat d'inadjon aife k re- connoitre par I'alongement & par un moindre degre de tendon, (a) (a) Quand on fait cette experience, il faut que le pubis foit prefque au meme niveau que le cartilage xiphoTde, la raifon en eft que la fituation verticale , le poids des vilcereJ porte ptincipaiement fur la partie inferieure des mufcles de I'abdomen ; delil une diften- Son & une i^nitence beaucoup plus confidc'rables. Oft DE TACADEMIE ROYALE DES SCIENCES. 257 On dira pcut-ctrc qu'en riippofant la partie fupericure du mufcle droit "^"^^"^^^^ contraftee & raccoiircic, tandis que rintcrieure eft dans un etat contraire, . ]a tendon nc fera pas pour cela plus coniiderable dans la premiere que ^ ^ t o m i e. dans la dcrniere , etant evident que toutes les parties d'une corde dont Annie tJdd. une portion fe raccourcit , doivent fe nicttre dans une cfpece dcquilibre. Je reponds que ccia n'efl: vr.ii que quand la corde eft libre , iloltic & ^galement capable d'obcir dans toute fa longueur, au-lieu que le mufcle droit eft retenu par les mufcles obliques de I'abdomen , dont les fibres aponevrotiques ne s'attachent pas feulement aux enervations du mufcle droit , niais penetrent encore dans fon intericur , & vont le former en Fartie , en forte que la plupart des fibres charnues qui fervent ^ batir un des ventres de ce mulcle, font une continuation des fibres des obli- ques , & non de celles qui forment les ventres voihns du mufcle droit , comme je I'ai obierve & enfcigne il y a long-temps. Les enervations du mufcle droit lervent done h rendre la contradioii d'un ventre independante de la contraAion des autres, tandis que I'union des enervations avec raponevrofe des obliques retient en partie I'extre- mite du ventre coiitradc , & empeche le refte du mufcle d'obeir autant qu'il le fcroit ^ la contradion de ce ventre. On comprend de quelle utilite tout cela peut etre dans le vomiiTement, le hoquet & tant d'autres occalions qui demandent une vaiiete prodi- gieufe de mouvemens de la part des mufcles de I'abdomen. Ces remarques ferviront en meme temps k eclaircir I'ufage du digaf- trique de la machoire & celui des enervations du droit de I'abdomen , qui ont tant embarralle jufqu'ici les anatomiftes. Au refte I'indefpendance dont on a parle , n'empeche pas que les dit- fcrens ventres des mufcles polygaftriques ne fe contradent tous egalement lorfqu'il s'agit de concourir ^ la meme adlion, par exemple, de titer la poitiine vers les os pubis , ou les os pubis vers la poirrine , les enerva- tions du mufcle droit & leur union avec raponevroie des obliques de- viennent alors trcs-inutiles. L'inflexioii du tendon du digajlrique eft produitc par iin ligament an- Deuxieme Obferva- nulaire & par une aponevroje qui s'attachent i I'os hyoide. *'""• Avant que de donner les oblervations qui fondent cette propofition, je rappcllerai quelques faits egnnus touchant le ftylo-byo'idien & le di- gaftrique. Le ftylo-hyo'i'dien eft un mufcle qui s'attachc par fon extremite pofte- Id^e du StyIo-hy6T- ricure \ I'apophyfe ftyloide , & par fon extremite antcrieure k I'os hyo'i'de '''^"• vers la jondtion de la bafe de cet os avec les cornes , la diredion de ce mufcle eft oblique , il fe pone en meme temps d'arriere en avant & de haut en bas. Le mufcle digaftrique a aufli une extremite pofterieure & fuperieure Hit du D^gafirique. qui tient i la tcte prcs de la racine de I'apophyfe maftoide, & une ex- tremite ant-' ^ <^u ligament ferver dans fon etat d'inflexion-, mais s'ils empechent le tendon de s'elever^'™" '" julqu'^ un certain point, ils ne contribuent pas moins i foutenir l'os hyoide, & quoiqu'ils partagent cet office avcc quelques autres parties, on peut adurer ccpendant qu'ils y ont la principale part. Ce que nous difons i cet egard de I'aponcvrofe & du ligament annulaire doit s'entendre du Uiagedu tendon du tendon meme du digaftrique qui retient I'un & I'autre , &; les met en etat digaftrique. de retenir eux-mcmes l'os hyoide. Le coude ou tendon da digajirique ne peut fe porter de bas en haul m. Obfcrvation. fins l'os hyoide. Si I'on conddere fur des pieces feparees toralement dillequees , ou tirtfes de quelque fujet fort ext6me, les liens qui retiennent le tendon du digal'- trique, on pourra fe perfuader que ces liens font tres fufceptibles d'extcn- fion, & par confcquent trcs-difpofes i ceder h ra(a:ion du digaftiique, & i laiffer monter le tendon de ce mufcle fins etre fuivi de l'os hyoide. On s'en fera une idee bien difFerente en les examinant dans Icur fituation na- turelle , fans autre dilfed-ion que celle qu'exige la recherch.e qu'on fe pro- pofe , & fur-tout en rciterant I'obfervation llir pluhcurs fujets ; c'eft ainli que j'ai reconnu que ces liens permettent rarement au tendon de monter au-dcl^ de la quantite de demi ligne, h moins qu'ils ne foient beaucoup plus longs & plus minces que de coutume-, j'ai meme trouv^ trois cada- vres fur douze dans lelquels il m'a cte impoilibie de porter i'extenli.on ^ un tiers de ligne. J'ai encore vcrifie le fait fur I'homme vivant, car i la faveur du doigt on peut fuivre toute I'etendue du tendon du digaflrique, juger fi ce muf- cle eft en contraftion , & li cette contradtion eft plus ou moins confide- rable : or , j'ai cprouve fur deux perfonnes que la plus forte contradion du digaftriquc n'a jamais pu faire monter le tendon fans l'os hyoide, ou Eloigner le premier du dernier ; & Ton doit d'autant plus faire fonds ilir cette experience, que la facilitc de toucher en meme temps le tendon & l'os hyoide donne celle de diftinguer le moindrc moavement, ne fiit-il que d'un tiers ou dun qiurt dc ligne. ^(,^. ABREGfi DES MEMOIRES MMiiiiMMmi^— £e ligament annulaire ne fait pas fonclion de poulie , tj ne donne point au tendon du digajlrique la liberti d'ob^ir a. la contraclion du ven~ ' tre poji&ieur de ce mujde , comme tant d'anatomiftes I'avoient avance, . Annie 2744. Mon deffein n'eft pas pricifement de proiiver que Ic tendon du digaf- trique n'a jamais aiicun mouvenient fans le ligament annulaire ou I'os IV'. Obfervition. hyo'ide , ni le ligament annulaire ou I'os hyo'ide fans le tendon ; je crois au contraire que les difterentes pohtions de la tete , de I'os hyo'ide, de la machoire, de la langue, &c. doivent operer un changement \ cet egard. Je fuis trcs-pcrfuade, par exeraple , que quand on baiffe la tete, le tendon fe meut en arriere fans I'os hyo'ide , & cela par une fuite neceflaife de I'attitude que les parties font obligees de prendre •, Je crois de meme que quand on tire beaucoup la langue hors de la bouche , I'os hyoide fe porte en devant fans etre lu'ivi du tendon , & enfin que dans ces deux cas le tendon ou I'anneau font fouvent quelque mouvement I'un par rapport \ I'autre. Je vais plus loin encore , & je penfe que la contradllon de I'un des ventres du digaftrique eft capable quelquefois de tirer un peu le ten- don en avant ou en arriere , fans que le ligament annulaire foit oblige de fuivre , mais je nie que ce ligament fade par office fondion de poulie , en forte que le tendon puifle glilTer aifement d'avant en arriere, & obeir Jibrement, comme on le fuppofe, h la contradbion du digaftrique toutes les fois qu'il s'agit d'abaiffer la machoire inferieure. Voici mes raifons , 1°. la portion du tendon comprife entre I'anneaii & le ventre anterieur du digaftrique n'a le plus fouvent qu'environ une ligue & demie d'eten- due, quantite infuftifante pour fournir au jeu que le tendon devroit faire dans I'anneau-, i°. I'aponevrofe du digaftrique unie comme elle eft avec k partie inferieure du ligament annulaire & avec I'os hyo'ide, ne laifTe pas au tendon la libertc d'obeir parfaitement \ la contradtion du ventre pofte- rieur de ce mufcle •, 5°. on ne trouve ici ni ces glandes, ni cette humeur onftueufe que la nature a placees dans tous les anneaux , dans toutes les gaines, les gouttieres, &c. dcftinees \ laiffer gliffer les tendons des muf- clesi 4°. quand on tire le tendon vers I'apophyfe mafto'ide pour voir le mouvement qu'il peut faire dans I'anneau, & qu'on a foin de le fiiire tou- jours partir de fa lituation naturelle, on eprouve en reiterant I'experience fur plulieurs cadavres, que ce mouvement eft d'ordinaire trcs- mediocre , fouvent extremement petit, quelquefois infenlible, & toujours infuffilant pour remplir les fonttions qu'on lui a attribuees : voilk ce que j'ai vu en examinant ce fait avec les attentions dont j'ai parle au fujet de I'obferva- tion precedente. Peu importe que ce mouvement paroifl'e dans quelques autres cas un peu plus conliderable , ce qui eft le plus fouvent impoffible ne peut pas faire regie dans la nature-, d'ailleurs cela ne vient ordinaire- ment que de ce qu'on fait ces recherches fur des parties deplacces, deta- cht-es ou alongees par la dilledion-, de ce qu'on prend pour modele cer- tains cadavres oii tout fe trouve dans un extreme relachement , & fur-tout de ce qu'on confond enfemble deux mouvemens diflerens. Pour cviter cette meprife il faut favoir que le tendon ^tant dans fa fituation naturelle, peut aufli bicn fe mouvoir d'airicre en avant, que d'avant cu arriere, ce I DE L'ACADEMIE ROYALE DES SCIENCES. 16} <)in fait cju'aprcs avoir etc portc en avant., Ij rctradlion paroit enfuite plii<; ^"^j i. i — coniiderable , paree qn'il y a iin retour qui ne doit pas ctrc compfe ; A n a t o m i t. 5°. le Dgament annulaire manque affez fouvent , on du moins il fe reduit h un petit nombre de fibres evidemment incapables de foutenir I'effort du Annt'e ij^^- digaftrique, & de fairc fondlion de poulie. Oil voit done que la principale delliiiation du ligament annulaire eft de reteiih: ou d'aider ^ retciiir le tendon du digaftrique : n'y eiit-il que les varictcs prodigieufts qui s'obfervent par rapport ^ ce ligament , e'en eft airez pour denioiitrer qu'il ne (ert qu'i dcs ufages qu'il partage avec d'au- tres parties qui peuvcnt aifcment le remplacer, au-lieu qu'on ne voit rien qui toit capable de faire fondlion de poulie dans plulieurs cas dont nous avons parle. De lavans anatomiftes qui nient I'exiftence du ligament annulaire ou de la poulie , prdtendent que raponevrofe ou les autres liens qui vont du tendon \ I'os hyo'ide , peuvcnt tenir lieu de poulie , parce qu'ils font , difent-ils , affez laches pour laifTer an tendon la .liberte de fuivre la con- tradion du ventre pofterieur du digaftrique, fans que I'os hyoide bouge de (:i place. Je reponds en nisnt le fait. Je fonde ma negation fur tout ce qui a ete dit pour etablir la troilieme obfervation. Ces liens ne font pas plus dif- )ofes \ ceder quand on les tire obliquement d'avant en arriere , fuivant a diredion du tendon du digaftrique , que quand on les tire de bas en hauf, on trouve de part & d'autre la meme facilite ou la raeme diiKcuItc, comme je I'ai fouvent eprouve fur les parties en place , du moins jc n'.-ii pas apper9U de difference ma;qu^e \ cct egard ; ainli mettant ^ part le petit mouvemcnt que le tendon fait fouvent dans I'anncau , j'ai reconnu dans la plupart des cadavres , que ces liens ne pouvoient, malgre i'effort du digaftrique en contradlion , donner ^ la retradion du tendon qu'envi- ron demi-ligne , & dans quelques-uns moins d'un tiers de ligne-, mais quand ces liens feroient toujoufs en etat de s'ctendre fuffilamnient , cela ne feroit jamais rien d''equivalent \ une poulie, la railon en eft evidente, c'eft que la poulie ne diminue pas la force abfolue d'une eorde : li le ventre pofterieur du digaftrique fe contrade, paf exemple, avec la force do cent livrcs, fon tendon paflant par une poulie agira lur la niachoire infericure avec la force de cent livresi il n'en eft pas de meme fi ce ten- don s'accroche en chemin , & qu'il doive tirer avec lui non-feulement h. niachoire inf^rieure, mais encore des aponevrofes , des ligamens, &c. qui reliftent confidcrabiement , car il eft evident qu'il y confumcra une partie de fa force , & que celle qui lui reftera pour agir fur la niachoire infe- xieure , fe trouvera moindre que n'eft celle du ventre pofterieur du di- gaftrique : il feroit fort aife d'en donner une demonftration rigoureufe, tiree des principes de mechanique , fi une verite auffl fenlible pouvoit en avoir befoin. On ne gagneroit meme rien \ fiippofer que ces liens cedent aifement \ I'adtion du ventre pofterieur du digaftrique , car cette aiflion tendant \ faire porter le tendon d'avant en arriere & de bas en haut , ces liens fe prcteront au mouvenient eu haut comrae au mouvcment cD ' i6^ ABREG^ DES MfiMOIRES Ill I »^M^ arriifre ; d'oii il s'enfuivra , i °.. que le digallrique le redreffera , & tju'il per- dra en fe redreffaiit une partie de (a tciilion , & par confequent line partie A N A T o M I I. jj^ 1.1 force abfolue avec laquelle il agiroit fur la machoire •, i°. que fa Anne'e 1747. diredion s'approchera de I'axe du mouvement d'abailfement de la ma- choire inferieure , d'oii il s'enfuivra que la force abfolue qui lui refte , contribuera moins ^ cet abailfemcnt : ainfi foit que Ics liens reliftent ou qu'ils ne rehftent pas, une bonne partie de la force du digalhique fera neceflairement perdue pour la machoire. La nature eft trop fagc pour n'a- voir pas prevu ces mouvemens, elle fait qu'une pOulie remedie "k tout; elle s'en fert conftaniment toutes les fois qu'il eft queftion de changer brufquement la direiftion d'uu tendon fans gener Ion mouvement ordi- naire , car ces gaines, ces anneaux , ces couliffes qu'on voit de toutes parts, ne font, pour ainli dire, que des poulies qui ne tournent point-, & puifque la nature n'a pas trouve 'k propos d'en donner une au tendon du digaftrique, ou que ce qui peut la reprcfenter eft infuififant, & man- que meme tres-fouvent, c'eft une marque certaine que ce ventre & ce tendon ne font pas faits precifement pour abaiffer la machoire inferieure ; j'ofe dire que cet argument feul doit paffcr pour une demonftration dans I'efprit de ceux qui ont peu medite fur I'economie animale : cepcndant je fuis bien aife d'avertir que je n'ai beloin d'aucune des obfervations precedentes , pour prouver que le ventre pofterieur du digaftrique a un iifage different de celui qu'on lui attribue, mais cela viendra dans la fuite de ce memoire. V. Obfervation. Le mufcle jlylohyoidien 6' le ventre pojle'rieur du digajlrique peuvent etre conJidMs comme im meme mufcle a deux tetes. La verite de ce paradoxe reiulte evidemment des obfervations que j'ai faites fur ces deux mufcles : on a cru jufqu'ici que le digaftrique tiroit uniquement fon origine de la racine de I'apophyle maftoide, que k ten- don mitoyen n'atoit forme que des fibres qui viennent du ventre pofte- rieur de ce mufcle , & que ce tendon traverfoit le ftylo-hyoidien , ou palfoit fenlement ^ cote lans communiquer plus particulierement avec lui: voici des faits qui renverfent toutes ces idees. 1°. Le tendon du digaftrique ne traverle pas entieremcnt le corps du ftylo-hyoidien , le ventre de ce dernier mufcle s'etant ouvert infcrieure- ment pour recevoir le tendon du digaftrique, paroit ^ la verit6 fe fendre fuperieurement & fe partager en deux faiiceaux charnus, pour laiffer for^ tir par leur ecartement le tendon du digaftrique , comme tous les anato- iniftes I'ont affure ; mais j'ofe dire que ce ne lont que de fauffes apparen- Le iiylo-hyoidien ces : le ftyle-hyoidien ne fe fend pas fuperieurement, il change feulement lie le fend pas fup^- jg nature , il devient en partie aponevrotique : le tendon du digaftrique iieurement. ^^ perce pas la partie fuperieure du ftylo-hyoidien, il y demeurc encore enfeveli , mais couvert feulement de la partie aponevrotique de ce muf- Nouvellc apon^vrofe cle : voici comment cela fe fait. Les fibres charnues du ftylo-hyoidien qui it ce mufcle. repondent ^ I'extremitc fuperieure de la fente apparente , deviennent d'abord tendineules ou aponevrotiques, & fans changer de diredion elles fiiivent le tendon du digaftrique. Le relidu des fibres du ftylo-hyoidien fe reduit 1 DE L'ACADEMIE ROYALE DES SCIENCES. 2^5 vidait ^ deux faifccaux charnus cjui batilient Ics cotes de la prt'tfndiif fente, & qui L'liicm cch.ippcr de nouvellcs fibres tendiueufes , pour con- A n a t o m i e courir avec les prccedentcs i la forination de raponeyroie qui couvre le tendon du digaftrique; ces faifceaux s'ctant avanccs I'un extcrieurement , Annie 1744- I'autre intcrieuremcnt vers la jondlion de la bafe avec les corncs de I'os hyo'ide , produifent un petit tendon qui fe joint au ligament annulaire , ou i raponivrofe du digaftrique , Si s'infcrc h I'os liyo'ide. L'aponcvrofe du (lyloliyoidii.'n eft ordinairement fort mince, en lorte qu'on croiroit que le tendon du digaftrique fe prcfente il nud , fi Ton n'avoit pas la precaution de le fuivre depuis le venire poftcrieur jufqu'au coude , & d'en fcparer tout ce qui appartient au ftylo-hyoidien -, fouvent cette aponevrofe, au-lieu de former un corps continu, fe reduit h quel- ques faifceaux tendineux, do»t les efpaces font remplis par r.ne mem- brane ccllulcufe fort fine : en revanche jc I'ai trouvee dans deux ou trois fujcts fort epaiife, fort aifee h reconnoitre au premier coup d'ceil, & cou- vrant i I'ordinaire le tendon du digaftrique. L'aponcvrofe dont nous parlons m'a paru manquer quclquefois , du moins je n'ai pu voir autre chofe en deux occalions , qu'une membrane mince fans fermete & fans aucun tiflu fibreux apparent. io. Le digaftrique a plus d'une origine-, outre celle que tout le monde Le digafiriquc tire connoit , j'en ai dccouveit une feconde qu'il tire d.' I'apopliyie ftylo'ide , P»f"- "is fon origine ou, ce qui revient au meme, du mulcle Ityio-hyo'idien. Toutes les fibres -°^^''^' qui batiifent le corps de celui-ci n'aboutiflcnt pas k I'os liyo'ide , une partie fe joint au tendon du digaftrique, & le porte avec lui d'arriere en avant pour I'aider h former le ventr? anterieur de ce mufclc Ces fibres vicnnent de dilferens points du ftylo-hyoidien , quelquefois de tous les points de la furface qui embralie le tendon du digaftrique, & particulie- rement des endrcits voilins de celui oii ce mufcle lemble fe fendre pour laillcr fortir le tendon-, elles fe tcrminent de m;me dans dilferens points, & fouvent dans prefque tous les points de la portion du tendon cacliee dans le ftylo- hyoidicn. Nous avons vu que le mufcle ftylo-hyo'idien fe termine par un tendon qui va s'inlerer ^ I'os hyoide, & par une aponevrofe qui garnit la fente apparente de ce mufcle , & qui couvre en cet cndroit le tendon du di- gaftrique ; cette aponevrofe grodlt encore le nombre des fibres du ftylo- hyoidien , qui voBt dans le tendon en queftion : aprcs qu'elle a un peu accompagni ce tendon , fes fibres vont faire corps avec lui , & fe conti- nuent comme les precedentes jufqu'au ventre antcrieur du digiftrique qui en eft en partie formd ■, j'ai vu deux fois cette aponevrole fe terminer dans le ventre antcrieur du digaftrique , fans avoir feulement contracle d'adherence avec le tendon ; j'ai vu aufli deux fois cette aponevrofe ne faire qii'environ une ligne de chemin avec le tendon, dii digaftrique, & I'aban- donner tout d'un coup en formant une efpecc d'arcade ou d'anncau , qui laiifoit fortic le tendon de ce mufcle , de la meme maniere que I'anncau de I'oblique externe de I'abdomen lailTe fortir le cordon des vaiffeaux ipermatique •, les piliers de cette arcade fe terminoient h I'os hyo'ide. Tome IX. Partie Franfoi/e. Li 1(5(5 ABREGE DES MEMOIRES Les fibres que le ftylo-hyo'idien fournit avant qu'il fe difpofe h. former A • A o \t I F ''^ fente app.irente , confervent leur nature clianuie Jufqu'h ce qu'clles faf- ■ lent corps avec le tendon ; J'en ai vii tantot line multitude prodigieufe , Annh 2744. & tantot une quantity aflez mediocre , elles m'ont auffi paru manquer quelquefois : il n'en eft pas ainii de celles qui fe detachent des endroits voilins de la fente apparente, je les ai conftamment oblervees, elles quit- tent Icur nature cliarnue avant de fe Joindre au tendon du digaftrique, oil elles fe tcrminent fouvent par faifceaux , tantot plus , tantot moins confi- derables , il y en a quelquefois qui meriteroient par leur grolleur Ic noin de tendon. II eft trcs-aife de fuivre ccs faifceaux ou ces fibres juf- qu'au ventre anterieur du digaftrique , oil elles reprennent leur nature charnue. Cette orJgine eft On fait que le ftylo-hyoidien ne s'ouvre pas toujours pour embraffer cciiltanie. jg tendon du digaftrique, & qu'il va quelquefois julqu'i los hyoide lans le rccevoir •, j'ai ete long-temps curicux de favoir li la communication dont j'ai parle , avoit lieu dans ces circonftances comnie dans les autres ; enfin j'ai eu occafion de verifier le fait fur deux cadavres , dans I'un & dans I'autre le ftylo-hyoidien alloit de I'apophyle ftyloide k I'os hyo'ide parallelement au digaftrique, & place un peu au-dcflbus du ventre pofte- rieur & du tendon de ce niufcle : aprcs avoir fait prcs des deux tiers de fa route , il lailfoit echapper quantitd de fibres qui le deiachoient de fa partie fuperieure , & fe terminoicnt aufli-tot dans la partie du tendon tournee du cote de ce mufcle •, ces fibres faifoient environ le tiers du ftylo-hyoidien dans un fujet , & le quart dans I'autre. Maintenant pour demontrer que le ftylo-hyoidien & le ventre pofte- rieur du digaftrique peuvent & doivent nieme etre coniidert;s comme un mulcle biceps ou ^ deux tctes, je ii'ai bcfoin que de rappeller une de- finition de nom. Deux mufcles qui fe reunilient en un leul ventre oil en un feul tendon, font un mufcle ^ deux tetes , & I'on peut dire que ce titre eft d'autant plus legitime , que la reunion fe fait plus loin de leur extremite : or le ftylo-hyoidien fe reunit par une bonne partie de fes fibres avec le tendon qui vient du ventre poftcrieur du digaftrique , & la reunion fe fait aflez loin de I'extremitc; d>! ftylo-hyoidien , & beau- coup plus loin encore de I'extrtfmitc; du digaftrique : on ne peut done iiier que les deux corps mufculeux dont je parle, ne forment un vrai biceps. On dira peut- etre qu'il n'eft pas jufie de comprendre fous ce titre la portion du ftylo-hyoidien , aui continue fa route pour le terminer ^ I'os hyoide , j'y confentirai fi Ton veut , pourvu qu'on m'accorde que cette portion fiit corps avec I'autre depuis I'apophyle ftyloide jufqu'^ la fepa- ration : il y a plus , la portion de ce mufcle qui s'infere ^ I'os hyoide , fe confond vers fa fin avec I'aponevrofe du digaftrique , ce qui pourroit faire encore ^ la rigueur un nouveau titre pour leur meriter le nom de biceps. II refulte de tout cela, 10. que les fibres du ftylo-hyoidien qui vont dans le tendon mitoyen , ont deux parties charnues ou deux ventres comme ceux des autres fibres du digaftrique; favoir, un ventre pofterieur DE L'ACADliMIE R0YAL.1 DliS SCIENCE^;. iCj qui s'dtend depuia I'ipophyfe ftyloidc jiifijiri Jcur union , & un ventre i ■ im antcricur qui fait partie de ccliii dii dig.iftriqiie. lo. Que le dicaftrique a deux vcnties poftcrieiirs , & qui le prendre ^ '^ ^ ^ o m i h. felon ion tout, il merite Ic nom de mufcle trigaflrique. Annie i'/aa. JO. Que le ftylo-hyoidien & le ventre pofterieur du digaftrique font dcftines h. agir enfemble, & ^ produire I peu-prd'S Ics mcnies effets. Ouand , ^? ('s\o-h^oi&(tn ce ne leroit pas une regie i I egard dcs mulcles i plulieurs tctcs , c en rieur du digaftriquc fcroit affez pour fonder cctte propofition , de favoir que le llylohyoidieii agiffem de concert. & le digaflrique , condderes depuis Tos temporal Jufqu'a I'os hyoide, ont la meme diredion •, que I'un eft enfermc dans I'autre , qu'ils font tons deux attaches i I'os temporal par leur extrimite pofterieure , & k I'os hyoide par I'extremite anterieure , ou du moins par une partie de I'extre- iiiite anterieure-, niais ce qui ne feroit peut etre qu'une opinion , devient un fait evident qu.ind on conhdere I'union qui rcgne entre ces deux nuifcles. Perlonne n'ignore les vues que la nature s'eft propofees dans la conllrudion des mufcles \ deux ou i plufieurs tetes , c'eft d'unir plus in- timement I'adion de leurs diffiirentes parties; & ces vues font ici d'autant plus marquees , quelle ne s'en ecarte pas menie lorfque le tendon du di- gaftrique fuit Ion chemin fans pen^trer le ftylo hyo'idien. L'os hyoide partant de fa fituation naturelle , ne fauroit fe mouvoir VI. Otfervation. d'avant en arrlere. Perfonne n'ignore que l'os hyoide peut fe porter d'arriere en avant , & fe remettre enfuite en fituation , mais ce retour i part , l'os hyoide a-t-il encore un mouvement d'avant en arriere? c'eft, ft je ne me trompe, ce qu'on fuppole communement , & que je pretends mipolFible. Je me fonde fur la lituation de l'os hyoide , cet os ne peut fe mouvoir en ar- riere qii'autant que les extremites pofterieures de fes grandes comes font en etat elles-memes de s'y porter •■, or , c'eft prccifement ce qui ne fau- roit etre, la raifon en eft qu'elles font appuyees fur le devant, tirant vers les cotes des vertcbres du cou , ou , ce qui revient au meme , fur les portions tendineufes des mufcles grands droits anterieurs de la tete , en forte qu'elles ne peuvcnt fe mouvoir en arriere fans forcer leurs appuis , deli vicnt qu'on a beau fuivre du doigt l'os hyoide dans tous les mou- vemens qu'il fait , on ne trouve jamais qu'il fe meuve d'avant en ar- riere , i moins que ce ne foit par un ample retour dans fa premiere fituation. On inferera deli que le mufcle ftylo-hyoidien fert bien i remettre l'os hyo'ide , & i le porter de bas en haut , &c. mais non pas i le tircr de fi fituation pour le mouvoir d'avant en arriere. Quand on abaijfe la mdchoire infirieure , l'os hyo'ide fe nieut ou ^'I^ Obicrvation. tend a fe mouvoir de haut en bas. M. Monro a oblerve que l'os hyoide defcend quand on abaifTe la ma- choire inferieure , je n'olerois dire que cela arrive toujours , mais je lais bien que cet os ne s'eleve jamais en parcil cas , qu'il montre au contraire une grande pente i defcendre, & qu'il defcend en eftct trcs-fenliblement lorfqu'on ouvre la bouche en tenant la tcte un pcu haute ; lorlqu'on abaifle LI ij 1(58 ABREGi DES M^MOIRES ■■iiMiiiniiiiMw la machoire malgre quelcjue obftacle exterieiir qu'on liii oppofe j ou lorf- qu'on force un pen rouvertiire de la bouche , la defcente de I'os hyoide A N A T o M I I. y^ dans ce dernier cas h environ denii-pouce , comme il eft aife de le Ann^e ij^^. fa voir par experience. Telles font les obfervations propres ^ appuyer ce que je vais dire des caiifes qui produifent le mouvcment de Tune & de I'autre machoire , & qui font I'objet principal de cet article. Pour proceder avec ordre, Je dois diftinguer ici deux genres de mou- vemens , le premier eft celui que les deux machoires partagent cntr'elles, c'eft le mouvemcnt qui fait ouvrir ou fermer la bouche i le fecond eft celui que la machoire infericure execute en fon particulier , favoir , le mouvement horizontal en devant , en arriere & vers les cotes. Parmi tant de mufcles qui s'attachent \ la machoire infericure ou ^ k tete , le pcaucier & le digaftrique out ete les feuls qui aient para capables de contribuer J* ouvrir la bouche, on a remarqus enfuite que I'aftion du peaucier fembloit etre purement mechanique , on a cru fur cela devoir fe reduire au digaftrique ; mais en convenant qu'il etoit le principal ou meme le feul abaiffeur de la machoire infericure, on a penfe alfez diftcremment , fur I'ufage de la conftruftion finguliere de ce mufcle, de I'inflexion de fon tendon , de fa liaifon avec I'os hyoide , &c. Enfin M. Monro s'eft elevc confre toutes les idees qui avoient eu cours avant lui •, il nie [a) que le digaftrique contribue en quoi que ce foit au mouvement de la machoire , & foutient qu'il fert uniquement i la deglutition en elevant I'os hyoide & le larynx -, il croit done que I'abaiflement de la machoire infericure ne reconnoic d'autre caufe que la contradion des rnufcles de I'os hyoide , de la langue & du larynx. M. Winflow a pris la plume pour defendre le fentiment recu , & retablir les droits du digaftrique attaques par M. Monro : c'eft 1^ I'objet d'une favante diflertation , ou I'efprit de recherche & I'amour du vrai fe font egalement reraarquer. Mouvement des deux Pour faire entendre ce que je penfe des mufcles deftinss ^ ouvrir k mathoires pour I'ou- ijQ^jche , je ne faurois me difpenfer de rappejler ici ce que j'ai demontre vertuiede a ouc e- j^j^j jg premier article de ce memoire , favoir, i°. que quand la bouche s'ouvre , les machoires fuperieure & infericure font mues par un feul & meme afte de la volonte, I'une de haut en bas, & I'autre de bas en hautv 2°. que le mouvement des deux machoires fe fait ^-peu-prcs fur le meme axe; 5°. que I'une & I'autre conttibuent enfemble ^ ouvrir la bouche. Id^e de ce mouve- Ce mouvement eft beaucoup plus compofe qu'on ne le penferoit d'a- >n«n^ bord •, j'ai demontre dans mon memoire fur le mouvement de la machoire infe'rieure J que par I'abaiflement de cet os {b) les condyles lortent des cavit^s glenoides, & fe portent d'arriere en avant, tandis que le menton & le corps de la machoire fe meuvent de haut en bas; en forte qu'on peut confiderer la machoire infericure comme un levier k deux bras qui fc (a) Dans deux Dinertations tres-intereffantes , dont I'lUi des principaux objets eit I'u- fage du digaflrique. Voyez les EJJais if Obfiryauom dc JMidecine di la SoiUU d'Edimkuig, Tome I, art. 11,6' Tome III , an, 13. (ij Voyez ci-delTut. DE L'ACADfiMIE ROYALE DES SCIENCES. 160 meuvent en fens oppofcis en tournant aiitour d'un axe variable , qui a fcs ~ poles cntrc le condyle & Tangle de la mkhoire , dans deux points fort a voilins des branches de cet os. Piiifque CCS condyles gliffent alors fur la tete, & fe meuvent d'arriere Ann{e 1^44. en avant, il eft evident que la tete tourn.int fur le mirme axe, doit gliffer de fon cote d'avant en arriere fur Ics condyles : fi Ton doutoit dc cc fait , on pourroit aifement s'en convaincre en cxaminant cc qui arrive lorfque la bouclie s'ouvre par le mouvcmcnt feul de la machoire fupc- rieure, comme dans certains cas dont il a etc parle au commencement de ce mcmoire, (a) car portant alors le doigt entre la raciiie de rapophyfe maftoi'de & le condyle de la machoire inferieure , on reconnoit lur le champ le mouveraent d'avant en arriere de la tete qui glifle fur ce con- dyle, en forte que la cavite glenoide du temporal eft oblig(5e de I'aban- donner. Cela pofe , j'e dis que les mufcles qui fervent a ouvrir la bouche font de deux fortes , les uns font glilfer les condyles fur la tete par un mou- vement d'arriere en avant, & la tete fur les condyles par un mouvement d'avant en arriere ; les autres ecartent les deux machoires , & font porter Tinfericure de haut en bas, & la fuperieure de bas en haut. Les mufcles qui font gliffer la machoire inferieure & la tete reciproque- Les pt^rygotdieiu ment I'une fur i'autre , font les deux pterygoidiens externes qui tiennent externes cm part !i chacun par I'extremite anterieure ^ I'apophyfe pterygoide , & par I'extre- '^^ '"0"^«™e°t. mite pofterieure au cou de la machoire inferieure , & ^ la partie anterieure du bord de la lame interarticulaire. L'ufage que j'attribue ^ ces mufcles ne fauroit fouffrir aucune difficulte, la moindre teinture d'anatomie fuffit pour faire connoitre qu'ils ne peuvent agir fans faire effort pour tirer en meme temps les condyles d'arriere en avant, & la tete d'avant en arriere; il eft meme certain qu'ils font les feuls mufcles qui puiffcnt produire cet effet fans empecher Tecartement des deux machoires : tous les raifonne- mens ne fauroient rien ajouter ^ la force de la demonftration qui refulte de ces reflexions. Voyons i prefent quels font les mufcles qui fervent ^ ecarter les deux machoires, ou ^ mouvoir I'inferieure de haut en bas, & la fuperieure de bas en haut. On ne fauroit douter, apres les faits qui ont ete etablis (fans farler de ceux que nous rapporterons dans la fuite de ce memoire) que ecartement des deux machoires ne foit I'effet de la contraction de plu- Mufcles deftir^s k fieurs mufcles de I'os hyoide & du digaftrique. C'eft ce que je vais faire ^"r'er les deux mi- voir en commen^ant par ceux de I'os liyoide. choires. Je dis 1°. que le mylo-hyoidien , Its deux genio-hyoidiens inferieurs, Les mufcles dc I'os & les deux genio-hyoidiens fuperieurs, (b) tous mufcles attaches pofte- '"y"''^* fervent au rieurement i I'os hyo.de, & ant^rieurement i la machoire inferieure, fer- j^jXrer"'" '"'"'' vent ^ abaiffer cette machoire ; 2°. que le ftylo-hyoidien fert -i elever la Quatre propofmi,ns machoire fuperieure i 3°. que tous ces mufcles ont un meme point fixe,i> ce fujct. (a) Voyez ci-delTus. (O Les Anatoraiftes les confondem ordioairement avec les gJnya-^oJlis. -0 A B R E G E D E S M E M O I R E S iqiii eft I'os hyo'ide; 4°. que le mylo-hyoidien & les genyo-hyo'icliens , peuvent aider dans cjiielques occalions k elever la machoiie fuperieu- ' " A T o M 1 E. j.g^ j^^jj q^jg jg ftylohyoidien ue faiiroit jamais contribiier i abaiirer I'iu- Ann^e 1^44. ferieure. J'ai dit 1°. que le mylo-hyo'idien & les genyo-hyoi'diens font abaiffeurs Prcuves e a pre- j^ j^ machoire inferieure : je n'ai befoin pour le prouver invinciblemciit, que des deux oblervations luivantes : i . celt un fait que ces mulcles font raccourcis, que leur extremite anterieure s'approche de la pofterieure par rabaiffement de la machoire. Pour s'en affurer , on n'a qui porter les doigts fur les points voifms de leurs deux extremites, ou prendre la dif- tance du menton h I'os hyoide , on eprouvera que cette diftance diminue trcs-fenfiblement , que le menton s'approche de I'os hyoide, & que tous ces mufcles deviennent plus courts-, i°. li I'on place le bout du doigt in- •dice fur le mylo hyo'idien & les genyo-hyo'idiens qu'on trouve trcs-aife- ment entre les deux digaftriques prcs de la bale de I'os hyoide, on y fen- tira une durete & une renitence manifeftes, & toujours proportionnees k Teffort qu'on fait pour abaiffcr la machoire; j'avertirai feulement que pour bien faire ces oblervations-, il faut non-feulement oppofer une reliftance exterieure au uiouvement qu'on a en vue , mais encore faire agir les mul- cles conime par fecoulles : c'eft un precepte que je fuppoferai toujours dans la fuite de ce memoire , lorfqu'i! s'agira de pareils taits. M. Monro affure que quand on abaiife la machoire inferieure , I'os hyoide fe porte en devant, 8c par confequent vers le menton -, d'ou I'on pourroit, ce lemble, inferer que la contradlion du mylo-hyoidien & des genyo-hyo'idiens fert bien moins i tirer le menton vers I'os hyoide Sck abaiffer la machoire , qu'i tirer I'os hyoide vers le menton , mais il eft: certain que le fait avance par ce celebre anatomifte eft contraire i I'expe- rience, comme je I'ai reconnu une infinite de fois : on a beau porter le doigt fur I'os hyoide , on n'y trouve jamais en pareil cas la moindre trace d'un mouvement qui tende k le rapprocher du menton ou de la machoire inferieure , on eprouve au contraire tres-fouvent qu'il s'cn eloigne fenli- blement en fe portant de haut en bas ; {a)i\ eft done evident que ces mufcles, dont la contraftion & le raccourciffement font fi manifeftes, ont leur point fixe ^ I'os hyoide, & par confequent leur point mobile a la machoire. II n'en fera pas de meme fi I'on vient i oppofer un obftacle in- vincible k I'effort qu'on fait pour I'abaiffer , car la machoire inferieure ctant une fois fixee, I'os hyoide deviendra /7oj/2f mobile, & fera tire vers le menton , comme je I'ai fouvent obferv^ ; mais ft I'obftacle qu'on op- pofe n'eft pas aflez conliderable pour empccher la machoire de defcendre, I'os hyoide & le menton s'approcheront niutuellement I'un de I'autre , & alors le point fixe fera place entre ces deux termes -, c'eft ce qu'il eft aife de reconnoitre par experience, & qui a vraifemblablement tronipe M. Monro, quoiqu'il n'arrive jamais rien de femblable ^ I'os hyoide loriqu'cn laiffe la machoire inferieure libre. (il) Voyez la feptieme obfcrvation. DE UACADEMIE ROYALE DES SCIENCES. -, J'ai dit 2°. que le mufcie ftylo-hyo'idicn fert k clever la machoire ftipd- ^^ ■— rieurc. Pour ctablir cette proportion, je dois rappcilcr ici que le mouve- mciit des deux machoires pour I'ouverture de la bouche eft I'effct d'un ^ ^ '* ^ o m i e. feul & meme ade de la voioiite, (a) que I'une & I'antre fe mcuvcnt fur y4nn(e 1744. le meme axe, & entiii que le mouvement de la machoire funerieure eft trcs-diffcrent du mouvement nature! de la tete , & rout-Jl-f.iit independant ^j'^"^"'' ^'^ '=" '«- de la contraftion des nm(c\es Jplcnius , compkxus (b) 8c de les autrcs '"°^"'""^"' elcvateurs ; cette reflexion fuflit h un anatomiite pour lui fairc penfcr que 1 elevation de l.i machoire fuperieure doit etre I'clfet dc la contradion du ftyiohyo alien & du ventre pofterieur du digaftrique; mais il nc s'agit k prefcnt que du premier. Suppofons pour un moment que le mufcie ftylo-hyo'idien , au-lieu dc fe terminer h I'os hyoi'de , fe prolonge jul'qu'au menton , il eft evident que ce mufcie vcnant i fe contracter, tcndra h eloigner la machoire inferieure de la fuperieure, & la fuperieure de I'infcricure, c'eft^-dire, qu'il fcra un effort egal pour abaiffer la premiere & pour clever la fecondc. II n'eft pas moins evident que li les deux machoires obeilfent egalcment, Ics deux cxtremites de ce mufcie attachees I'une au menton & T'autre a i'apophyfe ftyloide du temporal , (eront tirees vers le milieu qui tiendra lieu de point fixe ; dans cette fuppolition , la portion anterieure de ce mufcie abaiffera la machoire inferieure , tandis que la portion poftsrieurc elevcra la ma- choire fuperieure : tout ce que je veux inferer deli, c'eft que le flylo- hyoidien tend en effct i clever la machoire fuperieure, & qu'il ne (auroit ramener fon extremite poftericure vers I'anterieure , c'cft-i dire , I'apophyfe ftyloide vers I'os hyoide, fans produire cette elevation : cela pofc, voici les preuves cj^ la propolition que j'ai avancee. 1°. Un mufcie quclconque lert reellement h produire tous les niouve- mens auxquels il eft propre : or, nous venons de voir que le ftylo-hyoi- dien eft trcs-propre ^ clever la machoire fuperieure , il contribue done en effet h fon elevation , cette preuve peut etre prcfentee d'une autre ma- niere. Un mufcie quclconque ctant attache par fes deux extremites il deux OS differens , tout mouvement de I'un ou de I'autre de ces os qui fait porter une de ces extremites vers I'extremite oppofee , depend , au moins en partie, de la contradion de ce mufcie, la regie eft peut- etre nouvelle, mais qu'on y faffe attention , on ne trouvera prefque rieji dans tout ce que Ton a decouvert jufqu'ici fur I'ufage des differens mufcles du corps, qui ne foit en meme temps une confequence & une preuve de ce prin- cipe : or , c'eft un fait que I'clevation de la machoire fuperieure poite I'extremite poftericure du ftylo-hyoidien vers I'extremite oppofee-, done la contradtion du ftylo-hyoidien fert ^ elever la machoire fuperieure. 1°. II eft certain que lorfqu'on ouvre la bouche , le ftylo-hyoidien fe met en adtion , cela eft demontre, 1°. parce que fans cela I'os hyoide fe- roit mu d'arriere en avant par le mylo hyoidien & les gcnyo-hyoidicus, (a) Voyei; le premier article de ce M^moire. (i) Voyez cideffus. 2-1 ABREG^ DES M^MOIRES rmaata i^ qui 116 foiit pas iTioins d'effort pour tirer I'os hyo'ide vers le menton ,' que le menton vers I'os hyoide ; i°. parce que fi Ton porte le doigt fur ' le (lylo-hyo'idicn , on trouve en ce momeHt ce mulcle dur , tendu , con- .'innn'e 1744. tride; il eft vrai que le tendon du digallrique f.iit, pour ainli dire, corps avec le ftylo-hyoidien , & qu'il eft mal-aife de diftinguer I) ce n'eft pas la tendon du tendon , caufee par la contraftion du ventre pofterieur du di- gaftrique, qui fe fait fentir au doigt plutot que celle du mufcle ftylo hyoi- dien , raais j'ai demontriS dans la cinquieme obfervation que ces deux mul- cles n'en forment qu'un ^ deux tetes , & qu'ils ne doivent agir que de concert-, ainfi la contradion du ventre pofterieur du digaftrique prouve- roit elle-meme celle du ftylo-hyoidien. D'ailleurs j'ai cru reconnoitre alTcz diftindement que la inafle qui durcit a plus de volume que le tendon feul, il eft done conftant que le ftylo-hyoidien eutre en contraftion au moment dont nous parlons-, mais il eft de fait que I'extremite anterieure de ce mufcle attachce ^ I'os hyo'ide, n'eft nullement rapprochee de la pof- terieure, (a) qu'au contraire, Tcxtreraite pofterieure attachee ^ rapophyfe ftyloide, eft ramenee vers I'anterieure, & que ce mouvement eft neceffai- rement fuivi de I'eievation de la machoire fuperieure-, done le ftylo-hyoi- dien fert ^ elever cette machoire. Pieuves de la troi- J'ai dit 5°, que tous ces mufcles, tant le mylo hyoidieh & les genyo- fieinc propofition. hyo'idiens que les ftylo-hyo'idiens , avoient leur point^fixe h. I'os hyoide, ccla eft evident, puifque cet os ne s'approche ni du menton ou de la ma- choire inferieure , ni de Tapophyfe ftyloide, & qu'il n'obeit par confe- quent k la contradlion d'aucun de ces mufcles. Ccpendant il n'y a pas lieu de douter que ces memes mufcles agiffant de concert , ne tendcnt h ele- ver & h porter en devant I'os hyo'ide, mais cet os eft retenu par les hyo- tyro'idiciis , foutenus des fteino-tyro'idiens, par les fterno-hyoidiens & les cofto-hyo'idiens , qui n'empechent pas feulement Tos hyoide de monter, mais encore I'obligent fouvenc k defccndre : (b) dek vient qu'on les fent avec le doigt, durs, tendus, contracftes. . J'ai dit 40 , que le mylo-hyoidien & les genyo-hyo'idiens aident en cer- tains cas les ftylo-hyoidiens k elever la machoire fuperieure, mais que les ftylo-hyo'idiens ne peuvent jamais aider les premiers^ abaiffcr I'infcrieure : c'eft ce que nous allons dc5mon:rer. II peut arriver , & il arrive meme quelquefois , que la machoire infe- rieiire eft fixee , & que la bouche s'ouvre par I'eievation fcule de la ma- choire fuperieure i il peut fe faire de meme que la machoire fuperieure foit fixee , & que I'ouverture de la bouche loit uniquement I'ctict de rabaiflemcnt de la machoire inferieure. II femble d'abord que dans I'un & I'autre cas les ftylo-hyo'idiens & les genyo-hyo'idiens, &c. doivent concourir k mouvoir la machoire libre, comme s'ils ne formoient qu'un mufcle non interrompu, ou un mufcle digaftrique, mais ccla ne peut etre, vrai qu'autant que I'os hyo'ide eft en etat d'obcir •, or il I'eft en effet dans le pr>.mier cas , & non dans le I'econd. Lorfque la machoire inferieure eft: (a) Vovez les obfervations VI. & VII, (i) Voyez la feptieme obfervation. fixee,' I DE L'ACADfiMIE ROYALE DES SCIENCES. 175 fixce, I'os hyoide cede h la coiitradion dcs genyo-hyoidiens, &c. & fe — ■^^i— ■ porte vers le menton, coiiiine nous I'avons dcjk fait obferver, il s'y portc encore , mais d'une quautita moindre , lorfqiiune cnife extericure gciic ''^ '^ ^ ^ o m i e. feulement la machoire iiiferieiire, & tend i diminucr fon mouvcincnt fans Anrnfe 1^44. I'arreter tout-i fait -, il eft done evident que le mylo-hyoidien Sc les ge- ' nyo-hyoidiens concourent alors avec le ftylo hyoidien ^ elcvcr la ma- choire fupericure. II n'en eft pas de meme dans le fecond cas , on a beau fixer la machoire fuperieure, I'os hyoide ne fauroit obcir a la contraction des ftylo- hyoidiens, ni s'approcher de I'apophylc ftyloide, il faudroit pour cela qu'il put fe porter d'avant en arriere, ou pour le moins de bas en haut ; or la lituation de I'os hyoide s'oppofe au premier de ces mouve- mens, (a) &: la contradlion de fes abailieurs au fecond , on peut s'en convaincre par experience , & s'alfurer meme que dans le cas dont nous parlons , cet os s'eloigne fouvent de I'apophyle ftyio'ide en fe mouvaut de haut en bas : il eft done inconteftablement vrai que le ftylo-hyoidien ne peut Jamais en femblables circonftances retirer fon extremitci antcricure vers la poftcrieure , ni par confcqucnt concourir avec Jes gcnyo-hyoi- diens, Sec. ^ abasifer la machoire inierieure. Les mufclcs de I'os hyoide, dec. ne font pas feuls h ouvrir la bouche, le digaftrique y contribue beaucoup , comme )e I'ai d'abord avanc^ : voici I'idee qu'on doit s'en faire. Le ventre anterieur de ce mufcle concourt Le digaftiiquc fert avec les genyo-hyoidiens, &c. pour abaiffer la machoire infcrieure, tan- 2"'" ■» ouvtif h boa- dis que le ventre poftcricur fert avec le ftylo-hyoidien k clever la ma- ' choire fuperieure, en forte que dans le cas dont nous parlons, le coude ou le tendon mitoyen du digaftrique eft le point fixe de I'un Sc de I'autre ventre. J'ai dit 1°. que le ventre anC&ieur du digajlrique concourt avec les son ventre anterieur g^nyo-hyo'idiens , fev. a abaiJJ'er la machoire infcrieure : voici les preib abaiirelam^chuiiein- ves de cettc propofition. fcricure. •1°. Cette partie du digaftrique a prefque la meme direcflion , & tend evidemment 4 niouvoir la machoire dans le meme fens que les genyo- hyo'idicns. 2°. La machoire infcrieure ne peut defcendre fans porter I'extremite an- tirieure de ce ventre vers I'extremite pofterieure , c'eft-i-dire , vers Ic tendon mitoyen ou vers I'os hyoide -, la defcente de cette machoire de- pend done, au moins en partie, de la contradion du ventre anterieur du digaftrique : ce n'eft qu'une confequence de la regie que j'ai dcji rap- portee. 5°. Si Ton ouvre la bouche avec effort, & fur-tout en oppofant unc rellftance extericure ^ I'abaiffement de la machoire , on trouvera le ventre anterieur du digaftrique dur & contrade ; il eft vrai que ce fait a etc mh par M. Monro : fxl'on applique , dit-il, [a] les doigts fur les ventres an- te'rieurs des digajlriques j tandis qu'on ouvre grandement & promptcment («) Voyez fa lixieme obfervaiion. C*) EflTais de la Soci^c^ de M^decine d'Edimbourg , Ton. I, Art. i\, pa^e i6i. Tome IX. Fartit Fran^oije. Mm 17+ AB R i C t DES Mi MOIRES — ^■^^■■^— la houche , on fentira ces mufdes repoiiffVs en dehors par le gon- . flement des mul'des qui font au-defTus (c'cft-i-dire, du mylo-hvoidien & des genyo-hyoidiens) mais on ne s appercevra aucunement quds devten- AnrJe 1^44. ".ent plus durs. M. Winflow, dans le memoire que J'ai cite, fiitisfiit pleinemcnt \ cette difticulte, il oppofe une reliftance \ la machoire dans le temps qu'oii fait effort pour I'abjifier, & portant les doigts fur I'extremitc antcrieure du digaftrique , il y trouve nne tenlion & une durete qui ne peuvent mille- ment etre occafionnees par le gonflement des mufdes qui font au-dejfus: je me contente d'ajouter que le fait devient encore plus convaincant, s'il eft poffibie, lorfqu'on fait agir ce mufcle comme par fecouffes, & qu'on porte le doigt fur le coude oh le tendon mitoyen , au-deli des bornes des genyo-hyoidiens & du mylo-hyo idien , on fent alors ce tendon d'une manicre li manifefte, & la tenlion eft fi bien proportionnee ^'effort qu'on fait pour abaifler la machoire , qu'il eft impoffible de douter de la coii- tradion du digaftrique. Son ventre poft^- J'ai dit 2°, que le ventre pof^rieur du digafrique fert avec le Jlylo- rieur eleve la mi- hyo'idien , a /lever la machoire fup/rieure : les preuves de cette propo- cboire luperieure. ^j^j^,, i'Dd'Tent en foule. 1°. Nous avons demontre dans les obfervations prcliminaires , (a) que le ventre pofterieur du digaftrique n'eft nullement deftine k abaifler la ma- choire inferieure, comme on le croit communement , & que le tendon mitoyen n'a pas meme la liberte de fuivre fa contradion : il eft done bien naturel de penfer que ce ventre tirant I'apophyfe mafto'ide vers le tendon mitoyen , fert h clever la machoire fuperieure , dont le mouvement ne peut etre revoque en doute. 1°. Nous avons audi fait voir que le ventre pofterieur du digaftrique & le ftylo-hyoidien forment enfemble (B) un mufcle i deux tetes , qui doivent agir de concert & concourir ^ la produftion des memes mouvemens •, ce ventre fert done, comme le ftylo-hyoidien , ^ I'clevation de La machoire fuperieure, & le fait eft d'autant plus evident, que ces mufcles font pref- que les feuls qui puiflent produire I'efFet dont il s'agit. 3°. Il eft certain que dans le moment dont nous parlous, le ventre pofterieur du digaftrique eft en contraftion , & il faut oien qu'il le foit, ne fut-ce que pour fournir un point fixe au ventre anterieur : il eft ega- lement certain que le ventre pofterieur tend ^ tirer I'apophyfe mafto'ide vers le tendon mitoyen , que cette apophyfe obeit, quelle fe porte vers le tendon , & que ce mouvement eft luivi de I'elevation de la machoire fu- perieure -, done la contradion du ventre pofterieur du digaftrique fert ^ dever cette machoire. L« (feux Tencie» J'ai dit 3°. que dans le cas dont il s'agit, les deux ventres du digaf- entleur point fixe autrique ont leur point fixe au coude ou tendon mitoyen : cela refultc ivi- teiidon mitoyen. ''°,''y'.'.','!'^"'horizontaIement d'arriere en avant, ils ne fauroient agir fans faire effort icsRenvo-nvuidiens, . 1 a 1 ... n v ■ 1 & le (licraftrique ti- P^""^ ^"^^"^ '^ machoire direccement d avant en arriere ; comment done rent la miichoire en imaginer que ces mufclcs n'ont aucune part au mouvement d'avant en ar- 2rii«r«. riere de cet os, & que cet ufage eft relerve au crotaphite & au mjffcter, qui n'agiflcnt que fuivant des directions li cloignees de la direcftion de ce mouvement ? Ce que je dis des genyo-hyo'idiens , &e. doit s'entendre ^galement du mylo-hyoidien , dont les portions droite & gauche ne peu- vent agir enfemlsle fans tendre ^ tirer la machoire fuivant la merae di- redlion que les prec6dens. i°. C'eft un fait que par le mouvement d'avant en arriere de fa ma- choire , I'extremite anterieure de ces mufcles eft port^e vers I'extremitc pofterieure •, ils fervent done k produire le mouvement dont nous parldns : cette confequence fult de la regie que nous avons deji donnee. (a) 5°. Si Ton force un peu ce mouvement, & particulierement fi Ton fait agir les mufcles comme par fecoufles, on fentira avec le doigt le digaf- trique, le mylo-hyoidien & les genyo-hyo'idiens durs & contrades ; il n'y a done pas i doutcr que cej mufcles n'aient part k la retradion de la mSchoire. le ftylo-hyoidien y H eft bon d'obferver ici que le ftylo-hyo'idicn concourt en certains cas, roncribuc sn certains g^ ^^^ ^j^^, j'autres , ^ cette retradion ; il y contribue lorfque le mou- vement en devant a precede , & qu'il s'agit du fimple retour de la ma- choire & de I'os hyo'ide dans leur fituation naturelle , au lieu qu'il ceffe d'y contribuer lorfque la machoire vient ^ partir de cette fitiiation ; la raifon en eft que le mouvement en arriere de I'os hyo'ide eft alors im- poflible : (5) la cofitradVion du ftylo-hyoidien ne peut done fervir qu'4 retenir cet os, & k fournir un point fixe au mylo-hyoi-dien & aux genyo- hyo'idiens. Le dernier mouvement de la machoire dont j'ai encore i parler, eft celui qu'on a nomm^ latiral , parce qu'on I'a cru reellement tel : dans cette idee on a cherche des agens propres i porter la machoire entiere de droite ^ gauche, ou de gauche \ droite, & I'on a cru que cette fonftion devoi: regarder le pterygoidien interne du cote oppofe i celui vers lequel le mouvement fe fait. J'ai demontre dans mon M^moire fur le mouyement de la mdchoire infcrieure , que cette idee eft peu exade , que ce mouvement n'a etc nomnie lateral que par erreur , qu'il eft reellement circulaire , & qu'il Mt^eJu mniuemcnt confifte en ce que la machoire tourne horizontalement iur I'un des con- circiilaire de la mS- dyi^s , ou quelquefois fur un point pris dans la ligne qui joint enfemble Ls deux condyles. Voili ce qui a ete etabli par des experiences qui ne (0) Voyez ci-deffus. (i) 'Voyez la fixieme obfervaocat A T O M I E. DE L'ACADfiMIE ROYALE DES SCIENCES. 177 peiivent laifler aitcun doute : il me fuffira de rappeller ici les iaits rcLi tih k I'ufage dcs mufclcs qui produifcnt ce mouvement. » Lorfgue la machoire eft dans fa lltuation naturcUe , &: qii'on vjent ^ faire effort pour la porter d'lin cote ou d'autre , Ic condyle di: cote op- Ann^e rj^^. pofc i celui vers leqiiel on vent la porter , fe mcut d'arriere en avant , en forte que la machoire decrit iin arc de ccrcle fur le condyle oppofe, coniidere comme centre. Les mufcles qui produifent alors ce mouvement, Mufcresqui podi,i- font ccux qui ont coutume de mouvoir la. machoire d'arriere en avant , '^"' '•= mouvement favoir, les pterygoidiens externes aides en certains cas de la partie exte- "'^''''*'''^' rieure des malleiers •, toute la difference qu'il y a , c'eft qu'ils n'agiffcnt que du cote oppofe i celui vers lequel on fait tourner le menton. On peut encore executer ce mouvement la machoire dtant dans d'au- trcs fituations , mais ce n'eft pas par le fecours des memes mufcles 5 par cxemple , lorfque les deux condyles font hors des cavites glenoides, & que la machoire eft portee jufqu'au dernier degrc du mouvement en de- vant, s'il arrive que dans cette polition, & fans la changer que le moins qu'il eft poflible , on tache de porter encore la machoire vers le cote gauche, le condyle gauche fe mcut alors d'avant en arriere en faifant de- crire ^ tous les points de la machoire des arcs-de-ccrcles autour du con- dyle droit confidcre comme centre. Les mufcles auxquels ce mouvement eft du , font ceux qui mcuvent ordinairement la machoire d'avant en ar- riere , mais en cette occafion ils ne fe contraftent que du cote gauche, jl faut meme obfcrver qu'ils n'agiffent pas tous egalement •, le digaftrique & les genyo-hyoidiens, quoique tres-propres ^ retircr la machoire, ne font prefque rien dans le cas dont nous parlons. La raifon en eft que leur diredlion eft fort voifine du milieu , & qu'ils tendroient moins i titer en arriere un feul cote de la machoire que les deux enfemble, ce qui va centre la condition que nous avons fuppofee , qui eft qu'on ticnne la machoire en devant fans changer fa polition que le moins qu'il eft poflible : ce font done les fibres pofterieures du crotaphite , du maiTeter & du mylo-hyoidien qui font principalement cette rctradlion. Si la machoire fe trouve dans une lituatioii moyenne , & que fes con- dyles ne foient ni fort en devant ni fort en arriere , ils profitent tous deux de la liberte qu'ils ont, & fe portent Fun en devant, I'autre en arriere ; le centre du mouvement eft alors au milieu de la ligne qui les joint enfemble. On comprend quels font les mufcles qui Icur donnent ce mouvement , fans qu'il loit beloin de s'y arreter. Je terminerai ce raemoire par une digreffion qui a rapport \ d'au- Auties ufage* fans qu'il y Annc'e ij^-f. ait dilatation aux conduits lacrymaux ; inais je ne crois pas quelle puiffe arriver dans les conduits lacrymaux TluIs, a moins que robilruction dit fiphon ne foit ^ I'cntrie des conduits lacrymaux dans le fac , cc que je n'ai jamais vu •, je rapporterai cependant ci-aprcs une obfervation dans la- quelle il y avoit une grande difpolition ^ cette nialadie.- 4°. Quand la dilatation des conduits lacrymaux fait partie de la tumeur lacrymale, fi Ton comprime cette tumeur avec le doigt, on la vuidc tres- facilement par une fcule & legere compreffion que Ton fait enrre I'angle de la paupiere & le bord dc I'orbite, jufques dans la gouttiere ofllrufe qui contient le fic lacrymal , encore ne peut-on la vuider completemcnt par les raifons que nous dirons ci-apri;s, Quand la tumeur lacrymale n'eft formde que par la feule dilatation du • fac, il n'y a aucun changement aux paupieres j niais qiunj eile eft accom- pagnce de la dilatation des conduits lacrymaux , la reunion des paupiercs au grand angle eft toujours gonflee , quelquefois nieme doulourefife & enflammce. De ce qui vient d'etre dit , il nait une difficultc qui ne paroit pas d'abord facile ^ refoudre, favoir, pourquoi Ic i-c ]acr)nu! plus epais que les conduits lacrymaux, & renforce, tant par fa (ituation dans la gouttiere offeufe, que par la membrane aponevrotique qui le couvre, fe tiouve-t-il trcs-louvent dilate fans que les conduits lacrymaux le foient ? j'ai long- temps reflechi fur cette oojedHon lans y trouver d'abcrd d<: icponfe fatif- faifantc; mais ce fait dtant inconteftable , j'ai perfeverc dans mes rccher-r ches , & voici ce que j'ai trouve. Le fac & les conduits lacrymaux ne peuvent fe dilatcr que parce que Jes larmes ne pafTent pas dans le nez , les premieres gouttes qui lont arre- tees, rcmpliffcnt le fac; mais comme rien ne les poulfe du cote des con- duits lacrymaux , & qu'au contraire les larmes des conduits lacrymaux font toujours poulfees vers le fac par la force des paupieres, elles rempliffent le fac, font etiort contre fes paiois , & le dilatent peu-h-peu de la maniere que je I'ai annonce dans la feconde partie de mon premier memoire , c'eft- i-dirc, avec une force centuple de celle qu'ont les larmes qui pafTent dans le fac par le conduit lacrymal commun , en fuppofant que la furface in- terne du fac n'ait que cent parties egales k I'ouverture du conduit lacry- ' mal commun ■, ^ quoi j'ajoutersi ici que les larmes qui fcjournent dans le fac, peuvent le relacher Sc le rendre plus extenlible en af?biblifiant fon elaf- ticitd naturelle. On dira peut-etre que cela n'empeche pas qu'i leur toiu: les conduits lacrymaux ne fe dilatent •, il eft vrai, mais je reponds : i". Que les mouvemens continuels du globe de I'ccil comprimcnt )t chaque inftant les larmes contenues dans les points lacrymaux , & comme dies trouvent de la rcliftance vers le bas du fiphon , elles refluent vers I'ceil avec d'autant plus de facilitc que les ijoints lacrymaux font toujours ouvcrts. Nn ij i84 ABRtGEDESMiMOIRES i". Que les conduits lacrymaux ne penvent commencer ^ fe dilater fans A cuifer quclqiies inquietudes & de lefreres douleurs, ce qui cnsage les ma- lades a porter machinalemcnt le doigt dans le grand angle de 1 ceil , k Annie tJ44. comprimer ces canaux & en expiilfer les larmes ; de forte qu'etant vuides plulieurs fois dans la Journee , les larmes ne font plus effort centre leius (.irois; & a, fans comprimer les canaux lacrymaux Ton pouvoit comprimer I tumeur lacryniale faite par la dilatation du fac, audi exadlement que Ton comprime les canaux lacrymaux , cette tumeur ne fe formeroit pas fi promp- tement , mais cela' eft impoffible. Ce que je viens de dire fait voir que la tumeur lacrymale form^e par la dilatation des conduits lacrymaux n'eft pas fi frequente que celle qui fe fait par la dilatation du fac •, & par cette nieme raifon Ie5 filhiies lacrymales qui percent les conduits lacrymaux , font plus rarcs que celles qui percent le fac lacrymal. 11 n'eft pas difficile de diftinguer ces deux fiftules , quand on a etc te- " iiioin du commencement & du progrcs du ma! , parce qu'alors on a dii obferver les fignes que j'ai donnes ci-deffus , & favoir C\ la fiftule eft can- fee par la dilatation du fac , ou par celle des conduits ; les obfervations fuivantes ferviront de preuve k tout ce que j'ai avance. Uii enfant de 5 i 6 ans me fut amene par fa mere, depuis 7 ou 8 mois qu'il avoir eu la petite verole , il etoit afflige d'un gonflement erclipelateux des paupieres , acconipagne de cuiffons & d'un larmoiement continuelila mere feule en avoit eu foin , elle avoit employe pour le guerir difleren- tes eaux, des cataplafmes & autres topiques que des perfonnes charitables lui avoient donnes; mais comme la charite ne fuffit pas pour guerir, lap- plication de ces remedes n'eut aucun fucces. L'etat oii etoit la maladie nc me permettoit pas de juger fainement fi le larmoiement conliderable & la cuillon qui accompagnoient le mal, dependoient de I'affeftion du globe de I'ccil , de la conjondtive , ou de I'obftrudlion du (iphon lacrymal , parce <^ne le gonflement des paupieres joint k la douleur que relfentoit le ma- lade lori'qu'on I'cxpofoit au jour, m'empechoit d'ouvrir I'ccil; mais le gon- flement des paupieres, leur durete, la douleur & la rougeur m'annon- coient affez qu'il falloit avant toutes chofes detruire I'inflammation ; y ^tant parvenu par les remedes ordinaires , au bout de 7 ou 8 jours j'eus la facilite d'ouvrir I'ocil & d'y voir plulieurs ulceres ronds de la grandeur d'une tete d'epingle , places les uns fur la cornee , les autres fur la partie de la conjonftive qui entoure la cornee; on fait que ces ulceres qui dans leur commencement font de petits apoftemes , accompagnent ou fuivent fouvent les grandes ophthalmies : quoique I'enflure flit diflipee, le larmoie- ment fubfiftoit, & les larmes qui couloient continuellement, ne contribue- rcnt pas peu k la guerifon des ulceres, c'eft ce que j'ai obferve tres- fou- vent ; on peut dire meme que lorfqu'elles ne font point acres , elles font le meilleur topique qu'on puifTe employer, foit pour laver les ulceres, foit pour faciliter leur confolidation. Cet enfant fut gudri k cela prcs du larmoiement, qui ^ la verite n'etoit fis coniiderable , & que Ton regardoit comme une fuite de la petite verole. DE L'ACADEMIE ROYALE DES SCIENCES. 185 II y avoit plus de deux ans que Je n'avois vu cct enfant lorfi^u'on me ^^ lamciia aftligc de la nicme maladie , excepte Gu'il n'avoit point d'ulcere A n a t « m i e! fur la cornee, & qu'il pouvoit voir la luniiere lans fouilrir', le gonflement des paupieres ctoit plus conliderable qu'il n'avoit (ite la premiere fois; Ann^e i^.}'}- les remedes gencraux diminuerent le gonflement, a I'exception d'une du- retc ^ I'endroit du fac nafal , que je regardai comme une tumcur Jacry- niale, quoiqu'en la prefiant je ne fifle fortir par les points lacrymaux qui; !e peu de larmcs qui pouvoit etre contenu dans Icurs conduits : ce(te to-' meur qui ctoit dure &; qui ne diminuoit point en la preffant, pouvoit faire douter quelle flit lacrymale , & fi ces deux fignes ne m'cn impofercnt point, c'eft que Je les avois vus pluficurs fois a d'autrcs tumeurs reconnues pour ctre lacrymales depuis pluiieurs annies. ]'y fus trompe la premiere Ibis, mais mon erreur ne dura pas long-temps. Une tumeur de cette efpece que j'avois preflce fouvent fans la pouvoir vuider, un Jour en la preifant peut-ctre un peu plus fort, (c vuida en- tierement par les points lacrymaux-, la matiere qui en fortit, fut prife par les afliflans pour du pus, parce qu'elle etoit blanche : il m'arriva la mane chofe h. la tumeur de I'enfant dent il s'agit , apres y avoir applique pen- dant fcpt ou huit jours un cataplafme emollient, elle devint plus moll«, Je la preffai & Je fis fortir par les points lacrymaux une matiere blanche, femblable k celle dent je viens de parlcr. Avant que de finir cette ob- fervation , il me femble qu'il n'cft point hors de propos de rendre raifon pourquoi il arrive que la tumeur lacrymale, quoique preffee, ne fe vuide point , & les raifons que j'ai de dire que la matiere blanche qui en fort , n'eft point purulente. Si la tumeur lacrymale, quoique preflee, ne fe vuide point, cela ne pent venir que du r(5treciffenvent de I'embouchure du conduit lacrymal commun , caufe par I'inflammation qui a precede , ou de rcpaiffiffement des lormes par leur fejour dans le fac, & peut-etre des deux enfemble. A I'egard de la matiere blanche , Je mis perfuade qu'elle n'eft point Furulente , parce que dans I'efpece dont il s'agit s'il y a eu inflammation , inflammation a cefie, la tumeur a etc preffee & vuidiJe plufieurs fois par jour pendant plufieurs raois, & n'a pendant le Jour fourni aucune matiere femblable ^ du pus, Jufqu'au temps que la tumeur a ceffe de fe vuider. Pendant tout ce temps, il n*y a eu ni douleur, ni inflammation, par con- fequent point de pus , puilqu'il ne peut s'en former fans inflammation. Mais ce qui prouve que c'eft le fejour des larmes qui leiur doime cette couleur blanche, c'eft I'obfervation que j'ai faite & que Ton peut faire tous les jours : on confeille aux malades de preffer fouvent leur tumeur po%r dviter le fejour des larmes, ce qu'ils ne peuvent obferver que pendant le |our , & toutes les fois qu'ils font cette compreffion , il ne fort que des larmes fort claires ; mais comme pendant le fommeil ils ceffent de la pref- fer, les larmes fejournent & au rcveil ils trouvent leur tumeur pleine, ils la prcffent Sc en font fortir premicrement les larmes qui font dans les con- duits lacrymaux , lefquelles ayant peu fejournd , puifqu'elles font les der- nier cs aixivees , fe Uouvent prefque aufli ckixes' & aulC fluides que cellcs A N A T O M I i8(J A B R i: G E D E S M E M O I R E S 1 qui font dans les paiipieres : en continuant de preffer il en fort de moins claires & moins miides , puis dc moins claires encore & blanchatres, 8c ■ enfin ce qu'ils font fortir en preffant le fond du fac, eft tout-i-fait blanc : Anaee 1744. '' "^^"'^ heures apres ils preflent lent tumenr, il n'cn fort que des larmcs prefque claires, ou qui ne font que foiblement troublees par leur me- lange avec ce qui a pu refter dc matiere de la premiere predion , & 'k toutes celles qu'ils font jufqu'aii fommeil , ils ne font fortir que des larmes toutes claires, ce que fans doute ils feroient toujours, meme pendant la nuit, s'il etoit poffible qu'cn dormant ils preffaffent leur tumeur comme ils le font pendant le jour. L'enfant dont j'ai parle, ne pouvoit gu^rir que par I'operation dont j'ai traite dans mon premier memoire; je la propofai, mais la mere n'y voulut pas qonfentir, fe contentant de vuider ou faire vuider la tumeur. II fe pafla plus de deux ans fans que je vifle le malade , quoique pendant ce temps il eut etc plufieurs fois attaque d'inflammation que la iliere avoit' appaifee par I'ufage du cataplafme emollient-, le remede ayant un jour trompe fes efperances, la tumeur secendit le long de la paupiere inf6- rieure & fur la joue , & vint ^ fuppurer fans fe vuider •, la mere eut re- cours ^ moi, mais malgre la grandeur du mal, elle ne put confentir qu'on tit aucune operation h. fon enfant. J'appliquai une emplatre maturative -, vingt-quatre heures apres, le plus fluide de la matiere renfermce dans la tumeur, commen^a de fe vuider par les points lacrymaux; le plus groffier ne pouvant fnivre la meme route , fe fit jour en percant la peau fur la joue au-deflbus de la paupiere inferieure : la mere contents de cette eva- cuation , s'oppqfa ^ tout ce que je voulois faire , elle continua I'ufage de I'emplatre , dans I'efperance de gucrir fon fils , mais inutilement , parce que I'ouverture etoit devenue fiftulcufe, ce qui, joint au defagr^ment de voir toujours une emplatre fur I'ocil de fon fils , la determina i me remet- tre fon enfant entre les mains , & ^ me laifler faire tout ce que je vou- drois. Je fondai le trou fiftuleux qui , comme je I'ai dit , dtoit place beaucoup au-deflbus de la paupiere infiirieure, je conduifis la fonde vers le grand angle i ne pouvant la porter plus loin , je la tournai doucement de tous cotes , & ne remarquai aucune alteration aux os ; avant que de prendre aucun parti violent, je pris celui de continuer I'application de i'emplatre, pour avoir le temps d'examiner en quoi confiftoit cette fiftule, & quelles etoient les parties intereffees. La premiere chofe que je reconnus & qui m'etonna beaucoup , ce fut que le malade n'avoit plus de larmoie- ment, & qu'en preflant le grand angle de ToEil dans I'endroit ou fe trouve Ic fac, & par confequent la tumeur lacrymale, s'il y en a, je ne failois fortir aucune goutte de larmes par les points lacrymaux ; d'oii je tirois cette confequence, que les larmes n'entroient point dans le fac lacrymal, que le conduit lacrymaj coramun etoit perce dans le finus de la fiftule, & que ce 'finus qui avoit un bon pouce de longueur en defcendant, faifoit I'ofEce de la longuc branche du fiphon ■, ainfi la facilite avec laquelle les larmes y paflblent, itoit la vraie raifon pour laquelle le lai-moiement avoit cefle. Pour mieux trie convaincre de ce fait, je gardai l'enfant chez moi DE L'ACADEMIH ROYALE DES SCIENCES. 187 dciix ou trois htnires, )'6tai I'cmplatre, je nettoyai Ics environs de la fif- ^— iw— tide , &: peu apres je vis fortir les larmcs par le trou fiftulciix •, dies con- . tinuerent de coiiler en fi grande quantity qu'i chaqiie inftaiit Ic nialade ' '^ ■'^ ^ o m i ctoit obligi de s'elTuyer la joue , je remis Ion emplitre , & le renvoyai ytnne'e 1744. pour delib^rer fur le parti que je devois prendre. Quoiqu'il y eut difttrentes maiiieres d'attaquer cette fiftule , ccllc qui (e prefcntoit d'abord , etoit d'introduire une fonde cannelee dans le finus & de I'ouvrir avec un bitlouri jufqu'au fond pour en emporter les duretcs & les callohtcs , ainli que cela fe pratique i toutes les fiflules : par ce nioyen j'aurois pu guerir celle-ci corame on gucrit toutes Ics autres; mais outre que j'aurois ciufe bcaucoup de difiormite, attendu la grandeur dc rincilion , je n'aurois pas remedic au vice du Cphon lacrynial , qui ayant ite la premiere caufe de la fiftule, I'auroit reproduite fans doute peu de temps aprcs la gu^rifon. J'abandonn.ii , pour ainfi dire , la fiftule , en ne niettant au-dellus qu'une fimple emplatre ; je fis une incifion au grand angle pour ouvrir le fac lacrymal, je debouchai le canal nafal, & je paffai une bougie jufques dans le nez, de la maniere que je I'ai decrit dans mon premier menioire. Pendant vingt jours que je panfai le malade avec la bougie, les larmes ne fortirent que par le larmoyement , il n'en paffoit plus dans le fiphon lacrymal , puiiquil etoit bouche par la bougie & par le refte de I'appareil i par cette railon il n'en pafla plus dans le Irnus fiftuleux qui pcrcoit la ■joue, de forte que ce fuuis n'-etant .plus emreteuu par ies larmes, ne fiunta prefque plus & fat parfaitement reuni huit ou dix jours apres I'operation: cependant je ne ceffai I'ufage des bougies que le vingtieme jour ; alors la plaie fe reunit , les larmes reprirent leur cours naturcl , & quatre ou cinq Jours apres, le malade fut parfaitement gueri & fans aucune dif- formite. Les fiftules caufees par la perforation du fiphon lacrymal , peuvent ctre comparees aux fiftules caufees par la perforation des conduits urinairesi les unes & les autres different des fiftules qui furviennenl aux abces & aux plaies negligees ou mal panfees, en ce qu'outre les caufes qui empe- . chent la reunion & qui leur font communes, clles fe trouvent encore en- tretenues par I'ecoulement involontaire des urines dans les unes , & par celui des larmes dans les autres •, de forte que I'ecoulement des fiftules qui fuccedent aux plaies & aux abccs, n'eft que le pus que produit Ja iolution de continuitc , au-lieu que ce qui s'ecoule des fiftules lacry- males & urinaires, eft non-feulement ce pus, mais encoie I'urine & les larmes. II refulte de ce fait que fi Ton gudrit les autres fiftules en tariffant la fource du pus qui les entretient , il ne fuffit pas de faire la meme chofe aux fiftules lacrymales & urinaires , car fi Ton ne retablit pas le cours na- turel des urines dans les premieres, & le cours des larmes dans les fecon- des , ces fiftules ne fe ferment point , ou font bientot rouvertes par les urines ou par les larmes retenues. Ce qu'il y a de particulier entre ces deux genres de fiftules , c'cft i88 A B REG 'E OES MEMOIRES ^ann^^MBMH que I'oii cft prcfque tonjonrs oblige d'ouvrir tous les (iniis des fiftulcs ■ ^ordinaires, au-lieu que Ton peut tres-fouvent guerir les fiftules urinaires A N A T o M I I. ^ i(,5 fiftules lacrymales fans ouvrir leurs iinus. Jnn^e I7i4. ^^ "^ "^'^ "^" ^^ P'"^ '^^^ fiftules urinaires, parce qu'elles ne font pas de men fujet. Pour appliquer aux fiftules lacrymales le pricepte que Je viens de don- ner , il fuftiroit de reflechir un moment fur Toperation que j'ai dtcrite ci-defliis : on voit bien que j'ai gueri un abces degenere en fiftule , fans ouvrir la fiftule-, d^bouchant le canal nafal, j'ai retabli le cours niturel des larmes, Je les ai detournees de la route etrangere qu'elles avoient prife, & cctte route etrangere meme a ete guerie par cela fenl que les larmes ont ceffe d'y paffer. J'ai gueri de tneme deux autres fiftules du point lacrymal Inferieur, I'une & I'autre caufees par rinflammation & la fuppu- ration qui etoient furvenues ^ la retention des larmes. L'un de ces abccs s'etoit perce fur le conduit lacrymal, & I'autre ^ la partie moyenne de la paupiere inferieure , une ligne au-deffus du bord inferieur de I'orbite. ■ J'ai gueri l'un & I'autre fans ouvrir les fiftules , je fis I'incifion dans le fac lacrymal , je debouchai le canal nafal , j'y paflai une bougie , & con- duifant mes malades ainfi que je I'ai dit ci-deffus , les larmes reprirent leur cours naturel , & leurs fiftules furent gueries fans y toucher & faiis autre panfement qu'une compreffe trempee dans I'eau vuhieraire. SUR Q^UEL, t « Le cerveau reiiL'rme dans Ion epailieur plulicurs cavites appellees ven- tricules J celle qui eft recouverte par la voute ^ trols piliers , communi- Annie tj-f-f. que i deux autres que les anciens Aiiatomiftes dclignoient par les noms de fitp&uurs & ant&ieurs j & que M. Morand croit avec plus de raifon devoir nomnier lau'raux ; cai cii fortant de d?flbus la voiite , ils vont d'abord vers le derriere de la tcte , & fe courbant enfuite latcraiemcnt, & un pcu en djfcendant, ils reviennent en devant fe terminer ^ quatre lignes de I'apophyle clino'i'de , & i lix du nerf optique. Ces ventricules contienneiit , chicun dans Ton fond , un corps blanc iiommc come de bilier , recouvert prefqu'enticrement par un prolonge- ment de cette toile valculeufe qu'on nomine plexus choroide. M. Morand remarque qu'une partie de I'embarras qui fe trouve ^ concilier les anato- miftes , vient de ce qu'ils ont donne indifferemment le nom de cornes de bdier anx ventricules & aux parties qui y font ioutenues, ce font cellcs- ci qui font vraiment les cornes de belier , ou \ hippocampus , fuivant Arantius. M. Window , d'accord en ce point avec Arantius , regarde \' hippocam- pus comme un prolongement des piliers pofterieurs dc la voute , mais felon M. Morand , fi on renverfe en arriere les piliers pofterieurs de la voiite, apres avoir coupe le pilier anterieur, on voit evidemment qu'il n'eft que le prolongement da corps calleux , il n'cmprunte des piliers cu'une lame medullaire femblable ^ une bandelette blanche , qui garnit fa partie concave jufqu'aux deux tiers de fa longueur i la fubftance blanche dont Yhippocampus paroit revetu , n'eft qu'une efpece d'ecorce qui a tres- peu d'epaiffeur , & recouvre la lubftance grife dont il eft effentiellement compofc. Dans I'endroit ou Yhippocampus eft le plus gros, M. Morand I'a vu dans pluheurs fujets attache par deux petits cordons blancs trcs-diftindts , & ccartes d'une bonne ligne Tun de I'autre, ^ la partie inferieure du ventricule. La cavite des ventricules lateraux a encore d'autres enfoncemens qui lui font contigus , le premier eft ^ la partie pofterieure , il a un travers de doigt d':tendue , & va un peu en fe recourbant. Pluiieurs anatomiC- tes, entr'autres Vanhorne & les Bartholins, appellent cette cavite digitale j nom que M. Morand ne croit pas lui eonvenir , puifque dans prefque tons les fujets elle eft fort pointue-, cette cavite eft, felon tous les ana- tomiftes, denuee de toute partie faillante qui s'y loge, cependant M. Mo- rand y a trouve conftamment une protuberance de la moelle alongee , qu'il nomnie ergot , ^ caufe de fi reiremblance ik cette partie de la patte des oifeaux qui porte ce nom. Le fecond enfoncement occupe un petit efpace entre la cavite digitale & le rebord convexe de Yhippocampus ; il eft circonfcrit par un trait affez femblable ^ celui par lequel on traceroit une ancre de vaifleau, & c'eft pour cette raifon que M. Morand le iiomme caviti anch\ro'ide. M. Licutaud eft le premier qui I'ait reprefcntc dans les eflais d'anatomie. Tome IX. Partie Fran^oije, Oo i5)o ABREGi DES MEMOIRES ^— «— ^^— M. Morand accompagne toutes ces reflexions de figures exaifles ', qui , font des efpeces de demonflrations anatoniiques touioiirs pretes k mettre ions Jes yeux les parties dont il sagit, lans avoir bcloin de recounr a Ann^e 1^44. la dlfledion. SuR I.A Structure des Reins. Hifr. JLiES organes dii corps animal deftines ^ la fecretion des liqueurs, font ceux dont il eft le plus difficile de d^couvrir la ftrudure & le jeu , ce font aufli ceux dont les anciens anatomiftes nous ont donne les defcrip- tions les plus iniparfaites. Selon eux , la veine emulgente ayant apporte le fang dans le rein , s'abouchoit avec I'uretere , & le relldu de ce fang qui ne fervoit point ^ la fecretion de I'urine, formoit la fubftance pro- pre du rein, qu'ils nommoient en con(i(\nence parenchyme oujiic ^paijji^ ce qui ne donnoit qu'une idee tres-fauffe de la ftrudure admirable de cette partie. Des travaux plus fuivis ont conduit les anatomiftes modernes h des no- tions plus claires. Carpi obferva le premier , que I'eau injedee par la veine emulgente , fortoit , & par une incifion peu profonde faite h la convexite d'un rein, & par la cavite du baflinet •, il en conclut avec rai- fon qu'il y avoit une communication etablie entre la veine emulgente &; toutes les parties du rein, & que par confequent il s'en falioit beaucoup que la fubftance de cette partie fut un parenchyme , comme on I'avoit penfe jufques-lk. Cette decouverte I'anima ^ la recherche de la ftrudure du rein , il decouvrit que les vaiffeaux du rein fe diftribuoient par des ramifications prefque inhnies dans toute la fubftance de ce vifcere , & que de pluilcurs de ces ramifications partoient des tuyaux uriiiaires qui alloient porter I'u- rine dans le baflinet. On croiroit peut-etre qu'une decouverte auflr intereflante , auroit ith adoptee de tous les anatomiftes, cependant un petit nombre furent pen- dant un temps confiderabie les feuls depofitaires de la dodrine de Carpi , pendant que tous les autres s'occupoient des idees de cribles & de re- feaux qu'ils fuppofoient places dans la fubftance du rein. Pour entendre plus facileaient ce que les anatomiftes modernes ont dit de cet organe , il ne fera pas inutile de donner une legere idee de fa ftrudure. La figure du rein eft ^-peu-pres femblable ^ celle d'une feve; ^ fi con- cavite fe rencontrent les troncs des vaiffeaux fanguins & I'uretere , qui porte ^ la veflle I'urine filtree par le rein , il eft revetu d'une membrane exterieure fous laquelle, quand on I'a enlevee, on trouve une fubftance ferme, qu'on nomme exterieure ou corticale. En fendant un rein par fa convexite , on voit que cette fubftance en recouvre une autre compofee d'une infinite de tuyaux qui viennent fe DE L'ACADEMIE ROYALE DES SCIENCES, iyi rendre ^ des mamelons par ou I'liriiic fort de la riibflaace du rein, pour fe rendre foiis I'uretere. A n A t o m i £. Ces mamelons qu'on appelle Ics papilles du rein , font f^pares par des cloifons que la fubftance corticalc forme entre les difterens paquets de ii Ann^e tj^-f. fubftance tubuleufe-, de plus la fubflance corticalc eft encore parfcmee de plufieurs eiitrelacemens de vaiffeaux que I'injedion fait decouvrir, mais qui laiffent pourtant des efpaces affez conliderables dans lefqucls il nc paffe rien de la liqueur injcdcc. Ruyfch & Viculfens ont cru pouvoir conclure de cette ftruiture , que tout le rein etoit vafculeux, en prenant cette cxprefflon dans le fens le plus ctroit , c'e(l-^-dire , qu'il i'e faifoit un abouchcment des vaiffeaux laii- guins avec les tuyaux urinaires, & que I'urine fe filiroit dans les reins fans le miniftere d'aucune glande. Malpighi au contraire a penfe que des efpeces de grains contiiuis aux vaiffeaux formoient la fubftance corticale, & que ces grains etoicnt au- tant de glandes dont les tuyaux urinaires eteient les canaux excrctoires. Ces deux fyftemes fe contredifcnt formellement , Malpighi pretendant que la fccretion de I'urine fe fait par des glandes, & Ruyfch &i Vieuffens au contraire qu'elle fe fait fans ce fecours; cependant Boerhaave les admet tous deux , & il penfe qu'une partie de I'urine eft feparce du fang par des glandes, & qu'une autre partie en fort par le moyen des abouchemens des vaiffeaux fanguins avec les tuyaux urinaires. M. Bertin ayant entrepris de s'eclaircir fur un point audi intereffant, a employe tout ce que I'anatomie la plus delicate , aidee du fecours des in- jedions & du microfcope, a pu lui fourniri il a vu diftinftement les vaif- feaux fanguins qui ferment la fubftance tubuleufe , s'aboucher avec les tuyaux urinaires qui fe rendent aux papilles, appareil merveilleux &: qui nicrite bien I'attention d'un philofophe ; mais il a vu de plus d'autres fibres qui lui paroiffoient etre des tuyaux urinaires , fe rendant de meme aux papilles, & qui partoient des prolongemens de la iubftance corticale : il falloic done de neceffit^ que celle-ci flit glanduleufe , & que ces tuyaux fiiffent les canaux excretoires de fes glandes, mais ni la diffedion ni I'in- jedion ne donnoient aucune lumiere fur ce point , & rien n' eft fur ca phyfique que ce qui eft appuye du temoignage de I'experience. Enfin , M. Bertin s'eft avife de dechirer la fubftance du rein , au-lieu de la cou- )er; alors les glandes ont paru ^ d^couvert , & mcme fans I'aide de la oupe ou du microfcope, elles font en fi grand nombre qu'elles forment en entier la fubftance corticale , & la multitude des tuyaux urinaires qui en fortent, peut aifement fuppleer h. leur extreme petiteffe. Auffi n'heiite- t-il pas d'avancer qu'elles font un des organes principaux de la filtration de I'urine. II fe foit done reellement dans le rein deux fortes de filtrations, I'urine la plus groffiere eft feparce du fang par la fubftance tubuleufe -, auffi M. Bertin a-t-il vu diftindement de I'urine chargie de parties terreufes reconnoiffables , paffer au travers des papilles en les preffant , mais I'urine la plus claiie & la plus fubtile eft, felon lui, filtree par les glandes qui Oo ij i ipi abr£g£ des memoires — ^— ■^—^ compofent la fubftaiice corticalcj & apportee aux papilles par le nombre A prodieieiix de tuyaux qu'elles y envoient. II eft vrai que rinjedtioii ne A N A T o M I I. ' °. , , ' J- ' . y -a r ? -1 peut penetrcr dans ces tuyaux , mais les anatomiltes lavent qu n y a une iii- ^nn/e IJ44. finite de canaux excretoires, de glandcs , bien averes pour tuyaux, & qui refufent conftamment le pailage I I'injedion faite par les arteres qui por- tent le fang h ces glandes. Ce qu'il y a de iingulier, c'eft que Boerhaave , dont le fentimcnt fe Irouve etre le feul vrai, ne paroit I'appuyer fur aucune experience, & quil femble au contraire ne I'avoir adopts que pour concilier ceux de Malpighi & de Ruyfch qu'il n'ofoit foupconner de s'etre trompes. Tant il eft vrai que, meme en matiere de philofophie , I'efprit de deference pour ceux que nous devons regarder comme nos ma'itres , mene fouvent I la verite d'une xuaniere plus fure que I'efprit de difpute. " DIVERSES OBSERVATIONS ANATOMIQUES. I. Hift. 1VJ.R. BtRTiN a fait voir I I'academie deux petits os inconnus aux anatomiftes , & qui concourent k former les parois des (inus fphenoidaux. II les appelle cornets fphenoidaux , \ caufe de la refiemblance qu'iis ont avec les cornets du nez. On ne les trouve point dans le foetus, ils ne font fenfibles qui I'age de quatre ans ou environ, & vers celui de vingt ils commencen: \ fe fouder ^ I'os fpheno'ide avec lequel ils ne font plus qu'une feule piece. I I. M. DE CouDERE, chirurgien \ Beziers ; a cnvoye \ I'acadeniie la defcription d'un petit chien nionftrueux qui a vecu trois heures. Le nez de cet animal eft fait d'un prolongement de I'os coronal meme , auquel font attaches trois petits os qui forment un cylindre creux dont le bout du nez eft forme : ce nez eft bouche ^ fon extremite par une fubftance carti- l.igineufe ■, il y avoit entre le nez & la machoire fuperieure une feule fofle orbitaire qui logeoit un ceil unique, de la groffeur d'un pois •, I'os de la machoire fuperieure etoit fort court , & reprefentoit \ fa fymphife une ef- pece de coquille ; la langue etoit adherente i la machoire inferieure , le refte du corps etoit conforme comme celui d'un chien ordinaire. L'inf- peftion de ce monftre qui fut envoye quelques mois apres \ I'acade- mie, deffeche en partie, & le crane depouille des parties molles, con- firma en tout ce qu'on en put obferver , la defcription qui en avoit cte envoyee. DE L'ACADEMIE ROYALE DES SCIENCES. i^; I I I. Anatomii. M. BouvART a deniontri un inteftin hiimain , dans lequel il y avoit Anruc IJ4^. un volvulus , & raalgre ce derangement le niaUde ne fe plaignoit d'au- cune colique. I V. M. PE Buff ON a fait voir un petit veau mort-ne mondruenx, A la fimple iiifpeftion cet animal fans jambes ne fcmbloit cju'un gros peloton dans lequel le ventre & la poitrine paroifloient confondus; la tete com- pofoit elle feule prefque la moitie de tout I'animal, &: le mufle beaucoup plus court qu'i I'ordinaire , lui donnoit toute la rcffemblance d'un doguin. En oHvrant ce monftre , Mi^- Winflow & Morarid n'ont rien trouve qui flit centre nature dans les vifceres de la poitrine & du ventre •, la tete fi prodigieufcnient grolle, contenoit un tres-petit cerveau , un hydrocephale remplilfoit le rcfte. Ce que ce petit monftre avoit de plus lingulier, c'eft que le fquclcttc ne prcfentoit prefque rien de femblable h la couformatioa naturelle. L'acad^mie a vu un enfant de quatre \ cinq ans , nc en Araerique dans un endroit nomrae Macond/ , d'un negre & d'une negrelfe qui af- fure n'avoir jamais eu commerce avec aucun blanc. Le petit negre a la peau blanche, mais d'aiileurs tous les traits ordinaires aux negres, le ner, ecrafe, les levres grofles, il a audi cette efpece de laine qui leur tient lieu de cheveux, avec cette difference que la iienne eft blanche au-lieu d'etre noire, les fourcils & les cils des paupieres lont pareillemcnt blancs; il a les yeux toujours trcmblottans, & en les expofant au jour d'une certaine fa- ^on la prunelle paroit d'un rouge clair, la choro'ide fc voit telle au tra- vers de I'uvee meme , qui eft tranfparente-, il a la vue tres-tendre , & nc peut fouflrir le grand jour ; la pcau des mains eft rude & un peu cha- grinee , par-tout ailleurs elle eft douce & tres-unie. Plufieurs voyageurs affurent que dans un certain endroit peu eloigne de Mexique , on trouvc une nation entiere d'hommes blancs qui, comme le petit negre, ne peu- vent fouffrir le grand jour qu'avec peine, ils n'en different que par leuis cheveux qui , quoique blancs , font de veritables cheveux , & ne relfemblent point h de la laine. M. de Colligny correfpondant de I'academie a aflure qu'i Madagafcar il y avoit une nation de negres blancs, mais qui, avec les traits des negres , ont des cheveu.s pareils a ccux des Europeens. i9+ ABREG6 DES MfeMOIRES A N A T O M I E, V E A U MONSTRUEUX. M. .RS. MoRAND & LA SoNE ont fait voir ^ I'academie & diffeqn6 un nionftre de la clafle de ceux qu'on nomme par execs. C'etoit un veait compofe d'un veaii entier, & de la moltie on de la partie pofterieiire d'uu autre veaii , cjiii paroiffoit fe confondre avcc le premier dii coti droit aii- deffous des cotes, de maniere que fes dernieres vertebres du dos en s'u- nillant aiix memes vertebres dorfales du veau principal, faifoient.paroitre I'epine du dos comme bufurquee, en formant i-peu-prcs un angle droit un peu au-deffous du diaphragme. Le monftre entier avoit une feule tcte , deux pieds ou extremites an- terieures, & deux pofterieures. Le veau principal & le demi- veau avoient cfiacun un anus & une verge avec fon fourreau , tels qu'on les voit ordinairement dans ces quar drupedes. M E M O I R E Sur une des caufes qui peuvent rendre les Chevaux poujfifs , & fur ks precautions que L'on peut apporter pour prfyenir cette maladie. Par M. G u E T T A R n. ■3M^m. J^ES pluies frequentes qui arriverent en 1745 ^^'^ environs del'Aigle, petite ville de Normandie oii je reiidois alors, ayant depofe fur les pres une quantite de terre qu'elles entrainoient des montagnes voifines, firent contrader aux foins une mauvaife qualite qu'on appellc la vafe ; ces foins, ^ qui Ton donne le nom de foins yafe's , font regardes dans le pays comme une des caufes de cette efpece d'afthme nomme la poujf'e , dont les che- vaux font attaques. On eleve aux environs de I'Aig'Ie beaucoup de chevaux de prix, les haras du roi , plus magnifiques encore par la beaute de ceux que Ton y nourrit , que par les batimens oii on les garde , ne font pas ^ une journee de cette ville : l'on a meme fu exciter I'envie natarelle que I'interet de chaque particulier pouvoit lui donner, d'avoir de beaux cheveaux, par lui prix que Ton delivre , fuivant les ordres du roi , ^ celui qui peut avoir le plus beau poulain provenu d'un etalon des haras du roi. II fe tient tous les ans aux environs de cet endroit une foire qui eft le rendezvous de tous ceux qui prctendent ^ ce prix •, il eft done accorde \ eelui qui a amcne un tcl poulain, qui, au raoyen d'un certihcat que rinfpe(fl:eur des liaras a donn6 au proprietairc , lorfqu'il eft venu faire couvrir fa jument, doit etre reconnu par ce meme infpedteur pour etre provenu d'un etalon I DE L'ACADEMIE ROYALE DES SCIENCES. 195 des haras. On ed. ainti parvenu h peupler la Norniandie de chevaux ijui *^— — im^i^ fouvent difputcnt en beaute aux plus beaux chevaux ctrangers. La feule raifon que ces animaux attaqucs de la poufle perdent beau- •'^ '^ -* ^ o .m 1 e. coup de leur valeur , fuffifoit fans doute pour porter Ics habitans de cette Ann^e it At,. province i chercher les moyens de prevenir cette maladie , en rendant , autant qu'il eft po/Tible , aux foiiis vafes leur premiere bonte -, mais il regne dans ce pays un efprit porte i tout ce qui rcgarde les arts , qui a encore contribue beaucoup ^ leur en faire imaginer plulieufs. Ce font ces moyens & quelques autres precautions que }'ai cru pou- voir y joindre , que je me fiiis propofe de dccrire , dans la vue qu'ils pourroient ctre utiles ^ bien dcs pays oii ils ne font pcut-etre pas em- ployes, & que beaucoup de voyageurs pourroient apprendre par-1^ a fe precautionner centre une maladie dont ils pourroient voir leurs chevaux attaques , aprcs avoir parcouru des pays ou les foins auroient ct^ vafts. De quel interct mcme ccla ne peut-il pas etre fouvent pour les troupes que Ion envoie en garnifon dans des cantons i paturages , ou alors les ciievaux, au-lieu de fe r^tablir, contradteroient par leur nourriture meme une maladie qui les rend moins propres ^ foutenir les fatigues des cam- pagnes dans les temps de guerre ? La leclrure que j'ai faite du parfait Marechal de M. Solleyfel , ne m'ayant appris aucune des precautions que Ton apporte en Normandie pour ren- dre quelque bonte ^ ces foins vafes, J'ai cru que je fournirois un memoire utile^ i quiconque voudroit donner un nouveau traite fur I'art de gou- verner & de guerir les chevaux , & qu'il y trouveroit une noiivclle caufe de la poufle , dont M. Solleyfel ne park pas , & qui peut-etre en eft Hne des principales & des plus funeftes : outre que Ton peut acqucrir par-lh quelques connoiflances fur des m.iladies dont les chevaux font attaques , qui ne nous deviennent fi difficiles ^ connoitre que parce qu'on n'cft pas alTez attentif 'k s'afliirer des caufes qui ont pu les produire. Avant que d'entrcr dans le detail des moyens employes pour devafer les foins , il ne fera pas inutile , ^ ce que je crois , d'examiner (i les foins vafes peuvent occ.ilionner la poufle de la fagon qu'on le penfe dans le pays. On ne peut faire toniber aucun doute fur I'effet que ces foins produifent , I'univerfalit^ de ce fentiment , qui ne depend que d'une obfervation journalicre , leve tous ceux que I'on pourroit avoir -, mais c'eft fur I'explication que Ton donne de la maniere dont cette maladie , fe contrafte , qui bien conftatee , fournira des vues qui pourront engager ^ apporter des precautions que I'on n'cmploie pas encore. L'on penfe communcment que c'eft par la voie de I'eftomac que cette maladie fe gagne •, la terre , dit-on , s'amafle dans ce vifcere , elle s'y cor- rompt , gonfle les chevaux & les rend poufllfs : je crois que dans e& cas-ci, c'eft plutot par la refpiration que cette pouflicre penetre & quelle F.irvient jufques dans les poumons, qui font le liege de la poufle, & non eftomac. Pour faire comprendre comment Je concois que la poufle fe contrade par la refpiration , il fera bon de dire de quelle facoii les hommcs 19(5 ABRfiGE DES MfeMOIRES — — — ■ deviennent qiielquefois afthmatiqiies , & meme d'etablir, avant que de rap- . porter ce fait , la fimilitude qu'il y a entre rafthnie des homines & la A N A T o M I E. poufl-^. des chevaux. Anm'c 174c,. Les chevaux poufUfs, de incmc que les hommes afthmatiques , ne peu- vent refpirer qu'avec peine -, diSiculte qui augmente lorfqu'ils font quel- ques exercices violens, ou qu'ils out trop mange : fi un cheval, de m^iue Su'un homme , monte une montagne un pcu trop vite , & meme qiiand s la monteroient I'un & I'autre ^ pas lents , s'ils ne font pas de temps en temps quelques paufes , ils font bientot hors d'haleine ; s'ils boivcnt oil mangent trop ou trop vite , la refpiration devient plus frequente , ils font obliges de le faire plus lentement •, ils ne peuvent boire d'un trait , ceux qui fe piquent d'etre bons ecuyers en tous "points, ronipent, comme ils difent , I'eau ^ leur cheval , penfant qu'il ne lui eft pas bon de boire tout de fuite, mais lorfqu'un cheval eft pouflif, le maitre n'eft que trop bien decharge de ce foin , ce cheval ne boit qu'^ plufieurs reptiles •, un homme afthmatique ne peut boire de grands coups : un cheval pouflif eft plus fujet aux maladies inflammatoires , que celui qui n'eft pas atta- qu6 de la poufle •, pour pen qu'on lui faffe faire de longues journees , ou qu'on le pouffe un peu vivement , il lui prend , en terme de mare- chal , une courbature , maladie qui ne (e guerit que par la plupart des remedes que Ton pratique dans les maladies inflammatoires des hommes , auxquelles les afthmatiques font fur-tout fuJet, & principalement \ celles du poumon. Oil voit done que les fymptomes de la poufle des chevaux & de I'afthme des hommes etant les memes, il eft plus que probable que ces maladies font feniblables , ou plutot que c'eft la meme coninie fous dif- ferens noms •, & fi de plus les caufes peuvent etre femblables , il n'y aura f)as alors de doute fur la fimilitude de ces maladies : je fais que M. Sol- cyfel a etabli cette identite, mais outre qu'il le fait par des raifonnemens aflez finguliers , les doutes que Ton a touchant ce fentiment , ne m'ont pas paru etre detruits pnrmi ceux qui gouvernent les chevaux i il convient done de le confirmer de plus en plus , & par des raifons plus fimples que celles qui font donnees dans le parfait Marechal. Les hommes deviennent fouvcnt afthmatiques par les pouflieres que la nature de leur travail les oblige de refpirer •, celui qui bat du platre , qui pique ou fond du gres , qui continucilement renferme dans un gre- nier, valine du bled; celui qui pile dc la foude , ou bat de la poudre , ^ poudrer, & qui ne couvre pas le mortier d'une toile & meme d'une peau , tombe dans cette maladie qui degenere tres-louvent en phthilie dans les tailleurs de gres , maladie dont ceux des environs d'Eftampes meurcnt ordinairement. Tous ces ouvriers refpirent I'une ou I'autre de Ces poufljeres , qui pafJant dans les bronches du poumon , les embarraf- fent en epaifliflant ia lymphe •, ce qui y occadonne fouvent de petits tubercules , &: qui toujours devient une caufe prochaine des maladies inflammatoires du poumon. I! en eft de meme des chevaux qui mangent di4 foin vafc, ils font en DE L'ACAD1?:MIE ROYALE DES SCIENCES, i-)! en partie dans line pouflicre qui fort de ce foiii , & ils la refpircnt con- «— j^-— -^^-j tiniicllcaient : il nc s'agit pour s'affurcr de ce fjit, cjue de faire attention . ^ la fa^on dont ils font obliges de tirer le foin pour ie manger, on {,„ '^ ^ -^^ ^ o m i E. jette, & le plus foiiveni fans la delier , une botte dans Ic ratelier qui eft Ann(e iTdii. au-defliis de I'nuge, & dont les batons font peu ^cartes les uns des au- trcs; lorfque le cheval veut manger, il eft oblige de lever la tete, de tirer avec fecoulFe, & a plulicurs rcprifes, la bouchee de foin qu'il veut avoir; aiiili lorfque ce foin eft vafe, le nombre de fois que le cheval eft oblige de repcter jiifqu'i ce qu'il ait fini la botte, le met dans la niccflitc de rclpirer par les narines , & mcme par la bouche dans le moment qu'il ,cn vent tirer cette poufTiere que les fecoullcs qu'il dorine, font fortir du foin & fe repandre autour, de forte que le cheval fe trouve dans le cas de ces hommes qui travaillent toujours au milieu d'une pouffiere qui s'eleve de Icur ouvrage : aufll les uns &: les autres font ils fujets i des eternumens frcqu:'ns, occallonnes par le picotement que ces poufiieres produifent fur la membrane pitiiitaire, jufqu'i ce qu'elle foit accoutumce i ces imprellions , qu'elle devienne infcniible, & rende peutetre alors la pouffiere encore plus dangereufc , & plus capable de faire les uns afthmatiques & les autres pouffifs. En effet , dans le commencement la pouffiere procure , en picotant la membrane pituitaire , une plus grande quantite de la fecretion qui fe filtre dans les glandes de cette membrane , & c'eft ce qu'on obferve dans les uns & les autres •, le nez coule alors * plus abondamment, Ton lalit beaucoup plus de mouchoirs qu'i I'ordi- naire : les chevaux henniffent plus fouvent, & fe defont ainii de la ma- tiere trop abondante de cette fecretion , qui fe trouve chargee de la pouffiere ^ laquelle ils font expofes , & qui ainIi Icur eft alors moins \ craindre que lorfqu'elle li'occadonne plus ce grand ecoulement; les glan- des devenues inlenlibles & s'etant meme , pour ainli dire, bouch^es, laif- ient paffer cette" pouffiere qui coule deflus , & eft emportee par le filet d'air qui eft refpire jufques dans les poumons , oil elle s'embarraiTe , fe mele avec I'humeur muqueufe des bronches, I'^paiffit, & peut ainfi y oc- calionner de petits grains ou tubercules obferv^s fouvent dans les hommes. Le parfait rapport qui fe trouve entre les fymptomes de la poulfe des chevaux & de I'afthme des hommes, & entre une des caufes qui peuvent Its occalionner, me fait conclure que c'eft la meme nialadie, & que c'eft plutot par la rcfpiration que les chevaux qui mangent du foin vafe , la con- tradlent , que par I'eftomac : ce n'eft pas qu'2» la rigueur cette maladie ne put etre la fuite des mauvaifes digeftions , qui rendant le fang moins firopre \ circuler, le filfent refter plus long-temps dans le poumon , ra- entir ainfi le cours de la lymphc qui y eft deji trcs-lent, & confequem- incnt I'epaiffir de plus en plus; mais il eft inutile dans le cas dont il s'agit ici , d'avoir recours i une caufe fi dloignee , lorfqu'on en trouve une li prochaine & fi naturelle. Les mauvaifes digeftions font une des caufes, felon M. Sollcyfel, qui peuvent occafionncr la pouffe, mais il paroit n'avoir pas connu celle qui vieiit des foins vafes , piiifqu'il garde Ih-deifus uii lilcnce entier : on doit done joindre aux caufes qn'il rapports , ccUe-ci Tome IX. Fartie Fran^oij'e. . P p ipS ABRtGt DES MfiMOIRES MXKMJii. II I qui eft pcut-etre une des principaks & une de celles qui meritent le pins d'.itteiition. A N A T o M 1 E. j[ p_j|.Q;t jjjg,^ qj,g I'qi, penfe ainfi en Normandie , par les foins & les Ann^e I74'i. peines qu'on s'y donne pour enlever a«x foins vafes cette terre perni- cicufe, & d'autant plus pernicieufe quelle eft plus fine, ayant etc lavee par les eaux qui I'ont cmportce des montagnes , & qui par conicquent eft plus propre ^ penetrer dans les poumons & a etre portee jufques dans les dernieres ramifications des bronches. On peut en general reduire fous deux chefs les moyens doot on fe fert pour devafer les foins, les uns fe fervent de I'air, les autres de I'eau pour emporter cette vafe •, ceux qui ont recours a I'air , font fans doute ce . qu'ont fait les premiers qui ont voulu dcbarraffer leur foin de la vafe qui y avolt ete dcpofee : il etoit naturel de penfer que fi on fecouoit plus qu'on ne le fait ordinairement les foins en les fanant , ou que fi on les battoit avcc des flcaux conime on bat le bled, & qu'eniuite on les fe- couat, on parviendroit ^ leur oter cntierement ou en grande partie , la vafe dont ils ttoient charges. Ce font 1^ en effet deux des moyens employes, les uns fe contentent de faire fecouer plus qu'^ I'ordinaire , & plus haut le foin que Ton fane , alnfi I'air qui circule , cmporte avec lui une partie de la terre , mais il n'en emporte qu'une partie -, le foin n'eft pas affez fepare pendant qu'on le fane , • pour qu'une partie de la poulliere ne tombe pas encore fur le foin voiliii de celui qui eft remue aduellement , les fourchetees outre cela tombent les unes fur les autres, & renferment ainh beaucoup de cette pouffiere qui s'etoit elevee : il eft vrai cependant qu'il ne laiffe pas de s'en perdre en Fair, & qui auroit la precaution lorfqu'il en donne aux chevaux, de Ic battre avec la fourche & de le fecouer de noUveau , enleveroit allez de poulTiere pour en empecher peut-ctre les mauvais effcts ; mais il y a pen de palefreniers , fur- tout de ceux qui ont beaucoup de chevaux ^ foigner, qui aient I'attention de fecouer le foin , comme ils ont celle de remuer I'avoine -, c'eft pourtant une des meilleures facons que Ton puiffe em- ployer , & de celles qui emportent le moins de perte de foin avec elles. II en coute davantage h ceux qui le batteni avec des fleaux i bled, audi y a-t-il peu de perfonnes qui emploient ce moyen , il conduit k une certaine depenfe, il en couteroit affez en journees de batteurs, ^ qui auroit une grande quantite de foin en grenier , pour augmenter de beau- coup fa valeur, outre la perte qui s'en feroit, le foin ie brifant aifement fous les coups repetes du fleau ; mais c'eft une des meilleures facons que puiffent employer ceux qui font en etat de ne pas prendre garde h cette depenfe & ^ cette perte, ou qui aiment micux les fouft'rir que d'expofer leurs chevaux k tomber malades. Lorfqu'on a voulu s'epargner la depenfe des batteurs & la perte des brins caffes , on a eu recours ^ I'eau , & on a lave les foins ■, les uns le font aprcs la coupe de ces foins, & les autres lorfqu'ils font encore fur pied ; les premiers choihffent une petite riviere , ou un bras etroit d'une riviere un peu confidirabie j il y en a meme qui retrccillent encore ce DE L'ACADEMIE ROYALE DE.S SCIENCES. ^^j bras avec des planches s'll eft encore trop large, on barre ce bras ou IVn- — — — droit rctreci, d'une efpece de claie fembiable k celies qui font i la bonde . des if tangs, on jette enfuite une quantitc de foin dans cette eau, & on le ' '"* t o m t e. fait remiier par des hommes qui, s'ctant rais h I'eau, le foulent avec Ics ^nrJe 17 4o- pieds , ou qui le remuent avec des fourchcs ou des perches de deffus les bords de la riviere, I'eaii deiaie , dilTout la terre & I'entraine avec clle d'autant plus aifement , qu'oii a rendu Ton cours plus rapide par le rctre- ciirenient qu'on a fait ^ Ion lit; le foin ne peut pas le perdre etant arretc par la claie, enfuite on le retire de I'eau & on le fine avec foin. On peut bien avoir par-li du foin parfaitement dcvafe , &: dune facon trcs-facife 8c peu couteufe, mais le foin perd beaucoup de fa bonte, cette efpece de leffive liii emporte alTcz de ce qnl le rend agreable aux che- vaux , pour qu'ils le recdnnoillent ^ I'odorat , & n'en mangent qua la longue, lorfqu'on ne leut en donne point d'autre, & qu'ils s'y lont ainli occoutumes pcu-a^peu-, fi ce foin n'a pu ctre fane &; Icrri par un beau temps, il contrade aifement une odeur defagreable, il perd meme de fa couleur verte, il dcvient jaunatre ou noiratre', il eft dans le cas de celui qui a ete mouille lorfqu'il ^toit en vilottes ou en meules, & qu'il y a ^te alfez long- temps pour fe gater : il eft bon de favoir cette manoeuvre, non pour s'en fervir , mais pour I'eviter , i moins qu'en Temployant on n"y apportat beaucoup de promptitude, & quon le fit dans unbeau temps qui lechat proraptement le foin. II >y a d'autres particuliers qui ont recours i un moyen qui a quelquc cUofe de plus recherche que ceux qui font rapportes ci-devant : ils fe ■fervent prefque dc la meme caufe qui a vafc les pres pour les devafcr, ils n'attendent pas que les foins foient coupes , mais lorlqu'ils font encore fur pied ils les couvrent d'autant d'eau qu'il eft neceffaire pour que la vafc depofee au bas de I'herbe foit fous I'eau , & puiffe etre ainfi delayee & diUoute : comme les pres bas font ordinairement fur Ics cotes de quel- que riviere , qui en fe dcbordant fe repand dans ces prcs & les vale , on a imagine d'occafionner un fembiable debordcment , mais qui flit d'une eau claire & limpide ; on attend done que par la ceflation des pluies, ou que par un intervalle conuderable I'eau de la riviere ne foit plus char- gee de terre , & alors on la fiit entrer dans les pr^s. On emploie pour y parvenir deux moyens ail.'z liraplcsi ce n'eft pas cependant le ddvafement des pres qui les a fait imaginer , un befoin en- core plus preffant, en ce qu'il revient plus fouvent, y a fait penfer; les )res bas deraandent .^ ctre beaucoup mouilles , les temps de lechcreUe eur font trcs-prejudiciablcs , I'herbe alors eft trcs-petite & peu abondan- te-, c'eft done pour prevenir cet inconvenient que I'on a fonge dans beau- coup de pays i trouver la facon de pouvoir , comme Ton dit , les bai- gner ou les abreuver quand on le fouhaiteroit ; pour cet eftet on les coupe de plulleurs folTes d'un ou de deux pieds de profondcur , diriges fuivant le cours de la riviere, de forte cependant qu'en ferpentant dans les prcs ils puiffent porter I'eau dans toute leur etendue ; par leurs extremites. ils aboutJlTent ^ U riviere , ces extremites font fermcs d'une digue laite dc Pp ij f. ^co ABRIDGE DES MEMOIRES — »—iiM^— branches d'arbre , entrelac^es les unes dans Ics autres , & de couches de gazon oil bien de planches-, ces fofl'es font eux-mcmes perces de pkifieurs A N A T o M 1 £. p^jjjpj j.jgQ|^j p^j faignees. Ann^e 174S- Lorfqu'o" vent done Lire r^pandre Teaii dans les pres , on ouvre la digue dii haiit des foffes, c'eft-^-dire, celle qui eft oppofee au courant de la riviere , Teau entre dans ces foffes & dans les rigoles qui , etant rem- plies, fe degorgent fur les pres, on rebouche enfuite ce trou, & on laiffe I'eau autant de temps que les pr^s en ont befoin , toute la difference que Ton obferve lorfqu'il s'agit de devafer les foins , eft de retirer I'eau plus promptement , & de ne I'y laiffcr qu'autant de temps qii'il eft neceffaire pour que la terre fe diffolve ; on ouvre enfuite I'autre bout des foffes, & I'eau fe retire des pres par le moyen des rigoles dans les foffes qui la conduifent a la riviere : on repete cette manosiivre affez de fois pour que la vik foit entierement ou en grande partie emportee. La feconde fi90n ne differe de celle-ci qu'en ce que les foffes font de diftance en diftance, & i leurs extremites fermes de pales fcmblables k celles des moulins ; par le moyen de ces pales on fait la meme chole qu'avec les digues , tout ce qu'elles ont d'avantageux , c'eft qu'elles font plus commodes , qu'elles font faciles ^ manier , & qu'elles demandent moins de temps pour que Ton puiffe opere'r \ il eft plus aife d'elever ou d'abaiffer une pale, que de rompre & de retablir les digues faites de bran- ches ou dc planches decrites plus haut. Cette facon de devafer les foins eft fans contredit la meilleure , I'herbe ne perd point de fa quality, etant encore fur pied elle n'a pas I'incon- venient de la feconde , le lavage que Ton y fait du foin , le rend tou- jours d'une qualite tres-mediocre •, elle remedie aux Journees des bat- teurs, 4 la perte du foin qui fe fait par le fleau, & elle devafe mieux le foin que la feule fanaifon. II eft vrai que les pales occafionnent une certaine dtJpenfe , mais cette depenfe une fois faite, elles font d'un entretien peu conliderable , & qui fe trouve bien compenfc par Tavantage que Ton a, outre celui de devafer les foins , de pouvoir abrciiver facilement les pres quand Ton veut , ce qui devient de confequcnce dans les annees feches. II feroit ^ fouhaiter que ce moyen fe pratiquat au moins dans les endroits ou il y a des ha- ras , & oil par confequent on doit etre plus attcntif i prevenir tout ce qui peut etre funefte aux chevaiix. Le foin avec lequel on a coupe de foffes 4 pales, les pres qui font depuis la fource de la petite riviere d'Aure jiifqii'i Dreux , me font croire qu'on a fenti qu'on retiroit une grande utiiite de ces foffes, on les a tellement multiplies, fur-tout aux appro- ches de Dreux , que fouvent le lit de la riviere ne fe diftingue pas aife- ment des foffes lorfque ceux-ci font remplis d'eaii. Enfin de quelque facon que Ton fe ferve pour devafer le foin , il fera toujours ben de le faire couper plus haut qu'4 I'ordinaire , on aura h la verite moins d'herbe, mais elle fera meilleure, & Ton ne courra pas rif- que de rcndre fes chevaux maladcs •, & quand bien meme on auroit cette DE L'ACADEMIE ROYALE DES SCIENCES. 301 precaution , il convicndrojt pticore de fecouer le foin avec la fourchc ^___ avant que de le donner au chcval. L'explication que j'ai donn^e plus haut de la maniere que Ics chevaux " '^ ■* t o m i e. gagncnt la poulTe , me fait penfcr qu'il y auroit encore dautres atten- ^nnit ijaa. tions ^ avoir , qui feroient que Ton pourroit employer le foin meme avec fa vafe. J'ai fait voir que c'etoit par la voie des poumoiis , & non [>ar celle de I'eftomac, que les chevaux contra(5toient la pouffe, il n'y auroit done qu'^ troHver un expedient pour empecher la pouflicre de volcr, o« bien faire en forte que le cheval y flit moinsexpofi, & par-Ii on rem6- dieroit ^ I'effet contrairc. Je penfe que Ton trouveroit cet expedient dans une pratique que Ton emploie dcj^ dans un autre cas, ou dans une fa- ^on de prcfenter le foin au cheval, difterente de celle qui eft en ufage. Lorfqu'on veut rafraichir un cheval on niouiile fon foin, c'eft-i-dire, qu'aprcs avoir delie la bottc , on la trempe par poignde dans un feau d'eau , on fecoue chaque poignee en la retirant , & on la donne tout de fuitc au cheval ; il (croit done utile de laver ainii le foin vafe , on enleveroit par ce petit lavage une partie de la terre , on fixeroit I'autre de facon quelle ne pourroit pas s'elever en I'air, & le cheval ne feroit pas en dan- ger de la refpirer. Mais, dira-t-on, cette terre paflant dans Teftomac n'expofera-t-elle pas le cheval i d'autres maladies peut-etre ineme plus funeftes, & ne voit-on pas que dans I'homme un pain poudrcux devient mal-fain ;- Je ne connois poinr les efi'ets de la terre lur I'eftomac des chevaux , & je ne (ais li les effets que Ton pretend qu'elle fait fur reftomac de I'homme , font aflee bien etablis pour pouvoir rejetter entierement ce que Je propofe, dans I'incertitude ou Ton eft que le cheval contraftera une maladie dangereufe fi on fe fert de cette precaution , & dans la certitude oii Ton eft prefque qu'il deviendra pouffif li on la neglige. Ceux ^ qui elie ne plairoit pas, pourront trouver dans la feconde pre- caution que Je penfe devoir etre apportee , un autre fecours : on ne deiie jas ordinairement la bottc de foin en la prefentant au cheval, Sc on la ui donne dans le ratclier-, Je penferois done qu'il fnidroit tonjours la dc- lier, & mcttre le foin au-dcffous de fauge plutot que dans le ratelier, le cheval en prenant une bouchce feconeroit lui-meme le foin, & en rele- vant la tete il fe trouveroit moins cxpofc , h caufe de I'auge dc par !a dif- tancc, ^ la poufliere qui pourroit s'elever lorfque le cheval tireroit du foin : outre qu'il tomberoit toujours i bas de cette poufliere , & que le cheval I'eloigneroit plus aifement en fouftlant deffus, comnie ils le font lorfqu'on leur donne de Yxvome poudrde ; apres avoir eparpille de cote & d'autre cette avoine, on les voit fouffler fouvent defius par les nalaux, & chafTer ainll la poufliere qui y ctoit melee ; il eft vrai qu'on pourroit perdrc par le trepignement des chevaux un peu de ce foin ; niais audi il y auroit nioins h craindre pour eux , outre qu avec le moindre foin & la moindre induftrie on pourroit prcvenir cette perte. Enfin , le plus fur moyen feroit de ne Jamais donner aux chevaux de foin vafe •, m.-,is il y a peu de particuliers qui veuillent & qui puilicut I ;8i ABREGEDES MEMOIRES ■ rasme Jetter ce foin & refifter ^ I'envie de le vendre, rincertitiide meme ' oil Ton eft de ce que pent occalionner le foin pour lequel on a apportc A N A T o M I s. qiielqiies foins afin de le devafer , fait qu'on s'expofe i perdre fes che- Jn/iie t~46- vaux, oil ^ perdre ceiix des aiitres en le vendant, il n'y a que le proprie- '' taire d'interelle dans le premier cas; mais il feroit bon de pouvoir fe pre- eautionner contre les niarchands qui ne feroient pas (inceres, & avoir des marques auxquelles on put reconnoitre le foin vafe de celui qui ne left pas : rien de fi aife & de fi limple, il ne s'agit que d'en tirer une ou deux poignees de la botte & les fentir •, fi Ton voit une pouffiere confi- derable s'en clever, on peut alors regarder ce foin comme vafe, & s'il a line odeur defagriable & une couleur jaunatre ou noiratre , on doit etre fur qu'il a ete lave & mal feche ; ainfi il faudra avoir recours alors aux pre- cautions que Ton peut apporter fur le champ , comme de faire battre , fe- couer le foin , ou bien le mouillcr ou le faire mettre au bas de I'auge. Les fuites funeftes de la poulTe m'ont paru exiger les details oii je fuis entre, ces details pourront rendre plus attentif fur la qualite de la nourri- ture que Ton donne aux animaux : ce n'eft pas ordinairemcnt par I'excr- cice que les animaux abandonnes i eux-memes gagnent quelque maladie, ce n'eft pas par le trop de manger, Ton fait I^-delfus leur fobriete, mais c'eft fouvent par la qualite : on connoit la maladie qui attaque les mou- tons lorfqu ils mangent de cette efpece de renoncule , connue fous le noiu de douve. On lit dans I'hiftoire des plantcs de Lapponie par M. Linnxus, une obfervation tres-intereffante fur une maladie qui faifoit mourir prci- que fubitement les beftiaux d'un canton oii il fe trouvoit, & qui netoit occafionnee que par la grande quantite de la vraie cigue que ces animaux Kiangeoient •, il empecha que Ton ne menat les beftiaux dans les pres oil cette plante s'etoit confidcrablement multipliec , & des-lors la mala- die cefla. Je fais depuis long-temps d'une perfonne non fufpede , que fon che- yal perdit entiirement le poil pour avoir mange pendant un certain temps du foin qui avoit ete mis fous des facs de fel que Ton tranfportoit par charrois-, fon cheval gagna bien d'abord de I'embonpoint, comnie cela arrive ordinairement , mais des quelle n'eut plus de ce foin fale ^ lui donner, & quelle I'eut remis au foin ordinaire, le poil comrnenca h lui tomber & il devint tout ras : eftet fingulier qui ne feroit peut etre pas ar- rive fi cette perforaie I'eut fait paffer peu-i-peu du foin Hile au foin or- dinaire , quelle le lui eut melange , gu quelle eiit toujours pu I'etj nourrir. ) .,'j\\y SoHvent les caufes de certaines maladies font plus prochaines des caufes ordinaires que nous ne nous I'imaginons , elles ne nous paroiffent ex,-: traordinaires que parce que la maladie arrive plus rarement. DE L'ACADEMIE ROYALE DES SCIENCES. Js-J OBSERVATIONS Sur U Bandage comprejjif dejlini d la cure de la tumeur lacrymaU. Par M. Petit. A K A 7 O .M i £. Annce 27^5. JLiA tumeur lacrymale ne caiifc point de doiileiir \ moins qu'il n'y ait M(fm. inflammation , les malades peiivent eux-memes la viiider pluheiirs fois par Jour, & la faire difparoitre en la prefTint doucement avec le doigt. Cette facilite de la vuider a donne lieu de croire qu'un bandage, ou tout autre moyen capable de faire une preffion continuelle aa degrc de cclle que peut faire le bout du doigt , pourroit procurer une gucrifon parfaite ; c'efl pour rcniplir cette idee, qui paro'it limple & naturelle, que Ton a mis en ulage difi'erens moyens de la coifiprimer : on s'eft fervi d'abord de plufieurs comprefl'es de dift"^rentes grandeurs, ayant toutes la forme d'un croiilant , on pofoit la plus petite immcdiatemcnt fur la tumeur , & fur celle-lh, fuccelTivcmcnt & par degrcs , on en appliquoit de plus grandes, jufqu'i ce que I'efpace qui fe trouve entre le bord interne de Torbite & ]a voiite du nez fut entierenicnt rempli : fur la derniere compreffc plus large^que toutes les autrcs , & qui forme, pour ainh dire, la bafe d'line pyramide renverfee , on met une compreffc mince triangulaire , affez grande pour couvrir \'ce\\ malade &c le front •, le tout eft foutenu & af- lujctti par une bande large d'un pouce , & affez longue pour f.iire cinq ^ fix circonvolutions alternativement , d'abord fur Tcril , puis fur le front. Ce bandage nomme occulifle eft decrit par Laurent Verduc, {a) dans un petit Traitc des Bandages qu'il donna au public far la fin du dernier lieclc. On n'appliquoit cette compfeffe pyramidale & ce bandage , qu'apres avoir exadicment comprime la tumeur lacrymale avec le doigt , &: en avoir fait fortir par les points lacrymaux toutes les larmes qui la rempliffoient ; iiiais parce que I'application , tant des compreffes que de la bande , etoit difficile h. faire , que les malades ou leurs parens nc rcufliffoient pas tou~ jours k I'appliquer comme jl faut, & que d'ailleurs il etoit difgracieux d'avoir les yeux toujours couverts de compreffes & de bandes ; pour ob- vier i ces inconveniens on imagina un bandage d'acier moins incommode, plus facile \ placer , & qu'on peut lailfer pluheurs Jours dans la meme Elace fans le rcmuer , pas meme pour le relacher ou pour le refferrer au efoin. Ce bandage eft compole de deux portions de cercles EFG} DED Jointes & loudees enfemble au point £j & dune efpece d'an- tenne CA , formant enfemble quatre branches, comme on peut voir dans la planche , Fig. i 6' a. Fl. V. le demi-ccrcle DED faifant deux bran- ches , eft paffe fur le coronal d'une tempe i I'autre •, le denii-cerclc EFG (a) Chirurgien ]mi & pere des Verduc qui cnt imx. dc la Pathologic & do opera- tions chiiurgicales. 50+ ABREGE DES MEMOIRES » qui fait la troilieme branche , pnlle de devant en arriere delTus la future fagittale, & s'etend Jufques vers la partic poftcrieure & inferieure de I'os A N A T o M 1 E. opj-ipitji . jj portion CA fait la quatrieme branche de ce bandage , elle Ann^e 174^. defcend du front jufciu'au grand angle do rocil; elle eft compofee de deux pieces, I'une entre dans une elpece de mortaife qui fe trouve an point £, oil elle eft fixse par une vis au point oil il convient pour I'ajufter ^ la tumeur, I'autre piece CA eft jointe ^ cette premiere par une charniere au point C, oii une autre vis qui traverle la piece fixe , fert h eloigner ou a rapprocher ces deux pieces I'une de I'autre , pour augmenter ou pour diminuer la compreffion : I'extremite de cette quatrieme branche fe ter- mine par une petite platine Aj ^ laquelle on joint une pelotte de gran- deur & figure convenabies ^ la tumeur. On garnit la tete du malade d'une petite calotte de laine fur laquelle on place le bandage , lequel eft couvert de chamois bien doux, on raffujettit par le moyen de deux rubans qui font noues I'un fur le front & I'autre fous la machoire. Voili quels ont etc les bandages ufites par les praticiens pendant pres d'un fiecle , mais ni I'un iii I'autre n'a reum : ceux qui etoient perfuades que la compreffion devoit fuftire pour guerir cette maladie, ont recher- che les defauts de ces bandages, Sc croyant que le principal etoit les va- riations de la pelotte , ils en ont forme de difterentes matieres , d'abord de coton , de charpie , de laine , puis avec de la cire , qui , ^ caufe de fa molIelTe, peut non-feulement fe raouler k la partie , mais s'y rendre uti peu adherente & empecher fa vacillation : ce moyen n'a pas mieux raiffi ; on a trouve la cire trop molle , mais on I'a rendue plus folide en I'alllant avec la fleur de farine ou I'amidon : d'autres', pour la meme raifon , ont figure en pelotte un morceau de liege , & I'ont trempe dans la cire chaude ; d'autres enfin, fe font fervis de platre pafle au tamis fin, detrempi avec I'eau ou le blanc d'oeuf, & ib ont trouve que la compreffion etoit plus cgale & plus folide , mais trop dure. Voili une idee generate de la pratique de ceux ^ qui j'ai vu tenter la gnerifon de la tumeur lacrymale par la compreffion •, mais de telle matiere que foit la petite pelotte , de laine , de coton , de toile , de liege , de cire ou de platre, il faut toujours la maintenir en fituation par un ban- dage , & des deux que j'ai decrits , celui d'acier eft preferable : voici la maniere de I'appliquer. Les deux demi-cercles GFE8c DED etant places & lies fur la calotte ou bonnet de laine, comme il a ete dit ci-deffus, on comprime la tumeur, on la vuide exadement, puis on pofe la quatrieme ■ branche CA , on prend cette branche, on Tintroduit dans la mortaife E, comme on le voit dans la figure ■■, on la pouffe auffi avant qu'il faut pour que le bout A , garni de la pelotte , foit precifement fur la tumeur la- crymale, & lorfqii'elle y eft appuyee, on ferre la vis E pour raffujettir : on s'informe du malade fi le bandage Tincommode en quelque endroit, & s'il eft trop gene on y remedie-, mais on obfcrve fur-tout que la pe- lotte ne foit ni trop Lkhe ni trop ferrse, on corrige I'un ou I'autre defaut en relachant la vis Cj ou en la reiferrant, prenant garde fur- tout que Ic malade puilfe fupporter la compreffion fans douleur. On DE L'ACADEMIE ROYALE DES SCfRNCES. 505 Oil reconnoit fur le ciiarap on ptii dc temps aprcs, li cettc pclottc cfl: 1 lerrie an degrii coiivcnable , car qiiand elle eft: trop l.ichc , le larmoyement ne revient qii'aii bout de quatre ou cinq heiires plus ou inoins , parce "■ ^* -^ t o m i e. que Ic fac nctant pas coniprinic les larmes y entrent, & out alFez de force Aiin:'i ifdi pour foulcver la pelotte i li alors on appuie iivc le bandage, on fait fortir les larmes par le coin dc I'ttil , comme on le failoit avant qu2 le bandage tiit appliquii : quand le bandage eft lerrc au point convenable, le larmoye- ment paroit dans rinft:ant , parce que dcs qu'il eft applique les larmes ne peuvent entrer dans le fflc, eiles tombcnt tout de uiite fur la Jouc , & coiitinuent dc couler ainfi , ce qui oblige les malades de s'effuyer Teeil & la joue )l chaque inftant, de forte que h cinq ou lix heures aprcs I'ap- plication du bandage on appuie le doigt fur la pelotte, que le malade nc loufFre point , & qu'il ne iorte rien par les points lacrymaux , c'eft une prcuve que les larmes n'ont point palle dans ic fac lacryraal , que par con- lequent le bandage ell ferrc au point convenable. Je me fuis fcrvi de ce bandage alTez long-temps pour en connoitre le bon & le mauvais, je I'ai rendu plus commode & phis pirfait •, mnis je ni'en fers k d'autrcs ufages, I'expericncc m'ayant appris que non feulement il eft; inutile aux fiftules , mais qu'il peut etre nuilible aux tumeurs lacry- males : en effct , li Ton fe rappclle 1 etat dans lequel fe trouve Ic hphon lacrymal lorfque le fac dilate par les larmes forme la tumeur du grand angle, on verra clairement que Ic b/inJage dont il s'agit ne peut ctfe utile, ^ moins que par la compreilion qu'il fait , il nc dcbouciie le canal nalal en forcant les larmes d'y pafTer &; de couler par le nez-, mais c'eft; ce qu'il lie peut prefque jamais faire quand le conduit nafil eft bouche, car li lorfqu'on I'applique la tumeur eft pleine, elle fe vuide prefque route par. les points lacrymaux , avant qu'oii ait aclieve d'anpliquer la pelotte , & alors ce qui refte de fluide dans la tumeur eft en petite quantite , &: n'eft pas affez preffe pour forcer le canal nafal &: Ic debouclicr : on voit par-li que la precaution que Ton prend de vuider la tumeur avant que d'appli- quer le bandage, eft tout-i fait contraire ^ I'intention que Ton a, puifqu'il faudroit plutot, s'il etoit polTible, boucher les points lacrymaux pour cm- pecher les larmes de (ortir de la tumeur , il faudroit de plus que I'cftort qui empecheroit les larmes de fortir par les points lacrym.iux fut fuperieur ^ la caufe qui bouclie le canal nafal : dans cette fuppolition , le bandage comprellif poufferoit de tons les cotes les larmes qui lent renfermees dans la tumeur, & pourroit les faire paffer dans le nez, ce qui gueriroic le ma- lade, & li cela fe pouvoit, le bandage fcroit preferable k toutes les ope- lations. Mais la tumeur etant pleine, quel moyen pourroit-oii employer pour tenir les points lacrymaux bourhes, pendant tout le temps que le bandage comprime le fac? je n'en connois point, ce qui me fait croire que le ban- dage comprellif ne peut guetir la tumeur lacry'iuale. J'ai cependant fait la tentative d'ajoutcr au bandage une pelotte diflerente de cellcs dont on Ic: g.irnit ordinairement, lorlqu'on nc veut comprimer que le fac : avec celle dont il s'agit , j'ai effaye de comprimer enfcmble les points lacrymaux & If Tome IX, Panie Frangoije, Qq 5o(J ABREGE DES MEMOIRES mmmmm^^^Bi;m^ fac , elle eft plus devce dii cote des points kcrymaiix , afiii d'enjpecher les larmes de fonir dii lac pendant I'application de la pelotte-, mais malgre A N A T o M I E. j^^^j^ attention & les foins que j'ai pris pour Ti^ii(Iir i placer cette pelotte ylnnife l'^45. '^"' comprimer le dc pendant rapplication , je n'ai pu cmpecher que phis de la moirie des larmes ne fortit par les points lacrymaux -, de plus cette pelotte preffoit douloureufement le globe de I'oeil lur lequel elle doit neceffairement appuyer pour comprimer les conduits lacrymaux : k • ■■ . h douleur que caufoit ce bandage auroit pu fucccder Tinflammation , la fievre & autres accidens , & c'eft ce qui m'a fait abandonner cette en- trepriie. Si Ton ne pent appliquer la pelotte de tnaniere que la tumeur refte pleine , 'i\ refulte que tout ce que peut faire le band.ige , eft d'empecher pour un temps que la tumeur n'augmente, ou de I'eftacer pour toujours en rendant le fac dur & callcux, en collant fes parois , ce qui aneantit L cavite , ou enfin en obliterant les conduits lacrymaux , de lorte que les' larmes n'y paffent plus -, mais dans tous ces cas , il eft certain qu'il ne peut y avoir de guerifon compktte : en effet, ce n'eft pas guerilon (i la tumeur ne difparoit que pour un temps, ni meme quand elle difparottroit pour toujours de 1 une des trois manieres que je viens de dire , puifque Tceil rtfte larmoyant , c'eft ce que j'ai toujours obfervc. ^ Ainji on ne peut pas guerir completemcnt cette maladie , mais on peut la faire difparoitre pour un temps, meme pour toujours par I'ufage da bandage, ce qui arrive, i°. lorfque le bandage a its porte li long-temps qu'il a rendu le fac dur, calleux , & capable de relifter aux efforts que font le» larmes pour le dilater •, 2°. ce bandage peut encore produire le meme effet lorfqu'on I'applique affez long- temps pour rendre les parois du fac adlierentes & les colier I'une k I'autre-, ;°. la comprelllon que fait le bandage long- temps continue, peut obliterer les conduits lacryma\ix , & c'eft ce que j'ai vu rrcs-fouveiit : dans le premier cas li les larmes peuvent entrer dans le fac , elles ne peuvent le dilater h caufe de fa reliftance-, dans le fecond ellcs ne peuvent entrer datis le fac puifqu'il eft efface , elles peuvent encore moins y entrer dans le troilieme cas , pui(- qae les larmes ne peuvent paffer dans les conduits lacrymaux, ainli la tumeur lacrymale que le bandage a fait difparoitre , ne reviendra plus ■, mais le fymptome principal (je veux dire le larmoyement) fubliftera tou- jtjurs, & il fera meme plus incommode au malade qn'il n'etoit lorfque la tumeur exiftoit : en effet , quand il y a tumeur & que !c malade s'a(- Irtjettit k la vuider trois ou quatre fois par jour, plus ou moins, on ne s'appercevra pas qu'il ait Tosil larmoyant, parce que pendant tout le temps que le fac eft ^ fe remplir , les larmes ne tombent point fur la Joiie ; mais lorfqne les larmes I'auront rempli , le larmoyement recommencera , & il ceffera de nouveau I'inftant apr^ qii'on I'aura vuide , ainfi le malade n'aura point de larmoyement pourvu qu'il vuide toujours fa tumeur I'inl- tant avant quelle fbit entiirement pkine , c'eft ce que j'obferve tous les jours ; mais fi le fac eft calleux ou boCich^ , que les conduits lacry- ' mavix fojent obliter^, qu'il n'y ait point de tumeur, il y aura un lar- DE L'ACADEMIE ROYALE DES SCIENCES. 307 moyenient contimiel ■, car tant que le lac eft fufceptible d extenlion il ■ fen de refuge aiix brtnes , & elles ne tombei\t fur la joQe qu; cjiund , le fac ne peut plus en contciiir : ce qu'il y a dc plus fucheux dans ces ^ ^ t o m 1 e. trois cas, c'eft qne I'operation eft impraticablc , & qii'il eft uiipoffibJe de Ann^e fdi. rctablir le liphon lacrymal. II n'y a pas long-temps qii'on m'appclla pour decider f\ iin enfant 6toit giieri , il portoit le bandage depuis lix mois : j'examuui Iffiii, il ii'ctoit pas gueri , mais pour mcnager celui qui avoit traite le n)alade , jc dis feu'enicnt que je ne pouvois pas encore en ju^er, & qu'il falloit atten- dre quelques jours pour etre liir d'une guerifon parfaite : ce jugeraent ne fut pas bien rc^u du bandagifte , qui m'entreprit avec U pea de mr- nagement, que je ne pus m'empecher de dire au pere du malade. «« Vo- »> tre fils ne fera gucri completement que lorlque les larnies auront rcpris »> leur cours naturel dans le ncz ; or clles coulent actucllement fur la »> joue au-lieu de couler dans le ncz, par confequent votre fils n'eft point jj gueri : il eft vrai que la tumeur lacrymale n'exifte plus , mais c'eft » parce que le fac qui a etc long- temps corapiime &: rcduit a lou eten- »} due naturelle , peut avoir repris une partie de fon reilort , c'eft pour- >} quoi il peut quelque temps refiftcr ^ la dilatation ; mais les larmcs qui »} repaffent aduellcment , le dilatcront bicntot, parce qu'elles n'ont pas »> leur cours libre dans le ncz. >» Ce jugement flit confirms , en moins de quinze jours la turaeur commcnca a rcparoitre , iSc fut au bout d'uu niois audi grolfe quelle I'avoit 6tL Plufieurs croient avoir gueri completement cette maladie par le moyen du band.ige , parce que depuis deux ou trois ans qu'ils en ont ceffc I'u- fage la timiciu' lacrymale n'eft point revenue : Je convicns qu'ils ont gueri ou plutot fait difparoltre la tumeur , mais ils n'en ont pas gueri ni fait difparoitre le larmoyement , ce qui eft I'effentiel •, au contrairc , ils font rendu plus confidcrabic , moins fupportable , & ont mis le malade hors d'etat d'en guerir, comme je I'ai explique ci-dcffus. Je vois une dame agce de trente aus , qui, pour une tumeur lacry- male qu'elle avoit dans (a j;unefie , a porte le bandage deux annees dc fulte : fcs parens la crurent guirie , quoiqu'il lui flit reftc un larmoye- ment dont elle fe plaint encore : ce farmoyement n'eft confidcrable que qnand il fait froid , c'eft ce qui en impole , car quand ceux qui font dans ce cas ont naturellement peu de larmes , ils paroiffent gueris quoi- qu'ils ne le foient pas : la dame dont il s'agit eft de ce nombre , mais , outre qu'elle a roeil naturellement fee , elle a les points & les conduits lacrymaux exadement bouches, & je ne doute point que le fac lacrymal ne foit de mime : le long ufage quelle a fait du bandage dans I'age Ic >lus tendre , a tenu long- temps toutes ces parties preffces les unes fur es autres , & c'eft pour cela que la peau du grand angle de I'ceil eft aufli plus enfoncee dp ce c6te-li que de I'autre, comme fi la pelotte du bandage y avoit laiffi fon empreinte. Cette malade qui voudroit guerir, s'eft adrelfee I moi , 8c quoiqu; jc lui aie fait conno'.tce que fon lar- moyement eft incurable 3 elle met en ufage fuccelEvenient toutes les <2') ij I jcS abrege des memoires — ™*^— — »«■ Uv]ucur5 aftreingentes que les Oculiftes ignorans applicjiient ordinairemcnt . dms Ics cas oil ils veulent donner du reffort aiix vaifleaux qu'ils difent ^ T o M I E. ^jjg relaches, lie fachant pas que dans la maladie dont il s'agit, les vaif- ylnm'e tiA^. fcaux loin d'etre relaches & trop diverts , font an contraire entiere- ment bouches, & qu'ils ne le font que pour avoir fait ufage du ban- dage compreflif : cette dame ne pent done guerir puifqu'on ne peut retablir la fonftion du liphon lacrynial, attendu que tout eft bouche de- puis Torifice des points lacrymaux jufques & conipris Torifice du canal nafal. II pent arriver que les conduits lacrymaux foient obliteres, & que le fac ait conftrv^ la plus graiide partie de fa cavitc ; j'en at rapporte plu- lleurs exeniples dans les troifieme & quatrieme memoires que j'ai donnes ^ I'academie fur cette matiere : la petite verole en etoit caufe, mais le bandage produit le meme eftet , il oblitere les conduits lacrymaux , & peut ne point aneantir ni boucher la cavite du fac ; Je crois meme que quand il arrive que le (ac fe bouche , le bandage y a la moindre part , la compreffion ne peut jamais approcher fi exadtement les parois du fac , que lorfqu'il devient plus epais par le gonflement inflammatoire que la forte preflion eft capable de caufer •, car ce canal etant renfernic dans une gouttiere ofleufe & profonde, la pelotte du bandage n'appuie que fur les bords de la gouttiere, & n'en peut comprimer le fond dans le- quel prefque tout le fac eft loge : j'ajouterai que j'ai vu plulieurs malades quitter ce bandage, parce que bien loin de diminuer leur tumeur, ils ont obferve qu''elle avoit augments ; j'ai voulu me convaincre par moi meme de ce fait, j'en ai rccoiinu la verite, & fi Ton reflechit fur ce qui pour- roit etre la caufe d'un fait [\ (ingulier , on comprendra facilement que fi le bandage caufoit inflammation , il ne feroit pas etonnant que la tumeur augmentat •, mais comme les tumeurs que j'ai vu augmenter par I'ufage du bandage , n'etoient point enflammecs , j'ai cru que la caufe de cette augmentation etoit, i°. que la plupart de ceux qui font ufage du ban- dage ne s'en fervent point pendant le jour; 2^. que le foir lorfqu'ils !e remettcnt ils n'ont pas foin de vuider cxadlement le fac avant de I'ap- pliquer-, les larmes qui reftent dans le fac font pouffees par le bandage ^ la circonference ou elles font efiort contre les parois , elles alongent les fibres aux endroits oii la pelotte ne preife pas immediatement, de forte que lorlqu'ils ont ote leur bandage le fac eft flafque , & il peut y entrer une plus grande quantite de larmes ; ^ la verite ce qui entre de plus n'eft pas conhderable, mais fi peu que ce foit, rie fut-ce qu'une larme chaque jour , cela fuffit pour que la tumeur augmente ■, c'eft ce qui n'arrive- roit pas fi les malades dont il s'agit, vuidoient exattemcnt leur tumeur avant que d'appliquer le bandage, & s'ils avoient la conftance de le por- ter continuellement. La meme chofe s'obferve ^ I'andvrifme vrai : cette maladie eft faite par une dilatation de I'artere , on la guerit fouvent par I'application du bandage compreflif 5 mais il arrive quelquefois que quand la corapreflion n'eft pas exade , la tumeur augmente plu- tot que de diminuer , parce que Ten droit comprime rtlifte , & que A N A T O Ml F. DE L'ACAD1*MIE ROYALE DES SCIENCES. 309 dans les endroits que le bandage ne comprime point , le fjng agit plus puiirainmcnt qu'il iie feroit s'il n'y avoit point du tout de coiii- prefllon. Le bandage lacrymal ne convieiit done point dans tous les cas que je Annc'e z'^^'j. vicns de rapporter. Mais ce bandage dans lequel on rcconnoit le gcinie de ' I'inventeur, quel qu'il Ibit, & auquel je crois avoir ajoate quelquc per- fe(fbion , fera-t-il un inftrument inutile? non , fans doute, on y trouve deux chofes effenticilcs \ tout bandage, favoir, une partie qui pcut s'af- fujettir non-feulemcnt i la figure de la tcte , mais que Ton pcut figurcr & approprier i toutcs les parties du corps au voidnage defqueiJes on vcut ctablir un point de coniprellion , foit pour coUer les levres d'une plaie , fbit pour I'expullion du pus d'un llnus, (bit pour arrcter une hemorragic, foit pour guerir les anevrifraes , enfin pour la tumeur lacrymale nienie dans les cas que Je vnis rapporter. Apres avoir fait I'operation i I3 tumeur lacrymale , il arrive quelquefois que le fac lacrymal rede dilate , ce qui eft rare lorfque I'operation a ete faite fuivant ma methode -, pour remedier ^ ce fymptome , je me fuis fervi du bandage, & j'ai tres-heureufement reudi ; mais J'ai obferve qu'il lie faut pas que le bandage foit ferre, il fuffit qn'il comprime affez pour maintenir le lac dans fes bornes naturelles, & que les conduits lacrymaux foient legerement comprimes de manicre que les larm?s puiilent y palTer, & on juge que la comprefllon eft i ce degre lorfqu'aprcs I'application du bandage Tceil n'eft point larmoyant. Pour reulTir il eft abfolument ncceflaire que le canal nafal ait ete bicn debouche dans I'operation, fans quoi le bandage augmenteroit la dilatation du fac au-lieu de la diminuer : cette dilatation eft quelquefois plus con- fiderable aux conduits lacrymaux qu'elle ne I'eft au fic, & j'ai vu que I'eau froide ou un petit morceau de glace applique deux ou trois fois par jour, remedioit a cette dilatation-, mais fi ccla ne fuffit pas 011 appliquera le bandage , & on le ferrera modcrcment. JI5 ABREGfi DES M£ MOIRES A N A T O M I E. ilift. 1 Suk LA Maladie du cros Detail. \J N E maladic contagleufc qui a fait perir une grande partis des vaches & des boEufs pendant les derniercs annees , & qui faifoit en 1 74.+ les plus grands ravages dans la Bourgogne, ne pouvoit manquer d'cxciter a fa fois le zele des magiftrats charges de la police , & celui des phyliciens, Comme on etoit perfuadiJ avec raifon que ee mal fe conimuniquoit au betail fain par la frequentation de celui qui etoit dej^ infe(fl:e, on prit i ce fujet les precautions les plus grandes , on les pouffa meme jufqu'i de- fendre de fe fervir des cuirs des animaux morts de la contagion , de peur que ces peaux ne puflent porter avec elles un poifon dont on avoit dcja reffenti les funeftes efFcts. Cette dernicre circonftance parut a M. le mar- quis de Courtivron digne d'etre cxap.iinee avec foin ■, m efFer, une ma- tiere aufll indifpenfablement ndceffaire, que les cuirs, meritoit bien d'etre confervee , fi on le pouvoit faire fans peril , comme auffi il ne falloit pas hefiter un fcul moment ^ les facrifier, fi leur ufage pouvoit le moins du inonde etre fufpecl. C'etoit done i I'experience, veritable organe de la nature, i decider cette queftion \ heureufement M. de Courtivron etoit place dans^ un en- droit que la maladie avoit epargne , & on ne doutera pas qu'il n'cut pris toutes les precautions neceflaires pour que les dpreuves qu'il alloit faire ne puflent pas I'y introduire. II choilit une ecurie ecartife , de laquelle il fit murer les fenetrcs , il y fit mettre la provilion de paille & de foin •nece/Iaire pour y nourrir pen- dant leur retraite, les animaux qui y feroient enfermes : les leaux defi- nes i leur apporter il boire, ne devoient fervir que pour eux-, enfin rien ne fut epargiij pour eloigner des autres animaux du meme lieu, le danger auquel on alloit expofer ceux-ci. Tout etant prepare, M. de Courtivron fit conduire dans cette ecurie deux vidimcs qu'il vouloit ficrifier au bien public-, c'etoit deux vaches, I'une jeune & I'autre drjil agee : en meme temps il avoit fait venir fecre- tcment, car la phylique meme cxige quelquefois du myftere, des cuirs frais d'animaux de meme efpece, morts de la contagion; les deux vaches en etoicnt revetues la nuit , & le jour ces cuirs fervoient \ cnvelopper k paille & le foin deftines pour leur nourriture, & des morceaux des me- mes cuirs trempoient dans I'eau qu'on leur prefentoit h boire : les deux animaux n'eurent aucun dcgoilt de ces alimcns alnfi prepares, & aprcs io jours d'experience, pendant lefqufls ces deux vaches eurent abondam- ment du lait , on leur ota cet attirail incommode, on les parfuma pen- dant quelques jours avec le genievre , & on les laiffa allcr aux champs avec les autres bsftiaux , auxquels elles n'ont communique aucune maladie. II eft done bien conftant que les cuirs des animaux morts de la ccn- tacion, ont pu etre mis plus prcs d'autres animaux de la meme efpece I DE L'ACADEMIE ROYALE DES SCIENCES. 311 qn'aiicun haUrd ne poiirroit Jamais k-s placer, (aiis Iciir avoir commiini- ' ' 1 ■ que aiiciiii mal ; n>ais comme le tcmoienage d'line IcuIl* experience n'cll , ' ,- .T,- ^ »T 1 /- • ■ r 1- J ■ , A N A T o .\( I F. "as luthlant, M. de Cournvron cjiu le propole de conimiimqiicr au pii- lic celles qu'il a faites depiiis I'impreflion de ce'"mLnioire, exhorte tons Ann/e ij^c,. cciix qui pourroiit en faire de pareillcs , I ne Ics pas ncgliger. II paroit en general qu'on n'a point h craindre que Tufage des ciiirs des animaux "^ morts de la nialadie communique la contagion , & que par confiqucnt on ne doit point !es perdre, en obligeant les proprjetaircs des beftiaux tiiorts, dc Ics cnterrcr avcc Icur pcau. On peut bien penfer que M. de Courtivron n'a pas manque d'exami- ncr la maiadie en queftion , il auroit i^te bien plus flattcur de donner un inoyen de confervcr les animaux m^mes , que d'cnfeigner feulement ^ n'en p. s perdre Ics cuirs; mais les phenomenes qui ont accompagnc ceUc efpece de contagion, ont etc i\ lingulierement varies, & les remedes qu'cn a tcntes li rarement etiicaces , qu'il a ete inipollible de ricn ftatucr fur cctte matiere : il eft mcme i iouhaiter qu on nc loit de long- temps it por- tic de I'approfondir da vantage. « OBSERVATIONS ANATOMIQUES. I. M, -R. IE Due d'Aiguilion a fait voir \in petit licvre monftrneftx , trouvc h rifle-Adam : cet animal etoit compoie de deux lievres joints cnfenible par I'epine du dos, de fa^on que les deux corps oppoles Tun "k Uautre, font, pour ainfi dire, boat ^ bouf, ces deux corps pris enlem- ble etoient plus courts qu'ils n'auroient dii etre, en fuppofant la longueur ordinaire, parce qu'une portion de chacune des deux epines , s'etoit con- fondue avec une pareille portion de I'autre vers I'endroit de la Jondlion : ce que ce monflre offroit de plus lingulier , jr'etcit la polition des pattcs de derriere , ellcs etoient en apparence difpolees 4 I'ordinaire, en forte qu'on auroit cru en voir ^ chaque lievre une de chaque cote ; mais la difledion fit voir que les deux d« menie lievre etoient du meme cote, le ba(Iin , I'os factum & les hanchcs s'y ^tant coiles ^ cote & fuivant I3 longueur de I'epine, axi-lieu que dans I'etat nanircl ils lui iont perpendi- c.ilaires. Comme ce petit animal ^toit Ai)\ tres-maltraite des oifeaux quand on le troHva, & qu'il fut ouvert par quclqu'un qui n'avoit d'autre delfein que de le vuider pour le garder iec , il fut impoflible ^ M. Morand qui fe charge.-! de I'examiner , de ricn connoitre de la ftruclure des parties internes , defquelles il n'ctoit rien rcftc que deux cceurs bien diflinds, un dans chaque poitrine •, il y a bien de I'apparcnce que la plupart des autres vifcercs etoient doubles & places de la meme maniere. Licetus fait mention d'un monflre humain pnrcil, {a) d'un autre qui (a) Pag. 9c. 5ii ABREGli DES ME MOIRES i en approciie, (a) & d'uii lievre monftrueux, (b) mais different de celiii-ci: . les Ephtimcrides des ciirieux de la Nature, (c) fourniirent audi pUilleurs ^ " '■ ' exemples de monflres ^-peu-pres pareils k celui-ci ; c'eft tout ce que Annie 1745- ^' ^'^""'^ -^ P" tii^iiver fur cette maticre. I I. M. Dui'UY , mifdecln de la Marine ^ Rocht-fort, a ecrit k M. du H.i- niel , qu'au defannement de la Flute du Roi le Chameau , qui revenoit de Cadix, un matelot ayant debonde una futaille rcmplie d'eau de mer, qu'on avoit imprudemnient bouchee, fut tout d'un coup frappe d'une va- peur qui le renverfa roide mort , fix de fes camarades qui etoient dans ia mcme cale , mais un pen plus eloignes de la futaille, furent renverfiis, ils perdirent coniioiflance & parurent agites de violentes convuKions : le Chirurgien Major avcrti de cet accident voulut les aller fecourir , mais ■auffi-tot qu'il fut entre dans la cale , il s'evanouit & eprouva les memes accidens , on les tira tous de ce lieu empoifonne , des qu'ils eurcnt pris I'air ils revinrent : M. Dupuy voulut examiner le cadavre du mort , il itoit extremement enfle & fort noir, le fang lui fortoit par les narines, li bouche & les oreilles-, mais il etoit dcji fi corrompu qu'il ne fut pas pof- fible d'en faire I'ouverture. I I I. M. Amelot a montre ^ I'acadaTiie un oeuf de poule d'Inde , dans le- quel etoit renferme un autre oeuf garni de fa coque : ceux qui favent que la coque de I'ocuf ne fe forme que dans I'ovidudtus, ou canal qui conduit I'ceuf de I'ovaire au dehors de I'animal , fentiront combien doivent etre fares les circonftances necellaires pour produire un pareil eifet. IV. M. r>i Reaumur's fait part de quelques remarques fur une paralyse incomplette dont M. Garfin , fon correfpondant , a ete afflige , la main droite a perdu totalement le fentiment fans perdre pour cela le mouve- menf, il peut fe fervir de fes doigts pour tous les ufagcs ordinaires, mais ce n'eft qu'en les approchant de Ion vifage qu'il juge du degre de cha- leur qu'ils ont, & ce degre doit leur etre communique, ou par le voi^ linage d'une autre partie du corps contre laquelle on les tient , ou par le fecours du feu , car d'eux- memes ils ne s'eciiauffent pas plus que du mar- bre , I'hiver leur eft fort contraire , & I'empeclie d'en faire autant d'ufage qu'en ete ; en les chautFant ils fe brulent s'il n'y apporte pas un grand («) Pag. 316. Ci) Pag. 20. (c) Decurie I , ann. II , obf 94, pag. 68, & ann. Ill, pag. 397, & obf, 199 &200, pag. 30 1 & luiv. foin, DE L'ACAD^MIE ROYALE DES SCIENCES, jij foiii, car, comme nous I'avons dit , ils Ibnt infenfibles , & de plus ils fe : lent phis aifement & k line moindre diftance du feu que dans I'etat * brule naturel ; il ne s'apperifoit de la brulure que ouand elle eft faite , ce qui ''^ ** "^^ ^ " " ' ^* i'airujettit ik une attention trcs-gcnante, nialgrc laquellc il eft encore fujet Ann^e ijAi. ^ fe blelTer. Le moindre derangement dans le corps humain fait egalement fentir la necefllt^ de tous les organes qui le compofcnt , & la fageffe infi- nie qui Ics a difpofes. V. M. Gabon chirurgien, gagnant maitrifc \ FHotel-Diei! , a prefentc ^ I'acadcmie un enfant monftrueux , ni \ terme dans I'Hotel-Dieu nieme , le 8 odobre 174^ : cet enfant avoit deux tetes, un tronc commun & cinq extrcmites, deux fupdrieures & trois inf^rieures; des trois extrcmites in- ferieures une etoit monftrueufe, elle fortoit de la felfe gauche, & paroif- foit etre compofcc de deux extrtJmitss confondues Tune avec I'autre •, elle avoit quelques orteils qui reffembloient bcaucoup aux doigts de la main. II n'y avoir qu'un fcul foie qui avoit trois lobes , deux egaux & un troi- fieme plus petit, une feule vdicule du fiel, & un feul canal colidoque : le monftre avoit deux eftom.ics & deux rates, fitues I'un ^ gauche I'autre ^ droite du foic, chaque eftomac tenoit i Ton cefophage & aboutiiToit audi i un duodenum fepare 5 ces deux duodenum fe confondoicnt bientot & formoient une feule cavitc trcs-eourte, aprcs quoi cet inteftin unique fe bifurquoit : le Jejunum & une partie de riicum continuoiv;nt auffi a etrc doubles, vers le ccecum ilsfe reuniflbient pour ne plus former qu'un feul canal qui fe terminoit i I'anus : il y avoit deux pancreas & quatre reins , deux bien conformes , chacun furraonte de fa capfule atrabilaire, & garni de fon uretere qui alloit aboutir a une veflie unique •, les deux autres reins itoient plus pctits & fans capfules atrabilaires , chacun d'eux avoit un lue^ tere fort grele, & ces deux ureteres alloient s'ouvrir dans deux autres pe- titcs veflics oblongues , placL-es irregulierement dans le baflin, & devant lefquelles il y avoit un bout d'inteftin grele , affez femblable ^ une appen- dice du ccecum , cette appendice & les deux petites veilies s'ouvroient dans le redtum. Les parties de la generation t5toient bien conformees , la ca- vite de la poitrine etoit fort grande & contenoit deux poumons , dont chacun fourniifoit une trachee-artere qui alloit aboutir au fond de chaque bouche : le Cfcur renfernic dans la poitrine, avoit trois oreillettes & un feul ventricule-, les oreillettes recevoicnt trois veines-caves, dont une rap- portoit le lang des parties fuperieures, & les deux autres des parties infe- rieuresi du ventricule il partoit deux aortes & deux arteres pulmonaires, ii y avoit quatre valvules qui perraettoient au fang des trois oreillettes d'entrer dans le ventricule, & qui empechoient ce menie fang de rentrer dans les oreillettes : Ics deux tetes etoicnt polces fur deux epines, termi- nees chacune par un os ficrum & un coccyx, chaque cpine fe joignoit i deux OS des iiles ; les os ilchion & pubis n'etoient qu'au nombre de deux regulierement lituds vers la partie anterieure d'.i monllre , tous ces os for- flioient un bailin commun-, il y avoit 4S cotes, 14. antericurcs, dont li Tome IX. Partie Franfoije, Rr 514 A B R E G E D E S M £ M O I R E S , &c. ; appjrtenoient ^ chaque ^pine , Sc 14 pofterieures , dont 11 partoient A ,, . ^ aii'H <^e chaque epine •, les pofterieures etoient plus longues 8c plus appla- ties que Jes aiiterieures : de 1 arrangement & de la dilpolition de ces co- Anmc ij-ff,. t^s, il refulte una poitrine commune, terminee en devant par un fternuni regulier, & pofterieurenient par un autre fternum qui rclFemble beaucoup S cclui de certains quadrupedes : les autres parties etoient conformecs i I'ordinaire, excepts I'extremite inferieure monftrueufe , dont la ftrudure ctoit fort irregnliere , tant dans les mufcles que dans les os. Toutes ces particularites rekiltent de I'cxamen que Mfs. Winflow & de la Sone firent de ce monftre , que M. Boudou , chirurgien en chef de I'Hotel Dieu , avoit Juge digne de la curiolite de I'academie, & qii'il engagea M. Gabon it lui prcfenter. •>^ C H Y M I E. R 1 i] 5'7 C H Y M I E. MO r E N s DE CONGKLER L'ESPRIT DE VIN, Et de donner aux HuiUs graffes quelques-uns des caracleres d'une Huilc ejfentielk. ■ I E travail de M. Geoffroy fur le fameux remede de M'le. Stephens , '^^"'™^. pour la pierre, I'analyfe qu'il en a faite par decompojition & recompofi- q ,j ^ u i r. tion , les moyens qu'il a indiques pour le rendre noii feulement plus silr & plus (imple , niais encore moins dcgoutaiit, {a) Tont entraiiie dans un u^nn^e 27^2. grand nombre de recherches & d'operations chymiques fur le favon, principal agent de ce remede , & fur pluHeurs fubftances qui lui font analogues. On fait que le favon blanc d'Alicante , celui dont il s'agit ici , n'eft qu'une cfpece d'amaigame durci d'huile d'ollve & du fel alkali de la foude. La feparation de ces deux fubftances fe fait non-feulement par le moyen de I'huile de vitiiol, raais encore par un acide beaucoup moins fort, tel que le vinaigre ordinaire diftille. M. Geoffroy a diffous un gros de favon blanc dans trois onces on 14. gros de bon efprit de vin •, il a decante cette difiblution dans une fiole cylindrique qu'il a bien bouchee. La liqueur s'eft trouvee parfaite- ment limpidc, fans aucune teintc & extremement fluide. Pour la coh- denfer affez vite en une maffe aufll tranfparente que fi elle n'eut rien perdu de fa fluidity, & femblable ^ un cylindre folide du plus beau cryftal , il n'y a qui expofer la fiole h I'air dans un temps froid , oii le thermometre foit i deux degrcs au-deffus du termc de la congelation, ou bien i Tenfoncer un peu dans la neige i en 10 ou 11 minutes Ton a un coagulum tranfparent & uniforme , c'efti-dire, fans aucun glacon qui le traverfe. II faut feulement avoir foin de ne pas laiffer prendre i la li- queur un degre de froid trop vif, ni qu'elle en foit frappee trop bruf- quement, parce qu'alors le coagulum auroit une couleur laiteufe, & de- viendroit opaque. M. Geoffroy prcfente diffsrentes manieres d'expliquer ce phenomene. Tant que I'efprit de vin fe trouve dans un air tempere , il conlerve le degre de fluiditd qui lui eft propre , & en cet etat les particules des matieres C->) Voyei Ic Tome VIII. dc la Colleiflion Acade'miqtie , Panie Fran9oife. mKueHT^aMXTaw C H Y M I ji8 A B R ^ G :^ DES MEMOIRES I qui compofent le favoii y etant divifees & fiibdivifees prefqu'^ I'infini, cllcs fe tiennent fiifpendiies dans le liquide , fans qu'on y puiire apperce- voir aiicune opacite •, mats lorfque la liqueur vient k diminuer de volume Aiine'e I'tai. en fe condenlant par le froid, les particules du favon fe rapprochent, & deviennent alors plus apparenres qu'eJles n'etoient auparavant dans cette liqueur, quand clle avoit fon premier volume. II feroit peut-etre plus fimplc de n'attribuer qui I'lniile du favon la caufe de cette congelation diaphane par un froid modere , & de I'opacite occalionnee par un froid plus vif L'huile d'oiive & celle de Ren font de toutes les liuiles grafles celles qui fe congelent le plus vite au froid. Aind comme l'huile d'oiive n'eft que divifee dans I'efprit de vin , chacune dc fes perites parties refte tranfparente , tant que le degrc du froid n'eft pas aflez fort pour leur faire perdre leur diaphaneitd, mais qu'il I'eft feulenient aflez pour arreter la rapidite de leur niouvement. S'il furvient un froid trop vif ou trop fubit, chacune de ces petites parties, globuleufes, ou de telle figure qu'on voudra , fe congele ; & comme toute huile congelce eft opaque , tous ces petits corps ayant perdu leur tranfparence , la liqueur \ totale ne paroit plus que d'une couleur laiteufe. Quand cette diifolution du favon ne recoit de I'air qu'une impreflion de froid moderie , oh moyenne entre le degre de chaleur ncceffaire ^ la fluidite de l'huile , & le degrc de froid qui la gruniele, fa congelation fe fait & fe diftribue plus cgalemcnt, 8c toute la liqueur prend uniformement une forte de fo- liditi prefque iemblable h de la colle de poiffon , diifoute dans de I'eau bien claire. Une raifon aifez forte qui fait attribuer cette congelation de la totality de la liqueur k la feule huile du favon, c'eft que, quand on tient long-temps cc coagulum , deveiiu opaque, au grand froid, il paroit fcnfiblement le refferrer, & mcme il exprime des gouttes d'efprit de via qui reprennent la fluidite & la tranfparence qui leur font propres. L'huile faite par ebullition , ou par expreffion , fe diftingue des huiles cfTentielles & meme des matieres purement rciineufes , en ce que natu- rellement & fans preparation elle n'eft pas dilToluble dans I'efprit de vin ,' quoique capable d'inflammabilite •, elle en diftere encore , en ce' que les huiles effentielles melees avec I'eau , montent dans la diftillation , & que c'eft mcme un moyen de les rectifier, au-lieu que l'huile grafle laiffe mon- ter I'eau toute feule , & refte au fond de I'alembic. Mais le concours du fel alkali , & de I'acide qui fipare l'huile du favon , peut changer le carac- tere des huiles grades & communes & les convertir en une elpece d'huile etheree. On peut meme fubftituer au fel alkali les matieres calcin^es ter- reufes meme metalliques , & Ton obticndra le meme eftet. II faut qu'il y ait dans les huiles graffes quelque matiere qui s'oppofe ^ leiur union avec I'eau & avec les cfprits ardcns , quelque corps du genre des gommes, qui defend la partie purement huile de I'aftion de I'efprit de vin, comme k fon tour, la partie qui n'eft que huileufe ou inflam- mable, defend la gommeufe de Tadlion diffolvante de I'eau : ce qui fait foup^onner h M. Geoffrey, que les huiles communes non-eflenrielles ne font autre chofe que des gommes-ri^luics refoutcs, femblables ou de mcme 1 DE L'ACAD6MIE ROYALE DES sciences. ;ip ^^^^^ crnrc que nos gommes-rellnes feches qui font dillolubles en partie par ' . -! I'eau , en partie par un efprit ardenf.' C h y m i i. Quoi qu'il en ioit de cctte conjecture, M. Geoffrey eft parvenu i rcn- dre les huiles grallcs dilToIubles dans I'eiprir de vin , en leur otant la ma- yintiee ly^i. tiere mucilagineufe ou gommeufe qui les emp-choit de !e joindrc a I'cfprit de vin , & pour Ics dtipouiller de cette partie mucilagineufe ou gom- meufe , il ics a fait pail'er au travers des matieres calcinces, foit fniines , terrcufcs ou uK^t.iIIIqucs. Avec cette preparation , Ics huiles grades de- vienncnt plus fubtiles, Cc diilolvent dint I'efprit de vin, & prenncnt fcu beaucoup plus aifement qu'auparavant. TH^ORIE CHYMIQUE V E LA TEINTURE DES ETOFFES. JLiA t'iieorie des teintures n'eft pas moins intereffante pour ta pliyfique , Hift. & fur- tout pour la chyniie, que pour le commerce. M. Hcllot qui avoit deja commence, il y a un an, de traitcr cette matier; en chymifte phyli- cien, & en linmme inftruit des pratiques de I'art, & de I'importance de cct art pour le commerce du royaunie , a continue cette annee dc nous donner fts reflexions & fes experiences fur ce vafte fujet , dans le memo efprit & I'elon la nierae mcthode. Son memoire de 174.0, apres quelques prdiminairfs, traitoit du bleu; celui-ci qui en eft une fuite, traite du rouge & du jaune. (j) C'eft proprement i M. Colbert & aux reglemens faits fous fon minif- tere, que font dus les gra'nds fucces des teinrares en France. Les regle- mens donnes en i66j , & I'inftrudion publice deux ans apres par les or- dres , pour procurer aux etoffes de nos manufactures des couleurs qui r^liftaffent i I'air , commcncoient \ n'ctre plus executes , & ^ caufer un prejudice fenfible dans cette partie de notre commerce, lorfque M. Orry, controleur-gencral , crut qu'il etoit nccelfaire de charger un phylicien de I'academie des fciences du foin de revoir cet art, d'en retablir les prati- ques conformcment aux vues de M. Colbert, & de le porter, s'il eft pof- nble , ^ un plus haut point de pertV dion. L'art de la teinture avoit etc jufqueslh cntre des mains mechaniques, qui ne favent faire commune- ment que ce qu'elles ont deji fait, la tcte qui les doit conduire, manquant prefque toujnurs des connoillinccs acceffoires & des principes fondanien- taux , feuls capables d'cn varier & d'cn etendre les operations. M. du Fay fat nomme en 175 1 , par arret du confeil, pour travailler fur ce plan, & pour fournir au fage emulc de M. Colbert, toutes les inftrudions dont (1) CcllciSioTi Acadi-mique , Pani* Fuin^oife, Tome V HI. jio ABREGE DES M^MOIRES i^^MMMMi^M il auroit befoin pour le faire executer-, car la reforme des abus qui s'etoJent ■ introduits dans les teintures. demandoit qu'on y portat line double lu- C H Y M I E. n,jpje^ celle du magiftrat & du ininiftre, & celle du phyiicien & de I'ar- /Innf^ iTAt tifte meme, ou dun phylkien capable d'entrer dans tous les details de V^ * I'artifte. M. du Fay avoit dcji fait, en 173}, un affez grand nombre d'obfervations & d'experiences fur ce fujet , & il procura dcs-lors un re- glement utile k la fabrique des tapifleries , & concernant la teinture des faines filees qu'on y emploie. En 1757, il en occafionna un autre pour la teinture des laines fervant i la fabrique des etoffes, ou ^ la teinture des ^ofFes memes dejk fabriqudes. II n'etoit plus queftion que de decrire I'art en general •, mais la mort nous enleva, en 1759, cc digne academicien. M. Hellot, nomme i fa place, en 1740, a repete avec foin prefque toates les experiences de fon pred^ceffeur , & y a ajoute les fiennes. II s'eft atta- che parriculi^rement i expliquer par des principes re9us de tous les chy- myftes, la caufe de la tenacite des couleurs qu'on appelle de bon teint , & de la non tenacite de celles qu'on nomme de mauvais teint, ou qui ne refiftcnt ni I I'air ni k I'adion des fels qu'on emploie i leurs epreuves. Mc'ni CoMMUNEMENT , dit M. Hellot, dont nous abregeons le fecond inemoi- re , on admet pour couleurs de bon teint toutes celles qui , expofees aa foleil & au fercin pendant douze jours complcts , ne changent point, ou qui prennent une teinte un peu plus foncee fans perdre leur nuance prin- cipale. Toiue coulcur au contralre qui, pendant le meme efpace de temps, s'eclaircit trop , fe decharge & change , eft reputee de mauvais teint. Mais comme cette epreuve , la feule veritable , & qui feule devroit fuffire , ne peut etre mife en ufage dans ks cas oii il faut juger fur le champ fi unc dtofFe, expofee en vente dans une foire ou ailleurs , eft de bon teint, au cas que fon prix I'exige, il a fallu trouver des moyens de lui faire perdre, en peu de minutes, tout ce quelle perdroit etant expofee pendant douze ouqu«"ze jours au foleil. II y a dans le regleraent de M. Colbert fur les teintures, quelques methodes prefcrites pour les eprouver. Cependant 1 ex- perience ayant fait connoitre que ces methodes etoient infuffifantes pour certaines couleurs, feu M. du Fay a travaille long-temps pour en trouver qui fuffent ou plus generales ou plus fiires -, & c'eft d'apres un tres-grand nombre d'experiences, qu'il a faites avec beaucoup de foins, qu'on a re- diee la nouvelle inftrudion fur ces fortes d'epreuves , auxquelles on x donne le nom de debouillis. EUe fe trouve imprimee I la fuite du regle- ment de 1757 > fur les teintures. Quelques-uns de ces debouillis fe font par le favon , dautres par lalun, d'autres par le tartre rouge, d'autres enfin par le tartre rouge & ralun nic- ies enfcmble. Mais comme des regies generales , pour de pareilles epreu- ves, doivent etre fujettes I bien des exceptions , ou qu'on n'a pu prevoir, ou qui , ayant ete prevues , n'ont pu etre detaillees lans courir le rifquc de faire naitre de la confufion & des fujets de conteftations fans nombre , il elt clair que ces regies, donnies comme trop generales, font aufll trop rifoureufes dans plul'ieius cas, ou des couleurs claires demanderoient des * *■ fels DE L'ACADfiMIE ROYALE DES SCIENCES. 321 fels moiiis adifs one dcs couleurs bien chargfe , qui pcuvent perdrc une m^— — — ^ quantity conliderable des particules qui les teignctit, (ans qu'oii y apper- coive des changemens fort fenfibles. 11 auroit done fallii prcfcrire un dc- C h y w i e, boiiilli prefqtie pour chaaue nuance j cc qui etoit irapodible , vu Icurs Annfe fdi varietcs. Aind I'air & le (oleil font la veritable epreuve; 8c toute coulcur ' * qui leur refifte pendant un certain temps , ou qui y acquiert ce que les teinturiers nomment da fond , doit etre rcnutee de bon teint, quand mcme ellc changcroit beaucoup aux debouillis prcfcrits dans la nouvelle inftrudion. L'ecarlatc en eft un exemple : comnie le favon emporte entii- rement cette couleur, on I'a foumife i I'tfprcuve de I'alun de Rome; & ^uand elle eft de pure cochenille, clle 7 doit prendre une couleur pourpre. lependant fi on expofe de Iccarlatc au foleil , elle y perd i la verite Ibrr vif , & devient plus foncce , niais cette nuance foncce n'eft pas celle que I'alun lui donne. Ainli les debouillis ne peuvent pas, dans ce cas & dans plulieurs autres , etre fubftitues ^ ration de I'air & du foleil , quant ^ la paritc de I'effet. J'ai cru devoir commencer par ce que je viens de lire , avant que de difcrire les proccdcs qui donnent aux etoffcs la couleur rou- ge, afin qu'on fut d'avance cc que c'eft qu'une couleur de bon teint chez les teinturiers. D V Rouge. La couleur rouge ctant une des cina couleurs primitives de I'art de li teinture, & I'une des trois avec lefquelles on pent faire niechaniquement pefque toutcs les couleurs, i I'exception du noir, elle devoit fuivre le bleu, dont J'ai traite dans mon premier mcmoire, & etre fuivie du Jaune par lequel je finirai cclui-ci , oil je mettrai le moins de details ennuyeux qu'il me fera poffiblc. Les matieres qu'on emploie dans I'ufage ordinaire, pour faire les rou- ges de bon teint, font la racine de garence & le kermcs. Pour les rouges de feu, dits ecarlate , & pour les pourpres & cramoilis , on fe fert des par- ties colorantes de la gomme-lacque, de la chenille mefteque ou cultivce, & quelquefois de la cochenille lylveftre , qui ne fait pas li beau , dont il faut au moins quatre parties pour faire I'effet d'une fcule de mefteque, & qui par confequent n'eft pas beaucoup en ufage. On tire encore des rouges affez beaux du coccus polonicus , autre efpece de petit infede dont on faifoit autrefois un grand commerce en Pologne , mais dont I'cfFft n'eft pas comparable h celui de la cochenille. Quant ^ la perelle, I'orfeille des Canaries, preparees, les bois de Brelil , de Sainte-Marthe , de Fernam- bouc & autres, les rouges qu'ils donnent, en fuivaiit les methodcs confa- cries par la routine de I'ouvrier, font fouvent fort beaux, mais de pcu de durie , ou parce que leur couleur eft trop volatile pour ne pas s't;v.iporer ^ I'air, ou parce qu'on n'a pas encore trouve le moyen de la fixer iur les itoffes. Le roucou, le fafran batard bien degorg^, donnent audi de fort beaux rouges , mais qui ne refiftent pas plus que les prece Jens. Ain'i I'em- ploi de ces drogues a M prohibe dans le bon teint. Tome IX. Partit Franfoije. Sf II Y M I I. Jit A B Rt G t DES MfiMOIRES La racine de garance ou de rubia tinSorum, eft la fcule partie de cette plante qui ferve i la teinture. De tons les rouges, c'eft le lien qui eft le plus tenace , quand il eft applique fur une laiiie bien degraiffee , puis pre- Jrnife i-'ai P^^^^ P^"^ ^^^ ''^'^ ^^^'^ lefquels on I'a fait bouillir pendant deux ou trois heures, fans quoi ce rouge, prefquc inalterable apies cette preparation du fujet , ne refifteroit pas plus aux cpreuves que les rouges des autres ingr£- diens de faux teint. Pour teindre un drap blanc bien degraifle , en ronge de garance , on le fait bouillir pendant trois heures au moins dans uflc chaudiere, ou Ton a mis la quantite d'eau neceffaire , avec 4. ou 5 onces d'alun de Rome , I ou 2 onces de tartre crud pour chaque livre de drap , & environ uii quinzieme d'eau fure, qui eft une decoftion de fon de froment qu'on a laifle aigrir. Apres I'avoir retire de la chaudiere, on Texprime legerement. Si -on le porte tout humide dans un lieu frais , oii on le laiffe fept i huit Jours, afin que les fels aient le temps d'agir deffus , & de preparer les pores de la iaine I recevoir la teinture. Ce temps etant expire , on lave ce drap pour emporter les faletds fuperlicielles que le tartre pourroit y avoir laiffees ; car les fels qu'on emploie en teinture ne font jamais les plus purs : les ouvriers font trop avides de gain pour ne pas choifir ceux qui leur content le moins. Pour teindre ce drap garni de fels , on prepare un nouveau bain d'eau nette, & lorfque cette cau eft feulement tiede, ou qu'on peut encore y tenir la main , on y Jette une demi-livre de la plus belle garence-grappe pour chaque livre de drap , on la brouille bien dans la chaudiere-, qiiand on s'apper^oit qu'elle a donne fa teinture i I'eau , qui doit toujours refter entre le tiede & le bouillon, on y plonge le drap , que Ton roule fans difcontiniier, fur un rouet bas , affujetti au-deflus de la chaudiere, afin que la couleur prenne uniment. Sans cette agitation continuelle , I'ctofFe feroit teinte inegalement , & Ton y verroit des places de diiferentfs couleurs. Lorfque I'eau du bain ne paroit plus coloree, on qu'elle n'a plus qu'une couleur de paille , c'eft une marque que toiite la teinture de la garence s'eft appliquee fur le drap : alors on augmente le feu pour faire bouillir cette eau pendant quelques minutes -, ce qui acheve d'aflurer la teinture fur I'etoffe, parce que la fimple chaleur de I'eau tiede n'auroit pas ete fuffifante pour la parfaite diffolution du tartre crud, refte adherent aux fibres de la Iaine. Le kermcs eft une galiinfede qui croit, qui vit & qui multiplie fnt Xllex aculcata cocci glandifera. Cet infeifte, que quelques teinturiers qui s'en fervent encore, appel- lent graine J parce qu'il en a la figure, a fervi autrefois i faire cette couleur rouge qu'on appelloit ecarlate de France. Les draperies rouges des anciennes tapifferies font teintes avec cet ingredient, & leur couleur, qui dans quelques tapifferies a jufqu'i zoo ans d'ancienneti, n'a prefque rien perdu de fa vivacite. On connoit ^ prefent cette couleur fous le noin d'ecarldte de Venife j parce qu'elle y eft extrcmemcnt en ufage, & qu'on y en fait plus qu'en aucun autre endroit de I'Europe. Le godt en a paffe en France & dans la plupart des autres pays , parce qu'elle a I t. DE L'ACAD^MIE ROYALE DES SCIENCES. 515 effedivement moins de feu, & quelle eft plus brune que I'ccarlate ino- — — ii— denie k LiqucUe on eft accoutuinc •, inais elle a lur elle I'avantage de fc ^ foutenir plus long-temps, & de ii'ctxe point tachce par la bouc & par Ics » '^ w liqueurs acres. Annife ij^i Voici de quelle iranicrc on doit fairc cette ^carlate de graine, qui n'eft plus gucre en ufage que pour les laiiies dcftinces aux tapifleries. On commence par ebrouer la laine (ilee , c'eft-i-dire, que pour 10 livresj on met dans la chaudiere un demi-boiffeau de Ton , enfcrmc dans un fac , avec la quantity d'eau iiecefTaire pour que cette laine y foit bicn abrcu- vcej on la fait bouillir une demi-heure, apres quoi on la retire de I'eaui on I'cxprime , ou on la laiffe cgoutter : pendant ce temps-li on prepare le bouillon , qui eft compofe d'environ un quart d'eau lure & de trois quarts d'eau de riviere , dans laquelle on met 4 livres d'alun de Rome & i livres de tartre rouge. Quand ce bain eft bouillant, on y plonge let ccheveaux de laine, les tournant de temps en temps fur ks batons qui les enfilent, & au bout de deux heures on les leve, & les ayant expri- niis foiblcment , on les enferme dans un fac de toile qu'on porte \ la cave, oii on les laiffe cinq ou fix Jours, comme on a fait I'etoffe preparie pour le rouge de Garence. Le fixieme Jour on prepare un nouveau bain d'eau de riviere la plus claire, & lorfqu'elle commence \ ctre tiedc, oi> y Jettc 11 onces de kermts pulverifc, pour chaque livre do laine, au cas qu'on veuille une ecarlate bien plcine ou bicn fournic de coulmr. Si Ie> kermcs etoit trop vieux, il en faudroit au moins livre pour livre. Quand Ic bain commence ^ bouillir , on y met la laine , qui doit ctre encore humide : en cas qu'on I'eut laiffe ficher, il faudroit I'humeder de nou- veau dans de I'eau tiede •, ce qui eft une regie gencrale pour toutes les couleurs, parce que fi on mettoit les laincs ou les etoffcs , feches , dans les bains de tcinture, jamais elles ne prcndroient la couleur ^galement. Apres que la laine aura refte une bonne heure dans ce bain , ou Ton doit avoir tournc & retourne les ccheveaux autour de leurs batons , on la laiffera egouttcr , on I'exprimera & on la lavera en eau courante. Lc teinturier peut profiler du refte de fon bain encore colore , ce qui s'ap- pelle nne Jiiite , & y teindre d'autres laines preparees par le bouillon des fels comme les precedentes, en des couleurs qui feront des nuances de- f;radees de la premiere. On peut donner un peu plus d'eclat \ cette cou- eur, qui eft rouge de fang, en paffant la laine dans un bain d'eau plus que tiede, 011 Ton a fait fondre une petite quantitc de favon. A la vc- rit6, le favon, la rofe un peu, c'eft-i-dire, lui donne un petit ceU tirant fur le cramoili , mais elle en eft plus belle. L'eau- forte mife en petite quantiti fur le bain de kermes , ou encore mieux la compolltion pour I'ecarlate, dont il fera parle ci-apres, rend la couleur encore un peu plus agreable, mais alors elle eft fujette h tachcr i la boue. Ce qui rend le rouge de kermes aufll folide que celui de la garence , c'eft qu'il eft applique fur une laine preparee de mcmc par des fcls qui rififtent i I'aftion de I'air & du foleil : c'eft aulli vraifemblablement parce que cet infedc s'ctant nourii de la feve d'un arbriffeau aftihgcnt , \ S f ij 11 Y M I E. ;i+ ABREGfe DES MfiMOIRES I conferve cette propriete de donner plus de reffort aux parois des pores de la lainc pour fe rellerrer plus vite Sc plus fortement, quand die fort de I'eau bouillante & qu'on I'expofe i I'air froid. Que ce loit par cette rai- Anriife I'^az. fo". on p.irce qu'il fe fait avec les aftringens une precipitation de la terre de I'alun , j'ai remarque que toutcs les racines , les ecorces , les fruits & les autres maticres qui ont quelque adftriiSion , doiincnt toutes des cou- leurs de bon tciiit, en les employant avec I'alun & le tartre crud. II fera encore pavle de cette precipitation dans I'article de la cochcnille. La cochenille fine, qu'on nomme mejleque ou tefcalle , eft un infc(fle dont on fait une recolte confiderable dans le Mexique. La cochenille fyl- reftre ou campeffiane nous vient audi de la Vera-Cruz. C'eft dans les bois du nouvcau Mexique , que les Indlens vont la chercher. L'ecarlate couleur de feu, connue autrefois fous le nom d'ecarlafe de Hollande, aujourd'liui fous celui Vicariate des Gobelins j & dont Kunc- kel attribue la decouverte ^ un Chymifte nomme Kujler , eft la plus belle & la plus eclatante couleur de la teinture ; elle eft audi la plus chere , & I'une des plus difficiles ^ porter )l fa perfettion. On ne peut merae guere determiner quL-l eft ce point de perfection : car independamment des diHerens gouts qui partagent les honimes fur les couleurs , il y a audi des gouts generaux , pour ainli dire, qui font que dans un temps des cou- leurs font plus i la mode que dans d'autres. Ce font alors ces couleurs de mode qui font des couleurs parfaites. Autrefois on vouloit des ecar- lates pleines , foncees , d'une couleur que la vue fupportat aifement, Au- Jourd'hui on les veut orangees , pleines de feu , & dont I'ccil ne puifFe- foutenir I'cclat. Je ne dsciderai point lequel de ces goiits merite la pre- ference , mais je vais donner la maniere de les faire d'une fa^on & de I'autre, & de toutes les nuances qui tiennent le milieu entre ces extre- mites , ce qui depend de la quantite de I'acide , ou de ce qu'on nomme la compojition. , II n'y a point de teinturier qui n'ait une recette particuliere pour faire I'ecarlate , & chacun eft pcrfuade que la liennc eft la meilleure. Cepen- dant la reuffite ne depend que du choix de la cochenille & de. I'eau qui doit fervir i la teinture, & audi de la maniere de diflbudre I'etain qui entre dans la compofition •, car ce metal , mal choili ou diflbus fans pre- caution, eft fouvent la caufe du peu d'eclat d'une ecarlate, faite d'ailleurs avec tous les foins pofTibles. Comme c'eft par cette diffolution qu'on donne la couleur vive de feu au tcint de la cochenille , qui fans cette liqueur acide feroit naturcllement de couleur cramoilie , je vais donner U maniere de preparer la compofition qui m'a le mieux r^uill. Je prends 8 onces d'efprit de nitre , qui eft toujours plus pur que I'eau-forte commune & de bas prix , employee ordinairement par les tein- turiers. Je m'affure par les methodes connues des Chymiftes , qu'il ne contient point d'acide vitriolique. J'affoiblis cet acide nitreux en verfant deffus 8 onces d'eau de riviere filtrde : j'y difTous peu a-peu une demi- once de fel ammoniac bien blanc, pour en faire une eau rL'gale , parce que , comme on le fait , I'cfprit de nitre n'eft pas le dilTolvant dc I'etain. DE L'ACADEMIL ROYALE DES SCIENCES. 525 En6n J'y ajoute 2 gros fculement dc falpetrc dc \.\ troilieme cuite. On " [)ourroit le luppruner, raais je rae Hiis apper^it t]!!*!! contribuoit i unir C k y m i a couleur, c'elt-i-dire, k la faire prendre plus egalenicnt. Dans cttte cau regale alFoiblie je fais difibudrc une once detain d'Angleterre en lannes, Ann^t iji^- que j'ai grcnailie auparavanti mais Je ne fais toniber ces petits grains d'e- tain dans le dilTolvant , que les uns aprcs les autrcs , attendant qu? Ics premiers foient diffous avant que d'en mettre de noiiveaux , afin d evitcr la pcrte dcs vapeurs rouges qui s'cleveroient en granJe quantitc, & qui fe dilUperoient (i la diflblution du metal fe faifoit trop precipitamment. Ces vapeurs font neceflaires i confcrver , & , comnie Kunckel I'avoit ob- fervi de fon temps, clles contribuent beaucoup a la vivaciti de la cou- leur, foit parce que c'eft un acide qui s'evaporcroit en pure perte , foit qu'clles contiennent un fulfureux qui donne de I'cclat ^ la couleur. Cette methode eft beaucoup plus longue, ^ la virite, que celle des teintiiricrs, qui verfent d'abord leur eau-forte fur I'etain grcnailie, &c qui attendant qu'il fe fatTe une vive fermentation , & qu'il s'en eleve beaucoup de va- peurs , pour I'affoiblir par I'eau commune. Quand mon ^tain eft ainii dif- fous peu-i-peu, la compofition de I'ecarlate eft faitc , & la liqueur eft > d'une couleur de diflblution d'or, fans aucune boue prccipitce ni fedi- ment noir, parce que je me fcrs d'un dtain pur, fans allinge, & tel qu'il coule dcs la premiere fonte de ^i mine dans les fourncaux de Cornouailles , au-lieu qu'il eft rare de trouver de I'ctain \ petit chapeau qui ne laifle pas de fedimcnt noir au fond du vaiffeau. Cette diUoIution de I'ctain , tres- trar.fparcnte quand elle eft nouvellement faite , s'epaifHt & devient laiteufe & opaque dans les grandes chaleurs de I'ete. La plupart des tein- turiers font dans I'opinion qu'alors die eft tournee , & quelle n'eft plus bonne ^ rien. Cependant j'ai reconnu que la mienne, maigre ce dcfaut, faifoit I'ecarlate aufli vive que li elle fut reftee limpide. De plus , dans les temps froids elle reprend fa premiere tranfparence ■■, ce qui , a la vd- rite, n'arrive pas li exadlement i la compofition qui n'a pas ete prepar^e avec les precautions que J'ai indiqu^es. II eft necenaire d'avertir qu'il faut tenir cette dilfolution dans un grand flacon bouche d'un bouchon de cryftal. En fuppofant qu'on ait de la compofition deji prcparee , il f.uit , pour teindre un drap blanc en ecarlate , le bien humecfter d'abord, en le met- lant dans de I'eau de riviere un peu plus que tiede pendant un bon quart- d'heure, puis le retirer, I'exprimer legerement & le gardcr humide, afin qu'il le teigne plus uniment. II faut aufli de I'eau de riviere la plus pure pour tirer le teint de la cochenille : on n'y r^ufliroit pas de meme avec de I'eau de puits , ou avec toute autre eau crue & gypfeufe. II eft meme aflez convenable de preparer 1 eau de riviere , pour pcu quelle foit fuf- iiecte , en mettant dans la chaudiere un fac de toile blanche , rempli de on de froment, ou de quelque racine douce & mucilagineufe , comme de guimauve , ratiflee & coupee par tranches. II faut environ une once & demie de cochenille fine, pulverise & paf- fee par un tamis fin , pour teindre une aune de drap blanc , humecli C a Y M 1 E. 51^ AB R t Gt DES MiMOIRES ; comme on vicnt de le dire , & que je fuppofe dii poids de 1 livrcs ou environ lorfqu'il eft kc. Cette dofe de cochcnille s'emploie en deux foisj favoir , un tiers pour le bouillon qui prepare le drap , Sc lui donne en Ann/e 1741- meme temps une couleur de role vive, & les deux autres tiers pour la rougie ou fecond bain qui acheve de le teindre. On pourroit , \ la ri- gueur , fcire de I'ecarlate en un feul bain , mais j'ai rcconnu quelle n'en fort pas (i parfaite. Pour le bouillon , on met dans une chaudiere d'^tain fin 50 i 40 pintes d'eau de riviere-, lorfau'elle eft un peu plus que tiede, on y ajoute i onces de creme de tartre bien pulv^rifee & 4 gros de co- chenille en poudre fine , on brouille bien I'eau du bain , & auffi-tot quelle eft prete i bouillir, on y ajoute 1 onces au moins de compofition. Ellc change tout d'un coup la couleur du bain, qui , de cramoifi brun qu'il etoit , devient de couleur de fang arteriel. Aufli-tot que le bain a com- mence ^ bouillir , on y plonge le drap , & on I'y tourne & retourne pen- dant une heure & demie , apres quoi on le Icve , on I'exprimc , & on le lave dans I'eau froide. Dcs cette premiere preparation , il eft d'une couleur de rofe tres-vive, & I'eau du bain, qu'il faut jetter, n'eft prefquc plus ca- loree. Pour la rougie , on rcmet dans la chaudiere A'hain la meme qiun- tite d'eau que la premiere fois , une once dc cochenille pulverifee , 5 dcpouiller de cet alliage, on n'cmploie point quclquc compolition ca- jj pable de nuire i la fante de ceux qui le ferviroient de vai'iclle faite « de cette maticre. >> On ne peut douter que pour fe mettre en etat de donncr ces tclaircif- femcns, il n'ait fallu employer difFcrens moyens, & faire bien des ope- rations fur le metal qui en eft I'objet. Ce n'cft que par une longue fuite d'expericnccs qu'on peut parvenir ^ connoitre ce qui entre dans la com- polition dcs mixtes •, les lubftances metalliques iur-tout , ctant d'un tilfu plus ferre, plus lie, plus tenace que les vegctaux & les animaux , exigent un travail plus long & plus obftine. Mais entre les mctaux , I'etain eft un des plus difficiles a trailer lorfqu'on veut en reconnoitre la pureti. L'or & I'argcnt , par exemple , font ailes \ eprouver , en ce que leur parfaitc decompolltion ayant ete jufqu'ici impodible , on peut toujours feparer ai- fement de leurs parties propres les niatieres hcterogencs qui s'y melrnt. Un des meilleurs moyens de s'alTurer de la purete de Ict.-.in, eft de Ic calcincr ; car on fait que la chaux de I'etain, ou \i potee j cette efpece dc cendre qui refte \ la place de ce metal apres la calcination , eft d'autant lus blanche qu'il eft plus pur. L'academie a vu des preuves de cette verite, orfque M. Geoffroy, I'un des deux commilfaires nommes i I'examen dont il s'agit , kit il y a trois ans un premier memoire fur I'analyle de I'etain. [a) Les chaux qu'il fit voir alors ^ la compagnie , & qu'il a confervces ^ I'abri des imprellions de i'air , ont fervi aujourd'hui de pieces de com- parailon. Outre la calcination de i'etain du Sr. de Kemerlin, M"- Geoffroy & Hellot en ont fait la preuve par la pierre d'eJJ'ai des potiers d'etain , ef- pece de petit moule de pierre de tonnerre, ou Ton fait couler ce metal fondu , pour examiner la coulcur qui lui vient \ la fuperficie aprts fon re- froidiliement. Cet eliai , le leul qui foit en ulage chez les potiers d'etain de Paris, quoique fort douteux, a indique cependant h nos deux chymif- tes la route qu'ils dcvoient tcnir pour imiter I'etain du Sr. dc Kemerlin , 5: par confoquent pour donner leur avis fur fa purete. ( « ) Tome VIII. d« la CoileAion Acadiimitiue , Pariie Franjoifc. Tt ii r< C II Y M I E. 531 AB Rt G t DES MIEMOIRES lis fe font aiiffi fervi dii martcau des planeurs pour favoir li Tetain pro- pole fc forge aiifTi bien on mieiix que I'etain fin des pollers qui eft eii ufage pour la vnilTelle ; & de la lime pour coiinoitre quelle couleur il Annc'e ijii. V^'^^ ^ '•''"'' ^P""" '^^ liniple dechirement de fa lluface, avaiit qu'on lui donne un poli plus parfait Le mcmc etaiii a ete pefe dans I'air & dans I'eau, \ rimitation de cc que pratiqua Arcliimede fur la famenfe couronne du roi Hieron , pour I'indication de fon alliage , au cas que ce metal en eiit, en comparant Ibii poids \ celui dts etains connus. On I'a diflous dans une eau regale afFoiblie, pour favoir s'il ne s'en pre- cipitoit rjen de fale, conime cela arrive aux etains communs & allies de plomb, & cette meme difTolution appellee compofition dans I'art de la teinture , a ete employee enfuite avec un bain de cochenille fait ^ I'or- diiiaire, pour Juger par la vivacite de la coiileur ^carlate quelle don- ncroit k du drap , fi cet etain eft plus pur que tout autre : car ce n'eft qu avec une p.u:eille diflblution detain le plus pur, qu'on peut faire le bel ecarlate. Oi» a mis tremper de cet etain dans de la diflblution d'or, pour voir aufTi par la couleur pourpre que I'ctain fait prendre I la diiiolution de ce metal, li I'ctain dont il s'agit, eft aufli pur qu'un etain qu'on favoit I'etrc beaucoup. II a ete fondu dans un meme vaifleau & au meme feu avec trois autres etains, I'lin recoi.nu pour ctre pur, I'autre hmplement pour bon, & I'au- tre pour mauvais, afin de favoir combien il reliftoit plus que ics autres ^ I'aftion du feu. - On n'a pas dedaigne de confulter queiques potiers d'etain des plus ha- biles , & de faire en kur prcfence une partie des operations dont nous venous de parlcr. Enfin , Mrs. Ceoftoy & Hellot , ont aficz bien imite I'etain du Sr. de Kemcrlin pour fe detei miner lur ce qu'ils avoicnt ^ en dire. Toutes ces eprcuves, ces diverfes ejtperiences , & pluiieurs autres faites & repctees plulieurs fois, accompagnees de toutes les precautions, & meme de tons les cakuls dont elles etoient liifceptibles , ayant ete rapportees^^ racademie dans Ic plus grand detail, la compagnie a juge que I'etain pre- fente i M. le comte de Maurepas par Ic Sr. de Kemerlin , bien loin d'e- tre comme I'et.iin d'Anglcterre en laime, depouiUe de tout alliage, en a meme plus que I'ctain fin des potiers, puifqu'il pefe davantage-, car on fait que I'etain eft de toas les metaux le plus leger. La couleur de fes chaux apportces ^ rafiemblee par les commiii'aires , demontre aulli qu'il u'eft pas pur , puifqu'elles n'ont pas la blancheur de I'etain d'Angleterre iion allie. Cependant I'academie croit qu'il pent etre employe utilement ^ fabriquei de la vaiifelle, fans que ceux qui s'en ferviront en aient rien i craindre pour la fante, & qu'il a encore cet avantage fur I'etain fin des potiers, dc ■ ne point lailler appercevoir de cuivre, & d'etre un peu plus difficile ^ fondre. DE L'ACADEMIE ROYALE DES SCIENCES, jjj SUR LES MOYENS De volatUiJer I'Huile dt Vitriol, de la faire paroltre fous la forme d'une Huile eJJ'entielU , & de la re'duire enfuite a fan premier itat. JL/ans pliifieiirs memoires que M. Geoflroy a donncs i racademie fur Ilifr. les hiiiles cirentielles des plantes, & dont on troiive d'amples extraits dans les tomes V. & VI. de cette Colledion acadcmiqiie , & ci-devant, dans lefquels ila diitaille les principes qui compofent ces huiles, il avoit avancc qii'elles n'ctoient autre chole qiiiin melange intime de matiere fulplni- reufc, d'acide, de tcrre, dont la teniiite varie a I'infini, & d'lme portion adez conlidsrabie de phlcgme. II fe propofe aujourd'hui de montrer que la vegetation eft unc forte de fermentation qui unit quelques-uns de ces memes principes dans les plantes, tandis quelle en ecarte les autres & que c'elt de la dirferente combinaifon de ces premieres matieres que de- pend tonte la variete des odeuis , tant dans les tleurs que daus les autres parties de la plaiite. Comme ce memoire tient \ un grand nombre de connoiflances chymi- ques, & roule fur des operations delicates qui nous mcneroient beaucou* trop loin , nous ne fcrons ici qu'en rapporter liicciniflement le rekiltat. Pour mettre li-deOus fes conjcdturcs ou plutot fes preuves dans tout leur jour, M. Geoffroy prend une matiere qui a etc travailUe par les an- cicns Chymiftes & par les modernes , pallant ainil du connu h I'inconnu & de ce que I'art a fu compofcr ou deconipofer, i ce que la nature ?f- femble dans fes mixtes par des operations plus cachees, mais qui dans le fond font les mcmes, ou ne fnirnient secarter eirenticllement de Tou- vrage de I'art. Cette matiere eft le melange de I'efprit de vin , qui, felon M. Georiroy , conlifte en un combini d'eau , d'huile & de fels que la feule fermentation a unis entr'eux , avec I'huile de vitriol, c'eft-^-dire, avcc I'acide mineral Ic plus concentre ou le plus intimement uni aux autres. parties du mixte qu'on connoiffe. 11 flit remarquer qu'en diftillant ce melange apres une digeftion fuffi- finte, la varicte des odeurs que cette liqueur exhale, ne depend que de la differente modification de I'acide vitrioiique avec les parties huileufes rcpandues dans le phlegme de I'elprit de vin ; car on fait que les huiles & les foufres font le principe des odeurs, comme les fels font le pruicipe des faveurs. Aprcs avoir retire de ce compofi I'efprit aromatique, il refte dans 1* cornue une matiere relineufe qui fournit Thuile elfentielle qu'on nomme huik douce de vitriol; pour peu qu'on poufie vivcment le feu, elle dif- tille avcc un phlegme fulphureux volatil & trcs- penetrant. Et cette huile, pour Ic dire ici en palfant, eft: la b.ife de la liqueur anodine de M.PIotiinan, C 11 Y M 1 E. /innc'e tjfx.. ,34- ABRfiGfi DES MEMOIR ES iM^— i— — fi vantt-e par ce celebre chymifte , I'c reconiuie en cffet pour iin excellent Ipecifiqiie dans les maladies des iierfs. C H Y M I E. }j[_ Geoffroy pali'e enfiiite a la theorie de cette operation, & prouve Annie itao. ^''^'^'^'^"ce de I'acide fiilphureux dans cette hiiile douce & aromatimie par ' des experiences qui la demontrent, en feparant de cet acide la veritable huilc du vin. Detail curieux & utile qu'il faut voir dans le memoire nicme. S U R L'A N A L O G I E qu I S E T ROU V M ENTRE LE ZINC ET L' E TAIN. IJJft. JL/ans rimpoffibilite oil nous fommes prefque toujoUrs de connoitre les corps intrinlequement & par eux-memes, la chymie n'a pas de plus lur moyen pour en decouvrir la contexture & les principes , que de les comparer les uns aux autres , les moins connus ^ ceux qui Ic font da- vantage. C'eft la methode qu'a fuivie M. Malouin dans (es recherches fur le zinc ; il le compare avec I'etain , dont I'analogie avec ce mineral I'a d'abord frappe, & les experiences fur ce fujet Font conduit non-feulement ^ dc iiouvelles connoilfances fur la nature du zinc , mais encore fur celle de I'etain. Le zinc eft une matiere metalllque encore peu connue, dont les po- tiers d'etain font ufage , & qu'on emploie dans la foudure. Jufqu'i prefent toute matiere metallique de la couleur & de la duret^ de retain, & qui en avoit le cri, c'eft-i-dire , qui rendoit le meme bruit quand on la calToit on qu'on la plioit , avoit ete re^ue pour de I'etain , parce qu'on n'en connoilfoit point d'autre qui eut le cri qui caraclerife ce metal. Cependant M. Malouin a trouvc ce cri dans le zinc , & plus fenfible encore que dans I'etain, celui-ci meme le perd plutot par la cal- cination , que ne fait I'etain •, mais il a tire d'un alliage de zinc & dc plomb un metal plus traitable , plus blanc, plus dur, moins pefan: que le plomb , & qui a precifement le meme cri que I'etain ordinaire. 11 a decouvert a cette occafion une raaniere aifee de purifier le plomb & le zinc, & il a obferve que ces deux fubftances fulminent lorfqu'elles font tenues en fonte dans le meme creufet. Les circonftances de cette fulmination font curieufes. On n'avoit point encore calcine le zinc autrement qu'en le fublimant en fleurs ■, & comme Ton croyoit les fleurs du zinc irreduftibles , on difoit en confequence que ce mineral une fois calcine ne pouvoit etre retabli dans fon premier etat : mais M. Malouin calcine le zinc en cen- dres , comme on calcine I'etain , & il le retablit de meme ) ce qui peut conduire au retablillement des fleurs du zinc. DE L'ACADI^MIE ROYALE DES SCIENCES. 53,- Aprcs avoir dccouvert dans Ic zinc pluliciirs proprierifs qui n'y avoient point cte .nppercues & qui lui font comnuines avec I'iuin , M. Malouin fjlt voir qu'on pent blajichir fupcrficic-llenient Ic fer & le cuivre par uiic couche de zinc , comme on les blaiichit cu qu'on les etame avcc \'i- tain , & il en cxplique la manic-re. II y aura meme plulieurs avantages dans cette nouvelle efpece de blancliinient ; car le zinc eta;it beaucoup plus dur que I'etain , il Icra plus difficile ^ iifcr ; & commc il le fond audi plus diflicilcment, il devra micux relifter an grand feu. Mais ce qui eft d'une toute autre importance, il pourra prcvcnir Ics dangcreux effets d'un abus fort ordinaire, qui eft d'cniployer autant de plomb que d'ctain au blanc'iiment des vailieaux de cuiline •, ce qui le pratique iion-ftule- ment i caufe que le plomb coute beaucoup mains , mais encore parcc que mel'i avec Ictain le blanchiment qui en rclulte, a tout un autre otil, & qu'il eft beaucoup plus brillant que celui que donne I'etain fans me- lange. Cependant le plomb a des qualites trcs-nuihbles ^ la fan:e, on en a vii des excmples funeftes , ^ I'occalion dc la litharge mife trop rcccni- mzwt dans le vin pour le clarifier , & Ton lait que cctte drogue n'eft gucre que du plomb reduit en forme de fcorics ou d'ccume mctallique , par la calcination. Les vaiffeaux dc fcr dont il s'eft etabli quclques ma- inifaflures 'k Paris avec Tapprobation de Tacadcmie , outre qu'ils nous garantilTcnt des dangers du cuivre & de fon verdet, qui eft un vrai poi- fon , ont encore I'avantage d'etre blanchis avec I'etain tout pur •, mais des raifons de mode, de vains pr,:textes , & quelque chofe de pis de la part df s ouvricrs & de ceux qui ont h le fervir de vailieaux de cuiline , le- ront long-temps un obftacic invincible au fucces de cet utile etablif- fement. Pour en revenir k I'etamage de zinc, nous avouerons avec M. Malouin," qu'on y trouveroit aulli quclques inconveniens , quoique d'lnie autre elpece que ceux dont nous venons de parlcr : ce feroit i I'ufage & h la pratique d'y remedier, ou de le rejetter. La perfcctic^n des arts eft tou- jours prccedee de mille difticultes , & n'orrive qu'aprcs une longue iuite d'experiences. En pourfuivant ainli fes recherches fur I'analogie du zinc & de I'e- tain , M. Malouin a trouve que I'un & I'autre fondus avcc le mercurc perdoient leur cri. II a remarque aufli que le zinc & I'etain detonnent for- temcnt avec le nitre ; ce qui lui a fait croire que I'etain & le zinc abon- dent en foufre, & del^ lui eft venue I'idee de Ics travaillcr I'un & I'autre avec le foufre conimun. La fufion du foufre avec I'etain lui a donnc une matiere en aiguilles comme I'antimoine ; c'eft une efpece de mine d'ctain artificiclle. II n'cn a pas ete de meme avec le zinc , celui-ci n'a pu £tre dilToiis avec le foufre, il eft refte dans fon entier. Ici I'analogie ne fe foutient plus , & M. Malouin n'a pas voulu nous le lailfer ignorer. II faut bien que le zinc , qui aprcs tout n'eft pas de I'crain , ait fes proprietcs particulieres ■, mais I'expericnce que M. Malouin a faite pour s'cn con- vaincre, nous procurer! d'autres avantages dans la metallurgie , & rtous fournira fiu-tout un moycn dc debarradcr I'or & I'argcnt de Tetaiii y,6 K-RRtGt DES MEMOIRES BgTOMi lorfqu'ils y font nieles. Cette operation n'eft qii'annoncse dans ce m(!r«oire, mais elle nous fcra donnee dans un autre , ou dans plulicurs autrcs qui iuivront de pres celui-ci. Annie 174s.. ^^ lemblables vues, qui ne font pas (implement curieufes , mcritent ' affurement I'attention des artiftcs & du public. C » Y M I E. SUE L E S U C C I N. X ARMi les drogues & les fubftances dont on fe fert le plus commu- nement en mcdecine & pour les ufages de la vie , il en eft encore plu? fieurs dont on ne fait pas bien I'origine & la formation naturellc •, le fuc- cin , le carabc ou ambre jaune font de ce nombre : c'eft une niatiere dure & nn peu tranfparente que tout le nionde connoit. On nous I'apporte de Pruffe , oii les vagues de la mer Baltique le jettent fur les rivages -, Hiais on en trouve aulTi de liqnide & de folide aux bords de plulieurs petites rivieres aux environs de cette mer , & enfin il y en a bien avant dans les terres & dans des raontagnes fort eloignees de la mer, en Sicile, en Suede , en Provence pres de Sifteron , & en plufieurs autres lieux , ce qui a fait regarder le fuccin par la plupart des modernes, comme un foffile & une efpece de bitume. C'eft ain(i que nous le qualificrons d'a- pres M. Bourdelin , quoi^ue dans le memoire qui fera le fujet de cet article, M. Bourdelin fe Ibit moins propoK de nous donner I'hiftoirc naturelle du fuccin , que I'examen chymique des parties qui le compofent i il n'eft meme queftion dans fon memoire que d'une de ces parties, fa- Yoir, du fel volatil qu'on retire de ce bitume. Les premiers auteurs qui ont parle du fel volatil de fuccin, I'avoicnt range dans la claffe des fels volatils ordinaires & alkalis. Cependant M.Boul- duc le pere fit voir ^ I'acadsmie en 1659 {a) d'aprcs Barchufen, & con- tre le fentiment de Clafer , k Feve & Charas, que le fel volatil du fuccin difFeroit effentiellement des autres fels volatils, en ce qu'il fermentoit avec les alkalis, & que par confequent il ^toit acide. Mais quel eft le degre de volatility qu'il convient de lui attribuer » Quelques chymiftes ont cru qu'il le cedoit en ccla k la plupart de ces fels, & ils ne I'ont fait que demi-volatil. La raifon qu'ils en ont donnee, ctoit fondee fur ce principe , que les fels les plus volatils des corps mis en diftillation , montent avant leurs huiles. Or, en diftillant le fuccin, ils voyoient monter I'huile en meme temps que le fel, ou meme aupara- yanf, mais I'experience a bien convaincu M. Bourdelin qu'ils erroient dans le fait. II a toujours vu le fel volatil du fuccin monter apres I'efprit, & avant I'huile meme la plus claire. Ce n'eft pas que ces chymiftes aient voulu en impofer , ou qu'ils fe foient fait illulion k cet egard ; ils ont vu ( a) Voyei i'Hiftoire de cMte mnie , ft Collection A-cadiimique Partie Fransoife , Tume I. diftinftenjent DE L'ACADfiMIE ROYALE DES SCIENCES. 557 diftindlement cc cju'ils difciit avoir vu : toiite la difference vient du pro- — a^^— 1^» c^de, de l.i maniere de gradiier le feu Quand on a foin de doniier uii ^ feu trcs-doux, coiiime k pratique M. Bourdelin , le phlegine monte d'a- ^ " ■*' '■^ ' ^ bord, enfuite lefprit, qui eft une fcconde portion de phlegaie ou il en- Ann/e 174Z> tre aufli un pcu de fel volatil en diil'olution ; apris cettc premiere por- tion de fel volatil dillbus dans le phlegme, monte la partie la plus con- fiderable de ce fel qui eft fuivi de I'huile, blanche d'abord, Jaune enfuite, & enfin noire : mais h Ton donne un feu trop fort, comme ont fait fans doute les chymiftes dont il s'agit , I'lniilc monte en cffet avec le fel vo- latil confondu & nielc avec elle. Voili la fource de I'erreur, tant il eft aile de fe meprendre dans les operations chymiques, meme les plus ordi- naires , & plus encore dans les confequences prccipitees qu'on en tire. M. Bourdelin penfe done que le fel volatil du fuccin eft pour le moins aufli volatil que les fels alkalis volatils qu'on retire des matiercs anima- les, puifque ccux-ci ne montent qu'avec I'huile ou mcme aprts I'liuilc. On (avoit, dcs la fin du dernier liccle, que le fel volatil du fuccin fai- foit une claffe ^ part, une efpece de fel volatil different des autres, puif- qu'on n'ignoroit pas que ce fel ^toit en meme temps acide & fcrmentoit avec les alkalis, au lieu que les fels volatils qu'on avoit connus jufqu'alors, itoient alkalis & fermcntoient avec les acides ; mais on ne dcterminoit pas I'efpece d'acide qui conftituoit celui du fel de fuccin. Les modernes plus hardis fe font accordes ^ dire que cet acide , etoit I'acide vitriolique, & cela principalement fur deux raifons alfez fediiifan- tes; I'une qu'cn fouillant dans les mines de fuccin, on y trouvoit toujours un lit de mine de vitriol de mars au-defl'us du lit de fable, ou font or- dinairement loges les morceaux de fuccin ; I'autre que le fel du fuc.in ne fe decompofe point lorlqu'on verfe deffus de I'huile dc vitriol, ce qui devroit, difent-ils, arrivcr li c'etoit un autre acide que I'acide vitriolique qui entrat dans la compolition du fel du fuccin. Mais M. Bourdelin , aprcs avoir difcute ces raifons , fait voir fenliblement leur peu de folidite , & mOntre enfin par des experiences inconteftables , que I'acide en queftion eft veritablement celui du fel marin. Ce fentiment eft appuye fur des preuves dont voici le precis, i °. Les cryftaux du fel du fuccin font, comme ceux du fel marin, de figure cu- bique, feulement un pcu oblongs ou parallelcpipedes. 2°. Leur goiit eft celui du fel marin. 5°. lis decrepitent fur les charbons ardens. 4°. lis exhalent I'odcur de I'efprit de fel , quand on verfe fur eux de I'huile dc vitriol. 5°. Quelques gouttes de la diUolution des cryftaux du fuccin, verfees dans une diffolution de mercure par I'efprit de nitre, font un pre- cipite blanc. 6°. Enfin quelques gouttes de la diffolution de ces cryftaux, verfees dans une dilTolution d'argent par I'efprit de nitre , font la preci- pitation de I'argent en forme de cailie blanc , qui , quand on I'expofe au feu, devient cc queries chymiftes appellcnt lune corne'e i tous phenomencs qui appartiennent ^ I'acide du fel marin. Tome IX. Partie Frangoife. Vv 358 ABRfiGE DES MEMOIRES C' H Y M I E. Annie ly^z. o, SUR LA TeI NTU RE D' O RSEI LLE. N fait que la liqueur des therniometres eft coloree avec une teintarc d'orfeille , efpece de mouffe ou de lichen qui croit fur les rochers. {a) Mais cette belle couleur rouge qui a d'abord beaucoup d'eclat , s'aftoiblit avec le temps , & difparoit h la hn. D'oii vient cette decoloration de \i liqueur des thermometrcs. M. I'abbe Noliet a reconnu quelle n'etoit point caufee par un depot de la matiere colorante , puifqu'il n'en a jamais trouve au fond des bouies des thcrmometres decolores. II cherchoit cette caufe, lorfqu'un petit accident, un thermometre cafle,"la lui mit fous les yeux. La liqueur qui n'avoit point de couleur dans le tube fcelle , la re- prit lorfque Ic tube cafle lui donna communication avec fair extetieur. Cette teinture perd done fa couleur par le laps du temps , lorfqu'elle n'a plus de communication avec fair ext^rieur, & elle la reprcnd lorfqu'on lui rend cette communication. C'eft ce que M. I'abbe Noliet a verifie par plufieurs experiences , &; confirme par des exemples ou d'autres teinnires ont egalement befoin d'air pour conferver leur couleur. II fuit que pour conferver phis long- temps le rouge de la liqueur des thermometres , il faut laiffcr de I'air dans le tube qui contient cette liqueur. La liqueur des thermometres eft compofee, fuivant la regie de M. de Reaumur, de deux parties d'cfprit de vin & d'une pnrtie d'eau. C'eft I'eau qui eft caufe de la decoloration. Car la teinture k I'efprit de vin pur ne fe decolore point •, au moins M. I'abbe Noliet n'y a apper^u aucune alte- ration dans I'efpace de cinq \ fix ans. Dans le moyen propofe ci-deffus pour conferver la couleur ^ la liqueur melee d'efprit de vin & d'eau , fair ne pouvant toucher que la furface de la liqueur, M. I'abbe Noliet a remarque que ce contadl; n'empechoit pas la liqueur de fe decolorer au-deffous, fur-tout dans le bas du tube. En recherchant la caufe de cet inconvenient, il a trouve qu'il etoit produit par un defaut de parties fpiritueufes & volatiles , & qu'en confequence, pour prevcnir la d(fcoloration des thermometres, ou retablir plus effica- cement la couleur dans ceux qui font decolores , il fuftifoit de meler avec la liqueur un peu d'efprit volatil urineux ; ce qu'il en faut pour cet eftet, n'eft point capable de changer notamment leur degre de dilatabilite , & deux ou trois annees d'epreuves ne lui ont laiffe voir aucun inconvenient dans ce remede. Et quant au premier remede donnc par M. I'abbe Noliet, qui eft de laiiTer un peu d'air au haut du tuyau , il ne le propofe que pour les thermometres deftines ^ I'ufage ordinaire d'indiquer les differcn- tes temperatures de I'stmofphere, & dont la liqueur ne devant pas s'elever au plus haut degre de dilatation , n'a p.is befoin d'etre entierement pur- gee d'air. Co) L'orfcille fe prepare avec fa chaux & I'lirine , & loifqu'clle a hi fuffifamment maccree , on la detrempe dans I'eau pnur tcindie les ^toffes en rouge, yoyxi ci-divant la T/iiorie Chymiqut de la tiiinun des Eioffis. DE L'ACAD^MIE ROYALE DES SCIENCES. 559 DEUX PROCEDES NOU\'EAUX "vmie. Pour ohtenir fans le ficours da feu une Liqueur (fthMe fort approchante de celle a laquelle M. Frolxfnius , ' Chymifc Allemand , a donni k noni i/'Ethcr. Par M. D u H A M E I. V^ETTE liqueur que Frobenius a appellee Mer, eft cxtrememeiit fin- M3 I'efprit de vin & de I'efprit de nitre , ie boiiclion de la bontcille oii ■>■) Ton avoit t.iit ce melange faiua, & il fe repandit une forte odeiir d'cthei". >5 Cette circonflance ni'engjgca ^ faire difterens melanges d'efprit de via J3 & d'efprit de nitre dans des vaifleaux fermes , pour retenir cct cfprit >3 volatil qui avoit frappe mon odorat', ^ la fin je reullis a fairc une huile J3 ethcree, fuivant le precede que je vais rapporter. jj Je melai de I'efprit de vin & de I'efprit de nitre 6ga!e partie en me- ii fure & non en poids, le ii o61:obre je mis le tout dans une bouteille 5j bien bouchee •, le 51 du meme mois je trouvai environ un fixieme du >j melange fepare & furnageant le refte de la liqueur , cetoit une tres- jj belle huile etheree, tres-claire & prefque blanche. >j M. Navier n'etant pas h portee k Chalons d'avoir des efprits de vin & de nitre de difFircntcs forces , m'a marque que I'efprit de nitre qu'il avoit employe, etoit d'une mediocre force, & qu'il avoit egalement eu de I'huile etheree quand il avoit employe de bon efprit de vin qu'il avoit apporte de Paris , & de I'eau de vie qu'il avoit prife fur le lieu. Apres les experien- ces que j'ai faites depuis que j'ai recu la lettre de M. Navier , je crois pouvoir affurcr que toutes fortes d'elprits de vin & toutes fortes d'efprits de nitre fourniffent la liqueur etheree de M. Navier. Dans le memoire de 1734 4"^^ J ■'' "^^J^ *^''"^ ' °" ^°'f "^"^'^ ^- Grofle n'a pu reuffir ^ faire I'eiher Jaune qu'un Italien employoit ^ Paris pour difterentes maladies-, peut-etre cette liqueur jaune de I'ltalien approchoit- elle de I'huile etheree martiale que M. Navier a trouve le moyen de faire, & qu'il a aufli communiquee h. I'academie : voici comme il la fait. Proddi de M. Navier pour obtenir^fans le fecours du feu, une liqueur ithcrte martiale. >j La deflagration qui fe fait en plaijant une bougie allumde \ rembou- >3 chure du matras au fond diiquel il fe fait une dillolution de fer , foit 5> avec I'efprit de vitriol , (oit avec I'efprit de fel marin , & plulieurs aii- 33 tres experiences qu'il eft inutile de rapporter ici, ne lailiant aucun doute >3 que le fer ne contienne une alfez bonne quantite de parties graffes & 33 inflammables, je m'avifai de tenter de les feparer au moyen de mon huile >3 etheree. 33 Pour cet efFet je fis une forte difiblution de limaille de fer dans de 35 bon efprit dc nitre, j'ajoutai h cette dilfolution environ moitie d'efprit 35 de vin bien reftifie; aprcs avoir bien mele les deux liqueurs, je ijiis le S3 tout dans une bouteille que je bouchai & ficelai bien : lix femaines apres 33 m'avifant de regarder cette bouteille que j'avois comme oubliee , je J3 trouvai que fur une liqueur extremement rouge & foncee il en nageoit DE L'ACADEMIE ROYALE DES SCIEXCES. 34' 55 line autre tres-Iimpide & d'lin rouge plus clair. Je his furpris en debou- *— *=*— ■'^— » ch.iiit l.i bouttille, de la petulance avcc l.icjutlle line partie de ce quip »j etoit dedans fauta en I'.iir •, il en refta ccpcnJant alilz pour reiirer cn- »5 core un pen de la liaueur lurnageante, cetoit une huile ctheree d'une Ann^e zj4Z. >j odeur vivc, un peu fulfureufe, ccpendant affez gracieufe & d'un goiit >3 annr, & qui nagcoit fur I'eau. >3 Fort eniprcire alors d'en avoir une quantite raifonnablc pour pouvoir ti niicux {'examiner, je ne tard.ii pas ^ repetcr Ics melanges dont je viens >j de parler, roais ce fut fans fucces i je ne me rcbatai ccpendant pas, & J3 je recommcncai jufqu'^ ce que je fulFe parvenu k rcuflir lurcmcnt : voici »j toutes les circonftances de men operation. ij Je jette gros ^ gros de la limaille de fer bieii pure dans de bon efprit »> de nitre, ayant foin de n'en point remettre de nouvellc que I'autre ne » foit diffoute -, aJors il s'y excite une fermentation allez violente , Sc il >j s'y eleve des vapeurs rouges en grande quantite. J'ai foin aulTi-tot que j> j'ai mis la limaille, de boucher exadement le matras d'un bon bouchon »} de liege, i". pour empecher les vapeurs rouges qui contiennent beau- • »j coup de phlogfftique, de fe perdre , 1°. pour moderer la ferrrienta- » tion , qui (e fait fort doucement lorfqu'il n'y a plus de communication >j avec I'air exterieur; mais li j'ai tarde un peu trop h boucher le matras, »3 non-feulement je perds beaucoup de vapeurs rouges, mais encore la >3 fermentation s'y excite i'\ violemment que je ne puis plus alors boucher jj le matras (ans courir rifque qu'il ne vienne h fe brifer, comme il ni'eft >j arrive pliilieurs fois. Je continue ma dilfolution petit i petit. En hiver >j je mets Ic matras dans un endroit tempere, & en ete j'ai foin de I'e- jj loigner de la chaleur, parce qu'alors la fermentation feroit trop vio- j> lente , & pourroit avoir les luitcs que je viens de rapporter. Chaque JJ livre d'elprit de nitre dilTout environ 2 onces | de limaiUe. Je mets JJ ordinairement dix h douze jours pour finir cette diffolution. IJ La diffolution etant faite, li les fermentations ont ete un peu trop >j fortes dans le temps qu'on y a mis Ja limaille , & qu'on n'ait pas eii IJ foin de boucher le matras , elle eft d'un rouge Icger & quelqucfois »j fonce-, mais li au contraire on les a moderees, elle a un ceil verdatre & JJ affez clair. Cette liqueur eft un peu epaiffe & paroit onCtueufe-, quand >j on I'agite dans le matras elle forme des ftries le long des parois , fans s'y JJ attacher. II refte au fond du matras line efpece de terre metallique qui jj n'a pu etre diffoute , & meme un peu de limaille lorfque la dilTolution JJ fe trouve affez chargee. JJ A mefure que I'acide nitreux fe charge de fer, il produit des vapeurs >j rouges qui paroiffent en abondance en dcbouchant le matras , meme JJ apres que la fermentation eft entierement ceffee, & quoique Tefprit de JJ nitre que Ton a employe , n'ait nullement ete fumant avant que d'avoir JJ diffous de la limaille , plus il en diliout , plus il donne de vapeurs rou- jj ges ; ce qui paroit prouver que I'acide nitreux s'eft charge de beaucoup »j de phlogiftique de fer. >» Ma diffolution etant bien conditionnee , Je h d^cante doucement 5+1 ABRfiGlS DES Ml^MOIRES : »j dans nil autre vailleaii , & j'y ajoute environ moitie de bon efprit de P . ' >j vin ( en poids , & non en mefiire •, ) j'agite -bien le tout enfemble , les ' jj deux liqueurs fe melent intimement , n'ont d'autre odeur que celle d'un Annie 1740.. »> elprit de vin aftoibli, & ne forment plus qu'une liqueur homogene qui J5 eft fort claire : je la mets dans une bouteille ou dans un niatras de verre >> rcnforce , je la bouche exadlement avec du liege que je ficelle , & je •>j laiffe le tout en repos , ayant pris la precaution de laifler environ qua- jj trc doigts de vuide depuis la liqueur jufqu'au bouclion. >» Au bout de vingt-quatre heures la liqueur acquiert une petite cou- J5 leur rouge qui augmente de jour en jour , & en meme temps elle con- 53 tra(5le une odeur vive & penetrante , ce qui eft une bonne mnrque. 15 Vers le cinquieme jour la liqueur fe trouble, & il s'y eleve k la furface >5 une efpece de crafle; alors une petite fermentation commence ^ s'exci- » ter, & s'augmente jufqu'au point de faire eclater la bouteille, fi elle ») n'eft d'un verre tres-fort (ce petit nialheur m'eft arrive bien des fois.) >> A mefure que la fermentation fe fait , il s'y eleve des bulks d'air qui • >5 entrainent avec elles de petites portions d'huile , qu'elles depofcnt 'k la 5; fupcrficie de la liqueur, oil elles fe creventi on voit I'huile s'augmcn- >5 ter ainli petit ^ petit. >3 Pendant que tout cela fe pafle, il fe prccipite au fond du vaiifeau >j une efpece de crocus , parce que I'acide nitreux abandonne la fubftance 15 nietallique qu'il tenoit fufpenduc , pour fe joindre i I'efprit de vin qui J3 s'eft chargi de toute la partie graffe du fer-, ce qui paroit faire une ad- »3 dition h la table des rapports de feu M. Geoflroy. 55 Lorfque je vois affcz d'huile formee, je debouche la bouteille avec 15 toutes les precautions poffibles, & je tache de me rendre toujours mai- ij tre du bouclion, en donnant peu-^-peu de I'air ^ la bouteille-, car au- 53 trement, y ayant beaucoup d'air de condenfe entre le bouchon & la li- »3 queur, lequel s'y eft amaffe par la fermentation, il pouffe le bouchon »3 avec tant de violence qu'on n'en feroit plus le maitre, & il s'y feroit t5 alors une explolion violente, avec un bruit comrae un petit coup de 53 piftolet, qui feroit fuivie d'un jet de la liqueur contenue dans la bou- >5 teille , & fur-tout de I'huile •, au-lieu que le bouchon etant ote avec 15 beaucoup de management, I'air s'echappe en fifflant, & la bouteille >3 etant debouchee, il s'y fait un bouillonnement des deux liqueurs que jc >5 laiile un peu calmer, enfuite je fepare mon huile. 55 Je me fuis fervi d'abord pour cela d'une meche de coton •, mais J5 voyant qu'il falloit trop de temps, & qu'il fe perdoit ou evaporoit beau- is coup d'huile, j'ai compris que je reuffirois mieux avec un (iphon que J3 j'ai fait avec le bout d'un tuyau de barometre , & qui en effet failoit J5 un meilleur effet-, mais cela ne laiffoit pas d'avoir fon inconvenient, >5 parce qu'en pompant avec la bouche la longue branche pour I'emplir » d'huile, fourent je I'attirois jufqu'^ ma bouche : j'ai done eu recours ^ >j une petite feringue de verre qui s'empliffoit d'huile en tirant le pifton , »3 & n'avoit aucun des inconveniens fulaits. >j Lorfque I'huile ctoit tontc feparee, je rebouchois bien la bouteille. DE TACADEMIE ROYALE DES SCIENCES. $45 •J & la laiffois en repos jufqu'i ce cjii'il fc fut forme de nouvclle hiiile que — J je (cparois de noiivcau, & ainlrdc fuite jnfqu'^ ce qu'il ne s'y en for- ~~ J mat plus. Quclquefois il sen forme pendant un mois ou lix ("cmaines, ^ " ^' *' ' ' ' mais h melure que Ton fcpare I'hiiile, il y a moins de danger pour Ic yinnc'e i-^ax J vailFeau. ^ » La liqueur qui refte eft d'un rouge tres-fonce , retient I'odeur de >. I'huilc , & bouilloiine pendant long-temps ; elle eft inh'niment moins ) acide que lorlquc I'on a eu fait le melange avec I'dprit de vin , elle a > acquis une ftipticile qui furpa/Ie toutes celles que je puis connoitrc. Si J on la diftille, elle fournit une efpece de nitre dulcific , tres-odoraiit & J un pen acre, qui etant remis avec de la nouvelle diflolution martiale , 3 fournit encore de I'huile, mais en petite quantite. Si avant que de dif- 5 tiller la liqueur rouge, que Ton pourroit nommer teinture mnrtiale > aflringe-iU , on y remet de i'efprit de vin bien redlifie, elle precipitc ) beaucoup de crocus, mais elle ne fournit pas une goutte d'huile. Lorl- j qu'on diftille la liqueur rouge , & que Ton en a retire Tefprit le plus > volatil , li on la pouffe aprcs cela par un feu plus fort , elle lailfe prcci- 5 piter prefmie toute la fubftance mctallique quelle tenoit fufpendue , & > il en diftille un acide qui tient plus du vegetal que du mineral ; li Ton ' dilFout de nouveau de la limaille de fer avec cet acide, & que Ton dif- 3 tille doucement cette diffolution , on obtiendra un acide qui paroit ne 3 difFerer en rien du vinaigre diftille. Cette derniere diffolution de mars 3 melee avec I'elpiit de vin, ne fournit rien qui approche mcme de notre 3 huile. >3 L'efpece d'efprit de nitre dulcifi^, rctirde par la diftillation de la tein- 3 ture rouge, expofee au foleil dans un flacon, acquiert une Itfgere cou- 3 leur de pourpre , & en etant retiree & refroidie , elle redevient aulli 3 claire qu'auparavant , ce qu'elle acquiert & perd ain(i trois ou quatre 3 fois de Ante, jufqu'i ce qu'enfin elle ne prend plus de couleur, quoi- 3 qu'on I'y expofe. Si Ton verfe fur cet efprit un peu d'huile de vitriol , 3 on n'y voir point d'effet fenlible , mais peu de temps aprcs la liqueur J blanchit, & laiiFe precipiter un petit fediment blanc. 33 L'huile etant feparee de la liqueur qu'elle furnageoit, & mife dans un » flacon qui bouche exaftement , eft claire & limpide comme de I'eau •, > mais peu-^-peu elle acquiert dans I'efpace de trois femaines ou d'uii > mois imc belle couleur rouge , qu'elle perd enticrement li on I'agite J avec un peu d'eau, & cette eau retient la couleur qu'elle avoit aupara- j vant. L'hi'.ile etant confervee un peu de temps avec I'eau, lui commu- > nique une grande amertume, & malgrc cela elle devient mcme plus J amere qu'elle ne I'etoit , lorfqii'elle venoit d'etre ftparce de deffus ia 3 liqueur rouge. Je penfe que cette amertume pourroit bien venir des 3 parties graffes du fer. Si Ton agite notre huile rouge avec de la liqueur 3 rouge qu'elle a lurnagce, elle lui communique, comme i I'eau, de Ton 3 amertume & (a couleur. Tant que l'huile n'eft point enlevce de dclius 3 la liqueur rouge , elle n'acquiert Jamais elle-meme de couleur rouge. » Cette huile itant d'elle-memc trcs-inflammable , cela ma conduit ^ ,4+ ABREG^DESMiMOIRES I I I ^— ;; eflayer fi avec de I'huile de vitriol concentric, elle ne produiroir pas » de deflagration •, mais au-lieu de cet effet , j'en ai eii un autre auquel je C II Y M I £•„ „g ,,,'3,(^.„dojs pas, c'eft qu'il s'y excite line fermentation, comrae fi on Ann^e 174Z. " verfoit I'lniile de vitriol i'lir une liqueur alkaline, telle que I'huile de >5 tartre , & notre huile perd fa couleur rouge & devient claire. I J Si Ton verfe fur notre huile lorfqu'elle vient d'etre feparie, quelques J5 gouttcs d'huile de tartre par defaillance , il ne s'y forme point d'abord >3 de changement fenfible i mais au bout dc quelque temps, il fe forme >j des crytlaux en aiguilles qui font un veritable nitre regencre : alors fi >3 Ton debouche la bouteille , on fent une odeur nitro-fulphureufe des J3 plus penetrantes, ce qui ne laiffe aucun doute que notre huile ne con- >3 tienne de I'acidc nitreux. >j Lorfque par le moyen de I'huile de tartre on lui a enleve fon acide , >j elle eft bien plus volatile qu'auparavant; & lorfqu'on la verfe d'un fiacon 53 dans un autre, on voit en regardant au jour, quantite de vapeurs claires »i qui font cn pure perte pour le volume de la liqueur. L'huile que Ton >3 acquiert en mettant avec de la diffolution de mars I'efprlt que Ton s 3) retire en diftillant la teinture rouge , ne fe charge jamais de couleur 33 rouge-, peut-etre que cela vient de ce que la couleur rouge de notre J3 premiere huile eft occalionnee par quelques particules ferrugineufes qui >3 s'exaltent peu-k-peu , au-lieu que dans cette derniere huile fiire avec 33 un efprit de vin dej^ charge d'acide nitreux , les particules du fer qui y >3 peuvent etre , font dans une diffolution trop parfaite : ce lera par la J3 meme rail'on que I'huile de vitriol , verfee fur notre huile rouge , lui 33 fera perdre fa couleur. 33 J'ai tente le raeme procede en verfant de bonne eau-de-vie , au-lieu »3 d'efprit de vin, fur la teinture martiale, & j'ai obtenu igalement une »3 huile tres-fine en moins de temps, & prefque en aufTi grande quantite, 33 avec cette difference quelle etoit infiniment plus douce, & reffembloit >3 abfolument ^ Yoleum vini. 33 J'ai voulu tenter la meme chofe avec du vin , mais il n'a rien pro- >3 duit qu'une fermentation affez forte auffi-tot apres les avoir agites en- >3 femble •, le vin qui etoit rouge perdlt fa couleur , & le tout refta blanc. 33 Ce feroit omettre une circonftance effentielle que de negliger d'aver- 33 tir que j'ai tente la meme operation avec les acides vitriolique & marin, 33 fans pouvoir obtenir aucune liqueur etheree qui approchat de cellc 33 dont je viens de parler. 3j Une decouverte en produit prefque toujours d'autres •, celle que M. Na- vier a faite d'abord qui confiftoit i retirer une huile ith^ree nitreufe fans le fecours du feu , I'a conduit ^ faire la meme huile martiale ou chargee de phlogiftique du irars , & probablement M. Navier n'en reftera pas \k. II n'a point encore parle des ufages de cette liqueur , foit pour la mede- cine, foit pour les arts-, ce n'eft pas qu'il la juge inutile i ces egards, mais il a cru ne devoir rien precipiter, & il eft trop fage pour n'avoir pas eviti un ecueil ou tombent prefque tous ceux qui ont decouvert quelque chofe de nouveau. I*'uiape DE L'ACADEMIE ROYALE DES SCIENCES. J4^ L'ufage de I'academie, qiund on lui priJfciite queltjue chofe de noiiveau, ^^^m^— ^^^ eft de charger qiielqucs-uns de fes membrcs d'occuter Ics precedes , &p de r^peter les experiences qu'on lui aniionce. La lliigularite & la fimpli- citc de ceux de M. Navier ont excite la ciiriofite de pliilkiirs chymiftes, Ann{e 174Z. qui fe font prcfles de les rcpeter ; ils in'ont rcufli , ils ont reulli i fell M. Grofle, ils ont mis M. Geolfroy i portcc de tairc qutlqucs obfcrva- tions nouvclles, ce qui m'engage i inferer ici le rapport qu'il en a fait i I'academie. Mais je dois avertir que M. Rouel a fait liir ce nicme fujet Urt travail fuivi , & aflcz etendu pour former un niciHoire k part qu'on troii- vera dans le volume fuivant. Rapport que M. Geoffroy a fait a V Acadimie , Jur la Liqueur qui s'tteyc da melange de I'Efprit de Nitre dulcifi^, ohferyi par M. Navier. »> J'ai choifi une bouteiile forte, bouchee d'un bon bouchon de liege ; » j'ai mis dans cette bouteiile lo onces 6 gros d'efprit de nitre commun, »> j'ai mefure un pareil volume d'efprit de vin huileux , lequel a pefe >j 6 onces 6 gros , & ce meme volume en eau pefoit jufte 8 onces. L'ex- >5 perience a et6 fiite le 1 8 Janvier. >3 J'ai pris la precaution de ne verfer I'efprit de vin que fort doucemcnt » fur I'elprit de nitfe', dc forte qu'il s'eft trouve nager deflus fans etre »5 niele avcc I'efprit de nitre. J'ai bien ferme la bouteiile fans la remuer, »j elle eft toujours reftee b la meme place dans un lieu frais. »} Vingt quafre heures aprcs, j'ai obferve que I'efprit de nitre s'etoit im- »> bibe de I'efprit de vin d'environ un travers de doigt, ce qui paroiflbit 5> former trois liqueurs diftindes. 11 eft \ prcfumer que I'efprit de nitre »> dans fa diftillation avoit enleve avec lui un peu de fer , parce que le >J trait de la leparation a pris une couleur d'un tri;s-beau bleu d'azur ; cc » trait s'eft elargi , & a forme une bande par la fuite : alors de petites i» bulies d'air fe font elevees fans beaucoup de mouvement du melange dcs >J deux liqueurs. j> Le 5 fcvrier , la couleur bleue a totalement difparu , & I'efprit de >j vin s'etant totalement imbibe dans I'efprit de nitre , il s'eft fcpare une »> liqueur huileufe en affez bonne quantite. >> Comme ce melange travailloit toujours , quoique foiblement, je n'ai » fepare la liqueur huileufe que le 8 dudit mois fans la remuer; j'ai meme >j laiffe de cette huile fur le melange , & cette liqueur retiree a pefe une M once trois gros. jj Cette eipece d'huile etheree nage fur I'eau , clle enleve une panic dc »} la couleur de la diffolutiou de I'or. j> Cette huile au bout de 24 heures a pris une couleur d'aigue ma- ss rine, aprcs quoi elle a perdu peu-i-pcu la couleur qu'cUc avoit, en « laiffant precipiter I'or dont elle etoit chargce. »> Mais le 1 5 la liqueur de la bouteiile a commence i fermenter , a »3 chalK le bouchon au plancher avec bruit j & je comptc que I'cdU re- Tome IX, Fartie Franfoifc, Xjs 34« ABRIDGE DES ME MOIRES ■^^^^— — >3 gale de la diffolution va diiToudre I'or quelle avoit cede ^ cette huile „ »j qui , ne la pouvant earder , la rend ^ Ion premier dilloivant. >j Lc premier melange delpnt de vm & delprit de nitre continue en- jfinnie 1743- »' core k fournir des biillcs. » S U R L E ZINC. mf^^^^^^^ I i E s nouvelles recherches & experiences fur le zinc , dont M. Malouin . ^ a rendu compte \ I'Academie en 1745 & 1744 dans deux nouveaux m^- n-t J 43. ^Qifgs fur ce demi-metal, lui ont fait connoitre dans le zinc des fingu- 77^* larites qui le diftinguent de toutes les autres fubftances metalliques, dans les chofes roeme qui lui font communes avec elles. II a reconnu , par excmple, que le foufre mineral n'a pas plus de prife fur I'or que le zinc ; que I'antimoine crud, c'eft-^-dire, le r^gule d'antimoine fondu avec dii fouffre commun , ne diffout point le zinc , comme il ne diffout point For \ que le zinc rihfte encore au foufre joint ^ un alkali, c'eft-i-dire, au foie de foufre qui diffout I'or. II paroit furprenant que le foufre ne puiffe diflbudre le zinc, lui qui diffout toutes les autres matieres , \ I'exception de I'or. Voili une grande analogic entre I'or & le zinc. Mais le foie de foufae diffout I'or, & ne diffout pas lc zinc. Ici I'analogie ceffe , & cette propriete du zinc eft bien plus etonnante lorfqu'on fait attention qu'il paroit contenir beaucoup de foufre, puifqu'il brule en s'enflaramant, ce qui n'arrive ^ aucune ma- tiere metallique. M. Malouin foupgonne que ce foufre eft particulier au zinc, & n'eft point de la nature du foufre ordinaire. Cet habile Chymifte a fait fondre le zinc, & avec I'antimoine & avec le foie de foufre. Dans ces operations le zinc s'eft eleve en globules , & lorfque la maffe du foie de foufre a ete refroidie , ces globules etoient d'autant plus petits & d'autant plus hauts dans la maffe que le feu avoit etc plus fort. Le zinc a done une difpofition naturelle ^ fe mettre en globules comme le mercure •, fa partie calcinee fe met auffi en aiguilles comme le mercure , avec lequel il a encore cela de commun d'etre trcs- volatil. M. Malouin a enfin diffout le zinc par les alkalis fixes & les alkalis vo- latils, mais employes feuls •, car des qu'il les a voulu Joindre au foie de foufre, ils n'ont plus eu de prife fur le zinc. II en eft de meme des aci- des. L'acide niarin feul a bien diffout le zinc •, mais le phofphore dont I'acide eft l'acide marin n'a pu le diffoudre. II paroit done que les alkalis & les acides qui, feparement diffolvent (I bien ce demi-metal n'ont plus de prife fur lui des qu'ils font joints \ un principe inflammable. Ainfi non-feulement le foufre ne fauroit diffoudre le zinc , mais il empcche encore la vertu diffolvante des acides & des alkalis. Le foufre fixe, en quelque forte, le zinc lorfqu'ils font fondus enfemble , il I'em- peche de briiler & de s'elever en neursj & menie il en augmente un DE L'ACADiMIE ROYALE DES SCIENCES. 547 peu le poids , augmentation qu'il faiit plutot attribucr k J'acide du foufrc imhi^^m^^ qu'i fon principe luiilcux. ~~~~^"~~ De noiivclles experiences ont fait connoitre i M. Malouin que I'arfenic ^ " Y m i e. diflblvoit le zinc; que I'arfenic melc en petite quantitc avec le zinc, le _^,2/./ rendoit friable & moins bianc , & lui failoit perdre fon cri qui eft fern- /> blable h celui de I'crain. II croit que I'arfenic uni en grande quantitt; avec le zinc le detruit , parce qu'on ne peut feparer I'arfenic du zinc, comme on le fipare des autres mtftaux, le feu ncceffaire pour fublimer I'arfenic joint k une niatiere metalliquc , fuftifant pour diltiper aufll en fleurs le zinc qui eft coiiibuftible & s'enflamme tres-aifcment. {a) DIFF^RENS MOYENS De rendre le Bleu de P ruffe plus foUde a I' air ,6f plus facile d preparer. P ar M. G E o F F R o Y. F X lu mon frere donna \ I'academie en 1715, 'deux mcmoires fur ]e JVMm, bleu de PruiTe , dans lefquels il a eclairci , autant qu'il lui ctoit pollible alors, tout ce qui pouvoit etre regardc comme la thcorie de cette opera- tion. II lembloit cependant qu'il lui manquoit encore quelque chofe , puifqu'il dit \ la fin du fecond memoire, {b ) qu'il auroit d'autres opera- tions i rapporter fur cette preparation & fur les difl'erentes natures des bleus (ju'elle fournit , mais qu'il les rcferve pour un autre memoire. J'au- rois etc charme de publier ce memoire pofthume, fi on I'eiit trouve dans fes papiers : comme il n'en a rien lailTc par ecrit , il eft i prcfumer qu'il nc I'avoit que projette , que des occupations d'un autre genre qui I'ont dc- tonxni. de ce travail pendant quatre 4 cinq annees, Sc qui ont ete fuivies de la longue maladie dont il eft mort , nous ont prives de ce qu'on delJ- roit de lui lur cette matiere. Cette couleur eft devenuc un objet de commerce depuis que le goilt des vernis dans les appartemens, des camayeux fur les carrolTes, & plu- fieurs autres raifons de I'employer fe font extremement multipliees. Pour cviter qu'on n'en tire trop de I'etranger, J'ai cru devoir reprendre cette matiere, I'examiner de nouveau, tenter d'en perfeftionner la couleur, en rendre la preparation plus facile & faire en lorte d'en diminuer le prix; c'cft I'objet de ce memoire qui fervira de fupplcraent 4 ceux dc mon frere, s'il en eft Juge digne par la compagnie. Les principales circonftances de ropcration qui donne cette couleur, (a) C'eft ce qui a donn^ lieu ^ plufieurs Chymiftes He regarder le zinc ccmme une efpece de loufre. Glauber dit que le zinc eft un pur foufre foiaixe qui n'eft pas m(U. Bjl minim fulphur pilarc iion mattirum. (i) Colle<5ion Ac»d 27^.^. celles du vitriol & celles de I'alun. J'ai luivi premierement en petite dofe la proportion du dernier procede que Je vicns de decrire quant ^ la com- polition de la lelUve , il y avoit en tout 9 onces de niaticres miles au creulet , j'en ai fait la lellive dans deux pintes d'eau , je ne I'ai point env ployce lur le champ , mais je I'ai gardce jufqu'au lendemain. J'avois dif- rous le meme Jour 6 onces d'aiun avec 5 onces de vitriol ; au bout d^ vingt-quatre heurcs ayant fait chauffer les liqueurs , je les ai melees dans une terrine vernilfee -, tout-i-coup le melange a blanchi , puis il a pris line couleur cendree qui a paffe promptement au bleu pale, mais ce bleu ne paroiffoit pas dilpofe i prcudre plus d'intenlite fans addition , parce qu'il n'y ctoit entre qu'une pattie de vitriol centre fix d'aiun. J'avois dans line bouteille bouchee une dilfolution faite depuis trente jours, de } on- ces de vitriol dans j chopines d'eau, clle avoit beaucoup depofc de terre martiale-, je la furvuidai h. clair, & I'ayant fait chauffer, j'en verfai peu- i-peu une livre fur le melange encore chaud de la terrine, & je I'amcnai au bleu fonce fans avoir la moindre nuance de vert •, cette ficule bien lavee & fcchee pefoit un peu plus d'une once & eft reftee d'un bleu tres- fonce. Ainli voili un moyen ailez limple de faire le bleu de Prufie, & de lui donner telle nuance que Ton veutj il inJique en meme temps que pour reuffir avec plus de certitude, il n'y a qui priver le vitriol dc ce qu'il a de trop de terre martiale, foit par calcination, foit par dilTo- lution , ebullition , filtration , &c. De plus , en diffolvant le vitriol dans uue meme eau avec I'alun , Je mele (1 bien cette terre martiale avec la terre de I'alun , que quoique je fafle bouillir la diffolution ; ni I'une ni I'autrc des deux terres ne fe precipite en refroidilfant. Si dans la diffo- lution du vitriol feul, long-temps gardee, il fe fait une precipitation affcz abondante de terre Jaune, on en pent conclure qu'une portion de I'acide vitriolique ne tenant plus cette terre en diffolution , il devient libre d'agir comme diffolvant fur la terre Jaune du vitriol diffous avec I'alun , & qu'a- lors fans addition d'aucun autre acide il s'en trouve affez pour dllloudre la partie de cette terre jaune non revivifiee qui auroit altere la nettetc ou la purete du bleu. J'ai effaye avec le meme fucccs le fel de potaffe bien purifie de tout fel neutre , & en ayant calcine 4 onces avec 8 onces de fin.g de ba-uf deffeche, j'ai eu une lelllve fulphureufe qui, verfce fiur une diffolution d'aiun & de vitriol, dofee comme la precedente ou dans les memes pro- portions , m'a donne une fecule d'un bleu pale , i kquelle j'ai donne de meme la nuance de bleu fonce, en y ajoutant de la diffolution epuree & filtree de vitriol. La cendre gravelee , calcinee avec le fang de bauf , donne Une Icflivc qui fait le meme effet ; Ic detail en feroit fuperflu. Tome IX. Partie Franfoi/e. Y^ C H Y M 1 E. 354 AB R i G i D E S M E M O I R E S 1 Feu mon frere , en verifiant les experiences de M. Hcnckel , qui a tirat du bleu de la foude & du kali, s'eft contents de la certitude de ces faits, & n'a pas tente de fubfcituer le fel de la foude aux autres lels alkalis qu on Annies 1743. ^^°^^ '^^"^ I'ufage d'employer pour la preparation du bleu de Pruffe. Jai £' I'' 44. repris ce travail que je prevoyois devoir etre utile ^ mon pro jet , j'ai trouve , & j'ai dej^ fait voir ^ I'academie que le fel de la foude contenoit line bafe analogue i celle du fel marin , puifqu' avec I'huile de vitriol , j'en ai fart un veritable fel de Glauber. En dilfolvant le fel de la foude dans I'eau , elle refroidit confiderablement , je me fervois dun vaiffeau eleve & d'ouvcrture etroite ■, lorfque je jettois peu-^-peu de I'huile de vitriol fur cette leflive , il s'clevoit pendant la fermentation une vapeur blanche fulphureufe qui avoit cette odeur piquante fi fenfible aux acidules, principalement aux eaux de Spa , & fur-tout h. celles de la fontaine qu'on nomme de la Gironflere. Pendant la fermentation de la leflive de foude avec I'acide vitriolique, il fe pr^cipitoit un peu de fccule bleue; M. Henc- kel I'a obferve !e premier , & j'ai eu de plus des cryftaux de fel de Glauber bien formes , & affez colores de bleu pour qu'on les prit pour des faphirs -, je les ai fait voir \ la compagnie, il y a quelques annees, & ils ont coiiferve cette couleur dans le flacon de cryftal, oil je les ai tenus enfermis, II eft vraifemblable que ce bleu ne s'eft introduit dans ces cryftaux filins que de la maniere dont les couleurs s'infinuent dans les cryftaux co- lores, qu'on trouve dans leurs mines : ce font des diffolutions metalliqucs qui fe melent avec le fuc cryftallin. II n'y a point de plante qui ne con- tienne du fer, le kali en contient autant qu'aucune autre, lorfqu'on a brule cette plante pour en faire la foude, & que la cendre de cette plante, cal- cinee jufqu'i la fufion , a ete etouftce dans les foffes , on y a concentre un refte de principe fulphureux qui a pu revivifier les parties ferrugineu- fes , & faire dans cette calcination une partie de I'operation du bleu de Pruffe que I'acide du vitriol acheve , pendant que de fon union avec la bafe du lei marin , il fe fut un fel de Glauber. Quant \ I'exiftence d'un foufre dans prefque toutes les cendres des plan- tes, & principalement dans la foude, on en a la preuve dans I'odeur qui s'cleve de fa premiere leflive-, lorfqu'on la fait bouillir, elle eft femblable \ celle de X'hepar fulphuris : quand on prepare le fel de Seignette, qui eft un melange de leflive de foude avec la diffolution de la crcme de tar- tre, on fent pendant la fermentation de ces deux diffolutions une odeur d'hepar trcs-forte, ce qui n'arrive pas lorfque le fel eft bien depouille de fon foufre par une feconde calcination , ou lorfqu'on Jette la creme de tartre fur la diffolution d'un fel de tartre vrai & pur , pour en faire le tar- tre foluble-, il s'en eleve feulement une vapeur acide qui eft celle de I'acide du vin contenu dans la creme de tartre. Ceux qui ont fait le fel de Seignette , ont fans doute obferve , qu'^ la fin de I'operation , il refte line liqueur graffe tres-rouffe qui ne fe cryftallife plus ■, elle eft corapofce de I'huile du tartre, jointe a I'eau-mere de la foude. Si Ton jette fur cette liqueur une quantity convenable d'huile de vitriol , le melange deviendra bleu, & il fe precipitera une fecule bleue. DE L'ACADliMIE ROYALE DES SCIENCES. ,55 Cette difpoUtion natiirelle de la foude ^ donner le bleu, lorfqu'elle eft; aidee par I'acide du vitriol , m'a fait juger que cc devoit etre le lei alkali ^ qui conviendroit le plus k I'operation du bleu de Prull'e. L. h Y m i E. Ainii j'ai pris 4 onces de fel brut tire de la foude, je I'ai mele avec Annies Z74\ 8 onces de fang de basuf defleche , Je les ai calcines , & j'en ai fait la (/ 17 44- Icflive ; j'ai fait dilToudre , dans un autre vailTeau , 8 onces d'aiun avec 3 onces de vitriol, les deux liqueurs ont etc melees enfenible trcs-chau- des •, ce melange a etc du temps i rendre la fecule, elle etoit pale, mais fur le champ je lui ai donnc la nuance de bleu-fonce, en verfant deffus de la diilolution de vitriol , ancienne de deux ans , que j'avois trouvie dans mon laboratoire, celle-ci a fait fon effec beaucoup plus vite que la diUolution qui n'etoit faite que depuis un iiiois , & dont il a etc parlc ci-devant. C'eft ici qu'il eft temps de parler de ces deffeins que le hafard fournit, qui font toujours neufs, qui jamais ne fe repetent, & qui conviendroient extremement au gout prelentemcnt i la mode , des ctoffes nuancees des fabriques de Lyon. Mais il faudroit un defTmateur habile pour en copier promptement le trait, car ces deffeins linguliers n'exiftent pas plus de dix ou douze minutes. Pour les avoir , je verfe la lelTive chaude & les dilFo- lutions chaudes d'aiun & de vitriol dans un vaiffeau de terra verniffee plat & fort large , je les brouille avec line poignee d'olier a fouetter la creme : en remnant lentement ce vaiiTeau en dirferens fens , j'arrete , le piutot qu'il eft poffible, le r.iouvement circulaire du melange; fa furface devenant tranquille eft d'un bleu blanchatre ou fort pale : je verfe fur plu- fieurs endroits de cette furface des gouttes de difl'olution de vitriol la plus vieille ; ces gouttes en tombant s'epanouillent & fouvent fe divifent en rejailliflant , forment des fleurs prefque toujours defllnees de hon gout, des feuillages qui s'entrelacent & qui forment des bouquets , au moins auffi-bien jettes que le pourroit faire le plus habile deilinateur. Si une fleur fe trouve detachee & manque de queue qui la joigne au bouquet, une paille conduite legerement fuffit pour ouvrir la liqueur & former cette queue. II m'eft arrive plulieurs fois qu'une goutte tombee d'une hau- teur mediocre, m'a donne la figure d'un infede volant trcs-bien deflin^e. Ce ne font pas de ces deffeins qu'une imagination echauffee peut feule appercevoir -, plulieurs perfonnes de cette academie les ont vus comme moi , & de dix foi,s qu'on fait Texpcriencc , il y en a au moins fept dont un bon deflinateur peut profiter, le deffein etant copie , il n'y a qui brouiller la liqueur, la determiner \ devenir ^-peuprcs tranquille par le mouvement du vaiffeau en fens contraire , & verier de nouveau des gout- tes de diffolution de vitriol , on aura un autre camayeu \ defliner. , ;Ces deffeins ne deviennent li fenlibles que parce que la nouvelle diffo- Idtion de vitriol que J'ajoute, foumit un fer qui le reffufcite fubitement, & fe joint \ la terre de I'alun qui, par fa blancheur, lui donne une nuance dc bleu agrcable \ la vue •, fans elle il le feroit un precipite prefque noir, parce qu'il auroit trop d'intcniite. Cette maniere d'opcrer dans la prepara- tion du bleu de Piuffe a , comme je I'ai dit, I'avantage de pouvoir fournix Yy ij H Y M I E. J5 fTAA. excite i peii-^-peu le vinaigre a dilTous line partie de la terre, &■ le rcflc s'ctant dellcche, il s'eft fait aiix parois du vaiileau une cryil.illilation en croute qui a iaille au fond une niatitre de gypfe avec quelques Icls oil M. GcofJroy a reconnu de I'acide vitriolique. J'ai examine le fable fin qui fe trouve au fond des eaux, aprcs lavoir deflechc j'y ai prelentc le couteau aimante fans y dtfcouvrir de fer-, calcine meme avec des maticres graffes, je n'en ai pas decouvcrt davantage. Jen ai mis dans du vinaigre, il ii'y a point fermente f; ne I'a point .idouci. J'en ai mis dans de I'elprit de vitriol , & je ii'ai point vu par cette ex- perience qu'il fermcntat avec les acides , ainti que M. BralTart le pretend. Les experiences que je viens de rapporter, n'ont produit de fendble que le petit goilt de foufre qu'on appercoit dans ces eaux , le cliange- ment qu'clles caufent k I'huile de tartre & la qualite allcaline de la rcil- dence laillee par levaporation. On n'y a point decouvert de fer , cependant il eft: bien difficile qu'il n'y en ait point, quand on n'auxoit pour le foupconner que le voilinage d'une foiurce purcmen: ferrugineufc qui n'en eft eloignee que de 3 toifes; on n'y a pas trouve en nature cc qu'on appelle le vrai Jbufre mineral, mais I'odeur qu'elles exh.ilcnt, le gout qu'elles donnent, rimpreffion qu'el- ies font fur I'argent, ce qu'on rapporte des bois tiris des caves, qui slant brules fentoient le foufre , tout cela raffemblc fous un meme point de vue doit, ce me femble, etablir leur qualite fulfureufe. Si on n'a pu en feparer par I'analyfe aucune partie feniiblc de fer Sc de foufre, il y a lieu de croire que c'eft a caufe de leur trop petite quantitc par proportion avec la terre alkaline. Aufli M. Heroguelle cui le premier a trait6 de ces eaux , vouloit il en augmenter la force par I'addition des remedes tires fuivant les ditlcrens cas , du fer , du nitre , de I'alun , du foufre , de I'antLnoine ; au moyeu de quoi il trouvoit dans les eaux de Saint-Amand une pnnacie uiiiverfelle. Nous conclurons de cet examen , que les eaux de la fontaine du bouil- lon contiennent certainement une terre tres-fine, alkaline & abforbante, vraifemblablement du foufre & du fer ; nous allons voir qu'clles jcunif- fent les proprietes des eaux fultiireufes & ferrugineufes. En general ces eaux font douces, legeres, rafraichilTantes, aperitives & diuritiques. Ceux qui en ont icx'ii, en ont rapporte des vertus fins nombre, on y envoie des malades indiilcremment attaques de toutes fortes de maux , mais il y a toujours h rab.ittre des nierveilles que chaque auteur attribue aux eaux minerales qu'il entreprend de preconiler. J'y ai vu jufqu'i des gens incommodes de cancers & d'ecrouellcs , & qui les ont prifes , comme on s'en doutera bien , fans fucccs. Zz ij 3cret, & tout me porte ^ croire qu'clles s'accriditeront, k nioins qu'elles n'aient DE L'ACADEMIE ROYALE DES SCIENCES. 3«v n'aient contr'elles d'etre trop communes & trop faciles h. ac^uirir. II nous — ^^— ^— arrive fouvent de fouler aux picds, & quelquefois fans le lavoir , des re- „ medes puiffans auxquels il ne manqueroit pour avoir de la reputation, " ^ m i i. que de venir de bien loin & de couter cher. jinnies 1743. DI VERSES OBSERVATIONS CHYMIQUES. 1. Efet remarquable da Remede de MademoifdU Stephens. o, N a vu dans I'hiftoire de 174.1 , (a)que M. Geoffrey travailloit conjoin- Hift. tement avec M. Morand ^ s'afliirer des proprietes du remede Anglois pour la pierre, connu fous le nom de M'le- Stephens, ^ I'analyler, i le rendre moins degoiitant , & k conftater fes effets lur les pcrfonnes qui en out ufc. Cell ^ la fuite de femblables obfervations que M. Geoffroy a fait voir h I'academie une pierre que M. le Dran , fameux chirurgien de Paris , a tiree d'un homme qui aprcs avoir pris le remede de M'le. Stephens en boiflon pendant fix mois , fe fit enfin tailler I'anniie derniere. Ce remede avoit eu les plus heureux fucccs , le malade delivre de (es douleurs marchoit, montoit ^ cheval , alloit en voiture, foutenoit toute forte d'exercices & de fatigues , fans en reffentir la moindre incommodite , & cet etat dura environ un an. Vers la fin de 1741 , il eut quelques cuiffons k la veffie , & des ardeurs avec frequence d'urine , mais une lai- gnee, quelques bouillons, & des boiffons rafraichiffantes le remirent dans fon premier etat de tranquillite jufqu'au printemps de 1741. II fembloit que les changemens de faifon portoient dans ion fang une agitation qui pouvoit cependant etre calmee par le repos, & par le regime dont nous venons de parler. Mais des le temps que nous venons d'indiqner, tous ces fecours commencerent ^ devenir inutiles , & la difliculte d'uriner & les douleurs fe faifant fentir de quinze en quinze Jours , le malade prit cou- rageufement la refolution de fe faire fonder & tailler tout de fuite i ce qui fut execute le i feptembre de la meme annee. La pierre qu'on lui tira, & que nous avons vue , pefoit une once deux gros & un icrupule : elle etoit de forme ovale un peu applatie, grenue vers fes bords & un peu lifle ^ fa partie plate; fon tiiTu etoit ferrc, & fa couleur femblable i celle de la rouille de fer ou de certaiiies pierres d'aigle. On n'y a rien remarque qui put faire croire que le remede eiit agi fur fa fubftance, ni quelle en eut recu aucune diminution , elle etoit trop dure pour cela. Le foulagement que le remede avoit procure au malade, ne peut done etre attribue qua La depuration qui s'etoit faite dans fon (ang. En eftet , pen- (fl) Voyez ci-deffus. 7'ome IX. Piircie Francoife. Aaa 570 ABREGE DES MEMOIRES — M^Mi— ■ blanc fort fin , & dans la fuite , apres que le malade eut cede de le pren- _ dre , elles charioient un petit fable extremement fin , rougeatre , & de la coulcur meme de la pierre quon lui a tiree. Annies 2743. ^- Geoffroy conclut de tons ces faits, que le remede de M'le- Stephens & 1744. pent foulager pour un temps certains malades , en nettoyant la vefTie, & qu'il empeche du moins raccroiffement de la pierre pendant qu'ils en font ufage. Un autre malade qui I'a pris pendant trois ans, d'abord journelle- ment , & qui le prend encore aujourd'hui lorfqu'il reffent la moindre douleur, s'en eft toujowrs fort bien trouve. On eft affure de plus par un grand nombre d'obfervations que ee remede ne laiffe aucune mauvaife iraprefTion fur la veflie , & que les malades qui en ufent , font toujours en etat d'en venir k Foperation de la taille , fans qu'il en arrive aucun ac- cident de la part du remede , comme nous I'avons plus particulierement remarque en parlant du recueil d'experiences & d'obfervations , que M. Morand donna I'annee derniere fur ce fujet. (a) 'Le premier des deux malades, dont nous venons de parler , jouit d'une fante parfaite , depuis qu'il a ete taille, & le fecond , qui a pris le remede pendant plufieurs anr nees , fe porte aufli fort bien , & a meme engrailfc. I I. Sur deux ejpeces d'Etains allies. Il ne tieiit pas ^ I'academie que le public ne foit en garde contre les magnifiques promeffes qu'on lui fait li fouvent fur la traiilmutation ou fur le perfedionnement des metaux. On a vu, en 1741 , {i>) ce qu'il falloit penfer d'un nouvel etain dont on fe propofoit d'etablir la fibrique, & qui Jtoit bien eloigne dc remplir I'idee avantageufe qu'on en vouloit donner. Voici quelque chofe de tout femblable. Un pariiculier a fait prefenter ^ I'academie deux 6tains allies , fous le titre d'etain purifie, & purifie de telle forte, felon I'auteur, qu'on ne doit pas meme le regarder comme de I'etain, mais plutot comme un refultat lingulier de divers autres metaux , fer , acier , cuivre , &c. enfin comme une efpece de tranfmutation ^ laquelle on pourroit donner le nom de jimilargent , parce qu'avec ce metal on feroit en blanc tout ce qu'on fait en jaune avec le tombac que le Sr. Renty a nomine Jimilor. L'examen de ces deux etains ayant ete encore confie h Mrs. Geoffroy & Hellot , ils en ont rendu compte h h compagnie , & nous ne ferons prefqu'ici que tranf- crire leur rapport. De ces deux etains qui avoient eti envoyes en deux lingots larges & plats , avec deux afllettes qui paroifl'oient en avoir ete moulees , I'un que nous appellcrons le premier , eft fort aiguille a fa furface, ce qui annonce beaucoup d'aigreur. En effet, il caffe fort aifement lorfqu'on le frappe fur line enclume ou on le fait porter k faux. On reconnoit k fa callure qu'il («) Voyez ci-dclTus-. (i) Voyez ci-delTitf. DE L'ACADlfiMIE ROYALE DES SCIENCES. J71 eli compoft: de plulicurs matiercs metalliques inal liccs , & dont la plus f— — i— pefante, qui (e trouve au-defloiis pendant la fonte , c(i d'un grain fin & /-. dc couleur grife , tandis cju'on appercoit dans ceile qui eft niontie au- " ^ Mir. dciFus une infinite de facettes ftriecs & aiguillees qui rcU'emblent 4 des ai- Annits 174-'. guilles antimonlees , mais plus fines & dans des diredions differentes de & 1744. celles de I'antimoine. Le zinc ajoutc k un etaiu pur en fait un metal dtir & fee dont I'int^rieur eft dilpofe ^-peu-pres comme I'interieur de cclui-ci. Le fecond lingot ne fe rompt pas (i aifement : il a fallii lui donner plii- fieurs coups de niarteau fur lenclame, oii il portoit a faux, & memc le retourner pour achcver de le rompre. Cependant quoique plus mou & plus pliant, il I'cft encore moins que I'etain pur, & il n'eft fi difHcilc k rompre que parce qu'il eft coriace conimc le zinc •, car il fe gcrce fous le marteau, coninie cc femi-meta!. Son grain eft fin, niais d'un gris fale, au-licu d'etre blanc & argentin. On n'y voit point d'aiguilles comme au premier, mais on y apperijoit avec la loupe des coulcurs fort femblables ^ celles d'une marcadite ou pierre metallique cuivreufe , bleues , jaunes , rouges, violettes, &c. ce qui paroit indiquer que le cuivre qu'on y 3 fait entrer , eft mal lie avec les autres matieres du melange. Le premier etain , plus difficile i fondre que le fecond , &■ encore plus que I'etain fin de potier > ne coule pas comme doit couler I'ctain qui fe met en fonte. Au meme dcgre de clialcur qui fait fondre le bon etain , celui-ci fe reduit lous la forme d'un amalgame qu'on peut coupcr avec Ic couteaii, & divifer en autant de parties qu'on voudra, fans qu'elles fe re- joignent. II ne devient liquide que quand le fond de la cuiller de fer ou fe fait la fonte, eft tout-i-fait rouge i mais alors il s'en fcorifie une por- tion tres-conliderable qui prend une couleur bleue, & qui ne s'eft point reduite ou rcvivifiee en metal , quoiqu'on y ait ajoutc de la cire & de la Tellne , moyen ordinaire de retablir les parties metalliques , disjointcs on deguifees par la fcorification. Ainli il y auroit beaucoup de dechet fur ce metal toutes les fois qu'on le fondroit pour le couler en moule. Comme il eft prefque impoffible de lui donner la liquidite convcnable pour en faire I'effai i la pierre , felon I'ufage des Potiers , explique dans I'hiftoire de 1741 , (i2) la queue des effais qu'en ont fait Mrs. Geoftroy & Hellot, cette partie du metal qui a coule dans le canal ou la rainurc de la pierre, n'a jamais ete nette & deliee comme elle le doit etre quand I'etain eft de bon alloi. L'eculfon ou culot qui fe fige dans le creux hemifplierique dc la pierre, s'eft couvert ^ fa furface d'un nombre infini d'aiguilles-, ce qui eft toujours la marque d'un mauvais etain , & dont la vieille vailfelle n'eft prefque d'aucun prix. Le meme etain fc coule aufli fort ditficilement en lingot : la furface s'aiguille , prend un ocil gris, & fe ternit ^ I'air. On a Ii f)reuve que les deux etains dont il s'agit, lont difficiles h employei', dans es deux alHettes goudronnees qu'on en a prefentees. L'une qui paroit for- tir du moule , eft plus graveleufe & plus pleine de creux que ne I'eft une afliette d'ctalii fin des potiers fortant egalement du moule. L'autre qui *. («) Voyez ci-deffuf. Aaa ij 571 ABR^Gfi DES M^MOIRES i^— ■^— ■* ^te planee & polie , laiffe voir encore des marques de ce premier defaut , ^ ^^ ^^ plus elle a pris \ I'air un ail plombe que ne prend pas fi vite I'etain ' ordinaire. Annies 17 42- Le fecond itain fe fond plus aifement que le premier : il ne fe met pas 6' Z74^. d'abord en forme d'amalgame, mais il fe reduit de meme en pellicules fcorifi^es , que les matieres graffes ne revivifient pas. Ainfi il doit y avoir encore dans celui-ci un ddchet confiderabte par (a fonte & par fa refonte. L'ecufTon de I'eflai ^ la pierre en a coule aufli diflficilement que celui de I'autre. En repetant plufieurs fois ces effais, & toujours avec perte par les fcories , nos chymiftes n'ont pu le rendre affez coulant pour lui faire avoir line queue deliee. D'oii Ton peut conjedurer qu'il ne pourra Jamais fe mouler aifement pour des ouvrages delicats. M". Geoffroy & Hcllot pen- fent audi qu'il ne fe moulera pas fans foufflures dans les moules deftines ^ faire de la vaiffelle ordinaire, Tecuffon de fon effai fe trouvant plein de petits trous , quoique rien n'empeche la fortie de I'air fur la pierre d'eflai , comme il arriveroit dans un moule qui n'auroit que quelques events. Le lingot de ce fecond ctain n'a pas pris ceil mat & gris ^ I'air comme celui du premier •, mais la grande quantite de metal fcorifie qui eft venu k fa furface dans la cuiller dont on s'eft fervi pour en faire la fonte, I'a em- ■ peche egalement de coder k la maniere du bon etain. Mrs. GeofFroy & Hellot ont cru pouvpir fe difpenfer de pouffer plus loin leurs experiences fur un metal fi imparfait. C'eft de I'etain , mais de retain allie centre les reglemens. III. Huile caujlique pour marquer le linge. On fe fert dans I'lnde d'une huile tiree par expreflion de la fubftance ondueufe & en meme temps cauftique, qui eft entre les deux ccorces d'une efpece de noix , nommee bibo , pour marquer le linge d'une cou- leur noire inefFacable ^ routes les fortes de blanchiflage dont on ufe dans le pays. Le bibo eft le fruit du farancote, arbre des Indes qu'on a reconnu ctre le meme que celui qu'on appelle ici plus communement Xanacarde , & dont I'amande ou la noix eft par fa figure fort femblable \ un cocur, Cc fait qui nous avoit et6 envoye par M. Cofligny , ingenieur general des comptoirs de la compagnie des Indes & correfpondant de I'academie, fat d'abord verifi^ par M. Hellot ; les marques de rhulle de bibo fur du linge deji blanchi ou mis aux leflives ordinaires, ne s'effacerent point. Ce fucccs & quelques autres ^preuves firent efp^rer \ M. Hellot qu'on pourroit fe fervir dela meme liqueur, pour marquer les pieces detoile qu'on envoie aux blancheries •, mais les nouvelles experiences qu'il en a faites lui ont appris que I'huile de bibo, toute mordante quelle eft, n'y tient pas, & que les favonnages au favon noir, le fejour de la toile dans le lait, &c. font entierement difparoitre toutes ces marques. DE L'ACADlWIE ROYALE DES SCIENCES. 57 I V. C II Y ?.( 1 r. Pierre de Bologne. AnnUs 1 7^ a. L A pierre de Bologne , ainfi nommde parce quelle fo troiive prcs dc Bologne en Italie au pied du mont Paterno , eft line matiere gypleufe &• talqiieufe qui itant calcince par les chymiftes, s'imbibe de la lumiere au grand jour ou au foleil, & reliiit enfiiite h I'obfcurit^ pendant quclques minutes , comme un charbon ardent. Ces fortes dc pholphores qu'on fait par la calcination, & qui etoient autrefois en (i petit nomore, ont etc bien multiplies par M. du Fay. La plupart dcs picrres fines, les bols , la craie, le niocllon, la pierre de taille & de liais, tout eft devenu pliofpliore entre fes mains, [a) Cependant la pierre de Bologne a toujours confervt^ dans cefte clafle le premier rang qu'elle y tenoit par la force & par la duree de fa lumiere, autant que par fa celcbrite. Elle devient lumineufe aufli itant expofee au clair de la lune , i la lumiere d'un flambeau , & meme du crepufcule. Mais, ajoute M. du Fny, plulicurs auteurs ont doute de ces experiences, apparemment parce qu'ils fe font fervis de picrres qui avoient peu de vcrtu. En voici une qui rend le fait certain : elie fut donnee ^ M. I'abbd Nollet \ Turin en 1759, & par un grand prince, toute pr^pa- ree par la calcination. On la gardoit depuis quelques annees dans une pe- tite boite de carton garnie de flanelle en dedans. Cette pierre s'impre- gnoit non-feulement trcs-bicn de la lumiere du Jour , comme ont coutume de faire toutes celles de fon efpece, mais encore, quoique plus foible- ment, de la lumiere d'une limple bougie, lorfqu'elle y avoit etc expofee pendant quelques minutes ^ 4 ou 5 pouces de diftance. Ces phofphores que Ton conferve dans de la laine ou du coton , en les defendant foigneufe- ment des impreflions de I'air , durent plus ou moins felon diverfes circonf- tances, felon qu'on les expofe moins ou plus fouvent au jour, & periffent enfuite comraunement apres quelques mois , s'exfolient , fe pulverifent d'eux-memes comme la chaux , ou ne reluifent plus & venlent etre re- nouvellds par la calcination. Mais la pierre de M. I'abbe Nollet luiloit en- core en 1745, s'imbiboit meme encore de quelque lumiere dans le temps u'on alloit imprimer ce que nous venons d'en rapporter, c'eft-h-dire, IX ^ fept ans depuis qu'il I'a rccue &: peut-etre dix i douze ans depuis qu'elle fut preparee. Eft-ce par la nature ou par fa preparation qu'elle a ct^ doude d'une vertu li forte & li durable , ou par Tune & I'autre i la fois .- Cell ce que nous ignorons. («) Voyei les M^m. de 1730, Coliefiion Acad^mique , Partie FrangoUe, Tome VI. I 6 ITJ^. 374 ABR^GE DES M^MOIRES C H Y M I E. Hift. SUR LA TERRE D'ALUN. Jl_j*alun & le vitriol contiennent le meme acide avec des bafes dif- ferentes •, dans le vitriol il eft uni ^ une bafe metallique , dans rakin au contraire , il eft Joint k line terre qui paroit ne donner ailcun indice de metal. On pent par line diftillation faite h iin feu tres- violent feparer I'a- cide contenii dans le vitriol de la bafe ^ laquelle il etoit joint, & I'a- voir fous une forme liquide. En cet etat & concentre autant qu'il peut I'etre, on le nomme huile de vitriol, mais quoicjue I'alun contienne le meme acide, il eft infiniment plus difficile de le feparer de la bafe de ce fel que de celle du vitriol. II eft cependant en plus grande quantite ^ proportion de fa maffe , car fi on fait precipiter la terre contenue dans deux poids egaux de vitriol & d'alun , celle de ce dernier fel fera eii moindre quantite que celle de I'autre. On pourroit done croire avec rji- fon que I'acide eft plus profondiJmcnt engage dans la bafe de I'alun que dans celle du vitriol, qu'il y eft plus intimement uni, & c'eft ce qui avoit engage feu M. Geoffroy k donner dans fa table des rapports , i I'acide vitriolique plus d'affinite avec les rerres abforbantes qu'avec les fubftances metalliques, en forte que, fuivant cette table, il devroit abandonner tou- tes les terres metaliiques pour fe faifir des terres abforbantes. Cependant M. Geoffroy fon frere a trouve par plulieurs experiences , que lorfqu'on met des morceaux de fer dans une folution d'alun, I'acide abandonne la terre alumineufe, qui fe precipite au fond du vailfeau, & fe failit d'une quantite de fer egale ^ la quantite de terre qu'il a abandonnee ; eftet di- redement contraire i ce qui devroit arriver fuivant la table, & pour faire voir que cette terre eft veritablement celle de I'alun, M. Geoffroy a verfe deffus de I'huile de vitriol , & ayant expofe le vaiffeau i une forte chaleur, il s'eft forme des filets foycux femblables ^ ceux que M. de Tour- nefort avoit obferves dans la mine d'alun de milo , & il s'eft enfin rege- nere de veritable alun. II y a dans I'operation quelques circonftances dignes d'etre remarquees. On peut diffoudre dans la folution de deux onces d'alun Jufqu'a un gros de vitriol vert , fans que la liqueur fe trouble & qu'il fe fafl'e aucun pre- cipite i il y avoit done dans I'alun une portion d'acide en quelqiie fa9on oilive qui s'eft faille de la terre ferrugineufe. Si on veut avoir par la precipitation la terre alumineufe pure & fans melange de fer , il faut avoir foin de ne prendre que le premier tiers on environ de ce qui fe precipite. Des qii'en rongeant le fer en aflez grande quantite I'acide a compofe du vitriol, ou feulement de I'alun vitriole, il fe mele de la terre ferrugineufe ^ celle de I'alun , & celui qui en feroit regenere ne feroit pas pur. En lavant les terres precipitees de I'alun par le fer , & decantant les lotions , M. Geoifroy a vu a la fuperficie de petits cryftaux de fdenite , DE VACADtUlE ROYALE DES SCIENCES. 375 ce qui I'a confirmc dans I'idee ou il ctoit, que toutcs Ics fois que I'acide —————— vitriolique change de bafe , il fournit ce fel pierreux qu'il icgardc comme ~ " le premier element des talcs, des picrres foyeufcs, dcs amiantes, &c. " ^' ^' ' ^• II nc faut pas rcgardcr la colonne de I'acide vitriolique dans la table ^/j/i/c ,-.. de feu M. Geoffroy , comme generale & non fufccptible d'cxccption. ' M. Geoffroy invite tous les chymifles i communiqucr celles que leurs obfervations leur pourront founiir; & en effet plus on connoJira Ics cas ou cctte table dejk li utile eft Aijctte i exception , plus on fcra en ctat de s'y fier. II reftoit ^ determiner la nature de cctte terre alumincufe que Ccs ope- rations lui avoient donnee, il a foupgonne quelle pourroit etre compofce de matiercs vegetales ou animales calcinces. Dans cctte vue, il a fait cal- ciner de la corne de cerf, des os de mouton & dcs cendres de bois bicn Icffivces jufqu'i parfaite blancheur , & les ayant fait digcrcr feparement avec I'efprit de vitriol, toutes ces matieres ont donii^ de I'alun ; il eft done conftant que la bafe de I'alun eft une terre vcgetale ou animale cal- cin^e, & que les mines qui fourniffent ce fel, ont cte calcinces par les feux fouterrains, ce qui ne s'eloigne pas de ce que la lituation (a) de quelques-unes de ccs mines donne lieu de foup9onner. SUR LES EAUX MINERAL! S D ir Mont-d'Or. u. N voyage entrepris par M. le Monnier pour hcrborifer dans les mon- Ilift. tagncs d'Auvergne , I'a mis i portee d'examiner avec des yeux de phyfi- cien les eaux minerales du mont-d'or •, ces eaux font thermales , c'eft-i- dire, qu'ellcs fortent chaudes de la terre, & peuvent procurer du fecours aux malades, comme bains & comme boiffon. Elles font iituees au pied d'une des cotes du Mont-d'or, dans un vallon fort ctioit oii coulent les premiers ruilFcaux qui fornient la riviere de Dordogne. On ne fait pas au jufte depuis quel temps les eaux du Mont-d'or font connues , niais le nom de C'^rir que porte un de ces bains, & plulieurs reftes de batimens antique! qu'on trouve aux environs, prouvent evidemment qu'il y a long- temps qu'on les frequente. II y avoit autrefois trois bains, mais il n'en exifte plus que deux, les batimens du troificme ont etc demolis, la fource coule en plein air. La chaleur du bain de Cefar fait monter le thermometre ^ ^6 dcgrcs & dcmi au-deffus de la congelation, le fecond qu'on nomme le grand hiiin , n'a que 35 dcgrcs de chaleur, la troilieme fource cleve la liqueur du thermometre i 36 degres. («) Voyez i'Hiftoire it 17C2, Collection AcaJ^miqne, Partie Fran}. Tome I. C H V M 1 E. 57(J ABREGE DES MEMOIRES Ces eaiix ont un gout aigrelet, piquant & qui mottte au nez, i-peu- pres comme f>ut la biere nouvelle, niais ce gout eft bientot couveit par un autre fade & lixivieux , auquel les malades ont beaucoup de peine 4 Annc'e 1744- s'accoutumer , elles repandent aufli dans les bains une legere odeur de leflive; au refte elles font claires, legeres k leftomac, & douces au tou- cher jufqul paroitre favonneufes. M. le Monnier vouloit eprouver fi ces eaux d^jk (i chaudes, bouilli- roient plutot ou plus tard que les eaux de la Dordogne -, mais difFerentes circonftances Ten ayant cmpeche, il s'eft au moins bien affure que dans I'tibullition elles donnoicnt exadement le meme degre de chaleur. Par les epreuves chymiques il a trouve que ces eaux contenoient de la felenite, du fel alkali mineral, un peu de iel de Glauber, & une matiere graffe & bitumineufe ; ces matieres font les feules qui enti-ent dans la compolition de ces eaux en quantite fuffifante pour influer dans leurs efFets. Ce font auffi les memes que paroiffent contenir les eaux de Bourbon- I'Archambault, & $'il y a quelque difference, elle ne peut etre que dans la proportion. Les eaux du Mont-d'or ont pr^fente I M. le Monnier un fait qui , pour etre commun k prefque routes les eaux chaudes ou thermales , n'en eft pas moins fingulicr. A dix ou douze pas du bain de Cefar il coule une fource froide dont les eaux , ^ la chaleur pres , ont toutes les memes qua- lites que celies du bain. II a obferve la meme chofe aux eaux de la Bour- boule , I une lieue du Mont-d'or , i celles-ci il n'y a pas quatre pieds entre la fource chaude & la fource froide de meme nature •, ces fources femblent n'accompagner les eaux thermales que pour renverfer tous les fyftemes qu'on pourroit faire pour expliquer leur chaleur. Les malades qui prennent les bains du Mont-d'or, ou qui boivent de fes eaux , paroiffent fuer prodigieufement , mais fans aucun affoibliffement , parce que ce n'eft que I'eau elle-meme qui produit la plus grande partie de cette fueur. Par la meme raifon fi on I'arrete en s'expofant i fair , I'eaii prend la route des urines. M. le Monnier a cprouve lui-meme ces effets. On peut bien juger que les gens du pays ne manquent pas de faire va- loir la vertu de leurs eaux le plus qu il leur eft pofllble', & peutetre meme aux depens de la verite. M. le Monnier ne rapporte qu'une feule guerifon, parce que c'eft la feule dont il ait ete temoin. Un laboureur age de plus de foixante ans , plie en deux & tout con- trefait depuis dix ans par des rhumatifmes, ne pouvant ni demeurer en place ni faire le moindre mouvement fans fentir des douleurs tresaigucs, fe fit tranfporter au bain de Cefar-, il le prit fans aucune preparation & ne fua ce premier jour que mediocrement, aux bains fuivans il fua davantage & commenija h mouvoir fes bras & fes Jambes fans douleur •, enfin au (ixieme bain M. le Monnier le vit s'habiller feul & aller i I'eglife , fans avoir eu d'autre evacuation que les fueurs, & fans avoir fuivi aucun re- gime particulier dans le cours de fes bains, MEMOIRS i DE L'ACAD^MIE ROYALE DES SCIENCES. ^--, ,1 ' I ■ I I I ' • I 1 I .1 X w C H Y M I f, sua LEs sELs neutr.es, Hans lequel on propofc une divi/ion mModique de ces Sels , qui fac'ditt Us moyens pour parvenir a la thiorie de Uur cryjlallij'ation. Par M. R o u E L L E, I i A plupart des chymiftes ne donncnt le nom de fcl ncutrc moyen on MAn; faM, qu'i un trcs-petit nombre de fels, il y en a meme eu qui n'ont doiini ce uom qii'aii feul tartre vitriole , demandant pour caradcre de ces fels que I'acide & I'alkali qui les forment, foieiit tellcment unis qu'ils rcdftent ^ toute decompohrion , d'autres ont admis avec Ic tartre vitriole les denic fels neutres formes par Tunion des addes du fel niarin & du nitre a des bafes alkali fixes , tels font le fel marin & le nitre ; d'autres y Joignent trois autres fels formes par I'union des trois acides i un alkali volatil, qui' font le fel ammoniacal fecret de Glauber ou le fel ammoniacal vitrioli- que , le fel ammoniacal ordinaire , & le fel ammoniacal nitreux ; il y a eii d'autres chymiftes qui ont joint ati nombre de ces fels neutres plulicuis autres fubftances faiines. Je donne "k la famillc des fels neutres toute I'extenfioQ qa'elic peut avoir : j'appelle fcl neutre nioyen ou falc , tout fel forme par I'linion de quelque acide que ce foit, ou mineral ou vigctal, avec un alkali fixe, fln alkali volatil, une tcrre abforbante, une fubftance metallique, ou une huile. Je Joins enfemble routes ces fubftances faiines , & je les unis en une feule clalTe, parce qu'ellcs ont des figures & des proprietcs qui leur font communes', &, comme on le verra par la fuite , ces fels, li on n'a ^gard u'aux fcnls phenoraenes de la cryftaliifation , font fufceptibles d'une divi- lon nicthodique. L'eau eft le diffolvant des fels , elle les divife en des parties li fines qu'elles reftent confondues avec elle lans qu'on puifle les appercevoir, ils forment enlemble une liqueur qui paro'it homogene. Le fentiment fur les caufes de la diflblution ou de la fufpenlTon des fels dans l'eau, qui a etc le plus generalement re^u, eft celui qu'on a em- prunte des mathcmatiques •, on pretend que les molecules lalines font di- iunies les unes d'avec les autres de facon que chaque partie faline eft foli- taire & feparee des autres par des parties d'eau, & que dans cet etat ellcs font d'une gravite fpecifique egale h celle de l'eau , qu'elles font equiponde- rables h l'eau ', del^ on a conclu que ces parties (alines doivent rcfter ful- pendues dans l'eau ou elles fe trouvent , & ceder ^ tous les mouvcmens de ce fluide , puifque fi elles etoient fpecifiquement plus Icgercs ou plus Tome IX. Panic Franfoifc. B b b I jyg ABREGiDESMfiMOIRES Ml II n-fantes que lean , elles devroient nager dcffus ou fe precipiter au fond , P ce qiii n'arrive pas. U II Y M I E. p|y(^g„fs f_,v3ns chymiftes fe font apper^is de la foiblefle de ces raifons Anne'e IJ44. pour expliquer les diffoliitions chymiques, & ils ont objede qu'elles n'etoient pas feulement contraires i la nature des corps , mais que meme on ne pou- voit pas imaginer gu'une molecule faline qui eft tres-compofce , puiffe etre fpecinquement auui l^gere que les parties de I'eau qui font beaucoup plus fiinples quelle-, par exemple, la partie faline d'un fel neutre eft conipofee de deux parties , & chacune de ces parties eft effentiellement compofee de deux ou trois autres parties, & I'eau eft meme du r.ombre de ces parties. Les uns , pour refoudre ces objedHons , ont eu recours aux pores des molecules falines , mais ce fentiment a eu peu de fucccs. Les autres, en evitant les fuppoiitions , ont beaucoup plus approche de la nature i ils joignent l la petiteffe & ^ la legsrete des parties falines, le Hiouvement de I'eau qui en les remuant & les agitant, les tient fufpendues. La plus grande partie des chymiftes d'aujourd'hui admettent avec Stahl pour caufe immediate de la diffolution & de la fufpenfion des fcls dans J'eau , I'union & la coherence des fels avec I'eau , & ils y joignent la pe- tltefle des parties & le mouvement de I'eau, comme caufes auxiliaires con- courantes. Ces differens fentimens n'intereflent pour le prefent qu'autant qu'ils font voir en quel etat les fels font dans I'eau, c'eft-^-dire, qu'ils y font divifes en des molecules tres-petitcs. Tout le monde fait que pour que les fels puiffcnt fe cryftallifer, il faut pri- verleurs diffolutions d'une portion d'eau, afin d'occafionner par-1^ la reu- nion de leurs parties : ordinairement on emploie deux manieres d'evapo- rer, la premiere & la plus commune eft de faire evaporer une diffolution i une chaleur affez conllderable , jufqu'^ un certain point , ou jufqu'i ce qu'il paroiffe une pellicule ^ la furface , & de la tranfporter dans un en- droit frais, oii par le refroidiffement les parties falines fe reuniffenr & forment des cryftaux : la feconde maniere eft de mettre une diffolution dans un endroit echauff^, & de la laiffer ^ I'air libre, & le fel fe cryftallile ^ mefure que I'eau s'evapore. Dans ce memoire je diftingue trois evaporations ou plutot trois degres de I'evaporation , & ce ^ raifon du plus ou du moins de chaleur qui eft employe. Le premier degre de revaporation , que J'appelle {'evaporation injenfible , commence lorfque la gl.ice fe fond , ou , fi i'on veut , meme plutot, puifqu'on a obferve en phylique que la glace eft fufceptible de i'evaporation , & il s'etend jufques proche la chaleur , telle qu'eft celie du foleil dans les beaux jours d'ete. Le fecond degre de I'evaporation , que j'appelle I'evaporation moyenne , commence au degre de chaleur du loleil d'et^, & va jiifqu'^ une chaleur telle que les vapcurs de I'evaporation foient trcs-vilibies, & que I'on ne puiffe pas tenir le doigt dans la liqueur. Le troifieme degre de I'evaporation, que j'appelle lyvaporart'on rapide , commence ou ffnit la moycnne , & s'etend jufqu'a I'cbullition. L'effet immediat de la cryftallifation des fels eft le meme dans tous les DE L'ACADEMIE ROYALE DES SCIENCES. 37? auteurs ; des molecules falines fe reuniffent pluliturs enfcinble, torment — — 1— — des mallc'S de cryflaiix -, le fait eft conftant, & c'eft la premiere dcs loix„ de la cryflallifation. . , , . C 11 v m 1 £. Les parties falines ont la propricte de s'unir plufieurs enfemble en gar- Annd lJ4i. dant entr'elles un ordre fynimitrique tel qu'eilcs forment dcs corps rcgu- liers & diifcremment figures luivant la nature de chaque fel-, on appeile ces corps les cryftaux. Ces molecules (alines s'uniircnt aulli fuivant le* ditlifrens fentimens, ou, avec Delcartes, par I'impuiiion d'une matiere fubtile, oa, fuivant Newton , parce que ces parties (alines ont la propriety de s'attirer en raifon de leurs maffes, ou que, fuivant Becclier & Stahl, elles s'attircnt & s'uniffent en raifon de la nature de leurs faces. Les molecules (alines n'entrent pas feules d.ins la formation des cryf- taux, il y entre audi de I'eau, fans que cette eau foit elTenticlle h la na- ture de ces fels , puilqu'on la leur enleve tous les jours dans les travaux chymiques fans qu'ils perdent leurs proprietes, il n'y a feulement que la ftrudure des cryftaux qu'on dctruit. J'appelle cette eau qui entre aind dans la formation des cryftaux, I'eau de la cryftallifation , afin de la diftinguer de I'eau qui fe didipe par I'evaporation , i laqueile je donne le nom d'eau jhrabondante a la cryjiallijation , ou d'eau de la di(rolution , car c'eft cette derniere eau qui eft proprement I'inftrument de la diflolution. Tous les fels moyens n'ont pas une egale quantite d'eau dans la compo- (ition de leurs cryftaux, il y en a qui en ont un peu, d'autres bcaucoup. II y a des fels qui demandent beaucoup d'eau pour etre dilTous , pen- dant que d'autres en demandent peu. Les parties falines de quelques (els qui font libres dans la liqueur, s'en feparent auffi-tot, pendant que celles d'autres fels ne fe precipitent pas fur le champ, elles y reftent encore quelque temps ^ la faveur du mouve- ment-, il y a meme certains fels qui y demeurent tres- long- temps, & cell ^ raifon de la grande quantite d'eau qui entre dans leurs cryfluiux. Plus un fel dcmande d'eau pour etre ditfous, moins il refte de temps fufpendu dans fa liqueur aprcs I'evaporation, s'il a en meme temps peu . d'eau dans (a cryfbllKation. Ce font les molecules falines qui fe trouvent ^ la furface d'une diflo- lution, qui deviennent libres les premieres, parce que ce (ont les parties de I'eau qui font ^ la furface & qui ont un contadt immediat avec I'air, qui s'evaporent & s'elevent les premieres. Les molecules falines libres ie reunKfent pluiieurs enfemble ou il y a moins de mouvement dans la liqueur. La plus grande diminution du mouvement d'une dilfolution eft \ U furface qui a un contadl avec I'air, les autres furfaces , particulierement dans I'evaporation moyenne & la rapide, etant beaucoup plus echau[fees par la chaleur qui leur eft appliqude par-delTous les vaiifeaux. C'eft de I'evaporation & du refroidilFement qui fe font en meme temps ^ cette furface , qu'eft forme cette loi , que les premieres unions falines (e forment toujours i la furface d'une diffolution traitee particulierement par I'evaporation moyenne ou la rapide. Bbb i) ^nn^e tj44. ,80 ABRfiG^ DESMEMOIRES j Tons les fels neiitres ne donnent pas egalement des cryftaux confidera- „ blcs reeuliers & pnrfaits par Ics troits deeres de I'cvaporation , il v en a oiii C H Y M I L. J J -. 1" »• • r j-l 1 1 . J J .1" ■ demnndent 1 evaporation inlennble , les autres dcniandent 1 evaporation nioyenne , d'aiitres la rapide & le refroidiirement ■■, mais ce qu'il y a de plus fingiilier , c'eft qiul y a des fels , qui pendant qu'ils donnent des cryftaux reguliers par Tune de ces evaporations, donnent en meme temps par I'aii- tre des cryftaux reguliers , mais dune autre figure que les premiers ; le re- froidillcment prompt ou lent produit auill lur un mane fel une vari^te conftante & reguliere dans la forme de ces cryftaux. 11 ell: done cffcntiel ou plutot abfolument neceffaire, fi Ton veut faire quelque progres fur la theorie de la cryftallifation des fels, non-feulement de les bitn diftinguer les uns des autres , mais meme de les rapprocher fuivant leurs proprictes communes : j'ai done cru qu'il falloit les unir ou les divifer par fedUons ^ la maniere des naturaliftes, & ce fuivant les figu- res, les proprielcs communes ou difiercntes qu'ils prefentcnt dans la cryf-. tallifation. II eft vrai que plufieurs favans chymiftes ont donne des divifions des fels neutres tres- utiles en chymic , mais elles n'ont point pour objet la cryftallifation , cependant il y a dans leurs ouvrages quelques fragmens dpars fur la cryftallifation; quelques-uns ont obfcrve les figures de plufieurs Zeis, d'autres ont vu que le plus ou le moins d'eau de la cryftallifation produit des etfets varies. Feu M. Lemery , qui a beaucoup travaillc fur les iels, a donne dans les memoires de I'academie des fciences des obferva- tions, & quoiqu'il n'ait eu en vue que leur folubilite, cependant elles me font devenues utiles. Stahl eft celui qui dans fes differens ouvrages , & particulicrement dans Ton trait6 fur les fels, a le plus appuye fur les circonftances de la cryftalli- (ation , fur les eftets de la grande quantite d'eau de la dilfokuion & fur celle de la cryftallifation. M. Gulielmini, dans fa differtarion fur les fels, admet quatre fels primi- tifs ou naturels , auxquels il rapporte tous les autres comme ^ des chefs , mais cette divifion n'eft point cxadte & ne remplit qu'un trespetit nombre de vues dans la cryftallilation ; j'ai cependant profile de fon travail , il a dcveloppe quelques loix de la cryftallilation. J'ai done ramaflc , autant que je I'aipu, ce peu de fragmens ipars de tous cotes , je les ai de nouveau foumis \ I'experience , & les liant avec mes propres obfcrvations , j'ai tache d'en former un tout ; je ne me flatte point d'etre arrive ^ la perfection , je fuis au contraire li doigne de le croire, que' je fuis perfuad6 qu'une telle methode ne peut etre parfaite que lorfque par une fuite d'obfervations on aura forme la theorie particuliere d'un grand nombre de fels -, il me fuffit d'avoir feulement un peu dc- brouille le chaos de la cryftallifation en montrant une maniere de reduirc dans un ordre methodique les obfervations qu'on peut faire fur la cryftal- lifation des fels, de fa(,on qu'elles foient lices , & que par-la elles fe pre- sent reciproquemcnt des lumiercs^ ■ J'ai fait pendant long-temps dans mes obfervations ufage d'une me- DE L'ACADfiMlE ROYALE DES SCIENCES. 381 tliode que j'ai abandonnee dans I.i liiite. J'avois divife tons Ics fels ni'U- •■*■ tres en deux claflcs, le caradUre de ccs claffcs etoit tire de la qiiaiitite dif- . ferente d'caii que ccs fels demandcnt pour ctrc difioiis ; chaciine de ccs ^ ^ ^ ''' ' "" dalles etoit divilcc en deux fcdions, & cette divilion dtoit tiree de la Annce 1144. differente cjiiantite d'eaii qui cntre dans la formation de Iciirs cry/laux : les caraderes gencriques ctoieiit tires de la diliircntc nature des acides , & les caraiSeres fpecifiques etoieiit tires des bafes de ccs iels. D;ins cette inethode beaucoup de fels analogues par leur figure & Icur maniere de cryftallifer , fe rangcoient parfaitcment fuivant leur ordre , mais il y en avoit qui s'ccartoient trcs-fort de ceux avcc L'fquels ils auroieiit du ctre joints naturellement : j'ai done admis une autre niethode, & pour fonde- meiit de ces divihons j'ai choili iion-feulement la difference des figures des cryftaux, leur maniere de fe former, niais gcncralcment tous les piicno- niencs de leur cryllallifation. Je divife toute la claffe des fels neutres en fix fe E V I N. TT V/ N des meilleurs moyens que la chymie puiffe employer pour cor- noitre la nature des mixtes, eft la diffolution, c'eft-^-dire, la feparation de leurs parties par le moyen d'un liquide qui puiffe les penetrer, & qui foit propre i les defunir. L'efprit de vin a etc toujours regarde comme le diffolvant propre des huiles, mais il s'en faut beaucoup qu'il n'agiffe fur toutes egalement : les huiles graffes, celles qui font tirees par expreffion ou par ebullition, nc lui donnent aucune prife fi elles ne font diftillies & recftifiees; & les huiles effentielles au contraire , que l'efprit de vin diffout parfaitement dans leur etat naturel , perdent cette propriety ^ mefure qu'on les rensT line opinion affcz recue cliez les chymiftes, que la pliipart des ilift. mines dc fcr ne font pas attirables par I'aimant av.int que d'.ivoir etc cal- cinees avcc une nwtiere qui conticnne du phlogiftique. M. du Haniel a fait voir de la mine de fer en poudre noire qui fiit unc exception "k cette regie, I'aimant I'attire &; menie avec affez ds fjcilite. I I. M. Heliot a fait voir line matiere tiree d'une veinc de mine trouvec dans le Roullillon , & qui a etc cnvoyee pour mine dMi^n ; avec I'eaii commune on en tire un acide vitriolique , la calcination y fait recon- noitre une efpcce dc mine de fer , mais pour en tircr I'alun il faut la travaiiler avec de I'eau commune , mclce d'uriiie fcrmentec & de ccndrc de bois neuf. I I I. M. G120FFROY a dit que M. dc Bl.iry, medecin de Cambray, lui avoit envoye par curiolite dcs eaux niinerales d'Airig.ite, avcc une Icttrc de M. le chevalier Edouard Gaicoigne fur I'etat dc ces eaux , les maladies pour lelquelles on les emploie en Angleterre, les fucccs qu'elles ont cus fur lui-meme , & enfin certains cas oii elles ont mal raifli; M. Geoffroy les a foumifes aux epreuves chymiques, dont les rcfultats fe lont trouvcs conformes i ce que porte la Icttrc, pour I'odeur & la quantite de fcl qu'elles ont rendues ■, on doit lui envoycr du Id tire dc ces memes caiix fur les licux pour les comparer au lien, & jugcr par-la dc ce que le tranfport pent leur avoir fait pcrdre. I V. Il paroitra pcut-etrc fingulier qu'il puifle y avoir de k glace inflam- inrible. L'expcricnce fuivante, conftnuniquce a M. de Reaumur parM. Bofc, apprend i s'en procurer dc cette efpcce , il f.iut prendre de I'huilc de teriibenthine diftillee & la mettre dans m vailfcau fur un feu doux , on y fcra fondre Icntement du Jperma ceti ou blanc de balcine, cette folu- tion reftera audi claire que de I'cau de fontaine; en placant le vaill'eau qui la contient dans un lieu frais, en frois minutes au plus la liqueur fe glace, li clle fe glacoit trop di.'hcilcment , un peu dc nouvc.m Jperrn a ceti qu'on y feroit fondre, y remcdieroit , il n'y a nul inconvenient h en rc- mettre ^ plulieurs fois , la Icule circonftance elTcntidle eft de ne le point Ddd jj C H Y M I E. /innee ty^}^. 59« ABREGE DES M£MOIRES,&c. piler, mais de le mettre fondre en affez gros morccJiix , fans cela la glace leroit moins tranfparente •, lorfqiie la chaleur de I'etd eft trop forte ou qu'on n'a pas de lieu affez frais pour faire prendre la liqueur , il ne faut que mettre le vaiffeau qui la contient dans de I'eau bien fraiche , elle fe glace en moins d'une demi-minute , mais cctte glace faite brufquement n'eft jamais li belle que celle qui s'eft formee tranquillement, fi lorfque k liqueur commence a degeler & pendant qu'il y a encore des gia^ons flot- tans deffus , on y verfe de bon efprit de nitre , la liqueur & la glace s'enflamment & fe confument dans I'inftant , rien n'eft moins etonnant que de voir I'huile de teribentbine s'enflammer par I'efprit de nitre , I'art con- fifte h I'avoir charg^e d'une matiere capable de la reduire en glace fans alterer fa tranfparence & fon inflammabilite -, ce n'eft encore ici qu'une efpece de jeu chymique , mais c'eft k de tels jeux , toujours referves aux habiles chymiftes, que la phyfique eft redeyable d'une infinite de conr noilTances utiles. C H I R U R G I E. 559 CHIRURGIE. OBSERVATIONS DE CHIRURGIE. Hifloire d'une maladie JinguUere de la Matrice. V-/ N a vii plufienrs fois fe detacher des cfcarres du vagin & de la ma- ' trice, par des maladies & des accidens furvenus ^ ces parties, fans que la ^ malade en raour lit ■■, inais il n'y a point d'exempic d'une fcparation totale ^ " "^ ^ r c i ; de la matrice, ^ laquellc le Aijet ait pu furvivre. Cependant M. Vacher, Anne'e 1741. correfpondaiit de Tacademie, cliirurgicn major des armees du roi & des hopit.uix de Befancon , nous a rapporte un fait d'apres lequel , & ^ la fuite '''"' de divers accidens que nous fupprimons , il penfe que ce vifcere eft: en- tierement tombe par le vagin , fans que la maladc en foit mortc , ni lueme quelle ait cefle de jouir d'une parfaite /ante. Ce fera peut-etre un moyen de tirer de M. \''acher des eclairciireniens utiles (ur ce lujet , que d'ajouter ici quclques dilKcultes qui m'ont etc communiquees lur la relation par un favant nnatomifte de la compagnie. Quoique cette partie que rendit la malade & qu'on crut ctre fa ma- trice , fut fort epailfe , il ne femblc pas cependant quelle le fiit alfez pour cela , ni que ce flit autre chofe qu'une (imple exfoliation de ce vilcere. Les raifons que notre anatomifte allegue pour en douter, font 1°. Qu'une matrice malade pouvoit avoir conliderablement augniente de volume. 2°. Que la portion du vagin qui tcnoit ^ la partie de la matrice que M. Vacher nous fit voir , & qu'il avoue n'etre qu'une exfoliation dii vagin , ctoit d'une plus grande epailfeur que tout le vagin en etat de fante , & que par proportion la partie de la matrice qu'il prit pour la ma- trice entiere , n'en feroit pas pcut-etre la moitie ou le quart. 5°. Que I'extcrieur de cette portion n'avolt point I'appafence d'une membrane ; ap- parcnce qu'elle auroit eue li toutic corps de la matrice etoit tombe. 4'. Que le corps de la matrice ne fe feroit point detachc lans avoir emponc avcc lui quclques portions des trompes , des ligamens, &c. dont on n'a pour- tant pas vu de vefi;ige. 5°. Si tout le corps de la matrice ctoit tomoe, il feroit difficile que quclque intcflin n'eiit p.as protitc de I'ouverture qui fc feroit faite alors dais la cavite du bas ventre, pour venir fe loger dans le vagin, ou pour (ortir meme au-deli. 6°' Que I'exfoliation qui eft arrivce au v.igin , nous indique qu'il en a pu arriver une parcille dans le corps de la matrice; & cnfin que ce n'eft que la partie interne de ce vifcere qui 400 ABR i Gi DES MEMOIRES C H Y R U R G I E. Anne'e ij^i- s'efl; detachee par la pourriture gangreneufe qui la attaquee ainfi que le vagin. Qtioi qii'il en foit, robfervation de M. Vacher nous prefente iin fait tres-fingmier, & qui confirme parfaitement ce qu'on a vu dans quelques autres occafions, que des parties ou la nioindre blelTure eft preique tou- jours mortelle , & oil I'art ne fauroit porter fon fecours , peuvent quel- quefois fe trouver percees d'outre en outre, dechirees ou entidrement detruites , fans que le fujet en perde la vie , lorfque la niture a eu le temps d'y menager elle-meme fes reflburces. I I. Cure extraordinaire d'une Paralyfie. M. Giios , midecin de la ville d'Arles , nous a fait part de la guerifon d'un paralytique , tres-prompte & trcs-parfaite, qu'il a operee dans cette ville , en faifant frapper i diverfes reprifes & pendant quelques jours les parties affeiftees du malade , avec des orties piquantes. Sans pretendre rien oter k la fagaciti que M. Gros a marquee dans cctte rencontre, nous obferverons que la flagellation des orties, quoique peu connue , & dont nous ne favons pas que d'autres mddecins moder- nes aient fait ufage , n'a pas ete ignoree des anciens. Celfe la confeille pour la guerifon de la meme nialadie, [a) & recommande auffi I'applica- tion de la moutarde fur la partie paralytique. C'eft ce qu'ils appelloient Vrticatio , Sinapifmus , ou en general Fhxnigmus, nom qu'ils don- iioient k tous les remedes qui irritent la peau jufqu'i la rougeur , pour rappellerle fang & les efprits i I'habitude du corps. On pent voir ce qu'en a dit Rollincius,(6) favant medecin Allemand qui vivoit vers le milieu da fiecle paffe. ^ III. Reldchement des Mufcles des Bras & de la Tete. M. Martin, do6teur & profeffeur de medecine ^ Laufanne, corref- pondant de I'academie, a mande I M. de Reaumur , qu'un jcune gargon de lo ans, aprcs ime chiite dont il ne reftoit aucune marque exterieure, a les bras, les mains, & certains mufcles de la tete fans adtion, de maniere que la tete lui tombe tantot fur le dos , & tantot fur la poitrine. Cepen- dant par un jeu habituel du dos, il la place droite & en equilibre; mais elle retombe lorfqu'il penche le tronc par megarde. Du refte le jeune gar- con fe poitc bien , & la fenfation dans ces parties flafques lui eft reftee comme ^ I'ordinaire. fa) Lib. III. cap. 27. C4) Ordo &■ Method. Medk'm. fpeMis , ifc. page 438. SUR DE L'ACADfiMIE ROYALE DES SCIENCES. 401 SUR LA MALADIE Des enfans nouveau-nh , qu'on appelle Filet. Jr ARMi ce grand iiombre d'accidens qui emportent les enfins nouveau- ncs , on compte rarcment la maladie dont il s'agit ici , du moins ignore- t-011 coinmiinemciit i quel point I'operation qii'il faiit faire pour la giie- rir, eft daiigereufe & demands de precautions. C'eft ce dont on fera piei- nement convaincu par la lefture du niemoire que M. Petit vient dc nous donner fur ce lujet. Le filet ou le fr ein eft ce ligament elaftique , mufculeux , convert de U membrane qui tapiffe I'intcrieur de la bouche , attache au-deflbus & au milieu de la partie faillante de la langue. Son principal ufage eft de mo- dcrer les mouvemens trop vifs de cette partie ; de la conduire & de la rctenir lorfqu'on la pouffe en avant pour la faire fortir de la bouche, ou qu'on la retire en arriere & au fond du golier pour faire la deglutition , & de garantir par-1^ I'enfant qui vient de naitre , d'un accident qui a vrai- femblablement donne occalion \ ce memoire. La maladie du filet conllfte en general en un filet trop court , mais M. Petit la reduit au feul cas ou ce ligament fe trouve en effet (i court, qu'il ne permet pas \ I'enfant d'approcher fa langue des levres pour fucer la mamelle , & qu'il I'empeche de tetter. Hors ce cas , qui eft rare & qui requiert un prompt fecours , M. Petit ne croit pas que la maladie du filet cxige que Ton faU'e I'operation dans un age fi tendre , & il penfe que les mouvemens varies & infiniment repetcs de la langue, fuffifent prefque tou- jours pour alonger le frein avant que I'enfant loit en age de parler, & autant qu'il le faut pour cela , ce qui fait I'objet de la pratique ordinaire. Si la nature n'y remedie pas toute feule & alFez tot , i'art eft toujours i temps de venir ^ Ton fecours , & les dangers en feroiit d'autant moindres qn'ii y fera plus tard employe. Ceux qui ne favent pas combien cette partie eft neceffaire ^ I'enfant nouveau-ne , fe hatent done mal-k-propos de la couper , lorfqu'elle n'eft pas un obftacle invincible ^ fa nourriture , & ils I'expofent par-li ^ millc accidens facheux & fouvent mortels. Le premier qui fe prefente , eft I'hemorragie. Le frein ou le filet eft cnvironne de veines & d'arteres qu'il eft trcs-aife de blelfer fans le vou- loir , & d'autant plus que les yeux ne peuvent pas toujours conduire la main dans cette operation. II eft alors tres-difficile & fouvent impoflible d'arrcter le fang qui coule de ces vaiffeaux, par la difficulte extreme de fixer dans la bouche d'un enfant une partie audi mobile que la langue , & qui confpire fans cefle avec les autres parties de la bouche ^ la deglutition de tout ce qui s'y rencontre. Mais voici le fecond , celui-li mane que nous avons annonce comme plus particulier au memoire de M. Petit , & qui n'etant pas moins tuneftc Tonic IX. Fartie Fran^oiji, Eee C U I R U R G I E. Annie 1743- Hift. 4C1 ABREIGE DES MEMOIRES irr— "'^— " (.jue le premier , doit etre encore plus frequent , parce qu'il eft moins C H 1 R u R G 1 E. "-'O"""- L'op^ration du filet fiite fans n^cerfite ou au-deli de fes juftes bornes , laifle ^ la langue la dangereufe liberte de fe recourber en arriere •, Anne'e zy4Z. & facilitant ainfi ^ I'enfant un mouvement de deglutition auquel il tend fans ceffe, & qu'excite encore le fang epanche dans fa bouche, il va enfin jufqul avaler fa langue, c'eft-k-dire j^^ I'engager fi avant dans fon gofier qu'il en eft bientot Stouffe. Ceft un mouvement machinal equivalent ^ ce qu'on dit que font volontairement les negres efclaves en Amerique, pour le venger des maitres qui les traitent trop durement. On ne manque point alors d'attribuer la mort de cet enfant h des convuliions quelconques , ^ un catane fufFoquant & k mille autres caufes femblables, tandis quelle Ji'eft due qui notre ignorance , i un ufage aveugle ou pratiqu^ fans lu- miere , & i la pr^fomption d'avoir voulu ainfi fans autre examen corriger la nature. M. Petit nous en rapporte des exemples frappans obferv^s par lui-meme & detailles avec foin. II a vu perir , il a fauve auffi plufieurs de ces vie-. Ifnes de I'ignorance & de la mal-adrefle des perfonnes prepofees i cette fondtion. Depuis long-temps accoutume ^ faire venir les mechaniques au fecours de la chirurgie, il nous donne ici un inftrumcnt de fon inven- tion pour couper le frein furement & fans danger d'hemorragie. II ajoute les moyens dont il s'eft fervi avec fucces pour remedier k cet accident, lorfque I'opdration a etc faite par des mains moins habiles. Tout I'art con- fifte k retenir & fixer la langue de I'enfant. Quant au danger d'avaler fa langue, qui eft le plus h craindre » il faut le prevenir , en tenant une nourrice toute prete pour lui donner k tetter I'inftant nieme d'aprcs I'ope- ration, ou, au defaut d'une nourrice, lui mettre le doigt dans la bouche*, car determine comme il I'eft par I'inftitution de la nature , i fucer & i avaler , toute I'adtion de fa langue fe portera vers le mamelon ou vers le doigt qui lui eft prtfente. Dans ces enfans que M. Petit a fauves apres leur avoir retire la langue du gofier , ce qui ne fe fait pas fans effort, il a fjllu quelquefois s'afTujettir plufieurs jours de fuite k ces precautions , & y revenir fans relache apres de nouveaux accidens. Si I'humanite & I'interet des families ont k s'exercer fur quelque fujet important , c'eft affurement fur celui-ci. DE L'ACADEMIE ROYALE DES SCIENCES. +05 SUR UNE PARALYSIE Accompagnie de circonjlances Jlngulieres. C H I R U R G I £. Annie ij^z. JlVxr. de Lasone, doifleur-regent de la facultc de medecine de P^ris, Hift. & depuis peu membre de racadcinie , nous a rapporte les fymptomes par- ticuliers arrives ik line malade paralytique qu'il a traitee. Une femme agee d'environ }2 ans eut de grands chagrins, I'cvacaation de fes regies fut fupprimee , & il lui furvint les fymptomes ordinaires dans ce cas , mais fans aucun mal de tete. M. de Lafone travailla ^ dc- truire ces accidens par les remedes convenables; les fymptomes difparu- rent , & il en efperoit une guerifon parlaite , lorfqu'i rocca(ion d'un nou- veau chagrin la malade reflentit une grande pefanteur de tete accompagnec de douleur , ce qui lui occalionna quelques jours aprcs une foibleflc dans le genre nerveux, & un tremblement prefque univerfel. En cet ctat la malade ne voulut plus prendre de remede -, le tremblement parut cepen- dant diminuer , mais I'aDattement augnienta d'autant plus. L'ufage des fens & le mouvement des parties exterieures furent prefque entierement abo- lis, le pouls & la connoilfance fe foutenoient affez bien , & Torgane de la voix etoit libre. Cette efpece de paralyfie fe di/Tipa peu-i-peu avec la grande pefanteur de tete, mais le mal fembla affedler tour-i-tour differenJ points dans le cerveau , & differens organes qui apparemment leur r^pon- dent par le commerce des nerfs. D'abord la malade rellentit une douleur profonde au fommet de la tete , & fa vue s'affoiblit. Le point douloureux parut changer de lieu , fans quelle piit dehgner precifement I'endroit du crane oii il repondoit; la vue fe retablit, mais fes yeux n'eurent plus de mouvement. Quelques jours apres la vue s'obfcurcit de nouveau , & toutes les parties de I'dil furent affedees-, la langue tomba audi en paralyfie, & la falive couloit involontairement de la bouche. Ces accidens difparurcnt affez vite, mais la malade fe plaignit quelque temps apres d'un nouveau point douloureux i-peu-pres vers le centre de I'os occipital, ce qui aug- menta pendant quatre ^ cinq jours , & qui fut accompagne de frequens maux de cosur & de palpitations. Tous ces accidens fe dilliperent encore, & le point douloureux fe fit fentir plus haut derriere la tete vers Tangle de I'occipital. Alors les bras devinrent paralytiqucs, la douleur fe caLna en partie , & s'approcha de I'os parietal du cote droit de la tete -, le bras droit recouvra le mouvement, I'autre refta paralytique, & la douleiu- de la tete ne fe dillipa point. Quelque temps apres il fe forma un autre point dou- loureux vers le bord antirieur du mcme parietal, avec une efpece d'eii- gourdiffement le long de I'epine du dos •, la jambe & le pied gauche perdirent le mouvement & refterent en cet etat, conjointement avec I'ex- tremite fup^rieure du meme c6\t. Ces parties qui avoient entierement perdu le mouvement, n'ea etoient pas moins fenfibles aux imprefllons du Ecc ij 404 ABREGE DES M^M.OIRES i^— ^— — ■ froid & de la chaleur , & les corps aigiis y caufoient par leurs piquures „ des douleiirs audi vives que dans les parties enti^remeiit faines. En fin les L H I R u R G 1 E. jQj,ig„y5 jg I2 t^te augmenterent peu-^-peu , devinrenr generales, ie pouls Annie tj^Z. s'afFoiblit, & aprcs environ quinze jours de l.ingueifr la malade mourut. M. de Lafone ayant ouvert la tete du cadavre , y trouva dans les deux cndroits de la panic corticale du cerveau qui repondoient aux bords an- terieur & pofterieur du parietal droit , deux tumeurs fuperficielles , in^gales & calleufes, d'environ 5 lignes de diametre , & qui paroiffoient compri- mer la partie medullaire , que Ton regarde comme I'origine des nerfs. II y avoir beaucoup d'eau dans les ventricules, & le cervelet paroiffoit d'une confiftance un peu plus ferme qu'il ne left communement. Tous ces faits n'ont rien que de tres-analogue avec tout ce qu'on coti- noit dej^ de cctte redoutable maladie & de la ftrudure du cerveau. II paroit aufll par les obfervations qu'on a faites fur les animaux , que quand on comprime differens points de leur cerveau, difterentes parties qui re- pondent ^ ces points par le moyen des nerfs , font fubitement attaquees de paralytic ou de convulfion du cote oppofe k celui qui eft comprime. Du moins la compreflion des deux tumeurs calleufes trouvees au cote droit du cerveau de la malade dont nous venons de parler , ont-elles ete conftamment accompagnees de paralylic aux deux extremites du cote gau- che de fon corps. C'eft une fuite bien naturelle du croiferaent des nerfs que feu M. Petit a eu la gloire de conftater. R E C U E I L ^'EXPERIENCES ET D'OBSERVATIONS fc. Hift. S 1/ R LA Pierre, J_/ES r^compcnfes promifes par le parlement d'Angleterre ^ MUe. Ste- phens, pour la publication de fon remede fur la pierre, & plus encore ces recompenfes accordees apres le temoignage avantageux que les com- miflaires nommcs pour I'examiner , ont rendu i ce remede , ne pouvoient manquer d'exciter I'attention des gens de Tart. M. Morand, que fa profefllon & fon habileti dans la taille intireffent encore plus pour le bien public que pour I'honneur de cette operation , fouvent tres-difficile , toujours dangereufe, a fail! avec empreffement un remede qui pouvoit Ten difpenfer, & I'epargner aux raalades. On a vu ci-deflus, & dans le volume precedent une partie de fon travail fur ce fujet •, travail qui prefcnte le refultat dun grand nombre d'experiences , & qui fuppofe une connoiflance exade de tout ce qui avoit hi fait la-deffus en Angleterre. Dans le deflein de I'acquerir cette connoiffance M. Morand, qui fait fAnglois, s'etoit affocic avec M. de Bremond pour traduire tous les DE L'ACADEMIE ROYALE DES SCIENCES. 405 oiivragcs qui paroitroient fur cet important remcde , & tirer de qtielques- ai—— m^ uns des commiiraires nommcs par le parlement Ics ^clairciflemcns iic- -, ceflaires. C h i r u u g i r.. Apres avoir fait de Icurs traductions & des eclairciflemens qui s'y rap- yfnn/e i-a'^ portent, I'ufage qu'ils croyoicnt en devoir faire pour leurs reciierches particuiieres , ils n'ont pas voulu priver le public de cctte colieifVion qui a fourni la matiere de deux volumes remplis de pieces trcs-intcreflantes. Le premier volume eft de M"- Morand & Bremond conjointemcnt , le fecond eft de M. Morand feul. Le premier contient le detail de 155 obfervations, & Ics indudions qu'on en pcut tirer pour & contre le remede de M'le. Stephens, publiees par M. Hartley de la fociete royale, avec les experiences & les analyfes qu'il en a faites, foit immediatement fur les drogues memes, foit par leurs melanges avec I'urine. On trouve encore d»ns ce volume I'hiftoire da re- mede par rapport ^ la recompenfe qui avoir etc affurce ^ M"e- Stephens par le parlement d'Angleterre ; la recette veritable publide par M"e. Ste- phens en 1759; cinq lettres ecrites ^ M. Morand par differentes perfon- nes , entre lefquelles font quelques-uns des commiffaires du parlement j & un examen chymique des fubftances qui entreiit dans la recette, envoyi par M. Ceoffroy, 'k M. Hartley, ^ la follicitation de M. Morand. Car ces deux academiciens fe font encore aflbcies fur le mcme fujet; & il faut convenir qu'il brille dans tout ceci un zele defintereife dont I'amour pro- pre des favans ne fait pas toujours fon capital. Le fecond volume, qui a cte prefente ^ I'academie fur la fin de cefte aiinee, contient un fupplement de M. Hartley ^ fon premier ouvrage , fc les experiences particuiieres de M. Kirkpatrik medecin •, & ces experiences font d'autant plus precieufes & doivent avoir d'autant plus de poids, que M. Kirkpatrik avoit la pierre lui-meme. Suivent les analyfes des drogues qui compofent le remede, & principalement du favon qui en fait la bafc, par le cclebre M. Hales; I'extrait du memoire donned I'acadiimie en 1740 par M. Morand ; de nouvelles obfervations fur la meilleure maniere de faire ufage de ce remede, par M. GeofFroyj & enfin plulieurs lettres ecri- tes d'Angleterre )l ce fujet, par Mrs- Hales, Hartley & Pellet. II eft ^ remarquer que les deux nations ont pani egalemenf attentives ^ ce qui fe fiiloit en cette occafion de part & d'autre, & egalement dif- pofees ^ profiter de leurs lumieres reciproques : en meme temps que M. Morand publioit ^ Paris la traduiftion francoife de ditlerens ouvrages anglois , ou publioit ^ Londres la tradudion angloife des memoires de M. Morand. Tant d'experiences & de recherches n'ont pas et^ vaines. Le remede de M'le- Stephens a diiji foulagi plulieurs Pierrcux. II y en a, dit M. Mo- rand, des exemples inconteftables & non equivoques i Paris & i Londres; & remarquez que M. Morand a eu connoiffance de plus de foixante ma- lades qui en ont ufi. C'eft \ I'urine que le remede imprime ii vcrtu dif- folvante , capable d'entamer la pierre & d'en d^compofer les parties , comme on I'a vdrifie par les experiences , & par I'ouverture des cadavres. 4o5 ABRfiGE DES MfiMOIRES gCes affurances de la part d"un homme (i inftruit, & qui eft engage, pour Annile IJ4Z. aiiili dire , par dtat , i. decrier tous les diffolvans de la pierre , pourroient' L H I R u II G I E. gj]g5 ^g p35 fjifg imprellion fur les efprits? Tel eft cependant le lort de$ jiouveaux remedes , que d'abord on y court en foule , qu'on les applique k tout , & que bientot aprcs on les oublie , on ne sen lert plus. Celui- ci ne fe garantira pas fans doute de ce trifte retour , &• M. Morand fem- ble dejk le craindre dans la courte preface qu'il a mife ^ la tete de ce volume. La mode ne perd pas fes droits , fon inconftance & fes caprices s'exercenc depuis tout ce qu'il y a de plus frivole jufques fur notre propre vie. Les puiffanccs qui veillent ^ la confervation des citoyens ne retirent done pas toujours de leurs foins & de leurs liberalites ^ cet egard tout le fruit qu'elles en pourroient attendre. II eft peu de ces remedes d'a- bord trcs-accredites , qui ne perdent infiniment dans un certain public , des qu'ils ceffent d'etre inconnus , & qu'ils commencent ^ etre prepares & ofFerts par des mains intelligentes. Un des grands avantages de celui de M'le- Stephens , c'eft que parmi le grand nombre d'epreuves on n'a point obferve qu'il eut de mauvais cfFets , lots meme qu'il n'opere pas lelon fa deftination. On ne peut lui reprocher que d'etre fort degoiitant •, defaut qui merite ^ peine d'etre mis en ligne de compte k cote des dangers de la taille, & qu'on a meme fort corrige. Auffi M. Morand remarque judicieufement, que tout homme qui n'a d'autre reflburce pour mettre fin ^ fes maux que I'operation de la taille, ou le remede de M"e- Stephens, feroit infenfe, s'il n'effayoit de ce remede avant que de fe livrer au couteau. Cette coUeilion ne contient pas ^ beaucoup prcs tout ce qui a hh fait fur ce fujet, mais elle en eft la partie la plus utile, la plus fure, & cells dont le public eft le plus en etat de profiler. PARALYSIE SANS SENTIMENT, Quoique Us mouvemens de la partie infenfibk ne foient point d^truits. Hift. I L y a quelques annees que la relarion fuivante me fut remife. Je la gardois en attendant que j'en connuffe mieux I'auteur , lorfque M. Hel- vetius, premier medecin de la reine & infpedleur general des hopitaux de Flandre , I'envoya ^ M. Winflow , comme digne d'avoir place parmi fes obfervatlons , & par elle-meme, & par la main dont elle venoit, lavoir, de M. Briffeau, medecin des hopitaux militaires de cette province. Un foldat du regiment Suiffe de Seedorf , en garnifon ^ Douai , age de trente-deux ans , fut attaque de la paralylie dont il s'agit , & dont voici I'origine & les fymptomes , d'apres les queftions que lui fit M. Briffeau , h qui il fut prefente en 1759, & d'apres les reponfes du malade. 1°. 11 etoit entre i I'hopital militaire de Douai au commencement de decembrc 1750, pour s'y faire trailer d'une fievre intermittente opiniatre. DE L'ACADiMIE ROYALE DE.S SCIENCES. 407 8c accompagnie d'une fluxion catarreufe qui I'avoit fort abattu & amaigri. II en fortit vers la fin du nieme mois. i°. Dans les premiers jours de Janvier fuivant il fentit une douleur Ch I Jl U R G 1 E. trcs-vive au pliant du bras gauche : cette douleur dura environ trois jours, Ann^e 1743. i-peu-prcs de la meme force & fnns relache. Elle fe diflipa nianmoins en- tidrement ; niais quatre ou cinq jours aprcs il lui en prit une autre pour le moiiis audi violente i I'epaule , qui occupoit toute I'articulation de la tete de I'humerus avec I'omoplate , & qui dura cinq jours fans interrup- tion. C'eft toujours de I'epaule , du bras & de la main du cote gauche qu'il s'agira id. 3°. Quelques Jours apres il lui vint des efpeccs de phlydenes, bubes ou puftules, dans tout le dedans de la main, qui creverent bientot & rendi- rent beaucoup de fcrolite claire & fans odeur. 4.°. C'eft dans ce temps-la, c'elt-k-dire, vers la fin de Janvier 1751 » que le malade s'appergut qu'il perdoit chaque jour & de plus en plus le lentiment dans tout le bras. 5°. Au commencement du mois de mai de la meme annee, il lui etoit furvenu dans toute I'ctendue du bras, de I'avant-bras, & ^ la main , une dartre conliderable, & avec des croutes fort epaiffes, qui fuppura beau- coup pendant prcs d'un mois, & dont la matiere etoit tres-fertile. 6°. Il guerit de la dartre, mais il demeura tout-i-fait prive de fenti- ment depuis la partie inferieure du meme cote de I'occiput , & dcpuis I'e- paule juiqu'i I'extremite des doigts de la main, & il etoit encore dans cet ctat en 1759 oii fe termine la relation. II avoua cependant qu'il avoit une petite fenfation de froideur dans toutes ces parties, fenlation conftante qui ne diminuoit ni n'augmentoit jamais, ni en etc ni en hiver ni meme lorlqu'il s'approchoit du feu, ou qu'il prenoit de la glace dans fa main, 7°. On lui mit une tabatiere dans cette main infenfible; il la ferra for- tement du pouce centre fes autres doigts ; mais c'etoit , comme il le dit ^ M. BrilTeau , uniquement par habitude, & fans que le fentiment y eut aucune part. II empoigne de meme fon fufil & fon cp^e, il me le fulil fur Tune & I'autre epaule, & en general il remplit fort bien les fondtions de fon etat. II joue i la boule, il fend du bois, en y employant ics deux bras , fans que celui qui eft infenfible y fafle remarquer de la peine ou de la contrainte. 8°. Au mois de Janvier 1735, il leva par megarde avec la main infciv fible le couvercle d'un poele de fer trcs- ardent & prefque rouge, il le pofa enfuite tranquillement, 8c il ne s'apper^ut point du tout, du moins par le fentiment, qu'il s'ctoit brule tout le dedans de la main. Les tegu- niens internes, les tendons, & le periolle de I'index en furent tout-^-fait detruits : la gangrene fe mit ^ la plaie , & Ton y fit bien des incifions auxquelles il ne lourcilla pas , non plus que lorfqu'on lui appliquoit h pierre infernale. II en etoit demeure eflropie de deux doigts. Enfin quelque temps aprts, & malgrc toutes ces demonflrations d'une infenfibilite parf.iite , M. Brifleau voulut voir encore ce foldat, & il fit fur lui diveries lipreuves ou la furprife ne pouvoit manquer de le deccler , &il 4o8 ABRECE DES MEMOIRES y avoit eu de la fourberie, & fi, comme quelcjues-iins de fes fcmblables, ~~ " dont M. Briffeau dit avoir vu des exemples , il avoit joue le paralytique C II 1 R u R G I E. y,. obtenir fon conge -, mais il parut toujours que Ion mal ii'ctoit que Ann^e 274?. ^^°V ^^^^- ^^ J*^" auroit. etc bien long, bien cher, & d'ailleiirs affez inutile ' "' pai- la maniere dont cet homme faifoit fon devoir de foldat. L'aventure du poele & fes fuites iroient de pair avec tout ce qu'on nous raconte de plus ^tonnant de la conflance de quelques fauvages d'Amerique dans les tourmens que leur font fouffrir leurs ennemis. Du refte cette forte de pa- ralyfie qui ne tombe que fur les organes du fentiment , quoique tres-rare , neft pas inconnue aux modernes i Willis & Junker en ont parle dans leurs ouvrages. On en va voir un fecond exemple qui ne foiirnit aucun fujet de doute de la part de celui qui en eft atteint. Nous fupprimons quelques raifonnemens qui accompagnoient la relation precedence , & plus volontiers encore ceux que nous pourrians y ajouter. Autre Paralyfic de mime nature, RiEN ne prouve mieux la neceflite indifpcnfable de nos fens, & de la douleur menie, pour la confervation de notre corps, que les fuites funef- tes de la privation du fentiment dans le tad. Le plus fubtil phylkicn , le plus favant anatomifte , I'homme le plus attentif i ce qui peut liii nuire, ne fauroit ordinairement le prcvoir avec cette promptitude que I'occadon requiert prefque toujours , & avec laquelle le toucher Ten garantit. Encore moins pourroit-il (e promettre que rien ne detournera jamais fon atten- tion d'un danger qui echappe i tous fes autres fens. M. Garcin eft lui-meme le fujet du nouvel exemple que nous allons donner de cette efpece de paralyse , & c'eft encore k M. de Reaumur qu'il s'adreffe , en lui mandant qu'une bnilure qu'il avoit recue au pouce I'avoit empeche jufques-li de lui eciire. Tous (es doigts font infenfibles, fans etre prives de mouvement. II eft oblige d'en prendre un foin infini, & ^-peu-pres, dit-il, comme une nourrice ^ legard de fon enfant, pour les garantir de mille atteintes auxquelles ils font continucUement expofes •, mais malgre tous fes foins il lui arrive frequemment de s'oublier, & de s'y meprendre. Cette fois il avoit trop approchi fa main d'un petit poele ovi il vouloit la rechauffer , & oii le feu etoit plus ardent qu'il ne penfoit. Car un des principaux fymptomes de fon mal eft que fes doigts font tou- jours plus froids que ne comportc la temperature adtuelle de I'air ou il eft, & du refte de fon corps-, ils ne peuvent jamais fe rechaufFer d'eux- memes, mais il faut neceffairement avoir recours ^ une chaleur exterieiire, & il les tient d'ordinaire fur fa poitrine , h laquelle il les applique fous fes habits. Quand il veut reconnoitre leur etat, il les porte fur fon vifage, ne les fentant jamais par eux-memes ni froids ni chauds. II ne s'appercut de cette brulure que deux heures apres, par une groffe veflie qui en oc- cupoit la moitie de la circonference. Ce qui eft encore a remarquer, c'eft qu'il fe brule les doigts h une plus grande diftance du feu que celle oii on les tient communement dans I'ctat naturel. II faudroit avoir eprouve une DE UACADEMIE ROYALE DES SCIENCES. 409 line pareille incommodite pour imaginer tons les iiiconvcniens quelle en- lo— i— ^— iraine aprcs elle en niille rencontres ou Ton n'a pas le loilir de faire tou- ^ tes ces attentions. Audi M. Garcin avoue qu'il y manque fouvcnt , & qu'il »-'""' u r c i e. en eft fouvent puni. II n'oferoit prefque rien cntreprendre dans robfcu- yinn^c f^Ai. ritd, fins rifqucr dc fe meurtrir ou de s'ecorcher ^ ccs doigts tnfenfibles, faute de voir ce qu'il touche, &: comment il le louche. Comme ce n'ell que fuccindcment , & par occafion que M. Garcin a parle dc cette niala- die , nous ne faurions en dire davantage. Elle mcriteroit cependant un detail plus particulier , tant par rapport ^ fon origine , qu'^ la durce, & ^ toutes fcs autres circonftances. C'efl: de quoi reveiller I'attcntion des anatomiftcs fur cette queftion de- licate s'il y a des nerfs qui repondent direttemcnt au taCt & au lentiment, & qui n'cntrent pour rien dans les mouvemcnsi ou au contraire, Sec. Les cxemplcs qu'on vicnt de voir, femblcnt le fuppofer , mais on n'a encore rien d^couvert de polltif fur ce fujet. OBSERVATIONS DE CHIRURGIE. M R. BouvART a dit qu'une femme qui ne pouvoit avaler depuis ; deux mois, avoit vecu pendant tout ce temps i I'aide de lavemens nour- _^„^/g 2^44. riifans mcies de vin d'Efpagnc, & quelquetois de thcriaque; elle nc laiffa pas d'avoir pendam cct intervalle quelques vomiffemens bilicux, Hift. I I. On pla^a au mois de mars 1745 , i rhopital-gcneral de Rouen, un cn- fant-trouve qui paroiffoit age de fept ans, mais qui cependant comme on i'a verifie dans la fuite, n'cn avoit reellement que qiiatre-, la tcte & tout Ic tronc du corps etoient audi formes qu'ils auroient pu I'etre dans un enfant de fept ans , & la force paroiffoit etre audi la mcme -, mais les parties qui caradlerifent le fexe mafculin , etoient encore bien plus avancees h propor- tion , elles avoient toutes la grandeur qu'elles ont d'ordinaire dans un homme de vingt ans, les polls, la groffeur dc la voix y repondent par- faitemenf, ^ I'egard des cuiffes, des jambes & des pieds, ils ne ibnt ni ft forts ni fi nerveux que le refte du corps, & cet enfant marche mal & avec unc forte de foibleffe. Malhcureufement le corps paro'it avoir pris une croiffance li extraordinaire aux depens de I'efprit. Ce petit homme li pre- mature ne fcmble pas connoitre I'ufage dc la parole, il entend ncanmoins, & obeit ^ certains tons de fon gouverneur, accompagnes de geftes -, il le fait venir k lui , ouvrir & ftrmcr une porte , & pratiquer i-peu-pres les exercices qu'on peut exiger d'un chien mediocrement bien dreiis. Ceil k M. le Cat, correfpondant de Tacadcmie quelle doit cette relation. Tome IX. Partie Franfoife. Ff f 4IC A B R E G E D E S M E M 0 I R E S , &c. I I I, C H I R U B. G 1 H. Ann^e 1744. ^^ ^''°''^ commim^mcnt que lorfqiie quelqium eft falfi d'une grandc frjyeiir, foii fang couleroit diSicilement li on lui ouvroit I.1 veine. M. de Courtivron a communicjue h I'academie line obfervation qui paroit proii- Ver le contraire. On avoit menace un defertcur de Ic renvoyer i fes offi- ciers, la frayeiir le faifit, il fe trouva mal, & on eut toiites Ics peines dii monde h lui faire entendre qu'on avoit obtenu fa grace. Dans cet etat il flit faigne, h peine la veine fiit-elle ouverte que le fang s'elanca avec iiiv- petuofite, &: lortit de meme pendant tout le temps dc la faignee^ M. Di Lasone a lu ^ I'academie robfervation fuivante de M. de TEclufe, lieutenant de M. le premier chirurgien du roi h Chaulny. Un homme de vingt-deux ans recut un coup d'epee dans la poitrine un pea au-deflous de la mamelle gauche, les panfemens furent faits avec beau- coup d'attention & d'apparence de fucces , en forte que te cinquieme & le fixieme jour le malade fe trouva affez bien •, mais fur la fin du fixieme les accidens devinrent plus facheux, & il mourut. A I'ouverture du corps M. de TEclufe appercut une plaie au pericarde, il I'ouvrit, & trouva que le coup avoit perce le cceur entre fa pointe & fa partie moyeiine, la plaie penetroit dans le ventricuie droit, & tout Ic coeur ctoit rerapli d'un fang coagule. Le malade avoit done vecu fept jours entiers avec une plaie qui penetroit dans un des ventricules du cocur. L'acaderaie a deji fait past iu public de plufieurs exemples pareils* MECHANIQUE. Fff ij 4' J MECHANIQUE. SUR UN PROBLEME D E D Y N A M I Q U E. I i E nom de Dynamique qui eft dcpuis pen en ufage parmi les geonie- — — ^i— ■ tres Francois, & dont M. Leibnitz s'eft fervi le premier, lignifie cette w , mechanique fpeculative & fublime qui traite des forces motrices & adives echaniql'. des corps. Seion M. Leibnitz le michanifme de I'univers & celui des ou- Annie 1"ai. vrages de I'art ne different pas dans leurs principes. La pefanteur , difoit- il , & I'elafticitc qui font les deux grands moyens qu'empioic la nature dans la produdlion de fes divers phenomenes , peuvent etre expliquees mechaniquement comme nos machines ordinaires , & le doivent etre par le mouvement de la matiere ctheree ; mais, ajoutoit ce phLlofophe, le mouvement primitif des corps, cette force qui leur a ete imprimee par le Createur, & qui agit conftaninient en eux, s'y trouve differeniment li- iiiitee & modjfiee par les circonftances de leurs chocs reciproques. L'art de demeler , d'e valuer routes ces differences & d'en afligner les effets, il le nomma Dynamique. Les mechaniques , la ftatique , & ce qu'on appelle communement la Icience des forces mouvantes , n'en different qu'cn ce que les forces ou les puiffances y font quelquefois conlidcrees en limple pouvoir d'agir, ou meme comme pailivesi au-lieu que le veritable objet de la dynamique eft, comme nous I'avons dit, la thcorie des forces ac- tuellement agiffantes, A mefure que les fciences s'etendent & qu'on vient i les envilagcr fous de nouveaux alpeds , il eft utile qu'on leiu' impole de nouveaux noms pour en mieux caraclcrifer les parties. C'eft eniiiite aux ecrivains fages & intcjligens d'en ufer avec fobriete. Soit un anneau verticalement attache ^ la furface d'une table horizon- tale , par un point fur lequel il puilfe tourner comme centre. Soit cet anneau enfile par une baguette ou verge inflexible, qui y gliife librement felon la longueur , & qui foit charg^e ^ fes extrcmites ou i tcls autres points quelconques de chacun de fes bras, de part & d'autre de ce cen- tre , dun ou de plufieurs corps de mafic connue , i I'inhai. Si i'on ima- gine que cette baguette vienne i etre frappec ou mife en mouvement dc quelque maniere que ce foit autour de I'anneau dans lequel ellc peut g'rif- fer ou tourner , ou glifTer & tourner tout enfemble , il eft evident que chacune de fes extrcmites , chacun de ("es points', & par conftqucnt cha- cun des corps dont clle eft chargce , dtcrira ou des lignes droites , on des cerclcs , ou des courbes d'luie autre efpecc ■, favoir , des lignes dtoitcs M i. C H A N I Q U E. 414 ABREGfi DES MILMOIRES I qui fe confondront avec fon axe , (i la diredion du mouvement qui lui a etc iraprime eft lelon fa longueur-, des ccrcles, fi I'impulhon lui etant per- ' pendiculaire ou oblique, le mouvement communique aux corps qu'cllc Jinni'e tj^t. Porte, ne prodiiit en elle que la fimple rotation fans la faire gliffer danj lanneaui car en ce cas, qui ed cclui ou les forces centrifuges fc balaficent de part & d'autre , les rajons vedeurs ou les parties des bras de la ba- guette chargees de ces corps demcureront conftamment k mcme diflance du centre du mouvement. Enfin tous les points de la baguette decrironc des courbes differentes du cercle, fi elle gliffe & toiirne en meme temps, felon toutcs les combinaifons que peut recevoir ce mouvement compofe. II s'agit de determiner les viteffes qu'auront tous ces corps mis ainli ea mouvement, & les lignes droites ou courbes qu'ils decriront autour du centre immobile de la rotation. On fent affez de quelle difficulte eft ce probleme. M. de Montigny I'a rifoln par le calciil differentiel & integral , le feul vraifemblablement qui puiife atteindre i de pareilles queftions, ou les courbes memes qui en re- iultent ne font guerc exprimables que par des equations differentielles. H s'eft fervi aufli du principe de la confervation des forces vives ; principe plus ancien que ces forces, & que M. Huyghens a mis le premier en 0211- vre dans fon traite des pendnles appliques aux horloges , mais qui a etc depuis dellgne fous ce nom par de fameux geometres , qui out fuivi la doi5trine des forces vives de M. Leibnitz , i laquelle il leur a paru favo- rable. II ne fignifie ai-itre chofe , linon que dans tous les cas oii pkifieurs corps agiffent les uns fur les autres, foit par le choc, ^tarit fuppofes a ref- fort parfait, foit par des fils, ou par des verges inflexibles qui les tienncnt attaches , & qui les tirent ou les entrainent , la fomme des produits de leurs maffes par les quarres de leurs viteffes , fera roujours une qiiaiuite conftante. Audi ce meme principe a-t-il cte fouvent employe par d'autres geometres fameux qui rejettent formellement les forces vives , ou qui n'ont point vouki cntrcr dans la difcuffion de cette celebre difpute, dont jl peut ctre aifcmeiit ftpare. Du refte, il feroit inutile d'avertir que dans I'enonce du probleme de M. de Montigny , on doit concevoir Tanneau autour duquel fe font tous les mouvemens , comme un point , la baguette comnie une ligne ians lar- geur, les maffes qui y font fixement attachees , comme autant de petits corps dont tout le volume feroit reuni au point de cette ligne ou iis font attaches , & que dans toute cette recherche on fait abftradlion des frotte- mens. Ce font les conditions ordinaires de ces fortes de problemes qu'il faut toujours commencer de refoudre fous ce point de vue limple & pu- rement mathtfmatiques , pour en venir enfuite, lorfque le cas le requiert, k I'exaiTien des circouftances phyliques qui les accompagncnt. DE L'ACADl^MIE ROYALE DES SCIENCES. 4.15 Mechaiuqui. S U R L E S I N S T R U M E N S Annie ij^i. QUI ^SSORTISSEXT - LA MACHINE P N E U M A T I Q U E. J_Jis inventeurs dans les fcicnccs on dans les moyens de les acqudrir Hift. & di les perfeclionner, jouiffciit h-pcu-prcs dcs mcmes honneiirs. Le fa- meiix Boyle n'eft pas plus conim par les excellcntcs recherches de phyilciue, de cliymie & d'hilloiii.- iiatiirclL- , que par la machine dii viiije ou pneii- matique qu'il a inventee ou feulement perfectionnce , & i laqiielle plii- fieurs favans ont donne le nom de machine Boyliene. Eii'eff'et, combien de connoillinces utiles & curicules cette merveilleufe machine ne nous a-t elle p.is procurces? M. Tabbe Nollet, oblige par profelTion i f.iire un grand nombrc d'cxperiences, & dchrant donncr aux inftrumens qui fervent ^ prodtiirc cette extreme rarcfadion de I'air qii'on qualifie de vuide , toute la pcrL-ction dont ils font fufccptiblcs , a remonte Jufqu'i I'originc de la machine pneumatique , en a parcouru toutes les formes & examine ce qu'il y a d'avantageux dans les unes & de d^fecftueux dans les autres. II rendit compte \ I'academie de cet examen I'annee derniere [a] dans deux memoires, dont le premier traite en general des inftrumens propres aux experiences de I'air •, le fecond regarde pirticuliercment la conftruclion d'une nouvelle machine pneumatique de rarefaction \ d?ux corps de pompe, & celui-ci roule fur les inftrumens dont il convient d'aflbrtir fa machine pneumatique, pour en rendre I'ufage plus fur & plus commode. On y trouvera de nouveaux moyens pour opcrer avcc exactitude & avec facilitc dans les experiences du vuide qu'on connoiflbit dcja , & de nou- velles vues fur quclques autres non moins importantes, qui n'ont pas en- core ete executees. Telle eft celle qui a pour objet la nature & la qiianlite des matieres heterogenes dont I'air de notre atmofphere eft charge. II fe- roit difficile k la phyfique expcrimentale de s'excrcer fur quelque chofe de plus interelTant pour nous que TelaTient dans lequel nous vivons & que nous refpirons fans cede. M. I'abbe Nollet ne fe flatte pas qu'on puilfe fitot en avoir une connoiffance parf.iite-, mais les procedes qu'il indique pour ccla doivcnt porter al'ciTaycr, & nous autorifent ^ ne pas difclpt:- rei du fucccs. (i') Tome Vill, de la ColkiSion Aca(Wmique, Partie Fransoife^ 4i5 AB Rt Gt D E S M £ M O I R E S Mecuanique. Anne'e i-j^t. S U R LA CONSTRUCTION ■ D'UN PENDULE Qui ne puijfe s'alonger par la chahur , ni fe raccourcir par le froid. nil!. J_^r:Puis I'ingenieufe application dii pendule aiix horloges , due ^ M. Huyghens , la niechanique fembloit n'avoir plus rien h faire pour don- iier i ces machines toute la perfedtion dont elles font fulceptibles. En effet , h ne conliderer que ce qu'elies tiennent du pur mechanifme , & abftradtion faite des alterations que les caufes phyliques & accidcntelles peuvent y apporter, on ne voit pas qu'il leur manquat rien pour nous procurer une exadte mefure du temps. Peut-etre meme n'ofa-t-on d'a- bord y defirer rien au-del^. Mais comme les befoins & les delirs croif- fent ^ mefure qu'ils font fatisfaits, on n'a pas joui long-temps de ces ad- mirables horloges , deji plus regulieres dans leur marche que le foleil nieme, fans leur demander quelque chofe de plus. On a voulu que par iin principe interne & mechanique elles ftiffent en etat de prevenir tous les derangemens que la chaleur ou le froid peuvent caufer i leur mou- vement : car on lait que la chaleur rarefie & dilate les metaux, que le froid au contraire les condenfe & en accourcit toutes les dimenlions; & que les vibrations du pendule font par rapport h leurs durees en raifon inverfe des quarres de fes longueurs. D'ou il fuit que par cette feule cir- conftance phyfique I'horloge ou la pendule doit avancer en hiver & re- tarder en ete •■, ce qui peut aller ^ plus d'un quart de minute de diffe- rence par jour entre ces deux faifons de I'annee, dans un climat tel que le notre, & ainli ^ proportion dans les faifons moyennes. M. Grah.im fameux horloger de Londres, membre de la fociete royale, eft le premier qui ait tente avcc quelque fucces de remedier i cette caufe d'irr^gularite dans les horloges. Son idee qui eft tres-ingenieufe & qu'on pent voir dans les tranfaftions philofophiques , annee lyid, n". 55)2, doit etre regardee comme la fource de toutes celles qu'on a cues depuis fur ce fujet, quoique tres-diffirentes ; car il fuffit fouvent de favoir qu'il y a un moyen d'arriver au but, pour en imaginer bientot de plus fiirs & de plus commodes. Une experience que le celebre M. Mufichenbroelc a mife dans tout fon jour, favoir, que le cuivre & fur-tout le laiton ou cuivre Jaune, fedi- iate beaucoup plus par la chaleur que le fer , a fourni la maniere , juf- - qu'ici la plus exafte & la plus facile, de procurer aux horlogers cette rec- tification qu'on leur demande. M. Julien le Roy, Tun des plus habiles horlogers de Paris , a dejk conftruit fur ce principe des horloges tres- jiiftes DE L'ACAD^MIE ROYALE DES SCIENCES. 417 Juftes dont il prcifenta le modele i racademie en 1 7 5 8. 11 applique aiideffus ^— — ^»» de la boite qui- en conticnt le roiiage , un tiiyaii de laiton an haut diiqiie! ^i , eft fixement attachee line verge de (cc oil il rnfpend celle du pendule , chaniqu£. & qui, en vertu de la diff^rente dilatation des deux m(5taux , fcrt k fou- Ann/t tjdt. lever & i raccourcir celle- ci lorfqu'elle eft alongcc par la chalcur, ou ^ I'abaifler & I'alongcr lorfqu'elle eft raccourcie par le froid. Sur le fronton de la boite eft un cadran dont les divilions relatives aux imprefltons du froid & de la chalcur de I'air fur I'horloge , font parcourues par une ai- guille qui en iiidique les changemcns. L'artifte fcmble avoir voulu nous niettrc fous les yeux & la caufe & les effets qu'il avoit en vue dans foil travail •, ce qui peut ctre utile , tant pour regler la machine , que pour s'en fervir avec plus de connoiiknce. Mais voici la mcme invention pro- jettee fur un autre plan. Comme ce tuyau de cuivre qui s'eleve perpendiculaircmcnt au-dcflus de la pendule, doit avoir plus de 4 pieds \ de hauteur, & pourroit cau- fer quclque embarras ou queiquc diftormite dans les lieux oil Ton fou- haiteroit la placer, M. Cailini a imagine une autre conftruftion , qui eft tout-k-fait exempte de cet inconvenient. C'eft i la verge mcme du pen- dule qu'il applique les deux nietaux , par une ou deux contre-verges dc cuivre, dont les dilatations & les condenfations agillcnt en fens contraire ^ celles de la verge de fer du pendule , & y produifent le jeu que nous venons de decrire dans la pendule de M. le Roy. Aiiili la caiife ordi- naire qui foutient la boite de -I'horloge , & qui en cache les poids & les cordes , cachera cgalement la verge du pendule & toute cette mechani- que , qui ne devient par-li que plus conforme ^ I'ouvrage de la nature qu'eUe eft dcftinee 4 combattre. La conftrudtion que propofe M. CafUni ne touchant qu'i la verge 4a pendule , fans rien changer "k fa fufpenfion ni aux autres pieces de I'hor- loge , a encore cet avantage , qu'on peut I'appliquer aifemcnt & ^ peu de frais , aux pendules toutes faiies que Ton avoit auparavant. Tome IX. Panic Franfoifi. ^SS Mechanique. Annie i-j^ I , 418 ABR^Gl^ DES M:^M0IRES DIVERSM6 MOIRES OBSERVATIONS DE MECHANIQUE. I. Sur Ics Forces Matrices des Corps. Hift. X^ o T R E fiecle , ainfi que les beairs fiecles de Rome 9c de la Grece 5 pc-ut compter des philofophes parmi fes plus grands Poetes. M. de Vol- taire a prifente cette annee \ I'academie iin memoire intitule, doutes fur la rnejure des forces matrices d fur leur nature , oii il paroit etre fort au fait de la fameufe queftion des forces vives j ce qui n'eft pas commun > & avoir meditc avec lucces fur la nature du mouvement, ce qui eft en- ■ core plus rare. Ces deux points de vue. Tun plus paiticulier, I'autre plus general, font Tobjet & la divilion de fon memoire. La premiere partie contient une expofition abr^gee des principales rai- fons qui ont ete donnees, & qui prennent ici une nouvelle forme, pour prouver que les forces aftuelles des corps en mouvement font comme leurs quantites memes de mouvement, c'eft-^-dire, en raifon de leurs (imples viteffes muitipliees par leurs maffes. C'eft ce qu'on appelle I'opi- nian commune ou Cartifienne y & c'eft audi celle que M. de Voltaire a adoptee en oppofition \ celle des forces vives de M. Leibnitz, qui fait la force des corps comme leurs maffes muitipliees par les quarrcs de leurs viteffes. Une preflion quelconqne en un temps, ce font les paroles de M. de Voltaire , peut-elle donner autre chofc qu'une viteffe , & ce qu'on appelle une force ? Si une preflion en un temps ne peut donner qu'une force , deux preflions dans le meme temps ne donneront-clles pas (implement deux viteffes & deux forces ? Done en deux temps une preflion produit ce que deux preflions egales font en un temps, elle donne deux de vi- teffe & deux de force •, car 2 multiplie par i , eft la memc chofe que i multipli^ par 2. Done (i de deux corps egaux le premier fait le double d'effets de I'autre , c'eft qu'il a double viteffe , & s'il fait le quadruple d'effets avec deux de viteffe , c'eft qu'il agit en deux temps. Done h Ton veut que la force foit le produit du quarr^ de la viteffe par la maffe, il faudra qu'un corps avec double viteffe opere dans le meme temps une adion quadruple de celle d'un corps egal qui n'auroit qu'une viteffe lim- ple : ce qui eft contradidtoire , meme felon la dodtrine des forces vives. Done tous les cas ou cette contradidion d'une viteffe double qui agit comme 4 paroit fe trouver , doivent ctre decompofes & ramenes h la DE L'ACADEMIE ROYALE DES SCIENCES. 419 fimplicite de cette loi inviolable, par laquelle 2. de viteflc nc donne qu'iiii — — eftet double de I de vitefle, &'c. MicHANiouE C'eft en proccdant ain(i par les idces les plus fimples que M. de Vol- taire pafle aux cas plus compofes & qui exigent plus de c.ilcul. Le temps Annie 274.2. (1 infeparable de I'adion des forces , & que les partuans des forces vives voudroient bien en feparer , fait h bafe de tous fes raifonnemens. C'eft en vain qu'on ne feroit mention que de la viteflc, le temps y rentreroit niceflaireraent avec elle , puifque , felon la notion la plus fimple qu'ott puifle donner de la vitefle, ce n'eft autre chofe que I'efpacc divifc par le temps : c'eft- li fon eflence reduite meme nature que ceux dont il s'agit prefentement. M. Clairaut i qui la plupart de ces problemes out etd propofcs par Mrs- Bernoulli & Euler > Hift. donne diftcrentes manieres de les refoudre , & embraffe ^ cette occafion iin trcs-vafte champ. II fe fert pour ccla de divers principes , ou entiere- ment nouveaux , ou mieux developpes qu'ils n'avoient ct; jufqii'ici , 011 plus etendus par I'ulage qu'il en fait ; mais comme ces principes ne font eux-memes que des efpeces de lemmes giJneraux affez abftraits , ou de theoremes de dynamique parmi lefquels fe retrouve le principc de la con- fervation dis forces vives , dont il a etc deja parlc dans I'arcicle de 1741 cite ci-delfus, nous pallerons tout d'un coup aux problemes. Les queftions de dynamique ont ordinairemeni pour objet un fyfteme •de corps, ^ Tun ou ^ plulicurs dcfquels on imagine qu'il foit donnc un mouvement quelconque qui fe communique \ tous Ics autres ■, apres quoi il faut determiner les vitefles, les podtions, les ofcillations de chacun de 2-.JJ 4ii ABREGE DES MfiMOIRES ices corps, & les differentes combes qu'ils decrivent fur un oii plufieiirs . , , plans fixes ou en mouvemeiit , & dans I'efpace abfolu & immoDile. Le ■ mot de JyJIeme fignifie ici uii affembhge de deux ou de plufieurs corps Anii^e 174^. joints enlemble par quelque moyen que ce foir, par une verge inflexible, par une chaine ou par un fil fufceptibles de flexion , ou , plus gcnerale- inent, dependans les uns des autres par I'adlion reciproque de quelque caufe que ce foit & que chacun d'eux exerce fur fes pareils , de nianiere que I'un ne puilFe etre mu ou affefte par cette caufe , lans que tous les au- tres ne participent ik fon mouvement ou ^ la nouvelle modification qui lui furvient. Les boulets rames ou \ deux tetes, attaches enfemble par une chaine ou fiar une barre de fer, font en ce fens un fyfteme de deux corps, qui, par a quantite de mouvement que leur communique I'explolion du canon , par les differentes diredions que peut prendre eniiiite la chaine ou la barre de fer qui les joint , & par les courbes qu'ils decrivent en I'air , pourroient fairc le fujet d'une recherche de dynamique. Le foleil , & les planetes qui circulent tout autour , font dans I'hypothefe de la pefanteur univerfelle & reciproque , & en flyle Newtonien , le fyfteme folaire , & celles de ces planetes qui ont des I'ateliites, font de petits fyftemes particuliers , aftro- nomiques ou phyfiques , contenus dans le grand, & qu'on nomme audi fyftemes de la terre , de jupiter , de faturne. Mais ^ parler le langage de M. Leibnitz, ce font de vrais fyftemes de dynamique; & Ton peut dire que M. Newton a refolu plufieurs problemes de dynamique dans fon livre des principes, lorfqu'il a determine les pofitions de la terre & de la lunc, ou des autres planetes \ I'egard du foleil, & entr'elles, leurs viteffes rela- tives ou abfolues, & les courbes qu'elles decrivent autour d'un commun centre, en vertu de leurs attradions ou gravites reciproques. Ccpendant la dynamique, proprement dite , s'exerce ordinairement fur des fujets plus limples, ou qu'on a reduits \ unfe plus grande hmplicite , en les depouillant de tout ce que le phyfique & le fenlible y apportent de circonftances etrangeres. Ces queftions du cours & de I'aition reciproque des aftres appartiennent plus diredement ^ la phylique celefte •, mais voici un problerne de dynamique qui eft un de ceux que M. Clairaut a refolus dans fon memoire , & qui moyennant quelques nouvelles conditions que nous y introduirons, nous reprefentera tous les autres. Soit une table horizontale parfaitement polie , & fur cette table deux corps de maffe connue , deux boules , par exemple , attachees aux deux bouts d'un fil tendu, dont la longueur foit audi connue. Si, dans cet etat, on vient h frapper horizontalement I'une des deux boules, felon telle di- redion qu'on voudra, perpendiculaire, ou oblique i ce fil, & avec une force donnce quelconque, il s'agit de determiner la quantite de mouve- ment ou de viteffe qu'on aura communiquee ^ chacun de ces corps , les diredions fucceffives du fil qui joint leurs deux maffes , & les courbes qu'ils dicriront fur la table fuppofee fixe, ou mobile, & dans I'efpace ab- folu oil fe font tous ces mouvemens. On imagine chacune des maffes comme reduite ^ iin feul point. DE L'ACADfiMIE ROYALE DES SCIENCES. 41? Si au-Iicii de fiippofcr It-s boules parfaitemcnt librcs , ^ Texception dii *— ■^■— ^^ fil qui les joint , on fait niouvoir Tune dcs deux dans unc rainure droitc ,. , ou courbe, attachee a la table, ou dans un tiiyaii mobile autour dun cen- tre , ce feront dc nouvelles courbcs ^ diScrire pour la fecondc boulc , de Annt'c 2 74^- nouvelles viteffes dans les deux, de nouvelles portions au fil. Si I'une des deux boules etant fixe h un point du plan horizontal, celle qu'oii a mife en mouvcment, coule fur le bord reftiligne ou curviligne d'un nouvc.iu plan mobile, pofe h plat fur la table, & luppofe avoir une certaine made connue, on demande le mouvement, la vitelTc de ce plan fur une ligne donnee de pofition , par la prefllon qu'exerce fur lui la boule qui glide fur fes bords , & la courbe que cette boule dccrit dans I'efpace abfolu-, car la table & tout le fyfteme peuvent avoir en meme- temps un mouvement commun. Enfiii, on peut imaginer qu'une verge inflexible joignant les deux maf- fcs , foit retcnue fur le plan horizontal par une efpece de pivot ou d'an- neau fixe, dans lequel elle puiffe glider, & tourner en tous fens felon I'im- pulfion rccue \ un de fes bouts ■, ce qui produira de nouveaux cffcts , de nouvelles courbes, & dcs cas femblables ^ ceux qui out etc dccrits djns I'hiftoirc de 1741. {a) Ce qu'il y a de fingnlier dans quelques-uns de ces mouvemens , par excmple , dans ceux ou les boules glifferoient toutes les deux dans dcs rainures , c'eft qu'ils font periodiquement accclcres & retardcs , comme les ofciliations d'un pendule , quoique la force du reflbrt ni celle de la pe- lantcur n'y cntre pour rien. La feule pofition des rainures, rimpuliion donnee k I'une des boules, & la dircdion du fil, alternativement plus oil moins oblique k ces rainures , fuffifent pour y produire I'acccleration & Ic rctardement, en un mot de vraics ofciliations. Jufqu'ici la pcfanteur n'a eu nulle part aux problemes dont nous venons de parler. Tous ces mouvemens ont etc fuppofes fe faire fiir un plan ho- rizontal , auquel par confequent les direcfkions de la pefanteur etoient per- pcndiculaires, & Ton fait que les puiflances ou les forces dont les direc- tions font rcciproquement perpendiculaires ou fe coupcnt h angles droits, ne fe nuifent en aucune facon I'une \ Tautrc. Le calcul n'a done pu tom- ber que fur la quantite de made , ou fur I'inertie dcs corps mus ou \ mouvoir. Mais I'inertie, qui eft toujours proportionnellc \ la maffe, ne I'eft-elle pas audi i la pefanteur, puifque la pcfanteur dcs corps I'cft clle- menie \ Icur made ? L'incrtie & la pelanteur n'ont-elles pas tout au moins une grande affinite entr'elles? Quelle que foit cette affinite, il faut foigncu- fement les diftinguer dans toute cette th^orie, comme dans piufieurs au^ tres queftions phyhcoin.ithematiques. Imaginons deux Inheres parfaites fur cette table horizontale infiniment polie dont il a etc parle ci-dediis-, donnons b I'une de ces fphercs ico ds made ou de poids, & ^ I'autre 1 feulcmcnt, fans qu'il y ait cntr'clks ni verge ni fil, ni aucun autre lien qui les attache, ou qui en rcnde les (a) Voyez ci-dcvant 4H ABR^GE DES MIEMOIRES imouvemens dcprndans I'lin de I'autre. Cela pofe, & puifque les forces ou tendances dont les direftions fe coiipent h angles dioits ne fauroient fe nuire, .'lEcii ANiQUE. j[ ^^ ^[^|, jji^jg j^ moindre impuldon horizontale appliqiiee i chacune des Annci t74Z. deu'' fpheres, tant ^ eelle qui a loo, qu'i celle qui n'a que i de maffe, fera capable de les tirer du repos, & de les mettre en mouvement, plus ou moins , felon que I'impullion aura ete plus ou moins grande. Mais on concoit, ou Ton (ait du moins par mille experiences, que la meme im- pulfion ne produira pas la meme viteffe fur la fphere qui a loo de maffe, que fur celle qui n'a que i de maffe, ou, pour parler plus exaclrement , on fait que celle qui a loo de maffe ne prendra que i degr^ de viteffe, tandis que telle qui n'a que i de maffe prendra loo degrss de viteffe. La maffe influe done fur la viteffe communiquee au corps, independamment de I'adlion de la pefanteur, dans les cas ou cette derniere ne diminue rien des effets de I'impulfion , ou , ce qui rcvient au meme , il faut d'autant plus de force pour communiquer au corps une certaine viteffe, qu'il a plus de maffe. C'eft cette refiftance que les corps apporrent ^ etre mus , ou ^ etre arretes pendant qu'ils fe meuvent, que I'cn appelle inertie-, & c'eft cette meme force d'inertie qui eft entree leule jufqu'ici dans les pro- blemes de Dynamique que nous avons indiques. Introduifons maintenant la pefanteur dans tous ces problemes. II ne faudra pour cela qu'incliner, ou clever perpendiculairement ^ I'horizon la table fur Liquelle nous avons placd les deux maffes. Dcs-lors les foliicita- tions extrinfeques ou intrinfeques de la pefanteur fe melant fans ceffe avec les impullions & les mouvemens que nous y avons confideres, ne pour- ' ront manquer de les modifier de mille manieres differentes , & d'y pro- duire de nouvelles viteffes, de nouvelles courbes , & de nouvelles direc- tions du fil •, c'eft une nouvelle claffc de problemes. II fuftira au ledteur de les parcourir fous ce nouvel afpedl, & i nous de remarquer que M. Clai- raut les a refolus avec beaucoup de facilite & d'elegance, en reduifant leur folution i celle des premiers , par de petits changemens faits aux formules qui en expriment les refultats. Ces formules confiftent toujours ici en des equations differentielles dont I'integration eft fouvent trcs-difficile , & qui pourroient faire elles-memes le fujet de plufieurs problemes dignes d'at- tention. Une mcthode des plus generales que M. Clairaut emploie dans fon me- moire, confifte i imaginer d'abord le fyfteme dans une fituation quelcon- que , Sc ^ tracer chacune des peiites droites que les corps doivent parcou- rir dans I'inftant aprcs le choc. II trace enfuite au bout de ces petites droites celles que les mcmes corps decriroicnt dans I'inftant qui fuit, s'ils etoicnt libres-, & (ur les direcftions felon lefquelles les fils, les verges ou les leviers agiffent , il marque d'autres petites droites qui en expriment les forces, & qu'il determine par cette condition, que les diagonales des parallelo- grammes faits fur ces petites droites & fur les prolongemens des cotes pjicourus da^ns le premier inftant, foient terminees par des points oii les corps etant fuppofis dans le fecond , les fils, les verges ou leviers n'aient founert ni extenUon, ni inflexion. Aprcs quoi ayant aiiUi deux cotes confecutife DE L'ACADEMIE ROYALE DES SCIENCES. 425 confccutifs quc-Iconqiies dc chacune dcs courbcs dccrltcs par les diHcrcns wi— »— — ^— corps dii fydcme domic, la maniere de trouvcr Ics equations de ccs cour- , , bcs & tout le rcftc, n'cft plus qu'unc affaire dc calcul. Mechaniqui- M. Clairaut etcnd encore fa theorie h uii fyflemc de corps donr on fe- Ann^e tjaz, roit entrer la grandeur & la figure dans Ics conditions du probieinc de Dynainiquci car dans tout cc que nous vcnons dc voir, les maffcs ii'avoieiit ete conhJcries que comme autant de points. Cepcndant cctte con- dition de plus complique moins la queflion qu'on ne croiroit d'une pre- miere vue , par I'adreffe qu'on y emploie encore h en ramencr le calcul ^ celui des prccedentes. Ces corps quelconques de figure donnce auront uii centre de gravite -, le point de leur furface, qu'on fuppofe fixe ou mo- bile, qu'on tire, qu'on pouffe, ou qu'on fait glilFer le long d'une ligne droire ou courbe, forme avec ce centre un fyfteme pea ditiercnt dc ecus qui out fait Ic iiijet des autres problemes ; lorfque I'inertie & la perinteur agiront de concert fur Ics parties de ces corps, ils fe trouveront fouvent dans le cas des pendules , Sc feront fufccptibles d'ofcillation. Or, tous ces cas font compris dans les theories & les foluiions qui conviennent aux Hiaffes diftindles , abftradion faite de leur figure & de leur volume. II n'cft point de fpiculation mathematique , de quelque genre quelle foit, qui ctant pouffie un peu loin , ne rcnferme ou n'eftleure par quelque c6ti cclles d'une infinite d'autres genres-, c'eft le fruit des methodes geniralcs, & fur-tout de la geometric de I'infini foumife au calcul. Les anciens geo- metres ne pouvoient guere qu'entaffer probleme fur probleme , comme ils ont fait , en appiiquant h chaque nouvelle recherche fa mcthode propre & particuliere. Aujourdhui un probleme de geometric ou de mechanique bien manie, & envifagd fous differentes faces, ouvre dc toutes parts une carrierc immenfe, & fait appercevoir une fuite de problemes & dc theo- remes dont I'ench.iinement prefente h I'efprit un fpedlacic fouvent plus cu- rieux & plus intereffant que les verites qui en etoient I'objet. Tome IX. Partie Franfoife. Hhh ^i6 ABREGE DES ME MOIRES Mechaniq ut. Anne'e tj^z. IlUt. M E M O I R E S E T OUVRACES DE MECIIANIQUE, P R£ SENT ES A l'A C A D E M I E- I. Sur Us SouJJlcts de certaines Forges , produits par Id chute de I'eau. JVxr. Bauthes, de Narbonne, charge de lever la carte de la pro- vince de Langiiedoc , nous a envoye tin memoire fur la conftrudlion dee fouftlets qii'on emploie dans certaines forges par le moyen de la chute de I'eau , avec des recherches phyfiques & mechaniques fur la maniere d'exc- cater & de perfedionncr ces Ibufflets. Comme c'eft h ce dernier point de vue , ^ la pratique & i I'execution , que fe rapportent principalement les recherches de M. Barthes , c'eft dans la claffe de la mechanique que nous nous fommes refervc d'en parler. Par cette meme raifon , nous ne nous ctendrons point fur la caufe phyfique de cette propriety cju'on ob- ferve dans les liqueurs qui fe meuvent k travers I'air, d'entrainer & de chaffer autour d'elles une grande quantite d'air. II fuffit que le fait fdit bien conftate , & il I'efl par une infinite de phenomenes & d'experiences. Comme c'eft fur-tout par leur furface extericure que les liqueurs en mouvement entrainent beaucoup d'air , il s'cnfuit que plus elles prelen- teront de furface ^ ce fluide , ou , ce qui revient au meme , plus elles feront divifces & fubdivifees en petites molecules , plus elles feront capa- Lles de produire I'efFet propofe. On doit cependant mettre des bornes ^ cette fubdivilion , il faut que les molecules ou les gouttes de la liqueur qui en refultent , aient affez de poids pour vaincre aifcment la reliftance de I'air qui s'oppofe h leur mouvement, & pour y acquerir une certaine Viteffe. Les quantites de furface des corps de meme figure & les reliftances du milieu ^ leur paffage , ctant entr'ellcs en raifon inverfe de leurs dimen- fions femblables , ou de leurs diametres , deux gouttes de pluie , par exemple , pourroicnt avoir entr'elles tel rapport de groffeur & de poids, que I'une parcourroit dans I'air, par fa chute, plufieurs toifes en une feconde de temps, tandis que I'autre n'y parcourroit pas un ponce , & n'y produi- roit par confequent qu'un mouvement infenfible. Aufli voit-on que ce font prefque toulours les groffes pluies, celles qui tombent avec le plus de ra- pidity, qui font prdcedces ou accompagnies d'un plus grand vent. L'infpeftion de la nature pourroit do,-c avoir appris aux hommes ^ DE L'ACAD^MIE ROYALE DES SCIENCES. 417 conftruire Ics foiifflets dont il s'agit •, & eii eft'et um partie de I'art qu'on — ^^^""^^ y emploie, conhftc h rompre , i diviler d.ins line ccrtainc proportion '•! JVIi-'ch anio u ■ maire d'caii dont on pent difpoler pour Ics former par la chiite , & i la reduire en gouttcs i-pcu-prcs feinblables h celles dcs groffes pluies •, mais Ann^e tj^s- il y a encore plus d'apparence cjiie c'eft: ^ quelqiie heureux halard que nous en fonimes rcdevables. On voit dcs foulllets de cctte cfpece dans les mines de cuivre de Tivoli auprcs de Rome ; il y en a plulieurs le long de I'llere entre Romans & Grenoble, k Saint-Pierre, village dii Haut-Languedoc, dans les Pyrenees & en d'autres lieiix. Leur conftrmftion varie felon les circonftances loca- les, Li hauteur ou I'abondance de la fource, felon I'ufage auquel ils font deftincs, & enfin felon le genie dc I'inventeur on de I'ouvrier. Entre tous les foufflets a ea« qu'a vus M. Barthes, ou ^ compter depuis le foiul dc l.i cuLilfe , qui eft crcufec {phdriqiiement. Mechanique. Cette piece pcfc uii pen plus dc 865 livres. Elle eft prelque .uiffi torte que les canons ordinaircs de bronze, ayant Annee iy4Z, environ i pouces ]■ d'epaitieur au premier renfort , & n'etant par conlc- qiient k ce renfort que d'environ 5 lignes plus foible que les canons de bronze, & de pareil calibre, au premier renfort defquels on a coutumo de donner 5 pouces. Elle eft auni d'environ 2. pouces \ plus courte. Ayaht etc cliargee & tiree trois fois , elle foutint fort bien les trois coups de foil epreuve toujours i boulet; favoir, un coup avec une chirge de poudre du poids du boulet, un coup avec une charge de trois quarts, & un troilicme coup avec une charge aux deux tiers du boulet. On fut environ une heure a tirer ces trois coups , & la piece n'en retint aucuiic chaleur fenllble. La poudre qu'on y eniploya eft de celle qu'on nommc poudre de guerre, & avoit etc prife a rarfenal. Aprcs ces eprcuves le canon fiit lave, & ctant pofe verticalement la bou- che en liaut & la lumiere fermee , on Ic reniplit d'eau, &: I'eau y refta pen- dant 18 heures, fans tranlpirer par aucun endroit. Ce canon, quoiquc plus leger d'un quart ou environ que ceux de bronze de nicme calibre, eft pres de quatre fois plus pefant h proportion que les premiers qui avoient etc forges , &■ qui cicverent au premier effai. Une augmentation de poids li coiihderable diminue beaucoup Tavantage qu'on s'ctoit promis de ces canons pour le fervice dc terre, par leur Icgcrcti, & pour la facilite du tranfport •, niais elle ne leur ote rien par rapport au I'ervice de mer, 011 Ton ne fe plaint pas du poids des canons de fonte de fer , quoique plus pclans 'k proportion que celui ci de plus d'un quart. D'ailleurs , I'experience nous apprendra peut-etre qu'on en a augment^ I'cpaiireur au-dcl^ de ce qui ctoit neceffaire. Quand on a fouhaite davoir des canons de fer forge , on a efpere que fi Ton pouvoit reuffir i les faire d'un fer doux & fibreux, ces canons au- loient la qualite effentielle aux bons canons de fulil , de crever fans s'cn aller en eclats. II ciit done etc neceflaire , pour porter un jugement plus certain fur le dernier canon qui a etc prcfent^, d'en poulfer les eprcuves jufqu'i le faire crever, pour voir s'il etoit compofe de meilleur fer que les premiers, &: ll en crevant il fc feroit limplement fendui raais les S"- La- doyreau, Dide & Jandin n'ayant encore que celui ci en etat d'etre mon- tre , ont voulu le conferver pendant quelque temps. La meme raifon a empschc qu'on n'en reiterat les eprcuves un alTez grand nombre de fois , pour (avoir s'il rchfteroit plus au choc interieur & au trainement du boulet que ks pieces de bronze ; car lorfque I'ame de ces dtrnieres s'eft trop agrandie , on pent les refondre & en employer de nouveau le metal tans bcauconp de pcrte ; mais on n'a point cette reflource dans les canons de fer forge qui , en ce ca"; , ne peuvent plus fervir, & dont le prix, par rap- port ^ la matiere, fe reduit prcfque ^ rien en comparaifon de ce qu'il en a coiite pour la mettre en ccuvrc. Tome IX. Parlie Frangoife. I i » 43+ A B R i. G I D E S M £ M O I R E S MtcHANiQUE. MA C H IN E S et INVENTIONS Annie tj4%. approuvkes par L'academie En M. D C C. X L I I. I. Odometre. Ilift. \J N nomme odometre ou comptepas , line machine \ roiiage fort fem- blable ^ una inontre , & qui fert i compter le nombre de pas qu'on fait en marchant \ pied , ou Ics tours de roue d'une voiture. L'odometre a compter les pas s'ajufte dans le gouflet , oil il tient' \ un cordon qu'on fait pafler fur la jarrctiere au-deffous du genou, & qui, \ chaque fois qu'on plie le jarret, ou \ chaque pas, fiit avancer une aiguille qui marque les unites fur un cadran de la machine -, cette aiguille ayant flit fon tour , repond ^ une autre d'un fecond cadran qui marque les dixaines , & qui avance d'un cran \ celle-ci \ une troilieme aiguille & ^ un autre cadran deftine aux centaines pour autant de tours de la prece- dente , & ainfi de fuite Jufqn'i un cadran des raillicmes , ou des dix mil- liemcs s'il etoit necefTaire. L'odometre de la feconde efpece, & qui doit indiqucr les tours de roue d'un carroffe ou de telle autre voiture au dedans de laquelle on a cou- tume de I'ajufter, difFere peu du premier, fi ce n'eft par la grandeur & par la foliditii des pieces qui le compofent. C'eft celui dont nous ayons \ parler ici. Lorfqu'on a conflate par diverfes epreuvcs &: fur une longueur connue, la valeur des tours ou de la circonference des roues de la voiture \ la- quelle on a applique cet inftrument , on peut, par fon moyen, connoitrc avcc affez d'exacStitude la longueur du chemin que I'on a fait. C'eft de cette maniere que le celebre Fernel , medecin de la reine Catherine de Medicis, & I'un des plus favans hommes de fon temps, meme dans les fciences mathematiques , meiura le degre terreftre en allant de Paris ^ Amiens. II le trouva de 68096 pas geomctriques , ou d'environ 54747 toi- fes ; c'eft-^-dire , de 5 1 3 toifes plus court que ne I'a trouvti depuis M. Pi- card, & de 456 par rapport \ celui qui refulte des obfervations qui furent faites il y a trois ans : I'erreur n'eft que de 130 toifes fur le total. M. Pi- card , aide de tous les fecours de I'aftronomie moderne , & fur une fuite de triangles determines avec foin & felon les regies de la geodefc , s'y itoit trompe de lij toifes-, que pouvoit fairc Fernel avec un inftrumcnt qui, par le peu que nous en favons , ne lui donnoit les revolutions des roues de fa voiture que par des coups frappcs fur un timbre, & dans une route tortueufe , dont on ne rabattoit les finuofites que par la (implc cftime? DE L'ACADliMIE ROYALE DES SCIENCES. 455 Ce n'eft pas i des iifiges (i relcvcs , ni h mefiirer de grandes diftances • prelqiic toujours entrecoupees de rivieres & de montagnes , que i'on pre- , . , tend aujourd'hui employer I'odometre doiit il s'agif, mais on pent s'en echaniqve fervir trcs-iitilement en toiite autre occalion , & cela fans peine, fans cal- Ann^c I'/di. cul, & en vaquant i d'autres affaires. II faut fculement prendre garde que I'inftrument par fa conftrudlion interieure, & par la manicre dont il com- munique avcc la roue h laquelle il rcpond , donnc exaiilenient un pas d'aiguille iur le cadran des unites k chaque revolution de cette roue, & qu'il n'en donne jamais qu'un , qu'il Ibit folidemcnt attache , & que la inarche ne puiffe etre troublee par le cahotage de la voiture. L'academie avoit trouve tous ces avantages dans I'odometre qui lui fut prefente par M. Meynier en 1714. (a) II y reftoit cependant un defaut aUGUel julqu'ici perlbnne ne s'etoit Aviii de rcmedier. On ell quelquefois oblige de reculcr pour evitcr un mauvais pas, ou pour telle autre caufe que ce foit ; I'odometre cclle d'aller pendant ce recul , & reprenant en- iuite foH mouvcment ordinaire , il donne fur le cadran des unites Sc fur celui des dixaines. Sec. autant de tours de roue de trop en avant qu'il y en avoir' eu en arriere. II faut done alors, pour ne fe pas tromper, ctre attentif i compter ces revolutions excedentes, & i les dcdulrc enliiite de Ja longueur totale indiquce par I'inrtrument , ce qui lui ote une des prin- cipales commodites que nous lui avons attributes. Mais cet inconvenient a ete enfin trcs heureufement fauve dans un odometrc que M. I'abbe Ou- thier a prefente k l'academie. II fubftitue au rochet de I'odometre de M. Meynier, une etoile ^ lir pointes qui porte un pignon qui a aufli lix ailes , & dans lequel engrenent deux roues de 100 & de loi. Cette etoile eft retenue par deux lautoirs ou cliquets , I'un defquels eft toujours leve dans le temps que I'odometre agit, par une cheville placee fur I'une des deux poulies ou fe devide k corde qui aboutit ^ la roue de la voiture. Chacune des deux poulies eft iiiHl garnie d'une efpece de cliquet qui poulfe les pointes de I'ctoile dans le fens que tourne la poulie, & qui obtiit lorfque la poulie eft ramenec en fens contraire , par un reflbrt , dont une extremite eft attachee i un barrillet hxe a I'une des deux poulies, & I'autre , comme centre, i I'arbre fixe £k I'autre poulie. On voit que cette mechanique en faifant mouvoir I'une des deux poulies par le moyen d'une corde roulee delTus, en fera avancer ou reculer I'aiguille fur le cadran de I'odometre , felon que la voiture avanccra ou reculera. Ainii I'odometre dccomptera de lui-meme tous les tours qu'auront faits les roues en reculant. Cette dcfcription fuc- cindtc fuffit pour le faire cxtScuter k tout horioger ou machinilte mcdio- crement habile , & il eft h delirer que les perlbnnes qui font i portee de le procurer un lemblable inftrument & de s'en fervir, vcuillent en faire ufage pour perfcdionner la dcfcription topographiquc du royaume. (a) Voyez I'Hiftoire de cette ann^c, CoIIeiSion Acad. Part. Franf. Tome V. 4;'5 ABREGi; DES memoires I I. M E C H A N 1 Q u E. Aim/e 17 4Z. Nouvelle efpece de Clavecin. La mufique i plufieurs parties , vraifemblablemcnt iiiconnue aux ar.- cicns, doit avoir neceffairement produit des inflriimeiis nouveiux, ou dii moins plus compofes & plus etendus que ccux de nieiiie efpece ([ue les ancicns avoient deji, puifqu'il a falUi en imagintr qui hacnt a la fois tou- tes ces parties. On en peut Juger par les orgucs decrites dans Vitruve , qui Bont qu'un fort petit nombre de tuyaux , & par ceiles qu'on voit iur qucl- ques bas-reliefs antiques, comparees aux orgues que nous avons aujour- d'hui. Le clavecin , ^ cet egard audi ctendu que I'orgue, ell: encore plus nioderne •, car quelle comparaifon pourroit-on en faire avec quclques inl- truniens i percuffion des anciens ? L'orgue & le clavecin , qui (ont tout ce que nous avons de plus parfait en ce genre , nianquent ccpendant d'une perfection qui fe trouve dans des inflnimens qui lent font d'ailleurs bien infcrieurs par rapport au nombre des parties & i I'harmonie , tels que les inftrumens l archet, ceux qu'on pince avec les doigts, & les flutes ou au- tres pareils inftrumens ^ vent , dont on peut rendre le fon plus fort ou plus foible, plus ou moins enfle , ^ I'imitation de la voix. C'eft ce qui rend leur jeu fi animc, li touchant , & (i propre i emouvoir ou ^ flatter les paf- lions. Aufli a-t-on fait bien des tentatives pour procurer le meme avan- tage ^ l'orgue & au clavecin , mais jufqu'ici lans fucces , ou fans que les idees qu'on a cues fur ce fujet aient cte mifes en pratique. M. Perrault decrit dans une de fes notfs (iir Vitruve une efpece d'orgue de fon inven- tion , qui pouiroit pcut-etre imiter avec beaucoup de grace les accens & les inflexions de la voix-, mais M. Perrault ne dit pas que cet inftrument ait ete execute. Le farneux fliiteur automate de M. de Vocanfon , expofe \ la vue de tout Paris, & dont la mechanique a pout premier fondcment celle des orgues d'Allemagne , nous fournit un exemple brillant de ce que I'induftrie & I'art peuvent nous lailfer efpci-er fur cette matiere, & peut- etre ne feroit il pas polnble d'applicuer aux orgues ordinaires les moyens dont I'autcur s'eft fervi dans cette machine pour en modifier les ions. Quant au clavecin , nous ne favons que M. Marius, inventeur du clavecin brife , qui ait entrepris de lui donner la tcnue & les renflemens de fon des inflnimens h archet, & mcme d'y adapter I'archet. Nous vimes le mo- dele qu'il en avoit commence peu de temps avant fa niort , mais nous n'olerions dire quel en eiit cts le fucces, y trouvant des-lors des incon- veniens auxquels il n'avoit encore pu remedier. L'inftrument que M. le Voir a prefente cette annee a I'academie, a ete imagine dans le meme efprit, mais il eft d'une conftruition trcs-diftt^rente. C'eii: le compofe d'un corps de contre-bafl'c ou douhle-balie , & d'un corps de quinte-de-violon, aifujettis & renfermcs dans une caiffedont la forme eft ^ peu-prcs la meme que celle d'un clavecin un peu court. Cha- cun de ces corps d'inftrumtns porte vers fon milieu plufieurs chevalets DE L'ACADEMIE ROYALE DES SCIENCES. 457 fixes, fur lefcjucls pjlTcnt des cordcs de boyau tcriniivics h rextremitij inij — — w^mb— repond au petit bout du clavecin, par de petites traverfes ou fillets fixes, w & i I'autre extrciiiite vers le gros tout, par des couliffes fur klquelles^ eciianiqve. clles portent & qui font I'otKce de petits chevaleis mobiles. Par ce moyen Annc'i 1142., chaque corde etant coupee en deux pa: ties incgales par Ics chevalers du mi- lieu , chaoune de ces p.utics rend un ion relaiif \ la longueur , & aiiili I'inftrument a reeliement 50 touches, quoiqu'il n'ait que 15 cordes. Ces 2<; cordes (ont arrctees vers le bout qui regarde le Joueur, par des clie- viiles femblables a ccUes d'un violon , & qui fervent i les tendre & ^ les accorder •, & les petits chevjlets ^ coulille qui font tout auprcs, fervent ik en accorder exaiftcment & dans la proportion requife, la partie anterieure avec celle qui fe tcrmine ^ I'autre bout. Toutes ces cordes ou leiirs deux parties font traverfees ^ angles droits par d'-s archets , qui ne confiftent ici qu'en de limples ccheveaux de crin ; i chacune de Icurs extremites ils palfent fur des rouleaux places aux deux cotes de la caifle, oii ils viennent s'attacher ^ deux tringles de bois , qui font tires en bas par des cordes que font mouvoir les pieds du Joueur au moyen de deux pcdales. Aucun des archets ne touche les cordes •, les chcvalets fur lefquels elles pofent etant de hauteur ineg;ile , un archct en particulier ne pent toucher que celles du chevalet auqucl il repond, quand on veut qu'il les touche; mais de plus, chaque archet pallmt alternativement dcHus & delfous les cordes de ion chevalet fans les toucher, fon mouvemtnt ne feroit jamais renJre aucun fon 'k I'lnftrument, (1 par la niechanique qu'on va voir I'ar- chet ne s'npprochoit des cordes qu'il doit cbranler. Le large taout de la cailfe eft garni d'un clavier tout i- fait femblable ^ celui du clavecin. Ses touches portent ii leur extrtimitc poftericure une petite poulie ou un rouleau, qui, en s'elevant lorfqu'on appuie le doigt fur la partie anterieure , oblige I'archet de s'approcher de la corde qui eft au-deffus , & de la toucher en coulant & en continuant fon mouvc- iTient , auqucl ce rouleau obtit en tournant (ur fon axe. D'autrcs roi^- leaux portent fur les archets en dellus, & les obligent ^ defcendre fur Ics cordes qui fe trouvent delfous , & ces derniers tiennent a des bafcules que les touches font lever par leur bout interieur. Par ce moyen, & les archets etant en mouvement autour des cordes delilis & delfous, ii Ton appuie les doigts fur les touches , on oblige les archets h s'approchcr des cordes , Sc ces cordes touch ies relonnent plus ou moins fort , i mefure qu'on appuie plus ou moins-, aiiili \'o\i peut en enfler ou diminuer le ion, felon que I'exige le chant des pieces que Ion joue. Les oaffes de cette cipece de clavecin qui dans cette partie n'eft qu'une contre-bafle , relfcniblent aufll beaucoup pour le Ion i celles de cet inf- trument, & les tallies, fur-tout lorlqu'on ks touche Icgerement, ont beau- coup de rapport ^ celles de la viole touchees, comme difent ceux qui en jouent , en cnlevant avec I'archet. Le fon des delTus relfemble davantage b celui que rendroit un delUis de viole dun patron auffi grand que la quinte d'lm violon , qu'i» cciui 458 ABRiGEDESMEMOIRES 1,^^ dn violon mcme. II eft vrai qii'en ajoutant aiix deux corps d'inftrumcnt dont ce clavecin eft compoie , un corps de deflus de violon, on pourra Mechanique. ^j_|ij|.g parvenir k lui procurer un fon plus approch.int de celui du def- Ann^e 17 r- '"^ ^^ violon; & c'eft ce que I'auteur fe propole d'eprouver dans le pre- mier qu'il fera conftruire. La cadence du nouvel inftrument eft peut-etre ce qu'il y a de plus (ingiilier •, car chaqne archet etant dans un mouvement continuel , & no touchant qu'un inftant fur la corde , cette cadence ne reiremble , k pro- prement parler, ni k celle du violon, ni i celle de la viole, ni a cellc du clavecin , & fi Ton pent la comparer I quelque chofe de connu , c'eft plutot .=» celle du Thdorbe qua toute autre. II femble cependant qu'eu alongeant un peu plus les archets , on auroit pu lui donner quelque chofe de plus lie , & c'eft le deffein de I'auteur ; mais il y a telle efpece on tel tour de chant auquel cette cadence, dans I'etat quelle eft, con- vient affez bicn. Le fon de cet inftrument etant continu, fon accompagnement fera pen favorable aux voix & aux inftrumens d'un fon doux , tels que la flute traverfiere , &c. k moins qu'on ne le reduisit i une ou deux parties chan- tantes & touchees tres-legerement. Ce qui eft certain, c'eft que la manicrc ordinaire d'accompagner fur le clavecin n'y convient pas. Celle dont on fe fert pour accompagner fur I'orgue le plain-chant & les pieces en taille, paroit y ctre plus propre. C'eft i I'ufage & h I'experience de nous inf- truire fur ce point, & de fixer le vrai gout d'accompagnement qui pourra convenir i cet inftrument, tant par rapport aux voix qu'aux flutes, &c. Mais quand cet avantage lui manqueroit, il meriteroit encore qu'on pnt foin de le perfedionner. Ce fera toujours une chofe tres-commode , de poiivoir fe donner i foi-meme & aux auditeurs un pareil concert de fym- phonie. S'il y avoit quelque perfedion I perdre du c6te de I'accompa- gnement & de la liailon avec quelques-uns des inftrumens qui font con- nus, & avec les voix, I'agrcment de trouver ainfi plulieurs parties reunies compenferoit bien ce defaut. En general cet inftrument a paru trcs-bien imagine, ayant tout enlem- ble Si la tenue des fens comme I'orgue , & la propriete de les enfler & de les diminuer comme le violon. L'ufage pourra aifement s'en ctablir , fur -tout lorfqu'on y aura corrige des defauts prefque inieparables des nouvelles inventions ; c'eft ce qu'on a tout lieu d'attendre de I'application & du genie de fon auteur. I I L Compas a tracer des Spirales. La defcriptlon organique des courbes fur un plan fait une des plus ingenieufes parties de la geometric & de la mechanique. Elle exige & une grande connoiflance des courbes quelle a pour objet, & beaucoup d'in- vention & d'induftrie, pour imaginer & conftruire les inftrumens propres DE L'ACADEMIE ROYALE DES SCIENCES. 459 ^ Ics tracer. Les ancieiis ne connoiiroient guere en cc genre que la regie & ^— — —^m le compas : la Conclunde-Nicomcde eft peiit-ctrc la leule cntre les coiir- „ , bes cjiii paffcnt Ic fecond degrc , qu'ils lullcnt dccrire par un moiivement "'^^"^^'^* continu, & par Ic nioycii d'lin inftriimeiit autre que le compas & la regie Annc'e fAZ, ordinaires. Cc fut Nicomcde lui-meme qui invents la courbc &r rinftrti- ' ment •, & c'eft cettc meme courbe Sc cet inftniment que M. Blondel , Win des anciens mcmbres dc ccttc acadimie , appliqua fi hcurcufement au trait du rcnflemcnt & dc la diminution des colonnes. [a) Un dcs plus hnbilcs commentateurs dc la geometric dc Defcirtes , ( b) s'cft rendu celebre par le traite qu'il donna de la dcfcription organique des fedions coniqucs-, & ijarmi les ouvrages de M. Ic Marquis Poleni , fa dcfcription organique de a tratftatoire & de la logaritlimique n'eft pas un de ceux qui lui font le moins d'honncur. Les courbcs tranfcendantes fur-tout, qui ne peuvent ctre dccrites par des points trouves de proche en proche qu'en titonnant, les cycloides , les fpirales , qui font d'un ulage li frequent dans les mc- chaniques, mcritent une attention particuliere. L'inftrument qu'on troii- vera pour les tracer, fera , toutes chofcs d'ailleurs egales, dautant plus parfait , qu'il en pourra varier davantage les efpeces. Le compas \ fpirales dont il s'agit , 3 etc prefente ^ racademic par M. de Tiliere. II conlifte en deux jambes, I'une droite, fixe & immobile, ne pouvant tourner fur fa pointe , & dont la partie fuperieure eft formce en visi I'autre, mobile & pouvant tourner autour de la premiere, comme fiir un axe. Cette jambe ou branche mobile qui eft plus grande que I'au- tre , eft compofee de deux parties qui font cnrr'elles un angle obtiis , de maniere que fa pointe pcut s'.ipprocher de la pointe de la branche immobile, & la rcjoindre , & que cet angle peut s'agrandir ou diminuer i volonte. La partie fuperieure de la Jambe mobile a une rainure droite. Lorfqu'on fait tourner cette jambe airtour de celle qui eft immobile, ce mouvement fait avancer dans la partie fapsrieure de la Jambe mobile un ' ccrou qui fait lui-meme gliffcr une fichc placce dans la rainure; & cette fiche en gliffant fait ouvrix de plus en plus cette jambe, \ mefure qu'ellc tourne autour de I'autre. Par le moyen de ce compas on peut decrire des courbes en forme de limacon , ou dcs fpirales dont les tours s'ecarteront de plus en plus les uns des autres , en s'eloignant du centre qn'occupe la pointe dc ii jambe immobile. On peut voir plulieurs de ccs fpinales dans le nombre infini de ccs courbes que M. Varignon nous a indiquees. (c) Pour faire que recartement ou la diftance dcs fpirales cntr'cUes foit moindre & plus uniforme, il faut que la Hche, ^ I'origine dii mouvement, du centre 4 la circonference, fe trouve plus loin du fonimct ou de la tcte du compas, & au contraire , fi Ton vent que leur diftance croillc davantage •, a quoi M. de Tiliere eft parvenu par le moyen d'une fiche i vis dans la coulilTe (a) Tome V. des anciens M^moires de I'Acad. Colleft. Acad. Part. Franj. Tome I. (i) Sthooten. . (c) Voyez I'Hiftoire dc 1704, CoUcA. Acad. Part. Fran;. Tome U. 440 A B R E G E D E S M fi M O I R E S, _.,.....■. jc 1,1 rainiire, & dont lecroii s'approche on s'ccarte i volonte de la tete ,, . du conipas. Comme les tours dcs Ipirales tracees par ce moyen n ont pas entre ciix Annde I7fy> d^s diftances on dcs rayons qui foient dans un rapport d'egalite avec le mouvement angulaire, ils ne lauroient reprcfeiiti-r la Ipirale d'archiiiiede ou ce rapport eft conftant. Pour en avoir de cette efpc-ce M. de Tiliere change la rainure redtiligne de la partie fuperieure de la jambe mobile en une rainure courbe, dont il donne la deicription par pluli'urs points^ Pour augmenter ou diminuer la diftance des fpires de ces couibes, & les faire plus grandes , il n'y a qu'a aloiiger ou ^ raccourcir les pointes des deux jambes du conipas •, ce qui eft facile , parce que ces pointes coulent dans un cylindre creux, oii on les arrete cnfuite par le moyen d'une vis. M. de Tiliere nous a communique quelque temps aprcs un nouveau memoire fur ce fujet, & une machine qu'il a ajoutee ^ fon conipas, pour en rendre I'ufage plus fur & plus commode. C'eft une efpece d'anfe mo- bile autour de deux charnieres, & dont la partie fuptfrieure eft compofee de deux platines circulaires , entre lefquelles on fait pafler la tcte de la jambe immobile du compas. On empsche par-li que cette jambe ne tourne autoar d'elle-meme, inconvenient qui peut arrivcr lorfqu'elle n'eft retenue qu'avec la main. Cependant il faut quelque dexterite pour falre gliffer commodement la tete du compas entre les deux platines, mais avec un pen d'attention on y parviendra aifement. On trouve dans ce dernier meinoire une methode pour avoir le centre de la fpirale qu'on veut tracer fur un plan , di qui doit fe rencontrer fur le milieu de la ligne qui joint les deux charnieres. Enfin , M. de Tiliere y cnfeigne la maniere de decrire telle fpirale qu'on voudra , an moins de celles qui font comprifes dans I'etendue de fon compas , foit en fe fervant d'une echelle qu'il doone , foit par le moyen d'une fimple proportion , lorfqu'il s'agit de la fpirale d'archimede. Ce n'eft pas feulement ^ la geonietrie & k la conftrU(5l;ion de certaines machines que ce compas pcut etre utile , il pourroit encore le devenir pour plufieurs ouvrages de gout & d'ornement. La volute ionique , par exemple, qui par d maniere dont on a coutume de la tracer , n'eft qu'un affemblage d'arcs de dirterens cerclcs ajuftcs bout ^ bout, auroit vraiiem- blablement toute une autre grace , Il elle etoit ainli tracee par un mou- vement continu. Ce feroit alors une veritable courbe fpirale dans toutes fes parties, & Ton ^viteroit par-lh fans tatbnner, ces coudes ii defagrea- bles k I'oril , qu'on ne corrige qu'en s'ecartant plus ou moins du prcr mier trait. IV DE L'ACADEMIE ROYALE DES SCIENCES. 44/ I V. MicHANIQUE. Bandages. ^n/e ij^u M. Heivetius, premier mcdecin de la reinc, & membre de cette academic , nous a communique uiie' defcription & dcs deffeins trcs-exa(5b d'une nouvelle efpece de bandage, qui lui ont etc envoy^s par M. Abeillc iiig^nieur du roi \ Nantes. Ce bandage confidere en g^niral eft compofe d'un inftrument \ reflbrts, & d'une fimple ceintiire de peau de chamois. Les parties de I'inftrument font une plaque de tole , deux pitons dont les trous font perces ^ pans , une petite piece de fer ronde dans tome fa longueur, excepts aux extrimi- tes qui repondent aux ouvertures des pitons , deux relforts ^ boudin , deux lames de fer attachees fur ces refforts , une chappe de fer mince , &c. On a tente plufieurs fois de fe fervir de reiforts dans la conftrudiou des bandages, mais differens accidens les ont toujours fait abandonner. 11 arrivoit, par exemple, qu'ils preflbient fortement la partie inferieure de I'anneau du nnifcle oblique externe, pendant qu'ils ne faifoient qu'unc compreUion fort Icgere (ur la partie fupcrieure, ce qui donnoit iffue aux parties qui forment la hernie, & pouvoit en occafionner I'etranglement. Mais M. Abeille a tres-Ligenicufement corrige ces dcfauts; il a fu touniet i I'avantage du bandage de fon invention les accidens qui font la caufe la plus frequente de rinfuffifance des bandages ordinaires. II avoit remarque que lorfqu'on vient ^ touffer ou ^ faire quelque au- tre effort, les mufcles du bas-ventre iftant pouflcs en dehors, la peloftc du bandage ordinaire, qui par ce moyen s'ecarte de I'anneau du mufcle oblique exteme, permettoit i la hernie de gliiTer cntre les piliers de ce meme anneau, ce qui I'expofoit i etre comprimee, & contribuoit \ .lug- menter I'ecartement des piliers. Mais le nouveau bandage eft tel, que lorf- que les mufcles du bas-ventre font pouffss en dehors par les efforts de la toux ou autres , la partie de I'inftrument qui doit s'oppofer ^ la pouffee de I'intcftin & de I'epiploon, & par conftquent ^ leur chute, loin d'etre deplacee, n'en devient que plus ferme & plus inebranlable, parce <)ue la plaque de tole qui eft au-dcffus de I'anneau du mufcle oblique externe , & qui alors eft poufii^e en d..-hors, fait que par un mouvcmcnt contraire les refforts fe bandent & s'appliqiient plus immidiatement & plus forte- ment tons deux , favoir , I'intcrieur fur I'anne.iu par ou pourroient fortir les parties qui font la hernie , & I'extcrieur fur le trajct quelle feroit U elle ^tuit de nature ^ dcfccndre dans le fcrotum. Que! que foit le jugemcnt favorable que I'academie a porti du bandage de M. Aoeille, il n'y a que le temps qui en puiffc p.irfaitement faire con- noitre I'utilit^ ; mais nous devons avcrtir d'apres I'auteur , que les perfon- nes qui en ont deji fait ufige, sen louent cxtremement, & qu'aucune des pieces qui le compofent ne s'eft demcntie , maigre les toux violentes dont ces perionnes ont etc attaquees pendant pluilcurs mois. Tome IX, Partie Frariioife. K k k 441 ABREGE DES MEMOIRES MicHANIQUi. *^' Ann^e 174%. Ut pour Us Malades. Li lit pour Ics malades & impotens, dont on n'avoit qu'iin modele en petit, {a) a eti execute en grand cette annee, & perfeaionne par le St. Hannot menuilier , qui en eft I'inventeur , & enfuite par M. Guerin chirurgien de Paris, que fa profe/Hon & fon habilcte mettoient plus eii tm d'en connoitre les avantages, & de fuppleer I ceux qui pourroient y manquer. Une invention de cette nature, ainiJ perfcaioiinee, & qui in- tcrefle fi fort la fante & la vie des hommes, a paru ^ racademie meriter un nouvel examen. M^s- d'Ons-en-Bray , Petit , Morand & de la Sone , qui en avoient et^ charges, ont donne une defcription trcs-detaillee de la ma- chine & de fes iifagcs, I'ont irouve ingenieufe & utile, & I'acadcniie en a porte le meme Jugement. En general tome cette mdchanique , qui eft affez compliquee , & qui conlifte principalenient en plulieurs cordons & poulies, fe reduit i faire en forte que le malade foit enleve doucement vers le ciel du lit , avec fes draps & les matelats , pour y en fubftituer de nouveaux fans I'agiter , & fans lui faire perdre fa fituation horizontale. V I. FuJiL a deux coups. On fait que les fiifls qu'on appelie tournans a deux coups, portent deux canons pofes Tun fur I'autre , qu'ils ont deux baffinets & deux bat- teries , avec un feul chien. _ Lorfqu'on veut fe fervir de ces fiifils , on niet le chien en bande , on tire le premier coup, puis on remet avec la main le chien en bande, & appuyant fur la fougarde , on tournc les canons , afin que cekii qui etoit deffous fe trouve deflus, & alors le chien qui eft refte immobile, fe trou- yant vis-i-vis le baflinet du canon fuperieur qui doit tirer le fecond coup, il n'y a qu'^ appuyer le doigt fur la gachette , & le coup part. Le Sr.^ Reiniers , dit I'Hollandois , arquebulier ordinaire du roi , a pri- fente I I'academie un nouveau fufil de cette efpece , & de fon invention, qui a plufJeurs avantages. II fuffit d'appuyer fur la fougarde en tournant les canons pour tirer le fecond coup •, le chien fe releve , le fufil s'arme de lui-meme, & eft en itit de tirer. Tout ce que le Sr. Reiniers a fait pour cela , a ith. d'ajouter une piece ^ la platine de fon fufil , & d'y changer la figure d'une autre. La piece ajoutee eft une efpece de levier qui, etant engag^ par une de fes extremi- tes fous le limacon , appuie fur le grand reffort , & releve le chien en fai- (a) Hiftoire de 1741 jcideffus. DE L'ACADEMIE ROYALE DES SCIENCES. 445 Cant tourner I.1 noix. La piece dont il a cliang^ la figure efl I'dcrou qui, ■—,■■ dans tous les fufils tournans , prefle & retientles uns centre les autres, le ' ] tambour, la fourche & la piece dans iaquelle les culafles font affujetties , ^^ "**"'2"'• c'eft cet icrou ordinairement arrondi que le Sr. Reiniers a fait en fpirale Ann^e ou limacon. Le relevement du chien s'exicutc avcc bcaucoup dc douceur & de prccifion par ces petits changemcns , qui augmenteront peu le prix de ces armcs, qui n'exigeront pas de frequentes reparations, & qui vau- dront au fufilier ou au chaffcur une attention de moins , & lui feront gagner un temps quelquefois trcs-prccieux. La limplicite de cette invention , & tout le rede de I'exccution de I'ou- vrage , marquent I'habilete de I'ouvrier , qui foutient fort bien la grandc reputation que fon pere s'etoit acquife dans rarmuxerie. V I I. Machine d battre des Pilotis. Le Sr. Francois Martik, entrepreneur des batimens k Grenoble, a envoye la defcription d'une machine qu'il a imaginee pour enfoncer des pieux & des pilotis le long des rivieres. Le but de I'inventeur eft de fubftituer la force de I'eau ^ celle des hom- mes qii'on a coutume d'y employer. Pour cet effet, il etablit fur un bateau la fonnette ordinaire, machine fort connue, & avec laquelle on enfoncc des pilotis. II y applique une roue que le courant de I'eau fait tourner. L'axe de cette roue qui eft horizontale , pafle dans un tambour autour duquel s'enveloppe une corde, deftinie i enlever le mouton. Ce tambour peut tourner lui-meme fur l'axe de la roue, & s'y fixer ou s'en detacher par le moyen d'une clef ou broche de fer qui entre dans raillleu de la roue & dans le tambour. Lorfqu'il eft fixd k cet aiflieu, le mouton s'en- leve , & lorfqu'il en eft detach^ , le mouton retombe. Un feul homme fuffit ^ cette manoeuvre, c'eft-i-dire, k fixer & i detacher le tambour, en enfonc.int ou en retirant la clef, par le moyen d'un levier qui s'y applique. Tout le merite de cette machine confifte dans I'ufage qu'on en peut fairs lorfque la force du courant eft fullfilante , & qu'on veut racheter par le temps la depenfe des hommes qu'il faudroit employer ^ la machine or- dinaire. V I I L Serpentaux, Une machine fort fimple &: qui paroit devoir etre commode d.ins la pratique , pour charger h la fois un grand nombre de ferpentaux 8c autres i)etites pieces d'artifice , a etc communiquee i I'academie par le Sr. Pas-dc- oup d'Orlcans. Cette machine nc conlifte qu'cn deux plaiichettes , nofccs I'une au-delUis de Tautre. Celle de delTus peut fe haulier & le baiiler, & elle eft percee de plufieurs trous , de mauierc it y laiUer paffer autant de Kkk ij 444 ABRfiGE DES M^MOIRES ^^■^M^^— lerpentaux qui portent par leur autre extr^mite fur la planchettc inferieure. On charge chacuii des ferpentaux par le moyen d'un fourniment k reflbrt, Mechanique.^^jJ donne ik chaque ferpentau la qiuntit^ de poudre qu'U faut pour le Ann^e 17^2. remplir. D HORLOGERIE. Nouveaux /c/iappemens de Montrcs. nift. X^ E u X fameux horlogers de Paris , M^s- Pierre le Roy Sc Gourdain i font venus prifenter en meme temps ^ racademie de nouveaux ichappe- mens de montres, & lui ont lu leurs memoires fur ce fujet. Pour fe former une idee des changemens qu'ils ont faits ^ cette partie eflentielle de I'horlogerie , il fera bon de jetter les yeux fur la derniere roue des montres , appellee roue de rencontre , qui eft fort differentc des autres roues. Elle eft du nombre de celles qu'on nomme roues de champ , c'eft-^-dire, qui font terminees \ leur circonference par un anneau plat, pofe de champ ou perpendiculairement \ leur plan. On voit une autre roue de cette efpece dans les montres , & qui en eft ordinairement la troifieme roue-, mais celle-ci eft parallele aux platines de la cage, & a des dents perpendiailaires \ fa circonference , au-lieu que la roue de rencon- tre eft perpendiculaire \ ces platines, & que fes dents un peu crochues, font entaillees obliquement ^ la circonference de fon anneau, & penchent toutes vers un meme cote. De plus , la roue de champ proprement dite , & les autres roues, engrencnt dans des pignons qui leur repondcnt, au- lieu que la roue de rencontre n'engrene que dans deux palettes attachdes \ I'arbre du baLwcier , qu'elle pouffe alternativement en fens contraire. C'eft par cette mechanique que le balancier n'eft jamais un inftant en re- pos, & qu'il cede fans ceffe au mouvement qui lui eft imprimd par la roue de rencontre , parce que des que I'une des dents de cette roue , la fupi- rieure , par exemple , ^chappe de la palette qui lui repond , la dent op- pofee & infdrieure agit fur I'autre palette ■, & c'eft deli qu'on a donne le nom d'echappement \ cette partie de I'horloge. Si la force motrice, qui confifte ici en un reflbrt, etolt toujours egale, nne pareille conftruftion ne laiflerolt rien i delirer pour I'egalite de mou- vement qu'on fe propofe de procurer aux montres -, mais comme il eft impoflSble que I'adtion du reffort ne foit quelquefois inegale par elle- menie , ou tranfmife inegalement au balancier par les roues & les pignons intermediaires , il refulte de la maniere dont nous veiions de dire quelle y eft appHquee , que quand la force motrice augmente ou qu'elle dimi- nue , le balancier eft oblige de circuler plus vlte ou plus Icntement, fans pouvoir D^anmoins parcourir un plus grand ou un plus petit efpace pour DE L'ACADfiMIE ROYALE DES SCIENCES. 445 compenfer cette inegalite de vitcffc, D'oii il arrive que le rcffort fpinl — i— ■ qu'on fait ctre attache au balancier , & qui eft dellind ^ lui cominuntqiier , I'cgalite de vibrations propre aux refibrts, perd en grande partie I'avan- "* ^ •- " * '^ "^ ^ ^" tage qu'on en efpiroit , ne pouvant lui-mcnie Ics avoir igales , puilquc I'ifo- ^^/i/tf 7 7^;^ chronifme ou I'igaliti de durie des vibrations plus on moins grandcs des corps claftiques , ne fublifte qu'autant que ces vibrations s'achevcnt li- brement. Pour remidier ^ ces inconvinicns , le Sr. BaufFre, horlogcr francois, itabli ^ Londres, imagina en 1704 Icchappeinent qu'on nomme a repos , dans lequel tl fupprima les palettes & la roue de rencontre , & mit ^ leur place une efpece de cylindre & deux autres roues. II nous fuffira de dire que le principal ufage de ces nouvelles pieces eft de faire en forte que laiftion plus ou moins grande de la force motrice ou des roues inter- niidiaires fur le balancier , y produife des circulations proportionnees ^ ccttc acflion , & lui falTe dccrire des arcs plus ou moins grands , felon qu'elle le fait mouvoir avec plus ou moins de vitefle. Par-Ti le balancier ob^iilant toujours k toute I'impulfion qu'il recoit, la longueur des efpaces qu'il parcourt compenfe rinigalitc de fes viteffes , le reflbrt fpiral recou- vre la liberie de fes vibrations , & I'cgalite parfaite du mouvement de la niontre s'en enfuivroit necefiairement , f\ d'autres circonftances ne fe me- Iviicnt pas encore ici pour la troubler. Une des plus confiderablcs eft que cette facilite qu'a le balancier d'o- biir aux impulfions de la force motrice felon toute Icur etendue, lui per- met cgalement de cider aux fecouffes extcrieures anxquelles fe trouve cxpofee une machine que Ton porte ordinairement fur foi •, ce qui I'a fait retarder plus ou moins, & racme, comme on I'a eprouve , la rend, tou- tes chofes d'ailleurs egales , moins jufte qu'elle ne feroit avec I'echappe- ment ordinaire ik roue de rencontre •, & c'eft li ce que M"- le Roy & Gourdain ont cntrepris de recSifier par des voies fort ingenicufes , mais tres-dificrentes. M. le Roy conferve en g^niral I'ichappement ^ repos dont nous venons de parler , mais il fubftitue au cylindre du Sr. Bauffre un petit cone tron- que , & i fes deux roues qui font plates , deux roues de champ qui font mouvoir le balancier. La premiere montre qu'il ait exccutie fur ce plan , fut finie en 1757, & fervit d'exemple & d'eprcuve pour une gagcure con- liderable qui avoit etc faite ^ Lisbonne fur la preference qu'on devoit don- ner aux montres d'Angleterre , on de France. Celle-ci foutint d bien la comparaifon qui en fut faite avec une montre du celebre M. Graham, qu'il fut impoffible de decider laquelle etoit la meilleure. Le uiemoire que M. le Roy nous eft venu lire ^ cette occafion, a pani rempli de remarques curieufes & utiles , tant fur les cchapf>emens des montres, que fur la maniere d'y placer les pieces de la repetition, & fur quelques autres articles qui d'un premier coup d'ceil paroillent inditKrens, mais qui, lorfqu'on y regarde de plus prcs, fc trouvent etre de tres-grande importance. M. Gourdain a pris une autre route , il a imagine d'ajouter aux cchap- 4!^ ABREGEDES ME MOIRES »f^— i— ^™ pemens ^ repos line piece qu'il place fur la platine & fous le coq. Cette ,, , piece qui n'en fait qu'iine avec le rateaii , deiline ^ faire avancer ou recti- tcHANiQUE. j^j. ^i^p coulifle fur laquelle porte le reffort fpiral , & qui par fon mou- Annic iVdZ, vement fert k I'accourcir ou h I'aloiiger lorfqu'on veut avancer ou retar- der la niontre •, cette piece , dis-je , confifte en une petite Lime taillee en courbe, de manicre que le refl'ort fpiral la touche , & s'applique far fa courbure en d'autant plus ou moins de points que le balancier fait fi vi- bration plus grande ou plus petite. Le reffort fpiral s'accourcira done plus dans un cas & moins dans I'autre , ou , ce qui revient au meme , fa reac- tion en deviendra plus ou moins vive, plus ou moins prompte \ & cette conftruftion tenant lieu d'un rateau mobile par lui-meme, & k chaque inftant , felon I'exigence des cas , il eft clair qu'elle remediera aux caufes d'inegalite que nous avons indiquees. Mr. Gourdain a dej^ execute plu-- lieurs montres avec une pareille courbe; la premiere fut finie en lyzS. EUes fc font trouvees tres-juftes dans les differentes epreuvcs qui en ont ete faites , & I'academie , apres un mur examen , a juge que cette inge- uieufe invention meritoit d'etre fuivie. I I. Montre , & Horloge portative. Le meme M. Gourdain prefenta quelque temps apres ^ I'acadifmic une niontre , & une horloge portative en forme de petite pendule , avec ua memoire qui en contient la defcription. L'une & I'autre a pour force re- clame un balancier garni de fon reifort fpiral ordinaire , mais qui s'appli- ;jue 4 la courbe que nous venons de dbcrire dans I'article precedent, & de plus l'une & I'autre eft lans fufee. La petite horloge portative marque les heures, les minutes, les fecon- des, & le quantienie du mois •, elle eft ^ repetition continuelle, c'eft-k-' dire, qu'elle fonne d'elle-meme les haires & les quarts qu'elle marque. Elle repete aiifll quand on tire le cordon. On en fouftrait , fi Ton veut, la fonnerie pour ne lui laiffer que la repetition ^ tirage. On peUt en ar- rcter le mouvement ^ I'inftant de quelque obfervation qu'on aura faite. Son aiguille des minutes peut rettograder fans que la fonnerie crt foit derangee. Enfin elle eft k re veil. ' ■ Le principal merite de cette horloge & de la montre, dont I'executioH a ete trouvee d'ailleurs tres-parfaite , confifte ^ aller andi-bien qu'elles font, quoique fans fufee, fans corde ni chaine , & ^ balancier; car I'hor- loge ne s'eft derangee tout au plus que d'une minute dans les vingt-qua- tre heures , & quelquefois feuienient de peu de fecon^des , & la montre a paru aller aufli egalement que les montres brdinaires' ^-fiifee. M. Gourdain a voulu fans doute nous faire voir par-Irl plus diftindle-' ment I'utilite de d courbe; en quoi il a fort bien reufli, & I'academie en' a concu une idee avantageufe des echappemens ^ repos ainli rectifies ;' mais elle a juge en meme terrips iMiE a vu , avec plaifir, M..d'Arcy meriter mie feconde- fois (a) fes fuffrages par la folution fynthetiqiie da probleme fuivant. Ce probleme avoit ete propofe par M. Daniel Dernoiilli , fils du celebre pro- feffeur de Bafle , & celebre lui-meme par les ouvr.iges qu'il a doiines au public , & par les prix qu'il a remportes dans cette acadcmie. Tout corps qui defcend, qui gliffe ou qui roule le long d'un plan in- cline I rhorizon , preffe ce plan aux points oii il le touche , & cette pref- fion peut ctre decompofee en deux tendances ou diredtions dent I'une eft perpendiculaire, & I'autre parallele i I'horizon. Selon cette derniere, le corps tombant le long du plan incline tend k le faire reculer parallelement h rhorizon, & le fera reculer en effet, fi Ton fuppofe ce plan comme fji- fant partie de la furface d'un corps mobile qui , par une autre de fes hces planes , porte fur un plan horizontal infiniment poli. Si le plan inclini ^toit inebranlable , il eft clair que le corps qui roule ou qui gliffe deffus , decriroit une droite parallele i ce plan •, mais dans la liippofition que le plan incline eft mobile de la maniere que nous venons d'expliquer, il n'eft pas moins clair que le corps tombant, dont le mouvement devient des- lors compofe du fien propre & de celui du plan incline qui le foutient, defcendra felon une direcStion dift'^rente ou difteremment inclinee ^ I'hori- zon , & qu'il decrira dans I'efpace abfolu ou il fe nieut , une droite ou line courbe qu'on pourroit demander de determiner. Que fi pour rendre la queftion plus generale, on imagine, au-lieu du plan incline, une fur- face ou une rainure curviligne, on conceit que la ligne droite ou courbe decrite par le corps, tombant le long de cette rainure, fera encore diffe- rente. Enfin , on peut fuppofer que la viteffe du corps qui commence i gliffer de la partie la plus elevee de la rainure, foit telle qu'on voudra, comme s'il y etoit tombe auparavant d'une hauteur quelconque , failant toujours abftradion de tout reffort & de tout frottem?nt , & alors les- maffes, la courbe de la rainure, & la viteffe initiale du corps tombant ctant donnees, demander quelle eft la ligne droite ou courbe que le corps tombant doit decrire. Gn peut done encore ^noncer ainfi le probleme. Trouver la ligne de- crite par un corps qui tombe ou qui gliffe le long de I'hypot^nufe droite ou courbe d'un triangle reftangle, materiel & mobile, pofe fur un de fes cotes , & elevi perpendiculairement fiu un plan horizontal inebranlable. C'eft fous cette forme qu'il a ete propofe- & que M. d'Arcy I'a r^folu. Ou il nous fuftira de remarquer , i °. que dans le cas dti plan incline ou de I'hypotenufe redtiligne , le corps tombant decrit une droite difterem- ment & moins inclin6e vers Ihorizon que ce plan. i°. Que dans le cas od (a) Hilt. 1741. Voycz ci-delTut. DE L'ACAD^MIE ROYALE DES SCIENCES. 451 rhypoteniife e(l im arc de courbe , la ligne decritc efl aufli uii arc de ■■^^■^— »^ courbe , dont la foutendante eft moins iiiclince ^ I'horizon cjuc cello de , , I'jrc par oil le corps eft defcendu. Ce qui eft evident, puifijue dans le cas " '^ '^ ' ^ " ^• oil la made & la rcfiftance dii triangle materiel ieroient nuUcs, le corps ^nn^e Z74''. tombant defcendroit par line perpendiculaire , & que dans tous les autres cas finis, il doit venir rencontrer le plan horizontal entrc cette perpendi- culaire & le point oi"i le fommijt de Tangle aigu du triangle reculant, tou- choit ce plan avant que de reculer. }°. Que lanalogie des deux courbes eft telle, que les ordonn;5es de la premiere au cote perpendiculaire du triangle qui en eft I'axe, font divifecs par la feconde, en raifon donnce de la maffe du corps defcendant, i la mafle du corps reculant. 4°. Enfin , que pendant la chute de I'un des deux corps & le recul de I'autre, leur centre commun de gravite defcend par une droite perpendiculaire ^ I'horizon. Ce probleme fe trouve refolu analytiquement dans le quatrieme tome des (Eiivres de M. Bernoulli. MACHINES ET INVENTIONS APPIIOUVEES PAR L'ACADEMIE, En M. DCCXLIII. I. Machines d faire remonter les Bateaux^ & u brifer la Ckce des Rivieres. M, .R. Lavier, architede, a pr^fente i I'academie fept modeles dc machines dont les lix premieres font deftinces ^ faire remonter les bateaux centre le courant des rivieres , & la feptienie ^ brifer les glaces dans les grandes gelees. Les fix machines k remonter les bateaux font honneur ^ I'invention dc I'aiiteur , mais comme il y en a eu dqi quelques-unes de conftruites ^-peu-pres fur le meme principe pour la navig.-ition de la Loire, & qui n'ont pas entierement reulfi , il y a tout lieu de douter que celles-ci rcuffilfent. A I'cgard du brife-glace, comme le nomme M. Lavier, I'acadenue a jiigi qu'on pouvoit s'en fervir utilement , & qu'il pouvoit etre execute avec lucccs. On cviteroit par ce moyen une partie des accidens qui mc- nacent la vie des ouvriers employes ^ rompre les glaces , lorfqu'ils mon- tcnt delfus -, ce qui ne fe pratique que trop communenient poiu la feine, & au milieu de Paris. Lll \] 45 i ABREGfi DES MEMOIRES t— — — — Ccttc machine confide en line cfpece de mouton fiifpendu h une chevre ^ , qui pent s'incliner plus ou moins en s'avancant hors du bateau fur lequel MicHANiQUE. ^j[p g|^ pofee, & meme fe coucher tout-h fait pour paffer fous les ponts. Ann^e 17 43- ^^ plancher fur lequel porte toute la machine eft mobile, & peut tourner par Ic nioyen d'un treuil qui eft k I'arriere, & de quelques cordages; de forte que fans remuer le Jbateau on peut faire decrire ^ ce plancher un demi-cercle. Le mouton eft fiifpendu it un cordage qui s'entortille par I'autre bout i une poulie mobile fur fon axe, & qui n'eft cntrainde par cet axe, qu'au moycn d'une efpece de verrouil h relfort , qu'on peut la- cher par une corde qui y eft attachee & qui fort par I'autre bout de I'axe : les hommes appliques aux manivelles qui tiennent ^ cet axe, peuvent tou- Jours tourner du meme fens & fans s'arreter, & Ton eft maitre de lacher le mouton quand on veut, & de telle hauteur qu'on veut. On peut aufli fe fervir d'une pareille machine comme de pilon , pour ecrafer des matieres fort dures enfermces dans une boite. Mais \ I'^gard de I'emploi que M. Lavier croit qu'on en peut faire pour battre des pilo- tis , outre que les moutons de cette efpece ne font pas nouvcaux , on pourroit craindre que celui-ci n'apportat de la lentcur dans I'operation , i moins qu'on n'y employat un nombre d'hotnmes coiifiderable , auquel cas la fonnette ordinaire feroit preferable. I I. Machine hydrauUque. Cette machine , que M. I'abbe Geffrier a prefentee ^ I'academie , eft compofee d'un refervoir qui a quatre faces egales, plus hautes que larges, & paralleles entr'elles. II eft fermc par en bas, & fur le fond d'en haut il doit y avoir un tuyau montant pour porter I'eau que la machine eleve. Deux des faces paralleles du refervoir font percees , & portent des foupa- pes qui s'ouvrent en dedans. Ces memes faces ferment avec deux pun- jieaux mobiles qui y font attaches , deux efpeces de foufflets de cuir , aux- quels on donne un mouvement alternatif par le moyen d'un chaflis qui tient un panneau ouvert pendant que I'autre eft ferme , & ces panneaux font aufli perc- grene dans la roue de rencontre oii aboutit I'echappement k repos dont nous ne repeterons pas ici la conftrudHon. On connoit la petite machine qui fert h arreter les montres ^ fecondes jufqu'au moment oil doit commencer line obfervation. Outre cette piece M. Gourdain ajoute ^ fon horloge d'eftime un cliquet brife qui fert^ ar= reter la demi-minute lorfqii'elle eft ecoulee •, & la brifure de ce cliquet fait qu'on pent aifement le forcer i fortir de la coche ou il eft engag^ , quand on veut remonter la demi minute. • Cette machine a paru ingenieufe, propre k I'ufage auquel elle eft def- tinee , & Ton ne doute pas quelle ne foit plus jufte que I'ampoulette or- dinaire. Ce quelle coiitera de plus fera avantageufement compenfe par I'li- tilite qu'on en peut efperer. .■..J .'ill if .) ' MA CHINE^S'^du IN VENTIONS • .{il'-ij 'jVj^.f! Li il.-v .:lr^i ijo .Tfjll A'P PROUVEESPAR L'A C A i> ii'ltfl 3E^ '' ! I, :; ■If jti!'. . Ek M D c a X I I V. . ,. HI.. II I !■— \j K moulin propofe par M. Darand , pour fervir k la fois k degraifler les etoffes,^ les degorger quand elles font teintes, & h. frifer les ratines-, A;ir..e 1J44- ^^ ^^ j-^ j-^j.^ communeraent pour cette derniere operation que de ma- ilift- chines mues par des hommes ou par des chevaux. On a cru qu'un mou- vement ^gal, tel que le courant de I'eau, feroit plus convenable au but quoo fe prpppfc, & que les ratines y feroient beaucoup mieux frifees. iO;U li"V!;''>r! - • II. On connoit depuis long-temps I'ingenieufe machi?ie, inventee en An- gleterre, pour faire agir une pompe par le moyen du feu, I'acadcmie en a plufieurs fois parle dans fon hiftoirc. M. de Genfanne a trouve moyen de la rendre conhderablcment moins compofee, raoins couteufe & moins fujette aiix accidens; il y a joint un noiiveaa regulateur extremement iim- ple, & a mis cette machine en tel etat quelle peut ctre aifement executee par-tout oil on en aura befoin , & fous quel volume Ob voudra. ^ III. DE L'ACADEMIE ROYALE DES SCIENCES. 45; I I I. M E C H A N I Q U E. M. PoRRO, citoyen de Bcfangon, a fait voir ^ lacadcmic, de la tourbe /innce qu'il a trouve le fecret de convcrtir en charbon. Par les epreuves qui en out ete faites, on a jugc que cette nous'elie maticre chautfoit i-peii-prcs autant que le charbon de tcrre mediocre ', & comme clle peut ctre donnse ^ bcancoiip mcilleur marche , I'academie a cru que cette invention feroit avantageule au public. IV. Un nouvel odometre invente par M. de Hillerin de Boiftiffandeau, cct inftrument a, comme quelques uns de ceux que Ton connoiffoit deji , la propriete de dccompter les tours de roue que la voiture ^ laquelle il eft attache, fait en reculant, mais il a de plus celle de ne pouvoir mecomp- ter. On a trouv6 que cette machine etoit trcs ingcnieufement iniaginie , & quelle avoit toute la furete qu'on peut atcendre des inftrumcns de cette cfpcce. V. Une maniere de tirer k la filiere le fil d'acier canneic , deftine \ fiire des pignons aux monrres & aux pendules, par M. Blackey. II a paru par les effais qui en ont ete faits , que I'auteur ctoit r^ellement en pofTemoii de cet art dont les Anglois jouilfoient leuls depuis plus dc quarante ans, Sc dont ils faifoient un myftere. V I. Une efpece de guerite portative , propofec par M. Larier. On peut au moyen de cette machine , clever i une affez grande hauteur , un homme qui y fera commodement lans peril , & pourra de 1^ dccouvrir au loin ce qui fe paffe, ce qui pourroit etre fouvent utile ^ la gusrre : huit ou nsuf perfonnes fuffifent pour monter & demonter la machine qui fe tranfportcra aiferaent dans un ou plulieurs chariots. V I I. Une machine \ nettoyer les ports, prefentee par M. Macary. Cette ma- chine a paru ingenieufe, & on a penle que dans les cas qui y demande- roient quelque changemcnt, comme feroit la plus grande profondeur dc I'eau, ou la differente nature du terrein qu'on auroit ^ enlever, on pour- roit s'en rapporter k rinduftrie de I'auteur. Tome IX. Par tie Fra/ifoi/e. Mmra M r C H A N I Q U E. 45$ ABREGE DES MEMOIRES VIII. De nouvcllcs lantemes ^ reverbere, conftriiites par M. Bourgeois ;de Chateaublanc. Quoique I'idee dts lanternes ^ reverbere ne foit pas noii- velle, cependant comma ccIIl-s dont il s'agit, out la propricte de ne point jetter d'ombre au-deiTous d'elles, & qu'elles out paru donner plus de lii- miere que les lanternes ordinaires dont on fe fert pour eclairer- Ics rues, les cours & les efcaliers, I'academie a era qu'elles pourroieat etre utiles au public fi les frais n'en balan^oient pas I'avantage. IX. Une armure, propofee par M. Picault de Larimberture , pour defendre les bras du coup.de fabre; elle conlifte en quelques chaines legeres qui, etant attachees h un collier pafK autour du cou, defcendent pour couvrir I'cpaule & le bras ■, elles font loutenues dans une direction paralltle en- tr'elles , par quatre demi-cercles de fer qui s'attachent eux-incmes de dif- tance k autre , fur les bras jufqu'au poignet. On a cru que cette armure pourroit etre utile, fur- tout aux cavaliers & aux dragons qui font ordi- nairement plus expofes que les autres troupes, aux coups de I'arme blan- che tranchante. X. Un nouveau tour ^ tirer la foie des cocons, invente par M. Rouviere. II a paru que cette machine devidoit la foie tres-bien , tres-uniment & en plus grande quantite dans le meme temps, que ceux qui font adluel- lement en ufage , & qu'il meritoit de leur etre prefsre ^ tous egards. MACHINES ou INVENTIONS APPROUVEES PAR L' ACADEMIC En M. D C C. X L v. ,u. I. N projet de rames tournantes par M. I'abbe Maffon de I'academie de Dijon. L'academie a cru qu'on devoit en attendre plus d'avantage qu'on n'avoit pu reuflir ^ s'en procurer jul'qu'ici , nialgre les diverfes tentatives qu'on avoit faites •, que cette invention meritoit d'autant plus qu'on en fit des epreuves, qu'elles fe pouvoient faire aifement, en fe fcrvant des ou- vertures des labords ; & qu'il y a lieu d'efperer que I'experience fournira encore les moyens de perfedlionner ^ certains egards, cette invention dej^ fics-(imple & ties-ingenieufe. TPE rACADtMIE ROYALE DES SCIENCES, ^.jy 1 E »745- ' Un Ift fans colonncs dii Siciir Hanot, deftine aux mcm« nGges que yjn„/g Celui qu'il avoit prifente en 1741 : indtfpendamment de cjuelqucs perfec- tions qu'il y a ajoutc'es , celui- ci a de plus la conimoditc de pouvoir etre mis en ufage trcs-promptenicnt dans les cas prcflans, par la faciiite qu'on aura de le tranfporter & de le ftibftituer aux lits ordinaires fous toutes fortes d'impiriales. I I I. Une machine ^ curer les ports & les rivieres prcfent^e par M. Lavier. Quoique les dieffrcntes parties qui la component foient prefque toutes femblabics i celles qui font employees dans d'autres machines , cependant comme celie-ci eft affez fimple & facile k appliquer fur un bateau ordi- naire , on a cru qu'clle poiirroit fervir avec autant d'avantage que celles qu'oii emploie ordinairement k cct ufage. IV. Un nouveail rouet h filer, invente par le Sieur Andre Taint: : une fciile manivelie y diftribue le mouvemein i autant de bobines qu'on juge i propos d'y en placer : & chaciine de ces bobiiKS eft gamie de Ton epin- giler : on pcut arreter cflle qu'on voudra avec le pied aifemcnt 3i. lans in- terrompre le mouvement de la machine, par ce moyen les filcufes auront les deux mains libres, & feront en etat de beaucoup mieux travailler leur fil : fi on avoit la commodite de fubftituer h la manivelie un conrant dVau , on pourroit faire tourner h h fois un tres-grand nombre de bobines, & meme des devidoirs ou telles autres machines pareilles dont on auroit be* foin. Cette invention a para tres-fimple & avantageufe mx maniifadures. Une machine pour clever les eaux , propofee par M. Amy avocat an parlement de Provence. Quoiqu'cUc ne diftere pas pour le fond de celle de M. Joly de Dijon, dont on trouve la delcription dans le recueil des machines approuvees par I'academie , n°. io-, comme cependant M. Amy y a fait queiques changemens qui la rendent plus parfaite , & diminuent la depenfe deau qui y eft inevitable, on a penle que ces changemens pou- voient la rendre propre k plus d'ufages. M m m i) 4^o A B R E G £ D E S M 6 M O I R E S, &c. y I. MicH ANIQUE. Ann^e itac, ^^^ machine S> filtrer I'eau, du meme M. Amy : en ferrant plus on ^^^' ftioins les Sponges qui y fervent de filtres, on rend la filtration plus ou moins difficile ; on peut les oter & les remettre facilement lorfqu on vent ks nettoyer , les vaifTeaiix peuvent etre conftruits de plomb ou de terre , ce qui en rend le prix tresmodique. C'eft par toutes ces conliderations que , quoique cette machine foit fujette \ I'inconv^nient comraun \ tous les filtres , de ne pouvoir Sparer de I'eau les matieres ciui y feroient v6ri- tablement diffoutes , cependant racademie a juge queue etoit fuTceptible d'utjliti en diverfes rencontres. VII. Une marmite prefent^e par M. Pigage architede da roi de Pologne due de Lorraine : le feu y eft placi dans un tuyau vertical , foude au fond de la marmite qui eft perc^ en cet endroit, par ce moyen il agit plus puiflamment fur le fiuide dont il eft entour6. L'idee de placer un fourneaii au milieu de I'eau qu'on veut ^chauffer , n'eft pas nouvelle j mais on a Tobligation \ M. Pigage, d'avoir etendu I'ufage de ce fourneau, par Fap- plication qu'il en a faite aux vaiffeaux deftines \ faire ciiire des viandes ou des Mgumes j & on a cru qlie eetK machine pouvoit etre utile en plii- fieurs occaflons. VIII. Un compas d'engrenage invente par M. Gallonde, dej^ Connu par plu- fieurs inventions qui ont merite I'approbation de I'academie : cet inftru- ment extremement fimple, a paru d'un ufage plus fur & plus etendu qu'au- cun autre qui ait ete propofe pour la meme fin ; & il a de plus un avan- tage qui n'eft pas \ n^gliger, c'eft de pouvoir etre execute par un ouvrier meme niediocrement habile , fans ripn perdre de fa jufteffe. O BS E RVATIONS 'METEOROLOGIQUES. •«ftW»^*4^> " >**». *»(»*NWf» ^ N T l'Annee M. DC a X L 1 1. Par M. M A R A L D I, Ohfervations fur la quantiU de la pluie. E. Ann(fe 17 4Z. t N Janvier.. Fevrier. Mars Avril Mai Juln 7 I pouces. Ugnes I ,. o 6 .. o ,. o ,. o 4 f 4 f , 1 pouces. lignes. En Juillet 2 if Aout o 8 I Scptembre i 5 ^ Odobre i i i Novembre 2 2 ^ Dec£mbre„.... o 2 | DE L'ACAD^MIE ROYALE DES SCIENCES. 4^5 La pluie tombee dans les fix premiers mois de I'annce , n'a ctt5 que de -; ponces demi-limie, &celle dcs Cix dernicrs mois a 6tc de 7 | pouces «? lign'es, &: par conlequent la quantite de la pluie tombee pendant toute n]^^,^o,oioj'°f * Tannee, n'a etc que de ii pouces 9 ligncs & dcmie, ce qui marque uiie " annce feche •, ccpendant la moiffon & la vendaiige ont ete abondantes, Annie IJ^^ mais la recolte du foin a etc fort mediocre. Les laboureurS ont attribuc I'abondance dcs bleds .lu long f^jour que la neige tombee le 1 de Jan- vier & les I & 2 de mars, a fait fur la terre, & la mediocrite des foins k la fccherefi'e du mois de mai. Sur le Tliermometre. Lh froid de cette annee 1742 a hi fort grand, & le plus grand qu'on ait eprouve depuis 1709. II a commence par la neige qui eft tombee le 1 de Janvier, & il a etc en augmcntant Jufqu'au 10. V^oici le progrcs du froid marque par un thcrmometre de M. de RiJaumur , expofc au nord e» dehors de la tour orientate de I'obfervatoire ik 6 heurcs \_ du matin, avec les obfervations du barometre. Barometre Degr^t de froid au-deffous de la congeliUon. Tanv. 2 . . . 28P ol . . . . od neige. couvert, nord-eft foible, couvert, nord foible, ferein nord-eft calme. brouillard , nord-eft foible, ferein , nord-eft tranquille. ferein , nord-eft tranquille. ferein , nord-eft tranquille. , grand brouillard. L'ancien thermometre ^ la meme henre etoit le 10 de Janvier, jour du plus grand froid, ^ 5 degrcs ^, ou pretque 10 degres ; mais je m'appercus que ces thermometres baiffoient encore ; effedlivement ils conrinuerent de baiffer jufqu'^ 9 heures , que l'ancien thcrmometre etoit \ 8 degres j. Le thermometre de M. de Reaumur, qui eft \ cote de l'ancien dans I'in- terieur de la tour, etoit i 12 degres 5, & celui qui eft en dehors i 14 de- gres ^. II faifoit un grand brouillard epais , le temps etoit fort tranquille, comme il avoit ete les Jours precedens , & Je ne m'appercus point d'aucuii changement dans le vent-, j'y fus ccpendant fort attentlf , parce que jc fi- vois qu'on a remarque plulleurs fois que le froid eft plus grand lorf- qu'aprcs une gelce de plulieurs Jours le vent ctant au nord, fe tourne au midi. Mais le 1 1 au matin le vent etoit ^ I'oueft, & le mcme thermome- tre expofe au nord n'etoit qu'k 8 degres j •, le 1 2 il faifoit un grand vent de fud-oueft, & ce thermometre n'etoit plus qui 5 degrcs : il monta ^ 2 degres au-deffus de la congelation le i j , par un grand vent de fud- fud-eft, & c'eft la feule fois que je I'aie vu au-delTus de la congelation Tome IX. Partie Francoife. Nn* Barometre Degr« 2 . . . 28P ol ... od 5 • . 28 ok ... 5 4- . 28 It ... 5^: 5 • . 28 2 ... 8i 6 . • i? II ... Py 7 • • i7 9{ ... Ill • S . • 27 ici ... i2i S> • • i7 5> ... 12i 10 . • 17 8 ... 13^ 466 ABREGEDESMi MOIRES -""[■■•=■■ le z de Janvier jufquaii 15. An refte I'hiver a dure long-temps, ■ ~ car le 1 1 '& le iz du mois de mars le thermometre expofe nil nord etoit Observations ^ . ^^gtis ^ aii-deffous de la congelation, & je ne I'ai vu an tempere que M^^orologiques. j^^ ^ j^ ^^j'_ L^ f^^jj jg ^^ j^„ jc decembre a _ete afftz grand; le 17 dc Annife ijdz. ce mois le thermometre du nord a ete ^ 8 degres i- au-deflous de la con- gelation , par un temps ferein & un petit vent d'eft. La riviere a ete gelee la nuit du 16 au 27. La chaleur du commencement de juillet a ete fort conhderable, elk a approch^ des plus grandes chaleurs qu'on ait oblervees dans ce pays ; la li- queur de I'ancien thermometre eft montee le 1 de ce mois , \ 1 heures { apres midi , i 80 degres, celle du thermometre de M. de Reaumur qui eft i cote de celui-ci, eft montee h z8 degres, & celle du thermometre expole au nord eft montee ^ 29 degres. II y a eii plulieurs orages pendant ce mois, accompagnes de tonncrre & de greie. Vers la lin du mois d'aoilt il y a eu plulieurs jours fort chjuds-, le 27 de ce mois la liqueur du ther- mometre expofe au nord eft montee i 26 degres 4 , par un grand vent de fud. Sur le Barometre. Le mercure s'eft footenii dans le barometre i line grande hauteur pen- dant prefque toute I'annce-, il a et: ^ 28 pouces 6 lignes le 13 d'avril par un temps ferein & un grand vent de nord-eft , i 18 pouces 5 lignes 7 le 1 1 & le 1 2 du meme mois par un temps couvert & un petit vent de nord-eft, & le I'j par un temps caime & ferein. La moindre hauteur a ete de 17 pouces 2 lignes {• le 1 1 odlobre & le 4 de decembre, par un temps couvert & un petit vent de fud-eft. Declinaifon de V Aiguille aimantle. Lh x(, mai & le 2 de juin 1742, une aiguille de 12 pouces declinoit de 1 5 degres 40' •, le 2 1 de feptembre une aiguille de 4 pouces dcclinoit de 1 5 degres 1 o'. DE L'ACADEMIE ROYALE DES SCIENCES. 4^7 O BSER VAT ION S ME T E O R O L O G I Q U E S Observations M^teorologiqucs. faites a l^observatoire royal' Pendant l'A n n e e M. DCC. XLIII. Par M. M A R A L n I. Obfervations fur la quantite de la pluie. Efouces. lignes. pouces. lignes. N Janvier o s 4 En Juillct i 7 j Annie J-fJ. Mdm. pouces. lignes. IN Janvier o 5 { Fevrier i i j Mars I Avril I Mai 1 ' i Jilin I 4 'J I o En Juillct Aout - I 5 I Scptcmbre o i Oaobrc I 5 ) Novcmbre i 1 V Decembre '• ~ >, 6 4 -; La hauteur de la pluie tombie \ I'obiervatoire pendant I'annee 1745 , a etc de 1 5 pouces x lignes j , ce qui mnrque une annce fechc •, la pluie tombee pendant les lix premiers mois de I'annee, a ^te de 6 pouces le lignes ~ , & celle qui eft tombee pendant les fix derniers mois, a tte dc 6 pouces 4 lignes j. Obfervations fur le Barornetre a 6 beures du matin. Plus grande hauteur du mercurc dans le Barornetre. Jours, i P. L. Jaii"..-< '187 grand brouillard. Fivr..^' "^^iS 5 couvertjO. grand. 18 5 grand brouillard 18 jifereinjN.E.grand. 18 I'fer. N. E. foible. i 8 5 ferein , N, ^85 18 2 i ferein , calme. 18 4 fer.N.E.tres-foib Mars.. 1 J grand brouillard. DE UACADiMIE ROYALE DES SCIENCES. 469 ATIONS On voit par ces obfcrvations que la plus grande chaleur de I'annee 1745 eft arrivee Ic 17 de Juiii , que la liaueur de I'ancien thermometre eft "io"" Observ lee i 5 lieures aprcs midi h 74 dcgrc j , & celle du thermometre de M. de --• - ■ Reaumur, expofe au nord , h 16 dcgre •, la liqueur de ce dernier ther- mometre eft moiitee au meme degre le 3 1 juillct. Le plus grand froid ^f^nie Z/^J eft arrive le 7 de Janvier que la liqueur de I'ancien thermometre eft def- cendue i 21 degr^ , & cclle du thermometre dc M. de Reaumur I 5 de- gres I au-deffous de la congelation. D^dinaifon de I' Aiguille aimantie. J'ai obferve plufieurs fois pendant I'annee 174?) la dcclinaifon de I'aL- gu ille aimantce de 4 pouces, de 15 dcgres 10 minutes. OBSERVATIONS METEOROLOGiqUES faites a l' observatoire royal Pendant l'A n n e e M. DCC. XLIV. Par M. HE F o u c Ji V. Ohfervations fur la quantiti de la pluie. Efouces. lignes. N Janvier.... 055 Fevrier o Mars.. Avril.. Mai..., Juin .. 2. o I 5 5 4 I En Juillet 1 Aout I Septembre 1 Odobre 3 Novenibre.... i Dccembrc o foucts. lignis. '- 6 Annie 1744- 5 9 La pluie tombee pendant les C\x premiers mois de I'annee 1744, a ^tc de 5 pouces 9 lignes, & celle des fix derniers mois de 1 1 pouces i ligne, & par confequent la quantite de la pluie tombee pendant toute I'annee k cte de 16 pouces 10 lignes, ce qui approche dc I'annee moyenne. Sur le Tliermometre. Le froid de cette annie a cte affez grand, mais pourtant aii-deflbus de celui de 1 741 ■, la Seine a etc prife le 1 1 Janvier au matin par un vent de nord-cft foible &: ferein , le thermometre de M. de Reaumur expofe h I'air marquoit 7^, celui qui ctoit dans la tour 5 A 1^' T jJA N N E E M. D C C. X L V. Par M. D E F o u c H Y. Oiferyations fur la quantity de la pluie. Annie 1^4^' Mi;m. E pouces. lignes. N Janvier o 5 | Fevrier o Mars.. Avril. Mai.... Juin,.. 4 7 pouces, I En Juillet Aout 2 Septembre o Odtobre o Novembre i Decembre i , lignes. 6 i ^ i 5 J 6 S 7 10 La pluie , tombec les (ix premiers mois de I'annee , a ete de 4 pouces 7 lignes {, & celle des fix derniers mois de 7 pouces 10 lignes ^ , & par conlequent la quantite de pluie , tombee pendant toute Tannee , a etc de 1 1 pouces 5 lignes J , ce qui marque une annee feche , I'annee moyenne avant ete determiiiee en 1741 , de 16 pouces 8 lignes. DE L'ACADEMIE ROYALE DES SCIENCES. 471 Sur le Thermometre, Observations M^t(Soroiogiquei Le plus grand froid a hi le 14 Janvier, le thermometre de M. de Ann^e i"4S- Reaumur marquoit lod -^- expofe ^ rair,& I'ancien, placed cote, niarquoit 1 1 degres \. II eft i okfervcr que dans cet ancien thermometre , la temperature nioyenne des caves de robfervafoire y repond ^ 45 degres, & la conge- lation i 29 degres |. Le plus grand chaud a cte le 6 juillet, la liqueur du thermometre de M. de Reaumur eft montee h 14 degres i au-delTus de la congelation, i'ancien marquoit dans ce meme temps 69 degres. Sur le Barometre. Le barometre fimple a marque la plus grande elevation du mercure )t i8 pouces 9 lignes , le 20 de fevrier par un vent d'eft affez froid, il eft defcendu le plus bas \ xj pouces 4 lignes le 16 de novembre, par un vent du fud-oueft & un grand brouiUard. Didinaifon de V Aiguille aimande. Les 17, 18 & 19 mai 1745 > ""^ aiguille de 4 pouces declinoit de 16 degres 15' vers le nord-oueft. M. de Reaumur m'a communique les obfervations de la quantite d'eaii de pluie , tombce \ Nifmes , & celles du thermometre qui lui ont eti envoyees par M. Baux. La quantite d'eaU tombce pendant I'annee 1745 , eft de 4.; pouces 3 lignes , audi le pays a-t-il ete extremement maltraire par les inondations. Le plus grand froid a ete \ Nifmes le 20 Janvier, le thermometre de M. de Reaumur marquant Sd, le plus grand chaud a ete le 17 juiilct, le meme thermometre marquant ^\^ \. J'ai recu auffi celles que le P. Duchatclard, profefleur d'hydrograpbie \ Toulon , y a faites pendant la meme annee , dont voici le refultat. La quantite de pluie, tombee \ Toulon, a ete de 27 pouces 5 lignes j, aufll remarque t-il que cette quantite eft bicn au-detfus de ce qu'il plcut les annees meme pluvieufcs. Le barometre eft defcendu au plus bas le premier decembre , le mer- cure etoit \ 27 pouces 4 lignes , & le vent \ I'oueft-nord-oueft ; il eft monte an plus haut le } Janvier, le mercure ctant \ 28 pouces 5 lignes, par un temps calme & beau. Le thermometre de M. de Reaumur eft defcendu au plus bas les 25 & 24 Janvier marquant /<* 4 , & il eft monte au plus haut le 16 juillet marquant x\^. 47i A B R E C E D E S M E M O I R E S, &c. ■■^™^»^— L'aiguille aimantee dc 4 pouces y dcclinoit pendant les fix premiers Ob«erva.tions"'°'*', '^^ P"^" '^^ ''' ^^^^^^- ^- Sarrau a ecrk de Bourdeaux, qu'il etoit Mit^orologiques. 'tomb^ en cette ville en 1745 » 5° pouces 8 lignes d'eau. Par la comparaifon de toutes ces obfervations , il parolt qu'il a tombe Ann^e tj4§. beaucoup plus d'eau vers la partie meridionale de la France qu'k Paris, & que le plus grand froid & le plus grand chaud arrives k Paris , ont pre-: cede de quelques jours ceux de Nifmes & de Toulon, ,'^; Fin ^wTome neuvkmc. I 'o/ZvA ^.-.i./. P.ir/ . Fr . Tom IX.I'l.J. M.-in. .'.■ /./.• .Wjl-./'j'^.^y ^'.i,/^^ySJ'/.:K It.' r /■;.;.!. if i Mmh Fi., 3 >•/.;. + (■;•//•.•/ .-/ii/ Ti^V J'r r.->n IX T/ II. \L;n ..K-r.Lu.'.,-^, /'■..„■ C-;. /'/. /-//. J ic II 1 1 1 1 (JO I /< V 'ilut.s^ h vnuncus' . tv \s'sl lihu. ^r:'~^ iW/e.-f.J.uJ P.ir/ Fr.'Ii,m JX Pr Til. Met A^ /J^.\u^.j-44 .f.io.j.^.^ J>/ Xl/f. lWy<:f.'J. u./ I'urt. Fr Tom JZ. Pi 7/ .' ..T/.-w Je /^if.\i<'>.t-.f^.f:i,/.^ft^ .7^1 XIII. f. in t)t I ^^ ^•'r^ ^i If- ^' l\^U.-cl-l- 7.-. ix.r/.n ■ .Urn, Vf /.V, .1./ s K f. s X E fr UK s I'-iiii'ttiif u\'- t^/ir/ii'inrrifj' tJtt 'i/.r I'/w-r/if^-rif i^ct/i.r /a ii i.r/u/ufaliori . IS ectiou . Genres . /^«a•.-vv^/£^U.■/i/.•//^^{/yv4J'.■J■ /iy I Vi ivjiv/ />^'<-«..v/>^',e-/ 1 'c. /^rt'Vi vV/A/y iw^ / V - ,/n*t4.^t^r.ft'i/t<'7t/ . J/.)- ..re ,/ft 'iy-'r//^r '/ttv*-tetx/ '■<• fV2 - \^ Section. "uv .//.r A'ti, 1,-/1/ .fe.'' cn'.rtini.x: yji-/aif./'aic /crtJS e -^.rii/lW:'.i/.-.',;it.ui.','ti//.',/y/,,;,fi,.„ ,J,, , / •■'/■'■if.><-rifi..ui / .// Sitcctn . ^ + «7 iCi Cf-ai/c