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SEPTIEME

RECUEIL.

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AVIS.

Ce feptîeme kecueil & les précédens fe trouvent à Bruxelles, che^ Mr. Lemaire , Imprimeur - Libraire ; à Courtray , cke^ Mr. Gambar , Libraire ; & che^ tous Us principaux Libraires des Pays-Sas Autrichiens, fi'c. &c.

Iavisau relieur.

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Ce feptierpe Recueil doit commencer par l.i feuille A *f 'f 1" , jiirques & y coinpris la petite Table. On fera fuivre le Faux - Titre : Suite de la quatrième Partie du premier Recueil^ & la fignature 1***, juiqu'à la fin, avec la Table des Mati&res.

QUATRIEME PARTIE

D U*

SECOND RECUEIL.

m iHi. Il I S

k%

>*iim-:.

RECUEIL

DES

REPRÉSENTATIONS,

PROTESTATIONS

ET RÉCLAMATIONS

Z) E tous les Ordres de Citoyens , dans les Pays-Bas Catholiques ; au fujct des Infractions faites à la Conftitution , les Privilèges , Coutumes & Ufages de la Nation , & des Provinces refpeclives.

On y a joint la Joyeuse Entrée, avec Tes

Additions, &c.

Il y il roH.rta.nt une chofe que Von peut queljj'.efvis oppofer a.

la volonté du Prince ; t'e/i Ij. Religion. LiS Leix de la,

Religion font d'un précepte fiipérieur , parce qu'' elles font

données fur la tète du Prince comme fur celle des Sujets,

MONTESQ. Efprit des Loix , L. III , c. X.

'4^

De l' I m p r I m e r I e des Nation s.

M. Dec. L X X X V I [.

-t. 7

V

^ OCT 25 1968 ^

(7)

REMONTRANCES de^ rUniverfitc de Lo'uvain , à Sa Majeflé U Empereur & Roi ^ &c, 6'c. &c, (^)

SIRE,

V<

OTRE Université de Louvain n'a été principale- ment fondée que pour lervir de boulevard & de foutien à la piété ôc à la foi Catholique (h) : ceux qui la compofent, font chargés par état, & par les ordres, les plus exprès , émanés du Trône , de l'Inftruclion littéraire &: chrétienne de toute la jeunefie du Pays (cr). Former cette jeuneffe à la fcience.& à la vertu , éloigner d'elle tout ce qui eft capable de la pervertir, tels ont été toujours les devoirs facrés de fes Inftituteurs , & la partie la plus efientielle de leurs fondions.

Fidelle à Dieu & à fon devoir , TUniverfité op- poia conilaniment un digue impénétrable à toutes les néréfies , particulièrement à celles , qui depuis le malheureux fiecle de Luther & de Calvin , ont dé- folé l'Eglife , & màs l'Etat à deux doigts de fa perte. L'Univcrlité écarta touiours fort loin de la jeunefl'ff l'eiprit con-tagieux des difputes en matière de Rcli-

(a) Lz date manque au manulcrit de cette Pièce; mais il parole par tout fon contenu, qu'elle eft de l'an 1782.

{b) Tous les Diplômes & autres rrioauniens, concernsnt l'érection de l'Univerfité , prouvent cette aiicrtion. On iss trouve raflemblés dans le Livre impriitîé fous le titre de Privllepa Acad. Lovan. 6'c. Lov. 17^2 in-Ato.

(c) On peut voir entre autres , k célèbre Règlement de la vinte de l'Univerfité des Sét-cniirimes Princes Albert & irabellç^, dci'an 1617, iupiœmio &. ailleurs.

A A

C8 )

giori', Se tout ce qui pouvoit fervlr le moins du raoïulc a corrompre les mœurs , ou altérer la pureté de fa Doftrine.

Sa fermeté à cet égard , le vrai 2ele , la piété , le déiinrérelTcment, & enfin le courage héroïque de nos ancêcres , fe trouvent confignés à chaque page de nos fafre? , comme dans toutes les hiftoires de ce tems défaftreux , dont la Belgique malheureufcment garde un il profond fouvenir , & qui ont fouîlrait fept flo- riflantes Provinces à leur légitime Souverain. Tout cela a été reconnu enfin en plus d'une occafion par nos Souverains mêmes , les auguftes & pieux Pré- déceiïeurs de Votre Majeflé , qui attribuèrent haute- ment à rUniverfité , non -feulement la confervation de la Foi orthodoxe dans ces Provinces , mais en- core celle de l'Etat, & la fidélité des Sujets à l'au- torité légitime (a^.

Animée ainfi par l'hifloire du palTé & par de fi beaux exemples , l'Univerfité de Louvain ne peut en ce moment, que fe ietter aux pieds de \otre Majefté, à la vue des dangers , auxquels TEdit fur la Tolérance va expofer tout ce qu'elle a eu iufqu'ici de plus cher ! Elle ofe , Sire , vous fupplier d'éloigner ces maux & ces dangers , dont la crainte nous pénètre , de les éloigner de cette ieuneffe nombreufe & brillante , la fleur, refpérance, &c le renouvellement de la Patrie; & de quelle Patrie , Sire ! du Pays le plus florilîant peut-être de vos vaftes dominations.

L'expérience nous apprend , que jamais Théréfie n'a pu être tolérée dans un Pays la Religion Ca- tholique eft la feule Religion dominante, fans exci- ter tôt ou tard les troubles les plus funeftes ; car, ou la Tolérence civile y entraînera la Tolérap.ce Eccléfiaftique &:Religieufe ( & en ce cas la Foi efl

(a^ On peut voir à ce fu;et A^icol. VcrnuUl Academ» Lov. lé, I cap. 4. Se fur tout lib, 7. cap. ij, & dans l'E- pitre dédicat.

perdue ) (a) , ou elle fera le germe des clUTenîions , des haines Se c!e la fureur interminables des difputes (/>). Ces diffentions, ces haines, ces difoutes , font la fuite naturelle de la diverfité des Dogmes entre des Concitoyens , Se elles ne peuvent manquer d'être portées au comble , lorfqu'une de ces Religions , qu'on îiippofe être la dominante, condamne les Seftateurs des autres à la privation de tous les biens & de tou- tes les récompenfes d'une vie à venir , & les regarde même en général comme des viâ:ime3 dévouées à toute l'horreur d'un fupplice éternel : or c'eft pré- cifément ce que fait & doit faire la Religion Ca- tholique à l'égard de toutes les Se£les hérétiques fans diftindion , puifque Jefus-Chrift l'a fait lui-même , &: c'eft ce qu'elle propofe à fes enfans comme Dogme , & comme un Article eiTentiel & invariable de leur croyance (f) ; moyen après cela, que les Héré]

(j) La profeiTion de Foi de Fie IV, porte exprefTéinent: Hancvcrarn catholicam FiJerti ^ extra quant ncrno jhlvus efje fotcQ:. La Tolérance Ecciéfiaftiqne & Reiigicufe où. clcnc incompa- tible avec notre Foi.

ik) Les troubles des Pays-Bas foiis le Règne de Phiiippe II , Ceux de la France iufqu au Règne de Louis XIV &c. ce qui eft arrivé en Bohême du tems & fous la conduite îougueufe d'un Ziska, enWeftphalie f()i;s celle d'un Jean de Leyde , en Hongrie & dans d'autres Etats Catholiques en. diffé- rents tems ; tout cela prouve alfez notre aOertion.

k) Voyez la Note {a) ci-deiTus & le Cathechifme de l'Ar- clievèché de Malines & des autres Diocefes de la même Pro- vince, leçon 3,

On connoit aiTe?. racharnement des Hérétiques, & fur- toiit du parti Fhllofophiile contre TEglife Catholique au fu- jct de ce Dogme, qu'ils appellent cruel & barbare; mais fi Jefus-Chrlft l'a enleigné lui-même Ci)^' '^* Apôtres l'eu: prêché (2) & fi l'Egiiie n'a fait que le répéter d'après eux ,

a) Marc. 16, i'. 16. Ma::h. i3 , i>. 17. Joan. 3 , y. 1%. (i) G-Uc. j , jr. 20. 21. ad Tu. 3 , ^. 10. n, &c.

{ >o )

tiques puiflent vivre long-tems en paix avec ceux dont ils fe croient regardés comme féparés , non - feulement pendant cette vie , mais pendant réternité (^).

en le propofant à la croyance des Fidèles ; qui mérite le mieux le nom de cruel & de barbare , ou le lectaire , & le prétendu Philofophe , qui à force de clameurs étourdilTent le monde l'ur la crainte falutaire de fe perdre ; ou le Catho- lique qui lui anaonce une vérité rigide , fi on veut , mais néceflaii e pour alTurer Ton falut ? Au furplus , il y a long- tems que tous ces vains fophifmes & ces déclamations éter- nelles & fcandaleufes ont été rétines , pulvérifés même , par nos Apologilles. Les Nicole (i) les ThomaiTm ( i) les Papin (31 les Bergier ( 4 ) les Nonotte ( ■> ) le favant Évèque du Puy (maintenant Archevêque de Vienne en Provence (6), d'autres en grand nombre , ne laifTent rien à défirer à ce fujet. Il eft néanmoins à remarquer , que quoique ce foit un Do^ime parmi nous, que hors de l'Eglife point de falut , nous ne difons cependant à aucun Sectaire en particulier : Pous ferei damné ; Nous ne nions pas qinl foit ahfolument poffible , que «les Hérétiques , qui font baptifés & qui croient en Jefus- Chrift , puiiTtni; le fauver à la faveur d'une grande inno- cence des mœurs accompagnée d'une bonne foi, & d'une ignorance invincible : c'eft que dans cette fuppofit.on ils ne cefient pas encore d'être enfans de TEglife à laquelle li dirpofition de leur cœur & le baptême , qu'ils ont reçu , les tient toujours attachés. Au refte ce cas naturellement fort rare parmi les adultes, ne forme pas une exception bien pro- pre à appaifer les Hérétiques far le Dogme dont il s'agir , ri à diminuer fort !a haine qu'ils lui ont vouée.

l<î) C'eft de quoi le fameux Miniftre Jurieu Auteur infini- ir.ent confidéré parmi les P.éformés, ne fait aucune difficulté <le convenir. Après avoir parlé de la paix dans les Etats, Sc th la concorde entre les Citoyens, qu'on fe promet de la

(1) De l'unité de PEgHfe c'nnp. X. &:c.

(2) Traité de l'unité de rEgiie- Paris i6i6.

(î) Recueil des Ouvrages de M. F^pin, Paris 1713 8-vo, Tit. f. i Se fuiv.

(4) Le Dcifme refuté par iui-n;ême Lett, $. & ailleurs.

(5) Di<aion. Phiiofophique de la Religion , Art. Tolérance.

(6} Inllcuâion Palmeraie fui; la prétendue P.iilotophie des Incté<* «iuU^ modernes , tome i, cbap. 2.

D'un autre côté, comment Ce feroit-il que ck vrais & zélés Catholique^ pourroient entendre fans ef» froi , &: fans un laififlement mêlé d'horreur & d'indi- gnation, les horribles blafphêmes & les calomnies- atroces que les Hérétiques, les Calvinifles fur-tout, vomifTent continuellement contre les plus auguftes & les plus redoutables de nos Myfteres ! Comment pourroient-ils entendre de fang froid prononcer à tout propos le nom odieux & infâme d'Ante-Chrift &C de fils de perdition , que ces Sedlaires prodiguent , fans honte 6c fans retenue , au Chef vilible de l'E- glife , que nous appelions notre Père {a) ! Comment pourroient-ils ^nfin foutfrir toujours en paix , qu'où pouffe la témérité jufqu'à ofer taxer leur Culte d'ido- lâtrie , &: de tout ce que la fuperfîition a jamais en- fanté d'odieux (/>) ! Nous en concluons , Sire , que: des Religions fi oppofées & fi incompatibles dans un. Etat, fur-tout lorfqu'elles participent toutes deux aux

Tolérance civile, il ajoute, ., Que pour en venir à cette paix, il faut encore établir, qu'en ell fauvjen toutes Religions. J'avoue, ;7o«'y«i^i/, qu'avec une telle Théologie, on pour- roit fort bien nourrir la paix entre les diveries Religions : mais tandis que le Papille me regardera coir.ir.c un dam- 5, né, & que )e regarderai le Mahométan comme un réprou- vé, & le Socinien comme hors du Chrifbanirme, il fera impofllble de nourrir la paix entre nous car nous ne fau = rions aimer, fouffrir, ni tolérer ceux qui nous damnent. Nos Meilleurs tentent bien cela; c'eft pourquoi très aiTu- rément leur but eft de nous porter à l'indifférence des Re- ligions , fans laquelle leur Tolérance civile ne (éi-\'lroit de rien ^, du tout à la paix de la Société. Lett. de furleu. Lc:t. S. p. lu}.

(j) Voyez la prière ce Dlmancl'ie, après 'a prédication, imprimée avec les Bibles de Dordrecht. La ConfciTion Belgi- que, §. 36. La Préface qui fe trouve à la tète du Synode de Dordrecht Les ouvrages de Luther, des Flaccus lUy- ricus &c. en cent endroits.

{b] Cathéchiime d'Heidelberg , approuvé dans le Syno'.ie de Dordrecht, ?->o:ae. Dcrij.nûc. Rccueli des Actes 5c ÎVJéiV:0'.re5. du Clergé de France, l^aris, 1768, tome i. pag. 39. & fv'iv.

C'O)

t'iques puiffent vivre long-tems en paix avec ceut dont ils fe croient regardés comme féparés , non - feulement pendant cette vie , mais pendant réternitc (^).

en le propofant à la croyance des Fidèles ; qui mérite le mieux le nom de cruel & de barbare , ou le feclaire , & le prétendu Philofophe , qui à force de clameurs étourdiffent le monde fur la crainte falutaire de fe perdre ; ou le Catho- lique qui lui anaonce une vérité rigide , fi on veut , mais néceflaiie pour affurer fon falut ? Aufurpli:s, il y a long- tems que tous ces vains fophifmes & ces déclamations éter- nelles & fcandaleufes ont été réfutes , pulvérifés même , par nos Apologilles. Les Nicole (i) les Thomaffm (a) les Papin (31 les Bergier ( 4 ) les Nonotte ( ^ ) le favant Evèque du Puy (maintenant Archevêque de Vienne en Provence (6), d'autres en grand nombre , ne lailTent rien à défirer à ce {ii]et. Il eft néanmoins à remarquer , que quoique ce foit un Do^me parmi nous, que hors de l'EgUie point de falut , nous ne difons cependant à p.ucun Seclaire en particulier : Fous fere^ damné : Nous ne nions pas qis'il foit abfolument poffible , que des Hérétiques , qui font baptifés & qui croient en Jefus- Chrift , puiiTcni; fe fauver à la faveur d'une giande inno- cence des mœurs accompagnée d'une bonne foi, & d'une ignorance invincible: c'eft que dans cette fuppofit.on ils ne cefient pas encore d'être enfans de TEglife à laquelle la difpoution de leur cœur & le baptême , qu'ils ont reçu , les tient toujours attachés. Au refîe ce cas naturellement fort rare parmi les adultes , ne forme pas une exception bien pro- pre à appaifer les Hérétiques fur le Dogme dont il s'agit , ri à dimiuuer fort la haine qu'ils lui ont vouée.

{a] C'eft de qi'.oi le fameux Miniftre Jurieu Auteur infinî- mçnt confidéré parmi les P.éformés, ne fait aucune difficulté de convenir. Après avoir parlé de la paix dans les Etats, 8c fis la concorde entre les Citoyens, qu'on fe promet de la

(1) De l'unité de PEglife chap. X. &:c.

(2) Traité de l'unité de l'EgiiTe- Paris 1686.

(î) Recueil des Ouvrages de M. Papin. Paris 1723 J-vo. Tit. Ij ^, I &: fuiv.

(4) Le Déifmc refuté par iui-même Lett. $. & ailleurs.

(5) Didioii. Philofophique de la Religiot» , Art. Tolérance.

(â) inUcudion Paftùrale fut la prttcndue P.iilofopliie de* Incrc- «S'.ile^ modernes , tome 2^ cbap. lo

D'un autre côté , comment Ce feroit-il que c!e xrms. & zélés Catholique? pourroient entendre fans ef- froi , &: fans un faififfement mêlé d'horreur & d'indi- gnation, les horribles blafphêmes &: les calomnies^ atroces que les Hérériques , les Calviniftes fur-tout, vomifTent continuellement contre les plus auguftes èc les plus redoutables de nos Myfteres ! Comment pourroient-ils entendre de fang_ froid prononcer à tout propos le nom odieux & infâme d'Ante-Chrift & de fils de perdition , que ces Set^aires prodiguent , fans honte 6c fans retenue , au Chef vifible de i'E- glife , que nous appelions notre Père (a) 1 Comment pourroient-ils gnfin fouffrir toujours en paix , qu'on pouffe la témérité jufqu'à ofer taxer leur Culte d'ido- lâtrie , éc de tout ce que la fuperftition a marnais en- fanté d'odieux (h) ! Nous en corxluons , Sire , que des Religions fi oppofées &: fi incompatibles dans un Etat, llir-tout lorlqu'elles participent toutes deux aux

Tolérance civile, il ajoute, Que pour en venir à cette paix, il faut encore établir, qu'en ei\ fauv:en tpr.tes Religions. J'avoue, /^ou-yài^-i/, qu'avec une telle Théologie, on pour- toit fort bien nourrir la paix entre les dlveries Religions r mais tandis que le Papille me regardera ccir.ir.c r.n cam- né, & que je regarderai le Mahoir.éran comme un réprou- vé, & ie Socinlen comme hors du Chriftianifme, il iera impofrible de nourrir la pnix entre nous* car nou5 ne fau^ rions aimer, foutfrir, ni tolérer ceiix qui nous damnent. Nos Mefneiirs lentent bien cela; c'ert pourquoi très ailtt- rément leur, but eft de nous porter à l'indiiTérence des Re- ligions , fans laquelle leur Tolérance civile ne fei-viroit de rien ^ du tout à la paix de la Société. Lstt. de furïeu. Lat. S. p. //<;.

(a) Voyez la prière ce Dimancl'.e, après 'a prcôication, imprimée avec les Bibles de Dordrecht. La ConfofTion Belgi- que, §. 36. La Préface qui fe trouve à la tète du Synode de Dordrecht Les ouvrages de Luther, des Flaccus llly- ricus &c. en cent endroits.

•ybj Cathéchirme d'Heidelberg , approuvé dans le Syno'-ie de Dordrecht , Home. Dcr,j.:i^i. R:cueiî des Acres 5c Nîén'o'reî. du Clergé de France, l^aris, 1768, tome i. pag. 35. oi iulv.

( II)

emplois Se à radminiftration publique, font des ar- mées toujours en préfence , & toujours prêtes à s'af- faiiir les uns &: les autres (a).

Peut-être nous objedera-t-on que l'expérience eft contraire à ce raifonnement : que l'exemple de la Hollande , de l'Angleterre , de la SuiiTe , & enfin d'au- tres Pays Proteftans, prouve affez , que les difréren- tes Sedes , fans en excepter la Religion Catholique , peuvent fe fouffrir mutuellement & fe trouver en- iemble, fous un même Gouvernement, fans en trou- bler l'harmonie ^ en défunir les Sujets entre eux.

Mais ( &: c'eft à quoi il faut prendre garde ) dans toutes ces contrées , ce n'eft pas notre fainte Religion , c'eft une Sefte hérétique qui tient le ti- îiion du Gouvernement , & qui forme la Religion dominante de l'Etat : &: dès-lors la différence eft trop palpable , pour que des efprits juiles êsi attentifs puiffent s'y méprendre.

Les Seftes , quelqu'oppofées qu'elles foient entre elles, 6>c fur-tout avec la Pveligion Catholique , ne s'entre- condamnent cependant plus abfolument. Elles difent, elles croient , que pourvu qu'on foit d'accord fur les Articles , qu'il leur plaît , d'appeller fondamentaux , toutes les Religions font bonnes jufqu'à un certain pomt , & que du moins il n'y en a aucune , à qui le Ciel foit fermé {h).

Avec cette manière de penfer & d'envifager les chofes , il n'eft pas furprenant , qu'on puiffe vivre

iû) On "voit aïïez , qse c'efl du faic S: non du droit, que nous parions ici ; la Religion nous ordonne d'aimer tous les hommes fans exceprion, même nos plus grands ennemis, ïk les plus grands pécheurs : ello l'c permet donc de hai'r per- fonne; mais en même tems elle permet, elle ordonne de haïr les vices, & fur-tout i'iiércfie. O^tte difiiaftlon eli très-vraie ^'L très-néce.Taire ; malheurcuiement la folbleiTe harn aine eft gr.tTde , & rexpérieace prouve qu'on ne la fait pas toujours.

ib) Mémoires de i'Eglife , par M., de la Pvoque. Paris ^ 1C93 , in-^to. llv. 4. pag. 46S & (iilv.

€11 paix avec Tes Concitoyens : les diiïenîion.ç cîî matière de Religion , fous ce point ce vue , ne font plus , à proprement parler , que des difputes d'EccIe , des opinions fans confcquence , & très-conîpatibks entin avec le maintien du bon ordre ck de la tran- quillité publique.

Il faut cependant que l'enthoufiarme ne s'en môle pas , &c que les têtes ne s'échauffent pas trop. Sans ctre obligé de feuilleter les liiftoires des teins plus éloignés, ce qui eu arrivé depuis peu à Flefiingen, en Ecoffe , fur-tout en Angleterre , ious la 'conduitt d'un Gordon , fait bien voir , qu'à un certain point d'elfervefcence*, il n'y a de fécurité nulle part.

On nous demandera peut-être ici , comment il fe fait , que les Catholiques foient du moins laifiés en repos , & qu'ils y lalfient les Hérétiques à leur tour, dans les Pays qu'on vient de nommer ; ceux qui ne peuvent en aucune manière ni en aucun tems traliir ce dogme exclulif de leur Religion.

La réponfe eft faite : d'abord on vient de voir parf l'exemple de ce qui eu arrivé fous nos ^-eux en An- gleterre & ailleurs , que ce repos n'eft déjà pas trop alTuré : mais quand il le feroit davantage qu'il ne l'cfl réellement , la chofe n'auroit encore rien de furpre- nant , ni rien d'applicable aux Pays , la Religion Catholique domine avec la liberté entière , qui lui eft due de Droit divin , pour tout ce qui concerne l'exer- cice public de l'on culte. >j

C'cft que dans les Pays , pour le malheur des Peuples & des Souverains, elle n'eft pas la Religion du Prince & de l'Etat; c'eft-à-dire , elle n'eft pas dominante , les Fidèles 5c: leurs Miniftres font tenus dans un abaiffement & dans une fujetion con- tinuelle : point de culte publique , nulle apparence extérieure de K.eligion ne leur eft permife ; nul moyen de la défendre ou de la propager; il leur eft détendu , fous les peines les plus grieves , de travailler en pu- blic ou en fecret à la converfion de qui que ce puifTe être : ils font exclus fans ménagement Se iàns excep-

{ M > \\hn '^^ tout Fiiiploi Civil ou Eccl«*rMlViqiic, é< t\« mot ce f{\\\ \ le iiulimlrc rappurf avec rAclniiinflufidii

fHilMique. En un nvn, les Loix (In VA\"^ nuMikV»; ("ni 'crprit rie \.\ SocK tliuiiivmtr. lent Ibtuinif aUlolutimnt 1.1 lH)\iche pont LcnilMitic rcircui , on po\ii iVMMcmr

li en eft, Ik il tU'it, (àws doute en t^tie (ont au- trement tUns Icî Ëi;Us CAtliollmies , , jiMcc A li< divine IVovitleiicc ftt à Ia loi tlu Souvci.iin, h vt^- rite n'cll p.is eucnte captive, Ik lie l.unoit IVtrc k ce point, tant qu'on ne vinulta p.m l'ilMurer.

D.ms CCS Etats, les Minillrc; cle la vraie Re- lipion Ik de U faintc Doctrine ont , (k doivent avoir nccclTairemcnt la liberté île mai cher tête levée , do montrer l'appjireil de leur nùnillcie , 5< d'aniioiuer en public an Peuple aflemlilé aulont d'onv dan«; les Temples du Si-igucur, les VL*tite"; iuuuuibles de l'E" ^*angd€; il leur eft permis, il cil \\i\ de leurs premiers dcvxîirs , de tnci tout haut, C\nn( d fitt^ rfic'::n : dans ces Etah , Sire, s'il y a encore de U Religion parmi le Peuple, s'il y a de vrais Catho- liques ( ÎV certaiuciueiu il y en a au Pjys Bas) il y AXitt de roppoluion entre eux «k le«: pri^lenilus fle- fiirmes; 6c coftc o -'^'^i' "l'n ell de nature j^ exciter des nnubles. Parmi louvcnt hn coiuUiencc

par dil'puter, on Inut u.ii le battre. Le Peuple tft touiour< Peuple. iV r>V'' im'^ eu lout tcms inaitie du nin\iveiuent de lot

(^u'il nous loi fer^ation pin mie Votre Nln Etats, le Calvi parible avec la ( Tr^Mie nu^me , Ik

n>**

. , -l'auvirer ici une ob-

Pavmi lc<: dillcrcntes Seifles ,

■"■ dtf tolt^ier dans l'es

lemcnt le plus incom-

. mais avec le* droits du

nen^ent d\m loul. Cette

*>eiftc ne rclpirc que rind»'pendiince (a) , elle ne recou-

tT«> .. Qiuml 1.1 n'içian «htiènemje ( tlit le Ptcl". Momd-

iMii. M . / n»' , ,vi r. \ , tiv , : ). L^ . ) U'iifli i( . il V a lieux

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tsou u\ îiufoiltê ni Hiérarchies ; ^f on W vu pKw xVuwc ùmv leiuviTcr» 4Vvv 1rs auicU » le GoviYciue^- 4ncut civil nu'cllc tiouva êu»l>li. N(ni\ c«\ <(VO«\s ùit U trirtc c\|>éricnçe tous le Ho» Philippe U , ^i l<» cunu ùiij«i\e cMCorf, tjiuml uoih hlons les fçew* aO'ifiiU'v, qvic It* (.'vilvnulMic tlonn*» piMir lois» iUnik vi? P.ivs. l.'AMk;U"tnic , la Kuuur, le Nonvejvi NtomW ont cMi .iitlh U'"» Icius, N oi\ upporic ipic Jt»v»piv\ Koi vrAnuIclrrif , «jiii tUu\ ic mouiciit-U ùmhKMt liie tl,^Mv l\»ven»r ^< piévoir le ("ou uUtJUunc de llm (iivw'lleur , uvoit voutume *lc <lire»f«f piùnt J*§^\t^ t/u(S ^ jt'oi/if J( ii\'t ,, uuxim? i|ui pcnii-^ue n'eft p.»s adlv viMiMiic m uiéilitoc aiiioviurhui.

Ni>UN i*l^>éions cnlm , que U hoi\ié paternelle tW \ v»(iv' MaieOé le l.nlleni touchri A Ki wic Oe «as iM«<iMteN, Non jîéuiiIlcnitiiN , tio\ luunhles mais itx^ ventes piieir\, léimu-x uvi.v Krmoiiduiues lerpeciuciiles tic*» l'vOtpicv, ilrs \ilUs, vies l oiiiimin.iiiteN» ciWii> tli* n»UN \c\ ouliev de l'htai, rnip\\ hfronl que Vone M^iclle n'y éiemle le* ertcts> de l'olnrtt^ce tivilo, anlh loin rui-tu\it qu'elle l*«vt>it proietté i ^ le meiUewv lie tou\ le.^ Souveialni ne priu\rttiu pav» que non ("ondée"» heiiieii(r"«i iv tiaïupnilis voirai tenuîtte .m nulitit (rdli'* Ir gcinir tirs tlillrn(uMi\ » qui Irui ouf ^u- (i luuellc^ » N qu'une Iveli^ion Un.Ur , ipu v cft

(h'« lcs.tr iiiiilhrtiiciik puici^r, quI I4 cUvIIm cii ('«ihoriqn» .. N (Il l'ipirthnip , l'puj 1*» «h» Niuil puilutirteicm U IN.iJUiuc . iV KC\u lin Muli ^rtulcicnr Ih ('rtilio iqu§; tV"t>

.„ Utir k'k IVuplcMk (lu Nl> il \H\\ iS UMIiiUt UiUlitUlkMt «,>'<< ,1 0'inJiif(Hj,.iih* ^' J* lii>*'iti {\\\9 ll'uiU p** U\ l^ciqilpsi ilu ^ Mult, ts qn'iMit: Uchuioik, (pli i\\\ \\A* iIp i hct vUiblp,

,1 iAMIvIviM UHVU« •'l rtIuU |>f>iulililt <: (Ut lllIUtll, ipitfvplb y^u\

«t 9\\ a MU. "Ntnu n'avtmn urtulc il'rt»lt>|'iri l'uiiliifius; ili^n cli- iimii» v'9ll U' lyd^MiP le plus Uiu (lue l'plprii luiiUdii^ uit ptt i»ul.iiii<?r , <tl>lliAiuiii aii-'iiic t >ti0 (le Holiy^ioii ; ^\\^\% \\o\[> iintik invuit» Um umv, il %iA\^\i.i iHfit^v )«> jtrluelpcji Um ChI- <»;ii\ilitt«).

{«4>

tjon ^e tout Emploi Civil ou Eccl^fiaftique , ■& Ae tout ce qui a le mouiclré rapport avec l'Adminiflration publique. En un mot, les Loix du Pays moulées fur l'ciprit de la Seéle dominante , leur ferment abfolumant la bouche pour combattre l'erreur , ou pour foutenir la vérité.

Il en eft , &: il doit , fans doute en être tout au- trement dans les Etats Catholiques , , grâce à la divine Providence & à la foi du Souverain , la vé- l'ité n'eft pas encore captive , & rie fauroit l'être à ce point, tant qu'on ne voudra pas l'abjurer.

Dans ces Etats, les Miniftres de la vraie Re- ligion &: de la îainte Dodrine ont , &; doivent avoir nécefTairement la liberté de marcher tête levée , de montrer l'appareil de leur minillere , & d'annoncer en public au Peuple aflemblé autour d'eux dans les Temples du Seigneur, les vérités immuables de l'E- vangile ; il leur eil permis , il efl un de leurs pi'emiers devoirs, de crier tout haut, Cave.u a jer-^ mcnto : dans ces Etats , Sire , s'il y a encore de la Religion parmi le Peuple, s'il y a de vrais Catho- liques ( & certainement il y en a au Pays-Bas ) il y aura de l'oppo/ltion entre eux & les prétendus Ré- formés; & cette ôppofition eft de nature à exciter des troubles. Parmi le Vulgaire fouvent on commence par difputer , on finit par fe battre. Le Peuple eft toujours Peuple , & n*eft pas en tout tems maître du mouvement de fon zèle.

Qu'il nous foit permi'? , Sire, d'ajouter ici une ob- iervation particulière. Parmi les différentes Seftes , que Votre Majedé s'efi propofé de tolérer dans fes Etats , le Calvjnifme n'efï pas feulement le plus incom- patible avec la Ca:holicité , mais avec les droits du Trône même , & le Gouvernement d'un feul. Cette Seéte ne refpire que l'indépendance (a) , elle ne recou-

('a.^ Quand la F-ligion chrérierme ( dit le Prcf. Montef- (juleu^ £Jpr. des Loix , liv. 24. c. 5. ) toufi'iit , U y a deux

r 15)

noît ni auforité ni Hiérarchie ; &: on Ta vu plus d'une fois renverfer , avec les autels , le Gouverne- ment civil qu'elle tiouva établi. Nous en avons fait la trifle expérience fous le Roi Philippe II, ôc le cœur faigne encore, quand nous lifons les fcenes affrcufes, que le Calvinifme donna pour lors dans ce Pays. L'Angleterre , la France , le Nouveau Monde ont eu auffi les leurs, & on rapporte que Jacques I, Roi d'Angleterre , qui dans ce moment-là fembloit lire dans l'avenir 6^ prévoir le fort infortuné de fon fucceffeur , avoit coutume de dire , que point d'Evé- qiies , point de Hoi ; maxime qui peut-être n'eft pas aifez connue ni méditée aujourd'hui.

Nous efpérons enfin , que la bonté paternelle de Votre Majefté fe laiffera toucher à la vue de nos craintes. Nos gémifîemens, nos humbles mais fer- ventes prières , réunies aux Remontrances refpeftueufes des Evêques, des Villes, des Communautés, & enfin de tous les ordres de l'Etat , empêcheront que Votre Majefté n'y étende leé effets de Tolérance civile, aulîi loin fur-tout qu'elle l'avoit projette ; &: le meilleur de tous les Souverains ne permettra pas , que nos Contrées heureufes & tranquilles voient renaître aw milieu d'elles le germe des diffentions, qui leur ont été fi funeftes , & qu'une P^ehgion fainte, qui y eft

fiecles , ce malheureux partage , qui la divifa en Cathollqi:e & en Proteftante , les Peuples du Nord embrafferent la Piotcftantc. & ceux du Midi gardèrent la Catho.ique: ceft ,,, que les Peuples du No d ont & auront toujours un ejfiù d'indépendance & de liberté que n'ont pas les Peuples dv\ 3j Midi, & qu'une Religion, qui n'a pas de Chef vifible, convient mieux à l'indépendance du climat , que celle qui .,, en a un. "Nous n'avons garde d'adopter l'influence des cli- anats; c'eft le fyftême le plus faux que l'efprit humain ait pu ^funter, abftrailion même fàre de la Religion : mais nous nous fervoo* 4)] t^xte, 11 éj^ablit biçp les principes du C?il-- Kinjfme.

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feule révérée depuis tant de fiecles , vienne à fouffi-îr de la contagion des feftes.

Mais dût-on avoir le malheur de voir pénétrer les Seftes dans l'étendue de vos Provinces Beigiques, du moins , Sire , ne permettez pas , que ce^ foit dans votre Univerfité de Louvain , la feule que vous ayez dans cette belle Contré-\ Confervez à la Religion cette refTfturce tout entière ; permettez de tirer un cordon ferré au tour de la cité privilégiée, & qu'aucun feftaire ne foit en droit de le franchir. Tel eft l'objet par- ticulier de nos très-humbles & tres-refpedueufes Re- montrances ; & notre confiance eft fondée fur des raifons , qui nous paroiïïent de la plus grande force , &: que nous ne craignons pas de porter à la confidé- ration de Votre Majefté.

Nous l'avons déjà obfervé, l'Univerfité de Lou- vain eft la feule Ecole publique de tous les Pays-Bas, 6^: môme des Pays voilîns. La jeuneiTe nombreufe , qui forme le corps de fes élevés, eft deftinée à rem- plir un jour la plupart des Emplois Civils &: Ecclé- liaftiques du Pays. Quel dommage, quel tort à jamais irréparable pour la Religion , fi cette jeunefle venoit à fe corron.ipre ! fi au lieu d'être am jour les Défen- feurs de la Foi antique , qu'ils ont héritée de leurs pères, &de cette Religion fainte qu'ils ont fucée avec le lait, ils parvenoient à en être de vils apoftats !

La plupart des jeunes gens fe rendent à l'Univer- fité depuis l'âge de quatorze jufqu'à vingt-cinq ans. C'eft l'âge des paftions , & de cette mobilité de ca- raftere , qui n'oppofe qu'une foible réfiftance aux impreflions étrangères , fur-tout quand celles-ci ont le charme de la nouveauté & préfentent l'amorce d'une plus grande hberté, ou plutôt d'une plus grande licence. Que n'aurons - nous donc pas à craindre de tout ce qu'ils verront , de tout x:e qu'ils entendront autour d'eux ? fi des Inftituteùrs , des Profefteurs publics , on des Dofteurs viennent à être imlîus de maximes oppofées aux Dogmes Catholiques ; S: ce que l'on doit envifager comme le côté le plijs dangereux des

Se6les

( '7 )

S.cles Se des Se6^aires, û jamais les maîtres fe laiffent gr.gner à cet efprit d'indépendance , qui refiife de croire, ce que notre foible raifon n'approuve pas; n'eft-il pas à craindre que leurs Diiciples participe- mat plus ou moins au même elprit & aux mêmes ézaremens ? Des hommes faits , qui voient leurs voi- sins impunément n'oblerver ni abrtinence , ni Fêtes , qui les voient fe moquer de la Confeffion , de la Mefîc 6^ des cenfures de TEglik , doivent être bien sfrermis par la grâce , pour ne pas être ébranlés quei- qiiefois par l'exemple. Quefera-ce d'une jeuneiTe foible Çiirréfolue, aujourd'hui fur-tout, que nos Philolb- phes, que nos libertins ont ébranlé les fondemens de la foi ; que les âmes tiedes & pareffeufes traînent im- patiemment le joug de la Religion : hidGclU juga collo trahcntes. Horat. lib. 3. od. 3 , qu'ils n'at- tendent peut-être que le moment de le fecouer ?

Rien n'eft fi facile à féduire que la jeuneffe , elle ouvre le flanc aux coups qu'on s'apprête à lui porter. L'expérience l'a fait voir de tout tems. Le Roi Phi- lippe II , en étoit fi perfuadé , c\v.e voyant les Pays voi(ins du nôtre , la France fur-tout , infcftés du vc- n m dangereux des héréiies, il aima mieux fonder ex-

Bès &: à grand fraix une nouvelle Univerfité à ouay , que de fouffrir plus long-tems , que les pa- rer« expofaffent leurs enfans aux dangers de la fé- dufiion , en les envoyant faire leur cours d'Etudes d.ins des Dniverfités étrangères la contagion s'é- toit dé]a répandue.

C'eft le fameux Joachim Hopper , Confeiller &: Gar- de-des-Scéaux du Roi Philippe, qui nous apprend ces cifconflances &: ces motifs {a) ; ils font d'ailleurs énoncés d'une manière bien cl.iire & bie-; précife dans le Diplôme d'ére6lion ce la mên.e Univerfité. Voici ce, qu'on y trouve « : Quôd cùm P».egio in-

C û ) Hoynck Van l'anendrecht , AnakB. Bd^, tom. s. part. 2 y pas, 20 ^ 21,

B ttt

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» ferioris Germanise ipfîus Phllippi Régis diclioni » hereditario ]ure lubjeéia , omni ferè ex parte à » Popuiis haereticis atque fchifmaticis cinfta 6»:: ob- » ftiTa eflet, & propter eorum infidias peftiferafqiie » doctrinas Cadiolica illic Fides , & aniniarum Ik- » lus maximo in dircrimine verfaretur : tam gravi- » ter periclitanti in illis partibus fidei orthodoxa; & V animarum faluti aptiffimum elle remedium duxerat, » li in dicla Regione , quae à tôt tantii'que Popuiis » &: gentibus incolebitur , pra^ter illam celtberri- » mam ac famoram Univeriitatem fludii generalis >i Lovanienlem , alia quoque fimilis Uuiverlitas ftudii » generalis erigeretur Ça). «

Le célèbre Boéce , qui fut lire de l'Uni verfi de Louvain , pour ttre le premier ProfeiTeur en Droit dans cette Univerfité naifTante , qui a tant loué le R*oi Philippe, de l'avoir, érigée , ck qui confirme plus en plus ce qu'on vient de dire touchant les grands modfs. de .cette éreâ:ion (/•) ; les juftifie en même tems 'd'uae manière bièh feniible 6c bien pro- pre à faire impreluon par ion propre exemple , & par le récit de ce qui lui étoit, arrivé perronnelleintiit. dans le tems qvV.il , étoit allé étudier le^ Belles Lettres fous des maîtres ' & dans la fociété jjl^^ cUfqiplcs cor- .

rompus ft).. (',.;;)V af; ii'.V;

. Au relie , Sire 5 ce n'efl: pas Boéce ,' ce n'eft pasr Philippe II Teuls V "qui penferent ainli : tous nos Sou-, verains depuis Gharlemagne jufqu'à no5 jours, eurent les mêmes vue^ &: les mêmes principes., oc ils agirent conftamment d'après- les mêmes .règles..- Par-tout le même efprit, par- tout les mêmes ioins &: les mêmes attentions pour éloigner loin de leurs Sujets la con- tagion de l'erreur & l'attrait de la nouveauté en ma-

(.2) Mirai Optra d'iplom. tom. i. cjp. ii6. t b) In orat. funch. nomine Univerjluûs Duacena dïHA Pk'Uppo I] , per Boctium Eponeni.

{c) In prcf. jynui^mat, j,nùquït, Ecdef. pa^- _j , ^,

( »9 )

tiere de Religion ; mais fur-tout pour éloigner cette pefte des Ecoles deftinées à l'inflruéiion de la JeunelTe.

Pour ce qui regarde l'Univerlîîé de Louvain eu particulier , on peut voir une file d'Edits , de Ré- gleinens , de confultations , de Lettres , Edites de la part des Souverains, tendans tous au même but & dirigés par le même zèle , depuis le Duc Jean IV , qui tilt notre Fondateur, iulqu'à l'Impératrice Au- gufte & Religieufe qui laiffa le Trône & le Dladé- à Votre Majefté (^a).

L'Univerfité de fon côté n'eut en aucun tems rien plus à cœur , que d'obéir le plus ponftuellement à des Réglemens auffi fages , faits pour la gloire du Très-Haut & pour fa propre profpérité. Elle fit plus ; elle porta elle-même , en diffirens tems , félon l'exi- gence des cas &: la nature des circonftance*: ., un grand nombre de Réglemens de Difclpline £v de Poli- ce ( b.) , qui furent tous moulés f.ir l'efprit &: les intentions connues du Souverain ; & elle les fit conf- tamment exécuter , &c à la lettre , avec la dernière pondualité.

Ce fut ainfi que dès l'an 1545 (c) , c'eft-à-dire , dès la première époque des hérefies naiffantes de Lu- ther & de Calvin , elle fit ce fl:atut falutaire toujours obfervé depuis , confirmé en 1557 6>c 1579 (^) , fo-

(a) Nos Aftes font remplis de ces pièces: on en trouve

Î>lufieurs auffi dans la coUeftior' dfs Placards ou Edi:s pour e Brabant 8c pour la Flandre ; les bornes , qu'on s'efl pref- crit dans ces très-h'jmbles Remontr.;nces, ne permettent pas de les inférer ici, mais la chofe eft bien certaine.

(b) Tous ces Réglemens fe trouvent dans nos Actes; il ne feroit paspoifible oe leur donner une place ici, fans devenir extrêmement diffus : mais nous fommes prêts à les pro- duire à tout inftant.

(c) VaL Andrex Fafli Acai. Lov. 16 jo, \n-/i,to. pa^. j62. (^d) Vernulei Acad. Lov. Le Règlement de 1579, fe

trouve im'^jrimé tout au long à la tête des Lettres d'imma» triculation, qu'on délivre à chaque Ecolier,

B %

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iemnellemeat approuvé &: renouvelle en 1617 parr les Art. I , 2 , 76 & m du céltbre Règlement de la viilte des Séréiiiffimes Princes Albert & Ilabelle , èc dont on s'efi: fi bien trouvé juiqu'ici , qui exclut formellement de toute profefTion publique , ou privée dans l'Uni ver (i , ainfi que du droit d'y être reçus , comme Ecoliers , tous ceux qui refuierolent d'abjurer les héréiies , 6c de prêter le ferment de catholici'ié. L'Univerllté a toujours été fi terme dans ce prin- cipe , qu'aidée & Ibutenue de fes auguftes Maîtres , elle auroit préféré de tout facrifier , plurô'. que d'ad- mettre dans fon fein une feule perfonne, de quelque rang qu'elle pût être , dont elle n'auroit pas été àiTurée , qu'elle apportoit la plus fiine Doi^lrine : On l'a vue refufer ainfi un Eraime (a) un Jufte-Lip-

(fl) Erafme. dans une Lettre qu'il écrivit à George Haloin le 29 Août 1517, Si. qu'on trouve clans la dernière colledion de fes Ouvrages .tom. 3 , part. 1. Eplr. 264 , s'énonce de cette manière : Totus, hoc efi cum blbliothcca Lovanium cornini- frari : cum Th:o!ogis alùjfima pax , ai<^u: adeb necej/îtudo .... Dejîinant me in Juum orciinem coovtare &c. Il confie cependant par les Archives de la Faculté de Théologie, qu'il n'a pu parvenir à y être aggrégé: indubitiblement par la feule rai- Ion , qu'il étoit fufpeâ; de nouveauté. Il s'en plaint : ''ez ou- veneii»3nt dans fa Lettre du y Juillet IT21, aJ liîch^rd. Pa.- .€<ium ; & dans celle ad Petrum B.rblrlum de la même an- née, ièii. Eplt. 583, & 587. Au relie, l'Univerfité deLou- vain n'efl pas la feule, à qui la Dcftiiae d'Erairae ait pa- j-u fufpefle. La Faculté de Théologie de Paris cenfura pu- bliquement, en 15 31, un grand nonîbre de propofiuons ex- traites de fes paraphrafes fur le Nouvean Teflument , '6l de quelques autres de fes Ouvrages. Ses Colloques fureur éga- lement condamnés par la So bonne eu IÇ26 & la lecture en ■flit défendue dans l'Uni vcrfité en 15 28. Il efl vrai cepen- dant qu'Erî-nne déclara plus d'une fois de vouloir fonmetrri tous fes fentimens à l'Eglife ; & que fe trouvant à Bnfle , peu de tems avant fa Uiorc , il témoigna im grand déftr i'en fortir , pour ne pas finir fa vie dans un Pays , il étoit -envii-onaé d'Hérétiques. Voyez fa Lettre du 20 Jui»

( ^o

fe (a) un Blls (A) on l'a vue fur le point de rejetter un Marti'.i Dorpius (c) on l'a vue abandonner un Joiîe Velfin (ci) malgré les talens éminens qui Ijvilloient en eux &:ma[g'é le grand luitre, qu'ils dévoient pro- curer à nos Ecoles. On a vu enfin renvoyer d'illuf- tres Allemands , des Danois , des Polonois , des An- glois , des jeunes Gens d'autres Pays (c) aufïi diftin- gués par leur nom , que propres à porter au loin la réputation de l'Univerlité , par la feule raifon qu'ils ne faifoient pas proreffion de la Foi Catholique.

Seroit-il polfibie , Sire, que tant de Prirxes , & tant d'Hommes célèbres, qui ont fait & feront à ja- mais la gloire de l'Univerfité , fe fuflent trompés tous ,. pendant le laps de trois ficclcs , fur une affaire de

1536, à Conrard Gocleniiis , ihhi Epir. 1199; ce n'eft donc pûS ici notre intention de lui co;uef1;er ici fa Catholicité.

(a) Juûe Lipfe a été reçu dans rUniverfué, & ilyeilmort: Vi:ns ce n'a été qu'après avoir donné des preuves non équi- voques de fon changement , & de fa foiimiffîon entière * la Dodrine de l'Eglife, daiis laquelle il a toujours perfévéré depuis.

f.h) Louis Bils, Seigneur de Coppenfdamme , célèbre Ana- tomifte. La Lettre que l'Univerfiré écrivit à fon fujet au Marquis- dsCarafena, Gouverneur des Pays-Bas, îe 7 Mai 1664 , nor.9 paroit trop remarquable pour ne pas la joindre ici. On la trouvera ci-après yi^Z; lit. A-

(c^ Cette hiiloire fe trouve tout au long dans les Aélcs de la Faculté de Théologie , du aS .^aillée , du 4 Août 6c .du 3-0 Septembre 1520.

(^) Joffe Velfin Juftus Velfuis Dofteur en Médecine trè« renommé donna da^s les erreurs du Proteiîantifme ; il prit fagement le parti de fe retirer à Louvain , & de ne pas at- tendre qu'on y exécutât à fa chnrge les Décrets portés par rUniverfité en 1545, dont il a été fait niention plus haurJ Voyez fon Art. dans le Dlclionn. de Bayle, & dans les Mémoires pour fervir à l'Hilloire litt. des Pays-Bas par J, ■N. Paquot Lov. ij6j.

{C) Voyez fa Lettre fub lia. A. & VernuUi Acud. Lov, , . , Nos Ailes d'ailleurs en font pleinement foi,

Bj.

( 2i )

cette îiîiportaiice ? Se pourroit-il, que croyant avancer le bien public ,^ils n'auroient fait que le reculer? Pour- roit-on s'imagi;\er enfin , que dans le tems , qu'on les a cru remplis d'un faint & véritable zèle pour l'hon- neur de Dieu Se l'avancement de la Religion , ils n'au- roient été que des Entlioufiaftes & clés VilioAnaires ? Non , il en coûteroit trop au cœur fenf.bîe & géné- reux de Votre Maïeuc , de prononcer aufîi durement fur tant de pcrfonnageî vertueux , ainii qiie fur les Princes Tes Prédécefieurs : il en coûteroit trop à nous aiiili, de dégrader ainfi la mémoire de ceux, qui nous ont comblé de bienfaits , qui nous ont laifîe leurs lu- mières dans des Ecrits qui paffercnt à la pofterité la plus reculée ^ &C de qui enfin , nous tenons en tout 6i par-tout, notre état &: notre exiftence.

Mais , dira-t-on, les circonftances peuvent changer , ce qui fut utile au Public dans un tems , peut ceffer de l'être dans un autre. Les chofes humaines font lujettes \ des viciffitudes , qui ne permettent guère à un Legiflateur , quelque fage , quelque prévoyant , qu'il foit, de porter une Loi, qu'il ne pût jamais être queftion de réformer : oui , Sire , les chofes humaines font lujettes à ces viciffitudes , puifque l'homme qui les fait naître , y eft lui-même foumis : mais la Reli* gion ne l'efl pas ; elle eil: immuable dans fon effence , comm.e fon divin Auteur : elle le fera toujours ( puif- que Dieu ne peut faillir) jufqa'à la conibmmation des iiecles : &c c'elr ainfi , 'que tout ce qui foutient cette Religion , tout ce qui , de la part des hommes miême , tend à ihn. avancement, devroit l'être également.

Les nouveautés d'ailleiu'S , font toujours fufpeftes au fage ; elle font fouvent fune/les à la République. Il y a grand doute (difoit Montagne (^)) s'il peut fe trou- ;ver auffi évident profit au changement d'une Loi re- çue , telle qu'elle foit, qu'il y a de mal à la remuer. C'efl aînfi que penfoient les Philofophes de l'anti-

tf— r'iin.'ji ■#Wi>^i; m

4*) Liv. I, p. 162»

( )

qiiité : Platon (a) ne croyoit pas que l'on pût changer h miilique , fans altérer la conftitution de l'Etat. C'cil: pouiier les chofes trop loin , nous l'avouons : mais de quel œil lui oc fes femblables auroient - ils vu la moindre altération dans les chofes , qui intéreffent une Religion juftement reconnue pour la feule véritable? Enfin , nous ne hnirions pas , ii nous nous livrions à la confiance d'accumuler ici la foule des obfervations qui fe préfentent à notre efprit. Nous finirons pourtant , Sire , après nous être de nouveau jetés aux pieds de V. M., la fuppliant le plus humblement & inftamment de daigner avoir un favorable égard pour les refpeftueu- fes R-cmontrances de fon Univerfité , de calmer fes alarmes , & d'empêcher qu'une Loi , qui enheindroit nos fcrmens (b) , & porteroit atteinte à notre ancienne & perpétuelle Conftitution , qui jetteroit le trouble , enfin, parmi nos Profeffeurs &: nos Elevesj, puilTe y avoir fon exécution. " C'eft la grâce &:c.

D E VOTRE MAJESTÉ,

Les très-humbles Si très-foumis ferviîeurs &■: fui ers , les Refteurs & autres de l'Univerfité de Lou- vain.

Erat Jignatum Af. /. , Van-Gobbelsckroy , comme Recéeur actuel.

Hic habehamr Par Ordonnance , Signatum : P. H. HeNDRICK, Secret.

(a) Liv. 4. des Lcix.

(b) La prcfejTion de Foi de Pie IV , que nous avons tows jurée , porte expreffément : Hanc veram CathoUcam fidcm , ex- tra quum nmo jalvus ejp potefi.. . eamJem imegiam & inviola- tam , ufquc ad extrsmum vita Jpiritum , confianhjjîmè , Deo ju^ •vante, à mtis fubditls ,vel illis , quorum curdad me in munere me» fpeftahh, tencri , docerl & predicari, quantum in me erlt , cura- tknim. Après quoi fuit le Serinent.

»4

(M)

(A) ExcELLENTissiME Domine,

XNCREDlBlLEefl: quàm «ratanter & qiio applaufu ab Acaciemiis noflris , exceptum fit irainus illud quin- que cadaverum , quod tua munihcentia 6c te procurante lifibus medicorum noftrorum deftinatum eft, & cum illis hoc fît fingulare, quod condita aetatem , quin imo &: aDternitatem latura ibnt , toto illo , quo hœc dura- bunt , tempore tui memorla apud nos vigebit , ut qui in ils tibi fixeris Monuinentum. Sed & iftud beneficio accedit , quod Anatomicus , qui ea corpora condivit , dicatur docuiff; Profeilores noftros, artem veteribus ignotam , ut fine miflione Sanguinis cadavera recen- tia , imo &: animalia viva in partes difiecentur , quo invento, velut novus quidam Elbulapius , multa in cor- poribus humanis profectura, & fcientia; quae iîla cu- rât , opportuna producat : illud nihilomninus in authore difplicet, quod alienam aneftraReligionem profiteatur , quodque iMvis legibus Academicis , is apud nos tolerari non poterit : habent illse a prima ereclione, ut or- thodoxi foli in ca profiteantur , &: difcant , quas oppor- tuna fuerint oppugnandis illis , qui a vera fide defcive- runt. Idem perpétue ufu receptum, & per ScrenifTimos Principes Albertum & liabellam , in vïf.taûonc com- probatum , ut nemo apud nos Academiœ matriculae mferatur, nili qui profcirionem fîdei Catholicse , juxta BuUam Pii IV , Pontiiîcis , publiée & folemniter emi- ferit : quod adeo ilriftô obfervatur , cùm enim anno 1642, ad civitatem Lovanienlem , très Dani nobiles, iique Lutherani adveniffent, nequidem per commen- datitlas Régis fui , ab aula Regia obtinere poruerint, tit in Academia permanerent. Speranres , quod pro eo quo es & quem oflendifti , in nos afFeftu atque in Ca- tholicam Religionem zelo, idem prsEftabi^:, non parie: is inter nos vivere , qui alieni funt ab ea Religione , quam ab incunabulis cdofti , etiam fanguine noftro tueri fiimus parati. Accedit hoc ad cumulum glorix tUcC , te non

tantiîm benefaclorem nofirum , led 6<: fidei Catholicafr propugnatorem colère & revereri tenea- mur &c. Inicriiis habebatur,

Huinilli fervi Reftor & Univerfitas ftudii genera- lis , oppidi Lovanienfis. Hac fcptlma Mail i6'6'/\.

Supgrcriptio erat Excellentifîîmo Domino , Domino Marchioni de Carai'ena Belgii & Burgundiae Gu- bernaîori &c.

REMONTRANCE des Etats de Flandre à Leurs Alitjjes Royales^ au fujet des Remontrances du Chapitre de la Métropole de Ma ('mes.

Madame, Monseigneur!

XjES Prévôt, Doyen, &: Chapitre cela Métropole ce Malines, nous ont adrefié une Requête en date du 26 de Juin dernier ('■) , que nous prenons la ref- peélueufe confiance de joindre ici ,' par laquelle ils demandent notre interceiïion en qualité d'Eglitc-Mere de Flandre, pour faire pafler à Vos AlteiTes Royales leur réclamation contre les intraftions graves & multipliées faites à leurs Droits, Franchifes &: Pré- Togatives , & les fupplier très-refpectueufement de le.<; tranfmettrc à Sa Majefté l'Empereur & Roi , pour qu'il daigne leur en accorder la réintégration & re- drefîement complet.

Ils réclament également avec autant d'empreife- ment que d'amour pour leur Chef, le retour de fon Eminence le Cardinal- Archevêque & de i'Archi- Prêtre Huleu , dans leur Diocele , comme le trou- peau qui cherche de toute part ion Palpeur.

Nous croirions afi'ûiblir les caufes hi motifs qui

C*) Fo^t^ tcHi, 5. Part. Eccléfiaft. pag. 7.

( lO

les ont portés à donner leurs très-humbles Remon- trances à Vos Altefles Royales , nous entreprenions d'ajouter quelque choie à leur plainte.

V e Chapitre cftimable , par la Conftitution , comme- par 4es Membres qui le compolent , mérite à tous égards la coniîdération & la bienveillance de Vos AltelTes Royales.

Convaincus de leur attachement , de leur zèle , &; de leur amour pour tout ce qui peut contribuer à l'accroiflement de la Religion, nous iupplions en très-profond refpeélVos AlteiTes royales, i®. défaire parvenir au pied du Trône leurs jufles réclamadons , & de les appuyer de leur puiûante & Royale protec- tion, pour obtenir le redreflement complet de tou- tes les infracl:ions quelconques qui ont été faites à leurs Droits , Franchifes , & Prérogatives ; comme il a été fait pour tous les autres Corps.

2^ De demander & d'iniifter avec cette bonté fi naturelle à Vos AltefTes Royales , le prompt retour de Son Eminence le Cardinal-Archevêque de Malines dans fon Diocefe , & de rapptller prompteraent de fon exil rArchi-Prêtre Huleu.

Enfin, nous fupplions Vos AlteiTes Royales d'ac- corder à ce Chapitre les mêmes Décrets qu'il leur a plu de faire émaner pour tous les autres Corps & Etats de ce Pa5's , pour le redrefTement aux in- fractions de leurs Droits , Franchifes , & Préroga- tives, efijérant que Vos AltefTes Royales feront toute l'attention poinble à notre interceiiîon , pour des ob- jets fî intérefiants à la Religion , &: à la confervation de nos Loix fondam.entales.

Nous avons l'honneur d'être avec le plus profond refpefl: ,

Madame, Monseigneur, Z>E Fos Altesses P^oyâles, Les tns-humMes & très-obcijfams Serviteurs ^ Les Etats de Flandre,

De notre AjfanbUz. G and le 4 Juillet 1787.

Far Ordonnance , Jignc F. D. »' Ho OP,

( ^7)

DISCOURS adnjjc a Monjeigneur d'Ji^iuville d: MilLincourt , Evéque £Amyclcs , Sii-^ragant de Cambrai &c. 6'c. donnant la Conjirmadon en La Ville de Mons , /e 24 Juillet 1787.

B

Monseigneur,

É N I Toit celui qui vient au nom du Dieu de nos Pères 5 difoient autrefois les enfans des Hébreux, dans les tranfports de la' plus vive alégrefle : ne pourrois-^e pas faire ici l'application de ce même texte à votre entrée dans nos murs ? Béni foit celui qui vient au nom du Seigneur, qui le reprcfente fi fainteraent & par les fonctions de fon miniftere , & par la régularité de fes mœurs & par les travaux Apoftoliques ! Béni fcit celui qià vient au nom du Dieu , qui nous protège ii manir'eileip.ent d'un regard de fa bonté , dans la fecoufife terrible , qui agite ce notre R-eligion & notre Liberté !

Dans quelles circonftances , Monfeigneur , pour- riez-vous lamais paroître plus à propos au milieu de nous ? dans quel autre tcms votre préfence nous feroit-elle plv.s agréable ? fi jamais la vue d'un Pafteur chéri a rempli de joie {es ouailles, c'eft fans doute, lorfque , après avoir effuyé loin de lui , les efforts multipliés d'une tempête défaftreufe ; leurs yeux le rencontrent en miême tems que le calme renaît. C'eft alors qu'avec le plus tendr-e empreffement , on court à fa rencontre , pour fe réjouir avec lui. Avec quel ardeur ne lui peint-on pas les tnftes dangers auxquels on vient d'échapper ! quelle douce conlblation n°é- prouve-t-oîl pas à lui raconter comment on a fouftrait la tête à la foudre menaçante ! Qu'il eft délicieux pour nous , Monfeigneur , de pouvoir dépofer dans votre fein le fu]et des juPtes craintes , qui nous ont alarmés depuis quelque tems ] Vous avez partagé n®s

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■inquiétudes , vous avez gémi fur notre fituatlon , vos enirailks fe font émues, à la vue de tant de périls qui nous menacoient ; vous avez éievé avec nous vos yeux vers le Ciel , pour le conjurer de jctter fur nos Régions un regard de pitié. Nous ne doutons pas que vous ne voyez auiourd'hui avec joie , qu'il a entendu nos foupirs , qu'il a difperfé les Artifans de nos maux , qu'il fait enfin briller au grand jour fa Juflice & fa Pu^f^ance fuprême.

Lcrfqu'à la voix du Souverain , l'on vit tomber toutes les fortifications de nos Villes... croyoit-il peut- être que le feul courage des Belges fût dans leurs murailles ? Croyoit-il qx^t déchus de leur ancienne valeur , qui faifoit dire à J. Céfar , que de tous les Peuples des Gaules les Belges font les plus courageux , les plus redoutables ; croyoit - il que ne connoiffant plus l'honneur , ils n'auroient pas la force d'efi'aj'er leurs bras , pour foutenir leur liberté ? . . . Lorfqu'oii vit nos forterefîes fe détruire , tout le monde s'é- cria unanimement : Vienne a des deffeins , Vienne nous prépara des chaînes ! ce prcfleiitiment général ne s'efl malheureufemcnt que trop vérifié. Perfonne cependant n'auroit ofé s'oppofer à la volonté de celui qui i'ordonnoit , le moment n'en étoit pas encore venu.

Inceffamment après , les entreprlfes attentatoires à notre liberté fe fuccéderent fans mefure , on frappa coups far coups. Nous avons vu les Cloîtres brifés , les P».eligieux des deux fexcs bannis , chafics de leurs Maifons , leurs Biens devenir la proie de dépréda- teurs autorifés , leurs 1 emplcs dépouillés , détruits , les Ornemens des Autels convertis en toutes iortcs d'ufages , les Statues des Saints, leurs Reliques en- levées , arrachées de nos Eglifes : nous avons vu ces maux fans pouvoir y parer , réduits à en gémir amè- rement dans le fecrct de nos cœurs , jufqu'à ce qu'il plairoit au Tout - Puiflant de nous venir confolcr. Nous avons vu , fpour ainfi dire, lesMéforcr«is fcan- daleux du XMe. fiecle fe rc-nouvcUcr dans ces iours

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de défolation. Nous n'avions plus à craindre l'Inqul- iition , il ell vrai , parce qu'au lieu que Philippe II dilbit alors : la tolhanu mt rcndrcit irifiddc à nus fermeras : Joibph 11 venoit de la permettre , de la protéger ; nous ne redoutions plus ce Tribunal ; mais il s'en élevoit un autre , qui n'auroit été qu'une Inquilitron civile , Tintendance. Les revenus des Ab- bayes, que l'on fupprimoiî, n'étoient plus pour doter de nouveaux Evêchés ; mais pour s'engouffrer dans la CaiiTe de Religion. On ne s'efïbrcoit plus de faire admettre le Concile de Trente , il étoit reçu , fuivi ; mais on vouloit l'anéantir par des Edits. Toute com- munication avec Rome étoit interdite , on avoiî dé- fendu aux enfans de recourir à leur père. Ces Edits menacoient de faire tomber les clets des mains du Souverain Pontife , d'enchaîner le Spirituel fous le jOug du fceptre. A la faveur de ces Edits, l'impiété, l'irréligion levoient la tcte, triomphoient impunémen*", èf ne faifoient qu'enhardir le blafphéme. Vos Prcties, ô mon Dieu ! étoient tombés dans le mépris le plu* marqué, votre Culte tourné en dérifion, vo:; Sacre- mens méprifés , vos A4yiteres infultés , votre Peuple devenu le jouet de fes perfides ennemis , de façon qu'il pouvoit dire avec David : Dais vcncrunt Gsnîcs. in htzndïtaum tuam : Grand Dieu les Nations font entrées dans votre héritage : ellesont profané leTemple réfîde Votre Sainteté redoutable : elles ont fait de Jérufalem des monceaux des ruines ! . . . Mais nous nous femmes fouvenus que notre Dieu ell encore le Dieu de vengeances ; qu'entre (ts mains repofe le glaive de la juftice; qu'il ne lailTe élever aux hommes l'édifice de leur orgueil , que pour le renverfer avec plus d'éclat ; nous nous en fommes fouvenus , nous avons mis en lui notre confiance, & nous ne lérors pas trompés , mais nous n'étions pas encore au terme de nos alarmes.

Des Prêtres , le dirai-je ? que ne puis-je l'enfeve- lir dans les ombres d'un éternel oubli! des Prêtres, l'opprob.e du fîiçré ÎVlirdlIçre , chargés du pouvoir

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exécutif , étoient venus fcandaleufement fans Bré- viaire , Tans Habi-t; Clérical ', lans Science , n'apportant avec eux que la morgue allemande & les ordres ar- bitraires du Souverain ; ils étoient venus faire preuve de jeur miiTion , en détruifant, au lieu d'édifier. A-î- on jamais vu d'une manière plus î1.-appante , la dif- tance qui exifte entre les bons Pafteurs & les Merce- naires ? Quelle cfl: énorme! Vous , Monfeigneur , conG tamment attaché à remplir dignement les îaborieufe^ foQci:ions de rApofîolat , dont vous êtes chargé , vous iall:ruifez par vos exemples , vous attirez par vos vertus , vous répandez la bonne odeur de Jefus- Chrift , en femant par-tout fa parole ; vous parcou- rez votre Diocefe , pour diftribuer l'a grâce , pour fortifier les tendres agneaux , l'efpérance du bercail dans la génération future : vous donnez de iaints Mmifties aux Autels , de vigilans Pafteurs aux trou- peaux , vous vous faites tout à tous. Il n'en eft pas de même de ces Etrangers accourus du bout de la Germanie dans nos Contrées , ils ont cherché à s'in- troduire fous l'habit de Berger bienfaifant ; mais bien- tôt on s'apperçut qu'ils n'étoient que des loups vo- races. Aux premiers fons de leur voix , le troupeau s'effarouche & refufe de prendre la nourriture que leurs mains perfides lui piéparoient. lis appellent à leur fecours la force 6i la contrainte. Déjà pour mieux érayer leur entreprife , le Gouveruv^ment , dont un Miniilre odieux tenoit les rênes d'une main abfolue , avoit indignement dégradé les Fi//z de Felde & les Soutiens de la bonne caufe ; déia fous les prétextes vains & mfidieux on nous avoit privés de la colonne inébranlable de l'Eglife , en appelîant à Vienne le Cardinal de Malines. Déjà s'élevoit à grands fraix , ibus le nom de Séminaire-Général , le vafre édifice , où, pour répandre plus aifément &avcc plus de fuccès la Do61:rine- peftilentielle qu'on vouloit introduire , devoir fe raffembler pêle-mêle la jevuieife de tous les ^. > Diocefes du Pays. Une partie refu'a conftamment

Aq s'y rendre. D'autres attirés par l'appât des plus

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belles promeffes , y entrèrent , mais en fortirent prc^ que auffi-tôt en fecouant la poufuere cle leurs pitds. Les Religieux, ô vaine prudence du iîecle ! avoient quitté rhabit de leur Ordre , pour prendre l'uniforme du séminaire. Les feuls Pères Capucins , par une fer- meté intrépide, louable &: digne des liecles paiïés^ avoient .vigourerfement réfifcé : deux de leurs Chefs venoient d'en être dégradés , proicrits , exilés. Le digne Evcque de Namur, pour avoir éiudé l'ordre réitéré d'envoyer à Louvain fes jeunes Théologiens , avoir cffuyé le même outrage. Rien n'auroit pu ré- fifler à ce torrent impétueux , fi Dieu , qui fe piaït à confondre les forts par les foibies , n'étoit venu au fecours de fon Peuple à l'inftant or il alloit fuccom- ber fous les coups redoublés du pouvoir.

Jufqu'ici les entreprifes détachées , les in fuites par- ticulières faites à tout ce qui tient à la Religion , n"a- voient été que des eflais. Ces téméraires Architectes d'une nouvelle tour de Babel , qu'ils vouloient éle- ver contre l'Eglife , méditoient dans la profondeur de leurs vues une entreprife digne d'eux , qui , en ren- dant leurs noms immortels , eût changé la face de toute l'Eglife Belgique. Ils méditoient , les infenfcs ! d'exterminer dans le même pur , & ce jour n'étoit plus éloigné, toutes les maifons confàcrées à l'Eter- nel , Monafteres & Couvens. L'irréligion fe feroit affife fur leurs débris, &: d'un ris moqueur, le blas- phème fur les lèvres , elle auroit infulté à ces mor-- tels vertueux , qui vivent aujourd'hui dans l'obfcurité du Cloître , & qui dans la kiite , rodant à l'entour de leurs afyles détruits , auroient traîné les refies d'une vie miférable , dans les larmes & les foupirs.

Oui , Monfeigjieur , peu s'en eft fallu que vous n'ayez plus marché que ilir des ruines , que fur des décombres de ces faintes demeures. Le jour étoit mar- qué pour leur deftru6tion totale ; mais le doigt invi- lible , qui traça fur les fables les bornes aux mers , qui fufpendit le foleil au firmament , qui fait fouffler les veiits_ à fon gré , qui d'un figne appaife les tera-

pète , le doigt du Seigneur en avoir difpofé autre- ment. Et dans ces circonftances fâcheufes , nous étions réduits à dévorer en fecret nos inquiétudes 6>c nos chagrins ; dans ces jours d'alarmes , la vio- lence alloit nous arracher à nos retraites ; dans le juonient l'on ne paroiffoit plus attendre que le lignai de la dévaftation ; Dieu qui Te rit des vains projets des hommes , qui d'un fouffle difïipe leurs au- dacieux complots. Dieu , du haut de ion trône , avoit confondu les vaftes plans de ces orgueilleux Mortels , renverfé toutes les mcliires , changé la face des chofes. Tous ces Miniilres d'iniquité , obftinés à notre perte , avoient difparu ; ils s'étoient enfuis , pour cacher leur opprobre ; la honte & le mépris ont flétri leur ouvrage , & fe font par-tout attachés à leurs pas , femblables à l'impie , dont le Roi Pro- phète a dit : f^idi impium fiipcrcxaltatiim , & cleva- tum jîcut cedrus Libanï ; & tranjîvi & ecce non erat : Pf. 36 : J'ai vu l'impie honore 6>C élevé aufli haut que les cèdres du Liban ; je n'ai fait que pafTer & il n'étoit déjà plus. Tels ces Fabricateurs de fyftê- ïîies , ces Ouvriers du menfonge n'ont fait que paroî- tre , & font rentrés dans le néant. Le foleil a diffipé les ténèbres , les noirs nuages , qui du bout de la Germanie étoient venus fondre fur nos, tranquilles Régions, viennent d'être difperfés en un clin- d'œil. Heureux fi les fureurs des aquilons ne les repouffent plus fur nos têtes !

Mille aitions de grâces au fouverain Arbitre de l'Univers , qui nous a fi vihblement protégés de fon bras puiiTant i mille reconnoifiances à ceux , dont il a voulu fe fervir pour opérer cet heureux change- ment, cette réfurreclion , pour aim'î m'exprimer, de nstre Liberté & de notre Rehgion. L'eût-on cru que l'on pût revenir de fi loin ? en voyant la marche des chofes , eût-on put s'imaginer qu'il fe feroit trouvé des gens affez zélés , affez courageux , affez fermes , pour mettre la main au devant des projets de Céi'ar &: rarrêter au milieu de fa courte ? Le Ciel ,

le

(33)

le Ciel a infplré ces grandes Ames , ^^ leur a donné ce courage vainqueur de tous les obftacles. Oui , Mon- feigneur , nous avons la douce &: dëlîcieufe confolation de poiléder encore, au milieu de nos Provinces , diS hommes dont les mœurs &c la religion font à tou e épreuve. Nous avons des Citoyens intègres , des Sei- gneurs non moins grands par leur attachement aux bons principes , que par les titres rfe leur naillance, qui, dans le moment , nous tremblions pour nos Tsmples , n'ont pas craint de Ibutenir l'Autel de la mêm.e main , dont ils défendent les Loix , les Droits , les Privilè- ges du Pays. Nous avons de ces hommes reipecla- bles , que la Nation regarde comme les Pères & les Sauveurs de la Patrie , & dont le fouvenir nous fera éternellement précieux ; mais pourquoi ne nomme- rai-je pas ici ceS' intrépides Défenfeurs de la Liberté? pourquoi ne pas citer ici les Limmiuk^kc , les Van dcr Noot , les d'Are/nberg Se tous ces Membre^ va- leureux qui compoiént nos Etats .■' Voilà , Monfei- gneur , les dignes objets de notre julie reconnoiffance , voilà ceux qui ont repoufTi les chaînes , au bruit del- quelles nous avions frémi. Noms bénis à iamais ! im- primez-les dans votre Ibuvenir ces noius immortels ; à votre re*:our dires à ces Peuples heureux , qui vi- vent fous l'Empire des Lys , dites leur que , îur les bords de Tabyme , nous avons trouvé dans ces hom- mes à jamais mémorables & l'appui de la Rehgion ê"! le Soutien des Loix. Souvenez-vous de ces noms il chers à votre troupeau : Souvenez-vous fur- tout de celui , dont la main bienfaifante vient de nourrir tant de milliers de Pauvres ; &j chaque fois que fur l'Autel , vous immolerez l'Agneau fans tache , qui de fon fang a cimenté notre Religion , n'oubliez pas de l'interélTer pour eux & de demander à Dieu la force &c la fenneté qui leur font néceffaires , pour ache- ver ce qu'ils ont fi heureufement commencé.

cftt

C 54 )

P^EQUÊTE de Mr. LemEORY , ci-devant Prieur de Hou-^ali^c & Députe de fEtat Eccléfiaflique de la Province de Luxembourg, à Mgrs. Us Trois Etats du Pays.

A

M E s s E I G N E U R s !

SSEMBLÉS pour réclamer contre les atteintes données aux Conftitutions du Pays , vous recherchez avec zèle , & l'on vous expoie avec confiance les difFérens chefs d'entreprifes & de léiions faites con- •tre les Privilèges & les Propriétés des Corps &: àts individus de cette Province,

Qui a plus de droit que moi, Mgrs., à vous faire parvenir mes juftes réclamations? Je vois d'ici, en idée, la place que j'occupois laciis parmi vous. J'étois im des Membres de votre Afiemblce ; & vous devez vous rappeller qu'au moment de la liippreflion de ;iotre Prieuré de Houffalize , i'exerçois la Dépura- tion au nom de l'Etat Ecclenailique, 5c à la fatis- fa6lion générale du Corps.

Depuis cette fatale époque , à quoi mes Conireres & moi n'avons-nous pas été réièrvés.^ On nous a dépouillés de notre Etat , de notre exiftence légale , de nos titres , de nos propriétés, & de nos Droits de Citoyens. On nous a réduits à tramer une vie îfolée , inutile , ignoble , contre le vœu de la Reli- gion , les difpofitions des Fondateurs , les Ocirois des Soviverains , & le cri de l'humanité. Notre demeure a çté abondonnée à la déprédation , à un ]:ouieverfe- m^vii général; tout y a été changé, dévafté , & dan? cette deftruâ;ion on, ne reconnoît plu? le fejOur.de la piété , de l'étude , de la paix & de ia régularité. Les pauvres , les malades des environs ne retrouvent plus cette charitable habitation , ils vcnoient de- mander , &r d'où ils étoieut aifurés de remporter de«

(35) iecours de toute efpece. Les Peuples voudroient en Vdin fatisfaire leur piété dans des folemnités qui ont difparu ; les refiources du Saint Miniltere pour la fré- quentation des Sacreniens, pour le pain de la divine parole , & pour les exercices publics de la Religion , ne fubfiftent plus. On cherche Houffalize dans Houf- falize même : tant il eft changé depuis notre expullion.

Au moment qi;e ]e trace ces lignes , Melleigneurs , on me communique la Dépêche de L. A. R. en date du 2 de Juillet 1787. J y vois que toutes les intrac- tions ceffent , & que tout doit erre rétabh dans Ton premier état. J'ai donc droit à la même faveur, c^-: ce feroit faire iniure à votre équité , à votre religion & à votre zèle pour le bien de la Patrie , fi ]e Ibup- connois , Meffeigneurs , ou que vous ne me rappel- lerez pas pour reprendre ma Séance parmi vous , 011 que vous ne vous intérelTerez pas vivement au réta- bliffement de notre Prieuré , fur le pied qu'il étoit avant ces triftes changemens.

S'il y a des plans &: des projets à former pour cela, dans l'état de dégradation fe trouve actuel- lement notre Monaftere & ce qui en dépend, je me flatte que vous voudrez bien me les communiquer , 6c aux indi\adus de notre Communauté , dont ie fuis ici l'organe ; perfonne n'étant plus à même que nous de lever tous les inconvéniens & les obilacles qu'on pourroit oppofer à notre rétabhïïeirient.

J'attends avec confiance le favorable réfultat de -•cette Remontrance , &c.

C'eft la grâce, &c.

%,,„^

C 1

(30

Re dV E T E des Religieufes fupprimées de. Jéricho , aux bennes gens des neuf Nations de cette Fille de Bruxelles^ du i^ Mai l'y 8 y {a).

Bons et Respectables Citoyens,

i-j E S Dames Religieufes Se Sœiirs-Converfes du Mo naftere de Jéricho , dans cette Ville de Bruxelles , ayant été expuliées dans l'année 1783 , privées de leurs biens , revenus , & pofieffions , ainfi que des penfions , ou rentes-viagères , qui leur avoient été refpcftivement aflîgnées par leurs parens ou amis ; ayant porté au Confeil-Fiical , des plaintes intr^t^tueures contre de telles entreprifes; ayant appris, que d'autres Religieu- fes , qui ont fubi le même fort , ont également pré* fentes fans fuceès leurs juftes plaintes , par des Mé- moires adrefies à Sa Majefté ; ces Religieufes n'ont eu d'autre confoîation , que celle d'efpérer que par la continuité de leurs prières , par une humble réfigna- tion, 6c par l'accompliilement non interrompu de leurs devoirs de B.eligion , autant que cela peut îë faire au milieu du Siècle, elles obtiendroient du Ciel, un Pro- tefteur dont rinierceffion les feroit rétablir dans leur état , & dans leurs propriétés.

Dans la conjonfture actuelle , le peuple de Bra- bant commence à éprouver de la confoîation, après avoir eu le chagrin de fe voir enlever la plupart de

(â) Nous arrêtons ici , la publication des pièces de la même nature, préfentccs :.a Gouvernement , ou à différentes corpo- rations, au nom d'une multltiïde de maifons Religieufes. On a vu, dans les Ripvcfenuùons des EtJts de Flandres, combien de ces demandes s'étoient faites dans les feules Ville de Gand & de Bruges (4e. vol. Part. civ. p. 120. —-Autres Ibid, p. 211. Part. £ccl.)

(37)

Ces Droits ^ Privilèges conftitutionnels , elles font clans la terme confiance , qu'elles auront déformais le Protec- teur fi vivement defiré , &; qu'elles recevront bientôt le prix de leur confl:ante efpérance en Dieu , en recou- vrant , pour fon honneur & fa gloire , l'état Religieux qu'elles avoient embraifé à jamais , en continuant à vivre en conformité de leurs vœux , & fuivant les obli- gations monafliques de leur Maifon , hors de laquelle ( c'efi: à dire hors de leur Communauté ipirituelle , &; indifi~oluble ) , elles n'ont pas un inftant de vérita- ble repos à attendre.

Les démonftrations publiques leur apprennent afifez qui eft ce Protecteur : Eh I ;qui pourroit-ce être que le Peuple , dont la voix, regardée comme celle de Dieu même , doit en avoir aufîî la force & les effets ?

Elles ne peuvent donc s'emipêcher de croire que leurs vœux font accomplis.

Hommes edimables, dignes à jamais des plus grands éloges ! c'efi: par votre bienfaifant miniftere , que l'on peut porter à ce défsnfeur incorruptible fes juftes plain- tes. Daignez aujourd'hui recevoir les nôtres , pour l'a- mour & pour la gloire de Dieu tout-puilTant ! apprenez à la Nation , que les Religieufes de Jericho , ont été établies à Tercluyfen , le jour de Saint Laurent , l'an 1399 ; que leur Maifon ayant été incendiée dans le mois d'Avril 1456, Philippe & IJabel'e ^ Ducs de Brabant , leur ont donné le Couvent de Jéricho , dont elles ont pris polTefllion le 7 Septembre fuivant , dont l«s lettres leur ont été octroyées le 9 Février 1457, & approuvées par le Pape Caiixte , le 26 Avril de la même année , comme il fe voit dans la Brabantia il- lujlrata.

Dites à cette Nation ( Dieu vous en récorapenfera ) qu'indépendamment de ces titres , leur pofi^eflTion a été confirmée par toutes les inaugurations , ou Joycujcs Entrées , &c , en dernier lieu , par , & au nom de Sa Majefté ; que néanmoins, on leur a enlevé cette pof- feflTion également au nom de Sa Majefiié. Paflez fous filence , toutefois les maux fans nombre , qu'elles ont

C3

( 38 ) ciTuyés par rapport à la modicité de la penfion à la- quelle o.i les a bornées , foit qu'elles jouiffent de la fanté , ou qu'elles foient malades : tout cela , aind qu'pne infinité d'autres malheurs , font des chofes paf- fées , & fans remède ; d'ailleurs la Providence ne les a jamais abandonnées. Dites feulement à cette Nation, à laquelle vous êtes fi chers, que de tous les maux de toutes les calamités , de tous les chagrins , auxquels l'homme eft ailuietti dans ce Monde , le pire feroit, pour elles , de n'être point rétablies dans leur ancien état, de ne pouvoir reprendre les devoirs, & les rè- gles de leur Conftitution; affurez-la, nous vous en fupplions , que nous n'avons pas d'autres defirs , que cehii de nous retrouver dans notre premier état , avec la décence reqiiife.

Nous ne doutons point , Hommes refpeflables , que vous ne daigniez expofer iincérement , & avec énergie , nos chagrins inexprimables , & nos juftes plaintes à l'AiTemblée générale des Seigneurs Etats de Brabant^ intercéder pour nous auprès d'eux , ôc les aiïïirer que jamais nous ne cefferons de prier le Ciel , pour qu'il veuille accorder au Peuple , & à tous fes ' Repréfentans, une paix confiante, & un bonheur fans réferve , pour le corps OC pour l'ame.

C'eft dans cette ferme confiance , que nous avons foufcrit la procuration ci-]ointe , &: que la fouffignée fe déclare , en toute humilité ,

Bons et respectables Citoyens,

Votre très-humble ■&; très-obéiiTiinte Servante Dame E. J. f^ERBRUGG- 11 EN Frkure de JeRICHO.

à Bruxelles le zS Mai lySy.

Les Religieufes fouffignées du Monaflere de Jèri- eho , à Bruxelles déclarent que leur intention & leur volonté eO: d'être réintégrées dans leur Poffeffion , de dcraeurcT en Communauté, comme Religieufes,

( 39 ) dans îe Monaftere fuklit ; fuppliant , Je auîoriiant , en confëquence , leur Supérieure Madame Elijaheth Ferbruvyhen , paur taire tout ce qui Icra convenable à cet effet.

Fait h ic) Mai lySj.

CF. Crokacrt. M. F. Fajîcnckds. C. rrankcn. E. Boerrcmans. L. Bcrnacrts, M. A. Vcr- licyliweghcn. A, C. Godtfurneau. C\ A. Dc^y cor. E. A. De La Rocca. M. C. Furcndcth^ B. Ds. Bouk. M. A. Fajidcr liGôvcn. C. Aî. Vandcn Dricfiche. J . M. Ons. J. van Eejbcck. A, fan Langcnhoven, " A. De Prince. J. Mcrtcns. A. Fctuns. C. Gicnps. *|* marque dz Afarie De Roe. J. Vandcn Bor- re. E. De Nys. A. VeUcmans. C. Paridons, M. A. Jaiijj'ins. J. C. Heurs. M. A. Peaers, M. S. Fander Elfr.

Lettre de CEviqut de Brlnn au Souverain Pomije Pie FI.

Beatissime Pater , Très-Saint Père.

O USTULIT Au^uftif- Jimus terres Princeps nojîer mea in Diacefi tria re^u- larium Monajieria , unum Carthujîanorum , altetum monialium ordinisS. Fran- cifci diclarum , Francif- canarum , tertium monia- lium ordinis SancLe Clara.

Optio quidem Carthu- Jianis relicla fuit , vel extra

urras Aupiasas ad aliam treufe hors àc^ Etats ce

C4

X-j'Empereur notre Souverain , a fupprimé dans mon Diocefe trois Couvens , l'un de Char- treux , l'autre de Reli- gieufes dites Francifcaines, le troifieme de Religieufes de l'Ordre de Ste. Claire,

On a laiffe le choix aux Chartreux ou de le te- tirer dans une autre Char-

Carthujîam migrare , vel la Mailon d'Autriche , oti

intra cas aliud Religiofo- cl'embrafTer un autre Inl-

rum infuutum amp/.ai , titut d'Ordre Religieux

vel ad ftatum fctculartm ^^^^, ^^^ ^^'^^.^ ^f ^^ ^a-

tr^Tf^r/ . r,A «r/rr,^ . . c. 1^110, OU enfin dc rentrer

tranirc : Icd primo calu i ,,r- c > ^■

, ,•' r n dans 1 ttat becr.lier: mais

le lu m iplis appiomi um ; ,

^ n , , V ^^^'^ ^^ premier cas on ne

cjl viaticum , nulla. vero jg^^ promet qu'un fimple

ulunor Vax jufl'.ntano , viatique & point de pen-

cafu aluro pro annua fîon alimentaire ; dans le

unius fujîcntûtione dcfig- deuxième cas , on a af-

nati junt 200 nojîii jlo- figné deux cents florins

reni , adjlatum autem Jcc- cnlarem tïanjituri , pcn- Jione annuâ ^00 jlorcno- rum gaudèbunt.

Par fcre optio data fuit Monialibus , hoc ttïam

de notre mounoie pour la penlion annuelle de chaque individu; & ceux qui embrafferont TEtat Sé- culier jouiront d'une pen- fion annuelle de 300 flo- rins.

On a prefque fait les mêmes ofnes aux Reli-

addito : quod iftœ facida- gleufes : on y a ajouté ,

qu'elles poi-voient fe choi-

fir une M-ii^on Séculière

rem aliqunm Domum ,fibi ^^'^'^-^ poi-voient fe choi-

eligere pojjint , in qua fub direcîionc cujufJam f^ecu- laris prcfbyt&ri & penjinm jlbi ajjig^nandâ communi- ter vivant.

Facla diclorum Monaf- ieriorum abrogatione Z?c- cntum Aulicum medianrc Provïncîce gubsrnin mihi communicatum fuit ^ quo reguiares ut nu fq ne fexus ( non tuntuni illorum Mo- na(ii.rioTum , qua de jaclo

, fous la direction d'un Prêtre Séculier, elles pour- roient vivre en commu- nauté avec la penfîon qui doit le'T être afîignée.

Après la fupprelTon de ces Couvens , le Gou- verneur de la Province m'a intimé une Ordon- nance de Sa Mp.jeft:é, par laquelle les Religieux 5c Reiigieures, non-iéulement des Couvens Supprimés , mais tous ceux indiflinéle- fublata junt , fid indif- ment , qui délirent d'être

(4

crlminat'im : ) qui a vous fuis folvï cupiunt^ jubcn- tw ad proprlos j'uoi Epif- copos dïrigi , & apud hos dejidaat.im Dijpuifatïo- mm cvinctTi.

Non adeo multis pojl diebus monitus fum a Ke- giis Commijfariis , in nego- tïofubLatorum Monajhrïo- Tum ccnjiitutis , ut dlcm indien rt m , quâ f^cularim futi fucrint CaTihufiani.

Tandem ipjl P. P. Car- thufîaniprues fuas , quibus ad fiaium prefhytcrcrum fscularium transjtrri ro- gant , rclpfa mihi porrexe- runt , quarumJimiUi tum a Carthufiunis laicis ^ tum a fupra mcmoratis rnonïali~ bus quajî in horas expcclo.

Uis nrum adjunclis coarclatus confidtrabam , IX paru una , fort-fflmum tjji prof:{Jionis RciLolofa f^inculum , hujufquc fo- lutionem fcdi jipofioUces, rcfsrvatam , altéra ex parte regulares illos , quibus fu- premi Principis authori- laie , jam jam interdicium eji in terris aujlriacis more Carthujianorum vivere , ebpingi non pejje , Jîvi

I )

délivrés de leurs vœux , doivent s'adreffer à leurs propres Evéques pour en obtenir la Difpenfe.

Peu de jours après je fias avertis par les Com- mifLires Royaux , Dépu- tés pour les affaires des Couvens lupprimés , de défigner le jour que les Chartreux avoient été fé- culirifés.

Enfin les Pères Char- treux me préfenterent eux- mêmes des Suppliques par lesquelles ils demandoient de pafler à l'Etat de Prê- tres Séculiers : j'attens de mom.ent à autre de Temblables Suppliques des Chartreux laïques & des prédites Religieufes.

Embarrafle dans ces cir- conftaîices, j'ai conlidéré cC\i.n côté , que la Protel- iion Religieufe étoit un lien très-fort , &C que la Dll- penfe des vœux des Reli- gieux étoit réfervée au S. Siège ; d'un autre côté , j'ai confidéré que les Re- ligieux à qui Sa Majellé de Ton autorité a défendu de vivre conformément à la règle des Chartreux dans toute l'éteudaî' de

ut alurius ordinls Injli- fes Etats , ne pouvoient

tutum projiuantur , Jivi ut fuum , quod profiffi funt , profcquendl gratid ad terras exteras migrent^ cum inccrtitudinc prafcr- tirn , niim ibi recipiendi fine , & nifi rtcïpïantur ^ cum perlculo niccjjariœ. vïta fufltmatïonis amit- Und(Z. Implorato igiiur divïno Luinlne , aliis viris probis y & doclis conjul' tis , ïn divina Clerneritia 6' tacito Sanciitatis vcjlrj: confcnju confijus^ ijludcgi. , ux nutlatcnus via difpcn- Jationis , fcd Jimplicis declarationis pjocederem ; declaravi nempe : quod {"jEpedifti Carthufiani ex caufis mox adductis , ab oblervandls Ordinis fui ftatutis liberi (int , & ad ftatum presbyterorum fas- cularium tranfire, inque eo iub obedientia ordlnarii , rémanente Voto caftita- tls , & fervato , quantum in diâ:o ftatu feculari po- teft fieri, voto paupertatis , fuperflua prsefertim in pau- peres , aut alias pias eau- fas impendendo , vivere poflînt. Adjccia adhorta- tïone. , ut mimons aritpti

ctre contraints d'embraiTer rinftitnt d'un autre Or- dre , ou de Te tranfporter dans les Pays étangers pour continuer à vivre fous la règle qu'ils avoient pro- feffée , fur-tout avec l'in- certitude s'ils y feroient reclus , & avec le danger , en cas qu'ils n'y foient pas reclus , de perdre la penlion néceflaire à leur fuftentation. C'eft pour- quoi après avoir imploré les lumières du Ciel , & confulré des hommes de probité & verfés dans les Sciences, me confiant dans la divine Clémence ÔC dans le confentement ta- cite de Votre Sainteté , j'ai procédé par voie de fimple déclaration &: nul- lement de Difpenfe ; j'ai donc déclaré que Us pré- dits Chartreux pour Its raï- Jons alléguées étoient Li- bérés de Cobfervancc des Statuts de leurOrdre^ quils pouvoient pajjer à l'Etat de Prêtre Séculier , & y vivre fous fobéijfartce de C ordinaire , en gardant le vœu de chajleté , dans toute fon étendue , & celui de pauvreté autant quil eflpof- Jible dans l'Etat Séculier y en donnant leur fuperjlu

(43 ) prîmî propofitî fui a con- aux Pauvres , ou en Vcm~

poti

um pro^rcdi conundant.

HumïVùmt jam fup- plico , dignetur Saîicîiias

vejlra hanc circa Cartliu- jianos pnsbyteros a me jam fr.cîam , & tam circa

Canhujianos Laicos^ quam fubtatorum Alonajierio-

rûm mor.iaUs Jimititer fil-

nant de leur premier état , ils ne le rclâchafTent point de leur i'ainre ferveur , mais plutôt qu'ils redou- blaffent leurs efforts pour marcher de vertu en vertu. Je fiipplie maintenant Votre Sainteté , qu'elle daigne ratifier &j; confir- mer la Déclaration que j'ai faite en faveur des Chartreux Prêtres , & celle que je médite de faire tant pour les Char- treux laïques que pour les

ciendam Dèclaraûonem, Religieufes dont les Cou-

ratam kabere ac confir' vens font fupprimés, man.

Porro in cafus futuros , Pour les cas futurs , fi par

fi vel plura regularium exemple plufieurs Monaf-

Monafieria & convenus teres ou Couvens vendent

deinccps authoritate Pria- cipis urra tolhrcntur , vd fi regularium aliqui , quo- rum Monajïcria in terris Auftriacis etiam in futu- rum fubfiflcnt , conjormi- ter Décréta regio fupra memorato , fingulatim pro folutione Votorum Reli- gio forum apud me infia- rent , vel fi nonnulh il- lorum , fin earum , quO"

à être fupprimés par l'au- torité du Souverain , ou fi quelques Religieux dont les Monalteres pourroient exifter dans les Terres de la Domination Autrichien- ne , venoient à folliciter auprès de moi , confor- mément à rOidonnance Royale , dont j'ai fait mention , la diiTolution de leurs vœux ; ou fi enfin quelqu'uns de ceux ou celles

(44)

rum Monajlerîa, jamjam fublata funz , difpcnfa- tïoncm in voto caji'uatis , & paupcrtatis , vdfalum Ucentiam condcndl Tejla-' mcma a me peter enc^ pw kis & ejusmodi cafibus , yel miki necejfarias , & opportunas facuUates a Sancl'udU vejha providl concedi , vel de alio ne- cejjario , & opportiino remedlo profpici Jupplici- ter rogo^ qui hum'di , & Jin- ceropedum ojculo gratiam & benediclionem Apoflo' licam implorans , pcrfc' vero,

Sakctitatis Vestrm

Humillimus 6c Obedien- tiflimus films , & crea- tura M A T H I A S Franciscus, Epifco' pus Brunenfis,

Brun£ , die zda, Martii

dont les Couvens viennent d'être Tupprimés , s'adref- Toient à moi pour obtenir la Dirpeufe du vœu de chafteté hi de pauvreté , ou au moins la faculté de faire des teftamens , pour ces cas & autres femblables, ;e fupplie très- humblement Votre Sain- teté de m'accorder les pouvoirs néceffaires & convenables , ou d'y pour- voir par un autre remède néceffaire & opportun. Quoi faifant , je demande votre Bénédiftion Apof- tolique en baifant bumble- ment vos pieds & je fuis.

De Votre Sainteté,

Votre très-humble &: très - ObéiiTant Fils Mathias - Fran- ç O I s , Evéque de Brinn.

B RIN N , le 2

Mars

(45 )

Plus P. VI Vener. Frat. Mathiae Brunen- fium Epifcopo.

V EN. F R A T E R ^ S A L U T E M ^ &C.

J-j X Lïttcns quas G'^ . non. Mardi ac iterum 3*. 7ion. Aprilis ad nos dc- dijii gravem mœroris cau^ fam acccpimus. Dolcnda qiùdim rcs ejl quœ non- nullos Rcgular'mm Ordi- nes , hue illucqiie fubmo- \tt , ac Viras Rcligiojbs facrufque Virgines dejicit à MonaJIcriis ; fed nimis te propcrajft arbitramur , dcclaratione qua Dïo- michjs Carthujïanos tuâ in Diœceji ^Jîatim à proprds Lcgihus S^tatutijque iiberos foiutofquc renuntiat , ut conditionem Jlatumque Preshyterorum Jkciilarium illicb inirc vaUant. Cenc- ralis kœc namque DccLi- ratio qu(Z infcid prorfus Scde Apojlolicd, tibi, Ven. Fratcr , opportuna malis vija cjl^ nobis ciim intcm- pefîiva tum pcriculis plcna vidctur, Curandum impri-

Bref du Souverain Pomifi Pie VI^ Pape , à notre vénéra^ bit Fnrt Mathias , Evêqui de Brinn.

VÉNÉRABLE Fre-

RE, Salut , ôcc.

E S Lettres qne vous nous avez adreiTées en date du 2 Mars & du 3 d'Avril , nous ont eau la plus vive douleur , car c'eft un fpeélacle bien affligeant de voir dirperfer décote & d'autres difîerens Ordres P».éguliers , & ex- pulfer de leurs Monafleres des Vierges qui s'y font conlacrées à Dieu. Mais nous femmes d'avis que vous vous êtes trop pré- cipité en, déclarant que les Chartreux fupprimés dans votre Diocefe , font en- tièrement libres & exempts de la pratique de leurs Règles ce de leurs Statuts , &c qu'ils peuvent dès ce moment fe ranger dans la ClalTe des Précres Sécu- liers. En effet , Vénérable Frère , cette Déclaration , en termes fi généraux , que vous avez faite à l'infu du Siège Apoftoiique, §C

( 4<^ ^ mis cjî ut oinncs in voca- que vous avez imaginée tione (uâpcrmaiieant^ idcb- être propre à remédier aux que in aiiâ vd proprii vd maux préfens , nous paroît alterlus injUtial Monafi:- au contraire faite à con-

riafefc rccipiant^ ubï Kota folcmnia quibus vitarn D&o conf:crârunt , nclïqiu perfolviznt. Nulla rerum ku- tnanarum ratio , qiuiui te in Monachorum cauja prce ocul'is habuijjc fciibis , f'ed nnà Confcientiœ & SaLutis cura hcibcnda cfî. Hacfaiii

tretems &: fujette à beau- coup de dangers. Il faut, avant tout, employer les moyens les plus efficaces pour que tous perfiftent dans leur vocation. C'efl: pourquoi ils doivent fe re- tirer dans d'autres Monaf- teres , foit de leur Inftitut ,

nojîris vcrbis dicito Us , ad foit d'un autre Ordre , quos peninct , cofqm cou- ils pratiqueront parfaite-

jirma , (l a propojlto dcdl narc cognofcas. Ai ji forte, cuïp'tam acddat quod recep- toremjibi mqiuat irzvcnire , in hoc tantum infortunio

ment les obligations atta- chées aux Vœux folem- nels par lefquek ils fe font confacrés à Dieu. Il ne faut ici avoir aucun égard à

Jinimus , pojje 'eiim tamdiu quelque intérêt temporel injlaïuPresbytzriSacula- que ce puifTe-être : ( &

ris pcrniamre quamdiii ita vivcrc folâ jucefjîtatc coge- nir. Sed quijque dibet ver- Jari in Saculo memor voca- tionis fax , ejufqae tcnax DifapUntz & VitiZ E.cg':- laris oui fe pridzm adjcrip- Jerit , J^oîa folemnia quce

c'eft cependant ce que vous avez eu en vue dans l'affaire de ces Religieux , comme vous en faites vous- même l'aveu ; ) mais il fiut envifager uniquement le repos de leur confcience & la fureté de leur falut

femper firma fempcrque im- •éternel. Voilà ce que vous

motcL pzrmanùunt dïltgui- déclarerez de notre part à

tzr cujlodiat &ferv:t. Sacri- ceux à qui il appartient ;

hgnim profccio ejfet fi quïd Si vous en connoiflez qui

a purijjîmâ €ajîitatis obli- chancellent dans leur voca-

gatiom ditraherr.tur. Studio tion , & qui s'en écartent ,

ctiampaiiptrtatïs^quamiim ayez foin de les fouîenir

pro novd Vivendi r.itionc [as & de les raiTurer. Cepen-

erit, omnes addicii fint ^ ut dant s'il arrivoit que quel-

. ( 47 ) fallaci ternjîr'atm cupidl- qu'un ne put trouver d^a- tau immumm Utumauc fyle , ce n'eil: que clans ce aiiimumprafifcrant'yOhc- cas malheureux que nous dicntiam quoqiii prajhnt lui permettons de vivre Epijcopo & Jub vejlc ah- dans l'Etat de Prêtre Sécu- quod Jignum gérant regu- lier , pour aufli long-tems larisprofiJ/ionis,ne ex /iJc qu'il y lera torcé par la revcrà exiijfc videantur. leale néceflité ; & alors il Hahs itaquc Jentcntiam devra vivre dans le Siècle nojlram ad quant conjilia. ians perdre le fouvenir de omnia componcre acbss. (a. vocation , & obier ver Hi/zc ficlU intclligcs nos conftamîr.ent la Difcipline minime lis ajjcntin^ qui dif- Se les Obligations de la penfationem a vous JoUm- vie Régulière qu'il avoir

embrafle'e , gardant fidè- lement fes \ ceux foîem- nels , qui demeurent & qui demeureront dans toute lewr force. Et certainement le moindre manquement en matière de cha{l:eté , feroit un facrilége. Tous auffi devront s'attacher autant qu'il leur lera pof- £ble, dans leur nouveau genre de vie , à pratiquer

mbus pojiulant ^ ut cania- les nuptias contrahant , y cl condcre vahant tejîamznta. Cave igitur ne difpenfatio hiijxtfmodi qua décor ^pul- chritudo domûs Dci poilue- rttur ^ andiri contingat in Ecclijlâ. Neque tu potes jure ordlnario concedere , ut recie cogitas , neque nos tibi ejus tnbuenda jus po- tcjiatemve ddegamus.

le Vœu de pauvreté , en conferv'ant leur cœur libre &: dégasé de toutes affec- tions aux biens trompeurs ec périfTables de la Terre. Pour ce qui eft de l'Obéiffance , ils devront la ren- dre à leur Evêque , hi fous leur habit , ils porteront une marque dinflinetive de l'Ordre dans lequel ils ont profeifés , afin qu'ils ne paroifTent pas l'avoir réellement abandonné. Tels font, Vénérable Frère, nos vrais' fentimens fur lèfquels vous devez régler toutes vos démarches ; Se delà , il vous efl ailé de comprendre que nous ne fommes nullement d'iaten- tion d'accorder la difpenfe de leurs Vœux à ceux qui la demandent , ou pour embraffer l'état de Mariage ,

(4^) ou ponr faire des difpofitions teflàmentaires. Prenez donc garde qu'on n'er.temîe jamais parler dans TE- glif'e cle pareiiie.s Dirpsufes, qui terniroient le luftre &: la beauté de la Maifon de Dieu. Vous fentez affez te vous en convenez que vous ne pouvez , de votre autorité , accorder ces fortes de Dilpenfes , & nous ne vous donnons à cet effet aucun pouvoir.

Itaqiu cjîo mernor facer- C'eft pourquoi , fouve- dotil vu ^ & rnacih an'uno ut nez- vous du facré Carac- affiduis Deum prccibiis va- tere dont vous êtes déco- lidani nohis opcm impctrarc , & armez-vous d'un concris. Opdmd hâc fpz , nouveau zèle, afin que par t'ibï , l'^cn. FïCLtcr ^ atquc vos prières redoublées , ovihus Jzdei tua creditis vous nous obteniez du Apoliolicam Bcnediclionern Seigneur des fecours puii- pcrmancntcr impertimur. fans, C'eft dans cette ef-

pérance , Vénérable Frère , que nous vous donnons & aux Ouailles confiées à vos foins notre Bénédiftion Apoftolique,

Datis Videbona prïdic Donné à Vienne le il

idus Apr'dis lySl Avril 1782 , la hui-

P ontificatus nojlri, tieme année de no-

Anno 8v<9. tre Pontificat.

COPIE (Tune Lettre & cCun Mémoire préfenté à Sa Majejlé ^Impératrice Douairière & Reine Apojîolique , par les Evêques des Pays-Bas , co/z- ternant CEtat Religieux^ tan lyy^.

Madame,

J-JES Evêques des Pays-Bas ont l'honneur d'adreïïer à Votre Majefté de très-refpeftiieufes Répréfentations fur les Edits du 13 Mai 1771 , & du iS Aril 1772.. Les fentiineiu de piété dont Votre Majefiié eft pé- nétrée , leur infpire la plus vive confiance , que

vous

( 49 )^ vous entendrez avec autant d'attention que de bonté des Evcques qui n'ont d'autres intérêts que ceux de la Religion & de votre Gloire.

L'objet des deux Edits dont nous prenons la li- berté de porter nos plaintes à Votre Majefté , concerne trop direiflemcnt leur miniftere , pour qu'il leur loit permis de s'en diflimuler les l'uites & de le taire iur leurs difpofitions : &: dans quelle occalion une Au- gufte Princeffe , encore plus recommandable par fes vertus , que par l'éminence de Ion rang , écouteroit- elle des Ev«3ques , fi elle refuibit de les entendre , de prendre par elle-même connoiffance de leurs mo- tifs , & de les pefer avec maturité , fur une matière qui tient de fi près au Gouvernem.ent de TEglife, dont ils font refponfables à Jefus-Chrift qui le leur a confié ?

Les Monafteres font par leur nature des Etal^liffe- mens Eccléliaftiques, foumis à Tinfpedion des Evcques. C'eft à FEglifc qu'ils doivent leur éredhon primitive, c'eft elle qui dans tous les tems a réglé leur police , & leur deftination eft toute de fon reflbrt , puifque ce font des Maifons de retraite deftinées aux Fidèles qui défirent de fe vouer à la perfeâ:ion &: à la pra- tique des confeils évangeliques.

Votre Majefié verra dans les très-humbles Repré- fentations que nous avons l'honneur de lui adrefier ce que les faints Dofteurs & les Conciles ont penfé uniformément fur l'importance de ces Etabhfi^emens précieux à la Religion , fur la nécefiîté de les con- ferver, &: d'y entretenir ou d'y rappeller, par de fages & de folides réformes, l'ordre, la difcipline & i'efprit de régularité.

Si les deux Edits de 177 1 & 1771 n'étoient defiinés qu'à réprimer les, abus qui ont pu s'introduire dans les Cloîtres , nous nous ferions un devoir d'applaudir à un but fi louable ; & fi nous avions été confultés fur ces objets qui intérefient fi direftement notre laint Miniftere , ce témoignage de la confiance de Votre Majefté , que nous efpérons de mériter toujours , nous

D ttt

aurolt procuré la confolation de coopéerer à des vues il clignes de fa Religion , & de lui propoler les moyens les plus fûrs &: les plus efficaces pour les reiTîpllr.

Mais , quoique les Edits s'annoncent fous des aufpices fi favorables , nous ne craignons point de dire qu'en y cherchant ce qu'ils annoncjoient , nos efpérances ont été trompées ; & qu'au heu d'y trouver des Ré- glemens tendant à la réforme , nous n'y avons apperçu que des projets de deilrudion qui porteroient le coup le plus funefte à l'Inftitut Monaftique.

Nous favons que rien ne fut plus éloigné de vos intentions, & que votre rcfpefi: pour la Religion, que votre amour pour TEghfe vous font voir dans Tétat Re- ligieux ce qu'il eft en effet , un état faint par lui- même qui doit perpétuer dans l'Eglife la vie des premiers Chrétiens , &: qui eft un port de falut pour beaucoup d'ames qui fe perdroient dans le tinnulte du fiecle.

Cette idée eft celle qu'on s'en eft formée de l'o- rigine des Màiibns Rehgieufes , & qui s'eft perpétuée jufqu'à nous par une tradition confiante depuis 14 fiecles. On en a toujours conclu qu'il ne falloit pas détruire ces Maifons Privilégiées , parce qu'elles croient trop utiles pour les renverfer , & que , parce que les avantages - qu'on en attend , étoient attachés à la régularité , il falloit la maintenir dans ceux qui l'avoient confervée , ou la rétablir dans ceux elle étoit affoiblie.

Mais rien ne feroit plus contraire à cet intérêt ef fentiel que la ruine de l'inftitut Religieux , &: tout projet qui tend à la fappreffion, ne fauroit être que contraire au bien de la R.eligioii 6^ au vœu de l'Eghlé.

Oui, Madame,, nous le difons avec douleur, il n'y a pas lin feul Article dans les deux Edits , qui ne nous paroifTe menacer l'état R.eligieux d'une perte affurée. L'exécution de ces Loix fenneroit l'entrée des Monafteres ; elle dégoûteroi!: ceux de vos Sujets

( 5' ) .

qui fe fentiroient portés à s'y retirer , même elle n'infpiroit pas du mépris &: de Taverfion pour un érat qui a formé tant de Saints , &: la décadence des Monafteres bientôt abandonnés , feroit dans peu lui- vie de leur ruine abiblue.

Nous olbns affurer Votre Majefté qu'elle en fera elle-niême convaincue, û elle daigne fau'e lire nos très-humbles Repréfentations , tant les preuves que nous en avons mis fous les yeux de Votre Majefté lont fenfibles, multipliées & frappantes.

L'extinftion de l'Inftitut Monaftique eft le cen- tre , ou le terme commun auquel aboutit le fyftéme général des deux Edits. C'eft ce qui nous allarme , & ce qui touchera fans doute votre piété &: la bonté de votre cœur. Les deux Edits ont encore l'inconvénient de porter atteinte dans leurs Régle- mens particuliers , aux Décrets des Conciles , aux Loix fondamentales de la vie Religieufe , principale- ment fur l'étendue du vœu de pauvreté, &: fur les devoirs qu'exige le renoncement , auxquels les Re- ligieux s'engagent.

On ne fauroit leur laiiTer la liberté de toucher leurs penfions , & d'en difpofer, fans les rendre pro- priétaires , ou fans les inviter à le devenir.

C'eft l'effet nécefl'aire que produiroit l'Edit de 1772 , Se les Loix de la confcience ne permettent jamais aux Religieux d'ufer de la liberté qu'il leur accorde.

Nous fommes avec le plus profond refpeél, M A D A M E ,

DE F0TE.E MAJESTE^

Les très-humbles &: très-obéif- fants ferviteurs & Suiets. Etait Jigncs , f Jean-Henri Archevêque de Maiines. J. R. Evêquc de. Bru- gi$. M. G. EvêquiS d'Anvers, •}• Félix Evéque d'Iprcs. M. J. Evéque de liuremonde. G G, Eveque de Gand. F. Evêqut de Namur^

D 1

(50

MÉMOIRE préfcnté par les Evêques des Pays-Bas

à Sa Majtjîé i' Impératrice- Heine Douairière,

•ES Evéques à^s Paj's-Bas viennent avec la con- fiance la plus refpeclueufe, expofer à Votre Maiefté leurs allarmes les plus vives , celles que leur caufent les clifjjofitions des deux Edits publiés de votre au- torité les i"? Mai 1771, Se 18 Avril 1772, concer- nant l'Erat Reûgieiix.

Ces dei;x Loix paroiiTent avoir eu pour objet de rétablir dans les Monafteres l'exaftitude de la difci- pline régulière, en réprimant des abus propres à y cailler le reiâchement ; & des Evêques occupés de leur niiniilere , ne fauroient qu'applaudir à des vues fi fage<: en elles-mêmes, fi dignes de la piété d'une augulie PrincelTe qui m.et fa gloire à faire fleurir la, Rtlgion dans fes Etats : mais quelle n'a pas été leur cinfternation ," lorfqu'en lifant avec attention les deux Edits , lorfqu'en comparant leur difpofirif avec les motifs énoncés dans les préambules , ils ont eu la douleur de voir , que ceux-ci plus apparens que réels , annonçoient une réforme , mais que l'effef des régle- mens feroit infailliblement de porter à i'iitat Reli- gieux un coup tunefte , qui produiroit , quoique peut- être par des effets lents &: progreififs, la ruine totale des Monafi:eres.

Les deux Edits peuvent être confidérés dans leur généralité , & dans l'enfemble de leur iyftême , ou dans les difpofitions particulières qu'ils renferment. Sou<: ce dernier point de vue, ils préfentent parmi qiielqies réçjlemens utiles , des articles qu'on ne conciliera jamai., avec les Loix fondamentales de l'Inf- titut Religieux ; fous le premier afpeéf , beaucoup plus important, ils paroif^'ent menacer l'Ordre Re- ligieux d'une chute alTurée.

Mais qu'il nous foit permis , avant de développer

(53) Ibus les yeux de V. M. ce double fujet de nos juftes inquiétudes, de lui rappeller les idées primitives qu'on s'eft formées de l'Etat Religieux, l'intérêt que rÉglile a pris à fa confervation , 6>c les avantages que la Re- ligion a droit d'en attendre.

L'Etat Religieux doit fa naiiTance aux premiers fîecles de l'Egllfe , & comme l'ont remarqué les Ecri- vains les plus favans, c'efl dans les iiecles les plus faints & les plus éclairé? qu'il a commencé , 6c qu'il s'eft étendu avec des progrès qui rendent à jamais ces iiecles les plus dlftlngués dans les faftes de l'Egllfe.

L'Etat Religieux eut le double avantage , de pro- curer un afyie aux innocens , 6^ aux pécheurs touchés d<; Dieu, une retraice, ils puilcnt fe livrer aux exercices de la pénitence. Tous , ou prefque tous ceux qui avoient un délïr fincere de fe fauverjOU qui fe fentolent appelles à embraiTer la voie des con- feils évangellques , s'enfermoient dans les Monafte- res , parce que le falut y étolt plus facile , qu'on y étoit foutenu par l'exemple , & qu'à l'abri des ten- tations auxquelles expofe la corruption du fîecle , on yjvivoit fous l'empire d'une règle qui dirigeant toutes les aftions , ne laifioit aucun vuide dans la journée.

Il n'efi: donc pas furprenant , que l'Egllfe ait pris le plus vif intérêt à la confervation d'un Etat qui lui étoit fi précieux ; qui rendant la pratique des confells plus commune & plus facile , faifoit revivre dans les Provinces chrétiennes , le beau modèle des Fidèles de Jerufalem ; qui expofolt aux yeux de tous les peuples des Pénitens publics , tous occupés à appalfer la colère di- vine , &c à attirer les bénédicllons célei-les. Des Chré- tiens parfaits dont la conduite édifiante , en prouvant d'une manière fenfible la fainteté de l'Egllfe & la vé- rité delà Religion chrétienne, apprenoit aux Fidèles que la Foi évangélique , loin d'être impraticable dans fes préceptes , a la puiflance de rendre les hommes étran- gers à la terre, &: des êtres ici-bas , citoyens du Ciel.

Non-feulement les Monafteres étoient des Malfons de falut, pour un grand nombre de perfonnes qui s'y

( 54 )

t^evouoicnt aux travaux d'une vie pénitente; il'; devin- rent une fource de bénédiclions par l'exemple , les prières & les bonnes œuvres des Religieux qu'ils rena fermoient.

En travaillant à leur propre fanftification , les Reli- gieux n'oublioient point les befoins de leurs frères , ils mettoient au contraire au nombre de leurs plus ei- lentielles obligations , celles de fléchir la Juftice divine, d'implorer fa miféricorde , de lever des m.ains pure? au Ciel , pour attirer la bénédiction de Dieu , fur les travaux des Payeurs , & acquitter pour le commun des Fidèles engagés dans le iiecle , & trop partagés par les foins ôi les occupations extérieurs , le tribut des louanges à la Majefté Suprême. C'efl pourquoi Saint Bernard difoit aux Moines de Clairvaux, qu'ils étoient entrés dans le Cloître pour répandre des lar- mes continuelles fur leurs péchés & fur ceux du peu- ple, ia) ^

Pour peu qu'on ait de connoiflance de i'Hiftoire , on fait quels fecoiirs TEglife a retirés des Monaderes , foit par les Minières évangeliques qu'elle y trouvoit, foit parleur zèle à défendre la Foi contre fes ennemis. Ceft dans la iblitude des Cloîtres qu'ont été formés tant de faints Evêques , qui ont été la lumière de leur Siècle. » Et il étoit ordinaire de prendre les plus faints , » d'entre les Moines , pour en faire des Prêtres 6v des » Clercs; c'étoit un tonds les Evoques étoient af- » furés de trouver d'excellents fujets , & les Abbés » préferoient volontiers l'utilité générale de l'Eglife , à » l'avantage de leur Communauté, (b)

Il feroit trop long de rapporter les combats que les Religieux ont foutenus pour la défenfe de l'Egliie , 6c pour fa Doctrine , combats qui leur ont tait donner par Saint Jérôme , le glorieux titre de colonne de l'E-

(4) In hoc enim Monafterlo intramus , ut peccata noflra & populi defleamus. Ep. 445, (b) Fkury z. Difcours, n. 3.

gîlle (u) , &: qui les a fait appeller par Saint Grégoire de Naziance, le rempart cie la Foi, & le ibutien de VUnivers (/^). On lait que lorfque le flambeau de la Foi commença à s'éteindre dans l'Orient , l'Ordre de Saint Benoît procura une nouvelle fécondité à l'E- gliie , par ks Miffions en Angleterre &: dans tout le Nord; &: c'eft encore principalement aux travaux des Religieux, que, lorfque les dernières hérélies dévai- Toient tant d'Etats Catholiques , la découverte de l'A- mérique ayant ouvert un champ immenfe à la prédi- cation de l'Evangile , ces nouvelles Contrées durent leur vocation à la Foi de Jefus-Chrift. (c)

Mais rien n'eft plus propre à nous faire refpefler rinftitutMonaftique, que l'acharnement des Hérétiques pour le décrier , & le zèle confiant des faints Doéleurs &: ds;s autres Eccléfiaftiques pour repouffer leurs in- ventives.

Les Ariens , les Manichéens , les Donatiftes , fu- rent les ennemis les plus déclarés de l'Etat Monaf- tique : St. Augullin en prit hautement la défenfe dans fon Traité des Mœurs de fEgli/è. Tels ont été dans le 15™=. Iiecle >Viclef &c fes acil é.cns , &: dans les fiecles fuivans les prétendus Réformés , contre lef- quels nos Controveriiftes , chargés de la défenfe de l'Eglife , {e font fait un devoir de repouiîer leurs calomnies. C'eft en particulier l'objet du Traité que le favant tk pieux Cardinal Belbrnîin a publié fur les Moines.

De tout tems l'Etat Religieux trouva auffi des Ad- verfaires parmi les gens du fiecle peu inflruits des vérités , ou peu pénétrés des fentimens de R^eligion, qui plus occupés d'une politique toute mondaine, ont déclamé contre l'Etat R-cligieux ou infpiré contre hfi de funeftcs préventions.

(a) EpiP. Sô.

(t) SubfiUium Fidel , plebis laus , & bafis orbis Admjv.uor. Carm. pro Monachls.

•c) ThoiiKiiTin. D'ifàpL Eccl. T«m, 1. pa^c 1464.

i) 4

C 56)

En 592.5 clés CoLirtifans qui faifoient moins de cas de la gloire de l'Eglife que de la profpérité tempo- relle de TEtat, ayant eng.igé l'Empereur Maurice à publier une Loi qui interclifoit aux Militaires la li- berté d'exnbrafTer la vie monaftique , St. Grégoire- le-Grand ne put voir qu'avec la plus profonde dou- leur que l'entrée du Monaftere fût fermée aux Of- ficiers & aux Soldats , & qu'une Loi publique les privât d'un moyen fi utile de réparer par la Péni- tence les défordres û communs dans la profeffion des armes. 11 écrivit à l'Empereur pour lui faire fen- tir le danger de la nouvelle Loi , & perfuadé qu'elle intéreiToit fon falut , il le conjura de ne pas obfcur- cir devant Dieu par cette démarche, tant de lar- mes que ce Prince avoit répandues , tant de prières , de jeûnes &: d'aumônes que fa piété lui avoit fait f.iire.

Peut-être pourroit-on penfer , en voyant l'intérêt que les plus grandes lumières de l'Eglife ont pris à l'Etat Monafiique , que tous les Religieux dans la première ferveur de leur établiflement , couroient d'un pas égal la carrière dans laquelle ils étoient en- tjés. Mais nous apprenons des Saints Pères qu'il y avoit dès- lors des Religieux non- feulement foibles ik imparfaits , mais dont la conduite déshonoroit la profelîion Monaftique.

St. Auguftin écrivoit à fon Clergé que , s'il y avoit peu de Chrétiens plus parfaits que ceux <]ui avoient efficacement travaillé dans les Monafleres à la ré- forme de leurs mœurs , il connoilToit peu de Sujets plus conompus que les Moines qui dans le Cloître avoient dégénéré de leur vocation (rt). Frappé des iViiies fâcheufes de ce défordre , il fe croyoit obligé de prémunir fon Peuple contre le fcandale qui en ré-

' (a) Difficillimè fura expertiis meliores quàm qui in Monaf- tcrio pr( feceriint ; ita non fum expertus pejores quam qui in Monafieriis cecidcrunt. £f. yS,

(57) ^ultoît, & de l'avertir que la dépravation des mé- dians Religieux ne devoit pas taire plus d'imprei- iion lur les el'prits , que l'exemple des m.auvais Ecclé- fiaftiques &c des mauvais Chrétiens.

Mais au lieu d'en conclure qu'il falloit les aban- donner à leur malheureux ibrt , nos Pères n'en mon- troient que plus de zèle pour rappeller les Religieux à une exaéle difcipline , & en cela on peut dire qu'ils fe font conformés aux vues de la Providence , puif- qu'elle a fufcité en difFérens tems des hommes évan- geliques qui , pénétrés de l'efprit des premiers Fon- dateurs de rinltitut Monaftique, y ont reffufcité la fer- veur de fon premier âge. Que fur la première décadence de la vie régulière , ont eût pris le parti défefpéré de fupprimer l'Ordre Monaftique , l'Eglife eût été privée des abondantes bénédiftions qui ont été la faite & des grandes réformes telles que celles de Cluny & de Cîteaux , & de l'éreftion des nou- veaux Ordres.

C'efi: parce qu'on n*a jamais varié dans ces fenti- mens, que le Concile de Trente a ordonné de rétablir la régularité dans les Maifons conventuelles elle étoit tombée , 8c de la fortifier avec foin dans les lieux elle s'étoit heureufement maintenue (a). Le motif du Concile efl tiré des importans avantages que la Religion retire des Monafleres pieux &: réglés : Qiion'ia'n non ignorât fancia Synndus , quantum ex MonaJUnis pie injîitutis , & récit adminijlratis in Ec- clijïd Dit fplcndoris atque iitil'itatis oriatur. Ce motif avoit été celurdu Concile d'Auiun de l'an 670. C'eft celui qui fe trouve rappelle dans les Conciles pofté- rieurs. Le Concile de Cologne de 1451 penfoit que c'étoit contribuer à l'honneur de Dieu , au falut des âmes & au bonheur du Peuple , que de travailler à taire obfer\'^er aux Perfonnes Religieufes la règle à laquelle elles s'étoient vouées {h). Le Concile de

(>z) Seflf, 25. Conc. Labb. tooi. 14. pag. 896. Kb^ Ibid. tom. 13. p. 1381.

(5n

Malines Je i -570, en renouvellant îe Décret du Con- çue de Trente , fondoit la nccelî:té de réformer les Moiiaileres , lut ce que ceux qui ibnt hien réglés , font pour le Peuple Chrétien, ce que les Citadelles fortifiées font dans un Pays expofé aux incurfions de l'ennemi (a).

Quand oa connoit l'Infcitut MonaiHque , Ton objet, fa fin , les importans fervices qu'il a rendus à l'Eglife , & qu'il lui rendra touiours , quand on veillera à en coni'erver l'efprit dans les Ordres Religieux , on ne pourra qu'être alarmé de tout projet qui îendroit à pri- ver la Religion d'un Etr^blilTement fi faint en lui-même & fi précieux à l'Eglife , dont il fait un des princi- paux ornemens.

Dès le y, fiecle , le Concile général aïïemMé à Chalcedoine , avoit défendu , fous peine d'être traité comme violateur des fairxts Canons , de changer en habitations féculieres , les Monafteres légitimement érigés. La Loi portée par ce Concile, rappellée en 789 , dans le Concile d'Aix-la-Chapelle, & renouvellée par celui de Conftantinople de l'an 370 , a été in- i'erée dans le Corps de Droit (^).

Le Concile de Seviîle de 619 , en ordonnant que le5 Monaileres fuïïent maintenus dans une mviolable fl:..biliîé , déclara étranger au Royaume ele Dieu quiconque entreprendroit de les renverfcr (t). Le lécond Concile de Nicée , en 787 , regarcloit la del- truclion de ces Maifons vénérahles ^ commme un fléau attiré par les péchés des Peuples (_d).

(a) Monafteria rcflè inftituta , id funt in Populo Chrif-i tiano , quoJ arces mnitJin pnefidio bene infiruoii in regione hyitiuin incurfior.ibus expcfità. ( Tit. de regiJ. )

(^) Cor.c. Labb. t. 4. pag. 778.

(cj Si quis... qi'.odiibet Monailerium aut vi cupidiratis fucViandum , av.t riiriuktiône aliquà frauôii conveilendum tcr.taverit , anarhenia cftectus nianeat à Regno Dei extra- neus. ( Ibld. t. 5. /'jg. i6ôy. )

(i-fj Quod in magnà damnatlone fint , qui Monafteria

(59)

Si les Nîoines ( ce font les exprefllions du Concile* fie Tliionville , en 844 ) le conduilent d'une ma- nière peu honorable à la Religion , il faut les ré- former ; mais à Dieu ne plaife qu'on détruife l'Ordre Religieux , à caufe des raéchans qui s'y rencon- trent (a).

Le Concile de Meaux de 845 , repréfentoit aux Princes qu'ils étoient eux-mêmes intérefles à empêcher la ruine des Maifons Religieuies, parce qu'ils dévoient faire accomplir la pieufe intention des Fondateurs , & qu'en foufFrant la deftruction de ces Lieux faints, ils s'expoferoient à la vengeance que demanderoient à Dieu ces Fondateurs (/•). Celui de Pavie, de l'an 850, avertiffoit les glorieux Empereurs , que les Fondateurs ayant mis fous leur proteftion les Monafleres qu'ils avoient érigés , la Puiflance Souveraine , qui loin de les défendre, fe porteroità les fupprimer, dtvcit d'au- tant plus craindre le jugemient de Dieu , qu'il n'y a point ici bas de Tribunal qui puiffe la juger, (c)

Les Evéques des Pays-Bas n'ont garde de vouloir établir le parallèle le plus léger entre lôs Edits de 1771

communia faciunt habifacula, quoriam proprer calamitatem , qure pro peccatis ncftriâ , in Eccleilis fada efî , fi-brcptse funt. .. qucsdam venerabiles Doimis , & fa^ia fr.n: communia dlverforia. ( ItiJ. tom. 7. pag. 6oj. )

(j) Propter pravorum nequiriam , Ordo Re!'igior.ii; , & Loca facratiffima eis , qiùbus lic'tum non eft , ccmmittan- tur. ( Ihid tom. 7. )

ib) Providendum efl: Réglas Ma-eftati. . . Ut Ibidem Rcbgio «bfcrvarettir. . . Qiialiter veta ndeb.iim inconculTa peimaneant , ne voces eorum contra fe ante Deum clamantes,., ccndem- nabiles fentiat. (Ibïd. t. 7. pi:s;. iSp. )

(C) Suggerendum efi: beatilbmis Imperatoribus quia.. . . & il... impugnatcres (.fFicUinuir , qui praepugnaie c'ebv.ctTint , cavendum fumir^opere Principibv.s , ut qui a nemine nunc judicaptur, ne in futrro pîdicio gravit s judicentur.. . Nos qui debjtoies fumus ut fidcliier annuntiemus , idcl-c6 fidclîLtr fuggérimus , quod filere non audemus. ( Ji.-i. t. 8, pag. 6j, >

( 6o ) & 1771 , 5c les Loix facrileges de pluHeurs Princes fur Cet objet pour détruire l'Etat Religieux. Ils fe fe- ront toujours un devoir de rendre l'hommage le plus authentique à la piété de V. M. I. , à fon attache- ment pour l'Eghfe & pour la Religion. Mais c'eft l'in- time conviclion ils font , que Dieu a gravé profon- dément ces pieux lentimens dans le cœur de Votre Majefté , qui leur infpive la confiance de lui faire ap- percevoir le danger des deux Edits , qui , contre fon intention connue, &" fans doute contre celle des per- fonnes qui ont rédigé les deux nouvelles Loix , con- duiroient l'Etat Monafcique à un dépériiTement infen- /ible , à une mort lente , dont il ne fe releveroit pas. L'Edit du 13 Mai 177 1, paroît avoir eu un objet intérelf^iut , pour le bien de la Religion & de VEtat; il a été deftuié à rendre Vadmijjîon k C Etat Re- ligieux entièrement gratuite ; à faire revivre fur ce point important de la Difcipllne régulière , les difpofitions des faints Canons ; à faire ufage des moyens les plus propres à les faire refpecier & objerver ^ & à profcrire & prévenir tousles fubterfuges , tous les prétextes pal- liés par lefquels ont efl: parvenu à éluder leur fainte rigueur

LE dit a 73 Articles.

Le premier défend indiftin6lement à toutes les Com- munautés Religieufes , d'exiger &c même de recevoir quelque fomme que ce foit en argent , ou en valeur à titre de Dot , Habillement , Don, Penfion , de No- viciat ou autre titre Se prétexte que ce puiffe être , pour la réception ou admiffion des Religieux &: Re- ligieufes.

Le ime. Article déclare nulles toutes ftipulations, ou conventions qui fe feroient à ce iujet direélement ou indireftement , verbalement ou par écrit.

Le 3 me. Pour empêcher tout prétexte d'éluder la Loi, & fpécialement celui de la libéralité &; de l'au- mône, interdit la faculté de faire des dons &: legs, foit aux Maifons , foit aux perfonnes Religieufes.

( 6I )

Le4me. prononce une amende égale au don Se legs, ou à ce qui aura été ftipulé pour l'ingreffion en Re- ligion , quand même la convention n'tût point été elFeâ:uée , tant contre les Communautés qui auroient reçu , que contre ceux qui auroient donne ou contri- bué au payement.

Le çme. autorifc tous les Parens à réclamer pendant 30 ans les dons & dots faits aux Monafteres »i)u à leurs membres.

Par le 6me. l'amende & la confifcation font re- mifes à ceux qui répeteroient eux-mêmes , ou dénon- ceroient à la Juftice leurs propres conventions ou li- béralités.

Le yme. en étendant la même peine aux Nîonal^ teres des Mendians , veut que les amendes qu'ils au- roient encourues , foient payées par les Syndics de ces Ordres, ou que ces Monafieres ibient privés de la quête pendant fïx mois.

Pour parvenir plus lurement à l'exécution de ces difpofitions rigoureufes , l'Article 8 'enjoint aux Su- périeurs & Supérieures des Communautés Régulières, d'avertir les Officiers Fifcaux (un mois avant la Pro- feffion ) du nom du Novice , ainfî que de fes Père & Mère ou Tuteur , &: du lieu de Ta naiiîance , à peine de 200 écus d'amende.

L'Article 9 permet néanmoins aux Maifons R-eli- gieufes d'exiger des Novices qui quitteront l'Etat Re- ligieux, une penfion de 300 florins, pour nourriture, habillement & autres dépenlés de toute efpece.

L'Article 10 dépouille de la jouiflance de leurs biens , tous ceux qui entreront au Noviciat , fauf à les reprendre , s'ils renoncent à l'Etat Monaftiqi^e , mais fans pouvoir répéter les fruits perçus pendant cet intervalle.

L'Article 1 1 j voulant extirper l'abus des penfîons illimitées au profit des Reliaieux ou Religieufes , les réduit à la fomme de 50 florins, à peine de la con- fifcation de la rente ou penfion au profit des Pau- vres , 5c d'une amende de laoo flor. contre les Corn-

C 61 ) îîiunautés , Si d'une pareille amende conntre les Pè- res , Mères , Tuteurs & tous autres.

L'Article 12 défend aux Religieux qui font en congrégation , d'envoyer les Sujets Nationaux faire leur Noviciat clans des Mailbns fuuées hors les Terres & Pays de l'obéiffaiice de l'Imperatrice-Reine , à peuie de looo écus d'amende payables folidairement l>ar toutes les maifons de rC3rdre , & de pareille peine contre les Pères , Mères ou Tuteurs , & même d'interdiction perpétuelle à ces Novices de rentrer fous la domination dans une Maifon de l'Ordre ; fi le Novice eit d'un Ordre mendiant , le Couvent feia privé de ia quête pendant fix mois.

Enfin l'Art. 13 déclare que les contraventions aux dirpohtions précédentes ne pourront être couvertes par tonte prefcriprion au-defTous de 30 ans.

Le fécond Edit a enchéri fur des Réglemens déjà fi rigoureux.

Le premier Article a réduit à 150 florins la pen- fîon des Novices qui fortent des Maifons P>.eligieufes.

Le fécond a défendu de donner à aucune Com- munauté Régulière le capital de la rente ou penfion viagère de 50 florins, permife en faveur des Reli- gieux &. Religieufes, à peine de connfcation du ca- pital au profit des pauvres , &: d'une amende pa- reille fomme , tant contre le Couvent , que contre les Parens.

Le 3 me. a ordonné que les Couvens devant fournir toutes les chofes néceifaires à leurs Religieux, les Supérieurs ne pourroient retenir ni faire tourner au profit de la Communauté , aucune portion de la penfion de 50 florin^; , dont chaque Religieux ou Px^e- iigieufe jouira pour la totalité , fous la direction néan- moins de fes Supérieurs.

Par l'Article 4, il a été défendu d'admettre les Novices à Profeliion avant l'âge de 15 ans accom- plis , à peine de 4000 florins d'amende , d'expulhon perpétuelle des Supérieurs des Etats de l'Impératrice, iU de dépofitjon <^'es Supérieurs , avec inhabiUté de

( «3 )

pouvoir ]<im;iis occuper aucun emploi ou office dans l'Ordre , pour la première contravention ; & en cas de récidive, à peine en outre de la ilîpprellion en- tière du Monaflere.

L'Article 5 , dans la vue d'aflurer Texécution' dn précédent , a enjoint aux Supérieurs d'envoyer , un mois avant la Profellion , l'extrait bapriftaire de chaqu-e Novice duemeut légaiifé , aux Conseillers Filcaux , à peine de 200 écus d'amende.

Ce tableau pourra-t-il ne pas faire fur le cœur de de V. M. rimpreffion qu'il a gravé dans celui des Evêques des Pays-Bas ?

Nous ne pouvons qu'applaudir aux difpoiîtions de l'Edit du 13 Mai 1771 , qui profci"ivcnt les exactions de Dots, les Stipulations pour l'Ingrcilion en Reli- gion. Parfaitement conformes à l'erprit de l'Eglife , ces difpofitions ne font que Texprcffion fidelle des Conftituîions canoniques.

Mais qu'il nous foit permis de faire obferver à V. M. combien de Réglemens étrangers a cet objet préfentent les deux Edits. L'âge des vœux reculés à i"; ans; l'Interdiction aux Communautés Rcligieu- fes de recevoir des libéralités volontaires , à celles qui peuvent en avoir befoin , à vos fujets eux-mê- mes ; l'Interdiction de faire l'aumône à des Lieux faints ; ne permettre une peniion pour le Noviciat , que dans le cas les Novices renonceroient à la vocation Religieufe ; ces mêmes Novices punis, par la perte de leurs revenus pendant leur féjour au Novi- ciat, fans qu'ils aient droit d'exiger un compte de l'em ploi qu'on en a fait pendant leur demeure dans les Monafteres , quand même ils retournernient dans le fiecle ; la jouifTance exclufive de la penfion accordée aux Religieux qui les rendroit Propriétaires , fi con- traire au vœu de pauvreté. Les peines fi multipliées, fi effrayantes , fi peu convenables en parlant à des Religieux , qu'on lit cependant à chaque Règlement que contiennent les deux Edits , & qui ne peuvent

(64) ^ ^ qii'inrplrer ou du mépris ou du dégoût pour un état iaint en lui-même.

L'exaction des Dots eft un abus , p?.rce qu'elle tend à faire admettre Profeirion , fous l'appas d'un profit temporel , des Sujets qui ne font polnt^ appelles à la vie Religieufe ; parce qu'elle infefte de pactes hmoniaques, un eni^agement facré qui ne doit avoir que la Religon pour principes , & le ialut éternel pour terme. Mais la profcription de cet abiLs , dont l'ob- jet , fui van t l'efprit de l'Eglife , eft de maintenir la pureté de la vie Religieufe , peut avoir pour motif une politique purement féculiere , & le funefte deflein de préparer l'extmction des Monafteres médiocre- ment dotés , & d'enlever à fous les moyens d'admet- tre plus des Sujets qu'ils n'en peuvent entretenir , quelle que fût la vocation de ces fuiets furnuméraires. Autant le zèle qui arme la main du Protedeur des rè- gles canoniqvics, pour corriger ce qu'elles condamnent , eft-il digne de rcfpect Se de louanges , autant le but inf- piré par la politique, d'affoiblir, d'énerver l'Etat Re- ligieux , doit-il faire verfer des larmes aux Evêques , à qui le falut des âmes eft confié.

Nous ne le difor.s qu'avec la plus vive douleur ; tout fait craindre que l'efprit de réforme ait eu moins de part à la confe61:ion des deux Edits , que l'efprit de deftruftion. Si l'on ne vouloit que remédier à l'abus des dots , il étoit facile de prendre des pré- cautions pour le déraciner. Tant d'autres difpoiitions qui n'ont aucun rapport à cet objet , n'annoncent que trop qu'on a eu des vues ultérieures.

L'intérêt de la réforme n'exigeoit pas fans doute , qu'on fixât les Profeftions à un âge qui les rendra néceftairement plus rares & plus difficiles. Il n'exi- geoit pas qu'on mît tous les Monafteres dans la pro- hibition d'accepter les libéralités des fidèles, & que pour en arrêter plus fûrement la fburce , on fournît à des peines les mains charitables qui fe porteroient à les fecourir. L'intérêt de la réforme ne demandroit

pas

( «5 )

pas qu'on fermât pour ainfi dire , ou qu*on rétreftit du moins les avenues des Maifons Religieufes paf les dures conditions qui font impolées à ceux qui concevroient le pieux projet de Te confacrer à Dieu , 6c d'éprouver leur vocation pour cet état de perfcc-^ tion. Il ne demandoit pas qu'on ajoutât à ces pré- cautions afFeftées des détenles intimidantes , des mé-* naces de délation -, des amendes , des difpQfitions ou bannifTement des Supérieurs ou Supérieures Réguliè- res , la deftruftion même des Monafteres.

Quand ces Loix n'auroient d'autres dangers qm celui d'infpirer au Peuple, iinon de l'averfion & du mépris , du moins du dégoût & de l'indifférence pour l'Etat Religieux , c'en leroit aflfez pour engager Votre Majefté à les révoquer. Par cette feule im- preflion , ils feroient peu dignes de votre piété , ils ne pourroient qu'attrifter TEglife , en éloignant les fidèles des afyles qu'elle leur é ouverts pour les met- tre à l'abri des tentariorjs du rttonde.

Or, non -feulement les Edits produifent cette fu- nefle imprefîion , par le filence qu'on y garde fur les avantages de l'Etat Religieux , parce que rien n'y infpire le refpe(5l qu'il mérite ; parce que le peu de cas qu'on paroit en faire , frappe vivement les ef- prits , fur-tout dans un tems l'incrédulité &c l'ir- réligion font de il rapides & de ii malheureux prc grès •, mais c'eft l'effet naturel & néceffaire des Or- donnances que renferment les Edits. Ils accumulent en.traves far entra'î'es pour embarraffer l'accès des Maifons Religieufes. Ils en alarment & fatiguent les Membres , 6c fur-tout les Supérieurs. Ils prononcent dans un cas leur deflrudion irrévocable , Se fur le champ. Si ces Edits avoient Ueu, leur exécution, femblable à un poifon lent , ne tarderoit pas à ren- dre les Monaileres déferts.

Il efi fans doute de notre Miniftere de faire à Votre Majefté les plus refpeélueufes , mais les plus fortes Repréfentations fur des Edits fi vifiblement furpris à la bonté de votre cœur. Nous nous ren-

£ttt

( 66 ) tirions fourds à la voix de la Religion , fi nous étions inlenlibles au coup que ces Loix portent à l'Etat Re- ligieux , & nous ne pourrions reiîer dans le filence , à la vue des maux qui en doivent être la fuite, fans trahir nos devoirs , & le cri de notre confcience. Nous ne ferons donc que marcher (iir les traces de nos pères , & imiter leur zèle , en empruntant les ex- preffions du Concile de Pavie , en rappellant à Votre Majeflé ce que ce Concile difoit aux glorieux Empe- reurs : Les Monafteres font fous la proteftion des Princes, & fi, au. lieu d'en être les Défcnfeurs & la fauve-garde , ils s'en rendent les deftrudeurs , ils doivent craindre d'être févérement juges au Tribunal du Tout-Puiflant. Pour nous , de qui la fidélité de- mande que nous les avertiffions , nous leur fuggé- rons humblement ce que nous n'oferions leur taire : Nos verb , qui dcbltorcs jumiis , ut jiddita annuntic^ mus , idcirco fidclitcr fuggerimus , quod Jîkre non audemus. ^«•,

Mais indépendamment de 'ces premières obferva- tions , qui réfultent du fyftême général des deux Edits , qu'il nous foit permis d'entrer dans quelque détail fur leurs difpofitions particulières.

I®. L'Article 4 de l'Edit de 1771 , défend à tous Supérieurs Réguliers de l'un & de l'autre fexe , d'ad- mettre les Novices à la Profeffion avant l'âge de 0.5 ans; & cette défenfe cft accompagnée de menaces tfui montrent l'intérêt qu'on met à fon exécution.

Il n'eft pas befoin de chercher le motif de ce Ré- glement , s'il a eu pour objet d'enlever aux Monaf- teres un grand nombre de Sujets , qui , en les renou- veliant, perpétueroient leur exiftence. Mais en écar- tant ce m.otif, que la Religion ne pourra jamais avouer, quel prétexte raifonnable feroit capable de le jufii- fier ? Auroit-on craint que des engagemens pris trop légérem.ent dans les Cloîtres, n'excitaiîent enfuite le regret & le repentir , & auroit-on prétendu , en re- culant les vœux à un âge plus mûr , prévenir les facrifîces forcés, indifcrets, précipités?

(67)

On n'avolt pas cette appréhenfîon dans le.<; fiecles les plus éclairés de l'Eglilé. On voit par le Chap. y de la Règle de Saint Bafile, que ce Saint Dofteur , aflimilant l'engagement de la Profeffion Religieufe à celui du Mariage , regardoit l'âge requis par les Loix pour ce dernier engagement , comme la règle de l'autre. Dans la Lettre à Amphiloque , Saint Ba- file fixe de 15 à 17 ans l'âge l'on pouvoit ad- mettre les Filles dans les Monaftercs. Saint Chriibl- tome fuppofe , dans Ton Apologie pour l'Etat Monas- tique , que l'entrée des Monafteres étoit ouverte aus jeunes gens ; puilque c'eft aux pères qui détournoient leurs enfans de la vie Religieulé , qu'il adrefle les éloquens reproches. Saint Grégoire -le -Grand n'exi- gea pas plus de 18 ans pour les Monafteres d'Angle- terre. Si la Règle de Saint Benoît ne détermine au- cun âge précis , c'eft parce que , la capacité des jeu- nes gens étant plus ou moins tardive , on croyoit devoir laiffer aux maîtres de la vie Spirituelle , le difcernement de ceux qui étoient propres à la dis- cipline Monaftique. Dans la fuite, le dixième Concile de Tolède permit de recevoir les Religieux à 14 ans. Les Ordres de Cluny &; de Cîteaux turent autoriles par les Papes à recevoir les Sujets à 15 ans. Enfin, l'âge des vœux a été fixé par le Concile de Trente à l'âge de 16 ans ; Son Décret , précédé du plus Sé- rieux examen , & dreiSé avec la plus grande matu- rité , a formé la Loi générale de l'Eglife ; il a été reSpefté &: Suivi dans tous les Etats Catholiques.

En France méme^ l'Ordonnance d'Orléans avoit placé les vœux à 25 ans , on Se hâta de changer cet ufage pour Se conformer au Décret du Concile de Trente. Et l'Ordonnance de Blois , publiée par Henri lîl , Sur le vœu des Etats ce Royaume , fixa l'âge dés vœux à 15 ans.

Quelles raifons anez puifTantes pourroient aujour- d'hui faire déroger à une DiScipHne fi Sage & uni- verSelle } En eft-il aucune qui n'ait été pelée & ju- gée inSuffiSante par les P. P. du Concile de Trente ?

E z

i68) L'indlfcrétlon des engagemens dans l'Etat Religieux , n'étoit pas moins à craindre alors que dans notre iieele. Les jewnes gens n'étoient pas plus formés à rage de i6 ans : le facrifice de leur liberté étoit fufceptible des mêmes inconvéniens qu'on peut taire valoir aujourd^liui.

Que Votre Majellé daigne donner quetqu'attention- aux vues importantes qui avoient dirigé la pratique de l'Eglife , depuis tant de fiecles , ik qui ont été les foiides fondemens du Décret du Concile de Trente.

Il eft du fouverain domaine que Dieu s'eft ré- fervé fur les hommes, de dil'pofer de l'Etat qu'ils doi- vent embraiTer , &i d'accomplir les defTeins de fa Pro- vidence par la Profellion à laquelle il fe confacrent. Or c'eil: par la vocation qu'il infpire aux jeunes gens , qu'il difpofe pour l'ordinaire de leur entrée dans l'E- tat Eccléilaftique ou dans la vie Religieufe , Se c'efi à l'Eglife , ou à ceux de fes Minières qu'elle en  chargé , qu'il appartient de juger de la fincérité de cette vocation. Des Edits qui prohibent les vœux avant l'âge de 25 , ne femblent-ils pas dil'puter à Dieu ce domaine fouverain , ou lui donner des bor- nes , en en>péchant les jeunes gens de fuivre la voix de Dieu , qui les appelle à fon lervice }

Les Loix qui ont interdit aux Mineurs la difpofi- tion de leurs biens patrimoniaux , n'ont pas mis les mêmes entraves à Tulage de leur liberté , parce que c'eft un bien qu'ils ne tiennent que de l'Auteur de la nature. Pourquoi leur enlever le droit de la régler, de la captiver , même lorfqu'ils ont îie\i d'appréhen- der d'en faire un mauvais ufage dans le fiecle ? Dès qu'ils commencent à devenir pécheurs ^ à concevoir la grandeur des engagemens qu'ils ont voués dans leur Baptême, ils doivent avoir la faculté de prendre des mefures efficaces, ou pour recouvrer leur inno- cence , ou pour la conferver , en s'éloignant des ten- tations du fiecle.

Dans quelles incertitudes , dans quels embayias

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;ette-t-on les jeunes Pérfonnes de l'un ^ de l'autrfe fexe , qui Te croyent appelles à la vie de retraite &c de pénitence , ii l'on tarde les Protellions julqu'à 25 ans? A quels dangers n'expole-t-on pas ceux que ce retard obligera malgré eux de refter dans le tu- multe du monde , oii les occaiions de pécher lont incomparablement plus fréquentes que dans les Mo- nalteres ? Combien fe rt?ndront inndeles à kur pre- mière vocation? combien Te perdront dans le iiecle , qui auroient é\'ité le naufrage dans les Maiions Reli- gieul'es ? Le Sage déclare heureux ceux qui portent Le joug du Seigneur des V enfance j &C 11e met - on pas obftacle à ce bonheur , pour beaucoup de jeunes gens, en ne leur laiil^mt la liberté de taire des vccux qu'à ic ans ?

Quand on eft perfuadé que la vie Religieule eft un état dp perfedion , parce qu'elle conlifte dans la pratique des conl'eils évani,éliques , & que cette ol>- lervance li précieufe à l'Ëglire n'a prefque plus lieu que dans les Cloîtres , on n'eft pas tenté d'en rendre l'accès inacceflible , on doit plutôt favoriler le facri- hcQ de ceux que la piété y conduit. Or l'expérience prouve que les meilleurs Religieux font ceux qui fe Tont confacrés de bonne heure aux exercices de la Difcjpline régulière. Il faut être jeune pour fe plier au ]oug de l'obéifTance , & acquérir l'habitude des obfervances monaftiques. Il efl difficile , après 15 ans , de fe former aux vertus de cet état ; ou eft peu pro- pre aux connoiffances néceflaires pour remplir les obli- gations monaftiques , fur-tout li on a contracté dans Ife iiecle des habitudes vicieufes , fortifiées par leb années.

Combien d'ailleurs n'eft-il pas rare qu'on attende à UQ âge fi avancé pour faire le choix d'un état , pour embrafter un genre d'occupation ? Les jeunes gens qui auroient du goût pour la vie monaftique , perdront patience &: ne perfévérerorit pas. Les parens feront les premiers à les détourner d'un état qu'il t.iudra poftuler fi long-tems. Ils craindront de leur voir perdre , dans l'airente d'un engaeement incer-

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tein,'des années précieufes pour fe préparer aux dif- ferens emplois de la vie civile. Beaucoup même n'au- ront pas les tacultés nëceiraires peur les taire étudier &: lubfifter fans travail pendant un fi long intervalle.

C'eft au furplus priver les familles nombreules de cetie reiTource honnête pour placer leurs enfans. Pourquoi les enfans qui fe marient avant 25 ans, i'ous l'autorité de leurs parens , ne pourroient-iis pa.s également, fous la même autorité, fe dévouer à la Religion } Le mariage n'ell pas un engagement moins jndifl'oluble que celui de la Profeffion Religieufe : il a des fuites pour le moins auifi importantes pour l'Etat, & il n'a pas l'avantage d'être précédé d'une année de probation. La même Loi qui reftreint la li- berté des eitans pour les engagemens religieux , prive <iu même coup les parens d'une 'partie de l'auto- rité qu'ils tiennent des Loix ôi de la nature pour difpoiér de leurs enfans. Maître de les engager par des établiiïeinens humains , les parens n'auroient-ils les mains liées que pour les offrir à Dieu & les con- facrer à fon fervice }

Tels font les principaux motifs qui ont décidé les Pères du Concile de Trente. Ce n'eft pas qu'ils igno- ralTefit les raifons qu'on pourroit oppofer à ce que la Prôfeiîion Religieufe fe ht à 16 ans. Pi s favoient que la fixation de cet âge pourroit occafionner des engagemens précipités. Mais touchés avec raifon des .inconvéniens beaucoup plus con'idérables qui au- Toient réfulté du retardement de l'âge des vœux, ils ©nt fait un Décret folemnel que tous les Princes Ca- tholiques ont adopté. C'efl: ce Décret dont les E'. êques dis Pays-Bas réclament l'autorité. Les motifs qui l'ont dicté, n'ont rien perdu de leur force par l'exécution de deux fiecles dont le Décret a été fuivi , & fi les Religieux qui vivent fous la Domination des Princes Inlideles, jouiflent librement de la faculté d'engager les Sujets qui^ont atteint l'âge prefcrit par les faints Canons, auroit-on pu prévoir que, dans un Empire Catholique , cette liberté leur feroit enlevée ?

( )

L'Edit de 1771 défend indiftlnélement à toutes les Communautés Religieufes, non-feulement d'exiger quelque fonime que ce foit en argent ou en valeur , à titre de dot, d'habillement, de Penfion, de Novi- ciat , ou tout autre titre pour l'admiflion en Reli- gion, mais même de recevoir ce qui feroit offert gratuitement , & afin d'ôter tout prétexte de fraude il déclare, les maifons & les perfonnes Religieufes incapables de toute efpece de dons & legs.

Si le but de ces défenles n'a pas été d'annoncer un projet formé, d'éteindre les Maifons Religieufes , com- ment a-t-on pu confondre les fecours que ces Mailbns peuvent recevoir de la piété des Fidèles , avec l'exac- tion des dots pour l'émifïîon des vœux, & conclure de la néceflité de réprimer les flipulations fimoniaques , celle d'interdire aux Communautés Régulières toute capacité de recevoir. A s'en tenir aux termes de l'E- dit de 1771 , c'eft l'obfervation des faints Canons, qu'on s'ef^ propofé de rétablir , c'efl comme protec-, teurs de la difcipline , & chargé à ce titre de la main- tenir , qu 'on a choifî Us moyens les plus propres à la faire rej p celer ^ en rejettant indijlinclemeyit tous les Jub^ terfuges ^ qui avoient fervi k l'éluder. Il doit donc y avoir un rapport naturel entre l'abus qu'on a cherché à déraciner , &: les remèdes qu'on a employés pour y parvenir.

Mais quoique l'Eglife ait dans tous les tems con- damné l'exaélion des dots , elle a fu diflinguer ce que l'avarice exige de ce que la piété offre ; elle a ré- prouvé l'une , &: elle n'a eu garde de blâmer l'autre.

St. Auguftin , dans la Règle qu'il a dreifé pour les Religieufes , recommande d'admettre églement les pau- vres & les riches , elies ont le goût des vraies richefTes qui lont celles de la vertu. Mais bien loin de défa- prouver que les filles riches ou leurs parens offrent des préfens aux Monafleres , il fuppofa qu'on y pou- voir recevoir leurs libéralités , puifqu'il avertit les Religieufes qui jouilïent de quelque bien dans le fiecle , de tenir à honneur de l'avoir rendu commun y en

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( Il )

çr-traint dans l'Etat Religieux ôi de ne point fe glo- rifier d'avoir contribué à la vie & à la fubfiftance commune de la Maifon, en donnant quelque por- tion de ce qu'elles pofledoient (<:).

La Règle de St. Benoît eil: plus exprefTe encore. Après avoir fait promettre aux parens qui prëfen- toient leurs enfants à l'Etat Religieux , de ne leur jamais rien donner , ni par eux-mêmes , ni par des perfonnes interpofées , elle ajoute que , fi néanmoins ils défirent faire quelques aumônes par reconnoiffance, c'eft au Monaftere que leurs libéralités doivent être faites. ( Ckap. 59. )

Gratieii examinant s'il eft permis de demander quel- que ç ho fe pour l'entrée en Religion, prouve par la conduite d'Anne , qui fit des préfens aux Prêtres en leur offrant fon fils Samuel , qu'il n'efi: pas per- mis d'exiger , mais qu'on peut recevoir des libéra- lités volontaires , le premier étant défendu , &c le fécond étant légitime {b).

On trouve la même Doctrine , dans Pierre , Chan- tre de l'Eglife de Paris (c) , dans St. Thomas {d) , St. Bonaventure (e), Denis le Chartreux (/) & elle eft conforme à la décifion des Papes Innocent Ilî .(^) & Urbain V (A) : les Auteurs les plus rigides fe contentçnt d'ajouter avec Van Efpen , que les Re- ligieux ne doivent ni exciter, ni rechercher les li- béralités des Novices ou de leurs parens, ni même

-'.-(d) Epift. 211.

"^ ' Ce) Non permittitur aliquid exigere , fed fponte oblata fuf^ d'pere , quia illud damnabile eft , hoc veto minimes Cauf. i , ■pa^. 2.

ic) In verbo abbreviato, cap. 38.

(û^ 1%. q. 100, Art. 3.

U) Apologie de fon Ordre , p. 18.

(/) L. I , de la Simonie Art. 1 2.

fg) Illud tamen gratanter recipi poterit quod fuerit fin« ï^xarione gratis cblatum. L. <. Lit, ? de jlmonia. C^p. 30.

(h) Ibid. Cap. 1.

(73 )

les recevoir avec un efprit mercenaire (<z) , mais bien éloignés d'alîimiler aux dots exigées , les préfens offerts par la piété , & la reconnoiiîance , & de les Ibumettre à la même profcription , ils s'élèvent au contraire contre l'iniurtice &: l'avarice des parens riches, pour qui la réception gratuite dans les Monafleres eft un moyen d'augmenter la fortune des enfans qu'ils deftinent au fiecle. Van Ei'pen leur apprend que le bien des Monafteres étant le Patrimoine des pauvres , ils ne doivent pas faire confommer par leurs enfans une portion de ce Patrimoine , quia ipjonim proies loca paupcrujH occupant (b) , &: que {i c'efl: un de- voir de charité pour les fidèles d'aider par leurs au- mônes , ceux qui ont le courage de renoncer au mon- de , &: de s'enferm«r dans les Monafteres , il eft d'une juftice étroite pour les parens riches d'appli- quer leurs aumônes aux Maifons ou Congrégations qui ont rec^u leurs enfans (c) , il n'en excepte que le cas le Monaftere feroit affez riche pour n'avoir aucun belbin.

Si le Rédaéleur des Edits eût connu ces vérités , & que les règles de l'Eglife, dont il vouloit procu- rer l'exacle obfervation , enflent préfidé aux difpo- fitions qu'il écrivoit , il n'auroit pas mis c'ans la mê- me clafle les ftipulations illicites , & les témoignages de reconnoifîance. Il n'auroit pas regardé les libé- ralités volontaires offertes par les parens , 6c accep- tées par les Religieux , comme des fubterfiiges , pro- pres à éluder la Loi , comme des lunonies palliées. N'eût-il pas appréhendé au contraire de réduire les parents à l'impoflibilité de remplir un devoir de juf- tice ? Il fe feroit encore moins permis d'en détourner, par des menaces , ceux qui auroient eu la volonté de s'en acquitter.

(,î) Differt. Canon, de vitlo fimonise P. 2, Cap. 5 , S. j. . {b) Ibid. %. 4.

(c) Ipfa juffitia exigit ut bi eleemcflnam factant Congrega- tioni cui filius eorum jam incorporatu5 ell, ibid 1.

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Les Ecîlts ne fe contentent pas d'intert^ire tontes libéralités pour la réception des Religieux & Religieu- ses, ils mettent tous les Monaftsres indiftinétement cL^ns l'abfolue prohibition de recevoir aucuns dons & legs de qui que ce i'oit , & dans quelques circons- tances qu'ils puiilent i'e trouver ; ils détendent mê- me de leur donner le capital des foibles Penfions viagères qu'ils permettent aux parens de laifiér aux Religieux.

Ainfî , que des Monafteres n'aient des revenus que pour l'entretien de peu de Sujets , leur nombre ne pourra jamais augmenter, quelque foit l'emprsf^ fement d'un furnuméraire pour s'y confacrer à Dieu , quelques infiances qu'il tafle , quelque marque de vocation qu'il montre, en offrant une penfion pour fa fubfiftance , que le Couvent eft incapable de four- nir ; fon facrifice fera impoflible; le Monaftere feroit criminel , s'il avoit la condefcendauce d'ouvrir Ces portes ', le fujet feroit lui-même coupable & puni pour avoir ofé fuivre l'attrait de fa piété & donner de quoi fournir a fa fubfiftance.

Que les Communautés Religieufes éprouvent des pertes , qu'elles foient ravagées par les guerres , frap- pées du feu du Ciel , toutes les refTources leur font enlevées , ils n'ont aucun fecours à efpérer , les ibu- lagemens qui leur feroient préfentés , les aum.ônes qu'on leur feroit, feroient autant de délits puniffa- bîes que la judice pourroit pourfuivre pendant 30 ans , & qui expoferoient à la même fiétriffure & les Communautés qui auroient reçus, & les mains cha- ritables qui fe feroient ouvertes pour les fecou.rir

Les Evêques des Pays-Bas s'al^ftiendroiit de feire aucunes réflexions fur de telles difpofitions , dont ils apperçoivent toutes les conféquences ; & malgré toute la vivacité du fentiment qui les pénètre , ils fe font un devoir de le renfermer en eux-mêmes , pour s'en rapporter uniquement à la fenfibilité du cœur ma- ternel de V. M. qui ne rcfufera pas pour les pauvres Monafteres des Pays-Bas , de leur permettre de re-

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cevolr les mêmes fecours qu'elle vient de permettre pour ceux établis dans les Pays héréditaires d'Al- lemagne.

L'Art. 9, de l'Edit de 1771 , ne laiffe aux Mo- nafteres la liberté de prendre des Penlions pour les Novices, que dans le jlul cas , ces Novices quit- teroient le Noviciat. Cependant ces Pcniions , ( lur- tout le prix étant fixé à une lomme allez modique, réduite depuis à moitié par l'Article 1 de TEdit de 1772, ) ijc fauroient être une voie indirefte d'exiger des Dots &; de faire dépendre la Profeflîon Religieufe de pac- tions honteufes. Le Concile de Trente , en défen- dant aux Religieux dcî recevoir quoi que ce foit des Novices ou de leurs Parens avant l'émiiîîon des vœux , en excepte expreilément le vêtement & la nourriture : Excepta vïcîu & vejiitu novitii vel novit'uB illius temporis quo in probationc ejl (a). Les Edits condamnent donc ce que ce Concile approuve.

L'Art. 10 du premier Edit foumet aux liens d'une efpece d'interdiction les peribnnes de l'un ou de l'au- tre fexe qui entrent dans les Maifons Religieufes , pour éprouver leur vocation; il les dépouille, à l'inftant de leur entrée , de la jouillance des biens qui leur appartiennent , ou qui peuvent leur échcoir avant la Profeffion. Cette jouiffance eft transférée fur le champ à la famille , & s'il leur efl permis de fe faire réin- tégrer dans leurs Droits , cii quittant l'Etat Religieux avant la Profejfwn^ c'efl fous la condition qu'ils ne pourront répéter les fruits perçus pendant l'intervalle de leur Noviciat.

Eft-ce pour dégoûter de l'Etat Religieux qu'on a privé de leurs revenus tous ceux qui feroient tentés de l'embrafler , & qu'en même tenis on leur a en- levé toute efpérance de rentrer dans la jouiflance des fruits échus pendant leur épreuve , s'ils viennent à fortir du Noviciat } Il eft difficile de trouver d'au-

(4^ Seff, 25. Cap. 16. de Reg^iilar.

(7S)

tre intéî'êi: & d'autre motif à cette dirpolition. Mais fans invoquer ici l'autorité des Loix , qui affurent les fruits aux propriétaires des fonds, & qui ne permet- tent de dépouiller les Citoyens de l'adminifiratioi: & de la }ouiffancc de leurs biens, que dans le ca<; de Droit , nons ne pouvons nous difpenler de faire obferver à V. M. , que cette peine n'a point lieu contre les jeimes gens de l'un & de l'autre fexe, que leur mauvaife conduite fait renfermer dans des lieux de pénitence. Ils y font nourris & entretenus lur leurs biens , &: quand la liberté leur eft rendue , leurs Tuteurs ou Curateurs font chargés du renfeigne- ment des fruits. Les Novices , traités avec moins de ménagement, ne peuvent ni payer leurs penfions , tant qu'ils demeurent dans le Noviciat , ni le faire rendre compte de leurs revenus , lorfqu'ils en for- tent. Quel contraire ! Les perfonnes que la piété con- duit dans les Monaileres , ont un iort plus rigou- reux , que celle* que leurs défordies obligent d'en- iermer !

On ne fauroit ne pas être effi-ayé de la multipli- cité & de "la rigueur des pemes dont font accom- pagnées toutes les difpofîtions des deux Edits. Le Rédafteur des Edits ne s'eft pas fouvenu qu'il n'eft pas de la Majefté du Trône , que le Souverain ne parle qu'en menaçant dans les Réglemens qu'il publie, Eft-il convenable que dans des Ordonnances géné- ■fàles,ilne prévoie que des prévaricateurs , que la ■terreur feule peut retenir & foumettre.^

Que l'intimation de la vengeance p\ihlique foit employée, quand des Loix enfreintes obligent de les renouveller, ou lorfque des abus dangereux & com- muns , exigent qu'on leur oppofe de fortes digues : rien n'eft plus fage. C'eft pour ce cas que l'appareil du glaive eft réfervé. Mais prit-on jamais ces pré- cautions dans les Loix nouvelles , & dans des Loix deftinées à régler la Police des Monafteres ? Quelle idée fe forme-t-on des Religieux ? Quelle idée en inf pire-t-on au Public , en les traitant comme des en-

^ 77 ) ^

durcis dont rindocilité ne peut être réprimée que par (Jjs remèdes extrêmes ?

Nous ne retracerons pas fous les yeux cle Votre Majefté le détail des peines qui terminent chaque Ar- ticle des deux Edits. Mais nous manquerions à notre 'iiiniftere ^ fi noUs nous dillimulions Tinjuilice de -.iciques unes de ces peines , que le Droit naturel & OC le Droit divin réprouvent également.

C'efi un principe de l'un ce de l'autre Droit que l'innocent ne doit point être puni pour le coupable. Cependant l'Article 12 du premier Edit prononce une amende folidaire contre toutes les Mailons du même Ordre , fi l'une d'elles envoie des Su]ets faire leur Noviciat dans un Royaume étranger. Les Parens ou Tuteurs des Novices , qui peuvent l'ignorer ou n'y avoir aucune part, {ont eu\- mêmes aflujettis à la même amende.

Par l'Article 5 du fécond Edit , les Monafteres qui adniettroient à la Profeflion avant l'âge de 25 ans , font condamnés à une amende de 4000 iiorins , les Supérieurs font bannis ; & fi c'efl dans un Couvent de Filles , la Supérieure eft dépofée , transférée dans Une autre Maifon , déclarée incapable de remplir aucun Emploi dans l'Ordre ; &: comme fi ces peines euffent été trop légères pour un tel crime , il eft or- donné qu'en cas de récidive , le Monaftere fera fupprimé à perpétuité, & que les Religieux ou Re- ligieufes feront transférés dans d'autres Maifons du même Ordre. Que Votre Majefié daigne examiner devant Dieu , s'il efl; conforme à l'équité , que le Monaftere fouffre de la faute des Supérieurs qui le gouvernent , que les Fondateurs fruftrés de leurs pieufes intentions , partagent la peine du délit , &: que l'Eelife perde un Etabliffemeut confacré , au Culte de la Re-=' ligion.

Les Loix de l'Èglife ne permettent de fupprimer les Maifons Religieufes que pour caufe de néceifité ou d'une évidente utilité. Le Concile de Trente at confirmé &c renouvelle le Décret du Concile gé-

(78), nérAe de Confiance qui Tavoit ainfi réglé , & lorfcjue la fuppreffion fe prononce par voie peine, elle ne p«iut être méritée que par les plus grands crimes.

6^^ L'Art. 3 de l'Edit de 1772 , interprétant l'Art. 1 1 de l'hdit de 1771 , ordonne que tout Monaftere étant tenu de nourrir & entretenir fes Membres , les Supé- rieurs ou Supérieures ne pourront rien retenir fur la Penfion des Religieux ou Religieules , ni en appli- quer la moindre portion au profit de la Communau- té , fous quelque prétexte que ce foit , oc que cha- que Religieux ou Religieufe en Jouira pour ia tota- litî , fous la direftion néanmoins de fes Supérieurs.

Il eût été difficile de porter les précautions plus loin pour empêcher les Monafteres d'augmenter leurs revenus. On n'a pas cru que ce tût allez de réduire les Penlions des Religieux & Religieufes des Pays- Bas , à la fomme de 50 florins, pendant qu'elles font beaucoup plus con/iderables dans le furplus des Etats de Votre Majelté ; on a même appréhendé que les Maifons Régulières ne s'approprialTent quelque por- tion de ces Penlions fi modiques. La jouilfance en efl affe'51:ée primativement aux Religieux particuliers , & il eft défendu , fous peine d'une amende de mille écus , d'en appliquer quoi que ce foit au profit de la Communauté. Mais on n'a pas fait attention que ferver aux Religieux la jouiilance de leurs Penfions , c'étoit porter atteinte au vœu de pauvreté , ou du moins inviter les Religieux à violer cet engagement fondamental de l'Inflitut Monaftique.

La défappropriation a toujours été une des plus ef- fentielles obligations des Religieux. Elle appartient à la fubflance de leurs engagemens , & long-tems avant rétabliflement des vœux folemnels , elle croit regar- dée comme une vertu efientielle de l'Etat Monaili- que {a). La vie Monaftique conlifte en effet dans la

{a) Eifentia vltae Religlofce in tribus illls virtiutbus, obe- Jientiâ , paupertate, caltitate, ab omnibus hujus teniporis

(79)

pratique des confeils évangéliques , 6c fuivant Jefus- Chrift même , l'al^clication volontaire eu l'un des principaux ; Si vis pcrficlus ejfe , vade & vende ofnnia qua. hiibcs. La vie Monaftique doit retracer la con- duite des premiers Fidèles de l'Eglife de Jcrufaiem , parmi lefquels tout étoit en commun : Erant illis omnia commimia , nul ne poffédant quelque chofe^ comme lui étant propre : '!Scc quifquam eonim qiia pc(jukbat ^ aliquid fiinin &jfc diccbat (a). Les premiers Chrétiens vendoient leurs biens , &: en metioient le prix aux pieds des Apôtres , afin que les deniers ïuî- fent diftribués à chacun fuivant leurs befoins ; Divi- dcbanir autcm JïîiguUs prout aiique opus crat.

C'efl à cet exemple que les Saints Dofteurs SsC Ie> Conciles ont toujours rappelle les Religieux , comme à un modèle , dont il ne leur étoit pas permis de s'écarter.

Le Concile d'Orléans , de Tan 511, défend de rien biffer en propre aux Religieux , parce que tout ce qu'ils peuvent ac({uérir doit être employé au profit du Monaftere (b).

Un autre Concile tenu en France en 615 , leur interdit tout pécule , parce que tout doit être mis dans la maffe commune , pour être diilribué félon l'ordre des Supérieurs, (c) Le Concile de Cologne de l'an 1260, décide que le Religieux ne peut pof- féder quoi que ce foit fans la permiffion de fon Su- périeur, {d) Le Concile de Trente exclut tout pré-

Religiofis conftituitur. Idem fiebat ab antiquls : nam Au, guftinus & Eafilius fiC loquntur, {^Bdlarm, ^e Monachis, cap. /.)

(j) Aft. 4. ^. 32.

(i) Omnia quse acqiilfierit Monachus ab Abbatibus au- ferantur fecundum Regulam, Monafterlo profutura. ( Can. /p. Ldhh. tom. 4; pa§. 1408. )

(c) Peculare nullum habeant, fed fint eis omnia commu- nia , ficut Abbatis vel prcepofiti difpenfatio jufta perpende- rit. ( Can. 4. ibid. pag. 16^6. )

(ji) Statuimus quod Mpnachi proprium non habeant ^

texte capable d'excufet le vice de propriété , eii in- terdifant aux Religieux la faculté même de pofledcf ail nom du Monaftere, &: en leur ordonnant de tout rapporter à la mafle commune, {a)

Quelque chofe qu'acquière un Religieux , ou par fon induftrie , ou par des libéralités volontaires , le Concile de Cambray , de l'an 1565 , l'oblige de le re- mettre furje champ au Supérieur , pour qu'il en dif- pofe comme d'un bien commun, {f) Le Concile de Mali- nes, de 1570 , ne veut pas que les Religieux touchent leurs Pensions , même dans la vue de faire de bonnes œuvres, parce qu'elles doivent fervir à l'utilité com^ mune cki Couvent, (t)

Ces difpofltions ne l'ont au furplus que l'expref- fion fidelle de ce qu'on lit dans toutes les Règles' Monaltiques.

Une des premières in{l:ruâ;ions que Caffieft donne aux Religieux , c'eft qu'ils ne peuvent rien poiïeder , parce qu'ils font voués à une abdication pleine & fans réferve. {d}

Saint Bafilfe difoît à (qs Religieux , que toute pro-

fecunclum quod régula eoriim prascipit , nifi quod Abbas dccierit vel permifcrit ( Can. ^, ibid. t. 2. pn^. 7^3.)

(<î) Nemini Regularium liceat bona mobilia vel immobi- lia cnjalcunique qualitatls hierint , etiam quovis modo ab fis acquifita , tamquatTi propria aut etîain noinine coiiventûs pofûJère vcl tenùrc , fcd ftatim ea fuperiofi tradantur , con- venniiquc incorporcntur. i^SeJf. 2j. de Regular. Cap. 2.)

(i) Onînis pecuiiia vel les quam Monachus vel Monlalls acquifere , fiVe labore , five iiidufiria , five amicorum libe- raîitate , feu dcnique qiialibet alla occafione polfit, fiiperiori inox tiadatur, tta ut ad muum ejus tanquam tes communis împendatur. ( De Monafl. Cap. 10. )

(c) Penfiones vitales àut reditus perpétues nuUi permittan- tur recipsie , etiamh in ufus pios coiiverrcre velinr , fcd omnla in coninumem uiuili convertantur. [de Repil. Cap. 1. >

(d) Qui convertitur praî omnibus crudiri débet ut nihil ei peculiare liceat poiîidere , fed,.. fs nudatum ex omnï parte cognofcat. (_I'.<:g. Cup. 27.) ^ ^

priéte

( §1 )

priété eft incompatible avec leur état (.2) , & que s'ils avoient quelque chofe en propre , ils ne mar- cherolent plus lur les traces des premiers Chré- tiens. (/')

C'eft le premier précepte que Saint Auguftin pro- pore aux Religieufes dans l'a Règle : N'ayez rien en propre , oc que tout Toit commun parmi vous , comme chez les premiers Fidèles (c). Le Saint Dofteur en conclut , que tout ce.que reçoit une Religieufe , quand ce feroit même des vctemens , doit être detUné par la Supérieure à celles des Sœurs qui en ont le plus de belbin {a).

La Règle de Saint Benoît tire la même conféquence de la communauté des biens qui doit être invio- lable dans les Monafteres. Le Religieux , loin de garder, ne peut pas même recevoir, fans l'agrément du Supérieur , ce que les parens peuvent lui en- voyer ; il faut que le Supérieur foit maître enfuite <l'en difpofer : Si Saint Benoît ne veut pas que le Religieux fe chagrine de l'emploi que l'Abbé en fe- roit au profit d'un autre , de peur qu'il ne fuccombe aux fuggefhons du Tentateur (s;).

(a) Si quis proprium efle dicit , abfque dubio alienum fe facit ab eleclis Dei. ( Regul. bmlor. Cap. 27. )

{b , Nuinquid conveniataUquiJ proprium habere in focietate fratrum ? Hoc contrarium efl teiiimonio , quod refertur de lis qui crediderunt, in qiiibus fcriptum eiT; : nec quaquam eorum quœ polTidebat , aiiquid fuum efTe dlcebat. ; Ib'id. Cap. 8s. )

(c) Hase funt quse ut obfervetis prscipimus.. primum... non dicat'is aiiquid proprium , fad f:nt vobis omnia co m- inunia... fie enim legillis in acTibus Aportolcrum {Ep. 2; t. n, j. j

id) Sit in poteftate prspofiturae ut in commune reda6tum, cui neceffarium iuerit , prsbeatur. {îbid. n. 12.) * (0 Quod fi etlam a Parentibus ei qulcquam di'eftum fuerit, non prsfumat fufcipere ilhid , nifi priiis indicatum fucrit Abbati. Quod fi jufferit fufcipi , in Abbatis fit potel- tate , cui i'iud jubeat dari. Et non contriftetur frater cui forte diretftum fuerit, ut non detur occafio didjolo. ( Cap.j^.')

F t1t

^ ^ (Si)

On ne connoîtroit ni la nature , ni l'étendue du vœu de pauvreté , fi l'on regardoit ces Réglemens comme fufceptibles de reilri(5lion , ou fujets à la révolution des tems. Ils appartiennent à l'effence du vœu. Le renoncement du Religieux étant abiblu & fans réferve , il manque à Ion engagement dès qu'il jouit de quelque chofe comme lui étant propre , & toute coutume contraire qui s'introduiroit dans les Maiions Religieuies , loin de pouvoir être excufée , ne feroit qu'un abus qu'il faudroit fe hâter de réprimer.

C'eft pourquoi le Pape Clément VIII déclare dans la Bulle NuUius omnino puhlïù , pour la réforme des Monafteres , que le Religieux ne peut Te dilpenfer de mettre entre les mains de fon Supérieur tout ce qu'il reçoit , fans en excepter même les préiens de fa famille , afin que placé dans le dépôt commun , il ferve à pourvoir aux difFérens befoins des Membres de la Communauté. La défappropriation doit être fi générale dans les R.eligieux , que le même Pape leur recommande d'éviter l'efprit de propriété , jufques dans l'ufage. des chofes les plus nécelTaires {a), La Bulle de Clément VIII a été confirmée par Urbain VIIÏ dans fa Bulle Sacra Con^rto^atio^ & par Innocent XII , dans un Décret du Juillet 1695 ; le feu Pape Bénsit XIV la rappelle & y renvoie dans fon favant Traité des Synodes (/>).

Il y a donc dans la tradition de l'Eglife une uni- formité parfaite fur ce point important de la Difci- pline régulière. Tout doit être commun dans les

fa) Etiain fi fubfidia confangiiineorum , omnia fîatim Superiori tradantur & Conventui Incorporentur... quo com- iDiinis inde vittus & veftitus omnibus fuppeditari poflit ; ne eorum qu3e ad neceiruatem concéda erunt , ullus qiiidqaarrt poffideat , lit pro])rium , neque proprio utatur. ( Van Efpen, DiJJert. Canon, de v'ttio pecul. p. 1. cap. 1. h£l. 10. )

(b Gonfonant Clementis Vlll & InnocentisXIl Romano- îum Pontificum conftiuuiones. ( De Synodo l, 1, cap. /;?, n. 12, )

( S] )

^îonafteres , parce que le Religieux qui a tout abdi- qué, ne peut rien polléder qui ne ibit que pour lui; or , une chofe ceiTe d'être commune , dès que la jouilFance en eil tellement afieclée à un particulier, que tout autre einploi en eil prohil>é.

Que Votre Majefté daigne rapprocher ces principes înunuables de la dilpoiltion de l'Art. 3 de l'Edit du 10 Avril 1771. La contrariété efl iTcp évidente pour que votre piété n'en i'oit point alarmée. L'Edit dé- tend aux Supérieurs de retenir la moindre chofe des penlions des Religieux ou Religieuies , Si û'en faire tourner une partie quelconque au profit de la Com- munauté. Or les faints Canons.veulent que les deniers qui proviennent des Penfions foient dépofés dans le coffre com.mun. L'Edit atfefte aux Religieux la jouif- fance de la totalité de leurs Penfions. Les faints Dofteurs décident qu'elles doivent être diftribuées par les Supérieurs à proportion des befoins les plus preiTans , & la règle que les Religieux ont vouée , leur iiiterdit non-feulement toute plainte , tout mur- mure., mais toute peine intérieure fur cette diftribu- tion. A quels dangers n'eft-ce pas expofer les Religieux que de les autorifer à toucher leurs Penfions, à en jouir , à en difpofer ? Dans quels embarras ne jette-t- on pas les Supérieurs que leur devoir oblige de faire exécuter le vceu de pauvreté •, à quelle fâeheufe extré- mité ne réduit-on pas même les Evéques, à qui leur miniftere impofe la Loi d'avertir les P«-eiigieux qu'ils ne pourroient, fans intéreffer leur confeience &: com- promettre leur falut éternel , profiter du funeilc a.van- tuge qui leur eft accordé par la nouvelle Loi?

L'Edit, à la vérité, affujettit les Religieux à n'ufer de leurs Penfions que fous la direction de leurs Supérieurs. Mais en efl-ce aflez pour prévenir le vice de propriété .'' Ils feront gênés dans î'em.ploi des de- niers 'qu'ils pofiéderont. Il ne leur fera pas libre de les diflîper , de s'en fervir pour de vaines trivolités. En feront-ils moins propriétaires \ en auront-ils moins la jouiflance Ôc la difpofition de leurs revenus ? S'ils

F X

( ^4 ) îe deftinent à quelque chofe d'utile &: de raifonnp.blè , les Supérieurs leront dans la néceffité d'y confentir : or c'fcft la faculté même de toucher leurs Penfions , & d'en difpofer , que les Conciles condamnent dans les Religieux , parce qu'elle ne lauroit compatir avec le vœu de pauvreté. DuiTent - ils les conla- crer aux œuvres les plus pieufes , cette deftination , louable en elle-rncme , ne léroit pas capable de les excufer , ni de raffurer leur confcience. En 1648 & 1726 , une Univerfité célèbre conMtée fur cette matière importante , n'héfita pas à réprouver l'ufage qui laiiïbit aux Religieux la jouilTance de leurs Pen- fions , fur le principe , que fuivant les Loix Cano- niques , elles doivent être confondues dans les revenus du Monaftere {a).

Nous ne fommes point furpris que les perfonnes féculieres ignorent ces vérités , qu'elles ne font point obligées de favoir ; mais qu'il nous foit permis de rcpréfenter refpeclueufeirient à V. M. que ce ne font point elles , ou du moins que ce ne font point elles feules qu'il faut confulter fur des objets qui touchent fi direftement les liens de la confcience & la difcipline i'itérieure des Communautés Rèligieufes. J. C. a éta- bli dans fou Egîife des Miniures , à qui il en a con- fié radminiftration. Il leur a promis fon aififlance , en leur communiquant fon autorité. On ne fuit point l'ordre de Dieu , & par conféquent on s'expofe à s'égarer , lorfqu'en liégîigeant cette Infritution divine , on veut régler ce qui concerne la Religion , indé- pendamment des Evêques qui par état font chargés du Gouvernement de l'Eglife. {b)

Nous favons que les Souverains font les Proteéleurs

(<2) Ces confukatlons fe trouvent à la fin d\ipe DiiVcrraîion fur la pauvreté Religieufe , inipriinée à Paih chez Babud, en 1728,

(b) Quos pofuit _ Eplfcopos regere Ecclefiam Dei. Aft, Cap, 20,

( «5 )

de l'Egîife S: de Tes Canons ; nous honorons dans îa Sacrée Pcrfbune de Votre Maiedé cet augufte titre &: les droits qui y font attaché ? Nous nous ferons touiours une gloire de reconnoître , avec Saint Au- guftin , que les Rois doivent fervir Dieu en Rois , & qu'ils s'acquittent de ce devoir en faifant pour fon fervice ce que les Rois feuls peuvent ùïre {a). Mais nous favons en mérne-tems que le Proteéleur n'elî que TEvéque extérieur , que Dieu n'a point établi les deux Pui/Tances pour qu'elles fuffent oppofées ; & que félon i'expreffion d'Ives de Chartres , {{ l'heu- reux Gouvernement & le bonheur de l'Eglife réful- tent de leur concert , leur défunion menace les Inf* tîtutions les plus fages d'une ruine prochaine (h).

Les deux Edits qui excitent notre réclamation , confirment ce que l'expérience avoit déjà li fouvent juftifié : que ii les Evêques euffent été confulté , que fi le projet des Loix nouvelles leur eût été coînmuni- que , nous ne ferions pas dans la trifte néceffité de porter aux pieds du Trône nos plaintes trop fondées, de déférer à. Votre Majefté elle-même le danger de tant de difpofitions qui alarment la piété.

Les Evéques euffent prévenu la publication des Edits, en faifant fur leurs projets les obiérvations que nous venons de développer fur les différens articles de ces Loix. Ils auroient mis fous les yeux de Votre Maiefté les maximes des Saints Docteurs , les Décrets des Conciles , les règles de h Difcipline , &: par elles le vœu &c l'efprit de l'EgliJe. Votre Majefté eût été convaincue que, fous le fpécieux prétexte de corri-

(a) In hoc fervient Domino Reges, in qi'antum Tiint Re- ges , cum ea faciunt ad ferviendiim illi , quse non poilunt facere nifi Regcs. ( Ev. iç^. n. ip '^.

(h Cùm Regnum oc Sacerdotes inter Te conveniunt, bene regiair mundus, floret & fruiti'erat Ecdcfia: cùm vero inter fe dilcordant non tantum parva; res non crefcunt, fed etiam inagii» res miferabiiiîer dilabuntur, {^£f, 46 .

F3

( «o

ger des abus réels , on pouffoit cî*une part la févérité au-delà des bornes fixées par nos Pères , & que de l'autre, on autorifoit des pratiques que le relâche- ment a voulu introduire , & que la pureté de la mo- rale Evangélique n'a jamais permis de tolérer.

Mais ce que les ÉvéquQS euifent eu le plus à cœur de faire appercevoir à V. M. , c'eft l'affligeant ^jréfage que fait naître le coup-d'œil général des deux Edits ; c'eft h fanefle tentativede préparer par une décadence progreffive , la chute de l'Etat Monafti- que ; c'efl l'art avec lequel on a réuni tout les moyens propres à le conduire à* fa mine.

Votre Majefté Impériale eût appris des Evêques que rinftitut Monaftique eft faint en lui-même, parce qu'il confaere à la pratique des Confeils les enfens de l'Eglife qui ont un défir iincere de parvenir à la perfection ; qu'au jugement de Saints Pères la vie Religieufe eft une imitation de celles des Apôtres &: de J. C. rnême {a) ; que les Moines » ont trouvé » dans les premiers Chrétiens. . , dans Saint Jean- 9> Baptifte. .. dans les anciens Prophètes, un modèle » admirable de vertus , qu'ils ont excellemment pra- w tiquées. (t») «

Les imporrans fervices que les Monafteres ont rendus à l'Eglife , & le jugement uniforme qu'elle a porté depuis plus de dou'ze fiecles fur la fainteté de leur inftitution , eût difpenfé les Evoques de com- battre les iniufles préventions que l'incrédulité , ou l'indifférence pour la Religion , infpirent à tant de perfonnes , &: (ur-tout à celles qui inftruites dans la fagelTe du iiecle, ne fe piquent que d'une politique mondaine.

Les Evéques n'euflent point difîimuié à V, M. les progrès que le relâchement a fait dans les Cloîtres.

(c) Monachi genus vivendi Apoftolorum ac Domini imi- tantur. ( S. BaJIl. Conflit. Cap. 2.)

(J>) Thoinulfin. Difcipl. de l'Eglife, (T. i, p, 1422.)

C 57 ) En avouant Tes abus déplorables qui y régnent , ils auraient dit, avec le iavaut Pierre d'AïUi, Evéque de Cambray , que c'eft par la réforme , 6c non par la deftruclion qu'il taut y remédier , à l'exemple des médecins , dont la fonction n'eft pas de faire périr les malades, mais de guérir leurs infirmités (^).

Ils auroient eu la confiance d'aflurer à V. M. que le mal n'eft pas au point on i'e plaît de le porter; qu'il eft encore des Monafteres qui font les afyles de l'innocence, la pureté des mœurs, la pauvreté de l'efprit &: du cœur confervent , les Keligieux & Religieufes joignent à la régularité &: aux faintes rigueurs de la pénitence , un zèle brûlant pour la gloire de Dieu ; ces âmes pieufes occu- pées de chanter les louanges de Dieu , &: alTociées au miniftere des Anges , élèvent , comme Moïfe , des mains pures vers le Ciel , pour détourner les fléaux de la colère de Dieu, appaifer fa Juftice , &: attirer fur les Peuples &: fur ceux qui les gouver- nent, les Bénédidions du Ciel.

Les Evêques auroient repréfenté à V. M. qu'in- dépendamment de ces avantages, que le libertin peut xnéprifer, mais qui feront toujours précieuji aux yeux de quiconque ayant de la Foi &: tbrmé à l'école de l'Evangile , connoit tout le mérite de la prière , 6c croit avec le Prophète Roi , que fi le Seigneur ne garde lui-mérne la Ville, c'eft en vain que veille celui qui eft prépolé pour la garder. Ils auroient re- préfenté à Votre xM:ijefté qu'il eft encore de l'intérêt de la Religion & de l'Etat de perpétuer les Monaf- teres , & d'y .faire refleurir la lumière èc la vertu.

Ce font le Monafteres qui fourniftent au Clergé Séculier des Troupes auxiliaires toujours prêtes à les

(a^ Vitium vel abufus cortigi débet , & non ftatus deftrui , vel fuis dcbitis juribus defraudari, ficut boni Medici of?îcium eft ab Infirmo morbuni tollere , 6c non infirnium corpus del- truere. (^De Reform, Ecd. Cap, de Reform. capiùs, p. 8i. )

F4

(S2)

aider dans le pénible Minlftere des for.(ft"ions pa(l<v raies. Dans les Villes, les Religieux procureur de iavans & de zélés Prédicateurs. Dans les campagnes , ils fuppléent les Curés malades ou infirmes , leur charité procure aux habitans , ou la liberté de conl- cience néceflaire à plufieurs , ou les moyens de fa- tisfaire leur piété par la participation des Sacremens, principalement aux Fêtes iblemnelles.

C'eft dans les Ordres Religieux qu'on trouve le plus grand nombre des Miffionnaires qui s'expatrient pour aller porter le flambeau de la Foi dans les con- trées infidelles ,. & qui y annoncent l'Evangile au ril- que des perlécutions &c de la perte même de leur vie.

Les Couvens font des afyles pour les Orphelins , dont les Tuteurs feroient fouvent fort embarralTés , s'ils n'avoient pas cette reflburce, Combien de fa- milles feroient dans Tembarras pour l'éducation des jeunes Filles , fans le fecours des Communautés Re- ligieufes , on trouve des Maîtreffes fpécialement chargées de les inflruire à lire , à écrire &: à parler différentes Langues, de leur apprendre ou de les perfeélionner dans les différens ouvrages propres à leur état & à leur fexe , & fur-tout de les former dans les fentimens de Religion qui font les fonde- mens folides d'une éducation chrétienne.'* Les Royau- mes ravagés par les dernières héréfies , fentent & regrettent eux-mêmes la perte des Monafteres pour l'éducation de la Jeuneffe.

C'efl enfin aux Religieux à qui le Public eu rede- vable du commun enfeignem.ent de la Langue latine; emploi également difficile & important, qui demande «les taiens &" de l'expérience, auquel l'obéiiTance af- fujettit autant de Religieux , qu'il en eft befoin , & les attache par les liens du devoir & de la conf- cience.

Nous ofons nous fîntter que ces Repréfentations , qui euffer.t 'nfniiablement touché Votre Majefté , s'il eût été poffible aux £vêques de les lui adrelTer avant la promulgation des deux Edits , ne feront pas moins

( 89 )

d'imprcfilon dir rcfprit & le cœur de \''otTe î^îaiefté , depuis leur publication. Les motifs puiirans qu'ils au- roient employé , n'ont rien perdu de leur force par cette circonftance. Ils font diftés par la Religion. Ils ont pour objet le lalut des âmes & le bien public. Des Evêques ne pourroient être infenfibles à de fi grands intérêts ; &: fi conformément à la parole de Jefus - Chrift , ils .ont lieu d'efpérer Ton affiflance , lorfque pour fon fervice & celui de fon Eglife , ils font obligés de recourir aux Puiffances de la terre , quel droit n'ont- ils pas d'attendre un accueil favo- rable , en adrefiant leurs prières à une Augufte Prin- cefie, qui fait moins de cas des ornemens qui envi- ronnent le Trône , que de l'éclat que lui donnent: l'équité , la grandeur d'ame , la vertu.

Etaient Jîgnés ^ f Je AN Henry, Jrch. de. Malines, J. R. Evêquc de Bruges. H. G. Evêque d'Anvers.

F. Eve que d^Yprcs.

H. J. Evéquc de Ruremoîide,

G. G. Evcquc de G and. F. Evêque de Namur.

MÉMOIRE prèfcnté le 8 Janvier if^j y pour M. J. Janssens , Curé de la Ville de Wun , dans la Guildre Autrichienne , relatif à la Requête de M. le Confeiller & Mambour de Rurcrnonde.ÇTraduii du Flamand, )

J— 1 'Intimé ayant eu communication en Copie au- thentique de ladite Requête , &: fe réglant fur FOruon- n;nce enfuivie , en date du 15 Déoemb.e I7'^6' , a riionneur de dire :

Qu'aucune autre raifon que le cri de iu confclsnce ,

(9°)

ne Ta empêché pendant quelque tems de publier l'E- dit de S. iM. I. & R. du i6 Odobre 1786, portant éreftion du Séminaire-Général dans l'Univerfité de Lou- vain , parce qu'il n'avoit aucune afTurance , que les Evéqueç auroient une pleine impeftion fur les Livres & la Doélrine , ainii que fur les Règles de Difcipline & de Aîœurs , à obîtrver dans ledit Séminaire ; inf- pedlion qui appartient inconttftablement aux Evêques^ comme le- prouve non - feulement l'Ecriture - Sainte , mais l'ufage confiant toujours obfervc dans l'Eglife , dès les premiers iiecles.

L'Eglife d'Alexandrie nous en oirre une preuve re- marquable dans réledion, & cnfuite dans la dépo- lition faite par le Patrigrche Dérnéirius de la perfonne d'Origene , en qualité de Catéchifte de l'Ecole érigée en cette Ville par Srint-Marc , comme le reconnoît lui-même Elie JJup'in Bihliotheca Ecclejiajîica^ Tom. 1. in vita Paut&ni.

De même Saint- Auguftin , Evêquc d'Hypone , ayant érigé une Ecole pour tous les Eccléfialliques de fon Diocefe , ne confiroit les Ordres facrés qu'à ceux qui avoient été infiruits & fermés dans cette Eceie. C'eft ce qu'attefte PGJjîdius dans la vie de ce Saint, Ch. IL Le iiom même de Caré:hijîes , que l'antiquité donnoit aux Maîtres qui enfeignoient dans ces Ecoles , en four- nit auffi une preuve.

De même l'Apôtre Saint Paul dit : » Comment fe « chargeront-ils du Miniflere de la parole , s'ils ne re- » çoivent la Million » Quomodo vcrb prœdicabunt^ nijl mïttantur ? Le pouvoir de donner cette MiJJîon eft inconteftablement un droit qui appartient exclufive- ment aux Evéques , droit reconnu par tous \ts Ca- thoHques. l'Apôtre ajoute , qu'on ne doit pas or- donner des Néophytes , non Ncophytum.

Les Evêques pourront-ils fatisfaire aux devoirs que leur impofe le iacré Miniftere dont ils font revêtus , s'ils n'ont une entière infpeâ:ion fur la Doélrine qu'on enfeigne au Clergé de leur Diocefe?

Les Evêques ont d'autant plus de droit à cette inf-

C9I)

pedion, que dans tous les (iecles de l'Eglife, ils ont tou jours été reconnus par tous les Catholiques , comme les leuîs Juges des controverfes qui concernent la For ou les règles des Mœurs.

Auffi-tôt donc,, que l'Intimé a été informé avec certitude que l'inCpeclion &: la furintendance dudit Séminaire-Général avoient été accordées aux Evê- ques , oc qu'ainiî il a été dérivré du fcrupule fondé de confcience qui le tourmentoic , il n'a plus balancé un moment de publier le fufdit Placard : c'eft ce qu'il a fait le 17 Décembre 1786.

Il avoit cependant des informations certaines , qu'ur» très-grand nombre de Curés , tant du Brabant que de la Flandre , n'avoient pas encore jufqi-'ici publié ce Placard , Se qu'ils n'avoient pas été moleilés ni atta- qués en Juftice à ce fujet.

Ainfi ce n'a pas été par un pur entêtement , mais uniquement par la crainte juite & fondée de blefler fa confcience , qu'il a différé quelque tems cette pu- blication.

Il croit donc avec raifon , n'avoir rien à fe repro- cher à cet égard , d'autant moiiiS que Sa Majefté elle-même a depuis quelque tems accordé la liberté de Religion & de confcience dans les Pays-Bas aux Luthériens , Calviniftes & autres Sectes , tandis que la Religion Catholique & la liberté de confcience contorme à cette Religion étoient les feules qui au- paravant fuffent établies dans le même Pays. L'Inti- mé auroit donc , en pubhant ce Placard , tandis que ce fcrupule raifonnable {iibiiiloit , non-feulement grièvement péché , mais auroit paiTé pour le plus lâ- che des hommes. Car fi l'Empereur Confiance Chlore, quoique Payen', a chafié de ia Cour tous ceux de fes Courtifans , qui par crainte de la mort dont il menaçoit les Catholiques , avoient renoncé à leur Foi, apoftaiié contre la conviction de leur con- fcience , s'il les a, dis-je, chaiTés comm.e des lâches , comme des hommes en qui il ne pouvoir avoir au- cune confiance 6l capables de toute forte de for-

'(90

raits , 5: {i au contraire il a loué & élevé aux hon- neurs ceux d'entre eux , qu'aucunes menaces ne pu- rent forcer^ à abjurer leur Religion , en obéifTant à r£clit de l'Empereur , &: qui montrèrent ruSx , que nen au monde ne pourroit leur faire violer leurs devoirs; l'Intimé qui, en fa qualité de Curé, chargé de rinftruftion des Fidèles confiés à fes foins , eflmie que fa conduite par rapport au fu(dit Placard, mé- rite plutôt des éloges que le blâme , d'après les rai- fons qu'il vient d'expofer.

S'appuyant fur tous ces motifs, l'Intimé penfe s'erre fufïïfamment judifié , oc qu'ainfi tout procès ultérieur & toute condanmation en l'amende , & dans les frais de la procédure , viendront à ceffer.

Implorant, Sec. &c.

Copie de r Ordonnance du Confeil Souverain dt Ruremonde , fulvie fur U Alemcire de J Janfjens , Intimé.^ préjlntc le {|^ Janvier i^Sj. ('Traduction du Flamande)

La Cour ayant vu la Requête du Confeiller & Ma;nc>nur du Confeil de Sa Majefté , hier exhibée , & ayant de nouveau entendu les raifons pour lef- quelles il regarde comme entièrement inadmiflibles les excufes de l'Intimé, contenues dans fondit Mé- moire , pour fe juftiner d'avoir différé fi long-tems & avec tant d'opiniâtreté la publication de l'Edit de Sa Majefié du i6 Octobre 1786, touchant l'éreftion du Séminaire-Général pour les Etudians en Théolo- gie, ladite Cour condamne l'Intimé dans une amende de vingt-cinq florins de Brabant , argent de change , au p'otit des Exploits : & de plus elle trouve les principes expofés dans ledit Mémoire non moins faux

( 90

^qire dangereux , 5c qu'un Curé qui a la témérité d'a- vancer,fous les yeux mêmes de Ton Juge, de telles maxim.es , i'e déclare ouvertement l'ennemi de l'Etat 6c de l'Ordre piiblic , &: que comme tel il cft In- digne d'exercer les ronflions pailorales ; en conlé- qrence , interdit l'Intimé de toutes les tbnfticns de Curé ; & fera TEvêque du Diocefe requis d'établir in- cefiamment un Déierviteur pour la Cure de AVeert: en outre la Cour met en lequeftre le tem.porel de k même Cure , & commet pour l'adminiilrer fous ialaire le Notaire Dionlfii, réiident en la Ville de Weert , avec charge d'en rendre en fon temis un compte exacl & pertinent pardevant CommifTaire de la Cour , défend en conféquence à tous ceux qu'il peut appartenir , de faire aucun payement des ^revenus de ladite Cure à d'autres qu'au fufdit Admi- niilrateur 8c Séqueftre , fous peine d'être tenu de payer derechef : lequel Séqueftre payera des deniers provenans defdits revenus ; premièrement , la rétri- bution à afligner au Déferviteur , Se en fécond lieu une fomme de loo florins de Brabant , argent de change, accordée par cette à i'Intimé , pour lui fervâr de PePifion alimentaire , avec inioncllon très-expreiTe audit Intimé non-feulement de s'abftenir abfoîum.ent, auffi-tôt après l'iniinuation de cette , de toutes fonc- tions paftorales , comme dit eft , mais encore de fe garder d'avancer , foit dans des difcours , toit autre- ment , des m.aximes fanatiques fem.blables à celles qui fe trouvent dans fondit Mémoire , fous peine de privation de fadite Penfion alimentaire , de féqueftra- tion de fa Perfonne ou autres remiedes convenables , 6c d'être puni arbitrairement félon l'exigence du ca?; condamne l'Intimé aux frais du procès, montant à la fomme de foixante-quatre florins quatorze fols de change argent de Brabant; £c fera cette inceflam- me^tinfmuee d'office fous un double authentique fufdit audit Intimé , ainfl qu'au Séqueftre ; 6c de plus , pour- que chacun en ait connoiilance , affiché fur la porte

r 94 )

de VEgllfe Parolffiale de "Weert , comme aufïi à la breteque de la Mailbn-de-Ville dudit lieu.

Aclum inde. CanccUerye binncn Ruremonde dm 2.G Januani lySj , was gcparaplucrd L U t- GENS , ondcr Jlond ter ordïnantic van Hovc , was geùcekcnt F. B. van dcr Henne, ondcr jlond accordccrt by my , was gctcekeni F. B. van dcr Henne.

PhILIPPUS DamianU s , &c. &c, Rcvtrcndo Domino J, Janjfens Paftori W'crthenji nojira Dia^ cejis ^ falutem in Domino.

Exhibitum 8c communicatum nobis fuit Decretnm fupremae Curiae hujus Ducatûs 26a hujus contra te latum; que tanquam refradarius Mandatis Principis muiftaris , ac furdnens lenfa & principla ftatuî & bono publico nociva , totus hoflis declararis , publiée tanquam talis per aflixionem diéli Decreti denun- tiandus , ulteriùs omnibus Paftoratûs tui reditibus eo- rumque adminiflratione privaris , relictis tibi pro fliftentatione tua ducentis florenis noftroe cambialis Brabandae , hinc ob bas aliafque rationes animum noftrum moventes , te ab' omni funclione Officii Prtftoralis provifionaliter iufpendendum duximus , & per praef'entes furpenilim declaramus , idque donec aliter declaraverim.us.

Datum Rurcmondas in Palatio noftro Epifcopali, hac 30 Jan. 1787.

Epifcopus P^uremundenfis (a). De Mandato IllujI. ac Reverendijjimi Domini mei.

TheUNISSEN Secret.

(j) Il n'eft pas pofRble de concevoir que M. l'Evêque de Rurtmonde ait donné un pareil Décret contre un Padeur

(95 )

COPIE, £unc Lettre de M. U Secrétaire, Révérende Domine Pastor,

Ingrati certè nuntii Communicator eïïe debeo , nuntii decretae contra vos fufpenfioms ab Officio Paftorali ; nec enim IlluftriiTimus niiî vifa Decreti Copia , quod luprema Curia htijus Ducatiis ad valvas Ecclefis Verrîienfis affigi vcluit , in quo publicè tanquam hortis ftatûs & boni publici cenuntiaris , ad illud ex- tremi deduc^us eft. Humilis lubmilno veflra & recurfus ad diclam Curiam vel gubemium pro pœnae mitiga- tione , nurnquid foliun fvipereft remedium ? nulhim aliuvl , quvîntùm ego judicio , illudque effeftum optatum habiturum licet prasfagire. Maneo intérim plurimo cultu &;c.

Runmunia hac 2,0 Jan. 'iSy.

Theunissen Secret,

Lfs tris - bonnes raifons du rejpe^able Pajleur , qui nont eu aucun fuccès dans le moment , ont eu leur plein ejfet quand les circonflances ont favonfé la vérité 6' la juflice. Voici ce quon lit dans une Lettre de IV e en y en date du <^ Juin 1787.

Maxima res effe<^ , viri : timor omnis abefto. JE N. XI. 24.

» Il eft donc arrivé , l'heureux moment , qui nous

▼srtueux qui n'avoit açl que félon les lumières de la con- fc'.ence & de la vraie Théologie, fans s'jppofer qu'il s'étoit la lié détourner un moment de fes propres principes par Te- prit de terreur, qui à cette époque avoit fubjugué prefque t9us les efpriis.

(96)

confole d'une longue fervitude , d'une dure îk humi- liante opprefïion. Tous nos maux ont difparu en un feul jour!... L'Eglife de Dieu fembloit menacée de la plus cruelle comme de la plus lubtile perfécution -, des artifices & des ftratagêmes aufli puiflans & def- truftifs dans leurs effets , que fourds & uns dans leur marche , fembloient faire des ravages irréparables , rompre &: anéantir l'union Catholique , &: éteindre parmi nous le flambeau de la Religion : lorique tout- â-coup celui qui d'un clin-d'œil réforme la face des Empires , fe lérvit des démarches d'une Nation al- tiere & généreufe , pour arrêter le torrent qui em- portoit déjà les plus belles , pofTeffions de l'Eghfe, comme les plus précieux Droits de l'Etat... La Cité de Sion reprend fon éclat , une fplendeur nouvelle embeUit fes murs , on célèbre des feiVms dans toutes les rues de jérufalem, Fer vicos ejus allduia canta- bitur. (Tob. XIII. 21.^ «

» Vous favez, Monfieur, quelle profonde douleur nous a caufé la Sentence du 26 Janvier de l'année courante , qui déclaroit notre digne Curé indigne d'exercer les Fondions Pafl:orale.v , féquellrant l'on temporel en lui afïignant une penfion alimentaire de 2,00 fl. Vous favez auiTi que ce Pafieur fut fufpendu de toutes fes fondions par fon Supérieur Eccléliafti- que , & que la Sentence de la Cour de Ruremonde fut affichée à- la Maifon-de-Ville , & même à la porte de la propre Eglife du Curé. Quelle conflcrnation , quelle douleur, pour des âmes Chrétiennes, pour des ouailles tendrement attachées à leur fpirituel! Quel fcandale dans l'Eghfe de Dieu ! . . . Or , voici com- ment nous venons d'être dédommagés de notre défolation & de la prefTe fe trouvoient nos coeurs depuis quatre mois. Le 26 Mai , notre Curé reçut de la Cour de Bruxelles une Lettre avec deux incliifes, dont l'une à l'adrefTe de Mgr. l'Evêque , & l'autre à celle de M. le Mambour du Confeil de Ruremonde. Aufïi-tôt le Curé fe rendit dans ladite Ville, 6c quoiqu'il y arrivât le jour de Pentecôte, le

valet

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vatet àe îa Conr fut fur le champ expédié pout NVeert, pour annoncer au déferviteur que (es fonc- tions venoient à cefler. Ce valet arriva ici , le même jour , vers 4 heures & demie de l'après-midi. Cet événement répandit un contentement iiuiverfel dans toute la Ville. Les trois Corps de la Bourgeoise fous les armes, tambour battant , drapeaux déployés, allè- rent à la rencontre deThomme Apoftolique. Le Clergé en fit de même. CJne mulique lonore égaya la mar- che. Enfin à quelque diftance de la Ville on trouva îe bien-aimé Curé, Chacun s'emprefTa de le féliciter & de rembralTer. On rentra en Ville , au Ion de tou- tes les cloches. Le concours du Peuple étoit immenfe. Les rues devinrent trop étroites. Des acclamations &: des cris d'alégrefle tirent retentir tous les coins de la ville : ^ive le Faveur Janjfen^ ! Fïvc notre, bon Père! Vive l'homme Àpoftoliquc! Le cortège arrive enfin à la porte de l'Eglife paroiifiale ,

Et tandem îati nota advertuntur arenx. J£.s, V. 34.

Le Curé entre dans la Maifon du Seigneur, dont la iplehdeur lui tient (1 fort à cœuf :

Adfumus , porîus delati intramus arnicas.

Ib. 57.

, tranfporté d'une falnte joie , il fe profterne au pied du grand-autel, &c plein de reconnoifîance il y adore les deffeins de la Providence qui fait conlbler, quand il en eft tems , ceux qui fouffrent pour l'hon- neur de l'Eglife. Oh 1 fi dans ce moment on avoit pu voir tous les mouvemens de fon cœur , quel raviffant tableau ne feroit-on pas des diverfes affec- tions qui s'y font rencontrées ! On s'imagine bien qu'il aura dit avec Salomon : Domine Deus Ifraél ^ non c/f Jîmilis lui. . . Qui cujlodis paciurn & mife- rlcordiam J'ervis tui.i^ qui ambulant coram te in toto corde fuo.,. Benediclus Dcminus qui dédit requiem populo fuo (III Reg. VIII, 13. 56). Dans le même

G ttt

^ems , une foule innombrable adreffa au Ciel des re^ mercîmens bien finceres pour un bienfait fi éclatant. Hl autem Domïnitm bcnedicebant , qiùa mamijicabat lo- cum fuiim\ & umplum q:iod paulo antc timoré, .. crat plénum , apparent: omnipotente Domino , gaudio & /aùtia ïmplMan ejî (IIMach. III. 30). Entretems les Corps de la Bougeoifie firent une triple décharcre, & finalement M. le Curé fut reconduit dans la de- meure. i<

» Le lendemain , on chanta en adlion de grâces ime Gand-Meffe fuivie du Te Deum , au fon des Clo- ches. La vafte Egiife Paroiffiale étoit remplie de monde. Vendredi i de ce mois, la Cour de Rure- monde donna des ordres pour faire afficher à la porte ée l'Eglife Paroiffiale, ainfi qu'à ^a Mailon de Ville, l'ordre révocatoire de la difgrace du Curé. S'il fal- loit entrer dans tous les détails de nos réjouiiTances ,

Antt diem cUu/o cfimponet P'efper Olympo.

» Je fuis , 6cc,

V. .H. Serv. Mathias Kr**.

(99)

Quoicii/E cette Répréfentation regarde d'i- récif ment une Solemnicé particulière^ elle renferme des Obfervaùons générales fur VEdit relatif aux Procejjions ^ & par-là ^ devient d'urrintérêt ajj'e^ étendu pour troU' ver place dans ce Recueil,

RKPRkSElfTATIOH dts Etats du P^ys & Duché, di Luxembourg , à Leurs Altcjfss Royaits , taudiant Us deux Pr9cs£i0ni, de Iê. Stlemniû Notre-Dame^ Fuirons de La Province.

Madame, Monseicnevr,

R

EMONTRENT en très-profond refpeft les Etats ou pays Duché de Luxembourg 6i Comté de Chiny, ■que S. M. voulant faire ceffer les abus des Proceffions ta des Jubilés , elle a fait publier l'Ordonnance du 10 Mai dernier ci-jointe fub N». i". dont l'Article premier flatuc qH'outre les Rogations ordinaires, il ne pourra y avoir dans chaque Paroilîc que deux Pro- cefSons par an , dont l'une au jour de la Fête-Dieu , & l'autre à quelque autre jour de fête , à défigncr par l'ordinaire , 5c qu'il ne fe fera aucune Proceliion le jour de Dimanche , pour ne point déranger le fervice paroifîiale l'Article 2 ajoutant que l'on ne pourra plus porter de Statues ni d'Images quelconques, non plus que des enfeignes de Métiers , vêtemens extraordi- naires , ou autres bigarurres femblables dans les Pro- ceffions , ni les faire accompagner d'aucune mu- fîque.

Les Remontrans reconnoifTent avec d'autant plus de

G 2

( 100 )

confiance que l'Intention de leur Augufte Souverain < a été de rapprocher cette pnrtie du Culte divin des règles de la difcipline Ecclciiaftique établie par dif- ferens Conciles provinciaux , que ce n'eft que fovjs l'appui de ces Décrets canoniques , qu'ils efperent ob- tenir de la piété de Vos Altefîes Royales , la coniér- vation d'une folemnité rciigieul'e , qui ititérefTe fpé- cialement cette Ville capitale , &. toute cette Pro- vince de Luxembourg.

Il y a près de cette même Ville au Couchant , une Chapelle de Notre-Dame , célèbre par la dévotion des Fidèles qui y viennent de toutes parts, pour révé- rer rimage miraculeufe de la Sainte Vierge, Tous le litre de Conlolatrice des Affligés : les premières pier- res de fa co):rrru6"t!on en furent pofées l'an 1615 , par le Comte de Berlaymont, Gouverneur de la Ville &c de cette Province , les Comtes d'Egmondt & de Man- derfcheidt , les Abbés de Saint Maximin & de Munf- ter , en préfence de la Noblefie , des Confeillers , des Echevins de la Ville, & d'une grande multitude de peuple. . . ,^ , .

Cet Edifice pieux ne iùt achevé qu'en 161 j , mais il ne le tut pas plutôt , que l'on vit s'y opérer des miracles par l'intercefTion de l'Augufte Confolatrice : miracles examinés , avérés & approuvés par l'ordi- naire ; le nombre m.éme en devint fi grand 6i les eft'ets d'une proteélion divine dont ce Pays n'avoît cefié d'être favorifé dans les années de calamité , furent ii notoires & admirables, qu'ils déterminèrent le Prince de Chimay & le Confeil de cette Pro- vince , dont il étoit Chef en fa qualité de Gouverneur , à choifu- pour eux & leurs Succeffeurs notre Dame de Confolation pour Patronne perpétuelle de cette Ville de Luxembovirg : l'A'fle en fût dreflé le %j Seprembre de l'année 1666; les Magiitrats de la Vilie firent la méjne chofe le 5 Oéïobre de la même année : le Doyen au nom de tout le Clergé de la Ville dreffa fjr le même fujet un A.cle qui eft gardé parmi le« Aâ:es capiîulaires , 6c il fût envoyé

( lOI )

•les cbple's de ces Actes à i'Evêque d'Azot , pour 'lu'il les ratifiât comme Suffragant & Vicalre-Gene- al de l'Archevôque de Trêves, ce qu'il lit par Ion" Décret du 26 Mai de l'année 1668 , dans kquel il qualïHe la Chapelle de miracuîeuie, &: ordonna qu'on pourfuivît à Rome la confirmation de cette Election: d quoi on s'empreffa de latiskire , en raifant pré- jèp.ter les mêmes A6tes aux Cardinaux de la Con- grégation des R-ites : le rapport en fût fait par le Cardinal Celli, enfijite duquel & après que le tout eut été bien examiné , la Congrégation pronoiiqa qu'il conftoit fuffifamment que la Ville de Luxem- bourg avoit légitimement élu notre Dame de Conlo- laiion pour fa Patronne , approuva &: confirma ceitc Election , déclarant en outre qu'on pouvoit remire à cette fainte Patronne tous les honneurs qu'on rtnd aux autres Patrons légitimement élus , &; faire à fcfn égard tout ce qui fe pratique de droit &: de coutume envers eux : le Décret en a été expédié le 14 No- vembre de la même année 1668, figné & fcellé par le Cardinal Giiietti.

Les merveilles qui continuoient à s'opérer (h'.^s la famte Chapelle , produifirent une deuxième épo- que à fon hiftoire ; car non-feulement toutes les Vil- les, mais encore toutes les ParcilTes du Duché de Luxembourg & du Comté de Chiny voulurent imiter la Capitale , & excitées par une fainte émulution , choifirent chacune la Patronne commune , ainfi que cette Capitale l'avoit fait onze ans auparavant : la réfolution en tut prife le 6 Octobre de l'année 1677 , par les trois Etats de la Province l'exécution en fut commife à leurs Députés , auxqui;îs toutes les Villes de la Province , envoyèrent leurs AS.es d'E- leétion en parchemin , fignés par le Greffier & munis du Scel de chacune, dont la teneur eft tranfcrite dans la Copie ci-iointe fuh nv.mcvo i**. les Doyens Ruraux s'empreiferent d'en faire autant de la part de toutes les Paroiffes de cette même Province , fu;-

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( 102 >

vant leur Ac^e du mois d'Odobre de 167S, ci-joint' fiit r.umv.ro 'y.

Les ménies Députés s'adrefferent en conféquence, pour obtenir b confirmation de cette Election , non- feulement à l'Archevêque de Trêves & à l'Evcque de Liège , qui la confirmèrent par leurs Décrets du 4 Juin 1678 , & du 6 Février 1679 •• ci-joints lub Nhs. 4°. & 5*^. mai« encore aux Cardinaux de la Con- grégation des Rites à Rome , qui en firent dépê- cher leur Décret de confirmation en date du 6 Mai 1679 , ci-joint en copie fub Nro. 6**.

L'on confommr! l'œuvre d'un dévouement Ç\. unanime le le. de Juillet, jour de Dimanche de l'année 1679 ; l'Evêque d'Hierapolis , SufFragant de Trêves a la tête du Clergé, le Prince de Chimay avec tous les Officiers du premier Ordre , le Confeil Provincial du Roi , les Juges de la Ville accompagnés des Députés des dix-huit Villes de la Province , rendirent à TEglife pour lors du -Collège des Jéfuites la Ste. Statue étoit placée , fur un Autel qui lui a voit été préparé ; î'Evêque y célébra pontificalement la Grand'Mefîc ; il y eût Sermon , que l'Orateur termina en lifant les Lettres de Confirmation obtenues à Rome , Se pro- nonçant la formule d'éleflion au nom de toutes les Villes &: de toutes les ParoifTes du Duché de Luxem- bourg & du Comté de Ch':ny dont la teneur efl jointe fab n°. 7. Après les Vêpres du même jour on reporta la Ste. Statue dans fa Chapelle en une Pro- ceiHiôn formée de tous les Ordres tant Eccléiiaftiques nue Laïcs , dans laquelle l'Evêque Suffragant ci-defTus nommé porta le Saint Sacrement.

Qts hommages ainfi rendus à la Ste. Vierge de- \inrent pour les années fuivantes l'établlffemcnt d'une Solemnité qui les renouvelle religieufement. Le Samedi l'après-midi avant le quatrième Dimanche d'après Pâques, la Sre. Image fe porte en une fimple Procefïion en cette Ville dans TEgiife du ci-devant Collège des Jéfaires 6^ aujourd'hui Paroifîiale de St. Nicolas &c

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Stc. Thérefe ; Ta ChapeUe étant un Bâtiment trop petit, pour contenir la multitude des Perlonries que la dé- votion y appelle pendant TOclave de ce^te Solcmnité , il a fallu néceiïairement en placer le Siège dans cette Eglife qui , quoiqu'affez vafte , ne t'uffit pas encore pour contenir le Peuple qui s'y préfente , particuliè- rement les jours des deux Dimanches de l'Odave.

Cette Proceirion ne corififte que dans la cérémonie la plus fimple : les Ecoliers du Collège Royal con- duits par leups Régens &: leurs Profelleurs,, marchent les premiers , dont deux Chœurs chantent les Litanies de la Sainte Vierge 6>c les autres prient haut le Cha- pelet , fuivent les Bourgeois & autres Perfonnes nui s'y joignent qui prient de même, &c après eux les Maîtres II affiftans Confrères des treize Métiers de la Ville qui porteat des torches allumées , &: enfin le Clergé de la ParoilTe qui précède la, Ste. Image qui eft portée fous un Dais par quatre Prêtres &: le Dais par quatre Bourgeois Notables ; le Peuple de l'un Se de l'autre fexe fuit.

La Proceflîon étant arrivée à l'Eglife , les Prêtres p]a:ent ïkmgi de la Ste. Patronne fur l'Autel qui lui eft préparé au milieu de cette Eglife &: qui eft orné des Préfens précieux faits en différens tems à la Ste. Chapelle par des Pcrfoimes les plus illuflres &: même du premier rang : cette cérémonie s'achève par les Litanies de la Ste. Vierge que l'on chante au Chœur.

Le lendemain les Préfidens 6>t Gens du Confeil de Sa Maieité dans cette Province &: les Jufticiers &C Echevins de cette Ville fe rendent à la même Eelife , pour y affilier à la GrancrMelTe , qui y eft célébrée par un des Prélats des Etats & quele[uefois par l'E- vêque-Suffragant de Trêves , quand l'occafion s'en préfente : il s'y prononce un Sermon relatif à la célébrité du jour, après lequel , l'Orateur renouvelle l'afte d'éleftion au nom. de toutes les Villes & de toutes les Paroiiies de cette Province , fuivant la for- mule ci-deffus produits fub n*. 7^.

L'Eglife ne fe defcraplit pas pendant toute la fe-

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( 104 ) maine; cependant c*eft le Samedi &: le lendemain Dimanche de l'Odtave que la grande afRuence de Peuple fe fait principalement remarquer. De toutes parts de cette Province y du Pays de Trêves , de la Lorraine &: de troi-; Evéchés il vient une foule innom- brable de Fidèles implorer Tinterceffion de la Sainte Vierge dans leurs affligions , &: pour rendre leurs prières plus efficaces, ils ont recours aux Saints Sacre- ments de Pénitence & d'Euchariftie : toutes les Egli- fes de la Ville font remplies de ces Pénitens , & parce qu'il y auroit fallu une Eglife immenfe pour les contenir , le Souverain Pontife leur a donné cette liberté , pour gagner les indulgences attachées à cette dévotion , moyennant qu'ils vilitaiTent dans le jour la Sainte Image & qu'ils priaiTent pour les fins or- dinaires de TEelife.

Il fe fait, ce Dimanche cinquième d'après Pâques, la Proceffion Solemnelle dans laquelle on reporte la Sainte Statue à fa Chapelle : cette Proceffion com- mence vers les deux heures de l'après midi dans l'ordre fui van t.

i*'. Les eni^ns de l'Hôpital des Orphelins , précédés de leur croix & accompagnés du Prêtre leur Direc- teur , priant haut le chapelet.

1°. Les Ecoliers du Collège Royal conduits par leurs Régents &: Profeffieurs chantant en Chœur & priant , comme à la première Proceffion.

3". Les jeunes hommes de la Ville priant égale- ment haut.

4^. Les hommes mariés de la Ville Se de la Cam- pagne qui s'y joignent, pratiquent la même dévotion.

"j". Les maîtres des difFérens métiers de la Ville portant chacun un flambeau.

6^*. Tout le Clergé régulier & féculier de la Ville chantant les Litanies de la Sainte Vierge.

7^. Douze jeunes enfans du fexe en robes blan- ches garnies de bleu portant chacune un cierge blanc,

S^. Quatre Eccléfiaftiques en chappes qui font les fonélions de Chantres.

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9°. La Statue mlraculeuie de l'augufte Ccmfoîa- trice portée par quatre Prêtres , fous un Dais porté par quatre jeunes hommes de la Ville que quatre prê- tres accompagnent portant des flambeaux blancs.

lo^. Les treize maîtres des Corps de métiers de 1?. Ville avec les fiambeau'-: de leurs Corps.

11^. Les fergens du Magillrat de la Ville avec leurs hallebardes. -

12. Un Chœur d'Acolytes avec leurs encenfoirs, des fleurs &: verdures qu'ils répandent devant le Saint Sacrement.

13^. Les huiflîers du Confeil tenant chacun fon bâton Royal ea main.

14**. Les Juges du magiflrat de la Ville portant des flambeaux.

15°. Le très Saint Sacrement porté par un des Abbés de la Province fous un Dais porté par les plus refpeftables bourgeois de la Ville.

16*^. Les Préfidens , les Confeillers &: le Greflîer du Confeil aujourd'hui Souverain de Sa Majefté ayant .chacun un flambeau blanc.

17*^. Une compagnie de Grenadiers de la Gar- nifon.

18**. Une multitude de peuple difant haut le cha- pelet.

Tel efl: le récit fidèle d'une Solemnité qui a tou- jours été chaque année jufqu'à préfent la m^'me : même concors de peuple aufll prodigieux qu'édifiant, même ardeur pour s'approcher des Saints Sacrements , même confiance dans la puilTante interceflion de la Sainte Patronne, même modefl:ie & même fimplicité dans l'ordre , & la marche de ces deux ProceflSons : pas d'adions; pas de vetemens extraordinaires, rien en- fin, qui.fe reffentit des jeux & de la frivohté du fiecle.

Or , c'efl: ainfi , que la difcipline Eccléfiafl:ique 5<: Religieufe prefcrit , que les Proceflions fe faflent : l'pn citera à ce fujet d'autant plus volontiers le Çon-

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cilé de Cologne de Pan 1549 titre 12 (*), qu'il TeiVible qu'il ne ibit pas poilible de tranicrire rien de plus iage Si de plus propre pour canoniler le culte que l'on rend à la Sainte Patronne, dans les deux Procei- lions ci - deflus décrites : tout y rendu ii éncrgi- quement dans ce tife , que ce iëroit diminuer le mérite du paiTage ^ quoi qu'ailez prolixe , que d'en retrancher quelque choie : en voici les termes Nihil prope tam Sduclum eji ^ quod /cecularium homlnum vanitas non trahut in abujum. EccUJia de thefauro corporis Chljli exf'ultans circumfcrt Ic/igis Proceljionibus extra, Jacrus ctiis Hojliani ïLlam faliuanm : vïddïut fimul repmf';^- tujis lùniris Chrijîi hijlorïcun : qui dum quétrcrct falii- tem najiram , in mcdio populi vajatus ej^ , & iiniv^rja/n judaam eircumambuluvit , douns ^ & açiotos fanansy Dijcipulis comitantibiis _, quamobrcm & jcuiclorum n- liquias ^ & imagines corum qui vcjligia ejus fccudfunty jimul circumferimus , (ignificantes illos nunc cum ipj'o regnare & iriumpharc m calis. Qjice. memorana débet piis ejfe jucunda & Itzta. Vcrum hue jizcularis (lulto- rum liominum vanitas irrepjît^ & adhibentur ctiam Ludi profanï & fcurrilcs magno jlrepitu , ac quajî ad Bdlum procidendum effet tynipana puljantur : & otiojd Jpec- tacuhi eduntur , rébus IjUs non congnicntia , quitus populus deleclatus y a rébus quA FroceJJione aguntur ^ avocatur. Mandamus idcirco , ut juxi^ Cafartic Ala- jcj^atis rtformationem , quldquid non valet ad devotio- ■nem cxcitandam , a procîjjionihus removeatur : fed Jînt Procejjîones compofice. , graves & mediftx : abjait ri- jus , joci & confabulaîïones : & creiu homincs , aut J'uaviter corde & voce moâukntur : hec bsaia Virginis^ aut alunus cujuslibet funcîi , plures , quàm imago tma uniuscujufque circumfcratur : ne videa?nur magnas & parvas , cultas & incultas Jîaiuas infpicere & non

*) Analife des Conci'es généraux & parriculicrs , par Ip P. Rkkard, part. 2. T. 4 verb. Proceffion,

X io'7 > furfum mente în cœlum erccid rem Jî'^mficatam potins cogitare. At ubï popuhis vanus nolutrit abufnm hune eorrigcn, & infolcraiam prohihere , mandawus & piet-'' cipimus facerdotibîis & clèro ne talibus PrGceJJionibus mterjînt ^ ubi iram Dd ^ non vcro mlfcricoidiam In nos provocamus.

On ne peut reprocher aux deux Proceffions , dont il s'agit aucun de ces abus que ce Concile condamne , elles renferment au contraire , tout le mérite qui doit les carailerifer : le bel Ordre y règne ; elles font pleines de dignité ôc de modeftie , Ton y prie & l'on y chante, ////2^ compojîia ^ graves & tnodejict.

Si l'Ordonnance de Sa Majefié n'avoit pas défendu de porter dans les Procédons des Statues & àzs Ima- ges , il fembleroit qu'elle n'eut que renouvelle le Dé- cret du Concile de Cologne , ou plutôt ainfi qu'il l'a- norice , une réformation émanée fur cette matière, d'un des auguftes Prédéceileurs de Sa Majefté. Man- damus idcirco , ut juxta. Cafarea Majcfîutis reformatlo- jicju quidquid , &c.

Or , comme cette même Ordonnance défend en outre de faire dans chaque ParoilTe plus de deux Pro- ceffions par an , dont l'une au jour de h Fête Dieu, 6i l'autre à quelque jour de fête à défigrxr par l'or- dinaire , & qu'enfin il ne peut fe faire aucune Procef- fion le jour de Dimanche , pour ne point déranger le fervice Paroiilial , les vœux à&^ Etats font d'obtenir de Vos AltelTes Royales la difpenfe nécefiaire, pour continuer la folemnité du Culte de leur Sainte Pa- tronne , ainfi qu'il en a été fait une dcfcription ci-deffus ; favoir : dans deux Proceffions , dont l'une le Samedi avant le quatrième Dijnanche après Pâques, dans la- quelle :pn ne porte en Ville que la Sainte Image, & l'autre le cinquième Dimanche après Vêpres, l'on porte en outre le Saint Sacrement de l'Autel.

L'on vient de remarquer que la coutume de por- ter les Images à^s Saints dans les Pfoceiîions le Saint Sacrement eft également porté , ne doit l'on origine qu'à la coniparaifon uuffi jufte que pieufe ,

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que le Concile de Cologne en tait avec fous îcs tra- vaux que Jefus-Chrift accompagné de fes Dilciples a endurés dans la Judée , pour enltigner aux homme-î fa lainte ê»r falutaire Doélrine : Qui dum quarcvît Jalutcm nojzmm , in mcdw Popidi verfutus efi , uni- verfa/n JiuLzam cinumaïubulavit doccns , & a^rotos finans , Difcipuiis comitantilus : quainobrcm & Save- torurn Rcliquias & Imagines iorum qui vsfiig'a gui Jccud funt , Jimul circumfcrimus , Jigmficantis lUos nunc cum ipjo regnarc & trium phare m Cœiis,

Si donc en conformité de l'intention de l'un des Prédéceffeurs de Sa Ma]eil:c au Trône impérial , ce Concile a permis qu'il tût porte dans les Prcccffion» des Images de la Sainte Vierge îk des autres ; pourvu qu'il n'y en eût qu'une de chacun : Nec Bcam Vir- ginis , aut altcrius cujujUha Sancu , plures quàm Imago una imiufcujuj'qiu cïrcumjciatur : Il paroit cfue cette décilion Eccléhaftique ell d'autant mieux invoquée ici , qu'elle le trouve confirmée par beau- coup d'autres de différens Dloceles.

L'Auteur ci-deffus cité , rapporte ibidem un autre paffage du Concile d'Aix de l'an IV^5, tit. de Pro- ujjionihus , qui il:aîue que les Saintes Images & ks Bannières du Clergé ne foient pas portées par des Laïques , tînon au défaut de Clerc : Sacras Imagines , vexi/lave Clcri , ne Laicns homo in Proafjîonc pcffi- rat , iibi CUricus qiùfquam cji , qui hoc munus prctf- tan po(jit.

Van Efpen tranfcrlt en fon Jus EccUfiapicnin univer- Jum Part. \a. tit. i6', de cura Epifcopali N. 13. Un paiïage du Synode de Mali nés /'^zr/. Q..Tit. 14. Cap. 1 6' -3 , qui permet que l'on porte dans "les Procetlions les SaitUes images , moyennant que leurs parures foient décentes : Ei quœ ad Gmamimiun jupplica- tionum proponuniur ^ cjujmodi fint , qux ociilcs fpec- îandmn non oftendant... Numquam ctiam Rcliqui<z vd Imagines in Procefjlonibus dcfcrantur , niji per CUricos Sacris iniàaios.

Ce célèbre Caiioniile, que l'on n'accusera certaine-

( I09 ) ment pas de relscliement dans fa Do61rine ^ dit ail nomjjre fuivant qu'il n'3/ a rien qui ctfenfe la Dilbi- pline R.elig!eule, de porter les Images &: les Pveli- ques des Saints dans la même Proceffion, Ton porte le Saint Sacrement : Licet fer fe inordmatum non fit , imagines aut Reliquias SanÙorum unâ cum vcncrahili Sacramcnto in ProceUlonihus circumfcm ; fi'j^n'ip.canus , ut ait Synodus Colonunfis anno '549, illos nunc cum ipfa rcgnarc & tmmphare in Cœlis , ^ui vcjligia cjus hic in unis fccuti junt. Cependant , ajoute-t-il , fi l'Evéque remarquoit que ce \:\\t au pré- judice de l'Adoration Perpétuelle due au Saint Sa- wement , il pourroit interdire cette coutume.

Il paffe enl'uite au quatrième Concile de Milan , part. 2. ca.p. 4 , au Synode de Namur de Tan 1639, qui ne permettent pas de porter des P.eliques Se des images avec le Saint Sacrement , & de-là au Concile de Cologne de l'an 165 1 , qui le défend auiTi , à moins qu'une coutume pieufe & fort répandue ne l'exige autrement , de laquelle il eft réfervé à l'Ar- chevêque , à fon Vicaire-Général , ou aux Doyens Ruraux de coiinoifre , pour s'aiTurer li la vraie Se fincere piété en eft le foutien : Sïfi. pia multorum locorum confuctudo aliud pcfiuUt , de qua. tamen con- fuetudinc inte^rum tr'iî nobis , nojîrovc in fpiritiiali- bus yicario-Gemrali feu dccanis ruraUbus cognojccre ^ an cum pietatc vcra & yt-fuafa ccnfijlat.

Enhn l'Auteur termine cette queftion en remarquant que quoi qu'il n'y ait rien que de bien dans la cou- timie de porter les Saintes Images avec le Saint Sacre- ment : coutume à laquelle ledit Ccwicile de Cologne fe rapporte , il n'eil cependant pas moins de la com- pétence de l'Evêque de juger , ù cette coutume eft exempte de tout abus. Hinc patu dicium Jrch'icpif- copum defiderajfc quidem ut juxtâ S. Caroli prafcriptum cum vemrabiLl Sacramcnto Sariclomm ' Imagines noii circumfcrantiLr ., aliquid tamtn ccnfuctudini in rt de fe Mvnime inordinatâ dctulijfe ; ita tamtn vt fihi inte<jru!n ejfe declaravcrit , Judicare , num hic & nunc conjuc'

( )

tudo illd Vèraf77 populi divotiomm non impedlat , ntc cjus ergiX S anUiffimurn Sacramintum rtvtrentiam podus diminuât quùm promovcat.

Comme l'on doit être convaincu qu'il n'cft défendu de porter dans les Proccfiions des Statues 6c des Ima- ges que dans la vue de faire celler les afeus qui peu- vent en réllilter , l'on doit être également perfuadé que le mal n'exifte pas &: il n'efl: pas à crain- dre , Sa Maiefté eil pieufement difpofée à maintenir la coutume d'un culte aufïï précieux qu'édifiant, non feulement pour tous les habitans de cette Province , mais encore pour tous ceux des Provinces voifines qui s'empreflTent à y participer.

Il y a plus de cent ans que les Etats , au nom de toutes les Villes , & Paroiltes de ce Pays , ont voué ces hommages à la Sainte CoHlblatrice des Affligés ; & il y a auffi plus de cent ans que tous ces fidèles clients n'ont pas cefîe de recevoir par l'interccffion de leur augufte Patronne , dans les tems durs &c les ca- lamités publiques , le foulagement qu'ils réclamoient ; les Particuliers de tout diftriél & de toute contrée ont également rcfTenti les effets de fa puilfante mé- diation dans leurs peines ôc miferes privées & fe- eretes.

Ce culte n'a jamais varié dans fes cérémonies, chaque année a toujours préfenté le même ordre & la même dévotion pendant l'Oélave &c dans les Pro- ceffions conftamment épurées & dégagées de toute pratique contraire aux Décrets Eccléfiaftiques ci-deffus cités , & le tout a toujours été tellement approuvé par le fait même des Suffragants du Diocefe de Trêves , que l'on ne croit pas que depuis 1679 r époque de l'établiiTement de cette Solemnité, il en. ait été un qui n'y eut affiflé , tant en y célébrant pontificalement , qu'en portant à la Proceiïïon le Saint Sacrement; ou pourroit même en citer qui fe font acquittés pluficurs fois de ces fondions ; l'on ea a vu de nos jours la preuve dans la perfonne de i'illuftre M. de Kontheim, ^ à peine M. l'Evêquc

( III )

ti^Afcalon , fon coadjuteur , hit-il ^levé a cette 61-' gnité qu'il commença à lu ivre un fi bel exemple ôé il propre à rendre en même tems un témoignage éclatdnt de la pureté du Culte dont l'on honore dans cette occafion la Sainte Confolatrice.

Si d'un autre côté l'on obrerve que la dernière de ces deux Proceflïons fe fait un Dimanche ôi que l'Ordonnance de Sa Majcftc ne le détend , comm« il a déjà été rem.arqué ci-defïus , que par le m.otit de ne pas déranger rOfiîce divin, l'on doit aiiffi trou-^ ver que cet empêchement f* levé par lui-même, dès que l'on fe rarpelîe que cette Proceffion ne le fait qu'après les Vêpres du cinquième Dimanche après. Pâques ; ainfi qu'il a déjà été dit.

De tout ce que l'on vient d'expofcr , il réfulte donc que ce n'cft pas d'une cérém.onie pieufe éta- blie par une Paroiffe particulière dont il s'agit ; mais bien d'un Culte voué fclemnellem-ent à la Sainte Vierge par tous les Ordres Se par tous les Habitans d'une vafte Province : d'un Culte approuvé S: confirmé par l'autorité de l'Eglife & continue jufqu'à préfent ; d'un Culte enfin (imale , pure fans tache , auquel les habitans des P ovi.nces voifines font venus s'af- locier avec ardeur, & dès-lors en s'arrêtant à cette l'eule confidération &: fans égard aux avantages temi- porels que cette Ville de Luxembourg reçoit annuel- lement de ce concours prodigieux de Peuple dont l'expofé nuiroit à la pureté du motif qui anime les Etats ; il ne paro'it pas que l'on piîilTe fe refufer d'en conclure que s'i cxifte un cas qui mérite une difpenfe de l'Ordonnance , c'efl: certainement celui que l'on vient de repréfenter; fur-tout, que l'on n'a aucun lieu de douter que cette grâce ne foit accueil- lie prT l'ordinaire avec une pieufe alégrefle, n'ayant encore pas jufqu'à préfent defigné le jour à la Pa- roiffe de Saint Nicolas & de Sainte Thercfe de cette Ville pour la deuxième Proccflion permife par TArticle I de la même Ordonnance.

A ces cauf^s les £tats avec tous lois haJ»;tans dt

( iiO

cette Province , avec ceux de fes Frontières , Se par* ticuliérement avec tous les pauvres affligés qui fe trouvent parmi les uns &: les autres , fe profternent devant Vos AltefTes Royales , ^ les fupplient avec la plus refpeclueufe inftance & foumlfiion de main- tenir la Solemnité de notre Dame de Confolatiou dans le même état qu'elle a toujours été célébrée jufqu'à préi'ent par deux Proceflions &C une Octave , ainfi qu'il eft expofé par la préfente , en difpenfant pour autant de l'Ordonnance de Sa Majefté du lo Mai 1786 , & permettant au furplus aux Supplians de faire connoitre au Public cette grâce qu'ils efperent avec une entière confiance obtenir de la fainte piété de Vos AltefTes Royales. Fait à Luxembourg le 8 Décembre 1786.

Etaient Jignés , "Willibrord , Abbé de St. Maximin , Jean , Abké. de Miwjlcr , Emmanuel , Abbé d'Echternach , Soleuvre , le Baron du Prel , M. L. Jos Comte de Berlo Suys , le Baron de Zitzwitz , Comte de Bryas , Seyl , de la Mock , Foncin , Didier , Clees , U Chevalier delaBevill/deBlier,.T. C.DeWaldt, Huart , N. H. Chapelle , F. Henri , H. de xMufiel , \rattet , F. A. Merjay.

TRADUCTIO N d'une Lettre de N, S. P. U Pape Pie VI ^ à. t Empereur & Roi JosEPH II y fur l'ufurpation des Biens Eccléjlajliques.

ROFITANT de la liberté, qu'il a plu à Votre Maiefté de nous accorder fi gracieufement , de nous adreiler directement à elle , pour lui faire part de nos fentimens par rapport à l'intention elle feroit de ftatuer dans fes Etats , fur des chofes qui nous paroitroient contraires aux bonnes règles &: aux an- ciens ufages , &: préjudiciables à la Religion, dans

ce

(«M)

ce moment il eft parvenu à nos oreilles , que Votre Majefté penfe à priver les Eccléfiaftiques & les Egliles des biens , qui forment leur patrimoine , pour les réduire à l'état de fîmples penfionnés, nous croyons devoir lui repréfenter , que fi elle effeduoit un pareil projet , il en réfulteroit pour TEglife une cruelle léfion, &: pour les Fidèles une fcandale irré- parable.

II n'eft point de notre miniftere de nous mêler des affaires pol'tiques &: économiques de l'intérieur des Etats de Votre Majeflé. Nous ne le céderions ce- pendant à qui que ce foit des plus affectionnés à fes véritables intérêts , pour lui confeiller ce qui pourroit lui procurer de légitimes & honorables avantages. Mais pour nous renfermer dans notre miniftere , nous nous abfliendrons de toute réflexion Tur le dépérif- fcment &c le moins de rapport des Biens Eccléfiaftiques confiés à l'Adminifiiration des Séculiers non-proprié- taires ; fur l'infraftion des Traités entre vos Prédé- ceffeurs & diverfes Provinces ; fur le dommage qu'en éprouveroit la Conititution de l'Etat; fur la violation des difpofitions des pieux donateurs & fur le droit qu'auroient leurs héritiers de les revendiquer. Perfuadés que toutes ces conféquences n'auront point échappé à la perfpicacité de Votre Mai. Nous nous bornerons fimplement , pour ne rien difcuter d'étranger à notre miniftere , à lui repréfenter ce qui ell du devoir de ce même miniftere , aufili bien que de notre con- fcience.

En conféquence , nous difons à Votre Majefté que dépouiller les Eccléfiaftiques & les Egllfes ces biens temporels , qui leur ont été affeétés , eft en fait de Doftrine Catholique , un attentat manifefte condamné par les Conciles , réprouvé par les faints Pères , & qualifiée par les plus refpeftables &: recommandables Ecrivains , de Doftrine perverfe & de dogme impie.

En effet , pour faire adopter à un Souverain de pareilles maximes , il faut avoir recours aux faux enfeignemeni» des Vaudois , de Mt^icleiiftes , des Huf-

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(114)

iides Se de tous ceux qui , après eux , ont foutenu les mêmes opinions par un efprit trop commun dans ce liec.e , de dépravation, d'idées les plus faiutes &c les plus refpefté^s.

Nous nou. contenterons , pour ne point fatiguer V. M. , de rapporter parmi une infinité de citations , ctlie qji de tout tems a été appliquée à ceux, qui ont tcn é de s'emparer des biens des Eglifes : Rei funt âiimnation'is Ananïct & Saphirts , & oportct ejujmodi traiere fantanc ut jpïrïtus falviis jît.

Nous nous contenterons de tranfcrire ce qu'écrivoit au XII fiecle le Prêtre Jean à un Prince , qui pré-- tendoit pouvoir dil^poTer des Biens Eccléfiaftiques. Ce Patriarche d'Antioche , quoique fchifmatique , ne crut pas devoir le taire l'ur cette erreur de ce Prince. Toi 1 llii écrivoit il , » qui n'eft qu'un homme corruptible » & mortel , & d'une vie de peu de durée , comment » ofes-tu donner à un autre ce qui ne t'appartient » pas ? Si tu prétends donner ce qui eft à toi , en >> t'imaginant que les biens de Dieu font les tiens , » tu te fais égal à Dieu. Quel homme de bon fens « qualifiera donc cet a6le du nom de précaution } Il » la qialifiera plutôt de tranfgreffion - de défobéiifance » extrêm.e &: d'inquiétude perverfe. Comment celui , » qui profane les chofes queîcoi.ques confacrées à Dieu » le Roi céleftc, peut-il être un vrai Chrétien, & » fe croire tel ? «

Nous favons que les Adverfaires de notre Religion, pour foutenir leurs erreurs , s'étaient de divers paf- <'ages des Saintes Ecritures , qu'ils interprètent félon If ur vue ; mais fans entrer dans un examen particulier tie ces interprétations perverties Se intéreffées , nous îie voulons que demander à Votre Majefté fi elle p.dmettroit pour interprétation claire & décifive , celle qu'on lui feroit de quelqT.jes paiTages de l'Ecriture , qui paroitroient exprimer qu'il ne peut exifter dans ce inonde d'autorité fupreme &: de fouveraineté , hi nn'en conféquence on pourroit la dépouiller de la iianae pour le falut de fon ajue } Nous fommes per-

( t'î )

fuadés , que Votre Majefté regarderoit ces paffages comme mal interprétés , 6>c nous lui avouerions , qu'en les confidérant de la forte elle penleroit comme nous. Or , la même chofe peut fe dire dans le cas , des ennemis fecrets de l'Eglife , des Hérétiques , des Catholiques en apparence , de faux maîtres , des flatteurs de Princes , leur accordent , en vertu de quelques paflages mal interprétés de l'Ecriture , le droit de pouvoir priver l'Eglife & fes Miniftres de la pof- feffion de leurs biens.

Cependant , ils favent tous que les Lévites d'Ifraël poiTédoient de vaftes territoires , des cités entières , & que tous ces biens étoient inaliénables , comme confacrés & appartenant au Sacerdoce. Pourquoi donc ne pas concilier les livres du Lévitique , des Nombres , des Rois , des Paralipomenes , avec les cxpreflions qui paroiflent quelquefois contradiéloires à ceux qui ne favent pas mieux ? Pourquoi n'en feroit-on pas de même des paifages du Nouveau- Teftament & des aéles des Apôtres , comme l'ont fait les Pères de l'Eglife , pour ne pas donner té- mérairement dans une héréfie manifeilie , en taxant de contradidion les Livres faints diftés par la SagefTe divine .''

En faifant ces obfervations , nous femmes bien éloignés de penfer que Votre Majefté veuille fuivre l'exemple des feuls Princes Proteftans léparés de notre Communion , &: qu'elle ait une vraie intention de rabaifter l'Eglife au niveau de fimples particuliers , & de cendre la condition de cette Mère commune, pire que celles des fimples familles , dont il n'eft point de Souverain , qui -ne^ fente la conféquence de ref- pefter les propriétés.

Notre unique but eft de lui faire entendre en peu de mots , ce que les penfeurs modernes fe feront bien gardés de foumettre à la droiture de fon jugement. Nous ne nous diflimulerons pas que parmi les Ecclé- fiaftiques , il s'en trouvera toujours malheureufement qui feront des biens , dont ils auront la jouiiîance ,

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(iiS)

un ufage peu convenable &: peu mefuré : mais de cet inconvénient &c de ces abus particuliers , il ne s'en- fuit pas un droit , une autorité pour dépouiller ceux qui en font un ufage conforme aux faintes Ordon- nances , & pour enlever à la généralité , au détri-^ ment de l'Eglife &: des Eccléfiaftiques aétuels , & fliturs , des biens qui ne leur ont été accordés , que pour être tranfmis fans fin à des fuccelTeurs à perpétuité.

Dans les entretiens familiers , que nous avons eu avec Votre Majefté, pendant notre fé^our auprèsd'elle, nous ne traitâmes cette matière , que relativement au fequeftre particulier & momentané. Nous n'avons pas oublié , que nous oppofâmes à ce lui et à Votre Majefté des raifons qui parurent l'avoir déterminée à fe défifter de fon projet. Si Votre Majefté nous eût propofé le doute d'une privation générale illi- mitée , pour faire paiTer l'Adminiftration des Biens de l'Eglife aux Séculiers , nous n'euffions pas manqué de raifons fortes frappantes , qui fûrement l'eullent détourné d'un' tel proiet.

Ce que nous ne pûmes faire alors , faute d'avoir été Inftruits des fentimens de Votre Majeflé , nous le faifons par la préfente. Si elle ne produit pas l'effet, que peut-être nous euffions opéré de vive voix, elle prouvera au moins à l'Univers Catholique , que Votre Majefté n'a pas tenu grand compte de nos Repréfentations , ou qu'elle les a bientôt oubliées , puifque dans l'innovation qu'elle fe propofe, on ne peut voir que le renverfement des maximes catho- liques qu'elle nous demanda de lui rappeller.

Nous prions de tout notre cœur le Seigneur , que l'on voie toiijours briller dans le Gouvernement aélif de Votre Majefté , les proteftations d'un ftncere atta- chement à la pureté de la Religion , & que des faits contraires ne laiflent aucun doute fur leur fin- cériié.

' Nous nous femmes fervis pour la préfente , d'une autre main que de la nôtre , afin de n^ pas fatiguer

C «»7)

la vue de Votre Majefté par notre écriture moins coulante &: moins facile à lire. Nous vous cmbraffons jjdans la plénitude de notre afFedion , & vous donnonç notre bénédidion paternelle &: apoftolique.

Votre très-affe6lionné Père en Dieu &: Ami.

Etoit fignc Pie VI, Pape.

Donné à Rome , à Sainte Marie Majeure , le 3 d'A.oût de l'an 1781 , &: de notre Pontificat le VII.

Oest ici le Bref dont il ejl parlé à la p. 12.6. 6e. vol.' F, E. dans lequel le Pontife je plaint , que les -volontés de l'Empereur relativement aux Articles arrêtés aux Concile de Vienne , aient été Ji mal exécutées. Cette Fiece nous ejl parvenue trop tard pour être placée dans lendroic elle fe rapportoit,

EXEMPLUM Litterarum LETTRE du Souverain

JpoftoUcarumadEmi^ p^^^-j-^ ^ Monfcï^neur

mm (Jimum Architpïf- ^ , ,^.,

copum Mcdiolantnjan. l^-rchcvcquc de Milan.

Plus Papa VI. Pie VI.

JLx ILEÇT E Fïli nojlcr J\. Notre cher Fils falut,

faluum & Apoflolicam Nous vous donnons notre

bcncdïcliomm. Catum pro- Bénédiftion Apollolique.

jcclo nobis erat ; diUcic Nous étions perfuadés d'a-

fiUnoJlir,protuainApof- vance , vu le refpecl que

C >>8)

tolicamfedem oh/ervantia , vous avez toniours porte

ac intima nobifcujn coji- jimcïwru , proque ca par- ti , quam in Ecchjia me- ritb tantaquc cum hiude fuflines , tuis te ad Dcum cnixis votis fui{jc profecu- turiun ïur nojlrum vindo- homnfs. , iifquc gravijjlniis rcbus , pro qiùbus lubora- bamus , optimos fucccjjus prccatiirum. Sed cum pra- clanim hiijufmodi animwn tuis jam Literis nobis tam perfpiciie declaravcris , in q:dbiis de nojîra iiicolu- mitate , redituque Jiudio- fijjiml gratularis , vehemcn- ter jucimdum nobis accep- tumqiLt , profitcri hoc of- jicium tuiim , ac plurimas etiam gr.xtias tibi idcirco perfoivere. Id quidem per-

au fiege Apoftollque , &c l'attachement que vous avez toujours eu pour nous> &: la haute dignité que vous occupez dans l'E- glile avec tant de gloire , que vous présenteriez au Seigneur vos ferventes prières pour la profpérité de notre voyage à Vien- ne , & pour le fuccès des graves objets de nctre né- gociatien. En conféquence de votre Lettre , par la- quelle vous mettez vos excellentes intentions en plein jour, en nous féli- citant de notre fanté & de notre heureux retour , nous avons un grand plai- iîr à reconnoître formel- lement votre officieufe

iibcnter hifce nojlris prctf- conduite , & à vous en tamiis^ unaquc tccîim com faire beaucoup de remer-

miinicamus , dilcch Fili no fier, non exiguos nobis jam conjlare , ejus itincris, Idborij'qiu fructus , praic- reàquc optima nos volun- tatis Cafarls indicïa re- portage.

ciemens. C'eft ce que nous - faifons par les préfentes , & nous vous communi- quons en m.ême - tems , comme à notre cher Fils, que nous fom.mes déjà

convamcus que notre voyage & nos démarches n'ont pas été infruftueufes, & qu'il nous confte en ou- tre, des bonnes difpofition de S. M. I.

Utinam fpcs nojîra , Le Ciel veullie que nos ità rates, impojleràm fuit , efpérances foient ii bien ut nihil aniplius quod an- fondées & ii durables , gori nobis ejfc pojjîtfuper- que nous n'apprenions ja-

( "9 )

Vcnijje audîamus. Kon dif- mais qu'il foit furvenu f.mulamus tam:n ex ïis rc- quelque difporition abr- bus ^ qutz prafirtim ijiinc mante. Avec tout cela, enunciantur , vïdcrc nos , nous ne pouvons pas dif-

ac va.ldc doUre Cafaris , mandata ex minijirorum arhitrio alla , quam ipfe vclit , inurpretatione , ac etiam executione exajpe^ rari , quce ut tu prajcns , videnfque dejles , ita non mediocrem afftrunt anima nojirofoUlc'nudincm , quod-

fimuler , que d'après le bruit qui court dans la Ca- pitale de l'Autriche , nous jugeons , non fans une ex- trême douleur , que les or- dres de l'Empereur de- viennent défavorables par l'interprétaton arbitraire que leur donnent les Mi-

quc pojfumus ad Dzï ck- nillres , & n^ir la Imiilre mmtiamconvzrtïmur ^eum- exécution qu'ils en font. que ohfecramus ^utfufcepta Vous devez en «être péné-

pro ejus gloria conjUia nojlra optîmos ab eo , ut jam progrejfus habuerunt, ità etiam exitus confcquan- tur ; ac Jingularis. In te paterntz Charltatïs pignus Apojlolïcam Bencdiuioncm tibi^ dilccieFlli nofia\, tuœ~ quœ fidei concrcditis ovihis peramauier impcrtimur. Da- tum Romcz apud S. Ma- riam Majorcm Jub annulo Pifcatons dit Xril Ju- in lySx^Pon-tûs.Nri.anno Oclavo.

Benedictus Stay.

tré de douleur, à la vue des maux qui en réfultent, & que vous avez fous les yeux. Quant à nous , c'ell pour nous un grand fujet d'inquiétudes : tout ce qiii nous refte à faire , c'eft de nous adreffer à la Mi- féricorde divine , & de prier le Seigneur de bénir nos enîreprifes que nous avons faites pour fa gloire, 5c qui attendent une iffue heureufe de la part du Ciel , c'ont elles avoient déjà été bénies dans leurs

premiers progrès. Nous vous donnons , cher Fils , en gage de notre amour paternel , notre Bénédiction apoftolique-, ainfi qu'aux ouailles qui vous font con- fiées. Donné à Rome, à Ste. ^!arie Majeure, fous l'anneau du Pécheur, le 17 Juillet 1782. La 8c. an-^

née de notre PontifiCat.

SiiiTic Benoit Stay,

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'il Toit furvenu difpoiition alar- Avec tout cela , pouvons pas clif- que d'après le court clans la Ca- l'Autriche , nous non fans une ex- 3u]eur,que les or- l'Empereur de- t défavorables par jtation arbitraire - donnent les Mi- & par la finiftre )n qu'ils en font. vez en t!tre péné- louleur, à la vue xqui en jéfultent, A'ous avez fous les fuant à nous , c'ell JUS un grand fujet :tudes : tout ce qui efte à faire , c'eft î adreffer à la Mi- le divine , &c ae Seigneur de bénir .treprifes que nous aites pour fa gloire, attciident une ifTue fe de la part du ;ont elles avoient é bénies dans leurs ions, cher Fils, en notre BéiiédiiStiori ' i vous font con- vie Maieure , (bus I. : ':c. an-

I

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( iio )

FAUTES A CORRIGER. Ç

4_J IXItMF. Volume, Partie EccUfiaJîique , pag. 260, lig. ^0 ^

Riczinget , ïij'e^ Ricxinger. Pag. 277 , lig. 7 , celles , lif. les lettres. Pag. 282 , lig. 3 de la note (c^ , les bois, lif. le boit. Pag. 26'4 , li/f. la de la nott {b) , VeJJenitel , lif. efjentieî. Pag. 28S , lig, 4 de la note , pour en faire un compliment, li/". pout

faire un compliment.

Si ton n*i pas inféré la Dépêche de L. A. R. adrejfée à la Province de Gueldrcs , pour rétablir tout fur l'ancien pied; cejl qu'elle eft parfaitement conforme à celle tf« 30 Mai 1787, adref fée aux Etats de Brabant.

Nous avons reçu la Lettre de Tournay , par laquelle on nous avertit que les Curés du Dïoceje nont pas préfenté la Repréfentation far la ledure des Placards en Chaire, quon lit dans le 4e. volume des Repré- fentations , /7d^. 124. Nous avons tout bonnement pu- blic la Pièce .y fous le titre quelle portoit dans le ma- nufcrit qui nous a été envoyé ; nous avons été d'au- tant moins en garde contre f erreur que ladite Pièce ne conteîioit rien qui ne fait digne du \ele 6* de La piété des Pafleurs Chrétiens.

III

TABLE

DES MAT I E R E s.

R

EMONTRANCES de P Unïverjité de Louvain , à S.i y Majejk l'Empereur & Roi y &c. &c. &c, Pag. 7

Remontrances des Etats de Flandres , à Leurs Altfjjes Royales ,

AU fujet des Remoat-ances dt la Métropole di Malinef ^ du'4

\Judla. ly^j. -. - ■'.:-" ' ^5

D'ifcours adrejjé à Mgr. d'AÏ^uevilU de Mîll.in court , Evêque ^ d'Awycies y Sujfra^ant de dfmbrtii ,■ &>c. &c., donnant U Con>- ^firmaiion en U Faille de MonSy le. i4 -Juillet jjSj, •- ,-2.7

Requête de AI. Lembcry , ci-devant Prieur de Houffalife , & Député de FEtût Eccléjîaflique de U Province de Luxembourg , à M§rs. Ls Trois- Etats du Pays^ &c. 34

Requête des Religieufes fupprimees de Jéricho , aux Bonnes- Gens des Neuf J\"ations de la Fille de Bruxelles , du 7.S Mai 1787. 36

Lettre de V Evêque de Brlnn, au Souverain Font'fe Pie VI, du 1 Mars 1782. 39

£ref du Souverain Pontife Pie VI, Pape, à VEvêjîie de Brinn, du iz Avril 1782. 45

Copie d'une Lettre & d'un Mémoire préfentés à Sa Al.ijefté l'Im- pératr'cc Dou/iriere & Reine Apopolique , p^r Us Evêques des Pays-Bas , concernant l'Etat Rel'gieux , l'an 177^. 48

Mémoire préfenté le 8 Janvier 1787, pour M. J. Janjfens , Curé de U Ville de ïVeert , dans la Gueldre Autrichienne, relatf à U Requête de M. le Confeiller & Mambour de Ruremondc ,

1 ttt

iix TABLE.

Copi^ de rOrddânance du Confeil Souverain de Ruremondel

fuivie fur le Mémoire prétêdent , 6»ç. ^%

Ittue de Mgr, l'Eviquc de Ruremonde , à Ai. Janjfens , &£,

94

Copie d'une heure de M. le Secrétaire de Mgr. rEvêque de Rure- monde, à M. Janjfens^ fi'C. 95

Extrait d'une Lettre, datée de Weert , du '^ Juin 1787, relative aux affaires concernant Af. Janjfens , &c. ibid,

Repréfeitation des Etats du Pays & Duché de Luxembourg ^ à Leurs Altejfes Royales , touchant les deux ProceJJîons de SoUmnité de Notre-Dame , Patrone de la Province , du S Décembre 1786. 95^

TraduSion d'une Lettre de N. S. P. le Pape Pie VI , à l'Em- pereur & Roi Joseph II, fur tufarpation des Biens Ecclé- fiafliques , le 3 Août 1782. II3^

Lettre du Souverain Pontife à Mgr. V Archevêque de Milan , du 17 Juillet 1782. (Latine & Françoife.) 117;

115

SUITE

DE LA

QUATRIEiAIE PARTIE

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T. RECUEIL.

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. axzjminaa^-- js»«w*seMn.:.«wMcMBiGBi&':

{ 119)

MÉMOIRE fur les Droits du Peuple Brabançon £' les atteintes y portées au nom de Sa Majefîé C Empereur is Roi\ depuis quelques années ; préfenté à rAj- /emblée générale des Etats de ladite Province , par Monfieur H, C\ N, VanderNoot, Avocat au Confeil Souverain de Brabant , le z^ Avril 1787*

A MejUcigneurs Us Etats de la Province de Brabant» M ES SEIGNEURS,

,UELQUES Syndics des Nations de ceffe Ville de Bruxelles rv.t vinrent confulter fur un Mé- moire , qu'ils avoient fait faire, touchant les plain- tes , que lefdites Na ions eftiment d'avoir par rap- port aux infraâions ùq^ Privilèges & Loix fonda- mentales de cette Province , & me demandèrent d'en faire un deuxième, pour renforcer le premier; je leur répondis, que j'étois content, pourvu que les Nations me donnaffent une commiffion ; & l'un & l'autre d'eux vinrent médire, qu'ils s'occupoient à faire délivrer la fufdite commiffion. Ce non-obftant la commiffion n'a pas paru jufqu'à ce jour 16 Avril 1787 ; & ils m'ont mis dans le cas de laiffier écou- ler le terns néceffiaire pour traiter à fond un objet de la dernière importance.

fuis informé , Meffieigneurs , que le premier Mémoire vous eft remis, pour en être fait leflure, pendant votre Alfemblée générale ; mais craignant que ce Mémoire ne vous parût pas quelquefois affiex

I ***

. . ( >3o )

démontrer les infraélion'; , dont lefdites Nations vous ont voulu taire leurs juftes plaintes, j'eftime que, iuivant le 41e Aiticle de la Joycufé Entrée de notre Duc de Brabant du 17 Juillet lyfti, je puis libre- ment vous propoler les griets , fans encourir aucune indignation ou diigrace de Sa Majefté ou de quel- que autre.

J'eftime de plus , que le devoir de tout bon Sujet l'oblige de le faire. C'eft dans ces vues que je prends la rerpeéiueufe liberté , Mefieigneurs , de vous ex- poferruccinftement mes plaintes Tur le renverfement de la Conftitution fondamentale de cette Province.

Si ces Syndics n'avoient pas abule de mon tems , j'aurois pu entrer dans un détail plus circondancié ; mais néanmoins j'elpere , que vos lumières fupplée- ront à mon zèle, & j'ofe efpércr aufïi , que vous ferez convaincus de ma fidélité à mon Prince &c Souverain , de mon dévouement à Ion fervice , £>c de mon amour pour la Patrie.

Il me refte de vous aflTurer , Mefleigneurs , que la fatyre & la calomnie n'entrent pas dans mes vues; mais permettez-moi d'obferver avec l'Orateur Et- chyne , ce fameux rival de Démofthenes , qu'il eft ibuvent des procédés & des aâions, dont on ne peut parler, qu'on ne peut n:éme défigner , fans fefer- vir malgré foi d'expreffions un peu dures ; ce ne font point alors les mots qui exagèrent la chofe , c'eft la chofe qui force les mots.

Feu le Comte de Neny , dans l'Introdudion de Ces Mémoires Hljloriques & Politiques des Pays- Bas , obferve très- judicieulement, que l'hiftoire d'un Pays eft fi efiTentieliement liée avec fa Conftitution poli- tique , qu'il n'eft pas pofiîble de féparer ces deux objets. Cette vérité eft inconteftable, dit-il , fur- tout par rapport aux Pays-Bas ; de forte qu'il faut xiéceiTairement , avant de traiter de la Conftitution,

( 131 ) rapporter un précis de rf>n hlftolre; mon fujet ne me permet pas de recourir à ces Princes , dont les généalogies n'en font pas moins rapportées dans le Trélor des Privilèges de la Ville de Bruxelles, con- nu fous le nom de Luy (hr van Brabant ; parce qu'ils Tentent trop la fable : je me bornerai à l'époque à - peu - près avant que les ilomains en firent la conquête.

Les contrées connues aujourd'hui fous le nom des Pays - Bas , étoienî nommées Bd^iuni par les Romains.

Et avant l'arrivée des R,omains dans les Gaules , cette vafte région étoit compofée de plufieurs petits Etats; tels que ceux des Aduatlquts ^ des Grudiens , des Ambivarkis , qui habitoient à -peu -pies le Brabant moderne ; des Remois , des Ncrviens , & d'autres.

Dans ces contrées , les Nobles & les principaux Citoyens tenoient les rênes de la Police. La plupart des Républiques Gauloifes avoient un Gouvernement Ariftocratique , comme Str a B O N l'a remarqué : on y crèoit annuellement un Magtftrat , avec plein- pouvoir de régler toutes les affaires publiques ; en tems de guerre le peuple choiiiffoit un Capitaine- Général pour la conduite des armées.

Cependant quelques-unes de ces Républiques étoient gouvernées par àts Princes ou de petits Rois élec- tifs. Voyez DE VadderE de V Origine des Ducs de Brabant Chap. i. N. !.

Les Belges formoient dès-lors un peuple nom- breux , & Jules-Céfar les reconnoiffoit pour les plus vaillans des Gaulois : korum omnium fortijjlmi funt Belgx , dit - il , au premier livre de fes Commen- taires de la Guerre des Gaules ; auffi les diftinguoit- il des autres; il ne les chargeoit pas d'impoftions nouvelles : au contraire , il tâchoit de fe les atta-»

I 2

( 13^ )

cher, fuîvant Jufte-Lipfe : ad Cemm. Cafar. Uh. g- dc Bel. Gall.

Tacite , qui en parle dans Tes Annales , dit , qae les Romains traitoient les Belges d'affociés & de frere"^ ; honneur qu'ils n'accordoient à perfonne , qu'après une longue fuite de fervices : ils les efti- nioiont au point , qu'ils les admettoient pour gardes de corps à l'exclufion des autres Nations.

Jules-Céfar a eu l'expe'rience , que les Belges lui oppoferent la réfiftance la plus opiniâtre & la plus glorieuie; & il ne dut les avantages, qu'il remporta fur eux , qu'à rexxellence de la difcipline militaire de les légions Romaines.

Suivant le rapport de DE Vaddere loco cit. Ambiorix en haranguant Céfar, lui dit, que le peu- ple avoit autant de pouvoir fur fa perfonne, qu'il en avoit lui-même fur le peuple : ce qui veut dire, qu'il n'étoit pas parvenu à la dignité Royale par fucceflîon , mais par fon mérite , & par la faveur du peuple qu'il gouvernoit; de même que les Prin- ces, 5s: les petits Rois des autres diftrifts de la Gaule Belgique.

Cette partie des Gaules ne fut pas plutôt réduite fous robéiffance des Romains, qu'elle commença, comme la Celtique & l'Aquitaine , à regretter fon ancienne liberté : déjà plufieurs ville« confpiroient au foulevement & follicitoient le fecours de leurs alliés , qui leur prêtèrent fi promptement la main , que l'armée Romaine , quoique toute couverte de lauriers , n'eut pas le loifir de refpiier un moment : elle fut forcée de fortir de fes quartiers d'hiver pour acheté; plus chèrement fon repos par une nouvelle effufion de' fang , & pour étouffer ainfi l'incendie, qui s'allumoit , tandis que Rome reluifoit de feux de joie.

Les Romains furent obligés de bâtir des forts , &

( 133 ) d'entretenir de greffes garnifons , afin d'empêcher les foulevemens , que la dureté des commandemens & l'amour de la liberté rendoient fort fréquens.

La mérnnce , la jaloufie , & l'ambition ayant gagné chez les Romains , les guerres inteftines en font provenues ; de - le renverfement de cette Monarchie fioridante : des débris de l'Empire Ro- main il fe forma prefque par -tout de petites Sou- verainetés ; une partie des Pays-Bas réunie avec la Lorraine forma , pendant iong-tems , fous le nom d'Auftrafie, un Etat conlîdérabie , qui fut enfin in- corporé au Royaume de Franca , auquel Charlema- gne ajouta la plus grande partie de l'Europe.

La Maiion de Charlemagne étant par la difcorde tombée en décadence, le Officiers de \\ Couronne & les grands Seigneurs profitèrent de la foibîeffe des Princes régnans , pour rendre leurs Gouvernemens hé- réditaires dans leurs fan^iiles , ou pour fe les appro- prier. Les Provinces des Pavs-Bas efTuyerent par- différentes grandes révolutions; elles étoient fouvent féparées les unes des autres.

Ces révolutions & ces guerres , outre l'effufion de fang , occafîonnerent des frais immenfes, dont le peu- ple a foutenu & lùpporté le fardeau.

Il efl: certain, que la plupart de ces Princes étoient redevables de leur fouveraineté au peuple, qui veil- lant toujours à la confervation de la liberté publique , leur laiffa qu'un commandement prefque précaire: ils dévoient fe contenter de quelques terres qu'on leur avoit aflignées en domaine, & de quelques fub- fides affez légers : il falloir faire la convocation des Etats pour prendre leur avis , dans les affaires d'im- portance, & l'on ne pouvoir, fans le confentement defdits Etats, ni impofer aucuns fubfides, ni changer la for mi du Gouvcrfumint , quel qu'il pût être , ni

I 3

(134) feulement augmenter ni diminuer le prix des mon- noies. (^Supplément de Buikens ^ tom. x.)

Un autre ( BaJnagCy annales des Provinces-Unies , tom. i. ) dit , que, lorsque pluiieurs Provinces étoient réunies ious l'autorité d'un même Chef, comme cela arriva fous les Ducs de Bourgogne, & dans la Mai- son d'Autriche , elles ne laiflerent pas de conferver l'ancienne forn-.e de leur Gouverneipent.

J'ai déjà ci-devant obfervé , quelle étoit cette an- cienne forme de leur Gouvernement ; néanmoins je rapporterai ce que Bafnagc en dit.

La NoblefTe, continue- 1 -il lac. cit., & le peuple coinpoloient les Etats de chaque Province ; ils ré- gloient les fomnies qu*o!i dtvoit fournir au Souve- rain , & prenoient leur réfoîution fur les affaires importantes & générales. La Nobleffe avoit la plus ^ principale di'edlion de ces affemblées politiques, mais ' le peuple , qui vei'loit pour la conferVation de fes Privilèges", y donnoit aufîi fa voix; &: ce partage d'autorité rendoit le Gouvernement moins defpotique ôi plus doux.

Mefieigneurs , permettez - moi de vous obferver , que Bajnage n'a pas parlé de l'Etat Eccléfiaflique , parce que fes Annales concernent les fept. Provinces- Unies, & fur - tout parce qu'elles font dédiées aux Conreillers-Députés des Etas de Hollande & de AVeft- Frife.

Il n'eft pas inoins vrai que l'Etat Eccléfiaflique , depuis plufieurs fiecles , fait Membre & l'Etat pri- maire des trois Etats de cette Province ; les Joyeufes Entrées des Ducs de Brabant en font foi.

Le tems eft trop court pour entrer dans le détail circonftancié des motifs qui ont donné lieu aux Joyeu- fes Entrées reTpeftives , ainfi que des circonftances qui y ont occafionné des changemens fucceflifs. Jfi

me bornerai à obferver , que le Teflament de Henri III, Duc de Lothler & de Brabant , en à^ie de , i i^o «

ell la fource & la bafe des Joyeufes Entrées ;

Et que les ra-fons qui ont engagé les Princes à les accorder , ont été la valeur , rattachement & la libéralité , qne les Brabançons de tous tems , ont eus enver> leur Prince y plus que tous les autres Belges ; au point même , que leurs Princes Te font tait gloire, & même un devoir de paffer avec eux des acles pu- blics , par lefquels ils les reconnoidem publiquement. Les annales de cette Province 6c les hiftoriens les rapportent.

Quoique les circonftances des tems ayént donné lieu fuccefiivement à quelques changemens de quel- ques articles des Joynifes Entrées , il n'eft pas moins vrai , que ces changemens ont été faits non par rap- port au démérite des Brabançons , mais par rapport à d'autres objets.

Les Joyeujes Entrées contenoient au tems jadis pluiieurs points & articles très-confidérables, comme fe voit d'iceîles jurques-à celles de Charles V de 1514 : mais les dix-lept Provinces étant fucceffive- ment parvenues à un , & le même Prince , il fe trouva qu'on ne pouvoir les laiRer fubfifter dans leur ancienne étendue, fans troubler l'harmonie du Gouvernement général , ce qui donna lieu à des con- férences entre les Minières de l'Empereur , &: les Etats de Brabant , lefquels dans ces conférences font convenus des changement néceflaires , dont afte formel a été drefTé , & fait, &c la féconda inauguration de Charles V avec Philippe 11 Ion fils , comme Prince fuccefîif, du 5 Juillet 1549, a été changée fuivant cet aéle. Voyez le premier volume des Flac. de Brab. fol 1^2.

Depuis ce changement, les Joyeufes Entrées 011 Inaugurations de Brabant le font faites fur le même

I4

pied, fauf quelques changemens légers de quelques termes , qui fe font faits du gré & confentemeni des Etats de Brabant.

. Il eft conftant , & toutes les Jeyeufes Entrées en font foi , que , de tout tcms que les Joyeufcs Entrées exigent, jufques même celles de notre Duc régnant Sa Majefté l'Empereur & Roi Jofeph II , elles forment, ou font un contrat fynallagmatique , entre le Duc de Brabant, & le Peuple Brabançon.

Je dis, entre le Duc & le peuple; parce que vous, Mefleigneurs , en contraétanr avec le Duc, vous contrariez au nom , & comme repréfentant tout le Peuple : l'Etat Eccléliaftique les Ecc^étiafti- ques tant Séculiers que Réguliers , l'Etat Noble tout les Nobles, & le tiers -Etat les autres ctaffes des habitans : ainfi enfemble vous reoréfentez tout le Peuple du Brabant.

Conféqueminent il eft vrai de dire, que le Duc n'a pas feulement contrarié avec les Etats, ou quel- que Corps du Brabant, mais avec le Peuple du Brabant.

J'obferve aufii , qu'il confie , par lefdites Joyeufes Entrées , qu'elles rie contiennent rien qui foit con- traire aux bonnes mœurs, ni rien d'oppofé à la Souveraineté; mais au contraire, qu'elles contien- nent feulement ce qu'un bon Prince doit à fon Peuple : elles ont Téquité pour principe , & la iuf- tice pour bafe, qui feules ibnt les fondemens les pius lolides de la durée des Royaumes, font la paix &c la tranquillité des familles, la félicité du Peuple, le foutien du Trône, ôc la gloire du Prince : Jujîitid, dit -le plus fages des Ko\s , firmabitur folium j per me Reges régnant , Principes imp^rant , 6* conditores legum jufia decernunt,

Deforte que le Duc de Brabant, abflraftion faite du ferment qu'il a fait fur l'acconipliiTement , ou

( 137 )

i obrervation de fes engagemens , repris au contrat <îe les Joyeufcs Entrées , e(t tenu cla les remplir (cru- puleufement , & avec toute l'exaftîtude pofïible : Q^uid enim tam congruum fidci humancz , quàm ta , qucc inter eos placuerura , Jervare ? L. i. ff. de pacî,

C'eft auffi la dcdrine commune des Jurifconlul- Xes , que le Prince , en vertu d'un contrat , eft obligé de remplir les engagemens comme tout par- ticulier : Gait. lïb. 2. praci. obfcrvat, 5 5 » 6* ai'ù ah ipfo citât.

Brunneman , commtni. ad pandecî, ad l. "^ !• ff» de Ugib. enleigne même NN. ^ 6- 6 , que penbnne dans ce monde n'eft plus obligé à remplir Tes en- gagemens que les Princes : & il conclut N. 7, di- lant : Ex quo colllgitur , privilégia a Principe jlve, fuhdiiis Jive non fubdltis pcr modum contracîâs , vel oh bene mérita data, revocari a Principe non poffe , cum Princeps ex contracîu obligetur.

De plus , la loi 4 au cod. de Icgib. eft décifive à cet égard : Digna vox ejî ( porte - t - elle ) Majep.utc TcgnsLntis , legibus alligatum fe Principem prcfiteri : adio de aucîorit-'Jte jiiris nofira pendet aucioritas : & rêvera majus Imperio ejî , jubriiittere legibus Principa- tum , & oraculo priefentis eaicii , quod ncbis licere non patimur , aliis indicamus.

Nihil tamen ta.m proprium imperii e(l , quam U' gibus vivere , dit la Loi \. cod. de tdia;;ientis , à l'é- gard de l'îirîipereur même.

D'ailleurs perfonne ne peut ignorer , combien il eft eflentiel , qu'un Fnnce remplilTe les engagement : Régis ad exirnplum totus componitur orbis. Le Peu- ple ayant l'expérience , que le Prince n'efl pas fidèle à Tes engagemens , fe modelant fur lui , manque aufli à Tes conventions, non-feulement à l'égard du Prince , mais à ré,q;3.rd de tous ceux avec oui il contrafte ^ tant les collègues ou regnicoJes , que les Etrangers.

Ce vice , ou manquement de bonne foi , produit Il me'fi.mce, non - leiiieinerit entre les habitans du incine Pays , mais auffi à l'ég^ird de tous les Etran- gers ; d'où réfulte un déibrdre général, & la deftruc- tjOîi du comn)eice.

En outre, le défaut d'accompliffement des enga- gemens du Prince vis-à-vis de fon peuple , fait que généraletnent tout autre , qui efl dans le cas de de- voir contrafter avec lui, tant Pilnces Souverains, que tout autre Etranger, s'en méfie, & évite, au- tant q-je poffible , les occafions de contra<5l£r avec lai ; ce qui produit des eff;;ts très-nuifibles , & même funeftes au Peuple.

Il eft donc évident , que le Duc de Brabant ré- gnant a contrarié avec Ton peuple , 5c qu'il eft obligé cle remplir fes engagemens : je n'entreprendrai pas èe détailler quels font, les engagemens auxquels il s'eft obligé ; le tems me manque pour faire ce détail. D'ail- ieurs , MefTeigneurs, vous, qui avez contracté au nom , & comme repréfentant le Peuple, les connoiifez au moins autîi bien que moi ; & fes eng<igemens font connus non-feulement aux Brabançons, mais à toute I Europe : les Joyeiijes Entrées lont trop publiques pour qu'elles puillent être ignorées dans aucun recoin de l'Europe.

Je n'entreprendrai pas non plus de donner un détail exafl & précis de tous les points qu'il a man- qué d'obierver : ce détail demande trop de tems : j'euime, qu'il fuffira de rapporter les principaux ob- jets pour éiahîir le bouleverfement & l'anéantiffement de la Conflltution fondamentale de cette Province , que nos ancêtres ont acquife légitimement au prix de leurs biens, & de leur fang; & dont, à leur exem- ple , nous avons mérité la confervation , & la durée , pour la faire fuivre à nos fuccefTeurs.

Quoique je ne me propofe pas d'entrer dans un

(139) flitail particulier des infraélions faites vis-à-vis ou à Icgard des Eccléfiaftiques de cette Province (ce que les Philoi'ophiftes ne manqueroient pas de traiter de fanatifmc ) , j'eftime» que je dois r.t'celTairement trai- tcfr de l'Edit concernant la lupprelîion de plufieurs Couvens prétendus inutiles dans les Pays-Bas, donné en cette ville le 17 Mars 1785 ; paice qu'il eft une <!es- premières pierres d'achoppement de toutes les Intraftions faites à Tes engagemens , depuis fon avè- nement au Trône.

Permettez - moi , Meflsigneurs , qu'avant d'en- tier dans cette difcuffion , je fade une protefta- tion , que mon cœur me dicle : conféquemment je vous dis , que j'ai un attachement & un dévoue- ment pour mon Souverain autant que le plus fidèle des Sujets puifTe avoir , que je facrifierois & mon bien &C mon fang pour lui , & que je fuis convain- cu , que ce qvi'il fait , n'eft pas en vue de nous ôter nos Droits Se Privilèges ; mais que la religion eft lurpriC^ , & qu'elle l'a pu êtte , vu les circouflances cop.courantes , que je détaillerai dans la fuite.

Revenant au iurdit Edit de l'Empereur du 17 Mnrs 17^5 , j'obferve , qu'il a pour titre, Edit de C Empereur concernant la juppnjjion de plufieurs Cou- vens inutiles dans les Pizys- Bas. Souvenez - vous , Meffeigneurs , que je parle uniquem.ent pour le Bra- bant , oii j'ai le bonheur d'érre , 6^ que je ne traite pas des autres Provinces des Pays-Bas.

Qu'il me foit permis de demander , &C par quels moyens il a coiîfté à Sa Majcfté, qu'il y avo'.t des Couvens inuriies à \z Religion & à l'Etat dans la Province de Brabant }

Perfonne ne me pourra réfoudre cette demande : j'en fuis certain, comme de l'exiitence de Dieu. Au contraire , il y a ces moyens qui établilTent leur utilité pour la Religion ôc l'Etat.

( 140 )

Il eft notoire d'après notre Droit Provincial , qu'aucun Couvent, Communauté &c. , ne peut fe fonder , ou établir dans le Brabant , fans Lettres d'Oc- trpi du Prince.

Et l'on ne peut pas fupporer , fans faire ofFenfe CA\ injure aux PrédécefTeurs du Prince , qu'il n'ait pas confié de l'utilité & à la 'Religion & à l'Etat de ceux des Couvens fupprimés , lorfqu'ils ont été fondés & érigés.

Conréqueir.mcnt on doit admettre & tenir, que cette utilité cominue, du moins ju'qu'au tems que le contraire n'eft pas conftaté.

Le contraire n'a pas été conftaté à l'époque de la luppredion ; elle ti'a pas de ternies habiles à pou- voir fuppofer une démonftration ou une preuve d'in- utilité.

Cette prétendue inutilité eft un fait, un fait qui touchoit direftement les Couvens fupprimés ôc in- direftement les" Etats de cette Province.

Il concernoit direftement les Couvens fupprimés , puifque leur exiftence en dépendoit ; il concernoit indireftement les Etats, parce que chaque Couvent fupprimé , & même chaque individu de chaque Couvent formoit un être ou un individu des Etats, comm.e tout auire , depuis le premier jufqu'au der- nier , depuis le plus riche jufqu'au plus pauvre ; con- fêquemment chaque individu des Couvens fuppri- més formoit , & étoit un fujet de la Province de Brabant.

Petfonnene me peut ccntefler cette vérité. Confé- quem.ment ne peut on me contefter pareillement qu'ils étoient compris dans la difpofition du premier Ar- ticle de la Joyeufe Entrée de Sa Majeflé.

Je fuis informé que quelques mal-intentionnés, & anti-Moines, pour éluder cet Article, fe bornè- rent uniquement aux Couvens qui exiftoient à la

( I40 conceffion primitive dudit Article : mais Targument éloche à tous égards.

Il eft cerrain , que , depuis la concefTion primi- tive de cet Article , plusieurs Couvens font érigés dans cette Province; mais 11 n'eft pas moins certain, que tous ceux , fondés & érigés depuis , ont été compris rucceffivejnent dans l'Article de chaque ref- peélive Joyeuji Entrée.

Le Prince , en ocftroyant leur fondation & érec- tion , ne leur a pas fans doute oftroyé ou donné une exiftence précaire ou momentanée ; mais au contraire une exiftence folide , durable , £>c pareille à celle des Couvens déjà exiftans.

D'ailleurs en leur accordant les différentes per- millions ou oftrois pour acquérir des biens in.meu- bles , on leur a pareillement accordé une exigence pareille.

Feue Marie-Thérefe , l'Impératrice Reine , notre Duchcfle de Brabant, dont la mémoire fera en bé- nédiclion jufqu'à la confommation des (iecles , par fon Edit concernant l'acquilîtion des biens immeu- bles par les Gens de main-morte, n'a fait aucune diftiniftion entre aucuns Couvens.

Mais elle y a compris généralement tous ceux qui exiftoient : elle s'explique dans ces termes : » Nous connoiiTons toute la faveur que méritent des Eta- bliffemens, qui n'ont pour objet que le fervice de Dieu , l'inftru^^ion des Fidèles , &. le foulagernent des Pauvres, nous employons toujours volontiers nos foins , pour la confervation des pofTeffions lé- gitimes de ceux qui ont été formés par les motifs de l'utilité publique , & conformément aux Loix &c.« Vol. 8 des F lac. de Brab. fol. il.

O tempora ! ô mores ! Cette vertueufe PrinceiTe reconnoît l'utilité ou la faveur que méritent des Etabliffemens qui n'ont pour objet que le lervice de

( 14^- ) Dieu, rinftriK^Ion des Fidèles , & le foulagement des Pauvres :

Et des mal - intentionnés ofent prétexter que les Couvens fondés &: érigés depuis la conceffion pri- mitive du 1er. Art. des Joyeufes Entrées , n'y font pas compris , quoique leur EtabliflTement tende à l'objet que feue Sa Majefié l'Impératrice & Reine recon- noifToit mériter fa faveur?

Si la foluion propofée au fufdit prétexte , oppofé au fufdit I er. Art. , ne fuiTifoit pas , on poiirroit encore y ajouter que l'Article ii ed dans les mêmes termes des Joyeujes Entrées précédentes , 6>c que fi le Duc de Brabant, fous cette énonciation , n'a pas voulu comprendre généralement tous les Couvens, & les Individus d'iceux , eut s'expliquer plus clai- rement , & qu'au défaut de cette explication plus claire , l'Article doit être entendu contre lui : ^rg. 39, J^ de Paciis.

La fuppreffion de ces Couvens ayant eu lieu , il n'eft plus de termes habiles à conftater cette pré- tendue inutilité : cette funpreflion a effeftué l'anéan- tiffement àes, Corps que ces Couvens ont formés ; 6c cet anéantiflement doit être affimiîé à la mort naturelle d'une perfonne qui ne laifTe aucun héritier, ou repréfentant.

Et quand même cette preuve pourroit encore fe faire, il ne léroir pas moins vrai que la fupprefîion a été faite directement contre le fufdit Art. 1 de ladite Joycufe Entrée.

^u'on ne m'oppofe pas que la fuppreffion a été faite en vertu d'un Placard revêtu du vifa^àu Confeil de Brabant. J'ai à y répondre que la fuppreffion , à l'effet de la deftruêlion ou de l'anéantiffement d'un Corps , relativement à chaque Couvent fupprimé , doit être envifagée tant à l'égard defdits Couvens qu'à l'égard des Etats, comme la mort d'un Citoyen.

C 143 )

Or il eft notoire que ni le Confeil de Brabant ni un Juge quelconque ne peut condamner à mort ni opérer l'anéantiiTement de quelque Corps ou Indi- vidu , parte inaudita,

Conléquemment , avant de pafTer à h publication de cet Edit , il devoit indirpenlablemenr ouir & lefdlts Couvens &C même les Etats , ce qu'il n'a pis fait , comme vous , Mefleigneurs , & le Peuple en êtes convaincus ; & comme d'ailleurs il confie par la teneur de rEdit-même.

En outre les termes généraux de plufiturs Cou\tn.% inutiles repris audit Edit, donnoient matière à ne pas l'admettre ; ces termes généraux font d'une plus dangereule conféquence , que fi l'on propofoit uij Edit par lequel on voudroit bannir du Brabant tous les Sujets qu'on prétendroit envilager comme inu- tiles : parce que dans le cas fuppolé ces prérendus Sujets inuriles retiendroient la vie 6i la liberté de Ce retirer bon leur feinblcroit ; & que de plus on ne les banniroir pas fans les entendre , &: fans lenr laifTer la faculté de prouver , qu'ils font utiles à quelque égard ; au moyen de quoi l'Edit feroit fans effet vis-à-vis d'eux.

Mais rien de tout cela n'a eu lieu dans le fufdit Edit de fuppreffion. Et qui plu^ eft , j'eftime que le point le plus eiTentiellement requis eft ut Jît jujia ; & je défie qui que ce foit de prouver, que la Juf- tice de cet Ed.t fubfifte : d'où il reluire, fuivant le fentiment commun des Doé^eurs , qu'il ne peut avoir force de Loi.

Cependant il a paffé au Confeil de Brabant : mais par quels moyens & de quelle façon , je l'ignore ; ce que je fais, c'eft qu'il a eu toute la peine d'a- voir la pluralité des voix : mais malgré cette plu- ralité, vous êtes trop éclairés, & trop inftruits des circonflanccs , Meffeigneurs , pour ne pas feniir ,

i ( 144 )

tnême être convaincus , que cet Edit ne peut obli- ger, ni avoir force de loi.

L'Edit cop.cernant la fuppreffion des Confrairies, du 8 Avril 1786 , eft à peu-près de la même trempe. Il déclare , Art. i , toutes les Confrairies érigées dans les Eglifes & Chapelles quelconques , éteintes 6c fupprimées,

Quc'ind on obferve que ces Confrairies ont été érigées & fondées fuivant les maximes & la jurif- prudence de notre Province , par Odroi , même avec préalable avis du Fiic , on eft convaincu qu'el- les avoient une exifience légale , qui ne leur pou- voit être ôtée fans leur contentement, ou du moins fans préalablement les avoir ouïs.

Une telle difpofition approche du defpotlfme. C'efî à-peu-près comme fi l'on portoit une loi , que tout homme non-marié , 6c en âge de porter les armes, eft foldat , & doit fervir le Prince; ou que toute homme doit embrafier telle profeiîion qu'on lui preicrira.

Toute la différence qu'il y a dans le cas du fufdit Edit & le cas fuppofé, c'eft, que dans le premier on a fait la fimagrée de lui prêter le Fifo. du Confeil ce Brabant. Sur quoi je me réfère à ce que j'ai obfervé ci-deifus concernant le Fifo, de TE- dit portant la lupprefiîon des Couvens.

Je ferai une réflexion ultérieure relativement à l'Edit de la fuppreffion des Confrairies , qui quoi- qu'elle ne fe trouve pas dans fon contenu , n'en eft pas moins fenfible par les circonftances qu'on voit arriver.

Il eft connu que généralement à ces Confrairies font attachées àcs Indulgences , plufieurs même ac- cordées par le Pape de Rome ; de forte qu'en fup- primant les Confrairies, on anéantit aufîî ces In- dulgences : au moyen de quoi s'efiedue le grand but , l'abUraélion du Souverain Pontife.

Quoiqu'il

( M5 ) ^ ^

Quoiqu'il ne fe trouvât aucun Séminaire dans no- tre Province de Brabant , l'Edit concernant rétablii- fement du Séminaire-Général dans iXJnlverfité de Louvain, porfe infraftion aux Privilèges Brabançons. En premier lieu, l'Art. I porte, quant au Clergé Séculier , qu'ils feront réunis , à dater du mois de Novembre ij'66 , dans ledit Séminaire-Général à Louvain , pour y être élevés uniformément , dans une parfaite uniformité d'inftru6ïion & de morale, & faire le cours de Théologie dans les Ecoles publi- ques • de l'Univerfité : qu'on ne pourra dorénavant admettre aux Ordres majeurs aucun de nos fujets , à moins qu'il n'ait achevé fon cours de cinq an- nées dans le Séminaire-Général : en conféquence les Séminaires Epifcopaux feront fuppriméj & convertis en Presbytères , dans lefquels les Elevés Séculiers du Séminaire-Général, après avoir achevé leurdit cours , fe retireront , pour y pratiquer , fous le veux 4e leur Evêque , les différens exercices & fondions Eccléfiaftiques convenables , pour les rendre plus propres à la cure d'ames.

Je n'ai pas fait mention du texte concernant le Séminaire filial à Luxembourg , parce que les Bra- bançons ne font pas dans le cas d'y aller.

Je commence à demander , de quel droit on fup- prime les Séminaires Epifcopaux , ou celui d'Anvers qui eft l'unique en Brabant? Ce Séminaire a été érigé légalement. Il a donc droit d'exifter ; & les Diocéfams d'Anvers ont le droit légalement acquis d'y étudier la Théologie,

De quel droit peut-on obliger ceux qui font ap- pelles à l'Etat de Prêtrife , ( Séculiers s'entend ) de faire un cours de cinq ans de Théologie dans l'U- niverfité de Louvain, & d'y demeurer cinq ans dans le Séminaire- Général , & puis de fe retirer dans les anciens Séminaires Epifcopaux ? Le Concile de

( 146) Trente reçu & publié en Brabant en due formel ne prelcrit rien de tout c^rla.

C'eft aux Evéques à veiiler à la conduire de ceux qui afpirent & fe prélentent aux Ordres. C'tft à eux & à leurs Examinateurs de juger s'ils en font capables , mais nullement au Souverain du à fes employés.

Ce font les Evêques &C leurs Exaniinattrurs qui font rerponfables , & leur conlcier'ce qui eft char- gées des admifiîons aux Ordres. C\-ft à eux de ju- ger, quels cours de Théologie le-. Candidats doivent faire : c'eft au St. Sieçe ou aux Evêques ( (elon les difterens cas) de dilpen'er îur 1 âge des Candid;its pour Tadmiflion aux Ordres refpedifs ; peribnne ne peut le contefter. Donc , il leur appattient auffi de droit, d'admettre à la Piétrife, félon la capacité du Candidat, eût-il (eu emenî fait un cours de Théo- logie de deux , trois , ou quatre ans.

De quel droit veut- on, peut-on obliger une Per- fonne qui alpire uniquement à la Hrécrpe, de fe re- tirer dans les anciens Séminaires Epi copaux pour y pratiquer les différens exercices & fondions Ecclé- fiaftiques , afin de la rendre plus prop e à la cure d'ames ? II n'en eft pas ; & l'exécution en feroit même contraire à la liberté naturelle , qui {.Aiffe à un chacun la faculté d'embralTer tel état auquel il fe fent appelle.

Cette Ordonnance équipolle à celle par l'on voudroit obliger quelqu'un d'époufer la Perfonne déterminée ^ que la Loi ou l'Ordonnance nomme- roit ou prefcriroit.

Tout le monde fent non-feuîement le ridicule, mais l'injuftice d'une telle Loi ; on doit donc aufti fentir rinjuftice du texte que j'analyfc.

Quant au Clergé Régulier , il eft à remarquer que, fuiivant la dirpo^tion du texte , ceux qui (e deftineront ci -après à un Ordre Religieux, feront

C 147 )

îéunîs dans ce Séminaire-Général ; & qu*on n'en pourra dorénavant admettre aux Ordres majeurs au- cun , à moins qu'il n'ait achevé Ton cours de ciiiq années dans ledit Séminaire ; & que les Elevés dtt Clergé Régulier , perfiftant dans leur vocation , re- tourneront dans l'Ordre ils avoient été admis. Il faut auffi , à Fégard du Clergé Régulier , com- biner la difpofîtion du 7e. Art. , fuivant laquelle tous lea Ecoliers dudit Séminaire feront uniformément \'êtus en foutane noire , manteau court , dont le coUet fera de couleur violette, ainfi que le ruban ou bordure de devant du manteau. En outre , fui- vant la difpofition du fufdit ler. Art. , l'enfeignement de la Théologie , ainfî que de la Philofophie , eft fupprimé du i Novembre 1786 dans tous les Cou- vens , Monafteres , Congrégations , & autres endroits ou fondations , dans lefquels cet enfeignement fe pratiquoit.

Il eft palpable , que ces difpofîtions tendent di- reftement à la deflruélion du Clergé Régulier; cha-" cun devra habiter cinq an5 le Séminaire avant d'ê- tre admis aux Ordres majeurs , &: il devra préala- blement avoir achevé (on cours de Philofophie ; il ne pourra aufli être admis dans l'Ordre ou Maifon Religieufe pour commencer fon noviciat , qu'après avoir achevé le cours du Séminaire.

Je demande à préfent , quel Supérieur d'Ordre recevra un Afpirant pour commencer fon noviciat après avoir achevé les cours de Philofophie &c du Séminaire? L'Afpirant aura à -peu -près trente ans, quand il commencera fon noviciat ; il aura l'efprit formé , &: ne fe prêtera plus à recevoir les împref- iions que l'Etat Régulier exige.

Quel eft l'Afpirant qui , après avoir pafle tous ces degrés d'études ., retournera encore à quelque Ordrer Régulier, fur-tout s'il a quelque bonne perlpeftive à

( 14^ ) âiteadie par la ft-périorité de fon efprit ou de fe$ talens ? C'eft donc à dire qu'on deftine uniquement le rebut pour ie Clerçé Régulier.

De p'us , quelle afTurance donneront les non- JTicyennés aux Ordinaires ou Evêques pour être admis aux Ordres majeurs. Bref, il eft certain que ces difpofitions tendent à la deftruftion du Clergé Régulier , dont la fuite infaillible fera uniquement a.vantageufe au Fifc, qui emportera tous leurs fonds, comme biens vacaris.

Il faut en outre remarquer encore, que toutes les Waifons & Couvens du Clergé Régulier font fondés légalement , ou ont été admis avec le confentement du peuple , & que fuivant ledit premier Art. de la J oy tu fc Entrée^ le Duc s'eft folemnellement engagé, qu'il ne leur ftra , laï^tra ni foufrira être fait en ^açon quelconque aucune force ou volonté.

Ces difpofitions emportent manifefîement une force ouverte. On fupprime non-feulement leur enfeigne- ment de Philofophie & Théologie , mais on les force direftement contre leur Inftitution & les Canons du Concile de Trente, ici reçu & publié, de fe retirer au fufdit Séminaire. La fuite qu'elles ont entraînée, cft une force encore plus ouverte.

On avoit envoyé au Vifiteur Général de l'Ordre des Capucins un Ecrit intitulé I'EmpeREUR et Roi, daté de Bruxelles le 19 Janvier 1787 , pa- raphé KuLB. vt. figné par Ord. de Sa MajeAé F. H. DEREUL,par lequel on lui mandoit , que» comme » il convenoit que les jeunes Théologiens de fon » Ordre qui fréquentent les leçons de Théologie de » rUnîverfité de Louvain , ou celles établies au Sé- » minaire-Filial de Luxembourg , foient difpenfés de w tous les points de la règle qui pourroit les obliger » au chant , & à U fréquentation du chœur , loit » pendant la nuit ou pendant les heures de leçons

I

(149)

^ & d'études, nous vous (AiCons la préfentc por*f * vous ordonner de les difpenrer pour les rems de »» leurs études , & de leur prefcrire telles autres » pratiques de piété, compatibles avec votre Règle, » fans nuire à l'application & à la fanté des Ecoliers »> en Théologie , d'autant qu'ils doivent être confi- » dérés 6c traités, (ur le même pied que les Elevés >* du Séminaire-Général établi à Louvain , & du » Séminaire- Filial &c. «. Ce Père Vifireur a donc propofé par écrit le j^ Février au Gouvernement-^ Général les motifs ou^il avoit pour ne pouvoir ac- quiefcer à ce qu'on lui prefcrivoit. Le 3 Mars enfuite, ce même Père Vif.tcur reçut un autre écrit, daté du zj Février 1787 , intitulé, paraphé & figné comme le précédent , par lequel on lui mande, y> qu'ayant réfolu de f^ire entrer inceiïamment dans >* le Séminaire- Général à Louvain , fk refpeclive- » nient dans le Séminaire-Filial à Luxembourg, tous » les Réguliers étudiant en Théologie, &: ayant déjà » donné nos ordres en conféquence aux Reftcurs » c'r ces Sém.inaires , nous vous faifons la préfente yy pour vous faire connoître nos intentions à cefu- » jet, & pour vous ordonner de vous y conformer » fans délai. «

Je vous prie, Mefieigneurs, de faire attention que c'eft le î Mars que ce Père Vifiteur a reçu le fuldit fécond écrit.

Il eft facile à fentir que ce Vifiteur , ainfi que les autres Pères dévoient fe trouver dans une extrême perplexité , même hors d'état de fatisfaire au con- tenu dudit écrit, eût- il même été une Ordonnance portée fuivant nos Loix fondamentales.

Cependant nos Séréniffimes Lieutenans- Gouver- neurs &c Capitaines-Généraux des Pays-Bas ont, le même jour 3 Mars, adrelfé un écrit aux Con- feillers-FHcaux de Brabaiit , par lequel ils les char-

( MO )

gent de mander devant eux le Vifiteur Général des Capucins avec fon Vic€- Vifiteur , pour leur faire connoître que , fur le rapport qui leur a été fait de ia réponfe du 17 Février dernier à la Dépêche, qui lui a été adreffée le 19e. jour , concernant les Pveligieux de fon Ordre qui n'ont pas achevé leurs cours de Théologie, ils ont trouvé bon, rie dejTi- tiur ledit Vifiteur -G ènlr (il de fa place ^ & de le dé" clarer à jamais inhabile à toute f'upériorité dans fon Ordre , lui ordonnant de fe retirer d'abord dans un Couvent à la campagne , que lui aflîgnera le Vice- Vifireur, & dont il vous informera, pour y vivre en Jim pie Religieux.

lU chargent en mémetems lej'Confeillers-Fifcaux de Brabant d'intimer audit Vice- Vifiteur , qu'il faffe ceifer fur le champ tout enfeignement dans les Cou- vens de Ton Ordre , 6c qu'il ait à envoyer dans l'efpace de huit joers , au plus tard, au Séminaire- Général de Louvain , ou au Séminaire-Filial de Luxembourg refpedivement , tous les Religieux , qui n'ont pas encore fini leurs Etudes de Théolo- gie , fous peine de défobéifiTance , & d'être traité comme réfraftaire aux Ordres de Sa Majefté.

Ce Décret eft paraphé par le même Paraphant dont les fufdits deux écrits font paraphés , de forte que l'Auteur de ce Décret eft facile à connaître. Mais qu'importe qui en eft l'Auteur? Il eft évident que ce Décret eft un attentat manifefte aux Con(- titutions fondamentales de cette Province,

II eft à remarquer , que cet écrit étant adrefi^é aux Confeillers Fifcaux de Brabant , fon exécution con- cernoit des habitans de Brabant ; 6c la fuite en conf- tatera davantage la vérité.

Le i2 dudit mois de Mars, ledit Perc Vifiteur reçut ordre des Confeiilers-Fifcaux de Brabant de comparoître le lendemain 13 dite, chez les Con-

( I50

feil'ers-Fifcaux c!e Brabant , il fe rendit accom- pagné du Fere Agent de l'Ordre ; étant donc com- paru devant Icldits Conleillers-Fircaux , on lui pré- îut le ùii'dit Décret : li lefture étant faite , lefdits Ct^nifciliers-Fiicaux drefTerent un Procès- verbal ; Se à leur demande faire audit Père Vifîteur , s*il l'accep- toit , celui-ci répondit , qu'il le foumettoit aux or- dres de fa retraite.

Ce Père Vifiteur s'efl: retiré dans leur Couvent Ae Tervuren; mais quoiqu'il n'^ir pas accepté , ni i

foufcrit à la peine infamante de deftitution , le Gou- vernement-Général ne l'a pas moins tenu comme dégradé, & inhabile,

Puifquele n dite Mar«, le Père Agent de l'Ordre, & le Père Godefroid d'AIofl: étant demandés de fe rendre chez le Conteiller Procureur-Général de Bra- bant , & s'y étant rendus , on leur prélut une Let- tre de fon Excellence le Miniftre, adreflee aux Co-n- feiUers-Fifcaux de Brabant, dat^e du 19 dite , con- çue dans ces ternies : *► Sur le compte rendu à Leurs » AltefTes Royales de votre rapport du ij de ce » mois , je vous fait la prétente pour vous dire que » le Vice-Vifireur clés Capucins étant malade, & w réfident à Tournai , vous ayez à intimer d'abord » au fécond Vice- Vifiteur, l'ordre conrenu dans la » Dépêche qui vous a été adreflee en date du j de » ce mois ; en lui enjoignant d'en exécuter d'abord » la teneur, & de vous en faire confier endéans » 24 heures , fous peine de défobéifTance 6: d'écre ♦> traité comme réhvdAire aux ordres de Sa Ma- » jefté «. Ce refpeftdble Père Godefroid d'Aloft , fans s'arrêter à ce que Sa Majefté n'avoit pas le pouvoir en Brabant de donner des ordres , du mo- ment qu'ils contrevenoient à fes Joyeufes Entrées , X Se que perfonne ne devoir lui obéir en ce cas ( Art. 59 d'icelles } ; le 2t dite Mars, il rem-t par écrit

K4

( 150

aux Confeillefs-Fircaux de Brabant les raifons pour lerquelles (a confcience ne lui permettoit pas de remplir ce qu'on avoit voulu enjoindre au Père Vifiteur-Général.

Et le jo dito Mars on annonça audit Père Go- defroid d'Aloft, qu'il eût à comparoitre à midi de- vant le Confeiller- Procureur-Général , ou étant com- paru , les Confeillers-Fifcaux lui prélurent le Décret porté à fa charge par nos Séréniffimes Lieutenans- Gouverneurs &: Capitaines-Généraux des Pays-Bas, leur adreffé portant, » Chers & bien- Ames. Sur » le compte qui nous a été rendu de l'écrit témé- ^> faire &c fanatique, que le Fere Godefroid d'Aloft, M fécond Confulteur des Capucins, vous a remis, »» le 11 de ce mois, pour juftifier fon refus d'obéir » à l'ordre que vous lui avez intimé de la part du » Gouvernement d'envoyer au Séminaire-Général ^> de Louvain les Clercs Capucins qui n'ont pas w encore achevé l'étude de la Théologie > nous M vous chargeons de iîgnifîer à la réception de cette M audit Père Godefroid d'Aloft l'ordre de fe retirer » dans vingt-quatre heures de cette Ville, & dsns >* trois jours de terres de la domination de Sa Ma- i> jefté , avec défenfe d'y rentrer, fous peins d'être » appréhendé & traité comme vngabond «. (*)

Mefteigneurs , le récit que je viens de faire eft vrai ; j'ai vu toutes les copies des a«Eles; & fi vous voulez vous en convaincre davantage , le Père Antoine de Louvain , Agent de l'Ordre , vous le vérifiera.

De plus, j'ai examiné toute la marche de cette hif- toire , & je la trouve dépourvue & deftituée des forma- lités prefcrites par nos Conftitufions fondamentales.

De forte que c'eft à jufte titre , que j'^ii dit ci- defîus que le fufdit Edit entraînoit une force ou

(*) Voyez tom. 2. Part. Eccléfiaft. p. ao8.

( Î53 ) volonté; car ledit rere Godefroid d'AIofl:, confor- mément à la difpofuion du 42e. Art. de la Joyeufc Entrée , a pu en particulier dire & déclarer fou grief, fans pour ce encourir aucune indignation ou difgrace de Sa Majefté , ou de quelque autre; ni pour ce être mal vu de Sa iVîajeflé en aucune fa- çon : fon Alteflc Royale Albert Duc de Saxe-Tef- chen a même promis , au nom de Sa Majefté , de s^en prendre au corps & bien de celui , ou ceux qui ce feront,

C'eft cependant Sadite Altefîe Royale , conjointe- ment avec fon Augufte Epoufe Madame Royale l'Archiducheflc Marie-Chriftine, qui ont figné le fuf- dit Décret à charge dudit Père Godefroid d'Aloft.

Je tremble, &: le fang fe glace dans mes veines, quand je penfe à quoi nous fommes expofés : per- fonne n'eft plus fur de fon état civil. L'expérience nous en a donné récemment un exemple effrayant dans la perfonne du Sr. de Honot, habitant de cette Ville , dont je parlerai ci-après.

L'Article 5 du mêir.e Edit concernant l'établifiTe- ment du Séminaire Général fournit encore matière pour en conftater l'injufîice. Mais le tems trop court m'oblige de paifer à quelques obfervations fur le Diplômi de C Empereur portant éiablijfement £unt nouvelle forme de Gouvcrm-ment général des Pays- Bas f du I Janvier 1787.

Il femble au premier coup-d'œil, du titre de ce Diplôme , qu'il ne concerne aucunement la Pro- vince de Brabant , ni fa Conftitution fondamentale r néanmoins en l'examinant , on eft convaincu qu'il la bleffe eifentiellement.

Le fixieme Art. porte que , » Pour faciliter la di- »> redion des affaires du Gouvernement généra!|, & » lui procurer en tout tems des notions affurées » tur tout ce qui peut intéreller l'ordre public , ôc

( 154 ) >v le bien des Peuples coiifiés à (a foins, nous » avons réloiu de divifer nos Provinces des Pays- » B<is en neuf Cercles , & d'établir fous fe<; Oidres, » dans chacun de ces Cercles , un In'endant 6c » plufieuîs Commi flaires , lur le pied que le Gou- » vernement fera connoître par une Ordonnance » à émaner de notre part , félon laquelle , ainfi » que Ifclon les inilruclions , & les ordres qu'ils re- M cevront du Gouvernement , ces Inrendans & » Commiflaires fe régleront dans l'exercice de leurs » Cha'-ges «.

Cetre Ordonnance à émaner par ledit Article , eft donc émanée îe ii Mars 17^57, fous le titre 6.''Edit de r Empereur portant kablijfcmtnt des Irittn-^ dancis des Cercles aux Pays-Bas ; &: elle conftate que l'on a furpri»; la re'igion de notre Souverain Sa Majefté l'Empereur & Roi.

Il ne peur .Ignorer & encore moins difconvenir , qu'il a contrafté avec le Peuple Brabançon repré- fenté par les trois Etats , au jour de fon Inaugura- tion , le 17 Juillet 1781. L'ade qui en a été fait & dépêché, paraphé, figné , contrefîgné, & fceîlé du grand fcel de feue l'hrpérntrice- Reine , dont on fe fervoit encore alors en Brabant , & les Let- tres originales de Mandement irrévocable & procu- ration fpé.iale de Sa Majeflé l'Empereur & Roi , données & paflTées à Vienne le z Mars 17^1 fur cet Article, & le Duc de S-Hxe-Tefchen exiflant, le confiaient, ainfi que les copies imprimées, ré- pandues non -feulement dans les Pays-Bas, en France, ?:ic,^ mnis dans toute l'Europe.

Certe même Ordonnance, ou Edit , eft fi diamé- tralement oppofée aux engagemens que Sa Majeflé a pris, & a promis fous ferment de remplir & d'ob- ferver visa vis le Peuple Biabançon , que le Con- feil de Brabant n'a pu lui accorder le Vifa ni ia

( M5).

Sceller ou fîgner : faute de quoi nul Edit en Brabant ne peut avoir le moindre efFer , ou force , ou exé- cution : JrtïcU 46* ^ de la Joyeiife Entrée.

Ladite Ordonnance eft auffi diamétralement oppo- fée au ler. Article de la Joyeujï Entrée^ puifque Sa Majeflé ou Son Altefle Royale, en vertu du Man- dement fpécial & -procuration irrévocable, & plein- pouvoir ci-defîu5 réclamé , a convenu , & s'eft engagé enir'aurres , » qu'il ne leur fera , laifTera , ni (buffrira » être fait , en façon quelconque, aucune force ou vo- » lonté; & qu'il ne les traitera, ni laiffera traiter hors » de Droit & de Sentence :ains les traitera &fera traiter » tous les Prélats , Maifons-Dieu, Barons , Nobles 5^ » bonnes Gewh & Suiets de fes Villes, Franchiles &Fay<> » de Brabant, £c d'Outremeufe, en toute chofes, par w Droit & Sentence , fuivant les Droits des Villes Se » Bancs , il appartiendra , &c devra être fait. «

Il s'eft en outre obligé par le 5 e Art. entre aatres que » Sadite Majefté , fon Gouverneur, ou Gou- » vernante Générale fera traiter toutes les affaires ♦> dudit Pays & inhabitans d'icelui , concernant la » juftice, & ce qui en dépend, foit des Provifions » ordinaires de Juftice ou Statuts, Placards, Edits , » Ordonnances , Commandemens , ou autrement , >> par conieil &J avis d'icelui & dudit Confeil Bra- » bançon , fans en ce , leur pouvoir être fait , par » quelqu'un, aucun empêchement ou trouble, ni qu'ils feront touchant ce , fournis aux Ordonnan- » ces de quelqu'un , iinon de Sadite Majefté , ou » fon Gouverneur , ou Gouvernante-Générale.

De plus , dans l'Article <^^ , Sadite Alteffe Royale s'eft obligée » & a promis de bonne foi & juré » perfonnellement fur les faints Evangiles, pour Sa- » dite Majefté , fes hoirs & fuccefteurs , à tou? gé- n néralement Prélats , Maifons-Dieu , Monafteres , » Barons , Chevaliers , Villes & Franchifes , 6c

» tous fujets (îe Sadite Majefté , f-c bonnes Gens » de Tes Pays de Brabant & d'Outremeufc , leurs hoirs (k fucceiïeurs , de les tenir dorefnavant tous ** en général (lavoir , les Privilèges) fermes 6<C » fiables a toujours, & de ne iamais y contrevenir, » ni foufFrir qu'y foit contrevenu en aucune ma- » niere; & s'il airivoit, que Sadire Majefté , Tes » hoirs & fuccefleurs vinffent , allaffent, ou fiffent » à rencontre , par eux , ou par quelqu'un d'autre , en » tout, ou en partie, en quelle manière que ce

» foit, nous en ce cas, conlentons & accordons

w auxdits Prélats, Barons, Chevaliers, Villes, Fran- » chifes , & à tous autres nofdits Sujets, qu'ils ne ie- » ront tenus de faire aucun fervice à Sadite Ma- » jefté., Tes hoirs , ou fuccelTeurs , ni d'être obéil- » fans en aucune chofe de fon befoin , que Sadite » Majeflé pourroit ou voudroit requérir d'eux , julques à ce qu'elle leur aura réparé , redrefTé, & » entièrement défifté & renoncé à l'emprife ci-del- » fus mentionnée.

» Par-deffus ce ("porte la fuite du fufdit Art. 59) » Nous , au Nom de Sadite Majefté , voulons , dé- » cernons & déclarons que tous Cfficlcrs établis au » contraire de cette fa Joyeu(e Entrée , feront incon" » tinent defîitués , & que pareillement , tout ce qui » (îici en avant , pourroit être attente au contraire >* de ce que deffus ; ne, Jera^ ni pourra à f avenir être » d'aucune valeur &c, «.

D'après la citation ci-devant faite de la fubftance de quelques Articles de la Joyeufe Entrée , il eft évident , que l'émanation du Dip^rne du premier Janvier Î787 , portant Etablijjement £une nouvelle forme pour le Gouvernernent'Glnèral du Pays-Bas ^ ert contraire à ladite Joyeufe Entrée , tant du chef qu'il n'eft pas revêtu du Vifa & de la Signature du Confeil de Brabant , ainH que du Scel de Brabant ;

( M7 )

que parce que fuivant les Articles réclamés Si. cités de la Joyeufe Entrée , il n'eft pas dans le pouvoir da Duc de Brabant Sa Majefté l'Empereur & Roi de créer ou établir de nouveaux Emplois , contraires à ceux établis par la Joyeufe Entrée.

Coniéqueinment il n'eft pas dans fon pouvoir d'étjblir ni des Cercles , ni des Intendans , ni des Commiffaires dans le Brabant : Se par une coni'é- quence ultérieure , les Cercles de Bruxelles îk d'An- vers , énoncés par l'Edit du 1 1 Mars , & tout ce qui y eft relatif, n'eft d'aucune valeur ; Texprcffion defdits Articles de la Joyeufe Entrée eft claire & décifive à cet égard.

D'ailleurs ce même Edit du ii Mars eft auiS défeftueux du chef" des formalités , puiiqu'il eft pareillement dépourvu du Vifa & de la fignature du Confeil de Brabant , alnft que du icel Brabançon.

Retournant au Diplôme du premier Janvier 17^7 a je trouve que , fuivant la difpofition propofée Art. 6, dans chacun de ces Cercles il y aura un Intendant & plufieurs CommiiTaires fur le pied que le Gou- vernement fera connoître , par une Ordonnance à émaner de la part de l'Empereur & Roi.

Je trouve , fuivant le même Art. ô , que ces Intendans & Commiffaires fe régleront dans l'exercice de leur charge , i^. félon cette Ordonnance du Gou- vernement , & 1®* félon les Inftru£tions & les Ordres qu'ils recevront du Gouvernemeiit.

Je trouve encore que , fuivant l'Ordonnance annon- cée par le Diplôme, celle du 12 Mars 4787, Art, 5 » L'aftivrté & lafurvelllance des Intendans s'étendra , » fans exception ^ fur tout ce qui a tiait à l'Admi- » nlftratlon publique , politique, & économique : » en conféquence tous les OfHciers des Seigneuries, » fous les Magifirati , & autres Adminiflratcurs ou Réglffeurs des biens & deniers publics ( vous-mêmes

» donc auffi , Meffeignews I ) tous les Officiers, w Employés & Receveurs de nos Domaines & Fi- w nances ; ceux du fond de Religion, a in Ji que ceux *> des Provinces {donc vus ConfeiLlers- Receveurs ati'Jî^ ) » Villes & Communautés, leur (ont fubordonnés, » &c devront leur donner, en tout tems, infpeftion » & communication de leurs regiftres , protocoles, M & autres aftes , ainfi que tous les renl'eignemens » & éclaircifTemens relatifs aux objets de leur gef- » tien «.

Voilà ce qu'on veut bien révéler au Public , en attendant que ces Intendances foient établies 6c in- troduites.

Mais l'on pouvoit parvenir à les établir & les affermir ( dont Dieu nous préferve ! ) , alors , les Inftruélions & les Ordres qu'ils recevront , fuivant l'Art. 6 du fufdit Diplôme du i Janvier 1787 , en feroient fentir le'; funeftes effets.

L'Art. 6 de l'Edit du 11 Mars 1787 , eft le ga- rant de ce que j'en préfage : il ordonne » à tous » les Sujets , fans diflindion , d'obéir promptement » à tous les ordres qui feront expédiés par les » Intendances, comme s'ils étoient émanés de Nous, » quand même ils paroîtroient excéder les bornes » de leur autorité , fauf le recours au Gouvernoment- « Général, qui fera toujours libre à ceux qui pour» » roient fe croire léfés.

Je frémis, quand je vois de quoi nous fommss tous menacés , du defpotifme le plus abiolu I V^ous Brabançons , qui , à la gloire des Pays-Bas , avez le bonheur de vivre fous votre Conftitution Brabaa- çonne, vous la perdriez! Vous, dont les Fafîes , & les Annales vantent la bravoure, la valeur, l'at- tachement pour votre Prince & l'amour pour la Patrie , vous flétririez l'éclat de la gloire que vos ancêtres ont fi vaillamment acquife ! Tremblez : leurs

( 159 )

înânes vous le reprocheroient ; Sr la pnflerîté Bra- bançonne rv>ugirolt juiqu'à \a Confoniii.ation des fiecles d'étte clelctndue de vouç. Mais que dis je? Vous avez un Souverain équitable & jufle , qui ne refpire que pour votre bonheur: ofez-lui defiîUer les yeux ; les envieux ont falciné le Mon?rque.

Pardon, MciTeigneurj. ; je m'écarte; niais ratta- chement pour mon Prince , & l'àn-iour de ma Pa- trie m'entraînent. Ah ! que je voudrois pouvoir vcus diffiinuier , combien dans It Diplôme du le^. Janvier lySy , portant etablï[\smtnt d'une now- dit foi nu pour h Gouvernement Général des Pays- Ras, le contenu *du 7e, Art. vous eft In'uriei^x , vu qu'il dit o.:ver^ tement , que votre forme d'Admin^ftrarion ti\ à la furcharge du Peuple. Cette injure , qui ne peur ve- nir du Prince , n'eft qu'une infiigaMon de l'envie.

Tous les Ducs de Brabant ont eu rexpérience, que cette Province, dans toutes Ici occafions , leur a . fourni des foriunes incroyab'es : les Annales & les Joymfes Entrées mêmes l'attcflent ; &C ce non- obftanr, la P<ovince ou le Pays elr riche: c'eft ce qui nous a Tufcité des envieux. Si cependant le Peuple eût été furchsrgé par i'Adminiftrarion , ("oit provinciale , fbit quelconque , la Province ou !e Pays ne feroit pas fi florifTant , ni fi richt- qu'il Teft.

Ce n'eft pas cette prétendue furcharge qui a don- né lieu à cet Article ; c'eft un prétexte qu'on prend pour s'arroger î'Admin'ilraîion , & l'Article 8 le vé- rifie , puifqu'il pre/crit que le Collège aftuel des Députés des Etats viendra à ceHer avec le dernier du mois d'06lobre de cette année , & refiera fup- primé.

La dlfpofition de l'Arîicîe 9 confirme mon arer- tion , puifqu'il v efl dir , qu' « Au lieu He ce Col- » lege les Etafs de Brabint choifiront parmi ceux de » leurs Membres , qui feront préalabiement recon-

C i<^o ) w nus capables par le Gouvernement, un Député, M qui iera agrégé au Confeil du Gouvernement , » il aura le titre, le rang & les gages de Con- » i'eiller , 6c il rapportera immédiatement tous » les objets des Finances de fa Province , & autres, » que le Préfideat jiigera à propos de lui confier.

En premier lieu , il eft à remarquer par rapport à ce 9e Art. , que les Etats de Brabant font au nom- bre de trois, qui ont chaque leurs Députés: fuivant cedit Art. ils n'en auront qu'un , qu'ils choifiront parmi ceux de leurs MejnbrcN ; conféquemment ces trois Etats doivent enfemble choifir un Député qui cft Membre de ces trois Etats.

Les Etats Eccléfiaftique & Noble ne font pas û nombreux; mais le Tiers- ttat eu différemment compofé : il neû pas repréfenté par les Magiftrats des trois Chefs- Villes.

Louvain a quatre Membres: le Magiftrat , qui eft le premier ; le deuxième ceux du Confeil ; le troi- fiemc ceux de la Décanie , &c le quatrième les Chefs- Doyens , dits Overdekens.

Bruxelles en a trois : le Magiftrat , qui efl le pre- mier , le fécond le large Confeil ; & les neuf Nations compofées des Doyens des Corps des Métiers font le troifieme.

Anvers a quatre membres : les Bourguemaîtres & Echevins en fervice a6luel forment le premier ; les anciens Echevins le deuxième ; les Quartier-maîtres dits Wyckmeejlers le troifieme ; & les trois Chef-Na- tions des Bateliers , des Merciers & ^lQs Drapiers , fous lefquels tous les Métiers font compris , forment le quatrième.

Tous ces Membres refpedifs àes trois Chef-Villes font le Tiers-Etat de Brabant; conféquemment forment en concurrence avec les Etats Eccléfiafîique & Noble, les Etats de Brabant, Chaque individu de ces Mem- bres

( i6i ) bres cft Membre des Etats , même iufqu'au Doyen du Corps de Métier des Savetiers : ainfi donc jufqu'au Savetier, félon la difpofition duditAit.9, a droit de prétendre à la députation, puifqu'il efl vrai de dire, qu'il eft Membre des Etati. ^

Chaque des trois Etats a Tes Députés ; de quel Etat lera celui que l'Article prefcrit ? C'eft-ce qu'il n'a pu lietinir ; car en n'admettant qu'un Député pour les trois Etats , il faut nécclTairenient que deux Etats fo.ent dépourvus du leur.

Il eft cependant notoire , que les trois Etats ont des objets refpedtivement indépendans les uns des au- tres , 6c foiivent des intérêts contraires. Comment donc ces diflfércns objets feront-ils traités & furveiliés par. les Etats, qui feroient dépourvus de Députés?

De plus, les Etats ont plufieurs emplois à confé- rer parleurs Députés : comment la collation s'en fera- t-elle , quand il n'y aura qu'un feul Député ?

Taflant à préfent au choix, que l'Art. 9 prefcrit: de quelle façon fe fera-t-ii ? comment fera-t on confier de Id pluralité des voix après les trois ou fix anj^ que la députation durera, félon l'Art. 12? Voilà €« qu'il m'efl impoffible de concevoir. :

Mais fuppofez que cela foit poflible, l'Art. 9 prefcrit encore , que cet Elu doit être préalablement reconnu capable par le Gouvernement : celte capacité fera fi difficile à trouver au gré du Gouvernement, qu'elle ne le trouvera jamais ; & la coniéquence en fera , que , comme le bien public de la Province 6c des fujets exige , que l'Adminiftration provinciale ne foit pas dé- pourvue d'un Adminiftrateur capable , le Gouverne- ment en dénommera un ad inurim ou provifionnel- lement , pour dorer la pilule. Certe provifion fera continuée fuivant les çirconfîances du teins ; fi elles deviennent tant-foit-peu favorables , on en établira un indéterminément.

L ***

( i6i )

Si Von avale la pilule , adieu , Députatlon ! adieu , Etat*! adieu tout !

Revenant à un autre objet du même Art. 9 : que ce Député agrégé au Confeil du Gouvernement, y aura le titre, le rang, & les gages de Confeiller ; je commencerai par demander à charge de qui ces gages lui feront-ils payés? C'eft-ce que l'Article n'ex- plique pas. Conféquemment il faut fuppofer, que ce iera à charge des Domaines; c'eft une générohté qui donne à penfer : les penfées font libres ; mais je ne puis les confier au papier. Je puis néanmoins dire , que ce Député eft au fervice, & aux gages du Prince ; & j'edime , qu'il eft incompatible d'être Membre de l'Etat ôc d'être en même-tems au fervice &c gages du Prince : les intérêts de celui-ci font trop diamétrale- ment oppofés à ceux des Etat?.

Finalement, ce même Article 9 porte encore, que ce Député-Çonfeiller ( à gages) au Confeil- Général des Pays-Bas y rapportera immédiaterwenr tous les objets des Finances de fa Province. Ce terme immé' diatemtnt donne quafi à entendre, qu'il lui feroit dé- fendu d'en faire rapport aux Etats ; il eft cependant notoire, que les Députés, à chaque Aflemblée gé- néraie font rapport au Corps aflemblé des affaires fur- venues , qui paftent les fins de la dépuration , depuis l'Aflemblée précédente , & qu'alors les Etats pren- nent à&% réfolutions en conféquence , dont l'exécu- tion eft confiée foit aux Députés feuls , foit conjoin- tement avec les Commiffaires, que les Etats ont trouvé à propos de dénommer , pendant leur Affemblée gé- nérale.

En outre il eft auffi notoire , que les Députés par eux-mêmes n'ont aucun pouvoir , concernant des objets , qui paftent ceux qui font circonfcrits dans les bornes de la dépuration. Comment fera- t-il donc poffible audit Député de rapporter' immé-

( 1^3 )

diatement audit Confeil tous les objets des finances de fa Province ?

Il eft prefcrit , Article ii du môme Diplôme,- que les Etats éliront un Secrétaire. Prefque toutes les réflexions que j'ai faites cl deffus, par rapport à la l^ço^ de choifir un Député, Tonl adoptables à l'élec- tion d'un Secrétaire-: ainfi il iuffira de m'y rapporter.

La fin de l'Article lo du jmcine Diplôme m'oblige

à faire des réflexions relativement à la diïpofition

d'icelle. Il y eft dit, que les Etats de Giieldres ,

de Mallnes auront à commettre le foin de leurs at-

'faires au Député de Brabant.

Il faut obferver , que je parle dans la fuppofi- tion que le Diplôme ait lieu , ou folt exécuté.

Dans cette fuppofîtion , néanmoins faufle , on doit convenir, que le Député de Brabant aura de la befogne, autant qu'il pourra fupporter ; de plus qu'il n'a aucune notion des affaires des Provinces de Gueidre & Mallnes , & puis , que la première des deux eft trop éloignée de Bruxelles.

Cela étant, qui eft celui qui voudra fe chirger des affaires d'autrui ; je dis defdites deux Provinces? Culpa cnim tj2 immifcerc fc ni ad Je non pcrtincnti 1. î6. ft.de R. j.

D'ailleurs i'uppofons qu'il eût le pouvoir & l'au- toriré vis-à-vis de ceux de Gueidre 6^ de Malines, à l'effet de la difpofitlon fufdite, l'a-t-il à l'efFet de pouvoir obliger ou contraindre le Député du Bra- bant d'accepter ce foin ? Je réponds Se conclus, qu'il ne l'a que par !e defpotifme. ' Enfin pour corollaire de cedit Diplôme, il eft à réfléchir qu'il n'eft revêtu d'aucune formalité Bra- bançonne, fi abrolument & effentiellement requife, pour qu'un Diplôme , Edit ou Placard ait force de Loi: il ne porte ni le Fija , ni la lignaiure, ni le Scel Brabançon.

L 2

(1^4)

Et ce qui carsi^^érife en outre le derporifme le plus' abfolu , c'eft que, malgré qu'il foit dépour%'U Je ces formalités , on en a fait faire une prétendue publication partout en Brabant.

J'eftime que j'ai démontré fuffifamment la nulle valeur de ce mêine Diplôme, conféquemment je lecournerai encore à l'Edit portant étabiifTement des intendances des Cercles aux Pays-Bas, du i x Mars s 787 , quant aux Articles que je n'ai pas encore touchés.

Le préambule de l'Article 9 de cet Edit porte:** >> Comme cependant la protcdion des Sujets ôc Ha- » bitans du Pays, tant pour leurs perfonnes, que »> pour leurs poffeffions , contre toute violence &c » voie de fait , eft un des devoirs les plus eflen- » îlels du Gouvernement politique «.

Ce raifonnement ou préambule, pris dans un fens abftrait de la difpofition qui le fuit , eft très-vrai , & Julie f mais dans le l'ens dans lequel il eft pris, Se comme on le doit néceftairement prer.dre , en- fuite de la difpofition qui fuit , il eft controuvé , il eft paradoxe.

Ladite difpofition porte : » Nous attribuons aux w Intendances le pouvoir & l'autorité de décerner, y> & de mettre en exécution le provifoire momentané , » ou le poiTefibire fommariflîme , dans tous les cas » quelqu'un feroit violemment 6c de fait troublé » dans fa poftefîion , voulant que ce qui aura été » prononcé & ordonné, à cet égard, par les Inten- » dances , tienne lieu , jufqu'à ce qu'il en ait été au- » trement difpofé , foit au pcfteffoire , ou au pétitoîre , » par le Juge compétent.

C'eft une vérité inconteftabîe , que la proteélion des fujets & habitans, tant pour leurs perfonnes, que pour leurs poiTtinons , contre toute violence Se voie de fait , appartient au Gouvernement politique , à i'ef-

fet de prévenir , que les violences Si voies de fait ne fe faiïent , & que les tranfgrefî'eurs foient cor- rigés ou punis , félon l'exigence des cas.

Mais il eft controuvé qu'il appartiendroit au Gou- vernement politique , à tel effet, que celui qui a effuyé quelque violence ou voie de fait , folt remis dans fa pofleflîon ^ comme il fut avant la violence faite. Ce devoir appartient au Tribunal de Juftice , & c'eft le Confeil de Brabant, à qui cette Judicature , pour tout le Brabant , à i'exclufion de tous autres Tribunaux , appartient.

De plus ce Art. lo forme le contrafte le plus for- mel avec la di'pofition du 8e. Art. du même Edit , qui porte, » Nous exceptons abfolument des pouvoirs » &: de l'autorité des Intendances tout ce qui con- » cerne la Juftice purement contentieufe.

Car il n'eft pas poffibie de fuppoler , & même il ne peut pas tomber fous le {ens,que, dans une vio- lence faite, ou dans quelque voie de fait, il ne fe rencontre pas qvielque conteftation , ou quelque ma- tière contentieufe.

Cela étant , l'objet , félon le 8e Art. , efl: abfolument fouftrait aux pouvoirs & à l'avHoriîé des Intendances. En outre . le polTeffoire fommariffime n'eft pas connu en Brabant , il eft même de trop dangereufe confé- quence , comme on fentira par l'exemple , qui peut arriver , ôc que je propoferai.

Un homnie féduit & emmené une femme mariée, ou une jeune fille ; il fe retire dans l'un ou l'autre endroit , s'y fixe pour un certain tems. Le mari ou le père vient par hafard dans cet endroit , & ren- contre, fgit le mari fon époufe , ou le père fa fille mineure , fe promenant , au br.is du fédu6leur ; le mari ou le père agité par un jufte refTentiment , ar- rache en courroux fon époufe ou fa fille du bras de fon féduâ:eur ; celui-ci fe demene , il crie à toute force ;

L3

{i66) Monfieiir l'Intendant furvient , les entend : 1! y trouve un prérendu trouble ou voie de fait, & il prononce, que le prétendu troublé 6c la femme ou fille refie- ront enfemble. Le mari ou le père veut prendre (on recours au Juge compétent, mais entre-tems le ra- vifTeur eft parti avec fa proie , &c le mari ou le père en eft encore pour Tes fraix. Vraiment c'eft une Jurif- prudence pareille à la Coutume de Lovris , le battu paie l'amende.

Et le plus extraordinaire de tout, c'eft que malgré la reconnoiflance qu'on y fait, que la protection àes Sujets & Habitans du Pays eft un de5 devoirs les plus eftenriels du Gouvernement politique , on com- met trouble fur trouble, fous prétexte de vouloir le prévenir.

Le lie. Art. en fait la preuve; puifque l'on y pré- tend de (upprimer les charges de Grands - Baillis , Chefs - Mayeurs , qui néanmoins font admis par la Joyeufe- Entrée ^ Art. 37.

Enfin , je le répète encore , ce même Edit n'étant p5$ revêtu des formalités Brabançonnes , eft de nulle valeur : Forma enim dat ejje rei.

Paftant à l'autre Diplôme , portant établiftement des nouveaux Tribunaux de Juftice aux Pays - Bas, de la même date, 1 Janvier 17^7.

Pour éviter la répétition de ce que j'ai dit ci-defTus , par rapport aux formalités , dont un Diplôme , Pla- card , ou Edit doit être revêtu , & comme il doit erre fait, pour avoir quelque effet ou exécution, je me bornerai à dire , que ce même Diplôme en eft deftitué à tous égards. »

J'oblerve encore , que le titre ne quadre pas avec fa difpofition , vu que le titre porte feulement éta- b!iftem.ent des nouveaux Tribunaux de Juftice aux P;^y"^-Bas , & que fa difpofition , en outre , porte fup- preffion de tous les Confcils aftuels de Juftice ; il

C 167 ) porte encore également iiipprefiîon de toutes les Juf- tlces Seigneuriales; enfin il porte iuppreflîon, à l'ex- ception des feules Juftices Milifaires , de tous autres Tribunaux, Corps &f Cours de Juftices, qui fubfiftent dans les Pays-Bas, ainfi que des Tribunaux Eccîé- fiaftiques, & de ceux de i'Univerfité de Louvain , Art. 3 , 4 , 8 & 9.

Commençant par le Confei! de Brabant , j'eftime, qu'il fera convenable de rapporter ion origine , I;i manière dont il a été érigé; bref, un précis Uîccinél dudit Confeil.

Les Hiftoriens ne font pas d'accord fur l'époque de (on origine. Les uns veu'enr la fixer au tems de Godefroid- le- Barbu , mort l'an 1140, & enterré dins l'Eglife de l'Abbaye d'Afflighem.

Les autres la fixent au règne du Duc Jean II , 6t donnent l'on origine à la Chartre de Cortenbergh, du mois de Septembre , Mercredi avant la S. Ba- von 13 II.

Je n'approfondirai pas cette quefiion ; vu , en premier lieu, que le tems qui me refte eft trop court, vu en fécond lieu , que la féconde opinion me paraît la plus probable ; & vu en troifieme lieu , qu'elle eft plus que (uffilants pour établir ma thefe.

Cette fameufe Chartre fe trouve au premier vol. des Plac. de Brab' fol, \12.

Jean II fit donc une convocation générale de Tes Barons, Chevaliers, VafTrUix , Villes & Franchifes, 6c il fit dreflTer cette fameufe Chartre , connue fous le nona de Cortenberg , du nom du lieu elle fut donnée, qui étoit le lieu de la réfidence du Duc &C de fa Cour ; il eft étonnant de voir le grand nombre de Nobles qui y ont intervenu.

Par cette Chartre , le Duc , entre plufieurs autres points concernant l'avantage de fon Pays , réitéra la promeffe , tant de fois faite par (zs ancêtres , de

L 4

( i6-^ ) traiter toMS fes Sujets par Jugement & Juflice , St à cette fin il réfolut rEtabllflement de ce Confeil : auquel etret il ordonna » que lui & fes fuccefTevrs ^> de confeil commun ou avis de fon Pays , délig- w neroient quatre des principaux Chevaliers , & trois V perfonnes de Louvain , trois de Bruxelles , une ♦> d'Anvers , une de Bois-le-Duc , une de Tiriemont >♦ & une de Leeuwe , que ces quatorze perfonnes , » de trois en trois femaines, s'aflembleroient en la » Salie de Cortenberg ; qu'elles ordonnemient ce » qu'elles trouveroient , en équité , convenir pour » le repos & le plus grand bien du Pays , & enfin , i> que les Sentences & Ordonnances feroient ftables , » fermes & inaltérables «.

Il y eft auffi pourvu , ce quelle façon , en cas de mort de l'une ou de l'autre defdites perfonnes, elles devroient être remplacées.

Il eft de plus ordonné & ftatué , que lefdifs Che- valiers & Perfonnes élues jureroient fur les 'laints Evangiles, de conferver le Duc , & tous fe^ VafTaux de Brabant en leur Droit , ôc d'adminiftrer la Juftice le mieux qu'ils pourroient.

Voilà donc cette fameufe Chartre de Cortenberg , dont il eft tanf parlé dans les anciens a61cs , dont les Etats de ce Pays ont été fi jaloux , qu'ils en ont demandé à plufieurs reprifes une confirmation fcécifique de leur Prince. Vovez Euthcns , tom. 2 , iiv. 7 , § 1 ; il y dit tor.t ce que je rapporte.

Il dit encore, loc. cit. fol. 3^9, & feq. qu'en Tan 1572-^. le Duc ^yencefl^s de Bohême ôt Ton époufe la Duchefîe Jeanne, fii'c du Duc Jean III , firent une convocation générale des Etats à Corten- berg , , après plufieurs conférences, &: à l'inftance ces mêmes Etats , fiuent couchés plufieurs Articles touchant l'antorité du Confeil , & l'obfervation de îa Chartre de Cortenberg; entre autres, que totrs

( 1(^9) ceux qui pour lors ou dans la fuite gouverneroient I* Confeil , {croient (bus la garde 6c protedion fingu- liere du Prince , de même que tous ceux qui ie rendroient à Cortenberg , pour y pourfuivre leur droit : que fi quelqu'un ofoit contrevenir , il feroit châtie d'une manière qui ferviroit d'exemple à tout autre , Se que tous ceux du Confeil , ainfi que tous les principaux Officiers de Brabant feroicnt obligés de promettre par ferment , à prêter entre les mains du Prince, ou de deux Confeillers, d'obTerver , & de faire obferver, de point en point, laChartre de Cortenberg, & la Chartre ^yallone.

Oie finalement il fut ftatué , que tous Juges , 5c Officiers de Brabant auroient à obéir aux ordres du- dit Confeil, dans les alïaires qui le regardent, à peine d'être tenus pour délobéiiTans, 5c d'encourir les peines comminées par ladite Chartre de Corten- berg : il y rapporte même les Articles en langue originale.

D'après ce que je viens de rapporter , il eft évi- dent, que le Conseil avoit le maniement auffi bien de la Police que de la Juflice , & qu'il n'avoit pas d'awtre Chef que le Duc même, fauf, qu'en certaines occu- rences, îorfqu'il étoit nécefTaire , le Sénéchal de Bra- bant y préfidcit en fon nom. Mais le Duc AVenccflas étant mort, l'an i3?^4 , la DucheiTe Jeanne ne pouvant plus vaquer aux affaires du Confeil , tant à raifon de la guerre de Gueldre , que par d'autres embarras , elle inftitua un Chef perpétuel de fon Confeil , qu'elle qualifia de Chancelier.

Le même Euikens loc. cit. €. 2 , rapnorte en- cote , que le Duc Antoine, par l'Article IV de fa Joyeufe Entrée du si? Décembre 1404, avoic pa- reillement promis de n'admettre dans fon Confeil que des perfonnes de légitime mariage, né«s -de poiTel- fionécs en Brabant , &: que ceae promefie fut le-

C 170 ) nouvelîée par la Joytufe Entrée de Jean IV , en date du i} Janvier 141 J.

Et que ce Jean IV époufa, en 1418 , la fameufe Jaqueliiie de Bavière, Comteffe de Hollande, de Zélande , & de Hainaut , & qu'avant que de partir pour la Zélande l'an 1410, il voulut changer (on Miniftere & fa Cour, comme il avoit changé celle de la Duchefle (on époufe , qu'il fit aulTi quelque réforme en fon Conlei' , & nomma pour Conieil- 1ers Jean de Grimberghe , fire d'Aflfche , Jean de Grimberghe , fon fils aine, Maître Jean Bont, Cha- noine de Sainte Gudule à Bruxelles , Nicolas van Werve , Bernard Utenenge, fils unique d'Annekin Renier Noyts, Jean de HufHe , Nicolas de Colen- foene , ( lequel il fit , peu de tems après , Garde des fceaux } Guillaume Bont, & Rutger de Tele- gen Secrétaire; & que par a61:e du 26 Avril 11 or- donna ce Confeil tant pour le Gouvernement du Pays , que pour l'Adminiftration fouveraine de la Juftice ; mais que U difcorde, qui furvint entre le Duc & la Duchefle , de même qucntn U Duc 6* lis Etats ^ y caufa \\n entier changement : que les Etats mécontens du mauvais gouvernement de leur Prince, fe joignirent à la Duchefle, & appellerent même à leur fecours le Comte de S. Fol, frère du Duc, lequel ils conftituerent Ruart ou Régent, & Gouverneur- Général de Brabant : qu'ils caflerent aufli, fous fon autorité, par aftedu u Septembre, le Miniftere & les prédits Confeillers , commis par le Duc, & couftltuerent en leur place l'Abbé d'Af- iiighem Chancelier, Jean de Cuvck, fire l'Hoogf- rraeten , Corneille de Gavre dit de Liedekerke, lire de Lens, Thierry de Merthem , fire de Boxtel , Renier de B;uucrle:n dit de Berges, fire de Geele, Merxem ^iz. Amman de Cortenberg , dofteur es Loix & Doyen de S. Douât à Bruges , Williaume

( 171 ) (^(^ Gandjfire de Meerwyck , Everard TSerclaes^ Nicolas van de ^Verve , Ôc Gérard de Gemert. Que ces troubles ne durèrent que jufqu'au mois de Mai 1421, lorfque le Duc, le Ruart , les No- bles , 6v les Députés des Villes de Brabant f'e trou- vant en une Aiïemblée générale , a{riî{née dans la Ville de Louvain, il y fut traité d'un accommode- ment entre le Duc,& les Etats, par lequel le Duc confenrit & s'engagea à une nouvelle & meilleure forme de Gouvernement , &: ainfi il fut derechef rétabli dans toute fon autorité , & Ton frère fe dé- porta du nom &c de la qualité de Ruart.

L'Auteur poorfuivant fondit paragraphe, rapporte, que ce traité d'accommodement procura un nouveau luftre au Confeil de Brabant , & augmenta de beau- coup fon autorité; puifqu'il y fut ftipulé & promis, que , fans l'avis & confentement de trois ou quatre de ce Confeil , il ne feroit permis au Prince d'a- liéner aucune Ville, Pays, Château, ou autre Do- maine , ni d'entreprendre aucune guerre , ou de faire aucun traité ou alliance , pas même de faire grâce de crime , à qui que ce fut : que deux du Confeil commertroient tous les Officiers de la Cour du Prince, & cela au moindre nombre que faire fe pourroit, & de telle manière, qu'il ne fût pas né- ceflaire de changer de tems en tems l'état de fa maifon; que le Prince & le Confeil commetti'oient dans les Villes & Plat-Pays les Officiers les plus capables, qu'ils pourroient trouver, & qu'il ne fe- roit pas permis au Prince de les defîituer , fans le confentement de fon Confeil; qu'aucuns ne feront admis au fervice du Prince, finon les Nobles de Brabant, ou tels autres que le Confeil en jugeroit dignes, foit par leur naiffance , foit par quelques faits remarquables ; qu'aucun du Confeil ne rece- vroit de l'argent de perfonne , mais que l'argent

(I/O

qui devrolt leur être payé feroit remis au garde âa regître des Fiefs , qui en p^yeroit les vacations du Confeil , lorfqu'il s'occuperoit pour le fervice du Prince ou du Pays, & que le refte feroit employé aux menus plaiiirs du Prince.

Que le Conf'eil comme troit à la garde dudit re- g>tre des Fiefs une perfonn^ notable , qui fût le vallon & le flamand , que nul Prêtre ( à la réferve des Abbés de Brribant ; ne pourroit être admis à TEtat de Confeil ou Secrétaire : enfin qu'aucune perlonne, qui ne fût du Confeil, ne pourroit être commife à l'inftruftion ou décifion de quelque af- faire , finon du confentement du Confeil, & que û le Prince venoit à faire le contraire, la correftion en appartiendroit au même Confeil.

Cette Chartre , que Ton nomme le nouveau Gou- vernement du Duc Jean IV , fut fignée par le même Duc 5c par tous les Nobles , & les Députés des Villes, §^ Franchifes de Brabant, dont les noms font aufil rapportés par Divttus in nbi. ad ann. i/^riy & Butkens rapporte les Articles de la même Chartre en largue originale. Une partie des Articles de la même Chartre fut confirmée par la Joyeufe Entrée de Philippe I ( frère du Duc Jean IV , mort fans hoirs ) Articles 5 , 6 , & 7 : il fut ftipulé de plus, que le Prince ne pourroit établir ni deftituer le DrofTard ni le receveur de Brabant fans l'avis , & r approbation du Confeil ^ ou du moins de fix Con- feillers qui en figneroient les Lettres, comme auflî que le Prince r;e pourroit établir pour Chancelier finon une perfonne qui fût le latin , le flamand 5c le "wallon, & cela par avis des autres Confeillers, eu du moins de fix d'eux, qui aflîirmeroient fous ferment , que celui qui feroit préfenté pour Chan- celier , auroit les qualités requifes pour fervlr uti- kment le Prince, & fon Pays; ôi que le même

( 173) Chancelier fcroit enfuite le krment en préfence du Prince Se des Etats de Brabant.

Butkens rapporte les Articles qu'il en cite, mais cette même Joycuj'i Entrée le trouve dans le pre- mier vol. des Place, de Brab. fol. 145 & fuiv,

Philippe l ne Turvécut que fort peu de tems après, «tant mort le 4 Août 1430. Il eft enterré à Tervueren. Sa mort étant devenue publique , dit Buikens , hc. cit. §. 5 , le Duc de Bourgogne Philippe , lur-' nommé le Bon , & Marguerite de Bourgogne veuve de Guillaum.e Comte de Hainaut & de Hollande^ s'entredifputerent (a fucceffion : l'un & l'autre en- voyèrent leurs Ambafîadeurs pour remontrer leur Droit aux Etats, qui fe tenoient toujours aflembiés à Louvain , & qui enfin fe déclarèrent en faveur de Philippe. Mais avant que de le reconnoître pour Duc, ils traitèrent avec (&s AmbafTadeurs , tou- chant la forme du Gouvernement qu'il feroit obligé de tenir, & fur les Droits, Libertés & Privilèges» qu'ils demandoient qu'ils leur fuffent accordés & confirmés par ferment folemnel.

La principale partie de ce Traité rouloit fur le pou- voir &C fur l'autorité du Confeil. Ce Duc ayant dif- férentes Provinces , on jugeoit , que fes affaires ne lui permettroient pas d'être toujours dans le Brabant : on voulut donc s'affurer , qu'en l'un ou l'autre cas de préfence ou d'abfence , le Pays ne fût gouverné que par le miniftere Brabançon : c'eft ce qu'on voit à toute évidence par l'aéle de la Joyeufc Entrée de ce Duc du 5 Octobre 1430. il fe trouve au ler vol. des Place, de Brab. 1^1 & feq.

Il y fut ftipulé, que le Prince fera obligé de pren- dre le titre &c les armes de Lothier , de Brabant , de Limbourg, & du Marquifat du Su Empire. Q^\ie ce titre , ces armes devront être gravés fur le fcel <du Brabant , qui fera toujours diflingué de celui des

(174 ) autres Provinces ; que ce fce! ne fortira point 'du Pays ; que toutes les Dépêches qui regardent lefdites quatre Provinces, & le Pays d'Outremeufe, & nul- les autres , en feront fcellés par un Secrétaire dé- puté aux affaires Brabançonnes , & fouffignées par quatre Confeillers du Confeil de Brabant ; que ce Conlell fera comporé de fept peribnnes des plus dignes & des plus capables ; du nombre derquelies 4era le Chancelier, natif de Brabant, fâchant les trois langues; que des (ix autres, quatre devront cire Brabançons , ou polTéder Baronnie en Brabant ; 6c quant aux deux autres reftans, ils feront tels que le Prince voudra les choifir ; pourvu qu'ils fâchent le flamand , que le Prince étant au Pays , il devra faire traiter par ce Confeil toutes les affaires con- cernant lefdites Provinces , & qu'à ce fujet ce Con- feil fuivra toujours le Prince, & fe tiendra dans l'en- droit où il réfide ; mais que le Prince fortant du Pays , il le placera en Brabant , dans quelque lieu commode, il lui confiera le Gouvernement-Gé- néral des mêmes Provinces.

Que le Prince ne pourra établir ni deflituer aucun Officier , non plus que remettre aucune amende ou forfaiture , fans l'avis & l'approbation du Confeil , ou de quatre Confeillers, au moins (qui, attendu le nombre de fept , faifoient la pluralité), fauf l'Etat de Droffard , & celui de Receveur Général de Bra- bant , pour lefquels il faut l'approbation de fix Confeillers.

Que le Chancelier devra être choifi du corps du Concil, & cela par l'avis de fix autres Confeillers, -qui affirmeront fous ferment , qu'ils le croient ca- pable & utile au fervice du Prince , & à celui du Pays. Art. 4, 5,8, ]6 , 53 , & 54 de la même Joycufc Entrée.

Le tems ne me permet pas de fuivre le fil ou la

C 175 )

fuite des Ducs fucccflifs, & j'eftime , qu'il fuiSra de remarquer , que ces Articles cUns leurs Joycufcs Entrées^ julques dans celle du Duc régnant, ont été foigneufement répétés : fur -tout que toutes les nffaires àzs Provinces de Lothier , de Brabant , ce Lunbourg , du Marquifat du St. Empire, & des au- tres Pays annexés , feront traitées uniquement & fouverainement pardevant le Confeil de Brabant , &c que ce Confeil ne fera aux ordres de perfonne , fînon du Prince même, & de fon Gouverneuf & Capitaine - Général, f'oye^ V Ati. 5 dt la Joyeufe Entrée de. Sa Majcjlc du ly Juillet ijSr.

Il eft même certain que perfonne , hors fadlte Majefté , & Leurs Akeffes Royales , les Lieutenans Gouverneurs - Capitaines Généraux , ni le Confeil Privé , ni le Miniftre Plénipotentiaire , ni même le Gouvernement Général , n'ont aucuti ordre à don* ner au Confeil Souverain de Brabant.

Les termes dudit 5e. Art. du Pacle , ou Traité fait entre le Prince 6: les Etats repréfentant le Peuple , font à cet égard évidens & décififs. D'où l'on doit conclure , que ce Confeil n'eft pas feulement un Confeil de Juftice, mais auffi un Confeil de Gou- VMneneent.

L'autorité du Confeil de Brabant furpaiTe même celle du Grand-Confeil féant à Malines ; il a devers foi la Chancellerie : fon Chancelier en eft le Garce des Sceaux perpétuel : toutes les Dépêches en Bra- bant , & aux Pays y unis & annexés , ou en dé- pendans , doivent être fcellées de ce Sceau par- ticulier ; faute de quoi , elles n'ont aucune exé- cution.

Ce Confeil aceordolt grâce de .mort , rappel de ban , lettres de répit ou attermination , de fureté de corps , de ceffion de biens , d'adjonétion à l'office , pendant la yle de l'Officier, de iupplément d'âge &c.;

( I7M & à cet égard il étoit en paralelle avec le Confeil- Prlvé.

Il eft vrai , que fouvent on a voulu lui contefter ces Prérogatives ; mais alors les Chanceliers , per- ibnnes de naiïïance & de mérite , ont toujours fu écarter les pitges qu'on lui tendort. Ce n'eft que pendant ce fiede que l'intrigue , habilement menée , a pu parvenir à les fins , en établifTant des Chan- celiers , (i je puis le dire , de balle extraction , qui ont laifTé priver le Confeil de l'es Prérogatives, & înfenfiblement faper Tes fondemens , au point que, d'un trait de plume , on le veut aujourd'hui lup- primer : témoin le 3e. Art. du prétendu Diplôme portant Etablïjjîmtnt des nouveaux Tribunaux de Juflicc^ du piemier Janvier lySj.

Mais grâces à la valeur , à la bravoure , à la pru- dence , & à l'attachement de nos ancêtres pour le Prince ! grâces à leur amour pour la Patrie ! ils ont cimenté le^; fondemens du Confeil de Brabant d'un moellon fi iblide & fi inébranlable, que ni fape ni pic ne peuvent lui porter coup. Les Articles 4,5, 6, & 7, du Traité fait entre le Prince régnant & le Peuple , le 17 Juillet 17^1 , connu fous le nom de Joyeufe Entrée , lont les garans de fa confei^- tion & de fa durée.

Le Confeil de Brabant , indépendamment du fufdit Traité entre le Prince & le Peuple , a encore un autre appui , qui doit en écarter la fupprefTion , & qu'on a eu foin de laifTer ignorer au Prince.

L'Empereur Charles IV accorda en I349 à Jean lll. Duc de Brabant , le fameux Privilège par forme d*£dit perpétuel , nommé la Bulle d'Or Erabaminc , par laquelle il efl interdit à tous Princes EcciéfialHques & Séculiers, Juges & Tribunaux de l'Empire d'exercer aucune Jurifdidion fur les Habitans des Duchés de Brabant , de Limbourg & de leurs dépendances ,

de

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de les citer, évoquer ou arrêter en leur perfonne ^ ou bien,». , dans quelques afFoires que ce puiflTe être , criminelle*: , réelles ou perfonnelles.

Cette B'jlle fut confirmée par l'Empereur Sigif- mond en 1414, & par l'Empereur MaximiHen en i^iz , alnfi que par l'Empereur Charles V le 5 Juillet 15^0. Cette dernière confirmation fut donnée de l'avis des Etats de l'Empire, & Charles V commit l'exécunon de cette Bulle au Confeil de Brabant, qu'il conilitua à cet effet Pûcairc Impérial avec au- torité de procéder contre tous Contrevenans, Princes ou Membres de l'Empire , Séculiers , ou tccléfiaf- tiques, de quelque rang eu condition qu'ils puflenc être , comme contre des rebelles ; 6>c de les con- damner à une amende de deux cents marcs d'or , applicables pour une moitié au Fifc Impérial , & pour l'autre au Duc de Brabant ; & de les priver de leurs Droits , Rangs , Honneurs & Dignités , même de les mettre au ban de l'Empire : ordonnant bien exprefîement , que tout ce que le Confeil de Brabant fera & décernera dans celte matière , aurd la même force & vigueur , comme «.'il eût été fait & décerné par l'Empereur même.

Butkens tom. 2 loc. cit. §. 5 , rapporte que le Confeil de Brabant , en vertu de ces concevons , a toujours ufé de l'autorité de Vicaire Impérial^ &C de juge délégué dans l'Empire : qu'en cette qualité il a pris fouvent connoifTance , hi porté même des Décrets contre des Princes du premier Ordre. Haraeus rapporte, dit-il» qu'en l'an 14^7? le Duc de Ju- liers fut cité pour les violences par lui exercées contre quelques Citoyens de la Ville de Dieft , qu'il avoit fait condamner à mort.

Cette Bulle n'a pas été accordée imiquement en fa- veur du Duc de Brabant , mais auffi des Braban- çons &i. Limbourgeois \ Se de plus fon exécution a été

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donnée Si commife taxativemer,t au Confcil de Bra- bant par la confirmation de Charles V , du 3 Juil- let 1 550.

De lorte que fi le Confeil de Brabant étoit Tup- primé, cette exécution crouleroit d'elie-inéme, ainfi que la moitié de l'amende de deux cents marcs d*or que ladite confirmation de Charles V applique au Duc de Brabant : & par conféquent les Brabançons feroient indiredement prives du bénéfice de la Bulle d'Or.

Il eA fenfible, que tous les Ducs de Brabant fu- turs ne feront pas Empereur Romain , & Duc de Bra- bant à îa fois ; ainfi que de ce chef la fuppreHion du Confeil de Brabant feroit à l'avenir préjudi- ciable tk au Duc & aux Brabançons.

Revenant au fufdit prétendu Diplôme, il eu. en- core vrai de dire, que, fuivant le 9me. art., on a voulu fupprimer , à l'exception des feules Jufiices jmilitaires , tous les autres Tribunaux , Corps 5c Cours de Juflice àes Pays-Bas, & conféquemment aufli les Bines de Santhoven & d'Uccle.

Le Duc Régnant s'efl: formellement engagé arf. 40 de fon paéle ou traité, fait fous ferment le 17 Juillet 1781 avec fon peuple repréfenté par les Etais , qu'il les tiendra (ces Bancs) en état tels qu'i's étoieut lors, & comme il appartient, fes Eche- vins d'Uccle tenant leur réfidence en la Ville de Bruxelles.

Ayant parlé en particulier du Confeil de Brabant , des Bancs de Santhoven ^ d'Uccle , dont il eft ex- preiTément fait mention dans les Joyeufis Entrées^ 3e ne parlerai qu'en général des autres Cours de Juftice , parce que la préteadue lupprellion n'eft anlTî portée qu'en général par le fufdit Diplôme , fauf cependant qu'à l'égard des Juftices Seigneuriales il en e(l fait un article féparé : aina je propoferai

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mes. raifons fur ces deux points. Je commence par les trois Chefs-Villes.

Les Ducs de Brabant, dit Butkcns tom. 2 Uv. 8, ont de tout teins confié, & commis la Police, con- duite , & Gouvernement des Villes de leurs Pays aux Magiftrats , qui étoient étaWiî à cet effet.

La charge d'Echeyin eft fort ancienne , &c a ea félon toute apparence fon origine en France, puifcjue nous liions aux Capitulaires de Charlemagne ( qui font les plus anciennes Loix des François .1 qu'il commandoit à fes CommilTaires d'élire des Echevins , des Avocats, & des Notaires, ut M'iffi nojtrl Sca^ binos , Advocatos , & Notarios PER SlNGULA LOC A eligant ; 6c il y a plus de huit cents ans que cela fe pratique.

Lefdits Magiflrats ont de tems immémorial joui d'une telle autorité en Brabant , que devant leurs Lchevins font comparus le plus notables Seigneurs de ce Pays-Bas & de divers autres Provinces & Royaumes, pour y pafTer le« contrats de leurs ma- riages, teftaniens, partages & autres atfles de Juflice.

La forme d'élire les Echevins eu. prefcrice par JUSTINIEN in authcnticis ; & il efl trcs-nécef- faire qu'on choififfc des perfonnes de confidération , qui aient les conditions fuivantes : premièrement , qu'ils foient natifs de la même Ville, & non étran- gers ; parce que ceux qui ne iont pas natifs de la même Ville , ou qui n'y font domiciliés que depuis quelques années , ne peuvent jamais être fi propres au Gouvernement & maniement des affaires d'icelle que les originaires ; d'autant plus que pour l'ordi- naire un étranger n'eft jamais C\ agréable aux ha- biîans 6>c bourgeois que leur concitoyen , qui a na- turellement plus d'affeâiion pour la confervation de la Vilie ; joint aufli que par la difpofuion civile , extrantï facile ad regni arcana non fum admitundu

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Quant au Magiftrat de Louvain , il dit que (es fept Echevins é(oient anciennement des fept Ligna- ges Patriciens & Nobles ; mais que différentes dif- cuffions étant furvenues , elles turent afîbupies moyen- nant un arrangement que firent le Duc Wencelin & la Duchefle Jeanne , par forme de Concordat & d'Edit perpétuel, en date du 8 Septembre 1378; que delà en avant fero'nnt déjîgnés tous les ans par le prince quatre Echevins des Lignages privilégiés & trois de la Commune , & avec iceux onT^e Confeillers defdits Lignages^ hors dcfquels Jeroit choiji un Bourg" Mellre , &c. ; avec pluiieurs autres points , dont ils dépêchèrent leurs Lettres , qu'on nomme la Char- te de Règlement de Louvain.

Quant à cette Ville de Bruxelles, il dit que les fept Echevins ( qui forment l'Echevinage ) ont été de tems immémorial élus dans les fept Familles Pa- triciennes i nobles & privilégiées ; enforte que per- fonne n'eft admis à l'emploi d'Echevin ou de Ma- gifirat , s'il n'eft iffii d'une defdites familles.

Ce Privilège eft fi notoire , & fi conftamment ob- fervé jufqu'à ce jour, que perfonne de la Ville n'en doute.

Butkens rapporte une lifte des Magiftrats de cet- te Ville, qu'il commence feulement à l'an 1539. Mais il avoue que leur origine eft plus ancienne ^ & il s'exciife de ne commencer fa lifte qu'à la fuf- dite époque, par la raifon qu'autrement il ne l'au- roit pu donner fuivie & fans lacune.

Il fe trouve néanmoins dans le Tréfor das Privi- lèges de Bruxelles , dit den Luyjîer van Brabanty une Charte du Duc Henri I , en date deux jours avant le Dimanche des Rameaux 1134, qui porte, qu'on fera le choix Echevinal à Bruxelles huit jours avant la St. Jean ; preuve évidente , qu'alors il y avoit des Echevins à Bruxelles,

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Quant aux Echevins de la Ville d'Anvers , Bue- kens rapporte, que dès l'aa 1130, ils étoient au nombre de douze, qui furent augmentés dans la fuite jufqu'à feize , & qu'alors ils étoient au nom- bre de dix- huit.

Quant aux Echevins des autres Villes, peut-on douter qu'elles n'en aient eus ? Je trouve même une Charte , extraire de celles de Brabant , rappor- tée par Butkens aux preuves du Livre 4 , foL 46 , de Henri I Duc de Brabant, en date de iit;2 , par laquelle , entre autres , il oélroya , que tous les Bourgeois de Vilvorde ne leront traités par juilice qu'en leur Ville , & pardevant leurs Echevins.

Sur quoi il faut remarquer, qu'à cette époque les Cours des Echevins exiftoient déjà, puifque le Duc. ne les établiffoit pas , mais qu'au contraire il fta- tuoit, que les Bourgeois de Vilvorde devroient être traités dans leurdite Ville pardevant leurs Echevins.

11 eft encore à remarquer , que puifque Vilvorde , qui n'a jamais été une des Chef-Villes du Brabant, avoit déjà des Echevins , il efl moralement fur , que les Chef- Villes en avoient auflî.

Butkens rapporte loco cit. que dans la Ville de Bois-le-Duc , Godefroid Duc de Brabant en établit cinq en 1584.

Dailleurs il eft palpable , d'après robfervatiori de Butkens ci-deffus rapportée, que chaque Ville ôc Franchife a eu fes Echevins dès l'jnftant qu'elle a été érigée ; & cela devient indubitable , lorfqu'on obferve que dans les Joyeufes Entrées des Ducs de Brabant , depuis des fiecles & des fiec'es , il a été (lipulé & convenu , comme il l'eft par l'Art, i de celle du Duc régnant du 17 Juillet 1781 , qu'il les traitera & fera traiter tous les Prélats, Maiions-Dieu, Barons, Nobles & bonnes Gens, & Sujets de (qs Villes, Eranchifes, & Pays de Brabant, & d'Ou-

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tre-Meufe en toutes chofes par droit & fenfence i Julvant le droit des Villes & Bancs , il appai' tiendra & devra être fuit.

Quafit à la fuppreiîion des Juftices Seigneuriales, il faut obferver , que de celles-ci la plus grande partie a été vendue par le Prince, ou de l'a part, aux pofiefTeurs d'icelies , ou à leurs auteurs , & que quelques-unes de la part du Prince ont été enga- gées aux poflefieurs , ou à leurs auteurs , & que les Bcquéreurs en les acquérant, ont eu ces JuTùces en vue pour régler leur prix d'achat Ça').

De plus que les pofîeireurs à chaque changement, foit par fuccefllon , donation ou ach?it , en ont taire le relief , & payer les droits , &r même à l'a- venir en devront faire le relief & payer les droits ; quand, même, dans la fuppofition du Diplôme, ils en feroient privés; car le f^iifeur <]udit Diplôine n'y a nulle-part.rien difpofé relativement à la ceffation de ces reliefs.

(a) Dans le Diplôme du 22 Oilobre 1626, qui renferme les condiîiorjs de la vente d'un très-grand nombre de Seig- neuries de Brabant Cv de Limbourg , on Ht art. X. » Item, es Viiiages tk Seigneuries de toute ancienneté il y a eu Banc & Juftices, composez deMayeur &. Eciievins, lei'dits Bancs & Juftlces demeureront en même état qu'ils ont été jufques à préfent, & iront à rcffort , Loi & Ap- pel aux Co'-.rs & Confeils qu'il appartiendra , comme autres Juftices hames y fituées , & pourront les Ache- teurs établir & renouveller les OfBciers , &c. art. XI. Mais cil il n'y a point pour le préfenr , Icfdits Ache- 5, teurs en pourront établir & ériger de nouveaux , comme ., auiîi ériger figne patibulaire, carquant, plllory , & antres ,, marques deJuflice & JurifdiC'Lîon hautaine, &. y mettre tel Mayeur , Echevins &• autres Officiers capables , qu'ils ;, trouveront convenir, pour faire Droit, & prendre con- noiflance de tovues, tant caufes cviff;inelles que civiles, & ,, au furplus , exercer toute telle JuAlce qu'appariiendra aux Seigneuri^îs hautes , Moyennes Se b:iiTes en Erabant. "

( •»? )

Il n'a pas même W\(fé entrevoir, que fori inten"»" tîon feroit telle. Les circonrtances & la façon dont on agit , ne permetrent pas de fe flatter qu'on les fera ceflfer , ni qn'on en indemnifera !a perte ; car l'expérience jurqu'ici a conftaté , que le Datif efî au néant , &; {'Ablatif à place.

Rien n'ed fi contraire à la bonne foi que de vou- loir reprendre ce que vous avez vendu , & le droit porte qu'il faut repouffer certe demande: Querrz cnim de cvi&ione tenet aciio ^ eumdtm egîntim rcpcllit exapiio.

En outre , rede a voir , Meffeigneurs , ii cette fuppreflïon des Juftices n'efl pas une rufe pour fa- per infenfiblcment, métne anéantir l'Etat Noble cette Province, comme celle de ne pas conférer les IVélatures vacantes en eft une pour anéantir i'Etac Eccîénaftique , envahir les biens des Abbayes,' &c devenir ainfi feuî maître abfolu.

l! vous eft connu , Meffeigneurs , qu'aucun ne peut être reçu Membre de l'Etat Noble , fans qu'il ait une Terre titrée , ayant haute Juftice , dont il ti\ en droit de porter le titre honorifique: l'Art. 4 des Inflru£lions pour la direéiion dts preuves à faire le conflate.

Refle à voir fi par la fuite , dans !c cas qu'on admît ladite fupprefiîon , on ne voudra pas difpu- ter aux Seigneurs le droit de Hsute- Juftice , & en conclure qu'ils fout dépourvus de la qualité requife pour être admis à l'Etat Noble.

Ainû la prudence autant que l'équité exigent qu'on n'admette pas ladite fuppreffion projetteè : on peut , & on doit s'y oppofer.

Ce prétendu Diplôme bleffe le droit de tous le* h.ibirans de cette Province, & il ed contraire à la Confiirution fondamentale ; il n'efl fait , ni porté jl l'intervention du Confeil de Brabant, comme il îc devroit être, félon que j'ai remarqué ci-devànt; &

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qui pluseft, il porte même la fuppreflîon Scranéan- tiiTement de ce mêrne Conlei!.

Ce Diplôme porte la deftrudion du Paé^e ou con- vention , que le Duc régnant a fait & a faire pour que nous le reconnuffii^ns pour notre Prince: on voit même, qu'il y eft dit, Article :o , que tous Juges fans exception prêteront ferment à leur admiffion fur Toblervation exaélc du nouveau Rè- glement de la Procédure Civile , & des lnfiru6tion$ y relatives.

C'eft l'unique ferment qui leur eft enjoint , & du moment qu'ils l'ont prêté , tout eft dit ; fuivant la difpofition dudit Diplôme , ils entient en aéli- vité , fans qu'ils doivent prêter aucun autre fer- ment.

Cependant , fuivant la Joysuft Entrée , tout Juge en Brabant doit jurer l'obfervation d'iceîîe > Art. lo; le Prince eft convenu avec le Peuple de le faire obferver , &c. il l'a promis même fous ferment,

Confsquemment ledit Diplôme eft diainéiralement oppofé à fon contrat, à fa piomciïe & à fon fer- ment. Que peut-on , ou que doit- on attendre de celui qui contrevient à fa parole donoée , à fon con- trat, à la bonne foi , & même à ion ferment?

Jugez-en , MciTelgneurs ; un chacun penfe à cet égard , comme 11 !e fent , je me contenterai de vous laifter purtei votre jugement : perfonne que le Tout- Puiffant ne ccnnoîtra le mien ; il doit nse fuffirc de voii-^ l'avoir fait remarquer.

Je (lois cependant dire quelcue chofe relat've- ment au nouveau Règlement de la Procéduie civile, dont les Juges doivent jurer l'ob'^ervation exafte ; c'eft , que ce Réç^lement contient^ des erreurs , des contradiélions , même des abfurdirés telles , qu'on feroit bien d'en envoyer l'Auteur à CFcole. Ce Rè- glement , dont l'exécution eft impoffible , & qu'on

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propofe pour le bien public , prépare le malheur du Pays <k la ruine de bien des faoïiîles. Je ne fuis ni Monarque ni Légiilateur ; mais s'il ctoit poiîible, que mon nom pût paroitre à la tête d'un tel ou- vrage, je ne le fouffrirois pas > parce que je fuis cer- tain , que je leroi' bafoué tant des Juriicon^ultes , que des Praticiens mciiie les plus médiocres.

Je conclus donc pour les railons ci- devant détail- lées , y jointe la dilpcfition du 7e. Art. de ia fé- conde Lettre additionnelle du Duc Philippe-Ie bon , en date du j.^ Novembre !4S7 » qu'il a pareillement promis, & juré d'obferver : que cedit Diplôme n'eft pas admiflîble , qu'on ne doit pas y acquieicer , com- me étant non-feulement contraire,- aux Conftitutions foodamentales de cette Province , mais comme por- tant la deflruftion & l'anéantidement d'icelles , piiiiqu'il nous fait force & volonté.

Il me refte encore à traiter d'ui: objet de la plus grande importance ; des Abbayes qu'on laiflfe dé- pourvues reipedivement d'Abbés & d'Abbtfles, ce qui eft pareillement contraire à la Joyeuje Entrée,

Qjant à ce point , il faut obferver d'abord , qu'au- cune Abbaye, Prieuré, Maifon-Dieu , ou Couvent n'exifte en Brabant fans préalables Lettres d'06lroi , & de l'agrément des Villes : en fécond lieu , que tous généralement ont obtenu des Lettres ^ amsnifation ; ainfi que tous , conjentïentïhus Principe & Populo , (ont admis dans la Province, y vivent au rang des Sujets, ôc forment une partie de l'Etat : enfin que chaque Abbave conflitue un corps , dont l'Abbé ou l'Abbefle eft le Chef. Or il eft de toute évidence, qu'un corps naturel fans tête ne peut fubiîfter , ôc il en eft de même de ces corps allégoriques.

Les Abbayes fans Abbés fr-ufFrent une dégrada- tion continuelle , tant par rapport au fpirituel , que par rapport au temporel ', deforte que fi on ne les

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Tuppriine pas abfoliîment , comme on a tenté ce fupprimer le Confeii'de Brabant , & toutes les Cours de Jiiftice , elies s'anéantiront infenlible-ment d'elles- mêmes : car n'ayant pas respectivement d'Abbé ou <!'Abbe(T£ , perfonne ne fe présentera pour y être admis ; mr.is ne recevant pas de Novices , il n'y aura pics de jeunes Profès : ainfi le corps s'étein- dra , & par une coniequence inévitable , Tes fonds devenus des biens vacans , feront dévolus au Fifc ; & nous n'aurons plus de Corps Eccléfiafiique- Ré- gulier.

Ces obfervations faites , je vous prie , MelTeigneurs , cTe faire attention aux premier & cinquantefeptieme Articles de la Joyeufe Entrée, du ly Juillet 1781. Le premier porte entre autres , que Sa Majefié leur fera bon , équitable & fidèle Seigneur , & qu'il ne leur fera , laiflera , ni foufFrira être fait en fciçori quelconque aucune force, ou volonté &c. , le 57e., que dorénavant on ne pourra en maniera quelconque donner , faire ou laiïTer donner dans ledit Pays de Brabant aucunes Abbayes , Prélatures , ni dignités en Commande &c.

Peut-on dire qu'en eu bon , équitable 5; fidèle , quand on ne rend pas à chacun ce qui lui ei\ <, & ce qui lui appartient ? La négative efl: évidentip Jîme ; ciT c^eii contrevenir manifedement au troifieme précepte de Droit , jus fuum cuique trihuere. Or, c'eft wn droit qui appartient aux Abbaye*, qu'elles aient refpeftlyeraent leur Abbé ou AbbefTe.

Peut-on auffi dire, qu'on ne fait, ne laifTe faire, ou qu'on ne fouffre pas être fait en façon quelcon- que aucune force, ou volonté , quand on fiit tort à lin tiers , qui n'y a aucune part , 6c ne peut l'em- pé:her? On doit fans héfirer admettre la négative; car c'eft contrevenir au deuxième précepte de Droit , altèrum non 'x'din , q^â concerne la Société politl-

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crue, & qui nous ordonne de ne faire aucun préju- dice à qui que ce foit.

Ce précepte puremeut relatif à autrui , nous cLlige à le traiter comme nous voulons être traités nous- mêmes , ce qui forme le bon Citoyen ; & il n'tft pas jufte que l'on foufiVe du tait d'autrui , lorfqiie 'on n'y a point de part.

Les Abbaves refpeif^ivement dépourvues d'Abbé & d'Abbeiîe n'y ont aucune part : le choix tCi fait; les Coinmiiraires font pavés , Se tout ce qui eft re- quis pour obtenir un Abbé, efî achevé : il dépend uniquement du Prince de les nommer, &: il ne le fait pas. La conlequence eft jufte qu'il fait, ou laiïïe faire fores & volontî.

Il fait môm.e pis, que ce à quoi il s'eft engagé, audit Art. ^7, cii ne donner ^ faire on la'iffcr donner CCS Ahbayis en commence : car en ne nommant ni Abbés ni AbbeiTes , U fait que les Abbayes dépériront, dont à la fui'e i! pourra s'approprier tous les biens, au lieu que les Abbés Commendataires en ")ouiroient d'une partie , & ne manqucroient pas de travailler à en conferverl'exiftence; 5<: peut- être y reu(iiroient-ils.

Entre bien d'autres objets de plaintes , qui me ref- tent encore, je traiterai par préférence ce ce qui tou- ctîe îe plus direftement l'état des Citoyen^ ; tel eic l'enlèvement du iieur de Hondt , Habitant de cette Ville.

11 m'eft impofîîble de fixer l'époque de cette en- lèvement , mais l'époque n'y fait rien , il fufEt que le fait foit vrai , notoire.

La caufe en eft incornue ; on fait feukment par- la voix publique , qu'on le croit impliqué ï^ans l'af- faire , dont le Général Legisfcldt , prifonnier à Vienne, eft accufé.

Quoi qu';l en puifTe être , il eft conftant qu'on Ta furpris, enlevé, mal^-ré toutes les réclamations des

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ï^nviîffges du Pays, qu'il a pu faire; &c qu'on Ta nuitamment & furtivement tranfporté à Vienne , les fers aux pieds & aux mains.

Sa malheureufe Epoufe , dont la trifte fîtuation déchire le cœur de tout homme fenfîbie , implore votre fecours , MefTeigneurs , éontre la violation la plus outrageufe du droit des Gens , des Privilèges de cette Ville, & même de la Conftitution fondamen- tale de cette Province.

Je n'entrerai pas dans la Queftion , s'il eft cou- pable ou innocent , parce que cela ne fait rien à l'af- faire ; je dirai feulement que dans la fuppofition gratuite qu'il fût criminel , l'attentat n'en fubfîfte pas moins.

Je ne puis cependant omettre de remarquer qu'il ii'étoit pas convaincu , puifqu'il n'avoit pas été en- tendu par fon Juge compétent : & je dois obrerver aufîi, que fuivant les maximes de Droit , il doit être cenfé innocent : Qui/que prcefumitur bonus , donec probctur malus , & accufare fufficiat , quis inno^ cens erit ^

Dans ces circonftances , l'attentat eft plus outra- geant à fon égard , & il eft affreux pour fon Epoufe : dans quelle cruelle fituation doit-elle fe trouver , fé- parée à trois cens lieues de fon mari? Quelles agi- tations fon cœur ne doit -il pas effuyer ? Quel hor- rible tableau doit (e préfenter continuellement à fon imagination ! Elle voit fon Epoux courbé fous le poids de fes chaînes dans un cachot obfcur & infeâ, ne recevoir pour toute nourriture que du pain & de l'eau : elle le voit à tout moment frémir de crainte de devenir la vi6lime de fes accufateurs, & d'être enchaîné avec des forçats , dont le fort eft cent fois plus cruel que la mort. Elle le voit qui lui tend les bras, pour la confoler, malgré les angoifles dont fon cœur eft déchiré; il femble lui dire Chère,

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»» maïs trop malheureufe Epoufe , votre fituation eft » encore plus déplorable & plus touchante que la » mienne ; je luccomberai à mes maux ; vous me » furvivrez , mais veuve d'un homme qu'on croira » coupable, malgré fon innocence, tâchez que votre *> ame (uive la mienne, vos maux cefferont , &C » nous aurons le bonheur de voir paroître devant » le grand Juge, le Juge des Minières des Rois, » ceux qui nous caufent tant de maux , & leur in- » juftice fera confondue ; ils reconnoîtront enfin » combien les jugemens de Dieu (ont différens des » leurs. «

Il eft notoire , que le Sr. de Hondt eft depuis nombre d'années fixement domicilié dans cette Ville, qu'il y poffede des biens -fonds, & qu'il y a tou- jours joui d'une réputation à l'abri des reproches ; que par conféquent il y a acquis le droit de Citoyen, quoiqu'il ne Teroit pas Bourgeois , ce que j'ignore : mais il fuffit d'être Habitant pour jouir de tous les droits, ^ue la Coutume de la Ville accorde aux Bourgeois , hors ceux qui rendent habiles à entrer dans quelque Corps de Métier : ^rt, 225 eies Cou- tum. de Brux. *

Il convient de remarquer ce que la Coutume de cette Ville porte & ordonne à cet égard, i ^. Art. 4a , les Bourguemaîtres , Echevins & Confeiîlans font Juges ordinaires , ayant connoiffance fur les Bour- geois dans la Ville & fa Franchife , ôc fur ceux du Pays de Brabant , hors les Villes libres, auffi fur ta Habitans de la Ville , non privilégiés , en caufes criminelles, civiles, perfonnelles , & réelles &c.

z°. Art. 64. Il n'eft pas permis à l'Amman ni à fon Lieutenant , ni aux Sergens jurés d'appréhender aucuns Bourgeois , inhabitans de la Ville , pour caufes criminelles , fans due information , ni aufli pour caufes civiles &c.

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5®. Art. 113. Les Bourgeois internes & externes font fujeis au Magiilrat de cette Ville en matière criminelle , & de biens meubles , de dettes , amendes , & a(R:ions perfonnelles , comme à leur Juge ordinaire; la Judicature duquel ils ne peuvent décliner &:c.

4^*. An. 214. Les Bourgeois de Bruxelles ne peuvent être traités hors de droit , ni être arrêtés dans la Ville ou fa Franchi'e , pour cauîes civiles , léelles, amendes, ou aftlons perlonnclles ;.,.. & en caufes criminelles , ne peuvent être appréhendés fans préalable information.

D'après ces Articles , il eft évident , que fuivanî le Droit municipal , le Sr. de Hondt n'a pu être appréhendé & tranfporté à Vienne , fans commettre un attentat contre ce Droit. Le Magiftrat de cetre Ville eft Ion Juge naturel & compétent ; au point même , qu'il ne peut pas proroger la Jurifdlftion.

De plus , il n'y avoir ni informations prépara- toires , ni décret de prife de corps à fa charge ; j'entends , Informations prifes par celui nui eft ici dans la Ville le Prépofé public , ou TOfRcier de Juilice, 5^ -un Décret de fon Juge compétent.

Qu'on n'oppofe ; pas qu'il y avoir des informa- tions prifes par un autre Accufareur, & un Décret porté à fa ch.arge par un autre Tribunal. Cet Accu- jateur, ce Tribunal , n'avolent aucune Jurifciétion fur lui. Tout eft donc nul, fuivant le droit, 6c le fentiment univerfel de tous les Criminaliftes.

Et quand même, abftra£l:lon faite de cettç Jurif- prudence certaine, on voudroit oppofer qu'il exiftoit un Décret valable de prife de coips à fa charge, ion enlèvement & tranfport à Vienne n'en font pas moins un atter.tat à la Conflitution tondamentale ^ & au Pacle que le Duc régnant a fait.

L'Art. 17 de fa Joyeufc Entrée porte exprefie- menr, » Que fi quelque perfonne eft appréhendée

l

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» dans le Pays de Brabant &c d'Oufremeufe de Sa- » dite Majeitë , qu'il ne la fera mener, ni laiffera » mener Prifonniere hors desdits Pays.

De Hondt a été appréhensSé dans cette Ville même de Bruxelles par des pièges abominables qu'on lui a tendus , & d'une façon diamétralement oppofée à la bonne foi; on l'a lié, garroté, transporté à Vienne, par ordre de Sa Majefté , à ce qu'on lui difoit.

Cette appréhenfion & tranfport faits par ordre de Sa Msjefté, font des attentats & des allions de force ouverte les plus cara^leriiées.

Cependant Sa Majefté l'Empereur, par fon Pafle d'Inauguration, Art. I, a formellement ftipulé&C juré, qu'il ne leur fera, laiffera , ni (ouffriia être fait, en façon quelconque, aucuiîe force ou volonté.

Combinez à préfent l'appréhenfion & le tranfport de De Hondt à Vienne avec la ftipulation reprife audit Article. Q^el contfafle ! Ne diroit-on pas qu'il n'a fait ce Pa£\e qu'avec le defieiii de ne pas s'y tenir ; ou du moins de ne le fuivre qu'en ce qu'il lui plairoit ? C'efî néanmoins une Jurifprudence univerfelle , adoptée mém.e entre 1-es Nations les moins policées , que toute CONVENTION FAITE OULIGE.

J'ai appris qu'on vouloit légitimer cet attentat ,- par la raifon que De Hondt avoir eu la qualité d'jnf- pefteu-- des vivres ; mais ce prétexte efl plus fpécieuj: que folide. De Hondt n'a jamais été engagé comme militaire ; il n'a prêté aucun ferment : enfm , il n'a traité que pour la livraifon des fourrages aux troupes.

11 faut encore remarquer , que cette entrcprife n'a été faite que pour la Guerre, que Sa Majeflé vou- loit pourfuivre en qualité de Duc de Brabant contre la République d'Hollande, pour l'ouverture de i'fcl- eauti d'où il refaite, i". que De Hondt a contracté

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ici en Brabant , i*. qu'il a contrarié relativement au Duché de Brabatit.

Du premier réfultat il s'enfuit , que s'il eft cou- pable de quelque crime, fon procès doit abrolu- ment être inftruit en Brabant , &c que c'eft en Bra- bant qu'il devroit fbbir la peine , à laquelle il pour- roit être condamné: parce qu'il eft certnin , fuivant la Jurisprudence criminelle , quod rationt domïciL'ù accufatus de crimir.c fortiatur forum comptuns , de même que rationc Locï ^ uhï crimtn perpetiatum eft: car ubi te capio , ibi te pnnio. Dans les avions per- fonnelles &c civiles , le domicile , &t l'endroit le contrat s'eft pafîe, donnent auffi \e forum ou la com- pétence à l'égard du Juge envers celui , qui doit être aftionné.

Il fuit du fécond réfultat , qu'ayant contrafté eti Brabant, & par rapport à cette Province, il ne peut être aftionné, ni tranfporté hors du Brabant, encore moins dans l'Empire; la Bulle d'Or Brabanrine , dont l'Empereur , comme Chef de l'Empire , doit maintenir l'exécution, eft décifive à cet égard , com- me je l'ai démontré ci-devant en traitant de la fuppreflion du Confeil de Brabant.

En outre , on peut encore oppofer à cet enlè- vement & tranfport de force le 2 4me. Jrt. de la Joyeufe Entrée, qui porte , » Que Sa Majefté ne » fouffrira, qu'aucun de fondit Pays pourra arrêter, » inquiéter, ni adjourner un autre, hors le Pays, » fi ce n'eft qu'il feroit fugitif, fans fupercherie de » quelques chofes, telles qu'elles fuffent. de même, » ceux de fefdits fujets , qui provoqueroient un » autre hors le Pays, le feroient provoquer, ou ap- w peller, qu'ils fourferont deux cents marcs d Or , » ou feront autrement corrigés , à l'arbitrage , ,& y modération de ceux de fondit Confeil de Brabant «.

Suivant cette article, le Duc veut affranchir tous

ceux

ceux de fon Pays d'être arrêtés , inquiétés , ou ajournés hors dudit Pays , par les habitans d'icelui. Et il fait prendre, & transporter de HoxNDT dans un cachot, & il le retient prilonnier à Vienne!

C'eft vraiment pis qu'arrêter & inquiéter ; aufîî eft-il abfolument néceflaire , Meffe-gneurs , que vous le fouteniez , & le fafliez reproduire dans le Bra- bant, pour y être fon procès fait & partait, s'il y a matière, pardevant fon Juge compétent, jufqu'à la Sentence définitive; ôc s'il eft innocent, le ré- tablir dans fon état, avec dédomiragen-ent de toutes pertes & dommages fouffetts; & s'il eft coupable, le punir fuivant la difpofition de nos Loix.

Si l'on ne le réclame pas, cet exemple tirera à conféquence , & perfonne ne fera plus fur de foii état civil. On nous pourra tous enlever & tranf- porter , l'un devant & l'autre après.

Mais il efl: tems que je finifTe : car fi je devois détailler toutes les infradions &c atteintes faites oc portées à nos Privilèges , & à la Conftitution fon- damentale de cette Province , il me faudroit écrire des volumes. Je crois en avoir dit allez pour vous démontrer, Mefleigneurs , que la conflitution fonda- mentale du Pays eft violée , malgré que le Duc régnant , par ia Joyeufc Entrée , ait fi foiemnel- lement prom.is , & fe foit obligé fous ferment de la garder & remplir exaélem.enr.

Mais puifqu'il ne remplit pas fes engagemens , permettez-moi de vous rappeller, que par le 59me. Art. Son Alrefle » Albert , Prince Roval de Pologne » & de Llthuanie , Duc de Saxe-Tefchen &c. a au » nom de Sa Majefté promis de bonne foi & juré » perfonnellement , fur les faints Evangiles , pour » Sadlte Majefté, fes Hoirs &c SucceiTeurs , à tous » généralement, Prélats, Maifons-Dieu, Monafleres, iy Barons, Chevahers, Villes & Franc hifes, & tous

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>> Sujets (îe Sadite M;jjefté & bonnes Gens de Tes » Pays de Brabant & d'Outremeuie , leurs Hoirs » & SuccefTeurs, de les tenir dorénavant tous en gé- y> néral fermes & ftables à toujours , & de ne ja- » mais y contrevenir , ni fouftrir qu'il y foit con- » trevenu en aucune manière; te s'il arrivoit, que » Sadite Majefté , fes Hoirs & Succefleuts vinflent, » allaient , ou fiffent à l'encontre , par eux , ou » par quelqu'un d'autre, en tout, ou en partie, en » quelle manière que ce foit, en ce cas, il conjcnt » & accorde au nom de Sa Majefté, auxdits Prélats, » Barons , Chevaliers , Villes, Franchiles , & à tous » autres fefdits Sujets , qu'ils ne feront tenus de faire » aucun fervice à àadite Majefté , fes Hoirs ou Suc- » cefTeurs , ni d'être obéiftans en aucunes chofes de » {on befoin , & que Sadite Majefté powrroit ou » voudroit requérir d'eux, jufques à ce qu'elle leur » aura réparé, redrefle , & entièrement défifté ÔC » renoncé à l'emprife ci-deftus mentionnée «

C'eft d'après cette ftipulation & fon acceptation , & fous ces conditions , Mefieigîieurs , que Vous , repréfentant le Peuple de Brabant , avez promis que vous ferez en tout bons & obéiffans à Sadite Ma- jefté , comme des bons & fidèles Sujets le doivent être à leur îéglcime & véritable Piince.

Cette ftipulation & acceptation eft une condition Jlnc qua non ; conféquemmcnt , félon (a propre fti- pulation , vous êtes fondé à en faire uUige comme ont fait vos devanciers SsC ancêtres , les Etats de Brab?nt , envers le Duc Jean IV , qui n'avoir fait que quelque réforme au Confeil de Brabant, comme je i'ai démontré ci-devant.

Vous êtes, Mefteigneurs , à leur place , vous avez les mêmes droits : & le même fang Brabançon coule dans vos veines. Mais la voie la plus douce eft tou- jours la meilleure. Je fais que vous avez eu recours

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à Leurs Alrefie« Ro5'ales , mais fans fuccès : je m'é- tois pourtant attendu que votre démarche auroit eu <juelque effet , fur-tout confidérant que s'étant fait Brahantifcr y il y avoit lieu d'efpéier qu'elles au- Toient pris à cœur les Loix fondamentales Brabari' çonnes : mais quantum ejl in rcbus ïnane!

Enfin je tiens fermement que Sa Majefi^c n'efl: point informée au julle de ce qu'on prétend exécu- ter ici fous l'appui de fes ordres , & par l'abus de fon autorité. On n'aura pas manqué de lui faire part de ce que- des principaux Employés Brabançons avoient accepté de nouveaux Emplois , qui entraî- nent la deftruftion du Confeii de Brabant ; accep- tation qui les rend indignes du nom Brabançon & qui doit les faire conGdérer comme traître* à la Pa- trie , &: à leur ferment qu'ils ont faufle. Ces ac- ceptations , dont on aura informé le Monarque , l'auront induit en erreur ; elles l'auront autoriie à croire qu'on exécuteroit ici tout ce que l'on vou- droit. Je penfe donc qu'il importe hautemei.r , Mef- feigneutN, qne vous députiez quelques Membres de vorre Corps vers la Perfonne Sacrée de Sa Majefté , pour l'informer au jufte des attentats qu'on commet ici fous fon nom.

Et qu'on ne m'oppofe pas que pour cela il fau- droit une permiilion du Gouvernement ; c'eft une erreur. Vous avez con^radlé avec le Prince; il doit vous être libre de vous expliquer vis-à-vis de celui avec qui vous avez contra(5lé : ce feroit autre chofe, vous alliez comme Repréientans de quelque Corps, Peut-être préferrez- vous de les envoyer vers S. M. Très Chrétienne , pour iinplorer fes bons offices & fa Royale Protedion auprès de S. M. l'Empe-eur & Roi. Au reftc , Meffeigneurs, je m'en rappoire à votre fagaclté , fur laquelle je compre ; &'j'e{pere qu'à l'exemple de vos glorieux Ancêtres, vous pri-

N i

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ierverez la Province du coup fatal dont elle ef^ menacée , 5c que vous foutiendrez de tout votre pou» voir Ton ancien luftre & Ts liberté. Je vous pro- tefte , Mefieigneurs , que ce que je fais , n*eft que dans la vue de remplir les devoirs d'un bon Citoven : ce que je fais , je le dois , &c par attachement ponr mon Prince , & par amour pour ma Patrie.

C'efl: dans ces fentimens que j'ai l'honneur d'être avec le plus profond refpeft ,

Me s S E I G NEUR s ,

Votre très-humble S: trè;-obéiffant Serviteur, H. C. N. Vander Ngot jun.

Bruxelles^ ce 23 Avril 1787.

u

OBSERVATION.

N vrai &: zélé Patriote , ayant lu avec plaifir le Mémoire judicieux de l'Illuflre Henry vander Noot , contenant les Droits du Peuple Brabançon & les atteintes y portées depuis quelques années au nom de Sa Majefté l'Empereur & Roi , obf'erve , que ce Mémoire n'eft rédigé & mis au jour , que pour qu'à l'avenir les bonnes Gens du Pays & Duché de Brabant , mis au fait de leurs Droits & Privilè- ges, piiiiTent en tout tems en écarter toute atteinte & infraction ultérieure. Il obferve entr'autre avec l'illullre Auteur qu'autrefois on a fouvent voulu contefier les Prérogatives du Confei! Souverain de Brabant, mais nu'r.îors des Chanceliers, perfonnes de nsilïance &: de mérife , ont toujours fu écarter ie« pièges qu'on lui tendoi:, & que ce n'ert qi:e jj^ndant ce liecle-ci qu'on a pu parvenir à la fin

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^u'on s*ctoit propofée , en établiiïânt des Char.cc- iierf de bafle extraftlon , qui onr laiffé dépouiller le Confeil de (es prérogatives , comme entr'autres feu le ChinceWer Strcithagen , qui à (on avènement à cette Dignitç j aquiefça à l'abandon de quantité d'Oc- trois , grâces &c. donf ledit Confeil avoit conftarn- ment joui jufqu'en 1764, époque de ("on avène- ment à la même Dignité; 6f ces Oftrois, grâ- ces &c. iont repris dans la Dépêche en date ç Avril de la même année , adredée au Conl'eil Sou- verain de Brabant le 11 dudit mois, & dont on croit devoir transmettre la teneur au Public pour (on informatioTi.

€bàRLES-Jlex^XJDRE y Duc de Lorrain i& de Bar y Lieutenant^ Gouverneur & Capiiàinè-Gé- riérji de Pays-Bas, &c. &c.

A

YANT trouvé corvenable de porter à la con- noifiance de Sa Miijijîî les diverfes Repréfentations contenant les raifons &; motifs fous l'appui defqueU vous fouîenez être en droit d'accorder dans l'étendue 4e la Pro.vinc£. de Brabant généralement toutes efpe- ces d'Oclrois de Juftice , de grâces & autres, elle a bien voulu nous faire connoitre , que la concef- fioa dei Oé^rois , étant un attribut ini'éparable de la Souveraineté, vous n'avez pu en accorder que fous ion bon plaifir, & aufii long-tems qu'elle a bien voulu vous permettre l'exercice de cette autorité; qu'en coniequence elle a jugé à propos de (e ré- ferver ou à fon Gouvernement Général des Pay*- Bas, & de vous interdire la difpenfation des 06troii fuivans , à peine de nullité.

1^. Lettres de n-ituralité ^ d'habi'ité à l'cgircl ÀQ tous Etrangers non fujets de Sa Majejfé,

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1^. Lettres de légitimation.

30. Lettres d'amortiflement pour Gens de main- mo'ta.

4'<. Pour récibîiflernent de nouvelles Fabriques.

^*^. Pour la recherche des Minéraux.

6^. Pour Moulins à Eau & à Vent.

7®. Pour l'établifTeiDent des Voitures publiques.

H°. Pour la conftru^lion & entretien des Chauf- fées & excavation on approfondiiTemtnt de Canaux ou Rivières, lorfque ces ouvrages doivent fe taire hors du Diftriâ: ou de la Banlieue d'une Ville, Bourg ou Village.

ç**, Oélrois pour la conftruclion de nouvelles Eclufes & Tenues d'Eau.

ïo". Pour diguer les Terres inondées.

1 ïî". Pour fournir aux Aides & Subfîdes avec tout ce qui y a du rapport.

11^. Ceux qui regardent les Droits Domaniaux ou Régaliens, Papier Timbré, Tonlieue, Acciies , 3Ç)roits & Importions fur les Denrées ou Marchan- difes & choies lembltibles, foit que leur perception ait été accordée aux Adniiniftracions à titre d'enga- gere ou autre quelconque.

ij*?^;Ceux par leiqueis il s*agiroiî d'augmentef une Impofition éép établie.

4°. Ceux qui tendent à acquitter les dettes con- traélées pour quelqu'une des caufes fufdifeç.

ly^. Le Placet des Bulies- Apoftoîiques oour di- gnités Eccléliaftiques & pour les difpo/itions &* commiffions des Supérieurs Eccléfiaftiques étrangers,

i6*-\ Lettres de réiniffion, d'abolition , d'iujpofi»^ tion , de lilence , rappel de Ban, Sauve-gai de ou Saur conduit pour les Bannis, Criminels, Fugitifs, condamnée à peine afRiclive, & autres grâces fem- bîables.

i7*^. Pour Foire franche.

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i8^. Pour Marché hebdomadaire.

l()^. Quant aux Oélrois pour imprimer, on Te conformera à la Dépêche de Son Altcjji Royale du 27 Juillet 1763.

20^. Oclrois pour vendre , aliéner ou changer aux Etrangers les biens fitués fous la Frontière.

21^. Lettres de Si^nijicamus.

En vous notifiant cette difpofition d'après les Or- dres exprès de Sa MajcjU , nous vous prévenons , que, par provifion & jufqu'à autre Ordre, vous pourrez continuer d'accorder en la manière accou- tumée les autres Octrois non compris dans la ré- (erve ci-deffus , & au lurpius qu'il ne fera rien changé ni innové fur le fait des Oftrois en géné- ral quant au Scel ni quant à la Signature. A tant. Chers & Bien-Amés , Dieu vous ait en fa fainte Garde. De Bruxelles le 5 Avril 1764, étoit Para- phé, Ne. Vt. Signé, Char.les de Lorraine : Se plus bas contrefigné , Di Rcuu

UIPLOME par lequel les rênes du Gou- vernement des Pays-Bas font m'ijes par intérim entre les mains de Mr» le Comte de Muray,

J

OSEPH , ê<c. Ayant trouvé bon de rappeller près de notre Personne Impériale & Royale , pour un certain tems , Leurs Altefles R.ovales & notre très- cher Se féal Louis Comte de Barbiano de Belgio- jofo, notre Miniftre Plénipotentiaire dans les Pro- vinces Belgiques fous les ordres des Séréniffimes Gouverneurs-Généraux; l'attention que nous faifons à tout ce qui peut intéreiTer le bien - être de nos bons & fidèles Sujets Belgiques , nous porte à prendre

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tlès-à-préfent les précautions néceffaires pour pré- venir & empêcher les fuites préjudiciables, auxquelles rofdites Provinces Belgiques pourroient être expolées pendant Tabrence de Leurs Alteffes Royales & du Miniftre Plénipotentiaire, fi nous n'avions pas pourvu à leur AdminiRration par le choix d'une perfonne , qui fe trouvant fur les lieux, ait en même tems les qualités requifes pour prendre provifionnellement les rênes du Gouvernement- Général de ces Provinces. A ces caules , par la confiance que nous avons en notre très- cher & féal jofeph Comte de Murray , Baron de Me'gun , notre Chambellan aéluei , Che- valier de notre Ordre militaire de Marie-Thérefe , Confeilier d'Etat intime aâiuel , Lieutenant-Général, Colonel propriétaire d'un Régiment d'infanterie , &c notre Général-Commandant des armes aux Pays-Bas , èz fur la connoifïance que nous avons de fon zèle , de fa prudence & de fon expérience; favoir faifons, que ce que de'fTus confidéré ëc faifant une attention particulière aux fervices diftingués qu'il nous a déjà rendus, & à ceux qu'il continue de nous rendre à notre entière fatisfadion , nous l'avons créé , infiitué 6si établi, le créons, inflituons &: érabliffons p?ir les préfentes notre Lieutenant , Gouverneur &: Capi- taine-Général par intérim & pendant l'abfénce de ïeurfdites Aiteffes Royales aux Pays Bas. A quel eCÎQt nous avons donné & donnons audit Comte Jofeph de Murray, plein-pouvoir & autorité de gouverner -nos Provinces Belgique^ , de vaquer à toutes les af- faires qui y furviendront , de mainreiilr nos Vaffaux & Sujets DANS î>!OTRE SAINTE ReLIGKJN CATHO- LIQUE, Apostolique et Romaine; de faire ob- ferver la Juflice par tous nos Confeils , Jufticiers & 'Officiers, tous & chacun en leur RefTort & Jurif- diction ; de pourvoir & faire pourvoir & difpofer , comme il appartiendra fur k-s requêtes, plaintes ôç

( lor )

recours de nos Sujets ; de taire afîembîer devers lui, ou ailleurs bon lui femblera, & autant ce fols qu'il voudra , les Chevaliers de l'Ordre de la Toifon d'Or , notre Confeil du Gouvernement- C/énéral , &c tous autres nos ConieiU par nous or- donnés &C à ordonner ; d'y faire propoî'er mettre en délibération toutes les matières & affaires qui lui furviendronr ; de prendre fur leurs opinions & avis telles concluions &c réfolutions qu'il apparnendra , & de les faire mettre à exécution ; d'avoir la Turin- tendance, tant de ce qui concerne la Juftice & les Finances, qsi.e fur nos Troupes de terre 6s: de mer> ôc fur les Gouverneurs de nos Provipices & Villes, & fur tous autres Officiers , tant généraux que par- ticuliers de Juftice & de Recette dans toute l'étendue de notre domination aux Fays-B^s ; de faire émaner & publier toutes fortes d'Edits , Statuts , Ordonnances qu'il trouvera convenir au bien , utilité , commodité & bonne police de nofdits Pays & Sujets ; de con- férer toutes Charges , Dignités , Emplois , Offices & Bénéfices de notre difpoHtion , qui viendront à vaquer ; d'accorder 5t oftrover grâce , rémiffion , abolition , pardon &c rappel de banniiTement à tous criminels & malfaiteurs ; de faire convoquer & a<- fembler les Etats de nos Provinces refpeCtives des Pays-Bas, lorfque bon lui femblera, pour y faire propofer telles affaires que notre Royal fervice & le bien-être de nofdites Provinces pourront exiger; de figner de notre nom & fceller de nos Sceaux , toutes Provilions & Let'res-parentes qu'il aura trouvé bcn d'accorder ; quant aux Lettres clofes , nous voulons & ordonnons , que la Dépêche s'en faffe dorénavant fous notre Nom Royal , qu'elles foient: iignées par lui, & par celui de nos Secrétaires, au- quel il en aura commandé l'expédition ; & voulons que ces Let;res Se Provifions, ainfi dépâ.hée^ , ayent

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la même force, valeur & effet, que Nous-mêmes les euffions fignées ; avons enfin autorifé & autorifons ledit Comfe Joleph de Murray , à faire , ordonner , commander & faire exécuter tout ce qu'il verra être à l'avantage & à l'iionnear de notre Royal fervite, & à la conlervation de nos Droits, Haareurs , Sei- gneuries , Autorité & Prééminence , de même qu'au bonheur & à la tranquillité de nofdits Pays ÔC Sujets, tout alnfî , & en la forme & manière que nous ferions & pourrions faire , nous y étions en per- Tonne ; fuppléant à cet tf^t^i par ces préfentes à tout ce que pourroit réquérir ou e>:iger mandement plus ample ; &: promettant en fol & parole d'Empereur &c Roi , d'avoir pour agréable , ferme & flable , & d'obferver inviolabîement tout ce qui aura été fait , convenu & conclu , accordé & exécuté par ledit Comte Jofeph de Murray , en conféquence defdites prélentes, fans jamais faire, dire ni aller , ni foufFrir être fait , dit , ni allé au contraire , le tout fur le pied qu'en ont ufé & pu ufer les autres Lieutenans, Gouverneurs & Capitaines-Généraux , par intérim, & d'après les inftruéVions aftueiles de notre Gou- vernement-Général , & celles que nous jugerons à propos de lui donner dans la fuite. Donnons en mandement aux Chevaliers de l'Ordre de la Toifon d'Or, nos Conf'eillers d'Etat, & à notre Conl'eil du Gouvernement-Général, & à tous autres Conl'eils , à tous Gouverneurs, Capitaines, Jufticiers, Ofïiciers , Valfaux &: Sujets, que ce pourroit regarder & tou- clier , qu'ils ayent à reconnoure ledit JoTeph Comte de Murray pour notre Lieutenant , Gouverneur &c Capitaine Général par intérim de nos Provinces de» Pays-Bas, & comme tel, & repréfentant notre Per- fonne Royale, ils lui faiTent , portent & rendent tout honneur, refpeft & obéiffance , comme à Nous- mêmes; qu'ils l'aident oc l'alîiftent de leurs conféils

& lumières, de tout leur pouvoir, en tout ce qui concerne les aflfaires du Gouvernement- Général , autant de fois qu'ils en feront par lui requis , & qu'enfin ils le faiîent & laiiTent pleinement jouir & uier du Gouvernement- Général que nous lui con- fions de nos Provinces Belgiqnes , cefifant tous con- tredits & empêchemens au contraire; car alnfi nous plait-il : voulons qu'au vidimus des préfentes ou à la copie coliationnée & (ignée par un de nos Secré- taires , foit ajouté foi comme à l'original ; en té- moignage de quoi nous avons figné les préfentes , & nous y avons fait mettre notre grand Scel. Donné à Vienne, !e ^ Juillet ^'J^'J. Etait paraphé K. R. vt. fip^é : JOSEPH, Plus bas itoit : par l'Empereur & Roi , étoit figné : A. G. de Lederer.

Petite Pièce remarquable par des Anecdotes patriotiques que bien des per~ fonnes ignorent,

LES BRABANÇONS DE ZUMJUNGEN.

D

ANS un tems le Patrotifme zélé, dont les braves Belges font animés, attire fur nous les regards de toute l'Europe, on fera charmé peut erre de con- noître , qu'il e\ifîe loin de nous des Citoyens de Bruxelles, à qui la valeur mérita ce glorieux titre* On pourra voir en méme-tems , que nos Ancêtres furent récompenfer de la manière la plus fîatteufe des hommes courageux, qui bravèrent la mort pour défendre notre Ville , & qui au prix de leur fang en f^uverenr les habi*ans. Ne méritons point le re- proche d'enfevelir dans un oubli ingrat des aclions

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dont l'éclat fut fatal à nos ennetTiis; ayons la bonne toi de reconnoître que jadis Bruxelles dut Ton falut à des M'I.taires, qui unifiant l'intérêt du Prince avec celui de l'es Sujets, combattirent glorieufcment pour iiotre Fatiie. Voici le fait.

En 170S la Ville de Bruxelles fut afliégée par rEleâeur de Bavière. Monlîeur Pafchal en étoit Gouverneur, & Monfieur Wrangd commandoit la garnifon. Le fiege étant vivement preffé & la crife très- alarmante , on tint un Confeil pour décider, ii le chen-.in couvert de Scharbeck , qui dans ce mo- ment étoit de la dernière importance , feroit aban- donné:, avant de prendre une réfolucion dans des ci'confîances ayffi critiques , on demanda l'avis du Licutenant-^ Général Robert Murray , malade alors «îa-ns la Ville de Bruxelles. Son avis fut digne de <t>a courage. 11 prétendit qu'il falloit foutenir le che- min couvert , 6sC s'en chargea lui-même quoiqu'acca- hlé par une maladie douloureufe. Transporté dans Fendrolt ouvert aux coups de l'ennemi , il ne ba- lança point d'expoier Tes jours , pour défendre les Habitants de Bruxelles du maffacre & du pillage «doat llsetoient menacés; fécondé par la bravoure de tes foidats , entre autre d'une partie du Régiment de ZuTîîjungen , il refta en poffeffion du chemin cou- -ert ; le Prince Eugène eut le tems de quitter le i:-c2^G de Lille pour pafîer l'Eicaut à Audenarde, & ie leTidemain l'Elecleur fut contraint de lever le iîesje de Bruxelles. Les récompenfes fuivirent de près le mérite. Le Général Robert Munay {*) reçut

(a) Robert Munay pafTa la Mer avec Guillaume Roi d'An- gleterre, en qualité de Li'utenaiit-Colonel des Gardes Ecof- ioiftr;. Peu de tems après li fr:t fait Colonel-Propriétaire d'un l"i.è?;mtnr EcolTois au îervice cia L. H. P, I' mourut Gouverneur rf.-i ToOTna-i , Si laiiîa nn fih héritier de fes vertus , qrà marchant

des remerdmens flatteurs de la part des Etats-Cé- nérsux, & une Lettre de remercîment de la maia du Roi d'Efpigne , envoyée par un courier de Bar- celone ; diftinftion fort extraordinaire dans ce tems- là. Le régiment de Zurvjunçen eut le droit de Bour- gtoifïe; il porte aujourd'hui le nom de Kauniî7^-Riî~- ttrg , & fe trouve en garnifon en Allemagne.

Par un Ciieycn de BruxdUs»

AVIS AUX BELGES.

Res ac penculum commune coegît ^ quoi quifque foffit in re trépida Frc^fidii hi médium conferre. Difcours de Camille aux Ardeates. Tit, Liw Dec. i. Lib. 5,

A Majefté l'Empereur & Roi , demande aux Provinces Belgiques qu'eUes envoient leurs Dépu- tés à Vienne pour convenir & s'accommoder en- femble. Convient-il que les Provinces y envoyent leurs Députés ou non ? Voilà une réfolution terri- ble , d'où dépend la guerre ou la paix , le ialut ou

fur les traces de fon Père, eft aujourd'hui décoré des titres les plus honorables , & exerce la cii-rge importante de Com- raandanr-Général des Pays-Bas Aunich-.ens. Le départ de Leurs AlteîTes Royales & du Minl/lre, a forirjii à Sa Ma; ]ePic l'Empereur une occafion de témoigner hautement la confiance qu'elle a mife en ce Général , en le chargeant aJ intcrim du Gouvernement des Pays-Bas. Nous avons tout lieu d'efpérer , que u ie Fera Ecojfois a faiivé jadis la Ca- pitale du Brabant par fa valciir, le h!> Bdge faura main- ter.ir h tran':juillité & contribuer à la félicite pubiique par fa modératie» & par fa prudence.

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la défolation des Provinces , la vie ou la mort des Sujets. La choie eft donc affez conféquente pour que tout bon Citoyen , tout homme qui a quelque expérience dans les affaires , foit autorifé à commu- niquer au Public ce qu'il croit être utile aux cir- conftances. Voilà franchement ce que je penfe & les raifons fur lefquelles s'appuie ma penfée. Si je puis être utile au Pays , je me croirai heureux pour la vie; fi j'ai le malheur de ne pas l'être, ma vo- lonté eft bonne, & c'eft ma récompenfe , mon avis îie fera mal à perfonne.

Je crois donc ( fauf meilleur avis ) qu'il eft de l'intérêt du Peuple 5c des Provinces que les Dé- putés aillent à Vienne, en voici quatre raifons:

lo. 11 eft aufîi clair que le jour , que Sa Majefté fe troave dans un mauvais pas, qu'elle le fent, & qu'elle ne cherche qu'uh moyen honnête de s'en tirer ; la preuve de ceci réfulte évidemment de fa Lettre du 3 Juillet 1787, Sa Majefté réduite à des lieux communs , eft contrainte de fe rejetter fur fes internions qu'elle foutient avoir toujours été juftes , bienfaifantes , équitables. Or , nos Députés prouve- ront à Sa Majefté que fes volontés n'ont pas été exécutées , ils diront que notre réfiftance étoit pour demander l'exécution des volontés de Sa Majefté ; ils ajouteront que , fi l'amour de la liberté noiis a porté à quelque audace, quelque force dans nos Repréfentations , ils en viennent faire (oumiflion , & que ce n'en eft qu'une plus grande preuve de fidé- lité & d'srtachement au Souverain &c. ht voilà le moyen honnête que Sa Majefté attend pour fortir du mauvais pas elle fc trouve. C'efl peut-être le plus court & l'unique moyen de réconciliation. Ceux qui croient que , parce que nous ne fommes pas rebelles , nous ne devons pas faire de foumif- fion, ne connoiflient pas la Politique des Cours, ni

( se; ) le cœur des Rois. Qu'ils fe reflbiivjennent de ces trois vérités qui font ar.fK anciennes que les vices de l'homme, i ^ . Celui qui a oifenTÔ , ne pardonne jamais le premier. 2 ^ . Les Rois n'ont jamais tort, j^. Les Sujets doivent payer les taures des Princes. Q^uidciuid délirant Reçues pUcluntur Archivi. Korar. iv>. Jufqu'aujourd'hui tout ce qui a été fait peut être imputé au Miniflere & à un abus de l'autorité Souveraine , tout peut s'imputer au Miniftre , & ce fera juftement le refuge de Sa Majefté. Toutes nos Réclamations font connues de l'Univers. L'U- nivers eft notre Juge , l'Univers nous donne droit. Nous pouvons juiqu'ici paroïtre n'avoir réiiilé qu'au Miniftre qui abuloit de l'autorité du Souverain ; mais fi nous allons refufer à Sa Majefté Tunique cbofe qu'elle nous demande en fon propre & privé Nom, & pour notre réconciliation avec eHe, nous man- quons. Sa Majefté peut nous acculer d'une faute, & toutes les Nations nous en peuvent rendre cou- pables : d"où je conclus qu'il faut envoyer nos Dé- putés à Vienne pour prouver à tout l'Univers que nous avons été fournis jufqu'au dernier moment, jufqu'à ce qu'on nous a mis le couteau fur la gor- ge , & qu'ils nous a fallu nous relever pour ne pas être mutilé.

3*^. Nous ne ccnnoiftbns pas S. M. Ses inten- tions font- elles ju 1res ? Sont -elles iniques .* Con- noît - elle les Décrets oppreftifs contre lei'quels nous réclamons ? Lit - elle nos Repréfentations ? Les reçoit elle telles que nous les failons ? Nos en- nemis nous reprélentent-ils tels que nous fommes ? Nous n'en favons rien. Comment le favoir? En lui envoyant des gens qui ne [oient pas traîtres , des elprits pénétrans pour la fonder, des hommes favans pour i'inftruire , de vrais Patriotes pour nous dé- fendre , des cœurs généreux pour faire valoir nos

( 108 ^

Droits. Il convient donc d'envoyer des Députés à Vienne , pour que fi, S. M. eft jufle , on i'inftruife: fi elle ne l'eft pas , on la connoifle.

4°. Les grandes affaires fe traitent toujours mieux de près que de loin , par voix que par Lettres , avec les Maîtres qa'avec les Sujets ; fi S. M. eft offenfée , nous pouvons par ce juftes raifons l'adou- cir : dans le Miniftere à Vienne nous avons des cœurs dévoués; fi nos Députés y vont, ces cœurs dévoués Te joindront à nous , parleront pour nous , fe déclareront pour nous , &c avec nous travail- leront tou]ours à porter l'efprit du Souverain aux partis les plus. doux & les plus humains : fi nos Dé- putés , méprifant l'ordre exprès de S. M. , ne s'y rendent pas , ces cœurs dévoués fe tairont , n'ofe- ront prendre notre parti , &C par leur filence feront cenfés accéder à l'avis de nos ennemis , qui ne man- queront pas de fe prévaloir de notre abfence , & d'envenimer .les plaies dont ils nous ont couverts jufqu'aujourd'hui. il convient donc d'envoyer nos Députés à Vienne pour conferver les cœurs dévoués que nous avons encore à la Cour , & fi nous n'en avons pas, pour tâcher d'en faire. Je fais qu'on rai» {binne tout autrement, & qu'il y a mille raifons con- tre. Mais quel eft le meilleur parti pour l'intérêt 6c l'honneur de la Nation?..,

Mais , dit-on : quels Députés peut-on envoyer ? Quant à leurs qualités perfonnelles , ils ne doivent pas feulement être exempts de crime de trahifon envers la Patrie, mais même exempts de foupçon ; en outre il eft néceftaire qu'ils foient tels que je les ai dépeints dans ma 3nie. raifon. Quel doit être leur pouvoir? Aucun; ils font donc inutiles? Non, il faut aller Vienne pour obéir, & non pour être Jugé. Ils doivent porter aux pieds du Trône nos Conftiîutions, la Joyeufe Entrée ^ enfuile les Décrets

miniftériels

C ^09 )

miniftériels tels qu'ils font émanés pour y porter atteinte, & enfin les réclamations de toutes les Pro- vinces pour loutenir nos Droits. S. M. commencera par s'emporter , crier , menacer , pour déconcerter nos Députés, les confondre, les faire taire; ils doivent avoir l'efprit afTez fouple pour la laifler dire, afiez humble pour ne pas l'irriter , mais auiîi affez préient pour ne pas s'intimider, & afTez fort, afTez inftruit , afTez p'-éj)aré pour lui répondre.

L, A. R. ne peuvent partir avant nos Députés, ou au moins elles doivent favoir que nos Dépurés par- tiront : une prière générale dans toutes les Eglifes devroit aufïî accompagner leur départ. Si mon avis n'eft pas jugé bon , je l'efface. Mais tant pis pour nous ; je fouhaite feulement que quelqu'un puifTc le faire connoître à tems à ceux qui peuvent l'em- ployer. L'oblcurité de l'Ecrivain lui refufe le pou- voir de communiquer fon ouvrage par lui-même au Public.

Q

***

( 110 )

LETTFvE de Meffeigneurs les Etats de Erahant à Jojepk 11^ en reponfe à la Lettre de Sa Majejié ^ datée du 3 Ju'il^ let ly^j (^).

SIRE,

ONS avons reçu avec le plus profond refpeft , avec la plus parfaite rouailffion , la Dépêche que votre S-îCrée Majefté a cbiigné nous adrelTer le 3 de ce mois , (bus votre Seing auguile : les fenti- lîiens que votre déclaration, Sire, a excités, n'ont pas été ceux d'une joie aufïi pure, que pouvoir Je préfacer notre attachement à l'obéifTance , & notre zèle ardent pour vos intérêts. Si, d'un côté, Sire, ie récit àes thaux pub'ics, fi nos p'aintes fur les infractions faites à des Loix intaftes depuis iîx cens ans , ont touché votre fenfibiliré ainfî que vo- tre juftice , d'un autre côté, votre Majefté laiiTe en- trevoir des doutes douloureux pour la Nation , fur la nature des motifs qui ont dirigé l'oppofition des Etats des Provinces Belgiques , pour le maintien des juftes Droits fi chers à patrie.

Non , Sire , le cœur de vos Sujets n'a pas erré un feul inftant; leur tendre confiance, leurs hom-

( a) Le projet de Réponfe que Ton a vu circuler, en date <!u 2.4 Juillet, qui c(jmmence ainfi : Par la lettre , &c. & que l'on volt toîii. VI. P;irt. Civ. pa^. 103 , n'a point été réalifé. C'eft ici la véritable Réponfe des Etafs , & nous en garantif- fons l'authenticité. Des circonihuiccs imprévues onr obligé les Etats à la rendre publique avant l'arrivée deâ. Députés à Vienne.

mages s'élèvent fans ceffe , Sj: dans toutes les heures du jour , vers Vdtre Majefté.

L'impreffion opérée par le nouveau fyftême , n'a été ni intpirée m excitée par vos Etats ; c'ell celle , daignez , Sire , en être convaincu , qu'ont éprouvée & toute la Nation , & tous les individus agités de la plus violente inquiétude ^ à la vue d'un fyftéme , dont aucune conféquence n'a échappé dans tous (es détails funeftes & terribles ; car c'eft ici que tous les Citoyens , ceux tneines des derniè- res clafles , connoiffent leurs Droits, qu'ils les ché- riiïent , qu'ils en t'ont l'objet de leurs entretiens, de leurs penfées , qu'ils y attachent l'idée de la fureté, de la liberté, du bien , du falut public Se particulier.

Si dans les transfaâ;ions ordinaires , lorfqu'il n'eft pas quedion de l'elfence de ces Droits façrés , la Nation fe réfère aifément à (ts Reprcfentans ; dans celle-ci tout concours , tout confentement de la part des Etats contre le vœu général , contre le cri de la probité , eût été non- feulement Infruftueux, mais il eût produit des embrafemens & de longues calamités. Eh ! plût à Dieu que vous euffiez été témoin , Sire , des peines , des foins infinis que tous les Ordres des Etats fe font donnés pour cal- mer, adoucir, perfuader par-tout une multitude in- nombrable , réclamant contre la violation de la foi publique, oppofant la légnlité de (es^ craintes; c'eft alors que Votre Majefté eût reconnu que fon Peu- ple a été lauvé.

La principale inftruftion que nous donnons aux Députés , qui avec ceux des autres Provinces font chargés de fe mettre aux pieds du Trône , c'eft d'affurer , Sire, Votre Majefté, de notre amour, de nos hommages aufli fournis qu'affcftueux , de notre zele inaltérable & ftncere pour votre fervice ; de demander, de recevoir de Votre M^'efté rexpreftion

O ^

( îïi )

précieufe de votre bonté , de votre tcndrelTe pa- ternelle,

C'eft de votre bonté que nous attendons , Sire , que vous diffiperex les maux qu'entretient encore la terreur du Ivftéme ; déjà la piété fir.cere ^ l'attache- ment au culte , à cette Religion qui eft le plus ferme appui du Trône , font malheureufement trop affoi- blis par une fuite foutenue d'Ordonnances fur la Difcipline Ecclé/iaftique , par le peu de relpeft pour les anciennes maximes reilgicufes confacrées dans l'opinion des Peuples ; déjà les propriétés font avi- lies dans les échanges , le commerce fe détourne , 5c ce qui en refîe eft languiiTant ; le numéraire devient rare à niefure qu'il pafte à l'étranger , les fortunes fe convertifTent dans les porte- feui Iles ; l'Artifan , le- Laboureur font prêts à porter ailleurs leurs bras ÔC leur induftrie , fûrs de jouir du Gouvernement mo- déré , dont tous les climats voifins offrent les at- traits ; tandis que les troubles qui défoîent la Hol- lande eulTent amené ici une quantité étonnante de Sujets &: de capitaux utiles , fans l'étrange fatalité du fyftême.

Daignez , Sire , arrêter la fource de fi grands malheurs; il fuffira (& c'eft le moyen aufli jufte qu'unique) que Votre Majefté déclare que les Conf- titutions , Droits & Privilèges des Province*; Belgi- ques en général & en particulier , feront rc'igieufe- inent obfervés , qu'en conféquence les deux Diplô- mes il évidemment furpris à votre religion , Sire , viennent à cefîer , que toutes les infraélions faites ultérieurement à ces Conftitutions , Droits & Privi- lèges, feiont redreffées le plutôt poflible.

Depuis combien d^ rems , par combien de Re- montrances humbles & (oumifes nous a -ons récla- mé, Si-e, contre ces infraâions , expofé & détaillé nos plaintes !

(in)

Combien de fols vos fidèles Efats , Sire , fe font plaints de ce qu'on ne nommoit point aux Abbayes vacantes, malgré les titres & les concordats les plus authentiques; de ce que fur le prélude d'un Edit nul & captieux pour la fuppreffion des Couvens ar- bitrairement prétendus inutiles , on vouloir établir la poflîbilité d'une fuppreffion totale ou partielle des EtabliiTemens Eccléfiaftiques ou pieux quelconques, autrement qu'en gardant l'ordre de Droit ; que par -un fyftême fi oppofé au Droit de la propriété , la Nation devoit tôt ou tard voir engloutir êc dévo- rer fa plus pure fubfiance.

Avec quelles inftances nous avons fapplié , Sire , comme nous fiipplions encore très-humblement Vo- tre Majefté , de recirer le Diplôme fur l'EtablifTement des nouveaux Tribunaux , par la raifon feule qu'il efl: deftruftif de nos Droits les plus évidens & les plus précieux ; nous ne dirons donc pas que ces Tribunaux com.binés avec \a. nouvelle manière de plaider, ne îaifToient plus qu'un f^întôm.e de Juftice , une manière de juger prévôtale , imp- flîble à pra- tiquer dans un Pays les propriétés ibnt infiniment partagées , le3 conteftations judiciaires doivent être néceifairement fréquentes , ibuvent de légère importance , & devant être afloupies fur les litux , fouvent d'un intérêt fi grand , qu'elles réveillent toute l'attention publique : c'eft alors que les par- ties , que la Nation entière , ont le droit d'exiger qu'on écarte tout voile qui pourroit cacher la mar- che fecrete des Délibérations de la Juflice ; cette marche peut être lente , mais fur-tout elle doit être fûre.

Dans la nouvelle procédure , Sire , tout alloit fe palfer fous le plus impénétrable fecret , les Juges , d'autant plus à redou cr , n'étoient qu'en tiès-peiif

( ^14 ) nombre , le Préndenc abiolu , le Rapporteur încon- nu ; il ne s'agiiToit pas de juger bien, mais de juger vite : comme fi la Nation devolt être toujours dans l'état de guerre , fous la Loi martiale.

Les Magiflrats perdoient toute idée de l'honneur, en proie à des délations lourdes , mais ordonnées par la Loi , ne recevant plus que la vile impreflîon de la crainte ; d'ailleurs ambulatoires & deftituables à volonté , ils re/Tembloient plutôt aux Centurions d'une troupe de guerre qu'aux Miniftres auguftes de la Juftlce.

Mais , Sire , cette Juflice fi défigurée , fi mécon- noilfable, étoit encore reléguée aux objets contentieux entre pa;^îies privées; la partie publique, les Inten- dans , les Commifiaires , les Délégués ne dévoient garder aucune mefure , ils étoient au-defius des Tri- bunaux de Jufiice abarardis ; ils commandoient &c ils dévoient erre obéis ; la force exécutrice & la puif- fance îégiflative réfidoient dans un leul Conlell , &c ce Conîéil dans une feule Perfonne ; ainfi l'homme réparé de l'homme , l'individu ifolé , fans fecours , fans appui, fans voifiuage, étoient toujours trembians de- vant l'Intendance & (es Agens ; les ordres partolent d'un pouvoir fi monftrueufement réuni , & venoient frapper tour à-tour les Citoyens comme un coup de toudre ; ce n'étoit plus une Société civile , c'étoient des hom.mes , ou plutôt des cadavres livrés à la ter- reur, ne marchant plus que parmi les craintes &c à travers les ombres de la mort.

Sous un tel régime , Sire, vos Provinces Belgiqnes eufient été réduites bientôt en un vafte déiért ; l'in- duftrie, l'opulence eufient fui loin d'un climat fune{}e, rhommc n'eût pu compter ni fur le fruit de (zs îravaux , ni fur la liberté de ion individu.

Ici , Sire , les ho:nmes ne doivent , ne peuvent être

C ^15 )

bien gouvernés que fur les lieux , que par le moyen des corporations; il faut que les Loix , que les Or- dres quelconques paffent par cette épreuve utile , pour inlpirer la confiaHce : ce n'eft qu'alors que les fujets obéiiïent avec alégrelTe , parce que l'ip.liuence de ces corporations ell infiniment plus douce , plus l'aî^e , plus réfléchie, plus fuivie ; parce qu'enfin c'eft le droit de la patrie, judifié- par tant de Siècles de profpérité Sc -d'opulence.

Jugez donc , Sire , à quel point on a furpris votre bonté & votre religion , comme fi l'art , le grand art de gouverner étoit tout-à-coup devenu facile ou nouveau ; comme (i les grands exemples fuffent inu- tiles à la fagelTe, &: que Tetprit humain dût fe ré- plier fur fes premières notions, & rejeter toutes celles dont la fphere de fes connoiffances s'efi: accrue de- puis le commencement des Empires ; jugez , Sire , jufqu'où conduifent l'ignorance & la foif aveugle de dominer aux dépens des intérêts &: de la gloire du Maître.

Sire , nous l'avons déjà dit , s'il y a des abus à corriger, faut- il qu'on ait ^fuggéré à Votre Majefté , le moyen même qui les confacre , qui de plus en plus les augmente invinciblement &C à jamais ; oui rédiiife en folitude des Provinces floriffantes & fertiles ; d ail- leurs , les abus ne tiennent par aucun endroit à Tob- fervance de nos Privileg^is ni de nos Loix , ils ne fc font multipliés qu'à mefure qu'on les a néglgés , ou plutôt ignorés. Si l'on avoit fait obferver des Ordon- nances admirables fur la procédure , (i l'on avoit mis à la tête des Tribunaux , des perfonnes uniquenient animées , confumées du zèle de la Juftice, capables des fondions mâles & vigoureufes qu'elle exige , fi en cela la faveur avoit moins exercé fon influence , Votre Majeflé eût vu évanouir les plaintes des plai- deurs.

G 4

( ii6)

Daignez donc, Sire, daignez hâter les confola- tions de votre peuple ; que Votre Majefté veuille ac- corder une déclaration gracieufè , iur rinrégrité de nos Loix fondamentales , (ur la ceflation ^ce qui eft une Alite néceffaire ) des intraftions qu'elle^ ont ;oufîertes , fur- tout par les deux Diplômes du premier Janvier de cette année.

Veuillez encore. Sire , fi les hauts foins de votre Monarchie ne permettent pas à Votre Majcfîé de ve- nir parmi nous ^ munir Leurs Alteffes Roy^fles, nos Sérénifîimes Gouverneurs-Généraux, des pleins-pou- voirs, pour terminer avec les Etats dans différentes Provinces, les objets ultérieurs, qui tiennent à nos Conftituîions ; fur lefqueîs la nature de notre mandat ne nous permet point d'autori'ér en rien les Dé- putés qui portent nos hommages au Tiône de Votre Majefté; mais bien plutôt, venez, Sire, rempliffez votre promelTe auffi douce qu'augufte de vous trouver encore au milieu de vos Sujets , au milieu de vos Enfans; venez recueillir des bénédiftioni, fans nombre, ibyez le témoin de l'émotion d'un peuple fenfible à la vue de fon Souverain, de fon Père, les cœurs vont s'élancer fur votre pafTage, (k vous verrez vos Sujets , Sire, pleurer à vos genoux des larmes de joie & de tendrefle; c'eft alors, Sue, que Votre Majefté verra s'appbnir devant elle , fsns peine , les moyens d'aug- menter , de perpéfuer la félicité de vos Sujets, ôc que vous ferez inftruit, Sire, fur les lieux , par l'é- vidence même des chofes.

Puifte Votre Sacrée Majefté recevoir l'offrande pure de nos cœurs, de nos biens, de notre fang; puifte l'Etre-Supréme, vous combler de tous les dons , qu'il diïpenfe à fon gré; puifte votre Nom , Sire, refter à jamais placé à côté de l'immortalité , grand dans la paix 6>c dans la guerre.

Nous fommines avec un très - profond rerpefl: & toute la foumifiion pofTible ,

SIRE,

De votre facrée Majeflé Impériale & Royale Apoftolique ,

Les très humbles , très-obéif- fans & très - fidèles fervi- teurs, Sujets & Vaflaux, les Prélats , Nobles & Dépu- tés des Chef- Villes, repré- fetitant les Etats de votre Pays & Duché de Brabant.

Par Ordonnance , DE C O C K.

De notre AjJivikUe. oénèraLe tenue à BtuxcUes U 2^ JuiUet ^ySy,

Noms & qualités des Meffieiirs de diffé- rentes Provinces qui ont comparu à VAf- femblèe générale des Etats de Brabant en Juillet iJ^J.

-BRABANT

Etat E celé fia Clique. Monfeigneur l'Evêque d'Anvers. Mr. le Rév, Abbé de \ llerbeeck. ■> j^, , ^^ , Mr. le Rév. Abbé de Griinberghe. 3

Etat Noble.

Mr. le Comte de Spangen.

Mr. le Baron de Gentinnes. . «7 t^i i j'-, . , n i->vx X Députés AckL^ls^

Mr. le Baron d nove J, •^

( IIS)

Tiers - Etat.

Louvain. Mr. de Beeckman, Bourgmeftre. Mr. Reniers , Confeiller-Penfionnaire.

Bruxelles. Mr. de Locquenghien , Bourgmeftre. Mr. de Vieufart , premier Echevin. Mr. Vanlchelle, Confellier-Penfionnaire.

Anvers. Mr..' Délia Faille, Bourgmeftre.

L I M B O U R G.

Eiat Eccléjîajlique. Mr. le Révérend Abbé de Rolduc.

Etat Noble. Mr. le Baron de Loe Imfteradt , Député ordmaire. Mr. le Comte de Hoen Neuf-Château.

Tiers- Etat. Mr. Dodemonti

Mr. le Gros, Confeiller-Penfionnaire des Etats. Mr.de Limpens, Confeiller-Penfionnaire externe.

LUXEMBOURG.

Etat Noble. Mr. le Comte de Berlo Suys , Député ordinaire, & Préiident de la Députation extraordinaire. Etat EccUjîaJiique. Mr. le Révérend Abbé d'Echternach , Député or- dinaire.

Etat Noble. Mr. le Baron de la Barre.

Tiers-Etat. Mr. Foncin , Mayeur Royal à Vlrton. Mr. Didier, Echevin d'Àrlon, Député ordinaire. Mr. Roiîignon , Confeilier-Penfionnaire des Etats.

( 119 G U E L D R E. Mr. Syben , Confeiller Penfionnaire des Etats.

FLANDRE.

Mr. le Comte d'Affenede, pour la Châtellenie du

Vieux-Bourg. Mr. d'Afper Haut-Pointre , de la Châtellenie d'Au-

denarde. Mr. Defmet , Bailli du Pays de Gaveren. Mr. Raepfaet , Greffier de la Châtellenie d'Audenardc.

H A Y N A U T.

Etat EccUfiajlique. Mr. le Révérend Abbé de St. Ghiflain. Mr. Recq , Chanoine de Leuze. Etat Noble. Mr. le Marquis Du Chafteler Moulbais , Député

aftue!. Mr. le Chevalier Colins- de-Ham.

Tiers -Etat, Mr. Auquier, Echevin de la Ville de Mon*;. Mr. de Hamalt , Confeiller-Penfïonnaire de Mens.

N A M U R.

Etat Ecccéfiajîlque. Mr. le Révérend Abbé de Waulfort , Député a6luel.

Etat NobU. Mr. le Baron de Neverlé , Seigneur de Beaulet , Député aéluel.

/ Tiers - Etat.

Mr. Limmelette , Echevin de Namur.

Mr. Petit-Jean , Confeiller-Penfionnairc & Greffier i.t% Etats.

1 O U R N A I.

Mr. Vander Gracht , Mayeur.

Mr. de la Cazerle , Juré,

Mr. Herfecap , Confeliler-Penfionnaire.

TOURNESIS.

Mr. le Comte de Vanderdilfr, Doyen du Chapitre.

Mr. Defourdeau , de l'Etat Noble.

Mr. Macau , Confeiller Penfionnaire des Etats.

M A L I N E S.

Mr. le Baron de Snoy , Commune-Maître.

Mr. de Brouwer, premier Echevln.

Mr. de Quertemont, Confeiller-Penfionnaire.

Mr. de Cock , Secrétaire de la Ville.

Mr. d'Ancré, Député du Confeil-Large.

Mr. Van Kiel , Député du Confcil- Large.

W ES TF L A N D R E.

Mr. le Révérend Abbé de "Wormezeele. Mr. Aernout , Chanoine de la Cathédrale d'Ypres. Mr. Michel , Doyen de Ste. Walburge à Furnes. Mr. Vanderftichele de Maubus , premier Echevln

d'Ipres. Mr. Delimon , Echevln de la Salle & Châtellenie

d'Ypres. Mr. i. F. Marrannes , premier Confeiller-Penfionnaire

à Furnes.

DÉPUTÉS POUR VIENNE.

B R A B A N T.

Du Clergé. Mr. le Rjévérend Abbé de Grimberghe.

( 111 )

De l'Etat Noble, Mr. le Comte de Limmingen.

Du Tiers -Eue, Mr. Beeckmann de Vieufart.

DÉPUTÉS DE Flandres.

Du Clergé. Mr. de Grave , Chantre de la Cathédrale.

De l'Etat Noble, Mr. le Comte de Vilain XIV.

Du Tiers- Etat. Mr. le Comte d'Affenede , de la Châtellenîe du

Vieux - Bourg. Mr. Rohaert , Penfionnaire de Gand.

Députés du Hainaut.

Du Clergé, Mr. l'Abbé de St. Ghiflain.

De rEtae Noble. Mr. Le Chevalier Colins-de-Ham. Du Tiers - Etat. Mr. Petit , Avocat de la Ville de Mons.

DÉPUTÉS DE Luxembourg.

Mr. le Révérend Abbé d'Echternach. Mr. de Pfortzenheim , de TErat Noble. Mr. Didier , Echevin d'Arion , de la part du Tiers- Etat. Mr. Roflîgno», Confeiller-Penfionnalre des Etats,

DÉPUTÉS DE MaLINES.

Mr. de Quertemont , Confeiller-Penfionnaire. Mr. le Baron de Snoy , Commune-Maître. Mr. d'Ancré , Député du Confeil-Large.

( 2.22 )

DÉPUTÉS DE Tournât,

Mr. Vander Gracht , Mayeur. Mr. d'Angys. Mr. Delvigne.

DÉPUTES DU TOURNESIS.

Mr. le Chanoine d'Erneu. Mr. Sonrdeau. Mr. Vanderaeden.

DÉPUTÉS DE LA ^^ E S T-F L A N D R E.

Mr. Félix- Jean -Ignace Struye , Abbé de Worme-

zeele. Mr. Vandeiftichele , Echevin d'Ypres. Mr. Delimont.

DÉPUTÉS DE NaMUR.

Mr. Grégoire Thibault , Abbé de "Wanlfort , Député

a<ftue!. Mr. le Baron Vande Straat. Mr. de la Motte de Montigni , Echevin.

DÉPUTÉS DE LiMBOURG,

Mr. le Révérend Abbé de Rolduc. Mr. le Comte de Hoen Neu-Château. Mr. Dodemont, de la part du Tiers-Etat.

G U E L U R E.

S'eft joint à ceux du Brabant.

À:>

( 213 )

Précis de la Copie du Protocole tenu à r Hôtel de -Ville de Bruxelles , le i8 Juillet 17S7 , dans rjjfeniblée des Sei- gneurs Députés des Provinces de Lim- bourgs de Luxembourg^ de Flandre ^ de Hainaut ^ de Namur^ de Tournay ^ du Tourné fis , 6" de Malines ; conféquem- ment de toutes les Provinces des Pays- Bas Autrichiens , à V exception de celle de Gueldre^ laquelle a déclaré par mil- five quelle fe conformerait à la Délibé- ration des autres Provinces,

I

L a été délibéré qu'on déféreroit à la Lettre de Sa Majefté l'Empereur , datée de "Vienne le 3 de Juil- let , & qu'on enverroit incelTainment des Députés à Vienne.

Ceux qui feront députés de la part du Brabant , doivent faire aux Etats de cette Province le ferment ci delTous , du 30 Décembre 17» 5.

EXTRAIT du Regifn des Réfoludons de Mef- feioneurs Us Trois-Etats de Brabant , & de leurs Députéi , l'on trouve ce qui fuit :

» Je promets & jure que dans ma Commi£îon & Députation à la Cour de Vienne , auprès de Sa Ma/ejîé Impériale & Royale , fimployerai tout U :^ele & toute la dilisence pofjîble pour procurer U hien-itre de la Province de Brabant ; & que pendant sgut U tems de cette Députation ^ Commiffion , ji

( ^M )

ne ferai ni direclemem ni indirectement aucune de- mande , ne formerai nulle prétentioij , ne pourjuivrai nulle affaire concernant les intérêts particuliers , de moi , de ma famille , ou de mes amis , de quelque chef , ou fous quelque prétexte que ce puiffe être, Ainfi Dieu m'aide , &c. «

Note pour les diferens Etats des Provinces des Pays-Bas.

ZjOiî Excellence le Gouverneur & Capitaine- Gé- néral croît ne pouvoir pas diifimuler aux Etaf; que Sa Majefté n'a point été fatisfaite de la Déjéche qui leur a été adreflee ie i8 Juil'et, en ce qu'elle porte fur des motifs qui annonçoient de la part de la multitude des impreffions contraires à la confiance que Sa M^ijefté attendoit de la part de toutes les clafies de Tes Sujets» tandis que d*ai!!eursen pouvant faire naître des idées contraires à la Dignité Souve- raine , elles croifoient des meîurcf que pouvoient de- mander d'autres circonftances publiques ou particu- lières , qui feroient furvenues dan« l'intervalle.

Sa Majefté s'attend que ces circonf^inces exigeant à préfent une concentration des troupes , les Etats ainfi que la Nation n'en prendront point une défiance déplacée, & que la confiance générale, moins encore le calme , n'en feront pas altérés.

Sa Majcfté a expreflTément autorifé Son Excellence à vous aflfurer que cette concentration ou difloca- tion des troupes, n'a pour objet ni de porter attemte à la Conftitution du Pays , ni d'entraîner des démar- ches qui y feroient contraires.

Les Etats & toute la Nation fentiront fans doute que ne ^ifant rien de contraire à la Conditution

par

( iM )

pnj cette concentration , toute inquiétude ou dé- fîance à ce fujet , & plus encore les embarras , s'il en ("urvenoit à cette occaiion . fcroient juftemenc douter Sa Majefté de la vérité des affinions que les Etats ont faites de leur fidélité & de leur attache- ment, tandis qu'elle a déjà annoncé, comme elle l'annonce encore par fa lettre du oi Juillet, l'in- tention de traiter paternellenienî avec eux fur les objets qui intérefTent le bien général , conformémenc à la Dépêche adreffée aux Etats de Brabant Id 3 Juillet; & d'autant plus qva ce feroir réelle- mePit un icandale pour toute l't,urope, fi tiiême après les bontés que Sa Majeilé a déjà annoncées , fes Sujets pouvoient feulement avoir l'idée de tenir dans une entière inaftion fes troupes, comme fi elles étoient au fervice de quelque Grince étranger & en fimple quartier de pafi;-:2c.

La conduite de la Nation à l'égard de la con- centration dont il s'agit , étant d'ailleurs regardée par Sa Majefté comme la pierre de touche de la confiance & de la fidélité, Sa Majefié a en même tems fait connoître à ion Excellence, que, felort que la conduite qu'e'le s'affure que la Nation tiendra, lui donnera plein appaifement, les troupes Alteman" des défignées pour les Fays-Bas ne dépifferont point les frontières de fes Etats héréditaire?, excepté le régiment de Bender , que Sa Majc^fté juge pour des ralfons particulières , de fervice nécefT.iite à Luxetn- bourg. Fait à Bruxelles, le 5 Août ly^j. Sh^né le Comte De Murray.

Pour Copie y De Cock,

( zi6 )

Requête des 'Syndics des Nations de Bruxelles , à Meffci^neurs les Etats en leur Ajj^mblit - Gc^ néraU»

JLl

fES Syndics des Nations cle csxxe Ville , conf- iiiues comme par leurs Remontrances précéden- tes , fc trouvent forcés de prévenir vos Seigneuries Révérendlffimes & IlUiftrifiîmes , qu'ils ne rencon- trent dans le Peuple aucun fentiment d'infidélité ou de déloyauté à l'égard ou vis-à-vis de Sa Ma- jefté : le fujet des alarmes & de confternation , donr le Peuple généralement eft agité, eft, qu'il expé- rimente continuellement que des gens mal- intention- nés fomentent difFérens fujets de craintes & occa- sions de défiance ; ils s'avancent même de faire ientir , que .les portions àes troupes ne font pas un cordon qu'elles vont faire , mais font tellement dirigées , que les Villes principales du Brahant , fur-tout cette Ville, feront bloquées.

Ils débitent en outre , que la dépoiition des troupes étant faite , il arrivera ici au Pays , encore un corps de cinquante mille hommes ; les Remontrans igno- rent ce qu'il en efl, mais on rapporte néanmoins, que le Gouvernement eft occupé de traiter avec difFérens Entreprenneurs, relativement aux vivres 6c munitions nécefTaires à ce fujet.

Ces objets divulgés par les mal-intentionnés, ont jeté des alarmes dans le plus grand nombre du F'eupla , non-feulement des Villes principales de cette Province , mais généralement des Villages & Provinces voifines ; que tes Remontrans craignent avec ràiion , que le mouvement des troupes occa- fionnera une émotion générale ; ils font déjà aiïtt-

( ii7 ) fés , que grand nombre des perfonnes bien moyen* nées »au premier mouvement des Troupes quitteront à. jamais les Provinces ; taudis cependant qu'ils font in- tormés , que fi le calme renaifioit dans ce Pays, plufieurs familles Hollaftdoifes , dtgoûtées des trou- bles qui agitent leur patrie , ne manqueroient pas de venir s'établir chez nous.

Le devoir des remontrans les oblige d'informer vos Seigneuries Révérendifiîmes & Illuilriffimes, de ces craintes & de ces alarmes du Peuple , afin qu'elles les faiTent parvenir à la connoifiance de Ton Excellence le Gouverneur & Capitaine- Général , pour qu'elle daigne prendre des melures convenables pour éviter la cataftrophe funefte dont ces Provinces font menacées.

C'eft l'objet de leur très-humble recours vers vos Seigneuries Kévérendiflîmes & Uiui^riflimes.

Les fuppliant très-humblement de vouloir join- dre leurs inftances à celles du Peuple : plus bas étoit, c'eft la grâce ; étoient (ignés , A, Vandcr Stricht , Jean Jofeph Sagermans , H. De Puyt , P, J. C. Bceck- man , E. Adan , J. B. Van Lack , Jf C. Schrucrs , G. Ferfteylcn loco Van Campcnhout abfent , & J, B. Vandcn Sande,

Bruxelles, 7 Août 1787.

Relation de ce qui sejl pajfè à f Audience de Son Excellence le Comte de MurraY , du 7 Août 17^7.

i J ES Seigneurs de l'AfTemblée- Générale des Trois- ttats de Brabant , s'étant rendus à l'Audience de Son Excellence , lui ont déclaré qu'ils avoient prévu 6c fait connoître par leur dernière repréfentaiion ,

P 2

( 12? )

i^ne la tranfpofition ou qiflocation des Troupes pro-» duiroit ui» mauvais effet (ur l'efprit da Peuple; qu'ef- feéliveinent les Syndics des Nations de Bruxelles , tant pouf eux que coiTinie conftitués par les Mem* bres des àeux autres Chefi-Vi'les , venoient de pré- fenter à l'inflanr iriême à l'Afrernblée-Générale êç$ Seigneurs Etats de Brabanr , une Requête, par la- quelle ils JTianireftoieiit d'une manière énergique , lei grandes alarmes du l'euple, caulées par la ré- foluîion de déplacer les troiipes , en requérant qu'il y fût pourvu de façon à faire renaître de fuite la confiance propre à éloigner tous les événemens fâ- cheux»

Cette Requête fut lue à S Fx. & leurs Seigneu- ries iniifterent le plus fortesnetît & le plus vivement poffible fur la nécfrffité d'y pourvoir par un moyen efficace- Après que S. Ex. eut afluré Leurs Seigneu- ries qu'elle. co!»rentlroit à tout ce qui feroit en fon pouvoir , fans furpafier les ordres exprès de r^mpereur, elle dit que, pour donner une même preuve de confi.mce aux Syndics de Bruxelles &c Conftitués Louvain , elle défiroit également de leur parler, fur quoi quelques Seigneurs fortirent , afin d'appeller îefdits Syndics (>: Conftitués à l'Au- dience de S. Ex. Fendant cet intervalle, Leurs Sei- gneuries prièrent encore très-inffamment Son Excel- lence , de faire réellement tout ce qui étoit e!» Ton pouvoir, afin d'affermir la confiance du Peuple.

Les Syndics de Bruxelles, ainfi que les Commif» faites ,de Louvain étant arrivés à l'Audience , dé- clarèrent ouvertement à S. Ex. les fujets de défiance qyie la Nation croyoii avoir dans la diiîocation des Troupes,

Son txce'lence écouta le tout avec coi. plaifance 6c cifFabiliié, Si fit faire le6hire de- la Leirie de Sa Majtiîé l'Empereur j contenant en original ks ordres

( 12.0 )

pour le déplacement des Troupes àsns les circon/- îances publiques qui étoient furvenues , & alTurant que ce déplacement De le tailoit pas pour porter di- recleir.ent ou indiredlement quelques préjudices aux Loiv foîidamentales du Pays , qu'au concraire le dé- placement devoit s'effccluer en plein jour , & après qu'il en eut été donné amicalement part, quelques jours auparavant, aux Etats reipeflits.

Cette lecture iut fr4ite en préience de M. le Vice- Préfident Crumpipen , & de M. le Comedier Cor- net de Grez.

S. Ex. ailura alors à tous les Membres de l'Etat qui étorent préicns , que les Troupes qui fcro'ent déplacées, ne ferviroient ni ne feroinr en auccfne 3:ianiere employées à caufer à qui que ce Yoit le moindre trouble ou le moindre doinm^ge , non plus qu'à aucun projet de porter en quelque façon que ce puide être la moindre arreinte aux Loix eonf- titutionnelles du Pays; que Sa Majefté déclarcit. elle-même dans la Lettre , qu'aucune des Troupes Allemandes ne deicendroi: vers ces Pays, à l'oc- cafion de ce déplacement néceffaire de : Troupes , on dcnnoir pleine fati.'.faction à Sa Majefté , ainfi qu'on étoii obligé 4e le taire envers Ton Souverain légifime. - ^ .

Qu'entre- tems la bourgeoifïe pouvoit continuer de veiller à i'obîervation de la police iur le pied qu'elle le faiToit actuellement.

S. Ex. a dit de plus, que Sa Majefîé l'ayant laiffé à, fa difpofition , il n'étoit pas queftion de p'acer des Troupes à Louvain , mais bien peut-être à Sa- venthem, à. Erps ou dans Tes environs.

Qu'il n'entroit pas non plus dans la difpofition. de S. Ex. de placer des Troupes à Bruxelles , mais qu'elles camperoient ou ferolent cantonnées au-deiTus de Schaerbeeck ou vers cqs endreits.

P ^,

( 130 ) De tout quoi S. Ex. a donné fa parole d'hon- neur , requérant moyennant ce , que chacun voulût s'entendre & coopérer à la confervation du bon ordre &: de l'obéiflance dxie à S'a Majefté; ce qui fur ainfi promis par tous les Membres, en remer- ciant S, Ex. de l'Audience qu'elle avoit accordée.

£toit Jigné DE C o c K,

REPRÉSENT A J IONS des Etats de Flandre , a Sa Majefté V Empereur & Roi^ du zy Juillet 1787.

S I R É,

S

I parmi les alTurances que Votre Majefié nous' a daigné donner en dernier lieu , qu'elle confervera nos Droits , Conftitutions , Us & Coutumes , là' Nation n'avoit pas cru s'appercevoir que l'on a' infpiré à Votre Majefté des foupçons injuftes fur les fentimens c\çs Provinces Beigiques ; il eft fur que déjà le calme le plus profond regneroit parmi le Peuple. Sa confiance & fon efpoir cependant repofent encore fur la Juftice de Votre Majefté , 5^ plût à Dieu , que les manèges fecrets & les faux rapports ne l'euftent jamais arrêtée ou furprife. Nous croyons préfentement , Sire , afiez connoître nos ennemis , ou plutôt ceux de votre gloire ; mais de tous les traits, qu'ils nous ont lancés, celui qui nous eft le plus fenfible , & qui nous a d'autant plus b!efte , qu'il a été caché £c non prévu , c'eft le doute qu'ils ont trouvé moyen de jetter fur notre attachement inviolable à votre Augufte Perfonnc , & fur noire Loyauté ; auffi dès que nous en avons été informé , Sire , ( & ce n'a été que prefque dans le jour même

( i3i ) ©ù nous délibérâmes fur l'objet de la Députatiort qui devoir fe rendre au pied du Trône ) nous n'avons pas héfité un moment , à l'exemple des autres Pro- vinces Be'giques , de charger nos Députés principa- lement d'offrir à Votre Majcfté , nos trcs-finceres hommages , & les afTurances les plus pofirivts Se les moins équivoques de notre fidélité 6c de celle du Peuple flamand.

Etonnés encore , Sire , en ce moment de nous trouver dans le cas de devoir détruire des doutes des impreiîîons {îiilftres, qui n'ont jamais tlétri nos âmes, nous craignons de ne pas en dire aflfez , lors même que nous proreftons devant Dieu , devant Votre Majeflé , fk devant toute la terre , que nous fommes encore prêts à verfer notre fang , & à (a- crifier nos biens pour votre gloire.

Sire, vos Flamands vous font fidèles, &c vous Is feront toujours , l'oppofiîion qu'ils forment contre le nouveau Tyftéme que l'on fe propofoit d'introduire dans le Pays Bas , n'eft pas une marque de déloyauté , comme un Roi n'e(^ jamais plus Grand , que lorsqu'il défère aux juftes réclamations de Ion Peuple; de même la fidélité des Sujets ne brille jamais dans un plus beau jour , que lorfqu'ils ont le courage d'an- noncer aux Rois la vérité, qu'ils aiment tous, mais qui doit franchir des écuaiis infinis, avant de par- venir au Trône.

Le motif donc , Sire , de nos réclamations dérive d'une foUrce pure; ce font vos intérêts, Sire, ce font ceux de votre Peuple, qui noas ont dirigés; nous vivons fous ces mêmes Loix cimentées par le ferment du Monarque , (ous lelquelles nos Pères ont vécu heureux : il y a eu peu de guerres en Europe , dont les Pays-Bas n'aient été le berceau ou le théâtre;' mais à peine dévaflés par les fléaux , qui accom- ptigncnt conftammeiit Içs armées , l'on a vu ces

P4

( ^r- >

Prrivinces reprendre immédlarement !eur antique pro- priété , & ce n'eft qu'à la bonté de nos Loix , que nous devons ces avantages , dont un Pavs iouinis à un Gouvernement moins doux ne peut pas le vanter.

Le nouveau fydéme , Sire , les renverfoi: toutes , au lieu de (oumettre les opérations du pouvoir lé- giflatif & exécutif à l'examen refléchi des Maglftrat? & des Corporations. Ces deux pouvoirs auffi inté- telTans pour la (Cireté du Monarque que pour le bien-être des Peuples , étoient concentrés dans deux perfonnes ; le Minière, qui dominoit fur le Confeil Koyal , & rintendr^nt, qui en exécutoit aufïi aveu- glément qu'arbitrairement les ordres.

Une telle organifation \-)t^M être convenable dans un Pays , les Peuples gémiifent encore fous une efpece de joug de rari{locr;jtie féodale ; c'eft un pouvoir intermédiaire entre le Seigneur & le Vaifal ^ pUitôt l'efclave , peut-être eftce même un bienfait.

Mais dans des Provinces civilifées depuis tant de fiec-es , le Peuple eft induftrieux , laborieux , commerçant , des Corporations établies par la CcnAitutiOu pour éclairer le Gouvernement fur (es vrais intérêts , & pour garder les Droits du Peuple , empêchent conftamment qu'aucun Sujet ne Toit traité autrement que par Juftice & Sentence, devant fou Juge naturel ; toute Loi , qui attribue le pouvoir exécutif à un feul , efl une Loi qui doit anéantir le bonheur des Peuples 5c entraîner avec elle la ruine de l'Etat.

C'eft ce qui feroit arrivé infailliblement , Sire , dans ces Provinces , , malgré ce que Ton en ait pu dire à Votre Majefté , ch.ique individu connolt fes Droits publics & municipaux , il s'en repofe à îa vérité quant à la Direâiion &: l'Adminiliration fur à^i Corporations forniéçs de Concitoyens , parte

que ceux-ci font guidés par les mérries intérêt'; , Se de pins liés par un (eraient à Patrie. De- vienr auffi, que la perfuanon a plus d'empire fur ce Peuple que le commaiideîrient , & que lorfqu'il fuir la Loi , il la luit moins parce qvt'elle eft Loi , que parce qu'il la confidere pour un effet du zèle de Tes Repréientans & de la bonté de les Maîtres; mais lorlque la ' Conftitution eft ouvertement atta- quée, & que le Peuple i"e ruine, ce n'eft pas, { com- me l'on a peut-être infinué à Votre Majefté ) à des inftigations de c^^s Corporarions , qu'il faut at- tribuer cette etTerveicence , c'eft uniquement parce que le Peuple fent que la Baie de Ion bonheur eft ébranlée , il en juqe par lui-même.

Ces momens de fermentation ont fourni eux- mêmes la preuve la plus complète de la fageiîe de la Conftitution , qui a placé le pouvoir dans des compagnies ; fi un feul en .eût été revoru , le Pavs eut été perdu , Sire ; comme le dé(ei';>oir à la vue du nouveau fvftéme étoit à fon c«mb!e , les uns euftent égorgé les autres , tous les fléaux à la fois eiiHent exercé leuî^s rav?ges ; les Corporations , la uiodération & la Ugeïïe de Leurs Altelles Royales ont tout (auvé.

Et certes , fi les Pays de l'Europe , qui ne nous ofiVent que des efpeces de déferts 6-i annoncent par- tout la pauvreté &: la mifere , nous fournifîent à tout moiriCnt des exemples de Juge-: prévaricater.rs, ou d'Adininiftrateurs concuftionnaires & Intîde'es, tandis quM feroit prefqu'împoftlble d'en trouver un feul exemple dans nos Provinces floriflantes , il. eft de la dernière évidence , que ce mal eft inévita- bîe , parce que le pouvoir exécutif eft confié à un feul, & que cet abus ne fauroit fe rencontrer ici, puiCque ce pouvoir réfide dans des corporations trop difficiles à corroiripre.

( 2-34 )

Telle eft notre Conftitution, dont tout le monde admire la ("ageffe ; dans un Pays riche , & qui au- roit offert trop d'appas à la foif de l'Or, elle a pla- cé le dépôt de l'Adminiftration d^ns des Compag- nies , dans un Pays environné de Gouvernemens li- bres 64 modérés , elle a établi un Gouvernement doux , elle a écarté l'arbitraire pour y fixer rînduf- trie Oc les Arts ; mais , Sire , déjà ils commencèrent a dilparoître d'une manière lénlible & alarmante , encore quelques années , 6i vous y eufficz trouve un déferr.

CeuGent été , Sire , les fuites du nouveau fyftême , quant à la partie de TAdminidration : il en étoit de mcme, Sire, quant a la partie de la Juftice.

Au lieu de ces Compagnies permanentes , indé- pendantes & refpeftables , chargées par devoir 6c par honneur de prononcer entre le riche & le pau- vre (ur la vie' & la fortune des Citoyens , l'on vit s'élever des Tribunaux , compofés de Membres âtf" tituables à volonté , anibuiatoires Se dépendans , dont les opérations étoient couvertes , du voile du myftere , les direélions pretoient à àes furprifes con- tinuelles , & les opinions dans plus d'une matière étoient enchîiînées.

Soumis à des Inftruclions & à des Codes , qui n'avoient pas \a. moindre analogie avec nos Loix anciennes , avec nos mœurs & avec notre Com- merce ; qui en déceloient même l'ignorance la plus profonde , le premier effet de leurs travaux produi- iit une ftagnation générale dans toutes les affaires du Pays ; le fécond devoir en confommer la ruine.

A la vue de tant de maux , dont il dépendoit de votre bonté d'arrêter les ravages, aurions-nous été ficleies Sujets , Sire , fi par un fiience coupable , nous euliions trahi vos iwtéréts & ceux de votre Peuple?

( M5 )

Non, Sire, vous nous euffiez blâmés & la pofléritê inconnue eut condamné notre indifférence.

Nous ajouterons , Sire , au tableau de tant de dé- Taflres , les plaies que recevoit lans celle la Religion dans toutes (es parties , fous prétexte d'en réformer la difcipline, on en altéroit contre vos intentions les Dogmes ; fous prétexte de corriger Us mœurs du Clergé , dont la conduite & h fcience confon- doient celles de ces nouvelles inftiturions , on le calomnioit, on l'avilifToit , on !e perfécutoit , pour étouffer ies réclamations contre les nouvelles maxi- mes ; finalement fous prétexte d'ériger à rhumanité fouffrante , des établliTemens pieux, l'on fupprimoit arbitrairement les Couvens, & au lieu de tavoriler la Population dans ce Pays , ainfi qu'on fe le propo- foit , l'on ach^voit de l'arrêter 6i de détruire l'A- griculture.

Car , Sire , il peut être bon de prévenir ou de pourvoir à la multiplicité des Couvens & des éta- bliffemens Eccléfiaftiques dans un Pays d'une Popu- lation moyenne ; mais il n'en eft pas de n.iSme pour Kn Pays la population fe trouve fur un pied comme ici.

Tout le monde ne peut pas devenir Jujcifconfulte, Négociant, Laboureur ou Soldat; toutes les incli- nations ne font pas les mêmes , Se tout Père de fa- mille ne peut pas marier tous fes enfans, il faut donc néceffairement d'autres reffources ; mais fi ces ref- fources font fupprimées , 'les Mariages n'offient plus qu'un avenir inquiétant , l'on décline ces nœuds facrés , pour y fubftitcer un débordement de mœurs , & la Population en fouffre , la nôtre furpaffoit celle de tous ies Etats de l'Europe , malgré le nombre de Couvens , qu'il s'y trouvoit.

Les Biens de ces Couvens fe louent pubiiqne- ment & au plus offrant , il n'eft pas bien pofîîble

( 2-36 ) de le (dite d'une autre manière, tnais.le befpîri, mm? la jaloLiiîe les portent à un pilx infini; par-là on empêche le pauvre Laboureur de fe procurer quel- que petite reiïource pour fa famille ou de mettre «•quelque choie en réierve pour fes vieux jours ; il tiiï pauvre , il doit mourir d^ns h mifere , dan^ l'abandon; & qaand même on tût convertir les tonds des Couveni Iwpprimés en établidemens pour rhu!nanit4é l'ouffrante ; pour un pauvre de^ Vules, qui y anroit trouvé des lecou'rs &C des cpnfolations on auroit fait &: l'on a déjà fait cent maihe^^reux diifis les Campagnes.

Telle efl , Sire, refqu'iflfe du tableau général des maux , auxquels le nouveau Tvitcine alioit iivierees belles Provinces; tel eft , l'effet d'un fyfléme, .dans îs.^q:!el la Loi de la propriété eu. méconnue & les Inftitutions les plu? '^^g^î , le", plus facrees 6i; les. plus antiques» d'uri.Peapleibfrt comptées pour rien,; vous jugerez-, Sire , par vous -iriême , combien les effets fui:eiles doivent en être ék-.iclus & varies , combien en rn«me tems il (eroit impoffible ,. que trois QU:qna- tre per.i'onnes , quelque fupérioiiié de lumières qu'on, leur fuppoie, puiiTent ctre capables de les détailler tous à Votre" Ma'jefté heaucQOp moins les^difcutèr ; & combien ea même-tcms 11 efi important pour votre fervice & le bien de vos Peuples , que Votre M^jedé , daigne les vérifier fur les lieux, en per- ibnne , fi les intérêts de la Monarchie le permet- Tenr, ou s'ils ne le permettent pas , qu'elle daigne à ce autQriier Leurs Aheffes Royales , dont nous admirons également la prudence.

C'eft là. Sire, encore une Loi diftée par la fa- p^eiïe de vos auçufles Prédécefieurs & le confeil de nos ancêtres, convaincus, qu'il étoit im.pOiTîble , traiter des intérêts aufîî grands ,' ailleurs que dans le Pavs mênae.

C^37 ) Vorre Majefté vefi'a alors , que l'on a Tupporé des abus il n'y. en avoit pas; que ceux que l'on V pourroit rencontrer ne dérivent pas de la Confiitution , que les uus doirent être attribu.és à la trop grande inliuence du Gouvernement dans la Collation des Emj)!ois , par rapport auxquels on né- glige les qualités- 6c les précautions , que la Coni- tituîion elle-même prefcrit, que les autres (ont de la nature de ceux qui font inléparables de l'ouvraîîc àes hommes, dont la in.dn ne pr-€Kiuit rien de par- fait , & vous ferez convaiicu de plus , Sire , qu'à ces commua- al-us , le nouvX\HU fyfléme alloit îubf- tituer des vrais défafires.

Hâtez donc , Sire , ce moment de. confolation pour vos Provinces éplorées : tenez, venez, Sire tar:r la fource de nos maux & calmer nos inquiétu- des î vous n'y recucU'erez pas feuiemeut les hom» mages les plus purs de vos Sujets , mais Vous y éta- Wirc?; en tnême terns un féjour de paix pour cics voifîns induftrieux , que des divifions inteftines for- cent, à venir chercher un. afyle dans vos Provinces Belgiques : ils s'y fixeront , Sire , ils y apporteront leur induftrie avec leurs tréfors , fi le calme de notre Pays peut précéder celui <.\t leur Patrie.

Vous avez daigné -, Sire , déjà déclarer que votre inte:.tioîi invariable étoit de conferver nos Droits , nos Conftitutions & nos Ufages ; mais, Sire, cette déclaration gracieufe eCt accornpr,gnée d'espreflions qui ne diflipent pas tout-à-fait nos alarmes; elle eft incapable de produire tous les bons effets que Vo- tre Majeflé s'en eft promis ; il n'y a qu'une décla- ration limple & précife , Sire , qui puiffe faire renaî- tre le calme &: la confiance parmi vos Provinces, & la fureté qu'exigent les étrangers qui délirent de s'y fixer ; il conviendroit , Sire , que cette déclara- tion portât , que noi Droits feront inviolablement

(238) confervés; que le nouveau fyftérr.e ne fe reproduira en aucun tems , & que Votre Majefté daignera re- chercher & corriger les abus qu'il pourroit y avoir, de concert avec ies Etats , d'après les Loix fonda- mentales ; vous conrommerez , Sire , ce grand ou- vrage , digne de vous &c de la gloire de votre Rcgne , nous Tommes prêts à facrifîer nos vies & nos for- tunes pour l'illuflrer.

Nous Tommes avec le plus profond te(pQ^, SIRE, DE FOTRE SACRÉE MA JETÉ,

Les plus humbles , les plus obcïffans & trcs-fidclcs Sujets ,

LES ETATS DE FLANDRE,

SigrU , F. D. D'HOOP.

De notre AJjemhlU.^à Gand ce i-j Juillet 1787.

RfquÉte préfentée à Mejfeïgneurs les Etats de Brabant le 19 Juin ijSj ^ par les Chefs de la Bourgeoïfie (S* les Maîtres-de-Quar-* tiers (^ Hoofd mannen der Poorterye ende Wyk-meefters ) fa'ifant le fécond des trois Membres de la Ville di Anvers, (^traduction du Flamand,^

Messeigneurs,

xS OUS Chefs de la Bourgeoise & Maîtres-de -Quar- tiers , reprëfentant le fécond des trois Membres de la Ville d'Anvers , avons l'honneur de nous préfenter une féconde fois , avec un très- profond reipeél de- vant Vos Seigneuries Révérendiiîimes ôc llluftrif-

( ^39 ) /îmes, corr.ine nous l'avons déjà fait lors cîa l'ouver- ture de vos reTpeftables AiTemblées, & d'unir notre voix à toutes les remontrances ^que vous avez déjà faite»; , & que vous continuez* encore de faire à Leurs Alteifes Royies avec un zcle infatigable, & un cou- rage au-deffus de tout éloge , pour la coniervation des Privilèges accordés à ce Pays par la Joycuje En- trée ^ pour le maintien du Conleil Souverain de Bra- hantjôi fur tout pour la fupprelïîon des Intendances.

Les devoirs que nous impofe la qualité de pro- tefleurs du Peuple, nous a excités la première fois, &c nous oblige encore aujourd'hui, à faifir le mo- ment favorable , de défendre les intérêts des Ci- toyens, devant de tendres pères de la Patrie, &c de leur faire de rerpeftueufes remontrances , qui ont pour objet , le (bulagement , le bonheur & la prof- périté du Peuple, qui gémit depuis trop long-tems, lous le poids de la mil'ere.

Cette mifere a fa fource dans la ciierté du Pain, du Beurre, du Bétail, du Sel, de l'Huile, &c. en im mot , le Peuple eft dans la difette des chofes de première nécefiité.

L'Artifan ("e plaint avec juftice, qu'il peut à peine gagner fuffiamment de Pain pour la femme & Tes cnfans. Les plaintes du Bourgeois font également fon- dées. Il éft tems,il efl jufle que l'on prenne encon- (idération leurs doléances.

Cependant nous laifTons à votre fagefle & à votre prudence à juger , s'il convient de faire des repré- fentations à L. A. R. , pour défendre ou reftreindre la (ortie du Grain, du Beurre, du Bétail, &c. Et nous vous abandonnons auffi le choix des moyens , qui vous paroitront les plus convenables pour faire cefTer les juftes plaintes du Peuple.

Ah ! fi après de fi longs gémiflemens , nous pou- vions, Mefleigneurs , vous engagera faire tous vos

( ^-AO ) efïorts , pour obtenir en faveur du petit Peuple , U libre entrée, comme ci- devant du Hareng de Hoi- lairde ; par cet Article ieul , mille & mille individus reprendroient une nou\ielle vie. En effet, quel nom- bre mcroyable de perronne<; n'y avoit - il pas qui vivoient ioir en fumant le Hareng, (oit en le débi- tani ? Le pauvre Artiian avoit pour moins d'un fol deux bons Harctjgs , qui lui luffii'oient pour.un repas: le refte du faîaire de fa Jou-née , il pou voit le réfer- ver pour la fubliftance de (it femme & de fes en- fans , ou poLi;- d' utres nécefïité^. Maintenant hors d*état d'acheter de la Viande", à caufe de 1; cherté, il peut à peine fe procurer fuffifaniment de Pain : un mauvais Hareng d'Odende , eft en effet , trop cher pour lui, il Teft même pour le Bourgeois aifé. W\n &c l'autre fe piaignerit d'être obligés de tirer le Ha- reng d'Oftende ; ce qui peut être un avantage pour la Flandre , .mais, efi en méme-tems , un malheur ôc une opprelîîon pour le Peuple du Brabanr.

Nous n'ignorons pas , Mefleii^neurs , que la Ville d'Oftende a obtenu par un Oftroi de Sa Majcfté , le Privilège exclufit de faire entrer cette denrée dans nos Provinces.

Mais, jugez, fi l'équité permet d'accorder à un?:: Ville des Pnviltges, qui cauiént la ruine d'un nom- bre infini de Citoyens-

Jugez , fi cela peut fe concilier avec la Joyeufc Entrée^ qui défend bien exprefîément d'accorder des Privilèges ou exemptions , qui puifient en aucune manière être ptéjudiciables aux habitans du Brabanr. Telle eft la difpofition dti 4^e. Article de ladite Joyeufe Entrée.

Nous n'avons pas , il eft vrai , des raifons au/îî fortes de nous plaindre relativement à la Morue d'Of- tende , que par rapport au Hareng , (i noiis n'envl- fageons que l'avantage feul du petit Peuple. Mais

comme

( MI )

comme notre foilicitude embraffe aufli les intérêts de tous les Citoyens , nous avons cru qu'il étoit de norre devoir, comme Protecteurs du Peuple en gé- néral , de vous faire fur cet Article de rerpeftucufes remontrance^.

Oui, Mefleigneurs, vous devez en être perfucdés, &c c'eft un fait conrtant , que dans notre Ville , qui renferme tant de milliers d'habitans , nous avons à peine reçu d'Oftendeen une année autant de tonnes de Morues , que nous en recevions ordinairement en un mois avant cet oftroi oppreffif &: ruineux.

Le préjudice que ce Privilège exctufit a caufé à ceux qui font le commerce du PoifTon , & la dé- treffe il a jeté notre Bourgeoise , font trop con- nus pour s'arrêter ici à le démontrer plus au long.

Nous ne pouvons cependant nous empêcher de faire cette obfervation : ou la Ville d'Oftende n'a pas été en état de nous fournir fuffifamment de Morue, ou elle nous a de dcflein prémédité , laifîe en di- ferte de ce PoiflTon , pour nous Forcer à acheter à un prix exclufif de mauvaile Morue , parce qu'il étoit défendu d'en importer de bonne qualité de Hollande.

Nous vous repréfentons aufli , Meffeigneurs , que c'efl: un grand préjudice pour la Nation, que la jcu- nefife qui fe fent appellée à l'état Religieux, foit en- travée & arrêtée dans la vocation, par l'^dit du tS Avril 1-72, donné par notre gracieufe Souveraine M^rie-Thérefe de glorieufe mémoire , par lequel l'émiffion des vœux folemnels de Religion, qui étoit permiîe à l'âge de i6 ans , fuivant îe Concile deTrente , eft défendue avant celui de 25 ans.

L'etfet que cet Edit produit , c'eft qu'un petit nombre de jeunes gens embraflent l'état Keligitux. D'où il s'eni'uit, que plufieurs familles doivent à la fin tomber dans une décadence totale, pu (que cha- que entant prenant une part dans la lùccefli::: de Tes

( H^ )

parens, la famille ne peut plus fe foufenir dans Ton premier état de fortune Se d'aifance ; & lorfque les enfans qui kiccedent font en grand nombre, la part de chacun d'eux eft fi modique , qu'ils ne peuvent entreprendre un commerce d'une certaine étendue, ce que toutes fois ils auroient pu faire , fi quelques-uns de leurs frères ou fœurs , avoient eu la liberté de fuivre l'inclination qui les appelloit à l'état Eccléfiafiique.

Nous favons bien, Mefîeigneurs, que Sa Majefté ne défend point par cet Edit la vie Religieufe : mais nous favons auflîî , & l'expérience nous l'a ap- pris , que les fuites funeftes qu'a entrainé cette dif- pofition qui recule jufqu'à l'âge de 25 ans rép«.)que de l'émiffion des vœux , ont été que le nombre des familles eft diminué, & que les jeunes gens, après avoir à peine achevé le cours de leurs études, fe li- vrant audéfordre, deviennent un fardeau onéreux pour la fociété , au lieu qu'ils auroient pu être utiles à l'Etat 6c à l'Eglife , s'ils euffent été de meilleure heure mis à l'abri de la fédudion & de la corruption des mœurs.

Ajoutons à cela que les fciences qui contribuent tant à la gloire &: à la fplendeur d'une Nation, & qui font pour ainfi dire la bafe & le fondement de la félicité publique , font tombées dans un état de mépris & de langueur , ou plutôt font menacées d'une entière extindion. En effet, les Parens dont les enfdns montrent d'heureufes difpofitions pour les fciences , voyant que la carrière des études ne pré- fente point une heureufe iflue , ce qui pour un grand nombre eft l'état Eccléfir-ftique , n'y font point entrer leurs enfans, d'abord parce qu'ils fe trouvent dans rimpoflibilité de les entretenir jufqu'à l'âge de 25 ans , & enfuite parce qu'ils appréhendent avec rai- fon , qu'après avoir achevé leurs études , féduits dans un âge fi avancé par la corruption du fiecle , ils n'ayent plus de goût pour l'état Eccléfiaftique.

( MO ^ Cet Edlt prive donc d'un état honnête pîufieurs individus , qui auroicnt pu rendre des fervices ef- fentiels, comme ceux qui autrefois, quoique fortls de la moindre clalTe de la Bourgeoifie , font parve- nus aux plus éminentes dignités, foit de l'état foit de l'Eglii'e ; &c ainfî pîufieurs Pères de famille (e voyent forcés d'enlevelir , pour ainfi dire, les ta- lens & le génie de leurs enfans fous l'enclume &c le marteau d'un Métier fervil.

Telles font les obfervations que notre devoir nous a didées , & que la Religion du Serment que nous avons prêté & que nous voulons remplir , ne nous a pas permis de paffer fous filence.

Nous croyons avoir rempli l'obligation que nous impofoit la qualité de défenfeurs du Peuple , & nous vous fupplions ini^arument , Meffeigneurs , de daigner appuyer avec cette follicitude paternelle , donc vous avez donné tant de preuves , cette effufion de nos fentimens pour Ifc bonheur public, qui a été jufqu'ici l'objet de vos plus prelTantes démar- ches. Nous vous fupplions aufîi de continuer fanç interruption, des Aflemblées fi refpediables , jufqu'à ce que toutes les infraâiions faites tant à la Joyeufi Entrée^ qu'aux autres Droits, Libertés, Privilèges, Chartres^ Coutumes , Uiages & autres Droits, tant publics que particuliers foyent entièrement redreilées.

C'eft la grâce, &c.

Eto'unî fignès , P. A, Van dcn Bergen. J. E, C. Grigis. N. Jof. Hcny, C, M. N. Nan-. tenil fenior. 7, Huybrcchts. J. Alies, /, B. Gome^. N. De Manne^, F. C. J. Lar~ roie. Denis Corner. Jof, Herni. Bogaeris, P. Jof. Potteau. C. J. Dehaen. J, Van Bcrc- kelaer. F. D. De U'inter. De notre Aiïemblé<?, le 13 Juin 1787.

( 144 )

LETTR E d'un Patriote ^ fur la meilleure Admïnijlrat'ion de la Police dans les Provinces Belgiques.

m i F s défordres inféparables des tems de trou- bles & de diiïenfions publiques méritent de fixer l'at- tention , fur-tout des perfonnes , qui par état & par les fonélions de leur Emploi , (ont fpécialement chargées de veiller au maintien &c à la confervation du bon ordre & de la fureté publique.

M. le Comte VanderStegen & de Bouireval,Grand- Séuéchal ou Droflard en chef du Pays & Duché de Brabant, animé d'un zèle vraiment Patriotique, pour prévenir ces délordres , éloigner de ces Provinces route efpece de faâieux , de turbulens , de gens fans aveu & autres perfonnes fufpectes qui dans de fem- blables circonftances font les boute-feux qui fomen- tent, excitent & propagent les émeutes fous le pré- texte de la défenfe de la caiife commune , & cela dans l'efpérance d'exercer leur brigandage avec im- punité, confondus dans le grand nombre, offre d'é- tablir les moyens infaillibles d'extirper dans ces Pro- vinces le brigandage jufques dans fes racines ; avec impofîîbilité à toutes perfonnes criminelles & autres fans aveu de s'y réproduire dans aucun tems & (ous aucune forme.

Ces moyeris qui n'ont jamais été imaginés, (im- pies dans leur exécution , économes dans leur em- ploi , font le fruit de 40 ans d'étude & d'^ipplicatioii dans cette partie efîenti^lle de l'Adminiflration gé- nérale , dont par état il a fait l'objer de fes médita- tions.

11 feroit au comble de fes dcfirs , dans les cir-

C M5) conilances actuelles , il pouvoir donner à Tes Conci- toyens ce témoignyge de Ion amour pour Tordre pu- blic , affuré qu'il eft de l'efficacité de (es movens : efficacité qu'il offre de démontrer avant de les em- ployer.

Sans entrer dans le détail des avantages innombra- bles que procureroicnt ces moyens mis en exécu- tion , nous nous contenterons d'en indiquer quel- ques-uns.

D*accord avec l'autorité fuprême , le DrofTard de Brabant tait revivre , au fouiagement des Peuples , tous les Edits , Placards Sr Réglemens qui ont été promulgués depuis des fiecles , pour le maintien du bon ordre &i de la ("ûreté publique , en en rendant l'inexécution prefqu'impoffible.

11 vient au fecours des Peuples du Plat-Pays, par la fuppreffion entière d'une corvée onéreufe, péni- ble 5l illufoire : Les Patrouilles payfannes.

Il reftitue des milliers de bra,<; aux campagnes , & rend par-là une énergie précieufe à l'Agriculture.

Il élevé une Barri-ere infurmontable contre la fraude & la contrebande qui infeftent ces Provinces.

Il éloigne à iamais de ces Pays les vagabonds , gens (ans aveu & autres femblables , à qui il feroic impoffible, par le moyen de Ton cordon , de s'y in- troduire.

Il (urveille, avec une attention toujours aélive , les mal-inteûtionnés dont aucun mouvement ne peut échapper.

11 prévient enfin le défordre & le crime, S: afTitre aux Citoyens de tous les ordres , dans les Villes &c au Plat- Pays, la tranquillité la plus imperturbable dans leurs oerfonnes (k dans leurs biens; ce qui ne peut s'effcftuer qu'en augmentant la CcKiipagnie.

Tels font entr'autres , quelques-uns des avantages que préfentefon projet; touteslcs parties en font tel-

Q 3

( i4<5 ) iemeiit combinées &c confolidées par des Réglemens i'agement médirez , & par une tadique unique & par- ticulière à ce projet d'arrangement , qu'il ieroit dif- ficile de le trouver en défaut.

Il conlîfte à établir une Maréchauflee uniforme , fiffii.ante, toujours en activité & fi heureufement dif- tribuée à diftatîces égales au Plat-Pays & dans tou- tes les Provinces, qu'elle furveille à la fois toutes les parties du fervice : de manière que par une corref- pondance journalière & non interrompue, de la ca- pitale comme du centre , les o^rdres s'expédient tans celTe avec une rapidité étonnante jufqu'ajx extrémi- tés des Provinces , & les rapports en arrivent avec la même rapidité.

Cette correfpondance invariable n'eft due qu'à la diftribution combinée des Archers flarionnaires , pla- cés à trois quarts de lieue les uns des autres . dont les forxfVions font de parcourir tous les jours & en tous fens , le qùarré qui eft commis à leur carde , pour enfuite faire leur rapport à leur bas Officier , fïné au centre de la brigade compolée de huit Ar- chers.

Les rapport? font remis à jour fixé à des Cava- liers porte- caflettes, fiationnés de 4 en 4 lieues, oa- puis la capit^iîe juiqiraux extrémités des Provinces , dont les fondions font de parcourir , en rétrogra- dant , les routes qui leur font indiquées , pour , de pofte en pofte, faire parvenir ces rapports à leur dtC' tinaîion.

Voilà en deux mots , tous les détails de ces moyens afiirrés, fimples à la vérité, mais par leur {implicite même recommandablcs. Us femblent une méchaiii- que dont toutes les pa-fies font en mouvement con- tinuel par la combinaison de la correfpondance. Us font l'effet d'un filet tendu fur toutes les Provinces à la fois y pour en fermer l'entrée à tout ce qui

pourrolt en troubler l'ordre 6>c la tranquillité , & y furprendre immanquablement tout ce qui y fe- roit déjà.

Le mendiant profcrit par les Edits , le routeur fans aveu, le déferteur , le contrebandier, le brigand, le banqueroutier fugitif, le raviffeur, le voleur, Stc. ne trouvent plus de retraite qui ne foit fous les yeux de quelque ftationnaire ; & s'il eft alTez heureux pour échapper d'une maille , il eft fur qu'il fera pris dans une autre.

Tel eft enfin ce Plan , qu^^il peut erre confidêré à bon droit , comme le bouclier du Citoyen & du Voya- geur , le garant des propiétés , l'œil toujours ouvert «Je la Police , & l'objet long-tems dëfiré des habirans de la campagne , qui n'afpirent qu'à la fupprtffion de leurs Patrouilles pour y voir fubftituer celles in- diquées.

Pour y parvenir , l'Auteur vient de faire remet- tre aux Seigneurs Etats afTeir.blés un Mémoire rela- tif à Ton projet. Tout fait pré'umer qu'il fera favo- rablement accueilli , 5c qu'il recevra enfin une fandion qui mettra le comble à notre reconnoifTance pour le patriotifme généreux dont Meffeigneurs les Etats Unis de ces Provinces nous ont donné dans tous les teins, & nous donnent encore tous les jours, depuis trois mois , àcs preuves Ci ptécieufes.

Q4

( mS )

Lettre de remerciment à Mrs. les No- tables des Communes de la Ville de Gand^ demandant par leur repréfentatïon du J Juillet 1787 , le changement du Magïf- trat y pour le compofer exclnfivement de bons Patriotes y du xo Juillet 1787.

Messieurs,

E

N admirant d'un côté le Patriotiffrje le plus pur qui anime vos cœurs, je ne faurois me difpenfer de voir avec la plus vive indignation , que de l'autre côté , l'mtérêt le plus lordide & le plus mépri(able domine cette elpece de gens , qu'une ambition de- inefurée dévore , fans égard pour aucun principe, parce qu'ils ont befoin d'un emploi pour exifter»

En louant, Meffieurs, votre 2eie pour le bien gé- néral dans la demande que vous nous fîtes le 7 du préfent mois , pour obtenir le changement du Ma- glftrat , fuivant les Articles I 6c II de la ConceiTjon Caroline de Gand , dont le but principal eft de ^o\xs choifir un Repréfentant intègre, que le befoin de vi- vre des émolumens de fon emploi ne dirige point , un honnne impartial 8>c jufte , que l'appât du gain n'entraîne ni n'aveugle point, comme celui qui oc- cupe scluelîement cette ]5lace , le ne puis m'empê- cher de vous dire, que 3'ai été forcé de rougir de honte , ou plutôt àz douleur , îorfque dans notre féance fcabinale , j'ai entendu l'oppofition que firent a vos jufles repréfentations quelques individus, qui

( 149 ) <3epuis cette aftlon non patriotique , ont perdu tout le mérite qu'ils avoient à mes yeux.

L'homme intègre , celui dont l'ame eft pénétrée des fentimens de juftice &C d'équité , n'a rien à rif- quer dans ce chansement , parce cju'il eft intimement convaincu que la caufe générale doit être préférée dans tous les cas atout autre intétêt ; &c dans le cas dont il s'agit ici , j'ai vu avec une fenfibilité bien douloureufe , qu'il exidoit parmi nous de vils & de très-vils efclaves.

Je Tuis , je l'avoue , le moindre de tous vos Ma- giftrats , je fuis ce qu'on appelle un zéro dans l'Etat; mais s'il étoit pofiib'e que j'eufTe mille têtes , toutes aufli précieufes que celle du premier d'entre nous , je n'héfiterois pas à les dévouer toutes pour brifer ]qs chaînes d'une fervitude odieufe , pour rompre , dis-je , des chaînes que des traîtres , des cœurs bas &: rampans ont déjà baifées , & qu'ils baiferont en- core , dès que des récompenses précaires & momen- tanées en doivent être le prix , & à ce vil prix , leur criminelle condefcendance les portera à prodi- guer le rang & les plus beaux jours des Peuples au- trefois f. fortunés de la Belgique.

Aiîri facra famés , quid non mortalia cogis Pectora !

Maudite foif de r or, à quels excès n'entrair.cs-tu point les mortels!

Oui , Meflîeurs , il exifle pour notre malheur, de ces cœurs rampans , qui ne fe feroient aucun fcru- pule de ■acrifier leur poftérité , leurs frères , un Peu- ple entier , qui pour recevoir une gratification an- nuelle de quelques milliers de florins , vendroient leur propre famille , fans en excepter même leurs enfans &c leurs femmes,

Quelle abomination, vous écrierez- vous ! Je l'ai dit comme vous, & je n'aurois jamais pu me le perfuader fi je n'en avois été le témoin oculaire. J'ai lu fur le front de ces oppofans la crainte & la ter- reur. Ils croyoient déjà toucher au moment fatal qui devoit les priver de leurs appointemens ; car foyez bien certains, Mefîieuri, que ce n'eft aucunement la place qu'ils ambitionnent , mais les émolumens qu'ils en retirent.

Pourront-ils alléguer pour excufe, que le change- ment vifible qui s'opéra dans leur phyfioncniie pro- venoit de l'efpece d'affront que vous leur fîtes en nous propofant direftement de foUiciter notre def- tru61ion , & que ce fut l'unique fource de leur mauvaife humeur.

Cette défaite ne pourra jamais être admife parmi vous , Meffieurs ; vos yeux font plus pénérrans que ceux de ces hommes intéreffés à ie maintenir dans des emplois , fans lesquels ils mourroient de faim. D'ailleurs étant accoutumés par un abus de leur charge à dominer & à brufquer le Peuple ; ils fe verroient avec le plus grand regret privés de ce qu'ils appel- lent leurs Privilèges, comme fi s'en étoit un de mal- iraiter un Peuple lx)n & docile, de l'entendre jeter les hauts cris , lorfque par des manoeuvres reptiles il fe voit conduire au bûcher, il doit fe voir, par un raffmementde cruauté, confumer à petit teu ; <Sc fans doute qu'ils feroient déjà venus à bout de leurs de/Teins fi le Lion Belgique n'eût pris le parti d'abandonner fon écu{ron,pour s'élancer avec force fur ces Ojfeaux de proie & retirer d'entre leurs grif- fes des agneaux qu'ils étoient prêts à dévorer.

J'ai confidéré & je confidere encore votre de- mande ; je la regarde comme une des plus fortes preuves que vous puifiiez donner de votre fagacité

r-. (251 )

& tie votre furveillance pour l'intérêt commun^ Apres m'étre examiné moi-même avec attentiGn , je me fuis dit : ce ch?.ngemcnt n'influera en rien l'ur mol, fi j'ai le bonheur de pouvoir être utile ou nécelTaire à la Patrie.

Ne fuls-'ie d'aucune utilité ; je fuis donc indigne de la place que j'occupe, ik. je ne puis en con- fcience exercer plus long-tems un Emploi qu*on a daigné me confier , parce qu'on m'avolt cru capable de m'en acquitter ; il ne doit rien me coûter pour l'abdiquer, parce que j'agis contre le véritable but: de l'inftitutlon.

Suis-je utile au contraire , mais entrevois-je que quelqu'autre l'efl: plus que moi ; ô ma chère &: bien-alniée patrie , dès que je le connoitral , je m'em- prefferai de te le prélenter moi-même , te priant de vouloir bien me le prétérer. Je fuis un vrai Pa- triote; chaque goutte de mon fang porte l'empreinte de ton Lion : l'intérêt eft un monftre à mes yeux dans le moment il nous faut des hommes.

Rien de ce qui fera contraire au bien public ne me réduira jamais. Votre propofitlon , Meffieurs , eft le miroir de la vérité , que vous exposâtes à nos yeux , & chaque bon Patriote pou voit fe mirer, s'il n'avoir eu les yeux fafcinés. Cette forte d'expofition n'a pu paroître un affront qu'aux yeux des mercenaires qui n'ont en vue que des penfions, au lieu d'être avides de procurer le bien-étre de leurs Concitoyens.

Je n'ai dans aucun tems brigué ni follicité la place lucrative de premier Echevin , place qui m'eût , à la vérité donné entrée aux Etats, mais comme un phantôme, je n'aurois eu qu'un Droit de Repré- fentation : quant à la féconde place, qui confifte à être brufque envers tout le inoiide , fe préfenter

( 15^ ) aux audiences , y recevoir le peuple d'un air hau- tAin , je n'y afpirerai jamais , & encore moins à celle de Direfteur des ouvrages, emploi qui femble deftmé à des prépofés accoutumés à traiter leurs femblables, comme s*ils étoient d'une efpece diffé- rente de la leur.

Enfiti je n'ai jamais envié d'être à la tcte des Publicains , pour avoir une penfion de mille florins, prife fur la fubftance du Peuple , non plus que les deux milie qu'on accorde à un oremier , à condi- tion que j'aurois un caractère aufîî impitoyable que l'eft celui qui en eft revêtu aujourd'hui, & qui malheureufement eft trop connu pour en dire ici un feul mot.

Je ne connois d'autre attachement que celui que me difte le bonheur général des mes Concitoyens, ainfi que celui que me prefcrit mon devoir. Je ne défire uniquement qu'à coopérer, autant qu'il dé- pendra de moi, à la tranquillité publique, à faire adminiftrer la Juftice , comme elle doit l'être , aux pauvres comme aux riches.

Si comme j'ofe m'en flatter , & comme l'exem- ple de ceux de Namur me le fait efpérer votre de- mande eft agréée par le Gouvernement , j'entrevois que dans la crife oii nous nous trouvons, je ne peux jamais être qu'un être fouffrapit , parce que je n'ai qu'une voix très-foible dans toutes ces délibérations;

mais le Cœur! Ah] Meffieurs , tout le monde

avoit le mien , notre bonheur , notre exiftence li- bre feroit certaine, ou ft malgré nous, le contraire prévaloir , nous deviendrions des furies vengereffes prêtes à brifcr le joug, fous lequel on prétend nous courber.

Ne perdez point de vue le Peuple , vos familles, vos enfans , la poftérité même ; prouvez-leur que

(M3) "Vous en ctes les véritables Pères, & ne leur Coff- riez que des exeinples qu'ils ne rougiiTent pas d'i- miter,

ChoififTez nous des Chefs , dont les artères Sc les veines foienr remplis de pat-ionlme , & non de cette efpece d'hommes, qui changent de foyers comme d'habits , & dont la maxime indifféren- te eft :

^ Illa mlhi Patrla , non i;bi nafcor, fed ubi vefcor.

Ma Patrie n 'efl point U lieu je fuis , mais celui je trouve du pain.

Ah! Mefîieurs, puiffiez-vous inculquer aux com- munes de cette Ville , qui jouiffent de Privilèges encore plus étendus que ne font les vôtres, mais qui mal- heureufement pour eux font aveuglés & privés des mêmes fentimens , qui doivent vous immortalifer I puiflîez-vous parvenir au point de foulager ce Peuple , en le forçant, par votre exemple, à demander le changement du corps des deTpcres , dont la Magif- trature eft compofée ; vous rendriez aux B * * , vos alliés , leurs Droits & Privilèges, &: vous auriez en même tems le plaifir fenfible de voir dilparoître & s'éclipfer de l'afTemblée générale de cette Pro- vince , des perfonnages fufpefts par leur enthou- fia(me , leur forte de vénération mal entendue, & leur dévouernent pour le parti âes temporifeurs , dans l'inftant fâcheux le feu de la lédition menace d'embrafer toutes les Provinces Belgiques.

Chercher à étouiffer le cri du fentiment &c de l'humaniré, ajouter aux anxiétés d'un Peuple fouf- frant à la vue, des horreurs dont il eft menacé, & cela par refpoir honteux d'être revêtu d'un chétif em- ploi ; c'cft ce qu'on peut nommer l'exécration S\

( ^S4 )

^abomination publique, &: temporifer d.tns un ino- ment la foudre menaçante eft prête à éclater & à porter Tes ravages de toutes parts, tandis qu'elle devroit être conduite par le fil de la raifon & de l'expérience dans le puits de î'anéantifTement , c'eft fans contredit , le plus grand crime de Leze-Maiedé €\u\ pulfîe être commis envers l'htat , c'cfi: marcher la tête baiflee pour la recevoir : & cependant nos temporifeurs ne font pas femblant de concevoir cette vérité , quoique les effets foient prêts à les rédaire en poudre.

Je ne peuï mieux les comparer qu'aux Nègres , qui baifent le bâton dont on s'eft fervi pour les rofTer , ou plutôt à ces animaux domeftiques qui fe traînent fervilement à terre vers leur maître , pour obtenir un morceau de pain noir, que bien fouvent il leur refi-ife encore.

Courage , Meilleurs ; que votre démarche , que l'exemple que vous donnerez , forme , s'il (e peut , des âmes incorruptibles , que vos procédés loués à fi jufte titre nous donnent enfin des Maglitrats éclairés & s6lifs , de vrais Citoyens , qui fâchent connoître le prix de la liberté. C'eft le feul , l'unique moyen qui pourra concourir à Tencouragement du com- merce , de Tagricuiture & de l'induftrie j c'eft la feule & la vraie tentative qui pourra rendre à l'Etat fa première fplendeur en faifanî également le bonixeur de toutes les claffes de Citoyens ; c'eft , dis-je , ]>e feul moyen de maintenir l'ordre & la paix , en f.ù- fant fleurir tous ces objets , qui rendront au Souverain 6c au Trône fa grandeur primitive , & au Peuple fon bien-être.

Si l'on dédaigne de vous écouter ; ne vou<; décou- ragez point, redoublez vos efforts; il eft beau de furmonter les obftacles qui fe préfentent. Si la mon-

(MO

tagne eft efcarpée , fongez que la gloire en fera plus grande d'arriver jufqu'au fornmet. Ce n'efl qu'à fa cime que vous pourrez efpérer de trouver la gloire & le bonheur.

Je fuis ,

Messieurs,

P'otrî Compatriote. C. L. J. B. F.

RE MON TP. AN CE S des Etats de Brabant à FEmperdur o Roi.

SIRE,

L

E Comte de Murray , qu'il a plu à Votre Ma- jefté de commettre au Gouvernement-Général par intérim y nous avant fait connoitre qu'il déiîroit que les Députés de notre part fe rendiffent chez Son Excellence, il leur a communiqué vos intentions , Sire , au fujet de la Dépêche qui nous a été adre!- fée le ib' Juillet pafTé , relativement aux déplace- mens des Troupes ; nos Députés n'étant pas quali- fiés à s'expliquer par eux-mêmes fur ce que le Comte de Murray avoir à leur dire en vertu des ordres de Votre Majefté , ils ont prié Son Excellence de leur en donner le réfnltar par forme de note , ce qu'on a cru ]uûe d'accorder,-

Nous fupplions humbleîîient Votre Ma')ef}:é , d'être convaincue, que nous n'avons pas follicité la Dé- pêche dent il s'c^git , dans l'eiprit d'aucune rer.i- tence ni d'aucune défiance quelconque qui eût pu iroiK refter après que Votre Majefté, par fa gracieufe

Dépêche du 3 Juillet , nous avoit afiTures que votre Intention n'éroit pas de renverfer en rien la Confti- tution de vos Provinces Belgiques , que les vues de Votre Majefté ne tendoient qu'au plus grand bien- être & à la plus grande félicité de vos fidèles Su- Jets ; fur quoi vous vouliez bien , Sire , vous enten- dre avec vos Etats , d'après les Conftitutions fon- damentales.

La Dépêche du 18 Juillet a été donnée pour cal- mer les inquiétudes de toute la Nation , dans les moment que l'émotion étoit extrême , & qu'elle ctoit encore excitée par l'impreflion que cauioit le rappel, quoique momentané, des Séréniflimes Gou- verneurs-Généraux.

Sire , nous pouvons apprécier , fans exception , •tous les rapports qui peuvent être parvenus à V©- ttre Majefté- (ur nos démarches; nous n'en redoutons iuicun de quelque narure qu'il puiffe être ou de quel- <^ue fource qu'il puifle venir; bien fûrs de notre in- nocence , bien fûrs de ne nous être écartés en rien , de la foumlffion que nous devons à Votre Majefté, comme à notre feul & légitime Prince.

Mais, Sire, fi dans les tranfaftions ordinaires la Nation fe rapporte aifément à fes Repréfentan* , c'eft-à-dire, aux Etats, il eft indubitable, que pour promouvoir le nouveau fyftême en tout ou en par- tie , norre concours non-leulement n'eût infpiré au- cune confiance à ceux dont nous fommes obligés de fuivre le vœu univerfel , mais que ce concours eût caufé les plus grands malheurs.

Ceux-là , Sire , qui voudroient prétendre que les Etats ont renfermé ou fu reftreindre le vœu général dans cette occurrence, fe trompent eux-mêmes; ils n'ont pas plus la connoiftance de nos excellentes Loix conftitutionnelles que du caraflere des Habi- ta ns ,

C =57 ) tans , qui tous ^ dans toutes les clafTes font éclai- rés (ur les principes ii {impies de la Conflicution , qui alloit étie vifiblement entamée , & par - fa- crifiée.

Comment eft-il. poffible , Sire , qu'on n'a't pas (u déir^eler le vrai but qui a Ci bien réuffi, du ieul parti qui reftoit à la f^gefTe dans l'éloignenient de Votre Majerté, d^ms la lecoufTe violente, qu'avec peine il a été polfible de conjurer ? Comment quel- ques marques , quelques (igîies extérieurs , ou des démonftrationi inHgîiifiantes , mais exagérées 6c (inif- tremens prélentées, peuvent-elîes; prévaloir mainte- nant & après coup fur la nécefiîté des circonflan- ces , s'il eft vrai , Sire , que rotre Peuple a été fauve?

C'eft, Sire, cette raifon, à qui toute Loi doit cé- der pour le moment, qui a fait que Leurs AhefTes Royales n'ont pas fait fcrupule de déclarer que les intraétions laites à nos Conftitutions depuis 2CO ans feroient redrelTées , piirce qu'on ne pouvoit donner à la Nation que ce calmant , d'autant plus indifte- rent au fond, qu'il revient à l'obfervation des Conf- ritutions , telles que Votre Majefté les a jurées en 1781 , fans que nous ayons jamais eu la penfée , comme nous ne l'avons pas encore , de rien efpé- rer ni demander au-delà , ni en aucune façon de la bonté du Souverain; c'eft ainli que nous l'avons exprefTément déclaré dans le moment que les Séré- nifîimes Gouverneurs-Généraux Oîit accordé la Dé- claration du 30 Mai : c'eft ainfi que Votre Ma- jefté l'a entendu par la Dépêche du 3 Juillet, à ja- mais précieufe pour nous.

Raflurés pleinement par ce que le Comte de Murray nous fait l'honneur de nous dire dans la noce qu'il nous a communiquée , autant que par

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^<^P<^"^^^ oiis avolt afTures que votre

Intention i. . ^.nverrer en rien la Confti-

ludon de vos 1 I^, 'qiques , que les vues de

Votre Majefte ne t.ùoicnt qu'au plus grand blen- étrc & à la plus g- idc tclicifé de vos fidèles Su- ieti; fur quoi vous :>iiliez bien, Sire, vous enten- dre avec vos tcat» d'après les Conftitutions fon- damentales.

La Dépêche du Juil'ct a été donnée pour csl- "'C '«< '^^ :< i.fe la Nation, dans les moment q__ ctoit extrême, & qu'elle <foit encore t l'impreflion que cauloit le rappel , r.v .s.c, des Séréniflimes Gou- verneurs-G

Sire, nous pouvns apprécier, fans exception, tous I' irc M., aucun de ' que fourcf noccnc<' . dr la I

C(»fr)mc .1

Mau, s , Nation (c ra( c'cfti ' promo

uvent être parvenus à V®-

- - j.:ches; nous n'en redoutons

ure qu'il puifle être ou de que!-

nr; bien fûrs de notre in-

nous être écartés en rien.

■- devons à Votre Majefté, ime Prince. :><';r,iclions ordinaires la •nent à (es Reprélentanf , Hidubirable , nue pour •me en tout ou en par- tie , notre concour non- Lulement n'eût infpiré au- cime C' ' •''< nous fomme»? obligés de

luivrc - ; 'îiais que ce concours eût

caufé les plus grans malheurs.

Ceux-là. ' 'l- oient prétendre que le*:

Etats ont rc - rctlrcindre le vœu général

dans cette occurrece, (e trompent eux-mêmes; ils n*ont r-' ' 'T.'^ce de nos excellentes

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lu caraftere des Habi-

tans

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Ce.

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^JimÊiùe

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tans , qui tous îs{ dans rés (ur les principes li qui alloit étie vinblenic crifiée.

Comment eft-il pofii fu ciéiî^éler le vrai but parti qui reftoit à la i Votre Majerté, dans la peine il a été pofHb'c ques marques , que démonftrations iniîgwitiaii iremens prélentées, pei, nant & après coup :i ces , s'il eft vrai , Siu fauve?

C'eft , Sire, cette ra dcr pour le moment , ^ Royales n'ont pas tait infraélions faites à nos feroient redrefTées , p .r à la Nation que ce caii rent au fond, qu'il rcviwi ritufions , telles que Vt> 1781 , fans que nous à\ comme nous ne l'avons rer ni demander au-clei la bonté du Souverain ; expreflemePit déclaré dan niffimes Gouverneiirs-Gc claration du 30 Mai : jefté l'a entendu par la l mais précieule pour m^,

Raffurés pleineui^nt Murray nous fait Tho'. note quil nous a c^

les clafTes font éclai- s de la Cunflituiiôn , .tamée , Sc par - fa- Sire , qu'on nVt pas fi bien réulfi , du leul dans réloigiicmeni de ufle violente , qu'avec jurer ? Comment qucl- es extérieurs , ou des mais exagérées 6c (inif- slies prévaloir mair^tc- éceirué des circonflan- e Totre Peuple a été

i qui toute Loi doit cé- tait que Leurs AUeffes lie de déclarer que les .tutions depuis ico ans on ne pouvoit donner , d'autant plus indiffé- i'obfervation des Conf- 'lajefté les a jurées en jamais eu la penfée , i encore, de rien efpé- i en aucune façon de ainfi que nous l'avons il moment que les Séré- IX ont accordé la Dé- ainli que Votre Mâ- che du 3 Juillet, à ja-

:e que le Comte de de nous dire dans la quée , autant que par R ***

*M

(M» )

notre amour pour votre augufte Perfonnc , nous ne pouvons , Sire , qu'offrir à votre Majefté l'hom- mage de la plus entière confiance fur la concentra- tion des troupes : telle eft notre façon de voir; nous ne manquerons pas , Sire , d'employer tous les moyens qui font en notre puiïïance pour commu- niquer cette confiance, dans toute fon étendue, à nos Concitoyens,

Mais , Sire , puifle-t-il nous être permis d'expo- fer à votre tendreiTe paternelle , qui ne (e refufe pas au moindre de vos Sujets , les maux que nous endu- rons ! puiiTe-til nous être permis d'embrafler les ge- noux non d'un R.oi , mais d'un Père qui nous porte dans Ton fein ! Si jufqiî'ici la crainte feule du fyftê- me a banni le', refies du coir.merce , avili les pro- priétés, anéanti l'induftrie , occafionné une langueur mortelle dans tout l'entrecours de la fociété civile; fi la défiance s'efl eniparée non feulement des capi- talifles , mais de tous les individus, dans les affaires les plus ordinaires ; (\ des émigrations fans nombre ont déjà eu lieu par l'effet des infinuations étrangè- res ; f. d'autres fongent à quitter ces climats , que ne fera-ce point, Sire, lorfque le miliralre fera dans i'enceinte de vos plus riches Vil'es, ou femblera les menacer , tandis que la fuite de ces précautions , notcirement fuperfîues , ne peur être que l'effet des impulfions toujours plus alarmantes pour la con- fiance , & pour cette Opinion , qui eft la reine du monde ?

Da'gnez , Sire , daignez hâter la confolation de vos fidèles Sujets ; veuillez de votre Trône jetter un regard favorable fur nous , fur les Députés qui s'y préfenteront inceflamment : puiffent-ils, Sire, ren- dre a Votre Majefls, la pureté de notre amour, de notre foumifîicn inviolable , obtenir enfin de votre

( »59 )

ftcrée Majefté , la déclaration qui doit ramener no- tre bonheur.

Nous fommes avec un très-profond refpeft,

SIRE,

De votre facréc Ma jejlé Impériale & Royale Apof- toliquc ,

Les très-humbles, très-obéiiTans & très* fidèles ferviteurs , Sujets & Vaflfaux, Us Prélats , NobUs & Députés des Chef- Pilles , rtpréfentant Us Etats de votre Pays & Duché de Brabant,

Par Ordonnance , DE C O C K.

J)e notre AjjembUe générale tenue à Bruxelles U 5 Août 17S7.

Extrait de la Galette des Pays-Bas , du 3 1 Août. N^. 65.

LETTRE des Etats de Brabant, à S. Exe. Mgr. le Comte de Murray.

E S Prélats , Nobles & Députés des Chef- Villes , repréfentant les trois Etats de ce Pays & Duché de Brabant , croyent de leur devoir , d'ex- pofer à Votre Excellence , qu'ils ont vu , avec la plus grande furprife , & avec une jufte indignation , l'Article inféré au Supplément de la Ga:^etic de Co' logne , du 7 Août 17^7 , dans les termes fui vans :

♦> S'il en faut croire les Feuilles publiques , les » Etats des Pays Bas Autrichiens, ont écrit au Roi » de France , pour lui demander de l'appui ; mais n Sa Majefté très * Chrétienne leur a fait faire par

R z

( î«0 )

» fon Mlniftre des Affaires étrangères , la Réponfe ** qui fuit : M Jjleurs , U Roi mon Maître défapprouvc ** la démarche itlicite que vous avc:^ faite contre >* votre Souverain. Sa Majejîé ne doit ni ne veut Je >* mêler en aucune manière des okjeti et Adminijlration *^ de votre Monarque. Elle ri emploiera jamais Jes >> Troupes , pour f.utenir Vinjujlice , & Elle vous >* fait favoir , qu Elle a envoyé votre Mijjive en >* original à CEmpticur [on Allié ^ & en même-ienis >* donné des ordres à ^o,ooo hommes de fes Troupes ^ w de fc mettre en etut de marcher^ à la première *> réquiftion de Sa Ma je fié Impériale. «

» Quoique cette Lettre porte toutes les empreintes de fauffeté pour des yeux cîairvoyans , cependant les Reniontrans , qui Tentent leur honneur & leur loyauté publiquement inculpés, ne peuvent fe dif- penfer de protéger le plus hautement & publique- ment contre des faits auffi atroces que calomnieux , puifqu'il eft de toute vérité , que les B.emontrans n'ont jamais écrit au Roi de France , ni reçu aucune Lettre ou Piéponfe de la part de Sa Majefté Très- Chrétienne relativement aux affaires présentes ; qu'enfin , il ne s'eft jamais rien paiTé qui puilTe en avoir même l'apparence , ainfi que les Remontrans peuvent en faire confter par l'exhibition des Pro- tocoles de leurs Séances , & qu'ils efperent que Votre Excellence en eft d'ailleurs fufîiramment per- fuadée. C'efl: pourquoi , ils fuppl ent Votre Excel- lence, de recevoir leur défaveu , & leur proteftation formelle contre les faits fufmentionnés , rapportés dans le Supplément de la Galette de Cologne / qu'en conlequence , Votre Excellence veuille or- donner ou permettre que la préfente foit inférée dans la Galette des Pays- Bai ^ avec l'Apoftille Votre Excellence. En quoi &C. «

Si^né De Cock:.

( 25» )

Copie de VApo^llle.

s> Son Excellence ayant eu rapport du confenu de cette Repréfentattlon , a permis , comme elle permet par cette , aux Suppllans , de la faire inférer dans la Galette des Pays-Bas. Fait à Bruxelles , le 12 Août i']'6-j. Paraphe Cr. Vc.

Signé M U R R A Y.

Pour Copie DE COCK.

** Il efl: incroyable combien de menfonges , d'in- poftures , de calomnies , de contes extravagans & ridiculement romanelques, les Feuilles publiques, &: de petites Brochures clandeftines , ont accumulés de- puis quelque tems contre les Etats & le Peuple Bel- gique';, tandis que le Gnzettier de Cologne fabri(|ue ou publie des Lettres fibriquées fous le nom d'un grand Monarque (le Roi de France), contre l'hon- neur de cette brave Nation , celui du Bas - Rhin , fait des vœux pour qu'elle foit mafTaerée en corps, quoique dans un de Tes derniers Numéro ^ il fe borne à fouhaiter le maiTacre des Prêtres 5v des Religieux. L'abfurdité de ces calomniateurs publics va joîqu'à attribuer au Clergé les Réclamations des Beiges, tan- dis qu'il efl de notoriété publique, que fans la vio- lation des propriété-; , le nouveau fynême fe feroit confommé fans réiiibnce , je veux dire fans réfif- tance publique 6<: efHcace. Les Remorr ances ée^ Evéques , de TUniverfîté de Louvain , & de quel- que Corps que ce foit , en faveur de la Religion , étoient mifes au rebut 6c déjà oubliées , lorfque l'E- dit des Intendances & des nouveaux Tribunaux, ré- veilla le Lion Be'eique , profondément endormi , hé- las ! fur des intércrs plus graves, qui autrefois n'euf- fent point échappé à fa vigilance , mais qui aujourd'hui ,

( 1^2 )

ne font plus qu'un objet accidentel 5c fëcondaire (a), (^u*a de commun la Conftitution de l'h-glife Catho- lique , avec les nouveaux Tribun ux èx le. Inten- dans ? quel intérêt particulier avoit le Clergé à s'y oppofer? Les âmes chrétiennes peuvent bien regarder comme un bienfait de la Providence , le concours des caufes diverfes , qui ont produit enfin ce cri perçant dont route l'Jturope a retenti; mais elles ne Savent que trop qu'avant cette époque , le grand édifice de la Catholicité fe démoliflToit en filence , &: qu'il en refloit peu de choie fur pied , lorfque d'autres intérêts en ont arrêté l'entière deftruilion. D'où viennent donc les fureurs de tant de Gazet- tiers &: d'autres barbouilleurs , contre le Clergé Belge , qui n'a fait que joindre fa voix , toujours humble 6c fuppliante , à celle des autres clafîes de Citoyens? ... D'où vient que dans un tems l'on ne parle que de Liberté , de Droit naturel & d'égalité ; le defpotirme, la violence & l'arbitraire lont devenus

(<i) Il faut convenir cependant que depuis que la liberté des Réclamations a eu lieu , cet Article a été préfenté avec toute Timpreflion de fon importance. Les Etats, le Confeil & diverfes Corporations de Flandie fe font particuliéreinent diflingués à cet égard . & c'efl la Province les intérêts de la Religion ont été le plus fortement & le plus éloquemment appuyés. Heureux le Peuple foncièrement penuadé que ce doit être ici le premier objet de fa follicitude, & en quelque forte le garant des vœux qu il forme dans d'autres genres d'intêr':ts; conformément à rinconteftable cbfervation qu'un Poète Philofophe & Payen a fi bien exprimée , il y a i8 fie clés;

Dis te minorem quod geris , imperas.

Mine omne principiurn , hùc refer exitum. j

Dl multii nt'yLeŒi dédire \

Hefperia mala luftuofce.

HOR. L. lILOd.6.

(i«} )

plus que jamais l'objet d'une haine générale , d'où vient , dis-je, cette fureur outrageante & calomnieuie contre une courageule & verrueufe Nation , qui ''c- clame fa Conftitution & des fermens réciproques ? N'en doutons pas , c'eft la haine du Chriftianiinie , la haine de Dieu, de Ion Culte & de (es Minières, jui provoque & alimente cette manie de menfonges 6c dinjures contre la Nation qui a oié élever fa voix in faveur de ces refpeftables objets ; haine qui ho- nore l'EgJife du Dieu vivant , autant qu'elle la dif- '.ingue &c la caraélérife entre toutes les Se*51es qui ont ofé en afficher les caractères. Cela eft ii vrai , cjue dans la Belgique même , de prétendus Patriotes , ir.ais dont l'elprit & le cœur étoient déjà affervis à la corruption dominante , fe font recriés contre les Hemontrances faites par les Etats en faveur de la Ke^ ligion. Ils ont prétendu qu'il falloit en exclure le? intéicts & l'envifager comme une chofe étrangère aux plaintes de la Nation : comme fi fans cette fandion de tous les Droits & de tous les Contrats , il pou- voir y avoir quelque chofe de (ûr dans les Sermens , dans les Conventions quelconques , & dans les Conj- titutions des Empires î

^

L + ^

R4

( i<^4 )

REPRESENTATION du ConfeU de Flan- dre ^ du 17 Novembre 1786, fur la- quelle efi ftiïvi le Décret du ConfeU Privé du z Décembre 1786, quife trouve au 4e. voL du Recueil, r. 102. Q*)

SIRE,

Xl y a déjà quelque tems , que les nouvelles pu- bliques , ainfi que differens arrangemens , qu'on prend fous nos yeux, annoncent un fydiéme de réfonne générale dans l'Admlniilnfion Eccléfiafti- que , Politique &: Civile de ces Provinces.

Un projet de cette nature marque fans doute une affiduité étonnante des fcîins , que V. M. orend pour le Gouverneme:it de Tes Peuples; mais tandis que ces vues bienfritilantes font naître en nous les ientimens profonds de reconnoiiïance , nous ne pou- vons difTiniuIer, que bien loin que quelqu'un d'entre nous, ou de votre Peuple , envifage quelque avan- tage réel dans ces grandes réformes, elles mettent au contraire le cotr.ble aux inquiétudes & aux alarmes de votre Peuple , dont nous avons déjà informé V. M. par nos Remontrances précédentes.

Quiconque a connu depuis longues années l'état de ce Pays, conviendra, qu'il ne s'eft jamais trouvé

{'^ ) On n'a pu acquérir cette Pièce qu'avec des lacunes & des incorre<5î:ions, copiée d'après la minute dans laquelle le Rédafteur ( M le Confeiller de Grave ) avoir omis des pafTages & des mots qu'il a aioutès en la tranfcrivpnt. Nous n'avons pas cru devoir les fuppléer, pour ne pas déroger à iauihenticité de cet écrit important.

( s«; )

dans un degré de profpérité & de bonheur, comme depuis un certain tems , foit qu'on l'envifage du côté de la Population , de l'Agriculture, des Fabri- ques , du Commerce , des Art5 & Sciences , foic du côté des Mœurs, de la Police & de la tran- quillité publique.

Un Etranger eft extaGé en parcourant no?, belle? Campagnes , cultivées comme des jardins , -S: peu- plées à l'indar des Villes : les bras ne manquent pas ici aux terres ; mais celles-ci m.anquent aux bras; nos Fabriques de Toiles font portées à leur dernière perfection ; les autres prenneiit des accroi- femens fuccefTifs , &c ont déjà acquis un degré de conliflance inconnu ci-devant.

Parmi l'aifance que ces objets apportent , & au milieu d'une Population immenfe , qui augmente tous les jours , on voit polir les Villes , civilifer les Mœurs , cultiver les Arts & les Sciences , dim^nuer leà Sources de la Procédure ; une vigilante Police dans les Villes , ê«C une MaréchaufTée bien dirpofée au Pîat-Pays , maintiennent la tranquillité publique; la maifcn de correftion établie dans la Capitale prévient les grands crimes , en arrêtant le mal dans Ton principe , au point , que les effrayantes juftices , par les potences & les roues , femblent être difpa- rues : en un mot , on vo't régner par-tout une abondance, une activité irinuftricu:e , une férénité, dont on n'avoit pas d'idée depuis long tems , 6sc qui annoncent un Peuple heureux fous un Gouver- nement doux.

Quel dommage de voir cette férénité s'obfcurcir par des nuages , qui commencent à s'élever fur nos têtes ! Psr quelle fatalité peut-on Ci réfoudre , au milieu d'un calme (i heureux , à détruire les fources mêmes , dont notre préfent bonheur dé- coule ? Quel homme enfin , connoiiTant notre pofition ,

( 266 )

ie ferolt attendu à ces grands changemens , qui vont donner à notre Conftitution politique une tonne toute nouvelle ? Il n'eft pas pofhble de n'être pas ftupéfdit à la vue de remèdes i\ violens : car fi c'eft pour les appliquer à guérir de grands maux , on conviendra au moins , qu'il devoit être bien conftaté avant tout , que ces prétendus maux exif- tent : nous ne doutons pas , que c'eft- ce qu'on fait accroire à V. M. Des perfonnes , qui par leur pofition éloignées de nous , ont aifément pu Te mé- prendre , & qui réellement fe font trompées dans les faits, ont cru ?ppercevolr (\e^ défeétuofîtés dans nos Adminiftrations , êi de la corruption dans nos Wœurs, qui n'exiftent pas : de-là ils ont pu infpi- rer à V. M. des idées fi défavantageufes de notre pofition aduelle , ce qui eft un de ces malheureux eflcts pour nos Pays , de (q trouver à un fi grand éloignement de l'œil de leur Souverain ; mais le ta- bleau que nous venons de tracer de l'état de ces Provinces &: des Mœurs de Tes Citoyens , tableau qui eft peint d'après nature , eft un garant fur de la réalité du fait & peut raffurer V. M. fur toutes insinuations de différente nature. Si ce n'eft pas tant cette confidération , mais bien la vue , l'eipoir de tirer de plus grands avantages des nouveaux Eta- blifiemens, qui ont di(fté la réforme, dans ces cas la raifon , ainfi que la faine politique exigent , que ces prétendus avantages foient bien précieux , & les règles de la prudence dictent , que leur fuccès ne puiffe en aucun cas être équivoque : car il eft im- pofiîble de réalifer de grandes réformes fans renver- ler l'état & la fortune d'une infinité de Familles, & ce feroit la chofe la plus criante que d'expofer le prix de tant de facrifices aux feuîs coups du ha- iard : mais comment , fans fe faire illufion, pouvoir fe promettre une certitude décidée d'un pareil fuccès?

C 1^7 )

L'hiftoire de tous les tems démontre , que les apparences les pîus brillantes font troinpeuies, 6c qu'on a rarement été heureux dans l'exécution (\es grands plans de réforme : les projets d'amélioration eblouiffenr les yeux , le brillant de leur éclat fait JJlufion , il empêche l'œil de percer bien avant dans i avenir; c'eft communément aux dépens d'une trifte expérience , qu'on parvient à être détrompé : ce qu'il y a de déplorable dans ceci , & qui eu un des contraftes de la nature humaine , c'eft que com- munément les idées de réforme prennent aux ca- ra(fleres les mieux Niifans ; un mal quelconque len- fjble les touche; leur défir de faire du bien eft éveillé par la moindre apparence favorable ; le défaut d'ex- périence les empêche de voir , qu'il eft très-pofli- ble de faire de grand mal avec les meilleurs inten- tions du monde.

Nous ne voulons pas dire , qu'il n'exifte pas d'a- bus , bien moins , qu'il n'y auroit pas de bonnes chofes à faire pour le bonheur du Peuple : les abus ont été de tout tems le partage de l'humaniré; mais nous favons , que ceux , qui demandent à être cor- rigés , ne font pas de nature à devoir fubir des opérations violen^es. V. M. peut acquérir des no- tions (ûres fur l'efpece de ces abus , fur les moyens les plus propres à les faire cefTer , ainfi que fur le genre d'améliorations à faire : elle n'a pour y par- venir qu'à entendre (es Sujets Nationai>x , les Evo- ques , les Etats , & fpecialement fes difFérens Confeils de Provinces : nous fomnies à même de pouvoir pleinement fatisfaire V^ M. fur ces differens points, 6i particulièrement de lui préfenter un plan d'amé- lioration conforme aux vœux de tout le Peuple , & qui , à l'avantage certain de produire un bien- ctre public, jo:ndroir celui de ne porter du préju- dice à perfonne. C'eft ainfi , Sire , qu'en ont ufé

C 162 )

Tos Ancêtres : ils n'ont fait rien d'important en matière de Légiflation civile que d'après les avis de leurs Officiers de Juftice. Cet exemple mérite d'autant plus d'être imité dans le tems préfent , que

Votre Majefté, par Ton élolgnement de nos climats , Ôc par les vaftes occupations , n'eft pas à portée de

connoître par elle-même le befoin & les avanta- ges de Ton Peuple Belgique.

Ces Pro^vinces ont eu leurs Souverains réfidens chez eux jufqu'au tems rie Philippe Second , Koi d'Efpagne ; les Princes de U Maifon de Bourgogne, Phiîippe-le Bel , père de Charles V, & ce dernier, dont la mémoire eft encore fi chère à la Patrie , ont réfidé aux Pays-Bas; ces Princes, quoique ph'.cés au milieu de leurs Sujets , ne faifoient rien fans l'in- fluence de leur.s Conleils de Provinces ; leur Gou- vernement étoit compacté fur le génie , fur les mœurs, fur les ufages de la Nation ; les tems de leurs règnes ont été, au rapport de nos Annales, le (lecîe d'or des Provinces Be'giques. ^

Lorfque Charles V parvint au Trône , la Flandre avoir peu de Loix ; il ne crut cependant pas de fa fagefTe ni de l'intérêt de Tes Peuples , de les multiplier beaucoup; il vit , que ce n'eft pas la mul- titude , mais la bonté des Loix , qui conflitue l'ame d'un bon Gouvernement. Le Recueil des Loix éma- nées fous fon règne , qui a duré près de cinquante ans, ne monte pas à un volume auffi gros que celui des Loix que nous avons vu émaner depuis cinq à fix ans. Au lieu de créer un Code arbitraire , le Monarque invitoit Tes Peuples à lui préfenter les Digedes de leurs Coutumes, Droits & Ufages , pour leur donner une exiftence non équivoque par fa San<fi:ion fouveraine. Cet exemple a été imité par Tes Succefieurs, & particulièrement par les Archiducs Albert & Ifabelle.

C a<59 ) Comme une des qualités les plus efTentielIes des loix cft leur (lab-lité , pullque rien n'eft plus capable de faire perdre le refpeâ: qu'on leur doit , que des variations fubites & des interprétations multipliées, te Prince eut un foin extrême de les faire rédiger par des gens, qui à la maturité du jugement & à la fuperiorité des lumières , joignoient les fonds d'une longue expérience; «uilî quelle majefté , quelle fa- gelTe , quelle prévoyance clans ces Loix admirables qu'elle donna aux Peuples Belgiques , iur-tout les par- ties de la Police Eccléfiaftique &c Civile , fur la puni- tion des crimes & des Cv^ntrats ufuraires, Tur le com- merce &: la Navigation ? Loix , dit un homme connu , que la plupart des Nations éclairées ont cherché à imiter ou à adapter à leur ufages , & qui fubfiftent encore dans toute leur force; on les cite avec vé- nération , le peuple les aime , & y trouve fon bon- heur.

Dans le cas il s'agifToit de faire quelques chan- gement notables, opération qu'il eft impoffible de réal.i'er fans bleffer le droit de nombre de particu- liers , ce Monarque prit une voie admirable, pour prévenir les murmures , il entendit tous ceux qui fe difoient intéreffés aux changemens , &: il les admit eux-mêines dans la dilcuflion des moyens pour fixer» de la manière la plus conforme à l'équité, le degré de leur préjudice; nous en avons eiur'autres un exem- ple dans le fameux Concordat de Tan i ^ 3 i , conclu <;ntre le Doyen &c les Régens de la Faculté des Arts de rUniveriîté de Louvain , & les Patrons ou Col- lateurs Eccléfiaftiques de ce Pays. Ceux-ci s'étant plaints des Privilèges exce(iïfs accordés 4 !a Faculté en fait de nominations , le Prince fufpendit l'exécution du Privilège, chargea les parties de s'entendre, &: l'on conclut de gré à gré , fous fes yeux & de fon aveu , Ifi Concordat, qui a fervi de bafc aux Privilèges des

( 170 )

nominations de la Faculté des Arts jufqu'aii temps de leur anéantiffemenr.

Un autre exemple de modération, qui caraélérife le règne de ce Monarque , fe préfente dans le Con- cordat , qu'il a conclu lui-même avec l'Evêque de Liège pour la Difcipiine Eccléfiaftique dans la partie du Brabant , qui reflortiffoit fous le même Diocefer Les arrangemens pris dans ce Traité font connus fous le nom de Concordata Brabantix^ & conftituent une partie principale de la Légiftation Eccléfiaftique de la même Province.

Lorfqu'après les troubles de Gand , il fut trouvé «éceiTaire de bâtir une citadelle dans un emplacement occupé par le Monallere de S. Bavon, on ne procéda à la fupprefîion de cette Communauté qu'avec des égards fcrupuieux pour le fort des membres; on chan- gea l'Abbaye en Chapitre , aujourd'hui Cathédrale de S. Bavon, avec les formalités de Jufticerequifes. Cette voie de douceur rendit aux fupprimés leur diflblution même agréable.

On pouroit citer une infinité de pareils traits dans la vie de ce Prince , qui ont rendu fa mémoire fi chère : quelques-uris font confignés dans le premier volume des Placards de Brabant ; auffi les Etats du Pays, dans les hommages qu'ils lui rendirent , le jour de l'abdication à Bruxelles, fouhaiterent [fpécialément que (on fils fût l'imitateur de fa clémence , bénignité & modération.

Philippe Second fut le premier qui fixa fa réfidence à Madrid, à 300 lieues d'ici; ce puiffant Monarque , qui n'avoit vifité qu'une feule fois ces Provinces , oc- cupé d'ailleurs des foins d'une vafte Monarchie, diA- perfée dans différentes parties du monde , s'écarta de la conduite des fes ancêtres, & fe régla fur des avis étrangers , diélés par un elprit de prédileftion pour le Gouvernement , & on connoît les malheurs qui en

(^71)

ont été la fuite. Détrompé, par une malheureufe ex- périence , ce Prince gouverna eiifuite avec afîez de douceur, & établit même près de fa Per(onne un con- leil permanent de trois Confeiners nationaux, que l'Empereur charles VI a rétabli à Vienne en 1717, & qui a fubfifté jufqu'en 1757. Les Archiducs Al- bert &irabelle, &: puis les Rois d'tfpagne Philippe ÏII, Philippe IV, Charles II, l'Empereur Charles VI, & Marie-Thére(e votre augufte Mère, dont le nom e(ï fi cher aux habitans de ce Pays , ont tous marché fur les mêmes traces.

Nos régii'tres font foi, que ce Confeiî a influé dans tous les cas d'une Légillation importante , qui concer- noit la Province. Cette louable coutume, par laquelle les Princes de ce Pays fe font fait une Loi de pren- dre leurs avis de leurs Confeillers nationaux, a été fi condamment obfervée , qu'elle a pafTée aux yeux des Légifles du Pays comme une maxime , qui tient à la Conftirution de l'Etat. Perfonne ne(ï plus à por- tée de connoïtre les défauts de la Légiflation que les Confeils des Provinces

Tandis que nous femmes vivem.ent affeclés de ces

idées nous recevons l'Edit du 18 Oiflobre ,

qui concerne la fuppreffion des Séminaires Epifcopaux 5i la fubftltution

Le premier coup frappe fur ces pieux & falutaires EtablifTemens , qui ont fait bénir la mémoire des Pè- tes du Concile de Trente (a') , Se qui ont été reçus avec tranlport dans toute l'Europe Catholique.

On fent aifément que pour parvenir à la ruine de ces bons EtablifTemens , & pour induire V. M. aux prétendues réformes, qu'on a en vue, l'ori doit avoir

fj) Voyez le Concile de Trente, fciT. 23. ch. 18. lesConci- îcs nationaux 6cc. & nibfuc \?.iz-Ei\)cn èc Ccurnycr 6a:.

( ^72 ) groffi étrangement à Tes yeux les maux de ces Pro- vinces : la préFace de l'Edit le fait affez voir : on y dépeint les mœurs de nos habitans comme parvenues au dernier débordement. Heureufemenr, comme nous avons déjà obfervé , cela n'eft pas ; nous Tommes obli- gés d'en informer V. M. mais ce qui eft d'autant plus malheureux & affligeant pour la Nation, c'eft que ce prétendu débordement fert de prétexte à la terrib'e révolution , qui va la dépouiller de fon plus grand bien, en dépoffedant nonibre de perfonnes d'un état, qui leur appartient par une jufte récompenfe de leurs travaux , & dans lequel ils avoient droit de compter de finir tranquillement leurs jours; qui va fruftrer les parens des efpérances qu'ils s'étoient formées pour l'établilTement de leurs familles, & déranger une in- finité de gens , dont la fortune tient plus ou moins aux Adminiftrations , qui vont fubir la réforme.

Pour donner du relief au nouvel établiffement, on prône fur- tout C uniformité de Doclriru ^ quon y e/z- feignera. Quant à cette uniformité , Ton pourroit fe faire les demandes fuivanres.

Trouve-t-on dans nos Séminaires Epifcopaux une diverfité de Doftrine? Cette diverfifé, fi elle exifte, eft elle de nature grave? a-t-e!Ie du rapport à quel- ques points de dogme ou de controverfe ? a-t-elle jufqu'ici produit quelque mal ? fait-elle craindre quel- -que mal pour l'avenir ? Si la réponfe à ces queftions pouvoir être douteufe , & fi ce doute pouvoir être de conféquence , il eft du moins certain , qu'il ne feroit pas plus difficile d'introduire une uniformité de Dodrine {a') dans le petit nombre de nos Séminai-

{a) L'uniformité de Doftrine eft impofTible dans aucune fcience , elle les détruiroit toutes. L'unifonrà.é Théologique tlt parfaite dans toutes les matières la liberté des opinions n'a pas lieu. Voyt^ le 3c vol-. Part. Eccléf. p. 82

res

C ^75 )

res diocéfains, que de la fixer dans les deux Séminai- res nouveaux, éloignés l'un de l'autre d'une quaran- taine de lieues. On n'auroit qu'à charger les Evê- ques d'agir de concert, de dreffer de commune main une inftruclion pour fervir de règle à tous les Pro- feffeurs des difFérens Séminaires ; on pourroit même au befoin prendre recours à un Synode national , ainfi qu'il a été en ufage àès la naiflance de l'Eglife. Les Synodes de Cambrai & de Malincs , tenus ibus les aufpices de nos Souverains, publiés par leurs or- dres , & obfervés jufqu'à préfent , font une preuve manifefte , qu'on peut les employer avec i'uccès pour régler la difcipline de l'Eglife Belgique.

Quant à ce qui concerne cette claufule que d'étr© inftruit ou plus éclairé , on ne peut pas , fans in- juftice , accufer notre Clergé d'ignorance. . . .

Les principes de la Dodrine & de la Morale font fuffifans pour remplir avec fuccès les devoirs de leur état : l'expérience a démontré même , qu'ils font communément plus propres à la charge d'ames, que ceux qui poffedent une érudition.

Les Lovanifles ont un amour-propre, qui

donne certaine vanité , laquelle ne s'accommode guer res avec cet efprit d'humilité , avec un amour fi pro- pre pour la paix & la concorde, qu'un bon Pafteur

doit prêcher cette grande érudition met trop de

diftance entre le Pafteur & les Fidèles vifiter

les pauvres, donner au malade le courage & la pa- tience nécefifaires

Il femble du premier abord réfulter de l'Edit, que les Evéques n'ont plus de pouvoir d'enfeigner ou de faire cnfcigner la Théologie , ni d'ordonner d'autres que ceux que les Profeffeurs Royaux ont trouvés capables; mais nous avons jugé, combien la difpo- iition feroit frappante, fi l'Edit de voit être ainfi en-

( 174 )

tendu : ce fcroit peut-être la première dans le mon- de Chrétien ....

Les Evêques font , par la nature de l'Epifcopat , chargés de l'inftruftion des Fidèles , & leur ôter cette charge , c'eft détruire leur caraftere , . .. . c'eft vouloir faire rentrer dans la clafTe cominune des Fidèles ceux , qui font établis pour les gouverner . . .

Delà nous avons jugé, qu'il falloir donner un autre feus au dit Edit , iavoir que les dirpofitions y reprifes n'auroient lieu pour autant , que les Evêques y confentiroient ....

Il eft fait dans l'Edit une fuppofîtlon , que les Evê- ques accepteroient avec gratitude le nouvel Eta- blilTemenr ....

Ce n'eft que par ces motifs , que nous avons pu nous réfoudre à publier l'Edit avant de faire nos Repréientarions au Trône.

La furveillance & l'infpsftion des Ecoles de Théo- logie appartiennent privativement aux Evêques....

Les Papes en exerçant ce pouvoir n'ont pas en- tendu en priver les Evêques [a) . . . Circonftances

(.7) Diroit-on bien ce que les Promoteurs du nouveau ■fvfiênie , les Apologiftes de la Babylone des Séminaires- Généraux , oppofent à ces obrervations irréfragables ? Ils aA'ancent férieufement que la Théolopc n'eft pas une Science , que c'eft un enfemble d'idées vaines & de mots fans objet, raïquel il eft impoffible de déroger, puilque ce n'oft rien. Voilà comme la Science de la P».eligion eft naitée par l'Auteur de ces innovations funeftes , homme d'un nom célèbre, mais qui ne doit pas à lui fa célébrité. Si la Théologie n'eft pas ViTiQ Science pour lui , comme je n'ai pas de peine à le croire, elle a été la Science des Paul , des Polycarpc , des Athanafe , des Auguftin , des Chryfoftôme , des Boffuct &c. ; elle eft encore la Science de tous ceux qui pofîédent à tond la Doc- trine Chrétienne & qui favent repoufiér les traits qu'on lui lance \ elle eft la feule Science qei intéreile foncièrement l'hom- ïTie, en lui apprenant fes titres à l'imjnoriahté , & les moyens

(ï75 )

particulière? , qui ont donné lieu à réreclion <îe la Faculté de Théologie dans l'Univerfité de Lou- valn ....

Lorfqu'en 1416, le Pape Martin V , à la demande du Duc de Brabant , inftitua l'Univerfité de Lou- vain , le grand fciiifiTie de l'Occident touchoit à fa fin , la paix de l'Eglile étoit fur le point de renaî- tre: c'efl: pourquoi le St. Père ne voulant pas don- ner de fujet de mécontentement aux Eveques , n'o6troya que les Facultés des Arts, des Droits Ca- noniques & Civiles , & de la Médecine , & refufa d'oftroyer la Faculté de Théologie , quoiqu'elle fût demandé également. Quelques années après ce St. Père étant mort, Eugène IV, ion Succeifeur, re- doutant le Concile de Bâle, qu'il avoit été comme for- cé de convoquer, & qu'il étoit rélblu de diiïoudre, inftitua , à la demande du Duc de Brabant & de la Ville de Louvain , la Faculté de Théologie , vrai- fembîablement pour fe préparer un appui dans VU- niverfiré de Louvain , qui fîguroit déjà en Europe. II ne fut pas déçu dans (es efpérances ; la Faculté

d'y parvenir ; elle efi: la feule Science qv\ dans les grandes conclurions Toit coriflap.te & uniforme , qui n'admet ni fyf- tême , ni variation dans tout ce qui nous importe de favoir. Dans les plus grandes obfcurités , dans l'explication de fss plus profonds mytl;cres , elle poHede une fureté & précifion de lang'ige , qui ne font dans aucune autre Science ; qui ne laiîTe à l'erreur aucune échappatoire , aucun moyen de tergi- verfatlon & de déguifeir.ent. 11 eft vrai que dans des fiecles barbares , la Théologie a furchar^é fa doftrine de beaucoup de queftions inutiles ; mais on n'a plus ce reproche à lui faire , & en cela même elle n'éro"t point aufiTi repréhenfible qu.e fes Cenfeurs le prétendent. Voyez le DiB.Hijîor. Aulbtiurg. 1781-17S4, Art. Ahselme, Duns , Hangest , Suarez, Thomas d'Aquin. Cathic. P/iihf. n*. 419. 516.

( v«)

de Théologie foutint fortement Ton parti dans les querelles avec les Pères du Concile de Bâle: cette même Faculté ne contribua pas peu dans la (uite à empêcher dans ces Provinces la réception de la Pragmatique Sanélion de Charles Vif, Roi de France , digérée d'après les Décrets du même Concile , qui donnoit tant d'ombrage aux Papes , & que Léon X trouva moyen de faire abolir par (on Concordat avec François I . . . .

Une autre réflexion .... fe préfenfe fous un af- peâ: bien alarmant : fi nos Evcques acceptent l'E- dit , tous les Ecoliers en Théologie vont être af- femblés dans un même Edifice.... tout le dépôt de la Doftrine & de la Religion fera remis entre ces feules mains ....

Il eft dangereux de confier tont le dépôt de la Foi à un feul Corps.... l'elprit de l'Hétérodoxie s'emparant des Profefîeurs, le poifon palTera d'abord parmi tous les Ecoliers. Ce n'eft pas la même cho- fe lorfque l'enfeignement de la Théologie eu par- tagé en différentes Ecoles fous l'infpeélion des Evê- ques. Le Bayanifme n'a pas pp.fTé les murs de la Ville de Louvain .... Le calme regnoit dans les Séminaires (a) ....

(û) Que l'Augiifle Sénat avoir bien prévu le fâcheux ave- nir qui vérifia incontinent ces fages obfcrvations ! w Au inilieu de ces ravages ( difoit un Auteur trois ou quatre mois après la rédaction' de ces Remontrances) nous gardions encore cette foi antique qui avoir échappé à tant de ré- volations^ que des fedaires fanatiques & fanguinaires n'a- volent pu arracher du cœur de nos Citoyens ; lorfqu'un ,, prG;et qui ne peut avoir été conçu qu'à la fource de tou- tes ténèbres , rafTembla ('ans un même lieu les candidate du faint Miniftere , contre la Loi exprefTe du Concile de 5, Trente, Tufage de l'Eglife uriverfelle, la nature même Sc

( 177 )

Au terme de l'Art, ç de l'Edit toutes les Bour- f'es & Fondations ("ont transférées au profit des deux Séminaires nouveaux ; ce qui eft contraire à la juftice, aux volontés préfomptives des Fondateurs ....

Et quant à l'ufage répandu aujourd'hui de chan- ger quelquefois la deftination des Fondations ; ces changemens ne peuvent (e commettre fans injuftice; un Citoyen , par exemple , de Gand , de Bruges , D'Ypres, pouroit il être préfumé porter un confen- tement tacite , que cette Fondation foit transférée dans une autre Province à 30 ou 40 lieues de fa Patrie ? . . . . à faire perdre au Souverain l'amour & le refpeft & la confiance de fon Peuple?.... c'eft le manque d'égards pour la confervation de fes

le but de l'Inftitution Sacerdotale. On vit alors arriver de l'extrêmiré de la Germanie, des hommes conPxUS par l'iniquité de leurs principes , par leur attachement à une Sette odieufe ik particulièrement profcrite dans ce Pays , répandre la corruption à pleines mains , fouffler Thé éro doxie & le fchirme dans les difcours , dans les livres, dars les leçons publiques, & faire de i'Ecole de la Doc- trine (ainte , l'Ecole de toutes les erreurs... Pcntifes du ,, Seigneur, vous, aux (oins defqueis il a confié l'Egli'e Belgique, oîi s'eft per«.Iu dans ce moment cririque, votre zèle oc votre éloquence ? Comment des paroles de feu voiîs ont -elles manqué, pour réclamer votre plus cher héiitage ? Plus cruels que r Autruche du défen , avez-vous j, pu abandonner ce germe précieux fur le fable brûlant d'un rivaee perfide?... Mais(ô Providence qui dtniiit la force par la foiblefie ! .) les enfans ont condamné la fatuTe pru- dence des pères. L'ingénuité & l'innocence ont dévoilé l'impofture, l'ont combattue, l'ont confondue. Satellites, priions , menaces , traitemens durs 5c flétrifîans , vous avez couronné cette étonnante réfiflance. Mais , ô ten- dreiie paternelle, qu'avez vous éprouvé dans ces momens terribles 1 Pères Chrétiens , hommes généreux & fenfibles , dans quelle preffe ont été vos cœurs durant ces barbares expéditions ! "

( V8 )

Droits . r. . Nous avons vu ci-devant combien Char- les V eft parvenu à faire bénir fa mémoire par l'atten- tion particulière , qu'il s'efl donnée conftamment à radurer (es Sujets fur leurs intérêts & propriétés.

Nous paffons fur d'autres inconvéniens , qui fe préfentent dans l'exécution de l'Edit , tels que font la perte que la Flandre fera dans le cas de faire par l'exportation des deniers des Fondations , & par les gros frais auxquels fes habitans feront expofés pour élever leurs enfans à l'Etat Eccléfiaftique. Tous ces objets, quolqu'aflez notables pour mériter l'at- tention d'un bon Prince, femblent di!paroître devant ceux, qu'on a traités ci-devant. Une remarque en- core à faire , & qui n'eft pas à méprifer ; c'efî que ce furcroît de" dépenfes, la longue durée du cours de Théologie & d'autres confidérations pourroient ai- fément caufer dans le Pays une difette de Maîtres d'Eglifes pour la charge d'ames. On annonce une multiplication de Paroiffes : mais fi le dégoût pour l'Etat Eccléfiaftique , qu'on commence à voir pren- dre, fait encore quelques progrès; il eft à craindre, que même celles , qui exiftent aujourd'hui , ne devien- nent en partie déiertes.

Voilà , Sire , les confidétations que nous avons cru devoir mettre fous les yeux de Votre Majefté au fujet & à l'occafion de l'Edit des Séminaires. Nous n'avons pas moins procédé fans délai à fa publica- tion- Cette prompte déférence eft une marque cer- taine de la pureté de nos intentions : notre devoir , & notre zèle pour le bien du Royal fervice & de Ja Patrie ont di.^lé no< paroles, qui ne font dans le fond que la voix, les cris & les vœux du Peuple en général. Si nos effcnts font aftez heureux que de g;îgr,er quelque délai dans l'exécution de ces grands plans de réforme jufqu'à ce que Votre Majefté ait

C ^7^ )

entendu fes bons Sujets , les Evêques , les Etats ; les Officiers de Juftice , nous ne doutons pas de leurs fuccès ultérieurs.

Que fi malheureufement notre voix n'étoit pas écou- tée pour le préfent , & que les fuites ne répondroient pas aux efpérances , c'eft alors qu'en compatifTant avec la Patrie , notre peine ne fera pas moindre fur les regrets auxquels le bon cœur de Votre Màjefté fera expofé ; nous les partageons d'avance : car nous fommes intimement perfuadés des vues falutaires de Votre Majefté. On eft pénétré de refpcft & ravi d'admiration à la vue de cette activité laborieufe & infatigable , que Votre Majefté met dans les foins de fon Empire , à la vue de ces courfes & fatigues continuelles, qui en dérobant prefque le rems né- cefTaiie au repos & aux befolns de la vie , ne laiffent rien à la diiTipation.

Nous ne pouvons nous difpenfer de rappeller enfin à Votre Majefté que le titre , qui a porté la Souveraineté de îa Flandre dans l'augufte Maifon d'Aurriche n'a rien de commun avec ceux de fes autres vaftes Etats : ce titre eft un pur droit de fuc- ceftion aux anciens Comtes de Flandre. Le fort de fe trouver aujourd'hui au pouvoir d'im grand Mo- narque ne fauroit altérer fa condition : la réunion de plufieurs Couronnes fur une même tête n'eft pas un moyen légitime pour confondre les Droits de leurs différens habitans. Votre Majefté a pris des engagemens particuliers avec it^ Sujets de Flandre, ils lont confacrés par le ferment foiemnel , qu'elle a prêté lors de fon inauguration entre les mains des Repréfentans du Peuple.

C'eft cette déclaration folemnelle, à laquelle nous appelions , qui eft le palladum de nos droits & de nos libertés ; il a été refpeété , Sire , par vos An-

( ^8o)

cêtrcs, fauroît-on douter, qu*il ne le Toit également par un Prince auffi bienfaiiant &c aufîi humain que Joseph II.

Nous fommes avec le plus profond refpcft^ G uni, 17 Novtmbn 1786.

F I N.

TABLE

DES MATIERES.

iD £RMEys prêtes à l'Inauguration de S. M. Joseph II ,

en qualité de Comte de Huinaut , fplemn'ijéc à Muns L 27

Août 1781. Pag. 7

Réception de Sa Majejlé pour le Chapitre de Sainte- IVaudru ,

prononcée par la Dame Aînée. ibid.

Serment de Sa Majefté au Chapitre de Sainte - Waudru, 8

Serment de Sa Majefté aux Etats de Hainaut. n

Serment des Etats de Hainaut. lo

Serment de Sa Majejlé au Magifirat de Mans. 1 £

Serment de la Paille de Mons. 12

Extrait de la Chartre du Pays & Comté de Hainaut , contenant le

Serment que prêtent les Confeillers de la Noble & Soure.'-ainc

Cour de Mons. 13

Autre Extrait de la Chartre de Hainaut. ibidr

Dépêche de Leurs Altefjes Royales , en envoyant au Co::fc:l

Souverain de Hainaut un Exemplaire de t Ecrit rédigé par Sa

Majejlé , pour manifejler Jes vues & principes , &c. 1 4

Remontrances du Conj'eil Souverain de Hainaut, du 5 Février

1 787 , au fujet du nouveau Règlement de la Procédure Civile. 1 Ç

Réponfe du Gouvernement aux Remontrances précédentes. 21

Jirrêté du Confcil de Hainaut , envoyé par extrait de fes Regijlres

à Leurs AlteJJes Royales , avec la Lettre i envoi qui ejl à la

fuite, du 28 Avril IJ^J. 22

Lettre des Députés des Etats au Confeil Souverain de Hainaut ,

du "{O Avril 1787. 24

Remontrances des Magljlrats & du Confeil de Ville de la Ville

de Mons, du<) Mai 1787, à Leurs Altcjfes Royales. 26

Dépêche de Leurs Altejfes Royales , du 7 Mai 1787 , adrijfée

au Confeil Souverain de Hainaut , & par Copie aux Députéi

des Etats dudit Pays. 29

Lettre de Remercîment du Confeil de Hainaut à L. A. R. 31

Lettre des Préfident &• Gens du Confeil Souverain de Hainaut.,

à S. A. le Duc d'Aremberg , Grand- Bailli du Pays , &c. &c, 3 2

Compliment fait à la Cour à Mons , par les Avocats en corps ,

durant la Séance du matin du 8 Alai 1787. 33

Remerciment des Etats de Hainaut à Leurs Alteffes Royales , du

7 Juin lydj. 34

T **1

a8i TABLE.

Arrêt de la Noble & Souveraine Cour à Morts ^ prefcrivant des

précautions pour maintenir la tranquillité & le bon ordre en ce

Pays 6* Comté de Hainaut , rendu enfuite du Reemljltoire du

Coii/eiller- Avocat de Sa MajeJIé , du 2% Juin 1707. 3$

'^rrèt de la Noble & Souveraine Cour à Mons , quiprofcrit les

feuilles périodiques ayant pour titre : Journal - Général de

l'Europe, du %y Juin 1787. 39

■Jtepréfentiiticn des Etats de Hainaut à Leurs /îltejjes Royales ^

du 28 Juin 1787. 40

'jiutre Repréfentatien des mêmes , du 5 Juillet 1787. 42'

Lettre des Etats du Pays & Comté de Hainaut à Leurs Alujfes

Royales^ du 9 Juillet 1787. 44

Repréfentation des Etats du Pays &> Comté de Hainaut , à Sa

Majejîé l'Empereur &• Roi , du 9 Juillet 1787. 4$

^îémoire des Négocians & Armateurs de la Pêcke Nationale de

la Ville & Port de Nleuport , préfenté à Mejfeigneurs les Etats

de Flandre, k 19 Jiûn 1787, ^1

iJépcche de Leurs Altejjes Royales , du 24 Juin 1787. 83

Autre ^ du Juin 1787.

Autre, du 16 Juin 1787. S8

Autre, du 17 Juin 1787. 90

Copie de la Lettre du Magiflrdt d'Anvers , du 18 Juin I787. 92

Lettre des Etats de Brcbant à Leurs Altejfi.s Royales, du 20

Juin 1787. 9>

flemontrances des Syndics des Nations de Bruxelles , à Mgrs. les

Etats de Brabant , du 9 Juillet 1787. 97

'Littre du Prince de Kuunit^ , aux Etats de Brabant , du 3 Juillet

1787, avec la Lettre de l'Empereur & Roi fur la Repréfentation

du ix Juin. 100

'Jtcponfe des Etats de Brabant à la Lettre de l'Empereur & Rat ,

du 4 Juillet 1787. 103

dépêche de Leurs AltcJJ'es Royales aux Etats de Brabant , du

14 Juitla 1787. 107

^ut'-e Dépêche du iS Juillet, adreffée aux mêmes. no

^cprc(enta::on des Bcurgmejires , Echevins & Confeil de la Fille

de Bruges, du 3 Juillet 1787. lia

^éireacle^ concernant la démolition du Bâtiment nommé Water-

îialle , en la, Ville de Bruges , fous la direilion du Colonel de

Brou. u(

^ M.eure des Etats de Flandre , à Leurs Alteffes Royales , du 4

Juillet 1-^87, 129

^Repréfentation des Armateurs de la Pêche Nationale , du a Juillet

1787, <l Mgrs. les Etats de Brabant. 123

\Mimcire fur lii Dreàs du Peuple Braban^oit , & Us atttimei y

TABLÉ.

iSj

portées su Nom de Sa Majefié l'Empereur &> Roi^ depuis quel^ ^Uis années ; pré'ftnté à VAjfcmbUe Générale des Etats de Ladite Province, par M. H. C. N. Vander Noot , Avocat au Confeil Souverain de Brabant, le 23 Avril 1787. 129

Obfervat:on d'un rjlé Patriote, furie Mémoire précèdent ^ &c. 196

Diplcine par lequel les rênes du Gouvernement des Pays-Bas font mis par intermi entre les !;/iains de M. le Comte de Murrcy, du 3 Juillet 1787. 199

Les Brabançons de Zumjunoen. 2C3

Avis aux Belges , fur l'envoi des Députés i Vienne , &c &c,

205

Lettre de Mejfeigneurs ies Etats de Brahani , dit 15 Juil'et ijZj ■, à Jo s E P H II , e:i réponfe à la Lettre de Sa Majeflé , datée du 3 Juillet 1787. 110

iioms & qualités des MeJJicurs de différentes Provinces, qui ont comparu à l'AjfembUe Générale des Etats de Brahant , en. Juillet 1787. 117

Noms de Mejjkurs les Députés pour Vienne , de différentes Pro- vinces. 120

Précis de la Copie du Protocole tenu à l'Hôtel-de- Ville de Bruxel- les , le iS Juillet 1787, dans l'AjfembUe des Seigneurs Dé- putés des Provinces de Limbourg , de Luxembourg , de Flan- dre , de Hainaut, de Tournai , du Tournéfîs , & de Malines , conféquemment de toutes les Provinces des Pays-Bas Autri- chiens y à l'exception de celle de Gueldre , laquelle a déclare par mijjion quelle fe confonneroit à la Délibération des autres Provinces , &c. &c. 223

Note pour les différens Etats des Provinces des Pays-Bas , en- voyée par Mgr. le Comte de Munvy. 224

Requête des Syndics des Nations de Bruxelles , à Mgrs. les Etats, en Itur Affemblée , du 7 Août 1787. 226

Relation de ce qui s'ejl pajfé à l'Audimce de Son Excellence le Comte de Murray , du 7 Août 1787. 227

Repréfentations des Etats de Flandres , à Sa Majeflé t Empereur & Roi, du 27 Juillet 17S7. 230

Requête préfentée à Mgrs. le( Etats de B'abant, le 13 Juin 1787, par les Chefs de la Bourgeoifi^ , &c. Jaifant le fécond des trois Membres de la Ville d' Anvers, €^c. 23?

Lettre d'un Patriote , fur la meilleure Adminiflration de la Police dans les Provinces Belgiques, 244

Lettre de Remerciment à Mrs, les Notables des Communes de la Ville de G.md , demandant , par leur Repréfentition du 27 Juillet 1787, le changement du Magiflrat , pour l: compofer excluftvemtnt de bons Pa^tmtes ^ du %Q Juillet 1787. 24?

284 TABLE.

Remontrances des Etats de Brahant à l'Empereur 6^ Roi , du. 5 Aoiit 1 787. 2 )[ 5

Lettre des Etats de Brabant^ à S. Exe. Mgr. le Comte Je Murray , concernant un Article inféré dans h Gazette de Cologne, du 7 Août 1787, N**. 65. 259

Repréfentation du Confeil de Flandre^ du XJ Novembre 1786, fur laquelle efl fuivi le Pécret du Confeil-Privé ^ 4f^ Z Décem- bre 1786, &c, é-c. ' 264

Fm de la Table.

BINDING SECT. hPR 2

DH 617 M t. 7

Netherlands (Southern Provinces, 1581-1793) Recueil

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