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L'ORIENT CHRÉTIEN

RÉCUEIL TRIMESTRIEL

DEUXIEME SERIE Tome III (XIII)

PARIS BUREAUX LIBRAIRIE DES ŒUVRES D'ORIENT ἈΠ ΕΑ ER RICE ἘΠΕ ΥΘ ΘΟ ΒΕΒΔΕΡΗΩΟ RUE BONAPARTE, 82 AU SECRÉTARIAT UE DE L'INSTITUT CATHOLIQUE LEIPZIG

RUE DE VAUGIRARD, 74 OTTO HARRASSOWITZ Recuëil trimestriel. Prix de l’abonnement : 12 fr. Étranger : {4 fr.

TABLE DES MATIÈRES

CONTENUES DANS CE VOLUME

Page I. LE SANCTUAIRE DE LA LAPIDATION DE SAINT-ÉTIENNE A JÉ- RUSADEME (En) Dar Jr Bagrange προ tre re ent e Ι 1. UN DERNIER MOT SUR LES ÉGLISES SAINT-ÉTIENNE A JÉRU- SABEMMRDAr Ta d'A CLONES RU RME MR AN ANR PRINT 20 II. UNE VERSION ARABE D'UNE HOMÉLIE INÉDITE SUR LA PÉ- NITENCE ATTRIBUÉE A SAINT JEAN CHRYSOSTOME (TEXTE ARABE ET DRADUDIIONMERANCATSE) DATI LEROY AREA RE ΣῪ ἘΞ CNEe 29, 247 IV. LES COUVENTS DES CHRÉTIENS, TRADUCTION DE L’ARABE D'AT-MARRIZI par EL Leroy. 77... ΡΣ ΚΕΝ RM EE Did Gr 10 V. HISTOIRES DES SOLITAIRES ÉGYPTIENS (suite, ms. Coislin 126, fol. SJ SA) DAT EE ΝΘ NPA ANTON CRE AM ἐς ΠΣ RUE TEE de 16, 266 VI. UNE VIE ABRÉGÉE DE SAINTE MARINE (rExTE ARABE, traduction francaise) αν ΝΑ στ ἐν PAlACIOS EN ERA TERRE MR Se RAR 67 VII. ÉTUDE SUR LA CONVERSION DE L'ARMÉNIE AU CHRISTIANISME (Suite) 1GRÉGOIRE ET TIRIDATE, par ἘΠ. Tournebize.......... 12,142 VII. ÉTUDE SUR UNE TRADUCTION ARABE D'UN SERMON DE SCIIE- NOUDPSDAReE M PISSerant. Len NUE a RE NT SL IX. LE CALENDRIER D’ABOUL-BARAKAT, traduit en latin par Renau- LOS D LR RNA Se M εν ἀν ἘΣ Δ Me tune meurs des Mc ae ἐν 19 X. UN EXTRAIT DE LA DIDASCALIE : LA PRIÈRE DE MANASSÉ (avec unetéditiontdela#yersion syriaque)} DArtE ΤΠ Δι... || γον nn 154 ΧΙ. LITTÉRATURE ÉTIHIOPIENNE PSEUDO-CLÉMENTINE. TEXTE ET TRADUCTION DU MYSTÈRE DU JUGEMENT DES PÉCHEURS (suile el ΠΟ SAN CEE ED AUTEUR Re tt φοδον 166, 314

XII. SAINT EUTHYME LE GRAND, MOINE DE PALESTINE (suite), par ΞΟ TELE ES Re ERP LUDO ns CAT ue LE νόσον δὴν 181, 223, 359

XIE. HISTOIRE DE LA CONVERSION DES JUIFS HABITANT LA VILLE . DE TOMEI, EN EGYPTE, D'APRÈS D'ANCIENS MANUSCRITS ARABES, ΠΕΣ GTV © AU RE enr Me ENT AT ER de 298

VI TABLE DES MATIÈRES.

XIV. VIE DE BARSOMA LE SYRIEN (TEXTE ÉTHIOPIEN, traduction fran- CAISe) SpA SM GTÉDAUE EE MSA NES UN Sera AN ER re 901 XV. NOTES DE GÉOGRAPHIE ET D'HISTOIRE D'EXTRÈME-ORIENT, paryEBlochet: en EE ANA ETS ER E AR Re A an rs UE 346 XVI. HISTOIRE D'HAIKAR LE SAGE, d’après les manuscrits arabes 3637 ét0090 106 IPariS Dar Et Be TOY ANNEES CR ENNE τ ὉΠ δ ΡΝ 909 MELANGES I. TRADUCTION DE LA CHRONIQUE SYRIAQUE ANONYME ÉDITÉE PAR 5, B. Ms RAHMANI, PATRIARCHE DES SYRIENS CATHOLIQUES (SL Le TARA ΕΝ AU ET RARE AE AS το OR ER SERRE TE λα 90, 321, 236 II. COMITÉ D'ORGANISATION ET SECTIONS DU XV° CONGRES IN- TERNATIONAL DES, ORIENTALISTES, par ΕἸ Nau................... 99 IT. CONCORDANCE DE LA CHRONOLOGIE ÉTHIOPIENNE AVEC LA GOPRORIENNE DATES AG bAUE EN UE RARE ER SR ee 10] IV. DEUX CATALOGUES DE LA BIBLIOTHÈQUE DU HÉROMOINE IGNACE EN 1516-1522 (notes du ms. Coislin 292), par FE. Nau.........… 203 V.— RÉCENTS PROGRÈS DE LA PATROLOGIE ORIENTALE, par EF. ΝΘ 2290 PA AR NEC A A RP ap AU Se ADS TE RE AE OR 210

VI. NOTE SUR LES ANIMAUX DE SAINT-MÉNAS, par M. Chaïine.. 212

CHRONIQUE

Ι. LE XVe CONGRES INTERNATIONAL DES ORIENTALISTES (Copen- bague 4141-20 -Nouût- 1908) par dE ΔΨ ΘΠ 4 ne Lee re de De ΡΥ 329

BIBLIOGRAPHIE

Agnès Smith Lewis et Margaret Dunlop Gibson, Forly-one Fac-similes of

dated Christian Arabic manuscripts (F. Nau)......... re eee ae 105 Université Saint-Joseph (Beyrout), Mélanges de la Faculté orientale (F. Nau). 106 A. Gastoué, Catalogue des manuscrits de musique byzantine (F. Nau)....... 106 M. A. Kugener, Un trailé astronomique el météorologique syriaque, attri-

bué a Denys MAréonRqile (EN) Re ἘΝ ΡΥ ΤΣ ἢ, να NE ARE 107 EMacier (Mosaique. orientale (ES Nan) HER 2e Mal CR CEE Lin 108 Vigouroux, Bacuez et Brassac, Manuel Biblique, tome ΠῚ (F. Nau). ....... 109

Maximilien, prince de Saxe, Praelectiones de liturgiis orientalibus (F. Nau). 110 H. Pognon, /nseriptions sémiliques de la Syrie, de la Mésopotamie et de la M'ÉDON ARE NN ΠΟΘ (Ὁ ΝΟ A Te ASE UE RARE NAN AOC LORS Ar PA 110

:

ΓΕ. Pannier, Les Psaumes, d'après l'hébreu (L. Legrain).!..

TABLE DES MATIÈRES.

R. P. Salomon, La voir te la vérilé, revue néo-syriaque d'Ourmiah(F.Nau). Addaï Scher, Livre des mols persans passés dans la langue arabe (L. Leroy). H. Pognon, /nscriplions sémitiques, seconde partie (F. Nau)............... F. Cumont, La cosmologie manichéenne, d'après Théodore bar Kôni (F.

IN ELU AE PANIERS I SAUCE ALBI PS EE PE AU RE AE DE PN TEL AP PES Michelangelo Guidi, Un Bios di Constantino (F. Nau)...................... Basmadjian, Banaser, revue philologique et historique (L. Bouvat)....... R. P. Bedjan, Momiliae selectae mar Jacobi Sarugensis, 1. IV (F. Nau)..... K, Macler, Catalogue des manuscrils arméniens οἱ géorgiens de la Biblio-

RETURN ONGLES (ANA) RE ARR RER Ne er AE TE Université St-Joscph, Beyrout, Mélanges de la K'acullé orientale, t. III, fase. I

ΠΡΟ Er RS CR ER a PEN Ve Nu ET ge Ag ΡΣ τ ὉΠ ΒΟ OC ASC TES NA) ARRET OUR ARE LR et TE ER re I. Ephraem II Rahmani, Acta Piluti (Studia syriaca, fase. 2) (F. Nau)..... BNestle Sen A ouiaS UE (REANEAU) ARTE EEE, Denzinger, Enchiridion symbolorum..: (FE. Nau)..........................

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LE SANCTUAIRE DE LA LAPIDATION DE SAINT ÉTIENNE A JÉRUSALEM

(Suite) (1)

Venons maintenant, il est grand temps, au passage qui regarde le lieu de la lapidation de S. Étienne. Le texte de la recension À porte :

« Et qui mecum est in orientali parte monumenti jacens, pise est domnus Stephanus, qui lapidatus est a Judaeis et prin- cipibus sacerdotum in Jerusalem pro Christi fide foris portam quae est ad aquilonem, quae ducit ad Cedar; ubi die ac nocte Jacuit, etc. »

La recension B, dans le texte grec de Papadopoulos-Kéra- meus (2) : δὲ σὺν ἐμοὶ χείμενος, αὐτὸς ἐστιν χύρις "Στέφανος, «ὃ

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λιθοδοληθεὶς ὑπὸ τῶν ᾿Ιουδαίων ἐν ᾿Ιερουσαλὴν. καὶ ποιήσας νυχθήμερον ͵ Le ΠῚ Π ΠῚ \

ἐρριμένος εἰς τὰ ἘΞ Ξώπυλα τῆς πόλεως ὡς ἐπὶ τὸν (9) Κηδὰρ ἀπερχό- μεθα... « Celui qui repose avec moi, est seigneur Étienne, qui, ayant été lapidé par les Juifs à Jérusalem, et ayant passé une nuit et un jour jeté aux exopyla de la ville, comme [quand nous allons au Cédar... » Le texte syriaque est traduit par M. Nau (4) : « Il passa un jour et une nuit, gisant en dehors de la ville, dans le chemin de Cédar, selon l’ordre des princes des prêtres. » Le texte latin de la recension B dans Migne porte :

(1) Voy. ROC, 1907, p. 414 ss. (IP 432410: (3) Le ms. de M. Nau (Revue de l'Orient chrétien, 1906 p. 206), porte τήν. (4) Loc. laud., p. 206, note 6. ORIENT CHRÉTIEN. 1

2 REVUE DE L'ORIENT CHRÉTIEN.

« Qui autem jacet meum, domnus Stephanus est, qui a Judaeis Jerosolymis lapidatus est, et die noctuque in exapeleo jacuit civitatis, in via euntibus Cedar, jussu impiorum sacer- dotum projectus, ut a bestiis et avibus devoraretur. » Le Codex germanensis a tenté de rendre ἐῤῥιμένος, en séparant la lapida- tion et la projection du corps : « in exapoli jJacuit civitate. Inde abstractus est in via euntibus Cedar, jussu impiorum sacer- dotum, ut bestiis et avibus devoraretur ».

Le R. P. Vailhé aurait pu insister davantage sur le sens de ces passages. Si on s’en tient strictement au texte de la seconde recension, le lieu précis de la lapidation n’y est pas mentionné directement. 5. Étienne est lapidé à Jérusalem, puis jeté aux Exopula. Admettons si l’on veut qu'on l'ait jeté aux Exopula les plus voisins du lieu de la lapidation, s'il y en avait plusieurs, ces Exopyla qui sont, par définition, hors des portes, ne seraient toujours pas le lieu de la lapidation.

Et que sont, en somme, ces £xropula? J'avais proposé « fau- bourg » (1). Sur quoi M. Clermont-Ganneau fait remarquer : « J'inclinerais à voir dans les ἐξώπυλα, non pas précisément le faubourg, mais la voirie de Jérusalem, les tas d’ordures situés en dehors des portes de la ville (cf. les monticules de cendres d'au- jourd'hui, dans la région nord); les χόπρια sont, par définition, ἐξώπυλα; le corps du supplicié aurait été jeté (ἐρριμένος), en quelque sorte, aux gémonies » (2). Et cela parait bien, en effet, le sens du texte. D’après le R. P. Vailhé (3), « Les ἐξώπυλα sont les faubourgs de la ville, peut-être les tas d’ordures situés en dehors des portes et qui devaient exister sur plusieurs points aux alentours de Jérusalem ». Il faudrait opter, et je reconnais maintenant que le sens de M. Clermont-Ganneau est le seul qui explique bien ἐῤῥιμένος. Dans ce sens que je n'avais pas reconnu d'abord, il faut encore plus nécessairement conclure à un enlè- vement\du corps du lieu de la lapidation pour être jeté à la voi- rie, Car on ne peut pourtant pas admettre, et ce serait contraire au texte de cette recension, que la lapidation a eu lieu sur la voirie!

Continuons l'analyse du texte. J'avais déjà noté ce qu'ont

) Revue biblique, 1900, p. 143. ;

(I (2) Revue biblique, 1900, p. 308 5. (B)HP 97.

er

LE SANCTUAIRE DE LA LAPIDATION. 3

d'absurde les mots : « comme (quand) nous allons au Cédar », dans la bouche du défunt Gamaliel. Le R. P. Vailhé ne voit rien d’anormal non plus que M. Nau et trouve que la ver- sion latine « fort bien rendu ». Il faudrait dire /rès large- ment au point d'étre inexacte : ἐῤῥιμένος devient Jacuil, et cependant rien n'empêche de lui laisser son sens normal de « jeté, mis au rebut »; ἀπερχόμεθα devient l'inoffensif euntibus. M. Clermont-Ganneau avait cependant appuyé ma remarque et dit tout clair : « Les mots ὡς ἐπὶ τὸν χηδὰρ ἀπερχόμεθα ont tout l'air d’être une glose qu’on ajoutée au texte pour déterminer la direction de ces ἐξώπυλα (1) ».. Cette tournure qui a échappé au remanieur n'est pas pour recommander beaucoup le texte grec de B. Quant au texte syriaque, s'il suit B, il est évident qu'il abrège, ayant omis la circonstance intermédiaire indispensable de la projection du corps.

Mais qu'est-ce que Cédar ?

Le R. P. να 1Ππό nous fait du moins la gràce de ne point tra- duire Cédar par Cédron, comme avait rendu M. Nau, sans paraître même soupçonner que la chose n'allait pas de soi. « On serait bien tenté de lire Cédron, et, dès lors, toute difficulté disparaît. Plusieurs l'ont fait sans scrupule (2), mais je ne crois pas qu'on puisse l'interpréter ainsi pour le moment, puisque tous les textes portent Cédar. Disons plutôt que c'est « le nom, peut-être estropié, de quelque point des environs immédiats de Jérusalem », non encore retrouvé (3). »

Nous ne supposerions pas volontiers avec M. Clermont-Ganneau et le R. P. Vailhé que Cédar est le nom estropié de quelque point des environs immédiats de Jérusalem. D'ailleurs Ia po- sition prise par le R. P. Vailhé nous dispense d'insister sur Cédar.

Il faut maintenant comparer le texte grec de B avec le texte latin de A. La comparaison du R. P. Vailhé est très sommaire : « Les mots décisifs, foris porltam quae est ad aquilonem, manquant dans la traduction syriaque et dans l'original grec que nous regardons comme le texte de Lucien, jusqu'à plus ample

(1) Loc. laud., p. 309.

(2) Est-ce à l'adresse de M. Nau

(3) Vaicué, Loc. laud., p. 87; la citation est de Clermont-Ganneau, RB., 1900, p. 309.

4 REVUE DE L'ORIENT CHRÉTIEN.

informé, nous les tenons pour une addition postérieure (1). »

En réalité les deux textes diffèrent beaucoup plus. D'après le texte latin, S. Étienne, lapidé hors de la porte du nord, qui mène à Cédar, est demeuré là, abandonné, sans sépulture; d’après le texte grec, 5. Étienne, lapidé à Jérusalem, a été jeté sur la voirie extérieure, comme quand nous allons au Cédar. C’est entre ces deux recensions qu'il faut choisir.

Mais peut-être le R. P. Vailhé s'étonne et m'a déjà répondu : vous ne voyez donc pas que la recension latine, elle aussi, dit que 5. Étienne a été lapidé à Jérusalem, et cependant elle aussi place la lapidation hors de la ville? Précisément, mais la remarque prouve, simplement, que l'incise relative à la porte est indispensable à l'intelligence des faits! Tel qu'il est, le texte grec affirme la lapidation dans la ville. Pour que ce terme général pût s'entendre d’un endroit hors les murs, il fallait le dire... Sans cela l'opposition entre ἐν ᾿Ιερουσαλήμ. et τὰ ἐξώπυλα τῆς πόλεως, dépendant de ἐῤῥιμένος, ne nous permettrait pas de soupçonner que la lapidation eu lieu hors des murs.

Il y a plus, et nous avons de l’omission une preuve tout à fait décisive. M. Clermont-Ganneau regardait comme une glose les mots « comme (quand) nous allons au Cédar ». Cependant ils se trouvaient aussi dans la première recension, ils ne font pas l'effet d'une glose : la porte du nord, qui conduit à Cédar, cela s'entend très bien. D'où vient donc qu’ils ne se rattachent à rien dans la seconde recension? C’est précisément parce qu'elle ne parle pas de la porte, mais de la voirie. Même avec l’incurie moderne, on ne voit pas de débris ou de fumiers précisément en droit de la porte; on ne dit pas officiellement de la voirie que ce soit le chemin de tel (2) en- droit. Tout est parfaitement clair dans notre texte si l'on reconnaît que la mention précise de la porte été remplacée par la mention pathétique de la voirie. On ne pouvait plus dire : la voirie qui conduit à Cédar; et cependant, pour con- server ce détail, on dit : comme quand nous allons au Cédar. Paroles qui ne sont pas seulement déplacées dans la bouche de feu Gamaliel, mais qui ne conviennent pas au prêtre Lucien

(1) Loc. laud., p. 88.

(2) La colline de cendres du nord disparaître précisément quand on a fait un chemin qui la coupait.

»

LE SANCTUAIRE DE LA LAPIDATION. 5)

qui parle de Jérusalem comme de la grande ville il est étranger.

Les particularités de B, dans le texte qui nous importe, sont précisément celles de cette recension en général. Omission d'un détail précis, remplacé par un trait sensationnel, maladresse dans la soudure, négligence de détails précis de l'histoire, abondance de détails impressionnants et merveilleux, tout ce qui recommande la recension B à des auditeurs bénévoles, lui donne aux yeux des critiques une note de mauvais aloi. Nous avons donc le devoir de nous en tenir, sur le point précis de la lapidation de 5. Étienne, au renseignement topographique de la relation authentique relatif à la porte du nord, laissant pour ce qu'il vaut le renseignement émouvant de la voirie, à la relation légendaire.

III. UNE NOUVELLE COMBINAISON.

En discutant les textes de Theodosius et de Lucien, le R. P. Vailhé n'avait d'autre intention que de nous enlever des témoignages positifs; ces textes ne pouvaient être allégués pour la tradition du Cédron, qui n'est attestée formellement qu'au ΧΙ siècle, comme 1] Le reconnait.

Mais il existe un texte qui parle de la lapidation sans dire elle eu lieu; c’est celui du pseudo-Basile de Séleucie. Le voici encore une fois, d’après la traduction du ἢ. P. Vailhé :

« Les restes du bienheureux sont déposés, selon la propre volonté d'É- tienne, devant les murs de Jérusalem, à l’endroit où, lapidé et souffrant une mort célébrée sur toute la terre par d’illustres louanges, il avait ceint la brillante couronne du martyre. Juvénal, qui orne maintenant le trône glorieux et illustre de Jacques lui bâtissant une église digne de sa mé- moire, de ses travaux et de ses luttes admirables (1). »

(1) Loc. laud., p. SI.

Je n'ai pas à me plaindre de cette traduction, surtout en ce qui regarde le mot « bâtissant ». Les lecteurs seront étonnés que dans la même page le R. P. Vailhé commente : « Α ce moment-là, l’église était construite : ἐχχλησίας οἰχοδο- μηθείσης ». La loyauté m'avait fait un devoir de signaler cette nuance du passé, que le français « bâtissant » ne rend peut-être pas avec assez de précision. Pour être tout à fait exact, il faut noter que ce passé n’est pas un parfait, mais

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REVUE DE L'ORIENT CHRÉTIEN.

On le voit, ce texte ne parle ni de l’est ni du nord. En l’en- tendant du nord, on le met en harmonie avec la tradition an- cienne. L’entendre de l’est, ce n’est pas, d’un seul coup, donner raison à la tradition récente; c’est simplement établir un con- flit. Après cela on pourrait discuter de la valeur respective des textes et rappeler le jugement sévère de Tillemont sur l'éloge de S. Étienne faussement attribué par Combefis à Basile de Séleucie: « I] me semble qu'il y a très peu de génie et d’es- prit dans cette pièce. Le style en est aussi trop long, et le grec trop barbare pour croire qu'elle soit de lui (1). » Mais nous n'en sommes point réduits là. A la différence du R. P. Vailhé, je ne récuse aucun texte, et je ne leur attribue aucune confu- sion. Pour qu'on fût autorisé à mettre celui-ci en contradiction avec les autres, c'est-à-dire pour qu'on püt l'alléguer en faveur du Cédron, il faudrait :

Prouver qu'il y avait une église de 5. Étienne dans Ja vallée du Cédron avant 455, puisque le R. P. Vailhé admet qu'Eudocie commencé vers cette date la basilique du nord;

Prouver que cette église était la seule à Jérusalem.

Tant que cette double preuve n'aura pas été fournie, l’argu- ment est caduc en faveur de la tradition de l’est.

Or Je crois qu'il est plus facile d'établir l'existence d’un sanctuaire de 5. Étienne au nord de la ville dès 438 que celle d'une église à l’est vers cette même date. L'argument tiré du pseudo-Basile se retourne donc en notre faveur.

Voyons d’abord les arguments du R. P. Vailhé en faveur de l'est.

un aoriste. L'action est passée par rapport au verbe principal; il est possible qu’elle ne soit pas tout à fait achevée. Le sens est que Juvénal avait com- mencé cette construction pour y déposer les reliques; il se pourrait qu’elle ne fût pas terminée; tout ce que ce passé exige, c’est que l’église fût assez avancée pour recevoir les reliques. C’est un des sens du participe aoriste d’après Koch- Rouff : « Le participe aoriste peut encore (comme, en latin, le participe passé des verbes déponents) exprimer l’action avec l’idée de commencement, de telle sorte que le commencement de l’action secondaire, seul, précède l’action prin- cipale, et que, pour la suite, les deux actions s’accomplissent simultanément » (Grammaire grecque, Ὁ. 393). Il y sans doute quelque subtilité, mais il nous sera bien permis de prendre ce texte dans son sens grammatical strict, quand le R. P. Vailhé suppose si aisément des confusions dans ceux qui lui sont con- traires. (1) Mémoires, τ, XV, p. 345.

LE SANCTUAIRE DE LA LAPIDATION. 7

L'église de l’est est attestée par le Commemoratorium de casis Dei, en 808. J'avais cité ce texte (1); il faut le relire pour juger de l'importance que pouvait avoir ce sanctuaire : In valle Josaphat... in sancto Leontio, presbyter 1, in sancto Jacobo I, in sancto Quaranta ΠΠ, in sancto Christophoro I, in sancta Aquilina 1, in sancto Quiriaco 1, in sancto Stephano II, in sancto Dometio I. N'avais-je pas raison d'ajouter : « c'est un petit sanctuaire au milieu de beaucoup d'autres, relativement important puisqu'il trois prêtres »? Aujourd'hui je note qu'il n'est pas question de 5. Jean-Baptiste dans cette énumération assez considérable.

M. Nau a versé au débat deux autres textes : dans l’un, tiré des Plérophories, il est question, avant 41, de deux églises de saint Étienne οἱ de saint Jean (2), sans qu'on marque autre- ment leur situation; mais cette situation est fixée, croit-on, par un second texte. Le patriarche Amos avant l'an 600 —, pour expier une très sotte plaisanterie, il avait habillé un porc en moine —, fit bâtir une église à saint Jean-Baptiste : ἄρχεται χτίζειν ναὸν τοῦ ἁγίου ᾿Ιωάννου τοῦ προδρόμου ἔξω τῆς πόλεως, χατέναντι τοῦ ναοῦ τοῦ ἁγίου Στεφάνου χατὰ ἀνατολάς. En discutant ce texte en 1905 (3), le R. P. Vailhé le traduisit d'abord litté- ralement : Ainos commence à construire l’église Saint-Jean- Baptiste, hors de la ville, en face de l'Église Saint-Étienne, à l'Est. Puis il l'expliquait de l'est de la ville, « tout en recon- naissant qu'on pourrait traduire à la rigueur : l'église Saint- Jean-Baptiste, qui se trouve hors de la ville, en face et à l'est de Saint-Étienne ». Et en effet, si l’auteur avait voulu désigner Saint-Étienne de l'Est, par opposition à Saint-Étienne du Nord, il eût écrire : τοῦ χατὰ ἀνατολάς, ets’il eût voulu dire à l’est de la ville, il eût mettre les mots χατὰ ἀνατολάς après πόλεως.

Quoi qu'il en soit, la prudente réserve de 1905 complète- ment disparu en 1907, et cela n’ést pas un progrès.

Mais quoi, si en 451 il y avait déjà tout proche l'une de l’autre deux églises, de saint Étienne et de saint Jean-Baptiste,

(1) RB., 1894, p. 458.

(2) Revue de l'Orient chrétien, 1906, p. 211; M. Nau avait d’abord traduit une église consacrée à la fois à saint Étienne et à saint Jean, sur quoi avait tablé le R. P. Vailhé dans son article des Échos d'Orient de 1905.

(3) Échos d'Orient, 1905, p. 83.

: REVUE DE L'ORIENT CHRÉTIEN.

comment le patriarche Amos a-t-il eu l'idée de bâtir une église à saint Jean-Baptiste près de celle de 5. Étienne? A cela M. Nau avait répondu (1) que « s’il y a contradiction entre les deux anecdotes, c'est celle des Plérophories qui doit être retenue, car l’anecdote sur Amos est isolée, étrange et provient d’une source inconnue, mais il est facile de concilier les deux récits en supposant qu'Amos remplacé le martyrium par un beau temple comme cela résulte d’ailleurs de la fin de son récit ». Et c’est à quoi se range maintenant le R. P. Vailhé qui croyait, d’après la première traduction de M. Nau, qu'il n'y avait d'a- bord qu’une église, dédiée à la fois à saint Étienne et à saint Jean. Mais si on trouve ici cette solution si naturelle, pourquoi ne pas admettre qu'Eudocie, elle aussi, relevé avec plus d'é- clat un sanctuaire déjà existant au lieu de la lapidation? Et qu'est donc devenue cette église de saint Jean du Cédron, dont le Commemoratorium, si explicite, ne souffle mot? Et enfin, peut-on s'appuyer sur une anecdote isolée, étrange, contre des textes clairs et d'origine connue?

Toujours est-il que ces textes ne font aucune allusion à la lapidation.

A supposer qu'il y ait eu avant 451 une église de saint Étienne dans le Cédron, a-t-on le moindre indice qu'elle ait été bâtie par Juvénal? M. Nau prétend qu'elle été bâtie par le séna- teur Alexandre. « Toutes les rédactions grecques mentionnent un martyrium, bâti par le sénateur Alexandre, dans lequel on mit les reliques de saint Étienne (2). »

Le ἢ. P. Vailhé n’a jamais fait état de ces textes, d'origine très suspecte en effet, mais qui valent bien celui qui est relatif au patriarche Amos. Du moins ce sont des textes qui peuvent remémorer quelques vagues souvenirs relatifs à cet Alexandre. Si c'est Alexandre, du temps du patriarche Jean, et non Ju- vénal, qui a bâti cette prétendue église, on ne peut lui appli- quer le texte du pseudo-Basile, qui parle de Juvénal.

L'existence de l'église de l’est avant 451 repose donc sur la combinaison du texte, d'interprétation douteuse, relatif à Amos, avec le texte des Plérophories qu'il contredit, du moins en

(1) Revue de l'Orient chrétien, 1906, p. 212. (2) Revue de l'Orient chré ien, 1906, p. 214.

LE SANCTUAIRE DE LA LAPIDATION. 9

apparence, et rien n'indique que cette église ait été bâtie par Juvénal.

Était-elle bâtie sur les rampes du Cédron, près du rocher traditionnel, un trou figure le corps de saint Étienne, parmi les marches de l'escalier ancien? 1] n’est pas si facile de ré- * soudre la question par l'affirmative.

Un défenseur résolu de la tradition du Cédron, le R. P. Fioro- vich, S. J., soutenait qu'il avait toujours été impossible de bà- tir une église sur cette pente à pic, et formée de décombres, qui sépare les murs du torrent (1). On avait donc renoncer à consacrer par un sanctuaire le lieu du martyre; on avait bâti l’église ailleurs, et la tradition avait suivi l'église. C'est une pure conjecture, contraire aux textes, mais qui repose du moins sur une difficulté réelle.

D'ailleurs une possibilité n’est pas même une probabilité. Quelqu'un pu bâtir, quelque part à l'est, comme Mélanie au Mont des Oliviers, une église de saint Étienne, sans que pour cela on ait le droit de la placer près du rocher traditionnel. Et, quelle que soit sa place, pour qu'on puisse lui attribuer le texte du pseudo-Basile, il faudrait une autre condition que cette existence putative —-, il faudrait prouver qu'elle était seule. Tout ce qu'on peut dire, si on rejette le texte que nous allons produire, c'est que nous n’en savons rien. Celle de l'est et celle de Mélanie, d'après le R. P. Vailhé, cela fait déjà deux; pourquoi pas trois? Dire que nous n'en connaissons que deux, ce n’est pas avoir établi qu'il n’y en avait pas davantage. Tant qu'on ne sera pas fixé sur ce point, l'argument demeure sans vertu.

Mais j'ai promis de montrer qu'au contraire 11 existait dès 438 une église au Nord, église mentionnée par un texte presque contemporain, et non point échafaudée sur une combinaison branlante.

Le texte est celui de la Vie de Pierre l'Ibérien (2). Citons-le encore une fois :

« Cyrille (d'Alexandrie) avait été invité par la fidèle et orthodoxe reine

Eudocie à venir pour la déposition des os vénérés de l’illustre et très glo-

(1) Cf. Revue biblique, 1895, p. 156 5. (2) Petrus der Iberer, traduction du texte syriaque de la page 33, éd. Raabe.

10 REVUE DE L'ORIENT CHRÉTIEN.

rieux Étienne, le premier des martyrs et le premier des diacres, et pour accomplir la dédicace du beau temple qu'elle avait bâti en dehors des: portes septentrionales de la ville, et il accepta volontiers cet appel. Et lorsqu'il fut arrivé avec une foule d’évêques de toute l'Égypte et qu’il eut accompli avec honneur la déposition des saints os du premier des martyrs, le quinzième jour du mois de [787 (mai), il fit, le 16 du même mois, sur l’in- vitation de sainte Mélanie, la déposition des saints martyrs perses, des quarante martyrs avec eux au mont des Oliviers, dans le vénérable temple qui avait été aussi élevé brillamment par la reine Eudocie, elle-même, comme il est attesté et écrit dans une inscription sur la paroi. »

C'est catégorique. Pierre l’Ibérien est mort vers 485 et le biographe est un de ses disciples, contemporain d’une partie au moins des faits. Voilà une église un peu mieux attestée, en dehors des portes septentrionales, que cellei de l'est ou du Cédron! Aussi leR. P.Vailhé n’épargne rien pour se débarrasser de ce témoin comme des autres. Il suppose une confusion « d’au- tant plus vraisemblable que, selon le ἢ. P. Peeters (1), « cet épisode de saint Cyrille ne se lit point dans la Vie ibérienne ou géorgienne » de Pierre l'Ibérien qu'a publiée M. Marr (2) ». Je ne comprends pas. Si le texte n’est pas authentique, n'en parlons plus. Mais comment son absence dans une version confirme-t-elle la confusion supposée? C'est toujours la même argumentation que pour Theodosius. Le texte n’est probable- ment pas authentique et d’ailleurs l’auteur aura confondu; de toute façon, le témoin est suspect! Sur cette omission de la version géorgienne, j'ai consulté depuis longtemps le R. P.Pee- ters qui bien voulu me répondre : « Le passage relatif à la dédicace de la basilique de S. Étienne par S. Cyrille manque to- talement dans la Vie géorgienne de Pierre l'Ibère. Le & 19 (p. 89- 90 de la traduction russe) se termine sur les mots : « Praeposi- us... eos in monachos consecravit ad sepulerum Düi J. C. cum Murvano nomen Petrum dedisset et eunucho nomen Iohannem. Deinde eos in cœnobium reduxit. » Ces mots répondent bien, si je ne me trompe, au passage du texte syriaque qui précède immédiatement celui qui vous intéresse (p. 32, 1. 16-19). De notre abréviateur passe directement à un récit non pas identique mais très ressemblant à celui que le biographe syriaque reprend après la digression sur les constructions Eudoxiennes. Je ne

(1) Analecla bollandiana, janv. 1905, p. 137. (2) Loc.laud., p. 79.

LE SANCTUAIRE DE LA LAPIDATION, 11

crois pas que le nom d'Eudocie soit même mentionné dans le texte céorgien, ni à cet endroit, ni ailleurs. Est-ce l'effet d’une réticence systématique de l’abréviateur? 16 l'ignore. M Marr émis l'idée que la Vie géorgienne de Pierre, qui est certaine- ment une traduction du syriaque, ne dépend pas du texte de M. Raabe mais d'un autre qui reste à trouver. » On voit dans quelle mesure l’omission d’un passage par un recenseur que le R. P. Peeters nomme tout uniment « l’abréviateur » prouve que la recension syriaque de Raabe avait fait une confu- sion! Mais en quoi consiste donc cette confusion? D'après le R. P. Vailhé, le biographe confondu les deux séjours d'Eu- docie à Jérusalem : « Ainsi, il ferait dédier l'église Saint-Étienne d'Eudocie, lors du premier séjour de l'impératrice à Jérusalem, c'est-à-dire en 438 ou 439, alors que la dédicace de cette église n’a réellement eu lieu que le 15 juin 460, lors du second séjour de l’impératrice (1). » Mais cela ne va en somme qu'à une confu- sion sur la cérémonie de la dédicace. Peut-on en conclure que l’auteur s’est trompé aussi sur l'existence d'une église et sur la déposition des reliques en 438 ou 439? Ce qui prouve bien le contraire, c’est la sûreté de son information. « Car l'impératrice Eudocie, en 438 ou 439, assista réellement à la dédicace d'une église Saint-Étienne au mont des Oliviers, dans les monastères de sainte Mélanie (2). » Qu'un auteur si bien informé de ce qui se passa à Jérusalem le 16 mai, se soit trompé de plus de vingt ans sur ce qu'il dit s'être passé le 15 du même mois, c’est ce que je ne puis ni Concevoir, ni accorder.

Il est vrai que l'intervention deS. Cyrille m'avait été suspecte à moi-même, et que le R. P. Peeters y vu plus assurément une fiction monophysite. Cependant le savant et obligeant bollan- diste a bien voulu me communiquer un témoignage qui confirme la présence de Cyrille à Jérusalem en même temps qu'Eudocie. Il est tiré de la chronique de Jean, évêque de Nikiou, en Égypte, au vi siècle :

« L'empereur lui ayant donné son consentement Eudocie) écrivit aux gouverneurs de toute la province, leur ordonnant de recevoir l'impéra-

trice d’une manière digne d'elle, et il la fit accompagner à Jérusalem par Cyrille patriarche d'Alexandrie pour qu'il la bénit, la dirigeàt dans l'accom-

(1) Loc. laud., p. 79. (2) Loc. laud.,p. 79.

12 REVUE DE L'ORIENT CHRÉTIEN.

plissement des bonnes œuvres. C’est ainsi que se réahsa pour elle tout ce qu'elle avait demandé à Dieu : elle arriva à Jérusalem, restaura les églises et les habitations, et fit construire un couvent pour les vierges et un hos- pice pour les pèlerins et leur attribua de grands biens, elle fit aussi relever les murs de Jérusalem qui étaient tombés en ruine depuis longtemps. Tout ce qu'elle entreprenait, elle l’exécutait avec autorité. Ensuite l’impé- ratrice se retira du monde et elle vivait dans la solitude (1) .. »

Il est vrai que Jean est lui aussi monophysite, et il laisse entendre qu'Eudocie mourut fidèle à la secte; cependant il place correctement sa mort après la mort de Marcien. Il est donc vraisemblable que l’activité d'Eudocie, dès sa première visite aux lieux saints, été plus considérable qu'on ne le supposait jusqu’à présent, et qu'elle y a vraiment rencontré Cyrille; d’au- tant que le voyage du patriarche d'Alexandrie à Jérusalem ne peut être contesté (2).

L'auteur de la Vie de Pierre l'Ibérien était donc très bien in- formé; il n’y pas lieu de rejeter son texte, nide l’accuser d'une confusion bien étrange. Par conséquent il y avait une église de S. Étienne au nord, dès 438, et nous pouvons lui appliquer le témoignage du pseudo-Basile; nous le devons même si nous préférons, ce qui est raisonnable, le supposer d'accord avec Lucien et avec l’ancienne tradition de Jérusalem.

Il ne me reste plus qu’à donner satisfaction aux difficultés du R. P. Vailhé. Le lecteur n'exigera pas que je lui dise exactement comment les choses se sont passées. Ce serait affecter une assu- rance que l'état de nos connaissances n’autoriserait pas. Tout ce qu'on peut demander, après que j'ai établi la situation d’après tous les textes, c'est de montrer que les objections ne portent pas. ᾿

Au fond tout revient à ceci. Si le sanctuaire du nord existait dès 438, comment se fait-il qu'il n’était point encore achevé, lorsque Eudocie en fit la dédicace le 15 juin 460 (3), d'autant que, d'après le biographe de Pierre l'Ibérien, 5. Cyrille l'avait déjà

(1) Nofices el Extrails des manuscrits de la Bibliothèque nationale, t. XXIV (1883), p. 470 de la traduction de Zotenberg. Une partie de ce texte a été déjà citée par le R. P. Vailhé (Échos Orient, 1905, p. 785.); les passages qu’il a cités ne parlent pas deS. Cyrille

(2) Ὡς διέτριθον ἐν τῇ Αἰλιέων (P. G., LXXVII col. 341) et d’après Tillemont pré- cisément en 438.

(3) D’après Cyrille de Seythopolis, dont ie texte sera cité plus bas.

LE SANCTIAIRE DE LA LAPIDATION. 13

consacré par la déposition des reliques, en 438? On voit le there:

Deux solutions sont possibles (1).

Première solution : il y eu deux églises consécutives. C’est bien ce qu'admet le R. P. Vaïlhé, seulement il suppose qué celle de Juvénal était à l’est, et celle d'Eudocie au nord. Nous deman- dons : Est-il vraisemblable qu'on ait transféré les reliques hors du lieu du martyre, alors que, d’après le pseudo-Basile, 5. Étienne lui-même avait voulu qu'elles y fussent déposées? Est-il vrai- semblable que l’impératrice, qui voulait reposer auprès du saint, ait commencé par l'enlever du lieu qu'il avait choisi, plutôt que de fixer sa sépulture au lieu de la lapidation étaient déjà les reliques? On voit s’il est vrai de dire que « l'interprétation donnée des textes amène une meilleure intelligence des faits (2) ». Il n’y a rien d'étonnant à ce que deux églises, la se- conde sans doute plus grande et plus riche, aient été bâties au même lieu (9).

La difficulté est exactement la même que celle qu'on pour- rait soulever aujourd'hui à propos de la basilique restaurée. Un décret de la sacrée congrégation des Rites en faveur du sanctuaire dominicain du nord débute ainsi : « Quum Hieroso- Iymis Cœnobium et Ecclesia Fratrum Ordinis Prædicatorum extet in loco ubi martyrium subiit inclitus Protomartyr sanctus Stephanus »... il est daté du déc. 1887. Qui ne croirait qu'il s'applique à l'église actuelle? Or la première pierre de celle-ci n’a été posée que le 10 déc, 1895, c’est-à-dire huit ans après; l’ancienne église ou chapelle provisoire a été désaffectée et on serait bien embarrassé de reconnaitre sa destination. Comment aurait-on le droit d'exiger que nous retrouvions aujourd'hui l'église de Juvénal à côté de celle d'Eudocie ? Le R. P. Vailhé me rappelle que j'ai dit (4) : « Les fouilles exécutées avec soin

(1) Car je ne veux pas en proposer une troisième qui consisterait à préférer l'autorité du biographe de Pierre l’Ibérien, monophysite ardent, au très cons- ciencieux Cyrille de Scythopolis; absolument parlant il faut cependant recon- naître que Cyrille est postérieur d’une cinquantaine d’années.

(2) Est-ce bien une interprétation des textes que de les rejeter ou de leur prêter les plus ‘étranges confusions ?

(3) Nous n'avons jamais prétendu marquer le lieu de la lapidation d'un hic précis; il s'agit d’une certaine aire.

(4) Revue biblique, 1906, p. 301.

14 REVUE DE L'ORIENT CHRÉTIEN.

et relevées par un homme du métier n’ont permis de constater aucune dualité dans l'édifice, sauf l'addition de la petite église de beaucoup postérieure ». Mais d’abord 1] serait exagéré de conclure que « les fouilles s'inscrivent en faux » contre la suppo- sition de deux églises, parce que ce serait transformer un ar- gument négatif en preuve positive (1). Peut-être d’ailleurs ai- 16 excédé dans le sens du ἢ. P. Vaiïlhé. La seconde église, telle qu'on l’a découverte, est postérieure à la basilique, mais elle marque du moins une dualité qui est peut-être tradition- nelle; elle peut-être remplacé un sanctuaire plus ancien : peut-être aussi faudrait-il tenir compte de l’annexe qui forme comme une quatrième nef, et qui n’a point été rebâtie, parce qu'elle rentrait mal dans le plan d'une basilique, mais dont une mosaïque en dehors de l'église conservé la trace (2). Je me garderais bien de dire, c'est ceci ou c’est cela : mais Je réserve la possibilité de deux églises.

Cette possibilité, personne ne peut la contester, et dès lors il nous est bien loisible d'appliquer à la première église, bâtie par Juvénal, le texte du pseudo-Basile, surtout si, comme le prétend le R. P. Vailhé, cette homélie doit être placée plutôt au début qu'à la fin de l’épiscopat de Juvénal. Que le panégy- riste la déclare digne du premier martyr, c'est une affirmation de style : une impératrice a pu faire mieux.

Et cette solution est, croyons-nous, pleinement suffisante. Nous en avons promis une deuxième : la voici. La discussion est plus délicate. Il n’y eu peut-être au nord qu'une seule église, consacrée d'abord par la déposition des reliques en 438, puis dédiée par Eudocie en 460. Voici comment on pourrait concevoir les faits.

Juvénal aurait entrepris la construction de l’église du nord en même temps que St Mélanie bâtissait l’église de 5. Étienne au mont des Oliviers. L’impératrice Eudocie étant venue une première fois à Jérusalem en 438, et 5. Cyrille y ayant été mandé par l'empereur pour lui faire honneur, on profita de cette circonstance pour consacrer [65 églises, déjà bâties, ou sur

(1) Nous n’avons pas non plus retrouvé le couvent dont Gabriélos était higou- mène, avant même la dédicace de l'église.

(2) Cf. Saint Étienne et son sanctuaire, les plans de M. l'architecte Sandel, p. 121 et 131.

LE SANCTUAIRE DE LA LAPIDATION. 15

le point d'être terminées, par la déposition des reliques. Les troubles religieux éclatèrent. Eudocie revint à Jérusalem οἱ prit parti pour les monophysites. Lorsqu'elle eut reconnu le concile de Chalcédoine sur les instances de S. Euthyme, un de ses premiers soins fut de mettre son disciple Gabriélos à la tête de la vénérable maison de 5. Étienne qui existait donc déjà (1! Avant de mourir, elle se donna la consolation de célébrer la dédicace de toutes les églises qu'elle avait bâties, et entre au- tres de 5. Étienne qui n’était pas encore complète. Qu'on veuille bien ne pas oublier qu'il s'agissait d’un immense établissemen comprenant un couvent, un cloitre, peut-être des propylées, mais certainement une église à trois nefs avec une annexe, le

tombeau de 3. Étienne et celui d'Eudocie elle-même, qui en

effet ne devait pas être achevé (2). Au moment des troubles religieux, quand Eudocie était hérétique et en disgràce, on pu faire honneur de l'église à Juvénal; plus tard la tradition n’a retenu que le nom de l’impératrice.

Que l’église ait été d'abord seulement disposée pour le culte, et qu'on ait depuis repris les travaux, il n'y a rien d’extraor- dinaire, d'autant qu'à vrai dire aucun texte ne mentionne la part précise d'Eudocie. La date de 455 est purement conjectu- rale et ni Cyrille, ni personne, ne dit qu'Eudocie ait commencé les travaux de l'église après sa conversion.

La seule difficulté est donc dans la consécration, suivie d’une dédicace. II est d’ailleurs bien clair que si l’église pu être dé- diée avant d'être terminée, elle avait pu être consacrée dans le même état.

Au moment j'ai versé au débat le texte du biographe de Pierre, J'ai supposé que l’auteur avait quelque peu grossi le rôle de Cyrille (3), et j'ai soutenu plus récemment que 16 mot de dédicace était probablement trop fort (4), d'autant que l’au- teur ne parle en fait que de la déposition des reliques. C’est là,

(1) Καὶ τὸν μὲν Τ᾽αδριήλιον Ru ἡγούμενον τοῦ σεθασμίου οἴχου πεποίηχε τοῦ ἁγίου πρωτομάρτυρος Στεφάνου.

(2) Le sens du mot ἀπλήρωτον n’est pas tellement clair; en grec classique, cela signifie «insatiable » ; peut-être Cyrille veut-il dire simplement que l'installation n’était pas suffisamment complète ; peut-être même seulement qu'il y manquait des revenus; aussi ajoute-t-il qu'Eudocie y pourvut.

(3) Revue biblique, 1896, p. 459.

(4) Le syriaque est une transcription du grec ἐγχαίνια.

16 REVUE DE L'ORIENT CHRÉTIEN.

d'après le ἢ. P. Vailhé, « une mauvaise chicane; car la déposi- tion des reliques était précisément une des principales céré- monies de la dédicace (1) ».Je ne demande pas mieux que d'être instruit par le ἢ. P. des cérémonies de la dédicace au siècle. J'avais cependant cité les pages de ME Duchesne d'où 1] ré- sulte que, dans les premiers temps, la dédicace n'était, à pro- prement parler, qu'une solennité sans rite spécial (2). Je crois bien que la déposition des reliques était, à parler exactement, ce qui consacrait une église et permettait d'y célébrer le culte, mais il semble que, en Palestine du moins, on réservàt le terme de dédicace, ἐγχαίνια, à une solennité spéciale. Dans la rigueur du terme, on faisait les Encénies de temples détruits ou profanés : c'est ainsi qu'après la grande persécution de: Dioclétien et de Maximin, on fit en Orient des consécrations de temples nouvellement construits, et aussi des £ncénies, donc de temples anciens (3). Ce terme d'Encénies employé par le biographe de Pierre l'Ibérien n’est donc pas tout à fait propre, comme l’a noté l'éditeur, M. Raabe ; au contraire, si Eudocie fait faire les Encénies de l’église Saint-Étienne dont les travaux avaient été interrompus, qui avait peut-être été détruite en par- tie ou profanée pendant les troubles religieux, le terme serait absolument exact. Loin de s'étonner de cette seconde dédicace, il faudrait y reconnaitre une parfaite propriété des termes. On sait que ce mot été employé d'abord dans l'Évangile (Joan., x, 22) pour désigner la fête instituée par Judas Macchabée lors de la purification du Temple. Je ne prétends pas argumenter avec cette acribie; cependant 1] faut noter que la Vie de sainte Mélanie, parlant de la solennité du mont des Oliviers (au lende- main de celle de S. Étienne du nord, d’après le biographe de Pierre l'Ibérien), emploie bien en latin le mot dedicatio (4), mais

(1) Loc. laud., p. 79.

(2) Origines du culle chrétien, p. 386 ss.

(9) EUSÈBE, À. E., X, ὁ. τίνος ἐγκαινίων ἑορταὶ χατὰ πόλεις- χαὶ τῶν ἄρτι νεοπαγῶν προσευχτηρίων ἀφιερώσεις... La dédicace du martyrium constantinien à Jérusalem, en latin dedicalio, est ἀφιέρωσις (Vie de Constantin, 1v, 40, 49; cf. 1v, 47). C’est aussi la terminologie de Sozomène : ἀφιέρωσις, χαθιερῶσαι, Ch. XXVI; ἀφιέρωσις, ch. xxxur. Au contraire S. Athanase αἰ ἐγκαίνια, P. G., XXV, 0123 55.

(4) Deinde vadit (limpératrice Eudocie) et in virorum monasterium, et in- gressa audit ædificari prædictum martyrium iubetque celerius opus consummari, et rogat sanctam ut, dum ibidem esset, dedicatio celebraretur (éd. du card. Ram- polla, LVII). |

LE SANCTUAIRE DE LA LAPIDATION. 17

le grec dit seulement déposition des saintes reliques et non pas ἐγχαίνια (1).

En pareil cas la critique nous fait un devoir de tenir compte de ce qu'affirment les textes, plutôt que de nous buter à de prétendues invraisemblances.

On peut supposer d’ailleurs, sans la moindre invraisem- blance, qu'une église d’abord consacrée par la déposition des reliques été ensuite dédiée très solennellement. C'est presque ce qui a eu lieu de nos Jours. La nouvelle basilique, relevée de ses ruines, été bénite par Μϑ8" Piavi, patriarche de Jéru- salem, le 11 avril 1898; elle a été ensuite consacrée solen- nellement le 13 mai 1900 ‘par Mf Duval, archevêque de Pétra (2).

Le R. P. Vaïlhé a beau jeu de nous demander qu'est-ce que cette église qui a été dédiée deux fois? Je lui répondrai sans hé- siter que ce ne fut pas la seule, et précisément dans les mêmes circonstances. Le texte de Cyrille de Scythopolis nous est op- posé (3). Je n’élève contre lui aucune chicane; Je ne songe ni à en révoquer en doute l'authenticité, n1 à reprocher à l’auteur d'avoir confondu. Mais il faut le lire jusqu’au bout! On y voit que l’impératrice, en vue de sa fin prochaine, fit dédier foufes les églises qu'elle avait fondées. En avait-elle bâti tant en cinq années? Ne faut-il pas comprendre sous ce terme toutes les églises qu'elle avait réparées, peut-être même celles qu'elle avait enrichies? Plusieurs de ces églises avaient sans doute déjà servi au culte; elles avaient donc été consacrées. Mais on résolut de faire une sorte de solennité générale, qui rappelàt les bienfaits de l'impératrice et conservät son souvenir.

Dans ces conditions, est-il bien étonnant que l’église de S.- Étienne ait été d’abord consacrée, puis dédiée?

Au surplus je n’entends pas imposer la solution d'une seule église. Il suffit d’avoir constaté une église au nord de Jérusalem

(1) Ἤμελλεν ὃξ γίνεσθαι χατάθεσις τῶν ἁγίων λειψάνων ἐν τῷ νεωστὶ ὕπ᾽ αὐτῆς χτι- σθέντι μαρτυρίῳ (98).

(2) Il y manque encore bien des compléments qui figuraient dans le projet : un ciborium, des mosaïques, etc. !

(3) Καὶ δρομαίως ἐπὶ τὴν ἁγίαν πόλιν ὁρμήσασα, χαὶ τὸν ἀρχιςεπίσχοπον μεταστειλα- μένη, ἀπλήρωτον ὄντα τὸν ναὸν τοῦ ἁγίου Στεφάνου τοῦ πρωτομάρτυρος ἐγχαινισθῆναι παρεσχεύασε... χαὶ περιήρχετο πᾶσας τὰς ὑπ᾽ αὐτῆ: χτισθείσας ἐχχλησίας ἐγχαινίζουσα, χαὶ ἑκάστῃ ἀρχοῦσαν ἀφορίζουσα πρόσοδον (C'olelier, IV, p. 72).

ORIENT CHRÉTIEN. 2

18 REVUE DE L'ORIENT CHRÉTIEN.

dès 438. Peu importe, au regard des combinaisons du R. P. Vailhé, qu'elle ait été continuée ou rebâtie. Nous acceptons tous les textes et ils s’harmonisent très aisément.

Peu nous importe qu'il y ait eu avant 451 à l’est de Jérusa- lem, outre l’église de S.-Étienne du mont des Oliviers, une autre église située dans le Cédron, église dont l'existence n'est pas démontrée; il y avait aussi une église au nord, on avait dé- posé les reliques du saint. C'est à cette église que peut s’appli- quer, de 438 à 457, peu nous importe la date, le panégyrique du pseudo-Basile, et c’est à cette église qu'il doit s'appliquer, puisque la déposition des reliques a été faite au nord (Pierre) et au lieu du martyre (le pseudo-Basile), qui d'après Lucien et Theodosius était au nord; c’est aussi dans cette église que Mé- lanie est venue prier en 439, quelques jours avant sa mort. Pour affirmer que Juvénal construit son église dans la vallée du Cédron, il faut, sans parler des difficultés de la construction, re- jeter le texte de Lucien, le texte de Theodosius, le texte de la Vie de Pierre, et supposer que les reliques, d'abord déposées au lieu du martyre selon la volonté du saint (pseudo-Basile), ont été transportées au nord malgré sa volonté.

La principale autorité, ce sont les textes. Je crois avoir montré que ceux que j'avais allégués n’ont pas été ébranlés par le R. P. Vailhé. Tant qu'ils demeureront debout, 1] n’y aura pas de place pour les combinaisons qui n'en tiennent pas, compte, pour ingénieuses qu'elles soient.

Entrainé par sa démonstration, le R. P. Vaïlhé n'a pas craint d'écrire : « Aujourd’hui, les Grecs (1) prétendent avoir retrouvé, près de Gethsémani, les restes d’une ancienne église de Saint Étienne et ils invoquent à l'appui une inscription grecque qui semble bien leur donner raison (2). Cette trou- vaille épigraphique confirme admirablement les données his- toriques, possédées jusqu'à aujourd’hui, chose fort rare, sinon unique, dans l'histoire des sanctuaires palestiniens » (3). A ce raisonnement il n'y rien à répondre, si ce n’est : qu'il n'y à pas eu de trouvaille épigraphique de cette sorte à Gethsé-

(1) Lisez M. Spyridonidis et le diacre Louvaris, qui eux-mêmes ne vont pas si vite.

(2) Que sont devenues les réserves du début?

(3) Loc laud., p. 82.

LE SANCTUAIRE DE LA LAPIDATION. 19

mani; que cette trouvaille ne prouverait pas l'existence d'une église comme le R. P. l'avait d'abord compris; que les seules données historiques que nous possédions placent le lieu de Ja lapidation au nord, et que nous attendons toujours les textes anciens qui le placent à l’est.

L'accord « fort rare, sinon unique » des documents épigra- phiques et des données historiques en faveur du sanctuaire du Cédron, en l'absence soit de monuments, soit de textes avant le xure siècle, c'est tout de même un peu fort, et ce ne sont pas les combinaisons du R. P. Vailhé qui combleront la lacune.

Jérusalem, 16 juillet 1907.

Fr. M.-J. LAGRANGE.

P.-S. Depuis que cet article a été écrit, un fait s'est produit qui prouve que les discussions de ce genre ne sont pas toujours inutiles quand les opinants cherchent avec la même préoccupation du vrai. M. Nau a repris la question des manuscrits latins et a signalé avec une loyauté parfaite que quelques-uns disent Césarée et non Cedar. Nous n'avons plus qu'à le remercier vivement de sa découverte. Ces manuscrits sont plus rares, mais parmi les plus anciens, et on doit certainement préférer la lecon qui harmonise toutes les données. Le changement de Césarée en Cédar nous apparaît maintenant comme la cause de toute la confusion topographique. Un nom biblique a remplacé un nom latin comme le Jébuséen remplacé le Vésuve dans les Tractatus d'abord attribués faussement à Origène (Cf. Revue biblique, 1900, p. 299).

UN DERNIER MOT

SUR LES ÉGLISES S.-ÉTIENNE JÉRUSALEM

Aujourd'hui que le débat semble clos et que toutes les expli- cations ont été données, il nous semble opportun de résumer brièvement les résultats acquis après la précédente contro- verse:

D'après le R. P. Vailhé, il v avait anciennement, dans la vallée du Cédron, un sanctuaire dédié à saint Étienne. L’exis- tence de ce sanctuaire est confirmée par un témoignage de l’année 808, par un texte parlant d'un fait arrivé à la fin du vi‘ siècle, enfin par un texte de Jean de Maïouma dans les pre- mières années du vi° siècle. Ce dernier texte constate l’exis- tence de l’église avant l’année 451. Le témoignage de l’année 808 est indiscutable; les deux autres, plus anciens, ont été attaqués par le R. P. Lagrange, mais ses raisons ne sont pas de nature à entraîner la conviction. On ne peut récuser les données topographiques du Pré Spirituel ou ouvrages analo- gues à cause seulement de l'étrangeté des faits qui les encadrent. Remarquons, du reste, qu'aucun de ces trois textes n'’identifie l'église de l'Est avec celle de la lapidation, et le R. P. Vailhé ne l’a jamais prétendu (voir ROC., 1907, p. 72 seq.).

Pour placer le lieu de la lapidation dans la vallée de l'Est, le ἢ. P. Vailhé s'est appuyé sur une inscription trouvée non loin de Gethsémani et sur les difficultés que présente la conci- liation de certains textes avec la tradition du Nord.

a) Écartons tout d'abord le premier motif, car, après les explications des Pères Vincent et Lagrange, il est prouvé au-

UN DERNIER MOT SUR LES ÉGLISES S.-ÉTIENNE A JÉRUSALEM. 21

jourd'hui que l'inscription été trouvée à Bersabée, enterrée puis déterrée à Gethsémani par des Grecs.

b) La difficulté de concilier les textes avec la tradition du Nord provient surtout de Cyrille de Scythopolis. Celui-ci, his- torien bien informé généralement, assure que l'église du Nord, celle d'Eudocie, fut dédiée le 15 juin 460, avant d'être achevée. Or, deux auteurs contemporains : le pseudo-Basile de Séleucie et le biographe de sainte Mélanie, nous disent que l'église de la lapidation existait sûrement, d’après l'un avant l'année 455, d’après l’autre en l’année 439 au plus tard. Comme le R. P. Lagrange avait affirmé que « les fouilles exécutées avec soin et relevées par un homme du métier n'avaient permis de cons- tater aucune dualité dans l'édifice » du Nord, force était bien de distinguer le sanctuaire de la lapidation de la basilique eu- docienne. L'article du R. P. Lagrange écarte cette difficulté capitale en apportant deux explications :

Première explication. Il y eu deux églises au Nord, bâties sur le même lieu en moins de trente ans et dédiées l’une vers 438, l’autre vers 460. N’a-t-on pas fait la même chose de nos jours chez les Pères Dominicains! Avec cette explication, l'exemple apporté ne cadre pas d'une manière parfaite. En effet, la première église moderne des Dominicains n'était pas bâtie sur le même lieu que la seconde, mais assez loin de là; de plus, ce n’était pas une église, mais une salle transformée en chapelle provisoire jusqu’au jour les ressources ont permis de relever la basilique d'Eudocie. Au ν᾿ siècle, il ne pou- vait en être ainsi, puisque les reliques de saint Étienne repo- saient déjà, avant la construction de la basilique, dans une chapelle provisoire, sur le mont Sion, et qu'on n'éprouvait pas le besoin d’avoir une seconde chapelle provisoire sur le lieu du martyre, avant la construction de l’église définitive sur ce même lieu.

Seconde explication. « Il n’y eu au Nord qu'une seule église, consacrée d’abord par la déposition des reliques en 455 et dédiée par Eudocie en 460 ». C’est la vraie solution, si l'on veut tirer au Nordles textes si clairs et si concordants du pseudo- Basile et du biographe de sainte Mélanie. Mais cela à une condi- tion, c’est que la dédicace de juin 460, dont parle Cyrille de Scythopolis, soit une dédicace générale quelconque d’autres égli-

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2 REVUE DE L'ORIENT CHRÉTIEN.

ses ou d’autres constructions, ou bien une cérémonie se rappor- tant à la décoration de la basilique, et non la dédicace de la ba- silique elle-même quiétait dédiée depuis plus de vingt ans. Dans ce cas, et dans ce cas seulement, l’accord règne entre les textes cités. On peut alors faire dédier la basilique par saint Cyrille d'Alexandrie avant l’année 439, comme l’assurent le biographe de Pierre l'Ibérien et Jean de Nikiou. Et il faut reconnaitre sur -ce point que la lettre de saint Cyrille lui-même, Ep. 70, P. G., t. LXXVII, col. 341, versée pour la première fois aux débats par le R. P. Lagrange, est une confirmation authentique des affirmations de Jean de Nikiou et du biographe de Pierre. La date de la dédicace serait alors le 15 mai 438 ou 439, l’année 498 étant admise généralement pour le premier voyage d'Eu- docie à Jérusalem (1). Ainsi l'église Saint-Étienne du Nord serait bien le sanctuaire de la lapidation, mais la date de son érection devrait être vieillie de vingt à trente ans, ce qui n'est pas pour déplaire aux Pères Dominicains. On pourrait égale- ment l’attribuer soit à l’évêque Juvénal, comme le dit le pseudo- Basile, soit, d'après les autres sources, à l'impératrice Eudocie, qui avait sans doute avancé de Constantinople les fonds néces- saires à la construction. Avec cette interprétation, tous les textes concordent parfaitement. En même temps disparait la difficulté d'ordre moral, mise en avant par le ἢ. P. Vailhé, qu'il ait fallu attendre quarante-cinq ans de 415 à 460 pour avoir à Jérusalem, lieu de la lapidation de saint Étienne, un sanctuaire digne de lui.

Le R. P. Vailhé a de nouveau attiré l'attention sur les recensions latines de la lettre du prêtre Lucien. Il a constaté avec raison que la recension que l’on est convenu d’appeler la seconde, correspond dans l’ensemble aux textes grecs et syriaques de cette lettre, textes dont deux au moins, un grec et un syriaque, ont des attestations sérieuses dès le vi’ siècle. D'où la conclusion tirée par lui que cette seconde recension doit correspondre au texte original du prêtre Lucien. Or, cette seconde recension latine, comme d’ailleurs tous les documents grecs et syriaques, omet le passage décisif : foris porlam quae

(1) Le plus récent biographe de saint Cyrille d'Alexandrie, le R. P. Mahé, 5. J., fixe la rédaction de cette lettre après l’année 435, voir Vacant-Mangenot, Dic- tionnaire de théologie catholique, sub verbo, 1. III, col. 2498.

UN DERNIER MOT SUR LES ÉGLISES S.-ÉTIENNE À JÉRUSALEM. 23

est ad aquilonem, qui se trouve dans la première recension. A cette objection le R. P. Lagrange longuement répondu par des raisons de critique interne, arme délicate s’il en fut. En usant du même procédé, on montrerait peut-être que le premier récit, tout comme le second, est « embelli jusqu’au ridicule ». À quoi bon? Il suffit de retenir que Ja seconde re- cension est jusqu'ici la seule connue en Orient. D'ailleurs, M. l'abbé Nau montré (ROC., 1907, p. 441 seq.), d’après les seuls manuscrits latins de Paris, que le problème soulevé autour de la phrase incriminée était fort complexe. Il serait intéres- sant de montrer que tous les textes peuvent dériver de la pre- mière recension latine, auquel cas Césarée (pour Cédar) ne ferait pas de difficulté. Le débat reste encore ouvert, sur ce Don tout au moins.

+ LA RÉDACTION.

UNE VERSION ARABE

D'UNE HOMÉLIE INÉDITE SUR LA PÉNITENCE

ATTRIBUÉE A 85. JEAN CHRYSOSTOME.

AVERTISSEMENT

Au cours d'un voyage en Allemagne, pendant l'été de 1906, je passai quelques jours à Berlin et profitai de l’occasion pour visiter la Bibliothèque Royale. Je m'arrêtai de préférence à la section des manuscrits orientaux et, grâce à la complaisance de M. le Bibliothécaire, qui fit tout son possible pour faciliter mes recherches, je pus prendre la liste de tous les manuscrits chrétiens, de langue arabe ou copte. Quelques mois après, Je demandaï le manuscrit désigné comme il suit dans le catalogue :

10199 Ms. 105 15 BL 8% ,Abstc 1100 11688) Bruchstück der christl. Theologie angehôrig über den Messias, seine Eigenschaften und Aufgaben (1).

M. le Bibliothécaire voulut bien le prêter pour trois mois à la Bibliothèque des Facultés catholiques d'Angers, et je pus le copier à loisir.

La description donnée dans le catalogue n’est pas tout à fait exacte. Les 10 premières feuilles contiennent deux homélies incomplètes d'ailleurs (il manque le commencement de la première et la fin de la seconde) sur les deux premiers chapitres

(1) 15 feuilles in-octavo; transcrit vers l'an 1100 de l’hégire (1688 de l'ère chrétienne). Fragment concernant la théologie chrétienne, sur e Messie, ses propriétés et sa mission.

UNE VERSION ARABE D'UNE HOMÉLIE SUR LA PÉNITENCE. 95

de l’Ecclésiaste, et il n’est question qu'incidemment du Christ et de sa mission. Les quatre feuilles suivantes donnent une partie notable d’une homélie sur la pénitence et la crainte de Dieu, attribuée à saint Jean Chrysostome. Elle à pour texte le verset 1] du Ps. xxx : « Venite, filii, audite me, timorem Domini docebo vos. » Elle est d’ailleurs incomplète et la fin manque. M. Nau m'a signalé un texte grec analogue à cette homélie, contenu dans un manuserit du χα" siècle (1), et une autre traduction arabe, en caractères syriaques, de la même homélie (Bibl. Nat., Fonds syriaque, 239, feuilles 182-189). Celle-ci l'avantage d’être complète et plus correcte que celle de Berlin. Le texte en est parfois identique, mais elle présente, en plusieurs passages, des différences considérables. Je donne, en note, la traduction des passages omis dans le texte de Berlin.

Le parchemin de Berlin servi antérieurement à un autre manuscrit et il subsiste encore des traces de la première écri- ture, ce qui en rend la lecture souvent difficile.

Angers, janvier 1908. L. Leroy.

TRADUCTION

Au nom du Père et du Fils et du Saint-Esprit Dieu unique.

Homélie composée par le Père saint et pur Jean Chrysostome sur la Pénitence et la Crainte du Dieu Très-Haut, que ses prières agréables à Dieu nous gardent tous jusqu’au dernier soupir. Amen.

Il dit : David le Prophète nous donne une lecon excellente par ces paroles : « Venez, mes enfants, et écoutez, je vais vous enseigner la crainte de Dieu. » Il faut par conséquent que nous acquérions avant toutes choses la crainte pour qu’elle nous procure la vie éternelle. La crainte de Dieu _en effet nous conduit à la vie éternelle et chasse le péché. Elle nous donne non seulement la vie éternelle mais encore la gloire et la louange (2). Il

(1) Il est attribué aussi à saint Jean Chrysostome, sans doute à tort, car tous les éditeurs l’ont omis. Nous croyons donc qu'il n'existe aucun texte grec édité qui soit identique ou même parallèle à la présente homélie.

(2) Le texte de Paris débute dans les mêmes termes ; mais il contient, à partir de cet endroit, un long passage omis dans le manuscrit de Berlin : « Puisque la crainte de Dieu nous procure tous ces biens, ami de Dieu, rends-lui un culte véritable non seulement en paroles mais en œuvres. Établis la base de ton culte

20 REVUE DE L'ORIENT CHRÉTIEN.

faut prier. Ne dis pas : J'ai demandé telle grâce une fois, deux fois, mais je ne l'ai pas obtenue. N'abandonne pas la prière jusqu'à ce que ta

sur l'humilité, pour.que tu apprennes à connaître l’amour de ton Seigneur. Prends garde que, entrainé par quelque passion mondaine, tu méprises ton Seigneur. Sache que tu es un être éphémère et ne sois pas assuré de vivre jus- qu’au lendemain, car ta vie est bornée. Pourquoi la gaspilles-tu inutilement? Y'a-t-il au monde quelque chose d’assez sûr pour que tu t'y attaches? Qui donc est sans être mortel? ou quel est l’être assez excellent pour que le tombeau ne l’altère pas? Quel est le jeune homme qui ne vieillira pas ? Y a-t-il quelqu'un au monde qui doive survivre à son argent? Réfléchis à cela et à d’autres consi- dérations analogues, et rejette loin de toi toute pensée superbe. Sache que l’homme n’est que vanité et que ses jours passent comme l’ombre. Quand tu vois l'herbe des champs, songe à la nature humaine : les altérations que subit le gazon sont l’image des vicissitudes auxquelles l’homme est soumis. Le Seigneur a promis la vie éternelle et toi tu t'attaches à ce monde périssable. Rejette les plaisirs et triomphe des appétits du ventre. Ne néglige pas ces jours si brefs de peur que tu ne tombes dans le châtiment qui ne finira point. Il vaut mieux pour toi souffrir un peu ici-bas et échapper au châtiment sans fin. Ne marche pas chargé de la souillure des péchés pour servir d’aliment au feu qui ne s'éteint point. Je t'en prie, mon ami, ne t’écoute pas toi-même, si tu veux parvenir à cette gloire qui ne cessera point, au bonheur suprême, à la vie céleste, et aux tabernacles du Seigneur, Ne prétextons pas la longanimité du Seigneur Christ à notre égard. Ici-bas, en effet, il nous supporte et use de patience envers nous, mais là-bas il nous fera subir une investigation sévère. Surveille la porte de ton àme, je veux dire ta bouche, car la parole est le principe de la plupart des péchés. Ne dis pas: J'ai dit une parole sans importance, mais considère quelle en est la conséquence. Redoute l'approche du jugement terrible seront manifestées . toutes tes actions, car tous les péchés sont écrits là-bas. Tout ce que nous faisons et tout ce que nous disons y sera manifesté à son heure. Tremble, malheureux, et fais en sorte de ne rien écrire là-bas, mais efface plutôt ce qui s’y trouve déjà écrit. Il faut pleurer beaucoup, faire pénitence, prier et confesser tes péchés et faire d’autres bonnes œuvres; par ce moyen et d’autres œuvres de ce genre, tu effaceras tes péchés et tu échapperas à ce châtiment et à cette honte. On n’a pas besoin là-bas de richesses mais de bonnes œuvres. Tu ne fléchiras pas le juge par de l'argent mais par des pleurs. Si tu as de l'argent, distribue-le aux pauvres. Nous pouvons nous sauver si nous le voulons. Prends garde que les femmes de mauvaise vie etles publicains ne te précèdent dans le royaume. Gémis ici, pour te réjouir là-bas. Les pleurs qui passent valent mieux que les pleurs qui ne passent point. Sème ici le travail pour récolter le repos. Gémis, désole-toi et verse des larmes. Si la femme adultère, dont parle l'Évangile, a par ses pleurs obtenu le pardon du Seigneur Christ, les pleurs que tu répandras, avec le jeûne et la pureté, t’obtiendront mieux encore la miséricorde. Si tu n’as pas de bonnes œuvres, dis comme la Chananéenne : « Ayez pitié de moi, Sei- gneur. » Si tu n’as pas d'œuvres à montrer, réfugie-toi dans la miséricorde incommensurable du Créateur. Fréquente assidûment la source des livres saints. De même en effet que ceux qui sont assis près d’une source d’eau sont à l'abri de la chaleur, et jouissent de la fraicheur de l’eau, celui qui fréquente les sources des livres saints, sauve son àme de tous les maux et de la flamme de l'enfer, car la parole des livres vient de Dieu. Y a-t-il quelqu'un qui puisse s’'affliger de ce qui le console? La lecture assidue de l'Écriture ne doit pas t’ennuyer, car si tu

- UNE VERSION ARABE ΟὟΝΕ HOMÉLIE SUR LA PÉNITENCE. 27

demande ait été exaucée. Lorsque tu te prosternes devant Dieu, il ne faut pas que ta bouche seule prie tandis que ton esprit est loin de lui. Dieu n’a pas besoin de paroles, mais il demande des bonnes œuvres. Celui que tu pries est généreux. Ne dis pas (pour t'excuser) que tu as foi en sa miséricorde envers ceux qui ont recours à lui. Rougis de honte. Est-ce que celui qui est dans sa crainte le haïra? Celui qui le prie le négli- gera-t-il parce qu'il est miséricordieux? Pense, malheureux, à ton départ de ce monde, et à ce jour terrible où, ton âme étant prête à partir, tu seras étendu sur ton lit sans que ton intelligence puisse désormais lui être utile. Autour de toi tes parents et tes amis pleureront en voyant que ton àme va t’être ravie, mais aucun d'eux ne pourra intercéder auprès des anges qui voudront la prendre. Pense à toutes tes actions. Tu auras devant les yeux le ver qui ne dort point et le feu qui ne {s'éteint point et la four- naise qui ne se refroidit point. Éteins les péchés non sous l’abondance de l'eau, mais sous l’abondance des larmes, car les pleurs n’éteignent pas seulement le feu, mais ils purifient des péchés. C’est ce qu’atteste David le prophète, si éprouvé et si patient, quand il dit : « Toutes les nuits, je baigne ma couche (de mes larmes) » ; il ne dit pas : « Je mouille », mais « je baigne » pour nous apprendre que les larmes ont la vertu du baptème. Quand la douleur a Dieu pour cause, elle chasse la douleur du péché. Pleure ici sur tes péchés pour ne pas pleurer là-bas dans les tourments vengeurs. Découvre ta blessure au médecin et dévoile tes péchés. Redoute le Juge et crains le jour de la rémunération, quand viendra tout à coup l'heure du jugement pleine de tremblement et de larmes s'ouvrira l’abime de perdition, paraîtra le témoin qui ne se trompe pas. Pense à ces vérités, malheureux, et à d’autres du même ordre, et ne sois pas l’en- nemi de ton âme. Sache qu'il n’y rien de plus salutaire pour l’âme de l’homme que le souvenir de ses péchés. Sois assidu à la prière pour satis- faire ton Seigneur (1), car il a le pouvoir de te sauver. C’est pourquoi ne te relâche pas dans la prière même quand tu n'es pas en grâce avec Dieu. Prie alors pour obtenir la grâce. Tu seras sans doute exaucé de celui qui ne veut pas que l’homme se tienne éloigné de lui par crainte. C’est lui qui est ton Dieu; il veut ton salut plus que toi, et tu n’as pas à cet égard une sollicitude égale à la sienne. Aie soin, malheureux, de persévérer dans la prière. Elle n’exige aucun travail pénible. Livre-toi à cet exercice qui ne demande pas de peine et souviens-toi qu'il ne convient pas de proférer des paroles tout en étant dans un état de somnolence. Ne sera couronné que celui qui veille, qui travaille et qui persévère dans la prière,

éprouves de la fatigue, ton cœur est purifié. Applique-toi aux œuvres excellentes de la foi, aux invocations, aux veilles, à la patience et à la prière assidue. »

(1) A cet endroit le ms. de Paris s’écarte de nouveau de celui de Berlin. Il continue ainsi : « et lui donner l’occasion de manifester sa miséricorde par la rémission de tes péchés. Prends garde de ne pas mettre obstacle à sa bonté par ta négligence. Quand bien même tu serais tombé au dernier degré dans le péché, il a le pouvoir de t’en retirer ». Puis les deux textes coïncident de nouveau, avec des nombreuses variantes.

28 REVUE DE L'ORIENT CHRÉTIEN.

et l’homme n'obtient rien sans peine. Contiens tes passions par la lecture des livres saints et pense au jugement futur. Excite ton âme à méditer l'enfer. Prépare-toi à la lutte contre les démons afin que la miséricorde du Sauveur soit avec toi. Tu ne peux pas servir deux maitres. Pleure ici pour te réjouir là-bas. Il n’est qu'un häbleur celui qui se réjouit ici-bas, car il finira par pleurer. Que la voix que tu fais entendre soit celle des pleurs, la nuit comme le jour, car le résultat des pleurs est la joie éternelle. Prends garde de purifier ton âme. Tu dois t’'appliquer au travail et à la mortification de tes passions afin de mortifier ton corps et de le sauver, et toutes tes actions seront agréables à Dieu (1). Sache qu'il te faudra comparaître devant le Seigneur, que tu sois libre ou esclave, riche ou pauvre. Le vertueux Paul dit en effet que tout sera remis entre les mains du Christ. Il faudra donc, malheureux, que tu rendes compte non seule- ment des actions mais des paroles, car il te demandera un compte rigou- reux des paroles vaines que tu as dites, de l’aide que tu as pu prêter pour faire le mal, des paroles inutiles que tu as pu prononcer, car rien n'est nuisible à l’homme comme les paroles dites mal à propos et les discours frivoles qu'il tient. Aussi en rendra-t-il compte au jour du jugement. Prends garde, malheureux, car tu n’auras pas seulement à rendre compte de la parole, mais aussi de l’ouïe. Lorsque quelqu'un vient en ta compagnie et que tu accueilles sa parole, tu deviens son complice dans le péché, car la loi interdit cela. Et si celui qui ne fait qu'écouter doit être jugé, quel compte aura à rendre celui qui calomnie le prochain ?

Ce n’est pas seulement des paroles qu’il faudra rendre compte, mais encore des pensées. Sois donc désormais sur tes gardes : il te faudra rendre compte de toute parole mauvaise ou légère que tu auras dite à ton prochain ou de toute pensée de ce genre qui aura pu te venir à l'esprit (2). Réfléchis à tout cela, crains et tremble. Sache bien que Dieu n’est pas

(1) Le manuscrit de Paris contient, à cet endroit encore, un passage omis dans celui de Berlin : « Car une grande crainte s’emparera de ceux qui n’obéissent qu'à eux-mêmes. Prends donc garde, malheureux, de ne pas t'écouter de peur que tu ne tombes dans ce feu. Fais donc en sorte que ton àme ne soit pas trouvée de paille et que ce feu ne te brüle pas. Il n’écoute pas la parole de Dieu celui qui ne s’éveille pas de sa négligence bien qu’elle soit comme la trompette qui excite le cavalier au combat. Ne cesse pas de courir de peur que tu ne sois atteint par le lion dont lPApôtre Pierre parle en ces termes : « Mettez-vous en sûreté, car Satan, comme un lion, rôde cherchant à dévorer ceux qu'il trouve. » Prenez garde à lui, car il ne combat pas seulement pendant le jour, mais encore pendant la nuit. Il à une cavalerie puissante : ce sont les pensées impures. Prends garde, malheureux, aux menaces du lion. Ceins tes reins du cilice et verse des pleurs. Vaque sans cesse à la prière, de peur que tu ne tombes dans sa gueule. Ne cesse pas de gémir et de t’humilier devant Dieu, pour qu'il l’écarte de toi. Loue et remercie celui qui t'a créé. Réfléchis à toute heure et sache qu'il te : faudra rendre compte de tes œuvres quand le Seigneur Jésus viendra pour juger ses serviteurs. Sois à toute heure dans l’attente de ce jugement. Scrute ton cœur et rappelle-toi les œuvres que tu as accomplies dans tout le cours de ta vie. »

(2) A partir de cet endroit, le texte du ms. de Paris s'écarte de celui de Berlin et on n'y trouve plus de passage identique.

UNE VERSION ARABE D'UNE HOMÉLIE SUR LA PÉNITENCE. 90

seulement lumière, mais qu'il est aussi un feu qui brüle les pécheurs. Heureux_celui qui recoit la lumière, mais malheur à celui qui attend le feu, car les œuvres de tout homme seront éprouvées par le feu. Celui dont les œuvres subsisteront sera reconnu et récompensé; mais celui dont les œuvres seront consumées sera perdu. Dieu n’a pas besoin de bois; prends garde que tes œuvres ne soient du bois pour toi. Consulte les livres saints et considère quel a été le sort des saints et quel a été celui des pécheurs. prends garde d’éprouver le sort de ces derniers. Le Seigneur t'a planté comme une vigne vraie et féconde. Il viendra pour cueillir le fruit. Fais en sorte qu'il y ait en toi des grappes saines et de bons fruits, et prends garde qu’à son arrivée, il ne trouve en toi des épines au lieu de raisins. Tremble, malheureux, devant le châtiment, car le péché n’est pas à l’ex- térieur, mais il est imprimé dans le cœur. Ne cherche pas à nier en disant : « Je n'ai pas commis de péché »; car des témoins nombreux se présen- teront contre toi et les anges viendront en foule te reprocher hautement cet orgueil qui fait que tu renies tes péchés, que tu ne te résous pas à l’obéissance et que tu restes dans tes péchés. Sache, homme, qu'il n'y ni jeûne, ni prière, ni miséricorde, ni pleurs sans la charité et sans l’hu- milité. La crainte n'existe et n’est parfaite que lorsque l'orgueil est détruit. La crainte de Dieu donne la force; la crainte de Dieu fait couler les larmes; la crainte de Dieu attendrit le cœur insensible. De même que l’eau éteint les ardeurs du feu, la crainte de Dieu détourne l’homme de ce qui déplait à Dieu et l’amène à accomplir ce qui lui plait. Mets tous tes soins à ne pas t’'enorgueillir; de même en effet qu’il est au pouvoir de l'homme de faire le bien et le mal, ainsi il peut librement marcher dans la voie de l'enfer ou dans celle du ciel; il peut aussi briser l’orgueil de l'âme par l'humilité. C’est ainsi que Notre-Seigneur Jésus-Christ s’est abaissé afin de now rendre semblables à lui, comme il le dit lui-même : « Je suis doux et humble de cœur. » Il nous a tracé la voie du salut, afin que le chemin du ciel nous devint facile. Cette voie consiste en ce que Dieu ne demande ni or ni argent, mais le jeüne, la prière et l'humilité, et, à ces conditions, il sauve le pécheur de ses péchés. Adonne-toi donc au jeune, à la prière, à l'humilité, à la patience et à la résignation au milieu de toutes les peines, car le Seigneur éprouve celui qu'il aime dans ce monde qui passe, mais il lui donnera la joie parfaite dans... ᾿ ᾿ (A suivre.)

TEXTE ARABE

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copiste. J'ai rétabli 3,15 ae d'après le manuscrit de Paris.

(2) Le Ms. de Paris porte à cet endroit SLI AE «ἃ 89. « mets-toi dans l'esprit. » à

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4 suivre.)

(1) Ici s'arrête le ms. de Berlin. Je donnerai la fin de l’homélie d’après le manuscrit de Paris.

LES COUVENTS DES CHRÉTIENS

TRADUCTION DE L’ARABE D'’AL-MAKRIZI

INTRODUCTION

Les Couvents des Chrétiens précèdent les Eglises des Chré- tiens, dans l'AI-Khitat d'AI-Makrizi(v. ROC, 1907, 2, p. 190). Comme on pu s’en rendre compte par la lecture des Églises des Chrétiens, la relation de Makrizi donne une idée très juste de la situation du christianisme en Égypte pendant le moyen âge. La partie historique est moins développée dans le traité des Couvents que dans celui des Églises, notre auteur raconte tout au long les séditions survenues sous le règne du sultan Muhammed an-Nasser ben-Kalaoun; mais il s'arrête davan- tage aux traditions et aux légendes. L'impression qui s'en dégage est d'ailleurs la même. La désertion des couvents indique le relâchement de la vie religieuse et Ja diminution du nombre des chrétiens. De nombreux monastères sont ruinés soit par suite d'une persécution systématique comme sous le calife Hakim, soit par une explosion spontanée du fanatisme musul- man, soit qu'ils aient été abandonnés par les chrétiens devenus trop peu nombreux et trop pauvres.

Les Monastères ont été traduits en même temps que les Églises des Chrétiens, par M. Evetts, sous forme d’appendice à l'ouvrage d'Abou-Saleh l'Arménien, imprimé à la Clarendon Press (v. ROC, 1907, 2, p. 191). La traduction de M. Evetts ne donne pas deux morceaux de poésie cités dans la notice sur le monastère d’Al-Kassir. Elle présente en outre quelques variantes que j'indique en notes.

Comme pour les Églises des Chrétiens, j'ai utilisé l'édition des œuvres de Makrizi imprimée à Boulak en 1854.

ORIENT CHRÉTIEN. 3

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TRADUCTION

Ibn Saïdah dit : Le mot Deir (couvent) signifie une hôtellerie (khan) des chrétiens. Ce mot fait au pluriel Adyar et celui qui en est le chef est appelé Dayàr ou Diràni. De mon côté, je fais remarquer que le Deir (couvent) est l'habitation ré- servée aux moines qui y séjournent, tandis que la Kénissah (église) est 16 lieu le peuple se réunit pour prier.

AI-Kilâäyat à Masr. Al-Kiläyat (1) (la cellule) est un mo- nastère situé près d'AI-Maalakah que l’on appelle aussi Kasr ech-Chamâa dans la ville de Masr. C'est le lieu de réunion des moines les plus âgés etdes chrétiens les plus savants. Les déci- sions qu'ils prennent sont obligatoires pour tous les chrétiens.

Le couvent de Tourà. On l'appelle encore le couvent d'Abou-Girg. Il est situé sur le bord du Nil. Cet Abou-Girg n'est autre que saint Georges. Il fut l’un de ceux que tortura Dioclétien pour lui faire abandonner la religion chrétienne. Il le soumit à toutes sortes de tourments, le fit frapper et le fit brûler dans le feu. Mais Georges n’'apostasia point. IL eut la tête tranchée par le glaive le troisième jour de Tichrin qui coïncide avec le septième jour de Babàh.

Le monastère de Cha’aràn. Le couvent est situé aux confins du district de Tourà. Il est bâti en pierres et en briques et renferme des dattiers dans son enceinte. Il est encore appelé monastère de Chahrän avec un ἢ. Ce Chahràn était l'un des plus savants chrétiens. On prétend même qu'il était roi. Ce couvent portait autrefois le nom de Mercurius que l’on appelle aussi Markurah ou Abou-Markourah. Plus tard il fut habité par Barsumà ben at-Tabän et prit le nom de couvent de Bar- sumà. On célèbre sa fête le cinquième vendredi de Carême. Le patriarche y assiste avec les principaux chrétiens et on y fait de grandes dépenses. Quant à Mercurius, il fut l’un de ceux qui furent martyrisés par Dioclétien. Il fut mis à mort le dix-neuvième jour de Tamouz qui correspond au vingt-cin- quième d’Abib. Il était militaire.

(1) Ce mot vient du grec χελλίον. Masr désigne l’ancienne Fostat, le vieux Caire (V. ROC, 1907, p. 195, note 1).

LES COUVENTS DES CHRÉTIENS. 99

Le monastère des Apôtres. Ce monastère est à l'extrémité du district d’As-Souf et d’Al-Ouadi. C’est un couvent ancien, d'élégante architecture.

Le monastère de Pierre et de Paul. Ce couvent se trouve à l'extrémité méridionale d’Atfih. C'est un bel édifice. On y célèbre le cinquième jour d’Abib une fête qu'on appelle la fête d’AI-Kasriah. Ce Pierre était le premier des Apôtres. Il était tanneur, ou pêcheur d'après d’autres. Il fut mis à mort par l'empereur Néron, le vingt-neuvième jour d'Hazirän, le cin- quième d’Abib. Paulétait Juif; 1156 fit chrétien après l’Ascension du Christ (salut à lui), et prêcha sa religion. Il fut mis à mort par l'empereur Néron, un an après le martyre de Pierre.

Le monastère de Djoumaïzah. On l'appelle encore monas- tère d'Al-Djoud. Les mariniers appellent le lieu il se trouve Djazair ed-Deir (les îles du Couvent). Il est situé en face d’Al- Maïmoun et à l’ouest du couvent d’Al-Arabah. Il été cons- truit sous le vocable de saint Antoine qu'on appelle aussi An- tounah. Après le règne de Dioclétien, voyant qu'il avait échappé au martyre, il voulut le remplacer par un genre de culte qui mérität la même récompense ou quelque chose d’ap- prochant. Il se fit moine et il futle premier qui introduisit la vie monastique parmi les chrétiens pour tenir lieu du martyre. Il restait quarante jours et quarante nuits sans manger et sans boire et veillait pendant la nuit. C’est ainsi qu'il passait le carême chaque année.

Le monastère d’Al-Arabah (1). On se rend à ce couvent en trois jours de marche, à dos de chameau, à travers le désert oriental. Il est situé à une journée de marche de la mer Rouge. Presque toutes les espèces de fruits y sont cultivées. II est arrosé par trois sources. Ce monastère a été fondé par saint Antoine. Les moines qui l’habitent jeünent toute leur vie, mais seule- ment jusqu’après midi, heure à laquelle ils déjeunent. Toute- fois pendant le carême et le Barmoulat, ils jeûnent jusqu'au lever des étoiles. Le Barmoulat dans leur langue désigne un jeûne de cette sorte.

Le monastère d’Anbà Boulà. On l'appelait autrefois le

(1) Le monastère d’Al-Arabah et celui d’Anbà Boulà sont les deux célèbres ermitages de saint Antoine et de saint Paul.

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Monastère de Boulos ; on dit aujourd'hui le Monastère de Boul, ou de Namourah. Il est situé dans le désert à l’ouest du Sinaï, près d’une source vont puiser les voyageurs. Ils rapportent que c’est à cette source que se purifia Marie sœur de Moïse (salut à eux), quand Moïse descendit au milieu des fils d'Israël dans le désert de Colzoum (1). Cet Anbà Boulà était d'Alexan- drie. Quand son père mourut, il lui laissa, ainsi qu'à son frère, une fortune considérable. Son frère étant entré en contestation avec lui à ce sujet, il le quitta plein de colère. Α ce moment il aperçut un mort que l’on enterrait. Cela le fit réfléchir, et 1] partit marchant devant lui Jusqu'à ce qu'il arrivàt à cette source. Il y demeura et Dieu, le Très-Haut, pourvut à ses be- soins. Antoine vint l'y trouver et resta avec lui jusqu'à sa mort. Ce monastère fut bâti sur son tombeau. Il est à une dis- tance de trois heures de la mer. Il un jardin avec des pal- miers et des vignes et il est arrosé par une source.

Le monastère d'AI-Kassir. Abou-el-Hassan ben-Mohammed ach-Chabuchti rapporte, dans son Livre des Monastères, que ce couvent est situé sur un plateau qui couronne le sommet d'une montagne. Il est construit solidement, dans un style de bon goût. Sa situation est charmante. Il est habité par des moines. Il possède un puits creusé dans le roc l’on va puiser l'eau. Il y dans son église une image de Marie (salut à elle) oravée sur une planche. On va en grand nombre pour voir cette image. Au-dessus d'elle se trouve un appartement cons- truit par Abou-el-Geich Khomàrouïah ben-Ahmed ben-Touloun, avec quatre fenêtres dans quatre directions différentes. Il venait souvent au monastère pour admirer cette image qu'il trouvait très belle et qu’il ne pouvait se rassasier de regarder. Le chemin qui va de Masr à ce couvent est difficile, mais du côté du sud la montée et la descente sont faciles. Il y a tout près un er- mitage occupé constamment par un anachorète. Le couvent s'élève droit au-dessus d’un village appelé Chaharän et domine en même temps le désert et le fleuve. Chaharàn est un grand et populeux village situé sur le bord du fleuve. On rapporte que Moïse (que les faveurs de Dieu soient sur lui) naquit dans ce village et que sa mère le porta de au fleuve dans la corbeille.

(1) Colzoum est l’ancien nom de Suez.

LES COUVENTS DES CHRÉTIENS. sy

Il y aussi en ce lieu un couvent appelé monastère de Chaharän.

Le couvent d’'AI-Kassir est ün de ceux que l’on visite le plus. C’est un lieu de plaisance fréquenté à cause de la beauté de son site qui domine la ville de Masr et sa banlieue. Les poètes de Masr en ont parlé et l'ont écrit maintes fois, et ont célébré ses avantages et ses agréments. Ainsi Abou-Harira ben-Assam en parle en ces termes :

« Que de fois au Deir el-Kassir ai-je fait bonne chère avec une compagne pleine de jeunesse et de grâce!

« je me suis diverti avec un faon badin que les artifices littéraires sont impuissants à décrire. »

Ibn-Abd-el-Hakem dit dans son livre de la conquête de l’É- gypte : « Les opinions varient au sujet d’Al-Kassir. Ibn-Lahia affirme que ce n’est pas Moïse le Prophète (que Dieu lui soit propice et lui accorde le salut), mais Moïse le Magicien qui y naquit. De son côté Al-Mofaddal ben-Fadalà tient de son père le récit suivant : « Nous enträmes chez Qa'ab-al-Ahabär qui nous demanda : « D'où êtes-vous? » Nous répondimes : « Nous sommes deux jeunes hommes de Masr ». II nous demanda alors : « Que dites-vous d’AI-Kassir? C'estla maison de Moïse. » Il nous dit alors « : Ce n’est point la maison de Moïse, mais celle d'Aziz d'Égypte (1) qui s’y retirait dans le temps de l'inon- dation du Nil. C’est pourquoi ce lieu est saint depuis la mon- tagne jusqu'au fleuve. » Il ajouta : « On raconte encore qu'il y avait ici un feu que l’on allumait pour servir de signal à Pha- raon quand il se rendait en barque de Menf (Memphis) à Aïn ech-Chams (Héliopolis). Il y avait un autre feu sur le Mokattam. Quand ils voyaient ces feux allumés, les gens savaient que le roi venait en barque et lui préparaient ce qu'il désirait. Il en était de même à son retour d’Aïn ech-Chams. Dieu sait le mieux ce qu'il en est. »

Qu'y a-t-il de plus beau que ces vers de Qachädjim (2):

« Salut au monastère d’Al-Kassir et à la vallée qu'il domine, au milieu de jardins délicieux et de palmiers.

« Séjour enchanteur, j'avais tout à souhait, asile de mes plaisirs et de mes réjouissances ;

(1) Dans le Coran, Aziz d'Égypte désigne Putiphar. (2) Ces vers, comme les précédents, ne se trouvent pas dans la traduction Evetts.

REVUE DE L'ORIENT CHRÉTIEN.

CO ON

« Quand je m'y rendais, le bonheur était mon véhicule et Je revenais sur les barques qui voguent mollement.

« Au moment se borde l’œil de l’Aurore, alors que l’homme chasse dans la demi-obscurité,

« J'avais avec moi de gais compagnons, enjoués et parfaite- ment aimables, au delà de tout ce que l’on peut désirer.

« Notre nourriture se composait de ce que capturaient nos chiens et de ce que nous prenions dans nos filets;

« Chacun avait sa coupe et son aiguière ; nous jouissions des sons harmonieux de la flûte et de la Iyre. Nous étions servis par un échanson ingénu au regard langoureux,

« Souple comme une branche de saule que l'on brandit : c'est d'elle qu'il appris la grâce des mouvements.

« C’est que je savoure de délicieux breuvages et que des jours de Joie accompagnent ma vie. »

Les historiens chrétiens rapportent qu'Arcadius, empereur des Romains, fit chercher Arsénius pour lui confier l'éducation de son fils. Arsénius crut qu'il voulait le mettre à mort et s'en- fuit en Égypte, il se fit moine. L'empereur lui envoya un sauf-conduit (1) et lui fit savoir qu'il ne le cherchait que pour en faire le précepteur de son fils. Mais Arsénius s’excusa et s'en alla sur le mont Mokattam, à l’est de Tourà. Il habita pen- dant trois ans (2) dans une caverne, puis il mourut. Arcadius avait envoyé de nouveau vers lui, mais on le trouva mort. Il fit construire une église sur son tombeau. C'est le lieu appelé Deir el-Kassir. On l’appelle encore Deir el-Bahal (le monastère du mulet), parce qu'il y avait un mulet qui y apportait l'eau. Il sortait du couvent et allait au bassin. Il se trouvait quel- qu'un qui remplissait loutre. Quand l’eau était puisée, le mulet revenait au couvent.

Au mois de Ramadan de l'an 400 (1010), Al-Hakim bi-Amr-Illah (3) fit détruire le couvent d’AIl-Kassir, et 1l resta

(1) M. Evetts traduit « lui envoya un homme (sent man) » , parce que son texte porte LL! au lieu de 60}.

(2) Trois jours (three days) dans la traduction Evetts.

(3) Le khalife Fatimite Al-Hakem bi-Amer-Illah régna sur l'Égypte de l'an 386 de l’hégire jusqu’en 411 (996-1021). Il est célèbre par ses extravagances. Il se donna d’abord comme une nouvelle incarnation d’Ali, puis voulut se faire adorer

comme Dieu. Les Druses du Liban le regardent comme l'incarnation de la divi- nité. ν

LES COUVENTS DES CHRÉTIENS. 39

de longues années dans cet état de: désolation et de ruines.

Le monastère de Mar Hannà (saint Jean). Ach-Chabuchti relate que le monastère de Mar Hannà est situé sur le bord du lac d'Al-Habach (des Abyssins), non loin du Nil. Il est entouré de jardins dont quelques-uns ont été plantés par l'émir Tamim ibn-al-Moëz. Il y a aussi un pavillon qui repose sur des colonnes d'un beau style et bien travaillées et qui est entouré d'une mu- raille. Il été élevé par le même émir Tamim. Près du couvent se trouve un puits appelé le puits de Mamati. Il est ombragé par un grand sycomore au pied duquel on se réunit pour boire. C’est un lieu de divertissement, de bonne chère et de plaisir. Il est charmant au moment de la crue du Nil, quand le lac est rempli. La vue est également très belle pendant la saison des semailles et des fleurs. Il ne manque jamais de promeneurs qui viennent s'y divertir. Sa beauté et ses agréments ont été célé- brés par les poètes. On l'appelle maintenant le monastère d'At-Tin.

Le monastère d’Abou-an-Na'nà 4. Ce couvent est situé en dehors d’Ansina et il est un des anciens monuments de cette ville. Son église est construite sur le donjon et non sur le sol. Il est sous le vocable de saint Bakhens al-Kassir (saint Jean le Naiïn), dont on célèbre la fête le vingtième jour de Bäbä. Nous parlerons plus tard de saint Jean le Nain.

Le monastère de la grotte de Chakalkil. C’est un couvent d'aspect charmant, suspendu au flanc de la montagne. Il est creusé dans le roc. La pente au-dessous est si raide que l'on ne peut y accéder ni par en haut ni par en bas. Le seul moyen d'y parvenir été de pratiquer des trous dans la montagne. . Quand quelqu'un veut y monter, on lui tend une corde qu'il tient à la main, tandis qu'il met les pieds dans les trous et monte par ce moyen. Il y a un moulin qu'un âne met en mou- vement. Ce monastère s'élève au-dessus du Nil, en face de Menfalout et d'Oumm-el-Koussour. Du côté opposé se trouve une 116 entièrement entourée d’eau qui s'appelle Chakalkil. Elle contient deux villages dont l’un porte le même nom de Cha- kalkil et l’autre celui de Bani-Chakir. On célèbre dans ce cou- vent une fête pour laquelle s'assemblent les chrétiens. Il est dédié à saint Mennas. C'était un des soldats que Dioclétien tor- tura pour leur faire abandonner la religion chrétienne et re-

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venir au culte des idoles. Mais il persévéra dans sa religion et fut mis à mort le vingtième jour de Haziràn ou le sixième jour de Bäbà. ᾿ '

Le monastère de saint Victor. Sur la digue d’Anboub, à l'est de Bani Mour: il est situé au pied de la montagne, à une distance de deux cents toises (kassaba) (1). C'est un vaste cou- vent. On y célèbre une fête pour laquelle se réunissent les chré- tiens de la région de l’est comme de l’ouest du Nil. L'évêque y assiste également. Ce Victor était fils de Romanos, l'un des ministres de Dioclétien. Il était beau et vaillant et avait une dignité à la cour de l'empereur. Π se fit chrétien. L'empereur employa les promesses et les menaces pour le faire revenir au culte des idoles; mais il n’y réussit pas et il le fit mettre à mort le douzième jour de Nisan ou le vingt-septième de Barmouda.

Le. monastère de Bouktourchouk. Il est situé au nord d'Abnoub. C’est un petit monastère abandonné maintenant. Les chrétiens n'y viennent qu'une fois par an. Bouktourchouk (Victor de Bhouk ou Chou) est l'un de ceux que tortura Dioclé- tien pour les faire renoncer à la religion chrétienne. Il refusa et fut mis à mort le vingtième jour d'Hatour. Il était militaire.

Le monastère de saint Georges (2). Il été édifié sous le vocable de saint Georges. Il est aux portes d'Al-Maïsira, dans le district situé à l’est de Bani Mour. Il est parfois abandonné par les moines et d’autres fois habité par eux. On y célèbre une fête à une date déterminée.

Le monastère de Khamas. Khamas est le nom d’une ville située au nord du couvent. On y célèbre chaque année deux fêtes pour lesquelles se réunissent de grandes multitudes de peuples.

Le monastère d'At-Taïr, C’est un monastère antique qui domine le Nil. On y accède par des degrés pratiqués dans la montagne. Il est situé en face de Samallout. Ach-Chabouchti en parle en ces termes : « Il y a dans les environs d'Akhmim un vaste monastère, habité par une nombreuse communauté. On y vient de tous les côtés. Il est situé près de la montagne appelée Mont d'AI-Kahf (de la grotte). Cette montagne présente,

(1) La kassaba égyptienne est de 95, 90. (2) La traduction de M. Evetts porte au même endroit : « Monastery of Abu’s-Sari.

LES COUVENTS DES CHRÉTIENS. {]

une fente à un certain endroit. Le Jour de la fête du couvent, il ne reste pas dans tout le pays un seul Bou-Kir (sorte d'oi- seau) qui ne vienne à cet endroit. Ils forment une multitude innombrable et poussent de grands cris près de cette fente. Ils introduisent, l’un après l’autre, leur tête dans la fente, poussent des cris et se retirent. Ils continuent ainsi Jusqu'à ce que l’un d’eux ait sa tête prise dans la fente et y reste accroché. Il s’agite Jusqu'à ce qu’il meure. Alors les autres se séparent etiln’en reste pas un seul. » Le cadi Abou Djaafar al-Koudàhi dit également : « Parmi ses merveilles (il parle de l'Égypte), il y leravin des Bou-Kir, dans le district d'Achmoun, au Saïd. Ce ravin est situé dans une montagne et présente une fente. Les Bou-Kir y viennent, un jour déterminé, et se pla- cent au-dessus de la fente. Puis chaque Bou-Kir introduit son bec dans la fente et s'en va. Ils continuent ainsi jusqu'à ce que l'un d'eux soit pris dans la fente et retenu par elle. Tous les autres s’en vont alors. Quant à celui qui est pris, il reste sus- pendu jusqu'à ce qu'il tombe en morceaux. »

Le monastère de Bou-Harmina. Il est situé au nord de Fàou al-Khàrab et au sud de Barba-Faou se trouve un grand nombre de livres et d’écrits des sages. La distance entre le monastère d’At-Tin et ce couvent est d'environ deux Jours et demi. Ce Bou-Harmina était un ancien moine illustre chez les chrétiens.

Le monastère des Sept Montagnes à Akhmim. Ce couvent est situé à l'entrée de sept vallées. C'est un édifice élevé, en- touré de hautes montagnes. Le soleil ne se lève sur le couvent que deux heures après l’aurore, à cause de la hauteur de la montagne qui le domine. De même deux heures avant le coucher du soleil, il se trouve dans l'ombre, la nuit commence et l’on allume les flambeaux. Au-dessus de ce couvent se trouve une source ombragée par un saule et le lieu se trouve le monas- tère du Saule est appelé Ouadi ‘l-Moulouk (la vallée des Rois), parce qu'on y trouve une plante appelée Al-Moulouka qui res- semble au radis. Le jus en est rouge et est employé par les chimistes. Au-dessus de ce couvent se trouve :

Le monastère d’Al-Karkas. Il est situé au sommet de la montagne dans laquelle ila été creusé. On ne connaît pas d'autre moyen d'y accéder que par des trous pratiqués dans le flanc

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de la montagne. Entre le monastère du Saule et celui d’AI-Kar- kas, il y a une distance de trois heures. Au-dessous du couvent d'AI-Karkas se trouve une source d’eau douce et des arbres Bân (saule d'Égypte, muscadiers).

Le monastère de Sabra, situé à l’est d'Akhmim, est ap- pelé ainsi à cause de la tribu arabe des Bani-Sabra. Il est dédié à l'ange Michel. I n'est habité que par un seul moine.

Lecouventd’Abou-Bachada l'Évêque, dans le districetd’Atfa. Il se trouve sur la digue et il a, en face de lui du côté de l’ouest, Monchat Akhmim. Cet Abou Bachada était un docteur chrétien.

Le monastère de Bou Hor le Moine, appelé encore couvent des Saouada. Les Saouada sont des Arabes qui s’établirent en ce lieu. Ce monastère est situé en face de Minieh Bani-Khassib. Il été ruiné par les Arabes.

Tous ces couvents se trouvent à l'est du Nil et ils appartien- nent tous aux Jacobites. Il n’y en pas d'autres sur la rive orientale. La rive occidentale du Nil possède un grand nombre de couvents à cause de sa nombreuse population.

Le Monastère de Dimoua à Gizeh, appelé aussi Dimoua as- Sabà'a. Il est dédié à Côme et Damien. C’est un élégant petit monastère. Les Chrétiens rapportent que Dimoua fut habité par un sage nommé Saba° et que l’église de Dimoua, qui est maintenant entre les mains des juifs, était autrefois un couvent chrétien. Les Juifs la leur achetèrent dans un moment de gêne. Il a déjà été question de l’église de Dimoua ainsi que de Côme et de Damien qui étaient deux sages chrétiens et de pieux moines. Leur histoire est célèbre chez les chrétiens.

Le monastère de Nahia. Ach-Chabouchti en parle en ces ter- mes : « Nahia est situé à Gizeh. C'est un des plus beaux cou- vents de l'Égypte; un des plus agréables, des mieux situés et des plus pittoresques. Il est habité par des moines et d’autres personnes. Au moment de la crue du Nil, il offre une vue ma- gnifique, parce qu'il est entouré d’eau de tous côtés. Quand les eaux sont retirées et que les terres sont ensemencées, le sol, couvert de fleurs éclatantes, est merveilleux à voir. C’est un lieu de promenade recherché, dans une situation charmante. Il a un canal près duquel s'assemblent toutes sortes d'oiseaux. On y pêche beaucoup de poissons. Les poètes l'ont célébré et ont chanté son charme et sa beauté. »

LES COUVENTS DES CHRÉTIENS. 13

Le monastère de Tamouïah. Yakout donne la prononcia- tion de ce mot et ajoute : « Il y a en Égypte deux villages de ce nom : l’un dans la province d’Al-Mourtähïa et l’autre à Gizeh. » Ach-Chabouchti dit à son tour : « Tamouïah est sur la rive occi- dentale, en face d'Hélouan. Le monastère s'élève au-dessus du Nil, entouré de vignes, de jardins, de palmiers et d’autres arbres. C’est un lieu de villégiature populeux. On y jouit d’une belle vue sur le Nil. Quand le sol se couvre de végétation, il se trouve entre deux tapis : le fleuve et la verdure. C’est un des lieux de plaisance les plus en vogue pour les habitants de Masr et une de leurs villégiatures les plus célebres. Ibn-Abou-'Assim al-Masri l’a célébré dans les vers suivants (du mètre al-Basit) :

« Puissé-je boire à Tamouïah la vermeille liqueur qui couvre de confusion les vins de Hit et de ‘Anàt (1)!

« Sur des prairies aux fleurs éclatantes, coulent des ruis- seaux au milieu des jardins,

« Les bouquets de jaunes anémones s'y succèdent comme des coupes remplies d’un vin coloré,

« Et le narcisse dont la jolie fleur semble un œil qui cherche à faire par signes une communication silencieuse.

« Le Nil, quand le zéphyr caresse sa surface, semble revêtu d'une fine cotte de mailles.

« Lieux hospitaliers dont j'ai été épris violemment, qui avez été autrefois l'asile de mes plaisirs et mon refuge.

« Je n'ai Jamais cessé de me trouver le matin au tintement des cloches, tant est grande mon affection pourles monastères. »

Ce monastère porte chez les chrétiens le nom de Saint-Geor- ges. Ils s’y réunissent de toute la région environnante.

Le monastère d’Akfàs. Sa véritable orthographe est Akfahs. I est maintenant détruit. Le monastère à l'extrémité du district de Manharà. ΤΙ est

peu connu, car les moines qui y habitent ne distribuent pas d'a- liments.

Le monastère d’AI-Khadim (du Serviteur). Il se trouve sur le bord du canal d’Al-Manhi, dans le district d'Al-Bahanassà. Il est dédié à l’ange Gabriel. Il y a un jardin planté de pal- miers et d'oliviers.

(1) Ces deux villes, renommées pour leurs vins, sont situées sur l’Euphrate.

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Le monastère d'Achnin est ainsi appelé d’après le district d'Achnin, au nord duquel il se trouve. C’est un joli petit monas- tère dédié à la Vierge Marie. Il n’est habité que par un seul moine.

Le monastère d'Isous. Isous signifie Jésus. On l'appelle encore monastère d'Ardjanous. On y célèbre une fête le quinzième jour de Bakhons. La nuit qui précède ce jour, on obstrue un puits qui s'y trouve et qu'on appelle puits de Jésus. Ensuite on se réunit à la sixième heure du jour et l’on enlève le couvercle du puits. L'eau monte à ce moment, puis redescend. On mesure alors la différence entre le point elle est montée et celui elle est redescendue. Cette différence donne l’accrois- sement que le Nil doit prendre encore cette année-là.

Le monastère de Sadmant, près d’Al-Manhi, sur la digue qui va du Fayoum au Rif. Il est dédié à saint Georges. Son impor- tance a beaucoup diminué et les moines qui y vivent sont moins nombreux. |

Le monastère d’An-Nakloun, appelé aussi monastère d'Al- Khachba, ou de l'ange Gabriel, est situé au-dessous d'une grotte creusée dans la montagne appelée Tàrif al-Fayoum. Cette grotte est connue dans le pays sous le nom d’Abri de Jacob, car on prétend que Jacob, se rendant en Égypte, s'y mit à l'ombre. Cette montagne s'élève au-dessus de deux localités : Atfih Chilà et Chalà. L'eau nécessaire au couvent est puisée au canal d’AI- Manhi. Il se trouve au-dessous du couvent de Sadmant. On y célèbre une fête qui réunit les chrétiens du Fayoum et d’autres lieux. Cemonastère est situé sur la route qui descend au Fayoum. Cette route est peu fréquentée.

Le monastère d'AI-Kalamoun.— Ilest situé au désert, au pied de la colline d’AI-Kalamoun que les voyageurs descendent pour aller au Fayoum. Elle s'appelle colline d’Al-Gharik. Ce couvent est dédié au moine Samuel qui vécut dans l'intervalle qui sépara la venue de Jésus de celle de Mahomet. 1] mourut le huitième jour de Kihak. Il y un grand nombre de dattiers dont le fruit sert à la préparation de l’Adjoua (sorte de confiture), ainsi que des Labakh (perséa) qui ne se trouvent que là. Leur fruit est une sorte de limon à saveur douce de même goût que le Ränuikh (nux indica). Son noyau sert à divers usages. Abou-Hanifa dit à ce sujet dans son livre des Plantes : « Le Labakh ne croit qu'à

LES COUVENTS DES CHRÉTIENS, 45

Ansinà. Son bois sert à faire des planches pour les navires; il fait parfois saigner du nez l’homme qui le scie. Le prix d'une planche est d'environ cinquante dinars. Si on lie ensemble deux planches et qu’on les mette dans l’eau pendant un an, elles s'adap- tent l’une à l’autre et n’en forment plus qu'une. Ce couvent pos- sède deux tours bâties en pierres. Elles sont hautes et vastes et d'une blancheur éclatante. Il y a, à l'intérieur, une source d'eau vive et à l'extérieur une autre source. La. vallée contient un grand nombre d'anciens oratoires. Un peu plus loin la vallée appelée Ouadi al-Oumaiïlih possède une source d’eau vive et de petits dattiers dont les Arabes récoltent les fruits. Il y a en de- hors du monastère une saline dont les moines vendent le pro- duit. Toute la région environnante vient s'y approvisionner.

Le monastère de la Vierge Marie. Il est situé en dehors de Tounbadà et n’est habité que par un seul moine. Il est situé en dehors de la route fréquentée. Il y a aussi dans la province d’Al-Bahnsà un grand nombre de couvents détruits.

Le monastère de Bar Kànà, au nord de Bani-Khàlid, est construit en pierres dans un très beau style. Il est situé dans la province de Minieh. Il y avait autrefois mille moines; au- jourd'hui il n’y en a plus que deux. Il est bâti sur la digue au pied de la montagne.

Le monastère de Baludja, près d'Al-Manhi, appartient aux habitants de Daldja. C'était un des monastères les plus impor- tants, mais il été ruiné et il n’y reste plus qu'un ou deux moines. Il est situé en face de Daldja à une distance de deux heures environ.

Le monastère de Markoura, appelé aussi Abou Markoura, se trouve au-dessous de Daldja, en dehors de cette localité. Il est complètement abandonné.

Le monastère de Sanabou, situé au nord de la même ville et tout près d'elle, est dédié à la Vierge Marie. Il n'y reste plus -un seul moine.

Le monastère de Tàdoros (saint Théodore) est entièrement négligé à cause de la pauvreté des chrétiens.

Le monastère d'Ar-Raïramoun est situé à l’est du district d'Ar-Raïramoun, lequel se trouve lui-même à l’est de Mallaoui et à l’ouest d’Ansinà. Il est dédié à l’ange Gabriel.

Le monastère d'Al-Mouharak. Les chrétiens affirment que

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le Christ (salut à lui) a séjourné en ce lieu six mois et quelques jours. On y célèbre une fête solennelle appelée la fête de l'Oli- vier, ainsi que la fête de la Pentecôte qui attire une grande multitude de peuple.

Le monastère de Bani-Kalb, ainsi appelé parce que les Bani-Kalb sont venus s'établir aux alentours. IL est dédié à Gabriel. Il n’y plus un seul moine, mais il sert d'église aux chrétiens de Manfalout. Il est situé à l’ouest de cette ville.

Le monastère d'Al-Djàoulia. Ce couvent se trouve dans le district d'AI-Djäoulia, au sud de cette ville. Il est dédié au mar- tyr Mercuros, appelé aussi Markoura. Il des revenus assurés par des fondations et reçoit des offrandes votives et des dons. On y célèbre deux fêtes chaque année.

Le monastère des Sept Montagnes se trouve au sommet d’une montagne à l’ouest de Siout, sur le bord du Nil. On l’ap- pelle encore le monastère de Bakhens al-Kassir (saint Jean le Nain). On y célébrait plusieurs fêtes. Mais il été détruit en l’an 821 (1417) par une troupe de partisans qui le surprit pen- dant la nuit, Bakhens ou saint Jean le Nain fut moine et abbé. On conservé de lui un grand nombre de traits. On rapporte en particulier que, sur l’ordre de son supérieur, il planta en terre un bäton de bois sec et l’arrosa pendant quelque temps. Ce bâton devint un arbre et produisit des fruits dont les moines purent se nourrir. On l’appela l'arbre de l’obéissance. Saint Jean le Nain fut enterré dans son couvent,

Le monastère d’Al-Moutil. Ce couvent est sous le vocable de la Vierge Marie. Il est situé sur le flanc de la montagne, au-dessus du couvent des Sept Montagnes, en face de Siout. On y célèbre une fête pour laquelle se réunit la population des districts environnants. Il n'y plus un seul moine dans ce monastere.

(A suivre.)

Angers, le 22 novembre 1907. L. LEROY.

HISTOIRES DES SOLITAIRES ÉGYPTIENS

[S'uile (1); ms. Coislin 126, fol. 189 sqq.]

e/ δ ἘΝ A / ᾿ ᾿ à / _ / Οτι dei τὴν ἡσυχιᾶν LOL τὴν Ἀατᾶανυξζιν μέετας LWOZELV.

133. (f 189 v') Εἶπεν γέρων" ᾿Οφείλει μοναχὸς ἀγοράζειν τὴν ἡσυχίαν αὐτοῦ πρὸς τὸ καταφρονεῖν, ἐὰν χαὶ σωματικῇ ζημίχ συμοῇ. 134. --- Διηγήσατό τις" ὅτι τρεῖς φιλόπονοι ἐγένοντο ἀγαπητοὶ,

e \ FT 7 \ / ? ΄ 1 τ ΄ ᾿" χαὶ μὲν εἷς ἠρετίσατο τοὺς μαχομένους εἰρηνεύειν κατὰ τὸ εἰρημένον Μαχάριοι οἱ εἰρηνοποιοί. ὋὋ δὲ δεύτερος ἐπισχέπτεσθαι τοὺς ἀσθενοῦν- τας. δὲ τρίτος ἀπῆλθεν ἡσυχάζειν εἰς τὴν ἔρημον. οὖν πρῶτος χοπιάσας διὰ τὰς νΖχας τῶν ἀνθρώπων, οὐχ ἠδύνατο θεραπεύειν πάντας, χαὶ ἀκηδιάσας, ἦλθε πρὸς τὸν ὑπηρετοῦντα τοὺς ἀσθενεῖς, χαὶ εὗρε χαὶ αὐτὸν ὀλιγωροῦντα, χαὶ un φθάνοντα τελειῶσαι τὴν ἐντολήν. Kat συμφωνήσαντες οἱ δύο, ἀπῆλθον ἰδεῖν τὸν ἡσυχάζοντα ([ 189 ν") καὶ ἮΝ LA - \ / , = \ ΄ ΕἸ \ 5. ,

ιηγήσαντο αὐτῷ τὴν θλίψιν ᾿αὐτῶν, χαὶ παρεχάλεσαν αὐτὸν εἰπεῖν αὐ-

- , 2 MES / \ / FAN -᾿ τοῖς τι κατώρθωσεν. Καὶ σιωπήσας μικρὸν, βάλλει ὕδωρ εἰς χρατῆρα χαὶ λέγει αὐτοῖς" Προσέχετε εἰς τὸ ὕδωρ, ἦν δὲ τεταραγμένον᾽ χαὶ μετὰ

Ἀν ΄ la , v ο , \ Ζ Ἄν τον μιχρὸν, πάλιν λέγει αὐτοῖς" [Προσέχετε καὶ ἄρτι ὡς κατέστη τὸ ὕδωρ. Καὶ ὡς προσέσχον τῷ ὕδατι, θεωροῦσιν ὡς ἐν ἐσόπτρῳ τὰ πρόσωπα αὐτῶν χαὶ λέγει αὐτοῖς᾽ Οὕτως ἐστὶ καὶ ἐν μέσῳ ἀνθρώπων ἀπὸ τῆς ταραχῆς οὐ βλέπει τὰς ἁμαρτίας αὐτοῦ, ὅταν δὲ ἡσυχάσῃ, καὶ μάλιστα

PæXNS ER χε AUDIT ? CTP RER ARAITER ἐν ἐρήμῳ, τότε βλέπει τὰ ἐλατγώματα αὐτοῦ.

τ - Διηγήσατο γέρων ὅτι ἀδελφός τις ἀναχωρεῖν μέλλων, ἐχωλύετο ὑπὸ τῆς ἰδίας μητρός. δὲ οὐχ ἐπαύετο ([ 190 γ᾿) τοῦ . ἰδίου σχοποῦ λέγων Σῶσαι θέλω τὴν ψυχήν μου. Ὡς δὲ πολλὰ σπου- δάσασα, ἐμποδίσαι αὐτὸν οὐκ ἴσχυσεν, ὕστερον παρεχώρησεν αὐτῷ.

\ , / \ “Ὁ - a / ᾿Απελθὼν δὲ χαὶ μονάσας ἐν ἀμελεία τὴν ἑαυτοῦ χατηνάλωσςε ζωήν.

(1) Voy. 1907, p. 43, 111 68 395.

48 REVUE DE L'ORIENT CHRÉTIEN.

᾿Εγένετο δὲ τὴν υμητέρα αὐτοῦ ἀποθανεῖν, χαὶ μετὰ χρόνον ἀσθενήσαντα ? 3 U ΄ \ - " αὐτὸν ἀσθένειαν μεγάλην, γενέσθαι ἐν ἐχστάσει xat ἁρπαγῆναι εἰς τὴν τ ΄ ΕἸ - Ν = / D) χρίσιν, χαὶ ebps τὴν μητέρα αὐτοῦ μετὰ" τῶν χρινομένων. ᾿᾿ὐχείνη οὖν 5 2 \ - CR 2 \ ὡς εἶδεν αὐτὸν, χαταπλαγεῖσα εἶπεν. Τί ἐστιν τοῦτο, τέχνον, καὶ σὺ , \ ΄ - ΒΨ s\ 7 εἰς τὸν τόπον τοῦτον χατεκρίθης! καὶ ποῦ οἱ λόγοι σου οὖς ἔλεγες e/ _ ,' \ es t , ὅτι σῶσαι θέλω τὴν ψυχήν μου. ᾿Εντραπεὶς οὖν ἐφ᾽ οἷς ἤχουσεν, χατ- ͵ 02 "7 ͵ » ώδυνος ἵστατο μὴ ἔχων τί πρὸς αὐτὴν ἀποχρίνασθαι. (5 190 1) Καὶ » 2 , CS 5 nm » DA Τα ἀχούει πάλιν φωνῆς λεγούσης" Αρατε τοῦτον ἐντεῦθεν, ἐπὶ ἄλλον μονα- A ε , uw 1 « - = δὲ ΕΣ Gi δὲ χὸν ὁμόνυμον αὐτοῦ ἀπέστειλα ὑμᾶς τοῦ δὲ τοῦ χοινοδίου. Ὡς δὲ τέλος ἔσχεν n ὄρασις, ἐπανέρχεται εἰς ἑαυτὸν καὶ διηγεῖτο τοῖς παροῦσι - 1 δὲ Ξ 7 \ / -- , ΄ , ταῦτα. [oo δὲ βεθαίωσιν χαὶ πίστιν τῶν λεγομένων, παρεσχεύχσέ τινα - 9 A] - , 2 - ἀπελθεῖν εἰς ἤχουσε χοινόδιον, καὶ ἰδεῖν εἰ ἐχοιμιήθην ἐκεῖνος ἀδελ- φὸς περὶ οὗ ἤχουσεν. Καὶ ἀπελθὼν πεμφθεὶς, εὗρεν οὕτως. Ὅτε δὲ » - ΄ - , / “- ἀνέλαθε καὶ ἐγένετο ἑαυτοῦ, καταχλείσας ἑαυτὸν ἐχάθισε φροντίζων τῆς - 2 τ ᾽, Σ τ δ A σωτηρίας αὐτοῦ, μετανοῶν χαὶ χλαίων ἐφ᾽ οἷς ἔπραξεν ἐν ἀμελείᾳ τὸ

-

/ ΄ \ 5 ve A πρότερον. Τοσαύτη δὲ ἦν αὐτῷ χατανύξις, ὥστε πολλοὺς Tapaxa- λεῖν αὐτὸν ἐνδοῦναι μιχρὸν, μήποτε χαὶ (" 190 ν") βλάδην τινὰ ὑπομείνῃ διὰ τὴν ἀμετρίαν τοῦ κλαυθμοῦ. δὲ οὐχ ἤθελε παρακληθῆ- ναι λέγων" Εἰ τὸν ὀνειδισμὸν τῆς μητρός μου οὐκ ἤνεγχα, πῶς τὴν ἐπὶ Χριστοῦ χαὶ τῶν ἁγίων ἀγγέλων ἐνέγκω αἰσχύνην ἐν ἡμέρᾳ χρίσεως. 136. Εἶπεν γέρων: ὅτι εἰ ἐνεδέχετο ἐν τῇ παρουσίᾳ τοῦ Χρι- - \ \ 5.ῳν 2 - 1 A ΄ὔ DEN = στοῦ μετὰ τὴν ἀνάστασιν ἐξελθεῖν τὰς ψυχὰς τῶν ὀνθρώπων, ἀπὸ τοῦ. YA - 4 μὰ ΄ A , A ΄ , LA υ A (πε κεν AT ιχὴς AOL ἕχστα δ ι αι φύόδου πᾶς χόσμος ἀπέθνησχεν ἀπὸ φρίχης χαὶ ἐχστάσεως. Τί γάρ ἐστιν ἰδεῖν; οὐράνους σχιζομένους, χαὶ τὸν θεὸν ἀποχαλυπτόμιενον μετ᾽ ὀργῆς χαὶ ἀγαναχτήσεως, χαὶ στρατιὰς ἀναριθμήήτους ἀγγέλων, χαὶ ὁμοῦ πᾶσαν τὴν ἀνθρωπότητα θεάσασθαι. Δι’ οὕτως ὀφείλωμεν ζῆν, ὡς καθ᾽ ἑχάστην λόγον ἀπαιτούμενοις ὑπὸ τοῦ θεοῦ τῆς διαγωγῆς ἑαυτῶν. 137. (f 190 ν᾽ ᾿Αδελφὸς ἠρώτησε γέροντα λέγων᾽ Πῶς ΄ = = ; il , \ cr 7 LE PN 2 ἔρχεται φόθος τοὺ θεοῦ εἰς τὴν ψυχήν; Kat εἰπεν γέρων᾽ [ἐὰν ἔχῃ ἄνθρωπος τὴν ταπείνωσιν, χαὶ τὴν ἀχτημοσύνην, χαὶ τὸ μὴ κρίνειν, ἔρχεται αὐτῷ φόδος τοῦ θεοῦ. 138. ᾿Αδελφὸς παρέδαλε γέροντι χαὶ ἠρώτα αὐτὸν λέγων: AGGG πόθεν χαρδίοι ὕου σχληρά ἐστι χαὶ οὐ φοδοῦμαι τὸν θεόν: Λέγει αὐτῷ γέρων᾽ Νομίζω ὅτι ἐὰν ἄνθρωπος χρατήσῃ τὸν ἔλεγ-

»

χον ἐν τῇ καρδία αὐτοῦ, χτᾶται τὸν φόθον τοῦ θεοῦ. Λέγει αὐτῷ

ἀδελφός" Τί ἐστιν ἔλεγχος ; Εἶπεν δὲ αὐτῷ γέρων Ἵνα ἄνθρωπος ἐν

HISTOIRES DES SOLITAIRES ÉGYPTIENS,. 19

᾿ y d= / \ \ 7, CORRE V / e! παντὶ πράγματι ἐλέγχηῃ τὴν ἑαυτοῦ ψυχὴν λέγων αὐτῆ᾽ Μνήσθητι ὅτι δεῖ σε τῷ θεῷ ἀπαντῆσαι, λέγειν δὲ χαὶ τοῦτο᾽ Τί θέλω ἐγὼ μετὰ ἀνθρώπου; λογίζομα: ([. AOL rt) ὅτι ἐάν τις ἐν “τούτοις παραμιείνη, 1? ΕἸ τις / “Ὁ "Ὁ Ὥξει αὐτῷ φόθος τοῦ θεοῦ.

139. --- [Γέρων τις εἶδε τινὰ γελῶντα χαὶ λέγει αὐτῷ" "Ἔμπροσθεν

» / FIX Σ el. (D? Le - DA ÿ “- , < \ \ NN à 1 οὐράνου χαὶ γῆς, ὅλου τοῦ βίου ἡμῶν ἔχομεν δοῦναι λόγον, χαὶ σὺ γελᾶς! : , L/4 -- -

140. --- Εἶπεν γέρων: ὥσπερ τὴν χαχίαν ἑαυτῶν πανταχοῦ περιφέ-- ὅομεν, οὕτως ὀφείλομεν καὶ τὸ χλαίειν χαὶ τὴν χατάνυξιν μεθ᾽ ἑαυτῶν ἔχειν ὅπου δ᾽ ἂν ἐσμέν.

141. ᾿Αδελφὸς ἠρώτησε γέροντα λέγων: Τί ποιήσω; Kai εἷ-

ἌΤΕΝΣ ESE / 3 7 : / / / EU ΄ πεν αὐτῷ" Δαχρύειν ὀφείλομεν πάντοτε. Συνέζφη γάρ τινα τῶν πατέρων

1 τς \ \ \ e/ LES ΕἸ “ἢ u \ \ ποτε χοιμηθῆναι LOU μετὰ πολλὴν ὥραν πᾶλιν ἐλθεῖν εἰς ἑαυτὸν, χαὶ ἠρωτήσαμεν αὐτὸν λέγοντες" Τί εἶδες ἐχεῖ, 4064; Kai διηγήσατο ἡμῖν

» , -- ταν ΄ » χλαίων. Hxovcu ἐκεῖ φωνῆς χλαυθμοῦ λεγόντων ἀδιαλείπτως: Οὐχί μοι, οὐαί, μοι! Οὕτως ὀφείλομεν χαὶ ἡμεῖς ([ 191 γ᾿) πάντοτε λέγειν.

142. Ἤρώτησεν ἀδελφός τινα γέροντα λέγων᾽ Πῶς ἐπιθυμεῖ ψυχή LOU δαχρύων ὥσπερ ἀχούω τοὺς γέροντας χαὶ οὐχ ἔρχονται χαὶ θλίξεταί μου à ψυχή: Kai εἶπεν αὐτῷ γέρων: Οἱ υἱοὶ Ἰσραὴλ διὰ τεσσαράκοντα ἐτῶν εἰσῆλθον εἰς τὴν γῆν τῆς ἐπαγγελίας, εἰς Ὧν ἐὰν ἐπανέλθης, οὐκέτι φοῦῇ πόλεμον. Οὕτως γὰρ θέλει θεὸς θλίδεσθαι τὴν ψυχὴν, ἵνα. πάντοτε ἐπιθυμῇ εἰσελθεῖν εἰς τὴν γῆν ἐκείνην.

| LAS RIRE ᾿Αδελφὸς ἠρώτησε γέροντα Πῶς σωθὼ; δὲ ἐχδυσάμε- νὸς τὸν λεθήτωνα LA ζωσάμιενος τὴν ὀσφῦν, χαὶ χρεμάσας τὰς ἑαυτοῦ χεῖρας εἰς τὸν οὐρανὸν εἶπεν: Ὅτι οὕτως μοναχὸς ὀφείλει εἶναι" γυμνὸς ἀπὸ τῆς ὕλης τοῦ βίου καὶ ἐσταυρωμένος" ἐν τοῖς παλαίσμοσι πυγματί- ζει ([" 191 ν᾽) ἀθλητὴς, ἐν τοῖς λογισμοῖς ἀνασταυροῖ τὰς χεῖρας εἰς τὸν οὐρανὸν μοναχὸς χαλῶν τὸν θεὸν, γυμνὸς ἀθλητὴς ἔστηχεν εἰς τὸν ἀγῶνα παλαίων, γυμνὸς χαὶ ἄϊλος μοναχὸς, ἀλειφόμενος ἐλαίῳ χαὶ διδασχόμιενος ὑπὸ τοῦ ἐπιτάχτου πῶς δεῖ παλαίειν, οὕτως βεὸς ἐπιδάλλων ἡμῖν τὴν νίχην.

Ν / Περὶ ἐγκρατείας. ) , \ - Ὁ] \ ΄ , / 144: γένετο ποτὲ ἐν τὴ Σχήτει χαὶ ἔδωχαν γέροντι ποτήριον MAT 7 DEUX 5 22 ἂς 4 = 1 / οἴνου, χαὶ ἀποστρέψας αὐτὸ εἶπεν Αρατε am” ἐμοῦ τὸν θανατὸν τοῦτον.

> ΄ \ \ / LE > Ka ΝΣ Ἰδόντες δὲ χαὶ οἱ λοιποὶ οἱ συνεσθίοντες αὐτῷ, οὐδὲ αὐτοὶ ἐδέξαντο, ORIENT CHRÉTIEN. 4

20 REVUE DE L'ORIENT CHRÉTIEN.

145. Ἐπείνασέ τις τῶν ἀδελφῶν ἀπὸ πρωΐ χαὶΐ ἐπολέμησε μετὰ

-Ὁ- -Ὁ - A A LA , / et à ΄ τοῦ λογισμοῦ τοῦ μὴ φαγεῖν ἕως οὗ γένηται τρίτη ὥρα. Kai γενομένης τρίτης ἐδιάσατο (fe 191] ν") ἕως γένηται" ἔχτη ὥρα, καὶ βρέξας τοὺς ἄρτους ἐχάθισε φαγεῖν, καὶ πάλιν ἀνέστη λέγων τῷ λογισμῷ" Μείνω--

᾿νε, e! SNS TZ \ / ᾿ A 5 \ μὲν ἕως ἐνάτης ὥρας. Kai ἐγένετο ἐνάτη, χαὶ ποιήσας εὐχὴν εἶδε τὴν ἐνέργειαν ὡς καπνὸν ἀναδαίνουσαν ἐκ τοῦ ἐργοχείρου, χαὶ ἐπαύσατο πείνα ἐξ αὐτοῦ.

146. Διηγήσατό τις μαθητὴς περὶ τοῦ 4668 αὐτοῦ ὅτι ἐν ὅλοις

» : ͵ UN - , , : \ , , SU εἴχοσι ἔτεσιν οὐχ ἐχοιμηθη ἐπὶ πλευροῦ, ἀλλ᾽ εἰς τὸ χάθισμαι αὐτοῦ εἰς » 2 3 1 δ \ δ, εἰργάζετο ἐχεῖ ἐχάθευδεν καθήμενος. Ἤσθιε δὲ, à διὰ δύο, διὰ τεσσάρων, διὰ πέντε, οὕτως ἐπὶ εἴκοσι ἔτεσιν" ὅτε δὲ ἤσθιεν, μία αὐτοῦ χεῖρ ἐκτεταμένη ἣν εἰς προσευχὴν χαὶ τῇ ἄλλη ἤσθιεν, χαἀμοῦ δὲ εἰπόντος αὐτῷ Τί ἐστι τοῦτο; διὰ τί οὕτως ποιεῖς, a66%; (f° 192 r°) ᾿Απεχρίνατο πρὸς με’ Ὅτι τὸ χρίμα τοῦ θεοῦ τιθῷ πρὸ ὀφθαλμῶν μο

TPOS/E our 0 PAL OPUA ORAN

χαὶ δύναμαι καρτερῆσαι. ’Eyévero δὲ ποτὲ βαλλόντων ἡμῶν σύναξιν, ἔλαθέ με αὶ ἐπλανήθην λόγον ἀπὸ τοῦ ψαλμοῦ, καὶ ὡς ἐτελέσαμεν τὴν ΄ Fr » à \ e / 5 4 » \ “ἤ ρ / , ? - σύναξιν, ἀποχριθεὶς γέρων εἰπεν᾽ ᾿Εγὼ ὅταν βάλλω σύναξιν, ὡς πῦρ

5 « NS | AYOÜLAL ὑποχάτω μου χαιόμενον, χαὶ οὐ δύναται λογισμός μου ἐχ-

M RE) , -- \ = 45! » ! ΟῚ ΄ \ χλῖναι δεξιᾷ ἀριστερὰ" HAL ποῦ ἣν 0 λογισμος σου ὅτε ἐδάλομεν τὴν σύναξιν, ὅτι ἔλαθέ σε λόγος τοῦ ψαλμοῦ; Οὐχ οἶδας ὅτι ἐνώπιον τοῦ θεοῦ ἔστηχας, nat τῷ θεῷ ἐλάλεις ;

Ἔξῆλθε δὲ ποτὲ γέρων ἐν νυχτὶ, χαὶ εὑρέ με χοιμώμινον εἰς τὴν

, \ -Ὁ ΄ \ 37 Q / - \ r 3: αὐλὴν τοῦ χελλίου, χαὶ ἔστη γέρων θρηνῶν. μὲ χαὶ χλαίων ἔλεγεν" ἾΑρα ποῦ ἐστιν λογισμὸς τούτου, ([" 192 r°) ὅτι οὕτως καθεύδει μετὰ ἀμιεριμνίας.

147. ᾽Αδελφὸς παρέδαλε γέροντι δοχιμωτάτῳ, καὶ λέγει αὐτῷ: Κάμνω. Καὶ εἶπεν αὐτῷ γέρων" Κάθου εἰς τὸ χελλίον σου, χαὶ θεὸς παρέχει σοι ἄνεσιν.

[48. ---- - Ἠνέχθη εἰς τὰ χελλία σαΐτιν οἴνου ἀπαρχὴν, ἵνα δοθὴ τοῖς ἀδελφοῖς πρὸς ποτήριον. Καὶ Eubdvros τινὸς τῶν ἀδελφῶν ἐπὶ τὸν θόλον φυγεῖν, ἔπεσεν θόλος, χαὶ ἀπελθόντες διὰ τὸν ψόφον, εὗρον

OA 2 7 N'a 5’ ΤῸΝ > 1 7, ΄ἿΝ αὐτὸν ἐρριμμένον, καὶ ἤρξαντο αὐτὸν ἀτιμάζειν λέγοντες" Κενόδοξε, χαλῶς σοι ἐγένετο. Καὶ προσελάδετο αὐτὸν ἀσδᾶς λέγων: Ἄφετε τὸν υἱόν μου, καλὸν ἔργον ἐποίησεν, καὶ ζῇ κύριος, οὐ μὴ οἰχοδομηθῇ θόλος οὗτος ἐν τοῖς χρόνοις μου, ἵνα μάθη οἰχουμένη ὅτι διὰ ποτή- ριον οἴνου ([" 192 v°) ἔπεσεν θάλος εἰς τὰ χελλίᾳ.

HISTOIRES DES SOLITAIRES ÉGYPTIENS. ΟἽ

149. --- Παρέδαλέ τις τῶν γερόντων ἑτέρῳ 1 M χαὶ εἶπεν τῷ μαθητῇ αὐτοῦ" [Ποίησον ἡμῖν μιχρὸν ouxdv, χαὶ ἐποίησεν. χαὶ ὑρέξον 0 θ ? ? 26 > ASE \ Le [αὶ ΗΝ Ua Ψ LA ue / ἡμῖν ἄρτους, καὶ εὐρέζεν. Καὶ ἐμεῖναν ἕως ἄλλης ἡμέρας ἕως ὥρας Ψ CU \ -" \ CL - -- ἔχτης λαλοῦντες περὶ πνευματιχῶν. Kat λέγει τῷ μαθητῇ αὐτοῦ πάλιν᾽ Ποίησον ἡμῖν μιχρὸν φακὸν, τέχνον. Kai λέγει" Ar’ ἐχθὲς ἐποίησα. Kai οὕτως ἔφαγον.

150. --- ἴΛλλος τις γέρων παρέφ

=

αλέ τινι τῶν πατέρων. Ode / 2.2 1 ct ù - , ᾿ 2 ἣν A ἐψήσοας ὀλίγον ouxov, εἶπεν αὐτῷ" [Ποιήσωμεν μικρὰν σύναξιν, χαὶ ἐτέλεσεν εἰς ὅλον τὸ ψαλτήριον, χαὶ ἀδελφὸς ἀπεστήθισε τοὺς μεγά- λους δύο προφήτας. Καὶ πρωΐας γενομένης, ἀνεχώρησεν παραδαλὼν γέρων χαὶ τῆς τροφῆς ([" 192. ν᾽) ἐπελάθοντο.

151. -- ᾿Ἠσθένησέ τις τῶν γερόντων χαὶ μὴ δυνάμενος δέξασθα:

\ | A , œ \ πο ΣΝ. τὰ «

τροφὴν ἐπὶ πολλὰς ἡμέρας, παρεχαλεῖτο ὑπὸ τοῦ ἰδίου μαθητοῦ ὡς γε- νέσθαι αὐτῷ μιχρὸν λαχέντιν. Ἀπελθὼν δὲ, ἐποίησε χαὶ ἤνεγχεν αὐτῷ

φαγεῖν, ἦν δὲ ἐχεῖ ἀγγεῖον χρεμάμενον ἔχον μιχρὸν μέλι, καὶ ἕτερον ἀγγεῖον ἔχον ἔλαιον ἀπὸ λινοσπέρμου, χαὶ ἦν ὄζον προχωρὸν μὲν εἰς λύχνον. Καὶ ἔλαθε τὸν ἀδελφὸν, καὶ ἀντὶ μέλιτος fake ἐξ αὐτοῦ εἰς τὸ βρῶμα τοῦ γέροντος. 1 ευσάμιενος δὲ Ἴερον: οὐδὲν ἐλζλησεν ἀλλὰ σιωπῶν ἔφαγεν. Ἠνάγκασε δὲ αὐτὸν χαὶ τὸ δεύτερον φαγεῖν καὶ βιασάμενος ἔφαγεν. "δωκε δὲ αὐτῷ χαὶ τὸ τρίτον. δὲ οὐκ ἤθελε φαγεῖν λέγων" Φύσει οὐ δύναμαι ([" 193 r') φαγεῖν, τέχνον. δὲ ὡς προθυμούμενος αὐτὸν λέγει" Καλόν ἐστιν, ἀσοᾷ. ἰδοὺ χαγὼ τρώγω μετὰ σοῦ. Γευσάμενος δὲ καὶ μαθὼν ἐποίησεν, ἔπεσεν ἐπ αὐτοῦ λέγων" Οὐαί μοι, ἀδόᾶ, ὅτι ἀπέχτεινά σε χαὶ σὺ τὴν ἁμαρτίαν ἔθηχας ἐπ᾽ ἐμὲ ὅτι οὐχ ἐλάλησας. Λέγει γέρων" Τέκνον, μὴ θλιδὴ εἰ ἤθελεν θεὸς ἵνα φάγω μέλι, μέλι εἶχες βαλεῖν.

RS Fi Διηγήσαντο περί τινος γέροντος ὅτι ἐπεθύμησε πότε συχίδιν, ὅπερ λαύὼν ἐχρέμασε πρὸ τῶν ὀφθαλμῶν αὐτοῦ, χαὶ un ἠτγηθεὶς τῇ ἐπιθυμία μετενόει δαμάζων ἑαυτὸν ὅτι χἂν ὅλως ἐπεθύμησεν.

ISERE ᾿Αδελφός τις ἀπῆλθεν ἐπισκέψασθαι τὴν ἰδίαν ἀδελφὴν ἐν μοναστηρίῳ ἀσθενοῦσαν, ἦν δὲ πιστοτάτη, at ([5 193 r°) μὴ χαταδε- χομένη ἰδεῖν ἄνδρα, μηδὲ πάλιν τὸν ἴδιον ἀδελφὸν προφάσει αὐτῆς εἰς μέσον γυναικῶν εἰσελθεῖν, ἐδήλωσεν οὖν λέγουσα αὐτῷ" Πορεύου, ἄδε ελφε εὐχόμενος ὑπὲρ ἐμοῦ, καὶ χάριτι Χριστοῦ, βλέπω σε ἐν τὴ βασιλεία τῶν οὐράνων.

4

164. Μοναχὸς ὑπαντήσας κανονικαὶῖς κατὰ τὴν ὁδὸν, ὑπεχώρησεν

32 REVUE DE L'ORIENT CHRÉTIEN.

x τὴς ὁδοῦ. Εἶπεν δὲ ἡγουμένη πρὸς αὐτόν" Εἰ ἧς τέλειος μοναχὸς, ἡμῖν ὡς γυναιξὶν οὐκ ἂν προσέσχες.

one λὺ ελφὸς εἰς τὰ χελλία ἤνεγχζε τὰ ψωμία ἑαυτοῦ νεαρὰ, καὶ ἐχάλεσε μίαν τράπεζαν γερόντων, χαὶ ὡς ἔφαγεν ἕχαστος πρὸς δυὸ

/ Q 2 ‘O δὲ 20 Y ἰὸς \ , ὅτ / CAVE A ψωμία, ἐπαύσατο. è ἀδελφὸς εἰδὼς τὸν πόνον τῆς ἀσχήσεως αὐτῶν, διέδαλε μετάνοιαν λέγων" ([Ὁ 193 v°) Διὰ τὸν χύριον, φάγετε σήμερον ἕως οὗ χορτασθῆτε. Kat ἔφαγον πρὸς ἄλλα δέχα παξαμιάτια" ἰδοὺ οὖν παρὰ πόσον τῆς χρείας ἤσθιον οἱ ἀληθινοὶ ἀσχηταί.

156. --- ᾿χακώθη τις γέρων ἀσθενεία μεγάλῃ ὥστε τὰ ἐντὸς αὐτοῦ αἷμα. πολὺ ἐχβάλλειν. Evxatonce δέ τινι τῶν ἀδελφῶν νυξάρια ξηρὰ, χαὶ ποιήσας ἀθῆραν, ἔθοαλεν αὐτὰ κάτω, καὶ ἤνεγχε τῷ γέροντι, χαὶ παρεχάλει αὐτὸν γεύσασθαι λέγων’ Ποίησον ἀγάπην, φάγε, μήποτε nai συμφέρει. ᾿Ατενίσας δὲ αὐτῷ ἐπιπολὺ γέρων εἶπεν᾽ Ex” ἀληθείας, " eo A / e NET QUE - 3 / 2 DANS , 5 ἤθελον ἵνα ἀφηχέ με θεὸς ἐν τῇ ἀσθενίᾳ ταύτῃ ἄλλα τριάκοντα ἔτη.

\ 17 e 2 ͵ Ε V2 El \ f\— Kai κατεδέξατο γέρων ἐν τοιαύτῃ ἀσθενείᾳ, χἂν μιχρὰν ἀθῆραν φαγεῖν, χαὶ Ruby ([" 193 ν᾽) ἀδελφὸς ἀπῆλθεν εἰς τὸ ἑαυτοῦ κελλίον.

157. --- Λλλος γέρων ἐκάθητο εἰς ἔρημον μαχράν. Συνέθη δὲ ἀδελφῷ παραδαλεῖν αὐτῷ, χαὶ εὖρεν αὐτὸν ἀσθενοῦντα, χαὶ λαθὼν, ἔνιψεν αὐτὸν, χαὶ ἐξ ὧν ἤνεγχε χρειῶν ἐποίησε μιχρὸν ἑψητὸν, χαὶ ἤνεγχεν αὐτῷ φαγεῖν. ᾿Αποχρίθεις δὲ γέρων, εἶπεν" Φύσει, ἄδελφε, 5 / 5 CR». 1 > , ᾿ / Y \ ἐληθάργησα ὅτι εἶχον οἱ ἄνθρωποι τὴν ἀνάπαυσιν ταύτην. ᾿Πνεγχε δὲ

ste \ / \ ἰδὲ ΓΕ ΕΝ ΄ Ἐπ. : » αὐτῷ χαὶ ποτήριον οἴνου, καὶ ἰδὼν αὐτὸ, ἔχλαυσε λέγων᾽ Ὅτι οὐ προσ- εδόχησα. ἕως θανάτου πιεῖν οἶνον.

58. Ἤσχησε γὙέρων τοῦ μὴ πιεῖν ἡμέρας τεσσαράχοντα. χαὶ 158 Hoxnce γέ! μὴ πιεῖν 7 βάχοντα, εἴποτε ἐγένετο χαῦμα, ἔπλυνε τὸ βαυχάλιον χαὶ ἐγέμιζεν αὐτὸ ὕδατος, χαὶ ἐχρέμνα αὐτὸ ἐναντίον αὐτοῦ, καὶ ἐπερωτηθεὶς παρὰ ἀδελφοῦ (( 194 rt) δι᾽ ἦν αἰτίαν τοῦτο ποιεῖ, ἀπεκρίθη" Ἵνα μετὰ τοῦ διψᾶν με ΄ .- \ j\ ͵΄ \ “-- - πλέον χοπιῶ, χαὶ πλείονα μισθὸν λαμδάνω παρὰ τοῦ θεοῦ.

159. ᾿Αδελφὸς nv ὁδεύων μετὰ τὴς ἰδίας μητρὸς γραΐδος τυγχα- νούσης, χαὶ ὡς ἦλθον ἐπὶ ποταμὸν, οὐχ ἠδυνήθη γραῦς περάσαι, χαὶ λαθὼν υἱὸς αὐτῆς τὸ μαφόριον αὐτοῦ περιείλησε τὰς χεῖρας ἑαυτοῦ ἵνα un éyyist τὸ σῶμα τῆς υμητρὸς αὐτοῦ, χαὶ οὕτως βαστάσας αὐτὴν ἀπήνεγχεν εἰς τὸ ΠΡῸΣ Καὶ λέγει αὐτῷ h μήτηρ αὐτοῦ" Τέχνον, διατί ἍΚΩΝ τὰς χεῖράς σου; δὲ ἔφη: Ὅτι τὸ σῶμα τῆς γυναικὸς ἐστιν, χαὶ ἐχ τούτου ἔρχεται μνήμη ἄλλων, χαὶ διὰ τοῦτο οὕτως

ΤῺ » ἐποίησα.

HISTOIRES DES SOLITAIRES ÉGYPTIENS,. J9

LL (ᾧ 194 1°) νηστεύσαντα τὴν ἑδδομάδα τοῦ πάσχα, καὶ ὡς συνήχθησαν ὀψὲ, ἔφυγεν ἵνα LA φάγῃ εἰς τὴν ἐχχλησίαν, καὶ μικρὰ σεύτλα ἐποίησεν ἐχζεστὰ χαὶ ἔφαγε χωρὶς ἄρτου.

161. ᾿Απῆλθεν ποτὲ πρεσθύτερος τῆς Σχήτεως πρὸς τὸν ant puov Θεόφιλον τὸν Re ᾿Αλεξανδ ρείας, καὶ ὡς ὑπέστρεψεν εἰς Σχῆτιν, πρό τη ὅν αὐτὸν οἱ ἀδελφοί: Πῶς πόλις; δὲ εἶπεν αὐτοῖς" Φύσει, ἀδελφοὶ, ἐγὼ πρόσωπον ἀνθρώπου οὐχ εἶδον εἰ WA μιόνον τοῦ

"

ἀρχιεπισχόπου. Οἱ δὲ ἀχούσαντες, ἐταράχθησαν λέγοντες" Ἄρα ἐχχώθη- σαν, 466; ὋὉὧ δὲ εἶπεν' Οὐχ οὕτως, ἀλλ᾽ οὐκ ἐνίκησέ με λογισμὸς = 2 ͵ ΄ D / δ. 9 / Υ \ τοῦ ἰδεῖν τινά. Οἱ δὲ ἀχούσαντες ἐθαύμασαν καὶ ἐστηρίχθησαν ἀπὸ τοῦ λόγου ([5 194 νὴ) αὐτοῦ, ἵνα φυλάττωσιν ἀπὸ μετεωρισμοῦ τοὺς ὀφθαλ-- μοὺς αὐτῶν. D, - ἘϊΪσῆλθον ποτὲ πατέρες εἰς ᾿Αλεζάνδοειχν χληθέντες ὑπὸ 162 Εϊσὴλθ e Acad τοῦ μαχαρίου Θεοφίλου τοῦ ἀρχιεπισχόπου, ἵνα ποιήσωσιν εὐχὴν χαὶ χαθελῇ τὰ ἱερᾷ, καὶ ἐσθιόντων αὐτῶν μετ᾽ αὐτοῦ, παρετέθη κρέας μό- ï ET δὲ ! \ Θὰ AT) LEUR A σχιον, καὶ ἤσθιον μηδὲν διαχρινύμενοι, χαὶ λασὼν ἀρχιεπίσχοπος ἕν χοπάδιν, ἔδωχεν τῷ ἔγγιστα αὐτοῦ γέροντι λέγων' ‘Job τοῦτο καλὸν χοπάδιν ἐστὶν, φάγε, ἀσσὰ. Οἱ δὲ ἀποχριθέντες ε εἶπαν" fe εἷς ἕως ἄρτι

906=

λάχανα ἠσθιόμεν, εἰ δὲ χρέα ἐστὶν, ἡμεῖς οὐ τρύγωμεν, χαὶ οὐχέτι πὶ

LA

ἔθετο εἷς ἐξ αὐτῶν τοῦ πος αὐτοῦ.

Πρὸς τὸν ἐκ τῆς πορνείας ([" 194 y)

ἐπανιστά ὑενον Liv πόλε ὑον.

163. --- ᾿Αδελφός τις ἐπολεμιήθη εἰς πορνείαν, χαὶ nv πόλεμος ὡς , - δ, : = ε A Se ͵΄ δὲ 20 = \ πῦρ χαιόμενον ἐν τῇ XApÔIZ αὐτοῦ νυχτὸς χαὶ ἡμέρας. ἀδελφὸς ΄ὔ δὸς τῷ - \ \ \ ἠγωνίζετο und cuyratabñva τῷ λογισμῷ. Kai μετὰ πολὺν χρόνον, ε ͵ ΝΜ δὲ ΄ δ \ ἐν A -Ὁ \E - Ἂς 1 ἔφυγεν πόλεμος μηδὲν ἰσχύσας διὰ τὴν ὑπομονὴν τοῦ ας ελφοῦ, χαὶ ΄ τ - 3 = N/ , - εὐθέως φῶς ἦλθεν ἐν τὴ καρδίχ αὐτοῦ.

164. ᾿Αδελφὸς ἄλλος ἐπολεμήθη εἰς πορνείαν -καὶ ἀναστὰς νυ- χτὸς, ἀπῆλθε πρός τινα γέροντα χαὶ εἶπεν αὐτῷ τὸν λογισμὸν, χαὶ παρε- χάλεσεν αὐτὸν γέρων, χαὶ ὠφεληθεὶς ἀπῆλθεν εἰς τὸ χελλίον αὐτοῦ,

NS e 2 2 CIN χαὶ ἰδοὺ πάλιν πόλεμος ἐπετέθη αὐτῷ" δὲ πάλιν ἀπῆλθε πρὸς τὸν γέροντα, ({ 195 r°) ἐποίησε δὲ οὕτως πολλάχις, δὲ γέρων οὐχ ἐλύπη- σεν αὐτὸν, ἀλλ᾽ ἐλάλει αὐτῷ τὰ πρὸς ὠφέλειαν, χαὶ ἔλεγεν αὐτῷ: Μὴ

παραχωρήσης, ἀλλὰ μᾶλλον ἔρχου χαθότι πολεμεῖ σοι δαίμων, καὶ

54 REVUE DE L'ORIENT CHRÉTIEN.

“7 * \ \ » 2 ε LU \ \ s Va A ἔλεγχε αὐτὸν χαὶ οὕτως ἐλεγχόμενος ὑποχωρεῖ. Οὐδὲν γὰρ ἀηδίζει τὸν δαίμονα τῆς πορνείας ὡς τὸ ἀποχαλύπτειν τὰ ἔργα αὐτοῦ, καὶ οὐδὲν LU \ A st χαροποιεῖ αὐτὸν, ὡς τὸ χρύπτειν τοὺς λογισμοὺς αὐτοῦ. 165 "Er 0: st cu / CAT / > 1 9. πολεμήθη ἀδελφὸς εἰς πορνείαν, καὶ DYOVIGUTO ἐπιτείνων \ La A \ - τῷ τῷ» EL τὴν ἄσχησιν, καὶ τὸν λογισμὸν τηρῶν τοῦ μὴ συγχαταθῆναι τῇ ἐπιθυ- υἱχ. Ὕστερον ἐλθὼν εἰς τὴν ἐχκλησίαν, ἐνεφάνισε τὸ πρᾶγμα παντὶ τῷ = ! \ \ b - πλήθει, χαὶ ἐδόθη ἐντολὴ, καὶ πάντες ἐπόνησαν περὶ ({° 195 τ΄) αὐτοῦ a C4 = -- Q ΄ ἑσδομάδα εὐχόμενοι τῷ θεῷ, καὶ ἐπαύσατο πόλεμος. 166. --- Πρὸς τὸν λογισμὸν τῆς πορνείας, εἰπέν τις τῶν γερόντων / . , 7, Lu ς ΄ ἐρημίτης" Komwomevos θέλεις σωθῆναι; Ὕπαγε κάμε, ὕπαγε πόνεσον, δ, \ enr. ι - À L " ὕπαγε ζήτησον ai εὑρίσκεις, γρηγόρησον χαὶ χροῦσον, χαὶ ἀνοίγεταί a TSX ? οἦ PU ων \ » \ _ \ / \ σοι, εἰσὶν ἐν τῷ χοσμῷ παμμαχάριοι, χαὶ ἀπὸ τοῦ πολλὰ τύπτεσθαι χαὶ ε ΄ \ » - + ͵ δὲ δυο CT PE À δύ ΄ ἑστάναι χα! εὐτονεῖν, στεφανοῦνται, πολλάκις ὃεὲ χαὶ εἰς ἀπὸ OUO τυπτο- Ε 4 09 ch 2 ms / pevos, εὐτονήσας ταῖς πληγαῖς, τοὺς τύπτοντας ἐνίχησεν. Εἶδες εὐτονία / \ εἰ - ι \ \ G: “- \ πόση διὰ τὸν τῆς σοιρχὺς πορισμόν; Καὶ σὺ οὖν στῆθι χαὶ εὐτόύνησον, at θεὸς πολεμεῖ ὑπὲρ σοῦ τὸν ἐχθρόν. 'σὶ \ 1 » ι \ » 57. - TRES Πρὸς τὸν αὑτὸν λογισμὸν εἰρηχεν ἄλλος γέρων" Τ ενοῦ a 195 a x 2 ; LS διὸ ne! PANNES 2 / ps ( D V') ὡς παριὼν ἐν ἀγορᾷ διὰ χαπηλείου, χαὶ ὀσφῤαινόμενος ἑψήματος παρόπτου τινὸς, θέλων εἰσῆλθε χαὶ ἔφαγεν, δὲ μὴ 3 / ' τ τ \ \ / t θέλων, ὀσφράνθη μόνον παριὼν χχὶ ἀπῆλθεν. Οὕτως χαὶ σὺ, τίναξον , \ \ NS NS "7 3 , ᾿ nes - 4 ἀπὸ σοῦ τὴν δυσωδίαν, ἔγειρε χαὶ εὖξαι λέγων" Υἱὲ τοῦ θεοῦ βοήθει μοι.

AN , 5

Toÿro ποίει χαὶ ἐπ᾿ ἀλλοῖς λογισμοῖς, οὐ γὰρ ἐχριζωταὶ ἐσμὲν τῶν πα-

θῶν, ἀλλ᾽ ἀνταγωνιοσταί, a ᾿ =. \ 168: ᾿Αδελφὸς ἠρώτησε γέροντα λέγων: ᾿Εὰν ἐμπέσῃ μοναχὸς 5 à \ 0) LEE δ ΡΞ Se ge 214 9 bc à \ εἰς πειρασμὸν, θλίδεται ὡς ἀπὸ προκοπῆς εἰς ἐλάτγωσιν ἐλθὼν, χαὶ χοπιχ ἕως οὗ ἀναστῇ. δὲ ἀπὸ χόσμου ἐρχόμενος, ὡς ἀρχὴν βάλλων ποοχόπει. ΚΑ αὶ ἀποχριθεὶς γέρων εἶπεν. Μοναγὸς εἰς πειρασμὸν ἐμ.πί-- τροχοτει. A 240 εις 0 γέρω τι χοΞ ς TELO μ μν. ‘fo » SET; - 3 ι \ €! / - πτων, ([" 195 v”) ὥσπερ οἰκία πεσοῦσα ἐστὶν, χαὶ ἐὰν ὅλως νίψη τῷ λογισμῷ αὐτοῦ οἰχοδομῆσα! τὴν πεσοῦσαν οἰκίαν, πολλὰς ὕλας εὑρίσχει" \ ΄ x ΄ / τὰ θεμέλια, τοὺς λίθους, τὰ ξύλα, καὶ δύναται ταχέως προκόψαι ὑπὲρ ΣΕ ΣΝ ᾿ χαὶ ατδὲν ἔ: τὸν μὴ ὀρύξαντα χαὶ βάλοντα θεμέλιον χαὶ μηδὲν ἔχοντα προχρείαν, 1: CARE RME PS À) 2 NE y εν ΄ Οὔ 15 εἰ \ ἀλλ᾽. ἐπ᾿ ἐλπίοι βαλόντα εἴπως ἄρα τελειώσει. Οὕτως οὖν ἀπὸ τῆς μο- ms / 1 » \ \ ΄ 5, ναχικῆς ἐργασίας ἐὰν ἐμπέσῃ εἰς πειρασμὸν χαὶ ἐπιστρέψη ἔχε: πολλὴν

LA

ποογοείαν᾽ τὴν μελέτην. τὴν Ψαλυωδίαν. χαὶ τὸ ἐργόχειρον" ἅτινά POXPELX ἣν ALEAETAV, TA Re VE INA : θγύχεῖρ

ἐστι τὰ θεμέλια. “δὲ Go Loos

» Φ - Ἷ > \ » οχάριος, ἐν ὅσῳ ταῦτα μανθάνει, ἔρχη σὺ εἰς

\ / τὴν πρώτην τάξιν.

HISTOIRES DES SOLITAIRES ÉGYPTIENS. JJ

169. ᾿Αδελφός τις ὀχλούμενος ὑπὸ πορνείας, παρέδαλε γέροντι μεγάλῳ, καὶ παρεχάλει ([" 196 15) αὐτὸν λέγων" Ποίησον ἀγάπην, εὔχου ὑπὲρ ἐμοῦ ὅτι ὀχλοῦμαι ὑπὸ πορνείας. δὲ γέρων, ἐδεήθη τοῦ θεοῦ ὑπὲρ αὐτοῦ. Πάλιν ἐκ δευτέρου ἔρχεται πρὸς τὸν γέροντα, χαὶ τὸν αὐτὸν λόγον εἶπεν ὁμοίως, χαὶ γέρων οὐχ ἠμέλησε παραχαλῶν τὸν θεὸν ὑπὲρ αὐτοῦ χαὶ λέγων’ Κύριε ἀποχάλυψόν μοι τὸ χάθισμα τοῦ ἀδελφοῦ τούτου, καὶ πόθεν ἈΠΕ, ὅτι παρεχάλεσζ σε, χαὶ οὐχ εὗρεν ἀνάπαυ -

. Καὶ ἀπεκΖζλυψεν αὐτῷ θεὸς τὰ ur” αὐτὸν, καὶ εἶδεν αὐτὸν χαθε- τρῶν χαὶ τὸ πνεῦμα τῆς πθονε ας ἐγ de αὐτοῦ. Καὶ ἄγγελος ἵστατο πρὸς βοήθειαν αὐτοῦ πεμφθεὶς, καὶ ὠργίζετο τῷ ἀδελφῷ ὅτι μὴ ἐπέρ- ρίπτεν ἑαυτὸν πρὸς τὸν env ἀλλ᾽ ἡδόμενος ([5 196 r°) τοῖς λογια- μοῖς, ὅλον ἑαυτοῦ τὸν νοῦν ποοεδίδου τῇ ἐνεργείᾳ. Kai ἔγνω γέρων ὅτι αἰτία ἐχ τοῦ ἀδελφοῦ ἐστὶν, καὶ ἀνήγγειλεν αὐτῷ ὅτι σὺ εἶ

L. ΄ ΩΝ - ΟΝ \ NE) a SA X συγχατατιθέμιενος τῷ λογισμῷ σου" χαὶ εὐδίθαξεν αὐτὸν ντισ

& La;

πῶς δαχῆς

τοῖς λογισμοῖς, χαὶ ἀνανήψας ἀδελφὸς διὰ τῆς εὐχῆς ὯΝ δι γέροντος, εὗρεν ἀνάπαυσιν.

170. ᾿Ἐπολεμήθη ποτὲ μαθητὴς μεγάλου γέροντος εἰς πορνείαν. δὲ γέρων βλέπων αὐτὸν χοπιῶντα, λέγει αὐτῷ Θέλεις παρακαλῶ τὸν θεὸν χαὶ χουφίζει τὸν πόλεμον ἀπὸ σοῦ; δὲ εἶπεν: Θεωρῶ, ἀδδᾷ, ὅτι κοπιῶ, ἀλλὰ βλέπω ἐκ τοῦ χόπου χαρπὸν εἰς ἐμὲ, τοῦτο δὲ παραχάλεσον τὸν θεὸν, ἵνα μοι δῶ ὑπομονὴν τοῦ ὑπενεγχεῖν. ([ 196 v°) Λέγει αὐτῷ 466%c αὐτοῦ Σήμερον ἔγνων, ὅτι ἐν προχοπῇ εἶ χαὶ ὑπερέζης με.

Δ RD Ἔλεγον περί τινος γέροντος ὅτι χχτέθη εἰς Σχῆτιν χαὶ εἶχεν υἱὸν θηλάζοντα, καὶ οὐχ der τί ἐστι γυνή. Ὡς οὖν γέγονεν ἀνὴρ, ἐδείκνυον αὐτῷ οἱ δαίμονες τὰ σχήματα τῶν γυναικῶν, καὶ ἀνήγγειλε τῷ πατρὶ αὐτοῦ, χαὶ ἐθαύμασεν. [Ποτὲ οὖν ἀναθὰς μετὰ τοῦ πατρὸς αὐτοῦ εἰς Αἴγυπτον χαὶ ἰδὼν τὰς γυναῖχας, λέγει τῷ πατρὶ αὐτοῦ" *AG6G, οὗτοί εἰσιν οἱ ἐρχόμενοι πρός με νυχτὸς εἰς Σχῆτιν. Καὶ λέγει αὐτῷ πατὴρ αὐτοῦ" Οὗτοί εἰσιν οἱ μοναχοὶ τῶν χωμῶν, τέκνον, ἄλλο δὲ σχῆμα ἔχουσιν οὗτοι, χαὶ οἱ ἐρημίται ἄλλο. Kai ἐθαύμασεν γέρων πῶς καὶ ἐν τῇ ἐρήμῳ ἔδειξαν αὐτῷ οἱ δαίμονες (F .190 v°) τὰς φαντασίας τῶν γυναιχῶν, χαὶ εὐθέως ὑπέστρεψαν εἰς τὴν χέλλαν αὐὖ- τῶν. |

172. ᾿Αδελφός τις ἦν ἀγωνιστὴς ἐν Σχήτει, καὶ ὑπέθαλεν αὐτῷ ἐχθρὸς μνήμην γυναικός τινος εὐμορφωτάτης, χαὶ ἔθλιθεν αὐτὸν σφό τὰς

50 REVUE DE L'ORIENT CHRÉTIEN.

Καὶ κατ᾽ οἰκονομίαν, ἄλλος ἀὸ ελφὸς χατελθὼν ἀπὸ Αἰγύπτου εἰς Σχῆτιν, χαὶ λαλούντων αὐτῶν εἶπεν ὅτι γυνὴ τοῦ δεῖνος ἀπέθανεν. Ἦν δὲ αὕτη, εἰς ἦν ἐπολεμεῖτο ἀγωνιστής. δὲ ἀχούσας λαδὼν τὸν λεδή- Eu \ 2 \ 5, Dent \ 2 à rova αὐτοῦ νυχτὸς, χαὶ ἀναδὰς, ἤνοιξεν αὐτῆς τὸν τάφον, καὶ ἐξέμαξε τοὺς ἰχῶρας αὐτῆς τῷ λεδήτωνι αὐτοῦ, at ὑπέστρεψεν ἔχων αὐτὸν εἰς \ = / » "Ὁ \ 249, A 4 5 ΄ 2 3 - τὸ κελλίον αὐτοῦ, χαὶ ἐτίθει τὴν δυσωδίαν ἐχείνην ἔμπροσθεν αὐτοῦ, χαὶ ἐπολέμει τῷ λογισμῷ λέγων: ([ 197 τ) ᾿Ιδοὺ ΠΣ σου ἣν ἐζήτεις, ἔχεις αὐτὴν, χόρτασον σεαυτόν. Kai οὕτως ἐν τῇ δυσωδία JE 4 4 \ Ψ ΣΤ ΄ ΄ 5.5 » ἐρασάνιζεν ἑαυτὸν, ἕως οὗ ἐπαύσατο πόλεμος ἐξ αὐτοῦ. 173. ἜἬἜξηλθε ποτέ τις ἐν Σχήτει θέλων γενέσθαι μοναχὸς; ἔχων χαὶ τὸν υἱὸν αὐτοῦ ἀπογαλακτισθέντα μεθ’ ἑαυτοῦ. Καὶ ὡς ἐγένετο F D NE 5 νεώτερος, ἤρξαντο οἱ πόλεμοι ἐπιτίθεσθαι αὐτῷ, χαὶ εἶπεν τῷ πατρὶ 2 FRS ΄ Ω \ » x 2 1 αὐτοῦ: Υπάγω εἰς τὸν χόσμον᾽ οὐ γὰρ ἰσχύω τὸν πόλεμον ὑπενεγχεῖν. δὲ πατὴρ αὐτοῦ, ἐπέμενε Ki ον αὐτόν. Kat πάλιν λέγει νεώτερος" Ἀσύζ, οὐχ ἰσχύω, ἔχσδν με ἀπελθεῖν. Λέγει αὐτῷ πατὴρ αὐτοῦ" ΄Αχουσόν μου, τέκνον, ἔτι τὸ ἅπαξ τοῦτο, χαὶ λάδε σεαυτῷ τεσ- ΄ PORT, LA e - " : σαράχοντα ζεύγη ἄρτων, καὶ θαλλία ἡμερῶν τεσσαράχοντα ([" 197 r°) χαὶ ὕπαγε εἰς τὴν ἐσωτέραν ἔρηυιον χαὶ μεῖνον ἐχεῖ τεσσαράκοντα ἡμέ- \ = 7 x / / Ἂν / N τς \ , pas, χαὶ τοῦ χυρίου τὸ θέλημα γενέσθω. Ὑπήχουσε δὲ τῷ πατρὶ αὐὖ- - » \ 9 = ΟΣ 2 "7 ΩΣ ? - \ τοῦ, χαὶ ἀναστὰς, εἰσῆλθεν εἰς τὴν ἔρημον, χαὶ ἔμεινεν χοπιῶν ἐκεῖ καὶ = 7 \ L \ “7 Ur - πλέχων τὰ θαλλία ζηρὰ χαὶ τὸν ἄρτον ἐσθίων ξηρόν. Kat ἡσύχασεν ἐχεῖ εἴχοσι ἡμέρας, χαὶ εἶδεν τὴν ἐνέργειαν ἐογομιένην ἐπ᾽ αὐτόν. Kai ὥφθη Cure μερ " + φΌς Φ ἐργ Ξργ, ΓΞ CA 0 . φ ἐνώπιον αὐτοῦ ὡς Αἰθιόπισσα δυσωδεστάτη, ὥστε μὴ δύνασθαι αὐτὸν ΄, \ 3 ee τ C9 311} " τ Ε \ \ ΄ u EE φέρειν τὴν ὀσμὴν αὐτῆς. ᾿Εδίωχεν οὖν αὐτὴν, καὶ λέγει αὐτῷ. Ὅτι ὥνδιν 2 - ΄, τ r / , A \ A ÉVO ἐν ταῖς χαρδίαις τῶν ἀνθρώπων γλυχκεία φαίνομαι, ἀλλὰ ÔLX τὴν ὑπαχοήν σοὺ HAL τὸν χόπον σου, οὐχ ἀφῆχέ με θεὸς ἀπατῆσαι σε 107. χάὶ ἐνεφάνισέ Got τὴν δυσωδίαν μου. δὲ ἀναστὰς χαὶ εὐχαριστήσας τῷ θεῷ, ἦλθε πρὸς τὸν πατέρα αὐτοῦ χαὶ λέγει αὐτῷ" Οὐχέτι θέλω ἀπελθεῖν εἰς τὸν χόσμον, ἀδόᾷ, ἑώραχα γὰρ τὴν ἐνέργειαν χαὶ τὴν δυσωδίαν αὐτῆς. ἮΝ δὲ χαὶ πατὴρ αὐτοῦ πληροφορηθεὶς περὶ αὐτοῦ, χαὶ λέγει αὐτῷ Εἰ ἔμεινας τὰς τεσσαράχοντα ἡμέρας, χαὶ ἐφύλαξας τὴν ἐντολὴν, τ ἰδεῖν μείζονα θεωρίαν. : 174. Ἔλεγον περί τινος τῶν πατέρων ὅτι ἀπὸ κόσμου ἦν, καὶ ἐπολεμεῖτο εἰς τὴν ἑαυτοῦ γυναῖχα. Διηγεῖτο οὖν τοῦτο τοῖς πατρᾶσι͵ χαὶ εἰδότες ὅτι ἐργάτης ἐστὶν, χαὶ περισσότερα ποιεῖ ὧν αὐτοὶ λέγουσιν,

% / ? ἐτίθουν αὐτῷ πολιτείας, ὥστε ἐξασθενῆσαι αὐτοῦ τὸ σῶμα χαὶ μιηχέτι

HISTOIRES DES SOLITAIRES ÉGYPTIENS,. 57

(ἢ 197 ν") δύνασθαι ἀναστῆναι. Καὶ ατ᾽ oixovouiav δὲ θεοῦ, ἐλθών τις τῶν πατέρων ξένος παραθαλεῖν εἰς Σχῆτιν, καὶ ἐλθὼν χατὰ τῆς χέλλης αὐ- τοῦ, εἶδεν αὐτὴν ἀνεωγμένην, χαὶ παρῆλθε θαυμάζων πῶς οὐδεὶς ἐξῆλθεν εἰς τὴν ἀπάντησιν αὐτοῦ. Ὑποστρέψας οὖν, ἔχρουσε λέγων" Μήποτε ἀδελφὸς ἀσθενεῖ. Kai χρούσας, εἰσῆλθε χαὶ εὗρεν αὐτὸν ἐν πολλῇ ἀσθε- νεία. Καὶ λέγει αὐτῷ" Τί ἐστιν ἔχεις, πάτερ; Καὶ διηγήσατο αὐτῷ λέγων᾽ ᾿γὼ ἐχ τοῦ χόσμου εἰμὶ, καὶ πολεμεῖ με νῦν ἐχθρὸς εἰς τὴν ἐμὴν γυναῖχα, καὶ διηγησάμην τοῖς πατρᾶσι, καὶ ἐπέθηκάν μοι πολιτείας διχφύρους, χαὶ ποιῶν αὐτὰς ἐξησθένησα, καὶ πόλεμος αὔξει. ᾿Αχούσας δὲ ταῦτα γέρων, ἐλυπήθη χαὶ λέγει αὐτῷ" ([ 198 1) Οἱ μὲν πατέρες, ὡς δυνατοὶ, καλῶς ἐπέθεντό σοι τὰς πολιτείας, ἐὰν δὲ μου ἀκούσῃς τῆς ταπεινώσεως, ῥίψον ἀπὸ σοῦ ταῦτα, χαὶ μεταλάμθανέ σου τὴν μικρὰν τροφὴν εἰς τὸν χαιρὸν αὐτῆς, χαὶ ποιῶν τὴν μιχοάν GOU σύναξιν. ἐπίρριψον ἐπὶ χύριον τὴν μέοιμνάν σου, ἐν γὰρ τοῖς σοῖς πόνοις οὐ δύνασαι περιγέ- γεσθαι τούτου τοῦ πράγματος, χαὶ γὰρ τὸ σῶμα ἡμῶν ὡς ἱμάτιόν ἐστιν. Ἐὰν ἐπιμεληθῆς αὐτοῦ, ἵσταται, ἐὰν δὲ ἀμελήσῃς, σήπεται. δὲ ἀχούσας αὐτοῦ ἐποίησεν οὕτως, χαὶ εἰς ὀλίγας ἡμέρας ἀπέστη πόλεμος

LIRE) ΕἸ = GT ŒAUTOU.

TRADUCTION

QU'IL FAUT RECHERCHER LA SOLITUDE ET LA COMPONCTION,

133. Un vieillard dit (1) : 11 convient que le moine prise sa solitude au point de ne pas se préoccuper s’il lui en résultera un dommage cor- porel.

134. Certain racontait (2) que trois zélateurs devinrent amis et l’un s’occupait de réconcilier les ennemis, selon la parole : Bienheureux les pacifiques (3); le second visitait les malades; le troisième alla vivre dans la solitude du désert. Le premier, lassé des luttes des hommes, ne pouvait les guérir tous, il tomba dans le découragement et alla près de celui qui soignait les malades. [1] le trouva aussi tombé dans la négligence et ne pou- vant accomplir le commandement; tous deux tombèrent d'accord d'aller

(1) Coislin 127, fol. 46. M, 800, 15. (2) B, p. 444, 3: M, col. 860, 16; Paul, 42, Coislin 127, fol. 46", (3) Matth, v.

58 REVUE DE L'ORIENT CHRÉTIEN.

voir le solitaire; ils lui racontèrent leur affliction et le prièrent de leur dire jusqu'où il avait réussi. Il garda le silence un instant, mit de l’eau dans un vase et leur dit : Faites attention à. l’eau or elle était troublée. Un peu après, il leur dit encore : Regardez de nouveau maintenant que l’eau est apaisée, et lorsqu'ils s’'approchèrent de l’eau, ils virent leurs visages comme dans un miroir et il leur dit : De même celui qui vit parmi les hommes, à cause de l'agitation, ne voit pas ses péchés, mais lorsqu'il vit solitaire, surtout au désert, alors il voit ses défaillances.

135. Un vieillard (1) racontait qu'un frère voulant se retirer en était empêché par sa mère. Il n’abandonnaït pas son projet et disait : Je veux sauver mon âme. Elle prit beaucoup de peine sans pouvoir l’arrêter et le lui permit donc enfin. Il s’en alla et, devenu moine, consuma sa vie dans la négligence. Il arriva que sa mère mourut et que lui-même, au bout d’un certain temps, tomba dans une grave maladie; il fut ravi en extase et con- duit au jugement : il trouva sa mère parmi ceux qui devaient être jugés. Lorsqu'elle le vit elle dit, pleine d’épouvante : Qu'est-ce que cela, mon fils, toi aussi tu es jugé en ce lieu! sont tes discours? Ne disais-tu pas que tu voulais sauver ton âme? Rougissant à ces paroles, il restait saisi de dou- leur et n'avait rien à lui répondre. Il entendit encore une voix qui disait : Enlevez celui-là d'ici, je vous ai envoyés dans tel couvent à un moine son homonyme (2). Lorsque la vision eut pris fin, il revint à lui et raconta le tout aux assistants. Pour confirmer et certifier ce qu'il racontait, il envoya quelqu'un au monastère dont il avait entendu parler pour voir si le frère dont il avait été question était mort. L’envoyé trouva qu’il en était ainsi. Lorsqu'il eut repris ses forces et fut revenu à lui, il s'enferma et vécut dans le souci de son salut, plein de repentir et de larmes pour ce qu'il avait fait auparavant avec négligence. Sa componction était si grande, que beaucoup le priaient de s’en relâcher un peu, de crainte qu’il n’éprouvât du mal à cause de ses gémissements excessifs. Il ne se laissa pas convaincre et dit: Si je n'ai pu supporter le reproche de ma mère, comment supporterai-je, au jour du jugement, le blâme du Christ et des saints anges?

136. Un vieillard dit (3) : S'il était possible que les âmes des hommes quittent (leurs corps) à l’arrivée du Christ après la résurrection, tout le monde mourrait de crainte, d'horreur et d’égarement. Que verrait-on en effet, sinon les cieux déchirés, Dieu qui se montre avec colère et indigna- tion, les troupes innombrables des anges et toute l’humanité ensemble? Il faut donc vivre comme si Dieu devait à chaque instant nous demander raison de notre conduite.

137. Un frère demanda à un vieillard (4) : Comment la crainte de Dieu entret-elle dans l’âme? Le vieillard dit : Si un homme possède l'humilité et la pauvreté, et s'il ne juge pas, la crainte du Seigneur viendra en lui.

(1) Coislin 127, fol. 895, M 863, 20; 808, 216.

(2) Ceci ne se trouve pas dans M, 863, 20; mais bien col. 808, 216.

(3) Coislin 127, fol. 59"; M, 863, 21.

(4) Paul, 43, sous deux formes. L'une des deux formes donne au vieillard le nom d’'Euprépios: B, p. 741, 114; L, fol. 106; Coislin 127, fol. 60.

HISTOIRES DES SOLITAIRES ÉGYPTIENS, 29

138. Un frère rencontra un vieillard (1) et lui demanda : Abbé, pour- quoi mon cœur est-il dur et n’ai-je pas la crainte de Dieu? Le vieillard lui dit : Je pense que si un homme applique son cœur à se blâmer, il acquerra la crainte de Dieu. Le frère lui dit : Qu'est-ce que ce bläme? Le vieillard lui dit : C’est que l’homme en toute chose réprimande son âme et lui dise : Souviens-toi qu'il te faut aller au-devant de Dieu; dis-lui aussi : Qu'ai-je de commun avec l’homme? Je pense que si quelqu'un est dans ces senti- ments, la crainte de Dieu lui viendra.

139. Un vieillard (2) vit quelqu'un rire et lui dit : Nous devons rendre raison de toute notre vie en présence du ciel et de la terre, et tu ris!

140. Un vieillard dit (3) : De même que nous portons chacun notre malice (4) partout nous allons, ainsi nous devons avoir avec nous les larmes et la componction partout nous sommes.

141. Un frère (5) demanda à un vieillard : Que ferai-je? 11 lui dit: Il nous faut toujours pleurer. Car il arriva jadis qu'un père mourut et revint à lui après plusieurs heures. Nous lui demandämes : Qu'as-tu vu là, abbé? Et il nous raçonta en pleurant : J'ai entendu en cet endroit des voix en pleurs qui disaient sans cesse : Malheur à moi, malheur à moi! C’est ce qu'il nous convient aussi (de dire) en tout temps.

142. Un frère (6) demanda à un vieillard : Pourquoi mon âme désire- t-elle pleurer comme j'entends les vieillards le faire, et les larmes ne vien- nent pas et mon âme est affligée? Le vieillard lui dit : C’est au bout de quarante ans que les fils d'Israël sont entrés dans la terre promise. Si tu arrives à y entrer, tu ne craindras plus de guerre. Car Dieu veut que l'âme soit tourmentée, afin qu’elle désire toujours entrer dans cette terre.

143. Un frère demanda à un vieillard (7) : Comment serai-je sauvé? Celui-ci quitta sa tunique, ceignit ses reins, éleva les mains vers le ciel et dit : Voilà comment le moine doit être : Dépouillé de tout le matériel de la vie et crucifié. L’athlète combat dans les luttes et le moine doit élever ses mains en croix vers le ciel en invoquant Dieu. L’athlète se dépouille de ses habits pour combattre dans le cirque, ainsi le moine doit être nu et imma- tériel ; (l’athlète) est oint d'huile et instruit par un ancien sur la manière de combattre. C’est ce que fait Dieu qui nous donne la victoire.

(1) B, p. 734, 78; L, fol. 990; Coislin 127, fol. 60. M, 864, 22; 1045, 4. (2) Coislin 127, fol. 60; M, 804, 2. (3) Coislin 127, fol. 60: M, 864, 24. (4) M et C 127 : l'ombre de nos corps. (Ὁ) Coislin 127, fol. 60; M, 801, 26, (6) Coislin 127, fol. 60; M, 864, 27. (7) B, p. 497, 158; Paul, 406. Coislin 127, fol. 108"; M, 891, 16. La fin manque dans le latin et dans le Ms. 127.

60 REVUE DE L'ORIENT CHRÉTIEN.

DE LA TEMPÉRANCE.

144. Une fois (1), à Scété, on donna une coupe de vin à un vieillard. Il la rendit en disant : Enlevez-moi ce (poison) mortel. A cette vue, les autres qui mangeaient avec lui ne la recurent pas non plus.

145. Un frère (9) eut faim dès le matin et combattit avec sa pensée pour ne pas manger avant la troisième heure. Α la troisième heure, il s’obligea à attendre la sixième, puis il brisa le pain et s’assit pour manger; mais il se leva encore et dit à sa pensée : Attendons jusqu'à la neuvième heure. La neuvième heure arriva, il pria et vit la force (de la tentation) qui montait, comme une fumée, de son travail manuel, et la faim le quitta.

146. Le disciple (3) d'un certain vieillard racontait de son abbé que durant vingt ans entiers il ne se coucha pas sur le côté; mais il dormait assis sur le siège il travaillait. Il mangeait, ou chaque deux jours, ou chaque quatre jours, ou chaque cinq jours, et cela durant vingt ans. Lors- qu'il mangeait, l’une de ses mains était étendue en prière et il mangeait de l’autre. Je lui dis : Qu'est-ce que cela, abbé, pourquoi fais-tu ainsi? Il me répondit : Je place le jugement de Dieu devant mes yeux et je ne puis le supporter. Un jour que nous faisions l'office, je m'oubliai et je m'écartai du psaume ; à la fin de l'office, le vieillard me dit : Lorsque je fais l'office, j'imagine qu'il y sous moi comme un feu brûlant et ma pensée ne peut s’en écarter ni à droite ni à gauche. était ta pensée lorsque nous fai- sions l'office pour que tu en aies oublié le psaume? Ne sais-tu pas que tu te trouves en présence de Dieu et que tu parles à Dieu?

Une fois, le vieillard sortit durant la nuit et me trouva couché dans la cour de la cellule; il pleura sur moi et dit en pleurant : est donc la pensée de celui-ci pour qu'il dorme ainsi avec tranquillité !

147. Un frère alla trouver un vieillard très estimé et lui dit : Je souf- fre. Le vieillard lui dit : Reste dans ta cellule et Dieu te donnera le repos.

148. On apporta (4) aux Cellules une jarre (5) de vin comme prémices, afin qu'on la donnât à boire aux frères. L’un des frères montant sur la voûte pour s'enfuir, la voûte tomba, et ceux qui sortirent au bruit le trou- vèrent à terre et ils commencèrent à le blâmer et à dire : C’est bien fait, ami de la vaine gloire. L'abbé l’accueillit et dit : Laissez mon fils, il fait une bonne action. Vive le Seigneur! on ne rebâtira pas cette voûte de ma

(1) B, p. 470, 78; Coislin 127, fol. 77 : « il y eut une fête »; M, 871, 53.

(2) B, 468, 69; L, fol. 26". Paul, 87; Coislin 127, fol. 77; M, 871, 58. Paraphrasé dans M, 740, 4. :

(3) Cf. B, p. 533, 246; Coislin 197, fol. 77%.

(4) Β, Ρ. 471, 79; Coislin 127, fol 775: Μ, 871; 584.

(9) Ce mot manque dans le dictionnaire. Le syriaque porte seulement : « Une autre fois, on envoya des prémices de vin, pour en donner une coupe à chaque frère ».

HISTOIRES DES SOLITAIRES ÉGYPTIENS. GI

vie pour que toute la terre sache que la voûte est tombée aux Cellules à cause d’une coupe de vin.

149. Un vieillard (1) vint en trouver un autre qui dit à son disciple : Fais-nous un peu de lentilles, et il les fit, et : Mouille-nous des pains, et il les mouilla. Ils restèrent à parler de choses spirituelles jusqu’à la sixième heure du jour suivant, et le vieillard dit à nouveau à son disciple : Fais nous un peu de lentilles, enfant. Il répondit : Je l’ai fait dès hier. Et ainsi ils mangérent.

150. Un autre vieillard (2) vint trouver l’un des pères : Celui-ci, ayant fait cuire un peu de lentilles, lui dit : Faisons un petit office, et l’un ter- mina tout le psautier et l’autre récita par cœur les deux grands prophètes. Lorsque le matin fut venu, le vieillard s’en alla et ils oublièrent de manger.

151. Un vieillard (3) tomba malade et, ne pouvant prendre de nour- riture durant plusieurs jours, son disciple lui demanda d’accepter un pe- tit plat de légume (4). Il alla le faire et le lui apporta pour manger. Or il y avait là, suspendu, un vase dans lequel se trouvait un peu de miel etun autre vase avec de l'huile de graine de lin qui sentait mauvais parce qu’elle ne devait servir qu’à (garnir) la lampe. Le disciple se trompa et, au lieu du miel, il mit de cette (huile) dans la nourriture du vieillard. Quand le vieil- lard la goûta, il ne dit rien, mais la mangea en silence. Le frère l’obligea à en manger une seconde fois, et il le fit malgré sa répugnance. A la troisième fois, il ne voulut plus manger, mais dit : En vérité, je ne puis manger, enfant. Celui-ci répondit vivement : C’est bien, abbé, je mangerai avec toi. Quand il eut goûté et senti ce qu'il avait fait, il se prosterna et dit : Mal- heur à moi, abbé, voilà que je t'ai tué et tu as mis ce péché sur ma (cons- cience) puisque tu n'as pas parlé. Le vieillard dit : ΝΘ sois pas peiné, enfant, si Dieu avait voulu que je mange du miel, tu l'aurais eu sous la main pour le mettre.

152. On racontait d’un vieillard (5) qu'il désira un jour une petite figue (6). Quand il l’eut, 1l la pendit devant ses yeux et se repentit sans se laisser vaincre par le désir, il se dompta, si grande qu’eût été sa concu- piscence. ΩΣ

153. Un frère (7) alla voir sa sœur qui était malade dans certain cou- vent. Or, elle était très religieuse et, comme elle ne voulait pas voir d'homme ni donner prétexte à son propre frère de venir parmi les femmes, elle lui fit dire : Va, mon frère, en priant pour moi, et, par la grâce du Christ, je te verrai dans le royaume des cieux.

(1) Coislin 127, fol. 78; M, 871, 56.

(2) B, p. 466, 64. Coislin 127, fol. 78; M, 871, 57.

(3) Coislin 127, fol. 78: M; 871, 59; 767, 51.

(4) Nous traduisons comme λαχάνιον. Le latin porte : « Fecit de farinula lenti- culam, et zippulas ».

(9) Coislin 127, fol. 78; M, 767, 50; 872, 60.

(6) « Un concombre » M.

(7) B, p. 881, 158; Paul, 226; Coislin 127, fol. 78"; M, 760, 35; 872, 6L.

02 , REVUE DE L'ORIENT CHRÉTIEN.

154. Un moine (1), rencontrant des moniales sur son chemin, s’écarta de la route. La supérieure lui dit : Si tu étais un moine parfait, tu nenous aurais pas regardées comme des femmes (2).

155. Un frère (3) porta ses derniers petits pains aux cellules, et con- voqua (au repas) une table de vieillards. Lorsque chacun d'eux eut mangé près de deux petits pains, il s'arrêta. Le frère, connaissant leur grand ascétisme, s’excusa et dit : Par le Seigneur! mangez jusqu'à ce que vous soyez rassasiés. Et ils mangèrent dix autres petits pains. Telle est la proportion que ces véritables ascètes observaient entre la nourriture et leur besoin (4).

156. Un vieillard fut affligé d'une grave maladie (5) au point que ses entrailles rejetaient beaucoup de sang. Des sébestes secs ‘6) se trouvaient justement en la possession d’un certain frère qui fit une bouillie et les mit dedans. Il les porta au vieillard et le pria de les goûter, disant : Fais charité, mange, peut-être cela te sera-t-il bon. Le vieillard le regarda lon- guement et dit : En vérité, je voudrais que Dieu me laissât dans celte maladie durant trente autres années. Le vieillard dans une si grande infirmité n’accepta même pas de manger une petite bouillie et le frère, la prenant, retourna à sa cellule.

157.— Un ‘autre vieillard (7) demeurait dans le grand désert. Il arriva qu'un frère, le rencontrant, le trouva malade. I le prit, le lava, fit un peu de bouillie avec ce qu'il avait apporté et lui offrit à manger. Le vieil- lard lui dit : En vérité, frère, j'avais oublié que les hommes avaient cette consolation. Il lui porta aussi une coupe de vin; en la voyant, il pleura et dit : Je n’avais pas pensé boire du vin avant ma mort.

158. Un vieillard (8) eut l’ascétisme de ne pas boire durant quarante jours; lorsqu'il avait la fièvre, il lavait le seau, le remplissait d’eau et le suspendait devant lui. Un τ lui demandant pourquoi il faisait cela, il répondit : Afin que je souffre davantage lorsque j'ai soif et que je reçoive de Dieu une récompense plus forte.

199. Un frère (9) voyageait avec sa mère qui était vieille. Lorsqu'ils arrivèrent au fleuve, la vieille femme ne pouvait passer; son fils prit son maphorion (sa pèlerine) et s’en enveloppa les mains pour ne pas toucher le corps de sa mère, puis il la porta et la passa de l’autre côté. Sa mère lui dit : Mon fils, pourquoi as-tu enveloppé tes mains? II lui dit : Parce

(1).B, p- 715, 34. Coislin, fol. 78"; M, 872, 62.

(2) Le latin porte : « tu ne nous aurais pas regardées et tu maurais pas vu que nous étions des femmes ».

(3) Β, p. 468, 71. Coislin 127, fol. 78"; M, 872, 64.

(4) Ils mangeaient donc au sixième de eur faim.

(9) B, p. 467, 66; L, fol. 15r. Coislin, fol. 78; M, 872, 65.

(6) Le latin porte « nixa sicca » et semble conclure, dans l’'Onomasticon, qu’il peut s'agir de pruneaux.

(7) Coiïslin 127, fol. 78"; M, 873, 66.

(8) B, p. 468, 68; L, fol. 22; Paul, 87; Coislin 127, fol. 79;.M, 873, ne 67,

(9) B, p. 988, 387 ; Paul, 226; Coislin 127, fol, 79; M, 873, 68.

à :

HISTOIRES DES SOLITAIRES ÉGYPTIENS. 65

que le corps de la femme est un feu et qu'il nous rappelle d’autres (femmes), c’est pour cela que j'ai agi ainsi (1).

160. L'un des pères dit : Je connais un frère aux Cellules qui jeüna la semaine de la Pâque, puis, lorsqu'on se réunit au soir, il s'enfuit pour ne pas manger dans l’assemblée, il fit cuire de petites bettes et mangea sans pain (2).

161. Le prêtre de Scété alla une fois près du bienheureux Théophile, archevêque d'Alexandrie (3); lorsqu'il revint à Scété, les frères lui deman- daient : Comment est la ville? Il leur dit : En vérité, frères, je n'ai vu le visage de personne (4), sinon celui de l'archevêque. Les auditeurs furent étonnés et lui dirent : Ils avaient donc été détruits, abbé? Il leur répondit : Non, mais ma raison ne m'a pas imposé de voir quelqu'un. Les auditeurs furent dans l'admiration, et sa parole les fortifia pour préserver leurs yeux de la curiosité.

162. Les pères allèrent une fois à Alexandrie (5), convoqués par le bienheureux archevêque Théophile pour prier et pour détruire les temples. Pendant qu'ils mangeaient avec lui, on apporta de la chair de jeune veau etils mangèrent sans le remarquer. Puis, l'archevêque prenant un mor- ceau le donna au vieillard son voisin et dit : C’est un bon morceau, mange, abbé. Ils répondirent : Jusqu'ici nous avons mangé des légumes, si c’est de la viande nous n'en mangeons pas; et aucun d’eux ne voulut en

gouter. N

DE LA GUERRE QUE NOUS FAIT L'IMPURETÉ.

163. Un frère (6) était combattu par l’impureté et la guerre était comme un feu brülant jour et nuit dans son cœur. Le frère combattait pour ne pas céder à sa pensée. Au bout d’un long temps, la guerre cessa sans avoir abouti à cause de la résistance du frère et aussitôt la lumière vint dans son cœur.

164. Un autre frère était combattu par l’impureté (7). Il se leva de nuit, alla près d’un vieillard et lui fit connaître ses pensées. Le vieillard

(1) B, p. 478, no 102. Coislin 127, fol. 79; M, 873, n°69. Le latin porte : « dans (sa) cellule. »

(2) Syriaque : « il s'enfuit à sa cellule, pour ne pas manger dans l'assemblée, et il mangeaiït un peu de bettes pour cacher son ascétisme ».

(3) B, p. 698, 7. Le syriaque ne nomme pas Théophile. Coislin 127, fol. 79; M, 871, 55.

(4) Syriaque : « Lorsqu'il revint à Scété, et qu’il voulut fortifier les frères, il leur dit : Je vous avais entendus dire qu'Alexandrie est le siège d’une nom- breuse population, en vérité je vous le dis, moi qui y ai été, je n'ai vu le vi- sage de personne ».

5) B, p.884, 149; Coislin 127, fol. 79; M, 872, 68.

(6) B, p. 605, 595; L, fol. 85: Paul, 210; M, 876, 12.

(7) Paul, 59; B, p. 655, 556; L, fol. 8". Paraphrasé dans M, 743, 9; M, 876, pe 15. Le latin ajoute quelques lignes à la fin.

64 REVUE DE L'ORIENT CHRÉTIEN.

le consola, il retourna à sa cellule, et voilà que la lutte recommencait en lui. Il retourna près du vieillard et le fit ainsi souvent. Le vieillard ne le chagrina pas, mais lui dit ce qui pouvait lui être utile et ajouta : Ne t'enferme pas, mais viens plutôt, lorsque le démon te combat, réprimande- le et, ainsi réprimandé, il s’en ira; rien ne chagrine le démon de l’im- pureté comme de révéler ses œuvres et rien ne le réjouit comme de cacher les pensées qu’il inspire.

165. Un frère (1) était attiré vers l’impureté, il résistait (2) en aug- mentant son ascétisme et en préservant sa pensée des mauvais désirs. Enfin il se rendit à l’assemblée et révéla la chose à tout le monde. Tous recurent l’ordre de prier Dieu pour lui durant une semaine et la lutte cessa.

166. Un vieillard (3) solitaire disait contre les pensées d'impureté : Veux-tu être sauvé après ta mort? Va te fatiguer, va travailler, va cher- cher et tu trouveras, veille et frappe et on t'ouvrira. Dans le monde il y a des gladiateurs (4) qui sont couronnés lorsqu'ils ont beaucoup frappé, résisté et montré du courage; souvent un seul, frappé par deux, supporte courageusement ses blessures et vainc ceux qui l’ont frappé. Vois quel courage pour des avantages charnels ! Toi donc résiste avec courage et Dieu combattra l'ennemi à ta place.

167. Un autre vieillard disait des mêmes pensées (5): Fais comme celui qui passe sur la place publique devant une taverne, il sent le potage et quelque rôti; si cela lui plaît, il entre et mange ; si cela ne lui plait pas, il le sent seulement et continue son chemin. Toi de même, chasse bien loin toute mauvaise odeur, lève-toi et prie en disant : Fils de Dieu, se- cours-moi. Fais cela aussi pour les autres’ pensées, car nous ne pouvons pas extirper les passions mais seulement leur résister.

168. Un frère (6) interrogea un vieillard disant : Si un moine tombe en tentation, il est affligé parce qu'il passe du progrès à la défaillance, et il travaille jusqu'à ce qu'il se relève; mais celui qui vient du monde fait du progrès parce qu’il part du commencement. Le vieillard lui répon- dit : Le moine qui tombe en tentation est comme une maison qui tombe. Si sa pensée se purifie au point de rebâtir la maison tombée, il trouvera beaucoup de matériaux : les fondements, les pierres, les bois, et 1] pourra avancer beaucoup plus vite que celui qui n’a pas encore creusé ni jeté de fondement et qui n’a aucune avance mais qui travaille dans l’es- poir de terminer. Il en est de même du travail du moine : s’il tombe dans la tentation et se convertit, il a beaucoup d'avance : la méditation, la

(1) M, 877, πο 14: Paul, 59; B, p. 656, ne 597; L, fol. 9"; Coislin 127, fol. 87».

(2) Le latin ajoute : « durant quatorze ans ».

(3) B, p. 670, 590; Coislin 127, fol. 87"; M, 877, 15.

(4) Cf. supra, 39. Le syriaque rend ce mot par « athlètes »; le latin par « pan- cratiarii ».

(5) B, p. 669, no 589. Coislin 127, fol. 87"; M, 877, ne 10.

(6) Paul, 15; M, 877, πο 18,

HISTOIRES DES SOLITAIRES ÉGYPTIENS. 62 psalmodie et le travail manuel, ce sont les fondements; mais tandis que le novice apprend tout cela, l’autre arrive au premier ordre.

169. Un frère (1), tourmenté par l’impureté, alla trouver un grand vieillard et le supplia disant : Fais charité, prie pour moi, je suis tour- menté par l’impureté. Le vieillard pria Dieu à son sujet. J1 vint une seconde fois près du vieillard et lui en dit autant, et celui-ci ne négligea pas d’implorer Dieu pour lui et dit : Seigneur, révèle-moi le cas de ce frère et d’où vient que je t'ai imploré et qu'il n’a pas trouvé la tranquillité? Et Dieu lui révéla ce qui le regardait et il le vit assis, avec l’esprit d’im- pureté près de lui. Un ange avait été envoyé pour le protéger et s’irritait de ce que le frère ne recourait pas à Dieu, mais prenait plaisir aux pensées et abandonnait son esprit à toute leur action. Le vieillard connut donc que la cause provenait du frère, et lui dit : C’est toi qui es d'accord avec tes pensées! Puis il lui apprit à résister aux pensées et le frère, ramené à la raison par la prière et l’enseignement du vieillard, trouva le repos.

170. Le disciple (9) d’un grand vieillard fut combattu un jour par limpureté. Le vieillard, le voyant découragé, lui dit : Veux-tu que je demande à Dieu de te délivrer de cette lutte? L'autre répondit : Je vois, abbé, que je peine, mais je vois aussi que cette peine me porte des fruits ; demande donc seulement à Dieu de m’accorder la patience. Son abbé lui dit : Je vois maintenant que tu es en progrès et que tu me surpasses.

171. On racontait (3) qu'un vieillard vint à Scélé avec un fils encore à la mamelle, qui ne savait ce que c'était qu’une femme. Lorsqu'il devint homme, les démons lui montrèrent des figures de femmes, et il annonça à son père qui fut fort étonné. Un jour qu'il monta en Égypte avec son père et vit des femmes, il lui dit : Abbé, voilà ceux qui venaient près de moi, durant la nuit, à Scété. Et son père lui dit : Ce sont les moines des villages, enfant, ceux-là ont certain costume et les ermites en ont un autre. Le vieillard s’étonna comment, même dans le désert, les démons lui avaient montré des figures de femmes, etaussitôt ils retournèrent dans leur cellule.

172. Un frère luttait à Scété (4); l'ennemi lui rappela le souvenir d’une femme très belle et le tourmenta beaucoup. Par un effet de la Pro- vidence, un autre frère, venant d'Égypte à Scété, lui dit, tout en parlant, que la femme d’un tel était morte. Or c'était celle pour laquelle il luttait. Il prit donc sa tunique, s’en alla de nuit, ouvrit son tombeau, essuya le pus du cadavre avec sa tunique et le porta à sa cellule. Il plaça cette puanteur près de lui et combattit ses pensées en disant : Voilà l’objet de concupiscence que tu convoitais, tu l'as, rassasie-toi. Et il demeura ainsi dans cette puanteur jusqu’à ce que la lutte eût cessé.

(1) B, p. 660, ne 571; Paul, 64; L, fol. 106"; M, 745, no 13; Coislin 127, fol. S7r. * Le latin est une paraphrase; M, 878, ne 19.

(2) Paul, 210; Coislin 127, fol. 88; L, fol. 8"; M, 742, 8. Le latin allonge beaucoup; M, 878, 20.

(3) Paul, 210; Coislin 127, fol. 88; M, 878, ne 21.

(4) B, p. 666, 583; L, fol. 16*; Paul, 210. Coislin 127, fol. 88"; M, 744, ne 11; 878, 22.

ORIENT CHRÉTIEN,

ot

00 REVUE DE L'ORIENT CHRÉTIEN.

173. Un homme alla un jour à Scété voulant devenir moine (1); 1] avait avec lui son fils qui venait d'être sevré. Lorsque celui-ci grandit, il eut à lutter et dit à son père : Je vais dans le monde, car je ne puis sup- porter la lutte. Son père le pria longtemps et le jeune homme lui dit encore : Abbé, je ne puis plus résister, laisse-moi partir. Son père lui dit: Écoute-moi, mon fils, encore cette fois : prends quarante couples de pain et des branches tresser) pour quarante jours, puis va dans le désert intérieur et reste quarante jours, puis que la volonté du Seigneur soit faite. Il obéit à son père, alla au désert et souffrit à tresser des branches sèches et à manger du pain sec. Il y demeura vingt jours et vit un prodige (diabolique) venir près de lui. Il vit devant lui comme une négresse très fétide, au point qu'il ne pouvait supporter son odeur. Il la chassait donc et elle lui dit : Je parais douce aux cœurs des hommes, mais, à cause de ton obéissance et de ton travail, Dieu ne m'a pas laissée te séduire et te (ca- cher) ma puanteur. Il se leva, rendit grâces à Dieu, vint près de son père et lui dit : Je ne veux plus aller dans le monde, abbé, car j'ai vu son action et la puanteur (de la femme). Son père fut édifié à son sujet et lui dit : Situ avais attendu les quarante jours et si tu avais observé mon précepte, tu aurais vu mieux que cela.

174. On racontait d’un père que c'était un séculier et qu’il regrettait sa femme (2). Il le raconta aux pères, et ceux-ci, sachant que c’était un travailleur qui en faisait plus qu'on ne le lui disait, lui imposèrent un genre de vie qui affaiblit son corps au point qu'il ne pouvait se tenir debout. Par un effet de la divine Providence, un père étranger vint à Scété ; il passa devant sa cellule, la vit ouverte et passa, fort étonné de ce que personne n’était sorti à sa rencontre. H se retourna donc et frappa en disant : Peut-être que ce frère est malade. Après avoir frappé, il entra et le trouva en grande faiblesse. Il lui dit : Qu'as-tu, frère? Et il lui raconta disant : Je suis un séculier et maintenant l'ennemi me combat au sujet de ma femme, je l’ai raconté aux pères qui m’ont imposé diverses lignes de conduite et, en les suivant, je suis devenu malade tandis que la lutte augmente. Le vieillard l’entendant fut affligé et lui dit : Certes les pères, en hommes d'autorité, t'ont imposé de bonnes lignes de conduite, mais si tu veux écouter mon Humilité, laisse tout cela, prends un peu de nourriture en son temps, fais ton petit office et confie tous tes soucis au Seigneur, ce que tu ne peux faire avec tes durs travaux. Car notre corps est comme un habit : si tu t'en occupes, il dure, mais si tu ne t’en occupes pas, il pourrit. Il lui obéit et fit comme il le disait et, en peu de jours, la tentation le quitta.

(A suivre.)

(1) B, p. 663, 577. Ms. 1590, p. 3%; L, fol. 162"; Paul, 210; Coislin 127, fol.

(2) B, p. 708, 20; Paul, 213; Coislin 127, fol. 89; M, 886, 40.

UNE VIE ABRÉGÉE DE SAINTE MARINE

L'ouvrage de politique, bien célèbre, intitulé δή αἰ) al- mulük ou Lampe des princes (1), dont l’auteur est le soûfi espagnol Aboû Bekr Mohammed ibn al-Walid at-Tortoüchi, qui florissait pendant le xrr° siècle de J.-C. (2), renferme un grand nombre de récits édifiants, d'exemples de pénitence et d’ascé- tisme chrétien insérés par l’auteur, quoiqu'il soit musulman, afin de bien démontrer la nécessité de la vertu appelée az-10hd ou mépris du monde, non seulement pour tous les hommes, mais surtout pour les princes et les rois.

Les lignes suivantes nous font connaître un de ces récits (3) : la fille d’un roi quitte secrètement son palais pour se dévouer à Dieu dans la solitude, elle cache son sexe sous des vêtements d'homme, elle se fait admettre dans un couvent de moines: elle y pratique d'héroïques vertus qui lui conquièrent l'admira- tion des religieux du monastère; lorsqu'elle meurt, les moines chargés de laver son corps pour l'ensevelir reconnaissent que cest une femme; pénétrés de respect et de vénération, les moines prennent la résolution de ne pas inhumer aussitôt la sainte dépouille, mais de la soutenir sur leurs bras jusqu’à ce que la putréfaction l'ait entièrement consumée.

On le voit : ce récit a quelques traits communs avec la Vie de sainte Marine : il s’agit d'une femme qui a vécu sous des habits d'homme dans un couvent de religieux, son sexe n’est reconnu qu'après sa mort. En revanche, la fausse accusation du péché de fornication avec toutes les conséquences qui sont bien connues dans l’histoire de sainte Marine, manque tout à fait dans notre récit. Une autre différence remarquable entre

(1) s5sh)l Me édit. du Caire (1289 hég. 1872 J.-C.). (2) Cfr. BROCKELMANN, Geschichle εἰ. arabischen Lilteratur, 1. 459, (3) Sirâdj, page 39, ligne 4.

+

68 REVUE DE L'ORIENT CHRÉTIEN.

les deux histoires, c’est celle des honneurs funèbres tout extra- ordinaires et presque invraisemblables qu'on accorde au ca- davre (1).

ΕΥ̓

Ἔκ

Le récit du Sirddj est-il une nouvelle rédaction arabe de la Vie de sainte Marire, plus simple, plus abrégée, moins légen- daire et romanesque que toutes les versions connues, arabes ou autres (2)?

A première vue, c'est une réponse affirmative qu'il faudrait donner à cette question, si l'on ne trouvait, dans les récits hagiographiques des anciens monastères de l'Orient chrétien, des vies de femmes, autres que Marine, qui auraient aussi fui le monde, se faisant admettre dans des couvents de moines, déguisées sous des habits d'homme (3). II est donc très possible que la femme du récit du Sirädj soit une de celles-ci, puisque l’auteur ne nous pas conservé son nom. C'est pourquoi, avant de résoudre définitivement la question, il nous faudrait entreprendre une collation attentive de tous ces récits de femmes-moines avec le récit du Sirddj. Mais cet examen comparatif nous ferait sortir de la sphère de nos études habi- tuelles; nous laissons donc à d’autres le soin de le faire, et nous nous bornons à communiquer aux lecteurs de la Revue de l'Orient chrétien le texte arabe et la version du récit du Siräd).

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# *#

La filiation chrétienne du récit me semble indubitable, non seulement en raison de l'emploi exclusif du mot syriaque- chrétien > pour exprimer couvent monastère, mais encore parce que l'idée et le fait du déguisement d'une femme sous

(1) Cés témoignages de vénération sont si exceptionnels que rien de semblable ne se trouve dans l’œuvre de D. Bessé, Les. Moines d'Orient (Paris, Oudin, 1900) au chapitre on énumère les plus extraordinaires de ces moyens de canonisa- tion privée qui étaient alors en vogue. (Cfr. p. 545 et seq.)

(2) ROC, VII, 1902, p. 245. Voir dans cette même Æevue (VI, 1901, p. 283, 397, 572; VII, 1902, p. 156, 478, 647; VIII, 1903, p. 288, 614; IX, 1904, p. 240, 409) les versions syriaque, latine, grecque, copte, allemande, francaise, éthiopienne.

(3) ROC, VI, 1901, p. 278, n.3 et IX, 1904, p. 561,

UNE VIE ABRÉGÉE DE SAINTE MARINE. 69

des habits d'homme est et a toujours été chose inouïe chez des musulmans dont la religion défend en termes formels ces travestissements (1). Au contraire, c'est un thème assez com- mun dans l’hagiographie des anciens monastères chrétiens (2). Cependant, il y a dans le texte même du récit une petite difficulté, touchant la filiation chrétienne : c'est que l'auteur du Sirädj déclare l'avoir puisé à une source dont le titre semble israélite; on pourrait donc se demander s’il ne s’agit pas d’un récit provenant d’un monastère essénien ou thérapeute. Cependant, à notre avis, les mots dont se sert l’auteur pour commencer son récit : ἘΠ AN En) LL! Lrs « Une des choses les plus merveilleuses qu'on rapporte dans [165 récits] israélites » ne signifient pas qu'il l'emprunte directement à une source israélite, mais seulement qu'il le tire d’un ouvrage historique musulman, le Xifäb al-Israiliyat. L'auteur de cet ouvrage, Wahb ibn Munabbih, du commencement du siècle de l'hégire (vin de J.-C.), se vantait, au dire d'Ibn Qouteïba (3), d'avoir puisé aux sources religieuses les plus nombreuses et les plus variées pour rédiger ses compilations historiques. C'est pour cela que son nom (celui de Wahb ibn Munabbih) est très souvent invoqué par les écrivains musulmans, surtout soûfis, comme autorité hors ligne en tout ce qui se rapporte à la vie, aux miracles et aux sentences de Jésus-Christ. Après avoir fait toutes ces réserves, je n'oserais donc rien décider, soit parce que la filiation chrétienne du récit n’est pas absolument certaine, soit parce que nous ne connaissons pas toutes les légendes hagiographiques consacrées aux femmes- moines, mais en tout cas, même si notre héroïne n'était pas

() Cr. ον à CES au Cheikh ‘Upaïd ad-Darir (édit. du Caire, 1317 hég.), p. 131, L. 18: « Le Prophète maudit les hommes efféminés ainsi que les femmes qui se font passer pour hommes. » « Le Prophète maudit l’homme habillé en femme, ainsi que la femme déguisée sous des habits d'homme. » Cfr. _gibes OA sus τὸν Cl, ἀν }}} I ἐν LUI (Publi- cations arabes du Gouvernement Général de l'Algérie), Alger, Fontana, 1907 ; pages 37-38.

(2) Cfr. D. BESSE, op. cil., Ὁ. 65.

(3) Apud I8x Kuazuikax (édit. Boulaq, 1299 hég.), IL, 106, biographie de Wahb. Cfr. BROCKELMANN, 0p. cil., I, 69, pour la bibliographie de cet historien. Il était juif converti à l’Islâm. Cfr. Dee pol RS d'al-Ghazzali (édit. Caire, 1317 hég.), p. 34. à

70 REVUE DE L'ORIENT CHRÉTIEN.

sainte Marine, notre courte publication démontrerait qu'un récit assez analogue à la Vie de sainte Marine était déjà répandu parmi les musulmans avant le vin siècle de J.-C., c’est-à-dire à une date plus ancienne que celle du texte latin de la Vie de sainte Marine (inséré par Rosweyde dans son recueil des υἱέω et verba seniorum), que M. Clugnet considérait comme la rédaction primitive (1). |

TEXTE ARABE

(Extrait du Sirddj al-mulük, édit. du Caïre, 1289 h., pag, 28, 1. 4). D et ANNE CEE AE "Ὁ DaAiis cp ces ele GA & ans él Gb Guru je de AU de Vs Le LI pus de 3e cell ἘΠ X>)\ 4 δἰ νῦξ] ὧς ds ls, λας οὐ πὰ ke e&ls Al a ὧ“ ΠΣ 4, al Le JucYl ἀμ] 909 ΡΥ ais αοἱ..5- 6] 42. Ab St οἱ CN Qu all L éd: 2. )5}9 Cyabiall οἷα sl; Q* pAÏ Ja! 4) 759 ἀφο pl A ce lan Hd on lis G Lt pull dde sin bal lonmel UN Ge d'os 1 x 4 buses Lasdés Wihé Qi le ls GA ces re LE xelodls CSV Ge ἰρ λασο LA & Le lobes : Doll ei) ὧς JS: de ὧς ὯΝ de A>| 9 εἰς. ΕΈΕΝ pe les cobés τὰν Οἱ kgs du de 45 lu

Le Ace ce ||

(1) ROC, IX, 1904, p. 562, n. 2.

UNE VIE ABRÉGÉE DE SAINTE MARINE. 71

TRADUCTION

Une des choses les plus merveilleuses qu’on rapporte dans le Livre des traditions israélites c'est qu'une fille des rois embrassa la vie ascétique, renonçant au monde et se dévouant à Dieu par la pénitence. Elle quitta la cour et on la rechercha en vain; jamais on n’entendit plus parler d'elle et il fut impossible de découvrir la trace de ses pas.

Il y avait par un couvent de moines adonnés à la vie dévote. Un jeune homme vint les rejoindre pour se dévouer à la perfection. Ils observèrent en lui une telle assiduité, un tel effort, dans la pratique de la vertu, une telle fidélité aux règles monastiques touchant la distribution du temps et une persévérance si continuelle dans les œuvres de piété, qu'il surpassa en vertu tous les moines qui demeuraient au couvent.

Il ne cessa pas de se conduire ainsi tout le temps que Dieu voulut, jus- qu’à ce que, ses jours finis, la mort arriva vers lui, et le jeune homme lui paya son tribut.

Les moines du couvent, si détachés du monde, si austères, furent déso- lés d’une telle perte. Ils versèrent des larmes sur lui et ensuite, quand ils commencèrent à faire l’ablution du cadavre, ils reconnurent que c'était une femme. Recherches et vérifications faites, elle était la fille du roi. Tout ceci accrut l’admiration et la vénération qu'ils avaient auparavant pour lui. Ils se consultèrent les uns les autres sur les honneurs tout nouveaux qu’il fallait rendre à son corps, et on décida de ne pas l’inhumer sous la terre mais qu'ils le soutiendraient sur leurs mains.

Ainsi donc, ils firent l’ablution funèbre et, après l'avoir enveloppé dans la toile du linceul, ils firent les funérailles. Ensuite ils se mirent tous à la soutenir sur leurs mains et sur leurs avant-bras. Aussitôt que l’un d'eux éprouvait de la fatigue, un autre venait soutenir la charge avec ceux qui restaient. Et toutes les personnes qui arrivaient au couvent pour se dévouer au service de Dieu, se mettaient à la soutenir avec eux, jusqu'à ce qu'elle fût consumée par la putréfaction et que les articulations de ses membres se déchirèrent après une longue durée de temps. C'est alors qu'elle fut inhumée. Que la miséricorde de Dieu soit sur elle!

Madrid. Miguel AsIN PALACIOS.

ÉTUDE SUR LA CONVERSION DE L’ARMÉNIE AU CHRISTIANISME

(Suite) (1)

HousiG ET NERSÈS LE RÉORGANISATEUR DE L'ÉGLISE ARMÉNIENNE ; TENTATIVE DE SCHISME PAR BAB.

25. Les traditions laissées, au point de vue hiérarchique,

par Grégoire et Tiridate, sont fidèlement suivies de leurs premiers successeurs. Diran lui-même n'ose les en- freindre. Le catholicos Verthanès et le roi Khosroès paraissent avoir exactement suivi la direction politique et religieuse, inaugurée par Grégoire et Tiridate. Si leurs actes eurent moins d'éclat, ils ne furent pourtant pas sans mérites. Khosroës le Petit (Pokr), dont Moïse de Khorène parle avec dédain, est appelé un héros par Faustus (IL, 8, 4, 7, 11). L’entente du catholicos et du roi semble avoir été complète : le second, au point de vue politique, resta le vassal de l'empereur, comme le premier demeura, au point de vue religieux, le suffragant de l'archevêque de Cé- sarée. Leur subordination ressort de ce fait, qu'il n’y a point trace d'une rupture entre Grecs et Arméniens. Ne pourrait-on pas voir unindice de cette subordination, dans le nom même de patriarche, que les historiens les plus anciens donnent de pré- férence à l'archevêque de Césarée, encore que ce titre n'ait sou- vent signifié qu'une indépendance relative, et non une auto- nomie absolue (Socrate, V, ὃ; Greg. Naz. oratio XLII, 23)?

Ne fallait-il pas que ce lien à l'égard de Césarée fût bien éta-

(1) Voy. 1907, p. 22, 192, 280, 356.

ÉTUDE SUR LA CONVERSION DE L'ARMÉNIE AU CHRISTIANISME. 72

bli, pour que le fils de Khosroës, Diran, qui regardait d'un œil si jaloux tout ce qui fortifiait pouvoir spirituel du catholicos contre les abus de l'autorité royale, se décidàt néanmoins à en- voyer Housig, son beau-frère ou son beau-fils, recevoir la con- sécration épiscopale dans la métropole de la Cappadoce (1)? Comme Diran dut regretter, plus tard, que le siège du catho- licos ne fût pas isolé, sans autre abri que le trône royal, et dépourvu de vives attaches avec l'Église universelle, quand il entendit le jeune et austère catholicos flétrir, sans ménagements, les graves désordres qui déshonoraient surtout la cour royale : l’adultère, les péchés contre nature, l'oppression des faibles et des petits, l’effusion du sang! Sous ces cinglantes apostrophes, le roi s'irrite et s'emporte jusqu'à la fureur : il fait bätonner Housig, qui expire peu après; il fait étrangler le vénérable Daniel qui imite l'intrépide langage de celui dont on lui offre la succession. Et, tout impatient qu'il est de tenir sous la main une autorité qui exaspère son orgueil en entravant ses passions, Diran n'ose eucore trancher la racine qui attache le patriarcat arménien à l'Église universelle et lui donne, en face de la royauté, son prestige et sa force. Les occasions ne manquent pourtant pas, qui semblent favoriser une tentative de scission. C’est l’époque les fils de Housig, après avoir. été ordonnés diacres malgré eux, se marient, embrassent la carrière mili- taire et, par leur conduite, se proclament positivement indignes de la succession qui leur était destinée. Si l’on en croit Faustus, une grande partie des sujets de Diran ne vaut guère mieux

(1) Faustus (III, 12), après avoir nommé plusieurs des seigneurs qui accompa- gnent Housig à Césarée, ajoute : « et le prince de notre famille de la race des Saharouni ». Plusieurs historiens, entre autres Gelzer (Anfänge et trad. armén., p. 17), ont conclu de ce passage que Faustus, l'historien, était de la famille Saha-

‘rouni. On peut cependant douter qu'il ait fait réellement partie de cette famille, quand on le voit, lui, si partial en faveur des Mamigonian, étaler au contraire sans réticence la perfidie de Pad Saharouni (V, 25, 27). Ce qui parait certain, c’est qu’il composé son /istoire vers la fin du quatrième siècle et qu’il a puisé ses documents, ainsi que le fera plus tard Moïse de Khorène, dans les archives, les dictons, les chants et les traditions populaires. L'œuvre, probablement écrite en grec vulgaire, à été altérée et là, chargée de chiffres fantaisistes et de quel- ques récits fabuleux.

L'auteur de la Généalogie de Grégoire et de la Vie de Nersès, probablement un disciple de Mesrob, paraît avoir tiré une grande partie de ses documents de la - même source. Mais il souvent suivi de près ou copié Agathange et surtout Faustus. Quelques fragments semblent aussi avoir été ajoutés à cette œuvre.

74 οὐ REVUE DE L'ORIENT CHRÉTIEN.

(ΠῚ, 15). A l'entendre, la conversion de ceux qui n'étaient pas initiés à la littérature grecque ou syrienne, ou, comme 1] s’ex- plique, la conversion de la multitude, n'avait été qu’extérieure et forcée; le peuple n’entendait rien aux instructions des doc- teurs; il ne prenait plaisir qu'aux souvenirs de l’ancien culte paien, et continuait de le pratiquer à l'écart, dans l'obscurité des nuits. Ses mœurs étaient à l'avenant. Enfin, celui qui est choisi pour le catholicat, Paren, prêtre de l'Église de St- Jean-Baptiste de Daron, ne paraît guère disposé à résister au roi. Et, pourtant, au lieu d'inviter les évêques arméniens à lui imposer les mains, Diran l'envoie, avec une pompeuse escorte, dans la capitale de la Cappadoce pour y être consacré catholicos. A la mort de Paren, on donnera son siège à Sahag de la fa- mille Aghpianos, bien connue par sa complaisance pour la cour et les partisans de l'autonomie religieuse; et Diran, au lieu de mettre à profit ces circonstances, sollicitera encore pour le ca- tholicos l'imposition des mains du patriarche de Césarée.

26. Nersès le Grand: son éducation, ses qualités, son humilité; raisons de son élection; consécration à Césarée ; le réorganisateur de l'Église arménienne catholique, synode d'Achdichad, réformes disciplinaires; multiplication des églises οἱ des couvents, qu'illustrent quelques religieux par leur austlérilé el leur zèle apostolique; écoles de langue grec- que el syrienne; zèle de Nersès contre les vices et les prati- ques Superstilieuses; sa charilé, ses fondations de bienfai- sance. Evéques formant le conseil du catholicos; Khat, son courageux auxiliaire; protestation de Nersès contre la con- duile d'Arsace; son éloignement de la cour. Depuis la mort de Housig et de Khosroës, le peuple arménien, tout en demeurant catholique, c’est-à-dire uni à l'Église univer- selle, avait continué de déchoir au point de vue de la foi, de la morale évangélique et des pratiques du culte. Faute d’être comprises, les vérités dogmatiques et les règles disciplinaires, laborieusement prêchées par Grégoire et ses trois premiers successeurs, n'avaient, si l’on en croit Faustus, ni persuadé l'esprit ni gagné le cœur de la multitude. A peine avaient-elles commencé de germer dans ce sol peu propice, qu'elles venaient d'être couvertes et, çà et là, emportées par un reflux des su- perstitions et des coutumes immorales du paganisme.

ÉTUDE SUR LA CONVERSION DE L'ARMÉNIE AU CHRISTIANISME, 70

La civilisation chrétienne de l'Arménie menacçait donc de dépérir dans sa première fleur ou d’être facilement fauchée par les mazdéistes de la Perse, quand la Providence éleva sur le trône patriarcal un homme qui, par sa prudence, sa piété, son zèle, son amour pour Dieu, sa charité pour les pauvres, sa pitié pour les humbles, son orthodoxie, enfin par son génie organi- sateur, mérite d'être placé à côté de Basile le Grand.

Formé à la science et à la vertu, à Césarée, alors que Basile, par l'éclat de ses dons, y faisait présager un rôle extraor- dinaire, Nersès annonçait aussi les plus heureuses dispositions. Il paraissait même également apte à se distinguer dans les carrières les plus opposées. De belle prestance, d’une physio- nomie prévenante, il charmait par l’aménité de ses manières autant qu'il en imposait par sa réserve et sa gravité. Dans ce temps de désarroi politique et religieux, deux carrières surtout devaient solliciter un grand cœur : celle des camps ou celle de l'Église. Nersès était devenu soldat; on louait déjà sa bravoure et, ce qui est plus rare, sa conduite irréprochable. L'éclat de sa naissance et d’une récente alliance relevaient encore, aux yeux de la multitude, ces singuliers mérites. Arrière-petit-fils de Grégoire l’Illuminateur par son père Athanakinès, il avait pour mère Bambischen, la fille ou la sœur de Diran.

Son biographe ajoute qu'il épousa Santoukd, fille de Vartan Mamigonian, et que sa femme mourut à Césarée, au bout de trois ans, lui laissant un fils unique, Sahag (HA, 1897, p. 145; Langlois, ἢ. 2, p. 22). Nersès vint alors se mettre au service du jeune roi Arsace, qui, frappé de son esprit de sagesse et d'intégrité, le nomma presque aussitôt son chambellan et son conseiller. Il est à présumer, qu'à ce dernier titre, Nersès ne fut pas étranger à quelques-unes des meilleures mesures prises par le roi pour restaurer la bonne administration du royaume et réorganiser l’armée. Mais, quand le roi eut rappelé les quatre fils d’Ardavazt Mamigonian, réfugiés dans leurs domai- nes au pays de Daïk, quand il eut nommé Vasag commandant en chef de l’armée ou Nahabed, premier .chef, et placé sous ses ordres ses trois frères, Vartan, Vahan et Vrouj avec le titre de chiliarque ou hazarabed, alors l'assemblée générale des satrapes, du clergé et du peuple pressa le roi de restaurer aussi le siège patriarcal, en choisissant le titulaire dans la race de Grégoire

10 REVUE DE L'ORIENT CHRÉTIEN.

l'Illuminateur (1). La foule ne connaissait pas seulement le jeune chambellan pour l'avoir souvent admiré, « dans son bril- lant uniforme, debout derrière le roi, dont il tenait l'épée d'acier, dans son fourreau d'or, attaché à une ceinture ornée de perles et de pierres précieuses ». Elle appréciait plus encore, sans doute, d'autres qualités d'ordre supérieur. Aussi, d'une voix unanime, le proposa-t-elle pour la charge de catholicos.

Conduit en présence du roi et au milieu de l'assemblée gé- nérale, le Thomas Becket de l'Arménie fit tous ses efforts, semble-t-il, pour écarter de sa tête la dignité suprême. Au dire de son biographe et de Faustus, il en vint jusqu à s’accuser publiquement de péchés et d'actes d'impiété qu'il n'avait pas commis. À cette étrange confession d'une conscience égarée par l'excès même de son humilité, le peuple, les satrapes et le roi lui-même poussèrent des éclats de rire; les troupes firent écho à l'assemblée et, à sa suite, elles s'écrièrent : « Que tes péchés retombent sur nous; mais, toi, reprends l'œuvre de ton bisaïeul Grégoire ». Vainement, il se répandit en reproches contre les soldats et essaya de les fléchir par ses objurgations; leurs acclamations redoublèrent : «Eh bien, pécheur, criaïent- ils, nous ne voulons que toi pour notre pasteur ». Séance tenante, au dire de Faustus, ou, selon le biographe, devant l'assemblée qui eut lieu le lendemain, le roi se leva irrité, ar- racha le glaive d'acier des mains de son chambellan; il ordonna « de le lier, de lui couper ses cheveux bouclés, longs, épais, magnifiques, incomparables pour leur beauté, de le dépouiller de ses riches vêtements, de le revêtir d’habits sacerdotaux » ; puis il appela l'évêque Faustos, qui conféra au candidat le

(1) Jan, en arménien, marque la filiation; ani, ouni marquent la possession et terminent d'ordinaire le nom propre des nakharars, Ardzrouni, Pakradouni, etc. Nahabed signifie juge suprême ou chef suprême de l’armée (nah, ou nach, le premier ; bed, tête ou chef). Danouder, maître de maison, ancien de village, seigneur (doun, maison, et der, seigneur). Asbed, chef ou commandant de cavale- rie (Aswa, en sanscrit, signifie cheval). Sbarabed ou Zoravar, chef d'armée; Se- bouh, grand propriétaire : Ischkhan, administrateur d’ane partie de la contrée. Les nakhararq (ceux qui marchent en avant) sont les personnages politiques les plus importants après le roi; vassaux, gouverneurs de province, ils conduisent leurs propres troupes à l'appel du roi: dans les interrègnes, ils défendent les frontières; ils ont coussin à la table royale. Ce titre, d’abord donné aux seuls princes du sang, les rois l’étendirent ensuite à d’autres personnages, en raison de leurs services.

ÉTUDE SUR LA CONVERSION DE L'ARMÉNIE AU CHRISTIANISME. 77

diaconat par l'imposition des mains. Ce que nous savons du caractère de Nersès ne permet pas de douter qu'il ait donné le consentement, sans lequel son ordination eût été nulle. Le bio- graphe, lui, va plus loin : il suppose qu'un ange aurait dicté à Nersès son adhésion (dans Langlois, p. 25; Faustus, IV, 3).

La contrainte dont on usa à l'égard de Nersès met, une fois de plus, en lumière le fait de la transmission du ca/holicat de père en fils, qui a lieu, de préférence, dans la descendance de saint Grégoire. C’est la principale raison qui conduit Gelzer à assimiler à la succession du sacerdoce juif, la succession du haut sacerdoce arménien (Anfänge..…, 132, 136, etc.). Il faut bien reconnaitre que, dans l'Église arménienne, surtout à la période qui nous occupe, on souvent suivi de plus près que dans les autres Églises, tel ou tel usage en vigueur sous l'An- cien Testament. À ce résultat contribuait, entre autres causes, l'importance de l'élément juif mêlé à la population. Mais on excède, croyons-nous, en prétendant que le sacerdoce dans l'Église arménienne primitive se rattache uniquement, comme chez les Juifs, au principe d'hérédité. En réalité, descendre de Grégoire était un titre qui assurait à un candidat son élection au catholicat, pourvu qu'il en fût digne.

Ce nétait point une condition indispensable, ou absolu- ment suffisante. Faute d'un descendant de Grégoire, réunis- sant les qualités requises, on choisissait le catholicos, soit dans la famille rivale des Aghpianos, soit même parmi les prêtres qui étaient simplement les plus dignes, comme le chorévêque Daniel. Plus que l’origine de Nersès, plus que le désir, pourtant réel, de voir l'héritage de Grégoire, notamment le domaine d'Achdichad, faire retour au patriarcat et à l'Église, l'espoir de voir revivre l’apostolat fécond de l'Iluminateur en la personne de Nersès détermina les meilleurs à le choisir pour catholicos. Ce choix fut d’ailleurs confirmé par une assemblée d’évêques, qui se réunit chez le roi; et c’est sur l'attestation des vertus qui le recommandaient pour cette charge, que Nersès fut consacré évêque par l'exarque de Césarée. À ces signes, comme au carac- tère bien chrétien du sacerdoce arménien, on constate sans peine que les Arméniens lui attribuaient une origine non judaïque,

mais directement divine, et que la constitution de leur Eglise

78 REVUE DE L'ORIENT CHRÉTIEN.

ne différait pas essentiellement des autres Églises chrétiennes, reconnues et richement dotées par l'État.

Nersès, raconte son biographe, fut mené triomphalement à Césarée sur le char royal attelé de mules blanches, ayant pour escorte 4.000 cavaliers, à la tête desquels chevauchaient 26 na- kharas et 28 évêques. Faustus, qui est plus ancien, permet de réduire au delà des deux tiers ce pompeux cortège, qui reste encore imposant. La consécration de Nersès n'eut lieu que vers l'an 363, s’il faut ici ajouter foi à Faustus et au biographe, qui l'un et l’autre l’attribuent à Eusèbe de Césarée. Comme dans les cas précédents, l'archevêque ainsi que les évêques conférè- rent l'ordination par l'imposition des mains; on fit ensuite as- seoir Nersès sur un siège épiscopal; on l’acclama et il célébra ensuite la messe (Faustus, IV, 4; le Biographe, loco cit., n. 3).

Par ses sages règlements, ses institutions de bienfaisance, sa vie sainte, apostolique, et le martyre qui en fut le couronne- ment, Nersès est devenu l’un des hommes les plus populaires et les plus justement vénérés de l'Arménie. Peu après son retour de Césarée (365 ?), 11 convoqua les évêques arméniens en synode à Achdichad. Maintes circonstances désignaïient encore ce bourg pour être le centre de la réunion. N'’était-ce pas que se trouvait la première église, fondée par Grégoire, et il avait déposé, ainsi qu'à Pakvan, la plus grande partie des chères reliques apportées de la Cappadoce? N'était-ce pas, Achdichad, enfin, qui, après avoir été, avec Thortan, Ani, Erez, Thil, Paka- van, le principal centre de la résistance longue, acharnée du paganisme, était devenu le centre « d'ordinaire se tenaient les assemblées ecclésiastiques »?

Les Pères portèrent plusieurs décrets, ayant pour objet le rétablissement de la foi et de la discipline, qui s'étaient fort relächées sous le règne de Diran. Ces décrets n'étaient, en général, que la remise en vigueur des Znstitutions dites apos- toliques : On interdit le mariage entre parents, jusqu'au cin- quième degré; on défendit l'inceste et, pensons-nous, le divorce; car ne faut-il pas étendre jusqu'à la prohibition du divorce la recommandation faite aux époux de se garder « une fidélité mutuelle »? et nous savons d'autre part que, sous le pontifi- cat de Nersès, le divorce fut chose inouïe. On condamna aussi la fornication ou, selon lacurieuse expression de Faustus, « les rap-

ÉTUDE SUR LA CONVERSION DE L'ARMÉNIE AU CHRISTIANISME, 79

ports illicites avec les filles d’une beauté remarquable ». On régla jusqu’à l’usage du droit mutuel des époux, en renouve- Jant un précepte de la Loi mosaïque (Levit., vx, 24). C'est à la même influence qu'il faut attribuer la défense de se nourrir du sang et de la chair des animaux. Sans doute, quoique Faustus ne le dise pas, la seule chair interdite ici, en temps ordinaire, devait être celle des animaux étouffés (1). . Le synode d'Achdichad édicta d’autres prescriptions, ayant pour objet la restauration et la construction des églises, la ré- forme et la multiplication des cloitres, la fondation d'établisse- ments de bienfaisance, la suppression des abus et la réforme du clergé et du peuple. Le pontife, qui avait mis en avant ces pro- Jets, eut la gloire de les réaliser en grande partie. Il ne se borna pas à restaurer les églises dévastées, à rétablir les autels ren- versés. Il fit construire de nouvelles églises dans les villes et les campagnes et assura l'entretien de ceux qui les desser- vaient ; il donna plus d'éclat au culte. S'il faut en croire son biographe, 1] aurait fait siéger le clergé divisé en neuf classes, derrière les 400 nakharars, dont 1] avait, dit le même auteur, réglé l'ordre de préséance à la table du roi. Maïs cette dernière affirmation est en désaccord avec le témoignage des anciens historiens, qui attribuent au roi lui-même l'ordre selon lequel devaient siéger les nakharars ayant coussin à la table du roi. Le zèle et l'industrieuse activité de Nersès s'employaient aussi à donner un nouvel essor à la vie religieuse. Il interdit aux moines, ermites ou cénobites, aussi bien qu'aux évêques, de vivre au sein de leur famille, soit dans les villes, soit dans les campagnes. Il établit en plusieurs endroits des couvents, y réunit les moines en communautés, les dota de villages et de fermes. Il bâtit, dans certains bourgs etcertaines villes, des mo- nastères pour les femmes et les fit entourer de murailles. Il désigna d’autres monastères pour la sépulture des princes, des chefs arméniens, et en confia la garde aux religieux. En aug- mentant de la sorte leurs moyens de subsistance, tout en les excitant à la perfection propre de leur état, Nersès fut cause que le nombre des prêtres, des moines et des ermites s'accrut rapi- dement et que les couvents prospérèrent.

(1) Faustus, IV, 4; Act. apost., xv, 20; χχι, 25; Levit., xvu, 14, etc. ; Deuter., x, 16, 29... Gen., 1x, 4.

80 REVUE DE L'ORIENT CHRÉTIEN

Quelques-uns de ces moines exercèrent une profonde in- fluence. Tels furent surtout le Syrien Chaghida, Kint de Daron et le Grec Épiphane, tous disciples du Syrien Daniel. Kint, qui habitait d'ordinaire vers les sources de l'Euphrate, gouvernait un grand nombre de religieux, la plupart anachorètes. Leur régime était austère et semblable probablement à celui qu'avait autrefois suivi Resdagués (Agath. arabe, p. 138, fin) : 115 vivaient dans les anfractuosités de rochers, allaient nu-pieds, n'ayant qu'un seul vêtement de peaux de chèvre ou de brebis, ne buvant que de l’eau, ne se nourrissant que de légumes, d'herbes et de racines (Faustus, VI, 16). Chaghida, après avoir vécu sur la montagne d'Arioudz ou du Lion, se fixa, après la mort de Nersès, dans le canton de Gortouk; il y acquit une grande réputation de thaumaturge. Un jour qu'il traversait un fleuve, il fut emporté par le courant. Son corps ne put être re- trouvé, au grand désespoir de ses trop peu discrets admirateurs, qui escomptaient la mort du saint homme pour s'emparer de sa dépouille. Épiphane séjourna quelque temps au lieu mon- tagneux appelé Athorr Anahda, trône de Anahid, puis dans le désert du grand Dzoph, nommé Mambré, sur la rive du Ma- mouchegh.

F. TOoURNEBIZE. (A suivre.)

Le

ÉTUDE SUR UNE TRADUCTION ARABE D'UN SERMON DE SCHENOUDI

M. Amélineau écrit quelque part (1) : « Je ne crois pas qu'il existe dans les bibliothèques d'Europe un manuscrit arabe ayant trait à ce célèbre moine (Schenoudi); du moins n'en connais pas. » Il était bon d'ajouter cette formule de restriction, car il y a dans une bibliothèque d'Europe que M. Amélineau connait très bien une traduction en arabe d’un sermon de Schenoudi.

Le manuscrit de la Bibliothèque Nationale, fonds arabe, 144, contient du 9 au 20 un sermon que M. Nau avait remarqué dans le catalogue du Baron de Slane (2), et qui jusqu'ici n'a été signalé dans aucune étude sur Schenoudi, ni par M. Amélineau, ni par M. Leipoldt. Voici la notice qui se trouve sous le 144 : « (Fol. 9) Homélie dans laquelle le grand 5. Abou Scheloudah (34 1) archimandrite universel ($ Put ΣΝ ei) in- vite les hommes à se repentir de leurs péchés. » Dans une note, on relève une erreur de lecture du Baron de Slane, bien permise à qui se contente de lire le titre, mais qu'il est facile de corri- ger : « Au lieu de #4 οἱ lisez 594% sl; il s'agit d'Abba Sche- nouti le célèbre archimandrite copte. H. Z. » A la vérité, la forme du noun est un peu insolite, mais en prolongeant la lec- ture du ms. on ne tarde pas à trouver plusieurs exemples de cette graphie défectueuse, et la lecture du nom propre devient tout à fait certaine lorsqu'on remarqué le point diacritique

supérieur qui se promène, un peu en dehors de sa place, au- dessus du #waw.

(1) Mémoires publiés par les membres de la Mission archéologique française au Caire, t. IV, p. xzvur. Cf. Œuvres de Schenoudi, Paris, 1907, p. xvi. (2) Cf. Une version syriaque inédite de la Vie de Schenoudi, par F. Nau, Paris. 1900, page 30, note 5. ORIENT CHRÉTIEN 6

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Voici d’ailleurs les paroles par lesquelles le scribe annonce le sujet de sa copie : « Au nom du Père, et du Fils et du Saint- Esprit, Dieu unique, à lui gloire à Jamais. Nous commençons avec l’aide de Dieu (qu'il soit exalté! ), et la beauté de son secours, à copier l'homélie qu'a prononcée le grand Saint Abou Schenoudah, archimandrite du monde entier, pour avertir l’homme qu'il doit se convertir et revenir de ses péchés et de sa voie perverse, et qu'il doit suivre continuellement l'Église sainte, catholique, apostolique, et qu'il doit implorer le pardon de ses péchés. de Fa bonté de Dieu dans l'Église et les prophètes et les disciples et les martyrs et tous les ordres des anges dans la paix du Seigneur. Amen. »

Un texte de Jérémie (1) fournit à Schenoudi son entrée en matière : ce n'est pas à Galaad qu'il faut chercher des remèdes contre le mal, c'est dans l'Église sanctifiée par l'Esprit-Saint que sont maintenant tous les médecins et les remèdes, c'est dans l'Église que se tiennent Moïse, le chef des prophètes, les prophètes, les apôtres, les martyrs; tous les saints de l’Ancien et du Nouveau Testament se sont réunis en elle et leur maître à tous nous appelle : « Venez, à hommes fatigués et appesantis par les fardeaux (2) let il dit encore : Que celui qui a soif vienne vers moi, certes, Je le désaltérerai, et celui qui croit en moi, des fleuves d’eau vive couleront de Iui (3). »

Alors, Schenoudi entre dans le vif de son sujet : « Que sont ces fleuves qui sortiront de l’homme, sinon les paroles des pro- phètes et des apôtres? qu'est-ce que cette eau? Leurs comman- dements et leurs paroles que nous entendons à chaque instant dans les églises de Dieu. » Et voici comment ces fleuves sorti- ront de l’homme : « Ceux qui parlent ayant la bouche pleine de tout bien et de joie, en pourvoient les autres. » Il s’agit ici de la joie éternelle, de la sagesse et de l'intelligence qui viennent de Dieu. « Celui qui fera les œuvres du Seigneur vivra à

(1) Jér. (hébr. xzvi, 11) grec et copte, xxvi, 11. Ou bien: Jér. vin, 22: (2) Mat. xr, 28, (3) Jean, vi, 57-38.

V4

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jamais », car « il est réveillé, celui qui dormait; le Christ s’est levé d’entre les morts, lui, prémices de tous ceux qui dor- maient, nous ressuciterons donc de la mort du péché, afin que nous vivions avec lui, parce qu’il nous à tous fait nous relever avec lui, dans le baptême, de ce qui nuit, et de même que tous meurent de la mort du premier Adam, de même encore, ils vi- vent avec le Christ qui est le second Adam ». Suivons les traces des Saints.

Puis vient un long développement sur l'invitation de la Sa- gesse contenue dans Prov. vi et x1; écoutons la Sagesse, car elle a dit : « Certes, j'ai crié vers vous, mais vous n'avez pas répondu, ma main s’est tendue vers vous, mais vous ne vous êtes pas tournés, et à cause de cela, moi, maintenant, je me moque de votre silence. Lorsque je ferai descendre sur vous la colère et que vous me supplierez, alors je ne répondrai pas à vous qui m appellerez, et vous ne me trouverez pas. »

Schenoudi rappelle ensuite les promesses que le Seigneur a faites à ceux qui se convertissent : « Tournons-nous vers le prophète Jérémie : Revenez vers moi, enfants qui êtes éloi- gnés de moi! et je regarderai vers vous, car je suis miséricor- dieux; tournez-vous vers moi, car Je purifierai votre souillure. » Puis viennent des textes connus, d'Ézéchiel (1) et de David (2), un passage attribué à Salomon, enfin des paroles d'Isaïe (9) et de saint Paul (4).

Jésus le médecin suprême a effacé nos péchés par sa mort et nous à réunis au Père : « Le médecin prend garde aux mala- dies, tandis que Jésus-Christ donné son corps en échange de nos infirmités Le médecin regarde le malade pour son pro- pre bénéfice, tandis que Jésus-Christ, de qui est l'esprit de vé- rité, regarde ceux qui lui obéissent, afin de leur donner le royaume éternel. » Il ne faut pas avoir « deux cœurs », car Jésus dit : «.Celui qui aime un père ou une mère plus que moi n’est pas digne de moi. » C’est pourquoi il faut que nous renoncions au monde : « nous n’avons pas de cité nous de- meurions », et aussi : « nous sommes entrés en ce monde

(1) Ez. xxxur, 11. (OBS xxx ΤΟΣ (3) Is. 1, 16.

(4) Rom. xn, 1.

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n'ayant rien, etc. (1) ». Nous retournerons à la poussière (2).

Jésus aime les petits : « Si vous n'êtes pas comme ces petits enfants, vous n’entrerez pas dans le royaume des cieux. » Après cette longue suite de textes assez mal enchaînés, Sche- noudi adresse un véhément appel : « Jusqu'à quand remet- trons-nous de jour en jour, et persisterons-nous dans notre amour du monde? Jusqu'où accumulerons-nous péché sur péché, et corruption sur corruption, chute sur chute, mauvais désir sur mauvais désir, brigandage sur brigandage, trom- perie sur tromperie, regard mensonger sur regard mensonger, injustice sur injustice, rapine sur rapine, meurtre sur meur- tre, haine sur haine, jalousie sur Jalousie, médisance sur médi- sance, mauvaise action sur mauvaise action ? Combien de temps encore ne nous tournerons-nous pas vers Dieu, et ne le cher- cherons-nous pas, et ne reviendrons-nous pas de notre conduite détestable et de notre voie perverse? » Une citation de Jér. 1x, 1, termine cette invitation à la pénitence et sert de transition; il faut bien le constater, le mal existe sur toute la terre : «le chef rapine et le juge prend un cadeau, puis se montre injuste dans une parole funeste; le fort fait ce qu'il veut ».

Nouvelle description du bonheur de l'homme juste d’après le Ps. cxxvrr, 3, dont voici le sens intime : « Cela signifie ton âme dans la Jérusalem céleste (lauJl (sil 24), étant donné que toutes tes bonnes œuvres t'entoureront dans le royaume du ciel, tu t'en réjouiras, et tu t'entretiendras dans la Joie des anges. »

Mais, malheur à ceux qui ne craignent pas Dieu; « malheur, malheur à cette maison qui est celle des pécheurs! 11 aurait mieux valu pour eux n'être pas nés en ce monde », car personne ne peut les sauver, aucun homme ne peut porter secours à ce- lui qui est damné, « parce que chacun est occupé pour lui- même », l'âme meurt dans le péché qu'elle commis : « Ce ne sont pas les enfants de celui qui mangé des raisins verts qui ont les dents agacées, .. la faute du père ne pèsera pas sur le fils, ni celle du fils sur le père, mais il est écrit que l’homme ne délivrera pas l’homme et que le frère (ne sauvera pas) son |

(1) TTim. τὰ ἢ. (2) Gen. ur, 19.

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frère, et que l’on ne se rachètera pas l’un l’autre, il n’y a pas àme pour àme. »

Jésus lui-même (sans être nommé) entre en scène et reproche aux hommes les divers épisodes de sa passion, comme ils ont crié : « Crucifiez-le » (1), le Seigneur leur refusera la paix et leur rendra le mal, etc. « Comme vous m'avez frappé, je vous frap- perai dans la géhenne, et comme vous avez divisé mes vête- ments entre vous (2), moi, je vous diviserai et vous disperserai sur toute la terre, et vous deviendrez un objet de risée pour les rois de la terre, ... et comme vous avez scellé mon tombeau, 16 mettrai un sceau sur vous dans la géhenne, ... et de même que vous avez dit : Nous n'avons pas d'autre roi que César (3), moi aussi je dis : J’établirai sur ceux qui n’ont pas voulu de moi des rois qui marcheront à leur tête et les exposeront à la mort. » Les hommes n'ont pas écouté les paroles du Seigneur; il n’écoutera pas leurs cris lorsqu'ils appelleront au secours : « De même que vous avez dit : Cet homme n'est pas instruit, d'où est-il? moi je vous dirai aussi : Certes je ne vous connais pas, d'où êtes-vous ? Écartez-vous de moi, maudits! au feu éter- nel qui est le châtiment de Satan et de ses anges (4); et vous re- garderez votre père Abraham et Isaac, .. dans le royaume du ciel, tandis que vous serez éloignés et que vous serez rejetés avec le diable (5). »

Long développement sur les pécheurs, leurs différentes sor- tes de corruption, leur filiation diabolique, les menaces qui leur sont faites. Mais comment se fait-il que nous, chrétiens qui avons la vie, nous mourons? « Pourquoi sommes-nous cor- rompus, alors que nous avons celui qui ne se corrompt pas”? Pourquoi marchons-nous dans les ténèbres, tandis que nous avons la lumière de justice, le Christ? Pourquoi choisissons- nous la géhenne, alors qu’un lieu de repos nous été laissé en héritage dans le royaume du ciel? » Il faut que nous nous re- pentions et que nous nous convertissions sans tarder. Que per- sonne ne nous retarde, ni frère, ni père, ni fille : « Ne te place

(1) Marc, xv, 12, 15. (2) Mat. xxvu, 35. (3) Jean, ΣΙΣ; 15.

(4) Mat. xxv, 41.

(0) ΟΕ ππῖοὶ xVr28"

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pas loin de la vie du Christ Dieu, ne souille pas ton corps et ne le corromps pas par la luxure de peur que le châtiment vienne sur toi! ... ton corps sera corrompu dans le tombeau, ne cor- romps pas celle qui dure à jamais (l'âme). » A la question de Mat. xvi, 25, Schenoudi répond : « Je dis que l’homme ne don- nera en échange de son âme ni or, ni argent, ni quelque ri- chesse que ce soit. »

Sans aucune transition, on en vient au sort que le corps doit partager avec l'âme : « Tu as commis l'impureté avec ton corps, tu brüleras dans le feu avec ton corps. Toi, tu as été vierge avec ton corps, tu seras couronné avec ton corps. » Mais avant d'être couronné il faut combattre, « Notre Seigneur et Dieu Jésus- Christ ne nous a-t-il pas enseigné à combattre Satan et ses ar- mées, en disant que ce genre ne sort que par le jeûne et la prière (1)...? Souviens-toi, à homme, de ta fin dernière, et de ta sortie vers Dieu, il te récompensera de ce que tu auras fait, bien ou mal. Dégage-toi des œuvres de ce monde, et fais ce dont Dieu est satisfait sur la terre, avant que ta vie soit finie et que tes jours disparaissent. Ne remets pas de jour en jour, de mois en mois, d'année en année, parce qu'aucun Jour ne sera accordé à tes yeux. » L'incertitude du moment de la mort est un motif de conversion immédiate, la mort vient vite : « Les enfants seront pris promptement, et les parents n’en au- ront pas joui, et des frères se quitteront sans avoir joui les uns des autres, le jeune homme sera pris sans avoir joui de sa fian- cée et la fiancée sera enlevée avant que son fiancé ait joui d'elle, et après cela nous serons tous séparés les uns des au- tres. .… sont les frères qui étaient avant nous, sont ceux qui se sont rendus célèbres par leurs épées, sont ceux qui ont illustré leur nom, sont ceux qui étaient attachés aux honneurs du monde? . Ils sont tous dans les tombeaux, et leur nom et leur souvenir sont disparus. O homme, hâte-toi de te convertir avant que les jours de tes maux soient partis et que le regret t’ait enveloppé, et avant que tu dises : Je n'ai plus la faculté d'agir. O homme, convertis-toi avant que le so- leil disparaisse, et avant que la lumière de la lune et des étoiles soit obscurcie. ... Convertis-toi, homme, avant que l'argent soit transformé et que l'or soit corrompu. »

(1) Mat. xvn, 21.

ÉTUDE SUR UNE TRADUCTION ARABE. 87

Aux promesses de Dieu correspondent des menaces : « Celui qui travaille sa terre est rassasié de pain, et celui qui a suivi la paresse est rassasié par la faim ; celui qui craint Dieu est rassa- sié du pain de vie, Jésus-Christ a dit : Je suis le pain de vie descendu du ciel (1); celui qui garde la loi fait de son âme une forteresse solide, quant à celui qui bouche son oreille et n’écoute pas la loi, sa prière est vaine. ... Dieu est proche de ceux qui le craignent et ceux qui ont souci de lui posséderont la terre, mais ceux qui ne le craignent pas seront rejetés de la terre. Lorsque meurt l'homme vertueux, on le regrette, tandis que le pécheur, lorsqu'il meurt, on en écarte la main et on se ré- jouit de sa mort. »

Pour convaincre davantage ses auditeurs, après avoir rappelé les encouragements de la Bible, Schenoudi ajoute : « Moi, j'ai été un jeune garçon, et je suis devenu vieux, et je n'ai pas vu que Dieu ait jamais abandonné le juste, et je n’ai pas appris que le pain lui ait manqué (?). Le souvenir du juste est éternel, il s'étend comme le palmier, etc. » (Ps. xci, 13). Les cris des Justes les sauvent, ceux des pécheurs les font -périr ; car Dieu est bon, il aime les bons, il est miséricordieux, il aime ceux qui font miséricorde, l'amour remet la multitude des péchés; c'est par un panégyrique de l'amour, envisagé surtout dans l'au- mône, que se termine ce sermon sur la conversion.

Il reste à discuter la question d'authenticité : est-ce bien le grand moine d'Athribis qui prononcé le discours dont l’ana- lyse précède? Ceux qui connaissent Schenoudi répondront à la question ; qu'il soit permis cependant de faire ici quelques re- marques.

Tout d’abord, le texte arabe est une traduction, la langue en est défectueuse, la construction des phrases est souvent étran- gère à la stylistique arabe. Le mot mimar ων ΞΞΞ Jishe) employé par le copiste dans le titre qui a été signalé en tête de cet article indique comme pour le panégyrique de Visa (2) que le traduc-

(1) Jean, νι, 80; 98. (2) Mémoires, t. IV, p. 289.

δὼ REVUE DE L'ORIENT CHRÉTIEN.

teur était peut-être « un moine originaire de Syrie, et par con- séquent ayant longtemps habité Nitrie (1). » Les confusions de et >, de &, et :,. et l'écriture de : au lieu de ; qui se trouvent fréquemment dans les manuscrits d’origine syrienne appuie- raient cette hypothèse.

L'époque de la traduction n'est pas évidente, le manuscrit parait être du quatorzième siècle, car son écriture se rapproche des fac-similés donnés par Miss Lewis sous les numéros 27 et 30 qui sont respectivement de 1533 et 1386 (2). L'écriture est d'ailleurs tracée d’une main rapide et ferme, habituellement lisible, un peu trop avare de points diacritiques; l’alif n’est lié. qu'une fois au lam qui le suit.

Il y aurait à comparer le texte du ms. arabe 144 avec la tra- duction, également arabe, qui dans le ms. copte 68 accom- pagne un autre texte de Schenoudi, une comparaison avec le pagyrique de Visa publié par M. Amélineau serait aussi très intéressante ; plusieurs des spécialités graphiques du ms. arabe 144 Jui sont communes avec le ms. 72 du même fonds qui con- tient une traduction du copte (3).

Les citations bibliques, traitées d'ailleurs d'une manière très large, prouvent que l'arabe n'est pas un texte original, même les passages qui sont cités le plus littéralement divergent, quant aux mots, du texte établi par Walton. Pourrait-on établir par une comparaison avec la Bible copte que la traduction a été faite de cette langue? Deux ou trois passages dont les leçons curieuses avaient éveillé l'attention ont provoqué un examen qui est resté sans résultat. Ainsi Prov. ΙΧ, 1 sous la forme : « la Sagesse s'est bâti une maison sur sept colonnes d'or » n'appartient pas au texte copte tel qu'il se trouve dans Ciasca. Le passage de Jér. qui sert d'exorde au sermon échappé lui aussi à l’investigation. Au lieu du texte connu : « Monte à Galaad », le manuscrit porte ls x js |, « descendez de Galaad », puis un peu plus loin ak JT RS qu'il faut traduire : « la descente vers Galaad ». A quel texte se rap- porte cette leçon? Dans l'édition de Tattam, Jér. xxvi, 11, le

(1) Zbid, p. τὰ, Amélineau à propos du panégyrique de Visa.

(2) Forty one facsimiles of dated christian arabic manuscripts, Studia Sinaitica, t. XII.

(3) Cf. Proceedings of the Society of Biblical Archaeology, 1907, p. 137.

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texte est comme dans les autres versions : « monte Galaad ».

Le texte lui-même n'a révélé en ce premier examen aucune donnée historique suffisant à dirimer la question, et le nom de Schenoudi ne se trouve pas ailleurs que dans la notice du copiste. Le titre donné aux auditeurs pourrait paraître un ethnique, car on lit au 9, recto, 1. 11 : Gym, NT CON, ὃ,

er CSN"; le troisième mot ne portant que les points dia- critiques marqués, 11 est difficile de se prononcer en faveur de quelque lecture; on songerait peut-être à lire ris 1 « ha- bitants d'Athribis », mais il y a un ; de trop et la forme arabe du nom d’Athribis est so. D'ailleurs il ne faut pas lire un —, les dimensions de cette lettre sont telles que ce doit être J ou &S; il faut donc rétablir un terme cher aux prédicateurs syriens : « O mes enfants, les orthodoxes! » c’est-à-dire ess NI.

Il serait téméraire d'insister sur le style pour en faire un argument d'authenticité, les appels véhéments conviennent à Schenoudi, les énumérations abondent ici comme dans les textes publiés ailleurs. Enfin un texte du sermon sur la mort conservé dans le panégyrique de Visa est parallèle à un passage cité plus haut (cf. Mémoires, p. 349) : « Ton fils te sera enlevé pendant qu'il est dans tes bras, avant que tu n’aies pu te réjouir avec lui; la fiancée sera enlevée des bras de son fiancé avant α 6116 n'ait joui avec lui, le frère (des bras) de son frère avant qu'il n'ait rassasié ses yeux de sa vue; et dans tous les cas, il faut que quelqu'un se sépare chaque jour. »

La question d'authenticité reste donc ouverte, ne l’est-elle pas pour tout ce qui est attribué à Schenoudi? il suffit que ce sermon soit signalé; on ne pourra l’omettre sans discussion lorsqu'on voudra faire une étude d'ensemble sur le célèbre moine égyptien (2).

Paris, le 25 janvier 1908. Eug. TISSERANT.

(1) Cf. Guérin, Sermons inédits de Senouti, Rev. Eg., 1903, pp. 30 et 32 du tirage à part et: Mémoires, loc. cit., p. 130.

(2) L'évêché chaldéen de Diarbekir possède aussi une homélie carchouni « de Abou Schenouda sur la pénitence » qui a chance d’être identique à la nôtre, Cf, Journal asiatique, nov.-déc. 1907, p. 421,

MÉLANGES

TRADUCTION

DE LA CHRONIQUE SYRIAQUE ANONYME, ÉDITÉE PAR SA BÉATITUDE ME RAHMANTI

patriarche des Syriens catholiques.

(Suite) (1)

Des guerres contre la ville d’Ilion et de sa destruction.

Au temps les juges gouvernaient les fils d'Israël, quelque temps après Josué Bar-Noun, dans les jours du juge Æésebôn (2), lorsque les Grecs avaient plein pouvoir sur les îles de la mer, un homme nommé Alexandre Pâris, fils de Priam, roi d’Jlion, partit avec une armée navale, navigua jusqu’aux:iles de Rhode et de Crète. Il ravit Æéléne, [p. 28] femme du roi Ménélas, et la conduisit à /lion, grande ville sur la mer d’Asie. C'était une ville belle et superbe, entourée de solides murailles et elle était célèbre par toute la terre. Il nous à paru bon de faire mémoire ici de sa grande destruction, comme nous l’avons trouvée dans la chronique d’Aômérés qui commence son histoire dans le chapitre quarante-troisième (et continue) jusqu’au chapitre cinquante et unième. Il décrit donc son histoire dans huit chapitres (3).

(1) νὸν: 1907, Ὁ. 429.

(2) Il est dit plus haut que ce juge (non mentionné dans la Bible) aurait gou- verné après la mort de Samson, durant sept ans.

(3) Litt. : « discours ». Il ne peut s’agir ici de l’/liade; cependant le nom'de l’auteur est presque identique à Homère. Il est probable que l’auteur utilise les chapitres 43 à 51 d’une certaine chronique et qu’il remplace ici le nom de l’au- teur de la chronique par le nom d’Homère. Ce nom pouvait se trouver en tête de ces huit chapitres et notre auteur ne le connaissait sans doute pas par ailleurs.

MÉLANGES. 91

[ y eut un roi grec (1), nommé Thésée, qui eut une fille nommée ΜΝ οι, (Léda). Il la maria à un roi grec, car elle était très belle. Elle eut deux filles : l’une que son père nomma Clylemnestre fut mariée à un roi grec nommé Àgamemnon; l'autre fille reçut le nom d’Æélène, c'est à cause d’elle que toute la Grèce fut bouleversée et qu’/lion, la grande ville, fut détruite. Cette jeune fille était plus belle qu'aucune autre. Lorsque sa re- nommée se répandit en Grèce, beaucoup vinrent trouver son père et la demandèrent en mariage pour leurs fils. Le père répondit : « Que ferai-je maintenant? Je ne puis cependant la donner qu’à l’un de vous! » Ils ré- pondirent : « C’est bien vrai, tu ne peux la donner qu’à un ». Il leur ré- pondit : « Que ferons-nous et à qui d’entre vous la donnerai-je? Voilà que vous êtes tous prêts à combattre pour elle! » Enfin ils résolurent de dire à son père de la donner à qui il voudrait, et ils s’engagèrent, par pactes et serments, à ne pas se quereller par la suite : quiconque userait de ruse ou de violence et chercherait à l’enlever au roi aurait tous les autres pour ennemis et ils en tireraient vengeance.

Lorsqu'ils eurent fait au père de la jeune fille des serments redoutables, selon la coutume de leur religion, il maria la jeune fille à Ménélas, frère d’Agamemnon, époux de son autre fille, afin qu’elle ne demeurât pas loin de sa sœur Clytemnestre. Après cela les princes assemblés se dispersèrent et chacun retourna chez soi.

Priam, roi d’Ilion, avait des fils distingués, robustes et beaux; l’un d’eux se nommait Alexandre Pâris. Lorsque la renommée d’Aélène parvint en son pays, Alexandre fut enflammé de passion; il prépara de nombreux navires avec des hommes bien armés et bien équipés et des provisions, puis il prit la mer et arriva à Rhode, île de Ménélas l’époux de la belle Hélène, comme s’il voulait le saluer et voir sa femme, ou présenter ses hommages et offrir une dot à la nouvelle et illustre épouse et au fils du roi en même temps. Il laissa les navires et les hommes armés à un endroit caché de la mer et arriva à l’île avec quelques hommes. Lorsque Ménélas l’'apprit, il vint au-devant de lui avec allégresse, il le recut avec honneur et le fit entrer (chez lui) avec grande joie.

Hélène était alors assise dans une chambre en haut, elle regardait [p. 29] par la fenêtre pour voir le fils du roi qui venait la saluer. Quand elle vit Alexandre elle fut aussitôt enflammée d’amour pour lui, car il était très beau et d’abord agréable. Lorsqu'il fut entré dans le palais royal, tandis qu'ils se réjouissaient et se complaisaient avec l’hôte nouveau et illustre qui était venu chez eux, la reine Hélène se prépara aussi, selon la coutume

(1) Ce récit ne se trouve sous cette forme dans aucun autre chroniqueur grec, nous à affirmé M. Serruys, professeur à l’école des Hautes Études. Nous en tra- duisons donc une partie comme contribution à l’étude du cycle troyen dans l’O- rient médiéval. Michel le Syrien ne renferme pas de passage parallèle, Cf. Cons- tantin Manassé (xr° siècle), Migne, P. G.,t. CXXVII, col. 261-275. Les vers de Constantin ont été mis en prose dans le ms. grec de Paris 1140 A, fol, 495-09", Cédrénus place aussi la prise de Troie après Samson, Migne, P. G., t. CXXI, col. 181, mais ne la raconte que plus loin, col. 249-265,

92 REVUE DE L'ORIENT CHRÉTIEN.

des Grecs, à aller voir le fils de roi qui était venu chez eux. Une place d'honneur lui fut préparée et on la para de beaux habits et de la pourpre royale ; elle se prépara et s’habilla avec grande pompe et alla s’asseoir pour le repas avec son mari et ses familiers en face d'Alexandre Pâris et de ses fidèles.

Lorsqu'ils se virent, ils furent encore davantage épris, et brülèrent d'amour l’un pour l’autre ; tandis que les autres mangeaient, buvaient et se réjouissaient, leurs regards étaient croisés et correspondaient ; par signes ils s’entendirent tous deux.

Un jour ou deux après l’arrivée (de Pâris), vint de la mer une”nouvelle terrifiante : une bande de voleurs y circulait, elle pillait, dépouillait ou ra- vageait les iles qui appartenaient à Ménélas. A cette nouvelle, celui-ci partit promptement, il monta sur de rapides navires de combat avec toutes ses troupes et ils partirent pour atteindre les voleurs, reprendre leur butin et protéger le pays. Il commanda à ses serviteurs de servir son hôte avec honneur jusqu'à ce qu'il revint de poursuivre les voleurs, et lorsqu'il partit, ce fourbe (Päris) ne pensa pas que tout cela était disposé pour la perte de sa maison.

Dès que (Ménélas) se fut éloigné de la ville, la jeune reine Félène, durant la nuit, se rencontra avec Péris en un endroit; ils tinrent conseil entre eux et se firent un serment source de ruines et cause de guerres. Une autre nuit, elle se leva, elle prit ses serviteurs et ses servantes, ses bijoux, ses beaux habits et tout ce qui lui appartenait. Ils mirent tout cela sur des mulets et quittèrent le palais royal. Ils descendirent sur le rivage, les au- tres navires qui étaient cachés en mer vinrent près d’eux et ils ravirent l'épouse avec toute sa suite. Ils montèrent sur les navires et prirent vite la mer, ils passèrent de dans une autre mer et, au bout de peu de jours, ils arrivèrent dans leur pays. Des messagers coururent annoncer à Priam et à ses fils l’arrivée d'Alexandre Pris et de l'épouse Hélène qui l’accom- pagnait. Ils allèrent au-devant à la distance d’un jour de marche avec grande allégresse ; toute la ville d’Zlion se mit en fête en l'honneur du roi et de l’illustre épouse qu'il amenait dont le nom était célèbre par toute la terre. On lui fit des festins, des cérémonies nuptiales et des fêtes dont le bruit retentit par toute la terre. Ainsi s’accomplit ce tee illégal, source de calamités.

Alexandre avait une jeune sœur vierge nommée Mamisträ (Cassandre 3), qui prophétisait constamment. Tandis que tous étaient dans la joie, l’allé- gresse et le bonheur, elle pleurait et criait : Malheur à la ville d’Zlion et au royaume de Priam, [p. 80] car leur perdition viendra de cette réjouis- sance funeste; sa maison sera déracinée, son souvenir sera détruit, son enceinte sera ravagée.

Ménélas, revenu de la poursuite des voleurs. trouva sa maison pillée et son épouse enlevée, aussi la stupeur le saisit, puis il cria et rugit comme un lion et sa voix arriva à toute la Grèce, et le père (d'Hélène) et Agamemnon, mari de sa sœur Clytemnestre, l’entendirent. (Ces) rois se réu- nirent et grincèrent des dents à cause du grand affront qui leur était fait. Ils furent saisis de colère et firent connaître à tous les rois et à tous les

MÉLANGES. 93

princes de toute la Grèce la grande arrogance d'Alexandre, ainsi que l’op- probre et la honte qu’il avait jetés sur le puissant royaume des Grecs riches et orgueilleux. (Ils leur demandèrent), d’après leurs promesses et leurs serments au temps du mariage (d'Hélène), de se réunir pour combattre et pour tirer vengeance de la maison de Priam, roi d’Ilion. À ces nouvelles, les rois des Grecs furent remplis de colère et rugirent comme des lions; tous les rois se réunirent et se préparèrent ainsi que les hommes illustres, belliqueux et valeureux. Ils assemblèrent un peuple innombrable avec beaucoup de navires, de chars, d'armes, d’attirail guerrier, de lances, de machines de guerre (1), de munitions et de paille. Ils envoyèrent dire à tous les pays d’alentour de se préparer à leur fournir de partout les vivres et le nécessaire. Lorsque tout fut prêt selon leurs désirs, ils s’'engagèrent et promirent, sous de redoutables serments, de ne pas revenir, de ne pas se diviser entre eux, de ne pas cesser une guerre sans merci et de tirer vengeance de celui qui avait méprisé leur pouvoir. Ils se donnèrent pour chef à eux tous Agamemnon, frère de Ménélas époux d’Aélène, parce que c'était un homme sage et robuste. Lorsque tous les rois se mirent en route, que toutes leurs troupes montèrent sur les navires, que l’on étendit les voiles des navires et qu’on se mit en route, la terre fut étonnée aussi bien que les mers, et toute la création fut dans la stupeur au sujet de leurs luttes pour une femme, des déplacements d'armée, des bouleversements des, royaumes et des combats (qu’allaient livrer) 250000 hommes assem- blés.

Quand ils arrivèrent à une île il y avait un grand arbre et près de lui l’oratoire d’un temple des dieux païens, ils y prièrent et demandèrent un présage de ce qui arriverait. Comme ils allumaient du feu en cet endroit, selon le rit de leurs prières et de leurs encensements, un grand serpent sortit tout à coup de dessous le foyer du feu, il rampa et monta à l’arbre au haut duquel il y avait un nid avec neuf petits oiseaux. Le serpent, lorsqu'il les atteignit, les mangea tous l’un après l’autre et, à la fin, il mangea aussi leur mère. Lorsque tout cela se fut déroulé sous les yeux -des rois puissants, ils firent venir les devins qui étaient du nombre de leurs prophètes et leur demandèrent de leur donner des présages. Ceux-ci leur répondirent : [p. 81] De même que vous avez vu de vos yeux ce qui vient de se passer, vous combattrez contre la ville d'Ilion durant neuf ans, puis à la fin de la dixième elle sera livrée entre vos mains et vous la pren. drez. Lorsque les rois entendirent cette longue durée, ils en furent fâchés, mais parce que la ville devait à la fin tomber entre leurs mains et aussi à cause des serments redoutables et de l'alliance qui les liait, il ne leur était pas possible d’éviter le combat. Lorsque les barques et les navires arrivè- rent près de la terre, ils parurent aussitôt devant Zlion, ville de Priam.

Le cœur des habitants de la ville fut rempli d’effroi et ils furent saisis d’une grande crainte, mais ils n’avaient pas d'espoir de salut si ce n’est en résistant virilement et en combattant avec courage. Ils s'étaient bien pré-

(1) Litt. : « des mulets de bois ».

94 REVUE DE L'ORIENT CHRÉTIEN.

parés et avaient fait dire de tous côtés à leurs voisins et à leurs amis de venir à leur secours.

Les rois grecs quittèrent leurs navires et campèrent contre la ville du côté de la plaine. De l’autre côté, les montagnes empêchaient d'établir un camp : il n’était pas possible d’y camper ni même de chercher à entrer dans la ville du côté des montagnes. Ils se mirent à combattre sur terre et sur mer. Les uns étaient chargés de combattre chaque jour, les autres de diriger les machines de guerre contre les murs, les autres de construire des retranchements ou de creuser des fossés, chacun dans son rôle. On en chargea d’autres de surveiller la mer; d’autres, avec de nombreuses trou- pes, furent envoyés par tout pays pour ravager, piller, massacrer, jusqu’en Galatie, en Bithynie et en Cilicie. Ils se livrèrent ainsi à des luttes surhu- maines, vainqueurs et vaincus sans fin. Le roi Achille, fils de Peélée, homme étonnant et valeureux au delà de toute expression, se distingua surtout parmi eux.

De nombreux rois vinrent au secours d’Ilion ainsi que la reine célèbre des Amazones (1) avec des femmes, ses soldats, accoutumées à combattre courageusement. Cette reine était belle, redoutable, guerrière et très coura- geuse; c’est avec orgueil et confiance qu'elle mena ses troupes contre celles des Grecs pour les attaquer. Quand elle fut venue au secours de ceux d’7- lion, elle battit une grande partie des troupes grecques et leur tua beau- coup de monde. Lorsque le courageux Achille la rencontra, qu'elle le vit et le reconnut, elle osa (2) marcher contre lui et elle lui cria : « Com- ment, fils de Pélée, tes forces ont-elles diminué? » et elle lui lança un javelot qui traversa les trois couches de son armure, la cuirasse et le bau- drier dont il était revêtu, mais ne le blessa en rien. Il se préparait habile- ment et attendait comme si la reine l’effrayait et lui en imposait; ensuite il bondit sur elle avec la lame longue et solide qu'il portait et la frappa à l'extrémité de l’armure qui la couvrait, il la perca de son glaive sous l’épigastre et aussitôt elle tomba et mourut; ses troupes furent défaites et livrées au meurtre et au pillage et il y eut grande angoisse pour les fils d'/lion.

[Ρ. 82] Plus tard Amémnoun (Memnon), grand roi des Couschiles, vint au secours de la ville et la plus grande partie de ses troupes était formée de noirs du midi, c’est-à-dire de nègres. Ce roi Amdmnoun (Memnon) combat- tit vaillamment, il lutta seul avec Achille, homme redoutable, et leur combat dura depuis le matin jusqu’à la neuvième heure. C'était un éton- nant spectacle, aussi les troupes et tous les guerriers regardaient ce ter- rible tournoi, enfin le roi des Couschites faiblit et fut vaincu par Achille. Il fut tué et il mourut et une grande frayeur tomba sur ses troupes : un bon nombre fut tué et le reste s'enfuit.

Plus tard Achille fut frappé, à l'artère du talon, d’un trait aigu lancé de la ville par Alexandre Pâris; il mourut aussitôt et il y eut grande douleur chez les Grecs. Il y avait encore chez les Grecs Denâôqlititos (Philoctète ?),

(1) Penthésilée. (2) Litt. : « elle rugit et elle osa ».

A

MÉLANGES. 95

homme célèbre et renommé. Il lança avec force un trait redoutable qui frappa Alexandre Pâris à l’œil droit, et aussitôt il tomba et mourut. Dans cette guerre terrible périrent encore Hector le valeureux, frère d’Alexan- dre, et ses deux jeunes frères. A la mort d'Alexandre Pâris, il y eut riva- lité, au sujet d'Hélène, entre ses deux frères qui restaient. Le père (Priam) la donna pour femme au plus âgé, mais l’autre, irrité, passa chez les Grecs, qui le reçurent avec joie, et il leur indiquait les points faibles de la ville (1). Il leur fit connaître qu'ils ne pourraient pas s'emparer de la ville aussi longtemps que la statue d’Athéné y resterait. IIS s’ingénièrent donc à envoyer deux hommes robustes et fertiles en ruses qui entreraient pour voler la statue d’Athéné. Ces hommes partirent en secret, et volèrent la statue et ils la descendirent de sa base et la portèrent au camp.

C’est ainsi que. neuf années passèrent et que l’on arriva à la dixième, (Les Grecs) s’ennuyèrent de la longueur de la lutte ; beaucoup d’entre eux se blâmaient de s'être engagés, pour une femme, dans cette lutte ils faisaient tant de pertes et tant de héros avaient été tués dans des com- bats incessants; alors ils imaginèrent un moyen étonnant qui mit fin à la lutte. Ils se mirent à faire une grande figure de bois qui ressemble- rait à un cheval et au moyen de laquelle ils pourraient prendre la ville.

Les habiles menuisiers se mirent au travail ainsi que les hommes ex- perts dans la fabrication des ouvrages, ils réunirent une grande quantité de bois de tout genre, joignirent des poutres, et faconnèrent un cheval très grand, qui dépassait la hauteur du mur de la ville; ils le sculptèrent avec grand art et l’ornèrent de dessins et de peintures de diverses couleurs, de sorte qu'on ne voyait aucun vide entre une poutre et la voisine. [p. 33] 115 firent à cet animal, c’est-à-dire au cheval, une tête qui était très élevée puisque lui-même l'était déjà beaucoup; ils lui donnèrent de larges flancs pour qu’un grand nombre (d'hommes) püt y entrer et s’y cacher; d’au- tres se tenaient dans la tête et entendaient ce qui se disait au dehors. Ils lui firent de grands yeux et y mirent des verres pour que ceux du dedans pussent voir ce qui se passait et que ceux du dehors ne vissent rien. Ils lui firent des narines larges et profondes et une bouche afin que leur ha- leine sortit par ces ouvertures et que l’air leur arrivât sans qu'ils eussent à souffrir. C’est ainsi qu'ils fabriquèrent cet animal et 115 lui écrivirent sur le flanc, sur de l’or pur, en belles lettres, ce qui suit :

Ce cheval est le présent acceptable qui estoffert au temple grand et in- violable de la déesse A{héné qui està Zlion, parce que les Grecs ont pris son image vénérable et l’ont irritée contre eux. Que ce présent apaise son courroux et qu'elle leur pardonne le sacrilège qu'ils ont osé commettre.

Quand le travail fut achevé, des hommes courageux s’armèrent de lan- ces et de boucliers et entrèrent dans le cheval. Ils fermèrent l’entrée du de- dans et on ne la voyait pas du dehors. Cette même nuit, tous les camps des Grecs furent levés, ils quittèrent la plaine, mirent le feu aux maisons et aux tentes du camp, montèrent sur leurs navires et s’éloignèrent un peu jusqu’à un endroit protégé d’où ils n’étaient pas vus de la ville. Ils convin-

(1) Le syriaque porte en plus litt. : « et il leur ouvrit de mauvaises portes »,

96 REVUE DE L'ORIENT CHRÉTIEN.

rent avec ceux qui étaient dans le cheval, qu'au moment ce serait l’occasion et la ruse aurait son effet, ils leur fissent un signal de feu qui pût être vu des navires pour qu'ils vinssent les aider. [15 prirent aussi l’un d’entre eux, lui meurtrirent le corps, le dépouillèrent de ses vêtements, lui lièrent les mains et les pieds, lui rasèrent les cheveux et la barbe; il semblait avoir recu de nombreux coups; ils le jetèrent en cet état dans un endroit du camp et lui apprirent ce qu'il devrait répondre aux fils . d’lion lorsqu'ils l’interrogeraient sur les troupes des Grecs et leur départ et sur ce cheval.

Au matin, lorsque les Troyens virent que les Grecs étaient partis, que le feu brülait les maisons du camp et que les navires avaient déjà dis- paru et voguaient sur mer, ils se réjouirent grandement, se réunirent et quittèrent la ville pour piller et enlever tout ce qui restait, avant que le feu ne le détruisit. Lorsqu'ils virent ce grand animal qui ressemblait à un cheval, ils l’entourèrent et le regardèrent avec étonnement. Quelques- uns d’entre eux trouvèrent aussi celui qui étaitenchainé, meurtriet gisant, et ils l’amenèrent (près du cheval), et lui demandèrent quel était ce pro- dige et cet événement imprévu : pourquoi les Grecsétaient-ils partis, pour quelle cause avait-on construit ce grand animal semblable à un cheval, enfin pourquoi lui-même était-il ainsi blessé, meurtri, et avait-il les pieds et les mains liés? Il leur fit le récit trompeur qui lui avait été enseigné et imposé auparavant par ses compagnons: [p.84] « De mauvaises nouvelles leur sont arrivées subitement des iles et ils sont partis aussitôt pour rentrer chacun dans son pays; ils ontfait ce grand cheval comme un présent pour le grand temple d’Athéné, à cause de sa statue qu'ils ont enlevée à votre ville, car depuis que cette statue est dans leur camp, un grand courroux (divin) les poursuit; ils lui ont donné cette taille et ce poids pour que vous ne puissiez pas l’enlever tel qu'il est, mais que vous deviez le dé- pecer ou lui briser quelque membre et causer ainsi quelque dommage à l’offrande d’Athéné qui s’irritera contre vous et perdra votre ville. Pour moi, comme je les blâmais et leur disais : Quelle utilité tirons-nous de ces guerres contre {lion poursuivies pendant dix ans, nous nous affai- blissons? nous perdons nos armées et nos pays sont sans défense; nous subissons des pertes grandes et nombreuses. Nous sommes la risée et le spectacle des nations pour avoir mis en mouvement pour une femme (tous) les rois du pays des Grecs, nous sommes devenus un objet de fables et de récits. Au point nous en sommes, après avoir dévasté une grande partie des terres des fils d’Ilion, et en avoir massacré des milliers et des myria- des, pendant qu'ils nous rendaient la pareille, il ne nous convient pas de partir en laissant ce sujet de discorde entre nous et eux, entre nos enfants et les leurs ; et s’il y eu entre eux et nous beaucoup de dévastations et de meurtres, du moins faisonsla paix avec eux et rendons-leur ce qui est encore en vie parmi les captifs et le butin avec le reste des dépouilles que nousavons. Ne mettons pas le feu au camp, afin que ce que nous laisserons console un peu ces captifs indigents, fils d'Ilion. Comme je leur disais cela et choses semblables, ce fou de Ménélas me condamna à être frappé de nom- breux coups ; ils me lièrent les pieds et les mains et me jetèrent comme

MÉLANGES. πὰ ΟἿ

mort, puis ils s’en allèrent à la perdition après avoir pillé mes biens. »

Ces malheureux crurent à tout cequ'il leur disait, sa parole était persua- sive ; ils aimèrent ce fourbe et lui firent honneur (en lui donnant) des pré- sents et des habits. Ils entourèrent aussitôt l'animal, apportèrentde solides cordes et des roues, aplanirent la terre devant lui, la garnirent de ponts et de poutres qu'ils oignirent de graisse et d'huile afin qu'il pût glisser et progresser facilement; ils l’entourèrent par milliers et par myriades, dési- reuxdele conduire à la ville et soucieux de ne le laissersebriser en rien d’ailleurs ce n’était pas possible, tant il était solidement construit. Quand ils arrivèrent au mur, ils y firent une brèche grande et large, puis ils firent entrer cet animal et le placèrent à un endroit élevé devant le temple d’Athéné. Ils sacrifièrent des bœufs nombreux et des brebis, ils mangèrent, burent et se réjouirent grandement devant cet animal au point qu’ils s’eni- vrèrent, tombèrent comme morts et s’endormirent tous à l’unisson, ils gisaient comme des cadavres sur les toits, [p. 35] dans les rues et sur les places de la ville.

Lorsqu'il y eut un grand silence et qu’un profond sommeil s’appesantit sur eux, au milieu de la nuit, celui qui avait été laissé tout meurtri par les Grecs vint donner le signal à ceux qui étaient dans le cheval; ils ouvri- rent la porte de la sortie et descendirent comme des guêpes avec leurs épées nues en main. Ils mirent le feu pour que ceux des navires le vis- sent et ils se précipitèrent comme des lions sur un troupeau de mou- tons et comme des ours dévastateurs dans une vigne sur ceux qui gi- saient endormis et les mirent à mort sans pitié. Bientôt ceux des navires arrivèrent, ils entrèrent dans la ville par la brèche et par tous côtés; le Seigneur, irrité contre /lion et contre ses habitants, les livra au meurtre, au pillage, à la captivité et à la perdition par les mains des rois grecs et de leurs troupes. Mais qui pourrait écrire la grande calamité, le massacre, le sang répandu qui coula comme des fleuves et les ravages qui eurent lieu? Ainsi sont (décrits) la chute et la destruction d’J/ion ville au nom . célèbre et renommé dans de nombreux ouvrages de chroniqueurs.

Lorsqu'ils furent assouvis de meurtre et de carnage, ils emmenèrent en captivité une multitude de peuple : des femmes, des jeunes filles et des jeunes gens innombrables; ils pillèrent les richesses et les biens de cette ville superbe avec les demeures des chefs d'armée; ils pillèrent aussi le palais du vieux Priam homme malheureux et infortuné et enlevèrent tout ce qui s’y trouvait. Quant au roi Priam, ils le percèrent d’un coup de lance et le tuèrent; ils tuèrent aussi celui de ses fils qui était resté dans la ville. Ils trouvèrent Hélène, cause de tous ces désastres, qui s’était enfuie et cachée dans le grand temple d’Afhéné. Ils la saisirent, lui pardonnèrent et la remirent à Ménélas qui se réconcilia avec elle. Ils mirent le feu à toute la ville, la brülèrent, la renversèrent et en firent une colline dé- vastée. Ils retournèrent à leur pays avec grande joie, chacun avec sa part de captifs et de butin et après une victoire éclatante. Et la ruine de cette ville eut lieu de cette manière au temps des juges des fils d’/sraël, comme nous l’avons dit plus haut.

ORIENT CHRÉTIEN. 7

98 REVUE DE L'ORIENT CHRÉTIEN.

Après Hésebon, Abitsan jugea le peuple hébreu (1) durant huit ans. A cette époque mourut Zeus (Jupiter) et il fut enterré en Crète. Il vécut 780 ans, comme l’écrivirent les Grecs au sujet de la longue durée de sa vie. Α cette époque vivait Auth la Moabite.

Vient ensuite l’histoire de Rufh sans abréviation [p. 95-

39]. Suite des grands prêtres et des rois d'Israël jusqu'à Ama-

sias [p. 39-48]; histoire de Jonas, fils de la veuve chez laquelle avait demeuré le prophète Elie [p. 43-44]. Depuis Moïse οἱ la sortie d'Égypte jusqu’à Joatham il y 863 ans. Autres rois d'Israël et de Juda jusqu’à la mort d’IZsaïe [p. 44-45]. A cette époque les Romains ajoutèrent deux mois au nombre de leurs mois, à savoir le second Conôn et Schebat, car jusque-là ils ne comptaient que dix mois dans l’année. Tandis que Jérémie était en Égypte avec Joachaz, il apprit aux prêtres qu'une vierge enfanterait un fils et qu’au jour de sa naissance toutes leurs idoles tomberaient (2). Avant la prise de Jérusalem 1] emporta l'Arche d'alliance et tout ce qui s’y trouvait, puis les enferma dans un rocher qui était situé entre les montagnes furent enterrés Moëse et Aaron [p. 46]. Histoire de Daniel [p. 47]. Prise de Jérusalem par Nabuchodonosor [p. 48]. Le temple était resté debout, depuis sa fondation par Salomon, durant 441 ans.

Durant cette prise de Jérusalem, Simon était grand prêtre (3). I] était en bonnes relations avec le chef des satellites et il le pria de lui donner les livres de la loi. On les lui donna et il alla les cacher dans un puits, ainsi que le chandelier d’airain plein de feu et d’encens. Ils y demeurèrent soixante-dix ans jusqu’à ce que les fils d'Israël revinssent de Babylone. Jérusalem fut détruite et il n’y resta pas un homme. Jérémie fut lapidé en Égypte par ses compatriotes. Jusqu'ici les écrivains juifs possédaient la vérité. Mais, à partir de la prise de Jérusalem, on ne trouve plus la vérité dans leurs écrits, mais dans ceux des Patriarches (des Pères de l'Église?) seulement.

Captivité de Babylone, Daniel, Ézéchiel, les sept sages de la Grèce; deux notes marginales ont été ajoutées au sujet de Ju-

(1) Ces deux juges ne sont pas mentionnés dans la Bible.

(2) Figure dans le De vitis Prophetarum du pseudo-Épiphane, Migne, 2. G., t. XLIIL, et dans les Paralipomena du prophète Jérémie. La présente chronique traduit d’ailleurs à l’occasion de chaque prophète le De vilis Prophetarum.

(3) Cette chronique semble attacher grande importance à nous énumérer tous les grands prêtres successifs,

MÉLANGES. 99

dith et d’Esther dont il n'est pas question dans le texte [p. 49] (1). Baltasar; Darius; Cyrus; Zorobabel; prophètes Habacuc, Zacharie et Malachie ; le poète T'héognis; Pylha- gore; Cambyse [p. 501. F. Nav. (A suivre.)

IT

COMITÉ D'ORGANISATION ET SECTIONS DU XV: CONGRÉS INTERNATIONAL DES ORIENTALISTES

(Copenhague, 14-20 août 1907)

Nous avons déjà donné une première annonce de ce Congrès (cotisation 25 fr.), réuni sous le Patronage de Sa Majesté le roi Frédérik VII et des princes Christian et Valdemar. Les questions d'actualité politiques et religieuses sont exclues. Les langues admises pour les communications, en de- hors du danois, sont celles que nous admettons pour les traduc- tions de la Patrologie orientale : allemand, anglais, français, italien et latin. Les Compagnies de navigation de Copen- hague et d'Helsingfors accordent une réduction de 50 % ou de 32 1/2 % aux membres du Congrès.

Nous ajoutons ici la composition du Comité d'organisation et des diverses sections. Nous espérons que de nombreux sa- vants iront visiter ces pays du nord, cette Northmannie qui tant influé sur l’histoire de la France, de l'Italie du sud, de l'Angleterre et par suite des États-Unis et des autres pays de langue anglaise.

COMITÉ D'ORGANISATION

Président : M. Vilh. THOMsEN, D', Professeur à l’Université, St, Knud Ve) 36.

Vice-Président : M. Fr. Buxz, D", Professeur à l’Université, Osterbro- gade 56 A.

(1) Voir Esther, p. 52.

100

REVUE DE L'ORIENT CHRÉTIEN.

Secrétaire général : M. Chr. SARAUW, D", Frederiksberg Allée 48.

Membres :

MM. Dines ANDERSEN, D", Professeur à l’Université, Steen

Blichers Vej 4. J.-C. JACOBsEN, Professeur à l’Université, Norre Vold- gade 20. J. Osrrur, Dr, Norrebrogade 42: Valdemar ΒΟΉΜΙΟΤ, D", Professeur à l’Université, ΝΥ Kongensgade 14.

Trésorier : M. I. GLücxksTADT, Conseiller intime, Landmandsbanken,

Holmens Kanal 12.

SECTIONS DU CONGRÉS

PREMIÈRE SECTION

Linguistique. Langues Indo-euro- péennes : M. Vilh. THOMSEN.

DEUXIÈME SECTION

Langues et Archéologie des Pays Aryens : a) Inde : M. Dines ANDERSEN.

b) Iran : M. Edv. LEHMANN, Dr, Jægersborg, Gentofte.

TROISIÈME SECTION

Langues et Archéologie de lEx- - trême-Orient : a) Chine et Japon : M. J. HENNINGSEN, Conseiller, Amicisvej 6. b) Indochine et Malaisie : M. Α. de RICHELIEU, Vice-amiral, Directeur, Bredgade 77.

QUATRIÈME SECTION

Langues et Archéologie Sémitiques : a) Araméen, Hébreu, Phénicien, Éthiopien, etc. : M. Fr. Bu. b) Assyrie : M. Vald. SCHMIDT. c) Langues et Archéologie Mu- sulmanes : M. J. OSTRUP.

CINQUIÈME SECTION

Égypte et Langues Africaines : M. H.-0. LANGE, Bibliothécaire en chef, Jahnsensvej 11, Gentofte.

SIXIÈME SECTION

Grèce et Orient :

M. J.-L. HEIBERG, Professeur à l’Université

Classensgade 13.

SEPTIÈME SECTION

Ethnographie, Folk-lore de l'Orient: M. Vilh. GRONBECH, Dr; Ibsensve]j 7, Gentofte. ἘΝ:

MÉLANGES. 101

III

CONCORDANCE DE LA CHRONOLOGIE ÉTHIOPIENNE AVEC LA GRÉGORIENNE

Les années éthiopiennes, comme les années grecques, sont groupées par cycles de quatre ans. Les quatre années du cycle grec, intervalle compris entre deux fêtes des jeux olym- piques, forment une olympiade. Chaque année du cycle éthio- pien porte le nom de l’un des quatre évangélistes : la première année s'appelle Matthieu, la seconde Mare, la troisième Luc, la quatrième Jean. Luc est le nom réservé à la bissextile éthio- pienne.

L'année éthiopienne se divise en treize mois : Maskaram (1), 2 Teqmet, Hedär, 4 Tahchäach, Ter, Yakätit, Ma- gabit, Miyazya, Genbôt, 10° Sane, 11° Hamlé, 12° Nahase (chacun de trente jours), 13° Paguemen (de cinq jours dans une année ordinaire, de six jours dans une année bissextile). Aux mois depuis Paguemén jusqu'à Tahchach inclusivement, l'ère éthiopienne retarde sur la grégorienne de sept années, tandis qu'à ceux depuis Ter jusqu'à Nahase inclusivement elle retarde de huit années.

Nous ajoutons, pour faciliter les recherches chronologiques, deux tableaux, suivis de deux appendices, montrant de suite léquivalence des dates des deux calendriers éthiopien et gré- gorien.

(1) En ce siècle, le 1 Maskaram correspond au 11 ou au 12 septembre du calendrier grégorien. Voir ci-dessous.

102 REVUE DE L'ORIENT CHRÉTIEN.

PREMIER TABLEAU

Équivalence des ères éthiopienne et grégorienne.

Équivalence en grégorien du Maskaram.

Trois cas se présentent :

Depuis la réforme grégorienne jusqu'à la première des trois années séculaires communes (1582-1699).

Matthieu. 8 septembre ? Marc.

1er Maskaram Luc.

9 septembre ! Jean.

> Aux trois années séculaires communes (1700, 1800, 1900 2100, 2200, 2300 2500, 2600, 2700 etc.).

Δ chaque année séculaire commune, l'ère éthiopienne prend un retard d'un jour. Matthieu. Marc. Luc.

9 septembre

1700-1799 10 septembre | Jean.

Matthieu. { 10 septembre Marc. ler Maskaram } 1800-1899 \ Luc.

11 septembre | Jean.

Matthieu. 11 septembre ; Marc.

1900-1999 Luc.

12 septembre | Jean.

Aux années séculaires non communes (2000, 2400, 2800, 3200, etc.).

A chaque année séculaire non commune l'ère éthiopienne ne change pas. Elle reste ce qu’elle était à la dernière année séculaire commune.

Matthieu. Marc.

| 11 septembre Luc.

1 Maskaram { 9000-2099

12. septembre | Jean.

MÉLANGES. 103

SECOND TABLEAU

Équivalence des mois et des jours des deux années éthio- pienne et grég'orienne.

Deux cas se présentent :

1 Il s’agit des années Matthieu, Marc et Luc. Ces années ne coïncident jamais avec une bissextile grégorienne (1).

Voir ci-dessous l’appendice A.

Il s'agit de l’année Jean. Cette année coïncide toujours avec une bissextile grégorienne.

Pour l’équivalence en grégorien des jours de l’année Jean 2 périodes sont à distinguer :

a) Du 1* Maskaram au 21 Yakatit.

Pendant cette période, les mois de Maskaram, Teqmet, fle- dar, Tahchäch, Ter, Yakätit (exactement en grégorien du 12 septembre au 29 février) retardent d’un jour sur ceux des an- nées Matthieu, Marc et Luc.

b) Du 22 Yakatit au 5 Paguemen.

Pendant cette période, les mois de Magabit, Miyäzya, Gen- büt, Sane, Hamlé, Nahase, Paguemen (exactement en grégorien du 1°’ mars au 10 septembre) commencent à la même date que ceux des années Matthieu, Marc et Luc.

Voir ci-dessous l’appendice B.

Au moyen de ces deux tableaux et des deux appendices ci-dessous, le lecteur trouvera rapidement à quelle date grégo- rienne correspond une date éthiopienne quelconque.

Le Havre, le 20 janvier 1908.

Sylvain GRÉBAUT.

(1) La bissextile éthiopienne est toujours l’année qui précède la bissextile grégorienne.

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BIBLIOGRAPHIE

AGNES SMITH LEWIS et MARGARET DUNLOP GIBSON, Forty-one Facsimiles of dated Christian Arabic manuscripts (Studia Sinaitica, t. XII), in-4, xxII-82 pages, Cambridge, 1907. 10 sh. 6 net.

L'écriture arabe, de son origine à nos jours, est restée presque iden- tique à elle-même. Elle n’a pas, comme le grec, des onciales de divers modules et des minuscules de toute forme, depuis les belles écritures grecques du siècle jusqu'aux peu déchiffrables manuscrits postérieurs au xIv*, chargés d’abréviations et de ligatures. Aussi l’étude de la paléo- graphie arabe a été assez négligée et aucune publication peut-être n'avait été consacrée à la paléographie des mss. arabes chrétiens.

Mesdames Lewis et Gibson viennent de combler cette lacune en don- nant les photographies de pages de quarante et un mss. datés, tous con- servés au Sinaï, hors un de Paris et cinq du British Museum. Ils sont rangés par ordre chronologique depuis un papyrus de l’an 705 jusqu’à un ms. de 1787. Deux mss. sont sur parchemin (des années 876 et 917); tous les autres sont sur papier (des années 988, 989, 1056, 1065, 1095, 1103, etc.). Il ne faut pas s'étonner de trouver des mss. arabes sur papier aussi anciens, tandis que les mss. grecs sur papier n'apparaissent pas avant le milieu du ΧΠῚ siècle, car les Arabes apprirent à connaitre le pa- pier dès 751 dans leurs luttes avec les Chinois et fondèrent déjà en 790 sous Haroun ar-Raschid une papeterie à Bagdad. L'éditrice nous dit même (p. xx) que le nom latin donné au papier : Charta bombycina pro- vient de la ville d'Hiérapolis de Syrie, nommée aussi Mambidsch (Maboug) ou Bambyce.

On trouve, en frontispice, la photographie d’une page d’un nouveau pa- limpseste contenant la traduction arabe de quatre discours de Jacques de Saroug récrite au siècle sur un texte syriaque du Nouveau Testament écrit lui-même vers le γι siècle. Chaque photographie (hors celle du frontis- pice) est suivie de sa transcription et de sa traduction. M. David 5. Mar- goliouth ajouté quelques pages (p. Ix-Xv1) sur l'écriture arabe.

Le mot siag discuté par M. Lewis, page xvur, avait déjà été trouvé par elle dans l’histoire d’Ahikar, p. 115, note 2, il peut très bien avoir le sens d’étable, comme le grec onx6s. Il se serait ennobli d’ailleurs pour si- gnifier maison et même couvent ou église, Anal. Boll., 1908, p. 89,1. 16.

On remarquera avec plaisir que tous ces manuscrits arabes sont faciles

100 REVUE DE L'ORIENT CHRÉTIEN.

à lire et que les seuls textes ayant donné une véritable peine aux éditrices sont quelques lignes de grec récrites les unes sur le papyrus (pl. D et les

autres sur un ms. de 1739 (pl. XL). F. Na.

Mélanges de la faculté orientale de l'université S.-Joseph (Beyrout), tome 11, 4°, 493 pages, Paris, Geuthner, 1907.

Ce volume, digne en tous points du précédent, comprend huit articles.

I. Le Père Lammens continue ses études sur le règne du calife Mo‘äwia Ier, C’est une rédaction du cours d'histoire professé par lui et pour lequel il a réuni de nombreux matériaux empruntés aux sources ma- nuscrites aussi bien qu'aux ouvrages édités (p. 1-172).

II. Le Père 1. Dillenseger défend l’authenticité de la [15 Petri par témoignages externes (Justin, Barnabé) et internes (langue, style, dépen- dance littéraire, doctrine) (p. 173-212).

III. Le R. P. Mallon publie un second article sur « une école de sa- vants égyptiens au moyen âge ». Il cite et traduit des introductions et des specimens de scalæ coptes et donne quelques détails sur les auteurs et leurs ouvrages (p. 213-264).

IV. Le Père L. Jalabert continue à rapporter et à commenter les inscriptions grecques et latines de Syrie, 62-113, et signale un ms. épi- graphique en arabe : Coll. Schefer A. 117 (265-320).

V. Une étude écrite en allemand par le Père H. Wiesmann sur les Psaumes 40, 50, 51 (p. 321-335).

VI. Une étude par le Père R. Mouterde d’une borne milliaire de la voie romaine d’Antioche à Ptolémais (p. 336- 345).

VII. Le Père J. Neyrand montre que le men hébreu peut se traduire quelquefois par « en face de » plutôt que par un comparatif (p. 346-365).

VIII. Une étude du Père H. Lammens sur la géographie du massif montagneux sis au nord-ouest d'Alep et sur les Mazonites du pays d’'Oman (p. 366-407).

IX. Le Père L. Cheikho extrait d’un ms. arabe consacré au Sinaï et écrit vers 1710, le chapitre relatif aux archevêques du Sinaï (p. 408-421).

Cette importante publication intéresse donc toutes les branches de l’orientalisme : histoire, géographie, archéologie et critique biblique.

F. Nav.

AMÉDÉE GASTOUÉ, Catalogue des manuscrits de musique byzantine de la Bibliothèque nationale de Paris et des bibliothèques publiques de

France, 4, x-100 pages, 7 planches, Paris, L.-M. Fortin, 1907 (Publica- tions de la Société internationale de Musique, section de Paris).

L'ancienne notation musicale était surtout un aide-mémoire; c’est dire qu'elle comprenait seulement les signes strictement indispensables pour

BIBLIOGRAPHIE, 107

rappeler à la mémoire les thèmes musicaux transmis par l’enseignement oral. Aussi les manuscrits avec notation musicale retenaient fort peu l’at- tention du vulgaire et nous avons pu avoir plusieurs fois entre les mains un ms. dont M. Gastoué fait en plusieurs endroits les plus grands éloges (p. vit, 13, 52, 60, 96-99, pl. ITT), sans lui avoir consacré plus des deux lignes suivantes : « Chartres 1754; fol. 61-66, 218 sur 156 mm. Non pa- limpseste, minuscule sur parchemin. Hymnes avec notation musicale. » (Patrologie orientale, t. IV, fasc. 5, p. 520.)

M. A. G. nous rend le service de nous initier, dans sa première partie, à cette branche de la paléographie. Il reproduit, par lithographie, les anciens signes musicaux et nous donne ensuite leur explication. Cette partie la musique byzantine, les notations ekphonétique et diastéma- tique (évolution et principes de lecture) sera sans doute la plus goûtée des lecteurs. Nous nous demandons si le ms. palimpseste de Chartres 1754 n’a pas prêté à une petite confusion. Le catalogue de Chartres place sa composition du ix° au xv° siècle. Mais la date du 1x° ne s'applique qu'aux plus anciens écrits à certains caractères onciaux sous-jacents (1) et le fragment écrit en minuscules, avec des abréviations et des virgules, dont deux pages sont reproduites sur la planche III, ne peut sans doute être placé plus haut que le siècle. Chacun pourra en juger.

A Antioche, dès l’an 515, Sévère avait composé en grec une quantité d’'hymnes sur le propre du temps et les fêtes des saints pour les faire chanter à l’église et remplacer les chants païens. Il en reste une ancienne traduction syriaque (octoéchus) dont l'édition préparée par M. E. W. Brooks pour la Patrologie orientale est entre nos mains et paraîtra pro- chainement. Nous ne savons pas d’ailleurs si les plus anciens mss. étaient notés. Il est possible que les rythmes musicaux aient été transmis orale- ment. Les plus anciens mss. notés conservés semblent être du siècle au plus tôt.

La publication de M. A. G. rendra aux hellénistes le grand service de donner un sens à des signes et symboles qu’ils sont exposés à rencontrer bien souvent. Nous lui souhaitons donc la plus large vulgarisation.

F. Nau.

M.-A. KUGENER, Un traité astronomique et météorologique syriaque attribué à Denys l’Aréopagite, édité, traduit et annoté (actes du XIVe congrès des orientalistes, t. Il). Paris, Leroux, 1907, 8°, 64 pages.

Ce traité, conservé dans le ms. de Londres add. 7192 (sans doute du vue siècle), contient une partie de cet amalgame de philosophie et de cos-

τ (1) Ces caractères onciaux ont aussi grande variété de forme et de calibre. Si certains caractères anguleux sont du 1x° siècle, ceux des premières pages, fol. 1- 24 (écrits sous la vie de 5. Pacôme), sont certainement du vin° comme l’indique d’ailleurs le catalogue de Paris pour la fin de ce manuscrit (suppl. grec 480). Nous avons analysé les textes sus et sous-jacents des mss. 1753, 1754 de Chartres et suppl. grec 480 de Paris dans Patrol. orientale, t. IV, fase. 5,

108 REVUE DE L'ORIENT CHRÉTIEN.

mographie constitué par Aristote et qui devait se transmettre jusqu'aux temps modernes : Phases de la lune. Elle fut créée pleine, et cinq jours après le soleil sortit « de la porte orientale de la lumière ». Chaque mois elle est conçue (nouvelle lune) dans l’un des douze « magasins du vent », lequel influe sur toute la météorologie du mois correspondant. Explica- tion de la marche du soleil. Ce sont les vents qui le portent et le poussent. Les éclipses sont causées par le vent violent qui précipite le soleil en des- sous de sa route. Été et hiver. Altitude des étoiles, du soleil et des nuages. Des douze vents. Importance de la cosmographie. Réfuta- tion des Chaldéens ou astrologues.

M. Kugener traduit et annoté ce traité avec le grand soin qu’il ap- porte à toutes ses publications. Il a ainsi reconstitué un anneau très inté- ressant forgé sans doute à Édesse au vr siècle de la chaîne des sciences astronomico-philosophiques. Un autre Denys avait composé un ouvrage de cosmographie la philosophie avait moins de place (Cramer, Anecdota græca Parisiensia, t. 1, p. 369); il était sans doute syrien, car il un chapitre sur le pays d’Adiabène ; il n’y a pas de relation textuelle entre les deux ouvrages, mais il s'ensuit du moins que « Denys astronome » de- vait être connu en Mésopotamie, il a suffi ensuite de l'identifier avec l’Aréo- pagite. La réfutation des Chaldéens, analogue à celle de Bardesane, est in- férieure à celle qu'écrivait Sextus Empiricus.

F. Nav.

F. MACLER, Mosaïque orientale, 8°, 94 pages, Paris, Geuthner, 1907.

La première partie, intitulée Epigraphica, contient une note sur quel- ques écussons relevés à Münster, dans le Haut-Valais (armoiries de sei- gneurs locaux); une inscription punique du Musée archéologique de Ge- nève (ex-voto à Tanit); l'inscription syriaque de Sainte-Anne de Jérusalem (inscription funéraire en mauvais état); l'inscription arabe du brancard de Sahwet el-Khidr (..... Point de maison à habiter après la mort que celle qu'on se serait construite avant la mort.....); une note sur l'inscription arménienne de la cathédrale de Bourges (Sergis serviteur de Dieu).

La seconde partie intitulée (dans la table) Æistorica, contient la notice syriaque d’un manuscrit arménien (Colophon écrit le 15 février 1584); des documents relatifs à l’imprimerie arménienne établie à Marseille sous le règne de Louis XIV et enfin la requête de Ovanés Oglou Kivork et Cara- bet frères (demande de secours adressée à Louis XIV pour continuer leur voyage jusqu'à Amsterdam ils avaient vendu « du fil de chèvre » d’Angora). De nombreuses notes complètent l'ouvrage dont cette courte analyse suffit à montrer la variété et l’intérèt. F. Nau.

BIBLIOGRAPHIE. 109

Vicouroux, BACuEZ et BRassac, Manuel Biblique, tome IT, Nouveau Testa- ment, par A. BRassAc, douzième édition totalement refondue, in-12, x11-768 pages, Paris, Roger et Chernoviz, 1908.

M. Vigouroux a su faire des deux premiers volumes de ce manuel un ouvrage hors pair chez les catholiques français, par l’érudition, la pondé- ration, la clarté didactique qu’il su y mettre, et ces deux premiers vo- lumes trainaient les deux derniers à leur suite. Dans la présente édition M. A. Brassac, professeur d'Écriture sainte à l'école de Théologie d'Issy, fait un louable effort couronné de succès pour mettre les tomes ΠῚ et IV au niveau des précédents. Dans le tome III, seul paru, nous trouvons nombreuses notes bibliographiques et grande richesse d'informations. Peut- être l’auteur attache-t-il trop d'importance aux ouvrages de pure littéra- ture qui sont, plus ou moins, ouvrages d’actualité et, par endroits, de fantaisie, au détriment des éditions et discussions de textes qui sont les seules bases scientifiques de toute étude. On pourrait peut-être n’indiquer dans le cours du livre que les textes, les études et les ouvrages récents qu'il est souhaitable et possible de voir entre les mains des étudiants et reléguer dans un appendice à la fin du volume la bibliographie des mul- tiples ouvrages de littérature biblique que l’auteur pu parcourir, en ca- ractérisant chacun d'eux en quelques lignes. De cette manière nous ver- rons figurer à la page 114 les logia récemment découverts que les rationalistes voulaient opposer aux Évangiles, tandis que M. C. Wessely, après les avoir reproduits et commentés, vient de montrer qu’ils dépendent directement de nos Évangiles et ne font donc qu’en prouver l’autorité et l'antiquité (Patrologia orientalis, éd. F. Didot, t. IV, fasc. 2). De même à la page 121, nous trouverons mentionnés les textes (Évangiles des douze Apôtres et de S. Barthélemy) édités par la Patrologie orientale. Par contre beaucoup d’introductions (Introductio, Introduction, Einleitung) seront re- léguées à la fin du volume.

Du moins nous ne reprocherons pas à l’auteur d’avoir laissé relative-: ment peu de place aux hétérodoxes et aux objections, car celles-ci pro- viennent souvent des principes du contradicteur qui découlent eux-mêmes de sa tournure d'esprit. Il est fort inutile de réfuter dans un cours d’Écri- ture sainte les objections d’un matérialiste, il faut commencer par adresser celui-ci aux philosophes, le jour il sera devenu spiritualiste, partisan d’un Dieu personnel, créateur et conservateur des êtres, ce jour-là seule- ment, il conviendra de lui présenter la révélation et la Bible.

Les anciennes versions et les anciennes citations des Pères ont évidem- ment leur importance pour établir le texte du Nouveau Testament (p. 20, 1. 5-8), mais il ne faut pas oublier que tout traducteur est exposé à mettre un peu du sien dans la traduction (1) et que les écrits des Pères ont été

(1) L’antiquité d’une version copte ne peut jamais être admise a priori (p. 14), mais doit toujours être prouvée, car le grec était d’usage courant en Égypte chez les particuliers et dans l’Église. C’est après le concile de Chalcédoine seule- ment que le copte est devenu la langue officielle de l’Église jacobite. Il n’est pas

110 REVUE DE L'ORIENT CHRÉTIEN.

encore plus maltraités que les textes de l’Écriture. Par exemple, il ne nous reste des œuvres de saint Justin qu’un manuscrit complet qui est de plus moderne et mauvais. Dans bien des cas on risque d'interpréter obscurum per obscurius.

Ce manuel rendra gran dservice aux élèves de M. Brassac, et nous ne pouvons que regretter pour notre part de ne pas l'avoir eu au temps de nos études scripturaires (1).

F. Nav.

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MAXIMILIEN, prince de Saxe, Praelectiones de liturgiis ortentalibus habitae in universitale Friburgensi Helvetiae, 4, vir-242 pages ; Fribourg-en- Brisgau, Herder, 1908. 5 M.

Ce premier volume comprend une introduction générale sur toutes les liturgies orientales et une étude plus particulière du rit des Grecs et des Slaves.

Dans la première partie, l’auteur étudie la légitimité, l’authenticité, l'antiquité, les textes et les éditions des liturgies orientales, leurs qualités et leurs défauts, leurs différences entre elles et avec nos propres liturgies. Dans la seconde partie, consacrée aux Grecs et aux Slaves, il nous fait connaître toute la partie matérielle du culte (édifices, vases et vêtements sacrés, livres et personnes liturgiques), puis l’année ecclésiastique (Ca- lendrier, fêtes solennelles et fêtes mobiles, saints fêtés chaque jour de l'année). Une table des noms propres termine l'ouvrage.

C’est donc un résumé complet et didactique de toutes les généralités qu'il est indispensable de connaître avant de se livrer à une étude com- parative plus approfondie des diverses liturgies. Il sera très utile à tous les savants qui s'occupent des littératures chrétiennes orientales, car la liturgie est en général le pivot autour duquel sermons, synaxaires et même histoires évoluent.

F. Na.

H. POGNON, consul général de France, /Znscriptions sémitiques de la Syriè, de la Mésopotamie et de la région de Mossoul. Première partie, gr. in-4°, 11-100 pages, 25 planches, Paris, Lecoffre, 1907. 60 fr. (Prix de souscrip- tion des deux parties : 80 fr.)

Les facilités d’études que trouvent à Paris les futurs consuls formés à l’école des langues orientales, leur permettent, s’ils veulent s’en donner la

probable qu’on ait songé à traduire toute la Bible pour les paysans qui ne sa- vaient pas le grec. C’est ainsi qu’en Bretagne même on n’a pas éprouvé le besoin de traduire toute la Bible en breton.

(1) 82 gravures et cinq cartes ornent l'ouvrage. Les divisions sont un peu pé- nibles : faute de la division en livres, on trouve sections sur sections (II° section et dans le chapitre 1v de cette section).

BIBLIOGRAPHIE. 111

peine, d'ajouter les connaissances des langues mortes à celle des langues vivantes qui seules leur sont indispensables. M. Pognon donc appris et pratiqué en sus des langues vivantes : l’assyrien, le syriaque et le man- déen et pu ainsi s'intéresser à toutes les traces du passé qu’il rencontrait dans ses voyages. Son bel ouvrage s'ouvre par une inscription babylo- nienne d’un grand prêtre du temple de Sin (lune) à Harran en l’honneur de Nabonide, restaurateur de ce temple et contemporain de Cyrus (vi‘ siècle avant notre ère). Les 53 autres inscriptions sont syriaques et ont été recueillies sur des pierres isolées, sur des tombeaux, dans des églises et surtout dans des cavernes. Elles s’étagent du 1 au ΧΥΓ siècle; par exemple : 1 siècle (n° 2); an 201 (n° 36); 115 siècle (n°5 6-10); siècle (n° 21); γι" siècle (n° 19, 20); vur° siècle (13-14, 52), etc.

Elles nous font connaître des toparques, des évêques, des noms pro- pres, des faits historiques, voire des formes grammaticales, inconnus ou peu connus par ailleurs, de nouvelles formes des lettres et des chiffres (voir les planches), etc.

On trouvera la description minutieuse du site et du monument, le fac- similé, la transcription, la traduction et le commentaire de toutes les ins- criptions, avec de nombreuses notes historiques, géographiques et gram- maticales. C’est donc un ouvrage de patientes recherches, d’heureuses trouvailles et de savante élaboration. L'Académie, qui rumine longuement pour son Corpus des inscriptions sémitiques analogues ou inférieures à celles-ci, se devait, semble-t-il, d'encourager la présente publication. Nous n’en avons pas trouvé mention sur la couverture. Ce sera, espérons-le, pour le second fascicule.

En attendant nous ne pouvons que féliciter la librairie Lecoffre-Gabalda d'avoir entrepris cette publication de pure science; car ce ne sont pas les publications de ce genre qui enrichissent les éditeurs. L’élévation du prix ne peut compenser le nombre des acheteurs, de nos jours surtout la dispersion des ordres religieux en France supprimé ces centres d’éludes désintéressées, si nombreux il y deux siècles, acquéreurs-nés de tout ouvrage scientifique et dont les belles bibliothèques forment par suite de simple confiscation la plus belle partie de nos bibliothèques dites nationales ou départementales. 11 reste maintenant en France, comme dé- bouché pour les ouvrages de pure science, le dépôt légal qui est gratuit, quelques professeurs arrivés et quelques aspirants professeurs qui espèrent y trouver matière à avancement. C’est peu pour couvrir les frais considé- rables des éditions qui comportent des caractères étrangers.

F. Nau.

La Voix de la Vérité, revue néo-syriaque d’Ourmia (Perse).

Cette revue est dirigée par le R. P. Salomon, des prêtres de la Mission. Le néo-syriaque, parlé encore par cent mille chrétiens et juifs sur les con- fins de la Turquie et de la Perse, est le dernier reste des idiomes chal-

119 REVUE DE L'ORIENT CHRÉTIEN.

déens, araméens, syriaques, parlés dans ces régions depuis la captivité de Babylone et supplantés de plus en plus par la langue arabe. Le R. P. Sa- .lomon, dans cette revue mensuelle (16 pages in-4°), s'efforce de mêler l’ancien au nouveau. Dans le numéro de septembre 1907, il traduit en néo- syriaque une partie du voyage de Mar Jaballaha en Europe (édité par le R. P. Bedjan) et des lois de Hammourabi, il renseigne ses lecteurs sur les principaux événements des pays étrangers (Norvège, Chine et Japon, Maroc) et ajoute les faits divers de son propre pays (Iran). Il est regretta- ble que les déprédations continuelles des bandits kurdes rendent ce pays presque inhabitable pour les chrétiens, et obligent ceux-ci à émigrer vers les villes et même en Amérique. Si l'insécurité actuelle, les vols et les massacres ne sont bientôt enrayés, on peut prévoir à bref délai la dispari- tion des Chaldéens de tout rite, en dépit de la présence et des efforts des missionnaires américains, anglais et francais. Pour l'instant, nous signa- lons cette curieuse revue aux amateurs du néo-syriaque et de la philologie comparée (1). F. Nav.

(1) Sadresser au R. P. Salomon, imprimerie des missionnaires lazaristes, à Ourmia, Perse. Les lecteurs qui ne pourront se procurer la grammaire néo- syriaque de M. Nœldeke, pourront recourir à la grammaire peu coûteuse de J. Rosenberg : Lehrbuch der Neusyrischen Schrift- und Umgangsprache, Hartleben’s Verlag, Vienne et Leipzig, vr-l61 pages, 2 M.

Le Directeur-Gérant : F. CHARMETANT.

Typographie Firmin-Didot et Cle. Mesnil (Eure).

LE CALENDRIER D’ABOUL-BARAKAT

TRADUIT EN LATIN PAR RENAUDOT

Les synaxaires coptes rédigés en arabe, conservés dans nos bibliothèques (Florence, Gættingue, Londres, Paris, Rome), sont donnés comme l’œuvre de Michel, évêque de Malig, qui était célèbre aux environs de 1425. Ils reproduisent donc la liste des saints Jacobites fêtés à l'époque et dans la région vivait Michel.

Le calendrier d'Aboul-Barakat nous fait remonter plus haut, car son auteur vivait à la fin du ΧΠῚ ou au commencement du xiv° siècle. Il peut donc s'être écoulé près de cent cinquante ans entre la rédaction des deux calendriers. Celui d’Aboul-Barakat est conservé à Paris dans le ms. arabe 203, qui est du xiv® siècle, c'est-à-dire postérieur d'assez peu à l’auteur. Il occupe les folios 257-259"; les pages sont divisées en cases, les douze mois sont disposés les uns sous les autres et les trente jours courent horizontalement du fol. 257" au fol. 259". Chaque case ne peut contenir que de deux à trois noms. Les mots : patriarche, martyr, vierge, ne sont figurés que par la pre- mière lettre du mot arabe (1).

La traduction latine de ce calendrier, faite par Renaudot, se trouve dans le ms. Nouv. acqu. françaises, 7A71, fol. 439- 451 (2). Elle été faite comme complément et correction au

(1) Le travail d’'Aboul-Barakat est lui-même une compilation, car en un endroit au moins (17 Pachon), il nous donne deux noms en nous avertissant qu'il a trouvé le second dans « un autre exemplaire ».

(2) Nous avons trouvé cette traduction pour la première fois en 1902, lorsque nous cherchions, pour M. l'abbé Goussen, si les manuscrits de Renaudot ne contenaient pas les références des textes cités sans référence dans la Perpétuité de la foi. L'année suivante (1903), nous l’avons transcrit pour M. Goussen, afin

ORIENT CHRÉTIEN. 8

114 RÊVUE DE L'ORIENT CHRÉTIEN.

chapitre consacré par J. Selden au calendrier copte dans son De synedriis velerum hebraeorum. Notre but était d'éditer tel quel le travail de Renaudot, cependant nous avons pris la peine de revoir sur le ms. arabe fous les noms qui sont transcrits, car bien des points manquent; nous nous sommes assuré qu'il en est de même dans le ms.; d'ajouter toutes les différences du synaxaire de Michel de Malig pour le mois de Paophi (28 sept. au 27 octobre) (1), les notes ajoutées à ce mois suffiront pour donner une idée des nombreuses différences des deux calen- driers ; d'ajouter quelques explications ou quelques renvois à des passages parallèles du synaxaire de Michel de Malig (F) (2) des deux fascicules du synaxaire arabe jacobite publiés par M. René Basset, directeur de l’école deslettres d'Alger (R.B.)(3), et du synaxaire éthiopien (Zotenberg, Catalogue des mss. éthio- piens de Paris).

Paris.

F. Nauw.

De calendario sacro ecclesiae jacobiticae Alexandrinae seu Coptitarum. |

Ut singularem de Calendario sacro Coptitarum dissertationem scriberemus, suasit necessaria prope, ad ecclesiae Alexandrinae disciplinam in multis explicandam, festorum dierum qui in ea celebrantur expositio, ex quo sola intelligi potest quam parum a vetustis hac in parte universalis Ecclesiae ritibus degenera- verint. Unde cum vix ulla sit fidei vel disciplinae pars circa quam vel Protestantibus vel Catholicis quibusdam non accu- sentur, in ista ne minimam quidem suspicionem patiuntur. Pollicitus dudum fuerat Kalendarii istius editionem Athanasius Kircherus in Appendice ad Linguam Ægyptiacam restitutam et paucis post annis ejus consililum antevertere conatus est, sed

de l'aider à préparer un fascicule de calendriers orientaux pour la Patrologie orientale. La présente publication n’a pas encore d'autre but : mettre un docu- ment inédit à la portée des éditeurs de synaxaires et de calendriers orientaux.

(1) D’après le catalogue de la bibliothèque de Florence (ὃ. E. Assémani, Bibl. Palat. Med., Codex CXV), p. 164-187.

(2) D’après le catalogue de Florence cité ci-dessus.

(3) Pages 1-166 dans Patrol. orientale, t. I, fase. et p. 167-470, Zbid., t, ΠΙ, fasc. 5,

LE CALENDRIER D'ABOUL-BARAKAT. 115

parum feliciter, Joannes Seldenus, operis sui de Synedriis vete- rum Hebraeorum parte 3", ad quod sane Coptitarum festa nul- latenus pertinebant. Verum quod alias saepe parum secunda fama fecerat, praesertim in fragmento. unius folii ex historia Saidis f. Patrik, sive Eutychii, ex quo miras et inauditas origines Ecclesiae Alexandrinae elicere conatus est, id in Kalendario tentavit, quasi rem facilem et in qua nemo, ut videbatur, Ara- bicari secure non posset, cum nomina tantum continerentur. Ita tamen hoc in labore versatus est, ut nihil minus quam fe- storum et sanctorum in quorum memoriam celebrantur, adeo confusa omnia, perperam arabice lecta, et pejus latine descripta reperiuntur.

Ea itaque ratio nos movit, ut accuratius aliquid hoc in genere (fol. 4997) operi nostro adjungeretur, praesertim cum multos in eadem qua Seldenus religione, admiratos esse opus tam imper- fectum, ex eodem sacros nobis continuo texere Christianorum orientalium fastos, imo virum Æthiopice doctissimum Jobum Ludolfum, cum apud Æthiopes extent Kalendaria propria et notae auctoritatis, novum ex isto Seldeniano composuisse videa- mus, quae licentia non satisfacere eruditis potest, cum ita multa fastis ecclesiasticis Æthiopum inseruerit quae apud eos locum non habent.

Magna sane in extricandis multis nominibus difficultas est, quia nulli minus characteres quam Arabici, graecis vocibus explicandis conveniunt, ut norunt qui historias Arabum lege- rint, in quibus propria nomina agnosci vix possunt. Verum etsi pessimam seripturam, quando aliquatenus dubia est, referre licet ad aliorum experiunda judicia quod facere cogemur non

gemel danda tamen opera est ut aliunde lux talibus catalogis

inferatur, nisi operam ludere velimus, et vana orientalis litera- turae ostentatione fraudem puerilem nec tolerandam lectoribus facere. Itaque cum accuratam festorum omnium enumerationem nobis subministret Abulbircat circa finem operis sui, eidem po- tissimum insistere visum est et notas addere quae commen- tarii loco esse possint.

Annus Ægyptiacus, ut nemo ignorat, initium habet mense Toth, de cujus cum Romanis Graecisque aut Arabicis mensibus comparatione, cum illa paucis verbis explicari non possit, hoc loco nihil dicemus nisi quod per ἐπαγομένας accommodatur ad

116 REVUE DE L'ORIENT CHRÉTIEN

cursum anni Juliani, eo modo quo in tabulis expansis quae extant in variis codicibus praescribitur.

MENSIS TOTH. (29 août au 27 septembre).

1. Bartholomaeïi Apostoli. Elisaei prophetae. Diomedis marty- ris. [In graecorum synaxario 25° mensis Augusti memoria ejus- dem Apostoli notatur, sed translationis ejus reliquiarum. Dio- medis memoria est ejusdem mensis die 28]. Neuruz est initium anni, non habet Abulbircat, sed codex quo Seldenus usus est

(fol. 4401) 2. Joannis Baptistae (1), [nempe decollatio|] Kainanus martyr.

3. s5bsl Patriarcha (2). οἷο! patriarcha.

4. Simeon Anachoreta. Dionysius episcopus. Josue filius Nun propheta. [In graecorum menologiis, 2 sept., memoria fit Si- meonis stylitae et dormitionis Josuae|.

Ὁ. Mamantis martyris. Urale et LL martyrum. [Primus 2 sept. apud Graecos commemoratur|.

6. Isaiae prophetae. 22 etsiuxé martyres.

7. Dioscori patr. Agathonis patr. Alexandrinorum et fra- trum ejus. Severi patr. [Antiocheni. Pro Anbaiïato apud Sel- denum lege : Anba Agatho|.

8. Mosis prophetae. Zachariae sacerdotis. Hieremiae pro- phetae. Juliani mart. (3).

9. Athanasii patriarchae [Junioris Alexandrini, ut recte in indice Seldeniano|. Qt martyris.

10. Nativitas B. Mariae virginis. L»+-ls et filiorum ejus (4) mart.

11. Basilidis mart. Theodori episcopi.

12. Thomae Apostoli. Coesti (hi) Patriarchae et qui cum eo passi sunt martyrum (5).

1) Martyre de $. Dasius, soldat F. 2) En marge : Eumenii; synax. 18: sept. 3) En marge : 12 sept. syn. a ) Comm. de $. Jasina et de ses trois fils F. ) Translation des membres de $. Clément et des martyrs ses compagnons dans la ville d'Alexandrie, 2. B., p.47.

Des din. .

De “διὰ

LE CALENDRIER D'ABOUL-BARAKAT. 117

13. Isaac reclusi. Philemonis apostoli. στο) (Tarasii) martyris.

14. Mari Gatha (LL ἘΠ) mart. (1). Ananiae episcopi.

15. Stephani protomartyris.

16. Instauratio Anastasis [ecclesiae Resurrectionis Hieroso- lymis|. Helenae imperatricis. Inventio ossium Joannis Bäpti- βίδα.

17. Festum crucis gloriosae. Theognostae virginis.

18. Inventio ossium Thomae Alexandriae. Petri Halepen- sis archimandritae.

19. Euphemiae virginis. Acacii mart.

20. (fol. 440"). Melitinae virginis et martyris (ab).

21. Tiberii (2). Eumenii episcopi.

22. Dis et soror ejus martyrum (3). ων martyr (4). 23. Theclae martyris. Sidriae mart. ((,+) (André ?).

24. Gregorius Theologus patr.:

25. Depositio ossium trium puerorum. Thomae iterum.

26. Conceptio Joannis Baptistae in Elisabeth. SN}, mart. 27. Eustathius et uxor ejus mart.

22 O

. Aba Dir et Ira (l»1) soror ejus et Irene martyres (5).

29. Translatio Johannis. Arabsimae (Less D Sociarumque ejus virginum.

30. Gregorii Armenii et aba Pauli.

MENSIS PAOPHI, ARABICE BABA. (28 septembre au 27 octobre).

1. Chariton. Susanna. Abschai martyr. Anadia (L σὴ vir- go (6).

2. Ingressus Severi in Aegyptum [patriarchae scilicet Antio- cheni] (7).

(1) Mort de 5. Agathon stylite de Scété F.

(2) Sanctorum Cypriani et Justinae F.

(3) Martyre de 5. Cotila et de sa sœur Acsua, fils de Sapor roi des Perses, et de Tite (Tatius) son camarade F.

(4) Martyre de 5. Jules rédacteur des actes des martyrs F.

(9) Martyrium 5. Abatiri, ejusque sororis Irenes, sub Ariano Ægypti prae- fecto F.

(6) Martyre de sainte Anastasie F.

(7) Sic,F.

118 REVUE DE L'ORIENT CHRÉTIEN.

3. Qeshs ass, Lai NT (5 Ces,» pl. Gregorii episcopi arme- nii. Romanae et Bacchi (1).

4. Hananiae Apostoli. Pauli Tmueos martyris (2).

5. Jacobi, filii Alphaei apostoli. Abu Hour mart. (3).

(fol. 441) 6. Aüaf (slt) et Antonii martyrum. Simeonis epi- scopi et mart. (4).

7. Abu Pauli ex populo Tmueos (5).

8. Balachia et Bacchus (rats s 259$) martyres. Jbs Jonas propheta. sle3l Patriarchae (0).

9. Sanctae Ablagiae (a 1) vire. et mart. (7).

10. Sergii et Bacchi martyrum. Jacobi Patriarchae (8).

11. Dorothaei martyris. Demetrii patriarchae Alexandrini.

12. Matthaei evangelistae.

13. Abtalamae (Lt) et fratres ejus; Tarachi (#11) martyrum (9).

14. Demetrii. Joannis ἐλεήμονος. Philippi unius e septem [dia- conis| (10).

15. Petri martyris (11).

16. Sacerdotis Agathonis martyris. Antonii et sociorum ejus martyrum (12).

(1) Commémoraison de saint Grégoire, évèque d'Arménie, et de sainte Théo- dora, fille de l’empereur Arcadius. Mort de notre père Siméon, 91° patriarche d'Alexandrie F. La traduction de Renaudot ne semble pas exacte.

(2) Martyre de saint Bacchus, soldat, compagnon de saint Sergius, sous Antio- chus préfet de Syrie, et Maximien empereur F.

(3) Mort de notre père Paul, patriarche de Constantinople, disciple du père Alexandre, patriarche de la même ville F.

(4) Mort d'Anne, mère du prophète Samuel F.

(5) Mort de Paul l'ermite. Commémoraison des saintes Menna et Hasia mar- tyres F.

(6) Martyre de saint Métra le vieux et de ses compagnons sous l’empereur Dèce F.

(7) Mort du père Honorius pape de Rome. Commémoraison de l’évêque Siméon. Mémoire de la grande éclipse de soleil qui arriva sous le roi Job au temps du patriarche Cyrille lan 950 des martyrs (1243 de J.-C.) F. Pélagie figure au onze dans À. B., 115.

(8) F met Jacques « patriarche d’Antioche » au jour suivant avec sainte Péla- gie. Il omet Dorothée; place Démétrius, « 12° patr. d'Alexandrie », au 12 Paophi après saint Matthieu.

(9) Zacharie, moine F.

(10) Philippe seul dans F.

(11) Martyre de saint Magnus, de Pantaléémon et de ses compagnons sous Maximien F.

(12) Mort d’Agathon 39° patriarche d'Alexandrie F.

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LE ΟΑΠΝΌΒΙ ΒΒ, D'ABOUL-BARAKAT. 119

17. Translatio trium puerorum. Gregorii episcopi Nys- seni (1).

18. Theophili patriarchae Alexandrini. Heraclii patriar- chae (2).

19. Bartholomaei martyris. Depositio ossium Ignatii Patriar- chae (3).

20. Joannis reclusi et Cypriani martyris (4).

21. Eudociae et filiorum ejus. (fol. 4415) Ru... (e5,) vir- ginis in Khandek (Lib) suburbio Cahirae (5).

22. Lucae evangelistae. Cyriaci martyris ... Aaron (2 U2°) (6):

23. Joelis prophetae. Dionysii, philosophorum principis et astronomi, martyris (7).

21. &, martyris (8). Constantini episcopi Laodicaeae (9).

29: "ADla (Δ) monachus ex Thebaïde (10).

26. Jacobi fratris Domini, et Vares (Ç»,ls) martyris in monte S. Antonii (11).

27. Sancti Macarii episcopi et martyris; Ç-L#:6 mar- tyris (12).

28. Les SA) ur#)L martyris. Et Macarae (Ὁ) episCopi san- cti(13).

δ}

(1) Commémoraison de saint Grégoire, frère de saint Basile. Mort de notre père Dioscore, 31° patr. d'Alexandrie F,

(2) Théophile (23° patr.) figure seul dans F.

(3) Martyre de saint Théophile et de son épouse sous Dioclétien. Mémoire du saint synode d’Antioche contre Paul de Samosate F.

(4) Mort de saint Jean Κολοδὸς hégoumène F.

(9) Translation de l'ile de Chypres à Constantinople des reliques de saint Lazare que le Seigneur ressuscita des morts. Mémoire du grand prophète Joel. Mémoire des grâces que le peuple des Coptes a recues de Dieu par l’intercession de la Vierge Marie, mère de Dieu.

(6) Aaron ne traduit pas tout le texte. F porte Luc seul.

(7) Mort de Joseph, 52e patr. d'Alexandrie. Martyre de saint Denys, évêque de Corinthe sous Dioclétien F.

(8) F porte Zinih. A. B., p. 152, Zéna.

(9) Mémoire de notre saint père Hilarion l’anachorète. Martyre des saints Paul, Longin et Zina.

(10) Mort des saints Abib et Apollin (Apollinis Abla?) monachi F.

(11) Martyre de saint Timon, l’un des 70 disciples F.

(12) Mort du saint père Macaire « episcopi Cavensis (ou : Atakuae) » en Égypte, compagnon de Dioscore patr. d'Alexandrie F, Ce serait donc Macaire de Tkoou.

(13) Martyre des saints Marcien et Mercure, disciples de saint Paul, martyr, patriarche de Constantinople F,

120 REVUE DE L'ORIENT CHRÉTIEN.

29. Demetrii. Depositio capitis Joannis.Joannes continens(1). 30. Valentis (_=bJl) martyris (2).

MENSIS ATHYR. ARABICE HATHUR. (28 octobre au 26 novembre).

1. Cleophas apostolus ex minoribus [hoc est ex discipulo- rum numero|.

2. Petri, patriarchae Alexandrini. Irenes ( gpl).

9. Epimachi martyris et sociorum ejus.

4. Zachariae patris magni et Theodori martyris. . Adventus corporis (fol. 442") Theodori ad Schatibam (Lbs) (3).

0. Apostolorum cum Domino congressus.

7. Encoenia ecclesiae sancti Georgii martyris Alexandriae.

8. Quatuor sanctorum animalium angelorum (4) et appari- tionis signi Constantino.

9. (Memoria) trecentorum decem et octo qui Nicaeam conve- nerunt.

10. Isaaci patriarchae Alexandrini (5).

11. Agumii (sl) martyris (6).

12. Michaelis archangeli.

13. Anastasii imperatoris Christum amantis.

14. Eutranii (>>5l+bsl) martyris. Honorii imperatoris.

15. 5. Minae vel Mennae in Mareotide. Corobasii (relie) 95) martyris.

16. Eo die consecrata est ecclesia Abunefer (;$ +!) Misrae.

17. Samuelis martyris. Joannis Chrysostomi.

18. Philippi apostoli; Ga Cosmul Σ᾽ virgines (7).

19. Bartolomaei Apostoli. j

20. Matthaei (fol. 412") evangelistae. Aniani Patriarchae. Athanasii patriarchae.

OT

1) Martyre de saint Démétrius sous l'empereur Maximien F. 2) Mort du grand saint et du très pieux Abraham l’ermite F. 3) R. B., p. 178. 4) Les quatre animaux de l’Apocalypse F. 5) Le 495: F, (6) Archélaus martyr, À. B. p. 203. (7) Correspond sans doute à «Martyre d’Atarasie, fille de l'empereur Hadrien, et de Junie, vierges » F. R. B., Ὁ. 228.

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LE CALENDRIER D'ABOUL-BARAKAT, 121

. Gregorii Thaumaturgi. . Cosmae et sociorum ejus martyrum. 3. Quadraginta martyrum Sebastae et Cornelii. . Viginti quatuor presbyterorum Angelorum (1). . Mercurii martyris (2). . Gregorii Nysseni episcopi. . Jacobi intercisi martyris. Philemonis apostoli. 28. Serapionis. Absceda (#3l&l) episcopi (3) [vel Bicenda hoc est Vincentii | , 29. Clementis Apostoli. Petri patriarchae Alexandrini. 30. Abu Macarii martyris (4).

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MENSIS COHIAC.

(27 novembre au 26 décembre).

FAO

1. Petri junioris patriarchae. Hunesch (#5) episcopi. Je- min (Lr®#) martyris (9).

2. Abu Hur monachi. |-5l45! martyris (6). 3. Ingressus Mariae in templum. 4. Andreae Apostoli. Zachariae martyris. Ὁ. Isidori martyris. Nahum prophetae.

Ὁ. Ptolemaei ({.#lllsl) sacerdotis in ecclesia 5. Michaelis ad caput canalis.

7. Matthaei pauperis, martyris (7).

8. Aba Samuelis Kalmonii martyris. Aba Isa ( Ce). Teclae (LS) et Barbarae martyrum (8). 2

9. Sancti Yemini (rs) patriarchae qui martyribus accense- tur (9).

10. Sancti Nicolai (10).

11. Anba (Bigimi) et Ptolemaei (Llb:) (11).

(1) Les 21 vieillards de l'Apocalypse F.

(2) Martyre de Mercure le Romain sous Dèce et Valérien F.

(3) Serapionis, episcopi Nachiensis F.

(4) Macaire, martyr sous Dèce et Valérien F.

() F porte seulement : Mort de saint Pierre d'Édesse, évêque de Gaza, sous l'empereur Zénon.

(6) Ce dernier figure dans le synaxaire éthiopien, Catal. Zotenberg, p. 165.

(7) R.'B., 320-326.

(8) R. B., 329-335 et 327-328.

(9) Pamim, 2. B., p. 336-339.

(10) À. B., p. 341-347.

(11) PR: B;, p' 347-354.

192 REVUE DE L'ORIENT CHRÉTIEN.

12. Abu Hedri (,5 )°+) martyris Asuanae (ωἱ ab) (1).

13. Conceptio Mariae virginis per Annam. Barsomae.

14. Cerdonis (Christodule?) patriarchae Alexandrini. Simeo- nis martyris tempore Muhamedanorum in urbe Menaf .

15. Gregorii patriarchae Armeni (2).

16. 25831 et sociarum martyrum. Ruachiae ( Qrkals,) mar- tyris (3).

17. Serapammon et Eustathiae martyrum.

18. Heraclae et aliorum. Titi et Philemonis martyrum (4).

19. Joannis hegumeni martyris. Theophaniae virginis et martyris.

20. Danielis prophetae.. sl» (Jean?) episcopi Paraloou (ot) (5).

21. Anba Sabae Hegumeni.

22. Gabrielis Angeli. Anastasii patriarchae Alexandrini (6).

23. Ὁ] Col Coll martyrum.

24. Depositio sancti Ignatii patriarchae (7).

25. S. Joannis Kema (LS) (8) martyris. Theodori episcopi. : Pauli Confessoris.

26. Anastasiae martyris. πος martyris (Hérakion?) (9).

27. Oseae prophetae. Abshadae (#lésl) episcopi et marty- ris (10).

28. Vigilia nativitatis et... Imilitum mart. (11).

29, Nativitas sancta. Cornelii centurionis (12).

) À, B., Ὁ. 354-358. ) À. R., p. 389-392. ) Peut-être Herwäd)j, (αἰαὶ. éth. (Zotenberg), ᾿ 108, ) 1. B., p. 406-408.

(2) F porte au 19 : Sancti Patris Joannis episcopi Borles in Æzypto inferiori. Cf. R.B., p. 410-413.

(6) À. B., p. 430-433.

(7) Saint Ignace d’Antioche, disciple de saint Jean l’évangéliste, dans F. BR. B., p. 440-441. ; ᾿

(8) Mort de Jean le Noir, moine dans l'Égypte inférieure F. B., p. 443- 446.

(9) À. B., p. 447-454.

(10) Martyrium sanctorum Absadii et Callinici episcoporum Thepenensium, sub Diocletiano imperatore F. A. B., p. 454-458. . (11) Commémoraison de la Nativité de Notre-Seigneur Jésus-Christ. Martyre de 150 hommes et de 24 femmes dans la ville d’Antinopolis F. AR. B., p. 459- 40].

(12) Autre commémoraison de la Nativité selon le rite de l'Église Copte d’A- lexandrie F. À. B., p. 461-465.

LE CALENDRIER D'ABOUL-BARAKAT. 123

30. Davidis prophetae. Sancti Jacobi Episcopi et Apostoli. Joannis Hegumeni monasterii 5. Macarii. Minae patr. Alexan- drini (1).

MENSIS TYBI. ARABIBUS TUBA.

(27 décembre au 25 janvier).

1. ἜΣ ΠΣ (2.5.2) ossium Stephani diaconi. Pauli episcopi Ephesi.

Ὁ: ω»».»ὉὉ patriarcha (2). Theonas patriarcha Alexandrinus.

Ὁ, Infantium Bethlehem.

4. Joannis, filii Zebedaei, evangelistae.

Ὁ. Vénusfius ((=>$s) martyr (3). Ablagius (ἢ l'O- manus (kiss) ur):

᾿ Circumcisio. Eliae. Basilii Caesareae episcopi.

. Ephraem Syri. Eumenii martyris.

à Benjamini patriarchae Alexandrini. Dedicatio ecclesiae S. Macarii in Sceti (4).

9. Abrahami et Georgii martyrum in Sceti (5).

10. Patriciae 2) martyris. Vigilia Epiphaniae.

11. Epiphania. Ari (. 2,5) diaconus. Anuphius et Anatolius

martyres in Monia (Ὁ... ω» Us LUI 39}.

12. Theodori orientalis et Juliani mar vides

13. Cana Galileae (6). [we Las (Mina?) stylitae (7).

14. Maximi martyris. Heraclidis (8). Irenes (_5\»\) martyris.

15. Lab ἃ» martyrum. |

16. Philothei martyris. οὐ etuxoris et filiae ejus Eupra- xiae martyrum.

(1) F ne mentionne que Jean, hégoumène du monastère de Saint-Macaire à Scété, 72. B., p. 465-459.

(2) Doit correspondre à : Martyrium sancti Leondiani sub Maximiano impera- tore, que F porte au jour précédent. Le carchouni porte œasull& évêque sous Dioclétien.

(3) Le carchouni porte «ρα λας wo|. Martyrium sancti religiosi Eusecnii Uranici, et Malaniae sub Juliano Apostata F. Il s'agit sans doute des mêmes qi) CF. Catalogue éthiopien (Zotenberg), p. 170, saint Eusigne, Acta SS., août 2, p. 70.

(4) Dédicace de l’église du monastère de Saint-Macaire en Égypte, faite par Benjamin, 38° patriarche d'Alexandrie F.

(9) Mort du saint Père Abraham, moine du monastère de Saint-Macaire F.

(6) Mémoire du premier miracle fait par Notre-Seigneur à Cana de Galilée F.

(7) Les deux derniers se trouvent en éthiopien, Catal. Zol., p. 172.

(8) Archélides de Rome dans le carchouni.

124 REVUE DE L'ORIENT CHRÉTIEN.

17. Diomediani et fratris ejus Maximi martyrum (1).

18. Marthae et Mariae sororum Lazari.

19. Ptolemaei martyris.

20. Hathuae (l>) martyris (2). Pauli presbyteri et confessoris.

21. Obitus Alariae (Δ) (Hilaria) filiae Zenonis. Comme. Beatae Mariae (3).

22. Magni Antonii, patris monachorum.

23. Theodosii imperatoris (4).

24. Abschadae episcopi. Demetrii et sociorum ejus.

95. Anba Askla (NS. martyris, Dorothei Carpasi (5:9 ) ex Menuf.

26. Quadraginta novem martyrum in Sceti. Marathonii et Narii (Qr2)bs uesssbys) filii ejus (5).

27. Timothei apostoli. Serapionis Patriarchae Alexandrini. Sophronii martyris.

28. Clementis episcopi et martyris.

29. Anba Minae continentis.

30. Fideiï, Spei et Charitatis virginum et martyrum et matris earum.

MENSIS MECHIR, ARABIBUS AMSCHIR. (26 janvier au 24 février). 1. Judae Apostoli. Pauli martyris. 2. Patris Pauli immundorum daemoniorum expulsoris in monasterio Elzejage PES Thomae martyris. 3. Mar Ephrem martyris. Tirae (l;5) martyris. 4. Ptolemaei continentis et Maximi fratris ejus martyrum. Ὁ. Apollo solitarii. Inventio corporum quadraginta martyrum in Sceti. 6. Abu Kir et Joannis martyrum.. Î LI Qrssloss mariyrum. 8. Ingressus Domini in templum et Simeonis sacerdotis. JAJustx Url) martyris. Pauli Syri martyris. Mar Barsomae Syr1. (1) Commémoraison de Maxime et de son frère Domèce, moines sous saint Macaire F. (2) Correspond à Nahiae martyris de F. En éthiopien Behnouï martyr (p. 173). (3) Ε porte : « mort » de la sainte Vierge. (4) Martyre du saint apôtre Timothée F. (9) Tous figurent en éthiopien, (αἰαὶ. Zotenberg, Ὁ. 174.

ΡΣ.

LE CALENDRIER D ABOUL-BARAKAT. 129

10. Justi centurionis, filii regis, martyris. 11. Jacobi, filii Alphaeiï, apostoli. Basilidis martyris. 12. Joannis patriarchae [Alexandrini|. a 4y°s (33951. 13. Sergii et Abu Kir (seu Cyri) martyrum (1). Timothei junio- ris patriarchae Alexandrini. 14. Severi Patriarchae Antiocheni. Zachariae Prophetae. Agrippini (+,°|) patriarchae Alexandrini. 15. Papnuda (forte Paphnutii) episcopi. Je martyris. 16. Theodorae (1,546) Christum amantis. 17. Anba Abrahami et uxoris ejus Elisabeth. 18. Jacobi Apostoli. Bafami (e&) continentis. 19. Theocristae ( LS.) martyris. (fol. 445") 20. Petri junioris patriarchae Alexandrini. Clemen- tis patriarchae Romani. 21. Petri metropolitae Damasci. Basilii... (2) martyrum. . Afilii ( ἘΣ Porphyrii ("5 99) martyrum. | . Pauli et sociorum martyrum. . Timothei episcopi Gazae. (3) ὁ)" be, eola 1.6. . Sidrachi ((3)9..) et sociorum martyrum (4). . Theodori martyris Emeseni. . Theodori martyris. Didymi (53) ducis. . Pauli episcopi. Charis (2,5) martyris (5). . Inventio capitis Joannis Baptistae.

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MENSIS PHAMENOTH, ARABIBUS BARMAHAT. (25 février au 26 mars).

1 (a ΟἹ UN bib Ce AG χὸ (6) ss ie. 2, Anba 8 episcopi. Pionii martyris.

(1) F porte seulement : Sancti Sergii Athribensis.

(2) F porte : Basilii et Timothei Alexandriae.

(3) Semble correspondre à : Commemoratio Sanctorum Phonae diaconi mar- tyris Romae et Minae martyris in Cypro F. Cf. Catal. élh. (Zotenberg), p. 177: Cona martyr à Rome et Menas de Chypre.

(4) Martyrium Sadoch episcopi et centum viginti octo sociorum in Perside, sub Sapore rege, caesorum F.

(9) Martyrium 5. Polycarpi, episcopi Smyrnae F.

(6) F porte au jour suivant : Martyrium sancti Patris nostri Macravii, episcopi Nakii in Ægypto inferiore F.

(7) L’éthiopien (p. 178) porte : abba Mercurius, évêque.

120 REVUE DE L'ORIENT CHRÉTIEN.

3. Porphyrii martyris.

4. Petri qui fuit minister Severi patriarchae Antiocheni.

9. Anba Sereni (CB ) archimandritae (1).

6. Lazari martyris. Sernae (15...) hegumeni. Severi monachi.

7. Theodosii (fol. 446") imperatoris et martyrum... (2).

8. Matthiae apostoli. Hermanii ( Qt, |) praefecti (3).

9. Hippolyti et Kalderiani Forte Chic θυ ) mar- tyrum.

10. Inventio sanctae crucis Hierosolymis.

11. Juliani et Seuli (Os >) martyrum.

12. Demetrii Patriarchae Alexandrini. Malachiae martyris.

13. Quadraginta martyrum Sebastae.

14. Nisaphi ( Las) martyris (4).

15. Hieronymi martyris. 16. Heliae ex Ahnasa ( Qt) et Chaïlis patriarchae Alexan- IRL

17. Auamelasii (Xl) martyris (5).

18. Isidori et patris ejus et Matronae martyrum.

19. Ea die data est discipulis potestas solvendi et ligandi.

20. Martyris Abum (el.

21. Theodori et Timothei martyrum.

22, Titi apostoli. Pauli episcopi. Cyrilli sancti (6). 23. Eupragiae vel Euphrasiae martyris.

24. Micheae propheta.

25

. Arsabae vel Barsabai (Le) ex Perside et Danielis mar- tyris (7). ᾿ |

(fol. 416) 26. Korkii »»:5)}35) martyris (8). Epraxiae (as) virginis.

27. Magni Macarii in Sceti et Josephi continentis.

28. Sancti Agabii (211), Alexandri, Dionysii.

(1) Mort du saint Père Sérapion hégoumène, abbé du monastère de S.-Jean en Égypte F.

(2) Martyre des saints Philémon, Apollon et de leurs compagnons, sous l’em- pereur Dioclétien F.

᾿ Arien (éthiopien, p. 179). (4) Martyrium $S. Sanuthii (Schenoudi?) martyris F. (5) Éth. (p. 180) : Talasius martyr. ) Cyrille de Jérusalem F, (7) )

: ( 23

F porte au 25 : mort du grand prophète Daniel. (8) Sans doute Porphyre (éth., p. 180).

LE CALENDRIER D'ABOUL-BARAKAT. 127

29. Annuntiatio Mariae per Gabrielem Angelum. 90, Eugenii (ον. lets) Ὡς

MENSIS PHARMUTHI QUI ARABIBUS BARMUDA. (27 mars au*25 avril). 1. Aaronis sacerdotis ; et patris Sylvani martyris (2). 2, Acarista (sl) martyris in Perside. . Joannis archiepiscopi martyris. Sancti _63:512 (3). .. 4. Isaaci hegumeni. Victoris, Acacii (55) (4) et Irenae martyrum. Ὁ. Ezechielis prophetae. Theodori sacerdotis et martyris. 6. Marci fratris Joannis et Diogenis martyris. 7. Athanasii et Theodori martyrum. 8. Quadraginta martyrum ex Perside (5). 9. Sancta Tarbu (::#) martyris et sociorum. 10. 3 et cum eo martyrum 125. Honorii ascetae seu con- tinentis. (fol. 4477) 11. Joannis episcopi Gazae. Maximi patriarchae Alexandrini. 12. Juliani. Antonii episcopi Tmueos. Joelis prophetae. 13. Dionysiae ancillae (259...) (0). Didymi martyris. 14. Sancti Callinici. 15. Vadimi (yes ts) archimandritae et sociorum in Perside. 16. Ezechielis Prophetae et Sawe (2) martyrum (7). | 17. Aba Noun |vel Youn] (.,+) diaconi. 18. Euthronii (ur3$3 sl) et Euclavatii ( NS) martyrum. 19. Isaaci ascetae, Simeonis episcopi et... martyrum in Per- side (8). 20. Léo martyris (9). ;

©

(1) Translation du corps de saint Jacques l'intercis F.

(2) F ajoute la mémoire du moine Jean tué par les Musulmans l'an i380 de notre ère.

(3) Saint Jean, évêque de Jérusalem. 5. Michel, 71° patriarche d'Alexandrie. S. Deusdedit tué par les Musulmans en 1380 de notre ère F,

(4) Decii F.

(9) Lutte des cent cinquante martyrs Perses F.

(6) Diaconissae F.

(7) Éth. (p. 182) : Saba martyr.

(8) F ajoute le martyre du moine David tué par les Musulmans l’an 1383 de notre ère. Le mot qui manque doit être un chiffre. L'éth. (p. 182) porte 150.

(9) Martyre de 5. Bennodius sous Arien, préfet d'Égypte F. L’éthiopien porte : ce jour-là, martyre de 5, Schenouti, sous Dioclétien.

128 REVUE DE L'ORIENT CHRÉTIEN.

21. Crescentis (x%<#l) martyris et Dioscoridis (1).

22, Marci junioris et Alexandri patriarcharum Alexandrino- rum.

23. Sancti Georgii, inter martyres praecipui.

24. Septem puerorum Ephesinorum et sanctae GL » martyris.

95. Anba Paphnutii (+3) (2) senis, et L}, È Christum dili- sentis (3).

(fol. 447°) 26. Sisinnii martyris. Andronici patriarchae Alexan- drini.

27. Victoris, filii Romani, martyris. 28. Basilisei et sociorum mart. 29. (5. } martyris et sociorum. 30. Marci evangelistae et Apostoli.

À,

MENSIS PACHON, ARABIBUS BASCHNES. (26 avril au 25 mai).

1. Commemoratio B. Virginis, quod eo die celebratur dedi- catio Ecclesiae ejus in monasterio Elniha (Las).

2, Jobi justi. Theodori, Eusebii, Pachomii martyrum. Zeno- nis (4). : 8. Aba Hour, ε᾽5.9 CI Simonis, Pachomii sancti.

4. Joannis, patriarchae Alexandrini (5).

5. Jacobi, filii Zebedaei. Translatio Hieremiae prophetae.

6. Abu Isaaci (Dapharensis) martyris. Abu Macarii Alexan- drini. Arcadii. Hieremiae prophetae.

7. Athanasii apostolici. Abba Macarii archimandritae.

8. Abu Joannis reclusi. Lucae Sithiensis (_g>gil B,)).

9. Helenae imperatricis. Simeonis 554! G.

10. Trium puerorum (6) et Theclae.

11. Hilarionis senis.

12. Joannis Chrysostomi. Apparitionis crucis in coelo et Ste- phani ascetae.

(1) Figurent dans l’éthiopien (p. 182).

(2) 5. Bennodius, anachorète F.

(3) 5. Théodore le religieux et cent martyrs en Perse F.

(4) F ajoute le martyre du prêtre Philothée, tué par les Musulmans en 1383 de notre ère.

(5) Le vingt-neuvième F.

(6) Ananias, Azarias et Misaël F.

LE CALENDRIER D'ABOUL-BARAKAT. 129

15. Anba Arsenii praeceptorisfiliorum imperatorum et Joannis. 14. Pachomii magni. Epimachi martyris. 15. Judae apostoli. Aba Hur Galatiae. 16. Joannis evangelistae et Epiphanii. 17. Stephani senioris et in alio exemplari Epiphanii (1). 18. Georgii socii Abrahami. Ignatii (( bal) spiritualis viri in Sceti. 19. Dioscori et Isidori in Moniet (cs) filiorum Khassib (es). 0. Ammonii anachoretae. Zachaei Antiochiae. 1. Amos (Le) et Yusabi (LL). 2. Jacobi sacerdotis «Slt (9). 23. Sylvani (31...) (3) et matris ejus martyrum Alexandriae. 21. Ingressus Domini in terram Ægypti. Cucutasi (5.5.3) martyris. Habacuc prophetae. 25. Eleutherii (SE et Dik& et 53 martyrum in Perside. 26. Thomae Apostoli. Zachariae senis. (fol. 4487) 27. Obitus Lazari (4). Joannis Nikiusii patr. Alexandrini. 28. Sancti Aeonis ..} οἷο martyris. 29. Simeonis magni martyris in Gethsemani (ἀμ 0) (5). 90. Domni martyris.

MENSIS BAINI QUI ARABIBUS BAONA. (26 mai au 34 juin).

1. Abu Nefam (:L5) in urbe Taha (.-) quia eo die celebratur Ecclesiae dedicatio. Lindii (ex) martyris (6) tempore Musul- manorum.

2. Inventio ossium Joannis Baptistae.

3. S. Aba Hour martyris.

4. Bammonis (os #L) martyris, Aba Hour, Jerothei (Q=»b, 9}), Τυϑι!.

(1) Cette phrase est d’'Aboulbarakat et montre qu’il n’invente pas son calen- drier mais le tire d’écrits plus anciens.

(2) Jacques l’oriental (éth., p. 185).

(3) Juliani F.

(4) Évêque de Chypre F.

(5) Mort du saint père Siméon le Syrien, stylite F.

(6) L’éthiopien (p. 186) porte : en ce jour Léonce de Syrie et Bifamon (Patr, or., I, 32).

ORIENT CHRÉTIEN. 9

190 REVUE DE L'ORIENT CHRÉTIEN.

Ὁ. Aba Bage (- εἰ martyris et Sociorum ejus ne 6. Barsabae archimandritae, Theodori. 7. Ischyrionis (ar) martyris et Ptolemaei ascetae. 8. Bamadae (5519) et filiorum ejus (1) et Aba Eulogii marty- rum. |

9. Archelai [vel potius Achillae] (1) [patr. Alex.] (2). Isaac ascetae seniors.

10. Timothei, filii regis, martyris.

11. Claudii martyris, Cerdonis patr. Alex.

12. Michaelis archangeli. Justi patr. Alex.

13. Jacobi, Joannis et... (3) martyrum.

11. Zenonis archimandritae martyris.

15. Dedicatio Ecclesiae sancti Mennae, Bartaia (LB) 5) martyris.

16. Abunefer (4) senioris, commemoratio obitus ejus et con- secrationis ejus ecclesiae.

17. Patris Lethsan (στ) | 5) martyris. Barnabae apostoli et Bartholomaei martyris.

18. Damiani patriarchae Alexandrimi qui serpentem occidit.

19. S. Georgii (6).

20. Dormitio Elisaei. Mennae in Moniet Barra as).

21. Dedicatio Ecclesiae B. M. Virginis Athribae. Depositio ossium sancti Stephani.

22. Isaiae prophetae. Cosmae fratrum ejus et matris eorum martyrum.

23. ἘΠΕ. martyris (7). Amos prophetae.

24. Patris nostri Moysis nigri seu Aethiopum martyris. ἜΣ ΟΝ martyris.

25. Petri patriarchae.

26. Consistentia solis erga Josue fililum Nun. Commemoratio Se in urbe Fium. 7. Lazari pauperis, Ananiae (δ) et sociorum ejus sanctorum.

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(1) Éth. (p. 187) : mémoire de Temada et de ses enfants.

(2) L'’éthiopien (p. 187) porte : Archélaüs métropolitain.

(3) Le signe nou reproduit ici peut-être un chiffre copte. L'éthiopien (p. 188) après d’autres noms (Ab Lagé?) ajoute : « et de deux cents autres ».

4) Onupbhrius F.

5) Requies ὃ. Lytsonii presbyteri F.

6) 5. Georgii Neophyti (sous les califes Mahométans) Ε΄,

_ (7) Requies saneti Abanubii monachi sub Diocletiano imperatore F.

8) Ananie, évêque de Damas F.

LE CALENDRIER D'ABOUL-BARAKAT, 151

(fol. 4495) 28. Theodori patriarchae Alex. Depositio Nestorii. 29. Aba Hour et Abschaï et matris eorum martyrum. 30. Nativitas Joannis Baptistae. Marthae et Mariae.

MENSIS EPIPHI, ARABIBUS ABIB. (29 juin au 24 juillet).

1. Afraniae (L515l) virg. et mart. (1). (boul martyris. 2. Cyrilli, Kastaini [forte Celestini] (2) (xl), eodem die commemoratio Thomae Apostoli. 3. Cyrilli magni patriarchae. Yemini (ur) martyris. 4. Inventio ossium Abu Kir, sive Cyri, et Joannis. Ὁ. Martyrium Apostolorum Petri et Pauli. 6. Bartholomaei Raschedae (8541). 7. Abu Schenudae, seu Sanutii, archimandritae. ὃ. Abu Bischoi in Sceti martyris. 9. Simeonis , >%)| (3). 0. Dedicatio Ecclesiae Sancti Sergii Misrae. 1. Eliae senioris. 2, Aba Houri (ss). 3. Abu Basenda, [seu Vincentii] (#%«) episcopi Copti (4)

44. Macarii magni (fol. 450") martyris, Ammonii martyris.

15. Ephraem Syri. Aba Mona (L::), ep. Sacha (l&=).

16. Joannis qui evangelium aureum habuit, Palaemonis se- nioris.

17. Isidori martyris Heliopoli.

18. Euphemiae martyris.

19. Antonii episcopi Alepensis.

20. Theodori magni martyris.

21. Cyrilli et Laetae matris ejus martyrum.

22. Marcelli et Cyriaci martyrum.

23. Schenudae (534) martyris. Longini qui Dominum in cruce lancea perfodit.

(1) Phebroniae, monialis in monast. Sanctae Bryenae in urbe Nisibi in Meso- potamia F. À

(2) Célestin, pape de Rome, figure dans l’éthiopien (p. 188) au jour suivant.

(3) Simeonis Cleophae F.

(4) Requies patris nostri Bissinthii, episcopi Copton (éth., p. 190 : Picendi).

132 REVUE DE L'ORIENT CHRÉTIEN.

24. Simeonis, patriarchae Alexandrini (1).

25. Mercurii. Assumptio Henochi. 1291 ν᾽ ai TO 5 Gi (2).

26. Josephi fabri et Josephi 1051]. τως Eliae.

27. Ezechielis prophetae. Dedicatio Ecclesiae Joannis fil Zebedael.

28. Mariae Magdalenae. Thomae martyris Alexandrini.

29. Barsanuphii martyris. Thadaei Apostoli.

30. Aba Simon discipuli Pauli. Timothaei confessoris, patr. Alex.(3).

MENSIS MESORI. (25 juillet au 39 août).

Aba Pauli in Khandek 3.9) (4). Dormitio Annae matris B. Virginis. (fol. 450") 2. Daminae martyris (5). Andronici patriarchae Alexandrini. . Simeonis stylitae anachoretae. 1: ἘΝ Hour 5. Anba Davidis LSl=#1 (6). 6. Disa (La (7) discipuli Schenudae. Ἷ

CO

Timothei, patriarchae Alex. . Septem ΓΕ πὶ Antiochiae (8). 9. Anba Abari (LS )L1) (9 (9) ex Chetnufa ( Abe) et translatio corporis. 10. (>#2% martyris. 11. Ptolemaei episcopi Menuf. 12. Martyrum Neapolitanorum. 13. Transfiguratio dominica in monte Thabor.

(1) Le quarante-deuxième patriarche F.

(2) L’éthiopien place Mercure et Hénoch au jour précédent et porte encore (p. 191) : mémoire des cent quatre-vingt-dix mille quatre-vingt-quatre martyrs qui souffrirent avec Abba Nob.

(3) 22° patr.; figure au 26 dans F.

(4) Martyrium sancti Abali, filii Justi, sub Diocletiano i imper ratore F.

(5) Requies sanctae Bapsiae menuphensis F.

(6) Eth. (p. 192, au jour précédent) : à Sondjar.

(7) Lire : Visa.

(8) Les saints Macchabées.

(9) Abba Ari (éth., p. 193).

LE CALENDRIER D'ABOUL-BARAKAT. 133 14. Procopii martyris. TA Es (1) prophetae. τ᾿ 16. Ascensio corporis B. M. Virginis. 17. Jacobi martyris. 18, Andreae martyris. 19. Translatio corporis sancti Macarii ad desertum. Puerorum in spelunca Ephesi. Micheae ,cli»l (2). Dormitio et assumptio corporis B. Virginis eodem die. Martyrum Caesareae. Renovatio (ἐγχαίνια) Ecclesiae Theodori martyris. . Andreae et Agalliani (, »95 ΛΕ 1) martyrum. fol. 451 r) 26. Victoris et sociorum ejus martyrum. 1. Samuelis prophetae. . Abraham, Isaac et Jacob. 29. B. Mariae in Cappadocia. 30. Qw2$lsl in Scete. Mosis episcopi Pharma.

=

D ND Ἐπὶ

I VW NI W KI NI ὃ9 οι

92

Sequuntur EPAGOMENAE. (24 août au 98 août). Pachomii et Serapionis. Titi. Anatolii et uxoris ejus (3). Raphaelis.

». Hadriani et uxoris ejus et S. Barsumae Syri.

Huc usque ex Abulbircat, sed unico codice, Kalendarium ec- clesiasticum Coptitarum exscripsimus, qui codex etsi non ubi- que accurate scriptus sit, melior tamen et integrior Seldenianis fuit...

© το

CO

--

(1) La case est en blanc dans le ms. et ne porte que ln initiale de nabi (prophète).

(2) Dans F, au 22 : Mort du saint grand prophète Michée, fils de Joël.

(3) Martyrium τ dents et Natoliae ejus conjugis sub Maximino impera- tore F, Cf. infra 5

UN EXTRAIT DE LA DIDASCALIE : LA PRIÈRE DE MANASSÉ

(AVEC UNE ÉDITION DE LA VERSION SYRIAQUE).

D'après les Paralipomènes (If, xxxn1, 18-19) « le reste des paroles de Manassé, sa supplicalion adressée à son Dieu. sont écrits dans les discours des rois d'Israël ; sa prière aussi et son accomplissement... sont écrits dans les discours d'Ho- zaï ». On s'est demandé si la prière de Manassé conservée était une traduction de cette pièce antique ou si elle n'était qu’un apocryphe imaginé par un auteur, d’ailleurs ancien, pour com- bler la lacune de nos Bibles. La seconde hypothèse a prévalu : la prière de Manassé n’est qu'une composition littéraire du commencement de notre ère. On la trouve dans la traduction syriaque de la Didascalie (ouvrage du siècle; cf. trad. Ε΄. Nau, Paris, 1902, p. 44-45) (1), dans le texte grec des Constitutions apostoliques (π, 22; Migne, Patr. gr., 1, col. 648-649); dans le Codex alexandrinus (A) de la Bible, après le psautier parmi les cantiques (2) (éd. Breitinger, Tiguri Helvet., 1730, t. IV, p. 131. Ce ms. est du γ΄ siècle); dans le Psalterium Turicense (T) (3); dans le psautier éthiopien et dans les traductions éthio-

(1) M. Nestle écrit (Encycl. für prot. Theol., 3 éd., t. IL) et M. V. Ryssel 8 répété (cf. E. Kautzsch, Die Apocryphen und pseudep. des AT., Tubingue, 1900, 1) que la prière de Manassé est le seul morceau de la Bible syriaque qui n'ait pas été édité. En réalité il l’est, depuis 1851, dans la Didascalia Apostolorum de Paul de Lagarde (page 29-30).

(2) Même dans ce ms. A, la prière de Manassé n’est donc qu’un complément au psautier. Elle passé de la Didascalie dans un Recueil de çantiques et de dans les psautiers, puis dans le ms. A.

(3) Le texte grec de la prière de Manassé ne se trouve pas dans la Polyglotte de Lejay: Robert Étienne l'a imprimé dans ses bibles latines, éd. 1640, fol. 159.

UN EXTRAIT DE LA DIDASCALIE, 135

piennes et arabe des Constitutions apostoliques; enfin dans un psautier copte de la Bibliothèque nationale de Paris (n° 4, fol. 181" parmi les cantiques) et dans deux manuscrits syria- ques de la Bible, Rome, Bibl. Vatic. Catal., IE, 7 et Paris, ancien fonds 2 (actuellement 7). Ce dernier est donné comme une copie faite de la main d'Abraham Echellensis, il est donc possible qu'il ait été copié sur le ms. de Rome. La prière de Manassé figure à la suite des Paralipomènes, sans titre, après un espace blanc (Paris, 7, fol. 182) ; elle est suivie du desinit dés Paralipomènes et du livre d’Esdras. Elle figuré aussi à cette même place dans la Vulgate avant que le concile de Trente n’eût ordonné de la rejeter en appendice.

Nous avons comparé la prière de Manassé contenue dans la bible syriaque (Paris, 7) à la même prière contenue dans la Didascalie (ms. 62 de Paris édité par de Lagarde, Leipzig, 1854) et n'avons trouvé que des différences orthographiques; il est donc impossible que l’on ait deux traductions indépendantes et, comme le traducteur de la Didascalie ne transcrit pas la Peschito mais traduit directement les textes grecs, nous de- vons admettre que c’est lui qui a la priorité. La prière de Manassé qui figure dans un ms. de Rome et un de Paris de la Bible syriaque n'est donc qu'un extrait de la version syriaque de Ia Didascalie.

Nous pouvons aller plus loin et ramener au texte grec perdu de la Didascalie toutes les versions de la prière de Manassé. I n'y aucune difficulté pour les rédactions contenues dans les remaniements éthiopiens ou arabes de la Didascalie, ou dans le texte grec des Constitutions apostoliques qui n’est aussi qu'un remaniement de la Didascalie. Il nous suffit donc de montrer que tous les textes grecs de la prière de Manassé et ceux qui en découlent comme le copte et le latin proviennent des Constitutions apostoliques. En effet : les textes grecs conservés (et les versions qui en dérivent) sont inférieurs au texte grec

Walton a reproduit le texte de Robert Étienne et a ajouté Les variantes du ms. A. Swete (The old test. in greek, Cambridge, t. IL, p. 803-501) l'a imprimé parmi les cantiques.

136 REVUE DE L'ORIENT CHRÉTIEN.

des Constitutions apostoliques, car ils présentent une lacune à la fin du verset 7 qui n'existe pas dans les Constitutions aposto- liques (d'accord ici avec la Didascalie); les textes grecs conservés présentent, au verset 9, la même lacune que les Cons- titutions apostoliques, on ne peut donc admettre qu'ils pro- viennent d’une source différente, car ils n'auraient pas intro- duit la même omission au même endroit.

La version latine doit cependant être mise à part, car la Didas- calie été traduite en latin vers le 1v° siècle, l'édition de M. Hauler contient encore la fin de la prière et les Latins ont donc pu la connaître par là; cependant elle présente aussi la seconde lacune (fin du verset 9) et paraît done plutôt dériver des Constitutions. D'où le tableau :

Prière de Manassé dans la Didascalie grecque.

De syriaque Did. latine Constitutions Apost. he Bible latine (?) Bible Didascalie --2--- syriaque arabe et Bible Psautier grec, éthiopienne latine éthiopien (et

copte ?)

*

+ *#

Il reste à se demander l’auteur de la Didascalie a trouvé ce texte; l’a-t-il copié, remanié ou inventé? Il le donne comme une citation, car il débute par :

Écoutez donc à ce sujet, évêques, un exemple convenable et utile : Il

est écrit dans le quatrième livre des Rois et aussi dans le second livre des Paralipomènes que dans ces jours-là régna Manassé.

Viennent alors IV Rois xxt et II Paralip. ΧΧΧΠΙ. La prière de Manassé se trouve IT Paralip. xxx, au milieu du verset 15; puis vient encore un paragraphe inspiré par IT Paralip. ΧΧΧΙΙ, 15 (fin), 15, 16, 20 et on lit enfin :

(1) Si l’on n’admet pas cette idée, il semble du moins que l’auteur n’a pas transerit mais remanié une lettre antérieure, car tout le passage est un rema- niement et de plus nous ne croyons pas que les bibles du siècle portaient cette prière dans II Paral. xxxur. De plus la lettre remaniée par lui devait être écrite en grec et non en hébreu, car il utilise seulement le texte grec de la Bible.

UN EXTRAIT DE LA DIDASCALIE. 137

Vous avez entendu, fils chéris, comment Manassé servit méchamment et malheureusement les idoles et tua les justes et, quand il se repentit, Dieu lui pardonna.

L'auteur donne bien tout le passage qui nous intéresse pour une citation, mais il faut remarquer qu'il combine avec assez de fantaisie les Rois et les Paralipomènes. Voici en effet son dernier paragraphe (celui qui suit la prière et que nous avons dit être inspiré par IT Paralip. χχχπι, 13 (fin), 15, 16, 20) :

Et le Seigneur entendit la voix de Manassé, il en eut pitié; une flamme de feu tomba sur lui, tous les fers qui le couvraient furent dissous el brisés et Dieu délivra Manassé de ses souffrances et le ramena à Jérusalem, à la tête de son royaume, et Manassé reconnut le Seigneur et dit : « Il est le seul Seigneur Dieu », et il servit le Seigneur de tout son cœur, de toute son âme, tous les jours de sa vie. Il fut réputé juste et s’endormit avec ses pères et son fils régna après lui.

: Nous ne pouvons admettre qu’au moment de la rédaction de la Didascalie (11° siècle), la prière de Manassé ait pu figurer au verset 13 du chapitre xxxu1 de IT Paral., car nous ne compren- drions pas qu'Origène n'ait pas fait entrer ce chapitre avec astérisques dans sa version hexaplaire conservée en syriaque, ni qu'il ait disparu de cette place dans les manuscrits du 1v° au siècle. Il nous paraît plus probable jusqu'à nouvelle décou- verte que l’auteur de la Didascalie lui-même, qui remaniail tout le passage, a composé la prière de Manasé.

Il est certain que le morceau à une tournure hébraïque assez caractérisée et c'est pour cela que V. Ryssel en particulier l'at- tribuait à un juif (cf. E. Kautzsch, Die Apocryphen und pseu- depigr. des AT., Tubingue, 1900, I, p. 166-167); mais l’auteur de la Didascalie vivait assez près des judaïsants, sinon des juifs, et son style est assez nourri et imprégné de l'Écriture pour qu'il ait pu composer facilement ce pastiche. Nous tenons donc pour l'instant que la prière de Manassé paru pour la première fois dans la Didascalie et qu’elle a rayÿyonné de dans toutes les littératures.

Paris.

F. Nau.

138 REVUE DE L'ORIENT CHRÉTIEN.

. VERSION SYRIAQUE.

Nous utilisons le ms. syr. 7 de Paris (P); le manuscrit de la Didascalie 62 (fol. 22") ou édition de Lagarde (L), l'édition de M. D. Gibson (1) : The Didascalia Apostolorum, Londres, 1903, dans Horae Semificae, 1. 1, Ὁ. 50-51 (G) et les mss. 2023 de Cambridge (ΟἹ et du musée Borgia (B).

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(1) L'édition de M. D. Gibson est basée sur un ms. de Mésopotamie; les variantes des ms. C et B figurent à la fin, p. 227-228:

(2) P em. ce titre. (3) gw*2ls P.

(4) gemls GL. (Ὁ) Ο om. Book. (6) CGL ἃ]. sas.

(7) ARE [sas (1, PROS pas C.

(8) Pro G. (9) GL om. &v.

(10) pes bass ας

(11) feistns s GL.

(12) Nlo L.

(13) col 1,.

UN EXTRAIT DE LA DIDASCALIE. 139

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(1) GL om. » pol.

(2) Saxo wemslo οι ϑὲ «αϑῇ [Las (ἃ. (9) Sa L. wo ἃ.

(4) D G.

(5) us Ρ, (6) aj. loN.

(7) P om. lon.

(5) (10) .ὐ C. (D) ) ILasss os C ) 805 Loges No α:

13) lLaaug p.

4) G om. Μὲ. (15) Se G. (16) wySob CL. (17) iblo σα. (18) uso CGL.

(19) His P.

(20) om. P. (21) las ui L.

140 REVUE DE L'ORIENT CHRÉTIEN.

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TRADUCTION

PRIÈRE DE MANASSÉ.

1. Seigneur (7), Dieu de mes pères, Dieu d'Abraham, d'Isaac, de Jacob et de leur race juste; 2. toi qui as fait le ciel et la terre avec tout leur ornement (8); 3. toi qui as lié la mer et qui l’as constituée par le précepte de ta parole (9), toi qui as fermé l’abime et qui l’as scellé de ton nom (10) ter- rible et glorieux, 4. toi devant la puissance de qui (11) tout craint et tremble, 5. car la majesté de ta gloire ne peut pas être affrontée et personne ne peut subsister devant ta colère et ta fureur contre les pécheurs. 6. Sans limite et sans mesure sont les miséricordes de tes promesses, 7. car tu es le Seigneur (12) patient, clément et très miséricordieux, tu reviens sur les méchancetés des hommes. Toi, Seigneur, dans la bénignité de ta grâce, tu as promis la rémission à ceux qui se repentent de leurs péchés et, dans la grandeur de tes miséricordes, tu as placé ta grâce pour la vie des pécheurs (13). 8. Toi donc, Seigneur, Dieu des. justes, tu n’as pas placé la pénitence pour les justes, pour Abraham, pour Isaac et pour Jacob, qui n’ont pas péché contre toi, mais tu as placé la pénitence pour moi, pécheur, 9. car mes péchés se sont multipliés plus que le sable de

1) 90 P.— (2) om. G. (3) ls P. (4) S3 ἃ. Ὁ) P

Le 87]. do, (6) Cette finale est propre au ms. P. (7) Le grec et le latin ajoutent : « tout-puissant » ou « (Dieu) céleste ». (8) Sans doute « l’armée des cieux » ou « les étoiles ». (9) Lit. de sa parole. Cf. Job, xxxvur, 8-11. 1) Lit. son nom. 1) Lüt. devant ta puissance. 2) Le grec (hors les Const. ap.) et le latin ajoutent « très élevé ». 13) La fin de ce verset manque dans les manuscrits grecs Α et T comme dans le psautier éthiopien; elle se trouve dans les Const. apost.

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UN EXTRAIT DE LA DIDASCALIE. [A1

la mer (1) et je n'ai pas le courage de lever ma tête (2), à cause du nombre de mes iniquités. Et maintenant, Seigneur, c’est avec justice que je suis affligé, et je suis tourmenté comme je le mérite (3). Voilà que 76 suis pri- sonnier, 10 et courbé sous la multitude des chaînes de fer de sorte que je ne puis plus lever ma tête en haut. /e ne suis d'ailleurs pas digne de lever mes yeux et de regarder et de voir la profondeur du ciel, à cause de la grandeur de l’iniquité de mes infidélités ; car j'ai fait le mal devant toi, j'ai excité ta colère, j'ai élevé des idoles et j'ai multiplié les im- piétés. 11. Maintenant je plie les genoux de mon cœur devant toi et j'implore ta bonté.

12. J'ai péché, Seigneur, j'ai péché, et parce que je connais mes péchés, 15. je supplie en ta présence : Pardonne-moi, Seigneur (4), et ne me fais pas périr avec mes fautes, ne t'irrite pas pour toujours contre moi, ne laisse pas subsister mes fautes, ne me punis pas ef ne me jelte pas dans les profondeurs de la terre; car tu es le Dieu du pénitent; 14. montre- moi donc encore, Seigneur, {4 grâce, et, bien que je n’en sois pas digne, sauve-moi selon la multitude de tes miséricordes. 15. Et pour cela je te louerai toujours et tous les jours de ma vie. Car toutes les milices célestes te louent et te chantent à jamais, dans les siècles des siècles.

Fin du livre des Paralipomènes qui a cinq mille six cent trois stiches.

(1) Grec et latin : « j'ai péché au delà du nombre des grains de sable de la mer; mes péchés se sont multipliés, Seigneur, mes iniquités se sont multipliées ».

(2) Le grec et le latin ajoutent : « et de regarder la profondeur du ciel ».

(3) Cette phrase manque dans le grec et le latin.

(4) Le grec et le latin répètent : « pardonne-moi ».

ÉTUDE SUR LA CONVERSION DE L’ARMÉNIE AU CHRISTIANISME

Housiä ET NERSÈS LE RÉORGANISATEUR DE L'ÉGLISE ARMÉNIENNE; TENTATIVE DE SCHISME PAR BAB

(Suite) (1)

Ces trois moines menaient de front, avec l'œuvre de leur per- fection individuelle, le travail de l’apostolat, ce qui devait les rendre encore plus chers à Nersès. Épiphane, tout en fondant maints monastères, évangélisa la région du Grand Dzoph. En- suite, il précha dans le pays d’Aghtzniq, y établit des monas-

J

tères et érigea, en l'honneur des martyrs, une église à Tigra- "

nocerte. Puis, revenu, pour quelque temps, dans le lieu de son premier séjour, il l'abandonna définitivement, pour se rendre, avec 900 disciples, au pays des Grecs (Faustus, V, 25-28). Un trait original, conservé par laustus, met en relief la manière dont ce maître formait ses disciples. Ce trait peut paraitre d’un goût douteux et propre à déconcerter nos maitres de novices; malgré son tour bizarre, il révèle pourtant un idéal de modestie assez élevé. Tandis qu'il s'éloignait avec ses disciples, Épi- phane rencontra une femme; il en était déjà loin, quand il s’é- cria : « Comme cette femme est belle et magnifique! » L'un de ses disciples, qui était jeune, reprit : « La femme que vous louez est borgne . » « Pourquoi, reprit le saint, as-tu examiné son visage? N'est-ce pas une preuve que tu nourris de mauvaises pensées ? » et, sur-le-champ, il le congédia. On voit cependant

(1) Voy. 1908, p..72.

ÉTUDE SUR LA CONVERSION DE L'ARMÉNIE. 143

que la leçon d'Épiphane donnait prise à une réplique et qu'on aurait pu lui dire : Si votre premier jugement est fondé, c'est que vous avez vous-même manqué à la modestie. S'il ne l’est pas, en quoi diffère-t-il du mensonge ?

Quelles que fussent les lacunes de leur instruction, plu- sieurs religieux se dévoutrent néanmoins, non sans succés, soit à former, soit à convertir des Arméniens, restés ou rede- venus idolàtres. Nersès avait bien besoin de l'actif concours de ces missionnaires pour réaliser son plan de réforme religieuse et morale. Au début de son pontificat, l'ignorance était extrème. C'était l'une des principales causes du manque de convictions religieuses dans la masse du peuple et de l’impie cruauté de certains Nakharars, tels que le prince de Manadjihr. Évan- géliser les adultes était bien; former les enfants était mieux encore et d'un résultat plus fécond. Le génie organisateur et prévoyant de Nersès ne pouvait pas ne pas le comprendre. Aussi, comme les instructions religieuses se faisaient, d'ordi- naire, en grec et en syriaque, il fonda dans tous les districts des écoles étaient enseignées ces deux langues, et prépara ainsi à l'Arménie une génération de chrétiens plus éclairés, plus fermes, plus convaincus.

Tandis qu'il jetait ainsi dans les jeunes âmes de précieuses semences dont plusieurs fructifieront un jour, il s’efforçait par ses prédications et ses exemples, d’arracher les autres personnes au vice et de leur inculquer les vertus chrétiennes. Il prêchait avec force contre la fourberie, le mensonge, les faux témoi- gnages, l'envie, l’avarice, la lâcheté, l'ivrognerie, la gour- mandise, les mauvais désirs, l’adultère, les péchés contre nature, la sodomie, l'injustice, la vengeance, la violence, l’ef- fusion de sang, l’homicide. Aux criminels il annonçait qu'ils seront torturés par un feu inextinguible. Il visait à éveiller dans tous les esprits la foi et l'espérance, et, dans tous les cœurs, la clémence et la charité. Aujourd'hui encore, dans la plupart des contrées de l'Orient, il existe même chez des chrétiens un vieil usage, qui donne aux cortèges funéraires une allure presque païenne. Des parents, des amis, des femmes surtout, souvent gagées pour cet exercice, sanglotent, se la- mentent bruyamment autour du cercueil enfermant le défunt, se frappent le visage, agitent leurs mouchoirs et s’entrainent

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mutuellement en de douloureuses contorsions. Témoin attristé de ces scènes, l’on allait Jusqu'à se déchirer le visage, Nersès ne se contenta pas de les condamner. Il s’appliqua, en même temps, à détacher ses contemporains des joies grossières, de tous les plaisirs qui passent, et à les consoler en leur rappe- lant la résurrection et les récompenses de la vie future. L'abus survécut au zélé réformateur : dans le combat décisif contre Méroujan, Vatché, le lieutenant de Manuel, étant mort écrasé sous son cheval, il y eut, à ses funérailles, de grandes lamen- tations. Il en fut de même aux obsèques de Nersès, raconte son biographe. Néanmoins, pendant plusieurs années, ces dé- monstrations perdirent beaucoup de leur bruyant éclat; et Manuel, sur le point de mourir, interdira qu'on se lamente sur sa tombe, par respect pour Nersès.

Censeur de tous les vices, réformateur de tous les abus, Nersès n’en devint pas moins très populaire. Ce qui lui gagna surtout les cœurs, ce fut sa commisération, à la fois tendre et efficace, pour tous les malheureux. Aux maitres, aux Grands, au roi lui-même, il ne se lassait pas de prêcher la compassion envers leurs serviteurs et leurs sujets, recommandant aux uns de ne point imposer de charges ou d'impôts excessifs, et aux autres, d’obéir avec fidélité, sous l'œil du Maître qui devait tous les juger. Il délivra plusieurs captifs, tantôt en indemni- sant leurs maîtres, tantôt en les menaçant des jugements de Dieu. Par lui plusieurs institutions qui prospéraient à Césarée furent implantées et fleurirent en Arménie(l). Par ses œuvres de bienfaisance, il égala ses modèles. Peut-être les dépassa-t-1l. Avant lui, par crainte de la contagion, on chassait loin des lieux habités les lépreux ; et ces malheureux périssaient de misère, ou sous la dent des bêtes fauves. Le catholicos s’éleva contre cette conduite barbare. Il réunit les Iépreux dans le

canton des Antzévatzi, près d’une église fondée en l'honneur _ dela Mère de Dieu. On vénérait une image de la Vierge, que l'on disait apportée par saint Barthélemy, et qui attirait de nombreux pèlerins. Pour les autres malades pauvres, des hôpitaux furent construits dans les villes et dans les campa-

(1) Sur les institutions charitables établies chez les Grecs, voir les discours 14 et 43 de Grégoire de Nazianze, Migne, XXXV, 858 ; XXXVI, 494, 577-580 ; n.63. Basil., £Epist. M; Migne, XXXIT, p. 485.

ÉTUDE SUR LA CONVERSION DE L'ARMÉNIE. 115

gnes, et placés sous la direction d’un aumônier. Nersès pour- vut à leur entretien par des aumônes, tirées surtout des villages qui avoisinaient ces hospices. La mendicité vagabonde fut interdite, etles vrais malheureux, secourus à domicile, cessèrent d’errer de porte en porte. D'ailleurs, tous les affligés, infirmes, indigents, veuves, orphelins, qui n'étaient pas très éloignés de la demeure du catholicos, savaient à qui recourir : ils trouvaient toujours son palais ouvert et avaient accès à sa table. « Jamais, s'écrie Faustus, l'Arménie ne posséda un semblable pasteur ». Sous la plume d’un témoin de la charité de Nersès, un tel ju- gement n'est pas une hyperbole.

Nersès avait réorganisé la chrétienté arménienne catholique et élargi le cadre trop étroit, menacaient de l’enfermer ses deux prédécesseurs, sous la pression de Diran. Une vie à la fois mieux réglée et plus intense circulait dans cette partie importante de l'Église universelle, surtout dans le sacerdoce, son prin- cipal organe, et s'épanouissait en toute sorte d'œuvres. La foi, qui n’était plus chez un grand nombre qu'une opinion flottante, se transformait en conviction. L'éducation, les prédications des missionnaires la faisaient pénétrer dans les esprits; la charité du catholicos achevait de l’enraciner dans les cœurs.

De là, le prestise de Nersès aux yeux des nobles et surtout aux yeux du peuple ; prestige si grand, que le roi lui-même eùt couru le risque de n'être point obéi de ses sujets en leur com- mandant de lever la main contre le charitable pontife.

Mais, l'autorité dont il disposait, Nersès entendait la faire servir à la défense de tous les droits, et particulièrement de la foi, de la justice, de l'innocence et de la morale opprimées. Pour cette tâche ardue et délicate, Nersès rencontra parmi les prè- tres séculiers un courageux auxiliaire. Il s'appelait Khat et était originaire du canton de Garin. Il avait d’abord été chargé de surveiller l’œuvre de l'assistance des pauvres; ensuite, 1] avait été consacré évêque de Pakravant. Quand Nersès fut forcé par le roi de s'éloigner de son siège, il confia au fidèle Khat les fonctions de vicaire patriarcal. C’est ainsi qu'autrefois Grégoire paraît avoir pris Arisdaguès pour auxiliaire, avant que celui-ci héritàt de sa place. D’ordinaire, le vicaire résidait près du catholicos; il en était de même de l'administrateur du

palais patriarcal, nommé Faustos au temps de Nersès, et du ORIENT CHRÉTIEN. 10

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camérier, appelé alors Zorth et chargé comme le précédent de la surveillance des hospices. Ces trois personnages avec six autres évêques composaient le conseil du catholicos (Faustus, VI, 5). Le nombre des évêques membres du conseil patriareal, au dire de Neumann, s’est maintenu jusqu'au xvui° siècle, et, depuis cette époque, n’est plus que de cinq.

Khat, le vicaire de Nersès, n'avait qu'un pouvoir limité et devait s’en tenir aux instructions du catholicos. Mais, cette consigne, 11 l'observa exactement. Arsace, pour peupler sa nouvelle ville d’Archagavan, au district de Gokovid dans l’A- rarad, venait d'appeler, par la voix des crieurs publics, les mal- faiteurs, les hommes et les femmes qui avaient déserté leur foyer domestique, ou avaient des comptes à régler avec la justice; 11 les mettait à l’abri de tout châtiment. Khat lui reprocha cette iniquité. Le roi luioffrit de l'or, de l'argent, plusieurs chevaux de l'écurie royale, avec harnais enrichis d'or et de soie (Faustus, IV, 12, 13). Mais le vicaire, toujours incor- ruptible, répondit qu'il ne pouvait qu'exécuter les prescriptions du catholicos. Il distribua aux pauvres, en présence même du roi, les présents qu'il venait de recevoir, et persista dans ses objurgations tant et si bien, qu'Arsace, désespérant d’entraver son zèle, même par des chaînes d'or, le fit chasser du camp royal. L'indépendance et le désintéressement de Khat sont d'autant plus étonnants, que cet évêque était, ou, du moins, avait été marié et que l’évêque Asroug, ayant épousé l’une des deux filles de Khat, devait posséder plus tard son évêché de Pakravant.

Après avoir défendu les intérêts de son roi à la cour de l'empereur, probablement de Valens, Nersès crut de son devoir d'élever la voix contre les empiétements d’Arsace; il le blàma d’avoir accordé une complète immunité aux bandits réfugiés à Archagavan; il flétrit la connivence du roi dans le meurtre de Knel; il protesta sans doute contre les déportements du monarque, qui vécut d’abord, semble-t-il, dans le concubinage avec Parantzem, et l’épousa officiellement, après qu'elle eut empoisonné Olympiade. N'osant lutter ouvertement contre un pontife si universellement vénéré, Arsace avait feint de ne pas l'entendre, quand, par exemple, Nersès intercédait en faveur de l’innocent Knel. Indocile à ses réprimandes, le roi voulait

ÉTUDE SUR LA CONVERSION DE L'ARMÉNIE. 147

néanmoins que le patriarche s’interposät entre lui et les mé- contents, dont le nombre augmentait dans la noblesse, le clergé et le peuple. Mais Nersès ne pouvait empêcher un fort parti de Nakharars de s’allier avec Sapor, d'attaquer Archagavan et de passer au fil de l'épée ce qui, dans la ville coupable, avait échappé aux ravages d’une épidémie. On comprend que, las de protester et de s’interposer inutilement entre les divers par- tis, il se soit décidé à quitter la cour, alors même qu'il n'en aurait pas été banni (1). Il alla vivre à Édesse, dit le biographe, probablement trompé par l’analogie du nom de Nersès avec celui de Barsès, l’évêque de cette ville. Il est cependant pro- bable que Nersès émigra vers les régions de l'Euphrate; mais on peut présumer qu'il se retira dans son domaine d’Achdichad, sans y être inquiété par Arsace.

27. Première tentative pour séparer l'Église d'Ar ménie de l'Eglise universelle; elle échoue; l’épiscopal presque tout entier refuse de prendrepartausacre de Tchounag, qu'Arsace a mis à la place de Nersès; raisons de ce refus. Arsace se sentit soulagé ou enhardi par l'éloignement de son incorruptible censeur. Il mit alors à sa place Tehounag : ce prélat timide, sans éloquence, regardé comme le serviteur des serviteurs de la cour, ne pouvait que condescendre à tous les désirs du roi. Arsace savait bien que Basile le Grand, alors archevêque de Césarée, ne sanctionnerait pas cette intrusion. Toute interven- tion, d'ailleurs, d’un pouvoir spirituel placé hors de ses atteintes, et capable de se prononcer contre lui, devait lui porter om- brage. En rompant le lien organique qui rattachait l'Église arménienne à l’Église universelle, par l'intermédiaire de son chef, le roi devenait le maitre de cette Église, de sa hiérarchie, et, à certains égards, de ses décrets, de ses anathèmes beau- coup plus qu'il n’était le maître des Nakharars, de leurs sub- sides et de leurs soldats; dès lors, le domaine spirituel serait subordonné, inféodé au pouvoir temporel. Voilà ce que devait

(1) Il n’est pas vraisemblable que Nersès ait été banni par Valens. La source puisé Faustus doit avoir confondu Nersès avec Barsès d'Édesse, banni par Valens en 373 (Theodoret, H. E., IV, 14; Migne, LXXXIL, p. 1153). Ce qui semble vrai, c’est qu’Arsace, irrité de ses reproches, lui interdit de paraître à la cour; ou, plus probablement encore, Nersès n’attendit pas cet ordre pour n'y plus mettre les pieds. Selon Moïse de Khorène, Archagavan fut ruinée par les Nakha- rars, et selon Faustus, par une épidémie.

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répéter à Arsace un parti peu nombreux, mais remuant, plus favorable aux Perses qu'aux Grecs, et formé de tous ceux qui soupiraient, soit après les vastes possessions détenues par le clergé, soit après la licence du paganisme, soit après une auto- nomie religieuse absolue. Dupes de leurs propres visées, elles se coloraient pour leurs yeux prévenus contre les Grecs, de tous les reflets d’un ardent patriotisme.

Encouragé par ces hommes, de tendances schismatiques, nous dirions aujourd'hui anticléricales, et partisans de l'ab- solue suprématie de l'État sur l'Église, Arsace invita seule- ment les évêques arméniens à venir imposer les mains à son protégé Tchounag. Mais, seuls, l'évêque de Gortouk et celui d'Aghtzniq y consentirent. Ils appartenaient l’un et l’autre au sud-ouest de l'Arménie, dominaient les Syriens, qui voyaient avec plus de défiance que les autres, les intimes rapports des chefs de l'Église arménienne avec les Grecs (1). Mais, du témoignage de Faustus, il ressort que le groupe constitué par les partisans du schisme ou de l'Église stricte- ment nationale, vit se dresser contre lui la presque unanimité des évêques. Aux yeux de ces derniers, ou Nersès était le ca- tholicos légitime et Tchounag ne pouvait être consacré, ou s'ils admettaient que le siège du catholicos était vacant, leur refus de consacrer Tchounag signifiait, semble-t-il, qu'ils ré- servaient ce droit à l'archevêque de Césarée et qu'ils protes- taient contre les fauteurs de schisme.

(1) Faustus, IV, 15; Vie de S. Nersès, ch. 1v, Langlois, 1, 33. Le district de Gortouk est au nord, celui d'Aghtzniq est au sud de la rivière Bohtan-Sou et de Seurt, au sud-est du lac de Van. Gelzer supposé que ces deux districts ayant été cédés à Sapor II par Jovien en 363, leurs deux évêques titulaires devaient alors résider à la cour d’Arsace (Voir Faustus, IV, 21; Gelzér, Anfänge…., p. 155). Cette hypothèse est vraisemblable, non certaine. Minassiantz (p. 17) n’en détruit pour- tant pas ia probabilité en faisant observer que, d’après Faustus, les deux évêques sus- dits répondirent à l’appel d’Arsace. Le distingué vartabed va un peu trop loin, en concluant de ce texte, que, pour se rendre à l’appel d’Arsace, les deux évêques

durent s’acheminer alors seulement de leur district à la cour. D’après l’auteur de la Vie de Nersès (Langlois, p. 33), Tchounag fut consacré par l’évêque de Karni, George, l’évêque d'Aghtzniq, Gadjad, et l’évêque des Antzévatzi, Siméon. On ne peut identifier Tchounag avec Isaac l'Arménien, qui, d’après Socrate, a signé la lettre envoyée à Jovien par le synode d’Antioche (363-361; A. Ε΄... 111, 25). Cet Isaac, comme l’a pensé Gelzer, pourrait bien être le Sahag ou l’Isaac dont Faustus seul fait mention, et qui serait devenu catholicos après Pharen. Cette identifi- cation rendrait plus vraisemblable la consécration de Nersès en 363.

- ÉTUDE SUR LA CONVERSION DE L'ARMÉNIE. 149

L'usage d'aller chercher la consécration à Césarée avait donc alors force de loi (1). Plus d’un siècle après, l'auteur de la Vie de Nersès le reconnaîtra expressément, si naïve que soit l'explication dont il s'avise : « Les Arméniens (les Catholicos) allèrent, dit-il, demander leur consécration à Césarée, parce que l'apôtre Thaddée, auquel était échue en partage l'évangé- lisation de l'Arménie, illumina d'abord des rayons de la foi le roi Abgar et le pays d'Édesse, puis la ville de Césarée, qui avait toujours été sous la domination des Arméniens (!l). Là, il ordonna évêque l'un de ses disciples, Théophile. Ainsi, le premier évêque de Césarée, toujours soumise aux Arméniens, ayant été institué par Thaddée avant son apostolat dans la Grande-Arménie, il fallait que ses héritiers vinssent deman- der à l'archevêque de cette ville leur consécration (2). »

28, Bab reconquiert le trône de son père Arsace, avec

(1) M. Harnack affirme que la Grande-Arménie, politiquement indépendante de Césarée, ne pouvait, dans un sens strict, avoir celle-ci pour métropole religieuse (Mission ; IL, Verbreitung?, p. 171, note 1). Si le savant historien veut dire qu'une hiérarchie ecclésiastique en général, celle de l'Arménie en particulier, n'avait pas de point d'attache ou même n'était retenue par aucun lien, la subordonnant à certains égards à quelque siège placé au delà des frontières du royaume, qui enfermait cette hiérarchie, l'observation n’est pas exacte. D’ordinaire une chré- tienté nouvelle ressortissait immédiatement au siège qui l'avait évangélisée et fondée. Telle était la situation de l’église d'Éthiopie à l'égard du siège d’Alexan- drie, et celle de la Grande-Arménie à l'égard du siège de Césarée; ef. Gélase de Cyzique, Hist. du Conc. de Nicée, 11, 27 ; Mans, II, 929; Migne, P. G., LXXXV, 1510.

(2) Aujourd'hui encore, dans les manuels classiques d'histoire ecclésiastique de cours de religion, à l’usage des Arméniens non-unis, on suit à la lettre des lé- gendes aussi naïves, pour ne pas dire puériles. L'important est de montrer que l'autonomie de l’église arménienne remonte jusqu'aux apôtres; et l’on donne bra- vement le nom des catholicos, qui depuis la prétendue évangélisation de l'Arménie par cinq apôtres et la prétendue fondation du siège d’Ardaz par Thaddée, se se- raient succédé sur ce siège jusqu’à Grégoire lluminateur (Voir par exemple l'Histoire de l'Église, en arménien, par Khatchgants, secrétaire de l'Église ar- ménienne grégorienne, Constantinople, 1906).

Nous avons déjà montré que plusieurs de ces légendes ne sont souvent que de l’histoire altérée et travestie. Ainsi, ce Théophile, dont l’auteur de la Vie de Nersès et, après lui, les auteurs de manuels grégoriens classiques font remonter l’ordination à Thaddée, évoque naturellement l’idée du savant évêque Théophile d'Antioche et du Théophile évêque de Césarée en Palestine. Mais nous voilà loin de Césarée de Cappadoce, et dans le second siècle, sous Commode, et avec le se- cond Théophile, à la fin du second siècle (cf. Eusèbe, Æ. E., IV, 20, 24; V, 2? Migne, XX, p. 377, 389, 489). D'ailleurs, comment Thaddée, dont la légende place le martyre un peu après le milieu du premier siècle, a-t-il pu ordonner, au se- cond siècle, Théophile comme évêque de Césarée ?.. Le catalogue des catholicos avant Grégoire mérite la même créance.

150 : REVUE DE L'ORIENT CHRÉTIEN.

l'appui du duc Térence; d'abord rigoureux à l'excès contre les ennemis de l'Église arméno-calholique, il cède bientôt à d'au- tres passions; causes de conflit : ‘attachement de Nersès à l'Église universelle; Bab exclu du saint lieu; il empoisonne Nersès et nomme catholicos Housig; mais Basile de Césarée frappe celui-ci de suspens; malgré l'appui donné à Bab par l'archevéque de Tyane, l'épiscopat arménien conserve, sem- ble-t-1l, ses anciens rapports avec Césarée, et le roi lui- méme semble avoir été contraint par Basile d'accepter de nouveau celte subordinaltion.

Le règne d’'Arsace avait, à tous égards, bien commencé; à tout point de vue, aussi, il avait mal fini. Le règne de Bab devait susciter, puis trahir, les mêmes espérances. Arsace avait été chargé de chaînes d'argent par Sapor et relégué dans le fort d’Agabana ou de l’'Oubli. Mais les deux transfuges Cylax et Artaban, que le roi de Perse avait envoyés contre le fort d’Artagéras, étaient renfermés la femme et le fils d’Arsace, avec ses trésors, avaient passé du côté des assiégés. Ils avaient ménagé la sortie d’une troupe d'élite; surpris au milieu de la nuit, les assiégeants avaient été mis en fuite. Bab, sur les conseils de sa mère, avait quitté la place; et Valens lui avait donné à Néocésarée, dans le. Pont, une retraite et un traitement dignes de son rang. Peu après, par l’ordre de l’empereur, le duc Térence conduisit le jeune prince de Néocé- sarée en Arménie, sans toutefois lui donner les insignes de roi, pour ne point violer ouvertement l'humiliant traité imposé par Sapor à Jovien. Le roi de Perse dévasta de nouveau l'Ar- ménie. Bab poursuivi se réfugia, avec Artaban et Cylax, dans les montagnes qui séparent de l'empire le pays de Lazes. Les Perses, ne pouvant s'emparer de lui, incendièrent les arbres fruitiers des campagnes arméniennes, et reprirent quelques châteaux forts. Ils revinrent, après l'hiver, assiéger Artagéras; la place fut prise, ainsi que la femme et les trésors d'Arsace (Ammien, XXV, 6-7; XXVIIT, 12). Mais, grâce au secours d'une troupe grecque, commandée par Arinthée, Bab resta maitre de son royaume. À peine affermi sur le trône, son premier soin fut de favoriser le relèvement religieux de l'Arménie, dont la situation était bien déchue depuis l'éloignement de Nersès. Il déploya même dans cette tâche une rigueur exces-

ÉTUDE SUR LA CONVERSION DE L'ARMÉNIE. 151

sive. Les mazdéistes perses et les renégats arméniens qui, vers la fin du règne d'Arsace et surtout pendant sa captivité, s'é- taient multipliés beaucoup plus encore que les martyrs, furent fort maltraités par Mouchegh, avec l'approbation du roi. et là, on brüla, à petit feu, plusieurs sectaires mazdéistes. On vit des zélateurs arméniens emprunter à leurs voisins orien- taux une coutume des plus barbares : ils écorchèrent plusieurs seigneurs perses; ils rembourrèrent leur peau de paille et l'exposèrent sur les murailles des châteaux forts. Rien, sans doute, ne justifie ou même n'excuse ces atrocités. Quelques circonstances, pourtant, en atténuent l'odieux : Sapor les avait provoquées en imposant aux Arméniens l’adoration du soleil, du feu et de l’eau, eten multipliant par sa politique, tour à tour cruelle et cauteleuse, le nombre des apostats (Faustus, IV, 50, 55 et seqq.; V, 1). Mouchegh songeait à son père Vasag, écorché par l'ordre de Sapor, et dont la peau avait été bourrée d'herbe. Bab, de son côté, voulait, sans doute, venger l’humiliante et dure captivité de son père et les infämes outrages subis par sa mère.

Bab fit mieux cependant que d'encourager de sanglantes re- présailles. Il ne se contentait pas de faire renverser les pyrées. Il relevait aussi les églises ruinées par les Perses. En même temps, il appelait Nersès près de lui et paraissait disposé à le consulter « comme le père et le guide du peuple arménien ». En maintes occasions, il lui donnait les marques les moins équivoques de vénération et de confiance. Jadis, pour s’assu- rer la fidélité d’Arsace, Sapor lui avait fait prêter serment de vassalité sur les saints Évangiles. Le jeune roi Bab, dont Faustus exagère peut-être l'extrême défiance à l'égard de son héros Mouchegh, exigea seulement, pour se réconcilier avec lui, qu'il prêtàt serment de fidélité à son souverain, en prenant la main de Nersès (Faustus, V, 4).

Mais, entre le pasteur inexorable au vice et le capricieux jeune rot, l'accord ne pouvait subsister longtemps. Ce n'était pas que Bab fût dépourvu de qualités : il ne manquait ni d'in- tellisence ni de courage; il était même, par moments, ac- cessible aux plus généreuses inspirations. Malheureusement, ces dons heureux n'avaient chez lui aucune base solide. Dé- pourvu de fermes principes religieux, il se laissait emporter,

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avec la fougue de son tempérament passionné, à tous les excès de l’orgueil, de la colère et de la volupté. Il n'avait point appris à combattre ses inclinations vicieuses. Élevé par sa mère Pharantzem (Parantzem) dans les superstitions païennes, ét, selon Faustus, consacré, dès l'enfance, par son père, aux devs, que le paganisme arménien représentait sous la forme de ser- pents, il s'abandonna ouvertement, devenu adolescent, à l'a- dultère, et aux pires débauches (1). Il achevait ainsi d’ancrer dans l'âme de ses sujets la légende née de la crédulité populaire et du spectacle de ses vices précoces, à savoir qu'il était possédé par les devs, se déroulant sur lui, sous forme de serpents blancs. Ces racontars étaient déjà si répandus dans le public, que l'écho en parvenait jusque dans l'entourage de l'empereur Valens (2).

Sans s'arrêter à ces superstitions populaires, Nersès était attristé et indigné de l’inconduite du roi, et il avait trop la

(1) Faustus, V,22;1V, 15, 41, dans Langlois, p.263, 265. Il faut placer la naissance de Bab entre l’an 356 et l’an 358. Il semble bien qu'Arsace vivait déjà avec Pa- rantzem avant d'épouser Olympiade (Olombiata); mais plusieurs indices font supposer que Parantzem n’était alors qu’une concubine : il est à présumer, en effet, que si Parantzem eût été, à cette époque, la femme légitime d’Arsace, l'empereur Constance ne lui eût point donné pour épouse Olympiade, la fille de l’ancien préfet du prétoire Ablabius, la fiancée de Constant son frère (Athanas., Hist. arian. ad Monachos, n. 69 ; Migne, P. G., XXV,776; Ammien, XX, 11). On pourrait objecter, il est vrai, que Parantzem n'ayant point encore donné le jour à Bab, et affectant de fuir Arsace, put bien être renvoyée. Nous répon- drons que le roi, quand il épousa Olympiade, devait avoir congédié provisoire- ment Parantzem, ou du moins affichait son intention de la congédier, Il ne s'ensuit pas que cette dernière fût réellement son épouse. Moïse de Khorène (II, 914) οὐ Samuel d’Ani nous disent qu'Olympiade fut la première épouse d’Ar- sace. Mais il faut reconnaitre que Faustus, pourtant plus en mesure de connai- tre la vérité, n’est pas clair sur ce sujet. Marquart s'appuie même sur son témoignage pour en conclure qu'Arsace épousa Parantzem d’abord, puis Olympiade, et qu’il fut par conséquent bigame (Philologqus, 1890, p. 290). S. Weber croit, au contraire, que Parantzem ne devint l’épouse d’Arsace qu’a- près avoir fait empoisonner sa rivale (p. 246 et suiv.). Nous nous rangeons à ce dernier sentiment; car Parantzem vivait, pour ainsi dire, malgré elle avec Arsace; jusqu'à l’arrivée d'Olympiade, elle protestait en termes méprisants qu'elle ne voulait point derneurer avec le roi.

Nous convenons, du reste, qu'Arsace, si cela n’eût tenu qu'a lui, était bien capable eontracter, le cas échéant, un double mariage civil. Voir dans Faustus, IV, 20, par quelles intrigues Antov, prince de Siounie, empêche Arsace, son beau-fils, d’'épouser une fille de Sapor, du vivant de Parantzem.

(2) Faustus, IV, 41: voir encore sur Bab, IV, 55 ; V, 1-3,21-24. Ammien, XXX, JA EXNORTEMIE

ÉTUDE SUR LA CONVERSION DE L’'ARMÉNIE. 153

conscience de son rôle de gardien de la morale publique, pour ne point protester contre les scandales dont il était 16 témoin.

C'était la principale, mais non la seule cause qui devait porter à son comble la colère du Jeune roi. Entre lui et le ca- tholicos, les divergences soit au point de vue politique, soit au point de vue religieux, n'étaient pas moins graves. Nersès penchait fortement vers les Occidentaux, et préférait la su- zeraineté de Valens lui-même à celle d’un prince mazdéiste. Bab, habilement circonvenu par Sapor, se tournait de plus en plus vers ce redoutable et astucieux voisin. Pour s'assurer sa protection, il allait jusqu'à faire tomber et lui envoyer la tête de ses deux principaux ministres, Artaban et Cylax. Encore plus fréquentes étaient les occasions de heurts dans les questions religieuses. Tandis que le roi voyait avec défiance les relations de l'Église arménienne avec les Églises établies au delà de l'Eu- phrate, Nersès prenait part à leurs synodes et s’associait aux démarches des évêques grecs catholiques auprès des chef de la chrétienté occidentale. En 371 ou 372, sans s'inquiéter des tendances schismatiques de son roi, Nersès approuvait la lettre synodale adressée au pape Damase et aux évêques occi- dentaux. Dans cette supplique portée à Rome par le diacre Sabin, et écrite par Basile, en son nom et au nom de trente et un autres évêques orientaux, l'illustre docteur décrivait l’état navrant étaient tombées la plupart des Églises orientales : depuis l'Illyrie jusqu’à la Thébaïde, elles sont, disait-il, rava- gées par les hérésies nées de l’arianisme, et en proie à une indiscipline effrénée. Les évêques à genoux poussent un cri d'appel vers leurs frères d'Occident et vers leur chef, afin qu'ils se hâtent de les secourir, avant que la foi et les mœurs, dans les églises qui les entourent, aient fait un complet nau- _frage ; comment venir en aide aux Orientaux? l'Esprit saint, poursuivait Basile, leur en suggérera les moyens. Queles envoyés des Églises occidentales aient l'autorité et les autres qualités nécessaires pour porter remède à l'erreur, pour restaurer la foi de Nicée, proscrire l'hérésie, établir la concorde parmi les catholiques. Vers la fin, le grand évêque décrivait en ces termes le rôle qu'il reconnaissait aux destinataires de sa supplique : « Elle est réellement très digne de louange, la tâche qui a été assignée par le Seigneur à votre piété, de séparer ce qui est

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faux et altéré de ce qui est pur et vrai, et d'annoncer sans dissi- mulation la foi des Pères (1)... »

Nersès, en souscrivant à cette remarquable lettre, avait donné un éclatant témoignage de sa catholicité. Cette démarche ne pouvait que lui nuire auprès de Bab. D'ailleurs, le catholicos, à son retour, s’'aperçut avec douleur que le jeune prince s'en- fonçait de plus en plus dans la voie de désordres et de violences il s'était engagé. Tous les movens que suggérait la sagesse pour porter remède au mal avaient être employés. Et c’é- tait en vain. Les conseils, les représentations, les réprimandes et même les pénitences avaïent été inefficaces. Bab, en dépit de ses promesses réitérées, ne s’amendait pas. Nersès lui inter- dit enfin l'entrée de l’église. Cette prohibition exaspéra le cou- pable ; il en conçut un ressentiment implacable et ne songea qu'à se débarrasser de son rigoureux censeur. N’osant toutefois se défaire publiquement d'un pontife, objet d’un respect et d'un amour presque universels, il dissimula ses projets de ven- geance. Il invita le catholicos au château royal de Kakh, en promettant lui donner, cette fois, des gages irrécusables de repentir. Nous avons raconté ailleurs comment le roi servit une coupe empoisonnée à celui que, trois ou quatre ans plus tôt, il appelait son père (372-373). L'empoisonnement de Nersès par Bab paraît un fait bien authentique. Quant aux circons- tances de cet empoisonnement, il en est plusieurs de suspectes. Est-il vraisemblable que Nersès, sachant qu'il vient d’avaler un poison, ait refusé le contre-poison que des amis lui pré- sentaient? Ou ce dernier trait est une broderie, tissue, soit par l'imagination populaire, soit par l'historien; ou, s'il est

(1) « Δότε χεῖρα τοῖς εἰς γόνυ χλιθεῖσι... τῷ ὄντι γὰρ τοῦ ἀνωτάτου μαχαρισμοῦ ἄξιον TO τῇ ὑμετέοα θεοσεδείᾳ χαρισθὲν παρὰ τοῦ Κυρίου τὸ μὲν xi60n).0v ἀπὸ τοῦ δοχίμου xai χα- θαροῦ διαχρίνειν, τὴν δὲ τῶν πατέρων πίστιν ἄνευ τινὸς ὑποστολῆς κηρύσσειν... » Basil., epist. XCII, alias LXIX ; Migne, XXXII, p. 477-484. Cette lettre fut écrite en 372, peu de mois avant la mort de Nersès (Narsès). Voir la lettre LXX de Basile écrite l’année précédente au pape Damase, XXXII, 435. Cette lettre s'inspire de la même sollicitude inquiète pour le sort des Églises orientales et de la même confiance envers l’évêque de Rome. Dans la suite, Basile se plaindra de certains procédés hautains de Damase; mais laigreur qu'il en ressentira en voyant mettre de côté ses amis orthodoxes Mélèce et Eusèbe, ne l’empêchera pas de continuer de s'adresser à Damase, pour procurer la paix religieuse à l'Orient (lettre CCXXV, année 379, XXXII, p. 789; ép. CCXXXIX, p. 889; ép. CCLXVI, p. 991).

ÉTUDE SUR LA CONVERSION DE L'ARMÉNIE. 155

exact, il laisse plutôt supposer que le pontife ignorait encore la cause réelle de son mal. Le biographe ajoute que Nersès refusa le contre-poison, afin d’être à même « de célébrer le mystère divin ». Mais cette explication, comme les longs déve- loppements en forme de prophétie qui l’accompagnent, trahis- sent nettement leur caractère d'apocryphes.

Délivré de son vertueux mais rigide censeur, Bab fit monter sur le siège patriarcal l'évêque de Manazguerd, Housig, de la famille Aghpianos. C’est probablement le personnage dont on voit le nom, au bas de la lettre adressée par Basile, en 372, au pape Damase et aux évêques occidentaux. Soit que le roi redoutàt les énergiques remontrances de Basile, archevêque de Césarée, soit qu'il fût impatient de prévenir désormais toute vive opposition des catholicos, en enchaïnant leur siège à son trône, il ne proposa même pas à l’illustre primat de Cappadoce de consacrer le candidat élu. Sur l'origine de cette rupture avec Césarée, comme sur Ja fondation du patriarcat d'Etch- iadzin, on créera peu à peu une légende, et, dans quelques siècles, Jean VI catholicos (ch. 9) racontera que, dans un synode présidé par Nersès, sur l'initiative d’Arsace, fut prise la réso- lution de donner le titre de patriarche au catholicos et de Île faire consacrer désormais par les évêques arméniens, au lieu de recourir à l'archevêque de Césarée. Ce qui semble vrai, c'est que Nersès fut, non l’auteur, mais la victime de cette rupture, à laquelle avait été également étranger le synode présidé par lui à Achdichad. Cette scission tentée par Arsace, Bab la renou- velait, avec plus de chances de succès, après la mort de Nersès.

Saint Basile, cependant, n'était point homme à laisser usur- per, sans protestation, ses droits de métropolitain. Il réunit, écrit Faustus, un synode d’évêques cappadociens, qui censura Bab d’avoir installé Housig, sans le consentement et l’imposi- tion des mains du pontife de Césarée. Deux lettres synodales furent rédigées : l’une, remplie de reproches, était adressée aux représentants de l'Église arménienne; l’autre était pour le roi. Da nscelle-ci, l'archevêque déclarait nulle l’ordination du catholicos, il déniait à celui-ci le pouvoir d'imposer les mains aux candidats à l'épiscopat et ne lui laissait d'autre prérogative que de bénir la table du roi, ce qui veut dire, sans doute, de lui servir d’aumônier (Faustus, V, 29; Epist. Bas., 92; Migne,

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XXXII, 477). Les réclamations du grand archevêque et ses censures contre le nouveau titulaire arménien achevèrent, semble-t-il, de détacher du roi les membres du haut clergé. Il est très problable, sinon certain, que presque tous les évé- ques de l’Arménie respectèrent l’ordre émané de Césarée. « Dès lors, au témoignage de Faustus, le patriarche d'Arménie per- dit le pouvoir d'imposer les mains aux évêques; et ceux-ci, de toutes les parties de l'Arménie, se rendirent désormais à Césa- rée, pour y obtenir la dignité épiscopale. » 11 ne restait plus d'autre privilège au titulaire du patriarcat que celui « d’être considéré comme l’évêque le plus ancien » et « de bénir la table du roi » (F., V, 29; Langlois, 293-294).

Tout étonnant qu'il paraisse, le récit de Faustus est corro- boré par l’auteur de l’Exposé des choses arméniennes, le pseudo-catholicos Isaac. Jean VI catholicos, lui-même, pour- tant si jaloux de l'indépendance de son siège, convient que Sahag seul, au temps des catholicos Perkicho et Samuel, of- ficiellement reconnus par la Perse, avait reçu l'autorisation d’ordonner des évêques (ch. 1x). Ce qu'il y a d'obseur dans cette déclaration s’éclaire par un passage de Moïse de Khorène (IT, 65). Cet historien, après avoir raconté que Varam avait nommé Samuel à la dignité pontificale, en remplacement de Perkicho, ajoute que ce catholicos était chargé de l'administration des affaires temporelles, assistance du marzban, répartition des impôts, etc., tandis que Sahag avait le pouvoir d'enseigner la religion et d’ordonner les candidats à l’épiscopat, que lui dési- gnerait Perkicho. Or, la différence entre ces deux titulaires, c'est que Sahag seul était reconnu des Grecs. Tout porte à croire que ce droit était octroyé à Isaac le Grand par un plus haut dignitaire que les simples évêques arméniens. Peut-être faut-il voir aussi, en ce privilège, la raison pour laquelle Faus- tus appelle chefs des évêques, et jamais catholicos, Housig, Zaven, Sahag de Gordjaik et Asbouraguès, dont le pontificat remplit l'intervalle de Nersès à Sahag le Grand. Ne serait-ce pas encore pour ce motif que l’auteur de la Diègèsis dit de ces pontifes, qu'ils n'avaient du catholicos que le nom et que le biographe de Nersès les passe sous silence (1)?

(1) Διήγησις... Migne, P.G., τ. CXXXII, p. 1256; Th. Ardzrouni, éd. Patcanian, 1, 11, p. 74: Jean cathol., Loco cit. et éd. Emin, p. 34; Faustus, VI, 2-4, 15 etc... Moïse

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De ces témoignages, est-il téméraire de conclure que les évêques partisans de Bab car il dut y en avoir —- furent peu nombreux? Il semble que Bab lui-même, se sentant inca- pable de résister au courant catholique qui entraïînait évêques, prêtres et fidèles vers l'union avec l'Église universelle, se dé- cida, peu après l'interdiction portée par saint Basile, à en- voyer des évêques à Césarée, pour y recevoir l'imposition des mains. Saint Basile mentionne, en effet, dans ses lettres, un évêque du nom de Fauste, qui été envoyé de la Grande-Ar- ménie à Césarée par Bab, et auquel l'archevêque de Césarée refusé la consécration (1). Cet événement doit être postérieur à la mort de Nersès et à la rupture avec Césarée; autrement, l'ordination de cet évêque aurait pu, comme auparavant, avoir lieu en Arménie. |

Quant au refus de saint Basile d'imposer les mains à Fauste, on peut le déplorer. Mais la responsabilité en retombe beau- coup moins sur l'archevêque lui-même que sur ses suffra- gants. Ceux-ci, réunis en synode, avaient opposé à Fauste un autre évêque nommé Cyrille; et Basile, jugeant qu'il n'avait aucune grave raison de ne point condescendre à leur avis, avait conféré l’ordination épiscopale à Cyrille. Rebuté, Fauste eut recours à Anthimos, siégeant à Tyane et métropolitain de Ia deuxième Cappadoce. Cet archevêque s'était soustrait à lobé- dience du siège de Césarée et s'était posé en rival de Basile (2). Bien qu'il fût réconcilié avec lui à cette époque, il saisit avec empressement la nouvelle occasion qui s’offrait de contrecarrer

de Khorène appelle également Zavèn et Asbouraguès chefs des évêques, ebisgo- bosabed (111, 40, 41, 49)

(1) Voir lettre 58 de Basile à Mélèce d’Antioche ; aujourd’hui lettre 120, Migne, XXXII, p. 937; lettre 195, auj. 121. à Théodote de Nicopolis, Migne, XXXII, 540; lettre 313, δ]. 122, à Pouimenios de Satala. ᾿Αρμενία désigne manifestement la Grande-Arménie, par opposition à ᾿Αρμενία μιχρά. Mais il faut reconnaître aussi que les Grecs et les Romains entendaient sous le nom de Grande-Arménie inté- rieure la Haute-Arménie ou région de Garin, tandis que les Arméniens enten- daient sous le nom de Grande-Arménie toute l'Arménie située à l’est de l'Euphrate. Pour les uns et les autres, la Petite-Arménie était à l’ouest de l'Euphrate. Ce qui est certain, c’est que les envoyés arméniens devaient habiter à l’est de Sa- tala, car, au retour de Césarée, ils passent par Satala.— Voir encore lettre 187, 8]. 9, à Térence, écrite en 372, Migne, XXXII, 497.

(2) Lettres de Basile, 97, au sénat de Tyane, Migne, XXXII, 493; lettres 120, 121, 122, Migne, XXXII, 537-542.

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son ancien rival : il se hàta d'imposer les mains au plaignant et de déclarer nulle la consécration de Cyrille.

Peu après ces événements, Basile entreprit une tournée pas- torale vers les frontières de la Grande-Arménie: Il est à pré- sumer que, dans le cours de son voyage, il ramena sous son obédience ses anciens suffragants arméniens, au moins ceux qui étaient les plus voisins de la Cappadoce, et qui, par suite des intrigues de Bab et d’Anthimos, avaient pu se détacher du siège de Césarée (1).

28. Portée de l'œuvre destructive accomplie par Dubé pouvoir spirituel avili et absorbé par le pouvoir civil, fonda- tions ecclésiastiques el monastères confisqués, vœux suppri- més; laïcisation de la morale, renouveau du paganisme. Rien de nouveau sous le soleil. Bab, devenu suspect aux Grecs, est attiré à Tarse, d'où il s'échappe; sa fin tragique. Après sa mort, l'Église répare graduellement ses ruines.

En dépit du concours que durent lui prêter les membres de la famille Aghpianos, les partisans de l’ancien paganisme et plusieurs Nakharars, professant d'autant plus volontiers l'absolue suprématie du pouvoir civil sur l'Église, qu’ils espé- raient s'emparer des biens de celle-ci, Bab ne réussit pas à consommer le schisme entre l'Église arménienne et l'Église universelle, représentée par l’un de ses organes, l'Église de Césarée. Pourtant, s’il échoua, ce fut moins pour avoir voulu isoler l'Arménie religieuse des autres nations chrétiennes, que pour avoir entrepris une révolution radicale, nous dirions au- jourd'hui une laïcisation à outrance, dans l'intérieur même du royaume, en faisant table rase des anciens privilèges et des droits acquis des églises et des monastères. Ceux qui, de bonne foi, s'étaient réjouis d’avoir une hiérarchie ecclésiasti- que entièrement autonome, purent bientôt s’apercevoir com-. bien leur était nécessaire une institution religieuse, placée hors des atteintes d'un pouvoir civil capricieux, complètement

(1) Lettres de Basile, 99, à Térence, c. 4, Migne, XXXII, 501; voir encore Migne, XXIX, p. xcix de la Vie de Basile. Faute du concours de Théodote de Nicopolis, dont le diocèse compte des religieux sachant bien la langue et les usages des Arméniens, Basile n’a point donné de nouveaux évêques à l’Arménie; mais il pu apaiser les différends entre des évêques de cette région et supprimer quel- ques abus, Lettre 99, à Térence.

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ÉTUDE SUR LA CONVERSION DE L’ARMÉNIE. 159

indépendante dans sa sphère, planant au-dessus des partis politiques, et empruntant sa force au fondement visible posé par le Christ. Comme tous les gouvernements tyranniques et sectaires, qu'ils s'appellent royauté, aristocratie, démocratie, Bab voulut d'exigence en exigence, d’empiétement en empié- tement, anéantir les ordres monastiques et réduire le haut et le bas clergé séculier à n'être plus, selon une expression de Faustus, que les serviteurs des serviteurs de sa cour.

En abaissant l'Église arménienne catholique au rang d' É- glise nationale, il avait espéré tenir le pouvoir spirituel sous sa main et à sa merci. La plupart des évêques, surtout dans l'Arménie occidentale, n’obéirent pas à ses ordres schismati- ques. Il est tout à fait vraisemblable que la masse des clercs, des religieux et des fidèles imitèrent ou, du moins, soutinrent de leurs sympathies les évêques. Le gouvernement était seule- ment appuyé par une partie de la noblesse, comme il ressort du témoignage d'Ammien, et par cette lie de la population dont Faustus attribue à l'ignorance du grec et du syriaque l'attachement aux superstitions païennes et la résistance au christianisme. Mais, à défaut du nombre, du droit et de l’hu- manité, Bab avait pour lui la force. Exaspéré par la résistance qu'il avait rencontrée, il se mit à détruire avec une sorte de rage toute l'œuvre des réformes, si laborieusement édifiée par Nersès, sur le modèle des institutions qui florissaient au delà de l'Euphrate. Il ne laissa, dans chaque église, qu'un prêtre et un diacre et chargea les autres clercs d’un emploi au palais. La plus grande partie des biens ecclésiastiques fut confisquée ; des sept fermes affectées à chaque église, cinq furent livrées au fisc; supprimées aussi, les dimes levées par le clergé. On ferma les asiles des veuves, des orphelins, les hospices des pauvres, les hôpitaux construits dans plusieurs cantons. Les monastères de femmes, comme ceux des hommes, furent ra- sés, les religieuses forcées de se marier ou, même, si l'on en croit Faustus, livrées aux derniers outrages (Faustus, V, 51; Vie de Nersès, n. 14).

Nous ignorons si, comme on l’a vu plus d’une fois dans le cours des persécutions religieuses, le jeune roi eut la délica- tesse de prêter ses instincts et ses goûts à ses victimes et de se vanter, en brisant les portes des couvents, d’abolir des pro-

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messes contre nature et de rendre à ces pauvres reclus des deux sexes une personnalité illégitimement abdiquée (1).

L'autorité suprême, fondement et clef de voûte de l'Église, étant rejetée, la pierre du foyer qui s'appuyait sur cette Église perd sa fixité et devient une épave, jouet des plus folles passions. Bab déclara que le mariage religieux était sans valeur aux yeux de l'autorité civile. Tandis que, du temps de Nersès, nul époux n'abandonnait la femme qui avait porté le voile ou la couronne du mariage, bénis par le prêtre, le roi autorisa le mari à renvoyer sa femme; et 11 y en eut qui changèrent d’é- pouse jusqu’à dix fois. L'état des mœurs empira presque jus- qu'au degré l’avait rencontré saint Grégoire. Les prières et les pleurs modérés en faveur des défunts firent place aux la- mentations bruyantes et aux danses inconvenantes. Dans plu- sieurs provinces refleurit le paganisme, bien des personnes y relevèrent les idoles et de nouveau s’adonnèrent au culte des devs. Le brave Mouchegh étant mort, les gens de sa maison l'exposèrent sur une haute tour, dans l'espoir que les Arelez lui rendraient la vie (2).

Heureusement, la violente crise religieuse dura peu. Nous avons dit que Bab s'était détaché peu à peu de l’alliance avec les Grecs; il avait envoyé à Sapor le tête de Cylax et d’Artaban, les deux intermédiaires de la ligue gréco-arménienne, et il

(1) Il est aisé de constater dans le cours des divers âges, que la tactique des gouvernements antireligieux ou même areligieux ne diffère pas essentiellement, d'ordinaire, de la tactique de Bab, Seulement, les gouvernants modernes s’atta- quent d’abord, de préférence, aux couvents, comme aux avant-postes de l'Église. Pour n’en citer qu’un exemple, tiré de l’histoire ecclésiastique au début du vingtième siècle, les gouvernants français ont inauguré leur campagne contre l'Église, par la loi dite des associations (1902), en exécution de laquelle quinze mille quatre cents établissements d'éducation, sans compter beaucoup d’autres maisons religieuses, ont été fermés et confisqués (Rapport de Maurice Faure (un anticlérical) sur le budget de l'instruction publique, cité dans le journal l'U- nivers du 16 janvier 1907). La loi de la séparation de l'Église et de l'État a suivi la loi contre les associations religieuses et, comme il fallait s'y attendre, on dépouillé le clergé séculier après le clergé régulier, et l’on a frappé les divers membres du corps de l’Église, afin de tuer celui-ci, en le séparant de sa tête, le Pape.

(2) Faustus, V, 55, 90. Mouchegh est l’un des héros les plus célébrés par Faustus. Plusieurs de ses exploits sont des échos des chants populaires, probablement ajoutés au récit de Faustus. Outre que des additions ont altéré ou travesti cer- taines parties de son œuvre, cet historien est manifestement partial et pour la famille des Mamigonian.

ÉTUDE SUR LA CONVERSION DE L'ARMÉNIE. 161

s'était placé plus ou moins ouvertement sous la suzeraineté des Perses. Des princes arméniens et des Grecs, surtout le duc Térence, ne manquèrent pas de dénoncer à Valens ces actes de violence et de lui représenter qu'en laissant Bab sur le trône d'Arménie, on abandonnait ce pays aux Perses. Valens fit alors venir le jeune roi à Tarse, sous prétexte de conférer avec lui d’affaires urgentes, et il leretint prisonnier. Cependant le captif, qui ne manquait ni d'audace ni d'intrépidité, réussit à s'enfuir avec une escorte de 800 cavaliers arméniens; il mit en fuite une légion envoyée à sa poursuite. Plusieurs passèrent ensuite l'Euphrate à la nage. Quant au roi et à la plupart de ses principaux cavaliers, qui ne savaient pas suffisamment nager, ils traversèrent le fleuve sur des lits, sous chacun des- quels ils avaient assujéti deux outres; leurs chevaux, qu'ils tenaient par la bride, les suivirent à Ia nage. Pendant ce temps, par l'ordre de Valens, le comte Daniel et Barzimère, tribun des scutaires, accompagnés de mille archers, couraient derrière les fugitifs; ils arrivèrent même à le devancer et à occuper les deux chemins, entre lesquels il semblait forcé de choisir. Mais le rusé Arménien trompa ses ennemis par un habile stratagème, et, tandis que deux cavaliers, prenant les deux routes or- dinaires, annonçaient la prochaine arrivée de leur maitre, celui-ci s'engageait avec ses compagnons dans un sentier à peine praticäable aux cavaliers et réussissait à rentrer sain et sauf dans son royaume.

C’est alors que Daniel et Barzimère, pour se disculper, firent croire au crédule Valens que Bab possédait les secrets magiques de Circé, qu'il avait hypnotisé ceux qui le poursuivaient et leur avait échappé en substituant à sa forme humaine celle d’un vaisseau (vasorum). Bab passait peut-être pour un magicien aux yeux de Valens. Mais, à coup sûr, celui-ci le regardait comme un traître. Aussi ordonna-t-il à Trajan, commandant des troupes romaines dans le pays, de le faire périr. Le lieutenant de Valens se gèna d'autant moins à l'égard du jeune roi, que les dé- bauches, les injustices et les cruautés de ce dernier avaient éloigné de lui, avec le clergé, la plus grande partie des Nakharars. Bab fut attiré à un banquet, et, au moment il levait son verre, on l'égorgea sur l’ordre du comte Trajan (371; Faustus, V, 32; Ammien, XXX, 1).

ORIENT CHRÉTIEN. {1

162 REVUE DE L'ORIENT CHRÉTIEN.

Dès le lendemain de la mort de son persécuteur, l'Église commenca de se relever, mais lentement; car, des blessures qu'elle avait reçues, quelques-unes devaient être longues à se cicatriser. Varaztad, le cousin de Bab, ayant été mis sur le trône par Valens, sur la demande et avec l'appui d'une partie de la noblesse arménienne, l'application des mesures décrétées par Bab fut graduellement suspendue ou, du moins, adoucie. Plu- sieurs des institutions abolies reparurent, sous la régence de Manuel Mamigonian (1).

(1) Voici, dans leurs grandes lignes, les événements qui amenèrent Manuel au pouvoir. Désireux de protéger sa patrie contre les Perses, le sbarabed Mouchegh avait engagé l’empereur Valens à construire dans chaque province arménienne une ville, avec deux châteaux forts, jusqu'à la ville de Kantzag, la dernière pos- session arménienne du côté de la Perse, et d'entretenir dans chacune de ces places une garnison grecque. Pad ou Sempad Saharouni, qui convoitait la place du généralissime, mit à profit l'avance faite aux Grecs pour le perdre. Il persuada facilement au vaillant, mais trop crédule Varaztad, que Mouchegh avait déter- miné les Grecs à se défaire de Bab et qu'il voulait maintenant leur livrer l'Arménie ou même usurper le trône. Les Grecs n'étaient plus pour défendre leur intrépide ami. Ce devait être le moment la guerre contre les Goths obli- geait Valens de retirer ses troupes de l'Arménie et d'abandonner Sauromax, roi d'Ibérie, son protégé (Ammien, XXX, 2,8). Varaztad ménagea au traître Pad l’occa- tion d'égorger Mouchegh au milieu d’un festin; puis il éleva le meurtrier au poste tant convoité (Faustus, V, 35; Vie de Nersès, τὶ. 14).:

Mais, peu de temps après, Manuel Mamigonian, frère de Mouchegh et fils de Vasag, d’après le biographe de Nersès, ou fils d’Ardaschïn, selon Faustus, étant revenu avec son frère Goms, de la Perse, ils étaient captifs, revendiqua, les armes à la main, la dignité de sbarabed, comme un titre héréditaire dans sa fa- mille. Il battit Varaztad dans la plaine de Garin et le chassa devant lui, le frap- pant du plat de sa lance sur la tête; il s’était interdit et avait défendu à ses fils Hemaïag et Ardachès ainsi qu’à ses compagnons de tuer le roi, qui eut la facilité de se réfugier chez les Grecs (377). Pad, au contraire, fut égorgé avec son fils et ses principaux complices (F., V, 37).

Manuel gouverna l'Arménie au nom de la veuve de Bab, Zarmantoukhd, et de ses deux fils Archag et Vagharchag (Arsace et Valarsace), dont le premier, d’après Faustus, épousa plus tard une fille du régent. Il est bien probable que Sapor avait aidé le chef des Mamigonian à renverser Varaztad. Le fait est qu’il bénéficia de cette révolution politique. Manuel placa aussitôt l'Arménie sous sa suzeraineté ; le marzban Souren vint en prendre possession àla tête de 1.000 cavaliers (Ammien, XXX, 2,7; Faustus, V, 58). La reine Zarmantoukhd recut de Sapor un diadème et les deux fils de Bab, des couronnes. Le régent fut comblé de présents. Deux ou trois ans plus tard, cependant, l'horizon politique lui parut tout autre et lui inspira un changement de front. Placé entre deux nouveaux souverains, dont l’un était Théodose le Grand (379-395) et l’autre le Perse Ardachir (379-384), Ma- nuel devait incliner de toute son âme vers le premier. Faustus, toujours attentif à justifier le chef Mamigonian, prétend que Méroujan Ardzrouni fournit à Ma- nuel un motif de révolte contre Sourên, en accusant ce dernier de conspirer contre la liberté et la vie du régent. Attaqué à l’improviste par l’Arménien, le

ÉTUDE SUR LA CONVERSION DE L’ARMÉNIE. 163

Aussi fervent chrétien qu'intrépide guerrier, Manuel, à l'exemple de Nersès, son modèle, mettait au premier rang des vertus la miséricorde envers les pauvres (F., V, 44; VI, 5). Il fit rouvrir quelques-uns, au moins, des anciens hospices. L'évêque Fauste reprit ses fonctions de surveillant de ces éta- blissements. Il devait encore les exercer sous le règne d’Ar- sace que Manuel avait fait couronner quelque temps avant de mourir, et sous le règne de Khosroës.

Mais il est difficile de savoir si on vit jamais se rétablir la subordination du premier dignitaire ecclésiastique arménien à l'égard du grand archevêque de Césarée, Medzi Arqébisgobosin, comme l'appelle Moïse de Khorène (III, 39). Depuis la part prise par Nersès et l'évêque Housig au synode présidé par Basile en 372 (Philologus, LV, 227, an. 1896), on ne voit plus de représen- tants de la Grande-Arménie groupés, en qualité de suffragants, autour de l’archevêque de Césarée. Ces dispositions semblent déjà modifiées sous Helladius, le successeur de Basile (1). Mais

marzban évacua l'Arménie... Ici Faustus ou son falsificateur multiplie au delà de toute vraisemblance les victoires remportées par Manuel sur les Perses (F., V, 39-14). Moïse de Khorène, le panégyriste des Pakradouni, ne dit rien de Manuel et fait périr Méroujan au temps de Nersès, dans le combat de Tzirav, au pied du mont Nebad, et de la main de Sempad Pakradouni (111, 37). Faustus le fait tomber, près de Pakavan, sous les coups de Papig, chef de Siounie, et, d’après Moïse, beau-père d’Arsace. Mais il y a cette différence entre Faustus et Moïse : les récits du premier, quand ils ne dépassent pas les bornes de la vraisemblance, sont le plus souvent vrais. Le second est plus sujet à caution; le lecteur s’en aper- cevra en essayant de contrôler chacun de ses dires par les autres historiens. Par exemple, en attribuant à Théodose la mort de Bab, l'exil de Varaztad, ete. il commet un évident anachronisme. Il en est de même des prétendus rapports d’Arcadius avec Arsace, fils de Bab (111, 41-46).

Moïse, avons-nous dit, passe sous silence Manuel Mamigonian, dont le rôle, chez Faustus, est si prépondérant. En revanche, Moïse met en relief et grossit très vraisemblablement les exploits de Sahag Pakradouni. Il raconte que Valar- sace, frère d’Arsace, a épousé la fille de ce Sahag; en cela il est d’accord avec Faus- tus qui donne à Sahag Pakradouni le simple titre de général. Mais Moïse ajoute qu'Hamazasp, beau-fils de Sahag le Grand, succède, à la demande du dernier, à Sahag Pakradouni. 1] décerne ainsi à Sahag Pakradouni le titre de généralissime que Faustus et le biographe de Nersès attribuent à Manuel. Selon le biographe de Nersès, Hamazasp, qui épousa la fille du catholicos Sahag le Grand, était le troisième fils de Manuel, dont il obtint la charge de généralissime. Voir Faustus, V, 44: Vie de Nersès, n. 14, Langlois, p. 44; Moïse, III, 41, 51, dans ce dernier chapitre, Moïse est à peu près véridique, sauf en ce qui concerne Ardachir II, qu'il place un peu trop tard, et dont la lettre nous semble supposée.

(1) Voir Lübeck, Reichseint. u. Kirchl. Hierarch. d. Orient.; Kirch. g. Stud., V,4, p. 179 et suiv.

104 REVUE DE L'ORIENT CHRÉTIEN.

l'indépendance de l'Église arménienne à l'égard de Césarée se- rait-elle dès lors établie, on aurait tort d'en conclure qu'elle avait rompu soit avec Césarée, soit. surtout avec les autres Églises grecques et l'Église occidentale.

Ce qui est vrai, c’est que, sans rompre avec l'Église grecque, les chefs des évêques, Zavèn Aghpianos, fils de Pharen, Sahag de Gordjaïq et Asbouraguès Aghpianos, sont portés à s'éloigner d'elle par leurs origines, leur éducation, leurs goûts, leur mi- lieu, leur opposition même aux Grégorides. Siégeant dans la par- tie de l'Arménie soumise à la Perse, ils vivent dans une étroite dépendance du roi des rois (F., VI, 4). Mais, entre ces froideurs, ces défiances, et une émancipation totale, il y a une certaine distance, qui n’est pas encore franchie. L'absence des évêques au concile de Constantinople, en 381, ne peut être interprétée comme un signe de désunion; car Théodose avait seulement invité à ce concile les évêques de l'Arménie grecque. On ra- conté, au siècle suivant, que Nersès y avait assisté; mais cette légende n'aurait point pris naissance, et l'Église arménienne n'aurait point accepté les décrets des conciles de Constantinople et d'Éphèse, si, dès la fin du quatrième siècle, l'union tradi- tionnelle avec les grandes chrétientés placées au delà de l'Eu- phrate n’eût plus subsisté. Il y plus : le témoin qui, pour cette époque, est le plus digne de foi, relève avec soin les plus petites innovations introduites dans l’Église par les chefs des évêques. Il reproche à Zavèn d'avoir porté des vêtements dou- blés d'hermine et couverts, en guise de pardessus, d’une four- rure de renard, puis d’avoir imposé aux prêtres les vêtements courts et brodés, suivant la mode militaire, au lieu de ces lon- gues robes prescrites par l'Église apostolique (VI, 2) dont l’u- sage, continué au temps de Nersès, faisait dire au chef des eunuques, envieux des richesses des prêtres, qu'ils étaient vêtus comme des femmes (IV, 14). Il censure aussi les mœurs de Zavèn; et tout en louant beaucoup la vie vertueuse de Sahag et d'Asbouraguès, il leur reproche de n'avoir rien changé aux nouvelles coutumes, inaugurées par Zavèn, et d'avoir porté des vêtements ornés de rubans. Si ces évêques se fussent proclamés complètement autonomes et eussent imposé les mains à d’au- tres évêques sans en avoir obtenu le privilège, Faustus n'eût point manqué de rélever ce qui aurait été, à ses yeux, une usur-

ÉTUDE SUR LA CONVERSION DE L'ARMÉNIE. 165

pation. N'oublions pas, en effet, que, depuis l’interdit porté par saint Basile, l'historien regardait les chefs des évêques armé- _niens comme privés du pouvoir de conférer l'épiscopat, et, au moment il achevait son histoire, c'est-à-dire vers l'an 386- 387, cette défense, s'il faut l'en croire, était encore observée.

F. TOURNEBIZE.

LITTÉRATURE ÉTHIOPIENNE PSEUDO-CLÉMENTINE

TEXTE ET TRADUCTION DU MYSTÈRE DU JUGEMENT DES PÉCHEURS

(Suite) (1)

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(1) Voy. 1907.

(2) Texte très obscur : nAñ : CAT τ h7°Hove : Nov : 24. : ἈΞ RE : aan : (sic). (3) Ms. Τῶν" : (4) Ms. hég : (5) Ms. ne : (6) Ms. ον πη : (7) Ms. eraot- : (8) Ms. œrnwgæ- : (9) Ms. ρῶν: (10) Ms. nov : (11) Ms. 5e : (12) Ms. minor: :

LITTÉRATURE ÉTHIOPIENNE PSEUDO-CLÉMENTINE. 167

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(9) Ms. n&b@av: : (10) Texte très obscur. (11) Ms. ñov0 go: : (12)Ms. ACAg-o0e 2 (13) Ms. anime : —(14) Ms. ne7eæ : (15) Ms. oqheP : (16) Ms. : 952 : nov: : (17) Restitution; ms. NE : (18) Ms. πω ραν. : (19) Ms. AAxfoo: : (20) Ms. χάπην : (21) Ms. etnhp : (22) Ms. ἈΠῊ : (23) Ms. 07P# : (24) Ms. avpaGrov- : (25) Ms. --

168 REVUE DE L'ORIENT CHRÉTIEN.

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il y dans le ms. une ditographie. (2) Ms. 4rœ@n : (9) Ms. ALP αν :

(4) Ms. μον : ἅν, (5) Ms. ga : (6) Restitution; ms. ©. nA : (7) Ms. an : (8) Ms. hagwon- : (9) Ms. xng°e : (10) Ms. new: (11) Ms. nA%:— (12) Restitution; ms. haha. : (sic). (13) Solution de continuité dans le ms. (14) Ms. nyna : (15) Ms. ann : (16) Ms. enr : (17) Ms. nav: x (18) Ms. md 3 (19) Ms. ang: : (20) Ms. nn : (21) Ms. na :

(22) Ms. ἈΦ βρη: : ag] Ms. "nu on: : (24) Ms. χήνα: :

LITTÉRATURE ÉTHIOPIENNE PSEUDO-CLÉMENTINE. 169

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(1) Ms. hawov: : (2) Ms. qovme : (3) Ms. 5m : (4) Ms. ρα : (5) Ms. exnn : (6) Restitution; texte très obscur : DAnAQAV on : per, : (7) Ms. Phas Ἔν αν. : (8) Ms. ephor : (9) Ms. eye : (10) Ms. anûe : (11) Ms. erœ-up : (12) Ms. nes: (13) Ms. aag: : (14) Ms. rer à (15) Ms. non wav- : (16) Ms. aoû : (17) Ms. exnû : (18) Ms. σι An : (19) Ms. nn : (20) Ms. ῆδι :

(21) À partir d'ici les verbes ont été mis à la per. masc. du plur.

(22) Ms. e&h : —(23) Ms. An: —(24) Ms. ec : (25) Ms. môa :

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170 REVUE DE L'ORIENT CHRÉTIEN.

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LITTÉRATURE ÉTHIOPIENNE PSEUDO-CLÉMENTINE, 171

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(1) Ms. an : (2) Ms. 74 τ ἈΞ ΠΤ à (3) Ms. AAg: : (4) Ms. nov : (δ) Ms. 3.95:

(6) Ms. aoû : (7) Ms. ng°an : (8) Ms. xg°an : (9) Ms. eh? φι-- (10) Ms. Restitution du texte altéré : hnov : FA : ΔΆΠΦ : (11) Ms. rnao: : (12) Ms. na - (13) Ms. qi: (14) Ms. root : (15) Ms. np : (16) Ms. ng°an : (17) Ms. nm : (18) Ms. nono τ (19) Ms. œAñœñ : (20) Ms. ae : (21) Ms. roro : (22) Ms. an : (23) Ms. non : (24) Ms. ne : (25) Ms. ΔΈ :

(26) Ms. any :

1 REVUE DE L'ORIENT CHRÉTIEN.

ani : (1) HT τ 00 : ATEN : 107 : (2) AE : 060: an : . g°RhNav- : (9) PA τ OhôN : (1) men oo: : Oh : Fi fan : (5) 5 (F. 155 τ΄ ἃ) epzan av τ Alawg:re τ (6) HhôN : γἹ συ. : DAMES: : DEN» av- : Non : ae : DATPENP : 167 : (7) HAN : 2: P'he : Poe SN : HE : [δὸ :] HA NA : h9°06 : AA : Au-nnov- (5) [A réa no: : (9) Ana : Let: :] #6 : À ΠΛ. : Ch9°9® : (0) Ὧσυ- : DIN 3 : hÔL TN: : (1) œtrbmbT : (12) Ἀῤύφοη : DTANC : wALAS : ΟἿ ne : (13) 4220: : πσοθὶ : HAL AN: : oh : (14) HA Ab-0fNno: : (15) Ag 200 : (16) Chûov: : Ann : 24: : Aléno: : DAûh : CET : NAT : A7 : Ah : À Bow: : DAbz"07 : DATA Ah τ (17) ἈΠ ΔΆ : ἈΦ ΣΥ : δῆ : F1 2:21] (48) ho : An : RO : (19) διΛσυ- : (20) : 21) AFCANo®: : (F. 455 b) δὶ 1: : ΦΖῇἧ Ὦσυ- : D Cr : Π1Ρἃ : (22) 3butho:- : (29) Θρ.4: : A ιν Φ: (24) ωδ.1“ΦῸ09"Φ : (25) Ἰδσν : δὴ : CAE τ HF : ANNP

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(4) Ms. ni: (2) Ms. ὙΠῸῪ : (3) Ms. 59° mon: : (4) Ms. nmpæov- : (5) Ms. nav : (6) Ms. ose τ [7] Ms. ὙΠῸῪ : (8) Ms. nunnov: : (9) Ms. rznnan. : ἐν 0) Ms. οἴ δισνὴ : -- (11) Ms. nôgyrrnav : --- (12) Ms. rprpæ : (13) Ms. rene : (14) Ms. ρα:

(15) Ms. πδή"ηφ συ. : (16) Ms. nc : (1 7)Ms. nr: (18) Ms. “αἰ! : (19) Ms. σιν : mot inconnu. (20) Ms. Añnon- : (21) Ms. œ@nn : (22) Ms. zen : (23) Ms. à : ἘΠῚ Ms. τῶὴὸ : (25) Ms. χρὴ : (26) Ms. gnne-on- # (27) Ms. œmenr : (28) Ms. nan : (29) Ms. rneæ- : (30) Ms. ann : (31) Ms.

ΠΑἊΦ : (32) Ms. ern7û :

LITTÉRATURE ÉTHIOPIENNE PSEUDO-CLÉMENTINE. 173

oAeay : (1) δὲὸ + mebb[A :] 0Ct : (2) Nr: : © ph. : [ba :] λὐδειυσν- : NAS : (9) Nr : AIN : (4) Añoo : hAfgov- : 04.P : (5) [ohne : ἈΠῚΡσν- : (6) non : ἀσηΐγ : bo : [ἢΐσν :] éh@v: : ΘΗ συν : NA: : Le :] HA Nb Po τ HA NA : RAA - LU: : ΔΗΛ, : (7) ὠφι 95 : wife : (F. 155 ν᾽ a) AJ°ŒUNæ:- : DNA TU : Ἔσο Pa: : Λλαυ-ὙῈ : ἐφ : DAD-b AO: : h9°11 + HEÛC : prove τ GA : (8) EN τ DALL-o- : (9) : (0) adé : Ph : ἈΠ ΔΛ : Non : PAIN : NhéC : onu& : (11) [ho :] vAP #0: : (12) HAhñovée : AMV’: : À Ἄσυ-Ὑ}: τι τ (03) Non : 04.8 : Añh# 0: : OA : AA : 9" ( : AAA, : (A) ha : Fa pfav- : (15) ARIGEN ANA : (6) Farc : (17) 022 τ ἢρ, ἡ, : (18) AAA : (19) ἌΠχυ- : (20) HOAEZ : ἈΠῚΡσυ- : ΔΩ : (21) AA : AP h9°4. : (22) Ang : Bree : (23) AT R Po: : (24) : ΔΆ o0-y: τ ΦΩ͂ : Τά. : (25) Va: : DEP: : À Ἄσυ-.Ὑ}: τ 961 : οὐ τ (26) Fate : PF : ΠιΆιΡαν- : Nov : QU: : he τ HU: : N9NE : JNMC : (27) ἈΎΤ τ Ph τ 2 τ Ἀν σν- τ Lame τ (F. 155 ν᾽ Β) at : août : Hu: ΘΉῤη : 2% τ λυ: : Ron : οὐ : συ-ἣφ : (28) HA : OF - [Ar 1] @to 1m : NNL : συ- àG : (29) HA : 029 : ont : [ὦ ]næarñtt : (30) nn: :

(1) Ms. near : (2) Ms. δεῖ: - (9) Ms. rn&p : (4) Ms. ngoan : (5) Ms. δὰφ : (6) Ms. xnpwov: : [7 Restitution; texte très obscur : 4n&u: : fin : MAR: : HAeNd?ov- : Hh'YNA : Ah 2 LIU: τ MMILA : (SIC).

(8) Ms. &ph : (9) Ms. ne gave : (16) Ms. (11) Ms. 4& :

(12) Ms. œuag : (13) Ms. vas : (14) Ms. aan, : (15) Ms. 4. συ. : (16) Ms. una : (17) Ms. πάν : (18) Ms. nen : (19) Ms. añv4ñû : (20) Ms. nnzu : (21) Ms. vas : (22) Ms. Hnegve : (23) Ms. era.gf : (24) Ms. an : Fég#on- : (25) Ms. Tate : (26) Ms. 8 : (27) Ms. opm.c :

(28) Ms. ap : (29) Ms. 974 : (30) Ms. nowAñxr :

174 REVUE DE L'ORIENT CHRÉTIEN.

œFo4m : 451: τ HA τ NB τ HAU: τ AO-À τ hûo : Hooñà : ἢ, θυ σν- : HAZNA : Am. At - (D) ARE : (2) Δ 4: 6) ner : (4) ω ιση σοῦ : (5) Θ᾿: σηη : (6) Na : pré. ef. : (7) A04-P : HAL on. : ALP : ὯΔ : σὴν : (δ) #0 : (9) [nn :] τάως : (10) n°2 : hga, : ([1) ἢσγυ: : FADE τ aop-4y% : ΠΛ τ A9 : HAN : LH7 : HAL +. : (12) œanà : 2297 τ PAL: : (13) δῇ : Léo : (14) Ron : Ab : Nov : LAIE : [Φ]Δ : +CN : AQU: ΦΤΔΡ : Nbito : (15) σοῦ Φὰ : Lo lon : 1 4.,γ. oo. : [λ.σηήῤῷσυ- : #06 :] (16) œAA A : δῇ : 4.2.1: : [Δ] ee : (. 156 ἃ) eggg : (17) AZ HU: : (18) MAC : @- dE : 98 :(19) AAA τ dE τ AG, τ AA τ ἀνε} τ ne : (20) he : (21) ἡγΎ : οἰ κι : (22) ἈΎλ Ἀσυ- : AL bd : DéûL-0- : ᾿σὴ δι : NU: : ΘἾ 4." συ- τ 0,7" : Hu: : οἶδ ΤΟ Ὁ: συ- : (23) Ph U- τ Ana : DUNav- : ve: DL : (24) Nav : (25) Enr - OL Y - PRBU: =

(A suivre.)

(1) Ms. sm à (2) Ms. nt : (3) Ms. ae ε (4) Ms. πη} :

(5) Ms. λισ 95} : (6) Ms. en9°7 : (7) er4gt : (8) Ms. ἈΠ. : (9) Ms. ge : (10) Ms. τήφῳ : (11) Ms. ne, : (12) Ms. τάν : (13) Ms. ana - rer: : (14) Ms. een: (15) Ms. page7 : (16) Texte obscur : on : 4.8-#a0- : ge :

(17) Ms. he9ny : (18) Ms. maux τ (19) Ms. ane: : (20) Ms.

Ange : (21) Ms. :5p8 : (22) Ms. yen : (23) Ms. Ἀμάν. : (24) Ms. gav- : (25) Ms. war :

TRADUCTION

(Fol. 152 a, suite) Il détourna l'héritage de la souche de Cham qui ravissait, après qu’il eut décidé (de le faire), et il rendit l’héritage aux enfants de Sem qui se montrèrent vaillants, après qu'il eut juré (de le faire). Il affaiblit et détruisit les géants et les Cananéens. Il choisit Israël. C'est (d'Israël) (1) qu'il naquit. Quant aux Cananéens, il (les) couvrit d’opprobre, car ils adorèrent les idoles, les pierres et les arbres. La mai- son de Jacob, aussi, rendit (aux idoles) (2) les honneurs divins, pendant qu’elle se complaisait dans les idoles. Leur cœur ne devint pas droit devant le Seigneur, leur Dieu, en sorte qu'il les livra dans la main de leurs ennemis. Ils se lamentèrent. Il manqua (des gens) pour les enterrer et pour les secourir, en sorte qu'ils se repentirent dès ce jour-là. Lorsque (le Seigneur) les eut convertis, ils surent que le Seigneur était bon et ils revinrent sur eux-mêmes, (fol. 152 vo b) afin qu’ils se repentissent de leur malice et que leurs péchés et leurs crimes d’autrefois, qu'ils avaient faits par ignorance, leur fussent remis. Quant à moi, je retournai à eux, avec la clémence et avec la miséricorde (3) dans lesquelles j'ai pitié de mes créa- tures. Je fais justice aux générations qui m’aiment. Je me venge de ceux qui les haïssent, jusqu’à la troisième et la quatrième génération. (Je me venge) de ceux qui me haïssent et n’observent pas mes commandements. En effet, je suis jaloux. Je me venge de ceux qui (s’éloignent) de moi, (pour) forniquer (4). Quant à ceux qui se montrent constants (envers moi), dans les embarras et dans les difficultés, moi aussi, je les aime. Je ne m'éloi- gnerai jamais d'eux. Je ferai (ma) demeure avec eux, afin que, (moi) Jésus (Ὁ), je les avertisse et je me montre moi-même à eux. Mes comman- dements seront dans leur cœur ainsi que (6) l’Esprit-Saint, car ma demeure sera dans leur cœur, avec mon Père céleste et l’Esprit-Saint vivi-

(1) m. à m. « d’eux ».

(2) m. à m. « à elles ».

(3) m. à m. « dans ma clémence et dans ma miséricor de ». (4) m. à m. « de ceux qui forniquent loin de moi ».

(9) texte obscur.

(6) m. à m. « et ».

176 REVUE DE L'ORIENT CHRÉTIEN.

ficateur. En effet, (fol. 153 a) je suis leur Dieu et leur roi. Je me trou- verai toujours avec eux. Je mettrai l'héritage des anges sur eux. Je ferai tomber leurs ennemis devant eux. Je mettrai leurs adversaires dans la géhenne. Personne donc ne les égarera, car les démons seront sous eux. La famille des hommes se réjouira de (1) la chute des démons, car ses ennemis seront vaincus et deviendront comme s'ils n'avaient pas été créés. Les enfants des hommes recevront (2) leur propre héritage, afin de glorifier (le Seigneur). En effet, ils se ceindront les reins de justice. Ils feront briller leurs chaines avec de l'huile. Ils entreront par la porte étroite. Ils entreront dans leur lieu de repos, par l'ouverture de la porte, il n'y pas d'entrée pour les voleurs. Ils trouveront l'héritage que (le Seigneur) avait promis à Adam et à ses enfants. Il leur dit : « Vous êtes des dieux. (fol. 153 b) Vous êtes tous les enfants du Très-Haut. » Connais donc cet exposé, Pierre, mon serviteur. Telle est la miséricorde du Seigneur. Si tu ne m'avais pas poussé à bout, je ne t'aurais pas exposé (ceci), car cet exposé est un mystère caché. Ne révèle pas (ce mystère) et ne (l’}expose pas à qui ne peut pas le porter, car il rendra fou le cœur des enfants des hommes et il mettra la malice dans leur intelligence. Lorsqu'ils le connaïtront, ils deviendront pécheurs, en disant : « (Le Seigneur) nous pardonnera. Nous ne retournerons pas au Schéol (3) ». S'ils savent que la miséricorde du Seigneur viendra sur eux, lors de la résurrection, ils n’apprécieront pas mes vérités (4) que je t'ai exposées, afin de ne pas devenir meilleurs. Celui qui aura mangé ma chair et aura bu mon sang ne descendra pas dans le Schéol. Ceux qui n’auront pas eu pitié de leur prochain et n'auront pas fait du bien à leur prochain y descendront. Quant à toi, ne divulgue pas ce (mystère) glorieux, sauf aux sages qui (le) cacheront (fol. 153 ve a) et qui connaitront son expli- cation. Quant à toi, fais de cette exposition un trésor caché. Cet avertisse- ment-là, prends-(le) et fais-en un bouclier. A la place de la joie mets pour (les pécheurs) (5) la tristesse, afin que ceux qui ont péché autrefois, (en- trainés) par l'ignorance, par les séductions de Satan et de ses démons, soient sauvés par le repentir. Lorsque tu mettras leur repentir à la première place, par écrit, leur repentir (les) saisira davantage (6). Ils affligeront leur corps, afin de ne pas retomber (7), à nouveau, dans le péché et le crime. Tel (8) un enfant qui pèche contre son père et contre sa mère. (Cet enfant- là), on ne le frappe pas légèrement, (cela), afin de (le) corriger (9) et non afin de le faire périr, (mais) afin qu’il ne pèche pas à nouveau. Les coups (10)

(1) m. à m. « à cause de ».

(2) m. à m. « prendront ».

(3) m. à m. « nous n’aurons pas de retour dans le Schéol ». (4) texte obscur.

(2) τὰ. à m. « pour eux ».

(6) texte très obscur.

(7) τῇ. à τῇ. « revenir ».

(8) m. à m. « comme ».

(9) m. à m. « pour la correction ».

(10) m. à m. « ses coups ».

LITTÉRATURE ÉTHIOPIENNE PSEUDO-CLÉMENTINE. 177

mettent bas et secouent ses habits (1). On le revêt de ses habits, on ointses plaies, on secoue sa poussière, on l’adoucit, afin qu'il abandonne ses

- pleurs, (fol. 153 vo b) on lui donne de la nourriture. Quant à cette

castigation, elle pour but (2) que (l’enfant) ne recommence pas à pécher contre (ses parents) (3) ni contre d’autres personnes.

Lorsqu'il voudra pécher à nouveau, il verra les meurtrissures (4) de ses plaies guéries (5); il se souviendra de ses coups d'autrefois et ne péchera pas. C’est donc ainsi (qu’il en ira) (6), si (les pécheurs) sont châtiés par le repentir. Présentement, ils se repentiront (des fautes) d'autrefois (7). Ils ne recommenceront pas pécher). Ils verront les meurtrissures de leurs plaies et ils craindront de pécher. Ils s'étaient préoccupés autrefois de la saveur des mets. Ils se repentiront par un jeûne fréquent. C’est pourquoi, ils ne recommenceront pas à pécher, car ils craindront que l’affliction, inhé- rente au repentir (8), ne revienne sur eux. Puisque (l’affliction), inhérente au repentir (9), les effraye et les épouvante, je commencerai par la leur donner, afin qu'ils ne pèchent pas contre (leur) prochain ni contre les commandements du Seigneur. Fais du repentir un bouclier.

Après cela, écris cet (fol. 154 a) exposé, afin qu'il devienne une espé- rance pour les enfants des hommes. En outre, comprends ceci, savoir) que le Seigneur n’a pas créé Adam pour la castigation ni pour la corruption, mais pour la félicité et le plaisir. Lorsqu'il eut transgressé le commande- ment (du Seigneur), la mort poursuivit la vie d'Adam, comme la lumière poursuit les ténèbres. C’est ainsi que la récompense (d’Adam) été détruite par la mort. En outre, après qu'(Adam) eut fait pénitence, (le Seigneur) a-t-il dit, à nouveau, qu'il le ferait retourner dans l’anéantissement et la corruption? Loin de que (rien) de tel ne revienne, car le châtiment du premier (homme a eu lieu), parce qu'il avait prévariqué. C’est ainsi que (le Seigneur) a parlé à Adam : « Quant à moi, je t’ai créé pour l'honneur et pour la gloire. Mais toi, tu ne l’as pas compris. Tu es devenu semblable aux bêtes sans intelligence. En effet, tu as entendu ma parole et tu as transgressé mon commandement. C'est pourquoi, je ferai venir (fol. 153 b) sur toi la condamnation, c'est-à-dire la mort. » Il lui a dit : « Tu es poussière, retourne dans ta poussière se trouvent de nombreux péchés. » Après l'avoir ressuscité, l’anéantira-t-il à nouveau par la mort et par le Schéol? Après l'avoir rétribué selon sa faute, le Seigneur (l’anéantira-t-il à nouveau)? Pénètre et comprends ceci, savoir) qu'il ne le fera pas mourir une seconde fois. Que cet exposé devienne un mystère pour tout homme,

(1) texte très obscur.

(2) m. à m. « c’est afin que ».

(3) m. à m. « contre eux.

(4) m. à m. « la plaie de sa blessure ».

(5) m. à τὴ. « se guérir ».

(6) m. à m. « ainsi donc, 5115 sont châtiés ».

(7) m. à τῇ. « maintenant, repentir des fautes anciennes - (8) τη. à m. « le tourment qui est dans le repentir ».

(9) πὶ. à m. « parce que ce qui est dans le repentir ».

ORIENT CHRÉTIEN. 1:

τῷ

178 REVUE DE L'ORIENT CHRÉTIEN.

comme le premier exposé. Comme dit David : « Le Seigneur m'a rude- ment châtié, mais il ne m'a pas livré à la mort. Ouvrez-moi les portes de la justice. Que j’entre et me prosterne devant le Seigneur. » C’est ce que dit David au sujet de son père Adam. « (Le Seigneur) m’a rudement châtié, » dit-il, parce qu'(Adam) a été anéanti par la mort. « Mais il ne m’a pas livré à la mort, » dit-il, parce qu'il ne le fera pas descendre dans le Schéol, après la résurrection. (fol. 154 vo a) Ceci donc, sache-(le), comprends-(le), scrute- (le), médite-(le) en ton cœur. Les chefs (l’exposeront, mais (toi), tu (le) comprendras, en (le) méditant dans ton lit. Alors tu connaïitras la grandeur de la miséricorde du Seigneur envers Adam, sa créature. (Tu sauras) comment (Adam) voulut autrefois se faire Dieu et (comment) il voulut lui- même devenir Dieu, lorsqu'il fut séduit par le serpent, (lui) et sa femme. En effet, le serpent dit à la femme : « O femme, pourquoi le Seigneur vous a-t-il défendu de manger (du fruit) de l’arbre? » La femme lui répon- dit : « C’est afin que nous ne mourions pas. » Le serpent dit à la femme : « Certainement ce n’est pas (afin que) vous ne mouriez pas, mais c’est afin que vous ne deveniez pas Dieu, qu'il vous interdit l’arbre. » C’est dans l’espoir de devenir Dieu qu'(Adam) transgressa le commandement du Seigneur. Les (premiers) parents étaient comme des enfants qui se pro- menaient dans (fol. 154 b) le jardin. Leur Père avait planté dans le jardin un bel (et) splendide (arbre). Ses fruits étaient délicieux. Ils étaient bons pour l’âme et le corps. Si (les premiers parents) avaient été patients, (les fruits) auraient müri. Quant à eux, ils étaient les enfants du Maitre du jardin. Leur Père les envoya garder le jardin et leur ordonna de le cultiver. Ils mangèrent (des fruits) de toute couleur, qui provenaient du jardin. Leur saveur était celle de la figue et excellente. Lorsqu'ils virent (l'arbre défendu), afin qu'ils ne se trompassent pas à cause de lui (1), (le Seigneur) les amena aussitôt et leur fit voir (l'arbre) aux fruits d’une saveur excel- lente, qu'il avait planté dans le jardin. Il leur dit : « Ne touchez pas à cet arbre. Ne vous approchez pas de cet arbre, afin qu'il ne fasse pas venir sur vous la mort. »

De nouveau, il les instruisit et leur dit : « Prenez garde de n’y pas tou- cher, afin que (fol. 155 ἃ) je ne vous frappe pas dans ma colère. » De nouveau, il leur parla, les instruisit et leur dit de n’y pas toucher et de ne pas s’en approcher. « Lorsque vous élèverez vos mains sur cet arbre, avant que moi-même je n’aie donné (de son fruit) à vos dents (2) à manger, vu que c’est du fruit vert, votre ventre (en) sera torturé et (ce fruit vert) vous corrompra les yeux, vous brisera les os, vous cassera les membres, fera de votre corps une cendre et de votre vigueur une corruption, qui vous nuiront depuis les cheveux de votre tête jusqu'aux ongles de vos pieds. Jusqu'à ce que (les fruits) se soient développés et aient müûri, moi-même je viendrai vers vous. Je les cueillerai; je nettoierai (l'arbre); j’écarterai de lui jusqu'à tout être, afin que votre langue ne devienne pas ulcérée jusqu'à votre gorge et que ne survienne pas (fol. 155 b) le brisement

(1) m. à m. «en lui ». (2) m. à m. « molaires ».

ἀν

:

LITTÉRATURE ÉTHIOPIENNE PSEUDO-CLÉMENTINE. 179

de vos dents (1). (Soyez) dans (toute) la force de votre vigilance, Prenez garde de ne pas convoiter (le fruit défendu) et de ne pas le goûter, car c'est du fruit vert. » C’est ceci qu'il leur enseigna. Il leur permit de se nourrir des autres fruits qui se trouvaient dans le jardin. Or, il arriva que, lorsqu'ils eurent faim, ils mangèrent (du fruit) de l'arbre (défendu). Mais (en réalité, ce fut) dans l'espoir de devenir Dieu qu'ils transgressèrent le commandement de leur Père. Lorsqu'ils mangèrent (du fruit) de l'arbre, alors que c’était du fruit vert, iis n'avaient pas attendu qu'il se fût déve- loppé et eùt müri. Le fruit vert (les) corrompit. Les dents des enfants furent émoussées. Ils firent venir sur eux (le châtiment), dans l'espoir de devenir Dieu. En effet, l’'Ennemi les avait rendus fous. Leur Père sut que le fruit vert (les) avait corrompus, (selon son explication), et comment ils avaient mangé (le fruit) nuisible pour eux, avant que ne füt venue l’époque de la maturité, de la récolte, de la bonté (du fruit, époque où) il leur (en) eût donné. (fol. 155 a) C’est pourquoi, il se fàcha contre ces enfants et les fit sortir du jardin qu'il avait fait pour eux joie et plaisir. Il les chassa vers une contrée d’épines et de ronces, afin qu'ils (la) cultivas- sent dans la chaleur, dans la sueur, (pendant leur) existence. Le Père de ces enfantssutque l'Ennemi les avait égarés. Lui-même connut la tentation de l’Adversaire, (etsut) comment il avait raviles enfants par ruse, en s'étant caché dans le corps d’un serpent (et) en ayant chuchoté à leurs oreilles. Lui aussi, le Père des enfants, qui ne connaissaient pas le mal, (agit de même envers l’Adversaire, car) il ravit celui qui avait ravi les enfants. Il participa à la chair et au sang de ces enfants. En outre, il participa à leur propre mort, afin de leur donner sa propre vie. Avec une sagesse mysté- rieuse (2), leur propre chair qu'il prit, il l’unit (fol. 155 b) à sa propre divinité. En outre, sa propre beauté, il l’unit à notre propre corruption et à (notre propre) mort. La pesanteur de notre propre corruption fut absorbée par la beauté de la divinité, par la divinité glorieuse. Notre propre mort fut absorbée par sa propre vie sublime (3). En effet, il est devenu sembla- ble (aux hommes), à l’exception seulement (4) du péché. Il a porté notre fardeau, nos souffrances et notre faiblesse, afin de ravir l’Ennemi qui avait ravi les enfants que le fruit vert avait corrompus. De même que (l'Ennemi) s'était caché dans le corps d’un serpent, de même Notre Sauveur se cacha dans le corps d'Adam. Ce n’est pas immédiatement qu'il ravit (l’'Ennemi) et qu'il revêtit notre chair, mais c'est après avoir tardé, jus- qu'à ce que celui qui avait ravi les enfants eût oublié, afin qu’il ne le con- nüt pas. Lorsque (l’'Ennemi) eut approché de Lui, (Notre Sauveur) le tua avec le bâton de sa croix. Lorsque (l’Ennemi) eut ravi (les enfants), le fruit vert (les corrompit). Lui aussi, (Notre Sauveur), lorsqu'il eut ravi l’Auda- cieux, (fol. 156 ro a) (le) corrompit tout entier et le lia dans le Schéol

(1) m. à m. « molaires ».

(2) m. à m. « dans la sagesse du mystère ».

(3) autre trad. « .. fut absorbée par sa vie. En effet, le Très-Haut est de- venu... »

(4) m. à m. « à l'exception du péché seul ».

νον ἀν ENT Re τ AA

180 REVUE DE L'ORIENT CHRÉTIEN.

effroyable (1), dans les ténèbres extérieures, dans les larmes et les grince- ments de dents. Étant ressuscité, (Notre Sauveur) a ressuscité ses enfants, a fait d'eux des dieux comme lui, leur distribué sa propre vie, les faits égaux à lui (2), car il leur a donné sa chair et son sang, afin qu'ils devins- sent égaux à lui (3). (A suivre.) Gournay-en-Bray, le 21 octobre 1907. Sylvain GRÉBAUT.

(1) m. à m. « dans le tremblement du Schéol ». (2) m. à m. « avec lui ». (3) m. à m. « avec lui ».

.

SAINT EUTHYME LE GRAND

MOINE DE PALESTINE 970-473;

(Suite)

CHAPITRE III FONDATIONS MONASTIQUES DE SAINT EUTHYME.

La laure de Marda. Le monastère d’Aristobulias. La laure de saint Eu- thyme. Les premiers disciples du saint. Description de la laure. Mul- tiplication miraculeuse de vivres. Fondations monastiques des disciples d'Euthyme.

À peine Euthyme eut-il fondé son monastère et converti la tribu sarrasine, « qu’il ressentit le double ennui de n'être plus seul et de n'être plus ignoré ». Un Jour enfin, il prit avec lui son fidèle ami et compatriote Domitien et, sans avertir personne, s'enfuit dans la solitude de Rouba, près de la mer Morte. De là, Euthyme « monta sur une haute montagne, tout à fait isolée, et qui s'appelait Marda. Sur cette montagne, il trouva un puits et d'anciennes constructions tombées en ruines. Il éleva une église et dans ce temple bâtit un autel, lesquels existent encore », ajoute Cyrille de Scythopolis.

Lors de la visite de Jean Moschus à cette laure, vers la fin du vi‘ siècle, des anachorètes y gardaient toujours le souvenir d'Euthyme en faisant refleurir ses vertus. Leur jardin se trou- vait à quelque distance de la laure, sur les rives moins arides de la mer Morte, au dire du chroniqueur monastique, qui nous

182 REVUE DE L'ORIENT CHRÉTIEN.

a laissé ce récit charmant : « Il existe, près de la mer Morte, une montagne du nom de Marda, qui est très élevée. Sur cette montagne habitent des anachorètes, qui ont un jardin distant d'environ six milles, près du rivage de la mer, comme dans un vallon creux. Et lorsque les anachorètes désirent des lé- gumes du jardin, ils harnachent l'âne et lui disent : « Va-t'en au jardin pour le service et porte-nous des légumes. » Et l'âne s’en va tout seul trouver le jardinier et, quand il arrive près de sa porte, il la frappe avec sa tête et, tout aussitôt, le jar- dinier lui donne une charge de légumes et le renvoie. Et c'est un plaisir de voir ainsi cette bête s'en aller, toute seule, chaque jour, sans vouloir obéir à d’autres qu'aux anachorètes (1). »

Le vœu de stabilité n’entrait pas dans les goûts des moines palestiniens. Dès qu'Euthyme fut installé à Marda, 1] lui prit fantaisie de se retirer dans le désert de Ziph, pour voir les ca- vernes qui avaient servi d'asile à David fuyant devant Saül. Autant et peut-être plus que la Grèce, la Palestine regorge de sites, « que la création fit parfois monotones ou insignifiants, mais que les exploits ou les forfaits ont rendus grandioses ». La curiosité une fois satisfaite, le solitaire se trouva si bien dans cet endroit qu'il y demeura. Or, le fils d’un habitant d’Aristobulias, un bourg avoisinant, était tourmenté par un malin esprit, que la présence d'Euthyme en cette région génait visiblement. La délivrance miraculeuse de ce possédé valut à notre saint un regain de popularité.

Bientôtle miracle fut connu dans toute la contrée. « Les ha- bitants accoururent en grand nombre d’Aristobulias et des localités voisines et lui construisirent un monastère. Beaucoup

(1) Pratum Spiriluale, cap. eLvin. De grandes discussions se sont engagées au sujet de l'identification de cette laure, les uns tenant pour le Khirbet-el- Mird, tout près de Saint-Sabas, les autres pour Sebbéh, l’ancienne Massada, au sud d'Engaddi, Le premier lieu a l’homophonie pour lui et de belles ruines, mais il parait mieux convenir à l'emplacement du monastère de Castellium, fondé par saint Sabas et qui existait conjointement avec la laure de Marda et ne peut, par conséquent, se confondre avec elle. Sebbéh, en dehors du voisinage requis de la mer Morte, répondrait mieux à l'itinéraire que suivait Euthyme et il présente, de plus, ce fait curieux de posséder une église byzantine, dont on ne sait que dire. Les grottes, situées dans les-flanes des rochers, ont été habi- tées probablement par des solitaires, comme celles de toutes les laures. Voir Delau, Monastères palestiniens du cinquième siècle dans le Bullelin de liltérature ecclésiastique de Toulouse, Paris, t. (1899), p. 273-281.

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d’entre eux, hommes pieux, se décidèrent à y rester, Dieu leur donnant d'en haut, remarque l’hagiographe, ce qui était né- cessaire pour sustenter leur corps ». Les erreurs de Manés s'étaient glissées dans ces parages; Euthyme les en expulsa ; puis, comme le bruit de la gloire troublait à nouveau son hu- milité, il revint au monastère de saint Théoctiste.

Le monastère d’Aristobulias (1)que venait de fonder saint Eu- thyme, était situé au sud de Caphar-Baricha, lieu célèbre par le dialogue d'Abraham et des trois anges, qui cherchèrent en vain dans Sodome les dix justes réclamés par Dieu. Bien que l'hagiographe ne le dise pas, il est fort probable que cette fondation de saint Euthyme existait déjà avant lui et qu'il ne fit que la perfectionner. En effet, dès le milieu du 1v° siècle, sûrement avant 361, le site biblique de Caphar-Baricha avait séduit plusieurs ermites, qui s'étaient réfugiés à l'abri de ses ravins. Ils dépendaient d’un certain Pierre, dont l'extérieur hypocritement vertueux déguisait mal une âme vile et un cœur corrompu. Saint Épiphane de Salamine Le dénonça à l'autorité ecclésiastique, le poursuivit au delà du Jourdain et n'eut pas de cesse qu’il ne l’eût fait exclure de l'Église (2). La commu- nauté de Pierre se sépara alors de lui; cependant ses erreurs plus ou moins manichéennes trouvèrent asile chez plusieurs de ses disciples et chez les habitants des villages voisins, ainsi que nous l’apprend l’histoire de saint Euthyme.

C’est au retour de cette longue excursion qu'Euthyme et son fidèle Domitien s’établirent à trois milles du couvent de Théoc- tiste, dans la direction de Jérusalem. En quelques mots Cyrille de Scythopolis nous a laissé une description charmante du lieu qu'il connaissait bien, pour y avoir vécu plusieurs années de sa Jeunesse : « Il est, nous dit-il, une toute petite colline, as- sise entre deux vallées qui vont s’unissant contre 16 midi, après avoir quelque temps couru de front, l’une à l’orient, l’autre à l'occident. Au nord de cette colline s'ouvre une jolie plaine, d'environ trois stades d'étendue (près de 600 mètres), et que l’on dirait faite uniquement pour le plaisir et la séduction.

(1) Il est possible que les ruines de ce monastère se retrouvent à Néby-Youkin, sanctuaire musulman très vénéré, situé entre Beni-Naïm ou Caphar-Baricha et Kh.-Istaboul, l’Aristobulias de lhagiographe.

(2) Migne, P.G., t. XLI, col. 677.

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Un torrent descend des hauteurs de l’ouest et la plaine se l’at- tache, comme l'on fait d’une ceinture... Mais qui pourra décrire la nature de ce lieu? Et comme il y fait doux, et comme la terre yest fertile, et comme l'air y est tempéré! Tout y règne dans une juste mesure, la chaleur, la froidure et l'humidité. Elle est plus chaude, notre vallée, que les vallées bien froides, plus fraîche que les vallées bien chaudes, plus sèche que les vallées bien humides, plus humide que les vallées bien sèches. Tout s’y harmonise dans un ordre parfait. »

Pour être flatteuse, la description n’en est pas moins d’une ressemblance frappante. Rien ne saurait rendre le contraste que présente cette gracieuse plaine avec la nature étrange du désert voisin, mamelonné de boursouflures énormes aux dé- pressions pittoresques. Tout autour, on dirait une mer en furie, surprise dans sa colère et tout à coup pétrifiée, tant les cimes blanchätres des collines ressemblent aux vagues écumeuses, qui se poursuivent sans cesse et ne s'atteignent jamais. Pour notre monastère, le désert a perdu la rigueur de son aspect. Les montagnes éloignent leurs croupes rébarbatives, les ma- melons adoucissent leurs pentes et souffrent quelque verdure sur leur crâne pelé; ils encerclent la campagne d’un horizon moins sombre, faisant d'elle une coupe suave dans une région altérée. Que de fois, assis sur une pierre des murs éboulés, n’avons-nous pas contemplé la beauté de ce spectacle, rêvant à l’histoire de la laure et sentant peu à peu notre cœur envahi par cette tristesse qui étreint l'homme à la vue de toutes les ruines! LA

Si le site était ravissant, le dénuement d'Euthyme et de son ami étaient absolus. Le cœur d’Aspebet, le cheikh des Bédouins, fut ému de compassion et, par ses ordres, une citerne profonde à deux bouches fut aussitôt creusée, pendant que des maçons construisaient trois cellules, une dépense et un petit oratoire. Les trois cellules furent bientôt occupées et, dès qu'Euthyme consentit à recevoir des disciples, leur affluence s’accrut chaque jour. Parmi eux on distinguait Domitien, son confident intime et le compagnon de ses courses durant cinquante ans, qui le suivit sept jours après dans la tombe, laissant une mémoire à jamais bénie; Cosmas, qui devint ensuite gardien de la vraie croix, remplaça Olympios sur le siège métropolitain de Scy-

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thopolis et mourut après trente années d'un fructueux épis- copat; Chrysippe, son frère et son successeur comme gardien de la vraie croix, lequel emporta en mourant la réputation d’un brillant écrivain ; Gabriel, autre frère de Cosmas, enfant prédestiné qu’on mitun jour à la tête du monastère et de Ja basilique Saint-Étienne construits par l’impératrice Eudocie οἱ qui devait, lui aussi, être inscrit au catalogue des saints (1). On y voyait encore Domnos, neveu du patriarche Jean d'An- tioche et son futur successeur, qui se fit arracher la condam- nation de saint Flavien au brigandage d'Éphèse et revint, une fois déposé de sa dignité patriarcale, terminer ses jours auprès de son maître Euthyme, dans la cellule qu'il n'aurait jamais quitter. Près de lui s’exerçaient Jean, moine de Raïthou sur le golfe élanitique et troisième évêque de Paremboles ; trois frères, originaires de Mélitène comme le fondateur, à savoir : Étienne, fait depuis évêque de Jamnia; André, devenu hisoumène du couvent de Bassa, l'amie de l’impératrice; et Gaïanos, futur évêque de Madaba dans la province d'Arabie. Faut-il mentionner encore le prêtre Anatole, et Thalassios et Cyrion, prêtre à Scythopolis de l'oratoire desaint Basile martyr, et tant d’autres, qui furent la gloire de la laure ou de l'Église de Jérusalem, mais dont les noms ne sont inscrits qu'au livre de vie?

La bourse d’Aspebet était à la disposition d'Euthyme pour construire les cellules des religieux, dont le nombre ne dé- passa jamais cinquante. Un fait postérieur de quelques années, raconté par l’hagiographe, permet de supposer l'aspect que présentait déjà la laure, L'impératrice Eudocie, la femme de Théodose IT, avait élevé en Palestine un grand nombre d’'édi- fices pieux, de monastères et d'hospices pour les vieillards et les orphelins. Parmi ces églises, s’en trouvait une dédiée à l'apôtre saint Pierre, située dans le désert de Juda, en face de la laure Saint-Euthyme, à vingt stades (3.700 mètres) vers l'ouest. Près de cette église, Eudocie avait fait creuser une large et profonde citerne, qui devait sans doute, en cas de sécheresse, suffire aux besoins du monastère attenant à l’église et peut-être même aux besoins de la contrée. Or, un jour que l'impératrice

(1) La fête de saint Gabriel se célèbre le 26 janvier.

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était venue visiter sa fondation, elle aperçut de ce lieu qui dominait la plaine la laure d'Euthyme s'’étaler à ses pieds. Elle ne put contenir son admiration devant la belle ordonnance qui régnait parmi les cellules des anachorètes et, en voyant comment les cellules des frères étaient séparées les unes des autres, elle méditait sur ces paroles de l'Écriture :

Qu'elles sont belles, tes demeures, Jacob! Tes tentes, à Israël !

Ce simple détail, jeté par mégarde dans un récit, nous mon- tre que les cellules étaient des constructions dispersées dans la solitude et disposées probablement autour d'une église centrale. L'église n'était que la grotte primitive d'Euthyme, convenablement ornée par l’évêque de Paremboles et dont Ju- vénal vint célébrer la dédicace solennelle, au mois de mai 429. L'évêque de Jérusalem était accompagné pendant cette visite des deux gloires de son Église : le chorévêque Passarion et le prêtre Hésychius (1). Celui-ci n’est autre que le célèbre prédi- cateur et panégyriste, dont les commentaires sur l'Écriture Sainte, malheureusement inédits pour Ja plupart, rivalisaient d'éclat et de profondeur avec ceux de son contemporain, saint Jérôme. Quant à Passarion, « le grand ami des pauvres et des étrangers, comme disent les sources monophysites, il avait bâti hors de la porte orientale de Jérusalem un hospice pour les pauvres et, à l’intérieur des murs de la sainte Sion, un grand et beau monastère ». Les dignités étaient venues depuis l’arracher à sa cellule et le distraire de ses occupations favo- rites, sans faire taire au fond de son cœur ses préférences pour la vie contemplative. Il mourut moins de sept mois après la visite qu’il fit à la laure d'Euthyme, le 25 novembre, au dire des monophysites, qui lui ont voué un grand culte en le regardant comme « le nourrisseur des pauvres et l’'éducateur des orphelins ». Si les hérétiques ont accaparé la mémoire de cet homme de bien, ce n’est pas à dire qu'il ait jamais trempé dans leurs erreurs, car saint Euthyme n'aurait point professé une admiration aussi vive pour une personne dont la foi était suspecte, füt-elle un vieillard blanchi dans les bonnes œuvres

(1) Saint Hésvchius est inscrit dans les livres liturgiques, à la date du 98 mars.

SAINT EUTHYME LE GRAND. 187

et auréolé de vertus comme Passarion. Mais le monastère de Passarion était le premier du diocèse de Jérusalem, son archimandrite avait la juridiction suprême sur tous les moines des laures et sur les anachorètes et, à ce titre, il y avait profit pour les monophysites à le revendiquer pour un des leurs. De plus, Elpidios, qui remplaça Passarion dans la charge d’archi- mandrite, se montra assez longtemps hostile à la foi de Chal- cédoine et, depuis ce moment, son monastère ne jouit pas d'une très bonne réputation. Tous ces motifs justifient la ré- serve des catholiques, en même temps qu'ils expliquent les éloges des monophysites (1). |

Peu après la consécration de l’église par Juvénal, un jour que la laure se trouvait dans une pénurie extrême de vivres, quatre cents Arméniens, qui s'étaient détournés de la route en descendant à Jéricho, s'en vinrent frapper à la porte hospi- talière d'Euthyme. Celui-ci pria Domitien de leur servir à manger ; mais le pauvre économe, au lieu d'obéir promptement, se mit à lui représenter la pauvreté de la maison, l’assurant qu'il n'y avait même pas assez de pain à donner aux frères ce jour-là. Euthyme, s'appuyant sur la puissance de celui qui nourrit miraculeusement la veuve de Sarepta, ordonna alors à son disciple de se rendre à la dépense : « Vous y verrez, lui dit-il, ce que sont les pensées des hommes et ce que la bonté de Dieu peut leur fournir contre toute attente. » Domi- tien obéit et trouva la dépense si remplie de vivres qu'il n'en pouvait ouvrir la porte. Il appela d’autres frères et, avec leur aide, ayant enlevé la porte, il vit une si grande quantité de pain, de vin et d'huile que, frappé de la grandeur de ce miracle, il alla aussitôt se jeter aux genoux d'Euthyme et lui demander pardon. Ce saint le releva avec bonté et lui dit : « Mon fils, celui qui sème avec abondance moissonnera aussi avec abondance. Lorsqu'on exerce la charité envers les hôtes, on recueille sans y penser de grandes provisions et l'on ne

: (1) Dans plusieurs livres liturgiques grecs, on trouve un saint « Passarion thaumaturge », qui est fêté le 27 ou le 29 novembre. Comme cette date se rap- proche beaucoup de celle des monophysites (25 nov.), on voulu identifier ce Passarion avec le nôtre; mais je crois que les ménées et les synaxaires grecs ont confondu Passarion avec Pityroun, moine égyptien, dont le culte est attesté à ces deux dates.

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donne jamais autant que l'on recoit. C'est, mes frères, ajouta- t-il en se tournant vers les autres religieux présents, ce que vous devez observer fidèlement, si vous voulez n'être pas in- grats envers Dieu et obtenir de sa libéralité qu'il vous ac- corde les choses nécessaires. »

Ce prodige frappa tellement les esprits qu'on le mit au compte d'autres saints, mais en le revêtant d’une couleur légendaire que ne comporte pas le récit de Cyrille de Scythopolis. Je n’en citerai qu'un exemple, qui obtenu une fortune considérable dans la littérature hagiographique. Un jour que saint Théo- dose le Cénobiarque, ami de saint Sabas, revenait d’un pèleri- nage à la grotte de Bethléem, il s'arrêta au monastère de l'abbé Marcien, situé dans les environs. La dépense était vide, la bou- jangerie pareillement, et l’abbé n'eut que des lentilles à offrir à son serviteur, sans une miette de pain. Théodose avait prévu l’indigence de son ami et s'était muni de pain et de quelques provisions. Tout en prenant son maigre repas, 1] aperçut dans la barbe de Marcien un grain de blé, qu'il y avait peut-être jeté malicieusement. Il le retira, le présenta à son hôte avec un fin sourire et ajouta spirituellement : « Pourquoi vous plaindre de n'avoir pas de blé, alors qu'on en découvre jusque dans votre barbe? » Il va sans dire que le grain de blé fut gardé par l'abbé Marcien et que, rapporté au grenier le jour même, il augmenta considérablement et remplit si bien la salle qu'on ne pouvait plus ouvrir la porte (1). 1

Saint Euthyme a donc fondé quatre monastères, deux à Marda et au bourg d’Aristobulias, sur lesquels son action parait avoir été assez restreinte, et deux autres auxquels son nom est plus intimement attaché et qui dépendirent de lui jusqu’à sa mort. Son influence monastique ne s'arrêta pas et il contribua, au moins d’une manière indirecte, à l'établissement d’autres mai- sons religieuses. On se rappelle peut-être que les deux pre- mières recrues d'Euthyme dans la retraite s’éleva ensuite le couvent de saint Théoctiste, furent deux frères anachorètes, sortis comme lui de la laure de Pharan : Marin et Luc. Nous ne savons à peu près rien de l'existence de ces deux moines, sauf qu'ils fondèrent un monastère près du village de Métopa et

(1) Usener, Der heilige Theodosios, Leipzig, p. 78-74.

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_exercèrent à la vie religieuse le futur père des cénobites, saint Théodose. En rassemblant les maigres informations que l'ha- giographe leur consacrées dans ses biographies de saint Eu- thyme, de saint Sabas et de saint Théodose, on voit que Marin et Luc sont deux compagnons inséparables. A Pharan, à Saint- Théoctiste, à Métopa nous les retrouvons ensemble, Luc dé- signé toujours le second et paraissant n'être que le frère cadet. C’est Marin qui a construit le monastère dit de Photin, hameau ou propriété située aux environs de Métopa (1), et il a cédé en- suite la direction du couvent à son frère pour mener la vie érémitique.

Deux autres disciples de notre saint, Martyrios et Élie, pri- rent également place parmi les fondateurs de monastères, avant de s'asseoir l’un et l’autre sur la chaire patriarcale de Jérusa- lem. Voici à quelle occasion. Peu d'années après le concile de Chalcédoine, le patriarche hérétique d'Alexandrie, Timothée Elure, forçait par ses vexations les moines orthodoxes à cher- cher un asile en pays étranger. C’est ainsi qu’en 457, deux reli- gieux de Nitrie, le Cappadocien Martyrios et Élie l'Arabe, se présentaient à la laure de saint Euthyme. Celui-ci les admit sans tarder au nombre de ses enfants et leur donna à chacun une cellule, tout près de la sienne. Bientôt même, ils entrèrent si avant dans son intimité, qu’ils l'accompagnaient chaque année avec Gérasime, Domitien, Sabas et d’autres anachorètes dans sa retraite accoutumée aux déserts de Rouba et de Cotyla. |

Euthyme ne tarda pas à les laisser tous les deux maîtres de leur destinée; 115 profitèrent de cette liberté pour continuer leur existence pénitente, l’un à Jéricho, l’autre dans une grotte assez rapprochée de la laure de saint Euthyme. La grotte que Marty-

(1) On place le couvent de Métopa aux misérables grottes d’'Oum-Touba, à gauche de la route qui va de Jérusalem à Bethléem, dans une vallée profonde, sous les pentes qui descendent de Sour-Baher. L’homophonie, si précieuse dans ces questions de topographie, est assez satisfaisante : Oum-Touba et Métopa ne jurent pas trop de se voir associés. Une autre raison, plausible également, c’est qu’on voit encore près de des troncons de murs aux pierres blanches en bel appareil et que l’un d’eux porte le nom significatif de Khirbet-Biar-Louka, rui- nes des puits de Luc. Une grotte présente toutes les apparences d’une chapelle mortuaire. Cet oratoire, de forme carrée, était soutenu par quatre colonnes, qui sont en partie brisées et qui ont entrainé la chute des voûtes.

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rios avait choisie pour son nouveau genre de vie, se trouvait à l’ouest de cette laure, à quinze stades environ (1). Comme les vocations monastiques affluaient alors en Palestine, le rendez- vous continue] de nombreux pèlerins, Martyrios se vit rapide- ment entouré de tout un essaim de disciples; il dut condes- cendre à leurs vœux et bâtir peu à peu, dans le voisinage de la grotte, un célèbre monastère, dont il fut le premier supérieur. Il ne resta pas longtemps à exercer cette charge, car la mort de son protecteur, 20 janvier 473, le laissa inconsolable, lui et son confrère Élie. Le patriarche Anastase leur offrit ses condoléances par l'intermédiaire du diacre Fidus et les ramena dans son cor- tège à Jérusalem, après avoir présidé à la translation solennelle du corps du saint, 7 mai 473. Puis, persuadé que rien ne dissipe la tristesse comme les consolations spirituelles, il les ordonna prêtres en les inscrivant parmi les membres de son clergé. A Ia mort d'Anastase, janvier 478, le clergé et le peuple de Jérusalem conviaient Martyrios à recueillir sa succession.

Quant à Élie l'Arabe, il se construisit devant la ville de Jé- richo une petite cellule, qui fut le point de départ de deux mo- nastères. Les couvents s’établissaient tous à cette époque d’une manière uniforme. Un ascète éminent en sainteté groupait au- tour de lui des disciples, qui se procuraient des cellules conti- œuës à la sienne et observaient son genre de vie; insensiblement, les cellules agrandies et augmentées revêtaient l'aspect d'une laure ou d’un monastère, suivant les préférences du fondateur. On a écrit d'Élie que, sur le trône pontifical, comme dans sa cellule de reclus ou dans sa prison, il avait toujours observé avec une rigueur scrupuleuse les règles monastiques. Il ne buvait jamais de vin et demeurait jusqu’à l'heure de none dans la so- litude, le silence, le jeûne et la prière. Son patriarcat, qui fut assez long et assez agité, ne manqua pas d'un certain éclat; il sut s'opposer à l’immixtion sacrilège de l'empereur Anastase

(1) Les ruines du monastère de Martyrios se voient à El-Mourassas, à deux heures environ de Jérusalem. On y trouve une belle église à trois nefs, avec ses trois absides, son atrium et son pavé en mosaïques. Près de là, se remarquent des citernes fort considérables avec un certain nombre de canaux destinés à y déverser les eaux de pluie. Durant leur courte occupation de la Palestine, les Croisés utilisèrent les diverses constructions de l’ancien monastère ; une grosse tour entre autres accuse nettement une origine franque, bien que la plupart des matériaux soient empruntés.

SAINT EUTHYME LE GRAND. 191

dans le domaine de la foi et, quand l'heure du danger sonna, il préféra se laisser déposer et bannir plutôt que de complaire aux exigences de la cour. De son lointain exil d'Ela, il gouvernait toujours l'Église de Palestine et mourut dans une forteresse avec l’auréole du martyre (1).

J'arrête ici cette nomenclature de fondations ou de restaura- tions de maisons religieuses, qui fatiguerait le lecteur à la lon- œue, bien que l’activité d'Euthyme ne se soit pas bornée à celles que je viens de décrire. S'il ne contribua pas directement à l'é- rection des églises dont l'impératrice Eudocie couvrit le sol de la Terre Sainte, s’il était même éloigné de ses conseils au mo- ment elle construisit la plupart de ses monastères, du moins il s'entremit auprès d'elle, lors de son retour à l'Église catho- lique, et c'est à lui qu’elle demanda des religieux pour servir d'aumôniers à ses couvents ou à ses églises. Tombé de si haut, l'exemple de l’impératrice ne put trouver que de nombreux imitateurs.

S. VAILHÉ. (A suivre.)

(1) La fête de saint Élie se célèbre le 4 juillet.

LES COUVENTS DES CHRÉTIENS

TRADUCTION DE L'ARABE D’AL-MAKRIZI

(Suite) (1)

LES MONASTÈRES D'ADROUNKA.

La région d'Adrounka (2) forme l'un des districts chrétiens du Saïd. Ses habitants sont très instruits de leur religion et très versés dans la connaissance de la langue copte. Ils possé- daient un grand nombre de couvents en dehors de la ville, du côté du Sud, ainsi que dans la montagne. La plupart ont été détruits. Il reste encore les suivants :

Le monastère de Saint-Georges est une belle et solide Cons- truction. 11 n’y plus un seul moine. On y célèbre une fête à une époque déterminée. |

Le monastère d’Ard al-Hadjir, appelé aussi monastère de Michel ou de Qarfouna est sous le vocable de la Vierge Marie. On l’appelait aussi couvent d'Arafouna ou d’Aghrafouna γράφων), ce qui veut dire le Scribe, parce que c’est à cet endroit que se trouvaient autrefois les copistes chrétiens. Il est situé au sommet de la montagne. Il possède plusieurs grottes, dont quelques-unes sont assez profondes pour qu'on puisse y mar- cher pendant deux jours.

Le monastère d’Abou Baghàm est situé sur la digue au- dessous du couvent de Qarfouna. Abou Baghâm était militaire

(1) Voy. 1908, p. 33. (2 2) Adrounka ou Doronka est une localité située à quatre kilomètres au sud de Siout, près du canal de Sohag.

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LES COUVENTS DES CHRÉTIENS. 193

sous Dioclétien. Il se fit chrétien. On le tortura pour lui faire abandonner sa religion, puis il fut mis à mort le vingt-huitième jour de Qanoun al-Awal ou le deuxième jour de Qoïak.

Le monastère de Saint-Sévère sur la digue d’Adrounka est dédié à la Vierge Marie. Sèvère fut l’un des moines les plus remarquables et devint patriarche. Il se produisit un prodige au moment de sa mort: Il avait averti ses compagnons, au cours d'un voyage dans fa Haute-Égypte, que la montagne se fendrait au moment de sa mort, et qu'un gros morceau s'en détacherait et tomberait sur l'église sans l’endommager. Or un certain jour, une grande partie de la montagne tomba comme il l'avait dit. Les moines de ce couvent connurent ainsi que Sévère était mort. Ils notèrent ce fait et se rendirent compte que l'instant il se produisit coïncidait avec celui de sa mort. Ils donnèrent alors son nom au couvent.

Le monastère de Saint-Théodore est situé au-dessous du couvent de Saint-Sévère. Il y deux Théodore, qui tous les deux étaient militaires sous Dioclétien. L'un d'eux est appelé le tueur du dragon, et l’autre a pour surnom Alasfahlär. 115 furent mis à mort comme d’autres martyrs.

Le monastère de Mansi-Ak appelé encore de Manor de Bam'-Sak ou d'Isäk ce qui veut dire Isaac, était sous le vocable de la Vierge Marihäm, c’est-à-dire de Mar Mariam (sainte Marie). On lui donna ensuite le nom de Mansàk qui devint célèbre parmi eux (les chrétiens). Il y un puits situé au-dessous de ce couvent, sur la chaussée; il fournit de l'eau potable aux moines. En temps d'inondation, ils boivent de l'eau du Nil.

Le monastère des Apôtres se trouve au-dessous du cou- vent de Mansäk. On l'appelle encore le monastère des tamaris. Il est compris dans le district de Bou-Tig, tandis que celui de Mansàk est sur le territoire de Rifa (1); ceux de Sévère et de Qarfouna dépendent de Siout et celui de Saint-Georges dépend d’Adrounka. Le couvent des tamaris était dans un lieu désert, quand il se bâtit à côté un petit village appelé Manchat ach- Cheikh parce qu'il fut fondé par le Cheikh Abou-Bekr ach-

(1) L'édition de Boulak donne i5,, ce qui est évidemment une faute d’im- pression. ORIENT CHRÉTIENS, : 13

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Châdali qui y établit un vaste jardin. Dans ce jardin, 1] y avait un grand puits dans lequel on trouva un trésor. Quelqu'un qui l'a vu, m'a dit qu'il contenait des-pièces d'or carrées, qui avaient une croix sur l’une de leurs faces. Elles pesaient cha- cune un mithkal et demi.

Les couvents d'Adrounka, énumérés ci-dessus, sont rappro- chés les uns des autres. Il y a entre eux de nombreuses grottes, renfermant des tablettes sur lesquelles sont gravées des ins- criptions en caractères antiques, semblables à celles des anciens temples. Elles sont ornées de figures coloriées et se rapportent à diverses sciences. Le couvent des Sept Montagnes, le couvent d'AI-Moutil et le couvent d’An-Nassàkh, sont situés en dehors de Siout, au milieu des cimetières. On rapporte qu'il y avait sur les deux digues trois cent soixante couvents et que ceux qui allaient d'Al-Bedrachaïn à Asfoun (1) étaient constamment à l'ombre des jardins. Mais tout cela été détruit et la popu- lation a disparu.

Le monastère de Mouchah. Mouchah est situé non loin de Siout, du côté du sud. Ce couvent est dédié à l’apôtre Thomas l'Indien. Il se trouve au milieu des jardins près de Rifa. Pen- dant l’inondation, on ne peut y accéder qu’en barque. On y célèbre plusieurs fêtes. Les chrétiens de ces monastères con- naissent surtout le copte saïdique, qui est le principal dialecte copte. Après lui, vient le dialecte baharique. Les femmes et les enfants des chrétiens de la Haute-Égypte ne parlent guère que le copte saïdique. Ces chrétiens savent en outre très bien la langue grecque.

Le monastère d’Abou-Makroufa (Saint-Macrobe). Abou Makroufa est le nom de la localité se trouve ce monastère. Il est creusé dans la partie inférieure de la montagne, et il con- tient plusieurs grottes. Il est dédié à la Vierge Marie. Parmi les chrétiens de Makroufa, il y beaucoup de pâtres et de ber- gers qui sont pour la plupart des gens grossiers. Il y en a très peu qui sachent lire et écrire. Le monastère manque d'eau.

Le monastère de Bou-Bagham est situé près de Timah. Les habitants de cette localité sont chrétiens. C’étaient autre- fois des gens instruits.

(1) Asfoun est situé près d'Esneh dans la Haute- Égypte, à 688 kilomètres de Bedrachaïn.

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LES COUVENTS DES CHRÉTIENS. 195

Le monastère de Bou-Chanoudah (Chenoudi). On l'appelle encore le monastère Blanc. Il se trouve à l’ouest du district de Souhàdj. Il était construit en pierres, mais il a été détruit et il n'en reste plus que l'Église. On rapporte que sa superficie était de quatre feddans (1) trois quarts. Ce qui en reste, n’a plus qu'un feddan de surface. C’est un monastère très ancien.

Le monastère Rouge, appelé encore le couvent d’Abou- Bichàï, se trouve à trois heures de distance au nord du couvent Blanc. C'est un petit monastère construit en briques rouges. Abou Bichài était un moine contemporain de Chanoudah, qui était son disciple. Il avait sous sa direction trois mille moines. Il avait un autre couvent dans le désert de Chaïhat.

Le monastère d’Abou-Misàs ou d’Abou-Misis, c'est-à-dire Mousa (Moïse). C'est un vaste monastère, situé au-dessous d'Al-Balianà. Cet Abou Misis était un moine originaire d’Al- Balianà. Il jouit d'une grande réputation dans le pays, les habitants le regardent comme un saint et racontent à son sujet beaucoup d'histoires peu sûres.

Après ce monastère, il ne reste plus sur la digue d'Esnà et de Nakàda, que des couvents peu habités. Il y avait aussi à Asfoun un vaste couvent. Le pays d’Asfoun était le plus fertile de l'Égypte et le plus abondant en fruits de toutes sortes, et les

- moines de ce couvent étaient habiles et très versés dans les

sciences. Mais cette ville fut détruite en même temps que son couvent. C'est le plus éloigné des couvents de Saïd. Ils sont tous délabrés et oubliés, eux qui étaient si populeux et abri- taient d'innombrables moines, qui avaient de si vastes posses- sions et recevaient des dons si riches.

La Basse-Égypte comptait aussi un grand nombre de monas- tères qui ont été détruits. Quelques-uns cependant subsistent,

(1) Le feddan vaut un peu plus de 4.200 mètres carrés. La superficie du cou- vent était donc de deux hectares. M. Evetts traduit la même phrase de la ma- nière suivante : « It is said to have possessed land to the extent of 4 3/4 feddans, of which only one feddan is left, » Le texte de l'édition de Boulak porte :

A

85 ai 3 Lroiss x) | LI ωἱ ἠὼς US$ = Le Κρ}. Ce texte ne me semble pas susceptible d’une autre traduction que celle que je donne. Les mesures qu’il donne sont d’ailleurs inexactes, puisque le couvent Blanc, très bien conservé, recouvre une superficie de 12.000 mètres carrés, soit près de trois feddans. C’est peut-être cette inexactitude qui a induit M. Evetts à

donner une autre traduction.

196 REVUE DE L'ORIENT CHRÉTIEN.

Il y avait au Meks, au nord du Caire, plusieurs églises qui furent détruites par Al-Hakim bi-Amr-Illah Abou-‘Ali-Man- sour, le dix-neuvième jour de Di-al-Hadja, l'an 399 (1008). Il déclara propriété commune les objets qui s’y trouvaient, et il en enleva de très grandes richesses. Il avait déjà ordonné, au mois de Rabia’ al-Awal de la même année, de détruire les églises de Rächida à l’est de Masr. Il édifia à leur place la mos- quée, connue sous le nom de Ràchida. L'an 394 (1003), il détruisit deux églises au même lieu, et il obligea les chrétiens à porter des vêtements noirs et une ceinture. Il s'empara des biens des églises et des monastères, et les aflecta au divan de l'Etat. Il brûla un très grand nombre de croix et interdit aux chrétiens de décorer ostensiblement les églises à la fête des Rameaux. Il les opprima durement et en fit flageller un grand nombre. Il y avait dans l’ile de Rôda une église située près du nilomètre. Elle fut détruite par le sultan Al-Malek as-Saleh Nedjm ed-Din Ayoub en l’an 638 (1241). Il y avait encore sur le territoire d’Abou ’n-Noumrous, dans le district de Gizeh, une église dont la destruction fut suggérée par un homme d’Az-Zià- liat, parce qu'il avait entendu le son des cloches de cette église, au moment l’on annonçait la nuit du vendredi. Il ne put at- teindre son but sous le règne d’Al-Achraf Chaabàn ben-Hous- sein, à cause de la grande influence que possédaient les coptes dans le gouvernement. Mais il s’entendit avec le grand émir Barkouk, au moment celui-ei avait l'administration de l'É- tat, et il obtint la démolition de cette église. Elle fut faite par les soins du Cadi Djamal ed-Din Mahmoud al-Adjami, vérificateur des poids et mesures pour la ville du Caire, le dix-huitième jour de Ramadhan de l'an 780 (1379). Elle fut convertie en mos- quée.

Le monastère d’AI-Khandak (du Fossé). Il est situé près du Caire du côté du nord. Il a été construit par le caïd Djaouhar pour remplacer un monastère qu'il avait détruit au Caire. Ce monastère se trouvait près de la mosquée AI-Akmar, à l'endroit il y maintenant un puits connu sous le nom de puits d’AI- Azama, et qui s'appelait alors puits d'Al- Izàm, à cause des ossements qu'on enleva de ce couvent pour les transporter au . monastère d'Al-Khandak. Le couvent d’Al-Khandak fut détruit lui-même le quatorzième jour de Chaouâl de l'an 678 (1279)

LES COUVENTS DES CHRÉTIENS. 197

sous le règne d'Al-Mansour Kalaoun. Il fut ensuite restauré tel qu'il est maintenant et on y construisit deux églises dont nous parlons dans le chapitre qui concerne les églises.

Le monastère de Cyriacus (appelé aussi monastère de Saint- Hor).. On y célèbre une fête qui attire beaucoup de monde. I] s’y produisait autrefois un prodige dont parle Ach-Chabouchti : Quand quelqu'un avait les écrouelles, le supérieur de ce cou- vent le prenait avec lui et le faisait coucher sur le côté. Puis il amenait un porc qui léchait l'endroit malade et dévorait les tumeurs, sans toucher aux parties saines. Quand la partie malade était nettoyée, le supérieur y répandait de la cendre d'un porc à qui on avait fait faire la même chose auparavant, puis il l'oignait avec de l'huile de la lampe de l'église. L'in- firmité était guérie de cette manière. Ensuite on prenait le porc qui avait mangé les écrouelles, on le tuait et on le brülait. Puis on préparait ses cendres pour le même usage. Ce couvent était visité par un grand nombre de gens qui venaient chercher la guérison de cette infirmité, et il était habité par de nombreux chrétiens. ;

Le monastère d’Atrib (appelé aussi monastère de Sainte- Marie). Sa fête a lieu le vingt et unième jour de Bounah. Ach-Chabouchti rapporte que, ce jour-là, une colombe blanche pénètre dans le sanctuaire sans que l’on sache d’où elle vient, et on ne la revoit qu'à la fête suivante. Ce monastère est bien déchu de son ancienne prospérité, et il n'y plus maintenant que trois moines qui se réunissent pour sa fête. Il est situé sur le bord du Nil près de Benha al-Assal.

Le monastère d’Al-Mightas (la Baignoire) est situé près des salines qui avoisinent le lac de Bourlos. Les chrétiens y viennent en pèlerinage de la Haute et de la Basse-Égypte. Cela équivaut pour eux au pèlerinage à l'Église de la Résurrection. Ce jour-là, ils célèbrent au mois de Bachans une fête solennelle appelée fête de l’Apparition. Ils prétendent en effet que la Vierge Marie leur apparaît en ce jour. Mais c’est une prétention mensongère et erronée. Il n'y a pas autour de ce couvent d'autre endroit habité qu'une petite cabane du côté du sud-est. Près de se trouve la saline qui fournit le sel de Rosette. Ce couvent été détruit, au mois de Ramadhan de l’an 841 (1437), dans une émeute de fakirs qui s'étaient concertés dans ce but.

198 REVUE DE L'ORIENT CHRÉTIEN.

Le monastère d’Al-‘Askar (des Soldats) dans la région des salines, à une journée de distance du couvent d'Al-Mightas, est dédié aux Apôtres. Près de se trouve une saline qui produit du sel de Rosette. Il n’est plus habité que par un seul moine.

Le monastère de Djamiàna est dédié à saint Georges. Il est à trois heures de distance du couvent d’Al-‘Askar. Sa fête se célèbre immédiatement après celle du couvent d'Al-Mightas. Il est maintenant inhabité.

Le monastère d’Al-Maïmana près du couvent d’Al-'Askar. Il était autrefois florissant et il n'y avait pas dans la Basse- Égypte de couvent qui comptàt un aussi grand nombre de moines. Mais 11 fut abandonné et détruit. Plus tard, les Abys- sins vinrent s'y établir et le relevèrent. Il n’y pas dans la région des salines d’autres couvents que les quatre mentionnés 10].

Quant au Ouadi-Habib ou Ouadi an-Natroun, appelé encore désert de Chihat ou d'AT-Askit, et Mizän al-Kouloub, il comptait autrefois cent monastères. Il n'en reste plus que sept échelonnés à la lisière du désert qui va de la province d’Al-Bouhaïra au Fayoum. C’est une région de plaines sablonneuses alternant avec des marais salins, de déserts arides entrecoupés de roches dangereuses. Des citernes fournissaient l’eau potable et les chrétiens apportaient des ex-voto et des offrandes. Ils sont maintenant en ruines ces couvents d'où 70.000 moines, au rapport des historiens chrétiens, sortirent et vinrent, ayant tous la crosse à la main, au-devant d''Amrou ibn al-'As pour le complimenter. Ils reçurent de lui une lettre qu'ils conservent jusqu'à présent. Parmi ces couvents, mentionnons :

Le monastère de Saint-Macaire le Grand. Ce monastère est illustre chez les chrétiens. Tout près de se trouvent les ruines de plusieurs couvents. C'était autrefois un centre de vie monastique, et les patriarches n'étaient reconnus que lorsqu'on les avait intronisés dans ce monastère, après une première installation dans la chaire d'Alexandrie. On rapporte que 1.500 moines y résidaient. Il n’est plus habité maintenant que par un petit nombre. Il y a trois saints Macaire. Le plus grand d’entre eux était le supérieur de ce couvent. Il y eut aussi saint Macaire d'Alexandrie et saint Macaire évêque. Leurs ossements sont conservés dans trois chàsses de bois et les chrétiens vien-

LES COUVENTS DÉS CHRÉTIENS. 199

nent les visiter dans ce monastère. On y conserve également la lettre qu'‘'Amrou ibn el-‘As écrivit aux moines de l'Ouadi Habib, au sujet du tribut imposé aux districts du nord, selon ce que m'a rapporté un témoin oculaire.

Saint Macaire le Grand, le même que Macarius, reçut la re- 616 monastique des mains d'Antoine. Il est le premier chrétien qui revêtit le capuchon et l’askim, c’est-à-dire une ceinture de cuir sur laquelle est figurée une croix, et que les moines sont les seuls à porter. Macaire alla trouver Antoine dans les mon- tagnes orientales, au monastère d’Al-Araba, et il demeura près de lui pendant quelque temps. Ensuite Antoine le revêtit de l'habit monastique et lui ordonna d'aller se fixer au Ouadi al- Natroun. Il obéit, et un grand nombre de moines se joignirent à lui. Il leur donna l'exemple de nombreuses vertus. Ainsi il restait les quarante jours de carême sans rien manger ni rien boire tout en veillant pendant la nuit. Il préparait des feuilles de palmier et en faisait sa nourriture. Jamais 11 ne mangeait de pain frais, mais il se contentait de biscuits qu’il amollis- sait dans une infusion de feuilles de palmier. Tel était son régime et celui des moines de son couvent et ils ne prenaient rien de plus pendant toute leur vie jusqu’au jour de leur mort.

Saint Macaire d'Alexandrie vint d'Alexandrie trouver Macaire dont nous venons de parler et se fit moine sous sa direction. IL y eut ensuite an troisième saint Macaire qui devint évêque.

Le monastère d’Abou-Bakhens al-Kassir (saint Jean le Nain). On dit qu'il fut construit sous le règne de Constantin fils d'Hé- lène. Saint Jean le Naïn possédait d'éminentes vertus et il fut l’un des moines les plus illustres. Ce couvent était autrefois prospère et 1l était la résidence d’une nombreuse communauté. Il n'y plus maintenant que trois moines.

Le monastère d'Élie (salut à lui). Ce couvent appartient aux Abyssins. Il est en ruines comme celui de Saint-Jean, les vers rongent leurs boiseries, et ils tombent de vétusté. Plus tard les Abyssins sont venus s'établir

Au monastère de la Vierge de saint Jean le Nain, qui est un petit monastère près du couvent de Saint-Jean le Nain.

Près de ces couvents se trouve le monastère de saint Anoub qui est également en ruines. Ce saint Anoub était de Sama- noud. Il fut mis à mort sous la domination musulmane, et son

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corps est conservé dans une maison particulière à Samanoud.

Le monastère des Arméniens, situé près des couvents ci-des- sus énumérés, est aussi en ruines. Près de se trouve

Le monastère de Saint-Bichaï qui est en grande vénération chez les chrétiens parce que saint Bichaï était un moine du même degré que Macaire et Jean le Nain. Ce couvent est très vaste.

En face du couvent de Saint-Bichaï se trouve un monastère qui appartenait autrefois aux Jacobites. Il y trois cents ans il vint en la possession de moines syriens à qui il appartient en- core. Le lieu se trouvent ces monastères s'appelle Birkat al-Adiara (le Lac des Monastères).

Le monastère de la Vierge de Barmous, dédié à la Vierge Marie, renferme quelques moines. En face se trouve

Le monastère de Mousa (Moïse) appelé aussi Abou-Mousa le Noir, ou encore Bar-Mous (saint Moïse). Bar-Mous est le nom du couvent. On raconte à son sujet l'histoire que voici : Maxi- mus et Donnadius (Domitius) étaient fils de l'empereur romain, et ils avaient un précepteur nommé Arsenius. Celui-ci quitta le pays des Romains et vint en Égypte. Il se retira dans le désert de Chihat, embrassa la vie monastique et habita en ce lieu jusqu'à sa mort. C'était un homme d'une vertu éminente. Les deux fils de l’empereur vinrent le trouver pendant qu'il vivait encore et se firent moines sous sa direction. Après leur mort, leur père envoya une mission et fit construire en leur honneur l'église de Bar-Mous. Saint Moïse le Noir fut d'abord un brigand audacieux et il se rendit coupable du meurtre de cent personnes. Puis il se convertit à la religion chrétienne et se fit moine. Il est l’auteur de plusieurs livres. Il était l’un de ceux qui restaient tout le carême sans manger. Il était de race berbère.

Le monastère d’Az-Zadjàdj (du Verre) est situé aux portes d'Alexandrie. On l’appelle encore l'Häbaton (Enaton?). Il est dédié à saint Georges le Grand. Il était autrefois imposé aux nouveaux patriarches de se rendre d’Al-Moällaka Masr) au couvent d'Az-Zadjàdj. Mais de nos jours cette coutume été abandonnée. Tous ces couvents appartiennent aux Jacobites.

Les femmes ont aussi des couvents qui leur sont réservés exclusivement. Tels sont :

LES COUVENTS DES CHRÉTIENS. 201

Le monastère des religieuses dans le quartier de Zaouïla au Caire. Il est habité par des vierges qui ont embrassé la vie monastique et par d’autres femmes chrétiennes.

Le monastère d’Al-Banat (des Filles) dans le quartier grec, au Caire. Il est habité par des femmes vouées à la vie reli- gieuse.

Le monastère d'Al-Moàllaka dans la ville de Masr. C'est le plus célèbre des couvents de femmes.

Le monastère de Sainte-Barbe, à Masr, se trouve près de l'é- olise de Sainte-Barbe et est habité par des vierges vouées à la vie religieuse. Sainte Barbe vivait du temps de Dioclétien. Il la fit mettre à la torture pour lui faire abandonner sa religion et adorer les idoles. Mais elle demeura ferme dans sa religion et supporta avec patience des tourments horribles. Elle était vierge et pas un homme ne l'avait touchée. L'empereur, déses- pérant de la fléchir, lui fit trancher la tête. Plusieurs autres femmes furent décapitées en même temps qu'elle.

Les chrétiens Melkites possèdent un ermitage appartenant à leur patriarche. Il se trouve près de l’église de Saint-Michel, non loin du pont d’Al-Afram, en dehors de Masr. Il est habité par une communauté de moines originaires du pays des Grecs.

Le monastère de Bakhens al-Kassir (saint Jean le Nain). On l'appelle communément le couvent d’AI-Kussaïr. La vraie pro- nonciation d’après eux (les Melkites) est Deir al-Kassir, selon la forme Chahid. Mais on interverti les voyelles et on pro- nonce Al-Kussayyer. Les Musulmans l'appellent le couvent d'Al-Kussaïr (de la Petite Forteresse). A l'origine il s'appelait, comme 16 l’ai expliqué Deir el-Kassir (le Couvent du Nain) par opposition à Taouil (Grand). On l'appelle aussi le couvent d'Hé- raclius et le couvent du Mulet. La description en a été donnée ci-dessus. C’est un des plus grands monastères chrétiens; mais il n'a plus maintenant qu'un moine pour le garder. Il appar- tient aux Melkites.

Le monastère d’At-Tour (du Sinaï). Ibn Sidah donne l'expli- cation suivante : Aé-Tour signifie ἰὼ montagne et il se dit spécialement du mont Sinaï situé en Syrie. En syriaque il se dit Toura et l'adjectif correspondant est Touri ou Tououäri (Tourien). Yakout dit à son tour : Il y a sept endroits qui portent le nom de Tour : le premier est Tour Zaïta, nom dé-

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rivé de zait (huile) ; c’est une montagne située près de Ràs-'Aïn.

Le second, appelé aussi Tour Zaït (le mont des Oliviers), désigne une montagne situé à Jérusalem, à l’est de Siloé. Le troisième Tour est une montagne qui domine la ville de Tibériade sur le Jourdain. Le quatrième Tour est un nom de lieu, commun à plusieurs localités situées au sud de l'Égypte entre Masretle mont Pharàn. Le cinquième est Tour Sinà. Les avis sont partagés sur sa situation : les uns donnent ce nom à une montagne près d’Aïla; les autres à une montagne de Syrie; 1l y un mont Sinà au Hedjaz et un autre dans la Saharia. Le sixième est Tour Abdin, situé au pays de Nisibin (Nisibe), au milieu des montagnes qui dominent cette ville, et qui sont la conti- nuation des monts de Djouda. Le septième est Tour Hàroun (la montagne d'Aaron), frère de Moïse (salut à eux). Al-Ouàhidi rapporte ce qui suit dans son commentaire : Al-Qalbi et d’au- tres auteurs affirment que la montagne dont parle le Très-Haut quand il dit : « Mais regardez vers la montagne », est une haute cime du pays de Madian appelée Zabir. Al-Qalbi rapporte que le nom de Tour vient de Yatour fils d’Ismael. As-Sahili dit qu'on en retranché le Fa si cette étymologie est vraie. Omar ibn Chiba dit à son tour : Je tiens d''Abd el-"Aziz qui lui-même le tenait d'Abou Maa‘char, puis de Saïd ibn Abou-Saïd, qui l'avait appris de son père et celui-ci d’Abou-Harira (que Dieu lui soit favorable), que, d’après l'envoyé de Dieu (Dieu lui soit

propice et lui donne le salut), il y avait, dans le Paradis, quatre

fleuves, quatre montagnes et quatre batailles. Les quatre fleuves sont le Fishàn, le Djihàn, le Nil et l'Euphrate; les quatre montagnes sont le Tour, le Liban, l'Ohod et l'Ouarkân. Il ne parle pas des quatre batailles. D’après Πα Δ al-Ahbâr, les Musulmans ont trois remparts : contre les Grecs, leur rem- part est Damas; contre ad-Dadjàl, le Jourdain, et contre Gog et Magog, c'est le Tour. Cha θὰ rapporte, d'après Artàt ibn- al-Mandhor, que Dieu le Très-Haut dit à ‘Issà, fils de Mariam (Jésus fils de Marie), salut à lui : « Voici que j'ai suscité des créatures sur lesquelles aucun autre que moi n’a pouvoir. C’est pourquoi va avec tes compagnons à la montagne d'At-Tour. » Et il y alla avec 12.000 disciples. Talk ibn Habib avait entendu dire à Zra‘a : « J'eus l'intention d'aller à At-Tour (le Sinaï) et j'allai trouver ‘Abd-Allah ibn ‘Omar (que Dieu leur soit pro-

LES COUVENTS DES CHRÉTIENS. 203

pice) pour lui en faire part. Il me répondit : Ne fais de péle- rinage qu'à trois mosquées : la mosquée de l'Envoyé de Dieu, la mosquée d’Al-FHaram et la mosquée AI-Aksà, mais renonce au Sinaï et n y va pas. » Le Cadi Abou-‘Abd-Allah Mohammed ibn Salàma al-Kadài s'exprime ainsi dans sa nomenclature des districts d'Égypte : Parmi les districts méridionaux on compte les localités du Hedjàz; ce sont les régions d’at-Tour et de Phà- ran, de Râia et de Kolzoum, Aïlat et ses environs, Madian et ses environs, Al-‘Aouïbid, Al-Hourà et la région environnante, et enfin la contrée de Bedà et de Cha'aïb.

Les savants et les historiens sont tous d'accord pour recon- naître que c’est sur cette montagne d'At-Tour, ou tout auprès, que Dieu, le Très-Haut, a parlé à son prophète Moïse (salut à lui). Elle possède jusqu’à présent un monastère qui est entre les mains des Melkites. Il est habité et renferme un grand jardin planté de dattiers et de vignes, ainsi que d’autres arbres frui- tiers. Ach-Chàbouchti dit que Tour Sinà est la montagne sur laquelle la lumière s'est manifestée à Moïse ibn ‘Amrän (salut à lui) au bruit du tonnerre. Le monastère se trouve au sommet de la montagne; il est bâti en pierre noire et l'épaisseur de sa muraille d'enceinte est de sept coudées. Il trois portes de fer et du côté de l’ouest se trouve une petite porte devant la- quelle il y une pierre que l’on relève à volonté. Quand un visiteur approche, on l'abaïsse et elle recouvre l'endroit de sorte qu'on ne reconnait pas le lieu de la porte. Il y a une source à l'intérieur du couvent et un autre à l'extérieur. Les chrétiens prétendent qu'il y a, dans ce monastère, un feu de même nature que celui qui est à Jérusalem. On y prend du feu chaque soir. C’est une petite flamme blanche, qui donne peu de chaleur et ne brûle pas. Elle devient plus forte quand on y allume une lampe.

Le monastère est habité par des moines et très visité. Il est de ceux qui ont été le plus souvent décrits. Ibn ‘Amir en parle en ces termes : |

« moine du couvent, d’où vient cet éclat et cette lumière?

Elle est produite par quelque chose qui se trouve dans ton monastère d'At-Tour.

Le soleil y est-il descendu abandonnant les signes du Zo- diaque ? j

204 REVUE DE L'ORIENT CHRÉTIEN.

Ou bien la lune est-elle partie, et s’est-elle cachée là? »

Il répondit : « Ce n'est ni le soleil ni la lune qui est des- cendue. .

Mais on y apporté aujourd'hui des amphores de vin. »

Les historiens chrétiens rapportent que ce monastère fut édifié par Justinien, empereur grec de Constantinople. Il fit élever au-dessus une forteresse qui porte, à l'étage supérieur, un grand nombre de cellules. Il y établit, pour garder les moines, des Arabes de la tribu des Bani-Sàleh. Ce fut sous le règne de cet empereur que fut tenu le cinquième des conciles chrétiens. Entre ce lieu et la ville de Colzoum, il y a deux itinéraires, l'un par terre et l’autre par mer. Tous les deux conduisent à Phàrân, ville des Amalécites. De au Sinaï, la distance est de deux jours. De Masr à Colzoum (Suez) il y a trois Jours de marche. Pour monter au Sinaï, il faut gravir 6.666 degrés. A mi-hauteur il y a une église dédiée à Élie le prophète. Au sommet se trouve une autre église sous le vocable de Moïse (salut à lui) avec des colonnes de marbre et des portes d’airain.

C’est le lieu Dieu, le Très-Haut, parla à Moïse et c'est de

que ce dernier prit la pierre des tables de la loi. Il n’y qu'un seul moine pour le service de l'église. Ils prétendent que per- sonne ne peut y passer la nuit, mais il y a au dehors un abri pour le gardien il peut passer la nuit. Il ne reste maintenant plus rien de ces deux églises.

Le couvent des Filles de Kasr ach-Chama'‘a à Masr. Il est dédié à saint Georges. Il y avait à cet endroit, avant la conquête musulmane, un nilomètre dont on voit encore des restes.

Ce sont tous les monastères que possèdent les chrétiens en Égypte, Jacobites ou Melkites, hommes ou femmes, au Said et dans le Delta. Leur nombre est de quatre-vingt-six. Les Jaco- bites en ont (1)... et les Melkites...

Angers. L. LEROY.

(1) Les chiffres ne sont pas indiqués dans l'édition de Boulak et la place qui leur est destinée est restée en blanc. D’après la traduction Evetts, les Jacobites en avaient 84 et les Melkites 4 On peut d’ailleurs vérifier ces chiffres d’après l’'énumération qui précède.

MÉLANGES

DEUX CATALOGUES DE LA BIBLIOTHÈQUE DU HIÉROMOINE IGNACE EN 1516 ET 1522 (NOTES δῦ ms. coIsLiN 292).

Le ms. Coislin 292, sur papier, du xiv° siècle, contient une bonne partie des œuvres de Syméon de Saint-Mamas, le nou- veau théologien. Il porte en tête deux feuillets de garde en parchemin (A et B) et quelques pages blanches sur lesquelles les divers possesseurs ont inscrit quelques notes. Ces notes n'ont rien de capital, aussi Montfaucon n’en pas fait mention dans son catalogue (Bibl. Coislin., Paris, 1715, p. 410-411). Nous nous proposons de transcrire ici les plus intéressantes. Elles sont rédigées dans la langue qu'on appelle souvent grec vulgaire, c'est-à-dire en un grec qui ne tient aucun compte de la grammaire ni du dictionnaire; par exemple au folio A recto on lit :

Kai ἴυ Χαὶ υἱὲ τοῦ Θεοῦ αἰλαιησον μαί τον γαμαρτολον Ju τοῦ πα τὴ χοὺ τοῦ φυλοθαιου, c’est-à-dire :

Seigneur, Jésus-Christ, fils de Dieu, aie pitié de moi, le pécheur Jean ἐν qui aime Dieu.

.. Cette même formule été transcrite plus correctement au fol. À verso :

ER) NE ex ES - = ! Σ Ζ ! \ ε + S. ΩΣ

χε Ἴυ χε υἱὲ τοῦ Θεοῦ τοῦ ζόντος ἐλέησόν με τὸν ἁμαρτολὸν διὰ τῆς Θεοῦ. ᾿Αμήν.

Seigneur Jésus-Christ, fils de Dieu vivant, aie pitié de moi, pécheur, par (l’intercession de) la mère de Dieu. Amen.

Au fol. 1 recto, on trouve le commencement d'un récit, dans

200 REVUE DE L'ORIENT CHRÉTIEN.

lequel le scribe n’a pas écrit en général les premières lettres des phrases et des noms propres. Il se proposait sans doute de les écrire à l'encre rouge comme cela a lieu dans le manus- crit. Les noms des sept sages sont ainsi réduits chacun à quelques lettres et ne pourraient être identifiés si on ne les connaissait pas par ailleurs. Il ne s’agit pas cependant des apo- phthegmes des sept sages contenus dans tant de manuscrits :

(A juynots Διογένους φιλοσόφου. τινός. ([Π)ερὶ τῶν ἑπτὰ ἑλλήνων τῶν

φιλοσόφων διὰ τὴν ἄνω πρόνοιαν.

Récit d'un certain philosophe (nommé) Diogène au sujet des sept philo- sophes grecs sur la providence d’en haut.

Dans les jours de Diogène le philosophe, à Athènes, les sept sages vin- rent le visiter. Ils le trouvèrent assis sur une terrasse, le saluèrent et s’as- sirent également. Voici leurs noms : Plutarque (λοιγ χος)... 16 Trismégiste, Cléomède....… Ils conversèrent longuement avec lui de la géométrie et de l'astronomie et aussi des talismans et de la physique, et d’autres sujets très variés. Alors Diogène, se levant, dit : O hommes admirables et philo- sophes, (vous) les premiers et les docteurs des Grecs, je (veux) vous inter- . roger : Dans les derniers temps, que fera la Providence d’en haut envers la race des hommes? Car je sais que les enfants des Grecs sont devenus insensés : ils vivent indignement dans toutes les impuretés ; je vous de- mande donc un signe, à vous qui êtes de grands astronomes et (d’illustres) docteurs. Et Plutarque, ouvrant aussitôt la bouche, dit. |

Le scribe s'arrête et ne nous transcrit pas ce qu'a dit Plutarque. Au verso de ce feuillet, une note en grec barbare nous apprend encore que le manuscrit appartenu au monas- tère du Météore « de saint Météore », écrit le scribe :

τῷ παρῶν βιόλῆων. συμεῶν νέως θεολόγος. ὑπάρχει τῆς βασιλιχοτά- τῆς μονῆς τοῦ ἁγίου μετεώρου. χαὶ οἴτης τῶ ἀποξενώση ἐχ τὴν ρηθήσην μονὴν ἔστω ἀφωρημένος, χαὶ ἀσυγχώρετως. χαὶ μετὰ θάνατου αὔλητως: χαὶ να ἔχη χαὶ τῆς apw (1) τῶν τριαχοσίων χαὶ δεχαωχτῶ θεωφώρων za ἀθανασίου χαὶ ᾿Ιωάσαφ χαὶ τυμπανοι ἕως μενέτω, Ce qu'on peut tra- duire par :

Le présent livre : Syméon le nouveau théologien, appartient au très royal monastère du saint Météore. Quiconque l’emportera du monastère susdit sera excommunié, sans rémission, et ne pourra être pardonné (ἄλυ- τος) après la mort; qu’il porte aussi la malédiction des trois cent dix-huit

(1) Ces derniers mots semblent incompréhensibles, mais du moins ils ne le sont pas pour nous seuls, car apw ne figurait pas dans le texte et a déjà été ajouté comme explication au-dessus de la ligne. Nous lisons ἔχη κατάραν.

MÉLANGES. 207

(pères du concile de Nicée) inspirés par Dieu (θεσφόρων) et (celle) d’A/ha- nase et de Joasaph et qu'il gonfle jusqu’à ce qu'il meure (?).

Le couvent appelé proprement le Météore ou le couvent « du large rocher », πλατὺς Λίθος, situé en Thessalie, était le prin- cipal des couvents « des Météores », τὰ Μετέωρα, οἱ Μετέωροι Abc, suspendus sur des roches inaccessibles et formant par leur réunion ce qu'on appelait alors la Scété (la Thébaïde) de Stagi, Σχῆτις Στάγων. Cf. Léon Heuzey, dans Revue archéologique, IX (1864), p. 153; Annuaire de l’ass. pour l'enc. des Études grecques, t. IX (1875), p. 232.

Le ms. Coislin 237 provient aussi τοῦ Μετεώρου.

Athanase est le fondateur du couvent du Météore sur le large rocher. Il venait de l’Athos. Joasaph Paléologue fut l’un de ses disciples, venu lui aussi de l’Athos. Cf. Heuzey, An- nuaïire.., loc. .cit., p. 240-242.

Une punition analogue à celle qui termine le texte précé- dent (excommunication perpétuelle et gonflement du coupable) fut portée contre un certain Galactæon qui avait usurpé l’hé- gouménat et ruiné le couvent des Météores : χατέλιπον αὐτὸν ἐπ ἀλύτῳ ἀφορισμῷ, ὥσπερ νῦν ὁρᾶται τυμπανιαῖος, φρικτὸν, θέαμα, ἐν τοῖς τόποις τῆς Αρτης; εἰς τὸ Kopaxoynoiy, « ils lui infligèrent l’excom- munication indissoluble, par l'effet de laquelle on peut le voir encore à Korakonési, dans le pays d'Arta, avec la peau tendue comme celle d'un tambour, spectacle horrible ». L. Heuzey, Annuaire, loc. cit., p. 240.

Viennent ensuite, fol. B recto et fol. 2 recto, les deux catalo- gues qui forment le principal objet de cet article. Leur empla- cement seul au recto des feuillets B et 2 montre qu'ils sont antérieurs à la note (fol. 1 verso) qui attribue ce manuscrit au Météore.

(fol. B r°) Excus ζχδ΄ ἐν pnv ᾿Ιουζνίῳ), εἰς τοὺ

Lo

2? s Ἰγνάτιος ἱερομόναχος τὰ βιόλί

ἀρχὴ TET ἘΠ ΤΊ τὺ ταῖς δεχκατέσσαρ(ας) ἐπ λὼ ς) τοῦ μεγί Παύλ(ου) βιόλίον ἐξυγημέ(νον) ψαλτήριν μετὰ εὐχαῖς δρο

7

O- =? Ἄς = Le] <=

De von —- νόμιμ(α) B μιχρὸν χαὶ μέγα θηχαράδ(ες) β μι- υ. βιό

TD

υ χρὸν καὶ μέγα Κλήμαχ(ος) βιόλίον ---- βιόλίον τοῦ βαρλαὰ

τοῦ ΟΝ ΣΝ τοῦ véou θεολόγου --- βιόλόπουλον τοῦ ày - βιόλίον πατερικὸν. βιό

λίο “ρῦ vin! re) ! ταῖς ἰον του αγίου νυμφοὺυ y ψαλτηρι Ο

= PS OS S n ss" O

A Le > 5 ! 7 4 ἐξηγημένον Τυπιχὸν βιόλοπόλον τῆς ἁγίας μα βίου χαὶ .

208 REVUE DE L'ORIENT CHRÉTIEN.

ἔτους βιόλία β τῆς ἰατρικῆς τέχνης. εὐχολόγ. βιόλί(ον) μιχρὸν 8) ! De δ ὭΣ Ne, SN. , 3 ἊΝ le

βιθλοπόλον, περὶ τὰ ιβ ὄρη rai ἕτερα διάφορα πράγματα. ἀχολουθ(ία) = 1 ? 7 \ x 7 ASS - ΜΕ μος

τοῦ μεγάλου ᾿Αντων(ίου) μετὰ τὸν βίον του (αὐτοῦ) --- ἕτερ. φιλαὸ. πα-

τεριχ(όν) ---- βιόλίον γὙριγωρίου τοὺ χεραμέως δια χειρὰ γραφησ. τοῦ πλου- ΩΝ - n , 1 v , 2 ! Ἀττι ἘΣ 4

σιαδυνοῦ. βιόλοπόλον μικχρὸν. ee - βιόλίον θεοτοχάριν ---

ἀχολουθίαις ἕτερ. GS ar ἕτερον Ψ ἀρ μετὰ ταὶς εὐχαὶς. Δόξα τῷ θεῷ τῷ δόντι ἀρχ

(fol. 2 r°) Ἔτου

sit DHEA RAY ΤΕΣ ἥμιον

ἀρχὴ παραχλητιχὸν α --- Ψαλτήρια y ὁρολόγιον α --- τυπιχὸν α βιόλίον τοῦ πλουσιαδινοῦ --- βιὀλίον ἐπιστολαῖς τοῦ μεγάλου παύλου βιόλίον τοῦ ᾿Ιωάννου τοῦ τῆς χλήμαχος Φ΄ βιθλίον εὐχολόγια β --- τ οὐ τοῦ βαρλαάμ. --- ἰατροσόφια 8 --- νόμιμα β --- θηχαράδες. μιχρὸν nai μέγα β --- θεοτοχάρ(ιν) à --- βιδλίον τοὺ ἁγίου MHsee α Ψψαλτή- ριον ἑξηγημένω. μερικῶ α --- βιόλίον πατεριχὸν μετὰ ταῖς ἐπιστολαῖς μικρόν --- πατεριχὸν β. τοῦ ἁγίου νίλου τοῦ φιλοσόφου. --- βιόλίον ἕτερον μετὰ χαὶ πλήστους λόγους --- βιόλόπουλ(ον) y μιτζά --- βιθλίον τοῦ ἀσώτ(ου) βιὀλίον τοῦ νέου θεολόγου, ἔστι τοῦτ(οἹ --- βιόλίον τοῦ ἐφρέμ. ΒΡ. ὀλίον τριαδιχὸν ἀνθολόγ. --- ἀχολουθία τοῦ μεγάλου ἀντωνίου. αἱ ἑτέραις ἀχολουθίαις ιγ --- - βιθλίον . τετραδάγγελον α χαὶ ἐπ (x) μιχρὰ --- φιλάδ. β βιθλίον μικρὰ μεγαλ. λβ φιλάδ. μι- χραῖς μεγαλ. 18

βιόλίον τοῦ ἁγίου ἀνδρέου τοῦ σαλοῦ.

(fol. Β r°). L’an 7024 (7024 --- 5508 1516 de J.-C.), au mois de juin, le onze (de ce mois), j'ai écrit, moi aussi, /Zgnace le hiéromoine, tous mes livres dans ce volume :

1. Un Évangéliaire. —2. Les quatorze épîtres du grand (saint) Paul, exem- plaire commenté. 3. Un psautier (1) avec les prières. 4. Un Horolo- gion. 5. Un paracléticon. (2) 6 et 7. Deux volumes de canons, un petit et un grand. —8 et 9. Deuxlivres de prières, un petit et un grand (3). 10. Le livre de l'échelle (saint Jean Climaque). 11. Le livre de Bar- laam (et Josaphat). 12. Le livre de Syméon le nouveau théologien. 13. Un recueil de saint Ephrem. 14. Le livre Patéricon (Jean Moscus οἷ

(1) Contenant les heures diurnes. Ducange, Glossarium, col. 1794.

(2) Contenant ce qu’on doit réciter chaque jour à la messe, aux vêpres ou à Matines. Zbid., col. 1108.

(3) On lit dans $. P. Lambros, Catalogue of the greek manuscripts of Mount Athos, Cambridge, 1895, I, p. 123 (cod. 1351) : βιθλίον καλούμενον μέγας Θηχαρᾶς, ἐν περιέχονται οὐ μόνον οἱ προγραφέντες χαὶ τυπωθέντες ὕμνοι τῆς ζωαρχιχῆς τριάδος παρὰ τοῦ ἐν μαχαρίᾳ τῇ λήξει... ᾿Αγαπίον μοναχοῦ τοῦ Κρητὸς, ἀλλὰ πλεῖσταί τε χαὶ ἄλλαι εὐχαί.

[2

MÉLANGES. 209

apophthegmes des Pères). 15. Le livre (les traités) de saint Nyphon. 16. Un psautier commenté. 17. Un Typicon (indication des règles des offices, ordo?). 18. Un recueil sur sainte Marie (la sainte Vierge), vie et années. 19 et 20. Deux ouvrages sur fa médecine. 21. Un Eu- chologe. 22. Un petit recueil sur les douze montagnes (?) et d’autres choses diverses. 23. L'office du grand (saint) Antoine, avec sa vie. 24. Un autre Patéricon Philad. (1) (apophthegmes). 20. Le livre de Grégoire le potier (2) écrit de la main de (Jean) Plousiadinos (3). 26. Un petit livre de demandes et réponses. 27. Un livre de Théotokies (4). - 98 à 34. Six volumes d’autres offices (de saints) et un autre psautier avec les prières. Gloire à Dieu qui donne le commencement et la fin.

(fol. 2 r°) L'an 7030 (7030 5508 1522), au mois de juillet, le 27 (de ce mois), (le jour de la fête) du saint illustre martyr Pantéléémon, j'ai écrit (la liste de) tous mes livres.

1. Un Paracléticon. 2-4, Trois psautiers. 5. Un horologion. 6. Un typicon (5). 7. Le livre du Plousiadinos, quatre fois (6). 11-15. Le livre des épitres du grand (saint) Paul, cinq fois. 16-21. Le livre de Jean, celui de l’échelle (Jean Climaque), six fois. 22-25. Deux eucho- loges. 24. Le livre de Barlaam. 25-26. Deux livres de médecine. 27-28. Deux livres de lois. 29-30. Deux livres de prières, un petit et un grand. 31. Un livre de Théotokies. 32. Un psautier avec explication 33. Un Patéricon avec les épitres, petit. 33. Un second Patéricon, de saint Nil le philosophe. 34. Un recueil de mélanges, trois fois. 39. Le livre du prodigue (?). 36. Le livre du Nouveau Théologien qui est celui-ci. 37. Le livre d'Ephrem. 38. Le livre triple (?) anthologie (7). 39. Office du grand (saint) Antoine et treize autres offices. 40. Un petit évangéliaire. 41. De petits livres de lois. 42. Philad. (?), deux. 43. Un livre de petites et de grandes (feuilles?), trente-deux. 44. Philad. (?) petites et grandes, douze.

(1) Le Philad., sans doute φυλλάδιον, brochure, reviendra deux fois dans le catalogue suivant,

(2) Cf. Catalogue Lambros, I, p. 65 (cod. 741) : Τοῦ... Γρηγορίου ἀρχιεπισκόπου Ταυρομενίου τῆς Σιχελίας τοῦ Κεραμέως.

(3) Deux manuscrits de Paris du xv° siècle (n° 828 et 1732) sont de la main de Jean Plousiadinos. Cf. Omont, Znventaire sommaire des ms. grecs de la bibl. nationale, Paris, 1898. l

(4) Ou tropaire (odes) en l'honneur de la sainte Vierge, Du Cange, Glossar ium mediae et infimae graecitatis, Lyon, 1688, col. 491-492.

(5) Nommé chez les latins : Ordo divini officit recitandi. (6) Le nombre quatre n’est pas déterminé par le texte. Nous supposons qu’il désigne quatre exemplaires, car si l'ouvrage était en quatre volumes ou quatre parties, ce nombre aurait déjà figurer dans le catalogue précédent. Nous supposons donc que, de 1516 à 1522, Ignace fait trois copies du livre de Gré- goire le potier et en ainsi quatre exemplaires en 1522, [

(7) Anthologie en trois parties (?).

ORIENT CHRÉTIEN. 14

210 REVUE DE L'ORIENT CHRÉTIEN.

Gloire à Dieu, dans la Trinité, qui donné le commencement et la fin. Le livre de saint André Salos (1).

Cette bibliothèque comprenait donc surtout des livres d'’of- fice et de prière, avec quelques ouvrages ascétiques et des his- toires monastiques. Hors saint Jean Climaque, on n’y trouve pas d'auteur célèbre, l'Ancien Testament n'y est pas représenté, les ouvrages de médecine et de lois forment la partie pratique. Presque tous les ouvrages du premier catalogue se trouvent dans le second. On ne trouve cependant pas, dans le second catalogue, mention explicite du recueil sur les douze monta- gnes. Les nouveaux numéros nous semblent être des copies des anciens. |

Nous ne savons à quelle époque placer « le pécheur Jean », mais puisqu'il figure en tête, fol. À, il y au moins un préjugé pour le placer avant Ignace et nous sommes conduits à l'his- toire du ms. 292 suivante : |

Écrit au xi1v° siècle sur papier et d’ailleurs incomplet, il ar- riva en la possession du moine Jean (fol. A); Ignace, hiéro- moine et collectionneur de manuscrits, l’acquit immédiatement ou médiatement de Jean et le porta sur ses deux catalogues de manuscrits de 1516 et 1522. Après sa mort, le volume arriva au monastère du Météore et en dépit de la malédiction portée contre celui qui le vendrait il prit le chemin de la biblio- thèque du chancelier Séguier, ainsi que le ms. Coislin 237 qui provient lui aussi du Météore.

F. Nav.

Paris.

Il

RÉCENTS PROGRÈS DE LA PATROLOGIE ORIENTALE.

Nous n’annonçons pas en général à la bibliographie les ouvrages récemment parus dans la Pafrologie, parce que nos lecteurs en trouvent le titre sur la couverture, mais nous avons

(1) Cette dernière ligne désigne sans doute une acquisition récente.

MÉLANGES. 211

à cœur d'annoncer dès aujourd’hui que Son Altesse Royale Maximilien, prince de Saxé, professeur à l'Université catholique de Fribourg, a bien voulu s'associer à l'œuvre entreprise par ME Graffin, dont il a reconnu la haute utilité et la grandeur. Grâce à son concours, nous pourrons éditer les textes armé- niens et même géorgiens qu'il nous paraîtra urgent de faire connaitre aux savants occidentaux. Nous commencerons par le Synaxaire arménien.

Nous avons annoncé brièvement ci-dessus (p. 110) les Prae- lectiones de liturgiis orientalibus du prince Maximilien. Cet ouvrage d'ensemble sur les liturgies orientales, qui a nécessité la lecture de tant de documents édités et inédits, nous était un sûr garant que S. A. R. apprécierait à leur valeur ces recueils de documents que sont la Revue de l'Orient chrétien et la Patrologie. Son nom figure désormais dans le comité directeur de la Revue et, à partir du tome cinquième, il figurera en tête de tous les fascicules de la Patrologie orientale.

Nous restons d’ailleurs fidèles au plan formé par Mf Graffin Dee) Voir Pairror ti Lepiv, 210,528 vetc.:0), "el dont aucune contrefaçon et aucune menace de plagiat ne l'ont fait dévier, qui est de publier les principaux ouvrages de préfé- rence les ouvrages inédits des diverses littératures orien- tales, dans le format de Migne, avec la traduction sur la même page que le texte. Parmi le millier d'ouvrages orientaux qui attendent un éditeur, M. Graffin projeta de publier tout d’abord les Synaxaires (cf. Patr. or., loc. cit.) et.l'Histoire des patriar- ches coptes d'Alexandrie (M. Crum annonçait l'édition Evetts dans les Proceedings of the Society of Biblical Archaeology du 12 février 1902, t. XXIV, p. 73, L. 11), nous continuons ces éditions en dépit d’une tentative de dépossession : le fascicule 2 du Synaxaire arabe jacobite paraît, le mois de Hamlé du Sy- naxaire éthiopien est à l'impression, le fascicule 3 de l'Histoire des patriarches coptes est en placards, le Synaxaire arménien est en préparation; on lira d’ailleurs sur la couverture les éditions des autres textes arabes, éthiopiens, grecs et syriaques.

F. Nau.

212 REVUE DE L'ORIENT CHRÉTIEN.

II

NOTE SUR LES ANIMAUX DE SAINT MÉNAS.

Les deux chameaux traditionnels qui accompagnent habituel- lement la représentation de saint Ménasont été pendant longtemps et sont encore un sujet d'hésitation, sinon de discussion (1). L'identification des deux animaux est cependant aujourd’hui chose réglée : malgré les tàätonnements des premiers archéolo- œues (2), à lheure actuelle, tous sans exception admettent, semble-t-il, qu'ils représentent bien des chameaux (3). Toutefois le problème de leur origine ne semble pas définitivement résolu, du moins d'une manière absolument certaine. Bien qu’il existe une opinion commune sur ce point, tous y adhèrent en avouant néanmoins son caractère conjectural. L’explication suivie est celle donnée pour la première fois par Le Blant (4) à qui elle avait été suggérée par un passage de Tillemont (5) et dont il retrouva la source manuscrite dans le fonds latin de la Biblio- thèque nationale de Paris. « Avant d'être décapité, rapporte Tillemont, le saint ordonna que quand il serait mort on mit son corps sur un chameau qu'on laisserait aller il voudrait et qu’on enterrät son corps le chameau s’arrêterait ».

Deux autresincidents de la viede saint Ménas pourraient égale- ment expliquer la présence des chameaux auprès de son image. On les lit dans le récit abrégé de son martyre que contiennent les synaxaires des églises d'Égypte et d'Éthiopie (6), lesquels ne

(1) Cf. Dict. d’arch. chrét., t. I, col. 1725.

(9) Cf. Revue arch., 1844, t. I, p. 405; Birch, Arch. Zeitung, 1852, p. 223; De Rossi, Bull, di arch.crist., 1809, p. 32 et p. 46; Wiedemann, Sixième congrès des Orient. 1883, p. 162. Dès 1811 cependant, Quatremère avait signalé, d’après un manuscrit arabe, une représentation de saint Ménas avec les chameaux. Mémoi- res géographiques et historiques sur l'Égypte, Paris, 1811, t. I, p. 488.

(3) Gayet dans l'Art copte n'y voit que des dragons ou des serpents; ilest vrai qu'il attribue les monuments qu’il étudie à saint Georges, bien qu'ils portent le nom de Ménas, et qu’il en fait des antiquités coptes bien que la langue des inscriptions soit grecqué.

(4) Revue archéologique, 1878, t. XXXV, p. 304.

(9) Mémoires pour servir à l’histoire ecclésiastique, Paris, 1702, t. V, p. 798.

(6) Cf. René Basset, Le synaxaire arabe jacobite, dans Patrologie orientale,

MÉLANGES. 213

disent pas un mot de la légende citée par Tillemont. Lors d'un transfert par mer des restes de saint Ménas, des monstres ma- rins tête de chameaux apparurent aux bateliers pour les dé- vorer, et ceux-ci ne durent leur salut qu’à la protection du saint qui lança contre ces monstres des traits de feu et les mit en fuite. Pendant ce même voyage, lorsque ceux qui avaient em- porté les restes de saint Ménas voulureni les ramener au lieu de leur première sépulture, ils les placèrent sur un chameau pour les y faire transporter. Mais il arriva que ce chameau demeura immobile, de sorte qu’on ne put pas le faire lever, et ilen fut de même pour plusieurs autres sur lesquels on déposa ce fardeau. La volonté d'en haut fut reconnue par tous et on ensevelit le corps du saint au lieu même se passa le fait. Un des docu- ments qui nous rapportent ces détails a été publié depuis long- temps (1); mais, soit par raison de tradition ou pour tout autre motif, personne n’a cru bon de les invoquer et on s’en est tenu au récit de Tillemont confirmé par Le Blant. Cet incident du reste rapporté par l’auteur des Mémoires explique suffisam- ment la représentation des animaux. Il est vrai, comme plu- sieurs l'ont fait remarquer (2), ce récit ne parle que d’un cha- meau, tandis 4116 165 images en onttoujours deux, mais la raison de symétrie peut l'expliquer, les exemples de faits analogues ne sont pas rares dans l'iconographie des premiers siècles.

Tous ceux qui se sont occupés des représentations de saint Ménas, ai-je dit, n’ont pas laissé d’avouer que leur interpréta- tion-demeurait au fond conjecturale. Dans une étude récente, Miss M. A. Murray, réduite à accepter cette même conjecture, puisque nous ne possédons pas de documents écrits reconnus authentiques nous donnant les motifs d’une pareille représenta- tion, se refuse à admettre toute explication et se contente d’en- registrer le fait (3). D'après elle, les récits de Tillemont et de

t. III, p. 295-298; Zotenberg, Cataloque des manuscrits éthiopiens de la Bibl. Nat., Manuscrit 126, fol. 75 r°-76 r°. (1) Wustenfeld, Synaxarium das ist Heiligen-Kalender der Coptischen Christen,

Gotha, 1879, p. 117-119.

Amélineau, Les actes des martyrs del'Église copte, Paris, 1890, p. 89.

(2) Diction. d'arch. chrét., t. 1, col. 1725; Arvanitakis, Bulletin de l'Institut Égyp- tien, IV® série, 5, p. 169.

(3) Cf. Proceedings of the Sociely of Biblical Archeology, vol. XXIX, pp. 25-30, 21-60, 112-122.

2]4 REVUE DE L'ORIENT CHRÉTIEN.

Le Blant aussi bien que les deux incidents rapportés par le synaxaire, qu'elle seule cite pour la première fois, sont des re- lations faites après coup. « These lesgends, dit-elle, appear to me to be later invention evolved when the real meaning of the animals was lost, for when we turn to historical sources or examine the legends critically, we find that the camels are not accounted for (1). » Cette conclusion de la savante égypto- logue pourra surprendre quelques-uns, elle ne saurait être pour- tant taxée d'inexactitude, si l’on accepte les documents tels qu'elle les choisit et les apprécie et si l’on tient aussi la position qu'elle prend en face de la question présente. Miss M. À. Mur- ray traite en effet la représentation des chameaux auprès de saint Ménas comme étant nécessairement la signification d'un fait historique réel de la vie de saint Ménas. Elle cherche, en conséquence, la preuve de ce fait comme le doit un historien ri- goureux et, après examen des différents documents, ne se trou- vant pas satisfaite, elle déclare le problème insoluble, en atten- dant de meilleures preuves. Miss M. A. Murray ne nous donne pas les raisons de son refus des documents ici en cause; elle ne nous donne que son appréciation et il semble bien ressortir de ses dires que les actes de saint Ménas donnés par Surius (2) sont seuls accceptés par elle comme dignes de foi. Là, de fait, les chameaux ne sont pas indiqués, seuls les synaxaires et les ma- nuscrits de Tillemont etde Le Blant nous les ont signalés jusqu'à maintenant.

Je n'entreprendrai certes pas ici de défendre ou d’ attaquer ces vues, cette discussion relève des hagiographes. Je noterai seulement que la qualification de documents faits après coup, pour expliquer une représentation dont la signification a été perdue, donnée aux récits de Tillemont et du synaxaire, reste une assertion gratuite dans la forme elle est présentée. Néanmoins, comme je l'ai déjà dit, en conservant les docu- ments que retient le rédacteur des Proceedings et en tenant la position prise par lui, la conclusion doit être la sienne, la présence des chameaux reste inexpliquée.

Mais cette position prise par Miss M. A. Murray nes’ impose

(1) Proceedings, loc. eil., p. 98. (2) Cf. Analecta Bollandiana, t.1IT, p. 258-270.

MÉLANGES. 215

pas nécessairement, comme on pourrait le conclure d'après son étude (1). Il n’est certainement pas indispensable de s'assurer si la représentation des deux chameaux est basée sur un fait historique réel appartenant à la vie du saint. Les archéologues, sans rien préjuger de cette réalité, ne s'en sont pas inquiétés, ils ont simplement cherché dans le peuple auteur de ces re- présentations le sens et l’origine qu'il leur donnait. La vérité historique d’un fait n’est pas, en effet, requise pour justifier la représentation de ce fait. Les images authentiques faites d'après des légendes purement imaginaires ne sont pas chose inconnue en hagiographie et ailleurs, et nous pourrions, à la rigueur, nous trouver ici en face d’un exemple de ce genre (2). Cette hypothèse écartée systématiquement par Miss M. À. Murray reste possible. Quel est le récit qui a donné lieu à cette repré- sentation, voilà tout d'abord, cesemble, ce qu'ilfaut sedemander. Interpréter l'intention de l'artiste, c'est seulement ce qu'il importe. Quant à la vérité historique de ce récit, à la confor- mité de cette intention avec un fait qui s'est réellement passé, il relève d’un autre domaine.

Les sculpteurs ou les dessinateurs d'images de saints n'ont pas être nécessairement des historiens, pas plus que le peuple qui en usait. Pour ce qui est de saint Ménas, nous possédons des récits qui peuvent expliquer le type de ses repré- sentations. Ils ont pour auteurs ceux-là mêmes qui ont fait ces représentations. Ces récits, par ailleurs, ne sont pas évidem- ment, faits après coup, rien ne le prouve; jusqu'à production de cette preuve, il nous est donc pas interdit de conclure à un lien qui unit les uns aux autres. L'examen du problème reste par conséquent libre. La recherche du fait vrai histori- quement qui donné lieu à la représentation des chameaux ne s'impose pas. Ce peut être un fait réel aussi bien qu'un récit imaginaire. Miss M. A. Murray l’a estimé un fait réel et a traité la question au point de vue historique, sa position est soutenable. Les autres archéologues n'ont pas abordé ce côté de la question et ont étudié le problème sans s'occuper de ce point, ils le pouvaient aussi légitimement. On ne saurait donc

(1) Cf. Delehaye, Les légendes hagiographiques, Paris, 1905, p.242. (2) Cf. Delehaye, Loc. cit., p. 52.

216 REVUE DE L'ORIENT CHRÉTIEN.

voir entre l'appréciation de Miss M. À. Murray et celle de Le Blant une contradiction, il y a seulement divergence de posi- tion en face du problème.

. Pour ma part, sans attenter à l'option communément reçue, ni sans vouloir établir que la représentation des chameaux de saint Ménas un fondement historique réel, J'apporterai seulement un nouveau document concernant la vie de ce Saint, dans lequel se trouve rapportée l’origine même de cette repré- sentation. Peut-être ce document sera rejeté par l'histoire et classé parmi les récits de légendes. Mais, alors, même en ce cas, il n'en pourra pas moins constituer pour nous, à la con- dition qu'il n'ait pas été fait après coup, cela s'entend, la source d’une explication des chameaux de saint Ménas, peut- être eux aussi légendaires. Il nous donnera la pensée qu'avaient certains Orientaux de cette représentation, la signification qu'ils y voyaient.

Ce document nous est fourni par le fonds éthiopien de la Bibliothèque Nationale, collection d'Abbadie, manuscrit 92, du folio 123 verso a au folio 130 recto (1). Il est intitulé « Mar- tyre de saint Ménas, ascète et martyr de Notre-Seigneur Jésus- Christ ». Ces actes ne sont pas la traduction des actes grecs, tels qu'ils sont donnés dans Surius et les Analecta Bollan- diana, mais ils proviennent d’un texte analogue plus étendu, 5115 ne sont pas une simple amplification de ces derniers (2). Leur origine est certainement égyptienne. La marche du procès est celle-là même que contiennent les actes grecs. Nombre de réponses du martyr et en particulier plusieurs textes de l'Écri- ture cités par saint Ménas, sont les mêmes dans les deux rédac- tions. Α partir du folio 128 recto b, le texte éthiopien fait l'his- toire des restes du martyr, et c’est dans cette partie que nous relevons le passage relatant l’origine de la représentation des chameaux. Comme dans le synaxaire, le corps est emmené sur mer. C’est un préfet des troupes nommé Atnasis, qui l'em- porte comme une sauvegarde dans une expédition militaire (128 δ), et c'est dans le trajet entre la province d'Afrique et

(1) Cf. Catalogue raisonné des manuscrits élhiopiens apparlenant à Antoine d’Abbadie, Paris, 1869, p. 102.

(2) Des fragments d’une version copte existent aussi à la Bibliothèque Natio- nale; ils se rapprochent de notre version éthiopienne.

MÉLANGES, 217

d'Alexandrie qu'apparaissent par deux fois « des animaux hor- ribles, grands, à long cou », avec une tête pareille à celle des chameaux. Des traits de feu qui s'échappent du corps du saint les mettent en fuite. Après avoir atteint Alexandrie au cinquième jour de son voyage, Atnasis gagne Mariout par le lac, puis pousse par voie de terre Jusqu'à Mesten situé non loin. L'expédition terminée, Atnasis songe au retour et veut rapporter avec lui les restes du saint protecteur, il doit y renoncer à cause du refus des chameaux ; la scène se passe comme dans le synaxaire.

« Alors, poursuit notre texte, le préfet Atnasis attristé reconnut que cela venait de Dieu et il laissa le corps. Mais il fit faire sur bois l’image de saint Ménas martyr sous les appa- rences qu'on lui connaissait comme soldat, avec l’image des bêtes qui ressemblaient aux chameaux, placées à ses pieds et l’ado- rant. » Il déposa cette image sur le corps de saint Ménas pour obtenir son intercession, puis l’'emporta avec lui pour qu'elle lui fût un salut et un refuge sur mer et dans la guerre. On fit pour le corps du saint une chàsse en bois de Sag (1) qui ne pourrit pas et que les vers ne rongent point et Atnasis « l’ensevelit en ce lieu, après quoi il retourna dans son pays avec ses troupes » (fol. 128 b-129 à).

Cette composition, du moins dans sa rédaction totale, est postérieure à la conquête arabe. Dans les deux derniers folios, on y trouve, en résumé, l'historique du culte du saint jusqu’à Héraclius. Suivant le texte éthiopien, le premier monument qui fut élevé sur les restes du martyr, fut une construction en forme de tente (2), dans laquelle on suspendit une lampe. Sous le pa- triarche saint Athanase et le roi Constantin, une première église fut bâtie sous le vocable du saint et ce même patriarche la consacra. La première ne suffisant pas pour le grand con- cours des pèlerins, une seconde église dédiée à la Sainte Vierge fut bâtie sous le patriarche Théophile durant le règne de Théo-

(1) Ce bois est sans doute le LL quiest un bois incorruptible et que Kir-

cher identifie avec le mimosa nilotica. Cf. Lingua aegyptiaca restituta, p. 379. Voir aussi : Trailé des simples, par Ibn el-Beïthar, t. Il, p. 233, dans Voices et Extraits, t. XXV. Silvestre de Sacy, Chrestomathie arabe, t. III, p. 473.

(2) Rav, des haimat, c'est la hutte en limon des fellahs des bords du

Nil.

218 REVUE DE L'ORIENT CHRÉTIEN.

dose (1). Enfin l'empereur Zénon donna ordre d'y bâtir une ville (2) qui fut achevée sous le patriarche Timothée et tout demeura ainsi, dit le texte, jusqu’au temps d'Héraclius. Ces indications de monuments viennent d'être corroborées, pour la plupart, par les magnifiques travaux de Carl Maria Kauf- mann à Mariout (3). On ne saurait pourtant inférer de cette exactitude la vérité historique de notre récit, pas plus qu’on n'en saurait fixer l’origine à l’époque de la dernière rédaction de notre document; ces deux questions restent à résoudre. En attendant, il nous est légitime de le traiter tout au moins comme le récit de Tillemont et de Le Blant. Ces deux légendes ne se détruisent pas en effet nécessairement; aucune d'elles ne porte une preuve manifeste d'antériorité ou de plus grande vraisemblance. Elles peuvent nous fournir toutes deux le sens donné aux chameaux par deux époques ou deux régions diffé- rentes, aussi bien que relater le fait de deux explications exis- tant parallèlement.

Beyrout, novembre 1907. M. CHAINE.

(1) Arcadius et Honorius, dit le synaxaire éthiopien, loc. cil., p. 75-76.

(2) Amélineau, Géographie de l'Égypte, p. 243, n. 3.

(3) Cf. Die Ausgrabung der Menasheiligtümer in der Mareotiswüste, Cairo, 1906; Zweiler Berichl uber die Ausgrabung der Menasheiligtümer in der Mareo- tiswüsle, Cairo, 1907.

BIBLIOGRAPHIE

CHANOINE E. PANNIER, Doyen de la Faculté de Théologie de Lille. Les Psaumes d'après l’hébreu, en double traduction avec indications métri- ques et strophiques et la Vulgate latine en regard. In-8°, ΧΧΥΠΙ- 499 pages. Lille, 1908, R. Giard. 12 francs.

Une nouvelle traduction des psaumes ne peut laisser indifférent ni le professeur d’exégèse, ni l'historien qui recherche les documents de la piété juive, ni en général tous les prêtres qui en font un si large usage dans la liturgie et ont tout intérêt à les bien comprendre.

A cet égard le livre de M. le chanoïine Pannier marque un effort très sé- rieux pour rendre dans toute sa saveur l'original sémitique, si éloigné parfois de notre génie latin. Et il permet surtout les comparaisons les plus fructueuses avec la traduction latine de la Vulgate ou plus exactement avec la seconde retouche de saint Jérôme ou Psalterium gallicanum. Une lecture attentive montrera vite combien plus précis et clair se trouve enfin le sens des vieux psaumes dans certains passages difficiles, grâce à la nou- velle traduction.

Comment se présente 16 texte? Trois colonnes sur une page double. Sur la première à gauche en caractères plus petits, le texte de saint Jérôme; au milieu la nouvelle traduction latine, à droite la traduction française. Les strophes sont bien séparées, différents caractères marquent les morceaux disparates.

Faut-il signaler encore la préface l’auteur fait siennes les fortes pa- roles de saint Jérôme qui en appelle aux hébraïsants pour juger des choses hébraïques. C’est un vœu très respectable et que les lecteurs de la Revue seront les premiers à apprécier.

L. LEGRAIN.

290 REVUE DE L'ORIENT CHRÉTIEN.

M£r ADpaï SCHER. αὐ Al-Alfàth al-fârisia al-mouaraba taalif as-Saïid (Livre des mots persans passés dans la langue arabe). Imprimerie ca- tholique des RR. PP. Jésuites, Beyrouth, 1908. 1 vol. in-8, 194 pages.

Ms Scher se propose de rechercher la part de l'élément perse dans la langue arabe.

De tous les peuples voisins, c’est aux Persans que les Arabes ont em- prunté le plus de mots. Quelquefois ils ont pris le mot tel quel, mais, le plus souvent, ils en ont dénaturé l'orthographe et la prononciation, ce qui rend difficile, dans bien des cas, la recherche de l’étymologie.

M: Scher indique les principales modifications que les Arabes font subir aux mots perses en les introduisant dans leur langue :

Ils retranchent ou ajoutent des lettres soit au commencement, soit dans le corps du mot, soit à la fin.

Ils font éprouver de fréquents changements aux consonnes. Aïnsi le Noun et le donnent ordinairement Läm, le Käf est changé en Djim, le Khà en ΠΒὰ, le en Fà, etc.

Ils ajoutent fréquemment un Djim ou un Qâf à la fin des mots.

Parfois le même mot persan donne naissance à plusieurs mots arabes.

M: Scher donne ensuite la liste de plus de 1.500 mots arabes d’origine persane. Il indique le mot perse et les transformations qu'il a subies, et donne en outre les mots de même racine dans les langues suivantes : turc, kurde, syriaque, hébreu, grec, latin, sanscrit, abyssin, allemand, anglais, français, italien, russe et arménien.

Cet ouvrage est de la plus haute importance pour la philologie et inté- resse tout particulièrement les arabisants. Il suppose chez son auteur une somme de travail considérable, et une connaissance approfondie des lan- gues arabe et perse.

L. LEROY.

H. PoGNox, consul général de France. /nscriptions sémitiques de la Syrie, de la Mésopotamie et de la région de Mossoul, seconde partie, gr. 4, pp. 101-228, ΧΗ planches. Paris, Lecoffre, 1908. (Prix de souscription aux deux parties : 80 francs.)

Nous avions à peine annoncé la première partie (ROC, 1908, p. 110-111) * que la seconde a paru. Elle renferme soixante-quatre inscriptions (55 à 118).

Les premières inscriptions (55-56) fixent l'emplacement et la date de fondation (748) du monastère de Magim, à trois heures de marche au nord- ouest d'Édesse. Le fondateur était originaire de l’Adiabène et du couvent de Saint-Silas. Α l’occasion des suivantes (57-58), antérieures à notre ère, l’auteur nous fait connaitre l'emplacement des couvents de Saint-Jacques des tombeaux et de la Mère de Dieu, dans la montagne d’Édessé.

BIBLIOGRAPHIE, 221

Il en est de même dans tout le fascicule; l’auteur, qui l'avantage d’avoir vu et copié lui-même toutes les inscriptions, leur ajoute de nombreuses notes topographiques que l’on ne pourrait attendre d'un savant travail- lant sur un estampage. Comme nous ne pouvons tout citer, mentionnons seulement la perle la plus précieuse du recueil : l'inscription araméenne du vue siècle avant notre ère. Voici une partie de la traduction de la moitié de la stèle déjà retrouvée (1).

Stèle que Zakir, roi de Hamat et de Laache, a consacrée à Alour., Moi Zakir, roi de Hamat et de Laache, j'adresse [aujourd’hui] à tout le monde la proclamation suivante : Baal-Chamaïn ma... et s’est tenu avec moi, Baal-Cha- maïn m'a fait roi. Bar Hadad, fils de Hazaël, roi d’Aram, rassembla et unit contre moi... rois, Bar-Hadad et son armée, Bar-Gache et son armée, [le roi de] Kaweh et son armée, le roi d'Amq et son armée, le roi de Gourgoum et son armée, le roi de Chamal [et son armée], le roi de Malaz [et son armée]...

[Is étaient] sept [rois] avec leurs armées, et tous ces rois établirent des retran- chements contre [Hazrak]. Ils élevèrent un mur plus haut que le mur de Hazrak et creusèrent un fossé plus profond que [son fossé], J’élevai mes mains vers Baal-Chamaïn, et Baal-Chamaïn m’exauça. Baal-Chamaïn [me secourut] par le moyen des prophètes et par le moyen des... Baal-Chamaïn [me dit] : N’aie pas peur, car moi [je t'ai fait régner, moi je me tiens] avec toi, et moi je te déli- vrerai de tous [ces rois qui] ont élevé des retranchements contre toi...

[Lorsque j’eus défait tous] ces ennemis de tous les côtés, je construisis les tem- ples des dieux dans tous mes... je placai devant [Alour] cette stèle et [j’écri- vis sur elle] mes hauts faits. Quiconque ôtera [l'inscription] de Zakir, roi de Ha- mat et de Laache, de dessus cette stèle, et quiconque ôtera cette stèle de [de- vant] Alour..….

Zakir fut donc le contemporain de Bar-Hadad, roi de Damas (ef. IT Rois, xuI, 24), et par suite de Joas, roi d'Israël, et de Joas et d’Amasias, rois de Juda. Cette inscription est donc du commencement du vus siècle avant notre ère, elle a été gravée moins de cent ans après l'inscription de Mésa, roi de Moab, et elle est la plus ancienne de toutes les inscriptions araméennes actuellement connues.

M. Pognon ne doute pas qu’en faisant quelques fouilles, on trouverait le reste de la stèle. Pour faire ces fouilles, il faut un firman, qu’un simple particulier à peine à obtenir. Le gouvernement francais ne laissera sans doute pas à un autre l’honneur d’aider M. Pognon et de le mettre à même de compléter sa découverte, d'autant que la stèle de Zakir, si on la retrouve entière, aura par même plus d'importance que la stèle de Mésa (2).

F. Nav.

(1) M. Noeldeke commenté un bon nombre des passages suivants dans Zeitschrift für Assyriologie, t. XXI (1908), p. 375-384.

(2) On sait qu'il ne reste également que des fragments de la stèle de Mésa et que la stèle entière n’a été reconstituée que d’après une copie faite, a-t-on dit, par un Arabe, avant que la stèle n’eût été brisée; or un article paru dans la ZDMG, τ. XLI (1907), p. 921-

292 REVUE DE L'ORIENT CHRÉTIEN.

Franz CumonrT. Recherches sur le manichéisme. 1. La cosmologie mant- chéenne d'après Théodore bar Khôni. 8, 80 pages. Bruxelles, Lamer- tin, 1908.

M. F. C. explique et commente un texte de Théodore publié jadis par M. Pognon, cf. ROC, t. V (1900), p. 329-330. Il ne nous reste aucun ouvrage manichéen, mais cette hérésie occupé une telle place en Orient et en Occident, qu'on en trouve un bon nombre de réfutations. M. F. C. utilise les réfutations de saint Epiphane, de saint Augustin, des Acta Archelaï, avec les formules grecques d’abjuration et quelques textes orientaux, et peut montrer ainsi que le texte de Théodore bar Khôni, pour étrange qu'il nous paraisse, n’en reproduit pas moins, plus fidèlement que tout autre, les idées attribuées à Manès : deux royaumes opposés : au haut, celui de la Lumière règne le Père de la grandeur dans cinq demeures lumineuses; au bas, le roi des ténèbres et ses cinq mondes pernicieux. Ces derniers vont combattre la lumière, et le Père crée la mère de vie et l’homme primitif pour leur résister. L'homme primitif est vaincu, mais le Père on le devine n’éprouve aucune peine à créer de nouveaux éons qui ont raison des ennemis du bien et forment le monde avec leurs corps, etc., etc.

Les rapprochements de textes que fait M. F. C. sont fort intéressants, mais les généralisations et les recherches de filiation nous laissent scep- tiques. Nous instruisons le procès des Manichéens à l’aide de quelques citations faites par leurs adversaires. Il est possible que les Manichéens n'aient jamais reconnu ces absurdités qu’on leur imputait pour les pour- fendre plus facilement. S'il était prouvé par hasard qu'un ouvrage d’un auteur manichéen était rempli des absurdités conservées jusqu'ici, nous pourrions en conclure, croyons-nous, que cetouvrage n’a avoir aucune influence, car il révolte également les esprits simples et les hommes in- telligents. Des livres de ce genre éclosent encore tous les jours, citons par exemple les fantaisies d’Allan Kardec, mais leur influence est nulle, même lorsqu'ils se recommandent comme la « Chute d’un ange » du charme de la poésie et du nom de Lamartine (1).

M. Kugener collationné un manuscrit syriaque de Théodore bar Khôni conservé à Berlin et a ajouté un bon nombre de notes pour fixer le

925, semble démontrer si nous le comprenons bien que cette prétendue copie a été faite par un savant européen, et semble donc insinuer qu’on n’a jamais vu la stèle en- tière, qu'on n’en trouvé que des fragments et qu’au lieu de nous livrer ces fragments tels quels, comme le fait M. Pognon, un savant reconstruit la stèle. La ZDMGpublie cet article parce que les intéressés vivent encore et peuvent donc le réfuter s’il y a lieu.

(1) Quelques esprits moroses avaient pris au sérieux ce poème de « la Chule d’un ange » si apparenté aux fantaisies gnostiques : ils en concluaient que l’auteur était panthéiste, athée, matérialiste. Lamartine par bonheur vivait encore ; il eut donc soin d’imprimer en tête des éditions suivantes une profession de foi «en un Dieu possédant la suprême indi- vidualité », et de nous avertir en somme qu’il s’était borné à aligner des vers et que ce serait aller contre sa pensée que de les rattacher au panthéisme, au gnosticisme, au ma- nichéisme, au mazdéisme ou de chercher des équivalents sémitiques ou iraniens aux démons et aux héros dont sa fantaisie a peuplé tout l’ouvrage.

BIBLIOGRAPHIE. 223

sens de divers mots ou passages. Ce fascicule est donc un commentaire excellent du texte édité par M. Pognon et une intéressante étude sur le manichéisme dans 'la Fe chrétienne.

F. Nau.

MICHELANGELO Guipi. Un Bios di Constantino. 85, 66 pages, Rome, 1908 (Extrait du compte rendu de la Reale Academia dei Lincei, τ. XVI, fasc. 6, 9, 10).

M. M. Guidi, fils de M. Ignazio Guidi, vient de publier, d’après de nom- breux manuscrits grecs, la Vie de Constantin et de sainte Hélène dont nous avons résumé une petite partie, AOC, t. X (1905), p. 162-168.

Sainte Hélène, fille d’un hôtelier de Drépanon, est connue par Constant, alors tribun, lors d'une mission en Perse. Celui-ci, devenu empereur, adopte Cônstantin, fils d'Hélène, mais pour calmer la jalousie de Théo- dora, sa femme, il finit par le faire élever à Nicomédie de Bithynie, à la cour de Dioclétien; plus tard, près de mourir, il le fait venir en Bretagne etle prend pour héritier. Constantin va ensuite combattre les Perses, il est fait prisonnier, ses troupes le délivrent et tous retournent en Bretagne. Viennent ensuite les luttes contre Maxence et Maximien, les apparitions de saint Pierre, de saint Paul et de la sainte Croix, la fondation de By- zance et le récit des constructions palestiniennes dues à sainte Hélène. Cette Vie est d’ailleurs très touffue et doit être lue en entier.

M. M. Guïdi signale les passages d’Eusèbe, Socrate, Sozomène et Théo- doret qui sont parallèles au texte édité par lui. Quant aux passages pa- rallèles de Gélase de Cyzique et de Nicéphore Calliste, ils sont si nom- breux qu'ils demanderaient un travail spécial. Il semble que Nicéphore n’emprunte pas à la présente Vie, mais que tous deux proviennent d’une source commune. Cette source serait d’ailleurs antérieure au siècle, car M. M. Guiïdi eu le mérite de montrer qu'il existe deux rédactions différentes de cette Vie contenues déjà toutes deux dans des manuscrits du ΧΙ siècle. Ces deux rédactions ont donc toute chance d’avoir déjà été constituées au siècle précédent et leur source commune serait anté- rieure ; l’auteur semble avoir vécu à Constantinople (p. 38, 1. 13) un cer- tain temps après Héraclius (p. 54, 1. 8-10; p. 56, 1. 17), encore pouvait-il utiliser des documents antérieurs (1).

(1) Rappelons que G. Le Hardy (Nazareth, p. 22 et 120) accusait Nicéphore Calliste d’avoir inventé au xiv° siècle lestextes relatifs aux constructions palestiniennes de sainte Hélène. Il utilisait l'argument suivant, si cher aux historiens des dogmes et aux soi-disant critiques de la Bible : « Les historiens grecs ne marchandaïient certes pas la gloire à Constantin ni à sa mère et s’ils ne se sont pas extasiés sur la fondation d’autres églises en Palestine, c’est que sainte Hélène n’en a pas fondé d’autres. Un millier d'années plus tard, un autre historien grec (Nicéphore Calliste au xiv° siècle), écrivant lui aussi pour la gloire des empereurs à la cour desquels il vivait, n’énumère pas moins le vingt-quatre sanc- tuaires, édifiés par l’impératrice du 1v° siècle. C'était au temps des Paléologues et déjà depuis longtemps, les Grecs s’efforçaient de faire valoir leurs droits sur la Terre Sainte...» L'auteur semble supposer que les historiens ont tout connu, qu’ils ont écrit tout ce qu’ils

224 REVUE DE L'ORIENT CHRÉTIEN.

L'heureux choix de ce travail, aussi important pour l’histoire générale que pour l’histoire des sanctuaires palestiniens, et le soin avec lequel cette édition a été faite, font bien augurer de la carrière scientifique de M. M. Guidi. Π a d’ailleurs près de lui le meïlleur modèle et le meilleur guide que savant puisse jamais souhaiter et fera sans doute tous ses efforts pour s’en rendre digne.

F. Nav.

connaissaient et que tous ces ouvrages ont été conservés et lui ont passé sous les yeux. Dans le cas présent il ignorait la Vie de Constantin, et cette Vie prouve que la construc- tion des vingt-quatre sanctuaires n’a pas été imaginée au xiy* siècle, mais était consignée par écrit du vie au 1x° siècle. Nous avons proposé de nommer cette manière de raisonner « une preuve d’ignorance », car elle est toujours basée sur lignorance de son auteur.

Le Directeur-Gérant : F. CHARMETANT.

ES

Typographie Firmin-Didot οἱ C'°. Paris.

SAINT EUTHYME LE GRAND MOINE DE PALESTINE (376-473)

(Suite)

CHAPITRE IV VIE RELIGIEUSE DE SAINT EUTHYME.

Règlement monastique des laures en Palestine. Mortifications de saint Eu- thyme. Sa vie quotidienne, ses méditations et ses lectures. Retraites quadragésimales dans le désert. Miracles qu’il y accomplit. Dons sur- naturels du saint. Les prophéties. Prescriptions religieuses imposées à ses laurites. Silence et recueillement du saint. Sa direction spirituelle. Principaux traits de son caractère. Action sociale de sa laure.

Il ne suffisait pas à Euthyme d’avoir provoqué une germi- nation merveilleuse de colonies monastiques, 1l lui fallait aussi soutenir et encourager les âmes qu'avaient fatiguées la vie au milieu du monde et ses soucis multiples. Pour cela, ses préceptes et ses exemples s'offraient à elles. Certes! l'existence dans une laure présentait bien des difficultés et des inconvénients, et l’on conçoit que, malgré le vif attrait qu'elle avait inspiré à l'âge d’or du monachisme, elle soit ensuite tombée progressivement dans l'oubli; mais, au siècle d'Euthyme, elle avait encore les sym- pathies du plus grand nombre et toutes les faveurs des âmes avancées dans les voies de Dieu. Aussi convient-il d’en indiquer les lignes principales, afin que le lecteur soit à même d'appré-

cier ensuite la perfection de notre saint. J'en emprunte la des- ORIENT CHRÉTIEN. 15

226 REVUE DE L'ORIENT CHRÉTIEN.

cription à Cyrille de Scythopolis, qui n’avait pas connu la laure primitive de saint Euthyme mais qui, ayant sous les yeux les laurites de Saint-Gérasime et d’ailleurs, nous a retracé briève- ment le genre de vie qu'ils observaient.

Il y deux formes bien distinctes de la vie religieuse : la vie érémitique et la vie cénobitique. Chacune d'elles présente des inconvénients et des avantages, et les maîtres de la vie spiri- tuelle n’ont pas encore réussi à se mettre d'accord pour déter- miner laquelle des deux doit mériter les préférences. Si la pre- mière a, en soi, une grande supériorité sur la seconde, elle exige par ailleurs de ceux qui veulent la pratiquer plus de vertu et plus d'expérience. On peut ajouter aussi qu'elle requiert plus d'instruction et que le tort impardonnable des ascètes orientaux, en général, fut de vouloir astreindre à une vie presque angé- lique des hommes grossiers, sans culture et sans formation in- tellectuelle, qui n'étaient aucunement préparés à la supporter. Pour un Paul le Simple ignorant, capable d'atteindre sous la di- rection de saint Antoine les plus sublimes hauteurs de la con- templation, des milliers d'autres, engagés dans la même voie et abandonnés à leurs seules ressources, végétaient misérable- ment sans produire aucun fruit spirituel. Ainsi que le disait avec beaucoup de sagesse un moine fort expérimenté : « Qui veut habiter le désert sans avoir à en pâtir, doit être déjà un docteur et ne plus avoir besoin de maître. »

C’est pour remédier aux dangers de la solitude et de l’isole- ment qu'on avait engagé les ermites à séjourner dans le voisi- nage des monastères et à ne pas habiter des cellules trop éloi- gnées les unes des autres. C’est encore dans le même but qu'on avait imaginé la création des laures. La laure participe à la fois de la vie commune et de l’érémitisme. Elle se compose d'un nombre plus ou moins considérable de grottes ou de cellules, occupées par un ou plusieurs religieux, qui, tout en étant placés sous l’obédience d’un seul, conservent pourtant leur autonomie propre. Cette existence mêlée adoucit les rigueurs de l'isole- ment, sans assujettir au règlement précis et minutieux des mo- nastères; elle tempère ce que peut avoir de défectueux la vie solitaire, l'homme ne dépendant que de soi incline volon- tiers vers l’'égoïsme, à moins qu'il ne soit un prodige de vertu et de contemplation. |

SAINT EUTHYME LE GRAND. 297

-

La vie des laures, inaugurée pour la première fois en Égypte, 8 Ρ 5}

jouit en Palestine d’une faveur singulière et elle reçoit, à partir

du siècle, une réglementation très détaillée qu'il nous faut maintenant faire connaître. Pendant cinq jours complets de la semaine, du lundi au vendredi, le religieux laurite reste maitre de sa destinée et de son temps qu'il dispose selon son bon plai- sir; il vaque dans sa cellule ou dans sa grotte à la prière et au travail des mains, comme bon lui semble. Le samedi, dans l'a- près-midi, ilsort de son refuge et s’achemine, avec ses compa- gnons, vers l’église pour assister à l'office et à la messe; après

. quoi, il passe la journée du dimanche avec ses confrères, mange

au réfectoire et dort dans une salle commune. Il rend compte en même temps au supérieur et à l'économe de l'emploi de son temps, renouvelle ses provisions de bouche, sa portion d'eau, de branches de palmier et de jones qui lui serviront à tresser

des nattes et des corbeilles, puis 1] regagne sa cellule le di-

manche soir.

Il est interdit aux laurites. du moins à ceux qui dépendaient de saint Gérasime, d'allumer du feu ou de travailler à la clarté de la lampe dans leurs cellules, sous peine de redevenir simples cénobites. De même, on ne les autorise que le samedi et le di- manche, lorsqu'ils sont réunis en communauté, à manger des aliments cuits et à goûter un peu de vin; ce qui n’est jamais permis dans les cellules. Les autres jours de la semaine, ils doivent se contenter de pain, d'eau et de dattes. Sur ce point la règle est formelle et ne souffre aucune exception. Quelques moines ayant demandé à saint Gérasime la permission de faire chauffer leur eau, de manger des légumes cuits et de lire le soir après le coucher du soleil, il le leur interdit formellement en disant : « Si vous voulez vivre de la sorte, vous n’avez qu'à vous retirer dans un monastère, car je ne le souffrirai jamais de la part d’anachorètes. »

Pour tout ameublement, la cellule d'un laurite comprend une natte qui lui sert de lit, un traversin en paille ou en joncs, une couverture pour se couvrir la nuit et une cruche d'eau pour boire et attendrir les palmes ou les tiges de jorcs. Pas un d’en- tre eux ne possède d'habit de rechange et le vêtement qui revient à chacun est des plus pauvres et des plus modestes. De plus, il est enjoint à tous de laisser toujours la porte de la cellule ou-

228 REVUE DE L'ORIENT CHRÉTIEN.

verte, au moment de leur sortie, afin que les étrangers puissent s'édifier au spectacle de leur pauvreté et leurs confrères em- porter l’eau ou les palmes qui leur seraient nécessaires.

Telle est, en quelques mots, l'existence ordinaire d’un lau- rite, celle que mena saint Euthyme pendant soixante-huit ans et qu’il imposa à tous ses religieux, si l'on excepte pourtant la défense de lire ou d'écrire en cellule à la lumière de la lampe, défense qui ne paraît pas avoir été en vigueur dans sa laure. On comprend que de pareils ascètes aient considéré la vie com- inune dans un monastère comme une simple concession, faite à la médiocrité des jeunes gens et des personnes faibles. On comprend également que saint Sabas ait dit un jour à son ami, saint Théodose le Cénobiarque : « Père abbé, vous êtes higou- mène des enfants ; pour moi, je suis higoumène des higoumènes, car chacun de ceux qui me sont soumis, étant maître de sa personne, de sa propre cellule est le supérieur. »

Si les simples religieux se courbaient sous un joug aussi pénible, on juge de la ferveur qui était manifestée par ceux qui leur commandaient. Au témoignage de saint Cyriaque qui l'avait particulièrement connu, jamais Euthyme ne goûta à quoi que ce füt, hormis le samedi et le dimanche, il consentait à interrompre son Jeüne. Cette frugalité proverbiale se retrouve au même degré chez plusieurs ascètes d'Égypte ou de Pales- tine et, si étonnante qu'elle nous paraisse, elle est absolument garantie.

Nous avons une lettre de saint Barsanuphe, un émule d'Eu- thyme au vi‘ siècle, qui ne permet pas le moindre doute à ce sujet. « Je sais un homme, écrit cet anachorète, que le Seigneur connait et qui observe la règle suivante : Un jour ou deux par semaine, et même davantage, il se contente de nourriture spiri- tuelle, et la douceur de celle-ci lui fait oublier la nourriture corporelle. » ILest clair que saint Barsanuphe parle de lui-même dans ce passage, en dépit de cette vigoureuse protestation : « Pardonne-moi, mon frère, de ce que ne trouvant pas à me glorifier de ce qui est à moi, je me glorifie des travaux des autres, et cela pour ma propre condamnation. » La sévérité de ce régime n'allait pas, du reste, sans de sérieux renoncements et, encore, l'exemple de Barsanuphe atteste ce que de pareilles privations durent coûter à saint Euthyme : « Lorsque cet homme

SAINT EUTHYME LE GRAND. 229

que le Seigneur connaît, continue Barsanuphe, se présente pour manger, comme un homme qui est déjà rassasié et saturé, il ne veut d’abord rien prendre. Pendant qu'il mange, il se con- damne lui-même en disant : « Pourquoi ne suis-je pas mainte- « nant comme lorsque je ne veux pas manger? » et, ce nonobs- tant, il désire manger encore (1). » Telle est bien, en effet, la faiblesse de la nature humaine, que les saints déploraient mais qu'ils étaient aussi dans l'obligation de respecter, à moins a’attenter directement à leur vie.

Le silence et le recueillement d'Euthyme allaient de pair avec sa sobriété. Α moins d'une nécessité absolue, qui naissait par- fois de sa charge elle-même, il ne voyait personne du lundi au vendredi. Il aurait voulu se priver complètement de sommeil, mais il ne put, malgré tous ses efforts, renoncer à ce besoin inné de la nature; du moins, il fit de cette condescendance presque un autre supplice. Dès que l'excès de la fatigue le con- traignait au repos, il s’asseyait un moment en fermant les yeux, ou bien il S’appuyait des deux mains à une corde suspendue au plafond dans un coim de sa cellule. À peine avait-il clos ses paupières, qu’il se réveillait en répétant le mot de saint Arsène : « Viens ici, mauvais serviteur. » Jamais personne ne le vit couché afin de se reposer.

Du reste, en tout et partout, Euthyme était préoccupé d’imiter les actions de saint Arsène, + 445. Tant que ce grand solitaire vécut, il interrogeait les moines qui l'avaient connu en Égypte, se faisait raconter les particularités de sa vie, qu'il écoutait avec une attention extrème dans le dessein de les reproduire. Il imprimait dans son cœur, nous dit l’hagiographe, ce qu'il apprenait de ses vertus, sa tranquillité, son humilité, ses absti- nences, ses veilles, sa vigilance et sa sobriété; il se répétait à lui-même, comme plus tard saint Bernard, le mot qu’Arsène redi- sait sans cesse : « Euthyme, pourquoi as-tu quitté le monde? » Tout ce qui avait distingué l'ancien précepteur des fils de Théo- dose se retrouvait en lui avec le même éclat : sa componction, ses larmes, son amour de la solitude, son éloignement des con- versations, sa charité, sa discrétion, sa ferveur et son application à la prière, enfin cette grandeur d'âme qui se manifestait dans

(1) Échos d'Orient, t. VIII (1905), p. 18.

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toute sa conduite. Volontiers il eût répondu, avec Arsène, à ceux qui lui demandaient pourquoi il fuyait leur société : « Dieu sait bien que je vous aime, mais il m'est impossible de vivre en même temps avec le Seigneur et avec les hommes. »

On peut donc redire d'Euthyme ce que l'on a dit de si nom- breux anachorètes : son corps était sur la terre, mais son esprit vivait dans les cieux. En dehors du travail manuel et de l’orai- son mentale, sa journée était entrecoupée par des lectures pieuses, par la récitation ou le chant des hymnes et des psau- mes. Ici, force nous est bien de suppléer au silence de l'hagio- graphe par ce qui se pratiquait généralement dans les autres maisons religieuses, car, bien qu'un champ très vaste fût laissé dans les laures à l'initiative personnelle, la vie monastique se répétait à peu près partout et l'existence d'Euthyme devait, sur bien des points, ressembler à celle des autres anachorètes. S'il priait durant son travail, s’il veillait même presque toute la nuit afin de prier davantage, il retenait sur sa journée quelques heures qui étaient plus spécialement consacrées à la méditation et à la lecture. Son âme cherchait surtout son aliment dans les saintes Écritures et, parmi les ouvrages de l'Esprit Saint, les évangiles, les psaumes, les livres parénétiques devaient avoir toutes ses préférences.

Nul n'était tenu alors à la récitation quotidienne de l'office, qu'il fût moine ou prêtre séculier, engagé dans les ordres ou frère laïque, et cela dans l'Église d'Occident aussi bien que dans les Églises orientales. L'office liturg'ique précédait, accom- pagnait et suivait la messe et, pour lui comme pour la messe, l’église était son domaine propre. Dans les laures palestiniennes, la messe ne se célébrait que les dimanches et les jours de fête, il en était de même de l'office liturgique. Nous savons qu'Euthyme n’y manqua Jamais et que, même dans le désert, pendant sa retraite quadragésimale, ses compagnons se réunis- saient auprès de lui pour recevoir, une fois la semaine, le pain des forts de ses propres mains.

Mais si aucune règle ecclésiastique ne faisait de l'office une obligation personnelle, la tradition immémoriale des ascètes assignait certaines heures du jour et de la nuit à la récitation ou au chant de tels psaumes, de tels répons et de telles anti- phones. La liberté individuelle était grande, il est vrai, en

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pareille matière, bien qu'il existät certaines coutumes et pra- tiques dont aucun religieux n'aurait osé s'affranchir. Il n’y pas de raison de supposer que saint Euthyme se soit soustrait à cette loi orale, que l’on retrouve aux origines de toutes les ins- titutions et qui est parfois appliquée aussi scrupuleusement que les lois écrites. Bien plus, toute la tradition byzantine, suivant en cela son biographe, Cyrille de Scythopolis, lui attribue la première codification des lois monastiques, concernant l’exis- tence des moines et les détails du service divin. Ces règles, une fois fixées par écrit, furent transmises au plus illustre dis- ciple de saint Euthyme, à saint Sabas, qui les modifia à son tour. Depuis, les retouches qu'elles ont subies ont été si nom- breuses et si profondes qu'elles en ont peut-être changé com- plètement le contenu et que, en l'absence d'une bonne édition critique, il est impossible d'attribuer à chacun la part qui lui revient. Mais la part d'Euthyme est considérable et c’est à lui qu'est l'honneur d’avoir, le premier, rédigé ce fameux Typi- con de Jérusalem ou de Saint-Sabas, qui, encore de nos jours, fixe ce qui concerne le service divin de toute l’année dans les Églises orientales de rite byzantin.

La méditation des livres saints, le chant des psaumes et l’o- raison mentale ne pouvaient remplir la journée fort longue d'un anachorète. Comme ces divers exercices s’alliaient fort bien avec le travail des mains, il restait encore au propriétaire d’une cellule plusieurs heures libres à son entière disposition. Com- ment les employait Euthyme? Son biographe, qui suivait à peu près le même règlement que lui et qui écrivait pour ses dis- ciples, jugé inutile de nous transmettre l'emploi détaillé de son temps, mais nous croyons que la lecture constituait la partie essentielle de son ordre du jour. Il n'y avait peut-être pas encore, du vivant d'Euthyme, de bibliothèque commune que pussent consulter tous les laurites, mais chacun d'eux, et lui très certainement, possédait dans sa cellule des ouvrages patristiques, des Vies de saints, surtout des recueils monasti- ques de la Thébaïde. Ces derniers écrits obtinrent de tout temps les faveurs des moines, par la manière même dont ils étaient composés. Mélange curieux de prescriptions ascétiques, de proverbes empruntés au bon sens populaire, de faits avérés et de contes fantastiques, ils devaient par leur bigarrure plaire à.

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l'imagination ardente de ces hommes, pour qui le surnaturel n'allait pas sans merveilleux et sans prodiges éclatants.

Que l'esprit d'Euthyme se soit nourri de ces lectures pieuses, c'est à quoi ses fonctions de supérieur et de directeur de con- science l'obligeaient particulièrement et ce que manifestent les réponses ou les discours mis dans sa bouche par l'hagiographe. Mais sa qualité d'Arménien, la robustesse de son bon sens qu'il tenait de la classe moyenne le mettaient en garde contre les exa- gérations ; elles lui interdisaient de lâcher la proie pour l'ombre, de préférer les rêves aux réalités et de marcher sur les nuages.

C’est encore cette modération, qu'il apportait en tout et qu'il recommandait à tous, qui l’'empêcha de verser dans les morti- fications extérieures. Il se proposait de mortifier son corps, non de le réduire à merci; de l’assujettir, non de l’exténuer. Aussi, dans sa longue carrière monastique, n'est-il jamais parlé de discipline, de haire, de bracelet, de ceinture de fer, bref d'aucun de ces instruments de torture que mirent à la mode les péni- tents et les religieux du moyen âge. Tous ces supplices corpo- rels lui étaient absolument inconnus et il n’est même pas vrai- semblable qu'il ait jamais porté un cilice. Il s'en tenait aux mortifications que lui avait léguées la tradition de l'Égypte, aux jeùnes prolongés, aux veilles incessantes, aux stations conti- nuelles. Sa forte constitution l’autorisait, du reste, à en user sans crainte. S'il parvint à se passer à peu près de sommeil, à rester en temps ordinaire cinq jours de la semaine sans prendre aucune nourriture et à se tenir presque toujours debout, sa santé n’en ressentit pas la moindre atteinte, et nous le verrons mourir à l'âge de quatre-vingt-dix-sept ans, presque sans mala- die et sans avoir subi le cortège de misères qui s'impose habi- tuellement à la vieillesse.

La principale austérité de cette existence consistait dans sa monotonie; elle sévit dans le sanctuaire et le cloitre autant sinon plus qu'en tout autre lieu et, si elle n'est promptement combattue, elle finit par engendrer le dégoût ou la routine. De ces deux alternatives également funestes, Euthyme savait se prémunir et, à l'exemple des travailleurs consciencieux qui oublient un labeur en en commençant un autre, lui trouvait ses délassements à redoubler de mortifications. Ce zèle dévorant le saisissait surtout aux approches du carême. Du 14 janvier au

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dimanche des Rameaux, il se retirait chaque année dans le désert de Juda; il y priait et y vivait, Dieu sait comme. A cette rude pratique importée d'Arménie il resta toujours fidèle, Depuis son arrivée en Palestine, vers 405, jusqu'à l’année 473, date de sa mort, il n'y manqua qu'une seule fois, l’année même de sa mort, et il n'avait plus que six jours à vivre. D'abord suivi de Théoctiste et de Domitien, iladmit plus tard à partager ses pé- nitences ses disciples ou ses imitateurs les plus austères, comme Gérasime, Martyrios, Élie, Longin et même le jeune Sabas.

Si le nombre de ceux qui accompagnaient Euthyme dans le désert était fort réduit, les autres religieux de la laure n’en restaient pas pour cela pendant le carème confinés dans leurs cellules. Ils s’enfonçaient aussi dans la solitude, mais moins profondément qu'Euthyme, ayant soin de se tenir à portée d’un monastère ou d’une laure pour y passer la journée du dimanche ou s’y réfugier dans un danger pressant. Le départ général, fixé au 11 janvier du vivant d'Euthyme, avait quelque chose de grave et d'impressionnant; la scène des adieux présentait, dans sa simplicité même, un caractère affectueux et dramatique, que l'on retrouve de nos jours au séminaire des missions étrangères, lors du départ des missionnaires.

Dès que le jour du départ était venu, tous les religieux se réunissaient à l’église; le supérieur célébrait une messe solen- nelle et chacun, à son tour, s'approchait de l’autel pour parti- ciper aux divins mystères. On se rendait ensuite au réfectoire prendre une légère collation et de là, une seconde fois, à l’église. Après de longues oraisons suivies de prostrations nombreuses, tous les moines se donnaient l’accolade fraternelle et ceux qui devaient prendre part à la retraite quadragésimale se jetaient aux genoux de l'higoumène pour lui demander pardon de leurs errements passés et implorer humblement sa bénédiction. La porte du monastère était alors grande ouverte et chacun s’en allait lentement, modeste, les yeux baissés, tandis que les voix graves des anachorètes égrenaient les versets du Psaume xxvi, sublime de confiance en Dieu :

Le Seigneur est ma lumière et mon salut : Qui craindrais-je? Le Seigneur est le rempart de ma vie : Devant qui tremblerais-je?

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A mesure que les premières strophes du psaume se dérou- laient dans les airs en lentes mélopées, les ascètes se char- ceaient des provisions de bouche qu'ils avaient déjà choisies. Les uns ne prenaient que du pain, d'autres des figues ou des dattes ; les plus tièdes y ajoutaient des légumes cuits à l’eau ; les plus fervents auraient cru douter de la Providence en em- portant la moindre nourriture : ils comptaient sur les herbes et les racines qui poussent même au désert. Et tandis que cha- cun franchissait la clôture du monastère, les yeux fixés devant soi, sans regarder la direction que prenaient ses compa- enons (1), le chœur achevait l'appel à Dieu d’une voix vibrante :

Seigneur, enseigne-moi ta voie; Dirige-moi dans un sentier uni, à cause de ceux qui m'épient. Ne me livre pas à la fureur de mes adversaires, Car contre moi s'élèvent des témoins de mensonges, Et des gens qui ne respirent que violence.

Ah! si je ne croyais pas voir la bonté du Seigneur Dans la terre des vivants... Espère dans le Seigneur! Aie courage, que ton cœur soit ferme. Espère dans le Seigneur!

Il arrivait parfois que saint Euthyme trouvait le désert qui lui servait ordinairement de refuge trop fréquenté encore pour son cœur insatiable d'isolement et qu'il se retirait plus au sud, dans la région inexplorée de la mer Morte. Au milieu des dunes verdâtres ou des collines arides, la chaleur est intense et la ré- verbération du soleil intolérable. Pas un souffle d’air ne pénètre dans ces gorges, pas un arbre n'offre d'ombre protectrice. Les parois blanchätres, le sable, les pierres, les misérables touffes d'herbe, tout prend la couleur du feu. L’imagination surchauffée est en proie à toutes les séductions du mirage; elle illusionne les yeux, qui découvrent des lions mollement étendus, des mai- sons de campagne, des palais, des forteresses imprenables, tout

(1) Le cérémonial de cette scène grandiose nous à été conservé par saint S0- phrone dansla Vie de sainte Marie l'Égyptienne, Migne, P. G.,t. LXXX VII, pars tertia, col. 3701 seq. La traduction de ce psaume est empruntée à la Bible de Crampon,

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ce qu'un esprit malade peut rêver; elle pare ces lieux qui sont la désolation même des teintes les plus vives et les plus cha- toyantes ; elle crée surtout de beaux lacs, pareils à d'immenses nappes de métal en fusion dont on approche, confiant, pour étancher une soif de fiévreux. Et la belle nappe d’eau se dé- robe aux poursuites, elle recule indéfiniment, toujours aussi limpide, pendant que le soleil darde sur les têtes ses rayons de plus en plus brülants. Ah! comme devant cette ironie de la nature, on est tenté, à l'exemple d'Agar, de se coucher au pied d'une roche et d'attendre, dans la paix et le silence, la mort qui ne tarderait pas à venir.

C’est ce que fit un jour saint Sabas, pendant le carème de 469, alors que saint Euthyme touchait à la fin de sa carrière et que lui-même atteignait sa trentième añnée. Le jeune homme af- frontait pour la première fois les fatigues d’une pareille entre- prise et, soit faiblesse naturelle, soit que Dieu voulût manifester le crédit de son serviteur, il était tombé de défaillance, à demi mort de soif. On devine l'émotion d'Euthyme, lorsqu'il vit son cher disciple réduit à toute extrémité. Il se retira un peu à l'écart et supplia Dieu, à genoux, d'assister son enfant dans une nécessité si pressante; puis, sa prière finie, il prit le hoyau qui leur servait à arracher les herbes de leurs repas, en donna quelques coups à terre et fit jaillir une source, qui apaisa la soif de saint Sabas.

La foule, qui connaissait la vertu de saint Euthyme, savait à l'occasion utiliser sa grande influence auprès de Dieu; elle accourait de préférence en ces circonstances solennelles, sûre d'obtenir de lui l’objet de ses prières. Ainsi, une année que sé- vissait une redoutable sécheresse, lorsque « la terre était de fer et le ciel d’airain », pour employer un mot de l'Écriture cité par l'hagiographe, les habitants des bourgs et des villages en- vironnants se précipitèrent vers la laure avec des croix à la main et en lançant, de cœur encore plus que de bouche, cette supplication touchante : « Seigneur, ayez pitié de nous! » Eu- thyme, touché de compassion à la vue de cette multitude, leur dit : « Mes chers enfants, je ne suis qu'un misérable pécheur, qui besoin plus qu'aucun autre de la miséricorde de Dieu. Dans un temps il fait éclater sa colère, je ne suis pas assez présomptueux pour m'adresser seul à lui; mais parce qu'il est

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infiniment bon, prosternons-nous devant sa face et il nous exaucera. » Après avoir donné l'ordre au peuple de prier, 1] entra lui-même avec ses religieux dans l’église de la laure et, tandis que les supplications s'échappaient de ses lèvres, la pluie tombait en abondance sur la terre altérée.

Au dire de l'hagiographe, des grâces extraordinaires récom- pensaient la fidélité mise par le solitaire au service de Dieu. Un jour qu'Euthyme offrait le saint sacrifice, Domitien l’assistait à l'autel en qualité de diacre, tenant l'éventail sacré à la main, lorsqu'on les vit soudain environnés tous deux d’une flamme céleste qui nimbait leurs fronts et les auréolait de gloire depuis le commencement de l'oblation Jusqu'à la fin de la messe. Des assistants laïques se tenaient alors tout près d'Euthyme; ils furent si frappés du prodige qu'ils n'osèrent plus de leur vie approcher du sanctuaire pendant la célébration de la sainte li- turgie. Euthyme aurait même une fois raconté à plusieurs de ses religieux qu'il voyait souvent les chœurs des anges assister au sacrifice de la messe ou le célébrer avec lui. Il aurait encore avoué qu’en distribuant la sainte eucharistie, Dieu lui montrait à nu la conscience des communiants, dont les uns recevaient la vie, tandis que les autres trouvaient la mort dans cette nour- riture céleste.

Ne soyons pas surpris de ces confidences, qui ne sont pas nécessairement une invention du biographe ou de ses infor- mateurs, non plus qu'une atteinte à l'humilité requise des servi- teurs de Dieu. L'ascète dont nous avons déjà parlé, saint Bar- nuphe, ne disait-il pas un jour à un de ses correspondants : « Tout ce que je t'ai écrit par la main de notre cher enfant, qui nous aime de toute son àme, tout cela je te l'ai écrit, non pas de ma propre volonté, mais sur l’ordre de l'Esprit-Saint (1). » Et, un autre jour, le même saint ne faisait-il pas à son secré- taire cet aveu significatif : « Quand bien même 16 te dicterais à la suite mille mots à écrire, l'Esprit de Dieu ne permettra pas que tu en écrives un de plus ou un de moins, même malgré toi, mais il guidera ta main pour que tu les écrives tous à la suite et dans l’ordre je les aurai dits (2). » Le bon saint Bar-

(1) Échos d'Orient, t. VIII (1905), p. 17. (2) Échos d'Orient, loc. cit. -

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nuphe s'illusionnait sans doute. Toutes les lettres de direction que dictaient ses lèvres et qui passaient par la plume de son secrétaire n'étaient pas favorisées d’une assistance divine spé- ciale, qui aurait laissé derrière elle la révélation des prophètes et l'inspiration biblique des auteurs sacrés.

J'arrive aux prophéties, aux prévisions de l’avenir,aux prédic- tions qui sont nombreuses dans la Vie de notre saint. Ainsi Eu- thyme aurait annoncé longtemps à l'avance que le chorévêque Anastase deviendrait patriarche de Jérusalem, et l’on devine la scène piquante dont fut témoin à cette occasion toute la laure, lorsque Euthyme, entourant déjà le chorévêque des égards qui sont dus au premier pasteur du diocèse, ses reli- gieux l’avertirent en vain de sa singulière méprise. Il prédit également la défection de l’impératrice Eudocie, sa conversion future et sa prochaine mort. Il recourut inutilement à la menace d'une chute scandaleuse pour arrêter le moine Domnos qui voulait rejoindre son oncle, le patriarche d’Antioche, et le dis- ciple rebelle ne revint à résipiscence que lorsque, dépossédé du patriarcat, il se rappela la prédiction du saint. Il aurait en- core mis un terme à la stérilité de la femme du cheikh Té- rébon en lui annonçant la naissance de trois enfants. Enfin, il fit part à tous ses religieux de sa mort et de celle de Domitien en des termes qui ne laissaient aucune prise à la moindre hési- tation. |

Ces exemples, dont il serait aisé d’allonger encore la liste, ne sont pas particuliers à saint Euthyme; on en lit d’analogues dans d’autres Vies de saints. Il y lieu toutefois de les sou- mettre à une critique sévère, pour que le lecteur n’accorde sa confiance qu'à bon escient. Tout d’abord, les faits qui vien- nent d'être signalés ont été consignés par l'hagiographe plus de quatre-vingts ans après la mort du saint, alors qu'il n’'exis- tait plus qu'une seule personne, saint Cyriaque, qui eût connu personnellement Euthyme. Encore convient-il de noter que saint Cyriaque n'avait pas été témoin oculaire de ces prophé- ties, qui étaient toutes antérieures à son séjour en Palestine, quelques-unes même antérieures à sa naissance. Et se serait-il donné comme tel que son témoignage n'en serait pas moins suspect, car saint Cyriaque, qui avait près de cent huit ans au moment il faisait ces révélations, semble avoir dépassé à

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cet àge toutes les bornes de la crédulité. Ne racontait-il pas un jour à Cyrille de Scythopolis, de l'air le plus naturel du monde, qu'un lion s'était constitué gardien de son potager et protégeait ses salades contre les attaques des animaux mal- faisants ? ;

Ces réserves au sujet des prophéties d'Euthyme ne sauraient en rien affaiblir sa sainteté ni son influence, car l’une et l’autre paraissent avoir été considérables ; elles étaient toutefois bonnes à faire, les disciples des saints, comme ceux des grands hom- mes, étant tous plus ou moins enclins aux pieuses exagé- rations.

La création d'une laure et la sanctification personnelle, poursuivie en dépit de tous les obstacles, voilà tout autant d'œuvres considérables qui peuvent attirer sur une âme les bénédictions du ciel. Euthyme y employa toutes ses énergies et nous avons vu de quels dons surnaturels Dieu semble l'avoir favorisé. Mais la tâche d’un supérieur serait par trop incom- plète, lui-même resterait trop au-dessous de son devoir, s’il se désintéressait de sa maison et du progrès spirituel de ses reli- gieux. Devant Dieu il aura à répondre de leurs âmes comme de la sienne propre; d’où résulte pour lui l'obligation pressante de veiller à l’observance de la règle, et du corps de la règle aussi bien que de son esprit. Cette responsabilité qui lui in- combe embrasse la marche générale de la communauté, non moins que les détails de la vie journalière de chacun de ses membres et, sans revêtir les dehors d'une inspection tracas- sière, sa clairvoyance doit, comme l'œil de la Providence, s'é- tendre à tous et ne gêner personne en rien. Pour un supérieur de laure, comme l'était saint Euthyme, la charge se trouvait rendue d'autant plus facile que chaque religieux devait avoir atteint un éminent degré de perfection; néanmoins, il fallait obvier à des lacunes, soit dans l’organisation d'ensemble de la communauté, soit dans la distribution des offices monastiques et la direction particulière de chaque religieux; il fallait sur- tout parer aux mille imprévus que présente le gouvernement de toute société.

La règle monastique que saint Euthyme avait imposée à sa laure comprenait, en dehors des prescriptions générales que nous avons déjà fait connaître, certaines mesures qui s’intro-

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duisirent ensuite dans les autres monastères et qu'il importe de signaler. Les femmes étaient exclues de la laure, comme les eunuques et les imberbes. Pas d'exception à cette loi draco- nienne, même en faveur des têtes couronnées. Lorsque l'impé- ratrice Eudocie rechercha la société du solitaire pour abjurer ses erreurs monophysites, l’accès de la laure lui demeura in- terdit; ce qui la contraignit à construire une tour à quelque distance de pour y jouir des entretiens de notre saint. De même, une femme démoniaque ne put approcher du tombeau d'Euthyme et elle dut prier et jeüner hors de la clôture jusqu'à sa complète guérison. Réciproquement, tout religieux de la laure qui entrait dans un monastère de femmes ou entretenait avec des personnes du sexe des relations orales ou écrites, sans l’au- torisation préalable du supérieur, était banni pour toujours de la communauté.

La permission de s’absenter le samedi n'était accordée à per- sonne, hormis le cas d'une nécessité urgente, la vigile et le chant des offices liturgiques réclamant, ce jour-là, la présence de tous les moines. Euthyme était également très sévère, et-à bon droit, sur les sorties dans le désert, à part le temps du ca- rême. Ceux qui s’en allaient ainsi sans l’agrément du supérieur ne devaient recevoir aucune nourriture au retour, comme ils n'avaient emporté aucune provision à leur départ. Cette con- damnation absolue de l’idiorythmie est remarquable, car en laissant au moine la liberté de se gouverner à sa guise, on au- rait sapé par la base toute vie religieuse. L'exemple des monas- tères idiorythmes du mont Athos est, du reste, aujourd’hui pour nous montrer ce quil advient des traditions monasti- ques avec un pareil régime. Euthyme régla de même la succes- sion des moines qui étaient rappelés à Dieu ou promus à des di- gnités ecclésiastiques ; à aucun prix, leurs cellules ne pouvaient être distraites de la laure, cédées ou vendues soit à de simples particuliers, soit à des religieux d’autres couvents.

Bien que la règle des laures ne comportàt peut-être pas une telle prohibition, Euthyme s'était fait une loi absolue de n'ac- cepter aucune visite tumultueuse. C’est ainsi que, malgré les liens de la plus sincère affection qui l’attachaient au patriarche Anastase, il ne voulut jamais consentir à le recevoir dans sa laure, et, pour mettre un terme à ses vives instances, sans ce-

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pendant blesser une personne envers laquelle 1] n'avait que des obligations, il sut tempérer son refus par une charmante ré- ponse, telle qu'il n'en sort que de la- bouche ou de la plume des saints : « Quant à l’entrevue que vous sollicitez, lui disait-il en substance dans une lettre, ne me tourmentez plus à ce sujet; je ne fais d'exception pour personne. Si je vous reçois, il faudra que j'en reçoive d'autres, et si je ne vous reçois pas, il est bien évident que je ne recevrai personne. » Et comme le patriarche ne se rendait pas et qu'Euthyme se refusait à accorder le moin- dre fléchissement de la règle en faveur de la premiere autorité spirituelle du diocèse, on arrêta d’un commun accord comme lieu de rendez-vous un terrain neutre, le monastère de saint Théoctiste qui dépendait également de notre saint.

On comprend d'autant mieux le mérite qu'il y avait pour Eu- thyme à afficher un tel amour de l'indépendance, qu'il courait le risque de s’éxposer à de sérieux mécomptes. Sa laure n’était pas, en effet, comme les maisons religieuses d'un grand nom- bre d'Instituts occidentaux, soustraite à la juridiction de l'or- dinaire. Le patriarche de Jérusalem était le supérieur ecclésias- tique naturel d'Euthyme; de lui il tenait tous ses pouvoirs et, à la mort de saint Théoctiste, son intervention lui fut nécessaire pour être confirmé dans la charge de supérieur des deux monas- tères. Les évêques de Jérusalem entendaient, du reste, conserver leurs droits et les exercer au moment voulu et nous savons que Juvénal (1) avait l'habitude de visiter, pendant le carême, tous les couvents situés aux alentours de la Ville Sainte. Pour que saint Euthyme seul ait osé se refuser ainsi à tout contrôle, il fallait que son pouvoir sur ses religieux comme auprès des au- torités ecclésiastiques demeuràt incontesté et que son crédit, consolidé par sa vertu, balancçät celui des évêques du diocèse.

La liberté de la solitude que saint Euthyme maintenait in- tacte vis-à-vis des grands, il savait la protéger aussi contre les indiscrétions possibles de ses religieux. Nulle visite et aucune réception, tel est le programme qu'il s’imposa et qu'il suivit méticuleusement du lundi au samedi pendant les cinquante ou soixante années que dura sa vie monastique dans la laure. Au

(1) F. Nau, Les plérophories de Jean, évéque de Maïouma, Paris, 1899, in-8&, DATE

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monastère de Saint-Théoctiste, il se montrait plus accessible et recevait chaque jour les religieux qui voulaient s'adresser à lui ; mais son séjour dans ce couvent fut de courte durée et ne se rapporte qu'aux premiers temps de sa vie solitaire. A la laure, son biographe ne signale que trois ou quatre infractions à la dure réclusion qu'il s'était prescrite, etelles furent toutes provo- quées par des motifs de charité. Seul de tous les jours de la se- maine, le dimanche était consacré aux offices liturgiques, à des conférences spirituelles ; c'était aussi le jour les moines pouvaient tour à tour s’entretenir librement avec leur supérieur des affaires de leur conscience.

Il n’est pas facile de déterminer aujourd’hui le genre de direc- tion qu'adopta saint Euthyme. Aucun monument littéraire venu de sa main ne nous été conservé. A part certaines lettres qu'il adressa aux patriarches de Jérusalem et les règles monastiques que Cyrille de Scythopolis lui fait remettre à saint Sabas, il n’est même pas sûr qu'il ait jamais rien écrit. Toutefois, à présent que nous possédons (1) les lettres de direction 840 environ de deux moines palestiniens du vi° siècle, saint Barsanuphe et saint Jean le Prophète, les rapports particuliers d’un supérieur de couvent avec ses religieux nous sont parfaitement connus. Le rendement de compte, un des moyens les plus puissants de sanctification dans la vie religieuse, y tenait lieu de tout et remplaçait à peu près tous les autres exercices. Parfois, il con- sistait en une ouverture de conscience, que nous appellerions confession, bien que cette pratique ne fût ni très fréquente ni très complète dans les monastères de jadis; parfois il se bornaït à solliciter des conseils sur la fuite de tel péché ou l'acquisition de telle vertu. La plupart du temps, dans ce colloque familier avec son supérieur, le moine lui dévoilait les obstacles qu'il rencontrait dans l'exécution des ordres donnés; il lui soumettait des cas de conscience qui le concernaient ou que lui avaient posés

ses confrères ; il lui demandait des éclaircissements sur un pas-

sage de la Bible, sur une pratique de la liturgie, ou sur une ob- servance monastique. Dur enverslui-même, Euthyme fut toujours d'une indulgence

(1) Voir les articles des Échos d'Orient, t. VII (1904), p. 268-276 et τ. VIII (1905). p. 14-25). ORIENT CHRÉTIEN. 16

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extrême à la faiblesse d'autrui. De bonne heure, la discipline avait amorti en lui les passions et, comme les vieillards, il pra- tiquait largement la condescendance. Ses conseils d’une urba- nité exquise montrent bien que nous sommes en présence d'un vrai saint, modéré par tempérament et connaissant son monde, bien qu'il se fût retranché depuis de longues années du nombre des vivants. Sa douceur et sa bonté étaient telles qu'il gagnait par cette voie les esprits les plus farouches: sa chasteté, sem- blable à celle des anges, lui faisait découvrir les pensées les plus secrètes. Il délivra ainsi un de ses religieux de l'esprit de fornication, qui l'avait saisi pour avoir succombé à une mau- vaise sollicitation.

Dans les courtes exhortations qu’il adressait aux moines cha- que dimanche, il leur recommandait surtout l'humilité, le dé- pouillement de sa propre volonté, le travail des mains et la mortification, vertus dont il donnait constamment l'exemple. Il veillait à ce que le silence fût observé dans les cellules et ne permit Jamais que la moindre parole fût prononcée à l’église ou au réfectoire, les deux lieux réguliers par excellence. Enfin, il ne pouvait souffrir que des jeunes religieux affectassent de jeû- ner plus austèrement que les anciens, parce qu'il désirait, se- lon le précepte de l’évangile, que l’on cachàt du mieux possible le bien que l’on faisait. Si quelqu'un avait été tenté parfois de trouver ses avis spirituels un peu trop relàchés, en invoquant l'exemple des vieux moines de la Thébaïde, il leur aurait cer- tainement, comme Barsanuphe, répondu avec autant de grâce que de bonhomie : « Les pères du désert menaient un régime plus austère, parce qu'ils trouvaient leurs corps beaucoup plus obéissants que les nôtres... Si nous tenons le juste milieu, nous arriverons progressivement au mieux. Il ne faut pas, lorsqu'on pose le pied sur le premier degré de l'échelle, vouloir en même temps se trouver au sommet. » On ne saurait mieux dire, sur- tout lorsque chacun des jours de sa propre existence est écrit en lettres de souffrance et de mortification, comme l'étaient ceux de saint Euthyme.

Ce qui parait avoir surtout dominé en saint Euthyme dans ses relations avec ses religieux, c'est sa bonté et sa douceur. Son expérience de la vie l'avait convaincu qu'il ne faut pas être ex- trême dans ses affections. De même, elle lui rappelait sans cesse

SAINT EUTHYME LE GRAND. 243

qu'on habite le domaine des généreuses abstractions en s’ima- ginant que l'habit et les pratiques religieuses transforment su- bitement les natures. Aussi, grâce à sa délicatesse, à son cœur d’or tendu sur une main large ouverte, ne rencontre-t-on, chez les moines de sa laure, nulle trace, je ne dirai pas de révolte ou de mutinerie, mais de paroles amères ou de récriminations con- tre leur supérieur. Le fait est d'autant plus digne d'attention qu'il se faisait fort rare, du moins en Palestine. C'est ainsi que. le long supériorat de saint Sabas fut occupé en grande partie par des démélés avec ses religieux, qui l’expulsèrent et qu’il expulsa à son tour. Il est vrai que saint Sabas était Cappadocien et que, d'après un proverbe populaire du temps : « le Cappadocien est mauvais de nature ».

Le biographe de saint Euthyme ne signale que deux actes répréhensibles chez ses religieux, alors qu'il dirigeait la laure. L'un d’entre eux ne voulut pas se charger d’un travail manuel, qu'iltrouvait trop absorbantettrop vulgaire pour uncontemplatif; deux autres, pris de dégoût et rongés par l'ennui, tentèrent de s'évader de leurs cellules pendant la nuit. Α l’un comme aux autres Euthyme sut adresser des paroles touchantes, capables d'ébranler des cœurs de pierre, et, comme elles étaient sans effet sur leur obstination, il recourut, cette fois, à des mesures énergiques, qui eurent raison de leur entèêtement. Ces deux exemples nous prouvent que, chez lui, la vigueur s’alliait par- fois à la bonté et que son indulgence ne dégénérait jamais en faiblesse.

La facilité que saint Euthyme, à l'encontre de saint Sabas, éprouva toujours dans le gouvernement de sa laure, tient sur- tout au mode de recrutement employé. N'ayant sous son obé- dience qu'un nombre assez restreint de religieux cinquante aux plus beaux jours de la laure 1 veillait à n’admettre que des sujets de choix. Presque tous étaient prêtres ou destinés à le devenir et, du vivant même du fondateur, un bon nombre parvinrent au faîte des dignités ecclésiastiques. On compta un patriarche d'Antioche, cinq évêques de diverses villes de Pales- tine, plusieurs supérieurs de monastères ou d'églises, sans parler de deux religieux qui devinrent patriarches de Jérusa- lem après la mort d'Euthyme, mais après avoir vécu une quin- zaine d'années en sa compagnie. N'oublions pas de mentionner

244 REVUE DE L'ORIENT CHRÉTIEN.

aussi les moines qui se firent un nom dans la littérature byzan- tine ou dont le souvenir impérissable est inscrit au catalogue des saints. Dans ces conditions, avee le prestige de la science ou de la sainteté, quoi d'étonnant à ce que la paix ait fleuri dans la laure, alors qu'elle avait déjà pris possession des esprits et des cœurs!

Que dire à présent de l'action sociale exercée par saint Eu- thyme au moyen de sa laure? Elle ne fut certainement pas aussi grande qu'on serait porté à se le représenter. Pour qu'elle fût efficace et surtout durable, il aurait fallu rencontrer chez les supérieurs des autres laures la même sévérité dans l'accepta- tion des novices et la même douceur dans le maniement des âmes; sinon, même en les supposant tous très instruits et fort vertueux, les cinquante moines d’Euthyme, en présence des milliers de leurs confrères, ressemblaient à une fraiche oasis perdue dans le désert. Or, sur ces deux points en particulier, nous devons bien reconnaitre qu'il y eut de fàcheuses négli- sences et que, du recrutement de leurs religieux comme de leur formation intellectuelle et morale, les supérieurs eurent trop peu de souci. On acceptait n'importe qui et on le laissait se con- duire n'importe comme; à peu d'exceptions près, telle paraît être la règle générale en Palestine, comme en Égypte οἱ θη Syrie. Qui ne voit immédiatement à quels abus aboutissait en fin de compte un tel latitudinarisme”? La longanimité des supé- rieurs amenait à la vie religieuse des vocations tièdes, inutiles, souvent dangereuses, qui n'embrassaient cet état de renonce- ment qu’en vertu des privilèges qu'ils espéraient y rencontrer. En effet, les clercs et les moines jouissaient alors de telles exemp- tions civiles que beaucoup d'hommes fuyaient la société pour déserter leurs devoirs de famille et qu'ils cherchaient dans le cloitre un lieu de retraite et de repos plutôt qu'un asile de prière et de travail.

A ces natures grossières le frein moral des laures ne conve- nait aucunement; il était trop lâche pour les dompter, pour les réveiller de leur apathie ou pour les arracher à leurs instincts bas et vulgaires. Le travail continu, la prière incessante, la surveillance et surtout l’austère discipline de la vie commune étaient les seuls moyens de sanctification qui eussent pu les transformer ; et de ces moyens la majorité des moines ne voulait

SAINT EUTHYME LE GRAND. 245

à aucun prix. Tandis qu'il y avait affluence dans les laures, les couvents au début étaient rares et généralement déserts; s'ils se peuplèrent très rapidement ensuite, c'est parce que la vie des laures s'était déjà introduite parmi eux. Or, la plupart des laures palestiniennes n'évoquent pas, comme celle de saint Euthyme, l'idéal d'une chartreuse, dans laquelle la vie contem- plative rivalisait avec le travail des mains et surtout avec le labeur intellectuel. S'il y a dans les laures quelques consciences droites, des moines instruits, développant leurs connaissances par l'étude des saintes Écritures et des Pères de l'Église et composant des traités ascétiques, quand leur imagination ne rêve pas de quelque hérésie; la plupart, paresseux et igno- rants, s'ennuient de la longueur de la journée, dorment à leur aise, suivent la première pensée qui traverse leur cerveau et, bien abrités dans leurs cellules, les pieds au soleil, les mains pliant machinalement des palmes ou pendant avec noncha- lance, ils laissent tout doucement couler le temps. Le prix de la vie est une énigme qu’ils ne s'efforcent pas d'éclaircir. Ils sont convaincus depuis longtemps que la suprème béatitude consiste dans le repos, et que la moindre fatigue du corps ou de l'esprit tend à la diminuer. Pourvu que le pain arrive aux heures régle- mentaires, il leur importe assez peu qu’il soit noir ou blanc. Ne vaut-il pas celui qu'ils mangeaient dans leurs cabanes de fellah?

Les directeurs des moines de Palestine auraient prévoir ces inconvénients, étudier les caractères de leurs subordonnés et se rendre compte que, pour être près du sanctuaire, tous n'étaient pas, suivant un proverbe populaire, de la farine à faire des hosties. Ils auraient alors promulgué une règle accessible aux aspirations du plus grand nombre et qui aurait favorisé le recru- tement sur place. Faute d’avoir compris le sens pratique de la vie religieuse et pour avoir visé trop haut, ils manquèrent le but. Généreuse illusion, après tout, qui supposait dans autrui la perfection surhumaine qui les animait eux-mêmes!

Rendons pourtant cette justice à saint Euthyme, qu'il revint, sur le tard de sa vie, de ses illusions et qu'il ordonna, avant de mourir, de transformer sa laure en monastère. S'il avait procédé lui-même à ce changement, peut-être son autorité aurait-elle entrainé l’assentiment du plus grand nombre. Connu seulement après sa mort, son ordre n'était qu'une indication muette; elle

240 REVUE DE L'ORIENT CHRÉTIEN.

ne fut ni comprise ni imitée. La règle monastique resta fixée sur des cimes resplendissantes mais peu accessibles, et la majorité des religieux, découragée par une ascension aussi péni- ble, s'arrêta au pied de la montagne et tätonna dans les brouil- lards. Depuis lors, elle n’en guère bougé.

Siméon VAILHÉ des Augustins de l’Assomption.

(A suivre.)

UNE VERSION ARABE

D'UNE HOMÉLIE INÉDITE SUR LA PÉNITENCE

ATTRIBUÉE A 5. JEAN CHRYSOSTOME.

(Fin) (1).

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(1) V. ROC, 1908, p. 24. La seconde partie est éditée et traduite d’après le ms. carchouni de Paris, syr. 239; cf. supra, p. 32, note 1.

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248 REVUE DE L'ORIENT CHRÉTIEN.

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(1) Une note du manuscrit donne la variante ARE (le chemin) du ciel. (2) Le sens demande ici Nf: l’omission de cette particule est sans doute une faute de copiste.

254 REVUE DE L'ORIENT CHRÉTIEN.

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(1) Le Ms. porte un renvoi à ce mot; mais la note est effacée et illisible. (2) Une note du Ms. porte à cet endroit SE ἘΠῚ LR | aol, Ce se- rait . ἐς ] la fausse promesse, au lieu de 2 | le serment.

UNE VERSION ARABE D'UNE HOMÉLIE SUR LA A à 259 DE οἱ 2 ΕΚ à oE ὮΙ »Ξ O4 male DE 0 MT Js ls 32 SL: CES Ν ol 5] FE + Ν AM cr Qt DE: sl 88:9 Jj 385. ,5] pat BI καὶ αὐ CO Jde url ἐπ San Qué Dit ee ΟΝ] ll, ja M this, aus τ κι Lost Le Ἢ; sue Jet aa x Lil mes «ἐς ον. Ey Lt, Jus) Le Ces Lt CN ωὲ LA! Jess LS ue, - 9 ELU ECO SES, SL.) δος DES Jul cle Bi dv, ἜΣ a υ eue La Le, μη] bite UE LE st NT ce 2 ἂν LS 5% . Rae, da res pl ol Ge Rs jt ae ET COS 5, al DS Ν ro) FOR] ee) LB, Nul ce ARNCIENE 26; SA ΕΔ sent "Ὁ JAN DEAR JS οἱ ie À (EE οἱ [ὦ ω᾽ ss ΩΝ «τῶ Ὁ. δ τῶ ᾿ DIRE er al, Lt, NES LE ET) #6 Fe és, pe ωλ ep ΩΣ ὩὭΩὶ Je Les pell aôlere all Boss [λει 2 Juill Js QU 9 lus LG ΔΩ Bus ut, il 33e »" D) ox) ET ρῦσαι ects ss, τι 4} pk! τυ CERN ES #4 Ex Y, << ts] Je οἱ γῇ Qt dk 26 LE, ei (ὦ 189, a) db vS LE οὐ οἱ er τ να ἀπ 25 5] MT bi ὅσ» jet a LE ω ee ς ΕΣ ὩΣ ΟἿΣ La, uv” JE ES τς

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ΚΞ TRADUCTION

Sache qu'il te faudra comparaître (f. 185, a) devant le juge qui sonde le cœur et les reins; c’est pourquoi résiste avec constance au péché de parole. Sois persévérant et perspicace afin de n'être point condamné à ce grand jugement. C’est inévitable : si tu ne rentres pas en toi-même ici, tu te lamenteras là-bas comme le riche, et tu t'entendras dire comme lui : « Il y a entre nous et vous un abime immense (1) »; et tu ne pourras pas le franchir. Demande à Dieu qu'il te sauve des peines de ce lieu et qu'il te fasse parvenir avec ceux qui ont part à la béatitude là-haut, qui sont glorifiés et comblés des biens qui ne passent point. Éveille-toi de la langueur dans laquelle tu te trouves. Tu dois être ardent comme le feu ; prends garde d’être plus froid que la cendre et plus mort que les morts. Renonce à toutes choses, donne-toi à Dieu, et persévère nuit et jour dans la prière. Si tu agis ainsi, il bannira de ton cœur tout désir mondain et te fera parvenir à l'amour céleste. La pensée de ce jour te fera accomplir tout cela sans peine; tu perdras toute ta nonchalance et ton âme deviendra plus légère que la plume. Tu parviendras ainsi à la possession des biens que tu espères, après avoir rejeté les faveurs et la gloire de ce monde. Renonce à toutes les choses visibles, humilie-toi sans cesse et verse des torrents de larmes. Rien n'est plus profitable, et il n’y a rien qui nous unisse autant à Dieu comme les larmes qui proviennent de l’humilité. Si tu habites les villes, tu seras comme si tu vivais au désert.

Le Seigneur accorde également la béatitude à ceux qui gémissent. Que si l'on objecte cette parole de Paul : « Réjouissez-vous toujours dans le Sei- gneur, » que l’on sache bien qu'il s’agit seulement du plaisir et de la joie

(1) Luc., xvi; 26. ORIENT CHRÉTIEN. 17

208 REVUE DE L'ORIENT CHRÉTIEN.

qui sont le fruit de ces gémissements, Il dit en effet que la tristesse est inhérente aux joies du monde et que de même les pleurs qui sont versés à cause de Dieu, assurent une joie constante et inaltérable. Ainsi la femme adultère pleura dans la douleur de son cœur, et elle devint plus illustre que les vierges; de même en effet qu'une pluie abondante est suivie d’un temps serein et clair, les pleurs que l’on verse dans la crainte et la fer- veur dissipent les ténèbres du péché, et de même aussi que nous avons été purifiés une première fois par l'Esprit et l’eau, nous sommes purifiés de nouveau par les pleurs et la confession des péchés, surtout quand nous ne laissons pas voir nos larmes et que nous ne ressemblons pas à ceux qui composent leurs visages pour produire bon effet aux yeux des hommes. Pour ma part, je désire ces larmes que l’on verse dans l’humilité et non pour être vu; celles que l’on répand en secret, (f. 185, b) à l’intérieur de son appartement personne ne les voit. Telles étaient les larmes d'Anne : sa langue ne remuait pas, mais ses larmes avaient une voix puis- sante. Le Seigneur te demande encore de pleurer comme il pleura lui- même quand il se troubla au sujet-de Jérusalem. Qu'il ait pleuré, nous en trouvons l'attestation en plus d’un endroit : c'est ainsi qu’il pleura sur Lazare. Nous ne trouvons au contraire pas une seule attestation qu'il ait ri ou simplement souri. Il en est ainsi de Paul : nous lisons qu’il pleura en nombre de circonstances, mais nous ne trouvons pas qu’il ait ri, pas plus que quelque autre des saints. Aucun d’entre éux ne rapporte une chose semblable ni de lui-même ni d’un autre. Nous trouvons par contre que le fils de Noé fut surpris à rire et il devint esclave, de libre quil était. Je ne dis pas que tu ne dois jamais rire, mais qu'il ne faut pas rire comme ceux qui n'ont pas d'éducation. D'ailleurs tu ne dois jamais rire si tu con- sidères que tu dois comparaitre au jugement terrible et rendre compte de toutes tes actions, de celles que tu connais et de celles que tu ne connais

pas. Quand même tu n'aurais conscience d'aucune faute, tu ne serais pas.

justifié pour cela. Gémis sans cesse et prends garde que le démon ne te nuise. Tu diras peut-être : « Quand je pleurerai, à quoi cela servirait-il? » Mais à la fin du monde, quand la sentence sera rendue contre toi, tu obtiendras à ton heure miséricorde et pardon, si tu as gémi et si tu t'es affligé auparavant. C'est pour cette raison que le Christ Notre-Seigneur déclare bienheureux ceux qui gémissent et malheureux ceux qui rient; car c'est par les gémissements et les pleurs que nous aurons part à l'héri- tage de son royaume. Sache que tu es appelé à une vie céleste. Ne prends donc pas plaisir à dire des paroles inutiles, des plaisanteries, ou autres légèretés qui provoquent le rire; mais que ton cœur soit toujours humble.

Aspire de toute la force de tes désirs à être couronné et sache que tu as à lutter contre bien des tempêtes et des épreuves. Établis ton âme sur un fondement solide et ferme, car ce n’est pas par une seule épreuve, ni deux ni trois que tu seras assailli, mais c’est par de nombreuses afilic- tions que tu entreras dans le royaume. Nos efforts ne doivent pas ressem- bler à ceux des gens du monde qui essaient deux ou trois fois et qui se reposent ensuite, mais il faut que nous fassions chaque jour des efforts sans nombre, et ce n’est pas seulement pendant la journée, mais aussi

UNE VERSION ARABE D'UNE HOMÉLIE SUR LA PÉNITENCE. 299

pendant la nuit que notre vigilance doit être en éveil. Beaucoup triomphent pendant la nuit comme pendant le jour, et surmontent des épreuves de toutes sortes. Ou nous serons vainqueurs, ou nous succomberons. Consi dérons ceux qui succombent : celui qui injurie le prochain et lui fait du tort sans lui donner réparation, celui-là est vaincu. Nous voyons, dans les luttes mondaines, un grand nombre de personnes (fol. 186, a) recevoir des coups et des blessures et obtenir, par leur persévérance, la couronne du vainqueur. De même celui qui travaille pour Dieu et qui persévère au mi- lieu de toutes les épreuves qui lui sont envoyées, obtient la couronne et, comme le dit Notre-Seigneur au sujet des pauvres : « Tout ce que vous aurez fait à l'un de ces méprisés, c’est à moi que vous l’aurez fait (1) ». Prends garde de n'être pas ingrat envers Celui qui [ἃ comblé de bien- faits. Aime-le, car il t'appelle à toute heure. Il a bien voulu être crucitié pour te sauver et ce que tu méritais, c’est lui qui l’a supporté pour toi. Tu dois dire comme dans l'Écriture : « Que rendrai-je au Seigneur, pour tout ce qu'il fait pour moi (2)? » Veille, malheureux, à ne pas tomber entre les mains du Seigneur. Tout ce qu'il ordonne est profit, tandis que celuï qui lui désobéit est perdu, car toutes nos affaires sont comme la rosée : tu la cherches en vain aujourd’hui à l'endroit tu étais hier. Il en est de même du jour tu dépenses pour ton ventre, partageant ainsi les préoccupa- tions de ce monde, qui ne sont pourtant qu’une vaine apparence sans réa- lité. Recherche la réalité et tu ne pécheras pas, malheureux! L'Écriture dit en effet : « Toutes les choses de’ce monde passeront, mais le péché te précédera là-bas. » Tremble devant le grincement des dents, et préserve-toi de ce feu qui consume. Si au contraire tu te rappelles à chaque instant que le Seigneur est proche, tu ne pécheras point, car le péché ne provient que -du manque de connaissance de Dieu le Très-Haut et celui qui se souvient qu'il est vu de Dieu (louange à Lui!) ne pèche jamais. Sache qu'il te regarde et qu’à chaque instant il examine tes actions, écarte le péché, car ton esprit ne peut pas être à la fois en haut et en bas. S'il est dans la vérité, tu sauras que Dieu te regarde et tu n'approcheras pas de l'arbre (3). Dieu (louange à Lui!) sera devant tes yeux et tu marcheras sans peine dans la voie droite, car se trouve la crainte de Dieu, le péché ne peut en approcher. Sois convaincu qu'il est présent à chaque instant, qu'il serute tes actions et que rien n’est caché à ses yeux. Choisis la crainte grande et _noble, car toutes les choses du monde sont vaines tandis que la crainte est le grand et magnifique trésor qui plait à Dieu, prends pour ta part un cœur pur pour que tu mérites de voir Dieu, parce que quiconque n'a pas un cœur pur et saint ne verra pas le visage de Dieu le Très-Haut, selon ce qui est écrit, il faut que tu sois de sel pour que ton âme soit salée et que tes bonnes qualités demeurent, pour que ton intelligence et ta parole soient justes et que tu conserves tes bonnes actions, pour que tu fasses dis paraitre les pensées perverses et que tu te purifies de l'odeur infecte du péché. Quand (fol. 186, b) tu as purifié ton cœur de la corruption, il appar-

(1) Math., xxv, 40: (2) Ps. cxv, 12: (3) L'arbre du fruit défendu.

260 REVUE DE L'ORIENT CHRÉTIEN.

tient à Dieu qui seul est grand et puissant, et si tu ne retombes pas dans la négligence et le péché, Dieu se donne à toi. Il ne te demande pas seule- ment que tu te donnes à lui, mais il veut que ton influence soit bienfai- sante pour ceux qui t’entourent. Sois convaincu de l'utilité de la parole qui passe; fuis le péché qui perd et la calomnie qui n’a que de funestes conséquences et aucun avantage, car Dieu seul connaît celui qui est bon et celui qui est mauvais, et pénètre les secrets de nos cœurs, et en jugeant ton frère, tu ne fais que te juger toi-même. Considère la femme adultère, comment elle juge les autres en présence du Seigneur Jésus-Christ : par ses larmes elle plut au Seigneur, et le céleste médecin, écoutant la voix de ses pleurs, lui accorda le salut. Imite-la, non dans ses passions, mais dans sa pénitence et ses larmes. Prends le parti de t’'assurer, par tes larmes, la bienveillance du juge; éteins dès ici-bas le feu de l'enfer. Il t’a donné des commandements qui ne sont pas pénibles pour que tu t’'affranchisses par eux des œuvres mauvaises. Tu n’as besoin que du labeur des larmes et de la prière, du renoncement à la colère, à l’envie et à la médisance. Quelle monnaie te faut-il pour t’'assurer l’accomplissement de ces comman- dements? Tu n'as besoin que de l'humilité et tout ira bien pour toi. Je vais t'indiquer une médisance qui son utilité : médis de toi-même, et fais connaitre tes péchés pour que tu deviennes juste; car cette médisance est méritoire et salutaire. Ne scrute pas les affaires des autres, mais recon- nais tes propres défauts. Si tu sais quelle est la médisance méritoire, tu diras constamment du mal de toi-même. Oublie la médisance contre les autres et reconnais combien les avantages du silence sont grands et com- bien la parole est nuisible. De cette façon, malheureux, tu éviteras toute chute, et tu mériteras d’être transfiguré et de briller comme le soleil. Évite de dire du mal des autres en présence du juge, car si tu te préserves des mille sortes de médisances, tu ne pourras pas cacher ton éclat et tu obtien- dras une récompense de la part des autres : tu ne sauveras pas seulement ton âme, mais Dieu (magnifié soit son nom!) sera glorifié à cause de toi. Si au contraire tu n’agis pas ainsi, tu perdras ton âme et Dieu sera blas- phémé à cause de toi. Sois désireux de faire briller tes œuvres, non en en faisant étalage devant les hommes, mais en ne fournissant aucun motif à personne de dire du mal de toi. Lorsque, malgré ton application aux bonnes œuvres, tout le monde dit du mal de toi, aie soin de répondre à chacun par des bénédictions et ne t'afflige pas des calomnies dirigées contre toi. Elles te vaudront (fol. 187, a) une belle récompense, surtout si elles sont dénuées de fondement. Mais si le mal qu’on dit de toi est vrai, malheur à toi. N’aime pas seulement les bons, mais aime tous tes frères, car si tu aimes tes frères, tu éloignes de toi la haïne, et si tu aimes le bien tu chasses de ton cœur la haine et les traits de la calomnie. Sois miséricor- dieux, car cette vertu est magnifiquement récompensée et fait qu'on res- semble à Celui qui disait : « Je pleurais sur tous et je gémissais quand je voyais quelqu'un dans l’adversité. » Et si celui qui pleure est digne de ré- compense, celui qui désire secourir et fortifier le faible en mérite une plus grande. Rejette loin de toi la marque fétide de la médisance, car il est possible qu’un homme mauvais aujourd’hui, soit bon demain. Ne ta-

UNE VERSION ARABE D'UNE HOMÉLIE SUR LA PÉNITENCE. 261

buse pas : tu veux aller au ciel, renonce aux choses de la terre, c'est-à-dire aux affaires humaines, et abandonne-toi sans cesse aux pleurs pour que tes pleurs soient une semence. Tu n'as pas besoin de travail pour récolter le fruit de la pénitence, parce que, quand 1] le veut, le Seigneur n'a pas besoin de temps : en un clin d'œil il changea l’eau en vin et dans une seule heure il multiplia le pain pour une foule innombrable. De même la femme adultère se repentit et fut sauvée en un moment : au moment elle gémit, et en un instant elle exhala la bonne odeur de la pénitence. Le Seigneur ne lui dit pas en effet : « Je te pardonnerai tes péchés », mais : « Aie confiance, ma fille, tes péchés te sont remis (1) ». Tu as entendu dans cet exemple ce qui compense la calomnie et la médisance : ex- cite donc en toi l'humilité qui est le principe de tous biens et qui obtient des couronnes nombreuses à celui qui s’y applique selon la parole du Seigneur. « Heureux les humbles d'esprit (2) ». C’est un sacrifice qu'on lui offre l'humilité, car le cœur contrit est une victime offerte à Dieu qui est glorieux et puissant, et « il ne rebute pas le cœur contrit et‘humi- lié (1) ».

Voilà la vertu qui est le principe des bonnes œuvres. Comme les bonnes œuvres sont elles-mêmes le principe de la sagesse, et que l’orgueil est le principe du péché, l'humilité est de même le principe des bonnes œuvres et du bien. Nous en avons la constatation par le pharisien et le publicain : lun par son orgueil perdit tous les biens qu'il avait, et l’autre par son humilité recueillit des fruits qui n'étaient pas à lui. Puisque tu sais que l’orgueil est la racine et la source de tous les maux, applique-lui le remède qui lui convient, c'est-à-dire l'humilité. Car si tu établis l'humilité comme fondement de ton édifice, tu pourras édifier sur elle le bien que tu vou- dras. (fol. 187, b) Mais si tu n'as pas cette base, aucune de tes bonnes œuvres ne sera solide et ne subsistera, car le jeûne, la pureté, la miséri- corde et autres bonnes œuvres ne recoivent leur achèvement que de l’hu- milité. Fuis l’orgueil, car c’est un vice pernicieux ; crains Dieu à qui appar- tient la grandeur, qui est glorieux et puissant, et sois humble d’une Πα ΠΗ]: lité véritable, Que ta mise soit modeste, ton teint pâle et ton âme humiliée, car de même que la force du vin est brisée par l’eau, ainsi l’orgueil est brisé et l'âme acquiert de la valeur par l'humilité. Humilie-toi pour que tu sois élevé. L'orgueil est la source de tous les maux et l'humilité est le principe de tout bien. L'humilité est tellement sublime que le Seigneur s’est humilié afin de nous former selon sa ressemblance. C’est ainsi qu'il dit : « Apprenez de moi que je suis doux et humble de cœur (2) ». Il a placé devant toi plusieurs chemins pour arriver au salut, afin que le che- min du ciel fût plus facile pour toi. S'il n'avait mis à ta disposition qu'un seul chemin, tu dirais peut-être : Je ne puis pas le suivre. C’est pour cette raison qu'il établi des voies diverses d’après les différentes sortes de bonnes œuvres, afin que le chemin du salut soit facile pour toi. Si tu as la conscience chargée de nombreux péchés, dis seulement : « J'ai péché »,

(1) Joan., vur, 11. (2) Math., v, 5. (S)MPS-eL; 219;

262 REVUE DE L'ORIENT CHRÉTIEN.

et ils seront remis. C’est le premier moyen d'obtenir le pardon du péché, je veux dire l'humilité. Le second moyen est de gémir sur ses péchés. Tu n’as pas besoin de paroles, ni de fatigues, ni de faire un long chemin. Nous en avons un exemple dans le roi Achab : son visage devint triste, il gémit et il obtint ainsi que Dieu revint sur le châtiment qu'il lui préparait à cause de son péché. Ceux qui se lamentent sur les morts ne se laissent accabler par aucune douleur ni aucun désir pendant le temps du deuil, car leur esprit est absorbé dans les gémissements; de même, si tu pleures véritablement ton péché, tu ne seras vaincu par aucune affection mondaine. Si tu veux être consolé, lamente-toi, car c’est Dieu qui est le Consolateur. Quand même les douleurs pleuvraient sur toi de tous côtés, elles n’auront pas de pouvoir sur toi parce que les consolations de Dieu sont plus grandes que les souffrances. Le troisième moyen est de maitri- ser la colère et de pratiquer la douceur afin d'obtenir la bénédiction et la couronne accordées à ceux qui sont doux. Garde-toi de perdre la patience, le support d'autrui et la douceur surtout pour une cause futile. Si par exemple tu t’'emportes lorsque ton serviteur perd quelque chose, renverse de l’huile ou casse un objet, tu perds ta bénédiction et ta récompense. Si l’on t’excite à la colère, songe à Dieu (fol. 188, a) le Très-Haut, brise l’ar- deur de ton courroux et sois patient : tu obtiendras ainsi la couronne du martyre et tu seras comme un martyr en présence des hommes, confes- sant Celui qui ordonné d'être patient et doux. Considère comment le bienheureux Pierre voulut connaître quelles sont les limites de la patience; il demanda au Seigneur : « Si mon frère pèche contre moi, combien de fois lui pardonnerai-je? » Il crut parler d’un acte de haute vertu et du de- gré suprême auquel on puisse atteindre en disant : « Lui pardonnerai-je sept fois? » Mais le Sauveur miséricordieux voulut lui faire comprendre la différence qu'il y a entre la miséricorde des hommes et celle de Dieu Béni et Très-Haut et il lui répondit : « Pas sept fois, mais soixante-dix fois sept fois (1) ». Songe à la miséricorde ineffable de Dieu, garde les comman- dements et recois les conseils du Seigneur qui a dit : « Ne t’élève pas toi- même de peur que tu ne tombes », et marche dans la voie de la douceur, rejette loin de toi les ardeurs de la colère et les traits de l’envie, car l'envie est la racine du péché, un mal qui cause un grand trouble, et un clou aigu enfoncé dans le cœur. La douleur du clou n’atteint pas le cœur au- tant que le mal de l'envie lorsqu'il s’y implante, et il n’y a pas de mala- die qui altère le visage comme l'envie altère la beauté de l’âme. C’est pourquoi fuis l'envie et offre au Seigneur un sacrifice pur; sois son temple en le priant non avec des paroles trompeuses mais avec amour et prends garde au péché même lorsque tu prêtes un serment véritable, parce que l’homme tombe promptement lorsque son cœur ne veille pas. Applique- toi à te préserver de la semence de l'ennemi. Il cherche à perdre l’âme malheureuse par tous les moyens, mais surtout par la langue et la bouche, parce qu'iln'y rien qui contribue à nous perdre et à nous faire tomber

(@):Math.,"xvur, 22.

1 νον

UNE VERSION ARABE D'UNE HOMÉLIE SUR LA PÉNITENCE. 263

dans l’impiété comme la langue bavarde et la bouche ouverte. C'est d'elles que viennent la plus grande partie de nos chutes. C’est pourquoi il est dit : « Il vaut mieux trébucher sur la terre que de trébucher par la lan- gue », car celui qui fait un faux pas sur le sol ne blesse que son corps, mais celui qui trébuche par la langue perd à la fois son corps et son âme. Celui qui prie et gémit ne demande qu'une chose : C’est d’être préservé de sa langue. Si donc c’est de ta langue que viennent la vie et la mort, applique-toi à la diriger; évite le serment et toute parole mauvaise; marche constamment dans la voiie du salut (fol. 188, b) et évite l’orgueil, car le revers de l’orgueil est plein d’amertume. Ce vice est le premier qui soit venu de Satan et c'est par lui qu'il fait tomber Adam. Tout mal vient à proprement parler de l’orgueil. L'homme de bien est ouvert et ne songe point à mal, tandis que l’orgueilleux est perfide et artificieux el il cherche à perdre son prochain sans qu'il s’y attende. Mais si sa malice est cachée aux yeux des hommes, elle ne l’est pas aux yeux de Dieu. Prends garde de blâmer dans les autres des défauts que tu as toi-même. Quand l'homme vertueux voit un autre trébucher et tomber, il s’abstient de le juger. Prends garde de ne pas tomber et rejette le mensonge; qu'il n'y ait pas place en toi pour l’orgueil. Car le mensonge est l’œuvre de Satan. L'épée ne fait pas tant de mal que la langue, car l'épée ne tue que le corps, tandis que la langue tue à la fois l’âme et le corps. Rejette loin de toi l’orgueil et choisis la simplicité, la bonté et la continence. Occupe ton intelligence ; mais ne fais rien de ce qui excite la colère de Dieu. Ne t’en- orgueillis point lorsque tu auras fait quelque bonne action, car c’est un des dangers contre lesquels nous avons à lutter. Prends garde, malheu- reux, de ne pas mépriser Dieu par tes désobéissances. L'homme bon loue et glorifie Dieu, et de même le pécheur le méprise. Éloigne-toi du mal et assure-toi une récompense céleste. Mets ta confiance en Dieu et espère les biens durables qui ne passeront point. Tu dois fixer ton regard sur cette gloire éternelle et fuir la gloire du monde qui perd l’homme. Que les louanges des hommes ne t’élèvent pas et que leurs reproches ne t'ef- fraient pas. Éloigne-toi du tumulte et des affaires du monde et imite la conduite de ceux que le jeûne exténués. Ressemble-leur, car ce sont des colonnes divines. Par leur abstinence dans le manger et le boire et par leurs travaux, ils ont attiré en eux la grâce de Dieu (louange à Lui!) et ils sont devenus citoyens de la cité céleste. Marche assidüment dans cette voie et éloigne-toi du fléau de l’orgueil. Sois humble, non en paroles mais en effet. Sache que Dieu (qu'il soit exalté et béni!) résiste aux su- perbes et accorde ses faveurs aux humbles. C’est une belle chose qu'un homme fasse le bien sans s’enorgueillir. Que ta bonne action ne te soit pas imputée comme péché et que ta journée ne passe pas sans utilité. Veille sans t'ennuyer, car Dieu aime la veille joyeuse. Tout bien accompli avec joie produit du fruit tandis que ce qui est fait avec répugnance (fol. 189, à) n'obtient pas de récompense et est condamnable au jugement. Maintenant que tu connais ce qui est préjudiciable à ton âme, tu dois éviter toutes les pensées mauvaises et rejeter les choses du monde et les plaisirs des hommes. Évite l'amour des richesses et ne recherche qu'une

204 REVUE DE L'ORIENT CHRÉTIEN.

fortune modique; c’est ce qu'il y a de mieux. Si tu veux t'enrichir, fais en sorte que ce soit par les bonnes œuvres, car les richesses de ce monde ne font que passer, tandis que les richesses spirituelles sauvent l’âme de la mort. Si tu sais ce qu'est l’amour des richesses, si tu es persuadé que les trésors ne sont d'aucune utilité pour les pécheurs, tandis que les justes sont sauvés de la mort, si donc tu sais ce qu'est l’amour des biens de la terre, évite-le, et si tu possèdes des richesses, fais-toi des amis avec l’ar- gent d’iniquité. Ce ne sera pas sans profit, car Dieu a dit : « Soyez misé- ricordieux pour que vous obteniez miséricorde (1) ». Prodigue l’or comme l'ont prodigué les mages qui l'ont offert en présent, tandis que toi tu ne donnes même pas un morceau de pain. Is firent un long voyage et toi tu ne traverses même pas la rue pour monter chez le Christ malade. Que dis-je, tu n'as pas à changer de lieu, tu le vois tous les jours à la porte de l'église; il t'implore et te dit : « Aie pitié de moi », et toi tu ne le regardes même pas, mais tu détournes de lui ton visage comme on se détourne d’une idole de pierre. Puis quand tu es entré, tu te mets à le prier et tu dis : « Aie pitié de moi », et pourtant tu sais bien que ce que l’on fait aux pauvres, c’est au Christ qu’on le fait. Aie soin d'exercer la miséricorde envers les pauvres, si tu veux servir Dieu et non l’argent. Il ne demande de toi que la pureté d'intention et non la grandeur ou la modicité de l’of- frande. L'amour de l'argent et toutes les œuvres de péché sont viles. Hais ce qui est vil si tu veux aimer Dieu selon ce que dit l'Écriture : « Ceux qui aiment le Seigneur haïssent le mal ». Puis donc que tu sais que l’aumône est la première des bonnes œuvres, celle qui ouvre aux hommes les portes du ciel, choisis-toi un intercesseur, et quand même tu aurais de nombreux péchés, ne crains pas; il n’est pas un habitant des cieux qui te fera opposition, mais tu monteras recevoir ce qui est à ta charité et le messager céleste aura à la main l’engagement écrit par le Seigneur lui-même : c'est cette parole qu'il prononcée : « Tout ce que vous avez fait à l’un de ces malheureux, c'est à moi-même que vous l’avez fait (2) ». Sache que le Seigneur demande à chacun des œuvres conformes à la foi, et une foi conforme aux œuvres. (fol. 189, b) Veille sur toi pour que l'ennemi ne trouve point en toi de point vulnérable. Prie Dieu qu'il te donne son secours et qu'il te fasse connaitre comment tu dois éviter les pensées mauvaises. Tu as entendu cette parole du Seigneur Christ : « Que celui qui veut être mon disciple se renonce à soi-même (3) ». Et comment l’homme se renonce-t-il à lui-même, sinon en disant adieu à ce qui était en lui, en se vouant à l'amour de Dieu et en rejetant les pen- sées mauvaises et les désirs coupables. Nous t’avons expliqué quelle est la voie du salut et quelle est la voie des œuvres mauvaises. Prends-ÿ bien garde; scrute ton cœur et guéris ton âme comme le médecin qui re- tranche la chair corrompue pour soigner et guérir le reste. De cette facon tu assureras à ton âme et à ton corps une santé parfaite et tu parviendras

(1) Luc., ν΄, 36. (2) Math., xxv, 40. (3) Math, xvi, 245 Luc, 1x, 23.

1 δ | UNE. VERSION ARABE D "UNE PEACE SUR LA | PÉNITENCE. 265

à la ἜΠΗ δὲς δὰ repos qui ne finiront point. C’est la doctrine céleste : qui conduit au paradis et grâce à laquelle l’homme ne sera point privé de Ja louange et de la gloire avec le Père et le Saint-Esprit, maintenant, dans ae 18 les temps et dans les ΞἸΡΟΙ͂ΘΕ des siècles. Amen.

L. LEROY.

HISTOIRES DES SOLITAIRES ÉGYPTIENS

[Suite (1); ms. Coislin 126, fol. 198 sqq.]

175. ἠ᾿ἸΑναχωρητής τις ἦν ἐν ὄρει χαθήμενος χαὶ εὐλαδείχ προ- χόπτων ἐν τοῖς μέρεσιν Ἀντινόου, χαὶ πολλοὶ τῷ λόγῳ αὐτοῦ ὠφελοῦντο χαὶ τῇ πράξει. Τοιούτῳ δὲ ὄντι αὐτῷ, ἐφθόνησεν, ὡς ([ 198 1") χαὶ

5 \ ε ΄ \ -»" Φ - πᾶσι τοῖς ἐναρέτοις, ἐχθρὸς, χαὶ ὑποδάλλε: λογισμὸν τοιοῦτον ὡς εὐλαδείας αὐτῷ: ὅτι οὐχ ὀφείλεις δουλεύεσθαι διαχονεῖσθαι ὑφ᾽ ἑτέρου, ἀλλὰ χαὶ μᾶλλον ἑτέροις ὀφείλων διαχονῆσαι οὐ διαχονεῖς, ἀλλάγε, κἂν

- δ τ = 3 = ! \ (ὃ σεαυτῷ δούλευσον. Τοιγαροῦν ἄπελθε, πώλησον σου τὰ σπυρίδια χαὶ ΄ Ν ΄ \ 3 \ » 1 / ἀγόρασόν onu τὰς χρείας, καὶ ἀνάστρεφε αὖθις ἐπὶ τὴν ἀναχώοησίν σου, χαὶ μηδενὶ βάρος ἐπιτίθει. Τοῦτο δὲ συνεδούλευσεν δόλιος, φθονῶν ΕῚ a = = NS Fe 1 " ἷξε n αὐτοῦ τῆς ἡσυχίας καὶ TAG δεούσης σχολῆς πρὺς. τὸν θεὸν, χαὶ τῆς τῶν πολλῶν ὠφελείας" πανταχόθεν γὰρ ἐχθρὸς ἐσπούδαζε θηρεύειν ὀὐταν. δὲ ὡς ἐπ᾿ ἀγαθῷ λογισμῷ πεισθεὶς, x τέθη ἐχ τοῦ μοναστηρίου αὐτοῦ ποτὲ θαυμαζόμενος, ἄπειρος ὧν τῆς πολλὴς πανουργίας (f° 198 V*) τοῦ ἐνεδρεύοντος, γνώριμος χαὶ περίφημος ὑπὸ τῶν ὁρώντων ἄνα- γωρητής. Διὰ πολλοῦ δὲ χρόνου συντυχὼν γυναιχὶ, χαὶ ἐξ ἀπροσεξίας σχελισθεὶς, ἐλθὼν εἰς ἔρημον τόπον ἀχολουθοῦντος αὐτῷ τοῦ ἐχθροῦ, Fe \ 23 \ Δ te ar et \ > A τὶ ͵ ἔπεσεν παρὰ ποταμόν. ᾿Εὐνθυμιηθεὶς δὲ ὅτι ἐχάρη ἐχθρὸς ἐπὶ τῇ πτώ- σει αὐτοῦ, ἠθέλησεν ἑαυτὸν ἀπελπίσαι, ὅτιπερ μάλιστα τὸ τοῦ θεοῦ

-ῷ 2 / \ \ , 2 ΄ \ \ e ΄ / es \ πνεῦμα ἐλύπησε, χαὶ τοὺς ἀγγέλους καὶ τοὺς ἁγίους πατέρας, ὧν πολλοὶ

(] » , A , \ , \ ὐὸ 4 / e θ \ χαὶ ἐν πόλεσι τὸν ἐχθρὸν νενιχήχασιν. Kat οὐδενὶ τούτων ομοιωθεὶς, ἐλυπεῖτο σφόδρα, χαὶ μὴ μνησθεὶς ὅτι θεὰς χωρηγεῖ δύναμιν τοῖς ἐπ᾿

σφοῦρα; ZA μιὴ μινησύεις ὁτι VERS χῶρηγξ le Sr ὑτὸ ἡσίως ἐλπίζ ἸΠωρωθεὶς ἐπὶ τὴ τοῦ πλημμιελή βερα- αὐτὸν γνησίως ἐλπίζονσιν. ΠΠωρωθεὶς ἐπὶ τῇ τοῦ πλημμελήματος ϑερα

πείχ, ἠθέλησεν ἑαυτὸν εἰς τὸ ῥεῦμα ([" 198 ν") τοῦ ποταμοῦ ῥίψαι εἰς

(1) Voy. 1907, p. 43, 171. 393; 1908, Ὁ. 47.

HISTOIRES DES SOLITAIRES ÉGYPTIENS. 267

r \ “- " , pe V7 θάνατον καὶ τελείαν χαρὰν τοῦ διαβόλου. Ἀπὸ δὲ τῆς πολλής ὀδύνης τὴς Ψυχῆς αὐτοῦ τὸ σῶμα ἠσθένησεν, εἰ μὴ ὕστερον ἐλεήμων θεὸς , , - LT * = r A νῶν 7 . LA M ἐδοήθησεν αὐτῷ μιὴ ἀποθανεῖν, εἰς τελείαν χαρὰν τοῦ ἐχθροῦ. "Ecyzrov

\ 1 » 1 ΄, ΄ ( αὐ 0,» δὲ εἰς ἑαυτὸν ἐλθὼν, ἐλογίσατο πλείονα κόπον ἐν καχοπαθείᾳ ἐνδείξα-- ΄ 2 , vais à 10 ἐν, Ἂς Αι ": ΓΝ σθαι. Πάλιν oùv ἀνεχώρησεν ἐπὶ τὸ ἴδιον μοναστήριον, καὶ τὴν θύραν ΄ ε D / 9. +, 02 2 Ca “an A βθεὶ ἀναφράξας, ὡς δεῖ κλαίειν ἐπὶ νεχρῷ, οὕτως ἔχλαιεν ἱκετεύων τὸν θεὸν.

\ \ , τι ù ΕΣ \ “- ? ms Νηστεύων δὲ χαὶ ἀγρυπνῶν μετὰ ἀθυμίας, ἐλεπτύνθη τὸ σῶμα αὐτοῦ, πληροφορίαν μετανοίας οὕπω σχών. Τῶν δὲ ἀδελφῶν παραδαλλόντων

\ 3 \ r \ , En \ / à ( ΄ προὸς αὑτὸν πολλάκις πρὸς ὠφέλειαν ἑαυτῶν, χα! χρουόντων τὴν θύραν,

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αὐτὸς ἔλεγεν (R199%r) μὴ δύνασθαι ἀνοίγειν, δέδωχα γΖρ φησι λόγον, ἕνχ ἐνιαυτὸν γνησίως μετανοῆσαι, χαὶ ἔλεγεν" εὔξασθε ὑπὲρ ἐμοῦ, ἡ- πόρει γὰρ τὸ τί ἀπολογήσασθαι διὰ τὸ ui σχανδαλισθῆναι τοὺς ἀχούον- τας, ὅτι ἦν παρ᾽ αὐτοῖς τίμιος σφόδρα χαὶ uéyas μοναχός. Kai ἐποίη- σεν ὅλον τὸν ἐνιαυτὸν, ἐχτενῶς μετανοῶν, περὶ δὲ τὴν ἡμέραν τοῦ ΠΠ2σχα, τὴν νύχτα τῆς ἁγίας ἀναστάσεως, λαδὼν λύχνον χαινὸν LA σκευΐάσας, ἔθηκεν ἐν χαινὴ χύτρχ, χαὶ πωμιάσας αὐτὴν ἀφ᾽ ἑσπέρας εἰς εὐχὴν ἀνέστη λέγων᾽

οἰχτίρμων καὶ ἔλεήνιων θεὸς, χαὶ τοὺς βαρθάρους θέλων σωθὴῆ- ναι καὶ εἰς ἐπίγνωσιν ἀληθείας ἐλθεῖν, πρὸς σὲ χατέφυγον τὸν σωτῆρα τῶν ψυχῶν. ᾿᾿λέησόν ue, τὸν πολλί σε παραπιχράναντα {3 re) εἰς χαρὰν τοῦ ἐχθροῦ χαὶ ἰδοὺ νεκρός εἰμι ὑπακούσας τῷ ἐχθρῷ. Σὺ, δέσποτα, χαὶ τοὺς ἀσεδεῖς ai τοὺς ἀνελεήμονας ἐλεεῖς χαὶ τοὺς πλησίον ἐλεεῖν διδάσχεις" οἴχτειρόν μου τὴν ταπείνωσιν, παρὰ σοὶ γὰρ ἀδύνα- τον οὐδὲν, ὅτι παρὰ τὸν "Any διεσχοοπίσθη ψυχή μου" ποίησον ἔλεος

A

ὅτι χρηστὸς εἶ ἐπὶ τὸ ἴδιον πλάσμα, μέλλων καὶ τὰ οὐχ ὄντα σώματα ἐν τῇ ἡμέρχ τῆς ἀναστάσεως ἐγείρειν. Εἰσάχουσόν μου, χύριε, ὅτι ἐξέ- λιπεν τὸ πνεῦμα μου καὶ ταλχίπωρός μου ψυχή. ᾿Εξετάχη δὲ χαὶ τὸ σῶμά μου ὅπερ ἐμίανα, καὶ οὐχέτι ἰσχύω ζὴν τῷ σῷ φοδῷ συνειληρ.- μένος" ἀνθ᾿ ὧν τεθζῤῥηχα συγλεχωρῆσθαι τὸ πλημμέλημα τῇ μετανοίχ

διπλὴν ἔχων τὴν ἀνελπιστίαν ([5 199 v°) ζωοποίησόν με συντριδέντα

NES - A / \ ΄ δὴ χαὶ τῷ σῷ πυρὶ πρόσταξον τὸν λύχνον τοῦτον ἀναφθῆναι, ὅπως λαδὼν

3 \ 2 , - - , : ? rs \ ? LLYO θάρσος ἐλέους EL τῶν τῆς συγχωρήσεως οἰκτιρμῶν, τὸν ἐπίλοιπον “Δ Va CU \ ὃν ἄν μοι χαρίσῃ τῆς βιώσεώς μου χρόνον τὰς ἐντολάς σου τηρήσω, χαὶ

“Ὁ - ,ὔ \ >" -- ΕἸ ᾿ r / \ sf“ τοῦ σοὺ φόρου Un ἀποστῶ, αλλα γνησίως δουλεύσω πο, χαὶ πλεῖον

LA πρότερον.

\ = ? , © \ ω Ε] , \ NS r “- Kai ταῦτα εἰπὼν ἐν τῇ νυχτὶ τῆς ἀναστάσεως μετὰ δαχρύῳν πολ-

268 REVUE DE L'ORIENT CHRÉTIEN.

r

λῶν, ἀνέστη ἰδεῖν εἰ ἤφθη λύχνος, χαὶ ἀναχολύψας χαὶ ἰδὼν ὅτι οὐκ ἀνήφθη, πάλιν πεσὼν ἐπὶ πρόσωπον τὸν χύριον παρεχάλει λέγων" Οἶδα, κύριε, ὅτι ἀγὼν γέγονε τοῦ στεφανωθῆναί με, καὶ οὐ προσέσχον τοῖς ποσίν μου, ἑλόμενος μᾶλλον τὴ τῆς σαρχὸς ἡδονῇ (f° 199 ν᾽) τῶν ἀσεθῶν τῇ χολάσει ὑπαχθῆναι. φεῖσαι οὖν, κύριε, ἰδοὺ γὰρ πάλιν ἐξομολογοῦμαι τῇ σὴ χρηστότητι τὴν ἐμὴν ἀσχημοσύνην, ἐνώπιον πάντων. τῶν σῶν ἀγγέλων χαὶ δικαίων, χαὶ εἰ μὴ ὅτι σχζνδαλον ἦν, χαὶ τοῖς ἀνθρώποις ἂν ἐξομολογησάμην, ὅθεν οἴχτειρόν με, ἵνα χαὶ ἄλ- λους παιδεύσω. Ναὶ, χύριε, ζωοποίησόν pe. Καὶ οὕτως ἐπὶ τρεῖς εὐξά- μενος εἰσηκούσθη, χαὶ ἀναστὰς, εὗρε τὸν λύχνον λαμπρῶς χαιόμενον. Καὶ ἀγαλλιασάμενος τῇ ἐλπίδι, ἴσχυσε τὴ τῆς καρδίας χαρᾷ, καὶ ἔχαιρεν ἡδέως θαυμάζων τὴν χάριν, ὅτι αὐτὸν ἐπληρόφορησε χαὶ ἐν τούτῳ θεός" καὶ ἔλεγεν ὅτι ἀνάξιον ὀντα με χαὶ τῆς τοῦ χόσμου ζωῆς, ἠλέησας τῷ μεγάλῳ τούτῳ χαὶ χαινοτέρῳ σημείῳ. Οὕτως (f° 200 r°) δὲ δια- μείναντος αὐτοῦ τῇ ἐξομολογήσει διέφαυσεν ἡμέρα, χαὶ ἣν εὐφραι- νόμενος ἐν χυρίῳ, σωματικῆς τροφῆς ἐπιλαθόμενος. Τοῦ δὲ λύχνου τὸ πὺρ ὅλας τὰς ἡμέρας αὐτοῦ διεφύλαξεν, ἔλαιον ἐπιχέων χαὶ σχευζζων αὐτὸ ἄνωθεν ὅπως μὴ σθεσθῇ ;: καὶ οὕτως πάλιν τὸ θεῖον πνεῦμα ἐνῴχη- σεν ἐν αὐτῷ, χαὶ ἐγένετο πᾶσιν ἐπίσημος, ταπεινοφρονῶν, χαὶ τῇ ἐξο- μολογήσει χαὶ τῇ εὐχαριστίᾳ πρὸς χύριον εὐφραντιχός" Ὅτε δὲ ἔμελλε χαὶ τὴν ψυχὴν παραδιδόναι, εἶδε πρὸ ἡμερῶν ἀποχάλυψιν.

176. Γέρων τις ἐκάθητο εἰς μαχρὰν ἔρημον, εἶχε δὲ συγγενιχὴν, χαὶ διὰ πολλῷν ἐτῶν ἐπεθύμησεν αὐτὸν ἰδεῖν, χαὶ περιεργασαμένη ποὺ χάθηται, ἀνέστη χαὶ ἦλθεν εἰς τὴν ὁδὸν τὴς ([" 200 r°) ἐρήμου, χαὶ εὑροῦσα συνοδίαν χαμήλων εἰσῆλθεν εἰς τὴν ἔρημον μετ᾽ αὐτῶν. Ἦν δὲ ἑλχομένη ὑπὸ τοῦ διαδόλου. Καὶ ἐλθοῦσα εἰς τὴν θύραν τοῦ γέροντος ἤρξατο ἀπὸ σημείων συνιστάνειν ἑαυτὴν, λέγουσα" ὅτι συγγενική σου εἰμί, καὶ ἔμεινε πρὸς αὐτόν. Πολεμνηθεὶς δὲ γέρων ἔπεσεν εἰς αὐτήν. ἮΝν δέ τις ἄλλος ἀναχωρητὴς καθήμενος εἰς τὰ χάτω μέρη, καὶ ἐγέ- μιζε τὸ βαυχάλιον ὕδατος, χαὶ εἰς τὴν ὥραν τοῦ φαγεῖν ἐστρέφετο καὶ, χατ᾽ οἰχονομίαν θεοῦ, εἶπεν ἐν ἑαυτῷ Εἰσέρχομαι εἰς τὴν ἔρημον χαὶ ἀναγγελῶ τῷ γέροντι. Καὶ ἀναστὰς, ἐπορεύθη. ᾿Οψίας δὲ γενομένης, ἐχοιμήθη εἰς ἱερὸν δαιμόνων χατὰ τὴν ὁδόν. Kai ἤχουσεν ἐν τῇ νυχτὶ τῶν ([ 200 ν᾿) δαιμόνων λεγόντων" ὅτι τὴ νυχτὶ ταύτῃ, ἐῤῥίψαμιεν τὸν ἀναχωρητὴν εἰς πορνείαν. Καὶ ἀχούσας ἐλυπήθη, χαὶ ἐλθὼν ἐγγὺς

΄ τ RE \ 1 , DEC SES / YA 166 τοῦ γέροντος EUPEV αὐτὸν στυγνὸν, χαὶ λέγει αὐτῷ Τί ποιήσω, ἀδοᾶ,

LAS

HISTOIRES DES SOLITAIRES ÉGYPTIENS. 269

ὅτι γεμίζω pou τὸ βαυκάλιον ὕδατος καὶ εἰς τὴν ὥραν τοῦ φαγεῖν στρέ- φεται; Καὶ λέγει αὐτῷ γέρων" Σὺ ἦλθες ἐρωτῆσαί με ὅτι τὸ βαυ- χάλιόν μου στρέφεται, ἐγὼ δὲ τί ποιήσω, ὅτι τὴν νύχτα ταύτην πέ- πτωχαὰ εἰς πορνείαν. δὲ εἶπεν: Κὰ ἀγὼ ἔμαθον. Καὶ λέγει αὐτῷ" πῶς οἶδας; Καὶ εἶπεν αὐτῷ" ἹΚοιμώμενος ἤμην ἐν τῷ ἱερῷ, χαὶ ἤκουσα τῶν δαιμόνων λαλούντων περὶ σοῦ. Καὶ εἶπεν γέρων᾽ Ἰδοὺ χἀγὼ ἐξέρχο- μαι εἰς τὸν χύσμον. δὲ παρεχζΖλει αὐτὸν λέγων Μὴ ([ 200 v') πάτερ, ἀλλὰ παράμεινον ἐν τῷ τόπῳ σου, τὴν δὲ γυναῖκα ἀπόστειλον ἔνθεν. τοῦτο γὰρ συνάντημά ἐστι τοῦ ἐχθροῦ. “ὋὉ δὲ ἀχούσας αὐτοῦ ὑπέμεινεν ἐπιτείνων τὴν πολιτείαν αὐτοῦ μετὰ δαχρύων, ἕως οὗ ἦλθεν εἰς τὴν ἀρχαίαν αὐτοῦ τάξιν.

RATER ᾿Αδελφὸς ἠρώτησε γέροντα λέγων᾽ "Ἐὰν συμδῆ τινὰ εἰς

πειρασμὸν ἐμπεσεῖν χατά τινα ἐνέργειαν, τί γίνεται διὰ τοὺς σχανδα- λισθέντας: Καὶ διηγήσατο λέγων: Διάχονός τις ἦν ὀνομαστὸς ἐν χοι- Gt = Αἱ ΄ Η͂ Der δέ Ως OV

νοδίῳ τῆς Αἰγύπτου" διωκόμενος δέ τις πολιτευόμενος ἐχ τοῦ ἄρχοντος, NAME μετὰ παντὸς τοῦ οἴχου αὐτοῦ εἰς τὸ χοινόδιον, καὶ ἐξ ἐνερ-- γείας τοῦ πονηροῦ, ἔπεσε μετὰ γυναικὸς διάκονος, καὶ γέγονε πᾶσιν (5 201 r°) αἰσχύνη. ᾿Απῆλθεν δὲ πρός τινα ἀγαπητὸν αὐτοῦ γέροντα Μ RTE 2 Vs \ ei pa nat , 3 À V4 , Pie

χαὶ ἀνήγγειλεν αὐτῷ τὸ πρᾶγμα. Eiye δὲ γέρων χρυπτηρίαν ἐσώτερον τῆς κέλλης αὐτοῦ, χαὶ παρεχάλεσεν αὐτὸν διάχονος λέγων᾽ Θάψον με ὧδε ζῶντα χαὶ μὴ ἀναγγείλης τινί. Kat εἰσελθὼν εἰς τὴν σχοτίχν ae cine ΤΕ anne ας αν μετὰ fa ΠΑ ΕΑ γθ ΠΩΣ ἐχείνην μετενόησεν ἐξ ἀληθείας. Καὶ μετὰ χρόνον τινὰ, οὐχ ἀνέδη τὸ ὕδωρ τοῦ ποταμοῦ. Καὶ πάντων λιτανευύντων, ἀπεχαλύφθη ἑνὶ τῶν ἁγίων, ὅτι ἐὰν μὴ ἔλθη δεῖνα διάχονος, χεχρυμιμένος παρὰ τῷ δεῖνι τῷ μοναχῷ, οὐκ ἀνέρχεται τὸ ὕδωρ. Καὶ ἀχούσαντες ἐθαύμασαν. χαὶ ἐλθόντες ἐξήνεγκαν αὐτὸν ἐκ τοῦ τόπου NV, χαὶ ηὔξατο καὶ ἀνέδη

τὸ ὕδωρ, χαὶ οἱ σχανδαλισθέντες ([" 201 r°) ποτὲ πολλῷ μᾶλλον ὧφε- χήθησαν ἐπὶ τῇ μετανοίᾳ αὐτοῦ, καὶ ἐδόξασαν τὸν θεόν.

178. Εἶπεν γέρων ὅτι πολλοὶ πειραζόμιενοι ἐχ σωματικῶν ἡδονῶν, Uh πλησιάσαντες σώμασι, χατὰ διάνοιαν ἐξεπόρνευσάν, χαὶ τῶν σω- μάτων παρθένων φυλαττομένων, χατὰ ψυχὴν ἐχπορνεύουσιν. Καλὸν οὖν, ἀγαπητοὶ, ποιεῖν τὸ γεγραμμένον, καὶ πάσῃ φυλακὴ ἕχαστον τηρεῖν τὴν ἑαυτοῦ χαρὸ Lay.

17e ᾿Αδελφοὶ δύο ἀπῆλθον εἰς τὴν ἀγορὰν πωλῆσαι τὰ σχεύη αὐτῶν. Rat ὡς ἀπῆλθεν εἷς ἀπὸ τοῦ ἑνὸς, ἔπεσεν εἰς πορνείαν. ᾿Ελθὼν

δὲ ἀδελφὸς αὐτοῦ εἶπεν αὐτῷ᾽

270 REVUE DE L'ORIENT CHRÉTIEN.

[Αγωμεν εἰς τὸ χελλίον ἡμῶν, ἄδελφε. δὲ ἀπεχκοίθη αὐτῷ λέγων᾽ Οὐχ ἔρχομαι. Kai παρεκάλει αὐτὸν λέγων" (f 201 v°) Διατί, ἄδελφέ pou; δὲ εἶπεν: Ὅτι ἀπελθόντος σου ἀπ᾽ ἐμοῦ, ἔπεσα εἰς πορνείαν. Kat θέλων χεοδῇσαι αὐτὸν ἀδελφὸς αὐτοῦ, ἤρξατο λέγειν αὐτῷ" Κἀγὼ ὡς ἀπῆλθον ἀπὸ σοῦ, οὕτως μοι γέγονεν, ἀλλ᾽ ἄγωμεν μετανοή- σωμεν ἐμπόνως, χαὶ θεὸς συγχωρεῖ ἡμῖν. Kai ἐἔλθοντες ἀνήγγειλαν τοῖς γέρουσι τὸ συμύᾶν αὐτοῖς, χαὶ ἔδωχαν αὐτοῖς ἐντολὰς τοῦ μετα- νοῆσαι, χαὶ εἷς ὑπὲρ τοῦ ἄλλου μετενόει ὡς καὶ αὐτὸς ἁμαρτήσας. Ἰδὼν do θεὸς τὸν χόπον τῆς ἀγάπης αὐτοῦ, εἴσω ὀλίγων ἡμερῶν ἐφανέρωσεν ἑνὶ τῶν γερόντων ὅτι διὰ τὴν πολλὴν ἀγάπην τοῦ μὴ ἅμιαρ- τήσαντος ἀδελφοῦ, συνεχώρησα τῷ ἁμαρτήσαντι:! Ἰδοὺ τοῦτό ἐστι τὸ τιθέναι τὴν (5 201 v’) ψυχὴν αὐτοῦ ὑπὲρ τοῦ ἀδελφοῦ αὐτοῦ.

180. --- Ἦλθέ ποτε ἀδελφὸς πρός τινα γέροντα, καὶ εἶπεν αὐτῷ" ὅτι ἀδελφός μου παραλύει με ἀπερχόμενος ὧδε χἀχεῖ, χαὶ θλίδομαι. Καὶ παρεκάλει αὐτὸν γέρων λέγων: Βάσταξον τὸν ἀδελφόν σου, χαὶ θεὸς βλέπων τὸ ἔργον τῆς ὑπομονῆς σου, φέρει αὐτὸν, οὐ γὰρ μετὰ σχληρότητος εὐχερὲς φέρειν TUV4, οὐδὲ δαίμων δαίμονα ἐχδάλλει, ἀλλὰ μᾶλλον τῇ χρηστότητι φέρεις αὐτὸν, χαὶ γὰρ θεὸς ἡμῶν, τῇ παρα- χλήσει φέρει τοὺς ἀνθρώπους. Καὶ διηγήσατο λέγων" Ὅτι ἦσαν ἐν Θη- (αΐδι δύο ἀδελφοὶ, καὶ εἷς πολεμηθεὶς εἰς πορνείαν, ἔλεγε τῷ ἄλλῳ" Ὑπάγω εἰς τὸν χόσμον. δὲ ἄλλος ἔχλαιε λέγων Οὐχ ἀφῶ σε, ἄδελφέ μου, ἀπελθεῖν, καὶ ἀπολέσαι ([" 202 r') τὸν χόπον σου καὶ τὴν παρθενίαν σου. “Ο δὲ οὐκ ἐπείθετο λέγων" Οὐ κάθημαι εἰ μὴ ἀπέλθω, ἐλθὲ μετ᾽ ἐμοῦ, χαὶ πάλιν ὑποστρέφω μετὰ σοῦ, ἀπόλυσόν με καὶ μένω εἰς τὸν χόσμον. ᾿Απελθὼν δὲ ἀδελφὸς ἀνήγγειλε γέροντι μεγάλῳ ταῦτα. Kai εἶπεν αὐτῷ γέρων Ὕπαγε μετ᾽ αὐτοῦ καὶ θεὸς, διὰ τὸν κόπον σου, οὐχ ἀφίει αὐτὸν πεσεῖν. Καὶ αὶ ἀναστάντες ἤλθον εἰς τὴν οἰχουμιένην, HA ὡς ἔφθασαν τὴν κώμην, ἰδὼν θεὸς τὸν χόπον αὐτοῦ, ἦρε τὸν πόλεμον ἐκ τοῦ ἀδελφοῦ αὐτοῦ. Kai λέγει αὐτῷ "Αγωμεν πάλιν εἰς τὴν ἔρημον, ἄδελφε, ἰδοὺ νόμισον ὅτι ἡμάρτησα, τί ἐχέρδησα ἐκ τούτου. Kat ὑπέστρεψαν ἀδλαύεῖς εἰς τὸ κελλίον αὐτῶν.

181. --- ᾿Αδελφὸς ὑπὸ δαίμονος πολεμηθεὶς ἀπῆλθε (f° 202 r°) πρὸς τινα γέροντα λέγων: Ὅτι δύο ἀδελφοὶ éxetvor μετ᾽ ἀλλήλων εἰσίν. ἜἜμαθε δὲ γέρων ὅτι ὑπὸ δαιμόνων χλευάζεται, χαὶ πέμψας ἐφώνησεν αὐτούς, Kai ὅτε ὀψὲ ἐγένετο ἔθηκε ψιάθιον τοῖς δύο ἀδελ-

LU , ΄ » \ , « = “4 Ν Cu pois, καὶ ἐσχέπασεν αὐτοὺς εἰς ἕν στρῶμα λέγων" "Ori τὰ τέχνα τοῦ

HISTOIRES DES SOLITAIRES ΚΟΎΡΤΙΕΝΒ, 271

θεοῦ ἅγιά εἰσιν. Εἶπεν δὲ τῷ μαθητῇ αὐτοῦ" Tov ἀδελφὸν τοῦτον ἀπόχλεισον εἰς τὸ χελλίον παραμέρος, αὐτὸς γὰρ τὸ πάθος ἔγχει ἐν ἑαυτῷ.

182. --- ᾿Αδελφὸς εἶπεν γέροντι’ Τί ποιήσω; ὅτι ἀποκτείνει με ῥυπαρὸς λογισμός. Λέγει αὐτῷ γέρων᾽ Ὅτι ὡς θέλει μητὴρ ἀπο- (Sent τὸ παιδίον ἑαυτῆς σχίλλαν βάλλει εἰς τὸν μασθὸν αὐτῆς χαὶ ἔρχεται τὸ {πῶ 02. Νὴ παιδίον τῷ ἔθει θηλάσαι χαὶ ἀπὸ τῆς πιχρίας αὐτοῦ φεύγει, βάλλε χαὶ σὺ σκίλλαν. Λέγει αὐτῷ ἀδελφός: Τί ἐστιν σκίλλα, ἣν ὥφελλον βάλλειν. Kat εἶπεν γέρων᾽ Τὴν μνήμην τοῦ θχνά- TOU χαὶ τῶν χολαστηρίων τοῦ μέλλοντος αἰῶνος.

183. αὐτὸς ἠρώτησεν ἄλλον γέροντα περὶ τοῦ αὐτοῦ λογιο- μοῦ. Kai λέγει αὐτῷ γέρων' ᾿Εγὼ οὐδέποτε ἐπολεμήθην εἰς πρᾶγμα τοιοῦτον. Καὶ ἐσχανδαλίσθη ἀδελφός" χαὶ ἀπῆλθε πρὸς ἄλλον γέροντα λέγων ᾿Ιδοὺ τοῦτό μοι εἶπεν δεῖνα γέρων, χαὶ ἐσχανδαλίσθην ὅτι ὑπὲρ τὴν φύσιν ἐλάλησεν. Λέγει αὐτῷ γέρων᾽ οὐχ, ἁπλῶς εἶπέν σοι τοῦτο ἄνθρωπος τοῦ θεοῦ, λοιπὸν ἐγείρου μεταγόησον αὐτῷ, ἵνα εἴπη σοι τὴν δύναμιν τοῦ λόγου. ([. 202 v’) ᾿Ανέστη οὖν 0 ἀδελφὸς χαὶ ἦλθε πρὸς τὸν γέροντα ai ἔδαλεν αὐτῷ μετάνοιαν λέγων" Συγχώρησόν μοι, ἀδδᾷ, ὅτι ἀφρόνως ἐποίησα, ἀσυντάκτως ἐξελθὼν, καὶ παραχαλῶ σε; ἑρμιήνευσόν μοι πῶς οὐδέποτε ἐπολεμιήθης εἰς πορνείαν. Λέγει αὐτῷ γέρων" ᾿Αφ᾽ οὗ γέγονα μοναχὸς, οὐκ ἐχορτάσθην ἄρτου, οὔτε ὕδατος, οὔτε ὕπνου, καὶ μέοιμνα τούτων ὀχλοῦσά μοι πάνυ, οὐχ ἄφηχέ με αἰσθανθῆναι τοῦ πολέμου οὗ εἴρηκας. Καὶ ἐξῆλθεν ὠφεληθεὶς ἀδελ- φός.

184. ᾿Αδελφὸς ἠρώτησέ τινα τῶν πατέρων λέγων᾽ Τί ποιήσω ὅτι πάντοτε λογισμός μου εἰς τὴν πορνείαν ἐστὶν, καὶ οὐχ ἀφίει με ἀνα-- παῆναι "μίαν ὥραν, χαὶ θλίδεταί uou ψυχή. ‘O δὲ εἶπεν αὐτῷ᾽ Ὅταν οἱ δαίμονες σπείρωσι τοὺς λογισμοὺς ((- 203 r°) μὴ συλλαλήσῃς αὐτοῖς. Αὐτῶν γὥρ ἐστι τὸ ὑποδάλλειν πάντοτε χαὶ οὐχ ἀμελοῦσιν, οὐ μέντα βιάζονται. ᾿Εν σοὶ δέ ἐστιν δέξασθαι μὴ δέξασθαι. Οἴδας τί ἐποίησαν οἱ Ναδιανίται; καλλώπισαν τὰς θυγατέρας αὐτῶν χαὶ ἔστη- σαν, τινὰ δὲ αὐτῶν οὐχ ἐδιάσαντο, ἀλλ᾽ οἱ θέλοντες ἔπεσον μετ᾽ αὐτῶν, ἄλλοι δὲ ἀγαναχτήσαντες, μετὰ ἀπειλῆς φόνῳ ἐχρήσαντο: Θύτως ἐστὶ χαὶ ἐπὶ τῶν λογισμῶν. ᾿Αποχριθεὶς δὲ ἀδελφὸς εἶπεν τῷ γέροντι" Et οὖν ποιήσω ὅτι ἀσθενής εἰμι, χαὶ τὸ πάθος νιχᾷ με: δὲ εἶπεν αὐτῷ΄ Karavéncov αὐτοὺς, χαὶ ὅταν ἀρχὴν βάλωσι λαλεῖν, μὴ ἀποχριθῆς

αὐτοῖς, ἀλλ᾽ ἀνάστα εὔξαι, χαὶ βάλε μετάνοιαν λέγων᾽ “ιὲ τοῦ θεοῦ

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ἐλέησόν με. Εἶπεν οὖν αὐτῷ ἀδελφός" (f. 203 r°) ‘Toi μελετῶ, 466%, χαὶ οὐχ ἔστι pot χατάνυξις ἐν τῇ καρδία μου, ὅτι οὐχ οἶδα τὴν δύναμιν τοῦ λόγου. .δὲ εἶπεν αὐτῷ" Σὺ μόνον μελέτησον. ᾿Ἢχουσα γὰρ ὅτι εἶπεν ἀξθὰς ΤΠ]οιμὴν χαὶ πολλοὶ τῶν πατέρων τὸν λόγον τοῦτον ὅτι ἐπαοιδὸς οὐχ οἶδεν τῶν ῥημάτων ὧν λέγει τὴν δύναμιν, ἀλλὰ τὸ θηρίον ἀχούει, χαὶ οἶδεν χαὶ ὑποτάσσεται χαὶ ταπεινοῦται. Οὕτως χαὶ ἡμεῖς, κἂν οὐχ οἴδαμεν τῶν ῥημάτων τὴν δύναμιν, ὧν λα- λοῦμεν, ἀλλ᾽ οἱ δαίμονες ἀχούοντες φόδῳ ἀναχωροῦσιν.

185. --- [Ἔλεγον οἱ γέροντες ὅτι λογισμὸς τῆς πορνείας βιδλίον ἐστὶν, ἐὰν οὖν σπαρῇ εἰς ἡμᾶς, χαὶ μὴ πειθόμενοι αὐτῷ ἀποῤῥίψωμεν αὐτὸ ἀφ᾽ ἡμῶν, μετὰ ἀναπαύσεως κόπτεται, ἐὰν δὲ παρόντος αὐτοῦ (ie 203 v') ἐγγλυχάνθωμεν αὐτῷ ὡς πειθόμενοι, ἀντιστραφεὶς γίνε- ται σίδηρος χαὶ δυσχόλως χόπτεται. Χρεία οὖν ἐστι διακρίσεως ἐν τῷ λογισμῷ τούτῳ, ὡς τοῖς μὲν πειθομένοις αὐτῷ, οὐκ ἔστιν ἐλπὶς σωτη- ῥίας, τοῖς δὲ μὴ πειθομένοις αὐτῷ, στέφανος ἀπόχειται.

186. ᾿Αδελφοὶ δύο πολεμ᾿ηθέντες ὑπὸ τῆς πορνείας ἀπῆλθον χαὶ ἔλαθον γυναῖχας, ὕστερον δὲ εἶπον πρὸς ἀλλήλους" Τί ἐχερδήσαμεν ὅτι ἀφήχαμιεν τὴν ἀγγελικὴν τάξιν, καὶ ἤλθομεν εἰς τὴν ἀκαθαρσίαν ταύτην, χαὶ μετὰ ταῦτα εἰς πῦρ χαὶ εἰς χόλασιν μέλλομεν ὑπάγειν ; ἐξέλθωμεν πάλιν εἰς τὴν ἔρημον καὶ μετανοήσωμεν. Kat ἐξελθόντες παρεκάλεσαν τοὺς πατέρας δοῦναι αὐτοῖς μετάνοιαν, ἐξομολογησάμενοι ([" 203 ν") ἅπερ ἔπραξαν. Kai ἀπέχλεισαν αὐτοὺς οἱ γέροντες ἐπὶ ἐνιαυτὸν, καὶ τοῖς δύο ἐπίσης ἐδίδοτο ἄρτος χαὶ ὕδωρ, ἧσαν δὲ χαὶ τῇ εἰδέᾳ ὅμοιοι. Kai ὅτε ἐπληρώθη καιρὸς τῆς μετανοίας, ἐξῆλθον, καὶ εἶδον οἱ πατέ- οἐς τὸν ἕνα χλωρὸν χαὶ στυγνὸν πάνυ, τὸν δὲ ἄλλον εὐθαλὴ καὶ φαιδρὸν, καὶ ἐθαύμασαν, ὅτι χαὶ τροφὴν ἐπίσης ἐλάμδανον: Kai ἠρώτησαν τὸν στυγνὸν λέγοντες" Τί OT ES μετὰ τῶν λογισμῶν εἰς τὸ χελλίον σου: δὲ ἔφη: Τὰ χαχὰ ἐποίησα, χαὶ τὴν χόλασιν εἰς ἣν ἔμελλον ἀπελθεῖν ἐλογιζόμην, χαὶ ἀπὸ τοῦ φόύδου, ἐχολλήθη τὸ ὀστοῦν μου τῇ σαρχί μου. ᾿Ηρώτησαν δὲ χαὶ τὸν ἄλλον" Καὶ σὺ τί ἐλογίζου ἐν τῇ χαρ- dix σου εἰς τὸ χελλίον σου; δὲ ἔφη" Τῷ θεῷ εὐχαρίστουν ὅτι ἐξεί- λετό με ἀπὸ τῆς (f° 204 r°) ἀκαθαρσίας τοῦ χόσμου καὶ τῆς χολάσεως, χαὶ ἤγαγέ με εἰς τὴν ἀγγελικὴν ταύτην πολιτείαν χαὶ μνημονεύων τοῦ θεοῦ εὐφραινόμην. Kai εἶπον οἱ γέροντες" Ὅτι ἐπίσης μετάνοια τῶν δύο ἐστὶ πρὸς τὸν θεόν.

187. --- Γέρων τις ἣν ἐν Σχήτει, καὶ ἐμπεσὼν εἰς ἀσθένειαν με-

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HISTOIRES DES SOLITAIRES ÉGYPTIENS. 273

γάλην, ὑπηρετεῖτο ὑπὸ τῶν ἀδελφῶν, χαὶ βλέπων γέρων ὅτι χάμνου-- σιν, ἔλεγεν Ὑπάγω εἰς Αἴγυπτον, ἵνα μὴ παραλύω τοὺς ἀδελφούς. Kat λέγει αὐτῷ ἀδδὰᾶς Μωῦσῆς: Μὴ ἀπέλθῃς, ἐπεὶ εἰς πορνείαν ἔχεις πεσεῖν. δὲ λυπηθεὶς ἔλεγεν" ᾿Απέθανε τὸ σῶμιά μου χαὶ ταῦτά μοι λέγεις! Ἀπῆλθε οὖν εἰς Αἴγυπτον, χαὶ ἀχούσαντες οἱ ἄνθρωποι πολλὰ { γξις ς ρ προσέφερον αὐτῷ, καὶ παρθενεύουσα μία κατὰ πίστιν ἦλθεν ὑπηρετεῖν τῷ γέροντι. ([5 204 ν᾿) Μετὰ δὲ χρόνον μικρὸν ὑγιάνας, ἔπεσε μετ᾽ αὐτῆς καὶ ἐν γαστρὶ ἔλαύεν. Οἱ δὲ ἄνθρωποι εἶπον αὐτῆ᾽ [16θεν τοῦτο ; H δὲ εἶπεν: ᾿Απὸ τοῦ γέροντος. Kat οὐχ ἐπίστευσαν αὐτῆ. δὲ AAROS { γέρων ἔλεγεν. ᾿γὼ ἐποίησα, ἀλλὰ φυλάξατε τὸ παιδίον τὸ γεννώμε- γον. Καὶ ὅτε ἀπεγαλαχτίσθη, ἡμέρας ἑορτῆς γενομένης ἐν Σχήτει, χατ- ἦλθεν γέρων βαστάζων τὸ παιδίον ἐπὶ τοῦ ὥμου αὐτοῦ, χαὶ εἰσῆλ- pe θ Ξ Î , θεν εἰς τὴν ἐκκλησίαν ἔμπροσθεν τοῦ λαοῦ. δὲ ἰδόντες αὐτὸν, ἔχλαυσαν, χαὶ εἶπεν τοῖς ἀδελφοῖς: Βλέπετε τὸ παιδίον τοῦτο; υἱὸς τῆς παραχοῆς ς φ ; ᾿ ἐστιν, ἀσφαλίζεαθε οὖν ἑαυτοὺς, ἀδελφοὶ ὅτι εἰς τὸ γήρας μου τοῦτο ? 1 nl ρ Υ ἐποίησα. ἀλλὰ εὔξασθε ὑπὲο ἐμοῦ. Kai ἀπελθὼν εἰς τὸ χελλίον αὐτοῦ ? Lt (ἢ 204 ν᾿) ἔδαλεν ἀρχὴν τὴς πρώτης αὐτοῦ ἐργασίας. 188. ᾿Αδελφός τις ἐπειράσθη ὑπὸ τοῦ δαίμονος τῆς πορνεία e be PNEUS δεινῶς. Τέσσαρες γὰρ δαίμονες ἐν εἴδει γυναικῶν εὐμορφοτάτων μετα- σχηματισθέντες, ἐπὶ τεσσαράχοντα ἡμέρας ἔμειναν παλαίοντες πρὸς 1 τὰ ΄ » Y Ce > / 1 » / d 1G . LE ὃς ἀγωνισα- αὐτὸν, ἐφελχύσασθαι εἰς αἰσχρὰν μίξιν. ᾿Ιὐχείνου δὲ ἀνδρείως ἀγωνισα ΄ ᾿ Ν » ΄ \ / πο \ ᾿ D RES 3 pévou χαὶ μὴ ἠττηθέντος, θεὸς βλέπων αὐτοῦ τὸν χαλὸν ἀγῶνα, ἐχα- ρίσατο αὐτῷ μηκέτι πύρωσιν ἔχειν σαρκίχην. 189. ᾿Αναχωρητής τις ἣν ἐν τοῖς κάτω μέρεσι τῆς Αἰγύπτου,

΄

\ ὩΣ \ « 2 7 SELLE τ ἈΝ ΝΠ 1 χαὶ NY ονομᾶστος OTL εἰς μονοχελλίον ἐχάθητο ἐν τῇ ἐρήμῳ. Kai ἰδοὺ

ar ἐνέργειαν τοῦ Σατανᾶ, γυνὴ ἄσεμνος ἀχόυσασα περὶ αὐτοῦ, ἔλεγε τοῖς νεωτέροις" (f° 204 ν᾽). Τί θέλετέ μοι δοῦναι, χαὶ χαταθάλλω τὸν ᾿ ?

ἀναχωρητὴν ὑμῶν. Οἱ δὲ συνέθεντο δοῦναί τι φανερόν. Καὶ

ν NY ro) D © C? a R

4 πῇ DEN A , n J 1 , ἑσπέρας, ἄλθεν ἐπὶ τὴν κέλλαν αὐτοῦ ὡς πλανωμένη, χαὶ χρουσάσης αὐὖ- τπὶ ον ν᾽ δ ἈΠ ΔΟΝ » , ἜΝ LT / τῆς ἐξῆλθεν. Καὶ ἰδὼν αὐτὴν ἐταράχθη λέγων" [os ὧδε παραγέγονας: H δέ φησι χλαίουσα᾽ ΠΠλανωμένη nov ὧδε. Kai σπλαγχνισθεὶς, » ’, ᾿ \ 2 A 3 / \ 2 \ 2 \ / » -Ὁ εἰσήνεγκεν αὐτὴν εἰς τὸ αὐλίδιον, χαὶ εἰσελθὼν εἰς τὴν χέλλαν αὐτοῦ ἔχλεισεν. Kat ἰδοὺ ἀθλία ἔκραξε λέγουσα" ᾿Αδόᾷ, τὰ θηρία με κατα- τρώγουσιν. δὲ πάλιν ταραχθεὶς, καὶ τὸ κρίμα τοῦ θεοῦ φούηθεὶς, ἔλεγεν: ΠΠ6θεν ἦλθέ μοι ὀργὴ αὕτη, καὶ ἀνοίξας τὴν θύραν, εἰσήνεγχεν ES 7 24 e M a\ LEA . αὐτὴν ἔσω. Ηρξατο δὲ διάδολος χατατοξεύειν ([" 205 r°) αὐτὸν εἰς ORIENT CHRÉTIEN. 18

274 REVUE DE L'ORIENT CHRÉTIEN.

ε

αὐτήν. Ο δὲ νοήσας τὸν πόλεμον τοῦ ἐχθροῦ ἔλεγεν Αἱ μεθοδείαι τοῦ ἐχθροῦ σχότος εἰσὶν, δὲ υἱὸς τοῦ θεοῦ φῶς ἐστιν. ᾿Ανχστὰς οὖν, 3: τῷ A ΄ 5) ΄ δι SUD / 57 el \ ἀνῆψε τὸν λύχνον. ᾿Κχκαιόμενος δὲ τῇ ἐπιθυμίᾳ, ἔλεγεν" ὅτι οἱ τὰ τοιαῦτα πράσσοντες, εἰς χόλασιν ὑπάγουσιν, δοχίμασον οὖν ἐντεῦθεν, εἰ δύνασαι ὑπενεγχεῖν τὸ πῦρ τὸ αἰώνιον. Kai βαλὼν τὸν δάκτυλον αὐὖ- τοῦ ἐπὶ τὸν λύχνον ἔχαυσεν αὐτὸν, χαὶ οὐκ ἠσθάνετο καιόμενος διὰ τὴν ὑπερδολὴν τῆς πυρώσεως τῆς σαρχός. Καὶ οὕτως ποιῶν ἕως πρωΐ, ἔκαυσεν ὅλους τοὺς δαχτύλους αὐτοῦ. ᾿Κχείνη δὲ ἀθλία, ὁρῶσαι ἐποίη- σεν, ἀπὸ τοῦ φόθου ἀπελιθώθη.

Ἔλθοντες δὲ τὸ πρωΐ οἱ νεώτεροι πρὸς τὸν ἀναχωρητὴν, ἔλεγον" Ἦλθεν ὧδε γυνὴ ([. 205 τ") ὀψέ; δὲ εἶπεν: Ναὶ, ἰδοὺ ἔσω, χοι- μᾶται. Kai εἰσελθόντες, εὗρον αὐτὴν νεχράν. Kai λέγουσιν αὐτῷ᾽ ᾿Αὐδᾷ, τέθνηκεν. Τότε ἀναχαλύψας τὰς χεῖρας αὐτοῦ, ἔδειξεν αὐτοῖς λέγων" Ἰδού τι ἐποίησέ μοι θυγάτηρ τοῦ διαδόλου, ἀπώλεσέ μου τοὺς δαχτύλους. Καὶ διηγησάμενος αὐτοῖς τὸ γεγονὸς, ἔλεγεν᾽ l'éyou-

. \ ϑ. “4 ? \ \ \ LA πται Μὴ ἀποδώσῃς χαχὸν ἀντὶ χαχοῦ. Kai ποιήσας εὐχὴν ἤγειρεν αὐτὴν, καὶ ἀπελθοῦσα ἐσωφρόνησε τοῦ λοιποῦ.

190. ᾿Αδελφὸς ἐπολεμήθη ὑπὸ τοὺ δαίμονος τῆς πορνείας.

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Συνέξη δὲ αὐτὸν διαόῆναι εἰς κώμην τινὰ τῆς Αἰγύπτου, καὶ. ἰδὼν θυγατέρα ἱερέως τῶν “Ἰὐλλήνων, ἠγάπησεν αὐτὴν χαὶ εἶπεν τῷ πατρὶ αὐτῆς" Δός μοι αὐτὴν εἰς γυναῖκα. δὲ ἀποχριθεὶς ([. 205 v*) εἶπεν , ΡΝ ᾿ r / ΕἸ ΥΝ ι , \ -- - αὐτῷ" Οὐ δύναμαι δοῦναί σοι αὐτὴν, ἐὰν μὴ μάθω παρὰ τοῦ θεοῦ \ \ \ \ / 5 9 .— 4 \

μου. Kai πορευθεὶς πρὸς τὸν δαίμονα, εἶπεν αὐτῷ ᾿Ιδού τις μοναχὸς ἦλθε θέλων τὴν θυγατέρα μου, δώσω αὐτὴν αὐτῶ; Καὶ ἀποχριθεὶς δαίμων εἶπεν: ᾿Εὰν ἀρνεῖται τὸν θεὸν αὐτοῦ, χαὶ τὸ βάπτισμα, χαὶ

\ *) 2 τὸ ἐπάγγελμα τοῦ μοναχοῦ, ἐρώτησον αὐτόν. Kat ἐλθὼν ἱερεὺς εἶπεν τῷ μοναχῷ" Ἄρνησαι τὸν θεόν σου, χαὶ τὸ βάπτισμα, χαὶ τὸ ἐπάγ-

- - \ ΄, \ 2 ΄ τὰ \ \ γελμα τοῦ μοναχοῦ. δὲ συνέθετο, χαὶ εὐθέως εἶδεν ὡσεὶ περιστερὰν ἐξελθοῦσαν ἀπὸ τοῦ στόματος αὐτοῦ καὶ ἀναπτάσαν εἰς τὸν οὐρανόν. Καὶ πορευθεὶς ἱερεὺς πρὸς τὸν δαίμονα, εἶπεν αὐτῷ" ᾿Ιδοὺ συνέθετο τὰ τρία ταῦτα. Τότε ἀποχριθεὶς διάδολος εἶπεν αὐτῷ Μὴ δῷς ((. 205 ν᾽) αὐτῷ τὴν θυγατέρα σου εἰς γυναῖκα, γὰρ θεὸς αὐτοῦ οὐχ ἀπέστη ἀπ᾽ αὐτοῦ, ἀλλ᾽ ἔτι βοηθεῖ αὐτῷ. Kat ἐλθὼν ἱερεὺ εἶπεν αὐτῷ: Οὐ δύναμαι δοῦναί σοι αὐτὴν, γὰρ θεός σου βοηθεῖ σοι,

A , , / ᾿ 5 LS NES r e 20 \ 5 2 ms χαὶ οὐκ ἀπέστη ἀπὸ σοῦ. Ταῦτα δὲ ἀκούσας ἀδελφὸς εἶπεν ἐν ἑαυτῷ Et τοσαύτην ἀγαθότητα ἐνεδείξατο θεὸς εἰς ἐμὲ, ἐγὼ δὲ ταλαίπω-

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HISTOIRES DES SOLITAIRES ÉGYPTIENS. 219

ρος ἠρνησάμιην αὐτὸν χαὶ τὸ βάπτισμα χαὶ τὸ ἐπάγγελμα τοῦ μοναχοῦ, δὲ ἀγαθὸς ὧν ἔτι καὶ νῦν βοηθεῖ μοι.

Kat εἰς ἑχυτὸν ἐλθὼν, διένηψεν, χαὶ ἐξῆλθεν εἰς τὴν ἔρημιον πρὸς μέγαν γέροντα, καὶ διηγήσατο αὐτῷ τὸ πρᾶγμα. Kai ἀποχριθεὶς γέρων εἶπεν αὐτῷ᾽ κάθισον μετ᾽ ἐμοῦ εἰς τὸ σπήλαιον, χαὶ νήστευσον τρεῖς ἑδδομιάδας ζευγάρια, χἀγὼ παραχαλῶ τὸν θεὸν ὑπὲρ σοῦ. Καὶ ἐπόνησεν γέρων ([. 206 r°) περὶ τοῦ ἀδελφοῦ, χαὶ παρεχάλεσε τὸν θεὸν λέγων᾽ Δέομαι χύριε, χάρισαί μοι τὴν ψυχὴν ταύτην, χαὶ δέξα, αὐτῆς τὴν μετάνοιαν. Καὶ εἰσήκουσεν αὐτοῦ θεὸς, at πληρωθείσης τῆς ἑδδομάδος, ἦλθεν γέρων πρὸς τὸν ἀδελφὸν, χαὶ ἐπηρώτησεν αὐτὸν λέγων᾽ Ewpaxas τίποτε; Kai ἀποχριθεὶς ἀδελφὸς εἶπεν΄. Ναὶ, ἑώρακα τὴν περιστερὰν ἄνω εἰς τὸ ὕψος τοῦ οὐρανοῦ χατέναντ' τῆς χεφαλῆς μου. Καὶ ἀποχριθεὶς γέρων εἶπεν αὐτῷ: Πρόσεχε σεχυτῷ καὶ παρακάλεσον τὸν θεὸν ἐχτενῶς. Kai τῇ δευτέρᾳ ἑδδόμαδι, ἐλθὼν γέρων πρὸς τὸν ἀδελφὸν, ἐπηρώτησεν αὐτὸν λέγων" ώρακας τίποτε; δὲ ἀποχριθεὶς εἶπεν: Εἶδον τὴν περιστερὰν ([. 206 r°) ἐγγὺς τῆς χεφαλῆῇῆς μου. Kat παρήγγειλεν αὐτῷ γέρων: Νῆφε χαὶ εὔχου. Ἦλθε δὲ πάλιν γέρων πληρωθείσης τῆς τρίτης ἑδδομάδος, χαὶ ἐπη- ρώτησεν αὐτὸν λέγων᾽ Μὴ τί πλέον ἑώραχας; δὲ εἶπεν" “Εώραχα τὴν περιστερὰν ὅτι ἦλθε χαὶ ἔστη ἐπάνω τῆς χεφαλῆς μου, χαὶ ἐξέ- TEL τὴν χεῖρα μου κατασχεῖν αὐτὴν, δὲ ἀναπτάσα, εἰσῆλθεν εἰς τὸ στόμα μου. Kai εὐχαρίστησε γέρων τῷ θεῷ χαὶ εἶπεν τῷ ἀδελφῷ" Ἰδοὺ ἐδέξατο θεὸς τὴν μετάνοιάν σου, τὸ λοιπὸν πρόσεχε σεχυτῷ. Καὶ ἀποχριθεὶς ἀδελφὸς εἶπεν. Ιδοὺ ἀπὸ τοῦ νῶν ἔσομαι μετὰ σοῦ, d66&, ἕως οὗ ἀποθάνω.

191. --- Ἔλεγέ τις τῶν Θηδαίων γερόντων᾽ ὅτι ἐγὼ ἤμην τέκνον ἱερέως τῶν Ἑλλήνων. Μιχρὸς οὖν ὑπάρχων ([. 206 v*) ἐκαθήμην χαὶ εἶδον τὸν πατέρα μου πολλάκις εἰσερχόμενον θυσίαν ἐπιτελέσαι τῷ εἰδώλῳ. Ἅπαξ δὲ ἐν χρυφῇ εἰσελθὼν ὀπίσω αὐτοῦ, εἶδον τὸν Σατανὰν χαὶ πᾶσαν τὴν στρατιὰν αὐτοῦ παρεστῶσαν αὐτῷ, χαὶ ἰδοὺ εἷς ἄρχων αὐτοῦ ἐλθὼν προσεκύνει αὐτῷ. Ἀποχριθεὶς δὲ διάόολος εἶπεν αὐτῷ" Πόθεν σὺ ἔρχη; δὲ εἶπεν" Εἰς τήνδε τὴν χώραν ἤμην, KA ἐξήγειρα πολέμους, καὶ πολλὴν ἔκχυσιν αἱμάτων ἐποίησα χαὶ ἦλθον τοῦ ἀνχγ- Ἔν τριάχοντα ἡμέραις. δὲ χελεύσας μαστιχθῆναι αὐτὸν, εἶπεν"

᾿Ῥοσούτῳ χρόνῳ τοῦτο μόνον ἐποίησας.

276 REVUE LE L'ORIENT CHRÉTIEN.

Καὶ ἰδοὺ ἄλλος προσεκύνει αὐτῷ, καὶ λέγει αὐτῷ " Kai ([. 206 v’) πόθεν ἔρχῃ; ᾿Αποχριθεὶς δὲ δαίμων εἶπεν: Ἂν τῇ θαλάσσῃ ἤμην, χαὶ ἐξήγειρα ἀνέμους χαὶ χατεπόντισα πλοῖα, χαὶ πόλλους ἀνθρώ- πους ἀπέχτεινα, καὶ ἦλθον τοῦ ἀναγγεῖλαί σοι. δὲ εἶπεν αὐτῷ" ΠΠόσῳ χρόνῳ τοῦτο ἐπονήσας: δὲ δαίμων εἶπεν. Ἔν ἡμέραις εἴκοσι. Ἐχέλευσε δὲ τοῦτον μαστιχθῆναι λέγων" Διότι τοσαύταις ἡμέραις τοῦτο μόνον ἐποίησας.

Καὶ ἰδοὺ τρίτος ἐλθὼν προσεκύνει αὐτῷ. Εἶπεν δὲ καὶ τούτῳ Καὶ σὺ πόθεν Éoyn; Καὶ ἀποκριθεὶς δαίμων εἶπεν: Εἰς τήνδε τὴν χώμην γάμοι ἐγένοντο, χαὶ ἐξήγειρα πόλεμον καὶ πολλὴν ἔκχυσιν αἱμάτων ἐποίησα, ἀποχτείνας τὸν νυμφίον χαὶ τὴν νύμφην, χαὶ Ἧλθον τοῦ ἀναγ- γεῦλαι, (FE. 207 r°) co. ‘O δὲ εἶπεν Πόσαις ἡμέραις τοῦτο ἐποίησας: nai εἶπεν: Δέχα. ᾿Ἐχέλευσεν δὲ χαὶ τοῦτον ὡς χρονίσαντα μαστιγω- θῆναι.

Πρὸς τούτοις ἦλθεν χαὶ ἕτερος προσχυνῆσαι αὐτῷ. Εἶπεν δέ: Πόθεν χαὶ σὺ ἔρχῃ; ὋὉ δὲ εἶπεν" Ἔν τῇ ἐρήμῳ ἤμην ἰδοὺ τεσσαράχοντα ἔτη, πολεμῶν πρὸς ἕνα μοναχὸν, LOL τὴν νύχτα ταύτην χατέδαλον αὐτὸν εἰς πορνείαν. Τοῦτο ἀχούσας, ἀναστὰς, χατεφίλησεν αὐτὸν, χαι ἀρας ὃν ἐφόρει στέφανον, ἐπέθηκε τῇ χεφαλὴ αὐτοῦ, χαὶ ἐκάθισεν αὐτὸν ἐν τῷ θρόνῳ αὐτοῦ λέγων᾽ ὅτι τὸ μέγα τοῦτο πρᾶγμα ἠδυνήθης ποιῆσαι.

Εἶπεν δὲ γέρων: Τοῦτο ἐγὼ ἰδὼν, ἔλεγον: "Ὄντως μεγά ἐστι τὸ τάγμα τῶν μοναχῶν. Καὶ, τοῦ θεοῦ εὐδοχήσαντός μου ([. 207 r') τὴν

CT

σωτηρίαν, ἐξῆλθον χαὶ γέγονα μοναχός.

Διηγήματα πρὸς ὑπομονὴν καὶ καρτερίαν ἡμᾶς ἀλείφοντα.

192. Εἶπεν γέρων" ᾽Εὰν ἔλθῃ ἀνθρώπῳ πειρασμὸς, πανταχόθεν πληθύνονται αὐτῷ αἱ θλίψεις, ἵνα ὀλιγωρήσῃ χαὶ γογγύσῃ, λαὶ ηγή- σατο γέρων οὕτως" ᾿Αδελφύς τις ἣν εἰς τὰ Κελλία, χαὶ ἦλθεν ἐπ᾽ αὐτῷ πειρασμός. Καὶ εἰ ἔδλεπέν τις αὐτὸν, οὔτε ἀσπάσασθαι αὐτὸν ἤθελεν, οὔτε εἰς χελλίον εἰσαγαγεῖν, καὶ εἰ ἔχρηζεν ἄρτον, οὐδεὶς αὐτῷ ἐχίχρα, καὶ ἀπὸ τοῦ θερισμοῦ ἐρχόμενον, οὐδεὶς εἰς τὴν ἐκχλησίαν προετρέπετο δι᾿ ἀγάπην ὡς ἔστιν ἔθος. Ἦλθε δὲ μίαν ἀπὸ τοῦ θέρους, χαὶ οὐδὲ ἄρτους εἶχεν εἰς τὸ χελλίον αὐτοῦ χαὶ σὺν τούτοις ([. 207 v*) πᾶσιν εὐχαρίστει τῷ θεῷ. Ἰδὼν δὲ θεὸς τὴν ὑπομονὴν αὐτοῦ, ἦρε

\ , τὰ S DES » "9 ΝΥΝ τ \ 2 τὸν πόλεμον τοῦ πειρασμοῦ ἀπ᾽ αὐτοῦ, χαὶ ἰδού τις ἦλθε τὴν θύραν

HISTOIRE DES SOLITAIRES ÉGYPTIENS. QT

, ᾿ > 9 Tr \ " 6 # é χρούων, χάμηλον ἔχων ἀπ᾽ Αἰγύπτου μεστὴν ἄρτων. Kai ἤρξατο ἀδελφὸς χλαίειν καὶ λέγειν" Κύριε, οὐκ ἤμην ἀξιος θλισήναι μιχρὸν διὰ τὸ ὄνομά σου; καὶ ὡς παρῆλθεν πειρασμὸς, ἐκράτουν αὐτὸν οἱ ι \ DZ , il / , LU \ ει A , , ἀδελφοὶ χαὶ ἀνέπαυον εἰς τὰ χελλία αὐτῶν χαὶ εἰς τὴν ἐχχλησίαν.

193. Παρέδαλόν τινες ἀδελφοὶ ἐν τῇ ἐρήμῳ μεγάλῳ γέροντι, χαὶ εἶπον αὐτῷ Πῶς καρτερεῖς ὦδε, ἀδδᾷ, ὑπομένων τὸν χόπον τοῦτον; Καὶ εἶπεν γέρων Ὅλος χρόνος τοῦ χόπου μου οὗ ποιῶ ὧδε οὔπω ἡμέρας μιᾶς τῆς κολάσεώς ἐστιν.

194. Εἶπεν γέρων ὅτι οἱ ἀρχαῖοι οὐ ([. 207 v?) ταγέως μετέ-

ρ PX 1 Gouvoy ἐκ τοῦ τύπου αὐτῶν, ἐχτὸς τῶν τριῶν πραγμάτων TOUTE Ἔλδν τις εὑρεθῇ ἔγων τινὰ λυπούμενον χατ᾽ αὐτοῦ, χαὶ πάντα ποιῶν τὰ ς ρ ͵ L \ ? πρὸς θεραπείαν αὐτοῦ “μὴ δύναται αὐτὸν μεταδαλεῖν, πάλιν, ἐὰν συμ ἀπὸ πολλῶν δοξάζεσθαι, πειρασμῷ πορνείας περιπεσεῖν.

(Rire ? RSR 0 '

195.— Ἀδελφὸς ἠρώτησε γέροντα λέγων᾽ Τί ποιήσω ; ὅτι οἱ λογισμοὶ

ϑ \ Ÿ τὶ ne 4 θλίδουσί με λέγοντες: Οὐ δύνασαι νηστεύειν οὐδὲ ἐργάζεσθαι, χἂν ἐπισχέπτου τοὺς ἀσθενοῦντας χαὶ τοῦτο ἀγάπη ἐστίν. Λέγει αὐτῷ

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γέρων" Ὕπαγε; φάγε, πίε, χοιμῶ μόνον τοῦ χελλίου σου μὴ αποστῆς, εἰδὼς ὅτι ὑπομονὴ τοῦ χελλίου φέρει τὸν μοναχὸν εἰς τὴν τάξιν αὐτοῦ. Kat ὡς ἐποίησε τρεῖς ἡμέρας (2087) ἠχηδίασεν, χαὶ εὑρὼν μιχρὰ θαλλία, ἔσχισεν αὐτὰ, καὶ πάλιν τῇ ἑξῆς ἤρξατο πλέχειν αὐτά: καὶ πεινάσας, εἶπεν᾽ ᾿Ιδοὺ ἄλλα μικρὰ θαλλία εἰσὶ, πονήσω αὐτὰ χαὶ ἐσθίω. Καὶ ὡς ἐποίησε τὰ θαλλία, εἶπεν πάλιν ᾿Αναγινώσχω μικρὸν, χαὶ οὕτως ἐσθίω. Kai ὡς ἀνέγνω λέγει" Il μου τοὺς μιχροὺς ψαλμοὺς, χαὶ μετὰ ἀμεριμνίας ἐσθίω. Καὶ οὕτως κατὰ μιχρὸν προέκοπτεν, τοῦ θεοῦ συνεργοῦντος αὐτῷ, ἕως οὗ ἦλθεν εἰς τὴν τάξιν αὐτοῦ. Καὶ θάρσος λαδὼν χατὰ τῶν λογισμῶν ἐνίκα αὐτοὺς.

190. --- Ἠρώτηήθη γέρων" Διατί ἀχηδιῷ χατεζόμενος ἐν τῷ χελλίῳ vou; Καὶ ἀπεχρίθη: ὅτι oùy ἑώραχας ἀκμὴν οὔτε τὴν ἐλπιζομένην ἀνάπαυσιν, οὔτε "τὴν ἐσομένην ([. 208 r°) κόλασιν. Εἰ γὰρ ταῦτα » τὰ Fr, , / 02 \ e ἀχριδῶς ἑώραχας, εἰ σχωλήχων ἔγεμεν τὸ χέλλιον σου, ὥστε ἕως τρα-

2 , 9 δὲ N ΄ ΄ 4 N χήλου ἐν αὐτοῖς δεδυχέναι ὑπέμεινας ἂν μὴ ἀχηδιῶν.

197. Τινὰ τῶν γερόντων παρεχάλεσαν οἱ ἀδελφοὶ παύσασθαι τῶν

1 Ν φ

, / LA \ , Ν᾿ ΕἸ -Ὁ ᾽ὔ -Ὁ / μεγάλων πόνων. δὲ" ἀπεκρίθη αὐτοῖς’ Λέγω ὑμῖν, τέχνα, ὅτι ᾿Αὐραὰμ. ἔχει μετανοῆσαι ὁρῶν τὰς δωρεὰς τοῦ θεοῦ τὰς μεγάλας, διότι μὴ πλέον ἠγωνίσατο.

198. --- ᾿Αδελφὸς ἠρώτησε γέροντα λέγων Οἱ λογισμοί μου δέμιδον-

278 REVUE DE L'ORIENT CHRÉTIEN.

ται χαὶ θλίδομαι. Λέγε: αὐτῷ γέρων᾽ Σὺ κάθου εἰς τὸ κελλίον σου,

\ ΕἸ il 1 » «“ ἣν 1 3\ FT il ΚΤ χαὶ αὐτοὶ πάλιν ἔρχονται. “Ὥσπερ γὰρ ὄνος ἐὰν δεδεμένη χαὶ πῶλος αὐτῆς σχιρτὰ ὧδε χἀχεῖ HAL ὅπου δ᾽ ἂν ἀπέρχηται πρὸς τὴν unréox ([. 208 ν᾿) αὐτοῦ ἔρχεται, οὕτως χαὶ οἱ λογισμοὶ τοῦ διὰ τὸν θεὸν ἐγχαρτεροῦντος ἐν τῷ χελλίῳ αὐτοῦ, εἰ καὶ πρὸς μικρὸν ῥέμδονται, ἀλλὰ πάλιν πρὸς αὐτὸν ἀναστρέφουσιν.

199. --- Γέρων τις ἐχάθητο ἐν τῇ ἐρήμῳ ἔχων τὸ διάστημα ἀπὸ -ὠΦ / 10 EE) ! / (2 / / τοῦ ὕδατος μίλια δώδεκα, καὶ ἀπερχόμενος χαθάπαξ γεμίσαι, ὀλιγώρησε χαὶ εἶπεν. Τίς χρεία τοῦ χόπου τούτου, ἔρχομαι χαὶ μένω πλησίον τοῦ ὕδατος. Καὶ τοῦτο εἰπὼν ἐστράφη, at θεωρεῖ τινα ἀχολουθοῦντα

τ 5 - à ἐν 2 SNS χη τὺ δι 8... τ , 5 MAN χαὶ ἀριθμοῦντα τὰ βήματα αὐτοῦ, ἠρώτησε δὲ αὐτόν" Σὺ τίς εἶ; δὲ τ »” V4 , \ \ , r œ \ / f εἶπεν: Λγγελος zuplou εἰμὶ, xat ἀπεστάλην μετρῆσαι τὰ βήματά σου, χαὶ δοῦναί σοι τὸν μισθόν. Καὶ τοῦτο ἀχούσας γέρων, εὔψυχος ἐγένετο χαὶ προθυμώτερος, ([° 208 ν᾽) χαὶ προσέθηχεν ἐσωτέρω μίλια πέντε.

200. --- "Ἔλεγον οἱ πατέρες: Βὰν συμδῇ σοι πειρασμὸς ἐν τῷ τόπῳ ὅπου οἰκεῖς, μὴ χαταλίπης τὸν τόπον ἐν τῷ χαιρῷ τοῦ πειρασ- μοῦ, εἰ δὲ ua, ὅπου ἐὰν ἀπέλθης εὑρίσχεις ἔμπροσθέν σου φεύγεις, , τ e/ e / \ . / 7 ἀλλ΄ ὑπόμεινον ἕως οὐ παρέλθη πειρασμὸς, ἵνα ἀσχανδάλιστος γένη- ται ἀναχώρησίς σου χαὶ ἐν χαιρῷ εἰρήνης, ὅπως μηδὲ τοῖς χατοι- χοῦσι τὸν τόπον θλίψιν τινὰ ποιήσει χωρισμός σου.

201. --- ᾿Αδελφός τις ἦν ἐν χοινοδίῳ ἡσυγαστὴς, χαὶ συνεγῶς ἐχινεῖτο

φ ͵ ν ? L εἰς. ὀργήν. Λέγει οὖν ἐν ἑαυτῷ" ᾿Απέρχομαι χαταμόνας AVAL DEV χαὶ ἐν τῷ μὴ ἔχειν με τί ποτε μετά τινος, παύεται ἀπ᾽ ἐμοῦ τὸ πάθος. Ἐξελθὼν οὖν, ὥχησεν ἐν ([ 209 r°) σπηλαίῳ μόνος. Ἔν μιζ δὲ τῶν ἡμερῶν, γεμίσας τὸ βαυχάλιον ὕδατος ἔθηχε χαμαὶ χαὶ ἐξαίφνης ἐστράφη. \ , ΄ il \ / CR r r

Λαδὼν δὲ ἐγέμισεν αὐτὸ, καὶ πάλιν ἐστράφη. Εἶτα τρίτον Veioas ἔθηχε, καὶ πάλιν ἐστράφη. Kat θυμωθεὶς, ἐδράξατο αὐτοῦ χαὶ ἔχλασεν

Dir. ε x δ: 5 \ » > , CURE UN 7 αὐτό. Εἰς ἑαυτὸν δὲ ἐλθὼν, ἔγνω ὅτι ἐνεπαίχθη ὑπὸ τοῦ δαίμονος, χαὶ εἶπεν Ἰδοὺ καταμόνας ἀνεχώρησα, χαὶ ἡττήθην, ἀπέρχομαι οὖν εἰς τὸ χοινόξιον. Πανταχοῦ γὰρ, ἀγώνος χρεία χαὶ ὑπομονὴς χαὶ τῆς τοῦ θεοῦ βοηθείας. Καὶ ἀναστὰς ὑπέστρεψεν εἰς τὸν τόπον αὐτοῦ.

Ὁ) ᾿Αδελφὸς ἠρώτησε γέροντα λέγων᾽ Τί ποιήσω, πάτερ, ὅτι οὐδὲν ἐργάζομαι μοναχοῦ, ἀλλ᾽ ἐν ἀμελείᾳ εἰμὶ ἐσθίων, ( 209 r°) χαὶ πίνων χαὶ χοιμώμιενος, καὶ ἐν αἰσχροῖς λογισμοῖς χαὶ ἐν ταραχῇ

πολλὴ εἰμὶ, μετερχόμενος ἀπὸ ἔργου εἰς ἔργον χαὶ ἀπὸ λογισμῶν εἰς

HISTOIRES DES SOLITAIRES ÉGYPTIENS. 279

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, AC NS à ,3 Tr . A λογισμούς. Εἶπεν δὲ γέρων' Σὺ κάθου εἰς τὸ κελλίον σου, χαὶ δύνασαι ποίησον ἐχτὸς ταραχῆς. Θέλω γὰρ τὸ μικρὸν σὺ ποιεῖς ἄρτι, 7 , - / 2 / 1 , ᾿ AP 1 r ὡς ὅτι ἀδδᾶς Ἀντώνιος ἐποίει τὰ μεγάλα εἰς τὸ ὄρος, χαὶ πιστεύω el / u = , il \ LU -Ὁ κ ὃτι καθήμενος ἐν τῷ χελλίῳ διὰ τὸ ὄνομα τοῦ θεοῦ χαὶ τηρῶν τὴν ἑαυτοῦ συνείδησιν, εὑρίσχῃ καὶ αὐτὸς εἰς τὸν τύπον τοῦ 4664 ᾿Αντωνίου.

203. ὄἪὀρωτήθη γέρων πῶς δεῖ σπουδαῖον ἀδελφὸν μὴ σχανδαλι- σθῆναι ἐὰν ἴδη τινὰς ἀνακάμιπτοντας ἐν τῷ κόσμῳ; Καὶ εἶπεν" ὀφείλει σκοπεῖν τοὺς χύνας, τοὺς θηρεύοντας ([. 209 ν᾿) τοὺς λαγωοὺς, χαθά-

τ Lie , - A \ \ N ΓᾺ / x

περ εἷς ἐξ αὐτῶν ἑωραχὼς τὸν λαγωὸν ἐπιδιώχει ἕως οὗ φθάσῃ μὴ > \ 1 Ne τῷ ! \ / \ , δ ΄ὕ \ ἐμποδισθεὶς, οἱ δὲ λοιποὶ ὁρῶσι μόνον τὸν χύνα τὸν ἐπιδιώχοντα, χαὶ ἕως μέν τινος σὺν αὐτῷ τρέχουσιν, ὕστερον δὲ χατανοήσαντες ἀναχάμ.- - ΄ » -Ὁ ΓΕ δ ω 7

πτουσιν εἰς τὰ ὀπίσω, μόνος δὲ ἐχεῖνος ἑωραχὼς ἐπιδιώχει ἕως 00

/ τὸ , 5.3. Ν \ τῷ - χὰ RANCE 7 \ - ᾿ φθάσῃ μὴ ἐμποδισθεὶς ἐν τῷ σχοπῷ τοῦ δρόμου ὑπὸ τῶν ἀναχαμψάν- των, μήτε τῶν χρημνῶν χαὶ ὑλῶν χαὶ χέντρων φροντίζων. Οὕτως χαὶ « \ ! 1 3 Te 2 τ΄ _ 20 / 2 τὸν δεσπότην Χριστὸν ἐπιζητῶν, τῷ σταυρῷ ἀδιαλείπτως προσέχων,

\ - ΤᾺ πάντα ὑπερδαίνει τὰ συναντῶντα σχάνδαλα, ἕως οὗ φθάσῃ, τὸν σταυρω- θέντα.

204. ----Εἶπεν γέρων ὥσπερδένδρον χαρποφορῆσαι ἀδύνατον ([. 180 v’)

\

συνεχῶς μιεταφυτευόμιενον, οὕτως οὐδὲ μοναχὸς μεταδαίνων ἐκ τόπου

τὶ ! , \ 9 / / È εις TOTOV ἀρετὴν ἐπιτελέσαι δύναται.

205. --- ᾿Αδελφὸς ὀχλούμενος ὑπὸ λογισμῶν ὥστε ἐξελθεῖν ἐχ τῆς

μονῆς, ἀνήγγειλε τῷ 466%. δὲ λέγει πρὸς αὐτόν: Ὕπαγε, κάθου

εἰς τὸ χελλίον σου, καὶ παράσχου ἐνέχυρον τῷ τείχει τῆς κέλλης τὸ

σῶμα, καὶ μιὴ ἐξέλθῃς ἐκεῖθεν, ἄφες τῷ λογισμῷ λογίσασθαι βούλε- CIS 64 DR - / 1 a

ται, μόνον μὴ ἐχοάλης ἐκ τὴς χέλλης TO σῶμα.

206. Εἶπεν γέρων: κέλλα τοῦ μοναχοῦ ἔστιν κάμινος Bab- λῶνος, ὅπου οἱ τρεῖς παῖδες τὸν υἱὸν τοῦ θεοῦ εὗρον, καὶ στύλος τῆς νεφέλης, ὅθεν θεὸς τῷ Μωὺῦσῃ ἐλχλησεν.

207. ᾿Αδελφὸς ἔμεινεν ἐννέα ([. 210 r°) ἔτη πολεμούμιενος ἐξελ- θεῖν ἀπὸ κοινοδίου καὶ za” ἡμέραν ἡτοίμαζε τὸ ψνηλωτάριον αὐτοῦ ἵνα ἐξέλθη, καὶ ὡς ἐγένετο ὀψὲ, ἔλεγεν ἐν ἑαυτῷ Αὔριον ἀναχωρῶ ἐχ τῶν ὧδε. Καὶ πρωίας ἔλεγε τῷ λογισμῷ" Βιχσώμεθα ἑαυτοὺς χαρτερῆ-

\ \ / τ \ ΄ \ « 4 ,ὔ , / 1/2 σαι χαὶ τὴν σήμερον διὰ τὸν χύριον. Kai ὡς ἐπλήρωσεν ἐννέα ἔτη οὕτως ποιῶν, ἐχούφισεν θεὸς πάντα πειρασμὸν ἀπ᾽ αὐτοῦ χαὶ ἀνεπάη.

τ

TRAME ᾿Αδελφός τις ἐμπεσὼν εἰς πειρασμὸν ἀπὸ τῆς θλίψεως

" Η͂ , -Ὁ ΧΩ ἀπώλεσε τὸν μοναχικὸν χανόνα, χαὶ θέλων βαλεῖν ἀρχὴν, διὰ τὴν

280 REVUE DE L'ORIENT CHRÉTIEN.

θλίψιν ἐνεποδίζετο λέγων ἐν ἑαυτῷ: Πότε ἔχω εὑρεῖν ἐμαυτὸν ὥσπερ ἤμην ποτέ. Kai ὀλιγωρῶν, οὐχ ἴσχυεν ἄρξασθαι ([. 210 r') τοῦ μονα- τ ΚΑ ΟΣ ᾿ \ δὲ ΄ ΄ / 9 © A χικοῦ ἔργου. Ἐλθὼν δὲ πρός τῖνα. γέροντα διηγήσατο αὐτῷ τὰ χαθ ! ΡΟ. / 3 2 \ ΩΝ / Ε] - 4 ΕΣ - ἑαυτόν. Καὶ γέρων ἀκούσας τὰ τῆς θλίψεως αὐτοῦ προσήνεγχεν αὐτῷ ὑπόδειγμα τοιυῦτον, λέγων "Ανθρωπός τις εἶχε χωρίον, καὶ ἐξ ἀμε- λείας αὐτοῦ, ἐχερσώθη, χαὶ ἐπληρώθη θρύων χαὶ ἀκανθῶν. "Edoës δὲ αὐτῷ ὕστερον φιλοχαλῆσαι αὐτὸ, χαὶ λέγει τῷ υἱῷ αὐτοῦ" Ὕπαγε: / τ / \ \ en ΕἸ - / , 4 / χαθάρισον τὸ χωρίον. Καὶ ἐλθὼν υἱὸς αὐτοῦ χαθαρίσαι αὐτὸ, θεωρή- σας τὸ πλῆθος τῶν ἀχανθῶν, ὠλιγώρησε λέγων ἐν ἑχυτῷ [lôre ἔχω 7 πῷ , = A / δ "πὶ 7 ES , A " ὅλα ταῦτα ἀνασπᾶσαι χαὶ καθαρίσαι τὰ ὧδε, Καὶ ἀναπεσὼν ἤρξατο χοιμᾶσθαι ἐπὶ πολλὰς ἡμέρας. Μετὰ δὲ [{ 210 v°) ταῦτα, ἔρχεται πατὴρ αὐτοῦ ἰδεῖν τί ἐποίησεν, καὶ εὗρεν αὐτὸν μιηδὲν ἐργασάμενον χαὶ εἶπεν αὐτῷ Τί ὅτι ἕως τοῦ νῦν οὐδὲν εἰργάσω; Καὶ εἶπεν γέώτερος τῷ πατρὶ αὐτοῦ Μόνον ὡς ἠρχόμην ἐργάσασθαι, πάτερ, βλέπων. τὸ πλῆθος τῶν θρύων χαὶ τῶν ἀκανθῶν, συνειχόμην, καὶ ἀπὸ τῆς θλίψεως, , 4 9 \ \ , 1? 3 - \ Lu -Ὁ ΄ ἐτίθουν ἐμαυτὸν χαὶ ἐχοιμώμην. Λέγει αὐτῷ πατὴρ αὐτοῦ" Téxvov, ἴσον τοῦ πλάτους τοῦ στρώματός σου ποίει χαθ᾽ ἡμέραν, χαὶ οὕτω προχόπτει τὸ ἔργον σου χαὶ οὐχ ὀλιγωρεῖς. δὲ ἀχούσας ἐποίησεν “ιν ᾿ \ 2 OX 6 θα {cbr \ Σ ae Oÿ 5 x ι ι οὕτως, χαὶ ἐν ὀλίγῳ χρόνῳ ἐχαθαρίσθη τὸ χωρίον. Οὕτως οὖν at σὺ, ἄδελφε, HAT) ὀλίγον ἐργζζου καὶ οὐχ ὀλιγωρεῖς χαὶ θεὸς τῇ χάριτι αὐτοῦ ([. 210 ν᾽) πάλιν ἀποκαθιστὴ σε εἰς τὴν ἀρχαίαν σου τάξιν. δὲ ἀδελφὸς ἀχούσας, χαὶ χαθίσας μεθ᾽ ὑπομονῆς ἐποίει ὡς ἐδιδάχθη ὑπὸ τοῦ γέροντος, χαὶ εὗρεν ἀνάπαυσιν χάριτι Χριστοῦ.

200 Γέρων τις ἦν χαὶ συνεχῶς ἐχαχοῦτο χαὶ ἠσθένει. Συνέση δὲ αὐτὸν ἕνα ἐνιαυτὸν μὴ χαχωθῆναι, χαὶ ἐδυσφόρει δεινῶς χαὶ ἔχλαιςε, λέγων: Eyxatélimé με θεὸς καὶ οὐχ ἐπεσχέψατό με.

210. Eire γέρων" ὅτι ἀδελφός τις ἐπειράζετο ἀπὸ λογισμοῦ

ἐπὶ ἔτη ἐννέα, ὥστε αὐτὸν ἀπολέγεσθαι τὴν σωτηρίαν αὐτοῦ, χαὶ ἀπὸ , 7 ΄, \ , V4 2 A \ - ΄ εὐλαδείας κατέκρινεν ἑχυτὸν λέγων' ᾿Απώλεσά μου τὴν ψυχὴν, ὑπάγω ΕῚ \ τ , 1 N LUI εἰς τὸν χόσμον παρ᾽ ἀπωλόμην. ᾿Απερχομένου (f. 211 r°) δὲ αὐτοῦ, ἦλθε φωνὴ αὐτῷ χατὰ τὴν ὁδὸν λέγουσα: Ταῦτα τὰ ἐννέα ἔτη à Ε] , ΄ ot , r αἱ \ ἐπειράσθης, στέφανοί σου ἦσαν, ἐπίστρεψον εἰς τὸν τόπον σου, χαὶ xou- φίζω σε ἀπὸ τῶν λογισμῶν. Βλέπεις ὅτι οὐχ ἔστι χαλὸν, ἀπελπίζειν τ _ \ Al A] τ LU τινὰ ἑαυτοῦ διὰ τοὺς λογισμοὺς, μᾶλλον δὲ οὗτοι στεφάνους ἡμιῖν A = 5 ᾿ = ke προξενοῦσιν, ἐὰν αὐτοὺς καλῶς διεξερχώμεθα.

211. --- Γέρων τις ἦν ἐν Θηδαίδι χαθήμενος ἐν σπηλαίῳ, χαὶ εἶχε

HISTOIRES DES SOLITAIRES ÉGYPTIENS. 281

)

μαθητὴν δόκιμον. ἔθος δὲ ἦν καθ᾽ ἑσπέραν τὸν pense παραινεῖν ᾿αὐτῷ τὰ πρὸς ([) ὠφελείαν, καὶ μετὰ τὴν παραίνεσιν, ἐποίει εὐχὴν χαὶ / CREER) À 0% τ' " δὲ \ 2 LES .- ἀπέλυεν αὐτὸν χοιμηθῆναι. Συνέοη δὲ ποτὲ χοσμιχούς τινᾶς EU AXE, εἰδότας τὴν πολλὴν δ 211 ν᾽) ἄσχησιν τοῦ γέροντος, παραθαλεῖν χαὶ τοῖς σαι αὐτοῖς παράκλησιν. Kat μετὰ τὸ ἀπελθεῖν αὐτοὺς, ἐχάθισε πάλιν γέρων τῇ ἑσπέρᾳ χατὰ τὸ ἔθος, νουθετῶν τὸν ἀδελφόν᾽ χαὶ ὁμιλῶν αὐτῷ, χατηνέχθη εἰς ὕπνον. δὲ ἀδελφὸς παρέμενεν ἕως οὗ γέρων ἐξυπνισθῇ χαὶ ποιήσῃ αὐτῷ τὴν εὐχήν. ᾿ἰπιπολὺ οὖν χαθεζό- ὑενος, μὴ ἐξυπνιζομένου τοῦ γέροντος, ὠχλήθη ὑπὸ τῶν λογισμῶν LU \ À 29 ? \ » ΄ \ ΑἹ / \ ἀπελθεῖν χαὶ χοιμηθῆναι ἐχτὸς ἀπολύσεως. Καὶ βιασάμενος ἑαυτόν, ΄ - - νιν ,, A » a \ » » =” ἀντέστη τῷ λογισμῷ, καὶ ἔμεινεν, πάλιν δὲ ὠχλήθη καὶ οὐχ ἀπῆλθεν, ὡσαύτως δὲ ἕως ἑπτάχις ὀχληθεὶς ἀντέστη τῷ λογισμῷ: (MES) Μετὰ δὲ ταῦτα, τῆς νυχτὸς προκοψάσης διυπνίσθη He χαὶ εὕρεν αὐτὸν παρακαθεζόμιενον χαὶ λέγει αὐτῷ οὐκ ἀνεχώρησας ἕως ἄρτι; δὲ εἴπεν᾽ ᾿Ουχί: οὐ γὰρ ἀπέλυσάς με, ἀδοᾶ. “Ὃ δὲ γέρων εἶπεν" Καὶ διατί οὐχ ἐξύπνισάς με; ὋὉ δέ φησιν: Οὐκ ἐτόλμησά σε νύξαι, ἵνα μή σε παραλύσω. ᾿Αναστάντες δὲ ἔῤραλον τὰ ὀρθρινὰ, χαὶ μετὰ τὴν σύναξιν, , e , \ χὸ À AT ue 7, ὙΠ τ ἀπέλυσεν γέρων τὸν ἀδελφὸν χαὶ ἐκάθητο χαθ᾽ ἑαυτόν. [νεται οὖν ἐν ἐχστάσει, χαὶ ἰδού τις δεικνύων αὐτῷ τόπον ἔνδοξον χαὶ θρόνον ἐν ἑαυτῷ καὶ ἐπάνω τοῦ θρόνου ἑπτὰ στεφάνους. ᾿Πρώτησε δὲ τὸν N 2 = , - ε 5 ΕἸ - nm δεικνύοντα αὐτῷ λέγων᾽ Τίνος ταῦτα; δὲ εἶπεν αὐτῷ" Τοῦ (f. 211 ν᾽) μαθητοῦ σου; καὶ τὸν μὲν τύπον nai τὸν θρόνον ἐχαρίσατο αὐτῷ θεὸς διὰ τὴν ὑπαχοὴν αὐτοῦ: τοὺς δὲ ἑπτὰ στεφάνους ἐν τῇ νυχτὶ ταύτη ἔλαύδεν. Τοῦτο δὲ ἀκούσας γέρων ἐθαύμασεν, καὶ γενό- μένος ἔμφούος, χαλεῖ τὸν ἀδελφὸν λέγει αὐτῷ". Εἰπέ μοι τί ἐποίη- σᾶς τὴν νύχτα ταύτην. δὲ cire Συγχώρησόν μοι 406%, ὅτι οὐδὲν ἐποίησα. δὲ γέρων νομίσας ὅτι ταπεινοφρονῶν οὐχ ὁμολογεῖ, εἶπεν αὐτῷ" Οὐ παραχωρῶ σοι εἰ μὴ εἴπῃς μοι τί ἐποιήσας, h τί ἐνεθυμήθης A ΄ ΄ e \ 1 \ - \ ΄ τὴν νύχτα ταύτην. δὲ ἀδελφὸς, μηδὲν ἑαυτῷ συνειδὼς πεπραχέναι, ἠπόρει εἰπεῖν. Λέγει δὲ τῷ πατρί" ᾿Αδδᾶ, οὐδὲν ἐποίησα εἰ μιὴ μόνον ([.ὄ 212 r°) τοῦτο Ὅτι ὀχληθεὶς ὑπὸ τῶν λογισμῶν ἑπτάκις, ἀνα- = \ 25 œ , r 2 CT » NA - χωρῆσαι χωρὶς τῆς σῆς ἀναλύσεως, οὐχ ἀπῆλθον. ᾿Αχούσας δὲ τοῦτο γέρων, ἐνόησεν ὅτι ὁσάκις ἀντεμαχήσατο τῷ λογισμῷ, ue

ὑπὸ τοῦ θεοῦ, χαὶ τῷ μὲν ἀδελφῷ οὐδὲν τούτων ἐλάλησεν, ὠφελείας

(1) ΑΙ. τῷ γέροντι, νουθετεῖν αὐτὸν τὰ πρὸς σωτηρίαν χαὶ.

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δὲ χάριν διηγήσατο αὐτὰ πατράσι πνευματιχοῖς, ἵνα μάθωμεν ὅτι μικρῶν ἐνθυμιήσεων στεφάνους ἡμῖν θεὸς χαρίζεται. Καλὸν οὖν τὸ βιάζεσθαι ἑχυτὸν dux τὸν θεόν. Βιαστὴ γώ ἐστιν βασιλεία τῶν οὐρά- νων, χαὶ βιασταὶ ἁρπάζουσιν αὐτήν.

212. ᾿Ησθένησέ τις γέρων ποτὲ εἰς τὰ κελλία, καθεζόμενος χατα- μόνας χαὶ μὴ ἔχων τὸν ὑπηρετοῦντα ([. 212 r°) αὐτῷ. Καὶ ἀνιστά- μένος, εἴ τι εὕρισχεν ἐν τῷ χελλίῳ μετελάμθανεν (1). Μείναντος οὖν

2 ,

αὐτοῦ ἐπὶ πολλὰς ἡμέρας, οὐδεὶς ἤρχετο εἰς ἐπίσχεψιν αὐτοῦ. Πληρω- θεισῶν δὲ ἡμερῶν τριάχοντα, χαὶ υμηδενὸς ἐλθόντος πρὸς αὐτὸν, ἀπέ-

e \ LA e EN ΕῚ = Nice 1] e / \ στειλεν θεὸς ἄγγελον ὑπηρετεῖν αὐτῷ. Kai ὡς ἐμεινεν ἡμέρας ἔπτᾶ,

3 32 > e ΄ - ΄ ATEN ae ἐν 7, ja ἂν ἐμνήσθησαν οἱ πατέρες τοῦ γέροντος χαὶ εἶπον᾽ Μήπως ἀπέθανεν δεῖνα γέρων; Ὡς οὖν ἦλθον χαὶ ἔχρουσαν ὑπεχώρησεν ἄγγελος. δὲ

γέρων ἔχραξεν ἔσωθεν: Ὑπάγετε ἐντεῦθεν ἀδελφοί. ἹΚαταύαλόντες δὲ τὴν θύραν, εἰσῆλθον χαὶ ἠρώτων αὐτὸν διατί ἔχραζεν. δὲ εἶπεν αὐτοῖς Ὅτι τριάκοντα ἡμέρας εἶχον χοπιῶν, χαὶ οὐδεὶς ἐπεσχέψατό A ἐδ NT \ 2 ΩΝ , RAS 7 x # : με, χαὶ ἰδοὺ ἑπτὰ ἡμέραι εἰσὶν ἐξ οὗ ἀπέστειλεν θεὸς ἄγγελον ὑπηρε- - Ἂν τ »” , 5 3.0 -Ὁ \ - Sr εἴ , ΄ τεῖν μοι, χαὶ ὡς ἤλθετε, ἀπέστη am ἐμοῦ. Kat ταῦτα εἰπὼν, ἐχοιμιήθη. Οἱ δὲ ἀδελφοὶ θαυμάσαντες, ἐδόξασαν τὸν θεὸν, ὅτι οὐχ ἐγκαταλιμ.- πάνει χύριος τοὺς ἐλπίζοντας ἐπ᾿ αὐτόν. 213. --- Εἶπεν γέρων᾽ Eèv φθάσῃ ἀῤῥωστία σώματος, μὴ ὀλιγώρει, εἰ γὰρ θέλει σε δεσπότης σου καχοῦσθαι τῷ σώματι σὺ τίς εἶ δυσχεραίνων᾽ οὐχ αὐτός σον φροντίζει ἐν πᾶσιν; μὴ πάρεξ αὐτοῦ ζῆς; ἀνεξικάχει οὖν, χαὶ παραχάλει αὐτὸν παρασχεῖν σοι τὰ συμφέρονται. Τοῦτό ἐστι τὸ θέλημα αὐτοῦ" κάθου μετὰ μακροθυμίας, φάγε ἀγάπην. | 214. --- Διηγήσατό τις ([. 212 νὴ) τῶν πατέρων ὅτι ὄντος μου ἐν Ὀξυρύγχῳ, ἦλθον ἐχεῖ πτωχοὶ ἐν 626647 ὀψὲ, ἵνα λάόωσιν ἀγάπην. Καὶ χοιμωμένων ἡμῶν, ἦν ἐχεῖ τις ἔχων défi μόνον, τὸ Ἥμισυ ὑποκάτω χαὶ τὸ ἥμισυ ἐπάνω αὐτοῦ. Ἦν δὲ ψύχρα πολλή. Kai ἐξελθὼν εἰς ὕδωρ ἤχουσα αὐτοῦ ὀδυνωμιένου ἀπὸ τοῦ πολλοῦ ψύχους, παρεχάλει ἑαυτὸν λέγων' ᾿Ευχαριστῶ σοι, χύριε, πόσοι εἰσὶν ἄρτ' _ - 2 δ τῷ 57. ΄ μὴ ἐν τῇ φυλακῇ πλούσιο. σίδηορα φοροῦντες, ἄλλοι δὲ τοὺς πόδας ἦσφα- Η NS 2 - - \ λισμένοι εἰς ζύλον, μηδὲ τὸ ὕδωρ ἑαυτῶν δυνάμενοι ποιῆσαι. ᾿Εγὼ δὲ \ SMS Ven / A ANS \ » ΄ Ne à ὡς βασιλεὺς εἰμὶ ἐκτείνων τοὺς πόδας. Καὶ ταῦτα ἀκούσας dun yn-

σάμην τοῖς ἀδελφοῖς χαὶ ὠφελήθησαν.

(1) ΑἹ. ἤσθιξς μετ᾽ εὐλαδείας.

HISTOIRES DES SOLITAIRES ÉGYPTIENS. 283

215. Ἀδελφὸς ([. 184 r') ἠρώτησε γέροντα λέγων' ᾽Εὰν ἔλθῃ μοι θλίψις, καὶ μὴ ἔχω εἴς τινα πληροφορίαν τοῦ ἀναγγεῖλαι, τί ποιήσω; Λέγει γέρων" {Ππἰστεύω τῷ θεῷ ὅτι πέμπει τὴν χάριν αὐτοῦ χαὶ βοηθεῖ σοι, ἐὰν ἐν ἀληθείχ δεηθῆς. Ἤχουσα γὰρ ὅτι γέγονεν ἐν Σχήτει πρᾶγμα τοιοῦτον: Ἢν τίς ἀγωνιστής" χαὶ μὴ ἔχων πληρο- φορίαν πρός τινα, ἡτοίμασε τὸ μηλωτάριον αὐτοῦ ἀναχωρῆσαι, χαὶ ἰδοὺ ἐφάνη αὐτῷ χάρις τοῦ θεοῦ ὡς παρθένος, καὶ παρεκάλεσεν αὐτὸν λέγουσα: Μηδαμοῦ ἀπέλθῃς ἀλλὰ κάθου ὧδε μετ᾽ ἐμοῦ, οὐδὲν γὰρ χαχὸν γέγονεν ὧν ἤχουσας. ΠΕεισθεὶς δὲ ἐχάθισεν, χαὶ εὐθέως ἐθερα-

πεύθη αὐτοῦ χαρδία.

TRADUCTION

175. Un anachorète (1) demeurait sur la montagne dans les parages d'Antinoë; il faisait de grands progrès dans la piété et beaucoup pro- fitaient de sa parole et de sa conduite. L'Ennemi en devint jaloux comme de tous les vertueux et il lui suggéra les pensées suivantes sous couleur de piété : Il ne te convient pas d’être servi ou aidé par un autre, lors- qu'il te vaudrait mieux servir les autres; tu ne les sers pas, du moins sers-toi toi-même. Va donc vendre tes corbeilles, achète ce dont tu as besoin et reviens aussitôt à ta vie solitaire; ainsi tu n’incommoderas per- sonne. Le rusé lui suggéra cela parce qu'il était jaloux de sa solitude, du repos qu'il prenait près de Dieu, et du profit qui en résultait pour beaucoup; car l’'Ennemi cherchait de toute manière à le captiver. Plein de confiance comme en une bonne parole, l’anachorète illustre et renommé descendit de son monastère, lui qui avait été un objet d’admiration 1] n'avait pas encore. expérimenté la grande scélératesse de celui qui tend des embüches. Au bout d’un long temps il rencontra une femme; affaibli par la négligence, il alla dans un lieu désert en compagnie de l’Ennemi et pécha près du Nil. En songeant que l'Ennemi s'était réjoui de sa chute il se prenait à désespérer, surtout d’avoir contristé l'Esprit de Dieu et les anges et les saints Pères dont beaucoup ont vaincu l’Ennemi, même dans les villes. Comme il ne ressemblait à aucun de ceux-là, il s’affligeait beaucoup et ne se rappelait pas que Dieu donne la force à ceux qui espèrent fermement en lui. Aveuglé sur la guérison de sa faute, il voulait chercher la mort dans le cours du fléuve et rendre ainsi com-

(1) M Migne, Patr. lat., t. LXXIID), col. 886, 41; Ms. Coislin 127, fol. S9r. B (Bedjan, Paradisus Patrum, Paris, 1897), page 226. Ce chapitre se trouve en syriaque parmi les œuvres de Pallade, Le scribe dit lavoir trouvé après Jean de Lycopolis.

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plète la joie du démon. La grande douleur de son âme rendit son corps malade pour la plus grande joie de l'Ennemi, si Dieu n'était venu enfin à son secours pour l'empêcher de mourir..Rentré enfin en lui-même, il: se proposa de s'appliquer davantage à la souffrance. Il retourna donc à son monastère sa cellule), en ferma la porte et pleura en suppliant Dieu comme il faut pleurer sur un mort. Tandis qu’il jeünait et veillait avec découragement, son corps s’amaigrissait et il n'avait pas encore l'assurance d’une pénitence (suffisante). Comme les frères venaient sou- vent près de lui pour s’édifier et frappaient à sa porte, il leur disait ne pouvoir ouvrir; « j'ai promis, disait-il, de faire pénitence constamment durant une année » ; il ajoutait : « Priez pour moi ». Il ne savait que ré- pondre pour ne pas scandaliser les auditeurs, car ils le tenaient pour (un homme) vénérable et un moine illustre. Il passa toute l’année en continuelle pénitence et, au moment de Päque, durant la nuit de la sainte résurrection, il prit une lumière nouvelle, la garnit, la mit dans un pot nouveau, la recouvrit et se tint en prière dès le soir, disant :

O Dieu compatissant et miséricordieux, désireux que les barbares eux- mêmes soient sauvés et arrivent à la connaissance de la vérité, c’est à toi, sauveur des âmes, que j'ai eu recours. Aie pitié de moi qui t'ai beau- coup affligé, à la grande joie de l’Ennemi; voilà que je suis mort pour avoir écouté l’'Ennemi. Toi, Seigneur, qui as pitié des impies et des cruels et qui enseignes à prendre le prochain en pitié, aie pitié de mon humilité, car rien ne t'est impossible, voilà que mon âme a été emportée vers l'enfer. Aie pitié, parce que tu es bienveillant envers ta créature, toi qui dois éveiller, pour le jour du jugement, même les corps qui ne sont pas. Exauce-moi, Seigneur, car mon esprit défailli aussi bien que mon âme malheureuse. Mon corps, que j'ai souillé, s’est liquéfié, et je ne puis plus vivre depuis que j'ai abandonné ta crainte. Parce que j'ai cru fermement que la faute était effacée par la pénitence moi qui ai dé- sespéré comme seconde faute vivifie-moi dans mon affection et ordonne à cette lampe de s’allumer de ton feu, afin que, fortifié par ta miséricorde et ton pardon, je garde tes commandements durant tout le temps que tu me laisseras encore vivre, que je ne m'écarte plus de ta crainte, mais que je te serve sans trêve, mieux que par le passé.

Après ces paroles et de nombreuses larmes, durant la nuit de la ré- surrection, il alla voir si la lampe était allumée, la découvrit et, voyant qu'elle n’était pas allumée, se prosterna de nouveau à terre et pria le Seigneur en disant : Je sais, Seigneur, qu'il été question de me cou- ronner et je ne me suis pas approché, car j'ai pensé que la punition (qui attend) les pécheurs me convenait plus que les plaisirs charnels. Épargne-moi donc, Seigneur, je confesse de nouveau ma honte devant ta bonté en présence de tous tes anges et des justes; si ce n’était de crainte du scandale, je la confesserais aussi devant les hommes; aie donc pitié de moi, afin que j'instruise aussi les autres. Oui, Seigneur, vivifie- moi.

Lorsqu'il eut ainsi prié par trois fois, il fut exaucé et, lorsqu'il se leva, il trouva que la lampe était allumée. Réjoui par l'espérance, il fut fortifié

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par la joie de son cœur et il admira la grâce puisque Dieu lui rendait ainsi témoignage. Et il dit : J'étais indigne même de la vie de ce monde, et tu as eu pitié de moi (comme l'indique) ce prodige grand et nouveau. Pendant qu'il continuait ainsi sa confession, le jour parut et il se réjouis- sait dans le Seigneur sans penser à prendre la nourriture corporelle. 1 entretint le feu de cette lampe durant toute sa vie en y versant de l'huile et la tenant allumée au-dessus pour qu’elle ne s’éteignit pas. Ainsi l'Esprit- Saint habita de nouveau en lui et il devint illustre au milieu des autres, plein d’humilité et d’allégresse dans sa confession et son action de grâce au Seigneur. Lorsqu'il fut sur le point de mourir, il en eut la révélation quelques jours avant.

176. Un vieillard demeurait dans le grand désert (L), or il avait une parente et, après beaucoup d’années, elle voulut le revoir. Elle chercha il habitait et se mit en route pour ce désert, elle trouva une caravane de chameaux et entra dans le désert avec eux. Or elle était poussée par le diable. Quand elle arriva à la porte du vieillard, elle se fit reconnaitre et lui dit : Je suis ta parente: et elle demeura près de lui. Le vieillard, tenté, pécha avec elle. Or il y avait un autre anachorète qui demeurait à la partie inférieure du désert; il remplit un vase d’eau et, à l'heure de manger, (cette eau) se répandit. Par un effet de la providence, il se dit : J'irai au désert raconter cela au vieillard. Il se leva et partit. Le soir venu, il dormit dans un temple de démons le long de la route. Durant la nuit il entendit les démons dire : Nous avons fait tomber l’anachorète dans l’impureté. Ces paroles l’attristèrent; il alla près du vieillard, le trouva chagrin et lui dit : Que ferai-je, abbé, parce que je remplis un vase d’eau et au moment de manger elle se répand? Le vieillard ré- pondit : Tu viens me dire : Que ferai-je parce que mon vase se vide? mais que ferai-je moi-même qui suis tombé cette nuit dans l’impureté! L'autre dit : Je le savais. Et (le vieillard) lui dit : Comment le sais-tu? Il répondit : J'étais couché dans le temple et j’entendais les démons qui parlaient de toi. Le vieillard dit : Je vais m'en aller aussi dans le monde. Mais l’autre le suppliait et disait : Non, père, mais demeure à ta place et renvoie la femme d'ici, car c’est une embüche de l'ennemi. Il l’écouta, et con- tinua son genre de vie en versant des larmes jusqu’à ce qu'il fût revenu à son rang premier.

177. Un frère demanda à un vieillard : Si quelqu'un tombe en ten- tation relativement à quelque vertu, qu'arrive-til au sujet de ceux qui sont scandalisés (2)? Et le vieillard lui dit : Il y avait un diacre célèbre dans un couvent d'Égypte. Un magistrat (3) poursuivi par le gouverneur vint avec toute sa maison dans le monastère. Par l’action du malin, le diacre pécha avec la femme et tous furent dans la honte. Le diacre alla près d’un vieillard qu'il aimait et lui raconta la chose. Or le vieillard

(1]. M, 746, 14 et 879, 24: Coislin 127, fol. 91; B, p. 743, 119.

(2). M, 880; Paul, 15; Coislin 127, fol. 91. Cf. ROC., 1906, p. 198-199; B, p. 300.

(3) Le syriaque à transcrit le mot grec et un scribe ajouté en marge « Vi- Zir ».

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avait une cachette à l’intérieur de sa cellule et le diacre le pria et lui dit : Enterre-moi ici vivant et ne le dis à personne. Il entra dans cette obscurité et fit pénitence en vérité. Au bout d’un certain temps, l’eau du fleuve ne vint pas (le Nil ne déborda‘pas). Pendant que tous faisaient des prières, un saint eut une révélation : Si un tel diacre qui est caché chez tel moine ne vient pas, l’eau ne montera pas. Ceux qui lapprirent furent dans l’étonnement,; ils allèrent le chercher il était, il pria et l’eau monta, et ceux qui avaient jadis été scandalisés furent d'autant plus édifiés par sa pénitence et ils louèrent Dieu.

178. Un vieillard dit (1) : Beaucoup sont tentés par les plaisirs char- nels; bien qu'ils n’approchent pas des corps (bien qu'ils ne pèchent pas corporellement), ils commettent l’impureté par l'esprit et, tout en gardant leurs corps vierges, ils pèchent par l’âme. Il est donc beau, mes (frères) chéris, de faire ce qui est écrit, et de garder chacun son cœur avec grand soin.

179. Deux frères allèrent au marché (2), pour vendre leurs mar- chandises. L'un d’eux, lorsqu'il eut quitté l’autre, tomba dans l’impureté. Son frère revenant lui dit : Allons à notre cellule, frère. Il répondit : Je n’y vais pas. L’autre le priait et disait : Pourquoi, mon frère? Il ré- pondit : Parce que, au moment tu m'as quitté, je suis tombé dans l’impureté. Son frère voulant gagner son âme, se mit à lui dire : À moi aussi, lorsque je t'ai eu quitté, il m'en est arrivé autant, mais allons. faire pénitence avec soin et Dieu nous pardonnera. Ils allèrent raconter aux vieillards ce qui leur était arrivé et ceux-ci leur imposèrent un règlement pour faire pénitence. Cependant l'un d’eux faisait pénitence pour l’autre, comme s’il avait péché lui-même, et Dieu, voyant la fatigue que (lui at- tirait) sa charité, révéla à un vieillard, au bout de quelques jours, qu’il pardonnait au pécheur à cause de la grande charité du frère qui n’avait pas péché. Voilà ce qu’on appelle donner sa vie pour son frère.

180. Un frère vint un jour près d’un vieillard et lui dit (3) : Mon frère m'énerve en allant ici et et j'en suis affligé. Le vieillard l’encou- rageait en disant : Supporte ton frère et Dieu, voyant la peine (que tu prends) par ta patience, le ramènera, car il n'est pas facile de ramener quelqu'un par la dureté et un démon ne chasse pas un démon; tu le ramèneras plutôt par la douceur, car c’est par persuasion que Dieu ra- mène les hommes. Et il lui raconta (l’histoire suivante) :

Dans la Thébaïde, il y avait deux frères; l’un d’eux, tenté par l’impureté, dit à l’autre : Je vais dans le monde. L'autre pleura et dit : Je ne te laisse pas partir, mon frère, et perdre (le fruit de) tes travaux (antérieurs) et ta virginité. Il ne l’écouta pas et répondit : Je ne reste pas et je m'en, vais. Viens avec moi et je reviendrai avec toi, ou bien laisse-moi et je resterai dans le monde. Le frère alla raconter cela à un illustre vieillard

(1) M, 874, 2; attribué à Jérôme de Pétra.

(2) M, 744, 12 et 880, 24; Coislin 127, fol. 91r; Paul, 369; B, 589, no 389 ᾿ ΤΟ ΟΣ

(3) M, 880, 28: Coislin 127, fol. 92; Paul, 369.

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et celui-ci lui dit : Accompagne-le, et Dieu, à cause de la peine que tu prendras, ne le laissera pas tomber. Ils partirent pour les lieux habités et, lorsqu'ils arrivèrent près d’un village, Dieu, voyant la peine qu'il pre- nait, enleva la tentation de son frère. Celui-ci dit : Retournons au désert, frère, car, supposons que j'aie péché, à quoi cela me servirait-il? Et ils retournèrent sains et saufs à leur cellule.

181. Un frère, tenté par le démon, alla trouver un vieillard et lui dit (1) : Ces deux frères sont ensemble (et font le mal). Le vieillard com- prit que le démon le tentait et il appela les deux frères. Lorsque le soir fut venu, il leur déroula une natte et les couvrit d’une même couverture en disant : Les enfants de Dieu sont saints. Et il dit à son disciple : En- ferme ce frère dans une cellule à part, car c’est lui qui est tenté.

182. Un frère dit à un vieillard (2) : Que ferai-je? car les pensées honteuses me tuent. Le vieillard lui dit : Lorsque la mère veut sevrer son enfant, elle frotte ses seins avec une plante amère et lorsque l'enfant vient téter selon son habitude, il s’écarte à cause de l’amertume. Mets donc toi aussi une plante amère. Le frère lui dit : Quelle est cette plante amère qu’il me faut prendre? Et le vieillard répondit : C’est le souvenir de la mort et des châtiments du monde à venir.

183. Le même interrogea un autre vieillard sur le même sujet (3). Et le vieillard lui dit : Je n'ai jamais de tentation semblable. Le frère fut scandalisé; il alla trouver un autre vieillard et lui dit : Voilà ce que m'a dit un tel vieillard et j'ai été scandalisé parce que cela surpasse la nature. L'autre lui dit : Ce n’est pas sans motif que l’homme de Dieu t'a dit cela. Va donc lui demander pardon pour qu’il te découvre le sens de sa parole. Le frère se leva donc, alla près du vieillard et lui fit re- pentance en disant : Pardonne-moi, père, j'ai agi sottement en te quittant avec mauvaise disposition; je te prie de m'expliquer pourquoi tu n’as pas été tourmenté par l’impureté. Le vieillard lui dit : Depuis que je suis moine, je ne me suis rassasié ni de pain, ni d’eau, ni de sommeil, et la souffrance (provenant) de ces privations n’a jamais cessé de me tour- menter et ne m'a pas laissé sentir les tentations dont tu parles. Et le frère partit édifié.

184. Un frère demanda à l’un des pères (4) : Que ferai-je? Ma pensée est toujours pour l’impureté, elle ne me laisse pas reposer une heure et mon âme est affligée. Il lui dit : Lorsque les démons sèment ces pensées, ne parle pas avec eux, car c’est leur rôle de semer partout, et

ils n’y manquent pas, mais ils ne peuvent s'imposer. Il ne dépend que

de toi d’accepter ou de ne pas accepter. Tu sais ce qu'ont fait les Ha- dianites (5)? Is ont orné leurs filles et les ont mises (sur le chemin des

(1) M, 881, 29; Coislin 127, fol. 92.

(2) M, 881, 30; Coislin 127, fol. 92; Paul, 210; L, fol. 178.

(3) M, 88, 31; Coislin 127, fol. 92"; Paul, 210.

(4) M, 882, no 32; Coislin 127, fol. 92"; B, 658, 566; L, fol. 87v.

(5) Le ms. 126 porte : Εἶδες τί ἐποίησαν οἵ Μαδιηναῖοι. Ici, comme en bien d’au- tres endroits, nous suivons l’orthographe du ms. 127.

288 REVUE DE L'ORIENT CHRÉTIEN.

Israélites), mais ils n’ont contraint personne, ceux qui l'ont voulu ont seuls péché avec elles; les autres furent irrités et, après les menaces, en vinrent au meurtre (1). Voilà comme il faut agir avec les pensées. Le frère répondit au vieillard : Que ferai-je donc? car je suis faible et les passions me dominent. Il lui dit : Observe-les et lorsqu'elles com- mencent à parler, ne leur réponds pas, mais lève-toi et prie; agenouille- toi et dis : Fils de Dieu, aie pitié de moi. Le frère lui dit donc : Je médite bien, père, mais je n'ai pas de componction dans mon cœur, car je ne saisis pas la force de la parole. Il lui dit : Médite toujours; car j'ai appris que Poemen et beaucoup de pères ont dit que le charmeur ne saisit pas la force des paroles qu’il prononce, mais l'animal l'entend, com- prend, se soumet et s’humilie. Il en est de même de nous : bien que nous ne sentions pas la force des paroles, les démons qui les entendent s’éloignent avec crainte.

185. Les vieillards disaient (2) : Les pensées impures sont (comme) un livre : S'il vient semer chez nous, mais que nous le rejetions loin sans l'écouter, il se désagrège au bout de peu de temps (3). Mais si nous pre- nons plaisir à sa présence le lire) comme si nous l’approuvions, il deviendra bientôt comme du fer (dans notre esprit) et en sera difficile- ment extirpé. Pour ces pensées il faut donc faire la distinction (suivante) : Ceux qui leur cèdent n’ont pas d'espoir de salut, mais la couronne (de victoire) attend ceux qui leur résistent.

186. Deux frères combattus par l’impureté allèrent prendre des femmes (4), enfin ils se dirent : Qu’avons-nous gagné à quitter la cohorte angélique et à venir dans cette ignominie, pour tomber plus tard dans le feu et dans la punition? Retournons au désert et faisons pénitence. Ils allèrent demander aux pères de leur imposer une pénitence et confes- sèrent ce qu'ils avaient fait. Les vieillards les enfermèrent pour une année et leur donnèrent à chacun même mesure de pain et d’eau. Ils avaient à peu près le même extérieur. Lorsque leur temps de pénitence fut terminé, ils sortirent, et les pères virent que l’un était pâle et morne tandis que l’autre était prospère et joyeux; 115 furent dans l’étonnement puisque leur nourriture avait été la même. Ils interrogèrent le morne et lui dirent : Comment t’'entretenais-tu avec tes pensées dans ta cellule? Il répondit : Je pensais aux fautes que j'ai commises et à la punition que j'ai encourue, et la'crainte collait ma chair à mes os. Ils demandèrent à l’autre : Et toi, que pensais-tu en ton cœur dans ta cellule? Il leur dit : Je remerciais Dieu qui m'a arraché à l’impureté du monde et à la puni- tion et qui m'a conduit dans cet état angélique; j'étais plein de joie en songeant à Dieu. Et les vieillards dirent : La pénitence de chacun d'eux est égale devant Dieu.

(1) Nombres, xxv.

(2) M, 882, 33; Coislin 127, fol. 95.

(3) Π s’agit du papyrus, comme le porte explicitement le latin, et non du parchemin.

(4) M, 882, 34; Coislin 127, fol. 93; Paul, 18; B, p. 670, 591; mss. grecs 919, fol. 155, et 1596, fol. 327; L, fol. 18.

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HISTOIRES DES SOLITAIRES ÉGYPTIENS. 289

187. Un vieillard de Scété était tombé dans une grande maladie et les frères le servaient (1). Il vit qu'ils se fatiguaient et 1] dit : Je vais en Égypte, pour ne pas énerver les frères. L'abbé Moïse lui dit : N'y va pas, car tu tomberais dans l’impureté. Il fut affligé et dit : Voilà que mon corps est mort et tu me dis cela! II alla donc en Égypte et les hommes (des environs) lapprenant, lui apportaient beaucoup de dons et une femme, restée vierge par esprit de foi, vint même servir le vieillard.-Au bout de peu de temps, se trouvant guéri, il pécha avec elle et elle concut. Les hommes lui dirent : D'où vient cela? Elle répondit : Du vieillard. Ils ne la crurent pas, mais le vieillard dit : C’est moi qui l’ai fait, mais gardez- (moi) l'enfant qui est né. Lorsqu'il fut sevré, un jour qu’il y avait fête à Scélé, le vieillard entra dans. l'assemblée devant tout le peuple avec cet enfant sur l'épaule. Ceux qui le virent se mirent à pleurer et il dit aux frères : Voyez-vous cet enfant? C’est le fils de la désobéissance. Fortifiez- vous donc, frères, en voyant que j'ai fait cela (même) dans ma vieillesse et priez pour moi. Retourné à sa cellule, il reprit son ancienne con- duite. | 188. Un frère fut violemment tenté par le démon de l’impureté (2). Quatre démons métamorphosés en femmes très belles demeurèrent près de lui durant quarante jours pour l’amener à un acte honteux. Il résista courageusement sans céder et Dieu, voyant son beau combat, lui accorda de ne plus avoir aucune tentation charnelle.

189. Dans les régions inférieures de l'Égypte (3) il y avait un ana- chorète qui était très célèbre parce qu'il demeurait seul dans une cellule au désert. Voilà que, par l'opération de Satan, une femme sans pudeur, ayant entendu parler de lui, dit aux jeunes gens : Que voulez-vous me donner et je ferai tomber votre anachorète? Ils lui promirent une bril- lante récompense. Elle partit le soir, vint à sa cellule comme si elle était égarée, elle frappa et il sortit. Lorsqu'il la vit, il fut troublé et dit : Com- ment es-tu venue ici? Elle répondit en pleurant : C’est parce que je suis perdue que me voici. Plein de compassion, il la fit entrer dans la cour (4), et entra (lui-même) dans sa cellule dont il ferma la porte. La malheu- reuse se mit à crier et à dire : Père, les animaux sauvages me man- geront. Il fut encore ému et craignant le jugement de Dieu il dit : D'où me vient cette colère (cette dureté)? puis il ouvrit la porte et la fit entrer. Or le démon commenca à le tenter au sujet de cette femme, mais lui, se rendant compte du combat que lui livrait. l'ennemi, dit : Les sentiers de l’Ennemi sont (dans) les ténèbres, tandis que le Fils de Dieu est lumière. Il se leva donc et alluma la lampe. Comme le désir le brû- lait, il dit : Ceux qui font cela vont aux tourments; essaie donc ici si tu peux supporter le feu éternel. Il mit son doigt sur la lampe et le brüla, et il ne sentit pas qu'il brülait à cause de la passion excessive qui brülait

(1) M, 883, 35; Coislin 127, fol. 93"; B, p. 305: ms. 919. fol. 155: L, fol. 80. (2)'M, 883, no 36; Coislin 127, fol. 93*; Paul, 211. (3) M, 883, 37; Coislin 127, fol. 94; Paul, 226; L, fol. S5r. (4) αὐλύδριον Ο 126; αὐλίδρνον C 127. ORIENT CHRÉTIEN, 19

200 REVUE DE L'ORIENT CHRÉTIEN. x

sa Chair. Il continua ainsi jusqu'au matin et brûla tous ses doigts. Mais la malheureuse, voyant ce qu'il avait fait, fut pétrifiée.

Au matin, les jeunes gens, venant près de l’anachorète, lui dirent Une femme n'est-elle pas venue hier soir? Il répondit : Oui, elle est couchée dedans. Ils entrèrent et la trouvèrent morte et ils lui dirent : Père, elle est morte. Alors, découvrant ses mains, il les leur montra et dit : Voilà ce que m'a fait cette fille du diable, elle m'a fait perdre les doigts. 11 leur raconta ce qui était arrivé et il dit : Il est écrit : Tu ne rendras pas le mal pour le mal. Il pria et la ressuscita; elle partit et eut bonne conduite désormais.

190. Un frère fut tourmenté par le démon de l’impureté (1). Il lui arriva de traverser un village d'Égypte: il vit la fille d’un prêtre païen, l’aima et dit à son père : Donne-la-moi pour femme. Il répondit : Je ne puis pas te la donner sans consulter mon dieu. Il alla près du démon et lui dit : Voilà qu’un moine est venu et veut ma fille, la lui donnerai-je? Le démon répondit : Demande-lui s’il renonce à son Dieu, au baptême et à la profession monacale. Le prêtre vint dire au moine : Renonces-tu à ton Dieu, au baptême et à la profession monacale? Il le promit et aus- sitôt il vit comme une colombe qui sortait de sa bouche et s’envolait au ciel. Le prêtre alla près du démon et lui dit : Voilà qu'il m'a promis ces trois choses. Et le diable lui répondit : Ne lui donne pas ta fille pour . femme, car son Dieu ne l’a pas quitté mais le protège encore. Et le prêtre vint lui dire : Je ne puis pas te la donner, car ton Dieu te protège» et ne t'a pas quitté. À ces paroles le frère se dit en lui-même : Lorsque Dieu m'a montré tant de bonté, moi, misérable, je l’ai renié ainsi que le baptème et la profession monacale, et lui, (le Dieu) bon, me protège encore maintenant!

Rentré en lui-même, il sut se contenir et alla au désert près d’un grand vieillard auquel il raconta toute la chose. Le vieillard lui répondit : Reste avec moi dans cette caverne et jeûne trois semaines de suite; je prierai Dieu pour toi. Le vieillard prit de la peine au sujet de ce frère et supplia Dieu, disant : Je ten prie, Seigneur, donne-moi cette âme et accepte sa pénitence. Dieu l’exauca à la fin de la semaine, le vieillard vint près du frère et lui- demanda : N’as-tu rien vu? Le frère lui répondit : Si, j'ai vu la colombe en haut dans la profondeur du ciel, au-dessus de ma tête. Et le vieillard lui dit : Fais attention à toi et prie Dieu constam- ment. La seconde semaine, le vieillard vint près du frère et lui de- manda : N'as-tu rien vu? Il répondit : J'ai vu la colombe près de ma tête. Et le vieillard lui ordonna d’être sobre et de prier. Le vieillard vint encore à la fin de la troisième semaine et lui demanda : N’as-tu rien vu de plus? 1] répondit : J'ai vu la colombe venir et s'arrêter au-dessus de ma tête; j'ai étendu la main pour la saisir, mais elle, s’envolant, est entrée dans ma bouche. Et le vieillard rendit grâces à Dieu, et il dit au frère : Voilà que Dieu agréé ta pénitence; à l'avenir prends garde à toi. Le

41) M, 884, ne 38; Coislin 127, fol. 94"; Paul, 15; B, p. 303; ms. 919, fol. 156;

fol. 163,

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HISTOIRES DES SOLITAIRES ÉGYPTIENS. 291

frère lui répondit : Dès maintenant je reste avec toi, père, jusqu'à ma mort.

191. L'un des vieillards Thébains racontait (1) : J'étais fils d'un prêtre païen. Lorsque j'étais jeune, je voyais souvent mon père qui venait sacrifier à l’idole. Un jour que j'entrai en cachette derrière lui, je vis Satan et toute son armée autour de lui, et voilà que l’un de ses chefs vint l’adorer. Le diable lui dit : D'où viens-tu? Il répondit : J'étais dans tel pays, j'ai excité des guerres, j'ai fait verser beaucoup de sang et je suis venu pour te l’annoncer. Il lui dit : En combien de temps as-tu fait cela? Il répondit : En trente jours. Et il le fit châtier et dit : En tant de jours, tu n’as pu faire que cela!

Un autre vint l’adorer et il lui dit : D'où viens-tu, toi aussi? Le démon lui répondit : J'étais dans la mer, j'ai suscité les vents, j'ai sub- mergé des navires, j'ai fait périr beaucoup d'hommes et je suis venu te l’annoncer. Il lui dit : En combien de temps as-tu fait cela? Le démon répondit : En vingt jours. Et il ordonna de le flageller et il dit : Pourquoi, en tant de jours, n’as-tu fait que cela?

Le troisième s’approchant l’adora, et il lui dit aussi : D’où viens-tu ? Le démon lui répondit : Dans telle ville il y avait des noces, j'y ai excité une gueñre et j'ai fait répandre beaucoup de sang, j'ai tué l'époux et l’épouse et je suis venu te l’annoncer. Il lui demanda : En combien de jours as-tu fait cela? Il répondit : En dix jours. Et il ordonna de le flageller aussi, parce qu’il avait mis trop de temps.

Après ceux-là, un autre vint l’adorer. Il lui dit : D'où vienstu, toi aussi? Il répondit : Voilà quarante ans que je suis dans le désert à lutter contre un moine; cette nuit-ci je l’ai fait tomber dans l’impureté. À ces paroles, (Satan) l’embrassa et, enlevant la couronne qu'il portait, il la lui placa sur la tête et il le fit asseoir sur son trône et il dit : C’est parce que tu as pu accomplir cette grande action.

Et le vieillard ajouta : Lorsque je vis cela, je (me) dis : L'état monacal est donc vraiment grand! Et Dieu voulant mon salut je partis et je devins moine.

RÉCITS POUR NOUS EXCITER A LA PATIENCE ET A LA FERMETÉ.

192. Un vieillard dit (2) : Quand un homme est éprouvé, les afflic- tions lui viennent de partout pour l'impatienter et le faire murmurer. Et il racontait :

Il y avait un frère aux Cellules et il fut éprouvé : lorsque quelqu'un le rencontrait, il ne voulait ni le saluer ni le faire entrer dans sa cellule; lorsqu'il avait besoin de pain, personne ne lui en prêtait; lorsqu'il revenait de la moisson, personne ne l’engageait par charité à se reposer dans l’église comme c’est la coutume. Il revint un jour de la moisson et ne trouva même pas de pain dans sa cellule; malgré tout cela, il rendait

(1) M, 885, 39; Coislin 127, fol. 95; Paul, 99: B, 88, no 694. CAL ST ἘΣ ἘΣ ΘΙ 295; Coislin 197. 101. 124%

292 REVUE DE L'ORIENT CHRÉTIEN.

graces à Dieu. Le Seigneur, voyant sa patience, mit fin à son épreuve : un homme vint frapper à sa porte avec un chameau chargé de pain qu'il apportait d'Egypte. Le frère commença à pleurer et à dire : Seigneur, n'étais-je pas digne d’être un peu tourmenté pour ton nom? Lorsque l'épreuve fut passée, les frères vinrent le chercher pour le faire reposer dans leurs cellules et dans l’église.

193. Des frères vinrent au désert près d’un grand vieillard et lui dirent (1) : Comment peux-4u demeurer ici, père, et y supporter de telles fatigues? Le vieillard répondit : Tout le temps que j'ai passé ici à tra- vailler ne fait même pas un jour de la punition (éternelle),

194. Un vieillard dit (2) : Les anciens ne se hâtaient pas de quitter leur place, si ce n’est pour l’une de ces trois causes : si l’un se trouvait avoir quelqu'un mal disposé à son égard et qu'il ne püt, malgré ses efforts, le changer; ou encore s'il arrivait d’être loué par beaucoup; ou enfin de tomber dans l’impureté.

195. Un frère demanda à un vieillard (3) : Que ferai-je? Mes pensées me troublent en me disant : Tu ne peux ni jeûner ni travailler, du moins va visiter les malades, c’est une œuvre de charité. Le vieillard lui dit : Va. mange, bois, dors, seulement ne quitte pas ta cellule, sachant que le support de la cellule conserve le moine dans son état. Lorsqu'il eut passé trois jours il s'ennuya et, trouvant de petits rejetons de palmier, il les fendit, puis, le jour suivant, il les tressa. Après avoir travaillé, il dit : Voilà encore d’autres petits rejetons, je les prépare encore, puis je mangerai. Il les prépara, puis il dit : Je vais lire un peu, ensuite je man- gerai. Après avoir lu il dit : Je récite mes petits psaumes, ensuite je mangeral sans aucune inquiétude. Ainsi il progressa petit à petit avec l’aide de Dieu jusqu’au moment il entra dans son ordre. En prenant confiance contre ses pensées, il les vainquit.

196. On demanda à un vieillard (4) : Pourquoi suis-je découragé lorsque je suis assis dans ma cellule? Il répondit : Parce que tu n'as pas vu linstant favorable, ni le repos en lequel nous espérons (5), ni la punition future. Car si tu avais bien vu tout cela, si ta cellule avait four- millé de vers, au point d'y avoir été plongé jusqu’au cou, tu ne te serais plus découragé.

197. Les frères demandaient à un vieillard de cesser ses grands travaux (6). 11 leur répondit : Je vous le dis, enfants, Abraham a lieu de se repentir, en voyant les grands dons de Dieu, de ce qu'il n’a pas lutté davantage

198. Un frère dit à un vieillard (7) : Mes pensées vagabondent et (1) M, 900, 25; Coislin 127, fol. 125».

(2) M, 900, 26; B, 762, 164; Coislin 127, fol. 125.

(3) "᾿ 900, no 27, appelle ce vieillard Arsène ; Coislin 127, fol. 125

Re M, 900, ?8; B, 815, 300; Coislin 127, fol. 125.

(9) Le εἰ Ἀν : adhuc non vidisti speratam resurrectionem. Le syriaque

porte : « parce que tu n’as pas songé au repos auquel aboutissent ceux qui tra- vaillent ».

(6) M, 900, 29; Coislin 127, fol. 125. (7) Coislin 127, fol. 125": M, 900, 30; cf. B, 459, 38,

HISTOIRES DES SOLITAIRES ÉGYPTIENS. 293

j'en suis affligé. Le vieillard lui dit : Reste dans ta cellule et elles (te) reviendront. Si un âne est attaché et que son petit puisse courir et là, si loin qu'il aille, il revient toujours près de sa mère; il en est de méme des pensées de celui qui reste pour Dieu dans sa cellule, elles peuvent vagabonder un peu, mais elles reviendront près de lui.

199. Un vieillard demeurait dans le désert à douze milles de l’eau (1). Un jour qu'il allait puiser, il se fatigua et il dit : Pourquoi me donner tant de peine? Je vais aller demeurer près de l'eau. En disant cela, il se re- tourna et il vit quelqu'un qui l’accompagnait et qui comptait ses pas. Il lui dit : Qui es-tu? L'autre répondit : Je suis un ange du Seigneur et j'ai été envoyé pour compter tes pas et te donner la récompense. Le vieillard, à ces paroles, fut réconforté et encouragé et il alla demeurer encore cinq milles plus loin.

200. Les pères dirent (2) : S'il t’arrive une tentation dans l'endroit tu habites, n’abandonne pas cet endroit au moment de la tentation, sinon partout tu iras, tu trouveras devant toi ce que tu fuis. Prends patience jusqu'à ce que la tentation soit passée afin que ton départ se fasse sans esclandre au moment tout est. tranquille et qu'il ne cause aucune affliction à ceux qui habitent cet endroit,

201. Un frère était moine dans un couvent (3) et souvent il se met- tait en colère. Il se dit : Je vais me retirer à l'écart et, n’ayant plus de rapports avec qui que ce soit, cette passion me quittera. Il partit donc et demeura seul dans une caverne. Un jour, ayant rempli sa cruche d’eau, il la posa à terre et aussitôt elle se renversa. Il la remplit et elle se renversa encore. [1 la remplit une troisième fois et elle se renversa de même. Saisi de colère, il l’empoigna et la brisa. Rentré en lui-même, il reconnut qu’il avait été trompé par le démon, et il dit : Voilà que j'ai voulu vivre à l'écart et j'ai péché; je retourne donc au monastère, car on besoin partout de force, de patience et du secours de Dieu. Il se leva donc et retourna à sa (première) place.

202. Un frère dit à un vieillard (4) : Que ferai-je, père? car je ne fais rien de monacal; je mange, je bois et je dors avec insouciance, j'ai de mauvaises pensées et beaucoup de trouble d'esprit. Je vais de travail en travail et de pensées en pensées. Le vieillard lui dit : Demeure dans ta cellule et fais ce que tu peux sans te troubler. Le peu que tu fais main- tenant me semble égal aux grandes choses que le père Antoine faisait sur la montagne; j'espère qu'en demeurant dans ta cellule pour le nom de Dieu et en recherchant la connaissance de Dieu, tu te trouveras toi aussi à la place du père Antoine.

205. On demanda à un vieillard (5) : Comment un frère zélé peut-il ne pas être scandalisé s’il en voit qui retournent dans le monde? Il répon-

(1) Coislin 127, fol: 125"; M, 900; 31; B, p. 514; 198 ; L, fol. 89. Le sy- riaque porte : « dix milles ».

(2) Coislin 127, fol. 125';:,M, 9,01, 32.

(3) Coislin 127, fol. 125'; M, 901, 33

(4) Coislin 127, fol. 126; M, 901, 34.

(3) Coislin 127, fol. 126; M, 901, 35.

294 REVUE DE L'ORIENT CHRÉTIEN. :

dit : Il faut regarder les chiens qui poursuivent les lièvres et comment un chien ayant vu un lièvre le poursuit jusqu'à ce qu'il l’atteigne sans se laisser arrêter; les autres se bornent à regarder le chien qui chasse ou bien courent un peu avec lui mais changent bientôt d'avis et retournent; * lui seul, qui a trouvé le lièvre, le poursuit jusqu'à ce qu'il l’atteigne sans se laisser détourner de son but par les chiens qui s'arrêtent et sans se préoccuper des précipices, des broussailles et des épines. De même celui qui recherche (notre) maitre, le Christ, et qui regarde constamment sa croix, franchit tous les scandales qui surviennent jusqu'à ce qu'il arrive au crucifié.

204. Un vieillard dit (1) : De même qu'un arbre ne peut pas porter de fruits s'il est fréquemment transplanté, ainsi le moine qui erre de place en place ne peut arriver à la vertu.

205. Un frère tourmenté par ses pensées au point de quitter le mo- nastère, le raconta au père (2). Celui-ci lui dit : Va demeurer dans ta cellule, donne ton corps en gage au mur de ta cellule et n’en sors pas; laisse ton imagination imaginer ce qu’elle voudra, seulement ne retire pas ton corps de la cellule.

206. Un vieillard dit (3) : La cellule du moine est la fournaise de Babylone les trois enfants ont trouvé le fils de Dieu; c’est la colonne de nuées, d’où Dieu parlé à Moïse.

207. Durant neuf ans un frère fut tenté de quitter le monastère (4). Chaque jour il préparait son habit pour partir et, lorsque le soir venait, il se disait : Je partirai d'ici demain. Le lendemain il disait : Obligeons- nous à rester encore aujourd'hui pour le Seigneur. Quand il eut fait cela durant neuf ans, Dieu lui enleva toute tentation et il fut tranquille.

208. Un frère tomba dans la tentation et, de chagrin, il abandonna la règle monacale (Ὁ). Quand il voulut recommencer, son chagrin l’en empéchait toujours et il se disait : Comment pourrais-je jamais redevenir ce que j'étais! Il perdait courage et ne pouvait pas recommencer le tra- vail monacal. Il alla trouver un vieillard et lui raconta ce qui lui arrivait. Le vieillard, informé de son chagrin, lui proposa l'exemple suivant : Un. homme avait un champ, il le négligea et il devint inculte, rempli de jones et d’épines. Il songea enfin à le cultiver et il dit à son fils : Va net toyer le champ. Son fils alla pour le nettoyer mais, lorsqu'il vit le grand nombre des épines, il perdit courage et se dit : Comment pourrais-je arracher tout cela et nettoyer tout cela! Et il se coucha et se reposa durant plusieurs jours. Après cela, son père vint voir son travail; il le trouva à rien faire et lui dit : Pourquoi n’as-tu pas travaillé jusqu'au- jourd'hui? Le jeune homme répondit à son père : Dès que je suis venu pour travailler, père, et que j'ai vu le grand nombre des roseaux et des

(1) Coïslin 127, fol. 126; M, 902, τ" 36:

(Ὁ) Coislin 127, fol:126; M; 902, n°37:

(9) Coislin 127, fol. 126; ΝΜ, 902, 38.

(4) Coislin 127, fol. 126; M, 902; n°39.

(5) Coislin 127, fol. 196"; M, 902, 40; B, p. 672, 593: ms. 1996, p. 99 L, fol. 38":

HISTOIRES DES SOLITAIRES ÉGYPTIENS, 295

épines, j'ai été tourmenté et, à cause de cette affliction, je me suis assis et j'ai dormi. Son père lui dit : Enfant, si tu avais fait chaque jour seule- ment la grandeur de ton manteau, ton ouvrage aurait avancé et tu n'au rais pas perdu courage. Il le fit et, en peu de temps, tout le champ était nettoyé. Il en est de même pour toi, frère ; travaille peu à peu, tu ne perdras pas courage et Dieu, par sa grâce, te ramèénera à ton ancien rang. Le frère se mit à faire patiemment ce que le vieillard lui avait dit et, par la grâce du Christ, il trouva la tranquillité.

209. ΤΙ y avait un vieillard (1) qui était d'ordinaire malade et infirme. Il lui arriva certaine année de ne pas être malade, il en fut très affligé et il disait en pleurant : Dieu m'a abandonné et ne m'a plus visité.

210. Un vieillard dit (2) : Certain frère fut tenté par ses pensées durant neuf ans, au point de désespérer de son salut. Dans sa timidité, il se condamnait lui-même et disait : J'ai perdu mon âme, je vais dans le monde qui m'a perdu. Comme il s’en allait, une voix lui vint durant la route qui lui dit : Les neuf années durant lesquelles tu as été tourmenté étaient tes couronnes, retourne à ta place et je te délivrerai de tes pen- sées. On voit qu'il n’est pas beau pour quelqu'un de désespérer à cause de ses pensées, car elles nous apportent plutôt des couronnes pourvu que nous les supportions bien.

211. Un vieillard qui demeurait dans une caverne de la Thébaïde avait un disciple éprouvé (3). Le vieillard avait coutume de lui donner chaque soir de bons conseils, puis de faire la prière et de l'envoyer cou cher. Un jour, de pieux séculiers qui connaissaient le grand ascétisme du vieillard, vinrent le voir et il leur adressa des paroles d’édification. Après leur départ, le vieillard s’assit encore le soir selon sa coutume pour exhorter le frère et, pendant qu'il parlait, il s'endormit. Le frère attendit que le vieillard s’éveillât et lui fit la prière. Quand il eut attendu longtemps et que le vieillard ne s’éveillait pas, ses pensées le tourmen- tèrent pour qu'il s’en allàt et se couchât sans y être envoyé. Il résista à ces pensées et demeura; tenté de nouveau, il ne s’en alla pas; jusqu'à sept fois il résista à ses pensées. Après cela, la nuit touchant à sa fin, le vieillard se réveilla, le vit assis près de lui et lui dit : Tu ne t'es pas éloigné jusqu'à maintenant? Il répondit : Non, car tu ne m'as pas donné congé, père. Le vieillard dit : Pourquoi ne m’as-tu pas éveillé? Il répon- dit : Je n'ai pas osé t'éveiller, de crainte de te fatiguer. Ils se levèrent, récitèrent les laudes et, après l'office, le vieillard renvoya le frère et se coucha de son côté; il tomba en extase et voilà que quelqu'un lui mon- trait un endroit glorieux était un trône et sept couronnes sur le trône, 11 demanda à son guide : Pour qui est cela? L’autre répondit : C’est pour ton disciple; Dieu lui donné cette place et ce trône à cause de son obéis- sance; quant aux sept couronnes, il les a gagnées cette nuit. Le vieillard, à ces paroles, fut saisi d’étonnement et de crainte, il appela le frère et lui

ΕἸ Coislin 197, ΟΙ ΤΟΥ ΝΜ 903, 41. (2) Coislin 127, fol: 127; M, 903; 42: (3 Coislin 127, fol. 127; M, 905, 45.

296 REVUE DE L'ORIENT CHRÉTIEN.

dit : Raconte-moi ce que tu as fait durant cette nuit. L'autre répondit : Pardonne-moi, père, mais je n'ai rien fait. Le vieillard, croyant qu'il ne voulait pas le raconter par humilité, lui dit : Je ne te tiens” pas quitte si tu ne me dis pas ce que tu as fait ou ce que tu as pensé durant cette nuit. Le frère, n'ayant pas conscience d’avoir fait quelque chose, était embar- rassé pour répondre. Il dit (enfin) au père : Abba, je n’ai fait que ceci : Tourmenté par sept fois par mes pensées pour partir sans que tu m'aies renvoyé, je ne suis pas parti. Le vieillard comprit alors qu'il avait été couronné par Dieu chaque fois qu'il avait résisté à ses pensées. Il n'en dit rien au frere, mais, pour les édifier, il le raconta aux pères spirituels afin de nous apprendre que, pour de petites pensées, Dieu nous délivre des couronnes. Il est donc beau de se contraindre pour (l'amour de) Dieu. Car le royaume du ciel souffre violence et les violents le ravissent (1).

212. Un vieillard tomba malade aux Cellules (2): il vivait à l'écart et n'avait personne pour le servir. Il se leva et mangea ce qu'il trouva dans sa cellule. Il resta ainsi plusieurs jours sans que personne vint le voir. Au bout de trente jours, comme personne ne venait près de lui, Dieu envoya un ange pour le servir. Sept jours après, les pères se souvinrent du vieil- lard et dirent : Un tel vieillard ne serait-il pas mort? Lorsqu'ils vinrent et frappèrent, l’ange s’éloigna. Le vieillard cria du dedans : Partez, frères. Ils poussèrent la porte, entrèrent et lui demandèrent pourquoi il criait cela. ΠῚ leur dit : J’ai été malade durant trente jours sans que personne vint me voir, voilà seulement sept jours que Dieu envoyé un ange pour me servir et, lorsque vous avez frappé, il m'a quitté. Après avoir dit cela x mourut, et les frères, pleins d’admiration, louèrent Dieu de ce que le Seigneur n’abandonne pas ceux qui espèrent en Lui.

913. Un vieillard dit (3) : S'il te survient une maladie corporelle, ne timpatiente pas, car si le maitre veut affliger ton corps, pourquoi t’im- patienterais-tu? Ne s’occupe-til pas de toi en tout? Peux-tu vivre sans Lui? Sois donc patient et prie-Le de te donner ce qui te convient. Voici sa volonté : Demeure avec patience et mange l’agape.

214. Un père racontait (4) : Lorsque j'étais à Oxyrynque (5), des pauvres y vinrent. le soir du samedi, pour recevoir l’agape. Comme nous étions couchés, il y en avait un qui n'avait qu'une natte, la moitié sous lui et l’autre moitié dessus. Or ‘il faisait très froid. En sortant pour une nécessité, je l’entendis qui souffrait du grand froid et qui s’exhortait en disant : Je te rends grâces, Seigneur! Combien de riches sont main- tenant en prison chargés de fer, d’autres ont les pieds entravés dans des bois et ne peuvent même pas rejeter leur eau; tandis que moi j'étends mes pieds comme un roi. Quand j'eus entendu ces paroles, je les racontai aux frères et ils en furent édifiés.

) Matth., x, 12.

l (2) Coislin 127, fol. 127'; M, 904, no 44, ᾿

\

{ ( ( (

3) Coislin 127, fol. 128; M, 904, 45.

) Coislin 127, fol. 128; M, 904, 46; B, 814, 298. b) Le syriaque a transcrit ξενοδοχείῳ : lorsque j'étais « dans une hôtellerie » au lieu de ᾿Οξυρύγχῳ.

᾿ ἣν

a".

HISTOIRES DES SOLITAIRES ÉGYPTIENS. 297

215. Un frère demanda à un vieillard (1) : 511 m'arrive une affliction et que je n'aie pas la consolation de (pouvoir) la raconter à quelqu'un, que ferai-je? Le vieillard dit : J’ai confiance que Dieu t’enverra sa grâce et te secourra si tu le pries en vérité. Car j'ai entendu qu'il est arrivé à Srété une histoire de ce genre : Un homme souffrait et, n'ayant personne pour le consoler, il prépara son habit pour s’en aller. Alors la grâce divine lui apparut sous la forme d'une vierge qui l’encouragea et lui dit : Ne t'en va pas, mais reste ici avec moi, car aucun mal imaginé par toi n’est ar- rivé. I] lui obéit et resta, et son cœur fut guéri dès ce moment.

(A suivre.) F. Nav.

(1) Coislin 127, fol. 128 ; M, 90, 47; L, fol. 177.

HISTOIRE DE LA CONVERSION DES JUIFS HABITANT LA VILLE DE TOMEI, EN ÉGYPTE

D'APRÈS D'ANCIENS MANUSCRITS ARABES

La Palrologie orientale va publier prochainement, par les soins de M. 5. Grébaut, une apologie du christianisme, en lan- oue éthiopienne, que fait un Juif, nommé Jacob, nouvellement converti, et dans de singulières circonstances, à la religion de Jésus-Christ. C’est pour rechercher quelque forme arabe de cet écrit que j'ai feuilleté les différentes controverses judéo-chré- tiennes manuscrites.

Nous ne connaissons pas, en arabe, l'histoire de ce Jacob, mais une certaine littérature nous été conservée, dans cette langue, sur ce sujet des polémiques entre Juifs et chrétiens ; et il y aurait un chapitre nouveau à ajouter à la Polemische lilleralur de Steinschneider. Cette addition ne contribuerait pas à donner à ce répertoire un accès plus facile, mais elle le ren- drait tout à fait complet, c’est-à-dire parfait, pour certains.

Il ne fallait pas s'attendre à trouver le fond de ces contro- verses très différent d’un ouvrage à l’autre. En effet, il n'y pas deux manières, pour un chrétien, de combattre un Juif sur sa religion : quand il aura donné l'interprétation des prophé- ties qui concernent Jésus-Christ, relevé les indices, dans l’An- cien Testament, du dogme de la Trinité, il aura fourni son principal effort de controversiste. Il pourra encore montrer que la loi de Moïse devait s’abolir, et qu'il fallait que le précepte ancien tombât devant le précepte de grâce : et encore ici, 1] pourra s'appuyer sur les témoignages de Ia Bible.

L'ancêtre de tous ces ouvrages est l'évangile de saint Mat-

HISTOIRE DE LA CONVERSION DES JUIFS. 299

thieu : il nous indique à chaque endroit la prophétie qui s'y est accomplie; et par le soin qu'il apporte à ces confrontations, il décèle son souci apologétique. Le grand dialogue de saint Justin contre le juif Tryphon nous offre le type de ces écrits. Il n'en est point le modèle, car je veux croire que la plupart de ces récits sont sans doute réels, et que leur réalité historique en a, de l’un à l’autre, modifié la forme. Leur intérêt ne réside œuère que dans l'ordre nous sont présentés les arguments connus, et.qui peut être plus ou moins gradué et méthodique.

La Bibliothèque Nationale de Paris conserve sept manus- crits arabes renfermant des controverses judéo-chrétiennes, les ne VIP TOUL 005 11 210 48812 Notons seulement-ici que 214 en contient deux, dont l'une se retrouve au 20», et que 173 et 174 contiennent un même ouvrage, ainsi que d'autre part 215 et 4881].

Ce dénombrement n'est pas pour fatiguer le lecteur, mais pour éviter, à la réimpression des catalogues, de faire pour les mêmes textes des notices qui ne se ressemblent pas.

Plusieurs de ces morceaux n’ont pas un vif intérêt. Pour- tant une sérieuse discussion, bien que fort courte, est celle que nous donne, sous forme d'opuscule adressé au juif Bichr ibn Fenhas ibn Choeib, surnommé Al-Hàsib, /e complable, le docteur Jacobite ‘Isa ibn Zor’a, l'an 387 de l'Hégire (997 de J.- C.). Elle débute, dans le 173, par une suscription musul- mane : (us) JI sol =) spl Ait us. Le docteur, considérant que la vision nette du devoir fait d'une œuvre surérogatoire une œuvre d'obligation,'et que le devoir ne se borne pas aux préceptes de la loi écrite, entreprend l'œuvre qu'il à cœur, de la conversion des Juifs; il divise son travail en quatre chapitres : 1. Que la loi de Moïse est abolie, qu’elle n'oblige plus dans toutes ses prescriptions ; 2. Que le Messie annoncé est venu, et il y a de cela 998 années solaires ; 3. De la Trinité et de l'Unité de Dieu; 4. De l’'Incarnation. A la fin se trouvent annexées les objections des Juifs contre le Jugement dernier, et les preuves de l’immortalité de la doctrine de Jésus- Christ, qui ne sera jamais ni abolie, ni remplacée, et, à ce propos, une réfutation du Mahométisme, contre Aboul-Qàsem Abd Allah ibn Mohammed al-Balkhi, auteur d’un pamphlet contre le christianisme intitulé 1] NI ΤῊΝ c'est-à-dire /es

900 REVUE DE L'ORIENT CHRÉTIEN.

prémisses des arquments (1), Le tout forme un ensemble un peu disparate et s'étend sur 21 feuillets dans le 173.

Mais il est temps de parler d’une controverse d’un plus grand intérêt. C’est une véritable conférence contradictoire qui aurait été donnée vers 622 de J.-C., devant témoins; elle est encadrée d’une bonne mise en scène; elle se termine par la conversion de toute la population juive de Tomei, une bourgade de la basse Égypte (2).

Des trois mss. qui nous la transmettent, deux, à la Biblio- thèque Nationale, sont assez défectueux. Le 205, peu ancien (xiv° siècle), est toutefois plus correct dans le détail que le 214, du xvi* siècle, lequel n’est qu'une copie inintelligente d’un ancêtre du premier, malgré sa belle calligraphie et sa division en rubriques. Ces deux mss. ne se sont pas connus, pour plu- sieurs raisons, dont la principale est que le plus moderne pré- sente un passage qui à été, par distraction du copiste, sauté dans le plus ancien. La bibliothèque de l'Université d’Upsal renferme une autre copie, beaucoup plus ancienne, datée de 1040, que je n'ai pas vue; les deux copies de Paris nous suffi- ront à suivre l’histoire en son entier; 214 nous guidera, parce que le récit y est complet, et 205 nous en éclaircira tous les points obscurs.

Voici done un bref aperçu, en forme d'analyse, du récit qui nous est rapporté, et qui s'étend, dans le 214, sur 46 feuillets.

x Χ

Lorsque Vespasien détruisit Jérusalem, il bannit en Égypte un grand nombre de familles juives, qui expièrent ainsi le crime que leurs pères avaient commis en crucifiant Jésus- Christ. Or, beaucoup d’entre elles s’établirent à Tomei, qui est au nombre des villes que les Israélites bâtirent au temps de leur captivité sous les Pharaons (3). Cette ville était ainsi peu-

(1) Cet auteur est nommé, avec son ouvragé, par Hadji Khalfa; v. Flügel, 1 391]:

(2) Prononcons, suivant Yaqoüt, Tomei. Village près de Hauf, non loin de Bilbeïs.

(3) L'Exode (1, 11) ne donne pas ce nom parmi les villes construites par les Hébreux, mais seulement Pitom et Ramsès.

HISTOIRE DE LA CONVERSION DES JUIFS. 301

plée surtout de Juifs et, à cette époque, ils s’y trouvaient beau- coup plus nombreux que les chrétiens. C'était en l'an 547 des Martyrs, sous le règne de Justinien, empereur de Constanti- nople, auquel succéda Léonce, le dernier prince byzantin qui gouverna l'Égypte et la Syrie (1). Non loin de la ville, siège de l'évêque de Tomei et Achmoun, était situé, dans le diocèse de Taràbia, un monastère placé sous le vocable de Saint-Antoine, dans les montagnes de Qolzoum, et le culte que les moines y rendaient au Seigneur ressemblait à l'adoration des anges. Deux moines, pourvoyeurs de la communauté, étaient chargés d'aller à Tomei chercher les subsistances. L'un s'appelait Sati- rikos (2), et l’autre André. ν

Un jour, ils tombèrent sur une grande assemblée de Juifs fêtant la solennité des Tabernacles. Et l’un des deux dit à son compagnon : Crois-tu que Dieu ait pour agréable le culte de ce peuple? Et ils marchaient dans la ville, tout absorbés dans cette pensée, quand ils se trouvèrent devant un Juif lévite qui leur était connu, l’homme le plus considéré de la ville, nommé Am- ran, assis sur le seuil de sa boutique, et entouré d'un cerele de Juifs; il tenait à la main un livre dans lequel il lisait. Les moi- nes s’arrêtèrent pour faire, comme d'habitude, leurs achats; mais Amran leur dit: Aujourd'hui aucun de nous ne vend ni n’achète; vous reviendrez demain.

Mais les moines répliquèrent : Nous voulons connaître ce que contient ce livre que tu lis, pour savoir si le culte que vous rendez en ce jour au Seigneur trouve grace devant lui.

Eh! dit le Juif, pourquoi Dieu le repousserait-11? Ce livre, c'est la Loi, c'est la parole révélée par Dieu lui-même à Moïse, et que nous avons toujours observée jusqu'aujourd'hui. Et c'est par Moïse que nous avons appris à l’adorer; aussi pourquoi n’agréerait-il pas un culte qu'il nous donné lui-même? Et, si vous voulez, apprenez que le passage que je lisais, c'est celui-

(1) L'auteur a voulu établir un synchronisme, et n’a pas réussi. En effet, l’é- vénement s’est passé avant 622, comme on verra, date de la mort du patriarche d'Alexandrie Andronikos (v. Evetts, History of the Palriarchs, p. 487, dans Pa- trol. Or.). Or, en faisant partir, suivant l'usage, l'ère des Martyrs de l'avènement de Dioclétien, la date de l’auteur serait 631 de J.-C., date qui ne concorde pas non plus d’ailleurs que 622, avec le règne des princes cités.

(2) Peut-être Sotérikos.

909 REVUE DE L'ORIENT CHRÉTIEN.

Dieu dit: Faisons l'homme à notre image el ressem- blance.

Tu dis bien, c'est Dieu qui vous a donné cette loi pour qu'elle vous serve de religion; mais vous lisez, et vous ne comprenez pas ce que vous lisez; vous apprenez, et vous n'ob- servez pas ce que vous apprenez.

Quel est donc, dit Amran, le verset sacré que tu nous as vus jamais renier ou contredire?

C'est, par exemple, la parole de Dieu que di lisais à l’ins- tant : Faisons l’homine. Vous l'apprenez, et vous ne voulez pas la comprendre.

Amran allait répondre, mais Saürikos l'interrompit : Il ne faut pas que tu sois seul à parler contre nous deux, car les tiens pourraient dire : Vous deux, vous n’entendez que l’argu- ment d'un seul, et vous êtes deux à attaquer.

Qu'importe, ditle Juif, je vous défie, vous, avec tous les frères de votre couvent, et l'évêque votre chef, de nous tenir tête avec les armes de nos livres sacrés.

Et si, par les arguments tirés de vos livres, nous te ré- duisons au silence, tu abjureras ta loi devant tous ceux de ta race, et tu te feras chrétien?

Point, dit Amran, mais établissons des témoins. Si tu me confonds par la lettre de notre livre, je deviens chrétien, avec toute cette ville; mais si je te bats, c'est toi qui te fais juif, et tous les moines de ton monastère.

Et, sur l'heure, ils choisirent leurs témoins. Alors le Juif de- manda qu'on lui dit une parole des livres saints sur laquelle on püût l’attaquer, en ajoutant qu'il y répondrait. Mais Satiri- kos lui posa cette question : Que penses-tu du Verbe éternel de Dieu, créateur de toutes choses avec le Père, et qui s'appelle Jésus-Christ?

Je ne sais pas quel est ce Verbe de Dieu dont tu fais une . personne; je sais seulement que Dieu est unique, créateur sans Verbe pour l'aider, et sans prendre conseil de quiconque.

Pourtant, dit le moine, ne lisais-tu pas à l'instant que Dieu a dit : Créons l’homme? Si Dieu dit Créons, c'est assu- rément qu'il prend conseil de son Verbe. Ne va pas dire qu'il prend conseil des Anges; l'Écriture, dans ce cas, l'aurait fait sa- voir; puis, les anges n'étaient pas dignes de tant de gloire,

HISTOIRE DE LA CONVERSION DES JUIFS. 303

étant créés; car David dit : Π| a créé les Anges esprüts el ser- vileurs de feu brülant (1).

Le Juif demande quel verset de la Bible autorise à penser que, dans cette circonstance, le Créateur s'est entendu avec son Verbe; le moine alors lui répond :

-- Vous autres, vous lisez, et vous reniez Ce que vous lisez. N'as-tu pas entendu David : C’es{ La parole de Dieu el sa jus- lice qui ont créé les cieux; et encore : Tu as créé loule chose avec Justice (2)?

Mais Amrarf demande l’on voit que le Verbe et la Justice de Dieu, c'est Jésus-Christ. Alors Satirikos lui explique toutes les prophéties relatives au Verbe divin; l'annonce de Jérémie : En ce temps-là, j'enverrai vers eux mon Verbe, el je pla- cerai ma loi dans leurs cœurs (3); la prophétie d'Isaïe : Ma loi viendra dans Sion, et le Verbe du Seigneur dans Jérusalem, et il régnera sur un grand nombre de peuples (4). Sur les instances de son adversaire, qui commence à se laisser gagner, Satirikos accumule les témoignages, et juge le moment opportun pour lui dire :

Quelqu'un de ta race affirmé que 16 Verbe de Dieu est Jésus-Christ : convertis-toi à son témoignage. C'est Jean : Aw commencement était le Verbe et le Verbe s’est fait chair (5).

Mais Amran s'étonne que le Père, étant incréé et non en- sendré, puisse engendrer (6). Satirikos lui présente la géné- ration du Fils par le Père comme l'émission de la voix par l'homme.

La foi chrétienne fait du chemin dans l'âme de Amran; il adhère à l'existence du Verbe Messie, et demande à présent qu'on lui prouve son humanité, et sa naissance de la Vierge Marie. L'apologiste, ici, n’a pas de peine à lui fournir tous les témoignages des prophètes annonçant la venue et la vie ter- restre du Sauveur; et le Juif, déjà conquis, ne fait plus que de

1) C’est ainsi que la Bible arabe, à laquelle se fie l Queue traduit Ps. οἷν, 4.

2) Ps. LxxxIx, 13 sqq.

3) Jér., XXXI, 33.

4A)n]s., 11, 3.

9) Jean, 1.

6) Toute la réponse a été omise dans le 205; le récit reprend à la réponse de la question suivante. La suite des idées est, de ce fait, fort compromise dans ce ms.

904 REVUE DE L'ORIENT CHRÉTIEN.

pieuses objections : il s'étonne que les hommes aient pu sup- porter l'éclat de sa gloire, quand Moïse tomba la face contre terre, pour n'avoir qu'entrevu la majesté divine, et que Marie ait pu porter dans son sein la divinité, qui est un feu brülant. Le moine, lui ayant apporté des raisons fort convenables, entre autres que le Buisson de Moïse, symbole de la Vierge, brülait sans se consumer, s'applique à présent à lui démontrer que les prophètes ont annoncé l'adoration des Mages. Isaïe n'a-t-il pas dit : Avant que l'enfant sache crier : Mon père, on portera devant lui les richesses de Damas et de Samarie (1)? Et le Psalmiste : Les rois de Tharsis et des îles lui apporteront des présents ; et, plus loin : viendra, el on lui donnera de l'or de l'Arabie, οἱ on fera des vœux pour lui chaque jour (2).

Le Juif prétend que David n’a eu en vue que Salomon, et c'est son fils qu'il célèbre; mais le moine lui montre que le contexte est bien la glorification de Dieu. Puis il raconte l'ar- rivée des Mages à Jérusalem, et la prophétie de Michée : Μὲ loi, Bethléhem, et l’entrevue avec Hérode, et l’adoration des Mages, et la fuite en Égypte.

Mais la fuite en Égypte heurte les idées juives de Amran sur la divinité : Le potier, dit-il, a-t-il à craindre l'argile, et le maître a-t-1l peur de l’esclave? “"

Non pas, dit le moine, mais l'Égypte n'avait jamais eu de prophètes; elle était le peuple le plus éloigné de la connais- sance du vrai Dieu, et le Sauveur l'a visitée pour la sanctifier et la convertir. Dieu Sabaoth, dit Isaïe, descendil en la terre d'Égypte sur un nuage léger, et ce nuage, c'est Marie toute pure, el les idoles devant sa face se dissiperont (3). Et plus loin : En ce jour-là, Jéhovah aura un autel au milieu de la terre d'Égypte (4). En effet, l'Égypte adore Dieu à présent, et elle mérite cette parole : Bénie soit l'Égypie, mon peuple (5).

En entendant toutes ces preuves, Amran était fort troublé. Ce sont là, dit-il, des choses admirables; pourtant, notre livre n’appelle pas le Verbe fils de Dieu; fais-moi savoir comment

Îs., Var, 4.

TO n Ἤν 4 4 Ἐν =

HISTOIRE DE LA CONVERSION DES JUIFS. 905

vous justifiez ce nom qu'on lui donne, pour que, moi aussi, je puisse être chrétien, comme toi. »

Le moine commence alors par établir que le Verbe est éter- nel. En effet, comme créateur, il prononcé ce mot : Croissez el multiplie:, qui est un commandement dont l'effet ne doit pas cesser; et il n'appartient qu'à Dieu éternel de faire des commandements perpétuels. Puis il récite tout le début de l’é- vangile de saint Jean, l'histoire du Verbe, fils de Dieu, se trouve résumée; puis, le récit du baptème de Jésus, et de sa Transfiguration, apparait le témoignage même du Père : Celui-ci est mon Fils bien-aimé. Comment le juif peut-il re- fuser d'adhérer à la Transfiguration, puisque Jésus pris soin de s’adjoindre, comme témoins irrévocables, les deux représen- tants de l’ancienne loi, Moïse et Élie? Enfin Satirikos, qui sait bien comment se manient les àmes, dit à Amran, qu'il voit tout ébranlé :

« Il me reste à te donner le témoignage qui est dans la loi, mais Je crains que tu ne commettes le péché de nier ce qui est l'évidence.

Comment, s'écria Amran, pourrais-Je nier la preuve tirée de l'Écriture, en face des témoins placés devant moi?

Écoute alors ce verset du Psalmiste : Dieu dit : Tues mon fils, el aujourd'hui je l'ai engendré (1). Et pour bien appuyer la vérité de cette parole, David ajoute : Demande, el je te donnerai les nations pour hérilage, el pour domaine les extrémités de la terre (2). Or, tout cela s’est accompli : Quelle terre, en ce siècle, ne croit pas à Notre-Seieneur? Son nom est honoré dans tout l'empire de Constantinople, dans l'Iraq, dans tout l'Orient, dans les Iles et en Espagne (3). Et puis, quand nous lisons : le Christ est Fils de Dieu, nous ne voyons dans cette expression qu'une sorte de figure. Dieu emploie le langage des hommes : les trois anges envoyés vers Abraham savaient parfaitement toutes choses, mais, s'exprimant comme des

ΠΡ Στ, ἋΣ (2) 10., 8.

2 (3) Sos t, pet: Les Iles, c’est peut-être Alger. A ce moment, l'Afrique du Nord était sous la domination byzantine, et la religion chrétienne y avait été importée par les conquérants Vandales, ORIENT CHRÉTIEN. 20

900 REVUE DE L'ORIENT CHRÉTIEN.

hommes, ils demandent, comme s'ils l'ignoraient : est Sara (1)? De même, en tout, Dieu se sert d'expressions hu- maines. » :

Amran s'étonne encore que Jésus-Christ se soit fait baptiser; mais on lui réplique que le Maitre a voulu se donner en exem- ple, et nous ressembler en tout, sauf par le péché. Et Satirikos lui fait un tableau de la vie de Jésus; sa prédication, ses mi- racles, sa passion et sa mort. Et quand 11] terminé, et qu'il contre Amran montré que la divinité n’a pas répugné à la mort dans les tourments et l'opprobre, il £ite à son adversaire les prophéties qui visent les Juifs; il lui parle du jugement dernier, et l'engage à se convertir.

Amran, en vrai docteur, ne se laisse pas gagner par la seule éloquence, et il oppose encore de nouvelles difficultés. Cette fois, il lui faut des preuves de la Trinité, et Satirikos lui expose les passages de l'Ancien Testament apparait la trace de la Tri- nité, et il lui illustre le mystère par des comparaisons. Le soleil, ses rayons lumineux, et sa chaleur, ne font qu'un soleil : ainsi Dieu, l'éternel soleil; un arbre dont le tronc se divise en _trois ne forme qu'un seul arbre: ainsi Dieu, l'arbre de vie. Alors Amran s'écria :

« Je dis devant tous que je le crois fermement : il n’y pas de religion, en dehors de la religion des chrétiens, qui soit ᾿ agréée de Dieu. Nous et nos pères, nous avions un sceau sur le cœur et un bandeau sur les yeux : nous ne comprenions point, et nous étions aveuglés. » Puis, s'adressant au moine : « Je te demande, Père, que tu me pardonnes ma folie, et je veux que tu me baptises, moi et toute ma tribu, pour que nos péchés nous soient remis. »

Le moine alors l’invita à l'accompagner chez l'Évêque, et Amran, s'adressant à la foule, cria : « Que ceux qui veulent de- venir chrétiens me suivent chez l'Évèque, et si l’un de vous refuse, son péché demeurera contre lui. »

Et à l'instant, tous s’écrièrent, du plus grand au plus petit, qu'ils voulaient se convertir. Et vingt-deux hommes, des prin- cipaux de la ville, se levèrent, et suivirent Amran et les moines au couvent. Ils apprirent aux frères leur histoire, et leur in-

(1) Gen., xvin, 9.

HISTOIRE DE LA CONVERSION DES JUIFX. 307

tention d'aller trouver l'Évêque pour être baptisés. Les frères se réjouirent et glorifièrent Dieu, et le lendemain les vingt-deux Juifs, et Amran à leur tête, sellèrent leurs montures et allèrent en compagnie des moines à la ville de Taràbia, se trouvait l'évêque de Tome, et demandèrent à saluer Anba Yasib, évêque de Tomei et Achmoun. Ils le trouvèrent dans l'église catholi- que, qui est à l'orient de la ville, un peuple nombreux cé- lébraïit le second jour de la fête de la Croix, car c'était le 18 du mois de Tout.

Satirikos et André s'avancèrent vers l'évêque, et après lavoir salué, lui apprirent l'histoire des Juifs; il en fut très joyeux et ordonna de faire descendre les convertis dans sa maison jus- qu'à la fin des cérémonies de la Croix, en attendant de les exa- miner et de les baptiser. Les moines restèrent auprès de l'évé- que pour entendre la messe et recevoir la communion. Ils étaient onze; eten prêtant l'oreille aux paroles de la liturgie, ils furent dans l'admiration de voir qu'elles s'accordaient avec les évé- nements dont ils s'entrenaient depuis deux jours. Et ils se di- saient entre eux : « Cette aventure est de celles qui plaisent à Dieu : écoutons les paroles du livre qu'on lit, on dirait que Dieu veut faire allusion à ce qui est arrivé. » En effet, au mo- ment de l’Épitre, ils entendirent le lecteur qui disait : Z/ est une sagesse que nous préchons, Sagesse qui n'est pas celle de ce siècle... Nul des princes de ce siècle ne l'a connue, car S'ils l'avaient connue, ils auraient pas crucifié le Seigneur de gloire (1). Et dans les épitres catholiques, ils entendirent : Un temps élail vous n'éliez: pas le peuple de Dieu, ef vous êtes devenus le peuple de Dieu; vous néliez pas dignes d'obtenir miséricorde, el vous voilà qui avez oblenu miséricorde (2). Et dans les Actes des Apôtres : Paul leur dit : Avez-vous recu le Saint-Esprit? Is répondirent : Nous ne connaissons pas le Saint-Esprit. Alors Paul les bajlisa, el leur imposa les mains, et le Saint-Esprit vint sur eux (3). Et dans l'Évan- gile : Qui ne porte pas sa croix, el me suit, n'est pas digne de moi (4).

(ATICON?, τς 078: ΟΡ ur, 10: (8) Act., xIx, 2.

(4) Matth., x, 98.

308 REVUE DE L'ORIENT CHRÉTIEN.

En entendant ces passages, les moines étaient dans l'émer- veillement, et ils glorifiaient Dieu; et, quand la messe fut dite, l'Évêque emmena les moines chez lui, et rompit le pain avec eux. Ils lui répétèrent la controverse qu'ils avaient soutenue contre Amran, et l'Évêque fut dans l'admiration. Il demanda qu'on apportät des feuilles blanches et de l'encre, et qu'on écrivit toute la discussion, depuis son premier mot jusqu'au dernier. Puis il donna l’ordre de faire manger les Juifs et de les lui amener [6 lendemain matin.

Le lendemain, le P. Évêque était à l’église, et toute la po- pulation y était rassemblée, avec les moines, le caïd de la ville et les principaux personnages, pour fêter le troisième jour de la Croix. Les Juifs, Amran en tête, furent amenés dans l’église. L'Évêque leur dit de s'asseoir, et, s'adressant à Amran, lui souhaita la bienvenue. Puis il lui demanda qui avait vaincu son adversaire, du moine ou de lui. Amran dit que la victoire était restée au moine.

« Veux-tu, dit l'Évéque, que je lise devant ce peuple la re- lation de votre controverse?

Je le veux, répondit Amran, pour fortifier mon esprit. » Et le P. Évêque lut la discussion en son entier; et le caïd et tout le peuple, en l'entendant, manifestaient par des cris en glori- fiant Dieu leur admiration; et tous, émerveillés de l'intelligence de Satirikos, s’avancaient vers lui pour qu'il les bénit.

« Pardonnez-moi, s’écria le moine, en les bénissant, mes pa- roles n'étaient pas pour la vaine gloire de la science, mais pour la conversion de ce peuple et le salut de ces âmes. »

À ce moment, les Juifs s'écrièrent qu'on leur donnàt le bap- tème. Mais Anba Yasib leur dit : « J'appréhende de vous bap- tiser, de peur que de retour dans vos demeures, vous ne ren- contriez la contradiction auprès de vosenfants et de vos femmes, et que le baptème que vous aurez reçu ne soit chez vous une cause de division et un objet de scandale. Aussi, retournez à vos logis, et faites part de ceci à vos frères : Qui veut être chrétien, qu'il se purifie et qu'il purifie sa maison, et jeûne sept jours du matin au soir, et au huitième, Je le recevraïi avec le caïd et les notables, je le baptiserai, et je lui donnerai la com- munion. »

Les Juifs s’en allèrent avec Joie excepté Amran, qui demeura

HISTOIRE DE LA CONVERSION DES JUIFS. 309

auprès de Satirikos pour se fortifier dans la foi, et il exposa à l'Évêque ses dernières difficultés.

Amran ne s'explique pas que l'homme soit fait à l'image et à la ressemblance de Dieu; et l'Évêque répond en énumérant soixante-douze attributs humains qu'il retrouve en Dieu, en s'appuyant sur tous les passages de la Bible l’on dit que Dieu voit, entend, sent, parle, se tait, rit, pleure, étend la main, con- nait, feint d'ignorer, etc. (1). Et l'Évêque finit par tranquilliser pleinement l’ancien docteur lévite.

Quand arriva le 25° jour de Tout, l’évêque Anba Yasib, le caïd et beaucoup de prêtres se rendirent au couvent de Saint- Antoine; et les moines sortirent en procession à la rencontre de l'Évêque, avec les croix et les encensoirs. L'Évêque demanda des nouvelles des nouveaux convertis. Les moines lui assurèrent qu'ils avaient accompli tout ce qu'il leur avait prescrit, et qu'ils avaient jeüné avec leurs femmes, leurs enfants, leurs parents et leurs serviteurs pendant sept jours. Anba Yasib en fut rempli de joie, et demanda qu'on lui montrât un édifice 1] baptiserait tout ce monde. Les moines lui firent voir alors la salle destinée à leur immersion rituelile qu'ils pratiquaient le 11 de Tôbi. C'était une construction en pierres, blanchie à la chaux; l'Évêque fut très satisfait, et ordonna qu'on remplit d’eau la piscine.

Quand tous les préparatifs furent terminés, et c'était le 27 de Tout, il ordonna à Amran le lévite d'aller à Tomei chercher les Juifs, et de proclamer dans la ville : Qui veut être chrétien, qu'il aille vers notre Père l'Évêque; et qui n'ira pas, son péché demeurera contre lui.

Amran obéit; et aussitôt que les Juifs l’entendirent, ils se hâtèrent à l’envi vers le monastère, du plus grand au plus petit. Quant à Amran, il prit sa femme, ses enfants, avec les serviteurs, les esclaves et les servantes de sa maison, au nombre de quarante-six personnes, et parut au milieu du peuple, se dirigeant vers le couvent de Saint-Antoine de Qolzoum.

L'Évèque, en voyant la foule des Juifs réunie dans la grande

(1) Ce naïf travail ne mérite pas d'être rapporté. C’est en effet un hors-d’œuvre considérable, qui vient ici s’intercaler de force, en forme de dissertation en soixante-douze petits chapitres. Son intérêt pour la controverse est des plus médiocres.

310 REVUE DE L'ORIENT CHRÉTIEN.

salle du baptême, fut au comble de la joie. Il se mit à leur prêcher d'après les Écritures, et, à fin du sermon, il bénit . l’eau suivant les rites du baptême.

Au moment l'Évêque versait les saintes huiles sur le Jourdain dont la piscine est le symbole, au moment il dessinait sur l'eau, en la touchant de ses doigts, le signe de la Croix, on vit un très grand miracle. Sur les murs de l’édi- fice était peinte la figure de Jean-Baptiste baptisant Notre-Sei- gneur. Et chacun put voir à ce moment Jean-Baptiste remuant la main pour faire de ses doigts, sur l’eau, le signe de la croix. Alors le peuple, transporté, cria d’une seule voix : « Gloire au Père, Dieu d'Israël, au Fils, et à l’Esprit-Saint, dans tous les siècies des siècles, amen! »

En vérité, en ce jour éclata la force et la vérité de la religion du Christ. L'évêque dit ensuite aux hommes de commencer à descendre dans le Jourdain, et de s’y plonger trois fois au nom du Père, et du Fils, et du Saint-Esprit; et aux femmes et aux enfants de descendre à leur suite. |

Et Amran le lévite fut appelé le nouveau Paul (1). L'Évêque célébra la messe et fit communier la foule au corps et au sang de Jésus-Christ. Ainsi se termina le baptême des Juifs de la ville de Tomei, au nombre de 375 personnes. Et il y eut dans la ville de grandes réjouissances en leur honneur; les nouveaux chrétiens demandèrent à l'Évêque et à ceux qui l'avaient accompagné de faire avec eux leur entrée dans la ville; et l'Évôque le leur accorda, et demeura sept jours parmi eux; et 1] célébrait la messe, et donnait aux chrétiens la communion de sa main.

Anba Yasib apprit à connaitre Paul le lévite, et, le voyant homme de foi et d'expérience, il l’établit prêtre. Puis l'Évêque et le caïd, et tous ceux qui les accompagnaient, s'en retournè- rent en louant la Providence de Dieu.

Quelque temps après arriva au P. Évêque une lettre d'Alexan- drie l'invitant à se rendre en mêm2 temps que la foule des Évêques aux funérailles du P. Patriarche An ba Andronikos (2),

(1) Cf.ms. arabe, Paris 172. Un Juif, Aboul-Ala, surnomn l'Urfèvre, écrit ses difficultés sur le christianisme au docteur Mostafa Aboul-Fakhr, converti comme autrefois Saul, qui fut appelé Paul. Paul était le patron des convertis.

(2) 616-622, d'après Evelts, op. cit.

HISTOIRE DE LA CONVERSION DES JUIFS. 311

et à participer à l'élection de son successeur. Anba Yasib prit avec lui l'écrit de la controverse, emmena Paul le lévite, et se rendit à Alexandrie; et par la volonté du Seigneur, ils firent asseoir le P. Anba Beniamin (1) sur le siège patriarcal. Etil y eut dans toutes les églises de grandes réjouissances en son honneur.

Alors, en présence de la foule des Évêèques et de notre Père Beniamin, Anba Yasib sortit l'écrit de la controverse et le lut devant tous. Puis 11 leur montra le nouveau Paul, en leur disant : « C’est celui-ci qui est l'adversaire du moine Satirikos, c'est le grand docteur lévite qui s’est fait baptiser, lui et tous les Juifs de Tomei, au nombre de 970.»

Quand le’P. Patriarche entendit tout cela, et connut [6 miracle qui s'était vu lors du baptême, il fut confondu d’admi- ration; et chacun glorifia Dieu, en admirant la science du moine, et celle du Juif son adversaire. Et on fit le compte des témoignages de l'Écriture que Satirikos avaitinvoqués au cours de sa discussion, et on trouva que leur nombre s'élevait à 230. Alorsle P. Beniamin prit la parole :

« En vérité je vous le dis, à Pères purs, Dieu, voyant cette foule de Juifs dans cette ville, se dressant en tout temps contre l'Église, nous suscité cette controverse, pour l'imposer aux infidèles et aux hérétiques, et pour la proposer aussi aux Chrétiens peu instruits de leur religion, pour qu'elle les dirige dans le droit chemin de la vérité. Aussi, mes amis, je veux que cet écrit soit lu dans toute église trois fois l’an::

« Le jour de la fête de la Croix, le IS de Tout, jour de la discussion ;

« Le Jour de la fête de Noël, car elle démontre la nais- sance de Jésus de Marie toute pure ;

« Le jour de la fête de Pâques, car elle démontre et éclaire la résurrection de Jésus-Christ. »

Lorsque les Évêques eurent entendu ces paroles du Pa- triarche, ils en eurent une grande joie, et chacun d'eux prit une copie de la controverse, et s'en retourna à sa ville épis- copale.

Plusieurs années après, Anba Yasib mourut. À sa place fut élu

(1) 622-661, d’après Evestts.

312 REVUE DE L'ORIENT CHRÉTIEN.

Mouna, qui mourut après 1 an et 6 mois; et après lui, on élut un autre Père, qui siégea 3 ans. Alors le Patriarche, le P. Ben- iamin, se souvint de Paul le Lévite; et le manda auprès de lui. Il le nomma évêque; et il futun pasteur vertueux, et capable, par sa science, de préserver son troupeau des attaques des Juifs.

En ces jours, les Musulmans descendirent dans la terre d'Égypte (1); et Paul eut à retenir dans la religion de Jésus- Christ et à fortifier dans la foi un grand nombre de gens. Puis il mourut après une belle vieillesse; et le Maître le reçut, et il entra dans son royaume éternel, par la grâce de Dieu, qui fait miséricorde, et de Jésus-Christ, qui a tant aimé les hommes, et qui nous ressuscitera, notre Sauveur.

Telle est l'histoire de la conversion des Juifs de Tomei. Le récit porte de grandes marques d'authenticité : c’est l'appareil historique dont 1] S’entoure, et, dans le plan de la discussion, une certaine irrégularité, un cahotage, qui est peut-être la trace qu'y imprimée la réalité. Il porte aussi quelques carac- tères de la fiction, par bien des détails, détails de roman, comme celui de l'établissement des témoins, celui de l'accord mystérieux de la liturgie et de l'événement, et celui du miracle, qui paraît être bien un miracle d'imagination.

D'autre part, il ne faut pas infirmer le récit par le fait qu'on y trouve quelques mots qui effleurent l’anachronisme, comme le mot caid, et la mention de l'Andalousie, à l'époque de l'Hégire, c'est-à-dire à un moment un chrétien d'Égypte devait avoir une bien vague idée de ces choses, ou même nulle idée. En effet, cette histoire est écrite en arabe, c'est-à- dire après la conquête mulsumane, longtemps après l'événe- ment, à une époque l'institution des caïds fonctionnait, et l’Andalousie commençait à devenir célèbre. En somme, voici à quoi il est permis d’incliner : des moines du couvent de Saint-Antoine ont réellement converti un influent Israélite, et sa conversion amené celle d'un grand nombre de ses core-

(1) C’est la première conquête des Arabes, sous le calife Omar. !

HISTOIRE DE LA. CONVERSION DES JUIFS. 313

ligionnaires, dans la ville de Tomei; ces moines auraientmis par écrit, en copte ou en grec, le plus méthodiquement possible, les principaux points de la controverse qui aurait amené la conversion. Plusieurs copies s'en trouvaient en Égypte ; un homme intelligent, après le commencement du vai siècle, eu connaissance de cet écrit, et ilacomposé, en arabe, cetouvrage, pour placer dans son cadre, et situer dans l'histoire, à l'aide de traditions, cette discussion trop théorique; en même temps, comme il était aussi un bon théologien, et un homme avisé, ilaura profité de l’occasion pour faire passer un petit écrit delui, sur les attributs humains qui se retrouvent en Dieu, en 72 chapitres, dont il était, en tant qu'auteur, fort satisfait, et il l’a logé dans le cours du récit : de cette sorte nous tien- drions la relation de ce curieux événement ; et cette relation paru bien instructive et intéressante, puisqu'il en existe encore trois copies, d'âges-bien différents, et une analyse que voilà-

Paris. Robert GRIVEAL,

archiviste paléographe.

LITTÉRATURE ÉTHIOPIENNE PSEUDO-CLÉMENTINE

TEXTE ET TRADUCTION DU MYSTÈRE DU JUGEMENT DES PÉCHEURS.

(Fin) (D.

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(1) Voy. 1907 et 1908. (2) Ms. ἡ“ : --- (3) Ms. nra&p - (4) Ms. g°hetrn : (5) Ms. nanan : (6) Ms. ὥβαν : (7) Ms.. anim τ (8) Ms. ha.Ge :

(9) Ms. 098 : (10) Ms. eac% : (11) Ms. aan? : (12) Ms. hañoz :

(13) Ms. A#9%an : (14) Ms. Ἀλλ νὴ : (15) Ms. x cor : (16) Ms. héñn :

LITTÉRATURE ÉTHIOPIENNE PSEUDO-CLÉMENTINE. 319

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910 REVUE DE L'ORIENT CHRÉTIEN.

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LITTÉRATURE ÉTHIOPIENNE PSEUDO-CLÉMENTINE. 317

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318 REVUE DE L'ORIENT CHRÉTIEN.

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1) Ms. 774.7 3 (2) Ms. δΎΝ : (5) Ms. ñô4 : (6) Ms. secte tr :

(3) Ms. n9%6:7 : (4) Ms. φυλῇ : (7) Ms. ga. c :

TRADUCTION

(Fol. 156 τὸ ἃ, suite) Ceci donc, comprends-(le) et sache-(le). De même que, dans l'espoir de devenir Dieu, (les premiers parents) ont erré, de même ils ont atteint leur désir de devenir Dieu, par la participation à la chair et au sang (de notre Sauveur. Je me souviens, Seigneur, de ta mi- séricorde. Réveille en moi la parole de tes commandements, afin que je te glorifie, dans la mesure de ma force, tandis que je suis en vie. Mon âme te rendra grâces. Mon intelligence te bénira. Mes os crieront (fol. 156 b) vers toi dans le tombeau, car (c’est) toi (qui) es mon aide, (c’est) toi encore qui) m'as fait sortir du sein (de la terre), (c'est) toi aussi (qui) me feras retourner dans la terre, et (c'est) toi (qui) me feras sortir du sein de la terre. Mon âme sera dans ta main et tu recommenceras à me faconner, toi-même, (qui) m'as créé. Enseigne-moi les paroles dans lesquelles je (doive) te glorifier. Ouvre-moi les oreilles, afin que je t'écoute. Ne m'en- lève pas au milieu de mes années, afin que je te glorifie sans discontinua- tion. Mais, jusqu'à ce que j'aie vieilli et blanchi, ne m'abandonne pas, (à) mon Dieu, et (même) jusqu'à ce que j'aie raconté pour les générations futures ta justice, ta force, ta puissance (1), ce que tu as fait pour les an- ciennes générations. Ton œuvre est grande. Ta gloire est extrêmement merveilleuse. (Personne) ne la connait. Ton intelligence est très profonde. Il n’est pas possible de raconter ta grandeur.

Quant à David, lorsqu'il eut connu le chemin de ton salut, il dit : (fol. 156 à) : « Ton œuvre est merveilleuse; mon âme la connaît à fond. » Il

(1) M. à m. « ton bras ».

LITTÉRATURE ÉTINOPIENNE PSEUDO-CLÉMENTINE. 919 .

a dit encore : « Ce que j'ai fait en secret ne t'est pas caché ». Ceci, David l'a dit, sous le couvert (2) de son père, Adam, en pleurant, en implorant miséricorde, en demandant, en suppliant. « Est-ce que moi-même, Sei- gneur, j'ai été créé sans que tu m'aies créé, est-ce que moi-même je me suis créé, est-ce que moi-même j'ai fait ces os dans le ventre de ma mére, est-ce que moi-même je suis venu dans le monde sans que tu m'aies fait sortir (du sein de la terre)? Est-ce que toi-même, Seigneur, tu ne m'as pas fait mystérieusement (3), faconné de ta propre main, créé à ton image et façonné d’une facon merveilleuse? Quant à mon âme, elle connait cela à fond. Toi-même, Seigneur, tu m'as connu, avant de me créer. Quant à maintenant, à Seigneur, ne me néglige pas, car mes ennemis me feront tomber. Toi-même, tu connais ma faiblesse. Ne m'oublie pas, (pour m’aban- donner) à la corruption. (Fol. 156 b) Toi-mème, tu connais le moment je m'assieds, le moment je me lève (4) et toutes les pensées de mon cœur. Ta propre richesse me convient, car je suis ta boue. Ta propre elé- mence me convient, car je suis ta poussière. Ta propre vie me convient, car je suis ton limon., Ton œuvre est merveilleuse. Mon âme la connait à fond. (Elle sait) que tu ne m'as pas fait en vain, ni pour la corruption, (mais) pour la vie et pour le salut. En effet, je me souviens de toutes tes miséricordes, jusqu'à la première et jusqu'à la dernière. En effet, tu m'as fait justice et tu m'as vengé de l’Audacieux, qui m'a trompé et m'a fait des- cendre dans sa propre mort, par la malice de son œuvre, alors que moi- même, étant un enfant, je faisais l'œuvre d’un enfant. Si, d'autre part, toi- même, tu m'amènes à la vieillesse et tu m'instruis, je saurai et je croirai que (le Seigneur) aura pitié de moi, sera clément envers moi, (fol. 157 ἃ) ne jettera pas ma vie dans [6 limon et (dans) la poussière, mais ressusci- tera le pauvre de la terre et élèvera le misérable du limon. En effet, Lui- même sonde mon cœur et mes reins. Est-ce que tu m'as créé en vain? Est-ce que ce n'est pas à cause de nous que tu es descendu (sur la terre)? Alors que tu étais glorieux, tu t'es humilié. Alors que tu étais riche, tu t'es appauvri. Alors que tu étais porté sur les chars des Chérubins, tu as été porté sur le petit d’un âne. Alors que tu étais célébré par les Séraphins, tu as été loué par des enfants. Jusqu'à jamais les anges diront : « Hosanna, dans les lieux élevés, au Fils de David! » « Hosanna dans les lieux élevés » veut dire joie.

En effet, ses feuilles (4) sont brillantes. Elles ressemblent à la prière au- rifère. Quant à ses fruits, ce sont la justice. (Chaque fruit) rapporte des graines par milliers. (Fol. 157 b) Il a pitié des créatures. Il devient opprobre. Il la foi. Il produit des épines et pique par elles ceux qui pren nent ses fruits. Il prend la rosée du ciel par (son) tronc et (la) fait monter sur (son) sommet. En outre, ses fruits ont de la saveur (9), Leur saveur et

(1) M. à m. « par la parole ».

(2) M. à m. « dans le mystère ».

(3) M. à m. « tu cognovisti sessionem meam et resurrectionem meam ». Ps. CXXVIIT 2.

(4) Comparaison du Christ à un arbre.

(9) M. à m. «il a de la saveur dans ses fruits ».

320 REVUE DE L'ORIENT CHRÉTIEN.

leur odeur sont analogues à celles du miel. C’est pourquoi, les anges di- ront : « Joie, dans les lieux élevés, au Roï, au Fils de David ».

Quant à Abraham, notre père, il vit, le premier, le mystère du Fils, comme il revenait du massacre des rois d’Amalec. Lorsqu'il eut prié, il lui fut révélé, après (sa prière), le mystère caché de la Pâque, qui devait être accompli (par lui), alors que lui-même était le père des Lévites (et) le père des prêtres, puisque (ceux-ci) sont sortis de ses reins. Ce n’est pas par Abraham seulement que fut accompli ce mystère, afin qu'il le bénit, mais par les messagers (qu'il députa) à Melchisédec, afin qu’au nom de deux, de (fol. 157 a) trois (même) puisque l’Esprit-Saint s'appelle trois ils achevassent l’œuvre du mystère, qui sera accompli à la fin (des temps). En effet, tous les deux sont prophètes et tous les deux sont prêtres. Le premier prêtre, est celui qui n’est pas de la famille d'Abraham. Le der- nier prêtre est celui qui est formé des reins d'Abraham, c’est-à-dire le Lévite, le Père des Lévites, le Prêtre trin pour toujours, l'Esprit et le Verbe du Seigneur, qui est venu dans le monde, le Prince des prêtres, (l'être qui) s'est donné lui-même à cause de nous et pu guérir nos souf- frances, (l'être qui) par son propre sang racheté le monde et nous con- duits dans la vie, il n'y pas de maladie, (ni) de souffrance, (dans) le paradis du‘bonheurietideslatioe (EN Se CR ER Ἐπ AUTRE ce que l'œil n'a pas vu, (ce que) l'oreille n'a pas entendu, ce qu'il pré- paré pour ceux qui (fol. 157 b) l’aiment. Quant à Abraham, il donné la dime à Melchisédec, prêtre pour toujours. En effet, quant à ce mystère des prêtres et des rois, il pour but que les rois donnent des offrandes aux prêtres et que ceux-ci. à leur tour, demandent pardon pour les rois au Prince des prêtres véritable, notre foi, (à) Jésus, notre grâce, notre espé- rance, notre ornement, notre richesse, notre foi, notre force, notre fonde. ment, notre colonne, notre arrière et notre devant. Les rois et les souve- rains, par les aumônes, les prêtres pauvres, par les demandes, ont pour but de s'associer à la foi. De même que Melchisédec, prêtre pour toujours, béni Abraham, de même les prêtres bénissent les rois. En effet, Melchi- sédec, Abraham, le Christ, (successeur) de Melchisédec, c'est 16 troisième mystère (2).

Le Havre, 1S Juin 1908. Sylvain GREBAUT.

(1) Dans le ms. il y une ligne illisible.

(2) M. C. Bezold, après avoir lu le Wyslère du jugement des pécheurs, nous a fait les deux remarques suivantes, dont nous le remercions :

1°) ROC, 1907, p. 295. Au lieu de fav : ρθε. : aaAT: τ P84% x Lire δον : LOGE : wAOAT : PA τ Car (lEspril-Saint) reposera sur les saints. Cf. Dill- mann, Chrest. ælh., p.48, LA: à, τ ANT τ HE RU an: : LOGE :

2°) ROC, 1908, p: 984, συνῇ]; : OC : μυστήριον (?)

MÉLANGES

TRADUCTION

DE LA CHRONIQUE SYRIAQUE ANONYME, ÉDITÉE PAR SA BÉATITUDE ME RAHMANI

Patriarche des Syriens catholiques (Suite) (1)

Baltasar lui succéda et régna durant trois ans. Darius le Mède régna après lui durant un an. Tous les autres chroniqueurs disent que Darius régna durant onze ans.

Jéchonias épousa Galouth, fille d'Eliacim, et il engendra Salathiel à Ba- bylone. Salathiel épousa /{bath, fille de Helqana, et il engendra Zorobabel. Zorobabel épousa Melcath, fille d'Esdras le scribe, et il n’en eut pas d’en- fant à Babylone.

A cette époque qui est la trentième année de la captivité des Juifs. Cyrus, premier roi des Perses, régna durant trente ans. Il marcha contre Babylone, la prit, tua Darius, le roi Mède, s’empara de tout l'Orient et demeura à Babylone. Cyrus régna à Babylone au temps de Zorobabel; il prit pour femme Meschihath, sœur de Zorobabel, il la fit régner selon la cou- tume des Perses et il l’aima comme lui-même. Meschihath pria Cyrus son mari de renvoyer chez eux les fils d'Israël et Cyrus dit à Zorobabel : Prends tous tes compatriotes, monte à Jérusalem, bâtis la ville de tes pères et règne sur elle. Zorobabel emmena les Israélites de Babylone, ils étaient au nombre de cinquante mille, et il monta à Jérusalem.

De David jusqu'à la captivité de Babylone, il y eut cinq cent cinquante ans. Parce que Cyrus renvoya les fils d'Israël, selon la prophétie qui le concernait, Dieu dit par son prophète : J'ai pris par la main Cyrus mon

(1) Voy. 1907, p. 428 ; 1908, p. 90. ORIENT CHRÉTIEN.

322 REVUE DE L'ORIENT CHRÉTIEN.

serviteur (1), car la race de David fut renouvelée dans la sienne par le moyeñ de Meschihath l'Israëélite, sœur de Zorobabel, et il fut appelé l’oint (Meschiho) du Seigneur. Les Israélites quittèrent Babylone la seconde année de Cyrus et Zorobabel était leur chef, Bar Josédeg le grand prêtre l'apprit, ils bâtirent Jérusalem et jetèrent les fondements du temple.

A cette époque prophétisaient à Jérusalem Æabacuc, Aggée, Zacharie et Malachie; après eux il n’y eut plus jamais de prophète chez les Juifs. Le prophète Malachie avait une belle conduite dès sa jeunesse, tout le peuple l’honorait comme un saint et on le nomma Malachie (l'ange) à cause de sa conduite. Pour tout ce qu'il disait, un ange apparaissait le jour même et répétait ses paroles comme il les avait dites; il mourut jeune.

À cette époque le poète Théognis était célèbre et peu après vivait Pythagore le philosophe. La soixantième année de la captivité, la reine Mâgestà tua à la guerre Cyrus roi de Perse, et son fils Cambyse régna après lui durant huit ans. La soixante-cinquième année de la captivité, le roi Cambyse s’empara de l'Égypte et l'empire égyptien fut détruit. La soixante- huitième année de la captivité mourut le roi Cambyse et un autre Darius régna durant trente-six ans. En sa deuxième année se terminèrent [p. 51] les soixante-dix ans de captivité. Le prophète Zacharie en témoigne lors- qu'il dit : Seigneur (toult-)puissant, jusqu'à quand seras-lu sans pitié pour Jérusalem? Car voilà soixante-dix ans que tu es irrilé contre nous (?).

Le temple fut terminé en quarante-six ans et, après sa reconstruction, les prêtres recherchèrent les Livres (saints). Æsdras le scribe descendit dans cette citerne (où Simon les avait cachés, supra, p. 98) et trouva l’en- censoir plein de feu, et la fumée sortait de la citerne; mais les livres avaient péri à cause de l'humidité du lieu. Esdras prit l’'ehcensoir avec de la pous- sière des livres, sortit de la citerne et mit par trois fois de cette poussière dans sa bouche. Aussitôt Dieu fit reposer sur lui l'esprit de prophétie, il renouvela tous les livres des prophètes et de l'Ancien (Testament), et Jésus bar Josédeq, le grand prêtre, qui était monté avec eux de Babylone, les recut. Et le prophète Zacharie dit au (grand) prêtre Jésus : Ceux-là sont deux fils d'abondance Jésus, fils de Josédeq le prêtre, et Zorobabel le chef qui se tiennent devant le Seigneur de toute la terre (3). Le prêtre Jésus mourut et Simon son fils fut grand prêtre après lui.

A cette époque étaient célèbres Pentägnôs et Solon, philosophes frères. Xeræés, fils de Darius, régna durant vingt ans. La troisième année de son règne finit le cinquième millénaire. À cette époque étaient célèbres Di- gôrôs le philosophe et Socrale. À la même époque, lorsque le temple fut terminé, au bout de quarante-six ans, comme il est écrit dans le saint évangile, les Israélites firent une Pâque au Seigneur.

Comme il est écrit dans le livre du pacte du Seigneur avec Moise son serviteur, les fils d'Israël ont fêté trois Pâques durant tout leur temps : la première lorsqu'ils montèrent d'Égypte à l’époque du prophète Moïse: la

(1) Isaïe, xLv, 1. (2) Zac Me: (3) Zacharie, 1v, 14.

MÉLANGES. 323

seconde durant les jours de Josias, roi juste; et enfin cette troisième lors qu'ils montèrent de Babylone avec Zorobabel pour chef et Jésus pour (grand) prêtre; puis la Pâque leur fut enlevée pour toujours et ils ne la firent plus. partir de cette époque, les généalogies ont disparu de chez les écrivains hébreux et grecs et ils n’ont pu montrer d’où les patriarches avaient pris leurs femmes. Saint Æphrem montra clairement (1) que Zoro- babel engendra Abiud de Malcath, fille d'Esdras le scribe, lorsque les Israélites montèrent de Babylone.

Artaxerxès Longue-Maïin régna durant quarante-sept ans. Alors £liäsib, fils de Joachim, était prêtre à Jérusalem. Après lui (vint) /6iada'.

A cette époque était célèbre le médecin Jippocrate. La trente-deuxième année d’Artaxerxès, Jérusalem fut terminée. Après Joiada‘, Jean, son fils, fut grand prêtre. Alors Abiôd prit pour femme Zakith, fille de Jésus, fils de Josédeq, et il engendra Eliacim.

Jusqu'ici nous avons puisé dans les livres des saints prophètes, désor- mais [p. 52] nous puiserons dans les livres des Wacchabées qui ont écrit l’histoire jusqu'au temps des Romains. Un autre Artaxerxès régna durant quarante ans. cette époque eut lieu l’histoire d’Æsther, de Mardochée et d’Aman. Cette Esther rendit service aux Juifs et les sauva de la perfidie d’'Aman. Aman demanda à Artaxerxès de faire mettre les Juifs à mort. Esther jeüna durant trois jours et trois nuits, elle implora Dieu et les Juifs furent sauvés.

A cette époque, Æliacim prit pour femme /alfath, fille de Hatsôr, et il engendra Zôdoq. A cette époque on trouva chez les Grecs l'usage des 24 lettres, jusque-là 19 seulement étaient en usage. Il y eut alors un trem- blement de terre violent. Platon le philosophe était célèbre et Artareræes Ochos (régna) durant vingt-sept ans. cette époque Aristote, âgé de onze ans, écoutait (les lecons de) Platon. La cinquième année de cet Ar- taxerxès, Philippe, père d'Alexandre le Grand, régna sur la Macédoine du- rant dix-sept ans. La huitième année du règne de Philippe naquit Alexan- dre ; alors mourut Platon le philosophe et Alexandre le Grand fut instruit par le philosophe Aristote.

A cette époque Zaddés était grand prêtre à Jérusalem et Andromacôs était prêtre. Alors Zôdoq prit pour femme Qohelath, fille de Ounib, et il engen- dra Akin. Darius, fils d’Arsam, régna durant six ans. La première année de Darius, Alexandre le Grand régna sur la Macédoine. A cette époque, Akin prit pour femme /asnôth, fille de Thôl, et engendra Æliud. Alexandre, fils de Philippe, roi grec, régna durant douze ans et sept mois; il régna

sur toute la terre et ravagea beaucoup de pays. Il prit aussi les Juifs, ils le recurent, il monta à Jérusalem et fit des sacrifices à Dieu. Il honora Andrômacôs, prêtre des Juifs.

La sixième année de son règne, il combattit contre Darius roi de Perse, il le vainquit et le tua. Alors finit le royaume des Perses et des Babylo- niens qui avait duré deux cent trente ans. La septième année de son règne,

(1) Il s’agit sans doute encore de la Caverne des Trésors qui est souvent attri- buée à 5. Ephrem. Cet ouvrage fourni toutes les généalogies.

324 REVUE DE L'ORIENT CHRÉTIEN.

il bâtit Alexandrie la grande à laquelle il donna son nom. Il vécut trente- deux ans et mourut à Babylone, empoisonné par l’un de ses grands.

Le reste de ses exploits, les pays qu'il subjugua et les peuples nombreux qu'il vit, tout cela est écrit dans le livre consacré à son histoire.

Depuis Adam jusqu'à Alexandre il y 5170 ans d’après les chroniqueurs et 3500 d’après les Hébreux (1).

[P. 53] À cette époque, le philosophe Aristote réunit toutes les branches dispersées de la science et en fit un grand ensemble bourré d’érudition et de vigoureuses doctrines pour séparer ainsi la vérité de l'erreur; sans avoir lu le livre de logique qu'il fit, on ne peut pas saisir la science des livres, l'intelligence des doctrines, ni la force qui est dans les saints Livres sur lesquels repose l'espérance des chrétiens, à moins qu'il ne s'agisse d'un homme auquel aurait été donnée, à cause de l'excellence de sa conduite, la grâce du Saint-Esprit qui connait tout.

Alors était célèbre le prêtre Simon, fils d’Onias; δ μὰ épousa Sabastin, fille de Hesôl, et enfanta Eléazar. Séleucus Nicator, l’un des quatre servi- teurs d’ More le Grand, régna en Syrie après la mort d'Alexandre, il bâtit de nombreuses villes et, avant tout, il bâtit Édesse en Syrie.

De la construction d'Édesse.

Édesse durant les désastres des Israélites, à la montée et à la descente des Perses, fut sujette à de nombreux désastres et ravages ; elle fut détruite et renversée, ses habitants périrent, elle resta déserte pendant longtemps, nous ne pouvons dire au juste combien de temps, elle fut inhabitée jusqu’à l’époque de ce Séleucus, roi sage, l’un des quatre capitaines d’A- lexandre, celui qui régna après lui. Il passa par cette ville, la vit et elle lui plut beaucoup, il rassembla de nombreux ouvriers et tout ce qu'il faut pour construire une ville et nourrir ses habitants. Il commenca à construire un mur solide et très élevé, d’une belle construction avec des tours hautes et admirables, l'une du côté oriental au-dessus de la sortie des eaux qui sortent de la ville, et aussi avec la terre des fondations de place en place. Ce mur, bâti par Séleucus, fut détruit et rasé, comme nous le raconterons plus tard en son temps avec l’aide de Dieu qui (nous) fortifie. Il construisit aussi dans la ville, pour le roi, des puits etun palais remarquable et quatre citadelles aux quatre angles de la ville. Il fit encore un palais remarquable sur la fontaine qui est au nord de la ville au pied de la montagne en des- sous du château élevé il bâtit un temple remarquable et un autel [p. 54] aux dieux selon leur loi; il fit encore entrer les eaux dans la ville par le côté du nord; il les fit venir de loin par des fossés profonds creusés sous laterre, avec grand travail; il les distribua, à l’aide d’aqueducs et de canaux, par toute la ville, dans les maisons des chefs, dans les temples

(1) Une note marginale porte : Ici commence le comput des années grecques, c’est-à-dire d'Alexandre le Macédonien ; 1l y en a qui le font commencer quatre ans plus tard.

MÉLANGES. 329

et sur les places de la ville. Il fit à l’intérieur des remparts, de grandes places publiques et des portiques, belles constructions avec de grandes pierres, ainsi que tout ce qu'il faut dans une ville telle que celle-là, En dehors de la ville il fit d’autres conduites d’eau et des aqueducs, il planta des jardins et des vergers, avec de nombreuses espèces de vignes et des conduites (d’eau), il dirigea le cours des fleuves vers la plaine pour ar- roser et faire croître les fruits. Il S'occupa aussi de tout le pays jusqu'au fleuve Euphrate de tout côté et jusqu’à la grande montagne d’A$ômäà à l'est, il y établit des villages, des camps (castra), des bourgs et des champs cultivés (ἀγρός) innombrables, il les enrichit de conduites d’eau, de cours d’eau vive et de tout ce qu'il faut pour la vie des habitants. C’est ainsi que fut accomplie la construction de cette ville royale et elle recut un nouveau nom du roi Séleucus : le nom d’Édesse, qui était le nom de sa fille ainée Adäsà, à laquelle il donna cette ville en dot.

Séleucus bätit encore Antioche, Laodicée, Alep qu'il nomma Bérée, Séleucie, Apamée et Qennesrin. Le grand prêtre £léazar épousa Zahith, fille de Thélah et engendra Mathan. Partage de l'empire après la mort de Séleucus. [P. 55) Sous Antiochus, on commença à frapper des monnaies d’or et des dinars. Anfiochus bâtit des ponts remarquables, l'un sur le fleuve Sangaz, un autre sur le fleuve Sébàsti au pays de Samosate, lorsqu'il allait vénérer le haut lieu qui est sur la montagne au-dessus de Gaiwvacathi, près du célèbre monastère de Mar Bartsauma, comme en témojlenent jusqu’aujourd'hui les inscriptions qui sont sur les grandes tables de pierre et sur les colonnes dressées au-dessus des ponts.Judas Macchabée. La trente-cinquième an- née de Séleucus, Éléazar, frère de Simon, fut grand prêtre parce que son fils Jonias était encore enfant (1). Traduction des Septante. [P. 56] Rome fut fondée au temps d'Achaz. Éten- due de son empire. Histoire de Romulus et Rémus. [P. 57. Description de la ville de Rome à rapprocher de Land, Anecdota Syriaca, UT, p. 323; 1. Guidi, Bolletino della C'ommissione Archeolggica di Roma, IV (1884); A. Scher, Histoire Nesto- rienne, Patrol. or., IV, 284. |P. 58) Merveilles du monde. Du nom de Syrie (2) : c'est un nom générique : on appelle propre-

(1) On liten marge : « A cette époque vivait Jésus, normmé Asirà (Sirach). La mère de Jésus, qui fut (nommé) Bar-Asirà, était stérile et n'avait pas d'enfants elle pria Dieu de lui donner un fils...

(2) Ce chapitre est tiré de Denys de Tellmahré et a été transerit aussi par Michel le Syrien, IT, 76.

20 1 REVUE DE L'ORIENT CHRÉTIEN.

ment Syriens ceux qui habitent à l'ouest de l’Euphrate, depuis le mont Amanus au nord d’Antioche jusqu'à la Palestine. Ce nom vient d'un homme nommé 0705, frère de Qitikos, [p. 59] qui s'empara de ce pays et lui donna son nom au temps les Israélites habitaient l'Égypte. Métaphoriquement on appelle Syriens tous ceux qui parlent araméen à l’est et à l’ouest de ‘l'Euphrate, depuis la mer jusqu’à la Perse. La racine et le fon- dement de la langue syrienne est £desse. [P. 60] La nais- sance de Notre-Seigneur eut lieu l'an 309 des Grecs, la quarante et unième année d'Auguste César qui est la trente-troisième année d'Hérode. Accomplissement de la prophétie de Daniel. Depuis Adam jusqu'à la naissance du Messie, il y 5500 ans et depuis la captivité de Babylone et le retour des Israélites en Judée jusqu’à la naissance du Sauveur il y 550 ans.

Jacques épousa Æadibath, fille d'Éléazar, et engendra Joseph. Joachim, frère de Jacques, épousa Anne, fille de Faqôd,, et, soixante ans plus tard, engendra Marie, de laquelle naquit le Messie. Comme Joseph était, selon la chair, fils de l’oncle de Marie, elle lui fut donnée par la prescience di- vine, [p. 61] qui savait qu’elle serait persécutée par les Juifs, afin qu'il la gardât. Deux ans avant la naissance du Messie, une étoile apparut aux Mages en Orient, elle surpassait toutes les étoiles en clarté et une Jeune fille se trouvait au milieu portant un enfant dans son sein.

Les Mages arrivèrent à Bethléem huit Jours après la naissance du Messie; à quarante jours on le présenta au temple; il fut recu par Siméon, àgé alors de cinq cents ans. |P. 62] Fuite en Égypte. Naissance de Jean-Baplisle. Zacharie est tué dans le temple. Hérode régna trente et un ans. Il fit emprisonner de nombreux Juifs et ordonna de les mettre à mort pour ses funé- railles. Retour d'Égypte. [P. 68] Vie publique de Notre-Sei- oneur. ;

A cette époque s'éteignit la race des rois d’ Édesse qui descendaient de Séleucus le fondateur d'Édesse après Nemrod, comme nous l’âvons écrit plus haut. Il ne se trouva aucun homme de race grecque pour prendre le pouvoir. Or, le peuple Arménien qui s'était établit à Édesse et y était de- venu puissant, s'était attaché à l'empire grec; on établit donc pour roi un ‘homme de la race des Arméniens, nommé ne lui et ses fils gouver- nèrent Édesse et la Mésopotamie durant 380 ans, et beaucoup d'entre eux se nommèrent Abgar comme leur premier roi.

Un roi de Perse et de Médie, nommé A/hourin, bàtit Afhour y ,

MÉLANGES. 327

(Mossoul), en face des ruines de Ninive, et attaque constamment l'empire d'Abgar bar Manou, surnommé le Noir, à cause de la noirceur de son teint. [P. 64] Celui-ci recourt à Notre- Seigneur, l’an 342 (31), contre son ennemi et aussi pour être guéri de l’éléphantiasis. Hanania accompagne les envoyés et prend le portrait du Sauveur. Résumé de la lettre d'Abgar, [p. 65] réponse du Sauveur. Au retour, les messagers s'arrêtent à Maboug, le portrait du Sauveur se décalque sur les briques qui l’enserraient. Ces briques restent à Maboug et y opèrent des prodiges jusqu’à l’arrivée de l’apôtre Philippe, qui les place dans une église bâtie par lui. Abgar fut béni par le saint por- trait et sa maladie soulagée jusqu'à l’arrivée de l’apôtre A ddaï qui le guérit complètement.

[P. 66] Du grand temple qui est appelé (temple) d'Abqar (À).

Il y avait à Édesse un temple païen bâti avec magnificence dès le temps du grand roi Séleucus, au-dessus de la fontaine des eaux du côté occidental de la ville, richement orné, qui avait à l’intérieur de grandes colonnes de marbre. On l’ouvrit du côté de l’orient, on y bâtit un chœur dans lequel on fixa une table des mystères, l’apôtre A ddaï célébra sur cet autel et le roi ainsi que toute la ville prirent part (au saint sacrifice) et on appelait (cette église) le temple de Notre-Sauveur. Avec Addaï, l’un des soixante-dix (disciples), se trouvait toujours Aggée, fabricant de vêète- ments de soie, d'Édesse même. C'était un disciple d'Addaï et il le suivait toujours; (Addaï) l’envoya en Orient et dans la Perse inférieure, il alla catéchiser l’Arménie et toutes ces régions.

Du canal et du rempart qui furent construits à Edesse.

Tandis que l’apôtre Addaï était à Édesse, le fleuve qui traversait la ville était constamment plein, il entrait par le côté ouest de la ville et détruisait beaucoup de maisons ainsi que toutes les constructions qui étaient sur le cours des eaux, parce que le canal et le dégagement qui avaient été construits longtemps auparavant par Séleucus et Nemrod, en pierres avec de grands et spacieux portiques, deux constructions et trois conduites d’eau par le fleuve s’écoulait sans dommage, s'étaient, à la longue, remplis de sable, de boue et de détritus. L’apôtre s’en préoccupa et, par les soins du roi Abgar, on construisit un grand rempart de grandes

1) M. Pognon identifie l'emplacement de ce temple. Cf. Znseriplions sémiliques, LUE Us ᾿ Ï 1 1 Paris, 1908, p. 206-207.

998 REVUE DE L'ORIENT CHRÉTIEN.

pierres en tête du fleuve qui est en dehors.du mur occidental de la ville et qu'on appelle le fleuve de Stadion (et on fit des canaux longs et larges en grandes pierres réunies par de la chaux et du mortier que l’on pro- longea sous terre pour conduire l’eau de la ville dans le canal qui con- tourne la ville en dehors du mur sur tout le côté nord), ainsi depuis cette époque la ville fut sauvée contre toute inondation violente jusqu’au jour le rempart se démolit et la terre s’éleva; dès lors les eaux passèrent de temps en temps par-dessus ce rempart.

[P. 67] La passion du Sauveur eut lieu l'an 33, l'an 344 des Grecs selon le comput des chroniqueurs et 340 selon Andro- nicus. Pilate fit connaitre à T'ibère l'enseignement des chré- tiens et Tibère ordonna de les rechercher et de les poursuivre, Pilate n'exécuta pas cet édit et fut envoyé en exil; après diverses épreuves, |[p. 68]. comme l'écrit Philon le philosophe, il se tua. Pierre alla à Rome et y fut évêque durant vingt ans. Pays vont les divers apôtres. Judas le traître vécut qua- rante jours jusqu'à l'ascension du Messie; quand il se pendit, la corde cassa, il tomba à terre et ne mourut pas; il tomba dans une grave maladie inflammatoire durant de longs jours, après quoi il tomba du lit sur lequel 11 était, se brisa par le milieu et toutes ses entrailles sortirent. [P. 69] Premiers patriarches; Pierre et Paul furent mis à mort à Rome parce qu'ils avaient

“baptisé un fils de César. Guerre des Juifs, d’après Josèphe. On trouve mentionnés de nombreux dénombrements qui auraient été faits à Rome : sous Auguste, cinquante myriades d'hommes; à la mort d'Auguste, cent myriades; sous Domitien, cent cin- quante myriades; sous Antonin, deux cents myriades; sous Commode, deux cent cinquante myriades; sous l’autre Antonin,

trois cents myriades; sous Maximin, trois cent cinquante myriades; les chiffres croissent donc très régulièrement.

ΓΡ. 75] Depuis l’incarnation de Notre-Sauveur jusqu'à Constantin . l’ancien, nous écrivons ensemble les histoires ecclésiastique et profane. À partir de Constantin nous écrirons l’histoire profane à part, et l’histoire ecclésiastique à part dans un second volume. Si tu veux connaitre quelque fait de l'histoire ecclésiastique, cherche plus loin dans le second volume, (cherche) les histoires de tous les rois dans ce premier volume nous nous préparons à mettre chacun avec son nom et son époque avec l’aide du Seigneur qui fortifie.

(A suivre.) F: Nav:

CHRONIQUE

LE XV° CONGRES INTERNATIONAL DES ORIENTALISTES

(COPENHAGUE, 14-20 AouT 1908)

Sur cinq à six cents adhérents, quatre cent ving-huit se sont trouvés à Copenhague et ont donné, par leur affluence, grande animation aux séances et aux réunions. Tous les gouvernements, jusqu'à l'Inde et au Japon, s’étaient fait représenter. Parmi les Français, M. René Basset, direc- récteur du précédent congrès, était venu remettre ses pouvoirs à son suc- cesseur, M. Thomsen ; M. Émile Guimet, non content d’avoir déjà donné à la France un musée à sa seule initiative, développait encore le projet d'un nouveau musée d'Égyptologie ; enfin M. Clément Huart, M. Moïse Schwab, M. Paul Boyer n’ont pas, eux non plus, craint de faire le long voyage ; mais combien de délégués sont restés chez eux! Pour moi, chargé de représenter seulement l’Institut catholique de Paris et la Patrologie orientale éditée chez M. Firmin-Didot, je représentais, en fait, tout le clergé de France, car j'ai vu des prêtres catholiques Alsaciens, Autri- chiens, Bavarois, Espagnols, Hollandais, Syriens, mais Francais, aucun.

Le vendredi 14 août au matin, Son Altesse Royale le prince Christian de Danemark a ouvert le congrès par un petit discours francais plein de dé- licatesse et d’affabilité ; après les discours du président et des délégués des gouvernements, nous avons offert au congrès, au nom de Graffin, les prerniers volumes de la Patrologie orientale et nous avons annoncé que nous tiendrons des spécimens à la disposition des congressistes.

Le vendredi soir, nousavons exposé à la section Grèce-Orient, qui venait de nous nommer secrétaire, les résultats d'un travail sur diverses homé- lies pseudépigraphiques. Nous résumerons ce travail dans un prochain numéro de la Revue. Nous avons ensuite mis en relief les ouvrages grecs ou traductions d'ouvrages grecs parus à paraitre dans les Patrologies Orientale et Syriaque, et la Section, consultée par M. le Président, nous chargé d'adresser à M: Graffin un télégramme de félicitations et de re- merciements pour ses utiles publications.

990 REVUE DE L'ORIENT CHRÉTIEN.

Le samedi 15 août, M. Faulhaber (Strasbourg) énuméré les principales sources d'erreurs dans les références des chaines manuscrites grecques. En sus des fautes communes à tous les manuscrits : mauvaises lectures et inattention, il a signalé des références de notes, des chiffres ou des ini- tiales qui sont devenus des noms propres, tandis que d'autres noms propres écrits en abrégé étaient interprétés et intervertis de diverses manières. MM. Krumbacher et Heiberg ont ajouté des exemples analogues, surtout de chiffres considérés comme initiales de noms propres et devenus noms propres.

M. Mark (Limbourg) a montré que l'écriture des anciens manuserits arméniens trahissait une influence grecque et non syriaque, par exemple : réglage du papier, calibre des lettres, initiales en marge, abréviations des noms divins, ete. Il a présenté quelques spécimens de manuscrits.

M. Carolidis (Athènes), en rapprochant quelques traditions turques des données des historiens byzantins, montré qu'il existait déjà une mosquée à Constantinople du vif au 1x° siècle.

Le lundi 17 août, M. Lambros (Athènes) énuméré, décrit et analysé cinq documents, originaux découverts par lui de la correspondance des papes Innocent et Alexandre VI avec le prince Djim et le sultan Bajazet.

Nous avons lu ensuite un travail de M. Khakhanof (Moscou) sur les deux éditions de l’évangéliaire géorgien qui sont actuellement en’ cours à Saint-Pétersbourg et à Moscou.

L'édition de Moscou doit reproduire le texte de Palestine qui est le plus ancien. Jusqu'au siècle en effet, c’étaient les couvents géorgiens de Palestine qui traduisaient les livres saints et rédigeaient les livres d'office d’après les usages de l Église de Jérusalem. Cette rédaction, qui ne pro- vient pas de l'arménien, mais peut-être du syriaque plutôt que du grec, est conservée en particulier dans un manuscrit (Ourbnissi) daté de lan 6110 de la création, c’est-à-dire, d’après la chronologie géorgienne, de l'an 506 de notre ère. Il existe d’autres manuscrits plus récents.

L'édition de Saint-Pétersbourg doit reproduire le groupe de l’Athos qui comprend deux anciens manuscrits (Athos et Djrouthi), de 913 et 936, tra- duits vraisemblablement sur le grec, et deux revisions faites sur d’autres manuscrits grecs, par 5. Ephimi (+ 1028) et S. Georges Mthazmindelli (+ 1066). Cette dernière revision a supplanté ou peu s’en faut la précé- dente. L'édition de Saint-Pétershourg doit donc reproduireles deux anciens manuscrits et donner aux variantes les lecons propres aux deux revisions. M. Khakhanof d’ailleurs signalé un manuscrit provenant de Svaneti, qu'il appelle évangéliaire d'Adichi et qui diffère de tous les précédents. Il serait de l’an 897.

Le mardi 18 août, M. Lambros fait cote quelques documents sur les juifs de la Grèce au moyen âge. M. Moïse Schwab présente à ce sujet quel- ques observations.

M. Von Karabacek (Vienne) lit un travail sur les œuvres des artistes ita- liens à la cour des sultans de Constantinople. Il énumère les artistes et les œuvres conservées ; il présente de nombreuses photographies.

M. Cumont (Bruxelles) expose la transmission des textes astrologiques

er: ARTE

CHRONIQUE. 391

des Chaldéens aux Égyptiens (n° siècle avant Jésus-Christ) et à l'Occident: il étudie ensuite un document attribué à Tenkros (15 siècle avant notre ère). Ce texte grec met certains pays sous l'influence de chaque signe du zodiaque; l’étude de ces noms propres conduit M. Cumont à placer la ré- daction de ce document, au siècle avant notre ère, à l'époque Perse, et à conclure que les astrologues égyptiens du siècle avant Jésus-Christ ont disposé de documents grecs plus anciens ; MM. Jastrow, Zimmern, ss Hoffmann ont présenté quelques observations.

. Carolidis-(Athènes) fait connaitre les écrivains byzantins qui ont ts à des sources arabes et tout spécialement Agathias. Il fait constater que les noms et les termes officiels perses sont ie plus exactement par Agathias que par les historiens arabes et persans des temps islami- ques. L'étude des noms propres et de leurs diverses formes lui à permis de montrer que des historiens byzantins ont puisé directement à des sources arabes.

M. Krumbacher, avec l’aisance et la bonne grâce qu'il montre dans tous les congrès, il est le porte-drapeau des études grecques et byzantines, a ensuite clos nos travaux et donné lecture du télégramme de M# Graf- fin remerciant le congrès de ses félicitations.

La séction Grèce-Orient, un peu à l’étroit dans certains congrès d’orien- , talistes, d’ailleurs été cette fois très suivie; la feuille de présence porté Jusqu'à cinquante-quatre noms, en attendant qu'au prochain congrès à Athènes, dans trois ans, elle se taille une plus large place encore.

Le mercredi 19 août, nous avons lu à la section sémitique une courte note sur « les loups arabes ». Dans la littérature syriaque, ces loups ont : fort mauvaise renommée : Macédonius l'hérétique est appelé « un serpent rebelle, un loup arabe » (Patr. or., 11, 232); d’après Michel le Syrien (texte, p. 490) certains moines « s’élancèrent comme des loups arabes, avec des injures et des coups de pierre »; enfin Bar Bahlul, dans son diction- naire (éd. Rubens Duval, Paris, 1890, IT, 525, ou Payne Smith, Thesaurus syriacus, Oxford, 1874, I, 801), n’a trouvé, de cette locution, que l’explica- tion suivante : « Loup arabe, mentionné par Grégoire le Théologien; c’est- à-dire que les loups arabes sont plus redoutables que les autres loups ; c’est- à-dire qu'ils sont de la couleur de la terre et restent ainsi cachés jusqu'à l’arrivée du troupeau, alors ils s'élancent subitement sur lui ».

Cependant, d’après les explorateurs, le loup arabe est rare, plutôt timide, moins incommode que le chacal, et on a grand’peine à s'en procu- rer quelques spécimens pour les jardins zoologiques. Pour expliquer les textes syriaques, il n’est pas nécessaire de supposer que le loup arabe ait jadis été redoutable et redouté, il suffit de remarquer que Bar Bahlul ren- voie à Grégoire le Théologien et que le texte de la Patrologie orientale n'est qu'une traduction d'un texte grec. Nous sommes donc ramenés à la littérature grecque, nous constatons que les Septante ont traduit par « loups arabes (‘Arab) » les textes de Sophonie m1, 3 et Habacuc 1, 8, qui doivent être traduits par « loups du soïr (‘Æréb) » comme l'ont fait la Vulgate et la Peschito. Ce sont les loups du soir qui sont redoutables

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parce que l'ombre leur donne courage et la faim les fait alors sortir des repaires ils se sont cachés durant le jour. C’est ce que Virgile écrivait déjà : Inde lupi ceu Raptores, atra in nebula, quos improba ventris Exegit cæcos rabies… Enéide, 11, 355.

Le même mot, ou peu s’en faut, a causé ailleurs aux Septante une faute encore plus forte. Au lieu de traduire Jér. v, 6, comme la Peschito : « Les loups du soir (‘arabôth, soirs ou solitudes) les pilleront », ils ont traduit « le loup jusqu'aux maisons (‘ad bôth) les détruits ».

Nous avons conclu que si Bar Bahlul pouvait donner une nouvelle édi- tion de son dictionnaire, il écrirait simplement « Loup arabe, mentionné par Grégoire le Théologien, c'est-à-dire loup du soir (‘Arab pour ‘Eréb) ».

Nous ne pouvons rendre compte des nombreux travaux des autres sections, d'autant qu'une grève des typographes a rendu impossible même la publi- cation de courtes analyses. Signalons seulement à la section musulmane le travail de M. Asin y Palacios (Madrid) consacré à l'unique manuscrit du seul ouvrage d'Ibn Toumlous d’Alcira qui ait été conservé. C’est uh traité de logique écrit en arabe près de Valence au χα" siècle. L'auteur est dis- ciple d’Averroës, mais ne cite pas son maitre une seule fois, de crainte d'être, lui aussi, taxé d’incrédulité. Il se réclame par contre d’Al-Gazzali qui était considéré comme orthodoxe. En somme il semble, par endroits, se moquer des orthodoxes, en ayant soin d’ailleurs de cacher ses ironies sous le voile d’un profond respect. La partie la plus importante de l’ou- vrage est la préface, qui fait l’histoire des études de la logique en Espagne depuis l’arrivée des musulmans jusqu'à l’époque de l’auteur.

La section IT (Inde-[ran), les Français (hors M. Finot) « brillaient par leur absence », avait attiré de nombreux congressistes Allemands, An- glais, Danois, Hollandais (MM. Speyer), Italiens, Suisses. Mme Rhys Davids y rivalisait avec son mari et lisait une note sur « la place du Bouddhisme dans l’histoire de la philosophie ». Cette section, si bien représentée, vou- lait nous mener, dans trois ans, à Calcutta, mais la longueur du voyage a effrayé, à bon droit, les autres congressistes.

Le point de vue matériel n’a pas été négligé non plus : réceptions et visites de musées, promenade au bord de la mer le comité a offert un déjeuner, diner d'adieu, ont occupé tout le temps laissé libre par les séances. Signalons l'heureuse idée de donner la gratuité des tramways et omnibus à tous les congressistes; grâce à cela on n'avait pas à expliquer

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CHRONIQUE. 333

au conducteur, en langue franco-danoise ou plutôt nègre, l'endroit l’on voulait aller.

En somme, la bonne tenue du congrès fait grand honneur au président, M. Thomsen, et aux princes de la famille royale qui ont bien voulu y parti- ciper. Son Altesse Royale le prince Valdemar, époux de la princesse Marie de France, assistait à la séance d'ouverture ;il connait l'Orient, nous dit M. le Président, mieux que bien des membres du congrès; nous avons donc cru, comme orientaliste et surtout comme Francais, devoir porter notre carte à son château de Bernstorff. Le secrétaire général, M. Sarauw, se pen- chait, avec une inlassable bienveillance, pour entendre, en toutes langues, des requêtes et des réclamations. Il était d'ailleurs brillamment secondé par M. Bratli, qui unit à la connaissance des langues usuelles à Copenha- gue, celle, plus rare, de l'espagnol joint au francais. M. OEstrup, chargé de loger les congressistes, s’acquittait, avec un entrain tout militaire, de cet office de maréchal de camp. M. Lange faisait, avec la plus grande bienveil- lance, les honneurs de la Bibliothèque Royale. J'ai été particulièrement honoré d’être présenté par le Rév. Kissmeyer, au vénérable évêque de Seeland, Mer Skat Rœrdam, qui doit être, ou peu s’en faut, le doyen des syriacisants, car il y a bien longtemps (1859) qu'il publiait la version hexa- plaire du Livre des Juges. Encore au moment du départ, MM. Besthorn et Heiberg m’apprenaient qu'ils avaient édité quelques ouvrages de littérature scientifique arabe, et je saluais chez eux mes sympathiques prédécesseurs et maitres dans l'étude des sciences en Orient. En somme, c’est avec une véritable conviction que nous nous donnions rendez-vous dans trois ans si Dieu nous prête vie à Athènes, nous retrouverons, comme orga- nisateurs du XVIe congrès, MM. Carolidis et Lambros.

Berlin, 24 août 1908. F. Nau.

BIBLIOGRAPHIE

BANASÈR, Æevue philologique et historique, paraissant tous les trois mois. Prix de l’abonnement : 15 fr. par an. Impr. chez le directeur du journal : 9, rue Gazan, Paris.

De prime abord, c'était une idée audacieuse que de vouloir fonder à Paris une revue de philologie et d'archéologie arméniennes, rédigée en armé- nien. Les difficultés de tout ordre ne manquaïient certes pas, et il semblait bien qu'une telle publication fût condamnée à disparaitre bientôt. Il n’en a rien été : au bout de près de dix ans le Banasér « Philologue » est encore là, plein de vitalité, pour attester le zèle scientifique de son fondateur, M. K. J. Basmadjian, qui a su venir à bout de tous les obstacles.

Fondé le 1% janvier 1899, le Banasér eut, dès la première heure, des collaborateurs éminents : MM. Meillet, Gauthiot, l'abbé Ermoni, et notre regretté maitre, Auguste Carrière. Les PP. Baronian, Dadian, Nedjckiantz, Babguëèpe, Korioun, le D' Daghavarian, Mr. Conybeare, Mgr Miskgian, le professeur Patrubany, Néandre de Byzance, MM. Macler, Adjarian, Ana- nikian, Chalationtz, Hohanessian.

Nombreux et intéressants, les articles du Banasér sont, en outre, ex- trémement variés. M. Basmadijian y publié le catalogue des manuscrits arméniens de notre Bibliothèque nationale, et ses connaissances assyriolo- giques lui ont permis d’éclaireir certains points de l’histoire ancienne de l'Arménie, les campagnes de Darius dans cette contrée, par exemple, et d'étudier, dans les inscriptions Cunéiformes, les plus anciens monuments de la philologie arménienne. Il y a, de plus, abordé des questions d’art et d'archéologie, celle des ruines d’Ani, entre autres, publié des textes inédits et donné d'importants mémoires sur l’ancienne législation arménienne.

Les questions historiques et religieuses tiennent une large place dans le Banasér; elles sont trop nombreuses pour que nous puissions les énu- mérer. Mentionnons une longue étude de M. Adjarian sur Fauste de Byzance, une bibliographie des impressions arméniennes, due à un évêque qui voulu garder l’anonyme, le catalogue, dressé par le P. Koriona, des manuscrits arméniens de la bibliothèque de l’église des Saints-Archanges de Constantinople, des études de Mr. Conybeare sur les ordinations dans l’église arménienne, etc.

La philologie est également bien représentée. De 1899 à 1901, M. Millet a traité dans le Banasér, avec la compétence que tous lui reconnaissent, un certain nombre de questions relatives à la langue arménienne: en 1902, il

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BIBLIOGRAPHIE, 339

y exposait un nouveau système de transcription de l’arménien, à propos d’un dictionnaire que préparait M. Basmadjian. Rappelons, avec les articles de celui-ci, les études de MM. Gauthiot et Patrubany, et de Mgr Miskgian. En 1902, M. Hohanessian à consacré un long mémoire à la littérature arménienne du xix° siècle.

Si sommaire que soit notre apercu des dix années du Zanasér, il per- mettra cependant de se faire une idée de ce qu'est cette excellente revue, l’une des meilleures publications d'orientalisme que nous connaissions, qui a rendu et promet de rendre encore d’éminents services aux études armé- niennes.

Lucien Bouvar.

R: P. BEDJIAN, Homiliae seleclae Mur. Jacobi Sarugensis, tome IV, Paris, 1908, 1 vol. in-8°, x1V-916 pages.

Les trente-neuf homélies de ce recueil qui paraissent toutes (hors une pour la première fois, sont empruntées à des manuscrits de Mossoul, d'Ox- ford, de Paris, de Rome, mais surtout de Londres. Elles ont pour sujet : le Déluge; Abraham: Salomon ; Élie (quatre homélies) : Élisée (six homélies) : Jonas; Daniel et Nabuchodonosor (deux homélies); le char d'Ezéchiel; la tentation de N.-$.: le grain de sénevé; divers miracles de N.-S. (légion de démons, piscine probatique, figuier); la parabole de la vigne; les scruta- teurs; les évêques; les solitaires (deux homélies); les grâces et le bon usage du repos (huit homélies).

Cette édition (comme les volumes précédents) est faite avec le plus grand luxe : encadrement rouge, titres, finales, notes et table en rougé. Le ἢ. P. Bedjan édité ces homélies métriques en passant à la ligne après chaque vers et, dans sa courte introduction, il mis en relief l'im- portance de l’ouvrage et prémuni le lecteur contre quelques passages qui pourraient prêter à interprétation hétérodoxe. Afin de donner une pe- tite idée du genre mimr6 (homélie métrique) Jacques de Saroug, après S. Ephrem, est passé maitre, voici le commencement de la première ho- mélie sur les solitaires. Nous choisissons ce sujet pour que l’on puisse rapprocher ce genre du texte grec publié plus haut :

Par son enseignement Dieu conduit, éclaire les créatures,

Pour que le monde voie la route de vie et y marche.

Sa parole est une lampe puissante pour tous les êtres raisonnables, Elle répand une lumière éclatante sur leurs sentiers.

C’est la voie (de) la lumière et (de) la vie pour celui qui y marche, Et celui qui en sort tombera dans l'erreur.

En Notre-Seigneur marche celui qui veut voir son Père,

Il s’avance en lui jusqu'à ce qu’il se repose sur son Fils.

C’est la porte par laquelle on arrive à la Majesté (divine),

D’elle sortent des trésors pour enrichir tout le monde.

C’est la riches$e qui n’est pas montée sur roues pour s'enfuir

Mais qui se tient comme une colonne et qui £st inébranlable.

336 REVUE DE L'ORIENT CHRÉTIEN.

C’est le grand trésor en dehors duquel il n’y a que pauvreté, Faible et indigent est tout homme qui ne s’est pas enrichi en lui. L'or est fardeau, liens et entraves pour celui qui le possède,

C’est une rude corde et elle mène à (la mort par) suffocation.…….

L'auteur continue ainsi durant cinquante-quatre pages de vingt et un vers chacune. On constate que cet ouvrage prête peu aux renvois et aux citations : si nous avons tous les jours occasion de renvoyer aux sept vo- lumes des Acta martyrum et sanclorum par lesquels le ἢ. P. Bedjan commencé sa belle collection, nous n’aurons jamais l’occasion, croyons- nous, dans notre édition des histoires des solitaires égyptiens, de renvoyer à une ligne des cinquante-quatre pages que Jacques de Saroug a consa-

crées aux solitaires. F. Nav.

F. MACLER, Catalogue des manuscrits arméniens et géorgiens (de la Biblio- thèque nationale), 8, xxx-204 pages, cinq planches, Paris, Leroux, 1908.

Ce catalogue de 323 mss. arméniens et 26 mss. géorgiens fera connaitre à tous les orientalistes les manuscrits réunis à grands frais à Paris, surtout dans la première partie du xvue siècle.

Dans son introduction, M. Macler, professeur à l’école des langues orien- tales, esquisse l’histoire de la formation du fonds arménien : six mss. ac- quis pour la bibliothèque de Louis XIV, deux pour Colbert, cent vingt ac- quis de 1728 à 1730 par l’abbé Francois Sevin etc. Le corps de l'ouvrage renferme la description et le contenu de chacun des manuscrits : Ancien et Nouveau Testament 1-29: commentaires d'auteurs arméniens Sur divers livres de la Bible 30-43; livres liturgiques (bréviaires, rituels, hymnes ; missels, lectionnaires, prières) 44-108: homélies (en majeure partie de pères grecs) 109-129: mélanges théologiques relatifs pour la plupart aux croyances et à l’histoire de l’église arménienne 130-168; canons de l’église arménienne 171-1797; martyrologe 178; ménologes 180-183, 187, 189-190 ; histoire et mélanges historiques 179, 184-186, 191-239; philoso- phie (traductions de Porphyre et d’Aristote, commentaires arméniens) 940. 242; médecine, alchimie, comput, astrologie, grammaires, dictionnaires et mélanges.

M. Macler a ajouté une table de concordance des anciens numéros avec les numéros actuels, une table alphabétique et cinq planchès spécimens des diverses écritures arméniennes (1-1V) et géorgienne (v).

Cet ouvrage est donc indispensable aux arménisants qui'ne pouvaient venir consulter à Paris les catalogues manuscrits, et tous seront reconnais- sants à M. Macler de la peine qu'il a prise pour condenser tant de précieux

renseignements sous un si petit volume. F. Nau.

Le Directeur-Gérant : EF. CHARMETANT.

Typographie Firmin-Didot οἱ C°. Paris.

ΑΝ

VIE DE BARSOMA LE SYRIEN

La Vie de Barsoma le Syrien, que nous éditons et tradui- sons ici, fait partie du ms. 31 de Paris (fonds d’Abbadie). Ce ms. est ainsi décrit par M. d’Abbadie :

1. Histoire de Saint Antoine. 16 feuillets. 2. Sur la prière de Langinos. 1 feuillet. 3. Vie du Docteur Père Barsoma. 9 feuillets, etc. (1).

Barsoma est l'archimandrite syrien monophysite, près de

Samosate, l’ascète rigide, l'adversaire acharné du Nestoria- nisme, le soutien de Dioscore, patriarche d'Alexandrie. 1] joua un rôle considérable au Brigandage d’Ephèse (449), par- ticipa, par ses violences, au meurtre de Flavien, évêque de Constantinople, fut chassé du concile de C'halcédoine (451) et mourut excommunié le février 458 (2). _ La langue du ms. est tout à fait classique. Aussi, nous édi- tons le texte tel qu’il est dans le ms., en respectant l'ortho- graphe et la manière d'écrire les formes nominales et verbales. A peine nous est-il arrivé de faire çà et quelques légères corrections. Ces corrections, très rares et toutes de minime importance, ont trait uniquement à des fautes évidentes de copiste; nous donnons alors en note la lecon du manuscrit.

(1) Catalogue raisonné des manuscrits éthiopiens appartenant à Antoine d’Ab- badie, Paris, 1859, p. 37-40.

(2) Voir, pour plus de détails, l’article de M. Nau sur Barsumas (Barsoma) dans le Dict. de Théol. cath. Vacant-Mangenot, col. 434-435.

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338 REVUE DE L'ORIENT CHRÉTIEN.

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340 REVUE: DE L'ORIENT CHRÉTIEN.

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VIE DE BARSOMA. 941

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342 REVUE DE L'ORIENT CHRÉTIEN.

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TRADUCTION

(Fol. 18 τὸ c) Nous écrivons le combat de notre saint Père Docteur Abba Barsoma le Syrien, du couvent de Basmoul. Que sa prière, sa béné- diction, la force du secours de son Dieu gardent le serviteur du Seigneur, l’homme du Christ, pour les siècles des siècles. Amen.

O mes chers (frères), Salan, certes, l'ennemi de la justice, ne désarma pas; il ne laissa pas ce (saint). En effet, il existait, dans la ville d’Antioche,, des hommes, qui faisaient la guerre aux chrétiens et étaient des adver- saires de la foi droite. Il se trouva un (certain) individu parmi eux; Satan passa dans son cœur, l’écarta de la justice, se glissa dans son esprit et mit dans son cœur la tentation. Tandis que lui-même pensait à des ordres donner), voici que des hommes, ennemis de la foi, arrivèrent. Il leur conseilla de lutter contre le saint Docteur Barsoma. 11 devint lui-même impie ; il en vint, (en s’opposant) aux décrets (royaux), à lutter contre le roi; ilse prépara un diadème et des habits royaux; son âme s’enorgueillit de cela. Satan machina (si bien) son œuvre, que (cet homme) siégea sur le trône d’Antioche.

VIE DE BARSOMA. 514

L'un des jours de cette époque-là, il convoqua l'assemblée (Fol. 18 vo 8) des adversaires ; il alla à cheval, afin de revenir (plus vite). Tandis que lui-même allait lutter contre le saint Docteur Barsoma, il se trouva avec beaucoup de créatures, (faisant partie) des ennemis (du saint). Le saint Docteur Barsoma se tourna, pour voir ceux qui se trouvaient là, les gens qui s'étaient réunis vers lui, les auxiliaires (qui étaient) avec lui. On lapida saint Barsoma; une pierre l’atteignit aux yeux. Lorsque (son, disciple vit cela, il pleura et se mit à embrasser le saint et à le baiser. Aussitôt le saint dit : « Lapidez-moi, (mes) ennemis. » Le disciple lui dit : « O mon maïtre, pourquoi fais-tu cette demande? Pour nous, nous te disons de demander au Seigneur d’anéantir, à cette heure même, les impies. » (Le saint) dit qu’il convenait que (sa lapidation) eût lieu. « Sache, mon fils, (ajouta-t-il), que mon cœur souffrira. Car je vois des rois, des fils de rois, tombés sur mon escabeau, afin de le baiser; je vois des grands, des souverains, des juges et toutes sortes de créatures m'honorer. Moi, certes, je préfère l’abjection, afin que le Seigneur ait pitié de moi et me secoure. En effet, tout ce que j'ai fait moi-même avec les hommes, c’est afin qu'il résulte pour moi (un état, éloigné) de la gloire et de l'honneur. Mes os tremblent devant la louange de ce monde. (Fol. 18 b) Ma demande a pour objet la pénitence finale. C’est cette (pénitence) qui subsistera. J'ai vu les prophètes chassés et rejetés; mais moi, l’on m'exaltera et l’on m'honorera. Les apôtres aussi, on les Japida; mais moi, pas. Les martyrs ont été tués; mais moi, l’on me por- tera sur les têtes. Les fidèles ont été enchaïnés ; mais moi, l’on m'honorera. Notre Dieu aussi a été mis sur le bois de la croix par les Juifs rejetés, et on s’est moqué de lui. Mais moi, pécheur et être faible, on m'honorera, on me louera et on me célébrera.

« Ο Notre-Seigneur et Notre Sauveur Jésus-Christ, c'est la règle que le serviteur soit comme son seigneur et le disciple comme son maitre. Si je suis devenu moi-même le serviteur véritable du Christ, je deviendrai donc, moi aussi, comme il été lui-même. Que dirai-je demain, lorsque je me tiendrai devant le trône du Seigneur? Lui-même me dira : Qu'as-tu fait? Tu as rendu considérable ton ministère; tu t'es prosterné devant moi. Cela te Convenait. Tu m'as obéi. Cela te convenait. Moi, de mon côté, j'ai fait beaucoup de rois se prosterner devant toi et t'obéir, bien que cela ne leur convint pas. Si (cela) a eu lieu, (c’est parce que) tu m'as glorifié. Il te convenait de me glorifier. Moi, de mon côté, j'ai fait aussi des souverains et des grands te glorifier à cause de mon nom, (Fol. 18 vo c) et en échange de ton amour envers moi. Ton (amour) était dirigé vers (moi). Moi, de mon côté, j'ai fait tout le monde t'aimer plus que cela ne te convenait. En échange de ce que tu as laissé tes parents, m'as recherché et m'as suivi, moi, de mon côté, j'ai fait les riches et les pauvres te livrer leurs maisons. En échange de ce que tu m'as obéi et que ton (obéissance) été dirigée vers (moi), moi, de mon côté, j'ai fait les serviteurs et les êtres libres, obéis- sants à toi.

« Cependant je crains moi-même, à cause de ce qui est écrit dans l'Évan- gile. Alors le jour l’on dira : Seigneur, Seigneur, ouvre, car nous-

944 REVUE DE L'ORIENT CHRÉTIEN.

mêmes, nous avons fait en lon propre nom de nombreux prodiges; en ton propre nom nous avons quéri de nombreux malades et souffrants, 11 répon- dra et leur dira : Pour moi, je ne vous connais pas. (Je crains) non seu- lement à cause d’autres (passages de l'Évangile), mais aussi à cause de cette parole de l'Évangile saint : Malheur à vous, scribes, puissants hypocriles, qui filtrez le moucheron et dévorez le chameau. De plus, il leur dira : Malheur à vous, 6 scribes, puissants hypocrites, qui, par votre dehors, apparaissez aux hommes comme des lumières, mais, par votre de- dans, êtes des loups, des êtres ravisseurs et remplis de ruse, Pour vous, vous ressemblez à des sépulcres plâtrés, mais dans l’intérieur desquels il y a (Fol. 19 ro à) des cadavres. En outre, il dira : Malheur à vous, 6 scribes el pharisiens hypocrites, qui mangez les maisons des veuves et des orphe- lins, sous le prétexte de prolonger votre prière. C’est pourquoi, vous trou- verez toules sortes de supplices. »

Après l’achèvement de ce discours, cet homme tomba de dessus son cheval et mourut d’une mort affreuse. Satan et son armée qui lui obéis- sait furent vaincus. Ensuite (Barsoma) dit ses moines) : « Mes enfants, je veux que vous deveniez justes par votre parole et forts par votre foi. » Ayant entendu ses paroles, ils versèrent des larmes amères. Il leur dit : « Pour moi, je veux retourner vers le roi de Perse, (au pays des gens) qui adorent le feu, à l’instigation des magiciens et des païens, et aussi d’au- tres (éléments), à l’instigation de toutes sortes d’hommes. (Telle) était la pensée du saint Docteur Barsoma. Si elle était telle, c'était afin qu'il ren- conträt un homme d’entre les étrangers qui le tuàt, pour qu'il achevat sa tâche et reçût la couronne de la part de Notre-Seigneur Jésus-Christ.

Lorsque cet homme fut mort, les gens s’apaisèrent. (Barsoma) alla à la capitale de la Perse, comme il y avait songé. Il alla à la ville des magi- ciens et des païens. Il prêcha la foi et personne d’entre (les gens de la ville) n’éleva la main sur lui. Personne n'osa (Fol. 19 ro b) ouvrir les yeux devant sa face. Lorsqu'il arriva à la terre de l'Orient, de nombreux ennemis s'étaient réunis auprès du roi Théodose, en lui disant qu'Abba Barsoma avait peu de pudeur et était un menteur. « Tu t'es fié lui), (ajouta quelqu'un), pour ton royaume et pour tous les trônes de Rome. Il est changé, depuis que je l’ai vu jadis. Voici : il a agrandi ses biens (et ses) trésors. Il mange de la viande, boit du vin, dort sur un lit moelleux, est vêtu d’habits précieux, se rase les cheveux. Lui, de son côté, apparaît devant toi, sous l’aspect d’un pauvre. Voici : il est arrivé, pour prendre (ton) royaume. Lui-même profère d’autres paroles que tes paroles et (prêche) une autre foi que ta foi. »

Lorsque le roi eut lu la lettre qu'on lui avait écrite, il éprouva un grand étonnement. Il sut que ce qu’on avait fait provenait des gens de Satan. Il fit mander le saint par terre et le fit arriver, afin qu'il vit ce qu'on avait écrit à son sujet. Lorsque le saint arriva, en ayant la ressemblance de quelqu'un qui voyage, le roi sut (la vérité), glorifia le Seigneur et le re- mercia. Il éprouva une grande joie de l’arrivée (de Barsoma). I le baisa, se réjouit de s'être rencontré avec lui, mit sa main sur (Fol. 19 c) les cheveux du saint, le toucha et cria, parce que le Seigneur avait con-

VIE DE BARSOMA. 349

fondu les gens qui avaient menti et étaient dépravés continuellement. Le roi, ayant produit la lettre, la mit entre les mains du saint. L'ayant lue, (le saint) glorifia le Seigneur et le remercia. Alors, le roi Théodose écrivit de nombreuses lettres. Il les envoya dans tous les pays, en confir- mant la foi droite, de sorte que les jours mauvais furent changés. La paix eut lieu à l’époque de la paix, la calamité à l’époque de la calamité. Toutes choses eurent lieu et furent accomplies à leur temps. (Tout eut lieu comme c'était réglé : le jour et la nuit, l’été et l'hiver. Il y eut ensuite des temps fixés de joie et de bonheur et des jours (heureux). Le séjour (sur terre), la vie et la mort furent longs. Ce fut dans les jours Théodose écri- vit (ces) lettres qu'arriva sa mort. Sa mort eut lieu dans des jours heureux. L'Écriture dit : Bienheureuæ est l'homme par la main duquel survient le bien. Malheur à l'homme par les mains duquel vient l'épreuve. Les temps de Théodose furent des temps de bien, d'amour, de grâce et de salut. Ils furent comme les temps d’Awesyü, roi de (Fol. 19 ἃ) Juda.

Le zèle du Seigneur est plus grand que (celui de) tous les fils de l’homme. C'est pourquoi le Seigneur dit au sujet de (Théodose) : En effet, tu as accompli toute ma volonté. Cela Fa élé compté devant moi. Moi, Dieu, je l'ai aimé comme David, ton pêre. Je n'ai #as éloigné de toi tes ennemis, mais je les ai tués. Le châtiment qui est venu sur les enfants d'Israël vien- dra aussi sur eux. Mais je te ferai mourir et je te ferai passer vers tes pères, dans la paix, afin que lu ne voies pas le châtiment qui viendra sur les enfants d'Israël. Telle fut la mort de Théodose, en des temps de bien et de paix, dans tous les peuples et les églises.

Sylvain GREBAUT. (A suivre.)

Bézancourt, par Gournay-en-Bray, 26 octobre 1908.

NOTES DE GÉOGRAPHIE ET D'HISTOIRE D'EXTRÉÈME-ORIENT

Par E. Blochet.

ALBRACCA

Le Boïardo, dans l’Orlando innamorato et l'Arioste, dans l'Orlando furioso, donnent à la capitale d’Angelica, la souve- raine du royaume de Cathay, la Chine des empereurs Kin, le | ts des historiens musulmans, le nom d’Albracca. Ce fut près de cette ville que le ΤῸ] des Arabes, Sacripante, livra, pour sauver la reine de Cathay, un terrible combat à Agricane :

Son dunque, disse il Saracino, sono

Dunque in si poco credito con vui?

Che mi stimiate inutile, e non buono

Da potervi difender da costui?

Le battaglie d’Albracca già vi sono

Di mente uscite? E la notte ch'io fui,

Per la salute vostra, solo e nudo

Contra Agricane, 6 tutto il campo,scudo? (Or. fur.,chant I, 74.)

L'identification de cette ville d’Albracca n'est point chose aisée, car les deux poètes n'avaient sur la géographie et sur l'histoire des pays d'Orient que des notions très vagues; l'Arioste juxtapose dans le même roman Agricane, le prince seldjoukide ue S#s (1), le roi de Séricane de la dynastie de Thsin, Shi Hoang-ti, qu'il appelle Nabateï, évidemment du nom de la nation araméenne des Nabatéens, le frère d'Angelica,

(1) Revue de l'Orient Chrétien, année 1899 : le Songe du viel pélerin de Philippe de Mézières, page 607 ; le nom de Jageras, que je n’ai pu identifier dans cet article, est celui la tribu mongole des Ikiras ον!» δ᾽ de Rashid ed-Din.

NOTES DE GÉOGRAPHIE. 347

l'Argaïl, qui porte le nom du duché écossais d’Argyll, le duc anglais Astolfo, qui est le roi lombard Ataoulf, et bien d’au- tres personnages, tels que Marphisa, la reine de Perse, qui porte le nom du roi des Perses Μάραφις, cité par Eschyle dans un vers que la critique allemande regarde, on se demande pourquoi, comme interpolé (1), sans s'inquiéter des impossibi- lités qu'il accumule à plaisir.

Il est évident qu'Albracca n'a rien à voir avec le village d’AI- brac, aujourd'hui Aubrac, dans le diocèse de Rodez (Aveyron). un vicomte de Flandre, Allard, fonda en 1120 un ordre hospitalier qui dura jusqu'au xvu siècle; les poètes épiques italiens, malgré leurs fantaisies, n'auraient pas eu l'extrava- gance de faire d’un bourg du Rouergue la capitale des Altan- Khaghans, les #& ΞΕ qui furent détrônés par les Mongols, et Albracca est vraisemblablement la ville d’Almaligh, l'une des plus riches cités de l’oulous de Tchaghataï, que les historiens musulmans écrivent El et JU), et dont le nom esttranscrit par les Chinois sous la forme ff 7} 3 Æ A-lé-ma-li (Yuan-shi, chap. 63, page 31); le nom de cette ville, que les Persans ont confondue avec une localité qui en était très voisine, Ili-baligh Gb οἷ, χε Hi] À ΜΠ IHla-ba-li en chinois (ibid.), la « ville du fleuve Ili », est transcrit en arménien dans le voyage du prince Haïthoum (Journal Asiatique, 1868, pages 467-8) sous la forme Alvaligh Uyrewçbfs, ce qui indique une prononciation Albaligh, car, si le b peut se changer en v, m n’admet pas cette transmu- tation, tandis qu'il s'échange constamment avec b dans la transcription des mots turk-orientaux et mongols; c’est ainsi que le nom d’un des meilleurs généraux de Tchinkkiz-Khan, nommé par Rashid ed-Din, «& Tchébé, se trouve dans le D)1- han-koushaï d'Ala ed-Din Ata Mélik el-Djouveïni sous la forme xs Yémé, avec, en plus, l'alternance également constante dj = ch. Albaligh Almaligh, prononcé Albalak, avec la même altération de en & qu'on trouve dans Ili, transcrit par les Chinois γἦν #i] I-la et par Rashid ls Hila, et dont on trouvera d’autres exemples curieux dans le cours de cet article, est très voisin du nom d’Albrac que le Boïardo italianisé en Albracca, car la transcription de par 7) n’est pas une dif-

(1) Perses, 778, avec la variante Μάρφις.

948 REVUE DE L'ORIENT CHRÉTIEN.

ficulté; ce qui pourrait faire douter de l'exactitude de cette iden- tification, c'est qu'on ne voit pas dans quel récit de voyage en Asie centrale le Boïardo est allé le chercher; cependant il est certain que le Boïardo avait une connaissance assez étendue, quoique imprécise, de l'Asie centrale mongole et turque, car il cite, dans l’'Orlando innamorato, les noms des Kéraït, des Kara-Khitaï, des Konghourat, des Mongols, des Mongols Niroun, des Ikiras, des Kourlas, des Nogaïs, du Kiptchak, de la ville de Kara-kouroum, le tout dans de très bonnes trans- criptions (1). Jean de Plan Carpin cite bien une ville de Lemfinc avec les variantes Lemfiut, Lemfiuc, mais il me paraît très douteux qu'il faille corriger en Lemlinc pour | Aflemline, ce qui serait une détestable transcription d'Almaligh (2). Bien qu'il en parle d’une façon incidente, il est certain qu'elle se trouvait dans le pays de Tchaghataï : « In reversione in terram Biser- minorum, in civitate Lemfinc, invenimus Ugneum, qui de mandato uxoris Jeroslai et Bati, ibat ad praedictum Jeros- laum ». Peut-être, mais ce n’est qu'une pure hypothèse, Lem- linc, pour [A]lemline, représente-t-il la forme slavisée en #74 du nom d’'Almaligh ; Jean de Plan Carpin ne connaissait ces noms que par l'intermédiaire de son interprète, le polonais Benoît, comme on le voit par la forme qu'il donne au nom des Mu- sulmans, Bisermins qui est le russe Bycypmarrr, et l'on sait comment les Russes ont transcrit les noms turks et mongols des localités sibériennes : Tobolsk pour Tobol, Yakoutsk pour Yakout, Irkoutsk pour Irkout, Akmolinsk, qui est une Ak-ba- ligh, une « ville blanche », dont le nom est devenu Akmali par la chute du Æ et le changement de b en #1. En tout cas, il semble bien que ce n’est pas dans le texte de Jean de Plan Carpin, ou dans ceux qui en sont dérivés, que le Boïardo a pris le prototype d’Albracca. :

Marco Polo parle dans le récit de son voyage d'une ville qu'il nomme Ac balec Manzi et Acmalec Manzi, avec les variantes Achalet, Ativalet, Arcamalec; Pauthier l’a identifiée avec une A 28 hk Pé-koung-tching, la « ville du prince blane », mais

(1) Revue de l'Orient Chrétien, 1899, pages 606 et 607.

(2) Une localité nommée Lemphi se trouve dans l'O. de la province de Pitchan, mais il est bien douteux que ce soit à elle que Jean de Plan Carpin fait allusion, ΡΤ:

NOTES DE GÉOGRAPHIE. 349

on attendrait plutôt, à la Chine, Ak-téguin UNS «ὁ ou Ak-toro 5,5 Q car le mot malik 2% « roi » n'était guère employé que chez les Turks musulmans du Tchaghataï et encore assez _ peu à l’époque mongole, à laquelle on se servait plutôt de US, de :,3> ou de JBL. Cette Achbalec semble plutôt être une Ak-baligh εὐ 3! dont le nom traduit la forme mongole Tcha- ghan balghasoun.

Il ne serait pas impossible que ce nom d’Acbalec soit le pro- totype de l’Albracca du Boïardo et de l’Arioste; les littérateurs qui placent le récit de leurs fictions en Orient, déforment quel- quefois les noms d’une façon amusante; c’est ainsi que les Journalistes ont inventé la dynastie turque des Abdul, aujour- d'hui régnante sur les bords de la mer Égée, et qu’on vu figurer dans une nouvelle publiée, il y quelque dix ans, dans un grand quotidien, un certain Eddin Pacha dont M. Renan οὐδ certainement écrit qu'il portait « un nom théophore apo- COpe ».

LE PAYS DE THARSE.

« En roiaume de Tarse, dit le moine Haïthoum (1), si ha III provinces, et les seignors de celes provinces se font apeler rois, et ont une letre (2) et un lengage par eaus (3), et celes gens sont apelez Iougour (4)... Cestuy roiaume de Tharse devers Orient marche au roiaume de Cathay, devers Occident au roiaume de Turquestan, devers Septentrion marche au désert, devers Midi marche à une riche province qui est appellée Sim

(1) Éd. de l’Académie des Inscriptions, page 122. (2) Le caractère dit ouïghour qui a été copié sur le nestorien que les prêtres syriens avaient transporté en Asie Centrale ; les Ouïghours avaient une littéra- ture alors que les Mongols étaient complètement illettrés; l’auteur du Djihan- koushaï nous apprend que Tchinkkiz fit prendre l'écriture ouïghoure pour écrire le mongol et, en somme, l'alphabet mongol est le même que l’alphabet des Ouï- ghours avec l'addition de quelques signes qui servent à exprimer des articu- lations que l’ouïighour ne marquait pas d’une facon spéciale; l’alphabet des Mandchous est l’alphabet mongol augmenté de signes diacritiques qui expriment des nuances vocaliques que l'écriture mongole n'indique pas; les lamas ont tiré de l'alphabet mongol un système graphique qui leur sert à transcrire le sanskrit et qu'on nomme le mongol galik.

(3) La langue des inscriptions turques de lOrkhon, traduites par Radloff et Thomsen, et qui se rapproche d’une façon étrange de l’osmanli.

(4) En ouïghour, Ouighour, transcrit dans Rashid ; 3%9| et EE

390 REVUE DE L'ORIENT CHRÉTIEN.

qui est entre le roijaume de Cathay et le roijaume d'Inde e en 6616 terre se trouvent les fins diamans... » Jean de Plan Car- pin (1) cite ce pays de Tharse, en le distinguant des Huyur (— Ouïghour) et des Sari-huiur (= Sarigh Ouïghour, les « Ouï- ghours jaunes »), comme un de ceux qui furent conquis par les Mongols : «... Brutachi qui sunt judaei, Mordui, Turei, Ghazari, Samogedi, Perses, Tarci (avec les variantes Tarti Tarci, Tati Ta(r)ci, Thaos Thars, Thrac Tharc), India minor sive Ethiopia ».

Le nom de ce pays se trouve dans le Yuan-shi, chap. 4, page 5, sous la forme %k Δ] ΒΞ Tié-lié-sou et dans le Yuan- shao-mi-shi sous celle de { Ki ï# Thié-eul-sou, soit dans la prononciation chinoise du χα" siècle, Tersou et même Dersou. Ce fut dans le pays du Grand Dersou #4, nf 3% AJ ΖΞ Yé-kho Tié- lié-sou, en mongol yéké dersou, que, d’après le Yuan-shi, se tint, à la fin de 1257, le kouriltaï au cours duquel 16 khaghan Monkké résolut d'attaquer l'empire des Soung ét de terminer la conquête de la Chine. Rashid ed-Din nous apprend que cette assemblée se tint dans une localité que les manuscrits nomment

JF C5 2,555 ς 39)95).»5 dans un pays qui se trouve au

centre de la Mongolie mt Eulss LAN, &Ls Set dont le nom n'est point sûr. Le nom du Dersou se trouve dans l’histoire de Rashid ed-Din dans deux passages différents il est ques- tion de l’armée du Dersou, c’est-à-dire de Mongolie, qu'en l'année 1275, l’empereur Khoubilaï envoya sous le commande- ment de son fils, le prince impérial Nomokhan, contre Khaïdou.

Il se trouve sous les formes “5.2 5h, cette dernière écrite à CA ππτ α τ à MAS NE DU SAR) fautivement | : re “Δ LT, les Los Qt Los, " . = 5 Κ΄ as sa ᾿ 2 © sol. PME en Oo Dei LEA 3? (2), et υ δ), > sel ls Ki L' jrs (3). L'étymologie de ce nom de Dersou est obscure, néanmoins 1] faut peut-être le rappro- cher du mongol {ers, qui été emprunté par le turk orien- tal sous la forme {,-ÿ et qui désigne un pays habité par des

(1) Page 709. (2) Man. supp. persan 209, folio 219. (3) Zbid., folio 229".

NOTES DE GÉOGRAPHIE. 391

barbares. Le dictionnaire qui termine l'édition modernisée du Yuan-shi restitue ce nom, d’après la transcription τοῖα d’une façon tout artificielle à l’époque de Khien-loung, ff ΠΡ. ἐξ Té-lué-sou, sous la forme mantchoue Térésou dans ae vott une plante précieuse Æ ἐπ (1) et il confond le pays de ce nom avec celui de Talas # ΜΠ & is dont il sera auestion plus

ἫΝ loin. Le même ouvrage (2) ste le nom de 4, π| χκ AU 5%, dans l'édition modernisée, ff τῷ 1# #, soit Yéké Dersou, en Yéké Térésou, sans chercher à l'identifier. Vassaf, dans son histoire des Mongols, donne au nom que Rashid écrit 5,2 la forme 15» et il interprète d'une façon tout à fait arbi-

traire CRE JS par « armée nombreuse » : LG > p es ΘΓ. à AGP cu Î JUS Es = LR? ες (3) et ν᾿ 9 su

Sie, δα» ‘st, ὌΝ οὐδὲ st Goo p Wie σοὺ δ (ὦ. On voit” par la” comparaison des textes de Rashia et du FYuan-shi que le pays du Grand Dersou est la Mongolie dont la capitale était Kara-kouroum et dans laquelle furent conservés, jusqu'à la fin de la dynastie des Yuan, les quatre grands ourdous de Tchinkkiz Khan, les ἧς ΠΠ Πα % τῷ Æ dont parle le Yuan-shi. Cette contrée, comme le dit très Justement Haïthoum, avait été autrefois le royaume des Turks Ouighours ; dans sa notice sur la tribu des Ouïghours, Rashid ed-Din dit. en effet que dans le pays qu'ils habitaient jadis, il ν avait deux chaînes de montagnes fort élevées, l’une nommée Boukratou Bouzlouk et l’autre, Ashghounlouk Tengrim : les monts de Kara- kouroum se trouvent entre ces deux chaînes et on appelle la capi- tale qu'Ougédeï Kaan bâtie du nom ee cette dernière chaine : sis ς ag 5 de) «Ξ » «ὦ 5. 3) jt 9! Les > ve) ur) Si ων» 55 HS τ el 82 9 CE LS "Ὁ" ὅ55 0 ἐπ ETAPE 5 Let) aS Gytéo ssl S D).

C'est ce que ne apprennent également les historiens du

(1) Chap. 5, page 6.

(2) Chap. 4, page 13.

(3) Man. supp. persan 1641, fol. 57v. (4) Zbid., fol. 58".

(5) Éd. Bérézine, page 160.

392 REVUE DE L'ORIENT CHRÉTIEN.

Céleste Empire et on lit dans le Thoung-kian-kang-mou (1) que le deuxième mois de la seconde année Touang-phing de Li- Tsoung des Soung (1235), les Mongols firent revêtir d'une en- ceinte fortifiée leur ville de Kara-kouroum (Ho-lin) : fx δὰ À HE [El] #6 À {in #7 ἘΞ ἐκ k « Ho-lin, primitivement, à l'époque des Thang, était l’ancienne capitale du Houeï-hou Phi-khia Ho-han », c’est-à-dire du Bilghé-Khaghan, du sage Khaghan, dont on a retrouvé les inscriptions en caractères runiques sur les bords de l'Orkhon. Ala ed-Din Ata Mélik el-Djouveïni dit, dans le Djihan-koushaï (2), qu'Ougédei fit bâtir sa capitale d'Ourdou- baligh, ou Kara-kouroum, sur les ruines de l’ancienne cité de Boughou Khan, Je +, souverain des Ouighours, dont il ne restait plus à son époque qu'un mur d'enceinte érasé et quon nommait Maou-baligh ἐσὺ :.b, soit en mongol Maghou-baligh, la « mauvaise ville » (3).

C'est donc à tort que la personne qui a annoté les deux textes, français et latin, de la Fleur des Histoires d'Orient, écrit (4) que le royaume de Tharse est la contrée de Teras ou Talas, au Nord de la province de Ferghana, à l'Est de la Trans- oxiane, et qu'il est le pays auquel Marco Polo donne, dans le récit de son voyage, le nom de Chigin Talas. Cette annotation repose sur une triple confusion : Celle de 5 (5) Taraz, ou Tiraz suivant A bou Saïd, la ville moderne de Tourkestan ES 5,

(1) Sou-pian, chap. 20, pages 15 et 10.

(2) Folios 19.) et 94".

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(4) Pages 122, 262 et Index, page 994. (0) Yakout, Modjem, t. Il, page 524.

NOTES DE GÉOGRAPHIE. 393

dans le Syr-Daria (au N.-0. de Tashkent et au S.-E, de Pe- rovsk) avec la ville de Talas, que Rashid ed-Din écrit {-*, Qupuu Talas, dans le voyage du roi Haïthoum par Guira- gos (1), et à laquelle les Chinois donnent le nom de ΒΞ 7} ἘΠ Tha-la-seu (2), que la géographie des empereurs Mandchous place dans la province d’Ili, à l'Est de cette ville, et le X/ing- ting-Si-yu, avec la transcription CE, entre Yingohar JE: et Oulam-Mounar, FLE ss! ΞΕ, ΤΠ À ZX É ff, dans le Thian- shan-pé-lou, sans en déterminer la situation géographique d'une façon plus précise. Cette ville se trouve certainement sur le cours du fleuve Talas-ghol, le Ἐξ ΤΣ # du Taï-Thsing-yi- thoung-tchi (3), et c'est probablement sur ses ruines que s'élève la ville russe d’Aulié-ata; par la route, Tourkestan et Aulié-ata sont distantes de près de 350 kilomètres. la confusion de Taraz Tourkestan avec le pays qui avait pour capitale Kara-kouroum à 35 degrés plus dans l'Est. La confusion de Taraz avec le pays de Chingin-Talas dont parle Marco Polo.

Il serait d’ailleurs injuste d’en faire un crime inexpiable à Ch. Schefer, car on a vu plus haut que les académiciens chi- nois qui, sur l’ordre de Khien-loung, ont rédigé le Diction- naire du Yuan-shi, ont confondu le Dersou avec Talas, et l’auteur de la continuation de la Djami et-lévarikh (4) confond continuellement 5h Taraz et De Talas, ce qui induit en erreur Quatremère et après lui Ch. Schefer. Rashid ed-Din lui- même, qui commis si peu d'erreurs dans la Djami et-le- varikh, a été assez mal inspiré, au commencement de l'histoire des Turks, pour mettre Talas CES non loin de l'emplacement de Kara-kouroum, commettant en somme, à peu de chose près, la même hérésie que Schefer (5).

(1) Journal Asiatique, 1868, pages 467-8.

(2) Taï-Thsing-yi-thoung-tchi, chap. 415, page ὃ; Khin-ling-Si-yu-thoung-wen- tchi, chap. 1, page 98,

(3) Chap. 415, page 11.

(4) Man. supp. persan 209, folio 481": cette incroyable confusion a été com- mise par bien d’autres auteurs, par Bâber, l’auteur de l'Akbar-namèh, l'auteur du Heft-iklim et même, ce qui est incompréhensible, par Vassaf, qui forme un complexe de Taraz LL, Yenghi, Kentchek et Tchakal, Notices οἱ Extraits,

225, note, quand on sait qu'il s’agit certainement, comme on le verra plus loin,

du complexe Talas, Yenghi, Kentchek, Tchakal. (5) Le campement d’été d’Aboultcha Khan, dit Rashid, était dans l'Ortagh et le ORIENT CHRÉTIEN. 23

304 REVUE DE L'ORIENT CHRÉTIEN.

Si l’on en croyait Pauthier, le pays de Chingin Talas de Marco Polo serait la contrée de & αὶ # ΜΠ (1) Saï-yin Tha-la dont parle le Khin-ling-Si-yu-thoung-wen-tchi(2) et qui dépend d'Ou- roumtchi, l’ancienne ville de Besh-Baligh. Cette identification est impossible pour plusieurs raisons; tout d’abord, Saï-yin tha-la n’est que la transcription chinoise du nom de ce pays qui, en mongol, en mandchou, en tibétain, en djounghare et en arabe ne τον est écrit Saïn-tara; or il est certain, absolument cer- tain, que jamais Marco Polo n'aurait transcrit Saïn par Cingin Tchinguin et tara par talas.

Dans le récit de son voyage, Marco Polo, venant du Turkes- tan chinois, arrive à la ville de « Lop... qui est à l'entrée du grandisme désert, si que les cheminans se reposent en ceste cité pour entrer ou désert... et 11] est mains larges, si met on à passer un moys (9)... or vous laisserons de ce désert et vous conterons des provinces que l’on treuve à l'issue de ce grand désert de Lop (4)... quand on chevauchié trente journées en ce désert que je vous ai dit, si treuve l'en une cité qui est nommée Saciou (— Shatchiou, en chinois ἢ» }}} Sha- tchéou) qui est au grand Kaan. La province s'appelle Tan-

Kartagh, qui sont des montagnes grandes et élevées; 1] y a dans ces environs une ville nommée Anbaïdj; son campement d'hiver était dans ces mêmes parages, dans une localité appelée Yoursough et Ghaghian et Karkoroum que l’on pro- nonce aussi Kara-Kouroum; la ville de Talas et celle de Ghari-Saïram se trouvent également dans ce voisinage ; Ghari-Saïram est une très grande ville et

fort ancienne. | 4 he . S QU ee EU Si “2 οὐδοῦ ἀπ 95 δόλος. ω ba es τὰν (d Ai ἘΠῚ Ds ne 2

NT Ὡς , “. DA JL Σ “3 ς Ἀγ fi [Ὁ PE | Le pu Bérézine, REA page 14: πη peu plus loin, Rashid ed-Din dit qu'après s'être insurgé contre son père, Oughouz s’empara de tout le pays de Talas et Saïram jusqu’à Boukhara (ibid., page 20). Il est insensé de voir un auteur sérieux confondre Talas, Saïram et Karakouroum, en commettant une erreur aussi énorme que celle qui consisterait à mettre Marseille, Lyon et Dunkerque dans le même département. (1) Pauthier éerit JE A. (2) Chap. 1, page 9 (9) Ed. Pauthier, page 149. (4) Page 151.

NOTES DE GÉOGRAPIIIE. 399

σαί (1)... » Une fois arrivé à Sha-tchéou, Marco Polo prend cette ville comme origine de la description géographique des contrées du Si-yu oriental : «... Vous conterons d’une autre cité qui est vers maistre (Nord-Ouest) jouste le chief à cel dé- sert (2)... Camul (la ville que les Chinois nomment 14 %# Ha- mi, transcription de la forme ouïghoure Khamil) est une pro- vince qui jadis fu royaumes... Or vous laisserons de Camul, et vous conterons des autres provinces qui sont entre trémon- taine et maistre (entre le Nord et le Nord-Ouest), et est au grant Kaan, qui nom Chingin-talas. Chingin-talas est une province qui est encore ou chief du désert entre maistre et trémontaine. Elle est grant seize journées et est au grand Kaan (3)... Quand l'en se part de ceste province que je vous ai dit, si chevauche l'en entre grec et levant (Nord-Est et Est) dix journées, et en trestoute ceste voie n’a nulle habitation, se pou non (4)... et au chief de ces dix journées si treuve l’en une autre province qui est Suctur en laquelle a citez et chasteaux assez et. la maistre cité nom (5) Siccui (Sic-tchéou, soit x }}} Sok-tchéou).. La grant province général, ces trois provinces (Sha-tchéou, Chingin-talas et Suctur) sont est Tanqut (6). »

L'identification précise de ce pays de Cingin-talas (— Tchin- guin-talas) est tout ce qu'il y a de plus difficile. Philologique- ment, Cingin-talas ne peut être la Saïn-tara des environs d'Ou- roumtchi, et cela est également impossible au point de vue géographique. Marco Polo dit qu'il faut, en partant de cette province, dix journées de marche en se dirigeant dans l'E.- N.-E. (greco-levante) pour arriver à celle dont la capitale est Sok-tchéou, or Sok-tchéou est dans leS.-0. et non dans l’E.-N.-E. d'Ouroumtchi et la distance entre Sok-tchéou et Ouroumtchi est bien grande pour que les frontières de leurs provinces ne soient séparées que par dix jours de désert. Si Khamil est bien dans le N.-0. de Sha-tchéou « Jouste le chief à cel désert »,

390 REVUE DE L'ORIENT CHRÉTIEN.

la province qui est au N.-N.-0. de Sha-tchéou (entre. trémon- taine et maistre) et « qui est encore ou chief du désert » doit avoir sa capitale à la hauteur de Khamil sur la route de Kha- mil à Tourfan, très probablement, à Lodoung, Kosh, Tes, Pi- tchan [ἢ Æ ou Lemtchin, et elle est certainement différente de Tourfan qui était à l'époque mongole la ville de Kara-Kho- tcho. On sait par la grande géographie des empereurs mandchous (1) qu'à l'époque mongole, la province de Pitchan portait le nom de pays de Louktchak, que les Chinois ont tran- scrit & % Ἐξ τὰ Lou-khe-tchha-khe, ce qui n'a rien à voir avec le Cingin-talas de Marco Polo. Dans ces conditions, en admet- tant que la province de Suctur, dont Sok-tchéou est la capi- tale, commence à la limite actuelle du Kan-sou et du Sha-mo, très au N.-0. de An-si-tchéou, les deux provinces de Pitchan et de Suctur n'étaient en effet séparées que par environ dix journées de chemin à travers l'extrémité orientale du Sha-mo qui s’étend entre Asortou, Khoung, Lemfi et la route d'An-si- tchéou au Lob-Nor, mais la route qui conduit de Pitchan à Sok-tchéou, loin d’être orientée dans l'E.-N.-E., porte, dans une direction presque rectangulaire, au $.-0.

Il en faut très vraisemblablement conclure qu’en dictant, ou en rédigeant, ce passage de son livre, Marco Polo commis une confusion assez explicable quand l’on pense qu'il ne parle que. par ouï-dire de la province de Cingin-talas et qu'il ne l'avait pas visitée.

Aucune des explications qu'on données de ce nom n'est satisfaisante et il n'est pas, pour toutes sortes de raisons, la transcription du nom du lac de Tchi-kin à 260 de Sou- tchéou comme l'a prétendu Palladius (2), car il faudrait ad- mettre que ce lac était nommé Tchikin-talaï par les Mongols et que les copistes de Marco Polo ont transformé Tchikin-talaï en Cingin-talas, or on ne saurait tout expliquer par des déforma- tions paléographiques, et Jamais les Mongols n'ont nommé dalaë « la mer » un petit lac qu'ils appellent couramment nor et κοι, au point qu'ils désignent sous le nom de Keuké-Nor « le lac vert » l'immense nappe d'eau que les Chinois nom- ment la « mer verte » Ἐξ ΞΕ. D'ailleurs, Marco Polo donne aux

(1) Taï-Thsing-yi-thoung-tchi, chap. 417, page 1. (2) Yule, Marco Polo, 3" édit., I, page 214.

NOTES DE GÉOGRAPHIE. 391

provinces dont il parle le nom de leurs capitales et il est assez peu probable qu'il eût désigné un pays aussi étendu que celui de Cingin-talas par le nom d’un petit lac qui n’est du reste pas assez éloigné de Sok-tchéou pour satisfaire aux conditions géographiques qu'il énonce.

Je crois, mais sans en pouvoir fournir de preuves, que l'il- lustre vénitien a considérablement reporté vers l'Est une pro- vince de Cingin-talas qui n’appartenait pas au grand Kaan, mais à l'oulous de Tchaghataï, et que l’empereur de Daïdou au- rait volontiers annexée à son empire s’il l'avait pu. Cingin est la transcription mongole régulière de Yenghi, avec l’adjonction d'un paragogique, comme dans Peïn (1) qui est la ville de PaifÆ dans le gouvernement de Saïram, dans Khashin, nom d'un fils d'Ougédeï, qui est la transcription du chinois ἐπ ΤῈ Kha- shi, ancien nom du Tangghout, dans Shirin, transcription du prakrit siri, sanskrit 510 s77, dans Makhabalin Qt, nom d'un fils de Témour Oltchaïtou Khaghan et transcription du sanskrit Mahäbalt At (2), et la transformation de y initial en {ch comme dans le nom de la ville chinoise de # Ji Yang-tchéou qui est dans Rashid «= Tching-tchéou (3).

Les villes de Yenghi et de Talas formaient dans la géographie du pays de Tchaghataï un complexe Yanghi-Talas qui est sou- vent cité par les géographes musulmans et dont Quatremère (4) a donné plusieurs exemples. L'auteur du Mésalik el-absar (5), décrivant la route qui menait de Perse par Samarkand aux villes

+ Ed

du Céleste Empire, dit : Les 8.5 (6) εὧῷ Ji She Cp

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w s Φ 2, OI Sal ἐν Sr τον mis ἐπὶ LU is | de (7) VS 2

(1) Pauthier, Marco Polo, page 145; Marco Polo certainement entendu pro- noncer Peïn et ce n’est pas lui qui a ajouté un x à ce mot.

(2) Le thème de ce nom sanskrit est mahäbalin, mais le nom est mahä&balr.

(3) Avec l'alternance bizarre de a-e dont on trouvera des exemples fréquents dans le cours de ces notes; cette ville paraît dans le texte de l'historien persan à la page FVT (cf. note page FVT, et appendice à la page FVT) de l'édition qui s'imprime à l'heure présente chez Brill, à Leyde.

(4) Notices et Extraits, tome XIII, page 2%; dans un passage de la vie de Té- mour Keurguen par Ibn Arabshab, il est parlé de UE, au delà du fleuve de Khodjend, à environ 15 jours de Samarkand.

(5) Man. arabe 2325, folio 45 verso. (6) m. 4. - (7) M: se

308. REVUE DE L'ORIENT CHRÉTIEN.

(2) LE οἷς NT (4) LS ὅλα. }}}9 Les με Lie ssl,

ll (1) 4 nos es τς. ὑφ;

ες 62e δ lt bo jy CU A us Le sel SW δ] (8) = Ji (M es

(9) ἵν ἐν be Med Ur Les U%)) | Ce à Lx 118 (8) 9

EE gs ω ὄρ» de D 9 τοῖν ἈΠΕ ΠῚ: εν L Re Les 3%)! (10) Lu A! « De Samarkand a Yenghi, il y a 20 jours ; Yenghi se compose de 4 villes qui sont séparées cha- cune les unes des autres par un seul farsakh; chacune de ces cités un nom qui lui est propre; la première a nom Yenghi, la seconde Yenghi-baligh, une autre Kantchek, une autre Talas. De cette Yenghi à Almaligh lil y 20 jours, d'Almaligh à Kara Khotcho... (11), de Kara Khotcho à Kam-tchéou Ἢ; }}}. qui est la première des villes de la Chine, 40 jours, de Kam- tchéou à Khan-baligh 40 jours; ensuite, de Khan- baligh à el-Khinsaï (x fi King-ssé) (12), il y deux routes, une route par terre et une route par mer et, que l’on prenne l’une ou l’au- tre de ces deux routes, il y a de Khan-baligh à el-Khinsaï 40 jours de distance ».

L'existence du complexe Yenghi-Talas est suffisamment prou- vée par ce passage du Hésalik el-absar ainsi que par celui de la vie de Témour par Ibn Arabshah dans lequel ce virulent historien parle du pays de Yenghi-Talas 1 ET et son nom correspond d’une façon si parfaite à celui de Cingin-talas du

(1) m. λυ. (Cm. sb Aus (5) m. CS A, la ae Le est don- née d’après une forme citée dans la chronique de Vassaf. (4) m. JD: (9) m. Bla. (6) Il y ‘certainement ici une lacune que mare n’a pas vue quand il traduit ce passage du Mésalik (Notices, tome XIIT, page 224), c qui y introduit une confusion inextricable. (7) Le man. omet τ

LA ss. 2=7118)1m; JS? (9) m. ΕΞ

(10) m. Lust Ἰ:

(11) Il faut vraisemblablement restituer : 20 jours.

(12) King-ssé, en chinois, signifie « la capitale »; c’est pour cela que lPauteur du Mésalik, sachant que ces deux mots forment un nom commun, et non un nom propre, a construit leur transcription avec l’article arabe.

NOTES DE GÉOGRAPHIE, 359

récit du voyage de Marco Polo qu'il me paraît bien difficile de les séparer. Si cette opinion est juste, il en faudra conclure que le voyageur vénitien, en déplaçant de près d’un mois et demnide chemin dans l'Est la province de Yenghi-Talas et en appliquant son nom à la province de Pitchan, a été trompé par cette ville fantôme et mystérieuse, aujourd'hui perdue dans les steppes de l'Asie Centrale, qui égaré tous ceux qui se sont occupés d'elle et probablement aussi l’auteur de cette note.

Le nom du pays de Tharse n’a rien de commun avec celui de Sarze qui, dans l’Arioste, désigne le royaume de Rodomonte, le Mars africain que, dans d’autres passages, il nomme plus sim- plement le roi d’Algér. Sarze Sardzé est la transcription du nom arabe d'Alger ri | Djézaïr avec le zézaiement de dj trans- crit dz et la métathèse de la syllabe portant 17, phénomène très fréquent, comme le montrent suffisamment le latin forma en face du grec μορφή, l'arabe 3<,5 qui est le latin gradus com- plètement retourné, l'arabe JL bourghali « cuir de Russie », pour ἰδ boulghari (1).

HE FR FO-LIN = ‘Pour.

Fo-lin 2}; #x désigne d’une façon certaine, sans que l'éty- mologie en ait été donnée d’une façon irréfutable, l'empire romain (2). La prononciation annamite de ces deux caractères

(1) Dozy, Suppl, 1, page 79,

(2) Fo-lin EL À paraît pour la première fois dans le Souwï-shou (581-617) et est écrit }} JE Fo-lin dans le Ta-Thang-hsi-yu-tchi terminé en 646 (Hirth, China, page 17). C'était auparavant le pays de Ta-Thsin; d’après Edkins (A plea for Roma and Byzantium), le nom de Ta-Thsin fut changé en Fo-lin vers 607, d’après

des recherches faites par Pheï-kiu ΞῈ ἘΕ, qui obtint des informations sur les contrées de l'Ouest par les provinces turkes. On verra bientôt l'importance de cette assertion. Le royaume de Fo-lin, dit le Tchiu-Thang-shou (618-906), aussi nommé Ta-Thsin, est situé devant la mer occidentale ; au S.-E., il est frontière de

—H— En ν νυ, D la Perse : ἢ} #8 ΚΒ À X À Æ D ΜῈ ZE K ΤΏ 81 ὑκ ἘΠ 48

(Hirth, pages 51 et 104); le même ouvrage dit que quand les Ta-shi, les Arabes.

eurent conquis ces contrées, ils envoyèrent leur généralissime FE FE Mouo-ei pour assiéger la capitale du pays (Hirth, page 55). Moaviya, fils d’Abou-Sofian, fut en effet nommé gouverneur de Syrie en 641; le Æsin-Thang-shou (milieu du xr° siècle) dit que Fo-lin, l’ancien Ta-Thsin, est distant de 40.000 li de la ca- pitale du Céleste Empire, et situé à l'Ouest de Tchan, dont la prononciation

ancienne, d’après Hirth, est Shem ou Shim Æ 5 ΒΓ] F3 τς Æ Æ ΠῈ

360 REVUE DE L'ORIENT CHRÉTIEN.

est fet-lem qui est très voisine d'une prononciation fât-läm, le caractère #f se lisant pu en coréen, avec l'alternance d-{ —!/ qui se trouve dans le grec δάχρυμα et lelatin lacruma. La pronon- ciation ancienne de {᾿ξ τὰ paraissant être bul-lam, M. Hirth, dans son excellent livre, China and the Roman Orient, a rap- proché cette transcription du nom de Bethléhem, l'hébreu 2n9-n2 Jeth-léhem, du mot sémitique patrik, patrak qui désigne le Patriarche des Chrétiens, le syriaque bris, l'arabe JL, et 2, emprunté au grec πατριάρχης (1). Il serait bien

étonnant de voir l'empire romain désigné sous le nom de pays de Bethléhem, car cet humble village de Palestine, le Verbe s'est incarné par hasard, ne joue dans l'histoire du monde chré- tien qu'un rôle tout à fait effacé qui n’a rien de comparable à celui de Jérusalem, la ville sainte des Hébreux et des Arabes, qui était encore pour Dante le centre de l'Univers, et il serait tout aussi insolite de trouver l'empire romain désigné sous le nom de royaume du Patriarche. Personne, même à la Chine, n’a ja- mais songé à appeler la France le royaume de Lourdes ou la terre du Primat, et d’ailleurs des raisons phonétiques s'opposent à ces explications de M. Hirth; 1] y a dans l/éhem une très forte

, γν ENS 5 . CRE (Hirth, pages 56 et 106); #7 Shem est alors la transcription du nom Sha/m «

ele fe Sha/am, ou vulgairement L& Sham ; d’après Yakout(Hodjem, tome IT, page 240), le pays nommé Sham s'étend de l’Euphrate à el-Arish, aux frontières de l'Égypte, et des deux célèbres montagnes de Tayyi ee les seuls endroits l’on parle aujourd’hui larabe pur, à la Méditerranée ç>) Dax AVEC, COMME villes principales, Manbidj, Haleb, Hamah, Homs, Damas, Jérusalem, el-Maarra, et dans le Sàhel, dans l’ancienne Phénicie, Antioche, Tarabolos, Akka, Sour et As- ει ἘΞ ME τς a . ,. PARC - calon. Par Sham #7, il faut comprendre ici la Syrie de l’intérieur, la Syrie de Damas, que les géographes arabes (Yakout, ibid., page 587) nomment QD 2

= ΄-»ε

6.9 Dimeshk esh-Sha’m et que les historiens appellent simplement 42: esh- Sha’m, qu'il faut se garder de traduire par Syrie: les historiens musulmans comptent dans cette Syrie de l’intérieur, par opposition au Sâhel, les villes fron- tières y |, et l’Avasim ΜΕ ex) de sorte que l’histoire des Thang, si ron s’en

tient à la lettre du texte, entend par Fo-lin Ta-Thsin la côte phénicienne à l’Ouest de Damas.

(1) On pourrait aussi penser à patrik, du grec πατρίχιος, en arabe Gb, δ syriaque H;4le.

| NOTES DE GÉOGRAPIIIE. 961

aspiration, car ce mot sonne beaucoup plus /ékhem que léher, ce dont les Chinois auraient certainement tenu compte dans leur transcription s'ils avaient recueilli ce mot de la bouche d’un

Syrien ; il suffit d’avoir entendu un Arabe prononcer le mot “5: qui est le même que 27° pour être édifié une fois pour toutes à ce sujet; or les Chinois rendent toujours les articulations ;, τ

et on, T par les caractères de la classe # , de sorte que nn? eüt cer rtainement été transcrit /6-hé-ma ; c'est ainsi que l'arabe

΄

Sail est transcrit dans le J'uan-shi βΠ & Æ A-ho-ma. Il ne faudrait pas alléguer contre cet argument les tr ion chi- noises des noms mongols dans lesquelles un Æ} ou un gh éty- mologiques semblent avoir été omis, comme dans ΞΕ 8! da-ba qui transcrit une forme mongole dabak:han; en réalité, les Chi- nois n'ont pas transcrit une articulation qu'ils n’ont pas enten- due parce qu’au xu1° siècle le mot dabakhan se prononçait déjà daban, l'origine du turk fépé ou, tout au plus, dabaan, tandis qu'à l'époque les Chinois ont transcrit le nom de l’em- pire romain sous la forme $f #%, 2n97n2 s’articulait très nette- ment Beth-lékhem, comme il se prononcerait encore aujourd'hui sur le terroir syrien. 4% /am ne peut pas davantage transcrire rik ou rak de patrik, que les Chinois auraient certainement rendu par Æ, 5j, 7] lik, #k, fx lak: ou par quelque chose d’ap- prochant. De plus la transcription bu pour "2 de Bet-lékhem serait loin d'être satisfaisante.

Cela posé, il se peut que les deux caractères qui se lisent aujourd'hui Fo-lin représentent tout simplement la transcrip- tion du nom de Rome, entendu par les Chinois, non de la bouche d’un Latin, mais bien d'un Grec ou d’un Perse, d'un Oriental en tout cas, qui ne prononçait pas Roma comme l'arabe C2) Roum (1), mais bien Hroma, comme le montrent la forme

(1) Toutefois, dans son Modjem el-bouldan (tome 1. page 401), Yakout nous

2

= co À τ a conservé une forme | Ourim « avec un dhamma, puis un soukoun, et un

kesra sous le ra », qui est le nom de quatre villages qui dépendent d’Alep et dans laquelle il semble bien qu'il y ait le nom de ‘Pœoun. Ce qui est certain, c’est que la première syllabe ou- n’est point primitive et que Yakout en avait con- science; Abou Ali el-Fasavi disait, en effet, que, dans ce nom, le hamza, c’est-à- dire la voyelle ou, n’est pas étymologique et qu'il été ajouté pour lui donner

909 REVUE DE L'ORIENT CHRÉTIEN.

grecque Ῥώμη (1), la forme NTM Ahroumiyya avec un élif prosthétique qui se lit dans une inscription nabatéenne du 1" siècle (2), le pehlvi Hrum, l’arménien 4e Hrom (3) et le syriaque bc Rhoma (4).

Quelle qu'en ait été la prononciation exacte aux époques anciennes, il est certain que dans ff #%, le caractère 7% qui se prononce aujourd’hui lin, représente la syllabe rouwm, car un caractère identique # lin (5)transcrit, dans δὰ Ho-lin, le nom apocopé de (Kara)-Kouroum, la capitale des Mongols, qui se trouve dans Rashid ed-Din sous la forme 9) οϑ 5 dont la der-

nière syllabe Ὁ" est identique au nom arabe (> de la ville de

Rome. C'est un point qui ne fait aucun doute et, dans ces conditions, il est bien difficile de ne pas admettre que 3} représente une altération orientale du nom de la ville éter- nelle. La prononciation très ancienne du caractère ff, aujour- d'hui fo, était certainement buf, puisqu'il transcrit le mot prakrit but, dérivé du sanskrit Bouddha, et qui se trouve en

une forme arabe: ces localités se nommaient la grande Ourim, la petite Ourim, l’'Ourim du noyer, l'Ourim des Barmékides. L’Ourim du noyer était pleine de merveilles et de souvenirs chrétiens : il s’y trouvait un édifice qui anciennement avait été un temple et l’on voyait la nuit briller un feu écla- tant; si l’on s'approchait, la flamme s’évanouissait et l’on ne discernait plus rien. Un habitant d'Alep raconta à Yakout que, sur cet édifice, il y avait trois tables de pierre portant des inscriptions écrites avec un caractère ancien dans lequel il faut probablement reconnaitre de l'araméen; d’après cet individu, l'inscription qui se trouvait au Sud était ainsi rédigée : « Dieu est unique! Cet édifice fut terminé en l’année 328 à partir de la naissance du Messie. »

(1) Il semble que le pinitial du grec emportait toujours l’aspiration initiale qui est marquée par l'esprit rude 6; en somme, le grec traitait tous les mots qui commencent par un gp comme s'ils avaient commencé anciennement par le digamma ou une sifflante, tel ῥήγνυμι en face de frango; il n’y pas à douter que le grec prononcait Ῥώμη, Hromé, car, sans cela, les dialectes asiatiques qui ont emprunté au grec le nom de la ville éternelle n'auraient pas écrit Hrom, mais Rom.

(2) Cette forme m'a été indiquée par M. Clermont-Ganneau.

(3) En arménien, Zonmlp Horomkh ou amp Hromkh désigne spécialement les Grecs, 2 απ εξ Hromaietsikh, les Romains et les peuples d'Europe (Hist. Arm., page 7, note 9): la forteresse de DA xl est en arménien 2 argus Hromgla (ibid., page 154). ;

(4) Forme citée par Payne Smith à côté de la forme courante beoÿ Roma, page 680.

(6) {π|, Pi étaient des homophones et avaient anciennement la même pro- nonciation am.

NOTES DE GÉOGRAPHIE. 363

pehlvi sous la forme bw (1) qui a donné naissance au persan moderne + but. C’est un fait indubitable, mais ce qui l’est également, c'est que ce caractère, qui est aujourd'hui /o, se pro- nonçait /é{ ou fat à l’époque à laquelle il a été emprunté par l’'annamite, ce qui établit d'une façon certaine l'existence d’une prononciation tout wet, intermédiaire forcé et obligatoire entre la forme en ὦ, bout, et les formes avec f, car ne peut virer directement à /.

En somme, les Célestes entendirent prononcer le nom de Rome, non H-rum, avec un nettement distinct de l’7 comme l’écrivent le pehlvi Hrum et l'arménien ζ πη Hrom, mais bien R'um avec un 7 aspiré, comme l’écrivent le grec ‘Pour et la forme araméenne Hoosi Rhoma qui est citée par Payne Smith; or toutes les aspirées, ou plutôt les spirantes, ont une tendance marquée à aboutir à un phonème qui, pour une oreille étrangère, sonne à peu près comme un / - c’est ainsi qu'un français entend l'anglais Afhencum comme un complexe très voisin de Aji-

΄ο

nium, que l'arabe ὃὅ..3 kahva à été rendu en français par « café », avec l’alternance Lv f, que le participe persan £<s soukhta est prononcé soffa par les Tures et que dans leur langue >> djéhoud se prononce {choufout. Il est très vraisemblable que les Célestes ont entendu Rhum Ῥώμη prononcé à peu près comme /rum qu'ils ne pouvaient transcrire qu’en faisant une syllabe de l’f initial et une seconde syllabe du reste du mot, de même qu'ils ont transcrit le nom des Francs, par l'intermé- diaire du persan ESS Frang, sous la forme ff ΕΗ Fo-leang, dans laquelle le son initial /, certain dans frang, est rendu par f# homophone de ## fo, ce qui prouve bien que dans #f 4 Fo-lin le caractère θξ /o transcrit un f initial et que Fo-lin est bien pour /-läm H-rum. D'ailleurs, on sait comment l’aspirée et la sifflante / s'échangent, quand on passe d’un dialecte à un autre, dans'la prononciation d’un même caractère : ἤῃ Lo, avec les prononciations dialectales w0, vo, est en japonais wa et en annamite Lva; Je houo, dans lesdialectes fo,esten annamite σα, ἘΠ khouan, dans les dialectes fun, fon, est en annamite Æhroan. Il est probable qu’au commencement du vu‘ siècle, le caractère

(1) La longue du pehlvi büt n’est qu'orthographique et ne correspond pas à un allongement réel,

904 REVUE DE L'ORIENT CHRÉTIEN.

3. anciennement διέ, aujourd’hui fo, se lisait, soit wo, soit fof, avec une tendance à perdre sa dentale finale; d’ailleurs, 1] arrive que les Chinois introduisent dans la transcription des noms propres étrangers des lettres paragogiques, comme dans Pan-lé-ko qui transcrit Balkh; les Annamites qui ont entendu le nom du prince mongol Toghon, « le chaudron », certaine- ment prononcé Toghon, l'ont transcrit Toat-hoan (1) avec l'intro- duction inexplicable d’une dentale, ce qui expliquerait wot-lâm, fot-läm pour fo-läm. Ce qui prouve d’ailleurs, mieux que toutes les raisons phonétiques qui viennent d'être invoquées, que le nom de Fo-lin 9}! ÿ% du Soui-shou est bien une trans- cription du nom de Rome par l'intermédiaire du grec, c’est que les Chinois ont transcerit par les mêmes caractères le nom de l'empire des grands Seldjoukides qui comprenait alors l'Asie Mineure, le pays de Roum, le 91 δ. des historiens arabes, et le nom de la capitale des états pontificaux qui est indubitable- ment Roma. Dans son livre sur les rapports de l'empire chinois avec Fo-lin, M. Hirth ne s’est pas aperçu, ce qu'il serait fort injuste de lui reprocher, que les Célestes ont confondu sous ce nom de Fo-lin, suivant l’âge des livres historiques dans lesquels on le trouve, trois pays différents : la Syrie, l'empire Seldjoukide et les états du Pape.

L'histoire des Soung (960-1279) raconte (2) qu'en la an- née Yuan-feng (1081), le roi de Fo-lin, j$ 7 ff ἘΞ Ex #4 Miéh- li-i-ling-kaï-sa, envoya à la Chine un ambassadeur nommé An JE #4 © JE τῷ 31} Ni-ssou-tou-ling-sou-meng-phan. Hirth n'a pas reconnu la forme qui se cache sous la décevante transcription Miéh-li-i-ling-kaï-sa. Æ 8, dans certains dialectes, la pronon- ciation lüng, et 4 se prononce en coréen ryông. Je crois que le transcripteur chinois a entendu nommer ce prince Mélik Kaïsar-1- Roum, «le roi, César (du pays) de Roum », en persan y<$ SL

ὍΣ ce qui est un titre seldjoukide, les sultans osmanlis, sucC-

cesseurs politiques des Seldjoukides, étant nommés Kaïsar-1- Roum dans la poésie persane. Il s’est fait ce raisonnement

(1) Ad. Fillastre, Zbn-Batoutah, dans la Revue Indo-Chinoise, 15 février 1908 page 168. | (2) Hirth, pages 62-108.

NOTES DE GÉOGRAPHIE. 365

inconscient : Kaïsar est un titre : si Je voulais dire Kaïsar de Thsin, je dirais Thsin Kaïsar, mais comme les Persans ren- versent l’ordre logique, ils diraient; Kaïsar Thsin : ce qui suit Kaïsar, troum, est donc un nom de pays. Il eût fallu lui expli- quer l’origine pronominale de l'izafet, -i-, qui répond assez au Z du chinois, et que primitivement Kaïsar était un cas direct et Roum un cas indirect. En résumé, je crois que I-lüng- Kaï-sa Kaïsar-i-Roum, le chinois n'ayant pas la syllabe Roum et l'ayant rendue par un phonème qui s’en rapprochait. Ce roi de Fo-lin n’est donc pas un souverain de Syrie, mais bien le sultan seldjoukide (de Perse et) du pays de Roum, Mélik-Shah, le ἐν" >ÿ _«le des chroniqueurs arabes.

« Fo-lin, dit le HWing-shi (1368-1643) (1), est le même pays qui fut nommé Ta-Thsin sous les Han; les premiers rapports qu'il eut avec la Chine furent sous le règne de Houan-ti (147- 168). Sous les Tsin et les Weï, il fut également nommé Ta- Thsin; à l'époque des Thang, 11 fut nommé Fo-lin; à la fin de la dynastie des Yuan, un homme originaire de ce pays, Nié- kou-loun #4 τ ff, vint en ambassade ». Hirth, après Bretschnei- der (2), identifié ce personnage Nié-kou-loun avec Nicolas de Bentra que le pape Jean XXIT envoya à Khan-baligh pour y succéder à Jean de Monte-Corvino dans la dignité archiépisco- pale. Cette identification est très vraisemblable, et ici il est certain que le nom de Fo-lin recouvre le nom de Rome ou plutôt sa transcription en langue mongole.

Cette forme est connue par un passage de Jean de Plan Carpin qui cite la « terram soldani Urum » et par un pas- sage du Yuan-shi, dans lequel il est parlé du pays de JC # Ou-lin, soit avec l’équivalence δὲ roum, de Ouroum; on lit dans cet ouvrage (3) : EL ἧς πὰ σὺ PK de ἘΞ ΤῊ ἐξ Pi δ ἘΣ ΜΝ ἨΞ ΖΕ ΤῈ 5. "ὰ -- Ξ TE Ξ Φ Κὶ Ἐξ ζὰ ἘΡ ΕΞ Τ BE 2 ΚῈ D πὰ ΖΕ. « L'année ki-weï (— 1259), on mit en dé- route l’armée mobile (par opposition à l’armée qui défendait les forts) de Ou-lin, soit 4 (corps de) 10.000 (hommes). A-pi-

(1) Hirth, page 64.

(2) Zbid., page 65.

(3) Chapitre 149, page 15, dans la biographie d’un général mongol qui accom- pagna Houlagou dans sa campagne contre les pays occidentaux.

366 REVUE DE L'ORIENT CHRÉTIEN.

ting (1) Suan-than (— JL) fut grandement effrayé et vint faire sa soumission; on se rendit maître de 120 forteresses. Vers le Sud-Ouest, on marclia vers Khi-li-wan (— Kirwan Kirban Kirman ls). Hou- ΕἾ ΠΕ Suan-than (— Kotb ad-Din Sultan pue LS ds) (2) vint faire sa soumis- sion et les pays de l'Occident furent pacifiés ».

C’est de même que les Mongols ont transformé en Oroman, que Rashid ed-Din transerit ων ) οἷ, le nom du grand prince Roman de Riazan qui défendit Colomna contre l'invasion jaune.

La forme Ouroum est évidemment apparentée à celle de Hrum, R'um, empruntée par les Chinois à des populations qui avaient aspiré l’7 initial du mot Roma, et elle indique dans le mongol la même impossibilité à prononcer un 7 initial qui se trouvait dans le grec; la langue mongole ne peut, en effet, tolérer un mot qui commence par un 7; elle est obligée, pour le prononcer, de lui préfixer une Yoyelle épenthétique, la même que celle de la se- conde syllabe, qui sert de support au reste du mot; c’est ainsi que le sanskrit rafna est devenu en mongol a-ratna que l'on trouve dans l’onomastique des Yuan sous la forme ΚΒ #&l] τὰν #4 A-la-thé-na; que le tibétain rèn-{chen, traduction du sanskrit

ratna, été transcrit en mongol i-rintchen, π᾿ οἱ en persan,

JF δὲ Εἰ Z-lin-tchenn en chinois ; que Roum (2) comime on vient de le voir, est devenu en mongol ou-roum, forme prouvée par le latin Urum (— Ouroum) et le chinois JC δὰ ou-làm.

(A suivre.)

(1) Il s’agit très probablement ici du sultan 1zz ad-Din Kaï-Kaous II, quoique Lane, HMohammedan Dynasties, page 155, indique 1257 comme date de sa mort; Pif DA A-pi-tirg doit être une faute graphique pour πῃ 7} "J A-sou-ting, forme à laquelle on comparera la transcription "Atarw qui se lit dans une ins- cription seldjoukide de Sinope.

(2) D’après Lane, Mohammedan Dynasties, page 179, ce prince serait mort en 1297.

HISTOIRE D’'HAIKAR LE SAGE

D'APRÈS LES MANUSCRITS ARABES 3637 ET 9090. DE PARIS

INTRODUCTION

La version arabe de l’histoire d'Haïkar est fort connue.

Sa traduction française figure dans plusieurs éditions des Mille et une nuits, par exemple dans l'édition Chavis et Cazotte (Cabinet des fées), t. XXXIX, Genève et Paris, 1788, p. 266- 361; dans l'édition Caussin de Perceval, Paris, 1806, t. VIII, p. 167-221 (traduction du manuscrit 3637 de Paris; cette tra- duction été réimprimée dans l'édition Pourrat, Paris, 1542, t. IV, p. 61); dans l'édition Gauthier, Paris, 1822, t. VII. p. 313 (traduction faite par J. Agoub, d’après deux manuscrits non identifiés. Cette traduction a paru à part sous le titre « Le sage Heykar », Paris, 1824, et dans les YWélanges de littérature orientale et francaise, Paris, 1835).

Le texte arabe été publié par Salhani, Contes Arabes, Beyrout, 1890 et par Madame Agnès Smith Lewis avec traduc- tion anglaise dans The story of Ahikar, Londres et Cam- bridge, 1898.

Pendant longtemps on n’a vu dans ce récit qu'un simple conte, jusqu'au moment la découverte de la version syriaque montré que le nom du héros n’était pas Haïkar mais Ahikar (Achicar).

On alors reconnu, dans le héros du conte, le cousin de To- bie mentionné en plusieurs endroits du texte grec du livre de Tobie (τ, 213 11, 10; x1, 17-18; χιν, 10) et le sage mentionné par Strabon (XVI, 11, 39) d’après Poseidonios (n° siècle avant notre ère). On reconnu aussi, dans l’histoire d’Ahikar, le livre de maximes traduit et introduit en Grèce par Démocrite comme

368 REVUE DE L'ORIENT CHRÉTIEN. en témoigne Clément d'Alexandrie (Migne, P. G., VIIT, col. 142):

Les anachronismes et les invraisemblances dont le conte est émaillé impressionnaient fort défavorablement les critiques qui plaçaient sa composition du 11° siècle avant notre ère au 11° siè- cle après notre ère, mais le problème vient d'être transformé par la découverte de papyrus d’Ahikar qui remontent au siè- cle avant notre ère.

Ces papyrus, conservés à Berlin, sont ainsi décrits par M. Nau, dans la Revue du clergé français du novembre 1908, p. 306-307 (1).

« Au retour du Congrès des orientalistes de Copenhague nous avons pu voir ces papyrus exposés à Berlin, au nouveau Musée, sous les numéros 63 et 64 (2). Ce sont des fragments d'un rouleau littéraire, de 32 à 33 centimètres de haut; l’écri- ture, presque identique à celle de la requête des prêtres juifs est perpendiculaire aux fibres.

« Le numéro 63 contient les restes de trois colonnes que nous numéroterons 1, 2, 3, de droite à gauche; la colonne 1 compte 17 lignes, et les colonnes 2 et 3 en comptent quinze. Ces deux dernières colonnes se suivent sans interruption.

« Le numéro 64 contient les restes d’une colonne de quinze lignes. Il été reconstitué à l’aide de vingt-cinq morceaux.

« Il reste donc quatre colonnes de quinze (ou dix-sept) lignes plus ou moins mutilées; d’ailleurs chaque ligne peut compter de cinquante-cinq à cinquante-huit lettres (on le voit sur la colonne 2). Ces papyrus renferment donc un peu moins du sixième de la version syriaque. On nous demandé de ne pas en prendre une copie destinée à l'impression, nous pouvons dire du moins que le numéro 63 se rapporte à l'histoire d’Ahi- kar sous Sennachérib et Sarchédom et raconte en particulier sa condamnation à mort.

« Le numéro 64 contient des sentences et des allégories (ou

(1) Ce numéro de la revue annonce l’apparition prochaine à la librairie Le- touzey de « Histoire et sagesse d’Ahikar l’Assyrien, traduction des versions syriaque (manuscrits de Berlin, Cambridge et Londres), avec les principales dif- férences des versions arabes, néo-syriaque, grecque arménienne, slave et rou- maine avec une étude sur l’auteur et l'ouvrage, par F. Nau, environ 320 pages. Prix 5 francs. »

(2) Il y aussi quelques lettres privées non encore éditées.

HISTOIRE D'HAIKAR. 369

fables d'animaux), par exemple : « j'ai levé du sable et j'ai porté du selet cela ne m'a pas été plus lourd que... »; la pan- thère, la chèvre, la gazelle, les brebis y sont tour à tour mises en scène. »

Ces papyrus proviennent d'Éléphantine, au sud de l'Égypte, aussi M. Nau peut conclure que si {a légende d'Ahikar avait déjà pénétré, au siècle avant notre ère, jusqu’au sud de l'Égypte nous pouvons facilement croire que son hisloire re- monte bien au vir° siècle avant notre ère, c’est-à-dire à l'époque de Sennachérib, de Sarhédom et de Tobie.

Il faut bien remarquer que la légende pénétré l’histoire et que celle-ci ne peut être rendue responsable des fautes intro- duites par l’autre. D'ailleurs les versions diffèrent beaucoup les unes des autres, par exemple tous les textes édités font de Sen- nachérib le fils de Sarhédom, ce qui est un anachronisme, mais M. Nau nous signalé deux manuscrits syriaques (l’un des deux appartient à M£' Graffin, l’autre est conservé à Berlin) qui sont conformes à l’ordre chronologique.

Il s'ensuit que les défauts du conte ne doivent pas nous cho- quer, car ils n’existaient pas dans l'écrit primitif.

La version arabe est une adaptation de la version syriaque, qui introduit le styie narratif au lieu du discours direct avec quelques additions et beaucoup de suppressions.

Nous éditons le manuscrit de Paris 3637 dont nous repro- duisons la pagination. Il est désigné par la lettre (A). Nous ajoutons les variantes du manuscrit de Paris 3656 (B) et de l'édition de Madame Smith Lewis (C).

TRADUCTION

(p. 140). Au nom du Dieu clément, miséricordieux, vivant, éternel, sans fin, à qui nous recourons!

Nous commençons par la grâce du Dieu Très-Haut, par sa faveur excel- lente et sous sa direction, à écrire l’histoire d’Haïkar, le sage, le philo- sophe, vizir du roi Sennachérib, et de Nadan son neveu.

Ι. On rapporte qu'il y avait, au temps de Sennachérib, roi d'Assur et de Ninive, un homme sage nommé Haïkar. Il était vizir du roi Sen- nachérib et son secrétaire. C'était un homme opulent qui possédait de grandes richesses. Il était sagace, sage, philosophe, plein de science, de prudence et d’habileté. Il avait épousé soixante femmes pour chacune des- quelles il avait construit un palais, et cependant il n'avait pas d'enfant qu'il

ORIENT CHRÉTIEN. 2%

310 REVUE DE L'ORIENT CHRÉTIEN.

püt élever; cela l’affligeait beaucoup et un certain jour il rassembla les astrologues, les devins et les sorciers. Il leur fit part de sa situation et se plaignit de sa stérilité. Ils lui répondirent : (p. 141) « Va, offre des sacri- fices aux dieux, et invoque-les, peut-être t’accorderont-ils un enfant. » Il fit ce qu'ils lui recommandaient et il offrit des sacrifices aux idoles, eut recours à elles, s’humilia devant elles dans la prière et les invocations. Mais elles ne lui répondirent pas une seule parole et 1] sortit plein de tris- tesse et de chagrin. Il s’en alla fort peiné et revint au service du Dieu Très-Haut. Il crut en lui, eut recours à lui dans le regret de son cœur et l’invoqua ainsi à haute voix : « Dieu du ciel et de la terre, Créateur de tout l'univers, je te demande de m'accorder un fils pour qu’il soit ma consola- tion, qu'il m'assiste au moment de la mort, qu'il soit mon héritier, qu'il me ferme les yeux et m’ensevelisse. » Une voix lui parvint alors et lui dit : « Puisque tu t'es confié en premier lieu aux idoles faites de mains d'homme, et que tu leur as offert des sacrifices, tu n'auras pas d'enfants, ni fils, ni fille. Cependant va, prends le fils de ta sœur, Nadan, adopte-le pour ton enfant, enseigne-lui ta science, ta culture et ta sagesse ; c’est lui qui sera ton héritier après ta mort. »

IT. Il prit donc Nadan, son neveu, qui était un enfant à la mamelle, et il le confia à huit nourrices qui devaient l’allaiter et l’élever. Elles lu donnèrent la nourriture la plus exquise, et l'éducation (p. 142) la plus soignée; elles le vêtirent de soie, de pourpre et de cramoisi; il avait pour sièges des tapis de soie. En avançant en âge, il grandit comme le cèdre élevé; son oncle lui enseigna la politesse, l'écriture, la lecture, la philo- sophie et toutes les sciences. Un jour le roi Sennachérib ayant regardé Haïkar, vit qu'il était devenu un vieillard avancé en âge, et il lui dit : «Ὁ mon compagnon excéllent, honoré, sagace, habile, sage, mon secré- taire et mon vizir, mon confident et le gouverneur de mon empire, voici que tu as vieilli et que tu es avancé en âge, l'heure de ta mort et de ton décès est proche, indique-moi celui qui doit te succéder dans mon service. » Haïkar lui répondit : « Seigneur Roi, que votre tête vive éternellement! Voici Nadan, le fils de ma sœur, que j'ai adopté; je l’ai élevé et je lui ai en- seigné ma sagesse et ma science. » Le roi lui dit : « Fais-le venir en ma présence pour que je le voie, et si je le trouve capable, je l’établirai à ta place. Quant à toi, suis ton chemin, va te reposer et accorde la tranquil- lité à ta vieillesse; passe le reste de tes jours honoré et respecté. » :

Haïkar alla donc et introduisit le fils de sa sœur, Nadan, en présence (Ρ. 143) du roi. Celui-ci le recut avec faveur et fut saisi d’admiration et de joie en le voyant. Puis il dit à Haïkar : « C’est ton fils, Haïkar, je prie Dieu de le conserver; de même que tu m'as servi et que tu as servi mon père Sarhädoum avant moi, puisse ton fils me servir de la même manière, accomplir ce qui m'est avantageux, pourvoir à mes besoins, et exécuter mes travaux pour que je le comble d’honneurs et de puissance à cause de ta sagesse. » Haïkar se prosterna devant le roi et lui dit : « Que ta tête, sire, vive éternellement! Je te prie de lui accorder ta bienveillance, parce qu'il est mon fils, et d’être indulgent pour ses défauts, afin qu'il te serve comme il convient. » Le roi lui jura alors de lui donner le premier rang parmi

ὧν

HISTOIRE D'HAIKAR. J71

ses familiers et la plus grande puissance à sa cour. Il s’engagea à le com- bler d’honneurs et de dignités. Haïkar lui baisa les mains et lui exprima ses vœux et ses hommages. Ensuite il prit avec lui Nadan le fils de sa sœur, le fit asseoir dans un lieu retiré, et se mit à l’instruire le jour et la nuit, au point de le rassasier de sagesse et de science plus que de pain et d’eau. Voici quel était l’enseignement qu'il lui donnait.

Π|. « 1. Mon fils, quand tu entends une parole, fais-la mourir dans ton cœur, et ne la découvre à personne de peur qu’elle ne devienne un char- bon qui brûle ta langue, que tu n’établisses la douleur dans ton corps et que ton vêtement ne soit la nudité et que tu ne sois confondu (p. 144) de- vant Dieu et devant les hommes.

2. Mon fils, quand tu apprends une nouvelle, ne la divulgue pas et si tu vois quelque chose, ne le rapporte pas.

3. Mon fils, fais en sorte que ta parole soit facile pour l'auditeur et ne te hâte pas de répondre.

4. Mon fils, ne désire pas la beauté visible, parce qu'elle passe et cesse, tandis que la bonne renommée demeure éternellement.

Ὁ. Mon fils, ne te laisse pas tromper par la femme aux discours insensés, de peur que tu ne meures de la mort la plus honteuse, que tu ne sois em- barrassé dans les filets et pris au piège.

6. Mon fils, ne désire pas la femme revêtue d’habits multicolores et écla- tants, mais dont l'esprit est lourd et stupide. Garde-toi bien de lui céder en quoi que ce soit qui t'appartienne, ou de lui remettre ce que tu as dans la main, car le péché serait ton vêtement et Dieu serait irrité contre toi.

7. Mon fils, ne sois pas comme l’amandier qui se couvre de feuilles avant tous les arbres et qui est le dernier à donner des fruits, mais sois comme le müûürier qui donne des fruits avant tous les arbres et qui est le dernier à se couvrir de feuilles.

8. Mon fils, incline-toi en bas et modère ta voix; sois poli et marche dans la voie du bien; ne sois pas stupide et n’élève pas la voix quand tu ris ou tu parles, car si c'était par la hauteur de la voix qu'on élevait des maisons, l’âne en bâtirait plusieurs chaque jour.

9. Mon fils, il vaut mieux transporter des pierres (p. 145) avec un homme sage que boire du vin avec un homme stupide.

10. Mon fils, répands ton vin sur le tombeau des hommes de bien plutôt que de le boire avec des hommes stupides et imprudents.

11. Mon fils, attache-toi à des hommes sages et craignant Dieu, et sois comme eux, et ne fréquente pas l’impie de peur que tu ne deviennes comme lui et que tu n’apprennes ses voies.

12. Mon fils, si tu possèdes un ami ou un compagnon, éprouve-le d’abord, et fréquente-le ensuite. Ne le loue pas sans l'avoir éprouvé, et ne découvre pas ta parole à l’homme qui n’est pas sage.

13. Mon fils, tant que tu as une chaussure au pied, marche grâce à elle au milieu des épines. Prépare la voie à tes enfants et à tes petits-enfants; dirige ta barque avant que la mer soit en furie et gonfle ses vagues, de peur que tu ne sombres sans pouvoir te sauver.

14. Mon fils, si le riche vient à manger un serpent, les hommes l’attri-

VE REVUE DE L'ORIENT CHRÉTIEN.

bueront à sa sagesse, mais si c'est un homme pauvre, ils diront que c’est la faim qui l’y pousse.

15. Mon fils, contente-toi de ce que tu possèdes, et ne désire pas le bien de ton prochain.

16. Mon fils, évite le voisinage de l’insensé et ne mange pas de pain avec lui. Ne te réjouis pas des malheurs de ton voisin et si ton ennemi t'a fait du tort, réponds-lui par des bienfaits.

17. Mon fils, si un homme ne craint pas (1) Dieu, crains-le (p. 146) et honore-le.

18. Mon fils, l'insensé heurte l'obstacle et tombe, tandis que le sage, s’il vient à heurter l'obstacle, n’est pas ébranlé et ne tombe pas et s’il vient à tomber, il se relève promptement; s'il tombe malade, son esprit trouve la guérison, tandis que l'homme insensé et stupide n’a point de remède pour sa maladie.

19. Mon fils, si un inférieur te salue, rends-lui la salutation en restant debout, et s'il n’est pas reconnaissant pour toi, son maître le sera à sa place.

20. Mon fils, n’épargne pas les coups à ton fils, car les coups donnés à l'enfant sont comme l’engrais pour le jardin, comme le lien qui attache l’ouverture de la bourse, comme les entraves des animaux et comme la serrure de la porte. |

21. Mon fils, écarte ton fils du mal et fais son éducation avant qu'il gran- disse et se révolte contre toi, car il serait ta honte au milieu de tes com- pagnons, et courberait ton front dans les rues et les assemblées publiques, et tu serais couvert de confusion par ses actions détestables.

22. Mon fils, ne laisse échapper aucune parole de ta bouche sans prendre conseil de ton cœur, et ne reste pas au milieu des gens querelleurs, parce que la parole mauvaise engendre la querelle, la querelle engendre la guerre et la guerre engendre la bataille, et tu serais obligé de servir de témoin; mais fuis de et cherche la paix.

23. Mon fils, ne résiste pas à celui qui est plus fort que toi, mais acquiers la longanimité, la patience et la bonne volonté, (p. 147) car il n’y a rien de meilleur.

24. Mon fils, ne te réjouis pas de la mort de ton ennemi parce que dans peu de temps tu seras son voisin. Quant à celui qui te méprise et te haït, honore-le et sois le premier à le saluer.

25. Mon fils, quand l’eau s'arrêtera dans le canal, quand les oiseaux s’envoleront jusqu'au ciel, quand les noirs corbeaux deviendront blancs et que l’amertume deviendra douce comme le miel, l’insensé et le stupide deviendront intelligents et sages.

26. Mon fils, si tu veux devenir sage, préserve ta langue du mensonge, ta main du vol et tes yeux des regards mauvais; à cette condition, tu mériteras le nom de sage.

27. Mon fils, permets au sage de te frapper de son bâton, et ne permets pas à l’insensé de t'oindre de suaves parfums.

. (1) Le texte C n’a pas la négation, ce qui est plus logique.

HISTOIRE D'HAIKAR. ΘᾺ

28. Mon fils, sois humble dans ta jeunesse et tu seras honoré dans ta vieillesse.

29. Mon fils, ne résiste pas à l’homme qui possède l'autorité, ni au fleuve qui déborde, et ne cherche pas à conclure de mariage, car s’il est heureux on ne t'en félicitera pas, et s’il est malheureux on t'accablera d’injures et de malédictions.

30 Mon fils, fréquente celui dont la main est rassasiée et pleine et ne va pas avec celui dont la main est resserrée et affamée.

31. Mon fils, il y quatre choses contraires à la puissance du royaume et de l’armée : la dureté du vizir, (p. 148) la mauvaise administration, la perversité des desseins, et l'injustice envers les sujets, et quatre choses qui ne sont pas cachées : l’homme intelligent, l'homme stupide, le riche, et le pauvre. »

IV. Quand Haïkar eut fini d'exposer ces conseils et ces paraboles à Nadan, le fils de sa sœur, il pensa qu'il garderait toutes ses recomman- dations et il ne savait pas que son intention était de faire juste le contraire. Ensuite Haïkar resta assis dans sa maison et remit à Nadan tous ses biens : les esclaves et les servantes, les chevaux et le bétail et toutes les autres choses qu'il possédait. Nadan eut en son pouvoir le commandement et la défense et il eut ses entrées chez le roi comme son oncle Haïkar et même davantage. Quant à Haïkar, il restait chez lui et se reposait, et 1] n'allait plus chez le roi que de temps en temps pour le saluer, puis il rentrait dans sa maison. Nadan, voyant qu'il avait en main l'autorité, se moqua de son oncle Haïkar et le méprisa. Il commenca à lui faire des reproches quand il le rencontrait, disant qu'il était devenu vieux, qu'il radotait et qu'il n'avait plus aucune idée. Puis il se mit à frapper les serviteurs et les servantes, vendit les chevaux et les chameaux et com- menca à dissiper la fortune de son oncle. Haïkar, voyant (p. 149) qu'il n'avait aucun sentiment d'humanité pour ses esclaves et les gens de sa maison, le chassa de chez lui et fit avertir le roi qu'il dissipait ses biens et sa fortune. Le roi fit venir Nadan et lui dit : « Tant qu'Haïkar vivra, personne n'aura aucun pouvoir sur sa maison et sur ses biens. » Et Nadan dut retirer sa main de dessus Haïkar et de ce qu'il possédait. Il n’alla même plus chez lui et cessa de le saluer.

Υ. Haïkar se repentit alors de la peine qu'il s'était donnée pour Nadan et en concut un grand chagrin. Or Nadan avait un frère plus jeune que lui nommé Banoudan (1). Haïkar le prit chez lui à la place de Nadan, l’éleva, le combla d’honneurs, lui remit tout ce qu'il possédait et lui confia l'administration de sa maison et de ses affaires. Nadan voyant ce qui se passait devint envieux et jaloux et commenca à se plaindre à tous ceux qui lui en parlaient. Il proférait des propos outrageants pour son oncle : « Mon oncle, disait-il, m'a chassé de chez lui, et a préféré mon frère à moi, mais, si Dieu, le Très-Haut, m'en donne le pouvoir, je le ferai tomber dans une épreuve mortelle. » Et il ne cessait de réfléchir au piège qu'il tendrait à son oncle Haïkar. Longtemps après, Nadan écrivit un jour,

(1) Banouzardan d'après B et C.

374 REVUE DE L'ORIENT CHRÉTIEN.

(p. 150) pour Akhis Ibna-Chah Hakim roi de Perse, une lettre dans laquelle il lui disait : « Salut parfait, vie et honneur de la part de Sennachérib, roi d’Assyrie et de Ninive, et de son vizir et secrétaire Haïkar. Paix entre toi et moi, roi magnifique. Au moment ce papier te parviendra, lève- toi et viens promptement à la plaine de Nisrin en Assur et Ninive, pour que je te livre le royaume sans guerre et sans combat. » Il écrivit encore une autre lettre au nom d’Haïkar à Pharaon, roi d'Égypte : « Paix entre toi et moi, grand roi. Quand cette lettre te parviendra, lève-toi, et viens en Assur et Ninive, dans la plaine de Nisrin, pour que je te livre le royaume sans guerre ni combat. » L'écriture de Nadan ressemblait à celle de son oncle Haïkar. Il cacheta les deux lettres et les scella du sceau de son oncle Haïkar; puis il les jeta dans le palais du roi.

VI. Il alla ensuite écrire une lettre pour Haïkar, au nom du roi. Il lui disait : « Salut parfait à mon vizir, mon secrétaire et mon confident Haïkar. À l'instant cette lettre te parviendra, rassemble toutes les troupes que tu as sous la main. (p. 151) Qu'elles soient parfaitement habillées et équipées, et conduis-les jeudi dans la plaine de Nisrin, et au moment tu me verras venir vers toi, mets l’armée en mouvement contre moi, comme si j'étais l'ennemi et comme si elle me combattait. J'ai chez moi les envoyés de Pharaon roi d'Égypte : quand ils verront la force de notre armée, ils seront frappés de crainte, car ils sont nos ennemis et ils nous haïssent. » Ensuite il scella la lettre et l’envoya à Haïkar par l’un des serviteurs du roi. Puis il prit la lettre qu'il avait écrite auparavant, la remit au roi, lui en fit la lecture et lui en montra le sceau. En entendant le contenu de cette lettre, le roi fut grandement étonné. Il s’irrita, entra dans une violente colère et s’écria : « Qu'ai-je donc fait à Haïkar pour qu'il ait écrit cette lettre à mes ennemis? C’est la récompense des bienfaits dont je l’ai comblé. »

VIII. Nadan lui dit alors : « Ne t'inquiète pas, à roi, ne t'afflige pas et ne t'irrite pas; mais allons à la plaine de Nisrin et voyons si cette affaire est vraie ou non. » Quand,le jeudi fut arrivé, Nadan se leva, prit avec lui le roi, les ministres et les troupes et les conduisit dans la plaine de Nisrin. Quand ils furent arrivés, le roi apercut Haïkar avec l’armée rangée en bataille. Quand Haïkar (p. 192) vit le roi s’avancer, il ordonna aux troupes de prendre le branle-bas de combat, de s’escrimer et de manœuvrer comme pour combattre le roi, selon ce qui était écrit dans la lettre. Il ne savait pas quel abime Nadan avait creusé devant lui. Le roi voyant ce que faisait Haïkar, fut troublé et interdit. Il fut rempli de stupéfaction et s’emporta violemment. Nadan lui dit : « Tu vois, Sire, ce qu'a fait ce malheureux. Mais ne t'irrite pas et ne te tourmente pas. Retourne en ton palais et je te livrerai Haïkar garrofté et chargé de chaïnes, et je repous- serai loin de toi ton ennemi sans aucune peine. » Le roi retourna chez lui tout stupéfait de ce qu'avait fait Haïkar.

IX. Quant à Nadan, il alla trouver Haïkar et lui dit : « Le roi est en- chanté et te remercie d’avoir exécuté son ordre. Il m'envoie vers toi pour te recommander de congédier les troupes et de venir à lui lié et garrotté pour que les envoyés de Pharaon en soient témoins, car le roi est redoute au-

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HISTOIRE D'HAIKAR. 319

près d'eux et de leur roi. » Haïkar y consentit et Nadan lui lia les mains et lui entrava les pieds, puis il le conduisit au roi. Or le (p. 153) roi venait de prendre connaissance de l’autre lettre. Quand Haïkar entra chez le roi, 1 se prosterna devant lui la face contre terre. Le roi lui dit : « Haïkar, mon secrétaire, mon ministre, mon confident et le gouverneur de mon empire, dis-moi quel mal je t'ai fait pour que tu m'en récompenses par cette tra- hison? » Ensuite il lui montra les lettres scellées de son sceau et de son écriture. Quand Haïkar vit cela, ses membres tremblèrent, sa langue fut paralysée à l'instant et il ne put proférer un mot malgré toute sa sagesse et sa science, mais il baissa les yeux vers la terre et garda le silence. Voyant cela, le roi donna l’ordre de mettre à mort Haïkar et de lui tran- cher la tête aux portes de la ville. Nadan s’écria alors : « O Haïkar au visage noir, à quoi t'ont servi ta ruse et ta trahison après avoir agi ainsi envers le roi? »

Le bourreau s'appelait Abou-Samik et c'était un homme pauvre. Le roi lui ordonna de décapiter Haïkar à la porte de sa demeure et de transporter sa tête à cent coudées de son corps. Haïkar se jeta alors aux pieds du roi et lui dit : « Que mon Seigneur le Roi vive à jamais! Si tu (p. 154) veux me mettre à mort selon ton bon plaisir, bien que j'aie conscience de n'être pas coupable et que Dieu demande compte au méchant de sa malice, je prie mon Seigneur le Roi, dans sa bonté, de permettre au bourreau de donner mon corps à mes serviteurs pour qu'ils l’ensevelissent et que ton serviteur soit ta rançon. » Le roi permit donc au bourreau d’en faire ce qu'il voudrait. |

X. Les serviteurs du roi et le bourreau s’emparèrent alors d'Haïkar et l’'amenèrent tout nu pour le mettre à mort. Haïkar, ne doutant plus qu'on allait l’exécuter, envoya dire à sa femme, qui s'appelait Chafah- tini (1) : « Viens à ma rencontre et amène avec toi mille filles vierges, et revets-les d’habits de pourpre et de soie pour qu’elles pleurent sur moi avant ma mort. Sers un repas au bourreau et à ses aides et prépare-leur du vin en abondance, pour qu'ils puissent boire. »

. XI. La femme d’Haïkar fit ce que lui ordonnait son mari. Elle était elle-même instruite, intelligente, perspicace, pleine de culture et de science.

Quand les soldats et le bourreau avec ses aides furent arrivés, ils trou- vèrent la table servie avec du vin et des mets exquis. Ils se mirent à manger et à boire jusqu’à ce qu'ils (p. 155) fussent rassasiés et ivres.

XII. Haïkar prit alors le bourreau à part et lui dit : « Abou-Samik, quand le roi Sarhâdoum, père du roi Sennachérib, voulut te mettre à mort, je t'ai enlevé et je t'ai caché dans un lieu connu de moi seul, jusqu'à ce qu'il t’ait réclamé. Chaque jour je m'efforcais de le calmer, jusqu'à ce qu'il te redemanda. Et quand je te présentai à lui, il fut heureux de te revoir. Souviens-toi maintenant du bien que je t'ai fait. Je sais en effet que le roi me regrettera et entrera dans une grande colère pour avoir ordonné ma mort, car je n’ai pas commis de faute. Et si à ce moment tu me présentes

(1) Chahfana d'après B.

310 REVUE DE L'ORIENT CHRÉTIEN.

à lui, tu obtiendras une grande situation. Sache que c’est Nadan, le fils de ma sœur, qui m'a trahi et qui est l’auteur de cette action abominable. Mais le roi regrettera de m'avoir fait mettre à mort. Sache que j'ai, der- rière ma maison, un souterrain qui n’est connu de personne. Cache-moi et fais-le savoir à mon épouse Achfahtini. J’ai en prison un esclave qui mérite la mort. Fais-le sortir, revêts-le de mes habits, et ordonne à tes aides, quand ils seront ivres, de le mettre à mort. Ils ne sauront pas qui ils exécuteront. Ordonne-leur de porter sa tête à cent coudées de son corps et donne son cadavre à mes serviteurs pour (p. 156) qu'ils l’ensevelissent et tu gagneras ainsi un tresor dont je te serai redevable ! »

Le bourreau fit ce que lui recommandait Haïkar, puis il se rendit auprès du roi avec ses aides et ils crièrent : « Que le chef du roi vive à jamais. »

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318 REVUE DE L'ORIENT CHRÉTIEN.

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HISTOIRE D'HAIKAR. 319

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950 REVUE DE L'ORIENT CHRÉTIEN.

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HISTOIRE D'HAIKAR. 389

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(A suivre.)

SAINT EUTHYME LE GRAND MOINE DE PALESTINE (376-473) (Suite)

CHAPITRE V LES LUTTES DOCTRINALES.

Luttes de saint Euthyme contre diverses hérésies, Origénisme et nestoria- nisme. Concile d'Éphèse, 431, .et prétentions de Juvénal. Brigandage d’E- phèse, 449, et réserve de saint Euthyme vis-à-vis des hétérodoxes. Concile de Chalcédoine, 451. Influence d’Euthyme et de l’impératrice Eudocie. Euthyme défend les décisions du concile et résiste seul au patriarche intrus, Théodose. Luttes sanglantes entre le parti des moines et celui des évêques. Euthyme ramène plusieurs supérieurs de monastères, convertit l'impéra- trice et décide le triomphe de la vraie foi dans le patriarcat de Jérusalem.

Lorsque notre saint s'établit en Palestine, le gouvernement ferme de Théodose et le second concile œcuménique avaient porté à l’arianisme un coup mortel, mais il restait encore des partisans de cette hérésie, surtout parmi les moi- nes et les clercs, et nous savons, par son biographe, qu'Eu- thyme en ramena un certain nombre dans le sein de l'Église. Il ramena aussi des disciples de Manès et de Sabellius, vieilles hérésies très souvent condamnées, jamais détruites et dont la survivance tenait quelque chose du prodige.

Plus encore que toutes les erreurs qui viennent d'être signa- lées, celles d'un génie aventureux, Origène, avaient. trouvé en Palestine un terrain favorable à leur développement. Au moment Euthyme constituait sa laure, le silence se faisait à peine sur les discussions mémorables que les écrits du grand Alexandrin avaient suscitées. La mort de Rufin et de saint Jérôme, de saint Épiphane et de Jean de Jérusalem, de Théophile et de saint Jean Chrysostome, la disparition de tous ces grands lutteurs, qui avaient combattu contre l'ori- génisme ou en sa faveur, laissaient malgré tout un lumineux sillon dans lequel d'autres esprits s'engageaient après eux

390 REVUE DE L'ORIENT CHRÉTIEN.

Euthyme refusa d'admettre dans sa laure quelques moines origénistes, qui vivaient aux alentours de Césarée. Nous ne sommes pas autrement fixés sur cet apostolat, car l'hagio- graphe ne semble pas avoir disposé de plus amples renseigne- ments.

La condamnation de Nestorius au concile d'Éphèse, 431, ne souleva aucune protestation en Palestine. Juvénal, dont les idées ambitieuses commençaient à percer, trouva que les fa- veurs, à lui accordées, valaient bien l’anathème lancé contre un confrère malheureux ; il embrassa donc la doctrine de saint Cyrille et l’autorité de son nom entraïna le vote de tous les évêques palestiniens. Les moines, fort chatouilleux sur les pri- vilèges de la mère de Dieu que Nestorius s’efforçait de réduire, n'avaient aucune arrière-pensée en cette querelle; ils suivi- rent donc sans hésitation leurs pères dans la foi. C’est à peine si, dans toute l'histoire du monachisme de Palestine, il est fait allusion, une ou deux fois, à des religieux nestoriens! Quant à Euthyme, on sait avec quelle netteté il se prononça pour le concile d'Éphèse, auquel ses amis ou ses disciples, Pierre de Paremboles et Fidus de Joppé, avaient pris une assez grande part.

Si le concile d'Éphèse n'eut pas de suites funestes au point de vue doctrinal, il vit se poser avec plus d’acuité une ques- tion qui agitait depuis longtemps l'Église orientale et à la- quelle il importait de donner dans un sens ou dans un autre une prompte solution. Il s’agit du patriarcat de Jérusalem. Euthyme ne fut pas mêlé directement à cette controverse, et pourtant lui, dont l'humilité provoquait toutes les admiraticns, ne s’opposa pas à l'agrandissement du pouvoir de son évêque, et ses disciples, plus que lui encore, ne reculèrent devant aucune démarche pour assurer la réussite de ce projet.

Pour bien comprendre les débats qui vont suivre, 1] faut savoir que, durant les trois premiers siècles, jusqu'au concile de Nicée, en 325, Jérusalem n'était qu'un simple évêché sou- mis à la métropole de Césarée, qui elle-même relevait d'An- tioche. Cette sujétion d’un siège apostolique, d'une Église, qu'on avait qualifiée autrefois de « mère de toutes les Églises », a de quoi nous surprendre; elle s'explique toutelois. Depuis que les Romains avaient occupé la Palestine, Césarée était la vraie

SAINT EUTHYME LE GRAND. 391

capitale administrative de la province, et l'Église, pour la dé- limitation de ses diocèses, n'avait pas coutume généralement de s’écarter des circonscriptions territoriales de l'empire. Ajoutez à cela que Jérusalem, une fois détruite et mise à ras de sol par Titus, puis rebâtie par Adrien sous le nom d'Aelia Capitolina, n’évoqua plus pour les chrétiens l’image de la ville sainte, mais qu'elle resta le domaine sacré de Jupiter, le refuge des païens quise pressaient dans ses murs. Aussi quand, après l'expulsion définitive de tous les Juifs, l'évêque Marc condui- sit sur les ruines encore fumantes du mont Sion sa commu- nauté de chrétiens convertis du paganisme, la nouvelle ville avait rompu avec son passé et l’évêque n'était plus que le titu- laire d'un siège sans prestige, comme on en comptait beau- coup dans le pays. Néanmoins les souvenirs du Christ mou- rant et de la primitive Église étaient trop chers au cœur des fidèles, la chaire de saint Jacques trop en vénération, pour que l’évêque d’Aelia ne sortit pas rapidement de cette position inférieure. Dès le 11° siècle, son titre de siège apostolique avait valu à Jérusalem le premier pas après le métropolitain de Cé- sarée et, depuis lors, la question ne fit aucun progrès jusqu’au concile de Nicée.

Les Pères de ce concile tinrent à remercier publiquement saint Macaire de Jérusalem du zèle qu’il avait déployé contre les Ariens et, comme des difficultés existaient sans doute entre lui et le métropolitain, à préciser la nature de leurs rap- ports mutuels. De par le VII° canon de Nicée, Jérusalem ob- tint des privilèges purement honorifiques, « sans préjudice de la dignité qui revenait à la métropole » de Césarée, c'est-à- dire une place d'honneur dans les conciles généraux et le se- cond rang dans les synodes de sa province.

A partir de ce Jour, les empiètements de Jérusalem sur les droits de Césarée deviennent si fréquents qu'il est impossible de les énumérer tous. Les grandes luttes de saint Cyrille contre Acace avaient pour mobile le désir d'obtenir le premier rang autant que des motifs de pure orthodoxie. C'est l'historien So- zomène qui l’a noté depuis longtemps avec une fine pointe d'i- ronie, en disant que les accusations réciproques de ces deux évêques n'étaient que des prétextes masquant le véritable but à atteindre : la primauté dans la province.

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Le successeur de saint Cyrille, Jean, sans avoir hérité de ses visées ambitieuses, essaya cependant de secouer le joug de Césarée en prenant pour arbitre de sa querelle avec saint Jé- rôme le patriarche d'Alexandrie, Théophile. On sait comment le solitaire de Bethléem se plaignit très haut et réclama les droits sacrifiés de Césarée : « Quel droit a l’évêque d'Alexandrie sur Jérusalem? s’écriait-il avec humeur. La métropole de la Palestine c'est Césarée, et celle de tout l'Orient c’est Antioche. Voilà ce qu'ont réglé les canons de Nicée, dont on fait tant de bruit... » Puis, s'adressant à l'évêque Jean, 11 l’apostrophait ainsi : «Je sais pourquoi vous refusez de prendre Césarée ou An- tioche pour arbitre, c'est pour éviter de rendre à votre métro- politain les honneurs qui lui sont dus ». Saint Jérôme exagère ici, comme il le fait de temps à autre. Il savait fort bien que Théophile partageait alors les sentiments de Jean sur les écrits d'Origène et que l'évêque de Jérusalem, en déférant la cause à son tribunal, escomptait un jugement favorable; mais 1] feint de l’ignorer et se place au seul point de vue canonique, terrain qui pour lui était inexpugnable.

Praïle, dont la douceur de caractère répondait au nom, n'entreprit rien de contraire à la juridiction de Césarée. Le dernier assaut fut livré par son successeur, Juvénal, assaut ter- rible qui dura plus de vingt ans et fut couronné d'un plein succès. La première usurpation fut la nomination de Pierre Aspebet, le converti de saint Euthyme, à l'évêché de Parem- boles, vers l’an 425. Comme cet évêché de nomades était situé sur le territoire de Jérusalem et que Pierre n’était en somme que le coadjuteur de Juvénal pour les Arabes catholiques, il, n'est pas certain que celui-ci fût tenu en droit de consulter le métropolitain de Césarée pour le dédoublement de son diocèse. Mais Juvénal devait s’en référer à Césarée pour la consécration de l'élu, privilège réservé exclusivement à la métropole. Il n’en fit rien cette fois et nous savons, de plus, qu'il ordonna peu après Étienne, autre disciple de saint Euthyme, évêque de Jam- nia près de Joppé, une ville qui n’était pas comprise dans son diocèse.

Au concile œcuménique d'Éphèse, en 431, Juvénal crut voir enfin le couronnement de ses efforts. Il se présenta à la tête de nombreux évêques, qui soutenaient ses prétentions et lui

SAINT EUTHYME LE GRAND. 393

faisaient une escorte d'honneur, toujours prêts à proclamer la légitimité de ses actes. Par dépit plus que par mauvaise foi, le patriarche d’Antioche, arrivé en retard, tint avec ses suffragants une sorte de conciliabule, qui comptait annihiler l'action du vrai concile, présidé par Cyrille d'Alexandrie. L'évèque de Jérusalem soutenait le parti de l’orthodoxie et occupait le second rang. Il ne craignit pas de réclamer, dès le début, que le patriarche d’Antioche prétät obéissance au trône apostolique de Jérusalem, car l'ordre et la tradition des Apôtres confiaient à ce dernier la mission de régler et de juger le siège d'Antioche. On se demande, en vérité, comment Juvénal osait avancer de pareilles prétentions et sur quels faits anciens il les appuyait. Les actes du concile n’en parlent pas, mais la correspondance du pape saint Léon avec Maxime, patriarche d’Antioche, dévoile la mauvaise foi de Juvénal. A l’aide de fausses pièces, per commentilia scripla, l'évêque de Jérusalem: tàcha de gagner saint Cyrille et de se faire donner la supré- matie religieuse sur les trois provinces de Palestine, sur la seconde Phénicie et sur l'Arabie, ainsi que le titre de patriarche.

Juvénal n'avait donc pas hésité à commettre un faux pour satisfaire son ambition, mais la vigilance de saint Cyrille ne lui permit point de voir aboutir ses projets. On songea même, un instant, à le séparer de la communion catholique; le prési- dent du concile s’y refusa finalement en alléguant 16 malheur des temps et la crainte de grossir le nombre des hérétiques. En effet, l'évêque de Jérusalem était décidé à tout pour con- quérir ce titre de patriarche qui l’éblouissait, et son cortège d'évêques l'aurait appuyé dans toutes ses réclamations. En conséquence, saint Cyrille recula devant une mesure aussi grave et ses confrères partagèrent ses vues.

Le refus du concile ne découragea pas la persévérance de Juvénal. IL tint sa réponse pour non avenue et se mit, une fois de retour, à consacrer les évêques et à gérer les affaires des trois provinces palestiniennes, comme s'il était déjà patriarche. La Palestine ne lui suffit même pas, et nous avons encore la requête de plusieurs évêques de l'Arabie et de la Phénicie à l’empereur Théodose II, se plaignant d’avoir été ordonnés par Juvénal au mépris des saints canons et des droits d'An- tioche. Ces faits étaient antérieurs au concile d'Éphèse de 431,

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mais les intéressés n’en avaient rien dit, afin de ne pas entra- ver, déclarent-ils, par des questions personnelles le bien géné- ral de l'Église. ᾿

Ce que les orthodoxes avaient refusé à Juvénal, il le de- manda aux hérétiques; le brigandage d'Éphèse en 449 devait admirablement servir ses intérêts. Par calcul, il se jeta dans le parti de Dioscore, contribua par sa présence et son consen- tement tacite au meurtre de saint Flavien de Constantinople et réussit, à force d'intrigues et d'habiletés, à faire signer par les évêques fidèles le blanc-seing qui absolvait Eutychès. « Pour prix de son concours, Juvénal obtint, en faveur de ses préten- tions, plusieurs rescrits impériaux qui le reconnaissaient pour métropolitain des trois Palestines, et il siégea même dans le concile au-dessus du patriarche d’Antioche », Domnos, son ancien clerc à la laure de saint Euthyme, avant Flavien de Constantinople et d'autres prélats qui auraient pu lui disputer la préséance. Un des évêques qui l'accompagnaient, Alype de Bacatha, déclara Eutychès absous « suivant le décret de Juvénal, notre saint archevêque ».

La défection de Juvénal et de ses collègues au brigandage d'Éphèse eut un grand retentissement en Palestine, la majo- rité des clercs et des moines penchait vers le monophysisme. Euthyme savait bien de quel côté se trouvait la vérité, mais que pouvait-il seul contre les évêques et les moines réunis? il aurait prêché dans le désert. Il se contenta donc, tout en res- tant lui-même attaché à l'orthodoxie, de patienter et de re- prendre l’évêque bédouin Auxolaos, son voisin de Paremboles, s'en remettant pour le reste à la divine Providence, qui ne manquerait pas, un jour ou l’autre, de faire triompher la bonne cause. Au fond, c'était l'unique parti à prendre.

Deux ans après, au concile de Chalcédoine, les rôles étaient intervertis. La cour impériale favorisait l’orthodoxie; Juvénal et Dioscore, appelés à la barre du concile, avaient à se disculper de leurs violences et de leurs erreurs, lors du brigandage d'Éphèse. Dioscore, le brutal, persévéra dans sa conduite, fit l'apologie de ses actes et se vit déposer. L'habile Juvénal, lui, sans implorer son pardon ni reconnaitre aucunement ses torts, obtint un complet acquittement, siégea au concile parmi les présidents et lui demanda de ratifier la décision antérieure

SAINT ΕὔΤΠΥΜΕ LE GRAND. 205

de Théodose II. Pressé d'en finir avec ces débats interminables et craignant de tout perdre s’il résistait à cetintrigant, Maxime d'Antioche entra alors en pourparlers avec lui. D'un commun accord, les deux prélats rédigèrent une note, disant que « après de longues contestations, Maxime s'était entendu avec Juvénal, pour que le siège de saint Pierre à Antioche gardàt les deux Phénicies et l'Arabie et pour que le siège de Jérusalem eût les trois Palestines sous sa dépendance. On demandait au synode de ratifier par écrit ce traité ». Juvénal accepta la reconnais- sance authentique du concile pour les trois provinces de Pa- lestine et tous les évêques, à commencer par les légats du pape, ratifièrent cette décision.

« L'histoire de la Palestine entre alors dans une seconde période, les évêques qui ont joué le premier rôle, se reti- rent au second plan pour céder le pas aux abbés des grands monastères. Ce sont eux désormais qui, du fond de leurs re- traites, entourés de leurs moines, vont lutter contre les empe- reurs, partisans tyranniques de toutes les hérésies, soutenir les évêques et défendre les intérêts politiques et religieux de la Palestine.

« Le plus célèbre de ces abbés était Euthyme; 11 était comme le père et l’oracle de tous les moines, et sa renommée, qui faisait l'illustration de la Palestine, laissait complètement

dans l'ombre l’abbé Elpidios, supérieur du monastère Saint-

Passarion à Jérusalem et choisi par Juvénal pour maintenir la paix et l’orthodoxie parmi la foule souvent indisciplinée des religieux. Un seul nom balançait l'influence et la renommée d'Euthyme, celui de l’impératrice Eudocie qui, retirée depuis quelques années à Jérusalem, y régnait en quelque sorte par ses immenses richesses, ses bienfaits et les larges aumônes qu'elle ne cessait de répandre parmi le peuple et les religieux. Elle avait élevé à Jérusalem des églises, des monastères, des hôpitaux, bâti pour les évêques de Jérusalem, près de la ba- silique du Saint-Sépulcre, un superbe palais, construit dans le désert des laures et des couvents ; elle venait de rebâtir les vieux remparts de Jérusalem, ruinés depuis plus d'un siècle, et prétendait trouver dans les prophéties juives l'annonce de cette restauration. Malheureusement, Eudocie était profondé- ment attachée au parti de Dioscore et d'Eutychès; le souvenir

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toujours amer de sa lutte avec Pulchérie et saint Flavien con- tinuait à en faire la protectrice de Dioscore, qu'elle avait sou- tenu contre eux au temps de sa faveur: Aussi, lorsqu'elle apprit. la condamnation de son protégé à Chalcédoine et la part qu'y avait prise l'évêque de Jérusalem, sa colère fut profonde et elle jura de punir Juvénal.

« Cette nouvelle lui fut apportée par un moine, nommé Théodose, dont les clameurs et les cabales avaient un instant troublé le concile. Chassé autrefois de son monastère par l'é- vêque du diocèse, cet homme allait de ville en ville, dévoré d'ambition et cherchant, par ses intrigues opiniätres, à se créer un parti dans l'Église.

« À peine avait-on prononcé à Chalcédoine la condamnation de Dioscore et le rétablissement de Juvénal, qu'il accourut en Palestine, avec quelques moines de cette province, et annonça partout que le concile venait de trahir la foi, d'adopter l’hérésie de Nestorius, et obligeait à croire qu'il y a deux Christ, deux fils de Dieu. Il se hâta de gagner ia faveur d'Eudocie en accusant Pulchérie de partager et même d'inspirer les erreurs du concile; 1] insista sur ce que Juvénal, pour obtenir sa grâce, avait signé l’un des premiers la condamnation de Dioscore, et Eudocie, irritée contre Juvénal et charmée de prouver à Pul- chérie qu'elle n'avait pas encore perdu toute influence, résolut . de faire Théodose évêque de Jérusalem.

« Elle entraîne dans son parti tout le peuple de la ville qu'elle nourrissait de ses aumônes, les moines et solitaires qui la vénéraient et croyaient, en se déclarant pour elle, suivre la cause de l'orthodoxie; elle soudoie des partisans, lève des troupes, arme les moines et met une garde sur les remparts de Jérusalem. Par ses soins, Géronce, abbé des couvents de Sainte-Mélanie la Jeune, Pierre, abbé d’un monastère près de Jéricho, le célèbre saint Gérasime et surtout l’archimandrite Elpidios, établi supérieur de tous les moines, se déclarent pour Théodose. Mais Euthyme, à qui les évêques de Parem- boles et de Jamnia s'étaient hâtés d'apporter les premiers actes du concile, décida que ses décrets étaient orthodoxes et en prit la défense. Son autorité mit en échec l'influence d'Eudocie et retint un instant les moines ; puis les largesses de l’impéra- trice, les mensonges de Théodose et les faux actes du concile

SAINT EUTHYME LE GRAND. 397

qu'il répandait, séduisirent la foule et, dès lors, les moines, se séparant des évêques, firent un schisme qui dura vingt ans (1). »

Peu de temps après, Juvénal arrive à Césarée, fier d’avoir élevé Jérusalem à une aussi haute juridiction religieuse, mais les moines, qui n’ont pas comme lui un patriarcat en perspec- tive pour désavouer aujourd'hui ce qu'ils ont confessé la veille, accourent à sa rencontre et le somment de tenir ses engage- ments. L’entrevue lieu hors de la ville, près de l’église des Saints Apôtres. L'évêque refuse d’obéir à ces injonctions et, raconte un historien monophysite : « quand les moines le voient inébranlable et plein de confiance dans un empereur mortel auquel il cherche à plaire plutôt qu’à Dieu, tous le mau- dissent en face et retournent à Jérusalem. Là, se rassemblent tous les saints moines et les séculiers de toutes les villes, et les évêques orthodoxes qui sont restés chez eux sans aller au concile ; ils commencent alors, dans un anathème écrit, par déposer et rejeter le misérable Juvénal, puis, d’un consente- ment unanime (2), ils nomment un évêque zélé et saint, rempli de toutes les perfections apostoliques, je veux dire le bienheureux Théodose. Celui-ci succède à Jacques le Mineur, le frère du Seigneur, et 1] est établi chef, guide et pasteur dans la Ville Sainte, afin de consacrer des évêques pour toutes les villes. Le peuple accourt avec grand zèle, se rassemble et s'approche de lui, car il plaisait à tout le monde et était orné d’une foi orthodoxe et d'œuvres irréprochables (3) ».

Alors l'émeute se répand dans la ville entière, ouvre les prisons et massacre les partisans de Juvénal. Pour assurer son élection, Théodose veut faire assassiner le légitime pasteur, mais on le cherche vainement, il s'était évadé avec Domnos

(1) A. Couret, La Palestine sous les empereurs grecs, Grenoble, 1869, in-8°, p. 117-122.

(2) Nous savons par d’autres sources monophysites qu’une autre illustration du parti, Romain, archimandrite d’un monastère près de Thécoa qui comptait plus de six cents moines, fut également proposé comme candidat à l'évêché de Jérusalem.

(3) Les Plérophories de Jean, évêque de Maïouma (récits anecdotiques relatifs au siècle), traduites du syriaque par M. l'abbé Nau, Paris, 1899, in-8, p. 32. Voir aussi p. 12 et 59, et Ahrens et Krueger, Die sogenannte Kirchengeschichte des Zacharias Rhetor, Leipzig, 1899, p. 10-17.

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d'Antioche et tous deux s'étaient réfugiés auprès de saint Eu- thyme. Théodose, profitant de l'absence des évêques, qui n'’é- taient pas encore tous revenus du concile, met partout sur leurs sièges ses plus chauds partisans. Quelques villes, séduites par son zèle menteur, lui demandent elles-mêmes des évêques, entre autres Maïouma de Gaza, à laquelle il envoie le saint du parti monophysite, Pierre l'Ibérien, membre de la famille royale de Géorgie.

« Cependant Euthyme organisait la résistance, affirmait l'orthodoxie du concile, dénonçait hautement Théodose comme un usurpateur et un meurtrier, et se livrait à une propagande que son grand nom rendait féconde. Théodose s'émut ; il voulut voir ce moine qui osait seul lui résister et manda Euthyme à Jérusalem. Euthyme ne vint pas. Alors Théodose envoya l’archimandrite Elpidios et l'abbé Géronce de Sainte-Mélanie lui demander de fixer le théâtre d'une conférence. « Dieu me garde, se contenta de. répondre Euthyme, de me rencontrer jamais avec cet homme dans l'hérésie et le sang des prêtres égor- gés. » Enfin, lassé des intrigues et des messages continuels de Théodose, craignant même, à ce qu'il semble, que celui-ci ne se vantàt de l'avoir rallié à sa cause, Euthyme voulut rompre d'une manière éclatante avec les hérétiques. Il assembla ses religieux, leur fit jurer de ne jamais se réunir à Théodose et se retira au fond des solitudes de Rouba, près de la mer Morte et des ruines de Gomorrhe. Le bruit de cette retraite se répandit dans tout le désert, les solitaires et les abbés accoururent pour, consulter Euthyme; ils revenaient convertis. Mais son plus beau triomphe fut d’arracher à Théodose le plus illustre de ses partisans, saint Gérasime et ses soixante-dix religieux qui passèrent tous du côté des orthodoxes.

« À Jérusalem même, la résistance commençait. Un jour, dans la basilique du Saint-Sépulcre, le diacre Athanase (1) monte en chaire et prononce, aux acclamations des catholi- ques, une philippique violente contre Théodose. « Cesse tes assassinats, Théodose, lui cria le diacre, cesse de jeter comme un brigand le troupeau des fidèles hors de la bergerie, con- nais enfin l'amour que nous portons à notre pasteur légitime;

(1) La fête de ce martyr se célèbre le 5 juillet.

SAINT EUTHYME LE GRAND. 399

habitués à sa voix, nous ne suivrons jamais celle de l’étran- ger. » Théodose, au comble de la fureur, le fait arracher par ses satellites, massacrer à la porte de l’église et son cadavre, traîné hideusement par toute la ville, doit servir d'exemple aux catholiques.

« Cet exemple est inutile. Quelques jours après, le métropo- litain de. Scythopolis (1) s'élève en pleine église contre l’usurpa- teur; il est entrainé hors de la ville et massacré avec plu- sieurs de ses prêtres. L'abbé Gélase (2), mandé à Jérusalem et conduit au milieu de la basilique, reçoit l’ordre d’anathéma- tiser publiquement Juvénal; l'intrépide religieux déclare qu'il ne connaît point d'autre évêque de Jérusalem que Juvénal. On l’'emmène, on lui dresse un bûcher, mais le peuple se soulève et le délivre. Alors les bandes de Théodose et d'Eudocie se répandent dans toute la ville, poursuivent les orthodoxes, pil- lent et incendient leurs maisons, font signer à chacun la dé- position de Juvénal, et de grandes dames, assiégées dans leurs demeures, sont contraintes, l’épée sur la poitrine, de donner leur signature. Les moines en armes attaquent partout les défenseurs du concile, remplissent les villes de troubles et de séditions ; les Samaritains se révoltent, se jettent sur les deux partis, dévastent les églises et les monastères, allument des incendies, et la Palestine désolée semble en proie à une inva- sion de barbares.

« Le gouverneur de la province, que retenait une guerre contre les Sarrasins, apprend enfin ces excès; il accourt avec son armée, mais Eudocie lui fait fermer les portes. Le gouver- neur n'ose donner l'assaut; on lui fait jurer de soutenir le parti de Théodose et il n'entre dans la ville qu’en allié.

« Enfin Juvénal, qui avait gagné Constantinople, avertit l'empereur des troubles de la Palestine. Marcien, ne pouvant croire à l'importance de la révolte, envoie au gouverneur quel- ques troupes insuffisantes à rétablir l’ordre. Les moines, irrités

(1) Cet évêque, du nom de Sévérien, est fêté le 21 février dans les divers martyrologes. |

(2) Gélase, supérieur d’un monastère situé à Emmaüs-Nicopolis, s’est créé une place à part dans la littérature monastique, On lui attribue, entre autres miracles, la résurrection d’un enfant qu’un de ses religieux avait tué par inad- vertance, Apophthegmata Patrum dans les Ecclesiæ græcæ monumenta de Cote- lier, t. [°", p. 410 seq.

400 REVUE DE L'ORIENT CHRÉTIEN.

de cette intervention, adressent à Pulchérie une requête inso- lente, ils se plaignent des soldats, rejettent les désordres sur les Samaritains, les étrangers et les habitants de Jérusalem, refusent d'accepter le concile et semblent l’accuser elle-même d'hérésie. Marcien et Pulchérie, complètement instruits par les rapports du gouverneur et des magistrats, répondent aux moines deux longues lettres de reproches et de menaces, cependant ils promettent, sur les instances de Juvénal, une grace entière en échange d’une soumission immédiate. Cette amnistie enlève à Théodose la plus grande partie du peuple, mais les moines lui restent fidèles : Eudocie les retenait par son inflexible et hautaine résistance. Les lettres de sa fille Eudoxie, de son gendre Valentinien HI, de son frère Valère, d'Olybrius, plus tard empereur d'Occident, les exhortations du pape saint Léon, les efforts de la célèbre Bassa, fondatrice et supérieure de plusieurs couvents à Jérusalem, demeuraient inutiles; Eu- docie ne cédait pas (1). »

Alors l'empereur Marcien, effrayé des meurtres et des assas- sinats qui ensanglantaient le sol et les églises de la Terre Sainte, envoya le patriarche, le comte Dorothée et une armée puissante pour arrêter Théodose, les évêques et les principaux moines monophysites, rétablir Juvénal sur son siège et ramener l'or- dre dans une région troublée depuis trop longtemps. Pierre l'Ibérien seul, en raison de son origine royale, avait obtenu grâce et pouvait rester dans son couvent de Maïouma sans être inquiété. A l'approche de Dorothée et de ses troupes, les moines rebelles se portèrent à Naplouse, qu'habitaient surtout les Sa- maritains. Là, que se passa-t-il? Les moines refusèrent-ils sim- plement d'accéder aux injonctions impériales et de reconnaitre la foi de Chalcédoine? Tous les écrivains monophysites le ré- pètent à l’envi, vantant le courage de ces hommes simples, dont la foi et la pureté des mœurs constituaient les seules ar- mes. Il est probable, toutefois, qu'en ce moment, comme dans une foule de circonstances analogues, les moines firent usage des épées, des poignards et des bâtons dont ils avaient l’habi- tude de se munir, et que les soldats romains, exaspérés par cette résistance inattendue, se portèrent sur eux aux dernières vio-

(1) A. Couret, La Palestine sous les empereurs grecs, Ὁ. 123-128.

SAINT EUTHYME LE GRAND. [0]

lences. Sur ce point-là, d’ailleurs, tout le monde est d'accord. Un grand nombre de moines furent massacrés, leurs chefs faits prisonniers ou mis en fuite, Juvénal réintronisé au Saint-Sé- pulcre et l’ordre momentanément rétabli.

Un des coryphées du parti monophysite, l’archimandrite Romain, fort compromis dans toutes ces émeutes, futexilé par l'empereur en Syrie, dans la ville d'Antioche, 1] resta cinq ans, soutenant ses fidèles de ses discours et de son exemple. Quant à l'usurpateur Théodose, les soldats avaient l'ordre de le saisir et de l’amener vivant à Marcien, mais Théodose s'enfuit chez les solitaires du Sinaï, puis sous des déguisements divers, en Syrie, il fut enfin reconnu et livré à ses ennemis. Les catholiques l’enfermèrent dans une chambre, remplie de chaux vive, il ne tarda pas à succomber, vénéré comme un martyr par ses partisans. Sa tyrannie sacrilège avait duré environ vingt MOIS.

« Juvénal revint donc à Jérusalem il fut recu avec joie et, pour terminer le schisme, assembla en qualité de patriarche un concile de ses suffragants. Tous les évêques de Palestine qui avaient assisté au concile de Chalcédoine se réunirent, adres- sèrent une lettre synodique aux moines et aux abbés et décidè- rent l'expulsion des évèques établis par Théodose. \

« Sauf Euthyme, revenu dans sa laure, Gélase de Nicopolis, Théoctiste, Gérasime et quelques abbés, les moines, même à Jérusalem, ne reconnaissaient point Juvénal, et les représailles que voulurent exercer quelques partisans de l'évêque les affer- mirent encore dans le schisme. Eudocie les soutenait de tout son pouvoir; mais, trois ans après, son âme intraitable fléchit. Elle apprit coup sur coup le meurtre de son gendre Valentinien ΠῚ, le mariage de sa veuve avec le meurtrier, l'invasion des Van- dales appelés par elle, le sac de Rome, la captivité d'Eudoxie et de ses deux filles emmenées parmi le butin, jusqu'en Afrique, le fils de Genséric épousa l’une d'elles (1). »

Brisée par les désastres de l'empire et les hontes de sa fa- mille, l’infortunée princesse entendit la voix de la gràce et cessa de protéger les eutychiens de son nom, de son influence et de son crédit. Elle envoya le chorévêque Anastase consulter saint

(1),A. Couret, ὁ». cit., p. 128. ORIENT CHRÉTIEN. 26

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Syméon Stylite et la réponse du fameux thaumaturge est une nouvelle excuse pour l’impératrice : « Sachez, lui fit:il ré- pondre, que le démon, voyant la richesse de vos vertus, a de- mandé à vous cribler comme le froment et, par le moyen de ce pestiféré Théodose, il grandement corrompu votre âme. Mais ayez confiance, votre foi n’a pas défailli. Or, je m'étonne qu'ayant si près de vous la source, vous envoyiez si loin cher- cher de l’eau. Vous avez à vos côtés Euthyme le théophore; en suivant ses conseils, vous arriverez au salut. »

En dépit de sa justesse, cet avis n'était pas d’une exécution aisée, car le célèbre anachorète s'était interdit l'accès des grandes villes et, d'autre part, une défense expresse prohibait aux femmes l'entrée de sa laure. De plus, les luttes monophy- sites le contraignaient assez souvent à se réfugier dans Le désert de Rouba. En bonne fille d'Éve, Eudocie tourna la difficulté. Pour jouir des entretiens du solitaire, elle fit construire une tour à la cime d’un promontoire superbe qui dominait toute la contrée. La distance de la laure n'était que de trente stades, presque six kilomètres (1). Ces marques non équivoques d’un sincère retour, non moins que les prières d’Anastase et de saint Théoctiste, touchèrent le cœur d'Euthyme, qui se rendit au lieu du colloque et réconcilia l'impératrice déchue avec l'Église ca- tholique.

« Eudocie ramena avec elle une foule de moines, et surtout l’archimandrite Elpidios (de Saint-Passarion), qui jusqu'alors avait refusé de reconnaitre Juvénal. Mais cette conversion fit écla- ter une scission dans son couvent et quelques moines, entrai- nant avec eux plusieurs de leurs confrères, s’en allèrent fonder des couvents près de Bethléem ou dansle désert d'Éleuthéropolis.

« Comme expiation de sa trop longue erreur, Eudocie fit élever, à quelque distance de Jérusalem, au lieu saint Étienne subit le martyre, une superbe basilique, plus vaste (!)et plus riche encore que l’église du Saint-Sépulcre. Elle retournait souvent consulter Euthyme dans sa tour des montagnes (2). »

(1) Sur l'emplacement de cette tour, un disciple de saint Sabas, Jean dit le Scholarios, bätit plus tard un monastère, d’où sortit un saint, Abraham, évêque de Cratia en Paphlagonie, dont la Vie par Cyrille de Scythopolis été récem- ment éditée.

(2) A. Couret, op. cit, p. 130.

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Or, dit l’hagiographe (1), l’impératrice avait dédié à Pierre, prince des apôtres, une église située en face de la laure d'Eu- thyme. Étant venue la voir, elle aperçut cette laure et les cel- lules des frères, séparées les unes des autres, et méditant sur ce qui:est écrit: Qu'elles sont belles, les demeures de Jacob, Tes tentes, à Israël!

elle se sentit vivement émue et envoya Gabriel, demandant qu'il lui fût permis de s'approcher et de profiter des paroles et des leçons d'Euthyme. En même temps, elle song'eait à assigner des revenus à la laure pour assurer l'existence des frères. Mais le solitaire lui dit tout d'abord : « La mort est aux portes, ma fille, pourquoi s'occuper et se troubler de tant de choses? Ne songez plus qu’à sortir de cette vie. Ne pensez pas à nous don- ner de l'argent et des secours, mais souvenez-vous de nous devant notre commun maître; voilà ce que nous vous deman- dons. »

Elle l’écoutait, partagée entre l'admiration et la tristesse, étonnée qu'il eût d'avance connaissance de son dessein, peinée qu'il lui refusàt de l’accomplir, Puis, elle rentra dans la cité sainte, fit venir l’évêque Anastase et, après lui avoir exposé ce qu'elle tenait d'Euthyme, elle réalisa d'une autre manière ce qu'elle s'était proposé. Tout d'abord, le 15 juin, elle tit la dédi- cace du temple d'Étienne, premier martyr du Christ, qui n'était pas encore achevé. Elle lui attribua un revenu considérable et en confia le soin à Gabriel. Elle ne négligea pas les autres églises qu'elle avait bâties, prenant soin de les visiter, d'en faire la dédicace et de leur donner des revenus suffisants. Quatre mois après la dédicace de Saint-Étienne, elle-même quitta cette vie pour s’en aller vers le Seigneur.

Le calme était donc rétabli dans l’église de Jérusalem et 1l ne fut plus désormais troublé jusqu'à la mort de saint Eu- thyme, 473. Cette sérénité succédant aux violences d'une pa- reille tempête n’est pas uniquement le fait de notre saint et de ses bons offices, elle provient aussi des hommes que l’on voyait alors à la tête de l'empire. En eftet, de 450 à 474, l'empire by- zantin fut dirigé par Marcien et Léon I‘, deux soldats qui

(1) Cyrille de Scythopolis dans sa Vie de saint Euthyme.

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avaient l'âme catholique, le sens très net de leur responsabilité et la main assez ferme pour imposer leur vouloir aux moines récalcitrants. L'opposition le savait et elle resta dans l'ombre. Mais ce n'était qu'une trêve, imposée par les circonstances politiques; on le vit bien, à l'avènement de Zénon et surtout à celui d'Anastase. |

S'il est donc injuste d'attribuer uniquement à saint Euthyme le triomphe de lx cause catholique, ainsi que le font plus ou moins ses panégyristes, on s'exposerait, par Contre, aux mêmes critiques en déniant tout mérite à son intervention. Après la définition de Chalcédoine, notre solitaire et les deux monas- tères qui dépendaient de lui furent, 11 est vrai, les seuls à se prononcer nettement pour la légitimité du concile et pour l'é- vêque Juvénal, et cette décision dut paraître bien indifférente aux yeux des milliers de moines qui luttaient dans l’autre camp. En réalité, l'opposition silencieuse d'Euthyme était ap- pelée à provoquer une réaction profonde, à modifier l'opinion, à transformer en croyance universelle ce qui n'était Jusque-là en Palestine que le symbole d'une infime minorité.

Tout d'abord, saint Gérasime, l'organisateur de la vie des Jaures, le seul dont la sainteté püt balancer celle de notre soli- taire, se déclara pour lui en rejetant la communion de Théo- dose: il en fut de même d’autres anachorètes fameux, comme Pierre le Gyrnite, qui dirigeait une laure sur les bords du Jour- dain, Marc, Ioulon, Sylvain, ete. Ces conquêtes morales, en doublant le nombre des partisans des deux natures, décuplaient pour ainsi dire le crédit de notre saint. Lorsque, par ses soins, Eudocie rentra dans le giron de l'Église, ce fut une explosion de joie dans les laures et les monastères, libres enfin de manifester leurs sentiments et de se déclarer orthodoxes, sans courir le risque d'être privés de ce pain que leur distribuait si libérale- ment l'impératrice. Du fait de cette abjuration, la balance de la fortune penchait manifestement du côté des catholiques et le retour d’Elpidios, ramené lui aussi par les prières et les con- férences d'Euthyme, mettait le sceau à cette victoire, en déta- chant des monophysites le supérieur de tous les religieux du diocèse de Jérusalem.

Tant de résultats acquis en si peu d'années ne manquent pas d'être appréciables. Et ne faut-il tenir aucun compte de l'action

SAINT EUTHYME LE GRAND. A05

plus latente, mais réelle cependant, qu'Euthyme exerça dans la suite par l'intermédiaire de ses disciples? Si Marin et Luc, Martyrios, Élie et Sabas fondèrent, à eux seuls, quinze monas- tères attachés à la foi de Chalcédoine, si la Nouvelle-Laure fut maintenue dans l'orthodoxie par saint Cyriaque, si Théodose le Cénobiarque resta fidèle aux enseignements de l'Église, tous, sans exception, en sont redevables à saint Euthyme. Disciples directs de notre saint ou instruits par ses disciples, 1ls ne sont que la continuation de son apostolat, le prolongement de son œuvre apologétique. Sans lui, tout le patriarcat de Jérusalem fût tombé aux mains des hérétiques, et si les armes des empe- reurs étaient parvenues, en Palestine comme en Égypte, à ré- tablir par la violence l'ordre avec l’orthodoxie, là, comme en Égypte, leur projet d'unir les cœurs et de fusionner les esprits aurait couru au-devant d’un échec certain. Dès que la main im- périale eût cessé d'imposer le «redo à suivre, les bouches au- raient crié anathème au concile de Chalcédoine. L'attitude calme mais énergique d'Euthyme entraina plus d’adhésions sincères au dogme des deux natures que les édits des empereurs et les violences de leurs soldats. Tant il est vrai que la patience et la sainteté sont les seules armes qui conviennent dans les combats de la foi.

A la mort d'Euthyme, l’état d'esprit dans les monastères était transformé. Si l'on comptait encore çà et des moines mono- physites, s’il y avait même des couvents entièrement dévoués à l'hérésie, leur action était nulle sur les déterminations du plus grand nombre. Jamais le monophysisme ne réussit à s'implanter sur le sol de la Palestine, sauf sur le territoire de Gaza, et lorsque les empereurs s’avisèrent d'en faire une loi de l'empire, lorsque la volonté des patriarches ou des évêques commença à fléchir, on vit Sabas et Théodose, à la tête de près de dix mille moines, marcher sur Jérusalem au secours de la foi menacée et faire vénérer les quatre premiers conciles comme les quatre évan- giles. En ce jour mémorable, qui préserva le patriarcat pales- tinien du fléau de l’hérésie, Sabas et Théodose se montrèrent ce qu'ils étaient, de vrais disciples d'Euthyme.

(A suivre.) SIMÉON VAILHÉ, des Augustins de l’'Assomption.

NOTES

SUR DIVERSES HOMÉLIES PSEUDÉPIGRAPHIQUES, SUR LES OEUVRES ATTRIBUÉES A EUSÈBE D'ALEXANDRIE ET SUR UN NOUVEAU MA- NUSCRIT DE LA CHAINE CON(ra severianos (1).

-"-

. Sur trois homélies pseudépigraphiques. II. Sur un remaniement d’une homélie‘attribuée à saint Athanase : II. Classification de ces textes. IV. Macaire d'Alexandrie n’a pas posé de question à Eusèbe d'Alexandrie. V. Édition du texte d’Eusèbe d'Alexandrie cité par Nicon. VI. Édition des premières lignes des homélies attribuées à saint Jean Chrysostome et au pape Eusèbe. VII. Édition de l’'homélie attribuée au bienheureux Léonce. VIII. Édition des fragments syriaques d'Eusèbe d’Émèse. IX. Analyse du manuserit des œuvres d’'Eusèbe d'Alexandrie : Paris, suppl. grec 407. X. Hypothèse sur l’origine et l’ordre des écrits attribués à Eusèbe d’Alexan- drie, XI. Le manuscrit grec de Paris 1144 (contra Severianos).

I. Trois homélies grecques qui sont données comme dif- férentes dans les catalogues de Paris se ramènent, en somme, à celle d'Eusèbe d'Alexandrie De die dominica imprimée dans Migne, Pair. gr.,t. LXXX VI, col. 413-421. Incipit : Μετὰ τὴν ἀπό- λυσιν τῆς ἐχχλησίας... Des. nai τῷ ἐν αὐτῇ ἀναστάντι. δόξαν ἀναπέμ.- Ψψωμεν, σὺν τῷ πατρί, LC:

Ce sont manuscrit 769, fol. 180, Leontfii homilia in sanc- tam dominicam, H. Omont, /nventaire sommaire des mss.

grecs de la Bibl. Nal., Paris, 1886, p. 155; Incipit : Μετὰ τὴν

? = ἘΣ ε ΄ es αὐ 12 - ΄ =} ! ἀπόλυσιν τὴς ἁγίας nupraxñs...... Des. nai πλούσιος τοῦ πένητος; ὅτι τῷ θεῷ πρέπει τιμὴ, etc.

Dans la table alphabétique, H. Omont, loc. cil., p. 121, cette homélie est attribuée à Léonce, évêque de Néapolis, en Chypre, mais le manuscrit porte seulement ; «du bienheureux Léonce ». Nous avons déjà écrit (2) que les feuillets 169 à 192 du manus-

(1) Ces notes ont été communiquées le I4août 1908 au congrès des orientalistes réuni à Copenhague.

(2) Cf. La légende des saints évêques Héraclide, Mnason οἱ Rhodon, ou l’apos- tolicité de l'église de Chypre, dans Revue de l'Orient Chrétien, t. XII (1907), p. 129.

HOMÉLIES PSEUDÉPIGRAPHIQUES. 407

crit 769 appartiennent en réalité au manuscrit 979. L'homélie de Léonce appartient donc au manuscrit 979, du Χαμ" siècle, qui provient de l'ile de Chypre.

manuscrit 929, page 532, δ. Joannis Chrysostomi homi- lia de S. Dominica, H. Omont, /nv. sommaire, p. 178 la table alphabétique, H. Omont, p. 100, cette homélie est donnée comme ?r novam Dominicam, en réalité elle est seule de son genre); Incipit : Ἰ]ροσελθών τις ἀνὴρ εὐλαδὴς τῷ ἐπισχόπῳ αὐτοῦ... Des. χαὶ εὐφρανθῶμιν ἐν αὐτῇ. ὅτι αὐτῷ πρέπει δόξα, etc. Ce manuscrit du xv° siècle, imperiti ef inelegantis scriploris (1), nous conservé quelques pièces qui ne se trouvent pas ailleurs, comme l'apocalypse d'Esdras et l’homélie attribuée à saint Athanase : τρία πετεῖ (ἀπαιτεῖ) θεός (2).

manuscrit 947, fol. 1075, Æusebii papae sermo de sacra dominica, H. Omont, Inventaire sommaire, p. 181. Le manus- crit porte même : « Eusèbe, pape de Rome »; /ncipit : ’Ev ἡμέρᾳ χυριαχῆς, χαθεζομένου" τοῦ Eboeéiou, πάπα Ῥώμης... Des. χαὶ εὐφρανθῶμεν ἐν αὐτῇ, τῷ δὲ θεῷ ἡμῶν δόξα, etc. Ce manuscrit, copié en 1574, provient de l’île de Chypre, car il porte en tête : Vanslebius emit Nicosiae pro bibl. regis Chr., 1671, M. Junio (3).

IT. L'HOMÉLIE DE LÉONCE ET CELLE DE SAINT ATHANASE τρία ἀπαιτεῖ.

L'homélie « du bienheureux Léonce » mérite une mention particulière, car si sa première partie se ramène à l'homélie De die Dominica d'Eusèbe d'Alexandrie, sa seconde partie est parallèle à l'homélie τρία ἀπαιτεῖ θεός éditée à la suite des œu- vres de saint Athanase d’après l'unique manuscrit 929, bien qu'on s'accorde à reconnaître qu'elle n'est pas de ce docteur. Nous donnons donc ici l'analyse de l’homélie de Léonce avec renvois aux paragraphes (I à XIV) que nous emploierons dans son édition.

(1) δῖ. Montfaucon, dans Migne, Patr. gr., t. XXVIII, col. 1108,

(2) Nous l'avons décrit dans Revue de l'Orient Chrélien, t. XIT (1907), p. 226- 228, nous avons édité : Une didascalie de Notre-Seigneur Jésus-Christ (ou : Constitutions des saints Apôtres) d’après ce manuscrit.

(3) Notons que la pagination du manuserit passe de 166 à 172 sans lacune. Les pages 167 à 171 ont été portées leur place) entre 290 et 291. D'ailleurs les feuil- lets 283 à la fin, appartiennent à un autre manuscrit (synaxaire ou ménée).

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Le roi Alexandre demande à l’évêque Eusèbe pourquoi on ne doit pas travailler le dimanche (1). C’est le dimanche que Notre-Seigneur a donné. son corps et son sang aux apôtres et leur dit de faire la même chose en souvenir de lui. D'ailleurs le dimanche marque le commencement de la Création, de la résurrection et de la semaine. On travaille durant six jours et, le dimanche, on doit se purifier de ses péchés (11). Manière d'observer le dimanche : 56. lever matin, ne pas plaider, ne pas dire de paroles inutiles ni de médisances, ne pas se fàcher. Dieu a donné six jours pour travailler, 11 faut lui réserver le septième (111). Ne pas quitter l’é- glise avant la fin de l'office comme Judas est sorti avant la fin de la Cène. Il faut écouter les saintes Écriture et les graver dans son cœur (IV). Ne rien faire en cachette à l’église. Ne te lie avec personne; si tu es pur, communie ; si tu es brouillé avec quelqu'un, va te réconcilier (V). Si tu as eu rapport avec une femme la nuit précédente, ne communie pas. Chacun doit s’efforcer de communier (VI). Les autres jours on ne voit personne (dans les rues), le dimanche tous s'amusent. Quand on appelle à l’église, tous y vont lentement: quand on entend la cithare, tous courent (VII). Comparaison de ce qu'on trouve à l’église et dans les fêtes. La danse d'Hé- rodiade causé la mort de Jean-Baptiste (VIII). Dieu demande à tout chrétien la foi, la vérité et la pureté, τρία ἀπαιτεῖ θεός (IX). Diverses pu- nitions des pécheurs (X). Jeüner le mercredi et le vendredi (XI). Le matin faire le signe de croix, aller à l’église, ne pas jurer (XII). Ne te fâche pas, fuis la coquetterie, souffre en ce monde et Dieu te récompensera (XII). On vit quatre-vingts ans, on n'’atteint pas cent cinquante ans et après qu'arrive-t-i]? Heureux les riches qui ont fait l’aumône. Dieu aurait pu donner de l’or à tous, il ne l’a pas fait pour que les riches et les pauvres concourent au salut les uns des autres (XIV).

Les paragraphes I à VIIT correspondent à l'homélie d'Eusèbe d'Alexandrie et IX à XIV à celle de saint Athanase.

Cette dernière homélie (τρία ἀπαιτεῖ pose encore un petit pro- blème bibliographique. Montfaucon, qui l’éditait d'apres le seul manuscrit 929 de Paris, ajoutait qu'elle se trouvait în An- glicano quodam codice, Migne, Patr. gr., τ. XXVIN, col. 1108 et Fabricius, Bibl. graeca, éd. Harles, VIII, 205, en in- diquait deux manuscrits : /n. cod. Bodlei. 147 et cod. Gale, nr. 5949 (cat. codd. Angl.) inscribilur homilia de salute.

On lit en effet dans les Catalogi librorum mss. Angliae οἱ Hiberniae, Oxford, 1697, p. 19, sous le manuscrit du xv° siècle, Barocc. 147 :

Menae martyrium, fol. 229. Athanasii, archiepiscopi Alexandriæ, sermo de salute, fol. 237 (sic). τρία ἀπαιτεῖ 6 θεός, Timotheï archiep. Alex. narratio mira- culorum 5. Menae, fol. 234 (510). S. Ephraemi sermo de resurrectione, fol. 238.

HOMÉLIES PSEUDÉPIGRAPHIQUES. 109

Mais, dans le dernier catalogue des manuscrits grecs de la Bodléienne (confecit H.0. Coxe, Oxford, 1853), page 254, il n'est plus fait mention de cette pièce dans l'analyse du Barocc. 147 (1). Il semble donc qu'elle n’en jamais fait partie.

Quant au cod. Gale 5919 signalé aussi par Fabricius et que nous retrouvons à Cambridge sous le 1397 (2), ce manus- crit est donné comme une transcription de quelques manuscrits Baroce. d'Oxford. II reste donc à chercher d'où provient cette pièce, puisqu'elle ne peut plus provenir du Baroce. 147.

III. CLASSIFICATION DE CES TEXTES. Nous avons à classer les textes parallèles d'Eusèbe d'Alexandrie, de Léonce (1"° par- tie), de saint Jean Chrysostome et d'Eusèbe, pape de Rome.

Notre homélie, dans toutes les rédactions, suppose qu'un certain Alexandre demande à l'évêque Eusèbe de lui exposer pourquoi on ne doit pas travailler le dimanche. Saint Jean Chrysostome seul supprime les noms propres, mais deux pas- sages de notre homiélie cités dans les Sacra parallela de saint Jean Damascène sont attribués à Eusèbe. L'attribution à Eusèbe est donc certaine.

De plus, les pièces didactiques dans lesquelles Eusèbe ins- truit Alexandre forment certainement la partie la plus authen- tique des œuvres que l’on est convenu d'attribuer à Eusèbe d'Alexandrie (3). Le texte de cet auteur est d'ailleurs mal établi, car il diffère beaucoup des citations consignées dans les Sacra parallela du vi siècle et peut-être du va, cf. Migne, Palr. gr., t. LAXXVI, col. 287, 1. 17-20. Il diffère aussi du texte uti- lisé par Nicon au χι" siècle.

Nous placerons donc en premier lieu les textes d'Eusèbe uti- lisés par l’auteur des Sacra parallela au vin ou au vu siècle. De proviennent, par interpolation, l'homélie d'Eusèbe d'A- lexandrie imprimée dans Migne (4) et celle qui est attribuée à

(1) On lit seulement : Menae martyrium, fol. 229; Ejusdem martyrium auctore Timotheo, fol. 234; Saint Ephraemi sermo de resurrectione, fol. 258.

(2) Trinity college Library, Catalogue of the western mss., t. TT, p. 412.

(3) Sur les vingt-deux pièces éditées sous ce nom par Migne (après Mai, Patr. gr t. LXXXVI, les numéros I, ΠΡῚΝ, VI, VII, VII, X, XVI, XXIT, portent expli- citement : « Alexandre demanda à l'évêque Eusèbe, ou : à l'illustre Eusèbe, » ΠῚ et V sont cités comme les précédents sous le nom d'Eusèbe par Jean Damascene et IX n’est qu’une suite de VIIL. Ces pièces proviennent sans conteste d'un même

auteur qu'on est convenu d'appeler Eusèbe d'Alexandrie. (4) Maï signale l’homélie d'Eusèbe d'Alexandrie sur le dimanche dans le ma-

410 REVUE DE L'ORIENT CHRÉTIEN.

saint Jean Chrysostome. Les homélies, attribuées à Eusèbe pape de Rome et au bienheureux Léonce, peuvent provenir, par abré- viations et suppressions, de l’homélie d'Eusèbe d'Alexandrie.

Nous sommes donc ramenés à une source unique, à Eusèbe d'Alexandrie. Mais qui est cet Eusèbe ?

IV. MACAIRE D'ALEXANDRIE ΝᾺ PAS QUESTIONNÉ EUSÈBE D'ALEXANDRIE.

On lit partout (Fabricius, Maï, Migne) qu'Eusèbe est con- temporain de Macaire, car (1) : In ascetico adhuc inedito opere apud Montf., Bibl. Coislin. p. 111, necnon apud Lam- bec., loc. cit., et in cod. Vat. ejusdem operis, memorantur Ma- car quaestiones ad magnum Eusebium Alexandriae (nempe episcopum) (2). Ce synchronisme est basé sur une faute de scribe. Nous avons parcouru ce manuscrit de Nicon (Coislin 37) et avons trouvé, en effet, au fol. 149 à la fin discours 31 : ἐχ τὰς ἁγίου μαχαρίου ἀλεξανδρείας πρὸς τὸν μέγαν εὐσέόιον ἀλεξανδρείας (3). |

Mais le texte qui suit nous allons d’ailleurs l’éditer —.est un extrait du discours VI d'Eusèbe d'Alexandrie (Migne, Patr. gr., t. LXXXVI, col. 349) on lit : «le bienheureux Alexan- dre, entendant ces paroles, s'avança près du grand Eusèbe et l'interrogea ». Il faut donc remplacer τοῦ μαχαρίου ἀλεξανδρείας « questions de Macaire d'Alexandrie » par τοῦ μαχαρίου ᾿Αλεξάν- δρου « questions du bienheureux Alexandre ». D'ailleurs le ma:- nuscrit grec ὅδ0, fol. 162 et le manuscrit Coislin 297, tous deux de Nicon, portent bien devant le même texte ἐχ τῶν ἐρωτήσεων τοῦ μαχαρίου ᾿Αλεξάνδρου (880) ou ἐρωτήσεις ᾿Αλεξάνδρου (C. 297). Nous avons même vérifié que la traduction arabe de Nicon porte : « Des questions d'Alexandre le bienheureux, l’Alexandrin, à Eusèbe l’Alexandrin (4) ». nuscrit syriaque 368 du Vatican du vr° siècle; cf. Migne, Patr. gr., t. LXXX VI, col. 293, XIX (mais le catalogue attribue cette homélie à Alexandre, évêque d'Alexandrie). Elle se trouve dans le manuscrit grec quart. 46 de Berlin qui provient du monastère de Saint-Georges près de Trapezonte (Trébizonde), fol. 78-81 : τοῦ μαχαρίου Εὐσεθείου λόγος περὶ τῆς ἁγίας χυριαχῆς, ἤτοι τῆς ἁγίας τοῦ χριστοῦ ἡμῶν ἀναστάσεως. Μετὰ τὴν ἀπόλυσιν τῆς ἐχχλησίας ἐν ἡμέρα. τῆς ἁγίας κυριαχῆς, χαθε- ζομένου τοῦ μαχαρίου Εὐσεδείου ἐπισχόπου, προσελθὼν ᾿Αλέξανδρος λέγει αὐτῷ...

(1) Maï, reproduit par Migne, P. G.; t. LXXXVI, col. 289.

(2) Maï ajoute, ibid : « Certe Macarii Ægyptii non leve est testimonium. »

(3) Une main postérieure à barré δρείας et a écrit au-dessus ôpou.

(4) SLR ἘΝ ΟΦ’ ΚΟΥΙ LD) HS ω᾿- Μὰ-

HOMÉLIES PSEUDÉPIGRAPHIQUES. 41]

V. Épirion pu TEXTE D'EUSÈBE CITÉ PAR NICON.

L'édition de ce court texte tranchera la question de « Macaire d'Alexandrie » substitué par le scribe au « bienheureux Alexan- dre »; de plus elle montrera combien le texte utilisé par Nicon au ΧΙ siècle diffère encore du texte édité par Maï (puis Migne) d'après un manuscrit que Maï reporte au χα (1). D'ailleurs il est certain que Nicon transcrit fidèlement son texte, et ne le modifie pas, car dix chapitres plus loin (fin du chap. xLr) 1] le cite à nouveau et cette seconde citation est presque identique à la première, ce qui n'arriverait pas s'il remaniait le texte qu'il sous les yeux. Par exemple, le traducteur arabe qui traduit deux fois, de manière indépendante, le même texte (manuscrit 182, fol. 340° et 466"), le traduit de deux façons différentes et les mots diffèrent très souvent.

Nous utilisons les deux citations du manuscrit Coislin 37, fol. 149, fin du discours 31, que nous désignons par A; 2 fol. 212, fin du discours 41, que nous désignons par D. Nous don- nons aussi les variantes de deux autres manuscrits de Nicon, grec 879, fol. 364", que nous désignons par B, etenfin grec 880, fol. 162, que nous désignons par C.

Ἔχ τῶν ἐρωτήσεων τοῦ μακαρίου ᾿Αλεξάνδρου πρὸς τὸν μέγαν Ἐὐσέσιον (2).

Ἔν μιᾷ τῶν ἡμερῶν, ἄνθρωπός τις ἐν τῷ ποταμῷ παρασυρθεὶς , \ e AY 57 \ Na sr. » em , (72 ἀπέθανεν. Kat οἱ μὲν ἔλεγον ὅτι χατὰ τὰ ἔργα αὐτοῦ ἀπέλαθεν, ἕτεροι δὲ ὅτι θάνατος αὐτοῦ παρῆν. [Προσελθὼν δὲ μαχάριος ᾿Αλέξανδρος

πρὸς τὸν μέγαν Ἐῤσέφιον (9) ρώτησε περὶ τούτο" (4). Καὶ λέγει

nuscrit arabe de Paris, ne 182, fol. 340. Cette version arabe, à son tour, été traduite en éthiopien. Cf. Zotenberg, catal. des manuscrits éth. de Paris.

(1) Voir le discours VI, Migne, Patr. gr., Ὁ. LXXXVI, col. 349.

(2) Sie C. BD n’ont pas de titre. Voir plus haut le titre dans la version arabe et celui de la citation A (Coislin 37, fol. 149). Le manuscrit Coislin 297, fol. 10* (fin du chap. xur), porte : ἐκ τὰς ἐρωτήσεις ᾿Αλεξάνδρου πρὸς τὸν μέγαν Ed. A)e- ξανδρείας. La variété des titres montre qu'ils sont dus en partie aux scribes, mais ce dernier manuscrit est du χα siècle (sic Omont; Montfaucon le plaçait au xI°) et nous montre qu'au moins dès cette époque, l'interlocuteur d'Alexandre était censé être d'Alexandrie. Il en est de même des citations faites par les Sacra parallela. Elles portent en général « d'Eusèbe »; si l’on trouve en plus « d'Alexandrie » cette mention peut ne remonter qu'au scribe et non à l’au- teur.

(3) Τῷ μεγάλῳ Εὐσεδίῳ D,

(4) Τούτων D,

412 REVUE DE L'ORIENT CHRÉTIEN.

ΝΟΥ͂Ν , ΞῚ τὰ ι ; s: ι ΝῊ » . μέγας" οὐδεὶς αὐτῶν εὗρεν τὴν ἀλήθειαν, ἐχν γὰρ χατὰ τὰ ἔργα αὐτοῦ (1) , = , » "ἵ 4} δἰ πὸ , 02 ἀπελάγιθανέ τις, οὐχ ἂν εἴη χύσμος. Ἀλλ᾽ duébodoc (2) οὐχ ἔστι χαρ- Ν ΄ ; \ / r* \ [2 ,ὔ , διογνώστης ἀλλὰ παραχροαστής;, χαρδιογνώστης δὲ μόνος θεός ἐστιν. ΠΙῈἊαραχροάται τοίνυν τὸν θάνατον τοῦ ἀνθοώπου διάζολος, χαὶ οὕτως

΄

εἰσφέρει τὰ παρ᾽ αὐτοῦ, ἵνα τῇ παγίδι ἐπιγράφη (9) θάνατος" ὅταν ἴδη τὸν θάνατον τοῦ ἀνθρώπου, a. ξύνει εἴτε. εἰς μάχην ἐλθεῖν εἴτε εἰς ἄλλο τί οἵον (4) δήποτε υιυχρὸν ὑέγα;, εἴτε ὡς ἀπὸ παῤῥησίας πάλιν οἱασδ᾽ TO TOY ἄρχεταν (5), καὶ ἀπὸ μιχροῦ ῥαπίσματος εὐθὺς ἄνθρωπος τελευτῷ, ἐχ τούτου ἐκείνου, εἴτε πάλιν προτρέπει αὐτὸν περᾶσαι εἰς ποταμιόν᾽ εἴτε εἰς ἡμέραν χειμέριον ὄντα (6) ἐξελθεῖν, εἴτε εἰς δι pr \ δέ Ν οἷον δήποτε πειρασμὸν, ἐπιῤῥίψαι αὐτὸν (7) παρὰ τὰ δέον, ἵνα χαθὼς εἴπομεν (8) ἐπιγραφὴ τῇ παγίδι θάνατος᾽ ἵνα δὲ μάθης ὅτι οὕτως FEU EST τ ἐπα, υπό νειν α τ κα πο τοα ἐστὶ, βλέπε πῶς τινὰς τῶν ἀνθρώπων ἀνηλεῶς τινὲς τύπτουσιν, ὡς

\ » Ρν τιὶ > ἜΣ 2 ΄ χαὶ αὐτῷ τῷ θανάτῳ προσεγγίζοντας (9), χαὶ ξίφεσι χατατέμνωσ! (10) χαὶ οὐ τελευτῶσι, x οὖν δέ τίς ποτε (11) τύψας, λίθου βολὴν μιχρὰν πρὸς αὐτὸν ῥίψας κώσσον (12) δοὺς, εὐθὺς τῷ θανάτῳ παρέπεμψεν. Εἰσὶ δὲ τὰ τοιαῦτα οὕτως" ἐάν τις εἰς οἴκον ἐστὶν (13), χαὶ χειμέριος χαταλζοῃ (14) ox καὶ ἐν αὐτῇ τῇ (fol. 149 b) ὥρᾳ ἐξέλθῃ καὶ ἀπὸ τοῦ χειμῶνος τοῦ ἀέρος, ἀποθανη ἐν τῇ 606, ἘΠ τὰν θανάτῳ τελευτᾷ τοιοῦτος, ἐὰν δὲ ἐν εὐδείχ (15) ἐξέλθη καὶ παρὰ τὴν ὁδὸν

sr N ΄ \ 4 δ / EU χίνδυνος φθάσῃ, χαὶ μὴ ἔχων τόπον τοῦ Es χινδυνεύσιῃ, μαρ-- τυρικῷ θανάτῳ τελευτᾷ τοιοῦτος. Πάλιν ἐάν τις (16) ἀπέλθῃ εἰς ποταμὸν, καὶ τοῦτον εὑρήσει (17) βρυγμοὺς ἔχοντα θχνατηφόρους χαὶ

᾿ = » , LA \ NA CU τ

un διαπερῶντα τινὰ ἐπ᾽ αὐτῷ (18), αὐτὸς δὲ ὡς γενναῖος χαὶ δυνατὸς, θέλων δεῖξαι πόρον, εἰσέλθη χαὶ ἀποπνίγη ἐν τοῖς ὕδασι, παραθουλικῷ θανάτῳ τελευτᾷ τοιοῦτος, ἐὰν δὲ ἴδη, τὸν ποταμὸν εὐμαρῶς ἔχοντα, χαὶ ἑτέρους ἔμπροσθεν αὐτοῦ πορευομένους, αὐτὸς δὲ εἰσελθὼν χαὶ Ὁ: - \ 4 » PA r ( LENS - JU ἣν εἴτε Σατανᾶς τὸν πόδα αὐτοῦ CHAN (19), εἴτε ἄλλως πῶς πέσῃ χαὶ ἀποπνίγῃ (20) ἐν τοῖς ὕδασιν, μαρτυρικῷ θανάτῳ τελευτῇ τοιοῦτος, οὕτω (21) νοήσεις (22) καὶ εἰς πᾶν πρᾶγμα τοιοῦτον.

(1) Om. D. (2) χόσμος. 146. γὰρ D. (9) ὑπο ... Β. (4) ἐλθεῖν ἄλλοοιον D. (5) παρρησίας τινὸς ἄρχεται D. (6) om. D. m7) ἑαυτόν D. C : ποταμόν. à ἐν χαιρῷ χειμερίῳ ἐξελθεῖν, ἐπιῤῥίψαι ἑαυτὸν εἰς τινα πειρασμόν. (8) εἴπαμεν AB. - (θ) ---γγίζειν 6. (10) ---νουσι CD. --- (11) C om. ποτε- (12) χόσσον C. (19) ἐν οἴχῳ ὧν C. --- (11) --λάδει A, --λάθοι C. (15) εὐδίᾳ CD. (16) C add. ὁ. Cf. Sa- cra parallela, P. G., τ. XCVI, col. 69. Nous citons ce texte ci-dessous pour qu'on puisse le comparer. (17) εὑρεῖ D. (18) ἐπ αὐτὸν D. (19) σχάσει A, σχελίσει C, (20) πέσει καὶ ἀποπνήγει A. (21) οὕτως CD. (22) om. C.

HOMÉLIES PSEUDÉPIGRAPITIQUES. 113

Nous ajoutons la fin de ce même texte d’après l'édition Migne des Sacra parallela (P. G., XCVI, col. 69) pour montrer ce qu'il est devenu de Jean Damascène (vn°-vin® siècle) à Nicon ὑπὸ ΞΙΡΟΙΘῚ:

Ἔν τις ἀπελθὼν, βούλεται περᾶσαι ποταμὸν, χαὶ ὁρᾷ αὐτὸν παφλάζοντα LR: χαχλάζοντα), χαὶ χατασυρόμενον φοδερῶς, χαὶ μιηδενὸς ἄλλου ἐπιχειροῦντος διελθεῖν δι᾽ αὐτοῦ. παραθουλεύσηται δὲ χαὶ εἰσέλθη, θέλων ἐπιδείξασθαι ἑαυτὸν ὡς γενναῖον καὶ δυνατὸν, καὶ ἀποθάνη ἐν τῷ ποταμῷ, μετὰ τῶν παραδούλων χρίνεται ψυχὴ αὐτοῦ, ἐπειδὴ

βλέπων τὸν θάνατον αὐτοῦ, παρήχουσε τῆς Γραφῆς λεγούσης" Μὴ

/ TAON BE. = T7 \ δὲ 70 \ \ CN €, AN βιάζου ῥοῦν ποταμοῦ. ’Euv δὲ ἴδῃ τὸν ποταμὸν ἡσύχως ῥέοντα χαὶι Re \ HSE \ \ » FE « un ἀπειλοῦντα βρυγμοὺς θανατηφόρους, ἀλλὰ πραὺν χαὶ εὐμαρῆ, χαὶ NS 2 2 = - δ - τ - \ πολλοὺς διερχομένους, χαὶ εἰσέλθῃ τοῦ διελθεῖν δι’ αὐτοῦ, χαὶ ἐπα- Ve ' / , le LA Ἂς \ : = \ 1N γάγη αὐτῷ Σατανᾶς χῦμα χατὰ συγχώρησιν θεοῦ, χαὶ τὸν πόδα = , À 2 - αὐτοῦ CHAN, LA πεσὼν ἐν τῷ ὕδατι αὐτοῦ ἀποθάνῃ, μαρτυρικὸς αὐτοῦ

θάνατος λογισθήσεται.

Les Sacra parallela et le ms. d'Eusèbe d'Alexandrie édité par Maï et Migne procèdent du même texte grec, car ils em- ploient en somme les mêmes mots grecs; mais les Sacra pa- rallela en ajoutent trente-trois qui ne sont pas dans Migne, tandis qu'ils n'en omettent que cinq. Le texte cité par Nicon au contraire rend les mêmes idées par des mots presque toujours différents des mots de l'édition Migne et constitue une rédac- tion nouvelle.

VI. ÉDITION DE L'HOMÉLIE ATTRIBUÉE A SAINT JEAN CHRYSOS- TOME (1).

Nous désignons, par la lettre À, le ms. de Paris 929; par la lettre B, le ms. 947; par 5,165 Sacra parallela (Migne, Patr.gr., t. XCV-XCVI); par M, l'édition Maï (ou Migne) du sermon d'Eu- sèbe d'Alexandrie sur le Dimanche (Patr. gr., t. LXXXVI, col. 413-421).

Le ms. 929 est mauvais, comme on l'a déjà dit; on y trouve toutes les fautes possibles d'itacisme et d'accentuation :

(1) Nous avons préparé l'édition de toute l'homélie, avec les variantes de toute l'homélie attribuée au pape Eusèbe, mais nous n’en publions ici que le com- mencement pour ne pas trop charger la Revue.

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εἴμοι (pour εἰ μὴ); χύριξ (pour χῇρυξ) ; ταλέπορε (POUT ταλαίπωρε) ; θύραις (pour θῆρες); ὀφίλει (pour ὀφείλει); dd 1. τερα (pOur ὑψηλό- τερα); αὐτῆς (ρου αὐτοῖς) ; πήσης (ρου! πείσεις) ; ao (pour ἀπεράντους); ἀποστερίσεις (POUT ἀποστερήσῃς) ; ἀναπάθεσθαι (pour ἀνα- παύεσθαι); ἥτι (POUT ἥτοι) ; πρὸς ἐτάγις (POUT προσετάγης)», etc.

En général, nous avons corrigé ces fautes dans le texte sans en avertir; dans les variantes au contraire, nous avons con- servé les fautes du ms. B sans les corriger.

.

΄ L LU T !

Ἰωάννου ἀρχιεπισχόπου ἱΚωνσταντινουπόλεως τοῦ Χρυσοστόμου λόγος περὶ τῆς ἁγίας Ἰκυριαχῆς (1).

Ι. Προσελθών τις ἀνὴρ εὐλαθὴς τῷ ἐπισχόπῳ αὐτοῦ παρεχάλει αὐτὸν λέγων μετὰ τὴν ἀπόλυσιν τῆς ἁγίας χυρίου ἐχχλησίας ἐν ἡμέρᾳ χυριαχῆς" Δέομαί σου, δέσποτα, τίνος ἕνεχεν ἡμῖν ἀναγκαῖον ἐστὶν τὸ φυλάττειν τὴν ἁγίαν χυριαχὴν χαὶ μὴ ΤΣ (2), ποῖον χέρδο Fo ἣν ἁγίαν χυριακὴν χαὶ μὴ εργάς 2)} ΓΕΡῸ Ξ ἔχωμεν μιὴ (Ρ. 939) ἐργαζόμενοι.

ε δι ΄ 7 " ξ / SE TELE /

O δὲ μαχάριος ἐπίσχοπος ἤρξατο λέγειν αὐτῷ" Αχουσον, τέχνον, χαὶ ἐρῶ σοι περὶ πάντων τῶν γινομένων ἐν τῇ ἁγίᾳ χυριαχὴ κἄν TE ἀγαθῶν χάἄν τε πονηρῶν.

Τὸ φυλάττειν ἡμᾶς τὴν ἁγίαν χυριαχὴν χαὶ μὴ ἐργάζεσθαι τοῦτο ἐστίν (9)" ὅτε παραδίδου ᾿Ιησοῦς τοῖς. μαθηταῖς αὐτοῦ τὸ μυστή- prov (4), Aaboy τὸν ἄρτον εὐλόγησεν, χαὶ χλάσας ἔδωχεν αὐτοῖς

; ἘΞ τ: - ! ΤΟΝ \ - \ \ ς - ἴὰ , ΕΣ λέγων (5) Τοῦτο μού ἔστιν τὸ σῶμα. τὸ ὑπὲρ ὑμῶν χλώμενον εἰς ἀφε-

2

σιν ἁμαρτιῶν, ὁμοίως δὲ καὶ τὸ ποτήριον χεράσας (6), εἴπεν᾽ Τοῦτό μού ἐστιν τὸ αἷμα. τὸ ὑπὲρ πολλῶν (7) ἐχχυνόμιενον εἰς ἄφεσιν ἁμαρ- τιῶν, τοῦτο ποιεῖτε. εἰς τὴν ἐμὴν ἀνάμνησιν. ᾿Ανάμνησις οὖν τοῦ χυρίου (8) ἐστὶν ἡμέρα τοιαύτη (9), διὸ χαὶ (10) χυριαχὴ ἐχλήθη. Πρὸ γὰρ (11) τοῦ δεσποτικοῦ πάθους, οὐκ ἐλέγετο χυριακὴ ἀλλὰ πρώτη

RTE A ἌΣ ΩΝ NERO AREAS RUE εἰ é nou ξεν αὐτῇ γᾶρ τὴν AOYNY τῆς χοσμοποιίας κύριος ἡμῶν ἤρξατο,

(1) Τοῦ ἐν ἁγίοις πατρὸς ἡμῶν Εὐσεδίου πάπα ‘Pois λόγως περὴ τῆς ἁγίας χιριάχῆς Β.

(2) Ἐν ἡμέρᾳ χυριαχῆς, χαθεζωμένον τοῦ Εὐσεύίου πάπα Ῥώμης" πρὸ ἐλθὼν ἀνὴρ ὀνό- ματι ᾿Αλέξανδρος, χαὶ λέγη αὐτῷ᾽ Δέομιέ σου χύριε ἐπήσχοπε, τίνος ἕνεχεν ἡμῖν φυλάττην τὴν ἡμέραν τῆς Done B.

(3) δὲ μαχάριος Εὐσένιος ἤρξατο λέγην᾽ ’Axou, τέχνον, περὶ τῆς ἁγίας χηριακῆς, To μὴ ἐργάζεσθαι αὐτὴν᾽ τοῦτό ἐστιν τὸ ἔτιον B.

(4) Τὸν τύπον B. (5) Β add. λάδετε, φάγετε. --- (6) χυνώσας A.

(7) Τὸ ποτήριον εὐλόγισε χεράσας, ἔδωχεν λέγων᾽ πίετε ἐξ αὐτὸν πάντες" τοῦτό ἐστιν τὸ αἷμά μου τὸ τὴς καινῆς διαθήχης, τὸ ὑπὲρ ἡμῶν χαὶ πολλῶν Β.

(8) À om. τοῦ χυρίου. (9) αὕτη ἡμέρα ἐστίν Β. (10) διὰ τοῦτο B. (11) om. A,

HOMÉLIES PSEUDÉPIGRAPHIQUES. 415

καὶ ἐν αὐτὴ τῇ AL

, μέρᾳ (1) τὴν ἀρχὴν (p. 534) τῆς ἀναστάσεως ἐδω-

LA έ "ἢ -" - ς ar) APE = L # “ὁ - ΠΗ ε 4 ρήσατο τοῖς πᾶσιν (2). ᾿ὃν ταύτῃ τῇ ἡμέρα τὴν τῶν θείων μυστηρίων ; » τ 0 L 5 , » n λειτουργίαν ἐκελεύσθημεν ἐπιτελεῖν (3). ᾿Αρχὴ οὖν πάσης ἀγαθωσύνης ΄ - ε 7, (PART / RARES NE LR DE AA F NES «ΘᾺ Ne γέγονεν ἡμέρα αὐτὴ (4) ἀρχὴ χτίσεως χόσμωου (5), ἀρχὴ ἑοδομάδος, ᾿ "ΞΘ 1 “7 ε ς , 1N + ἀρχὴ ἀναστάσεως, τρεῖς ἀρχὰς ἔχουσα ἡμέρα αὕτη" τριΐζϑος ἀγαθῆς

δηλοῖ (6) τὴν ἀρχήν (7).

VII. ÉDITION DE L'HOMÉLIE ATTRIBUÉE AU BIENHEUREUX LÉONCE.

Celle-ci n’a pas l'importance de la précédente pour la critique du texte d'Eusèbe d'Alexandrie, puisqu'elle n'en renferme qu'une partie assez librement remaniée, mais elle l'avantage de renfermer à la fin un texte parallèle à l’homélie τρία ἀπαιτεῖ attribuée à saint Athanase et publiée d'après un seul manuscrit. De plus, elle peut être l'œuvre d’un certain Léonce de Chypre, qui peu de chance d'être l’évêque de Néapolis connu par ail- leurs. Ce Léonce aurait soudé ensemble deux homélies anté- rieures pour en faire une nouvelle procédé encore en usage et mériterait peut-être de figurer dans une note de littéra- ture grecque. Nous avons analysé plus haut cette homélie (su- pra ID) et nous l’éditons ici en y corrigeant seulement quelques fautes d'itacisme du ms. 769.

Λόγος τοῦ μακαρίου Λεοντίου περὶ τῆς ἁγίας χυριαχῆς, (εὐλόγησον δέσποτα).

1. Μετὰ τὴν ἀπόλυσιν τῆς ἁγίας χυριαχῆς, προκαθίσαντος τοῦ μακαρίου Ebcebiou, προσελθὼν Ἀλέξανδρος βασιλεὺς, λέγει, αὐτῷ" Δέομιαί σου, ἀγαπητὲ τοῦ θεοῦ Εὐσέόσειε, διὰ τί φυλάττωμεν τὴν ἡμέραν τῆς ἁγίας κυριακῆς, χαὶ οὐχ ἐργαζώμεθα αὐτὴν ὡς ἐργαζόμεθα τὰς ἐξ ἡμέρας:

IL. δὲ μακάριος Εὐσέδιος λέγει αὐτῷ" Αχουσον, τέκνον ᾿Ἀλέ-

1) A om. ἐν αὐτῇ γὰρ τὴν ἀρχ. τ. 206... 2) ἡμῖν ἐδωρήσατο Β. 3) B om. Ἐν ταύτῃ... -- (4) αὕτη ἡμέρα Β. (5) B add ἐστὶν.

(6) dun A. --- αὕτη τριάδος ἀγαθὴ ἡμεινίει Β.

(7) En quatorze endroits le présent texte se trouve d’accord plus bas avec les Sacra parallela contre l'édition Migne d’Eusèbe d'Alexandrie. Il pourra donc être utilisé si l’on réédite à nouveau cette homélie.

( ( (

410 REVUE DE L'ORIENT CHRÉTIEN.

ξχγδρε, χαὶ ἐρῶ σοι περὶ πάντων τῶν γινομένων τὴν ἁγίαν χυριαχὴν ἀγαθά: ᾿Εν (fol. 1785) ταύτῃ τῇ ἡμέρα τοῖς ἑαυτοῦ μαθηταῖς Κύριος 2 “δ x Ale ἜΗΝ δὲ \ Von ONE \ /

ἐπαρέθωχεν TO μυστήριον, χαὶ λαδὼν τὸν ἄρτον εὐλόγησεν, χαὶ κλάσας

΄,ὕ -- - ΩΝ \ , , 1 ΄ δέδωχεν τοῖς ἑχυτοῦ μαθηταῖς χαὶ ἀποστόλοις, εἰπών᾽ Λάδετε, φάγετε, . - \ - / \ τοῦτο ἐστὶν τὸ σῶμα μου, ὁμοίως χαὶ τὸ ποτήριον συνχεράσας εὐλό- \ 5 Fe , 2 1 23 \ , x \ x χαὶ εἶπεν" [liste ἐξ αὐτοῦ πάντες καὶ ποιεῖτε (1) εἰς τὴν ἐμὴν

ἀνάμνησιν (2). ᾿Ανάμνηςσ γάρ ἐστιν τοῦ χυρίου ἡμῶν Ἰησοῦ Χριστοῦ

σις / δ il τω » PAT \ χαὶ τῶν ἁγίων αὐτοῦ μυ GT np LOV, χᾶι OX TOUTO οὐχ ἐργαζόμεθα T'AY

ἡμέραν τῆς ἁγίας κυριαχῆς" ἀρχὴ Ὑὰρ ἀγαθωσύνης γέγονεν ἡμέρα ταύτη: ἀρχὴ χτίσεως χόσμου, ἀρχὴ ἀναστάσεως, ἀρχὴ ἑσδομιάδος.

Τρεῖς ἀρχὰς ἀγαθὰς ἔχει

ε / - / ΕΝ Ν ( ἡμέρα. τῆς ἁγίας κυριαχῇῆς, χαὶ τριζδος

AVAUNTIGHEL ἡμῶν, προσχυνεῖν τριάδα τὴν ὁμοούσιον χαὶ θεότητα. ἡμέραις ἔχει ἑδδομάς" τὰς ἕξ ἡμέρας ἡμῖν θεὸς εἰς τὸ ἐργά- < \

lecb nv δὲ ἣν ἔδωχεν à βεὸς εἰς εὐγὴν χαὶ ἀνάπ ΩΝ ζεσθαι, τὴν δὲ χυριαχὴν ἔδωχεν ἡμῖν θεὸς εἰς εὐχὴν χαὶ ἀνάπαυσιν χαὶ λύσιν πάντων χαχῶν, ἵνα ἤτοι. ἁμλοτίας ἁμαρτίσωμιεν, ἐν TA ἡμέοα ? re μ υ ? Û γ᾽ τῆς ἁγίας χυριακῇς καθαρισθῶμεν ἀπὸ τῆς ἁμαρτίας. ς \ \ : υν

TT. ’Epyouévns γὰρ τῆς ἁγίας χυριαχῆς, ὄρθρισον, πὰράμεινον \ ΄“ e " re 1 ΄ \ ἕως ἂν πληρωθῇ ὄρθρος, εἶτα πλήρω ς οθο "ἡ σεγ- ληρωθῦ ρθρος, εἶτα πληρωθέντος τοῦ ὄρθρου, μὴ προσεγ

D N , x Li ᾿ 5

γίσῃς ἐν δικαστηρίῳ, λόγον ἀργὸν (fol. 179") μὴ εἴποις, καὶ (μὴ) ολύνης Σὰ Luyr 0 s NH LA / βλά ; χχὶ A τ τα-- μολύνης τὴν ψυχήν σου, χαὶ τοὺς ἀχούοντας βλάπτῃς, καὶ μὴ χατα λαλήσῃς κατά τινος, χαὶ μὴ ὀργίσθης χατὰ μικροῦ χατὰ μεγάλου. Οἱ (ἐπὶ) τῇ χακίχ μένουσιν χαὶ οὐχ ἐκατηλλάγησαν εἰς πῦρ ἀσδεστον ἀπελεύσονται. "Εδωχεν ἡμῖν θεὸς ἐξ ἡμέρας εἰς τὸ ἐργάζεσθαι, ἵνα ἐν αὐταῖς πωλεῖν, ἀγοράζειν, χαὶ συνευφραίνεσθαι μετὰ τῆς γυναικός σου τῆς ἐκ νεότητός σου. Χάρισαι χαὶ σὺ τῷ θεῷ σου μίαν ἡμέραν πρὸς σωτηρίαν τῆς ψυχῆς σου, λέγω δὴ τὴν ἁγίαν κυριαχήν.

ΙΝ. Καὶ μὴ ἐξέλθης ἐκ τῆς ἐχχλησίας σου ἐὰν WA ἀπόλυσις fi

SZ θ᾽ A Τὴ δό δ À ἐξ 40. υνήσθητι γὰρ τοῦ προδότου ᾿Ιούδα, χαὶ μὴ ἐξέλθης, ἐχείνου γὰρ ἀρχὴ τῆς ἀπωλείας ἐγένετο τοῦ μὴ παραμεῖναι μετὰ πάντων. Λαξὼν À Σ \ 57 0] ΄ 2 - ΄ - ζω 1e À γὰρ τὸν ἄρτον Ἰούδας ἐν τῷ στόματι αὐτοῦ ἐξῆλθεν ἔξω, καὶ ἐχόρευσεν Σατανὰς, χαὶ ἐσπούδασεν εἰς τὴν προδοσίαν τοῦ Σωτῆρος. Ἐὰν ἊΝ προ στα Δ re re eau ἐχχλησίας ἐξέλθ᾽ “οςχτὸς av οὖν πρὸ τῆς ἀπολύσεως τῆς ἁγίας ἐκχλησίας ἐξέλθῃς παρεχτὸς

ἀνάγκης, μετὰ Ἰούδαν ἐλογίσθης. Καὶ βλέπε, ἀδελφέ (9) μὴ δι᾽

(1) πίετε MS. πα Cor ΧΙ 245 Luc: χα:

39

(3) βλέπετε, ἀδελφοὶ Ms.

HOMÉLIES PSEUDÉPIGRAPHIQUES. 117

ὀλίγην ὥραν, μέλλῃς ἀπολέσαι τὴν ψυχήν σου, χαὶ αἰωνίως χολαζε- σθαι, οὐ μάχαιρα, οὐ κίνδυνος, οὐδὲ ἕτερον χολαστήριον ἐστὶν, τὸ δοχοῦντα ἡμᾶς ἐκ τῆς ἁγίας ἐκχλησίας, ἀλλὰ στήθι οὖν μετὰ φύδου, χαὶ ἀχροᾶσαι, (fol. 1817) αἵπερ λέγουσιν oi ἱερεῖς χαὶ οἱ Λευῖται ἐκ

- \ x ΄ - N/ τῶν θείων γραφῶν, χαὶ γράψαι αὐτὰ εἰς τὰ βάθη τῆς χαρόίΐας σου,

- # ΕἸ Ἂν , 1 - ἵνα παραλάδῃς αὐτὰ εἰς νουθέτησιν τοῦ θεοῦ σου. V. Kai μὴ xhan7 ἐν τὴ ἐχχλησία χαὶ συνζεύξης μετά τινα = αι μὴ x απῆς ποτὲ EV τῇ ἐχχλήησια HAL συν-εὐυςῆς μετα τινᾶ,

ἐπεὶ μισθὸν οὐχ ἔχεις, ἀλλὰ στῆθι οὖν μετὰ φόδου, χαὶ ἴδε τὸν δεσπό-

= « * ΄ NS τὴν Χριστὸν διαμελιζόμενον, καὶ μὴ διχιρούμενον, χαὶ μεταδιδόμιενον εἰς σωτηρίαν πάντων, χαὶ εἰ μὲν ἔχεις χαθαρὸν τὸ ἀγγεῖον τῆς ψυχῆς

΄ τ , \ ΤΕ , δὴ

σου, πρόσελθε καὶ χοινώνησον, εἰ δὲ καὶ κατανοεῖ λογισμώς σου, ὅτ' Ἷ - " τ \ ἊΣ , 5 e / ee 1} Ψ A ἔχεις χαχίαν μετά τινος, ἄφες τὰ δῶρα ἐν τῇ ἁγίᾳ τραπέζῃ, vai στ

ϑ ἄφο" χαὶ χοι-

ἄπελθε χαὶ διαλλάγηθι τῷ ἀδελφῷ σου, καὶ τότε νῴώνησον.

VI. Εἰ δὲ πΖλιν κατανοεῖς ὅτι συνεγίνου μετὰ γυναικὸς τῇ νυχτὶ ἐκείνη, μὴ προσέλθῃς τοῦ μεταλαύεϊν. Καιρὸς γάρ ἐστιν τὸ πάντοτε. O γὰρ ἐσθίων χαὶ πίνων τὸ σῶμα χαὶ τὸ αἷμα τοῦ κυρίου, χρίμια

?

αὐτῷ ἐσθίει χαὶ πίνει. ᾿Ανθρωπος δὲ Χριστιανὸς μένων ἀκοινώνητος

΄

χωρὶς ἀνάγχης παρεσυνεσλέθη τοῖς χτήνεσιν τοῖς ἀνοήτοις χαὶ ὡμοιώθη αὐτοῖς. Τὸ αὐτὸ καὶ γυνὴ χωρὶς ἁμαρτίας χαὶ σωματιχῆς ἀσθενείας ἐὰν χωρίσῃ αὐτὴν ἐχ τῆς ἁγίας ἐκκλησίας χωρὶς ἀνάγκης, καλὸν εἶναι αὐτὴν εἰ οὐχ ἐγεννήθη, οὐαὶ δὲ χαὶ τῷ συνόντι μετ᾽ αὐτῆς, ἤγουν (fol. 189) τοῦ ἄνδρος αὐτῆς.

ὙΠ]. "Απελθε ἐν. ἄλλῃ. ἡμέρχ καὶ οὐχ εὑρήσεις τινὰ ἐν τῇ μέσῃ, χαὶ ἄπελθε ἐν ἡμέρχ χυριαχῆς χαὶ εὑρήσεις οἱ μὲν χιθαρίζοντας ἄλλους ὀρχουμένους, ἄλλους παλαίοντας, ἄλλους χλέπτοντας, ἄλλους διχαζο-

LA

μένους, ἄλλους σύροντας οαλλήλους, ἄλλους μεθύοντας, ἄλλους διανεύον- \ A F4 \ , \ Ë -Ὁ \ / - ΄ \ τᾶς ἐπὶ τὸ χαχόν. Kat οὐαὶ αὐτοῖς ὄντως, χαὶ τίς τολμᾷ λέγειν τὰ ι “» . ᾿ς 2 \ -- ι - , _ ἀγαθὰ τῆς ἁγίας χυριχχκῆς, οὐαὶ τῷ χλέπτη, οὐαὶ τῷ πόρνῳ, οὐχὶ τῷ = , LU / = e f 09 -Ὁ- ι - χαταλαλοῦντι ἐν τῇ ἡμέρα τὴς ἁγίας χυριαχῆς. Καλεῖ εἰς τὴν ἐχχλη- CHE 2 ξ λέ δ) \ E5) τ à , Ξ ἰὸν - LEA 2 2 σίαν χήρυξ, λέγω δὴ τὸ ζύλον, χα! πάντες οχνοῦσιν, γέγονεν φωνὴ / ε A ΄ L κιθάρας, καὶ πάντες ὡς ἀπὸ πτερύγων φθάνουσιν. Α΄ " / - LA , Al * VIII. Axove, ἄνθρωπε, τί θεωροῦσιν οἱ ἐρχόμενοι εἰς τὴν ἐχχλη- / \ NES Æ » ΄ Ξ / ᾿ σίαν, τὸν δεσποτὴν Χριστὸν χελαδοῦντα, τοῦ ἀποστόλου [Πχύλου τὸν = / \ _ LA -Ὁ χαλὴν διδασχαλίαν {1}: τὰς τῶν πάντων χαρδίας ὁμιλοῦντα, (ox (L) Sic Migne. Cette mention de la didascalie de Paul (lecture d'une épitre ?) ORIENT CHRÉTIEN. 97

2)

4] : REVUE DE L'ORIENT CHRÉTIEN.

ἀχαταπαύστως τὸ ᾿Αλληλούια τὰ Χερουδὶμ, τὰ Σεραφὶμ, τὰ ἄσματα τῶν ἀσμάτων, τὴν παραίνεσιν τῶν ὁσιωτάτων ἐπισχόπων τε χαὶ πρεσδυτέρων, ὅλα αἰώνια, ὅλα πνευματικὰ χαὶ ὠφέλιμα. ἐρχόμενος εἰς τὴν ἐχχλησίαν ταῦτα θεωρεῖ, χαὶ ἐρχόμενος ἐν θεάτροις, θεωρεῖ ὅλα διαδολιχά" θεωρεῖ γὰρ τὸν γελοιασμὸν, τὰς τραγῳδίας, τὸν κιθα- ρισμὸν, τοὺς χοροὺς, τὰ τύμπανα, τὰς οἰνοποσίας, τὰς γαστριμαργίας, (Lol. 182) ἐχεῖνα γὰρ τοῦ διαύόλου εἰσὶν τὰ τεχνάσματα καὶ ᾿τῶν ἐθνῶν παίγνια" γυνὴ γὰρ ὀρχισμένη οὐδὲν ποιεῖ ἄλλο εἰ μὴ αὐτοπροαι- ρέτως δαιμονίζεται, ὀρχισαμένη γὰρ Ἡροδιὰς, τὴν χεφαλὴν ᾿Ιωαννοῦ τοῦ βαπτιστοῦ ἀπέτεμεν. πονηρὸν ὄρχισμα γυναικὸς, πονηρὸν τόλμημα γυναιχὸς, πονηρὰ γυνὴ ὅπου ἀνεῖλεν τὸν τοιοῦτον ἄνδρα. Kai βλέπε, ἄνθρωπε, ὅτι δεσπότης ἡμῶν Χριστὸς καὶ φιλάνθρωπος χαὶ ἐλεήμων, πῶς ἐμαστιγώθη ai ὡς ἁμαρτίαν οὐκ ἐποίησεν, οὐδὲ εὑρέθη ἀδικία ἐν αὐτῷ, σὺ δὲ, ἄνθρωπε, ὧν ἁμαρτίαις δεδουλωμένε, βαστάζεις τὸν πλησίον σου. ;

ΙΧ. Τρία (1) γὰρ ἀπαιτεῖ θεὸς παρὰ παντὸς Χριστιανοῦ. πίστιν ὀρθὴν, ἀλήθειαν ἀπὸ γλώσσης καὶ ἁγνείαν (2) ἀπὸ τοῦ σώματος. Καὶ τὰ ἄλλα ὁμοίως φύλαττε, πρῶτον μὲν μὴ λαλήσῃς, ἄλλ᾽ ὅτε ἀχούσης τινὸς χαταλαλοῦντος, φύγε ἀναχώρησον ἵνα μὴ χαὶ σὺ ὅμοιος γένῃς τοῦ χκαταλαλοῦντος, χαὶ ἀπέλθῃς εἰς κόλασιν αἰώνιον. εἰς δράχοντας πυρίνους τρώγοντας τὴν γλῶσσαν.

Χ. Εἶπεν γὰρ Θεὸς διὰ τοῦ προφήτου ὅτι τῶν διανευόντων οἱ ὀφθαλμοὶ, ὑπὸ ἀνελεημόνων ἀγγέλων (9) ἐξορύσσονται. Τότε οἱ γελῶν- τες πιχρῶς χλαύσουσιν, τότε οἱ φλυαροῦντες ἐλεεινὰ στενάξουσιν, «χατα- διχαζόμενοι;:- εἰς τὸν πύρινον ποταμὸν, εἰς τὸν δυνὸν “Λδην, εἰς τὸν σκώληκα τὸν ἀκοίμητον, εἰς τὸν πιχρὸν χλαυθμὸν, εἰς τὸν βρυγμὸν (fol. 1831) τῶν ὀδόντων.

NI Τετράδην χαὶ παρασχευὴν νήστευε, τὰς δὲ ἄλλας ἡμέρας ἐξου- δίαν ἔχεις, κἂν θέλῃς νήστευε, χἂν θέλῃς μὴ «“νήστευε;- (4). Ὥσπερ ἐποίησεν θεὸς τὸν ἄνθρωπον κατὰ φύσιν τὸ ἀναπνέειν, οὕτως ἐποίησεν

ἁρμόζειν καὶ τὰς γυναῖχας ἵνα πάντοτε νηστεύωσι.

manque dans les Sacra parallela et dans l’homélie attribuée à saint Jean Chrysostome.

(1) Ici commence l'emprunt à l’homélie attribuée à saint Athanase.

(2) ἄγνοιαν Ms.

(3) ἀνελεήμων ἀνδρῶν Ms.

(4) χἂν θέλεις νήστευσε, κἂν μὴ θέλεις Ms.

HOMÉLIES PSEUDÉPIGRAPHIQUES. 419

\ 2 ’ὔ \ A \ 7 d / , / ΧΙ]. ᾿Ανισταμένου σου τὸ πρωΐ τὸν τύπον τοῦ τιμίου σταυροῦ ποίει εἰς πάντα τὰ μέλη σου. Kai περιπατῶν χαὶ χοιμώμιενος χαὶ πάντοτε P On 4 e CU La 4 \ , » λέγε" Küpue ᾿Ιησοῦ Χριστὲ βοήθησον ἡμιῖν. Ectépas au πρωΐ εἰς τὴν , ΄ 4 = - 2 ΄ 71 ἐχχλησίαν ἀπέρχου, χαὶ ἐξομολογοῦ τῷ θεῷ τὰς ἁμαρτίας σου ἅσπερ πῇ 5 » . ΡΝ A bo > L) 12 v4 x fs 00 x Ι fe émousos, χαὶ βλέπε, ἀνθῦρωπε, μὴ ὀμοσὴς PLATE ἐν τῷ οὐρανῷ μήτε , - ΡΝ ε Υ , \ ( 0 / , \ ἈΠΕ ΘΑ = AA ἐν τῇ γῆ, γὰρ οὐρανὸς θρόνος τοῦ δεσπότου ἐστὶν, δὲ γῆ ὑποπόδιον = da » “Ὁ A LR ] ! 73 \ \ ὀἠ 9 ΄ τῶν ποὸῶν αὐτοῦ, ἀλλὰ ἐὰν βίχ σοι γένηται παοὰ τινὸς τοῦ ὀμόσαι, τ - ᾿ \ ΠῚ 2 ; EN \ εἶπε αὐτῷ ᾿Αλήθειαν λέγω καὶ ψεύδομαι. Μετὰ ἀνδρῶν χαὶ γυναι- χῶν φλυάρων, μὴ συνχαθίσης ποτέ. XIII. Kai βλέπε, ἄνθρωπε, μὴ ὀξύνθης, ὅτι διάδολος ἐπιφέρει " r 7 “-ω , 2 x τὴν ὀξυχολίαν, ἵνα ὀξυνθῆς, χαὶ ἀπολέσῃς τὴν ψυχήν σου, τὴν δὲ «Δ Q ᾿ δ n \ 5 2 \ ω 3 / πραύτητα θεὸς διδοίη, ἵνα διὰ τῆς πραύτητος καὶ τῆς ἐλεημοσύνης σωθῇς. Καὶ βλέπε, ἄνθρωπε, τὸν χαλλωπισμὸν τῶν ἱματίων μὴ ἀγα- πήσης, μηδὲ τὴν βλακείαν ποθῆς, ἀλλὰ μᾶλλον ταπεινὰ φύρει χαὶ » = τ - ? e x ε eu A N 7 εὐτελὴ διὰ τὸν θεὸν, ἵνα ἐχεῖθεν ἐνδύσῃ σε θεὸς ἡμῶν στολὴν δόξης, ἔνδυμα ἀφθαρσίας, (fol. 189) στέφανον κάλλους, διάδημα βασι- λείας, ἵνα τότε ἔχῃ ψυχή σου παῤῥησίαν πρὸς τὸν θεὸν λέγουσα᾽ ᾿ζύριε S je χη μη στ ΞΟ Δ EAN JS - προ ΄ - / \( « 29: ω \ p] 4 ἐν τῷ χόσμῳ τούτῳ τῷ ματαίῳ πολλὰ ὑστερήθην ἵνα τὴν βασιλείαν σου ἀπολαύω (1) δέσποτα, καὶ τότε ἐρεῖ δεσπότης ἡμῶν Χριστὸς φιλάνθρωπος καὶ ἐλεήμων" οὗ μὲν ὀλίγα ἐχοπίασας, πρῶτα ἡτοίμασά σοι ἐγὼ; ἀλλὰ δεῦρο εἴσελθε εἰς τὸν νυμφῶνα τῆς δόξης μου, χαὶ ἀπό- λαυσον ὀφθαλμὸς οὐκ εἶδεν, χαὶ οὖς οὐχ ἤκουσεν, χαὶ ἐπὶ χαρδίαν ἀνθρώπου οὐκ ἀνέθη ὅσα ἡτοίμασα τοῖς ἀγαπῶσιν τὸ ὄνομά μου. \ 1 -- ΄ . , XIV. Εν ὀγδοήκοντα γὰρ ἔτη πληροῦται χρόνος τοῦ ἀνθρώπου, εἰ χαὶ τρυφῶμιεν χαὶ πλουτῶμεν πεντήχοντα ἔτη χαὶ ἑχατὸν χαὶ μετὰ ταῦτα τί πρόχειται; Μαχάριοι οἱ σπουδάζοντες ἐπιτυχεῖν τῆς ἀτελευ- ᾿ e » τ e SES τήτου βασιλείας. Μακάριος ἄνθρωπος éxeivos διὰ τοῦ "ἰδίου πλούτου λυτρώσηται τὴν ἑαυτοῦ ψυχὴν ἐκ τῆς χολάσεως, λυτροῦται γὰρ τὸν » 97 ΄ e 1 ΕΣ A ἄνδρα ἴδιος πλοῦτος, καὶ πάλιν᾽ Μαχάριος συνιὼν ἐπὶ πτωχὸν καὶ πένητα, ἐν ἡμέρᾳ πονηρᾷ ῥύσηται αὐτὸν Κύριος. [Ποίαν ἡμέραν πονη- L 4 Lu - (4 LU ν « -- βὰν λέγει προφήτης. ἐδιηγεῖτο υὲν (2) ἡμῖν περὶ τὴν ἡμέραν τῆς

:

χρίσεως, τί γὰρ χειρότερον χολάσεως; ὄντως οὐδέν, Τί γὰρ ἀδυνατεῖ

(1) Montfaucon a édité : ἀπολάθω χαὶ ἀπολαύσω. C'est deux fois le même mot, car le ms. 929, d’après lequel Montfaucon a donné son édition, porte souvent 8 pour νυ, par suite ἀπολάδω ἀπολαύω.

(2) Prima manu : αἰδιηγήσω (sec. m. ἐδι---) γάρ Ms.

420 REVUE DE L'ORIENT CHRÉTIEN.

τῷ θεῷ ὀμόρους χρυσοῦ χατενεγχεῖν ἐπὶ τὴν γῆν ἵνα πάντες πλοῦτον ἔχωμεν; παρὰ τῷ θεῷ πάντα δυνατά εἰσι. (fol. 184") Ἵνα πένης ἄφεσις τῶν ἁμαρτιῶν τοῦ πλουσίου γένηται, χαὶ πλούσιος τοῦ πένη- τος, ὅτι τῷ θεῷ πρέπει τιμὴ χαὶ δόξα εἰς τοὺς αἰῶνας τῶν αἰώνων.

᾿Αμήν.

Migne déjà édité en triple recension quelques homélies d'Eu- sèbe d'Alexandrie et d'Eusèbe d'Emèse, Patr. gr., t. LXXXVI, col. 384, εἰς τὸν διάόολον nat εἰς τὸν ἄδην ; COL. 509, περὶ τῆς παρουσίας Ἰωάννου εἰς ἄδην ; la présente publication montre qu'il aurait pu en faire autant pour l’homélie sur le Dimanche en ajoutant, comme edilio altera et editio tertia, les textes attribués à saint Jean Chrysostome et à Léonce (1). Enfin, nous avons apporté notre contribution à une synthèse des textes ecclésiastiques : homé- lies, canons, didascalie de J.-C. ou Constitutions des Apôtres, lettres de J.-C. ou tombées du ciel, qui ont concouru avec les textes civils : lois de Constance, de Théodose, de Constantin, de Valentinien, de Léon, pour imposer le repos dominical et la cessation, en ce jour-là, des actions en justice comme de tout spectacle profane (2).

VIII. ÉDITION DES FRAGMENTS SYRIAQUES D'EUSÈBE ΕΜ ΒΕ,

Tous nos textes nous ont ramené à Eusèbe, dit d'Alexandrie, comme à la source première. On ne sait au juste ni où, ni quand il vivait. On a proposé ou combattu son identification avec Eusèbe d'Emèse qui vécut à Alexandrie et fut même nommé évêque de cette ville, dignité qu'il n’accepta pas d’ailleurs, d'où on le transféra à Emèse. Nous avons cherché mais sans suc- cès à trancher cette questien. Nous voulons du moins faire connaître les documents nouveaux non encore versés au dé- bat dont nous avons disposé.

(1) Cf. Revue de l'Orient Chrélien, 1907, Une Didascalie…., p. 245-249.

(2) Les lois des empereurs se trouvent dans le Corpus juris civilis, cod. HI, tit. x, de feriis, par exemple Constantin (en 321) : omnes judices, urbanaeque plebes, et cunclarum artium officia venerabili die solis quiescant. L'empereur Léon surtout, en 160, est complètement d'accord avec nos homélies pour prescrire le repos et défendre les actions en justice ou les spectacles : Dies festos majestati allissimae dedicalos nullis volumus voluptalibus occupari, nec ullis exactionum vexationibus profanari…. praeconis horrida vox silescat, respi- rent a controversiis liligantes… Transacliones loquantur.…. Nihil eodem die sibi vindicet scena theatralis, aut circense cerlamen.. Ces lois sont traduites en grec dans le livre VII Βασιλιχῶν.

FRAGMENTS D'EUSÈBE D'ÉMÉSE, 19]

Philoxène de Maboug, mort vers 523, a ajouté, à la fin de l'un de ses traités sur l’Incarnation, un recueil de témoignages qui renferme vingt-huit courtes citations d'Eusèbe d'Émèse. Ce traité, déjà signalé par Assémani (1), n'est pas encore édité; il est contenu en particulier dans un ms. de Londres, add. 12164, écrit à Édesse au γι siècle. Nous avons donc toute chance de trouver sans altération des textes authentiques de cet auteur. Enfin un ms. de Londres, add. 14665, renferme un fragment d'Eusèbe d'Émèse «sur le jeûne ». M. E. W. Brooks a bien voulu nous transcrire ce dernier texte.

Nous n'avons trouvé aucun de ces textes syriaques d'Eusèbe d'Émèse dans les œuvres grecques éditées sous le nom d'Eusèbe d'Alexandrie, ni même dans les vingt fragments cités sous le nom d'Eusèbe dans les Sacra parallela. Nous n'avons donc aucune raison d'identifier les deux Eusèbe. Nous ne concluons pas cependant qu'ils sont différents, car Eusèbe d'Émèse, d'a- près saint Jérôme, innumerabiles confecit libros, et nous con- cluons seulement que les fragments syriaques appartiennent à des ouvrages qui ne sont pas conservés en grec.

IL est intéressant de remarquer que les fragments choisis par le monophysite Philoxène ont une tournure doctrinale dia- métralement opposée à celle des deux fragments cités par Théo- doret, l'ami de Nestorius: Pour Philoxène, Eusèbe d'Émèse rap- proche les deux natures, divine et humaine, au point de n’en faire qu’une (2); pour Théodoret, Eusèbe d'Émèse les sépare et les oppose au point d'en faire deux personnes. Cette facilité avec laquelle les adversaires pouvaient se servir d'Eusèbe d'Émèse personnage d’ailleurs de second ordre, et discuté aussi pour ses opinions astronomiques est peut-être cause de la dispa- rition de ses ouvrages. Aucune faction n’a eu intérêt à les con- server et à les exploiter.

(1) Bibl. or., 11; 28. (2) Formée de deux sans mélange ni confusion, disent Les Jacobites.

ADD, REVUE DE L'ORIENT CHRÉTIEN.

À. Fragments conservés par Philoxène (ms. du Brit. Mus., add. 12164).

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426 REVUE DE L'ORIENT CHRÉTIEN.

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D'Eusèbe d'Émèse, du discours sur la foi.

1. Lorsque j'ai regardé, j'ai vu une vision nouvelle : Dieu sur la terre dans (un) corps. Ne nous privons pas de la paix de Dieu, qui est venu près de nous comme nous.

2. Du méme. Dieu est venu, et il a apporté aux hommes ce qu'aucun homme ne pouvait produire.

3. Du méme. Moi, certes, je proclame bienheureux ce sein qui a été jugé digne de recevoir Dieu.

Du même, du discours sur les nouveaux changements.

4. Qui est venu près de nous? Un serviteur? Non, mais son maitre. Ce n'était pas un homme, mais Dieu. Ce n'était pas celui qui a été élevé chez Pharaon, mais celui qui était près de Dieu et qui était avec son père. Quelle est cette nouveauté? Sinon que Dieu Emmanuel est avec nous.

Ὁ. Du même. Ce qui est nouveau, c’est que Dieu a été vu sur la terre. Le soleil n’a pas l'éclat de ce prodige, car le soleil (brille) d'habitude, tandis que Dieu (est) sur la terre nouvellement.

6. Du même. Dieu est venu près de nous; que l’incrédule observe les événements et se rende compte sont les dieux (païens) ce vrai (Dieu) les vaincus et sont les temples celui qui est descendu du ciel les a détruits.

7. Du même. Quel est celui qui est venu? Dieu. Mais tu diras peut-être : Nous n’entendons pas cela de Dieu, mais (d’un) homme. Veillons à ce que ses serviteurs ne se relàächent pas; quiconque appellera Jésus un homme, nous serons jugés, moi et lui.

8. Du même. Ο la nouvelle venue de Dieu près des hommes! O la chose nouvelle, qu'un vivant a été vu dans le schéol.

Du même, du discours qu'il prononca à Beyrout. 9. Dieu est descendu du ciel pour ramener les hommes à le con- naitre, pour ne plus adorer les créatures.

10. Du méme. Puisque le verbe s'était égaré, il convenait que le Verbe vint le ramener. Un homme ne pouvait le faire, parce qu'ils étaient tous dans l’erreur. Puisque l’homme ne pouvait sortir de cet égarement, il fallait donc que Dieu vint ramener les égarés à sa connaissance. Il con- venait que Celui qui n'avait pas été créé descendit chez les créatures.

11. Du méme. Dieu, dans sa miséricorde, devint homme. Celui qui

FRAGMENTS. D'EUSÈBE D'ÉMÈSE. 427

l’oublie en sera puni. Je n’ai pas la force de crier, comme il le faudrait, que le riche s’est appauvri pour enrichir les pauvres. Il est Dieu de Dieu et tous les prophètes en témoignent : Michée dit : Dieu vient du midi (1), et [Isaïe dit : Son nom est Dieu fort (2), et David dit : Le Seigneur a dit à mon Seigneur : Assieds-loi à ma droite (3), et un autre prophète proclamé sa divinité.

12. Du méme. Sa bonté n’a pu le faire descendre de force du ciel, il est donc descendu par sa volonté, et il a été enfanté d’une vierge par sa grâce. Ce n’est pas parce qu’elle était vierge qu'elle enfanté Dieu, mais parce que Dieu, maître de la vierge, a accompli, dans sa miséricordieuse providence, tout ce qui était écrit.

D'Eusèbe d'Émèse, du discours sur les nouveaux changements.

13. Cette conduite est admirable, or, personne ne s’étonnerait s’il n’y avait qu'un homme; donc est la cause d’admiration, si ce n’est dans ce qu'on vu nouvellement et que tous ne croient pas : que Dieu est devenu homme.

14. Du méme. Au lieu de Dieu, c'est notre verbe qui s’est fait homme . pour toi. Ne rougissons pas de sa petitesse et ne renions pas sa passion.

15. Du méme. Ce Seigneur donc, lorsqu'il voulu dans sa miséri- corde envers les hommes demeurer avec ses serviteurs, été appelé : « Notre Dieu avec nous » afin que, nous aussi, nous nous unissions à lui.

16. Du méme. Ne te scandalise pas lorsque tu entends dire que Dieu était homme. Car c’est pour toi que ce riche s’est appauvri, afin que tu ne demeures pas dans ta pauvreté. Considère donc les prodiges qu'il opérés dans le corps, ils t’'apprendront qu'il est Dieu.

17. D'Eusèbe d'Émèse. La Vierge nouvellement enfanta et Dieu nou- vellement apparut dans un corps. Le chef des saints (Gabriel) annonca à la Vierge : « Celui qui nous est caché vient près de toi; celui que nous adorons en haut demeure en toi. »

18. Du méme. Plût à Dieu que le Juif eût su que c'était Dieu qui était parmi eux, qui était d’une vierge.

19. D'Eusébe d'Émése. Pour l’homme le vivant est mort.

20. Du même. Mais tu diras peut-être que Dieu été crucifié. Tu as mieux parlé que moi. Si tu ajoutes que par la croix il a vaincu et que par la souffrance il l’a emporté, tu auras dit le terme de sa puissance.

(1) Habac., mx, 3. (IST ES (3) Ps. c1x, 1.

428 REVUE DE L'ORIENT CHRÉTIEN.

21. Du méme. Pensons à deux choses : qui était1l? et qu'a-t-il souf- fert? Le juge a été jugé; le vivant été livré à la mort, celui qui nour- rit l’univers eu faim, et la source eu soif, celui qui était couvert de gloire s’est trouvé avili, le roi comparu devant le gouverneur et Dieu été condamné par les hommes.

. Du méme. Dieu est mort pour nous, et nous, nous ne mourons pas Le nous-mêmes.

23. Du méme, de la bénédiction dont 1] bénil le peuple. Is se levèrent et louèrent le Vivant qui mourut pour leur propre mort, pour les ramener de la mort à la demeure de vie.

Du même, du discours sur la divinité du fils.

24. Jésus, au commencement, existait avant le temps des mondes et avant la constitution des créatures, de sorte que toutes les choses qui doi- vent ensuite s’accomplir dans leurs effets témoignent de sa prévoyance et de sa divinité.

25. Du méme. Etienne témoigné, devant toute la foule des Juifs, que Celui qu'ils avaient crucifié était Dieu.

26. Du même. Considère et vois si ces choses proviennent d’un homme. Situ veux ne rien omettre, ces choses t'obligeront à confesser que Celui qui été crucifié est Dieu.

27. Du méme. Ce n'était pas un homme comme le peignent les Juifs et les païens aux dépens de leur vie; mais il est apparu comme un homme, et il a fait des prodiges parce qu'il était Dieu. Mais tu diras peut-être : S'il est Dieu, comment a-t-il été crucifié? Sache que s'il n'avait pas été cru- cifié, il n'aurait pas été évident qu’il avait pris un corps; il souffrit donc comme homme et le même ressuscita les morts en tant que Dieu.

28. D'Eusèbe d'Emése.

Dieu fut crucifié, hommes, je n'ai pas la force de le crier autant qu'il le faudrait.

B. Fragment sur le jeüne (ms. du Brit. Mus., add. 1466). D'après le catalogue, ce fragment irait du fol. 16* au fol. 18. En réalité, d'après la copie que M. E. W. Brooks nous a adressée, le fragment s'arrête au bas du fol. 16". Il doit ensuite manquer quelques pages dans le manuscrit et la suite appartient à une homélie métrique sur le démon et la fin du monde.

(sic) Lea.-a-mus) ωολϑιροοΐο foanmss) woassmo/s Boo, ἊΜ pa

FRAGMENTS D'EUSÈBE D ÉMÈSE. 129

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D'Eusèbe évêque (1) d'Émèse. Sur le jeûne.

[Tandis que] l'esprit se complait surtout dans le jeûne et (l’abstinence) de vin, il nous est ordonné de prier pour ne pas entrer en tentation (2); c'est en notre pouvoir si nous prions avec foi. L’homme qui s'attache aux voluptés s'offre de lui-même à la tentation malgré son jeûne, et c'est en vain qu'il dit dans sa prière : ne nous laisse pas succomber à la tentation (3). Car toutes les tentations redoutables arrivent par l'entremise de la volupté, c'est par son moyen que Satan enchaîne l’âme comme par un lien et attire ses serviteurs. [On tombe d’abord] dans les tentations mauvaises du man- ger et du boire, puis...

IX. ANALYSE DU MANUSCRIT D'EUSÈBE D'ALEXANDRIE, Paris, suppl. grec 407.

De nombreux manuscrits renferment quelques homélies d'Eusèbe, mais un seul, semble-t-il, renferme toute la collection (avec une lacune) et la Vie de cet auteur. Ce manuscrit de Crypta Ferrata, utilisé par Turrianus, a été édité pour la pre- mière fois par Mai. L'éditeur modifié l'ordre des homélies ; on lit, par exemple : Sermonum tituli, «ad paulo commodiorem ordinem revocati, Migne, Patr. gr., LXXXVI, col. 291. Les fo- lios du manuscrit, lorsqu'ils sont donnés, nous permettent de nous faire une idée des interversions : à la colonne 297 on trouve cité 16 folio 344 et plus loin, à la colonne 505, le folio 949 : plus loin encore, colonne 332, on trouve citéle fol. 346 du manuscrit ;

) Le syriaque répète : « et Eusèbe évêque » ) Cf. Matth., xxvi, 41. ) Matth., vi, 15.

430. REVUE DE L'ORIENT CHRÉTIEN.

à la colonne 364, le folio 245 (?) et à la colonne 365, [6 folio 329. Or, nous avons à Paris une copie de Sirmond qui semble pres- que identique à ce manuscrit (1) unique de Crypta Ferrata (maintenant au Vatican). Il nous semble donc intéressant de donner l’ordre et les particularités de cette copie de Sirmond (suppl. grec 407).

fol. 176. Εὐσεόίου ἐπισχόπου ᾿Αλεξανδρείας περὶ νηστείας. Παραγενομένης etc. Migne, Patr. gr., LXXXVI, col. 313-324. Le mot ᾿Αμήν manque à la fin.

fol. 180". τοῦ αὐτοῦ περὶ ἀγάπης. Μιᾷ τῶν ἡμερῶν etc. Migne, col. 324-327.

fol. 182. λόγος τοῦ ἁγίου Εἰὐσεόίου εἰς τὴν Χριστοῦ γέννησιν. ΠΠαραγενομένης τῆς τοῦ Χριστοῦ γεννήσεως. Migne, col. 365-372.

A fol. 185. τοῦ αὐτοῦ περὶ τοῦ β Migne, col. 372-380.

fol. 1887. τοῦ αὐτοῦ λόγος εἰς τὴν ἐνανθρώπησιν τοῦ χυρίου, καί τινων ἕνεχεν ἐνανθρωπήσεως (sic). Τοῦ χατελθεῖν etc. Migne, col. 928-332.

Dans le manuscrit, la fin du fol. 190* et le folio 191 sont en blanc; on trouve ensuite le titre suivant, dont les quatre pre- miers mots sont écrits en one aie :

fol. 192. “λόγος τοῦ ἁγίου εὐσεόίου περὶ ὅτι σὺ εἷς on

βαπτίσματος. ᾿Εἰπειδὴ χθὲς, etc.

a ©? ᾿Ξ =: Ξὶ τ Ξ 5 a Lula fn —., in »- _Q LL _< a Q το is Oo Ἐπ = O- Oo < [49] Cat ©

ἕτερον προσδοχῶμεν. Migne, col. 380-384.

fol. 194. τοῦ αὐτοῦ περὶ τῆς παρουσίας ᾿Ιωάννου εἰς τὸν ἄδην καὶ εἰς τὸν ἐγνόντων (510). ᾿ΑναῚ HAE ἐστιν πάλιν σήμερον etc. Signalé par Migne, col. 384, et édité plus loin, comme edilio altera, col. 509-526.

fol. 197. τοῦ αὐτοῦ εἰς τὴν προδοσίαν τοῦ Ιούδα. Δεῦρο λοιπὸν υἱέ μου etc. Signalé par Migne, col. 384, et édité plus loin, Re rene Col. 525-556.

fol. 199. αὐτοῦ etc τὸν διάδολον χαὶ ᾿ τὸν ἄδην. ᾿Αχούσας διάδολος τοῦ “er εἰπόντος᾽ περίλυπός ἐστιν etc. Migne, 60]. 384- 400.

C’est la première rédaction éditée dans Migne, mais les pre- mières lignes manquent. Ces lignes ont cependant leur impor-

(1) Les interversions, marque caractéristique du ms. de Maï, semblent les mêmes dans le ms. de Paris. Voir quelques différences sous 9, 10°, 16°, 18°.

SUR EUSÈBE D'ALEXANDRIE. 431

tance, car elles rattachent ce discours au précédent : « Il est juste, nos amis, que nous revenions au discours d'hier et que nous voyions ce que le diable et l'enfer ont persuadé aux Juifs contre le Seigneur. » Il s'ensuit que dans le ms. suppl. grec 407, le présent discours n’est pas rattaché au précédent; d’ail- leurs on peut voir même dans Migne, col. 536, que l’editio al- tera (celle de notre manuscrit) ne rattache pas le précédent discours à celui-ci; la note de Migne, col. 535 : ex fine hujus orationis el initio sequentis constal duas hos homilias, nempe de Proditione Judae et de Diabolo et Orco eumdem sibi vin- dicare auctorem vel eliam unam ac eamdem efficere homi- liam, manque donc de point d'appui.

10° fol. 203. τοῦ ἁγίου εὐσεόίου εἰς τὸ πάθος τοῦ χυρίου χαὶ σωτῆρος ἡμῶν, ὅτι ἐν ἡμέρᾳ ἐξεδλήθη ᾿Αδὰμ. τοῦ nie ἐν τοιαύτῃ εἰσῆλθεν λῃστὴς εἰς τὸν παράδεισον. τι ΠΝ Ιρι: χθὲς: ὑποσχέσεως σήμερον βούλομαι τὸ χρέος πληρῶσαι, ἀγαπητοὶ, χαὶ τῶ ποὺ τηνιχαῦτα τὸν ἐσφραγίσαμιεν.... La fin du précédent discours et le commence- ment de celui-ci se rattachent l’un à l’autre. Ce discours De passione Domini manque dans le ms. qu'a utilisé Maï. Il note, en effet, Migne, col. 293, xx : Tültulus hic legilur in codice olim Cryptae Ferratae nunc Vat., sed sermo abest. Cf. Migne, col. 405, note 1 et 421, xvir. Il est publié parmi les œuvres de S. Jean Chrysostome, Patr. gr., t. LXIT, col. 721. Notre ma- nuserit 407 le contient tout entier.

119 fol. 2067. τοῦ αὐτοῦ εἰς τὴν ἀνάστασιν τοῦ κυρίου. ᾿Ανέστη τῇ τρίτῃ ἡμέρᾳ... Mentionné par Migne, col. 421, sous Le ΧΥ͂ΠΙ, et publié Patr. gr., t. LAT, 00]. 733, parmi les œuvres de 5. Jean Chrysostome.

12° fol. 208". τοῦ αὐτοῦ εἰς τὴν ἀνάληψιν τοῦ χυρίου (1). ’Exer- δὴ χάριτι τοῦ χυρίου ἡμῶν τὸν λόγον τὸν περὶ τοῦ La τοῦ χυρίου ἐποιησάμεθα χατὰ τὸν χαιρὸν τῆς διούσης ἡμέρας, ὁμοίως... Mentionné par Migne, col. 421, sous le ΧΙΧ, et publié Pb : ΤῊΝ t. LXIV, col. 45, parmi les œuvres de S. Jean Chrysostome.

13° fol. 211". λόγος εἰς τὴν δευτέραν. παρουσίαν. Μεπὰ τὴν ava- ληψιν τοῦ χυρίου εἰς τοὺς οὐρανοὺς nai τῶν μαθητῶν ἀτενιζόντων εἰς τὸν οὐρανόν... Mentionné par Migne, col. 424, sous le xx, et publié

(1) Sans doute l’homélie du ms. arménien 110, du xn° siècle, fol. 433-435 : « Homélie d’Eusèbe d'Alexandrie sur lAscension ».

432 REVUE DE L'ORIENT CHRÉTIEN.

Patr. gr., t. LXT, col. 775, parmi les œuvres de 5: Jean Chry- sostome.

14° fol. 214". τοῦ αὐτοῦ a ὧν ἀποθνησχόντων εἰς τὰς παγίδας. Mix τῶν ἡμερῶν etc. Migne, col. 349-353.

15° fol. 2167. τοῦ αὐτοῦ λόγος εἰς τὴν χυριαχήν. Μετὰ. τὴν ἀπό- λυσιν τῆς ἐχχλησίας etc. Migne, col. 413-421. II y ici de nom- breuses variantes, car Migne ne reproduit pas le manuscrit de Crypta Ferrata, mais une ancienne édition faite sur d’autres manuscrits.

16° τοῦ αὐτοῦ διήγησις ὅτε εἰσῆλθεν εἰς τὴν ἁγίαν πόλιν. Δεῦρο - φιδὰν «= x τ - f = ΝΣ = λοιπὸν, ἀδελφοὶ, χαὶ περὶ τοῦ θανάτου αὐτοῦ διηγήσωμαι ὑμῖν. [Too τῶν

ἡμερῶν τοῦ θανάτου αὐτοῦ προεγίνωσχεν τὴν ὥραν, χαὶ προχαλεσάμενος τὸν ᾿Αλέξανδρον λέγει αὐτῷ etc. C'est donc la fin de la prétendue biographie d'Eusèbe qui nous est donnée ici sous forme de dis- cours. La fin de la biographie précède le commencement et ilen était de même dans le ms. de Maï, car la fin (Migne, col. 305) était au folio 343, et le commencement (Migne, col. 297) était au folio 344. Nous trouvons iei dans notre manuscrit le texte de Migne, col. 305 à 309. Avant οὗτοι oi λόγοι, Sirmond (fol. 221") a mis un trait horizontal sur toute la page (1).

17° fol. 222". Après la fin de la biographie πᾶντες οὖν οἱ ἐνηγ- χάνοντες (510) τῇ βίδλῳ ταύτῃ δοξάσατε τὸν πατέρα nat τὸν υἱὸν χαὶ τὸ ἅγιον πνεῦμα εἰς τοὺς αἰῶνας τῶν αἰώνων. ᾿Αμήν (Migne, col. 309), on trouve aussitôt : δμιλία εὐσεδίου ἐπισχόπου ἀλεξανδρείας. T'éyovey

ἀνήρ τις τῶν εὐσεδῶν ὧν ξγνωμεν πλησίον ἀλεξανδρ είας τῆς μεγαλοπό- Ἄξως etc. C'est le commencement de la prétendue biographie d'Eusèbe ΠΝ se trouve dans Migne, col. 297-301.

o A = > - , δ᾽ 18° fol. 225: λόγος περὶ τῆς ἐπισχοπῆς τοῦ RENE ευσεδίου χα! REA SAS > OUTILS SEE Las: πῶς ἐπέστρεψε τ λέξανδρον. --- υαχάριος Τυὐσέθιος δεξάμενος τὴν

χάριν etc. ΝΕ col. 301-305. Ce discours se termine par ἀνά- παῦσις ; les deux lignes qui suivent dans Migne ἐλέους à ᾿Αμὴν ne se trouvent pas dans notre manuscrit, mais on trouve aussi- lobe

19° fol. 226". τοῦ αὐτοῦ περὶ veopeviac χαὶ σαδδάτὼν χαὶ περὶ τοῦ μὴ φυλάττειν φωνὰς ὀρνέων. Mix τῶν ἡμερῶν etc. Migne, col. 353- 307.

Sirmond n'a pas continué à transcrire et se borne, au fol. 298,

(1) Au lieu de Μοσόδιον. on trouve ici la variante Mocoÿiov.

SUR EUSÈBE D'ALEXANDRIE. 4133

à donner le titre et l’incipit de trois autres discours. Nous trans- roue Ne quelle cette fin :

ma L _ ? ὩΣ + « 20-2 οὐ αὐτοῦ πρὸς εὐχαριστεῖν τῷ θεῷ τὸν ἀῤῥωστοῦντα χαὶ εἰς

αὺ 2 ἔχοντος χάριν μεταδοῦναι τῷ μὴ ἔχοντι χαὶ περὶ

φιλάνθρωπος σωτὴρ ἡμῶν οἰχτείρων τὸ γένος ἡμῶν.

τοῦ αὐτοῦ περὶ ψνείας ἁγίων.

Μιᾷ τῶν ἡμέρων μνήμη ἁγίων ἐπετελεῖτο ἐν τῇ πόλει.

Ces trois discours se trouvent dans Migne, col. 332-541, col. 341-349, col. 357-365.

X. Nous terminerons par une remarque sur cette collection. Elle n’est pas primitive, vu l’interversion dans la soi-disant Vie d'Eusèbe. La phrase « tels sont les discours du bienheureux Eusèbe; tels ses mérites et ses combats » ne se trouve plus à la fin des discours à Alexandre; elle précède même le récit des premières années et de l'épiscopat d'Eusèbe. Puisque cette col- lection provient à coup sûr d’un remaniement dans l'ordre des discours, il est probable que le texte lui-même a aussi été re- manié. De plus, les instructions d'Eusèbe à Alexandre ne sont pas des homélies ni des discours proprement dits, par exemple : sur le jeûne (Migne, col. 313): « A l'approche de la sainte quarantaine des jeünes, Alexandre, s'avancant, dit au bienheu- reux évêque Eusèbe : Je t'en prie, vénéré Père, dis-moi com- ment on doit jeüner durant ces jours des jeûnes et comment, après cette époque, on doit Jeüner encore le mercredi et le ven- dredi? Alors le saint commença à dire... » Plus loin on trouve (Migne, col. 332) : « Un long temps se passa, sans qu'Alexandre trouvât occasion d'interroger. Un jour, sortant de l'église, il vit, dans une cabane, un homme couché sur un lit: il alla le voir et demanda aux assistants : Depuis combien de temps est-il ma- lade? Ils lui répondirent : Trois ans et six mois, et il s'éloigna en gémissant sur lui. Allant près du bienheureux évêque Eusèbe, il lui dit... » Ces prétendues homélies ne sont donc que la suite de la narration de Jean le notaire, Alexandre est d’ail- leurs déjà converti ou il « sort de l’église ».

Il semble donc qu'après la rédaction des Didascalies et Fe

Constitutions apostoliques et avant les luttes christologiques, un ORIENT CHRÉTIEN. 28

484 REVUE DE L'ORIENT CHRÉTIEN.

auteur, qui se donne le nom de Jean le notaire, a voulu compo- ser lui aussi une didascalie qu'il n’a pas mise sous le nom d'un apôtre, mais d'un héros imaginaire auquel il donné le nom, célèbre alors, d'Eusèbe.

Il a commencé par présenter son héros, en faire un ascète, le mettre en rapport avec saint Cyrille et en faire un évêque d’A- lexandrie. Il a ensuite introduit Alexandre et a supposé sa con- version (première partie de la biographie). Sous prétexte d’ins- truire Alexandre, il était facile dès lors d'imaginer une didascalie comprenant les discours I, IL, IV, VI, VII, VII, X, XVI, XXII qui sont tous adressés à Alexandre, peut-être aussi IT, V, IX, XI. Après quoi, Jean le notaire raconte la mort d'Eusèbe et l’intronisation d'Alexandre (fin de la biographie, Migne, col. 305) : « Il me reste, mes frères, à vous raconter sa mort. Sept jours avant sa mort, il en connut l'heure; il appela Alexandre et lui dit... » enfin il signe son œuvre : « Tels sont les discours du bienheureux Eusèbe, tels ses mérites et ses combats. II dit tout cela en réponse aux interrogations d'Alexandre. Ce qu'il a dit à l'église, nous l'avons déjà écrit en un livre. Son ouvrage sur la discipline monastique est à part (1)... »

Cet écrit fut utilisé par l’auteur des Sacra parallela. Plus tard, un autre auteur intervertit, remania et introduisit d’au- tres discours qui, cette fois, portaient de manière authentique le nom d’'Eusèbe. C'est cette dernière collection qui est conser- vée dans le ms. édité par Maï et dans celui qu'a transcrit Sir- mond. Il est donc inutile de chercher et quand a vécu Eu- sèbe d'Alexandrie. La didascalie d’Eusèbe, rédigée par Jean le notaire, comme toutes les didascalies et les Constitutions des apôtres, est un ouvrage pseudépigraphique.

XI. UN NOUVEAU MS. DE LA CHAÎNE CONTRA SEVERIANOS.

Les principaux passages de cette chaine ont été édités par

(1) Un ouvrage, d'origine syriaque, conservé sous le titre de « livre des de- grés », est attribué « au moine Eusèbe ». Son édition est commencée depuis longtemps dans la Patrologie syriaque de Με Graffin. C’est un ouvrage très ancien (1v° siècle ?) formé de trente discours : 15 sur la distinction des comman- dements ; sur ceux qui cherchent la sainteté; sur la dévotion corpo- relle et spirituelle, 29, Sur la macération de la chair. 30. Sur les comman- dements de la foi et de la charité que doivent suivre les solitaires. Si Jean le notaire a cet ouvrage et cet auteur en vue, il aurait chance d’être lui-même sy-

rien et on lui pardonnerait plus facilement d’avoir si mal connu l’histoire de l’église d'Alexandrie.

SUR EUSÈBE D'ALEXANDRIE. 435

Maï, Script. vel. nova coll., VIT, I, 1-73, d'après deux mss. du Vatican (1). M. Krumbacher, Byz. Litt., 209, 290, mentionne encore le cod. Misc. 184 d'Oxford et rappelle que Labbe a utilisé à Paris un manuscrit de cet ouvrage qui appartenait au col- lège de Clermont. Ce ms. est encore cité (chap. 9 et 36) dans la préface à saint Jean Damascène, Migne, Patr. gr., 94, col. 267, 280, 307, 308. D'après M. Schermann, le ms. de Clermont se- rait le cod. misc. 184 d'Oxford (xir siècle) (2). Cependant nous avons encore-à Paris un manuscrit de cette chaine dogmatique. Il n’est pas mentionné par M. Schermann et nous croyons utile de le faire connaitre avant que M. F. Diekamp n'ait édité cet ouvrage (cf. Byz. Zeitschr., 1905, p. 326).

C’est le ms. grec 1144 de Paris ainsi décrit au catalogue : Collectanea ex scriploribus ecclesiasticis, cap. ITI-XXXV, initio et fine mutila, XV° siècle, Papier. 227 fol. (Colbert 4656) Petit. En réalité, les chapitres 35 et 36 sont conservés en entier et le chapitre 37 commence au fol. 225". Le €, qui est assez mal fait, ressemble à ς et a donc fait lire 35 au lieu de 37. L'en- cre a souvent rongé le papier, le ms. est couvert de nom- breuses taches. Les citations des chapitres 9 et 36, Migne, col. 267, 280 et 308, se retrouvent fol. 24 et 221. Le ms. n’a pas de marque d'origine en dehors de Colbert 4656 et Regius 2903 (99); 511 provient de Clermont, il aurait donc appartenu à la première collection de Clermont achetée par de Thou puis par Colbert; par contre si le ms. du collège de Clermont doit être identifié avec celui d'Oxford, comme l'écrit M. Schermann, le nôtre aurait quelque chance d'en être une copie.

F. Nau. (1) 1102 du xve siècle et 2200 du 1xe siècle.

(2) Cf. Die Geschichte der dogmatischen Florilegien vom V-VIIT Iahrh. dans Texte und 'Unters., t. XXVIIL.

MÉLANGES

TRADUCTION

DE LA CHRONIQUE SYRIAQUE ANONYME, ÉDITÉE PAR SA BÉATITUDE ME RAHMANI

Patriarche des Syriens catholiques

(Suite) (1)

[P. 76] Règne de Constantin l’ancien (Constance Chlore) et de Constantin. |P. 78] Constantin trouve que Rome est trop éloignée du centre de son empire, il va d'abord à VNicomédie, [p. 79] il établit enfin son séjour à Byzance. Voici ce qu'on raconte de la première construction de cette ville (2) :

Au temps beaucoup de rois se partageaient l'empire romain, il y avait un roi pour l'Italie, un autre pour la Macédoine, un autre pour la Thrace, etc., le roi Byzos possédait l’Asie et la Thrace et cherchait un endroit favorable pour y construire sa capitale. Il choisit un architecte habile et l’envoya chercher un endroit qui répondit à son dessein. L’ar- chitecte, après avoir recu cet ordre, parcourut beaucoup de pays et, cer- tain jour, fatigué et découragé, il se laissa tomber à terre pour se reposer. Il prit la règle, le cordeau et l’équerre qu’il avait avec lui, il les enroula dans une couverture rouge, les plaça près de lui et s'endormit. Un aigle affamé, qui volait en l’air et cherchait de la nourriture, vit cette couver- ture rouge et crut que c'était de la chair; [p. 80] il descendit pour l'enlever et, par la force de son élan, ses serres s’engagèrent dans la cou- verture et dans le cordeau. L'homme s’éveilla au bruit des ailes de laigle et se dressa plein de frayeur; l'aigle lui-même, effrayé par l’homme,

(1) Voy. 1907, 429; 1908, 90, 321. (2) Cf. Michel le Syrien, t. Il, fasc. 3, p. 486. Notre auteur et Michel transcri- vent une même source qui est sans doute l’histoire de Denys de Tellmahré.

MÉLANGES. 137

emporta la couverture avec ce qui s’y trouvait et s'éleva en l'air, mais, à cause du poids, il ne put aller loin; après avoir volé un peu, il descendit en certain endroit, délivra ses pattes de cette couverture, la laissa et s’en alla. L'homme voyant l'endroit l'aigle se posait, alla cher- cher sa couverture et ce qu’elle contenait. Tout en y allant, il examina ce lieu et trouva qu'il convenait très bien à l'habitation des hommes et répondait au désir du roi, je veux dire par l’espace qui s’y trouvait et par ses fortifications naturelles, car il était entouré de trois côtés par la mer et il abondaït en sources d’eau douce et agréable. Il alla donc trouver le roi et lui raconta ce qui venait d'arriver. Celui-ci, plein d’admiration, comprit que ce prodige venait de Dieu; il alla voir l'endroit et y fit bâtir une ville longue de dix milles et large d’une mer à l'autre. Tandis qu'ils la construisaient, le roi Byzos mourut avant la fin; Antios, son frère, lui succéda, la termina et l'orna; aussi, du nom des deux, elle fut appelée Byzantia.

De la construction et de l'accroissement (de Byzance) au temps de Constantin.

Lorsque l'empire romain fut unifié et que Constantin en fut le chef, Byzance lui agréa plus que toutes les autres villes de son empire. Il ordonna de l'agrandir de deux autres milles au couchant, de sorte qu’elle eut douze milles (de long). Il la bâtit et l’orna de toute manière. Cette ville est bâtie sur sept montagnes; entre deux montagnes il fit un port pour les navires et y construisit deux fortes tours entre lesquelles on tendait une solide chaîne de fer qui empêchait les navires de sortir du port sans la permission du gouverneur de la ville et les navires ennemis d'y entrer. La mer entoure (la ville) de trois côtés; du côté de l’ouest c’est la terre ferme, un grand mur y fut construit à une certaine distance d'une mer à l’autre et il est appelé Magrontinos, c'est-à-dire « le long mur » (maqronteichos). Entre ce mur et la ville est comprise une grande plaine. La largeur de la mer (incluse) dans la ville du côté du levant et du nord est de quatre milles et sa profondeur est insondable. Quand la ville fut achevée, [p. 81] il y amena beaucoup d'hommes et la fit l’égale de la grande Rome; il l’appela Constantinople, c'est-à-dire « ville de Constantin ». Il porta une loi pour l'appeler seconde Rome.

Il bâtit encore une ville grande et illustre au nom de sa mère et il la nomma /lélénopolis, car à ce moment elle aussi porta la couronne et battit monnaie. Il bâtit encore, dans la ville (de Byzance), de belles églises, l’une l’église d’Aridnä (1) et l’autre au nom des apôtres. On éleva aussi dans la ville des colonnes et des talismans nombreux dont un grand nombre subsiste jusqu’aujourd’hui. :

Au temps de ce roi, bien des choses furent régularisées dans l'Eglise : c'était l'habitude des Chrétiens, depuis le temps des apôtres jusqu'alors, de ne se faire baptiser qu'à trente ans, et de ne fêter la Pâque, la Nativité

(1) Irène, Socrate, Hist., I, 46.

488 REVUE DE L'ORIENT CHRÉTIEN.

et l’'Hosanna (les Rameaux?) qu'une fois tous les trente ans; de com- mencer le jeûne des quarante jours à partir du baptème et, lorsqu'il se terminait, d'offrir le (saint) sacrifice sans (jour de) fête; ils comptaient la Pâque pour la faire avec les Juifs, et ils fêtaient la résurrection le jour elle tombait, soit un dimanche, soit dans la semaine.

[P. 82] Conversion de l'Inde intérieure (Socrate, 1, 19); [p. 83] conversion des Zbères (Socrate, I, 20); [p. 84) mœurs des habitants de Balbek (Socrate, 1, 18). Sainte Hélène dé- couvre le bois de la vraie croix (1) (Socrate, I, 17). [P. 86] Ma- ladie de l’empereur et testament qu'il fit (Socrate, I, 39).

[P. 87] Des enfants de l'empereur, de son baptème et de sa mort. Destruction de la ville de Nicomédie.

À cette époque, il y eut un grand tremblement de terre, la ville de Ni- comédie fut alors ravagée et entièrement détruite. Mar Ephrem le docteur, qui demeurait alors à Nisibe près du bienheureux Jacques, évêque de cette ville, et qui accompagna son maître au concile de Vicée, composa beaucoup d’hymnes sur Nicomédie. À l’âge de soixante-cinq ans l’empe- reur tomba malade, la maladie s’aggrava; il fut baptisé à Nicodémie et 1] prit ses trois fils pour héritiers. il avait régné trente et un ans et huit mois... Sapor assiégea Nisibe en vain et ravagea toute la Mésopotamie l'an 649 des Grecs (338).

ΙΡ. 88] Résumé du règne des fils de Constantin et de Julien. P. 90] Lettre de Julien à saint Basile et réponse de celui- ci; cf. Patrol. grecque, t. XXXII, col. 341-348.

[P. 92-95] L'auteur déclare qu'il a seulement résumé l'his- toire de Julien et qu'il va revenir sur ce sujet d'après le chapitre τὸ du livre ΠῚ de Socrate. Après ce chapitre qu'il tra- duit, il passe au chapitre xx1, ajoute que Julien permit le pil- lage à ses soldats, mais que l’un de ses généraux nommé Jovien sauva les églises et les temples ainsi que la ville d'Édesse. Ce rôle de Jovien est développé dans le roman sy- riaque édité par M. Hoffmann (Jwlianos der Abtruennige Leyde, 1880). L'auteur termine par :

[P. 96] On ne sut pas qui avait frappé Julien. Certains dirent qu'il le (1) On lit en marge : « La croix fut trouvée la 19e année du règne de Constan-

tin, 295 ans après l’Ascension de Notre-Seigneur (en l’année 636 des Grecs, ou 320). :

MÉLANGES. 139

fut par les Perses qui étaient venus près des Romains et étaient avec eux, d’autres dirent que l’un des Romains qui étaient avec lui le frappa et c'est ce qui fut répété le plus, mais on ne connut pas la vérité de l'affaire. C’est ainsi qu'il mourut et son corps fut emporté et enterré à Tarse de Cilicie (1).

Règne de Jovien.

Après la mort de Julien, Jovien, général de son armée, fut proclamé empereur. Par son habileté et sa sagesse il apaisa les Perses et emmena les troupes romaines hors de la Perse; il donna Nisibe aux Perses pour avoir la paix durant un temps fixé. Quand il voulut révéler qu'il était chré- tien, il refusa l'empire en disant : Je ne puis gouverner un peuple paien, puisque je suis chrétien, et tous s’écrièrent ensemble : Quiconque n’ad- hère pas au christianisme mourra. Ainsi il régna, le christianisme se ré- pandit de nouveau et le paganisme disparut. Il régna durant une année et, sans arriver à la ville impériale, il mourut en route.

Règne de Valentinien, de ses frères οἱ de son fils.

Lorsque Jovien mourut à Vicée de Bithynie, les Romains proclamèrent [Ρ- 97] empereur Valentinien, issu de Phénicie, de la ville de Qibälôn, homme courageux, parce que Jovien n'avait pas d'enfants. Depuis que Constantin avait transporté le siège de l'empire dans la ville nouvelle qu'il avait bâtie, c'est-à-dire à Byzance, tous les empereurs qui régnèrent depuis lors dans la ville impériale, s'ils n'avaient pas un frère ou un proche, s’associaient qui ils voulaient et l’un régnait à Rome, sur les Æs- pagnes et tout l’Occident, tandis que l’autre, de Constantinople, gouvernait l'Orient, comme nous le raconterons avec l’aide de Dieu qui (nous) for- tifie. Valentinien s’associa donc son frère Valens qui avait été baptisé par les ariens, par l’évêque ÆEudoxe, et qui infligea beaucoup de maux aux orthodoxes ; nous avons raconté ce qui le concerne dans le livre des his- toires ecclésiastiques (second volume de cette histoire). Il nomma Auguste César son fils Gratien et envoya son frère Valens en Orient.

Ce Valentinien avait deux femmes (Socr., IV, 31), l’une nommée Sdve- rianà (Sévéra), mère de Gratien, et l’autre Justine, mère de Valentinien. Aussi il fit une loi, qui permettait à (tout) chrétien d’avoir deux fermes. Plus tard, à l’âge de δά ans (Socr., 54), il alla combattre les Sarmates, et comme, dans cette guerre, il s’inquiéta et s’angoissa, ses nerfs se contrac- tèrent et ses veines s’ouvrirent, il perdit beaucoup de sang et mourut après avoir régné 11 ans (Socr., 13). Α sa mort, son fils Gratien n'était pas et son frère Valens demeurait à Antioche; les troupes proclamèrent donc empereur son jeune fils Valentinien, âgé de quatre ans, parce que sa mère Justine était présente.

Τ Cf. Socrate, III, 26.

440 REVUE DE L'ORIENT CHRÉTIEN.

On avait prédit à Valens qu’un homme dont le nom commencait par théta régnerait (Socr., IV, 19) aussi il avait fait mettre à mort beaucoup d'hommes dont le nom commencait par th: Ce Valens, bien que chrétien, fit endurer aux chrétiens beaucoup plus de maux que ne l'avait fait Julien le païen, par des persécutions, des meurtres et des confiscations, lorsqu'ils ne partageaient pas l’hérésie arienne. Enfin il alla combattre les barbares et leur livra bataille; il fut vaincu, s'enfuit et entra dans une ferme. Comme les barbares le poursuivaient et entouraient la ferme, il entra dans un tas de paille et se cacha dans la paille. Les barbares ne le trou- vant pas mirent le feu à toute la ferme, il mourut dans la fumée et eut une mauvaise fin, tandis que Gratien combattait contre les Goths. Valens mourut après quatorze ans (de règne).

Gratien régna donc sur tout l'empire avec son frère d’une autre mère, Valentinien le jeune. Après la mort de Valens, [p. 98] Gratien s’associa Théodose, Ibère d'Espagne, et lorsque Gratien eut été tué dans un complot, régnèrent seulement Valentinien le jeune et Théodose l’Ibère.

A cette époque, il y eut un tremblement de terre à Alexandrie; la mer fut agitée et les navires passant par-dessus le mur allèrent tomber dans les maisons de la ville; la mer abandonna aussi sa place habituelle et se retira, les navires restèrent échoués. Le peuple alla piller les richesses des navires, mais la mer revint et les engloutit. Les matelots des navires échoués se réjouirent lorsque la mer revint.

Règne de Théodose en 689 (378). L'auteur ne rapporte que la révolte d'Eugène et d’Arbogast (Socr., V, 25) et la réforme des deux abus qui s'étaient introduits à Rome (Socr., V, 18).

[P. 99] Théodose vécut 60 ans, en régna 16 et laissa l'em- pire à ses fils Arcadius et Honorius. Vertus de ce dernier (Socr., VII, 22). [P. 100) Destruction du temple de Jupiter à Apamée du temps de l'évêque Marcellus, comme dans Théo- doret"Hest., Vrai

Mort de l’empereur Arcadius.

L'empereur Arcadius était entré dans le temple d’Acace pour y prier, et une grande multitude s'était réunie pour voir l’empereur. Lorsqu'il fut sorti ainsi que le peuple, le temple tomba soudain et l’on vit ce pro- dige par la prière de l’empereur. Arcadius mourut à l’âge de 31 ans après - avoir régné durant 13 ans. Il laissa son jeune fils Théodose âgé de ans, petit et incapable de gouverner, tandis qu'Honorius était à Rome. Aussi l'empereur fit un testament, le remit à Waroutha, évêque de Maiferqät, et l’envoya près d’Zsdegerd, roi des Perses, pour qu'il fût tuteur (curator) de son fils Théodose. Arrivé en Perse, Maroutha y opéra beaucoup de prodiges et y instruisit beaucoup de gens. Le roi l'aima beaucoup et 1] chassa un démon de sa fille. Lorsque le roi Isdegerd eut recu le testa-

MÉLANGES. 44]

ment, il envoya Théodose un pédagogue nommé Aflicus et des ser- viteurs avec lui; il écrivit encore aux Romains une lettre dans laquelle il disait : Arcadius autocrator est mort et m'a chargé de régler ses affaires. Si donc vous causez du tort à son fils Théodose, qui est élevé près de son oncle Æonorius, p. [102] ou à sa sœur Pulchérie, sachez que je vous ferai la guerre sans trêve. Ainsi les Romains jouirent d’une paix profonde et le christianisme progressa chez les Perses, grâce à Maroutha, évêque de Maiferqat.

Légation de Maroutha chez les Perses, comme Socrate VII, ὃ. [P. 109) Embüches tendues par les juifs aux chrétiens dans la ville d'Alexandrie au temps de Cyrille, comme Socrate, VIT, 13. [P. 104) Révolte des moines à Alexandrie, comme Socrate, VII, 14. [P. 405] Mort d'Honorius. Jean est vaincu et tué par Ardabour, Valentinien (III) est nommé César. Sous Théodose le jeune, Cyrus renouvela le mur de Rome, les sept enfants d'Éphèse ressuscitèrent, S. Barsumas vint à la ville impériale, le concile des deux cents évêques (Éphèse) fut réuni contre Nestorius. Abhai rassembla toutes les soi-disant reliques que l'on vénérait et leur fit subir l'épreuve du feu. Celles qui n'étaient pas authentiques furent brülées; l'empereur fit élever un grand temple pour recevoir les autres, Abhaï fut attaché à ce temple et, après la mort de l'empereur, il se rendit sur le haut cours de l'Euphrate, au pays de Samosate (1).

[P. 106] Des temples, des églises et des monastères qui furent cons- truits à Édesse.

On bâtit d’abord le temple illustre de Thomas l'apôtre du côté ouest- sud de la ville. On y plaça le saint corps de Thomas l’apôtre, à l’en- trée du portique nord de l’église, à l’ouest du portique. On bâtit un grand temple aux douze saints apôtres du côté oriental de la ville; il n'y en à pas au monde qui soit aussi beau ni avec d’aussi belles divisions. On. bâtit aussi un temple remarquable sous le nom du saint martyr Sergis à la porte orientale de la ville, sur le modèle de celui des apôtres. Ces deux temples furent construits par Zbas, évèque d’Édesse, celui qui tomba dans l’hérésie de Nestorius, c’est-à-dire des deux natures, l’année 746 (435 de J.- C.), au temps de l’évêque Ibas qui succéda à Rabboula (2). On bâtit aussi le temple illustre et remarquable de Mar Jean-Baptiste du côté occi- dental de la ville; il avait de superbes colonnes de marbre rouge; il fut

(1) La Vie d’Abhaï a été éditée par le R. P. Bedjan, Acta marlyrum el sanc- torum, t. VI, Paris, 1896. Le présent incident y figure, p. 297-601.

(2) Phrase embarrassée et sans doute inexacte. Ibas succéda à Rabboula pré- cisément l’an 435.

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bâti par Vouna, évèque d'Édesse. En 722 (411 de J.-C.), un temple fut bâti à Mar Étienne, au milieu de la ville, par Rabboulas, évèque avant Ibas ; c'était auparavant la synagogue des Juifs. On bâtit aussi un temple à Mar Sergis, du côté oriental de la ville, un peu au sud du temple des apô- tres, sur le modèle du grand temple de Thomas. On bâtit aussi deux temples à l’illustre Mar Théodore, l'un dans la forteresse supérieure de la ville, l’autre au dehors, dans la montagne, du côté de l'occident sur le chemin de Saroug. Un temple illustre fut encore bâti à Remath-Dougé (la hauteur des veilleurs) sous le nom des saints martyrs et on y ajouta un monastère pour les moines. On bâtit encore un autre temple à ces saints martyrs Gowria, Schamona et Habib sur la porte au nord de la ville. [P. 107] On bâtit encore un temple à l’illustre Mar Cyriaque, au nord-est (1) de celui des Confesseurs. On bâtit encore un temple à Mar Jacques dans le village voisin Édesse, nommé Karmousch, sous le nom de Mar Jacques qui fut martyr au temps de Julien. On bâtit aussi des temples remarquables aux saints Cosme et Damien, l'un à Mar Cosme du côté sud au dehors, dans la plaine, et on y mit son corps, l’autre à Mar Da- mien en haut sur le sommet de la colline qui est près de la ville et on y plaça son corps. On bâtit encore sur la montagne même des monastères illustres et des couvents nombreux, parmi lesquels le monastère de la Mère de Dieu, le monastère des Orienlaux au pied de la montagne, deux monastères à sainte Barbe et le monastère de Qoubé, au pied de la mon- tagne, au sud du temple de Mar Cosme, le monastère de Mar Jean le Théo- logien sur le sommet de la colline au bout de la montagne; et le monas- tère α᾽ ἐξέδρα, c’est-à-dire le monastère du haut de la montagne et du supé- rieur, parce que ἐξέδρα (est) pour les supérieurs. Un temple emarquable fut bâti à Mar Jacques de Nafschotô (des tombeaux?) à l’intérieur, entre les montagnes (9), à l'endroit était bâti un grand autel des païens qui subsiste jusqu'aujourd'hui dans le monastère même. (On bâtit) un temple à la Mère de Dieu dans la montagne, au sud du monastère de Mar Jacques. En 624 (313 de J.-C.), du temps de Constantin, l’évêque Οὐ» (Cànà?) jeta les fondements de la grande Église, l'évêque Schabrouth (Sa‘ad ?) la ter- mina, et l'évêque Aitallaha qui était au concile des 318 (de Nicée) la con- sacra.

Sur Aigôsôfià (3)

Parlons encore du temple grand et illustre qui fut bâti dans la ville. L'évêque Attallaha, qui était évêque d'Édesse au temps du victorieux

(1) Litt. : « à Est et Nord ».

() A une heure et demie de marche de la ville, au sud. Cf. Pognon, Inscrip- tions sémitiques…., p. 105.

(3) On peut se demander si l’auteur netransporte pas à Édesse l’église « Sainte- Sophie » de Constantinople, ef. Evagrius, IV, 35, car jusqu’ici nous ne connais- sons pas d'église de ce nom à Édesse.

MÉLANGES. | 143

Constantin, et qui fut l’un des 318 (évêques de’ Nicée), commença à le construire. Personne ne peut raconter (dignement) ses splendeurs et ses remarquables constructions, il faisait l’admiration des visiteurs, il était recouvert en dedans d’or, de cristal et de marbre blanc; beaucoup de rois contribuèrent à sa construction. On bâtit encore au milieu de la ville une paire d’églises remarquables, l’une sous le vocable de la Croix, puis, lors qu'on apporta à Édesse le chef vénéré du martyr Mar Théodor e et qu'on l'eut placé dans ce temple, il fut appelé du nom du martyr jusqu'aujour- d'hui; l’autre temple en face de celui-ci au sud (fut placé) sous le vocable de la Mère de Dieu. Un autre temple fut bâti sous le vocable de la Mère de Dieu (1) au nord du temple de Mar Étienne. Un autre temple fut bâti dans l’angle de la ville sous le vocable de lillustre martyr Mar Georges, ainsi que |[p. 208] beaucoup de temples et de monastères qui furent bâtis au dedans et au dehors et dont les noms ne sont pas connus. Un autre temple fut bâti du côté sud de la ville sous le vocable de l’ange Michel. Sur le nombre de ceux qui furent baptisés dans le monastère ἃ’ ἐξέδρα, nous avons trouvé écrit dans les livres que douze mille maçons qui tail laient les pierres de la montagne pour (sa) construction furent baptisés en un jour, la fête de la Nativité, dans le monastère qui était sur la montagne d'Édesse. A cette époque il y avait neuf mille moines dans la montagne.

Mort de Théodose. En 763 (452) règne Marcien; il épouse « la moniale Pulchérie, sœur de Théodose, elle quitte l'habit et devient sa femme ». Dioscore condamne Eutychès; 11 est con- damné lui-même à Chalcédoine.

Léon l’ancien choisit Zénon pour général; il règne dix-huitans. [P. 410] L'auteur résume « le règne de Léon comme l’a écrit Jean d'Asie ». Règne de Zénon. Révolte de Basilisque et des Sa- maritains. [P. 1411] Règne d'Anastase. Péroz, roi des Perses, est tué par les Huns. Qavad lui succéda. Siège et prise d'Amid d’après le pseudo-Zacharie. Land, Anecdota syriaca, HI, 204- 209. Le résumé que fait notre auteur est indépendant du résumé fait par Michel le Syrien. [P. 413] Construction de Dara; révolte des Arméniens; destruction de Nicopolis, mort d'Anas- tase.

(A suivre.) F. Nau.

(1) Cf. Michel le Syrien, Il, 3, p. 476.

BIBLIOGRAPHIE

Université Saint-Joseph, Beyrout. NWélanges de la Faculté orientale, t. III, fasc. 1, 1908, 4°, 480 pages.

Ce volume, comme les précédents, est formé de sujets très variés : ἂν an-Na'am, texte lexicographique arabe, édité et annoté par le P. M. Bouyges. Ce traité occupe les pages 328-408 d’un manuscrit de Damas de 440 pages intitulé Xitäb al-Garälim; son intérêt provient surtout de ce qu'il reproduit le texte du Wousan, écrit par Abou ‘Oubayd, vers la fin du second siècle de l'hégire, pour expliquer les mots éfranges rencontrés dans les ouvrages profanes. Le Mousan fut étudié par cœur, copié, altéré par les lexicographes et le Kitäb an-Na‘am peut servir à rétablir son texte. 20 Études sur le régime du calife Omaïyade Mo‘âwia Xe (3 série : la jeunesse du calife Yazid fer), par le P. H. Lammens. Nous ne savons pas si les Arabes des premiers siècles de l’hégire ont jamais distingué l’his- toire de la poésie; du moins c’est la plupart du temps chez des poètes que le R. P. Lammens va glaner les traits originaux et intéressants qu’il con- signe dans ses études d'histoire. Nous trouvons ici des monographies sur la tribu de Kalb au vu: siècle, l'enfance, l'éducation, la jeunesse, le pèle- rinage à la Mecque et les campagnes de Yazid, fils de Mo‘äwiah. A noter que saint Jean Damascène semble avoir été le commensal de Yazid et ne s'être fait moine que sur le tard (p. 260). L’érudition du P. Lammens qui s'étend aux manuscrits aussi bien qu'aux éditions lui permet de renou- veler, du moins d'éclairer, bien des points obscurs du 1er siècle de l’hégire. Elius Statutus, gouverneur de Phénicie, par le P. L. Jalabert. Son nom se trouve sur deux bornes destinées à limiter des propriétés. Son titre n'est pas certain, mais le P. Jalabert croit probable qu'il a été gouverneur de Phénicie vers 293 à 305. Notes de lexicographie hébraïque, par le P. Paul Jonon. L'auteur explique un certain nombre de mots et de passages de l’Ancien Testament. En dernier lieu (p. 336), il propose de traduire I Rois, ΧΥΠΙ, 21, par : « jusqu’à quand boiterez-vous à deux béquilles » au lieu de « jusqu’à quand boiterez-vous des deux côtés », οὰ « sur vos deux jarrets ». Kehrverspsalmen, von Hermann Wiesmann (psaumes 105- 107, 80, 42-43, 99). Ausflüge in der Arabia Petraea, von D" B. Moritz. L'auteur, à l’occasion d’une excursion de vacances faite à l’aide du chemin de fer Damas-la Mecque, nous communique ses remarques sur Ma'an, Pétra, Greje, Qasr ‘amra. De nombreuses photographies et reproductions

BIBLIOGRAPHIE. 445

d'inscriptions complètent sa description. Znscriplions d'Asie Mineure (Pont, Cappadoce, Cilicie), par le P. ἃ. de Jerphanion et le P. Jalabert. Recueil de soixante-treize inscriptions, grecques et latines, surtout d'ins- criptions funéraires, inédites.

F. Nau.

XPYCOCTOMKA. Studi ricerche intorno a 5. Giovanni Crisostomo, pub- blicati a cura del Comitato per il XV° Centenario della sua morte, Rome, librairie Pustet, 1908, fasc. I, 8°, 242 pages.

L'ouvrage comprendra trois fascicules dont le prix de souscription, qui est de 8 marks, sera porté à 10 marks après l'apparition. Le premier fas- cicule, seul paru jusqu'ici, comprend :

1. La figura morale di S. Giov. Cris., par Prof. NicoLa TURCHI, p. 1. 9. Autorship of the Dialogus De Vita Chrysostomi, par Right Rev. Dom EF. C. Butler. ABBOT OF DOWNSIDE, p. 90. 3. S. Giov. Cris., anello provi- denziale tra Costantinopoli e Roma, par P. AMBR. AMELLI, Priore di Monte-

cassino, p. 47. 4. S. Giov. Cris. e la vita sociale, par Prof. SABATINI, p.61. 5. Der heilige Joh. Chrysostomus und Libanios, par Dr. ANT. NAEGELE, p. 81. 6. 5. Οἴου. Cris. nella letteratura armena, par Giov.

AUCHER, Mekitarista, p. 143. 7. S. Jean Chrys. dans la littérature arabe, par P. Const. BACHA. B. S., p. 173. 8. S. Giov. Cris. nella letteratura russa, par P. AUR. PALMIERI, O. S. Α΄, p. 189. 9. δ. Jean Chrys. dans la littérature géorgienne, par P. MICHEL TAMARATI, p. 213. 10. Chryso- stomus-Fragmente zum Buche Job und in der Briefsammlung des heil. Nilus, par Prof. SEB. HAIDACHER, an der Universität Salzburg, p. 217. 11. Der ursprüngliche Umfang des Kommentars des heil Joh. Chrys. zu den Psalmen, par P. Carys. BAUR, Ὁ. 5. B., p. 235.

Dom Butler compare à l’histoire lausiaque le dialogue sur la vie de saint Jean Chrysostome ; il relève des locutions communes, des fautes com- munes dans deux citations de l’Écriture, des mentions communes de divers personnages. Il en conclut que les deux ouvrages peuvent être d'un même auteur bien que plusieurs critiques aient été d’un avis contraire.

Les Pères Aucher, Bacha, Palmieri et Tamarati énumèrent les œuvres de saint Jean Chrysostome conservées et souvent éditées dans diverses litté- ratures. Le même travail pourrait être fait pour toutes les langues, car l'admiration des linguistes a encombré toutes les littératures des œuvres de cet infatigable orateur. M. l’abbé Leroy nous édité et traduit un dis- cours arabe jusqu'alors inédit. Nous ne savons pas si beaucoup de lecteurs ont eu la curiosité de le lire, mais nous croyons prudent de ne pas leur présenter beaucoup d'œuvres, même inédites, de cet auteur. On l’admire beaucoup plus qu'on ne le lit. Nous avons à Paris le commentaire sur l’é- pitre aux Ephésiens, dans un manuscrit syriaque de l’an 615 provenant du célèbre monastère de la Mère de Dieu, à Scété, mais, en dépit de la valeur du manuscrit, l’édition de cette traduction ne tentera de longtemps aucun éditeur, sûr qu'il serait de ne pas trouver vingt lecteurs. La littérature

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éthiopienne renferme aussi un bon nombre de traductions d'œuvres de saint Jean Chrysostome, sans doute d’après l'arabe.

M. Haidacher qui s’est fait une spécialité de l'étude des homélies du saint docteur, a réuni un certain nombre de notes intéressantes et d’iden- tifications nouvelles (1). Les fragments Zn beatum Job (Migne, P. G., LXIV, 505-656) sont déjà tirés d’autres écrits de saint Jean Chrysostome et n’au- raient donc pas eu besoin d’être édités à nouveau. M. Haïdacher indique leur place et signale un bon nombre de textes de saint Jean Chrysostome dans les lettres de saint Nil (Migne, LP. G., t. LXXIX).

Enfin, d’après M. Baur, saint Jean Chrysostome n’a pas commenté tous les Psaumes et il est probable que nous possédons tout ce qu'il a écrit sur ce sujet. :

F. NU.

I. EPHRAEM II RAHMANI, patriarche des Syriens catholiques, Jypomnemata Domini nostri seu Acta Pilati, antiqua versio syriaca, in-4, IV + 38 + 24 pages; Harrassowitz, Leipzig, 1908 (Studia syriaca, fasc. 2).

ME Rahmani publie cette édition d’après deux manuscrits syriaques, copiés sur un même exemplaire, qui renferment aussi les lettres de Pilate à Hérode et de Hérode à Pilate, déjà éditées par Wright d’après un manus- crit de l’an 587. Les Acta Pilati ont toute chance, vu leur importance, d’avoir été traduits avant ces deux lettres. La version syriaque nous re- présente donc un texte grec au moins du sixième siècle et très vraisem- blablement antérieur. Ce texte grec était de la famille de la recension A, éditée par Tischendorf, mais beaucoup plus concis. L'auteur de la recen- sion À semble s'être proposé de mettre davantage en relief la méchanceté des Juifs etde disculper Pilate (p. 7-8); les textes parallèles aux Évangiles ne se retrouvent pas textuellement la plupart du temps dans nos textes ou versions. Il est d’ailleurs vraisemblable que l’auteur de cette narration ou de ce discours sur la Passion, devait en user assez librement à l'égard des évangiles canoniques; il serait donc très hasardé de vouloir reconstituer l'évangéliaire dont il se servait (2).

M‘ Rahmani ajoute, d’après ses manuscrits, les lettres de Pilate à Hérode et de Hérode à Pilate mentionnées plus haut, ainsi que de courtes lettres de Théodore à Pilate, de Longin à César Auguste et d'Ursinius :

Pilate écrit à Hérode qu'après la résurrection, sa femme Procla et ensuite lui-même avec elle ont été voir le Christen Galilée et l'ont adoré.

Hérode à son tour raconte à Pilate que la glace s’est ouverte sous les

(1) M. Haïidacher est mort durant ces vacances. L'article dont nous rendons compte est donc l’une de ses dernières productions. Ἷ

(2) En particulier il combine volontiers ensemble les récits des évangélistes; lorsqu'on trouve ailleurs un court fragment présentant une combinaison analogue, il ne faut donc pas en conclure, dit M“ Rahmani, que l’on possède un texte antérieur aux Évangiles, car : on peut n'avoir qu’un fragment d’Acta Pilati ou même d’un apocryphe de moindre valeur encore.

BIBLIOGRAPHIE. 4417

pieds de sa fille Hérodiade et l’a décapitée. Ce fait figure dans plusieurs rédactions de la Vie de saint Jean-Baptiste, cf. Patrol. Orientale, t. IV, fasc.5, p. 923-524. Lysanias, fils d’Hérode, est à l’agonie et Hérode lui-même est hydropique. L'auteur de cette lettre a confondu Hérode, fils d’Antipater, avec Hérode, frère de Philippe (p. 30, 37).

Théodore écrit à Pilate : « Si les Juifs demandaient à bon droit de cru- cifier Jésus, pourquoi ne l’astu pas permis; et si ce n’était pas à bon droit, pourquoi l’as-tu laissé faire? » Pilate répond : « A cause de ses pro diges, je ne voulais pas le crucifier, mais parce qu'il se disait roi je l’ai crucifié. » Voici ce qui concerne Longin : « Longin, dans la section III de son ouvrage sur les guerres des Romains et sur la victoire qu'ils ont rem- portée sur Antioche de Syrie, écrivit à César Auguste : Les Perses sont venus de l'Orient et ont été en Judée pour offrir de l’encens à un enfant dans ce pays. Qui est-il et de qui est-il fils, nous ne le savons pas. C’est à toi à t'en informer. » Auguste répond : « Hérode, qui est gouverneur en ce pays, nous écrira et nous informera à ce sujet, à savoir : à qui on a en- voyé des présents et dans quel but. »

Enfin Ursinius dit dans le traité V : « Nous avons été saisis de trouble et de crainte à l’arrivée de l’éclipse et du tremblement de terre, et lorsque nous avons appris les horribles calamités survenues dans les villes des Juifs. Aujourd’hui nous apprenons par la lettre de Pilate à Tibère César que tout cela est arrivé à la mort de cet homme que les Juifs ont crucifié. César, à cette nouvelle, déposa Pilate parce qu'il avait obéi aux Juifs; il menaca aussi ceux qui avaient crucifié Notre-Seigneur. » Ces dernières lettres sont citées aussi par Michel le Syrien (1). Le texte grec des deux premières a été édité par M. R. James, d’après le 929 de Paris elles figurent aussi à la fin des Acta Pilati. CE. M. R. James, Apocrypha Anec- dota, 11, Cambridge, 1897 (Texts and studies, V), p. xzIv-L et 66-75.

F. Nau.

E. NESTLE, Septuagintastudien, II, IV, V, in 4, 56, 24, 24 pages (Additions au programme du séminaire de Maulbronn, 618, 668, 733), Stuttgart, 1899, 1903, 1907.

Ces études sont consacrées à la prière de Manassé et au livre de Tobie (ΠῚ ; à la prière de Manassé, au livre de Tobie, au livre de Baruch, à la lettre de Jérémie, au second livre des Macchabées (IV); et à la critique de

(4) Les compositeurs de M# Rahmani ont fait de grands progrès. Mentionnons deux fautes causées par le caractère employé qui prête à confusion entre le yod et le noun, p- >, dern. ligne, KA LU 010 pour 21302 0730 et p. 8, ligne 8, Laso | POUT Hrasa |. Les ribouis et les points eninterligne font aussi mauvais effet; page 5, 1. 6-7, on peut lire peut-être f1a5a99 Frs équivalent à Jaoys Fa hommes prudents ou illustres ». Les fautes de composition sont beaucoup plus nombreuses dans le latin. M. Paul Maas signalé (Byzant. Zeitschrift, 1908, p. 25%) qu'un bon nombre d'hymnes De virginitate avaient été éditées par M£' Lamy (t. IV), mais l’édition de M£' Rahmani (supra.1907, p. 16$) est plus correcte et plus complète.

A48 REVUE DE L'ORIENT CHRÉTIEN.

la grande édition des Septante qui paraît maintenant à Cambridge (V). Nous les mentionnons surtout pour signaler aux futurs éditeurs d’apocry- phes la belle étude de M. Nestle sur la prière de Manassé (énumération des éditions et des manuscrits; remarques sur l’établissement du texte, sa provenance et son histoire). On y trouve (III, 15) que la version syriaque a été éditée par Paul de Lagarde avec la Didascalie, (III, 18) que tous les manuscrits grecs dérivent des Constitutions apostoliques et de la Didasca- lie. Les précédentes éditions et traductions sont donc fautives puisqu'elles n’ont pas pris la Didascalie pour base (HIT, 17).

Nous sommes heureux d’avoir été devancé par M. Nestle, car cela nous permet de mettre notre précédente étude sous son patronage et d'espérer que désormais la prière de Manassé sera regardée, non plus comme un apocryphe de l’Ancien Testament, mais comme une prière d’origine

chrétienne (1). F. Nav.

H. DENZINGER, Enchiridion symbolorum definitionum et declarationum de rebus fidei et morum, editio decima, emendata et aucta, quam paravit Clemens Bannwart, S. J., in-8° xxvi1-628 pages ; Herder, Fribourg-en- Brisgau, 1908. Broché, Μ.; relié, 6 M.

Cet ouvrage toujours eu pour but de fournir au théologien les docu- ments principaux pour exposer, prouver et défendre la doctrine catholique : symboles, professions de foi, décisions des pontifes romains ou des con- grégations romaines et canons des conciles. La présente édition apporte encore de nombreuses améliorations aux précédentes. On trouve (p. 532- 980) les principales décisions portées sous le Pontificat si court mais déjà si fécond de Pie X : sur le caractère historique de la Sainte Écriture ; l'authenticité mosaïque du Pentateuque, le mariage et les erreurs moder- nistes. Les matières sont disposées par ordre chronologique, mais un index systématique [p. 581-612] et un index alphabétique des noms et des choses (p. 613-626) permettent de trouver facilement les décisions sur un sujet quelconque. Les canons des conciles grecs sont donnés dans le texte ori-

sinal avec une traduction latine. F. Na.

(1) C’est dans le manuscrit grec de Paris, 510, fol. 435 vo, que le roi Manassé est représenté « in tauro æneo », comme l’écrivait Cotelier (Migne, P. G., 1, 649, note 33); voir H. Omont, Fac-siméle des miniatures des plus anciens manuscrils grecs.…., Paris, 1902, planche LVII. M. Bordier écrit à tort que Manassé est en prière « devant » un taureau (Description des peintures..…., Paris, 1883, p. 86); car il est bel et bien « dedans » (jusqu’au milieu du corps), comme l'a dit Cotelier. L'auteur de la peinture infligeait à Manassé le supplice de Phalaris.

Le Directeur-Gérant : F. CHARMETANT.

Typographie Firmin-Didot et C'°. Paris.

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